becker, histoire de la senegambie (1985)

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  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    1/31

    EHESS

    Histoire de la Sénégambie du XVe au XVIIIe siècle: un bilan (The Precolonial Period inSenegambia, 15th to 18th Century)Author(s): Charles BeckerSource: Cahiers d'Études Africaines, Vol. 25, Cahier 98 (1985), pp. 213-242Published by: EHESSStable URL: http://www.jstor.org/stable/4391965

    Accessed: 06/09/2009 08:35

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  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    2/31

    NOTES

    ET

    DOCUMENTS

    Charles Becker

    i s t o i r e

    e

    l

    enegambie

    d u Xve

    u XVIIIC

    i e l e

    u n

    b i l a n

    Troisreflexionspreliminairespermettrontd'introduirece bilan, forcement

    partiel, de l'histoire de

    la

    Senegambie

    entre

    le milieu du xve

    siecle (soit

    la

    decouverte europeenne

    et la

    production

    des

    premieres

    sources ecrites

    europeennes)

    et la fin

    du

    xvIIIe

    siecle (c'est-a-dire

    e

    toumant

    que

    constitue

    le passage progressif de

    la traite

    des

    esclaves au

    ((

    commerce legitime )).

    i.

    Nous parlerons d'histoire et d'historien dans un sens a la fois

    precis

    et

    tres large. L'histoire est une

    discipline et un discours sur

    le

    passe de groupes sociaux plus ou

    moins 'tendus, sur leur vie materielle,

    culturelle, politique.

    II

    n'est pas question

    de

    la

    re'duire a

    un

    discours

    universitaire:

    au

    contraire,

    le

    discours historique

    est

    multiple,

    et

    la

    reconnaissance de chacune de ses formes, de leurs specificites et de leurs

    limites

    aussi,

    est

    indispensable a

    a

    reconstitution du

    passe. Plus:

    l'histoire

    universitaire parait souffrir lourdement de son quasi-complexe de supe-

    riorite sur

    l'histoire

    traditionnelle,

    dont toutes les voies n'ont pas

    ete

    explorees,

    sinon

    tres

    mal. Ainsi

    la

    promotion de l'histoire passe-t-elle

    par l'interrogation

    de toutes

    les

    sources

    disponibles

    -

    bien

    que parfois

    cachees

    -

    sur

    un

    evenement

    ou

    sur

    une periode ancienne.

    Activite

    critique

    sur toutes

    ces sources,

    l'histoire ne peut etre que le fruit d'une

    collaboration

    honnete

    et

    franche

    entre des chercheurs qui

    ne

    seront

    jamais des observateurs neutres,

    ((

    surplombant

    ))

    i

    la fois le passe et les

    societes actuelles oiu ls exercent leur metier.

    2. Nous n'entreronspas dans le debat concernant le statut de l'histoire

    parmi

    les

    sciences

    sociales, ou plutot

    par rapport

    i

    I'anthropologie.

    Rappelons seulement qu'il a fallu longtemps

    pour que soit reconnue la

    possibilite

    d'une

    histoire africaine et que l'ethnologie a trop souvent

    etudie

    les

    societes

    dans une

    perspective an-historique.

    Si les

    discussions

    au

    sujet

    de

    l'ethno-histoire sont, dans une large mesure,

    depassees,

    elles

    ont

    neanmoins clarifie

    certains problemes

    et permis de mieux

    X

    Cet article

    est

    la

    version

    l6gErement

    remaniee d'une

    communication,

    intitule

    ((La

    p6riode

    '

    precoloniale 'ou la

    S6n6gambie du xve au

    XVIIIe sicle )),

    pr6sent6e

    au premier

    colloque de

    l'Association des historiens

    senegalais, qui

    s'est tenu

    A,

    Dakar

    (2I-24

    mai 1982).

    Caihiers d'tItudes

    africaines, 98, XXV-2, I985,

    pp. 2I3-242.

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    3/31

    2I4

    CHARLESBECKER

    definir la tache de l'historien. Citons par exemple A. Leroi-Gourhan

    (I975

    :

    I3):

    ((

    L'intervention

    du temps dans

    les sciences

    humaines

    et

    particuli6rement

    en ethno-

    logie

    se traduit sous

    trois aspects

    qu'il est difficile

    de

    consid6rer

    tout

    a fait comme

    compl6mentaires.

    Le premier

    est

    fond6

    sur les documents 6crits,

    le second

    sur

    les

    informations orales,

    le

    troisieme

    sur les documents

    archeologiques.

    Chacune de

    ces

    m6thodes pr6sente un

    c6te positif et

    un

    cot6

    n6gatif

    qui

    ne sont

    pas

    n6cessairement

    compl6mentaires

    mais que l'on

    trouve, dans

    les meilleurs

    cas, en convergence

    au

    moins approximative

    )).

    Rappelons aussi

    le rapport introductif

    au colloque

    sur l'Anthropologie

    en France

    (I979:

    i6o-i6I), oU

    les relations entre anthropologie et histoire

    sont presentees

    d'une maniere

    qui nous

    semble juste

    Histoire

    et anthropologie diff6rent moins

    par

    leur

    objet (il n'y a pas

    des soci6tes

    d'essences differentes

    selon qu'elles sont

    de tradition

    orale ou

    6crite, europeenne

    ou

    non

    europ6enne)

    que par leurs

    techniques d'investigation.

    Certes ces

    techniques

    ne sont pas neutres,

    elles impliquent

    en raison de leurs specificites

    et des traditions

    propres

    3

    chaque

    discipline,

    des

    probl6matiques

    et

    des conceptualisations

    diffe-

    rentes. I1 s'agit donc

    non seulement

    de completer une

    technique

    de recherche

    grace

    a

    d'autres

    techniques, mais

    encore de tenter

    d'unifier

    les champs

    conceptuels.

    Histoire et anthropologie

    ou anthropologie

    historique

    l'enrichissement

    doit

    etre

    mutuel car il

    s'agit en fait d'une

    seule et meme

    discipline ou

    science

    [...] L'anthro-

    pologie

    et

    l'histoire,

    consid6rees

    comme discipline

    unique,

    ont pour tache,

    a

    travers

    des

    techniques

    vari6es et

    complementaires (6crit,

    oral,

    mais

    aussi arch6ologie,

    bota-

    nique,

    linguistique,

    biologie, etc.) d'analyser

    les

    logiques

    des continuites, ruptures

    et

    transformations sociales )).

    C'est

    pourquoi

    il est

    bon

    de

    considerer

    le

    travail

    historique

    comme une

    part

    majeure du travail

    anthropologique,

    et

    de

    reconnaltre

    que,

    effective-

    ment,

    ((

    histoire )),

    ((

    ethno-histoire ),

    ((

    socio-histoire

    )),

    ((

    anthropologie

    historique

    ))

    constituent

    la meme discipline,

    l'anthropologie,

    en tant

    qu'

    elle

    s'interesse

    aux

    societ's

    dans

    toutes

    leurs dimensions

    temporelles.

    3. Nous reprenons ici la distinction classique entre sources internes

    et sources

    externes, que

    nous

    avons

    explicitee

    precedemment

    (Becker

    & Martin

    I975;

    Becker

    I977:

    2I0-214).

    Les

    sources

    internes, qui

    sont

    parfois

    ecrites (tarikh

    en arabe ou

    en

    walafall)

    ou

    le

    plus

    souvent

    orales,

    comprennent

    les

    divers

    types

    de traditions

    (villageoises,

    familiales,

    provinciales,

    dynastiques)

    auxquelles

    il faut

    joindre

    les donnees

    socio-

    logiques,

    linguistiques,

    ethnologiques

    eclairant

    le

    passe

    des

    societes

    senegambiennes.

    Les sources

    externes

    sont

    presque

    exclusivement

    d'origine

    europeenne, pour

    la

    periode

    qui

    nous

    occupe.

    Cependant,

    les

    donnees

    relatives

    au Fuuta Tooro

    dans le Tarikh es-Sudan ne

    peuvent

    i.

    Walafal:

    terme de'signant

    une

    transcription

    du

    wolof

    en caracteres

    arabes.

    La transcription

    des

    noms

    propres

    de

    pays

    ou

    de

    personnes

    et

    des

    quelques

    noms

    communs

    utilises

    suit les

    regles

    du

    decret

    no

    75-I026

    (lu

    To oct.

    I975,

    modifie

    par le d6cret

    no

    85-1232

    du

    20 nov. 1985,

    Journal

    officiel

    de

    la

    Republique

    du

    Sene'gal,

    23

    nov.

    I985 .

    519-52

    I.

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    4/31

    HISTOIRE

    DE

    LA

    SENEGAMBIE, XVe-XVIIIe

    SIECLE

    2I5

    etre

    considerees

    tout

    a

    fait

    comme des sources

    internes,

    au sens de

    sources

    produites dans et

    par

    la

    societe

    decrite. Les

    donnees

    archeologiques

    peuvent

    etre

    rattachees

    legitimement aux

    sources

    internes,

    mais

    on

    peut

    aussi

    insister sur la

    specificite

    de ces

    sources et du travail

    archeologique.

    Notons donc

    que la

    distinction

    entre sources

    internes et sources

    externes

    reste

    a

    affiner, et

    qu'elle

    ne

    recoupe

    pas

    celle

    etablie

    entre

    tradition orale

    et

    texte

    ecrit, le

    vestige

    archeologique etant un

    temoin

    particulier.

    Dans

    des

    textes

    anterieurs, nous

    avons

    souligne le fait

    indiscutable

    que les

    sources

    internes

    ont

    ete

    insuffisamment mises a

    contribution,

    alors

    que

    les

    traditions

    representent

    pourtant ((la

    premie're

    et

    principale

    source

    de l'histoire sene'gambienne, qui est demeuree trop peu exploitee dans le

    passe

    ))

    (Becker

    I977:

    21I).

    Nous avons

    egalement

    mis

    l'accent sur

    la

    necessite

    d'une

    confrontation

    entre les

    deux

    types

    de

    sources

    (et l'archeo-

    logie, si elle

    est

    consideree

    comme

    source

    specifique)

    des

    'a present

    et,

    surtout, lorsque

    la

    collecte des

    traditions aura

    avance

    et

    que de

    veritables

    corpus

    auront ete

    constitues.

    II

    reste,

    en

    tout

    cas,

    important

    de

    poursuivre et

    d'ameliorer

    la

    reflexion

    sur

    les

    sources, de

    prendre

    conscience

    de

    l'interet

    mais aussi

    des

    limites

    inherentes

    a chaque

    type de

    source,

    pour

    orienter

    les

    travaux

    vers

    des

    domaines

    prioritaires

    et

    sortir, grace

    'a

    ceux-ci, des

    ornieres

    oiu

    s'enfoncent

    trop souvent les historiens de la periode ((precoloniale

    )2*

    Apres

    ces

    remarques

    preliminaires, qui

    meriteraient

    plus de

    develop-

    pements,

    venons-en au bilan

    meme des

    etudes

    concernant la

    Senegambie

    precoloniale

    )).

    Pour evaluer

    les

    etudes

    dej'a

    entreprises,

    nous

    avons

    d'abord

    effectue

    un

    inventaire

    des travaux

    academiques

    (theses,

    memoires,

    diplomes)

    sur

    l'histoire de

    la

    Senegambie.

    Cet

    inventaire, mis

    a

    jour et

    publie

    par

    ailleurs

    (Becker &

    Diouf

    I985),

    est

    instructif

    bien

    qu'il

    soit

    a

    completer

    par

    une

    bibliographie exhaustive

    des

    autres

    travaux histo-

    riques et

    recents

    -

    qui

    serait

    tres utile et

    n'a

    jamais

    ete

    etablie:

    son

    elaboration pourrait se faire 'al'aide des guides bibliographiques existants

    (Porges

    i967,

    1977; Gamble

    I979;

    Brasseur

    I964,

    I976;

    Toupet

    I959,

    I977).

    L'examen

    de

    la

    litterature

    universitaire et

    des

    autres

    etudes sur

    la

    Senegambie

    ((

    precoloniale

    ))

    permet

    de dresser un

    constat

    global

    assez

    negatif,

    qui

    peut etre

    formule

    ainsi:

    la

    periode,

    delimitee a

    partir

    de

    criteres

    discutables,

    reste

    mal

    connue,

    et

    le projet

    d'une

    histoire

    globale

    2.

    I1

    n'est

    pas

    n6cessaire

    de

    rappeler

    ici les

    discussions

    m6thodologiques

    autour

    de

    i'histoire,

    de

    1'ethno-histoire,

    de la

    tradition

    orale.

    La

    question

    du

    statut

    de

    ces disciplines et des types de sources historiques est loin d'etre

    resolue, et les

    theses

    avanc6es

    par

    divers auteurs

    (Y.

    Person,

    J.

    Vansina,

    D. P.

    Henige,

    H.

    Brunschwig,

    H.

    Deschamps,

    C.

    Coquery-Vidrovitch)

    continuent

    'a

    faire

    l'objet

    de

    d6bats

    s6rieux et

    parfois

    apres.

    Tranclieront

    certainement

    les

    etudes

    plus

    nombreuses

    qui

    seront

    r6alisees

    h

    I'aide

    des

    traditions

    et

    qui

    demontreront

    I'apport

    indiscutable de

    la

    m6moire

    orale i

    i'histoire

    de

    I'Afrique.

    6

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    5/31

    2I6

    CHARLES

    BECKER

    -economique,

    sociale, politique, culturelle, demographique n'a ete

    que

    tres

    partiellement

    realise.

    . Temporellement,

    on

    releve

    des

    inegalites

    flagrantes

    entre les

    peiodes

    ou sous-periodes

    qui peuvent

    etre distinguees

    dans ces

    350

    annees.

    Le

    nombre et

    l'interet des

    etudes

    varient beaucoup, en fonction

    de l'impor-

    tance et de

    la valeur des sources

    utilisees.

    . Spatialement,

    la

    Senegambie

    -

    au sens

    large que nous pouvons lui

    donner

    avec

    B. Barry

    ([I98o])3

    -

    n'est qu'en partie

    couverte par les

    travaux publies.

    Pour

    certaines regions, les donnees accessibles

    a

    l'histo-

    rien sans enquete personnelle preliminaire sont tres rares, ce qui rend

    assez precaire

    toute tentative

    de synthese

    generale

    pour l'ensemble

    senegambien.

    . Qualitativement,

    les

    sujets abordes

    different

    selon

    qu'on emploie

    preferentiellement les

    sources ecrites ou les traditions

    orales. Dans le

    second cas,

    les

    etudes

    fondees sur des renseignements

    traditionnels

    privilegient

    l'histoire socio-politique,

    en

    insistant

    sur le

    regne

    de tel ou

    tel

    souverain,

    ou

    sur

    le

    role

    de telle famille

    ou de tel

    groupe

    ;

    elles

    traitent

    souvent

    de

    l'organisation sociale

    et

    politique,

    et

    citent presque toujours,

    jusqu'a present,

    les donn6es

    fournies

    par

    Yoro

    Dyao

    (I864;

    Rousseau

    I933, I94i)

    et Sire Abbas Soh

    (19I3)

    dont

    l'int6ret

    est

    ind6niable

    mais

    dont

    la

    r6p6tition

    obligatoire

    dans

    tous

    les

    travaux

    sur les

    pays

    wolof

    et

    le

    Fuuta

    peut

    etre

    lassante.

    Dans

    le

    cas des

    travaux

    exploitant

    essentielle-

    ment les sources

    ecrites, l'importance

    accord6e

    au

    commerce atlantique,

    aux

    'tablissements

    europeens

    de

    la

    cote,

    aux relations

    entre

    les

    souverains

    cotiers

    ))

    et les

    commerSants

    6trangers

    est nette.

    . L'utilisation

    des

    sources ecrites

    a

    ete

    plus frequente que

    celle des

    traditions

    orales.

    De ce

    fait

    la

    confrontation

    des

    deux

    types

    de

    sources

    demeure

    rare et

    presque

    toujours

    limitee.

    Pour

    cela

    aussi,

    l'elaboration

    d'une

    synthese,

    qui

    resulte

    d'une

    veritable

    confrontation,

    est difficile

    car

    on manque

    encore

    trop

    de

    corpus

    consistants

    de traditions

    orales.

    .

    Alors

    que

    des documents

    archeologiques

    existent

    pour

    toute la

    periode

    ( precoloniale )),

    ls

    n'ont

    presque

    pas

    ete

    interroges

    et

    les

    fouilles

    relatives

    a

    cette

    epoque

    sont

    tres limitees.

    Malgre

    les difficultes

    de

    leur

    exploitation

    (il s'agit

    de

    vestiges qui

    concernent

    parfois

    directement les

    populations

    3.

    La d6finition

    exacte

    de la S6n6gambie

    pose

    des problemes

    r6els.

    Cependant,

    celle

    proposee

    par

    B. BARRY

    ([I980]:

    25)

    est assez

    satisfaisante;

    celul-ci

    suggecre

    de

    deborder

    le cadre

    des

    deux

    ttats

    actuels du S6n6gal

    et de la

    Gambie:

    (

    histori-

    quement, la S6n6gambie d6passe largement les frontieres actuelles du S6n6gal

    et

    comprend

    l'ensemble

    des deux

    bassins

    du

    Fleuve

    S6n6gal

    et

    du Fleuve

    Gambie

    depuis

    leurs sources

    dans

    les

    Hauts Plateaux

    du Futa Jalon

    jusqu'a

    leurs

    embouchures

    dans

    l'Ocean

    Atlantique.

    I1 s'agit d'une

    vaste r6gion

    ayant

    pour

    limites,

    au Nord

    la Vall6e du

    Fleuve S6negal,

    au Sud

    le Rio

    Grande

    et

    a

    l'Est

    le Bafing

    )).

    C'est

    surtout

    la frontiere

    ainsi

    d6finie

    au nord qui

    nous

    semble

    devoir etre

    adoptee

    pour

    englober

    les anciennes

    entit6s politiques

    riveraines.

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    6/31

    HISTOIRE DE LA

    SENEJGAMBIE

    XVe-XVIILe

    SIECLE

    '7

    actuelles, reticentes 'a l'idee d'une eventuelle fouille), ces temoignages

    devraient servir

    a resoudre

    diverses

    questions peu

    ou mal

    abordees.

    Ce constat assez

    negatif

    une

    fois

    6nonce,

    evoquons

    quelques

    problemes

    poses a l'historien

    de

    la

    periode

    ((

    precoloniale

    ))

    pour

    mettre en

    evidence

    des acquis anciens

    et

    recents, pour

    delimiter

    certaines

    zones

    d'ombre,

    et pour

    essayer

    de cerner les

    taches

    qui

    demeurent.

    Le bilan

    prospectif

    ainsi propose

    ne

    peut

    bien

    su'r

    citer tous les

    auteurs et tous les

    apports

    -

    ce

    n'est pas

    un palmares

    -

    mais

    retient

    surtout,

    avec

    une

    part

    certaine

    d'arbitraire,

    quelques

    etudes

    qui

    nous

    paraissent

    marquantes

    a un titre ou a un autre et sont evoquees a titre d'exemple. Quand une

    bibliographie plus complete aura ete etablie

    et

    depouillee,

    il sera

    possible

    de

    mieux

    classer

    les

    etudes

    et

    d'en

    souligner l'interet.

    Nous

    tenterons

    pour

    l'instant

    de

    repondre

    a

    trois

    questions: (i)

    Quelle

    est

    la

    pertinence

    du

    terme

    ((

    precolonial

    ))

    ou, quelle periodisation doit-on

    retenir

    pour

    J'histoire

    senegambienne

    ?

    (2)

    De

    quel

    materiau

    dispose-t-on

    ? Il

    sera

    surtout

    question

    ici

    des

    sources

    disponibles (materiaux

    ((

    bruts

    )))

    et des

    travaux

    realis6s

    (materiaux

    ((

    elabors

    ))). (3) Que

    reste-t-il

    a

    faire ?

    Nous

    nous

    contenterons d'avancer quelques

    propositions

    pour

    l'orientation des

    travaux

    futurs.

    Faut-il parler de

    l'epoque

    <

    precoloniale >>?

    La

    question de

    la

    periodisation

    de

    l'histoire

    senegambienne doit

    etre

    abordee

    en

    premier. Elle

    est essentielle, et

    epineuse.

    Rappelons les

    articles

    deja

    anciens d'Yves

    Person (I962) et

    d'Ivan

    Hrbek

    (I97i) qui

    posaient,

    en des

    termes

    toujours tres

    actuels, cette

    question

    de

    la

    periodisation et

    des

    reperes

    chronologiques

    necessaires

    a

    l'elaboration

    d'une

    synthesc

    historique.

    Ces

    reflexions

    soulignaient

    l'importance de la recherche d'un cadre chronologique, mais aussi les

    difficultes

    particuli'eres

    quIon

    rencontre dans

    les

    diverses

    societes afri-

    caines.

    Dans

    le

    cas de

    la Senegambie, ces

    difficultes paraissent

    moins

    grandes qu'ailleurs car

    les

    societes

    ((

    etatiques

    ))

    predorninent

    par rapport

    aux

    societ6s

    egalitaires

    ou

    a chefferies

    lignageres.

    En

    effet, les

    principes

    de

    constitution

    des

    traditions,

    differents dans ces deux

    types de

    societes,

    font

    que

    les

    premileres ont retenu

    des

    dates

    parfois

    etonnamment precises,

    alors que les

    secondes n'ont

    guere

    eu

    cette

    preoccupation

    et proposent

    des

    genealogies non

    datees,

    sans

    reference

    a

    des

    evenements

    situes dans

    le temps. On

    est

    donc

    oblige de

    privilegier d'une

    certaine

    maniere

    les

    societes etatiques pour periodiser l'histoire senegambienne a partir de

    criteres

    internes, et de

    ((

    raccrocher

    ))

    tant bien que

    mal les autres

    societes

    au cadre

    chronologique

    defini.

    I1

    est

    possible de faire

    un choix dont

    il

    faut

    enoncer les

    implications.

    En

    effet, nous parlons de la

    periode

    ("precoloniale

    ))

    en

    distinguant

    deux

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    7/31

    2I8

    CHARLES

    BECKER

    grandes sous-periodes: l'une, allant de la fin de la protohistoire jusqu'a la

    d6couverte

    europeenne au

    milieu du

    XVe siecle,

    qui ne sera pas

    traitee

    ici;

    I'autre, allant

    du milieu du

    xve

    siecle

    jusqu'a la

    fin du xvIIIe

    siecle,

    soit

    la

    periode de

    la traite

    atlantique,

    dont les

    caracteristiques

    ont

    varie

    durant

    ces

    350

    ans.

    Cette

    schematisation

    retient

    surtout (sauf

    pour le

    debut, d'ailleurs

    difficile

    'a

    situer dans le

    temps) des

    criteres externes,

    admettant

    donc

    implicitement

    que la traite

    atlantique, ses

    debuts,

    son

    evolution,

    puis

    l'instauration du

    ((

    commerce

    legitime

    ))

    sont

    des

    faits constitutifs

    de

    l'histoire

    senegambienne et

    servent

    'a

    la

    periodiser.

    Ces dates

    sont uti-

    lisees par la plupart des auteurs (Crowder

    I977;

    Coquery-Vidrovitch &

    Moniot

    I974;

    Deschamps

    I970; Ajayi &

    Crowder

    I97I,

    etc.,

    qui

    retiennent

    i8oo comme

    tournant,

    alors que

    Ki-Zerbo I972

    ne se

    pro-

    nonce pas

    vraiment).

    Le

    decoupage

    de l'ensemble

    de la

    ((

    periode

    precoloniale

    ))

    met

    en

    evidence

    une

    certaine

    unite

    de la

    periode,

    avec

    la

    cesure

    principale

    que

    represente

    le debut de

    la

    traite atlantique. I1

    va de soi

    que

    l'utilisation

    de

    dates

    precises

    comme

    1450

    et I8oo est

    commode mais

    reste a bien des

    egards insatisfaisante.

    I1 n'est

    pas

    assure, a

    moins

    que des

    travaux

    ulterieurs

    viennent

    le

    demontrer, que

    ces

    dates correspondent

    'a

    de

    reels

    tournants dans la vie des societes senegambiennes memes. ILest nean-

    moins possible,

    en

    l'etat

    actuel des

    connaissances,

    de les

    retenir

    aujour-

    d'hui avec des reserves

    et

    en

    constatant, par

    exemple, que

    pour

    tel

    royaume

    ou tel

    ((

    pays

    ))

    d'autres

    periodisations, plus

    fines,

    se

    justifient

    'a

    partir

    de

    criteres

    internes

    (comme les

    6tapes

    de

    l'histoire

    du

    peuplement).

    Si

    l'on

    accepte

    le

    cadre

    general

    des

    350

    annees,

    en

    reconnaissant

    le

    role

    majeur de la

    traite

    atlantique

    dans

    l'evolution

    des

    societes

    senegam-

    biennes,

    on

    peut

    suggerer

    une nouvelle

    subdivision,

    'a

    partir

    d'une

    date

    marquante pour les

    royaumes

    du Nord et de l'Ouest

    senegambien,

    'a

    savoir

    l'episode connu sous le nom de ((guerre des marabouts )) (ou guerre de

    Tuubefiaan:

    I673-I677).

    Ainsi aurait-on

    La

    sous-periode

    de

    I450

    i

    677, marquee

    par

    le

    debut

    et

    le

    develop-

    pement

    de

    la

    traite

    atlantique.

    La

    traite

    des

    esclaves,

    mais aussi

    le

    commerce

    d'autres

    produits,

    caracterisent

    celle-ci:

    son

    d6but

    connalt

    une

    ((

    refonte

    de

    la

    carte

    politique

    ))

    (Boulegue [I968]: I77

    sq.)

    ou

    plutot

    des

    modifications

    notables,

    suivie

    d'une

    relative

    stabilite

    qui

    sera

    remise

    en

    cause

    par

    l'augmentation

    de

    la

    traite

    des Noirs.

    I1

    est

    probable

    que

    le

    commerce transsaharien

    et

    le commerce

    interafricain se

    sont

    maintenus

    dans

    une

    large

    mesure.

    A

    l'aide

    des

    travaux de

    Boulegue ([I968]),

    de

    Moraes

    (I976)

    et

    de

    Thilmans4,

    et en

    privilegiant

    des

    criteres

    externes,

    4.

    On trouvera, dans le

    Bulletin de

    l'IFAN, de nombreux

    documents du XVIIe iecle

    publi6s

    et commentes

    par G. Thilmans

    et N.

    I.

    de Moraes. II

    est impossible

    de

    les citer

    ici.

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    8/31

    HISTOIRE DE LA

    S?gNEGAMBIE, XVe-XVIIIe

    SLECLE

    2I9

    nous pouvons encore distinguer (a)

    la

    periode portugaise

    avec les

    modifi-

    cations politiques; (b) la

    ((

    nouvelle ere

    dans

    le commerce

    atlantique )

    (Boulegue [I968]: 246 sq.) due

    h la

    rivalite

    entre

    les

    nations

    europeennes

    a partir du dernier tiers

    du xvIe

    siecle.

    .

    La

    sous-periode

    de

    I677

    .

    i8oo,

    ojU

    la traite des esclaves a joue

    un

    role

    dominant dans le

    commerce, avec

    la

    gomme

    comme

    second

    produit

    d'exportation.

    C'est

    l'epoque des nombreux conflits entre Etats

    sene-

    gambiens, de la pression maure sur le

    Senegal

    et de

    profondes

    modifica-

    tions sociales,

    economiques et

    religieuses.

    En retenant ces dates, approximatives, nous admettons que l'histoire

    de

    toutes les

    societes

    senegambiennes

    a

    ete

    marquee par

    l'existence de

    la traite atlantique et ses

    consequences

    induites. Si

    l'on cherche 'a pro-

    mouvoir le point de vue africain

    et

    'a

    comprendre ce qui s'est

    effective-

    ment

    passe

    dans

    ces

    societes,

    il faut suivre la voie tracee

    par

    I. Hrbek

    (197I: I26):

    ((

    Nous devons

    [...]

    nous

    d6barrasser de toute id6e

    pr6conque

    et essayer de suivre

    le

    processus historique

    en

    Afrique d'un point

    de vue

    africain,

    sans

    oublier

    bien

    s,6r

    les forces exterieures qui

    fagonn6rent

    ou influenc6rent ce processus. Puisque

    1'his-

    toire

    africaine

    est

    essentiellement

    l'histoire

    des

    peuples qui habitent

    ce

    continent,

    toute periodisation qui se veut objective doit 8tre envisag6e de favon Atenir compte

    principalement et essentiellement

    du developpement des soci6t6s africaines:

    commencer

    avec

    les

    Africains

    et

    voir en eux non seulement

    l'objet,

    mais

    le

    sujet

    du

    processus historique )).

    I. Hrbek

    poursuit en soulignant que la periodisation

    marxiste

    de

    l'histoire universelle est

    inoperante

    pour l'histoire africaine, et

    en recon-

    naissant comme nous la

    difficulte

    de delimiter les

    periodes.

    La

    solution

    provisoire consiste a convenir que l'evolution des

    societes

    a

    ete inflechie

    par la traite atlantique, mais de

    maniere

    differente

    sur

    la cote,

    dans les

    Etats de

    l'interieur,

    dans les

    societes

    non

    etatiques,

    et dans

    l'hinterland

    d'ou provenaient la

    plupart des captifs vendus sur

    la cote.

    Outre cette

    periodisation

    generale

    -

    l'aide de dates qui ont l'avantage

    de

    la

    certitude mat6erielle,

    on peut aussi suggerer d'autres

    decoupages

    beaucoup plus imprecis,

    comme ceux que nous avons

    adoptes dans

    l'Atlas

    du

    Senegal (Martin

    & Becker

    1977:

    52-53):

    (a) l'empire du

    Jolof,

    XIVe-XVe

    siecles; (b) Koli

    Tengela et la domination pel,

    XvIe-

    XvIIe

    siecles;

    (c)

    l'empire

    du Kaabu, xiiIe-xvIIe

    siecles

    (dont l'histoire

    s'acheve

    au XIxe

    siecle).

    Cependant, ces delimitations peuvent

    etre

    critiquees, et elles ont

    l'inconvenient de laisser hors du champ histo-

    rique

    les

    zones, parfois vastes, qui ne

    faisaient

    pas partie de

    ces

    entites

    principales.

    On

    peut

    conclure

    que

    ces deux

    periodisations restent

    insuffisantes, bien

    que

    la

    premiere

    soit

    plus

    commode

    a appliquer. Les questions chrono-

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    9/31

    220

    CHARLES

    BECKER

    logiques pour les Etats ne sont pas resolues, et elles sont plus complexes

    encore pour les

    societes

    sans structure

    etatique.

    Par ailleurs, les processus

    de transformation des

    societes

    sont mal connus, et il est donc difficile

    de

    decider

    quelle

    modification

    (demographique,

    socio-familiale, culturelle,

    economique) est

    decisive

    dans un ou dans tous les domaines de

    la

    -ie

    sociale.

    C'est pourquoi il convient d'employer le terme

    ((

    precolonial

    ))

    avec

    beaucoup de

    reserves,

    en laissant ouverte

    la

    discussion sur

    la possibilite

    et

    la pertinence d'autres denominations, ainsi que sur les

    criteres

    de

    periodisation valables dans le cas de

    la Senegambie.

    Disons cependant

    que, selon nous, l'histoire des peuplements, qui suppose une histoire

    des villages, des familles et des migrations,

    merite

    une attention parti-

    culiere car elle pourrait sans doute livrer des

    criteres

    neufs applicables

    aux

    Etats, mais surtout aux pays sans

    Etat.

    Elle constituerait un utile

    contrepoids

    a

    l'histoire politique qui a

    ete privilegiee:

    elle rendrait compte

    de la

    partie negligee de la vie economique et culturelle, toujours

    mal

    evoquee

    par les sources

    europeennes.

    De quel materiau disposons-nous?

    Nous abordons ici le vrai bilan (provisoire) des connaissances, que nous

    completerons

    'a

    l'aide de la bibliographie5,

    en examinant

    pour

    cette

    periode

    les

    sources existantes, leur interet et

    leurs

    lacunes, puis

    en

    pre-

    sentant quelques tentatives de synthese regionale traitant de toute

    la

    zone

    ou d'une de ses parties, de toute la periode ou d'une sous-periode

    definie

    par

    l'auteur. Ce

    faisant,

    nous essaierons

    de

    preciser

    certaines

    urgences

    du travail

    historique

    et

    de

    cerner

    quelques questions.

    I

    -

    Les materiaux

    ((

    bruts

    ))

    Notons

    d'emblee la

    contingence

    et la

    fragilite'

    de ces

    sources,

    surtout dans

    le

    cas des traditions

    orales.

    S'agissant

    des

    sources

    ecrites,

    la

    conservation

    a

    ete assuree

    pour

    une

    petite partie

    des

    documents

    dont

    nous

    aurions

    besoin,

    et

    la decouverte

    des textes

    anciens est

    souvent le

    fait

    du

    hasard,

    meme

    lorsqu'on

    les

    recherche

    systematiquement. Toutefois,

    on

    remarque

    bien

    de

    grands

    ((

    trous

    ))

    dans

    la

    documentation

    concernant

    certaines

    periodes ou

    certains

    pays. Quant

    aux

    traditions,

    il

    n'est

    pas

    necessaire

    de

    rappeler que

    des

    temoignages importants,

    sinon

    capitaux,

    ont

    disparu

    5. Bibliographic

    des

    travaux universitaires

    (BECKER

    & DIOUF I985)

    en cours

    de

    r6vision,

    portant,

    en

    L'Ftat

    actuel,

    sur 6oo titres.

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    10/31

    HISTOIRE

    DE

    LA

    SENEGAMBIE,

    XVe-XVIe

    SIECLE 22I

    ou sont en train de disparaitre sous nos yeux

    sans

    qu'on

    ait fait

    les

    efforts suffisants pour les recueillir.

    Des problemes specifiques

    se

    posent

    a

    propos

    des trois

    types

    de

    sources

    (internes; externes; archeologiques) decrits plus bas,

    et donc

    de

    leur

    mise en perspective historique. Ainsi, chaque type apporte

    des

    reponses

    dans tel ou

    tel

    domaine, mais

    la

    convergence, souhaitable,

    entre

    ceux-ci

    n'est souvent pas effective dans

    la

    pratique

    courante

    des

    historiens.

    a/

    Les sources internes

    . Les traditions orales publiees consistent pour la plupart en chroniques

    evenementielles, plus ou moins completes, accompagnees

    de

    renseigne-

    ments sur l'organisation

    socio-politique.

    Ces

    donnees

    sont souvent

    exposees de

    maniere

    statique,

    ce

    qui

    laisse

    penser 'a

    tort

    que

    les

    rapports

    entre

    les groupes sociaux (castes, ordres)

    n'ont

    pas

    evolue durant

    des

    siecles et que

    le

    meme titre correspond 'a

    la

    meme

    fonction tout au

    long

    de

    la

    periode.

    . Les traditions villageoises existent

    i

    peu pres partout,

    mais ont ete

    tres

    peu exploitees

    et

    publiees. Nos recherches ont porte sur

    ce

    sujet

    et de nombreux recueils

    historiques suivront

    ceux

    que

    nous

    avons realises

    (Becker & Martin

    i98ia,

    b, c,

    I984;

    Martin & Becker

    I979b).

    *

    Les traditions relatives

    aux

    anciennes provinces

    constitutives

    des

    royaumes sont egalement mal connues. Elles existent, mais souvent

    leur collecte se fait difficilement dans ces provinces ou leur capitale,

    et leurs detenteurs

    se

    trouvent plutot dans

    les

    centres urbains.

    Ces

    traditions ont, elles

    aussi,

    ete negligees.

    . Les

    traditions familiales sont

    tres eparpillees, surtout

    celles

    des

    grandes

    familles dont

    la

    dispersion

    est

    i

    suivre

    a I'aide

    des traditions

    conservees

    dans

    des regions parfois eloignees.

    I1

    serait

    possible

    d'en

    enregistrer un

    grand nombre dans les villes.

    .

    Les donnees

    concernant l'economie, l'agriculture, le commerce n'ont

    guere ete

    recueillies

    en

    tant que

    telles.

    On trouve en gen'ral des men-

    tions

    sur

    certaines

    questions,

    mais

    les traditions n'ont pas

    ete

    suffi-

    samment interrogees sur ces sujets, et la documentation restera sans

    doute

    fragmentaire.

    .

    De

    meme, les traditions

    sur la vie

    culturelle et religieuse sont

    'a

    ras-

    sembler

    -

    notamment

    les

    manuscrits arabes (qui parlent aussi des

    familles).

    On

    doit

    rechercher

    davantage

    tous

    les

    temoignages culturels

    pour

    en

    determiner

    l'origine

    et

    la

    signification historique. Citons, dans

    ce

    domaine,

    les

    travaux des

    Archives culturelles (collecte d'objets, de

    traditions

    ; publication

    de

    quatre repertoires)

    et

    du Centre d'etudes des

    civilisations

    (publication de

    la

    revue Demb ak Tey), les

    donnees apportees

    par

    H. Gravrand

    (sp.

    I983)

    sur

    les Sereer, et notre presentation des lieux

    de culte

    traditionnels

    sereer

    (Martin

    &

    Becker

    I979a).

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    11/31

    222

    CHARLES

    BECKER

    . Les donnees linguistiques ont ete peu utilisees, en particulier pour une

    etude

    systematique

    de la toponymie,

    dont

    l'interet

    historique

    est evident.

    .

    Enfin, les

    donnees sociologiques

    sur la

    repartition

    des

    familles

    et des

    categories

    sociales

    peuvent jeter

    une

    lumiere

    sur

    le

    passe,

    comme le

    demontrent

    nos

    etudes

    sur les

    familles

    sereer

    et

    wolof (Becker

    & Mar-

    tin

    I980,

    I982, I983).

    Apparaissent

    des

    situations

    sociales

    qui sont

    manifestement

    le

    resultat

    de I'histoire,

    et donc

    sont mis

    en

    evidence

    des

    aspects meconnus

    de

    cette

    histoire.

    Ainsi, la

    tradition

    orale fournit

    de nombreuses

    donnees

    sur

    les

    royaumes, les familles, les villages, en developpant souvent les recits

    d'origine qui legitiment

    le

    pouvoir et

    la fonction.

    Le probleme

    majeur

    est

    que

    certaines periodes

    sont mal

    couvertes, et

    qu'on passe frequem-

    ment

    de la fondation

    'a

    des

    evenements

    re&cents

    n laissant

    un grand

    hiatus a propos

    des

    periodes

    intermediaires.

    Mais

    il

    existe cependant,

    tres souvent, des genealogies

    fiables qui comblent

    partiellement

    ce fosse.

    Un travail systematique

    sur

    ces genealogies,

    dans

    les societes avec

    ou

    sans Etat central, autorisera peut-etre

    des conclusions

    historiques

    assurees

    quant

    "a

    'anciennete des

    villages et

    l'histoire des

    pays.

    Signalons

    aussi

    que

    la faiblesse

    des donnees

    statistiques

    est

    une lacune

    importante

    des

    traditions.

    Enumerons

    les

    principales

    publications

    ainsi

    que

    les sources

    existantes

    et mal connues:

    .

    Parmi

    les auteurs

    anciens, on

    note surtout

    Yoro DyAo

    et Sire

    Abbas

    Soh

    (I9I3),

    ainsi

    qu'Amadou

    WAadeI964).

    Toutefois les renseignements

    livres

    par Y.

    DyAo

    n'ont

    ete

    qu'imparfaitement

    edites

    par

    Rousseau

    (1933,

    I94I)

    et Gaden (I9I2),

    et des

    papiers

    non

    publies

    subsistent.

    La

    constitution d'un corpus

    et

    la recherche,

    vaine

    jusqu'h present,

    des

    cahiers manuscrits de cet auteur

    sont capitales.

    .

    On doit

    egalement

    citer

    des auteurs du

    xIxe,

    voire du xvliie

    siecle,

    tels Boilat

    (I853),

    Bocande,

    Le Brasseur,

    Golberry, qui

    transcrivent

    des

    traditions collectees

    'a

    l'epoque

    et

    dont les details

    sont

    a

    comparer

    a

    ceux

    des

    recits posterieurs

    sur les memes

    personnes

    ou

    evenements.

    .

    Parmi les etudes recentes,

    on remarque

    l'edition

    (ou

    la seule

    citation)

    de

    traditions

    dynastiques

    qui

    portent

    sur tous

    les

    souverains

    ou

    sur

    quelques-uns

    seulement6.

    .

    Les traditions familiales

    concemnent

    souvent

    les

    dynasties

    -

    qui

    sont

    a

    succession

    patrilineaire

    ou,

    ailleurs,

    matrilineaire

    -

    mais

    n'ont

    que

    rarement

    fait

    l'objet

    de

    publications

    separees.

    6.

    Cf.

    DIOuF

    (I972)

    pour le Siin;

    BA

    (I976)

    et

    SARR

    (I983)

    pour

    le

    Saalum

    et

    le

    Badibu;

    DyAo

    (I864),

    FALL

    (I974),

    A.

    M. SAMB

    (i964),

    K. SAMB (I983)

    pour

    le

    Kajoor

    et

    le

    Bawol,

    WADE

    (i964) pour

    le

    Waalo,

    etc.

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    12/31

    HISTOIRE DE LA

    SENEGAMBIE, XVe-XVIIIe

    SItCLE

    223

    Les manuscrits d'erudits arabisants commencent 'a etre edites

    -

    ainsi

    ceux

    laisses par Sheikh

    Musa Kamara

    (cf.

    M.

    Ndiaye

    I975)

    -

    mais de

    nombreux

    textes

    attendent, ou sont

    conserves de

    maniere precaire dans

    les villages. Une

    ample moisson serait

    'a

    faire

    par des arabisants

    quant

    a

    l'histoire des

    royaumes, des pays, des

    familles,

    et il n'est

    pas impossible

    que

    des

    decouvertes

    inesperees

    soient ainsi

    realisees.

    Ces

    manuscrits

    en

    arabe sont

    cependant

    'a

    exploiter avec

    precaution car

    il

    s'agit quelquefois

    de

    transcriptions de

    textes fran9ais (listes

    dynastiques

    et

    chronologies

    publiees qui

    sont

    reprises, parfois

    avec

    des

    erreurs

    faciles 'a

    reperer).

    . Les traditions villageoises ont ete collectees sur le Fleuve et dans le

    Bundu7,

    mais la

    documentation est

    incomplete.

    Dans les pays

    sereer,

    H.

    Gravrand

    (I983)

    fournit

    essentiellement des

    renseignements

    sur le

    Siin.

    Dans

    les

    regions wolof et

    sereer,

    comme en

    Casamance,

    P.

    Pelis-

    sier

    (I966)

    a

    recueilli

    beaucoup de

    donnees sur l'histoire

    des villages

    et

    des

    peuplements.

    Nous

    avons

    rassemble ces

    traditions dans les

    pays

    du

    Siin,

    du

    Bawol, du Saalum,

    du Jegem et dans

    les divers pays wolof:

    nous avons

    ainsi publi6 un

    recueil sur

    les

    lles

    du Saalum

    (Martin & Becker

    I979b),

    trois recueils sur le

    Saalum

    (Becker &

    Martin

    i98ia,

    b,

    c),

    un

    autre sur

    l'arrondissement de

    Niakhar

    (Becker & Martin

    I984).

    Pour la

    Casamance, il existe des donnees inedites colligees dans les villages de

    Basse-Casamanceau

    cours

    des

    annees 1950.

    .

    Un bon nombre

    de

    notices, souvent

    breves, ont ete publiees depuis le

    debut de la

    colonisation

    jusqu'a nos

    jours pour evoquer une

    personnalite

    c6lebre

    ou un

    evenement

    important, un

    fait

    marquant,

    telle une

    bataille;

    elles

    eclairent

    souvent

    l'origine d'une

    coutume ou d'un trait

    de

    l'organi-

    sation

    socio-politique. Parmi les

    nombreux

    documents,

    citons le texte

    de

    F.

    V.

    Equilbecq (I974) sur

    Samba

    Gelajo; la

    Grammaire

    de la

    langue

    woloffe de P.

    D. Boilat

    (I858), qui

    fournit des

    donnees

    sur Kocc Barma

    et sur d'autres

    philosophes comme

    Biram Cam

    et Maseni; les traditions

    sur Kocc Barma

    (cf.

    un

    texte inedit de

    B.

    Bocande,

    et un

    num6ro special

    de la revue

    Demb

    ak

    Tey) ; les

    theses comportant des recueils de

    traditions8.

    .

    Une seule

    presentation

    synthetique

    de traditions a

    ete proposee, par

    F.

    Brigaud (I962),

    pour

    tous les

    anciens

    royaumes du

    Senegal : il faut la

    mentionner

    malgre

    ses immenses

    lacunes.

    .

    Beaucoup

    d'autres donnees sur les

    cultures

    traditionnelles

    ont

    ete

    publiees

    ou

    sont

    consultables

    (telles celles

    mentionnees

    dans les

    quatre repertoires

    etablis par

    les

    Archives

    culturelles). Remarquons

    7.

    Cf. les travaux

    de

    CURTIN

    I975;

    ROBINSON, CURTIN &

    JOHNSON

    I972;

    BATHILY

    I985 ;

    CISSOKO

    1979.

    8.

    Cf.

    les travaux de

    B. DIENG

    (I978)

    sur le

    Kajoor,

    de

    LY

    (1978)

    sur le

    Fuuta, de

    S.

    DIENG

    (I984) sur El

    Hajj

    Omar.

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    13/31

    224

    CHARLES BECKER

    en outre qu'une reflexion sur les proverbes peut etre riche en perspectives

    historiques9.

    Un

    reel

    effort

    a

    ete

    effectue

    pour faire

    mieux connaitre

    toutes ces

    sources et

    percevoir

    l'interet

    de chacune

    pour la

    recherche

    historique.

    Les

    chroniques et

    chronologies

    sont

    disponibles,

    depuis

    longtemps pour

    certains

    pays, beaucoup

    plus

    recemment

    pour

    d'autres.

    Quant aux

    traditions

    villageoises,

    familiales,

    provinciales, leur

    publication

    commence

    a peine

    mais on

    peut

    esperer

    la

    constitution

    prochaine de

    corpus qui

    permettront

    de nouvelles

    approches de

    l'histoire du

    peuplement.

    Malgre les travaux recents, des vides subsistent "apropos de certaines

    zones: il

    faudrait, en

    particulier, mener

    des etudes

    sur les

    anciennes

    provinces

    (creation, liste

    des

    chefs,

    role

    dans

    l'histoire des

    royaumes)

    dont les

    traditions

    pourraient

    etre

    utilement

    confrontees aux

    documents

    du

    debut de

    la

    colonisation,

    quand de

    nombreux

    renseignements

    ont

    etc

    reunis pour

    determiner le

    decoupage

    des

    cantons10. On

    peut donc

    consi-

    derer qu'une

    certaine

    priorite

    devrait,

    a

    l'avenir,

    etre accordee a

    l'inves-

    tigation dans les

    regions

    mal

    prospectees

    et

    dans les

    provinces

    anciennes,

    'a

    la

    publication de

    corpus

    solides et

    a

    la

    recherche

    de documents

    comple-

    mentaires pour

    des

    periodes

    moins bien

    explorees

    de

    l'histoire

    des

    royaumes et des dynasties.

    b/ Les sources

    externes

    Ces

    sources,

    rappelons-le,

    peuvent

    faire etat de

    traditions

    orales

    et

    constituer de ce

    fait un

    temoignage sur la

    maniere dont

    elles

    etaient

    fixees

    'a l'epoque.

    Cependant

    ces

    documents,

    presque exclusivement

    europeens dans

    l'etat actuel

    des

    connaissances, ont en

    general

    d'autres

    centres

    d'interet.

    I1

    faut

    souligner

    le

    caractere

    partiel

    et

    lacunaire de

    ces

    sources

    qui

    expriment trop souvent le seul point de vue europeen sur les societes

    africaines, d'ou

    des

    omissions et

    des erreurs

    regrettables.

    Elles insistent

    sur

    les faits

    economiques, les

    relations

    commerciales,

    la

    vie des

    comptoirs

    et

    de

    leur

    personnel. Les

    renseignements

    sur

    l'interieur du

    pays

    sont

    tres

    rares et ne

    portent

    que

    sur les

    abords

    immediats

    des

    axes fluviaux

    que

    sont la

    Gambie et le

    Senegal;

    le

    Saloum

    et

    la

    Casamance resteront mal

    connus

    jusqu'au

    xIxe

    siecle,

    ou une

    cartographie

    correcte

    en sera

    proposee.

    D'ailleurs

    la

    cartographie

    demontre

    a

    souhait

    les

    limites

    de l'information

    procuree

    par

    les

    documents

    europeens:

    assez

    riche

    pour

    la

    cote

    et

    les

    9.

    Cf. le Dictionnaire sereer...

    de CRfTOIS

    (I972-77),

    ainsi que les travaux in6dits

    de

    N. Diatta sur

    les

    Jola,

    de

    J.

    N. Diouf et

    J.

    N.

    Seck

    sur les

    Sereer.

    IO. Cf. les donn6es contenues

    dans les rapports

    des sous-s6ries

    i G et 13 G des

    Archives nationales du

    Senngal

    (citees

    infya

    ANS), intitul6es

    respectivemeint

    ttudes

    generales. Missions,

    notices, monographies,

    I8I8-192I ,,

    et

    ((

    Affaires

    politiques, administratives

    et musulmanes,

    I782-I9I 9D.

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    14/31

    HISTOIRE

    DE

    LA

    SENEGAMBIE, XVe-XVIIIe SIECLE

    225

    deux vallees principales, elle est a peu pres inexistante pour le reste de la

    Senegambie.

    Ces

    sources

    sont variables

    en nombre

    et en

    qualite

    selon

    les

    epoques.

    Ce sont

    des relations

    de

    voyageurs

    ou

    bien

    de

    residents

    dont les

    temoi-

    gnages

    sont

    souvent importants, mais

    aussi plus

    rarement

    -

    des

    documents scientifiques comme ceux

    rediges

    et

    partiellement

    publies

    vers le

    milieu du

    xVIIIe

    siecle

    par le naturaliste

    Michel

    Adansonll.

    En

    outre,

    les archives

    des anciennes

    compagnies

    commerciales existent

    (surtout pour les

    XVIIe

    et

    XVIIIe

    siecles)

    mais

    les

    pieces

    du

    XvIIe

    siecle

    restent

    tres fragmentaires alors

    que

    celles

    du

    XvIIIe

    sont

    mieux

    conservees,

    sous forme de series continues et dans des depots connus. Signalons en

    particulier, aux

    Archives nationales de

    France

    (Paris),

    le

    fonds des

    Colonies (series

    C6

    a C8) et celui de

    la

    Marine;

    dans

    la

    Section

    Outre-Mer,

    le

    depot

    des

    fortifications des colonies (DFC;

    Saint-Louis,

    Goree, Cotes

    d'Afrique)

    et

    la

    cartotheque, comportant

    les cartes

    du DFc avec

    d'autres

    documents

    geographiques;

    a

    la

    Bibliotheque

    nationale

    (Paris),

    les fonds

    du

    departement

    des

    cartes

    et

    plans

    et

    ceux

    du

    cabinet des

    manuscrits;

    au Service

    historique

    de l'Armee

    de

    Terre

    (Vincennes), plusieurs series;

    celles du

    Public

    Record Office

    (Londres);

    aux

    Archives

    nationales du

    Senegal

    (Dakar),

    de rares

    pieces anterieures

    au

    XIxe

    siecle. On

    dispose,

    pour le reperage des sources, d'instruments importants tels que les

    Guides

    edit's par le

    Conseil

    international des

    archives (I970-83), ceux

    des

    archives

    anglaises et

    portugaises,

    ainsi

    que

    les

    repertoires

    des

    archives

    du

    Senegal

    et

    de

    l'AOF.

    Les

    recherches

    exemplaires

    mene'es

    sur ces

    fonds d'archives, en

    particulier celles

    de A.

    Brasio (I958-79), de G.

    Thilmans, de N. I. de

    Moraes (I976),

    ont montre que

    beaucoup

    de

    textes nouveaux

    pouvaient

    etre

    exhumes

    et

    qu'ils se

    trouvaient parfois

    en

    des lieux

    inattendus. De

    meme,

    les

    recherches

    inachevees

    de

    J. Mettas

    (I978, I984)

    sur

    la

    traite

    des

    Noirs

    ont

    mis en

    lumiere

    l'interet

    d'un

    examen

    des

    archives por-

    tuaires

    fran9aises

    (et

    etrangeres):

    elles

    ont

    livre une documentation

    neuve sur cette

    question encore

    largement debattue.

    Parmi

    les

    publications, on peut

    mentionner:

    . les

    relations

    d'epoque, qui sont

    toujours

    citees

    dans les

    travaux univer-

    sitaires;

    beaucoup

    d'autres

    demeurent

    inedites,

    malgre leur importance

    i

    i.

    Adanson

    est

    un

    botaniste

    franSais,

    n6

    en

    1727,

    qui

    s6journa

    au

    S6n6gal

    de

    1749 -

    I754.

    C'est

    le premier

    scientifique de renom

    'a avoir r6alis6

    des

    etudes

    tr6s poussees en Afrique subsaharienne. Son projet de publication d'une ency-

    clop6die

    consacr6e

    au

    Sen6gal ne put

    etre men6 i

    terme: un seul

    volume,

    avec

    une

    relation

    de son

    sejour et

    une

    pr6sentation

    descoquillages,futpubli6

    (I757).

    Mais

    beaucoup d'el6ments ont ft6 utilis6s dans

    l'ouvrage

    majeur

    du

    naturaliste,

    intitul

    Famille

    des

    plantes

    (1763),

    et de

    multiples

    fragments manuscrits

    sont

    conserves

    dans un carton

    d6pose'

    L

    a

    biblioth6que du

    Museum

    d'histoire

    natu-

    relle,

    a

    Paris.

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    15/31

    226

    CHARLES

    BECKER

    pour l'histoire de tel ou tel royaume. Toutefois, de nombreux textes

    ont ete

    presentes

    au cours

    des

    dernieres annees

    par Thilmans,

    Moraes

    (I976),

    Becker

    et Martin

    (I975),

    Ritchie

    (I968), Delcourt

    (cf.

    David

    I974):

    les efforts

    plus

    anciens

    dans

    ce

    domaine

    (Cultru,

    Froidevaux,

    Machat,

    Marty, Schefer)

    ont

    ete

    ainsi

    poursuivis

    et

    amplifies.

    . le recueil

    des

    cinq volumes

    de

    Brasio

    (1958-79),

    qui comporte

    des

    textes

    de tout genre,

    connus

    (edition

    critique,

    dans

    ce cas)

    ou

    inedits.

    Ces

    Monumenta

    missionaria...

    ont

    revele

    l'importance

    des archives

    portugaises

    (trop

    peu exploitees)

    et des

    archives

    missionnaires.

    Cet ouvrage

    est

    fondamental

    et

    a largement

    servi

    'a

    la synthese

    de

    J.

    Boulegue

    ([i968])

    -qui

    a

    publie

    par

    ailleurs

    plusieurs

    traductions

    de textes

    portugais.

    *

    les

    editions

    critiques,

    par Mauny,

    Monod,

    Teixeira da

    Mota,

    Bourdon,

    de textes

    anciens

    comme

    ceux

    de A. Zurara,

    Valentim

    Fernandes,

    B. Miinzer,

    Diogo Gomes,

    C.

    Dornelha.

    On

    peut

    conclure

    que

    la documentation

    desormais

    utilisable

    pour

    le

    xvIe

    et le

    xvIIIe

    siecles

    s'est considerablement

    enrichie.

    Les

    decouvertes

    realisees

    doivent

    encourager

    a

    poursuivre

    la recherche

    patiente et metho-

    dique

    des

    documents,

    en particulier

    sur

    les periodes

    obscures,

    et

    a

    ras-

    sembler les textes disperses (par exemple une bonne partie des manuscrits

    d'Adanson).

    Les

    sujets

    abordes

    dans

    ces materiaux

    sont

    varies,

    comme on

    le

    constate dans

    le recueil de textes,

    en

    quatre

    volumes,

    de

    N. I. de Moraes

    (I976)

    et dans

    sa

    synthese,

    en deux

    volumes,

    qui

    recapitule

    les

    donnees

    de

    faZon

    thematique.

    Mais les

    renseignements

    sont

    tres inegaux

    : le

    fait

    que

    beaucoup

    de

    choses aient ete

    trouvees

    concernant

    la Petite-Cote

    au

    xvIjIe siecle

    ne

    signifie

    pas qu'une

    recherche

    sur d'autres

    regions

    serait aussi

    fructueuse

    -

    et il est

    probable

    que

    les documents

    sur

    les

    pays

    de

    l'interieur (comme

    le

    Jolof)

    resteront tres

    rares.

    On

    peut

    ajouter

    que les sources decouvertes decrivent la vie a proximite des comptoirs

    europeens,

    et

    beaucoup

    moins

    la vie

    "a

    'interieur

    des

    royaumes

    cotiers,

    la rarete

    des

    relations

    sur

    les

    capitales

    etant significative.

    La collecte de

    ces sources n'est

    donc

    pas

    close,

    mais

    ses

    resultats

    concerneront

    surtout

    la

    cote

    et

    les

    vallees.

    Comme nous avons

    voulu

    le

    suggerer

    dans

    une

    planche

    de

    l'Atlas

    du

    Senegal

    sur

    ((

    La Senegambie

    au

    xvlIIe

    siecle

    ))

    (Martin

    &

    Becker

    I977

    :

    54-55),

    en illustrant

    l'epoque

    de

    la traite

    des esclaves

    par

    la carte de d'Anville

    et deux

    plans

    (Saint-

    Louis et

    Goree),

    la

    connaissance

    de

    la

    Senegambie

    est

    tres

    mince et

    se

    limite

    aux endroits

    strategiques pour

    le commerce

    atlantique.

    Cependant,

    pour le XVIIIe siecle mais aussi pour les siecles precedents, d'impor-

    tantes

    precisions

    chronologiques

    et de notables

    donnees

    statistiques

    existent.

    Toutefois,

    la

    chronologie

    ne

    peut

    etre

    fondee

    que

    sur

    des

    tra-

    ditions,

    et une

    liste

    dynastique

    ne

    peut

    en aucun

    cas

    etre

    dressee

    t

    partir

    des

    seules

    sources

    ecrites

    :

    signalons,

    a

    titre

    d'exemple,

    le

    probleme

    du

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    16/31

    HISTOIRE

    DE

    LA SENEGAMBIE,

    XVe-XVIIIe SItCLE 227

    teeii2 appele Denchafour par les documents europeens du

    XVIue

    siecle,

    dont

    le nom

    est

    deforme a

    un

    point

    tel

    que

    son identification avec un

    teeW

    de

    la

    tradition

    est malais6e

    (Moraes

    et Thilmans n'avancent

    pas d'hypo-

    these; peut-etre s'agit-il

    du teeii Ce

    Ndela).

    De

    meme,

    les

    renseigne-

    ments

    statistiques

    ne

    peuvent

    etre

    accept6s

    sans

    critique,

    et nous

    avons

    souvent insist6

    sur

    la necessit6

    de

    tenir

    compte

    de

    tout

    le

    trafic

    illicite

    que

    les

    documents

    officiels

    taisent.

    De

    ce

    fait,

    les chiffres de la traite

    atlantique, merme

    ceux

    avanc6s apres

    des recherches

    m4ticuleuses,

    resteront toujours

    incertains et

    seront 'a

    considerer comme des estimations

    minimales

    (Becker i985)13.

    c/

    Les

    sources

    archeologiques

    Ces

    sources existent

    et sont

    a etudier. Or elles restent encore tres negligees,

    a quelques exceptions pres (travaux inedits

    d'O.

    Linares

    en

    Basse-

    Casamance,

    de

    Gray puis

    de Hill en

    Gambie,

    de

    Thilmans

    'a Goree,

    notices

    de

    Mauny, Monod,

    Teixeira

    da Mota

    sur

    les

    anciens

    comptoirs). L'omission

    de

    ces sources constitue une

    grande

    lacune

    pour

    la

    connaissance de

    la

    periode.

    Meme

    si

    toutes

    ne

    sont

    pas exploitables (comme

    les cimetieres),

    leur etude

    concomitante

    avec celle des autres sources s'impose.

    . Pour les comptoirs comme

    Saint-Louis et

    Goree,

    ainsi que ceux de la

    vallee du Senegal

    et

    de

    la

    Gambie, les recoupements avec les documents

    europeens sont assez nombreux, ces documents pouvant meme

    orienter

    utilement

    les

    fouilles. On attend

    en particulier les

    resultats

    de Thilmans

    a Gor6e,

    ses fouilles etant

    un

    pr6alable necessaire a la restauration

    de

    l'ile.

    Des

    travaux devraient

    etre

    conduits sur les anciens comptoirs cotiers

    et

    fluviaux, pour retrouver

    non seulement l'emplacement et

    les restes

    de

    ces

    etablissements, mais aussi les traces

    de

    l'activite

    economique

    et

    commerciale (par exemple l'exploitation

    aurifere

    ancienne et les

    mines,

    autour de la Faleme).

    .

    Plus

    delicate est 1'exploitation

    d'autres sources dont on doit

    au

    moins

    assurer

    le

    reperage.

    Ainsi les

    cimetieres

    traditionnels (les tumulus ou

    lomb chez

    les Sereer, voire les

    baobabs

    a

    griots) et les lieux de culte ou

    les emplacements

    celcbres.

    Leur

    recensement et leur

    etude,

    meme

    si elle

    ne peut

    etre accompagnee

    de

    fouilles,

    peut se

    reveler

    riche en

    renseigne-

    ments

    historiques.

    *

    Il

    existe n6anmoins beaucoup de lieux historiques

    ou

    des travaux

    archeologiques

    seraient

    possibles, apres des reperages

    prealables.

    Ainsi,

    12.

    Teeni:

    titre donn6

    au souverain

    du Bawol.

    I 3.

    Une longue

    discussion a

    6te consacr6e

    au problme du

    chiffre de la

    traite

    frantaise

    au

    xvIrle

    si6cle

    (BECKER I985).

    Nous

    avons

    montre

    que

    les

    chiffres

    officiels,

    obtenus a partir d'un

    depouillement

    systematique

    des

    sources (METTAS

    1978,

    I984; Becker, recherches

    personnelles), sont i r6viser

    substantiellement

    en

    hausse, et que les

    sources memes

    demeureront sans

    doute toujours

    lacunaires.

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    17/31

    228 CHARLES BECKER

    il serait bon de visiter, dans une perspective archeologique, les anciennes

    capitales pour identifier les

    hleux

    oiu

    se

    deroulaient

    les

    ceremonies

    du

    couronnement, les lieux de culte, les amas d'ordures ou les places autre-

    fois habitees, et d'autres vestiges

    6ventuels.

    La phase

    preliminaire

    d'exploration exige bien

    sCur

    ue l'on soit attentif

    'a

    toutes les traditions

    relatives aux restes

    archeologiques, a

    leur

    anciennete,

    h

    leur signification.

    Cette

    etude des capitales pourrait

    s'etendre

    aux chefs-lieux des provinces

    historiques, aux villages principaux correspondant aux

    premieres

    implan-

    tations de familles importantes, aux villages

    consider6s

    comme des points

    de dispersion pour certaines castes (forgerons, cordonniers, boisseliers),

    aux villages pres desquels se sont deroules des evenements particuliers

    ou

    des batailles.

    La

    fouille des amas de

    dechets

    d'anciennes capitales ou

    d'anciens centres fourniraient des

    donnees

    tout

    'a

    fait neuves sur la vie

    inaterielle et culturelle.

    *

    Le

    recensement systematique des emplacements de villages abandonnes,

    ainsi que l'analyse de la toponymie pourraient sans doute nous apprendre

    beaucoup sur l'histoire du peuplement et sur des migrations mal connues.

    Sur ces emplacements, une collecte

    preliminaire

    d'objets est souvent

    possible.

    . De mexme, l'inventaire des puits anciens, generalement proches de ces

    emplacements, reste a faire. I1 demontrerait l'existence de grands puits,

    creuses a travers des materiaux divers, attestant des technologies par-

    ticulieres (les

    grands puits du Kajoor dont

    les

    plus celebres

    sont ceux

    de

    Ndande; ceux du Saalum; les puits creuses dans la

    laterite,

    au Ferlo

    et

    en Haute-Casamance).

    *

    Dans les

    regions c6tieres,

    les

    amas

    coquilliers

    sont

    egalement

    'a

    prendre

    en

    consideration.

    J.

    Joire

    (I947)

    a

    entrepris

    cette

    etude

    dans

    les

    environs

    de

    Saint-Louis, oiu

    les

    amas sont

    presque

    tous

    plus

    anciens

    que l'epoque

    precoloniale

    meme.

    Le travail

    archeologique

    sur la

    periode

    est encore

    considerable

    et

    tiendra ses

    promesses

    s'il

    est

    ouvert

    'a

    'apport

    de toutes

    les autres

    sources,

    surtout des traditions.

    Mais

    rappelons,

    avec

    M.

    Posnansky (I97I: II3),

    [qu']il

    ne

    faut

    pas trop

    attendre

    de

    I'arch6ologue.

    On

    court

    un

    danger

    en

    posant

    dles

    questions auxquelles

    on ne

    peut r6pondre

    et en

    y repon(lant par

    r6f6rence

    h

    des

    d6ductions qui

    ne

    furent

    jamais destinees

    a etre

    appliqudes a

    des

    champs

    d'6tude

    plus vastes. L'archeologie fournit,

    au

    mieux,

    des informations mat6rielles

    sur

    la

    technologie

    d'un

    peuple,

    sur

    son

    &conomie

    de

    base,

    6ventuellement

    sur

    l'importance

    approximative

    de

    ses

    groupes sociaux,

    sur ses coutumes

    funeraires

    et,

    dans une

    certaine

    mesure,

    sur ses

    realisations

    artistiques.

    Elle

    n'est

    pas

    en mesure

    de donner

    des d6tails sur son organisation sociale, son economie politique, sa langue, sa reli-

    gion ou

    son ethos culturel

    Ainsi

    peut-on legitimement

    demander

    a

    l'archeologie

    des

    renseigne-

    ments

    sur

    des

    questions peu

    etudiees

    auxquelles

    des

    elements

    de

    reponse

    pourront

    etre

    fournis.

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    18/31

    HISTOIRE

    DE

    LA

    SENEGAMBIE, XVe-XVIIIe SIECLE

    229

    2

    -

    Les materiaux ((elabores ))

    La

    limite entre

    les materiaux

    ((

    bruts

    ))

    et

    ((

    elabores

    ))

    n'est

    pas

    toujours

    nette, car

    beaucoup d'etudes

    juxtaposent

    ou

    compilent

    surtout

    des

    donnees

    traditionnelles ou

    ecrites,

    sans

    veritable

    travail

    d'elaboration

    et de critique.

    I1

    n'est

    pas possible d'examiner

    et

    de citer

    les

    nombreuses

    theses,

    les

    etudes ou les ouvrages,

    les

    commentaires sur des

    textes

    publies.

    La

    seule liste

    des

    travaux universitaires

    (Becker

    &

    Diouf

    I985)

    permet

    de

    noter leur

    grand

    nombre, etant donne

    que

    la

    plupart

    des

    textes,

    meme

    'ils traitent du XIXeou du xxe siecle, proposent un rappel plus ou moins

    original

    sur

    la

    periode

    ((

    precoloniale )).

    Toutefois, soulignons

    que

    dans

    cet ensemble

    la

    part des travaux universitaires n'est

    pas dominante,

    comme on

    le

    constate

    par

    exemple

    dans la

    ((

    Bibliographie

    sur

    le

    Siin,

    le

    Saalum

    et

    le

    Badibu

    ))

    que nous avons

    jointe a une

    chronique

    tradi-

    tionnelle d'A.

    Sarr

    (I983)

    et

    comme

    on

    le

    verifierait

    aisement

    pour

    les

    autres

    royaumes.

    Nous parlons donc

    ici

    des travaux

    comportant

    la

    presentation

    et

    l'utilisation de

    documents publies ou

    inedits, donc un examen

    critique

    des

    sources

    relatives

    a

    un

    ou

    plusieurs royaumes,

    au

    Senegal, 'a

    un

    pays

    voisin, a la Senegambie entiere. La valeur de ces travaux, universitaires

    ou

    non,

    est sans

    doute

    tres

    inegale,

    et

    leur

    nature est variable

    -selon l'utilisation

    predominante des

    sources

    internes

    ou

    des

    sources

    externes;

    il

    s'agira de

    presentations et de

    commentaires de

    documents

    europeens,

    ou de

    regroupements de traditions

    orales plus ou moins

    completes. L'utilisation

    simultane'e

    des deux

    types

    de sources

    est assez

    frequente,

    mais

    leur

    confrontation est

    generalement limitee 'a la

    chrono-

    logie dynastique

    et

    aux

    caracteres

    de

    l'organisation

    socio-politique. Or,

    la

    confrontation est

    necessaire pour

    eviter

    ce qui

    apparait dans de mul-

    tiples etudes comme une simple juxtaposition: cette confrontation ne

    peut

    resoudre

    tous

    les

    problemes

    mais au moins

    certains, quitte

    a

    constater

    les contradictions

    eventuelles et les

    points d'accord

    indiscutables, ainsi

    que

    la

    complementarite

    des

    sources. Citons comme

    exemplaire

    l'

    etude

    de

    J.

    Joire

    (1955)

    sur les

    tumulus

    de

    Rao,

    bien

    qu'elle traite surtout

    la

    periode anterieure

    au

    xve

    siecle.

    -

    selon le

    ou les

    themes

    retenus;

    on trouvera

    des

    etudes

    centrees

    sur

    l'histoire

    politique,

    sur le

    commerce, les

    etablissements

    europeens, sur

    la traite

    des

    escla-ves et

    l'evolution de

    l'esclavage,

    sur

    la vie

    economique,

    sur

    l'evolution

    du

    droit

    foncier, sur une periode de

    l'histoire d'un royaume

    ou sur un regne remarquable, sur des personnalites importantes. Plus

    rares sont les

    tentatives

    de

    synthese appliquees 'a une partie

    ou

    a

    l'en-

    semble de

    la

    Senegambie.

    L'examen de

    quelques problWmes

    rendra evident le

    fait que

    l'elaboration

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    19/31

    230

    CHARLES

    BECKER

    historique souffre encore trop des lacunes mentionnees a propos des

    sources dont

    la collecte et

    la publication

    sont pour

    nous prioritaires.

    (a)

    Les chronologies:

    des

    progres

    notables

    ont

    ete

    enregistres

    grace

    aux

    travaux relatifs

    aux divers

    royaumes

    -

    au Waalo

    (Barry

    I972),

    au

    Fuuta Tooro (Kane I970;

    Robinson,

    Curtin & Johnson

    I972),

    au

    Gajaaga (Bathily

    i985;

    Curtin

    I975),

    au Haut-Fleuve,

    au Xaso

    et au

    Bundu (Curtin I975;

    Cissoko I979),

    au Kajoor

    et au Bawol (Becker

    &

    Martin

    I975

    ; Martin

    & Becker I976),

    au Saalum (Becker

    & Martin

    Ig8I

    d;

    Boulegue i966),

    au Siin (Becker

    &

    Martin

    I972),

    au Jolof (Monteil I966;

    0. L. Ndiaye

    I966).

    Cependant, pour ces pays situes au nord de la Sene-

    gambie,

    les

    listes et les dates

    ne sont pas egalement

    fiables,

    car

    de mul-

    tiples

    problemes

    subsistent

    au Saalum, au

    Waalo, mais

    surtout

    au

    Siin

    et

    au

    Jolof.

    Les

    donnees

    sur les unites politiques

    meridionales

    -

    le Kaabu

    et

    ses

    provinces,

    les pays

    manding du IRoomi,

    du Badibu,

    du Raani,

    du

    Wuuli

    et

    les petits

    territoires

    du

    Sud-Est

    -

    sont

    encore tres

    diffuses,

    mais

    les etudes de

    B. K. Sidibe'4

    apporteront

    sans doute

    des

    elements

    chronologiques

    interessants.

    Toutefois,

    des

    progres

    doivent etre

    accomplis

    dans

    tous les

    royaumes

    senegambiens

    pour parvenir

    'a dresser

    un tableau

    synoptique

    complet.

    Un tel tableau

    pourrait etre

    propose des 'a

    present;

    cependant, sa realisation est delicate, necessitant non seulement la

    connaissance

    des

    listes chronologiques,

    mais aussi le recours a d'autres

    traditions qui mettent

    en

    rapport

    les regnes de

    deux ou plusieurs

    sou-

    verains contemporains.

    Apres

    un

    tel travail, subsiste

    le probleme

    d'une

    integration

    de

    l'histoire

    des societes lignageres

    oju

    les

    reperes

    datables

    sont minces:

    cette tache

    est

    peut-etre

    vouee a

    l'echec

    pour

    la

    periode

    precoloniale

    )),

    meme

    si

    les etudes historiques

    sur

    les

    villages

    et

    les

    familles

    ont

    notablement

    avance

    en Basse-Casamance

    et chez les

    popu-

    lations tandanke.

    (b) L'histoire evenementielle comme 1'histoire structurelle sont

    tributaires

    de la

    qualite

    et

    de

    l'importance

    des

    sources.

    De

    plus,

    l'asso-

    ciation

    et donc

    le

    recoupement

    des sources

    sont

    indispensables

    mais

    ne

    sont

    pas

    toujours possibles.

    Nous

    n'avons

    pas

    cache

    les lacunes

    des

    traditions

    et

    des

    textes

    ecrits.

    D'une certaine

    maniere,

    les

    premieres

    apportent

    plus

    de

    details 'a

    'histoire

    evenementielle

    et

    les

    seconds

    a

    l'histoire structurelle grace

    aux

    donnees statistiques

    et

    chronologiques.

    Toutefois,

    cette

    impression

    reste

    tres

    nuancee

    et

    l'historien

    ne

    peut

    cacher

    les

    points

    de

    desaccord

    et

    les

    silences

    qui

    semblent

    definitifs.

    II

    est

    possible

    de

    revenir

    sur la

    periode

    de la traite

    des esclaves en

    souligilant

    ses "tapes et ses developpements, comme l'ont fait differents auteurs, en

    14.

    Directeur

    du Musee

    national

    de

    Banjul (Gambie),

    auteur

    de

    trois

    commnunica-

    tions

    in6dites

    au

    Congr6s

    des

    'tudes

    man(ling

    (School

    of

    Orien-tal

    and

    African

    Studies,

    Londres,

    I972).

  • 8/16/2019 Becker, Histoire de La Senegambie (1985)

    20/31

    HISTOIRE

    DE LA

    SENEGAMBIE,

    XVe-XVIIIe

    SIECLE

    23I

    se

    fondant

    surtout sur les

    documents europeens

    (car

    la tradition

    ne

    parle

    pas

    beaucoup du sujet),

    alors

    que

    la meme

    periode

    peut

    etre

    vue,

    i

    I'aide

    des

    traditions, comme une

    periode

    riche en

    evenements.

    La

    comple-

    mentarite

    des

    deux types de sources est

    soulignee

    dans de

    nombreuses

    etudes, parmi

    lesquelles on peut citer en

    particulier l'analyse

    de la

    guerre

    de

    Tuubefiaan par B.

    Barry (I972: I35-I59;

    I984: 8i-90).

    Pour

    toute

    interpretation

    des evenements et

    pour chaque tentative

    de periodisation

    (longue

    duree), la part de

    l'hypothese

    reste

    reelle,

    mais comme pour toute

    science,

    l'hypothese n'est

    emise comrne

    principe

    heuristique

    qu'apres

    un

    examen

    honnete

    de

    toutes les sources

    existantes.

    (c) La demographie et les migrations sont des sujets peu abordes en

    tant que

    tels alors que

    1'evolution

    demographique de la Senegambie

    depuis

    la

    prehistoire

    jusqu'a

    nos

    jours represente une

    question passion-

    nante.

    Comme pour tant

    d'autres

    questions

    negligees (Pourquoi la

    proto-

    histoire

    a-t-elle

    ete

    si mal

    consideree jusqu'a la derniere

    decennie

    ?

    Pourquoi

    s'est-on si peu interesse

    a la

    traite des

    esclaves

    et

    'a

    ses

    conse-

    quences ?

    Pourquoi n'y a-t-il

    pas eu,

    jusqu'a une epoque

    tres

    recente,

    d'etudes sur des souverains

    ((

    precoloniaux

    ))

    ou des

    personnages

    mar-

    quants ?), il

    convient de

    comprendre

    pourquoi les historiens

    n'y ont

    guere

    prete d'attention.

    Pourtant, dans

    ce cas, les donnees

    sont

    abon-

    dantes: les traditions permettent souvent de suivre les etapes de la

    constitution

    des provinces et

    de

    l'implantation des families dans un ou

    plusieurs royaumes (cf.

    les

    travaux, en partie

    publies,

    de J.

    Schmitz

    I98I)

    ; les textes

    europeens

    evoquent aussi

    diverses

    migrations,

    guerrieres

    ou

    non,

    les

    disettes et les

    famines

    qui ont

    entraine

    des

    exodes ou de

    fortes

    mortalit6s, les

    guerres qui ont eu

    pour

    cons6quences le

    d6peuplement

    des

    zones

    frontalieres entre les

    royaumes et le

    repli de certaines

    societes dans

    les

    ((

    forets

    ))

    ou

    les

    ((

    montagnes )), les

    evenements

    politiques qui

    ont

    provoque des

    redistributions du

    peuplement, tels

    des

    regroupements ou

    des

    migrations,

    voire

    des

    revoltes sous

    l'egide

    de

    l'islam.

    I1

    y

    aurait

    beaucoup d'autres exemples 'a ajouter pour montrer que l'histoire d6mo-

    graphique

    pendant la

    periode

    ((

    precoloniale

    ))

    est

    etroitement

    liee

    'a

    celle de

    la traite

    atlantique

    (Becker I985).

    (d) Le

    role

    de l'islam et des

    religions

    traditionnelles au cours de la

    periode

    ((

    precoloniale

    ))

    est

    tres

    mal

    connu.

    Ici,

    les sources

    ecrites

    euro-

    peennes

    (et

    chre'tiennes)

    sont

    souvent d'une

    grande

    partialite

    et tres peu

    fiables.

    Pourtant,

    leur

    reexamen

    a dej'apermis de

    noter

    l'importance des

    implantations

    islamiques dans

    une

    grande partie de

    la

    Senegambie'5.

    Les souirces

    traditionnelles

    continueront sans

    doute

    a livrer de

    nouveaux

    documents probants, qui demontreront definitivement le caractere

    g5.

    Comme nous

    le

    suggIrions

    sur

    Ia

    planche

    a

    Histoire

    de

    l'islam

    D de

    I'Atlas

    du

    Se'negal

    (MARTIN

    &

    BECKER

    I977

    72-73)