classes de similitude de matrices - service central d ... de... · préparationàl’agrégation...

25
Préparation à l’agrégation Classes de similitude de matrices ENS Rennes - Année 2014–2015 Romain Basson Classes de similitude de matrices Table des matières 1 Rappels concernant les modules de type fini sur un anneau principal 2 1.1 Bases adaptées ................................................... 2 1.2 Forme normale de Smith .............................................. 3 1.3 Algorithme pour le cas euclidien ......................................... 4 1.4 Structure des modules de type fini sur un anneau principal .......................... 6 2 Invariants de similitude d’un endomorphisme, décomposition de Frobenius 7 2.1 Lien entre endomorphismes de E et k[X]-modules ............................... 7 2.2 Endomorphismes et modules cycliques ...................................... 8 2.3 Invariants de similitude d’un endomorphisme, décomposition de Frobenius .................. 9 2.4 Calcul effectif des invariants de similitude .................................... 11 3 Applications 12 3.1 Classes de similitudes et extension de corps ................................... 12 3.2 Transposée ..................................................... 13 3.3 Paramétrisation des classes de similitude en dimension 2 et 3 ......................... 13 3.4 Commutant ..................................................... 14 3.5 Classes de similitude de polynôme caractéristique donné ............................ 16 3.6 Théorème de Brauer ................................................ 17 4 Topologie des classes de similitudes 17 4.1 Propriétés topologiques génériques d’une classe de similitude ......................... 17 4.2 Propriétés algébriques d’une matrice vs topologie de sa classe de similitude ................. 19 5 Endomorphismes semi-simples 22 A Espaces localement fermés, espaces localement compacts 24 Références [Ber12] Grégory Berhuy : Modules : théorie, pratique... et un peu d’arithmétique. Calvage & Mounet, 2012. [BMP05] Vincent Beck, Jérôme Malick et Gabriel Peyré : Objectif agrégation. H&K, 2005. [Bou71] Nicolas Bourbaki : Éléments de mathématique. Topologie générale. Chapitres I-IV. Hermann, 1971. [CG13] Philippe Caldero et Jérôme Germoni : Histoires hédonistes de groupes et de géométries. Calvage & Mounet, 2013. [Cog00] Michel Cognet : Algèbre Linéaire. Bréal, 2000. [FGN09] Serge Francinou, Hervé Gianella et Serge Nicolas : Oraux X-ENS, algèbre 2. Cassini, 2009. [Gou08] Xavier Gourdon : Algèbre. Ellipses, 2ème édition, 2008. [Mne97] Rached Mneimné : Éléments de géométrie, actions de groupes. Cassini, 1997. [Mne06] Rached Mneimné : Réduction des endomorphismes : tableaux de Young, cône nilpotent, représentations des algebres de Lie semi-simples. Calvage &amp ; Mounet, 2006. [Que07] Hervé Queffélec : Topologie : cours et exercices corrigés. Dunod, 3ème édition, 2007. [RT86] Mneimné Rached et Frédéric Testard : Introductiona la théorie des groupes de Lie classiques. Hermann, 1986. [Sam71] Pierre Samuel : Théorie algébrique des nombres. Hermann, 1971. 1

Upload: dangthu

Post on 06-Feb-2018

230 views

Category:

Documents


1 download

TRANSCRIPT

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

Classes de similitude de matrices

Table des matières1 Rappels concernant les modules de type fini sur un anneau principal 2

1.1 Bases adaptées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.2 Forme normale de Smith . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31.3 Algorithme pour le cas euclidien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41.4 Structure des modules de type fini sur un anneau principal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

2 Invariants de similitude d’un endomorphisme, décomposition de Frobenius 72.1 Lien entre endomorphismes de E et k[X]-modules . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72.2 Endomorphismes et modules cycliques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82.3 Invariants de similitude d’un endomorphisme, décomposition de Frobenius . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92.4 Calcul effectif des invariants de similitude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

3 Applications 123.1 Classes de similitudes et extension de corps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123.2 Transposée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133.3 Paramétrisation des classes de similitude en dimension 2 et 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133.4 Commutant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143.5 Classes de similitude de polynôme caractéristique donné . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163.6 Théorème de Brauer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

4 Topologie des classes de similitudes 174.1 Propriétés topologiques génériques d’une classe de similitude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174.2 Propriétés algébriques d’une matrice vs topologie de sa classe de similitude . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

5 Endomorphismes semi-simples 22

A Espaces localement fermés, espaces localement compacts 24

Références[Ber12] Grégory Berhuy : Modules : théorie, pratique. . . et un peu d’arithmétique. Calvage & Mounet, 2012.[BMP05] Vincent Beck, Jérôme Malick et Gabriel Peyré : Objectif agrégation. H&K, 2005.[Bou71] Nicolas Bourbaki : Éléments de mathématique. Topologie générale. Chapitres I-IV. Hermann, 1971.[CG13] Philippe Caldero et Jérôme Germoni : Histoires hédonistes de groupes et de géométries. Calvage & Mounet,

2013.[Cog00] Michel Cognet : Algèbre Linéaire. Bréal, 2000.[FGN09] Serge Francinou, Hervé Gianella et Serge Nicolas : Oraux X-ENS, algèbre 2. Cassini, 2009.[Gou08] Xavier Gourdon : Algèbre. Ellipses, 2ème édition, 2008.[Mne97] Rached Mneimné : Éléments de géométrie, actions de groupes. Cassini, 1997.[Mne06] Rached Mneimné : Réduction des endomorphismes : tableaux de Young, cône nilpotent, représentations des

algebres de Lie semi-simples. Calvage &amp ; Mounet, 2006.[Que07] Hervé Queffélec : Topologie : cours et exercices corrigés. Dunod, 3ème édition, 2007.[RT86] Mneimné Rached et Frédéric Testard : Introductiona la théorie des groupes de Lie classiques. Hermann,

1986.[Sam71] Pierre Samuel : Théorie algébrique des nombres. Hermann, 1971.

1

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

Dans tout ce qui suit, k désignera un corps. Pour n ∈ N∗, le groupe GLn(k) des matrices inversiblesde taille n à coefficients dans k agit par conjugaison sur l’espaceMn(k) des matrices carrées de taillen à coefficients dans k. Il est naturel de se demander si l’on peut décrire pour cette action les orbites,i.e. les classes de similitudes de matrices, et leurs stabilisateurs, liés aux commutants des matrices.Précisément, existe-t-il un représentant canonique pour chaque classe de similitude ? Peut-on déciderde façon effective si deux matrices sont semblables ? Que peut-on dire de la topologie des classes desimilitude ? Que peut-on dire du commutant d’une matrice ?

Ces questions relèvent bien entendu purement de l’algèbre linéaire sur un corps. Toutefois le langagedes k[X]-modules et les propriétés des modules de type fini sur un anneau principal offrent un cadrefavorable à l’étude des ces diverses questions (exception faite de l’aspect topologique) et notre exposése fera donc sous cet angle. Deux bonnes références pour ce point de vue sont [BMP05] et [Ber12]. Pourun exposé uniquement basé sur l’algèbre linéaire, on pourra consulter [Gou08, Annexe B], [Cog00] ou[CG13, Chapitre III].

1 Rappels concernant les modules de type fini sur un anneau principal

Tout au long de cette section, A désigne un anneau principal.

1.1 Bases adaptées

Un sous-module d’un A-module libre de type fini, lorsque A est un anneau quelconque, n’a aucuneraison d’être de type fini ou libre, ce qui contraste fortement avec la situation des espaces vectoriels,i.e. lorsque A est un corps.

Exemple 1.11. Le sous-module Z(N) du ZN-module libre de rang 1 ZN n’est pas de type fini (autrement dit

l’anneau ZN n’est pas noethérien).2. Le sous-module 2Z/4Z du Z/4Z-module libre de rang 1 Z/4Z n’est pas libre (2 = |2Z/4Z| n’est

pas une puissance de 4 = |Z/4Z|).

Toutefois, lorsque l’anneau des scalaires A est principal, la situation redevient analogue à celleconnue des espaces vectoriels. Précisément, on a le résultat suivant.

Théorème 1.2 - Base adaptée. Soit A un anneau principal et M un A-module libre de rang fini n.Si N est un sous-module de M , alors il existe une base (e1, . . . , en) de M , un entier s ∈ [[0, n]] et desscalaires (d1, . . . , ds) ∈ (A \ {0})s tels que

1. d1 | · · · | ds ;2. la famille (d1e1, . . . , dses) est une base de N .

En particulier, le sous-module N est libre de rang fini s 6 n. En outre, l’entier s et la suite des idéaux(ds) ⊂ · · · ⊂ (d1) sont uniquement déterminés par N .

Démonstration. On pourra se reporter à [BMP05, th. 6.58 p. 276] ou [Ber12, th. 2.1 p. 258] pourune démonstration s’appuyant sur l’existence d’une forme de Smith ou à [Sam71, 1.5 p. 26] pour unedémonstration par récurrence sur n.

QED

2

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

Exemple 1.3 Soit A = Z, M = Z2 et (ε1, ε2) la base canonique de M . Considérons le sous-moduleP = Z(1, 3) ⊕ Z(1, 1). P = Z(0, 2) ⊕ Z(1, 1) et s = 2, d1 = 1 et d2 = 2, la famille (ε1 + ε2, ε2) étantune base adaptée de M à P = 2Zε2 ⊕ Z(ε1 + ε2). On notera que ((1, 3), (1, 1)) est une base de P dontles éléments ne sont pas des multiples d’une base de M et, qu’à la différence des espaces vectoriels, Pest un sous-module libre stricte de M de même rang !

Exercice 1.4 - Facteur direct. Soit A un anneau principal et M un A-module libre de rang fini. Àquelle condition sur les scalaires di un sous-module N est-il un facteur direct de M ?

1.2 Forme normale de Smith

On s’intéresse à l’action à gauche du groupe GLm(A) × GLn(A) sur le module libre de rang mnMm,n(A) donnée par

(P,Q).M = PMQ−1,

deux matrices deMm,n(A) dans la même orbite pour cette action étant dites équivalentes.Lorsque A est un corps, la situation est bien connue : les orbites sont classifiées par un invariant

qui n’est autre que le rang r de la matrice et chacune des orbites, en nombre fini égal à min(n,m) + 1,

contient un représentant privilégié, à savoir la matrice Jr =

(Ir 00 0

).

Exercice 1.5 - cf. [FGN09, ex. 4.1 p. 217].Déterminer l’adhérence et l’intérieur des orbites {M ∈Mn(k) / rgM = r}, lorsque k = R ou C.

Le théorème suivant généralise le résultat précédent lorsqu’on se place sur un anneau principal,en précisant les invariants qui permettent de décider si deux matrices sont dans la même orbite et endonnant un représentant privilégié de chaque orbite.

Théorème 1.6 - Forme normale de Smith.Pour un anneau principal A, toute matrice M ∈Mm,n(A)est équivalente à une matrice de la forme :

Dm,n(d1, . . . , ds) =

d1 0 · · · 0 0 · · · 0

0. . . . . .

......

......

. . . . . . 0...

...0 · · · 0 ds 0 · · · 00 · · · · · · 0 0 · · · 0...

......

...0 · · · · · · 0 0 · · · 0

où d1| . . . |ds. L’entier s et les idéaux (ds) ⊂ · · · ⊂ (d1) étant uniquement déterminés par la classed’équivalence de M . La matrice Dm,n(d1, . . . , ds) est dite sous forme normale de Smith et lesidéaux, ou les di, associés sont appelés les facteurs invariants (de Smith) de M .

Démonstration. Considérons l’application linéaire f : An −→ Am dont la matrice dans les basescanoniques respectives de ces deux modules libres de rangs finis est M et soit L son image. Soit alors

3

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

(e1, . . . , es) une base adaptée de Am à L et d1, . . . , ds la famille de scalaires correspondants (uniquesà des inversibles près). Si l’on se donne pour tout i ∈ [[1, s]] un antécédent fi de diei, alors la famille(fi)16i6s est libre et An = Af1 ⊕ · · · ⊕ Afs ⊕ ker f . Comme ker f est un sous-module de An il estlibre et si l’on en choisit une base quelconque la réunion de (fi)16i6s et de cette base constitue unebase B de An. La matrice de f dans les bases B et (ei)16i6m est alors Dm,n(d1, . . . , ds), cette dernièreétant équivalente à M . En outre, si Dm,n(d1, . . . , ds) est équivalente à Dm,n(d′1, . . . , d

′s′), alors ces

deux matrices définissent la même image dans Am, dont une base est donnée, relativement à la basecanonique (ei) de Am, par (diei) et (d′iei) respectivement. Le théorème de la base adaptée assure alorsque s = s′ et (di) = (d′i), pour 1 6 i 6 s.

QED

Remarque 1.7 L’unicité peut aussi être déduite du résultat suivant : si M est une matrice de taillem× n équivalente à Dm,n(d1, . . . , ds) pour une certaine famille (di)16i6s de scalaires non nuls tels qued1| . . . |ds, alors pour tout entier k le produit d1 . . . dk est le PGCD des mineurs d’ordre k deM , avec laconvention dk = 0 pour k > s. Cette formule fournit un moyen théorique d’obtention des di à partir deM . Toutefois cela demande un nombre prohibitif d’opérations (songez que pour tout k 6 min(m,n),il y a

(mk

)(nk

)mineurs d’ordre k à calculer et qu’il reste ensuite leur PGCD à déterminer).

1.3 Algorithme pour le cas euclidien

Lorsque A est un anneau euclidien "effectif", muni du stathme δ, l’obtention de la forme de Smithd’une matrice est effective via l’algorithme qui suit.

Pour toute matrice non nulleM ∈Mm,n(A), on note δ(M) la valeur minimal de δ sur les coefficientsnon nuls de M . On appelle opération élémentaire sur une matrice l’une des opération suivante :échange de ligne ou de colonne et ajout à une ligne (resp. une colonne) d’une combinaison linéaired’autres lignes (resp. colonnes). Chacune des ces opérations transforme une matrice en une matriceéquivalente (le vérifier !).

Algorithme : Si M = (Mi,j) est nul, c’est terminé.Étape 1 : par opérations élémentaires on se ramène au cas où δ(M) = δ(m1,1).Étape 2 : s’il existe sur la première ligne deM un élément non multiple dem1,1, on peut le remplacer,

par opérations élémentaires, par le reste r de sa division par m1,1, lequel vérifie δ(r) < δ(m1,1) =δ(M). On reproduit alors les étapes 1 à 2 et comme δ(M) ne peut décroître strictement indéfi-niment (N est bien fondé), en un nombre fini d’étapes tous les termes de la première ligne sontmultiples de m1,1. On applique le même procédé à la première colonne et on obtient une matricedont tous les termes de la première colonne et de la première ligne sont des multiples de m1,1.Par opérations élémentaires, on obtient alors une matrice dont tous les coefficients mk,1 et m1,k,k 6= 1 sont nuls.

Étape 3 : on a ainsi une matrice formée de deux blocs. Un bloc 1×1 (m1,1), vérifiant δ(m1,1) = δ(M)et un bloc (m−1)×(n−1) N . Si l’un des coefficients de N n’est pas multiple dem1,1, on additionssa ligne à la première, puis, par opérations élémentaires on remplace l’élément en question (surla première ligne) par le reste r de sa division par m1,1, qui vérifie δ(r) < δ(m1,1) On reproduitalors les étapes 1 à 3 et, δ(M) ne pouvant décroître strictement indéfiniment, en un nombre finid’étape tous les coefficients du bloc N sont multiples de m1,1.

Étape 4 : on applique récursivement l’algorithme à N .

4

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

Pour un sous-module N d’un A-module libre Am, donné via une famille génératrice (xi)16i6n,la démonstration du théorème 1.6 indique un moyen d’expliciter une base adaptée de Am pour N .Précisément, on écrit en colonnes les générateurs de N dans la base canonique de Am, soit une matriceC ∈ Mm,n(A) (matrice de l’application linéaire surjective f : An −→ N, (ai) 7−→

∑aixi). On utilise

alors l’algorithme de réduction sous forme de Smith pour déterminer U ∈ GLm(A) et V ∈ GLn(A)telles que C = UDm,n(d1, . . . , ds)V . Les colonnes de la matrice U donnent alors les coordonnées dansla base canonique de Am d’une base adaptée (ei)16i6m de Am relativement à N et (diei)16i6s est unebase de N .

Exemple 1.8 Soit A = Z, M = Z3 et N le sous-module de M engendré par les vecteurs (4,−2, 0),(2,−2, 2), (−3, 0, 3). On s’intéresse donc à la matrice suivante relative à la base canonique de M :

C =

4 2 −3−2 −2 00 2 3

.

On va donc mettre sous forme de Smith la matrice C en lui appliquant une série d’opérations élémen-taires. En l’occurrence des opérations de transvections liées aux matrices de transvection

T(l)i,j (a) = Il + aEi,j , pour a ∈ A \ {0} .

Rappelons que T (l)i,j (a) est inversible d’inverse T (l)

i,j (−a) et que l’opérations élémentaires Li ←− Li+aLjsur C correspond au produit matriciel T (m)

i,j (a)C. À chaque étape de l’algorithme, on obtiendra desmatrices C(i), U (i) ∈ GLm(A) et V (i) ∈ GLn(A) telles que C = U (i)C(i)V (i). Toutefois, pour notrepropos, on ne s’intéressera pas aux matrices V (i), i.e. on ne gardera pas la trace des opérations sur lescolonnes de C. Initialement C(0) = C et U (0) = I3.

C1 ←− C1 + C3 donne C(1) =

1 2 −3−1 −2 03 2 3

et U (1) = I3,

∣∣∣∣ C2 ←− C2 − 2C1

C3 ←− C3 + 3C1donnent C(2) =

1 0 0−2 2 03 −4 12

et U (2) = I3,

∣∣∣∣ L2 ←− L2 + 2L1

L3 ←− L3 − 3L1donnent C(3) =

1 0 00 2 −60 −4 12

et U (3) = T(3)2,1 (−2)T

(3)3,1 (3) =

1 0 0−2 1 03 0 1

,

L3 ←− L3 + 2L2 donne C(4) =

1 0 00 2 −60 0 0

et U (4) = U (3)T(3)3,2 (−2) =

1 0 0−2 1 03 −2 1

,

C3 ←− C3 + 3C2 donne C(5) =

1 0 00 2 00 0 0

et U (5) = U (4).

Ainsi e1 = (1,−2, 3), e2 = (0, 1,−2) et e3 = (0, 0, 1) forment une base adpatée de M à N et (e1, 2e2)est une base de N .

5

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

1.4 Structure des modules de type fini sur un anneau principal

Théorème 1.9 - Facteurs invariants. Soit A un anneau principal. Si M est un A-module de type fini,alors on a un isomorphisme de A-modules :

M ' Ar⊕(

s⊕i=1

A/(di)

)où (r, s) ∈ N2 et où les (di) sont des idéaux non triviaux de A tels que (ds) ⊂ · · · ⊂ (d1). L’entier r etles idéaux (ds) ⊂ · · · ⊂ (d1) sont uniquement déterminés par la classe d’isomorphisme de M .

Définition 1.10 Les di, déterminés à des inversibles près, sont appelés les facteurs invariants (oudiviseurs élémentaires) du A-module M .

Démonstration. Soit (x1, . . . , xn) est une famille génératrice de M et f : An −→ M le morphismesurjectif associé. Le noyau de f est un sous-module de An. Il existe donc, d’après le théorème de labase adaptée, une base (e1, . . . , en) de An et une famille (d1, . . . , ds) d’éléments de A, avec d1| . . . |ds,telles que (d1e1, . . . , dses) soit une base de ker f : An = ⊕ni=1Aei et ker f = ⊕si=1Adiei. Alors

M ' An/(ker f) '

(s⊕i=1

Aei/Adiei

)⊕(n⊕

i=s+1

Aei

)'

(s⊕i=1

A/(di)

)⊕An−s

En éliminant les di inversibles, pour lesquels A/(di) = {0}, on obtient la décomposition voulue. Pourl’unicité on se reportera à [BMP05, p. 282].

QED

Remarque 1.111. Tor(M) =

⊕si=1A/(di) et r = rgA(M/Tor(M)), l’unicité de ce dernier est donc claire.

2. La démonstration, vu le procédé décrit avant l’exemple 1.8, donne une méthode explicite pourobtenir les facteurs invariants de M lorsque ce dernier est donné par générateurs et relations(i.e. lorsqu’on connaît une famille génératrice de M et du noyau ker f).

3. Lien avec la forme normale de Smith : soit ϕ : N −→ M A-linéaire, où M et N sont deuxA-modules libres de rangs finis. Les facteurs invariants du module M/ϕ(N) sont les facteursinvariants non inversibles d’une matrice associée à ϕ.

Lorsque A = Z, le théorème précédent se reformule dans le langage des groupes abéliens.

Corollaire 1.12 - Théorème de structure des groupes abéliens de type fini. Si G est un groupeabélien de type fini, alors il existe deux entiers r, s ∈ N et des entiers d1, . . . , ds > 2 tels que d1| . . . |dset

G ' Zr ⊕ Z/d1Z⊕ · · · ⊕ Z/dsZ.

De plus les entiers r, s et d1, . . . , ds sont uniques et caractérisent la classe d’isomorphisme de G.

Exercice 1.13 Combien y a-t-il de classes d’isomorphisme de groupes abéliens d’ordre 24 ?

6

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

2 Invariants de similitude d’un endomorphisme, décomposition deFrobenius

Tout au long de cette section, E désignera un k-espace vectoriel de dimension finie n.

2.1 Lien entre endomorphismes de E et k[X]-modules

Soit A un anneau commutatif et unitaire. Tout A[X]-module M est aussi muni d’une structurede A-module, par restriction des scalaires, et l’application µX : M −→ M,m 7−→ X.m est alors unendomorphisme du A-module M . Réciproquement, pour un A-module M , l’extension des scalaires deA à A[X] est précisée par la proposition suivante, où i : A −→ A[X] est l’inclusion :

Proposition 2.1 Soit M un A-module et u un endomorphisme de M . Il existe alors sur M une uniquestructure de A[X]-module vérifiant X.A[X]m = u(m) et i(a).A[X]m = a.Am, pour a ∈ A ; elle estdonnée par :

∀ (P,m) ∈ A[X]×M, P.A[X]m = P (u)(m)

Démonstration. Exercice.

QED

Il y a ainsi équivalence entre la donnée d’une structure de A[X]-module et un couple formé d’unA-module et d’un endomorphisme de ce dernier.

Lorsqu’on considère un corps k et un k-espace vectoriel E, on peut donc associer à tout endomor-phisme u de E un k[X]-module Eu, d’ensemble sous-jacent E. On peut alors établir un dictionnaireentre l’algèbre linéaire de (E, u) et la structure de k[X]-module Eu.

Proposition 2.2 Soit u et v deux endomorphismes d’un k-espace vectoriel E de dimension finie.

1. Les sous-modules de Eu sont les sous-espaces de E stables par u.

2. Les applications linéaires entre Eu et Ev sont les endomorphismes φ de E tels que φ ◦ u = v ◦ φ.En particulier, les endomorphismes de Eu sont les endomorphismes de E qui commutent avec u,autrement dit C(u) = Endk[X](Eu).

3. À un vecteur x ∈ E correspond un morphisme de k[X]-modules k[X] −→ Eu, P 7−→ P (u)(x).

4. Le polynôme minimal de u est le générateur unitaire de l’idéal annulateur de Eu. En particulierEu est de torsion.

5. Eu ' Ev si et seulement si u et v sont semblables.

Démonstration.

1. Un sous-module de Eu est un sous-espace de E stable par l’action externe de k[X].

2. Les applications linéaires entre Eu et Ev sont les endomorphismes de l’espace sous-jacent Ehomogènes pour les lois externes induites par u et v.

3. Simple vérification.

4. Par définition de πu.

7

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

5. S’il existe f ∈ GL(E) tel que v = f ◦ u ◦ f−1, alors ϕ : Eu −→ Ev, x 7−→ f(x) est un morphismede k[X]-modules, en vertu de 2, bijectif, donc un isomorphisme.Réciproquement, supposons qu’il existe un isomorphisme de k[X]-modules f : Eu −→ Ev. Enparticulier, f ∈ GL(E) et, d’après 2, v = f ◦ u ◦ f−1, ainsi u et v sont semblables.

QED

2.2 Endomorphismes et modules cycliques

Définition 2.3 - Matrice compagnon.Soit P = Xn + an−1Xn−1 + · · ·+ a1X + a0 ∈ k[X] unitaire, la

matrice compagnon de P est

CP =

0 −a0

1. . .

.... . . . . .

.... . . 0 −an−2

1 −an−1

.

Remarque 2.41. Remarquons que CP = (−a0) si n = 1.2. En développant selon la dernière colonne, on vérifie que χCP = P .

Définition 2.5 - Cyclicité.Soit E un k-espace vectoriel de dimension n et u ∈ L(E).1. u est dit cyclique lorsqu’il existe x ∈ E tel que (x, u(x), . . . , un−1(x)) est une base de E.2. Un sous-espace u-stable F de E est dit u-cyclique lorsque l’endomorphisme uF , induit par u

sur F , est cyclique.3. Un k[X]-module M est dit cyclique lorsqu’il existe P ∈ k[X] tel que M ' k[X]/(P ).

Remarque 2.6 SiM ' k[X]/(P ) est cylique, alorsM est un k-espace vectoriel de dimension n = degP

et admet pour base (1, X, . . . ,XdegP−1

).

Proposition 2.7 Soit E un k-espace vectoriel de dimension n, pour u ∈ L(E) s’équivalent(i) u est cyclique ;(ii) χu = πu ;(iii) πu est de degré n ;(iv) il existe une base de E dans laquelle la matrice de u est une matrice compagnon ;(v) dim k[u] = n ;(vi) u admet un unique invariant de similitude ;(vii) le k[X]-module Eu est cyclique.

8

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

Démonstration.— Puisque k[u] ' k[X]/(πu) et πu|χu, on a facilement (ii)⇔ (iii)⇔ (v).— (i)⇔ (iv) résulte simplement des définitions 2.3 et 2.5.— (i)⇔ (vii) repose sur la remarque 2.6 pour le sens réciproque et, pour le sens direct, sur l’intro-

duction, pour un vecteur x ∈ E tel que (x, u(x), . . . , un−1(x)) soit une base de E, du morphismesurjectif de k[X]-modules ϕ : k[X] −→ Eu, Q 7−→ Q(u)(x).

— (i)⇔ (vi) résulte du théorème 2.8 ci-après.— Pour (i) ⇔ (iii), le sens direct est aisé et la réciproque repose sur l’existence de x ∈ E tel que

πu,x = πu (basée sur le lemme des noyaux, cf. [BMP05, App. 4.40 p. 165] ou [CG13, Prop. 5.4 p. 102]).

QED

2.3 Invariants de similitude d’un endomorphisme, décomposition de Frobenius

Théorème 2.8 - Décomposition de Frobenius - Invariants de similitude.Soit E un k-espace vectorielde dimension finie n et u ∈ L(E). Il existe une décomposition de E en somme directe de sous-espacesu-stables non nuls E = E1 ⊕ · · · ⊕Er et des polynômes unitaires non constants P1, . . . , Pr ∈ k[X] telsque(i) P1 | · · · | Pr ;(ii) pour i ∈ [[1, r]], uEi est cyclique et πuEi = Pi.

Les polynômes Pi sont uniquement déterminés par la classe de similitude de u et ils la caractérisent ;ils sont appelés les invariants de similitude de u.

Démonstration. Eu est un k[X]-module de torsion (Annk[X](Eu) = (πu) est non trivial) et de typefini (E est de dimension finie). k[X] étant un anneau principal, d’après le théorème 1.9, il existeP1, . . . , Pr ∈ k[X] unitaires et non constants tels que P1 | · · · | Pr et

Eu 'r⊕i=1

k[X]/(Pi).

Les sous-modules cycliques Ei de Eu, qui correspondent via l’isomorphisme précédent aux sous-modulesk[X]/(Pi), sont donc des sous-espaces u-stables de E (point 1 de la proposition 2.2) sur lesquels u induitdes endomorphismes uEi cyclique, en vertu de la proposition 2.7. En outre, en vertu du point 4 de laproposition 2.2, πuEi est le générateur unitaire de Annk[X](Ei) = (Pi). Enfin, les polynômes Pi sont lesfacteurs invariants de Eu et caractériser la classe d’isomorphisme de ce dernier revient à caractériserla classe de similitude de u (point 5 de la proposition 2.2).

QED

Remarque 2.91. Une telle décomposition de E = E1 ⊕ · · · ⊕ Er en sous-espaces u-cycliques s’appelle une dé-

composition de Frobenius de E relative à u. Notons que les sous-espaces Ei ne sont pasuniques.

2. Les invariants de similitude de u sont les facteurs invariants de Eu.

9

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

3. En termes matriciels, il existe une matrice représentative de u, nommée réduite de Frobeniusassociée à u, de la forme

C =

CP1

. . .CPr

.

4. Deux endomorphismes sont donc semblables si et seulement s’ils ont les mêmes invariants desimilitude et dans chaque classe de similitude de matrices, i.e. dans chacune des orbites d’unematrice sous l’action par conjugaison de GLn(k), il y a une unique réduite de Frobenius.

5. χu = χC =∏ri=1 χCPi =

∏ri=1 Pi et πu = πC = ppcm16i6r(πCPi ) = Pr.

6. dimk E = degP1 + · · · + degPs et degPi > 1, ainsi le nombre s d’invariants de similitude estinférieur à dimk E. En outre, s = dimk E ⇔ degPi = 1⇔ deg πu = 1⇔ u est une homothétie.

7. On peut donner une démonstration du théorème 2.8 uniquement à partir de concepts de l’algèbrelinéaire sur un corps (cf. par exemple [Gou08, Annexe B] ou [CG13, Th. 5.7 p. 105]). La partieexistence du théorème se démontre par récurrence, après avoir établi que le sous-espace u-cyliqueengendré par un vecteur x ∈ E tel que πu,x = πu admet un supplémentaire u-stable.

8. La réduction de Frobenius possède certains avantages sur d’autres méthodes de réduction clas-siques (Chevalley-Dunford, Jordan, diagonalisation, trigonalisation...). Par exemple, elle ne néces-site d’hypothèse ni sur le corps k, ni sur E, excepté sa dimension finie, ni sur l’endomorphisme u.En revanche, elle présente l’inconvénient que les matrices compagnons ne sont pas très "agréables"du point de vue du calcul. Songeons seulement que si λ 6= µ, la réduite de Frobenius de la matrice

diagonale(λ 00 µ

)est la matrice compagnon

(0 −λµ1 λ+ µ

).

Application 2.10 On retrouve donc le théorème de Cayley-Hamilton qui énonce que πu|χu et quiimplique en particulier que tout facteur irréductible de πu divise χu. La réciproque s’avère égalementvraie, puisque un diviseur irréductible de χu divise l’un des Pi qui divisent Pr = πu.

Exemple 2.11 Soit U =

0 0 0 01 0 0 00 0 0 00 0 0 0

=

CX2

CXCX

et V =

0 0 0 01 0 0 00 0 0 00 0 1 0

=

(CX2

CX2

).

X|X|X2, ainsi Inv(U) = (X,X,X2), πU = X2 et χU = X4 et X2|X2, ainsi Inv(V ) = (X2, X2),πV = X2 et χV = X4. Notons que πU = πV et χU = χV , mais que U et V ne sont pas semblables(rgU 6= rg V ).

Exemple 2.12 Pour P1, P2 ∈ k[X] unitaires et non constants, quels sont les invariants de similitude

de la matrice C =

(CP1

CP2

)?

(kdegP1+degP2)C ' k[X]/(P1)⊕ k[X]/(P2) ' k[X]/(pgcd(P1, P2))⊕ k[X]/(ppcm(P1, P2)), en vertudu théorème Chinois. Or pgcd(P1, P2) | ppcm(P1, P2), ainsi Inv(C) = (pgcd(P1, P2), ppcm(P1, P2)) etχC = P1P2, πC = ppcm(P1, P2).

Exercice 2.13 Quels sont les invariants de similitude d’une homothétie ? d’une transvection ? d’unendomorphisme diagonalisable de valeurs propres distinctes ? d’un projecteur ? d’un bloc de Jordan ?

10

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

2.4 Calcul effectif des invariants de similitude

Théorème 2.14 Les invariants de similitude de U ∈Mn(k) sont les facteurs invariants non inversiblesde la matrice XIn − U ∈Mn(k[X]).

Ainsi le calcul des invariants de similitude d’une matrice deMn(k) repose sur la mise sous formenormale de Smith d’une matrice de Mn(k[X]), ce calcul étant effectif via l’algorithme décrit au pa-ragraphe 1.3. Observons ici un autre avantage de la réduction de Frobenius par rapport aux autresréduction classiques (Jordan, Diagonalisation, Trigonaisation, Dunford) : il n’y a pas de valeurs propresà déterminer, autrement dit pas de polynôme à factoriser ! Notons par ailleurs que ce théorème s’in-terprète de la façon suivante : les matrices U et V de Mn(k) sont semblables si et seulement si lesmatrices XIn − U et XIn − V deMn(k[X]) sont équivalentes.

Démonstration. Soit P1, . . . , Ps les invariants de similitude de U . XIn − U est alors semblable etdonc équivalente à Diag(XIdegP1 − CP1 , . . . , XIdegPs − CPs) et il suffit alors de montrer que le seulfacteur invariant non inversible de XIdegP −CP est P . Posons P = Xn +

∑n−1i=0 aiX

i et procédons auxopérations élémentaires suivantes

XIn − CP =

X a0

−1. . .

.... . .

. . ....

. . . X an−2

−1 X + an−1

0 · · · · · · 0 P−1 X a1

. . .. . .

.... . . X an−2

−1 X + an−1

L1←− L1 +XL2 + · · ·+Xn−1Ln

0 · · · · · · 0 P

−1. . .

... a1. . .

. . ....

.... . . 0 an−2

−1 an−1

Ci ←− Ci +XCi−1, pour 2 6 i 6 n

0 · · · · · · 0 P

−1. . .

... 0

. . .. . .

......

. . . 0...

−1 0

Cn ←− Cn + a1C1 + · · ·+ an−1Cn−1

−1

. . .−1

P

Li ←→ Li+1, pour 1 6 i 6 n− 1

QED

11

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

3 Applications

3.1 Classes de similitudes et extension de corps

Soit k ⊂ K une extension de corps. Par unicité dans la réduction de Frobenius d’une matrice, lesinvariants de similitudes de U ∈Mn(k) sont aussi ceux de U ∈Mn(K). Autrement dit, les invariantsde similitude, en particulier le polynôme minimal, ne dépendent pas du corps choisi dans lequel lamatrice a ses coefficients. On en déduit les deux résultats suivants.

Proposition 3.1 U, V sont semblables dansMn(k) si et seulement si elles le sont dansMn(K).

Remarque 3.2 Si k ⊂ K est une extension d’anneaux le sens réciproque de la proposition précédentedevient faux, comme le montre le contre-exemple donné par :

k = Z, K = Q, U =

(0 11 0

)et V =

(1 00 −1

).

En effet χU = X2 − 1, ainsi U est diagonalisable sur Q sous la forme V et les deux matrices sontsemblables sur Q. En revanche, si elles l’étaient sur Z, elles le seraient en particulier sur F2, ce qui estexclu dans la mesure où V mod 2 = I2.

Proposition 3.3 Une matrice deMn(K) est semblable à une matrice deMn(k) si et seulement si sesinvariants de similitude sont dans k[X].

Exemple 3.4 Considérons les matrices complexes suivantes

M1 =

i 1 0 00 i 0 00 0 −i 00 0 0 −i

et M2 =

i 1 0 00 i 0 00 0 −i 10 0 0 −i

.

(C4)M1 ' C[X]/((X − i)2)⊕ (C[X]/(X + i))2 ' C[X]/((X + i)(X − i)2)⊕ C[X]/(X + i).

Ainsi Inv(M1) = (X + i,X3 − iX2 +X − i) et M1 n’est pas semblable à une matrice réelle.

(C4)M1 ' C[X]/((X − i)2)⊕ C[X]/((X + i)2)⊕ C[X]/(((X + i)(X − i))2).

Ainsi Inv(M2) = ((X2 + 1)2) = (X4 + 2X2 + 1) et M2 est semblable à la matrice réelle

CX4+2X2+1 =

0 0 0 −11 0 0 00 1 0 −20 0 1 0

.

12

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

3.2 Transposée

Proposition 3.5 Une matrice et sa transposée sont semblables dansMn(k).

Démonstration.Versions k[X]-module : soit U ∈ Mn(k), U et tU sont semblables dans Mn(k) si et seulement si

XIn −U et XIn − tU = t(XIn − U) sont équivalentes dansMn(k[X]), ce qui est le cas en vertu de laremarque 1.7 qui implique que ces matrices ont les mêmes facteurs invariants.

Version algèbre linéaire : via la réduction de Frobenius d’une matrice, il suffit d’établir que, pourP ∈ k[X] unitaire, CP et tCP sont semblables. Or πtCP = πCP = P = χCP = χtCP . Ainsi πtCP = χtCP ,autrement dit tCP est cyclique et est semblable à CπtCP = CP (cf. proposition 2.7).

QED

3.3 Paramétrisation des classes de similitude en dimension 2 et 3

En dimension 2 et 3, le polynôme minimal et le polynôme caractéristique déterminent entièrementles invariants de similitude et donc la classes de similitude d’un endomorphisme. Précisément on a laproposition suivante.

Proposition 3.61. En dimension 2, u et v sont semblables si et seulement si πu = πv.2. En dimension 3, u et v sont semblables si et seulement si πu = πv et χu = χv.

Démonstration.1. En dim. 2, un endomorphisme u a au plus deux invariants de similitude :

— si deg πu = 2, alors u admet un unique invariant de similitude, qui est πu ;— si deg πu = 1, alors πu = X − λ et u est l’homothétie de rapport λ. Inv(u) = (πu, πu).

2. En dim. 3 :— si deg πu = 3, alors u admet un unique invariant de similitude, qui est πu, et χu = πu ;— si deg πu = 2, comme χu/πu est de degré 1, u n’a que deux invariants de similitude, qui

sont χu/πu et πu ;— si deg πu = 1, on retrouve comme précédemment une homothétie, Inv(u) = (πu, πu, πu) et

χu = (πu)3.

QED

Remarque 3.7 le résultat n’est plus valable à partir de la dimension 4 (cf. exemple 2.11).

Application 3.8 - Classes de conjugaison de GL2(F3). D’après la proposition 3.6, les classes desimilitude, i.e. les classes de conjugaison, des éléments de GL2(F3) sont paramétrées par le polynômeminimal. GL2(F3) est donc formé de 8 classes de conjugaison correspondant aux 8 polynômes uni-taires de degré 1 ou 2 sur F3 dont le coefficient constant est non nul (les matrices sont inversibles !).Précisément, pour chaque polynôme minimal, on donne un représentant de la classe :

13

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

Type I : X + 2 pour I2 et X + 1 pour 2I2.

Type II : X2 +X + 1 = (X + 2)2 pour(

1 10 1

)et X2 + 2X + 1 = (X + 1)2 pour

(2 10 2

).

Type III : X2 + 2 = (X + 1)(X + 2) pour(

1 00 2

).

Type IV : X2 +X + 2 pour(

0 11 2

), X2 + 1 pour

(0 21 0

)et X2 + 2X + 2 pour

(0 11 1

).

Pour le type I, les matrices sont scalaires et il n’y a donc pas le choix du représentant. Pour le typeII, le polynôme minimal est scindé et on donne la réduite de Jordan de la classe de similitude. Pourle type III, le polynôme minimal est scindé simple et on donne une matrice diagonale de la classe desimilitude. Pour le type IV, l’endomorphisme associé est cyclique (à l’instar des type II et III) et ondonne la matrice compagnon de la classe de similitude.

L’obtention de ces classes de conjugaison est par exemple utile pour déterminer la table des carac-tères irréductibles de GL2(F3), ce qui nécessite également de déterminer le cardinal de chacune de cesclasses. Cela revient, sachant l’ordre de GL2(F3), à déterminer le stabilisateur, i.e. le centralisateur,de chacune des matrices précédentes.

3.4 Commutant

Le stabilisateur d’une matrice M ∈ Mn(k) pour l’action par conjugaison de GLn(k) n’est riend’autre que l’intersection de GLn(k) avec son commutant. Nous allons préciser ce dernier lorsquel’endomorphisme associé à M est cyclique et nous indiquerons dans le cas général sa dimension.

Dans cette section, E désigne un k-espace vectoriel de dimension finie et u un endomorphisme deE. Notons qu’on a toujours k[u] ⊂ C(u).

Proposition 3.9 C(u) = k[u] si et seulement si u est un endomorphisme cyclique.

Démonstration. Rappelons que C(u) = Endk[X](Eu) (point 2 de la proposition 2.2) et que la sous-algèbre k[u] de C(u) correspond aux endomorphismes µQ : x 7−→ Q · x = Q(u)(x), pour Q ∈ k[X], deEndk[X](Eu).

Supposons u cyclique, il existe alors x0 ∈ E qui engendre le k[X]-module Eu. Pour v ∈ C(u), ilexiste Q ∈ k[X] tel que v(x0) = Q · x0. Alors pour x ∈ E, il existe P ∈ k[X] tel que x = P · x0 et

v(x) = v(P · x0) = P · (v(x0)) = P · (Q · x0) = Q · (P · x0) = Q · x,

autrement dit v = Q(u) ∈ k[u] et C(u) = k[u].Réciproquement, supposons que C(u) = k[u] et considérons E = E1⊕· · ·⊕Es une décomposition de

Frobenius de E relative à u. Soit v la projection sur E1⊕· · ·⊕Es−1 parallèlement à Es, v ∈ C(u). Parhypothèse, il existe Q ∈ k[X] tel que v = Q(u). Or, pour x ∈ Es, 0 = v(x) = Q(u)(x) = Q(uEs)(x),ainsi πu = πuEs |Q. On en déduit que v = Q(u) = 0, donc E = Es, ce qui signifie bien que u estcyclique.

QED

14

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

Remarque 3.10 - Bicommutant de u.Lorsque u est quelconque, on a C(C(u)) = k[u] [Cog00, Prop. 6.2.3 p. 379].

Proposition 3.11 Si P1 | · · · | Pr sont les invariants de similitude de u, notant pi = degPi, on a

dimC(u) =∑i,j

min(pi, pj) =r∑i=1

(2r − 2i+ 1)pi.

La démonstration que nous donnons de cette proposition s’appuie sur le lemme suivant.

Lemme 3.12 Pour un anneau principal A et a, b ∈ A,

HomA(A/aA,A/bA) ' A/pgcd(a, b)A.

Démonstration. Premièrement, en vertu de la propriété universelle du quotient, se donner un élémentde HomA(A/aA,A/bA) équivaut à se donner un élément de HomA(A,A/bA) dont le noyau contient aA.Or se donner un élément f de HomA(A,A/bA) revient à se donner f(1) (le A-module A est monogène,engendré par 1). Finalement se donner un élément de HomA(A/aA,A/bA) équivaut à se donner unélément f de HomA(A,A/bA) tel que f(1) soit annulé par a. Autrement dit

HomA(A/aA,A/bA) ' Tora(A/bA).

Établissons que Tora(A/bA) = bdA/bA, où d = pgcd(a, b). Soit c ∈ A/bA tel que ac = 0, alors

b | ac. Or b = db′ et a = da′, avec pgcd(a′, b′) = 1. Ainsi, en simplifiant par d, il vient b′ | ca′ et donc,en vertu du lememe de Gauss, b′ | c, soit c ∈ b′A/bA. Réciproquement, si c ∈ b

dA/bA, on a c = b′x,avec x ∈ A/bA, et ac = ab′x = a′db′x = a′bx = 0.

Enfin, soit π : A −→ A/bA la surjection canonique et f : A −→ A/bA, a 7−→ aπ( bd) = bdπ(a).

Clairement im f = bdA/bA et ker f = dA, ainsi, en vertu du 1er théorème d’isomorphisme, on a

b

dA/bA ' A/dA.

QED

Revenons à la démonstration de la proposition concernant la dimension de C(u).Démonstration. Eu ' k[X]/(P1)⊕ · · · ⊕ k[X]/(Pr), ainsi

C(u) = Endk[X](Eu) '⊕i,j

Homk[X](k[X]/(Pi), k[X]/(Pj))

et doncdimC(u) =

∑i,j

dim Homk[X](k[X]/(Pi), k[X]/(Pj)).

Or, pour tout i, j, on a Pi | Pj ou Pj | Pi. Dans le premier cas, en vertu du lemme précédent,

Homk[X](k[X]/(Pi), k[X]/(Pj)) ' k[X]/(Pi)

15

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

et doncdim Homk[X](k[X]/(Pi), k[X]/(Pj)) = dim k[X]/(Pi) = pi = min(pi, pj).

L’autre cas donne le même résultat de façon similaire et on obtient la première égalité de la proposition.Par hypothèse, pi 6 pj , pour i 6 j, on obtient alors la deuxième égalité en additionnant tous les

éléments de la matricemin(p1, p1) min(p1, p2) . . . min(p1, ps)min(p2, p1) min(p2, p2) . . . min(p2, ps)

.... . .

...min(ps, p1) min(ps, p2) . . . min(ps, ps)

=

p1 p1 . . . p1p1 p2 . . . p2...

. . ....

p1 p2 . . . ps

.

QED

3.5 Classes de similitude de polynôme caractéristique donné

Deux matrices semblables ont le même polynôme caractéristique, mais la réciproque est évidemmentfausse (dans le cas contraire la théorie des invariants de similitudes n’aurait pas de raisons d’être !).Ainsi, pour un polynôme caractéristique donné χ, l’ensemble des matrices ayant χ pour polynômecaractéristique forme une réunion (finie) disjointe de classes de similitude.

Exemple 3.13 Cherchons toutes les classes de similitude de matrices de M5(R) dont le polynômecaractéristique est (X2− 2)(X − 1)3. Si P1, . . . , Ps sont les invariants de similitude d’une telle matrice,alors

∏si=1 Pi = (X2 − 2)(X − 1)3, ce qui mène aux trois éventualités suivantes :

— s = 1 et P1 = (X2 − 2)(X − 1)3 (il s’agit du cas où la matrice est cyclique) ;— s = 2 et P1 = X − 1, P2 = (X2 − 2)(X − 1)2 ;— s = 3 et P1 = P2 = X − 1, P3 = (X2 − 2)(X − 1).

Un représentant de chacune des classes de similitude est donné par la réduite de Frobenius (écrite parblocs), soit respectivement :

Cχu =

0 0 0 0 −21 0 0 0 20 1 0 0 −10 0 1 0 10 0 0 1 1

,

1

0 0 0 21 0 0 −40 1 0 10 0 1 2

et

1

10 0 −21 0 20 1 1

.

Exemple 3.14 Naturellement le nombre d’orbites formant notre partition dépend du corps sur lequelon se place. Par exemple, cherchons les classes de similitude de matrices deM4(k) dont le polynômecaractéristique est (X2 + 1)2. Lorsque k = R, les listes d’invariants de similitude (P1, . . . , Ps) possiblessont :

— s = 1 et P1 = (X2 + 1)2 ;— s = 2 et P1 = P2 = (X2 + 1) ;

auxquelles s’ajoutent, lorsque k = C :— s = 2 et P1 = (X − i)(X + i)2, P2 = X − i ;— s = 2 et P1 = (X + i)(X − i)2, P2 = X + i.

16

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

3.6 Théorème de Brauer

Théorème 3.15 - Théorème de Brauer.Soit k un corps de caractéristique nulle. Deux permutations σ et τ de Sn sont conjuguées si et

seulement si les matrices de permutations Pσ et Pτ sont semblables sur k.

On pourra se référer à [BMP05, ex. 6.7 p. 321].

4 Topologie des classes de similitudes

Dans toute cette section, k désigne le corps R ou C et, pour une matrice A ∈ Mn(k), on noteraSk(A) sa classe de similitude sur k et Z(A) son centralisateur dans GLn(k). Nous allons voir quetoute classe de similitude est localement compact et non ouverte et que ce peu de propriétés topolo-giques génériques pour les classes de similitude est compensé par la possibilité de caractériser certainespropriétés algébriques d’une matrice par des spécificités topologiques de sa classe de similitude.

Les références utilisées pour ce qui suit sont [FGN09, CG13, RT86, Mne06, Mne97].

4.1 Propriétés topologiques génériques d’une classe de similitude

Proposition 4.1 Une classe de similitude n’est jamais ouverte.

Démonstration. La trace étant constante sur une classe de similitude, cette dernière est incluse dansun hyperplan affine deMn(k).

QED

Proposition 4.2 Sur C les classes de similitude sont connexes.

Démonstration. Pour A ∈ Mn(C), SC(A) est l’image du connexe GLn(C) (cf. [RT86, 1.5.1]) parl’application continue GLn(C) −→Mn(C), P 7−→ PAP−1.

QED

Concernant la connexité, la situation sur R est légèrement plus délicate (cf. proposition 4.15).

Comme nous le verrons à la proposition 4.9, les classes de similitude compactes sont rares. Néan-moins on dispose du résultat suivant [Mne97, 0-C.1.1].

Proposition 4.3 Sur R et C les classes de similitude sont localement compactes.

Pour de brefs rappels au sujet de la notion de compacité locale, et notamment son lien avec lesespaces localement fermés, on se reportera à l’annexe A. Avant de passer à la démonstration du résultatprécédent, remarquons-en immédiatement une conséquence intéressante.

L’application continue GLn(k) −→Mn(k), P 7−→ PAP−1, pour A ∈ Mn(k), induit une bijectioncontinue f : GLn(k)/Z(A) −→ Sk(A). Pour une action continue quelconque d’un groupe topologique Gsur un espace topologique X, cette bijection continue G/Gx −→ G.x, pour x ∈ X, n’est pas en général

17

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

un homéomorphisme (cf. [RT86, exercice 7 du chap. 2, p. 51] pour un contre-exemple). Toutefois lerésultat classique suivant

Proposition 4.4 Si f : X −→ Y est une bijection continue avec X compact et Y séparé, alors f estun homéomorphisme.

se généralise en

Proposition 4.5 [RT86, Th. 2.3.2] ou [CG13, Th. 3.4.3 chap. II]. Soit G un groupe topologique locale-ment compact et dénombrable à l’infini (i.e. réuninon dénombrable de compacts), opérant continûmentet transitivement sur un espace E localement compact. Alors la bijection f : G/Gx −→ E, pour x ∈ E,est un homéomorphisme.

Remarque 4.6 Ce résultat permet de démontrer par récurrence sur n la connexité du groupe GL+n (R)

(cf. [RT86, 2.6.1]).

GLn(k) est localement compact et dénombrable à l’infini (ouvert deMn(k) qui l’est) et agit conti-nûment et transitivement, par définition, sur Sk(A), qui est localement compact, ainsi la bijectioncontinue f : GLn(k)/Z(A) −→ Sk(A) est un homéomorphisme.

Revenons à présent à la démonstration de la proposition 4.3.Mn(k) est un espace vectoriel norméde dimension finie, il est donc localement compact (corollaire du théorème de Riesz) et, en vertu dela proposition A.8, il suffit d’établir qu’une classe de similitude sur R ou C est localement fermée. Enoutre, on peut se contenter d’établir le résultat sur C, dans la mesure où la classe de similitude réelled’une matrice de Mn(R) est la trace de sa classe de similitude complexe dans le fermé Mn(R) deMn(C) (cf. proposition 3.1).

Nous allons nous appuyer sur le résultat intermédiaire suivant.

Proposition 4.7 Pour 0 6 r 6 min(m,n), on note Or = {M ∈Mm,n(k) / rgM = r}, alors

Or =⋃s6r

Os.

Démonstration. Pour I ⊂ [[1,m]] et J ⊂ [[1, n]] de même cardinal, le mineur d’indice (I, J) est l’appli-cation continue

∆I,J :Mm,n(k) −→ k, (ai,j)16i6m,16j6n 7−→ det(ai,j)i∈I,j∈J .

Or nul n’ignore que le rang de A ∈ Mm,n(k) se caractérise comme l’ordre du plus grand mineur nonnul de A, ainsi ⋃

s6r

Os =⋂

|I|=|J |>r+1

∆−1I,J({0})

est un fermé deMm,n(k) et Or ⊂⋃s6rOs. Réciproquement, soit A une matrice de rang s 6 r, il existe

donc P et Q inversibles telles que A = PJsQ−1. Pour k ∈ N∗, soit Ak = P

Is 1kIr−s

(0)

Q−1,

(Ak)k∈N∗ est une suite d’éléments de Or qui converge vers A, ainsi A ∈ Or et on a l’inclusion réciproque.

QED

18

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

Remarque 4.81. L’unique orbite fermée est donc celle de la matrice nulle O0 et l’unique orbite ouverte estOmin(m,n), qui est donc un ouvert dense de Mm,n(k). On retrouve donc le résultat bien connupour GLn(k) = On dansMn(k).

2. Ainsi les orbites Or sont d’intérieur vide pour r < min(m,n), puisque incluses dans le ferméd’intérieur videMm,n(k) \ Omin(m,n).

3. L’adhérence d’une orbite Or est une réunion d’orbite, ce qui est un résultat général pour uneaction continue d’un groupe topologique sur un espace topologique [CG13, Ex. F.4 p. 66].

4. L’orbite Or = Or ∩⋃s>rOs est l’intersection d’un fermé et d’un ouvert de Mm,n(k), elle est

donc localement fermée (cf. proposition A.3) et, ainsi, localement compacte.

D’après le théorème de Weyr 1, pour A ∈Mn(C), avec SpC(A) = {λ1, . . . , λr},

SC(A) = {M ∈Mn(C) / χM = χA} ∩r⋂i=1

n⋂k=0

{M ∈Mn(C) / rg(M − λiIn)k = rg(A− λiIn)k

}.

Le premier ensemble, qui caractérise le fait que M et A ont même spectre, est un fermé deMn(C),puisque M 7−→ χM est continue, et les autres ensembles sont localement fermés, d’après la remarqueprécédente, ainsi SC(A) est localement fermée, d’après le corollaire A.4.

4.2 Propriétés algébriques d’une matrice vs topologie de sa classe de similitude

Les résultats suivants se trouvent dans [FGN09, ex. 4.15-4.17], [Mne06, §16.7] ou [CG13].

Proposition 4.9 Pour A ∈Mn(k), Sk(A) est bornée si et seulement si A est une matrice scalaire.

Démonstration. Le sens réciproque est clair, puisque la classe de similitude d’une matrice scalaire est unsingleton. Pour le sens direct, contraposons et munissons kn de sa norme infini (les normes étant touteséquivalentes). Soit u l’endomorphisme de kn canoniquement associé à A, u n’est pas une homothétie etil existe donc x ∈ kn tel que la famille (x, f(x)) soit libre. Pour λ ∈ k∗, considérons Bλ = (e1, . . . , en)une base de kn telle que e1 = λx et e2 = u(x), alors la première colonne de Bλ = MatBλ(u) ∈ Sk(A)est t(0, λ, 0, . . . , 0) et ‖Bλ‖∞ > |λ|. Ainsi Sk(A) n’est pas bornée.

QED

Proposition 4.10 Pour A ∈Mn(k), Sk(A) ⊂ GLn(k) si et seulement si A est inversible.

Démonstration. Le sens direct est clair. Réciproquement, soit (Ap)p∈N une suite d’éléments de Sk(A)convergant vers une matrice B. Pour tout p ∈ N, detAp = detA et, par continuité du déterminant,detB = lim

p→+∞detAp = detA 6= 0, ainsi B ∈ GLn(k).

QED

1. Théorème de Weyr : lorsque k est un corps algébriquement clos, deux endomorphismes u et v d’un k-espace vectorielE de dimension finie sont semblables si et seulement si, pour tout λ ∈ k et n ∈ N?, rg(u − λ idE)n = rg(v − λ idE)n. Ils’agit d’un corollaire de la réduction de Jordan.

19

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

Le résultat suivant est uniquement valable sur C.

Proposition 4.11 Pour A ∈Mn(C), SC(A) est fermée si et seulement si A est diagonalisable.

Démonstration. Supposons A diagonalisable et considérons (Ap)p∈N une suite d’éléments de SC(A)convergant vers une matrice B. Pour tout p ∈ N, χAp = χA et, par continuité des coefficients dupolynôme caractéristique, χB = lim

p→+∞χAp = χA. En outre, A étant diagonalisable, πA est scindé

simple. Puisque Ap ∈ SC(A), πA(Ap) = 0, pour tout p, et ainsi πA(B) = 0. B est annulé par unpolynôme scindé simple et est donc diagonalisable. Finalement les matrices A et B sont diagonalisableset de même polynôme caractéristique, elles sont donc semblables.

Réciproquement, soit A = (ai,j) ∈ Mn(C) telle que SC(A) soit fermée. Quitte à remplacer A parune matrice semblable, il est loisible de supposer A triangulaire supérieure. Notons B = (e1, . . . , en) labase canonique de Cn et, pour p ∈ N∗, considérons la matrice Ap de l’endomorphisme u canoniquementassocié à A dans la base Bp =

(1pe1, . . . ,

1pn en

). Pour j ∈ [[1, n]], on a

u

(1

pjej

)=

1

pju(ej) =

1

pj

j∑i=1

ai,jei =

j∑i=1

ai,jpj−i

1

piei.

Ainsi, Ap est également triangulaire supérieure, de même diagonale que A, mais tous les coeffi-cients strictement au-dessus de la diagonale sont divisés par une puissance de p. En conséquencede quoi lim

p→+∞Ap = Diag(a1,1, . . . , an,n). Or Ap ∈ SC(A), pour tout p, et SC(A) est fermée, donc

Diag(a1,1, . . . , an,n) ∈ SC(A) et A est diagonalisable.

QED

Sur R, le sens réciproque subsiste (la preuve précédente reste valable), mais le sens direct est faux.En effet, pour A ∈Mn(R), SR(A) = SC(A)∩Mn(R) (cf. proposition 3.1). Ainsi, si A est diagonalisable

sur C sans l’être sur R, comme par exemple(

0 −11 0

), la classe de similitude réelle de A est fermée.

Autrement dit, via les résultats de la section 5 sur les endomorphismes semi-simples (cf. exercice 5.12),on a

Proposition 4.12 Pour A ∈Mn(R), SR(A) est fermée si et seulement si A est semi-simple.

Remarque 4.13 Plus généralement, il est naturel de se demander quelle est l’adhérence d’une classede similitude. L’énoncé de ce résultat (cf. [CG13, Chap. III, 2.7.1 et 3.3]) est aisé à l’aide de la notionde tableaux de Young, qui intervient dans l’étude des classes de similitude de matrices sur C via laréduction de Jordan. N’ayant pas adopté ce point de vue dans ce cours, on renvoie le lecteur intéresséà [CG13, Chap. III] ou [Mne06].

Proposition 4.14 Pour A ∈Mn(k), 0 ∈ Sk(A) si et seulement si A est nilpotente.

Démonstration. Supposons qu’il existe (Ap)p∈N une suite d’éléments de Sk(A) qui converge vers 0.Alors, par continuité des coefficients du polynôme caractéristique, Xn = χ0 = lim

p→+∞χAp = χA. Ainsi,

20

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

An = 0, en vertu du théorème de Cayley-Hamilton, et A est nilpotente. Réciproquement, si A estnilpotente, son polynôme caractéristique est Xn et il existe une base (e1, . . . , en) de kn dans laquellela matrice A0 = (ai,j) de l’endomorphisme canoniquement associé à A est triangulaire supérieure àdiagonale nulle. Comme dans la démonstration précédente, on considère la base Bp =

(1pe1, . . . ,

1pn en

),

pour p ∈ N∗. Puisque A0(ej) =∑j−1

i=1 ai,jej , A0

(ejpj

)=∑j−1

i=1ai,jpj−i

eipi. Ainsi, la suite de matrices

(Ap)p∈N∗ , où Ap est la matrice de l’endomorphisme canoniquement associé à A dans la base Bp, estune suite d’éléments de Sk(A) qui converge vers 0.

QED

Proposition 4.15 Pour A ∈Mn(R), SR(A) est non-connexe si et seulement si Z(A) ⊂ GL+n (R).

Démonstration. Si Z(A) ⊂ GL+n (R), on dispose alors d’une application continue et surjective

GLn(R)/Z(A) −→ GLn(R)/GL+n (R) ' {±1} .

Or, on a vu à la section précédente, comme application de la locale compacité de SR(A), que SR(A)est homéomorphe à GLn(R)/Z(A) et, s’appliquant sur {±1}, ne saurait donc être connexe. Récipro-quement, s’il existe Q ∈ Z(A) avec detQ < 0, alors, pour P ∈ GLn(R), PAP−1 = (PQ)A(PQ)−1 etP ou PQ ∈ GL+

n (R), autrement dit SR(A) = GL+n (R).A. Or GL+

n (R) est connexe (cf. [RT86, 2.6.1] 2).

QED

Corollaire 4.161. Pour une matrice A ∈M2n+1(R), SR(A) est connexe.2. Pour une matrice A ∈M2n(R), s’équivalent

(i) SR(A) est non connexe ;(ii) le commutant de A est formé de matrices de déterminant positif.(iii) il n’existe pas de décomposition de l’espace en somme de deux sous-espaces stables de

dimension impaire ;

Démonstration.1. −I2n+1 ∈ Z(A) est de déterminant strictement négatif.2. (i) ⇔ (ii) est clairement une conséquence de la proposition précédente. Pour l’équivalence avec

(iii), on renvoie à [Mne97, 0-C.11.51]

QED

Remarque 4.17 D’après le corollaire précédent, la classe de similitude de A ∈ M2(R) est connexesi et seulement si A est diagonalisable (cf. [Mne97, 0-C.11.49] pour une preuve directe).

2. Plus modestement, on peut établir la connexité de GL+n (R) via l’homéomorphisme entre GLn(R) et S++

n (R)×On(R)donné par la décomposition polaire d’une matrice.

21

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

5 Endomorphismes semi-simples

Cette section dédiée à la notion d’endomorphismes semi-simples suit de très près l’exposé de la notede cours d’Antoine Ducros Quelques compléments concernant les invariants de similitude disponiblesur le site de la préparation à l’agrégation de Rennes 1.

Définition 5.1 Un endomorphisme u d’un k-espace vectoriel E est dit semi-simple lorsque toutsous-espace u-stable de E admet un supplémentaire u-stable.

Cette définition se généralise aux A-modules :

Définition 5.2 Un A-module M est dit semi-simple lorsque tout sous-module de M admet unsupplémentaire.

Ainsi un endomorphisme u d’un k-espace vectoriel E est semi-simple si et seulement si Eu est unk[X]-module semi-simple.

Remarque 5.3 Les espaces vectoriels sont des modules semi-simples.

Dans toute la suite de cette section, A désigne un anneau principal, pour lequel on note P unsystème d’irréductibles, et M un A-module de torsion. Par exemple, le k[X]-module Eu associé à unendomorphisme u d’un k-espace vectoriel E de dimension finie.

Les quatre lemmes suivant caractérisent la semi-simplicité de M en fonction de sa p-torsion, notionque nous commençons par rappeler.

Définition 5.4 Pour p ∈ P, un élément m ∈ A est dit de torsion p-primaire lorsqu’il existe n ∈ Ntel que Ann(m) = pnA. On appelle composante p-primaire de M , notée M(p), le sous-module de Mformé des éléments de torsion p-primaire.

Lemme 5.5 Si M est un A-module de torsion, alors M =⊕

p∈PM(p) et, pour un sous-module N deM , N =

⊕p∈P N ∩M(p).

Démonstration. Commençons par établir que les composantes p-primaires deM sont en somme directe.Soit m = mp1 + · · ·+mpr = 0, avec mpi ∈M(pi) et p1, . . . , pr ∈ P distincts. D’après le lemme Chinois,pour i ∈ [[1, r]], il existe ai ∈ A tel que ai ≡ 1 mod Ann(mpi) et ai ≡ 0 mod Ann(mpj ), pour j 6= i.Alors 0 = aim = mpi , pour tout i.

Pour m ∈M , considérons ϕ : A −→M,a 7−→ am. M étant de torsion, il existe b ∈ A \ {0} tel quekerϕ = Ann(m) = bA. Décomposant b =

∏p∈P p

np , on a alors

m ∈ imϕ ' A/ kerϕ '⊕p∈P

A/pnpA ⊂⊕p∈P

A(p).

Ainsi M est la somme de ses composantes p-primaires et M =⊕

p∈PM(p).Pour la seconde assertion, il suffit d’observer que N , sous-module d’un module de torsion, est lui

même de torsion et que, pour p ∈ P, N(p) = M(p) ∩N .

QED

22

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

Remarque 5.6 Si M est de type fini, il existe d1, . . . , dr ∈ A \ ({0} ∪ A∗) tels que d1 | · · · | dr etM ' A/d1A ⊕ · · · ⊕ A/drA. Soit p1, . . . , ps ∈ P distincts tels que dj =

∏si=1 p

ni(j)i , alors, d’après le

lemme Chinois, M '⊕s

i=1

⊕rj=1A/p

ni(j)i A et M(pi) =

⊕rj=1A/p

ni(j)i A.

Lemme 5.7 Si M est un A-module de torsion, M est semi-simple si et seulement si M(p) est semi-simple, pour tout p ∈ P.

Démonstration. Supposons M semi-simple et soit p ∈ P et N un sous-module de M(p). N admet doncun supplémentaire N ′ dans M , pour lequel

— N ∩ (N ′ ∩M(p)) ⊂ N ∩N ′ = {0} ;— pour m ∈M(p), il existe (n, n′) ∈ N ×N ′ tel que m = n+ n′, or m,n ∈M(p), donc n′ ∈M(p).

Ainsi N ′ ∩M(p) est un supplémentaire de N dans M(p) et M(p) est semi-simple.Réciproquement, si M(p) est semi-simple pour tout p ∈ P. Soit N un sous-module de M , par

hypothèse, pour tout p ∈ P, le sous-module N ∩M(p) de M(p) admet un supplémentaire N ′p. Alors,N ′ =

⊕p∈P N

′p est un supplémentaire de N dans M , d’après le lemme 5.5.

QED

Soit p ∈ P et M un A-module de type fini et de torsion p-primaire, i.e. M = M(p). Il existe alors,d’après la remarque 5.6, des entiers n1, . . . , ns ∈ N∗ tels que M '

⊕si=1A/p

niA.

Lemme 5.8 Avec les hypothèses et notations précédentes, M est semi-simple si et seulement si ni = 1,pour tout i.

Démonstration. SiM '⊕s

i=1A/pA, alors Ann(M) = pA et la structure de A-module deM induit unestructure de A/p-espace vectoriel. Or les sous-espaces de M pour chacune de ces structures coïncident.PuisqueM est semi-simple pour sa structure d’espace vectoriel, il l’est donc également pour sa structurede A-module. Pour le sens direct, contraposons en supposant qu’il existe j tel que nj > 2 et considéronsle sous-module N =

⊕i 6=j A/p

niA ⊕ pA/pnjA de M . Si N possèdait un supplémentaire dans M , ilserait isomorphe àM/N ' A/pA, donc formé d’éléments annulés par p. Or ces éléments appartiennentjustement tous à N ; en effet la projection d’un tel élément sur A/pnjA est la classe d’un élémentmultiple de pnj−1 donc de p. M ne saurait donc être semi-simple.

QED

Lemme 5.9 Soit M un A-module de torsion de type fini et d1 | · · · | dr ses facteurs invariants. M estsemi-simple si et seulement si dr est sans facteur carré.

Démonstration.(M est semi-simple)

⇐⇒(∀ p ∈ P,M(p) =

r⊕i=1

A/pνp(di)A est semi-simple) lemme 5.7

⇐⇒(∀ p ∈ P,∀ i ∈ [[1, r]] , νp(di) 6 1) lemme 5.8⇐⇒(∀ p ∈ P, νp(dr) 6 1) puisque di | dr

QED

23

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

Finalement, le lemme précédent implique la proposition suivante.

Proposition 5.10 Soit E un k-espace vectoriel de dimension finie et u ∈ L(E). u est semi-simple si etseulement si πu est sans facteur carré.

Démonstration. πu est le facteur invariant dr du k[X]-module de torsion de type fini Eu.

QED

Remarque 5.11 Sur un corps algébriquement clos, les notions d’endomorphismes semi-simples etd’endomorphismes diagonalisables se confondent.

Exercice 5.12 Si k est de caractéristique nulle, montrer qu’un endomorphisme d’un k-espace vectorielde dimension finie est semi-simple si et seulement s’il est diagonalisable sur une extension de k.

A Espaces localement fermés, espaces localement compacts

Pour ces deux notions de topologie, deux bonnes références sont [Bou71] et [Que07]. Dans tout cequi suit, X désigne un espace topologique.

Définition A.1 Une partie L de X est dite localement fermée en x ∈ L s’il existe un voisinage V de xdans X tel que L ∩ V soit un fermé de V . L est dite localement fermée lorsqu’elle l’est en chacun deses points.

Exemple A.2 Toute partie fermée de X est naturellement localement fermée.

Proposition A.3 Pour L ⊂ X, s’équivalent

(i) L est localement fermée ;

(ii) L est un ouvert de L ;

(iii) L est intersection d’un ouvert et d’un fermé de X.

Démonstration. (ii)⇒ (iii) est trivial et (iii)⇒ (i) en vertu de la définition A.1. Pour x ∈ L, il existeU un voisinage ouvert de x tel que U ∩L soit fermé dans U . Ainsi U ∩L = U ∩L, ce qui montre dansle sous-espace L que x est intérieur à L, i.e. L est ouvert dans L, soit (i)⇒ (ii).

QED

Corollaire A.4 L’intersection de deux sous-espaces localement fermés l’est également.

24

Préparation à l’agrégationClasses de similitude de matrices

ENS Rennes - Année 2014–2015Romain Basson

Proposition A.5 Dans un espace topologique X séparé, en un point x ∈ X, s’équivalent(i) x possède un voisinage compact ;(ii) x possède une base de voisinages compacts.

Le cas échéant, X est dit localement compact en x. X est dit localement compact lorsqu’il l’est enchacun de ses points.

Démonstration. Seul (i) ⇒ (ii) est à montrer. Soit x ∈ X, U un voisinage compact de x et V unvoisinage de x. V ∩U est un voisinage de x dans le sous-espace compact U . Soit δ la frontère de V ∩U ,qui est compact (fermé dans le compact U). Pour tout y ∈ δ, il existe Uy 3 y et Wy 3 x des ouvertsdisjoints de V ∩ U (X est séparé). On peut alors extraire un recouvrement fini du compact δ par lesUy et considérer W l’intersection des ouverts Wy correspondant. Alors W est un voisinage compact dex dans V ∩ U .

QED

Exercice A.61. Un espace compact est localement compact.2. Un espace vectoriel normé est localement compact si et seulement s’il est de dimension finie

(corollaire du théorème de Riesz).3. Tout ouvert et tout fermé d’un espace localement compact le sont également.

Les notions de localement fermé et localement compact sont intimement liées comme le montre lesdeux propositions qui suivent.

Proposition A.7 Dans un espace séparé, tout sous-espace localement compact est localement fermé.

Démonstration. Soit A un sous-espace localement compact et x ∈ A, il existe alors V un voisinage dex dans X tel que V ∩A soit compact et par suite fermé dans V .

QED

Proposition A.8 Dans un espace localement compact X, tout sous-espace localement fermé est loca-lement compact.

Démonstration. Supposons A localement fermé dans X. Pour tout x ∈ A, il existe U un voisinagede x dans X tel que U ∩ A soit fermé dans U . Soit V ⊂ U un voisinage compact de x dans X,V ∩A = (U ∩A) ∩ V est fermé dans V , donc compact et c’est un voisinage de x dans A.

QED

Corollaire A.9 Dans un espace localement compact, l’intersection de deux sous-espaces localementcompacts l’est également.

Remarque A.10 L’importance de la notion de compacité locale se justifie notamment par les deuxrésultats suivants :

1. Un espace topologique localement compact est un espace de Baire.2. La compactification d’Alexandrov d’un espace localement compact.

25