concours national de la résistance et de la déportation 2008 · l’action résistante implique...

15
Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 Musée de la Résistance et de la Déportation 33, Grand’Rue Villenouvelle 82000 Montauban 05.63.66.03.11 [email protected]

Upload: others

Post on 11-Aug-2020

3 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008

Musée de la Résistance et de la Déportation 33, Grand’Rue Villenouvelle 82000 Montauban

05.63.66.03.11 [email protected]

Page 2: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 2

BIBLIOGRAPHIE Cette bibliographie n’est pas exhaustive, de nombreux autres ouvrages, archives et dossiers documentaires concernant des personnages ou des événements relatifs à l’aide aux pourchassés sont également consultables au centre de documentation du musée, sur rendez-vous (05.63.66.03.11).

• OUVRAGES

Aubrac Lucie : La Résistance expliquée à mes petits-enfants, Seuil, Paris, 2000. Cohen Asher : Persécutions et sauvetages. Juifs et Français sous l'Occupation et sous Vichy, Cerf, Paris, 1993. Drouin François et Joutard Philippe (sous dir.) : Monseigneur Théas, les Juifs, les Justes, Privat, Toulouse, 2002. Fau Jean-Claude (sous dir.) : Ces Tarn-et-Garonnais qui ont aidé et sauvé des Juifs durant les années noires 1940-1944, Scérén, Toulouse, 2006. Guéno Jean-Pierre : Paroles d'étoiles. L'album des enfants cachés (1939-1945), Les Arènes, Paris, 2002. Gutman Israël : Dictionnaire des Justes de France, Fayard, Paris, 2003. Hazan Katy : Les orphelins de la Shoah. Les maisons de l’espoir 1944-1960, Les Belles Lettres, Paris, 2003. Lagarrigue Max (sous dir. de) : 1940, la France du repli. L’Europe de la défaite, Privat, Toulouse, 2001. Lewertowski Catherine : Morts ou Juifs. La Maison de Moissac 1939-1945, Flammarion, Paris, 2003. Marcot François (sous dir. de) : Dictionnaire historique de la Résistance, Bouquins, Robert Laffont, Paris, 2006.

• TRAVAUX UNIVERSITAIRES

Caïla Pascal : Le clergé catholique du diocèse de Montauban dans la tourmente. Organisation, réactions et attitudes de 1939 à 1945, mémoire de maîtrise sous la direction de P. Laborie, Université de Toulouse-le-Mirail, 1989.

Griffe Gaëlle : Réactions et actions des protestants du Tarn-et-Garonne pendant la Seconde Guerre mondiale, mémoire de maîtrise sous la direction de P. Cabanel, Université de Toulouse-le-Mirail, 2001.

• REVUES, ARTICLES

Numéros spéciaux « Concours de la Résistance et de la Déportation 2008 » du Patriote Résistant, du Déporté, des Chemins de la mémoire.

Caïla Pascal et Lagarrigue Max : « Pierre-Marie Théas, évêque de Montauban : 1940-1945, un prélat hors du commun », dans Arkheia, n°7-8-9, février-juillet 2000, p. 16 à 21.

Gineste Marie-Rose : « Mémoires », dans Arkheia, n°2-3, février-juillet 2000, p. 109 à 131.

Lagarrigue Max : « Marie-Rose Gineste, Juste parmi les Nations. Femme d’action, femme résistante », dans Arkheia, n°7-8-9, 2002, p. 12 à 14.

Piquemal Bernard : « 1942-1944 : évadés de France par l’Espagne », dans Arkheia, n°5-6, 2000, p. 72 à 76.

• DOCUMENTAIRES

Bertucelli Julie : Alexandre Glasberg, mémoires, mémoires, 1999. Gilou Thomas : Paroles d’étoiles, les enfants cachés, Dreamway, 2005. Ribowski Nicolas : J’avais oublié… la maison de Moissac, Injam Productions, 2005.

• SITES INTERNET sur le thème du concours Fondation de la Résistance : http://www.fondationresistance.org/ Fondation pour la Mémoire de la Déportation : http://www.fmd.asso.fr/ sur les Justes de France

Comité français pour Yad Vashem : http://www.yadvashem-france.org/

Page 3: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 3

LA SITUATION DE LA FRANCE EN JUIN 1940 En quelques semaines, de mai à juin 1940, l’armée française est battue par l’Allemagne

nazie. La défaite entraîne sur les routes des millions de personnes qui fuient devant l’avancée allemande et se réfugient vers le sud de la France. : c’est l’Exode.

Le 22 juin 1940 est signé l’armistice. Une des clauses importante de l’article 2 est le partage de la France en deux zones. La zone nord est occupée par les nazis et la zone sud dite « libre » est dirigée par le gouvernement de Vichy du maréchal Pétain. Les deux zones sont séparées par la ligne de démarcation, véritable frontière très surveillée des deux côtés, qui traverse 13 départements sur près de 1200 km.

Le 10 juillet 1940, l’Assemblée nationale vote les pleins pouvoirs à Pétain. La République est abolie, la devise « Liberté, Egalité, Fraternité » est supprimée. C’est l’Etat français, régime autoritaire et antidémocratique, avec son « Travail, Famille, Patrie » qui les remplacent.

Le 24 octobre 1940, Pétain rencontre Hitler à Montoire (Loir-et-Cher) et signe un pacte de collaboration : agriculture, économie, justice, police, administration, toutes les ressources de la France sont mises au service de l’occupant nazi. Ceux qui s’expriment ou agissent contre ces idées, opposants ou résistants, sont poursuivis par les polices vichystes et nazies. Nombre d’entre eux sont arrêtés, torturés, internés dans des prisons ou des camps, fusillés ou déportés. De même, des catégories de personnes définies comme « indésirables », étrangers, juifs, tsiganes, font l’objet de mesures de répression.

Page 4: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 4

L’AIDE AUX POURCHASSÉS : UNE FORME DE RÉSISTANCE … CIVILE

Pendant la Seconde Guerre mondiale, l’action de la population française et des réseaux d’évasion aurait permis à 28 000 personnes d’échapper aux nazis et de quitter la France.

Aider une personne recherchée par les nazis ou la milice* se fait pour des motivations et dans des circonstances diverses. Ceux qui ont porté assistance à des personnes ont souvent eu conscience des risques encourus, à savoir la prison, la mort ou la déportation en camp de concentration, s’ils étaient pris ou dénoncés. Le plus souvent, ces personnes disent avoir agi dans l’urgence et la phrase « c’était notre devoir, c’était humain » revient régulièrement dans la bouche de ces témoins.

Ainsi, l’aide aux pourchassés est une forme d’opposition qui appartient à la résistance civile* parce qu’elle est concrètement refus de la politique raciste et antisémite du gouvernement de Vichy et des nazis, contraire aux valeurs de liberté et de fraternité.

L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au

pouvoir de l’occupant. Au début, la Résistance est un phénomène spontané et isolé. Peu à peu, il s’organise jusqu’à devenir en 1944 une réaction nationale, contribuant à la victoire sur le nazisme aux côtés des Alliés. On distingue la résistance armée qui consiste à lutter contre Vichy et l’occupant les armes à la main, et la résistance civile qui regroupe des activités de renseignement, liaison, ravitaillement, hébergement… La résistance civile a longtemps été considérée comme secondaire par rapport à la lutte directe souvent mise en œuvre dans le cadre des maquis*. Or, la résistance armée n’a pu subsister et se développer que grâce à la résistance civile. Rien n’aurait été possible sans la complicité d’une partie de la population qui, sans forcément s’engager vraiment en résistance, a favorisé son action en portant notamment secours aux personnes en danger.

L’importance de la résistance civile : des « anonymes » qui choisissent d’aider les autres « Dans le train qui nous emmenait en déportation se trouvaient deux paysannes arrêtées pour avoir ravitaillé le maquis installé dans leur région. Ces femmes ignoraient tout de l’idéologie nazie. Ce qu’elles refusaient, c’était l’occupant et ses méthodes. Tout le monde ne pouvait s’engager, plonger dans la clandestinité, mener la lutte armée. Mais sans l’aide de gens comme ces deux femmes, la Résistance n’aurait pas été possible. […] autre exemple : un parachutiste allié tombe dans un champ et se blesse. Que fait le paysan qui se trouve dans le champ ? Il a le choix. Soit il le dénonce, soit il lui porte secours. Il n’hésite pas et entre ainsi dans le cycle. Il appelle son fils pour qu’il l’aide à transporter le blessé chez le médecin – qui lui aussi a choisi. Le parachutiste est conduit à l’hôpital. La chaîne continue, la solidarité fonctionne, malgré le danger. Quand l’homme est guéri, on cherche comment le rapatrier en Angleterre. Là commence l’action de la Résistance dite organisée avec ses filières et ses réseaux. Tous ces gens étaient des êtres humains pour lesquels c’eût été une indignité que de livrer un homme blessé. Ils ont agi à leur manière, ils l’ont fait avec leurs mots. Et ils sont restés anonymes».

Geneviève de Gaulle-Antonioz, revue Le Patriote résistant de décembre 1994.

Dans l’histoire de la résistance française et tarn-et-garonnaise, nombre d’exemples

d’aide aux pourchassés révèlent l’engagement de personnes dévouées et désintéressées qui le plus souvent sont restées anonymes.

Page 5: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 5

QUI SONT LES PERSONNES POURCHASSÉES ? Par ordre chronologique, on peut citer :

� Les étrangers ayant fui leur pays pour des raisons économiques ou politiques � Les prisonniers de guerre qui s’évadent des camps d’internement en France ou des

stalags* en Allemagne � Les soldats alliés encore présents en France et notamment les aviateurs abattus dans

l’espace aérien français � Les opposants au régime de Vichy et les résistants � Les Juifs � Les requis au Service du travail obligatoire (STO)* en Allemagne

COMMENT AIDER LES PERSONNES PERSÉCUTÉES ? Chaque région de France, chaque département, de par sa situation géographique, connaît des particularités différentes. Les événements en Tarn-et-Garonne : 1) Montauban et le Tarn-et-Garonne : terres d’accueil de réfugiés

Bien avant le début de la Seconde Guerre mondiale, Montauban accueille des réfugiés antifascistes. Au début de 1935, lorsque la Sarre est rattachée à l’Allemagne nazie, nombre de Sarrois passent en France. Les autorités françaises dirigent alors beaucoup d’entre eux vers le sud-ouest et plusieurs viennent à Montauban. Comme le prouvent les fonds importants des archives municipales relatifs aux réfugiés, la ville est une terre d’accueil pour les étrangers : Allemands, Autrichiens, Polonais, Italiens, Espagnols, Belges, Suisses, Luxembourgeois, Néerlandais, Tchécoslovaques…

Avec l’occupation de la France, le Tarn-et-Garonne devient un lieu de rassemblement de nombreux réfugiés antifascistes. A l’initiative du député Marcel Guerret, près de 80 familles de socialistes autrichiens sont accueillies en Tarn-et-Garonne. Réputée terre d’asile, Montauban voit dès lors arriver des centaines d’étrangers qui s’ajoutent aux milliers de réfugiés français fuyant leurs régions envahies par l’armée allemande.

Hanna Papanek, réfugiée à Montauban à l’été 1940 avec sa famille, témoigne de l’aide reçue : « Au moment du repli, les exilés politiques cherchaient donc des moyens pour s’enfuir dans la zone dite libre et éviter ainsi d’être pris par les Allemands. […] Les socialistes autrichiens […] venaient presque tous à Montauban. […] La ville, qui avait parmi ses élus le socialiste Marcel Guerret (député de Castelsarrasin et adjoint au maire de Montauban), était un endroit dans lequel on pouvait s’attendre à une atmosphère positive à l’égard des exilés. […] L’avant-garde du groupe avait été Otto Leichter et ses deux fils, Heinz et Franz, qui arrivaient à Montauban le 2 juin 1940. […] Durant les premiers jours arrivaient surtout des femmes, des enfants, et des hommes âgés, car les hommes plus jeunes avaient été internés dans des camps français pour étrangers, en tant que « sujets ennemis » à cause de leur provenance d’Allemagne ou d’Autriche, même s’ils étaient apatrides et en France parce qu’ils avaient fui les nazis. […] Finalement, 200 à 300 socialistes autrichiens se trouvaient à Montauban. […] Marcel Guerret et M. Hinard aidaient beaucoup d’exilés autrichiens, par exemple en fournissant de faux papiers […]. Après le début des persécutions systématiques des juifs en 1942, bien d’autres ont été cachés par des montalbanais courageux […] ».

Source : conférence donnée à Montauban en 1997 par Hanna Papanek, professeur à l’université de Harvard (Etats-Unis),

dossier « Les réfugiés autrichiens », musée de la Résistance – Ville de Montauban

Page 6: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 6

Dans une lettre adressée à son père Otto (cité dans le témoignage précédent) le 13 juin 1945, Henry Leichter, évoque l’aide apportée par Marcel Guerret et diverses personnes gravitant dans son réseau de Résistance : « Ce que Guerret, sa femme et Hinard ont fait va au-delà, est au-dessus de l’humanité. Aider les juifs était seulement une partie de leur œuvre. Guerret travaillait pour les renseignements britanniques, avait une position de meneur dans la Résistance et passait clandestinement des aviateurs alliés ».

Source : document fourni par les archives d’Amsterdam, dossier « Les réfugiés autrichiens », musée de la Résistance – Ville de Montauban

Repérée comme terre d’accueil, le département de Tarn-et-Garonne devient terre de

camouflage pour nombre de personnes pourchassées par les nazis ou le gouvernement de Vichy. 2) Les opposants au gouvernement de Pétain

Le parti communiste ayant été interdit en France depuis le décret du 26 septembre

1939, de nombreux militants tarn-et-garonnais sont arrêtés par la police française pour avoir distribué des tracts considérés comme propagande illicite, jugés et condamnés. Les francs-maçons* connaissent aussi une situation difficile : leurs groupements sont interdits, des fonctionnaires sont révoqués. Dans l’ensemble, la population tarn-et-garonnaise accepte le nouveau gouvernement. Cependant, dès le mois d’octobre 1940, de jeunes élèves du lycée Ingres de Montauban, regroupés dans la Phalange anti-nazie (PAN) signalent leur opposition à Pétain par des graffitis, des tracts et leur journal clandestin « L’Etincelle ». 3) Les résistants

Le 11 novembre 1942, la zone libre est envahie et le département est occupé. Les forces militaires des mouvements de résistance se structurent en vue des combats pour la libération, ce qui provoque une réaction de la police allemande. De nombreux résistants sont arrêtés en Tarn-et-Garonne. Si quelques rares sont restés internés en France jusqu’au mois d’août 1944, les autres sont déportés ou fusillés. En effet, comme partout en France, les résistants sont considérés comme « illégaux et terroristes », des combattants clandestins exclus de ce fait des conventions de Genève visant à protéger les prisonniers des exécutions et des tortures. Pour ces pourchassés, la question de l’hébergement et du ravitaillement est cruciale. Or, sous l’Occupation, tout individu doit avoir des papiers justifiant de son identité pour pouvoir circuler. Il faut donc leur fournir une nouvelle identité, de faux documents avec des photographies modifiées (coiffure, moustache, barbe, lunettes…) et tout ce qui est nécessaire à leur survie, dans un pays où l’on doit présenter des papiers pour se nourrir ou trouver du travail.

4) Les requis au Service du travail obligatoire

Par le décret du 16 février 1943, tous les Français de sexe masculin de 20 à 22 ans sont astreints à un service du travail en Allemagne d’une durée de deux ans. Finalement, ce décret sur le Service du travail obligatoire (STO) permet au gouvernement collaborateur de Vichy d’offrir de la main-d’œuvre française à l’industrie allemande.

Page 7: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 7

Comment échapper au STO ? � en obtenant, grâce à des certificats médicaux délivrés par des docteurs français,

la carte de travail n°4 portant la mention « à maintenir sur place » ; � en rejoignant les Forces françaises de l’extérieur en passant par l’Espagne avec

l’aide de filières d’évasion ou de passeurs : ce sont les « Evadés de France » ; � en rejoignant le maquis.

Certains entrent dans la clandestinité uniquement pour échapper au STO ; d’autres choisissent d’agir vraiment pour la Résistance. Dans tous les cas, ces « réfractaires » au STO sont recherchés par les polices françaises et allemandes qui menacent aussi ceux qui les cachent.

Par exemple, en Tarn-et-Garonne, par une circulaire du 24 septembre 1943, l’Inspecteur d’académie rappelle aux instituteurs que des peines d’emprisonnement sont prévues pour tout complice de réfractaires au STO. A Montauban, le 16 mars 1943, une manifestation a lieu à la gare de Villebourbon, à l’occasion d’un départ de requis au STO.

En février 1943, Jean Vignoboul, jeune résistant, reçoit sa convocation au STO. Grâce à la licence

de mathématiques qu’il est en train de préparer à Toulouse, il obtient une dérogation de quelques mois. Mais il sait qu’il va être de nouveau appelé. Il entre donc en contact avec une institutrice de Maubec, dont il connaît les idées antivychistes et dont le fils subit la même situation. Jean Vignoboul trouve alors refuge chez cette famille d’agriculteurs, ne sortant que la nuit par précaution pour lui et ceux qui l’hébergent en secret. Puis, les caches changent. En bicyclette, les deux réfractaires partent dans le Tarn, près de Gaillac où vivent les parents de Jean Vignoboul. Ils restent parmi eux environ trois semaines puis retournent quelques jours à Maubec. Jean Vignoboul trouve ensuite refuge faubourg Lacapelle à Montauban, chez sa belle-mère. Là, il entre en contact avec le parti communiste clandestin

afin d’entrer dans un maquis. Mais on le refuse, à cause d’importants problèmes d’intendance liés au manque d’armes et de nourriture nécessaires aux maquisards déjà présents. Il doit donc attendre et se cacher à nouveau. Après le débarquement allié du 6 juin 1944, Jean Vignoboul refuse de continuer à vivre cette situation : il intègre enfin le maquis. Dans ce cadre, il détourne entre autre près de Castelsarrasin, des barils d’essence pour faire fonctionner des véhicules dont dispose le maquis. Avec d’autres résistants, ils parviennent ainsi à effectuer plus rapidement le trajet vers Albias ou Réalville où ils commettent des sabotages de voies ferrées et de poteaux électriques à l’encontre des troupes

d’occupation. Jean Vignoboul précise que rien n’aurait été possible sans la complicité ou l’aide de fermes alentours.

Source: musée de la Résistance – Ville de Montauban

Aucun maquis ne peut survivre sans l’aide du milieu rural avoisinant et en particulier

des paysans. De vastes chaînes de solidarité se mettent en place avec toutes les composantes de la société rurale pour assurer le ravitaillement, la sécurité, le renseignement. Cette participation expose les auteurs à de violentes répressions. En Tarn-et-Garonne, lors de l’attaque du maquis de Cabertat (près de Vaissac) le 20 juin 1944, les assaillants incendient des fermes ; dans l’une, trois personnes dont un enfant ont été brûlées vives.

Page 8: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 8

5) Les Juifs

Avant la guerre, la présence juive en Tarn-et-Garonne est relativement peu importante. Elle s’accroît avec l’arrivée de réfugiés au printemps 1940 : environ 1600 nouveaux venus juifs, pour la plupart d’origine étrangère, s’installent dans le département.

Les organisations juives légales doivent s’adapter dans l’urgence à la détérioration

brutale de la situation des Juifs en France, consécutive à l’application des lois des 3 octobre 1940 et du 2 juin 1941. Ce sont les Statuts des Juifs qui les excluent de la fonction publique, leur interdisent d’exercer certains métiers ou de posséder une entreprise. Tout ceci s’accompagne d’une intense propagande antisémite.

L’Oeuvre de secours aux enfants (OSE)* crée de nouvelles maisons d’enfants,

s’occupe du sauvetage des jeunes juifs menacés de déportation en les dotant de fausses identités ou en organisant des filières clandestines d’évasion.

En 1941, les rafles débutent : les Juifs sont emprisonnés ou menés dans des camps d’internement français.

Un pas supplémentaire est franchi en 1942, suite à la conférence nazie de Wannsee, près de Berlin, où est proclamée la « Solution finale au problème juif » autrement dit l’extermination des Juifs d’Europe. Dans ce cadre, la police française procède en Tarn-et-Garonne à des rafles en août 1942. Les arrestations ne s’arrêtent qu’à la libération du département.

Près de 76000 Juifs sont déportés de France, dont 11000 enfants. Moins de 3000

ont survécu. Grâce à l’enquête de l’historien Serge Klarsfeld et aux Archives départementales de Tarn-et-Garonne, le dossier complet - dates et lieu d’arrestation ; dates et numéros de convois de déportation – a été établi pour 235 Juifs arrêtés en Tarn-et-Garonne . D’autres ont été arrêtés mais leur dossier est incomplet.

Et derrière : le Juif – Affiche de propagande vichyste Fac-similé, 1943

Couleur - 47x35 cm

Coll. musée de la Résistance – Ville de Montauban

Un personnage inquiétant, vêtu de noir, est au centre de la composition.

Il est identifiable par une étoile de David, symbole de la religion juive,

qui est mise en avant. Cette caricature rassemble nombre de traits sous

lesquels les Juifs sont représentés à l’époque: épais sourcils, regard

malveillant, nez grossier, lèvres charnues. La silhouette imposante

suggère ici la richesse, le confort et la malhonnêteté. L’homme se cache

derrière les drapeaux du Royaume-Uni, des Etats-Unis et de l’URSS.

L’espace de l’affiche est entièrement utilisé afin de donner la sensation

que tous les éléments ne font qu’un : ainsi les Alliés sont accusés de

dissimuler les intérêts des Juifs. En les assimilant aux défauts

représentés par la caricature, on cherche à les discréditer aux yeux de

l’opinion publique.

Page 9: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 9

DES FORMES D’AIDE INDIVIDUELLES

Franchir les frontières De 1940 à 1942, franchir la ligne de

démarcation, véritable frontière, est possible seulement grâce à un laissez-passer, un Ausweis, délivré par les autorités allemandes.

Pour ceux qui veulent quitter la France, la situation est encore plus compliquée. Les

côtes françaises sont déclarées « zone interdite » : elles sont très surveillées et on n’y circule qu’avec des papiers spécifiques.

L’une des premières actions d’aide aux pourchassés est donc de faire franchir ces frontières de manière clandestine. Les départs par bateau ou par avion sont rares et seuls des réseaux bien organisés y parviennent. Pourtant, il est impératif pour certaines personnes de fuir à l’étranger ou de rejoindre les pays alliés en fuyant par l’Espagne ou la Suisse, pays officiellement neutres. Ainsi, des passeurs organisent, de nuit le plus souvent, l’itinéraire de personnes désirant quitter leur région ou la France. Ce sont pour la plupart des paysans qui connaissent bien les chemins et les raccourcis qu’ils utilisent souvent. Malheureusement, des individus seulement intéressés par l’argent se font payer leurs « services », parfois volent les personnes qu’ils sont censés aider, les abandonnement en chemin ou les dénoncent aux autorités. Mais nombre de passeurs aident aussi avec honnêteté et humanité des réfugiés, des Juifs, des résistants…

Bernard Piquemal est adolescent lorsqu’il s’engage fin 1940 dans la Phalange anti-nazie (PAN), groupe de résistance de Montauban. Lorsqu’en novembre 1942, la zone « libre » est occupée par les nazis, il

décide avec d’autres compagnons de Tarn-et-Garonne de rejoindre les Forces Françaises Libres* en Angleterre. Pour cela, il doit franchir la frontière espagnole. Il évoque le souvenir positif d’un passeur : « L’un des plus grands convois qui a franchi la frontière franco-espagnole est, sans conteste, celui des cinquante-quatre évadés du 20 juin 1943, au Port de Belhay, à 1800 mètres d’altitude, en pays basque, au sud de Sainte-Engrace. Je garde avec émotion, dans ma mémoire le souvenir de notre passeur Michel Olazabal et de son beau-père Pierre qui organisèrent, avec quelques complicités, la formation de convoi et en assurèrent la progression jusqu’à la frontière pendant trois longues étapes nocturnes. […] Il y eut des concours de circonstances, des complicités, sans lesquelles eût été vaine notre entreprise. […] Les premiers axiomes de la résistance étaient le silence, le secret. […] Il fallait aussi de l’argent […]. Le docteur Dupuy, homme de progrès, désintéressé, dont nous vénérons particulièrement la mémoire, qui était au courant de toutes nos activités clandestines, nous fournit les fonds. […] juste avant la frontière nous essuyâmes un très violent orage, peut être salvateur car il confina dans leurs abris les gardes frontières allemands. Nos guides nous firent jeter nos bâtons, dangereux en cas d’orage et on s’abrita contre une roche en surplomb. Vers la fin nous repartîmes sous une pluie fine, passâmes près de trois vaches mortes qui avaient été foudroyées. Nos guides s’arrêtèrent, nous indiquèrent le val de Venta de Arraco que nous devions descendre jusqu’à Isaba et nous demandèrent d’acquitter le péage. Comme je tendais à Pierre les 3000 francs convenus il me demanda ce que je faisais dans la vie ! Je répondis que j’étais étudiant. Alors il prit 1000 francs pour assurer, me dit-il, la bonne marche de sa ferme pendant qu’il s’occupait des passages et me rendit 2000 francs dont, dit-il, j’aurais bien besoin sous peu. Merveilleux passeurs basques ! ».

Source : dossier « Les évadés de France par l’Espagne », mémoires de Bernard Piquemal , musée de la Résistance – Ville de Montauban

Ausweis d’un italien résidant à Montauban,

1943 Source : 1Z54 musée de la Résistance – Ville de Montauban

Page 10: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 10

Camouflage et sauvetage En Tarn-et-Garonne, certaines figures sont restées célèbres pour avoir aidé des

personnes pourchassées : Marie-Rose Gineste, Pierre-Marie Théas, l’abbé Glasberg… Mais il faut souligner qu’à côté de ces noms qui sont entrés dans l’histoire, beaucoup de gens « ordinaires » ont porté secours à d’autres et sont restés méconnus. Ainsi, quand le Train fantôme, convoi 261, traverse le département le 10 juillet 1944, des déportés réussissent à s’évader et bénéficient de l’aide de sauveteurs anonymes. De nombreux autres exemples mettent à l’honneur des hommes et de femmes qui ont sauvé des vies au péril de la leur.

Marie-Rose Gineste débute son activité de

résistante à Montauban en août 1940. Fournissant de faux-papiers aux personnes dans le besoin, elle facilite aussi le passage de la ligne de démarcation à des réfugiés belges souhaitant rentrer chez eux. Puis, elle est chargée par l’évêque de Montauban Pierre-Marie Théas, du camouflage de Juifs chez des particuliers ou dans des couvents du département. Secrétaire de l’œuvre d’assistance du Secrétariat social installé faubourg du Moustier, elle établit dans ces locaux une véritable fabrique clandestine de faux-papiers. Elle parvient à se procurer des tampons de mairie, préfecture, police, ainsi que des permis de circuler. Elle héberge par la suite des agents et des aviateurs alliés, alors que son domicile est à quelques pas du siège de la Gestapo*.

Dans ses mémoires, Marie-Rose Gineste évoque différentes formes d’aide apportée aux personnes en difficulté : L’ aide aux réfugiés « […] il y eut l’armistice, et l’événement qui suivit fut le premier appel du général de Gaulle – l’appel du 18 juin 1940. Quel immense espoir a fait naître en moi, comme en bien d’autres, cet appel du général de Gaulle […]. Il n’en était pas fini de la France. Un général nous demandait de continuer la lutte. Cela correspondait à mon sentiment, mentalement il avait mon adhésion, il me restait à découvrir comment traduire concrètement mon engagement. Cela est venu plus tard. A cette période il y avait dans le Midi de nombreux réfugiés du nord de la France, de l’est de la France et de la Belgique. […] A Montauban, […] l’œuvre catholique d’aide aux réfugiés […] fût le secrétariat social, 64 faubourg du Moustier, et la secrétaire de ce secrétariat social que j’étais, apporta sa collaboration sans réserve à l’œuvre d’aide aux réfugiés. Une assistante sociale très connue à Montauban à cette époque, très dévouée, très aimée, Mme Coulon, protestante, apporta elle aussi un concours très généreux à l’œuvre d’aide aux réfugiés. […] Ces réfugiés étaient rassemblés en ville dans divers locaux et sous la halle Prax-Paris qui rideaux fermés étaient transformée en un immense dortoir où l’on dormait sur la paille. C’est là, qu’avec le père Boon, nous allions les ravitailler en pain et fromage. […] C’était pour nous passionnant d’apporter notre aide, notre accueil, notre amitié à tous qui étaient si éprouvés. Nous qui étions des privilégiés, notre devoir était de leur venir en aide dans toute la mesure du possible et nous l’avons fait ».

Source : revue Arkheia n°2-3 de février-juillet 2000

Marie-Rose Gineste dans son bureau du

Secrétariat social à Montauban Source : coll. part. Marie-Rose Gineste

Page 11: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 11

L’ aide aux Juifs « Le 22 août 1942, Mgr Saliège, archevêque de Toulouse, publia une importante lettre concernant les juifs et la persécution qui sévissait contre eux, lettre de vive protestation. Le 26 août 1942, Mgr Théas, évêque de Montauban, avait lui aussi rédigé une lettre de violente et retentissante protestation contre l’antisémitisme des barbares nazis. […] Ce document était destiné à tous les curés du diocèse, pour être lu en chaire à tous les offices le dimanche suivant, 30 août. […] Mgr me donna à lire sa lettre de protestation, me demanda ce que j’en pensais et si je voulais bien la taper sur un stencil et la tirer ensuite au duplicateur que nous avions au secrétariat social. […] Je lui dis alors qu’il ne fallait pas la confier à la poste, que la censure en ferait interdire la lecture le dimanche suivant, et je lui ai proposé d’aller moi-même, à bicyclette, la porter à tous les curés, toutes les paroisses du diocèse. Mgr Théas a accepté et ainsi fût fait. […] Ayant par ce moyen échappé à la censure, ni les collaborateurs français, ni les Allemands n’en eurent connaissance avant. Ce n’est qu’après, qu’une enquête fut faite auprès des curés, afin de savoir s’ils l’avaient lue et comment elle leur était parvenue. […] A partir de ce moment, je fus chargée par Mgr Théas, du camouflage des enfants et des adultes juifs, dans les couvents du département : des religieuses bénédictines de Mas-Grenier, des religieuses de l’Ange-Gardien à la Molle à Montauban, des religieuses du Refuge à Montauban, soit chez des particuliers et de leur procurer faux papiers, cartes d’alimentation, etc… ».

Source : revue Arkheia n°2-3 de février-juillet 2000

L’aide aux agents alliés « […] il me fut proposé de prendre chez moi un agent anglais de l’Intelligence Service, service d’espionnage […], il était opérateur radio. Ce monsieur vint régulièrement chez moi, les mois de décembre 1943 et janvier 1944. […] Avec son poste émetteur clandestin, il entrait en communication avec Londres, transmettait les informations qu’il avait et en retour recevait des instructions. Je dois dire que chaque fois qu’il venait chez moi, j’étais fort inquiète, envisageant le pire. […] la Gestapo était à 150 mètres environ de mon domicile, dans la même rue […] Il est certain qu’engagée comme je l’étais dans la résistance, une perquisition aurait pu se reproduire pour tout autre motif et cette découverte aurait été très grave pour moi et pour maman aussi. Tous ces dangers je les connaissais, j’en ai eu pleinement conscience. […] Le sacrifice de ma vie j’en ai accepté l’éventualité une fois pour toutes lorsque j’ai opté pour servir dans la résistance ».

Source : revue Arkheia n°2-3 de février-juillet 2000

L’aide aux personnes désirant quitter la France

« […] il me fut demandé d’héberger des aviateurs anglais, canadiens et américains. Ces aviateurs avaient eu leur avion abattu en Belgique ou dans le nord de la France. Sauvés et pris en charge par des organisations de résistance, ils étaient convoyés et amenés dans la région de Toulouse où ils devaient attendre, quelques jours, quelques semaines parfois, pour qu’un passage clandestin en Espagne puisse s’effectuer. De l’Espagne, ils rejoignaient ensuite l’Angleterre ».

Source : revue Arkheia n°2-3 de février-juillet 2000

Page 12: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 12

Pierre-Marie Théas, évêque de Montauban, prête

également son aide aux personnes pourchassées par les nazis ou le gouvernement de Vichy. C’est ainsi qu’il accueille l’abbé Glasberg, recherché à Lyon par la Gestapo pour avoir lui-même participé au sauvetage d’enfants juifs. Il lui confie la paroisse de Léribosc où Glasberg tisse rapidement des liens avec la résistance locale et aide à son tour Juifs et maquisards.

Le 26 août 1942, comme l’a fait quelques jours avant l’archevêque de Toulouse, Saliège, Pierre-Marie Théas rédige une lettre de protestation suite aux rafles de Juifs menées en Tarn-et-Garonne.

La « Lettre de Monseigneur l’Evêque de Montauban sur le respect de la personne humaine » rapporte que « dans nos régions, on assiste à un spectacle navrant : des familles sont disloquées ; des hommes et

des femmes sont traités comme un vil troupeau, et envoyés vers une destination inconnue, avec la

perspective des plus graves dangers » et critique les mesures antisémites qui « sont un mépris de la

dignité humaine, une violation des droits les plus sacrés de la personne et de la famille ».

La lettre est confiée à Marie-Rose Gineste qui, avec deux amis, Mlle Puig et M. Bossu,

fait le tour du département à vélo pour transporter le document destiné à être lu lors des messes du dimanche 30 août. L’aide que Théas apporte aux Juifs est également matérielle : il leur trouve des refuges et leur procure des papiers en signant notamment de faux certificats de baptême.

L’évêque Théas à Montauban Source : coll. part. Lucien Etienne

Page 13: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 13

FILIÈRES ET RÉSEAUX : DE VÉRITABLES ORGANISATIONS D’ASSISTANCE

Des filières pour quitter la France

En janvier 1944, deux pilotes américains dont l’avion a été abattu au-dessus de la France, parviennent à regagner le Tarn-et-Garonne. Ils espèrent ensuite passer en Espagne pour pouvoir rejoindre l’Algérie. Le chef de gendarmerie de Saint-Antonin-Noble-Val, Delpech, accueille ainsi James Dyson et Charles Bigler qu’une filière conduit au maquis d’Ornano, situé entre Penne et Cazals. Ils y sont cachés quelques temps avant de parvenir à quitter la France.

La Maison de Moissac : des enfants cachés, des enfants sauvés

En 1939, le mouvement scout des Eclaireurs israélites de France décide d’ouvrir à Moissac un centre d’évacuation afin de mettre à l’abri les enfants juifs des villages menacés par les bombardements. Epaulés par une équipe de jeunes bénévoles, Edouard dit « Bouli » Simon et sa femme Shatta dirigent la Maison de Moissac qui, au 18 quai du Port, devient un lieu de refuge pour enfants. Ils viennent de France, d’Allemagne, de Belgique, d’Europe de l’Est… Beaucoup ne parlent pas français, plusieurs ont été sauvés des camps d’internement où sont détenus leurs parents.

Jusqu’en 1942, les enfants vivent

plutôt bien à Moissac. Mais dès l’été, les rafles débutent en Tarn-et-Garonne. En août 1942, la police française vient arrêter des enfants juifs étrangers de la Maison. Les dirigeants doivent alors non plus seulement accueillir mais cacher les enfants. C’est ainsi qu’ils entrent dans la clandestinité, à travers un réseau de résistance appelé « la Sixième » .

« Jimmy » (1) et « Charlie » (2), aviateurs

américains, ont été des hôtes de passage du maquis d’Ornano en 1944, avant de

regagner l’Espagne

Source : musée de la Résistance – Ville de Montauban

Les enfants quittent la Maison pour se rendre à l’école de

Moissac

Source : Lewertowski Catherine : Morts ou Juifs. La Maison de Moissac ©

Aiglon ou Egermeier (coll. part.)

Page 14: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 14

Les adultes de la Maison de Moissac deviennent désormais de véritables acteurs de la résistance juive d’aide aux pourchassés. Ils cherchent à se procurer ou fabriquer de faux-papiers - cartes d’identité, passeports, certificats de baptême - souvent obtenus grâce à la complicité d’employés de la mairie de Moissac et de la préfecture de Montauban. Suite à des dénonciations, la Maison de Moissac ferme fin 1943. Les enfants doivent alors être cachés ailleurs : chez des curés dans les paroisses, chez des pasteurs ou dans des temples protestants, dans des couvents, des monastères et la plupart chez des familles, sous une fausse identité.

De 1939 à 1944, environ 500

enfants âgés de 2 à 18 ans ont trouvé refuge à la Maison de Moissac, certains pour quelques jours, d’autres pour des années. Tous ont échappé à la déportation, sauf un qui, repris par ses parents, est mort avec eux dans un camp nazi.

DES « JUSTES » ET DES ANONYMES QUI ONT AIDÉ AU PERIL DE LEUR VIE

Pour honorer les personnes qui ont risqué leur vie en venant en aide à des Juifs, a été

créé le titre de « Juste parmi les nations ». Pour que le titre soit décerné, il faut prouver, grâce à des témoignages, que la personne a porté secours à des Juifs sans avoir rien demandé en contrepartie. En Tarn-et-Garonne, en 2007, 46 Justes sont reconnus. Mais tous ceux qui ont aidé des Juifs n’ont pas reçu la médaille des Justes, soit parce qu’ils ne l’ont pas souhaité, par humilité, soit parce qu’ils sont restés anonymes.

La situation est la même pour les personnes qui ont aidé d’autres catégories de pourchassés : si des noms sont restés célèbres, beaucoup ont conservé l’anonymat et n’ont livré leur témoignage qu’à leur famille, à leurs amis ou à des historiens locaux.

Venir en aide à un persécuté ou à un pourchassé s’effectue dans des circonstances et pour des raisons différentes. Ces sauveteurs qui risquent leur vie pour des gestes essentiels de solidarité et d’humanité, sont issus de conditions sociales, de professions, de religions diverses et n’appartiennent pas forcément à des réseaux organisés. Par la suite, la plupart d’entre eux n’ont pas revendiqué leur appartenance à la Résistance car ils trouvaient leur action toute naturelle. Pourtant, à côté et avec une résistance militaire, ils constituent une forme de résistance civile peu visible mais efficace.

Plaque en l’honneur de Bouli et Shatta Simon, sur

la place qui porte leur nom à Moissac

Source : musée de la Résistance – Ville de Montauban

Page 15: Concours National de la Résistance et de la Déportation 2008 · L’action résistante implique un engagement volontaire dans le but de s’opposer au pouvoir de l’occupant. Au

© Musée de la Résistance et de la Déportation – Ville de Montauban, 2007 15

LEXIQUE

FFI Forces Françaises de l’Intérieur. Créées en février 1944, elles réunissent toutes les forces

armées de la Résistance. Le général français Koenig en dirige l’état-major à Londres.

FFL Forces Françaises Libres. Formées par le général de Gaulle à l’été 1940, elles sont

commandées depuis l’Angleterre et sont le symbole de la résistance extérieure.

Franc-maçonnerie Organisation associative initiatique à caractère philosophique se consacrant à l’amélioration

de l’homme et de la société. Gestapo Abréviation des termes allemands « Geheime Staatspolizei », c’est la police secrète

allemande d’Etat. Créée par Goering en 1933 et dirigée par Himmler à partir de 1934, la Gestapo est chargée de la répression des opposants au nazisme et des résistants.

Juif Les Juifs pratiquent une religion née il y a plusieurs milliers d’années : le judaïsme. Ils vivent

dans plusieurs pays du monde : ils peuvent donc être Français, Anglais, Allemands, etc., de la même manière que le sont des catholiques ou des musulmans. Etre juif ne correspond pas à une nationalité, c’est avoir une religion ou appartenir à une culture, une tradition juives, sans forcément croire en dieu. Etre juif ne correspond pas non plus à une « race » comme le pensent les nazis car le concept de race pour les humains n’existe pas (voir la définition du mot « race »).

Juste En 1953, le titre de « Juste parmi les nations » est créé par le comité Yad Vashem de

Jérusalem pour honorer les personnes, les villages ou les institutions qui ont sauvé des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. En 2007, 21758 Justes sont recensés.

Maquis Expression d’origine corse désignant un espace de végétation touffue et dense. Symboles de

la résistance armée, les maquis désignent des lieux en général cachés et difficiles d’accès, regroupant des résistants. Le maquis se situe donc surtout dans des zones assez difficiles d’accès pour ceux qui ne le connaissent pas et notamment pour les troupes d’occupation. Le maquis désigne aussi le groupe humain formé par ces résistants, les maquisards, qui, au regard du régime de Vichy, vivent dans l’illégalité.

Milice Institution créée en janvier 1943 par le chef du gouvernement Pierre Laval et spécialement

chargée de la traque des résistants. En avril 1943, elle devient une direction autonome de la police mise à disposition des préfets.

OSE Œuvre de secours aux enfants. Organisation juive d’assistance fondée en Russie en 1912 et

qui a acquis entre la Première et la Seconde guerres mondiales une grande expérience de secours aux populations. L’OSE siège à Paris depuis 1933. A partir de l’été 1940, ses dirigeants, réfugiés en zone libre, développent une aide sociale aux multiples formes à travers la création de maisons d’enfants, puis, à partir de 1942, à travers une action clandestine visant à sauver des enfants juifs de la déportation.

Race Groupe d’êtres vivants aux caractères biologiques semblables. La notion de race n’a aucun

sens pour différencier les êtres humains. Il n’existe qu’une espèce humaine.

Résistance civile Forme de résistance non armée à l’occupation nazie : désobéissance, renseignements, impression et distribution clandestine de journaux et de tracts, fabrication de faux-papiers, aide aux personnes pourchassées… Elle a été fondamentale, souvent première à apparaître, précédant la lutte armée. Sans son précieux secours, les maquis n’auraient pu ni s’organiser de manière autonome ni durer dans le temps.

Stalag Camp pour prisonniers de guerre situé dans les territoires de l’Allemagne nazie.

STO Service du travail obligatoire. Créé en février 1943, ce système devait fournir les entreprises

nazies en main-d’œuvre par l’envoi en Allemagne de jeunes français nés entre 1920 et 1922. Très impopulaire, le STO a incité de nombreux jeunes à entrer dans la clandestinité, à se cacher : ce sont les réfractaires, ceux qui refusent le STO. Certains rejoignent les maquis et la Résistance.