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DO-IT-YOU RSELF UN FILM DE ERIC LEDUNE E DOSSIER PÉDAGOGIQUE EN COMPLÉMENT DU COURT MÉTRAGE AVEC LE SOUTIEN DE LA COORDINATION PÉDAGOGIQUE DÉMOCRATIE OU BARBARIE

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DO-IT-YOURSELF UN FILM DE ERIC LEDUNE

E

DOSSIER PÉDAGOGIQUE EN COMPLÉMENT DU COURT MÉTRAGE

AVEC LE SOUTIEN DE LA COORDINATION PÉDAGOGIQUE DÉMOCRATIE OU BARBARIE

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Table des matières

La torture est un sujet souvent abordé par AmnestyInternational. Depuis des années, nous essayons desensibiliser les citoyens à cette problématique autravers de nos différentes campagnes. Car malgré soncaractère illégal et immoral, la torture est encorepratiquée dans au moins 102 pays, selon le dernierrapport annuel d’Amnesty.

Des dossiers sur la torture, Amnesty en a déjà fait beaucoup. Cettefois, nous vous proposons d’aborder ce sujet de manière originale,en partant d’un court-métrage intitulé DDoo--iitt--yyoouurrsseellff («faites levous-mêmes»). Ce titre ironique exprime à quel point la torturepourrait devenir banalisée si nous n’y prenions garde…

Ce dossier vise donc à permettre aux élèves du secondaire de réflé-chir à la problématique de la torture à partir d’un film qui doit sedécoder : à la première vision, on ne sait pas en effet qu’il s’agitd’un film sur la torture. Le ton ferait d’ailleurs plutôt penser à undocumentaire animalier ou à une recette de cuisine ! Mais petit àpetit, un malaise s’installe chez le spectateur : il s’agit bien d’unmode d’emploi pour infliger volontairement des souffrances à un«individu» sans défense. La force du film est qu’il parle de cetteviolence presque ordinaire, institutionnalisée de la torture sanstoutefois montrer aucune scène réelle de torture !

La motivation première d’Eric Ledune est un coup de gueule ! Pourlui, «il semble évident que nous vivons une période où nos démo-craties tendent à perdre la tête, où de dangereuses tentations totali-taires s’ingénient à réduire subrepticement bon nombre d’acquisdémocratiques et cela est justifié le plus naturellement du mondepar une peur de l’Autre savamment entretenue. Et comme noussommes entourés d’“Autres qui ne nous aiment pas et qui nousveulent que du mal”, guerres préventives et tortures deviennentune manière légitime de défendre ce que nous avons de plus cher :

OBJECTIFS DU DOSSIER

Première partie :Proposition d’animations sur le thème de latorture sur base de l’exploitation du courtmétrage d’Eric LeduneI.1. Vision du court métrage et débat I.2. Recherche individuelle ou en groupe I.3. Mise en commun

Deuxième partie : De 24 heures Chrono à Guantanamo

II.1. La banalisation de la torture et de la violence dansles séries télévisées

II.2. Guantanamo, la face visible de la guerre contre le terrorisme

II.3. Tableau récapitulatif et carteII.4. Conclusion

Troisième partie :Pistes pédagogiques sur la torture

III.1. Le rapport à l’autorité – l’expérience de MilgramIII.2. Morale-Religion-HistoireIII.3. HistoireIII.4. LittératureIII.5. Langues étrangèresIII.5. Musique

Quatrième partie :Informations complémentaires

IV.1. Définition de la tortureIV.2. Comment devient-on un bourreau ?IV.3. Les objectifs de la tortureIV.4. Les victimesIV.5. Les méthodes de tortureIV.6. La torture est-elle illégale ?IV.7. Le commerce de la tortureIV.8. Les moyens de lutte contre la tortureIV.2. Questions-réponses

Cinquième partie : Questions / RéponsesTémoignagesBibliographie / FilmographieIndex DVD

RRééddaaccttiioonn :: Céline LanduytCCoooorrddiinnaattiioonn dduu ddoossssiieerr :: Philippe Hensmans et Rolandd’HoopMerci à Claire Pahaut et Michel Hérode de la Coordinationpédagogique Démocratie ou Barbarie pour leur soutien et leursconseils.Illustrations : Diane Delafontaine et Eric Ledune (images dufilm Do-it-yourself).Amnesty International Belgique Francophone (AIBF) •Programme Jeunesse • Rue Berckmans 9 – 1060 Bruxelles • Tél :02 538 81 77 Fax : 02 537 37 29 • [email protected] •www.amnesty.be • ÉÉddiitteeuurr rreessppoonnssaabbllee :: Sven Pitseys •N° banque carrefour : 418 308 144

ERIC LEDUNEDiplômé de l’ESAPV-Mons (Belgique), Eric LEDUNE est un véritabletouche-à-tout (peinture, illustrations, photos, installationsvidéo,…). C’est à 15 ans qu’il fonde Tache d’Encre, un fanzine debandes dessinées. Dès 1986, il réalise dans le cadre scolaire descourts métrages, certains déjà primés en festival. Viennentensuite quelques génériques, puis Procession, et caetera (plus de50 sélections en festivals internationaux et nombreux prix), sonpremier film hors école. Souvent en sélection officielle à Annecy,il réalise Haïku (1998), un pilote pour série télévisée qui gagna leGrand prix du meilleur projet dans ce même festival. Il enchaîneavec Bayan Bana Bak Bayan (2001), Déjà Vu (2003) et Do-it-yourself(2007), ces deux derniers également sélectionnés à Annecy. ERICLEDUNE partage le reste de son temps entre ses multiples activitésartistiques et l’enseignement en Belgique.Site d’Eric Ledune : http://users.skynet.be/patachon

INTRODUCTION

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notre merveilleuse civilisation occidentale de plus en plusmenacée...»

En plus du film «Do-it-yourself», le DVD contient également desextraits de témoignages de victimes et de bourreaux, ainsi que lesinterviews de spécialistes qui soignent les victimes. Ces séquencessont complémentaires à l’approche un peu décalée du film, etpermettent de revenir à un débat autour de thèmes d’actualité, telsque l’utilisation de la torture comme arme de défense contre lesterroristes ou comme instrument de pouvoir dans les dictatures.

Le danger le plus immédiat est à notre avis la justification de latorture dans le cadre de la guerre contre le terrorisme. Il nous sembleen effet important de dépasser l’émotion liée aux actes terroristespour développer une réflexion objective sur les meilleures façons delutter contre ce phénomène. L’actualité récente nous montre en effetque lorsque l’on accepte le recours à la torture, on assiste à desdérives comme celles d’Abou Graib en Irak, de Guantanamo ou desautres prisons secrètes mises en place pour la détention de «terro-ristes».

Le danger est encore plus grand lorsque la torture est justifiée demanière plus diffuse dans certaines séries TV ou jeux vidéo. Dansune série comme 24 heures chrono, les bourreaux ne sont plus lesméchants, tueurs en série et trafiquants de drogue, mais lesgentils, les héros : les patriotes.Et comme le souligne Eric Ledune, «qu’y a-t-il de pire lorsque cesont nos propres sociétés, si vertueuses et éternelles donneuses deleçons universalistes, championnes de la bonne conscience auto-proclamée, qui pèchent et trébuchent dans leurs propres contradic-tions? Sans que cela nous pose plus de problèmes de consciencequ’il n’en faut».

Aux Etats-Unis, le Président Bush a signé le 20 juillet 2007 un ordreprésidentiel qui permet à la CIA de continuer à utiliser certainesdes méthodes brutales qu’elle employait contre des personnessoupçonnées de terrorisme. Même si ce texte interdit formellementles méthodes les plus violentes comme les humiliations sexuellesou religieuses, il reste très vague sur beaucoup de points et n’im-pose aucune limite à l’usage de méthodes coercitives – parexemple, la privation de sommeil et les positions de souffrance –qui sont expressément interdites dans l’armée et la police.

Tant que la torture fait partie du camp du mal, des dictatures, on

peut facilement la condamner. Lorsqu’elle est présentée comme unmal nécessaire pour lutter contre les terroristes, il devient difficilede prendre une position claire.

Pourtant, tous les experts, qu’ils soient de la C.I.A., du F.B.I ouinstructeurs militaires, affirment la même chose : la torture n’estpas un outil efficace, quelle que soit la situation dans laquelle onse trouve. «La torture n’a jamais conduit à la vérité, seulement à lasouffrance. Au mieux, l’interrogé vous dira ce que vous voulezentendre. Au pire, vous n’obtiendrez rien» raconte Joe Navarro, unagent du FBI à la retraite.

La peur n’est jamais bonne conseillère. La peur du terrorisme ou detout autre péril ne justifie pas le recours à la torture, cet acte quidéshumanise non seulement la victime mais aussi celui qui lapratique et qui l’ordonne.

C’est cette idée que nous voulons illustrer à travers l’exploitationpédagogique du court-métrage DDoo--iitt--yyoouurrsseellff et des autres pistesproposées dans ce dossier et ce DVD.

La structure du dossier :Nous avons divisé le dossier en cinq parties. La première, très concrète, est basée sur le film «Do-it-yourself» etvous propose quelques pistes d’animation pour analyser le film. La seconde aborde la question du terrorisme, en partant notam-ment de la justification de la torture dans la série 24 heureschrono et de manière plus générale dans la guerre contre leterrorisme.La troisième partie vous propose des pistes pédagogiques sur lerapport à l’autorité, le débat moral, les exemples dans l’histoirerécente… La quatrième partie contient des informations complémentairessur la torture avec des pistes pour approfondir vos connaissances.Enfin, la cinquième partie propose une série de questions-réponses qui pourront vous être utiles pour alimenter le débatdans votre classe. Nous tenons à préciser que ces informations nedevraient pas être données telles quelles aux élèves mais plutôtêtre utilisées comme outil d’argumentation. Vous trouverez à la fin du dossier des témoignages et des cita-tions que vous pouvez utiliser afin d’illustrer votre cours.N’oubliez pas de consulter l’INDEX du dvd à la fin de ce dossier.

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EXPLOITATION DU COURT MÉTRAGE

Activité 1Vision du courtmétrage + débatAvant toute chose, visionnez le courtmétrage avant de le montrer aux élèves.Nous vous proposons de le montrer auxélèves sans leur dire de quoi il s’agit afinqu’ils l’appréhendent sans a priori.

ConcrètementLe texte du film s’inspire d’un véritablemanuel de la C.I.A. en usage dans les dicta-tures d’Amérique latine des années 70.

Première partie :

Nous vous proposons 6 activités pour aborder le thème dela torture à travers le court métrage d’Eric Ledune. Ces 6activités suivent un cheminement. Vous pouvez soit lesexploiter en profondeur en vous inspirant des différentespistes pédagogiques proposées, soit juste les parcourir.Cela dépend du temps dont vous disposez, du nombred’élèves et de leur intérêt pour le sujet.

Beaucoup de recherches et activités sont proposées.Par facilité et pour gagner du temps, répartissez letravail et demandez à chaque sous-groupe de prendreen charge une recherche ou une activité, d’en faire despanneaux et de les afficher en classe ou dans lescouloirs pour que tout le monde puisse en profiter.

Petit mot du réalisateur à propos de son court métrage «Pourquoi et comment parler avechumour d’un sujet si grave et si unanime-ment condamné, la torture? La réponse seveut quelque peu provocatrice. Elle prendla forme d’un petit manuel de torture auton badin et ne masque en rien la duretédu propos. Il remet ce dernier en perspec-tive et le grossit de manière exponentielle,tant ce qui est dit semble de plus en plusénorme et insupportable au fur et àmesure du déroulement du film. Celui-cisemble démarrer tel un simple traité de

pêche quelque peu loufoque, jusqu’à l’in-tolérable de viols et meurtres d’enfantsutilisés pour faire pression sur leursmères. (…) La torture, sujet inacceptables’il en est, semble dès lors un excellentvecteur pour réfléchir à l’état du mondeaujourd’hui. Peut-être qu’en proclamantl’inacceptable sur le ton de l’humour et encréant le décalage (l’esthétique utilisée yparticipe pleinement), l’impact sera-t-ilplus fort ?»

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I.1. Vision du court métrageVisionnez le court métrage une premièrefois dans son entièreté. Ensuite donnezquelques directives et proposez uneseconde vision du court métrage. Les élèvesdoivent être attentifs à différentes ques-tions.

Exemples de questions :– Quel est le sujet abordé ?– La torture– Comment le sujet est-il traité ?– Sous la forme de conseils, d’uneméthode. Le récit est donné du point devue du bourreau– Sur quel ton le sujet est-il abordé ?– La dérision– Quel personnage est utilisé pourparler de ce sujet ? – Un poisson

2. DiscussionPour l’instant, demandez seulement auxélèves d’essayer de répondre aux questions

en fonction de ce qu’ils ont perçu dans lecourt métrage.De quoi parle-t-on ? Le court métrage parle de la torture.

Pourquoi le réalisateur a-t-il structuréson information comme une méthode ?Le texte est inspiré d’un manuel de la C.I.A.Il existe un code de la torture comme ilexiste un code de la route. La torture estdonc institutionnalisée. Son utilisationn’est pas quelque chose d’improvisé, lespersonnes qui torturent ont été formées. Lecourt métrage montre bien que tout estcalculé : le bon moment pour arrêter lafuture victime (heure, lieu,…). Comment ladéstabiliser, la faire douter «car le douteengendre la peur et la peur engendre lavérité».L’obtention d’information est secondaire,«peu importe l’efficacité de la collecte derenseignements. Cependant, les aveux, voirla confession, peuvent ajouter un certainpiment à un interrogatoire réussi».

Pourquoi utiliser la dérision ?Afin de montrer toute l’absurdité de latorture.Le réalisateur arrive à parler de la torturesans en montrer des images réelles etinsoutenables qui pourraient être traumati-santes pour le public.

Pourquoi choisir un poisson pour parlerde ce thème ?Le poisson est un animal. En montrant unpoisson se faire torturer on déshumanise latorture, ce qui la rend moins grave.Un poisson n’a pas de sentiment, il ne criepas donc il n’a pas mal, ce n’est donc pas sigrave de le torturer.De même, le bourreau déshumanise savictime pour rendre sa tâche plus facile,moins grave.Les dirigeants essaieraient-ils de noyer lepoisson quant à la problématique de latorture ?

Après avoir répondu aux questions, lesélèves peuvent exprimer leur ressenti sur lavision du court métrage et leurs idées surce qu’est la torture.Au fur et à mesure de la discussion et desréflexions des élèves, essayez de structurerleurs idées sous forme de tableau. En-dessous de chaque colonne – Quoi, Où,Qui, Pourquoi – notez les réponses desélèves par des mots clés. Ensuite lorsquevous aurez avancé dans l’exploitation ducourt métrage et du dossier, complétez letableau avec les nouvelles informations.Faites-le dans une autre couleur afin queles élèves puissent se rendre compte del’évolution de leurs acquis.Ne posez pas les questions telles quelles,déduisez-les des commentaires, remarqueset questions des élèves.

QUOI ? Divisez votre classe en petits groupes etdemandez-leur de définir les mots suivants: – torture– autorité– responsabilité– violence– maltraitance– etc

Où ? D’après eux, dans quel contexte a lieu latorture ? (Guerre/Paix/etc)

L’Ecole des Amériques

L’ Ecole militaire des Amériques est uneécole militaire anciennement située auPanama. Elle fût créée et dirigée par lesÉtats-Unis en 1946, l’objectif étant deformer des militaires Nord et Sud-Améri-cains. En langue anglaise, l’école estparfois surnommée l’«École des assassins»(«School of Assassins»).

Créée juste après la Seconde Guerremondiale, elle a servi pendant la guerrefroide à lutter contre le communisme enAmérique du Sud.

La CIA y dispensait des cours sur la répres-sion des guérillas et les techniques detortures aux officiers de régimes «amis».

De nombreux dirigeants de l’armée dudictateur général chilien Pinochet y ontétudié, ainsi que les dictateurs nicara-guayen Somoza et panaméen Noriega. EnArgentine, plusieurs présidents dictateursen sont sortis comme les généraux-prési-dents argentins Levingston (dont lemandat fut particulièrement cruel) etGaltieri. Notons aussi un des plus sinistres,l’amiral Emilio Eduardo Massera, membre

du triumvirat militaire argentin de 1976.

Elle a été transférée à Fort Benning enGeorgie (USA) en 1984. En 2001, étantdonnée sa sinistre réputation, un amende-ment fut déposé par les deux partis à laChambre des Représentants (House ofRepresentatives) nord-américaine, visant àfermer l’Ecole des Amériques, et à engagerune enquête menée par le Congrès. LaChambre refusa de le ratifier, à dix voixprès. Suite à quoi, on changea simplementson nom qui devint WWeesstteerrnn HHeemmiisspphheerreeIInnssttiittuuttee ffoorr SSeeccuurriittyy CCooooppeerraattiioonn((WWHHIINNSSEECC )) dont la traduction françaiseest Institut de l’Hémisphère Ouest pour laCoopération en matière de Sécurité (ouIHOCS). Sources : wikipédia

AAccttiivviittéé ppééddaaggooggiiqquuee :: Après la vision ducourt métrage, si les élèves posent desquestions sur le manuel de la C.I.A.,proposez leur de faire eux-mêmes unerecherche sur LL’’EEccoollee ddeess AAmméérriiqquueess..

AA vvooiirr :: LL’’ééccoollee ddeess AAmméérriiqquueess a été miseen cause dans le film ÉÉttaatt ddee ssiièèggee du réali-sateur Costa Gavras.

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QUI ? Qui torture ? Qui est torturé ?

POURQUOI ? Pourquoi torture-t-on ? Quels sont les objec-tifs de la torture ?

Activité 2 Recherche individuelle ou engroupeSuite à la préparation, à la vision du courtmétrage et au débat, relevez une série dequestions qui vous semblent importantespour les élèves.

Exemples de questions :– Comment définit-on la torture dans les

textes internationaux ? La torture est-ellelégale ?

– Où pratique-t-on la torture ? Dans quelspays (actuellement ou dans le passé) ?Sous quels types de gouvernements(actuels ou passés) ?

– A quoi servait le manuel de la C.I.A. ?destiné aux gouvernements d’AmériqueLatine ?

– Quelles ont été les différentes formes detorture utilisées par le passé ? (la ques-tion,…) ?

– Existent-ils des organisations qui luttentcontre la torture ? Quels sont leursmoyens d’actions ?

– Qui sont les victimes de la torture ? /Qui sont les bourreaux ?

– A quoi sert/servait la torture ? Quelest/était son but, officiel et officieux ?

Les élèves devront, en groupe ou indivi-duellement, y répondre en s’aidant desources comme le site internet d’AmnestyInternational, www.amnesty.be. Si vousavez beaucoup de questions, vous pouvezles structurer par thème. Chaque groupepeut prendre en charge un thème.Si vous n’avez pas assez de temps, vouspouvez y répondre vous-même grâce auxinformations données dans la 3ème et la4ème partie. Nous vous conseillons néan-moins de faire cet exercice avec les élèvesafin qu’ils fassent eux-mêmes la démarchede la recherche d’informations.

Pour connaître les sources intéressantesréférez-vous à la bibliographie donnée enfin de dossier.

Activité 3 Mise en communChaque groupe/élève présente les résultatsde sa recherche. Mise en commun desinformations.Si vous avez du temps, proposez aux élèvesde présenter les informations de façondynamique : sous la forme d’exposés,d’images, de cartes ou de sketch.

Exemples :– Pour illustrer la question dans «quels

pays pratique-t-on la torture ?», proposezà vos élèves de réaliser une carte dumonde géante et d’y coller des photos,dessins, symboles pour désigner les paysqui pratiquent/pratiquaient ou non latorture. Y montrer aussi les pays quiappliquent la peine de mort, etc.

– Pour illustrer les textes internationauxparlant de la torture, pourquoi ne pasimaginer de jouer une scène de torturepuis l’intervention d’un émissaire del’Etat lisant à haute voix (un peu commeau Moyen-âge) l’article 5 de la Déclara-tion des droits de l’homme.

– Pour la définition de la torture ou lesdifférentes méthodes de torture utilisées,cherchez des dessins ou images commeillustrations (voir 4ème partie). Vouspouvez aussi replacer sur une ligne du

temps les différentes formes de tortureutilisées en fonction des époques.

L’objectif étant surtout qu’ils s’approprientl’information et non qu’ils la restituenttelle quelle. À vous de corriger d’éven-tuelles erreurs si nécessaire.Vous pouvez compléter le tableaucommencé lors de la première activité afinde voir l’évolution des acquis. N’hésitez pasà illustrer ce tableau.

Questions du professeurAprès la mise en commun, questionnez lesélèves sur le but de l’exercice.– Pourquoi parle-t-on de la torture ?– Pourquoi débat-on sur le sujet s’il est

tellement évident que c’est quelquechose de répréhensible ?

– Pourquoi les médias, les séries téléviséeset la littérature nous montrent-ils uneimage de la torture qui serait acceptabledans certains cas ? Pourquoi le bourreauy est-il présenté comme quelqu’un debien qui sauve le monde et non commeun méchant ?

Pour vous aider à gérer le débat et les ques-tions délicates, référez-vous aux questions-réponses données dans la 4ème partie dudossier.

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Jusqu’à présent, nous vous avonsproposé d’exploiter le court-métrage«Do-it-yourself» pour aborder lecaractère méthodologique de latorture. Ce court-métrage, commevous le savez, est inspiré d’unmanuel des années 1970. Il s’in-spire donc d’une vision de la torturequi avait cours avant les attentatsdu 11 septembre 2001, époque queles jeunes ne connaissent pas bien.

Nous vous proposons maintenant detravailler sur des références sans douteplus proches des jeunes, la série télévisée24h Chrono. En effet, depuis le 11septembre 2001, quand on parle de torture,

on fait surtout référence au terrorisme, àAl Qaida, ou à Guantanamo.

L’information sur ces deux phénomènes(les séries télévisées et la tentative des auto-rités américaines de relativiser l’interdic-tion de la torture dans le cadre de la luttecontre le terrorisme) est essentielle afin depercevoir le danger potentiel qui menacenos sociétés : si la torture devient banale, sielle est justifiée, y compris dans des paysdémocratiques, comment le monde va-t-ilévoluer ? Quels sont les risques pour lesdroits humains ? Comment pouvons-nousréagir à cette évolution ?

Qu’est-ce que la série 24h Chrono ?Cette série diffusée sur les écrans depuis2001 fait un tabac auprès du public améri-cain, mais également en Europe. Lescénario est simple : il décrit une journée

de 24h au cours de laquelle un agent de lacellule anti-terrorisme de Los Angeles tented’arrêter un complot qui met en danger lepays. Cet agent nommé Jack Bauer estconfronté au concept de la ««ttiicckkiinngg ttiimmeebboommbb»». Ce concept d’origine française,remontant à la guerre d’Algérie, est utilisépour légitimer l’utilisation de la torture.La série 24h Chrono fait l’apologie de latorture comme étant uunn mmooyyeenn eeffffiiccaaccee eettnnéécceessssaaiirree pour obtenir des aveux.

Cette série est donc forte-ment mise en cause parles mouvements dedéfense des droitshumains car elle auraitun impact important surles soldats américains etaurait servi de modèlelors de la guerre en Irak.Le message retenu par les

De 24 heures Chrono à Guantanamo

Deuxième partie

II.1. Banalisation de la torture et de la violence dansles séries télévisées

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soldats est le suivant : la torture est efficaceet peut être utilisée par les gentils. Cettepratique fait d’eux des héros, des patriotes.

PPoouurr vvooiirr ddeess eexxttrraaiittss ddee ssccèènneess ddee ttoorrttuurreede séries américaines comme 24h Chronoou Lost, allez sur le site www.humanrightsfirst.us/us_law/etn/primetime/index.aspOOuu ssuurr YYoouuttuubbee :: www.youtube.com/watch?v=iXEUlWkUqGo&NR

La télévision a pris une place de plus enplus importante dans notre façon d’êtreinformé et donc de voir le monde.

Questions :Demandez aux élèves s’ils connaissent lasérie et s’ils ont été frappés par les actes detorture montrés dans certains épisodes.Pensent-ils que c’est juste une fiction oùque dans la réalité les interrogatoires sepassent réellement comme cela ?Pensent-ils qu’une fiction peut influencerla réalité ? Leur opinion sur la torture a-t-elle été influencée par la série ? Si oui,pourquoi ?Connaissent-ils d’autres séries téléviséesqui montrent des scènes de torture ? Si oui,lesquelles ?

Analyse selon HumanRights First1er constat : la torture est en hausse surnos écrans de télévision (cette analyse a étéfaite aux États-Unis). Ces 5 dernièresannées, le nombre de scènes de torturediffusées pendant les heures de grandeécoute est en constante augmentation et lareprésentation faite de la torture a elleaussi fortement évolué. Avant, il était clairque seuls les méchants torturaient, aujour-d’hui, le chic type torture aussi et cettetorture est dépeinte comme nécessaire, effi-cace et patriotique.Le tournant ? Le 11 septembre 2001. De1996 à 2001, 102 scènes de torture ont étédiffusées aux heures de grande écoute, etpas moins de 624 de 2002 à 2005.

2ème constat : Cette banalisation a desconséquences particulièrement perverses.Elle ne rend pas seulement la torture plusacceptable aux yeux des téléspectateurs,elle influence aussi jusqu’à ceux quimènent des interrogatoires sur le terrain :les soldats en Irak. «Nous avons un faisceaude preuves qui montre que les jeunessoldats imitent les techniques d’interroga-tion vues à la télé », alerte David Danzig,qui dirige la campagne « PrimetimeTorture».La diffusion de scènes de torture lors desheures de grande écoute a un impact signi-

ficatif sur la façon dont les interrogatoiressont menés par les soldats américains. Eneffet, il semblerait que les soldats améri-cains voient dans ces scènes un modèle detravail, un mode d’emploi, des conseils, destechniques efficaces d’interrogatoire.

Suite à ces constats, Human Rights First alancé le projet «Primetime Torture» qui viseà limiter l’impact négatif de la violencediffusée dans les séries télévisées sur l’atti-tude des soldats.

Le projet «Primetime Torture» se struc-ture en deux axes1) Le projet d’un film éducatif :En collaboration avec des instructeurs mili-taires, Human Rights First a lancé unprojet de film à but éducatif afin demontrer aux jeunes soldats qu’il y a unedifférence entre ce qu’ils voient dans lesséries télévisées et la forme que doitprendre un interrogatoire sur le terrain ensituation réelle.

Human Rights FirstHuman Rights First est une organisationindépendante créée en 2002 aux Etats-Unis dont l’objectif est de protéger lespersonnes qui risquent d’être victimes detorture et de mauvais traitements (réfu-giés qui fuient les persécutions,personnes victimes de crime contre l’hu-manité, personnes victimes de discrimi-nations et toutes personnes dont lesdroits sont bafoués au nom de la sécuriténationale ainsi que les défenseurs de cesdroits).

Human Rights First œuvre avant toutpour empêcher les violations des droitshumains et pour rechercher les respon-sables de ces violations. Elle fait untravail de prévention, de sensibilisation,de lobbying auprès des instances natio-nales et internationales, elle demandejustice pour les victimes et un procèséquitable pour les coupables. Son travailconsiste également à conscientiser lescitoyens au rôle des médias dans la diffu-sion d’images et de messages qui vont àl’encontre des droits humains. Dans cecadre là, elle a effectué une analyse trèsintéressante de l’impact de la violencedans les séries télévisées.

Le concept de “Ticking time bomb”Selon Darius Rejali, professeur de sciencepolitique, le concept de «ticking timebomb» est apparu pour la première foisdans un roman français de Jean Lartéguyde 1960 LLeess CCeennttuurriioonnss, écrit pendant l’oc-cupation brutale de l’Algérie par la France.Le héros du roman, après avoir battu unefemme arabe résistante et l’avoir soumise,découvre un complot imminent concer-nant l’explosion de bombes partout enAlgérie et doit livrer une course contre lamontre pour arrêter cela. Selon Rejali, quia étudié des documents liés au conflitfranco algérien, cette histoire n’a aucunfondement. Selon lui, le fil de l’histoire desCCeennttuurriioonnss a fourni aux politiciens fran-çais une raison plus convenable pour justi-

fier la torture que celle d’un racismeprésent dans la mentalité française quivoulait que les Algériens soient des simplesd’esprit qui ne comprenaient que lelangage de la force. Le scénario deLartéguy exploitait un sentiment d’insécu-rité partagé par de nombreuses sociétéslibérales : leur système légal rationnel lesrendaient vulnérables aux menaces sécuri-taires.Sources : www.planetenonviolence.org

AAccttiivviittéé ppééddaaggooggiiqquuee ::Trouvez d’autres exemples de conflits oùle concept de «ticking time bomb» estutilisé pour justifier la torture.

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Human Rights First a rassemblé, pour cefilm des témoignages d’interrogateursprofessionnels. Parmi eux, Tony Lagou-ranis, un ancien interrogateur militaire quia travaillé à la prison d’Abou Ghraib. Il adû s’interposer, un jour, lorsque des soldatsont demandé à leur traducteur de hurlercomme s’il était torturé pour terroriser lesprisonniers : ils venaient de voir la mêmescène dans 24 Heures chrono en DVD.Certains enseignants de l’académie mili-taire de West Point considèrent même JackBauer comme l’un de leurs principauxproblèmes. Les cadets leur disent : «Je l’aivu dans 24 Heures chrono . Jack Bauer tiredans les jambes du gars, et il craque immé-diatement.» «Les instructeurs doiventrépéter non seulement que ce n’est paslégal, mais qu’en plus ce n’est pas efficace,explique David Danzig. La série est remar-quablement réaliste, mais ce n’est pas laréalité. Dans la réalité, la torture nemarche pas.»

2) Un contrôle du contenu des sériestélévisées :Human Rights First encourage la créationd’un contrôle sur le contenu des sériestélévisées afin de dresser un portrait plusnuancé de la torture et pour que les réalisa-teurs prennent plus leurs responsabilitésdans ce qu’ils diffusent. Il ne s’agit pasd’empêcher la diffusion de scènes detorture, mais de la condamner ainsi quecelui qui la pratique.En automne 2006 les représentants deHuman Rights First et des militaires expéri-mentés ainsi que des interrogateurs du FBIont organisé une rencontre avec les réalisa-teurs de 24h Chrono pour leur demanderd’arrêter d’utiliser la torture car les consé-quences sur le terrain sont désastreuses.

«Nous leur avons expliqué que lesmeilleures techniques demandent dutemps et de la patience, par exemple,établir une relation personnelle avec l’in-terrogé, raconte Joe Navarro, un agent duFBI retraité qui a conduit des milliers d’in-terrogatoires. La torture n’a jamais conduità la vérité, seulement à la souffrance. Aumieux, l’interrogé vous dira ce que vousvoulez entendre. Au pire, vous n’obtien-drez rien.» Les scénaristes ont pris desnotes, posé des questions sur les méthodes«douces», et argumenté que ce n’est que dela fiction et que les téléspectateurs le

savent. «Ils ont été surpris par l’impact deleur série sur les soldats », souligne JoeNavarro.Pour autant, recourront-ils moins à latorture dans leurs scénarios ? David Danzigest plutôt optimiste : «Nous espérons lesconvaincre qu’il est possible de maintenirla même tension dramatique sans.» L’agentdu FBI, Joe Navarro est plus pessimiste :«Nos techniques n’ont rien de spectacu-laire. Mais le public veut de l’action.»

Débat : La violence à la télévision– Etes-vous pour ou contre le contrôle,

voire la suppression des séries violentes àla télévision ?

– Quelle est l’utilité de la violence à la télé-vision ?

– Y a-t-il une différence entre la violencedans les séries ou les films et la violencedans les informations ?

– Est-ce le public qui prend goût à laviolence et en redemande ou est-ce unbesoin créé ou alimenté par le pouvoir,dans le but de faire peur à lapopulation ?

– Y a-t-il un danger comparable dans l’utili-sation excessive de jeux vidéo violents ?

Pour illustrer ce débat– Voir les commentaires de Michael Moore

sur le syndrôme du terroriste caché oudu tueur noir solitaire : pour contrôlerune population, il est utile qu’elle aitpeur…SSoouurrccee :: Bowling for Columbinehttp://www.youtube.com/watch?v=NPBHt-jZmSpw

– Sur l’influence des jeux violents sur lesjeunes , voir aussi la pièce «20 novembre»du metteur en scène et auteur suédoisLars Norén. Cette pièce est inspirée d’untragique fait divers, qui s’est déroulé le20 novembre 2006, dans la petite villeallemande d’ Emsdetten. Sebastian Bosse,18 ans, pénétrait arme au poing dans sonancien lycée pour y abattre de sang-froidd’anciens camarades et professeurs. Lejeune homme choisira ensuite de sesuicider. Une vie broyée sous le poids desmoqueries.

– Sur le même thème, voir aussi l’analysedu Washington Post, suite au massacrede Virginia Tech.www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/article/2007/04/22/AR2007042201562.html?referrer=email

Un référendum en faveurde la torture ?Le succès des séries TV montrant latorture est même interprété par certainsmédias proches de l’Administration Bushpour justifier le recours à la torture.

Voir à ce sujet le plaidoyer pour la torturesur Fox TV.

La plupart des Américains adorentla série 24heures, ils adorent JackBauer. Dans mon esprit, il s’agitd’un référendum national où lesgens diraient : ok, on peut utiliserdes méthodes très musclées,comme la torture, contre lesmembres importants d’Al Quaïda.

Laura Ingraham, journalistevedette de Fox News, la chaîne

pro-BushA voir sur :http://www.youtube.com/watch?v=UkMI5t6WVMs

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10 DO-IT-YOURSELF • Dossier pédagogique

II.2. Guantánamo, la face visible de la guerre contre le terrorisme

«Leurs récits étaient remarquablementsimilaires : passages à tabac, suspension

par les poignets suivie de coups, confisca-tion des vêtements, port d’une cagoule sur

la tête, exposition à un froid extrême enétant totalement nu [...] Tous ont confirmé

que ces traitements avaient été infligés pardes Américains [...] Plusieurs ont parlé dedécharges électriques [...] Certains en ont

reçu, beaucoup y ont assisté.»?Notes d’un avocat américain qui a

rencontré des détenus koweïtiens àGuantánamo en janvier 2005.

«Au mépris de toutes les garanties prévuespar la loi, mon pays m'a livré aux États-

Unis, comme si j'étais une sucrerie. LesAméricains m'ont envoyé en Jordanie pour

y être torturé, puis à Bagram et enfin ici[…] Je vis hors du monde depuis plus dequatre ans et je ne sais vraiment pas ce

qui se passe à l'extérieur.»Mohamedou Ould Slahi, détenu à

Guantánamo, 13 septembre 2005.

Visitez Guantánamo, ses plages, sespalmiers, ses cages, ses prisonniers, sessalles de torture...La base de Guantánamo n'est pas vraimentune destination touristique. Imaginez unpeu : une base militaire construite envitesse pour accueillir des centaines deprisonniers, “pêchés” un peu au hasard,surtout en Afghanistan et au Pakistan, puisdétenus dans des conditions effrayantes,

sans procès depuis plus de cinq ans.

Rappelez-vous : le 11 septembre 2001, despirates de l'air détournent quatre avions envol au-dessus des Etats-Unis. Ces attentatsvont réellement traumatiser les Améri-cains. Ce pays qui se sentait jusqu'alorsinvulnérable, du fait de son statut depremière puissance mondiale, tremble àl'idée de nouveaux attentats.

Tout d'un coup, des centaines de personnesse font arrêter uniquement en raison deleurs convictions religieuses ou de leurapparence physique… C'est dans ce climatde peur et de traumatisme que le PrésidentBush annonce qu'il va lancer la guerrecontre le terrorisme. A priori, rien de trèsétonnant : Les Etats-Unis sont attaqués, ilest logique qu'ils se défendent. Sauf quecette guerre contre le terrorisme devientfinalement une guerre où tout est permis,y compris arrêter des personnes n'ayantaucun lien avec des mouvements terror-istes, les faire torturer, les détenir dans desconditions inacceptables, sans les juger, oules renvoyer vers des pays en sachant trèsbien qu'ils s'y feront torturer. Ce qui estvraiment choquant dans cette affaire, c'estde faire croire qu'on peut résoudre le prob-lème du terrorisme en bafouant les droitshumains.

Un des plus grands scandales La base de Guantánamo doit être fermée,

pas simplement parce que des violationsdes droits humains flagrantes ont lieu dansce centre, mais aussi parce qu'ellesymbolise le mépris des États-Unis pour ledroit international dans le cadre de la«guerre contre le terrorisme». Ce centre est lapartie visible, mais bien peu transparente,d'un iceberg aux sombres facettes : déten-tions illimitées et au secret, «restitutions»,recours à la torture et aux traitementscruels, inhumains ou dégradants,«livraisons» de détenus à d’autres pays, oùils seront torturés à l’abri des regards et del’attention médiatique.

En effet, d’après de nombreuses sources, lesEtats-Unis auraient mis en place toute unetoile de centres secrets, dont la base deGuantánamo ne serait que la face visible.Bien d'autres questions concernant Guantá-namo restent sans réponse. Ainsi, AmnestyInternational a reçu des informations selonlesquelles des agents d'autres pays, notam-ment la Chine et la Libye, se trouvaient àGuantánamo et participaient aux mauvaistraitements infligés aux détenus. L'organi-sation n'a reçu aucune réponse satis-faisante à ce sujet.

Les auteurs de sévices aiment le secret. Lesecret favorise les tortures et les autrestraitements cruels, inhumains etdégradants. Il permet également dedissimuler l'ampleur de ces agissements.

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DO-IT-YOURSELF • Dossier pédagogique | 11

Une plaque tournante pour les «restitu-tions»Guantánamo Bay fait partie d'un réseaumondial pour les «restitutions». Ceprogramme illégal dirigé par la CIA faitappel à des avions loués par des sociétésprête-noms ou des compagnies d'aviationreconnues pour transférer secrètement desdétenus vers d'autres États – notammentl'Égypte, la Jordanie et la Syrie – où lesinterrogatoires sont fréquemment assortisde tortures.

Nombre des personnes qui auraient ététorturées dans ces pays ont ensuite étéenvoyés à Guantánamo. L'un des avionsutilisés par la CIA, un Gulfstream V succes-sivement immatriculé N379P, N8068V etN44982, a effectué plus de 50 voyages versGuantánamo, ce qui lui a valu le surnomde «Guantánamo Bay Express».

Des «sites noirs» à GuantánamoPar le biais du programme de «restitu-tions», des personnes ont été envoyées versd'autres prisons contrôlées par les États-Unis dans le monde entier, y compris versles centres de détention clandestins géréspar la CIA, les fameux «sites noirs». On asignalé l'existence de tels centres enAfghanistan, à Diego Garcia (un territoirebritannique situé dans l'océan Indien), enJordanie, au Pakistan, en Thaïlande et dansdes pays d'Europe de l'Est.

Le 6 septembre 2006, le président Bush afinalement confirmé des informations quicirculaient depuis longtemps, à savoir queles États-Unis avaient recours aux déten-tions secrètes et aux disparitions forcées –qui constituent un crime au regard dudroit international – dans le cadre de leur«guerre contre le terrorisme».

Le transfert d’un détenu à Guantánamo enavril 2007 prouve d’ailleurs que le réseauaméricain de centres de détention secretsest toujours opérationnel, même si lesautorités n’ont jamais révélé combien depersonnes avaient été placées en détentionclandestine.

Pour en savoir plus, voir le rapportd’Amnesty «Guantánamo, la pointeémergée de l’iceberg», disponible surhttp://web.amnesty.org/library/index/fraamr511902006

Silence, on torture !Les sévices dont témoignent les photosprises à Abou Ghraib ont fait l’objet d’unecondamnation unanime, mais d’autrestortures et mauvais traitements ont étéinfligés par des fonctionnaires américainspar la suite : des détenus ont été soumis àun isolement prolongé, à des privations desommeil et des sens, à des humiliationssexuelles et autres, à des simulacres d’exé-cution et à d’autres menaces.

Des témoignages continuent d’arriverd’Afghanistan, de Guantánamo, d’Irak etd’ailleurs. Le gouvernement des États-Unisa mené un certain nombre d’examens etd’enquêtes sur le traitement et les inter-rogatoires de détenus, mais aucun ne s’estcaractérisé par l’indépendance nécessaireet n’a été poussé assez loin. Pour que toutela lumière soit faite sur les violations quisemblent avoir été commises sous laresponsabilité des forces américaines(détentions arbitraires, «disparitions», actesde torture et autres traitements cruels,inhumains ou dégradants, en particulier),il faut que des investigations exhaustives,transparentes et indépendantes soientmenées sur ces crimes.

Un nouveau rapport d’Amnesty montre quela grande majorité des personnes toujoursdétenues à Guantánamo sont maintenuesdans des conditions cruelles d’isolementqui bafouent les normes internationales.Pour voir le rapport, allez surhttp://www.amnestyinternational.be/doc/article10398.html

C’est Bush qui le dit !« N’oubliez pas, ceux qui sont à Guan-

tanamo Bay sont des tueurs. Ils ne parta-gent pas nos valeurs».

«Il s’agit de tueurs de sang-froid quitueront s’ils sont remis en liberté».

G. W. Bush

«Les Etats-Unis sont engagés dans la luttemondiale pour l’élimination de la tortureet nous menons cette lutte par l’exemple».

G. W. Bush

Mais d’autres ne pensent pas commelui :

«Nous n’avons sûrement pas capturé lesbonnes personnes.»

Michael Scheuer, agent de la CIA,

qui était responsable de l’unitéchargée de surveiller les groupes liés

à Osama Bin Laden jusqu’en 1999.

«Oui, ils pourraient être détenus là pour lereste de leurs vies.»

Cully Stimson, assistant député dusecrétariat à la défense des détenus.

Les tracts diffusés par les USA après le11 septembre en Afghanistan et auPakistan Un grand nombre de suspects livrés auxAméricains ont été dénoncés par des habi-tants, uniquement par appât du gain.

Il faut dire que les tracts promettaient desgrandes sommes d’argent comme récom-pense en échange de combattants d’AlQaïda et de Talibans capturés. Beaucoupdes personnes arrêtées à l’époque ontensuite été transférées à Guantanamo.Voici la traduction des tracts :

«Vous pouvez avoir plus de richesse et depouvoir que ce que vous n’aviez jamais pu

rêver… Vous pouvez recevoir des millionsde dollars américains en aidant les forces

anti-Taliban à attraper les criminelsTaliban et d’Al Qaïda. Cette somme d’ar-

gent est assez élevée pour que vous puissiezprendre soin de votre famille, de votre

village et de votre tribu pour le reste devotre vie. Vous pouvez acheter du bétail,

payer pour aller chez le médecin, pouracheter des livres pour l’école ainsi que des

logements pour tout votre peuple.

Chers habitants, les terroristes d’Al Qaïdasont nos ennemis. Ils sont les ennemis de

votre indépendance et de votre liberté.Allons-y. Trouvons leurs cachettes secrètes.

Recherchez-les et informez le service provin-cial et gagnez la récompense.»

D’où vient la guerre contre leterrorisme ?La «guerre contre le terrorisme» ou «guerrecontre la terreur» est un concept développépar l’administration américaine de GeorgeW. Bush après les attentats du 11septembre. Il s’agit de diverses actions poli-cières, politiques et militaires que réalise legouvernement des Etats-Unis (avecdifférents alliés) contre différentes organi-sations liées au terrorisme islamiste (Al-Quaïda, le Hamas, le Hezbollah).

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12 DO-IT-YOURSELF • Dossier pédagogique

Ce type de guerre est dénoncé par denombreuses personnalités :

«La guerre contre le terrorisme est uneguerre menée contre les peuple, déstruc-

turant les sociétés pour mieux dominer ouéliminer des populations. [...] . Des milliersde civils innocents ont été tués, entraînantla colère de millions de personne à traversle monde. [ ...] Le monde risque en effet de

sombrer dans une escalade de violence».Georges Sorros

Procès à Guantánamo ? Plutôt uneparodie de justice !Les Etats-Unis ne respectent pas les conven-tions internationales qu'ils ont pourtantsignées : les personnes détenues à Guantá-namo n'ont pas le droit de choisir leuravocat, les aveux sont considérés commedes éléments de preuves recevables mêmesi les accusés déclarent qu'ils ontété arrachés sous la torture, etc. En outre,les détenus n'ont pas le droit à la présomp-tion d'innocence (c'est-à-dire que, dans uneprocédure équitable, les détenus doiventêtre présumés innocents jusqu'à ce queleur culpabilité ait été prouvée de manièreirréfutable). Or tous les détenus de Guantá-namo ont été assimilés à des “combattantsennemis”, c'est-à-dire qualifiés de “tueurs”et de “terroristes”. Mais la plupart d'entreeux sont privés de liberté depuis plusieursannées sans avoir été jugés ni mêmeinculpés. Seuls dix détenus ont été inculpésjusqu'à présent.

Guantánamo en quelques chiffres– 5 mètres sur 3 – la taille moyenne d’une

cellule à Guantanamo– 1805 – le numéro de jours que des

centaines de prisonniers ont passé àGuantanamo sans accusation ni procès àcompter du 10 décembre 2006

– 430 – environ le numéro de personnesen détention à Guantanamo à compterdu 17 novembre 2006

– 14 – le numéro de «prisonniers de hautevaleur» (ou jugés comme tels par lesautorités) détenus à Guantanamo

– 13 – l’âge de Mohammed Ismail Agha,quand il a été arrêté par les Américainsen Afghanistan fin 2002, avant d’êtretransféré à Guantanamo

– 10 – le nombre de détenus à Guanta-namo qui ont été accusés d’un crime

Tentatives de suicide et d’automutilation– 350 – incidents d’automutilation à Guan-

tanamo en 2003– 110 – incidents de mutilation/ suicide

ont été rapportés en 2005– 34 – le nombre de prisonniers dont les

actes d’automutilation étaient jugéscomme «tentative de suicide» par lesEtats-Unis depuis janvier 2002

– 23 - le nombre de prisonniers qui onttenté de se pendre ou s’étrangler en août2003

– 21 – le nombre de prisonniers dont latentative de suicide étaient qualifiés parles agents comme des gestes visant à«attirer l’attention»

– 3 – le nombre de prisonniers qui sontmorts en détention à Guantanamo à lasuite d’un suicide apparent

Détenus sans indices valables– 55% - de détenus n’ont pas été accusés

d’avoir commis des actes hostiles contreles Etats-Unis

– 40% - de détenus qui n’ont aucuneconnection définitive avec Al Qaïda

– 18% - de détenus qui n’ont aucuneconnection définitive avec Al Qaïda oules Talibans

– 8% - de détenus qualifiés de combattantsd’Al Quaïda

À l’époque où les Etats-Unis ont offert desgrandes primes pour la capture dessuspects :– 86% - des prisonniers qui n’ont pas été

arrêtés sur le champ de bataille, mais quiont été arrêtés soit par le Pakistan soitpar l’Alliance du Nord et après ont étéremis aux autorités américaines

Source : Denounce Torture, Action Guide,Amnesty USA, 2006.

Action pédagogique : Et si on te mettaitdans une cellule de Guantanánamo ?Voici une action de sensibilisation à laquestion des conditions de détention desprisonniers de Guantánamo et de la peinede mort en Chine. On joue sur lecontraste : le fait qu’une surface est vrai-ment trop petite quand on considère unecellule à Guantánamo, et en même tempstrop grande quand on voit le cimetière enChine. L’idée est de faire passer une fardede jeune en jeune, ou de classe en classe.

«Passe le message». Il s’agit de diffuser àune vingtaine de jeunes une fardecontenant 100 feuilles A4. Sur chaquefeuille : 77 croix.

Sur une feuille introductive est simplementécrit :

Bonjour.Il y a ici un paquet de feuilles. L’exer-

cice est très simple :•1.Tu te trouves un endroit un peu dégagé.•2. Tu poses ces feuilles par terre (pas celle-ci,

sans quoi tu ne pourras plus lire la suite),côté imprimé vers le haut. Elles doiventformer un grand rectangle de 10 feuilles delarge et 10 feuilles de long.

•3. Voilà. Cette surface, c’est la dimension dela cellule dans laquelle Shaker Aamer estenfermé depuis 5 ans, à Guantanamo.Personne ne sait ce qu’on lui reproche.Personne ne peut même dire quand il serajugé.

•4. Voilà. C’est tout.•5. Enfin non, pas tout à fait. Tu vois toutes

les croix, là ? C’est comme un cimetière.Chaque croix représente une personne, uncondamné à mort exécuté en Chine – rienqu’en Chine – en 2006, d’après les sourcesfiables d’Amnesty. Les autorités en avouent7 fois moins.

•6. Tu peux récupérer les feuilles et passer ledossier à quelqu’un d’autre, pour qu’ilsache, lui aussi.

Source : Groupe Amnesty de Chaumont-GistouxPour plus d’infos sur le déroulement decette action, contactez Laurent Deutsch :[email protected]

Pour en faire plus /Pour passer à l’action– Vous pouvez trouver des témoignages

vidéos d'anciens détenus de Guantánamoet de leur famille sur le site suivant:http://web.amnesty.org/pages/guantana-mobay-cases-fra

– Pour consulter tous les articles traitantde Guantánamo ainsi que les actions quevous pouvez mener (pétitions ou lettres)www.amnestyinternational.be/doc/article9241.html

– Visionnez en classe le film “The Road to

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DO-IT-YOURSELF • Dossier pédagogique | 13

Guantánamo” qui relate l'histoire vraiede quatre jeunes Anglais partis célébrerle mariage d'un ami au Pakistan, leurpays d'origine, fin septembre 2001.

– Voir aussi «Silence on torture», d’AntoinePlantevin (30 minutes) : documentairesur les prisons cachées de la CIA, 2007

– Un journaliste de Libération a réalisé unexcellent reportage sur la base deGuantánamo. On y entend notammentdes militaires, qui justifient l’existencedu centre…«Vous ne trouverez nulle part ailleurs auxEtats-Unis ce niveau de soins» ;«Leurs grèves de la faim, leurs tentatives desuicide, tout ça ce sont des tactiques de guerreasymétrique» ;«Ca ne m’empêche pas de dormir…» (…) ;«La question n’est pas de savoir s’ils sont inno-cents, mais de savoir s’ils sont des combattantsennemis illégaux». (…)Voir «Guantánamo vu de l’intérieur» surhttp://grangereau.blogs.liberation.fr/video

– Proposez à vos élèves de participer à lacroisière virtuelle d'Amnesty contreGuantánamo. Il faut choisir un person-nage et embarquer à bord du navired’Amnesty…http://amnesty.textdriven.com/guantanamo/home/

– Dans la même idée, montrez à vos élèvesles sites sur les restitutions de prison-

niers : www.airtorture.com ouwww.terrorairlines.com

– Réalisez avec vos élèves une vidéo présen-tant votre mobilisation pour obtenir lafermeture de Guantánamo. Inspirez-vousdes réalisations présentées sur le site:http://noise.amnesty.org/ Vous pouvez également mettre en ligne,sur ce même site, vos vidéos.

– Empruntez-nous les salopettes orangessymbolisant la tenue vestimentaire desprisonniers de Guantánamo (elles sontdisponibles chez Amnesty) et organisezun happening sur le modèle des actionsd'Amnesty dans le monde. Pour voir desexemples de manifestations déjà réali-sées, visitez le blog:http://blogs.amnesty.org/blogs/closeguan-tanamo/

– Organisez dans votre école une action«torture» afin de faire réagir les autresélèves à l’horreur de la torture. Atten-tion, cela ne s’improvise pas. Nouspouvons vous donner des conseils, vousmettre en contact avec une troupe dethéâtre-action ou encore vous montrerun exemple d’action en vidéo. Nous insis-tons sur le fait que cette action doit êtreencadrée par des adultes et prolongéed’une information sur le message de lacampagne. N’oubliez de demander l’au-torisation de la Direction !

–Allez voir avec votreclasse la pièce «Unpour la route», oufaites-la venir dansvotre école. Cettepièce de Harold Pinteret mise en scène parJean-François Novilleparle de la torture etpropose une anima-

tion avec les comédiens sur le thème durapport à l’autorité. L’animation reposesur les trois principes énoncés parHannah Arendt : idéologie positive (jedéfends ma patrie et mes valeurs face àla barbarie des «autres»), rapport à l’auto-rité, admiration du leader idéologique (jene suis pas seul—je fais partie d’un tout—Dieu s’exprime par ma bouche) et impu-nité (je suis couvert par mes supérieurs-expérience de Philadelphie). L’objectif del’animation et du spectacle est de mettre

en évidence auprès des élèves que toutun chacun peut être conditionné àdevenir un tortionnaire, et que leprocessus de torture mentale relève d’unchoix idéologique et non pas d’une fata-lité ou d’un rapport de force.La pièce sera jouée de mi-octobre à mi-décembre 2007, et de mi-janvier à mi-mai2008.Pour plus d’informations, contactez leThéâtre Varia au 02/640 35 50 ou [email protected]

Vous pouvez aussi inviter dans votreécole les comédiens de la FreeeksFactory, qui ont mis au point dessketches basés sur le film «Do-it-yourself»,destinés à faire réagir les élèves… Pourtoute information sur cette animation,contacter le 0473/45 23 06 [email protected]

MATERIEL PROMOTIONNEL Commandez les badges, les banderoles, lesautocollants gratuits…Matériel à vendre : t-shirts, affiches A2,bics... Voir sur la boutique : www.amnestyinternational.be/shopping

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14 DO-IT-YOURSELF • Dossier pédagogique

II.3. Activité 6 –Tableau - carteTableau :Reprenez le tableau commencé lors de lapremière activité et complété tout au longdes travaux et débats. Que pouvez-vous enretirer ? Que pensent les élèves de l’évolu-tion des informations. Leur vision sur lapratique de la torture a-t-elle changée ?Faites en sorte que ce tableau soit le plusvisuel possible et affichez le en classe àcôté des autres travaux éventuels sur latorture. Vous pouvez aussi l’illustrer.

Carte :Sur une carte du monde, marquez d’unsymbole les pays où on pratique la tortureet les pays où il y a du terrorisme. Quellesconclusions pouvez-vous en tirer ?Vous pouvez faire cet exercice au cours degéographie.

II.4. Activité 7 –ConclusionLa fin justifie-t-elle les moyens ? Jusqu’oùest-on prêt à aller ? L’autorité a-t-elletoujours raison ? Quelle est la place dulibre arbitre ?

Il est possible de débattre de ces questionsen classe ou de les proposer comme sujetde dissertation. Quoi qu’il en soit, chacunaura sa propre réponse. L’important c’estsurtout que les élèves se rendent compte aubout des différentes activités que la torturen’est pas une réponse et que jouer le jeu dela torture, c’est jouer le jeu de l’arbitraire,de la terreur, de la peur, de l’impunité etdonc de la privation des droits de chaqueêtre humain.

Réflexion :La torture est arbitraire car elle ne répondpas à une logique claire délit/punition,nous pouvons tous risquer de subir latorture un jour même si nous n’avons riencommis d’illégal. L’arbitraire entraine laterreur et la terreur entraine la peur.

«L’histoire a montré que l’espérance et l’op-timisme – contrairement à la peur – sont

des facteurs de progrès. Alors pourquoicertains dirigeants jouent-ils sur la peur ?

Parce qu’elle renforce leur pouvoir, créée defausses certitudes et permet de se sous-

traire à l’obligation de rendre des comptes»Irène Khan, Rapport annuel

d’Amnesty International, 2007.

A voir : sur le DVD, visionnez letémoignage d’Eren Keskin, une avocateturque victime de torture. Attention, lasituation décrite date d’avant 2000, laTurquie a depuis fait beaucoup d’effortspour lutter contre la torture et pour punirles personnes qui s’en rendent coupable.Voir aussi les autres témoignages repris surle DVD, comme celui de Sihem Bensedrine,militante et journaliste tunisienne desdroits humains, ou celui de Maher Arar,torturé en Syrie après avoit été livré par lesÉtats-Unis.

Personne n’est protégé du risque de subirun jour la torture. Dans nos sociétés

démocratiques, même si elle n’est pasprévue dans les techniques d’interroga-toires, la torture et les mauvais traitementssont parfois pratiqués. Beaucoup de jeunesont été un jour arrêtés pour délit de salegueule.

Lors d’animations sur la torture et la peinede mort dans les écoles belges et dans lesIPPJ (centres pour jeunes délinquants enBelgique), Roland d’Hoop, responsablejeunesse d’Amnesty International Belgiquefrancophone, entendait souvent les jeuneslui raconter la même histoire : les policiersqui donnent des coups de bottins sur latête, juste pour humilier le jeune, commepour lui dire «on peut te traiter comme ça, cartu ne mérites pas le respect». Quand ildemandait aux jeunes pourquoi ils neportaient pas plainte, la réponse était : «quevaut la parole d'un jeune contre celle d'un f lic? Etsi je porte plainte, que m'arrivera-t-il si jeretombe sur le même f lic en rue ?»

Cela prouve qu’il ne faut pas voyager trèsloin pour être confronté aux mauvaistraitements ou à des actes de torture,même si ces actes sont interdits et punispar la loi. À partir du moment où unpolicier ou un représentant de l'ordre sesent investi d'une telle supériorité, d'un telpouvoir sur un suspect ou sur quelqu'unqui a le défaut de ne pas lui plaire, et àpartir du moment où il a l'impression qu'ilne sera pas puni ou que ses actes ne sontpas graves, tout peut arriver. Même dansun pays comme la Belgique, dont la Consti-tution protège pourtant les citoyens contreces abus d'autorité.

Questions :– Demandez aux élèves si certains ont déjà

vécu ce type d’expérience ? Qu’ont-ilsressenti ?

– Ont-ils porté plainte ? Si oui, pourquoi ?Si non, pourquoi ?

– Que pensez-vous des baptêmesétudiants ? Peut-on les comparer à de latorture ?

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Nous vous proposons ici quelquesanimations pour aller plus loindans votre réflexion. La plupart deces pistes sont tirées du dossierpédagogique «Papiers Libres»d’Amnesty International publié en2000. Vous pouvez trouver l’inté-gralité de ce dossier sur notre siteà cette adresse :http://www.amnestyinternational.be/doc/rubrique75.html

III.1. Le rapport à l’autoritéCitations«Le seul tyran que j’accepte sur cette terrec’est ma petite voix intérieure.»

Gandhi«La désobéissance civile est un droitimprescriptible du citoyen, il doit oser s’enservir sans crainte de cesser d’être unhomme.»

Gandhi

«Les “nouveaux” qui arrivent au campapprennent d’emblée que, pour survivre, ilfaut, comme les “anciens”, adopter l’uni-vers du camp et les valeurs des nazis. Pourtous les autres, l’issue de cette vie inhu-maine est la mort, choisie ou acceptée.»

Bruno Bettelheim

«Quand je vois des soldats marcher au pasau son de la musique militaire, je medemande pourquoi ils ont un cerveau ; lamoelle épinière leur suffit.»

Albert Einstein

Vous pouvez lire ces citations avec vosélèves et leur demander leurs avis. Expli-quez bien chaque citation, surtout celle deGandhi parlant de la désobéissance civileafin que le terme ««ddééssoobbééiissssaannccee»» ne portepas à confusion.

Activité pédagogique : L’expérience de MilgramAvant d’analyser la vraie expérience deMilgram, nous vous proposons de «mani-puler» vos élèves en leur faisant croire qu’ilest normal de pouvoir envoyer desdécharges électriques sur des êtreshumains pour mener à bien une recherchescientifique sur la mémoire. Lorsqu’ils

réagiront sur la procédure, faites attentionde garder le discours et le regard du scien-tifique qui observe, qui ne juge personne.

Expliquez comme suit à vos élèves l’expé-rience de Milgram, sans notifier que vousvoulez susciter une réflexion sur lesrapports d’autorité et la torture.

Il s’agit d’une expérience sur la mémoirefaite en 1974 aux Etats-Unis. Un médecinen blouse blanche proposa à des personnesde l’aider dans sa recherche sur l’apprentis-sage et la mémoire. Après avoir lu desinformations à un malade ligoté sur unechaise, le volontaire devait lui poser desquestions de mémoire. À chaque mauvaiseréponse, il fallait administrer une déchargeélectrique et les décharges administréesdevaient croître en puissance au fur et àmesure. On pouvait entendre les cris et voirpar un hublot les convulsions et évanouis-sements du malade. Il a fallu, chaque foisque l’interrogateur hésitait à administrerune nouvelle décharge, qu’il soit encouragépar le médecin. Le travail de l’interrogateurétait d’autant plus difficile qu’il était écritsur l’appareil «chocs dangereux» à côté dela puissance de 375 volts. 35% des interro-gateurs envoyèrent des décharges de 300volts sans que les troubles de mémoire ne

PISTES PÉDAGOGIQUES SUR LA TORTURE

Troisième partie

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16 DO-IT-YOURSELF • Dossier pédagogique

AIBF EN ACTION

se dissipent. Les 65 autres % atteignirent450 volts. L’expérience conclut que leschocs électriques ne sont pas des incitantspour la mémoire et qu’ils sont doncinutiles en cas de perte de mémoire.Attendez les réactions des élèves et expli-quez assez vite que l’expérience portait enfait sur l’autorité, que le médecin étaitMilgram lui-même, que les déchargesn’étaient pas réellement envoyées, que lesmalades ligotés étaient des comédienssimulant la souffrance et que l’expérienceconclut que nous sommes tous dangereuse-ment influençables. Précisément, lesconclusions de Milgram furent celles-ci :certaines personnes acceptent n’importe queltravail pourvu qu’elles soient sous l’autorité d’unepersonne qui en supporte la responsabilité, notrenature humaine connaît le «phénomène dupremier pas» : une fois que l’on a fait quelquechose (surtout quand c’est quelque chose destupide ou qui provoque une tension), on tend àse justifier en continuant ce que l’on fait, voire, enl’amplifiant, surtout si on s’est impliqué. C’est leprincipe du petit compromis qui, de fil enaiguille... mène à la compromission.

Pour rappel :CCoommpprroommiiss :: accord obtenu par des conces-sions réciproquesCCoommpprroommiissssiioonn :: action de compromettreou de se compromettre ; accommodementconclu par lâcheté ou par intérêt.

Débat : interroger les élèves sur lamanipulation– Quelles ont été vos réactions (incrédulité,

indignation, indifférence, approba-tion,…) face à l’idée même d’une expé-rience scientifique basée sur la torture ?Pourquoi ?

– Comment réagissez-vous face à la trom-perie dont vous venez juste d’êtrevictime ?

– Pouviez-vous imaginer que nous sommestellement influençables ?

– Connaissiez-vous par votre propre expé-rience le «phénomène du premier pas» ?

– Comment expliquez-vous la petite phrasede Socrate «Connais-toi toi-même» ?

– Quels sont les ordres qui ne sont pas légi-times ? Dans quelle situation peut-onparler du «devoir de désobéissance» ?

Outils pédagogiquesSupport audio-visuel :

- Le film policier «Icomme Icare» deHenri Verneuil en1979 avec YvesMontand contient ladescription de l’expé-rience de Milgram.Utile pour lancer undébat.

- «Le fils de monvoisin», film danois de 1982 (65’). Jusqu’en1974, au quartier général de la police mili-taire grecque à Athènes, de jeunes mili-taires sont enrôlés pour pratiquer latorture. La Grèce connaît alors les empri-sonnements politiques et des cas detorture. Disponible en prêt à la Média-thèque.

--Dans «La Jeunefille et la Mort» deRoman Polanski, ily a une scène où letortionnaire (BenKingsley) explique àsa victime(Sigourney Weaver)pourquoi il latorture, en sebasant sur le

respect des règles et de l’ordre établi. Faitesla comparaison avec la justification de latorture dans le cadre de la guerre contre leterrorisme.

Roman : Dans «Le meilleur desMondes» d’AldousHuxley, le pouvoir créeune société de cloneshumains, où lesdéviants sont standar-disés, où la science semet au service d’uneidéologie totalitaire.Voir aussi la pièce dethéâtre «Un pour la

route» de Harold Pinter (pour plus d’infossur la tournée de cette pièce, voir laDeuxième partie – Pour en faire plus / Pourpasser à l’action).

III. 2.Morale / ReligionHistoire La torture est-ellemoralement accep-table ?

A priori, chacun s’attend à une réponseunanime : non, la torture est un actebarbare. Mais faites le test dans votreclasse : combien sont d’accord avec l’idéeque Marc Dutroux mérite la torture ?

Même si le débat risque d’être ardu, voiciquelques arguments pour vous aider àéviter de tomber dans une discussion tropémotionnelle et pour revenir à un débat defond, sur les valeurs humaines.

Est-ce que le fait de torturer quelqu’un lerendra plus respectueux des autres ?Pourra-t-il mieux prendre conscience dumal qu’il a fait ? Ou au contraire aura-t-ilencore plus de haine en lui de la société ?

Si on accepte la torture dans certainessituations bien précises, cela risque inévita-blement d’entraîner des dérives (on saitque les limites ne sont jamais totalementrespectées : ce n’est pas parce que la vitesseest limitée à 120 km sur l’autoroute quechacun respecte cette règle !).

Il y a toujours le risque de torturer uninnocent.

Si on accepte le principe de la torture, ondoit alors accepter d’être un bourreau.

La torture est un acte lâche : un homme, lebourreau, a tous les pouvoirs sur un autrehomme sans défense.

«Ne fais pas à l’autre ce que tu ne voudrais pasqu’il te fasse». Ce principe revient danstoutes les grandes religions monothéisteset chez la plupart des philosophes. Il s’ap-plique parfaitement à la torture.

Torture et douleur : les cauchemars desvictimesQui dit torture dit douleur. Certainesvictimes sont marquées à vie, physique-ment et psychologiquement. Il leur est très

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DO-IT-YOURSELF • Dossier pédagogique | 17

difficile de se réadapter à la vie quoti-dienne. En plus de la douleur, il y a la peurde n’être pas cru, de n’être pas compris parles autres. Et parfois un sentiment deculpabilité de s’en être sorti, alors qued’autres y sont restés. Certains médecins serendent complice des tortionnaires, tandisque d’autres font tout pour soigner leursvictimes.

Pour découvrir des témoignages devictimes, pour mieux comprendre les liensmalsains entre médecine et torture, lire«Douleur morale et physique» surhttp://www.amnestyinternational.be/doc/article106.html

III. 3. Histoire : à larecherche d’un bouc-émissaire

L’être humain est un être social qui abesoin de l’autre pour exister. Mais danschaque relation, il y a des contradictions,tour à tour, l’autre suscite de l’intérêt oueffraye. L’angoisse fait partie de l’êtrehumain. En grandissant, on découvre lemonde, certaines peurs s’estompent etd’autres apparaissent. En général, nous

avons peur de l’inconnu et selon notreexpérience personnelle, cette peur resterasoit «acceptable» et elle sera dépassée, soitelle deviendra «inacceptable» car injustifiéeet elle sera alors amplifiée.

Souvent, face à nos peurs, nous avonsbesoin d’un défoulement, c’est-à-dire deprojeter l’origine de nos peurs sur quelquechose ou quelqu’un (une personne ou ungroupe). C’est ce qu’on appelle un «boucémissaire». Pour Jean Delumeau, «se mobi-liser contre quelqu’un est un exutoire idéal» (J.Delumeau, La peur en Occident, Fayard,1978).

Aujourd’hui, nos peurs concernent la peurdu lendemain, le chômage, la précarité, lasécurité, etc. Les médias véhiculent cesentiment profond d’insécurité. Cesangoisses sont difficilement gérables etnous leurs cherchons un responsable, quipeut être l’autre, l’étranger, l’immigré juif,arabe, italien ou autre selon les lieux et lesépoques, bref celui qui est différent denous, celui qui menace notre confort, noscertitudes.

Le fait de faire porter les responsabilitésd’un problème ou d’une crise à un groupeparticulier donne une illusion de contrôle.La peur provient très souvent de notreaffectif et non de notre raison. Raison deplus pour s’informer, pour s’intéresser à

l’autre. (Racisme et discriminations, dossierpédagogique du Centre d’Information et deDocumentation pour les Jeunes, disponiblesur le site www.cidj.be) – dossier papierslibres 2005

Le dernier bourreauanglaisVoici le témoignage du dernier bourreauanglais chargé des exécutions capitales. Ildémissionna de sa fonction en 1956, dixans avant que la peine de mort soit abolieen Grande-Bretagne. À l’époque, le gouver-nement lui interdit de révéler ses motiva-tions. Après avoir pris sa retraite, il parla.

«Pendant mes vingt-cinq années d’activitéen tant qu’exécuteur, j’ai fermement cruexercer une tâche d’utilité publique. J’aimené chaque exécution avec grand soin etla conscience nette. Je ne me suis jamaispermis d’interférer dans la controverse àpropos de la peine de mort.

Maintenant, j’espère sincèrement qu’aucunhomme ne sera plus appelé à devoiraccomplir une exécution dans ce pays. Jesuis arrivé à la conclusion que les exécu-tions ne constituent pas une solution, maissont seulement des reliques du désir devengeance. C’est une manière facile decharger d’autres du soin de se venger. (…)J’ai agi pour le bien de l’Etat et j’ai toujoursété convaincu que ce que je faisais était laméthode la plus humaine et la plus dignede mettre à mort un délinquant -que lasentence de mort ait été juste ou pas. (…)Mais la conclusion de cette expérience a unarrière-goût amer : je ne crois pas mainte-nant qu’aucune des centaines d’exécutionsque j’ai conduites ait pu -d’une manièrequelconque - prévenir quelque crime quece soit. La peine capitale n’est rien d’autre,selon moi, qu’un acte de vengeance.»

Quelle est la part de conscience indivi-duelle laissée au bourreau ? Agit-il en tantqu’être humain ou en tant que robot ? Y a-t-il dans l’histoire belge des témoignages debourreaux repentis ? Cherchez de la docu-mentation sur les mauvais traitements ettortures infligés par les colons belges auxpopulations du Congo durant la colonisa-tion.

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18 DO-IT-YOURSELF • Dossier pédagogique

Activités pédagogiques :«Ceux qui sont prêts à renoncer à la liberté

pour obtenir la sécurité, ceux-là n’aurontet ne méritent ni l’une ni l’autre»

Thomas Jefferson, Président desEtats-Unis de 1801 à 1809

Méditez cette réflexion. Etes vous d’accordavec Thomas Jefferson ?

Cherchez à travers l’histoire, des conflitspour lesquels on a fait porté les responsabi-lités à un groupe particulier. Ex : l’inquisition, la chasse aux sorcières,...

III.4. LittératureLL’’oobbééiissssaannccee,, ddee FFrraannççooiiss SSuurreeaauu,, GGaallllii--mmaarrdd..

Furnes, mars 1918. La guerre,la Grande, est sur le pointd’être perdue. Les arméesmultiplient les assauts. Aumilieu du chaos, un soldatbelge est condamné à mort. Ila tué pour voler les deux

femmes qui l’hébergeaient. Pas de pardonpour un tel crime, à un tel moment. Alorsque tant d’hommes risquent leur vie sur lechamp de bataille, il faut faire un exemple.Mais, problème. Depuis cinquante ans, laBelgique n’exécute plus ses criminels. Et nepossède plus la fameuse machine à tuer.Qu’à cela ne tienne. Le gouvernement belgefait appel à la France qui accepte de prêterbourreau et guillotine. Second problème.Pour arriver à Furnes, il faudra traverser leslignes ennemies. Et l’impensable seproduit. Des sauf-conduits seront délivréspar tous les belligérants. Ainsi les États semettront-ils d’accord, non pour arrêter lemassacre, mais pour permettre la mise àmort en toute légalité d’un homme deplus. Sur cette histoire vraie, FrançoisSureau livre un roman bâti sur des lettres,des extraits de témoignages, des circulairesadministratives. Et brosse ainsi quelquesportraits, celui terrible du bourreauDeibler, celui des membres de l’escorte, quin’ont qu’un souci : mener à bien la missionconfiée, sans trop se poser de questions.Car le grand sujet de ce livre c’est bienl’obéissance aux ordres. Une méditationsur la conscience de ceux qui acceptent,qui consentent malgré eux, malgré tout…Doctrine qui a mené, notamment, auxévénements épouvantables de notre siècle.

PPiittiiéé ppoouurr llee mmaall,, ddee BBeerrnnaarrdd TTiirrttiiaauuxx,, éédd..JJCC LLaattttèèss

Fin août 1944, une colonnedisparate d’Allemandsdémobilisés fait étape dansune ferme de Wallonie etréquisitionne chevaux etchariots pour rentrer chezeux. Indigné, Mutien, undes enfants du lieu,

entraîne son frère sur les traces du convoidans le but de reprendre Gaillard de Graux,un brabançon prestigieux, orgueil de sonpère, lui-même victime des nazis. Entreinconscience et témérité, les deux garçonspénètrent au coeur d’un pays ruiné maté-riellement et moralement. Ils connaissentsix semaines de dangers terribles et d’inou-bliables moments de fraternité. Sur le piedde guerre, ils donnent du fil à retordre audétachement ainsi qu’à un vieil officier dela Wehrmacht qui les a pris en sympathieet s’évertue à les protéger.

LLEESS BBIIEENNVVEEIILLLLAANNTTEESS,, ddee JJoonnaatthhaann LLiitttteell,,éédd.. GGaalllliimmaarrdd ((GGrraanndd PPrriixx dduu rroommaannddee ll’’AAccaaddéémmiiee ffrraannççaaiissee,, ssuuiivvii dduu pprriixxGGoonnccoouurrtt llee 66 nnoovveemmbbrree 22000066..))

Cet imposant roman deprès de 900 pages estconstitué par le récitrétrospectif de Maximi-lien Aue qui, des décen-nies plus tard, se penchesur une période crucialede sa vie : sa participa-tion aux massacres de

masses en tant qu’officier SS, entre 25 et30 ans. Il assume, au-delà du bien et dumal, son engagement nazi pour le peupleallemand conduit par le Führer, en ayantd’ailleurs le plus souvent une position d’ob-servation...

III. 5. LanguesétrangèresLe site internet www.humanrightsfirst.orgest en anglais.Proposez aux élèves d’y chercher des infor-mations sur l’analyse de l’impact de laviolence dans les séries télévisées ou sur leprojet « Primetime Torture ».

Toutes les sections d’Amnesty ont un siteinternet. Vous pouvez encourager vosélèves à aller les visiter.Amnesty Vlanderen : www.aivl.beAmnesty Allemagne :www.amnesty.de/ai.htmAmnesty international : www.amnesty.org.Ensuite, choisir la langue souhaitée (Espa-gnol, Arabe, Anglais, Français).

III.6. MusiqueVoici les paroles d’une chanson à exploiterau cours de musique.

PPaarroolleess ddee BBiikkoo ddee PPeetteerr GGaabbrriieellSeptember ‘77 Port Elizabeth weather fine It was business as usual In police room 619

** Oh Biko, Biko, because Biko Oh Biko, Biko, because Biko Yihla Moja, Yihla Moja The man is dead, the man is dead ...

When I try to sleep at night I can only dream in red The outside world is black and white With only one colour dead

** Oh Biko, Biko, because Biko Oh Biko, Biko, because Biko Yihla Moja, Yihla Moja The man is dead, the man is dead ...

You can blow out a candle But you can’t blow out a fire Once the flames begin to catch The wind will blow it higher

** Oh Biko, Biko, because Biko Oh Biko, Biko, because Biko Yihla Moja, Yihla Moja The man is dead, the man is dead ...

And the eyes of the worldare watching now ...are watching now ...

SStteepphheenn BBaannttuu BBiikkoo (1946-1977) est un mili-tant noir d’Afrique du Sud et une desgrandes figures de la lutte anti-apartheid.

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DO-IT-YOURSELF • Dossier pédagogique | 1919 | BILAN 2006

INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRESQuatrième partie

Cette partie est purement informa-tive. Elle vous servira à répondreaux questions et à gérer les débats.Elle ne doit donc pas être donnéetelle quelle aux élèves.

IV.1. Définition de la torture

Dans l’article 5 de la Déclaration univer-selle des droits de l’homme il est dit : «Nulse sera soumis à la torture, ni à des peinesou des traitements cruels , inhumains oudégradants.»

Mais alors qu’est-ce qu’un acte de torture ?Définir la torture n’est pas facile. En effet,comment établir un seuil dans la douleurqui distinguerait la torture des «traite-ments cruels, inhumains ou dégradants»,eux aussi utilisés dans des milliers deprisons à travers le monde ? L’intensité dela douleur et le caractère délibéré de l’acteseront déterminants pour qualifiercertaines pratiques de torture. A l’inverse,les «traitements cruels, inhumains oudégradants» sont parfois le résultat d’unenégligence (mauvaises conditions de déten-tion) ou n’ont pas nécessairement commebut de faire souffrir (mesures pénibles,

telles que l’emploi de menottes commemoyen de contrainte).

Selon l’ONU , pour qu’il y ait torture, ilfaut qu’il y ait :

– un bourreau qui représente une autoritéofficielle ou qui agit sous les ordres del’autorité ou avec son consentement(policier, militaire, médecin, bourreau,gardiens de prison…) ;

– une intention de la part du bourreaud’obtenir quelque chose de la victime(des renseignements ou des aveux), de lapunir d’un acte, de l’intimider ou defaire pression sur elle, ou pour toutautre motif fondé sur une discrimina-tion ;

– une douleur ou des souffrances aiguës,physiques ou mentales.

Historique de la tortureTout d’abord, il faut savoir que tous lespays du monde ont pratiqué la torture à unmoment de leur histoire. Mais seuls lesChinois, les Égyptiens et les Assyriens del’Antiquité nous révèlent, au travers detextes juridiques, qu’ils ont eu recours à latorture dans le but d’arracher des révéla-tions auprès des ennemis du pouvoir.

Durant l’Antiquité, on ne torturait que lesesclaves, considérés comme des animauxdomestiques, et les étrangers.

Ce n’est qu’après la chute de l’Empire

romain que la torture fut appliquée auxcitoyens et aux chrétiens afin qu’ils renon-cent à leur croyance et acceptent l’empe-reur comme la puissance divine. Il semblequ’ensuite elle fut moins fréquente.

Malheureusement, au XIIe siècle, onretrouve un argumentaire en faveur de latorture - composé par Justinien au VIe

siècle. C’est alors que la torture sera léga-lisée et utilisée par l’Eglise afin de luttercontre ses opposants. Durant l’Inquisition,les tortionnaires vont se perfectionner etinventer des tortures physiques et moralessusceptibles d’arracher des aveux aux«hérétiques». La situation devint tellementgrave et grotesque que certains papesexcommunièrent des ecclésiastiques hautplacés. Et parce que les Eglises catholiquesd’Espagne et du Portugal ne respectèrentpas les ordres de Rome, les «hérétiques»furent massacrés en masse, avec parmi euxune majorité maure et juive. (Du Xè auXVIe siècle, la torture est aussi attestée auJapon.)

Enfin, Montaigne au XVIe siècle et les philo-sophes des Lumières aux XVIIIe, dontMontesquieu, Diderot et Voltaire notam-ment, ouvriront les portes d’un nouvelhumanisme. Grâce à leur travail, Louis XVIla supprime en France, Frédéric II enPrusse, Marie-Thérèse en Autriche (elleconvint les juges de ne plus l’infliger maisne parvint pas à la rendre illégale), tandis

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20 DO-IT-YOURSELF • Dossier pédagogique

qu’en Russie, Catherine II ébauche le projetd’abolition (qu’Alexandre Ier adoptera en1801). On la supprime aussi à Venise, enLombardie et en Toscane. Mozart est de lapartie, il dédie à l’archiduc de Toscane sonopéra La Clémence de Titus, œuvreporteuse d’un message philosophique etmoral.Cependant, les guerres et leurs cortèges deviolations des droits humains n’épargnè-rent pas le XIXè siècle. La torture fut doncpratiquée malgré son statut illégal. Cepen-dant, l’horreur des conflits fit réagir leshumanistes et aboutit à la création en 1863de la Croix Rouge, un bond en avant dansla reconnaissance de la souffrance et l’aideaux blessés.

Les causes fondamentales de la réappari-tion de l’usage systématique de la tortureau XXè siècle sont l’émergence des totalita-rismes et la création des services de rensei-gnements spéciaux.

Source : Papiers Libres 2000 - «La disgrâcede l’humanité», Serge Patrice Thibodeau,VLB éditeur, 1999.

IV.2. Commentdevient-on un bour-reau ?– Le Journaliste : Vous connaissez

Monsieur X ?

– Le Tortionnaire : Oui, je m’en souviens.

– Le Journaliste : Quelles méthodes d’in-terrogatoire avez-vous utilisées ?

– Le Tortionnaire : Toutes. Passage àtabac, sous-marin, électricité…

-– Le Journaliste : Et si on vous avaitdemandé de torturer un enfant pourfaire parler un prisonnier, l’auriez-vousfait ?

– Le Tortionnaire : Oui. Sans hésitation.

– Le Journaliste : Sans hésitation ?– Le Tortionnaire : Absolument.

(extrait du « Fils de ton voisin », film dePeterson et Stephensen, sur la formationdes tortionnaires à l’époque des colonelsen Grèce. Voir l’extrait sur le DVD).

Ce dialogue montre à quel point unhomme peut se soumettre complètement àl’autorité, même lorsque l’ordre apparaîtcomme horrible. Pour cela, les bourreauxont souvent été soumis eux-mêmes à deshumiliations, à des situations où l’on peuttester leur degré d’obéissance. Il est plusfacile de manipuler quelqu’un qui estfaible, pour lui faire accomplir des actescontraires aux valeurs humaines.

Mais la torture n’est pas uniquement dueaux frustrations ou au sadisme de tortion-naires isolés, ou au manque de contrôle dela justice. Le bourreau est avant tout mani-pulé par le pouvoir qui considère souventla pratique de la torture comme faisantpartie intégrante de la stratégie en matièrede sécurité. Parce que la torture est unetechnique qui vise à supprimer toute oppo-sition, elle implique chez le bourreau uneobéissance à toute épreuve.

Pour cela, trois conditions sont souventnécessaires :– l’existence d’une idéologie qui conforte

le bourreau dans la conviction de l’uti-lité de son travail,

– le rapport d’autorité : le bourreau obéità un supérieur. Il est donc un simple«exécutant» et ne se sentira pas respon-sable,

– l’impunité : le bourreau est sûr qu’il nesera pas puni, puisque la justice est auxmains du pouvoir et que les juges sonttous corrompus.

Parler de l’évolution du profil du bourreauaprès le 11/09. Le bourreau est devenu unchic type, patriote qui sauve l’humanité.

IV.3. Quels sont les objectifs/ motiva-tions de la torture ?Lors de la Conférence internationale sur latorture, qui a eu lieu à Stockholm en 1996,Sally Sealy, une ancienne détenue et mili-tante des droits humains en Afrique duSud, a dégagé au moins quatre raisons quimotivent l’usage de la torture :

11)) OObbtteenniirr ddeess aavveeuuxx oouu ddeess rreennsseeiiggnnee--mmeennttss à objectifs officiels ! C’est la justifi-

cation pour légitimer voir légaliser latorture.On torture principalement pour forcer dessuspects à avouer les crimes dont on lesaccuse, ou à donner des informations quel’on croit importantes pour la sécurité del’Etat.C’est cet argument qu’invoque par exemplela Turquie pour justifier la torture, surtoutpratiquée contre les Kurdes. Le même argu-ment a été utilisé par le gouvernementisraélien, qui utilisait l’expression «pres-sions physiques modérées» pour désigneren fait les actes de torture pratiqués contrede soi-disant terroristes palestiniens oulibanais. Israël était le seul pays au mondeà reconnaître officiellement l’usage de latorture jusqu’en septembre 1999, date àlaquelle la Haute Cour de justice d’Israël adéclaré que cette pratique était illégale.Toutefois, il y a encore des tentatives d’au-toriser les services de sécurité intérieured’Israël (Shin Bet) à recourir à la forcephysique pendant les interrogatoires danscertaines circonstances.D’un point de vue moral et juridique, latorture est condamnée dans tous les textesinternationaux relatifs aux droits humains.Chaque fois que les forces de l’ordre obtien-nent l’aveu d’un crime par la torture, lasociété le paie d’un crime nouveau,accompli par ceux-là mêmes qui sontcensés faire respecter la loi.

22)) BBrriisseerr ll’’iinnddiivviidduu à objectifs plus offi-cieux, recherche d’un bouc-émissaire.On torture aussi dans le but de briser lesindividus physiquement et mentalement,pour les déshumaniser. On cherche ainsi àanéantir les personnes dont le caractère estexceptionnellement fort, parce qu’onestime qu’elles représentent une menacepour le pouvoir politique, qu’elles soienten liberté ou qu’elles soient en prison.Par exemple, on arrive à dépersonnaliserles prisonniers quand on leur ordonne dese déplacer dans tel sens et en silence, tousvêtus du même uniforme et le crâne rasé. Iln’y a alors plus de place pour la personna-lité, plus aucun droit à la liberté ni aumouvement. Certains prisonniers réagis-sent en désobéissant à ces ordres, afin d’af-firmer leur existence propre. Ainsi, MilenaJesenska, une journaliste tchèque arrêtéependant la Seconde Guerre mondiale pouravoir aidé des Juifs à fuir la Tchécoslova-quie, bravait ses gardiens en marchant

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DO-IT-YOURSELF • Dossier pédagogique | 21

dans le sens inverse de celui du groupe eten chantant tout haut ou en sifflotant, cequi lui valut plusieurs jours de cachot.Jean-Paul Sartre fut particulièrement sensi-bilisé au problème de la torture, ayant vécudurant la Deuxième Guerre mondiale etayant soutenu puis dénoncé le commu-nisme : «Le but de la question n’est pas seule-ment de contraindre à parler, à trahir : il fautque la victime se désigne elle-même, par ses cris etpar sa soumission, comme une bête humaine, auxyeux de tous et à ses propres yeux. Il faut que satrahison la brise et se débarrasse à jamais d’elle.Celui qui cède à la question, on n’a pas seulementvoulu le contraindre à parler ; on lui a pourtoujours imposé un statut : celui de sous-homme.»

33)) TTeerrrroorriisseerr ll’’iinnddiivviidduu oouu uunn ggrroouuppee ssoocciiaallLa torture est un instrument des plus fortscontre les plus faibles : les minorités, lesopposants, les membres de groupes sociauxdéfavorisés…Dans ce cas-ci, on torture dans le but defaire naître la peur dans des communautéset des groupes sociaux déterminés.Souvent, cette violence organisée prendpour cibles des minorités ethniques ousexuelles, ou encore les individus apparte-nant à des mouvements d’opposition poli-tique, que ces derniers soient armés ounon.C’est ici qu’on voit le caractère organisé etinstrumentalisé de la torture. La torturefait partie d’un système qui vise à fairepression sur la population en faisant des«exemples» afin que chacun reste à saplace. Très souvent, la torture est alors justifiéepar une idéologie raciste ou nationaliste,comme par exemple celle qui a conduit àl’épuration ethnique en ex-Yougoslavie oudans la région des Grands Lacs en Afriquecentrale (Congo, Rwanda, Burundi). EnAmérique, entre autres, la violence estdirigée contre les Mayas du Chiapas(Mexique) et du Guatemala, ou encorecontre les autochtones et les paysans duBrésil. En Colombie, on se livre au«nettoyage social» en s’acharnant contre lesenfants des rues, les toxicomanes, leshomosexuels, les prostituées… Quand cetteviolence ne mène pas directement auxmassacres ou au meurtre, elle se manifestepar la torture.Par contre, la torture est condamnable nonseulement sur le plan humain, mais aussicompte-tenu de ses aspects sociaux. Les

institutions qui en font l’usage en sontcorrompues : au lieu de rechercher lavérité et de s’occuper des problèmes réels,elles ont les moyens de s’attacher seule-ment à l’apparence des choses. Au lieu derentrer dans une logique de juste rétribu-tion (le coupable doit être trouvé et puni),elles rentrent dans une logique de terreur,de violence communautaire (peu importequ’on tienne LE coupable, on tient un deses «frères», et c’est pareil) et d’escalade dereprésailles, conduisant à un conflit géné-ralisé.

44)) PPuunniirrOn emploie enfin la torture pour punir desindividus d’un crime réel ou supposé. Elleprend alors la forme de châtiments corpo-rels tels que les amputations ou les coupsde fouet en public, notamment en Iran eten Arabie Saoudite. Dans certains pays, lesimple fait de publier un article sur l’étatde santé du Président sera considérécomme une atteinte à la sécurité et pourraentraîner des actes de torture sur le journa-liste. En le torturant, on le punit d’avoirécrit l’article, mais on donne également unsignal à tous les autres journalistes quiseraient tentés de critiquer le pouvoir oude dévoiler des secrets. Punir, cela peutdonc vouloir dire maltraiter physiquementun individu en prison pour se venger de luiou du groupe auquel il appartient.

IV.4. Qui sont les victimes ?Le monde a changé en profondeur, depuisqu’Amnesty a commencé à dénoncer latorture, en pleine guerre froide dans lesannées 60, mais la torture existe encore etn’est pas réservée aux dictatures militairesou aux régimes autoritaires. La torture estégalement pratiquée dans les pays démo-cratiques, même si elle n’y est pas utiliséede façon systématique. Il est également

clair que les victimes de la torture sontaussi bien des suspects de droit communque des prisonniers politiques, despersonnes défavorisées, des dissidents, desgens visés à cause de leur identité commede leurs croyances. Le plus souvent cependant, ceux qui sonttorturés par des agents de l’État sont descriminels ou des suspects de droitcommun. Ces victimes de torture n’osentsouvent pas se plaindre et n’ont pas l’ar-gent ou les relations pour se payer unavocat. Ces personnes sont souvent issuesdes couches les plus pauvres et les plusmarginalisées de la société.L’enquête d’Amnesty International a révélédes cas de torture sur des criminels ou desprévenus de droit commun dans plus de130 pays depuis 1997. Pendant la mêmepériode, les prisonniers politiques ont étévictimes d’actes de torture dans plus de 70pays et les manifestants non violents dansplus de 60 pays.

La torture est discriminatoireOn utilise la torture quand on considère lapersonne comme non humaine, inférieure.La torture est donc souvent employéecontre des groupes sociaux, politiques ouethniques méprisés par les gouvernementsou pouvoirs en place. Les minorités, lesfemmes, les homosexuels et mêmes parfoisles enfants, seront donc les principalesvictimes.

IV.5. Quelles sont lesméthodes de torture ?Les techniques de torture vont des plusanciennes -le fouet, la matraque, leschaînes, les brûlures, l’isolement completdans le noir …- aux plus modernes :décharges électriques, tortures psycholo-giques, drogues, simulacres d’exécutions...Les viols et autres tortures sexuelles sonthélas de plus en plus fréquents…Mais aujourd’hui, les tortionnaires n’hési-tent pas à s’entourer de médecins poursavoir jusqu’où l’on peut pousser ladouleur sans risquer de tuer le prisonnier.L’un des principaux soucis des pays quipratiquent la torture est de laisser unminimum de cicatrices visibles sur le corpsdes survivants, afin d’éviter la condamna-tion d’organisations internationales

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comme Amnesty. Pour cela, on invente denouvelles techniques qui laissent très peude traces : matraques électriques, médica-ments qui rendent fous…

IV.6. La torture est-elle légale ?L’interdiction de la torture dans les loisinternationales est absolue. «Nul ne serasoumis à la torture, ni à des peines ou traite-ments cruels, inhumains ou dégradants»,déclare l’article 5 de la Déclaration univer-selle des droits de l’homme. Des phrasessimilaires apparaissent dans beaucoupd’autres textes internationaux en matièrede droits humains.Aucun gouvernement ne peut justifier latorture au nom d’un Etat ou d’une menacede guerre, de l’instabilité politique interneou de tout autre motif d’urgence nationale.Et pourtant, selon l’enquête d’AmnestyInternational, certains pays autorisentmême les châtiments corporels, comme lesamputations et les flagellations. Certainsde ces châtiments, comme l’amputation oule marquage au fer, ont clairement pourbut de mutiler le corps humain de manièredéfinitive, et tous peuvent causer des bles-sures à long terme ou qui ne disparaissentjamais.

IV.7. Le commerce de la tortureLe marché mondial des instruments detorture est en fait constitué d’un circuitclandestin d’argent et d’équipements quitraverse beaucoup de frontières. Depuisquelques années, le secteur en expansionest celui des armes électriques – conseilléespour le peu de marques physiques qu’elleslaissent tout en infligeant un maximum dedouleur.Durant les années 90, les armes électriquesont été utilisées dans les prisons, lescentres de détention et les commissariatsde police de plus de 60 pays. Les armes àpoing électriques, comme les boucliers, lesmatraques, les pistolets hypodermiques,ont été utilisées dans au moins 20 pays.Plus de 120 entreprises dans 22 pays, dontla Belgique, sont impliquées dans la fabri-

cation, la vente, la promotion ou la fourni-ture de ce genre d’équipement.Les ceintures électriques sont largementutilisées sur les prisonniers aux États-Unis.Elles peuvent même être activées àdistance ! La ceinture électrique envoie unchoc de 50 000 Volts durant 8 secondes.Celui qui la porte est immobilisé pendantquelques premières secondes et ressent unedouleur extrême qui s’intensifie progressi-vement.Amnesty International a demandé lasuspension de l’usage de tous les équipe-ments électriques jusqu’à ce que l’onpuisse prouver qu’ils ne sont pas dange-reux. Les ceintures électriques devraientêtre interdites définitivement.

IV.8. Les moyens d’action d’Amnestycontre la tortureAmnesty International fait pression sur lesgouvernements afin qu’ils prennent desmesures pour lutter contre la torture et lesmauvais traitements, en ordonnant aussirapidement que possible l’ouverture d’en-quêtes impartiales et efficaces sur les allé-gations de torture et en traduisant enjustice les tortionnaires. Les autres mesurespréconisées par Amnesty Internationalpour protéger les détenus sont :– l’élaboration de lignes de conduite

faisant clairement savoir que la tortureet les mauvais traitements ne seront pastolérés,

– la suppression de la détention au secret

et la possibilité pour les détenus d’êtreexaminés par un médecin indépendantet de consulter un avocat,

– l’interdiction d’utiliser des aveuxobtenus sous la torture à titre de preuvedevant les tribunaux ;

– l’inspection des lieux de détention pardes personnes indépendantes,

– la notification de leurs droits auxdétenus,

– la mise en place d’une information rela-tive aux droits humains pour lepersonnel chargé de l’application deslois,

– le versement d’une indemnité auxvictimes de torture,

– la prise en charge médicale des victimesde torture et l’aide à leur réadaptation.

Chacun de nous peut contribuer à la luttecontre la torture, en écrivant des lettres deprotestation aux autorités responsables.Cette méthode a permis d’éviter certainestortures, de faire en sorte qu’elles s’arrê-tent, d’aboutir à une enquête et au juge-ment des coupables. Vous pouvez obtenirdes modèles de lettres chez Amnesty Inter-national ou vous inscrire au réseau d’ac-tions urgentes. Grâce à ce réseau, desmilliers de lettres sont écrites tous les jourspar les membres ou sympathisants d’Am-nesty dès qu’un risque de torture ou demauvais traitement apparaît.

Douze revendications lancées par Amnesty à tousles gouvernements1. Condamnation sans réserve de la

torture et des autres mauvais traite-ments.

2. Garantir la possibilité d’avoir descontacts avec les prisonniers.

3. Pas de détention secrète.4. Mise en place de garanties pendant la

détention et les interrogatoires .5. Prohibition de la torture et des autres

mauvais traitements dans la loi.6. Enquêtes.7. Poursuites des bourreaux.

8. Nullité des déclarations arrachées sousla torture ou sous d’autres mauvaistraitements.

9. Efficacité de la formation des fonction-naires : interdiction d’utiliser latorture !

10. Droits à réparation : indemnisation,soins,…

11. Ratification des instruments interna-tionaux par tous les Etats.

12. Responsabilité sur la scène internationale :intervenir auprès des gouvernements

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1. Qu’appelle-t-on torture ? Qu’ap-pelle-t-on mauvais traitements ?Quelle est la différence entre cesdeux notions ?Selon la définition donnée par la Conven-tion des Nations unies contre la torture, onappelle «torture» tout acte par lequel unedouleur ou des souffrances aiguës,physiques ou mentales, sont intentionnelle-ment infligées à une personne aux finsnotamment d’obtenir des renseignementsou des «aveux», de la punir d’un acte, del’intimider ou de faire pression sur elle. Ceterme s’applique aux formes de mauvaistraitements particulièrement graves etintentionnels.Il est impossible d’établir une distinction tranchéeentre les traitements qui constituent des actes detorture et ceux que l’on qualifie de traitementscruels, inhumains ou dégradants (mauvais traite-ments). Cependant, d’un point de vue pratique,cette distinction importe peu car toutes les formesde torture et de mauvais traitements sont stricte-ment interdites par le droit international. Il nes’agit d’ailleurs pas d’une question purementjuridique : cette prohibition juridique universellerepose sur un consensus philosophique égalementuniversel selon lequel la torture et les autresmauvais traitements sont abjects, intolérables etimmoraux.

2. N’existe-t-il pas toutefoiscertaines situations extrêmes danslesquelles ces interdictionsjuridiques internationales ne s’ap-pliquent plus ?La prohibition de la torture et des autresmauvais traitements relève du droit inter-national coutumier. Elle s’applique à tousles États, qu’ils soient ou non partie auxtraités internationaux formulant l’interdic-tion. Elle s’impose en toutes circonstances,sans aucune exception, et ne peut enaucun cas être suspendue, même en tempsde guerre ou de danger public excep-tionnel. Cette prohibition est clairementdéfinie dans l’ensemble du droit relatif auxdroits humains. Le droit internationalhumanitaire, applicable lors des conflitsarmés, interdit également en toutescirconstances la torture et les autresmauvais traitements. Les États ont doncreconnu que de tels agissements devaientêtre proscrits, même en temps de guerre, etmême si un avantage militaire pouvait enêtre tiré. Le Statut de Rome de la Courpénale internationale, dont les dispositionss’appliquent aux crimes les plus gravesrelevant du droit international, interdittotalement la torture et les autres mauvaistraitements, en tant que crimes contre l’hu-manité et en tant que crimes de guerre.

La torture et les autres mauvais traitementsétant toujours et partout condamnables,tous les États doivent dénoncer publique-ment ces actes dans les termes les plusfermes et prendre des mesures concrètesafin qu’ils ne surviennent jamais sur leurterritoire ou dans d’autres pays. En outre,les autorités doivent traduire en justice,dans le cadre de procès équitables, ceuxqui sont soupçonnés d’avoir perpétré desactes de torture ou d’autres mauvais traite-ments ou d’y avoir participé, tout commeles personnes soupçonnées d’avoir commisdes crimes contre l’humanité et attaquédes civils.

3.Quand on interroge des «terror-istes» présumés, n’est-il pasadmissible de priver un peu cesindividus de sommeil ou de leurinfliger des sensationsdésagréables ne causant pas dedommages corporels durables ?En droit international, l’interdiction destraitements cruels, inhumains ou dégra-dants porte sur la privation de sommeil, lestechniques de «pression et de contrainte» etles autres moyens prétendument «moinsdurs» visant à obliger des détenus à fournirdes renseignements. Maintenir un prison-

QUESTIONS/RÉPONSESCinquième partie

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nier sous l’eau jusqu’à ce qu’il ait l’impres-sion de se noyer est cruel et inhumain. Ilest dégradant de photographier unepersonne nue et de lui infliger des humilia-tions sexuelles, en bafouant les exigencesélémentaires d’humanité et de respect dela vie privée. D’autres méthodes visentnotamment à venir à bout de la résistanced’une personne en créant la confusion et ledésarroi. Parmi ces méthodes se trouvent laprivation de sommeil, la privation senso-rielle, notamment par la détention dans uncachot, le fait d’encagouler une personne,la surexposition sensorielle, par exemple àun bruit prolongé et excessif, le fait desoumettre une personne à des tempéra-tures extrêmes ou de la maintenir dans despositions pénibles.Il est démontré que de telles méthodes,même si elles ne laissent pas de cicatricesphysiques, provoquent des dégâts mentauxpouvant perdurer pendant des années et nejamais guérir complètement. La privationde sommeil entraîne des troublescognitifs : déficit de l’attention, troubles dela mémoire, du raisonnement, de lacommunication verbale et de la prise dedécision. Les conséquences d’un isolementprolongé peuvent être particulièrementdésastreuses ; elles peuvent notamment setraduire par l’impossibilité de réfléchir etde se concentrer, des phénomènes de déso-rientation, des hallucinations, des troublesdépressifs et d’autres graves atteintesmentales, entraînant par exemple des auto-mutilations et des tentatives de suicide.Les effets de ces méthodes s’exacerbentpour des raisons de degré, de durée et aussilorsque plusieurs d’entre elles sontemployées concurremment. Par exemple,en privant quelqu’un de sommeil pendantquinze minutes, on risque tout au plus dele contrarier ; mais il a été démontré que laprivation de sommeil pendant des périodesprolongées causait des dommages psycho-logiques graves et durables. Il en est demême pour les positions pénibles etdouloureuses et les privations sensorielles.Lorsque plusieurs de ces procédés sontutilisés sur une période prolongée, l’effetquantitatif joue sur la durée et sur lacombinaison de méthodes multiples.Les dispositions politiques ou législativesqui autorisent le recours à la torture et auxautres mauvais traitements, même en leréservant à des situations extrêmes, enfrei-gnent l’opposition de principe à l’usage de

méthodes inhumaines. De plus, dans lesfaits, il est impossible de définir une limiteprécise. À la connaissance d’Amnesty Inter-national, il n’existe pas d’État qui maltraiteles détenus pour obtenir des informationset se limite à ces pratiques, sans jamaisavoir recours à la torture. D’un point devue moral et pratique, si nous considéronscomme tolérable le recours aux pressionsphysiques et psychologiques lors d’un inter-rogatoire, jusqu’à quel point admettrons-nous que la pression soit accrue si unepersonne refuse de parler ? Dès lors que larègle interdisant strictement les traite-ments inhumains est bafouée, la tendanceest toujours à l’intensification et l’onbascule vite dans des méthodes relevant dela torture.Malgré cela, les autorités américaines,comme celles de différents États ayant eurecours à la torture et à d’autres mauvaistraitements, ont cherché à se soustraire àla prohibition internationale. Elles ontproposé des définitions très restrictives dela torture, ont décrit certaines formes demauvais traitements comme étant des tech-niques de «pression et de contrainte» et ontaffirmé que certains types de traitementsn’étaient pas forcément illégaux etpouvaient se justifier par la nécessité mili-taire ou la légitime défense, par exemple.Mais ni l’un ni l’autre de ces principes juri-diques ne saurait justifier l’utilisation de latorture ou d’autres mauvais traitements,quelle que soit la situation. Par ailleurs, latorture et les autres mauvais traitementsne deviennent pas plus tolérables lorsqu’ilssont désignés par d’autres termes et l’em-ploi d’euphémismes ne peut permettre depasser outre les obligations juridiques etmorales.

4. La torture ou les autres mauvaistraitements, s’ils ne sont utilisésque dans les situations les plusimpérieuses, ne constituent-ils pasun moindre mal ? Ne serait-il pasacceptable de maltraiter unepersonne si cela pouvait sauver desmilliers de vies ?À travers l’histoire, certains ont tenté dejustifier la torture ou les autres mauvaistraitements par des buts supérieurs àatteindre, tels que le bien commun, la

liberté ou des idéaux liés, entre autres, à lareligion. Toutefois, nous ne pouvonsdéfendre des principes et des idéaux pardes actions qui leur portent atteinte. Ledroit de ne pas être torturé et de ne passubir d’autres formes de traitementscruels, dégradants ou inhumains est peut-être le droit humain le plus communé-ment admis. Si l’interdiction de la tortureet des autres mauvais traitements est trans-gressée, quel espoir reste-t-il quant à laprotection des autres droits humains ?La prohibition de la torture et des autresmauvais traitements étant absolue etinconditionnelle, l’équilibre à établir entreles droits des différentes personnes ouentre les droits des personnes et le biencommun ne relève ni de l’acrobatie ni dutour de passe-passe. Le droit internationalet les règles morales communémentadmises, suivis en cela par la communautéinternationale, proscrivent de façon incon-ditionnelle les actes inhumains de toutesorte, quels qu’en soient les auteurs.La seule manière de protéger efficacementles droits humains est de respecter le prin-cipe selon lequel chaque personne possèdecertains droits fondamentaux inhérents etinaliénables, ne pouvant pas êtresupprimés même au nom du «biencommun», d’états d’urgence, de la sécuriténationale ou d’idéaux religieux ou autres.Sans cela, personne ne peut réellementêtre en sécurité.

5. Supposons que quelqu’un soitsur le point de faire exploser unebombe atomique : ne serait-il pasjustifié d’avoir recours à desmauvais traitements, voire à latorture (bien que ces agissementssoient ignobles) si cela permettaitde recueillir des renseignementscruciaux susceptibles de sauver desmilliers de vies ?La torture et les autres mauvais traitementssont illégaux, immoraux et ne sont jamaisjustifiés. Avancer que dans certaines situa-tions ces agissements pourraient être légi-times revient à accepter que la fin justifieles moyens. Cette logique est similaire àcelle souvent utilisée pour tenter de justi-fier des actes «terroristes».

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Certains ont laissé entendre que l’usage dela torture pourrait être contrôlé et limitéaux situations les plus extrêmes et les plusurgentes. D’aucuns ont même soutenu quel’existence de la torture était inévitable etqu’il valait donc mieux qu’elle soit léga-lisée et réglementée plutôt que niée ouexercée clandestinement. L’argumentationsuivante a également été développée : lors-qu’il est absolument nécessaire d’obtenirdes informations urgentes afin de sauverdes vies et qu’il existe des motifs valables(une forte probabilité) pour penser qu’unepersonne détient de telles informationsmais refuse de les révéler, un mandat judi-ciaire pourrait autoriser le recours à desactes de torture non létaux effectués pardes moyens contrôlés - par exemple uneaiguille stérilisée, enfoncée sous un onglepour provoquer une douleur insoutenable.Toutefois, cette hypothèse et les raisonne-ments similaires selon lesquels la tortureserait acceptable dans des cas extrêmespour empêcher la mort imminente decentaines ou de milliers de personnes - l’ar-gument des «bombes à retardement» - repo-sent sur un scénario extrêmement impro-bable et hypothétique. Le tortionnaire enpuissance doit être sûr qu’il y a réellementune bombe (alors même que personne, àpart les «terroristes», ne l’a vue), qu’elle vaexploser si elle n’est pas désamorcée, que lapersonne détenue sait vraiment où setrouve la bombe (que l’engin n’a pas étédéplacé, que les plans n’ont pas étéchangés lorsque les «terroristes» ont appris

l’arrestation de cette personne), que, si lapersonne est torturée, elle fournira lesrenseignements nécessaires, que ces rensei-gnements seront exacts et qu’ils permet-tront de désamorcer la bombe à temps,qu’il n’existe aucun autre moyen detrouver la bombe, etc. Une situation aussiimprobable ne suffit pas pour justifier queles gouvernements puissent habiliter leursfonctionnaires à utiliser la torture oud’autres mauvais traitements. Il est essen-tiel de maintenir l’interdiction absolue deces méthodes afin que les responsables del’application des lois ne soient pas tentésd’y recourir en cas d’échec des autresméthodes.Les faits sont flagrants. Les États qui ontrecours à la torture et aux autres mauvaistraitements le font largement et accompa-gnent ces méthodes d’autres mesuresrépressives. Amnesty International mènedes recherches dans le monde entier sur latorture et les autres formes de traitementscruels, inhumains et dégradants depuis desdizaines d’années. D’après les informationsrecueillies par Amnesty International,aucun État n’aurait utilisé la torture «justeune seule fois» ou seulement dans quelquescas extrêmes. À chaque fois qu’un gouver-nement, où qu’il soit, légitime l’usage de latorture et d’autres méthodes cruelles «dansdes circonstances extrêmes», l’utilisationde ces méthodes se généralise ; les moyensutilisés sont de plus en plus extrêmes et lessituations dans lesquelles ils sont utilisés lesont de moins en moins. De plus, non

seulement les États qui utilisent la tortureet les autres mauvais traitements contre lesopposants politiques ne mettent pas fin àson usage, mais ils recourent également àd’autres pratiques violentes et répressives,telles que les «disparitions» et les exécu-tions extrajudiciaires, en les infligeant nonseulement à des détenus mais aussi à touteune population associée à l’«ennemi». L’ex-périence d’Amnesty International montreque, si la torture n’est plus strictementinterdite, l’attitude des agents de la forcepublique change. Au fil du temps, l’idéeque la torture et les autres mauvais traite-ments sont parfois acceptables gagne duterrain et se répand dans l’ensemble dusystème ; les personnes soupçonnées d’in-fractions de droit commun finissent parsubir le même traitement que les « terro-ristes » présumés.La plupart d’entre nous admettent proba-blement que, dans des situations critiques,nous laisserions notre gouvernementprendre des mesures et assumer despouvoirs que nous hésiterions à luiconsentir en temps normal, par exempleprocéder à des perquisitions ou à desfouilles, boucler une zone, interdire lesrassemblements, imposer un couvre-feu ouaccroître la surveillance. Toutefois, si l’onadmet que la torture soit justifiée, celasignifie fondamentalement que nous auto-risons notre gouvernement à arrêter n’im-porte lequel d’entre nous et à lui infligerabsolument n’importe quel traitement,sans aucune barrière morale. Souhaitons-nous réellement conférer à nos gouverne-ments des pouvoirs absolus de cruauté ?La seule façon de garantir la sécurité et delutter contre le «terrorisme» est deformuler et de respecter un principe biendéfini interdisant toutes les formes de trai-tements cruels ou inhumains. Nous nepouvons défendre nos principes en allant àl’encontre de nos propres valeurs morales.De même, l’État ne peut avoir recours à desactes de «terrorisme» pour lutter contre lesactes de «terrorisme» des groupes armés.

6. Et si la vie de votre enfant étaiten jeu ? Ne voudriez-vous pas queles autorités fassent tout pour lesauver ?Que ferions-nous dans un moment depanique ou de désespoir, si un être cher

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était en danger ? Il est difficile de l’ima-giner. Une chose est sûre : la réponse àcette question permet de mesurer l’am-pleur de notre détresse mais ne sauraitguider notre comportement moral. Dans detelles circonstances, certains d’entre nousn’auraient pas recours à la torture,d’autres, peut-être. À vrai dire, si un enfantétait enlevé par des «terroristes», certainsparents pourraient, pour le sauver, céderaux demandes des «terroristes», même sicela impliquait de poser une bombe poureux.Tout le monde compatirait à l’horreur decette situation, au désespoir qui pousseraitun parent à exécuter de telles actions. Celane peut cependant justifier ni l’usage de latorture ni le fait de poser des bombes.Quelle que soit la réaction, si humaine etcompréhensible soit-elle au niveau indivi-duel, les émotions personnelles ne doiventen aucun cas déterminer les mesures légis-latives et gouvernementales. L’État a pourdevoir d’appliquer les principes du droit etde protéger les droits humains de toutes lespersonnes qui relèvent de son ressort.

7. Pourquoi les «terroristes»auraient-ils les mêmes droits quenous alors qu’ils ne respectent pasnos droits ?Amnesty International condamne tous lesattentats délibérés contre des civils, commeceux consistant à poser des bombes dansdes restaurants ou dans des gares ouencore à provoquer l’effondrement de bâti-ments, entraînant la mort de milliers depersonnes. Le fait de prendre délibérémentpour cible des civils constitue une violationgrave des droits humains fondamentaux etva à l’encontre des principes de base del’humanité. Amnesty Internationalcondamne de telles atrocités et demandeque les responsables présumés de ces actessoient déférés à la justice afin qu’uneenquête et qu’un procès puissent avoir lieuet que les auteurs soient condamnés, dèslors que leur culpabilité a été établie. Lesgouvernements ont le devoir de veiller à ceque les personnes qui préparent etcommettent de telles atrocités soienttraduites en justice et jugées de façon équi-table.Le système des droits humains comporteune certaine flexibilité : il permet aux

États de réagir face à des événementsexceptionnels en restreignant certainsdroits humains importants, tels que ledroit de circuler librement et le droit à laliberté, dont peuvent être privées despersonnes qui s’en prennent illégalement àla vie ou à l’intégrité morale ou physiqued’autrui ou sont surpris en pleine prépara-tion de tels agissements. En revanche,certains droits humains fondamentaux, ycompris le droit de ne pas être maltraité outorturé, ne peuvent en aucun cas êtresupprimés, quelle que soit la conduite de lapersonne. Nul ne peut torturer, assassiner,réduire à l’esclavage, violer ou humilier unêtre humain, si horribles que soient lesactes qu’il a commis ou qu’il est soupçonnéd’avoir commis. Les actes de torture et lesautres mauvais traitements, tout commeles attaques visant des civils, constituentdes violations des droits humains fonda-mentaux. Commettre l’un de ces actes nepeut excuser ou justifier que l’autre soitperpétré en contrepartie.

8. Êtes-vous en train de dire quetous les détenus sont innocents ?Non. Nous n’en savons rien. La culpabilitéest une question de preuve. Selon un prin-cipe fondamental du droit, toute personneest présumée innocente tant que sa culpa-bilité n’a pas été établie de façon convain-cante. Lorsque des éléments laissent àpenser que des personnes ont participé à lapréparation ou à la réalisation d’actes«terroristes», une enquête doit être menée,ces personnes doivent être inculpées etimmédiatement jugées à l’issue d’unprocès équitable, et, si leur culpabilité estétablie, condamnées. Cependant, dans lecontexte de la prétendue «guerre contre leterrorisme», certains hauts fonctionnairesdu gouvernement américain ont fait fi decette présomption d’innocence en quali-fiant les détenus de «terroristes» et d’«assas-sins».Le fait que les gouvernements présumentde la culpabilité des prisonniers et lespunissent en conséquence par des actes detorture et des mauvais traitements avant latenue d’un procès constitue une menacecontre notre liberté et notre intégritéphysique à tous. Nous pourrions tous êtrearrêtés par erreur, ou dénoncés par unvoisin malveillant qui indiquerait que noussommes des «terroristes» très recherchés ;

cela est arrivé à certaines personnes quiont ensuite été torturées ou maltraitéesafin qu’elles livrent des informationsqu’elles ne détenaient pas. Voulons-nousvraiment qu’un gouvernement exerce surnous un tel pouvoir ?

9. Il faut trouver des moyens orig-inaux de faire face aux menacescontemporaines. Le danger du«terrorisme» international estapparu récemment : ne faut-il pasy répondre par de nouvelles tech-niques ?La menace du «terrorisme» internationaln’est pas nouvelle. Il convient cependantque les organes chargés d’assurer le respectdes lois élaborent des compétences et destechniques spécifiques en matière de main-tien de l’ordre, d’enquêtes et de recueil derenseignements, notamment en coopérantau niveau international, afin d’éviter lesactes de «terrorisme», de protéger la popu-lation et de traduire en justice lespersonnes soupçonnées d’avoir commis oud’avoir projeté de telles atrocités. Les tech-niques utilisées doivent tenir compte desnouvelles caractéristiques du «terrorisme»international au xxie siècle, comme l’utili-sation de l’informatique et d’autres techno-logies récentes. Le recours à de nouvellesméthodes de criminalistique et à d’autrestechniques de maintien de l’ordre est peut-être nécessaire, mais l’utilisation deméthodes archaïques comme la torture etles autres mauvais traitements ne peut êtrejustifiée.Les autorités ont le devoir de garantir lasécurité de la population, de prendretoutes les mesures légitimes pour prévenirles actes de «terrorisme» et de traduire enjustice les personnes soupçonnées d’avoircommis ou d’avoir projeté de tels actes.Toutefois, elles ont également le devoir derespecter, ce faisant, le système de défensedes droits humains. L’usage de la torture etdes mauvais traitements risque de réduireles chances de comparution en justice desresponsables présumés d’actes de «terro-risme», car le droit international relatif auxdroits humains interdit formellement queles informations obtenues sous la torturesoient utilisées comme preuves dans despoursuites judiciaires. Cette prohibition

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apparaît dans la législation nationale denombreux pays.Quels que soient les pouvoirs de l’État, ilest impossible de garantir une sécurité etune sûreté totales. L’État ne peut être abso-lument certain qu’aucun «terroriste»n’aura jamais la possibilité de commettredes atrocités contre des civils. Si despouvoirs extrêmes étaient conférés auxÉtats dans ce but, nul ne serait libre, et nulne serait d’ailleurs en sécurité dans unetelle situation. Pour préserver les droitsfondamentaux de tous, les droits humainset le respect du droit international doiventconstituer des éléments centraux dans laquête de justice et de sécurité.Il est particulièrement important dedisposer de règles incontestables et clairesen situation de conflit, d’urgence ou decrise, car ce sont des périodes où l’on peutfréquemment invoquer le sentiment denécessité pour tenter de justifier n’importequelle action, aussi abominable soit-elle.Qui plus est, la discipline, soit militairesoit civile, se perd rapidement en de tellescirconstances mais ne peut être rétablieaussi vite ; elle est parfois même presqueimpossible à rétablir. Loin de compro-mettre la sécurité, le respect des droitshumains la garantit. La sécurité s’obtientpar le respect des droits humains et nonpar leur violation.

10. Si la coopération internationaleconstitue un élément important destechniques nécessaires pour luttercontre le «terrorisme» interna-tional, quel mal y a-t-il à envoyerdes «terroristes» dans d’autrespays afin qu’ils soient interrogéspar les autorités de ces pays ?Les attaques visant des civils, telles que lesattaques du 11 septembre 2001 aux États-Unis, l’attentat contre une discothèque deBali en octobre 2002 et les bombes poséesdans des trains à Madrid en mars 2004,constituent, comme la torture, un crime auregard de tous les systèmes juridiques. Ilappartient aux États de mener desenquêtes et de poursuivre les responsablesprésumés de ces actes s’il existe suffisam-ment de preuves recevables ou de lesextrader vers un autre pays qui veut et peutengager ces poursuites en utilisant des

procédures parfaitement compatibles avecle droit à bénéficier d’un procès équitable,sans recours à la peine capitale. Le systèmejudiciaire international qui se met peu àpeu en place commence à permettre lacoopération entre les instances de justicepénale des États concernés afin de veiller àce que les responsables présumés soienttraduits en justice. Toutefois, ce système decoopération est actuellement inefficace etsouvent inéquitable. De plus, commeindiqué ci-après, les autorités s’y sous-traient fréquemment.L’interdiction absolue de la torture et desautres mauvais traitements englobe l’inter-diction absolue de transférer une personnedans un État où elle risque d’être torturéeou soumise à d’autres formes de traite-ments cruels, inhumains ou dégradants. Dece fait, le tribunal qui supervise l’extradi-tion ne doit pas autoriser le transfert si detels risques existent.Cependant, sous le couvert de la coopéra-tion internationale pour la sécurité, lesÉtats-Unis ont eu recours à une pratique de«remise» de prisonniers, qui leur a permisde transférer un grand nombre de «terro-ristes» présumés sans aucun contrôle judi-ciaire, et souvent en secret, vers des paysconnus pour leur recours à la torture lorsdes interrogatoires. Certaines despersonnes concernées ont donné des infor-mations crédibles faisant état d’actes detorture. Des pays où la torture est notoire-ment pratiquée auraient été choisis délibé-rément dans le dessein de recevoir en vued’interrogatoires certaines personnes déte-nues dans le contexte de la «guerre contrele terrorisme». Des Américains auraient enoutre menacé de nombreux détenus, lorsd’interrogatoires, de les envoyer dans lespays en question. Cela revient à contournerla prohibition de la torture par le droitinternational en «sous-traitant» cettepratique.La sous-traitance de la torture peut égale-ment avoir lieu sans même transférerphysiquement une personne dans un autrepays. En août 2004, la Cour d’appel duRoyaume-Uni a statué que la législation«antiterroriste» britannique permettait, etmême exigeait, que les informations obte-nues sous la torture puissent être retenuesà titre de preuve dans les tribunaux britan-niques, du moment que la torture n’avaitpas été commise ou tolérée par des respon-sables britanniques. Cette pratique viole le

principe formellement reconnu dans laConvention des Nations unies contre latorture, à laquelle le Royaume-Uni estpartie, qui dispose qu’aucune déclarationdont on sait qu’elle a été obtenue sous latorture ne doit être retenue à titre depreuve dans aucune poursuite judiciaire.

11. Et si l’autre État promet de nepas maltraiter la personne, commelorsqu’un État, dans le cas d’uneextradition, donne l’assurance quela peine de mort ne sera pasinfligée ? Ne peut-on pas appliquerla même règle en ce qui concerne latorture et les autres mauvais traite-ments ?Dans de tels cas, il est impossible de se fieraux promesses diplomatiques, qui ne sontpas comparables à celles faites dans les casrelatifs à la peine capitale. Même siAmnesty International s’oppose catégori-quement à la peine de mort, le droit inter-national ne la prohibe pas encore formelle-ment et en toutes circonstances. Dans cesconditions, les États qui ont recours à lapeine capitale ne s’en cachent pas : la légis-lation de ces pays prévoit l’application dece châtiment. En revanche, les États quienfreignent le droit international en tortu-rant ou maltraitant les détenus de façonsystématique le nient tout aussi systémati-quement et font le nécessaire pour s’encacher. C’est pourquoi il est impossible dese fier à ces États lorsqu’ils promettent dene pas infliger de tortures ou d’autresmauvais traitements.Aux yeux d’Amnesty International, la luttecontre la torture et les autres mauvais trai-tements doit être menée au niveaumondial. Il se trouve que tous les États - ycompris les États-Unis - ayant ratifié laConvention des Nations unies contre latorture et d’autres traités se sont expriméségalement dans ce sens. Il est inacceptablequ’un État rejette officiellement la tortureet les autres mauvais traitements tout enles utilisant lui-même en toute discrétion,il est inacceptable qu’un État prétendecondamner ces méthodes tout en fermantles yeux lorsque d’autres les pratiquent enson nom. Si nous nous opposons à latorture, nous ne devons en aucun cas la

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tolérer, la pratiquer ou la sous-traiter ;nous ne devons jamais coopérer avec destortionnaires, de quelque manière que cesoit.

12. Ce qui est arrivé à Abou Ghraibest exceptionnel. Pourquoi AmnestyInternational affirme-t-elle que detels agissements relèvent de lapolitique des États-Unis ?Les recherches menées par Amnesty Inter-national l’ont amenée à conclure que lesfaits survenus à Abou Ghraib ne sont pasune exception. On a vu se développer unvéritable système, des techniques élaboréespour les interrogatoires en Afghanistan et àGuantánamo étant ensuite adoptées enIrak. Ces pratiques consistent notamment àencagouler les détenus, à les soumettre à laprivation sensorielle, à les isoler, à leurinfliger des positions pénibles ; sont égale-ment utilisées des techniques destinées àhumilier, à dégrader, à effrayer, telles quele rasage et le déshabillage forcés ou l’utili-sation de chiens. La diversité des endroitsoù des actes de torture et d’autres mauvaistraitements ont été signalés, ainsi que lenombre de personnes concernées, indi-quent qu’il ne s’agit pas seulement dequelques allégations relatives à unproblème isolé.Cela n’a rien de surprenant ; en effet,depuis environ deux ans, les choix gouver-nementaux s’appuient sur des conseilsformulés dans des avis juridiques secretsémanant du ministère de la Justice, quirestreignent la définition de la torture etindiquent que le président peut autoriserle recours à la torture pour des motifs telsque la nécessité militaire. Les États-Uniscontinuent d’affirmer que les personnesdétenues à Guantánamo et en Afghanistann’ont pas droit aux protections garantiespar les Conventions de Genève. Ces orienta-tions, adoptées aux plus hauts niveaux del’État, ont mis à mal le respect par lesÉtats-Unis de la prohibition internationalede la torture et des autres mauvais traite-ments. De plus, la décision de maintenirdes milliers de personnes en détention ausecret, ou presque au secret, pendant despériodes prolongées, dont certaines dansdes centres de détention secrets, sans accèsau monde extérieur, a favorisé le recours àla torture et aux mauvais traitements.

13. Pourquoi Amnesty Internationals’en prend-elle aux États-Unis ?Qu’en est-il des autres pays danslesquels la situation en matière detorture est bien pire ?Amnesty International ne classe pas lesÉtats en fonction de l’ampleur ou de lagravité des violations des droits humainscommises par leurs représentants ni necompare les États entre eux. L’organisationévalue la situation des droits humainsselon des règles internationales en matièrede droits humains applicables sur le planuniversel, que les États ont eux-mêmesétablies et qu’ils se sont engagés àrespecter. Le rapport 2005 d’Amnesty Inter-national sur l’état des droits humains dansle monde couvre 149 pays et contient desinformations sur les atteintes aux droitshumains, y compris la torture et les autresmauvais traitements dans le contexte de laprétendue «guerre contre le terrorisme»,dans le monde entier. Rapport 2005 d’Am-nesty International (index AI : POL10/001/2005)Les États-Unis d’Amérique ont été parmi lesprincipaux initiateurs de la Déclarationuniverselle des droits de l’homme, adoptéeen 1948 et base actuelle du droit interna-tional relatif aux droits humains. Cepen-dant, un grand nombre des actions menéespar les États-Unis au nom de la prétendue«guerre contre le terrorisme» traduisent lerefus de s’appliquer à eux-mêmes des règlesqui seraient, selon eux, impératives pourles autres pays. Les violations des droitshumains que le gouvernement américainne souhaite pas qualifier de torture lors-qu’elles sont commises par ses propresreprésentants sont régulièrement décritescomme telles par le Département d’Étataméricain lorsqu’elles ont lieu dansd’autres pays.Les opérations antiterrorisme des États-Unis ont une influence directe et indirectedans le monde entier. Aucun autre pays n’adavantage de pouvoir politique, militaire etéconomique. Le fait que les États-Unis rejet-tent de manière sélective certaines disposi-tions du droit international fragilise l’en-semble du système international decontrôle et de protection des droitshumains et autorise les gouvernements dumonde entier, qu’ils commettent ou non

des violations, à considérer que de tellespratiques sont acceptables.

14. Puisque le gouvernementaméricain a rejeté explicitement latorture, est-ce qu’il subsiste vrai-ment un problème ?Il est important que les États et les diri-geants dénoncent la torture et les autresmauvais traitements. Toutefois, les motsseuls ne suffisent pas ; ce sont les actionsqui importent. Même si le président Bush arégulièrement condamné la torture, desconseillers juridiques du gouvernementaméricain ont émis des avis visant à définirle terme de torture de la façon la plusrestrictive possible. Par exemple, en juin2003, le président Bush a déclaré au mondeentier que les États-Unis s’engageaient àéliminer la torture partout dans le mondeet montraient la voie à suivre. Mais, à cettemême période, la politique du gouverne-ment américain s’inspirait d’un avis juri-dique secret rédigé par le ministère de laJustice en août 2002. L’avis en question(rejeté par le gouvernement un peu moinsde deux ans après, à la suite des révélationsconcernant Abou Ghraib) expliquaitcomment les agents ou militaires améri-cains qui interrogeaient les détenuspouvaient échapper à toute responsabilitépénale pour actes de torture, suggérait derestreindre la définition de la torture, indi-quait que les responsables pouvaient s’ensortir impunément en infligeant des traite-ments cruels, inhumains ou dégradantsprétendument différenciés des actes detorture et conseillait le président sur lapossibilité de contourner les interdictionsinternationales ou nationales en matièrede torture.Si les mots sont nécessaires dans la luttecontre la torture et les autres mauvais trai-tements, ils ne sont guère plus que desdénonciations rituelles lorsqu’ils ne s’ac-compagnent pas de mesures fermes ou queles gouvernements condamnent la torturetout en cherchant des moyens de se sous-traire à l’interdiction internationale de latorture et des autres mauvais traitements.

15. Mais n’y a-t-il pas de nombreuxcas où la torture est efficace ?Lorsque l’on torture ou maltraite des

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personnes afin de leur extorquer des infor-mations, certaines parlent, d’autres non.Beaucoup de celles qui parlent sont prêtesà dire toutes sortes de choses pour cesserde souffrir : la vérité, des mensonges, desdemi-vérités. Tout au long de l’histoire, despersonnes ont été torturées jusqu’à cequ’elles abjurent leur religion ou «avouent»des actes de sorcellerie ou des crimesqu’elles n’avaient pas commis. D’autres ontrefusé de parler, parfois jusqu’à en mourir.Pouvons-nous malgré tout obtenir desrenseignements utiles en torturant et enmaltraitant des personnes ? Les tortion-naires et les autorités ayant recours à latorture l’affirment.Pouvons-nous réprimer les insurrections,les rebelles et le «terrorisme» au moyen dela torture et des autres mauvais traite-ments ? L’histoire nous a prouvé que non.Quelles que soient les informations quenous pouvons obtenir, nous pouvons êtresûrs de susciter la douleur, la souffrance,l’humiliation, la peur, la colère et enfin lahaine aussi bien chez la personne torturéequ’au sein du groupe humain dont elle faitpartie.

16. Pourquoi Amnesty Internationalse soucie-t-elle plus des «terror-istes» que de leurs victimes ?

Amnesty International se place du côté desvictimes de la torture et du «terrorisme» etdemande justice et réparation pour cesvictimes. L’organisation demande que lesauteurs présumés de crimes contre l’huma-nité et d’autres attaques contre des civils,ainsi que les auteurs d’actes de torture etd’autres mauvais traitements, soienttraduits en justice, conformément au droitinternational relatif aux droits humains etau droit international humanitaire. L’ins-tauration de la Cour pénale internationaleouvre de nouvelles voies en matière depoursuites pénales internationales, ycompris en ce qui concerne les crimescontre l’humanité commis par des groupesarmés. De ce fait, l’opposition persistantedu gouvernement américain à la Cour,bien loin de servir son objectif affiché delutte contre le «terrorisme», lui est préjudi-ciable.Les États ont le devoir de protéger le droit àla vie des personnes se trouvant sur leurterritoire, notamment en instaurant des

mesures efficaces de prévention et dedissuasion contre les actes «terroristes».Cela n’autorise pas pour autant les gouver-nements à bafouer d’autres droits humainset à ne pas respecter des règles de droit,qui, en fait, facilitent le maintien de l’ordreet renforcent la sécurité humaine en rédui-sant la probabilité de troubles sociaux etd’instabilité. Le fait d’enfreindre les prin-cipes du droit et de torturer, d’humilier, demaltraiter des détenus soupçonnés d’êtredes «terroristes», même si ces agissementssemblent utiles à court terme, comprometla sécurité à long terme.

17. Comment éradiquer la torture etles autres mauvais traitements ?Amnesty International appelle tous lesgouvernements à appliquer un programmede mesures pratiques afin de mettre unterme à la torture et aux autres mauvaistraitements. [Voir également Combattre latorture - Manuel pour l’action (index AI :ACT 40/001/2003).]Les plus hautes autorités de chaque paysdoivent condamner sans réserve la tortureet les autres mauvais traitements, quidoivent être interdits par la loi. La déten-tion au secret et la détention secrète nedoivent pas être autorisées. Tous les lieuxde détention devraient recevoir des visitesd’inspection régulières, indépendantes,inopinées et sans restriction ; un avocatdevrait être présent lors des interroga-toires. Tous les prisonniers doivent êtreimmédiatement informés de leurs droits,notamment le droit de voir un juge statuerdans les plus brefs délais sur la légalité deleur détention et le droit de présenter desplaintes relatives aux traitements qu’ilssubissent. Toutes les plaintes faisant état detorture ou d’autres mauvais traitements

doivent faire rapidement l’objet d’enquêtesimpartiales et efficaces menées par unorganisme indépendant. Les responsablesprésumés d’actes de torture ou d’autresmauvais traitements doivent être traduitsen justice et les victimes de torture oud’autres mauvais traitements doivent avoirdroit à réparation. Il doit être clairementindiqué au cours de la formation des fonc-tionnaires que la torture et les autresmauvais traitements ne seront jamaistolérés et qu’il s’agit d’actes criminels. Cesagents devraient également être informésqu’ils ont le droit et le devoir de refuserd’obéir à tout ordre d’infliger des torturesou d’autres mauvais traitements. L’obéis-sance à des ordres émanant de supérieursne devrait jamais permettre de justifier latorture ou d’autres mauvais traitements.Les déclarations obtenues sous la tortureou sous d’autres mauvais traitements nedoivent jamais être invoquées à titre depreuve au cours d’une procédure. Lesgouvernements doivent ratifier et respecterles traités internationaux comportant desmesures de protection contre la torture oules autres mauvais traitements, doiventintercéder auprès des gouvernements desÉtats dans lesquels des cas de torture oud’autres mauvais traitements sont signaléset ne doivent pas transférer une personnedans un pays où elle risquerait d’êtretorturée ou maltraitée.

Sources! DVD «Do-it-yourself»! Dossier Papiers Libres 2000, Amnesty

International Belgique francophone.! Dossier Papiers Libres 2005, Amnesty

International Belgique francophone.! «Le monde après le 11/09», Amnesty

International Belgique francophone.

Sites internet :! www.amnesty.bewww.amnesty.org! www.humanrightsfirst.org! www.planetenonviolence.org! www.ecrans.fr/spip.php?article865

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30 DO-IT-YOURSELF • Dossier péda-gogique

Témoignages«J’avais une ferme, un mari, ma

petite entreprise. C’était une bonnevie. Aujourd’hui, presque tout ce que

j’avais a disparu.»Wanjiku, rescapée de la torture.

«Aujourd’hui, j’ai découvert un autremoyen de lutter. Je dois rester envie. Je dois répandre la lumière demon témoignage au coeur de l’his-

toire.»Babek, rescapé de la torture.

« Le pire moment, ça a été lorsque lapolice m’a fait écouter une fille qu’on

torturait dans une autre pièce. Elleappelait ses parents en hurlant. »

Fatma, rescapée de la torture.

« Ce qui m’a fait aussi beaucoup de bien,c’est d’en parler dans un groupe de

femmes, avec d’autres personnes ayantvécu des expériences similaires. »

Wanjiku, rescapée de la torture.

« Tu essaies d’être élégante, bienhabillée et de montrer aux gens quetu es heureuse alors qu’à l’intérieurtu es déjà morte. C’est ce que je fais

en ce moment. »Chantal, rescapée de la torture.

« Mon frère cadet a été torturé sous mesyeux... Est-ce que vous pouvez imaginer un

tel calvaire ? »Babek, rescapé de la torture.

« Ils m’ont enlevé mes vêtements et m’ontdonné un pyjama et le numéro 887. Ils ont

dit que mon nom n’existait plus. Lapremière semaine, j’ai été battu tous les

jours. »Rad Baan, rescapé de la torture.

« J’ai été torturé pendant six mois, jusqu’àce que j’« avoue » être un espion. J’ai perdu

ma femme et ma vie de famille normale. »Hwang, rescapé de la torture.

« La plus grande perte tient peut-être àl’anéantissement de toute confiance. »

Babek, rescapé de la torture.

« Les soldats nous ont bourrés de coups àplusieurs reprises jusqu’à ce que nous

passions aux « aveux »… Nous avonsensuite été obligés de prendre la pose pour

être photographiés, vêtus de tenues mili-taires et portant des fusils. »

Rodolfo, rescapé de la torture.

BBiibblliiooggrraapphhiiee

– Marco Antonio de la Paria, Lettre ouverteà Pinochet, Le Serpent à Plumes, 1998

– Rony Brauman et Eyal Sivan, Éloge de la Désobéissance, Le Pommier, 1999, un commentaire du procès Eichmann– Stanley Milgram, Soumission à l’autorité,Calmann-Lévy, 1974, la fameuse “Expérience de Philadelphie”– Omer Bartov, L’armée d’Hitler, HachetteLittératures, 1999– Eric Conan, Le Procès Papon, le journald’une audience, Gallimard, 1998 – Christopher Browning, Des hommes ordi-naires, le bataillon de réserve de la police allemande en Pologne Les Belles Lettres, 1994 – Raoul Hilberg, Exécuteur, victimestémoins, Gallimard collection NRF essais, 1994– Hannah Arendt, Eichmann à Jérusalem,Gallimard collection Folio Histoire, 1991 Hannah Arendt, Le système totalitaire, LeSeuil, 1972

FFiillmmooggrraapphhiiee

– Rony Brauman et Eyal Sivan, Un Spécia-

liste, Le procès Eichmann, 1999,– Roman Polanski, La Jeune Fille et la Mort, avec Ben Kingsley et Sigourney Weaver,1996, d’après la pièce d’Ariel Dorfman. – Costa-Gavras, L’aveu, 1975, – Ido Sela, Témoignage, les soldats israéliens et l’intifada, 1993,– Roberto Rossellini, Allemagne, année zéro, 1947.– Das Experiment (l’expérience), Alle-magne, réalisé par Oliver Hirschbiegel sorti en 2001.– Silence on torture d’Antoine Plantevin(30 minutes) : documentaire sur les prisons cachées de la CIA, 2007.

TThhééââttrree– L’asbl Etats d’Art (Freeeks Factory)propose aux écoles une animation théâ-trale basée sur le film «Do-it-yourself». Infos:www.freeeks-factory.com ou 0473/45 23 06 ou [email protected]– Un pour la Route, de Harold Pinter.Théâtre Varia 02/640 35 50 [email protected]

© David Herthnek

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INDEXDVDVous trouverez sur le DVD accompagnant cedossier des témoignages de victimes ou bour-reaux, des interviews d’un médecin soignantles victimes, des analyses du phénomène de latorture, un spot d’Amnesty... Sur ce mêmeDVD, vous pourrez télécharger ce dossier péda-gogique ainsi que le manuel de torture de laCIA datant des années 1970, une archive qui aété déclassée aux USA.

Témoignages devictimes :IInntteerrvviieeww dduu DDrr JJoorrggee BBaarrrruuddiiLe Docteur Jorge Barrudi, qui fut lui-mêmevictime de torture au Chili, soigne à présentles victimes de torture au centre Exil de Bru-xelles. Il décrit de façon limpide le mécanismede la torture.

EErreenn KKeesskkiinn ((TTuurrqquuiiee)) ::Interview d'Eren Keskin, une avocate turque.Extrait de "Femmes, une égalité de droits",Amnesty International BF — Wake up, 2000.Attention, la situation décrite date d’avant2000, la Turquie a depuis fait beaucoup d’ef-forts pour lutter contre la torture et pourpunir les personnes qui s’en rendent coupable.

MMaahheerr AArraarr ((SSyyrriiee))Maher Arar a été détenu en Syrie du 9 octobre2002 au 5 octobre 2005. Il a été détenu ausecret pendant presque toute cette période,dans des conditions inhumaines, dans uneminuscule cellule non éclairée de la branche

palestinienne des services de renseignementsmilitaires à Damas, avant d’être remis enliberté sans avoir été inculpé.

Au cours de sa détention en Syrie, il a ététorturé ; il a notamment été frappé avec uncâble électrique noir épais effiloché. On l’amenacé du supplice de la « chaise allemande »et du supplice du « pneu » ainsi que de chocsélectriques. Il entendait d’autres prisonniershurler pendant qu’on les torturait. Les interro-gateurs qui travaillaient peut-être à partir d’in-formations fournies par les services de renseignements canadiens etaméricains le soupçonnaient de coopérationavec Al Qaïda.

SSiihheemm BBeennsseeddrriinnee ((TTuunniissiiee))Interview de Sihem Bensedrine, militante et jour-naliste tunisienne des droits humains, "Paroles defemmes", Amnesty International 2004

Sur le phénomène de latorture : ""LLee ffiillss ddee ttoonn vvooiissiinn"" ((GGrrèèccee))Reportage sur la «Grèce des colonels»: durantla dictature d'une junte militaire en Grècedans les années 60, le recours à la torture a étémis en lumière. Ce documentaire montrecomment on devient bourreau, et les senti-ments qui animent les personnes quipratiquent la torture. Impressionnant.

AAnnnnaaPortrait d’Anna, réfugiée d'Amérique Latine auDanemark, et qui a été aidée par le Centredanois de réhabilitation des victimes «Malgrétout», Amnesty International.

SSppoott TTVV AAmmnneessttyyUn spot sur la torture, AIR & Amnesty, 2006.

Cette photo montre un détenu torturé sur un "bâton de perroquet", une méthode très courante dans les commis-sariats au Brésil, dans le milieu des années 1980.

Torture chinoise des mains coupées, telleque décrite par des détenus en Guinée.

Un dessin d'un enfant des rues. L'inscrip-tion en-dessous du dessin signifie : «Arrêtéet battu, pourtant j'étais innocent. Ilsn'étaient pas encore satisfaits. Ils m'ontmis en prison».

La police a arrêté cette fille de 5 ans alorsqu'elle se promenait dans les rues. Elle apassé 16 heures avec des adultes avantque des avocats n'aient pu obtenir salibération.

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DEVENEZ LE CAUCHEMAR DES BOURREAUX. SIGNEZ CONTRE LA TORTURE. WWW.AMNESTY.BE