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  • 7/21/2019 Edition du Jeudi 9 Octobre 2014

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    LESANNONCESDELASEINE

    JOURNALOFFICIELDANNONCESLGALES- INFORMATIONSGNRALES, JUDICIAIRESET TECHNIQUESbi-hebdomadaire habilit pour les dpartements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

    12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Tlphone : 01 42 60 36 35 - Tlcopie : 01 47 03 92 15Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : [email protected]

    FONDATEUREN1919 : RENTANCRDE - DIRECTEUR: JEAN-RENTANCRDE

    Jeudi 9 octobre 2014 - Numro 41 - 1,15 Euro - 95eanne

    Conformment la Constitution,lAudience Solennelle de Rentre desCours et Tribunaux mongasques se tientle premier jour ouvr du mois doctobre,

    Son Altesse Srnissime Albert II de Monaco ahonor de sa prsence la rentre judiciaire 2014 place,ce 1eroctobre, sous les signes du respect et du vivreensemble par les Chefs de Cour Brigitte Grinda-Gambarini et Jean-Pierre Drno.

    On a pu relever la prsence des plus hauts reprsentantsdes autorits religieuses, politiques, militaires et judiciairesau premier rang desquels le Ministre dtat MichelRoger, Monseigneur Barsi Archevque de Monaco,le Prsident du Conseil National Laurent Nouvion,Philippe Narmino Ministre Plnipotentiaire, Directeurdes Services Judiciaires et Prsident du Conseil dtat ainsique lAmbassadeur dItalie Antonio Morabito.Au cours de sa brillante intervention, Brigitte Grinda-Gambarini a notamment dclar : il semble bienque nous regardions tous dans la mme direction,celle dun tat qui vise lexcellence et la performancemais noublie pas pour autant lthique, la loyaut etles valeurs humaines .Madame le Premier Prsident de la Cour dappel de

    Monaco a galement insist sur lthique dans la

    discussion qui doit permettre datteindre le consensusou la vrit des parties .Quant au Procureur gnral Jean-Pierre Drnorelevant que vouloir affaiblir de faon injustifielinstitution judiciaire revient vouloir branler lundes piliers de ltat de droit ,cette constatation laconduit sinterroger sur ce quest devenu le soclede la vie institutionnelle en Principaut. Concluantson brillant propos, il sest dclar satisfait que le

    respect des exigences minimales de la vie en socitprservent les conditions du vivre ensemble telle quecette notion est dsormais consacre par la CourEuropenne des Droits de lHomme et des libertsfondamentales (CEDH) .Le discours dusage a t consacr la CEDH juridictionen perptuelle volution , il a t prononc par StphanieMourou-Vikstrm, Premier Juge au Tribunal dePremire Instance. Elle sest livre une analyseminutieuse et approfondie du fonctionnement et durle de linstitution europenne qui anticipe les rformespour atteindre un plus grand degr de performancedans le traitement des nombreuses requtes qui lui sontadresses afin de parvenir toujours plus deffi cacit et dtre constamment en qute damlioration et de

    perfection . Jean-Ren Tancrde

    Cours et Tribunaux mongasquesAudience solennelle de rentre, 1er octobre 2014

    PhotoJean-Re

    nTancrde-Tlphone:01.42.60.36.35

    Jean-Pierre Drno et Brigitte Grinda-Gambarini

    COURSETTRIBUNAUXMONGASQUESlRentre Solennelle- Le respect par Brigitte Grinda-Gambarini...................................................2- Vivre ensemble par Jean-Pierre Drno........................................................ 4- La Cour Europenne des Droits de lHomme :

    une juridiction en perptuelle volution par Stphanie Mourou-Vikstrm.... 6

    VIEDUDROITlConseil de lEurope 10meanniversaire de ladhsion de Monaco ......... 9lProfessions rglementes- Conseil National des Barreaux et Confdration Nationale des Avocats 13lAide juridictionnelle Remise du rapport Le Bouillonnec ......................14lJuridictions Interrgionales Spcialises (JIRS)10meanniversaire..... 14lMairie de Paris : lAvocat dans la Cit

    Les avocats du Barreau de Paris rencontrent les Parisiens .........................22

    PALMARSlPrix de lAudace cratrice 2014 .......................................................... 12

    CHRONIQUElDroit Constitutionnel et Institutions de la Principaut mongasque Monaco, Monarchie et dmocratie par Laurent Anselmi ....................10lLa formation :

    une ardente obligation pour les Avocats par Jean-Marc Peyrical ........ 15

    INMEMORIAMlJean Algre nous a quitts................................................................... 11

    ANNONCESLGALES............................................................ 16

    ADJUDICATIONS...................................................................... 21

    DCORATIONlYves Repiquet Officier de la Lgion dhonneur ......................................22

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    Audience solennelle

    Le respectpar Brigitte Grinda-Gambarini

    A(...)vant de dclarer ouverte une nouvelleanne judiciaire il nous faut fermer laporte de lanne coule, en tachant

    de faire ntres les propos dAlexander GrahamBell pour qui il ne faut pas perdre trop de temps contempler la porte ferme sous peine de perdrede vue ce que laisse augurer celle que lon vient

    douvrir. (...)La porte de lanne coule que nous sommes entrain de refermer a sans doute laiss dans lespritdaucuns un trange sentiment de perplexit, tantil est vrai que certaines affaires, pas ncessairementles plus importantes dun point de vue juridique,ont fait parler de notre Justice.Montesquieu avait vu juste en affi rmant que lavoix de la justice a du mal se faire entendre dansle tumulte des passions .Le rle du Juge est dautant plus difficile queles attentes des uns et des autres sont souventteintes de contradiction : Poursuit-on trop outrop peu ? Trop tt ou trop tard ? Communique-t-on trop ou pas assez ? Juge-t-on de faon trop

    souple ou trop svre ?Les commentaires sont aiss, frquents etrarement convergents.La vraie question est ailleurs : peut-on exercerdignement le mtier qui est le notre si lon estpermable tout ce tumulte ? La rponse estnon La justice a besoin de srnit pour remplirson offi ce qui, lui, est immuable : veiller la bonneapplication des lois.Voil le seul et unique moteur du magistrat,celui qui lui permet davancer en se concentrantsur sa mission. Notre carburant nous vientexclusivement des codes et lois : pas dnergiealternative. Quant notre GPS -pour entretenirla mtaphore avec les vhicules moteur- il ne

    saurait tre autre chose que lintrt gnral.Au risque de dcevoir les faiseurs de bruit, jevoudrais dire humblement au nom de tous mescollgues que le son du tumulte est inaudible ceux qui travaillent dans ces murs Ici, nousnous appliquons chaque jour solidairement

    amliorer le service public de la justice avec pourseul objectif la satisfaction de cet intrt gnral.Il en va de notre responsabilit collective.Ce formidable lan dnergie positive, cestprcisment la porte qui souvre.Lan dernier, jvoquais notre rapport au temps et lespace. Je choisirai cette anne trs brivementde vous faire part de notre devoir dadaptation,similaire finalement celui de la Cour Europennedes Droits de lHomme.Stfan Zweig a souvent mis en vidence la

    diffi cult rencontre par nos contemporains accepter lvolution des socits dans lesquelles ilsvivent. Il faut pourtant constamment surmontercette rsistance et fournir leffort dajustement quencessite la cohrence de nos rponses au mondequi nous entoure.Cest dans cet esprit que je crois pouvoir direque ni lankylose, ni la moindre lthargie, ne sontdactualit au sein de nos institutions.Si la voix de la justice semble avoir perdu, vu delextrieur, quelques dcibels en 2014, ses autressens demeurent en veil.Nos forces vives, celle du Barreau, mais aussibien sr celles du Gouvernement mongasque,du Conseil National et du Conseil dtat uvrent

    en continu pour moderniser notre droit, affi nernos comptences, multiplier et diversifier nosrponses et amliorer le service rendu.Je ne trahirai rien en rappelant quun grand chantierest en cours qui tend la modernisation du droitconomique et la mise en place dun dispositifgnral rgissant le droit international priv.De telles rformes, parmi dautres, tendentindiscutablement renforcer lattractivit de laPrincipaut dun point de vue conomique maiselles ont aussi pour objet de garantir une meilleurevisibilit et scurit juridique.Nous sommes satisfaits dtre, dans la trs grandemajorit des cas, consults sur ces importantsprojets de rforme, mais l ne sarrte pas notre

    mission... Avocats et magistrats du Sige et duParquet ont, cette anne encore, uvr ensemblepour suggrer des modifications textuelles.Ces propositions ont t successivementtransmises la Direction des Services Judiciaires,soit par le Conseil de lOrdre, soit par les magistrats,

    Brigitte Grinda-Gambarini

    Photo

    Jean-RenTancrde-Tlphone:01.42.60.36.35

    LESANNONCESDELASEINESige social :

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    l 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUSTTlphone : 01 34 87 33 15l 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNETlphone : 01 42 60 84 40l 7, place du 11 novembre 1918, 93000 BOBIGNYTlphone : 01 42 60 84 41l 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROITlphone : 01 45 97 42 05

    Directeur de la publication et de la rdaction :Jean-Ren Tancrde

    Comit de rdaction :

    Thierry Bernard,Avocat la Cour, Cabinet BernardsFranois-Henri Briard,Avocat au Conseil dEtatAgns Bricard, Prsidente de la Fdration des Femmes AdministrateursAntoine Bullier, Professeur lUniversit Paris I Panthon SorbonneMarie-Jeanne Campana, Professeur agrg des Universits de droitAndr Damien,Membre de lInstitutPhilippe Delebecque, Professeur de droit lUniversit Paris I Panthon SorbonneBertrand Favreau, Prsident de lInstitut des Droits de lHomme des Avocats Europens,ancien Btonnier de BordeauxDominique de La Garanderie,Avocate la Cour, ancien Btonnier de ParisBrigitte Gizardin,Magistrat honoraireRgis de Gouttes, Premier Avocat Gnral honoraire la Cour de cassationChlo Grenadou,Juriste dentrepriseSerge Guinchard,Professeur de Droit lUniversit Paris II Panthon-AssasGrard Haas,Avocat la Cour, Prsident de GesicaFranoise Kamara, Conseiller la premire Chambre de la Cour de cassationMaurice-Antoine Lafortune,Avocat Gnral honoraire la Cour de cassationBernard Lagarde,Avocat la Cour, Matre de confrence H.E.C. - Entrepreneurs

    Jean Lamarque, Professeur de droit lUniversit Paris II Panthon-AssasChristian Lefebvre, Prsident Honoraire de la Chambre des Notaires de ParisDominique Lencou,Prsident dHonneur du Conseil National des CompagniesdExperts de JusticeNolle Lenoir,Avocate la Cour, ancienne MinistrePhilippe Malaurie, Professeur mrite lUniversit Paris II Panthon-AssasJean-Franois Pestureau,Expert-Comptable, Commissaire aux comptesGrard Pluyette, Conseiller doyen la premire Chambre civile de la Cour de cassationJacqueline Socquet-Clerc Lafont,Avocate la Cour, Prsidente dhonneur de lUNAPLYves Repiquet,Avocat la Cour, ancien Btonnier de P arisRen Ricol,Ancien Prsident de lIFACFrancis Teitgen,Avocat la Cour, ancien Btonnier de ParisCarol Xueref,Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilo r International

    Publicit :Lgale et judiciaire : Didier ChotardCommerciale : Frdric Bonaventura

    Commission paritaire : n 0718 I 83461I.S.S.N. :0994-3587Tirage :13 467 exemplairesPriodicit :bi-hebdomadaire

    Impression :M.I.P.3, rue de lAtlas - 75019 PARIS

    Copyright 2014Les manuscrits non insrs ne sont pas rendus. Sauf dans les cas o elle est autoriseexpressment par la loi et les conventions internationales, toute reproduction,totale ou partielle du prsent numro est interdite et constituerait unecontrefaon sanctionne par les articles 425 et suivants du Code Pnal.

    Le journal Les Annonces de la Seine a t dsign comme publicateur officiel pourla priode du 1erjanvier au 31 dcembre 2014, par arrts de Messieurs les Prfets:de Paris, du 24 dcembre 2013 ; des Yvelines, du 19 dcembre 2013 ; des Hauts-de-Seine,du 18 dcembre 2013 ;de la Seine-Saint-Denis, du 26 dcembre 2013 ;du Val-de-Marne,du 30 dcembre 2013 ; de toutes annonces judiciaires et lgalesprescrites par le Code Civil, les Codes de Procdure Civile et de Procdure Pnaleet de Commerce et les Lois spciales pour la publicit et la validit des actes deprocdure ou des contrats et des dcisions de Justice pour les dpartements de Paris,des Yvelines, de la Seine-Saint-Denis , du Val-de-Marne; et des Hauts-de-Seine .N.B. : Ladministration dcline toute responsabilit quant la teneur des annonces lgales.

    - Tarifs hors taxes des publicits la ligneA) Lgales :

    Paris : 5,49 Seine-Saint-Denis: 5,49 Yvelines : 5,24 Hauts-de-Seine : 5,49 Val-de-Marne : 5,49

    B) Avis divers : 9,76C) Avis financiers : 10,86 D) Avis relatifs aux personnes :Paris : 3,83 Hauts-de-Seine : 3,83 Seine-Saint Denis : 3,83 Yvelines : 5,24 Val-de-Marne : 3,83 - Vente au numro : 1,15 - Abonnement annuel : 15 simple35 avec supplments culturels95 avec supplments judiciaires et culturels

    COMPOSITIONDESANNONCESLGALESNORMESTYPOGRAPHIQUES

    Surfaces consacres aux titres, sous-titres, filets, paragraphes, alinas

    Titres :chacune des lignes constituant le titre principal de lannonce sera compose en capitales (oumajuscules grasses) ; elle sera lquivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi 4,5 mm.Les blancs dinterlignes sparant les lignes de titres nexcderont pas lquivalent dune ligne de corps6 points Didot, soit 2,256 mm.Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de lannonce sera compose en bas-de-casse(minuscules grasses) ; elle sera lquivalent dune ligne de corps 9 points Didot soit arrondi 3,40 mm.Les blancs d interlignes sparant les diffrentes lignes du sous- titre seront quivalents 4 points soit 1,50 mm.

    Filets :chaque annonce est spare de la prcdente et de la suivante par un filet 1/4 gras. Lespace blanccompris entre le filet et le dbut de lannonce sera lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot soit2,256 mm. Le mme principe rgira le blanc situ entre la dernire ligne de lannonce et le filet sparatif.Lensemble du sous-titre est spar du titre et du corps de lannonce par des filets maigres centrs. Le blancplac avant et aprs le filet sera gal une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm.

    Paragraphes et Alinas :le blanc sparatif ncessaire afin de marquer le dbut dun paragraphe o dunalina sera lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces dfinitions typographiquesont t calcules pour une composition effectue en corps 6 points Didot. Dans lventualit o lditeurretiendrait un corps suprieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

    2013

    P R E S S EPAYANTEDiffusionCertife

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    3/24Les Annonces de la Seine - Jeudi 9 octobre 2014 - numro 41 3

    Audience solennelle

    et touchent des domaines varis de la procdurecivile ou des questions plus prcises de procdurepnale.De son ct, le Parquet gnral a men son termele projet initi sous limpulsion de MademoiselleAlexia Brianti tendant crer une associationdes victimes ; les statuts en ont t dposs trsrcemment et le local destin accueillir cetteassociation sera situ non loin du Palais de justice.Enfin, je vais continuer mettre en uvre, sousla haute autorit de la Direction des Services

    judiciaires, les prconisations procdant de ltudeapprofondie conduite par Monsieur FrancisCasorla, Conseiller dtat, concernant lorganisationdes greffes et linformatique de gestion dont lesrsultats ont t communiqus rcemment.Nous avons dj pu obtenir en 2014 deux postesde greffiers volants et surtout assurer en interneun vritable programme de formation de cesstagiaires.Madame Aline Brousse, magistrat rfrendaire,

    sest srieusement implique dans le processusdapprentissage de ces personnels qui ont puacqurir en quelques mois une grande polyvalenceet immdiatement remplacer des fonctionnairesmalades ou en cong de maternit.Notre plan de formation ne doit pas sarrter lpuisque que des contacts ont t pris rcemmentavec lcole nationale des greffes de Dijon, unedemande de coopration est en cours dexamenet nous esprons vivement pouvoir rapidementobtenir un accord permettant nos greffiersde suivre des stages de formation permanente lENG ; nous poursuivrons paralllement eninterne notre action avec un plan de mobilit desgreffiers qui en font la demande et des sessions deremise niveau.Par ailleurs, et toujours dans le cadre des

    prconisations de cette tude, Madame le Greffier

    en Chef a pu, avec laccord de la Direction desServices Judiciaires, mettre en place au rez-de-chausse de notre btiment un service degreffe avanc rduit aux besoins essentiels desjusticiables frquentan t le Palais de justice,sagissant notamment des dpts et retraits depices apostille, des dpts dactes de socit,de la dlivrance de dcisions et des casiersjudiciaires, de lenregistrement et du rglementdes cessions de salaire et ce, pour dsengorgerles services du greffe gnral et surtout amliorerle service rendu.Enfin, lharmonisation de la chane pnale avecle Parquet gnral, linstruction et le greffecorrectionnel demeure pour nous tous unepriorit. Les consultations en cours devraientprochainement permettre de lancer laudit pnallgitimement souhait par Monsieur le Procureurgnral et Madame le Prsident du Tribunal.Nous le constatons, notre institution est, limagede la Cour europenne, en pleine volution.Qui dit adaptation suppose galement un travailde rflexion. ce jour, notre institution se voit trop souventcomme un lieu dexposition ou un terraindaffrontement, rarement comme une place dersolution des diffrends, et quasiment jamaiscomme un site dharmonie et de rconciliation.Ce terrain de conflit est frquemment raill parles hommes de lettres et aucun dentre nous napu oublier cette jolie rfrence de Molire aumonde de la justice dans les Fourberies de Scapin : ... Voyez combien dappels, de degrs de

    juridic tion, de procdures emba rrassantes,combien danimaux ravissants par les griffesdesquels il vous faudra passer....La justice peut-elle se satisfaire dtre une formede mcanique, souvent rgie par une certaine

    logique de lquivalence, et ne doit-elle pas essayer

    de devenir cette justice dau-del de la justice si joliment dcrite par Franois Mauriac.Cest prcisment cette rflexion de la justicesur elle-mme qui a conduit cette anne leBarreau mongasque et notre Cour proposer la Direction des Services Judiciaires la crationdun groupe de travail compos davocats, demagistrats et dminents universitaires pourvoquer le thme bien connu en France de lamdiation.Cette thique de discussion doit permettre datteindrele consensus ou la vrit des parties travers desdialogues constructifs et pragmatiques. Vritablemode de rgulation sociale, la mdiation permetde rsoudre les difficults lies la lhtrognitdes droits en cause et dviter certaines stratgiesjudiciaires incertaines quant au rsultat, agressivespour les justiciables, souvent coteuses et nassurantpresque jamais la confidentialit.Les acteurs dun conflit deviennent alors avec leursavocats les auteurs dune solution et lancien terraindaffrontement peut ainsi se transformer en un sitede consensus.Le Conseil de lOrdre et notre comit de pilotageont eu cette anne le plaisir dchanger leursides avec de grands spcialistes Parisiens de lamdiation, mais galement avec deux conseillersdtat mongasques, Monsieur Francis Casorla, trsintress par cette question et Monsieur le DoyenRoger Bernardini, minent universitaire en chargedu diplme de mdiation luniversit de Nice quinous ont tous deux fait lhonneur de participer cesrunions de travail.La rflexion est lance.A cet gard, nous ne pouvons quvoquer notreenrichissante rencontre, il y a quelques mois, avecMadame Anne Eastwood, Haut-commissaire laprotection des droits, des liberts et la mdiation

    dont la rcente nomination rvle galement

    Son Altesse Srnissime le Prince Albert II de Monaco et Philippe Narmino

    PhotoJean-RenT

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    Audience solennelle

    la volont de son Altesse Srnissime le Princesouverain et du Gouvernement mongasque defavoriser le plus possible les solutions de compromis.Il semble bien que nous regardions tous dans lamme direction, celle dun tat qui vise lexcellenceet la performance mais nen oublie pas pour autantlthique, la loyaut et les valeurs humaines.Je terminerai mon propos en voquant trsbrivement un lment clef de ce processusdadaptation et dont on dplore souvent ladisparition dans nos socits : il sagit du respect.Jentends par ce vocable lensemble des gardsdus par tout citoyen ou toute institution enversses homologues.Une relation teinte de respect mne lauthenticitdes rapports humains, mais aussi institutionnels.Comment un Juge qui ne respecterait pas lapersonne quil va juger ou lesprit des institutionsde son pays serait-il un bon juge ? linverse, le magistrat fidle ce devoir thiquenest-il pas en droit dattendre des justiciables, aussibien que des institutions, la prise en considrationdes Hautes exigences de sa fonction ?Les rponses donnes certaines interrogationsmdiatiques par Monsieur le Directeur desServices Judiciaires sous la Haute autorit deSon Altesse Srnissime le Prince ont, cette

    anne encore, confort le respect dont jouitnotre Justice.Les magistrats sont dans leur ensembleinfiniment reconnaissants Monsieur leDirecteur des Services Judiciaires davoirtoujours fermement traduit la volont duChef de ltat de protger linstitution judiciairedans lexercice de sa mission, respectant en celalesprit de notre Constitution.Ils entendent en outre exprimer leur Directeurleur gratitude pour la mise en uvre desmultiples projets tendant lamlioration de laJustice mongasque :- rsolution des problmes lis lexigut deslocaux,- prise en compte de la ncessit damliorer lascurit lintrieur du palais de justice,- prise en considration de nos besoins relatifsaux greffes et, trs rcemment, des difficultsrencontres par la Cour dappel avec la cration au1erjanvier 2015 dun cinquime poste de conseiller,- cration dun service de greffe avanc,- promotion de loutil informatique mais aussiconfiance accorde aux magistrats et auxavocats sur les thmes de rflexion qui leursemblent primordiaux.Ce respect, nous le croisons enfin quotidiennement

    dans ces murs et il mane du corps des greffi ersqui ne comptent pas leurs heures de travail, detous les personnels, appariteurs et huissier dontlinvestissement quotidien est digne dloges, etenfin des Magistrats de lensemble des juridictionsqui ont, cette anne encore, beaucoup travailldun point de vue quantitatif, vous le constaterezsur nos plaquettes, mais surtout grandementamlior les dlais de traitement des affaires etles dlais de dlibr.La moyenne pour lensemble des juridictionspermanentes confondues passe dun taux moyende traitement des affaires exprim en mois de14,07 pour lanne prcdente un taux de 10,60en 2014 et dun taux moyen de dlibr galementexprim en mois de 1,83 en 2013 1,48 en 2014.Certains de ces rsultats ont pu tre rcemmentports la connaissance de la commission desuivi du Conseil de lEurope et ont favorablementimpressionn le rapporteur.Aucune autosatisfaction cependant, car la routeest encore longue pour que notre justice soitperformante et moderne mais aussi protectriceet consensuelle.Avec de la volont, et pour reprendreen mongasque le clbre yes we can de MonsieurObama jai envie de dire Purmu u f . (...)

    Vivre ensemblepar Jean-Pierre Drno

    M

    onseigneur,-Vous nous faites un immensehonneur- en assistant notre traditionnelle

    audience de rentre.- Vous le savez,cette audience solennelle est la fois linstant dubilan de lanne coule et celui des projets quenous nous efforcerons de mettre en uvre dansles mois venir.- Or, il se trouve que lanne judiciaire qui sachvea t marque par une affaire criminelle duneexceptionnelle gravit qui sest droule Nice.- Grce une coopration policire et judiciairefranco-mongasque de tous les instants dans lessemaines qui ont suivi ce terrible fait divers, sansprcdent en Principaut- Cette affaire a connu un premier pilogue.- et il convient dsormais de laisser la justice

    marseillaise suivre son cours.- Et lanne judiciaire qui sachve nous a parailleurs conduits relever lapplication pourne pas dire le zle, ou mme lacharnement dequelques justiciables propager la mfiancesinon le mpris envers la justice que nousrendons en Votre nom.- Votre prsence constitue donc pour nous tousaujourdhui la fois un vritable rconfort et unmotif de trs grande fiert.- Pour ces raisons aussi je souhaite sincrement,vivement et chaleureusement vous remercier. (...)- Comme laccoutume, Madame lePremier Prsident, nos invits ont trouv sur leursige un fascicule qui contient toutes les donnes

    relatives nos activits de lanne coule.- En ce qui concerne la matire pnale, ceschiffres ne trahissent aucune aggravation de ladlinquance au cours de ces 12 derniers mois.- Nous devons bien-sr ce rsultat leffi cacitpermanente des services de police

    - et la jurisprudence pnale particulirement clairedu Tribunal correctionnel et de la Cour dappel- et je puis assurer nos auditeurs que nous allonsencore les uns et les autres et au Parquet gnralavec le renfort de Cyrielle Colle, poursuivre nosefforts durant les mois venir- pour faire diminuer :- les violences, notamment sexuelles,- le commerce et lusage de substances stupfiantes,- les vols et notamment les cambriolages- le nombre des usagers de la route trop alcooliss

    - les escroqueries ou bien le recyclage de largentsale.- Ce fascicule recense galement lensemble desdcisions prononces dans cette enceinte depuisle 1eroctobre 2013.- Il sagit exclusivement de dcisions judiciaires du

    latin JUS/DICIERE - cest--dire des dcisions qui disent (DICIERE)le droit (le JUS).- Ces dcisions nont, pour seul fondementquun fondement juridique- elles appliquent le droit, la loi aux situations quiont t soumises aux juges.- Si elles peuvent avoir des consquences dansnotre vie sociale- En aucun cas il ne saurait sagir de dcisionspolitiques

    - dans le sens o elles souhaiteraient simmiscer,dans le Gouvernement de la cit ce qui est lasignification grecque du mot politikos .- et il serait absurde et insens de supposer un seulinstant que les magistrats puissent avoir de tellesintentions.

    Jean-Pierre Drno

    PhotoJe

    an-RenTancrde-Tlphone:01.42.60.36.35

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    Audience solennelle

    - Je tiens ces propos- car nos activits judiciaires au cours de ces12 derniers mois ont parfois suscit divers discours

    tendant diffuser la dfiance envers quelques unesde nos dcisions sinon mme les discrditer.- Que nous faut-il penser en effet de la ractiondune autorit administrative indpendante- sempressant de publier un communiqu auxtermes rageurs et trs critiques- alors mme que lencre dune dcision de notrejuridiction suprme |qui sest prononce sur laconstitutionnalit et la rgularit des pouvoirset activits de cette autorit administrativeindpendante, -na pas encore sche- vous obligeant ainsi,Excellence,Monsieur le Directeur des Services Judiciaires, faire paratre une premire mise au point.

    - Que faut-il penser encore, lorsquelargumentation juridique de certains plaideursse rduit exclusivement des invectives enversdes reprsentants de lautorit judiciaire ?- Que faut-il penser toujours de dclarations qui seveulent fracassantes de ces justiciables sestimant,prcisment, victimes de dcisions politiques- ou dune justice dont le rythme (traduisez lavitesse) ne serait pas le mme pour tous- vous obligeant encore,Excellence,Monsieur le Directeur des Services Judiciaires, une nouvelle mise au point.- Que faut-il penser enfin de ces justiciablesqui entendent engager des poursuites pnales

    contre les magistrats chargs, par la loi, de traiterles affaires dans lesquelles ces mmes justiciablessont impliqus ?- Ce qui pourrait tre de nature interdire, sinonles vocations, tout le moins toute candidature la magistrature mongasque.

    - Pour ma part, je ne puis que relever- que vouloir affaiblir de faon injustifielinstitution judiciaire revient vouloir branler

    lun des piliers de ltat de droit- et le risque est ainsi pris, en branlant ce pilier,davilir ltat de droit.- Quest donc devenu, le consensus qui est lesocle de notre vie institutionnelle et de notre

    volont de vivre ensemble en Principaut ?- Alors pour tenter de comprendre ce contexte,auquel il nous faut trs srieusement prterattention, et prendre garde- je me suis souvenu, outre ses talents de cinaste,- de ce que jai lu sous la plume de Votre aeulMonseigneur, le Prince Albert Ier, lequel crivaitdans le Journal de Monaco du 5 janvier 1909 : Lesprit moderne fait natre partout des passions,des ambitions et des agitations extrmement

    dangereuses pour lexistence dun pays - Je me suis aussi souvenu, ayant t bordelaispendant quelques mois pour avoir frquentlcole Nationale de la Magistrature, commenous tous ici, des lettres persanes de Montesquieuque vous avez, Madame le Premier Prsident,voques : Linaudible voix de la justice dans le tumulte despassions - Je me souviens galement des discours duPremier Prsident Pierre Drai qui aimait citerBalzac Se mfier de la magistrature et mpriserles juges, cest un commencement de dissolutionsociale - Je me souviens enfin de cette pense de

    Michel Debr : La valeur de la justice et le respect dont sesdcisions sont entoures attestent du degr decivilisation quun peuple atteint - Mais toutes ces pripties, lesquelles auront eu lemrite damliorer notre taux dadrnaline

    - et donc de doper nos activits intellectuelles etnos capacits rester veills- toutes ces pripties auront t occultes par

    une dcision du Tribunal Suprme, notre CourConstitutionnelle qui nest, nous le savons, pasune juridiction de lordre judiciaire- lequel Tribunal Suprme est venu rappeler le16 juin dernier,- comme lavait dj fait la commission de Venisedont javais rsum les conclusions lannedernireau cours de cette mme audience de rentre,- lequel Tribunal Suprme est venu rappelerque la combinaison de dispositions de notreconstitution, darticles du code de procdurepnale et darticles des lois relatives au statut dela magistrature et lorganisation judiciaire- cette combinaison garantissait lindpendance,

    vis vis de lautorit gouvernementale, desautorits judiciaires,- lesquelles poursuit le Tribunal Suprme, sontdotes de comptences propres leur permettantde garantir le respect des liberts et droitsfondamentaux.- Je suis un peu contrari que les mdias naientpas t correctement informs de cette dcisionqui rejetait une requte sollicitant lannulation dela nouvelle loi sur la garde vue.- Mais il est vrai que seuls intressent lecteurs etauditeurs les trains qui draillent sinon du moinsceux qui enregistrent des retards.- Et pourtant, Madame le Premier Prsident- ce sont bien les trains ou les avions qui partent

    et arrivent lheure qui favorisent le respect desexigences minimales de la vie en socit et quiprservent les conditions du vivre ensemble telle que cette notion est dsormais consacre parla Cour Europenne des Droits de lHomme et desliberts fondamentales. (...)

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    Audience solennelle

    La Cour europennedes Droits de lHomme :

    une juridiction enperptuelle volutionpar Stphanie Mourou-Vikstrm

    Il nest pas rare dentendre que la Coureuropenne des droits de lHomme est un chantier institutionnel permanent .Un chantier voque lide dun travail en

    cours dachvement, et, terme, la promesse dunbel difice. Alors la comparaison entre la Coureuropenne des Droits de lHomme et un chantierest-elle pertinente ? Tout la fois oui et non.Non, elle nest pas pertinente parce que la Courpoursuit depuis sa cration la mission humaniste quiest la sienne, sans jamais que son ambition ni son idalne soient altrs. Elle nest donc pas un chantier, maisune ralisation. Elle est un concept abouti.Cependant, on peut comprendre, dans unecertaine mesure la comparaison avec un chantier,et mme y souscrire, ds lors que lon prend enconsidration les mthodes de travail de la Cour.Elles sont en permanence rajustes, sans quejamais ne soit branle la structure de ldifice.Il est vrai que la Cour est sans cesse en train derflchir aux moyens damliorer son effi cacit etde rendre une bonne justice.Elle ne fait pas que rflchir puisquelle sest rformeet continue de se rformer de manire trs concrte.Dailleurs, tout observateur du systme europende protection des Droits de lHomme ne peut queconstater une vidence : cest que la Cour telleque nous la connaissons aujourdhui en 2014dans sa physionomie, mais aussi dans son mode

    de fonctionnement interne est bien diffrente decelle cre lorigine et qui a tenu sa premiresession en 1959.lRappelons quelle tait jusquen 1998, date deladoption du protocole numro 11, un organesubsidiaire, non permanent, dont la saisine directepar les individus ntait pas de droit, et quelle estaujourdhui permanente, incontournable, et surtoutquelle est lexpression la plus aboutie de la protectiondes Droits de lHomme en Europe.lRappelons galement que la Cour sadapte depuisles annes 80, de manire empirique laccroissementdes affaires, d la ranon de son succs. Un succsdont elle est loin de se glorifier puisquelle aimerappeler que sa plus grande russite serait ne plus

    recevoir de requtes ce qui voudrait dire que les droitsde lHomme sont garantis par les tats.Je dois avouer quil tait tentant par souci desimplification, de prsenter les rformes de la Courpar le biais dune tude des protocoles damendementsqui ont apport des modifications institutionnellesimportantes.Or, une telle prsentation aurait ncessairement taustre, mais surtout aurait t incomplte car elleaurait pass sous silence les rformes qui se forgentdans la pratique de la Cour et dans lorganisation dugreffe ; fruit de la gestion quotidienne des affaires,de choix prtoriens de la Cour et de mesuresdadministration internes, il faut bien reconnatreque certaines rformes, pourtant fondamentales, ne

    relvent daucun protocole.Alors, aprs avoir cart une tude acadmique desprotocoles, comment poser la problmatique de larforme de la Cour ?Michle de Salvia, ancien greffier et ancienjurisconsulte de la Cour, a utilis en 2003, lors dune

    table ronde, une formule qui rsume bien le parcoursvolutif de la Cour. Il a parl d trange destine pour faire rfrence un double mouvement derformes engages de manire trs rapproche dansle temps.lPremier mouvement de rformes : la Cour aremodel son architecture pour la rendre compatibleavec ses ambitions. Elle est devenue une juridictionpermanente traitant toutes les requtes qui lui sontadresses.lSecond mouvement de rformes :la Cour a dmodifier son mode de fonctionnement pour faireface au flux des requtes et trouver des solutionsinnovantes afin dviter tout engorgement de son rle.

    Ce sont ces deux grands mouvements volutifs quicaractrisent le destin hors du commun de la Courde Strasbourg que je vais tenter de prsenter traversdeux questions.

    I. Comment la Cour europenne des Droits delHomme sest-elle impose en tant quorganejuridictionnel permanent, central, accessible plus de 800 millions de requrants ?Cest ce quelle est incontestablement, aujourdhui,mais ce nest pas ce quelle tait lorigine.Le systme originel de protection des Droits delHomme a vu le jour en 1950, date de la signature dela Convention de sauvegarde des Droits de lHommeet des liberts fondamentales et a vcu jusquen 1998,

    date de la cration de la nouvelle Cour .Lorsque le 4 novembre 1950, Rome,Robert Schuman et Winston Churchill, parmidautres, ont sign le texte de la Convention quelmcanisme de protection ont-ils fait adhrer leurstats ? A quelle Cour ont-ils donn naissance ?On a tendance loublier, mais ctait un systmetripartite qui avait t mis en place et dans lequel laCour navait quun rle subsidiaire, tout au moins enterme quantitatif. Elle navait pas le rle central quonlui connat aujourdhui. Ce rle, elle a d le gagner.Trois organes de nature trs diffrente et auxcomptences diverses intervenaient dans letraitement des requtes, crant un systme mi-juridictionnel, mi- politique :

    lLa Commission europenne des droits de lHomme,lLe Comit des Ministres,lLa Cour europenne des droits de lHomme.lLa Commission europenne des droits de lHommea tenu sa premire session du 12 au 17 juillet 1954.Organe denqute et de conciliation, elle tait

    galement un organe de filtrage puisque toutesles requtes lui taient initialement adresses.Elle transmettait ensuite celles quelle considraitrecevables au Comit des Ministres, tout en donnantson avis sur la violation ou la non violation des droitspar ltat dfendeur. Elle tait donc aussi une quasi-juridiction. Or, les membres de la Commissionntaient pas des Juges qui statuaient sur le fond desaffaires. Par ailleurs, les membres de la Commissiontaient lus par le Comit des Ministres, cest--direpar un organe politique.Si la Commission europenne des Droits delHomme fait aujourdhui partie de lHistoire, il ne fauttoutefois pas croire quelle soit tombe dans loubli.

    Pendant ses 45 annes dactivit, elle a t au centredu mcanisme europen de protection des droits delHomme. Ses avis, ses dcisions font partie intgrantedu corpus de prcdents sur lequel la Cour fonde sesmotivations et tablit aujourdhui sa jurisprudence.Elle souffrait dun mal inhrent sa constitutionen raison de sa nature hybride, mais surtout, ellemanquait dune lgitimit juridictionnelle.Pourtant, la Cour et la Commission concouraientau mme idal. Dailleurs danciens membres de laCommission ont t lus en qualit de Juges la Couret ont accd de hautes fonctions. Je citerai commeexemples Sir Nicolas Bratza, et Christos Rosakis,anciens membres de la Commission devenusrespectivement Prsident et Vice-Prsident de la Cour.l

    Le Comit des Ministres tait ds loriginecompos des Ministres des affaires trangres destats membres du Conseil de lEurope qui dans lapratique dlguaient leur Sige, comme cest le casaujourdhui, leurs ambassadeurs. Il a toujours t unorgane minemment politique, mais il avait un rlejuridictionnel puisquune fois saisi du rapport de laCommission europenne des droits de lHomme, ildcidait sil y avait ou non violation dun droit garantipar la Convention.lAlors, entre la Commission et le Comit desMinistres, quelle place restait-il la Cour ?Certes ses dcisions taient empreintes dun grandprestige et avaient une autorit particulire puisquelletait le seul organe juridictionnel part entire du

    systme, mais il faut bien reconnatre quelle ntaittoutefois que rarement saisie. En presque quaranteannes dexistence (de 1959 1998) la Cour na renduque 837 arrts. A titre de comparaison, elle a renduplus de 10.000 arrts entre 1999 et 2009.Comment expliquer un tel cart entre ces chiffres ?

    Stphanie Mourou-VikstrmPhotoJean-RenTancrde-Tlphone:01.42.60.36

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    Lexplication tient essentiellement aux conditions desaisine de la Cour et la place de lindividu en tantque requrant, cest--dire en tant que sujet de droitde droit internationalLe droit de recours individuel est considr commela cl de vote du systme de protection des droitsde lHomme. Cest la facult pour chaque individurelevant de la juridiction dun tat membre duConseil de lEurope, de saisir la Cour. Ainsi, unressortissant dun tat non membre du Conseil delEurope, australien ou chinois, emprisonn dansun tablissement pnitentiaire russe peut saisir laCour dune violation de ses droits contre la Russie etventuellement la voir condamne.Cest la force de la Cour. Mais ce droit, qui est peruaujourdhui comme un acquis, nexistait pas dans lesystme mis en place en 1950.Un individu pouvait certes saisir directement laCommission europenne des Droits de lHommemais la condition que ltat y ait pralablementconsenti en signant une clause dacceptation.On comprend que lacceptation dune telle clause aitfait grincer les dents de bien des tats qui y voyaientun abandon de leur souverainet. Mme la Francena souscrit que le 2 octobre 1981 cette dclarationdacceptation, et ce, sous linfluence claire de RobertBadinter, alors Garde des Sceaux.Toutefois, les tats staient fait une raison et dansla pratique, partir de 1990, la ratification de laConvention a t concomitante la dclarationdacceptation du droit de recours individuel.Qui pouvait saisir la Cour dans le systme originel ?Elle ne pouvait tre saisie que par la Commissioneuropenne des droits de lHomme ou un tatintress par une affaire, et ce, si ltat dfendeuravait accept la comptence de la Commission et lajuridiction de la Cour.Le 1er octobre 1994 marque une date importante. La

    Cour peut dsormais tre saisie par un individu, maistoujours, sous rserve dune acceptation pralable parltat mis en cause.En termes daccessibilit, le chemin qui sparait unepersonne victime dune violation de ses droits de laCour tait long et sem dembches Tout dpendait en dfinitive du degr dengagementde chaque tat partie et de la bonne volont de laCommission ou dun tat intress dfrer uneaffaire au Juge.Il faut en outre rappeler que la Cour fonctionnaitpar sessions. Ainsi, les Juges ntaient pas tenus dersider Strasbourg et exeraient pour certains,paralllement, une autre profession.Elle navait donc pas les moyens de simposer en tant

    quorgane juridictionnel. Elle tait statutairementtrop faible et elle ntait quun rouage au sein d unmcanisme prsentant un certain nombre de failles.En rsum, le systme originel, ntait pas satisfaisant.En tout cas, il portait en lui les germes de lchecpuisque des organes tels la Commission (hybride) oule Comit des Ministres (administratif et politique)taient investis de pouvoirs juridictionnels, et ce, audtriment de la sparation des pouvoirs.Venons-en maintenant la plus grande rformeque la Cour ait connue : ladoption du Protocolenumro 11 qui a cr la nouvelle Cour .Ce fameux Protocole dont il est question depuisle dbut de mon intervention est entr en vigueurle 1er novembre 1998. Novateur et audacieux, il

    a apport des modifications substantielles danslorganisation et le fonctionnement de la Cour. Denombreux mrites doivent lui tre reconnus :- Le premier mrite est le plus gnral : il a judiciarisle systme de protection des Droits de lHomme :la justice des Droits de lHomme en Europe est

    dsormais rendu exclusivement par une juridiction,lIl a procd selon lexpression de Jean-Paul Costa,Prsident de la Cour de 2006 2011, une vritable fusion-absorption qui sest traduite par lasuppression de la Commission europenne desDroits de lHomme. La Cour est devenue lorganeunique de contrle, et elle devenue permanente,lIl a aboli la possibilit de refuser le droit de recoursindividuel, mme sil est vrai qu la veille de ladoptiondu Protocole, tous les tats avaient accept le droit derecours individuel,lIl a modifi lorganisation de la Cour dans le sensdune diminution du nombre de Juges composantles formations de jugement.- La Grande Chambre a t rduite 17 Juges (elle encomprenait 21 auparavant)- Les Chambres qui sont les juridictions de droitcommun ont t rduites 7 Juges (elles encomprenaient 9 auparavant)- Les comits de 3 Juges ne statuant que sur larecevabilit des requtes ont t crs.Tacitement, le Protocole numro 11 avait pourfinalit dapporter une solution laccroissement desrequtes, mais les concepteurs de ce texte navaientpas mesur lampleur du phnomne.Car le problme majeur auquel fait face la Coureuropenne des droits de lHomme depuis laseconde moiti des annes 1980, cest lafflux massifet constant des requtes portes devant les Juges deStrasbourg et lencombrement du rle qui en a tla consquence.En guise dillustration, une mtaphore mythologiqueest parfois utilise et la Cour est compare Sisyphe, lehros grec condamn devoir porter perptuellementet inlassablement en haut dune montagne sonrocher qui redescend inluctablement ; si Sisyphe estlincarnation de la Cour, le rocher reprsente quant lui le stock, sans cesse renouvel, des requtes.

    On comprend bien quil ne peut pas tre faitabstraction des chiffres car la prise de conscience estne des chiffres.Pour tre concret, 5 annes aprs lentre en vigueurdu Protocole numro 11 crant la nouvelle Cour :l27 900 requtes nouvelles ont t enregistres,l38 500 requtes taient pendantes devant uneformation judiciaire.Telle tait la photographie statistique de la Cour en2003.- Certains commentateurs ont opt pour uneprsentation lgante et positive du phnomne enrelevant que la Cour tait face un dfi statistiquecrucial .- Dautres, plus alarmistes, ont parl dasphyxie.

    En fait, il y a un double courant :lAugmentation des nouvelles requtes,lAugmentation du back log , cest--dire desaffaires non rsolues dans un dlai de 3 ans.Quelles en sont les causes ? Elles sont diverses.Augmentation du nombre des requtes :Dabord, la visibilit de la Cour est plus tendue. Sesarrts sont comments, ses positions mdiatises.De plus en plus de justiciables non satisfaits dunedcision rendue lchelle nationale vont la contesterdevant les Juges europens.Qui na pas entendu retentir comme une menace ouun cri de dsespoir la phrase ? : on ira Strasbourg eton obtiendra justice , oubliant que la Cour nest pasune 4meinstance.

    Autre raison laccroissement du nombre desrequtes : laugmentation du nombre des tatsmembres du Conseil de lEurope. Ils taientseulement 11 en 1954 lorsque la Commission a sigpour la premire fois, ils taient 39 en 1998 et ils sont47 aujourdhui.

    Il faut bien reconnatre que des tats qui ont adhr la Convention et au systme de protection des droitspar la Cour dans les annes 90 se sont rvls, pourcertains, tre de gros pourvoyeurs de requtes.Je fais rfrence la Russie, lUkraine et laRoumanie qui ont sign la Convention entre 1993et 1996 et contre lesquelles des milliers de requtestaient pendantes en 2009, anne o la Cour a soufflses 50 bougies.l33 568 requtes contre la Russie,l9975 requtes contre lUkraine,l9812 requtes contre la Roumanie.Quant laugmentation des affaires pendantes(119.300 en 2009) Madame Franoise Tulkens,Juge la Cour pendant des annes, en a relev lesraisons : un arrir important daffaires hrites dela Commission, une insuffisance de juristes, desrequtes surabondantes et prolixes, et enfin desdemandes rptes dextension des dlais pour lesobservations.

    II. Comment la Cour a-t-elle fait face au fluxincessant des requtes qui la submergent ?La Cour na jamais t complaisante avec elle-mme.Anime de pragmatisme, elle a ralis quelle devaitprendre des mesures drastiques pour rguler laccs son prtoire, mais sans toutefois faire preuve dunerigueur excessive.Elle a pens et conceptualis ces mesures lors desommets ddis lavenir de la Cour : les Confrencesde haut niveau dIzmir (2010), dInterlaken (2011)de Brighton (2012), et plus rcemment lors de laConfrence qui sest tenue Oslo en avril 2014 surlavenir long terme de la Cour.Des solutions concrtes se sont dgages et il a tnotamment dcid dagir sur deux types de requtes :lLes requtes rptitives, traites notamment par laprocdure des arrts pilotes,l

    Les requtes manifestement irrecevables.Il sagissait selon lexpression employe parGuy Canivet, alors Premier Prsident de la Cour deCassation, de management juridictionnel. Traitercertaines affaires de manire plus efficace, le but tantin fine que les Juges et le Greffe concentrent leurtemps sur les affaires qui ncessitent plus de rflexion.

    1.La procdure des arrts pilote .Il sagit dun dispositif qui est parti dun constatstatistique effectu en 2004. Parmi les 50 000 affairespendantes devant la Cour, un grand nombre dentreelles, taient rptitives cest--dire quelles trouvaientleur source dans des dysfonctionnements internesdes tats membres du Conseil de lEurope dont

    certains sont des contrevenants chroniques selon la formule de Jean-Claude Mignon, qui futnotamment Prsident de lAssemble parlementairedu Conseil de lEurope.La Cour sest dote dun mcanisme : les arrts

    pilote qui permettent une fois que le problmestructurel, endmique, est identifi, dy mettre fin enordonnant des mesures de redressement.Cest dans laffaire Broniowski c/ Pologne quia donn lieu un arrt de Grande Chambre du22 juin 2004 que la Cour a pour la premire foisadopt un arrt pilote.Monsieur Broniowski avait hrit de biensimmobiliers qui aprs la seconde guerre mondialeavaient d tre abandonns par sa famille parce

    quils se situaient, au-del de la rivire Boug, dans desterritoires livrs lUnion sovitique. Dpossd de saterre et en dpit des promesses des autorits polonaisesde lindemniser, les dmarches du requrant taientrestes vaines. Monsieur Broniowski a alors portson affaire devant les Juges de Strasbourg. La Cour

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    a tout dabord constat quil y a bien une violationdes droits de Monsieur Broniowski, mais elle sestaussi rendu compte, avec un certain effroi, quil yavait 80 000 personnes qui taient dans la situationanalogue celle du requrant, (80 000 requrantspotentiels) et quelle tait dj saisie de 167 requtes.La Cour a fait deux choses :lElle a gel les autres affaires,lElle a demand la Pologne, tat dfendeur, detrouver une solution financire ou patrimoniale.Le rsultat fut ladoption par la Pologne en juillet2005 dune loi mettant en place un mcanisme decompensation financire pour tous les propritairesde parcelles de terre situes au-del de la rivire Boug.La Cour a ainsi pu radier plus de 200 affaires quitaient en attente et viter dtre saisie de milliersdautres requtes.La codification de la procdure des arrts pilotes est intervenue en mars 2011 donnant lieu ladoptiondun nouvel article du rglement de la Cour, larticle 61.Laffaire Bronowski est lillustration dun cas de figureidal, ce qui ne veut pas dire quil soit isol. Dunemanire gnrale, la procdure de larrt pilote estun succs.Toutefois, je vais voquer un exemple dans lequella procdure de larrt pilote na malheureusementpas permis dapporter une solution un problmestructurel et ainsi dallger le rle de la Cour par laradiation de milliers de requtes.Cet exemple concerne lpineuse question du droitde vote des dtenus au Royaume-Uni.Depuis le 19me sicle, les prisonniers britanniquesperdent le droit de voter de manire systmatique,non diffrencie, du seul fait de lapplication gnraledun texte. Le 6 octobre 2005, la Cour, saisie par undtenu, a constat dans larrtHIRST, que le RoyaumeUni avait viol larticle 3 du Protocole numro 1 dela Convention en ne garantissant pas le droit des

    lections libres.Toutefois, 5 annes aprs larrt HIRST, le Royaume-Uni navait toujours pas modifi sa lgislation en lamatire, alors que 2500 requtes similaires avaientt reues entre temps. La Cour a dcid de recourir un arrt pilote, larrt Greens et M.T., pour acclrerle mouvement lgislatif et la rsolution dfinitivedu problme. Mais, en dpit des dlais prorogs,le Royaume Uni ne sest pas dot dune lgislationsatisfaisante relative aux droits de vote des dtenus, et ce, dfaut dune volont politique en ce sens. Le premierMinistre britannique ayant pris personnellementposition en indiquant que lide que des dtenusbnficient du droit de vote le rendait malade .Que pouvait faire la Cour face lopposition

    persistante du Royaume-Uni ?Tout en menant des dmarches diplomatiquesvisant expliquer la teneur de larrt, la Cour a misfin au gel des affaires et a dcid le 24 septembre 2013dexaminer les 2281 requtes pendantes contrele Royaume-Uni et relatives au droit de vote desdtenus. Certains ont qualifi les arrts pilote deprocdure dabattage, il sagit plutt dun progrsprocdural notoire, qui permet de prvenir pluttque de gurir .

    2.Outre la procdure des arrts pilotes , ladeuxime rforme mise en place pour traiteravec plus de clrit les affaires rptitives estne du protocole numro 14 entr en vigueur le

    1er

    juin 2010.La grande innovation procdurale apporte par leProtocole 14 est incontestablement la cration du Jugeunique. Le Juge unique a hrit des comptences quiappartenaient auparavant au Comit des 3 Juges, cest--dire le pouvoir de dclarer irrecevables des requtes,

    de les radier ou de les orienter vers une formation dejugement.Paralllement, le protocole 14 a institu un transfertdes comptences qui appartenaient exclusivementaux Chambres de 7 Juges vers les Comits de 3 Juges(qui sont devenus des mini Chambres). Les comitsde 3 Juges se voient reconnatre la pleine juridiction.Ils peuvent trancher certaines affaires sur le fond.Il sagit des affaires dont la solution est conforme une jurisprudence bien tablie . En fait, les Comitsde 3 Juges statuent sur des affaires dites clones ,cest--dire, maintes fois tranches suivant une lignejurisprudentielle constante, et parfaitement claire.Ces modifications qui vont dans le mme sens, nontpas entran une leve de boucliers car elles ont tperues comme un mal ncessaire compte tenude la situation.

    3. Par ailleurs, la Cour a modifi les critresdordre dexamen des requtes en vue dacclrerle traitement des affaires les plus importantes.Ainsi, le rglement de la Cour a t modifi en ce senset le 29 juin 2009, une prioritisation des requtesa t institue. Cest la fin de lexamen chronologiquedes requtes.La priorit repose sur 7 catgories dont les 3 premiressont les suivantes :lEn premier lieu les affaires urgentes cest--direles cas o une mesure provisoire est applique, ouceux qui prsentent un risque pour la vie ou la santdu requrant, ou encore si le bien tre des enfants esten jeu.lEn second lieu, sont examines les affaires ayant uneincidence sur lefficacit du systme de la Convention,et celles qui soulvent une question importantedintrt gnral, ainsi que les affaires intertatiques.lEnfin, les affaires qui reposent sur des violationsdes articles 2, 3, 4, ou 5 1 de la Convention dans

    lhypothse o des menaces directes auraient tportes sur lintgrit physique ou la dignit dunepersonne. Les articles viss correspondent aux core rights droit la vie, interdiction de la torture,interdiction de lesclavage, et droit la libert et lasret.lEnvisageons enfin le sort rserv aux requtesmanifestement irrecevablesOn peut dire grosso modo que 90 % des requtes quisont traites par le Greffe de la Cour sont dclaresirrecevables. La Cour a d rationalis ce processus.On a dj vu que le protocole numro 14 a cr leJuge unique qui traite trs rapidement les requtes enappliquant la mthode one in, one out .Paralllement, la Cour qui avait t encourage en

    ce sens par la Confrence intergouvernementalequi sest tenue en fvrier 2010 Interlaken a misen place une section de filtrage charge decentraliser les requtes manant des 5 tats qui sontles plus importants pourvoyeurs de requtes : Russie,Turquie, Roumanie, Ukraine et Pologne. (Ces 5 tatstotalisent plus de la moiti des requtes pendantesdevant la Cour). Cette section qui fonctionne depuisle dbut de lanne 2011, et dont le champ dactiona t rcemment tendu tous les tats, trouveson fondement dans une mesure dadministrationinterne. Elle est un vritable centre daiguillage quipermet dorienter les requtes vers le Juge unique, lesComits de 3 Juges ou vers les Chambres.Enfin, une nouvelle condition de recevabilit a t

    cre par le Protocole numro 14. La Cour peutdsormais carter les requtes dans lesquelles lerequrant na pas subi un prjudice important.Ce nouveau critre est lexpression de ladage latin de minimis praetor non curat ?( le prteurne soccupe pas des petites affaires ).Ainsi, faisant

    application de ce nouveau critre formalis parlarticle 35 de la Convention, la Cour, dans un arrtAdrien Mihai Ionescu c. Roumanie en date du1erjuin 2010, a dclar irrecevable la requte portantsur une somme de 90 euros qui correspondaient desdommages et intrts que voulait obtenir le plaignantdune compagnie de transport routier qui navait pasrespect les conditions de confort et de scuritdcrite dans son offre publicitaire. La Cour ne sest pascontente de relever que le prjudice financier ntaitpas trs important, elle est alle au-del, en relevantque le respect des droits de lHomme nexigeait pasun examen au fond, et que la situation conomiquedu requrant ntait pas telle que lissue de laffaire avaitdes rpercussions sur sa vie personnelle.Notons quavant lentre en vigueur du Protocolenumro 14, la Cour avait, de manire prtorienne,fait application du critre dabsence de prjudiceimportant loccasion dune affaire relative auremboursement de comprims de magnsium dunmontant de 7,99 euros.Affaire Stephen Bock c. Allemagne, 19 juin 2010.

    ConclusionAprs tant de rflexion et tant dactions concrtes,quel regard peut tre aujourdhui port sur la Cour etsa capacit traiter les requtes qui lui sont adresses ?Sans cder aucun triomphalisme, mais sans nonplus cacher une certaine fiert, la Cour relve quele mouvement de rduction de larrir de requtesest spectaculaire. La courbe sest inflchie en 2012,et ce mouvement a t confirm en 2013 et 2014.La dcrue du flot contentieux sest donc installe etsemble prenne.Cest donc sans rvolution dides et sans heurt que laCour a volu, au gr de rformes penses et peses.Elle sest remodele et sest adapte linflation dessaisines, sans jamais se renier.

    En dpit de ses bons rsultats, la Cour nentendtoutefois pas sendormir sur ses lauriers. Elle poursuitla marche des rformes afin de parvenir toujoursplus defficacit :lLarticle 47 du rglement de la Cour fixe depuis le1erjanvier 2014 de nouvelles conditions de forme plusstrictes pour introduire une requte.lLe Protocole 15 raccourcit de 6 4 mois le dlai danslequel une requte doit tre porte devant la Cour aprsla dernire dcision de droit interne. Il ajoute en outreune rfrence au principe de subsidiarit et la margedapprciation des tats rappelant lide que les autoritstatiques doivent prendre toutes les dispositions en vuedanticiper les violations des Droits de lHomme.lLe Protocole 16, non encore en vigueur, est qualifi

    de protocole du dialogue par le Prsident de laCour Dean Spielmann sans doute parce quil prvoitla possibilit pour un tat de solliciter un avis titreconsultatif auprs de la Cour.Lavenir rside dans lanticipation et laresponsabilisation des tats.Alors est-ce que la comparaison avec un chantierpermanent (que jai partiellement carte au dbut dema prsentation) nest pas finalement le plus beau et leplus juste compliment que lon puisse faire la Coureuropenne des Droits de lHomme ? Remodeler,retravailler une uvre ne signifie pas quelle estimparfaite, mais quelle est digne denrichissement.Quel meilleur exemple que celui de la Sagrada

    familia , chef duvre architectural de Gaudi sur

    lequel les artistes depuis 1882 interviennent dansune qute damlioration et de perfection. Alors quepeut-on souhaiter la Cour ? Un destin semblable celui de la basilique catalane qui traverse les dcenniesen voluant sur le chemin des rformes tout en restantfidle son pre fondateur ? 2014-534

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    9/24Les Annonces de la Seine - Jeudi 9 octobre 2014 - numro 41 9

    Vie du droit

    Conseil de lEurope10meanniversaire de ladhsion de Monaco*

    Strasbourg, 6 octobre 2014

    Jos Badia, Conseiller de Gouvernement pour les Relations Extrieures et la Coopration sest rendu Strasbourg,les 6 et 7 octobre derniers, afin de clbrer le 10meanniversaire de ladhsion de la Principaut au Conseil de lEurope.

    A cette occasion, une rception a t offerte par le Conseiller de Gouvernement et Son Excellence Claudette Gastaud,Ambassadeur, Reprsentant Permanent auprs du Conseil de lEurope, runissant de nombreuses personnalits duConseil de lEurope dont la Secrtaire Gnrale adjointe, Gabriella Battaini-Dragoni, le Prsident de la Cour europenne,

    Dean Spielmann et les Reprsentants permanents des 47 tats membres.Du ct mongasque, ont notamment pris part cet vnement Son Excellence Phil ippe Narmino, Directeur desServices Judiciaires, Jean-Charles Allavena, Conseiller National, Prsident de la Commission des Relations Extrieures,Anne Eastwood, Haut Commissaire la protection des droits, des liberts et la mdiation, Georges Marsan, Maireet Martine Castoldi, Prsident du Tribunal de Premire Instance.

    Jos Badia a notamment rappel, lors de son allocution, lengagement de Monaco en faveur de promotion et de la protectiondes Droits de lHomme ainsi que son attachement aux principes de ltat de droit et de la dmocratie. 2014-535 *Le 5 octobre 2004, Monaco devenait le 46metat membre du Conseil de lEurope.

    D.R.

    Jean-Laurent Ravera, charg de mission la Direction des Affaires Juridiques ; Stphanie Mourou Vikstrm, PremierJuge au Tribunal de Premire Instance ; Son Excellence Philippe Narmino, Directeur des Services Judiciaires ;Isabelle Berro-Lefvre, Juge mongasque la Cour Europenne des Droits de lHomme ; Marie-Pascale Boisson, Directeurdu SICCFIN ; Jos Badia, Conseiller de Gouvernement pour les Relations Extrieures et la Coopration ; Martine Castoldi,Prsident du Tribunal de premire instance ; Son Excellence Claudette Gastaud, Ambassadeur, ReprsentantPermanent de Monaco auprs du Conseil de lEurope ; Anne Eastwood, Haut Commissaire la protection des droits,des liberts et la mdiation ; Jean-Charles Allavena, Conseiller National, Prsident de la Commission des Relations Extrieures ;Elisabeth Lanteri-Minet, Directeur des Affaires Internationales et Georges Marsan, Maire de Monaco.

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    10/2410 Les Annonces de la Seine - Jeudi 9 octobre 2014 - numro 41

    Chronique

    Si le droit mongasque suscite, depuis cesdernires annes, un regain dintrt, lonne compte gure de travaux rcents, eten particulier douvrages, exclusivement

    consacrs au droit constitutionnel.Celui du Professeur Jol-Benot dOnorio,enseignant en droit constitutionnel et sciencespolitiques la Facult de Droit dAix-Marseille,vient donc point nomm.Son titre, Monaco, Monarchie et Dmocratie ,exprime lui seul la conclusion dune fineanalyse juridique des institutions de laPrincipaut, au travers des diffrentes tapes duconstitutionnalisme mongasque. La structurede louvrage est ainsi ordonne en fonction desgrandes phases de lhistoire constitutionnelle deMonaco. Il est divis en six chapitres, chacunayant pour objet un moment de cette volution,depuis 1848 jusqu la dernire modification dela Constitution en 2002 et ses suites.Au cours de ce droul, sont mises en exerguedes personnalits publiques, et en particuliercelles des Princes Souverains qui ont exerc lepouvoir constituant.Le lecteur peut aussi trouver en annexe de cetouvrage, lensemble des textes constitutionnels

    passs et en vigueur, ce qui constitue galementlun de ses atouts.Sur le fond, lauteur nous livre, ce qui est rare,une analyse de la charte promulgue par lePrince Florestan Ier, le 25 fvrier 1848 jamaisentre en vigueur en raison de la scessiondes villes de Roquebrune-Cap-Martin et deMenton, devenues franaises en 1861, dansdes conditions du reste relates dans louvrage.Il consacre ensuite des dveloppementssubstantiels la premire Constitutionmongasque effective, en date du 5 janvier 1911,

    octroye par le Prince Albert Ier, en voquantson origine tenant aux dolances dumouvement constitutionnel mongasque,ainsi que les travaux de trois juristes franais,Louis Renault, Andr Weiss et Jules Roche,missionns par le Prince Albert Ier.Il en dtaille les principales innovations :reconnaissance de droits et liberts fondamentaux,cration dune assemble lgislative de 21 membreslue au suffrage universel (le Conseil National)ainsi que dune haute juridiction constitutionnelle(le Tribunal Suprme).Le Professeur dOnorio relve toutefois lesimperfections et les insuffisances du nouveaudispositif lesquelles furent la source de notablestensions politiques, pour en conclure que cetteconstitution tait refaire .Telle est la tche laquelle sattela lePrince Rainier III qui promulgua une nouvelleconstitution le 17 dcembre 1962. Lauteur yvoit la marque dune transition dmocratique de la Principaut caractrise par le fait que,contrairement au texte de 1911, le Princepartage dsormais son pouvoir constituantavec le Conseil National dans les conditionsfixes par le Titre XI de la Constitution relatif

    sa rvision.Il procde en outre une exgse mticuleusedes principales dispositions constitutionnellesen faisant ressortir limportance accorde parses rdacteurs, le Doyen Georges Vedel, assistdes Professeurs Prosper Weil et Marcel Bridel, la revalorisation, dans le cadre dun dispositifquilibr, tant de la fonction lgislative quede loffice du juge. Cest ainsi que le TribunalSuprme, tout en conservant son statut de courconstitutionnelle, devint Juge administratif delexcs de pouvoir.

    Est ensuite traite lunique rvision que subitla Constitution en vigueur, en loccurrenceen 2002, dmontrant ainsi leffectivit desdispositions de son Titre XI prcit. LeProfesseur DOnorio explicite le contextede cette rvision lie aux conditions mises,en matire constitutionnelle, par le Conseilde lEurope en vue de ladhsion de Monaco.Il conclut par le constat de la compatibilitfondamentale de la rvision constitutionnelleavec la tradition juridique mongasque et dumaintien ne varieturdu rgime politique etinstitutionnel de la Principaut. Le dernierchapitre de louvrage nous livre une rflexionsynthtique traitant de lquilibre dmocratiquede la monarchie constitutionnelle .A ce titre, on relvera une thorie originale,procdant du constat historique selon lequel Monaco, cest la monarchie qui a sauvla dmocratie . En vertu de cette thorie,le principe dune monarchie politiquementactive met le Prince de Monaco en position la fois de premier dfenseur des droits et desliberts, et darbitre suprme dot dune parolepacificatrice et rgulatrice.Louvrage prend fin par une ultime dclaration

    aux termes de laquelle la Constitution de Monaco,si elle est monarchique et non parlementaire, necesse pas pour autant dtre dmocratique et parlaffirmation de la souverainet mongasque, plusque jamais ncessaire lheure de lintgrationeuropenne.Lon ne peut donc que recommander la lecturede ce livre susceptible de captiver tous ceux quisintressent la Principaut et ce, bien au-deldu cercle des constitutionnalistes.2014-536 Laurent Anselmi

    Conseiller dtat Monaco

    Droit Constitutionnel et Institutionsde la Principaut mongasque Monaco, Monarchie et dmocratie

    La Principaut la plus clbre du mondeest paradoxalement la moins connuequant son mode de gouvernement.Au-del des chos mdiatiques, peusavent que Monaco est dot duneorganisation tatique et dun systmejuridique complets qui lui sont propresen raison mme de sa souverainet.Celle-ci se manifeste essentiellementdans sa dynastie sept fois centenaireparce que le Prince y est la clde vote de lordre constitutionneldo il ressort comme le seul de tousles monarques europens gouvernerrellement son tat et disposerde pouvoirs rgaliens. Nanmoins, lamonarchie mongasque a toujours ten phase avec son temps en se mettantprogressivement au diapason desrequtes de la modernit dmocratique.

    Monaco, les tapes duconstitutionnalisme se sont toujoursinscrites, au long des cent derniresannes, dans le sens dune concertationinstitutionnelle entre la Couronne,le Gouvernement nomm par lePrince et le Conseil National lu parle peuple. Il en rsulte un rgimepolitique original, ni parlementaire niprsidentiel, mais de type mixte, refetde ce gouvernement modr thorispar Montesquieu et illustr par Portalis.Pour tre unique en son genre enassociant une monarchie active et unedmocratie effective, la Constitution de

    la Principaut de Monaco nen est pasmoins conforme aux canons des libertspubliques fondamentales et aux normescommunment observes de nos joursen Europe et dans tout lOccident.

    Le Professeur Jol-Benot dOnorioenseigne le droit constitutionnel,la science politique, les relationsglise-tat et la culture juridique la Facult de Droit dAix-Marseille.Membre de lAcadmie royalede Jurisprudence et Lgislationde Madrid et ancien expert

    gouvernemental auprs du Conseilde lEurope Strasbourg, il estlauteur de nombreux ouvrageset tudes sur diffrents thmesde droit et dhistoire, ainsi quedarticles dopinion dans la grandepresse. Familier de la Principaut, il y

    conduit rgulirement les promotionssuccessives de ses tudiants delInstitut Portalis dAix-en-Provencepour des sessions dinformationsur les institutions mongasques.

    Ouvrage du Professeur Jol-Benot dOnorio

    ditions Universit Provence

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    11/24Les Annonces de la Seine - Jeudi 9 octobre 2014 - numro 41 11

    Nous nous retrouvons nombreux, ce soir,dans cette glise pour rendre hommage,ensemble, Jean Algre, votre pre,notre ami. Nous voulions donner loccasion ceux qui lon connu et qui ont travaill aveclui de tmoigner leur estime, leur affection, leurreconnaissance aussi, par leur prsence dans celieu de recueillement.Nous ressentions le besoin de cette rencontreparce que chacune et chacun dentre nous a ttouch par la mort de Jean, et nous voulions

    dire notre motion sa famille quil aimait tant.Nous voulions aussi lexprimer entre nous,simplement, humainement.Mme ceux qui se mfient des effusions et quitiennent la garde bien serre, mme les espritsforts ne savent pas rsister la personnalitaimable, attentive, gnreuse de Jean.Ce ntait pas de surface : ce sourire accueillant,cette disponibilit sancraient des convictionsbeaucoup plus profondes et tenaces puisquilstenaient srement de sa foi et de sa culturehumaniste, mais aussi de sa terre, des paysanspyrnens, de ses engagements associatifs, et deson culte exigeant de laustrit.Mais cette bont nexpliquait pas toute la

    personnalit de Jean.Il y avait aussi sa comptence professionnelle,son amour du travail bien fait, ses scrupules et satnacit.Avec lui, une runion tait prpare par une notedtaille, et la rencontre termine, un compte-

    rendu aussi prcis que complet tait envoy auxparticipants.Cet acharnement au travail le rendait viteindispensable aux quipes, aux associations,aux institutions qui avaient recours lui.Et cet amour du travail tait aussi un traitde sa personnalit. Il me rappelait ce quePguy disait des laboureurs de Dorigny : ... ils ne veulent pas moissonner sans avoirlabour, rcolter sans avoir sem. Car ne serait pasjuste. a ne serait pas dans lordre du bon Dieu !

    Jean ne transigeait pas avec cet ordre dans letravail, il nen dmordait pas, ce qui lui donnaitune grande force et une grande libert.Et cest sans doute cette libert qui lui permit depasser ces nombreuses annes dans le mondepolitique de Paris et de Bruxelles sans perdre sonme ni son sourire.Dans ce monde o rgne une forme de violence,o les promesses ne sont pas tenues, o la posturela dfinitivement emporte sur le fond, cest peudire que Jean dtonait.Sa franchise et sa constance, son enttementparfois, constituaient surtout des repres.Le consulter au cours dun dbat, dunengociation permettait de savoir immdiatement

    o on en tait par rapport au point de dpart, etau but vis.La force de ses convictions ne sest jamais mieuxexprime que sur les questions europennes.Dans les cabinets o il a travaill, lareprsentation permanente, au parlement

    europen, Europartenaires il avait acquis uneconnaissance exceptionnelle des mcanismescommunautaires, tout particulirement dansle secteur juridique. Et il en faisait largementprofiter ceux qui le consultaient.Ainsi, jusqu la veille de sa mort, il fit bnficierles professions juridiques franaises de sa scienceeuropenne.Cette matrise se nourrissait, elle aussi, aux fortesconvictions de Jean.Pour lui, lEurope ntait pas celle dont on parle trop,

    celle de la crise de lEuro, du droit de la concurrence,de la bureaucratie bruxelloiseLEurope laquelle il a tant donn tait celle decette aventure unique dans lhistoire des hommeso des peuples, qui se sont battus pendant dessicles, dcident de mettre en commun une partde leur souverainet pour construire un mondemeilleur, dans le respect des rgles communeset des particularits de chacun.Jusquau bout, Jean nous a manifest ce respect,il a t attentif chacun dentre nous, cestpourquoi, dj, il nous manque tantIl ne nous reste qu le faire vivre dans nos curs, lcouter nous parler encore.Ce soir, il pourrait savancer parmi nous, surpris

    de nous voir rassembls, et pourrait nous dire,avec ce petit reste daccent du Sud Ouest queje partageais avec lui : Merci dtre l. Je vous aime tous .2014-537 Par Henri Nallet, Ancien Ministre,

    Prsident de la Fondation Jean-Jaurs

    Jean,Ctait un intellectuel qui savait couper les rosiersUn polyglotte qui vous disait en grec quil aimaitlEuropeEn anglais quil combattait pour la JusticeEt en franais quil tait notre ami pour la vieCtait un magistrat barnais, ces deux qualitstaient aussi interdpendantes pour lui que,pour dautres, celles de lac creusais ou de

    fonctionnaire aveyronnais.

    Nous nous tions connus par lisabeth Guigou en1997 et nous ne nous tions pas quitts depuis,tous les amis de Jean connaissait ses messagesmanuscrits o lcriture tournait autour de lapage avec des renvois, des flches, des rajouts,avec la mme densit que sa parole.Nombre dentre nous avons eu le bonheurdtre autour de lui pour cette reconnaissancede la Lgion dhonneur quil savait tre une

    des dernires manifestations des cercles

    de fidlit quil avait tracs autour de lui.Comme les anneaux de lOlympe, ces cerclesfaisaient de Jean un champion de lamiti et desmises en relations des uns avec les autres.Nous pensons lui et pas seulement enentendant ici et l ce lger accent barnaiscomme une signature attnue de ce quil nousa apport.Merci Jean.

    Christian Vigouroux

    Jean Algre le 26 juin 2014 Bruxelles

    Jean Algre nous a quitts8 juin 1946 - 17 aot 2014

    Il y avait foule dans la basilique Sainte Clotilde de la rue Las Cases Parisvendredi dernier pour assister lmouvante crmonie organise en lhommage de

    Jean Algre survenu le 17 aot 2014 (Les Annonces de la Seine du 25 septembre 2014page 15).Robert Gelli, puis Christian Vigouroux et enfin Henri Nallet ont salu la mmoire dudfunt en brossant avec une infinie justesse les traits de son attachante personnalit.

    Porter haut les couleurs de lEurope est un devoir que Jean Algre simposait depuisde longues annes.Tout au long de sa vie, il a su incarner dans son entourage des valeurs de justiceet de progrs. Il sest constamment intress aux autres sans jamais rechercher sonintrt personnel.

    La perte de Jean Algre est douloureuse, nous continuerons faire vivresa mmoire et poursuivrons le chemin quil a trac au nom des liberts. Jean-Ren Tancrde Ph

    otoJe

    an-RenTancrde-Tlphone:01.42.60.36.35

    In memoriam

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    12/2412 Les Annonces de la Seine - Jeudi 9 octobre 2014 - numro 41

    Palmars

    L(...)e Prix de lAudace Cratrice, cest demontrer quil y a des possibles, querien nest vritablement impossible,

    y compris votre performance sportive qui nedoit pas effacer votre performance industrielle.Car, je crois que ce qui compte, cest davoir tcapable de reprendre une entreprise familialeque votre pre avait cre, spcialise dans les

    robots, pour ensuite avoir le gnie de penser quenous pouvions tre les premiers pour les drones.Sur le plan militaire, nous navons pas toujourst les premiers, je le dis pour que nous puissionsmaintenant tre la hauteur du dfi.Mais, pour les drones, tels que vous les avezconus - cest--dire des drones qui servent la fois la protection civile, mais aussi lasurveillance des installations-, donc, ces drones-l, que vous avez exposs dans les jardins dellyse, -et vous avez sans doute recueilli desinformations extrmement prcieuses-, cesdrones-l, vous les avez non seulement fabriquspour les besoins de notre conomie nationale,mais vous les avez exports l o il y avait des

    considrations de sret qui taient parmi lesplus exigeantes.Et je pense notamment la Chine, puisque vousavez install ces systmes de scurit et vous tesquasiment un des premiers fournisseurs de cesmatriels en Chine. Cela veut dire, que toutes

    les installations nuclaires chinoises et noustravaillons ce que les entreprises franaisespuissent tre prsentes pour les dvelopper avecnos amis Chinois, cest vous qui avez la chargede les surveiller.(...)Vous avez aussi t capable dtre uneentreprise innovante,pas simplement sur lesdrones, venants aprs les robots, mais galementmaintenant sur les imprimantes 3D, puisque

    vous avez repris une filiale, une entreprise etvous allez vous porter sur ce march, marchl aussi trs disput, mais qui est essentiel etqui correspond aux 34 plans industriels que leMinistre Macron est maintenant en charge defaire appliquer avec les entreprises et on voit bienque limprimante 3D, que lusine du futur, queles robots, que les drones, font partie de ce quepeut tre lexcellence franaise.Monsieur de Lacharrire a voqu aussi votreforme de patriotisme. Cest--dire davoirpens que vous pouviez vendre, exporter, fairefabriquer quand ctait ncessaire ltranger,mais garder votre Sige et lessentiel de vosemplois, ici en France, notamment dans le Sud-

    Est. Cest un choix qui vous honore, mais cestun choix qui permet de comprendre que lacomptitivit franaise, elle est sur linnovation,elle est aussi sur le cot du travail et que nousavons justement favoris et linnovation et lacomptitivit sur les cots eux-mmes.

    Vous tes galement une entreprise exemplaire,puisque vous avez pu avoir la confiance devos partenaires et notamment de la BPI, quevous avez cite et qui participe votre capital,ce qui permet de garder lindpendance.Lindpendance, cela, cest le mot cl. La Francedoit tre ouverte, doit tre dans le monde, doittre partout prsente et en mme temps, elle doitgarder autant quil est possible des entreprises

    qui peuvent tre indpendantes dans leurs choixet dans leurs dcisions.(...)Voil ce que je voulais aussi vous annoncer loccasion de ce prix de lAudace Cratrice. Parceque lAudace, elle doit tre chez le crateur, elledoit tre dans toute la socit.Ce qui fait le talent franais et vous voyagezbeaucoup et souvent ce sont les trangers quinous le disent. Cest prcisment laudace etle panache. Cela fait partie de nos rfrences.Le panache daller avec parfois son drapeau,parfois son orgueil, parfois sa fiert, mais aussisa crativit.Donc, laudace elle doit tre partout, partout.Chaque fois que lon a dfendre ce que lon

    pense tre lessentiel, nos valeurs, nos principes,nos ides, nos produits, nos innovations, noscrations, notre culture, notre langue. Il fautmettre de laudace. Et ce sont les pays audacieuxqui gagnent.Pas forcment les pays les plus forts. (...) 2014-538

    Prix de lAudace cratrice 2014Palais de llyse - Paris, 30 septembre 2014

    PhotoJean-RenTancrde-Tlphone:01.42.60.36.35

    Cest Marc Ladreit de Lacharrire (1), Prsident de Fimalac, qui a fond le prix de laudace cratrice en 1995, il est dcernchaque anne une entreprise particulirement performante ayant russi faire progresser simultanment son chiffre daffaires,

    sa rentabilit et ses effectifs. Le 19meprix a t remis, llyse, le 30 septembre 2014 par Franois Hollande Raphal Gorg (3)Prsident du Groupe Gorg fond par son Pre Jean-Pierre (2)en 1990. Nous saluons les initiatives prises par ce jeune Chefdentreprise qui a su diversifier et dvelopper les activits traditionnelles du groupe familial en soutenant, avec audace, lavaleur du travail, de linnovation et celle du risque. Jean-Ren Tancrde

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    13/24Les Annonces de la Seine - Jeudi 9 octobre 2014 - numro 41 13

    Vie du droit

    Le Conseil National des Barreaux, runien assemble gnrale extraordinairele 3 octobre 2014, connaissance prisede la volont gouvernementale de faire

    adopter en urgence, dans le cadre de la rformedes professions rglementes, les mesures suivantesspcifiques la profession dAvocat :lsuppression de la territorialit de la postulationet de son tarif,louverture aux tiers du capital social des SEL,l exercice dans le cadre de structurescommerciales de droit commun,lsuppression du contrle pralable de lordre surlinstallation des bureaux secondaires,lconvention dhonoraires obligatoires en toutematire,lcration dun statut de lavocat salari en entreprise.

    Rappelleque les Avocats ne sont pas opposs une rflexion approfondie sur lensemble de cessujets, et de manire gnrale toute rformevisant moderniser la profession et amliorerloffre de droit.Constateque lensemble des rformes envisagessont susceptibles de modifier considrablementla dontologie, lexercice et lorganisation de laprofession ainsi et surtout que lquilibre de la socit.Dplore que les Pouvoirs Publics puissentenvisager une rforme dune telle ampleursans avoir valu ses incidences tant pour lesentreprises que constituent les cabinets dAvocatsque pour loffre de droit aux justiciables.Stonnede lempressement des Pouvoirs Publics vouloir imposer une rforme dont ni lurgence,ni lopportunit conomique ne sont dmontres.

    Dnoncecomme intolrable la mthode brutaleretenue par le gouvernement.

    Dans ces conditionsRefusede cder la pression qui le contraindrait voter dans lurgence et la prcipitation unerforme brutale, bcle et envisage sans relleconcertation et engageant lavenir de la profession.Exigeque des tudes srieuses et circonstanciessoient mises en uvre pour valuer les impactsconomiques, gographiques et sociaux desmesures importantes envisages.Sopposefermement et vigoureusement touterforme dampleur qui naurait pas fait lobjet, dansla srnit, de la rflexion, de la concertation et delvaluation ncessaires. Source : communiqu du 3 octobre 2014

    1- Conseil National des Barreaux

    2- Confdration Nationale des Avocats

    Professions rglementes

    Depuis le 10 juillet dernier et uneconfrence de presse donne par leprcdent Ministre de lconomie,les avocats sont fustigs comme

    lune des professions rglementes qui par son

    fonctionnement priverait les franais dune partde leur pouvoir dachat.Dans ces conditions, les fonctionnaires de Bercyont dcid la hte et sans la moindre concertationde modifier en profondeur notre profession.Lors dune runion qui sest tenue le mercredi24 septembre dernier la Chancellerie enprsence le matin la fois du Ministre de laJustice et du Ministre de lconomie, et laprs-midi en la seule prsence de hauts fonctionnairesessentiellement de Bercy la profession a tmise en cause de manire inadmissible, sesreprsentants tant dailleurs pris de haut par desfonctionnaires pensant connaitre linstitutionjudiciaire quils nont pourtant jamais frquente !

    Cest dans ces conditions que sest tenuelassemble extraordinaire du CNB le3 octobre dernier, au cours de laquelle, pressepar le gouvernement, la profession a dcid devoter la hte sur lessentiel de son avenir.

    La CNA a soutenu, aux cts des autres syndicats,que cette mthode gouvernementale devait trefermement condamne et souhaitait en outre quilny ait pas de vote montrant ainsi au Gouvernementque nous ne cdions pas ses menaces.Le vote a eu lieu et, en dehors de la suppressiondu tarif, ce que nous condamnons, les autresvotes sont alls dans le sens que nous souhaitons.Pour autant, la menace existe toujours et lesfonctionnaires de Bercy veulent toujours :lLa fin de la postulation, voire de lavocatobligatoire devant les TGI, remplace par uneprocdure strictement crite de nature nationalemettant fin au rapport direct entre le magistratet lavocat cest--dire le citoyen ;

    lLa fin de tout tarif ;lLentre sans limite de capitaux extrieurs dansles socits dexercice ;lLa cration de socits davocats purementcommerciales ;l

    La cration du statut davocat salari enentreprise.Nous ne pouvons nous laisser faire sans ragir !!!Aussi, la CNA vous propose dadresser lalettre ouverte*ci-dessous votre dput, votresnateur, au Ministre de la Justice et au Ministrede lconomie.Cest parce que nos ractions seront fortes que leGouvernement reculera. Si nous nagissons pasmaintenant, ces rformes passeront et cest touteune part de notre profession qui disparatra.Chacun dentre nous doit ragir !Avec la CNA, faites entendre la voix de tous lesavocats de France ! Source : communiqu du 9 octobre 2014

    L es avocats assurent sur tout le territoirenational, dans toutes les rgions,et dans la plus grande partie descommunes franaises, la dfense, le conseil,la reprsentation et lassistance de tous nosconcitoyens et de toutes les entreprises.Ils sont leur porte-parole et leur permettentdtre entendus et compris quelle que soit leursituation de dtresse conomique, sociale oumorale. Ils permettent aux entreprises, quelle quesoit leur taille ou leur situation de dpendanceconomique de bnficier o quelles se situent

    des mmes conseils, des mmes droits et enconsquence des mmes chances que leursconcurrentes franaises ou trangres.Aujourdhui la profession davocats estmenace par des projets construits et crits parladministration de Bercy qui voudrait ainsi faire

    croire quen attaquant les avocats, elle rsorberaitles 2000 milliards de dficit de notre pays.Cela laisserait supposer que nous constituons uneprofession de nantis qui senrichirait au dtrimentde nos concitoyens, au moment o tous les rapportsmontrent que notre profession sappauvrit et quele nombre des avocats en situation de dtresseconomique ne cesse de crotre.Si ses projets taient raliss :lCe serait la fin de la postulation obligatoire,permettant non seulement aux avocats davoir unrapport direct avec les magistrats de leur ressort,

    mais ce qui entranant terme la fermeture de trsnombreux cabinets davocats dans les petites etmoyennes villes, ce qui priverait les citoyens dunevritable coute de proximit.Nos concitoyens les plus fragiles conomiquementne pourraient plus avoir un accs la dfense,

    lassistance et au conseil. Ce serait objectivementla cration dune justice deux vitesses au profitdes seuls nantis.lLentre sans limite de capitaux extrieursdans les cabinets davocats entranerait de faitune dpendance considrable des avocats et lafin de lindpendance de la profession. Commentun avocat dont les capitaux seront dtenus parun investisseur ou une compagnie assurancepourra-il librement accepter de nouveauxdossiers et dfendre les intrts de ses clients eten toute indpendance.

    lLa cration de socits purement commerciales,les avocats en marchants du droit comme si laprestation juridique tait un commerce de servicecomme une autre alors que la CJUE rappelleconstamment quil sagit au contraire dunematire dont la spcificit et les intrts quelle

    *Madame la Dpute , Monsieur le Dput, Madame la Snatrice, Monsieur le Snateur, Madame la Ministre, Monsieur le Ministre, Madame, Monsieur,

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    14/2414 Les Annonces de la Seine - Jeudi 9 octobre 2014 - numro 41

    Vie du droit

    dfend sont diffrents voire suprieurs de seulsintrts capitalistiques.Ce faisant, sera favorise, au grand dommagedes citoyens la cration dofficines vendeursde droit avec pour seul objectif la rentabilit etignorant des rgles protectrices de dontologie.

    Le droit nest pas largentlLa cration dun statut davocat salari enentreprise dont ni les entreprises ni les avocatsne veulent, sinscrit dans le mme processus desubordination et de rentabilisation.Ce statut serait seulement le moyen de braderlune des protections majeures de tout citoyen : ledroit au secret de ses confidences son avocat. Ilpermettrait aux compagnies dassurances et autrestablissements financiers de disposer rapidement

    de leurs propres avocats salaris qui seront plus oumoins imposs leurs clients et qui ne pourront, enlabsence totale dindpendance, remettre en causeles dcisions de leur hirarchie mme si celles-cisont contraires lintrt du client.

    Il en sera ainsi finide lindpendance et du secretToutes ces rformes dont limpact conomiquerel na fait lobjet daucune tude pralable ne sontque lexpression du fait du prince et leur mise enuvre dans la prcipitation sans concertationpralable, rgle primordiale de la dmocratie,nest que le reflet dune volont technocratiquede tenter de faire valider le projet de loi de financesfranaise par les autorits de Bruxelles.Elles auraient pour consquence la disparition

    dune activit rgulatrice des litiges, delindpendance, de la dfense, du secret du auclient, et donc de la mission de Conseil et dedfense et toute libert des droits de chacun.Nous vous demandons de ragir nos cts enintervenant directement auprs des Ministresconcerns.Les avocats garants des droits sont aussi la garantiede la prservation des liberts individuelles etcollectives, les atteindre cest remettre gravementen question lessence mme de la dmocratie.Nous avons besoin de vous pour prserver lesdroits fondamentaux garants des liberts !Restant votre disposition pour toute rencontreque vous jugeriez utile, Nous vous prions de croire,en lexpression de notre haute considration.

    2014-539

    Juridictions Interrgionales Spcialises (JIRS)10meanniversaire - Marseille, 3 octobre 2014

    Mises en place le 1eroctobre 2004, les JIRS luttent contre la criminalit organise et la dlinquance c