bruce campbell 11 mai 2016 comité sénatorial

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  • 8/15/2019 Bruce Campbell 11 mai 2016 Comité Sénatorial

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    11 mai 2016

    http://www.parl.gc.ca/Content/SEN/Committee/421/trcm/52588-f.htm?Language=E&Parl=42&Ses=1&comm_id=19

    Notre prochain t émoin est Bruce Campbell, professeur invit é, facult é de droit, Universit é d’Ottawa.M. Campbell est actuellement en cong é de son poste de directeur g énéral du Centre canadien de politiquesalternatives.

    Bruce Campbell, professeur invit é, facult é de droit, Universit é d’Ottawa, à titre personnel: Merci dem’avoir invit é à contribuer à votre étude importante sur la s écurité des transports du p étrole vers le march é.Mes commentaires portent exclusivement sur le transport du p étrole par rail, et plus sp écifiquement sur lerégime r églementaire du transport par rail, qui est au centre de mes travaux pratiquement depuis lacatastrophe de Lac-M égantic.

    Un mot sur ma biographie: En 2015, en grande partie en raison de mes travaux sur Lac-M égantic, j’ai été récompens é par la bourse de leadership communautaire en justice de la Fondation du droit de l’Ontario. Jetravaille actuellement aupr ès de la facult é de droit de l’Universit é d’Ottawa, comme l’a dit le pr ésident, et

    bénéficie d’un cong é du Centre canadien de politiques alternatives. Je m’appr ête en fait à quitter le centredont j’ai été directeur g énéral pendant 22 ans.

    Comme vous le savez, le transport du p étrole par rail continue de jouer un r ôle important, quoiquesecondaire, parmi les diff érents moyens de transport du p étrole au march é. Les volumes transport és ontatteint un pic puis d écliné. Je crois que l’Association canadienne des producteurs p étroliers était ici l’autre

    jour. Ils continuent de pr évoir un triplement du volume de p étrole transport é par le rail d’ici 2018, de200 000 à entre 500 000 et 600 000 barils par jour.

    Le public canadien croit, dans son écrasante majorit é, et les donn ées des sondages le confirment, que lapremi ère priorit é du gouvernement est de prot éger la sant é et la s écurité de l’environnement; et il ne fait pasconfiance aux soci étés pour qu’elles s’auto r églementent. Ce n’est qu’apr ès une catastrophe majeure que lepublic perd confiance dans la capacit é du gouvernement de le prot éger. Ce n’est qu’apr ès une catastrophemajeure que les failles dans le r égime r églementaire apparaissent.

    Bien que les catastrophes majeures aient un caract ère unique, les failles du r égime r églementaire qu’ellesrévèlent, pr ésentent des aspects communs. Qu’il s’agisse de la crise financi ère am éricaine, de la catastrophede la plate-forme p étrolière Deepwater Horizon , de Fukushima et, plus pr ès de chez nous, de Ocean

    Ranger et Westray, ces aspects communs apparaissent avec évidence. Ils ont clairement jou é un rôle à Lac-Mégantic.

    En font parti e des r èglements vagues, le manque d’inspection pour v érifier la conformit é avec lar églementation, le manque d’instruments de r épression et de p énalit és pour faire respecter lar églementation, le manque de volont é de sanctionner les infractions des soci étés et le d étournementflagrant de la r églementation.

    Il y a d étournement de la r églementation lorsque celle-ci est r égulièrement amen ée à servir les int érêtsprivés de l’industrie r églement ée au détriment de l’int érêt public, lorsque l’industrie est r égulièrement enmesure de fa çonner la r églementation qui r égit ses op érations, de bloquer ou de retarder l’adoption d’unenouvelle r églementation, et de supprimer ou d’ édulcorer la r églementation existante lorsqu’elle estimequ’elle a une r épercussion n égative sur ses co ûts.

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    http://www.parl.gc.ca/Content/SEN/Committee/421/trcm/52588-f.htm?Language=E&Parl=42&Ses=1&comm_id=19http://www.parl.gc.ca/Content/SEN/Committee/421/trcm/52588-f.htm?Language=E&Parl=42&Ses=1&comm_id=19http://www.parl.gc.ca/Content/SEN/Committee/421/trcm/52588-f.htm?Language=E&Parl=42&Ses=1&comm_id=19http://www.parl.gc.ca/Content/SEN/Committee/421/trcm/52588-f.htm?Language=E&Parl=42&Ses=1&comm_id=19

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    On parle rarement du contournement de la r églementation dans le contexte de la catastrophe de Lac-Mégantic, mais je crois que divers éléments prouvent que c’est un facteur qui a contribu é à la catastrophe.Tant que les causes de la catastrophe de Lac-M égantic n’auront pas été pleinement comprises et qu’on n’yaura pas rem édié, le transport du p étrole par le rail — en d épit des am éliorations apport ées à la sécurité durail jusqu’ici — continuera de pr ésenter des risques significatifs et de se heurter à la résistance du public.

    Des groupes de citoyens se sont form és un peu partout au pays — Safe Rail, Voix citoyens au Qu ébec. Leshabitants des municipalit és de Lac-M égantic sont d étermin és à exiger que les compagnies obtiennent unpermis social pour se livrer à leurs activit és.

    Il a été mis en évidence r écemment que le gouvernement avait apport é une contribution de 75 millions dedollars au fonds de 460 millions de dollars charg é du règlement de la plainte collective et des poursuitespour n égligence ayant entra î né la mort, prot égeant Transports Canada, l’une des parties d éfenderesses, de lamenace de poursuites ult érieures en responsabilit é. Le règlement a barr é la voie à la recherche dansdiff érentes directions prometteuses de ce qui s’ était produit et pourquoi, en éliminant le moyen d’obligerles témoins à témoigner et d’obliger à fournir l’information qui n’a pas encore été fournie jusque-l à.

    Le rapport du Bureau de la s écurité des transports du Canada, publi é en 2014, repr ésentait l’enqu ête la plus

    compl ète sur l’accident. Le gouvernement a consid éré que c’ était le dernier mot; toutefois, nombreuses sontles pistes qui n’ont pas été suivies et les questions sans r éponse. Les gens de Lac-M égantic ont demand é à de nombreuses reprises une enqu ête ind épendante.

    D’autres grandes catastrophes au Canada ont donn é lieu à des enqu êtes judiciaires ou des commissionsroyales — Hinton Rail, Ocean Ranger, Westray, l’affaire du sang contamin é, Walkerton — alors pourquoipas Lac-M égantic? Il s’agit d’un accident sans pr écédent dans l’histoire du Canada, selon moi, si l’on tientcompte à la fois des pertes en vies humaines, des d égâts caus és à la propri été et à l’environnement.

    Le ministre des transports a le pouvoir en vertu de l’article 21(1) de la Loi sur le transport desmarchandises dangereuses de convoquer une enqu ête publique si l’ émission de produits dangereux « ontfait des victimes — morts ou bless és — ou caus é des dommages aux biens ou à l’environnement. » Si

    jamais il y a eu une bonne raison d’invoquer ce pouvoir, c’est bien celle-ci.

    J’ai parl é plus tôt des failles dans le r égime r églementaire du rail. Il est vital de demander quels sont lesproblèmes qui persistent, et j’esp ère que vous prenez cela en consid ération dans votre étude.

    Je veux me concentrer sur le détournement de la r églementation. Les compagnies de chemin de fer sontdepuis toujours des joueurs puissants. Cela, en tant que tel, ne constitue pas un d étournement de laréglementation, mais cela le rend plus probable. C’est l’un des arguments sur lesquelles j’insiste: il n’existepas d’organisme de r églementation fort pouvant faire contrepoids à l’industrie.

    En conclusion, vous devriez peut- être prendre en consid ération un certain nombre de moyens pourrenforcer la r ésistance de Transports Canada à la tentation de s’inf éoder la r églementation.Premi èrement: un minist ère bien pourvu de l’expertise professionnelle n écessaire, capable d’ évaluer lavalidit é des propositions de r églementation avanc ées par l’industrie et de prendre ses propres d écisions surla base des éléments de preuve à sa disposition dans le respect de son mandat public.

    J’ai examin é le budget relatif au transport des produits dangereux et le budget relatif à la sécurité du rail.Ce dernier a été amput é de 20 p. 100 de 2010 à 2014. Sur la base des priorit és des pr évisions deplanification pour les deux ann ées à venir, il para î t absurde de s’attendre à une augmentation. Le budgetconsacr é au transport de produits dangereux est pratiquement rest é constant sur toute la p ériode depuis que

    j’ai commenc é à l’examiner en 2009-2010. On me dit que le budget de l’Office des transports du Canada

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    est pratiquement gel é depuis quelque temps d é jà. Je pense qu’un effort doit être fait pour accro î treaugmenter et renforcer les ressources allou ées à ces agences.

    Vous savez que le transport du p étrole par rail a connu une augmentation énorme, certainement depuis2010-2011. Comme je l’ai dit, le volume transport é a quelque peu baiss é récemment. En 2009, il y avaitun inspecteur de la s écurit é du rail pour 14 voitures charg ées. En 2013, il y avait un inspecteur pour4 000 voitures charg ées. Dans le secteur du transport des marchandises dangereuses, au moment del’accident, seuls 16 inspecteurs avaient les comp étences requises pour inspecter les chemins de fer pour cequi est du transport de marchandises dangereuses.

    Je sais qu’en 2015, sous l’ancien ministre des transports, le nombre d’inspecteurs de la s écurité du rail aaugment é, le syndicat qui repr ésente les employ és du transport craint qu’une bonne partie de cetteaugmentation profite à la fonction audit et non aux inspections sur le terrain. C’est I l’inspection sur leterrain qui repr ésente le volet le plus important de l’ensemble du m écanisme de r églementation, et jepense que c’est l’une des faiblesses du syst ème.

    Parmi les autres éléments à prendre consid ération, l’expertise interne et la capacit é de se procurer dessources d’information ind épendante, plutôt que d’avoir à compter sur l’information fournie parl’industrie; des mesures visant à remédier aux cons équences du flux unilat éral de personnel de l’industrievers Transports Canada, y compris des exigences strictes en mati ère de conflits d’int érêts et autresdispositions relatives à la reddition de comptes; un programme robuste de protection des lanceurs d’alarmevisant à garantir que les employ és qui signalent des probl èmes de s écurité ne feront pas l’objet deharcèlement ni de menaces; plus grande transparence et divulgation de l’information de sorte que lesgroupes citoyens des municipalit és soient mieux en mesure d’ évaluer si le minist ère remplit son mandat.

    Enfin, les d écisionnaires politiques doivent reconna î tre le r ôle indispensable de la r églementation. Laréglementation est depuis trop longtemps d énigrée par les partisans de la d éréglementation, pr ésentéecomme une charge suppl émentaire pesant sur les entreprises, de la paperasserie, un obstacle à lacompétitivité, un tueur d’emplois silencieux. Imaginez-vous travaillant dans une agence de r églementationconsid érée comme tueur d’emplois silencieux! Il est temps de r établir la r éputation des praticiens de la

    réglementation et leur r ôle essentiel en tant que gardiens du bien public.Merci.

    Le vice-pr ésident: Merci, monsieur Campbell pour votre pr ésentation. C’est maintenant au tour dessénateurs de poser des questions.

    Le s énateur Mercer: Monsieur Campbell, merci beaucoup de votre pr ésence. Vous avez commenc é pardire que vous allez vous concentrer sur le transport du p étrole par le rail, et vous avez fait r éf érence à uncertain nombre de choses. Lac-M égantic nous a appris que tout n’allait pas pour le mieux dans le domainedu transport du p étrole par rail, et vous avez signal é certains probl èmes au sein du minist ère dont nousreparlerons au cours de notre étude.

    Toutefois, si vous acceptez la pr émisse que l’on doit transporter le produit de l’Alberta et la Saskatchewanau march é, et esp érons-le jusqu’ à un terminal maritime, le march é ne se r éduisant pas seulement à nos amisaméricains, pensez-vous que passer du transport par rail au transport par un ol éoduc serait plus payant?

    M. Campbell: J’ai pris connaissance en partie des t émoignages pr écédents du Fraser Institute, et lorsqu’ontient compte des pertes en vies humaines, l’ol éoduc, sur la base de l’exp érience canadienne, est beaucoupplus s écuritaire. Je ne suis pas qualifi é pour faire cette comparaison. Je sais ce que disent les statistiques. Jecrois l’avoir entendu ici ce soir. Les deux sont extr êmement s ûrs.

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    Les statistiques du Bureau de la s écurité des transports du Canada concernant les d éraillements sur les voiesprincipales faisant intervenir des produits dangereux, lorsqu’on compare 2013 à 2014, montre que lenombre de d éraillements sur les voies principales est pass é de 11 à 25, c’est- à-dire qu’il a plus que doubl é.En 2012, il y en avait eu 5. La tendance est pr éoccupante.

    Il suffit d’un accident, et les gens de Lac-M égantic ont pay é le prix, et les gens de Gogama n’ont pas eu à déplorer de perte de vies humaines de justesse. Il y a eu un d éraillement l à, il y a à peu pr ès un an. En fait, ily a eu deux d éraillements, l’un tr ès près de la ville. Les d égâts à l’environnement ont été importants. Lestravaux de nettoyage se poursuivent et la faune et l’eau ont également souffert.

    Voici un autre chiffre que j’ai trouv é dans les statistiques du BST pendant que je pr éparais mon auditiond’aujourd’hui et c’est à peu pr ès ce que j’ai de plus r écent, au cours des six premiers mois de 2015, lenombre d’accidents par million de miles-train faisant intervenir des produits dangereux s’est établi à97, soit 33 p. 100 au-dessus de la moyenne sur 5 ans de 73.

    C’est une tendance qui d érange et qui n’est certainement pas faite pour rassurer les gens de Lac-M égantic.

    Le s énateur Mercer: Vous ne nous faites pas nous sentir bien. Ce n’est pas votre travail; vous êtes ici pournous donner des informations.

    Vous avez reconnu la valeur de la r églementation. Je pense que ce sont les mots m êmes que vous avezemploy és. Nous traitons la r églementation avec respect. L’une des choses qui nous pr éoccupent dans laréglementation, c’est le risque d’aller trop loin ou de trop r églementer. Existe-t-il un exemple de quelqu’unqui aurait trouv é le juste équilibre en mati ère de r églementation du transport des produits dangereux?

    M. Campbell: C’est la t âche des responsables des politiques. Avant tout, le public veut être prot égé. C’estl’intérêt public. Il y aussi un int érêt public relatif à l’économie. Évidemment je privil égierais la s écurité parrapport à l’économie et m’en remettrais au principe de pr écaution dans mon approche. Mieux vaut p écherpar exc ès de prudence. Voil à la réponse que je ferais à cela.

    Le s énateur Greene: Le sénateur Mercer vient de poser les questions que je voulais poser et je cherchaisun moyen diff érent de poser la m ême question, mais je n’y parviens pas. Je vous remercie infiniment.

    La s énatrice Unger: Merci, monsieur Campbell. Pouvez-vous me rappeler ce que veut dire « regulatorycapture », d étournement de la r églementation, dans le texte en fran çais?

    M. Campbell: Comme je le disais, il s’agit d’un ph énomène commun dont on a constat é l’existence dansdes catastrophes tr ès diff érentes. Dans le cas de Fukushima, c’est une autre fa çon de dire qu’il y avait desrapports de copinage.

    L’industrie du rail dans le cas qui nous occupe est tr ès puissante et l’a toujours été, mais c’est lorsqu’onconstate que de mani ère routini ère et syst ématique la r églementation vise à r épondre aux int ér êts dur églement é et que l’autorit é de r églementation sacrifie l’int ér êt public. Sur la base de mon exp érience,lorsque j’examine la catastrophe de Lac-M égantic, il appara î t à premi ère vue qu’il y a d étournement de laréglementation. C’est l’un des facteurs qu’il faut comprendre et prendre en consid ération dans la poursuitede nos efforts pour mettre en place un syst ème de r églementation assurant le maximum de s écurité.

    Tous les faits n’ont pas été mis à jour dans ce cas, et c’est pourquoi j’estime qu’il est n écessaire de menerune enqu ête publique. Les poursuites au civil ont été bloqu ées. Le minist ère des Transports n’est pas dansune position o ù il peut mener l’enqu ête lui-m ême, et le Bureau de la s écurité des transports du Canada était

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    aux coupables a commenc é. Tout le monde bl âmait tout le monde. Je me sentais en mesure de fournir unpoint de vue ext érieur ind épendant sur la question. Puis j’ai appris que ma coll ègue avait perdu troismembres de sa famille dans cet accident, ce qui m’a fait me sentir personnellement motiv é. Cela ferabientôt trois ans que je m’occupe de cela.

    Vous avez signal é que le train avait été laissé sans surveillance sur la voie principale. Le rapport du BSTabordait la question, mais il a été enterr é. Seul le travail d’un intr épide reporteur du Globe and Mail apermis de d écouvrir que la compagnie avait donn é explicitement pour instruction de ne pas activer le freinautomatique sur les wagons. Il y a trois freins; le frein ind épendant sur les locomotives, le freinautomatique sur les wagons, et les freins à main. On sait que la partie relative au frein à main a été débattuepubliquement, et je pourrais en parler.

    La question est de savoir, cependant, comment il se fait que Transports Canada ait laiss é cette compagniedonner pour instruction à ses employ és de ne pas activer le frein automatique? Cela figurait dans lesinstructions sp éciales. Est-ce que cela figurait dans les instructions sp éciales? C’ était pr évu dans le syst èmede gestion de la s écurité? Nous ne savons pas parce que n’est pas rendu public.

    Ensuite il y a la question des trains laiss és sans surveillance. Imm édiatement apr ès l’accident, Transports

    Canada a adopt é une directive d’urgence. L’une interdisait qu’un train puisse circuler d ésormais avec unseul employ é à bord. Pourquoi cela avait-il été permis jusque-l à est une autre question, d’une importanceincroyable, selon moi, du point de vue de la r églementation. Une autre directive interdisait de laisser destrains sans surveillance sur la voie principale. Directive qui devait être annul ée six mois plus tard. Despropositions furent faites par l’Association des chemins de fer du Canada. Des mesures ont été propos ées etaccept ées par Transports Canada visant à assurer un niveau de s écurité équivalent.

    Je ne suis pas en mesure d’ évaluer si elles assurent un niveau de s écurité équivalent. De l’avis de certainespersonnes auxquelles j’ai parl é, elles marquent un recul et circonviennent la r églementation. Voil à qui estdit. Des trains de marchandises transportant des marchandises dangereuses sont toujours autoris és,dans certaines conditions, à stationner, sans surveillance.

    La s énatrice Unger: La semaine derni ère nous avions une compagnie de chemin de fer qui t émoignait. Jepense que l’industrie a appris de ces énormes erreurs, et je crois qu’elle travaille dur pour am éliorer sonbilan en mati ère de s écurité. En fait, les personnes qui sont venues t émoigner, pensaient avant tout à lasécurité. Ils ont mis au point un certain type d’application qui sert à l’élaboration des rapports. Je n’entreraipas dans les d étails, mais cela m’a impressionn é.

    Je suis intimement convaincu que les pipelines et les chemins de fer font de gros efforts. La derni ère deschoses qu’ils veulent, c’est un autre d ésastre de ce genre . Seriez-vous d’accord pour dire qu’ilss’efforcent d’am éliorer la s écurit é? Je suis certain qu’on se livre à un examen de conscience au sein dusystème gouvernemental des transports également.

    M. Campbell: Je pense que la tension reste pr ésente. Il y a eu des améliorations dans la s écurité des

    chemins de fer. Des probl èmes persistent. Je ne comprends pas, par exemple, pourquoi on n’a pasencore mis en place de mesures pour extraire les composantes volatiles du p étrole ou du goudrondilué avant le transport.

    Je m’interroge sur les raisons pour lesquelles l es compagnies n’insistent pas davantage pour queTransports Canada proc ède à des inspections sur le terrain ou n’y sont pas plus favorables. Je croiscomprendre qu’elles manifestent des r éticences et estiment avoir fait ce qu’elles devaient avec la mise enplace de leur syst ème de gestion de la s écurité, qu’elles savent mieux que quiconque ce qu’elles doiventfaire et qu’elles le font. Il y a un autre aspect à cette question. Pour que les syst èmes de gestion de la

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    La s énatrice Unger: Merci beaucoup.

    Le vice-pr ésident: Monsieur Campbell, je sais que votre pr ésentation principale traite de la s écurité durail. Toutefois je voudrais vous parler de quelque chose qui m’intrigue dans vos écrits ant érieurs: c’estvotre comparaison du mode de gestion de l’industrie du p étrole en Norv ège et au Canada. Je me demande sivous pourriez d évelopper cela. Je sais que vous avez écrit un article il y a quelques ann ées à ce sujet — en1913. Le monde du p étrole a chang é — son prix aussi. Je voudrais entendre votre point de vue l à-dessus etles raisons pour lesquelles vous pensez que le syst ème de gestion norv égien est plus avantageux et que nousdevrions l’imiter.

    M. Campbell: Tout d’abord, c’est en 2012 que j’ai fait ces travaux. L’ambassadeur norv égien m’avaitinvité à sé journer quelques temps en Norv ège. J’ai beaucoup appr écié; l’exp érience a été très instructivepour moi.

    Pour ce qui est des transports, il n’y a pratiquement pas de transport de p étrole par le rail; il se fait surtoutpar pipelines et par bateau. C’est sans doute le cas partout en Europe. Je ne suis pas absolument certain,mais nous n’avons pas de base de comparaison, je crois, à ma connaissance en tout cas sur ce point,concernant le transport du p étrole de marchandises dangereuses par rail au Canada et ailleurs en Europe, ycompris en Norv ège.

    Mon rapport portait avant tout sur la gestion de la manne p étrolière et comparait la Norv ège et le Canada.Bien s ûr, leurs syst èmes politiques sont diff érents. La structure f édérale du Canada avec son partage despouvoirs, et cetera, est beaucoup plus complexe que celle de la Norv ège.

    Ce n’est qu’ à la toute fin des ann ées 1960 que l’on a d écouvert du p étrole l à-bas. Tr ès vite, ils se sontintéressés à toute une s érie de questions concernant la gestion du p étrole, le mode d’appropriation et dedistribution des recettes p étrolières. Ils ont d écidé de les garder pour l’essentiel dans le domaine public. Enmême temps que la Norv ège mettait en place sa compagnie nationale du p étrole, le Canada faisait demême.

    Au début des ann ées 1960, ils ont abouti à un consensus. Ils l’ont appel é « les 10 commandements du secteur p é trolier; » il se r é sumait en 10 points tr è s simples . La mise en valeur, l’appropriation et ladistribution des recettes p étrolières et du potentiel p étrolier relevait de la gestion publique. Ce qui ne veutpas dire que les multinationales n’avaient pas leur r ôle à jouer — évidemment, elles jouaient un r ôle —mais dans le contexte d’un service public fort. Il avait des pouvoirs d’ évaluation et de remise en question.Lorsque la d écision a été prise d’augmenter les taxes, les multinationales ont menac é de plier bagage. Celane s’est pas produit. Les multinationales sont toujours l à, et elles s’en sortent fort bien. Mais le tauxd’imposition des soci étés y est passablement élevé: 78 p. 100. Le taux g énéral d’imposition sur les soci étésest de l’ordre de 50 p. 100 auquel vient s’ajouter presque 30 p. 100 pour les soci étés pétrolières. Et voussavez comment cela se compare avec le Canada.

    Cela couvre également la compagnie p étrolière nationale, qui est cot ée en bourse. Elle est pr ésente dans lemonde entier, comme Statoil, y compris au Canada, aux États-Unis, et cetera.

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    Ce qu’ils n’ont pas fait en Norv ège, alors que cela s’est fait au Canada, en particulier en Alberta, c’est dediminuer les autres taxes lorsque les recettes p étrolières rentraient en abondance. La Norv ège ne l’a pasfait.

    Quand on examine le r égime g énéral de taxe sur les ventes, les taxes à la consommation sont tr ès élevéesen Norv ège, comme c’est le cas partout en Europe; elles sont parmi les plus élevées. Quelqu’un a demand é plus tôt ce soir comment la Norv ège pouvait financer un r égime de s écurité sociale si g énéreux. Voil à, jecrois, un élément de r éponse.

    Ils étaient également tr ès attentifs à l’environnement. Gro Harlem Brundtland était premier ministre dansles ann ées 1980 — lorsque l’ONU a publi é son premier rapport sur le changement climatique. Ils ont misen place une taxe sur le carbone d ès le début des ann ées 1990. Aujourd’hui, leur taxe sur le carboneéquivaut à quelque 60 $ le baril. Ce n’est pas une grande source de revenus par rapport aux autres sourcesde revenus du gouvernement

    Voil à, brièvement r ésumés, quelques-unes des diff érences entre la Norv ège et le Canada. La gestionpublique et un service public vigoureux en sont des ingr édients majeurs.

    Le s énateur Mercer: Merci pour votre pr ésentation. Je voudrais revenir sur deux points que vous avezabordés dans vos r éponses à d’autres questions.

    Vous avez dit que les employ és de Transports Canada viennent pour la plupart de l’industrie.

    M. Campbell: Oui.

    Le s énateur Mercer: J’ai géré des organisations de bonne taille, et j’ai toujours trouv é que c’ était mieuxd’avoir affaire à des gens qui comprenaient en quoi consistait le processus de gestion. Je tiens également à dire clairement que nous n’avons pas dans l’id ée de critiquer les employ és de Transports Canada enl’absence d’ éléments pr écis montrant que quelque chose n’allait pas.

    Vous avez laiss é entendre que les r èglements sont faits dans l’int érêt des réglement és plutôt que du grandpublic, et j’ai r édigé une note p our demander si vous laissez entendre qu’il y a collusion entre l’autorit éde r églementation et les organismes r églement és.

    M. Campbell: Je ne le sous-entends pas.

    Le s énateur Mercer: Vous avez failli dire « pas n écessairement. »

    M. Campbell: Je n’ai pas de preuve de collusion.

    Laissez-moi vous donner un exemple de la fa çon dont, comme je le crains, la r églementation peut êtrecontourn ée. Cela concerne la possibilit é d’exploiter des trains avec un équipage d’une seule personne etles circonstances dans lesquelles la MMA, qui a un tr ès mauvais palmar ès en mati ère de s écurité, a été autoris ée à le faire.

    Lorsque j’ai commenc é à enquêter là-dessus, j’ai appris que l’A ssociation des chemins de fer du Canadaavait modifi é la r é glementation en 2008. Elle a fait des consultations. Elle l’a fait malgr é les objections —elle a modifi é la r é glementation, et a introduit une disposition dite r è gle g é né rale M.

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    En gros, auparavant, il n’y avait qu’une compagnie de chemin de fer au Canada autoris ée à exploiter entrain à un employ é, c’était une compagnie dans le nord du Qu ébec et le Labrador. Elle b énéficiait d’uneexemption minist érielle pour ce faire. Avec cette exemption minist érielle, elle devait remplir69 conditions, sauf erreur, pour pouvoir op érer. La r ègle g énérale M a balay é cela, donc il n’ étaitplus n écessaire d’avoir une exemption minist érielle officielle.

    Alors, MMA, qui op érait depuis une dizaine d’ann ées, a vu cela et a voulu exploiter des trains avec unéquipage d’une seule personne. Une fois la r ègle générale M en place, elle s’est adress ée de nouveau à Transports Canada. L ’Association des chemins de fer du Canada a pris fait et cause pour elle, en faveur del’introduction de trains à un seul employ é , bien que le syndicat des ouvriers de la m é tallurgie, lacompagnie, le syndicat des employ é s du transport, qui organise les inspecteurs et cetera à TransportsCanada, se soient d é clar é s contre. Les gens de Transports Canada, ceux du bureau r égional au Qu ébec, yétaient oppos és. Il y avait toute cette opposition.

    Transports Canada avait m ê me commandit é une é tude au Conseil national de recherches sur ce sujet. Dans son rapport, celui-ci recommandait de faire une é tude pilote avant d’aller de l’avant, en s’entendantsur le parcours à retenir, et en veillant à ce qu’il y ait une é valuation s é rieuse avant de poursuivre. Celatrois ou quatre mois peut- ê tre avant que MMA ne commence exploiter ses trains à un seul employ é pour le

    transport du pé trole. C’

    é tait en juillet 2012 et elle les a exploit

    é s jusqu’en juillet 2013.

    Suite à une demande d’acc ès à l’information, j’avais pris connaissance de la correspondanceélectronique, c’est la raison pour laquelle je sugg ère qu’il y ait une enqu ête judiciaire ind épendanteafin que toutes les informations soient mises sur la table et que les personnes soient cit ées à compara î tre.

    Le s énateur Mercer: Je ne suis pas contre. Nous souhaitons tous aller au fond des choses. Je ne suis pascontre une enqu ête judiciaire ou une enqu ête d’un genre ou d’une autre. Mais je ne voudrais surtout pas quel’on montre du doigt les officiels de Transports Canada ou de l’Association des chemins de fer avant queles résultats d’une enqu ête ne nous autorisent à le faire. J’appr écie votre t émoignage, mais je veillerai à ceque nos d écisions ou recommandations ne se fondent pas uniquement sur des ont dit en l’absence

    d’éléments probants. Je fais largement confiance au personnel de Transports Canada, encore que vosremarques sur le budget me tracassent. Les gouvernements aiment équilibrer leur budget, mais lespr éoccupations d’ équilibre budg étaire doivent passer au second plan quand il s’agit de lar églementation en mati ère de s écurit é. C’est tout ce que j’ai à dire.

    M. Campbell: Je suis d’accord.

    La s énatrice Unger: Pouvez-vous me dire si le rail jouit ou non du permis d’exploitation social, que, entreparenth èses, certains t émoins ont d écrit comme quelque chose d’impossible à définir.

    M. Campbell: les gens de Lac-M égantic avaient des trains-citernes qui traversaient leur communaut é. Ilsne la traversent pas maintenant. La travers ée est suspendue pour un an. Y aura-t-il, d ébut 2017, des trainscharg és de p étrole ou de marchandises dangereuses qui la traverseront? Je n’en sais rien. Si vous n’ êtes

    jamais all é à Lac-M égantic, cela donne la frousse d’imaginer ce qui s’est pass é.

    Les gens de Lac-M égantic veulent une voie de contournement. Ils estiment que le gouvernement le leurdoit. Les maires d’autres villes comme Toronto et les municipalit és environnantes, ont aussi demand é unevoie d’ évitement. Dans le cas de Lac-M égantic, cela s’impose, je crois. Ils demandent aussi une enqu ête

    judiciaire parce qu’ils trouvent que de nombreuses questions restent encore sans r éponse. Tant qu’ilsn’auront pas ces r éponses, ils n’auront pas le sentiment que la r églementation est suffisamment forte pour

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  • 8/15/2019 Bruce Campbell 11 mai 2016 Comité Sénatorial

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    garantir la s écurité des transports ferroviaires pour leur communaut é et pour garantir qu’il n’y aura pas unautre Lac-M égantic ailleurs au Canada.

    Le vice-pr ésident: Merci, monsieur Campbell. Nous vous savons gr é d’être venu nous voir ce soir, et nousvous remercions de nous avoir accord é votre temps.

    M. Campbell: Merci de m’avoir invit é.

    Le vice-pr ésident: La semaine prochaine nous poursuivrons notre étude et entendrons le commissaire à l’environnement et au d éveloppement durable, Teamsters Canada et Safe Rail Canada.

    La séance est lev ée.

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