constitution du 4 octobre 1958...

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Année 1990 . - N a 82 [2] A . N . (C . R .) ISSN 0249-3088 0242-6186 Mardi 13 novembre 1990 DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 9 e Législature PREMIÈRE SESSION ORDINAIRE DE 1990—1991 (67• SÉANCE) COMPTE RENDU INTÉGRAL ? e séance du lundi 12 novembre 1990

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Année 1990. - N a 82 [2] A . N . (C . R .)ISSN 0249-3088

0242-6186 Mardi 13 novembre 1990

DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

9e Législature

PREMIÈRE SESSION ORDINAIRE DE 1990—1991

(67• SÉANCE)

COMPTE RENDU INTÉGRAL

?e séance du lundi 12 novembre 1990

Page 2: CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 9earchives.assemblee-nationale.fr/9/cri/1990-1991-ordinaire1/067.pdf · Si l'on en juge par les seuls taux de couverture des impor-tations par les exportations

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2+ SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M . GEORGES HALE

1 . Loi de finances pour 1991 (deuxième partie) . - Suitede la discussion d'un projet de loi (p . 5123).

DÉPARTEMENTS ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER

M. Maurice Pourchon, rapporteur spécial de la commissiondes finances.

M. René Drouin, rapporteur pour avis de la commissionde la production.

M. Jérôme Lambert, rapporteur pour avis de la commissiondes lois, pour les départements d'outre-mer.

M. Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis de la com-mission des lois, pour les territoires d'outre-mer.

M. Claude Lise,M m• Lucette Michaux-Chevry, M . Louis Le Pensec,

ministre dcs départements et territoires d'outre-mer ;

MM. François Asensi,Pierre-André Wiltzer,Jean-Paul Virapoullé,Léon Bertrand,Dominique Larifla,Auguste Legros,Ernest Moutoussamy,Henry Jean-Baptiste,Alexandre Léontieff,Maurice Louis-Joseph-Dogué,Gérard Grignoc ;,Alexis Pota,Guy Lordinot,André Thien Ah Koon,Elle Castor.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

2 . Ordre du jour (p. 5150) .

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2• SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M . GEORGES RAGE,

vice-président

La séance est ouverte à quinze heures.

M . le président . La séance est ouverte.

1

LOI DE FINANCES POUR 1991

(DEUXIÈME PARTIE)

Suite de I. discussion d ' un projet de loi

M . le président . L'ordre du jour appelle la suite de ladiscussion de la deuxième partie du projet de loi de financespour 1991 (no 1593 et lettre rectificative n° 1627, rapportn° 1635).

DÉPARTEMENTS ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER

M . le présidant . Nous abordons l'examen des crédits duministère des départements et territoires d'outre-mer.

La parole est à M . Maurice Pourchon, rapporteur spécialde la commission des finances, de l'éc000mie générale et duPlan.

M . Maurice Pourchon, rapporteur spécial. Monsieur leministre des départements et territoires d'outre-mer, commechaque année, l'examen des crédits de votre ministère. estpour nous l'occasion de prendre conscience que les réalitésdémographiques et politiques de l'outre-mer français sontparmi les plus vivantes de l'ensemble français . Les dernièresdonnées du recensement de 1990 sont plus qu'éloquentes àcet égard . Elles font apparaître dans tous les départementsd'outre• mer, entre 1982 et 1990, un accroissement notable dela population, méme s ' il varie dans de grandes proportions,de 10 p. 100 à plus de 50 p. 100, ce dernier pourcentageconce . :Aat la Guyane . En outre, elles montrent que les fluxmigratoires entre la métropole et les départements d'outre-mer sont désormais inversés . Le temps des installations mcs-sives en métropole semble révolu : le phénomène a d'ailleurscorrespondu à une politique délibérée des pouvoirs publicsqui a couvert un peu plus de deux décennies.

Dans ce contexte, l'économie des départements et terri-toires d'outre-mer se fragilise-t-elle ?

Si l'on en juge par les seuls taux de couverture des impor-tations par les exportations « hors invisibles », la situationpeut paraître des plus compromises à moyen terme.

De méme, l'évolution de l'emploi salarié dans des départe-ments ou territoires dont le taux de chômage peut dépasser30 p . 100 de la population active ne satisfait que très impar-faitement aux impératifs d'un développement équilibré . Enoutre, plus des deux tiers de la population active occupées'emploient au sein des seuls secteurs administratifs et para-administratifs.

Dans ces conditions, il parait aisé à certains - comme onl'a vu à cette tribune il y a quelques jours - de dénoncerl'assistanat généralisé, voire la « désincitation » à l'emploi, àl'encontre du revenu minimum d'insertion . Mais que propo-sent ses détracteurs 7

En tout état de cause, il serait plus utile d ' étudier plus pré-cisément, dans les deux années à venir, les effets induits duR.M.I ., y compris les répartitions définitives des supplémentsde pouvoir d'achat qu ' il procure à l'économie locale.

Le budget des départements et territoires d 'outre-mer doitavoir un but essentiel que nous ne cessons de rappeler : ledéveloppement économique et social, en tenant compte desspécificités de chacune des entités qui composent l'outre-meret en veillant constamment, je tiens à le souligner, à ne pasaggraver les disparités entre elles.

Pour 1991, les dépenses ordinaires et les crédits de paie-ment augmentent de 5,44 p. 100 pour atteindre 2,17 milliardsde francs. En comparaison des dotations consenties auxautres ministères, cette augmentaion notable s ' inscrit dans la« moyenne; haute » de la fourchette . L'outre-mer est donc,dans le contexte budgétaire actuel, érigé au rang des prio-rités.

Les dotations du F.I .D.O .M. progressent de plus de20 p. 100 en crédits de paiement, alors que celles duF.I .D.E .S . enregistrent une croissance analogue à celle dubudget du ministère.

Les crédits spécifiquement dévolus à la Nouvelle-Calédoniesont également en très sensible augmentation, notamment surle « chapitre réservoir » 68-93, qui est spécifiquement attribuéau développement du territoire, avec une progression supé-rieure à 15 p . 100.

A cet égard, il convient de veiller à maintenir une justeparité vis-à-vis des autres territoires . Les besoins de la Poly-nésie, où votre rapporteur a effectué une mission en juilletdernier, de Mayotte ou encore de Wallis-et-Futuna ne doi-vent pas être méconnus, quand bien même ces territoires nesont pas, a priori, confrontés aux mêmes échéances que laNouvelle-Calédonie.

Par ailleurs, est-il judicieux d'avoir partiellement gagé lacréation d'une section de service militaire adapté dans la pro-vince Nord par une réduction des effectifs aux Antilles-Guyane ?

Globalement, sur la base des budgets proposés, on estimeà plus de 29 milliards de francs l ' effort global de l ' Etat, horsD .G.F., en faveur de l'outre-mer. C'est dire que les crédits duseul ministère des départements et territoires d'outre-mer nefinancent qu'une petite fraction de cet ensemble, j 'allais direla partie émergée de l'iceberg.

S ' agissant du logement, par exemple, désormais financé surla ligne budgétaire unique, la dotation progresse de 13 p . 100et permet de respecter intégralement l'objectif fixé en cedomaine par la loi-programme, qui prévoyait d'y consacrer,au cours de sa durée d'exécution, 4,7 milliards de francs autotal.

Le problème du logement outre-mer est très préoccupant.Je souhaite donc, monsieur le ministre, que la délégationinterministérielle à la ville et au développement social voie samission étendue à l'expertise pour les centres urbains d'outre-mer, dont la croissance prend souvent des formes anar-chiques . Le contrat de ville récemment conclu entre l'Etat etSaint-Denis-de-la-Réunion est une nouvelle formule qui méri-terait d'être étendue à d'autres agglomérations . La résorptionde l'habitat insalubre, là plus qu'ailleurs, reste une priorité.

Les efforts consentis pour le logement outre-mer sontincontestables, mais si la délégation interministérielle à laville était associée à la mise en oeuvre de ces programmes,sans doute pourrait-on éviter de renouveler des erreurs com-mises en métropole il y a vingt ou trente ans et qu'elle doitaujourd'hui réparer.

Par ailleurs, l'exécution en 1991 des contrats de plan,parfois tardivement mais définitivement conclus, et descontrats de développement, formule spécifique au bénéficedes provinces de Nouvelle-Calédonie, bénéficiera dans cemême budget de I l l millions de francs .

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2 . SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

Enfin, 60 millions de francs sont réservés au financementdes primes d ' équipement et d'emploi dans les départementsd'outre-mer . Sur ce point, une évaluation de l'efficacité desattributions mériterait certainement d ' être entreprise . Certes,les chiffres s'alignent et les dotations sont consommées, maispour quels résultats ?

Enfin, les dotations destinées aux Terres australes etantarctiques françaises, regroupées sur deux lignes du cha-pitre « subventions aux budgets locaux des territoires d'outre-mer » et qui représentent certes peu de chose, enregistrentune baisse limitée de 0,75 p . 100 . Une seule mesure nouvelle,au demeurant symbolique - un peu plus de 250 000 francs -est demandée en faveur de la recherche en vue de l'actualisa-tion des coûts de fonctionnement.

En ce qui concerne l'intensification des programmes derecherche, les crédits spécialement dévolus à ces territoiress ' établissent à 20 millions de francs en autorisations de pro-gramme comme en crédits de paiement, soit une progressionde plus de 5 p. 100.

Cependant, pour répondre à l'objectif d'achèvement destravaux de la piste aérienne, dont on parle depuis si long-temps dans cette enceinte, un abondement d'environ 10 mil-lions de francs paraîtrait nécessaire en raison de retards dusà la fois aux conditions climatiques et aux difficultés d'ap-provisionnement du chantier en matériaux à la suite d'unincident survenu récemment au navire L'Astrolabe.

De plus, dans le contexte exacerbé de concurrence interna-tionale sur cette zone, 'la mise en place de l'Institut derecherche polaire Paul-Emile Victor, qui devrait prendre laforme d'un groupement d'intérèt public, doit être accélérée.

M. Michel Sapin, président de la commission des lois . Trèsbien t

M. Maurice Pourchon, rapporteur spécial. Qu'en est-il del'exécution des précédents budgets, question qui a donné lieuici même à de fréquentes controverses ? Cette année, mon-sieur le ministre, il convient de vous décerner des compli-ments et la commission des finances m'a chargé de vous fairepart de sa satisfaction. Son rapporteur estime en effet néces-saire de souligner les progrès réalisés depuis deux ans dansla gestion des crédits de votre ministère.

D'une part, les reports, traditionnellement très importants,ont sensiblement baissé depuis l'exercice 1989 : moins67 p . 100 et 78 p. 100 respectivement pour les sections dépar-tementales et régionales du F .I .D .O .M. et pour la sectiongénérale du F .I .D.E .S. C'est un exemple que devraientméditer de nombreux autres départements ministériels.

D'autre part, je tiens à le souligner, la mise en place desprocédures de secours puis d'indemnisation a révélé uneréelle capacité d'exécution budgétaire en urgence à la suitedes cyclones Firinga à la Réunion et Hugo en Guadeloupe.

En revanche - chaque observation a ses deux facettes -certains des crédits de fonctionnement du ministère ne témoi-gnent pas, a priori, du même dynamisme.

Le « projet de service global » intéressant l'administrationcentrale constituera certainement une heureuse initiative, s'ilparvient véritablement à mobiliser toutes les catégories dupersonnel . On peut toutefois s'interroger sur l'apparente fai-blesse des ambitions concernant les services extérieurs duministère. Seule la préfecture de la Guyane bénéficiera, parexemple, de créations d'em plois en catégorie A . Il s'agit d'ail-leurs de remédier quelque peu à un sous-encadrement chro-nique, désormais inconciliable avec la gestion du programmede financement des infrastructures Phèdre, dont l'année 1991marquera le lancement.

En matière de crédits de matériel, on regrettera qu'il n'aitpas été donné satisfaction aux demandes des administrations,notamment dans les territoires d'outre-mer . Ainsi, les locauxdévolus aux services du Haut Commissariat en Polynésiedepuis la mise en place du nouveau statut d'autonomie nesont conformes ni à la rationalité de l'exécution des tâchesqui lui reviennent, ni même aux impératifs de la positionmatérielle qui doit être celle de l'Etat, à tous les niveauxpolitiques et administratifs lie la République . Prenons garde àne pas donner, par l'image d'une dégradation matérielle, lesentiment d'une démission progressive . Je souhaite que cetavertissement puisse être entendu, et en particulier de voscollègues du budget .

M . Michel Sapin, président de la commission des lois. Trèsbien l

M. Maurice Pourchon, rapporteur spécial. En ce quiconcerne maintenant la situation budgétaire et fiscale del'outre-mer, une réflexion s'impose aujourd 'hui à nous tous.Je l'ai signalé à la commission des finances, qui a bien vouluretenir ce voeu . Mais je voudrais m'attarder un peu sur ceproblème.

En premier lieu, il est clair que les systèmes de prélève-ments à l'importation, tel que celui de l'octroi de mer, relè-vent d'une des plus anciennes formules fiscales et douanières.Ils traduisent par trop la dépendance économique et socialede l'outre-mer vis-à-vis de l'extérieur et donc de la métropole.

Au niveau communal, la situation n 'est guère plus bril-lante . La crise des finances publiques, de la Polynésie parexemple, à laquelle l'Etat a cherché à apporter des Temèdesd'urgence au cours de cette année, s'es, ainsi diffusée à l'en-semble des communes qui, à défaut de recettes particulièresd'un volume suffisant, dépendent qns si exclusivement destransferts de l'Etat et du territoire . Leur endettement atteint,en outre, des niveaux supérieurs à celui des communesmétropolitaines.

La commission des finances pourrait utilement engager uneréflexion approfondie sur différents thèmes : l 'évolution fis-cale de l'outre-mer comme l'efficacité des aides à l'investisse=ment . Une approche prospective pourrait sans doute êtredégagée sur la base d'un bilan. Le cadre de la mission d'in-formation, tel qu'il existe à la commission des finances,semble tout à fait approprié à ce genre d'examen . Il faut agird'autant plus vite que les échéances communautaires se préci-sent . Le programme P.O .S .E .I .D .O .M. n'est-il pas entré envigueur ?

Cette réflexion serait, bien sûr, indissociable de l'étude dessuites à donner aux propositions du rapport Ripert sur l'éga-lité sociale et le développement économique des départe-ments d'outre-mer.

De même, votre rapporteur souhaite que soient désormaissérieusement et donc plus précisément effectuées des étudessur le système de formation des prix outre-mer . Une plusgrande rigueur conceptuelle suppose d 'ailleurs une extensiondes champs d'investigation aux processus de dilution localedu pouvoir d'achat des agents économiques.

Enfin, il est nécessaire de planifier dès à présent les étapesde l'alignement des prestations familiales sur les niveauxmétropolitains . Le Gouvernement s'est engagé sur cetobjectif. Il conviez :* de dire ce qui est possible à court terme,et même de ne pas cacher les difficultés de mise en place, àmoyen terme, de certaines extensions . Vous avez récemmentesquissé une tentative de clarification, monsieur le ministre.Nous serons donc attentifs à vos explications . Les débats quis'engageront très bientôt sur le devenir de notre protectionsociale à l'occasion de l'examen du projet de C .S .G. serontpour nous une excellente occasion de vérifier ce que nouspouvons et ce que nous devons faire pour l 'outre-mer.

Monsieur le ministre, la commission des finances, de l'éco-nomie générale et du Plan a examiné le rapport que je lui aisoumis . Elle en a conclu que votre projet de budget était bonet méritait qu'elle vous accorde sa confiance en donnant unavis favorable à l 'adoption des crédits de l ' outre-mer.(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président . La parole est à M . René Drouin, rappor-teur pour avis de la commission de la production et deséchanges.

M. René Drouin, rapporteur pour avis. Monsieur le prési-dent, monsieur le ministre, mes chers collègues, retracer, pen-dant les quelques minutes dont je dispose, l ' évolution écono-mique des départements et territoires d'outre-mer, tient de laGageure . Je tenterai cependant de relever le défi et de vousfaire part des enseignements que je tire de la situationactuelle, en vous demandant de pardonner à un tout nouveaurapporteur plongé dans le concert des spécialistes que vousêtes depuis fort longtemps, de négliger, dans son propos, cer-tains détails importants pour souligner les orientations essen-tielles.

Je traiterai des départements d'outre-mer d'abord.Globalement, les engagements du Gouvernement pris dans

le cadre de la loi de programme ou de la convention deMayotte ont été honorés . La politique de libéralisation des

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2° SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

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transports, notamment, s 'est poursuivie selon le programmeétabli . A partir de ce constat, la poursuite des efforts doits'orienter dans quatre directions.

La première concerne la poursuite de l'égalité sociale et dudéveloppement économique.

La notion de parité sociale globale, prévue par la loi deprogramme, est trop restrictive ; le but à atteindre doit êtrel 'égalité sociale . La simultanéité du versement du R .M .I . dansles départements d 'outre-mer et en métropole a été un pre-mier élément . Le second, constitué par la commission sur« l'égalité sociale et le développement économique », créee àla suite du rapport Ripert, doit permettre, après les consulta-tions en cours, d'apporter des solutions durables afin decréer des emplois pour contenir l'accroissement du chômageet, si possible, le faire régresser.

C'est pourquoi il convient d'insister sur la formation ini-tiale et professionnelle qui, en limitant l'appel à la main-d'oeuvre extérieure, devient un facteur de productivité favo-rable à la croissance économique.

La seconde direction est relative à l'amélioration desconditions d'insertion des départements d'outre-mer dans lemarché unique européen.

Comme l'a fort justement rappelé le rapporteur pour avisde la commission des lois « la perspective du marché uniquede 1993 comporte, pour les départements d'outre-mer, quisont intégrés dans l'espace européen, des incidences généra-trices d'inquietudes que les élus de ces départements ontexprimées à travers un grand nombre d'interventions, dequestions orales ou écrites et de propositions de loi . »

Outre les problèmes posés par l'avenir de certains produits,comme le rhum ou la banane, ou par celui de l'octroi demer, il s'agit plus généralement de savoir comment l'Europetiendra compte des handicaps spécifiques des départementsd'outre-mer dus à leur insularité et à leur éloignement - leprogramme POSEIDOM semble la bonne réponse - ou àl'inégalité des conditions de concurrence avec les pays A .C .P.voisins.

L'évolution favorable de ces questions est vitale pour ledevenir des départements d'outre-mer. Certes, la Commissiondes communautés européennes a tenu compte des handicapsspécifiques des départements d'outre-mer dans le cadre descrédits communautaires réservés au financement des pro-grammes de développement régional . A cet effet, elle aretenu le principe d'un programme d'initiative communau-taire en faveur des 11es éloignées . Ce programme Regis doitcompléter les financements communautaires déjà acquis auniveau des cadres communautaires d'appui.

Par ailleurs, des travaux ont été menés en 1990 entre laCommission et les responsables socio-économiques desdépartements d'outre-mer, en vue de définir le contenu desréformes à mettre en place dans la perspective du marchéunique et intéressant les productions des départementsd'outre-mer ou leur fiscalité . Je souhaite, monsieur leministre, que les résultats obtenus soient à la hauteur desambitions et des besoins.

La troisième orientation concerne la réalisation desobjectifs des contrats de Plan.

Cette procédure a été l'occasion de définir des orientationsprécises et des actions en partenariat avec les régions d'outre-mer et de mettre en place, au niveau tant de l'Etat que de larégion, plusieurs échelons de responsabilité : comité intermi-nistériel d'aménagement du territoire pour les enveloppesfinancières, préfets pour la mise en œuvre, exécutifs régio-naux pour l'application.

Tous les contrats de Plan sont aujourd'hui signés, ce quidevrait permettre d'approfondir la réflexion dans chaquedépartement sur les conditions de la croissance, en particuliersur les investissements publicL qui la favorisent . Ne serait-cepas l'occasion, monsieur le ministre, d'accélérer la mise enplace d'un observatoire économique et social des départe-ments d'outre-mer dont la nécessité se fait de plus en plussentir ?

La quatrième direction est la mise en place et le dévelop-pement d'une véritable politique de coopération régionale.

Cette politique est d'autant plus nécessaire que leséchanges commerciaux entre les départements d'outre-mer etles pays A.C,P. sont faiblee et surtout déséquilibrés . Lesdépartements d'outre-mer importent trois fois plus qu'ils

n'exportent dans ces pays, dans la zone Caralbe comme dansl'océan Indien . Ils ont comme partenaires des pays en voiede développement, manquant de devises, avec un pouvoird'achat limité et qui, malheureusement pour nous, ont mis enplace des restrictions aux importations.

On arrive ainsi à une situation dans laquelle les départe-ments d'outre-mer, membres à part entière de la C .E .E., sontcontraints de laisser entrer, sans réciprocité, des produits pro-venant de pays A .C .P., alors que, dans le même temps, leursproduits sont lourdement taxés, voire parfois interdits.

Certes des actions sont entreprises, soit dans le cadre de lacommission de l ' océan Indien, pour La Réunion, soit danscelui de la conférence sur la coopération régionale dans lesCaraïbes et la Guyane.

Les axes d'une politique globale de coopération tendant àmieux insérer les départements d'outre-mer dans leur envi-ronnement régional ont été définis et reposent sur trois pointsessentiels : une coopération accrue entre les départementsd ' outre-mer et les pays voisins avec la création d'un fondspour la coopération régionale ; une coordination des rela-tions avec le pays de la zone et les organisations régionalesexistantes ; un renforcement des liens avec la C .E.E. par lebiais d'accords commerciaux négociés entre la C .E .E . et lesEtats A.C .P.

Toutes ces mesures sont bonnes, mais elles ne pourro:porter pleinement leurs fruits que si deux contraintes sontlevées : la définition des contreparties aux facilités d'accèsqui seront demandées pour les produits des départementsd'outre-mer, sachant que les productions A .C .P. accèdent aumarché communautaire sans condition de réciprocité ; lacapacité des entreprises locales à satisfaire, en termes de qua-lité, de délai de livraison et de prix, les demandes des paysde la zone.

Une politique de coopération régionale reposant sur desprincipes équitables et sur des actions bien conduites devraitdéboucher sur des économies complémentaires, mais nonconcurrentes.

J'en arrive à la deuxième partie de mon propos, relativeaux territoires d'outre-mer.

La situation économique des territoires d'outre-merdemeure soumise aux évolutions de l'environnement interna-tional et aux relations financières et commerciales qu'ilsentretiennent avec la métropole.

A partir de ce constat, et bien que ne faisant pas partie dela Communauté économique européenne, les territoiresd 'outre-mer voient, avec une certaine inquiétude, la mise enplace du grand marché de 1993, d'autant que cette année doitêtre renégocié le régime d'association mis en place le30 juin 1986 entre les pays et territoires d'outre-mer et laC.E.E . dans le prolongement de la convention Lomé IV.

En effet, malgré une nature juridique différente de celledes pays A.C.P., et du fait que les pays et territoires d'outre-mer entretiennent des liens particuliers avec leur métropole etpar extension avec l'ensemble de la C .E .E ., il existe dia res-semblances entre les deux régimes.

Les pays et territoires d ' outre-mer connaissent, comme uncertain nombre de pays A .C .P ., des contraintes liées à l'insu-larité qui les empêchent de tirer profit de toutes les possibi-lités offertes par le régime d'association . Par ailleurs, l'évolu-tion économique et sociale des territoires d'outre-mer se situedans le contexte de ces conventions que la Communauté éco-nomique européenne signe depuis longtemps avec les EtatsA.C .P. pour contribuer, selon les termes consacrés, à lasolution des problèmes internationaux d'ordre économique,social, intellectuel et humanitaire, conformément aux aspira-tions à un nouvel ordre économique plus juste et plus équi-libré ».

Dans ce contexte, la négociation pour une nouvelle déci-sion d'association des pays et territoires d'outre-mer à laC.E .E. constitue une étape importante et significative . Je mefélicite, monsieur le ministre, que cette négociation se soitengagée selon un processus dont l'originalité mérite d'êtresoulignée . C'est en effet la première fois dans l'histoire desrelations entre les pays et territoires d'outre-mer et la C.E.E.qu'en préliminaire aux négociations elles-mêmes les représen-tants élus des territoires d'outre-mer ont eu la possibilité des'exprimer ensemble et directement auprès des services de laCommission des communautés chargés d'élaborer le projet dedécision qui sera soumis ensuite au Conseil .

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2 e SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

Lors des deux rencontres, à Bruxelles et à Paris, ces repré-sentants ont pu ainsi préciser à leurs interlocuteurs de laC.E .E . leurs préférences sur les objectifs à atteindre dans lecadre de la nouvelle association, compte tenu à la fois dubilan de la précédente décision, des résultats des négociationsde Lomé et des répercussions de l'établissement du marchéunique sur leurs débouchés en Europe continentale.

Ces entretiens nous ont ainsi permis, monsieur le ministre,de remettre à la Commission un document de synthèse conte-nant les orientations souhaitées par les territoires d'outre-meret portant sur cinq points essentiels.

Premièrement, la politique d'aide de la C .E .E . doit corres-pondre à l'accroissement des responsabilités des autoritéslocales.

Deuxièmement, la coopération régionale, notamment avecles pays A .C .P., doit être renforcée afin de surmonter leshandicaps liés à la structure économique des territoiresd'outre-mer.

Troisièmement, une gestion plus souple des dérogationsaux règles de l'origine doit être mise en place afin d'amé-liorer les débouchés des produits des territoires d'outre-mersur le marché communautaire.

Quatrièmement, le droit d'établissement doit être adapté àla politique de promotion sociale et de soutien à l'emploi despopulations.

Cinquièmement, enfin, la ventilation des crédits du fondseuropéen de développement en faveur des aides non pro-grammables doit être mieux répartie.

Je souhaite, monsieur le ministre, que les voeux formulésdans ce document de synthèse, que je viens brièvement derappeler, soient pris en considération - si possible dans leurintégralité - lors de l 'établissement des propositions quiseront soumises au Conseil en vue du prochain accord d'as-sociation.

Ce rapide examen de la situation économique des départe-ments et territoires d'outre-mer m'a permis de montrer que,globalement, le niveau de développement s'était amélioré.C'est pourquoi toutes les réformes en cours d'élaboration oud ' application sont vitales : les contrats de plan pour affermirla décentralisation ; le programme d'options spécifique desdépartements d 'outre-mer pour compenser les handicapsnaturels ; la mise en place des aides apportées par les nou-veaux fonds structurels pour déboucher sur une économiesaine ; des actions précises pour développer l'économie calé-donienne ; une organisation mettant en place une véritablecoopération régionale.

Cet ensemble de mesures, en traduisant la reconnaissanceeuropéenne du rôle international des départements et terri-toires d 'outre-mer, en fait des bases pour le développementdes relations commerciales avec les pays voisins, des relais dela coopération de la France avec les pays du tiers monde etaussi des pôles de rayonnement de la francophonie.

M. André Thlen Ah Koon et M . Henry Jean-Baptiste.Très bien t

M . René Drouln, rapporteur pour avis . te suis conscientque des difficultés subsistent et que l'insertion européennedemande encore beaucoup d'efforts . Mais je crois fermementque cet objectif sera atteint, car la spécificité de ces départe-ments conduira à la mise en place de politiques adaptées . Jedemeure également convaincu que rien ne sera possible si leshabitants et leurs élus ne prennent pas en main leur propredestin et si l'utilisation des crédits légitimement mis à leurdisposition n'est pas rigoureuse et rationnelle.

Vous avez dit récemment à cette tribune, monsieur leministre, que « les départements d'outre-mer disposaient,gràce à leur appartenance à la République, gràce aussi à leurrichesse humaine et à leurs efforts, d'atouts considérablespour relever les défis qui s'adressent à eux . » Vous auriez pule dire aussi pour les territoires d'outre-mer.

C'est pourquoi, face à cette évolution économique favo-rable et à l'augmentation des moyens financiers y afférents,la commission de la production et des échanges a donné unavis favorable à l'adoption des crédits des départements etterritoire& d'outre-mer. (Applaudissements sur les bancs desgroupes socialiste et de l 'Union du centre .)

M. te président . La parole est à M . Jérôme Lambert, rap-porteur pour avis de la commission des lois constitution-nelles, de la législation et de l 'administration générale de laRépublique, pour les départements d'outre-mer.

M. Jérôme Lambert, rapporteur pour avis. Monsieur leministre, mesdames, messieurs, en tant que rapporteur pouravis du budget des départements d'outre-mer au nom de lacommission des lois, je ne tiens pas, dans cette présentation,à vous infliger trop de chiffres, car vous pourrez toujours lesconsulter dans mon rapport. Je souhaite m'attacher auxpoints qui me semblent les plus importants, à savoir l ' enve-loppe budgétaire par elle-même, le développement écono-mique et social et la question de la place des départementsd'outre . mer dans le marché européen unifié en 1993.

Avec une enveloppe budgétaire en augmentation substan-tielle, la politique de développement de l'outre-mer est main-tenue en 1991 au rang des priorités gouvernementales . Eneffet, pour 1991, le montant de la dotation avoisinera,recherche comprise, 2,2 milliards de francs, soit une augmen-tation de 5,45 p . 100 par rapport à la dotation de 1990,laquelle marquait un accroissement de 3,46 p . 100 par rap-port au budget de 1989.

La progression des dépenses en capital traduit la prioritéplus affirmée de l'action économique et sociale dans lesdépartements d'outre-mer et l 'augmentation globale descrédits de paiement et des autorisations de programmemontre que l'effort budgétaire en 1991 portera principalementsur le F.I .D .O .M., dont l'action est destinée à concourir audéveloppement économique de Poutre-mer.

Je pense que l'accroissement significatif de cette dotationtraduit la détermination du Gouvernement de répondre auxbesoins les plus urgents, d'autant plus que l'effort réelconsenti pour l'outre-mer dans l'ensemble du budget 1991représentera, hors D .G.F., 29,9 milliards de francs, soit uneprogression de 5,20 p . 100 par rapport à 1990.

Le montant des dépenses ordinaires évolue peu :1,6 p. 100. Parmi les crédits du titre III, seuls ceux qui serontconsacrés à la modernisation de l'administration enregistrentune progression . Ce processus passe également par le renfor-cement des moyens de fonctionnement de l'administration.C'est pourquoi les crédits de vacations seront revalorisés.

Le projet de budget prend aussi en compte les consé-quences financières du protocole d ' accord sur la rénovationde la grille des classifications et des rémunération des fonc-tionnaires en vue de revaloriser les rémunérations les plusbasses et d'offrir un meilleur déroulement de carrière, confor-mément aux instructions du Premier ministre.

Ces quelques chiffres et orientations budgétaires indiquentl'ampleur de l'effort de l'Etat envers l'outre-amer, effort ren-forcé dans le cadre du développement économique . Danscette perspective, le F .I .D .O.M., destiné à assurer le dévelop-pement économique des départements d'outre-mer atteint468,5 millions de francs en autorisations de programme et311 millions de francs en crédits de paiement, s'agissant de lasection générale, et 163,4 millions de francs en autorisationsde programme et 135,4 millions de francs en crédits de paie-ment, pour ce qui concerne la section décentralisée . Lescrédits de paiement de cette dernière connaissent une trèsnette progression, de 170 p . 100.

Ce renforcement du F.I.D.O.M. décentealisé témoigne del'amélioration de la consommation des crédits consécutive àla gestion directe des opérations par les collectivités locales.

Le F.f .D .O .M. général permettra, notamment, de financerles opérations et programmes suivants : 136,3 millions defrancs seront consacrés à la dernière phase d 'exécution de laloi de programme dans les D .O .M. et les collectivités territo-riales de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte ; 60 millionsde francs seront réservés au financement des primes d'équi-pement et d'emploi.

on ce qui concerne les contrats de plan, aujourd'hui toussignés, on observe que le total des financements contractua-lisés de l'Etat s'élève à 2 255 millions de francs pour lesD .O .M., Mayotte et Saint-Piere-et-Miquelon.

Les principales lignes d'actions de ces contrats sont les sui-vantes :

Premièrement, la formation et la recherche : 308 millionsde francs sont accordés à titre exceptionnel aux établisse-ments scolaires et 118,5 millions de francs sont consacrés auxétablissements universitaires . La formation professionnelle est

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financée à hauteur de 143,5 millions de francs, ce qui traduitun effort remarquable en ce domaine . La recherche se voitdotée par l'Etat de près de 50 millions de francs.

Deuxièmement, le développement de l'emploi local : leX• Plan est l'occasion de la mise en place des F .R.I .L .E .,fonds régionalisés d'aides aux initiatives locales pour l'em-ploi . Globalement, 712 millions de francs sont affectés parl'Etat aux secteurs économiques, dont 577 millions de francsà l'agriculture et au développement rural.

Troisièmement, l'amélioration du cadre de vie : le dévelop-pement social des quartiers occupe la place prépondérantedans les moyens dégagés pour l'amélioration du cadre de vieavec un total de 260 millions de francs.

Quatrièmement, les infrastructures et l'environnement :249,5 millions de francs sont consacrés à la construction deroutes et de rocades urbaines ; 88,5 millions de francs sontaffectés à l'aménagement des infrastructures aéroportuaires et40,5 millions de francs à l'amélioration des infrastructuresportuaires et à la poursuite d'une politique de désenclave-ment des collectivités d'outre-mer ; 145 millions de francsenfin traduisent les préoccupations nouvelles qui se font jouren matière d'environnement et de protection contre les crues.

Après deux ans, le taux de réalisation financier de cescontrats atteint 39 p . 100 dans les D.O .M.

Dans le cadre du développement économique et socialdes D.O .M., le rapport Ripert apporte des propositionsimportantes que le ministre a d'ores et déjà acceptées : élar-fiiesement du marché des entreprises des trois départementsfrançais d'outre . mer et des Antilles et simplification des for-malités, conclusion d'accords commerciaux avec les Etats dela région, amélioration des conditions de financement desentreprises, lutte contre les pratiques anticoncurrentielles,effort particulier dans le domaine de l'éducation, coordina-tion des formations professionnelles, etc.

Les entretiens que j'ai pu avoir avec des responsablessocio-économiques ont fait ressortir le caractère « mobilisa-teur » de ce rapport, qui a été bien accueilli, même si cer-taines propositions doivent faire l'objet de nouvelles concer-tations avant d'être mises en application.

En matière d'égalité sociale, la loi du 1•r décembre 1988,relative au revenu minimum d'insertion, a prévu que cettemesure s'appliquerait dans les départements d'outre-mer . Or,en dépit de certains dérapages, notamment à la Réunion,auxquels il est d'ailleurs porté remède, la mise en place duR.M .I . dans les départements d'outre-mer présente bien desaspects positifs : en tout premier lieu, couvrir des personnesqui restaient jusqu'alors exclues de tout dispositif de protec-tion sociale.

L'article 51 de la loi du l•* décembre 1988 a prévu l'appli-cation aux départements d'outre-mer du revenu minimumd'insertion « selon les modalités particulières d'application ...dans le respect des principes mis en oeuvre en métropole ».

Tel a été l'objet du décret du 20 janvier 198/ qui a prévuque le montant du R .M .I . dans les D.O .M. serait égal à80 p. 100 du montant fixé en métropole, afin de tenir comptedu rapport moyen existant entre le S .M .I .C. des D .O .M. etcelui de la métropole.

Les droits au R.M .I . ont été ouverts le ler janvier 1989dans les D.O .M . Un an plus tard, on comptait 72 000 bénéfi-ciaires pour une population de 1,458 million d'habitants . Lenombre d'allocataires devrait y être de l'ordre de 90 000 à lafin de l'année 1990.

En matière d'insertion, le dispositif et les « outils » -contrats de retour à l'emploi, activités d'insertion, contratsemploi solidarité, mesures en faveur du logement des plusdémunis notamment - sont les mêmes en métropole que dansles D.O.M. Ils y ont été mis en place parallèlement . LesD .O .M . ont disposé de programmes départementaux d'inser-tion dès 1989 ; les C.D .I ., les C.L .I . et les cellules d'appuifonctionnent comme en métropole . La différence essentielleentre les D.O.M. et la métropole dans ce domaine résidedans l'importance des crédits disponibles pour mettre enœuvre des actions d'insertion dans ces départements . Enmétropole, comme dans les D .O .M., conformément à l'ar-ticle 41 de la loi du 1• F décembre 1988, relatif au financementdes actions nouvelles destinées à permettre l'insertion desbénéficiaires du R .M .I ., les départements sont tenus d'inscrireannuellement dans leurs budgets un crédit au moins égal à20 p . 100 des sommes versées par l'Etat au titre de l'alloca-tion différentielle .

En 1989, ces inscriptions ont, au total, dépassé de 200 mil-lions de francs les D .O .M. contre un peu plus de 1 milliardde francs dans l'ensemble de la métropole.

En matière de priorités, même si ces problèmes se posentégalement en métropole, l'accent a été mis dans les D .O.M.surtout sur le logement, mais aussi sur l'alphabétisation et surla formation professionnelle pour faire face à des phéno-mènes qui y ont une plus grande ampleur.

Si on devait faire un bilan, on pourrait dire que les bénéfi-ciaires du R.M.I . sont majoritairement des personnes ou desfamilles avec enfants ; viennent ensuite des personnes isoléessans enfant avec une nette prédominance des hommes. Ilssont jeunes : 61 p . 100 sont âgés de moins de quarante ans,dont les trois quarts sont âgés de moins de trente-cinq ans.

L'allocation différentielle moyenne versée en 1989 s'estélevée à 1 589 francs . En juin 1990, elle était passée à1 976 francs pour ceux qui disposent de prestations familialeset à 1 483 francs pour ceux qui n'en ont pas. L'engagementfinancier de l'Etat pour cette allocation a été de 712 millionsde francs en 1989, mais il s ' élevait déjà à 625 millions defrancs au cours du premier semestre de 1990.

Concernant l'insertion, on peut établir qu'au titre de lacréance de proratisation 1989, 223 millions de francs ont étédélégués au préfet. Ces crédits sont affectés à trois typesd'actions d'insertion : à l ' insertion sociale à hauteur de5 p. 100, à l ' insertion par le travail pour 5 p. 100, et par lelogement pour 90 p . 100 des crédits.

Il convient en outre de noter qu'à la Réunion une mesureexceptionnelle a été prévue pour favoriser l'embauche saison-nière d'allocataires du R.M.I . pour la campagne de la coupede la canne à sucre : l'Etat prendra à sa charge les cotisa-tions patronales des personnes concernées . Pour financercette mesure une somme de 10 millions de francs sera pré-levée sur la créance de proratisation de ce département pourfavoriser l'embauche de 1 500 personnes.

Sur le détail de la mise en place du R .M.I. dans chaquedépartement d'outre-mer, je laisse le soin à ceux que celaintéresse de l'examiner dans mon rapport.

En matière sociale, le problème du logement social dansles départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et àMayotte se pose encore aujourd'hui en termes de pénurie,d'insalubrité et de précarité.

Pour répondre aux besoins actuels liés à la fois à l'accrois-sement démographique, au renouvellement du parc ancien età la résorption de l'habitat insalubre, il faudrait pouvoirconstruire 15 000 logements aidés par l'Etat par an.

Pour répondre à l'ampleur et à la diversité des besoins, lescrédits d'Etat consacrés au logement, regroupés sur une lignebudgétaire unique ont été en constante augmentation ; pas-sant de 1 milliard de francs en 1990, ils devraient atteindre1,134 milliard de francs en 1991 . Les crédits de la ligne bud-gétaire unique abondés par la créance de proratisation duR.M .I . devraient permettre en 1990 d'engager la réalisationde 13 000 logements nouveaux.

Pour améliorer encore les conditions de mise en oeuvre decette politique ambitieuse du logement social, l'adapter aucontexte géographique et socio-économique des D.O.M. etpréparer ainsi la suite de la loi de programme du31 décembre 1986 dont les mesures arrivent à échéanceen 1991, une phase de réflexion d'évaluation des actionsengagées et d'analyse des opérations réalisées est organiséedans chaque D .O.M., dans le cadre des assises locales del'habitat.

Enfin, j'en arrive au dernier point de mon intervention, àsavoir la place des départements d'outre-mer dans le marchéeuropéen unifié de 1993.

Cette question continue à alimenter l'inquiétude de noscompatriotes, ce qui est tout à fait légitime puisque l'intégra-tion des D.O .M. dans l'espace européen peut être à même demodifier les circuits de production et de commercialisationdes productions locales.

En effet, en premier lieu, les D .O.M., bénéficiaires de poli-tiques de développement économique et de mesures favo-rables, pourraient être contraints de réexaminer certaines deleurs particularités.

En second lieu, les D .O .M . risquent d'être confrontés à desdifficultés qui ne résultent pas de leur intégration à l'espaceeuropéen, mais de l'appartenance même de la métropole à laCommunauté, dans la mesure où le marché métropolitain ne

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pourra plus être réservé, par diverses dispositions réglemen-taires, aux productions traditionnelles des D.O .M. De ce fait,il est important que des mesures soient prises pour protégerles principales productions des D .O.M. dans le cadre dumarché européen. Pour illustrer mon propos, je prendrail'exemple du rhum qui représente environ 3 000 emplois etdont l'ensemble de la filière canne-sucre-rhum emploie50 000 personnes dans les D.O .M. Si le régime fiscal particu-lier, lui permettant de ne rapporter que la moitié des droitsd'accises et de retrouver une forme d'organisation du marchémettant en œuvre la préférence communautaire, n'est plusappliqué, le rhum entrera en concurrence directe avec celuides pays A .C .P.

En ce qui concerne la banane, des dispositions sont actuel-lement à l'étude pour pallier les difficultés qu'entraînera l ' ou-verture du marché unique européen de 1993 . Vous pourreztrouver le détail de ces mesures dans mon rapport.

S 'agissant des autres produits agricoles, le programmed'options spécifiques à l 'éloignement et à l'insularité desD.O.M., P.O .S .E .1 .D.O.M., adopté en décembre 1989 par leconseil des Communautés européennes, prévoit la mise enplace de mesures de soutien en leur faveur . Ces mesurespourront prendre la forme d ' aides à la production, à la trans-formation et à la commercialisation des produits . Elles serontégalement destinées à pallier les effets de la situation géogra-phique exceptionnelle des D.O.M. en améliorant les condi-tions d ' approvisionnement, notamment en exonérant des pré-lèvements à l 'importation les céréales destinées à laproduction animale et les produits intermédiaires pour l'ali-mentation ce qui entraînera une baisse des prix pour le pro-ducteur et donc un gain de compétitivité.

En ce qui concerne les produits industriels, ils ne bénéfi-cient pas d ' une protection spécifique communautaire dans lesens où ces produits seraient protégés par des quotas permet-tant d'assurer un écoulement à un prix garanti.

En revanche, la commission des Communautés euro-péennes a tenu à renforcer les entreprises des D .O.M. enmobilisant, par l ' intermédiaire des cadres communautairesd'appui, des crédits des fonds structurels en faveur du secteurproductif. Au total, pour l 'ensemble des D .O.M. et pour lapériode 1990-1993, près de 400 millions de francs serontoctroyés directement au secteur de l'industrie, de l'artisanatet des services.

L'aide communautaire est un facteur essentiel pour ledéveloppement économique et social des D .O.M.

Les crédits communautaires octroyés aux départementsd'outre-mer proviennent essentiellement des fonds structurelseuropéens fonds européen de développement régional,fonds social européen, fonds européen d'orientation et degarantie agricole, section orientation . Or depuis la réformedes fonds structurels entrée en vigueur le l « janvier 1989, uneffort particulier est entrepris pour renforcer la cohésion éco-nomique et sociale de la Communauté afin que la réalisationdu grand marché en 1993 n ' accroisse pas les disparités inter-régionales.

A cet effet, la Communauté a défini des objectifs priori-taires d'intervention des fonds en faveur des D .O.M. Le pre-mier est de rattraper les retards structurels des régions moinsfavorisées un deuxième est de combattre le chômage delongue durée ; un troisième est de faciliter l'insertion profes-sionnelle des jeunes.

Le 31 octobre 1989, la Commission européenne a adoptéles cadres communautaires d 'appui des D .O.M. Ces docu-ments décrivent les axes prioritaires du développement éco-nomique et social de chaque région et déterminent pour lapériode 1989 . 1990 des dotations communautaires ainsi queles crédits nationaux qui seront associés.

Ces subventions, conjuguées avec des crédits nationaux et,dans certains cas, des prêts de la banque européenne, servi-ront à financer, selon des montants variables pour chaqueL .O .M . : le désenclavement - routes, ports, aéroports, télé-communications - ; le développement de l'industrie, de l'arti-sanat et des services ; l'agriculture et le développement rural ;l'investissement et la valorisation de nos ressources touris-tiques ; les infrastructures de support : eau, énergie, la pro-tection de l'environnement, la recherche ; la formation et lavalorisation des ressources humaines.

D'autres crédits sont mobilisés par des initiatives commu-nautaires telles que « Stride », programme de recherches, ouENOVEQ, programme d'environnement régional .

Si une meilleure intégration des D .O.M. dans l'espaceeuropéen est nécessaire, une politique régionale semble indis-pensable . En effet, les échanges commerciaux entre lesD.O.M. et les Etats A.C .P. sont faibles et déséquilibrés, dansla mesure où les départements d 'outre-mer importent environtrois fois plus qu'ils n'exportent dans ces pays . D'unemanière générale, les économies des D.O.M. et des Etatsenvironnants sont plus concurrentes que complémentaires,fondées sur la production et la transformation de produitstropicaux.

De ce fait, les axes d'une politique de coopération régio-nale ont été déterminés dans le cadre de la conférence quis'est tenue à Cayenne les 5 et 6 avril 1990 et qui a permisune large concertation entre les représentants de l'Etat, lesparlementaires, les présidents des conseils généraux et régio-naux et les présidents des chambres consulaires de Guade-loupe, de Guyane et de Martinique.

Voilà les différents points que je souhaitais présenter et quifont l'objet de développement dans le rapport que vous avezà votre disposition . J'oubliais simplement d'évoquer la ques-tion de l'octroi de mer qui est, elle aussi, étudiée . Vous trou-verez dans mon rapport le point de la réflexion au niveaueuropéen sur cet important sujet, le ministre nous ayantassuré qu ' il nous ferait prochainement des propositions dansce domaine.

En conclusion, le projet de budget des D.O .M. pour 1991s'inscrit dans une politique positive pour les départementsd'outre-mer, une politique tournée vers ia prise en compte deleurs difficultés et susceptible d ' assurer au mieux leur déve-loppement . C'est la raison pour laquelle le budget desD .O .M. a été accepté par la commission des lois . (Applaudis-sements sur les bancs du groupe socialiste.)

M . le président. La parole est à M . Jean-Paul Virapoullé,rapporteur pour avis de la commission des lois constitution-nelles, de la législation et de l'administration générale de laRépublique, pour les territoires d ' outre-mer.

M . Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis. Monsieurle président, monsieur le ministre, mes chers collègues, laspécificité de la commission des lois nous a conduits à pré-senter quelques remarques sur les moyens budgétaires pro-prement dits du ministère des départements d'outre-mer, maiségalement à analyser l'évolution des institutions nouvelles quiont été mises en œuvre en Nouvelle-Calédonie, en Polynésiefrançaise et qui le seront demain, si possible, à Wallis etFutuna.

S'agissant de notre analyse budgétaire, je remarque que lescrédits accordés aux territoires d ' outre-mer sont simplementreconduits même si le budget de l'ensemble du ministère pro-gresse de 5,45 p. 100, soit un peu plus que le budget del'Etat . Il retrouve ainsi son rang prioritaire qui avait étéaffirmé par le Gouvernement en 1987 et qu'il avait perdu l'andernier.

Monsieur le ministre, si l 'on compare les crédits prévuscette année au budget de cc ministère à ceux exécutés l'andernier, la somme est légèt ment inférieure : 889 millions defrancs cette année contre 89 : millions de francs l'an dernier.Vous me direz que cette diminution est due à la prise encharge des greffes des tribunaux administratifs par le minis-tère de la justice, ce qui équilibre ce léger différentiel.

Monsieur le ministre, vous avez regroupé les actions devotre ministère sur les deux types de collectivités : départe-ments et territoires, ce qui ne facilite pas notre tâche . L'andernier déjà, monsieur le ministre, j'avais relevé cette diffi-culté . Or le « bleu » présente l'ensemble des interventions devotre ministère dans ces deux collectivités de nature institu-tionnelle différente et le rôle légitime du contrôle parlemen-taire s 'en trouve amoindri . A force de répéter, on finit parfaire passer ses messages . Je répète donc, au nom de la com-mission des lois, qu'il serait utile que vous obteniez du minis-tère du budget que la présentation des actions se fasse nfonction des collectivités concernées.

Les crédits sont présentés en six actions : administrationgénérale, services extérieurs dans les départements d'outre-mer et dans les territoires d'outre-mer, collectivités localesdes départements d'outre-mer et des territoires d'outre-mer,action sociale et culturelle conduite dans les départements etterritoires d'outre-mer, action économique, enfin, l'actionrecherche est la seule action spécifique bien détachée : sescrédits augmentent de 2,8 p . 100 .

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Les autres collègues rapporteurs ayant formulé lesremarques sur l'aspect budgétaire, je passerai à l'aspect insti-tutionnel qui intéresse la commission des lois, en commen-çant par la Nouvelle-Calédonie.

En 1989, ce furent les événements dramatiques et l'assas-sinat de Jean-Marie Tjibaou. En 1990, son successeur,M . Néaoutyne, a été désigné . Si le dialogue a repris, il fautnéanmoins constater qu'une forte tension sociale demeure,caractérisée par de nombreuses grèves et de nombreuxconflits sociaux qui portent atteinte au développement écono-mique de ce territoire, voire à son rééquilibrage tant souhaitépar les accords de Matignon . Il faudra donc, monsieur leministre, être très vigilant sur la nécessité d'un véritable dia-logue social en Nouvelle-Calédonie . Je sais qu'il est plusfacile de le demander ici que de le pratiquer sur le terrain,mais c'est une nécessité à laquelle la commission est trèsattachée.

Par ailleurs, en Nouvelle-Calédonie, l'année 1990 a étémarquée par la mise en place des institutions nouvelles quidécoulent de la loi référendaire et des autres lois qui ont étévotées . Les treize arrêtés du haut-commissaire ont permis detransférer les pouvoirs du territoire aux provinces, dans desdomaines aussi variés que la jeunesse et les sports, lesaffaires maritimes, la pêche, les affaires économiques, l'agri-culture, le développement et les travaux publics.

Monsieur le ministre, 3 700 agents ont été transférés . Maison constate que dans la région Nord et des îles Loyauté,celle cù l'on avait précisément besoin de fonctionnaires nou-veaux, des difficultés subsistent pour pourvoir les postes . Jus-qu'à• l ' élaboration de notre rapport, nous avons été informésque de nombreux postes restent vacants . Je voudrais doncsavoir quelle action le haut-commissaire et le Gouvernementenvisagent de conduire pour pourvoir ces postes encore dis-ponibles.

Sur le plan des interventions financières en Nouvelle-Calédonie, il faut savoir qu'un contrat a été conclu entrel'Etat et la collectivité, qui porte sur 355 millions et qui per-mettre de réaliser des actions essentielles pour l'équilibre del'aménagement du territoire, pour l ' action sanitaire et socialeet pour le logement social.

Dans le domaine sanitaire et social, 12,6 millions servirontà financer de nombreuses opérations, notamment dans lesendroits éloignés, destinées à améliorer la qualité du servicesanitaire.

Un plan logement est mis en oeuvre pour lapériode 1990-1995, concernant 8 200 logements.

En ce qui concerne le désenclavement, les projets de routesont à l 'étude et seront réalisés prochainement, mais celui duport reste un peu en rade . Monsieur le ministre, nous aime-rions avoir des informations sur le calendrier de réalisationde ce port.

Les institutions, ainsi que je vous l'ai souligné, sont misesen place assez rapidement.

Le comité consultatif a été mis en place, le comité consul-tatif coutumier également. II doit jouer un rôle essentiel pourfaire évoluer le droit coutumier vers le droit commun, notam-ment en matière de droit rural car c'est l'une des zonesd'ombre de la réussite des accords de Matignon.

La chambre territoriale des comptes est également mise enplace.

L'institut de formation a à son actif des résultats positifssensibles comme la formation des secrétaires de mairie . Il aprévu un programme de formation continue susceptible deconcerner 700 personnes . Ainsi que nous vous l'avons dit encommission des lois, monsieur le ministre, nous souhaiterionsque des jeunes agriculteurs néo-calédoniens, notammentd'origine mélanésienne, puissent faire des stages et prendreainsi contact avec des milieux agricoles métropolitains oudomiens afin de faire évoluer les mentalités sur place.

L'A.D.R .A .F . a un stock de 85 000 hectares de terres et elleen a redistribué 41 000, Cela ne se passe pas trop mal, maisla réussite de la distribution des terres repose sur la qualitédes hommes qui vont y travailler . Ainsi que je le répète lorsde l'examen de chaque budget, c'est de la qualité de l'enca-drement agricole que vous mettrez sur place en Nouvelle-Calédonie et des échanges qui auront heu entre les Néo-Calédoniens mélanésiens et leurs collègues agriculteursmétropolitains que dépendra en partie la réussite du dévelop-pement du monde rural dans ce territoire.

Le budget des provinces subit également un rééquilibragepuisque, pour les dépenses globales de fonctionnement, lebudget de la province Sud est de 775 millions, celui de laprovince Nord de 447 millions et celui des lies Loyauté de261 millions . Le même mouvement s'observe pour l'investis-sement.

S'agissant de la Polynésie, la loi du 12 juillet 1990 confortele statut d'autonomie de ce territoire en renforçant ses com-pétences.

La loi procède également à un rééquilibrage institutionnel.Les compétences du président du gouvernement du territoiresont renforcées. Le caractère présidentialiste du régime semanifeste en particulier par la suppression de la doubleinvestiture, la nomination du Gouvernement étant effective,sauf adoption d'une motion de censure.

D 'autres institutions ont été créées en Polynésie pouraccroître le dialogue : une collège d'experts fonciers et cinqconseils d'archipel pour rompre l'isolement des habitants desarchipels.

Enfin, la commission attache une grande importance à laréforme du régime comptable budgétaire et financier du terri-toire, qui doit être mise en place comme le souhaitent lesélus de cette collectivité.

Pour le développement économique de la Polynésie,trois axes ont été retenus : la formation et la recherche, l ' em-ploi et les infrastructures . La formation parce que c'est bienévidemment de la qualité des hommes de ce territoire dontdépendra son développement . La recherche parce que laFrance a la chance d'être présente dans cette zone, qui peutapporter à la communauté nationale des éléments de réussiteéconomique profitables à tous . L'emploi parce qu'il s ' agit,comme l'ensemble des D.O .M. et des T .O .M., de régions àpopulation jeune qui a donc besoin d'une insertion et nond ' une exclusion professionnelle.

En ce qui concerne Wallis-et-Futuna, permettez-moi derappeler, monsieur le ministre, que les élus de ce territoirevous ont demandé une grande concertation en vue d ' uneréforme leur donnant plus de pouvoirs, une décentralisationaccrue . Nous espérons que le Gouvernement va entamer cedialogue pour aboutir avec eux non seulement à une réformeinstitutionnelle mais aussi à l'octroi de moyens accrus . Cen'est pas parce qu'ils sont très loin et très peu nombreuxqu'ils doivent être les oubliés de la République.

Je ferai miennes, sans les développer, les considérations demes collègues des autres commissions sur les problèmes euro-péens . II est vrai, monsieur le ministre, mes chers collègues,que la grande inquiétude de l'outre-mer, au-delà des pro-blèmes d ' éducation, de formation, d'aménagement du terri-toire, de rupture de notre isolement, concerne les modalitéspratiques de notre intégration à l ' ensemble européen.

Si nous arrivons à nous concerter et à réussir ensemblecette intégration, il naîtra entre nous un climat de stabilitéinstitutionnelle et de confiance fondé sur le progrès écono-mique et l ' épanouissement social . Dans le cas contraire, mon-sieur le ministre, vous ne pourrez pas e,npécher des apprentissorciers ou des aventuriers de prêcher la politique du pire.

La vigilance du Gouvernement, sa détermination doiventrejoindre celles des élus des D .O .M. et des T .O .M. pour quenous soyons intégrés à l'Europe, mais compte tenu de notreultra-périphéricité . (Applaudissements sur les bancs du groupede l'Union du centre et sur plusieurs bancs du groupe socialiste .)

•M . le prdsldent. Mes chers collègues, vingt orateurs sont

inscrits dans ce débat . Votre président se félicite qu'ondéroge à la règle de l'orateur unique par groupe ordinaire-ment observée dans les débats budgétaires . Il ne doute pointque vous ferez tous les efforts nécessaires pour contenir votrepropos, qu ' il sait intéressant, passionnant, dans les limites dutemps qui vous est imparti ou, en tout cas, que vous ne l'ou-trepasserez pas trop 1 (Sourires.)

La parole est à M . Claude Lise.

M . Claude Lise . Monsieur le président, monsieur leministre, mes chers collègues, dans l'ambiance budgétaire quenous connaissons, sur fond de crise du Golfe, il faut d'em-blée reconnaître que le budget du ministère des départementset territoires d'outre-mer a été bien défendu lors des arbi-trages interministériels.

i

à

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ASSEMBLÉE NATIONALE -- 2 . SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

Alors que, l'année dernière, dans un contexte autrementplus favorable, il n'augmrntait que de 3,4 p. 100, il connaîtcette année une progression de 5,45 p. 100, supérieure parconséquent à celle de l'ensemble des dépenses de l'Etat.

A cette première constatation, dont il convient de soulignerle caractère positif, je veux en ajouter trois autres qui appor-tent quelques motifs de satisfaction à l'élu d'un départementd 'outre-mer que je suis.

La première a trait à la part dévolue aux D .O.M. dansl'enveloppe globale de 2,2 milliards de francs . Cette année,nos départements sont mieux traités puisque un peu plus de953 millions de francs leur sont consacrés, soit une augmen-tation d'environ 8,4 p. 100.

La deuxième est relative à la place importante faite auxdépenses en capital par rapport aux dépenses ordinaires.

La troisième concerne le F .I .D .O .M., dont les crédits depaiement augmentent de 21,6 p . 100. Surtout, la tendancecentralisatrice que je dénonçais l'an dernier s ' inverse, puisquec'est la section décentralisée qui progresse le plus.

Tout cela est bien et prouve peut-être qu'un certainnombre de nos interventions ne sont pas demeurées sansécho.

Mais, s'il faut s'en féliciter, et vous en féliciter, monsieur leministre, il faut aussi se garder d'en tirer des conclusionsd'un optimisme excessif, un optimisme que ceux que nous,députés d'outre-mer, représentons ici ne pourraient com-prendre, tant la réalité qu'ils vivent ne cesse de devenirchaque jour un peu plus préoccupante.

Au demeurant, il convient peut-être de souligner pour ceuxqui croient déjà déceler que l'outre-mer est devenu une véri-table priorité nationale pue la part du budget du ministèredes D.O.M.-T.O .M. dans le budget général est demeuréeinchangée - 0,17 p. 100 - et qu'il en est pratiquement demême en ce qui concerne l'effort global en faveur de l'outre-mer à l ' intérieur du budget de l'Etat, avec un taux toujoursde l'ordre de 2,3 p. 100.

En réalité, le vrai problème n'est pas là . Il n'est pas essen-tiellement d'ordre quantitatif mais, pour une grande part,d'ordre qualitatif.

Ainsi que je l'ai déjà affirmé avec force à cette tribune, ence qui concerne les départements d ' outre-mer, il ne s'agit pasuniquement de savoir s'il est possible de toujours dépenserplus - encore que cela sera nécessaire aussi longtemps qu'il yaura des rattrapages à effectuer - il s'agit surtout de sedonner les moyens de dépenser mieux.

Bien sûr, je devine la réaction des néo comme des archéo-jacobins t C 'est précisément, me diront-ils, pour que lescrédits de l'Etat soient dépensés dans les meilleures condi-tions possibles que sont mises en place, depuis les adminis-trations centrales, et avec le concours actif de leurs prolonge-ments locaux, toutes ces procédures d'encadrement et decontrôle que vous ne cessez de critiquer.

Malheureusement, tout le zèle qu'ils déploient dans cetteperspective, en refusant obstinément de comprendre qu'il estdes réalités difficiles à appréhender de très loin ou dans trèspeu de temps, n'aboutit souvent qu'à décourager les initia-tives originales et à freiner le dynamisme des élus et desentrepreneurs locaux.

Imaginez par exemple ce qui aurait pu déjà être fait enMartinique, et certainement ailleurs, en matière de logementssociaux, et sans un centime de plus à la L.B.U., si, depuisdes années, on avait accepté d'admettre qu'en raison du typede relief et du régime des eaux les problèmes de mur desoutènement et de V.R.D. prennent une tout autre dimensionqu'en métropole, si l'on avait compris que, pour les plusdémunis chez nous, il n'y a aucune autre solution que le sur-subventionnement des programmes de construction.

Quelles difficultés n'ai-je pas rencontrées, vous le savez,monsieur le ministre, pour que le conseil général injecte unepartie des sommes qu'il a l'obligation d'inscrire à son budgetdans le cadre du R.M .I . pour agir en ce sens 1

Comme si l'insertion pour des milliers de gens chez nousne commençait pas forcément par l'obtention de conditionsde logement décentes 1 Et comme si, dans un tel domaine etavec les énormes besoins qui existent, l'on avait le loisir defaire de l'action purement individuelle I

Je pourrais, si j'en avais le temps, multiplier les exemples,démontrant ainsi à quel point, à défaut de laisser davantaged'initiative aux .élus, ainsi d'ailleurs qu'aux socio-

professionnels des D.O.M., d'importants dossiers sontcondamnés à l ' enlisement, comme cela s'est passé jusqu'àprésent pour la coopération régionale, ou sont traités sansque soient véritablement pris en compte nos intérêts fonda-mentaux.

C'est ce qui s'est passé au départ avec l'octroi de mer et lapréférence communautaire . C'est ce qui se passe en cemoment avec le dépôt d'un amendement à la loi de finances,terriblement dangereux, qui s'attaque à des dispositions de laloi de défiscalisation dont la suppression aurait des consé-quences extrêmement dommageables pour notre économie.

Et pourtant nos élus ont, me semble-t-il, amplement fait lapreuve de leur capacité, dans la majorité des cas, à répondreau mieux aux besoins souvent très spécifiques et très com-plexes qu'il faut prendre en compte chez nous.

Voyez par exemple, en Martinique, le conseil général ;voyez combien est appréciée sa gestion des collèges, sa poli-tique d'action sociale, de maîtrise des dépenses d'aide médi-cale, de transport, etc.

Voyez le conseil régional, les centaines d'emplois qu'il acréés chaque année, l'oeuvre importante qu'il a déjà accom-plie en matière de formation professionnelle, de lycées, deculture, de logements.

Plus près de nos préoccupations budgétaires d'aujourd'hui,voyez combien progresse la consommation de crédits duF.I .D.O.M. décentralisé dès lors que les collectivités localesen ont la pleine maîtrise !

Je m'arrête là . Vous avez compris. La responsabilité localen'est pas seulement affaire de dignité pour nos départementsd'outre-mer, elle est également une condition indispensable,incontournable de leur développement.

C'est pourquoi le moment est venu, je le crois sincèrement,de repenser la décentralisation dans les D.O.M. avec laconviction que, puisqu'il s'est révélé impossible d'en fairevraiment respecter l'esprit, il est désormais nécessaire d'enmodifier la lettre.

Tout nous y eagage : l'expérience des années que nousvenons de vivre, l'insatisfaction grandissante de flotte jeu-nesse, l'inquiétude croissante de tous devant les échéances,notamment européennes, qui approchent, mais aussi le senti-ment qu'il y a la place maintenant pour un débat serein etune révision tranquille du cadre institutionnel dans lequelnous nous trouvons, un cadre qu'il faut désormais imaginernon plus comme un prêt-à-porter confectionné pour l'en-semble des quatre D.O .M . mais comme un vêtement taillé surmesure pour habiller au mieux chacun d'entre eux.

Dans cette perspective, et préalablement à toute discussionavec les instances gouvernementales, nous devons le plus vitepossible engager dans chacun de nos départements l'indis-pensable débat qui, je l'espère, débouchera sur un très largeconsensus.

Mais, dans le mène temps, nous ne devons pas négliger defaire avancer les importants dossiers qui ont pour nom :

Octroi de mer, et, permettez-moi de vous dire, monsieur leministre, que nous aimerions bien être associés à l'élabora-tion du texte en cours ;

Préférence communautaire, avec actuellement l 'épineusequestion des quotas de bananes ;

Egalité sociale, question sur laquelle j'ai eu l'occasion d'ex-primer déjà certaines inquiétudes ;

Défiscalisation, question sur laquelle je viens égalementd'en exprimer une ;

Coopération régionale ;Marché Antilles-Guyane ;Amélioration du système éducatif, etc.Pour tous ces dossiers complexes qui conditionnent le

développement économique de nos départements, et parconséquent notre avenir, le maître-mot doit être le mot « con-certation », un mot qui en appelle d'ailleurs immédiatementun autre : le mot « partenaire » qui, lui, de toute évidence, neprendra pour nous tout son sens que lorsque, enfin, la res-ponsabilité locale sera vraiment chez nous à la hauteur denos espérances . (Applaudissements sur les bancs du groupesocialiste )

M. l• président. La parole est à Mme Lurette Michaux-Chevry.

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2• SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

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Mme Luestte Michaux-Chevry. En vous entendant toutà l 'heure, mes chers collègues, j'avais l'impression que toutallait bien, que la loi de programme avait eu des effets consi-dérables, puisque c'est la trame, l'essentiel de l'action duGouvernement dans les départements et territoires d'outre-mer.

Pourquoi donc, à la Guadeloupe, le climat social n'est-ilpas au beau ? Des hôtels et des crèches se ferment, des tou-ristes quittent la Guadeloupe pour se rendre à la Martiniquealors que nous attendons l'arrivée de la Route du Rhum etl'inquiétude grandit même si, à juste titre, comme vient de lerappeler à l'instant mon collègue de la Martinique, ClaudeLise, le climat est tout de même au consensus et au dialogue.

Mais pour créer un climat de dialogue, monsieur leministre, il faut d'abord que vous entendiez concerter avectoutes les couches de la population . Or je viens d'apprendreque vous devez vous rendre très prochainement à la Guade-loupe, à une date symbolique, pour aborder le problème del'approfondissement de la décentralisation . Il eût été néces-saire au préalable de nous consulter I

Bref, examinons votre budget.Tout va très bien . Effectivement, le budget des départe-

ments et territoires d'outre-mer augmente de 5,45 p . 100.Mais soyons clairs I Cela ccncerne prioritairement laNouvelle-Calédonie, ce que nous approuvons puisque ce ter-ritoire avait enregistré des retards considérables . Dans lesdépartements et territoires d'outre-mer, vous êtes en traind'instaurer un processus de charité qui est le R .M .I ., et jem'étonne que nous n'ayons pas le courage de dire la vérité,parce que le R.M .I ., c'est la voie sans issue ! Après la forma-tion sur la formation qui conduit à des stages « parking », ilne reste en bout de compte que le R .M.I.

M . René Drouln, rapporteur pour avis . II faut le sup-primer 1

Mme Lucetta Michaux-Chaut . Or si, dans son essence,c'est une mesure sociale, elle devait être exceptionnelle etnon banalisée et distribuée comme 'inc véritable charité.

Que cherchent les départements d'outre-mer ? Non pas uneformation pour la formation, mais une véritable qualificationqui permette d'orienter les jeunes, après l'école, vers la vieactive.

Or, quel que soit le domaine, nous ne créons pas d'em-plois, nous n'incitons pas au travail : nous attendons le verse-ment du R .M.I . comme unique réponse^pu chômage.

J'en viens à l'orientation de votre budget . Je ne discuteraipas de la modernisation du ministère des départements et ter-ritoires d'outre-mer, laquelle était, je crois, indispensable.

S'agissant de l'égalité sociale, vous conservez des critèresqui me surprennent : l'A.N .T. - l'ancien Bumidom - et leS .M.A. Et en ce qui concerne les crédits d'investissement, onparle beaucoup d'autorisations de programme, mais tout unchacun sait en matière budgétaire ce que signifie une autori-sation de programme.

Le F.I .D .O.M . n'est porteur de développement que dans lamesure où des directives formelles sont données dans les dif-férents services de l'Etat pour que les dossiers ne soient pasbloqués . Je vous citerai quelques exemples à cet égard, mon-sieur le ministre.

La filière canne-rhum est sous perfusion . Nous sommes entrain d'examiner comment suppléer à l'économie bananièreque Eruxelles considère comme condamnée et dont le rem-placement qu'on prévoit déjà se traduirait par un véritablechômage technique . Pourquoi veut-on remplacer cette éco-nomie bananière qui est porteuse pour les Antilles de15 000 emplois directs et de 30 000 emplois indirects ? Vousle savez très bien, monsieur le ministre, les cultures de substi-tution telles que les exploitations légumières, fruitières,vivrières forment une économie marginale et nous n'avonscessé de demander tant au ministère de l'agriculture qu'àvous-même, depuis 1988, une agriculture plus performante,comme cela se fait dans de nombreux pays, qui serait attrac-tive pour la jeunesse . Nous attendons toujours une réponse.

A Bruxelles, j'ai entendu beaucoup parler . Mais l'hydro-ponie n'a pas été retenue au P .I .C., et je le regrette . Lescadres communautaires d'appui ne prennent pas en comptecette culture, qui est performante et qui est de nature à être

attractive pour la jeunesse, car elle nécessite une mise sousinformatique, ce qui entraînerait ainsi une formation pournotre jeunesse.

Prenons maintenant le domaine de la pêche. Où ensommes-nous des négociations pour les Caraïbes et à Saint-Pierre-et-Miquelon ? Le Gouvernement entend-il mener unepolitique de fermeté pour que les accords soient respectés, etnotamment la décision concernant Saint-Pierre-et-Miquelonqui doit intervenir en novembre 1991, afin de répondre à lapréoccupation exprimée dans ces régions en matière depêche ?

Que faut-il donc faire ? II faut dynamiser économiquementles départements d'outre-mer . La départementalisationde 1946 a apporté incontestablement un rattrapage au niveausocial.

C'était nécessaire ! Il fallait mettre fin dans les départe-ments et territoires d'outre-mer à ce tissu social dégradé . Onj 'a fait . On l'a fait au mieux ! Mais votre politique actuellesuit la même politique, parce que vous entendez privilégier ladépartementalisation sociale, alors que, dans les départementsd'outre-mer, on ressent de façon très claire une volonté dedéveloppement économique.

La jeunesse des départements d ' autre-mer n'attend pas l'as-sistanat . Elle veut accéder aux moyens modernes de forma-tion . Elle veut accéder à sa dignité . Elle veut gérer lesaffaires de sa région . Et elle s'en sent capable.

De quoi a-t-elle besoin ? On parle beaucoup de coopéra-tion . On a évoqué la rencontre de M . le Premier ministre, enGuyane, avec les parlementaires de l'outre-mer et les prési-dents de région . Comment voulez-vous, monsieur le ministre,parler de coopération régionale, alors que, d ' une part, nousne savons rien des interventions du ministère des affairesétrangères ni de celles du ministère de la coopération, minis-tères qui interviennent tous les deux dans la zone ? En fait,nous ne sommes présents sur aucun marché. Le CARICOMne nous connaît pas I On ne nous connaît pas I Notre zonen'entretient aucune relation avec les pays de la mer desCaraïbes.

L'élément essentiel est le dialogue . Or nous ne parlons pasl'anglais 1 A part avec quelques régions créolophones, commela Dominique, nous sommes handicapés par le langage . Lepremier objectif à atteindre pour réussir le développement dela coopération régionale, c'est celui de la communication IDès l'école il faut, instaurer l ' apprentissage de l'anglais, quipermettra d'entretenir avec les îles de la Caraïbe une commu-nication normale.

Le deuxième élément est lié au développement écono-mique. Nous faisons beaucoup pour l'égalité : l'égalitésociale, l'égalité du revenu . Ce sont des mots qui chantent,qui font très bien, qui bercent. Mais la réalité, elle, est diffé-rente ! Comment voulez-vous que notre économie bananièreet notre production de rhum puissent vivre ? Notre rhum estdéjà en concurrence avec celui de la Jamaïque, dont la qua-lité n ' est pas comparable . La France n 'a jamais su que lerhum agricole était un produit agricole . Elle n'a jamais su ledéfinir à Bruxelles . La vérité, elle est là I Nous en supportonstous les conséquences . Comment voulez-vous que notre pro-duction tropicale puisse concurrencer et affronter le marchéde la Caraïbe alors que le coût de notre main-d'"auvre estplus élevé et qu 'au surplus vous laissez systématiquement

• pénétrer dans les départements d'outre-mer toute la produc-tion de la Caraïbe, sans contrôle phytosanitaire ? Ces pro-duits sont introduits par de petites barques et sont vendussur les marchés . Ainsi se banalise l'irrégularité de ces petitsmarchés ambulants de Hatti ou de la Dominique, qui ven-dent à des prix portant atteinte à la loyauté de la concur-rence nonnale dans les départements et territoires d'outre-mer.

On ne peut parler de coopération. C'est en réalité un néo-colonialisme qui s'instaure dans la Caraïbe . Car il faut aumoins que nous ayons des rapports de réciprocité dans nosrégions concernées.

Le deuxième point concerne les entreprises.Nous avons demandé - étant donné que le taux de la

T.V .A. a été réduit - que la T .V .A. dans les départementsd'outre-mer soit diminuée, puisque nos départements sontsoumis à l'octroi de mer . Et à cet égard nous sommes dansune situation, au regard de Bruxelles, qui est plus grave quecelle qui existait à l'époque coloniale. Car, à cette époque,les assemblées de la colonie décidaient elles-mêmes du tauxde l'octroi de mer.

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2• SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

Aujourd'hui, le système qui sera retenu est le suivant.Nous aurons une taxe sur les produits qui pénétreront sur lesmarchés de nos départements et une taxe pour notre propreproduction locale . Et pour obtenir l'exonération, nousdevenons de petits enfants : nous serons obligés de demanderà Bruxelles, à une commission, l'autorisation d'obtenir cequ'autrefois, dans le système colonial, nous nous octroyionsnous-mêmes . Et vous prétendez que ce système est de natureà inciter les départements d'outre-mer à produire ? Lesdépartements d'outre-mer iront acheter dans leur zone géo-graphique des produits tropicaux, qu'ils vont revendre.

Par conséquent, j'estimais nécessaire déjà, dans le cadre dugrand marché unique européen, d'accorder une baisse de laT.V .A.

Comment parler de coopération entre nous lorsque, chaquefois que nous quittons la Guadeloupe pour nous rendre à laMartinique ou en Guyane, nous sommes soumis à uncontrôle policier ? C'est la raison pour laquelle j'ai déposéune proposition de loi visant à mettre fin à ce fameux décretde 1835. Comment admettre qu'une production locale guade-loupéenne, martiniquaise ou guyanaise soit soumise à desformalités administratives extrêmement complexes et coû-teuses pour aller d'un département à l'autre ?

Parler de coopération entre départements d'outre-mer, c'estfaire tomber un certain nombre de réglementations périmées,qui ne correspondent plus à la réalité actuelle.

La Guadeloupe, la Martinique et la Guyane doivent consti-tuer le petit marché de la Caraïbe. Et, pour qu'il devienneune réalité, il ne suffit pas de le proclamer, il faut com-mencer par faire tomber ces barrières administratives, cesréglementations . C'est ce que les socioprofessionnels vousdemandent . Je suis de celles qui pensent qu'une marchandisecontrôlée au départ doit circuler librement, avec un véritablepasseport qui spécifie que cette marchandise remplit toutesles conditions réglementaires et administratives prévues.

Examinons le rapport Ripert.Oui 1 ce rapport est un excellent document de travail . Il a

le mérite d'exister. Mais son raisonnement est astucieusementmené. D'une part, il admet qu'il faut reconnaître nos particu-larismes, nos spécificités . D ' autre part, il convient qu ' il fautréduire certains abattements fiscaux dont les D .O .M. bénéfi-cient . Et le courant passe bien, même dans cette assemblée.Tous les parlementaires considèrent que l'outre-mer bénéficiede trop d'avantages fiscaux . Mais personne n'a encore eu lecourage, le mérite et la détermination de savoir le coût réelde l'éloignement pour les départements et les territoiresd'outre-mer. En tant qu'élue, je dis qu'un journal édité enmétropole coûte deux fois plus cher lorsqu'on l'achète dansles départements d'outre-mer - sans parler des territoiresd'outre-mer I Et l'on pourrait multiplier les exemples.

Par conséquent, si l'on veut parler d'égalité, il faut com-mencer par réduire certains coûts qui pèsent sur la formationculturelle et sur le coût des marchandises . Or le rapportRipert n'analyse pas ce problème . Il y a des fonctionnairesqui touchent 40 p . 100, il y a des pauvres travailleurs quin'ont pas ces 40 p . 100. On est en train de créer deux caté-gories de citoyens, qui commencent à se détester ! C'est cequi explique la violence de la grève qui sévit actuellement enGuadeloupe ! Il n'est pas concevable que, dans des hôpitauxde Guadeloupe, il n'y ait pas d'eau ! Cela n'est pas accep-table 1 Et nous ne pouvons admettre que des crèches fer-ment l Il n'est pas tolérable que l'incendie puisse se déclarerdans la région de Pointe-à-Pitre sans que l'on puisse inter-venir I Si nous approuvons la grève, la violence de la grèveréside justement dans ce discours que l'on entretient, qui faitcroire à certains qu'ils sont pénalisés . Nous devons rétablirdans les départements et territoires d'outre-mer les justesnotions de valeur, les justes notions de travail bien fait, ladignité par le travail 1

J'examinerai ensuite - et mon collègue de la Martinique l'aévoqué - l'amendement Richard . Oh ! je savais qu'il y auraitl'amendement Richard . Lorsqu'un ministre est allé à Saint-Martin et qu'il a vu les bateaux, il a dit : « Voilà la défiscali-sation 1 » En Guadeloupe, en Martinique, nous neconstruisons pas de bateaux . Par conséquent, tous cesbateaux qu'on a vus en rade sont des constructions des chan-tiers de la métropole.

Il y a des effets pervers de la défiscalisation, car il y a desspécialistes pour essayer d'« exploiter » les lois qui sontfaites . Mais, monsieur le ministre, je vous pose une question .

Il y a, sur nos routes, des bandes jaunes, qui sont souventfranchies par des chauffards . Allons-nous décider de sup-primer les bandes jaunes parce que !es chauffards ne les res-pectent pas ? Ne disposons-nous pas, en France métropoli-taine, d'une panoplie de mesures pour faire respecter la loi ?Il était nécessaire, et indispensable, de sanctionner ceux quiont utilisé la loi de défiscalisation pour faire des construc-tions qui sont louées et sous-louées . C'était nécessaire tC'était indispensable 1 Mais le rapport Ripert, monsieur leministre, était clair . II y a une dynamique des responsabilitésengendrée par !a loi de défiscalisation . II fallait revoir cetteloi de défiscalisation 1 Aussi, je vous soumets une proposi-tion . Pourquoi ne pas utiliser la défiscalisation comme moyende création d ' emplois ? Toute entreprise qui, pendant unepériode déterminée, embaucha sous le contrôle de l'Etatpourrait bénéficier de la défiscalisation.

Car il ne s'agit pas seulement de faire de la défiscalisationdu matériel . On pourrait aussi faire de la défiscalisationhumaine I En effet, l'un des problèmes explosifs dans lesdépartements d'outre-mer reste celui de l'angoisse de la jeu-nesse et de son absence d'avenir. Chez nous, les jeunes n'ontplus, ou presque, la possibilité de se rendre dans les univer-sités pour poursuivre leurs études supérieures ! Faute deplace ! Faute de logement ! Ils sont obligés de rester surplace, donc de vivre en circuit fermé, avec l'angoisse desavoir que passer dans la vie active, c'est attendre le R.M.I.comme revenu.

Donc - et mon collègue Lise l 'a dit à juste raison - cen'est pas une question de montant financier de votre budget ICela ne nous intéresse pas de savoir qu'il a augmenté de 6,de 10, de I .t' p. 100 1 Ce qui intéresse la population d'outre-

r, c'est que vous puissiez cibler quelques opérations defaçon claire et mener des actions novatrices porteuses dedéveloppement et de dignité pour les peuples de l' outre-mer.C'est ce que les départements d'outre-mer attendent.

Je pourrais dire que votre budget a beaucoup augmenté ence qui concerne les voyages officiels . Je pense que cesvoyages seront très profitables pour nous et que l'on va vousvoir très souvent, vous et vos services . Il y a une enveloppequi est considérable . Je ne critique pas tout cela . ..

M. Louis Le Penses, ministre des départements et terri-toires d'outre-mer, porte-parole du Gouvernement . MadameMichaux-Chevry, m'autorisez-vous à vous interrompre ?

Mme Limette Michaux-Chaut . Je vous autorise tou-jours, monsieur le ministre I

M. le président . La parole est à M . le ministre des dépar-tements et territoires d'outre-mer, avec l'autorisation de l'ora-teur, et celle du président . (Sourires.)

M. Louis Le Pense«, ministre des départements et terri-toires d'outre-mer, porte-parole du Gouvernement. Madame ledéputé, il est un certain nombre de questions qui m'irritentfondamentalement et des évocations rhétoriques qui revien-nent à un rythme permanent . Oui ou non, regrettez-vous l'ini-tiative qui a été prise de verser le revenu minimum d'inser-tion aux populations qui en avaient besoin dans l'outre-mer ?J'aimerais que l'on réponde là-dessus . Car, ayant été celuiqui, le premier en métropole, a pensé qu'il fallait apporter àde nombreuses familles qui n ' avaient pas les moyens de seloger et de se nourrir une telle réforme, que d'autres, en leurtemps, n'ont pas pu faire, je souhaite que l'on soit précislà-dessus.

M . René Drouin, rapporteur pour avis. Bravo !

M. le ministre des départements et territoiresd'outre-mer. Je n'ai jamais considéré que le revenuminimum d'insertion était une mesure suffisante et qu'ilappelait que soit donné un contenu au « I » de l'insertion.Oui ! le R .M .I . est une mesure novatrice ! Que cela enappelle d'autres, oui ! Et j'en évoquerai un certain nombretout à l'heure.

Sur le second point, j'ai quelque peine à comprendre votreremarque . Vous êtes bien ia première à protester quand vousestimez que vous ne voyez pas suffisamment le représentantde l'Etat, notamment en Guadeloupe !

Je vous demande donc d'être plus explicite là-dessus.

M . René Drouln, rapporteur pour avis. Très bien !

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2• SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

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Mme Lucane Michaux-Chaut . Monsieur le ministre, j'aiconstaté, dans votre budget, au chapitre 34-03, que des fraisde réception et de voyage ont augmenté de 400 p . 100 . J'ailégitimement le droit d'en faire l'observation.

Vous voulez qu'on aborde le problème du R.M .I . Parfaite-ment t Je n'ai pas de leçon à recevoir. Personne n'a le mono-pole du cœur . J'ai la prétention de connaitre très bien lespopulations d'outre-mer . Je suis favorable à ce que nospopulations d'outre-mer bénéficient de la solidarité nationale.Mais vous avez fait, dans les départements d'outre-mer, du« R.M. » sans « 1 » I Où est la formation ? La commissionvient de se réunir dans les départements d'outre-mer. Certes,vous utilisez à bon escient une partie du R.M .I . pour mettreen place le programme des logements sociaux . Et j'approuvecette politique qui consiste, pour l'Etat, à aider à mettre fin àl'inégalité sociale en construisant des logements décents.Mais où est la formation professionnelle ? Les instituts depèche qui apprennent aux plaisanciers à conduire les bateauxne font pas de la formation, n'apportent pas aux marins-pécheurs une réponse au problème de la pêche . Qu'est-ce quele R .M .I . apporte en matière de culture ? Est-il normal que lepréfet de la Réunion soit obligé de prendre une décisionpour contraindre les travailleurs à couper de la canne, parceque, précisément, le R.M .I . a été dévoyé ? Est-il normal qu'enGuyane on utilise le R .M .I . pour acheter de la conserve aulieu de consommér la production locale ? Voilà ce que jevoulais dire sur le R .M .I . 1

Si la mesure est généreuse et bonne, son application sur leterrain a été mal adaptée, et il faut vite rétablir la situation.Sinon, le R .M .I . sera considéré comme la charité . Voilà ceque je voulais dire 1 Et j'ai l'habitude d'être claire dans l'ex-posé de mes moyens.

Pour terminer, je dirai que, si les crédits d'investissementont augmenté, ils ont augmenté considérablement en autorisa-tions de programme . J'eusse souhaité que la section décentra-lisée vit ses crédits augmenter dans le domaine des crédits depaiement.

Mais revenons-en à la formation professionnelle . Lescrédits qui lui sont alloués sont importants, monsieur leministre, je ne le conteste pas . Mais à quoi aboutit cette for-mation professionnelle ? On se rend compte que certainsjeunes suivent des stages de trois, quatre mois, pour suivred'autres stages de trois, quatre mois et se retrouver sur lemarché sans travail et réduits au R .M.I . Je suis obligée de ledénoncer 1 Je ne peux tout de méme pas donner un blanc-seing au Gouvernement, alors que je constate sur le terrainque la politique, telle qu'elle est appliquée, est perçue partout le monde comme une politique d'assistanat . Et il est demon devoir d'élue, représentant la Guadeloupe, de signalercette politique . Pour la population, le R.M.I . est un complé-ment de revenus I

Par ailleurs, vous ne pouvez pas l'ignorer, le R.M .I . aug-mente le travail clandestin 1 Il constitue en effet un appointpour ceux qui veulent travailler sans être déclarés . Je me doisde dénoncer cette situation . Je me dois de ne pas laisserdévoyer des fonds d'Etat.

Les populations des départements et territoires d'outre-merne doivent pas être maintenues dans une situation d'assis-tanat . Elles ont besoin d'être responsabilisées. Elles sontcapables de l'être . Elles le demandent . Elles le souhaitent . Cen'est pas en les faisant rêver avec l'assistanat qu'on assureraun véritable développement des départements et territoiresd'outre-mer 1

J'évoquerai maintenant le grave problème de l'immigration.Si demain cinq ou dix bateaux chargés d'Hattiens débar-

quent en Guadeloupe ou en Martinique - et je ne parleraipas de la Guyane -, quelles dispositions le Gouvernementcompte-t-il prendre pour y remédier ?

On me parle de politique de l'environnement dans nosdépartements . Mais je constate que nos forêts, qui sont sousla responsabilité de l'O.N.E .F ., sont en train d'être déboiséeset que les HaTtiens et les étrangers font du charbon de bois 1

Quant à nos hôpitaux, ils connaissent une situation défici-taire du fait de la présence majoritaire de Dominicains etd'HaTtiens 1

Je considère que, dans le cadre de la coopération régio-nale, le Gouvernement doit entretenir avec les pays de laCaraibe un véritable dialogue sur le problème de l'immigra-

tion . En effet, cette immigration, qui préoccupe tant lesdépartements et territoires d'outre-mer, est à l'origine de lamultiplication des travailleurs clandestins et des situationsconflictuelles entre les ressortissants de ces départements etterritoires d'outre-mer et les étrangers.

Ce problème, on le retrouve dans les maisons d ' arrêt . A cetégard, le rapport de M . Sapin, à la suite de sa visite dans lesdépartements d'outre-mer, n'est pas de nature à me tranquil-liser . L ' état de nctre milieu carcéral est très préoccupant. Orla politique de construction des maisons d'arrêt modernes,permettant la réinsertion des jeunes délinquants, est encorerenvoyée à je ne sais quand.

Très sincèrement, je pense que la France est porteused'équilibre dans la Caraïbe. Son image de générosité peutpermettre de créer des échanges entre les départementsd'outre-mer et leur zone géographique.

La France doit par ailleurs dessiner une politique nova-trice, pour permettre aux départements et territoires d 'outre-mer d'affronter avec détermination le marché européen . Enfait, si ceux-ci craignent l'Europe, c'est qu ' ils ne sont pas trèsinformés de ce qui se passe.

Monsieur le ministre, l'année 1989 devait être celle du dou-blement des fonds structurels . Or l'examen du F.E.D.E .R.,publié le 12 juin 1990, fait apparaître l'absence totale definancements pour la Guadeloupe en 1989.Les jeunes desdépartements et territoires d'outre-mer consultent ces docu-ments ; or ils sont donc préoccuç"s de constater que leF.E.D.E .R. n'a pris en compte aucune des propositions oudes suggestions qui avaient été faites . Nous n'avons doncrien obtenu de ce côté-là 1

Je vous avais également demandé de me communiquer lesdirectives sur le P.I .C . J 'ai constaté que cela n 'était pas pos-sible . Alors je me suis adressée directement à Bruxelles, quim'a donné satisfaction et j'ai obtenu ainsi les documentsnécessaires.

Ma préoccupation est grande . Le mémorandum de 1987devait permettre aux départements et territoires d 'outre-merde rattraper leur retard . Or rien n'a été fait 1

Je l'ai dit, c'est un budget de continuité, un budget quicontinue la loi de programme . Mais c'est un budget orientévers la suppression de la défiscalisation . En tout cas, ce n'estpas un budget qui apportera à l'outre-mer, en 1991 et dans lecadre d'une coopération régionale, les moyens d'engager leurdevenir avec responsabilité et dignité.

Et je n'ai pas évoqué, monsieur le ministre, la question deslycées . Je sais que vous me répondrez qu ' il s'agit d'une ques-tion relevant de l'assemblée régionale.

M . Jean-Paul Virapoullé, rapporteur pour avis . C ' est vrai 1

Mme Limette Michaux-Cherry. Mais il n 'en reste pasmoins qu'il faut penser dès aujourd'hui à la politique quidevra être conduite demain en matière d 'éducation, d'orienta-tion et de formation.

Certes, ce budget comporte des éléments constructifs,notamment en matière de logement où un pas considérable aété fait, mais il n ' en reste pas moins que l 'on n ' y trouve pasce qui, pour moi, est fondamental : la dignité des départe-ments et des territoires d'outre-mer par le travail . Je suisdonc au regret de ne pas pouvoir le voter . (Applaudissementssur les bancs des groupes du Rassemblement pour la Républiqueet Union pour la démocratie française.)

M. le président. Mes chers collègues, la passion apportéepar certains orateurs et la controverse n'indisposent point leprésident . Il lui est d'ailleurs difficile d'interrompre des ora-teurs chez qui la passion le dispuste à la sincérité, et qui, deplus, ont été aux affaires. Cependant, je vous invite àcontenir vos propos dans les limites acceptables pour legentil président que je suis . (Sourires .)

La parole est à M. François Asensi.

M . François Asensi . Monsieur le président, monsieur leministre, mes chers collègues, les députés communistes ontbien noté que les crédits de votre ministère progressaient de5,45 p . 100. Cette évolution, qu'ils ne sous-estiment pas,appelle, selon eux, plusieurs remarques.

Ils n'y voient pas d'abord la réponse urgente et massivequ'exige de la part de l'Etat la situation économique etsociale désastreuse des départements et territoires d'outre-mer.

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2• SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

Certes, le F.I .D .O.M. et le F.I .D.E .S. bénéficient de dota-tions accrues et des efforts sont cor .eacrés au logement social,aux constructions scolaires et au R.M.I. Toutefois, ces pro-gressions demeurent hors de proportion avec celles quidevraient étre mises en oeuvre immédiatement, pour faire faceà la véritable explosion du chômage en Guadeloupe, à laMartinique et à la Réunion.

Ces progressions ne permettront pas de faire reculer lapauvreté, la misère extrême dans laquelle sont en train desombrer d'innombrables familles d'outre-mer frappées par lespolitiques d'austérité successives.

Elles ne suffiront pas à corriger les effets les plus criantsde la crise du logement dont souffrent tant les populationsinsulaires, et à remédier au grand déficit-existant en matièred'éducation, déficit que la présente rentrée scolaire vientencore d'illustrer cruellement.

Enfin, elles n ' autoriseront même pas un freinage du déla-brement croissant des économies de ces départements, enparticulier les cultures traditionnelles.

Les députés communistes ne distinguent pas dans votrebudget la 'volonté de s'attaquer résolument aux causes pro-fondes des difficultés des départements et territoires d'outre-mer, lesquelles résident, pour une large part, dans la persis-tance de structures de type colonialiste.

Même si l'on prend en compte le petit coup de poucedonné au S .M.I .C ., i . n'en reste pas moins que la scandaleuseinégalité sociale qui règne entre la métropole et les départe-ments d'outre-mer en matière de S .M .I .C . et de prestationssociales demeure.

Enfin, aucune mesure ne vient remettre en cause la toute-puissance des ministères et administrations métropolitainesdans les décisions intéressant les D.O.M. Cela prive les popu-lations de la possibilité de prendre leurs affaires en main etcontribue à faire prévaloir des orientations qui n'ont rien àvoir avec les réalités locales mais qui satisfont surtout lesgrands intérêts commerciaux et financiers implantés enmétropole.

Vous me répondrez, monsieur le ministre, que vous avezouvert une vaste concertation, sur la base du rapport Ripert,sur le thème de l'égalité et du développement économique.Mais, à mon sens, cela n ' excuse nullement l'absence demesures immédiates que requiert la situation, en particulier lechômage, ni l ' insuffisance des moyens prévus pour l ' éduca-tion nationale.

Cela n 'excuse pas davantage le maintien de l'inégalitésociale dont sont toujours victimes les populations d'outre-mer, inégalité qui, faut-il le rappeler, est contraire aux prin-cipes constitutionnels.

La métropole doit, en tout état de cause, réparer ces consé-quences inacceptables du colonialisme.

J'ajoute que si nous pouvons vous donner acte de votrevolonté de concertation, les propositions que vous avez faiteslors du débat du printemps dernier appellent plusieursremarques.

Vous vous refusez à prendre position sur le rapport Ripertqui, s'il dresse un bilan assez exact de la situation desD .O.M., n'en proposa pas moins des solutions souvent réac-tionnaires et intégrationnistes.

Pour notre part, nous considérons qu'il ne faut pasopposer développement économique et questions institution-nelles alors qu'II est désormais évident que le développementsuppose un cadre institutionnel approprié, favorisant lesprises de responsabilité, mobilisant les énergies tt protégeantles productions locales, tout en ouvrant les D.O.M. sur leurenvironnement naturel . Il s'agit donc d'un cadre bien diffé-rent du cadre départemental, même décentralisé, comme vousle proposez maintenant.

Enfin, les propositions que vous faites dans le domainesocial - s'en remettre au bon vouloir du patronat pour lerelèvement des salaires et du S .M.I .C ., tout comme l'aligne-ment des allocations familiales sur le régime métropolitaind'ici à 1995 - sont décalées par rapport aux besoins . La sup-pression des compléments de rémunération pour ceux quientreront dans la fonction publique territoriale et la suppres-sion de la réfaction de l'impôt sur le revenu auront en effetdes conséquences désastreuses pour le pouvoir d'achat.

Mais surtout, le Gouvernement continue de se faire lechampion de l'uniformité européenne, ce qui signifie pour lespopulations insulaires la disparition, à terme, de toutes les

activités économiques traditionnelles et l'impossibilité desortir du sous-développement, avec pour conséquence latransformation des départements et territoires d'outre-mer ensimples comptoirs des pays hautement industrialisés 1

Il faut, à notre avis, inventer une tout autre politique, abo-lissant les inégalités sociales et redonnant la responsabilitéaux peuples des départements et territoires d'outre-mer.

Cela suppose une augmentation importante et une réorien-tation des crédits pour les D.O.M. qui permettent un vraidéveloppement d ' activités agricoles et industrielles créatricesd'emplois et de richesses, à partir de l'utilisation des atoutsexistants.

II faut également revoir les relations institutionnelles entrela France et l'outre-mer, pour leur substituer un dispositifrespectueux de la spécificité des populations, dans la pers-pective de l'exercice de leur droit à l'autodétermination . Acet égard, les D.O.M. devraient disposer chacun d'une assem-blée unique, dotée de compétences et de moyens largementétendus, ainsi que de prérogatives spécifiques vis-à-vis de laC.E .E.

Permettez-moi, pour conclure, d'ajouter quelques motsconcernant la Nouvelle-Calédonie.

Les crédits consacrés à ce territoire sont substantiels, maisil reste à bien les orienter. Cela ne dispense pas de veiller àce qu 'il n'en résulte pas une explosion du monde desaffaires.

Une bonne application des accords Matignon exige, eneffet, une amélioration de la situation des forces vives du ter-ritoire, et en particulier de celle de la population, de celledes travailleurs kanaks et de celle des provinces où ces der-niers sont majoritaires . C'est cela que supposent le « rééquili-brage » et le développement du territoire, c'est-à-dire le pro-cessus qui doit le conduire à l'indépendance en 1998.

Or la société calédonienne demeure extrêmement inégali-taire . L'amélioration profite surtout aux plus favorisés,comme le montre l'actuelle montée du mouvement social . Lestentations sont grandes de maintenir la ségrégation, commel'atteste la décision du président de la province Sud d'écarterI'U .S.T.K.E. en tant que syndicat représentatif du comité éco-nomique et social.

De plus, l'affaire du lycée Jules-Garnier de Nouméa netraduit-elle pas aussi la persistance de pratiques humiliantespropres à créer des conflits entre les communautés ?

Il y a donc encore beaucoup d'efforts à faire pour installerla justice sur ce territoire et faire respecter les droits dupeuple kanak.

Toutefois, compte tenu de la progression substantielle descrédits consacrés au F .I .D .E .S ., au F.I .D .O.M. et à laNouvelle-Calédonie, et comme nous n'avons pas l'intentionde pratiquer la politique du pire ou du tout-ou-rien, je vousindique, monsieur le ministre, que le groupe communistes'abstiendra sur ce budget.

Pour finir, je voudrais vous faire part d'un vau qui avaitété émis ici même par notre collègue Guy Drut, lors du débatsur le budget de la jeunesse et des sports : il est bien de seféliciter de la part essentielle prise par nos athlètes desdépartements et territoires d 'outre-mer pour le renom et leprestige de la France et de leur rendre hommage, mais ceserait leur rendre justice que d'organiser chez eux les futurschampionnats de France d 'athlétisme . (Applaudissements surles bancs du groupe communiste.)

M. le président . La parole est à M . Pierre-André Wiltzer.

M . Pierre-André Wiltzer. Monsieur le président, mon-sieur le ministre, mes chers collègues, l'analyse détaillée dubudget des départements et territoires d'outre-mer, à laquellese sont livrés les rapporteurs, et les orateurs qui m'ont pré-cédé à cette tribune, me dispense de procéder, à mon tour, àun examen technique - et le terme « technique » n'a pas unesignification péjorative dans ma bouche - de ce document.Le temps qui m 'est imparti - que je vais essayer de res-pecter - ne me permettrait d'ailleurs pas de le faire.

Mon propos, en tant que porte-parole du groupe Unionpour la démocratie française sera donc avant tout politique,c'est-à-dire qu'il portera sur les conséquences pour l'outre-mer de la politique globale du Gouvernement . Je vais doncvous livrer les principales observations que mon groupe par-lementaire souhaite faire à l'occasion de cette discussion bud-gétaire.

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2. SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

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Tout d ' abord, nous nous réjouissons, comme l'ensemble decette assemblée, de constater que l'année passée la paix civilea régné mer les parties du territoire de la République situéesoutre-mer, te qui contraste avec ce q'ri s'est passé précédem-ment . Ce signe encourageant permet d 'espérer que toutes lesénergies se consacreront désormais au développement écono-mique et au bien-être des populations.

bleus aurions aimé faire un constat identique pour lamétropole, mais le climat d ' insécurité et les actions de terro-risme organisé qui caractérisent la Corse nous l'interdisent.Est-ce d ' ailleurs pour cette raison que le Gouvernement envi-sage de transformer la Corse en une sorte de territoired'outre-nier qui, au train où vont les choses, pourrait bienêtre rattaché à votre ministère 7 (Sourires.) Tout comme, parla suite, d'autres lies de ce grand archipel qu ' est la France IMais ce n ' est pas le sujet du jour.

Ensuite, nous notons qu'avec une augmentation de sescrédits de 5,45 p . 100 et une progression des dépenses encapital de plus de 10 p . 110, votre ministère ne figure pasparmi les victimes de la rigueur. On pourrait s ' en féliciter,car les besoins de l'outre-mer sont grands . Toutefois cetteimpression doit être relativisée d 'un double point de vue :

En premier lieu, avec 2,2 milliards de francs, le budget devotre ministère ne représente en réalité qu'une part assezmodeste de l'effort global de la collet:divisé nationale enfaveur des départements et territoires d'outre-mer : un peumoins de 10 p . 100 . Le seul examen de ces crédits ne permetdonc pas une évaluation complète de la politique menée parl'Etat dans l'outre-mer.

Pour que cet examen puisse avoir lieu, il faudrait, commel'a souligné le rapporteur de la cqmmission des lois à proposdes départements d'outre-mer, que la récapitulation de l'en-semble des dépenses prévues en faveur de l'outre-mer dansles différents budgets ministériels concernés soit mise à ladisposition du Parlement en temps utile.

Dans le même souci de permettre une appréciation com-plète et claire de l'ensemble de la politique menée, je pense -et plusieurs de mes collègues des départements et territoiresd'outre-mer, je le sais, partagent ce sentiment - qu'il faudraitaussi que soit établi et communiqué au Parlement un docu-ment qui fasse ressortir les crédits de provenances diversesaffectés à chaque département ou territoire, tant sont grandesles spécificités de chacun d'entre eux.

La deuxième constatation de nature à relativiser notreimpression est que les crédits de paiement affectés auF.I .D.O .M., s'ils sont globalement en nette augmentation,n'en subissent pas moins, d'une année sur l'autre - on l'aconstaté encore pour l'année écoulée -, ce que le rapporteur,M. Jérôme Lamber!, appelle à juste titre des « oups d'accor-déon qui ne sont pas un signe de bonne administration ».

Ce sujet a déjà été évoqué au cours des années précédenteset je sais, monsieur le ministre, que vous vous êtes efforcé deporter remède à ces défauts de gestion . Mais force est deconstater que le résultat n'est pas encore atteint.

Troisième observation : la France s'est engagée depuislongtemps dans un effort de solidarité au bénéfice de sesdépartements et territoires d'outre-mer. Cet effort, auquelnous avons participé activement quand nous exercions la res-ponsabilité du pouvoir, reposait et repose toujours sur lecoupl,, développement économique-progrès social . L'équilibreentre ces deux éléments est une condititon essentielle detoute politique sérieuse en faveur de l'outre-mer.

Or nous avons des raisons de craindre que cet équilibresoit menacé. L'introduction du revenu minimum d'insertions'est en effet réalisée outre-mer dans des conditions difficiles,encore moins bonnes qu'en métropole . Nous savons tousqu'à défaut d'une politique efficace d'insertion,, c'est bien ceque vous appeliez ici-même, monsieur le ministre, en juindernier, au cours du débat sur la politique de l'outre-mer, le« scénario inacceptable » de l'assistance gé .téralisée qui esten passe de se réaliser.

Qu'il n'y ait pas d'ambiguïté 1 Je ne prétends pas qu'il soitfacile de mettre en place rapidement une politique de forma-tion et d' 3nsertion . Je dis simplement que, pour le moment, leR.M.I . marche à cloche-pied, et qu'il risque, si l'on n'y prendpas garde, de rester une simple allocation de subsistance quipourrait décourager les efforts.

Nous souhaitons clairement que nos compatriotes d'outre-mer puissent bénéficier des progrès réalisés en métropole enmatière sociale . A cet égard, nul ne nie qu'il y ait un rattra-

page à effectuer . Mais l'introduction sans préparation, voiresans les adaptations nécessaires, de certaines mesures socialesdans les économies fragiles des départements d 'outre-mer seretournera en réalité contre les intérêts des plus défavorisés.L'exemple du R .M.i . dans le département de la Réunion enest une démonstration éclatante I

De même que trop d'impôt tue l'impôt, trop de prestationssociales risquent de tuer le progrès social, car elles tuerontles entreprises existantes et empêcheront d'en créer de nou-velles.

Quatrième observation : les élus et les responsables socio-professionnels d'outre-mer, particulièrement dans les D .O.M.,manifestent une inquiétude justifiée devant les conséquencesde l'intégration européenne.

La disparition progressive des protections dont ils bénéfi-cient pour leurs productions agricoles et industrielles, l'aggra-vation de la concurrence qu'ils subissent de la part des paysdes zones Afrique, Carabe Pacifique et l'arrivée éventuellede nouveaux concurrents représentent une somme d'incerti-tudes et de menaces très réelles.

Ces diverses observations, déjà formulées par d'autres ora-teurs mais que j'aurais voulu pouvoir développer, sont autantd'interrogations en face du projet de budget qui nous est pré-senté.

Nous ne doutons pas, monsieur le ministre, de votrevolonté personnelle d'appréhender les problèmes des départe-ments et territoires d'outre-mer. Mats ce n'est pas votreaction personnelle qu 'il s'agit d'apprécier.

La question posée à notre assemblée est celle de l'adéqua-tion de la politique gouvernementale d'ensemble à la situa-tion particulière de l'outre-mer, puisque le budget du minis-tère ne reptésente qu'une part de l'effort total de l'Etat enfaveur de l'outre-mer.

De ce point de vue, le groupe de l'U .D.F. n'a pas trouvédans les propositions du Gouvernement des éléments suffi-samment convaincants pour le conduire à voter ce budget.

Au surplus, les conditions dans lesquelles se déroule cetteannée l'examen du projet de loi de finances ne sont pas denature - c'est un euphémisme 1 - à nous satisfaire . La plupartdes budgets, nous l'avons constaté au fil des jours et, en toutcas, la quasi-totalité des plus importants, ont été réservés parle Gouvernement et renvoyés à la fin de la discussion budgé-taire pour faire l'objet d'un vote global, sans doute à coupd'article 49-3, preuve que le Gouvernement ne trouve pasdans cette assemblée de majorité pour les voter. Comment ceclimat pourrait-il ne pas rejzillir sur le budget que nous exa-minons aujourd'hui ?

Nous n'en écouterons pas moins, monsieur le ministre,avec une grande attention les explications que vous donnerezà l'assemblée, réservant notre décision définitive pour la findu débat . (Applaudissements sur les bancs des groupes Unionpour la démocratie française et de l'Union du centre.)

M . le présidant. La parole est à M . Jean-Paul Virapoullé.

M . Jean-Paul Virapoull6 . Monsieur le président, avant dem'exprimer au nom du groupe U .D .C ., avec mes collèguesHenry Jean-Baptiste et Gérard Grignon, je voudraisreprendre un instant mon rôle de rapporteur pour avis etdire, ce que j'ai omis de faire, que la commission des loi aémis un avis favorable à l'adoption des crédits du ministère.

Je parlerai des départements d'outre-mer en tant qu'élu dela Réunion . Sur le budget, je crois que tout a été dit et je n'yreviendrai pas.

Monsieur le ministre, je m'adresse au responsable de l'ac-tion du Gouvernement dans les départements et territoiresd'outre-mer . II faut avoir le courage de ne pas chercher àdresser un catalogue hétéroclite de mesures disparates. II fau-drait plutôt définir quelques grandes priorités, chercher l'inte-raction entre elles et les mettre en oeuvre avec une grandevolonté politique.

Nous devons être capables, vous et nous, de faire deschoix courageux . Mon collègue Wiltzer s'est interrogé à justetitre : il reste beaucoup de zones d'ombre, beaucoup d'inter-rogations, et nous sommes là pour vous dire, avec détermina-tion et courage, quelles sont, d'après nous, les grandes prio-rités qui permettront de faire évoluer les choses dans le bonsens et de dissiper les zones d'ombre qui restent au tableaudu développement économique et de l'épanoeissement socialdes départements d'outre-mer.

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2• SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

La première grande priorité, la priorité des priorités, c' est,je le dis avec inquiétude et sincérité, la jeunesse . J'ai suivi laplupart des débats à la télévision et j'ai lu les journauxconcernant les problèmes des lycéens métropolitains . Je suisaussi père de famille. Je m'aperçois que les jeunes ont perduconfiance en leurs dirigeants - et je ne politise pas le débat -qu'ils soient de droite ou de gauche. Malgré le réel effort quia été consenti, en particulier dans la loi d'orientation surl'éducation, que j'ai votée, les jeunes ont du mal à renouer ledialogue avec les dirigeants du pays.

Nous devons déceler ensemble, aujourd'hui, les grandsproblèmes qui se posent en matière d'éducation, afin d'éviterque telle ou telle carence ne soit demain l'objet de conflitsaux conséquences incalculables.

Soyons constructifs . Quels sont ces problèmes ?Le premier d'entre eux était la création de postes dans

l'enseignement public et privé . Il est, je crois, en voie derèglement, grâce à l'effort qui a été consenti ces deux der-nières années.

Le deuxième problème a été évoqué il y a huit jours parM. le ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale.Répondant à une question que j'avais posée, il a précisé :« monsieur le député, lorsque les collectivités locales devrontréaliser ces universités, la répartition ne s'effectuera plus parmoitié entre l'Etat et les collectivités mais selon la proportiondeux tiers pour les collectivités, un tiers pour l'Etat.

Cela va entraîner une grave crise dans les départementsd'outre-mer et à l'échelon national . En effet, actuellement leconseil régional de la Réunion construit trois lycées par an.Lorsque ces élèves sortiront du lycée, ils ne trouveront pas deplace à l'université de la Réunion. Or nous avons signé, surla base de 157 ou 158 millions de francs, une conventionprévoyant un financement assuré pour moitié par l'Etat, pourun quart par le conseil général et pour un quart par larégion. Mais la Cour des comptes a estimé que les servicescentraux du ministère ne pouvaient pas mettre en œuvrechaque année plus de 500 millions de francs de travaux pourtout le territoire national du fait du manque de fonction-naires et de la lourdeur des procédures . On constate unelourdeur à l'échelon métropolitain, mais les dossiers de cheznous, même s'ils ne prennent pas la route du Paris-Dakar,suivent néanmoins le chemin des écoliers pour aboutir auministère, et un simple va-et-vient exige de trois à six mois.

Monsieur le ministre, décentralisez la construction de l'uni-versité d'Antilles-Guyanes et de celle de la Réunion . Ayonsle courage - c'est un problème qui nous concerne tous - dedire à M . le ministre du budget que nous lui ferons faire debannes économies : 5 000 gardes mobiles dans quatre anspour maintenir l'ordre à la Réunion, cela coûte plus cher quea construction de l'université décentralisée I

Qu'il laisse la clé de répartition de la convention Etat-région-département s'appliquer dans le cadre d'une maîtrised'ouvrage déléguée . Qu'il laisse se faire l'université de laRéunion.

La deuxième grande priorité consiste à définir un schémade formation . La formation des jeunes constitue, avec l'édu-cation, le binôme vital dans les départements d'outre-mer.C'est d'ailleurs un problème national car vous aussi, meschers collègues, dans les régions métropolitaines, vous vousapercevez que les formations ne débouchent pas toujours surdes emplois . Il y a pourtant des remèdes permettant de venirà bout de cette situation.

Une convention a été signée - vous l'avez signalé, mon-sieur le ministre, pendant votre séjour à la Réunion - entreun syndicat professionnel et un syndicat patronal afin d'amé-liorer tes bas salaires . Ne pourrait-on encourager la signaturede telles conventions par branche, en faisant intervenir lefonds national pour l'emploi, de manière à alléger les chargessociales et à favoriser la formation des travailleurs dans lesentreprises concernées ? Ce serait un premier remède.

Second remède : on pourrait étendre le champ d'applica-tion ses contrats de retour à l'emploi . Il vaut mieux que lesjeunes soient au travail plutôt qu'au chômage, percevantpériodiquement le R .M .I . Or les C.R.E. ne sont pas acces-sibles aux plus de vingt-cinq ans chômeurs depuis moinsd'un an . Monsieur le ministre, l'article 73 de la Constitutionvoua permet à cet égard d'adapter la loi à la réalité locale.

Par ailleurs, certains contrats emploi-solidarité peuventdurer un an alors que d'autres durent deux ans . Nous avonsdemandé au ministre du travail, et je renouvelle officielle-

ment la demande aujourd'hui, de prévoir le prolongementdes C.E .S . dans le cadre d 'un plan emploi . Il vaut mieux, eneffet, que les jeunes travaillent plutôt que d ' être condamnés àl'inaction . D'autant que ce que vous paierez pour les C.E.S .,vous ne le paierez pas pour le R M .I ., et vous aurez en outrel'avantage que ces jeunes travailleront.

Lors de la discussion du budget de la formation, nousavons demandé au secrétaire d'Etat chargé de la formation,M. Laignel, qu 'une charte de la formation professionnellesoit signée entre vous, représentant l'Etat, et nous, éluslocaux . Dans quelles conditions envisagez-vous d'associer lesparlementaires et les responsables des collectivités locales deces départements à l'élaboration de mesures spécifiquesconcernant le troisième plan emploi ? Il faut prendre desmesures spécifiques en faveur des D .O .M. et engager unelarge concertation . Sous quelle forme allez-vous nous associerà vos réflexions ? La même procédure doit être suivie en cequi concerne la formation.

La troisième priorité, essentielle, qui relève de l'aménage-ment du territoire est le lo?ement . Je relève à cet égard que,en matière de crédits de paiement, la créance de 1989 n'a pasété totalement déléguée à la Réunion et qu'il nous manque51 millions de francs. Comme nous avons épuisé la totalitéde la ligne budgétaire unique et la totalité des crédits quinous ont été délégués, comment, monsieur le ministre,envisagez-vous de nous déléguer ce solde de 51 millions defrancs ?

Par ailleurs, et bien que les responsabilités soient à cetégard partagées, à quelle date comptez-vous déléguer lacréance 1990 à nos départements et quel sera son montant ?

Je reviens sur un problème esquissé par mon collègue Lise,je veux parler du financement complémentaire en matière delogement social . Les banquiers de la Réunion préfèrent prêterde l'argent aux populations défavorisées pour acheter unevoiture plutôt que pour construire une maison.

Nous sommes dans un système libéral, mais ce n'est pasune raison pour que certains fassent n'importe quoi. Je necomprends pas l'attitude des banques de la Réunion qui neparticipent pas à l'élaboration et au financement de la poli-tique de construction de logements sociaux, notamment enmatière de logement évolutif social . Une négociation est àmener pour faire changer d'avis les organismes financiers,qui ont d'ailleurs largement profité des crédits importantsversés au titre du R.M .I ., de toutes ces aides qui relèvent dela solidarité nationale et de la politique de développementdes départements d'outre-mer. C'est le vrai problèmepour 1991 : pourquoi les banques des D.O.M., notammentcelles de la Réunion, n'assurent-elles pas le complément definancement pour les logements sociaux ? Vous doublez laligne budgétaire unique, conformément à la loi-programme,vous accordez une créance de « proratisation », conformé-ment à la loi sur le R .M.I. Que peut-on faire pour compléterles crédits en matière de logement évolutif social ?

Ma dernière question sur le logement a déjà été évoquéepar le rapporteur spécial de la commission des finances l'andernier, mais elle n'a pas trouvé de réponse dans le projet debudget pour 1991 : je yeux parler des produits de l'émission,qui constituent un véritable problème.

Les lois votées par le Parlement doivent être respectées . Ildevrait en être de même pour les ordonnances . Or l'ordon-nance de 1959 n'est pas respectée en l'état actuel du projetde loi de finances . Les produits de l'émission représentent àpeu près 400 millions de francs . Or, d'après nos renseigne-ments, 100 millions seulement vont être inscrits au titre desopérations d'intérêt social, agricole ou concernant l'immobi-lier dans les D .O.M. Que deviennent les 300 millions res-tants ? Nous n'avons pas de réponse. Monsieur le ministre, laposition du Gouvernement est illégale et elle n'est pas pourfavoriser le bon climat de dialogue que vous comme noussouhaitons entretenir.

Faites-vous fi des remarques de la Cour des comptes, del'ordonnance de 1959 ? Pourquoi 25 p . 100 seulement desproduits de l'émission sont-ils investis dans les D.O.M. ?Pourquoi 75 p. 100 sont-ils incrits au chapitre 12-30,article 10, « opérations communes », alors que tous mes col-lègues viennent de souligner les difficultés des D.O.M. enmatière de logement ?

A chaque critique une proposition . Notre proposition est lasuivante : affectez les produits de l'émission au logementsocial et au logement intermédiaire dans les D .O .M., parce

à

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que le logement intermédiaire représente une soupape desécurité pour l'industrie du bâtiment, qui constitue l'une desprincipales branches de l'économie de nos départementsd'outre-mer.

Sur l'Europe, tout a été dit. Mais, en tant qu'élu d'undépartement d'outre-mer, je voudrais vous faire connaître maposition, qui est simple et, je crois, responsable . Les chefsd'Etat et de Gouvernement sont en train de préparer le nou-veau traité européen, qui sera d'ailleurs déposé sur le bureaudes assemblées pour ratification . Vous êtes allé, monsieur leministre, jusqu'à l'Elysée avec notre proposition, mais il n'y apas eu de retour jusqu'à présent. Lorsqu'on étudiera à l'écolele Traité de Rome, on lira l'article 227-2, qui date de 1957.Mais, en 1993, cet article ne sera plus d'actualité, ne seraplus adapté aux réalités économiques des départementsd'outre-mer. Vous-méme, lorsque vous allez, soit seul, soitavec nous, négocier à Bruxelles, vous voyez bien que les res-ponsables administratifs de Bruxelles ne veulent pas nousaccorder des dérogations et élaborer des règlements spéci-fiques aux D.O .M., au motif que ceux-ci font partie de l'Eu-rope et que l'Europe forme une unité ; selon eux, la bananede la Martinique ou de la Guadeloupe n'a pas à bénéficierde dérogations par rapport à celle des pays A .C.P. que l'Eu-rope privilégie par ailleurs l

Vous devez disposer d'un traité comportant une clausesemblable à celle de l'article 73 de la Constitution, maisadaptée aux réalités européennes et permettant à vous, Gou-vernement, comme à nous, élus locaux, de dire à l'Europeque, compte tenu de notre caractère ultra-périphérique, lesrèglements communautaires doivent être adaptés à la réalitééconomique et sociale des D .O .M., et que les échanges avecles pays A .C .P. doivent s'effectuer à double sens et ne pasêtre à sens unique, comme certains pays A .C.P . ont trop ten-dance à le croire.

En d'autres termes, monsieur le ministre, nous ne devonspas être traités comme les enfants illégitimes de l'Europe oucomme les vaches à lait des A .C.P. l Une volonté politiqueau plus haut niveau doit faire apparaître cette volonté d'inté-gration adaptée, conforme à l'article 73 de la Constitution, auniveau européen. Je sais que vous y étes favorable, mais jesais aussi qu'il est difficile de faire valoir les intéréts de1,5 million de personnes face à ceux des dizaines de millionsd'habitants des pays A .C .P.

Il n'y a pas antinomie, il n'y a pas antagonisme entrenous : il y a complémentarité, mais il faut que les règles dujeu soient claires l En l'état actuel des choses, il y va des65 000 emplois de la filière canne-sucre-rhum et de la filièrebanane . C'est l'économie fragile des départements d'outre-mer qui est en jeu. Cela mérite une union entre nous pourconvaincre, d'une part, le chef de I'Etat, mais aussi les ins-tances communautaires, que les D.O .M. forment une entitéqui vaut d'étre considérée dans le nouveau traité . Sinon, nousnous engagerons dans la voie de l'aventure sur le plan écono-mique.

J'en arrive à un élément qui m'a outré : je veux parler del'amendement adopté la semaine dernière en commission desfinances, alors que sept personnes étaient présentes . Pendantce temps, à la Réunion - je n'ai pu y être parce que je devaisintervenir ici, mais j'ai lu avec attention tout ce que vous yavez déclaré - vous disiez de bonne foi que nous améliore-rions ensemble les dispositions de la défiscalisation . Or, encommission des finances, à sept personnes, on détruisait l'en-semble du dispositif de la défiscalisation que nous avons votéen cette assemblée en 1986.

Cela n'est pas conforme au dialogue que vous voulezmener outre-mer. Cela n'est pas non plus conforme auxconclusions du rapport Ripert, qui signalait le bien qui avaitété fait . On peut nous dire qu'il y a eu quelques abus, mais,comme l'a dit ma collègue Lucette Michaux-Chevry, certainesdispositions de toutes les lois sont toujours outrepassées . IIne faut pas détruire la loi l Il faut l'améliorer I Mais, pourl'améliorer, une discussion entre nous, une concertation s'im-posent . Je ne veux pas défendre les fraudeurs, mais je sou-

site, monsieur le ministre, que le Gouvernement n'acceptepas l'amendement de la commission des finances I En effet,chacun a reconnu que la défiscalisation avait permis, avec ledoublement de la L.B.U., dans la loi de programme, un cer-tain développement dans les départements d'outre-mer.

Quelle est la position du groupe de l'Union du centre ?Mes collègues Henry Jean-Baptiste et Gérard Grignon s'ex-primeront à leur tour. Nous souhaiteri elle une suspension dît

séance pour nous entretenir avec vous . Compte tenu desengagements que nous aurons obtenus quant au rejet del'amendement concernant la défiscalisation et des réponsesque vous aurez bien voulu apporter à nos grandes interroga-tions sur l'éducation, la formation dans les D.O.M. et l'Eu-rope, nous déciderons de notre attitude finale. (Applaudisse-ments sur les bancs du groupe de l'Union du centre et surplusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Répu-blique.)

M . le président . La parole est à M . Léon Bertrand.

M. Won Bertrand . Monsieur le président, monsieur leministre, mes chers collègues, la configuration économiquemondiale est en pleine évolution et les grands Etats d'hier serévèlent aujourd'hui des édifices fragiles dont la structure sefissure et menace d'éclater à tout moment.

Ce risque, dans nos régions d'outre-mer, est d'autant plusressenti que, bien qu'éloignées du théâtre des opérations, lemoindre surcoût entrainé par les crises se répercute immédia-tement sur toutes les charges liées au transport des produitsimportés ou exportés.

Le budget qui nous est présenté aujourd'hui est en aug-mentation de 5,2 p . 100 par rapport à 1990, mais il ne com-pensera pas le surcoût de la crise du Golfe.

Avec la perspective du grand marché commun, l'ouvertureà l'Est, la France devra se tailler rapidement une place depremier choix. Sa position de troisième puissance maritimemondiale que lui confèrent les terres françaises situées horsmétropole devrait lui permettre de s'assurer cette place.Encore faut-il qu'elle veuille bien conserver et mettre envaleur ces terres.

Les liens entre les régions d'outre-mer et la métropole sontforts, mais ils sont tissés d'incompréhension : la métropole,mère nourricière, ne peut plus assumer pleinement ce rôle ;les régions d'outre-mer, adultes, conscientes des difficultés,sont dans l'incapacité d'y porter remède, faute d'avoir étéassociées en temps utile aux décisions les concernant.

Parentes pauvres de la nation française, charnières entreles pays développés, dont elles relèvent par leur statut, et lespays Bous-développés, dont elles relèvent par la géographie etl 'économie, nos régions d'outre-mer n'ont jamais pu jouerleur rôle de trait d'union entre ces deux mondes.

Pour assurer leur développement, année après année, nosrégions se sont vu appliquer des « plans » qui, souvent, nerésistent pas à une analyse objective.

J'en donne pour exemple le dernier mis en oeuvre enGuyane, appelé « programme PHEDRE » qui, d'après sesobjectifs, devrait faire bénéficier l'ensemble de notre régiondes retombées du spatial.

Qu'en est-il en réalité ?Imaginé et mis en place sans consultation véritable des

élus, créé pour satisfaire la demande de certains qui se sontprésentés en garants de la paix sociale et dont on verrabientôt qu'en fait ils ne maîtrisent rien sur le terrain, ce plandéversera la plus grande partie des sommes allouées sur deuxcommunes « directement concernées par le spatial » et lereste, dérisoire, aux autres communes par le biais d'un cha-pitre intitulé « Solidarité ».

Où se situe donc la solidarité ?Force est de constater que l'affectation de ces crédits aug-

mente encore l'émet de développement entre les deux com-munes dont je viens de parler et le reste de la Guyane.

Pourquoi avoir tout centré sur cette seule industrie ? Pour-quoi ne pas avoir incité au développement d'unités produc-tives •- artisanat, petite industrie, agriculture - sur l'ensemblede notre région ?

Qu'adviendra-t-il des emplois liés au spatial si l'Europe -et la France - sollicitée par l'Australie pour l'implantationd'une base sur son territoire répond : « oui » ?

Certes, l'argument de la stabilité politique interne de cepays est tentant. Mais à quel prix celle-ci a-t-elle étéobtenue ? Le Président Mitterrand l'avait très , justementremarqué : « Ce pays n'a pas de problèmes internes avec sesautochtones . Eliminés physiquement ou réduits à la misèredans des régions inhospitalières, ils sont exclus de fait de lascène politique et économique. » Bel exemple de solidarité etd'humanité 1

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J'en reviens au plan dont je parlais à l'instant : où sont lesproductifs, les artisans, les industriels, tous ceux que laGuyane entière attend ?

Je remarque que si l'on appliquait au centre spatial le sys-tème de fiscalisation normal, par exemple avec le paiementde la taxe professionnelle, toute l'économie de la Guyane enbénéficierait . Il ne serait plus nécessaire d'avoir recours à des« plans », à des subventions limitées dans le temps.

Pourquoi cet exorbitant privilège accordé à la seule indus-trie importante de notre région, l'écartant ainsi de touteimplication directe dans notre développement ?

Une fois de plus, force m'est de constater que l'économiede nos régions n'est qu ' un mirage pouvant disparaître à toutmoment du seul fait d'une décision politique, et cela sansconsultation des populations.

Pour situer nos exigences, nous souhaitons la venue d'unemission d'évaluation des effets de la décentralisation dans lecadre de la départementalisation, de la rentabilisation desressources dues à cette décentralisation, mais nous souhaitonsaussi que l'on établisse un constat des différences de notrerégion par rapport aux autres D .O .M. sur les plans géogra-phique, ethnique et social.

Je sais que les résultats de cette étude mettront en Cvidencele danger de centrer le développement d ' une région sur uneseule activité - le spatial pour la Guyane, le tourisme pourd'autres - et le fait qu'il faut trouver d'autres ressourcespourvoyeuses d'emplois, et mettre nos régions en valeur dansleur environnement naturel.

Pour ce faire, que nous propose-t-on régulièrement ? Dessubventions I Et encore des subventions 1 Comme s'il n'étaitpas connu que les subventions n'ont jamais rien développé,sinon le goût de l'affairisme, ni rien créé sinon des« assistés ».

Cette position de solliciteur permanent, de quémandeurperpétuel est une position humiliante pour les départementsd'outre-mer et agaçante pour les gouvernements qui ne peu-vent perpétuellement rallonger des enveloppes qui, d'annéeen année, s'amenuisent.

Lors de son passage à la Réunion, en mai 1989, le Premierministre déclarait : « Les D.O.M. doivent cesser d'imaginerque tout se fait à Paris, que Paris est le Bon Dieu . » Il préci-sait par ailleurs : « On a l'avenir que l'on se fait . »

Un premier pas a été fait en ce sens avec la mise en placede la loi de défiscalisation.

La relance du secteur immobilier a été indéniable . Nousdevons continuer dans la voie indiquée et je demande quel'on remplace pour la Guyane le terme de « subvention », parcelui d'« exemption ».

Il devait s'agir d'une exemption ou d'un agrément ponc-tuel, ainsi que le souhaitent les élus, et comme cela est pra-tiqué dans les zones franches, les ports francs ou les zonesd'entreprises : exemption de droits divers, mais égalementassurance donnée de rapatriement des profits, facilités d'em-prunts à des taux réduits et même dérogations à la législationdu travail.

L'institution de zones franches, préférée au versementd'une subvention équivaudra, sur placc, à la création d'unenouvelle ressource avec tout ce qui en découle, sur les planstant économique que psychologique.

II est connu que le développement économique exige desconditions favorables à l'investissement . Or la Guyane,insérée dans les pays dits - par euphémisme - « en vole dedéveloppement » n'est pas compétitive dans son milieunaturel, alors qu'elle a, par son apparente prospérité, un pou-voir attractif très puissant sur les miséreux des pays voisins.

« La France ne peut accueillir toute la misère dumonde » : c'est la position de principe du Gouvernement . Onnous l'a dit . On nous l'a répété . Mais, pour la Guyane, rienn'a changé . L'immigration clandestine relève toujours du cau-chemar éveillé.

A rebours de ne principe, la France peut-elle continuer àpayer à guichets ouverts pour effacer la dette des insolvables,multiplier les secours humanitaires ?

Dans les D.O .M .-T .O .M ., peut-elle poursuivre sa politiqued'élévation du niveau de vie, de protection sociale hors ducommun et garantir à ces départements et territoires, dans lemême temps, la compétitivité vitale à leur survie dans leurrégion géographique ?

La Guyane peut-elle se permettre d'être la vitrine rutilanted'une boutique vide ?

On explique à nos populations que la croissance écono-mique en métropole est difficile, qu'il est logique que celledes D .O .M.-T.O.M . suive mais, lorsque nos populations assis-tent, interloquées, aux remises de dettes dispensées à certainspays - quelquefois leurs propres voisins et souvent leursrivaux économiques - que doivent-elles en penser ?

M. Emmanuel Aubert . Bonne question 1

M . Lion Bertrand. L'exercice est difficile, voire périlleux,pour les élus locaux que celui de justifier le paradoxe d'unepénurie de moyens à l'intérieur et d'une aisance affichée àl'extérieur . Car, à bien considérer l'état de l'enseignement, del'agriculture et de l'emploi, il nous faut bien reconnaître queles « laissés-pour-compte » sont aussi parmi nous et que c'estd'eux qu'il conviendrait de s 'occuper en premier.

En Guyane, tout ou presque tout, est à faire. Ce n'est pasfaute de matière première, mais d'une réelle volonté politiquedes gouvernements d'impliquer la population locale dans sonpropre développement . Ce phénomène ne date pas d'hier etil faut y mettre fin.

Il faut également dissocier le développement de la Guyanede celui de ses voisines des Antilles et cesser d'appliquer desparamètres de développement identiques sur des régions dif-férentes.

Saint-Pierre et Miquelon sont également des îles françaisesaux Amériques . Partant de ce principe, conviend : sit-il de leurappliquer les paramètres valables pour les Antilles, ou vice-versa ?

Dans l'absurde, on peut aller loin 1 Il faut comparer ce quiest comparable.

Pourquoi la justice, l'enseignement sont-ils centralisés surnos voisines avec tous les problèmes que cela suppose pourle temps gaspillé, les frais de déplacements et les dossiersperdus ?

La Guyane doit avoir une justice adaptée à son contexted'immigration et de démographie galopantes, avec leur cor-tège de violence et d'insécurité.

Il faut à la Guyane un enseignement adapté à ion environ-nement géographique, à la présence d'une technologie depointe, à l'existence sur son sol d'un biotope particulier,unique, méritant la mise en place de structures de rechercheet d'enseignement des sciences de la nature.

Toutes les possibilités de faire rayonner l'image de laFrance vers ses grands voisins d'Amérique du Sud doiventêtre utilisées.

Si la France ne fait rien pour elle, pour son rayonnement,que peut faire seule la Guyane, d'autant que notre avenirnous apparaît bien incertain ?

Nous observons l'évolution statutaire de la Corse et noussommes inquiets . Y a-t-il eu une consultation générale de lapopulation ? Nous n'en sommes pas à travailler sur un chan-gement de statut pour la Guyane, mais si cette questiondevait venir à l'ordre du jour, nous souhaiterions en discuteren toute connaissance de cause.

Aussi demandé-je à nouveau que soit conduite d'abord unemission de réflexion et d'évaluation des effets de la décentra-lisation, afin que l'on puisse mesurer si nous avons su enexploiter et rentabiliser toutes les ressources.

Monsieur le ministre, s'agissant du vote du budget desdépartements d'outre-mer, je me rallie aux propos tenus parM. Virapoullé tout à l'heure concernant l'amendementRichard sur la loi de défiscalisation . J'attendrai donc la findes débats pour définir ma position . (Applaudissements sur lesbancs du groupe Union pour la démocratie française et surquelques bancs du grou pe du Rassemblement pour la Répu-blique .)

M. le président . La parole est à M . Dominique Larifla.

M . Dominique Larifla . Monsieur le ministre, noussommes, aujourd'hui, réunis pour examiner les crédits duministère des départements et territoires d'outre-mer.

Comme les années précédentes, je pourrais, à l'occasion decette discussion, vous interroger ou attirer votre attention surun certain nombre de rubriques traditionnelles relevant ounon des crédits de votre département ministériel .

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C'est ainsi qu'en 1988 et en 1989, j'avais évoqué, pour lademander - et je m'en étais ensuite réjoui -, la décentralisa-tion des crédits du F .I .D .O .M. local . Je m'étais inquiété descrédits affectés au logement et inscrits dans la L .B .U. etj'avais réclamé des crédits supplémentaires pour l'éducationet la formation de nos jeunes . Je m'étais étonné de l'inexis-tence de mesures en faveur d'activités traditionnelles, commel'agriculture, ou en faveur d'activités d'avenir, telles que letourisme, ou encore de secteurs prioritaires comme les trans-ports aériens ou l ' environnement.

J'avais de mime déploré la faiblesse des moyens mis à ladisposition de I'A.N.T., organisme ayant pour vocation l'in-sertion et, projet ambitieux, la promotion de nos compa-triotes installés en métropole.

Cette année, compte tenu du temps de parole qui m'a étéattribué, je dirai, monsieur le ministre, que mes sentiments àl'égard de l ' évolution de ces rubriques traditionnelles sontrestés quasiment inchangés, mis à part l 'effort important faitpar le Gouvernement dans la situation de catastrophe induitepar le cyclone Hugo . Pour le reste, monsieur le ministre, mescraintes demeurent.

En revanche, je m'interroge beaucoup sur trois sujets : lesinstitutions, l ' identification des acteurs de notre développe-ment économique et les moyens de la formation des hommesde l'outre-mer.

Les institutions, tout d ' abord.Le bilan de la décentralisation est à peu près connu et il

est globalement positif. Il nous faut poursuivre dans cettevoie, en approfondissant la décentralisation et en apportantles nécessaires améliorations que réclame la diversité dessituations.

Ainsi que je l'ai souvent dit, ce qui est bon pour tel dépar-tement d'outre-mer ne l'est pas forcément pour tel autre.

En tout état de cause, les Guadeloupéens exigeront d'étreconsultés sur toute question qui conditionne leur devenir . Ilssont convaincus que la loi doit nécessairement être l ' expres-sion de la volonté générale.

Deuxième sujet d ' interrogation : l'identité des acteurs denotre développement économique.

En ce qui concerne le plan local, les choses sont claires :les habitants des départements . et territoires d'outre-mer sontdéterminés à étre les principaux artisans de leur développe-ment économique.

La réalité devient tout de suite plus fuyante quand nouscherchons, dans le maquis des départements ministériels, uninterlocuteur qui se reconnaisse tout du long compétent pouraborder nos problèmes . Trop souvent, nous sommes renvoyésau F.I .D .O.M. Certes, celui-ci est l ' un des éléments indispen-sables des politiques économiques locales, mais il évolue defaçon contrastée d'une année sur l'autre et ses capacités sont,ce qui est normal, limitées . Elles sont de toute façon insuffi-santes compte tenu de l'ampleur de la tâche à accomplir.

II est impensable que, faute de pouvoir bénéficier desconseils des administrations techniquement pointues et descrédits des fonds spécialisés - le F .I .A .T., par exemple - lesopérations que nous jugeons indispensables et qui nécessitentdes financements importants demeurent à l'état de projet.

Troisième et dernier sujet d'interrogation : la formation deshommes dans les départements d'outre-mer . Son caractère depriorité ne s'inscrit aucunement dans les faits.

En premier lieu, nous devons adapter les programmesd'enseignement à la réalité et aux besoins de notre environ-nement.

Les filières techniques actuellement proposées sont sansrapport avec le marché local du travail . En fait, nous fabri-quons des chômeurs . D'autant que les jeunes sortant du cyclecourt ne trouvent pas de place en première d'adaptation deslycées et sont ainsi exclus de l'objectif national consistant àconduire 80 p. 100 d'une classe d'âge au baccalauréat.

En second lieu, nous manquons de moyens.Je pourrais illustrer mon propos par de multiples exemples.

Cependant, je m'arrêterai sur le sort réservé à l'U .F.R. dessciences médicales de l'université des Antilles et de laGuyane . Cette U .F .R., créée en 1985, est dotée d'un troisièmecycle depuis 1988 . Elle regroupe 170 étudisnts, répartis surtrois sites, Guadeloupe, Martinique et Guyane . Mais elle estprivée de locaux et fonctionne avec un encadrement pédago-gique réduit à huit enseignants et des effectifs A.T.O .S. déri-soires puisqu'ils sont limités à trois postes .

Or l'enjeu est considérable puisque, de l'avis des profes-sionnels, compte tenu du faible nombre d'originaires desAntilles et de la Guyane dans les U .F.R. médicales métropo-litaines et du laminage de nos compatriotes du fait desconditions de sélection en métropole, nous parviendrons d'icipeu à une élimination de l'élément antillo-guyanais des spé-cialités et même de la profession médicale.

La question des moyens et de l'imolantation d'un premiercycle à I'U .F .R . des sciences médicales des Antilles et de laGuyane appelle donc une réponse urgente.

Monsieur le ministre, je vous remercie de bien vouloirprendre en compte ces quelques remarques dans troisdomaines de la plus grande importance : les institutions,l'identification claire de nos partenaires au sein de l'ensembleque forme le Gouvernement et les moyens consentis pour laformation des hommes de l'outre-mer. Je demeure confiantcar je suis sûr que, comme toujours, vous mettrez le plusgrand soin à rechercher des réponses adéquates à nos préoc-cupations. (Applaudissements sur les bancs des groupes socia-liste et communiste et sur &vers bancs des groupes Union pourla démocratie française et de l'Union du contre .)

M. le président . La parole est à M . Auguste Legros.

M. Auguste Legros . Monsieur le ministre, je déplore toutparticulièrement que sotte voyage à la Réunion ait eu lieu àla veille de ce débat . Sans doute était-il programmé avant lechangement intervenu dans l ' ordre du jour de l'Assemblée.Toujours est-il que je regrette de n'avoir pu vous rencontrerdans mon département.

Aujourd'hui, les lycéens sont dans la rue et les Françaisd'outre-mer pourraient eux aussi venir manifester leurmécontentement . Dans son rapport, la commission de la pro-duction et des échanges a dressé un bilan extrêmement gravede la situation des départements d'outre-mer, alors même quela conjoncture était favorable.

Presque tous les secteurs sont en difficulté . La balancecommerciale de nos départements n'a jamais été aussi mau-vaise, l'agriculture a subi les chocs des catastrophes natu-relles, les entreprises du bâtiment enregistrent un ralentisse-ment, la loi de programme va expirer dans un an et, avecelle, tous les avantages que nos économies en ont tirésdepuis 1986.

Le rapport Ripert avait fait naître dans nos départementsde très grandes attentes. Lors du débat de juin dernier, jem'étais inquiété de l'absence de mesures concrètes à prendredans l'immédiat, ce qui risquait de renvoyer le financementde ces mesures au budget de 1992 . A l'époque, vous m'aviezrépondu que la nécessaire concertation allait intervenir trèsvite et que les premières mesures pourraient trouver une tra-duction budgétaire dès 1991 . La balle se trouve maintenantdans le camp des assemblées locales et des partenairessociaux, si bien que, dans le budget qui nous est soumis,nous n'avons trouvé aucune mesure significative pour l'appli-cation du rapport Ripert.

II y a simplement eu un rattrapage du S .M .I .C . à la Réu-nion, mais le projet de budget ne donne aucune indicationcomplémentaire . Je crois même que vous venez de déclarer àla Réunion que l'égalité sociale - celle-là seulement - ne seraatteinte qu'en 1995, avec de toute façon un S .M .I .C. inférieurde 20 p. 100 au S .M.I .C . métropolitain.

M le ministre des départements et teriitoirea d'outre-mer, porte-parole du Gouvernement . Puis-je vous inter-rompre 7

M. Auguste Legros . Je vous en prie.

M . le président. La parole est à M . le ministre avec l ' au-torisation de l'orateur.

M . le ministre des départements et territoiresd'outre-mer. Monsieur le député, lors de mon voyage àla Réunion, où je regrette comme vous que nous n'ayons punous rencontrer, l'occasion m'a été donnée de faire le pointsur l'évolution envisagée par le Gouvernement pour l'aligne-ment des S .M.I .C . Selon un quotidien, celui où vous avezvraisemblement puisé l'information dont vous faites état, leS .M .I .C- local, malgré les rattrapages, conserverait en 1995 unretard de 20 p . 100 par rapport au S.M.I .C . métropolitain.Cette information est erronée et nous l'avons signalé aujournal en question . Je croyais pourtant avoir été très clair à

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ce sujet : l 'application d'un certain nombre des propositionsdu rapport Ripert sera réalisée au l er janvier 1995 . L'égalitésociale pour le S .M .I .C . et les prestations sociales sera effec-tive à cette date . Pour le S .M.I .C ., nous procéderons d'ici làpar étapes mais, au tertre de ce processus, aucun retard nesubsistera par rapport à la métropole.

M . Auguste Legros. Monsieur le ministre, je prendsbonne note de cette précision, dont je n'étais effectivementpas informé. Mais l 'égalité sociale est, à mon sens, unenotion globale qui recouvre à la fois le logement, l'éducationet l'emploi . Or les nombreuses mesures qu'elle implique nesont pas traduites dans votre budget.

La loi de programme s ' était fixé comme objectif la réalisa-tion de l'égalité sociale deux ans avant la date que vousvenez d ' indiquer . Certes, nous ne sommes plus à deux ansprés, mais cette lui vivra sa dernière année en 1991 et toutesses conséquences positives viendront à expiration . Je mepermets moi aussi d'insister, après M . Virapoullé etMme Michaux-Chevry sur les mérites de la défiscalisation, iaseule mesure qui ait vraiment créé des emplois à la Réunion.Ses avantages dépassent largement ses inconvénients.

Au mieux, face à l'attente des populations, votre projet debudget accorde aux U.O.M.-T.O .M. une priorité secondaire,une priorité de seconde zone . Tous les clignotants sont aurouge vif - chômage, P.I .B ., logement, encadrement, éduca-tion nationale, balance des paiements etc . - mais vous nousproposez une progression de 5,4 p. 100 seulement des crédits.C'est à peine la prise en compte de la dérive des prix outre-mer . Cela n'a plus rien à voir avec un budget destiné à faireface à une crise économique et sociale majeure.

Encore l'augmentation des dépenses ordinaires n'est-elleque de 1,6 p . 100, et celle des autorisations de programmedes F .I .D .O .M. décentralisés, instrument privilégié de l'inter-vention économique pour les collectivités locales de0,5 p. 100 seulement . Comment interpréter également larégression de 5 p. 100 des interventions publiques endépenses ordinaires ? On ne voit pas très bien, dans cesconditions, où se trouve le grand souffle décentralisateur.

En ce qui concerne enfin le service militaire adapté, dontchacun admet l'importance pour les jeunes d'outre-mer, sesautorisations de programme diminuent de 28 p. 100 et sescrédits de paiement de 48 p . 100. La caricature cache tou-jours un fond de vérité et Mme Michaux-Chevry nous a dit

lue les travaux d'intérêt local régressent de 42 p . 100 pen-ant que les frais de réceptions et de voyages exceptionnels

augmentent considérablement.

Il ne suffit plus aujourd'hui d'arriver dans les D .O .M . etde dire aux habitants : nous prévoyons, nous envisageons,nous allons faire 1 Votre discours, pour être crédible, dort êtresuivi d'actes . Mais nous risquons de voir reculer d'une annéesupplémentaire les actions indispensables promises etattendues.

Je sais que tous les problèmes ne sont pas du ressort devotre ministère et que le budget de l'outre-mer ne couvrequ'une petite partie de l'effort bugétaire total .. Qu'on nouspermette donc enfin, et c'est là une réclamation que je faisdéjà depuis plusieurs années, de juger sur pièces la politiquedu Gouvernement. II serait grand temps que le Parlementdispose, au moment de la discussion budgétaire, d'un docu-ment indiquant clairement tous les crédits réservés auxD.O.M.-1'.O .M. pour l'année à venir . Le simple bilan de find'exercice présenté près de deux ans plus tard ne nous suffitpas . Faute d'une pareille approche, nous ne pouvons quenous renvoyer des affirmations et des dénégations stérilesconcernant ce budget.

J'aimerais également que votre ministère nous présenterégulièrement une approche globale de la situation desD.O.M., afin de nous permettre de suivre le processus de rat-trapage annoncé dans les discours officiels . En particulier,quel sera le calendrier précis des actions de rattrapage pouraller vers l'égalité et quelle en sera la traduction budgétaire ?Quel sera l'instrument juridique et financier qui prendra lasuite de la loi de programme ? Est-il prévu, comme l'ademandé le conseil régional, de faire bénéficier les régionsd'outre-mer d'une baisse homothétique du taux majoré deT.V .A. ?

La liste des interrogations est longue . Elle pourrait toucherl'enseignement, la solidarité, le système éducatif, etc .

Monsieur le ministre, vous aurez le dernier mot dans cedébat mais, avec les seules promesses et les seules déclara-tions d'intention, on ne peut faire une politique à long terme.Surtout elles ne suffisent plus.

Je ne vois pas de grandes ambitions dans ce projet debudget . Je pourrais dire, après d'autres, que c'est un budgetde routine qui ne prépare pas l'outre-mer aux difficultés quil'attendent, en particulier avec l'ouverture du grand marchéde 1993 et la fin de la loi de programme . Je souhaite que desréponses précises soient données à ces questions . (Applaudis-sements sur les bancs des groupes du Rassemblement pour laRépublique, Union pour la démocratie française, et sur quelquesbancs du groupe de l'Union du centre .)

M . le président . La parole est à M . Ernest Moutoussamy.

M . Ernest Moutoussamy. Monsieur le président, mon-sieur le ministre, mes chers collègues, la discussion de cebudget se déroule, s'agissant du département de la Guade-loupe, sur fond de crise et de conflits sociaux qui traduisentun mécontentement grandissant du monde du travail . Plutôtque de disserter autour des chiffres de votre budget, je vou-drais rapidement, monsieur le ministre, compte tenu descinq minutes dont je dispose, souligner que le marasmesocial actuel, caractérisé par la récession économique, ladég.adation des moeurs et des valeurs, le parasitisme social,inquiète tous les responsables.

L'augmentation des dépôts de bilan, la chute du taux decouverture des importations par les exportations, les spécula-tions de toutes sortes, le trafic de drogue, le chômage, ladélinquance, l'angoisse 6e l'Acte unique européen, les gravescarences de fonctionnement que connaissent les juridictionsen raison des insuffisances tant en moyens matériels qu 'enpersonne'., démontrent qu'il faut changer les recettes tradi-tionnelles et ouvrir d'autres perspectives, particulièrement àla jeunesse et au monde du travail.

Cela implique la mobilisation de toutes les énergies pourélaborer un plan rationnel de développement, de reconstruc-tion et d'organisation administrative et institutionnelle du ter-ritoire.

Construire l'avenir, c'est lutter contre les discriminations,travailler à la formation professionnelle de la jeunesse, pro-mouvoir un développement productif générateur d 'emplois etavancer vers le plein exercice de la responsabilité.

Or, monsieur le ministre, nous ne sommes pas tout à faitsur cette voie. En effet, l'on tente de régler le sous-développement par le développement de la consommation encréant toutes sortes de besoins auxquels on répond essentiel-lement par des transferts sociaux. L 'avenir de l 'industriesucrière est pensé plus en termes de liquidation qu'en termesde sauvegarde du patrimoine et de rationalisation de laculture de la canne à sucre . Aucune étude sérieuse n'a étémenée dans ce domaine . Les cadres communautaires d'appuiet le P.O.S .E .I .D.O.M . ne prennent pas suffisamment encompte les spécificités locales et les intérêts économiques desdépartements d'outre-mer.

D ' ailleurs, notre collègue Jérôme Lambert, dans son rap-port pour avis, insiste sur la nécessaire protection des princi-pales productions des départements d'outre-mer . Sans cetteprotection, c'est la ruine de l'économie agricole et ta dispari-tion de 15 000 emplois . C'est pourquoi, dans l'immédiat,faute d ' un statut spécifique de coopération avec l'Europe quenous réclamons avec force, il faut arracher une politique dedérogation et de protection, si l'on ne veut pas que la C .E.E.« éteigne » les départements d'outre-mer et les transforme ensimples comptoirs de redistribution.

En Guadeloupe, l'école souffre toujours de discriminationset de maux insupportables . Sachez, monsieur le ministre, queplus d'un siècle après Jules Ferry l'école, chez nous, n'est pasencore gratuite puisque les parents doivent acheter lesmanuels et le matériel scolaires, contrairement à ce qui sepasse ici, ce qui leur coOte entre 700 et 900 francs par enfantscolarisé à l'école primaire.

Sur le plan politique, la décentralisation a atteint très viteses limites car, face au veto du Conseil constitutionnel, ellen ' a pas pu rompre avec l'assimilation et s ' est engluée dansun bicaméralisme ne permettant pas de poser objectivementet sérieusement les problèmes du développement . Aussi faut-il en finir avec les tergiversations, le laxisme et le régime desdeux assemblées locales .

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2• SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

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Les Etats généraux du mois de juillet en Guadeloupe, lesélections régionales de la Martinique ont démontré que leproblème des institutions ne pouvait pas être occulté. Aujour-d'hui, un consensus guadeloupéen semble se dégager pourexaminer cette question dans le cadre de la définition d'unnouveau type de rapports avec la France et l'Europe.

La départementalisation décentralisée ou régionalisée et laséparation d'avec la France peuvent être écartées pour créerles conditions les meilleures de conception d'un projet desociété pour la Guadeloupe.

Le projet de loi relatif à la Corse, que vous soutenez, mon-sieur le ministre, me laisse penser que, prochainement, nousdébattrons ici-même de l 'avenir institutionnel de la Guade-loupe et de ses dépendances . Nul ne peut en effet admettreque le Gouvernement accepte une réforme institutionnellepour la Corse, ce qui est à son honneur, et qu'il refuse lamême procédure aux départements d ' outre-mer et particuliè-rement à la Guadeloupe. Cela n'est pas concevable t Pournous, de toute urgence, dans un large débat démocratique, ilfaut tenir une table ronde sur l 'avenir institutionnel de laGuadeloupe, de façon à jeter les bases d'un statut spécifique.

Avec la Corse, le Gouvernement a choisi la bonne voie.Surtout, qu'il ne s'arrête pas en si bon chemin t

En terminant, monsieur le ministre, je voudrais vous poserquelques questions précises.

La Guadeloupe a été sérieusement touchée par les pluiesdiluviennes des 9, IO et I1 octobre dernier . Ma commune deSaint-François - que vous connaissez bien - a subi desdégâts évalués à près de 4 millions de francs, après les35 millions de francs de dommages que lui avait infligés lecyclone Hugo. Pensez-vous intervenir auprès du Gouverne-ment pour que le département soit déclaré en état de catas-trophe naturelle ?

Depuis 1985, le ministère de la défense envisage d'im-planter à Saint-François un champ de tir et de manoeuvresmilitaires sur prés de 200 hectares de terrain . Cette infrastruc-ture n'a pas sa place dans la seule station balnéaire de laGuadeloupe et suscite une vive opposition . Pouvez-vousobtenir du Gouvernement l'annulation de ce projet ?

Après le passage du cyclone Hugo, la lutte contre l 'habitatinsalubre est une priorité dans la reconstruction de la Guade-loupe . Des moyens non négligeables y sont consacrés, mais ilserait bon d ' accompagner ces efforts par une vraie politiquede la ville avec des interventions de la délégation interminis-térielle à la ville . Pouvez-vous intervenir en ce sens, notam-ment pour la commune de Saint-François qui souhaiteconclure avec l'Etat un contrat ville-habitat ?

La crise de l'industrie sucrière atteint son paroxysme . Pouréviter que la restructuration ne soit pas la liquidation, commece fut le cas dans le passé, quels sont les moyens que vousentendez mettre en oeuvre pour sauvegarder la culture de lacanne à sucre et les usines sucrières ?

Enfin, et ce sera ma dernière question, entendez-vous,monsieur le ministre, étendre à la Guadeloupe le bouclage del 'allocation-logement ? (Applaudissements sur les bancs dugroupe communiste.)

M . le président . La parole est à M . Henry Jean-Baptiste.

M. Henry Jean-Baptiste . Monsieur le président, mon-sieur le ministre, mes chers collègues, deux traits caractéri-sent, pour l'essentiel, le budget aujourd'hui soumis àl'examen et au vote de notre assemblée.

En dépit d'un pourcentage d'augmentation de 5,4 p. 100par rapport à 1990, votre budget, monsieur le ministre, nereprésente plus que 6 à 7 p . 100 environ du total des créditsengagés par l'Etat pour l'ensemble de l'outre-mer français.

L'observation n'est pas nouvelle et, l'an dernier, à cettemême tribune, j'ai eu l'occasion de dire que cette évolution,de plus en plus marquée d'un exercice budgétaire au suivant,e pour conséquence d'accroître sensiblement les responsabi-lités du ministère et de ses services, dam ses fonctions d'im-pulsion, d'entralnement et de coordination des autres minis-tères vis-à-vis de l'outre-mer.

Ainsi, à Mayotte, nous voyons bien toute l'utilité de tellesinterventions dans l'élaboration des ordonnances prises enapplication de la loi d'habilitation du 23 décembre 1989 etdont les Mahorais attendent - faut-il le répéter : dans lesdélais prévus par le législateur ? - la rénovation du régimejuridique applicable à notre collectivité territoriale.

C'est pourquoi nous approuvons sans réserve les diversesmesures visant à améliorer les moyens et à renforcer la voca-tion interministérielle de vos services, monsieur le ministre.En ces périodes de difficiles arbitrages budgétaires, l'exercicede ces fonctions de coordination est, à nos yeux, particulière-ment important.

Plus contestable en revanche nous apparaît le pratique,dont je me suis à plusieurs reprises inquiété, qui aboutit à laprésentation des crédits de l'outre-mer par gravides masseslargement indifférenciées et sans répartition des dépenses parterritoire, en raison notamment de la non-affectation préa-lable des crédits du FIDOM et du FIDES.

Cette présentation par grandes « actions » communes àl'ensemble des départements, territoires et collectivitésd'outre-mer n'est pas satisfaisante ; elle n'est pas, en tous cas,suffisante . D'ailleurs la commission des lois s'est fait l'échode cette préoccupation et je m'en félicite, monsieur le prési-dent Michel Sapin.

II faut répéter ici que l'outre-mer français se caractérise- chacun le sait bien - par l'extrême diversité des situationsgéographiques, économiques, sociologiques et humaines . Ilest, de ce fait, évident que l'impact de la dépense publique,son effet d'entraînement dans le processus de développement,l'évaluation des actions, l'appréciation des résultats ne sontpas les mêmes, ici ou là . C'est pourquoi, à l ' U .D.C., noussommes également attentifs à l'affectation, à la répartitiondes crédits et, surtout, aux modalités d'exécution et aurythme de réalisation de la dépense.

En réalité, cette approche globale inscrite dans votrebudget, monsieur le ministre, connaît une exception : ce sontles crédits de la Nouvelle-Calédonie, regroupés et répertoriésà l'article 68 .93.

Pour avoir depuis longtemps approuvé et soutenu les poli-tiques de rattrapage, de rééquilibrage et de mise à niveau enNouvelle-Calédonie, je n'en suis que plus libre pour vcusposer, monsieur le ministre, la question suivante : est-ilnormal, est-il raisonnable que les seules priorité retenues eten tout cas affichées par votre budget soient celles, et seule-ment celles qu'inspire l'urgence politique 7

C'est pourquoi, je tiens, au nom de la population maho-raise, à vous indiquer quelques priorités essentielles à lapoursuite des progrès économiques, sociaux et culturels deMayotte et qui appellent, monsieur le ministre, des engage-ments précis du Gouvernement.

Ces priorités résultent d'une triple nécessité : améliorer lamaîtrise foncière à Mayotte ; assurer l'évolution du systèmeéducatif, en fonction de nos besoins réels et Jean-Paul Vira-poullé en a parlé tout à l ' heure avec beaucoup de force ;favoriser dans le processus du développement économiquemahorais les « micro-réalisations ».

Les insuffisances et l'archaïsme du droit foncier applicableà Mayotte, les lacunes du système d'immatriculation desterres et, pour tout dire, l'absence d'un véritable cadastreapparaissent, de plus en plus, comme un goulot d'étrangle-ment qu'il est urgent de supprimer. L'effort de constructionsociale se trouve aujourd'hui ralenti par le manque de ter-rains disponibles et de réserves foncières. Le domaine publicn'est toujours pas clairement délimité et la plus grande incer-titude règne sur les droits et les limites de nombreuses pro-priétés privées, bâties ou non bâties.

Une clarification s'impose afin d'assurer les conditionsd'application du nouveau code de l ' urbanisme . Il s'agit ausside déterminer, suivant un plan d'ensemble, la surface agri-cole utile au développement des productions locales ou lessuperficies nécessaires aux opérations d'équipement publicainsi qu'aux projets d 'aménagement du territoire et demodernisation des villages et communes.

Sur ma demande, une mission du C .N.A .S .E.A., le centrenational pour l'aménagement des structures des exploitationsagricoles, s'est rendue à Mayotte en 1987 pour établir un dia-gnostic et proposer des solutions . Cependant les recomman-dations relatives à la mise à jour du livre foncier tardent tropà trouver une traduction dans les faits . Lorsque l'on nousobjecte le coût trop élevé de l'établissement d'un cadastre àMayotte, je réponds, monsieur le ministre, que c'est le typemême de la dépense productive . La modernisation du régimefoncier permettrait en effet de jeter les bases d'un systèmefiscal plus cohérent, notamment en ce qui concerne le fonciernon bâti . En outre, se trouverait relancé l'investissement

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2 s SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

immobilier, industriel et touristique, actuellement freiné parla confusion, la complexité et la précarité de la situation desterrains à Mayotte.

Mesdames, messieurs, la crise de l'enseignement, chacunen a pleinement conscience aujourd'hui à Paris - d'ailleurs,avec mon collègue Gérard Grignon, nous venons de recevoir,au nom de l'Union du centre, une délégation de lycéens -,est ancienne, profonde et générale . Mais, à l'échelle deMayotte, c ' est d'abord une crise de croissance et, d'une cer-taine manière, la conséquence des progrès réalisés au coursdes dernières années.

II s'agit, en effet, de faire face aux conséquences de lacroissance démographique et de l'augmentation des effectifs.

II importe également de résorber progressivement lesretards du passé et de répondre à l'attente et aux exigenceslongtemps différées des familles mahoraises dans le domainede l'éducation.

II faut donc élargir les capacités d'accueil des établisse-ments d ' enseignement en prolongeant et en amplifiant le pro-gramme retenu dans la convention entre l'Etat et Mayotte,qui arrive à son terme en 1991 . A cet effet, nous avons saisile ministère de l'éducation nationale, ainsi que vos services,monsieur le ministre, d'un projet d avenant à la convention,auquel la population et les élus de Mayotte attachent la plusextrême importance.

Je souhaiterais vous convaincre, monsieur le ministre, que,pour répondre aux changements d'ordres de grandeur aux-quels nous assistons aujourd'hui dans le système éducatif deMayotte, certaines pratiques budgétaires ne suffisent plus . Jeveux parler des simples redéploiements de crédits desdiverses directions au profit de Mayotte ou des transferts decharges d'un ministère à l'autre, qui ne sont pas accom-parés de ressources nouvelles . L'avenant à la conventiondoit donc garantir à Mayotte, sur la période 1992-1996, lesmoyens que l'Etat entend consacrer à cette nécessaire évolu-tion du système éducatif.

II faut enfin que les engagements pris soient tenus.Monsieur le ministre, lors d'une récente réunion sur le

nouveau système d ' association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté européenne, vous avez reconnu, avecnous, que plusieurs territoires ou collectivités d'outre-mersont des micro-économies et par conséquent, qu'ils relèventtrès largement, comme Mayotte, pour leur développement, del'action micro-économique, c'est-à-dire des petits projets.

L'organisme le plus apte à susciter ou à accompagner cetype d'initiatives s 'appelle l'A .N.D.D.O .M ., l ' associationnationale pour le développement de l'outre-mer. Fondée surla recherche et la pratique d'un partenariat Etat-secteur privé,cette association, par la recherche d'une assistance techniqueou financière appropriée ou de participations diverses,contribue à l'émergence de petites entreprises et à la réussitede micro-réalisations.

Or il est navrant de constater que I'A .N.D,D .O.M. a étéprogressivement privée de moyens de fonctionner . La subven-tion de 4,5 millions prévue pour 1989 n 'a été versée, à hau-teur de 2,5 millions, qu'en mai et une partie seulement dureliquat - soit 1,8 million - a été débloqué en juillet 1989,L'A.N.D.D.O.M., n'a rien reçu en 1990 et ses activités s'enressentent, évidemment . C'est, en particulier, le cas deMayotte, où trois micro-projets intéressants et significatifssont aujourd'hui au point mort : une coopérative de menui-serie, une entreprise également coopérative de valorisation dupoisson' et un projet d ' assistance et de conseil aux petitesentreprises.

Monsieur le ministre, je sais que Nous en conviendrez, lesartisans et entrepreneurs de Mayotte méritent mieux quecette désinvolture, d'autant qu'une telle situation doit êtremise en parallèle avec le volume considérable de crédits duFIDOM qui, faute d'emplois, continuent de faire l'objet dereports, d une année sur l'autre : ainsi près de 612 millionsde franc§ ont été reportés de l'exercice 1989 sur celuide 1990.

Judicieusement utilisée, I'A.N.D.D.O.M. peut devenir - etj'en exprime en même temps la conviction et le souhait -l'instrument de véritables projets et d'une stratégie de déve-loppement adaptés à la situation de nos micro-économies etdont, pour sa part, Mayotte a le plus évident besoin.

En définitive, monsieur le ministre, votre projet de budgetne me semble pas, dans sa présentation « globale », faire uneplace suffisante à de telles préoccupations .

Je vois bien, pour l'administration, tous les intérêts d'unegestion plus souple et fonctionnelle de ces crédits regroupéspar grands thèmes d'action. Toutefois, il faut aussi com-prendre que dans nos territoires - et singulièrement àMayotte - certains retards sont indignes de notre Répu-blique : l'appel et l'urgence des progrès à réaliser requièrent,par conséquent, des engagements plus précis, des prioritésreconnues, affichées et partagées. Il y a donc un équilibre àtrouver entre ces deux exigences qui ne sont nullementcontradictoires.

En somme, monsieur le ministre, si j'osais je dirais quevotre budget pèche moins par actions - comme vous dites -que par omissions 1

Mesdames, messieurs, il est visible que Mayotte a réaliséquelques avancées significatives au cours des récentes années,en particulier depuis la loi de programme de 1986, la conven-tion de 1987 et le contrat de plan de 1988. Par un paradoxe,simplement apparent, les obstacles que nous rencontronsaujourd ' hui sont les conséquences de ces premières entre-prises, décisives mais ponctuelles, de développement écono-mique, social et culturel de Mayotte.

Monsieur le ministre, les Mahorais attendent de vous, devos réponses, l'assurance que nous pourrons désormais, surdes bases sOres et plus larges, poursuivre, obstinément - jeveux dire : en dépit de toutes les pressions d'où qu'elles vien-nent - notre marche en avant au sein de la nation française.

C 'est l 'une des manières dont Mayotte continue d'affirmer,depuis 1841, sa fidélité et son attachement aux valeurs deliberté et de progrès, qui sont aussi celles de la République.(Applaudissements sur les bancs des groupes de l'Union ducentre, du Rassemblement pour la République et Union pour ladémocratie française).

M . le président . La parole est à M. Alexandre Léontieff.

M . Alexandre Léontloff . Je ne peux que me féliciter devotre affirmation, monsieur le ministre, aux termes delaquelle l 'outre-mer reste une priorité budgétaire pour leGouvernement.

Cette assertion ne peut que recueillir l'assentiment des élusde l ' outre-mer, mais également de l ' ensemble de la représen-tation nationale : le retard des départements et territoiresd'outre-mer en matière de développement économique etsocial justifie qu ' ils bénéficient pleinement des effets de lasolidarité nationale.

En effet, loin d'être, comme certains l'affirment encore, des« danseuses de la République », ils contribuent au rayonne-ment de la France et de la francophonie dans le monde et,du moins en ce qui concerne la Polynésie, constituent un élé-ment essentiel de l'effort de défense nationale.

Mais, l'outre-mer est-elle effectivement une priorité ?Le fait que votre budget ne soit pas sacrifié sur l'autel de

la rigueur est le signe de l ' intérêt accordé aux départementset territoires d'outre-mer, mais il ne vous pemiettra pas de lesaider autant que cela serait nécessaire dans leur effort demodernisation.

Je suis sensible à l'augmentation de 15 p . 100 du F .I .D.E .S.qui permettra notamment d ' engager en Polynésie française,au travers de la société Fare-de-France, un programme deconstruction de 279 logements en 1991.

Cette société qui associe, à parité, l'Etat et le territoirefonctionne d'une manière exemplaire et j'aimerais, monsieurle ministre, que, dans les années à venir, l'effort en matièred'habitat soit intensifié, car la mise en place d'une politiquedynamique du logement social conditionne le règlement debeaucoup de problèmes sociaux.

Le territoire de la Polynésie française espère que l'Etataccompagnera son effort selon le calendrier prévu au contratde plan. Je ne peux que me réjouir de la conclusion de cedocument qui montre la voie que doit prendre la coopérationentre l'Etat et le territoire . Cette contractualisation desactions à mener permet en effet à l'Etat de manifester sa soli-darité tout en respectant l'autonomie du territoire . Les Poly-nésiens sont satisfaits du statut d'autonomie interne dont ilsbénéficient depuis 1984, auquel le Parlement a apporté, parla loi du 12 juillet 1990, la modernisation nécessaire.

Certains n'y ont vu qu'une modification institutionnelle,mais, outre des améliorations du fonctionnement du gouver-nement territorial, de l'assemblée territoriale et du comité

a

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2' SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

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économique et social, la loi de juillet 1990 confère au terri-toire des compétences nouvelles dans les domaines de lazone économique exclusive des 200 milles, du contrôle del 'immigration et des investissements étrangers, sans oublier lamise en place d ' un collège d'experts fonciers auprès du tri-bunal et l'institution des conseils d'archipel . Enfin, des com-pétences diplomatiques sont reconnues à l ' exécutif territorialdans la zone du Pacifique.

Je réaffirme que ce statut doit être considéré comme unoutil au service du développement économique, social etculture de la Polynésie.

L'autonomie interne du territoire de la Polynésie françaiseau sein de la République a trouvé désormais son équilibre etsa plénitude sans qu ' il soit besoin de débaptiser la Polynésiefrançaise ou d'instituer un sénat territorial et un président dugouvernement élu au suffrage universel comme le réclamel ' ancien secrétaire d'Etat chargé des problèmes du PacifiqueSud.

Je voudrais, monsieur le ministre, que vous me confirmiezsolennellement que les compétences nouvelles dévolues auterritoire ne seront pas reprises par des réglementations oucirculaires nationales, notamment en ce qui concerne lecontrôle des investissements étrangers . Je souhaite également

tune concertation étroite s'établisse rapidement entre leuvernement et les autorités territoriales pour la mise au

point des transferts de compétences sur la zone économiqueexclusive, plus particulièrement pour les accords de pêche yafférents.

Mais, monsieur k ministre, le budget de votre ministère nereprésente qu'une partie de l'effort effectué au bénéfice del'outre-mer et il conviendrait d'examiner les budgets de l'en-semble des ministères pont apprécier l 'effort consenti parl'Etat au profit du territoire de la Polynésie française et desautres territoires d'outre-mer.

A cet égard, alors que la Polynésie française doit faire faceà une pression démographique considérable, la dotationaffectée par l'Etat à l'enseignement secondaire n'accompagnepas la croissance démographique, mais stagne.

Je suis parfaitement conscient des probtèrnct qui se posentà votre collègue de l'éducation nationale . Mais ce secteur estvital pour le développement économique de l'outre-mer dontles populations ont un besoin de formation considérable . Jene doute pas, monsieur le ministre, que vous vous ferez notreinterprète auprès de votre collègue pour le convaincre de lanécessité qu'il y a à autoriser des créations de postes ennombre suffisant pour accompagner la croissance de nospopulations.

De même, je ne peux que m ' associer au rapporteur pouravis de la commission des lois quand celui-ci, s'il se félicitede l'augmentation du F.I .D .E .S ., particulièrement de la pro-gression de 17,6 p. 100 des autorisations de programme,constate que cet accroissement ne permet pas d'opérer unrééquilibrage entre les territoires d'outre-mer, dont un seul, laNouvelle-Calédonie, absorbe 62,6 p . 100 des crédits inscritsau titre VI de l'action économique.

Monsieur le ministre, depuis plusieurs années, la Nouvelle-Calédonie bénéficie de dotations spéciales de l'Etat pour l'ac-tion économique, notamment pour compenser la baisse descours du nickel . Il est nécessaire aussi que l'Etat accompagnel'effort du territoire de la Polynésie française pour stabiliserle prix d'intervention du coprah, indispensable pour l'équi-libre socio-économique des archipels éloignés . En effet, lachute brutale des cours mondiaux du coprah, qui affectetoutes les économies insulaires du Pacifique sud, entrainedésormais des charges budgétaires annuelles très importantespour le territoire - plus d'un milliard de francs Pacifique -que ne compense nullement le Stabex européen, dont l'appli-cation s'est révélée décevante.

Je profite de cette incidente pour préciser . en réponse auxinterrogations de M . Virapoullé, que le territoire a élaboré unprojet de code de la comptabilité publique qui sera soumis à

assemblée territoriaie, au cours de sa session budgétaire,avant la fin de l'année.

Le projet, qui devrait vous donner toute satisfaction, a étéélaboré en concertation avec les services de l'Etat . II com-

lète l'effort de rigueur budgétaire et comptable entrepris parle territoire qui, dès la fin de 1989, a mis en place, sansattendre la promulgation de la loi du 12 juillet 1990, unmécanisme de contrôle des dépenses engagées .

M. Pourchon a mis en évidence l'acuité des problèmesbudgétaires en Polynésie française, engendrée essentiellementpar une mauvaise progression des recettes fiscales . Celles-cidevraient s'améliorer très sensiblement en 1991 et en 1992par les mesures suivantes : tout d'abord, la récupération desmoins-values budgétaires sur la convention C .E .A.-C .E.P. ;ensuite, le renforcement des services fiscaux du territoirepour lutter contre l ' évasion fiscale ; la modernisation destextes fiscaux, en concertation avec les forces vives du terri-toire, pour les adapter au contexte économique, social etbudgétaire de la Polynésie ; enfin, la progression du niveaude l'activité économique résultant de la reprise de l'investisse-ment privé - d'ores et déjà engagée dans le secteur hôtelier -et le maintien de l'investissement public à un niveau élevé.

II convient de mettre en exergue l ' effort exceptionnel qu'aaccompli le territoire pour apurer les dettes qui subsistaientdepuis de nombreuses années, la plupart antérieures à 1988,afin que le contrôle des dépenses engagées soit une réalité.Un emprunt spécial a été contracté avec votre accord, mon-sieur le ministre, pour l'apurement de ces charges et cetteprocédure exceptionnelle, autorisée par l'assemblée territo-riale, est parfaitement légale et conforme à l ' esprit de rigueuret d'assainissement des finances publiques.

La progression des dépenses a été considérablementfreinée, avec une amputation de 10 p. 100 des crédits defonctionnement au premier semestre, portée à 20 p. 100 audeuxième semestre . Par ailleurs, le blocage des indemnitésdes élus en 1990 sera reconduit en 1991.

Ce souci de rigueur se traduit de nouveau dans le budgetdu territoire par une réduction de 20 p. 100 en 1991 des fraisde fonctionnement des services - hors dépenses de solidarité- sans pour autant que soient sacrifiés les investissements quiconditionnent l'avenir économique du territoire.

Les éléments d'une reprise plus forte de la croissance éco-nomique sont au rendez-vous : une inflation ramenée à0,40 p . 100 sur les douze derniers mois, le taux de chômagele moins élevé de tous les D.O.M.-T.O.M., des projets d'in-vestissement hôtelier d'un montant de 30 milliards de francsPacifique recencés au code des investissements, des projetsd'aménagement et d'infrastructure routière ambitieux, lesphosphates de Matatva, le développement de la perlicultureet de la pêche industrielle.

Des contraintes pèsent cependant lourdement sur l'éco-nomie territoriale : son éloignement et le coût des transports,la baisse du dollar, la dispersion géographique de la popula-tion sur un ensemble grand comme l ' Europe.

Le territoire assume totalement les charges résultant dudésenclavement des archipels, mais l'Etat doit intervenirauprès de la compagnie nationale Air France pour que soitamélioré le désenclavement de la Polynésie française.

L'organisation communale est une autre donnée fondamen-tale de la Polynésie française. Il est, à cet égard, souhaitableque le Gouvernement central prenne conscience de la néces-sité pour les communes, ainsi que l'a fait remarquer le rap-porteur spécial M . Pourchon, d'accéder à une fiscalité spéci-fique . Le territoire ne pourra supporter indéfiniment detransférer aux communes chaque année de 8 à 9 milliards defrancs Pacifique de ees ressources fiscales.

Le projet de loi étendant aux communes la loi de 1982 surla décentralisation se prêterait, à mon sens, à une telleréforme.

Les communes sont de compétence d'Etat . L'essentiel deleurs ressources doit être d'origine communale ou d'Etat.Comme l'a dit le Premier ministre à Tahiti : « Qui paiecontrôle I » et, par conséquent : « Qui contrôle paie l »

L'effort d'assainissement en profondeur des finances terri-toriales ne pourra porter ses fruits que sur plusieurs années.Le territoire espère que le Gouvernement l 'accompagneradans cette démarche.

Sur le plan social, en Polynésie française où le R.M .1.n'existe pas, l'Etat se doit de combler un retard considérableau niveau des personnes âgées et l'année 1991 doit concré-tiser la signature d'une convention augmentant très sensible-ment la part de l'Etat, très faible, dans le coût social despersonnes âgées démunies de ressources relevant de l'officeterritorial d'action sociale et de solidarité, i'OTASS, et cellesrelevant du régime de protection sociale du monde rural, leRPSMR .

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2 . SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

Une inspection générale de l'IGASS est actuellement sur leterritoire et je souhaite que ses conclusions accélèrent laconcrétisation de cette convention.

En ce qui concerne les fonctionnaires d'Etat en poste enPolynésie française, j'aimerais, monsieur le ministre, que soitentamé, une bonne fois pour toutes, le processus conduisantà la mise en place d'une véritable sécurité sociale pour cesfonctionnaires.

Ceux-ci ne disposent pas, en effet, en Polynésie française,du libre choix du médecin ou de l'établissement d'hospitali-sation, ni de la prise en charge des frais pharmaceutiques- hors hospitalisation - et des frais de prothèse dentaire,comme en bénéficient leurs collègues en poste en métropoleou les Polynésiens qui cotisent à la caisse de prévoyancesociale.

Pouvez-vous m'assurer, monsieur le ministre, qu'il est biendans l'intention du gouvernement central de régler avec legouvernement territorial ce problème qui remonte au tempsdes colonies et qui concerne les fonctionnaires d'Etat dePolynésie française, mais aussi ceux . des autres territoiresd'outre-mer ?

Je ne peux également qu'approuver les remarques du rap-porteur pour avis de la commission des lois sur l'administra-tion pénitentiaire, qui demeure à la charge du territoire . Vousaviez, monsieur le ministre, pris lors des débats sur laréforme statutaire des engagements et j'aimerais savoir si cedossier peut aboutir dans un délai raisonnable dans le senssouhaité par le territoire.

Je me félicite, monsieur le ministre, des réunions de travailavec la commission européenne, que vous avez organiséesmercredi dernier.

Les mesures de sauvegarde qui devraient être intégréesdans la décision d'association ainsi que l'affirmation de lanon-application aux territoires d'outre-mer de l'Acte uniquesont de nature à rassurer nos populations. Mais, comme par-lementaire, je suis choqué que les mécanismes du traité deRome ne permettent pas de consulter la représentation natio-nale sur la décision d'association et, comme Polynésien, j'aidu mal à admettre que l'Assemblée territoriale soit totalementexclue du processus de décision.

Telles sont, monsieur le ministre, les réflexions qu'entraînepour moi votre budget . Vous avez réussi à préserver lesactions essentielles mais, pour traduire dans les faits la prio-rité accordée à l'outre-mer, il sera nécessaire dans les annéesà venir d'intensifier cet effort . (Applaudissements sur les bancsdu groupe socialiste et sur divers bancs des groupes de l'Uniondu centre et Un?' pour la démocratie française .)

M . le présidant. La parole est à M, Maurice Louis-Joseph-Dogué.

M . Maurice Louis-Joaeph-Dogué . Monsieur le président,monsieur le ministre, mesdames, messieurs les députés, la dis-cussion des crédits du ministère des départements et terri-toires d'outre-mer est traditionnellement l'occasion d'unbalayage des nombreux problèmes et des grandes difficultésque nous, élus ultramarins, rencontrons quotidiennement surle terrain, problèmes dus essentiellement à l'immense retardaccumulé depuis des décennies.

Je ne faillirai pas, monsieur le ministre, mes chers col-lègues, à la tradition non sans avoir établi le lien entre cetacte éminemment politique que représente le vote du budgetet ses applications dans la pratique.

Que l'on lise les rapports de présentation du budget desdépartements et territoires d'outre-mer ou que l'on vousécoute présenter, monsieur le ministre, les actions entreprises,préparées ou conduites par votre département ministériel, etl'on est pénétré du sentiment objectif que le Gouvernement avraiment fait du développement économique et social desdépartements et territoires d'outre-mer une priorité nationale.

Nous vous donnons donc acte, monsieur le ministre, devotre effort soutenu, de votre volonté constante d'améliorertant le cadre matériel, les infrastructures économiques etsociales, que le développement de r a responsabilité et del'animation locales . Cet effort est d'autant plus méritoire,venant de vous et du Gouvernement auquel vous appartenez,que l'époque que nous vivons, charnière entre la société duXX• siècle et celle du XXI• siècle, est une période de gesta-tion, qui réclame, qui exige des fonds toujours de plus enplus importants et, pour les trouver, probablement une autrenuit du 4 août. Je souhaite que ceux, tous ceux, qui doiventse remettre en cause, ne tardent pas trop à le faire .

Notre but, complémentaire de l'effort que vous consentezpour plus d'égalité, plus de dignité, est de vous aider à mieuxagir pour réussir vite et bien.

Nous avons souvent réclamé plus de responsabilités, unréel pouvoir local . De votre côté, vous nous sollicitez sou-vent, et avec insistance, afin que nous nous définissionsmieux, que nous précisions clairement les limites, lescontours et le contenu des futures relations entre la métro-pole et l'outre-mer . D'ores et déjà, monsieur le ministre,placez les grands services de l'Etat, D .D.E., D.A.F., O .N .F.,l'université, directement et en totalité sous l'autorité desassemblées locales . Là aussi, la gestation est difficile, le jeud'autant plus compliqué que nous sommes encore divisés.

C'est la raison pour laquelle je souhaite que, rapidement,notre sens commun de ia responsabilité pour le présent, maissurtout face à l'avenir, nous rassemble, nous soude afin defaire front uni pour redéfinir nos sociétés d'outre-mer aveclucidité et clairvoyance, en toute logique, et de manièrerationnelle.

Ce nouveau cadre en gestation pour la Martinique doitévoluer rapidement, harmonieusement, par le concours denos volontés conjuguées et des efforts du Gouvernement versplus de décentralisation et une meilleure intégration, à la foisdans son milieu naturel américano-caribéen, et dans celui,plus lointain, mais tout aussi incontournable, que crée l'Acteunique européen.

Des efforts méritoires du côté du Gouvernement, certes,mais on ne peut malheureusement pas dire, monsieur leministre, que chez nous, à la Martinique, le climat soit sereinet l'avenir motivant.

Notre angoisse première, symbolisée par le « grandméchant loup qui va venir nous manger », chanson phare dudernier carnaval, reprise en choeur par la population toutentière, c'est le grand marché européen de 1993.

L'Europe, qui veut priver les collectivités locales, grandesdispensatrices d 'emplois dans le contexte que vousconnaissez, d'une part essentielle de leurs ressources - modi-fication, puis suppression de l'octroi de mer - sans que l'onait dit aux communes quelle sera désormais l'origine de leursrecettes ordinaires.

L'Europe, qui met en péril les deux piliers de notre éco-nomie : le rhum, qui n'obtient pas son appellation contrôlée,et la banane dont les débouchés semblent se réduire commeune peau de chagrin. Leur disparition, ou plus simplementtoute réduction de leur poids économique, sera cruellementressentie et difficilement supportable.

L'Europe qui, d'une façon générale, en menaçant toutesnos activités agricoles - élevage, maraîchage et autres -menace l'existence même de notre agriculture, je devrais direde notre population. Parallèlement, pourquoi jusqu ' ici nousrefuser obstinément la préférence communautaire pour nosproduits ?

Pourtant, conscients des actions positives menées par vouset vos services, avec l'appui du Gouvernement, nous osonsespérer. Avec nous, les milieux socio-économiques, les collec-tivités régionales, départementales et communales attendentqu'au plus haut sommet du pouvoir il soit affirmé, proclamé,et enfin admis par les décideurs communautaires que laFrance est une : le continent et son outre-mer, qui exige untraitement adapté et beaucoup plus juste.

Mais l'Europe n 'est pas, il s'en faut de beaucoup, notreseul souci . Et je souhaite appeler votre attention, monsieur leministre, sur quelques-uns de ces problèmes spécifiques quinous interpellent.

En premier lieu, le danger d'inondations, toujours latent,mais que la tempête tropicale Klaus a exacerbé . A un agricul-teur, conseiller municipal de ma commune, qui m'interrogeaitau sujet de ses plantations, situées dans la plaine duLamentin, qui ont été recouvertes par un mètre cinquanted'eau, j'ai dû répondre que la drague cofinancée par l'Etat,la région et le conseil général ne remit livrée que dans huitmois, de même que l'autre unité de dragage qui pourrait êtreacquise par le syndicat intercommunal des communes duSud . Ces deux engins permettront le nettoyage de la baie deFort-de-France et la mise à «, vieux-fond vieux-bords » denos cours d ' eau, mais que, en tout état de cause, les terresappartenant à cet agriculteur ne pourront 2tre exondées quedans trois à cinq ans au mieux . Je vous laisse deviner laréaction de cet agriculteur : il est resté comme pétrifié . Etmoi sans réponse et sans pouvoir le rassurer .

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ASSEMBLÉE NATIONALE - SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

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Cette anecdote me fait espérer qu'il ne faudra pas attendreune autre catastrophe pour que des mesures logiques et effi-caces soient prises rapidement : le dragage de la baie deFort-de-France et la remise à « vieux-fond, vieux-bord » desembouchures de nos principales rivières.

Seconde préoccupation : la formation des agriculteurs. Surmon territoire est implanté le lycée agricole de la Martinique.Nous disons, nous répétons à l'envi que l'agriculture est lemoyen n° 1 de notre développement économique et social,qu'il nous faut sur ce petit territoire, plus qu'ailleurs, uneagriculture de pointe compétitive . Or l'enseignement dispensépar ie L.E .P.A. ne dépasse pas le niveau du baccalauréat.Donnons-nous les moyens de notre ambition en accordant àcette unité de formation agricole toute la capacité souhai-table, celle de conduire nos jeunes vers les hautes écoles, versdes études agricoles supérieures.

Au nombre de nos préoccupations figure également lastructure foncière de notre île, qui n'a pas beaucoup changédepuis le XIXC siècle, et qui mérite d'être repensée . Sans tropmorceler, nous devons pense' à l'installation rationnelle detous ceux, jeunes ou moins jeunes, qui veulent, qui peuvent,être des agriculteurs performants.

On ne saurait penser agriculture compétitive, même avecdes agriculteurs bien formés, si la question de l'eau n'étaitpas maîtrisée . Il est indispensable, dans cette optique, derégler le problème de l'irrigation du Sud-Ouest, de la plainede Rivière La Manche, de Rivière Salée de la presqu'île sud-ouest face à Fort-de-France à partir de la retenue de Saint-Pierre Manzo. Cette irrigation permettrait, en outre, le reboi-sement qui doit être massif, de tout le Sud, et de la côteCarabe nord.

Je ne fermerai pas le chapitre « Agriculture » sans avoir,au préalable, insisté sur la nécessité vitale de réorganiser noscircuits d'approvisionnement et nos marchés d'écoulement,afin de favoriser la production locale, et de réorienter larecherche, en regroupant les centres et en leur assignantcomme tâche la recherche appliquée, en relation avec lemilieu local, dans le but de trouver des produits typiques àforte valeur ajoutée.

Qui parle de développement, monsieur le ministre, parleégalement de formation et d'éducation.

Nos lycéens de l'Hexagone sont aujourd ' hui dans la rue etmalgré l ' apparent calme qui règne dans les D .O .M. la situa-tion n'est guère plus brillante : dans nos communes, nous res-sentons l'impérieuse nécessité de parfaire les equipements dupremier degré et des maternelles dont ben nombre ont besoind'être reconstruites et modernisées pour répondre pleinementà leur vocation.

Qui parle d'égalité sociale - et je vois sais, monsieur leministre, très sensible à ce sujet - ne peut qu'évoquer lasituation du logement social, élément capital . Si la loi dedéfiscalisation avait notamment comme objectif de relancerla construction, ses effets pervers ont fait grimper les prix desterrains à bâtir à des sommets inquiétants.

Les acteurs sociaux, dans leurs efforts pour construire deslogements à des prix abordables, sont bloqués par le coûtélevé de la maîtrise du foncier et de la viabilisation.

Trois mesures semblent s'imposer : l'exercice du droit depréemption des collectivités par les acteurs sociaux ; l'aide del ' Etat à la viabilisation des terres destinées aux logementssociaux : le conseil régional et le conseil général se sont déjàengagés dans cette voie selon leurs possibilités ; enfin, lecontrôle des prix des matériaux de construction qui sontexorbitants outre-mer.

Telles sont, monsieur le ministre, quelques-unes des préoc-cupations auxquelles il me semble urgent de répondre si l'onveut que nos départements aient une chance quelconque desurvivre au choc qui se prépare.

Je ne voudrais pas terminer cette intervention sans dire unmot de ceux des nôtres qui vivent en métropole, coupés deleur famille, de leurs amis, de leur culture.

Ces "Noirs en France", auxquels un hebdomadaire métro-politain consacre une étude cette semaine, vivent de plus enplus péniblement leur séjour en France pour de multiplesraisons.

Le chômage est plus difficile à supporter en un milieu deplus en plus hostile à l'emploi de l'Antillais . Ils ont des diffi-cultés à trouver un emploi et un logement décent : nombre

des nôtres se voient refuser un logement disponible par desprivés et des sociétés H .L .M. parce qu'ils sont noirs . Rejet deleurs compatriotes métropolitains, voire manifestations deracisme, de plus en plus fréquents, sont le lot quotidien deces Français que l'on considère trop souvent comme desimmigrés, et qui, dès lors, n'ont qu'une idée, dont mes col-lègues sont, comme moi, saisis tous les jours : rentrer aupays, qui par le biais d'une mutation, qui en se débrouillantsur place, qui en démissionnant sans aucune garantie detrouver une situation matérielle meilleure au pays.

Il est urgent, monsieur le ministre, de se pencher sur lemal-être de nos compatriotes . Le problème de la réservationdu plus grand nombre de postes disponibles dans les D.O.M.aux Domiens se pose avec acuité. Il faut « antillaniser » nosgrands services : préfecture, D .D.E., D.A.F., police, douanes.

Augmenter, au plan local, les possibilités de retour ? Créesen métropole les véritables conditions d'une intégrationréussie ? Nous sommes prêts, monsieur le ministre, à vousapporter toute l'aide dont vous aurez besoin.

Monsieur le ministre, que d'efforts et de difficultés nousattendent!

Que votre volonté, celle du Gouvernement, conjuguée àcelle de tous les élus d'outre-mer, ainsi que toutes les forcesvives des D .O .M. se rejoignent en une seule idée : relever ledéfi.

C'est sans doute notre vmu à tous. (Applaudissements surles bancs du groupe socialiste.)

M . le président. La parole est à M. Gérard Grignon.

M . Girard Grignon . Monsieur le président, monsieur leministre, mes chers coilègues, l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon a-t-il un avenir ? Les jeunes Saint-Pierrais-et-Miquelonnais peuvent-ils envisager de vivre et travailler dansl'archipel 7

Le peu de temps qui m'est imparti ne me permet évidem-ment pas de développer totalement cc thème mais, si je suisà cette tribune, monsieur le ministre, c'est parce que je croisen l'avenir de Saint-Pierre-et-Miquelon et de sa jeunesse,mais je sais que c'est aux Saint-Pierrais-et-Miquelonnais eux-mêmes qu'il appartient de le bâtir, et je suis persuadé quemon combat n'est pas vain car j'ai confiance en la jeunesseet je sais qu 'elle saura, le moment venu, prendre ses respon-sabilités.

De cela, monsieur le ministre, nous faisons notre affairecar l'avenir de Saint-Pierre-et-Miquelon dépend aussi de lavolonté politique du Gouvernement de nous doter des outilsindispensables à notre développement. Et de cette volonté,monsieur le ministre, permettez-moi de douter encore.

Certes, il existe des points qui me satisfont . J'en citeraiquelques-uns, avec les remarques qui conviennent et je por-terai la plus grande attention à vos réponses.

Je tiens à revenir sur la pêche industrielle, et les articles duMarin de cette semaine m'y engagent d'ailleurs davantage.

L ' accord d'arbitrage de mars 1989 installe jusqu'à la finde 1991 une situation de pénurie pour les industries de pêchede l'archipel et celles de Saint-Malo . Le Gouvernement aalors réparti les quotas entre les entreprises de l'archipel et laComapêche de Saint-Malo en octroyant de plus à cette der-nière des subventions et des aides à la diversification, l'exclu-sivité des quotas de crevettes au Groenland, en Norvège eten Guyane.

Face au défi lancé par la Comapêche, le Gouvernement estresté ferme et les chalutiers malouins ont momentanémentquitté le 3 P.S ., momentanément car, ainsi que le président dela Comapêche vient d'ailleurs de le confirmer, la raisonessentielle de leur départ est l'absence de poisson dans cette-one à cette période.

D'ailleurs, les élus de Saint-Malo et les représentants de laComapêche ont demandé à rencontrer le Gouvernement pourrenégocier. Certains élus ont déjà été reçus dans les cabinetsministériels. Je souhaiterais que vous me confirmiez lavolonté du Gouvernement, face à ces nouvelles tentatives deremise en question de son arbitrage, de prendre des mesuresindispensables au respect de ces décisions . Vous savez queles moyens de police maritime dont disposent les pouvoirspublics sont insuffisant, monsieur le ministre. Commentcomptez-vous renforcer vos moyens d'action ?

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ASSEMBLÉE NATIONALE — 2• SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

Mais si ce probleme franco-français, nuisible par ailleursaux relations franco-canadiennes, impulsé par la seule Coma-pêche, représente pour l'archipel un danger évident et grave,il s'agit néanmoins d'un danger à court terme. Le véritabledanger, c'est l'après 1991 . Le Gouvernement a-t-il l'intentionde reprendre dès le début de 1991 les négociations franco-canadiennes pour la défense de nos droits de pèche sur labase de l'accord franco-canadien de 1972 afin d'assurer laressource indispensable à l'exploitation et au développementde nos entreprises de pèche ?

A propos du port de Miquelon, lors de la discussion deson budget, le ministre char z de la mer m'a indiqué que lesdix millions qui lui ont été avancés par vos services, mon-sieur le ministre, seraient restitués aux services de Miquelon,par le biais de la loi de finances rectificative de 1990 ou pardécision commune de vos deux ministères en vue de l'ins-cription de nette opération au budget de 1991 . J'aimerais quevous me confirmiez cette décision ainsi que la solutionretenue.

Permettez-moi d'ouvrir une petite parenthèse à propos dumillion qui a été voté pour la protection du littoral l 'autrejour au F.I .D.O .M. Des phénomènes d'érosion récents onttotalement coupé la route de Miquelon et je crois qu'il vafalloir rectifier le tir.

La traduction de la volonté politique du Gouvernement,c'est aussi le contrat de Plan. Ce n'est pas un secret, mon-sieur le ministre . Je vous ai dit en privé que c'était unmauvais contrat de Plan.

Il est mauvais parce qu'il vient d'être signé et que déjàdeux ans se sont écoulés, parce que Miquelon est ignoré, etparce qu'il ne règle en rien le problème des outils indispen-sables à notre développement que sont l'aéroport et le port.

Je : vous accorde que tout n'est pas contractualisé et quevous n'êtes pas totalement responsable de cc manque d'orien-tations claires et donc de l'absence de mise en place desfinancements relatifs à notre désenclavement . Pour signer uncontrat, il faut, en effet, être au moins deux . Ce n'est pastoujours le cas, comme vous avez pu le constater récemment.

C'est pourquoi je réserverai mon vote final, monsieur leministre, car, si j'attends de vous que vous répondiez positi-vement aux questions postes plus haut, j ' attends aussi devoir comment vous réagirez aux brèves remarques suivantes.

A propos de l'aéroport, la construction d'une seconde pistesur l'île de Saint-Pierre ne me semble pas raisonnable . Lesétudes prouvent qu'elle serait inefficace, trop coûteuse etqu'elle se traduirait par une détérioration sans précédent dela qualité de vie des habitants. Chacun sait qu'en raison dela géographie de l'lle et des conditions climatiques de l'ar-chipel il est impossible de le désenclaver à 100 p . 100.

Pourquoi persister dans ce projet irréaliste, sachant qu'unedeuxième piste n'améliorerait la moyenne annuelle de des-serte aérienne que de 4 p . 100 par rapport à la piste actuelle,que, pendant les quatre mois intéressants pour l'archipel aupian touristique, juin, juillet, août, septembre, le taux depénalisation d'une telle réalisation serait de 21 p . 100, que lerare site naturel de Ille encore fréquentable serait définitive-ment saccagé ?

Le désenclavement aéroportuaire de l'île, monsieur leministre, passe par l'amélioration des installations actuelles,par le prolongement de la piste sur la mer, par l'acquisitiond'un appareil adapté, rapide, confortable, et par l'expériencede pilotes compétents comme ceux que nous avons actuelle-ment.

Je rappelle par ailleurs que l'état de la piste actuelle néces-site des travaux importants et urgents.

Monsieur le ministre, deux ans sont déjà perdus . Lesétudes sur le prolongement de la piste actuelle ne sont pasencore terminés, et le conseil général vous en demande unenouvelle.

En ce domaine, je souhaite que le Gouvernement optepour la solution qui soit la synthèse du raisonnable et del`efficace, que vous mettiez tout en oeuvre pour que les tra-vaux commencent enfin dès le printemps prochain, que vousnoua confirmiez pour ce faire, outre les crédits déjà en place,les décisions du Gouvernement d'y ajouter dix-neuf millionspendant quatre ans, financement sur lequel semble planerune certaine ambigutté .

Et que dire de l'amélioration des infrastructures portuairesprévue au contrat de Plan, sinon que ce projet manque d'am-bition, qu'il est pénalisant pour l'avenir, parce qu 'il est enénorme retrait par rapport au projet précédent ? Doter l ' ar-chipel d 'un outil de dé veloppement consiste-t-il à dépenserquarante millions pour la réalisation d'un seul poste à quaisupplémentaire ?

Le port de Saint-Pierre, monsieur le ministre, c'est plus de100 millions de francs par an, 120 emplois directs auxquelss'ajoutent les 360 emplois des entreprises de pêche.

Les ports de Saint-Pierre-et-Miquelon offrent l'avantaged'être les seuls de la région libres d'accès en permanence carils ne sont jamais bloqués par les glaces . Le port me sembleêtre de toute évidence l'instrument privilégié du développe-ment économique de l'archipel au service de la France et del'Europe, d'où l'intérêt de défendre la thèse de l'équidistancepour la détermination de la zone économique exclusive, aveccouloirs d'accès libres aux eaux internationales.

M. Henry Jean-Baptiste . Très bien l

M. Obrard Grignon. Le port d,e Saint-Pierre est apte àcréer de nombreux emplois pourvu qu'on augmente très net-tement sa capacité d'accueil et qu'on y mette en place uneinfrastructure de carénage et de réparation navale . Si lesCoréens, pour ne citer qu'eux, désertent ce port qu'ils fré-quentaient assidûment et livrent leur cargaison en passantaux Açores, c'est précisément parce que nous n'avons pas suleur apporter ce service.

Le projet actuel n'est pas à la hauteur des atouts de l'ar-chipel . Je souhaiterais connaître votre point de vue, monsieurle ministre.

J'aurais bien d ' autres sujets à vous exposer mais j 'y revien-drai tout à l'heure dans les questions . Si vous me répondiezdéjà à ceux que je viens d'évoquer, et dans le sens que j'es-père, nous aurions fait ensemble un pas dans la bonne direc-tion. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et dugroupe de l'Union du centre. )

M. le président . La parole est à .M. Alexis Pote.

M. Alexis Pots. Monsieur le président, monsieur leministre, mes chers collègues, le retard des D .O.M. dans desdomaines aussi importants que l'emploi, la formation, lelogement, la santé est considérable.

La Réunion compte aujourd'hui plus de 46 000 bénéfi-ciaires du R.M .I ., 75 000 personnes sans emploi, soit37 p. 100 de la population active, taux trois fois et demiesupérieur à la moyenne métropolitaine, ce qui révèle unetriste réalité.

Il faut que le Gouvernement se donne les moyens de pour-suivre ler efforts entrepris pour la réduction des inégalités etle développement économique de ces régions . Il doit doncagir, agir vite, notamment sur la formation et l'emploi.

A l'école, les Réunionnais ne bénéficient pas toujours desmoyens nécessaires, principalement en personnel, pour suivreleur scolarité dans les meilleures conditions, ce qui pose laquestion des mesures spécifiques à prendre pour éviterl'échec scolaire. Il convient sans doute dans le très courtterme et pour une ptriode donnée d'instituer des mécanismescorrecteurs au mode de recrutement métropoiitain.

L'objectif, à terme, est donc de donner à une majorité deRéunionnais les meilleures chances d'atteindre un niveaud'études supérieures afin qu'ils puissent accéder plus aisé-ment à l'Institut universitaire de formation des martres . Ainsi,le nombre d'enseignants réunionnais augmentera d'autantplus.

Monsieur le ministre, 70 p. 100 des actifs n'ont aucunequalification à la Réunion . Pour sortir de cette situation post-coloniale, la formation professionnelle continue est un atoutfondamental . La région Réunion s'est engagée de manièrerésolue dans cette voie en faisant de la formation sa prioritéabsolue . L'Etat doit prolonger et renforcer ies effortseffectués en 1989 et 1990.

Une de nos principales préoccupations reste la situation del'emploi . Aussi, les dépenses engagées par l'Etat pour favo-riser les créations d'emplois doivent progresser davantage queles sommes consacrées à l'assistance.

Aidons nos entreprises à résoudre leurs difficultés d'em-bauche en main-d'oeuvre qualifiée par un effort au niveau dela formation . Pour ie recrutement de nouveaux salariés,

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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2. SÉANCE DU 12 NOVEMBRE 1990

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exonérons-les de charges sociales durant plusieurs années . Endonnant aux Réunionnais du travail, nous leur redonnonsleur dignité.

La Réunion est malade de l'assistance qui freine son déve-loppement économique . Il faut donc relancer l'activité écono-mique, une activité saine et créatrice d'emplois.

Deux mesures s'imposent si l'on veut y parvenir :La première consiste en une exonération de 50 p. 100 de

l ' ensemble des cotisations sociales versées aussi bien par les• sociétés que par les entrepreneurs individuels.

En 1988, le montant total des charges patronales s'élevait à1 840 millions de francs. Un abattement de 50 p. 100 le feraitpasser à 902 millions de francs par an . Le différentiel, c'est-

• à-dire le coût de cette mesure, peut, s'il existe une volontépolitique, étre pris en charge par l'Etat . Quand on sait que lasomme attribuée à la Réunion au titre du R.M .I . avoisine lemilliard de francs, un tel effort, dont l'effet sur l'économieest bien plus positif et plus sain, doit être accompli.

A n'en pas douter, les conséquences bénéfiques d'une tellemesure sur l'emploi se feront sentir à court terme, d'autantque la Réunion connalt un fort taux de chômage. Elledevrait, par ailleurs, inciter les investisseurs métropolitains eteuropéens à venir s'installer à la Réunion, générant ainsi unedynamique de développement.

La seconde mesure est la création d'un fonds d'investisse-ment et de développement économique à capitaux publics.Son financement serait assuré par l'Etat et les collectivitéslocales . Les économies réalisées par les administrationspubliques au titre de l 'exonération de 50 p . 100 des chargessociales pourraient notamment être affectées à cette institu-tion . soit la moitié de 869 millions de francs si l'on se fondesur les chiffres de 1988.

Monsieur le ministre, je ne demande pas que l'Etat versedavantage d'argent à la Réunion . Je souhaite simplement queles fonds publics versés soient mieux répartis et servent plusau développement économique qu 'à l'assistance généralisée.

Ainsi, ce développement économique permettra aux Réu-nionnais de bénéficier de meilleures conditions de vie etnotamment de logement . En attendant, l'Etat doit poursuivrel'effort qu'il a entrepris en matière de logements sociaux . Onprévoit qu'en I9 ;3 II n ' y aura plus d'exclus de l'aide socialeau logement en métropole . Qu ' en sera-t-il pour les D .O .M. ?

Il est nécessaire de déterminer sans plus tarder les délaisde réalisation de l'égalité et du développement.

Qu'attend-on pour aligner les allocations familiales desD.O.M. sur celles de la métropole 7 Vous savez que cette dis-position aurait des conséquences économiques favorables encreusant l'écart entre le revenu du S .M.I .C . et celui des allo-cations du R .M.I.

Quand peut-on prévoir un second rattrapage du S .M.I .C . ?Si aucun effort particulier n'est fait en faveur de ces

régions en retard de développement, je doute qu ' elles puis-sent aborder avec succès les échéances européennes.

Monsieur le ministre, j'ai noté avec satisfaction l'augmenta-tion de 5,45 p. 100 de votre budget par rapport à l'annéedernière, mais je constate aussi qu'il reste modeste au vu desbesoins des D .O .M. Cependant, cette augmentation marqueune volonté manifeste du Gouvernement d 'oeuvrer à leurdéveloppement . C'est pour cette raison que je le voterai.(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et dugroupe de l'Union du centre .)

M. I. président . J'informe les orateurs que la petiteréglette lumineuse qui leur indique qu'ils ont dépassé leurtemps de parole est tombée en panne.

Sans doute a-t-elle trop fonctionné avec les quatorze pre-• miers orateurs . (Sourires .)

Monsieur Guy Lordinot, vous avez la parole, sans réglette- ce qui ne signifie pas que votre temps de parole soit infini.(Sourires .)

M. Guy Lordlnot . Monsieur le président, je m'efforceraide ne pas trop dépasser le temps qui m'est imparti . J'estimeen effet que l'exemple donné par mes collègues n'est pasbon, car je sais que les orateurs qui ne sont pas encore inter-venus auraient souhaité ne pas ltre obligés de venir ce soir.Mais nous serons présents à vingt et une heures trente .

Monsieur le ministre, mesdames, messieurs, vous aurezpeut-être l'impression en m'écoutant d'entendre un raya, caril y aura un certain nombre de redites dans mon propos.Elles sont cependant volontaires . Elles ont pour but de mon-trer que, par delà les opinions politiques, l'accord est réaliséentre les élus de l'outre-mer sur un certain nombre de ques-tions fondamentales.

Monsieur le ministre, votre projet de budget pour 1991montre une progression . Il prend en compte les besoins de laNouvelle-Calédonie . Il marque cette année encore dans lebudget général un intérêt marqué pour l'outre-mer . Nos rap-porteurs l 'ont montré ; je n'y insisterai donc pas . Ma brèveintervention portera sur les freins et obstacles à l'indispen-sable développement économique des départements d'outre-mer, notamment à la Martinique . Je les aborderai sous quatretitres : stabiliser les esprits ; unifier la gestion ; développer ;Europe et départements d'outre-mer.

Stabiliser les esprits est nécessaire . Depuis quelques annéesles esprits sont perturbés par la menace qui pèse sur la rému-nération des fonctionnaires et l'insuffisance de celle du sec-teur privé. Notre solution : faire rentrer les 40 p. 100 d'indem-nité de vie chère des fonctionnaires dans leur traitement, afind'éviter les multiples grèves et permettre ainsi aux ensei-gnants de s'adonner sans retenue à leur mission d'éducateurs.Quel élu d'outre-mer accepterait d'ailleurs de voter l'abroga-tion de la loi qui institue l'indemnité de vie chère ?

Il faut aligner le S .M .I .C . outre-mer sur le S .M.I .C . France,avec compensation pour les entreprises, étalée dans le tempset portant sur les charges sociales.

Il faut aussi agir sur les prix, notamment par l'intermé-diaire de l'octroi de mer rénové.

En second lieu, il convient d'unifier la gestion.An moment où la Corse, à laquelle s'applique pourtant le

principe de continuité territoriale, se voit dotée d'un statutd'autonomie, comment concevoir que les départementsd'outre-mer restent régis par un statut bâtard, résultat d'unmauvais compromis datant de 1982 ?

Les résultats des élections régionales à la Martinique mon-trent bien qu'une évolution institutionnelle est très largementsouhaitée . Il convient de passer à la mise en chantier urgentede l'Assemblée qui aura en charge la gestion unifiée de ceuxdes départements d'outre-mer qui le ,souhaitent . L'efficacitéest à ce prix . La logique et le bon sens le commandent.

Unifier aussi - comme en Corse - la gestion de l'eau danstous ses aspects, ressources, distribution, assainissement, nousdonnera un instrument incomparable pour l'aménagementharmonieux du pays.

Développer suppose le maintien des richesses agricolesexistantes et la réalisation de quelques réformes . Parmi celles-ci, j'en citerai particulièrement deux :

Pour élargir notre marché, assumer la libre circulation desbiens et marchandises entre la Martinique et la Guadeloupe.Au nom du Gouvernement, M . Jean-Pierre Soisson a reconnula nécessité d'opérer cette réforme, qui correspond à unevolonté fortement exprimée par l'Union régionale des P .M.E.et les conseils régionaux de la Guadeloupe et de la Marti-nique.

Pour dynamiser notre économie, mettre en oeuvre unnouvel octroi de mer qui, tout en alimentant les budgets descommunes, assurera un soutien effectif de nos industries,soutien amorcé par la défiscalisation . Précisons à ce proposque, s' il convient de moraliser la défiscalisation en annihilantses effets pervers, le moment n'est pas encore venu de la sup-primer.

S ' agissant de l'Europe et des départements d'outre-mer, laréalisation du marché unique en 1993 pose de graves pro-blèmes aux départements d'outre-mer . Soyons cependantconscients que ces problèmes viennent non du statut desdépartements d'outre-mer par rapport à l ' Europe, mais del'intégration de la France elle-même à la Communauté . C'esten effet cette intégration de la France qui interdit le maintiende l'organisation nationale de marchés et compromet de cefait l'avenir de notre économie bananière.

Que cela n'empêche pas le Gouvernement d'obtenir commepour l'Espagne que l'organisation du marché bananier resteen vigueur jusqu'en 1995 . Nous avons besoin de ces troisannées supplémentaires.

Que cela n'empêche pas le Gouvernement d'obtenir que,comme pour l'octroi de mer, un délai de dix ans nous soitdonné pour le rhum et l'ananas . Nous avons besoin de ce

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délai supplémentaire. Notre économie repose sur ces produc-tions . Il faut à tout prix les maintenir . Il faut les défendrecontre le Cameroun, qui s'apprête à détruire notre bananedans les conditions mêmes où notre ananas frais a été éli-miné du ma' ché.

Assurer la survie des départements d'outre-mer, en cettepériode difficile où la Communauté européenne en construc-tion exige de tous ses membres et de tous ses partenairesA.C.P. des sacrifices, impose aux populations d'outre-mer deredoubler d 'efforts.

Enseigner l'effort à tous : telle est la mission retrouvée del ' éducation nationale à la Martinique . Tel doit être l'objectifde tous.

Pour mobiliser toutes les énergies dans l'effort pour lerenouveau des départements d'outre-mer, quelques solutionsviennent d'être proposées : stabiliser les esprits en réglant leproblème des rémunérations et des prix, unifier la gestion desdépartements par l'instauration d'un exécutif unique émanantd'une Assemblée unique dans les départements d'outre-merqui le souhaitent, développer les départements à partir deleurs ressources actuelles, pour lesquelles la préférence com-munautaire doit s ' appliquer, redynamiser la machine éduca-tion.

Monsieur le ministre, le Gouvernement a-t-il bienconscience de l'urgence qui s'attache à appliquer ces solu-tions ?

A-t-il bien conscience que c'est de sa volonté d'enclencherce processus de réformes que dépend l'attitude de la jeunessede nos pays 7

Monsieur le ministre, gardons-nous de ce que Serge Julyappelle dans libération d'aujourd'hui la paraplégie gouverne-mentale !

L'exemple de la Nouvelle-Calédonie et de la Corse nousinvite à méditer cette maxime : « Ce n'est pas par la révolu-tion, mais dans l'évolution que toutes les choses s'accomplis-sent » . (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste .)

M. le président . La parole est à M . André Thien AhKoon.

M . André Thien Ah Koon . Monsieur le ministre, nousnous retrouvons pour la deuxième année consécutive pourdiscuter de votre budget . Bien qu'une augmentation figuredans votre budget, nous savons que la Nouvelle-Calédonie ensera pratiquement la seule bénéficiaire.

Vous savez pourtant que les problèmes des départementsd'outre-mer et des territoires d'outre-mer sont immenses etque ceux qui ne sont pas sous le feu de l'actualité souffrentautant que les autres.

Prenez garde, en favorisant certains territoires, de créer uncertain sentiment de frustration chez ceux qui auront l'im-pression d'être abandonnés. Il ne serait pas bon d'accréditerl'idée qu'il suffit d'être turbulent pour être payé de retour.

Monsieur le ministre, il faut étre raisonnable, patient etjuste . Vous avez donc eu raison d'aborder de front la ques-tion de l 'égalité sociale, en proposant des mesures, mais aussides réponses qui clarifient certaines ambiguTtés, notammentquant aux droits sociaux des agents de la fonction publique.

Si l'extension du R.M .I . à la Réunion est critiquée danscertains milieux bien-pensants, sinon caricaturée par une cer-taine presse nationale, mon expérience de maire m'autorise àvous dire que vous avez bien agi en faveur des pauvres, pour

qui le revenu minimum est synonyme de justice sociale etn'égalité.

Bien entendu, certains collègues ont parié ici d'une poli-tique d'insertion . Je pense que vous n'utilisez pas assez defaçon dynamique la créance de proratisation qui permettraitde mettre en place un programme ambitieux de formation etd'insertion.

N'allons pas affronter le Marché commun en 1993 avec ceque certains ont pu appeler ici « l'entretien des chômeurs »- ou du chômage . Il existe des technologies nouvelles quiappellent la mise en place de formations susceptibles dedonner des débouchés aux jeunes au plan européen . C'est lecas des tours à commande numérique ou de la conduited'engins de travaux publics, pour lesquels les équipements

sont tellement élevés qu'on ne trouve, ni à la Réunion ni sansdoute dans les autres départements des formations qui pour-raient leur être offertes.

On peut dire que le R .M .I . est une première démarche dereconnaissance vers !e statut de citoyen français.

Par conséquent, au nom de la population de la Réunion etde nos enfants, je voudrais vous adresser l 'expression denotre gratitude.

Avec le réalisme qui s'impose, je me dois de marquer àvotre actif l'extension des textes concernant : les assurancescontre les risques naturels et cycloniques ; les travaux impor-tants que vous avez réalisés dans le cadre duP.O .S .E.I .D .O .M. et les excellents résultats que vos avezobtenus auprès de la Communauté économique européenneconcernant le maintien de l 'octroi de mer ; le démarrage destravaux de basculement de l'eau, qui permettra la mise envaleur d'importantes surfaces de l 'ouest de file ; la mise enœuvre d'un programme ambitieux en matière de constructionde logements sociaux.

A cet égard, vous me permettrez de vous faire plusieursréflexions.

Premièrement, en tant que parlementaire, je n'accepteraipas qu'une « vivisection » soit opérée sur notre dotationde 1989 et 1990. Car les fonds prélevés sur l'égalité socialedoivent revenir aux familles réunionnaises concernées, et riend'autre . Les programmes devront être maintenus_, et il seraitbon d'adapter les financements aux besoins exprimés sur leterrain, notamment en matière de maîtrise du foncier.

Deuxièmement, dans ce schéma, des mesures de défiscali-sation devront s'appliquer aux logements sociaux et profiter,entre autres, aux artisans. Des collègues ont demandé unesuspension de séance pour discuter de ce point . Nous devonsêtre très vigilants à cet égard, dans la mesure où des millierset des milliers d'artisans dans notre département sontconcernés par ces mesures de défiscalisation.

Vous me permettrez, monsieur le ministre, de regretter avecamertume nue les promesses d'indemnisation concernant lecyclone Firinga n'aient été que partiellement tenues . Il fautrappeler que ce cyclone, d'une violence sans précédent, a faittrès mal et qu'il est encore aujourd'hui la cause de grandesdifficultés.

Nos planteurs et nos éleveurs subissent, après Firinga, unedure sécheresse qui aggrave encore leurs difficultés . Desmesures urgentes doivent être prises. Et je voudrais vous ensuggérer quelques-unes : la déclaration en zone sinistrée desactivités agricoles aggravées par la sécheresse ; le dégrève-ment des impôts locaux, le report des dettes et prise encompte des mesures administratives et financières adaptées àla situation et aux difficultés rencontrées ; la mise n placed'un programme de restructuration de l'économie sucrière àlong terme la définition d'une stratégie de diversification etde développement des filières « viandes r, enfin l ' étude desperspectives d'exportation floricole, horticole et fruitière àl'échelle européenne.

Ce problème de diversification et de transition ne peut êtretraité ni dans la précipitation, ni dans l'incohérence.

Eu égard à l'importance de cette question, le Gouverne-ment doit servir de vecteur pour compenser certaines insuffi-sances locales.

Si, aujourd'hui, l'avenir de la canne nous interpelle, com-ment ne pas aussi se poser des questions sur la détresse denos vieux agriculteurs et de nos vieux travailleurs salariés 7Lorsqu'on connaît leur courage et leurs conditions difficilesd'existerce, on peut s'interroger sur la façon dont ils sonttraités par les services sociaux, car, au crépuscule de leur vie,leur accès à une retraite devient problématique.

D'abord, on exige trente-sept ans et demi de déclaration àl'A .M.E.X.A. Or, cette caisse n'existe à la Réunion quedepuis 1964, c'est-à-dire depuis vingt-six ans 7

Comment peut-on exiger que la retraite soit prise àsoixante-cinq ans, alors que l'espérance de vie de ces mêmestravailleurs est de soixante-six ans à la Réunion, contresoixante-douze ans en métropole.

Comment peut-on refuser à des travailleurs physiquementusés le fonds national de solidarité alors que l'inaptitudephysique est la condition fondamentale pour accéder à uneretraite minimale ?

Dans ce même schéma, pourquoi tant de sévérité enversnos handicapés, à qui on supprime les allocations sans hési-tation et pour quelles raisons beaucoup de nos anciens inva-

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!ides, incapables de travailler, vcient-ils leurs dossiers rejetéspar les services de contrôle ". Dans cette affaire, ou bien leGouvernement a donné des instructions pour faire des éco-nomies sur le dos des vieux travailleurs et des handicapés, oualors il faut réviser te système actuel, ou enfin changer lesmédecins en charge de ces contrôles . Il s'agit d'une questionde justice.

II n'est pas concevable que nuus acceptions, par notresilence, d'être les complices d'une exclusion sociale perpétréeces derniers temps contre des personnes analphabètes et dansla plupart de cas incapables de défendre elles-mêmes leursintérêts vitaux.

Je vous demande donc, monsieur le ministre, de manièresolennelle, que bon ordre soit apporté aux missions desmédecins contrôleurs et qu ' un rapport soit demandé aux ins-tances compétentes.

Pour conclure sur des propos d'avenir, je rappellerai que lajeunesse réunionnaise est une chance pour la France . Elleaura sa place demain dans la croissance régionale, nationaleet européenne.

Votre ambition de doter de nombreux lycées, dans le cadredu contrat de plan F.tat-région, m'amène à vous interrogersur les conditions d'accès à l 'université de nos jeunes bache-liers.

Vous le savez, beaucoup de bacheliers ne peuvent accéderaujourd'hui à l 'université faute de logements et de moyens. Sil'on considère que l'université devra s'ouvrir sur les pays del 'océan Indien, son importance impliquerait inéluctablementsa délocalisation vers le sud, tant en termes de formationtechnologique qu'en termes de formation classique . Sa délo-colisation sera synonyme d'économies pour la collectivité etassurément une promotion plus tangible pour les bacheliersdu sud de Pile . A ce jour, ceux-ci sont trop souvent victimesd'un système qui les désoriente, qui les pénalise et qui lesexclut de la société moderne.

Ces propos m ' amènent à évoquer la politique d'ouverturede la France sur les pays francophones de l'océan Indien,une réalité qui s'exprime chaque jour grâce au Gouvernementet aux assemblées territoriales . Quel sera le poids de notrepolitique culturelle, confrontée demain à celle de notre puis-sant voisin l ' Afrique ua Sud ? Faut-il développer dans notrerégion une politique de la francophonie dynamique qui s'ap-puierait sur la création d'un haut conseil francophone del'océan Indien 7

La suppression de R.F.O.-Paris s'impose-t-elle ? La restruc-turation et le redéploiement des moyens en matière de com-munications régionales et internationales favoriseraient lescréations locales et renforceraient les moyens, qui sontaujourd ' hui insuffisants.

Telles sont les préoccupations, monsieur le ministre, que jevoulais aujourd'hui soumettre à votre examen . S'agissant duvote du budget des départements d'o'rtre-mer, je partagerai laposition de mes collègues qui ont le souci d'affirmer que laFrance dans l'océan Indien et l 'appartenance de la Réunion àla France, c'est le bonheur de la population. Je voterai doncvotre budget . (Applaudissements sur les bases du groupe del'union du centre et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M . la président . La parole est à M . Elle Castor.

M. Elle Castor . Monsieur le ministre, le projet de budgetpour 1991 que vous nous présentez est à l'évidence la truduc-tion de la volonté manifestée par le gouvernement de tirer lesconséquences des réflexions que nous avons engagées et desdébats qui ont eu lieu durant toute l ' année 1990 . Les prioritéssont donc l 'égalité sociale, le dévelopoement économique etla modernisation du service public.

Permettez-moi, monsieur le ministre, avant d'analyser dansle détail le contenu de votre budget, de vous informer despréoccupations majeures qui sont celles de notre circonscrip-tion : la formation des hommes et la réforme institutionnelle.

Les fortes secousses qui perturbent aujourd'hui les élé-ments du système éducatif français et dont les manifestationsde lycéens ne constituent qu'une des composantes sontencore accentuées en Guyane de par la forte poussée démo-graphique, la vétusté et le manque de locaux scolaires, lemanque de formation des maîtres et la modicité des créditsde l'Etat.

Cette année encore, la formation des hommes constituepour nous une priorité . En effet, lors de la rentrée du moisde septembre dernier, de nombreux jeunes Guyanais qui

avaient droit d'accéder à une classe de seconde se sont vuorienter vers la vie active, sans pouvoir recevoir une forma-tion complémentaire.

Par ailleurs, le ministre de l'éducation tarde à faireconnaitre sa décision concernant la création de filières tech-niques et technologiques en rapport avec le développementdes activités spatiales, de l'agro-alimentaire et des métiers liésaux problèmes de l'environnement.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer, au casoù des crédits supplémentaires seraient dégagés par leministre de l'éducation nationale, si ces problèmes pourraienttrouver une solution très rapide.

En ce qui concerne la réforme institutionnelle, l'annoncepar le Gouvernement d'un projet de loi relatif au statut de laCorse a plongé l'ensemble des élus des D .O .M. dans la plusgrande perplexité.

Huit années seulement après le vote d'un statut particulierque nous avons considéré comme exceptionnel pour laCorse - statut qui a d'ailleurs été refusé aux collectivités del'outre-mer -, le Gouvernement reconnaît que l'éloignementcrée un problème, que le partage des compétences entre cequi relève de l'Etat et ce qui ressortit aux collectivités territo-riales est incertain et que es textes sont inadaptés aucontexte spécifique de la société insulaire corse . Enfin, ilreconnaît l'existence du peuple corse en tant que commu-nauté historique et culturelle . Que dire alors de nos commu-nautés de Guyane, de Martinique, de Guadeloupe et de laRéunion ?

Le Gouvernement a donc décidé de proposer au vote duParlement un projet de loi portant statut de la collectivitéterritoriale corse qui a pour objectif la rénovation du cadreinstitutionnel, l'approfondissement et l'élargissement descompétences confiées à l'assemblée de Corse . Force est doncde constater, monsieur le ministre, que les analyses qui ontété retenues pour la région Corse et qui lui valent aujour-d'hui de se voir proposer - et nous en sommes d'accord - unnouveau statut plus conforme aux réalités socio-économiqueset culturelles, doivent être a fortiori appliquées aux départe-ments d'outre-mer.

Aussi, les élus des D .O .M. - surtout de gauche, mais aussiune majorité d'élus de droite - ne peuvent accepter que cequi est proposé pour la Corse ne le soit pas également àl'ensemble des entités de l 'outre-mer.

Dès le mois de juillet dernier, monsieur le ministre, vousavez consulté les assemblées départementales et régionalesafin de connaître leur avis sur l'approfondissement des loisde décentralisation . Vous avez également indiqué que vousseriez éventuellement favorable au dépôt d'un projet de loipour chacune des entités de l'outre-mer.

Confirmez-vous aujourd'hui ce que vous nous aviezindiqué dans votre correspondance du 6 juillet dernier ?Quelles seront les dates où nous serons consultés ? Par ail-leurs, les populations locales pourront-elles être consultées aupréalable avant tout débat à l'Assemblée nationale 1

J'en viens au projet de budget.Monsieur le ministre, le projet de budget que vous nous

avez présenté est en augmentation de plus de 5 p. 100 parrapport au budget précédent. La priorité au développementdes D .O .M., fixée par le Gouvernement, est donc respectée.

Nous notons avec satisfaction l'augmentation des créditsdu F.I .D.O.M . général . Ceux-ci permettront de financer entiè-rement le programme Phèdre, les opérations qui figurentdans la loi de programme et la politique des contrats dePlan.

Nous devons également saluer l 'effort qui a été fait auniveau du F.I .D .O .M. décentralisé, qui est géré directementpar les collectivités territoriales . Ses crédits sont en nette pro-gression.

Si l'on en croit le rapport économique du dernier trimestreétabli par l'I .E .D .O.M., on peut constater, après un ralentis-sement de la croissance en début d'année, dû notamment àl ' interruption des lancements d'Ariane et à l'essoufflement dela consommation et de l'investissement, la poursuite à la findu deuxième trimestre de l'amorce de développement quiavait été engagée.

Cependant, vous comprendrez aisément, monsieur leministre, mon inquiétude lorsque j'évoque les difficultésconjoncturelles de l'économie guyanaise, qui viennent ampli-

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fier les handicaps structurels de l'ensemble des départementsd'outre-mer, handicaps que mes collègues ont déjà dénoncésici à plusieurs reprises.

L 'achèvement des grands chantiers inhérents au pro-gramme Ariane posera un problème au secteur du bàtimentet des travaux publics qui bénéficiait jusqu'alors de ce ballond'oxygène.

Pour autant, dans ce contexte délicat, les grosses entre-prises exerceront naturellement une stratégie de repli que nepeuvent engager les petites et moyennes entreprises guya-naises, qui demeurent au centre de mes préoccupations. . Pourrépondre aux exigences d 'une demande de plus en pluspointue et pour résister àla concurrence probable d'entrepre-neurs venus de l'extérieur - attirés, à tort, par ce qu'onappelle aujourd'hui le « boom guyanais » -, ces petites etmoyennes entreprises guyanaises doivent nécessairements 'équiper et pouvoir aussi compter sur des cadres formés.Aussi, je me permets d'insister tout particulièrement auprèsde vous, monsieur le ministre, pour que vous ir .'erveniezauprès du ministre des finances pour que ces petites entre-prises puissent enfin accéder à des prêts réescomptables autaux de 7,5 p. 100 . Il convient de convaincre la résistancepersistante du ministre chargé du budget.

Il nous faudrait beaucoup de temps pour passer en revuetous les secteurs de l'économie guyanaise, aussi je me bor-nerai à n ' en citer que quelques-uns.

Tout d ' abord, te secteur de la pèche, et particulièrementcelui de la pêche crevettière, est frappé de plein fouet, à lafois par l 'augmentation importante du prix du fioul et par laconcurrence des productions aquacoles en provenance del'Equateur.

L'augmentation des produits pétroliers, liée à la crise duGolfe, a engendré une dépense supplémentaire de200 000 francs par mois et par chalutier . Or, il ne semble pasque les mesures annoncées par le ministre de la mer enmatière de remboursement du capital et des intérêts s'appli-quent à nos p rofessionnels qui, pour la plupart d'entre eux,ont contracté des prêts auprès de la S .O .F .I .D .E .G. ou desbanques locales.

En second lieu, l ' activité agricole exportée ou susceptiblede l 'ètre est compromise dans son existence même à causedes augmentations de tarif de la compagnie Air France. Auxaugmentations substantielles déjà pratiquées avant le conflitdu Golfe, viennent maintenant s'en ajouter d'autres . C'estainsi que la production d'ananas, sur laquelle nous avionsfondé quelque espoir, a dû être arrêtée en raison de l ' aug-mentation du frét de plus de 30 p . 100 depuis le début del'année.

Enfin, l ' exploitation forestière et la production des pro-duits finis sont très sérieusement compromises du fait de laconcurrence de plus en plus vive des bois brésiliens, notam-ment sur le marché antillais . Pourtant, les exploitants fores-tiers de Guyane - assimilés à tort à des négociants - atten-dent depuis lonetemps, trop longtemps d ' ailleurs,l'application du régime fiscalscal qui doit leur être appliqué endroit, c'est-à-dire le régime agricole, et qui leur est infinimentplus favorable, en particulier en ce qui conpeine la percep-tion de la taxe professionnelle.

L'Europe. Avant 1992, il faudra répondre à la question ins-titutionnelle : intégration ou partenariat 7

Partenariat, répondons-nous déjà en écho .

En attendant, je voudrais évoquer le problème de la miseen oeuvre des fonds structurels européens et plus particulière-ment le circuit très long des demandes de paiement et desversements de crédit.

Sous l'empire de la réglementation de 1984, la procédurede mise en nuvie était lourde et complexe en raison de lamultitude des services et rouages administratifs qui rallon-geaient à souhait les délais . Ceux-ci oscillant de sept à dixmois entre la demande et le règlement.

Aujourd'hui, le même parcours complexe est utilisé pourl'acheminement de la demande de concours à Bruxelles et estréitéré pour ce qui concerne les paiements.

Les nouveaux règlements communautaires de juin 1988 etde décembre 1988, qui régissent les procédures de finance-ment, sont entrés en application à partir de janvier 1989 . Il ya une différence fondamentale entre les deux procédures.Toutefois, les engagements et les versements se font sur labase de tranches annuelles calculées sur l'ensemble du pro-gramme opérationnel.

Il faut donc donner la possibilité au préfet et au trésorier-payeur, dans le cadre d'une déconcentration bien comprise,d'effectuer les versements dans des délais raisonnables.

Je suis persuadé, monsieur le ministre, que vous pèserez detout votre poids auprès de vos collègues et que vous fereztout au niveau de votre ministère pour faire aboutir ces justeset légitimes revendications, que j'ai dû malheureusementexposer un peu trop rapidement.

Compte tenu de l ' augmentation importante de votre budgetet du cadre dans lequel celui-ci se situe, je voterai voscrédits, monsieur le ministre . (Applaudissements sur les bancsdu groupe socialiste.)

M . le président. La suite de la discussion est renvoyée àla prochaine séance .

2

ORDRE DU JOUR

M . le président . Ce soir, à vingt et une heures trente, troi-sième séance publique :

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet deloi de finances pour 1991 (n o 1593 et lettre rectificativeno 1627, rapport no 1635 de M. Alain Richard, rapporteurgénéral, au nom de la commission des finances, de l'éco-nomie générale et du Plan).

Départements et territoires d'outre-mer (suite).Annexe n o 12 . - M. Maurice Pourchon, rapporteur spé-

cial ; avis n° 1639, au nous de la commission des lois consti-tutionnelles, de la législation et dr l'administration généralede la République : tome I (départements d ' outre-mer), deM. Jérôme Lambert ; tome lI (territoires d'outre-mer), deM . Jean-Paul Virapoullé ; avis n° 1640, tome III, de M . RenéDrouin, au nom de la commission de la production et deséchanges.

La séance est levée.(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)

Le Directeur du service du compte rendu sténographiquede l'Assemblée nationale,

CLAUDF. MERCIER

Paris . - Imprimerie des Journaux officiels, 26, rue Desaix .

103900822-001190