du viol des foules à la synarchie - yann mon comble

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sociologie

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  • Yann Moncomble

    Du viol des foules la synarchie

    Ou le complot permanent

    Faits et Documents

  • Imprim en France

    1983 by Yann Moncomble,

    PARIS

  • Du mme auteur

    La Trilatrale et les secrets du Mondialisme , Faits et Documents, 1980. LIrrsistible expansion du Mondialisme , Faits et Documents, 1981. Les Vrais responsables de la Troisime Guerre mondiale, Faits et Documents, 1982. Du Viol des foules la synarchie ou le complot permanent, Faits et Documents, 1983. La Maffia des Chrtiens de gauche, Faits et Documents, 1985. Quand la Presse est aux ordres de la Finance, Faits et Documents, 1986. Les Professionnels de lanti-racisme, Faits et Documents, 1987. La Politique, le Sexe et la Finance, Faits et Documents, 1989. Le pouvoir de la drogue dans la politique mondiale, Faits et Documents, 1990.

  • Table des matires

    1 - Le Viol des Foules par la propagande politique 2 - Le jeu des socits secrtes 3 - De curieuses constatations

    La synarchie ou le complot permanent

    4 - Jean Monnet ou lhritier de la synarchie 5 Conclusion 6 Annexes

    Docteur Flamme Le sjour dAlexis Carrel en France (1941-44) Patrie et Progrs Les polaires

  • Le systme capitaliste de lOccident et le socialisme de la Russie cheminent lun vers lautre,

    vers la solution de synthse... ils sont ports par un

    humanisme semblable.

    Edgar Faure, Humanisme et Culture (avril 1964)

    De toutes les sciences, la plus dangereuse serait celle du contrle de la pense des foules,

    car elle permettrait de gouverner le monde.

    The Nine Unknown (Les Neuf Inconnus)

    Talbot Mundy (1927 - ancien membre

    de la police anglaise des Indes).

  • 1

    Serge Tchakhotine ou le viol des

    foules par la propagande politique

    En 1944, un certain Serge Tchakhotine fondait une

    organisation du nom de S.A.L. Science Action Libration.

    La personnalit et la vie hors du commun de ce

    personnage nous oblige donner ici une tude dtaille de

    sa biographie afin dessayer de comprendre le pourquoi et le comment de certains faits.

    N le 13 septembre 1883 Prinkipo, prs de

    Constantinople, il est le fils dun consul russe, Stepan Ivanovitch Tchakhotine et dAlexandra Motzo, dorigine grecque. Son pre appartenait une secte Les Vieux

    Croyants qui pratiquait des murs trs svres et qui se montrait extrmement laborieuse. Il fut successivement

    interprte au Consulat Imprial de Russie

    Constantinople, vice-consul Jrusalem, puis consul de

    Russie Nich, en Serbie.

    Serge Tchakhotine, lve luniversit de Moscou, fait partie ds 1902 du mouvement de la jeunesse

    universitaire anti-tsariste qui organise une des premires

    manifestations en se barricadant dans les locaux de

  • luniversit. Laffaire se termina la prison de Boutyrki. Ce fut l un tournant pour Serge Tchakhotine...

    Son pre, diplomate du Tsar, fit des dmarches et

    obtint la libration de son fils la condition quil quittt la Russie. Il partit donc avec sa mre en Allemagne,

    Munich, o il sinscrivit la Facult de mdecine. Se liant avec le milieu russe trs important cette poque, et avec

    des gens tels que Arnoldi Yakouchkine, les frres Kananoff

    et Woulf, ceux-ci lui firent connatre le mouvement

    social-dmocrate allemand. Cest cette poque quil lisait le journal rvolutionnaire Iskra de Lnine, mais bien

    quau dbut ses sympathies allaient du ct des bolcheviks, trs rapidement, il glissa vers laile gauche des mencheviks et adhra au groupe de Plekhanov et

    dAxelrod.

    Quittant Berlin, il sinscrit Heidelberg, la facult des sciences, o il fait la connaissance du professeur Otto

    Btschli et du docteur Salmanoff, qui travaillait alors

    comme assistant dans la clinique du clbre professeur

    Erb. Ctait un spcialiste des mouvements politiques et sociaux.

    Trs li avec Zavadsky, collaborateur du professeur

    Tchakhotine, Zavadsky et Emma femme de Tchakhotine : il stait mari entre-temps partirent Villefranche-sur-Mer, o il poursuit ses recherches la

    station zoologique marine. Zavadsky, membre du Parti

    socialiste rvolutionnaire, avait t envoy par le Parti

    Villefranche, en mission secrte, et Tchakhotine avait

    consenti laider.

  • Son travail consistait alors recevoir des bonbonnes

    dacide nitrique et de glycrine, commandes en son nom au titre de substances ncessaires ses travaux

    scientifiques. La nuit, ces bonbonnes taient transportes

    dans la baie de Villefranche o une villa tait loue par

    deux couples dtrangers qui taient en ralit membres dun groupe de combat socialiste rvolutionnaire. Cest l que, la nuit, ils fabriquaient des explosifs et des bombes

    qui taient ensuite achemins en Russie. Ce groupe de

    combat terroriste du parti social rvolutionnaire tait

    dirig par un mystrieux personnage surnomm loncle et qui, en ralit, ntait autre que le fameux provocateur Azeff1.

    Jai eu une fois loccasion de le voir, crit Tchakhotine dans ses mmoires privs. Il tait laid, avec des grandes

    oreilles dcolles et un cou de taureau ; il avait laspect maladroit et repoussant. Cette prcision est trs

    importante en ce qui concerne le cas Azeff car, jusquici, personne navait jamais su quil avait t Villefranche.

    Le rgime tsariste stant entre-temps assoupli, 1 Yvan Azeff disposait de fonds normes et Nicolaevski, dans une tude approfondie sur le cas Azeff Histoire dun tratre, attribue ces abondantes ressources le double rle jou par lagent provocateur qui aurait ainsi puis pleines mains aussi bien dans les caisses du gouvernement que dans celles du Parti socialiste rvolutionnaire (P.S.R.). Azeff participa tous les prparatifs de lattentat commis par Kaliaieff le 17 fvrier 1905 Moscou sur la personne du grand duc Serge Alexandrovitch. (Renseignements tirs de Des Prodromes du Bolchvisme une Socit des Nations, par J. Tchernoff. Editions Rieder, 1938.)

  • Tchakhotine retourne Odessa, au cours de lt 1909, o il prpare lexamen dagrgation. Cest cette poque quil la bora un systme de fiches et se mit poser les bases de la mthode M. T. (masse-temps) quil perfectionna toute sa vie et quil publia une brochure intitule La langue internationale de la science, dans

    laquelle il donna lide dune langue auxiliaire internationale, qui lui paraissait une ncessit logique

    pour lorganisation de la docu mentation scientifique.

    Pendant lhiver de la mme anne, il se rend Moscou et Kazan, o il retrouve son ami le rvolutionnaire

    Alexandre Mikhailovitch Zavadsky, devenu professeur

    agrg luniversit. Ensuite il retourne Heidelberg.

    En 1912, se rendant Saint Petersbourg afin de voir sil ne lui serait pas possible de reprendre son travail

    scientifique en Russie, il rencontre le docteur Pavlov qui

    sint ressait de trs prs aux travaux de Tchakhotine sur la microponcture. Cet minent savant lui offrit

    sur-le-champ un poste dassistant au laboratoire de physiologie de lAcadmie des Sciences.

    Juste avant la grande guerre, en voyage Todtmoos

    dans la fort Noire, en compa gnie de Charlotte Weigert

    une Isralite qui, voulant rencontrer Tchakhotine Saint Petersbourg et ne pouvant pas obtenir un visa tant

    donn ses origines juives, stait convertie la foi luthrienne - ils furent surpris par la dclaration de

    guerre, et ne purent quitter Todtmoos temps.

    Aprs bien des pripties, il retourne en Russie, Saint

  • Petersbourg, transform entre-temps en Petrograd.

    En 1915, il crit un article intitul Il est temps de se

    rveiller ! Rveillons-nous qui parait dans le grand

    quotidien Birjeviya Viedomosti, et dans lequel il exhorte

    la jeunesse. Cet article ayant eu un grand cho, il fonde

    avec quelques amis un Bureau dorganisation qui entre en contact avec la Socit Impriale Technique Russe, et

    orga nise avec elle le Comit dAide Technique Militaire des Associations Scientifiques et Techniques Runies

    (KOVOTEP).

    Trs rapidement, ce Comit devint la troisime grande

    organisation publique en Russie, ct du Comit de la

    Production industrielle Militaire et du Zemgor (Comit

    des organisations rurales et municipales runies), et il

    joua un rle considrable dans la rvolution de 1917. En

    effet, cest ce comit qui organisa les premires polices rvolutionnaires.

    Install lInstitut Mariinsky ( lpoque du F Kerensky), le Comit se transfor ma en Comit de

    lEducation Sociale et Politique, sous la prsidence dhonneur de la Grand-mre de la Rvolution , la vieille rvolutionnaire Brechko-Brechkovskaya, et

    Tchakhotine forma les Soviets des dlgus des

    Travailleurs intellectuels.

    Entre-temps, Lnine tait revenu en Russie.

    Tchakhotine, membre du parti de Plekhanov, laile extrme-gauche des sociaux-dmocrates, tait trs

    proche des ides de Lnine.

  • Mais les bolcheviks voyant lpoque dans chaque intellectuel un bourgeois et un

    contre-rvolutionnaire , les relations entre le

    gouvernement sovitique et le Soviet des Dputs des

    Travailleurs Intellectuels senvenimrent de plus en plus, au point quen dcembre 1917, lors de la grve des fonctionnaires des institutions gou vernementales

    laquelle le Soviet des Dputs avait pris une part active, la

    police perquisitionna au sige de lorganisation et Tchakhotine fut arrt. Relch, un ordre darrestation fut lanc contre lui au dbut de lanne 1918. Prvenu temps, il senfuit en direction du sud.

    Un gouvernement de l Archigrande Arme du Don ainsi se nommait ltat nouveau de la rgion du Don avait t form Novotcherkassk avec, sa tte, le

    gnral cosaque Krassnoff. Dans ce gouvernement, le

    poste de ministre des affaires trangres avait t confi

    au gnral Bogayevsky qui connaissait Serge Tchakhotine

    et qui, au courant de ses connaissances en langues

    trangres, lui proposa le poste de directeur de

    lInformation dans son ministre.

    A ce poste, des documents secrets lui passaient entre les

    mains et ce fut ainsi quil dcouvrit que Krassnoff faisait des avances aux Allemands qui occupaient alors lUkraine et cherchait obtenir de lAllemagne la reconnaissance de lindpendance du Don et de lui-mme comme Chef-ataman de ltat nouvellement cr. Aussi Tchakhotine, tant contre ce projet, prpara-t-il un

    rapport secret quil transmit au Grand Cercle , le

  • Parlement du Don, accusant Krassnoff de trahison. Mais

    Krassnoff obtint quand mme la majorit au Parlement et

    Tchakhotine dont la tte avait t mise prix partit rapidement pour Ekaterinodar, dans la rgion du

    Kouban, o se trouvait lArme Volontaire dirige par le gnral Alexeieff.

    Arriv destination, il se prsenta au prsident du

    Conseil des Ministres, le gnral Dragomiroff, qui il

    raconta son histoire. Quelques jours plus tard, il tait

    charg dorganiser une section dinformation et de propagande de larme, qui prit le nom dOSVAG (OSV : les premires lettres du mot information en russe, et AG

    : agitation)2.

    La grande guerre touchant sa fin les Allemands abandonnaient lUkraine les flottes allies, aprs avoir forc le passage travers le dtroit des Dardanelles pn

    traient dans la Mer Noire, des missions militaires anglaise

    et franaise arrivrent Ekaterinodar et, ayant visit

    lOSVAG, furent trs surprises de lampleur et des formes de la propagande dveloppe par Tchakhotine lOSVAG reoit le nom de ministre de la Propagande ; elle est

    transfre Rostov et lon place sa tte un trs riche poli ticien cosaque de la rgion, Paramonoff.

    Las des vicissitudes et des dboires vcus en Russie,

    Serge Tchakhotine part en 1919 avec sa famille pour Paris.

    Cest cette poque quil se rendit compte que les intellec-

    2 Information scrit OSVIENOMLENIE ; agitation scrit AGITATSIA.

  • tuels rvolutionnaires et, en particulier, lui-mme, avaient

    emprunt une fausse route, menant, comme il tait

    vident, dans la direction qui tait contraire aux espoirs et

    aux intrts des masses populaires .

    Lui qui allait devenir un spcialiste de la propagande

    politique, avait t manipul par des gens plus forts que

    lui, les vritables inspirateurs de la Rvolution

    bolchevique dont jai parl dans mes prcdents livres. Comme nous allons le voir au fil de cette tude, ce ne sera

    pas la dernire fois que Tchakhotine sera manipul.

    Il prit donc la dcision de reprendre ses travaux

    scientifiques. Le prince Albert de Monaco, lui-mme

    zoologiste, lui offrit alors de travailler dans son Muse

    Ocanographique. Toutefois, Tchakhotine navait pas pour autant abandonn son rve : ldification du socialisme. Bien que stant rendu compte de son erreur, il fit paratre plusieurs articles dans des journaux

    yougoslaves il travaillait alors lInstitut de Zagreb (1921) favorables aux bolcheviques, et il tait membre du Comit directeur du journal Nakanune3.

    A ceux qui le lui reprochaient ou sen tonnaient, il rpondait que la lutte des l ments avancs des

    intellectuels russes, surtout des migrs, contre les

    bolcheviques, soutenus par les masses populaires, non

    seulement tait sans effet, mais tait mme criminelle, car

    3 Nakanune, organe du mouvement des intellectuels qui paraissait Berlin, qui, sans tre communiste, nen soutenait pas moins la cause de la Russie sovitique.

  • elle faisait durer le dsordre et empchait le

    rtablissement rapide des forces conomiques et

    culturelles du pays. Cest dans cet esprit quil publia la brochure A Canossa, qui tait un appel aux intellectuels

    russes.

    Aprs Zagreb, il se rendit en Italie, Gnes, o avait

    lieu la premire Confrence in ternationale laquelle

    prenaient part, pour la premire fois, des dlgus de la

    Russie sovitique. L, il fit la connaissance de

    Tchitchrine, commissaire du Peuple pour les Affaires

    trangres, de Vorosky, de Ioffe, de Litvinov et de

    Krassine qui tait alors directeur de la Reprsentation

    commerciale sovitique Berlin.

    Ce dernier proposa Tchakhotine, spcialis dans

    lorganisation rationnelle, de venir Berlin afin dy faire une enqute sur le travail au sein de cette Reprsentation.

    Dans le mme temps, il faisait paratre Berlin un livre

    ayant pour titre : LOrganisation. Principes et mthodes dans lindustrie, le commerce, ladministration publique et politique, dans lequel il prconisait lide de lorganisation rationnelle du travail, calqu sur le principe de lingnieur amricain Frederick Winslow Taylor, qui avait cr dans lindustrie le mouvement connu sous le nom de taylorisme, ou organisation scienti-

    fique du travail.

    En Union Sovitique, on sintressait de trs prs ce problme et Abram Samolovitch Gallop, chef de

    lINOTORG et ami de Tchakhotine, introduisit son ou vrage en U.R.S.S., o il fut rimprim plusieurs fois.

  • Le Commissaire du Peuple R.X.I. (Inspection Ouvrire

    et Paysanne) lui proposa alors dditer par ses soins un ouvrage de bibliographie europenne des livres sur lor ganisation scientifique du travail, qui servirait de manuel

    en Russie pour ltude de ces questions. Ce qui fut fait rapidement.

    Couronnant son ralliement au nouvel tat, il reoit

    quelque temps aprs, Berlin, de lAmbassade, la citoyennet sovitique.

    Au cours de lautomne 1924, il passe dfinitivement la Reprsentation Commerciale Sovitique et y organise une

    section dorganisation, donne des leons dorganisation scientifique du travail aux employs de cet office et, de ce

    fait, contribuera grande ment la technique

    dorganisation administrative pour les plans quinquennaux. Dans le mme temps, il tait membre de

    la Socit Allemande dOrganisation (G.F.O.). Il dmissionnera quelque temps aprs de la Reprsentation

    Commerciale Sovitique cause du surmenage. Il partit

    dabord en Bavire du Sud, puis retourna Gnes o il reprit ses travaux scientifiques avec son ami le professeur

    Benedicenti.

    En 1930, il reoit une bourse de la Research

    Corporation de New York, afin quil puisse continuer ses recherches en toute tranquillit, et ceci pour trois ans,

    Heidelberg, lInstitut de biologie dpendant de la grande socit allemande, la Kaiser Wilhelm Gesellschaft.

    Au sein de cet Institut, il travailla assidment la

  • constitution de son vaste fichier baptis M. T.

    (Masse-Temps), vritable ordinateur manuel, ce qui le

    place, de ce fait, en tant que lun des prcurseurs dans ce domaine.

    La rputation de sa mthode tait telle que ses

    collgues la baptisrent la machine penser et quelle se rpandit lextrieur de lInstitut. Au point que M. Borntrger, un grand diteur de Berlin, vint Heidelberg

    en 1932 pour conclure un accord afin dditer ce fichier tel quel, cest--dire sous forme de fiches. Il accepta mme la propo sition de Tchakhotine de lditer non seulement en allemand, mais aussi en espranto, langage

    que Tchakhotine jugeait absolument ncessaire pour le

    succs des relations scientifiques internationales et quil enseignait, en dehors de son travail, aux jeunes ouvriers.

    Cest montrer limportance de sa mthode.

    Ce travail, bien que commenc, naboutit jamais, car lanne suivante, Adolf Hitler arrivait au pouvoir et, comme Tchakhotine tait un adversaire du rgime

    national-so cialiste, lditeur se retira.

    Il fait connaissance, la mme anne, du

    social-dmocrate russe Alexandre Mikhailovitch Chiffrine

    qui tait alors rdacteur dans un grand journal de

    Mannheim. La situation politique allemande attirait de

    plus en plus lattention de Tchakhotine, et cest cette poque que lui vint lide de biffer les croix gammes dessines un peu partout en Allemagne. En biffant la

    croix gamme, son ide tait dimplanter dans les cerveaux de ceux qui percevaient visuellement cette

  • nouvelle image (la croix gamme biffe, cest--dire battue, affaiblie) un nouveau rflexe conditionn,

    profitable au parti qui lavait biffe. Convoquant une dizaine de ses jeunes ouvriers esprantistes et des jeunes

    socialistes, il leur remit des btons de craie en leur

    expliquant ce quil attendait deux, en leur recommandant de donner ce trait la forme dune flche, puis, trs vite, de trois flches4.

    A partir de ce moment, aid de Chiffrine, il fit plusieurs

    confrences et se lia troitement avec un jeune dput de

    Darmstadt au Reichstag, le docteur Mierendorff. En 1932,

    ils formaient au sein du parti social-dmocrate une

    organisation para-militaire trs connue, sous le nom

    dEiserne front (Front dAirain) dirige par le social-dmocrate Hltermann, avec lequel Mierendorff

    entretenait de bonnes relations.

    Tout en poursuivant son activit scientifique, il

    continue laborer des plans politiques. Il prpare pour

    le parti tout un programme organique de lutte contre

    Hitler, en proposant une technique nouvelle, fonde sur

    des donnes scientifiques ; il sagis sait de crer chez les masses populaires passives un rflexe conditionn en

    employant des symboles politiques qui ne seraient dans

    ce cas pas autre chose que des excitants conditionnels

    4 Au Rite Ecossais Ancien et Accept, 21e degr (Noachite), lemblme est justement une flche la pointe en bas. Tchakhotine frquentait dj un nombre impressionnant de francs-maons, aussi on peut se poser la question de savoir sil y aurait un rapport. Il aurait t trs simple de lui suggrer le fait.

  • sinspirant des travaux de Pavlov.

    Il russit si bien dans son action que Hltermann le

    nomma chef de propagande du Front dAirain et quil reut le sobriquet de Gbbels rouge. Mais rapidement, il sattira la mfiance de certains chefs du parti qui voyaient dun mauvais il ses pro cds auxquels ils ntaient pas habitus, et qui, rapidement, mirent en avant le fait qutant citoyen sovitique, il faisait laffaire des communistes ; les fonds importants dont disposait

    alors le Front dAirain samenuisrent, ce qui eut pour effet de freiner le dveloppement de la campagne lance

    par Tchakhotine.

    Nanmoins, il ne se tenait pas battu pour autant et,

    lors des lections dans ltat de Hesse, il organisa, en compagnie de Mierendorff, une campagne lectorale

    monstre sous le signe des trois flches. Se fondant sur le

    principe de lefficacit maximum de rflexes conditionns, tablis base de linstinct de lutte, il conut toute la propagande mettre sur pied cette occasion,

    comme devant faire appel cet instinct.

    Ne disposant pas des fonds ncessaires, il avait russi

    financer cette campagne par la vente des insignes aux

    trois flches quon portait la boutonnire. En deux se maines, plus de 50 000 furent vendus Darmstadt, bien

    quil ny eut dans cette ville que 10 000 membres du parti social-dmocrate. Sur ces entrefaites, il fut appel

    Berlin afin dexposer ses ides devant les dirigeants du parti social-dmocrate. L, le parti accepta officiellement

    de prendre pour symbole les trois flches, le cri de

  • ralliement Freiheit (Libert) et le geste du poing lev.

    Il employait les mmes mthodes que son adversaire,

    au point de faire dfiler les membres du Front dAirain en uniforme, marchant au pas cadenc et portant des

    drapeaux flchs, aux sons de marches militaires. Il savait

    tout comme Hitler que la vue des troupes en uniforme marchant au pas et au rythme de la musique,

    avait toujours excit les foules. Il avait donc galement

    introduit cette pratique au Front dAirain.

    Il forma de grandes manifestations-cortges, divises

    en plusieurs groupes qui de vaient avoir les fonctions

    psychiques suivantes :

    1er cortge : Susciter un sentiment dmotion, de compassion et de rvolte. Faire souffrir la foule.

    2e cortge : Provoquer un effet dynamique,

    dexcitation et denthousiasme, dmotion.

    3e cortge : Susciter lironie, la moquerie. Son but tait de donner aux specta teurs un rpit, la

    possibilit de se remettre de lmotion cause par le deuxime cortge.

    4e cortge : Etait consacr lidal et aux rclamations politiques, la fraternit des peuples.

    5e cortge : La victoire, reprsente par de fraches

    et belles jeunes filles.

    6e cortge : Linvitation laction, voter pour le parti. Tchakhotine avait mme prvu, afin de

    sensibiliser encore plus les spectateurs, pour mettre

  • leurs nerfs en dsquilibre et rehausser le degr de

    leur excitation par le bruit, denvoyer un groupe de motocyclistes tourner sans arrt autour du cortge.

    Cette mthode fut donc employe en Hesse et russit,

    puisque son parti gagna largement contre celui dHitler. Mais le gouvernement Hindenburg-von Papen inter dit

    toutes les manifestations en uniforme. Mme des

    dirigeants du propre parti de Tchakhotine, tels Otto Wels

    et Breitscheid, adressrent Hindenburg, le 17 juillet, un

    tlgramme portant leurs signatures et dans lequel ils le

    suppliaient dinterdire les manifestations et le port de luniforme.

    Toujours pas battu pour autant, Tchakhotine organise

    meetings sur meetings. Au cours dun de ceux-ci, il reoit le dput du Labour Party, Ellen Wilkinson, minente

    dirigeante de la Fabian Society.

    Mais le 20 juillet 1932, le ministre social-dmocrate

    Severing, chef de la Bannire du Reich , abandonnait le

    combat et, partir de ce moment, la propagande de

    Tchakhotine tomba petit petit en dsutude. Aux

    lections du 31 juillet, si Hitler ne gagna pas, le parti

    social-dmocrate perdait plus dun million de votes. Tchakhotine se retire nouveau de la scne politique.

    Partant vers la fin de lt 1932 pour Rome afin dassister au Congrs internatio nal de physiologie, il rencontre son matre penser, Pavlov, qui il raconte son

    essai dappliquer sa doctrine des rflexes conditionns la politique dans sa lutte contre Hitler. De retour en

  • Allemagne, il assiste lavnement au pouvoir dAdolf Hitler. Son domicile et son laboratoire sont

    perquisitionns. Rien nayant t trouv, on le laisse en paix. Quelque temps aprs, il partait pour Gnes, chez son

    ami Benedicenti, et reprend ses travaux scientifiques.

    A nouveau de retour Heidelberg, il ny reste pas longtemps, le prsident de lInstitut linvitant quitter rapidement celui-ci, tant donn quil stait ml de la politique allemande malgr sa nationalit trangre.

    Dcidant alors de quitter lAllemagne, il se rend au Danemark, Copenhague, o il est accueilli par son amie

    Charlotte Weigert. Cette dernire tait trs amie avec

    Mme Xenia Jacobsen, veuve du propritaire de la fameuse

    brasserie Carlsberg, qui hbergea Tchakhotine dans sa

    proprit portant, fort curieusement, le nom de Svastika

    Il trouva galement du travail lInstitut de Pathologie Gnrale de luniversit de Copenhague, dirige par le professeur Oluf Thomsen, un autre grand ami de

    Charlotte Weigert. Cest l quil fit la connaissance du grand physicien atomiste, le professeur Niels Bohr.

    Entre-temps, le virus de la politique le reprenant, il se mit

    crire des articles dans les journaux danois et prit

    contact avec les principaux leaders du parti

    social-dmocrate.

    Entre-temps, son amie Charlotte Weigert, qui le suivra

    tout au long de ses prigrinations davant-guerre, tait devenue une anthroposophe convaincue, cest--dire une adepte des ides de Rudolph Steiner. Ce dernier

    (1861-1925), avait t le secrtaire de la Socit

  • Thosophique Berlin et tait trs li avec le docteur

    Hubbe Schleiden, secr taire gnral de la Socit

    Thosophique dAllemagne et prsident de plusieurs socits secrtes allemandes telles que les Templiers

    Noirs ou lOrdre rosicrucien. Dautre part, Steiner tait en contact troit avec la Golden Dawn et lOrdo Templi Orientis (O.T.O.).

    Au dbut, Tchakhotine resta totalement tranger

    cette doctrine cause de son mysticisme et de sa

    philosophie pseudo-scientifique. Mais, press par son

    amie, il aborda la lecture des uvres de Steiner, sintressa leurythmie, Expression plastique de la mentalit anthroposophe, et crivit quelques vers sur ce

    thme. Cest dailleurs en prenant des leons deurythmie quil fit la connaissance de Tatiana Dimitrievna Semionova dont le mari travaillait Nakanune lve passionne du fameux mage Gurdjiev.

    Ayant appris quEinstein quil connaissait bien avait quitt lAllemagne et se trouvait aux Pays-Bas, il prit immdiatement lavion pour le rencontrer. Mais Einstein avait quitt ce pays pour la Belgique et rsidait

    Coq-sur-Mer. Il sy rendit aussitt pour apprendre quentre-temps, le savant tait parti pour Londres. Ayant obtenu un visa britannique Bruxelles, il finit par

    rencontrer Einstein. De retour Copenhague, il se

    replonge dans la politique et entretient une

    correspondance avec Henri Barbusse, ce qui lui permet

    de se tenir au courant des tendances politiques dans les

    milieux intellectuels franais.

  • Tchakhotine mena une propagande intensive au sein

    des Jeunesses socialistes da noises, qui adoptrent le

    symbole des trois flches. Il crivit et publia un livre en

    danois Trepil mod Hagekors (Les trois flches contre la

    croix gamme) qui souleva lenthou siasme parmi les jeunes, mais lui attira lhostilit des milieux dirigeants du parti ; en effet, dans son ouvrage, il critiquait

    ouvertement leurs collgues allemands avec les quels ils

    avaient beaucoup en commun.

    Nayant plus la possibilit politique dentreprendre ce quil avait envie de faire au Danemark, il dcide de partir pour la France. Faisant tout dabord un voyage de recon naissance, il sarrte tout dabord Londres o il rend visite Ellen Wilkinson, de la Fabian Society, puis

    Bruxelles, o il rencontre le synarque belge Henri de

    Man, alors vice-prsident du Parti socialiste, et Paul

    Odet, de lU.A.I.5

    Arriv Paris (1934), il se lie avec Marceau Pivert et

    Zyromski de la S.F.I.O. et, suivant leur conseil, il fait une

    confrence lAssociation des Jeunesses Socialistes qui, emballs, adoptrent immdiatement le symbole des trois

    flches.

    Cest la mme poque quil reoit une invitation de Stafford Cripps, dirigeant de la Fabian Society et proche

    de la Pilgrims, qui le prie de venir faire une confrence

    sur ses ides et ses mthodes de combat devant les

    lments du Labour Party. Cette confrence naura pas

    5 Voir La Trilatrale et les Secrets du Mondialisme.

  • lieu, Tchakhotine nayant jamais russi obtenir un visa.

    Entre-temps, il se rend Bruxelles, o il prend la parole

    devant les membres de lU.S.A.F., les jeunesses socialistes belges. De retour en France, il se lie avec le dput radical

    Gaston Bergery qui publiait le journal La Flche et dont le

    mouvement Front Commun avait adopt lune des trois flches du Front dAirain6.

    Revenu Copenhague, il prpara son dmnagement

    Paris o, de retour, il retrouve des amis denfance, George Zousmann, le docteur Popovsky, le docteur Likhnitzky et

    le violoncelliste Bogroff. Quarante annes auparavant, ils

    avaient fond LAmicale des Cinq au gymnase dOdessa.

    Avec bien des difficults, il sinstalle au laboratoire dvolution de la Sorbonne grce au professeur Maurice Caullery, qui essaya mme de lui faire obtenir, sans

    6 La S.F.I.O.. utilisera comme symbole pour sa propagande politique trois flches parallles diriges vers le bas et inclines vers la gauche. Avec la disparition de la S.F.I.O., les trois flches furent, elles aussi, abandonnes. Le nouveau Parti socialiste adopta le poing la rose . Cr par la fdration de Paris du Parti socialiste, ce poing brandissant une rose symbolise lnergie, la force, la volont des travailleurs se saisissant du bonheur reprsent par la fragile rose, toute dharmonie et de dlicatesse, Expression vivante de laspiration un monde meilleur. (Le Monde, 20 novembre 1971). Ce qui est plus intressant, cest de savoir qu Indpendamment de son rle dans les divers Rites de Rose-Croix, la Rose est la fois symbole de Beaut et de Secret... Sur un plan plus mystique, la Rose peut tre conue comme le symbole de la Paix et de lIllumination... La fleur quest la rose (rouge) est utilise dans certaines crmonies : adoption, crmonies funbres, initiation mme. (Dictionnaire Universel de la Franc-Maonnerie. Editions du Prisme, 1974.)

  • succs, une bourse auprs de la Fondation Rockefeller.

    Paralllement ses travaux scientifiques, il organisa, la

    demande de Gaston Bergery dont il se sparera quelque temps plus tard des meetings la salle Wagram.

    Au dbut de lanne 1935, Caullery lui procura des fonds de lAcadmie des Sciences afin que Tchakhotine puisse poursuivre ses travaux. Se liant avec Jean Nocher,

    lun des fondateurs des groupes J.E.U.N.E.S. Jeunes Equipes Unies pour la Nouvelle conomie Sociale , ce dernier y donne plusieurs confrences et prend une part

    active lorga nisation des Jeunesses Socialistes et la Fdration de la Seine du Parti S.F.I.O., o Marceau

    Pivert fut lu secrtaire gnral. Au sein de cette dernire,

    Tchakhotine fit un cours de propagande, dirig par

    lavocat Andr Weil-Curiel.

    Dans Les Militants, Raymond Abellio crit :

    Sous linfluence dun certain Serge Tchakhotine, que Marceau Pivert avait pr sent la Gauche

    rvolutionnaire sous le pseudonyme de professeur

    Flamm (en ralit docteur Flamme. NDLR) et qui

    devait publier plus tard, en 1939, un ouvrage vite clbre :

    Le Viol des Foules par la propagande politique, la

    Gauche rvolutionnaire, ses dbuts, sappliquait tirer quelque leon des mthodes de la propagande fasciste,

    notamment pour la mise en scne des runions, les

    uniformes, les chants rgls et les symboles... Pour barrer

    sur les murs la croix gamme des nazis, Tchakhotine avait

    in vent le fameux trident flches obliques dont la

  • social-dmocratie allemande, daprs lui, navait pas su se servir. Le mouvement des jeunesses socialistes de la

    Drme, qui ne tarda pas grouper deux bonnes centaines

    dadhrents, tint ses premiers succs ces nouveauts. Sa prsentation au public, la salle des ftes de Valence,

    avec une trentaine de jeunes en chemise bleue frappe de

    lcusson aux trois flches rouges et chantant sur la scne lhymne de La Jeune Garde, suscita dans lassistance une motion qui se libra dans un soudain enthousiasme. A la

    fin du premier couplet, spontan ment, les quinze cents

    auditeurs se levrent, le poing dress, et reprirent en

    chur le refrain. 7

    En 1937, participant au Congrs International du

    Cancer Bruxelles, il fait la connaissance du

    physiologiste espagnol Juan Negrin, qui devait devenir

    ministre-prsident de lEspagne rpublicaine 8 . Au moment de la guerre dEspagne, il fait la connaissance du

    7 Les Militants, Raymond Abellio, Gallimard 1975, pp. 253-254. Note : Jean Zyromski, ami de Tchakhotine, tait ancien dirigeant de la S.F.i.O., membre du comit de patronage de la revue marxiste Cahiers Internationaux et tait au Parti socialiste Ouvrier et Paysan. (P.S.O.P..), avec Andr Weil-Curiel et Georges Soules (Raymond Abellio), futur secrtaire gnral du Mouvement Social Rvolutionnaire (M.S.R.) dEugne Deloncle. Jean Zyromski ami de Raymond Abellio et qui mourut dans les prisons de lpuration , tait en fait un bolchevik qui ne militait quen vue du rtablissement de lunit ouvrire rompue en dcembre 1920 au Congrs de Tours. Sa violence la tribune allait du martlement saccad la frnsie hurlante coupe dtranglement (Les Militants, p. 91). Voir en annexe I, la reproduction de la lettre de Tchakhotine Zyromski date du 29 juin 1934. 8 Negrin tait mari une Russe ; il parlait cette langue et allait trs souvent Moscou o ses enfants taient lcole.

  • professeur Albert Bayet, lun des dirigeants les plus actifs du Comit de Vigilance antifasciste, de Pierre Cot, alors

    ministre de lAviation, et mme de Maurice Thorez, chef du Parti communiste, auquel il exposa ses ides sur la

    propagande et les mthodes dutilisation de cette nouvelle faon dagir. Il rencontra galement Frdric Joliot-Curie, qui appartenait laile gauche du Parti socialiste et qui avait beaucoup de sympathie pour la Russie sovitique,

    ainsi quHenri Sellier, ministre de la Sant publique, qui entretenait de bonnes relations avec les milieux

    communistes. Il est aussi en relations avec lconomiste Jacques Duboin, fondateur du Mouvement Franais de

    lAbondance (M. F. A.).

    Lanne 1937 fut galement celle de lExposition Universelle. Pendant lexposition, eurent lieu Paris une srie de congrs auxquels Tchakhotine prit une part

    active. Le premier fut le Congrs Esprantiste, puis celui

    du R. U. P. Rassemblement Universel pour la Paix dont le prsident, pour la France, tait un ami de

    Tchakhotine, le profes seur Langevin. Il participe

    galement au Congrs International de la

    Documentation, prsid par Paul Otlet, fondateur

    Bruxelles du Palais Mondial, et o il rencontre H. G.

    Wells.

    Paralllement, Tchakhotine mne son travail

    scientifique dans deux directions : au laboratoire du

    professeur Caullery, sur les problmes de la cytologie

    exprimentale, et lInstitut Prophylactique du docteur Arthur Vernes, sur le problme du cancer.

  • A lautomne 1937, se tient un fait trs important dans la vie de Serge Tchakhotine. Lors dune confrence organise par le Centre dOrganisation Scientifique du Travail.

    (C. O. S. T.), il fait la connaissance de Jean Coutrot,

    patron du trs secret Mouvement Synarchique dEmpire (M. S. E.). En compagnie des conomistes les frres

    Guillaume, Coutrot tait linitiateur et la cheville ouvrire du Centre dtudes des Problmes Humains (C. E. P. H.), association dintellectuels qui se runissaient deux fois lan aux alentours de Paris, la vieille abbaye de Pontigny, endroit o Tchakhotine fit plusieurs

    confrences.

    Les frres Guillaume, qui avaient entrepris une srie de

    travaux sur lconom trie, taient des adeptes de lide de lHumanisme conomique et publiaient une revue du mme nom. Dans le cadre de la commission

    psycho-biologique du C. E. P. H., Tchakhotine fit des

    confrences sur la doctrine de Pavlov propos des

    rflexes conditionns et sur le viol psychique des masses

    en politique, ainsi que sur lemploi des m thodes rationnelles dans lactivit scientifique, et notamment dans lactivit cratrice.

    Dtail de grande importance : peu de temps avant la

    seconde guerre mondiale, ce furent Coutrot et des

    membres du C. E. P. H. qui incitrent Tchakhotine

    crire un ou vrage relatif ses ides se rapportant aux

    liens de la politique et de la science. Termin, cet ouvrage

    sintitulera Le Viol des Foules par la propagande

  • politique. Lors dune confrence du C. E. P. H., labbaye de Pontigny, o il fit un expos sur les vnements qui

    prcdrent la capitulation de Munich, il fait la

    connaissance du docteur Arthus qui lui propose de

    donner une srie de leons lInstitut de Psychologie Applique (T. P. S. A.) quil venait de crer. Il y fait galement la connaissance du docteur Martiny qui visita

    le laboratoire de Tchakhotine en compagnie du docteur

    Mondain, directeur du grand hpital Leopold-Bellan, o.

    Martiny travaillait. Mondain lui propose alors de

    transfrer ses travaux lhpital Hellen, o il met un laboratoire sa disposition.

    Nous verrons plus loin que tous ces dtails ont une

    grande importance.

    Dans le mme temps, il se met travailler intensment

    son livre sur la violence psychique exerce sur les

    masses par la propagande politique et, grce son fichier

    Masse-Temps il put terminer son livre vers la fin de

    lanne 1938.

    Sur les conseils de Coutrot et du C. E. P. H., il propose

    son manuscrit la maison Gallimard qui accepte de

    lditer aprs que lcrivain Jean Paulhan, ayant lu le manus crit, et donn un avis trs favorable. La maison

    Gallimard mit comme condition son dition une

    certaine rvision, en insistant sur la ncessit dliminer quelques Expressions qui lui paraissaient trop crues.

    Tchakhotine refusa. Mais, press par ses amis du C. E. P.

    H., il donna son consentement une certaine rvision du

    texte qui se fit en collaboration avec lcrivain Robert

  • Aron. Cest dailleurs Aron qui trouva le titre final.

    Le professeur Langevin, communiste notoire et qui

    sympathisait avec les ides de Tchakhotine, lui promit

    une prface pour Le Viol des Foules. Mais lditeur, prenant en considration lopinion publique, apprhendait que le nom de Langevin pt confrer au

    livre une couleur politique trop prononce... Langevin

    lui-mme tomba daccord avec ce raisonnement et Tchakhotine dut renoncer sa prface.

    Il fait alors connaissance avec lcrivain et psychanalyste franco-russe Monod-Herzen, petit-fils

    dAlexandre Herzen, crivain et critique politique russe ; du psychologue et propagandiste amricain Leites, quil avait en fait connu Berlin en 1932, ainsi que de lancien ministre catalan de la propagande rpublicaine,

    Miretvilles.

    Tout nallait pas bien pour autant... En effet, recevant lexemplaire pagin du Viol des Foules, Tchakhotine trouve curieux quil ne soit pas accompagn des preuves pr cdentes et commence donc comparer, grce une

    copie quil avait garde, cette copie pagine avec son manuscrit. Il dcouvrit ainsi que son livre avait t

    censur.

    Des phrases entires et des mots isols avaient t

    supprims et dautres changs. On avait plus prcisment enlev ce qui pouvait paratre dsagrable aux yeux de la

    politique nationale socialiste allemande et fasciste

    italienne, ainsi que les donnes par trop positives au sujet

  • de la Russie sovitique.

    Cette censure avait t opre pour des raisons

    diplomatiques. En effet, le ministre des Affaires

    trangres, Georges Bonnet9, ayant eu vent quun ouvrage sur ce su jet devait paratre chez Gallimard, en rclama

    les preuves et les soumit la censure le plus simplement

    du monde. Monod conseilla Tchakhotine de sadresser Me Amde Dunand, menaant ainsi Gallimard dun procs retentissant. Le reprsentant de Gallimard, Me

    Garon, jugea plus prudent de reconnatre le bon droit de

    Tchakhotine et tout rentra dans lordre.

    Mais indirectement, le but du ministre des Affaires

    trangres tait atteint. Cette affaire avait

    considrablement retard la sortie de louvrage, et ce nest que le 20 juillet 1939 un mois et demi avant la guerre quil parut.

    Dans ce livre, le professeur Tchakhotine dmontre

    dune faon magistrale quen jouant consciemment ou non sur les instincts de conservation comme de reproduc

    tion de lhomme noy au sein de la foule, on peut obtenir de la foule elle-mme et mme des masses humaines en gnral toutes les ractions que lon dsire pourvu que le sujet soit convenablement hypnotis, et que ses

    impulsions soient guides dans le sens qui convient le

    9 La raison en tait fort simple : le 6 dcembre 1938, Georges Bonnet avait sign un acte de bon voisinage avec von Ribbentrop. Le soir, il y eut, au Quai dOrsay, un dner o tait prsent Daniel Serruys, synarque fide-commissaire de la Banque Lazard Frres. Nous aurons loccasion de reparler de cet individu.

  • mieux son niveau intellectuel, social, physique, etc.

    Cest ce quil appelle Le viol psychique des masses par la propagande politique .

    Bien qucrit par un homme qui prit une part active la Rvolution russe 10, cet ouvrage et lon sen doute tant donn le sujet , est totalement interdit en U.R.S.S.

    Un exemplaire se trouve la bibliothque Lnine. Il a

    t traduit en russe, mais nest communiqu qu des citoyens ayant toutes les qualits requises pour se

    servir du contenu qui est, notre avis, une petite bombe

    retardement...

    Cest ainsi quon peut lire la page 47 de son livre Le Viol des Foules dans le chapitre sur la psycho-physiologie compare qu en U.R.S.S., on a procd une extension des recherches sur les rflexes

    conditionns, en crant des laboratoires spciaux pour

    ltude de la physiologie compare du systme nerveux... et, la page 124 chapitre sur la rflexologie et pdagogie qu on peut entrevoir des rapports trs nets entre lducation, dune part, et la propagande et la publicit, de lautre, car lune et lautre cherchent agir sur les mmes mcanismes essentiels de lhomme et former des rflexes conditionns appropris .

    Tchakhotine crivait galement que lignorance est donc le meilleur milieu pour former des masses se

    prtant facilement la suggestion. On la toujours su

    10 Le Monde, 5 janvier 1974.

  • mais, grce Pavlov, on est en tat aujourdhui de comprendre la raison physiologique de ce fait capital

    dans le domaine social et politique . (p. 45.)

    En clair, ceci revient dire quun petit groupe aura la haute main, par le systme de la manipulation psychique,

    sur la masse. H. G. Wells, grand admirateur des ides de

    Tchakhotine, disait lui-mme que, pour conduire les

    masses populaires sur cette voie (le socialisme visage

    humain !), cela ne pourra tre que luvre en premier lieu dun Ordre dhommes et de femmes, anims dun esprit combatif, religieusement dvous lide, qui sefforceront dtablir et dimposer une nouvelle forme de vie lespce humaine 11.

    Cette mthode de viol psychique est relativement

    au point puisquil est prouv, la suite des recherches statistiques de ces dernires annes, quet peine 10 % des individus sont capables de rsister la technique de la

    propagande affective se fondant sur les lois des rflexes

    conditionns, les 90 % succombant automatiquement au

    viol psychique.

    Tchakhotine explique dailleurs fort bien le pourquoi de cette emprise. Il dit en effet que la diffrence

    indiscutable que lon constate entre les hommes est due ce que les hommes nont pas tous la mme histoire

    11 The Shape of Things to Come (The Ultimate Revolution), 1933. Hutchinson. London. Il est. curieux de constater que dans le Pacte Synarchique dEmpire, la proposition 255 tait ainsi libelle : La rvolution prventive doit donc tre installe au cur de ltat et servie par une lite synarchiste dans un plein esprit de sacrifice.

  • individuelle : les uns, plus favoriss par le destin, ont pu

    sapproprier des connaissances et exercer leurs mcanismes psychiques leur garantissant la facult de

    discerner, de se dfendre contre le viol psychique, les

    autres la majorit plus primaires cause de leur ducation, domins par les n cessits de la lutte pour

    lexistence et les conditions sociales de leur vie qui forgent leur psychisme, deviennent facilement la proie

    des machinations des aventuriers et des usurpateurs, et

    sont incapables de leur rsister, mme si leurs intrts

    immdiats et vitaux sy opposent.

    Ce phnomne est facilit par le fait biologique et

    psychologique, mis en vidence par J. Monnerot12, que

    "des individus, rduits une vie animalement prive,

    adhrent ce qui dgage une certaine chaleur humaine,

    cest--dire ce qui a group dj beau coup dindividus. Ils ressentent lattraction sociale dune manire directe et brutale" (pp. 540-550).

    Ceci expliquant cela, on comprend un peu mieux

    maintenant le rle trs impor tant jou par les grandes

    coles comme Polytechnique, Harvard, Oxford, les

    Rhodes Scholars, le Ruskin College, la London School of

    Economics, lE.HA., etc., au sein des quelles on forme les 10 % chargs ou qui seront chargs de manipuler et de contrler les 90 % ou masse , bien queux-mmes soient, leur tour, manipuls par le fameux 1 % qui a

    12 Sociologie du Communisme, par J. Monnerot, 1949. Gallimard, cit par J.-M. Dome nach, La propagande politique, 1950. P.U.F. Srie Que sais-je ? n 448, p.

  • pratiquement la haute main sur toutes les donnes

    mondiales et que jai tudi dans mes trois premiers livres.

    Cela explique galement la multiplication et le rle

    important des partis politiques et des syndicats qui,

    crant les antagonismes et les conflits do rsultent batailles striles, grves stupides et chmage, font que ces

    90 % sont perptuellement en lutte pour leur existence et

    leur condition sociale, problmes qui, les affaiblissant

    moralement et physiquement, en font des proies toutes

    rves pour les machinations politiques en tout genre...

    A titre dexemple de viol psychique des foules hors du commun : lAffaire de latten tat de la rue Copernic, en octobre 1980, o une bombe explosa la hauteur dune synagogue...

    En moins de temps quil nen faut pour le dire, la presse, la tlvision, la radio, les syndicats et les partis,

    tous ventails politiques dploys, de la gauche la

    droite, mus par on ne sait quel mystrieux ressort, se sont

    mis immdiatement hurler au nazisme, au fascisme et,

    bien entendu, lantismitisme. Cet attentat ne pouvait tre et sur tout ne devait tre aux yeux du grand public, que loeuvre de la bte nazie ressus cite , dignobles mules dAdolf Hitler, bref de sales antismites...

    Rsultat psychique, ds le lendemain, toutes les

    organisations politiques, syndicales et, bien entendu,

    juives, appelrent une grande manifestation unitaire

  • contre lanti smitisme et le nazisme. Et, naturellement, tout ce beau monde descendit dans la rue, bras dessus

    bras dessous ; ctait celui qui ferait (parmi les hommes politiques) la dclaration la plus tonitruante contre

    lantismitisme et le nazisme ; des violences et des exactions furent commises sur des individus, sur le

    simple prtexte quils taient habills de telle ou telle faon... et tout cela sans que personne ne chercht

    vrifier, rflchir, tant donn quaucune enqute policire navait encore pu tre mene A son terme.

    Quelques jours aprs, on apprenait quen fin de compte, on ne savait pas trs bien qui avait fait le coup

    (formule consacre). En effet, lenqute sorientait dabord vers les milieux chypriotes, puis arabes, certains allant mme sans recevoir de dmen tis jusqu crire que ce serait le MOSSAD, cest--dire les services secrets israliens, qui auraient fait le coup afin de

    resserrer les liens de la communaut juive13. En tout cas,

    quoi quil en soit, plus question de piste nazie ou antismite, puisque, en date du octobre 1981, Henri

    Hajdenberg, responsable du Renouveau Juif, interview

    par Radio J. la radio libre de la communaut juive dclarait, la mort dans lme (on le comprend) : Eh bien, aujourdhui, malheureusement, on peut considrer

    13 Le Monde, du 15 novembre 1980, titrant La section franaise du congrs mondial juif prpare l "aprs-Copernic" crivait : La plupart des dirigeants de la communaut estiment, en effet, quIl y aura un "aprs-Copernic" marqu par un renforcement de lidentit juive sous forme, notamment, dun effort accru pour dvelopper la culture et lducation juives.

  • quil y a malheureusement toutes les conditions qui font que cest certainement un attentat dorigine pro-arabe, pro-palestinienne. Je crois quon (qui, on ?) a t tromp en attribuant cet attentat des extrmistes de

    droite.... (Rappelons que cest un avocat qui parle)

    Ceci revient dire quil a fallu qu ON , lance par lintermdiaire des mdias les mots-cls psychologiquement que sont nazisme antismitisme

    , extrme-droite ou fascisme , pour que 90 % des

    individus descendent dans la rue, sans rflchir, viols

    psychiquement...

    Et quand je dis 90 %, il ne faut pas oublier que parmi

    ceux-ci, il y avait un nombre apprciable de membres

    faisant partie des 10 % reprsentant les partis politiques

    qui, selon Tchakhotine, sont mme de sapproprier des connaissances et dexercer leurs mcanismes psychiques leur garantissant la facult de discerner, de se

    dfendre contre le viol psychique.

    Quelles connaissances ? Quelle facult de discerner ?

    tant donn que ces 10 % consciemment ou non sont eux-mmes contrls par le 1 % ou ON qui fait, lui, rellement la pluie et le beau temps suivant ses intrts.

    Cest ce 1 % qui orga nise scientifiquement et sur des bases biologiques, appropries chaque catgorie, le Viol

    mondial des foules par la propagande politique afin

    dinstaurer un Gouvernement Mondial dont il sera le matre.

    Ce problme de psychisme, ou de psychologie, est

  • tellement important de nos jours, quaux tats-Unis, par exemple, le budget du Dpartement de la Dfense aux

    recherches en psychologie est pass de 63,5 millions 105

    millions de dollars, et celui de la National Science

    Foundation, dans le mme domaine, est pass de 8,6

    13,4 mil lions de dollars !

    Cependant, une chose est sre. Tchakhotine, ne

    serait-ce quen soutenant le prin cipe de la Rvolution bolchevique, sest fait violer psychiquement par une propagande organise et soutenue par des gens beaucoup

    plus experts que lui en la matire. Si son livre est

    aujourdhui quasiment introuvable, cest peut-tre parce quil a mis tout cela par crit et quil dmontre comment cela fonctionne.

    Mais, aprs tout, il nest pas impossible que je me fasse violer psychiquement en vous racontant tout cela !

    Autre point important, son ouvrage est ddi non

    seulement Pavlov, mais ga lement mon grand ami

    H. G. Wells . Or, Wells tait lami et le collaborateur de W. Stead, lun des fondateurs de la Round Table, et organisa avec lui le ministre de la Propagande de guerre

    lors de la guerre 1914-1918. Dautre part, H. G. Wells, so cialiste mondialisant, inventeur du New World Order

    et membre important de la Fabian Society, appartenait,

    ds 1924, la Society for Cultural Relations between the

    Peoples of the British Commonwealth and the Union of

    Socialist Soviet Republics, et fut co-fondateur, quelques

    annes plus tard, du Realist Magazine avec George Catlin

    (C.F.R., Pilgrims, Pugwash) qui, comme par hasard, tait

  • lassoci de Clarence Streit (Rhodes Scholar, C.F.R., Federal Union), membre tout comme Catlin dailleurs de la Fondation Rockefeller et fondateur de lAtlantic Union, do sortira le Mouvement Atlantique et, par la suite, tous les drivs que nous avons tudis dans La

    Trilatrale et les Secrets du Mondialisme14.

    H. G. Wells, faisant une critique du Viol des Foules,

    crivait que cet ouvrage est le plus lumineux et complet

    expos de la psychologie sociale contemporaine. Ce livre

    traite le sujet de tous les cts et fond. Il analyse le

    processus historique la lumire dune critique des plus modernes, et le diagnostic des vnements que nous

    vivons le mne ltablissement convaincant des mesures prendre. Je suis fier daffirmer combien je suis en accord avec les ides exposes dans ce livre aussi

    magistral que moderne.

    Or, lune des mesures et des ides matresses de louvrage de Tchakhotine tait jus tement une ide chre Wells : un tat Fdral Mondial auquel Tchakhotine

    avait tellement bien pens, quil donne la page 505 de son livre un schma de ce quil sera.

    Le voici :

    14 Daprs louvrage de Jean-Michel Angebert Les Mystiques du Soleil, publi en 1971 chez Robert Laffont collection Les Enigmes de lUnivers H. G. Wells aurait t membre de la Golden Dawn, socit secrte rattache la Loge du Vril (p. 340).

  • Dautre part, nous verrons plus loin ltrange similitude de date Tchakhotine a dress ces plans avant-guerre et en prvoyait laboutissement en 1950 entre ce projet et le groupe secret France 1950 de Francis Hekking, lun des plus importants synarques.

    Mais revenons Tchakhotine. La seconde guerre

    mondiale commence, les dif ficults surgissent. Il

    rencontre au Rockefeller Center lun de ses amis de lpoque de Gnes et dHeidelberg, le docteur OBrien, qui lui promet dessayer de lui procurer un visa et les moyens pour aller aux tats-Unis, au Rockefeller Institute.

    Cette dmarche naboutira pas et, le destin faisant bien les choses, cest ce moment quil fait la connaissance, par lintermdiaire du thosophe Monod-Herzen, du professeur Girard, directeur de lInstitut de biologie physico-chimique. Entre-temps, la vente de son livre est

    interdite. Mais, bien quadversaire dclar du IIIe Reich, il ne sera arrt quen 1941 en tant que ressortissant sovitique, lors de la dclaration de guerre de lAllemagne lU.R.S.S.

    Emmen au Fort de Romainville, le lendemain, il est

    transfr Drancy, puis au camp de

    Compigne-Royallieu. L, il se lie avec les avocats juifs

    communistes, Pittard, Hajje et Michel Rolnikas15 et fait la

    15 Michel Rolnikas fut lorganisateur de lactivit culturelle durant de nombreuses annes, avant la guerre, dans les organisations juives (p. 55). Crateur dun Comit dintellectuels juifs qui sassociera lorganisation juive de rsistance Solidarit, il dirigera la Ligue Culturelle et sera professeur au Sminaire marxiste-leniniste juif de

  • connaissance dun Amricain trs mystrieux, le docteur Morris B. Sanders qui devait, par la suite, jouer un rle

    important S.A.L. et COFORCES et qui sera libr trs

    rapidement16. Tchakhotine, quant lui, sera libr le 23

    janvier 1942 ; il retournera vivre Paris o il se remettra

    travailler avec bien des difficults tant donn lpoque avec Sanders17.

    Ce dernier, qui avait beaucoup de relations dans

    lentourage dAlexis Carrel, vint plusieurs reprises chez Tchakhotine, avec des gens de Carrel, afin dtudier son fameux fichier Masse-Temps. Il est bon de faire

    remarquer qu cette poque, les ides de Carrel concidaient, dans les grandes lignes, avec les propres

    intentions de Tchakhotine et dH. G. Wells.

    Cest cette poque que Sanders joua un rle des plus tranges ct de Tchakhotine.

    Le docteur M.B. Sanders tait effectivement un curieux

    personnage. Il tait, de faon peu prs certaine, membre

    Paris. Arrt avec le groupe davocats, Pittard, Hajje, cra au camp de Royallieu une organisation de solidarit qui aida puissamment les interns subsister. (p. 208) in Les Juifs dans la Rsistance franaise, 1940-1944, par David Diamant, Le Pavillon, Roger Maria diteur, 1971. 16 Le Dr Sanders disparatra compltement de la circulation lpoque de la guerre de Core. 17 Il fut libr de Compigne car, parat-il, les Allemands ignoraient que Tchakhotine tait : 1) lun des dirigeants du Front dAirain ; 2) lauteur du Viol des Foules. Ce qui est tout de mme assez curieux, tant donn que les Services de Scurit allemands passaient pour les mieux organiss et les mieux renseigns.

  • des services de renseignements amricains (O.S.S.). Il

    tait dailleurs en troit rapport avec Jrome S. Bruner, directeur des Services Gnraux Service Information des tats-Unis et avec Marguerite L. Richards, du mme service, et quil mit en rapport avec Tchakhotine.

    Effectuant un voyage de travail aux tats-Unis en 1945,

    Sanders rencontre Vannevar Bush, directeur de lOffice of Scientific Research and Development, pendant la guerre,

    et inventeur dune intricate Calculating machine . Ce dernier, impressionn par la similarit de la conception

    de lorganisation entre Tchakhotine et lui, propose imm diatement dans la revue The Scientist Looks at

    Tomorrow dirige par M. Weeks, directeur de la revue Atlantic Monthly un article dans lequel il met laccent sur les extraordinaires possibilits qui souvriraient si lon mcanisait le fichier Masse-Temps de Tchakhotine.

    Il est un fait que, face aux mthodes amricaines,

    Tchakhotine travaillait de faon artisanale. Mais son

    systme M. T. tait rvolutionnaire : ctait, comme je lai dj indiqu, un systme ordinateur manuel. Sanders qui avait dcidment beaucoup de relations et, de ce fait, on peut se demander ce quil faisait auprs de Tchakhotine si ce nest de le surveiller et de noter ses ides pour sen servir , sentretint mme avec le docteur Gregg, de la Rockefeller Foundation, du fichier M. T. .

    Ds le dbut de S.A.L., le professeur Bruner vint voir

    Tchakhotine et lui demanda de recopier tous les schmas

    graphiques du systme dorganisation de son fichier M. T. , et lui annona que Le Viol des Foules avait t

  • traduit en amricain et tait devenu un livre dtude dans la section de Relations humaines Princeton.

    Quelque temps aprs, ctait le docteur OBrien de lInstitut Rockefeller qui, aprs avoir rendu visite H. G. Wells, lui rendait visite afin de se documenter

    Au cours de ce mme voyage, Sanders contacta M.

    Waldemar Kaempffert, directeur du dpartement

    Sciences au New York Times et auteur de Science Today

    and Tomorrow, et le mit en rapport avec Tchakhotine ; et

    le professeur Clyde Miller, fon dateur de lInstitute for Propaganda Analysis and Associate Professor

    luniversit de Columbia, prside par son ami Nicholas Murray Butler, directeur de la Carnegie Endowment for

    International Peace et de la Pilgrims Society.

    Sanders, qui tait membre du Conseil des directeurs de

    la Carnegie Endowment, avait t rendre visite, ds le

    dbut, son patron, Malcolm Davis, alors directeur euro

    pen de la Carnegie Endowment et membre du C.F.R.,

    afin de lui parler des ides et du travail de Tchakhotine.

    Sur ce, Davis donne pour directive Sanders de faire

    contacter Tchakhotine par un expert, en loccurrence le professeur Miller.

    Sanders rencontra galement Bill Cunningham, du

    Boston Herald, intress par S.A.L. et qui le mit en

    rapport avec Thomas H. Mahony, un homme de loi de

    Boston, directeur du Massachusetts Federation for

    World Peace et qui fut lun des chefs de la Confrence de Dublin en octobre 1945. A son tour, Sanders mit

    Tchakhotine en rapport avec Mahony. Or, dans le mme

  • temps, Thomas Mahony tait le prsident de la Catholic

    Association for International Peace, et membre du

    comit excutif de lUnited World Federalist, dont les administrateurs et patrons ntaient autres quAl bert Einstein, ami de Tchakhotine, Cord Meyer, Jr., du C.F.R.

    (qui deviendra par la suite lun des directeurs de la C.I.A.), Edwar M. M. Warburg, banquier et prsident de

    lAme rican Jewish Joint Distribution Committee, Norman Cousins, Cass Canfield, prsident de Harper &

    Bros de New York, et Grenville Clark tous trois du C.F.R. W. T. Holding, prsident de la Standard Oil

    Company des Rockefeller, Charles G. Bolte, de lAmeri can Veterans Committee et Rhodes Scholar, Arthur H. Bunker, partenaire de Lehman Brothers et Charles D.

    Hilles, Jr., vice-prsident d I.T.T.

    LUnited World Federalist, avec lequel Tchakhotine tait en relations, lui demandait, en date du 23 octobre

    1945, sous la signature de Lewis H. Larson, Jr., prsident

    de la division internationale de luniversit du Minnesota, de lUnited World Federalists, de leur communiquer si possible, les noms des tudiants et des professeurs duni versits et dcoles secondaires, ainsi que les noms et adresses des groupes politiques dtudiants qui seraient ventuellement intresss par laction en vue de ltablisse ment dun Gouvernement mondial.

    Toujours la mme mthode daction... investir les milieux estudiantins.

    Revenons en France. Cest toujours Sanders qui fait faire connaissance de Franois Perroux Tchakhotine. Ce

  • dtail aura son importance. Perroux, alors directeur de

    lInstitut Carrel, tait tout particulirement intress par le fichier Masse-Temps et persuada Tchakhotine de

    travailler pour lInstitut Carrel. Quelques jours plus tard, lorganisateur principal de lInstitut, lingnieur Desoubliaux, lui rendait visite afin de prparer le travail,

    et on lui confia le soin dorganiser la documentation. Sur ce, Tchakhotine dmnage son laboratoire et va sinstaller lInstitut de Pierre Girard, avec lequel il commence prparer un Plan dactivit sociale daprs-guerre, tout en restant en troites relations avec Perroux.

    Les ides essentielles de ce Plan aux dires mmes de

    Tchakhotine, concidaient parfaitement avec les ides de

    Wells donnes dans son ouvrage Open Conspiracy ; en

    dfinitive, il pensait que la direction de lhumanit devait tre entre les mains des hommes de science.

    Perroux quitte lInstitut Carrel et Tchakhotine le suit quelques jours aprs. Sur ces entrefaites, Perroux fonde

    lInstitut des Sciences conomiques Appliques (I.S.E.A.) et demande Tchakhotine de travailler avec lui. Au sein

    de cet Institut, Tchakhotine organisa une documentation

    sur les problmes de lconomie et mit au point un sys-tme pratique dutilisation de cette documentation.

    La Libration venue, le professeur Girard et

    Tchakhotine se remirent tudier le Plan prpar

    pendant la guerre et, le 1er septembre 1944, les cinq

    fondateurs du futur mouvement Science Action

    Libration (S.A.L.) se rassemblrent dans les locaux de

    lI.S.E.A., Girard (), Monod-Herzen (thosophe),

  • Perroux (synarque), Sanders (Carnegie) et Tchakhotine.

    Le sige de cette nouvelle organisation fut fix lInstitut de physico-chimie de Pierre Girard.

    Tchakhotine, lui, continuait travailler lI.S.E.A., au sein duquel Perroux organisa en octobre 1944 une

    entrevue entre Girard et Tchakhotine dun ct, et Emmanuel Mounier, directeur de la revue Esprit, de

    lautre, pour essayer dorganiser la collabora tion de S.A.L. avec cette revue. Cette tentative neut pas de suite.

    Nous allons tudier maintenant en dtail les hommes et

    les organisations travaillant de concert avec Serge

    Tchakhotine.

  • Lalliance entre la Science et les Travailleurs, ces deux ples extrmes de la Socit qui,

    par leur union, peuvent librer de toute entrave la civilisation, voila le but auquel jai dcid de

    vouer ma vie jusqua mon dernier souffle.

    Ferdinand Lassalle,

    discours sur La Science et le Travail., repris dans le Bulletin n 1, 15 octobre 1944, de S.A.L. N en 1825 dans

    la communaut juive de Breslau, Lassalle fut le fondateur, en 1863, de lAssociation gnrale des ouvriers allemands.

  • 2

    S.A.L. et COFORCES

    ou le jeu des socits secrtes

    Le 1er septembre 1944 vit natre S.A.L.,

    Science-Action-Libration, ayant pour objet ltude des questions de la science sociale sur la base des sciences

    biologiques, avec pour sige le 13, rue Pierre-Curie Paris

    (Statuts de S.A.L., n de Registre 4155. Dossier

    79501-7043).

    Dans lAppel n 1 de S.A.L. (tract), on en apprenait un peu plus, car il tait crit que cette organisation tait un

    groupe de socialisme actif prnant linstauration dun fd ralisme mondial par le socialisme actif .

    Le prsident de S.A.L., le F Pierre Girard, tait le directeur de lInstitut de biologie physico-chimique toujours en activit de nos jours sigeant au 13, rue Pierre-Curie, sige central de S.A.L.

    Pierre Girard tait trs li avec le baron Edmond de

    Rothschild18 au point que celui-ci octroya une donation 18 Philanthrope dou dun remarquable sens des affaires, le baron Ed. de Rothschild fut galement le fondateur du Foyer national de Palestine, ainsi que des synagogues de la rue de Chasseloup-Laubat et du Raincy. Ayant rapidement compris limportance de certaines appli-cations physiques et chimiques dans le droulement des conflits, il

  • de 40 millions (1920) afin de construire cet Institut de

    biologie19, et lun des fondateurs avec Girard ntait autre que le professeur Charles Richet, physiologiste, membre

    de la Loge Cosmos, de la Grande Loge de France, ancien

    prsident du Conseil franais de la Paix, prsident du

    conseil de direction de la revue La Paix par le Droit et,

    comme par hasard, membre du Conseil dadministration en Europe de la Carnegie Endowment for International

    Peace20.

    Pierre Girard, en outre, faisait des confrences sur la

    Paix en tant que prsident-fondateur de COFORCES, au

    Cercle dtudes "Franklin Roosevelt", maison maonnique, sous la prsidence de M. Francis Viaud,

    Grand Matre du Grand Orient de France, assist du

    professeur Louis Lapicque, du Grand Orient galement et

    membre dhon neur de S.A.L.

    Le vice-prsident tait un autre fran-maon, en la

    personne de Pierre Grass, spcialiste de la sociologie

    animale, directeur du Laboratoire dvolution des tres Organiss, la Sorbonne (1940-1967), et

    directeur-fondateur de la Mission biologique du Gabon

    au Centre national de la Recherche Scientifique

    fonda vers 1920 une Fonda tion daide la recherche, dote dun capital de 10 millions et il avait particip la cration de lInstitut de physique mathmatique Henri-Poincar, cr par la Fondation Rockefeller. 19 Revue de Paris, 4e anne, n 1, 1er janvier 1935. 20 Richet tait galement prsident de lInstitut Mtapsychique International, fond par Jean Meyer, directeur de La Revue Spirite de 1916 1931.

  • (C.N.R.S.).

    Le trsorier tait Mose Kneler, membre de la L volution conomique et Homme Libre Runis (Rf. :

    Bulletin Hebd. des Loges de la R. P. 811). Le secrtaire

    gnral de S.A.L. tait, bien entendu, le professeur Serge

    Tchakhotine.

    Au sein du Conseil de direction de S.A.L., on trouvait

    donc, non sans surprise, M. Franois Perroux qui

    dirigea avec Jacques Madaule 21 la Communaut

    Franaise, re vue marchaliste publie Paris en

    1941-1942, et collabora, la mme poque, Ides, revue

    de la Rvolution Nationale ... Il fut galement lun des penseurs les plus appr cis de ltat Franais et rdigea avec Yves Urvoy plusieurs fascicules de doctrine

    qui faisaient autorit entre 1942 et 1944, tels que La

    Charte du Travail et conomie planiste. Lun des ouvrages connus sign Franois Perroux, Le Capitalisme,

    paru en 1948, porte le titre dun ouvrage sign en 1945 : Franois Perroux et Yves Urvoy. Ce dernier fut excut

    sommairement par des maquisards aprs la

    Libration22.

    21 Aujourdhui membre de la LICRA, prsident de lAmiti judo-chrtienne et signataire, le 31 mai 1968, de la ptition de lUnion des intellectuels et de la classe ouvrire, parue dans lHumanit, journal du Parti communiste. 22 Dictionnaire de la Politique Franaise, Henry Coston, T. I. Note : Yves Urvoy accepta en 1941 de diriger lInstitut de formation lgionnaire o lenseignement philosophique et social quil dispensait ne sapparentait en aucune faon aux doctrines totalitaires... En dsaccord la Lgion avec le groupe Darnand, il se rendit rapidement

  • Mais Franois Perroux tait galement secrtaire

    gnral, au ct du docteur Alexis Carrel, de la Fondation

    franaise pour ltude des problmes humains, do il dmissionnera en dcembre 1943. Trs ami, comme nous

    lavons vu, avec Serge Tchakhotine, il reprit contact avec ce dernier ds janvier 1944, envisageant la mise en marche

    dune Fondation Franaise de Synthse des Sciences de lHomme (F.F.S.S.H.), qui deviendra en octobre 1944 le Centre de synthse des Sciences de lHomme et sera, en fait, lorigine de la fondation de S.A.L.

    Dans une lettre date du 20 janvier 1944 et adresse

    Serge Tchakhotine, Franois Perroux crit : Jespre que vous avez obtenu la solution des difficults administra

    tives de la Fondation. Si par hasard cela ntait pas, prvenez-moi, sil vous plat, et je ferai intervenir notre ami Pujade qui vous reste, vous le savez, entirement

    compte que la conjoncture ne lui permettait plus de dfendre au sein de cet organisme des ides dont les idologies extrmes en prsence lui interdisaient lExpression. Gardant son franc parler, ne cachant pas moins son opposition raisonne aux dcisions de Londres et dAlger qu la politique de Vichy, Yves Urvoy appartient cette ligne royale dhommes courageux que lon rencontre en France dans les priodes de guerre civile, ennemis ns des factions et du fanatisme. Retir Teysounac (Lot-et-Garonne), o il possdait un modeste domaine... cest l quune premire fois un maquis espagnol vint perquisitionner et linterroger. Mais il tait dit que ce seraient des Franais qui devaient assassiner ce Franais de bonne race. Le 19 aot 1944, des membres dun groupe F. T. P. arrtaient le chef de famille. Abattu sans jugement, on devait retrouver son cadavre le lendemain dans un bois. Cinq jours plus tard, de nuit, la maison de la victime tait pille de fond en comble. (Le Systme. 1943-1951, par Jean Maz. Ed. Sgur, 1951, pp. 25-26.)

  • dvou.

    Ce dtail est de la plus haute importance, car :

    1. 1 Pujade, Pierre, directeur administratif

    dmissionnaire en mme temps que Perroux de la

    Fondation Carrel, faisait partie de lInstitut des Sciences conomiques Appliques (I.S.E.A.), qui

    avait pour sige social celui de la Fondation

    Carnegie23, et dont le patron tait Franois Perroux.

    Or, la Fondation Carne gie soutenait, dans le mme

    temps, les efforts de lU.A.I.24, du comte Richard Coudenhove-Kalergi 25 , du C.E.N.E.24, et son

    prsident cette poque tait le fameux Nicholas

    Murray Butler, membre du C.F.R., mais galement

    prsident de la trs maonnique Pilgrims Society.

    1. 2 Le troisime homme dmissionnaire de la

    Fondation Carrel tait le secr taire gnral adjoint,

    M. Yves Mainguy, que lon retrouve aujourdhui au Comit directeur de lInstitut dtudes mondialiste25 et lInstitut des Sciences conomiques Appliques (I.S.E A.), dirig par... Perroux !

    Mais surtout, ne vous faites pas des ides... tout cela est

    fortuit !

    Franois Perroux poursuivait ainsi :

    23 Remarquons ltrange similitude avec, de nos jours, lI.I.A.S.A. (Institut International des Systmes Appliqus), vritable bastion mondialiste... quelle belle continuit... 24 Voir La Trilatrale et les Secrets du Mondialisme. 25 Voir LIrrsistible expansion du Mondialisme.

  • Jai demand il y a un peu plus dun mois si, oui ou non, on voulait publier la confrence ci-jointe sous les

    auspices de la Fondation. Je vous la fais parvenir titre

    purement PERSONNEL (nen parlez personne).

    Cest grce lamiti de Marie-Thrse Genin (lditeur) que je puis en avoir quelques exemplaires.

    Je serai heureux davoir votre avis sur ce texte qui prolonge un certain nombre de conversations que nous

    avons eues ensemble et qui vous montrera que,

    contrairement ce que lon a pu dire, tout mon effort a t de construire une science conomique appuye sur la

    biologie.

    Franois Perroux terminait sa lettre en disant :

    Je demeure convaincu que vos si intressantes

    thories sur les instincts fondamen taux demeurent

    essentielles pour lconomiste et lhomme qui pratique les sciences humaines. Lavenir nous sourit de plus en plus. Vous le savez, je vous associe dans notre pense nos

    efforts. Nous reprendrons bientt ensemble le travail

    temporaire ment interrompu.

    Autre curiosit : dans le rapport du Comit Gnral

    dExperts (C.G.E.) o M. Michel Debr fit ses premires armes de doctrinaire politique auprs de M. Robert

    Lacoste adress Londres en 1943 et oh il tait tudi le mouvement synarchique que nous allons rapidement retrouver il tait crit :

    Plus dangereuse est laction de Perroux. Lhomme a tout de mme, sinon plus de classe, du moins un

  • rayonnement plus tendu et plus ancien. On lui a fait un

    personnage de grand catholique26. La comdie est par

    trop sinistre. Les confrences de Perroux sont un long

    dveloppement sur le thme de la REVOLUTION

    PERMANENTE, dans la meilleure ligne de Trotsky.

    Lappartenance de Perroux au clan synarchique est douteuse. Mais cest bien celui-ci qui lui a fait son succs Vichy en 1941.

    Pucheu et Marion lont soutenu, aid, lui donnant une influence prpondrante auprs des "cadres" suscits

    par eux, en particulier auprs de ceux de du Mayet de

    Montagne.

    Actuellement, Perroux opre surtout Paris, en

    liaison avec lInstitut Carrel. Les intellectuels sous son influence dpassent nettement la synarchie, mais il

    continue y avoir interpntration dans les deux milieux.

    En tout cas, il y a synchronisme des tendances.

    Beaucoup de chefs, de jeunes ou de dirigeants

    activistes subissent linfluence de Perroux et de lInstitut Carrel qui a lanc lide de lAvnement de lHomme, reprise par la presse parisienne et que lon retrouve sous une prsentation lgrement diffrente dans les revues

    clandestines. Un nouveau snobisme joue. On se

    proclame, sans lavoir jamais lu, llve de Perroux ; on na pas tout fait tort, car la vulgarisation de ses ides est

    26 A lpoque de la fondation de S.A.L., Perroux tait la tte dune association de la jeunesse catholique, cre par lui et portant le nom de Renatre.

  • plus pousse quon ne se limagine.

    Sous lgide de Perroux se dveloppe un sectarisme intellectuel de type rvolu tionnaire, que la Synarchie

    espre utiliser, comme le totalitarisme sempara, sans lui demander son avis, du rationalisme sectaire de M.

    Maurras.

    Comme ce dernier, M. Perroux nentend pas les voix de la nature. Ce ne saurait tre un reproche. Cela pourrait

    excuser le fait quil dupe tant de gens, et quil ne se fasse lui-mme duper. 27

    Au risque de paratre un peu longs, nous avons voulu

    donner tous ces dtails afin dessayer de saisir le comment et le pourquoi de certaines rencontres. En effet,

    Tchakhotine devait ignorer tous ces petits dtails et bien dautres, comme nous le verrons car nous ne voyons pas comment expliquer autrement une

    collaboration aussi intime avec un homme comme

    Franois Perroux.

    La preuve en est que nous avons retrouv dans ses

    archives prives un document vraisemblablement

    27 Synarchie et Pouvoir, par Andr Ulmann et Henri Azeau. Julliard, 1968, pp. 302-303. Note : Perroux fit partie galement du Comit directeur du groupement de gauche Temps Nouveaux, fond en 1960 pour rechercher les volutions qui, dans lorganisation des soci ts, simposeront aux gnrations venir . Cela fait penser au Club de

    Rome et Futuribles ! taient ses cts Temps Nouveaux : Mlle Germaine Tillon, proche du F.L.N., Henry Torres, avocat communiste, et Ren W. Thorps, btonnier qui soutint la candidature de Franois Mit terrand en 1965.

  • rdig par lui ou par lun de ses proches , que nous donnons dans son intgralit, vu son importance :

  • Note remise titre personnel

    M. le docteur Milliez sur la Fondation

    Franaise pour l'tude des Problmes Humains

    La dissolution totale de la F.F.P.E.P.H. parat tre la

    condition ncessaire dune reconstruction visant faire de cet organisme linstrument scientifique quil devrait tre. Un remaniement, rduit llimination des personnes qui dtiennent les hauts postes de direction scientifique ou

    dadministration, laisserait en effet subsister la masse du personnel recrut dans des conditions dplorables,

    pendant deux ans et demi. Les collaborateurs de qualit,

    recruts pendant le secrtariat de M. Franois Perroux, se

    sont dmis en bloc lors de son dpart, en dcembre 1942.

    Aussi ne reste-t-il pas, lheure actuelle, plus dun domaine de collaborateurs offrant des garanties srieuses.

    Si lon admet ce point de vue, la liquidation de la Fondation implique la recherche pralable des

    responsabilits et pose divers problmes.

    I. Sur le plan scientifique

    Les budgets 1942 et 1943 nayant pas t excuts, cest au total une cinquantaine de millions de francs qui ont t

    dpenss par la Fondation, depuis sa cration, le 17

    novembre 1941. Les rsultats acquis ce prix, tant sur le

    plan scientifique que sur le plan des ralisations pratiques,

    sont nuls. Les ralisations de mdecine du travail, qui sont

  • parfois inscrites lactif de la Fondation, ont t obtenues par les services de la Mdecine du Travail qui dpendent

    exclusivement du ministre du Travail. La confusion toute volontaire est rendue possible par le fait que lun des deux vice-rgents de la Fondation, le docteur Gros,

    ex-mdecin-inspecteur gnral du Travail, na voulu faire aucun dpart entre ses deux activits, ou plutt na entrepris la Fondation aucun travail spcifique et sest born utiliser, dans sa tche de mdecin-inspecteur,

    certains des moyens (en hommes et en argent) que lui

    offrait la Fondation.

    Aucun programme de travail na jamais t dress, aucune directive, mme trs gnrale, na jamais t donne par le docteur Carrel, en dpit des instances

    rptes de M. Franois Perroux et de ses collaborateurs

    administratifs et techniques.

    Les efforts faits, sous la pression du secrtariat gnral

    et de ladministration, par les membres de certains dpartements de la Fondation, ont t fatalement

    sporadiques et incoordonns, et les rsultats quasi nuls

    ds quils dpendaient des autres dparte ments, ce qui est la rgle dans un Institut de synthse.

    Lattitude du docteur Carrel, devant les tentatives du secrtariat gnral et de lad ministration pour mettre la maison au travail, a t constamment lindiffrence totale, sinon lhostilit dclare. Les meilleurs moments ont t les absences, longues et fr quentes, du rgent : la dernire

    a dur six mois, sous prtexte de vacances, puis de

    maladie (juin-dcembre 1943). A la suite de celle-ci, le

  • rgent na jamais repris sa place la Fondation et sest born assister, chaque mardi, de 11 heures midi, la

    runion hebdomadaire des collaborateurs, parlote confuse

    o aucune question scientifique nest aborde, et o chacun se borne prsenter ses dolances personnelles au

    rgent ou ladministration.

    Une telle attitude de la part de lhomme qui ltat franais octroyait quarante mil lions de francs par an (le

    docteur Carrel en avait demand cent et a failli les obtenir)

    constitue manifestement une escroquerie scientifique.

    Les sanctions quelle appelle peuvent tre de deux sortes :

    1. blme officiel par lautorit comptente ;

    2. sanction pcuniaire inflige, aprs intervention dune juridiction comptente, au rgent et aux deux vice-rgents.

    II. Sur le plan financier

    Parmi les nombreuses irrgularits dordre financier commises par le docteur Carrel, lune des premires en date et les plus importantes a t lachat dun vaste do-maine, pour la somme de trois millions de francs, aux

    parents de Mme Carrel (famille Lozout). Destin

    devenir le Centre de Synthse de la Fondation, aucun

    travail scientifique na jamais t entrepris dans ce domaine qui a t install en centre de rception et qui,

    suivant une clause non crite du contrat de vente et non

  • connue de ladministration, a pourvu aux besoins de la famille de Mme Carrel en lgumes et en bois de

    chauffage.

    Parmi les traitements exorbitants ou distribus sans

    aucun motif, il convient de citer celui qui a t servi Mlle

    de La Motte, cousine de Mme Carrel, nomme surin

    tendante du domaine des Brullys, sans quaucun travail effectif ait jamais pu tre demand lintresse.

    Tous les collaborateurs dmissionnaires la suite de

    M. Franois Perroux en d cembre 1943, et plus

    spcialement ceux qui occupaient les postes

    administratifs do ils ont eu connaissance de ces faits, sont prts apporter en toute objectivit leur tmoignage

    personnel sur ce sujet.

    III Sur le plan politique

    Il ressort des renseignements recueillis que les

    principaux membres de la Fondation taient en liaison

    avec la Synarchie qui, avec lappui de grandes industries et certaines banques, se proposait de raliser sur la

    France une mainmise tout fait homologue celle qui, en

    Allemagne, a port Hitler au pouvoir. Les agents de cette

    liaison ont t, ds lorigine, MM. Missenard et Mntrier. Ds le dpart de M. Perroux, M. Henry de

    Segogne, bras droit de M. Lehideux, est entr la

    Fondation comme conseiller technique.

    Le ministre de la Sant a dailleurs, dans un communiqu rcent, qualifi d antinationale lactivit

  • du docteur Carrel. Il y aura lieu, dans cet ordre dides, de ne pas ngliger son intimit avec M. Bunau-Varilla,

    propritaire du Matin, ni les contacts qui ont t pris,

    selon toute vraisemblance, avec Jacques Doriot.

    Enfin, aucun renseignement daucune sorte na pu tre obtenu par M. Franois Perroux, en sa qualit de

    secrtaire gnral, sur la mission effectue en Allemagne,

    peu de temps avant lentre en fonctions de ce dernier, par plusieurs collaborateurs sous la direction de MM.

    Gros et Mntrier.

  • IV En ce qui concerne la correction des procds

    Linexistence de tout travail effectif a toujours eu pour pendant, la Fondation, un rclamisme du plus mauvais

    aloi de la part dun organisme scientifique. Aux tapa geuses dclarations radiodiffuses, faites ds lorigine de la Fondation par un des vice-rgents, ont succd des

    campagnes outrancires dans la presse pro-allemande.

    De ces campagnes, le docteur Carrel na jamais voulu prendre la responsabilit : il a jug prfrable de laisser

    faire ses lieutenants immdiats ou Mme Carrel,

    appliquant en ce domaine un procd qui lui est familier.

    Dautre part, des mthodes de la plus extrme grossiret ont t mises en uvre plusieurs reprises ; particulirement dans laffaire de la rquisition allemande des laboratoires de la rue Pierre-Curie, o

    travaillaient des savants authentiquement franais.

    M. Pierre Girard, directeur de ces laboratoires, peut

    donner cet gard toutes les prcisions dsirables, car il a

    eu affaire personnellement lpoque avec le docteur Carrel.

    *

    Il est joint la prsente note :

    1 Une copie de la note du 7 dcembre 1943, sur

    ladministration de la Fondation (destine au contrle financier de la Fondation et au ministre

    des Finances).

  • 2 Le Pacte Synarchique rvolutionnaire , qui nest possd quen un seul exem plaire et devra tre retourn aprs copie.

    Paris, le 5 septembre 1944.

    Bien entendu, suivant notre habitude, nous avons

    cherch vrifier certaines donnes et, tout

    particulirement, les accusations portes contre MM.

    Missenard, Mntrier, Gros, Henry de Segogne...

    Ce dernier tant dcd, sa femme nous rpondit, en

    date du 23 juillet 1983 :

    Mon mari, Monsieur Henry de Segogne, tant dcd

    depuis plusieurs annes, il mest impossible de rpondre aux renseignements que vous me demandez. De ce ct,

    malheureusement, nous ne pouvions plus rien28.

    En revanche, M. Andr Missenard, vice-rgent de la

    Fondation Carrel, nous a t dun prcieux secours. En effet, rpondant notre lettre du 22 juillet 1983 dans la

    quelle nous lui demandions ce quil fallait penser des affirmations portes contre lui, il nous rpondit en date

    28 N le 30 avril 1901 de Henry de Segogne, avocat au Conseil dtat,

    et de Mme ne Valentine Hersant. Matre des requtes au Conseil dtat de 1938 1950, il est nomm en 1942 commissaire gnral au tourisme. Aprs la guerre, il devient conseiller dtat, puis prsident de la Commission de contrle des films, membre du Comit des programmes de tlvision et administrateur de la Compagnie des chemins de fer du Nord.

  • du 2 aot 1983 par la lettre suivante :

    Je flicite votre Bureau de Documentation de faire

    une tude sur la Fondation Alexis Carrel qui, en ralit,

    sappelait : Fondation franaise pour ltude des Problmes humains. Alexis Carrel en tait effectivement

    le rgent et jen tais un des deux vice-rgents.

    Pour clairer votre lanterne, je vous envoie deux

    papiers que javais rdigs lintention de la Socit des Amis du Docteur A. Carrel29.

    Je ne sais qui est lauteur de ce rapport "confidentiel" et ronotyp prtendant que "jtais en liaison avec la Synarchie, qui se proposait de raliser sur la France une

    mainmise analogue celle dHitler sur lAllemagne..." Je nai jamais t en contact avec la Synarchie. Je crois quelle comportait un certain nombre de mes camarades poly techniciens, avec lesquels jai effectivement pu tre en rapport, mais jamais il na t question de la Synarchie dont