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IEPF INSTITUT DE L ÉNERGIE ET DE L ENVIRONNEMENT DE LA FRANCOPHONIE NUMÉRO 47 – 2 e TRIMESTRE 2000 Organisation Internationale de La Francophonie Pour une gestion durable de la biomasse-énergie Pour une gestion durable de la biomasse-énergie

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IEPF

INSTITUT DE L ÉNERGIE ET DE L ENVIRONNEMENT DE LA FRANCOPHONIE

NUMÉRO 47 – 2e TRIMESTRE 2000

Organisat ion Internat ionale de

La Francophonie

Pour une gestion durablede la biomasse-énergie

Pour une gestion durablede la biomasse-énergie

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Numéro 472e trimestre 2000

est publié trimestriellement par l’Institut de l’énergie et del’environnement de la Francophonie (IEPF).56, rue Saint-Pierre, 3e étageQuébec G1K 4A1 Canada Téléphone : 1 (418) 692-5727Télécopie : 1 (418) 692-5644Courriel : [email protected] Internet : www.iepf.org

Directeur de la publication :El Habib Benessahraoui

Rédacteur en chef invité :Boris E. Utria

Comité éditorial : El Habib Benessahraoui Sibi BonfilsFrançois DorlotDibongué A. KouoBoufeldja BenabdallahJean-Pierre NdoutoumSory I. DiabatéCarole Grass-Ramalingum

Édition et réalisation graphique :Caractéra inc.

Illustration de la couverture :Programme du Symposium sur la biomasse-énergie

ISSN 0840-7827

Tirage : 4000 exemplaires

Dépôt légal :Bibliothèque nationale du QuébecBibliothèque nationale du Canada

Les textes et les opinions n’engagent que leurs auteurs.Les appellations, les limites, figurant sur les cartes de LEF n’impliquent de la part de l’Institut de l’énergie etde l’environnement de la Francophonie aucun jugementquant au statut juridique ou autre d’un territoirequelconque, ni la reconnaissance ou l’acceptation d’unelimite particulière.

Prix de l’abonnement annuel (4 numéros) :40 $ CAD ; 28 $ USD ; 30 € EUR ; 16 000 CFA ; 380 000 Dongs vietnamiens

Poste-publications – ConventionNo 155 7440

INSTITUT DE L ÉNERGIE ET DE L ENVIRONNEMENT DE LA FRANCOPHONIE

Pour une gestion durable de la biomasse-énergie

MOT DU DIRECTEUR EXÉCUTIF 3

ÉDITORIAL 4

VERS UNE VISION AFRICAINE DE LA GESTION DURABLE 6DE LA BIOMASSE-ÉNERGIE

par Mamadou DIANKA

LA STRATÉGIE ÉNERGIE DOMESTIQUE : 11DIX ANS D’EXPÉRIENCE AU NIGER

par Hamadou MAMADOU et Issoufou TIÉMOU

VALORISATION ÉNERGÉTIQUE DE LA BIOMASSE AGRICOLE 17ET PRÉSERVATION DES RESSOURCES NATURELLES AU SOUDAN

par A. EL HASSAN et G. VAITILINGOMB

PROGRAMME ÉCONOMIE DE BOIS DE FEU AU CAMBODGE : 23ÉMERGENCE D’UN RÉSEAU DE COMPÉTENCES AVEC

DES RÉSULTATS ENCOURAGEANTS

par Jean-François ROZIS, Myriam RONDET et Sam VITOU

PRODUCTION INTÉGRÉE D’ÉLECTRICITÉ À PARTIR 25DE BIOMASSE AU BURKINA FASO

par S. BALA, F. BOURGOIS, H.P. TCHOUATÉ, F. HUPIN, E. VERHAEGEN et G. YAMÉOGO

TECHNOLOGIES MATURES SUR LE CONTINENT AFRICAIN, 28DANS LES PAYS INDUSTRIALISÉS ET CONDITIONS DE TRANSFERT

par Edgard BOSSOKEN

MODÈLES DE FINANCEMENT DE LA BIOMASSE-ÉNERGIE 36par Smail KHENNAS

ASPECTS SOCIAUX ET RÔLE DES FEMMES 39DANS L’UTILISATION DE LA BIOMASSE

par Oumy Khaïry NDIAYE

LE PROGRAMME RÉGIONAL POUR LE SECTEUR 43DES ÉNERGIES TRADITIONNELLES – RPTES :RÉALISATIONS ET PERSPECTIVES

par Boris E. UTRIA

Sommaire

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Pour une gestion durable de la biomasse-énergie 3

EL HABIB BENESSAHRAOUI

Mot du directeur exécutif

On estime aujourd’hui à 40 %la part de la biomasse dans laconsommation mondiale d’énergie.Cette part atteint 70 % à l’échellede l’Afrique. On sait qu’elle dépasse90 % dans certains pays de cecontinent. La biomasse reste, entout cas, l’énergie de base sinon laseule source d’énergie qu’utilisentdes tranches encore significativesdes populations des zones ruraleset périurbaines pour répondreà leurs besoins de cuisson,de chauffage, voire d’éclairage…

Dans ces zones, les procédés devalorisation restent rudimentaires,à l’image du foyer à trois pierres,encore largement répandu, malgrédes décennies et quantités deprogrammes de diffusion de foyersaméliorés. On en connaît lesconséquences : crises de bois de feuau Sahel, pression sans précédentsur les forêts, singulièrement à lapériphérie des grandes métropoles.Les maladies respiratoires liéesà la fumée et qui frappent surtoutles femmes et les enfants sontaujourd’hui citées au nombre deseffets délétères de cette utilisationinefficiente.

Les plus récentes prospectivesénergétiques mondiales, celles du

Conseil Mondial de l’Énergie oude la Banque mondiale, montrentque cette situation va perdurer.En 2020, 2 milliards de personnessur les 7,4 millions que compteraitla Terre, continueront de recouriraux énergies traditionnelles etprincipalement à la biomasse, pourl’essentiel de leurs besoins, et de viecourante et de développement.

C’est, de fait, comme instrumentde développement que les«perspectives» qu’explore cenuméro spécial de Liaison Énergie-Francophonie, veulent considérerla biomasse. C’est sous cet angleet celui de la sauvegarde del’environnement que le Forumd’Abidjan, dont sont extraits lestextes publiés ici, l’a traité : labiomasse peut être source d’énergiede production et, gérée de façonrationnelle et durable en mettantà contribution les nouvelles tech-nologies énergétiques, outil dedéveloppement durable, pour despopulations qui vont continuer d’endépendre sur les décennies à venir.

De ces perspectives nouvelles etde vécus originaux s’inscrivantdans cette nouvelle dynamiquetémoignent des «gens d’expérience»dans ce 47e numéro de notre revue.

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4 Liaison Énergie-Francophonie • N° 47

BORIS E. UTRIA

Responsable du

programme RPTES

Division Énergie

(AFTGL)

Département

Infrastructure (AFTIE),

Banque mondiale

Éditorial

La biomasse est la principalesource d’énergie en Afrique oùelle représente en moyenne 70 %des bilans énergétiques nationaux.Elle est utilisée essentiellement sousforme de bois de feu et de charbonde bois pour des besoins domes-tiques. Le développement techno-logique offre aujourd’hui d’énormespossibilités de valorisation de labiomasse sous forme d’électricitéet de chaleur utilisable dans lesménages et les entreprises.

La problématique de la biomasseénergie a plusieurs dimensionsimportantes :

• environnementale d’abord, ence que la demande croissanteen bois de chauffe a exercéde fortes pressions sur lesécosystèmes, allant jusqu’à ladestruction irréversible des forêts,surtout dans la région sahélienne,mais aussi autour de toutes lesvilles africaines ;

• socio-économique, car le secteurdevenant de plus en plus monétisé,les prix des sous-produits, tels quele charbon de bois, augmentent etobèrent les budgets des ménages,notamment dans les centresurbains ;

• technologique, enfin, car lesprocédés de transformationénergétique de la biomasse quise développent dans le mondetardent à percer de manièrenotable en Afrique.

Par ailleurs, au plan institutionnel,le dualisme entre les décideursdes secteurs de l’énergie et ceuxdes ressources naturelles, ainsi que

la problématique du financement,restent des contraintes majeuresde la valorisation énergétique dela biomasse.

Bref, la biomasse-énergie se pose,plus que jamais, dans une pers-pective de développement durableet devrait être traitée avec uneapproche systémique incluant autantl’offre et la demande que les aspectssocio-économiques, technologiqueset environnementaux.

C’est dans ce cadre que l’IEPFet ses partenaires1 ont organisé,du 29 novembre au 2 décembre1999 à Abidjan, un symposiumsur le thème «La biomasse-énergie etle développement : quelles perspectives pourl’Afrique ?». Les présentations ontpermis de revoir la place que labiomasse devrait occuper poursatisfaire la demande en énergiedes pays africains et d’identifierles outils de prise de décisionpermettant l’intégration de labiomasse-énergie dans le dévelop-pement durable de l’Afrique. Lesymposium était aussi l’occasiond’échanger sur les leviers dontpourrait bénéficier l’énergie tiréede la biomasse compte tenu de sonimpact positif sur les changementsclimatiques et sur les moyensde mobilisation des ressourcesfinancières dans le cadre de cettepréoccupation mondiale.

Une cinquantaine de communi-cations ont été présentées lors dece symposium, touchant à divers

1 Coopération française, Région Wallonne.ACDI, Banque mondiale, Banque africainede développement, CIRAD, ADEME

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aspects, dont le bilan et l’évaluationdes programmes en cours, lesaspects technologiques, institu-tionnels et environnementaux.

Le présent numéro de LEF regroupehuit contributions qui permettentde rendre compte de l’essentiel desdébats en cours en Afrique sur labiomasse-énergie. Les auteurs sontdes experts en la matière.

Mamadou DIANKA, par saconnaissance du domaine desénergies rurales en Afrique, faitun survol de la problématique auniveau du continent et propose unevision dite africaine de la gestiondurable de la biomasse-énergie.Cette vision est fondée pourl’essentiel sur l’intégration de labiomasse-énergie dans les plans dedéveloppement, la décentralisationde la gestion forestière, l’économiede l’énergie, et les réformes,notamment fiscales, pour attirerle financement privé.

L’article de Hamadou MAMADOU(et alii) fait un bilan des expériencesen matière d’énergie domestiqued’un pays déficitaire en biomassecomme le Niger. La stratégie mise

en place depuis plusieurs annéesdans ce pays et qui comporte desactions dans les domaines deplanification de l’approvisionnement,de réforme de la législation sur lebois, de structures de gestiondécentralisées, constitue uneexpérience remarquable.

Smail KHENNAS passe enrevue plusieurs mécanismes definancement pouvant s’adapterà des projets bioénergétiques depetite, moyenne et grande tailles.

Edgard BOSSOKEN décrit lestechnologies prometteuses pourla conversion de la biomasse enélectricité. Il analyse les outilsutilisés dans les pays développéspour promouvoir ces technologieset propose des pistes pour enfaciliter le transfert en Afrique.

A. EL HASSAN etG. VAITILINGOMB proposentune description des expériencessoudanaises dans la mise en valeurde la biomasse tirée du secteuragricole.

La contribution de Madame OumyKahry NDIAYE est consacrée aurôle des femmes dans l’utilisation

de la biomasse. Elle montre l’intérêtà profiter de la phase de mutationdans la gestion des ressourcesnaturelles au Sénégal pour donnerune chance aux femmesdéfavorisées des communautésde base d’accéder à des emplois,de s’impliquer dans le commerceet de développer de nouvellescapacités d’autogestion.

Enfin, sont passés également enrevue, le bilan et l’avancement duprogramme régional africain pour lesecteur des énergies traditionnellesgéré par la Banque mondiale ainsique les perspectives d’avenir.Ce programme, appelé RPTES(Programme régional pour lesecteur des énergies traditionnelleset de substitution) est en passe dedevenir un programme panafricainmajeur dans le domaine.

Ces réflexions illustrent l’essentielde la problématique discutée ausymposium d’Abidjan pour quela biomasse réponde aux besoinsde base des populations africainesmais également aux besoins de laproduction et du développementindustriel.

ELECTRALIS 2001 est le nom générique d’une séried’événements d’envergure internationale, qui se dérouleront àLiège (Belgique) pendant l’année 2001 et qui rassemblerontl’ensemble des acteurs mondiaux de l’électricité.

Le thème central de l’événement, l’électricité, sera abordé sousdivers angle et notamment celui du Citoyen (exposition « aucœur de l’électricité » de mars à novembre 2001) celui du futurtechnologique (exposition dans le domaine de la recherche

avancée du 14 au 21 mars 2001), celui de la géopolitique(Congrès mondial sur « les enjeux liés à la fourniture d’uneélectricité propre et rentable à l’ensemble de la planète ») etenfin sous l’angle de l’ouverture et notamment à d’autresmanifestations qui se dérouleront tout au long de l’année 2001.Pour de plus amples informations : http://www.electralis.com;courriel : [email protected] ; adresse postale : Eventis SCRL,41 avenue de Gerlache 4000 Liège Belgique ; téléphone : (32) 4 254 97 80 ; télécopie : (32) 4 254 97 89

ELECTRALIS 2001

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6 Liaison Énergie-Francophonie • N° 47

Secrétaire technique

du Groupe africain

d’appui au

programme RPTES

n effet, la biomasse-énergie constitue pour l’essentiel des pays africainsla seule ressource énergétique locale renouvelable, occupant en moyenneplus de 70% des bilans énergétiques nationaux (plus de 90% pour un payscomme le Burkina Faso). Toujours classée dans le secteur informel, la biomasse-énergie occupe pourtant une place importante dans la vie des populationsafricaines. Dans des pays comme le Sénégal, et selon le rapport nationalRPTES sur la question, la filière bois-énergie emploie plus de 4000 personneset aurait généré en 1995 plus de 20 milliards CFA de chiffre d’affaires.

À ces caractéristiques s’ajoute l’impact négatif de l’exploitation de la biomasse-énergie sur l’environnement. Face au souci de satisfaire les besoins des popu-lations en combustibles, la destruction du couvert végétal pose problème.

Au début de la présente décade, les États africains et certains bailleurs defonds ont pris conscience de la gravité du problème face au dilemme causépar la nécessité d’approvisionner les populations en bois-énergie et le soucide préserver l’environnement.

E

Programme régional pour le secteur des énergies traditionnelles – RPTES

Le GAA est un réseau formé de hauts responsables du secteur énergétique de l’Afrique de l’Ouest courriel :[email protected] - page Web : http ://www.enda.sn/gaa

Vers une vision africaine de la gestion durable de la biomasse-énergie

Vers une vision africaine de la gestion durable de la biomasse-énergie

En matière d’énergie, on peut dire que la décade finissantea été surtout marquée par les réformes entreprises dansun grand nombre de pays africains à l’intérieur de secteurshautement capitalistiques comme ceux de l’électricitéet des hydrocarbures. Les investissements consentisdans ces domaines sont considérables, comme l’attestentd’ailleurs certains rapports annuels d’institutionsfinancières internationales.

Pendant longtemps, la biomasse-énergie a été le parentpauvre des secteurs classiques de l’énergie en termes deplanification, d’organisation et surtout d’investissementsmalgré sa prédominance dans le système énergétiqueafricain.

MAMADOU DIANKA

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C’est dans cet esprit qu’une réflexiona été entreprise depuis un an par le Secrétariat technique du Groupeafricain d’appui (GAA) dans le cadre de l’IPASET (Initiative de politiqueafricaine dans le secteur des énergiestraditionnelles) avec pour objectifd’amener les responsables africains à asseoir une vision consensuelleafricaine de gestion durable de labiomasse-énergie.

Aperçu de la situation économique et de laproblématique de l’énergiede la biomasse en Afriqueau sud du Sahara

Avec près de 600 millions d’habitants(environ 10% de la populationmondiale), l’Afrique au sud duSahara (ASS) a un PNB estimé àenviron 300 milliards de dollars,dont 130 milliards sont réalisés parl’Afrique du Sud. Ce qui est négli-geable à l’échelle mondiale si l’onsait qu’un pays comme la Corée duSud a un PNB évalué à 485 milliardsde dollars en 1997. Les économiesdes pays qui composent cet espacegéographique sont fortement dépen-dantes de l’agriculture, qui repré-sente environ le tiers du PIB de larégion. L’écrasante majorité de lapopulation travaille dans le secteuragricole, malgré un taux d’urbanisa-tion global d’environ 32%.

Selon plusieurs spécialistes desquestions de développement, enparticulier ceux de la Banque mon-diale, étant donné le rythme élevéde la croissance démographiqueprojetée (3% par an en moyenne),il est non seulement nécessaire quele développement de l’agriculture etdu secteur primaire en général soitinscrit au rang des priorités maisaussi que ce développement se fassesans compromettre l’environnement.

Sur le plan énergétique, le rapportannuel de la Commission européenne(Annual Energy Review, 1997),indique une valeur de l’intensitéénergétique (kep/1000 US $)

d’environ 501 en 1994 pourl’ensemble de la région (321 sansl’Afrique du Sud et 169 pour l’Unioneuropéenne). La situation demeureassez paradoxale, avec des ressour-ces énergétiques appréciables alorsque les potentialités identifiées sontfaiblement exploitées.

Dans la plupart des pays de l’ASS,les filières d’approvisionnementénergétique sont désorganisées ettrès archaïques, les énergies moder-nes étant beaucoup moins accessibles.

D’une façon générale, la biomasse-énergie sous sa forme traditionnelle(bois de feu, charbon de bois,excréments d’animaux, déchetsorganiques, résidus agricoles ouagro-industriels, etc.) constituel’énergie domestique par excellenceet elle intervient pour plus de 90%dans les bilans énergétiques de cer-tains pays (Burkina Faso, Tanzanie,Éthiopie) alors qu’elle représentemoins de 15% dans un pays commel’Afrique du Sud. Les autres filièresde valorisation énergétique plusmoderne de la biomasse (biocarbu-rants, biogaz, biocombustiblesmodernes comme les briquettes oule gelfuel) n’ont eu jusqu’ici que desapplications relativement isolées.

Les problèmes liés à la demande en énergiestraditionnelles

D’une façon générale, dans la plupartdes pays africains, la gestion de lademande dans le secteur des com-bustibles ligneux est menée de façonassez aléatoire, sans une véritableprise en compte de la ressourcedisponible.

La planification de l’approvisionne-ment des ménages en combustiblesdomestiques qui devait servir d’outild’analyse de la demande et des prévisions sur la consommation asouvent fait l’objet d’une faibleattention lors de l’élaboration despolitiques énergétiques. Aussi ladéfinition des objectifs visés est

généralement restée floue, entamantdu coup la réussite des stratégiespolitiques choisies par le passé.

Le manque de système permanentd’informations sur le sous-secteur est une constante qui se retrouvedans la presque totalité des pays del’Afrique au sud du Sahara. Et lorsqueles structures existent dans un paysdonné, la gestion de l’informationest souvent parcellaire, ce qui entache, dans une certaine mesure, la pertinence de l’exploitation desdonnées aux fins de la prospective.

Si les structures de gestion et d’opérations gouvernementalesinterviennent en amont de la filièrepar l’intermédiaire des services encharge de l’exploitation forestière,en revanche, en aval, leur absencelaisse parfois le champ libre auxspéculations sur les prix au granddam des consommateurs urbains.

Même lorsque l’État intervient dansla fixation des prix du combustibleligneux en tant que produit de première nécessité, comme c’est lecas dans quelques pays de la sous-région, les prix réels pratiqués surles marchés diffèrent sensiblementdes prix officiels.

Mais, depuis quelques années, unintérêt grandissant est de plus enplus accordé à ce sous-secteur éner-gétique, notamment dans les paysles plus touchés par le phénomènede la désertification. C’est ainsi quedans plusieurs pays du Sahel, onassiste à l’émergence de structuresgouvernementales, appuyées par les projets de coopération bi oumultilatéraux, et dont un des défismajeurs est la rationalisation desfilières biomasse-énergie depuis laproduction jusqu’à la commercialisa-tion. L’objectif final étant de propo-ser aux consommateurs un produitde très haute qualité et respectueuxde l’environnement, notamment des écosystèmes forestiers.

Aussi, un effort important de planifica-tion, basé sur un système permanentde gestion de l’information, doitêtre mené à l’échelle continentale si

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on veut trouver une solution durablepour la question de l’énergie domes-tique en Afrique subsaharienne. Ilconviendrait également de rétablirl’intérêt des prix en tant qu’instrumentde politique énergétique durable, eninternalisant à juste titre les coûtsenvironnementaux dans la valeuréconomique de la ressource boisface à son coût d’opportunité dansl’optique d’une substitution vers leGPL ou le kérosène ou encored’autres combustibles alternatifs.

Les problèmes liés à l’offre en énergies traditionnelles

En cette fin du XXe siècle, la plupartdes pays africains sont confrontés àune dégradation alarmante et conti-nue de leur environnement et plusparticulièrement de leurs ressourcesforestières. Cependant, la probléma-tique de la gestion forestière en ASSfait ressortir quelques nuances selonqu’on se situe en zone sèche ou enzone humide.

Dans les pays de la zone sèche, lagravité du processus de dégradation,voire de désertification s’expliquepar la conjonction de plusieursfacteurs complexes qui sont pourla plupart connus, mais encore malmaîtrisés selon les spécialistes. Parmiles plus importants, on peut citer : • les facteurs climatiques défavorables,

dont les sécheresses successives,la diminution et l’irrégularitédu régime pluviométrique, ayantpour corollaire la disparition denombreuses zones forestières etfauniques et la dégradation dumilieu naturel ;

• les facteurs anthropiques liés àune forte croissance démographiqueet à l’existence de systèmesd’exploitation agricoles et pasto-raux le plus souvent extensifs etinadaptés aux conditions du milieuavec pour conséquence le pillagesystématique de la ressourceforestière.

Dans les pays de la zone humide, le potentiel forestier est encore

important. Générant des revenusimportants, notamment pour lafilière bois d’œuvre, ce potentiel estsurexploité sans aucun respect desrègles d’exploitation rationnelle etdes capacités de régénération de laforêt. L’une des conséquences gravesde cette surexploitation est à termele recul de la diversité biologique.

Lors du séminaire régional dela FAO sur la «Décentralisationdes programmes forestiers», tenuà Harare en novembre 1995, quelques contraintes unanimesont été évoquées :• un manque d’informations et

de connaissances sur le potentielforestier réel ;

• une quasi absence de politiqued’aménagement et de planificationde la gestion des ressourcesforestières ;

• un manque de coordination desprogrammes nationaux en matièrede foresterie.

De plus, les structures en charge dela gestion de l’offre se caractérisentle plus souvent par une vieille tradi-tion de centralisme ou encore parune incapacité à faire respecter les textes, quelquefois peu adaptés, élaborés par les pouvoirs publics en vue de réglementer la productionde bois pour l’usage domestique oul’industrie du bois.

Face à ces insuffisances, beaucoupde pays ont élaboré, avec l’appuides organismes internationaux, desprogrammes d’action dont l’objectifest de renforcer les institutionschargées de la gestion, de la planifi-cation et de la réglementation dusecteur forestier en vue d’arriver àun approvisionnement durable desménages en combustibles ligneux.

Une politique volontariste fondéesur l’industrialisation des culturesénergétiques telles que les végétauxriches en sucre, en amidon ou encoreen cellulose pour la productiond’éthanol et d’autres végétaux richesen huile (colza, tournesol, etc.) pour

la production des huiles énergétiques,constitue une alternative qu’il seraitbon de promouvoir au même titreque le gaz butane ou encore lekérosène.

Par ailleurs, l’aménagement desforêts naturelles peut contribuer à une meilleure valorisation desdéchets agroforestiers à des finsénergétiques par la mise en place de plates-formes de compostage depetite taille. Cette voie permet deréduire considérablement les effetsnéfastes des fertilisants chimiquestout en améliorant le processus derégénération du capital forestier.

Le contexte d’analyse du problème de la biomasse-énergie

Consommant très peu d’énergiesdites modernes ou commerciales, les populations rurales africaines àfaible revenu utilisent généralementla biomasse-énergie pour les besoinsde cuisine et d’éclairage. S’il existeun impératif fondamental pour ledéveloppement d’un pays, c’est biensûr, son approvisionnement durableen énergie dans la mesure où lesperspectives de croissance écono-mique sont étroitement liées à la fourniture d’une énergie fiable età un coût abordable.

Partant, les traitements des questionsd’énergies domestiques devraient bénéficierd’une plus grande priorité et d’une plusgrande attention au moment de la définitiondes politiques et stratégies énergétiques despays africains, car il est établi quedans la majorité des pays africains,ces énergies assurent plus de70% de la consommation totaled’énergie.

L’idée, longtemps entretenue par les responsables politiques africainsainsi que par de nombreux organis-mes d’aide au développement, selonlaquelle la croissance et le dévelop-pement économique permettraientune transition harmonieuse de labiomasse-énergie traditionnelle aux

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combustibles modernes a largementcontribué à reléguer au second planle secteur de la biomasse-énergie.

Bien que l’énergie de la biomasse ne soit pas forcément la sourced’énergie la plus rentable d’un pointde vue économique, elle demeurenéanmoins la plus accessible, et à ce titre, en raison de la faiblessedes revenus, la biomasse-énergiecontinuera d’être largement utiliséepar les populations et la transitioncomplète ne se fera pas, en tout cas dans le court ou moyen termedans la plupart des pays.

S’il demeure vrai que de nombreuxpays africains risquent de connaître,à long terme, une pénurie aiguë debois de chauffe, il est généralementadmis que pour les pays situés dansles zones arides comme la zone soudano-sahélienne, ce risque estbeaucoup plus grand. Quand on saitque la population africaine connaîtun taux de croissance démographiquede 3% en moyenne avec une urba-nisation galopante et des économiesencore faibles, on peut imaginer lecontexte dans lequel se pose la pro-blématique de la biomasse-énergieen cette fin du second millénaire.

La complexité de la filière bois-énergie, de la production de boisjusqu’à la commercialisation, avec des intermédiaires à plusieursniveaux, constitue également unfrein majeur pour les besoins de la statistique.

Ressources essentielles d’un continentinterpellé par les grands défis dumonde (éducation, lutte contre lapauvreté, bien-être social entreautres), les traitements des questionsde la biomasse-énergie devraient sefaire dans le cadre d’une nouvellevision que s’est forgée le Groupeafricain d’appui (GAA) au ProgrammeRPTES.

Cette vision qui s’inscrit dans lesillage d’une gestion durable des ressources naturelles s’est définieavec l’espoir que les différentsacteurs impliqués (politiques,

décideurs, privés, professionnels,etc.) pourront tirer le meilleur profit de l’exploitation forestière.

Cette vision est d’autant nécessairequ’il est acquis aujourd’hui que ledéveloppement, pour qu’il soitassuré sur une très longue période et généralisé, doit être durable. Les énergies tirées de la biomassepourraient, à travers les projetsénergétiques dans certains pays,suite au concept RPTES, constituerun champ d’application de cettenouvelle approche du développementdurable, basée sur les facteurs essen-tiels, d’égale importance, que sont la croissance économique, la pro-motion sociale et la préservation de l’environnement.

La nouvelle vision de gestion durable de la biomasse énergie

Au regard des mutations en coursdans les politiques énergétiques dela plupart des pays et au vu de lacomplexité de la filière biomasse-énergie en Afrique, il convient, dansle cadre global de la lutte contre la pauvreté, de définir une nouvelle visionde gestion durable de la biomasse-énergie.

Faire reculer la pauvreté en Afriquesubsaharienne est devenu depuis les premières années de la décadeen cours un credo des gouvernementset de certains partenaires au déve-loppement comme la Banque mon-diale et le PNUD.

Parmi les principales causes de lapauvreté en Afrique, on peut noterentre autres, selon un grouped’experts de la Banque mondialesur la question :• la destruction des ressources natu-

relles, qui entraîne une dégradationde l’environnement et une baissede productivité ;

• l’insuffisance d’accès aux possibilitésd’emplois ;

• l’absence de participation, les masses pauvres n’étant pas

associées à l’élaboration des programmes de développement.

Quand on sait la place qu’occupe la biomasse-énergie dans les bilansénergétiques des pays de l’ASS, la prédominance des populationsrurales ainsi que le taux croissant de l’exode rural (plus de 3%), onreconnaît qu’il y a là matière àréflexion, ce qui demande que desmesures idoines soient prises pourassurer une gestion durable des ressources naturelles au profit despopulations rurales.

Le Groupe africain d’appui au RPTESpense que la vision qui s’imposeaujourd’hui pour la problématiquebiomasse-énergie doit s’appuyer sur les axes définis ci-après :

AU NIVEAU NATIONAL

– disposer d’une politique globale dedéveloppement intégrant les autres problé-matiques : foresterie, agriculture,élevage, gestion des ressourcesnaturelles, population, urbanisa-tion, décentralisation, lutte contrela pauvreté, industrialisation dumonde rural, etc. ;

– considérer les forêts naturellescomme une véritable ressource énergé-tique renouvelable et en tenir compte dans la définition et la mise en œuvre des politiques énergétiques nationales ;

– favoriser une exploitation forestièreplus rationnelle grâce à la mise enœuvre d’un cadre réglementairefiscal plus adapté au contexte de raréfaction de la ressource ;

– conférer aux populations ruralesdes villages riverains des forma-tions forestières, la gestion desressources de leurs terroirs c’est-à-dire assurer un véritable transfert de la gestion des forêts vers les collec-tivités locales ;

– proposer aux consommateurs une gamme variée de combustibles : gaz butane, kérosène, briquette de tourbe, de résidus agricoles ou agro-industriels ;

– promouvoir une politique de réduc-tion de la consommation de biomasse-

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énergie au niveau de toute la filièrede la production jusqu’à laconsommation : techniques améliorées d’exploitation etd’utilisation ;

– promouvoir une politique d’infor-mation et de planification cohérente,transparente avec une implicationde tous les acteurs en développantles capacités à tous les niveaux ;

– créer un cadre juridique et finan-cier favorable pour une implicationdu secteur privé et des collectivitésdécentralisées afin de promouvoirdes activités génératrices derevenus dans le contexte d’unegestion durable des ressourcesde biomasse (en amont et en aval)et de promotion d’énergiesalternatives et de substitution ;

– tirer profit des nouveaux mécanis-mes de financement qui s’offrentdans le cadre du protocole deKyoto sur les changements climatiques (activités exécutéesconjointement, mécanismes de développement propre) pourl’émergence de programmes degestion durable de la biomasse-énergie.

AUX NIVEAUX RÉGIONAL ET INTERNATIONAL

– créer, conformément au traitéd’Abuja, des pôles régionauxd’excellence jouant le rôle deConseils ou de laboratoiresd’idées pour une mise en cohé-rence des politiques nationaleset une meilleure planificationdu sous-secteur de la biomasse-énergie ;

– développer les capacités de con-ception, d’analyse et de manage-ment des compétences africainesdans le cadre de l’appropriationdes différents concepts de gestionde la biomasse-énergie et destechnologies reliées. Des actionsrelatives aux IEC (Information,éducation, communication)s’appuyant sur les technologies de communication modernes(Internet) devraient être promues

dans le cadre d’échanges et deconcertations sous-régionales.Dans cette optique des répertoiresde compétences devraient êtrerendus disponibles ;

– traiter les questions de biomasse-énergie dans le cadre des rencon-tres internationales liées à l’énergieet l’environnement : Conseil mondial de l’Énergie, Commissionafricaine de l’Énergie (projetOUA), et autres structures sous-régionales impliquées comme leCILSS, l’IGADD, le Kengo etc. ;

– l’initiative du Secrétariat techniquedu Groupe africain d’appui d’établirun partenariat avec le Programmeénergie d’ENDA-TM pour créerau niveau régional un Centre deressources et d’études des stratégiesdu secteur des énergies tradition-nelles (CRETAS) mérite d’êtreencouragée.

Conclusion La biomasse-énergie représente unpotentiel considérable pour l’Afrique.Cependant, les méthodes tradition-nelles d’exploitation de cette biomasseont non seulement eu de lourdesconséquences sur l’environnement,mais n’ont pu résoudre que partiel-lement la question cruciale del’approvisionnement des ménagesen combustibles domestiques.

Néanmoins, les récents progrèsréalisés quant à l’amélioration destechnologies de valorisation de labiomasse-énergie laissent entrevoirdes perspectives intéressantes enfaveur d’une modernisation et d’unemeilleure appréciation des filièresbiocombustibles et biocarburants.

La réflexion engagée ces dernièresannées par un groupe d’experts africains regroupés autour du GAA,sous l’impulsion du programmeRPTES, et fondée sur une approchenouvelle de la gestion des ressourcesforestières, illustre l’attention gran-dissante des pouvoirs publics à labiomasse-énergie, qui fut depuis

longtemps reléguée au second planen faveur des énergies dites conven-tionnelles.

Compte tenu de la complexité desproblèmes de la biomasse-énergie,qui ont des liens directs avec la pauvreté, il est clair que des actionsisolées ne pourront arriver à bout de la problématique. C’est pourquoiil est indispensable de promouvoirla collaboration régionale et le par-tenariat pour une meilleure efficacitédans l’action.

Bibliographie :

1. Le rapport régional RPTES,Maastricht - 1995

2. Le Programme énergétique africain,BAD - 1995

3. Le rapport annuel de la Banquemondiale – 1998

4. Guide de la biomasse-énergie, IEPF – 1994

5. Relance du développement écono-mique et social de l’Afrique, OUA,Addis-Abéba, -1995

6. Traité instituant la Communauté économique africaine, OUA, ABUJA – 1991

7. Document CEA/NU sur la Confé-rence des ministres africains desMines et de l’Énergie, Accra –1995

8. Taking action to reduce poverty in Sub-Saharan Africa, Banquemondiale – 1996

9. La problématique des énergiesdomestiques en zone sahélienne etles différentes stratégies, – Conseilmondial de l’Énergie, Tokyo,Mamadou Dianka – 1995

10. Annual Energy Review,Commission européenne – 1997

11. Rapport annuel sur le développe-ment humain, PNUD – 1999

12. Economic Report on Africa 1999 –The challenge of poverty reduction,UN/Economic Commission forAfrica

13. Déclaration de Libreville sur la Croissance et la Lutte contre la pauvreté, 18-19 janvier 2000.

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Pour une gestion durable de la biomasse-énergie 11

Directeur projet

aménagement des

forêts naturelles

Banque africaine

de développement

(PAFN/BAD)

Issoufou TIÉMOU,

Directeur projet

énergie domestique/

DANIDA (Agence

Danoise d’Assistance

au Développement)

Amadou

ASSOUMANE,

PAFN/BAD,

Chef d’antenne

de Dosso

La stratégie énergie domestique : dix ansd’expérience au Niger

La stratégie énergie domestique : dix ansd’expérience au Niger

approvisionnement en bois-énergie des grandes villes du Niger com-porte un enjeu environnemental, par l’importance des prélèvements effec-tués sur des massifs forestiers fortement dégradés, un enjeu social, puisquec’est pratiquement toute la population rurale comme urbaine qui est direc-tement concernée soit en tant que consommateur, soit en tant que producteur ;et enfin un enjeu économique, en raison des revenus générés directement ouindirectement par cette filière. Il s’agit également d’une production nationalequi réduit la dépendance énergétique du Niger avec une incidence signi-ficative et positive sur la balance des paiements, une incidence d’environ120 milliards Fcfa pour le gaz et 107 milliards Fcfa pour le pétrole par an.

Le bilan énergétique du Niger indique que le bois-énergie représente, en1995, 80% de la consommation nationale d’énergie. Le chiffre d’affairespour la consommation annuelle globale de la filière bois est de l’ordre de3,75 milliards de Fcfa pour la seule ville de Niamey. À la production, il estde 0,5 milliards Fcfa. C’est dire l’importance des enjeux sous-jacents et lanécessité pour l’état d’intervenir afin de garantir sur le long terme l’exploi-tation, inéluctable du fait de la croissance démographique, d’écosystèmesforestiers reconnus comme fragiles.

Aussi le Niger s’est engagé, depuis 1989, dans la mise en œuvre d’une nou-velle politique forestière ayant pour objectif l’amélioration de la gestion etde l’exploitation des forêts naturelles en vue de l’approvisionnement en boisde feu des principales villes, avec la participation des populations riverainesdes massifs forestiers. Cette nouvelle politique baptisée Stratégie énergiedomestique (SED) se fonde sur le postulat de base que le bois de feu est etsera pour longtemps encore le seul combustible domestique d’origine natio-nale peu coûteux et facilement accessible aux populations urbaines et rurales.

Au Niger, le couvert végétal a connu au cours de cestrente dernières années une dégradation sans précédentavec pour conséquence la détérioration continue desconditions de vie de la population. Dès lors plusieursstratégies et approches ont été développées à traversdes programmes et projets pour contrecarrer cettedégradation des ressources végétales.

L’

HAMADOUMAMADOU

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La SED, soutenue par l’Agencedanoise de coopération (DANIDA),la Banque mondiale et la Banqueafricaine de développement, s’appuiesur un ensemble de mesures techni-ques, réglementaires et législativesmises en œuvre et coordonnées par l’administration forestière à travers le Projet énergie II-énergiedomestique.

L’approche testée par cette opérationse veut pragmatique et vise à donnerà l’arbre une valeur sur pied qui aideà la prise de conscience par lespopulations que la forêt, pour elles,sans autre valeur que celle donnéepar les droits d’usages traditionnels,mérite d’être entretenue et exploitéedans une perspective à long terme.

Dix ans après le lancement de cettestratégie, le bilan qui peut en êtrefait montre qu’il est possible d’aborderles problèmes d’aménagement fores-tier dans un cadre durable et partici-patif où l’on associe l’ensemble desacteurs intéressés par cette filière ;ainsi en est-il des villageois riverainset bénéficiant des droits d’usage traditionnels, des transporteurs-commerçants qui assurent le trans-port du bois des zones de productionvers les villes et enfin des agents des services forestiers qu’ils soientaffectés à des tâches de contrôle sur le terrain pour surveiller lesconditions techniques d’exploitationou dans les villes pour s’assurer que les taxes dues par les transporteurssont effectivement perçues.

Seront successivement abordés danscet article, le système de gestion etd’exploitation forestière en vigueur,les premières opérations d’aménage-ments forestiers villageois conduitesau Niger, le contenu de la nouvellepolitique de gestion forestière, lebilan technique et socio-économiquede la SED après dix ans de mise enœuvre, notamment les perspectivesoffertes par cette nouvelle politiqueen terme de gestion participative

durable des ressources forestières, dedéveloppement rural local et de luttecontre la pauvreté en milieu rural.

Le système d’exploitation en vigueur

Les villes sont approvisionnées enbois suivant un système d’exploita-tion dit incontrôlé par lequel lecommerçant-transporteur de boisdétenteur d’un permis de coupeest libre d’aller exploiter le boisoù il veut sans contrôle effectifdes volumes prélevés et des lieuxd’exploitation. Il n’existe pas nonplus de mécanisme d’orientation dufront d’exploitation en fonction del’abondance ou de la raréfaction dela ressource ; cela se traduit par unedéforestation galopante des auréolesimmédiates des gros centres urbains.

Dans ce système, les communautésrurales riveraines des massifs fores-tiers sont exclues et les principauxacteurs sont : les agents forestiersqui délivrent les permis de coupe,c’est-à-dire le droit d’exploiter et les commerçants-transporteurs quicumulent les fonctions de produc-tion, de transport et de commercedu bois. De plus, les principauxbénéficiaires n’ont aucune obligationen matière de restauration des zonesainsi exploitées et dégradées.

Il est évident qu’un tel système minierne permet pas une exploitationdurable des ressources forestières.Les premières tentatives en matièred’aménagements forestiers ont vu lejour à la suite de ce constat et visentà remplacer le système d’exploitationincontrôlé par un système contrôléet participatif.

Les premières opérationsd’aménagementsforestiers villageois : lescoopératives forestières.

Au début des années 80, l’État ainitié et testé une nouvelle politique

notamment en recherchant pard’autres moyens que les plantationsclassiques, les moyens de répondre à cette demande urbaine inélucta-blement en croissance.

C’est ainsi qu’est née l’idée de «gestion des formations naturelles»dont on savait à l’époque qu’ellescontribuaient à la majeure partie des besoins de ces populations.Plusieurs expériences furent tentéesdont la plus connue fut l’aménage-ment forestier de la forêt classéeGuesselbodi à 20 km de Niamey.

Toutes ces opérations, maintenantarrêtées, se sont centrées sur la ges-tion technique proprement dite deces massifs : il s’en est suivi des plansd’aménagement globaux calqués sur les normes des zones tempéréesbasées sur des durées de rotationqui variaient entre 10 et 15 ans sans que l’on connaisse très bien le pourquoi et le comment de ceschoix mais surtout en ne tenant passuffisamment compte des multiplesusages coutumiers de ces forêts.

Le principal problème de ces amé-nagements fut donc de ne considérerles forêts que par rapport à ce qu’ellescontenaient en terme de ressourcesdisponibles et de rechercher, ensuite,comment on pourrait associer lespopulations riveraines à leur gestionnotamment par la mise en place de coopératives forestières inter-villageoises.

Ces coopératives n’ont pas atteintles objectifs escomptés puisque produisant des quantités limitées debois sans effet significatif sur l’offrede bois en ville et possédant desorganes de décision monopoliséspar quelques responsables autopro-clamés. Ces premières expériencesétaient bâties sur la législationforestière existante qui n’était pasappropriée pour induire les change-ments souhaités, et donc qui néces-sitait des réformes. Il était aussinécessaire de revoir le schéma

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d’organisation pour le rendre plusfacilement compréhensible et doncaccessible aux populations riveraines.

Le défi à relever était donc de passerdes systèmes coopératifs lourds etdifficilement extensibles au planspatial à des systèmes plus simplesaisément diffusables à l’échelle desbassins d’approvisionnement desvilles. Il était nécessaire pour cela de simplifier en les gardant perfor-mantes, voire en les améliorant, lesméthodes acquises et expérimentéespar les pionniers au cours de ladécennie 1980.

L’avènement de laStratégie énergiedomestique (SED)

Les opérations d’aménagement desforêts naturelles ont été développéesà partir des années 80 à la suite desrésultats mitigés des grands projetsde reboisement à but productif nonreproductibles financièrement etéconomiquement dans le contextesocio-économique du Niger. Unenouvelle philosophie de gestionrationnelle et décentralisée des res-sources naturelles existantes à traversles opérations d’aménagementsforestiers ruraux s’est développée,pour aboutir à l’élaboration au coursdes années 86/87 d’une nouvellepolitique énergétique et forestièreappelée Stratégie énergie domestique(SED) faisant pour la première foisle lien entre l’offre et la demande decombustibles ligneux des ménagesurbains et ruraux. Il s’agit de jouersur les deux tableaux, à savoir, d’une part, stabiliser sinon réduire la consommation des combustiblesligneux par la substitution et l’éco-nomie de bois, et d’autre part, rem-placer progressivement le systèmed’exploitation anarchique des forêtspar un système contrôlé, rationnelet durable.

Ainsi depuis 1989, le gouvernementdu Niger développe un vaste pro-gramme de gestion des formationsligneuses périurbaines à travers le

projet Énergie II-énergie domestiquequi a deux composantes :

• une composante Substitution etéconomie d’énergie, dont lesinterventions seraient axées sur la promotion des énergies de substitution et des équipementsd’économie de bois ;

• une composante Gestion partici-pative des forêts placée sous laresponsabilité de la Direction de l’Environnement ; elle est aucentre de la nouvelle politiqueforestière de gestion participativedes ressources forestières.

LA STRATÉGIE ÉNERGIEDOMESTIQUE – COMPOSANTEGESTION ET AMÉNAGEMENTSFORESTIERS VILLAGEOIS

La Stratégie énergie domestiques’est développée à partir des quatrepiliers suivants :

• le Schéma directeur d’approvi-sionnement (SDA) : c’est un outilde planification et d’orientationqui définit les modes de gestionet l’organisation souhaitable del’exploitation du bois-énergie destiné à l’approvisionnement desvilles sur les plans géographique,technique et socio-économique ; il s’agit en effet d’un documentrésultant d’un diagnostic global(physique et socio-économique)du milieu.

• la réforme de la législation sur le bois : cette réforme constituel’élément central de la SED; elle a permis de transférer la gestiondes forêts aux communautés ruraleset de les rétablir dans leurs droitsen instituant les marchés rurauxde bois-énergie ; elle a modifié lesrôles des acteurs de la filière bois :la production primaire et le com-merce du bois en milieu rural auxvillageois, le transport et le com-merce du bois en milieu urbainaux commerçants-transporteurs,le contrôle et le suivi-conseilaux agents de l’administrationforestière. La réforme fiscale aaussi transféré la perception de

la taxe forestière aux villageois etinstitué une répartition des recettesau profit de tous les partenaires àsavoir les ruraux, les collectivitésterritoriales, le Trésor national etmême l’administration forestièrepar la création d’un fonds decontrôle forestier (compte spécial3001). La réforme fiscale fait aussiobligation à chaque partenaired’affecter une partie de ses revenusfiscaux à des travaux d’aménage-ment et de développement desforêts. Elle a institué un systèmede taxation différentielle quipénalise et décourage l’exploita-tion anarchique et incontrôléelourdement taxée, au profit del’exploitation contrôlée par lesmarchés ruraux, faiblement taxée.Les textes consacrant cetteréforme sont les suivants :

– l’ordonnance 92-037 du 21 août1992, portant organisation de lacommercialisation et du transportde bois dans les grandes agglomé-rations, et la fiscalité qui lui estapplicable ;

– le décret 96-390/PRN/MHE du 22 octobre 1996 (abrogeant le décret 92-279 du 21/8192) ;

– l’arrêté No 0039/NIFOE/DE du 15 juillet 1997, portant tarificationdes redevances perçues à l’occasionde la délivrance du permis d’exploi-tation du bois (abrogeant l’arrêtéN’009/NIFOE/DE du 23 février1993).

• les structures locales de gestiondes forêts et des marchés rurauxde bois-énergie, instituées parl’ordonnance 92-037 du 21/8/92.Ce sont des organisations villa-geoises chargées de gérer les forêtset de produire le bois-énergie destiné à l’approvisionnement des gros centres urbains.

Dans le processus de développementd’un marché rural, qui comprend six étapes, depuis l’information des villages jusqu’à la formation des responsables locaux en passantpar la délimitation des terroirssylvo-pastoraux qui seront exploités ;

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le moment crucial qui permet dedire que le marché rural est effecti-vement créé et est opérationnel, est celui où l’administration accordel’agrément et remet le carnet decoupons permettant la collecte des taxes par le gestionnaire.

La négociation inter et intra-villageoiseest fondamentale pour que, lorsquel’exploitation commence et que lesvillages comprennent la réalité dutransfert monétaire ville-campagne,des conflits d’ordre foncier ne surgissent pas : la concertation doitêtre effective et réelle. En outre, la quantité globale de bois qui peut-être exploitée par le marché ruralchaque année est limitée par unquota annuel fixé par l’administrationforestière. Ce quota est fonction dela surface du terroir sylvo-pastoralvillageois délimité et des potentialitésà l’unité de surface pour le type deformation concernée.

Chaque village exploite son terroirsylvo-pastoral selon des règles définies dans un dossier d’agrémentet fixe notamment, en relation avecl’administration, les droits et devoirsde toutes les interventions.

Ce dispositif de quota constituedonc, en soi, un début d’améliorationde l’exploitation forestière et doncla première étape de l’aménagementforestier qui sera complet si cesmarchés ruraux s’appuient sur desmassifs où il est possible d’intégrerdes parcellaires d’exploitation.

Le renforcement du contrôle forestieret le suivi administratif sont les garantsdu respect des conditions d’exploi-tation et de gestion durable desressources forestières. L’appui desagents de l’administration forestièreest indispensable à la mise en œuvrede la Stratégie énergie domestique.L’intervention des agents forestiersa été sciemment subdivisée en deuxvolets :

– un volet purement de «contrôle»dit Contrôle forestier, exercé prin-cipalement sur les commerçants-transporteurs (lutte contre toutesles formes de fraude par exemple),

mais aussi sur les marchés ruraux(respect des quotas d’exploitationet du parcellaire, respect des normes de coupe, vérification des reversements de taxes, etc.). Il s’agit là de l’aspect vérificationdu respect des règles du jeu partous les acteurs concernés ouaspect de police forestière.

– un volet d’appui/conseil aux mar-chés ruraux, appelé suivi adminis-tratif ; il porte principalement surles activités de suivi, de formationet d’encadrement des ruraux à lamise en œuvre des plans d’aména-gement : appui/formation en débutde campagne à l’identification desparcelles à mettre sous exploitation,rappel en début de campagne desquotas d’exploitation et des normestechniques de coupe, appui àl’identification, à l’élaboration et àl’exécution des fiches d’opérationspour les travaux de régénérationde la forêt et pour les actions dedéveloppement villageois, suivi et appui/conseil en matière defonctionnement institutionnel, en matière fiscale et commerciale,appui à la demande des villageoispour lutter contre toutes agressionsextérieures portant sur la forêt,etc. Il s’agit là du rôle de«conseiller de développement»de l’agent forestier.

LA COMPOSANTE SUBSTITUTIONET ÉCONOMIE D’ÉNERGIE OUGESTION DE LA DEMANDE

Le volet Demande du projet ÉnergieII a pour finalité de contribuer à lapréservation des ressources forestièresen réduisant les prélèvements debois de feu. Aussi, les objectifs spé-cifiques de ce volet sont entre autres :– l’économie du bois par la diffusion

et l’utilisation à grande échelle defoyers améliorés et d’équipementsde substitution à travers le déve-loppement d’unités nationales deproduction et de commercialisationfiables et autonomes ;

– la substitution du bois par descombustibles alternatifs (gaz,pétrole lampant).

BILAN TECHNIQUE ET SOCIO-ÉCONOMIQUE

Sur le plan technique, la mise aupoint d’un type d’aménagement participatif simplifié, l’interventiondu projet en matière d’aménagementsuit une procédure en trois phases :

– une phase préparatoire de collected’informations d’ordre techniqueet socio-économique ; cette phasese termine par la cartographie des terroirs concernés et inclut de larges négociations liées à ladélimitation des terroirs entre les différents villages limitrophes,la réalisation d’un inventaire et la définition d’un parcellaired’exploitation qui soit adapté aucontexte local ; ainsi il est fonda-mental de faire en sorte que lesdistances entre les zones de coupeet les centres de vente ne soientpas trop importantes ;

– une phase d’élaboration du pland’aménagement ; celui-ci regroupetous ces éléments techniques et yrajoute le mode de gestion adoptéainsi que le cadre juridique del’exploitation (acte de concessionrurale). Il prévoit également lesinterventions techniques à réaliser(coupe du bois et exploitationd’autres produits, travaux de res-tauration du sol et plantations,gardiennage, commercialisationdes produits, etc.) et, bien sûr, le quota d’exploitation ;

– une phase de mise en applicationdu plan d’aménagement : il s’agitde l’exécution sur le terrain desactivités contenues dans le pland’aménagement ; il s’agit essentiel-lement de mettre sur pied la struc-ture de gestion et de former lesvillageois en alphabétisation et en gestion. Il est important queles populations puissent gérer parelles-mêmes ces structures pourêtre autonomes ; un délai de deuxans a été défini pour arriver à une complète autonomie de cesmarchés ruraux.

Le bilan socio-technique réalisé en1998 après deux ans d’interruption

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du projet, au niveau des aménage-ments forestiers villageois de Bangoet de Tientiergou dans la zone deSay, révèle que les villageois se sontapproprié l’opération, même s’ilexiste encore quelques difficultés.Les villageois se sont effectivementapproprié des ressources forestièresde leur terroir qu’ils protègent etdéfendent contre toute action des-tructrice extérieure. L’exécution desplans d’aménagement montre queglobalement les exploitants villageoismaîtrisent assez bien les parcellaires,les normes d’exploitation, les quotas,la régénération des différentes espè-ces coupées, les travaux de restaura-tion, la fiscalité, etc. En un mot, lesrègles de l’aménagement sont connuesmême si leur application n’est pastoujours rigoureuse au niveau decertains marchés ruraux. Les diffi-cultés de maîtrise et d’applicationdes règles proviennent le plussouvent du fait de l’intégration de nouveaux bûcherons qui n’ont pasbénéficié de formation préalable.Ces difficultés proviennent aussi del’insuffisance du suivi et de l’appuides services forestiers locaux.

Les principaux résultats techniquesobtenus du volet Demande parrapport à ces deux objectifs peuventêtre résumés comme suit en fin 1996: – 13 000 réchauds à pétrole diffusés

en trois ans, soit 4 000 à 5 000réchauds par an pour un taux depénétration de 10% à Niamey,9% à Maradi, 16% à Zinder et10% à Tahoua ;

– 12 000 réchauds à gaz en troisans, avec un taux de pénétrationde 20% à Niamey, 12% à Maradi,11% à Tahoua et 10% à Zinder ;

– 10 000 foyers améliorés métalliquespar an, avec un taux de pénétrationde 13%à Niamey, 31% à Maradi,26% à Tahoua et 38% à Zinder ;

– 4 000 foyers en Albarka (enbanco) par an en milieu rural.

Par rapport à l’impact écologique de préservation des ressources forestières, ces actions ont permisd’économiser 3 000 à 5 000 tonnes de

bois de feu par an, soit 2 000 à 3 000hectares de forêts épargnés par an.

Sur le plan socio-économique, la Stratégie énergie domestique estune stratégie véritable de lutte contrela pauvreté, de sécurité alimentaireet de développement économique et social des communautés rurales.

Le réseau de marchés ruraux, mis enplace et fonctionnel entre 1993 et1997, concerne actuellement unecentaine de villages de cinq régionsau potentiel de production importantet sujets, les années antérieures, à l’exploitation incontrôlée descommerçants-transporteurs. Cesvillages ont ainsi pu bénéficier derevenus jusqu’alors inconnus del’ordre de 400 millions de Fcfa.

Ils produisent actuellement près de15 à 20% de la consommation enbois-énergie de la ville de Niameysoit environ 16 000 à 20 000 tonnesde bois de feu par an pour un chiffred’affaires d’environ 80 millions Fcfaaux producteurs. Le chiffre d’affairespar village est d’environ 1,5 millionsde Fcfa pour des revenus individuelspar bûcheron de l’ordre de 80 000Fcfa pour des revenus annuels habi-tuels par habitant estimés à 50 000Fcfa (Tiré de Pierre Montagne, janvier1999, les marchés ruraux de bois-énergie :Bilan et perspectives, Niamey). Certainsexploitants ruraux de bois gagnententre 250 000 et 300 000 Fcfa parcampagne. Les gestionnaires de cer-tains marchés ruraux ont des revenusqui peuvent atteindre 400 000 à500 000 Fcfa par campagne de sixmois.

À titre d’exemple, les ressourcesfinancières générées par le marchérural du village de Kankani (cantonde Torodi) de 1995 à 1997 se sontélevées à 27 millions de Fcfa dont25,5 millions de chiffre d’affaires(vente de bois) et 1,5 millions depart de taxe.

Les revenus tirés de l’exploitation du bois ont permis de réaliser des investissements individuels etnotamment collectifs de lutte contre

la pauvreté : construction et réfectionde salles de classes, de salles desanté et de mosquées, formationpaysanne, pharmacies villageoiseset achats de vaccins à l’occasiondes épidémies, prises en chargedu carburant des équipes médicales,pharmacies vétérinaires, constructionet réfection des ouvrages d’hydrauli-que villageoise et pastorale, créditdu petit commerce pour les femmes,embauche, matériels et intrants agricoles, etc. Ces ressources ontégalement contribué à améliorerla sécurité alimentaire dans la zoned’intervention où presque tous lesvillages à marché rural de bois sesont, spontanément, dotés de banquescéréalières. Sur le plan individuel,les revenus du bois des bûcheronssont utilisés par ordre d’importanceà l’achat de vivres.

La SED a également permis d’atté-nuer le phénomène d’exode rural en créant des emplois aux jeunesruraux. Actuellement, 1 500 à 2 000jeunes (bûcherons et gestionnaires)sont occupés par l’activité d’exploita-tion et de commercialisation du bois.

Une partie des recettes fiscales estdestinée au financement d’actionsde développement forestier Cessommes existent et des initiativeslocales ont déjà eu lieu pour desinvestissements. Les fonds d’aména-gements constitués et réinvestisdans la forêt par les communautésrurales se sont élevés entre 1993et 1996 à 23,5 millions Fcfa, sanscompter la participation bénévoledes villageois car la plupart desactions se font sous forme de travauxcommunautaires. Comme travauxréalisés, on peut citer :

– la création de mini pépinièrespour la production de plants et le reboisement ;

– la lutte contre les feux de broussepar la réalisation de «pare-feux» ;

– le paillage et les semi-directs ;– la surveillance des forêts contre

l’exploitation frauduleuse et lesdéfrichements agricoles.

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Concernant le volet Demande, il ya eu la promotion d’une sociétéprivée de production de réchauds àpétrole. Elle fabrique deux modèlesde cet équipement. La distributiondu pétrole et des équipementsdomestiques par les Energy Shops,autres structures privées mises enplace par cette composante.

Le bilan socio-économique est éga-lement satisfaisant dans l’ensemble,sur le plan du fonctionnement démo-cratique et au vu des investissementsruraux collectifs et individuels réali-sés. Cependant, des insuffisancessont notées au niveau de certainsmarchés ruraux en ce qui concernela tenue régulière des assembléesgénérales, la tenue des documentscomptables et la gestion transparentedes fonds par certains responsables,le manque de suivi régulier par lesservices forestiers, etc.

Conclusions et perspectives

De 1989 à 1997, la stratégie SED aété mise en œuvre à travers le projetÉnergie II-énergie domestique surfinancement de l’Agence danoise de coopération (DANIDA) et de laBanque mondiale. Cette expérienceoriginale initiée par le Niger a faittache d’huile dans toute l’Afrique etplus particulièrement dans la sous-région sahélienne où des opérationssimilaires se développent au Mali,au Tchad, au Burkina Faso et auSénégal. Les éléments pertinents de conclusion à retenir sont que :• les ruraux sont bel et bien capables

de conduire des aménagementsforestiers simplifiés mais garantsde la durabilité de la ressource ;on peut se fonder à ce titre surle fait que les marchés rurauxont continué à fonctionner sansle projet depuis fin 1996 et sansun appui effectif des servicesforestiers locaux, souvent mêmecontre leur gré ;

• la force de la SED a été d’avoiropéré cette réforme législative etréglementaire en matière d’exploi-tation forestière en remettant encause les concepts de «broussesvacantes et sans maître». En effet,la réforme institutionnelle de 1992a redistribué les droits, les rôlesainsi que les ressources financièresgénérées par la forêt entre les prin-cipaux acteurs, services gouverne-mentaux, collectivités territoriales,commerçants-transporteurs etpopulations rurales précédemmentexclues. L’élément qui paraît leplus important est sans doute lerétablissement des communautésrurales dans leurs droits de ges-tionnaires et de propriétaires des ressources forestières de leursterroirs ;

• la SED est un axe majeur de luttecontre la pauvreté en milieu rural,de sécurité alimentaire, et en unmot un moteur de développementéconomique et social local ;

• la SED mérite d’être poursuivie etconsolidée et il est encore néces-saire de poursuivre et d’intensifierles actions notamment dans lesdomaines suivants : recherche etdéveloppement sur la régénération

des espèces exploitées, de laformation et de la sensibilisation des agents forestiers à la SED,de l’animation rurale et de laformation villageoise, la com-munication et la sensibilisationdu grand public, la mise en placede tous les instruments et lesstructures prévues par la réforme(schémas directeurs, actes deconcession rurale, commissionsde fixation des quotas, commis-sions d’arbitrage et de règlementdes conflits, etc.), substitutionet économie de bois.

D’ores et déjà, l’Agence danoise dedéveloppement a marqué sa volontéde poursuivre la mise en œuvre de la SED à travers le financementd’une deuxième phase du projetÉnergie II dont la convention definancement est déjà signée et ledémarrage est prévu pour le débutde l’an 2000. De son côté, la Banqueafricaine de développement vientd’accorder un financement pour un projet d’aménagement des forêtsnaturelles qui vient de démarrer.Plusieurs autres partenaires au déve-loppement ont manifesté leur intérêtà aider le gouvernement du Niger àpoursuivre les opérations de gestionparticipative des forêts.

16 Liaison Énergie-Francophonie • N° 47

La 8e édition de ce festival se déroulera à Lausanne (Suisse) du 15 au 16 mars2001 au palais de Beaulieu. Cette édition verra l’ouverture de la compétitionaux courts métrages et aux « spots » publicitaires sur les thèmes de « L’énergiesur grand écran » et « Spots publicitaires sur l’énergie ».

Pour plus d’information voici les coordonnées des organisateurs : Energyfilm festival Lausanne, ch. de Mornex 6, case postale 674 CH- 1001Lausanne. Téléphone : 41 21 310 30 90 ; télécopie : 41 21 310 30 40. Courriel :[email protected]. Site Internet ; http :// www.fifel.electricite.ch

FESTIVAL INTERNATIONAL DU FILMSUR L’ÉNERGIE DE LAUSANNE (FIFEL)

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Pour une gestion durable de la biomasse-énergie 17

Bilan énergétique du Soudan : importance de la biomasse

u Soudan, comme dans d’autres pays en développement, la biomasseest la première source d’énergie. Elle assure presque toute la demandeénergétique des secteurs de consommation : • 84,8% pour le secteur domestique sous forme de bois et charbon de

bois ;• 51,2% pour l’industrie telle que les boulangeries, briqueteries, etc ;• 35,6% pour les services (restaurants et salons de thé) consommateurs

de charbon de bois ;• 97,6 % pour les écoles coraniques.

L’environnement est affecté sérieusement par la détérioration des forêts ; desmilliers d’hectares ont été coupés non seulement pour l’agriculture mais aussipour la production d’énergie.

Valorisation énergétique de la biomasse agricole et préservation des ressources naturelles au Soudan

Valorisation énergétique de la biomasse agricole et préservation des ressources naturelles au Soudan

Le bilan énergétique du Soudan n’a pas connude grand changement pendant la dernière décennie(1986-1996). En 1996, l’énergie totale approvisionnéea été estimée à 11,20 millions de tonnes équivalentpétrole (TEP) ; la biomasse représentait 87 % du total,les produits pétroliers importés 12 % et l’électricité 1 %.

A. EL HASSAN

A

Département

des sciences

environnementales

et des ressources

naturelles, Université

de la Gezira, Soudan,

et G. VAITILINGOMB

Laboratoire de bio-

énergie, Département

amélioration

des méthodes pour

l’innovation

scientifique, CIRAD

(Centre de

Coopération

Internationale

en Recherche

Agronomique pour

le Développement)Pétrole

Électricité

Biomasse

Figure 1.

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D’après l’Institut mondial des res-sources, les pertes de la couverturevégétale au Soudan ont été estiméesà 540 000 hectares/an. D’autre part,le reboisement en 1995-1996 étaitde moins de 40 000 hectares/an(soit 7%). Ceci indique la rapiditéalarmante de la détérioration et dela disparition des ressources naturellesau pays (Elgazoli, 97).

Conscient de cette situation, l’Étata lancé une vaste campagne desensibilisation traduite par le slogan :«Protéger les ressources naturelles, c’estprotéger l’environnement, et protéger l’envi-ronnement, c’est se protéger nous-mêmes».L’État a incité les institutions natio-nales à engager des recherches dansle domaine de l’énergie pour mettreun terme à cette situation dramatiqueet sortir le pays de ce goulotd’étranglement.

Désormais, l’utilisation des sourcesd’énergie disponibles comme lessous-produits agricoles (tiges decotonnier, coques d’arachides, etbagasse de canne à sucre) est envi-sagée comme une solution possibleet préconisée par les institutionsnationales et internationales dans la formulation du Plan national del’Énergie (1990-2015).

Le plan recommande, dans le cadrede projets de coopération avec desorganismes internationaux, d’engagerdes opérations de valorisation deces sous-produits agricoles et dedévelopper leur utilisation commecombustibles de substitution pourles usages domestiques et industriels.

Secteur agricole et énergie de la biomasse auSoudan : potentialités

Le secteur agricole joue un rôle trèsimportant vis-à-vis de l’énergie de la biomasse. Le secteur agricole estconsommateur d’énergie d’une partet producteur d’énergie d’autre part.Ainsi, la relation entre le secteuragricole et le secteur de l’énergieest-elle à double sens (Parikh, 92).

Le secteur agricole consomme del’énergie pour presque toutes lesopérations (indirectement par le travail humain et animal et les équi-pements), ce à quoi il faut ajouterl’énergie sous forme de pesticides etd’insecticides (Parikh, 93). Le secteuragricole produit de l’énergie sousforme de bois de feu, de sous-produitsagricoles et de déjections animalesutilisables à cette fin.

Le Soudan est le plus grand pays en Afrique (2,5 millions km2, soit250 millions d’hectares). Sur ses250 millions d’hectares, le Soudanà la chance de posséder une poten-tialité énorme en terme d’expansionde la production agricole grâce àdes ressources en terres arables nonencore exploitées et à la disponibi-lité en eau. Aujourd’hui, la surfacedes terres arables disponibles aupays a été estimée à 84 millions hadont 10 millions ha seulement sontcultivés soit :

• 1,8 millions ha en zone irriguée(périmètres étatiques),

• 4,0 millions ha en zone sèchemécanisée (grandes exploitations),

• 4,2 millions ha en zone sèche non-mécanisée (exploitations familiales).

Ce secteur est le nerf de l’économienationale, il produit des quantitésénormes de sous-produits agricoles.Nous avons essayé d’estimer lapotentialité des trois culturesprincipales au pays (tiges de coton-nier, coques d’arachide et bagassede canne à sucre), en utilisant lesfacteurs suivants :

1. les surfaces moyennes cultivéesde chaque culture durant la campagne agricole 1996/1997 ;

2. la productivité des sous-produitsagricoles/unité de surface cultivée ;

3. les taux de disponibilité de chaque sous-produit agricoleselon des études préalables.

À partir de ces données nous avonsestimé la potentialité qui pourraitêtre utilisée à des fins énergétiquesau niveau national, afin de diminuerles effets de la crise énergétique surla biomasse. (Tableau 2)

D’après ces résultats, la potentialitédes trois cultures principales étudiéesest environ de 6,3 millions de tonnes.Cette quantité immense pourrait avoirune influence très importante sur lesbilans énergétiques au niveau du pays.

Afin de transformer cette potentia-lité de sous-produits agricoles à des fins énergétiques, l’option prisea été le transfert de technologiesexistantes ailleurs et qui soient bienadaptées aux conditions socio-économiques et aux ressourcesen sous-produits agricoles du pays.

Historique des options techniquesde transformation des sous-produitsagricoles au Soudan

La technologie du briquetage des résidus agricoles au Soudan adébuté en 1950. Le premier projetpilote de fabrication de briquettes,

18 Liaison Énergie-Francophonie • N° 47

Secteur Biomasse % Pétrole % Électricité % Total %

1. Agriculture 0,00 0,00 181,37 14,8 2,60 2,5 183,97 2,9

2. Industriel 173,5 3,5 175,52 14,4 31,2 30,5 380,22 6,0

3. Transport 0,60 – 743,24 61,0 0,00 0,0 743,24 11,7

4. Ménage 4662,72 93 26,7 2,2 57,5 1,2 4746,92 75,0

5. Autres 175,48 3,5 92,29 7,6 11,1 10,8 278,87 4,4

Total 5011,7 100 1219,12 100 102,4 100 6333,22 100

% du Total 79,1 19,3 1,6 100

Énergie totale consommée (1000 TEP) par secteur en 1996/1997

Tableau 1

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Tableau 2

installé dans la zone de la Gezira, a échoué en raison de problèmestechniques et de maintenance.

En 1977, à l’initiative d’une entrepriseprivée, Sirkis Azmerilian, la fabricationde briquettes a été reprise dansune unité à proximité d’une usine dedécorticage d’arachide à Khartoum.La commercialisation de ces briquet-tes a rencontré diverses difficultés :concurrence avec les combustiblesclassiques (bois et charbon) dontles prix étaient relativement bas ;dégagement important de fumée ;approvisionnement instable enmatière première.

En 1980, une unité de briquetage decoques d’arachides a été installée àElbagier au niveau de la plus grandeusine de décorticage du pays, à 35 kmau sud de Khartoum. Des tests depréférence ont été réalisés auprèsdes utilisateurs à Khartoum. Lesrésultats de ces enquêtes ont mis en évidence que l’utilisation de cesbriquettes entraînait un dépôt desuie mais ne modifiait pas le goûtdes aliments (UNSO, 1984). Lesutilisatrices étaient disposées à lesutiliser à un coût moins élevé et àcondition qu’ils soient disponiblessur les marchés (Gasim, 1984).

En 1984, au regard des disponibilitésen bagasse de canne à sucre dans larégion Est (environ 0,5 million det/an), le programme de développe-ment de la biomasse de la FAO etdu CF-AR (comité européen d’aideaux réfugiés) en collaboration avec

le département des ressources natu-relles au Soudan, a mis en place uneunité de fabrication des briquettesà usage industriel et artisanal. Cesbriquettes ont trouvé leur placefacilement sur les marchés descombustibles dans la région avecl’aide de l’état régional qui interditl’utilisation du bois de feu par lesecteur industriel (FAO, 1988).

En 1985, une unité pilote de brique-tage direct des tiges de cotonnier aété installée dans la zone de la Geziradans le cadre d’une collaborationentre NEA du Soudan et DANIDA(Danish National & InternationalDevelopment Agency), avec pourobjectif premier de lutter contre les maladies du coton. Malgré lesrésultats phytosanitaires satisfaisantssur le coton, ce projet n’a pas étépoursuivi en raison des difficultésd’adaptation de la technologie auxtiges de cotonnier.

En 1997, un projet de coopérationentre le ministère de l’Énergie sou-danais et le PNUD (Programme des Nations-unies pour le dévelop-pement), financé par DANIDA surla production de briquettes à partirde la bagasse, à usage domestique etindustriel, a été engagé à l’est dupays dans la zone de Nouvelle Halfa,zone de production de canne àsucre avec une capacité productivede 1200 tonnes/saison.

Le projet est entré dans la phase de production ; des modificationstechniques ont été apportées pouradapter la technique aux ressourcesdisponibles et les démonstrations du produit sont en cours pour vul-gariser ce nouveau combustible.

Le présent article présente quelquesapplications des options techniquesdes sous-produits agricoles auSoudan qui sont :

• technologie de briquetage destiges de cotonnier et des coquesd’arachides ;

• technologie de densification debagasse de canne à sucre ;

• technologie de carbonisationdes tiges de cotonnier (boulets) ;

• technologie de gazéification.

Briquetage des tiges de cotonnier et des coques d’arachides

En 1995, un nouveau projet de production de briquettes de tigesde cotonnier a vu le jour. Ce projetde coopération entre le PNUD et le ministère de l’Énergie soudanaisfinancé par DANIDA s’est concré-tisé par une unité de fabrication debriquettes dans le périmètre agricolede la Gezira.

La capacité productive de l’unité estd’environ 2 000 tonnes/saison (soit6 tonnes /jour) de briquettes à usagedomestique en remplacement dubois de feu et du charbon de bois,et artisanal (boulangeries, briqueteries,huileries, savonneries) en remplace-ment du bois de feu. Le projet aréalisé des démonstrations pourpopulariser le produit et favoriserson usage.

L’unité est entrée dans une phase depleine production et de diffusion àl’échelle régionale, mais elle n’a pasencore atteint les résultats escomptésau départ. Son impact sur les con-sommateurs et les effets sur lesbilans énergétiques des ménages dela zone viennent juste d’être étudiésafin de dégager les contraintes à sondéveloppement. Le tableau 3 montrel’évolution de la production des briquettes de tiges de cotonnier.

Le projet de briquetage des coquesd’arachides entre dans le cadre d’un projet de coopération entre lePNUD et le ministère de l’Énergieau Soudan financé par DANIDApour développer et utiliser les res-sources locales disponibles afin de lutter contre les déforestations.L’unité de production des briquettesde coques d’arachides, à usagedomestique et industriel, a étéinstallée en 1988 dans la zone de

Pour une gestion durable de la biomasse-énergie 19

Culture Surface Quantité Quantité cultivée produite disponible

(ha) (tonnes) (tonnes)

1. Coton 247 380 606 080 484 860

2. Arachide 887 360 2218 400 1 331 040

3. Canne à sucre 166 460 10 600 200 4 558 100

Total 1 301 200 1 324 700 6 374 000

Potentialité moyenne de sous-produitsagricoles disponibles à des fins

énergétiques au Soudan en 1997

Source : Enquête, Elhassan, 1998

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Kordofan, zone principale pour laculture de l’arachide.

La capacité productive est estimée à environ 2 000 tonnes/saison (soit6 tonnes/jour), ce projet est entrédans une phase productive depuis1990. Les études d’évaluation faitespar les organisations concernéesfont apparaître des résultats trèsencourageants pour l’avenir de cettetechnologie dans la zone (Mudawi,1993). Le tableau 3 illustre l’évolutionde la production des briquettes descoques d’arachides dans la zone.

Densification de labagasse de canne à sucre

La densification de la bagasse decanne à sucre est une technologiemanuelle simple qui consomme peud’énergie par rapport aux autrestechnologies des sous-produits agricoles. Elle se réalise de la façonsuivante :

• obtention des résidus appelésbagasse après écrasement descannes à sucre à l’usine ; labagasse représente environ 45%de la quantité totale de cannesécrasées ;

• séchage de la bagasse au soleil ;

• transport de la bagasse par descharrettes à traction équine, versl’usine de densification ;

• mélange d’une certaine quantitéde bagasse de l’année avec de la

bagasse de l’année précédente etune quantité de mélasse servantde liant (tableau 4). Ce processusse fait manuellement par desouvriers, il faut mélanger parfaite-ment les trois composants ;

• mise en place de la bagasse obte-nue sur les plateaux pour obtenirla forme de briquette ; compactagepar une presse manuelle, et obten-tion des deux types de briquettes :une briquette de 29 x 11,8 cm de2 kg pour usage industriel et unebriquette de 23 x 11,8 cm de1,3 kg pour usage domestique ;

• séchage des briquettes au soleilpendant 1 à 2 semaines ;

• stockage et vente auxconsommateurs.

Le projet de densification de labagasse de canne à sucre est unprojet de coopération entre la FAOet le département des Ressourcesnaturelles au Soudan. En 1992,l’unité de production a été installéedans la zone du Nil blanc à proxi-mité de l’usine sucrière de Assalya.

L’objectif principal de ce projet étaitde produire deux types de briquesde bagasse de canne à sucre (avec unecapacité productive de 6 tonnes/jour),pour remplacer le bois de feu et lecharbon de bois dans leurs usagesdomestiques et le bois de feu dansson usage industriel. L’unité estactuellement en phase de pleineproduction. Une étude vient d’êtreentreprise pour évaluer l’impact deces combustibles sur les consomma-teurs et ajuster la production et ladistribution en fonction des besoinsdes ménages. Le tableau 5 donnel’évolution de la production des briques de bagasse dans la zone.

Carbonisation des tiges de cotonnier (boulets)

Le charbon de bois est le combustibleprivilégié des ménages urbains sou-danais et il pourrait le rester encorede nombreuses années. Il est doncindispensable et urgent de trouverun produit de substitution de qualitéet d’apparence à peu près équivalen-tes au charbon de bois. Les procédésde transformation des sous-produitsagricoles par carbonisation permet-tent d’obtenir un tel produit commeles boulets de charbon de tige decotonnier qui conviennent à denombreux usages locaux. La carbo-nisation procède par différentes étapes sur les lieux de production età l’usine de transformation.

Aux champs, après avoir été arrachées,les tiges de cotonnier sont mises entas pour être séchées au soleil. Lestiges sèches sont ensuite carboniséesdans un four dit «moderne» parl’exploitant et sa famille. Les tigescarbonisées sont ensuite transpor-tées vers le site d’agglomération. À l’usine d’agglomération, cinq opé-rations principales sont réalisées : le broyage, la préparation du liant,l’agglomération, le séchage etl’emballage.

En 1986, dans le cadre de la straté-gie nationale de lutte contre ledéboisement et la détérioration des ressources naturelles, un projetde fabrication de charbon de tiges

20 Liaison Énergie-Francophonie • N° 47

Briquettes tiges de coques cotonnier d’arachides

93/94 900

94/95 1240

95/96 350 1180

96/97 840 1200

97/98 1210 1450

Moyenne 800 1194

Évolution de production des briquettes detiges de cotonnier et de coques d’arachides

(1993-1998 en tonne/saison)

Source : Projet documents, Soudan, 1999

Composants Bagasse Bagasse Mélassenouvelle ancienne

Volume 10 75 15

Poids 7 60 33

Composition des briquettes de la bagasse de canne à sucre

Année Production

93/94 880

94/95 1214

95/96 1310

96/97 1248

97/98 1350

Moyenne 1200

Évolution de la production des briques de bagasse de canne à sucre (1993/1998 en tonne/saison)

Source : Projet documents, Soudan, 1998.

Tableau 3

Tableau 4

Tableau 5

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de cotonnier carbonisées sous formede «boulets» a été amorcé, en collaboration avec l’ERC (Centrenational de la recherche énergétique)du Soudan et la GTZ (Cooperationallemande), dans la zone de Gedarif(au niveau du périmètre agricolede Rahad) à l’est du pays. L’objectifprincipal de ce projet était de pro-duire du charbon à partir des tigesde cotonnier carbonisées, unique-ment pour un usage domestiquecomme combustible d’appoint pourles paysans de la zone de Rahad.Depuis 1990, le projet est géré entiè-rement par l’entreprise agricole deRahad, syndicat agricole et l’ERC en tant qu’agent d’appui technique(Hood, 1990).

La capacité productive de l’unité estde 800 tonnes/saison ; les démons-trations ont été réalisées dans plu-sieurs villes et villages auprès desménages utilisant des foyers amélio-rés. Ce nouveau combustible a reçuun accueil positif parmi les utilisatri-ces et grâce à une bonne substitutionau charbon de bois et à son prixabordable il a pénétré les marchésde combustibles dans les zones.

Outre l’intérêt incontestable defournir un combustible de substitu-tion au charbon de bois, cette initia-tive procure une nouvelle source derevenu aux exploitants par la ventede tiges de cotonnier carbonisées.

Afin de pouvoir comparer du pointde vue énergétique les combustiblesdes sous-produits agricoles (briquettes

des tiges decotonnier, decoques d’arachi-des, de bagassede canne à sucreet boulets destiges carbonisées)et les combusti-bles classiques(bois de feu etcharbon de bois),les pouvoirsénergétiques dechaque type decombustible ontété déterminésdans le labora-toire du CIRAD-Forêt, sur des échantillons provenantdirectement du Soudan. Les travauxd’analyse ont classé les boulets detiges de cotonnier carboniséescomme ayant le plus fort pouvoirénergétique et observé le plus faiblepouvoir énergétique sur les briquettesde tiges de cotonnier non-carbonisées(tableau 7).

Technologie de gazéification En 1985, dans le cadre de la valo-risation énergétique des ressourceslocales au niveau du pays, un projetde coopération franco- soudanais a été mis en œuvre par l’AFME(Agence française pour la maîtrisede l’énergie) et la NEA (Adminis-tration nationale de l’Énergie) duSoudan. Il s’agissait de tester et

d’évaluer un gazogène de technolo-gie française dans les conditionssoudanaises pour la productiond’électricité destinée au pompage-irrigation et à l’électrification rurale(Vaitilingom, 86).

Devant le très faible nombre deréférences sur la gazéification decombustibles tropicaux dont lescaractéristiques varient de surcroîtavec les variétés, il était nécessaired’ajuster les appareils localement.L’objectif final étant un transfert de cette technologie après mise au point et adaptation locale.

L’unité est composée d’une remor-que routière supportant un gazo-gène et un groupe électrogène.Rendue opérationnelle avec sonbroyeur, lui-même alimenté parle groupe électrogène qui fournit

Pour une gestion durable de la biomasse-énergie 21

Année Production

1991 250

1992 300

1993 310

1994 390

1995 450

Moyenne 340

Évolution de la production de boulets destiges carbonisées (Tonnes/saison)

Source : Projet documents, Soudan, 1998.

Combustible Briquettes Briquettes Boulets Briquettes de tiges de coques de tiges de bagasse

cotonnières d’arachides carbonisées de canne à sucre

1. Échantillon 10 10 10 10

2. T° initiale 20,38 20,38 20,38 20,38moyenne C

3. T° finale 23,09 23,09 23,11 23,09moyenne C

4 Pouvoir 0,386 0,495 0,434 0,505énergétique (TEP)

Pouvoirs énergétiques des combustibles des sous-produits agricoles (TEP)

Source : Laboratoire Énergie-Environnement, CIRAD-Forêt, juillet 1998. TEP : Tonne équivalente pétrole.

Tableau 6

Tableau 7

Schéma du procédé

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le combustible, la chaîne est com-plète et délivre 28 KVA.

Phase I : Pompage de l’eau d’irrigationdans une ferme de la faculté d’agri-culture de l’Université de Khartoumpendant une année. La biomasse utilisée a été du bois de feu puis destiges de cotonnier. Des modificationstechniques ont été faites sur l’unitépour qu’elle s’adapte aux combus-tibles locaux (en particulier réglagedu gazogène pour éviter la forma-tion de mâchefers). Les bilans deconsommation ont révélé un ratiode 1,5 kg de tiges de cotonnier par kWh électrique fourni(Vaitilingom, 86).

Phase II : Les limitations d’approvi-sionnement et le prix élevé des carburants, ajoutés aux difficultés detransport dans la plupart des régionssoudanaises, expliquent le manqued’électricité dans les villages qui parailleurs disposent de sous-produitsagricoles. Ceci justifiait l’examenéconomique de la filière gazogènelà où la biomasse combustible seraitdisponible. Cette phase a vu la miseen œuvre sur site de l’unité électro-gène pour fournir de l’électricité àdes réseaux villageois. Dans deuxvillages éloignés (puissance moyennede 8 kW et 19 kW), plus de 450 heu-res ont été effectuées en conditionsréelles d’exploitation, alors que l’unitéavait fonctionné de 8 à 10 heurespar jour (Vaitilingom, 89).

La biomasse utilisée : briquettes des tiges de cotonnier, briquettesdes coques d’arachides et tiges de cotonnier. Les consommationsétaient de l’ordre de 20 kg de bio-masse par heure. Les résultats desexpérimentations ont montré queles briquettes des tiges de cotonnierétaient le meilleur combustible pourle gazogène. (Elhassan, et Ninnin,88) (tableau 8).

Les expériences soudanaises ontmontré que le gazogène apparaîtcomme une solution prometteusepour l’électrification rurale. Maisson succès dépend largement des

possibilités de réduction de soncoût d’investissement en envisageantpour cela la possibilité de fabricationde l’unité au pays. Le projet étaittrès bien vu par les responsablessoudanais.

Grâce à cette réussite, la recherchedans ce domaine s’est poursuivie pardes essais de fabrication locale degazogènes soudanais par l’ERC(Centre national de la rechercheénergétique) au pays. Un gazogèney a été fabriqué pour la productiond’électricité (2 KVA) en utilisant des briquettes des tiges de coton-nier et de bagasse avec des résultatsencourageants (Eltaybe, 97). Uneautre voie de recherche conduite ausein de cet institut est l’utilisation de gazogènes pour produire de lachaleur (usage direct des gaz) enremplacement du bois de feu dansles boulangeries.

À l’Université de la Gezira, aucentre du pays, il existe un projetde recherche sur l’utilisation de gazo-gène soudanais pour faire tourner lemoteur d’une voiture en utilisant lesbriquettes des tiges de cotonnier enremplacement du fuel (Idris, 98).

Synthèse et conclusion La conclusion que l’on peut retenirde l’expérience soudanaise dans ledomaine de la transformation dessous-produits agricoles à des finsénergétiques, c’est que les options

techniques pourraient jouer un rôleconsidérable sur l’allègement de laforte pression qui s’exerce sur lesressources de la biomasse, et ainsicontribuer à réduire la crise éner-gétique nationale dans les deuxsecteurs consommateurs de la bio-masse (ménages et industrie tradi-tionnelle telle que les boulangeries,briqueteries, etc.), en remplaçantle bois de feu et le charbon de boisdans leurs usages.

Les problèmes rencontrés par cesoptions techniques au Soudan sontd’origines différentes. Il s’agit plutôtde problèmes de distribution et demarketing des combustibles de subs-titution sur les marchés et de pro-blèmes de qualité des produits quede problèmes technico-économiques.Le Soudan est considéré parmi lespays africains comme celui où cesoptions techniques ont des chancesremarquables de réussite.

Enfin, la réussite de la valorisationde ces sous-produits agricolescomme combustibles de substitutionau niveau des ménages dépend de la politique énergétique définie àl’échelle nationale par les autoritésgouvernementales qui peuvent favo-riser la diffusion de ces combustiblespar diverses mesures incitatives :

• investir dans ce domaine del’énergie de substitution ou bienencourager le secteur privé àinvestir en lui facilitant le transfertdes technologies bien adaptées ;

• former des cadres professionnels,soutenir les centres de recherchetravaillant dans ce domaine pro-metteur et encourager les échangesscientifiques nationaux et interna-tionaux ;

• mobiliser et encourager la popu-lation à utiliser ces combustiblesau niveau de leurs ménages afinde servir l’intérêt national pour la lutte contre la détérioration des ressources naturelles et la préservation de l’environnementau pays.

22 Liaison Énergie-Francophonie • N° 47

Caractère Tige Briquettes Briquettescotonnier de tiges de de coques

cotonnier d’arachides

Allumage rapide moyenne Lente

Mâchefer non non Énorme

Quantité élevé moyenne Peude cendres

Moteur moyenne Très bien moyenneperformance

Performances du gazogène par rapport aux combustibles utilisés

Source : Elhassan & Ninnin, Soucian, 1988.

Tableau 8

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Pour une gestion durable de la biomasse-énergie 23

Consultant

indépendant

pour le GERES,

coordinateur du

programme

Myriam RONDET,

responsable

administratif,

Sam VITOU,

responsable réseau

bois de feu

Cambodge

Programme économie de bois de feu au Cambodge :émergence d’un réseau de compétences avec des résultats encourageants

ne approche pragmatique face à des signes alarmants...Dès le début, une approche pragmatique a été retenue, avec une phase dediagnostic de l’existant sur la province de Kompong Chhnang conduisantl’équipe locale à accentuer ses efforts sur deux utilisations finales prépondé-rantes du bois de feu : cuisson domestique et production du sucre de palmier.

Les premières enquêtes ont montré l’ampleur de la déforestation en cours(59% de la forêt dense a disparu entre 1985 et 1993 dû en grande partieà la collecte pour le bois de feu) avec un déficit de l’offre en bois de feude 171 000 tonnes en 1998, évalué à 505 000 tonnes en 2010 si rien n’estentrepris.

Les deux premières années ont donc été employées à tester en laboratoireet sur le terrain des modèles rustiques, réduisant sensiblement la consom-mation en bois de feu tout en s’adaptant aux possibilités d’acquisition desutilisateurs.

Deux axes de travail : la cuisson domestique...En énergie domestique, pour le milieu rural, il a été retenu le concept desfoyers bi-marmites d’après un modèle indonésien en terre cuite (productionartisanale traditionnelle très forte sur la province) au coût d’un dollar US en

Débuté en octobre 1997, le programme Économie de bois de feu au Cambodge, soutenu par la Commissioneuropéenne et, depuis 1999, par l’IEPF, mis en œuvre par le collectif GERES/YDD1, achève sa première phase. Il s’agissait alors de valider en province de KompongChhnang des références techniques et socio-économiquessur la filière bois de feu, en partenariat avec le ministèrede l’Environnement.

1 GERES : Groupe Énergies renouvelables et environnement – France, YDD: Yayasan DianDesa – Indonésie

U

Programme économie de bois de feu au Cambodge :émergence d’un réseau de compétences avec des résultats encourageants

JEAN-FRANÇOISROZIS

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l’adaptant aux usages locaux (possi-bilité de griller le poisson), maisaussi de proposer un modèle auto-construit pour les ménages les plusdémunis ou nécessitant une plusgrande capacité de cuisson. Pour lemilieu urbain, un modèle thaïlandaisperformant fonctionnant au charbonde bois a été introduit, des unités deproduction sur l’ensemble du paysont été formées pour la réalisationde ce modèle. Un appui à sa commer-cialisation est en cours.

En mars 2000, environ 3500 foyersont été ainsi commercialisés sanssubvention par le réseau de distribu-tion traditionnel. Les essais réaliséssur le terrain ont montré une réduc-tion de 25 à 30% de la consomma-tion en bois. En 1998, la cuissondomestique représentait une consom-mation de 400 000 tonnes de boispar an soit 80% de la consommationtotale en bois de feu.

et la production de sucre de palmier...

Pour la filière économique de pro-duction de sucre de palmier, il s’agitd’une activité ancestrale délaisséepar les structures d’appui. Force estde constater qu’il s’agit d’une desrares possibilités de diversificationen milieu rural cambodgien(elle concerne 4200 familles de laprovince) et que faute d’améliorations

technologiques elle reste trèsconsommatrice en bois de feu(autour de 6% de la totalité du boisde feu consommé dans la province,soit 30 000 tonnes par an). L’accenta donc été mis sur l’ensemble de lafilière avec notamment une recherched’amélioration de la qualité, uneréorganisation de la commercialisa-tion et un outil de production pluséconome en bois de feu et permettantd’atteindre cette qualité. Commepremier saut technologique, il a suffide passer d’un modèle traditionnelmono-marmite (type trois pierresabrité) à un modèle bi-marmite aveccheminée. Outre les qualités du bi-marmite (gain de temps, facilité dumaintien de l’ébullition,...), l’absencede retour de fumées dans la massecuite a permis d’obtenir une meil-leure qualité gustative.

Une forte sollicitation de divers orga-nismes de développement à l’échellenationale pour diffuser ce type defours (formation de technicienslocaux, d’auto-constructeurs,...) amis en relief le succès de ce modèle.Et pourtant le concept existait, déve-loppé depuis une dizaine d’annéesen Thaïlande, et des tentatives d’in-troduction au Cambodge avaient eu lieu. La logique de diffusion àl’époque était basée seulement surl’économie de bois de feu, avec unmodèle d’une cinquantaine de dollarsUS (usage de briques cuites, degrille métallique, ...). Compte tenude la faible production annuelle etdu prix du kilo de bois de feu, cette

argumentation n’était guère suffi-sante. Un modèle auto-construit àcoût marginal, permettant une meil-leure qualité, a alors trouvé naturel-lement sa place. L’économie obtenueest de 25% en bois de feu. La pro-chaine étape en terme de réductionde bois de feu sera d’encourager leregroupement des producteurs pourréduire la consommation spécifiqueavec des modèles à trois/quatre marmites. Ce concept de regroupe-ment était inimaginable dans lasociété civile traumatisée par l’èrede Pol Pot ; actuellement, peu à peu,en milieu rural, l’intérêt de réunirses efforts et ses outils de produc-tion fait son chemin.

Restituer les acquis et accompagner l’émergenced’un réseau decompétences cambodgien

Le programme engage maintenantun travail de restitution de ses pre-miers acquis, de formation de cadres,de techniciens, de vulgarisateurs, de fabricants de foyers en parallèleavec la sensibilisation du grandpublic à la bonne gestion du bois de feu et l’utilisation de foyersaméliorés.

L’objectif à moyen terme est demettre sur pied un véritable réseaude compétences disposant de moyensdidactiques, techniques et informa-tionnels pour répondre aux multiplesproblématiques liées à l’usage del’énergie issue du bois de feu. Ceréseau a vu le jour le 14/03/2000lors de sa réunion fondatrice, ilregroupe une quarantaine de struc-tures gouvernementales et non gouvernementales. La secondephase du programme en préparationsera donc de donner les moyens àce réseau de prendre en main unestratégie nationale sur le bois defeu, de former ses techniciens, d’in-former les décideurs, de suivre lesactions régionales sur le thème et dedévelopper son propre programmede Recherche et Développement.

24 Liaison Énergie-Francophonie • N° 47

Four à sucre de palmier :modèle traditionnel

Four à sucre de palmier : modèle amélioré avec cheminée

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Pour une gestion durable de la biomasse-énergie 25

Association interdisciplinaire

pour le développementlocal (AIDL),

[email protected]

Bourgois F, Tchouaté H. P., Université

catholique de Louvain –Groupe énergie biomasse –

[email protected]

Hupin F., Université catholique

de Louvain – Unité d’écologie

des grandes cultures – [email protected]

Verhaegen E., Association interdisciplinaire

de développement en environnement

et population (AIDEP), [email protected]

Yaméogo G., Groupe d’études

et de recherches en énergieet développement, [email protected]

Production intégrée d’électricité à partir de biomasse au Burkina Faso

Production intégrée d’électricité à partir de biomasse au Burkina Faso

L’électricité est un facteur essentiel au développement économique et social de la population d’une région, d’uneville ou d’un village. Elle apporte la force motrice pourles activités de production, le froid pour la conservationdes aliments ou des vaccins, l’éclairage favorisantainsi l’éducation, l’amélioration des soins de santé etpermettant le développement de la culture et des loisirs.

alheureusement, dans les pays en développement, l’accès à l’électricitéreste très limité. Les investissements nécessaires sont souvent considérableset les frais d’exploitation résultant du prix élevé des combustibles pétroliers,surtout s’ils sont importés, réduisent les possibilités d’extension du secteurélectrique. La biomasse, largement disponible dans beaucoup de régions dusud, à un coût sans comparaison avec les combustibles pétroliers importés,peut contribuer au développement d’une électrification à moindre coût. Etson exploitation, pour autant qu’elle se fasse de façon soutenable, est sourced’activités économiques et participe à la préservation de l’environnement.

Dans ce cadre, la gazéification a un rôle fondamental à jouer : parmiles technologies de conversion énergétique de la biomasse, c’est la seuledisponible qui permette d’obtenir des coûts et rendements acceptablesdans la gamme de puissance 10-500 kWe.

La technologie de la gazéificationLa gazéification peut être assimilée à une combus-tion menée en défaut d’air de façon à convertirle bois, combustible solide, difficile à utiliser, enun combustible gazeux beaucoup plus commoded’emploi. Le principe de fonctionnement dugazogène à lit fixe et co-courant est représentésur le schéma ci-contre. La biomasse est introduitedans la partie supérieure du gazogène et subitdifférentes transformations thermochimiques.

En fonction de la nature de la biomasse, 80 à 97% de la masse initiale estconvertie en gaz qui peut être utilisé dans un moteur. Le rendement éner-gétique de conversion du gazogène à co-courant est de l’ordre de 70 à 80%.

M

AirAir

Eau

Gaz

Combustion

Réduction

SANOU BALA

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La biomasse est caractérisée par une très grande diversité à la fois au niveau des origines (agricole,forestière, industrielle), de sa nature(bois, pailles, coques, ...), etc. Elleprésente cependant pratiquementtoujours la même composition encarbone, hydrogène et oxygène.Si bien qu’un grand nombre de bio-masses peuvent être gazéifiées etproduisent un gaz de qualité compa-rable pour autant qu’elle répondent àdes critères d’humidité (< 20%), degranulométrie (> 10 mm, < 150 mm)et de teneur en cendres (< 5%).

La composition et la qualité du gazen font un combustible tout à faitapproprié pour les moteurs. Moyen-nant un conditionnement du gaz etquelques adaptations du moteur,celui-ci peut être utilisé dans ungroupe électrogène classique. Uneinstallation de gazéification pour la production d’électricité (groupegazo-électrogène), comprend donc :

• un lieu de stockage et de condi-tionnement de la biomasse ;

• le gazogène ;

• le laveur ;

• le groupe électrogène.

INSTALLATION DE PRODUCTION D’ÉLECTRICITÉ PAR GAZÉIFICATION DE BOIS

De telles installations sont disponi-bles dans la gamme de puissance10 à 500 kWe, ont des rendementsde conversion de la biomasse enélectricité de l’ordre de 20 à 25%:1 kg de biomasse sèche donne envi-ron 1 kWh. De plus, il est possiblede récupérer la chaleur au niveaudu moteur (cogénération) pour leséchage ou tout autre applicationnécessitant de la chaleur, notammentla production de froid par absorption.Les recherches menées au Groupeénergie biomasse de l’Universitécatholique de Louvain ont conduità une technologie robuste etperformante.

Le contexte burkinabèLe Burkina Faso est un pays de lazone soudano-sahélienne ne dispo-sant pas de ressources fossiles etsitué à près de 1000 km des portsde Lomé et d’Abidjan dont dépendson approvisionnement en carburant.

Malgré les efforts considérablesentrepris par la Société nationaleburkinabè d’électricité (SONABEL),le taux d’électrification du pays étaitde 7% en 1997 et, parmi ces abonnés,88% habitent les 3 plus grandesvilles du pays. Sur les 8000 localitéset 306 chefs-lieux de provinces etdépartements que compte le Burkina,27 étaient électrifiés en 1997. Lesvilles secondaires et les zones ruralessont donc particulièrement démunies.Plusieurs raisons peuvent expliquerce faible taux d’électrification, dontle coût élevé de l’énergie primaire. Il est important de rappeler que les2/3 de l’électricité consommée auBurkina sont produits dans des cen-trales thermiques à partir de produitspétroliers importés et transportéspar route ou rail sur près de 1000 km.

Production d’électricité par gazéification debiomasse au Burkina Faso

Une étude financée par l’IEPF etmenée par une équipe pluridisci-plinaire composée d’agronomes, d’économistes, de sociologues etd’ingénieurs, en collaboration étroiteavec la Direction générale del’Énergie du Burkina, a eu pourobjet d’évaluer l’intérêt économique,

social et environnemental etla faisabilité de l’implantationd’une filière complète de pro-duction d’électricité à partirde biomasse, depuis la mobili-sation de la biomasse jusqu’àla fourniture d’électricité.

Cette étude a comporté uneanalyse au niveau nationalqui a consisté à réaliser undécoupage du pays en zonesrelativement homogènes du

point de vue des conditions éco-climatiques de production de bio-masse susceptible d’être convertieen électricité, des grands systèmesagraires (élevage dominant, céréalesdominantes, coton-maïs, ...) etsocio-démographique (structure de la consommation d’électricité,groupes ethniques, ...) dans le butde définir les zones qui offrent unpotentiel intéressant pour l’implan-tation d’une filière. Une analyse de l’organisation de la productiond’électricité et du plan d’électrifica-tion de la SONABEL a permis dedéfinir le créneau des villes secon-daires non-reliées au réseau inter-connecté comme secteur privilégiépour l’implantation d’une telle filière.

Au terme de cette première phase,les différents partenaires de l’étude,en concertation avec la Directiongénérale de l’Énergie, ont sélectionnésur la base de différents critères troissites, chacun associé à un type debiomasse potentiellement intéressantpour le développement de la filière :

Les villes de Manga et Houndéviennent d’être électrifiées (démar-rage de la centrale en 1999), tandisque celle de Dano est inscrite auplan d’électrification de la SONABEL.

26 Liaison Énergie-Francophonie • N° 47

Site Type de filière

Manga (province Boisdu Zoundwéogo)

Houndé Tiges de cotonnier(province du Tuy)

Dano Andropogon(province du Ioba)

Réseau dedistribution

Groupe électrogèneLaveurGazogène

Armoire decommande

Tableau 1

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Au cours d’une deuxième phase,chacune des filières a été analyséede manière détaillée à la fois auniveau technique (analyse de lademande en électricité, disponibilitéde la biomasse et conditions de pro-duction/mobilisation, test en labora-toire afin de vérifier l’aptitude desdifférentes biomasses à être gazéifiées,choix des options technologiques),économique (coût du kilo de bio-masse à l’entrée de la centrale, coûtsdes investissements, coût de produc-tion du kWh, rentabilité de la filièrecomparée à la production classiqueau gasoil), socio-organisationnel(existence de structures pourla mobilisation, le transport etl’approvisionnement de la centraleen biomasse, aspects institutionnelset organisationnels liés à l’implanta-tion d’une centrale gaz-électricité etenvironnemental (choix des espèces,pratiques culturales, réduction desémissions de CO2, NOx et SO2).

La filière « tiges de cotonniers » à Houndé

La demande prévisible en électricitéà Houndé basée sur l’étude de laSonabel s’élève à 245 MWh/an.Pour satisfaire cette demande aumoyen d’un groupe gazo-électrogène,la consommation annuelle en tigesde cotonnier serait de 280 tonnes.Les tiges de cotonnier sont un résiduactuellement non valorisé et large-ment disponible : en 1999, la com-mune de Houndé comptait 1 200hectares de champs de coton produi-sant 1 800 tonnes de tiges, soit plusde 6 fois les besoins de la centrale.

Pour les agriculteurs, la vente destiges de coton n’entraîne aucunemodification de leurs pratiqueshabituelles, aucun coût supplémen-taire puisque de toute façon les tigesdoivent être coupées. Au contraire,ce débouché énergétique pour lestiges est l’occasion pour eux demieux valoriser le travail fourni surles champs de coton en leur procu-rant un revenu supplémentaire net.

TIGES DE COTONNIERS PRÉPARÉES POUR LES TESTS DE GAZÉIFICATION

Les producteurs de coton sontregroupés en GPC qui jouent le rôled’intermédiaire avec la SOFITEX,entreprise qui achète et traite lecoton. Cette structure est prête àprendre en charge l’organisation de la filière d’approvisionnement de la centrale en biomasse.

Le coût du combustible comprenantla récolte, le transport par charrettesà traction animale, le conditionne-ment et le stockage a été évalué à22 FCFA/kg M.S.

En prenant des hypothèses iden-tiques pour les deux sites, soit untaux de croissance annuel moyende la consommation de 7% pour les 10 premières années et 5% pour les10 années suivantes, un facteur decharge de 30% en année 1 croissantjusqu’à 55% en année 10, lesbesoins sont satisfaits en année 1par un groupe de 100 kW, complétépar un 2e groupe en année 10.

Le tableau présente les critères derentabilité retenus en fonction de lafilière. Le taux d’actualisation retenuest de 5%, retenu pour l’électrifica-tion des villes secondaires et del’électrification rurale.

Il ressort que la filière biomasse-électricité est la plus rentable. Ellepermet une économie variant de15 à 25 FCFA par kWh produit.Le surinvestissement lié au groupe

gazo-électrogène par rapport à unesolution classique au diesel est récu-péré dans un délai de l’ordre de 3 ans.

Dans cette application, la filièregazo-électrogène permet une éco-nomie en émissions de CO2 de 200 à 250 tonnes par an, soit environ 2,5 tonnes de CO2 parmillion de FCFA investi. Parallèle-ment, 80 tonnes d’émissions de SO2sont évitées par an.

La rentabilité de la filière dépendévidemment du coût de la biomasseconditionnée. L’analyse de sensibilitédu prix des tiges de coton sur larentabilité montre que le «breakevent point» pour lequel le coût de production du kWh par la filièregazo-électrogène serait équivalent à celui produit par un groupe dieselse situe à 48 FCFA/kg, soit plus du double de l’estimation (haute) du coût du coton.

Conclusions et perspectives

Globalement, il ressort de ces ana-lyses que les filières «bois» et« tiges de cotonniers» présentent un potentiel de développement réellement intéressant. Elles offrentla perspective de rémunérationscomplémentaires pour les agriculteurs,permettent de produire un kWh àun coût inférieur à celui des centralesclassiques et présentent une faisabi-lité agronomique, technique et orga-nisationnelle prometteuse. Il restemaintenant à mettre la filière enplace afin de vérifier l’impact réel de la filière.

RemerciementsNous tenons à remercier l’IEPF qui a financé l’étude, la Direction géné-rale de l’Énergie du Burkina et lesnombreux services ministériels, admi-nistratifs et autres du Burkina Faso quiont mis à notre disposition les don-nées nécessaires et nous ont donnéles conseils judicieux qui ont permisla réalisation de cette étude.

Pour une gestion durable de la biomasse-énergie 27

Production Filière Classique « Coton »

(groupe diesel)

Investissement 44 000 97 000actualisé [kFCFA]

Coût du kWh 81,7 56,3produit [FCFA]

Coût du combustible 62,8 22,2dans le kWh [FCFA]

Temps de retour 3,4du surcoût d’inves-tissement [ans]

Tableau 2

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28 Liaison Énergie-Francophonie • N° 47

Directeur de projet

INESTENE, France

Technologies matures sur le continent africain, dans les pays industrialisés et conditions de transfert

Technologies matures sur le continent africain, dans les pays industrialisés et conditions de transfert

objectif principal de cette politique est d’assurer une sécurité d’appro-visionnement à long terme. Il implique de mettre en œuvre certainesactions telles que développer une production domestique d’énergie, promou-voir l’utilisation rationnelle de l’énergie et diversifier les approvisionne-ments extérieurs de combustibles par énergie et par origine géographique.Dans un contexte de marasme économique exacerbé par une concurrencefarouche entre nations, cet objectif constitue un défi colossal pour les pays africains. Leurs économies, en majorité basées sur les revenus de l’agriculturene peuvent se transformer efficacement dans une conjoncture de non-compétitivité des coûts de l’énergie, leur dépendance énergétique étantforte. Leur besoin en capitaux pour assurer leur développement et leurapprovisionnement en énergie ne cesse de croître.

Bien plus, l’emploi de combustibles fossiles en importante quantité pour la production d’électricité et les transports allié à une utilisation massiveet inefficiente de la biomasse contribuent fortement à l’émission des gaz àeffet de serre. Dans les bilans énergétiques, la biomasse compte pour envi-ron 15% de l’énergie utilisée dans le monde et pour près de 40% de celleutilisée dans les pays en développement. Cependant, une part importantede cette biomasse est utilisée de manière inefficace ; elle est abondammentexploitée pour la cuisson ou le chauffage dans les zones rurales des pays endéveloppement et ce très souvent grâce à des techniques séculaires.

Aujourd’hui la biomasse peut être convertie en «vecteurs énergétiques» tels que gaz, carburants et électricité et ainsi contribuer à satisfaire lesbesoins en énergie de diverses populations. Ces vecteurs énergétiques sontproduits dans de nombreuses circonstances à des coûts compétitifs. Pour

L’

La politique énergétique d’un pays est un élémentindispensable pour assurer sa souveraineté et sondéveloppement. Elle doit répondre à des grandes prioritésqui sont : la sécurité énergétique à long terme, laparticipation à la création de la richesse nationale enoffrant aux entreprises une énergie compétitive et laconstruction d’un développement énergétique durable(viable, équitable et vivable) et respectueux del’environnement.

EDGARD BOSSOKEN

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les pays en développement, une utilisation efficace de la biomassecomme énergie constituerait unebase de développement rural, decréation d’emplois et de lutte contrel’exode rural de nombreuses popula-tions. Bien plus, si la biomasse estexploitée de manière durable, saproduction et son utilisation n’indui-sent aucun effet sur l’atmosphère.

Cet article traite de la valorisationde la biomasse en électricité. Il présente d’abord l’état de l’art destechnologies de conversion de labiomasse. Il analyse ensuite les poli-tiques incitatives de leur promotiondans quelques pays occidentauxainsi que les besoins en termes detransfert de technologies en Afrique.

État de l’art des technologies deconversion de la biomasse

ANALYSE TECHNIQUE

La valorisation énergétique de labiomasse est assurée par trois typesde transformations : la transformationchimique (production de biocarbu-rants essentiellement), la transfor-mation biologique (méthanisation)et la transformation thermochimiqueà plus de 95%. Seule cette dernièresera analysée dans le cadre de cetarticle. Les principales conversionsthermochimiques de la biomasse et

les produits obtenus sont résuméesdans le tableau ci-dessous.

Ces procédés de conversion, condi-tionnés par les performances de la centrale (type de combustion etgroupe turbo-alternateur) sontcaractérisés par des rendementsthermiques et électriques différents.

Il apparaît ainsi que la combustiondirecte de la biomasse est le procédéle mieux adapté pour la productionde la chaleur, tandis que la gazéifi-cation directe est plus favorable à la production d’électricité.

La filière combustion Cette filière utilise un cycle à vapeurde Rankine. Le combustible est brûlédans une chaudière afin de produirede la vapeur sous pression qui estdétendue dans une turbine et entraîneun alternateur, générant ainsi del’électricité. Les rendements obtenussont faibles (inférieurs à 25%) dufait de la faiblesse du pouvoir calori-

fique inférieur des combustibles utilisés et de la température de com-bustion. Les techniques d’utilisationde la filière combustion sont matures,fort répandues dans l’industrie etparfois très concurrentielles. Ce qui explique l’engouement des agro-industries et des industries forestièresà les utiliser pour produire la chaleuret l’électricité dont elles ont besoin.

L’analyse de nombreux projets déjàréalisés montre que la combustionest la filière la plus appréciée par les industriels pour satisfaire leursbesoins à partir de la biomasse.Toutefois, pour que ce soit rentable,certaines conditions sont nécessaires :capacité d’investissement importante,implantation pérenne de l’unité indus-trielle à alimenter en énergie et prixélevés des combustibles concurrents(pétrole et gaz principalement).L’optimisation de la mise en œuvretechnique de la combustion assuresa compétitivité même dans les pays où les produits pétroliers sontbon marché (cas des pays du Sud-Est asiatique tels que Malaisie etIndonésie).

Pour la production de l’électricité,les performances techniques de lafilière combustion-turbine à vapeursont tributaires de la taille de l’ins-tallation. Ainsi pour un systèmed’une puissance installée de 0,5 à 2 MWe, le rendement électrique est d’environ 15% alors qu’il variede 20 à 22% pour des puissancessupérieures à 2 MWe.

Les installations utilisant la combus-tion directe sont très répandues enAmérique du Nord et en Suède. Lespuissances communément installéesvarient de 10 à 30 MWe. La plusgrande unité de ce type d’une puis-sance de 50 MWe et d’un rendementde 25% est en fonctionnement auxÉtats-Unis (Burlington) ; des usinesde 150 MWe y seraient en dévelop-pement.

La filière pyrolyse La production d’électricité par cettefilière est assurée par 1’utilisation

Pour une gestion durable de la biomasse-énergie 29

Technologie Produits primaires obtenus

La pyrolyseElle correspond à la décomposition thermique de la biomasse sous Charbon, Combustible liquidel’action de la chaleur et en l’absence de l’air Gaz énergétique

La gazéificationElle correspond à la conversion de la biomasse en gaz énergétique par Gaz énergétiqueoxydation partielle et à température élevée.

La liquéfactionElle correspond à la décomposition de la biomasse à basse Combustion liquidetempérature et à haute pression en présence d’hydrogène ou de monoxyde de carbone

La combustionElle correspond à l’oxydation complète de la biomasse en Chaleurprésence de l’air

Conversion thermochimique de la biomasse

Technologie Rendement Rendementthermique électrique

La pyrolyse 44 % 19 %

La gazéification 76 % 34 %

La combustion 80 % 22 %

Rendements des différentes techniques de conversion

Tableau 2

Tableau 1

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centrale à charbon varie de 600 à1200 MWe avec un rendementsupérieur à 34%).

La principale conséquence découlantde cette limitation de taille est larestriction de ces technologies auxapplications ponctuelles. Les coûtsdes combustibles étant importants,seules les industries possédant d’im-portantes quantités de rebuts peuventproduire de l’énergie à un coût compétitif. Cette compétitivité estd’autant meilleure que l’installationfonctionne en cogénération. Trèssouvent cette énergie est dédiée à lasatisfaction de leurs besoins propreset non mise à la disposition du réseauélectrique (en cas de productionélectrique).

Des progrès ont été réalisés d’unepart dans les techniques de condi-tionnement ou de conversion de la biomasse en combustible (solide,gazeux ou liquide), minimisant lespertes et de fait les tensions sur laressource et, d’autre part, sur lestransformations de la chaleur obtenueen électricité. Ce dernier point estprincipalement lié aux cycles utilisantles turbines à injection de vapeuret/ou des moteurs Stirling. Ces nouvelles techniques permettant desgains substantiels sur les rendementsdes centrales fonctionnant à la bio-masse, la production d’électricité àdes conditions économiques accep-tables serait possible dans un avenirproche.

Plusieurs unités à base de chaudièreet de four fonctionnant à partir de la biomasse transformée en com-bustible gazeux ou liquide pour laproduction d’électricité sont opéra-tionnelles. Elles utilisent très souventdes moteurs alimentés en gaz pauvreou des turbines à vapeur. Les rende-ments attendus sont de l’ordre de30% pour des moteurs à combustioninterne testés par la compagnie suédoise TPS. D’après de nombreuxspécialistes, la technologie la plusprometteuse serait la filière combi-nant la gazéification de la biomasseà une turbine à gaz à injection de

vapeur. Ce concept serait accessibleà un coût minime tout en permettantd’atteindre des rendements élevés.Toutefois la réussite de la filièregazéification de la biomasse pour laproduction d’électricité est assujettieà une incertitude de taille et descoûts réels d’investissement à con-sentir. Cette incertitude n’est pas leseul biais qui entache l’avenir de lafilière gazéification. L’analyse destrente-huit pilotes en fonctionnementdans les universités et les industriesen 1992 montre qu’afin d’assurer sonopérationnalité, des problèmes detraitement des effluents sont encoreà résoudre. Toutefois, la productiond’électricité à partir de la gazéifica-tion de la biomasse comporte denombreux avantages qui sont direc-tement exploitables : – des coûts d’investissement plus

faibles à terme,– de meilleurs rendements

électriques, – une fiabilité plus élevée et une

maintenance plus aisée pour lesturbines,

– des rejets dans l’atmosphère plusfaibles du fait de l’intégration de systèmes d’épuration des gaz(des réductions de 50 à 80% desémissions de polluants par kWhproduit comparé à la combustiondirecte).

ANALYSE ÉCONOMIQUE PORTANT SUR LA FRANCE

L’analyse des coûts d’investissementet des coûts de production des cen-trales existantes ou d’études réaliséesen Amérique et en Europe pour despuissances de 5 à 100 MWe permetd’appréhender les effets liés à« l’économie d’échelle», à « l’appren-tissage» et à « la technologie».

Les coûts d’investissement d’unecentrale électrique à base de bio-masse sont plus élevés que ceuxd’une centrale à combustible fossile.Ces coûts sont assujettis à un «effetd’échelle» : les coûts unitaires d’uneunité de puissance plus importante

sont moins élevés que ceux d’uneunité de puissance plus faible. Entre20 et 50 MWe, les unités à base degazéification présentent des coûtscomparables à ceux des systèmes àcombustion directe aux rendementsplus faibles.

Les unités de gazéification à cyclecombiné sont quant à eux assujettisà un effet d’apprentissage : leurs coûtsd’investissement diminuent avec lenombre d’installations identiquesinstallées. Ainsi, si pour la premièreunité ce coût se situe à 17800 FF/kwe,il passe à 9750 FF/kWe pour la cinquième et à 8450 FF/kWe au boutde la dixième unité.

Afin d’appréhender l’économie desdifférentes filières, trois types defilières de production électriqueà partir de la biomasse en Franceont été distingués pour les besoinsd’une étude réalisée pour l’agence de l’Environnement et de la maîtrisede l’Énergie : la combustion directeavec turbine à vapeur, la gazéificationavec turbine à vapeur et la gazéifi-cation avec turbine à gaz. Troisniveaux de puissance ont été étudiéspour ces filières : 5, 16 et 32 MWe.

a- La combustion directe en chaudière couplée avec une turbine à vapeur

Cette filière présente le handicapd’avoir des rendements de produc-tion électrique trop faibles (environ18% en turbine à vapeur à conden-sation, et 25% en turbine à vapeur à contre-pression) pour permettreune économie satisfaisante comparéeà d’autres moyens de productionélectrique. L’investissement pourcette filière, compris entre 9000 FFet 12000 FF/kWe est relativementindépendant de la taille. Cela poussedonc à étudier les petites puissancesavec forte valorisation de la chaleur(industrie, chauffage urbain) et basprix du bois compte tenu d’unevalorisation de bois de rebut. Lecoût du kWh produit varie de 55 à91 centimes avec un coût d’achat du bois à 400 FF la tonne.

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b- La gazéification du bois puis la valorisation du gaz en turbine à vapeur

Cette voie, permettant d’atteindrede meilleurs rendements (voisin de40%) est maintenant mature. Desexpérimentations ont été conduitesen Suède, en Finlande et aux États-Unis. Toutefois, seule l’utilisation de turbine à vapeur en aval dugazéifieur est recommandée du faitde la présence de goudron dans legaz qui conduit à l’encrassage desmoteurs diesel ou à combustioninterne. Cette filière connaît d’im-portants effets d’économie d’échelle.

La littérature internationale met en évidence un intérêt économiquepour des centrales de l’ordre de 200 MWe. Il est vite apparu que lesdisponibilités de bois ne pouvaientexcéder 30 MWe. Dans ces condi-tions, l’investissement passerait de27 000 FF pour 5 MWe à 17 000 FFpour 32 MWe. Le coût du kWhproduit varie de 49 à 80 centimesavec un coût d’achat du bois à 400 FF la tonne.

c- La gazéification du bois avec production d’électricité en turbine à gaz.

C’est la filière d’avenir. Avec ungazéifieur pressurisé, elle permet des rendements approchant 45%voir 50%. Elle bute néanmoins sur des difficultés de traitement etd’épuration des gaz agressifs pour la turbine. Cette filière ne fait pasencore l’objet d’installations de tailleindustrielle. Les données techniqueset économiques la concernant étantpeu fiables, on n’a retenu que lesdeux premières filières.

L’avis des experts internationauxconcernant les projets à base degazéification de la biomasse en coursde réalisation dans le monde, estd’avoir des centrales les plus grossespossibles (d’une puissance au moinségale à 100 MWe) en gazéificationutilisant soit un cycle combiné(IGCC) soit une turbine à gaz(STIG ou ISTIG) pour bénéficier

d’un effet d’échelle, et en nombreimportant (au moins dix unités)pour bénéficier de l’effet d’appren-tissage et faire tomber les coûtsd’installation. Dans le cas de laFrance, compte tenu des difficultésà mobiliser la ressource en deçà d’uncertain prix, la taille optimale seraitentre 30 et 50 MWe en cogénération.

ANALYSE DE L’ADÉQUATION ENTRELES BESOINS DE DÉVELOPPEMENTDES PAYS AFRICAINS ET LAPALETTE DES SOLUTIONSTECHNOLOGIQUES DISPONIBLES

Cette analyse porte essentiellementsur la rentabilité d’une installationde production d’électricité à partirde la biomasse. Elle procède de la compétitivité de tels moyens deproduction d’électricité face auxmoyens conventionnels dont dispo-sent les pays africains.

Les installations de production del’électricité à partir de la biomassesont onéreuses car ce sont générale-ment des équipements produits àl’unité et nécessitant une importantemobilisation de capitaux. Leurimplantation nécessite des étudesapprofondies. Cependant quelquescaractéristiques essentielles peuventêtre édictées :– la production électrique doit se

situer en base (durée de fonction-nement de la centrale d’environ6000 heures par an) afin d’amortirun investissement important.Faute de pouvoir fonctionner ensuivi de charge pour des duréesd’appel très courtes, l’économiedes projets pousse à un usage de longue durée.

– l’installation doit fonctionner encogénération si possible afin devaloriser la chaleur au maximum.La réduction de coût du kWh estcomprise entre 4 et 13 centimes.Ce qui nécessite l’implicationd’une industrie consommatrice de chaleur.

– il faut disposer d’une ressource en bois garantie et à bas coût(notamment du bois de rebut issu

de la transformation du bois).D’où l’importance de la mise enplace de contrats entre les pro-ducteurs de bois et l’exploitant de la centrale. Un prix du bois de plus de 300 FF/tonne induit un coût total du kWh électriquesupérieur à 60 centimes. Dansl’exploitation d’une installation de production d’électricité, le prixde la ressource en bois est de loinle plus gros poste (entre 30 et 40 centimes par kWh). Dès lors,il faut rechercher toutes les solu-tions permettant d’accroître lesrendements. Une autre voie seraitd’améliorer la logistique afin debaisser le coût de mise à disposi-tion du combustible.

– le « réglage» optimal de l’instal-lation est nécessaire si l’on veutminimiser le coût de rachat.Celui-ci est en effet très sensibleau rendement électrique (à rende-ment thermique fixé et prix decombustible donné).

– les coûts les plus faibles pour les centrales à combustion directesont obtenus pour les petites puissances compte tenu d’une ressource moins chère et d’unemeilleure valorisation de la chaleur. Un contexte optimal peut permettre de descendre endessous des 50 centimes le kWh.

– la puissance choisie pour la filièreen gazéification avec turbine àvapeur voit son économie s’amé-liorer au fur et à mesure que lapuissance augmente. Les montantsd’investissements les plus faiblesprennent en compte une subven-tion importante destinée à gommerle surcoût actuel. Sans subventionà la recherche-développement, lekWh électrique n’est jamais infé-rieur à 60 centimes. Avec subven-tion il peut descendre à 50 centimes(avec valorisation totale de la cha-leur). La supériorité de la filièregazéification-turbine à vapeurn’est pas établie par rapport à lafilière à combustion directe pourles petites puissances. Bien que

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cette filière soit la plus attractivesur le plan économique, elle sembleencore peu réalisable dans lecontexte africain actuel car ellenécessite un effort conséquent degestion de la ressource : une unitéde 30 MWe a un productible de464,4 GWh par an ; si l’on faitl’hypothèse que la forêt en serégénérant produit 4 tonnes dematière sèche à l’hectare par an,pour satisfaire cette production,l’exploitation forestière doitse faire sur une surface de122500 ha/an soit 1225 km2/ an(correspondant à un carré de35 km de côté).

– Compte tenu des faibles densitésde population dans les zonesforestières, il est préférable deconstruire des installations à combustion directe de petite puissance directement prises encharge par des industriels. Ceci se justifie par la nécessité de valo-riser la chaleur en cogénération,de disposer d’une ressource à basprix et d’acquérir une premièreexpérience industrielle pour cetype de centrales électriques.

– Le développement de la filièregazéification et production d’élec-tricité par turbines en cycle combiné nécessite la réalisationd’unités pilotes dans des zonesbien définies et la mise en œuvred’une étroite collaboration entreles compagnies électriques, lesuniversités et les sociétés indus-trielles. Le dimensionnement desunités opérationnelles ne pourrase faire qu’avec la certitude de la disponibilité de la ressource etdes compétences pour leur main-tenance. La construction de plu-sieurs installations du même typepourra alors être étendue.

– Cette étape franchie avec unepremière installation, il pourraêtre envisagé un second type detechnologie avec turbine à gaz en aval du gazéifieur (technologiepermettant d’améliorer les rende-ments électriques). D’ailleurs,

dans les années qui viennent,l’expérience industrielle s’accroîtrafortement, tirée par les pays dispo-sant actuellement des meilleuresréférences (Amérique du Nord etScandinavie).

Analyse des politiquesincitatives de promotion des technologies

Le but ultime que recherchent lespolitiques de promotion des énergiesrenouvelables en général et de labiomasse en particulier est de trans-former le système énergétique d’unpays en incitant à la consommationdes énergies indigènes. Avant d’ana-lyser les politiques de promotiondes technologies de production del’électricité à partir de la biomasse il est important de noter que ledéveloppement de la productiond’électricité à partir des énergiesrenouvelables a connu deux èresdistinctes.

La première, caractérisée par uneintervention directe des pouvoirspublics pour améliorer l’indépen-dance énergétique de leur pays pro-cède de la crise pétrolière de 1973.Cette dernière a contraint les auto-rités des pays industrialisés ayantpeu de ressources fossiles sur leurterritoire à mettre en œuvre desprogrammes de développement destechniques utilisant des ressourcesénergétiques nationales afin d’amé-liorer leur indépendance énergéti-que. L’enjeu essentiel était d’assurerl’approvisionnement énergétique du pays (se défaire des contraintesgéopolitiques de l’énergie) auxmeilleures conditions financières. En général, le soutien des pouvoirspublics s’est quasiment arrêté dès la crise passée.

La seconde est survenue avec lespréoccupations environnementalesdes populations des pays industriali-sés au début des années 1990. Unevérité s’imposait enfin : si le modèlede développement économiqueconnu par ces pays était suivi par les

pays en développement, non seule-ment les ressources fossiles ne suffiraient pas, mais la planète nepourrait le supporter. Il est apparuurgent de promouvoir un dévelop-pement basé sur des énergies «propres», respectueuses de l’envi-ronnement, un développementdurable.

Le développement de la productionde l’électricité à partir de la biomassedépend du contexte économique,législatif et réglementaire de chaquepays. La production d’électricitéà partir de la biomasse dans unpays est fortement influencée par :la situation générale du systèmeélectrique, le cadre général et régle-mentaire de ce système, ses struc-tures et les règles qui s’y appliquentet les types d’acteurs engagés dansson développement. Les mécanismesincitatifs mis en œuvre découlentgénéralement de ce contexte.

La suite de cette partie décrit lesmécanismes utilisés par quelquespays pour promouvoir la productiond’électricité à partir de la biomasse.

LE CAS DE L’ANGLETERRE ET DU PAYS DE GALLES

La promotion des énergies renouve-lables au Royaume-Uni n’a été renduepossible que grâce à une action incitative radicale : la législation quia institué l’Electricity Act en 1989 etl’Environnemental Protection Act en 1990.Un des effets du processus de priva-tisation au Royaume-Uni issu de cestextes a été la mise en place par legouvernement d’une taxe applicableà toute l’électricité produite à partirdes énergies fossiles. Le produit decette taxe, environ 10 milliards deFF par an devait servir à développerles énergies non fossiles. Cependant,l’industrie nucléaire a été la princi-pale bénéficiaire de cette taxe. Eneffet, une part du marché électriqueau moins égale à 17% lui étaitgarantie et elle a perçu 94% desmontants prélevés au titre de laFossil Fuel Levy (FFL) alors que lesrenouvelables n’en percevaient que 2%.

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La politique énergétique et envi-ronnementale du Royaume-Unicomporte certains mécanismes intéressants pour la promotion del’efficacité énergétique et de la production d’énergie électrique parles énergies renouvelables.

– La Non-Fossil Fuel Obligation(NFFO) qui oblige les fournisseursd’électricité à acheter une quantitédonnée d’énergie d’origine nonfossile (environ 20%). Dans cecadre, l’électricité produite à partirde l’énergie nucléaire, des énergiesrenouvelables ou des déchets disposent d’un marché exclusif.Cette obligation constituait aupréalable une protection de l’in-dustrie nucléaire dont les surcoûtsétaient dus à la faible compétitivitéde la filière développée par le pays.Elle s’est avérée ensuite comme unsoutien important d’une mutationde l’industrie électrique vers lesénergies renouvelables.

– Une taxe sur l’électricité d’originefossile ou Fossil Fuel Levy (FFL) deprès de 10% sur les ventes d’élec-tricité a été imposée jusqu’à 1998,voire au-delà. Elle représentait unmontant d’environ 10 milliards de FF par an. Son taux était ajustéde façon à couvrir les surcoûtsencourus par les achats au titre de la NFFO. Elle fut supprimée en 1996 à l’occasion de la privati-sation de Nuclear Etectricity et l’aideaux énergies renouvelables a étémaintenue via une taxation del’ensemble de l’électricité.

– Un fonds pour la promotion de la maîtrise de l’énergie, l’EnergySaving Trust, a été créé en 1992 parle gouvernement et les principauxacteurs du secteur de l’énergie.Ses ressources annuelles de prèsde 2 milliards de FF par an sontdestinées à financer les projets demaîtrise de la demande d’énergie.La nouvelle législation prône un

prélèvement annuel d’environ 10 FF par consommateur d’électri-cité et de gaz.

Dans le cadre des Non Fossil FuelOrders, l’énergie produite par lesénergies renouvelables et livrée auréseau électrique, bénéficie d’uneprime financée au moyen de la taxesur l’électricité d’origine fossile (FFL).

Ce processus a créé un véritableengouement pour les énergiesrenouvelables : les réponses sélec-tionnées aux appels d’offres ontporté sur des capacités de 138 MWen 1990, 457 MW en 1991 et de626 MW en 1994 alors que lesniveaux initiaux des appels d’offresétaient respectivement de 100, 250 et 400 MW.

Toutefois, bien que ces projets pouvaient être financés à hauteur de 70 à 80% du coût total par unebanque et le reste de fonds propres,le financement de ces projets a étéconsidéré comme une véritable barrière pour les énergies renouvela-bles. Les banques, sensibles aux prixd’achat de l’électricité produite doncau temps de retour de l’investisse-ment, exigeaient des taux d’intérêtélevés et se désintéressaient desmicro-projets.

Les principales limites rencontréespar ces projets ont été analysées par D. FINON (IEPE, 1995) :

– la difficulté d’obtenir un contratdans le cadre du NFFO dans unsystème concurrentiel ;

– le manque d’attrait pour les finan-ciers de projets dont la taille esten général petite et dont la tech-nologie employée est très souventnouvelle, le manque de flexibilitédes banques anglaises face à despromoteurs de projets nouveauxdont l’assise financière est le plussouvent perçue commeinsuffisante ;

– les coûts financiers proportionnel-lement prohibitifs pour les petitsprojets.

LE CAS DE LA SUÈDE

Depuis 1991, le gouvernement suédois développe un programme depromotion des sources d’énergiesrenouvelables. La base des incitationsest la subvention. En effet, l’installa-tion de turbines éoliennes et d’équi-pements solaires bénéficie d’unesubvention de 25%. Un fonds de625 millions de SKr soit 500 millionsde FF est géré par NUTEK, l’agencede l’énergie pour subventionner lamise au point de nouvelles technolo-gies à base de biomasse (gazéificationet production d’électricité, etc.).L’usage de la biomasse pour la pro-duction électrique s’effectue principa-lement par l’usage des déchetsconstitués de liqueur de papeterie etdes déchets urbains. L’industrie pape-tière produit actuellement 2,4 TWhen cogénération-biomasse.

LE CAS DE L’ALLEMAGNE

L’un des objectifs des politiquesénergétique et environnementale en Allemagne est l’utilisation desénergies renouvelables. En effet, la«nouvelle politique énergétique»du parlement allemand prône leséconomies d’énergie et l’utilisationdes énergies renouvelables pourréduire les émissions de CO2 enAllemagne de 25 à 30% à l’an 2005comparé au volume des émissionsde 1987. Le parlement a ainsiadopté en 1990 une loi sur la four-niture électrique (Stopeinpeisegesetz)définissant les principes de défini-tion des prix d’achat minimum.

Il est à noter que la sensibilité envi-ronnementale des populations joueen faveur de la promotion des éner-gies renouvelables en Allemagne.On assiste ainsi à la mise en placed’une politique de niches fondée sur l’obligation d’achat et des sub-ventions directes ou tarifaires.

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Propositions pour la mise en place de programmesvolontaristes de promotion de la biomasse en Afrique

La biomasse employée comme combustible pour la productiond’électricité représente encore unepart infime alors que le potentieltechnique est énorme dans diverspays du monde. Ceci est attribuableà l’état actuel de développement destechniques de conversion qui sonttributaires des caractéristiques dumarché de l’énergie (notion de com-pétitivité entre les énergies alorsque les coûts des énergies fossilesn’intègrent pas les externalitésqu’elles génèrent) et des contraintesinstitutionnelles (domination duconventional wisdom qui explique laréticence des planificateurs à essayerdes technologies parfois nouvelles).Pour la production de l’électricité,de nombreuses barrières s’opposentà la pénétration de la biomasse :le manque d’infrastructure, leurrelative immaturité technique etéconomique et les besoins d’écono-mies d’échelle dans la fabricationdes composants et le déploiementtechnique. Dans les conditionsactuelles, l’exploitation du potentielbiomasse à grande échelle nécessiteen général : – d’améliorer l’efficacité et l’économie

des systèmes de productiond’énergie à partir de la biomasse ;

– de développer le déploiement etl’intégration effective dans les systèmes existants de productiond’énergie malgré la restructurationet la privatisation des industriesénergétiques.

L’avènement de ces conditions esten passe d’être réalisé dans les paysoccidentaux dans lesquels de nom-breux efforts en faveur de la promo-tion des énergies renouvelables ontété entrepris depuis des années parl’adoption d’incitations financières,fiscales ou législatives. Aussi, pour la majorité des pays européens parexemple, les politiques adoptées

visent à assurer qu’une part impor-tante de l’accroissement des capacitésélectriques nationales se fonde surles technologies utilisant les énergiesrenouvelables. Ces politiques géné-ralement déterminées par la situationdes systèmes électriques, sont surtoutla résultante des politiques gouver-nementales de réduction des émis-sions de CO2 et de la sensibilitéenvironnementale qui se manifestedans ces pays.

La promotion de l’utilisation desénergies renouvelables pour la pro-duction de l’électricité en Afriquereste à bâtir. Bien que les conditionsde leur développement soient pré-sentes (abondance de ressources,sous-capacité du système électriqueet croissance forte de la demanded’électricité, notamment), des han-dicaps majeurs subsistent : manquede cadre législatif et institutionnel,contrainte financière et développe-ment technique.

Cependant, depuis les conférencesde Rio de Janeiro en 1992 et Kyotoen 1997, les besoins de mécanismespour une collaboration internatio-nale avec pour but d’aider les diffé-rents pays à atteindre les objectifsde sécurité énergétique à long terme,de protection de l’environnement etde limitation des émissions de gaz àeffet de serre ont été appréhendés.Cette collaboration doit entre autresactions se traduire par des effortsaccrus de recherche et développementau profit des meilleures technologiesqui permettraient aux différentspays de réaliser leur objectif desécurité, de propreté, d’accessibilitéet de solidité d’offre et de demanded’énergie. Les gouvernements peuventinfluencer le progrès technologiquepar des actions institutionnelles,économiques, fiscales et des mesuresde régulation ayant pour finalitéd’inciter les producteurs d’énergie àdédier une part importante de leursinvestissements aux technologies les plus performantes.

La mise en œuvre effective des déci-sions internationales de limitation

des émissions des gaz à effet deserre constitue une chance inespéréepour l’Afrique. Certains instrumentspolitiques peuvent désormais aiderle continent pour l’utilisation desénergies renouvelables dans la pro-duction de l’électricité. Parmi ceux-ci on peut citer : les mécanismespour un développement propre(MDP), la mise en œuvre conjointeet l’échange de permis d’émission.De nombreuses actions peuvent êtreentreprises dès à présent : – la création des agences nationales

d’énergie et d’un réseau inter-africain de celles-ci en charge dela vulgarisation des informationset de techniques éprouvées enprovenance des pays tiers, de laconception de programmes depromotion de technologies perfor-mantes de consommation et deproduction d’électricité et de ges-tion de programmes de rechercheet développement sur l’utilisationdes énergies renouvelables ;

– une planification des besoins deproduction électrique prenant enconsidération une palette large detechnologies existantes en regarddes ressources nationales des payset du potentiel des économiesd’électricité ;

– une restructuration des compagniesélectriques africaines et la créationd’un cadre politique incitant l’auto-production d’électricité par lesentreprises privées ; ce qui est justifié par le manque de capitauxnécessaires au développementd’une électrification en réseau ;

– une obligation pour les exploitantsde scieries d’une certaine taille àréaliser des unités de productiond’électricité à partir de la bio-masse, dont l’énergie serait géréepar les compagnies électriques ; la réalisation d’unités pilotes estun préalable à la généralisationd’une telle obligation ;

– l’incitation de certaines multinatio-nales à réaliser des unités piloteset/ou de production semblables à celles qu’elles exploitent endehors du continent africain.

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Senior Energy

Specialist, ITDG,

Grande-Bretagne

Modèles de financement de la biomasse-énergie

Modèles de financement de la biomasse-énergie

1 Rural energy and development : improving energy supplies for 2 billion people, p.72,World Bank, 1996.

a plupart des projets biomasse n’exigent qu’un financement relativementmodeste. La gestion d’un projet à petite échelle est pratiquement la mêmeque celle d’un projet de grande envergure. Par exemple, l’analyse des prêtsde la Banque mondiale dans le cadre du programme Lending commitments for sustainable supply and use of woodfuels (60 projets, 1,1 milliards de dollars, 32 pays) montre que 0,3% des prêts ont été destinés aux foyers amélioréset aux meules. Les plantations ont bénéficié de 55% des prêts1. Deux typesde projets peuvent être identifiés. Les banques classiques pourraient êtreintéressées si un projet d’envergure était mis en place.

Échelle et mécanismes de financement Selon la taille des investissements, des mécanismes différents devraient êtremis en place.

PROJETS À PETITE ÉCHELLE ET MODES DE FINANCEMENT

Un premier constat est que le financement classique n’est pas adapté auxprojets de petite taille. Le principe est la création d’intermédiaires financiers

dont les coûts de fonctionnement seraient extrêmement réduits de manièreà donner une certaine rentabilité aux projets à petite échelle. CertainesONG jouent en fait implicitement ce rôle. Par exemple au Pérou, mais dans

Il y a un lien étroit entre la valeur de la marchandise biomasse et la demande. Du point de vue de l’économiepure, les investissements s’orienteront vers les secteursayant un taux de rentabilité élevé. Ceci est particulièrementvrai quand les ressources financières sont rares. La diffusionà l’échelle africaine de technologies rentables et matures,y compris au plan culturel et social, ne poserait pas deproblèmes majeurs. Le problème n’est pas technologiquemais plutôt celui de l’absence d’une stratégie régionalevoire continentale incluant le financement.

DR SMAIL KHENNAS

L

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un secteur autre que la biomasse,Intermediate Technology Pérougère un « revolving fund» octroyépar Inter-American Bank ofDevelopment (IDB) d’environ undemi-million de dollars pour lefinancement de micro-centrales. Cemême type de financement a étéutilisé dans d’autres pays mais par le biais d’institutions para gouverne-mentales pour le financement defoyers améliorés.

Cinq types de modèles pourraientêtre envisagés selon la nature del’investissement.

Les banques de développementrural à capitaux publics Ces banques assurent déjà dans certains pays la fonction d’intermé-diation financière pour des projets à petite échelle. Ainsi au Népal, la Banque pour l’Agriculture et leDéveloppement (ADBN) non seule-ment finance ce type de projetsénergétiques mais gère également lasubvention gouvernementale. Deuxenseignements peuvent être retenusà partir de l’expérience népalaise.Avant la mise en place de branchesrégionales, le système était non seu-lement bureaucratique mais égalementcoûteux pour de petits entrepreneursqui étaient obligés de se rendre plusieurs fois (50 fois dans un casextrême) dans la capitale pour lesmultiples formalités nécessaires àl’octroi du prêt. Cela suppose égale-ment que l’entrepreneur potentieldispose des capacités pour rassem-bler les éléments préliminaires pourl’examen de la demande. À ce stade,les ONG peuvent jouer la fonctionde mise en relation entre la banqueet l’entrepreneur. En dépit de ceslimites, ce type de mécanisme a permis le financement de plusieursdizaines de micro-centrales hydro-électriques. Ce modèle peut êtreappliqué au secteur de la biomassecomme par exemple, le biogaz oud’autres technologies.

Financement de proximité : l’effet multiplicateur Le second modèle est celui déve-loppé au Bangladesh et maintenantconnu sous le nom de GrameenBank2. Cette expérience quiremonte au milieu de la décennie1970 peut être considérée commeun succès. La majorité des prêtssont accordés à des femmes et lemontant est extrêmement modeste,de l’ordre d’une centaine de dollars.Le taux de recouvrement est trèsélevé et s’explique largement par le montant peu élevé du prêt et letravail de proximité. En juillet 1998,la banque disposait de 1 100 antennes,était présente dans 36 000 villageset avait accordé plus de 2,5 milliardsde dollars pour la plupart grâce auxremboursements. La banque disposaitde plus de 2,4 millions de «clients»et employait quelque 12 000 person-nes essentiellement dans les villages.

Intermédiation directe assurée par des organisations non gouvernementalesÉgalement, dans ce troisième modèle,les frais de fonctionnement sontextrêmement faibles. Cependantl’effet multiplicateur pourrait êtrelimité car les ONG ont d’autresobjectifs souvent d’une priorité plusélevée. Par ailleurs, même dans lecas de montants relativement faibles(moins d’un demi million de dollars)une expertise financière est nécessaire.Ce modèle a été mis en œuvre parIntermediate Technologv au Pérou(ITP) grâce à un prêt de l’ordre d’undemi-million de dollars octroyé etgéré par ITP pour le financement de micro-centrales hydroélectriques.Les limites énoncées plus haut ontvite contraint ITP à sous-contracterles services d’un petit bureau ayantce type d’expertise. Un modèlesimilaire a été mis en œuvre parIntermediate Technology Kenyapour la promotion des foyers amé-liorés en milieu rural au KenyaOuest. Cependant le fonds « revolving», relativement limité,

a été géré par une institution paragouvernementale. Dans ce cas, des contraintes bureaucratiques ont surgi et ont atténué l’effet multiplicateur.

Formes d’épargne traditionnelle C’est le quatrième modèle, similaireaux tontines en Afrique de l’Ouest.Une combinaison entre épargne/financement traditionnel et desmécanismes plus conventionnelspourrait conduire à accélérer le fluxd’investissements en faveur de labiomasse-énergie. Par exemple, unepartie des ressources collectées parles canaux traditionnels pourrait servir de garantie aux prêts accordésà la communauté.

Agences bilatérales de développement Ce cinquième type de financementest le recours à des agences commepar exemple DANIDA, NORAD,ACDI, SIDA, Department ForInternational Development enGrande-Bretagne (DFID, exOverseas Development Agency), etc.

PROJETS DE MOYENNE ET GRANDE ÉCHELLES

Les conditions macro-économiquesne sont généralement pas favorablesà ce type de projets. Les taux d’inté-rêt sont particulièrement élevés, laréglementation n’est toujours pas en faveur des projets bio-énergietels que la production d’électricité àgrande échelle. Ce type de projetsimplique la mobilisation de fondsimportants. Les institutions multila-térales de financement (Banquemondiale, Fonds de l’environnementmondial – FEM) pourraient assurerune partie du co-financement.

Il existe cependant des créneaux oùles investissements bio-énergieseraient économiquement rentables,comme par exemple la productiond’électricité, particulièrement dans

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2 Voir Banker to the poor, Aurum Press,London 1998.

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les zones proches des centres deconsommation où les déchets exis-tent en grande quantité. La valorisa-tion des résidus végétaux pourraitainsi offrir des opportunités d’inves-tissement. Ainsi, au Zimbabwe,quelque 40 000 tonnes de déchetssont disponibles dans la région deMutaré (Manicaland) et sont actuel-lement déversés dans les déchargespubliques moyennant une redevanceperçue par la municipalité. L’indus-trie forestière est très intéressée carelle a à supporter les coûts liés àl’exploitation de la décharge. Dansle cas du Kenya, la jacinthe d’eaupose des problèmes environnemen-taux considérables et pourrait égale-ment aboutir à des projets prochesde la rentabilité économique sil’impact sur l’environnement estinclus dans le calcul économique.Ces projets exigent généralementun investissement d’au moins unedizaine de millions de dollars. Parexemple, sur la base d’un kW installéde 2000 $ US, une centrale électri-que d’une dizaine de MW utilisantla biomasse nécessite un investisse-ment de 20 millions de dollars.

Pour les projets à moyenne et grandeéchelles, la contrainte principale estle manque du capital initial pour laprésentation de projets susceptiblesd’intéresser les organisations multila-térales. Même si certains organismescomme le FEM (GEF) mettent à ladisposition des institutions intéres-sées des fonds limités pour la formu-lation de projets, comparativementau potentiel, peu de projets sur labiomasse ont pu être financés. Parailleurs il n’est pas sûr que les pro-jets financés soient nécessairementles plus rentables.

L’analyse économique et financièren’obéit pas toujours aux critères de la rentabilité économique.

Dans les pays africains, des étudesde préfaisabilité et de faisabilitépeuvent exiger plus de ressources

que prévues car l’information n’estpas toujours disponible ou, à défaut,aisément accessible. Les capitauxpublics sont loin d’être suffisantscompte tenu de la demande poten-tielle en études de préfaisabilité. Par ailleurs, il n’existe pas de straté-gie de mobilisation, allocation etsuivi dans ce domaine. Une analysedes sources externes de financementdestinées à la maturation de projetsmontre qu’un nombre limité de paysafricains y ont accès. Par exemple,les projets soumis au FEM (GEF)jusqu’à présent ne concernent qu’unnombre restreint de pays africains.Une large proportion de ce finance-ment est destinée aux grands paysd’Europe de l’Est (essentiellement la Russie), d’Amérique latine commele Brésil, ou d’Asie comme la Chineet l’Inde. Comme il s’agit de finan-cement pour la préparation de pro-jets d’investissements, il est certainque l’écart va s’agrandir davantagecar les investissements mis en œuvreseront autrement plus importants.Enfin, il est important de soulignerque seul un petit nombre de projetsconcernent l’énergie. La majeurepartie des projets soumis porte surla biodiversité.

Au manque de capital initial pour la maturation des projets s’ajoutel’absence de capitaux pour la réalisa-tion des projets proprement dits.Cependant, cette contrainte pourraitêtre atténuée si des projets financiè-rement et/ou économiquement viablessur la bio-énergie étaient formulés.

L’absence de projets susceptiblesd’intéresser le capital financier expli-que la faiblesse de l’investissementdirect en Afrique et non l’inverse. Àce titre, la petite et moyenne entre-prise qui est le catalyseur du proces-sus de développement est souvent le chaînon manquant en Afrique. Àtitre d’exemple, selon la CNUCED,l’investissement direct étranger s’est

élevé en 1996 à quelque 350 milliardsde dollars dont environ 10 à 15%pour les petites et moyennes entre-prises. Ce qui représente un montantde l’ordre de 15 à 22,5 milliards dedollars dont une très faible propor-tion destinée à l’Afrique.

Traitement différencié selon les objectifs

Les projets ayant un contenu socialimportant devraient bénéficier demesures financières d’accompagne-ment, par exemple les prêts à faibletaux d’intérêt ou des subventions.Actuellement l’accès aux optionsénergétiques est très inégal. Lespopulations rurales n’ont en faitqu’un choix relativement limité etsupportent par conséquent des coûtsélevés si l’on intègre la qualité duservice. Dès lors il devient logiqued’introduire des mesures incitativesen faveur des investissements desti-nés à ces populations. Cependant,afin d’optimiser les coûts, la gestiondevrait obéir aux règles du com-merce, ce qui n’exclut pas bienentendu des subventions.

En revanche les projets dont le con-tenu social est moins évident (parexemple le recyclage des résidusvégétaux pour la production d’élec-tricité pour satisfaire une partie des besoins en énergie d’une usine)ne bénéficieraient pas des mêmesavantages.

Le même modèle devrait s’appliqueraux projets structurants en bioéner-gie. En effet, lorsqu’il s’agit d’inves-tissements d’infrastructure commepourraient l’être certains projets bioénergétiques, les flux financiersen provenance du capital privé sontmarginaux. L’absence d’un cadrepolitique et institutionnel a étéidentifiée comme une contrainteprincipale.

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Pour une gestion durable de la biomasse-énergie 39

Sociologue – Chargée

de la communication

programme

PROGEDE, SÉNÉGAL

Aspects sociaux et rôle des femmes dans l’utilisation de la Biomasse

Aspects sociaux et rôle des femmes dans l’utilisation de la Biomasse

ette connaissance du partenariat a permis de constater des situationsd’inégalité dans les bénéfices de la forêt non seulement entre les milieuxurbain et rural, mais aussi entre les différentes catégories de partenaires.Dans la plupart des cas les femmes sont celles qui ont le moins d’opportu-nité de tirer des avantages économiques de la biomasse, même lorsqu’ellesont démontré leur implication constante dans les programmes de reboisement.

Le présent article illustre une expérience qui vient de démarrer au Sénégalet dont l’objectif est de prendre en compte la dimension «genre» dansun programme d’aménagement participatif de forêts pour la productionsoutenue de bois et de charbon de bois.

Exemple de prise en compte du genre : cas du PROGEDELe Programme de gestion durable et participative des énergies traditionnelleset de substitution – PROGEDE – a pour objectif de contribuer à l’approvi-sionnement des ménages en combustibles domestiques de manière régulièreet durable, en préservant l’environnement et en offrant des possibilités élargiesde choix et de confort aux consommateurs. Il privilégie dans sa mise en œuvre :

• l’aménagement et l’exploitation durable de 300 000 ha de formationsforestières naturelles, prises en charge par les populations ruralesconcernées dans le cadre d’un aménagement intégré des ressourcesnaturelles leur assurant des profits ;

• le soutien à la reconversion des acteurs actuels de la filière charbon debois vers d’autres activités économiques ;

Tous les intervenants du secteur de la biomasse-énergies’accordent aujourd’hui à qualifier comme une conditionsine qua non de succès l’implication des populations etparticulièrement celle des femmes. Le choix de méthodesparticipatives pour la mise en valeur de la biomasse-énergie a permis de mieux cerner les partenaires debase, ceux qui vivent autour des forêts d’où provientla biomasse-énergie.

OUMY KHAÏRY NDIAYE

C

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• l’appui aux initiatives du secteurprivé pour le développement del’utilisation des combustibles etdes équipements de substitution ;

• le renforcement des institutions(gouvernement, collectivités loca-les, ONG, secteur privé) concer-nées par la planification de cesecteur et la promotion de leurparticipation.

L’implication des femmes dans leprogramme constitue un enjeu parti-culièrement important. L’appui duPROGEDE est orienté entre autresvers :

• la création d’emplois et d’opportu-nités de développement économi-que pour les femmes au niveaudes communautés de sa zoned’intervention ;

• l’implication des femmes dans lagestion et la commercialisationdes combustibles ligneux ;

• l’allégement de la charge de travaildes femmes et l’accroissement deleur pouvoir d’achat ;

• le développement des capacitésd’autogestion des femmes.

Prise en compte del’analyse «genre» dans le volet offre

Il existe dans les régions de Tamba-counda et de Kolda des institutions(ONG, structures de l’État, projets,collectivités locales) qui ont déjàdes préoccupations quant à la priseen compte de l’approche «genre».Certaines en sont à l’étape de laréflexion, de la proposition de stratégie, d’autres ont déjà démarrédes programmes d’activités.

Parmi les structures de l’État, souventhandicapées par la faiblesse des res-sources, on peut retenir : les servicesrégionaux et départementaux dudéveloppement communautaire, lesservices régionaux et départementauxde développement à la base, lesCentres d’expansion ruraux poly-valents, CERP, où sont affectées,en principe, des monitrices. Ces

partenaires peuvent être misà contribution pour l’exécutiondes programmes d’activités, dansle cadre de protocoles d’accord.

Au titre des projets dont les objectifsprennent en compte l’approche«genre», on peut retenir le Projetd’appui aux groupements de promo-tion féminine, PAGPF. La phaseactuelle du PAGPF qui s’est achevéeen décembre 1998 a mobilisé unmontant total de 5,5 milliards deFCFA, pour des prêts aux GPF desrégions de Dakar, Thiès, Diourbel,Tambacounda et Kolda.

À travers les comités de suivi tech-nique régionaux, départementaux etlocaux, l’exécution du projet impli-que toutes les structures techniqueset toutes les instances de décisioncompétentes. Les engagements res-pectifs du PAGPF et des comités desuivi technique sont consignés dansdes cahiers de charge approuvés parles conseils régionaux.

Les contraintes principales résidentdans la faiblesse des ressourceshumaines. L’un des palliatifs à cettesituation pour laquelle les solutionsstructurelles peuvent prendre dutemps a été l’alphabétisation desfemmes instruites du milieu.

Sur le plan des ONG, on peut citerle Groupe autonome pour le déve-loppement communautaire, GADEC,qui intervient dans les régions deTambacounda et Kolda. L’ONGcomprend une structure associative(de type conseil d’administration) etune structure professionnelle, chargéede l’exécution des programmes.

L’ONG Fodde Ve (ex-VredeseilandenKolda), qui intervient dans la régionde Kolda, accorde également unegrande importance à la prise encompte de l’approche genre. Cetobjectif est posé d’abord au niveaude la structure de l’organisation(équité dans le recrutement et dansl’attribution des responsabilités, dis-crimination positive en faveur desgroupes vulnérables) et au niveaudes programmes exécutés au béné-fice des villageois et villageoises.

Atouts et contraintes pour une insertion des GPF1

dans la filière bois-énergie

CARACTÉRISTIQUES SOCIO-ÉCONOMIQUES

Au-delà des caractéristiques nationa-les, si l’on regarde de plus près lesrégions de Tambacounda et de Kolda,on peut mettre en évidence des carac-téristiques spécifiques qui peuventrendre l’intervention moins aisée quedans d’autres régions du Sénégal.

On peut citer, entre autres, l’éloi-gnement des deux régions (500 et700 kilomètres de Dakar), l’état desroutes, l’enclavement des villagesproches de la zone d’intervention(zones de Maka Coulibantan etdépartement de Vélingara), la pau-vreté relative qui concerne plutôt la région de Kolda. Selon la réparti-tion spatiale des pauvres dans les 10 régions du Sénégal effectuée par la Banque mondiale, les scoresdes deux régions sont les suivants :ménages pauvres et individus pau-vres, Kolda 2e sur 10, Tambacounda7e sur 10.

Pour Tambacounda, selon les chif-fres du dernier Recensement généralde la population (1988), complétéspar les documents sectoriels etrégionaux de la Direction nationalede la statistique (1990/1991), on citeun taux d’analphabétisme de 83%.

En ce qui concerne le départementde Vélingara, région de Kolda, leschiffres du Service régional de lastatistique de Kolda, (1992) fontétat d’un niveau de scolarisation des filles de l’ordre de 20%. Le tauxd’analphabétisme global pour larégion de Kolda est de 52% etgrimpe à 75% lorsqu’on isole lesfemmes. Néanmoins, les programmesd’alphabétisation en cours (PAPF,PAIS, programme Sénégal/GTZ,etc.), devraient, à moyen terme,modifier la situation au bénéfice des femmes.

40 Liaison Énergie-Francophonie • N° 47

1 Groupement de promotion féminine

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Pour les deux régions, les ethniesmajoritaires sont le Pulaar et leMandingue. L’ethnie Pulaar est particulièrement réputée pour unconservatisme aigu qui se traduit parune faible propension des femmes àjouer un rôle social saillant. Quant à la société Mandingue, en plus duconservatisme, elle est connue pourune surcharge des femmes qui sontresponsables aussi bien des activitésde production que de reproduction.Les hommes Mandingue se réserventpour la guerre.

L’introduction de l’approche «genre»devra tenir compte de ces situationsspécifiques.

PLACE ACTUELLE DES FEMMESDANS LA FILIÈRE BOIS-ÉNERGIE

On constate en premier lieu l’inexis-tence de données désagrégées parsexe dans les statistiques relatives àl’exploitation forestière.

Le recensement de mai 1997 desacteurs de la filière de productiondu charbon de bois, principal com-bustible faisant l’objet d’une exploi-tation organisée, suivie et créatricede revenus substantiels a décompté19 300 acteurs.

Pour l’ensemble de ces 19 300 acteurs,la division aménagement et produc-tion forestière de la DEFCCSrecense 7 femmes dans la catégorie«exploitants» pour le charbon etune femme active dans le domainedu bois d’œuvre.

Néanmoins, il convient de préciserqu’en ce qui concerne la vente audétail du charbon, les statistiquesofficielles concernent les revendeursinstallés à Dakar et dans les grandesvilles (Diallo Kerin). Il existe cepen-dant des cas de femmes qui vendentdu charbon à Tambacounda,Ziguinchor ou Kolda, sans comptercelles qui vendent au bord de laroute les reliquats de chantiers decarbonisation.

L’exploitation des produits decueillette est un secteur d’activitéde prédilection des femmes et les

techniciens de la DEFCCS consi-dèrent que 98% des acteurs de cesecteur sont des femmes. Un recueilsystématique de données au niveaudes brigades forestières où sont déli-vrés les permis de circulation permet-trait de se faire une idée exacte de laplace des femmes et de leurs revenus.

GESTION DES RESSOURCESNATURELLES ET RÉGIONALISATION

La production de charbon reste uneactivité extravertie par excellence :au niveau de la coupe et de la carbonisation, la domination desSourgas guinéens persiste, l’intérêtde quelques autochtones pour cetteactivité est récent.

Les patrons (exploitants) sont pres-que tous originaires de zones autresque la région d’exploitation, à l’imagede l’arrondissement de Makacouli-bantan. 53% du quota de la régionde Tambaccunda, 22% du quotanational de charbon de bois en1996, en proviennent et un seulexploitant est natif de la zone.

Dans la situation actuelle, les popu-lations peuvent bien donner leuraval à l’exploitation car elles y trou-vent un intérêt immédiat (revenusde la coupe et carbonisation pourcertains villageois, pots-de-vin réelsou supposés aux chefs de village,etc.) mais il n’existe pas de moyensd’orientation et de contrôle sur ledéroulement effectif des opérations.

La conséquence de cet état de faitest la quasi-généralisation de prati-ques nocives, surtout de la part desSourga étrangers, allant jusqu’à desincursions dans le territoire gambien,le non-respect de la distance mini-male entre les villages et les sites de coupe entraînant une raréfactiondu bois mort et de plus longues dis-tances à parcourir pour les femmeschargées de la collecte de bois.

Quand on ajoute à cela la faiblessedes ressources humaines et maté-rielles du service des Eaux et Forêtsqui a la responsabilité de la policeforestière, on imagine toute

la difficulté de garantir une exploi-tation forestière durable.

L’entrée en vigueur de la Loi sur larégionalisation depuis le 1er janvier1997 crée un contexte nouveau dansla mesure où la gestion des ressourcesnaturelles fait partie des domainesde compétence transférés par l’Étataux collectivités locales. L’État con-tinue cependant de jouer un rôle derégulateur de l’équilibre précaireentre la satisfaction des besoins encombustibles ligneux et la préserva-tion des ressources forestières. Letexte de loi sur la décentralisationprécise de façon explicite les préro-gatives que l’État continue d’exercer.

Cependant, malgré toutes ces garan-ties institutionnelles, le réalismeimpose de prévoir une phase detransition avant que les collectivitésne soient en mesure d’assumer plei-nement leurs responsabilités en raisondes multiples obstacles à leur exer-cice de ce pouvoir fondamental :analphabétisme, ignorance des lois,ressources faibles, enjeux écono-miques et financiers énormes, etc.

La position des femmes dans cecontexte est encore plus délicatelorsqu’on analyse les structures dupouvoir au niveau local. Les statisti-ques les plus récentes en la matièresont celles qui ont été compilées parla direction des collectivités localesdu ministère de l’Intérieur, à l’issuedes élections locales, municipales etrégionales de novembre 1996. Onen retient que la représentation desfemmes reste faible, puisqu’elle sesitue en dessous de 20% pour lesdifférents cas de figure. Pourtant laLoi 72-25 relative à la structurationdes communautés rurales préciseque le tiers des conseillers rurauxdoit être constitué des coopérativesexistant dans la CR. Cette disposi-tion devrait jouer en faveur des GPFqui, aujourd’hui, sont une formed’organisation bien plus visible queles coopératives.

Cela signifie que globalement lespopulations riveraines des zones

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d’exploitation forestières sont peuarmées pour assumer leurs préroga-tives en matière de gestion des res-sources naturelles, et les femmes en particulier sont très faiblementreprésentées aux niveaux où lesdécisions en la matière se prennentou seront prises à brève échéance.

SITUATION DES GPF DANS LES RÉGIONS DE TAMBACOUNDA ET KOLDA

Au cours des visites de terrain pourla confection du présent documentde travail, une diversité de situationsa été observée en ce qui concerne le dynamisme des GPF. Certainsgroupes sont dans une léthargiedéconcertante, alors que d’autresfont preuve d’initiatives et d’origina-lité dans la valorisation de la valeurfondamentale qu’est la solidaritévillageoise.

BONNES DISPOSITIONS DES SERVICES TECHNIQUESCHARGÉS DE LA RÉGULATION DE LA FILIÈRE

La direction des Eaux et Forêts aconfirmé la disponibilité du serviceforestier à accorder une discrimina-tion positive en faveur des GPF auniveau de l’agrément des organismesexploitants. Les GPF présentant uncertain nombre de garanties pour-raient en bénéficier dès la prochainecampagne d’exploitation. Le seulpréalable reste le respect d’unelogique d’aménagement, gestionet exploitation.

Il constate par ailleurs que les produitsde cueillette (fruits, feuilles, racines,gommes et résines) sont surexploitésdepuis la dévaluation, surtout pourla pharmacopée, et qu’il serait inté-ressant de mieux cerner les contoursde ce secteur.

Recommandations Au terme de l’analyse des informa-tions recueillies pour l’élaborationdu présent document de travail, on peut formuler quelques

recommandations qui peuventorienter le PROGEDE dans sonobjectif de contribuer à la priseen compte de l’approche genredans la gestion durable et partici-pative des ressources forestières.

Quelques préalables conditionnentla faisabilité d’un programme testd’activités lucratives dans la filièrebois-énergie au bénéfice des GPF :

• la formation en approche genredes agents du PROGEDE et desagents des IREF Kolda etTambacounda concernés ainsi quela création d’un environnement«gender sensitive» ;

• la fixation d’objectifs réalistes, enfonction du niveau d’engagementsouhaité par les GPF partenaires ;

• le renforcement des capacités demanagement des membres desGPF partenaires (alphabétisation,formation/recyclage en gestion) ;

• la mise à la disposition des GPFpartenaires d’un système de créditet l’identification des institutionspartenaires à responsabiliser ;

• l’instauration d’un système desuivi/évaluation participatif de laphase test assez souple, puisquedes ajustements sont à prévoir en cours d’exécution du test ;

• l’encadrement et la facilitation dutransport pour que les GPF soientindépendantes des transporteursqui se rendent sur les chantiers.

Vu l’implication déjà forte des femmesdans la commercialisation des pro-duits forestiers non ligneux parfoistransformés (fruits, feuilles, racines,

gommes, résines), le PROGEDEpourrait commanditer une étudepour mieux cerner les données de ce domaine et juger de l’opportunitéde l’appuyer de façon conséquente.

Conclusion L’idée de profiter de la phase demutation dans la gestion des ressour-ces naturelles que connaît le Sénégalpour donner une chance aux femmesdéfavorisées des communautés debase de se positionner est extrême-ment séduisante et semble rencontrerun écho favorable chez la plupart desparties prenantes de la problématique.

De nombreux avantages peuventfaciliter l’entrée des GPF dans un ou plusieurs segments d’une filièreparticulièrement rémunératrice, encommençant par leur solide réputa-tion de partenaires fiables et de travailleurs. Néanmoins, le secteurdu bois-énergie, véritable chassegardée, complexe, nécessitant unniveau d’investissement relativementélevé et fonctionnant selon desrègles bien établies, ne sera pasfacile à pénétrer. Les GPF devrontdonc être encore plus vigilants etminimiser les risques d’erreurs.

Les actuels acteurs forts de la filièrebois-énergie, aujourd’hui très biendisposés à l’égard de GPF qui nepeuvent pas, pour le moment,menacer leurs intérêts, risquentde se mettre sur la défensive aufuret à mesure du renforcementde l’influence des collectivités etacteurs locaux, dont les GPF.

42 Liaison Énergie-Francophonie • N° 47

Les spécialistes des transports électriques du monde entier se sont donnésrendez-vous pour discuter des plus récentes découvertes technologiques del’industrie des véhicules électriques dans le cadre d’une conférence et d’uneexposition qui se tiendront du 15 au 18 octobre 2000 à Montréal (QuébecCanada). Pour plus d’informations : www.evs.org

VÉHICULES ÉLECTRIQUES : 17e SYMPOSIUM INTERNATIONAL ANNUEL

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Pour une gestion durable de la biomasse-énergie 43

Responsable du

programme RPTES

Division énergie

(AFTGL) Département

infrastructure (AFTIE),

Banque mondiale

Le Programme régional pour le secteur des énergies traditionnelles – RPTES : réalisations et perspectives

Le Programme régional pour le secteur des énergies traditionnelles – RPTES : réalisations et perspectives

u fait de ce déséquilibre entre les niveaux de consommation etd’investissement, les efforts de développement ont naturellement favoriséle secteur moderne où les besoins en financement externe ont été beaucoupplus évidents. Toutefois, l’idée que la croissance économique et le dévelop-pement permettraient de faciliter la transition des combustibles tradition-nels aux combustibles modernes n’est plus une règle générale. La lenteurde la croissance et la baisse des revenus dans les zones urbaines et ruralesont poussé à l’utilisation continue et très élevée des combustibles tradition-nels qui représentent encore les sources d’énergie les plus accessibles (maispas nécessairement les plus économiques) pour une croissance démogra-phique rapide. Les pressions exercées sur la biomasse et sur les terres arablesdans un environnement en dégradation mettent en danger les perspectivesà long terme de l’économie dans son ensemble, avec des conséquences

Dans de nombreux pays de l’Afrique subsaharienne, laplanification du secteur de l’énergie a longtemps étéreconnue comme une sorte de paradoxe étant donné le rôleque tiennent dans l’économie les combustibles modernescomparés aux combustibles traditionnels. Bien qu’ils soientessentiels au fonctionnement de la société, les combustiblesmodernes ne comptent en général que pour 15 à 40 %de la consommation totale en énergie. Cependant, étantinséparables des méthodes modernes de transformationet d’utilisation de l’énergie, ces combustibles modernesabsorbent virtuellement tous les investissements réalisésdans le secteur de l’énergie. D’un autre côté, bien qu’ilsoccupent une place dominante dans le bilan énergétiquetotal et dans la consommation des ménages, lescombustibles traditionnels ont été très peu servis en cequi concerne la planification, l’élaboration de politiqueset les investissements.

D

BORIS E. UTRIA

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réelles sur la désertification et lechangement climatique, la majeurepartie des risques étant supportéepar les populations les plus pauvres(les pauvres en milieu rural et lesfemmes). Dans ce contexte, le déve-loppement du secteur des énergiestraditionnelles peut conduire à desaméliorations tangibles en termesde durabilité de l’environnement(local et mondial), à l’atténuationde la désertification, à l’allégementde la pauvreté rurale, à l’efficacitéénergétique et économique, età l’équité entre les genres.

Objectifs et champ d’action

C’est dans ce contexte que la RégionAfrique de la Banque mondiale adécidé en 1993, avec l’aide d’unfonds spécial offert par la Directiongénérale de la coopération interna-tionale (DGIS/NEDA) du gouverne-ment des Pays-Bas, d’entreprendreun examen des politiques, stratégieset programmes du secteur des éner-gies traditionnelles (RPTES) afind’assister les gouvernements d’Afriquesubsaharienne dans la planificationet le développement de ce secteur.

Un groupe de cinq pays sahéliens, à savoir le Burkina Faso, la Gambie,le Mali, le Niger et le Sénégal, a étéchoisi pour participer à la premièrephase du Programme. Suite aux travaux entrepris dans ce premiergroupe de pays, le Programme a étéélargi vers la fin de l’année 1996afin d’offrir une combinaison desoutiens politiques et opérationnelsà cinq autres pays, à savoir l’Éthio-pie, la Guinée, la Guinée Bissau, la Mauritanie et le Mozambique. Le Bénin et le Togo ont intégré leProgramme au second semestre del’année 1997, et le Zimbabwe ausecond semestre de l’année 1998. La Namibie et la Zambie ont rejointle Programme au mois d’août 1999.

Un nouveau programme quinquen-nal soutenu par le DGIS/NEDA a

commencé en décembre 1997.Du fait de l’expansion géogra-phique du programme, la nouvellephase de 5 ans a été rebaptisée«Programme régional pour le sec-teurdes énergies traditionnelles».Au cours de cette nouvelle phase,le Programme continuera à sedévelopper en assimilant l’expérienceméthodologique, politique et opéra-tionnelle acquise. Il continuera éga-lement à élargir graduellement sonchamp de couverture à d’autres payssubsahariens, sur la base des requêtesformulées. Bien que le Programmeoffre un soutien adapté aux besoinsspécifiques de chaque cas, en général,il aide également les pays à :

(i) entreprendre une évaluationrétrospective des objectifs, de l’am-pleur et de l’approche du travailréalisé à ce jour dans le secteur desénergies traditionnelles ; une évalua-tion des politiques, stratégies etprogrammes qui en résultent, et cesur la base des politiques officielles ;une évaluation de leur mise enœuvre par les agents des secteurspublic et privé ; et une évaluationdes activités des organismes d’aideexternes ;

(ii) identifier les principaux liensintersectoriels qui affectent le fonc-tionnement du secteur des énergiestraditionnelles dans chaque paysparticipant, et tout en collaborant à la création d’un consensus inter-sectoriel et à une convergence poli-tique, il aide à définir, dans cecontexte plus large, un cadre opéra-tionnel stratégique pour le secteur ;

(iii) rédiger une série de recomman-dations sur les nouvelles approchesà adopter afin de développer le sec-teur des énergies traditionnelles etde définir des politiques de mise enœuvre bien ciblées que les institutionsnationales et les agents économiquesdevront appliquer en utilisant lesinstruments d’aide externeappropriés ;

(iv) identifier et préparer des projetset/ou programmes d’investissement

capables de faire obtenir des résultatsconcrets le plus rapidement possible.

Outre la fourniture d’une assistancesur mesure à chaque pays participant,le RPTES a également un mandatrégional qui consiste entre autres :(i) à diriger des travaux sectorielssur les questions/thèmes d’intérêtrégional relatifs à l’énergie tradition-nelle ; (ii) à soutenir l’intégration etles contacts régionaux entre lesreprésentants officiels/experts dugouvernement des pays participants ;(iii) à promouvoir une coopérationet des activités horizontales directesconduisant à un échange d’informa-tions et d’expériences entre les paysparticipants ; (iv) à appuyer le déve-loppement de mécanismes de soutiensectoriel dans l’énergie tradition-nelle et la création de groupes detravail à l’échelle régionale ; et (v) à diffuser les expériences et leçonstirées de tout cela aux autres paysafricains, au bailleur de fonds, auxservices d’assistance technique et à la communauté des ONG.

L’approche de lacoopération pourle développementadoptée par le rptes

Le Programme RPTES est fondé surle principe qu’il est essentiel que lepays s’approprie les conclusions etrecommandations relatives aux poli-tiques si l’on veut qu’elles soient tra-duites avec succès en actions réelleset durables sur le terrain. Dans cecontexte, le Programme cherche dèsle départ à maximiser la contributionafricaine à travers un processusintensif et interactif de collaborationentre experts africains et expertsexpatriés. La mise en œuvre duProgramme RPTES commence habi-tuellement par une explication duconcept de « l’examen des politiques»aux représentants officiels du gou-vernement de chaque pays. Deséquipes nationales pluridisciplinairessont alors créées dans chaque pays

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sous la direction d’un coordinateurnational (dans la plupart des cas, ledirecteur de l’Énergie). Les équipesnationales comprennent en généraldes représentants officiels des diffé-rents ministères chargés de l’énergie,de l’environnement, des ressourcesforestières et hydrauliques, du déve-loppement rural, des affaires socialeset de la femme, ainsi que des repré-sentants d’organisations régionales(par exemple le CILSS), et danscertains cas, des ONG. Une foisque les équipes sont formées, leProgramme met un ou des consul-tants en appui de chaque équipenationale pour le transfert deméthodologies analytiques et lesactivités de développement descapacités. L’équipe nationalecommence alors à travailler surson propre examen des politiquesnationales. Le Programme étayeces activités par une assistancetechnique directe et un financementrestreint pour le travail de terrain etles coûts de la recherche, par la miseà disposition au niveau international/local d’un ou de plusieurs consultantsvenus en appui, par la productionet la diffusion de rapports, parles communications, etc. Aprèsque les équipes nationales ontterminé leur examen des politiques,le Programme contribue à la promo-tion d’un large débat national et à lacréation d’un consensus (séminairesnationaux, ateliers techniques etprogrammes de communication).Une fois qu’un consensus nationala été établi sur les politiques et quedes actions concrètes de suivi pourun investissement ont été identi-fiées, le Programme aide chaqueéquipe nationale à préparer unprogramme ou projet d’investisse-ment sectoriel pouvant être financépar la banque, et à obtenir un finan-cement pour l’investissement destinéà la mise en œuvre de ce projet ouprogramme. L’investissement qui enrésulte peut se présenter sous formed’opérations de la Banque mondialeou être réalisé par des bailleurs defonds bilatéraux. Dans les cas où les

opérations de la Banque mondialeont été préparées (IDA, GEF et/ouAIJ), l’équipe de la Banque pour leRPTES devient responsable de lasupervision de la mise en œuvre.

Le Programme est géré à la Banquemondiale par une équipe de coordinations1

centrale de taille réduite ; il a unComité directeur2 indépendant composéd’experts internationaux confirméset bénéficie d’un Groupe d’appui africain(GAA) composé des coordinateursdes différentes équipes nationales.L’équipe de coordination de laBanque est responsable de la gestiondes ressources du Programme, de lafourniture d’une assistance techniquedirecte aux équipes nationales, etde la mobilisation d’une expertisespécialisée à partir des «Réseaux»Énergie, Agriculture et Environne-ment de la Banque ainsi que de sour-ces externes. Le Comité directeurdonne des orientations thématiqueset supervise l’exécution générale duProgramme. Le Groupe d’appui afri-cain est responsable de la coordina-tion des communications régionaleset des activités de soutien à traversle pays (coopération horizontale).

Quelques exemples de « résultats surle terrain » du rptes

Suivant les conclusions et recomman-dations de l’examen des politiques réalisépar le RPTES au Burkina Faso, unministère de l’Énergie a été créé etcorrectement structuré par rapportaux problèmes énergétiques duBurkina. Par la suite, un «Programmed’investissement du RPTES» de17,5 millions de dollars américains(15 millions de dollars provenant duDANIDA et 2,5 millions de dollarsprovenant du «Projet de gestion de l’énergie durable – SEMP» de la Banque/AIJ) a été préparé et estactuellement en train d’être mis enœuvre afin d’accroître de 300 000 hasupplémentaires la zone de forêtnaturelle sous une gestion commu-nautaire durable. Ce programme

d’investissement aura pour résultatla production durable de plus de70% des combustibles ligneuxnécessaires aux marchés urbains dupays. Ce programme est fondé surles plans communautaires de gestiondes ressources naturelles développéspar le Burkina Faso avec l’appui du«Programme national de gestiondes terroirs – PNGT» dirigé parl’IDA (International DeveloppmentAssociation) et du projet de la FAO,à savoir, le «Programme nationald’aménagement forestier – PNAF».Outre ces réalisations, le RPTES arécemment obtenu du gouvernementhollandais un engagement supplé-mentaire de 9 millions de dollarsaméricains pour rajouter une com-posante énergie traditionnelle dansle prochain «Projet communautairede développement rural » dirigé parla Banque.

L’équipe nationale du Sénégal pourle RPTES a préparé un plan directeurdétaillé relatif au développement du

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1 L’équipe de coordination centrale de laBanque est actuellement composée de :Boris Utria, directeur de programme, économiste principal (basé à Harare,Zimbabwe) ; Koffi Ekouevi, coordinateurau siège (basé à Washington D.C.) ; MathieuKoumoin, coordinateur régional pourl’Afrique de l’Ouest (basé à Dakar, Sénégal) ;Suzanne Rodclis, analyste chargée desopérations (siège), Kellie Anderson, assis-tante de programme (siège). Les coordina-teurs actuels du Programme RPTES basésaux missions résidentes sont : Dernba Balde,spécialiste en approche participative,Sénégal ; Emmanuel Nikierna, spécialisteen ressources naturelles, Burkina Faso ;Abdoulaye Yero Balde, économiste, Guinée ;Souleyrnane Sow, administrateur de pro-gramme, Mauritanie ; et Christian Loupeda,administrateur de programme, Bénin.

2 Hama Arba Diallo, secrétaire exécutif,UNCCD; Youba Sokona, ENDA-TM(Sénégal) ; Mark Mwandosya, Centre pourl’énergie, l’environnement, les sciences & latechnologie (Tanzanie) ; Margaret Skutsch,professeur, Twente University (représentantde DGISINEDA) ; Francois Falloux, spé-cialiste principal en environnement (AFTEI,Banque mondiale) ; et Eric Cruikshank,économiste principal, SFI, Banque mondiale.

CILSS: Comité permanent inter-états de luttecontre la sécheresse dans le Sahel (FAO)

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secteur des énergies traditionnellesqui a été, entre autres, un soutiencritique pour l’achèvement du nou-veau code forestier (avril 1995) et la réorganisation radicale du servicedes Eaux et Forêts. Avec l’appropria-tion et l’engagement entier du pays,l’équipe nationale du RPTES a pré-paré et met en œuvre le «Projet de gestion durable et participativede l’énergie (SPEMP)» dirigé parIDA/GEF et d’un montant de 20 mil-lions de dollars américains afin demettre 300 000 ha de forêt naturellesous le contrôle direct de la commu-nauté en vue d’obtenir une productiondurable de combustibles ligneuxdestinés aux marchés urbains. Cetteopération, qui incorpore l’expérienceacquise au Burkina Faso voisin, estfondée sur un concept de dévelop-

pement rural qui intègre entièrementla gestion des forêts pour la produc-tion d’énergie tout en gérant d’autresressources naturelles. Elle intègreégalement une série d’activitéscibles servant à appuyer, dans lesvillages participants qui sont à peuprès au nombre de 250, un proces-sus de développement économiqueet social sensible au genre et plusimportant. Le SPEMP est considérécomme une référence dans le pro-cessus participatif de développementet d’autonomisation de la commu-nauté rurale au Sénégal, et commeune «meilleure pratique» en Afriquede l’Ouest.

Avec l’assistance du RPTES etle financement de l’IDA (Projetd’énergie pour les ménages urbains),

le gouvernement du Mozambiquevient d’achever la mise en œuvre dela première étape du «Projet pilotede gestion communautaire de l’ap-provisionnement en combustiblesligneux dans la forêt de Licuate».Avec ce projet, 70 000 ha ont étéplacés sous une gestion communau-taire directe afin d’avoir un approvi-sionnement durable en combustiblesligneux pour les marchés de l’énergiede Maputo. En adaptant les expé-riences tirées du Burkina Faso et duSénégal, ce projet pilote a réussi àintégrer la gestion de l’énergie etdes forêts, le renforcement des capa-cités locales ainsi que le renforcementdes institutions locales et des struc-tures sociales traditionnelles ; il aégalement créé de nouvelles oppor-tunités économiques et d’emploi(fabrication de briques, améliorationdes techniques et de la technolo-giede carbonisation, graines detournesol) et a entre autres facilitél’introduction de mécanismes demicro financement. Ce projet piloteest considéré comme un exemple de«meilleure pratique» dans la gestiondes ressources naturelles durablesvis-à-vis de l’environnement et dansle développement rural de la régionSADC.

Le gouvernement du Mozambique a récemment désigné l’Institut natio-nal pour le développement rural(INDER) pour qu’il dirige la mise en œuvre d’une deuxième phase de12 mois du projet pilote de Licuate,avec pour objectif de préparer unprogramme d’investissement capabled’étendre la réussite de ce projet auniveau national.

Aller de l’avant À partir de janvier 1999, le Pro-gramme RPTES a lancé un processusde décentralisation et de transfertprogressif des responsabilités duProgramme vers l’Afrique. Le direc-teur du Programme RPTES s’estinstallé à Harare, Zimbabwe, pour

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• Des évaluations du secteur des énergies traditionnelles et la formulation de plansdirecteurs et de cadres stratégiques pour les cinq premiers pays du RPTES(mai 1995) ;

• Le développement institutionnel et la formation technique (renforcement des capa-cités) de plus de 70 professionnels africains, la création d’une approche innova-trice à la coopération pour le développement et à l’intégration régionale pour lesecteur des énergies traditionnelles, la contribution à la mise en œuvre et/ou àl’expansion des projets précédemment élaborés qui totalisent quelques 15 millionsde dollars américains (Mali et Niger, juin 1996) ;

• 40 millions de dollars en nouveaux investissements dans des projets participatifsdans le secteur des énergies traditionnelles (Sénégal, juin 1997, Burkina Faso, sep-tembre 1997) avec une appropriation nationale totale et un engagement à la miseen œuvre de ces projets ;

• La préparation et/ou l’aide à la préparation de composantes d’investissement pourle secteur des énergies traditionnelles qui s’élèvent à 20 millions de dollars dansle secteur énergétique ou dans les projets de gestion des ressources naturelles enÉthiopie, en Mauritanie, au Mozambique (Juin 1997) et en Guinée Bissau (juin 1998) ;

• Le début de la préparation des composantes d’investissement dans le secteur desénergies traditionnelles s’élevant à 60 millions de dollars dans les projets de laBanque mondiale relatifs au secteur de l’énergie : Burkina Faso (Projet de dévelop-pement rural géré par la communauté, 1er juin 1998), Éthiopie (Projet de distribu-tion d’électricité, novembre 1998) Mozambique (Projet LIL du secteur de l’énergie,1er juin 1999) et Bénin (Projet de gestion des ressources naturelles, 1er juillet 1999).

JANVIER 1999

PROGRAMME RPTESR é s u m é d e s r é s u l t a t s

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une période de trois ans afin demettre sur pied et de diriger le pre-mier bureau du RPTES sur le terrain.En plus de la gestion globale duProgramme, le bureau de Harare estdirectement responsable de la coor-dination des activités du Programmedans les régions de l’Afrique de l’Estet de l’Afrique australe. Le bureaude Harare du RPTES est localisé àla mission résidente de la Banquemondiale à Harare, et il fait partieintégrante de l’infrastructure et del’équipe technique de la Banque surle terrain.

À la suite de tout cela, un deuxièmebureau du RPTES sur le terrain a étécréé en mars 1999 à Dakar, Sénégal,afin d’assurer la coordination des acti-vités ouest-africaines du programmeà partir de la mission résidente de la Banque.

L’objectif de cette décentralisationest d’initier pour ce Programme unprocessus graduel de transfert desservices d’assistance technique etdes responsabilités du personnel dela Banque vers les groupes d’expertslocaux basés en Afrique. Dans le casde l’Afrique australe, le personnel du RPTES, soutenu le cas échéantpar des experts recrutés localement,développe un réseau régional/localau fur et à mesure que le Programmeélargit son champ d’action dans larégion. Étant donné le pool d’exper-tise immédiatement disponible dansla région SADC, la majeure partiedes services d’assistance techniquedu RPTES pour les pays SADC seradélivrée à travers une coopérationhorizontale. Dans le cas de l’Afriquede l’Ouest où le Groupe d’appuiafricain du RPTES a déjà créé un«Secrétariat technique» (ASG/TS)à Dakar, le personnel clé du RPTESaidera l’ASG/TS à se consolider età se développer jusqu’à ce qu’ilsoit complètement installé commegroupe fonctionnel d’experts, capa-ble d’entretenir le réseau du RPTES,de faire un travail sectoriel dansles pays membres, d’offrir uneassistance technique directe à

travers l’identification et la mobili-sation de l’expertise régionale exis-tante (coopération horizontale) etde diriger les initiatives sectoriellesrégionales.

Après une période d’environ trois ans,le personnel-clé du RPTES devraretourner au siège en laissant derrièrelui des réseaux régionaux entièrementfonctionnels et capables de dirigerl’intégralité des services d’assistancetechnique du RPTES. Il est envisagéqu’à cette période, les bailleurs defonds du RPTES offriront un soutienfinancier direct aux réseaux régio-naux du RPTES, leur donnant ainsiles moyens d’opérer en étant suffi-samment indépendants vis-à-vis del’équipe du siège, excepté pour lescontrôles financiers et les contrôlesde qualité. Le processus de décentralisation/transfert des responsabilités proposédoit atteindre quatre objectifs principaux : (i) le renforcement des

capacités locales/régionales ; (ii) uneplus grande appropriation desinitiatives sectorielles à l’échellelocale/ régionale ; (iii) la maîtrisede la hausse des coûts des servicesd’assistance technique du Programmeen question au fur et à mesure que lenombre de ses membres augmente ;et (iv) l’allégement progressif,dans le moyen terme, des tâches du personnel-clé du Programme afin de superviser de manière adéquatele portefeuille croissant d’investisse-ments subséquents sans qu’il soitnécessaire d’agrandir l’équipe dusiège déjà créée. Ce portefeuillereprésente actuellement 150 millionsde dollars. Bien qu’il soit difficile de prédire à quelle vitesse ce porte-feuille continuera à croître à partirde l’an 2000, on anticipe le maintiend’une croissance minimale de 50 millions de dollars pour lesinvestissements annuels allantjusqu’à l’an 2005.

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HTTP://WWW.IEPF.ORGA FAIT PEAU NEUVE

Le site internet de l’Institut, en ligne depuis 1996 était ces derniers mois entravaux. Il s’agissait de le rendre plus actuel tout en lui conservant ses qualitéspremières : une accessibilité optimale et une offre de services intégrale. Ce sitea pour objectif principal de diffuser en temps réel l’information la plus à jour surnos activités et de permettre, à tous, l’accès aux ressources de l’IEPF : périodiques,ouvrages de référence, atlas des expertises, etc.

Mais cette nouvelle version du site ne marque pas pour autant la fin des travaux.En effet, nous travaillons à la mise en lignes de plusieurs de nos bases de donnéesactualisées, dont le célèbre «Profils énergétiques des pays ayant en commun l’usagedu français » mais également de « l’Atlas des expertises en biomasse énergie ».

Le site devrait laisser également une grande place au Projet RELIEF (RÉseaude Liaison et d’échanges de l’Information environnementale Francophone »financé par le Fonds francophone des Inforoutes, et actuellement conduit parl’IEPF et ses partenaires : l’OEI de l’UQAM (Université du Québec à Montréal –Canada), Agora 21 de l’école des Mines de Saint-Étienne (France) et le REDDAd’Abidjan (Côte d’Ivoire).

Le site de l’IEPF est celui de tous les acteurs francophones du développementdurable (énergie et environnement) ; il est donc ouvert à vos propositions, sugges-tions et informations. À vos claviers : [email protected]

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INSTITUT DE L’ÉNERGIE ET DE L’ENVIRONNEMENT DE LA FRANCOPHONIE (IEPF)56, RUE SAINT-PIERRE, 3e ÉTAGE, QUÉBEC (QUÉBEC) G1K 4A1 CANADA