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reproduction autorisée Lettre d’information et de débat n°14 Parution bimestrielle, juillet-août 2009 Bâtir un projet de société Nous l’avons démontré lors du dernier colloque de Réforme & Modernité - « De la crise à l’après crise, quelle trajectoire pour la France ? », la sortie de crise ne sera ni uniquement ni principalement économique et financière, mais elle se fera davantage autour d’une vision, d’un projet de société. Je suis un libéral assumé, je ne suis pas matérialiste pour autant. Jean-François Copé a eu la bonne idée de me demander un rapport sur la prise en compte, dans notre famille politique, des « questions de société ». Mon rapport est disponible sur notre site comme sur mon blog (www.herve- mariton.net ), les comptes rendus d’auditions le seront bientôt. Oui, nous pouvons offrir à nos concitoyens autre chose que le travail le dimanche ou la poursuite de finalités matérielles. Nous pouvons construire un projet et je propose une méthode : écouter la société française dans sa diversité, travailler les sujets qui font débat en affirmant nos convictions, au premier rang desquelles la dignité de la personne, faire œuvre de pédagogie sans nous laisser impressionner par les sondages, nous libérer de la dialectique de la conservation et du changement et rechercher ce qui est juste. Souvent nous sommes engagés, directement, personnellement, en politique parce que nous voulons construire plutôt que céder à un sens de l’histoire. Pour autant, notre engagement a un sens, en prise avec un monde qui bouge. Autour de ce travail, Réforme & Modernité organise un débat à Paris le mercredi 16 septembre, avec les amis de quelques autres lieux de réflexion politique. Autour de ces thèmes, j’interviendrai à la rentrée lors de différentes « Universités d’été » et Réforme & Modernité sera présent au campus des Jeunes Populaires. Parce que Réforme & Modernité peut apporter une valeur ajoutée essentielle à la fondation, à la formulation et à l’explication d’un projet politique dont la France a vraiment besoin - 2012 se jouera sans doute largement là-dessus. De quoi espérer de la politique. Merci à toutes et à tous pour votre engagement. Bon été et bonne rentrée. Hervé Mariton Député de la Drôme Président de Réforme & Modernité Contact : [email protected] PAGE 1

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Page 1: Bâtir un projet de société - Institut économique Molinari · 2019. 5. 21. · portefeuille de mesures Grenelle Environnement »1 de Boston Consulting Group (BCG) présentée le

reproduction autorisée

Lettre d’information et de débat n°14 Parution bimestrielle, juillet-août 2009

Bâtir un projet de société

Nous l’avons démontré lors du dernier colloque de Réforme & Modernité - « De la crise à l’après crise, quelle trajectoire pour la France ? », la sortie de crise ne sera ni uniquement ni principalement économique et financière, mais elle se fera davantage autour d’une vision, d’un projet de société. Je suis un libéral assumé, je ne suis pas matérialiste pour autant.

Jean-François Copé a eu la bonne idée de me demander un rapport sur la prise en compte, dans notre famille politique, des « questions de société ». Mon rapport est disponible sur notre site comme sur mon blog (www.herve-mariton.net), les comptes rendus d’auditions le seront bientôt.

Oui, nous pouvons offrir à nos concitoyens autre chose que le travail le dimanche ou la poursuite de finalités matérielles. Nous pouvons construire un projet et je propose une méthode : écouter la société française dans sa diversité, travailler les sujets qui font débat en affirmant nos convictions, au premier rang desquelles la dignité de la personne, faire œuvre de pédagogie sans nous laisser impressionner par les sondages, nous libérer de la dialectique de la conservation et du changement et rechercher ce qui est juste.

Souvent nous sommes engagés, directement, personnellement, en politique parce que nous voulons construire plutôt que céder à un sens de

l’histoire. Pour autant, notre engagement a un sens, en prise avec un monde qui bouge.

Autour de ce travail, Réforme & Modernité organise un débat à Paris le mercredi 16 septembre, avec les amis de quelques autres lieux de réflexion

politique. Autour de ces thèmes, j’interviendrai à la rentrée lors de différentes « Universités d’été » et Réforme & Modernité sera présent au campus des Jeunes Populaires.

Parce que Réforme & Modernité peut apporter une valeur ajoutée essentielle à la fondation, à la formulation et à l’explication d’un projet politique dont la France a vraiment besoin - 2012 se jouera

sans doute largement là-dessus. De quoi espérer de la politique.

Merci à toutes et à tous pour votre engagement. Bon été et bonne rentrée.

Hervé MaritonDéputé de la Drôme

Président de Réforme & Modernité

Contact : [email protected] PAGE 1

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La croissance verte au secours du développementpar Cécile Philippe, directrice de l'Institut économique Molinari

Au milieu d’une crise dont tout le monde reconnaît le caractère redoutable, on s’accroche à ce qu’on peut. Pour beaucoup la solution serait dans le vert pour restructurer une économie en berne. C’est bien ce que conclue le rapport « Réflexions sur le portefeuille de mesures Grenelle Environnement »1

de Boston Consulting Group (BCG) présentée le 16 juin en affirmant que les mesures du Grenelle de l’environnement pourraient créer environ 600 000 emplois par an.

Cela semble fort prometteur face aux 700 000 emplois qui seront détruits en 2009, selon l'INSEE !2 Sauf que la création de ces emplois pour la plupart aidés va aussi entraîner une destruction d’autres emplois dans le secteur privé traditionnel.

Afin de lutter contre le réchauffement de la planète dont l’homme est accusé d’être responsable via ses émissions de CO2, les pouvoirs publics en France et d’ailleurs subventionnent les énergies renouvelables comme l’éolien et le solaire. Censées favoriser un meilleur environnement - point néanmoins débattu par près de 700 scientifiques au niveau international3, les énergies renouvelables sont aussi considérées comme un formidable moyen de relance économique.

Sauf que les futurs emplois verts pour la plupart aidés, seront financés par des impôts et taxes, prélevés sur les secteurs traditionnels, ce que l'étude passe sous silence. Ces nouveaux emplois vont absorber des ressources et du capital, qui ne seront plus disponibles pour s’investir dans les entreprises privées. Ce serait une erreur de se focaliser sur la création des emplois verts en occultant la destruction d’emplois traditionnels. C’est cet effet global que des économistes espagnols ont essayé d’estimer pour leur pays. Ils calculent ainsi que chaque emploi vert crée sur fond public entraînera la destruction de 2,2 emplois privés4.

Cette méthode n’est pas sans rappeler celle d’un

économiste français du XIXe siècle, Frédéric Bastiat. Pour ce dernier, le bon économiste était celui qui voit « ce que l’on voit » mais aussi « ce que l’on ne voit pas ». Dans sa fameuse « pétition des marchands de chandelle », il imaginait des fabricants de chandelle proposant de stimuler leur activité en empêchant le soleil de briller. Bien sûr, cette démarche aurait permis de créer des emplois dans cette industrie. Elle aurait néanmoins détruit des ressources utiles ailleurs et conduit in fine à une détérioration des conditions de vie du plus grand

nombre. Confondre l’intérêt à court terme de certains fabricants et celui de l’ensemble des individus n’est jamais une bonne chose…

Aussi, on peut craindre aujourd’hui que les milliards dépensés pour subventionner les technologies vertes enrichissent une minorité tout en retardant ou empêchant l’apparition d’autre technologies, biens et services que nous jugerions plus utiles.

Sous cet angle, l’engouement pour le vert ne pourrait être qu’un mirage incompatible avec un vrai développement durable. Pire, il pourrait nous ralentir et conduire à l’émergence d’une nouvelle bulle…. verte cette fois !

__________________________________________1. Voir le rapport disponible sur http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/nbon_rapprt_cle66a96e.pdf2. Voir Conjoncture française, Insee, juin 2009, p. 75, disponible sur http://www.insee.fr/fr/indicateurs/analys_conj/archives/juin2009_f1.pdf3. Voir la pétition signée par ces scientifiques sur http://epw.senate.gov/public/index.cfm?FuseAction=Minority.Blogs&ContentRecord_id=2674e64f-802a-23ad-490b-bd9faf4dcdb7 4. Voir Gabriel Calzada, « Study of the effects on employment of public aid to renewable energy sources », Universidad Rey Juan Carlos, mars 2009, disponible sur http://www.juandemariana.org/pdf/090327-employment-public-aid-renewable.pdf, p. 28

▫ Directeur de publication : Herbert Axelrad ▫ Rédacteur en chef : Julien Arnoult PAGE 2

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Les « élections européennes » des 4-7 juin,vraies ou fausses élections

par Christian Casper, membre du bureau de R&M

Le débat sur l'avenir de l'Europe, de l'Union européenne (UE), et sur leur place dans un monde où le rapport des forces évolue très rapidement n'a pas eu lieu à l'occasion de « ces élections ». Dans l'UE, comme en France, aucun bilan n'a été fait, aucune perspective n'a été tracée. On doit le déplorer.

En France, on se préoccupe désormais des élections régionales de mars 2010 avec, en arrière-plan, l'élection présidentielle du printemps 2012. Le Président de la République n'a pas eu un mot sur l'Europe dans son discours devant les deux assemblées réunies en Congrès dans le cadre solennel de Versailles le 22 juin dernier.

Décidément, le temps politique est court. Il est rythmé par des échéances électorales qui sont et qui restent géographiquement nationales.

*

Tout d'abord, soyons précis. L'élection du 7 juin en France n'était pas une « élection européenne »; elle portait sur l'élection en France de 72 députés au Parlement européen qui est l'une des trois principales institutions de l'UE (Conseil, Commission, Parlement européen). De même, la présidence française du deuxième semestre 2008, dont on a tant parlé en France, et dont on parlera de moins en moins, a été une présidence du Conseil européen et non pas de l'UE.Albert Camus a justement écrit : « Mal nommer les choses, c'est ajouter au désordre du monde ».Or, mal nommer les choses quand les règles de fonctionnement de l'UE sont déjà si complexes est un phénomène aggravant conduisant au mieux au désintérêt, à la désaffection et au pire au rejet quand la signification du vote échappe à des citoyens qui veulent simplement savoir « où est le pouvoir? » avant de déposer leur bulletin de vote dans les urnes.

D'autres raisons : la confusion entre enjeux européens et enjeux nationaux, circonscriptions

électorales trop grandes (huit en France) pour qu'il soit réellement nécessaire aux candidats de faire campagne, scrutin proportionnel avec listes bloquées (les candidats éligibles sont désignés par l'appareil des partis politiques pour des raisons, entre autres, d'équilibres internes, l'élection elle-même étant une simple variable d'ajustement), etc... ont eu pour conséquence que ces « élections » sont restées « très mal identifiées ».

Ajoutons qu'en France, par un habile détournement de procédure qui s'apparente à un détournement (pour ne pas parler « d'abus ») de pouvoir, le même traité présenté habilement et à tort comme « simplifié » rejeté par une nette majorité lors du référendum du 29 mai 2005 a été ratifié postérieurement par le Parlement.

Il ne faut pas s'étonner, et peut-être même faut-t-il sans aucun cynisme se réjouir, que le taux d'abstention ait atteint le chiffre de 59,5% en France, la moyenne européenne se situant à 56,9%.Peut-on parler de « vraies élections »? J'en doute.

*

La campagne fût atone. Sur le fond, le débat a été essentiellement limité en France à trois sujets:- l'adhésion, en cours de négociation, de la Turquie (pays très majoritairement musulman) à l'UE, celle-ci étant repoussée par une large majorité de Français ;- le réchauffement climatique qui fait l'objet d'un large consensus mou ;- la crise financière et économique en dénonçant l'inaction de la Commission à laquelle, comme pour la mise en œuvre de la Stratégie de Lisbonne, on n'a pas donné les moyens juridiques et financiers de l'action.

En résumé, ces « élections » ont été géographiquement bornées dans un registre cadré. L'UE mérite plus ; elle mérite mieux.

►►► (suite page 4)

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Les « élections » au Parlement européen qui ont eu lieu du 4 au 7 juin dans les vingt-sept états-membres qui composent l'UE auront été de « fausses » élections, ou des élections de deuxième classe, dans la mesure où l'UE continue à demeurer incomparablement sous-dotée en légitimité politique par rapport aux états- membres. Il est clair en particulier que les plus grands d'entre eux sont plus « visibles » que ne l'est actuellement l'UE prise dans son ensemble.

Quelle qu'ait été l'ampleur considérable des réalisations accomplies depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, et notamment la création réussie de l'euro, les défis posés à l'UE sont aujourd'hui encore plus considérables parce que la naissance d'une Europe politique est encore en gestation. Sa réalisation imposerait de nouveaux abandons de souveraineté. Les états-membres ne semblent pas encore tout à fait disposés à y consentir. Certains d'entre eux se crispent toujours sur leur mémoire de royaume, d'empire, et d'autres, notamment ceux qui ont retrouvé récemment leur souveraineté, ne semblent pas vouloir aller plus loin après avoir confié l'essentiel de celle-ci, la défense, à l'OTAN.

En terme de puissance, les chiffres (démographie globalement en berne, maigres budgets militaires orientés à la baisse, etc.) sont douloureux à lire et trouvent leur traduction dans la faible influence géopolitique de l'UE. Il est inconvenant d'additionner des chiffres nationaux pour se donner l'illusion de la puissance. Seule la fédération des chiffres donnera des leviers de puissance.

Faute de puissance, les états-membres de l'UE s'adonnent au soft power ou, plus élégamment encore, au smart power...

*

L'Europe est aujourd'hui en panne. Ce n'est pas qu'une panne technique. C'est une panne d'identification et d'envie de la part des citoyens, les élites politiques et économiques leur ayant confisqué l'appropriation de l'Europe. L'Europe citoyenne, c'est-à-dire politique, est à créer.

On a pu, reprenant Stéphane Mallarmé, qualifier la

Politique étrangère et de sécurité commune (PESC) de « bibelot d'inanité sonore ».

Il est de plus en plus en plus évident qu'une Europe politique et démocratique ne pourra se former qu'à contre-courant de ce qui a été fait jusqu'à présent. Il appartient aux états-membres les plus peuplés (les six plus grands d'entre eux représentent 75% de la population de l'UE, soit une population de 340 millions d'habitants qui est encore légèrement supérieure à celle des États-Unis) d'avoir le courage de prendre l'initiative et de définir avec les peuples qui le voudront l'avenir de l'Europe dans un espace partagé. Sans eux, rien n'est possible.

Des progrès vers une UE politique ont été amorcés très récemment dans la mesure où la question des frontières de l'UE a été soulevée. En outre, selon les sondages, l'idée d'un président de l'UE élu au suffrage universel n'apparait iconoclaste.

L'avenir de l'UE, et donc de la France, reste ouvert : elle peut devenir un acteur à part entière des relations internationales, mais elle peut également rester de fait un simple relais de la domination américaine, ou tomber en léthargie et cultiver un jardin somme toute bien agréable.

Convenons que, pour effectuer le choix de l'Europe, il faudra organiser une « vraie » élection précédée d'un débat dense et approfondi, échappant au temps court...

On a pu dire qu'il faut donner du temps au temps, mais j'ajouterai, en reprenant le beau titre du dernier livre d'Antonio Tabucchi, que « le temps vieillit vite ».

Vous pouvez librement diffuser ce bulletin autour de vous, par voie électronique ou papier PAGE 4

Elections au Parlement européen, juin 2009répartion des 736 députés par groupe politique

GUE/NGL (35)Verts/ALE (55)SD (184)Non-inscrits (26)

ADLE (85)

PPE (265)

ECR (55)ELD (32)

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Mieux vaut voter que travailler le dimanchepar Julien Arnoult, président du Cercle Jean Bodinet Matthieu Labbé, membres du bureau de R&M

Presque tombée aux oubliettes après les divisions de la majorité l'hiver dernier, la question du travail dominical, qui a déjà connu deux rapports et deux propositions de loi en un an et demi, est revenue à l'agenda cet été. Lourd d'enjeux, ce thème est devenu au fil du temps l'un des symboles d'un gouvernement qui veut incarner le changement.

Le Président de la République, en annonçant son programme de rupture, a voulu faire bouger les lignes à un rythme effréné. Désacraliser le travail et la consommation le dimanche s'inscrit dans cette logique. Mais une fois le mouvement enclenché, la fixation de ces nouvelles lignes se posent, ne serait-ce que pour légiférer. Les discussions ont d'ailleurs porté sur la définition du nombre de jours ouvrés supplémentaires, des zones touristiques concernées ainsi que la rémunération des salariés. C'est à ce moment que la forme intervient, en particulier la méthode, a posteriori de nombreuses réserves et d'un vote difficile au Parlement. Le référendum est à la fois le moyen le plus direct d'introduire pleinement le débat dans la société, et son résultat l'état des lieux précis de cette évolution et le feu vert citoyen à ladite mesure.

Les deux derniers référendums, sur le quinquennat en 2000 avec une maigre participation et le « non » franc à la Constitution européenne en 2005, étaient de nature institutionnelle, donc politiquement risqués. D'où le refus de Nicolas Sarkozy, exprimé durant la campagne présidentielle, de consulter ses concitoyens. Or, les questions de société ne revêtent pas la même difficulté politique, où, quel que soit le résultat, personne ne peut revendiquer une victoire ou une défaite, et où aucune idéologie ou courant de pensée ne saurait prévaloir. Le référendum vise à demander aux électeurs d'exprimer leur choix de société.

Au-delà des arguments avancés sur les bienfaits espérés de l'extension du travail dominical sur l'économie, le débat porte aussi sur les valeurs tel le rapport au travail ou encore la religion. Il en est de même pour l'euthanasie, le mariage homosexuel, la bioéthique, la dépénalisation de certaines drogues, etc. Sur ces sujets, gouvernement et parlementaires ne sauraient être complètement légitimes pour décider

seuls de l'orientation à donner. Sans faire référence à notre voisin suisse, dont le système de consultation populaire est exemplaire et sans égal, on peut par exemple citer les Californiens, qui se sont prononcés en 2004 sur le financement des cellules souches, ou encore les Portugais en 2007 sur l'interruption volontaire de grossesse.

Certes, la consultation peut être détournée à des fins politiciennes, risque par ailleurs inhérent à tout scrutin via le vote-sanction. Mais cette politisation peut être évitée en faisant voter les

Français le même jour sur plusieurs sujets. C'est une pratique courante à l'étranger, où les référendums se mêlent, y compris avec des élections locales voire parfois législatives.

Tactiquement, le Chef de l'État introduirait ainsi de nouveaux clivages ou créerait des consensus, répondant ou retirant des revendications de ses adversaires politiques. A commencer par Ségolène Royal, chantre de la « démocratie

participative », qui se verrait couper l'herbe sous le pied d'une de ses principales spécificités.

Outre la véritable innovation politique qu'elle représente, cette méthode permet de faire vibrer notre vie publique et au Président de la République de symboliser la modernité démocratique. D'autant plus que le changement aura lieu au rythme et à la volonté déterminé par le peuple, par cette voie ou par une autre. C'est peut-être aussi cela, la rupture.

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Réussir l'entrée de l'aéronautiquedans son troisième âge

par Renaud Bellais, président de la commission Défense de la Fondation Concorde

Le Salon du Bourget a montré la résilience d'Airbus face à la crise économique. En effet, celle-ci frappe tout particulièrement les compagnies aériennes : le trafic passager a baissé de 9,3% depuis un an quand le trafic fret s'est contracté de 17,4%. Néanmoins Airbus maintient ses prises de commandes bien mieux qu'au cours des crises précédentes. En 1993, elle n'avait récolté que 38 commandes sur toute l'année ; en 2009, Airbus a déjà engrangé plus d'une centaine de commandes dont 58 fermes. S'il est bon de s'en réjouir, il ne faut cependant pas négliger les menaces et défis qui sont bien réels pour notre industrie aéronautique.

La fragilisation due à la crise sera perceptible plus nettement en 2010, quand Airbus ajustera son plan de charge au regard des commandes actuelles et des annulations ou reports de livraison. Néanmoins Airbus comme Boeing semblent confiants et maintiennent un programme de production relativement élevé. Au-delà des évolutions conjoncturelles, ce sont les transformations structurelles, profondes de l'aéronautique qu'il faut prendre en considération pour assurer la pérennité et la croissance d'une industrie par essence de souveraineté, porteuse d'emplois qualifiés et vecteur d'exportations. Car la concurrence mondiale devient de plus en plus forte et le besoin d'investissement crucial.

La première transformation est industrielle : la mondialisation de l'industrie aéronautique. Jusqu'alors concentrée en Europe et aux États-Unis, cette industrie s'ouvre de plus en plus à des partenariats internationaux et voit apparaître de nouveaux compétiteurs. Ainsi certains n'ont pas manqué de s'émouvoir du vol du premier A320 produit en Chine en mai dernier. De fait, il s'agit d'une évolution majeure pour Airbus qui a ouvert sa première ligne d'assemblage finale hors d'Europe. En transférant nos savoir-faire et nos technologies, ne

risquons-nous pas de favoriser le renforcement à terme d'un concurrent ? La question se pose aussi pour les coopérations avec la Russie, le Brésil, le Mexique, etc.

Airbus et Boeing accordent une place de plus en plus grande non seulement de la production mais aussi du développement de nouveaux modèles à des partenaires de premier rang. Boeing a ainsi confié près de la moitié du développement du 787 à des entreprises japonaises et italiennes, quand Airbus a

proposé de confier plus de 10% du développement de l'A350 à des entreprises chinoises et russes. Il s'agit plutôt d'une accélération d'un processus déjà bien engagé que d'une réelle rupture.

Depuis les années 1970, Boeing et Airbus n'ont cessé d'accroître l'internationalisation de leur approvisionnement. Par exemple, un tiers des Boeing dans le monde et la moitié

des Airbus ont des composants chinois. De fait, l'aéronautique entre dans son troisième âge. Après le temps des pionniers et celui de la production industrielle vient celui de la mondialisation de la chaîne de valeur, liée tant au souhait de nombreux pays d'accéder aux compétences aéronautiques qu'au coût d'entrée dans les nouveaux programmes qui conduit à une nécessaire division internationale des activités.

La deuxième transformation est technologique. Les avions de demain doivent répondre à des contraintes économiques et environnementales de plus en plus fortes. Ces deux dimensions sont d'ailleurs liées : des avions plus propres seront aussi des avions moins coûteux à opérer, parce qu'ils consommeront moins de carburant et qu'ils ne seront pas sanctionnés pour leurs émissions. Cependant cette évolution suppose des sauts technologiques.

►►► (suite page 7)

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►►► (suite de la page 6)

En effet, des ruptures conceptuelles et des innovations majeures sont nécessaires pour la prochaine génération d'avions à l'horizon 2020-2025, en particulier pour le successeur de l'A320 et du 737.

Nombre de commandes d'avions d'Airbus et de Boeing :

Il n'est donc pas possible de nous reposer sur nos lauriers : la France et les pays européens doivent mobiliser leurs ressources financières, mais aussi

scientifiques et humaines pour inventer les avions de demain. Si nous négligeons cet effort, d'autres pays aéronautiques émergents n'hésiteront pas à prendre la relève et à nous supplanter. Or les enjeux de souveraineté, de croissance, d'emplois et d'environnement sont majeurs. Les pôles de compétitivité ont montré la voie, mais l'effort reste encore en deçà de l'investissement et de la mobilisation nécessaires.

Conserver en France des activités de production est nécessaire pour maîtriser le développement des futurs modèles. Sans elles, nous perdrions des compétences et des savoir-faire essentiels pour assurer notre place dans l'économie mondiale. Cependant il est tout aussi illusoire de vouloir garder en Europe toutes les activités, car ce serait ni économiquement ni politiquement acceptable. L'industrie a un avenir en France si nous choisissons la bonne place dans la chaîne de valeur dans une activité en voie de mondialisation et si nous sommes à même d'y dédier les ressources idoines.

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Des nouvelles de Réforme & Modernité1) Notre club va organiser, courant septembre, une initiative réservée aux adhérents de R&M : un petit-déjeuner festif un samedi matin à Versailles, suivi d’une visite privative guidée d’une partie du Château par un des conservateurs.C’est une des valeurs ajoutées de l’adhésion : adhérez.

2) Hervé Mariton a animé un groupe de travail de l’UMP sur les questions de société. Son rapport a été remis mi-juillet. Vous pouvez le consulter sur notre site à cette adresse : http://reformeetmodernite.free.fr/?189/Rapport_parlementaire_sur_les_questions_de_societe

3) Les antennes locales du VIIe arrondissement de Paris de Réforme & Modernité, du Parti chrétien-démocrate, du Parti radical et de l’Alliance centriste organisent, sous l’égide de Martine Aurillac, députée UMP de l’arrondissement, le mercredi 16 septembre prochain, de 19h00 à 21h00, une réunion ouverte, autour de Hervé Mariton, sur le thème « Bioéthique et questions de société ». Cette réunion aura lieu dans la salle Colbert de l’Assemblée nationale.

4) Nous tenons à féliciter notre ami Michel Lopez, membre du bureau de R&M, de son élection comme président de la fédération de Paris de l'Alliance centriste, parti présidé par le sénateur et ancien ministre Jean Arthuis.

5) R&M aura un stand lors des prochaines universités d'été de l'UMP. Il sera tenu par l'équipe de R&M Jeunes, animée par Pierre de Saboulin. Pour le contacter : [email protected]

Contact : [email protected] PAGE 7

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De la réforme à la transformation :un nécessaire changement de posture intellectuelle pour

relever les défis du XXIe sièclepar Miguel de Fontenay, PDG d'Ineum Consulting

« Un Etat qui n'a pas les moyens d'effectuer des changements n'a pas les moyens de se maintenir ». Ce constat, formulé à la fin du XVIIIe siècle par l'homme politique et philosophe irlandais Edmund Burke, demeure d’une grande acuité.

Le 23 juin 2009, la Cour des comptes a publié son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques qui dresse le constat d’une aggravation de la situation des finances publiques dont les conséquences seront durables en l’absence d’une transformation radicale de la nature du pacte qui lie les français à leur État.

La Cour constate que la France connaissait dès 2008 un déficit budgétaire public de 3,4% du PIB dont les déterminants étaient essentiellement structurels. La formation de ce déficit résulte tant de la persistance du déficit du budget de l'État que de celui du régime général de sécurité sociale, les collectivités territoriales n’ayant pu stabiliser le leur qu’au prix d’une réduction de leurs investissements. Le financement de ce déficit par le recours à l’emprunt a porté la dette publique à 68,1 % du PIB fin 2008. La seule charge des intérêts a représenté 55 milliards d'euros, soit plus que le produit de l’impôt sur le revenu. En 2009, la dégradation des finances publiques va s’accélérer en raison de la forte dégradation de la conjoncture économique : selon la Cour, le déficit public total pourrait plus que doubler en 2009 et dépasser 7% du PIB dans l’hypothèse où la baisse du PIB serait de 3%. Il serait pour moitié environ d’origine structurelle.

La crise économique mondiale constitue un des déterminants de la dégradation des finances publiques. Le modèle social et économique français dote notre pays de puissants stabilisateurs automatiques économiques (assurance chômage, existence d’un fort niveau d’emploi public, importance de l'État dans l’activité économique…)

qui contribuent à limiter les incidences de la crise sur nos concitoyens. Toutefois, ce modèle, résultant d’un pacte social bâti au fil d’une histoire nationale pluriséculaire au sein duquel l'État occupe une place centrale, semble avoir atteint ses limites en termes de soutenabilité financière. Les choix de notre génération, tels que la préférence pour le recours à la dette pour financer les déficits publics, constitueront un héritage difficilement gérable par les générations futures qui seront également confrontées à une modification drastique de la structure démographique faisant peser sur une population active en déclinante

le poids croissant du financement du système social. Ce liminaire n’est qu’un constat. Ni plus, ni moins.Ces choix, s’ils ne se modifient pas, remettront en cause notre modèle même de société.

L’absence de choix a longtemps résulté d’une conviction collective : la réforme est en cours ; elle permettra de concilier un haut niveau de protection sociale et d’emploi public avec une réduction de la pression fiscale nécessaire à la libération

des énergies créatrices. Force est de constater que la France est un pays de réformes. Si on ne considère que l'État, on ne peut que constater qu’il a connu un processus continu de réformes depuis 60 ans. La révision générale des politiques publiques (RGPP) participe de cette constante volonté réformatrice. Elle vise, par l’intermédiaire d’un rigoureux examen des politiques publiques et de leurs modalités de mise en œuvre, à moderniser l'État. Si la RGPP a impulsé une dynamique continue de changement au sein des administrations publiques, son impact sur le niveau de la dépense publique semble relativement faible et ne suffira pas au redressement de ce bien collectif que sont les finances publiques.

►►► (suite page 9)

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La réforme se définit comme une évolution apportée à une politique ou à une institution, en vue de l’améliorer. Ma conviction est que la réforme n’est plus un mode de changement suffisant et adapté aux enjeux de notre société. Ce sont désormais de transformations dont nous allons avoir besoin car transformer consiste à modifier les caractères généraux d’un ensemble donné en vue d’une reconstruction sur des fondamentaux revus volontairement - et non de manière subie, ce à quoi la crise actuelle nous contraint. La transformation constitue une réponse appropriée à l’échelle des problèmes auxquels doit faire face notre société et répond aux contraintes nouvelles et aux exigences générées par cette situation adverse que le monde traverse. La transformation est aussi – et c’est essentiel pour notre avenir et celui des générations à venir – prélude à, ou moteur de l’innovation, car facteur de bouleversement de modèles établis, nécessitant donc une réinvention.On a coutume de dire qu’une crise se résout soit par l’inflation, soit par la révolution, soit encore par la spoliation…gageons que celle qui nous occupe se résoudra par la transformation.

La transformation doit permettre de bâtir un modèle de société soutenable pour les générations futures en revisitant, sans tabou, l’ensemble des fondements de notre modèle sociale et économique. L’histoire nous enseigne que les périodes de crise sont des périodes favorables à la transformation : de 1789 à la Libération, en passant par les lendemains de la défaite de 1870, la transformation de la société a toujours eu besoin de ce catalyseur que constituent les crises pour fonder un nouveau paradigme.

La mondialisation de l’économie est devenue un fait que l’avènement de la société de l’information semble avoir ancré durablement dans la réalité. Les entreprises tendent à localiser leurs activités ou leurs segments d’activités dans les zones géographiques optimales au regard de leurs équations d’optimisation sous contrainte. Les dirigeants et les salariés tentent de devenir mobiles – théoriquement et virtuellement, de plus en plus souvent, par l’utilisation de technologies de l’information - à l’échelon planétaire. L’attractivité du territoire constitue donc un facteur déterminant de la prospérité nationale. L'État et les

collectivités locales doivent contribuer à cette attractivité : qualité des infrastructures de transport et de communication, formation et recherche, innovation, stabilité de l’environnement juridique et fiscal sont autant de responsabilités qui leur incombent.

La production, la gestion et la diffusion de l’information sont devenues une des sources de richesses des entreprises. Elles constituent pour beaucoup d’entre elles le cœur de leurs activités. Ainsi, comme l’illustre la crise financière qui a affecté en premier les établissements bancaires, la maîtrise de l’information est un des principaux actifs des banques. L’administration française, dans toutes ses composantes, doit être transformée pour entrer dans l’ère de l’information. La société industrielle, qui a connu son apogée au cours des « Trente glorieuses », a été accompagnée par un phénomène de massification dans le cadre duquel la relation avec l’usager était placée sous le signe de la sujétion et de l’indifférenciation. L’avènement de la société de l’information contribue au développement de la « personnalisation » du service dans le cadre de laquelle l’usager est perçu comme un client. Ce nouveau paradigme s’appuie sur la mobilisation des technologies de l’information et des modèles d’organisation en réseaux qui bouleversent l’organisation wébérienne des administrations publiques. Il s’appuie aussi sur un besoin croissant d’innovation que l'État devra favoriser, quel qu’en soit le prix à payer.

Le monde a changé depuis 60 ans. La réforme de l'État qui a longtemps été incarnée dans des processus d’ajustement du modèle bureaucratique wébérien a rencontré ses limites en étant incapable de proposer un modèle de société soutenable d’un point de vue financier. Il relève de la responsabilité du politique de mettre en œuvre un véritable processus de transformation fondé sur une évaluation approfondie de la situation existante et la décision préalable d’accepter un véritable changement de paradigme sur des sujets essentiels. Ainsi, se concentrer sur les seules dépenses de fonctionnement de l'État est insuffisant.

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Le poids des dépenses d’intervention nécessite de les recenser, d’évaluer leurs effets et de décider de leur maintien sur le fondement de critères objectifs. De même, les prélèvements obligatoires doivent être revisités de la même manière et dans la perspective de restaurer la soutenabilité financière de notre modèle social et économique.

Nous devons donner à notre État les moyens d’effectuer les changements nécessaires au maintien

de notre mode de vie et à son évolution selon les valeurs démocratiques et les exigences de sauvegarde de notre planète. Cela passe me semble-t-il, par la volonté et la décision d’évoluer rapidement du principe de réforme à celui de transformation.

Cet article est un résumé des propos tenus par Miguel de Fontenay lors de notre colloque du 11 juin 2009, qui s'est tenu à l'Assemblée nationale sur le thème « de la crise à l'après-crise, quelle trajectoire pour la France ? »

˜ NOTE

Réforme & Modernité est un club attaché au libre débat, sa lettre s’en veut le reflet. Il va donc de soi que les opinions qui y sont exprimées n’engagent que leurs auteurs et aucunement le club.

La salle Colbert, à l'Assemblée nationale, durant un de nos colloques

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