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Hubert O. Gilliéron Denis Cherpillod Conformité au droit de la concurrence Guide pratique à l’usage des PME

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Page 1: Conformité au droit de la concurrence · Le droit de la concurrence représente l’ensemble des normes visant à assurer le maintien d’une concurrence efficace sur le marché

Hubert O. Gilliéron Denis Cherpillod

Conformité au droit de la concurrenceGuide pratique à l’usage des PME

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2 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

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Suis-je concerné ? Questionnaire d’orientation

OUI NON

Connaissez-vous les règles applicables en matière de droit de la concurrence ?

Disposez-vous d’une information suffisante sur les règlements, lignes directrices, communications, activités et décisions des autorités de la concurrence ?

Consultez-vous régulièrement le site Internet des autorités de la concurrence ?

Disposez-vous d’une unité spécifique au sein de l’entreprise consacrée aux questions de droit de la concurrence, ou du soutien d’une personne spécialisée en droit de la concurrence ?

Disposez-vous de règles de conformité internes, d’un guide en matière de conformité ou de procédures internes indiquant les points devant être soumis à approbation préalable et informant les employés et personnes-clés du comportement à adopter ?

Disposez-vous d’un conseiller externe traitant des questions de droit de la concurrence ?

Les cadres supérieurs de l’entreprise et les employés ont-ils suivi une formation en matière de droit de la concurrence ?

Si vous avez répondu "non" à plus de deux des questions posées ci-dessus, vous n’êtes pas sensibilisé à la problématique du droit de la concurrence. Il se peut que vous preniez des risques sans en être conscient.

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2 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

PréambuleCette brochure consacrée à la conformité au droit de la concurrence (compliance en anglais) fait suite aux deux premiers guides pratiques dédiés aux PME et coédités par le Centre Patronal et la Fédération des Entreprises Romandes Genève, l’un consacré à la responsabilité sociale des entreprises et l’autre à la gouvernance d’entreprise.

Le but à chaque fois recherché est de donner à nos membres des bases théoriques, mais surtout de proposer une approche très concrète et la possibilité de se situer par rapport au sujet traité, grâce à une série de questions posées de façon didactique.

Les entreprises qui évoluent dans un monde de plus en plus globalisé et compétitif doivent pouvoir bénéficier des meilleures conditions-cadres possibles. Une concurrence efficace en est une. Ainsi, le droit de la concurrence – et notamment la législation sur les cartels – constitue un élément crucial de tout régime économique libéral et responsable. Il nous a dès lors semblé important d’y consacrer une publication. Ce d’autant plus que les petites et moyennes entreprises (PME) ainsi que leurs associations professionnelles peuvent parfois avoir l’impression que le droit de la concurrence, qui repose sur trois piliers (appréciation des accords restreignant la concurrence de façon notable, lutte contre les abus de position dominante et contrôle de concentrations d’entreprises), ne les concerne guère. Or, force est de constater que tel n'est pas le cas. D'une part, les PME sont presque toujours parties à des accords entre entreprises susceptibles de produire un impact sur la concurrence. D'autre part, les PME, même lorsqu'elles ne sont pas directement visées par les règles du droit de la concurrence, peuvent s'y référer afin de faire obstacle à certaines pratiques dont elles sont les victimes. Les PME sont donc concernées à double titre par les règles présentées dans le présent guide.

Mettre en évidence les aspects les plus importants du droit de la concurrence, déterminer ce qui peut constituer un acte contraire à ce dernier et donc faire l’objet d’une sanction, nous a paru nécessaire, mais pas suffisant. Nous avons voulu proposer aux PME des outils de prévention, tels que le programme de conformité et expliquer comment le réaliser de façon simple et pragmatique. Il ne s’agit bien évidemment pas d’effrayer, mais d’expliquer et de proposer des solutions afin que nos membres puissent appréhender, comprendre le contexte juridique et s’y adapter, en cas de besoin.

Bonne lecture !

Christophe Reymond Blaise MattheyDirecteur général Directeur généralCentre Patronal Fédération des Entreprises Romandes Genève

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PréfaceLausanne, en janvier 2014

La publication d’un Guide pratique de la conformité au droit de la concurrence offre aux entreprises la possibilité de comprendre les enjeux fondamentaux de ce domaine du droit, ainsi que d’adapter leurs comportements et pratiques de façon à éviter de violer la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les cartels et autres restrictions à la concurrence. Aussi convient-il de saluer vivement l’initiative conjointe du Centre Patronal et de la Fédération des Entreprises Romandes Genève. Un tel guide contribue à assurer l’effet préventif de cette loi, c’est-à-dire la prise en compte spontanée de celle-ci par les entreprises. Il s’agit du but ultime visé tant par le législateur fédéral que par la Commission de la concurrence.

Le droit de la concurrence est souvent présenté comme une matière complexe. Maîtres Denis Cherpillod et Hubert Gilliéron, avocats et docteurs en droit, sont néanmoins parvenus à en présenter les aspects les plus importants de manière claire et accessible. Ils méritent d’être félicités à cet égard.

Dans ce guide, les entreprises sont rendues attentives à plusieurs règles qu’elles sont tenues de respecter afin de se conformer au droit suisse. Les petites et moyennes entreprises verront dans ces règles non seulement une limitation quant à leurs pratiques et comportements admissibles, mais aussi une protection, par exemple face à une entreprise en position dominante. Les interventions de la Commission de la concurrence dans ce dernier domaine bénéficient en effet souvent aussi à de telles entreprises.

Dans l’intérêt d’une "économie de marché fondée sur un régime libéral" (art. 1er de la loi sur les cartels), les règles du droit de la concurrence préservent un vaste espace de liberté pour les entreprises afin d’innover, d'améliorer leurs produits ou leurs services et, en fin de compte, de se démarquer de leurs concurrents. Le développement durable de l’économie suisse suppose une concurrence efficace et non faussée par des accords ou des pratiques illicites.

Vincent Martenet Président de la Commission de la concurrence Professeur à l’Université de Lausanne

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4 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Mots des auteurs Les auteurs tiennent à remercier la Fédération des Entreprises Romandes Genève et le Centre Patronal de leur engagement en faveur d’une sensibilisation des entreprises romandes au droit de la concurrence. Ce thème demeure largement méconnu et peu souvent pris en compte par les entreprises dans leur vie quotidienne. Ces entreprises, de bonne foi pour la plupart, prennent donc des risques sans en être conscientes.

Le présent ouvrage vise à permettre à tout un chacun de mieux percevoir les contours du droit de la concurrence et les implications que celui-ci pourrait entraîner sur la façon de mener les affaires. Cet ouvrage n’a en revanche ni la vocation, ni l’ambition d’être exhaustif et d’apporter une réponse à toutes les situations auxquelles une entreprise pourrait être confrontée. Son rôle premier est de sensibiliser le lecteur, et de l’inciter, à l’issue d’un examen de conscience, à prendre les mesures qu’il estimera utiles afin d’intégrer au mieux le droit de la concurrence dans sa vie professionnelle au quotidien.

Bonne lecture !

Denis Cherpillod Hubert O. Gilliéron

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Comment utiliser ce guideCe guide est divisé en cinq parties. La première, assez brève, vous permettra de vous familiariser avec le thème de cette brochure, à savoir le droit de la concurrence et l’importance de s’y conformer.

La seconde partie est un questionnaire qui vous permettra d’identifier plus précisément les risques que pourrait courir votre entreprise en matière de droit de la concurrence. Nous vous conseillons de remplir ce questionnaire avec attention et en faisant preuve d’introspection.

Dans la troisième partie, vous trouverez un exposé des principales règles du droit de la concurrence. Si vous ne souhaitez pas la lire en entier, nous vous conseillons de vous concentrer sur les chapitres auxquels le questionnaire vous aura renvoyé.

La quatrième partie présente les éléments principaux d’un programme de conformité et vous propose un guide pratique pour mettre en place un tel programme au sein de votre entreprise.

Enfin, dans la cinquième partie, nous vous proposons quelques règles de comportement simples destinées à être relues de façon rapide ou partagées avec vos collaborateurs.

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Table des matièresGÉNÉRALITÉS

Qu’est-ce que le droit de la concurrence ? 10

Quels sont les risques en cas de violation des règles du droit de la concurrence ? 11

Qu’est-ce qu’un programme de conformité et quels sont les avantages 12

pour l’entreprise de mettre en place un tel programme ?

Comment ce guide peut-il vous aider ? 14

QUESTIONNAIRE D’IDENTIFICATION DES RISQUES

Rapports avec les concurrents en général 16

Accords sur les prix 17

Répartition du marché 18

Échange d’informations 19

Activités de recherche et de développement, de transfert de technologie 19

et de propriété intellectuelle

Achats groupés 20

Participation à des marchés publics 21

Vie associative 22

Rapports avec les fournisseurs 24

Rapports avec les clients, revendeurs et distributeurs 25

Position sur le marché 27

Acquisition d’entreprises et entreprises communes 29

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ÉLÉMENTS FONDAMENTAUX DU DROIT DE LA CONCURRENCE

Accords illicites entre entreprises 32

Généralités 32

Restrictions les plus graves 34

Accords entre concurrents sur les prix 36

Accords entre concurrents sur la répartition du marché ou de la clientèle 38

Accords verticaux sur la fixation des prix de revente 41

Accords verticaux et clauses d’exclusivité 43

Accords verticaux portant sur des restrictions territoriales ou en matière de clientèle 44

Autres accords entre entreprises 45

Généralités 45

Partenariats avec des concurrents 46

Échange d’informations 48

Vie associative 49

Partenariats avec des non-concurrents 53

Contrats avec des sous-traitants 54

Abus de position dominante 54

Notion de position dominante 54

Marché concerné et position sur le marché 55

Comportements abusifs 56

Concentrations d’entreprises 58

Notification des opérations de concentration 58

Aspects relevant des accords entre entreprises 60

Due diligence 61

Entreprises communes 61

Sanctions 63

Principe 63

Autres conséquences 64

Programme de clémence 64

Autres sanctions 66

PME et droit de la concurrence 66

Commerce international 67

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8 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

PRINCIPES ET MISE EN ŒUVRE D’UN PROGRAMME DE CONFORMITÉ

Définition 70

Éléments-clés de réussite d’un programme de conformité 70

Soutien de la direction 71

Politique d’entreprise et procédures appropriées 71

Formation 73

Contrôle et surveillance 73

Actions disciplinaires 74

Les quatre étapes de la mise en place d’un programme de conformité 75

QUELQUES RÈGLES DE COMPORTEMENT PRÊTES À L'USAGE

Quelques règles de communication interne 82

Quelques règles de comportement en cas de perquisition 84

Quelques règles de comportement dans le cadre des associations professionnelles 86

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CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCEGUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Généralités

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10 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

GénéralitésQu’est-ce que le droit de la concurrence ?Le droit de la concurrence représente l’ensemble des normes visant à assurer le maintien d’une concurrence efficace sur le marché. En Suisse, le principal texte en la matière est la loi fédérale sur les cartels et autres restrictions à la concurrence (LCart).

Le droit de la concurrence suisse se fonde sur trois piliers principaux :

a. les règles régissant les accords entre entreprises (y compris oraux ou tacites) et les pratiques concertées susceptibles d’affecter la concurrence sur un ou plusieurs marchés, notamment les accords portant sur la fixation des prix, sur la répartition des marchés ou de la clientèle, sur une réduction concertée de la production ou encore sur l’exclusion de concurrents ;

b. les règles visant à réprimer les abus commis par une entreprise en position dominante, notamment l’imposition de conditions inéquitables à ses clients, la discrimination opérée au préjudice de certains d’entre eux, ou encore les entraves imposées à certains concurrents (existants ou potentiels) en vue de rendre l’exercice de la concurrence ou une entrée sur le marché plus difficile ;

c. les règles régissant les concentrations d’entreprises et visant à s’assurer que le rapprochement d’entreprises concurrentes ne porte pas atteinte à la concurrence sur un marché donné.

Les dirigeants des petites et moyennes entreprises (PME) pensent souvent que le droit de la concurrence ne s’adresse qu’aux grands groupes ou aux entreprises puissantes sur le marché. Or rien n’est plus faux. Le droit de la concurrence a un impact sur à peu près tous les aspects des activités des entreprises en Suisse, quelle que soit leur taille. Il s’applique aussi aux pratiques des PME, en particulier aux accords qu’elles concluent avec leurs fournisseurs, sous-traitants, distributeurs et clients, ainsi que, bien entendu, aux rapports qu’elles entretiennent avec leurs concurrents.

Le droit de la concurrence est mis en œuvre par la Commission de la concurrence (Comco), une autorité administrative fédérale dotée de larges pouvoirs d’enquête ainsi que du pouvoir de prononcer des sanctions. Les décisions de la Comco peuvent faire l’objet d’un recours au Tribunal administratif fédéral (TAF), puis au Tribunal fédéral (TF).

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Le droit de la concurrence vise à garantir les mécanismes du libre marché en vue d’une allocation optimale des ressources au bénéfice du plus grand nombre de personnes.

Le droit de la concurrence comporte des règles sur :

• les accords entre entreprises ;

• les pratiques d’entreprises en position dominante ;

• les concentrations d’entreprises.

Le droit de la concurrence s’applique à toutes les entreprises, y compris les PME.

Quels sont les risques en cas de violation des règles du droit de la concurrence ?Une violation des règles du droit de la concurrence peut entraîner des conséquences particulièrement lourdes, aussi bien pour l’entreprise que pour ses employés et dirigeants, notamment :

• l ’ouver ture d’enquêtes de la par t des autorités de la concurrence, particulièrement longues, coûteuses – notamment en termes de frais de défense – et mobilisant de nombreuses ressources au sein de l’entreprise ;

• des mesures structurelles et des injonctions de comportement imposées par les autorités de la concurrence ;

• des sanctions pécuniaires pouvant aller, en droit suisse, jusqu’à 10% du chiffre d’affaires (et non du bénéfice) réalisé en Suisse par chacune des entreprises concernées au cours des trois dernières années ;

• des dommages en termes de réputation et d’image, les autorités ayant pour pratique de donner de la publicité à leurs actes ;

• la nullité, totale ou partielle, de contrats importants en raison de leur illicéité ; ou encore ;

• des prétentions en dommages et intérêts de la part d’entreprises concurrentes et de clients, potentiellement lésés par le comportement illicite.

La bonne foi de la direction de l’entreprise ne joue aucun rôle, ni dans l’appréciation du caractère illicite du comportement incriminé, ni dans le calcul de la sanction. Le respect des règles – parfois complexes – du droit de la concurrence est de la seule responsabilité de chaque entreprise.

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La violation du droit de la concurrence peut entraîner des conséquences particulièrement lourdes pour l’entreprise, notamment en termes financiers et de réputation.

Qu’est-ce qu’un programme de conformité et quels sont les avantages pour l’entreprise de mettre en place un tel programme ?Un programme de conformité a pour principal objectif de prévenir la commission d’infractions et, dans l’hypothèse où une infraction aurait tout de même été commise, de la détecter au plus tôt et de prendre les mesures qui s’imposent. Un programme de conformité est donc avant tout un outil de gestion des risques.

Les avantages d’un programme de conformité sont multiples :

• le principal avantage réside dans la réduction du risque d’exposition de l’entreprise aux conséquences potentiellement très lourdes d’une violation du droit de la concurrence (prévention du risque) ;

• le programme de conformité permet également de détecter rapidement d’éventuelles infractions commises par l’entreprise. Si celles-ci ont déjà eu lieu, il est toujours de l’intérêt de l’entreprise de les détecter rapidement et d’y mettre fin volontairement. Le cas échéant, l’entreprise devra examiner l’opportunité d’une dénonciation spontanée aux autorités de la concurrence, afin de bénéficier du programme de clémence et d’être ainsi exonérée de sanction (limitation et gestion du risque) ;

• l’existence et la mise en œuvre d’un programme de conformité contribue à la protection de la réputation de l’entreprise. Non seulement, elle est préparée à la gestion de la communication en cas d’enquête, voire de sanction, de la part des autorités, mais encore elle est à même de mettre en avant une stratégie volontariste de conformité au droit de la concurrence et d’augmenter ainsi son attractivité pour les employés, les clients et les partenaires de l’entreprise en raison du climat de confiance ainsi établi (gestion de la communication) ;

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• grâce au programme de conformité, les dirigeants et employés de l’entreprise connaissent les règles du jeu. L’entreprise peut donc se positionner sur le marché et développer ses affaires sans violer le droit de la concurrence mais sans excès de timidité non plus (saine gestion de l’entreprise) ;

• enfin, dans le cadre de la révision de la LCart actuellement en cours, il est prévu d’introduire dans la loi un motif de réduction de la sanction pour les entreprises qui auraient mis sur pied un "plan d’action strict afin de respecter la loi sur les cartels" (réduction d’une éventuelle amende).

Qu’en est-il du coût d’un programme de conformité ? L’élaboration et la mise en œuvre d’un tel programme occasionnent des coûts. Selon la taille de l’entreprise, la complexité des circonstances, les ressources et compétences disponibles au sein de l’entreprise, il sera peut-être nécessaire de faire appel à des experts externes pour la mise en place et le suivi du programme de conformité. La formation des collaborateurs représentera également un coût. Cependant, l’expérience montre que les retombées positives du programme sont supérieures à ses coûts. Le programme permet en effet de réduire le risque d’infraction, et donc de sanction, d’amoindrir le risque d’un dommage à la réputation et d’être mieux préparé dans le cas où, malgré tout, l’entreprise viendrait à être visée par les autorités.

Un programme de conformité permet en particulier :

• de prévenir la réalisation d’une infraction au droit de la concurrence ;

• d'atténuer les conséquences d’une éventuelle infraction.

Il s’agit donc avant tout d’un outil de prévention et de gestion du risque.

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Comment ce guide peut-il vous aider ?Ce guide se veut basé sur trois piliers distincts :

1. Identification du risque : identifiez plus précisément les risques auxquels votre entreprise est confrontée en matière de droit de la concurrence, en répondant au questionnaire figurant au chapitre suivant.

2. Acquisition de connaissances de base / mesure du risque : approfondissez vos connaissances en droit de la concurrence en lisant le chapitre consacré aux éléments fondamentaux du droit de la concurrence. Si vous ne souhaitez pas tout lire, concentrez-vous sur les passages auxquels le questionnaire vous aura renvoyé.

3. Gestion du risque : découvrez quels sont les éléments-clés d’un programme de conformité et comment le mettre en place, en quatre étapes.

Prendre des risques fait partie de la vie de l’entreprise. Il s’agit toutefois de le faire en toute connaissance de cause, et non par simple ignorance ou manque de connaissances.

Ce guide vise à vous permettre de mieux mesurer les risques de droit de la concurrence auxquels votre entreprise est confrontée et d’y apporter une réponse appropriée.

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CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCEGUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Questionnaire d’identification

des risques

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Questionnaire d’identification des risquesL’identification des risques est un élément essentiel de la mise en place d’un programme de conformité. Elle présuppose que vous connaissiez parfaitement les domaines d’activité de votre entreprise ainsi que la façon dont sont menées les affaires.

Le questionnaire ci-dessous vous aidera à vous poser les questions vous permettant d’identifier les principaux risques auxquels votre entreprise est confrontée en matière de droit de la concurrence, puis d’orienter votre programme de conformité en fonction de ces risques.

Rapports avec les concurrents en généralOUI NON

Rencontrez-vous vos concurrents ?

Vous arrive-t-il de discuter de votre politique commerciale (prix d’achat ou de revente, stratégie actuelle ou future, augmentation ou réduction de prix, conditions d’approvisionnement, limitation des ventes ou de la production, territoires d’activité, clientèle de l’entreprise, marketing et publicité, procédés propres à l’entreprise, etc.) avec vos concurrents ?

Vos employés ont-ils des contacts avec vos concurrents ?

Dans votre branche, les employés changent-ils fréquemment d’employeurs ? Avez-vous récemment engagé un employé qui travaillait précédemment pour un concurrent ?

Vos concurrents sont-ils également vos clients ?

Avez-vous conclu un accord écrit ou oral avec vos concurrents en vue de limiter la concurrence entre vous, de quelque manière que ce soit ?

Si vous avez répondu "oui" à l'une ou l'autre des questions posées ci-dessus, veuillez vous référer au chapitre Accords illicites entre entreprises (p. 32), plus particulièrement aux sous-chapitres Généralités (p. 32) et Restrictions les plus graves (p. 34) ainsi qu'au chapitre Autres accords entre entreprises (p. 45).

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Accords sur les prixOUI NON

Votre entreprise est-elle partie à un accord (écrit ou oral, juridiquement contraignant ou simple gentlemen’s agreement) avec un ou plusieurs de ses concurrents, dans lequel les parties s’accordent sur les prix de certains produits ou services (ou sur les composants du prix : marge, politique de rabais, etc.) ?

Dans votre branche, y a-t-il une obligation, résultant d’un accord entre les entreprises ou d’un usage, d’appliquer un prix fixe ou minimum pour certaines prestations ? En d’autres termes, vous est-il interdit ou déconseillé de baisser vos prix en-dessous d’un certain seuil en raison de cet accord ou usage ?

Votre entreprise utilise-t-elle des documents/lignes directrices communs à sa branche pour fixer ses prix, ses marges ou ses rabais (par exemple liste de prix conseillés, tableau de prestations habituelles, schéma de calcul des prix, catalogue de produits commun à la branche) ?

Déterminez-vous le prix ou les éléments de coût et autres éléments composant le prix ou permettant de fixer un prix en coordination avec vos concurrents ?

Si vous avez répondu "oui" à l'une ou l'autre des questions posées ci-dessus, veuillez vous référer au chapitre Accords illicites entre entreprises (p. 32), plus particulièrement au sous-chapitre Accords entre concurrents sur les prix (p. 36).

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Répartition du marchéOUI NON

Vous répartissez-vous le marché avec vos concurrents, que ce soit géographiquement ou en fonction de la clientèle ?

Votre entreprise est-elle partie à un accord (écrit ou oral, juridiquement contraignant ou simple gentlemen’s agreement) avec un ou plusieurs de ses concurrents, par lequel elle s’interdit de réaliser des ventes dans certains territoires ou en dehors d’un territoire qui lui est attribué, ses concurrents pouvant prendre à son égard un engagement similaire ?

Votre entreprise a-t-elle pour habitude de contacter certains de ses concurrents avant de faire une offre à un client, par exemple pour s’assurer que le client n’est pas déjà servi par un concurrent ou pour se "répartir" avec un concurrent les affaires réalisées avec le client ?

Votre entrepr ise appl ique -t- e l le un "code d ’éth ique professionnelle", écrit ou non écrit, y compris émanant d’une association professionnelle, lui interdisant par exemple d’approcher un client s’il est déjà en relation avec un de ses concurrents ou d’offrir des prix inférieurs à ceux pratiqués par la concurrence ?

Vous entendez-vous avec vos concurrents sur la répartition de vos sources d’approvisionnement ou sur leur limitation ?

Coopérez-vous avec des concurrents en vue d’écarter un concurrent spécifique du marché et/ou des clients particuliers ?

Négociez-vous avec vos concurrents des éléments susceptibles d’affecter la concurrence, tels que le prix ou des éléments de coûts, avant ou dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres ? Coopérez-vous avec vos concurrents dans ce contexte ?

Si vous avez répondu "oui" à l'une ou l'autre des questions posées ci-dessus, veuillez vous référer au chapitre Accords illicites entre entreprises (p. 32), plus particulièrement au sous-chapitre Accords entre concurrents sur la répartition du marché ou de la clientèle (p. 38).

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Échange d’informationsOUI NON

Votre entreprise partage-t-elle avec ses concurrents (directement ou par le biais d’une plateforme commune) des informations notamment relatives à ses prix, ses marges, sa politique de rabais, ses dépenses marketing, son chiffre d’affaires, ses dépenses de recherche et de développement, etc. ?

Avant de prendre une décision de nature commerciale (fixation d’un prix, conclusion d’un contrat, etc.), vous arrive-t-il de rechercher préalablement l’avis de certains de vos concurrents ?

Une association dont votre entreprise est membre collecte-t-elle des informations de la part de ses membres ? Diffuse-t-elle des données statistiques ou les résultats de questionnaires adressés à ses membres ? Si oui, est-il possible d’individualiser les réponses données par un ou plusieurs membres de l’association ?

Si vous avez répondu "oui" à l'une ou l'autre des questions posées ci-dessus, veuillez vous référer au chapitre Accords illicites entre entreprises (p. 32), plus particulièrement au sous-chapitre Échange d’informations (p. 48).

Activités de recherche et de développement, de transfert de technologie et de propriété intellectuelle

OUI NON

Votre entreprise mène-t-elle des activités de recherche et de développement conjointement avec une autre entreprise ?

Votre entreprise est-elle partie à un accord qui régit l’usage (en termes de produits, de clientèle ou de zone géographique) des résultats de recherche et de développement menés par ou avec une autre entreprise, cet usage pouvant être soit réservé à une seule partie, soit partagé ?

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OUI NON

Votre entreprise est-elle partie à des accords par lesquels elle cède ou acquiert la propriété d’un droit de propriété intellectuelle (marque, brevet, savoir-faire, design, droit d’auteur sur logiciel, etc.) ou à des accords de licence portant sur l’usage d’un tel droit ?

Votre entreprise est-elle partie à un accord de coexistence de marque ou à un accord de licence régissant l’usage d’une marque ou d’un autre droit de propriété intellectuelle ?

Votre entreprise est-elle active dans un domaine caractérisé par l’existence de standards techniques ?

Si vous avez répondu "oui" à l'une ou l'autre des questions posées ci-dessus, veuillez vous référer au chapitre Autres accords entre entreprises (p. 45), plus particulièrement au sous-chapitre Partenariats avec des concurrents (p. 46).

Achats groupésDans le cadre de votre politique d’achats,

OUI NON

Procédez-vous à des achats groupés avec vos concurrents ?

D’éventuels achats groupés s’inscrivent-ils dans une politique de standardisation de la production ou de l’approvisionnement ?

Certains de vos concurrents sont-ils exclus de la procédure d’achats groupés ?

Rencontrez-vous vos concurrents pour planifier votre politique d’achats groupés ?

Échangez-vous des informations avec vos concurrents sur des produits ou des services qui ne sont pas concernés par les achats groupés ?

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OUI NON

Communiquez-vous vos conditions d’achats à des tiers ?

Le fait de vous regrouper avec vos concurrents vous permet-il d’imposer des conditions commerciales à vos fournisseurs ?

Prenez-vous des engagements à l’égard de vos fournisseurs ou concurrents quant à l’utilisation ou à la revente des produits acquis par le biais d’un groupement d’achats ?

Si vous avez répondu "oui" à l'une ou l'autre des questions posées ci-dessus, veuillez vous référer au chapitre Autres accords entre entreprises (p. 45).

Participation à des marchés publicsDans le cadre de procédures d’appel d’offres ou de mise en soumission publique,

OUI NON

Discutez-vous des conditions de soumission avec des tiers (concurrents ou association professionnelle) ?

Disposez-vous d’informations sur les soumissions de vos concurrents avant de déposer votre offre ?

Vous basez-vous sur des tarifs ou autres éléments connus à l’avance dans la préparation de votre soumission ?

Mandatez-vous des tiers pour vous aider dans la préparation des documents de soumission, et ces tiers travaillent-ils parfois pour d’autres concurrents dans ce cadre ?

Négociez-vous avec vos concurrents des éléments susceptibles d’affecter la concurrence, tels que le prix ou des éléments de coûts, avant ou dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres ? Coopérez-vous avec vos concurrents dans ce contexte ?

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22 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

OUI NON

Avez-vous conclu un accord de principe avec vos concurrents sur une alternance entre chacun d’entre vous pour la participation à des procédures d’appel d’offres et/ou sur les conditions de soumission de chacun d’entre vous (rotation) ?

Lorsque vous ne disposez pas de toutes les ressources nécessaires requises dans les documents d’appels d’offres, vous arrive-t-il de conclure un accord de coopération ou de consortium avec vos concurrents ?

Si vous avez répondu "oui" à l'une ou l'autre des questions posées ci-dessus, veuillez vous référer au chapitre Accords illicites entre entreprises (p. 32), plus particulièrement au sous-chapitre Accords entre concurrents sur la répartition du marché ou de la clientèle (p. 38).

Vie associativeS’agissant de la participation de votre entreprise et de ses employés à la vie associative,

OUI NON

Votre entreprise est-elle membre d’une association professionnelle ?

Les employés de votre entreprise sont-ils membres d’une association professionnelle ? Si oui, occupent-ils une position spécifique (membre d’un comité ou groupe de travail) ?

Les cadres ou employés de l’entreprise entrent-ils en contact avec des cadres ou employés d’entreprises concurrentes lors des réunions des associations professionnelles dont ils sont membres ?

Les réunions de l’association ou de son comité font-elles l’objet de procès-verbaux détaillés ?

Les réunions de l’association sont-elles assorties d’événements informels ?

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23

OUI NON

Les réunions se tiennent-elles sur la base d’un ordre du jour communiqué à l’avance ? Cet ordre du jour permet-il de se faire une idée des thèmes abordés ?

Les réunions sont-elles fréquentes ?

Les réunions traitent-elles de la politique commerciale des membres de l’association ou d’autres sujets de nature commerciale (informations et statistiques de vente, exportations, importations, prix, capacités, projets de développement de marché, nouvelles technologies) ?

Au cours des réunions de l’association, les membres présents parlent-ils des prix et autres conditions de vente ou d’une éventuelle répartition des marchés ou de la clientèle ?

Les cadres et les employés participant à ces réunions prennent-ils et conservent-ils des notes sur les sujets abordés et le contenu des discussions ?

L’influence exercée par l’association professionnelle sur ses membres limite-t-elle la concurrence entre ces derniers ?

L’association prend-elle des décisions restreignant la liberté de ses membres quant à leurs activités ou leur comportement sur le marché ?

Les standards techniques concernant les activités des membres de l’association limitent-ils les domaines d’activité commerciale des membres de l’association ?

Les statuts des associations professionnelles dont vous faites partie (ou d’autres documents tels que code de conduite ou de déontologie professionnelle, catalogues de prestations, etc.) contiennent-ils des dispositions de nature à restreindre la concurrence (tarifs conseillés ou obligatoires, prix indicatifs, interdictions de publicité agressive ou de démarchage de clients qui sont en relation avec une autre entreprise membre de l’association, etc.) ?

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24 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

OUI NON

Le cas échéant, les membres de l’association qui ne respectent pas ces dispositions s’exposent-ils à des sanctions (rappel à l’ordre, blâme, voire exclusion) ?

Si vous avez répondu "oui" à plus de deux questions posées ci-dessus, veuillez vous référer au sous-chapitre Vie associative (p. 49). Dans tous les cas, veuillez également répondre aux questions posées dans les chiffres précédents et traitant des relations avec les concurrents.

Rapports avec les fournisseursDans vos rapports avec vos fournisseurs,

OUI NON

Êtes-vous limité par vos fournisseurs dans votre liberté de déterminer les conditions de revente à vos clients (prix minimum, prix maximum, prix recommandé, politique en matière de rabais, délais de paiement, etc.) ?

Êtes-vous soumis à des règles particulières en matière de contact avec vos clients ou de démarchage de ceux-ci (interdiction de faire de la publicité ou d’autres démarches ou de vendre en dehors de votre territoire ou point de vente, interdiction de démarcher certains clients, interdiction de vendre par Internet, etc.) ?

Êtes-vous au bénéfice d’une exclusivité et, si oui, cette exclusivité est-elle respectée ?

Êtes-vous limité dans vos possibilités d’approvisionnement en produits contractuels, notamment si vous souhaitez vous approvisionner auprès d’un fournisseur situé à l’étranger (exclusivité au bénéfice d’un fournisseur, interdiction de vous approvisionner à l’étranger ou auprès d’un autre fournisseur) ?

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OUI NON

Avez-vous été confronté au refus d’un fournisseur de vous livrer des produits en raison d’un accord entre ce dernier et votre fournisseur habituel ou un autre fournisseur ?

Si vous avez répondu "oui" à l'une ou l'autre des questions posées ci-dessus, veuillez vous référer aux sous-chapitres Accords verticaux sur la fixation des prix de revente (p. 41) et Accords verticaux et clauses d'exclusivité (p. 43).

Rapports avec les clients, revendeurs et distributeursDans vos rapports avec vos clients, revendeurs et distributeurs,

OUI NON

Déterminez-vous le prix de revente pratiqué par vos revendeurs et distributeurs ?

Suggérez-vous des prix de revente recommandés à vos revendeurs et distributeurs ?

Si tel est le cas, vous assurez-vous que ces prix sont suivis en pratique ?

Intervenez-vous auprès de vos revendeurs et distributeurs au sujet de leurs conditions de vente, par exemple sur les prix, les rabais et les délais de paiement ?

Limitez-vous les ventes de vos distributeurs à leurs clients, par exemple en fonction du type de clientèle, de la provenance de la clientèle ou des quantités ?

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26 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

OUI NON

Soumettez-vous vos revendeurs et distributeurs à des règles particulières en matière de contact avec leurs clients ou de démarchage de ceux-ci (interdiction de faire de la publicité ou d’autres démarches, de vendre en dehors de leur territoire ou point de vente, interdiction de démarcher certains clients, interdiction ou limitation de la vente par Internet, etc.) ?

Avez-vous concédé des territoires ou une clientèle particulière à vos différents distributeurs ?

Interdisez-vous les ventes réalisées par vos distributeurs agréés dans les régions concédées à d’autres distributeurs ?

Imposez-vous à vos clients, revendeurs ou distributeurs des quantités minimales d’achats ou des objectifs de ventes ?

Vos clients et distributeurs ont-ils la possibilité de s’approvisionner ailleurs pour les produits que vous vendez, que ce soit auprès d’autres distributeurs ou de concurrents ?

Refusez-vous de livrer certains clients sans justification objective (par exemple solvabilité du client ou limites de capacité de votre entreprise) ?

Vos distributeurs peuvent-ils refuser d’honorer une garantie sur des produits vendus par un autre distributeur ?

Si vous avez répondu "oui" à l'une ou l'autre des questions posées ci-dessus, veuillez vous référer aux sous-chapitres Accords verticaux sur la fixation des prix de revente (p. 41), Accords verticaux et clauses d'exclusivité (p. 43) et Abus d'une position dominante (p. 54).

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Position sur le marchéLes questions qui suivent visent à déterminer si votre entreprise - ou l’un de vos partenaires commerciaux - occupe une position dominante et non à déterminer si un comportement illicite a été commis. Il est rappelé que la taille de l’entreprise n’est pas déterminante pour une éventuelle position dominante. Une PME pourra notamment être en position dominante dans un marché de niche.

À titre préalable, déterminez sur quel(s) marché(s) de produits ou de services votre entreprise est active. À cette fin, définissez l’ensemble des produits ou des services qui, du point de vue du consommateur final ont les mêmes caractéristiques et les mêmes usages et constituent de ce fait de véritables substituts, immédiatement accessibles à un prix similaire, à vos produits ou services. Tenez compte de tous les paramètres, y compris le prix.

Déterminez dans quelle zone géographique votre entreprise et ses concurrents directs écoulent leurs produits ou services. S’agit-il d’un espace :

• local (par exemple une agglomération ou un canton, y compris éventuellement les aires limitrophes d’autres cantons ou pays) ;

• régional (par exemple plusieurs cantons ou une zone linguistique comme la Suisse romande) ;

• national ;

• international (incluant un ou plusieurs pays européens, voire plus lointains).

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28 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Dans le marché de produits ou de services et dans la zone géographique déterminés précédemment :

• à combien estimez-vous votre part de marché (en pourcentage du chiffre d’affaires total du marché) ?

• à combien estimez-vous la part de marché de vos trois principaux concurrents ? Est-elle plus élevée que la vôtre ou au contraire estimez-vous que votre entreprise est leader sur le marché, en termes de chiffre d’affaires ?

• de nouveaux concurrents sont-ils entrés sur le marché au cours des deux dernières années ? Si oui, quelle est aujourd’hui leur position sur ce marché ?

• selon vous, une entreprise qui choisirait de devenir active sur ce marché pourrait-elle le faire facilement, rapidement et sans grands investissements ?

• votre entreprise dispose-t-elle d’un avantage concurrentiel particulier par rapport à ses concurrents (par exemple l’accès exclusif à une source de matières premières ou un canal d’approvisionnement, un brevet, une technologie ou un savoir-faire particulier) ?

Analysez vos réponses aux questions précédentes. Si votre part de marché est de 40% ou plus et/ou qu’elle est significativement supérieure à celle de vos principaux concurrents et/ou que le marché est difficile d’accès pour de nouveaux concurrents, il est possible que votre entreprise détienne une position dominante. Dans ce cas, certains comportements lui sont interdits.

De même, si l'un de vos concurrents ou l'un de vos partenaires commerciaux détient une position dominante, certains comportements lui sont interdits à votre égard.

S’il est possible que votre entreprise détienne une position dominante ou que vous soyez confronté, en tant que concurrent ou partenaire commercial, à une entreprise en position dominante, veuillez vous référer au chapitre Abus de position dominante (p. 54).

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29

Acquisition d’entreprises et entreprises communesEn relation avec l’éventuelle acquisition d’une entreprise,

OUI NON

Avez-vous acquis ou envisagez-vous d’acquérir une autre entreprise ? Si oui, s’agit-il d’un concurrent ?

Votre entreprise est-elle sur le point d’être vendue ? Si oui, est-ce à un concurrent ?

Dans le cadre des négociations, avez-vous échangé des informations de nature commerciale (prix d’achat ou de revente, stratégie actuelle et future, augmentations ou réductions de prix envisagées, conditions d’approvisionnement, limitation des ventes ou de la production, territoires d’activité, clientèle de l’entreprise, chiffre d’affaires, marques, technique de commercialisation, procédés propres à l’entreprise, etc.) ?

Avez-vous conclu ou envisagez-vous de conclure des engagements de non-concurrence ou des accords relatifs à la commercialisation de produits valables à la suite de l’opération d’acquisition, y compris en cas de transaction portant sur une partie de l’activité déterminante ?

Si vous avez répondu "oui" à l'une ou l'autre des questions posées ci-dessus, veuillez vous référer au chapitre Concentrations d'entreprises (p. 58).

En relation avec la création d’une entreprise commune ou une prise de participation dans une entreprise conjointement avec une autre entreprise,

OUI NON

Votre partenaire est-il l’un de vos concurrents sur un marché quelconque ?

L’entreprise commune est-elle indépendante ou conclut-elle des affaires principalement avec les fondateurs ou partenaires ?

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30 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

OUI NON

Des informations ou autres éléments de nature commerciale sont-ils communiqués par les fondateurs ou les partenaires à l’entreprise commune ou entre les partenaires ?

Les fondateurs ou les partenaires ont-ils pris des engagements visant à ne pas concurrencer l’entreprise commune ou à ne pas se faire concurrence entre eux ?

L’entreprise commune est-elle active sur le(s) même(s) marché(s) que les fondateurs ou partenaires ?

L’entreprise commune a-t-elle conclu des accords avec les fondateurs ou les partenaires et portant sur la commercialisation ou la revente des produits ou des services de l’entreprise commune par les fondateurs ou partenaires ?

Si vous avez répondu "oui" à l'une ou l'autre des questions posées ci-dessus, veuillez vous référer au chapitre Entreprises communes (p. 61).

Page 33: Conformité au droit de la concurrence · Le droit de la concurrence représente l’ensemble des normes visant à assurer le maintien d’une concurrence efficace sur le marché

CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCEGUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Éléments fondamentaux

du droit de la concurrence

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32 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Éléments fondamentaux du droit de la concurrenceLe droit de la concurrence repose sur trois piliers :

• les règles relatives aux accords entre entreprises (p. 32) ;

• les règles relatives à la lutte contre les abus de position dominante (p. 54) ;

• les règles relatives au contrôle des concentrations (p. 58).

Ces trois points seront traités dans la présente section. Celle-ci sera complétée par quelques précisions relatives au cas particulier des entreprises communes (p. 61), aux sanctions auxquelles s’exposent les entreprises ayant enfreint les règles du droit de la concurrence (p. 66), ainsi que par quelques considérations relatives aux PME (p. 66) et quelques aspects liés au commerce international (p. 67).

Accords illicites entre entreprisesGénéralités

Le droit de la concurrence régit les accords conclus entre des entreprises ayant pour objet ou pour effet de restreindre la concurrence en Suisse. De tels accords sont illicites lorsqu’ils suppriment la concurrence ou l’affectent de façon notable sans qu’ils ne puissent être justifiés par des motifs d’efficacité économique.

Plusieurs conditions doivent donc être réunies pour qu’un accord soit considéré illicite. Il doit s’agir (1) d’un accord, (2) conclu entre plusieurs entreprises, (3) ayant pour effet de supprimer la concurrence efficace ou de la restreindre de façon notable, (4) sans être justifié par des motifs d’efficacité économique.

La notion d’accord entre entreprises est particulièrement large. Elle vise toute forme de coordination consciente du comportement d’entreprises sur le marché. Sont ainsi qualifiés d’accords les conventions, contrats, gentlemen’s agreement ou autres actes juridiques, écrits ou non, qu’ils aient force obligatoire ou non, ainsi que les pratiques concertées visant à substituer aux nécessaires incertitudes liées au marché une prévisibilité accrue quant au comportement des parties impliquées. En d’autres termes, peu importe la forme, seuls comptent les effets de la coordination. Ainsi, un échange d’informations sensibles entre des entreprises,

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portant par exemple sur une variation des prix (à la hausse ou à la baisse), une stratégie ou des investissements marketing, ou encore l’adoption d’un nouveau standard peut tomber sous la notion d’accord en ceci qu’il substitue aux nécessaires incertitudes liées au marché une prévisibilité accrue quant au comportement futur des entreprises en question. Peuvent également être concernées de simples recommandations sur un comportement particulier, lorsqu’il est prévisible que leurs destinataires auront tendance à s’y conformer.

Parmi les accords visés, la loi instaure une distinction entre les accords entre concurrents actuels ou potentiels (dits accords horizontaux) et les accords entre entreprises qui ne se situent pas sur le même plan du marché, par exemple entre fabricants et distributeurs ou entre importateurs et distributeurs (dits accords verticaux). Ces deux catégories d’accords sont visées par la loi et peuvent s’avérer illicites.

Il convient de signaler qu’un accord peut exister même lorsqu’un comportement semble unilatéralement imposé par une entreprise à une autre entreprise, à partir du moment où l’autre entreprise y consent et/ou y a un intérêt. Tel sera par exemple le cas lorsqu’une entreprise renonce, soit par contrat soit à la suite de menaces ou sur la base d’une promesse incitative, à adopter un certain comportement sur le marché (par exemple concéder des rabais, s’approvisionner auprès d’un autre fournisseur, etc.).

La notion d’entreprise est très large. Elle comprend tout acteur qui produit des biens et des services et participe ainsi de manière indépendante au processus économique, que ce soit du côté de l’offre ou de la demande, indépendamment de son organisation ou de sa forme juridique. Sont ainsi des entreprises les sociétés, les indépendants, les entreprises de droit public, voire l’État lorsqu’il déploie des activités relevant de la vie économique. En revanche, les consommateurs et les travailleurs ne sont pas des entreprises au sens du droit de la concurrence.

Pour qu’il y ait accord entre entreprises, il faut que deux entreprises au moins participent à l’accord. À cet égard, les accords entre des sociétés appartenant à un même groupe échappent en règle générale au droit de la concurrence, l’ensemble des sociétés d’un groupe étant en principe assimilées, en droit de la concurrence, à une seule et même entreprise.

La simple existence d’un accord ne signifie pas que cet accord est illicite. Encore faut-il (1) qu’il restreigne la concurrence de façon notable (2) sans pouvoir être justifié par des motifs d’efficacité économique. Ainsi, même lorsqu’un accord restreint la concurrence de façon notable, il demeure possible de le justifier par des motifs d’efficacité économique (voir ci-dessous, chapitre Autres accords entre entreprises, p. 45 ss.). Il ne faut toutefois pas que l’accord supprime toute concurrence sur le marché. En pratique, s’agissant des infractions les plus graves, une telle justification n’est admise que dans des circonstances exceptionnelles.

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34 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Restrictions les plus graves

Les accords suivants sont considérés comme les plus graves en raison de leur objet ; ils sont réputés supprimer la concurrence et sont passibles de sanctions pécuniaires directes :

• les accords entre concurrents (accords horizontaux) (1) qui fixent directement ou indirectement des prix (accords sur les prix), (2) qui restreignent des quantités de biens ou de services à produire, à acheter ou à fournir (accords sur les quantités) ou (3) qui opèrent une répartition géographique des marchés ou une répartition en fonction des partenaires commerciaux (accords de répartition du marché) ;

• les accords entre producteurs et distributeurs (accords verticaux) qui ont pour objet soit (1) d’imposer aux revendeurs ou distributeurs un prix de vente minimum ou un prix de vente fixe (accord sur les prix de revente), soit (2) d’attribuer des territoires de revente ou de distribution, lorsque l’accord interdit les ventes (même non sollicitées) à des clients situés hors du territoire attribué (accords de répartition du marché).

Ces accords sont examinés individuellement et plus en détail dans les sous-chapitres suivants.

En l’état actuel du droit, ces accords réputés les plus graves sont illicites en raison de leurs effets, non de leur seul objet. Les entreprises ont ainsi la possibilité de s’exonérer en invoquant qu’il subsiste une concurrence suffisante entre les membres de l’accord ou du fait de la présence d’autres acteurs économiques non parties à l’accord. En pratique toutefois, d’une part, la preuve de cette concurrence suffisante est très difficile à apporter et, d’autre part, la restriction en cause n’est pratiquement jamais considérée comme nécessaire pour atteindre les gains d’efficacité économique invoqués, la privant ainsi de toute possibilité de justification ; ces accords sont donc le plus souvent jugés illicites et entraînent des sanctions pécuniaires, sauf s’ils n’ont que des effets très marginaux sur le marché (absence d’effets ou effets insignifiants), ce qui est rare.

Par ailleurs, une révision de la loi en cours au Parlement prévoit de déclarer par principe illicites les accords qui sont actuellement présumés supprimer la concurrence, indépendamment de leurs effets réels sur le marché.

Ainsi, quelle que soit la taille de votre entreprise, il convient de faire preuve d’une grande prudence dans vos contacts avec d’autres entreprises, que ces dernières soient vos concurrentes ou non.

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En pratique, sont présumés illicites les accords ayant pour objet ou pour effet de :

• fixer les prix ou coordonner les variations de prix ou d’autres éléments de fixation des prix entre concurrents ;

• répartir les marchés ou les sources d’approvisionnement entre concurrents ;

• limiter la production entre concurrents ;

• restreindre la liberté d’un distributeur ou d’un client de fixer ses prix ;

• limiter les territoires ou la clientèle d’un distributeur ou d’un client, notamment la capacité de donner suite à des demandes non sollicitées.

Questions et réponses

Q : Est-il encore possible d’avoir une discussion avec un concurrent ?

R : Oui, mais il faut prendre garde au contenu de la discussion. Il est parfaite-ment licite d’aborder des questions générales (fiscalité de la branche, for-mation des employés, évolution du marché, régulation, etc.). En revanche, les discussions portant sur le niveau des prix, les quantités mises sur le marché, les importations parallèles ou encore les systèmes de distribution doivent être évitées.

Q : Comment faut-il réagir si, au cours d’une discussion, un concurrent aborde un thème problématique ?

R : Il est recommandé de refuser d’entrer en matière, de demander que la discussion ne se poursuive pas sur ce sujet, voire de mettre un terme à la discussion et partir. Si la discussion fait l’objet d’un procès-verbal, veillez à ce que votre désaccord soit protocolé, de même que votre départ éventuel, afin d’être en mesure de prouver par la suite que vous n’avez pas pris part à cette discussion.

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36 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Accords entre concurrents sur les prix

L’accord sur les prix constitue un cartel "dur" qui est réputé porter l’atteinte la plus grave à la concurrence et fait donc l’objet de l’interdit le plus strict. La LCart prohibe toute forme de coordination entre concurrents sur les prix des produits ou services, sous quelque forme que ce soit. Chaque entreprise doit fixer ses prix de manière indépendante de ses concurrents, en ne tenant compte que des paramètres qui lui sont propres.

La forme que prend l’accord n’est pas pertinente ; il peut notamment s’agir d’un contrat en bonne et due forme (cas devenu rare), d’une coordination dans le cadre d’une association professionnelle, de l’emploi de listes de prix communes, de l’application d’un "tarif de la branche" ou d’un catalogue commun, d’échanges entre concurrents par e-mail ou par téléphone ou encore d’une simple poignée de mains.

Lorsque l’accord naît dans le cadre d’une association professionnelle, par exemple lorsque celle-ci émet des listes de prix ou renseigne ses membres sur les prix moyens pratiqués dans l’association, l’enquête de l’autorité de la concurrence visera tous les membres de l’association, sans exception. En général, l’autorité ne distingue pas les membres de l’association selon qu’ils suivent ou non les prix communiqués. Dès lors, une entreprise peut être exposée à des sanctions du simple fait qu’elle est membre de l’association professionnelle concernée.

Il est non seulement interdit aux entreprises de coordonner leur comportement dans la fixation du prix final, mais également de coordonner leurs pratiques sur des composantes du prix final ou sur des variations du prix pratiqué. Un accord peut ainsi également être illicite s’il porte sur des composantes du prix comme les rabais, les marges ou encore sur une variation - à la hausse comme à la baisse - coordonnée des prix. De même, il importe peu que l’accord laisse aux entreprises une marge de manœuvre en prévoyant par exemple une fourchette de prix ou des prix minimaux.

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Les schémas communs de calcul des prix ne sont admissibles que si leur contenu est limité à des formules de calcul des coûts et des prix, tout en laissant la liberté à chaque entreprise de déterminer ses prix et d’accorder des rabais. Ils ne doivent pas imposer ou proposer des montants ou des pourcentages forfaitaires concernant le décompte des coûts, ni imposer ou proposer des marges, des rabais, d’autres éléments du prix ou des prix finaux.

Il n’est pas nécessaire que l’accord soit appliqué à la lettre pour être déclaré illicite. Il suffit pour cela qu’une partie (même minoritaire) des entreprises qui y participent l’appliquent, régulièrement ou non.

L’accord horizontal sur les prix est condamné avec sévérité non seulement en Suisse, mais aussi partout en Europe et en Amérique du Nord. Ces accords ne peuvent pratiquement jamais être justifiés par des motifs d’efficacité économique.

À noter que les accords portant sur les quantités ont théoriquement des effets similaires aux accords sur les prix et sont traités, en droit de la concurrence, de la même manière. Ils sont toutefois bien plus rares.

Votre entreprise doit fixer ses prix de manière totalement indépendante de ceux de ses concurrents. Elle ne doit pas se fonder sur un accord, une pratique, une liste de prix commune, un "prix du marché" fixé par un groupement de professionnels ou sur toute autre forme de concertation entre concurrents.

L’accord est illicite s’il porte :

• sur le prix final (prix fixe ou minimal) ;

• sur le niveau des rabais ;

• sur les marges ;

• sur toute autre composante du prix ;

• sur un niveau de variation du prix, à la hausse comme à la baisse.

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38 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Questions et réponses

Q : Il existe entre mes principaux concurrents et mon entreprise une pra-tique selon laquelle nous ne livrons pas certains produits en-dessous d’un prix déterminé. Est-ce licite ?

R : Non, il s’agit d’un accord sur les prix. Cette pratique est illégale et doit être abandonnée.

Q : Une association professionnelle dont je suis membre édicte des tarifs ou un catalogue de produits avec des prix indicatifs. J’utilise ces infor-mations comme base de référence pour fixer mes prix, mais m’en écarte presque systématiquement en accordant des rabais. Est-ce problématique ?

R : Sauf exception, oui. Même une minorité de prix fixés selon les tarifs ou le catalogue peuvent être considérés comme le résultat d’une coordination illicite entre concurrents. Il est vivement conseillé de ne pas se référer aux tarifs ou au catalogue pour la fixation des prix.

Q : En vertu d’une ancienne pratique, mes concurrents et moi n’accor-dons jamais à nos clients de rabais supérieur à 10%. Cette pratique constitue-t-elle un accord sur les prix ?

R : Oui, un accord sur les prix peut porter tant sur le prix final que sur une composante de celui-ci. Dans ce cas, votre entreprise fixe certes son prix de base librement, mais elle s’interdit de le réduire au-delà d’un certain pourcentage.

Accords entre concurrents sur la répartition du marché ou de la clientèle

L’accord horizontal sur la répartition des marchés est la seconde catégorie de "cartel dur" et fait, comme les accords sur les prix, l’objet d’une sévérité toute particulière de la part des autorités de la concurrence. La LCart interdit tout accord par lequel les entreprises se répartissent entre elles les marchés (marchés de produits ou marchés géographiques) ou la clientèle. La forme juridique de l’accord est sans importance ; seuls comptent ses effets.

Le cas classique est celui dans lequel des entreprises concurrentes se répartissent un territoire en s’attribuant mutuellement une exclusivité sur une partie de celui-ci et en s’interdisant de servir des clients situés hors de leur propre territoire. Il s’agit néanmoins d’un cas relativement rare qui ne doit pas être confondu avec un

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accord de distribution exclusive. Ce dernier n’est pas interdit par principe mais est soumis à des règles et limites propres (cf. sous-chapitre Accords verticaux et clauses d'exclusivité, p. 43).

L’accord de répartition des marchés peut prendre la forme d’un engagement de ne pas démarcher des clients déjà en relation avec un concurrent. Sur de petits marchés où les concurrents se connaissent personnellement, il arrive qu’un gentlemen’s agreement ou un "code éthique" impose de consulter préalablement ses concurrents avant de répondre à une demande d’offre émanant d’un client. Ce type de pratique est assimilable à un accord sur la répartition des marchés.

Un autre cas fréquent d’accord de répartition des marchés, particulièrement dans le domaine de la construction, est le cartel dit de soumission (qui ne doit pas être confondu avec le consortium) : dans le cadre d’un appel d’offres – public ou privé –, les entreprises qui envisagent de déposer une offre se concertent préalablement pour déterminer celle d’entre elles qui déposera l’offre la plus avantageuse et remportera l’appel d’offres. Les autres s’engagent soit à s’abstenir de participer à l’appel d’offres, soit à déposer une offre artificiellement élevée, en contrepartie de l’obtention de travaux de sous-traitance ou de l’assurance de pouvoir emporter une offre ultérieurement. En matière de travaux publics, il a été démontré que les prix avaient baissé de manière significative à la suite du démantèlement de cartels de ce type. La Comco a à plusieurs reprises confirmé son intention de lutter avec vigueur contre ce type d’accords et d’infliger des sanctions maximales contre les entreprises concernées. À noter que le cartel de soumission doit être distingué des soumissions conjointes (consortiums),

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qui permettent à des petites entreprises de se réunir aux fins de participer, ensemble et de façon ouverte, à un appel d’offres auquel elles n’auraient pas pu participer de façon individuelle en raison de capacités limitées. Dans un tel cas, les entreprises soumettant une offre conjointe devront veiller à limiter leurs discussions et échanges aux seuls paramètres nécessaires en vue de la soumission de leur offre conjointe, et éviter avec soin tout autre échange, pour ne pas se voir reprocher un échange d’informations ou un autre comportement illicite (sur ce point, voir ci-dessous le sous-chapitre Échange d’informations, p. 48).

Votre entreprise ne doit pas s’interdire, en vertu d’un accord avec un concurrent,

• de livrer des produits ou des services à certains types de clients ;

• de livrer des produits ou des services à des clients situés dans un territoire déterminé ;

• de servir un client, de le démarcher ou de lui faire une offre.

Elle doit également s’abstenir de s’accorder avec ses concurrents dans le cadre d’un appel d’offres public en vue d’influencer le résultat d’un processus d’adjudication (sous réserve de la soumission d'une offre conjointe dans le cadre d'un consortium).

Questions et réponses

Q : Mon entreprise de construction métallique est sise à Yverdon. Avec mon principal concurrent, qui se trouve à Lausanne, nous avons convenu que je ne répondrai pas aux appels d’offres pour des chan-tiers situés au sud d’Échallens. En contrepartie, mon concurrent renoncera à participer aux appels d’offres pour des chantiers au nord de cette localité. Est-ce licite ?

R : Non, il s’agit d’un accord de partage de la clientèle selon le territoire. Cette pratique est illégale et doit être abandonnée.

Q : Avec mes quatre principaux concurrents, nous avons convenu que si l’un de nous était approché par un nouveau client, nous chercherions d’abord à savoir s’il était déjà en relation d’affaires avec l’un de nous. Si tel est le cas, nous refusons de faire une offre ou faisons une offre volontairement inintéressante. Est-ce licite ?

R : Non, il s’agit également d’un accord de partage de clientèle. Ce type de pratique est illégal et doit être abandonné.

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Q : Avec mes cinq principaux concurrents, nous nous réunissons lors de chaque appel d’offres important et décidons, selon un tournus, lequel d’entre nous fera l’offre la plus intéressante et décrochera le marché. Est-ce licite ?

R : Non, il s’agit d’un cartel de soumission. Cette pratique est illégale et doit être abandonnée.

Q : Je voudrais participer à un appel d’offres public, mais mon entreprise ne dispose pas des compétences ni de la superficie financière suffi-sante pour participer à cet appel d’offres. Puis-je contacter certains de mes concurrents dans la même situation que moi pour déposer une soumission commune satisfaisant aux critères posés dans les documents d’appel d’offres ?

R : Oui, ce type de consortium est généralement favorable à la concurrence pour autant qu’aucune des entreprises s’alliant avec vous ne soit en mesure de déposer une offre individuelle et, bien entendu, pour autant que vous apparaissiez toutes de façon transparente vis-à-vis du pouvoir adjudicateur. Veillez toutefois à n'échanger avec vos concurrents que les informations strictement nécessaires à l'offre conjointe. Par ailleurs, si vous n'arrivez pas à vous mettre d'accord avec vos concurrents sur les conditions du consortium, vous devriez éviter de participer à ce marché public, que ce soit individuellement ou dans le cadre d'un autre consortium.

Accords verticaux sur la fixation des prix de revente

Les accords entre producteurs (ou importateurs) et distributeurs qui fixent les prix de revente que doit pratiquer le distributeur sont absolument interdits. Cette interdiction s’applique aussi bien à la détermination de prix fixes que de prix minimaux, de rabais, de composants du prix et d’autres conditions de vente. Une entreprise n’a que la possibilité de fixer des prix de vente maximaux, pour autant qu’ils ne correspondent pas dans les faits à un prix de vente fixe ou minimal.

Ne limitez pas la liberté de vos distributeurs de déterminer de façon indépendante leurs prix de revente et n’acceptez aucune limitation de votre liberté dans la fixation de vos prix de revente.

Les recommandations de prix ne sont admissibles qu’à des conditions très restrictives. Il doit s’agir de pures recommandations, desquelles le distributeur doit être entièrement libre de s’écarter. Au contraire, les recommandations de prix dont les effets, suite à l’exercice de pressions ou à l’octroi d’incitations, sont similaires à

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des prix fixes ou minimaux sont prohibées. De même, les recommandations de prix sont susceptibles d’être assimilées à des accords en matière de prix lorsqu’elles sont largement respectées en pratique, ce en particulier lorsque des écarts de prix sensibles peuvent être constatés entre des régions proches ou comparables (par exemple entre la Suisse et des pays voisins).

Les recommandations de prix :

• doivent être expressément désignées comme non contraignantes ;

• doivent être rendues largement accessibles, et non pas uniquement réservées aux revendeurs ou commerçants ;

• ne peuvent sous aucun prétexte être assorties de menaces ou autres formes de pression, ni de l ’octroi d’avantages particuliers ; et

• doivent être abandonnées lorsqu’elles sont largement suivies en pratique ou que les prix des produits concernés se situent à un niveau sensiblement plus élevé que celui prévalant dans un pays voisin pour une prestation comparable.

Questions et réponses

Q : Puis-je donner à mes distributeurs une recommandation de prix de revente à titre indicatif ?

R : Les recommandations de prix posent problème. Elles doivent dans tous les cas être accessibles et être explicitement décrites comme non contrai-gnantes. Si les prix devaient être nettement plus bas dans les pays voisins, il faudrait alors renoncer à toute recommandation. Des recommandations de prix ne peuvent en aucun cas être liées à des pressions (par exemple menaces de résiliation, non livraison, etc.) ou à l’obtention d’avantages particuliers (rabais, bonus pour respect de la recommandation).

Q : Lorsqu’un fournisseur livre l’un de ses distributeurs, peut-il imposer un prix de revente ?

R : Non, le distributeur doit être entièrement libre de déterminer ses prix.

Q : En tant que distributeur, puis-je suivre volontairement une recom-mandation de prix, en sachant que je n’encours aucun inconvénient si je ne la suis pas ?

R : En l’état actuel du droit, ce n’est pas recommandé. En suivant volontairement une recommandation de prix, vous exprimez votre accord avec celle-ci, ce qui peut être interprété comme un accord en matière de concurrence.

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Q : Un fournisseur me propose des conditions d’achat particulièrement avantageuses ou encore un bonus à condition que je revende ses produits à un prix (minimum) déterminé. Dois-je accepter cette offre ?

R : Non. Vos fournisseurs ne peuvent pas vous prescrire des prix de revente. Refusez donc cette offre.

Accords verticaux et clauses d’exclusivité

De façon générale, les distributeurs peuvent être liés de façon exclusive à des fournisseurs (approvisionnement exclusif), pour autant (1) que ces fournisseurs n’occupent pas une position puissante sur le marché et (2) qu’il demeure possible pour les distributeurs de s’approvisionner en produits contractuels du même fabriquant auprès d’autres fournisseurs pour une partie substantielle de leurs besoins.

Il est également possible d’accorder à un distributeur un territoire de vente exclusif (exclusivité territoriale). Une entreprise peut de même s’engager, en respectant certaines conditions, à ne livrer qu’un client déterminé (exclusivité de clientèle). De tels accords nécessitent, avant leur conclusion, un examen détaillé au regard des exigences imposées par le droit de la concurrence. Les ventes passives (commandes non-sollicitées de clients) doivent en particulier toujours rester possibles.

Ne conférez à aucun client une exclusivité de distribution ou d’achat sur un ou plusieurs produits et n’exigez pas de l’un de vos distributeurs qu’il se fournisse exclusivement, ou pour la plus grande partie de ses besoins dans un produit spécifique, auprès de votre entreprise sans obtenir au préalable un conseil spécialisé.

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Questions et réponses

Q : Puis-je imposer à un client des quantités d’achats minimales ?

R : Oui, cela est en principe possible. Lorsqu’une obligation d’achats minimaux correspond en pratique à une interdiction de concurrence (ce qui est le cas lorsque l’obligation d’achat porte sur plus de 80% des besoins du client dans le produit concerné, tel que déterminé sur la base de la valeur des achats effectués au cours de l’exercice précédent), elle ne peut être conclue pour une durée indéterminée ou pour une durée supérieure à cinq ans. De même, il ne faut pas que cette obligation d’achats minimaux interdise en pratique au client de se procurer les produits contractuels auprès d’autres fournisseurs de la même marque, par exemple si cette obligation couvre l’intégralité de ses besoins. Une telle obligation d’achat pourrait alors en effet être interprétée comme une façon indirecte de cloisonner le marché.

Q : Puis-je moduler les rabais que je fais à mes clients non pas (ou pas seu-lement) en fonction de leur volume d’achat absolu, mais en fonction du volume relatif de leurs achats par rapport aux achats faits auprès de mes concurrents ?

R : Un tel rabais peut équivaloir à une clause d’exclusivité. Les précautions susmentionnées sont de mise.

Accords verticaux portant sur des restrictions territoriales ou de clientèle

Une entreprise peut attribuer à ses distributeurs un territoire exclusif ou une clientèle exclusive. Il peut être en particulier interdit aux autres distributeurs de démarcher activement des clients ou d’exploiter un établissement dans ce territoire (interdiction des ventes dites "actives"). Il doit en revanche toujours être possible pour les distributeurs de donner suite à des commandes non sollicitées, même si ces commandes proviennent de territoires attribués à d’autres distributeurs (ainsi dites "ventes passives"). Les règles déterminant les restrictions admissibles à la liberté des distributeurs de vendre ou de s’approvisionner dépendent du type de distribution choisi. Il est donc recommandé de soumettre au préalable l’accord envisagé à un spécialiste pour qu’il valide votre approche.

Ne restreignez pas le territoire dans lequel un distributeur a le droit de vendre les marchandises ou les services contractuels, ni le cercle de clients auxquels il peut les revendre sans avoir au préalable consulté un spécialiste.

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Questions et réponses

Q : Puis-je interdire à un distributeur des moyens de publicité dans les médias ou sur Internet ?

R : Non, de tels moyens de promotion des ventes doivent toujours être pos-sibles, sauf s’ils sont spécifiquement orientés vers des territoires dans les-quels les ventes actives sont interdites au distributeur.

Q : Puis-je interdire à un distributeur de revendre des produits par Internet ?

R : Non. Les ventes par Internet sont considérées comme des ventes passives et doivent donc toujours être possibles.

Autres accords entre entreprisesGénéralités

Même s’ils n’entrent pas dans la catégorie des accords les plus graves, d’autres accords entre entreprises peuvent avoir des effets sur la concurrence. Ils sont illicites s’ils restreignent la concurrence de façon notable et ne sont pas justifiés par des motifs d’efficacité économique.

Un accord qui affecte de manière notable la concurrence peut être justifié pour des motifs d’efficacité économique. Tel est le cas lorsqu’il est nécessaire pour réduire les coûts de production ou de distribution, pour améliorer des produits ou des procédés de fabrication, pour promouvoir la recherche ou la diffusion de connaissances techniques ou professionnelles, ou pour exploiter plus rationnellement des ressources. La possibilité d’une justification est examinée non seulement pour l’accord dans son ensemble, mais également pour chaque restriction individuellement, en ce sens que chaque restriction doit être nécessaire pour générer le gain d’efficience économique invoqué. En outre, la restriction ne doit pas permettre aux parties à l’accord de supprimer la concurrence efficace. De façon schématique, un accord pourra être justifié si (1) le gain d’efficacité économique invoqué ne peut pas être atteint d’une façon moins nuisible pour la concurrence et si (2) les avantages liés au gain d’efficacité obtenu l’emportent sur les inconvénients créés pour la concurrence par l’accord en question.

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Une typologie des accords potentiellement problématiques a été développée par la pratique et codifiée, notamment dans l’Union européenne. Il est possible de s’en inspirer en droit suisse. Dans tous les cas, il convient de rappeler que les restrictions décrites comme graves et analysées dans les paragraphes précédents (accords sur les prix, territoires, clientèle, débouchés) ne sont susceptibles d’être justifiés que dans des circonstances exceptionnelles.

Quelques cas fréquents d’accords horizontaux pouvant entraver la concurrence, mais susceptible d'être justifiés par des motifs d'efficacité économique, sont présentés ci-dessous.

De façon générale, un accord pourra être justifié si (1) le gain d’efficacité économique invoqué ne peut pas être atteint d’une façon moins nuisible pour la concurrence et si (2) les avantages liés au gain d’efficacité obtenu l’emportent sur les inconvénients créés pour la concurrence par l’accord en question.

Les restrictions graves mentionnées aux points précédents ne sont toutefois pas susceptibles d’être justifiées par des motifs d’efficacité économique, sauf circonstances exceptionnelles.

Partenariats avec des concurrents

Les partenariats entre entreprises concurrentes jouent un rôle important pour permettre à des entreprises d’atteindre, en se regroupant et en mettant leurs ressources en commun, une taille suffisante pour mener certains projets, par exemple dans la recherche et le développement, dans la production conjointe, ou encore pour grouper leurs achats et ainsi augmenter leur pouvoir de négociation. Dans le cas de projets risqués et nécessitant de lourds investissements, un partenariat (par exemple sous la forme d’un consortium) permettra, le cas échéant, de diversifier le risque et donc de favoriser la réalisation de tels projets. Ces accords ont en général des effets favorables sur la concurrence et peuvent donc être justifiés par des motifs d’efficacité économique. Ils peuvent cependant aussi entraîner des restrictions de la concurrence, sous forme de coordination des prix, de répartition de la clientèle ou encore de diminution de la production.

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Parmi les accords généralement considérés de façon bienveillante par les autorités de la concurrence, mentionnons les catégories suivantes :

• les accords de recherche et de développement, soit les contrats par lesquels les parties conviennent de mener conjointement des travaux de recherche et de développement. Ils règlent généralement aussi l’usage que chaque partie peut faire du résultat de ces travaux ;

• les accords de production, soit les contrats par lesquels une entreprise confie à une autre la production de ses produits (sous-traitance) ;

• les accords d’achats groupés, par exemple sous forme d’une centrale d’achats commune à plusieurs concurrents ;

• les accords de transfert de technologie, qui incluent les contrats de transfert de droits de propriété intellectuelle (brevets, marques, droit d’auteur sur logiciel, savoir-faire, design, etc.) ainsi que les accords de licence portant sur de tels droits.

Pour l’heure, aucune communication ou ordonnance suisse ne décrit les conditions auxquelles ces accords sont considérés comme justifiés. Ils font toutefois l’objet de réglementations européennes très techniques et détaillées, dont les autorités helvétiques s’inspirent dans l’application du droit suisse.

Bien que ces accords soient en principe considérés de façon bienveillante par les autorités, il n’en demeure pas moins que chaque accord est susceptible de restreindre la concurrence d’une façon illicite selon son contenu (par exemple, accord de répartition des territoires ou de la clientèle pour les produits concernés, accord sur les prix) et/ou les circonstances dans lesquelles il s’inscrit (par exemple position dominante d’une des parties à l’accord, ou position de puissance de marché des deux parties à l’accord).

Dans tous les cas, il est donc recommandé de rechercher un conseil spécialisé.

Certaines catégories d’accords entre concurrents sont susceptibles d’être justifiés par des motifs d’efficacité économique.

Avant de conclure un tel accord, il conviendra néanmoins de s’assurer auprès d’un spécialiste que les modalités de mise en œuvre de l’accord sont compatibles avec le droit de la concurrence.

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48 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Échange d’informations

Il peut arriver que des concurrents soient amenés à travailler ensemble. Outre les accords évoqués au paragraphe précédent, des concurrents peuvent notamment être amenés à coopérer en vue de soumettre une offre conjointe dans une procédure d’appel d’offres (par exemple consortium de construction) ou pour développer un nouveau marché (par exemple au moyen d’un joint-venture ou d’une entreprise commune). Il se peut également qu’une entreprise veuille racheter les activités d’un concurrent.

Dans tous ces cas, il est essentiel que les partenaires conservent constamment à l’esprit le fait qu’ils sont et demeurent des concurrents. Cela signifie qu’ils devront limiter leurs échanges au strict objet de leur coopération. De plus, ils devront s’assurer de ne pas transmettre à leur concurrent des informations sensibles sur leur entreprise, notamment des informations de nature stratégique (plans de développement, stratégie marketing, etc.), de nature financière (structure de coûts, politique en matière de marges et de coûts, etc.) ou commerciale (réseau de vente, sources d’approvisionnement, etc.), à moins que ces informations ne soient exigées et indispensables en vue de la réalisation de l’objet de leur accord. En phase de pourparlers, autrement dit avant que la décision de mettre en œuvre l’accord ait été prise, il sera recommandé de confier les informations les plus sensibles aux conseillers financiers de son partenaire, et non pas au partenaire directement. En d’autres termes, il conviendra de mettre en place des garde-fous permettant de s’assurer que l’accord de coopération ou le travail commun ne soit pas utilisé comme un moyen indirect de procéder à un échange illicite d’informations entre concurrents.

De façon générale, souvenez-vous que tout échange d’informations entre concurrents portant sur des paramètres concurrentiels tels que les prix, les rabais, les quantités vendues, le chiffre d’affaires, l’évolution des ventes, les coûts (de marketing, de développement, etc.) est problématique.

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Vie associative

Les associations professionnelles jouent un rôle important en tant que forum de discussion d’une branche d’activité. Elles défendent les intérêts généraux de la branche, notamment pour l’amélioration des conditions-cadres. Elles permettent également, dans certains cas, de réduire les coûts de fabrication et d’élargir l’éventail des produits disponibles par l’adoption de standards uniformes (normes énergétiques, caractéristiques unifiées de certains produits, etc.). En ce sens, les associations professionnelles s’inscrivent dans une dynamique d’amélioration des mécanismes du marché et peuvent ainsi se révéler bénéfiques à la concurrence.

Il convient néanmoins de tenir compte du fait que les membres de l’association sont des concurrents et d’adapter son comportement en conséquence. L’association ne doit ainsi pas se transformer en plateforme d’échanges d’informations sensibles entre concurrents ou en lieu de conclusion d’ententes illicites. Il convient donc de faire preuve de prudence dans les activités menées et les propos échangés.

À cet égard, il convient de garder à l’esprit que les associations professionnelles comportent plusieurs risques :

• des sujets confidentiels, dont il ne faudrait jamais discuter avec des concurrents (p.ex. des hausses de prix prévues), pourraient être abordés au cours d’une discussion ;

• une autorité de la concurrence pourrait supposer, sur la base d’autres indices suggérant un comportement coordonné au niveau de la branche, qu’un accord de nature cartellaire a été conclu dans le cadre de l’association ;

• les statuts de l’association pourraient désavantager certains concurrents déterminés ;

• d’éventuels standards techniques pourraient être utilisés pour écarter du marché certains acteurs déterminés ;

• la défense des intérêts de la branche pourrait être confondue avec une protection des intérêts commerciaux individuels de ses membres.

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En revanche, il est légitime que les discussions portent et que des informations soient échangées sur les thèmes suivants :

• questions techniques, de nature non confidentielle, et concernant l’ensemble de la branche, telles que, par exemple, standards ou prescriptions en matière de santé ou de sécurité ;

• thèmes généraux relatifs à des technologies, comme propriétés et adéquation d’instruments particuliers ou de technologies spécifiques ;

• conditions-cadre offertes par la région ou par la Suisse (droit du travail, fiscalité, transports, etc.) ;

• campagne de communication ou lobbysme au sein de la branche.

Rappelez-vous que les membres d’une association professionnelle sont non seulement des collègues, mais également des concurrents.

Dès lors, ne participez à aucune discussion (ni de nature formelle, ni de nature informelle) portant sur :

• les prix de votre entreprise, de ses concurrents ou de l’ensemble de la branche, les modifications de prix, les conditions commerciales, les différences de prix, les rabais et remises, les suppléments de prix, etc. ;

• les coûts, les formules et méthodes de calcul des coûts ;

• les conditions pratiquées par les fournisseurs ;

• les projets futurs des entreprises à titre individuel, p.ex. s’agissant du marketing, des fournisseurs, etc. ;

• les clients.

Les associations professionnelles réalisent parfois des études de marché et d’autres enquêtes statistiques auprès de leurs membres, voire même au-delà. En soi, de telles études ne sont pas contraires au droit de la concurrence. Au contraire, elles sont même susceptibles de la favoriser par une meilleure connaissance pour leurs membres du marché dans lequel ils évoluent ainsi que, le cas échéant, par une meilleure appréciation de leurs forces et faiblesses.

De telles études peuvent néanmoins constituer un échange d’informations illicite, voire un instrument de coordination du comportement concurrentiel des membres de l’association. Afin de ne pas vous exposer à quelque problème que ce soit en

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relation avec l’établissement de statistiques relatives à votre branche, assurez-vous de respecter les points suivants :

• la collecte et le traitement des données doivent être réalisés par une entreprise indépendante (ou, à tout le moins, par une équipe exclusivement composée de collaborateurs de l’association professionnelle, à l’exclusion de tout collaborateur des entreprises membres de l’association) ;

• faites en sorte que l’association s’assure que les informations fournies ne soient pas transmises à des concurrents et que la confidentialité des données fournies soit pleinement respectée ;

• les statistiques doivent être établies de façon abstraite et ne doivent pas permettre de mettre en relation des données particulières avec l’entreprise qui les a fournies ;

• les données relatives à des informations sensibles, telles que les prix, la production ou le chiffre d’affaires, ne doivent jamais être livrées à une association professionnelle. Cela s’applique aussi bien à des données actuelles qu’à des données historiques. En cas de doute, obtenez un conseil spécialisé avant toute transmission de données ;

• n’annotez pas les statistiques avec des commentaires, des analyses, des observations ou des recommandations ;

• les statistiques ne doivent jamais être discutées par les entreprises ayant fourni des données, ni avant, ni après, ni pendant une réunion d’association d’entreprise ni à toute autre occasion.

Dans tous les cas, assurez-vous, avant de participer à une telle enquête, de bien connaître les modalités de collecte et de publication des informations que vous envisagez de soumettre. En cas de doute, n’hésitez pas à poser des questions ou à demander à ce que l’association valide son approche auprès d’un spécialiste.

Les enquêtes de marché et autres enquêtes statistiques comportent potentiellement aussi bien des aspects pro-concurrentiels qu’anti-concurrentiels.

Assurez-vous à l’avance qu’aussi bien la collecte des informations que la communication des résultats de l’enquête sont conformes au droit de la concurrence. En cas de doute, n’hésitez pas à poser des questions.

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52 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Questions et réponses

Q : Comment dois-je me comporter lors d’une réunion d’association professionnelle ?

R : Soyez prudent et exigez à l’avance une copie de l’ordre du jour. Si vous trou-vez des points susceptibles d’être problématiques sous l’angle du droit de la concurrence, veillez à demander des renseignements complémentaires et, si des doutes subsistent, ne participez pas à la réunion.

Q : Au cours d’une réunion, l'un des participants aborde l’un des sujets sensibles évoqués plus haut. Puis-je me contenter de ne pas m’expri-mer sur le sujet ?

R : Non. Si, au cours d’une réunion, des sujets sensibles au regard du droit de la concurrence devaient être abordés, communiquez clairement aux autres participants votre préoccupation par rapport au droit de la concurrence et exigez que la discussion prenne fin. Dans tous les cas, faites retranscrire votre prise de position dans le procès-verbal. Si les autres participants poursuivent la discussion malgré votre intervention, quittez la réunion, après avoir pris soin de le faire retranscrire au procès-verbal. Si vous avez des doutes quant à l’admissibilité des thèmes abordés, demandez à ce que le point de l’ordre du jour concerné ainsi que d’autres discussions sur ce thème soient reportés à la prochaine séance. Consultez ensuite un conseil spécialisé.

Q : Je reçois régulièrement, par le biais d’une association professionnelle ou d’un groupement d’entreprises dont je suis membre, des infor-mations sur les prix moyens pratiqués par ses membres. J’utilise ces informations pour fixer mes prix, même si je m’en écarte pour certains clients à qui je concède des rabais. Est-ce problématique ?

R : Oui. Chaque entreprise doit fixer ses prix de façon indépendante, sans s’appuyer sur les prix de ses concurrents. Vous devez demander à ce que ces prix ne vous soient plus communiqués, voire quitter l’association ou le groupement qui vous les communique.

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Q : J’ai reçu un questionnaire de mon association professionnelle qui mène une enquête sur les activités de ses membres. Puis-je y répondre librement ?

R : Oui, après vous être toutefois assuré que vos informations demeurent confidentielles (y compris à l’égard du comité), qu’elles ne soient pas reconnaissables et que les questions posées ne portent pas sur des sujets sensibles et non pertinents (prix, stratégie, répercussion des variations de change, etc.). En cas de doute, assurez-vous que l’association a analysé la conformité de son approche au regard du droit de la concurrence.

Partenariats avec des non-concurrents

Le fait de conclure des accords avec des entreprises qui ne sont pas concurrentes permet souvent d’améliorer les processus de production ou de distribution et de favoriser l’innovation. De tels accords ne sont en général pas interdits par le droit de la concurrence, pour autant qu'ils ne contiennent pas de restrictions qui ne sont pas nécessaires pour améliorer les processus de production ou de distribution ou pour mener des projets de recherche et développement.

D’autres limitations convenues entre les partenaires, portant notamment sur des activités de recherche ou commerciales sans lien direct avec le partenariat entrepris ou qui ne sont pas nécessaires à la réalisation de l’objectif principal du partenariat, peuvent en revanche relever des dispositions sur les accords illicites. Tel sera par exemple le cas d’engagements de ne pas développer ses activités dans un domaine nouveau sans rapport direct avec le partenariat ou sans rapport avec la contribution de l’une ou l’autre des parties, ou encore des accords entre les parties portant sur la commercialisation par chacune des produits ou services résultant du partenariat.

Lorsque votre liberté commerciale ou votre autonomie en matière de recherche et de développement est limitée par un accord de partenariat, ou lorsqu’un accord de partenariat conclu avec un non-concurrent contient des limitations qui ne sont pas en lien direct avec l’objet du partenariat, il est recommandé de rechercher un conseil avisé avant de conclure un éventuel accord.

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Contrats avec des sous-traitants

Un accord de sous-traitance est un accord par lequel un donneur d’ordre fournit une technologie ou un équipement à un sous-traitant (non-concurrent !) qui s’engage à fabriquer certains produits (exclusivement) pour le donneur d’ordre sur la base de cette technologie ou de cet équipement. Ces accords ne sont en général pas interdits par le droit de la concurrence, pour autant que la technologie ou l’équipement considérés soient nécessaires pour mettre le sous-traitant en mesure de fabriquer les produits. Toutefois, d’autres limitations imposées au sous-traitant, telles que l’obligation de ne pas effectuer ou exploiter ses propres travaux de recherche et de développement ou de ne pas produire, en général, pour des tiers, peuvent relever des dispositions sur les accords illicites.

Sauf cas de position dominante, vous pouvez limiter l’utilisation qui est faite des technologies et/ou des équipements que vous confiez à des sous-traitants non-concurrents.

Si vous souhaitez toutefois restreindre autrement l’activité d’un sous-traitant, recherchez auparavant un conseil spécialisé.

Abus de position dominanteLa détention d’une position dominante n’est pas illicite en soi. Elle entraîne toutefois pour l’entreprise qui en bénéficie une "responsabilité spéciale" de ne pas en tirer profit au détriment de ses concurrents et de ses partenaires commerciaux.

Notion de position dominante

La position dominante se définit comme la possibilité pour une entreprise de se comporter de manière essentiellement indépendante par rapport aux autres participants au marché (concurrents, fournisseurs ou acheteurs). La position dominante peut être du côté de l’offre (un fournisseur incontournable) ou de la demande (un distributeur incontournable). En d’autres termes, du fait de sa position sur le marché, l’entreprise dominante est dans une large mesure déliée de la pression concurrentielle à laquelle est habituellement confrontée toute entreprise.

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La position dominante n’est pas fonction de la taille de l’entreprise, mais de la taille et de la structure du marché. Il arrive fréquemment que des PME soient confrontées à des partenaires ou des concurrents qui se trouvent en position dominante. Toutefois, sur un marché local ou très spécifique, même une PME pourra être considérée comme dominante. Il est également possible que plusieurs entreprises, qui ne sont pas en position dominante sur le marché de façon individuelle, soient considérées comme dominant ensemble le marché (position dominante collective).

Marché concerné et position sur le marché

Afin de déterminer la position de votre entreprise ou celle de ses partenaires contractuels, il convient de délimiter le marché concerné.

La détermination du marché pertinent se fait sur la base de plusieurs critères, essentiellement sur la base des produits et du territoire concernés.

Le marché de produits comprend tous les produits ou services que les partenaires potentiels de l’échange (fournisseurs ou clients) considèrent comme substituables en raison de leurs caractéristiques et de l’usage auquel ils sont destinés. En d’autres termes, il faut rechercher les produits ou les services qui ont des caractéristiques similaires et sont destinés à un même usage que ceux de l’entreprise concernée.

Le marché géographique comprend pour sa part le territoire sur lequel les partenaires de l’entreprise concernée peuvent acquérir, respectivement écouler les produits du marché de produits. Ce marché peut être très local, par exemple si les produits concernés sont destinés à une clientèle locale ou si les coûts de transport rendent l’achat du produit prohibitif hors d’une certaine zone. Il peut au contraire être national, voire international lorsque l’entreprise fait face à une concurrence globale.

Une fois le marché défini, il s’agit d’analyser la position que détient l’entreprise concernée par rapport à ses concurrents sur ce marché. Cette analyse se fonde principalement sur la part de marché de l’entreprise, exprimée en pourcent du chiffre d’affaires global du marché pertinent, par rapport à celles de ses concurrents. Si cette part de marché dépasse 50%, l’entreprise est présumée être en position dominante. Il peut cependant y avoir dominance même avec une part de marché inférieure, notamment si le reste de l’offre est très éclaté (parts de marché faibles), si les investissements requis pour entrer sur le marché sont élevés, ou si l’entreprise concernée dispose d’un autre avantage (par exemple marque de renom, exclusivité sur une technologie spécifique, position de force sur un marché voisin, etc.).

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56 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Exemples :

• votre entreprise exploite un poste de production d’enrobés bitumineux. Votre concurrent le plus proche est situé à 100 km. Tous les chantiers dans un rayon de 50 km de votre entreprise se fournissent chez vous, car au-delà de cette distance la durée du transport de l’enrobé bitumineux diminue sa qualité et le coût du transport devient excessif par rapport au prix du produit lui-même. Votre entreprise est probablement dominante sur ce petit marché local ;

• votre entreprise détient un brevet sur un processus de fabrication d’un composé polymère. Sur la base de cette technologie, elle a élaboré un caoutchouc particulièrement adapté aux balais d’essuie-glaces et fournit, en volume, 62% de la demande mondiale de ce produit, directement ou sous licence. En raison du brevet, il est difficile pour un concurrent de parvenir à s’implanter sur ce marché. Votre entreprise détient vraisemblablement une position dominante sur ce marché de niche.

Si votre entreprise détient une part de marché de 40% ou plus et qu’il est peu probable que cette position soit contestée avec succès par un concurrent à court terme, elle détient vraisemblablement une position dominante.

Elle doit dès lors prendre garde à ne pas adopter de comportements qui constitueraient un abus de position dominante.

Comportements abusifs

La loi réprime les pratiques d’entreprises en position dominante lorsque celles-ci abusent de leur position et entravent l’accès d’autres entreprises à la concurrence ou son exercice, ou désavantagent les partenaires commerciaux. La loi réprime donc des pratiques d’entrave à la concurrence ou d’exploitation de la position dominante.

La notion d’abus est difficile à appréhender car elle ne se définit pas par l’acte qui est commis, mais par ses effets négatifs sur la concurrence. Il est donc ardu d’établir une typologie des comportements illicites, car ce sont toujours les effets qui sont déterminants. La loi cite quelques exemples, parmi lesquels :

• le refus d’entretenir des relations commerciales, par exemple le refus de livrer ou d’acheter des marchandises ou la cessation de livraison sans raison objective. Ce cas de figure s’applique en particulier si votre entreprise livre des composants essentiels à certains de ses concurrents ;

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• la discrimination de partenaires commerciaux en matière de prix ou d’autres conditions commerciales, par exemple l’imposition de prix plus élevés à un concurrent (actuel ou potentiel) qu’à d’autres clients ;

• le fait d’imposer des prix ou d’autres conditions commerciales inéquitables ;

• la sous-enchère en matière de prix ou d’autres conditions commerciales, dirigée contre un concurrent déterminé. Il s’agit pour l’entreprise dominante de vendre à un niveau de prix insupportable pour le concurrent dans l’espoir de le faire sortir du marché ;

• la limitation de la production, des débouchés ou du développement technique ;

• le fait de subordonner la conclusion de contrats à la condition que les partenaires acceptent ou fournissent des prestations supplémentaires.

Il n’est pas nécessaire que l’abus déploie ses effets sur le même marché que celui où l’entreprise est dominante (effet de levier). Par exemple, une entreprise qui dispose d’un accès privilégié à une matière première ou à une technologie commet un abus de position dominante si elle se sert de cet accès privilégié pour désavantager ses concurrents sur le marché des produits fabriqués au moyen de cette matière première ou de cette technologie.

Les comportements abusifs ne peuvent être justifiés que pour des motifs très limités (notamment solvabilité du partenaire contractuel, impératifs de sécurité ou risque d’espionnage industriel).

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58 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Si votre entreprise se trouve en position dominante, il est vivement conseillé de faire appel à un conseil juridique spécialisé et de mettre en place un code de conduite strict et détaillé.

Il est essentiel que votre entreprise intègre cette dimension dans sa stratégie commerciale, car ce qui est autorisé pour une entreprise "normale" ne l’est pas nécessairement pour l’entreprise en position de force sur le marché.

Votre entreprise peut également être victime d’un éventuel abus. Le cas le plus évident est lorsqu’une entreprise dominante refuse de conclure un contrat avec vous sans motifs objectifs ou lorsque cette entreprise vous discrimine, toujours sans motifs objectifs, par rapport à ses autres clients. Dans de tels cas, vous pouvez utiliser le droit de la concurrence pour revendiquer un traitement équitable par rapport aux autres partenaires de l’entreprise dominante.

Le droit de la concurrence peut être invoqué par une entreprise victime d’un abus afin de mettre un terme à cet abus, notamment pour obtenir un traitement équitable par rapport aux autres partenaires de l’entreprise dominante.

Concentrations d’entreprisesNotification des opérations de concentration

Le contrôle des concentrations a pour but d’empêcher qu’un regroupement d’entreprises donne naissance à une entité dont la position sur le marché lui donnerait les moyens d’entraver la concurrence.

Ainsi, à partir d’une certaine taille, les opérations de concentration d’entreprises doivent obligatoirement être notifiées aux autorités de la concurrence (Comco) et ne peuvent pas être réalisées avant d’avoir été autorisées. La Comco peut interdire l’opération (ou l’assortir de charges ou de conditions) si elle aboutit à la création ou au renforcement d’une position dominante.

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Les opérations de concentration concernées sont les suivantes :

• les fusions au sens propre (selon la loi fédérale sur la fusion) ;

• les opérations de prise de contrôle d’une entreprise par une autre ou plusieurs autres. Il s’agit du cas le plus fréquent en pratique. La prise de contrôle peut se réaliser par l’acquisition de la majorité ou de la totalité du capital-actions de l’autre entreprise, mais aussi par tout autre moyen permettant d’exercer une influence décisive sur cette entreprise (participation au conseil d’administration, contrats de prêt, etc.) ;

• La création d’une entreprise commune ("joint ventures"), pour autant qu’elle ait tous les attributs d’une entreprise indépendante (cf. sous-chapitre Entreprises communes, p. 61). À défaut, les entreprises communes sont régies par les dispositions sur les accords entre entreprises.

Les opérations de concentration ne doivent faire l’objet d’une notification à la Comco que si elles atteignent une certaine taille, exprimée en termes de seuils de chiffres d’affaires réalisés par les entreprises participantes. Ces seuils sont les suivants :

• les entreprises participantes ont réalisé, au cours du dernier exercice, un chiffre d’affaires global cumulé d’au moins deux milliards de francs ou un chiffre d’affaires en Suisse d’au moins 500 millions de francs ; et

• au moins deux des entreprises participantes ont réalisé individuellement, au cours du dernier exercice, en Suisse, un chiffre d’affaires minimum de 100 millions de francs.

Pour le calcul de ces seuils, les entreprises participantes sont, en cas de fusion et de création d’une entreprise commune, les entreprises qui fusionnent, respectivement qui créent l’entreprise commune. En cas de prise de contrôle (cas le plus fréquent), les entreprises participantes sont la - ou les - entreprise(s) acquéreuse(s) et l’entreprise acquise (à l’exclusion de l’entreprise qui cède sa participation). Dans tous les cas, les chiffres d’affaires des filiales et des sociétés sœurs sont additionnés à ceux de l’entreprise participante pour le calcul des seuils. Par ailleurs, lorsque plusieurs entreprises acquièrent le contrôle de l’entreprise acquise, il est possible que l’obligation de notifier soit déclenchée par les seules entreprises acquéreuses, indépendamment de la taille de l’entreprise acquise.

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60 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Ces seuils relativement élevés ont pour conséquence que les cessions de PME sont rarement soumises au contrôle des concentrations et peuvent donc être réalisées librement. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que tous les pays européens (ainsi que l’Union européenne elle-même) connaissent un mécanisme similaire de contrôle, parfois avec des seuils moins élevés ou sur la base de critères de déclenchement différents. Une concentration entre entreprises suisses peut devoir être notifiée dans un autre État si les entreprises concernées y réalisent un chiffre d’affaires excédant le seuil fixé par la législation de cet État ou si d'autres critères propres à cet État (par exemple en termes de parts de marché) sont satisfaits, quand bien même elles n’y ont aucune implantation.

La notification d’une opération de concentration à la Comco est un processus complexe qui nécessite dans tous les cas un conseil juridique spécialisé. Il vaut donc la peine de s’interroger dès le début du processus de rapprochement sur l’éventuelle obligation de notification et d’anticiper les difficultés qui pourraient survenir.

Aspects relevant des accords entre entreprises

Outre la question de la notification, il ne faut pas perdre de vue que les contrats qui fondent des opérations de concentration et qui n’atteignent pas les seuils de notification sont soumis aux règles sur les accords en matière de concurrence. Il en va de même des restrictions contenues dans ces contrats qui ne sont pas directement nécessaires à l’opération de concentration et ne peuvent ainsi être considérées comme de purs accessoires à cette opération. Il convient notamment d’être attentif, dans ces contrats, aux clauses de non-concurrence entre acheteur et vendeur, aux restrictions territoriales ou de clientèle, ainsi qu’aux licences de droits de propriété intellectuelle.

Par ailleurs, et indépendamment du fait que les seuils déclenchant une obligation de notifier sont atteints ou pas, toute opération de concentration entre concurrents implique que les règles de comportement entre concurrents soient respectées au cours du processus de rapprochement. Cela signifie en particulier que le projet de concentration ne doit pas devenir l’occasion d’échanger des informations sensibles (prix d’achat ou de revente, stratégie actuelle et future, augmentations ou réductions de prix envisagées, conditions d’approvisionnement, limitation des ventes ou de la production, territoires d’activité, clientèle de l’entreprise, chiffre d’affaires, marques, technique de commercialisation, procédés propres à l’entreprise, etc.), ni non plus l’occasion de s’accorder sur des questions de nature stratégique.

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Aussi longtemps que le rapprochement n’est pas réalisé, les entreprises participantes demeurent indépendantes et soumises aux règles régissant les accords entre entreprises.

Due diligence

Le rapprochement de deux ou plusieurs entités auparavant indépendantes est source de grandes opportunités, mais également de risques.

Au nombre des risques pouvant être "importés" au sein de l’entreprise figure celui lié au droit de la concurrence.

Si l’entreprise acquéreuse ne met pas un terme aux activités illicites dès le premier jour du rapprochement, elle devient à son tour l’auteur d’une infraction au droit de la concurrence.

Par ailleurs, il se peut que l’entreprise acquéreuse doive assumer les conséquences liées au passé, notamment lorsque le vendeur a cessé d’exister.

Enfin, il est possible que le cœur d’activité de l’entreprise acquise, notamment ses contrats-clés, soit gangrené. Dans ce cas, il est capital d’obtenir une renégociation de ces contrats avant même l’opération de rapprochement.

Dans le cadre d’une opération de concentration (fusion ou acquisition), évitez d’importer des risques de droit de la concurrence liés aux activités de votre partenaire potentiel. Intégrez donc le droit de la concurrence dans les points de votre due diligence.

Entreprises communesPar entreprise commune, on entend une entreprise dans laquelle participent deux ou plusieurs entreprises par ailleurs indépendantes et actives sur le marché. Une entreprise commune peut par exemple être constituée par plusieurs sociétés voulant développer ensemble un projet nouveau, unissant ainsi leurs forces et leurs compétences pour en favoriser la réussite ou réduire leur risque individuel.

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62 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Si, de manière générale, la mise en commun de ressources est de nature à favoriser la concurrence, la réunion au sein d’une même entreprise de plusieurs entreprises par ailleurs concurrentes, voire actives dans des marchés proches, est néanmoins de nature à restreindre la concurrence à plusieurs égards, par exemple par des échanges d’informations sensibles entre concurrents ou encore par une coordination du comportement des partenaires sur le marché.

La création d’une entreprise commune ou l’entrée dans le capital d’une autre entreprise doit être analysée aussi bien sous l’angle du contrôle des concentrations que sous l’angle des accords entre entreprises.

Lorsque les entreprises participant à la constitution d’une entreprise commune ou lorsque les entreprises sur le point de devenir partenaires au sein d’une entreprise commune génèrent un chiffre d’affaires proche ou supérieur aux seuils applicables en matière d’opérations de concentration, ou lorsque l’une des entreprises participantes a été considérée comme dominante sur le marché par l’autorité de la concurrence, il convient d’examiner si l’opération envisagée doit faire l’objet d’une notification préalable auprès de l’autorité de la concurrence.

Dans tous les cas, et indépendamment d’une éventuelle notification préalable de l’opération, les entreprises partenaires devront veiller à respecter les règles régissant les accords entre entreprises dans le cadre de leurs relations. En particulier, elles ne devront pas communiquer ou échanger des informations sur des sujets qui ne se rapportent pas à l’entreprise commune, ni convenir d’accords qui ne seraient pas nécessaires à la réalisation des objectifs de l’entreprise commune.

La création d’une entreprise commune ou une prise de participation au sein d’une entreprise commune est susceptible de devoir être notifiée au préalable à l’autorité de la concurrence. Ne mettez aucun projet en œuvre avant de vous être assuré de la nécessité ou non d’une notification.

Les relations entre les partenaires d’une entreprise commune sont régies par les règles ordinaires applicables aux accords entre entreprises. Veillez donc à les respecter en tout temps.

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SanctionsPrincipe

Les violations de la LCart sont passibles de sanctions administratives qui visent l’entreprise qui les a commises (à l’exclusion des personnes physiques qui la dirigent). Ces sanctions prennent la forme d’amendes pouvant atteindre au maximum 10% du chiffre d’affaires (et non du bénéfice) réalisé en Suisse au cours des trois derniers exercices.

En règle générale, une sanction n’est imposée qu’en cas de récidive, sauf pour les infractions les plus graves, passibles d’une sanction immédiate, à savoir :

• les accords horizontaux portant sur les prix, la répartition des marchés ou les quantités, même s’ils ne suppriment pas la concurrence efficace ;

• les accords verticaux imposant un prix de vente minimum ou fixe et les accords de distribution attribuant des territoires de vente, lorsque les ventes passives par d’autres fournisseurs sont interdites, même s’ils ne suppriment pas la concurrence efficace ;

• les abus de position dominante.

Ces amendes potentiellement très élevées ont naturellement un but dissuasif en exposant les entreprises concernées à devoir payer un montant au moins aussi élevé que le profit qu’elles ont – théoriquement – retiré de leur infraction. Même si la sanction doit respecter le principe de proportionnalité et qu’elle ne devrait en principe pas mettre en danger la survie de l’entreprise, les PME ont rarement la trésorerie nécessaire au paiement de l’amende infligée et celle-ci peut gravement prétériter leur avenir.

Le montant de 10% du chiffre d’affaires est un maximum, et non pas une sanction fixe. Le montant de la sanction est fonction principalement de la gravité et de la durée de l’infraction, les accords horizontaux portant sur les prix ou la répartition du marché étant considérés comme les infractions les plus graves, justifiant la sanction la plus élevée possible. La répétition de l’infraction, le refus de collaborer avec les autorités, le fait d’avoir joué un rôle d’instigateur ou d’auteur principal de l’infraction constituent, entre autres, des circonstances aggravantes.

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64 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

À noter que le délai de prescription est de cinq ans avant l’ouverture d’une enquête par la Comco. Autrement dit, un comportement illicite ne pourra faire l’objet d’une amende s’il a cessé plus de cinq ans avant l’ouverture d’une enquête par l’autorité.

Autres conséquences

À la sanction pécuniaire s’ajoute souvent un dommage de réputation, la Comco ayant pour pratique de rendre publiques ses décisions, ainsi que les frais de la procédure elle-même, qui sont mis à la charge de l’entreprise condamnée et peuvent atteindre plusieurs centaines de milliers de francs, sans compter les frais de défense. Les risques de prétentions en dommages-intérêts devant les tribunaux civils doivent également être pris en compte.

L’importance de ces sanctions rend l’adoption d’un plan de conformité d’autant plus nécessaire. Dans nombre de cas, la violation de la LCart est commise par certains employés seulement (en général les responsables commerciaux ou des achats), qui sont peu au fait des limites posées par la LCart, sans que la direction n’en ait connaissance avant que l’infraction ne soit découverte et qu’il ne soit trop tard.

Cela dit, il existe des moyens de diminuer la sanction, voire de l’éviter entièrement.

Programme de clémence

Le programme de clémence permet à une entreprise qui est partie à un accord illicite d'être exemptée de toute sanction si elle est la première à en informer la Comco et à lui fournir des informations ou des preuves de l’accord en question. Cet outil a été qualifié par certains d’incitation institutionnalisée à la délation. Il est toutefois devenu, dans la plupart des juridictions qui le connaissent, la première source d’information des autorités de concurrence, qui ont autrement beaucoup de difficultés à prouver l’existence de restrictions illicites à la concurrence. L’exemption totale de sanction pour la première entreprise à dénoncer l’accord illicite vise naturellement à inciter les entreprises à mettre fin à leurs comportements illicites, mais aussi à déstabiliser l’accord (course à la première auto-dénonciation).

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Les conditions de l’exemption totale de l’amende sont les suivantes :

• l’entreprise dénonciatrice doit être la première à se dénoncer à la Comco ;

• elle ne doit pas avoir été l’instigatrice de l’accord illicite ;

• elle doit remettre spontanément à la Comco toutes les informations et preuves dont elle dispose ;

• elle doit coopérer sans interruption et sans réserve avec la Comco ;

• elle doit cesser d’appliquer l’accord illicite dès la dénonciation ;

• enfin, la Comco ne doit pas avoir déjà connaissance de l’accord dénoncé.

Sans aller jusqu’à une exonération complète, la sanction peut par ailleurs être réduite lorsqu’une entreprise participe spontanément à une procédure et qu’au moment où elle fournit des preuves à la Comco, elle a cessé de participer à la pratique anticoncurrentielle. La réduction peut atteindre 50%, en fonction du rôle joué par l’entreprise dans la réussite de la procédure, voire 80% si l’entreprise fournit des informations ou des preuves sur d’autres accords illicites susceptibles d’être sanctionnés.

Enfin, aucune sanction ne peut être prise si l’entreprise annonce la restriction à la concurrence à la Comco avant que celle-ci ne déploie ses effets, au moyen d’un formulaire ad hoc (procédure d’annonce préalable). En d’autres termes, l’entreprise peut soumettre à la Comco des clauses contractuelles potentiellement en infraction à la LCart avant leur entrée en vigueur sans prendre le risque d’être sanctionnée, sauf si la Comco ouvre, dans les cinq mois à compter de cette annonce, une procédure d’enquête préalable ou d’enquête formelle. Cette limitation entraîne en réalité trop d’incertitudes, de sorte que la procédure d’annonce préalable est très peu utilisée en pratique.

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66 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Autres sanctions

L’inobservation d’un accord amiable ou d’une décision antérieure entrée en force est punissable d’une amende du même montant que les infractions mentionnées ci-dessus.

Il faut encore mentionner que la réalisation d’une opération de concentration sans procéder à la notification obligatoire est passible d’une amende pouvant aller jusqu’à CHF 1 million.

Enfin, l’inobservation de l’obligation de renseigner l’autorité de la concurrence ou de produire des documents est passible d’une amende d’un maximum de CHF 100’000.-, ce même si l’entreprise concernée n’est pas partie à l’enquête.

PME et droit de la concurrenceLes responsables de PME pensent souvent que le droit de la concurrence ne s’adresse qu’aux grands groupes et aux entreprises puissantes sur le marché. Or rien n’est plus faux. Le droit de la concurrence s’applique aussi aux pratiques des PME, en particulier aux accords qu’elles concluent avec leurs fournisseurs, sous-traitants, distributeurs et clients, ainsi que, bien entendu, aux rapports qu’elles entretiennent avec leurs concurrents.

Afin de clarifier certaines règles, la Commission de la concurrence a publié une communication sur les accords entre PME. Selon cette communication, les accords en matière de concurrence ayant pour but l’amélioration de la compétitivité sont en principe admissibles lorsque les parts de marché cumulées des entreprises parties à un accord horizontal ne dépassent pas 10% ou que les parts de marché détenues par chacune des entreprises parties à un accord vertical ne dépassent pas 15%.

De même, la Commission de la concurrence considère comme n’affectant pas la concurrence de manière notable les accords entre micro-entreprises (moins de 10 collaborateurs et chiffre d’affaires annuel ne dépassant pas CHF 2 millions).

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Ces règles ne s’appliquent cependant pas si les accords concernés ne visent pas d’objectif économique légitime (gain d’efficacité). Elles ne s’appliquent pas non plus aux restrictions caractérisées au droit de la concurrence (accords durs). Leur portée pratique est donc très restreinte.

Les PME sont soumises au droit de la concurrence au même titre que toutes les autres entreprises. Les conditions posées à l’application du régime de faveur prévu par la Communication PME sont si drastiques qu’il convient de considérer que ce régime n’a pas véritablement de portée pratique.

Ce qui précède ne doit pas uniquement être perçu comme une menace. Il s’agit également d’une chance à saisir pour les PME. Le droit de la concurrence leur offre le moyen de lutter contre certaines pratiques qui réduisent leur capacité concurrentielle, comme par exemple l’interdiction de s’approvisionner à l’étranger, la possibilité d’accepter des commandes venant d’un territoire non concédé ou encore la possibilité de fixer librement leurs prix. De même, les PME peuvent se prévaloir du droit de la concurrence pour lutter contre des pratiques abusives d’entreprises en position dominante dont elles sont les victimes.

Commerce internationalLe présent guide n’aborde pas les questions liées à l'application et au respect du droit de la concurrence dans un contexte international. Il convient néanmoins de rappeler que le droit de la concurrence s’applique en général sur la base des effets produits par un accord ou une pratique. Cela implique notamment qu’un accord conclu entre une entreprise suisse et une entreprise à l’étranger pourra aussi bien être visé par le droit suisse que par le droit national étranger, voire par un droit supranational comme celui de l’Union européenne. Cela signifie également qu’une opération de concentration pourra être soumise à l’autorisation d’une autorité étrangère, même lorsque toutes les parties ont leur siège en Suisse. Cela implique enfin que les éventuelles sanctions liées à une pratique illicite ne se limitent pas nécessairement aux sanctions potentiellement infligées par les autorités suisses de la concurrence.

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68 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Au contraire, la tendance est à une internationalisation des enquêtes de droit de la concurrence, chaque autorité observant les activités menées dans les pays voisins, et donc à une multiplication des sanctions imposées aux entreprises.

Les entreprises suisses sont souvent actives sur un plan non seulement national, mais également international. Il est donc important, le cas échéant, qu'elles prennent en compte la réglementation étrangère du droit de la concurrence.

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CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCEGUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Principes et mise en œuvre d’un programme de

conformité

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70 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Principes et mise en œuvre d’un programme de conformitéDéfinition

Un programme de conformité au droit de la concurrence est un ensemble de processus constituant un outil de gestion des risques liés au droit de la concurrence. Il doit viser les objectifs principaux suivants :

• assurer une connaissance, au sein de l’entreprise, des règles fondamentales du droit de la concurrence ainsi que de la façon dont elles doivent être suivies par tous les collaborateurs ;

• permettre la reconnaissance par les collaborateurs de l’entreprise des situations relevant du droit de la concurrence ;

• développer des réflexes appropriés pour éviter que des infractions ne soient commises et, le cas échéant, les détecter.

Éléments-clés de réussite d’un programme de conformitéLe contenu d’un programme de conformité doit être adapté aux particularités de chaque entreprise et de chaque marché. Il n’existe pas de modèle standard applicable à tous les cas de figure.

Cela étant, tout programme de conformité doit réunir les éléments suivants :

• soutien de la direction ;

• procédures appropriées ;

• formations ;

• contrôles et surveillance ; et

• actions disciplinaires.

Ces cinq éléments forment la colonne vertébrale de tout programme de conformité.

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Soutien de la direction

La mise en œuvre d’un programme de conformité doit relever d’une véritable politique et culture d’entreprise et non d’un simple exercice de style. Il est essentiel que tous, au sein de l’entreprise, se sentent concernés et que chaque collaborateur puisse faire le lien entre les consignes reçues et des situations auxquelles il est confronté au quotidien. Ce n’est que si le programme de conformité est conçu et mis en œuvre de façon sérieuse et engagée qu’il pourra atteindre ses objectifs.

Dans ce contexte, le soutien des cadres supérieurs est essentiel comme indicateur de l’engagement de l’entreprise à se conformer aux règles du droit de la concurrence. Ce soutien doit être actif, visible et réaffirmé régulièrement :

• la manifestation la plus évidente d’un tel engagement consiste précisément à mettre en place un programme de conformité, auquel les cadres supérieurs de l’entreprise devront participer, qu’ils devront connaître et promouvoir, et dont ils devront s’assurer qu’il soit effectivement connu et mis en œuvre. À cet égard, il est recommandé de désigner un membre du conseil d’administration ou de la direction comme responsable de la mise en œuvre du programme, ce dernier établissant un rapport annuel sur son déploiement et son efficacité ;

• cet engagement doit ensuite être confirmé et réaffirmé de différentes façons : un message personnel aux employés de l’entreprise déclarant l’engagement envers le programme ; des références au programme dans les objectifs de l’entreprise ou dans le code de conduite de l’entreprise ; une participation active aux séances de formation ;

• cet engagement doit enfin se confirmer dans les actions de l’entreprise. Les cadres supérieurs devraient ainsi éviter d’engager des personnes précédemment impliquées dans des pratiques contraires au droit de la concurrence. Les objectifs commerciaux devraient être fixés de façon réaliste et de telle sorte à ce qu’ils puissent être atteints en conformité avec les règles du droit de la concurrence ;

• enfin, les cadres supérieurs se doivent de donner l’exemple, en évitant toute action qui pourrait être interprétée comme une tolérance à l’égard de pratiques discutables ou sensibles au regard du droit de la concurrence.

Politique d’entreprise et procédures appropriées

Au titre de la politique d’entreprise, il convient d’imposer un devoir spécifique à tous les employés de s’acquitter de leurs obligations professionnelles en conformité avec les règles du droit de la concurrence.

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72 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Beaucoup d’entreprises choisissent d’orienter leurs employés sur le droit de la concurrence, sur l’engagement de l’entreprise à respecter les règles du droit de la concurrence et sur les procédures établies au sein de l’entreprise au travers d’un guide ou de lignes directrices écrites.

Un tel guide contient généralement les éléments suivants :

• une déclaration claire de la politique d’entreprise de se conformer au droit de la concurrence ;

• un exposé synthétique des principales règles du droit de la concurrence. Cette partie devrait inclure un exposé des principales interdictions législatives, des pouvoirs d’enquête des autorités ainsi que des conséquences potentielles de la violation des règles ;

• des exemples de conduites illicites et des comportements à risque possibles dans le cours des affaires de l’entreprise.

Pour marquer de façon indiscutable la volonté de l’entreprise d’exiger le respect du droit de la concurrence, il est recommandé de demander aux employés de signer un engagement écrit à cet effet, et de les avertir que des sanctions disciplinaires internes pourront être prononcées à leur encontre s’ils enfreignent le droit de la concurrence dans le cadre de leurs activités, que ce soit de façon intentionnelle ou par négligence.

Afin de permettre aux employés de respecter leur engagement et de permettre à l’entreprise de détecter d’éventuelles infractions au droit de la concurrence, il conviendra de mettre en place des procédures permettant de soutenir les employés et les cadres de l’entreprise dans leur démarche.

En particulier, un mode opérationnel devrait être mis à disposition des employés afin de leur permettre :

• d’obtenir des avis sur la conformité au droit de la concurrence d’une activité particulière ; et

• d’annoncer une activité à propos de laquelle ils auraient des soupçons de non-conformité au droit de la concurrence.

Ce mécanisme produit un double effet, préventif et curatif, en ce sens qu’il doit permettre d’éviter que des erreurs soient commises, par ignorance, imprudence ou sentiment d’impunité, et qu’il permet à l’entreprise de gérer d’éventuelles erreurs commises en prenant toutes les mesures adéquates pour remédier au problème constaté et éviter qu’une telle situation se produise à nouveau. Pour que ce mécanisme soit efficace, il faut veiller à ce que les cadres supérieurs de l’entreprise soient rapidement informés des points potentiellement sensibles. Une réaction rapide dans la gestion de la découverte d’une infraction peut en effet avoir des conséquences importantes sur les sanctions potentiellement infligées à l’entreprise.

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Formation

Un programme de conformité ne doit pas consister en un simple exercice sur papier. Il doit impérativement être complété par des séances de formation, adaptées en termes de forme et de contenu à leurs destinataires.

Afin d’être efficaces, ces formations doivent viser les bonnes personnes au sein de l’entreprise, en particulier les employés dont les actions pourraient porter à conséquence en droit de la concurrence.

Elles doivent être adaptées aux activités concrètes de l’entreprise de manière à apparaître comme pertinentes, retenir l’intérêt des employés, et couvrir les principales activités sensibles de l’entreprise.

Elles doivent être offertes sur une base continue. Un cycle de formation devrait commencer par une introduction initiale des nouveaux employés aux règles de droit de la concurrence et ensuite voir des formations offertes sur une base continue de sorte à renforcer le message de conformité et à tenir le personnel informé des évolutions législatives et jurisprudentielles.

Elles doivent tenir compte des destinataires de la formation. Il est essentiel d’adapter le message à son auditoire, aussi bien en termes de contenu (le bon message aux bonnes personnes), mais aussi en termes de forme (un message compréhensible par chacun).

Elles doivent être interactives. Les réactions, commentaires et réponses des destinataires sont de bons indicateurs sur la réception du message et son adéquation, mais également sur les pratiques réelles prévalant au sein de l’entreprise.

La manière dont cette formation peut être dispensée est présentée plus en détail au sous-chapitre Les quatre étapes de la mise en place d'un programme de conformité (p. 75).

Contrôle et surveillance

Un programme de conformité a peu de chances de mener à des résultats à long terme si son efficacité n’est pas régulièrement évaluée et contrôlée.

Une évaluation est essentielle non seulement pour assurer le bon fonctionnement du programme de conformité, mais également pour permettre d’identifier les activités à risque, de les traiter de façon adéquate et, le cas échéant, d’adapter les fonctions et les procédures du programme.

Le processus d’évaluation et de contrôle devrait inclure certains ou l’ensemble des éléments suivants :

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74 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

• tests sur les connaissances des employés en droit, procédures et politiques en matière de concurrence ;

• audits formels des processus transactionnels de l’entreprise, annoncés ou par surprise, afin d’en vérifier la conformité ;

• mécanismes d’annonce des violations effectives ou potentielles du droit de la concurrence aux cadres supérieurs et systèmes d’intervention permettant de limiter les dommages et de s’assurer de leur non-réitération.

Actions disciplinaires

Une violation par un employé des règles du droit de la concurrence, et donc de la politique de conformité de l’entreprise, ne doit pas demeurer sans conséquence pour l’employé ayant enfreint ses obligations.

Selon la gravité de la faute commise, un renvoi avec effet immédiat se justifiera. Il conviendra néanmoins de veiller à coordonner le renvoi avec la réponse donnée par l’entreprise à la violation. Il est dans tous les cas nécessaire de préserver l’ensemble des données relatives aux événements reprochés à l’employé fautif, de sorte que l’entreprise puisse fournir à l’autorité les éléments nécessaires à son enquête. De même, si l’entreprise souhaite faire appel au programme de clémence, il sera nécessaire d’éviter que l’employé concerné n’ébruite les faits litigieux avant qu’ils ne soient communiqués aux autorités de la concurrence.

Lorsqu’une infraction est découverte et annoncée à l’autorité de la concurrence, il pourra s’avérer utile de coordonner cette annonce et le renvoi éventuel de l’employé impliqué dans l’infraction.

EN RÉSUMÉ

Pour être efficace, un programme de conformité doit

• avoir le soutien et être promu par les dirigeants de l’entreprise ;

• être adapté à la taille et aux activités de l’entreprise ;

• identifier et traiter les principaux risques auxquels l’entreprise est confrontée ;

• être mis en œuvre par différents moyens, de façon régulière et continue ;

• faire l’objet d’une évaluation périodique ;

• intégrer des processus de soutien aux employés ;

• intégrer des processus d’annonce pour les employés ;

• responsabiliser le personnel et les cadres de l’entreprise ;

• prévoir des processus rapides et efficaces en cas de découverte d’une situation potentiellement sensible.

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Les quatre étapes de la mise en place d’un programme de conformitéCe chapitre vous propose un processus type de mise en place d’un programme de conformité au droit de la concurrence. Il va de soi que chaque entreprise est différente et que chaque marché présente des particularités. Par conséquent, le programme de conformité de votre entreprise devra être entièrement adapté à sa taille et à son activité.

La mise en place d’un programme de conformité s’articule généralement en quatre étapes, autour d’un noyau central et fondamental, l’engagement de conformité.

Noyau central : engagement de conformité

L’engagement fondamental de se conformer au droit de la concurrence est la première étape et le cœur de la mise en place du programme de conformité. Il doit venir de la tête de l’entreprise (conseil d’administration et direction générale).

La mise en place du programme de conformité doit faire l’objet d’un soutien sans faille de la tête de l’entreprise. Il y a lieu d’obtenir ce soutien avant d’entreprendre toute démarche et de s’assurer tout au long du processus que ce soutien persiste.

Engagement de conformité

Identification des risques

1

2

4

3 Évaluation des risques

Réduction des risques

Révision

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76 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Première étape : identification des risques

En premier lieu, identifiez les risques juridiques auxquels votre entreprise fait face en matière de droit de la concurrence. Pour cela, vous pouvez par exemple répondre au questionnaire d’identification des risques du présent guide.

Interrogez-vous notamment :

• sur les accords auxquels votre entreprise est partie avec des concurrents, des fournisseurs ou des distributeurs ;

• sur les associations professionnelles dont votre entreprise ou ses employés sont membres ;

• sur les informations que vous partagez avec vos concurrents ;

• sur les partenariats avec ces derniers (achats communs, recherche et développement, etc.) ;

• sur la structure de votre réseau de distribution ; et

• sur votre position sur le marché.

Si votre branche est soumise à une réglementation particulière (télécommunications, énergie, transports, finance en particulier), tenez compte de cette réglementation.

Deuxième étape : évaluation des risques

Lorsque les risques ont été identifiés, il s’agit d’évaluer s’ils sont sérieux, de les classer par ordre de gravité et selon leur degré d’actualité pour votre entreprise (risques actuels ou potentiels).

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À cette fin, vous pouvez :

1. Identifier les employés qui sont le plus à même de commettre ou d’avoir commis des violations du droit de la concurrence. Ce sont le plus souvent :

• les cadres dirigeants, notamment ceux qui déterminent la politique stratégique et commerciale de l’entreprise ;

• les représentants commerciaux de l’entreprise ;

• les membres du service juridique ;

• les autres employés de la vente, du marketing, du service après-vente et des achats ; et

• les autres employés qui ont des contacts avec vos concurrents.

2. Conduire des entretiens avec ces employés afin de rechercher s’ils ont pu commettre (même malgré eux…) ou sont susceptibles de commettre à l’avenir des violations du droit de la concurrence.

3. Effectuer une revue des contrats auxquels l’entreprise est partie, notamment avec des concurrents, des fournisseurs, des distributeurs, des clients ou des partenaires de recherche, d’achats, etc. afin de rechercher s’ils contiennent des clauses problématiques au regard du droit de la concurrence.

Troisième étape : réduction des risques

Sur la base des risques identifiés et évalués, l’étape de réduction des risques consiste à prendre les mesures appropriées pour supprimer les éventuelles violations qui ont été constatées et surtout pour éviter que des violations du droit de la concurrence ne soient perpétrées à l’avenir. Les mesures suivantes peuvent être mises en œuvre :

1. Former les employés de l’entreprise (ou au moins ceux qui ont été identifiés comme les plus susceptibles de commettre des violations du droit de la concurrence) pour leur enseigner les bases du droit de la concurrence et leur indiquer ce qu’ils peuvent ou ne peuvent pas faire.

La formation est la mesure la plus importante du plan de conformité. Elle doit être mise en œuvre dans tous les cas.

La formation doit viser les bonnes personnes. Il s’agit des employés dont les actes pourraient avoir des conséquences en droit de la concurrence, en particulier ceux qui sont en contact avec les clients, les concurrents, les fournisseurs et les distributeurs.

La formation doit être adaptée aux activités concrètes de l’entreprise, à son public cible, aux risques identifiés et aux spécificités du marché sur lequel évolue l’entreprise. Elle doit être conçue de manière à apparaître comme pertinente, retenir l’intérêt des employés et couvrir les principales activités sensibles de l’entreprise.

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78 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

La forme de la formation importe peu (séminaires et conférences, présentations, jeux de rôles, questionnaires, e-learning, etc.). Elle devrait inclure un test pour les participants afin de s’assurer de leur connaissance de la loi, de la politique de l’entreprise et des procédures, ainsi qu’un feedback pour le formateur.

La formation doit être renouvelée régulièrement, en particulier à l’intention des nouveaux employés de l’entreprise. Ceci permet de renforcer le message de conformité et de tenir le personnel informé des évolutions législatives et jurisprudentielles. Il est recommandé de tenir à jour un relevé des formations dispensées, afin d’assurer un suivi du niveau de formation des employés de l’entreprise.

2. Mettre sur pied une procédure interne à l’entreprise pour tous les cas de contacts avec des concurrents (notamment dans le cadre d’associations professionnelles). La personne qui aura le contact avec les concurrents devrait en informer préalablement la direction et, après le contact, rapporter la teneur des discussions, afin de permettre une réaction rapide en cas de violation du droit de la concurrence.

3. Mettre sur pied une procédure de reporting interne permettant à tout employé – le cas échéant sur une base anonyme – de signaler une éventuelle violation du droit de la concurrence ou un éventuel soupçon. Lorsqu’une telle violation a été identifiée, il est en effet essentiel que la direction de l’entreprise en soit informée aussitôt que possible.

4. Permettre aux employés de rechercher conseil auprès d’une personne de référence. Il convient de s’assurer que les employés connaissent effectivement l’existence de cette personne et qu’ils n’hésitent pas à s’y référer.

5. Rédiger un manuel de conformité, un code de conduite ou des directives à l’intention des employés de l’entreprise. Dans les plus petites entreprises, ces directives peuvent se limiter à une liste de comportements clairement prohibés et à nommer une personne de contact (souvent le chef de l’entreprise) en cas de doute sur le comportement à adopter dans un cas concret. Dans les entreprises plus importantes, les directives devront refléter la complexité de l’environnement économique de l’entreprise.

Le manuel de conformité a généralement la structure suivante :

• rappel de la philosophie de l’entreprise et de l’engagement de sa direction, qui doit tendre au respect de la loi et à la responsabilité des employés ;

• une présentation simple et accessible, adaptée aux spécificités de l’entreprise, des règles essentielles du droit de la concurrence ;

• une présentation des comportements prohibés, adaptée aux spécificités de l’entreprise, en particulier aux risques identifiés ;

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• un rappel des sanctions encourues par les employés en cas de violation des règles du droit de la concurrence ;

• des lignes directrices en matière de communication interne (cf. p. 82) et de contacts avec des concurrents dans le cadre des associations professionnelles (cf. p. 86) ;

• la procédure de reporting interne.

Il convient de s’assurer que ce code de conduite, respectivement ces directives sont connus et respectés au sein de l’entreprise. Il peut être y être fait référence dans les contrats de travail, au même titre que d’autres règlements internes.

Quatrième étape : révision

Les étapes 1 à 3 ci-dessus doivent être répétées à intervalles réguliers. La révision est essentielle afin de s’assurer que le programme de conformité ne demeure pas un exercice de papier.

La révision a pour objectifs, d’une part, de corriger et d’adapter le programme de conformité et, d’autre part, de détecter à un stade précoce d’éventuelles violations de la loi. Elle permet de vérifier que ce qui a été dit a bien été compris et mis en œuvre, ainsi que d’évaluer les employés et d’obtenir un retour d’expérience. Enfin, elle offre la possibilité de réaffirmer la politique de l’entreprise en matière de conformité.

En fonction du dynamisme de l’environnement dans lequel se situe l’entreprise, de sa taille et de l’évolution de ses affaires, cette révision peut avoir lieu tous les ans ou moins souvent. Certains événements extraordinaires, tels que l’acquisition d’une autre entreprise, l’entrée sur un nouveau marché ou l’ouverture d’une enquête des autorités de la concurrence doit également vous amener à revoir le programme de conformité.

Exemples :

Q : Je dirige une entreprise de vente d’équipements fabriqués à l’étranger que j’achète auprès de l’importateur suisse. J’ai une dizaine d’employés, dont un responsable des achats, deux commerciaux pour les grands comptes et trois vendeurs dans mon point de vente. Il n’y a pas d’as-sociation professionnelle de la branche, mais nous entretenons des contacts réguliers avec nos collègues pour prendre la température du marché. Comment dois-je organiser mon programme de conformité ?

R : La première des choses à faire est d’identifier les principaux risques auxquels votre entreprise est confrontée. À première vue, les questions relatives aux contrats verticaux (approvisionnement et revente) ainsi que celles relatives aux contacts entre concurrents devront être traitées avec soin. Il conviendra également de vous assurer que vos pratiques passées étaient conformes

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au droit de la concurrence, car il n’est pas exclu que vous ayez fait quelque chose de faux. Vous-même, ainsi que les employés que vous avez mention-nés, devriez suivre une formation de base en matière de concurrence. Dans un premier temps, des piqûres de rappel annuelles, assorties de tests de base, peuvent être souhaitables, quitte à les espacer ensuite dans le temps. Il serait en revanche disproportionné de vouloir engager une personne aux seules fins du droit de la concurrence. Assurez-vous néanmoins de savoir à qui vous adresser si vous avez des doutes sur un sujet particulier.

Q : Je suis à la tête d’une petite entreprise qui s’approvisionne auprès d’un grand groupe qui vient de faire l’objet d’une enquête en matière de concurrence. Je n’ai moi-même pas été inquiété, mais voudrais savoir ce que je dois faire. J’ignore tout du droit de la concurrence et mes employés aussi.

R : Il semble important que vous-même et vos employés receviez une for-mation en droit de la concurrence. Il semble également important que vous vous informiez sur la nature de l’enquête menée à l’encontre de votre fournisseur. Il est en effet possible que vous ayez été partie à un accord illicite. Si tel devait être le cas, vous devrez préparer et assurer votre défense, mais aussi analyser quelles sont les opportunités qui peuvent se présenter à vous. Il n’est en effet pas exclu que cette enquête vise à vous accorder une plus grande flexibilité dans votre politique d’approvisionnement ou dans votre politique commerciale.

Q : Mon entreprise est actuellement en pourparlers avec un concurrent que nous envisageons de racheter. Nous avons un programme de conformité, mais ce concurrent n’en a aucun. Nous sommes en-des-sous des seuils de notification de la concentration. Que dois-je faire pour ne pas me tromper ?

R : Plusieurs choses. La première est de vous souvenir qu’aussi longtemps que vous n’aurez pas conclu l’affaire, vous restez concurrents. Évitez ainsi d’échanger des informations sensibles avec cette entreprise. Vérifiez égale-ment que vous ne devez pas notifier cette opération dans un pays étranger où vos entreprises sont actives. Dans le cadre de votre revue des affaires de votre concurrent, assurez-vous que ses affaires ont été menées de façon conforme au droit de la concurrence. Si tel n'est pas le cas, vous devrez décider de la façon dont vous entendrez gérer cette situation (abandon de la transaction, notification aux autorités, etc.). Quoi qu'il arrive, pensez à insérer des garanties dans votre contrat d’achat. Dans tous les cas, si la transaction se fait, il conviendra de vous occuper de l’intégration des employés de cette entreprise dans votre programme de conformité et de vous assurer que votre philosophie de conformité soit partagée par vos nouveaux employés. Suivez avec attention les activités de ces derniers pour vous assurer que le message a bien passé.

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CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCEGUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Quelques règles de comportement

prêtes à l'usage

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82 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Quelques règles de comportement prêtes à l'usage

Quelques règles de communication interneSe comporter conformément aux règles sur la concurrence n’est pas tout. Encore faut-il que cela se sache, ou à tout le moins éviter, par des formulations maladroites, de faire naître un doute infondé dans l’esprit du lecteur.

Il s’agit donc de veiller à ce que les expressions utilisées reflètent véritablement l’intention de leur auteur et ne communiquent pas un message erroné. À cet égard, il convient de se souvenir que les autorités de la concurrence peuvent, dans le cadre d’une perquisition, saisir tous documents ou données, y compris courriels, notes, messages courts, etc. Les conseils qui suivent s’appliquent ainsi à toute expression écrite, quel que soit son support.

Conseils

• Culpabilité : Il est légitime de vouloir assurer la confidentialité de certaines discussions et/ou de vouloir limiter le cercle de diffusion d’un document au sein ou en dehors de l’entreprise. Évitez toutefois de recourir à des expressions suggérant la possibilité d’un comportement répréhensible ou que vous avez quelque chose à cacher :

À éviter "détruire après lecture", "il fut convenu qu’aucune note ne serait prise", "pas de copies"

À privilégier "strictement confidentiel", "secret des affaires - communication restreinte"

• Spéculations : Évitez de recourir à de pures spéculations qui pourraient donner l’impression que vous êtes en train de vous comporter de façon contraire au droit de la concurrence, alors même que vous voulez en réalité faire preuve de prudence :

À éviter "Cette discussion pourrait ne pas être conforme, alors faisons attention"

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À privilégier "Nous devons vérifier que cet accord est conforme au droit", "Évitons ce sujet avant consultation du département juridique"

• Imprécisions : Évitez de recourir à des formulations vagues ou imprécises, notamment dans des domaines sensibles tels que les prix des concurrents ou des distributeurs, qui peuvent s’avérer particulièrement dangereuses, comme par exemple :

À éviter

"Le consensus dans l’industrie est que les prix doivent monter" ou "le distributeur doit gérer la marque et promouvoir les produits de façon conforme sinon les conséquences seront dramatiques"

À privilégier

"La hausse du prix des matières premières pourrait entraîner une hausse des prix au détail", "les analyses de marché ont montré que le positionnement et le prix de nos produits sont compétitifs ; il faut que le distributeur consacre plus d’énergie dans la promotion de nos produits et fasse plus d’efforts marketing pour promouvoir notre marque"

• Domination : Évitez de recourir à des expressions suggérant l’existence d’une puissance de marché, voire l’intention d’en abuser, alors que vous voulez vous donner les moyens d’être les meilleurs dans un environnement très concurrentiel :

À éviter "dominer", "rentabiliser sa position", "écarter la concurrence"

À privilégier "l’une des entreprises leader", "position significative", "politique agressive sur le marché"

L’entreprise doit assurer une gestion saine et rigoureuse de sa documentation, quel que soit son support. Une bonne organisation permet non seulement de vérifier plus aisément les comportements internes à l’entreprise, mais également de mettre à l’écart les documents protégés par le secret professionnel. La rigueur doit être de mise dans l’indication des sources des documents conservés, en particulier lorsque ces documents ont trait aux pratiques commerciales des concurrents. Il conviendra dans ce cas d’indiquer la source de l’information, les circonstances dans lesquelles cette information a été reçue, ainsi que la date de l’événement, ce afin d’éviter de faire naître le doute que des concurrents ont procédé à un échange illicite d’informations sensibles dans le cadre d’une pratique concertée.

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84 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Quelques règles de comportement en cas de perquisitionEn cas de soupçon fondé d’une infraction à la LCart passible d’une amende, le Secrétariat de la Comco peut, avec l’approbation d’un membre de la présidence de la Comco et avec l’aide de la police, procéder à des perquisitions dans les locaux des entreprises concernées. Il est utile de se préparer à de telles perquisitions, qui ne sont pas annoncées, et de connaître ses droits et ses devoirs dans un tel cas.

À titre préventif, il est utile de mettre sur pied une équipe de réponse qui serait en première ligne en cas de perquisition. Cette équipe, qui devrait inclure un informaticien, doit être informée du comportement à tenir en cas de perquisition et savoir où se trouvent les documents au sein de l’entreprise. Assurez-vous que la réception sache qui sont les membres de cette équipe et comment les contacter.

Comment se comporter en cas de perquisition ?

• restez calme, courtois et professionnel ;

• vérifiez l’identité des enquêteurs, le mandat et le motif de la perquisition ;

• contactez immédiatement la direction de l’entreprise ou le coordinateur de l’équipe de réponse. L’interlocuteur des enquêteurs doit, si possible, être la personne qui a le plus haut rang hiérarchique au sein de l’entreprise ;

• contactez immédiatement un avocat externe et demandez-lui de venir aussitôt. Si possible, faites patienter les enquêteurs dans l’attente de l’avocat ;

• ne laissez jamais les enquêteurs seuls. Faites les accompagner par un collaborateur expérimenté, si possible du département juridique, au fait des droits et obligations en cas de perquisition ;

• conservez une copie des documents saisis ou copiés par les enquêteurs. Pour cela, vous pouvez mettre à leur disposition un photocopieur et un collaborateur pour les assister dans le travail de copie ;

• dressez une liste exhaustive de tous les documents saisis par les enquêteurs. Confrontez votre liste avec celle des enquêteurs et demandez une copie du procès-verbal d’inspection ;

• insistez auprès des enquêteurs sur la confidentialité des documents saisis.

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Quels sont mes droits et obligations en cas de perquisition ?

• vous avez le droit à l’assistance d’un avocat. Les enquêteurs n’ont cependant pas l’obligation d’attendre l’arrivée de l’avocat pour commencer la perquisition ;

• vous devez donner accès aux enquêteurs à tous les documents de l’entreprise (à l’exception de la correspondance avec l’avocat externe), au format papier ou sous forme électronique. Concrètement, l’autorité doit pouvoir accéder aux documents papier, aux serveurs, aux ordinateurs, aux téléphones portables, etc. Ne refusez pas de collaborer, car cela pourrait être retenu contre vous dans la fixation d’une éventuelle sanction ;

• la correspondance entre l’entreprise et un avocat externe ne peut pas être consultée ni saisie. Les enquêteurs ne peuvent pas non plus saisir de documents sans rapport avec l’enquête. En cas de désaccord avec les enquêteurs, vous pouvez demander que les documents contestés soient mis sous scellés ;

• vous avez le droit de refuser de répondre à des questions qui impliquent de contribuer à votre propre incrimination (par exemple : "Quel était l’objet de cette réunion ? Quelles décisions y ont été prises ?"). Vous pouvez demander que les questions compliquées ou détaillées vous soient soumises par écrit. En revanche, vous ne pouvez pas refuser de répondre à des questions pratiques relatives à la perquisition (par exemple : "Où se trouve tel document ?").

Quels sont les comportements à éviter absolument ?

• refuser de produire, détruire ou cacher des documents ;

• laisser les enquêteurs sans contrôle ou assistance ;

• faire des fausses déclarations ;

• montrer le contenu de documents couverts par le privilège de la correspondance avec l’avocat externe ;

• répondre à des questions pour lesquelles on n’est pas compétent, donner une opinion ou émettre des suppositions.

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86 CONFORMITÉ AU DROIT DE LA CONCURRENCE – GUIDE PRATIQUE À L’USAGE DES PME

Quelques règles de comportement dans le cadre des associations professionnelles La vie associative réunit souvent des concurrents actifs au sein d’un même secteur d’activité. Les associations professionnelles représentent ainsi un lieu de dialogue et d’échanges qui comporte, par ce fait même, des risques au regard du droit de la concurrence.

Le tableau ci-dessous vise à donner quelques règles de comportement simples à adopter, ainsi que quelques sujets de discussion à éviter soigneusement.

Pour le surplus, veuillez vous référer au chapitre Vie associative (p. 49).

Mesures à adopter

En tant qu’entreprise :

• établissez une liste des associations dont vos employés et collaborateurs font partie, y compris les éventuelles fonctions exercées au sein d’organes ou de comités ;

• assurez-vous que seules les personnes effectivement concernées par un sujet ou une thématique spécifique participent aux séances de l’association ;

• sensibilisez toute personne faisant partie d’une association professionnelle à la problématique du droit de la concurrence et rendez-la attentive aux principaux risques auxquels elle pourrait être confrontée.

Séances de comité ou d’assemblée générale :

• préparez/demandez un ordre du jour précis à l’avance ;

• n’hésitez pas à demander des clarifications lorsque le sujet à aborder n’est pas clair ;

• évitez les discussions déviant de l’ordre du jour ;

• faites cesser toute discussion qui pourrait à votre avis contrevenir au droit de la concurrence. Si nécessaire, quittez la réunion sans hésiter, tout en vous assurant que votre départ est mentionné au procès-verbal, de même que sa raison ;

• établissez/faites-vous remettre un procès-verbal détaillé ;

• prenez copie et conservez tout document qui est échangé ou discuté lors de réunions associatives.

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Enquêtes sectorielles :

• informez-vous sur la façon dont les données sont collectées (seulement par un tiers indépendant ou par le secrétaire de l’association, dans tous les cas par une personne qui n’est pas un concurrent) ;

• assurez-vous que la présentation des résultats de l’enquête ne permette en aucun cas d’effectuer un lien entre les réponses données et l’entreprise ayant fourni ces réponses (agrégation des résultats, minimum de réponses à chaque question) ;

• limitez-vous à des informations passées et évitez de fournir des informations portant sur le futur ;

• soyez conscients que plus les informations demandées portent sur des éléments de nature commerciale (prix, conditions d’achat, stratégie, etc.), plus les risques liés à l’enquête sont élevés ;

• restez attentifs à éviter que la présentation des résultats de l’enquête ne compromette la confidentialité des informations fournies et limitez vos discussions avec vos concurrents à cette occasion à des thèmes purement généraux et non commerciaux.

Sujets de conversation

Limitez-vous aux sujets de conversation liés aux intérêts généraux (conditions-cadres, standards) du domaine d’activité concerné, à l’exclusion de toute discussion commerciale ou stratégique.

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En particulier, évitez les conversations :

• liées aux prix ou pouvant avoir un impact sur les prix (passés, présents ou futurs) de l’entreprise, y compris prix par produits, changements de prix, différentiels de prix, mark-ups, rabais, seuils, quotas, termes de crédit et prix de livraison, revenus, structures de coût, marges de profit, niveaux de production, capacités, inventaires et ventes ;

• sur la stratégie présente et future et les plans d’affaires de membres particuliers, notamment en termes de produits, de vente et de production ;

• liées aux offres de membres particuliers sur des produits à la vente ou des marchés publics ;

• sur les allocations de marchés géographiques, de fournisseurs ou de clients ;

• liées à des accords de boycott ou d’accord de mise en commun de négociations avec des fournisseurs, clients ou autres concurrents.

Toutes les discussions avec des concurrents doivent être abordées avec prudence, qu’elles s’inscrivent dans le cadre d’un événement formel (assemblée générale, séance de comité, etc.) ou informel (cocktail, apéritif, sortie annuelle, etc.). C’est même lorsque les langues se délient que la situation devient dangereuse.

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T 058 715 31 11

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Baker & McKenzie Genève

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T 022 707 98 00

[email protected]

N° ISBN : 978-2-940087-29-7 – Janvier 2014 – Imprimé sur papier Cyclus Print 100% recyclé

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