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MONDIAVITI Bordeaux 1 er & 2 DØcembre 2004 109 Climat du vignoble et raisonnement de l’irrigation et de la conduite Professeur Alain CARBONNEAU IHEV - Institut des Hautes Études de la Vigne et du Vin Agro Montpellier UnitØ Mixte de Recherche « Sciences Pour lnologie » [email protected] Le climat du vignoble est de faon gØnØrale la composante environnementale majeure, aux Øchelles de la gØoviticulture ou du terroir (Carbonneau, 2001a). Une mØthode globale de caractØrisation du macroclimat ou du mØsoclimat, la Classification Climatique Multicritères (CCM), a ØtØ mise au point et validØe par Tonietto(1999), Tonietto et Carbonneau (2004). Il est indispensable de caractØriser le climat du cycle vØgØtatif de la vigne de faon intØgrØe, car les facteurs radiatifs, thermiques et hydriques interviennent ensemble sur la physiologie de la vigne : la rØduction de lapproche climatique un ØlØment, ce qui est fait la plupart du temps, est source derreur. Ainsi, il est apparu nØcessaire et suffisant de caractØriser le climat viticole par une analyse multivariables ou une combinaison de classes fondØes sur les 3 indices suivants (mØthode CCM): IS = Indice de sØcheresse ou bilan hydrique potentiel du cycle, IH = Indice HØliothermique ou Indice de Huglin du cycle, IF = Indice de fracheur des nuits ou tempØrature minimale moyenne de la maturation. Cette caractØrisation fait Øvidemment suite la prise en compte de facteurs limitants simples comme les seuils de gels, le minimum de pluviomØtrie en labsence dirrigation, des tempØratures trop fraches la floraison ou trop ØlevØes en ØtØ, ou tout type daccidents. Le climat ainsi caractØrisØ peut Œtre mesurØ : en termes de moyenne et de variance inter-annuelle ou intra-annuelle (climats de type tropical) pour des comparaisons ou des cartographies rØgionales, en termes de suivi en temps rØel au cours du cycle vØgØtatif pour des prises de dØcisions techniques, ou de suivi des changements climatiques en fonction du millØsime, du cycle solaire ou du rØchauffement global.

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MONDIAVITI Bordeaux � 1er & 2 Décembre 2004 109

Climat du vignoble et raisonnement de l’irrigation et de la conduite

Professeur Alain CARBONNEAU IHEV - Institut des Hautes Études de la Vigne et du Vin

Agro Montpellier Unité Mixte de Recherche « Sciences Pour l��nologie »

[email protected]

Le climat du vignoble est de façon générale la composante environnementale majeure, aux échelles de la géoviticulture ou du terroir (Carbonneau, 2001a).

Une méthode globale de caractérisation du macroclimat ou du mésoclimat, la Classification Climatique Multicritères (CCM), a été mise au point et validée par Tonietto(1999), Tonietto et Carbonneau (2004).

Il est indispensable de caractériser le climat du cycle végétatif de la vigne de façon intégrée, car les facteurs radiatifs, thermiques et hydriques interviennent ensemble sur la physiologie de la vigne : la réduction de l�approche climatique à un élément, ce qui est fait la plupart du temps, est source d�erreur. Ainsi, il est apparu nécessaire et suffisant de caractériser le climat viticole par une analyse multivariables ou une combinaison de classes fondées sur les 3 indices suivants (méthode CCM):

• IS = Indice de sécheresse ou bilan hydrique potentiel du cycle,

• IH = Indice Héliothermique ou Indice de Huglin du cycle,

• IF = Indice de fraîcheur des nuits ou température minimale moyenne de la maturation.

Cette caractérisation fait évidemment suite à la prise en compte de facteurs limitants simples comme les seuils de gels, le minimum de pluviométrie en l�absence d�irrigation, des températures trop fraîches à la floraison ou trop élevées en été, ou tout type d�accidents.

Le climat ainsi caractérisé peut être mesuré :

• en termes de moyenne et de variance inter-annuelle ou intra-annuelle (climats de type tropical) pour des comparaisons ou des cartographies régionales,

• en termes de suivi en temps réel au cours du cycle végétatif pour des prises de décisions techniques, ou de suivi des changements climatiques en fonction du millésime, du cycle solaire ou du réchauffement global.

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Les climats viticoles mondiaux (tonietto, carbonneau)

Les planches 1,2,3 présentent la méthode de calcul de IS, IH, IF.

Planche 1

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Planche 2

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Planche 3

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La figure 1 reproduit le résultat de l�analyse en composantes principales de ces indices climatiques effectuée sur une base de données météorologiques mondiales, incluant environ 70 sites à proximité de vignobles sur l�ensemble des régions viticoles mondiales et des types de climats. Il est ainsi possible de mesurer les « distances climatiques globales » entre ces sites sur la base de toutes les variables climatiques dominantes, tout en vérifiant la correspondance avec les grands types de climats.

Fig 1 : Résultat en Analyse en Composantes Principales de la méthode " Classification Climatique Multicritères " avec le positionnement des sites viticoles mondiaux, regroupés selon la typologie climatique classique (Tonietto et Carbonneau, 1997).

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La figure 2 illustre les 2 saisons climatiques au cours de l�année sous un climat intertropical, celui du nord-est du Brésil.

Fig 2 : Exemple de variation climatique intra-annuelle en région intertropicale (nord-est du Brésil) sur la base de la méthode " Classification Climatique Multicritères " (Tonietto, 1999) .

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La figure 3 montre les fluctuations climatiques entre millésimes dans l�Hérault en France, attestant qu�un même lieu peut significativement changer de climat au cours du temps.

Fig 3 : Exemple de l’application de la méthode " Classification Climatique Multicritères " à l’étude des variations entre millésimes dans l’AOC La Livinière en Languedoc (Association Climatique de l’Hérault) .

Ces types d�informations issues de l�utilisation de la CCM à l�échelle régionale constituent des préalables indispensables aux échanges à l�échelle de la « géoviticulture », ainsi qu�à l�étude des Unités de Terroir de Base � UTB (interaction « mésoclimat � sol/sous-sol ») et des Unités de Terroir Viticole �UTV (interaction « UTB � cépage � technologies »).

NB : Des indices climatiques spécifiques peuvent évidemment être mis au point en fonction des particularités d�une étude. Par exemple, pour celle concernant le zonage des potentialités de teneur en sucre du raisin des vignobles européens (Riou et Carbonneau, 1994), la base de l�algorithme agro-climatique a reposé sur IS et STVR (somme de températures entre véraison et récolte). La figure 4 illustre le résultat cartographique de cette étude.

Dans cette optique et de façon simplificatrice, il est possible de considérer 9 grands groupes de climats en croisant 3 classes de IS avec 3 classes de IH (tableau 1), et en apportant une modulation en fonction des classes d�IF (il s�agit là de la seule composante climatique majeure non modifiable par les techniques viticoles, mais à prendre en considération). Voici ces groupes avec les principaux problèmes viticoles attachés : 1) « frais – humide » :

énergie solaire très limitante, risques de gel, risques sanitaires fréquents; 2) « tempéré – humide » :

énergie solaire limitante, vigueur élevée, risques sanitaires fréquents; 3) « chaud – humide » :

vigueur excessive, risques sanitaires très élevés, températures de nuit variables ; 4) « frais – modéré sec » :

énergie solaire limitante, risques de gel, risques sanitaires ;

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5) « tempéré – modéré sec » : situation équilibrée et irrigation d�appoint selon les terroirs, températures de nuit variables;

6) « chaud – modéré sec » : situation équilibrée et irrigation selon les terroirs, températures de nuit variables;

7) « frais – sec » : risques de gel, irrigation régulière selon les terroirs;

8) « tempéré – sec » : situation équilibrée et irrigation régulière selon les terroirs, températures de nuit variables ;

9) « chaud – sec » : irrigation abondante et régulière, risques d�échaudage, températures de nuit variables.

Quels sont les critères de raisonnement de l�irrigation et de la conduite du vignoble dans ces 9 cas ? Tableau 1 = groupes de climats obtenus par croisement des classes d’IS (Indice Sécheresse) et d’IH

(Indice Héliothermique) de la méthode CCM

IS (mm) IH (°C * j)

HUMIDE = Humide + sub-humide

(…150 ! 50)

MODERE SEC = À sécheresse

modérée (50 ! -100)

SEC = À sécheresse forte + sécheresse très forte

(-100 ! -200…)

FRAIS = Très frais + frais (1500!1800)

1- FRAIS HUMIDE Ex. Champagne, vignobles alpin

4 – FRAIS MODERE SEC Ex. Oregon, sud Nouvelle Zélande

7 – FRAIS SEC Ex. Washington, Colombie britannique

TEMPERE = Tempéré + tempéré chaud (1800 ! 2400)

2 – TEMPERE HUMIDEEx. Bordelais, Charente

5 – TEMPERE MODERE SEC Ex. Languedoc, Vallée du Rhône

8 – TEMPERE SEC Ex. Centre Chili, Rioja, Napa

CHAUD = Chaud + très chaud (2400 !3000 …)

3 – CHAUD HUMIDE Ex. Uruguay, Inde, Thaïlande

6 – CHAUD MODERE SEC Ex. Corse, Canaries, sud Brésil

9 – CHAUD SEC Ex. Centre Californie, centre Australie, Mendoza

Fig 4 : Résultat cartographique du zonage des vignobles européens sur la base du potentiel de teneur en sucre du raisin ( Riou et Carbonneau, 1994).

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Raisonnement de l’irrigation

Objectifs de production et stratégies d�irrigation sont successivement présentés. 1) Objectifs :

Le premier niveau de raisonnement est lié à l�objectif principal de la production, et fait apparaître deux concepts :

• L’irrigation quantitative : l�objectif est d�abord d�assurer un niveau de production élevé, en évitant de créer des problèmes importants de qualité du raisin ; c�est le cas de la plupart des productions de raisins de table où le tri des grappes permet de concilier ces deux aspects ; c�est celui de vignobles destinés à la production de vins soumis à distillation, comme pour l�élaboration du Pisco ; c�est celui aussi de vin de consommation courante, mais avec le problème de la mévente sur la plupart des marchés.

• L’irrigation qualitative : l�objectif est d�abord d�optimiser et de maîtriser la qualité du raisin et du vin pour tous ses aspects ; c�est le cas des diverses productions de vins fins dans des situations à contrainte hydrique, dont l�intensité va déboucher sur au moins 3 stratégies d�irrigation ; à ce niveau, la prise en compte de la physiologie de la vigne est particulièrement déterminante, de même que celle du type de vin à élaborer (ex : vin rouge à consommer jeune ou de garde ; vin blanc à fraîcheur acide ; vin effervescent).

Pour chacun de ces objectifs ou concepts, il convient de définir des stratégies adaptées en fonction du

degré de contrainte hydrique. Une approche simplifiée du problème est ainsi proposée : 2) Stratégies :

• Stratégie générale d’une irrigation quantitative : - assurer le remplissage de la réserve utile du sol pour le début du cycle végétatif et estimer son volume; - suivre régulièrement l�évolution d�IS ou bilan hydrique potentiel, avec quelques points de contrôle plus

précis par tensiométrie et/ou potentiel hydrique foliaire de base (ou une méthode étalonnée en fonction) ; - calculer, par période, les quantités d�irrigation sur la base d�une valeur empiriquement validée d�une

fraction K de IS, ou plus simplement d�une de ses composantes majeures la transpiration potentielle du vignoble « Tv = k ETP » où k estime le % d�absorption du rayonnement par l�architecture végétative ; si des données locales d�EvapoTranspiration Maximale (ETM) sont disponibles, par lysimétrie notamment, raisonner sur la base de K ETM ;

- moduler K au long de la saison avec le rythme suivant : élevé au printemps afin d�assurer une vigueur élevée de façon à développer rapidement l�architecture et à stimuler la fertilité ; réduit à la floraison pour limiter le risque de coulure ; de nouveau élevé en phase 1 du développement du raisin pour favoriser son grossissement ; réduit progressivement en phases 2 et 3 (sans arrêter, sauf vers la fin) afin de garantir une maturité suffisante ;

- utiliser la technique goutte à goutte à des fins d�économie de l�eau ; mais possibilité de recourir à l�irrigation gravitaire par submersion ou à la raie.

• Stratégies d’irrigations qualitatives :

a) Sous climat « modéré sec » :

Il s�agit ici d�une irrigation d�appoint avec recherche du maintien d�une typicité optimale du vin liée au terroir et/ou au cépage (ex : Languedoc). Le but est d�éviter une déviation de typicité ou une perte de qualité, liée à un dépassement durable de la zone de contrainte hydrique modérée pendant le développement du raisin. Les choix proposés sont les suivants ; ils relèvent d�une stratégie générale et surtout d�une tactique d�adaptation permanente : - estimer la réserve utile du sol juste avant le début du cycle végétatif, vérifier son remplissage et

éventuellement le compléter ; - suivre régulièrement l�évolution d�IS (ou de k ETP), avec quelques points de contrôle précis grâce au

potentiel hydrique foliaire de base (ou une méthode étalonnée en fonction), la tensiométrie étant réservée

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si besoin à la décision du déclenchement du début des irrigations, mais pas à son pilotage en raison des problèmes de représentativité de ces valeurs en rapport avec le sol et l�état hydrique réel de la vigne ;

- mesurer la SFEp (Surface Foliaire Exposée potentielle : Carbonneau 1995b) à partir de la nouaison à deux stades, et au moins à la fin de la constitution de l�architecture végétative, aux alentours de la véraison par exemple ; accorder sans doute plus d�importance à SFEp pour les climats de type « tempéré � modéré sec » que pour ceux de type « chaud � modéré sec », à des fins d�interventions correctrices en cours de saison ;

- démarrer une irrigation d�appoint en général après la nouaison, sauf millésime exceptionnellement sec à ce stade, en visant à n�apporter le supplément hydrique qu�au moment où la croissance des radicelles annuelles se termine (en fin de phase A du développement du raisin, avant la phase B « plateau de croissance herbacée », ou vers la « fermeture de la grappe » ; vérifier au début de l�usage de l�irrigation que la morphologie radiculaire naturelle liée au type de sol et au système cultural (conduite de la plante, entretien du sol) n�est pas significativement modifié ;

- piloter les périodes et les quantités d�irrigation uniquement sur la base de l�état hydrique de la vigne mesuré au minimum toutes les deux semaines, Ψ base par exemple ; organiser l�irrigation d�un vignoble en fonction d�un début plutôt tardif en fin de phase A, et d�un arrêt vers la fin de la véraison ou éventuellement un peu plus tard selon le millésime (un arrêt systématique à la véraison n�est pas généralisable : la décision est liée à l�état hydrique réel de la vigne qui devient souvent critique à partir de la véraison sous ces climats) ;

- utiliser la technique du goutte à goutte (ou de micro-aspersion en sol sableux ou très argileux à « fentes de retrait »), à des fins d�économie de l�eau, et de précision dans la limitation de l�apport hydrique en veillant au positionnement journalier optimum (début de nuit en général).

NB : classes de contrainte hydrique (première esquisse) avec les valeurs correspondantes de potentiel hydrique foliaire de base -Ψb (bars), moyen pendant la maturation, en rapport avec la maturité du raisin de cépages comme Syrah, Grenache noir, Cabernet-Sauvignon, Merlot, sous climat de type « modéré sec » (Carbonneau, 1998) : • contrainte hydrique nulle ou faible : 0 ≥ -Ψb > -3 • contrainte hydrique modérée (optimale) : -3 ≥ -Ψb > -6 • contrainte hydrique forte (sécheresse) : -6 ≥ -Ψb > -10�

b) Sous climat « sec » : La démarche générale proposée pour les climats de type « modéré sec » s�applique, avec au niveau

de l�organisation de l�irrigation du vignoble, une exigence de disposer de quantités d�eau nettement plus abondantes et plus précocement en saison.

Pour des raisons d�économie d�eau et de précision du contrôle des apports, il n�est plus possible de justifier l�utilisation durable d�irrigation de type gravitaire, sauf en début de cycle pour le remplissage de la réserve utile du sol.

Également l�argument de l�utilisation de l�aspersion à des fins de « rafraîchissement » de la canopée est fallacieux en raison de l�effet très passager à ce niveau. ; son usage reste justifié en cas de lutte contre le gel de printemps, mais d�autres méthodes existent dans ce cas.

L�irrigation « qualitative » est donc à ce jour liée à l�utilisation de la technique du goutte à goutte,

avec de surcroît un pilotage fin en fonction de l�état hydrique de la vigne, assorti surtout pour les climats de type « modéré sec » d�une possibilité de plafonnement et de contrôle stricts des quantités apportées. Il est à noter ici l�intérêt d�une organisation du pilotage de diverses parcelles, voire de secteurs de parcelles, de façon différenciée et centralisée au sein d�un réseau informatisé.

Le terme général « d’irrigation raisonnée de précision » - IRP ( « Precision Rational

Irrigation » - PRI) est proposé.

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Raisonnement de l’architecture et de la conduite Il convient de présenter d�abord des principes généraux de la conduite du vignoble, avec la gestion

de l�eau (Carbonneau, 1999b, 2001b, 2004), que l�on retrouve sous les divers climats, en les raisonnant en fonction des objectifs de production et en les illustrant avec quelques exemples techniques ; ensuite de préciser des modalités d�adaptation en fonction des particularités des divers climats.

Il est à noter que les principes ci-après sont énoncés dans le but d�obtenir un rendement physiologique élevé du vignoble, qui peut être exploité en priorité pour obtenir, soit un rendement important, soit une qualité optimale.

En termes de modélisation, la base d�un fonctionnement repose sur un ensemble de « triptyques biologiques » faisant intervenir source, structure, système de régulation (Carbonneau, 1996). L�illustration en est fournie ci-après au niveau de la mesure des éléments de caractérisation de la physiologie liée au système de conduite (géométrie de plantation, tailles de formation et de renouvellement, conduite de la végétation comme le palissage ou les opérations en vert).

1) Principes généraux de conduite : • Obtention d�un minimum de SFEp, dans une gamme de valeurs moyennes à élevée. • Mise en rapport du niveau de SFEp avec la production, puissance (production totale de matière sèche) ou

production de raisins « P », en particulier sous forme du simple rapport SFEp/P. • Indexation de SFEp/P sur la vigueur, notamment la vigueur estivale « V », qui est directement reliée à

l�état hydrique de la vigne ou au potentiel hydrique foliaire ; au total prise en compte du triptyque « SFEp � P � V ».

• Contrôle d�une exposition optimale des raisins, évitant d�un côté une surexposition avec des risques d�excès de chaleur, et de l�autre une sous-exposition avec un ombrage excessif.

• Obtention progressive d�un volume de vieux bois suffisant au niveau de la partie aérienne au moins, pour pallier des baisses d�activité photosynthétique (ou autres liées aux éléments minéraux) pour diverses situations limitantes.

2) Adaptation de la conduite aux objectifs de production :

Pour les caractéristiques et les potentialités des principaux systèmes de conduite, il est conseillé de

consulter l�ouvrage de Carbonneau et Cargnello de 2003 « Architectures de la vigne et systèmes de conduite ».

La figure 5 illustre les principales formes de base regroupant les systèmes de conduite évoqués. De même, les informations complètes sur les systèmes de conduite figurent dans les 13 Comptes

rendus du GESCO, notamment les n°s 11, 12, 13.

Fig 5 : Diversité des architectures ou des formes de base de vigne (Carbonneau et Cargnello, 2003).

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a) Conduite quantitative :

Le but est ici d�assurer une production élevée. La première des conditions est de disposer d�une puissance et d�une charge importantes à l�hectare, donc d�être associée à une disponibilité hydrique peu limitée. De telles conditions doivent en même temps permettre l�obtention d�une SFEp relativement élevée, de façon que le rendement physiologique en termes de bilan de carbone soit haut et que la maturité ne soit pas trop limitée à cause d�un rendement important. La latitude de choix du système de conduite dans de telles conditions apparaît finalement assez réduite si on tient compte d�impératifs économiques minimaux qui sont dictés par le type de production et son contexte. - Productions de raisins de table : Les critères de base dominants sont la garantie d�un rendement très élevé et la facilité de cueillette. Le système de conduite Lyre ouverte (forme de base « Lyre ») apparaît comme doué d�un potentiel de production élevé en maintenant une qualité suffisante, et d�une grande facilité de cueillette : il est recommandable en premier. L�angle des plans de palissage est modulable selon les conditions. Les systèmes de conduite rattachés aux formes de base de type « Toit » comme le Tendone, sont également performantes surtout au niveau du rendement qui peut éventuellement être un peu supérieur à celui de la Lyre ouverte, mais restent limitées en termes de facilité de cueillette, également de lourdeur d�interventions en vert et d�installation. - Productions de raisins de cuve pour la distillation : Les critères de base sont la double garantie d�un rendement très élevé et d�un coût de production minimum. Le système de conduite qui répond le mieux à ces exigences est la Taille minimale (forme de base « Filet ») dans des situations naturellement productives et vigoureuses. Une partie des problèmes sanitaires qui peuvent se poser trouve une solution dans une récolte avant maturité « sucres ». La vendange mécanique est requise. - Productions de raisins de cuve pour des vins d�entrée ou de c�ur de gamme : Les critères de base sont l�obtention d�un rendement suffisamment élevé, d�une maturité et d�un état sanitaire suffisants, d�un coût de production réduit. Les systèmes de conduite qui sont bien adaptés à ce cahier des charges sont sans doute en premier la Taille minimale dans des situations moyennement vigoureuses, notamment la Taille minimale ouverte, car elles rivalisent en termes de qualité avec les conduites en Espalier qui servent de référence, avec des coûts moindres et des rendements généralement supérieurs.

Il est tout à fait possible également, en particulier pour des raisons d�homogénéité culturale au sein d�un domaine déjà conduit en Espalier, de penser : - au système de conduite Lys (forme de base « Lys » proche du type « Déployé » ; Castro et al., 1996), ou

pour des raisons de modularité vis à vis de la demande du marché ou de l�environnement (viticulture durable),

- au système de conduite en Lyre pliable totalement mécanisable.

b) Conduite qualitative :

Le but premier est ici d�exprimer au mieux le potentiel qualitatif du raisin qui est fourni à la base par les caractéristiques de l�interaction « cépage � terroir », surtout dans une optique de production de vins complexes, originaux, allant jusqu�au haut de gamme et au cru.

Le choix doit ici se résumer aux systèmes de conduite les plus performants sur tous les critères énoncés dans les principes généraux de la conduite du vignoble. Il faut également que ces potentialités aient été vérifiées par une expérimentation solide et s�inscrivent clairement dans une démarche de viticulture durable de qualité.

L�histoire nous lègue des expériences enrichissantes, mais la recherche de ces toutes dernières décennies encore davantage. Les 13 numéros des Comptes Rendus du GESCO (Groupe d�Étude des Systèmes de COnduite de la vigne) en témoignent.

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Une idée force qui ressort concernant le système de conduite est, qu�en plus de ses impacts largement reconnus au niveau de la rentabilité de l�exploitation et de la maîtrise du rendement, il est un des déterminants premiers des composantes de la typicité et de la qualité des vins, ceci dans le cadre de l�expression des effets des terroirs.

Rappelons les trois niveaux de définition du terroir (Carbonneau, 1995a):

- l�Unité de Terroir de Base (UTB) est définie comme l�interaction entre le mésoclimat (ou le topoclimat) et le sol (avec le sous-sol associé), au niveau d�une entité homogène ;

- l�Unité de Terroir Viticole (UTV) est définie comme l�interaction entre l�UTB, le cépage, les technologies viticoles et �nologiques, au niveau d�une entité homogène ;

- le Terroir Viticole est défini, au niveau local, comme un ensemble d�UTV, concept qui est en France à la base des Appellations d�Origine Contrôlée ou de tout type de production de terroir.

Les recherches sur les terroirs viticoles, et notamment le « réseau Syrah » développé par l�Agro Montpellier / INRA (Tonietto, Carbonneau), ont permis de mettre en exergue sur une large diversité de parcelles de vignes et de leurs vins, le rôle de certaines composantes de l�UTV sur des variables sensorielles déterminantes des vins (figures 6, 7) : les indices mésoclimatiques (IS, IH, IF), la réserve hydrique du sol, le rapport SFEp/P.

Fig 6 : " Implantation des parcelles du réseau syrah " de l’Agro Montpellier / INRA (Carbonneau).

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Fig 7 : Résultats du " réseau Syrah " de l’Agro Montpellier / INRA : proximités graphiques en Analyse en Composantes Principales entre les variables du vignoble et les éléments significativement en rapport de l’analyse sensorielle des vins (Carbonneau et Tonietto, 1999) .

Force est de constater que ces deux dernières variables sont déterminées par des facteurs naturels (eau disponible avec ses conséquences sur l�entassement du feuillage et le poids des grappes), mais que le vigneron possède à ce niveau une large marge de man�uvre (entretien du sol comme l�enherbement, irrigation, conduite de la végétation).

Les choix techniques du vigneron, en fonction du cépage et de l�environnement ou terroir de base, sont donc intégrés dans l�expression même du terroir viticole. Cette expression est fortement liée aux caractéristiques de l�architecture et du système de conduite ; elle l�est aussi aux niveaux de contrainte hydrique pendant la maturation, notamment la plage de contrainte hydrique modérée. Ces deux volets sont du reste intimement liés car l�état hydrique de la vigne est le résultat de l�équilibre entre le niveau de l�offre

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(bilan hydrique potentiel), celui de la demande (absorption du rayonnement, SFE), celui des régulations physiologiques mises en jeu (autre illustration du concept de « triptyque biologique »).

Les recherches en cours de l�équipe « Physiologie de la Vigne » de l�UMR « Sciences Pour l��nologie » Agro Montpellier/INRA, ont pour but principal de préciser l�influence de l�architecture et du niveau de contrainte hydrique sur les réponses physiologiques de la vigne et les éléments remarquables de la typicité des raisins et des vins. Ces essais confirment en tout cas l�intérêt pour la qualité des choix suivants en matière de conduite du vignoble.

Les Espaliers sont la référence générale de la conduite des vignobles de qualité, et leurs aptitudes sont d�abord liées à la valeur du rapport entre la hauteur de leur feuillage et l�écartement entre leurs rangs. Toutefois la recherche de ces 30 dernières années a montré que d�autres systèmes de conduite sont largement concurrentiels, certains comme les types « Lyre » ayant confirmé leur supériorité (Carbonneau, 1999a). Sur ces bases, les choix suivants peuvent être proposés.

Au terme de longues séries d�observations écophysiologiques au vignoble et d�analyses sensorielles

des vins, les vignes en Lyre ouverte, en Lyre tronquée ou en Lyre pliable (Carbonneau et al., 2004 ; figures 8, 9, 10) sont les plus largement recommandables, en raison de leurs aptitudes à favoriser la qualité du raisin, l�expression des typicités des vins, de leur plasticité en rapport avec la variabilité des climats et des terroirs, de leur robustesse vis à vis des niveaux de rendement ou de vigueur, de leur intérêt en terme de rentabilité par rapport aux autres systèmes « qualitatifs ».

NB : il est important d�adapter les dimensions et la nature des palissages des vignes en Lyre aux caractéristiques de développement des vignes et d�économie de l�exploitation.

Comme choix complémentaires :

- le Lys ou le Niof Casarsa sont intéressants surtout dans le contexte d�une transition à partir d�Espaliers larges ou demi-larges en vignoble assez vigoureux ;

- le Gobelet érigé reste adapté à des situations sèches de coteaux ou de pentes irrégulières ; - l� Arpava convient particulièrement aux terrasses étroites.

Fig 8 : Lyre ouverte sur Muscat de Hambourg en Vaucluse. Noter la facilité d’accès aux grappes en cours de véraison. Amélioration possible de la cueillette manuelle avec la Lyre pliable (Carbonneau).

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Fig 9 : Lyre pliable et lyre ouverte sur Pinot noir en Bourgogne (AOC

Auxey-Duresses, Domaine Henri Latour), dans un contexte de viticulture durable avec enherbement (Carbonneau).

Fig 10 : Lyre pliable sur Pinot noir à Mendoza par transformation de Parral (essai de l’INTA en association avec l’Agro Montpellier, Raul del Monte).

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3) Adaptation de la conduite aux climats De façon simplifiée, afin de traiter la question de l�adaptation de la conduite du vignoble aux climats,

il est possible de tenir compte de IH et de IS sous forme de climats chauds ou non, de climats secs ou non. Notons que IF est négligé dans ce cadre car la technique n�a pas de prise véritable sur la température nocturne.

En outre, la plupart des résultats expérimentaux ou même écophysiologiques ont été obtenus dans la gamme des climats tempérés. L�extrapolation à des climats plus extrêmes, chauds et/ou secs notamment, se fait généralement en considérant que les réponses du fonctionnement de la vigne à l�environnement (ex: photosynthèse) ne sont pas linéaires, mais font apparaître des seuils, des plateaux ou des optimums. L�idée générale est de ramener, grâce à la technique, le vignoble dans une situation microclimatique plus modérée.

Ceci est effectivement vrai pour la plupart des variables environnementales comme le bilan hydrique ou la température ; ceci l�est beaucoup moins pour l�éclairement où il doit rester en général élevé au niveau individuel de la feuille, car les feuilles « d�ombre » ont toujours des bilans de carbone insuffisants, même s�il convient de réduire l�absorption globale. Un autre point sans doute important, mais mal connu, est l�équilibre microclimatique interne à l�architecture, entre feuilles et grappes notamment. Le maintien, grâce à l�architecture (ex:Lyre), d�un tel équilibre peut expliquer une certaine constance des résultats relatifs à d�autres formes sous des environnements très différents.

Sur la base de ces idées générales et d�observations dans des situations hydriques et thermiques extrêmes, voici quelques principes de choix de conduite dans des climats « chauds ou non », « secs ou non ».

a) Climats chauds ou non :

Sous climat raisonnablement chaud où la température estivale sous abri excède rarement 30ºc, la

recherche d�une exposition élevée » du feuillage est largement recommandable. Les raisins doivent bénéficier d�une exposition optimale et souvent maximale.

Lorsque l�on s�adresse à des climats nettement plus chauds et ceci régulièrement, il convient d�être vigilant à l�exposition des feuilles, en essayant de contrôler en dessous de l�enveloppe de la végétation 1 ou 2 couches de feuilles par face bénéficiant d�un éclairement suffisant et où la température est un peu moins excessive qu�au niveau de l�enveloppe. Pour autant, le maintien de feuilles « d�ombre » est à éviter pour les raisons invoquées.

Les raisins doivent ici être particulièrement protégés du rayonnement direct et ne recevoir quasiment que du rayonnement diffus, sans qu�ils soient plaqués aux feuilles.

b) Climats secs ou non :

Sous climat sans contrainte hydrique excessive pendant le développement du raisin en particulier, la recherche d�une exposition du feuillage maximale est très favorable à l�expression de la qualité et de la typicité. Le raisin doit toujours bénéficier d�une exposition optimale.

Lorsque l�on considère des climats nettement plus secs, notamment pendant le développement du raisin, et dans le cas où l�irrigation ne permet pas de maintenir la vigne en état de contrainte hydrique modérée, il convient de réduire l�absorption du rayonnement en limitant le développement de la végétation, si la vigne n�a pas déjà régulé dans ce sens (rognages modérés relativement précoces à la nouaison par exemple).

En aucun cas, il ne faut provoquer de l�entassement pour réduire la transpiration : il faut conserver une exposition des feuilles suffisante, sans exagérer l�épaisseur de la végétation, tout en réduisant la dimension du capteur solaire.

Ces règles sont particulièrement valables quand sécheresse se combine à chaleur, ce qui correspond aux situations les plus fréquentes.

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c) Systèmes de conduite adaptatifs :

La maîtrise de l�état hydrique et de la vigueur de la vigne, par irrigation et entretien du sol, est la condition générale de l�adaptation à ces situations extrêmes. Mais le système de conduite est particulièrement déterminant par son architecture pour contrôler l�exposition optimale des feuilles et des raisins.

Parmi tous ceux qui ont déjà été cités, celui qui est sans doute le plus doué de capacités adaptatives est la Lyre pliable (figures 8, 9, 10) puisque ce palissage permet, avec peu de contrainte technique, de contrôler, soit une architecture ouverte et exposée quand les conditions sont favorables à cela, soit une architecture refermée sans trop d�entassement quand il s�agit de réduire la demande transpiratoire ou de cueillir le raisin dans des conditions commodes (récolte mécanique par secouage latéral).

La présentation de ce système a été faite en particulier par Carbonneau, del Monte (2004) dans le cadre d�une coopération entre l�Agro Montpellier / INRA et l�INTA Mendoza / Université Lujan de Cuyo.

Ce système de Lyre pliable, et les vignes en Lyre en général sont de surcroît particulièrement bien adaptées aux exigences d�une viticulture durable de qualité. Références bibliographiques directes : CARBONNEAU A., 1995a. La notion complexe de terroir. Progr. Agric. Vitic., 112(2), 29-30. CARBONNEAU A., 1995b. La Surface Foliaire Exposée potentielle. Guide pour sa mesure. Progr. Agric.

Vitic., 118(7), 155-161. CARBONNEAU A., 1996. General relationships within the whole plant : examples of the influence of

vigour status, crop load and canopy exposure on the sink « berry maturation » for the grapevine. Acta Horticulturae, 427, 99-118.

CARBONNEAU A., 1998. Irrigation, vignobles et produits de la vigne. In Traité d’irrigation, Lavoisier, Paris Ed., 257-276.

CARBONNEAU A., 1999a. Conduite en Lyre dans le monde : les résultats d�une première expérience. Progr. Agric. Vitic., 116(12), 276-277.

CARBONNEAU A., 1999b. Actualités et perspectives en agronomie de la vigne en France (nouvelles architectures « Lyre repliable » et « Lyre volume »). C.R. GESCO, 11, 148-170.

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CARBONNEAU A., 2001b. Gestion de l�eau dans le vignoble : théorie et pratique. C.R. GESCO, 12, Journée Professionnelle, 3-22.

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CARBONNEAU A., MONTE R. del, LOPEZ F., OJEDA H., 2004. La Lyre pliable : intérêt écophysiologique de la gestion dynamique de l�absorption du rayonnement ; intérêt technologique pour la mécanisation de la vendange. J.Int.Sci. Vigne Vin, 38(1), 89-95, et C.R. GESCO, 13.

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L’évaluation de la contrainte hydrique : développer des outils pour mieux connaître ses conséquences sur la

qualité de la vendange.

Jean-Christophe PAYAN ITV France, unité de Montpellier

Domaine de Piquet, route de Ganges, 34790 Grabels Tél. : 04 99 23 33 00 – Fax : 04 99 23 33 09 - E_mail : [email protected]

Avant-propos : le projet retenu par ITV France sur la gestion de l’alimentation hydrique est conduit sur l’unité de Montpellier par Jean-Christophe PAYAN et Élian SALANÇON. Les résultats présentés dans cette étude sont le fruit du mémoire d’ingénieur de Kamal KANSOU (ENSAR-ENSAM) co-encadré par Christian GARY (INRA-CIRAD). Les données relatives à l’étude ont été collectées auprès des laboratoires de recherche de l’INRA et du CIRAD ; et auprès des services techniques des Chambres d’Agriculture de l’Aude ; des Bouches-du-Rhône, du Gard, de l’Hérault, du Vaucluse ; du Var ; du SGVRCDR ; du CIRAME et du CIVAM Corse. Introduction

Cela fait plusieurs années maintenant que viticulteurs, techniciens, œnologues et chercheurs tentent d’appréhender les relations entre le régime hydrique de la vigne et la qualité du vin obtenu. L’alimentation en eau du vignoble est un facteur prépondérant de la typicité des terroirs et de la qualité des millésimes. Cette place est en partie liée à son rôle essentiel dans la production de toute culture mais également (et plus particulièrement), à la dimension économique et juridique qu’elle tient dans le monde viticole. En France, est-il encore besoin de le rappeler, l’irrigation des vignes à production de raisin de cuve est réglementée, sinon interdite, par des décrets ministériels. Cette interdiction relève historiquement (1964) de problèmes liés à la surproduction d’une part, mais également du souci de préserver l’expression naturelle des caractéristiques d’un terroir. Cependant, avec le développement de techniques résolument orientées vers l’obtention d’un vin de qualité, l’évolution de la demande du marché économique et les modifications climatiques de plus en plus perceptibles, il est légitime de se questionner sur le bien-fondé d’une telle réglementation en cas de sécheresse grave. Pour illustrer cette idée largement répandue et bien acceptée dans le milieu viticole, il s’agit plus aujourd’hui de développer des techniques de gestion de la contrainte hydrique que de promouvoir une irrigation raisonnée. Pour ce faire, il est indispensable de disposer de méthodes permettant de quantifier fidèlement les niveaux de contrainte, d’une part et de connaître ses répercussions sur les composantes de la vendange d’autre part. L’ITV travaille en collaboration avec l’INRA de Montpellier et les organisations professionnelles viticoles du pourtour méditerranéen pour mettre au point une méthode modélisant l’évolution des réserves hydriques du sol. Ce travail a aboutit à la création d’une base de données représentative de la diversité des situations viticoles méditerranéennes. Dans ce document est proposée une méthode de classification des parcelles et millésimes élaborée à partir d’entretiens auprès des experts méridionaux concernés, ainsi que les premiers résultats illustrant les principales répercussions de la contrainte hydrique sur la qualité de la vendange. La méthodologie retenue permettra de proposer aux organismes agricoles, un protocole simple de suivi de l’intensité de la contrainte hydrique sur un millésime et d’en estimer les conséquences les plus plausibles sur les caractéristiques de la récolte (sous réserve de la pertinence des prévisions climatiques).

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1. Définir l’évolution de la contrainte hydrique du couple « parcelle/millésime ».

Deux démarches peuvent être retenues pour définir la contrainte hydrique en temps réel. La première

repose sur l’utilisation « d’outils de diagnostic de la contrainte hydrique ». Ils consistent à recourir à différents appareillages permettant de mesurer, à un moment donné, l’intensité de la contrainte hydrique d’une parcelle viticole. À titre d’exemple, parmi ces outils figurent des mesures directes sur la plante comme l’utilisation d’une chambre à pression, la mesure de la température foliaire, la micromorphométrie, la fluorimétrie… Ces techniques se veulent précises et instantanées, mais présentent comme inconvénients majeurs une mise en œuvre délicate et une information ponctuelle. Ces défauts font que leur utilisation en routine n’est pas (ou peu) envisageable à grande échelle. D’autres techniques complémentaires consistent à mesurer les caractéristiques hydriques du sol. Il s’agit là de l’utilisation de sondes à neutrons ou de tensiomètres principale-ment. À partir de la connaissance de la teneur en eau du sol, on en déduit le niveau de contrainte hydrique potentielle de la parcelle. La deuxième démarche revient à exprimer des niveaux de contrainte hydrique en regard des caractéristiques climatiques de l’année. La définition d’indices bioclimatiques et le recours à la modélisation sont des alternatives simples, peu précises mais pouvant couvrir une vaste échelle géographique, d’interprétation du niveau global de contrainte du millésime.

Le modèle de bilan hydrique utilisé dans cette étude présente l’avantage de réunir les points forts de chacune des méthodes précédentes. D’un côté, les mesures de la contrainte hydrique sont précises, mais difficiles à mettre en œuvre et ponctuelles. De l’autre côté, la modélisation est peu précise, mais facile d’accès et permettant une actualisation quotidienne. La démarche consiste alors à paramétrer le modèle climatique sur des mesures effectuées à la parcelle (Riou et Lebon, 2000 ; Payan et Salançon, 2002). Pour ce faire, quelques mesures de potentiel hydrique foliaire de base (utilisation d’une chambre à pression) sont réalisées sur la saison, puis on estime l’évolution de la contrainte entre deux points de mesure à partir des données météorologiques (pluie, température et évapotranspiration) (figure 1). L’application du modèle sur une parcelle suppose une première étape d’apprentissage, qui se traduit par l’estimation de la réserve hydrique du sol accessible aux racines. Cette étape d’apprentissage nécessite la mesure du potentiel hydrique foliaire de base de 3 à 5 reprises sur le cycle végétatif pour 1 à 3 années selon la qualité des résultats. À partir de cette phase d’apprentissage, l’utilisation du modèle devient de plus en plus accessible, de simples vérifications du niveau de contrainte hydrique estimé étant nécessaires en cours de saison. Le modèle de bilan hydrique simule ainsi l’évolution de la réserve hydrique du sol en se servant de la plante comme indicateur. Le cœur de la démarche repose sur une relation liant l’intensité de la contrainte hydrique à la quantité d’eau disponible pour la plante (Lacape et al., 1998 ; Lebon et al., 2003 ; Pellegrino, 2003). Cette relation mathématique permet alors d’exprimer le niveau de contrainte hydrique de deux façons différentes : estimation de la quantité d’eau disponible pour la plante dans le sol ou du potentiel hydrique foliaire de base (figure 2). On obtient ainsi une courbe décrivant l’évolution de la contrainte hydrique par sa date d’apparition, sa durée et son intensité. Mise en place depuis 1998, cette démarche a permis de définir les conditions et limites d’utilisation de la méthode, puis de constituer une base de données conséquentes sur la caractérisation de la contrainte hydrique sur différents sols, cépages, climats et millésimes (figure 2). Ce sont ces caractéristiques de la contrainte hydrique qu’il est aujourd’hui nécessaire de confronter aux données qualitatives observées sur le moût au moment de la vendange, pour identifier dans quelle mesure l’outil proposé peut être utilisé pour gérer la contrainte hydrique des vignobles méridionaux. Ce modèle s’applique pour l’instant aux parcelles palissées planes et non enherbées. La prise en compte complémentaire de

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Figure 1 Exemple de bilan hydrique : évolution de la réserve hydrique du sol. Le trait continu représente la valeur simulée à partir des données climatiques.Les points représentent les valeurs mesurées au vignoble.

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facteurs liés au ruissellement de surface et à la transpiration de la culture intercalaire pourrait permettre d’étendre le champ d’exploitation des résultats.

2. Élaboration d’une grille de classement de l’évolution de la contrainte hydrique

En absence de grille généralisable de définition des répercussions de l’intensité de la contrainte hydrique sur la qualité de la vendange, l’avis des différentes personnalités professionnelles (dénommées « experts » ci-avant) travaillant sur la gestion de la contrainte hydrique au vignoble en région méditerranéenne a été recueilli. Une démarche d’enquête a été conduite auprès d’eux pour collecter des informations visant principalement à répondre aux objectifs suivants :

- préciser la méthodologie la plus pertinente pour mesurer la contrainte hydrique ; - définir et quantifier une zone de contrainte hydrique « optimale » ; - identifier les relations directes entre contrainte de la vigne et qualité du raisin.

Trois grandes tendances se dégagent très nettement de cette enquête :

- le potentiel hydrique foliaire de base est la méthode reconnue pour caractériser précisément le niveau de contrainte hydrique en région méditerranéenne ;

- la notion d’évolution de la contrainte hydrique est primordiale pour définir une zone optimale ;

- la définition de la zone optimale est d’une grande similitude entre les différents experts.

La gestion de ces données permet d’aboutir très facilement à un consensus pour définir la grille de classement des niveaux de contrainte hydrique présentée dans la figure 3. Elle combine niveaux de contrainte hydrique et date de survenue de la contrainte. En fonction de l’intensité de la contrainte souhaitable aux stades débourrement, floraison, fermeture de la grappe, véraison, mi-maturité et récolte, les parcours hydriques définis par le modèle peuvent être regroupés en quatre classes dénommées :

- H : humide - Oh : optimal humide - Os : optimal sec - S : sec

La construction de ces classes a été réalisée autour de l’itinéraire hydrique « optimal », lui-même

calculé à partir de la moyenne des valeurs « idéales » de potentiel hydrique foliaire de base proposées par les experts. Les limites des tendances « humide » et « sec » des classes « Oh » et « Os » représentent l'enveloppe des valeurs optimales proposées.

Figure 2 Présentation de la variabilité du jeu de données collecté. Les parcours hydriques sont exprimés en estimant quotidiennement la réserve hydrique du sol (figure de gauche)ou le potentiel hydrique foliaire de base (figure de droite).

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NB : cette grille a été adaptée aux données recueillies pour le grenache et la syrah en production de vin rouge et rendement maîtrisé (inférieur à 60hL/ha). Elle pourra être affinée avec l’adjonction de cépages complémentaires. Deux grilles indépendantes ont initialement été définies (une par cépage), mais leur superposition quasi parfaite permet la proposition d’un classement unique. Par la suite, il est probable que différentes grilles devront être élaborées en fonction des objectifs de production, du type de vin recherché ou du cépage.

3. Relations entre contrainte hydrique et caractéristiques de la vendange

Les différents parcours hydriques recueillis sur le réseau de parcelles ont été positionnés sur la grille de classement (figure 3). L’appartenance d’un parcours hydrique (un couple parcelle/millésime) à une classe a été réalisée par comptage du nombre de jours passés au sein de chaque classe. Les relations entre les classes de contrainte et les caractéristiques de la récolte observées au moment de la vendange sont présentées dans la figure 4. Une analyse de variance accompagnée d’un test de Tukey complète la classification. Les résultats hautement significatifs et reproductibles entre grenache et syrah montrent d’une part le bien-fondé de la définition de la grille de classement sur la base des dires d’experts, et d’autre part la pertinence du modèle de bilan hydrique dans sa dimension descriptive des conséquences de la contrainte hydrique sur la qualité du raisin.

Les effets les plus probants sont observés sur le poids des baies, et les concentrations en sucres et en acides. Bien que l’effet dépréciatif de la contrainte hydrique sur le poids des baies soit progressif, c’est surtout la classe « sèche » qui présente une baisse conséquente de ce paramètre. Les concentrations des moûts en sucres sont surtout discriminées dans les classes extrêmes, alors que l’élévation du niveau d’acidité s’observe essentiellement sur la classe « humide ». Les relations liant contrainte hydrique et teneur en anthocyanes n’ont pu être observées que sur le cépage grenache. Si les différences ne sont pas significatives, la tendance conforte certaines observations bibliographiques (Ojéda, 1999 ; Deloire et al., 2003) qui indiquent un rôle positif d’une contrainte hydrique modérée sur la composition finale des moûts en anthocyanes. La qualité technologique de la vendange est ainsi grandement influencée par le régime hydrique des vignobles. Les effets sont concomitants et significatifs en terme de rendement et de concentrations en sucres et en acides. Un régime hydrique trop humide conduit à des rendements importants associés à une acidité importante. Un régime sec se traduit par une richesse des moûts en sucres élevée, au détriment du poids des baies. Le rapport usuel de définition du niveau de maturité « sucres/acides » témoigne nettement de cette tendance.

Figure 3 Exemple de grille de classement de l’évolution de la contrainte hydrique au vignoble,applicable à un réseau de parcelles de grenache et syrah en région méditerranéenne. D = débourrement ; F = floraison ; V = véraison ; R = récolte ; H = « humide » ; Oh =« optimal humide » ; Os = « optimal sec » ; S = « sec ». + = jeu de données utilisé pour ladéfinition des classes.

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D’un point de vue physiologique, il est également éloquent de constater l’effet du régime hydrique sur le fonctionnement de la plante. Il existe un asynchronisme entre le rendement physiologique et la définition de la qualité technologique de la matière première vinicole, expliqué en grande partie par un effet majoritaire sur le poids des baies. En effet, la quantité de sucres accumulée par baie (figure 4) est un bon marqueur de l’activité végétative en cours de maturation. Il est de ce fait logique de constater un effet dépréciatif du niveau de contrainte hydrique sur ce paramètre, la plante fonctionnant moins bien en présence de contrainte hydrique. Il en va de même avec l’acidité de titration dont l’accumulation dans les baies (notamment l’acide malique) dépend en grande partie des conditions de croissance (Champagnol, 1984), elles-mêmes favorisées dans les classes « humides ». Ainsi, bien que les effets de la contrainte hydrique soit dépréciatifs de ces deux paramètres, l’effet concomitant observé sur le poids des baies compense par des phénomènes de concentration ce manque à la maturité. En d’autres termes, les teneurs en sucres et en acides sont diluées dans les situations humides, et concentrées dans les situations sèches. Le rapport « sucres/acides », comme les résultats de dégustations organoleptiques du produit fini (Jacquet, 2004), concourt à promouvoir l’apparition d’une contrainte hydrique au cours du cycle végétatif, un manque d’eau faisant certainement moins de tort à la qualité qu’un excès d’eau, pour un objectif de production défini.

Figure 4 Relations entre le régime hydrique de floraison à récolte et les caractéristiques de la vendangeobservées sur grenache et syrah. H = régime « humide » ; Oh = régime « optimal humide » ; Os = régime « optimal sec » ; S = régime « sec ».La barre d’erreur représente l’intervalle de confiance à 5%. Les astérisques correspondent à la pertinence dutest de Tukey postérieur à l’ANOVA aux seuils de *=10% ; **=5% et ***=1% ; ns=non significatif.

Teneur en anthocyanes

600650700750800850900

H Oh Os S

mg

/ kg

Grenache ns

Poids de 200 baies

200250300350400450

H Oh Os S

g

Grenache*** Syrah***

aa ab a b a

c b

Concentration en sucres

200210220230240250

H Oh Os S

g / L

Grenache** Syrah ns

aab

abb

Acidité de titration

2,0

3,0

4,0

5,0

6,0

H Oh Os S

g / L

Grenache*** Syrah*

aab

b b

Quantité de sucres par baie

200250300350400450500

H Oh Os S

mg

/ bai

e

Grenache** Syrah**

ababaaaa

b b

Quantité d'acides par baie

3,0

5,0

7,0

9,0

H Oh Os S

mg

/ bai

e

Grenache*** Syrah**

a a

ba

c abc

b

Rapport sucres / acides

405060708090

H Oh Os SGrenache*** Syrah*

c bb ab

aba

ab

a

Production moyenne par cep

0,01,02,03,04,05,0

H Oh Os S

kg /

cep

Grenache** Syrah***

a

bab

aba a

bb

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Conclusion

Ce travail présente une méthodologie permettant de quantifier l’évolution de la contrainte hydrique d’une parcelle sur un millésime. Cet outil de description de la situation viticole peut être associé à une grille prévisionnelle d’éléments caractérisant la récolte avec un degré de confiance élevé. Elle peut être utilisée en routine comme outil d’aide à la gestion de la contrainte hydrique sur des parcelles référencées. À ces fins, l’utilisation du modèle de bilan hydrique passe par une première étape d’apprentissage qui ne permet une connaissance des paramètres propres à la parcelle (coefficient cultural, réserve hydrique…) qu’a posteriori, c’est-à-dire au terme de la saison végétative. Par la suite, le praticien peut, en cours de saison, en confrontant données météorologiques et mesures de potentiel hydrique foliaire de base, porter un diagnostic a priori sur les effets attendus du millésime. De façon pratique et pragmatique, le modèle de bilan hydrique peut être utilisé aujourd’hui pour :

- identifier les situations non problématiques (classe « humide ») ; - interpeller sur les signes avant-coureurs d’une sécheresse (classe « sec ») ; - faciliter et compléter le suivi de parcelles expérimentales.

Cette méthode permet de suivre l’évolution de la contrainte hydrique à grande échelle sur des

parcelles « référence » . En se basant sur un indicateur robuste et reconnu (potentiel hydrique foliaire de base), elle permet d’uniformiser les grilles de lecture de l’évolution de la contrainte hydrique et facilite ainsi les comparaisons inter-vignobles et inter-millésimes. La capacité prédictive de la qualité de la récolte est cependant mineure, la complexité des relations liant plante, sol et climat dans l’expression de la typicité d’un terroir ne permettant pas d’en espérer davantage. Le faible nombre de caractères pris en compte ne prétend pas modéliser la qualité des raisins produits, mais permet cependant d’identifier les paramètres qualitatifs les plus sensibles à l’alimentation en eau.

Par ailleurs, la généralisation des résultats observés sur grenache et syrah doit être vérifiée. Il est probable que différentes grilles de classement seront obtenues en fonction des cépages concernés, du type de vin recherché ou du niveau de rendement espéré.

En attendant une plus grande acuité dans l’exploitation des résultats, la mise en œuvre de la méthodologie présente un avantage certain quant à la caractérisation de la contrainte hydrique pour les organisations professionnelles et une aide au raisonnement des interventions culturales à adopter en conséquence, l’eau n’étant pas l’unique facteur explicatif de la qualité mais y contribuant grandement. Références bibliographiques Champagnol F. 1984 Eléments de physiologie de la vigne et de viticulture générale. Imp. Déhan, 351p. Deloire A., Carbonneau A., Federspiel B., Ojéda H., Wanh Z. et Costanza P. 2003 La vigne et l’eau.

P.A.V., 120, 4 : 79-90. Jacquet O. 2004 Relations vigne-eau en terroir méditerranéen. Rapport DPE, 80p. Lacape M.J., Wéry J. et Annerose D.J.M. 1998 Relationships between plant and soil water status in five

field-grown cotton (Gosstpium hirsutum L.) cultivars. Field Crop Res., 57: 29-43. Lebon E., Dumas V., Pieri P. et Shultz H.R. 2003 Modelling the seasonnal dynamics of the soil water

balance of vineyards. Functionnal Plant Biology, 30: 699-710. Ojéda H. 1999 Influence de la contrainte hydrique sur la croissance du péricarpe et sur l’évolution des

phénols des baies de raisin (Vitis vinifera L.) cv. Syrah. Thèse ENSAM, 144p. Payan J.C. et Salançon E. 2002 Définition de la contrainte hydrique : incidences sur les caractéristiques de

la vendange. Entretiens Viti-Vinicoles Rhône-Méditerranée, éd. ITV France : 6-9. Pellegrino A. 2003 Elaboration d'un outil de diagnostic du stress hydrique utilisable sur la vigne en

parcelle agricole par couplage d'un modèle de bilan hydrique et d'indicateurs de fonctionnement de la plante. Thèse ENSAM, 138p.

Riou C. et Lebon E. 2000 Application d'un modèle de bilan hydrique et de la mesure de la température de couvert au diagnostic du stress hydrique de la vigne à la parcelle. Bulletin de l'O.IV., vol. 73, 837-838 : 755-764.

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La composition isotopique du carbone des sucres, un outil de mesure de la contrainte hydrique pendant la maturation du raisin

Jean-Pierre GAUDILLERE, Philippe PIERI, Cornelis VAN LEEUWEN UMR Œnologie Ampélologie, INRA, ENITA Université Bordeaux 2

BP 81 - 33883 Villenave d’Ornon [email protected]

Le bilan hydrique au vignoble.

Depuis les travaux de Seguin (1975), il a été montré que très généralement un stress modéré de la vigne en été est favorable à la maturation des raisins de cuve. Le statut hydrique de la vigne est une information importante pour le viticulteur. Ce statut hydrique de la vigne est déterminé par l’équilibre entre la ressource en eau du sol et la consommation en eau de la vigne. Elle est liée à l’interception du rayonnement solaire.

Dans une zone climatique donnée, un stress modéré est obtenu en sélectionnant les parcelles viticoles

en fonction de leur réserve utile en eau. Un ajustement fin peut être obtenu en en adaptant la l’architecture du feuillage et l’interception du rayonnement solaire.

Les paramètres qui vont intervenir dans la balance hydrique de la vigne sont donc :

Caractères structuraux • La texture du sol qui détermine la réserve utile • La profondeur d’enracinement de la vigne (volume de sol accessible à la vigne • La surface foliaire installée (hauteur feuillée, épaisseur et porosité pour un palissage vertical).

Caractères climatiques • La demande climatique : évapo-transpiration potentielle (rayonnement solaire, humidité, vent) • La pluviométrie

Caractères physiologiques • Réponse de la vigne au stress, régulation de l’ouverture des stomates

On dispose maintenant de modèles qui prennent en compte l’ensemble de ces paramètres et sont

capables de calculer le niveau de stress hydrique subi par une vigne au cours de son cycle.

Ces modèles s’appuient sur un certain nombre de règles générales qui demandent une validation au cas pas cas. La réserve utile en eau d’un sol est définie entre la capacité au champ (l’eau est librement accessible) et le point de flétrissement (les racines ne sont pas capables d’extraire l’eau du sol sec). Par convention le point de flétrissement de la plupart des espèces cultivées est atteint quand le potentiel hydrique de l’eau du sol atteint –0,15MPa. C’est une valeur approximative pour la vigne.

La profondeur d’enracinement de la vigne est un paramètre extrêmement important pour définir la réserve utile dans une parcelle viticole. Elle est particulièrement difficile à évaluer. Le système racinaire de la vigne est caractérisé par une faible densité, des capacités d’extension importante. Un profil racinaire fournit une information utile. On constate qu'environ 90 % de la masse racinaire d’une vigne adulte se trouve dans le premier mètre de sol. Cependant comment prendre en compte les quelques racines plongeantes observées souvent au fond des fosses.

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La pratique de l’enherbement introduit une complexité supplémentaire. Il faut évaluer la zone de sol explorée par l’herbe et les modifications que l’enherbement provoque sur la distribution du système racinaire de la vigne.

Ces indéterminations font que l’intensité du stress hydrique de la vigne au cours de la saison ne peut être évaluée que de façon moyenne dans une zone géographique donnée (figure 1).

Figure 1 : Exemple de bilans hydriques établis à partir du climat moyen de 3 régions viticoles, méditerranéenne (43051), atlantique (46042) et septentrionale (52055). Les caractéristiques culturales, réserve utile en eau et architecture de la vigne sont identiques. A : variations de la réserve utile en eau au cours de la saison. B : indice de stress calculé, proportion de la demande en eau satisfaite.

À l’échelle de la parcelle, ces modèles doivent être validés par des mesures du statut hydrique de la

vigne. La vigne réagit au déficit hydrique par toute une gamme de réponses physiologiques. La mesure de ces réponses permet d’évaluer le niveau de contrainte subie. Méthodes de mesure de la contrainte hydrique de la vigne :

Les réponses physiologiques des plantes au stress hydrique sont nombreuses. L’alimentation en eau est un facteur essentiel de l’adaptation des plantes à leur environnement. Les réponses concernent toutes les fonctions physiologiques : établissement du potentiel hydrique et osmotique, ajustement de l’ouverture des stomates, croissance des organes. Ces réponses sont associées à des modifications de composition métaboliques et d’activités enzymatiques. De façon pratique on va sélectionner les indicateurs les plus faciles à mesurer et les plus spécifiques aux conditions d’alimentation en eau (Van Leeuwen et al., 2001).

Le potentiel hydrique d’un organe mesure le degré de liaison des molécules d’eau avec les constituants de ce tissu. Ce potentiel décroît avec le niveau de déshydratation des tissus. Classiquement on mesure le potentiel hydrique foliaire. Du fait des alternances jour nuit et du flux transpiratoire associé, ces mesures sont faites la nuit pour stabiliser la mesure et la rendre indépendante des conditions locales (feuille à l’ombre ou à la lumière). Cette mesure est bien représentative du déficit hydrique moyen subi par la vigne à l’échelle de la journée. Elle ne permet pas de rendre compte de l’intensité du déficit en cours de journée. En outre elle ne détecte pas les premières étapes du déficit hydrique lorsqu’il est encore modéré. La mesure de potentiel de tige est réalisée le jour sur une feuille préalablement mise à l’obscurité. Dans ces conditions on accède au statut hydrique global du tronc de la vigne. Cette mesure rend compte du statut hydrique global de la plante. Elle permet de détecter les premières étapes de la mise en place du stress hydrique (Choné et al., 2001). Ces mesures de potentiel sont fiables. Elles sont couramment utilisées pour piloter l’irrigation. Cependant en conditions naturelles le statut hydrique est fluctuant au rythme des précipitations. Si on veut évaluer la moyenne d’une contrainte pendant une phase de développement, il est nécessaire de répéter les mesures pour intégrer toute la période (Myers, 1988).

0

102030405060708090

100

100 150 200 250 300 350jour de l'année

bila

n hy

driq

ue 430514604252055

A 0.0

0.2

0.4

0.6

0.8

1.0

100 150 200 250 300 350jour de l'année

indi

ce d

e st

ress

430514604252055

B

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L’arrêt de croissance de la pousse feuillée est un indicateur du stress hydrique. L’eau est un constituant essentiel de la matière vivante. La vitesse croissance est donc très dépendante de l’alimentation en eau de la plante. La première manifestation du stress hydrique est observée sur la croissance végétative bien avant d’affecter la photosynthèse. La mesure de la vitesse de croissance est donc un bon indicateur, du stress hydrique. C’est une mesure intégratrice. Cependant du fait de sa sensibilité elle discrimine peu les situations de stress intermédiaires et intenses.

Un viticulteur averti peut diagnostiquer un stress hydrique en observant la turgescence des feuilles, leur couleur, leur température. Ces méthodes sont efficaces pour les stress intenses. Mais elles sont peu quantifiables. Des recherches sur les relations entre la température des feuilles et la contrainte hydrique sont en cours. Les appareils de mesures de température foliaire par thermométrie infra rouge sont très pratiques. Mais la difficulté est que la température des feuilles n’est pas spécifique du stress hydrique. Elle est la résultante d’un bilan énergétique complexe qui fait intervenir ses propriétés optiques, son exposition au rayonnement solaire, la vitesse du vent et l’humidité de l’air. La discrimination isotopique du carbone assimilé par la vigne

La plupart des éléments naturels sont représentés par différents isotopes que l’on distingue par leur masse. Les isotopes naturels de l’hydrogène sont au nombre de 2, l’hydrogène proprement dit (1H)et de deutérium (2H). L’oxygène est représenté par l’16O et 18O, le carbone par le 12C (98.9%)et le 13C (1.1%). Les formes isotopiques légères sont plus réactives, elles diffusent plus vite, elles sont préférées par beaucoup de réactions biochimiques. Dès que ces atomes sont en circulation sous forme d’eau (H2O), de CO2 dans un écosystème on observe une discrimination isotopique entre les formes légères et lourdes au passage de l’atmosphère dans les plantes. L’intensité de cette discrimination varie en fonction des caractéristiques des principales réactions impliquées dans le contrôle du flux. La photosynthèse est un processus qui prélève du gaz carbonique dans l’atmosphère et l’incorpore dans la biomasse végétale en le convertissant en sucres. En étudiant la photosynthèse on a observé que la première réaction biochimique, la carboxylation qui convertit le CO2 en sucre est extrêmement discriminante. La forme légère 12CO2 est préférée nettement à la forme lourde, 13CO2. Une plante a un libre accès au CO2 de l’atmosphère, quand ses stomates sont grands ouverts. Elle peut donc choisir les formes légères et on constate un appauvrissement relatif de sa biomasse en 13C par rapport au rapport 12C/13C de l’atmosphère. Par contre lorsque les stomates se ferment les échanges de CO2 entre l’intérieur de la feuille et l’atmosphère sont freinés. L’atmosphère interne n’est plus en équilibre avec l’atmosphère. Elle s’enrichit en forme lourde du CO2 au fur et à mesure que l’enzyme de carboxylation consomme la forme légère. Elle a donc progressivement de moins en moins le choix entre les formes lourdes et légères. La discrimination isotopique (δ13C) diminue. Dans ces conditions les sucres et la biomasse produits ont des compositions isotopiques qui se rapprochent de celles de l’atmosphère. Ce phénomène a été analysé et modélisé en détail par Farquhar et al (1989).

En conclusion, la composition isotopique de la biomasse végétale reflète le niveau d’ouverture

moyen des stomates des feuilles au moment ou elle a été synthétisée. Les stomates sont les structures qui permettent aux plantes d’économiser l’eau en s’opposant à la

transpiration lorsque l’eau du sol est limitante. Le principal facteur qui détermine le degré d’ouverture des stomates est donc le statut hydrique de la plante. Cependant il faut se rappeler que d’autres facteurs peuvent être à l’origine de la fermeture des stomates. La nutrition azotée, des conditions d’irrigation particulières, des caractéristiques génétiques peuvent modifier la conductance stomatique indépendamment du statut hydrique de la vigne. Une étude dans des conditions variées a montré que le facteur hydrique est très prépondérant et rend compte de la variabilité des discriminations isotopiques observées dans les conditions viticoles habituelles (Gaudillere et al., 2002). On note en particulier que le porte-greffe a relativement peu d’impact sur le statut hydrique de la vigne. Comme toute plante pérenne, la vigne équilibre le développement foliaire et racinaire ce qui balance l’offre en eau du sol et la demande climatique. Le statut hydrique de la vigne est donc plus représentatif des caractéristiques structurales du sol (et de sa réserve utile) que de la vigueur observée au vignoble. Par exemple, une vigne qui développe une vigueur aérienne importante ne peut le faire que si le système racinaire est suffisamment développé pour assurer l’alimentation en eau de la vigne. Comment mesure-t-on la discrimination isotopique par la vigne ?

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Les sucres issus de la photosynthèse et stockés dans la biomasse conservent la mémoire des conditions hydriques pendant leur synthèse. Les conditions hydriques journalières peuvent donc être recherchées dans les sucres solubles des feuilles récoltées en fin de journée. Pour intégrer une période plus longue il faut rechercher des sucres stockés à plus long terme. Ce peut être l’amidon dans les bois, la cellulose des parois végétales. Cette propriété est utilisée en archéologie historique pour repérer les années sèches. On prélève soigneusement les cernes des arbres et on mesure la composition isotopique de la cellulose. On peut ainsi remonter plusieurs milliers d’années en utilisant les bois des sites archéologiques datés par les techniques dendrochronologiques.

Dans le cas de la vigne nous bénéficions d’une situation particulièrement favorable pour appliquer cette technique. Les sucres des raisins à maturité sont accumulés spécifiquement à partir de la véraison. Leur signature isotopique est donc très bien définie dans le temps de début août à la récolte. Le viticulteur est particulièrement intéressé par cette période déterminante de la qualité des raisins. La méthode consiste donc à récolter un échantillon représentatif de raisin, d’en extraire un jus qui en moyenne contient 180 à 220 g/l de glucose et de fructose. Après précipitation du bitartrate de potassium et centrifugation, les carbones des sucres en solution sont très majoritaires. Il suffit alors de prélever un échantillon de jus et de faire faire l’analyse isotopique par un laboratoire spécialisé sur l’équivalent de 1 mg de sucre. Applications de la technique :

• Relation potentiel hydrique de base et d13C La figure 2 présente la relation qui relie le potentiel de base mini atteint en été et la composition

isotopique des sucres des raisins à maturité. Cette relation a été établie avec des mesures réalisées sur 3 types de sol, 4 années de mesures et 3 cépages. Le stress hydrique est bien la principale source de variation de la discrimination isotopique (figure 2).

Figure 2 : Relation établie entre le potentiel de base minimal mesuré en été et le δ13C des sucres

des moûts de 3 cépages, cultivés sur 3 types de sol entre 1997 et 2000

• Variations de la discrimination selon les millésimes. Sur la figure 3 on observe les variations de statut hydrique de la vigne en fonction du climat de

millésimes successifs à Bordeaux. On note très clairement les années sèches (1998 et 2000), les années intermédiaires (1999, 2001, 2003) et les années humides (1997 et 2002). L’analyse isotopique des sucres à la vendange permet une classification précise des années sur le critère contrainte hydrique. Il est aussi possible d’établir une classification des parcelles sur ce critère. On observe que les écarts entre parcelles qui différent par leur réserve utile sont plus importants en année sèche qu’en année humide. L’utilisation de cet indice doit donc être répété quelques années pour fournir une information précise. Il peut alors être relié à des propriétés structurales de la parcelle et participer au zonage du domaine.

R2 = 0.95

-26-25-24-23-22-21-20

-1 -0.8 -0.6 -0.4 -0.2 0

Potentiel hydrique foliaire (MPa)

δ13C

1997199819992000

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Figure 3 : Variations interannuelles du δ13C des sucres de raisins prélevés sur 3 types de sols

• Relation entre le δ13C et les bilans hydriques calculés

Les modèles de bilans hydriques qui sont basés sur l’étude du climat et la dynamique du développement de la vigne permettent de calculer un indice de stress. Cet indice défini comme le pourcentage de satisfaction de la demande potentielle de la vigne. Il varie entre 0 et 1, entre une situation de stress intense et une situation d’alimentation en eau non limitante (figure 4). La confrontation des indices de stress calculés et du δ13C des sucres permet de déterminer une réserve utile apparente à la parcelle. On peut alors faire des hypothèses sur la profondeur d’action du système racinaire de la vigne. Dans cet exemple on prévoit une profondeur d’enracinement efficace de 2 m dans le sol graveleux (RU = 174 mm), 1.7 m dans le sol argileux (RU = 210 mm) et 2.7 m dans le sol sableux (RU = 250 mm). Ces évaluations établies sur une observation pluriannuelle d’une parcelle doivent être validées par l’observation de fosses.

Figure 4 : Exemple d’ajustement entre l’indice de stress hydrique calculé et la composition

isotopique des moûts. Le réserve utile des 3 parcelles a été ajustée à partir des mesures obtenues sur 7 millésimes.

-27-26-25-24-23-22-21-20

0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2

indice de stress hydrique

13C

grave argile sable sur nappe

-27

-26

-25

-24

-23

-22

-21

-201996 1998 2000 2002 2004

GraveArgileSable sur nappe

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• Effet de l’enherbement

L’entretien du sol, en particulier le travail superficiel et l’enherbement, sont susceptibles de modifier l’accessibilité de la vigne à l’eau. L’incidence réelle de la présence d’herbe est difficile à prévoir. D’une part l’herbe consomme une fraction de l’eau du sol. D’autre part elle crée une compétition pour l’azote du sol et on constate immédiatement une baisse de vigueur de la vigne. Ceci à pour conséquence de diminuer les besoins en eau de la vigne. Enfin la présence d’herbe déplace le système racinaire de la vigne vers des zones plus profondes, ce qui augmente la réserve en eau accessible par la vigne. L’impact de l’enherbement peut être évalué par une mesure du δ13C de vignes enherbées et désherbées. Nous avons réalisé de nombreuses mesures au vignoble en situation sèche et humide dans différentes régions viticoles. Elles ont rarement montré un effet significatif de l’herbe sur la discrimination isotopique du carbone par la vigne. Notre conclusion est que généralement l’herbe ne modifie pas le statut hydrique de la vigne. Certainement il faudra explorer des situations viticoles plus variées pour confirmer ce résultat qui contredit une appréciation commune sur l’effet de l’herbe. La discrimination isotopique permet d’apporter une réponse précise à cette question. Conclusions

La discrimination isotopique répond à plusieurs questions que peut se poser le viticulteur ou son conseiller. Quelle est la disponibilité en eau de ma parcelle ? Ai-je bien choisi le cépage en fonction de mes objectifs oenologiques (rouge ou blanc, rapport rendement qualité) ? La densité de plantation et le choix de la hauteur de palissage sont-ils adaptés à la ressource en eau de ma parcelle. La mesure isotopique est basée sur un seul prélèvement à la vendange. Elle peut faire l’objet d’un échantillonnage poussé au sein de la parcelle. Elle permet donc de réaliser le zonage des potentialités hydriques des parcelles plantées en vigne d’un domaine. Cette mesure peut conforter une appréciation semi-quantitative basée sur l’expérience et surtout d’évaluer l’importance des écarts entre parcelles. Elle permet aussi d’apporter des réponses dans des situations difficiles à apprécier comme l’effet de l’enherbement, la validation du choix du porte-greffe, la hauteur de palissage par exemple.

Cette méthode ne fournit des réponses sur des vignes en place et donc a posteriori. Elle permet

cependant de valider des choix et participer à des prises de décisions pour adapter la vigne aux caractéristiques structurales de la parcelle. Bibliographie Choné X., Van Leeuwen C., Dubourdieu D. and Gaudillere J.P. 2001. Stem water potential is a sensitive

indicator for grapevine water status. Ann. Bot. 87: 477-483 Farquhar G.D., Ehleringer J.R. and Hubick K.T. 1989. Carbon isotope discrimination and photosynthesis.

Annual Review of Plant Physiology and Plant Molecular Biology 40: 503-537 Gaudillere J.P., Van Leeuwen C.and Ollat N. 2002. Carbon isotope composition of sugars in grapevine, an

integrated indicator of vineyard water status. J. Exp. Bot. 53: 1-7 Myers B.J. 1988. Water stress integral: a link between shot-term stress and long-term growth. Tree Physiol.

4: 315-323 Seguin G. 1975. Alimentation en eau de la vigne et composition chimique des moûts dans les grands crus du

Médoc. Phénomènes de régulation. Conn. Vigne Vin 1: 23-34 Van Leeuwen C., Choné X., Trégoat O. and Gaudillere J.P. 2001. The use of physiological indicators to

assess vine water uptake and to manage vineyard irrigation. Grapegrower & Winemaker Issue 449: 18-24

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Adaptation de la conduite du vignoble : la gestion du rapport feuilles/fruits

Vine training adjustment : managing leaves/fruits ratio

Marie BONNISSEAU (1) - Thierry DUFOURCQ (2)

(1) I.T.V. France - Unité d’Angers - 42, rue Georges Morel - 49070 Beaucouzé (2) I.T.V. France - Unité de Gaillac - Domaine de Mons - 32100 Caussens

Résumé : Des essais de variations de la surface externe du couvert végétal (secv) par rapport au poids de récolte (p) sont menés sur huit cépages palissés de quatre régions viticoles françaises différentes. La variation de cet indice est obtenue par maîtrise de la hauteur de feuillage et du rendement. Les effets sont mesurés à la fois sur vigne, sur moût et sur vin. L’indice secv/p est fortement corrélé avec la discontinuité du feuillage, le taux en alcool volumique potentiel de la récolte, la teneur en anthocyanes des vins finis et ce sur tous les secteurs viticoles et quels que soient les cépages et leur niveau d’alimentation hydrique. Plus l’indice augmente et plus ces paramètres sont de meilleures qualités. Les optima de l’indice sont variables suivant les cépages. Les dégustations confirment qu’atteindre un optimum de l’indice permet de favoriser l’expression de ces paramètres. Ce doit être un objectif dans les stratégies de conduite agronomique de la vigne. Abstract : Variation’s tests of the exposed canopy (secv) on a vertical trellis system associated to different crop load levels (p) are being carried out on eight vine varieties in four different French wine areas. The variation of this leaf/fruit ratio (secv/p) is obtained by controlling the height of foliage and the yield. The effect of this variation is measured on vine, must and wine. The secv/p index is strongly correlated with : the discontinuities of the foliages, the sugar level at harvest time, anthocyanin content on wines in all wine areas (whatever the vine variety and their hydric status). Therefore, the higher the index, the better is the correlation, regarding these three parameters. The optimal index depend on the variety. Tastings confirm that the optimum index supports the best expression of these parameters. This should be an objective of the agronomic vine training strategies. Key words : vertical trellis system, exposed canopy, yield, index secv/p, improving the vine training Mots clefs : vigne palissée en espalier, surface externe du couvert végétal, rendement, indice secv/p, optimisation de la conduite de la vigne

Éléments de bibliographie

Les relations entre feuilles et fruits se caractérisent entre autre au niveau de la plante par la relation source-puits. Une concurrence notable entre développement végétatif et développement reproductif est mise en avant par différentes études.

La compétition par ordre de priorité dans la répartition des produits de la photosynthèse est retranscrite de la façon suivante (CHAMPAGNOL, 1984) : - en période de croissance, priorité à la consommation sur place puis à l’exportation vers l’extrémité des

rameaux et enfin à l’exportation vers les jeunes baies ; - en période de maturation, deux cas peuvent se présenter. Si les vignes sont faibles, la priorité est donnée

à la consommation sur place puis à l’exportation vers les baies et enfin à l’exportation vers les parties vivaces pour la mise en réserve. Un manque de vigueur serait donc néfaste à la maturation. En revanche,

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si les vignes sont vigoureuses, c’est-à-dire que la croissance est maintenue, l’exportation vers l’extrémité des rameaux prime toujours sur celle vers les baies. Un excès de vigueur entraîne donc l’exaltation et le maintien des caractéristiques juvéniles ce qui aboutit au retard des phases de nouaison, véraison et maturation. Une vigueur trop élevée abaisserait de ce fait la qualité de la récolte.

Une charge excessive entraîne (MORINAGA et al., 2000) :

- une baisse de la respiration et de la nutrition azotée au niveau des racines dues à une baisse de la capacité d’absorption de la solution du sol par ces mêmes racines

- une baisse de la croissance en longueur des tiges latérales et l’amoindrissement de la production de nouvelles racines

- une perte en masse des grappes et baies ainsi qu’un abaissement du taux de sucre de ces dernières. Une charge en raisin réduite est donc garante d’une bonne maturation des raisins, donc de la qualité des vins.

La nouaison-véraison est citée comme date charnière de la relation de concurrence feuilles-

fruits (CHAMPAGNOL, 1984 et FOURNIOUX, 1997) ; après cette période, la maturation des grappes prendrait le dessus sur le développement végétatif qui tendrait à s’arrêter, une vigueur trop élevée entravant ce basculement en prolongeant le développement végétatif. La relation entre l’alimentation hydrique et l’architecture de la plante est dans cette période essentielle et conditionne la composition biochimique de la baie (DELOIRE et al, 2003).

Il apparaît que l’optimisation de la surface foliaire assimilatrice de la vigne d’une part et de la charge en raisins d’autre part sont des paramètres pertinents pour obtenir des vins de qualité.

Cette surface foliaire assimilatrice correspond à la surface de feuilles dont le bilan photosynthétique est positif (CHAMPAGNOL, 1984 et ARGILLIER, 1989). Par ailleurs, la relation entre la surface foliaire et le degré de maturité du raisin (taux de sucre principalement) a été soulignée (BOURDE et al., 1997 MURISIER, 1996 et MURISIER et al., 1997). Appuyée sur les principes de mesures de la Surface Foliaire Exposée potentielle (SFEp) proposée par CARBONNEAU (1995), MURISIER (1996 et 1997) a déterminé qu’il faut environ 1 à 1,2 m2 de surface externe de couvert végétal (S.E.C.V.) pour faire mûrir 1 Kg de raisin.

Cette courte bibliographie sur les relations physiologiques et métaboliques entre feuilles et fruits a pour but de parler non plus d’optimisation de la surface foliaire mais d’optimisation du rapport entre surface foliaire assimilatrice et la quantité de raisins produite : c’est le rapport feuilles/fruits ou l’indice secv/p. Contexte de l’étude

Depuis 5 ans, au sein du programme d’expérimentation « optimisation de la conduite de la vigne » d’ITV France , nous avons étudié l’impact de la variation du rapport entre la surface foliaire de la vigne et sa charge en raisins sur la qualité des moûts et des vins.

Ces expérimentations ont été réalisées dans les vignobles de Midi-Pyrénées sur Colombard, Côt, Duras et Négrette, du Languedoc et de l’Ardèche sur Mourvèdre, du Val de Loire sur Grolleau et du Bordelais sur Cabernet-Sauvignon et Merlot.

Cette diversité des localisations permet d’observer les résultats dans différentes situations de cépages, terroirs et climats.

L’objectif de ces essais est de fournir des références techniques fiables aux viticulteurs, aux techniciens de développement, aux organisations professionnelles en charge de la gestion des zones de production.

Les résultats doivent permettre de définir des choix techniques adaptés : − au moment de la plantation à l’échelle des zones de production (AOC, VDP) − au cours de la campagne viticole à l’échelle de la parcelle (chartes de production raisonnée, cahier des

charges de caves coopératives…).

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MONDIAVITI Bordeaux – 1er & 2 Décembre 2004 141

Matériels et méthodes

Le dispositif expérimental mis en place est similaire dans chaque région : un même cépage est étudié sur deux à trois terroirs contrastés afin d’observer des situations variables d’alimentation hydrique, étant entendu que ce paramètre influe considérablement sur la physiologie de la vigne au cours de sa croissance et de la maturation des fruits.

Les différents dispositifs se situent dans des typologies de vignobles de faibles à moyennes densités (3000 - 6000 pieds par hectare) sur vignes en espalier palissées verticalement.

Sur chaque site, on induit une variation du rapport feuille/fruit par la variation de la hauteur de rognage et par la suppression de grappes. On obtient sur chaque parcelle expérimentale entre 4 (2 hauteurs x 2 rendements) et 6 (3 hauteurs x 2 rendements) valeurs d’indice suivant les dispositifs.

La hauteur de la haie foliaire est réglée par un écimage manuel et maintenue de la sorte dès que la croissance du végétal l'impose. L'épaisseur du feuillage est la même pour toutes les modalités d'un même site.

Sur chaque placette élémentaire (même hauteur de feuillage), la moitié des pieds produisent le rendement classique de la zone de production, l’autre moitié est éclaircie à 50% par égrappage manuel au début du stade véraison.

L’estimation de la surface foliaire exposée est réalisée selon la méthode proposée par MURISIER (1996) en mesurant la Surface Externe du Couvert Végétal (figure 1).

L’arrêt de croissance est déterminé par la mesure du niveau de croissance des apex. La contrainte hydrique de la vigne est mesurée au cours de la campagne viticole par des potentiels

hydriques foliaires de base ou de tige (en fonction des régions) grâce à la technique de la chambre à pression décrite par SCHOLANDER et al (1965).

Les principaux constituants du raisin sont analysés au cours de la maturation et au moment de la récolte. Les raisins sont vinifiés selon des modes opératoires normalisés au sein de chaque unité.

Après élevage, les vins obtenus sont dégustés par un collège spécialisé constitué de techniciens et de professionnels. Les composés aromatiques des vins de Colombard (thiols variétaux) sont dosés selon la méthode décrite par SCHNEIDER (2003). Fig. 1 : Calcul de la S.E.C.V. (surface externe du couvert végétal) ; H: hauteur de feuillage (en m) ;

L : largeur de feuillage (en m) ; E : écartement entre rangs (en m) ; D : pourcentage de discontinuité du feuillage.

LL

EE

HHHH

LL

EE

HHHH2xH + L

Ex (1-D)SECV = 2xH + L

Ex (1-D)2xH + L

Ex (1-D)SECV =

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Résultats

! Effet de la hauteur de rognage sur la S.E.C.V.

Les différentes variables pour le calcul de la S.E.C.V. ont été analysées afin de connaître l’impact de chacune d’elle. Si la hauteur est un paramètre maîtrisé et prépondérant, il est intéressant de constater que l’augmentation potentielle de la S.E.C.V. liée à une hauteur de rognage plus élevée est corrigée à la baisse par l’augmentation significative de la discontinuité du feuillage. Ce constat a été réalisé aussi bien sur Duras (Midi-Pyrénées) que sur Grolleau (Anjou) ou Mourvèdre (PACA-LR) (figure 2). En revanche, l’épaisseur moyenne n’est pas significativement modifiée et dans tous les cas ne dépasse pas les 0,5 mètre.

Fig. 2 : Corrélation entre la hauteur de feuillage et l’augmentation de la discontinuité

Si l’augmentation de la hauteur de feuillage a pour effet d’augmenter ponctuellement la discontinuité, cette dernière a aussi l’avantage de favoriser l’aération du feuillage et de permettre un meilleur éclairement des feuilles plus internes. Cette amélioration du microclimat n’est pas sans conséquence sur la qualité des raisins. Il s’agit en revanche de prendre en compte les discontinuités importantes provoquées par des ceps manquants ou un palissage défectueux.

! Indice secv/p et sucre potentiel à la récolte

Les résultats obtenus en Midi-Pyrénées, PACA-LR et Anjou permettent d’observer l’influence de l’indice secv/p sur le taux en alcool volumique potentiel (T.A.V.) à la récolte. Il apparaît de façon évidente que l’augmentation de l’indice favorise l’augmentation du TAV avec des relations fortement significatives.

Toutefois, deux situations sont à distinguer :

− Dans les situations où le climat et les réserves hydriques des sols ne sont pas de réels facteurs limitants, le mode de conduite est primordial. L’effet de la variation de l’indice sur le T.A.V. est constant quel que soit le millésime : plus l’indice est haut et plus le T.A.V. est important (cas du Grolleau en Anjou – figure 3 et cas du Duras à Escabes - figure 5, cas du Colombard à Eauze, cas du Merlot à Saint-Emilion – figure 6). Jusqu’à un indice de 2 m2/kg, on améliore le potentiel des cépages rouges testés, comme observé en Midi-Pyrénées (DUFOURCQ et SERRANO, 2002).

− Dans les situations où le climat s’avère être une contrainte et/ou la réserve hydrique des sols est

faible, l’effet millésime plus que la valeur de l’indice conditionne le niveau de sucre des moûts. Quel que soit le millésime, l’indice le plus élevé entraîne le meilleur potentiel de vendange (cas du Mourvèdre en PACA LR – figure 4, cas du Duras à Frausseille – figure 5, cas du Colombard à Caussens).

R2 = 0,55

R2 = 0,53

R2 = 0,78

0%

5%

10%

15%

20%

25%

30%

0,5 0,7 0,9 1,1 1,3 1,5 1,7

hauteur en m

% d

e t

rou

s

Duras - Midi Pyrénée 200 à 2002

Grolleau - Anjou 2002 à 2004

Mourvèdre - PACA LR 1999 à 2003

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MONDIAVITI Bordeaux – 1er & 2 Décembre 2004 143

Fig. 3 : Corrélation entre l’indice secv/p et le titre d’alcool volumique potentiel à la vendange sur le

secteur d’Angers entre 2001 et 2003 dans trois situations de sol différentes–Cépage Grolleau Parcelle 1 : sol superficiel - Parcelle 2 sol intermédiaire - Parcelle 3 : sol profond

Fig. 4 : Corrélation entre l’indice secv/p et le titre d’alcool volumique potentiel à la vendange sur le

secteur de Nîmes entre 1999 et 2003 pour une même parcelle – Cépage Mourvèdre L’année 2002 a été supprimée en raison d’un problème de pourriture acide ayant affecté profondément la récolte.

R2 = 0,90

R2 = 0,83

R2 = 0,80

8

9

10

11

12

13

14

0 2 4 6 8 10 12 14

rapport feuilles/fruits en m2/kg

TA

V %

vo

l.

Parcelle 1

Parcelle 2

Parcelle 3

R2 = 0,94

R2 = 0,92

R2 = 0,98

R2 = 0,88

10

11

12

13

14

15

0,4 0,6 0,8 1 1,2 1,4 1,6 1,8

rapport feuilles/fruits en m2/kg

TA

V %

vo

l.

1999

2000

2001

2003

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MONDIAVITI Bordeaux – 1er & 2 Décembre 2004 144

Fig. 5 : Corrélation entre l’indice secv/p et le titre d’alcool volumique potentiel à la vendange sur le

secteur de Gaillac entre 2000 et 2002 pour deux parcelles – Cépage Duras Escabes : parcelle à forte réserve hydrique Frauseille : parcelle à faible réserve hydrique

Fig. 6 : Corrélation entre l’indice secv/p et le titre d’alcool volumique potentiel à la vendange sur le

secteur de Bordeaux entre 2000 et 2003 – Cépage Merlot Une parcelle de Saint-Emilion

R2 = 0,85

R2 = 0,82

R2 = 0,78

R2 = 0,21

R2 = 0,89

8

9

10

11

12

13

14

0,5 0,7 0,9 1,1 1,3 1,5 1,7 1,9 2,1 2,3 2,5

rapport feuilles/fruits en m2/kg

TA

V %

vo

l.

2000 Escabes

2001 Escabes

2002 Escabes

2000 Frausseille

2001 Frausseille

R2 = 0,67

11

12

13

14

0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5

rapport feuilles/fruits en m2/kg

TAV

% P

ot

Données 2000à 2003

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MONDIAVITI Bordeaux – 1er & 2 Décembre 2004 145

! Indice secv/p et acidité à la récolte

L’indice secv/p n’influence pas la teneur en acidité des moûts. Aucune corrélation stable pour aucun des secteurs géographiques étudiés n’est mise en évidence.

! Indice secv/p et anthocyanes sur vins

L’influence de l’indice secv/p est observée sur la teneur en anthocyanes (méthode de Stownstreet) sur vins finis. Plus l’indice est élevé et plus la teneur en anthocyanes est importante. À noter qu’il n’apparaît pas de relation significative entre la progression de l’indice et le taux d’anthocyanes sur baies à la récolte.

Ces résultats observés sur l’ensemble des sites étudiés (figures 7 à 9) sont d’autant plus intéressants qu’ils sont optimisés par une augmentation de l’indice au même titre que la teneur en sucre. De ce fait, les durées de macérations pré-fermentaires pour les vinifications en rouge peuvent être adaptées pour optimiser la couleur.

Ces corrélations sont de même observées avec l’indice de polyphénols totaux et l’intensité colorante sur vins finis.

! Indice surface foliaire – poids de récolte et qualité aromatique du Colombard en Midi-Pyrénées

De récentes avancées dans la connaissance des précurseurs d’arômes de type thiols variétaux ont

montré la présence dans les feuilles de ces composés mettant ainsi en avant la quantité de feuillage comme organe source et pourvoyeur potentiel des moûts (PEYROS, 2000). Certains thiols, le 3-mercapto-hexanol (3MH) et l’acétate de 3-mercapto-hexile (A3MH), contribuent fortement à la typicité des vins de Colombard. Nous avons profité du dispositif expérimental en place pour étudier l’effet de la variation du rapport entre la surface foliaire totale (sft) et le poids de récolte (p) sur la quantité de ces arômes obtenus dans les vins.

Il apparaît que la relation entre la quantité d’arômes dans les vins et la variation de l’indice sft/p s’établit différemment en fonction de la contrainte hydrique pour les deux composés d’odeurs responsables du bouquet des vins de Colombard (figure 10).

Fig. 10 : Évolution du nombre d’unités d’odeur (concentration en arôme / seuil de perception) de

vins de Colombard en fonction de la variation de l’indice sft/p (Surface Foliaire Totale /Poids de récolte) ; millésime 2001, 2002, 2003 ; 3MH : 3-Mercapto-Hexanol, odeur de pamplemousse, fruits tropicaux ; A3MH : Acétate de 3-Mercapto-Hexile, odeur de buis et fruits exotiques

Globalement, la quantité de thiols variétaux retrouvée dans les vins augmente lorsque l’indice

s’accroît. Ces résultats ne se confirment pas en 2003, l’effet millésime (canicule) a fortement pénalisé le

potentiel en arôme variétal et domine l’effet mode de conduite, dans ce cas particulier. Ce dispositif a été reconduit en 2004.

indice feuille/fruit, contrainte hydrique forte et concentration en A3MH des vins de Colombard

R2 = 0,7925

0

50

100

150

200

0,50 1,50 2,50 3,50 4,50 5,50

sft/p en m²/kg

unit�

s d'

odeu

r

2003

2001-2002

indice feuille/fruit,contrainte hydrique faible et concentration en 3MH des vins de Colombard

R2 = 0,6425

05

1015202530354045

0,50 1,50 2,50 3,50 4,50 5,50 6,50sft/p en m²/kg

unité

s d'

odeu

r

2003

2001-2002

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MONDIAVITI Bordeaux – 1er & 2 Décembre 2004 146

! Indice secv/p et dégustations

Les effets parcelles et millésimes sont très importants.

De ce fait, si les modalités à indice élevé ne sont pas chaque année les mieux appréciées à la dégustation, il ressort néanmoins les points suivants : − en Anjou, si les Grolleau sont visuellement mieux jugés, ils n’apparaissent pas toujours comme bien

équilibrés ni bien notés à l’olfaction. Les modalités à indice faible ne sont pas toujours les moins appréciées par rapport à celles à indices intermédiaires. Les synthèses de dégustation sur plusieurs années (figure 11 A – une parcelle) tendent à montrer que les modalités à indice fort ne se démarquent pas négativement.

− en PACA-LR, les Mourvèdres tendent à avoir une expression florale et fruitée plus intense et moins d’amertume sans que la différence soit toutefois significative.

− en Midi-Pyrénées, les indices élevés sont mieux appréciés sur parcelle à faible contrainte hydrique (figure 11 B).

La chaptalisation de certains vins masque les différences observées sur moûts.

Les résultats montrent donc la difficulté d’obtenir des vins équivalents, les effets parcelles et

millésimes étant importants. Il apparaît toutefois que les vins issus des indices les plus forts ressortent majoritairement plus positivement.

Fig. 7 : Corrélation entre l’indice secv/p et la teneur en anthocyanes sur vins finis sur le secteur

d’Angers entre 2001 et 2003 dans trois situations de sol différentes – Cépage Grolleau Parcelle 1 : sol superficiel - Parcelle 2 sol intermédiaire - Parcelle 3 : sol profond

R2 = 0,70

R2 = 0,69

R2 = 0,33

R2 = 0,61

0

20

40

60

80

100

120

140

160

180

0 0,5 1 1,5 2 2,5

indice secv/p en m2/kg

an

tho

cyan

es

en

mg

/L

2000 2001

2002 2003

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MONDIAVITI Bordeaux – 1er & 2 Décembre 2004 147

Fig. 8 : Corrélation entre l’indice secv/p et la teneur en anthocyanes sur vins finis sur le secteur de

Nîmes entre 1999 et 2003 pour une même parcelle – Cépage Mourvèdre L’année 2002 a été supprimée en raison d’un problème de pourriture acide ayant affecté profondément la récolte.

Fig. 9 : Corrélation entre l’indice secv/p et la teneur en anthocyanes sur vins finis sur le secteur de

Gaillac entre 2000 et 2002 pour deux parcelles – Cépage Duras Escabes : parcelle à forte réserve hydrique Frauseille : parcelle à faible réserve hydrique

R2 = 0,91

R2 = 0,86

R2 = 0,5218

300

350

400

450

500

550

600

650

0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1 1,1 1,2 1,3 1,4

indice secv/p en m2/kg

an

tho

cyan

es

en

mg

/L

2000

2001

2003

R2 = 0,53

R2 = 0,38

R2 = 0,64

R2 = 0,38

600

700

800

900

1000

1100

1200

1300

1400

1500

0,5 1 1,5 2 2,5 3

indice secv/p en m2/kg

an

tho

cyan

es

en

mg

/L

2000

2001

2002

2003

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Fig. 11 : Résultats de dégustation

A : comparaison des indices le plus faible (< 0,7) et le plus fort (>1,4) sur 2000 à 2002 sur parcelle à sol superficiel en Anjou B : comparaison des indices le plus faible (<1) et le plus fort (>2) sur Escabes en 2002

Conclusion

Ces années d’études sur une diversité importante de régions, de cépages, de situations de parcelles mettent en avant des pistes intéressantes pour la gestion agronomique des parcelles par l’indice secv/p. Les résultats seront repris dans une synthèse nationale en 2005 dans laquelle sera proposé un abaque adapté aux caractéristiques viticoles régionales, qui résumera et prendra en compte les objectifs des productions locales et les contraintes d’appellation.

Des trois variables qui contribuent au calcul de l’indice secv/p nous considérons que : − L’écartement entre les rangs est le meilleur paramètre pour faire varier de façon importante la surface

foliaire. − La hauteur de feuillage participe également dans des limites tant physiologiques que matérielles à cette

gestion. # Ces deux critères peuvent et doivent être pris en compte dès la plantation.

− Sur vigne en place, la maîtrise du rendement est le meilleur moyen d’optimiser l’indice.

L’indice secv/p est à adapter en fonction des cépages et des régions : − Pour favoriser l’augmentation du T.A.V. et la couleur des vins vinifiés en rouge, un indice supérieur à

1,5 m2/kg semble nécessaire. − Augmenter encore l’indice ne pénalise ni le T.A.V. ni la couleur et peut même s’avérer optimal sur

certains cépages. − Les vins issus des indices élevés se distinguent également en dégustation.

L’alimentation hydrique de la vigne est un facteur qui influence la relation entre l’indice secv/p et les indicateurs de qualité du moût : − Les parcelles sous contrainte hydrique, sont gérées avant tout par cette contrainte, l’effet millésime est

prononcé ; toutefois, le mode de conduite influence les paramètres viti-vinicoles de façon non négligeable mais non constante.

− Sur les parcelles en conditions hydriques moins limitantes, le mode de conduite, à travers cet indice, devient un outil de gestion agronomique important car stable quels que soient les millésimes.

0

1

2

3

4

5

6

7qualité globale

intensité des arômes

qualité olfactive

complexité olfactive

note fermentairenote végétale

note florale

note fruitée

intensité olfactive

0

1

2

3

4

5

6

7Intensité colorante

Qualité aromatique-Nez

Sucrosité / Gras

Acidité

Amertume

Qualité aromatique

Note végétale

Note fruité

Quantité de tanins

Qualité des tanins

Persistance

Note d'ensemble

Indice secv/p faible

Indice secv/p fort

A B

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Remerciements : Nous remercions tous les viticulteurs qui ont participé aux actions et qui nous ont mis leurs parcelles à disposition. Références bibliographiques ARGILLIER J.P., (1989), Interdépendance des facteurs de qualités, CA de l’Hérault, 55p. BOURDE L., BAGARD A., SALVA G., RAOULX-PANTALACCI N., VALLEE D., LAVERGNE C., SERPENTINI M-

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Estimation de l’impact du changement climatique sur les résultats agronomiques de la vigne avec le modèle STICS.

Iñaki GARCÍA DE CORTÁZAR ATAURI, Nadine BRISSON, Bernard SEGUIN INRA, Unité Climat Sol Environnement

Site Agroparc, domaine St-Paul, F-84914, Avignon cedex 9, France. E_mail : [email protected]

1. Introduction

Les perspectives d’évolution du climat, à cause de l’émission de gaz à effet de serre d’origine anthropique, ont des conséquences sur l’évolution probable des productions agricoles (IPCC 2001, Perarnaud et al. 2003). Les prévisions, issues des modèles climatiques globaux, se sont affinées et ont gagné en fiabilité ces quinze dernières années, ce qui permet de conduire des études d’impact, en particulier dans le domaine agricole. Il semble à présent bien établi que la température moyenne va augmenter (l’ampleur de l’augmentation étant liée à nos capacités de régulation des émissions de gaz à effet de serre) et que les écarts de pluviométrie entre nord et sud de la France d’une part et entre saisons d’autre part, vont s’accentuer (Planton, 2003).

Les impacts attendus sur la vigne sont ceux généralement attendus sur les systèmes à couverts

végétaux pérennes (Seguin et Garcia de Cortázar, 2004). Ainsi la plante sera directement concernée par l’augmentation de la concentration atmosphérique en CO2,. La stimulation de photosynthèse liée à cette augmentation devrait atteindre 20 à 30 % (dans l’hypothèse d’une concentration double de celle des années 90, soit environ 700 ppm de CO2), suivant les cultures et les conditions de milieu. L’augmentation résultante de biomasse sera de 15 à 20 %, compte tenu de l’augmentation de la respiration induite par l’augmentation de température. Par ailleurs, l’efficience d’utilisation de l’eau devrait être augmentée (de l’ordre de 10%), par suite de l’augmentation de la résistance stomatique. Le cycle phénologique sera modifié à cause de l’accélération de la vitesse de développement en réponse à l’augmentation des températures. Il est probable qu’un équilibre agrophysiologique différent de l’actuel se mettra en place, conduisant à revoir l’ensemble des pratiques culturales.

Des indices de plus en plus nombreux montrent que le réchauffement climatique a déjà

commencé (Seguin et Stengel, 2002) en accord avec les prédictions des modèles climatiques globaux (Planton, 2003). Ainsi, l’augmentation de température moyenne française au cours du siècle passé est de l’ordre de 0.9°C (Moisselin et al. 2002), plus particulièrement focalisée sur la dernière décennie (de 0.4 à 0.6°C). Comme en écho à ce réchauffement, les manifestations phénologiques des cultures pérennes ont été plus précoces, qu’il s’agisse des dates de floraison (avancée de l’ordre de deux à trois semaines en trente ans, aussi bien pour la vigne que pour les arbres fruitiers), ou des dates de vendange qui ont avancé de presque un mois en cinquante ans, aussi bien dans le Médoc que dans les Côtes-du-Rhône (Ganichot 2002), sans que cela puisse s’expliquer par les pratiques culturales.

Pour relier ces deux éléments climatique et physiologique, il existe des outils agroclimatiques

plus ou moins élaborés. L’indice de Huglin (1978) est un outil très simple, basé uniquement sur la température qui, cependant, donne déjà des résultats significatifs. Ainsi les travaux de Seguin et Garcia de Cortázar (2004) et Duchêne (2004), montrent que l’évolution récente du climat actuel (plus chaud et régulier) se traduit par des valeurs de l’indice plus favorables à la production viticole, comme l’attestent des informations des milieux professionnels sur l’augmentation de la teneur en sucre et la baisse de l’acidité au cours de cette période. Cette analyse de l’indice de Huglin montre également une

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tendance claire à approcher, sinon dépasser, les limites d’adaptation des cépages aux zones climatiques tels qu’ils étaient définis à partir du climat du passé, supposé stationnaire. Ce dernier point nous interpelle sur le possible déplacement des aires actuelles de répartition des cépages (Schultz, 2000, Seguin et Garcia de Cortázar, 2004).

Pour assurer une certaine crédibilité aux études d’impact, il importe de pouvoir prendre en

compte l’ensemble des réactions biophysiques des éléments du système sol-climat-cépage-techniques culturales à la modification des facteurs du climat et à l’élévation du C02 Si l’on peut prévoir que les modifications majeures vont concerner la phénologie, le bilan carboné et le bilan d’eau, il y a aussi des éléments plus subtils, tels que le risque que peut représenter pour la qualité du vin en milieu méditerranéen l’avancée de la maturation vers les périodes plus chaudes de l’été (Lebon 2002). Compte tenu de la complexité des modifications, induites par le changement climatique dans les interactions au sein du système viticole , il semble pertinent d’utiliser un modèle de culture mécaniste, pouvant être forcé par des variables d’entrée provenant des scénarios climatiques produits par les modèles globaux.

L’objet de cette communication est de présenter une étude d’impact du changement climatique, réalisé avec le modèle STICS-Vigne pour deux régions viticoles d’intérêt représentant les AOC Champagne et Côtes-du-Rhône Méridionales (CRM). Une première partie sera consacrée à l’explication du fonctionnement du modèle, une seconde partie décrira le protocole de simulation et la dernière partie sera consacrée aux résultats présentés par grandeur agrophysiologique.

2. Matériel et méthodes 1) Le modèle STICS-vigne

Les modèles de cultures, qui se sont développés depuis une vingtaine d’années, offrent un cadre conceptuel permettant de calculer les éléments de production comme résultant des interactions dynamiques entre la plante, le sol, le climat et les techniques culturales à l’échelle parcellaire. Cependant l’essentiel des efforts de modélisation s’est fait sur les grandes cultures (Brisson et al., 1998) et peu de choses existent sur la vigne (Bindi et al., 1996 a et b). À l’INRA, depuis 1996, nous développons un modèle de culture générique s’appuyant sur de nombreuses plantes modèles, dont la vigne (Brisson et al., 2002b). Nous donnons ci-après quelques éléments clés du fonctionnement du modèle adapté à la vigne.

STICS est un modèle dynamique, à pas de temps journalier, qui simule le comportement du

système sol-culture au cours d’une année, afin d’estimer à la fois des variables agricoles (rendement, qualité, consommation d’intrants) et environnementales (pertes d’eau et de nitrate). Pour cela, il prend en compte les variables climatiques standard (températures maximales et minimales, pluies, rayonnement, ETP ou éventuellement vent et humidité) et les variables représentatives du sol/sous-sol.

La vigne est appréhendée globalement par sa biomasse aérienne (rameaux, feuilles et grappes)

et sa teneur en azote, l’indice foliaire ainsi que le nombre de baies, leur biomasse et leur teneur en sucre. Le sol est assimilé à une succession de couches horizontales, chacune de ces couches étant caractérisée par sa réserve en eau, en azote minéral et organique. Les interactions entre le sol et la culture sont assurées par les racines, celles-ci étant définies par une distribution de densité racinaire dans le profil de sol.

La croissance de la culture est réalisée par l’interception du rayonnement solaire par le

feuillage puis transformation en biomasse aérienne qui est orientée préférentiellement vers les baies à partir de la nouaison. Le bilan azoté de la culture est simulé parallèlement au bilan de carbone, dont il dépend en partie. L’existence éventuelle de stress hydrique et azoté est prise en compte au travers d’indices, calculés dans les bilans hydrique et azoté, qui peuvent réduire la croissance foliaire et l’accumulation de biomasse en conditions d’alimentation limitante. La vigne est une culture

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indéterminée, c’est-à-dire que la compétition trophique entre les feuilles et les baies est un élément moteur de la production de la culture et de sa conduite.

La teneur en CO2 de l'atmosphère agit à la fois sur l'efficience de conversion de l'énergie solaire en biomasse (augmentation avec le taux de CO2) et sur la transpiration (réduction de la conductance stomatique et donc de la transpiration avec l'augmentation du CO2).

Le débourrement est calculé à partir de l’intégration du modèle BRIN (Garcia de Cortázar et al., 2004) qui calcule la date du débourrement (stade C de Baggiolini) à partir de la combinaison du modèle de Bidabe (une somme d’actions froid) et du modèle de Richardson (somme de températures horaires). Les autres stades phénologiques (floraison, véraison, récolte) sont calculés à partir du principe de sommes de degrés-jours en base 10 (température base déterminée pour la vigne).

La teneur en sucre du raisin est décomposée en deux variables calculées indépendamment : la teneur en sucre de la masse sèche d’une part et la teneur en eau du raisin d’autre part. Une dynamique hydrique de la baie est simulée à partir de la véraison. Elle s’appuie sur la différence de température entre la culture et l’air, qui diminue la teneur en eau du raisin.

Les variables d’intérêt pour notre étude, simulées à l’aide du modèle concernent :

♦ la phénologie : levée de dormance, débourrement, floraison, véraison et récolte ♦ le bilan de carbone de la pante : biomasse totale et indice foliaire à la récolte ♦ la vendange : matière fraîche et sèche des fruits récoltés et leur teneur en sucre. ♦ les réserves hivernales

Le modèle STICS-vigne fait actuellement l’objet d’un paramétrage détaillé s’appuyant sur un

réseau national de sites expérimentaux dans le cadre d’une collaboration entre l’INRA et les organismes professionnels viticoles. Par conséquent, la version du paramétrage utilisée pour cette étude est essentiellement générique, en particulier la spécificité des cépages n’intervient que sur la phénologie et la taille potentielle des baies.

2) Choix des situations viticoles et protocoles de simulation

Nous avons choisi deux régions très différentes, le département du Vaucluse (84) pour représenter l’AOC Côtes-du-Rhône Méridionales et le département de la Marne (51) pour représenter l’AOC Champagne. Les cépages utilisés son Grenache (CRM) et Pinot Noir (Champagne).

Le département de Vaucluse (84) est dominé par un climat typiquement méditerranéen. Il se définit par un hiver doux et humide et une période estivale aux températures élevées et aux faibles précipitations. Les températures moyennes varient régulièrement entre 10°C l'hiver et 25°C en été. Il faut noter qu'on compte en moyenne 20 jours où la température moyenne est supérieure à 30°C.

Le climat de la Marne est un climat océanique de transition. La légère continentalisation se caractérise par des pluies convectives estivales et une amplitude thermique annuelle dépassant 15°C. La répartition moyenne des précipitations en cours d'année est relativement homogène. La température moyenne annuelle est voisine de 10°C sur l'ensemble du département. En hiver, le nombre moyen de jours avec une température inférieure à 0°C est de 60. L'été est relativement contrasté avec une moyenne de 43 jours où la température dépasse 25°C sous abri.

Les itinéraires techniques sont typiques de chaque région et les parcelles sont supposées non enherbées, non fertilisées et bien contrôlées en ce qui concerne les adventices et maladies. Le premier rognage est simulé à la floraison et les rognages successifs sont réalisés en fonction de la croissance du feuillage ainsi contrôlée. Ni éclaircissage, ni effeuillage sont supposés être pratiqués mais la charge laissée est différente selon la région et le type de conduite : 15 grappes dans le cas du Grenache en Côtes-du-Rhône et 20 grappes dans le cas de la Champagne. La taille est réalisée à la fin de l’année.

Les sols choisis sont aussi représentatifs de chaque région : pour la région des Côtes-du-Rhône, une terrasse ancienne du Rhône, sol caillouteux avec une texture limoneuse-sableuse ; pour la région du Champagne, un sol à bonne perméabilité avec une texture sablo-argileuse, moyennement calcaire et apparition de la craie à 60 cm de profondeur.

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Les données climatiques utilisées pour ce travail sont issues des simulations réalisées avec le modèle ARPEGE-Climat, modèle de circulation générale construit à partir du modèle de prévision opérationnelle de Météo France. Les séries d'années simulées correspondent aux périodes « actuelles » (1960-1989) et « futures » (2070-2099), dont la composante « actuelle » a été validée (Gibelin et Déqué, 2001 ; Diaz, communication personnelle). La période des années entre 1960-1989 correspond à la situation avant la manifestation du changement climatique (360 ppm de CO2), ce n’est pas la période présente qui, comme nous l’avons vu, se trouve déjà dans la dynamique du changement.

La période des années entre 2070-2099 prend en compte les concentrations annuelles des

principaux gaz à effet de serre prévues par le scénario SRES-B2 du GIEC (IPCC, 2001a). Ce scénario fait l’hypothèse d’un accroissement modéré, dans lequel la concentration de gaz carbonique atteint le double de sa concentration préindustrielle à la fin du XXI siècle (610 ppm de CO2). Les caractéristiques principales de ce nouveau climat sont une augmentation de la température de 2.6°C , une augmentation des pluies hivernales et printanières et une diminution des pluies estivales provoquant une augmentation des déficits hydriques pendant la saison de végétation de la vigne.

Nous avons décidé de travailler directement avec les deux séries simulées, afin de préserver la logique physique entre les variables du climat. L’autre possibilité aurait été de travailler par « anomalies », en extrayant des comparaisons simulations futures/actuelles, les écarts sur les variables climatiques mensuelles – ou les rapports selon les variables- et en les appliquant à des séries réelles. Mais cette méthode induit une perte de cohérence entre les variables physiques du climat. 3. Résultats

• La phénologie Avec l’option choisie dans le modèle, la vendange est supposée intervenir à une valeur

prescrite de teneur en eau des baies. Cette valeur a été fixée à 77% pour les Côtes-du-Rhône Méridionales et 80 % pour la Champagne. Certaines années, les conditions climatiques ne permettent pas d’atteindre ces valeurs ; dans ces cas, une date butoir de vendange est imposée au 10 octobre pour les Côtes-du-Rhône Méridionales et au 30 octobre en Champagne.

Figure 1 : Évolution des stades phénologiques.

Phenologie

10/1 4/2 29/2 25/3 19/4 14/5 8/6 3/7 28/7 22/8 16/9 11/10 5/11

Dormance

Débourrement

Floraison

Véraison

Récolte

Stad

es

Dates

Champagne ActuelCRM actuelChampagne FutureCRM Future

20/1210/12

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Les simulations du modèle montrent que le réchauffement climatique provoque un raccourcissement du cycle et une avancé de tous les stades phénologiques sauf la levée de dormance (figure 1). Si la différence entre nos deux régions, Champagne et CRM, n’apparaît pas pour le débourrement, c’est parce que les besoins en chaleur entre la levée de dormance et le débourrement, spécifiques du cépage comme les besoins en froid, sont tels qu’il y a une sorte de compensation calendaire. La vigne sort plus tard de dormance (plus tard en Côtes-du-Rhône qu’en Champagne), mais la somme de températures entre la dormance et le débourrement correspond à une durée plus courte (moins en Champagne qu’en Côtes-du-Rhône), à cause de l’augmentation de la température moyenne dans cette période.

Les variations moyennes par région entre les simulations passées et les simulations futures sont synthétisées dans le tableau 1 : Tableau 1. Comparaison des stades phénologiques obtenus avec les deux séries de données

climatiques

CRM actuel

CRM future

Différence Fut-Act

Champagne actuel

Champagne future

Différence Fut-Act

Levée de dormance 6–déc. ± 4 17-déc ± 3 +9 jours 2–déc. ± 5 15-déc ± 4 +13 jours

Débourrement 6-mai ± 9 15-avril ± 8 -21 jours 6-mai ± 10 15-avril ± 10 -21 jours

Floraison 27-juin ± 8 7-juin ± 7 -20 jours 6-juil ± 9 17-juin ± 8 -19 jours

Véraison 29-août ± 13 31-juil ± 7 -29 jours 24-sept ± 24 13-août ± 12 -41 jours

Récolte 26-sept. ± 11 27-août ± 8 -30 jours 15-oct ± 17 5-sept ± 13 -41 jours

Il semble que le raccourcissement des phases phénologiques concerne surtout la phase levée

de dormance-débourrement et la phase floraison-véraison. Cette dernière est particulièrement importante en Champagne (40 jours en moyenne contre 30 dans les CRM). De plus, la variabilité interannuelle de ces résultats est toujours plus faible pour le scénario futur. Ces résultats confirment et complètent ceux annoncés par Lebon (2002) et Seguin et Garcia de Cortázar (2004).

1. Le bilan de carbone de la plante Pour étudier l’évolution du cycle du carbone, nous avons simulé la matière sèche totale et

l’indice foliaire (LAI) à la récolte (résultats tableau 2).

Tableau 2. Comparaison des résultats obtenus sur les variables du bilan du carbone avec les deux séries de données climatiques

CRM actuel

CRM future

DifférenceFut-Act

Champagne actuel

Champagne future

Différence Fut-Act

Biomasse sèche totale (t/ha)

6.55 ± 0.68 6.24 ± 0.9 -0.31 6.57 ± 0.7 6.60 ± 1.06 0.03

LAI 0.83 ± 0.46 1.52 ± 0.34 0.69 1.24 ± 0.56 1.52 ± 0.56 0.28

Nous observons, une perte de biomasse sèche totale dans les Côtes du Rhône Méridionales et

une absence de modification en Champagne. Ces résultats, qui semblent contradictoires avec la stimulation de la photosynthèse par l’augmentation du CO2 ,, s’expliquent par plusieurs raisons :

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1. un raccourcissement du cycle de la vigne. L’analyse de la phénologie a déjà montré auparavant qu’il existe un raccourcissement du cycle très important, qui diminue la période pendant laquelle la plante intercepte du rayonnement et fabrique de la biomasse.

2. l’augmentation de la température. L’optimum thermique journalier pour la photosynthèse se situe entre 18 et 23 °C, en deçà et au-delà de ces seuils la photosynthèse est réduite. Or le scénario climatique futur correspond à une augmentation de la température moyenne de 2°C entre la floraison et la véraison. En CRM il est probable que cette augmentation provoque des situations supra-optimales pour la photosynthèse et donc défavorables à l’accumulation de biomasse. Au contraire, en Champagne, région où la photosynthèse est actuellement le plus souvent sub-optimale, cette augmentation permet d’accroître les périodes de fonctionnement optimal.

3. l’augmentation des stress. La mise en place plus rapide de l’indice foliaire combinée à la diminution des précipitations estivales peut créer des situations de déficit hydrique supplémentaires ou des intensités plus grandes des déficits actuels. Nous observons un accroissement de l’indice foliaire à la récolte dans les deux régions, facteur qui joue un rôle important sur la production, tant en quantité qu’en qualité (Riou, 1994). Compte tenu de la compétition feuilles/fruits, cette croissance végétative supplémentaire peut se faire au détriment des fruits. Tel n’est pas le cas dans nos situations simulées car nous avons introduit le rognage dans les deux régions d’étude. Cela met toutefois en lumière la nécessaire prise en compte des techniques culturales dans ce genre d’étude d’impact. .

2. La vendange Nous avons étudié le rendement (en matière fraîche et matière sèche) et la quantité de sucre

accumulée dans les baies à la récolte, dont la date est déterminée par la teneur en eau des baies (cf. paragraphe sur la phénologie) (tableau 3).

La tendance représentée par l’évolution entre les deux séries climatiques, « passée » et « future », semble assez réaliste. Elle montre par exemple que dans le cas de la série « passée », 1 année sur 4 (résultats en dynamique non illustrés dans ce papier) le raisin n’atteint pas la maturité requise à la vendange pour la période « actuelle » ou que la notion de maturité a changé. Cette proportion correspond également à des vendanges déclenchées en fonction de contraintes climatiques (pluies, baisses des températures…) ou sanitaires (mildiou, botrytis…). Pour la période « future », le modèle estime que l’accumulation de sucre dans les baies sera suffisante, tous les ans, pour déclencher la vendange sur des critères physiologiques.

La diminution du rendement dans la région des Côtes-du-Rhône Méridionales est liée à la difficulté de la plante à remplir ses fruits, à cause du raccourcissement de la période entre la floraison et la récolte (dix jours en moyenne) et des fortes températures entre la floraison et la véraison. De plus, la possibilité de vendanger toutes les années à un optimum de qualité (77% d’eau dans les baies correspondant à 13° dans le cas des CRM) génère une perte de rendement et une augmentation de la concentration en sucre.

L’adoucissement du climat dans la région du Champagne, même s’il crée un raccourcissement de la période de remplissage, ne provoque pas de perte de rendement en matière sèche à cause sans doute de l’effet photosynthétique, qui ici est suffisant pour compenser l’impact phénologique. En revanche, la perte de rendement en frais existe aussi et s’explique de même par la vendange plus tardive, si on l’exprime dans le calendrier physiologique, avec une moindre teneur en eau des fruits et des concentrations en sucre plus importantes.

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Tableau 3. Comparaison des résultats obtenus sur les variables de la vendange avec les deux séries de données climatiques

CRM actuel

CRM future

DifférenceFut-Act

Champagne actuel

Champagne future

Différence Fut-Act

Rendement (t/ha) 13.65 ± 3.5 10.24 ± 2.59 -3.65 18.54 ± 6.5 15.7 ± 4.25 -2.84

Biomasse sèche des fruits (t/ha) 3 ± 0.46 2.39 ± 0.61 -0.61 3.15 ± 0.6 3.18 ± 0.86 0.03

Sucre (g/l) 195 ± 8 219 ± 0 24 168 ± 8 194 ± 1 26

3. Les réserves

Le rôle des réserves de la plante est fondamental dans la reprise de végétation au printemps.

Après le débourrement, la jeune tige se développe et forme les jeunes feuilles qui vont tout d’abord constituer des puits d’utilisation des réserves carbonées.

Le modèle montre une forte augmentation des réserves dans la région des Côtes-du-Rhône. L’adoucissement du climat à l’automne et l’avancement de la période des vendanges peuvent être la cause de cette augmentation des réserves.

Par contre, dans la région de Champagne, le modèle simule des quantités des réserves très faibles. La sévérité du climat automno-hivernal dans la région ne facilite pas leur accumulation. Par contre, nous observons une augmentation (faible) de l’accumulation des réserves dans le futur grâce à l’adoucissement de la température.

Tableau 4. Comparaison des résultats obtenus sur les réserves avec les deux séries de

données climatiques

CRM actuel

CRM future

DifférenceFut-Act

Champagne actuel

Champagne future

Différence Fut-Act

Réserves (t/ha) 1.76 ± 0.53 2.45 ± 0.71 0.69 0.01 ± 0.01 0.05 ± 0.11 0.04

Conclusion

Ce travail a permis de réaliser une première approche des possibles impacts du changement

climatique, à l’aide du modèle STICS-vigne. Les résultats obtenus sont très variés. Dans certains cas, nous observons une confirmation des hypothèses déjà exprimées dans d’autres travaux : avancement du cycle de la vigne, raccourcissement de la période entre la floraison et la récolte, amélioration de la qualité de la récolte (toujours en assimilant la qualité de la récolte à l'accumulation de sucre). Cependant, de nouvelles questions apparaissent quant à la gestion de la surface foliaire et sa concurrence avec le rendement ou quant à la gestion des réserves d’une année sur l’autre.

Ce travail préliminaire s’inscrit dans le cadre d'une thèse qui cherche à étudier les impacts du

changement climatique dans différentes régions viticoles françaises : Côtes-du-Rhône Méridionales, Bourgogne, Champagne, Val de Loire, Cognac, Bordeaux et Languedoc. Au-delà du constat des impacts, l’objectif est d’analyser la capacité d’adaptation de différents cépages et des techniques culturales aux possibles modifications du climat.

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Maturité phénolique : Mesure et adaptation de la vinification

Yves GLORIES, Cédric SAUCIER Faculté d’œnologie, UMR Œnologie - Ampélologie 1219

Université Victor Segalen Bordeaux2, 351 cours de la Libération, 33405 Talence France Tél 05-40-00-64-85 ; Fax 05-40-00-64-68 ; email : yves.glories@œnologie.u-bordeaux2.fr

Introduction Dans le but d’obtenir des vins rouges de grande qualité, une attention particulière doit être accordée aux composés phénoliques pendant la maturation du raisin. Parmi les divers composés présents, les tanins et les anthocyanes sont particulièrement importants au niveau quantitatif et qualitatif. Les tanins sont responsables du « bon » vieillissement du vin et participent à son goût (Ribéreau-Gayon et Stonestreet 1966, Haslam 1980, Prieur et al. 1994). Les anthocyanes, extraites à partir du raisin (Ribéreau-Gayon 1964), sont responsables de la couleur du vin jeune. À partir de ces composés, de nouveaux pigments se forment ensuite progressivement pendant le vieillissement (Somers 1971, Vivar-Quintana et al. 2002). Il est donc particulièrement important de suivre l’évolution de ces composés pendant la maturation des raisins afin d’orienter les vinifications. Ceci nécessite des mesures quantitatives mais également qualitatives.

1) Évolution quantitative et qualitative des composés phénoliques pendant la maturation.

Sur le schéma 1, nous avons représenté l’évolution « idéale » des tanins et des anthocyanes dans le raisin pendant la maturation. Après véraison, les anthocyanes s’accumulent dans la baie jusqu’à ce qu’un maximum soit atteint et diminuent ensuite. Ce déclin correspond à une période de surmaturation accompagnée d’un arrêt de synthèse de ces molécules et au début de leur dégradation. Ce maximum est observé seulement si les conditions sont favorables (terroirs, conditions climatiques), ce qui n’est pas toujours le cas. En outre il ne coïncide pas toujours avec la maturité technologique (maximum S/AT).

La quantité de tanins des pellicules augmente également jusqu’à un maximum avant de diminuer

(début de la surmaturation) quand les conditions sont favorables ; en fait leur quantité est bien corrélée avec celle des anthocyanes. En effet la synthèse des anthocyanes est accompagnée par celle de nombreux composés phénoliques, en particulier les tanins. Tout se passe comme si les anthocyanes étaient des marqueurs de la synthèse des constituants phénoliques de la pellicule. Cette propriété est employée dans la méthode Glories (partie 2) pour calculer la teneur issue des pépins.

Les tanins des pellicules sont généralement considérés comme de « bons tanins » ; leur réactivité vis-

à-vis des protéines diminue pendant la maturation ; celle-ci est mesurée par l’indice de gélatine. Cette baisse dépend des conditions du millésime ; elle est faible si la maturation est difficile ; les tanins des pellicules sont encore agressifs, généralement amers ; elle est importante quand les conditions sont bonnes, les tanins sont pleins et souples, ils sont responsables de la structure tannique et du charnu du vin. L’évolution des caractéristiques des tanins de pellicules semble être liée à la synthèse des sucres ; un degré potentiel supérieur à 12% est en relation avec des tanins de pellicules peu amers ; c’est l’inverse pour des volumes inférieurs à 12%.

La quantité de tanins de pépins diminue généralement pendant la maturation des raisins. On ne sait pas

dans l’état actuel de nos connaissances, si leur quantité diminue réellement ou s’il s’agit simplement d’une modification de leur solubilité et de leur extractibilité. De toutes façons cette diminution est favorable à la qualité du vin, car les tanins des pépins sont généralement agressifs avec une réactivité élevée vis-à-vis des protéines plus ou moins forte selon le degré de maturation du raisin.

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AnthocyanesAnthocyanesTpelliculesTpellicules

T pépinsT pépins

Quantité

Tempsvéraison

Figure1. Évolution schématique des composés phénoliques pendant la maturité

2) Mesure de la maturité phénolique

En tenant compte de ces phénomènes, notre laboratoire a développé une méthode pour la maturité

phénolique du raisin (« Méthode Glories »). Les échantillons (au moins 200 baies) sont broyés deux minutes dans un mixer et séparés en deux lots. On effectue alors deux macérations à pH différent.

- Une première macération à un pH voisin de 1, favorise la dégradation cellulaire et permet d’extraire un maximum de composés phénoliques, en particulier les anthocyanes qui diffusent facilement.

- La deuxième macération est à pH 3,2 proche des pH du moût et du vin. Dans ces conditions plus modérées, seuls les composés facilement extractibles sont libérés.

Après macération et filtration, les analyses suivantes sont effectuées : solution pH 1 ! dosage des anthocyanes ; solution pH 3,2 ! dosage des anthocyanes et mesure de l’absorption à 280 nm (RPT).

A pH1 ! quantité d’anthocyanes (en mg x l-1) dans la solution pH 1 . On considère qu’elle représente la

richesse anthocyanique du raisin ; elle est fonction du terroir, du cru, du mode de culture et des conditions de la synthèse…. Elle peut varier de 700 à 2400.

A pH 3,2 ! quantité d’anthocyanes (en mg x l-1) dans la solution à pH 3,2 . Cette valeur correspond aux

molécules les plus facilement extractibles en conditions douces voisines de la vinification. PAE! [A pH 3,2) ] x 100 représente le Pourcentage des Anthocyanes Extractibles.

A pH1

Il est fonction de la dégradation des membranes des cellules de la pellicule…. En général en relation avec la surmaturation. Il augmente pendant la maturation jusqu’à une valeur limitée qui semble être fonction des conditions climatiques, sa valeur varie de 20 à 80%. RPT ! (d280 de la solution à pH 3,2) x 100 représente la Richesse Phénolique Totale. Cet indice est voisin de l’indice de phénols totaux (IPT) du vin correspondant. MP ! exprimé en pourcentage, représente la contribution des tanins de pépins à la richesse phénolique totale (RPT). Il est obtenu par la relation MP=[RPT– (ApH3,2 x 40)]x100 RPT où : ApH 3,2 est exprimé en g/l

40 correspond à un coefficient moyen (dpellicule) x100 = 40

A (g/ l) Ces paramètres sont utilisés par l’œnologue pour fixer la date des vendanges et guider la vinification.

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3) Adaptation de la vinification

Sachant que les anthocyanes sont extraites en début de vinification et en particulier en phase aqueuse et peu alcoolisée, les valeurs de ApH1 et de PAE sont indispensables pour adapter la technologie correspondante (SO2, température, temps, enzymes, ∆P…) . Si ApH1 est élevé (> 1200) il est tout à fait possible d’obtenir des vins riches en anthocyanes. Quand A pH1 est inférieur à 1000 (raisins pas mûrs attaqués par Botrytis cinerea… ou en surmaturation importante dans les zones chaudes), le problème est relativement plus complexe.

Les tanins des pellicules, situés dans des cellules plus difficiles à extraire, sont solubilisés tout le

long de la cuvaison. Attention aux caractères amers susceptibles de passer dans le jus lors des remontages si le raisin n’est pas très mûr.

Les tanins des pépins sont extraits en phase alcoolique. Le contact du jus et du marc (remontages,

pigeages, lessivage, immersion….) favorise cette solubilisation. Ce sont des molécules indispensables à la structure du vin et à la stabilité de la couleur. Si la quantité est trop faible < 50%, le vin manque de charpente et la couleur évolue rapidement ; si elle est trop forte > 60% (Pinot, Tempranillo, Sangiovese, éventuellement Merlot), le vin présente une astringence manifeste, difficile à modifier. La valeur de Mp est très utile pour orienter la fréquence et l’intensité des remontages ainsi que la température de cuvaison. La macération post-fermentaire permet une extraction supplémentaire du matériel végétal. Elle favorise par la température et le temps, la modification de structure des différents tanins et conduit à des vins charnus, pleins et relativement souples, dans la mesure où les polysaccharides interviennent pendant cette période. Conclusion La maturité phénolique est un paramètre utile pour l’Œnologue impliqué dans la production de vin rouge de qualité. Nous avons développé une méthode permettant d’obtenir des informations à la fois quantitatives et qualitatives des composés phénoliques des raisins. À l’avenir, avec l’aide de nouvelles techniques telle que la Spectroscopie Infrarouge à Transformée de Fourier, nous espérons diminuer le temps d’analyse et permettre un accès rapide et précis de ces données. Bibliographie Haslam E., 1980. In Vino Veritas : Oligomeric procyanidins and ageing of red wines. Phytochemistry, 19 :

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Composantes de la couleur du vin rouge en vinification et en élevage

Benoît LABARBE* ŒNODEV

32400 Maumusson-Laguian +33 5 62 69 85 74, +33 5 62 69 87 02F, http://www.oenodev.com

*Remerciements à ITVFrance / SICAREX Beaujolais (unité de Villefranche-sur-Saône) et INRA Montpellier (dans le cadre de la thèse de Vessela ATANASOVA) pour leurs contributions respectives à ce travail.

Introduction

L’évolution de la couleur du vin rouge pendant la vinification peut être suivie par des paramètres analytiques simples fondés sur des mesures spectrophotométriques UV-Visible : Intensité Colorante (IC), Teinte (T)… Ces critères sont utiles pour réaliser un suivi descriptif mais ne permettent pas d’approfondir l’explication des phénomènes en jeu.

Nous proposons ici un protocole analytique simple adapté au suivi de la couleur du vin au cours de la

vinification et de l’élevage. Nous illustrerons son application par deux exemples : la macération préfermentaire à chaud et l’élevage par micro-oxygénation. Les évolutions de la couleur sont interprétées grâce aux évolutions de ses composantes dont on peut quantifier l’importance relative. Protocole d’analyse

Les analyses sont réalisées sur moût ou sur vin clarifié par centrifugation, et filtration si nécessaire. Le protocole, récemment décrit (1), met en œuvre un ensemble de mesures d’absorbances à 520nm dans différentes conditions et une analyse HPLC des anthocyanes natives (Tableau ). Le pH est également mesuré.

Les paramètres obtenus donnent des indications sur la couleur du vin et ses composantes : nature des pigments (2, 8), coefficient d’ionisation des anthocyanes (7), phénomène de copigmentation (5, 6)… Il est possible de définir des bilans qui peuvent être suivis au cours de la vinification (Tableau I).

Tableau I. Conditions de mesure des absorbances à 520nm. Les valeurs obtenues sont exprimées pour une dilution de 1 et sous un trajet optique de 10mm (notées E520nm).

E520nm Conditions de mesure[1] mesure (1mm) directe sans ajout[2] mesure (1mm) après ajout de 0.02vol. CH3CHO (solution à 12.6%v/v)[3] mesure (1mm) après ajout de 0.02vol. SO2 (solution à 13.5%w/v)[4] mesure (1-10mm) après ajout de 9vol. HCl (solution à 2%w/v)

[5]mesure (10mm) après ajout de 0.02vol. CH3CHO (solution à 12.6%v/v) et de 9vol. H2O (ajustement du pH par NaOH ou HCl 0.5N)

[6] calcul de l'absorbance équivalente (10mm) des anthocyanes libres quantifiées par HPLC

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Tableau I. Composantes de la couleur (calculées d’après les mesures) et bilans (CV, PT, PD).

Paramètre ExpressionAnthocyanes Colorées [AC] [AC] = [5] - [3]Pigments Polymériques [PP] [PP] = [3]Copigmentation [C] [C] = [2] - [5]Anthocyanes Natives [AN] [AN] = [6]Anthocyanes Dérivées [AD] [AD] = [4] - [3] - [6]Anthocyanes Incolores [AI] [AI] = [4] - [5]Couleur du Vin [CV] [CV] = [2], [CV] = [AC] + [PP] + [C]Pigments Totaux [PT] [PT] = [4], [PT] = [AN] + [AD] + [PP]Pigments Décolorables [PD] [PD] = [4] - [3], [PD] = [AC] + [AI]

Vinification par macération préfermentaire à chaud

La matière première provient de cépage Gamay Noir (Beaujolais, millésime 2002). Elle a été vinifiée par une technique de macération préfermentaire à chaud (MPC), technologie proche de la thermovinification : 65°C pendant 12h, refroidissement à 25°C, levurage, 2.5 jours de macération en fermentation alcoolique avant décuvage, pressurage et fin de fermentation alcoolique des jus assemblés à basse température (4).

Le suivi des composantes de la couleur a été réalisé régulièrement, de l’encuvage à la fin de la fermentation alcoolique (FFA), notamment un jour après levurage (J+1), après décuvage, pressurage et assemblage des jus (DEC), en fin de macération (M+1h) et après refroidissement (REF). Élevage par micro-oxygénation

La matière première est un assemblage Cabernet-Sauvignon/Tannat (60/40 v/v, Madiran, 1999) au stade FFML. Le vin est réparti en 2 × 3 cuves cylindriques de 3 hl adaptées pour la micro-oxygénation du fait de leur hauteur : 3 cuves servent de répétitions pour le vin témoin, qui ne subit aucun traitement particulier, et 3 cuves répétées pour la modalité micro-oxygénée (dose constante pour les besoins de l’essai : 5 ml/l-1.mois-1). Les vins sont analysés au début de l’élevage, après 1 mois et 7 mois, terme du suivi. Résultats

! Macération préfermentaire à chaud (Figure I)

L’évolution de la couleur est marquée par quatre phases : une extraction importante pendant la macération à chaud du moût, une chute très prononcée le premier jour de FA, une augmentation plus lente jusqu’au décuvage et une diminution en FFA. L’extraction des pigments polymériques est forte au début de la macération et modérée ensuite. En revanche, les évolutions de AC et C sont très intéressantes. Pendant la macération à chaud, ces deux composantes augmentent de manière identique. Puis la forte chute à J+1 est attribuable en majeure partie à une diminution du phénomène de copigmentation (85% en moyenne). Pendant la macération alcoolique, AC augmente plus vite que C et les deux chutent en FFA. Ce résultat concorde avec ce que l’on connaît du phénomène de copigmentation (6, 7). En effet, à rapport anthocyanes/copigment donné, ce phénomène est maximum en absence d’alcool : il n’est donc pas étonnant de le voir diminuer fortement en début de FA. Un changement dans la force ionique du vin (précipitation de bitartrate de potassium) pourrait également expliquer cette chute de copigmentation.

L’étude du bilan des pigments apporte des informations supplémentaires sur la nature des supports

de couleur : pendant la macération à chaud, ce sont les anthocyanes natives qui sont extraites en majorité. La chute de couleur à J+1 ne se traduit pas par une chute de pigments totaux mais on assiste à une diminution des anthocyanes natives alors que les anthocyanes dérivées augmentent.

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0

1

2

3

4

5

6

7

8

9

25/9 27/9 29/9 1/10 3/10 5/10 7/10 9/10 11/10 13/10date

E 520

nmCVACPPC

M+1h

DEC

FFA

J+1

REF

(a)

0

2

4

6

8

10

12

14

16

18

20

25/9 27/9 29/9 1/10 3/10 5/10 7/10 9/10 11/10 13/10date

E 520

nm

PTANPPAD

M+1h

DEC

FFA

J+1REF

(b)

Figure I. Évolution type des bilans et de leurs composantes en macération préfermentaire à chaud.(a) Couleur du Vin, (b) Pigments Totaux.

! Micro-oxygénation Le Tableau II reprend les valeurs moyennes des composantes de la couleur calculées au cours du

suivi. La couleur du vin diminue moins en micro-oxygénation ce qui traduit une stabilisation de celle-ci au cours du temps. D’abord la plus élevée proportionnellement, la copigmentation devient le terme le moins important à mesure que le vin évolue alors que la part des pigments polymériques ne cesse d’augmenter : les anthocyanes et les copigments sont remplacées par des pigments plus stables chimiquement. Ceci est confirmé par le bilan des pigments qui montre une part plus importante de pigments polymériques et d’anthocyanes dérivées avec le temps, et ce, de façon plus prononcée pour la micro-oxygénation. Les coefficients d’ionisations (AC%/PD), liés au pH, restent stables et similaires entre les lots témoins et les lots micro-oxygénés.

Tableau II. Bilans des composantes de la couleur en élevage (termes du bilan en % du total)

MOD STADE CV AC% PP% C% PT AN% AD% PP% PD AC% t0 21.3 38% 19% 43% 41.8 56% 35% 10% 37.7 22%

Témoin 1 mois 13.9 41% 28% 30% 39.3 55% 35% 10% 35.3 16% 7 mois 11.9 38% 40% 22% 29.2 51% 33% 16% 24.4 19% t0 21.3 38% 19% 43% 41.8 56% 35% 10% 37.7 22%

Micro 1 mois 14.2 40% 30% 31% 39.3 56% 33% 11% 35.1 16% 7 mois 12.5 38% 43% 19% 28.9 44% 38% 18% 23.5 20%

Conclusion

La mise en œuvre d’un protocole simple d’analyse de la couleur du vin permet de suivre de manière

détaillée les évolutions de couleur au cours de divers procédés technologiques de vinification ou d’élevage. Il est possible d’interpréter les évolutions de couleur et de pigments totaux comme la somme de différentes composantes. Le phénomène de copigmentation semble jouer un rôle majeur dans la couleur du vin et son évolution au cours de la vinification et de l’élevage. La prise en compte de ce paramètre, avec les autres composantes présentées ici, permettrait une meilleure compréhension des évolutions de la couleur du vin et des facteurs susceptibles de l’affecter. Références bibliographiques (1) Atanasova V., Fulcrand H., Cheynier V. et Moutounet M., 2002. Analytica Chimica Acta, 458: 15-27. (2) Bakker J., Preston N. et Timberlake C., 1986. American Journal of Enology and Viticulture, 37: 121-126. (3) Berger J.-L., 1992. Industrie delle bevande, 21: 285-291. (4) Berger J.-L. et Cottereau P., 1999. Actes du XXIV Congrès Mondial de la Vigne et du Vin – OIV, Mayence. (5) Boulton R., Neri R., Levengood J. et Vaadia M., 1999. In: OEnologie 99: 35-38. (6) Boulton R., 2001. American Journal of Viticulture and Enology, 52: 67-87. (7) Brouillard R., Mazza G., Saad Z., Albrecht-Gary A. et Cheminat A., 1989. Journal of Chemical Society, 111: 2604-2610. (8) Somers C. et Evans M., 1977. Journal of the Science of Food and Agriculture, 28: 279-287.

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Utilisation d’un nouvel outil d’estimation du potentiel aromatique des raisins - Cas pratique du melon B.

Frédéric CHARRIER, ITV France ITV France, unité de Nantes - Château de la Frémoire - 4 120 Vertou, France

[email protected] Problématique

Comme pour toutes les variétés dites « neutres » [1], les composés aromatiques des raisins de melon B. sont présents dans les baies sous forme liée, essentiellement à des sucres : ce sont des glycosides [2]. Ces derniers sont formés d’un ose et d’un aglycone (composé aromatique) liés par une liaison de type β-glucosidique, l’ensemble formant un précurseur d’arômes. Celui-ci est inodore en l’état mais susceptible au cours des procédés de transformation, par voie chimique voire enzymatique, de générer des composés fortement odorants [3]. Dans le cas présent, la fraction aromatique appartient principalement aux familles des monoterpènes et des C13-norisoprénoïdes, avec formation notamment de β-damascénone.

L’analyse du potentiel aromatique présent dans les raisins est réalisée couramment en laboratoire de recherche. Sa mise en œuvre reste malgré tout complexe et nécessite matériels et compétences spécifiques. En tout état de cause, la méthodologie employée est incompatible avec la réalisation de dosages en routine indispensables pour répondre à une large demande.

Une méthode, appelée glycosyl-glucose ou G-G et fondée sur la structure chimique des glycosides des raisins (présence équimolaire de glucose et d’aglycone), a été développée en Australie par l’Australian Wine Research Institute (AWRI). Cette technique analytique reste malgré tout globale, voire imprécise [4]. Aussi, considérant que la détermination du potentiel aromatique des raisins présentait a priori un réel intérêt, en particulier pour le technologue, il est apparu opportun de mettre en place un procédé rapide d’évaluation des précurseurs glycosidiques dans le raisin. Utilisant la spectroscopie infrarouge à Transformée de Fourier (IRTF), un tel dosage serait ainsi envisageable au sein de laboratoires de transfert à vocation œnologique, avec une réelle capacité d’analyse en temps réel des échantillons [5, 6, 7]. Présentation de la méthode d’évaluation du potentiel aromatique du melon B.

L’analyse est mise en œuvre à partir d’un échantillon de raisins (baies intègres) et se décompose en deux étapes :

− La première, automatisable, est une phase d’extraction sélective de la fraction glycosidique. − La seconde concerne l’acquisition d’un signal IRTF à partir de l’extrait précédent.

L’interprétation des résultats du spectre est effectuée à partir d’un modèle prédictif spécifiquement

établi pour le cépage melon B. Celui-ci découle des corrélations statistiques entre les données quantitatives obtenues par un dosage classique en chromatographie en phase gazeuse/spectrométrie de masse et les spectres acquis par IRTF sur les mêmes extraits glycosidiques issus d’échantillons de raisins présentant une grande variabilité.

Les erreurs de prédiction enregistrées à ce jour avec cette méthode dite « rapide » sont de l’ordre de la précision de la méthode de référence pour les familles d’aglycones C13-norisoprénoïdes et monoterpènes (principales dans le cas du melon B.).

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L’évaluation du potentiel aromatique des raisins par IRTF est donc opérationnelle en pratique pour le cépage melon B., avec un appareillage en partie disponible dans bon nombre de laboratoires œnologiques. Applications pratiques de la méthode d’évaluation du potentiel aromatique du melon B.

• Suivi d’un réseau de parcelles La méthode rapide d’évaluation du potentiel aromatique par IRTF a été appliquée à des échantillons

de raisins de melon B. à maturité technologique et issus d’un réseau de parcelles de vignes présentant des potentialités viticoles contrastées.

Aucune corrélation nette n’est mise en évidence entre d’une part les teneurs en glycosides C13- norisoprénoïdes et monoterpènes et d’autre part les paramètres oenologiques classiques tels la richesse en sucres des baies et leur acidité de titration (Figures 1 et 2).

0

100

200

300

400

500

150 160 170 180 190 200

Sucres (g/l)

µg/l

C13-norisoprénoïdes monoterpènes

Figure 1 : Relation entre la concentration en sucres et les teneurs en précurseurs glycosidiques dans les raisins de melon B. à la récolte, millésime 2001 - Essais ITV France

0

100

200

300

400

500

4,0 4,5 5,0 5,5 6,0 6,5

Acidité totale (g H2SO4/l)

µg/l

C13-norisoprénoïdes monoterpènes

Figure 2 : Relation entre la concentration en sucres et les teneurs en précurseurs glycosidiques dans les raisins de melon B. à la récolte, millésime 2001 - Essais ITV France

La mesure du potentiel glycosidique constitue donc une information supplémentaire pour caractériser les vendanges au moment de la récolte. L’intérêt paraît évident pour les centres de vinification traitant de multiples apports de vendange, aux origines géographiques variées.

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• Caractéristique du millésime

Sur plusieurs années, la détermination du potentiel glycosidique a été mise en œuvre sur plusieurs

parcelles ciblées (Figures 3 et 4). Les différences entre millésimes, notamment pour les C13-norisoprénoïdes, sont particulièrement significatives. Cette mesure paraît être une méthode objective de caractérisation globale et précoce d’un millésime donné.

0

100

200

300

400

µg/l

parcelle A parcelle B parcelle C

1999 2000 2002 2003

Figure 3 : Effet du millésime sur les teneurs en précurseurs glycosidiques de la famille C13-norisoprénoïdes dans les raisins de melon B. à la récolte – Essais ITV France

0

100

200

300

400

500

600

µg/l

parcelle A parcelle B parcelle C

1999 2000 2002 2003

Figure 4 : Effet du millésime sur les teneurs en précurseurs glycosidiques de la famille des monoterpènes dans les raisins de melon B. à la récolte – Essais ITV France

• Contrôle de l’état de maturité des raisins

Des mesures du potentiel glycosidique ont été effectuées simultanément au suivi classique de maturité des baies de melon B. dans différentes situations viticoles (Figures 5 et 6). Au cours de la maturation des raisins, le potentiel aromatique des baies évolue. Cette dynamique n’est pas rigoureusement corrélée avec les autres paramètres (sucres, acides).

De ce fait, de manière similaire au suivi du potentiel polyphénolique des variétés rouges, la mesure du potentiel aromatique des raisins blancs est un indicateur supplémentaire susceptible d’être considéré dans le choix de la date optimale de récolte.

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0

100

200

300

400

500

600

T T + 6j T + 12j

µg/l

0

50

100

150

200

g/l o

u m

eq/l

C13-norisoprénoïdes monoterpènessucres acidité totale

Figure 5 : Évolution de la teneur en glycosides au cours de la maturation des raisins de melon B.,

exemple parcelle A millésime 2002 – Essais ITV France

0

100

200

300

400

500

600

T T + 6j T + 12j

µg/l

0

25

50

75

100

125

150

175

200

g/l o

u m

eq/l

C13-norisoprénoïdes monoterpènes sucres acidité totale

Figure 6 : Évolution de la teneur en glycosides au cours de la maturation des raisins de melon B., exemple parcelle C millésime 2002 – Essais ITV France

• Outil de pilotage de la vinification

Les exemples précédemment cités illustrent des applications concrètes concernant l’application de la méthode rapide d’évaluation du potentiel aromatique du cépage melon B. Toutes aboutissent à une meilleure connaissance de la composition des raisins.

Il est ainsi concevable d’adapter les procédés technologiques en cave au potentiel aromatique des raisins récoltés. Dans le cas de la production de Muscadet, deux voies d’élaboration sont schématiquement imaginables, pour deux types de produits distincts.

! 1er cas : le potentiel glycosidique des raisins récoltés est faible. L’objectif est de produire un vin à consommer dans l’année, où l’arôme issu de la fermentation

alcoolique (esters de fermentation, composés soufrés tel 3-mercapto hexanol) est prépondérant. Pour cela, les étapes technologiques suivantes seront privilégiées :

- extraction rapide des jus - conditions de fermentation alcoolique propices à la formation d’arômes fermentaires (choix de la

levure, profils thermiques) - protection des arômes formés durant la conservation : lutte drastique contre l’oxydation après

fermentation alcoolique (inertage lors des transferts de vin, élevage sur lies), conservation en cuve à basse température

- conditionnement précoce.

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! 2ème cas : le potentiel glycosidique des raisins récoltés est important. L’objectif est de produire un vin à consommer de manière différée (type « vin de semi-garde »), en

cherchant à valoriser le potentiel aromatique intrinsèque des raisins : - macération pré-fermentaire pour faciliter l’extraction des précurseurs glycosidiques - conditions fermentaires standards - utilisation d’enzymes à activité secondaire de type β-glycosidase - élevage sur lies durant un an pour bénéficier des phénomènes d’autolyse des levures et de ses

conséquences organoleptiques - conditionnement tardif et éventuellement vieillissement en bouteilles

Perspectives

Une méthode rapide d’évaluation du potentiel aromatique glycosidique a été développée pour le cépage melon B. L’étape de vulgarisation est en cours pour le vignoble du Muscadet. Des informations concernant la composition aromatique des raisins, habituellement réservées aux chercheurs, sont désormais disponibles en pratique pour le technologue.

Cette démarche est parfaitement en phase avec la recherche d’outils d’aide à la décision indispensables à l’application du concept d’œnologie raisonnée. Bien évidemment, d’autres applications s’imposeront au cours du temps (sélection du matériel végétal ? Hiérarchisation des parcelles viticoles ?…).

Initiée sur melon B, la même démarche est envisageable sur d’autres cépages pour lesquels les précurseurs glycosidiques jouent un rôle significatif dans l’arôme des vins (chardonnay et riesling par exemple). Les travaux de transferts consisteront alors à constituer un modèle prédictif adapté au cépage et au vignoble considéré. Remerciements aux partenaires financiers : Conseil Interprofessionnel des vins de Nantes, Sicarex du Pays Nantais et Onivins Références bibliographiques : [1] Bayonove C., 1998. L’arôme variétal : le potentiel aromatique du raisin. Œnologie : fondements

scientifiques et technologiques, C. Flanzy, Lavoisier Tec&Doc Paris, 164-235. [2] Schneider R., 2001. Contribution à la connaissance de l’arôme et du potentiel aromatique du melon B. et

des vins de Muscadet. Thèse de Doctorat, Université de Montpellier II, 222 pages. [3] Winterhater P., 1993. The generation of C13-Norisoprenoid volatiles. Connaissance aromatique des

cépages et qualité des vins, Actes du Symposium International de Montpellier (France) 9-10 février 1993, 65-73.

[4] Abbott N., Williams P. et Coombe B., 1993. Measure of potentiel wine quality by grape analysis. Connaissance aromatique des cépages et qualité des vins, Actes du Symposium International de Montpellier (France) 9-10 février 1993, 335-343.

[5] Dubernet M., Dubernet M., 2000. Utilisation de l’analyse infra-rouge à transformée de Fourier pour l’analyse oenologique de routine. Revue Française d’Oenologie, 181, 10-13

[6] Dubernet M., Dubernet M., Dubernet V., Coulomb S., Lerche M. et Traineau I., 2000. Analyse objective de la qualité des vendanges par spectrométrie infra-rouge à transformée de Fourier et réseaux de neurones. Revue Française d’Oenologie, 185, 18-21

[7] Bouvier JC., 2001. Réflexion sur l’analyse œnologique par spectrométrie infrarouge. Revue Française d’Oenologie, 191, 16-17.

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Rôle du glutathion dans l’élaboration des vins blancs secs

Valérie LAVIGNE-CRUEGE et Denis DUBOURDIEU Faculté d’Oenologie, 351, cours de la Libération, 33405 Talence, France

Tel 003354000647 ; Fax 0033540006468 ; e-mail : [email protected]

Introduction L’addition à des jus de fruits de peptides ou acides aminés soufrés pour prévenir leur brunissement

et la détérioration de leurs arômes, a depuis longtemps été envisagée (Molnar-Perl et Friedman, 1990 ; Naim et al.,1993, 1997) et testée avec succès.

Comme les jus de fruits, certains vins blancs secs peuvent manifester au cours de leur vieillissement une évolution aromatique défectueuse, qui se caractérise par la perte des arômes fruités du vin jeune et l’apparition de nuances plus lourdes rappelant la cire, la naphtaline ou encore l’encaustique. Ce vieillissement prématuré de l’arôme des vins blancs secs s’accompagne d’ailleurs, le plus souvent, d’une modification de leur couleur et en particulier d’une augmentation de la teinte jaune, orangée.

La fréquence de ce défaut dans les vins blancs secs et le handicap commercial qu’il constitue ont suscité l’intérêt des chercheurs. Ainsi, la contribution de la 2-amino acétophénone au vieillissement atypique (ATVA) des vins blancs secs allemands a été clairement démontrée (Rapp et al., 1993).

La présence de 3-hydroxy-2(5H)-furanone (sotolon) a également pu être mise en évidence dans des vins blancs secs présentant un défaut de vieillissement aromatique prématuré. Si la contribution de ce composé à l’arôme des vins jaunes du Jura et des vins de Xérès (Dubois, 1976; Guichard et al., 1993), ainsi qu’aux nuances « figue sèche » et rancio des vins doux naturels et des vins de Porto (Cutzach, 1998) a été clairement établie, le rôle du sotolon dans le vieillissement aromatique des vins blancs secs n’a pas été étudié à ce jour. Nous avons recherché et dosé ce composé dans différents vins blancs secs présentant une évolution aromatique défectueuse. Les quantités de sotolon rencontrées, bien que très inférieures à celles décrites dans les vins sucrés élevés en conditions oxydatives, peuvent dépasser le seuil de perception (8µg/L).

Ainsi, l’altération de l’arôme et de la couleur des jus de fruit d’une part et le vieillissement atypique des vins blancs secs d’autre part, nous semblent présenter certaines similitudes. C’est pourquoi nous avons imaginé que les moyens mis en œuvre dans les jus de fruit pour prévenir ce type de déviation, c'est-à-dire l’addition de peptide ou acides aminés soufrés, puisse également s’avérer efficace dans le cas des vins blancs secs. Nous présentons ici les premiers résultats concernant le rôle du glutathion sur l’évolution aromatique des vins blancs secs.

1-Le glutathion des moûts et des vins : 1-1 - Le glutathion, constituant naturel des moûts. Le glutathion est un constituant naturel majeur de nombreuses plantes et aliments (Friedman, 1994 ;

Noctor et al., 1998 ; Son et al., 2001). Ce tripeptide est décrit comme un bon inhibiteur des mécanismes enzymatique et non enzymatique de brunissement des jus de fruit et autres aliments (Molnar-Perl et Friedman, 1990 ; Friedman, 1994, 1996). Il prévient également la formation des radicaux libres et joue un rôle de détoxification des cellules. Il est utilisé, à ce titre, dans l’industrie pharmaceutique (Ho et al., 1992 ; Jones et al., 1992).

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La présence de quantités importantes de glutathion dans les baies de raisins a été mise en évidence par Cheynier et al. (1989) et Liyanage et al., (1993). Les mécanismes d’accumulation de ce composé dans les raisins sont aujourd’hui mal connus. Il semble cependant que l’alimentation azotée de la vigne intervienne de façon significative. Nous avons en effet comparé les teneurs en glutathion de moûts présentant des teneurs en azote assimilables différentes (évaluées par la méthode au formaldéhyde). Dans les moûts carencés en azote (teneur inférieure à 160mg/L), la teneur en glutathion est systématiquement beaucoup plus faible, dans nos conditions d’extraction, c'est-à-dire en l’absence d’oxygène et en présence de quantités importantes de SO2 (10g/hl) (Tableau I).

Tableau I : Incidence de l’alimentation azotée de la vigne sur la teneur en glutathion des moûts de

raisins blancs.

Moût 1 Moût 2 Moût 3 Moût 4 Moût 5 Moût 6 Moût 7 Moût 8Assote assimilable

(mg/L) 62 244 76 202 224 56 187 42

Glutathion (mg/L)

12 28 17 28 25 6 22 4

Malgré la forte réactivité du glutathion vis-à-vis de l’oxygène et des composés phénoliques du moût,

nous avons pu mettre en évidence dans des jus de raisins blancs, extraits dans les conditions de la pratique, la présence de glutathion sous sa forme réduite. Les teneurs rencontrées dans les différents moûts analysés, varient de quelques milligrammes à une vingtaine de milligrammes par litre (Tableau II).

Tableau II : Exemples de dosage du glutathion dans différents moûts de sauvignon et sémillon.

Moût 1 Moût 2 Moût 3 Moût 4 Moût 5 Moût 6 Moût 7 Moût 8Glutathion

(mg/L) 11,5 5,8 3,1 24,5 2,5 6 18 7,3

1-2 - Évolution de la teneur en glutathion au cours de la fermentation alcoolique des vins blancs secs . Le glutathion, qui représente plus de 95% du pull intracellulaire des thiols de faible poids

moléculaire chez la levure (Elskens et al., 1991), est indispensable à sa prolifération (Murata et Kimura, 1986).

Si l’on suit l’évolution de la teneur en glutathion du moût au cours de la fermentation alcoolique, on observe dans un premier temps une diminution de sa concentration. Après 4 jours de fermentation, la teneur en glutathion augmente à nouveau dans le moût, ce qui corrobore les dosages de Park et al. (2000). Cette augmentation progressive de la concentration en glutathion se poursuit après le sulfitage du vin, pour se stabiliser un mois environ après l’achèvement de la fermentation alcoolique (Figure 1).

0

2

4

6

8

10

12

moût T1 T3 T6 T9 sulfitage T20 T30

concentration en glutathion (mg/L)

Figure 1 : Évolution de la teneur en glutathion des moûts au cours de la fermentation

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Tout se passe comme si la levure utilisait le glutathion disponible dans le moût pendant sa phase de croissance, puis le libérait en fin de fermentation alcoolique. Il est très vraisemblable que le glutathion soit libéré par la levure en même temps que le pool d’acides aminés, au tout début de son autolyse.

Ainsi, lorsqu’il est conservé sur lies, le vin blanc acquiert au début de son élevage un « potentiel réducteur ». Il existe semble-t-il, pour des conditions de vinification données, une bonne corrélation entre la teneur initiale du moût en glutathion et celle retrouvée dans le vin un mois après la fermentation alcoolique (Tableau III).

Tableau III : Incidence de la teneur en glutathion du moût sur la teneur en glutathion du vin jeune.

Glutathion du moût (mg/L)

9 5 4 17 2

Glutathion du vin correspondant (mg/L)

11 7 6 22 3

1-3 - Évolution de la teneur en glutathion des vins blancs secs au cours de l’élevage. Nous présentons ici, à titre d’exemple, (Figure 2) l’évolution de la teneur en glutathion d’un même

vin de sauvignon conservé 10 mois en fûts neuf ou usagé, sur lies totales ou en l’absence de lies.

02468

1012141618

[glutathion] (mg/L)

Fin Fa décembre janvier février mai prélèvements

fût neuf

fût neuf soutiré

fût usagé

fût usagé soutiré

Figure 2 : Incidence des modalités d’élevage en barriques sur l’évolution de la teneur en glutathion

des vins. Lorsque les lies sont éliminées du vin, la teneur en glutathion diminue rapidement et dans des

proportions significatives au cours de son élevage. Le phénomène est d’ailleurs accentué en barrique neuve, où les phénomènes oxydatifs sont plus importants. Quelles que soient les modalités d’élevage considérées, on observe une érosion non négligeable du « pouvoir réducteur » du vin. Cependant, la conservation des vins sur lies permet de mieux préserver la teneur en glutathion. Dans ces conditions, la diminution du « potentiel réducteur » du vin est à la fois plus lente et moins importante.

2- La teneur en glutathion des vins et leur évolution aromatique :

2-1 - Incidence de la teneur en glutathion des vins au cours de l’élevage, sur leur évolution aromatique.

Nous avons suivi, dans un vin blanc de sauvignon du millésime 2000, conservé en barrique neuve ou

usagée, sur lies totales ou en l’absence de lies, les évolutions simultanées, du glutathion, des thiols volatils (4-méthyl-4-mercaptopentanone, 4MMP et 3-mercaptohexanol 3-MH), composés clés de l’arôme des vins de sauvignon (Dubourdieu et al., 2000), du sotolon et de la 2-aminoacétophénone, marqueurs du vieillissement défectueux des vins blancs secs.

Comme nous l’avions observé précédemment, la teneur en glutathion du vin diminue de façon très importante en l’absence de lies, particulièrement lorsque le vin est conservé en fût neuf (Tableau IV).

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Tableau IV : Évolution de la teneur en glutathion d’un vin de sauvignon au cours de l’élevage en barriques.

Teneur en glutathion (mg/L) Barrique

usagée Barrique usagée

soutirée Barrique

neuve Barrique

neuve soutirée Fin FA 6,3 6,3 6,3 6,3

Novembre 7,5 5,2 6,7 4,1 Avril 5,8 3,1 4,8 2

Les principaux marqueurs de l’arôme fruité des vins de sauvignon, le 3-MH et la 4-MMP, suivent une évolution comparable (Tableau V).

Tableau V : Évolution de la teneur en 4-MMP et 3-MH d’un vin de sauvignon élevé en fût selon différentes modalités.

4-MMP (ng/L)

3-MH (ng/L)

Fin FA 11 1501 Barrique usagée Novembre 13 1508

Avril 13 1318 Fin FA 11 1501

B usagée soutirée Novembre 11 1144 Avril 10,1 717 Fin FA 10 1406

Barrique neuve Novembre 8,7 1240 Avril 8,3 1235 Fin FA 10 1406

Barrique neuve soutirée Novembre 8,7 1231 Avril 5,5 520

Après huit mois d’élevage (Avril), la teneur en 3-MH, composé volatil dont l’arôme évoque le pamplemousse, diminue dans des proportions considérables lorsque le vin est conservé sans lies. Les concentrations en 4-MMP sont plus stables. Elles diminuent toutefois d’un facteur deux, dans la barrique neuve soutirée, c'est-à-dire dans ces mêmes conditions d’élevage qui conduisent à l’altération la plus significative du potentiel réducteur du vin. Ces résultats montrent clairement l’effet protecteur des lies vis-à-vis de l’arôme fruité des vins jeunes. Il semble que la présence des lies au cours de la conservation des vins blancs secs en barriques retarde également le «vieillissement » de leurs arômes. Le dosage du sotolon et de l’amino acétophénone dans les différentes modalités de notre essai en fin d’élevage en apporte la confirmation (Tableau VI).

Tableau VI : Dosage du sotolon et la 2-aminoacétophénone en fin d’élevage.

B 1 vin B 1 vin soutirée B neuve B neuve soutirée Sotolon (µg/L) 1 2,6 4 8,2

2-aminoacétophénone (ng/L) < 20 75 80 128 Le sotolon dont la présence dans les vins blancs secs n’avait pas été mise en évidence jusqu’ici, est détecté dans chacune des modalités étudiées. Là encore, c’est en absence de lies et en barrique neuve que la teneur en sotolon du vin est la plus élevée. Il en va de même de la teneur en 2-aminoacétophénone. Toutefois, contrairement au sotolon, le seuil de perception de ce composé n’est jamais atteint dans les conditions de notre essai. Ces résultats montrent que les lies sont susceptibles de limiter la formation du sotolon et de la 2-aminoacétophénone au cours de l’élevage et de préserver ainsi l’arôme des vins blancs secs d’une évolution prématurée. Nous montrons que les conditions les plus favorables à la préservation des qualités aromatiques des vins blancs secs sont celles qui limitent la diminution de leur teneur en glutathion. L’aptitude des lies à combiner l’oxygène (Salmon et al., 1999) explique vraisemblablement leur effet protecteur vis-à-vis du glutathion d’une part et des arômes soufrés d’autre part.

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2-2 - Incidence d’une addition de glutathion à la mise en bouteille sur l’évolution aromatique du vin.

Nous avons pu observer que les différentes opérations de stabilisation subies par le vin avant sa mise en bouteille (collage, traitement par le froid, filtrations) pouvaient conduire à une diminution sensible de sa teneur en glutathion. Or, lorsqu’il n’est pas apparu au cours de l’élevage, le défaut de vieillissement prématuré se manifeste parfois très rapidement après la mise en bouteille. Nous avons comparé l’évolution aromatique d’un même vin de sauvignon (millésime 95), additionné ou non de 10mg/L de glutathion au moment de sa mise en bouteille. Le dosage des thiols volatils, du sotolon et de la 2-aminoacétophnone, ainsi que l’estimation de l’intensité de la couleur jaune (DO 420), ont été effectués après trois ans de bouteille (Tableau VII).

Tableau VII : Mesure de la teinte jaune des vins après trois ans de bouteille.

vin témoin vin additionné de glutathion (10mg/L)

DO 420 0, 203 0, 136 Il apparaît clairement, que l’addition de glutathion au moment de la mise en bouteille, limite significativement l’évolution de la couleur du vin vers des nuances jaunes. Ces résultats confirment l’aptitude du glutathion à inhiber les phénomènes enzymatique et non enzymatique de brunissement déjà décrits dans les jus de fruit (Molnar- Perl et Friedman, 1990 ; Friedman, 1994, 1996). En présence de glutathion, l’arôme fruité du vin jeune, évalué ici par le dosage du 3-MH, est également mieux préservé (Tableau VIII).

Tableau VIII : Dosage du 3-mercapto-hexanol dans les vins après trois ans de bouteille.

Vin témoin Vin additionné de glutathion (10m/L)

3-MH (ng/L)

320 445

De plus, comme nous l’avons observé au cours de l’élevage, l’apparition du défaut de vieillissement défectueux de l’arôme des vins blancs secs est nettement retardée lorsque le vin est additionné de glutathion au moment de sa mise en bouteille (Tableau VIII).

Tableau IX : Dosage du sotolon et de la 2-aminoacétophénone dans les vins après trois ans de bouteille.

Vin témoin

Vin additionné de glutathion (10mg/L)

Sotolon (µg/L) 9 3 2-aminoacétophénone (ng/L) 215 125

La teneur en sotolon du vin témoin dépasse le seuil de perception (8g/L). Cet échantillon renferme également deux fois plus d’aminoacétophénone que le vin additionné de glutathion. Ces résultats confirment le jugement des dégustateurs qui identifient un défaut de vieillissement défectueux dans le vin témoin, alors que le vin supplémenté en glutathion à l’embouteillage est jugé beaucoup plus frais. Conclusion

Comprises entre 0 et 30 mg/L, les teneurs en glutathion des moûts de sauvignon sont influencées par l’alimentation azotée de la vigne. Les moûts les plus pauvres en azote contiennent également moins de glutathion. Au début de la fermentation alcoolique, pendant la phase de multiplication des levures, le glutathion disparaît presque complètement du moût ; il augmente à nouveau en fin de fermentation et pendant le premier mois de conservation sur lies. Au cours d’un élevage en fût, les présence des lies

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réductrices limite la baisse de la teneur en glutathion et en thiols volatils variétaux des vins de sauvignon ; simultanément, les lies préviennent le vieillissement aromatique défectueux des vins blancs secs (sotolon et 2-aminoacétophénone). L’addition à l’embouteillage de 10mg/L de glutathion à un vin de sauvignon limite le jaunissement de sa couleur, l’érosion de son arôme variétal et sa tendance au vieillissement défectueux. Références bibliographiques : Cassol T. and Adams D.O, 1995. Detection of Glutathion in White Wines Using an Enzymatic Analytical

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