feuilletez le numéro n°167 de l'eglise dans le monde

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167 INDE élections 2014 : entre séduction et intolérance Chili L'après Pinochet Terre sainte Climat œcuménique à Jérusalem VITALITÉ • DÉTRESSE • FAITS & TÉMOIGNAGES L’ÉGLISE DANS LE MONDE • N°167 • Février 2014 • 6 e

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Février 2014, au sommaire : -Inde -Chili -Terre Sainte

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Page 1: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

167

inde élections 2014 : entre séduction et intolérance

ChiliL'après Pinochet

Terre sainteClimat œcuménique

à Jérusalem

VITALITÉ • DÉTRESSE • FAITS & TÉMOIGNAGES L’ÉGLISE DANS LE MONDE • N°167 • Février 2014 • 6 e

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www.aed-france.org

DU 24 AU 28 MARS 2014

VEILLÉES DE PRIÈRE ET TÉMOIGNAGES

> LUNDI 24 MARS

STRASBOURGÉglise catholique Saint-Pierre-le-Jeune 20h30 veillée

> MARDI 25 MARS

BORDEAUXCathédrale Saint-André 20h veillée

> MERCREDI 26 MARS

MARSEILLEBasilique du Sacré-Cœur 20h veillée

> VENDREDI 28 MARS

PARISCathédrale Notre-Dame de Paris 18h30 messe 20h veillée

POUR LES CHRÉTIENS PERSÉCUTÉS

Témoignages de personnalités de Centrafrique, d’Égypte, du Liban, d’Irak et de Syrie

TÉLEVISION CATHOLIQUETÉLEVISION CATHOLIQUE

AED_MAG EDM 200/265.indd 1 20/12/13 13:54

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L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 3

Fêtes liturgiquesAu moment où le dimanche semble perdre de plus en plus son caractère spécifique et où on nous assène avec de nouvelles fêtes inventées pour quasiment chaque jour (journée internationale contre l’hypertension, sans téléphone mobile, pour la normalisation,

de la gentillesse, du chant choral et du Nutella,…), comme il est bon de retrouver tout simplement la séquence des temps liturgiques qui ont rythmé notre histoire et façonné notre culture.

Pourquoi pas du Nutella, par exemple sur des crêpes, mais encore faudrait-il savoir pourquoi on mange des crêpes le 2 février. Avant d’être une opération commerciale, la chandeleur est la fête de la Présentation du Christ, une fête qui clôt naturellement le temps de Noël, une fête joyeuse donc, mais qui nous prépare déjà en quelque sorte au mystère pascal.

Cette année, le carême commence très tard (5 mars) et cette transition pourra donc se faire en douceur. Au beau milieu du carême, l’AED vous proposera néanmoins de vous plonger davantage dans ce mystère pascal avec la Nuit des Témoins où seront évoquées les figures des prêtres, religieux et religieuses, laïcs missionnaires qui auront, à l’instar du Christ, donné leur vie par amour de leurs frères.

Pour cette 6e édition, nous évoquerons tout particulièrement nos frères d’Égypte avec Mgr Ibrahim Isaac SIDRAK, patriarche copte-catholique, d’Irak avec Mgr Amel Shamon NONA, archevêque de Mossoul, et de Syrie avec sœur Raghida AL KOURI, religieuse de Damas, ainsi que nos frères de Centrafrique avec Mgr Dieudonné NZAPALAINGA, archevêque de Bangui. La veillée aura lieu à Strasbourg, Bordeaux et Marseille, respectivement les 24, 25 et 26 mars puis finalement à Notre-Dame de Paris le vendredi 28 mars. Nous vous y attendons !

SOMMAIRE actualité

lEs points chauds ..............................................................4lE MondE En BREF ...................................................................6tRiBunE   Nouvelles Guerres Froides ...................................7décRYptaGE   Evangelii Gaudium Le pape François vise au cœur .....................................................8

caRnEt dEs continEnts

EuRopE   RéfugiésPas de place à l'auberge ! ............................................................10aFRiQuE   Afrique du Sud L’Église, goutte d'eau dans un ciel ombragé ....................14aMéRiQuEs   ChiliL’après Pinochet ................................................................................18 pRochE-oRiEnt   Terre sainteClimat œcuménique à Jérusalem ............................................22asiE   IndeÉlection 2014 : entre séduction et intolérance .................26

REndEz-vous

coMMunautés du MondE La communauté de l’Agneau .....................................................30kiosQuE   Écouter, lire, voir ...................................................32poRtRait   Édouard Cortès .....................................................34pRojEts dE l’aEd ..................................................................35pRièRE .................................................................................................36

vEillEz Et pRiEz

caRnEt dE pRièRE .................................pages centrales

Ce numéro Comporte un enCart posé sur la Couverture.Pour vous abonner, contactez l’AED, écrivez à la rédaction : 29, rue du Louvre - CS 30057 - 78 750 Mareil-Marly - 01 39 17 30 10 - [email protected] - Photo de couverture et photo de la 4e de couverture : © Anto Akkara - Directeur de la publication : Pierre Bouhey - Rédacteur en chef : Marc Fromager - Rédactrice en chef adjointe : Amélie de La Hougue - Comité de rédaction : Marc Fromager, Amélie de La Hougue, Philippe Oswald, Claire de Guillebon - Secrétaire de rédaction : Véronique Belle - Fabrication / production : CLD, 33, avenue du Maine, 75015 Paris - Impression : Imprimerie de Champagne, Z.I. les Franchises, 52200 Langres - Inscription CPPAP - n° 0510G79871 N° ISSN : 0252-2578 - Dépôt légal : janvier 2014

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édito

Marc Fromager Directeur national

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4 ■ L’égLise dans Le monde n° 167

Trente mille jeunes venus de toute l’Europe se sont réunis à Strasbourg fin décembre pour la rencontre annuelle de Taizé, avec l’œcuménisme au cœur de leur rassemblement.

france

Selon les chiffres de la préfecture de la Maison pontificale, plus de 6 600 000 personnes ont pris part aux différentes manifestations prési-dées par le pape François depuis son élection le 13 mars 2013.

vatican

Depuis le 15 décembre, les combats entre les partisans de Kiir et ceux de Machar ont causé la mort de plus de 1 000 personnes et l’évacuation de 200 000 autres.

soudan du sud

L’article 20 du projet de constitution tunisienne adopté début janvier soutient l’égalité hommes-femmes : « Tous les citoyens et les citoyennes ont les mêmes droits et les mêmes devoirs. Ils sont égaux devant la loi sans discrimination aucune. »

tunisie

Inquiétude

Vitalité

Détresse

Le pays devient le premier au monde à légaliser la production, la vente et la consommation de la marijuana. Une forte menace pour la population selon l’Église locale.

uruguay

Les points chauds ActuAlité

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L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 5

Retrouvez toute l’actualité de l’Église en Détresse sur

www.aed-france.org

L’année 2013 aura été la plus meur-trière pour le pays depuis cinq ans en raison du mécontentement de la mi-norité sunnite et du conflit syrien. Trente-cinq personnes ont été tuées le jour de Noël.

irak

Un nouvel attentat a frappé début janvier la banlieue sud de Beyrouth, ce qui porte à six le nombre d’attentats depuis juillet 2013. Au total, près d’une centaine de morts et de nombreux blessés.

liban

La population globale de l’archi- pel a perdu 244 000 personnes cette année, un record. L’Église catholique au Japon a réagi en rappelant son engagement en faveur de l’augmentation des nais-sances dans le pays.

japon

Du 24 au 26 mai prochain, le pape se rendra à Amman, Bethléem et Jérusalem pour « commémorer la rencontre historique entre le pape Paul VI et le patriarche Athé-nagoras, le 5 janvier 1964 ».

terre sainte

Les conditions de vie déjà dramatiques deviennent insurmontables avec le froid et la neige pour des cen-taines de mil l iers de réfugiés syriens ayant fui les zones de guerre.

jordanie

À l’approche des jeux Olympiques de Sotchi (du 7 au 23 février), la sécu-rité est menacée dans certaines zones du pays. Deux attentats suicide ont tué plus de trente personnes.

russie

L’insécurité pour les responsables chré-tiens a fortement augmenté. Victimes d’attaques violentes ou d’accusations pénales mensongères, ils doivent faire face à un islamisme militant croissant.

tanzanie

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Le monde en bref ActuAlitéActuAlité

6 ■ L’égLise dans Le monde n° 167

l Irak : le 25 décembre devient fête nationale. Le gouvernement chiite de Nouri al-Maliki a institué le 25 décembre, jour de « fête natio-nale » pour tous les Irakiens, à la demande de Mgr Louis Sako, patri-arche de Babylone des Chaldéens. C’est une nouvelle reconnaissance de l’exécutif irakien envers la minori-té chrétienne du pays, une commu-nauté depuis toujours très impliquée dans la vie du pays, mais tentée depuis près de dix ans par l’exode face aux violences à son encontre. Le gouvernement veut ainsi montrer sa « proximité » et son « respect » à l’égard des chrétiens. Pourtant, l’année 2013 aura été l’une des plus meurtrières pour ce pays.

l Malaisie : Usage du terme Allah de la part des chrétiensPlus de trois cents exemplaires de la Bible ont été placés sous séquestre et deux responsables chrétiens ont été arrêtés le 2 janvier 2014, dans l’État malaisien de Selangor. Selon la police, le chef d’inculpation est « usage illégitime du terme Allah

1.1 million

›› Gros planaugmentation de la violence antichrétienne en 2013Selon l’Agence Fides, au cours de l’année 2013, vingt-deux agents pastoraux – en majorité des prêtres – ont été tués, soit près du double par rapport à l’année 2012, qui avait enregistré treize morts. Pour la cinquième année consécutive, le nombre le plus élevé de meurtres d’agents pastoraux a été relevé en Amérique latine, la Colombie occupant la première place de ce classement. En 2013, dix-neuf prêtres, une religieuse et deux laïcs sont décédés de morts violentes. Selon la répartition par continent, quinze prêtres ont été tués en Amérique. En Afrique, un prêtre a été tué en Tanzanie, une religieuse à Madagascar et un laïc au Nigeria. L’Asie compte trois morts violentes d’agents pastoraux : deux prêtres, l’un en Inde et l’autre en Syrie, et un laïc aux Philippines. En Europe enfin, un prêtre a été tué en Italie. ■

Quinze prêtres ont été tués en amérique en 2013.

par les chrétiens », reconnu par une décision de justice d’octobre 2013. Se concrétisent ainsi les inquiétudes des chrétiens qui craignaient que cette décision cause des problèmes

« Nous sommes appelés à prendre conscience des violences et des injustices présentes dans de nombreuses parties du monde et qui ne peuvent pas nous lais-ser indifférents et immobiles : l’engagement de tous est néces-saire pour construire une société vraiment plus juste et solidaire. » Déclaration du pape François à l’occasion de la Journée mondiale de la Paix le 1er janvier 2014. ■

›› Il l’a dit

Selon le directeur de Caritas Liban, 1,1 million de réfugiés syriens vivraient actuellement au Liban, alors que ce pays lui-même ne compte qu’environ quatre millions d’habitants.

aux communautés et à la diffusion de leurs publications, à commencer par la Bible. Les musulmans con-stituent dans le pays plus de 60% de la population et les chrétiens 9%.

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Tribune ActuAlité

UtreFoIs, AU sIècle dernIer, la grande menace qui pesait sur le monde était l’ogre

soviétique et son insatiable appétit de conquête ter-ritoriale et aussi, paradoxalement, de conquête spi-rituelle. Pourtant résolument athée et définitive-ment en guerre contre l’Esprit de Dieu, l’URSS avait bien l’ambition de coloniser les esprits des hommes, ce en quoi – il faut bien le reconnaître – sa réussite fut éclatante, du moins en dehors de ses frontières et ce particulièrement en France.

ce qUI est toUt à FAIt sUrprenAnt avec notre époque, c’est que la Russie aujourd’hui, d’épouvantail qu’elle était, semble être devenue le camp du Bien : artisan de paix en Syrie, avocat du bon sens sur le mariage homosexuel, asile pour les réfugiés politiques (Snowden), c’est une véritable inversion de ce qu’on a connu le siècle dernier. Pour le coup, c’est plutôt les États-Unis maintenant qui nous envoient des messages inquiétants : guerres à répétition, restriction croissante des libertés civiques, espionnage tous azimuts mais, reconnaissons-le, tou-jours avec le sourire, en donnant l’impression de nous rendre service.

certes, Il y AUrAIt beAUcoUp de choses à dire sur la Russie actuelle et malgré tout, les États-Unis demeurent dans beaucoup de domaines un pays incon-tournable, mais clairement, le monde a changé. ce qUI s’est pAssé en syrIe début septembre a été assez révélateur et l’a été suffisamment pour que

le 27 novembre dernier à paris, l’Aed avait retenu comme thème pour son colloque annuel celui des nouvelles Guerres Froides avec comme sous-titre Incidences sur les chrétiens. Après les très fortes tensions apparues début septembre autour du dossier syrien, le concept de guerre froide, perçue comme un affrontement sans conflit armé direct, nous est en effet apparu pertinent.

réapparaisse l’expression de guerre froide. Même si nous n’avons pas retrouvé l’extrême tension qui régnait au début des années 80 (invasion de l’Afghanistan, guerre des étoiles), on peut néanmoins imaginer qu’on a vrai-ment frôlé une crise extrêmement dramatique, qui serait partie en vrille avec des conséquences en cascade que plus personne n’aurait su maîtriser.

or, c’est bel et bIen lA rUssIe qui a fait capoter ce projet. La Russie avait évidemment ses propres intérêts mais ce qui est apparu de manière évidente, c’est qu’elle avait à nouveau les moyens de s’opposer à la toute-puissance américaine.

qUItte à exploIter le FIlon, on a étendu le concept de guerre froide à d’autres relations, celle qui existe entre les États-Unis et la Chine, où il n’y a pas

– encore – de conflit armé, mais où la tension est réelle et appelée à durer, et celle qui existe entre l’Arabie Saoudite et l’Iran avec ce qu’elle représente de compétition exacer-bée aujourd’hui entre sunnites et chiites pour la primauté au sein du monde musulman. Cet affrontement se déroule en Irak, en Syrie, au Liban, au Bahreïn et de manière plus générale dans tout le Moyen-Orient et même au-delà.

or, ces troIs GUerres FroIdes ont ceci en com-mun qu’elles ont des conséquences, en général néga-tives, sur le sort des communautés chrétiennes dans le monde. C’est ce que nous avons évoqué tout au long de cette journée de colloque dont les Actes seront pro-chainement publiés. ■

Marc Fromager

les chrétiens face aux grandes

puissances

L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 7

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nouvelles Guerres Froides

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DécryptageActuAlité

« evangelii Gaudium » : le pape François vise au cœur !

joie de l’Évangile » (« Evangelii Gaudium ») qui n’existe qu’en étant diffusée et partagée.

l’enjeu : non pas tant la bonne marche de l’Église comme si celle-ci était une fin en soi, mais l’évangéli-sation, la mission. Qu’est-ce qui l’entrave aujourd’hui ? Qu’est-ce qui la bloque, parfois ? L’adversaire, les persé-cutions ? Mais il y en a toujours eu, même s’il en pleut, il est vrai, aujourd’hui, comme peut-être jamais avec cette ampleur et cette intensité dans l’Histoire de l’Église. Mais le principal obstacle est intérieur : il est à vaincre d’abord et toujours en chacun de nous, les baptisés. Repli, frilosité, paresse, querelles, ambitions, peur, peur surtout… nous ligotent, nous rendent muets et consti-tuent autant de contre-témoignages.

le mot de « fermeture » (ou encore sa variante « l’im-manentisme ») revient souvent sous la plume du pape François, non pas tant pour l’opposer à « l’ouverture », comme sous le pape Jean XXIII, mais à la remise

en marche, au mouvement perpétuel de « sortie » (n°27), à la rencontre courageuse et aimante d’un monde incroyant (et pourtant fort crédule !) qu’il nomme aussi les « périphéries existentielles ». En effet, « l’Église n’est pas une douane, elle est la maison paternelle où il y a de la place pour chacun avec sa vie difficile » (n°47).

consacré à « l’annonce de l’évangile dans le monde d’aujourd’hui », le premier texte de grande ampleur du pape François est une exhortation à la vraie joie : celle des véritables disciples du christ.

8 ■ L’égLise dans Le monde n° 167

haque synode des évêques se conclut par des « propositions » faites au pape. Celui-ci s’en empare et en donne quelques mois plus

tard la conclusion dans une exhortation apostolique. Ce texte du souverain pontife synthétise les travaux des évêques, en livre la juste interprétation et fixe la « feuille de route » qui en résulte pour l’Église. Le synode d’oc-tobre 2012, convoqué par le pape Benoît XVI à l’oc-casion du 50e anniversaire du concile Vatican II, avait pour thème : « l’Évangélisation et la transmission de la foi ». Thème prophétique puisque celui qui allait suc-céder à Benoît XVI quelques mois plus tard en a fait son leitmotiv et comme le cœur du programme de son pontificat.

c’est donc au pape François qu’il est revenu d’écrire cette exhortation apostolique (publiée le 26 novembre 2013). Et elle mérite bien, sous sa plume, cette appellation d’« exhor-tation » ! Qu’il s’agisse de la réforme de l’Église, de la vie économique et de son système en crise à cause de « l’idolâtrie de l’argent », du respect de la vie ou de la défense de la famille, tous les catholiques, l’ensemble des fidèles, évêques, prêtres, religieux ou laïcs, sont invi-tés à « se bouger », pourrait-on dire. Car il s’agit ni plus ni moins que de « mettre l’Église en mouvement de sortie de soi, de mission centrée en Jésus-Christ, d’engagement envers les pauvres » pour lui faire goûter pleinement « la

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Vaincre ses peurs et sortir évangéliser

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et spirituelles de pauvreté contre lesquelles l’Église ne peut lutter qu’avec un cœur de pauvre (« Je désire une Église pauvre pour les pauvres», n°198.)

Alors le prêtre retrouvera le goût de préparer de bonnes et revigorantes homélies (pas moins de neuf articles sont consacrés à cette question), le laïc sortira de sa coquille pour témoigner de sa foi dans son entourage par ses actes d’abord, ses paroles ensuite, les personnes mariées accepteront « d’entrer dans une union de vie totale » (n°66), bref tout bap-tisé renouera et rayonnera des grâces de son baptême. Et le peuple de Dieu trouvera ou retrouvera la vraie joie, celle des vrais disciples du Christ, de ses brebis qui en ont la bonne odeur. ■ Philippe Oswald

le pape François n’oublie pas qu’il est un jésuite. C’est en quelque sorte en directeur spirituel de toute l’Église qu’il s’attaque à la « mondanité spirituelle » et à tout ce qui donne aux chrétiens des « faces de Carême sans Pâques » ! Et de lever l’objection – la mauvaise excuse – la plus courante à la passivité, au repli et à la tristesse qui en résulte : « Ne disons pas qu’au-jourd’hui, c’est plus difficile : c’est différent » (n°263).

oui, il faut se secouer, sortir d’une « acédie paraly-sante » (n°81), de « la mondialisation de l’indifférence », récuser « la culture du déchet » (variante de la « culture de mort » du pape Jean Paul II), lutter contre l’«exclu-sion » sous toutes ses formes et se soucier quotidienne-ment des « pauvres » et de toutes les formes matérielles

L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 9

Œuvre de Dieu, l’évangélisation demande tout, mais elle offre tout !« Bien que cette mission [évangéliser] nous demande un engagement généreux, ce serait une erreur de la comprendre comme une tâche personnelle héroïque, puisque l’œuvre est avant tout la sienne, au-delà de ce que nous pouvons découvrir et com-prendre. Jésus est « le tout premier et le plus grand évangélisateur » (cf. Paul VI, Evangelii Nutiandi). Dans toute forme d’évangélisation, la primauté revient toujours à Dieu, qui a voulu nous appeler à collaborer avec lui et nous stimuler avec la force de son Esprit. La véritable nouveauté est celle que Dieu lui-même veut produire de façon mystérieuse, celle qu’il inspire, celle qu’il provoque, celle qu’il oriente et accompagne de mille manières. Dans toute la vie de l’Église, on doit toujours manifester que l’initia-tive vient de Dieu, que c’est « lui qui nous a aimés le premier » (1 Jn 4, 19) et que « c’est Dieu seul qui donne la croissance » (1 Co 3, 7). Cette conviction nous permet de conserver la joie devant une mis-sion aussi exigeante qui est un défi prenant notre vie dans sa totalité. Elle nous demande tout, mais en même temps elle nous offre tout » (n°12). ■

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L’année 2013 se termine sur le triste constat d’un manque crucial de liberté religieuse dans plusieurs pays du monde, obligeant de nombreux chrétiens à fuir leur pays. Trouvent-ils un accueil en Europe comme ce fut le cas à une certaine époque ? Bénéficient-ils d’un statut au sein de la Communauté européenne ?

La situation des communautés chrétiennes s’aggrave en plu-sieurs régions du monde :

Moyen-Orient, dictatures africaines, régimes encore communistes. Lors de sa première bénédiction Urbi et Orbi et dans son tweet de Noël le pape François a invité à prier de-vant la crèche de façon spéciale pour ceux qui souffrent la persécu-tion à cause de leur foi. Puis le lendemain, fête de saint Étienne le premier martyr, il n’a pas mâché ses mots : « Je suis certain que, mal-heureusement, ils sont plus nom-breux aujourd’hui que dans les pre-miers temps de l’Église. Il y en a tellement ! Cela arrive spéciale-ment là où la liberté religieuse n’est pas encore garantie ou

n’est pas pleinement réalisée. Mais cela arrive aussi dans des pays et des milieux où, sur le papier, on protège la liberté et les droits hu-mains, mais où en fait les croyants, et spécialement les chrétiens, ren-contrent des limitations et des discriminations. »

Europe : le rêve briséQuand leur situation devient intenable, ces chrétiens n’ont

Pas de place à l'auberge !

souvent pas d’autre solution de la dernière chance que l’exil, même s’ils préféreraient rester dans les pays où ils ont toujours vécu, comme leurs évêques les invitent à le faire. Mais où aller ? L’Europe, cette terre aux racines chrétiennes, apparaît à beaucoup comme un havre. N’a-t-elle pas été tradition-nellement une terre d’accueil pour les chrétiens persécutés ou menacés, quand ils fuyaient la persécution ou

EuropECARNET DES CONTINENTS

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L’Europe « chrétienne », terre d’accueil (ou non) pour les chrétiens persécutés ?

Selon l'Onu, presque un Syrien sur cinq est réfugié. L'Europe saura-t-elle les accueillir ?

10 ■ L’égLise dans Le monde n° 167

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les discriminations, par exemple les Arméniens à l’époque otto-mane, les chrétiens des pays de l’Est à l’époque communiste, ou encore les boat-people vietnamiens. Qu’en est-il aujourd’hui ? La ques-tion est légitime, sous les différents aspects où elle se décline : le nombre

de réfugiés chrétiens ayant fui leur pays croît-il ? De quels pays vien-nent-ils surtout ? Pourquoi les ont-ils fuis ? Guerre ? Persécutions ouvertes ? Discriminations ? Absence d’avenir ? Raisons économiques ? Comment sont-ils arrivés en Europe ? Comment sont-ils accueillis par les administrations des pays d’Eu-rope ? Comment sont-ils accueillis par leurs Églises ? Existe-t-il une poli-tique européenne commune pour

Europe

faire face à cette réalité dramatique du monde présent ?

Mais la réalité est aujourd’hui bien différente de ce qu’elle fut jadis ! « Pas de place à l’auberge », comme il y a deux mille ans à Bethléem, pourrait-on résumer l’enquête que nous avons faite sur ce sujet.

Dans une Europe qui a largement renié ses racines chrétiennes, ceux qui fuient leur pays parce qu’ils sont persécutés ou menacés comme chré-tiens, n’existent pas en tant que tels. Même s’il arrive que leur situation dramatique soit parfois évoquée au niveau de telle ou telle instance européenne, aucune action d’ac-cueil spécifique n’est mise en œuvre ni même envisagée à l’échelle de la Communauté européenne.

La sécularisation des mentalités est sans doute la première cause de cet aveuglement. Il s’y ajoute une raison plus précise : l’atten-tion aux droits des minorités s’ar-rête en général quand celles-ci sont chrétiennes par suite d’une erreur de perspective, volontaire ou non.

Grande-Bretagne, France, Autriche C’est a ins i qu’en Grande-Bretagne dont le chef de l’État, la reine Elisabeth II, est aussi chef d’une confession chrétienne, la com-munion anglicane, le gouvernement de David Cameron a décidé de refu-ser d’apporter une aide aux pays où les minorités homosexuelles seraient l’objet de discriminations, mais ne prévoit rien de tel pour ceux

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Les chrétiens, souvent premières victimes des violences, doivent fuir à contrecœur leur pays sans savoir ou aller.

L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 11

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où les chrétiens sont persécutés. Les fortes déclarations publiques du prince Charles le 17 décembre 2013, à l’occasion de ses visites à la cathédrale syrienne orthodoxe de Londres et à la communauté copte orthodoxe de Stevenage dans le Hertfordshire, ont mis en relief cette réalité. L’héritier de la cou-ronne britannique s’est déclaré « pro-fondément troublé » par la perte de cet « irremplaçablement précieux » que sont les communautés chré-tiennes du Moyen-Orient sous les coups de l’islamisme, et a voulu manifester sa solidarité avec les réfu-giés chrétiens dans son pays en visi-tant deux de leurs communautés.

Mais en va-t-il différemment ailleurs en Europe ? En France, la législation interdit « la constitu-tion et donc la consultation de don-nées créées sur des domaines sen-sibles tels que l’appartenance réelle ou supposée à une religion donnée’’. En clair : ceux qui fuient leur pays pour cause de persécution de leur foi n’existent pas en tant que tels.

En Autriche, le gouverne-ment a récemment décidé d’ac-cueillir cinq cents réfugiés syriens. Une goutte d’eau par rapport aux deux millions qui ont fui la guerre, dont près de cinq cent mille chrétiens, selon les chiffres donnés par le patriarche melkite catholique Grégoire Laham III en octobre 2013, soit une propor-tion bien supérieure au pourcen-tage de la population syrienne que ces chrétiens représentent. À la mi-octobre 2013, le ministre autri-chien de l’intérieur, Karl-Heinz Grundboeck, accueillait la pre-mière famille syrienne arrivant

en Autriche. Or celle-ci était chré-tienne, ce qui a valu au ministre de sévères critiques dans la presse ! Il a dû se « justifier », rappelant que les chrétiens étaient une mino-rité particulièrement menacée aujourd’hui en Syrie.

LampedusaPourtant, pour nombre de chré-tiens de Syrie, d’Irak, d’Égypte, d’Érythrée ou d’Éthiopie, l’Eu-rope demeure une espérance. L’horrible drame de Lampedusa, début octobre 2013, vient de le rap-peler, lorsqu’une embarcation contenant au moins cinq cents personnes a pris feu, causant la mort de trois cent soixante-six de ses occupants – des Érythréens en majorité, fuyant les persécutions des chrétiens dans ce pays au régime dictatorial impitoyable (considéré comme un des dix pays ou la situa-tion des chrétiens est la plus difficile au monde), et des Éthiopiens.

Selon le P. Mussie Zerai, respon-sable de l’organisation Habeshia qui vient en aide à des réfu-giés chrétiens arrivant d'Italie par la mer, 90 % des survivants

de ce naufrage sont des chré-tiens et, selon leur témoignage, la même proportion de ceux qui ont

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Dans l'attente d'un pays d'accueil, la vie dans les camps s'organise tant bien que mal.

L'hiver rend la situation des réfugiés encore plus tragique.

EuropE CARNET DES CONTINENTS

12 ■ L’égLise dans Le monde n° 167

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Europe

péri en mer. Combien de naufrage faudra-t-il de plus pour que les auto-rités civiles et les Églises prennent la vraie mesure de cette tragé-die ? Toujours selon le P. Zerai, au moins trois mille Érythréens, en grande majorité des chrétiens, fuient leur pays chaque mois. Combien arrivent vivants dans un pays prêts à les accueillir ?

En faisant la première visite offi-cielle de son pontificat sur l’Ile de Lampedusa, le 8 juillet 2013, le pape François avait posé un geste fort pour attirer l’attention du monde sur ce drame des boat-people de notre temps, parmi les-quels de nombreux chrétiens. En octobre, il a qualifié la mort en mer de ces centaines de réfugiés d’« outrage » et appelé à un « ven-dredi des larmes », alors que par ailleurs, dans son message pour la Journée mondiale 2014 du mi-grant et du réfugiés, le 19 janvier, il a appelé à reconnaître les valeurs qu’apportent migrants et réfugiés dans les pays qui les accueillent et à remplacer la « culture du rejet » par une « culture de la rencontre » à leur égard.

Il importe de faire passer ces requêtes du pape François dans les actes. En effet, en dehors de l’Italie, quel homme politique, quel journal, en France ou ailleurs en Europe, a mis l’accent sur le fait que la grande majorité des victimes

Aux marges de l’Europe, une exception : la Géorgie et l’Arménie

La Géorgie et l’Arménie ont été parmi les premières nations à embrasser la foi

chrétienne. Celle-ci a survécu à des siècles de persécutions à l’époque ottomane

pour l’Arménie (y compris le génocide qui a frappé ce peuple chrétien durant

la Première Guerre mondiale) puis à l’époque communiste pour les deux na-

tions. Elle demeure une composante constitutive de l’identité des deux nations

et de leurs État. Contrairement à ceux de la Communauté européenne,

ils sont donc attentifs au redoublement de la persécution contre les chrétiens

au Moyen-Orient, particulièrement à cause de la montée en puissance des isla-

mistes en Syrie. La Géorgie accorde ainsi, en 2013, deux mille visas pour des

chrétiens de Syrie (contre 222 en 2012) et s’apprête à en accueillir un plus grand

nombre encore. L’Arménie fait actuellement construire près d’Erevan une cité

baptisée « Alep nouvelle », en vue d'accueillir les chrétiens arméniens qui fuient

la guerre et les violences contre leur communauté en Syrie. Six cents familles y

ont déjà été installées et d’autres sont attendues. Ces deux pays accueillent aus-

si des Coptes d’Égypte. L’exemple qu’ils donnent à l’Europe malgré un niveau de

vie et des possibilités bien inférieurs à ceux des État de la Communauté mérite

d’être souligné. La Belgique sera-t-elle le premier pays à le suivre ? C’est en tout

cas ce qu’ont demandé le 5 décembre 2013 la sénatrice Vanessa Matz et le dé-

puté George Dallemagne dans La Libre Belgique.

de la tragédie de Lampedusa étaient des chrétiens fuyant leur pays à cause de la persécution ? Ceci vaut d’ailleurs aussi au niveau des Églises catholiques d’Europe qui devraient mieux prendre en compte cette réa-lité. Comment ne pas remarquer, par exemple, que l’organisme catho-lique officiel pour les réfugiés et déplacés et migrants, l’ICMC Europe (International Catholic Migration Commission), à Bruxelles, met l’accent à juste titre sur son action « sans distinction de croyance, de groupe ethnique ou de natio-nalité », mais ne mentionne pas dans les titres de son site cette réa-lité spécifique des chrétiens fuyant aujourd’hui la persécution ou les menaces ? ■

Antoine Rizzo© A

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Pour nombre de réfugiés chrétiens (ici, irakiens), l'Europe reste une espérance.

L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 13

Page 14: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

L’Afrique du Sud continue d’attirer les regards. Symbole de lutte contre l’apartheid à travers la figure de Mandela, le pays est aussi l’espoir du continent par ses richesses naturelles. Mais la « nation arc-en-ciel », ne peut cacher ses nuages noirs que sont la violence et l’écart flagrant entre riches et pauvres. L’action de l’Église apparaît au milieu comme autant de gouttes d’eau essentielles à la stabilité du pays.

Afrique du SudL'église catholique, goutte d'eau dans un ciel ombragé

L’histoire de l’Église catho-lique en Afrique australe commence avec la venue

du navigateur portugais Barthélémy Diaz en 1487, suivie de mission-naires de l’équipe de Vasco da Gama. Il ne reste hélas guère de traces de

cette période-là et dès le XVIIe siècle, le catholicisme a été interdit pen-dant plusieurs décennies, en vertu de la règle de la Compagnie hollan-daise des Indes, puis plus tard, sous la domination britannique. En 1818, signe d’espoir, le premier vicaire

Zimbabwe

Namibie

Botswana

Mozam

bique

Le Cap

Lesotho

Superficie : 1 219 912 km2

Capitales : Pretoria (administrative),

Le Cap (législative), Bloemfontein (judiciaire)

religions : chrétiens 81,7% (dont 8%

de catholiques, 31,8% de protestants,

3,6% d’anglicans et 38,3% d’autres Églises)

animistes 9,3%, agnostiques 3,2%, musulmans 2,4%,

hindous 2,4%, autres 1%.

Langues officielles : anglais, afrikaans,

ndébélé, xhosa, zoulou, sotho du Nord,

sotho du Sud, tswana, siswati, venda, tsonga

14 ■ L’égLise dans Le monde n° 167

AFrIQuECARNET DES CONTINENTS

Page 15: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

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Afrique du SudL'église catholique, goutte d'eau dans un ciel ombragé

apostolique du Cap est nommé par Pie VII mais il ne pourra jamais y mettre le pied, le gouvernement de Londres le lui interdisant ! Il fau-dra attendre la nomination de Mgr Griffith en tant que troisième vicaire apostolique du Cap et pre-mier évêque de l’Afrique du Sud, en 1837, pour que l’histoire de l’Église catholique commence de manière visible.

pour voir le premier séminaire local). Malgré tout, au cours du XXe siècle, elle a montré des signes remar-quables de croissance et gagné en influence dans tous les sec-teurs de la société. Aujourd’hui elle œuvre essentiellement dans les trois domaines de la santé, l’édu-cation et la paix sociale. « On dit que l’Église catholique est la plus grande pourvoyeuse de soins en Afrique du Sud », affirmait d’ailleurs il y a quelques mois Mgr Ponce de Leon, vicaire apostolique d’Ingwavuma, à l’AED. À noter que la société sud-africaine reste largement chré-tienne à plus de 81% mais répartie

refuge pour les familles de migrantsLe refuge Bienvenu, soutenu par l’AED, a été fondé par les religieuses

de saint Charles Borromée. Il est le seul à Johannesburg (3,8 millions

d’habitants) qui puisse accueillir des femmes migrantes avec leurs

enfants. Selon la communauté, 72% des réfugiés sont victimes

en Afrique du Sud de crime, contre 42% des Sud-Africains. Des souf-

frances qui s’accumulent à celles déjà subies dans leur pays qu’ils ont

fui et que les trois religieuses sur place aident à soulager au quotidien.

L'Église catholique, minorité influenteCependant, très peu avait été fait pour les peuples autochtones et l’Église catholique de l’Afrique australe a longtemps été considérée comme étrangère (il a fallu attendre 1927

Afrique du Sud

en seize Églises officielles différentes, les catholiques représentant donc une minorité. En 1952, la conférence des évêques a fait sa première décla-ration contre le racisme. Et cinq ans plus tard, elle a condamné l’apar-theid comme « intrinsèquement mauvais ». Pourtant, « comme la plupart des Églises chrétiennes, l’Église catholique a été relativement lente en opposition à l’apartheid », peut-on lire sur le site de la confé-rence des évêques d’Afrique aus-trale. Cependant, sous l’influence du concile Vatican II et stimulée par des protestations de clergé noir, l’opposition catholique a commencé

L'apartheid racial a certes disparu mais il a laissé place à l'apartheid social.

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Le pays est largement chrétien mais avec une minorité de catholiques. À gauche, la paroisse de Prétoria. À droite, l'église du Cap.

L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 15

Page 16: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

persistent et n’épargnent personne, malgré les efforts de l’Église et du gouvernement pour les stopper. Le 3 novembre dernier, le curé de Pretoria, le P. Craigh Laubsher, a été hospitalisé dans un état cri-tique après une brutale agression. À Johannesburg, on ne compte pas moins de cinquante meurtres par jour rien que dans la ville. Le fossé entre riches et pauvres est

gigantesque. Noirs et Blancs ne se mélangent pas réellement, 80% des terres appartiennent tou-jours à des propriétaires blancs et 8 millions d’Africains noirs sont sans abri. Le chômage touche plus de 40% de la population et le sida atteint des proportions tout autant vertigineuses, même si l’Afrique du Sud est l’un des rares pays de l’hémisphère sud à pouvoir fabri-quer des antirétroviraux. La corrup-tion sévit à tous les niveaux et l’unité entre la population aux onze langues off iciel les et

à s’intensifier. Le soulèvement de Soweto de 1976 a conduit à une prise de conscience encore plus grande, et à la fin de l’apar-theid, les catholiques ont continué de s’impliquer dans la réconciliation entre les peuples auprès du gouver-nement. À l’instar du P. Jacques Amyot d’Inville, père Blanc fran-çais, qui a été président de l’un des nombreux « Comités de Paix ». Leur but, explique-t-il « était d’ai-der à préparer un climat de paix pour les premières élections géné-rales ouvertes à tous en avril 1994 » qui verront la victoire de Mandela. Il s’agissait de sillonner les routes pour « encourager à voter plutôt que de se battre ». Peu de temps après, le P. Jacques a été nommé rappor-teur officiel de la commission Vérité et Réconciliation créée pour enquê-ter sur les violations des Droits de l’homme depuis 1960.

L’Église impliquée dans Vérité et réconciliationLa création de cette commission, issue de longues négociations entre le Congrès national africain (ANC) de Nelson Mandela et le gouverne-ment, a sans nul doute contribué à épargner un bain de sang à l’Afrique du Sud libérée de l’apar-theid. S’y présentaient d’une part ceux qui avaient commis des crimes et voulaient obtenir une amnistie et d’autre part, les victimes qui vou-laient obtenir une compensation. Le but : faire la vérité sur les faits commis, désactiver le désir de ven-geance et peu à peu construire la réconciliation entre les peuples. La personnalité de Mgr Desmond

Tutu, archevêque angl ican de Johannesburg, et les notions chrétiennes de pardon et de repentir ancrées dans la société sud-africaine ne sont évidemment pas étrangères à la réussite de cette expérience d’amnistie. Sans compter le cha-risme de Nelson Mandela et son en-gagement pour la promotion de la dignité humaine qui lui vaudra de recevoir le prix Nobel de la Paix.

Les défis de l’Église aujourd’hui Si la commission sous l’impulsion de Nelson Mandela a certainement réussi sur le plan de la vérité (vingt-deux mille victimes ont été identi-fiées), certains disent pourtant qu’elle n’a pas totalement réussi sur le plan de la réconciliation. Des sen-timents de vengeance et d’amer-tume continuent de flotter dans le pays. Certes l’apartheid racial est vaincu mais d’aucuns disent qu’il a laissé la place à un apartheid social. La criminalité et la violence

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Les célébrations sont empreintes de chants et de joie. ici, à Prétoria.

AFrIQuECARNET DES CONTINENTS

16 ■ L’égLise dans Le monde n° 167

Page 17: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

de diamants et d’argent). Son entrée en 2011 dans les Bric (Brésil Russie Inde Chine) laisse aussi entrevoir son rôle à jouer dans les années à venir. Selon le père Jacques Amyot d’Inville : « Il faut vivre l’après Mandela de manière posi-tive. Dieu continue comme depuis toujours à travailler dans les cœurs de tous les Sud-Africains de bonne volonté et ils sont très nombreux. » Un encouragement qui rejoint

ses nombreux migrants reste un vrai défi. Face à cette dure réalité, la mort de Mandela n’est pour cer-tains qu’un douloureux souvenir rempli de nostalgie évincée de toute espérance.

Et pourtant….Certains au contraire voient dans le départ de « Madiba » l’opportu-nité pour le pays de se prendre réel-lement en main, fort de tout ce que le premier président de l’Afrique du Sud élu démocratiquement a transmis. Et fort de ses ressources naturelles, notamment dans son sous-sol (l’Afrique du Sud est le 2e producteur mondial d’or,

les vœux conclusifs de l’exhortation apostolique post-synodale Africae Munus remis le 19 novembre 2011 par Benoît XVI au Bénin : « Puisse l’Église catholique en Afrique être toujours un des pou-mons spirituels de l’humanité, et devenir chaque jour davantage une bénédiction pour le noble conti-nent africain et pour le monde entier ! » ■

Amélie de La Hougue

Le père Mick Deeb, responsable du bureau Justice

et Paix à la Conférence des évêques sud-africaine,

répond à nos questions sur la situation actuelle

de l’Afrique du Sud.

En quoi consiste votre action à Justice et paix ?Nous travaillons à la lutte contre la criminalité, contre

la propagation du VIH, à la création de moyens de sub-

sistance, la prévenance du viol… Nous dénonçons for-

tement la corruption à tous les niveaux et œuvrons aussi

sur des sujets tels que le choix de sources d’énergie re-

nouvelables ou la promotion d’un accès juste de la terre.

Sur le plan national et local, Justice et Paix travaille avec

les décideurs politiques, les autres Églises, les ONG et

les médias. Grâce à cela, l’Église est maintenant consi-

dérée comme un acteur crédible et important à prendre

en compte sur tous ces sujets.

Quelle évolution avez-vous vu dans la société depuis la fin de l’apartheid ?Après l’enthousiasme et l’espoir qui ont accompagné

la fin de l’apartheid, l’Afrique du Sud est devenue comme

la plupart des démocraties dans le monde, pleine d’op-

portunistes et contrôlée par des gens obsédés par

le maintien du pouvoir à tout prix. Ainsi, la corruption

n’a cessé de croître depuis 1994 et est en train de tuer

l’âme de la nation. La mort de Mandela, qui a donné lieu

à une vague d’admiration pour son intégrité, a servi

à mettre justement cela en évidence. Néanmoins, il reste

beaucoup de bons fonctionnaires qui font encore

de nobles efforts pour relever les grands défis auxquels

est confronté le pays. On en voit les preuves dans les

progrès pour réduire la pauvreté en permettant aux gens

d’avoir accès à un minimum vital.

pensez-vous qu’il y aura un « après Mandela » ? Je ne pense pas que la mort de Mandela aura un impact

majeur sur le pays. Le sens de l’unité autour de son hé-

ritage sera temporaire (un peu comme la Coupe du

monde 2010), même si sa mémoire est utilisée par

tout le monde pour faire valoir ses bonnes intentions.

Néanmoins, l’Afrique du Sud est aujourd’hui une démo-

cratie dynamique et les gens prennent de plus en plus

le pouvoir en mains. Cependant, même si une culture

démocratique et critique est en train d’émerger douce-

ment, l’absence d’une forte autorité morale laisse

craindre que la fragmentation politique devrait se pour-

suivre pendant un certain temps. Amélie de La Hougue

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Afrique du Sud

Le cap de Bonne espérance, promontoire de l'Afrique australe.

L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 17

Page 18: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

Chili

L'après Pinochet

S’étirant le long de la cor-dillère des Andes et de l’océan Pacifique, le Chili

possède une superficie de presque 20% de plus que la France pour une population atteignant à peine le quart. 87,5% des Chiliens se disent chrétiens. Parmi eux, 60% seraient de confession catho-lique, même s’ils étaient 10% de plus il y a vingt ans.

La population est donc forte-ment imprégnée par les valeurs et la culture chrétiennes, bien que les athées représentent actuellement

plutôt discret dans l’échiquier international, le Chili fait figure de spécimen quant à ses lois sociétales. restes de dictature ou choix volontaire ? L’Église a aujourd’hui un rôle primordial à jouer pour éclairer les consciences et les protéger des idéologies occidentales.

10% de la population totale. Parmi les minorités, outre les juifs, citons les musulmans et les reli-gions animistes. En effet, il existe encore au Chili une religion tradi-tionnelle d’origine indienne, celle des mapuches. Si seule une petite partie des habitants pratique encore

population : 17 094 275 millions

d’habitants

religions : 61,5% catholiques, 26% de protestants

et orthodoxes, 10% athées

Capitale : Santiago

Superficie : 756 950 km2

Langue officielle : espagnol

cette religion (1,6%), il arrive, comme dans d’autres pays mar-qués par les religions animistes, que certains chrétiens pratiquent la religion mapuche de façon cultu-relle et traditionnelle, en paral-lèle de leur culte officiel. Chez les Mapuches, il est intéressant

Argentine

Brésilpérou

Bolivie

uruguay

paraguay

Santiago

CARNET DES CONTINENTS AMÉrIQuES

18 ■ L’égLise dans Le monde n° 167

Page 19: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

le Sénat a finalement autorisé la rupture du mariage civil.

Quant à l’avortement, même thé-rapeutique, il est interdit depuis 1989. L’enfant à naître obtient ainsi l’éga-lité des droits face à sa mère.

Le Chili, à l’instar de l’Irlande, défend la vie et remet en doute cer-taines idées reçues. Ainsi, la prési-dente socialiste Michelle Bachelet puis son successeur de droite, Sebastian Piñera, ont mis en place des programmes d’aide aux enfants, aux femmes en difficulté et des for-mations pour les parents. En 2011, le Chili a reçu l’International Protect Life Award, prix décerné à New York par une trentaine d’organismes pro-vie en lien avec l’Onu à l’occasion de la 55e session de la Commission de la condition juridique et sociale de la femme.

Dans ce pays d’Amérique du Sud, les femmes n’ont pas plus le droit à la pilule contraceptive qu’à l’avor-tement, ce dernier restant mal-gré tout sujet à débat et scandale, notamment depuis la triste his-toire de la petite Belén, enceinte à onze ans après avoir été violée par le concubin de sa mère.

Contre le mariage des personnes homosexuellesSi le Chili connaît les mêmes ques-tions sociétales que la France, le sentiment populaire est bien diffé-rent. En mars 2012, un jeune homo-sexuel, Daniel Zamudio, était battu à mort dans la capitale de Santiago. L’Église chilienne a subi elle aussi plusieurs attaques pour avoir proclamé clairement son désac-cord avec tout acte de violence ou

de relever que les chefs spirituels, les Machis, sont généralement des femmes, qui possèdent, en tant que « Chaman », le pouvoir de guérir ou de jeter des sorts. Leurs croyances sont fondées sur le culte des esprits des ancêtres et des esprits de la nature. Les Mapuches possè-dent également des mythes et des musiques religieuses, qu’on retrouve spécialement dans les Andes et aussi en Argentine.

L’Église catholique chilienne est séparée de l’État depuis 1925 mais sa parole reste influente comme on a pu le constater en 2004/2005 sur les questions de société comme le divorce et l’avortement et aujourd’hui sur le mariage homosexuel.

En dehors de toute idéologie reli-gieuse, la société chilienne est mar-quée par ses valeurs traditionnelles et son histoire fortement influen-cée par la politique de Pinochet. Le Chili était, avec Malte, l’unique et dernier pays occidental à interdire le divorce. C’est en octobre 2003, après huit années de débat, que ©

AED

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Procession dans le village de Macaya pour l'inauguration de l'église restaurée par l'AED.

Bible pour enfant en espagnol, distribuée par l'AED.

Chili

L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 19

Page 20: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

toute discrimination de personne. C’est donc l’Église catholique qui a pris la défense des personnes discriminées, à la suite de quoi la loi Zamudio a été mise en place pour la prévention et la punition de toutes sortes de discriminations.

Cela dit, l’Église catholique et les communautés chrétiennes du Chili se sont associées à la société civile pour exposer leurs convictions et leur engagement en rédigeant une lettre collective adressée au président de la République et aux membres des commissions législative et judiciaire exprimant leur point de vue défa-vorable à l’union des personnes homosexuelles.

Depuis juin 2011, le gouvernement donne des instructions aux minis-tères visant l’application concrète du service pastoral dans les hôpi-taux, les prisons, au sein des forces armées et des forces de sécurité publiques, afin que chacun ait le droit et la possibilité de partici-per régulièrement au culte auquel il appartient. Ces instructions visent également à faire respecter l’égalité religieuse dans les écoles.

Cet idéal prône le respect des convictions personnelles et l’impo-sition d’aucune pratique religieuse. Actuellement et toujours au nom ©

AED

« regalos con sentido »Des cadeaux qui ont un sens. Cette campagne est développée par l’Aide

à l’Église en Détresse présente au Chili depuis 1997. Depuis 2003, cette

campagne a pour but de transmettre les valeurs chrétiennes à travers des

cadeaux offerts aux particuliers ou aux entreprises (calendriers, jeux,

livres,…). L’argent gagné par ces ventes est utilisé pour les missions

au Chili ou dans le monde entier. En achetant un de ces objets, vous don-

nez un sens à votre cadeau par le message bienveillant qu’il véhicule mais

aussi par le don que vous faites pour l’Église.

de cette égalité, il serait même ques-tion de reconnaître les fêtes musul-manes et baha’i. Le bahaïsme est un mouvement religieux, dissident du chiisme, né en Perse en 1790. Pourtant, ces deux religions ne représentent qu’un tout petit pourcentage de la population. Faut-il donner les mêmes droits à une minorité et à une majorité ? Les communautés chrétiennes com-mencent à se sentir lésées...

Le scandale des abus sexuelsSi beau que soit ce pays, il n’est pas plus épargné que les autres pays d’Amérique latine par les affaires d’abus sexuels qui touchent l’Église. Plusieurs accusations ont été por-tées depuis quelques années contre des religieux. En décembre 2013, l’archevêque de Santiago, Ricardo Ezzati, s’est rendu à la Chambre des députés pour écouter les accu-sations énoncées. Selon les députés, il s’agirait d’une douzaine d’en-fants abusés, dont cinq d’entre eux accueillis par des centres religieux.

L’archevêque a reconnu la gra-vité de la situation mais a demandé à son tour aux députés de lui mon-trer les mesures mises en place par le pays ces dernières années

pour tenter de protéger les enfants et leur donner de bons éducateurs. Un médecin psychiatre se serait levé à son tour en reprochant aux dépu-tés de n’avoir pas agi depuis vingt-cinq ans, avant d’être mis dehors pour turbulence.

Ces crimes semblent toucher toutes les catégories sociales et l’Église doit arriver à les combattre aux côtés de l’État chilien.

La socialiste Michelle Bachelet a été élue présidente, pour la deu-xième fois, dimanche 15 décembre, avec 62 % des suffrages face à la can-didate de droite Evelyn Matthei (38 %). Elle a promis des trans-formations et des réformes pour une plus grande justice au Chili ; réformes qu’elle compte mettre en place dans les cent jours suivant

20 ■ L’égLise dans Le monde n° 167

AMÉrIQuESCARNET DES CONTINENTS

Page 21: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

Chili

son investiture, le 11 mars prochain.Son idée est de faire sauter les

« verrous antidémocratiques » de la Constitution de 1980 héri-tée de la dictature de Pinochet. Mais les attentes de la popula-

tion chilienne paraissent davan-tage tournées vers la réforme de l’éducation, réclamée à coups de manifestations depuis 2011. Michelle Bachelet prévoit donc de réformer l’éducation, ainsi que la santé, les services publics et d’aller jusqu’à une réforme fiscale. Parmi ses projets, la légalisation de l’avortement et

l’ouverture du débat sur l’union des personnes de même sexe figurent en bonne position.

Pourtant, lors de son précédent mandat, la présidente avait créé le programme « Le Chili gran-

dit avec toi » pour la défense des enfants. A-t-elle changé de straté-gie ? L’idéologie socialiste va-t-elle prendre le dessus sur la culture chré-tienne ? Quelle est la part de vérité du matraquage médiatique ?

Avec ce nouveau mandat socia-liste, la question des valeurs du Chili se pose. Vont-elles radi-calement basculer ? Ne sont-elles

que des vestiges de la dictature d’Augusto Pinochet ou seront-elles désirées et défendues par la nou-velle génération pro-vie ? L’enjeu est de taille et l’Église catholique va avoir un grand rôle à jouer pour préserver la dignité humaine.

prochaine visite du pape ?Le Chili a des frontières com-munes avec l’Argentine, le Pérou et la Bolivie. En octobre 2013, les évêques de Bolivie, du Chili et du Pérou se sont rencontrés à La Paz, capitale de la Bolivie. Par la proximité culturelle et géo-graphique de leur pays, ils ont pu partager leurs problèmes communs (trafics de drogues, réalités migra-toires, pauvreté, crise de la famille, abandon des jeunes, etc.) et forts de leur foi, réaffirmer leur volonté de s’unir et s’engager à nou-veau pour favoriser l’intégration, la justice et l’unité. Les évêques ont conclu de cette façon : « Nous désirons faciliter la connaissance mutuelle et partager des expériences qui amènent à dépasser les idéolo-gies nationalistes pour vaincre tout ce qui nous sépare, car plus nous nous connaîtrons, plus nous pour-rons marcher ensemble. »

Le 26 octobre 2013, le pape François a reçu un groupe d’an-ciens élèves des jésuites d’Uru-guay et leur a annoncé : « Lorsque je visiterai l’Argentine, je devrai visiter aussi le Chili et l’Uruguay, tous les trois ensemble. Nous nous rencontrerons là-bas. » Une visite se profilerait dans ces État voisins en 2016... ■

Hortense de Villers

« Capillaspara Chile »

Ce programme soutient et pro-

meut la construction de nou-

velles chapelles dans les régions

les plus démunies du pays.

Grâce aux collectes de fonds et

aux dons, 37 chapelles ont vu

le jour et 45 autres chapelles

d’urgence ont été construites

dans les régions dévastées par

le tremblement de terre de 2010.

L’élévation de tous ces clochers

est un symbole d’espérance

pour les populations les plus

pauvres et délaissées qui peu-

vent enfin bénéficier d’un lieu

de prière et avoir accès au ser-

vice pastoral.

Messe d'inauguration de l'église de Parca dans le désert chilien.

La cordillère des Andes marque la frontière est du pays.

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L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 21

Page 22: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

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Au lendemain de la semaine de l’unité des chrétiens vécue en janvier, le p. Frans Bouwen*, spécialiste des Églises orientales, arrivé en Terre sainte en 1969, dresse un tableau de l’œcumé-nisme à Jérusalem. prochain voyage du Saint-père avec S.S. Bartholomaios Ier, tentative d’une célébration de la pâque latine à la même date que les orthodoxes, recherche d’un dialogue commun des treize Églises face au conflit israélo-palestinien… les thèmes abordés par le père Blanc donnent des signes concrets d’espoirs sans pour autant cacher les difficultés.

proCHE-orIENTCARNET DES CONTINENTS

Pouvez-vous nous décrire brièvement quel est le climat œcuménique actuellement à Jérusalem et en Terre sainte ?Il est bon de s’interroger de temps en temps sur la situation réelle des relations œcuméniques entre nos Églises. À Jérusalem, comme en beaucoup d’autres endroits, nous avons l’habitude de le faire à l’occasion de la semaine de prière

Terre sainte

Climat œcuménique à Jérusalem

pour l’unité des chrétiens, au mois de janvier. Cette année, il y a en plus un autre événement important qui nous invite à un petit examen de conscience. En effet, le 5 janvier 2014, nous avons commémoré le 50e anni-versaire de la rencontre historique du pape Paul VI et du patriarche œcuménique Athénagoras Ier, ici à Jérusalem, au mont des Oliviers. Cette rencontre s’est, au fil des ans,

chargée de toute une significa-tion symbolique. L’image du bai-ser de paix entre ces deux grands chefs d’Église est devenue comme une icône de tout le développe-ment ultérieur des relations œcu-méniques entre l’Église catholique et l’Église orthodoxe. J’entends ici la parole « icône » dans tout le sens théologique qu’elle a dans la tra-dition orthodoxe : non seulement

Échanges traditionnels de vœux entre représentants des 13 Églises chrétiennes de Terre sainte.

22 ■ L’égLise dans Le monde n° 167

Page 23: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

une photo, mais une image symbo-lique qui de manière mystérieuse, je dirais presque de manière sacra-mentelle, contient déjà la réalité qu’elle représente. Ces retrouvailles entre frères dans le Christ et dans

le ministère apostolique ont été le début d’un rapprochement vécu qui a ouvert le dialogue de la cha-rité entre catholiques et orthodoxes et a préparé le dialogue théologique commencé officiellement en 1980.

Quels sont à Jérusalem les projets œcuméniques prévus pour célébrer ce 50e anniver-saire de la rencontre du pape Paul VI et du patriarche œcuménique Athénagoras Ier ?Plusieurs idées avaient déjà été avancées, quand le patriarche œcuménique actuel, S.S. Bartho-lomaios Ier, successeur du patri-arche Athénagoras Ier, a suggéré au pape François, lors de l’inaugu-ration de son ministère d’évêque de Rome, qu’ils se rencontrent tous les deux à Jérusalem pour com-mémorer cet événement historique et symbolique. Le 5 janvier dernier, cinquante ans après, jour pour jour, la rencontre historique entre le pape Paul VI et le patriarche Athénagoras, le pape François annonçait sa pro-chaine visite en Terre sainte pour les 24 et 26 mai 2014. Son pèle-rinage comportera trois étapes : Amman, Bethléem et Jérusalem. Une telle rencontre demande évi-demment une sérieuse prépara-tion car elle comporte toujours, qu’on le veuille ou non, des impli-cations diplomatiques et même politiques, en particulier en raison de la situation générale complexe dans la région. Toutefois, selon les dernières nouvelles, les prépa-ratifs sont en bonne voie et le pape a prévu de célébrer cette rencontre œcuménique avec le patriarche Bartholomaios au Saint-Sépulcre

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Terre sainte

Comment se vit la semaine de prière

pour l’unité des chrétiens à Jérusalem ?

Cette semaine a quelque chose

d’unique à Jérusalem. Chaque

jour, un office de prière est pré-

paré par une Église différente,

catholique, orthodoxe ou protes-

tante. Tout en suivant le thème

de l’année proposée par

le Conseil œcuménique des

Églises et le Conseil pontifical

pour l’unité, les Églises préparent

un office conformément à leur

tradition liturgique propre, orien-

tale ou occidentale. C’est une

occasion unique pour connaître

la richesse des nombreuses tra-

ditions présentes à Jérusalem.

Et une source d’espérance pour

l’avenir.

même, avec tous les représen-tants des Eglises chrétiennes de Jérusalem.

Qu’attendent les Églises de Jérusalem de la future visite du pape François et de sa rencontre avec le patriarche Bartholomaios ?Ce sera d’abord une occasion de se souvenir de la nouveauté et de la beauté de la rencontre de 1964. Nous espérons que cela encoura-

gera les Églises à s’interroger sur la façon dont elles ont perpétué ce souvenir et s’en sont inspirées. Il sera donc important d’impliquer étroitement les différentes Églises dans la préparation de la prochaine visite du pape et du patriarche et de trouver moyen de leur permettre d’y participer activement. Beaucoup espèrent qu’elle sera l’occasion de donner un nouvel élan à l’enga-gement œcuménique des Églises et pourra donner naissance à quelque initiative concrète nouvelle.

Est-il possible de distinguer d’autres étapes significatives dans les relations œcuméniques à Jérusalem ?Pour les relations entre catholiques et orthodoxes, une autre étape

© D

RLa rencontre entre le pape François et SS. Bartholomaios se déroulera au Saint-Sépulcre.

L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 23

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au temps du premier soulèvement palestinien (intifada), à partir de décembre 1987. Face à la situa-tion de violence et de souffrance, les chefs des Églises de Jérusalem ont eu la sagesse de se concerter afin d’adopter une attitude commune et de parler d’une même voix, appelant à une paix juste pour tous. À partir de ce moment, ils ont commencé à publier des déclarations et des messages communs ; en particulier chaque année ils rédigent un mes-sage commun pour Noël et Pâques et continuent à diffuser ensemble des appels ou déclarations quand des événements importants se pro-duisent. Ils ont publié ensemble deux mémorandums, en 1994 et en 2006, sur la signification reli-gieuse de Jérusalem pour les chré-tiens et les droits qui en découlent pour les communautés chré-tiennes. Depuis lors aussi, les chefs de treize Églises à Jérusalem (lire encadré p. 24), ayant des évêques à leur tête, se rencon-trent à peu près tous les deux mois

importante a été le retour des reliques de saint Sabas, fondateur du célèbre monastère dans la vallée du Cédron qui porte le même nom. Ces reliques ont été apportées de Venise, où elles se trouvaient depuis le Xe siècle, à Jérusalem, en passant par Athènes, en octobre 1965. Le patriarcat grec orthodoxe célèbre toujours ce retour avec solennité liturgique. Malheureusement, les fruits œcu-méniques n’ont pas été tout à fait ce qu’on aurait pu souhaiter. Ainsi,

aujourd’hui, les moines de Saint-Sabas ne permettent pas aux catho-liques de réciter une prière près des reliques quand ils visitent le monastère.

Vivre au milieu du conflit entre Palestine et Israël participe-t-il à un rapproche-ment des Églises ?Effectivement, une autre étape importante dans les relations œcuméniques a été franchie

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Les treize Églises de JérusalemLes premières communautés chrétiennes à Jérusalem ont vécu

en harmonie jusqu’en 451 où les orthodoxes (grecs), en reconnaissant

le concile de Chalcédoine, se séparent des Églises orientales ortho-

doxes (coptes, arméniennes et syriennes). La deuxième division

majeure est apparue en 1054 entre les Églises d’Orient et d’Occident.

C’est ainsi qu’aujourd’hui, Jérusalem a treize Églises:

l six catholiques : les latins, les grec-catholiques (ou melkites),

les maronites, les syriens, les arméniens et les chaldéens,

l cinq orthodoxes : les grecs, les arméniens, les coptes, les syriens

et les éthiopiens,

l deux protestantes : les anglicans et les luthériens.

L’ensemble représente entre 1 à 2 % de la population de la Terre sainte.

L'église de la Dormition est tenue par les latins.

Prière pour l'unité des chrétiens dans la paroisse melkite de Jérusalem.

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Terre sainte

sur le calendrier grégorien depuis la fin du XVIe). Ils ont proposé cette initiative à titre d’essai. Si cette pre-mière célébration commune s’avé-rait positive, elle deviendrait géné-rale et définitive à partir de 2015, car en 2014 les dates occidentales et orientales coïncident de toute façon. Le moment est donc venu de faire une évaluation attentive de ce qui a été vécu cette année. Il nous faut

reconnaître qu’il y a eu des réactions très différentes dans les paroisses catholiques et les communautés religieuses. En conséquence, l’ap-préciation n’est pas facile. Les uns se disent favorables, les autres sont portés à dire que l’initiative a créé de nouvelles dissonances qu’il vau-drait mieux éviter. La coordina-tion œcuménique aussi n’a peut-être pas été suffisamment préparée. Pour le moment, la suite concrète qu’il convient de donner à cette ini-tiative n’est pas claire. ■

Propos recueillis

par Amélie de La Hougue

pour s’entretenir de questions qui se posent à eux tous.

Ces discussions communes portent-elles également sur l’aspect pastoral ?Il est vrai que ces échanges portent surtout sur des problèmes externes, comme la difficulté d’obtenir des visas pour le personnel religieux, les difficultés de circulation entre Jérusalem et les Territoires pales-tiniens, en particulier Bethléem, etc. On pourrait souhaiter une plus grande collaboration pastorale, mais il importe de se réjouir de tout ce qui existe et qui est un bon point de départ pour aller de l’avant. Après la rencontre de 1964, la plus belle célébration œcuménique en Terre sainte a été l’inaugura-tion solennelle commune du grand jubilé de l’an 2000. Le 4 décembre 1999, la place centrale de Bethléem était remplie de chrétiens, locaux et pèlerins, représentant les diffé-rentes Églises, tandis que les chefs des Églises étaient assis ensemble

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derrière la même table sur le podium. Durant tout l’après-midi, les chants et prières des différentes Églises se sont succédé et un message com-mun pour le jubilé a été présenté. Malheureu sement il n’a pas été pos-sible d’avoir une autre célébration de cette envergure depuis lors.

En 2013, l’Église catholique en Terre sainte a pris l’initiative de célébrer Pâques à la même date que les ortho-doxes. Quels ont été les fruits œcuméniques ?Les fidèles tant catholiques qu’or-thodoxes de Terre sainte demandent depuis longtemps une unification de la date de Pâques. Le synode spécial des évêques pour le Moyen-Orient, en octobre 2010, a égale-ment encouragé les initiatives dans ce sens. Dans cet esprit, les chefs des Églises catholiques ont pris la décision de célébrer Pâques en 2013 à la date des orthodoxes (ndlr : les orthodoxes sont encore sur le calendrier julien et les latins

*Le P. Bouwen est membre de la Commission internationale pour le dialogue théologique entre l’Église catholique et l’Église ortho-doxe, vice-modérateur de la commission Foi et Constitution du Conseil œcuménique des Églises (Genève) et directeur de la revue « Proche-Orient Chrétien ».

Église orthodoxeSte Marie-Madeleine.

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ASIECARNET DES CONTINENTS

Fondée par l’apôtre Thomas, l’Église en Inde, avec ses dix-huit millions de fidèles,

n’a rien à envier à la « fille aînée de l’Église » : elle est aussi ancienne et compte finalement plus de pratiquants que l’Église en France ! La bienheureuse Mère Teresa, fondatrice des Missionnaires de la Charité, en est la figure emblématique.

Missionnaire, c’est la réalité de l’Église en Inde aujourd’hui, avec un nombre considérable de prêtres et de religieuses en mission à l’étran-ger, à tel point que soutenir maté-riellement et spirituellement cette Église, surtout la formation, c’est réellement investir pour la mission universelle de l’Église.

Et pourtant, à l’intérieur du pays, plusieurs sources semblent

confirmer que l’Église y manquerait d’audace missionnaire. Premier obs-tacle : très (trop ?) engagée dans le service social (écoles et dispen-saires), elle n’aurait plus le temps ni l’énergie nécessaires pour l’évangélisation. Deuxième obs-tacle : une théologie de la mission périmée où le salut serait accessible à tous, sans nécessité de passer par le Christ.

Quoi qu’il en soit et bien que très modeste en taille – les chrétiens représentent 2,3 % de la popula-tion indienne et les catholiques environ 1,5 % – l’Église en Inde a une immense force de témoignage, notamment par son action édu-cative et caritative : vingt millions d’étudiants dans vingt-cinq mille établissements et 25 % des hôpi-taux et centres de soins. Cette force

Inde

élections 2014 : entre séduction et intoléranceAlors que l’Inde se prépare à vivre des élections générales en mai 2014, la minorité chrétienne est partagée entre l’espérance que peut susciter la liste des promesses électorales et l’inquiétude devant l’augmentation des attaques dont elle est victime. Procession lors

d'une ordination à Sunamaha. L'Église, bien que minoritaire, reste visible.

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une cible de choix des politiques car leur vote représente une réserve de voix non négligeable pouvant décider de l’issue des scrutins dans certaines régions.

C’est le cas par exemple du Kerala, État situé dans le sud-ouest de l’Inde, et où les chrétiens repré-sentent un peu plus de 20 % de la population. Le BJP, parti nationa-liste hindou, n’y a encore jamais obtenu un seul siège au Parlement, ce qui explique l’intensification de sa campagne de séduction des chré-tiens lors de ces dernières semaines. Le BJP, comme tous les autres partis politiques en Inde, croit fermement qu’il n’y a pas d’en-nemis irréductibles en politique.

Il voudrait bien que le symbole de son parti, le lotus, fleurisse égale-ment au Kerala. Il serait même très content de voir le lotus fleurir sur la croix. Cette grande séduction fonctionnera-t-elle ?

Au même moment, c’est le tenant de la ligne dure, Narendra Modi, qui a été désigné par le BJP au niveau national comme candidat au poste de premier ministre pour ces mêmes élections. Narendra Modi est un ancien militant du « Rashtriya Sawayamsevak Sangh » (RSS), l’une des organisations hindoues les plus actives, radicales et vio-lentes. Le BJP, connu pour son sou-tien aux groupes tels que le RSS, milite pour un État « 100 % hindou ».

Les Sœurs de la charité maintiennent sans faiblir leur rôle auprès des jeunes.

Le plus grand temple hindou du monde

Moins de deux semaines après l’inauguration très médiatisée en no-

vembre 2013 du chantier de la plus grande statue du monde à la gloire

de Sardar Patel, héros de l’indépendance de l’Inde, dans l’État du Gujarat,

c’est au tour de l’État du Bihar de faire la Une des médias indiens avec

un projet encore plus démesuré, celui de la construction du plus grand

temple hindou jamais édifié. Les élections générales de mai 2014 semblent

ainsi susciter des vocations architecturales au sein de la classe politique

indienne.

dérange-t-elle ? Confrontée à une persécution latente dans l’ensemble du pays et à une persécution vio-lente dans certaines régions, l’Église poursuit sa mission avec une cer-taine appréhension.

Élections généralesEn Inde, les élections sont en géné-ral un temps béni pour deux caté-gories de la population, les pauvres et les minorités religieuses, comme les chrétiens. Celles-ci sont alors l’objet de toutes les attentions de chaque parti politique qui les cour-tise de façon éhontée. Les pauvres sont particulièrement recherchés, car ils constituent plus de 70 % des électeurs en Inde. Mais les minorités religieuses sont elles aussi devenues

Superficie : 3 287 263 km²

population :1 241 millions

religions : hindouisme : 80,5%

islam : 13,4% christianisme : 2,3%

sikhisme : 1,9% bouddhisme : 0,7%

jaïnisme : 0,5% zoroastrisme, judaïsme

Langue officielle : anglais et hindi.

Dix-huit langues constitutionnelles.

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Inde

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Birmanie

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Bangladesh

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Difficile dans ces conditions d’ima-giner quel bénéfice les chrétiens pourraient en tirer.

Sur le frontIl y a aujourd’hui en Inde envi-ron 24 000 prêtres, la plupart étant relativement jeunes, 6 000 frères dans l’enseignement et 100 000 reli-gieuses. La plupart sont hautement qualifiés (doctorat en théologie et en écriture sainte...). L’Église catho-lique y compte trois rites : latin, syro-

malabar et syro-malankar. Les dix-huit millions de catholiques y sont massivement fidèles à une pratique régulière.

Cette fidélité est d’autant plus nécessaire que leur situation est loin d’être paisible. Même si les attaques les plus violentes sont concentrées au nord du pays dans ce qu’on appelle la « Hindi Belt »

ne signifie pas l’oubli. L’AED vient de publier (octobre 2013) un recueil des événements dramatiques sur-venus dans l’État d’Orissa en 2008 rédigé par un journaliste indien, Anto AKKARA, et qui s’intitule Martyrs d’Orissa – Nouveaux témoins du Christ en Inde.

Nulle quête de sensationnalisme ou de curiosité morbide dans cette longue litanie de souffrances, mais une stèle mémorielle en l’honneur de tous ces chrétiens dont la pos-térité admirera la foi et la fidélité au Christ, comme l’indique dans sa préface le cardinal Oswald Gracias.

Face à cet acharnement, on est en droit d’en chercher le sens. Si on en veut ainsi à l’Église, c’est sans doute qu’elle dérange mais dans ce cas, pourquoi l’Église dérange-t-elle ? Tout d’abord, son

(on compte des centaines d’attaques anti-chrétiennes chaque année), on note une discrimination rampante contre les chrétiens, même dans le sud, depuis une dizaine d’années. Cette détériora-tion est essentiellement le résultat de l’activisme politique du BJP, responsable d’un climat d’impu-nité régnant, quant aux violences commises au nom de l’hindutva, une idéologie de l’extrême-droite hindoue. Au-delà des attaques,

force est de constater la tentative de légaliser des restrictions de la liberté religieuse, avec le vote de lois anti-conversion (impossibilité de devenir chrétien).

Reste la violence quasi quo-tidienne qui finit à juste titre par exaspérer la communauté chré-tienne, même si le pardon demeure au cœur de notre foi. Mais le pardon

ASIECARNET DES CONTINENTS

L’échec total de la justice

À Bhubaneswar le 30 octobre

2013, 54 extrémistes hindous

accusés d’être responsables

de saccages et de violences

antichrétiennes à Noël 2008

dans le district de Kandhamal

(État d’Orissa) ont été acquittés

faute de preuves suffisantes.

Pour le Conseil global des chré-

tiens indiens (GCIC), ce procès

a démontré « l’échec total

de l’administration et de

la justice ». Selon le GCIC,

les preuves étaient pourtant

évidentes et incontestables.

Ces « absolutions trop faciles »

sont une honte pour l’Inde.

Le cardinal Toppo prie devant une statue décapitée à Balliguda.

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Inde

influence dans la société indienne est largement supérieure à sa taille. Ensuite, il y a des conversions, même s’il s’agit essentiellement de dalits (intouchables) et de popu-lations tribales. Enfin, parce qu’elle est une réelle menace pour le sys-tème des castes.

Le cardinal Telesphore Placidus Toppo, archevêque de Ranchi, va même jusqu’à dire que les chré-tiens sont de la « matière explo-sive » dans le système des castes. Avec leurs programmes de forma-tion et d’aide sociale et sanitaire pour les populations hors castes, l’Église a en effet favorisé leur décollage. Si tous les hors castes et les groupes tribaux devenaient chrétiens, ils pourraient croître à deux cents millions, estime le car-dinal, menaçant ainsi l’hégémonie du système traditionnel des castes.

Le pogrom contre les chrétiens en Orissa, qui a causé un véri-table « tsunami humain » selon Mgr Toppo, est focalisé sur la reli-gion, mais les causes profondes sont en réalité économiques et politiques.

Elles sont liées aux prêts à usure que les organisations nationalistes font aux plus pauvres dans les commu-nautés tribales et parmi les dalits, ce qui ruine des familles entières. C’est un système d’exploitation lar-gement répandu en Inde, semble-t-il.

Les filles ont disparu !L’Église dérange également par son action opiniâtre en faveur des femmes, dont la situation a empiré ces dernières années. Toutes les sept minutes, une femme meurt pour des causes liées à la grossesse, tandis que l’élimination volontaire des fœtus féminins a atteint des proportions dramatiques. Selon un récent rapport de l’UNICEF, 71 000 enfants naissent chaque jour en Inde, mais seules 31 000 sont des filles. Ce déficit d’au moins 5 000 filles par jour signifie près de 2 millions de filles en moins par an !

Selon un rapport du programme des Nations unies pour le déve-loppement de 2010, il manquerait quarante-trois millions de femmes

en Inde. Si l'on prend en compte simplement la dernière décen-nie, le nombre des femmes esti-mées « manquantes » serait de trente-sept millions. C'est le chiffre qui a été retenu pour la campagne en faveur des femmes qui a été lancée dimanche 27 janvier 2013 par l'archidiocèse de Bombay.

Appelée « 37 million Diyas ('lumières') », cette campagne a consisté à allumer des bougies et des lampes à huile dans toutes les paroisses de l'archidiocèse entre 19h et 20h et de prier à la mémoire des 37 millions de victimes 'sacri-fiées' en Inde, « uniquement parce qu'elles étaient des femmes ». « Ces 37 millions de ‘diyas’ qui brû-lent dans la nuit symbolisent toutes les femmes victimes de ce véritable génocide qui est la honte de l'Inde », a déclaré l'archevêque de Bombay, le cardinal Gracias, qui considère que c'est avant tout « le manque de considération et le mépris de la société indienne pour les femmes qui sont à l'origine du génocide féminin ».

La campagne de l’Église de Bombay vise donc à informer et à sensibiliser un large public sur les dures réalités de la condition féminine en Inde : avortement, infanticide, meurtre pour dot, har-cèlement sexuel, viol, kidnapping, violences domestiques. Il faudrait y ajouter encore les unions forcées et la prat ique du mariage des enfants, la prostitution et le travail des fillettes, sans compter le taux exceptionnellement élevé de la mortalité des filles en dessous de cinq ans par manque de soins. ■

Marc Fromager

La politique de limitation des naissances accentue la sélection des filles.

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la communauté del'agneau

communauté du monde

CharismeLa communauté a pour mission de témoigner du mystère de l’Agneau au cœur du monde : l’Agneau, c’est Jésus, pauvre, vulnérable et désarmé qui se fait mendiant de notre amour. Par sa Croix glorieuse et sa Résurrection, l’Agneau triomphe de la mort et anéantit tout le mal du monde : « Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde. »Les frères et sœurs sont consacrés au cœur de l’Église pour vivre et an-noncer la joie de l’Évangile, dans un propos quotidien de conversion et de charité fraternelle, dans une vie contemplative toute livrée à la Parole de Dieu. C’est en pèlerins, pauvres et mendiants qu’ils sont envoyés sur les pas de saint Dominique et de saint François à la rencontre des plus pauvres pour que tous, riches et pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle de la tendresse de Dieu.

HistoriqueLa Communauté de l’Agneau, qui appartient à la famille dominicaine, fête cette an-née trente ans de fonda-tion. L’évêque responsable est le cardinal Christoph Schönborn, archevêque de Vienne en Autriche. La com-munauté est constituée d’une branche de petites sœurs et d’une branche de petits frères venant de tout pays. Lui sont rattachés des personnes laïques (célibataires, familles, enfants, jeunes) et des prêtres diocésains qui forment « la famille de l’Agneau ». Chacun selon son état de vie s’engage à vivre le mystère de l’Agneau, dans la pratique de ce qui est devenu la devise de la commu-nauté : « Blessé, je ne cesserai jamais d’aimer. »

Jeunes/VolontariatChaque été, la communauté propose aux jeunes un camp international de prière : enseignements, offices liturgiques, participation à la vie fraternelle et de service des frères et sœurs. Pendant l’année, diverses propositions sont faites également : week-ends de prière ou de chantier, rencontre des pauvres...

Cette année la communauté fête ses trente ans.

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Quelques chiffres La Communauté de l’Agneau rassemble aujourd’hui plus de cent cinquante petites sœurs et une trentaine de petits frères. Elle est présente en France (Toulouse, Marseille, Avignon, Lyon, Rennes, Béthune, Saint-Pierre), en Espagne, en Italie, en Autriche, en Pologne, en Allemagne, en Argentine, au Chili et aux États-Unis.Depuis quelques années, la communauté est entrée dans une étape nouvelle qui est la construction de « petits monastères de l’Agneau » à la fois simples et beaux, entièrement financés par la Providence, au cœur des grandes villes ou à l’écart. En France, un projet est en cours dans les quartiers nord de Marseille.

InformationsLieu communautaire en France :Saint-Pierre 11270 Plavillatél. : 04 68 60 53 11www.communautedelagneau.org

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Une présence active auprès des gens du voyage.

FormationLes frères et sœurs sont essentiellement formés par la Parole de Dieu, lue, méditée, apprise par cœur, célébrée dans des offices liturgiques très dévelop-pés. Le catéchisme de l’Église catholique, les Pères de l’Église, les textes primitifs de l’ordre des Prêcheurs, les écrits du concile Vatican II, le magistère des papes tiennent également une place privilégiée dans la for-mation. L’étude qui appartient à la vie entière n’est pas séparée du cheminement spirituel. ■

Des monastères en bois au cœur des grandes villes.

Verset biblique« C’est Lui qui est notre paix. En sa chair, en sa Personne, Il a tué la haine » (éphésiens 2, 14-16).

Missions avec les familles de Kansas City (Missouri).

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32 ■ L’égLise dans Le monde n° 167

Rendez-vous

En chemin vers RomeAvec nos enfants, l’âne Octave et notre rêve…Édouard Cortès Édition XO, novembre 2013, 251 p., 18,90 €

Pour leur voyage de noces, Édouard et Mathilde Cortès avaient décidé de marcher jusqu’à Jérusalem sur

les pas des premiers pèlerins. Aujourd’hui jeunes parents, ils sont partis randonner en famille du Puy-

en-Velay jusqu’à Rome sur l’antique voie de pèlerinage, la Via Francigena. Trois enfants, une carriole,

une tente et un âne, et c’est parti pour 1 300 km d’aventure humaine, familiale et spirituelle. On se laisse

facilement émouvoir par cette joyeuse épopée familiale retranscrite sous la plume vivante d’Édouard Cortès qui n’hésite pas,

pas à pas, à livrer au lecteur ses réflexions spirituelles et humaines. ■

La joie de l’ÉvangileEvangelii gaudium, exhortation apostoliqueÉdition Téqui, novembre 2013, 168 p. 6,50 €

« La joie de l’Évangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus. Ceux qui se laissent

sauver par lui sont libérés du péché, de la tristesse, du vide intérieur, de l’isolement. Avec Jésus-Christ,

la joie naît et renaît toujours. Dans cette exhortation, je désire m’adresser aux fidèles chrétiens

pour les inviter à une nouvelle étape évangélisatrice marquée par cette joie et indiquer des voies

pour la marche de l’Église dans les prochaines années. » Pape François. Par son ton vivant et

personnel, le pape laisse entrevoir les clés de son programme pontifical, à savoir une invitation

à rencontrer personnellement le Christ dans la Parole de Dieu. ■

coup de cœur

Kiosque

Rome – ÉcôneL’accord impossible ?Christophe Geffroy

Édition Artège, novembre 2013,

183 p., 14 €

Les discussions entre Rome et la

Fraternité Saint-Pie X ont un moment

laissé espérer qu’un accord était en-

visageable. Aujourd’hui, l’échec est

malheureusement patent. Pourquoi l’accord espéré

ne s’est-il finalement pas réalisé ?

Christophe Geffroy, également auteur de Benoît XVI et 

“ la paix liturgique ” retrace dans cet essai l’histoire des

relations tumultueuses entre la Fraternité Saint-Pie X et

l’Église, et donne des clefs de lecture pour comprendre

les deux parties. Un livre fort éclairant, quelles que

soient les connaissances du lecteur sur le sujet. ■

L’enjeu spirituel du mystère d’Israël Moïse Ballard

Édition des Béatitudes, décembre 2013,

144 p., 11,50 €

Après le concile Vatican II et le pon-

tificat de Jean-Paul II, la compréhen-

sion que l’Église a du plan de Dieu sur

le peuple juif a évolué. Jean-Paul II

affirmait : « L’Alliance [avec le peuple juif] n’a pas été ré-

voquée. » L’essai de Moïse Ballard vise à expliquer la por-

tée de ces paroles. L’auteur explore d’une manière claire,

enrichie de références bibliques, la question de l’élec-

tion d’Israël. Il emmène le lecteur visiter la crèche pour

ensuite remonter avec lui l’Ancien Testament et termine

en montrant combien le « mystère d’Israël » est un

enjeu pour la vie spirituelle d’un chrétien. ■

Page 33: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

Je reçois gratuitement le carnet de prière « Veillez et priez » avec chaque numéro de « l’Église dans le Monde »

Je m’abonne pour un an (5 numéros) : 30 € (étranger 40 €)

Je choisis l’abonnement de soutien (5 numéros) : 40 €et je permets à des personnes aux ressources limitées de s’abonner.

Par Internet : www.aed-france.org(rubrique « nous aider»)

Par courrier, en envoyant ce coupon accompagné de votre chèque (ordre : AED)

sous enveloppe affranchie àAide à l’Église en Détresse (AED), 29, rue du Louvre, CS 30057, 78750 Mareil-Marly

M Mme Père Sœur

Nom :

Prénom :

Adresse :

Code postal :

Ville :

E-mail :

Rendez-vous Kiosque

L’Odyssée de saint PaulDominique Bar

Éditions Triomphe, 19,80 €,

novembre 2013, 88 p.

Cette BD entraîne le lecteur à

la suite de l’apôtre des Gentils,

du chemin de Damas, où il sera

illuminé par l’intervention du Christ, jusqu’aux routes

de l’évangélisation. Au fil des pages de ces deux tomes,

on découvre ou redécouvre Saül, persécuteur des chré-

tiens qui, une fois converti, a pris tant de risque pour

annoncer l’Évangile par monts et par vaux. On suit

les périples de l’auteur célèbre des Épîtres qui devien-

dra avec saint Pierre martyr à Rome et pilier de l’Église

catholique. ■

CD Les Chœurs du Vatican15.99 €, Sony music,

décembre 2013

Les Chœurs du Vatican, pour

la première fois en CD. Dirigés

par Monseigneur Pablo

Colino, grand maître de

la Basilique Saint-Pierre, les Chœurs du Vatican

ont enregistré les plus beaux titres classiques et

religieux lors de trois nuits exceptionnelles dans

la basilique Saint-Pierre. Les Chœurs interprètent

les grandes pièces du répertoire sacré (Les anges 

dans nos campagnes, Cantique de Jean Racine, Jésus, 

que ma joie demeure, l’hymne pontifical …) ■

L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 33

Page 34: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

34 ■ L’égLise dans Le monde n° 167

Rendez-vous

«Peut-être est-ce la sagesse qui me manque », s’interroge Édouard Cortes, frottant sa barbe brune. Écrivain-voyageur, ce jeune homme de trente-

trois ans vient de publier un livre intitulé « En chemin vers Rome »*, récit de ses trois mois de pérégrination en famille du Puy-en-Velay à Rome. Une équipée pour le moins originale qui en a étonné plus d’un ; 1 300 km à pied sur la Via Francigena avec sa femme Mathilde et leurs trois filles de trois ans et demi, deux ans et neuf mois portées dans une carriole par un âne – Octave – qu’il faudra savoir apprivoiser. D’aucuns diront que l’expédition est effrayante quand on pense au parcours qui flirte avec les cols enneigés des Alpes et la chaleur écrasante de la Toscane, aux arrêts nets et catégoriques de l’âne aquaphobe (ou juste entêté ?) terrorisé à l’idée de passer le moindre gué, à la fièvre grimpante due à la varicelle des enfants, aux chemins glis-sants et escarpés qui feront chuter la carriole de 7 mètres (sans aucune égratignure pour personne, deo gratias). Et sans compter, rajoute le jeune père de famille, « l’éternelle question du nomade ; où dormir ce soir ? ». Surtout quand on est cinq. Plus un âne. Alors est-ce la sagesse qui manque à l’aventurier ? ou cette épopée est-elle au contraire le fruit d’une subtile alliance entre professionnalisme et rêves à accomplir, le tout enrobé d’un délicat parfum d’abandon ? Car profession-nel de l’aventure, Édouard Cortès l’est. En témoigne ses

édouard cortès,Épopée familialevers la Ville éternelle

dernières expéditions. De sa traversée en 2CV de la France à Saigon, lorsqu’il était étudiant, jusqu’aux 5 788 km parcourus à pied de Paris à Jérusalem avec sa jeune épouse en voyage de noce, en passant par les prisons du Caucase quelques années plus tôt et j’en passe, l’expérience d’Édouard n’est plus à refaire. « L’aventure a toujours eu pour moi des parfums exo-tiques », explique-t-il, comme si nous pouvions encore en douter. Parfums exotiques et aussi spirituels, pour-rait- il rajouter, lui qui affirme qu’« on part toujours trop chargé de ses peurs. » Un appel à lâcher prise, une invi-tation concrète à s’abonner à la Providence. À chaque

pas. « J’avance avec deux pieds, celui de la raison et celui de la foi », n’hésite pas à confier cet aventurier de la foi, fasciné par la représentation du visage du Christ sur le voile de Manopello, dont il fera une étape-clé de son pèlerinage. Et lorsque toute la famille se retrouve enfin à Rome au pied du tom-

beau de saint Pierre, Édouard écrira, reconnaissant : « Se poser, fermer les yeux, respirer doucement et par l’intermédiaire du prince des apôtres remercier Dieu de nous avoir conduits ad limina petri. » ■

Amélie de La Hougue

« J'avance avec deux pieds, celui

de la raison et celui de la foi »

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e Retrouvez les aventures de la famille Cortès sur www.enchemin.org

*voir la rubrique kiosque p. 32

Une heure avec…

Page 35: Feuilletez le numéro n°167 de l'Eglise dans le monde

L’égLise dans Le monde n° 167 ■ 35

Projet de l'AEDAgir

Chaque année, l’AED collecte près de 80 millions d’euros pour soutenir l’Église dans le monde• grâceàdesmilliersde

donateurs,l’AEDredonneforceetvitalitéàl’Églisedansplusde137pays:

• Desmilliersd’églisesetchapellesontétéconstruitesoureconstruites.

• l’AEDsoutient1séminaristesur12danslemonde.

• 45millionsde«Biblespourenfant»ontétédiffusées.

• Desmilliersdeprêtressurviventgrâceauxoffrandesdemessetransmisesparl’AED.

• Descentainesdeprogrammesderadioettélévisionontétéfinancéspoursoutenirleschrétiensisolés.

• Desmilliersdevéhiculesontétéachetéspourpropagerl’évangile:voitures,motos,bicyclettes,bateauxàmoteur…touslesmoyenssontbonspourlesmessagersdelaBonneNouvelle!

La Colombie est en crise perpétuelle depuis des décennies. Les luttes sont permanentes entre policiers, militaires, cartels de la drogue et guérilleros. Les conséquences sont dramatiques : corruption, inflation galopante, des milliers de dépla-cés… Dans certaines régions, il n’y a même pas encore de routes, certains villages ne sont accessibles que par bateau. L’Église mène plusieurs actions dans le pays, au risque de mettre ses propres prêtres en dan-ger (enlèvements, assassinats). Elle soutient au mieux les réfugiés, les orphelins, ainsi que ceux qui vivent dans la pauvreté et ont subi de lourds traumatismes. Elle aide également d’autres pays en envoyant des prêtres là où il n’y en a pas.

Le diocèse de Sonson-Rionegro, au nord-ouest de la Colombie, est un véritable centre de formation des prêtres : plus de huit cents jeunes issus de plusieurs diocèses se pré-parent au sacerdoce. Cent quinze

d’entre eux sont formés au sémi-naire Notre-Dame de Marinilla et sont aidés par l’Aide à l’Église en détresse. Dans ce diocèse, la moitié des prêtres sont envoyés en mission à travers dix-huit pays.

Les représentants de l’Église colombienne rappellent que « la mission de l’Église est d’être un instrument de paix et une voix prophétique pour la justice et la vérité – une voix avant tout pour les pauvres et les personnes en détresse ». Le rôle du prêtre est d’être au service de cette paix, dans un pays ou le « message de l’Église est certes respecté, mais hélas pas assez écouté ». Et de conclure : « La paix en Colombie ne doit pas être une paix des tombes, mais une paix vivante à laquelle toutes les parties doivent contribuer. »L’AED a besoin de votre aide pour continuer à soutenir les séminaristes de Colombie. Un grand merci ! ■

Envoyez vos dons à : AED - 29, rue du Louvre -

CS 30057 - 78 750 Mareil-Marlyou sur notre site internet

www.aed-france.orgMerci pour votre aide !

Aider 115 séminaristes de Colombie

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on Dieu, tu es toute tendresse pour moi.

Je te le demande par ton Fils bien-aimé :

accorde-moi de me laisser remplir de miséricorde

et d’aimer tout ce que tu m’inspires.

Donne-moi de compatir à ceux qui sont dans l’affliction,

et d’aller au secours de ceux qui sont dans le besoin.

Donne-moi de soulager les malheureux,

d’offrir un asile à ceux qui en manquent,

de consoler les affligés,

d’encourager les opprimés.

Donne-moi de pardonner à celui qui m’aura offensé,

d’aimer ceux qui me haïssent,

de rendre toujours le bien pour le mal,

de n’avoir de mépris pour personne,

et d’honorer tous les hommes.

MPrière de St AnSelme de CAntorbéry (1033-1109)