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BACCALAURÉATS PROFESSIONNELS 14 Jean Echenoz Livret pédagogique correspondant au livre élève n°67 établi par Valérie SPRINGER, professeur de français, professeur certifiée des lycées professionnels.

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BACCALAURÉATS PROFESSIONNELS

14

Jean Echenoz

L i v r e t p é d a g o g i q u e

correspondant au livre élève n°67

établi par Valérie SPRINGER, professeur de français,

professeur certifiée des lycées professionnels.

Sommaire –2

14–3

S O M M A I R E

REPONSES AUX QUESTIONS ET PISTES D ’ACTIVITES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

Chapitre 1 (début) ......................................................................................................................... 4

Réponses aux questions .................................................................................................. 4

Activité supplémentaire .................................................................................................... 4

Chapitre 1 (fin) ............................................................................................................................... 7

Réponses aux questions .................................................................................................. 7

Activité supplémentaire .................................................................................................... 7

Chapitre 4 ...................................................................................................................................... 9

Réponses aux questions .................................................................................................. 9

Activité supplémentaire .................................................................................................. 10

Chapitre 6 .................................................................................................................................... 12

Réponses aux questions ................................................................................................ 12

Activité supplémentaire .................................................................................................. 14

Activité supplémentaire .................................................................................................. 14

Chapitre 10 .................................................................................................................................. 15

Réponses aux questions ................................................................................................ 15

Activité supplémentaire .................................................................................................. 17

Chapitre 11 .................................................................................................................................. 18

Réponses aux questions ................................................................................................ 18

Activité supplémentaire .................................................................................................. 19

Chapitre 12 .................................................................................................................................. 21

Réponses aux questions ................................................................................................ 21

Activité supplémentaire .................................................................................................. 22

Tous droits de traduction, de représentation et d’adaptation réservés pour tous pays.

© Hachette Livre, 2015.

43, quai de Grenelle, 75905 Paris Cedex 15.

www.hachette-education.com

14 –4

R E P O N S E S A U X Q U E S T I O N S

E T P I S T E S D ’ A C T I V I T E S

C h a p i t r e 1 ( d é b u t )

Réponses aux questions

Entrée en guerre et dans le récit

1 Il s’appelle Anthime, il exerce la profession de comptable (l. 28) et habite en Vendée (l. 12), région

maritime (l. 25). C’est un jeune homme (l. 60).

2 D’une colline, il observe le mouvement des cloches puis entend le tocsin. Il comprend alors que la

mobilisation est décrétée.

3 Le premier lieu est la colline où il observe la campagne environnante et les bourgs dominés par les

clochers. Le second est la ville d’où il est originaire et dans laquelle il est revenu en hâte.

Activité supplémentaire Il serait intéressant de faire lire cet extrait du roman de Victor Hugo Quatrevingt-Treize, référence insérée

dans le roman et que l’auteur explicite dans l’interview en page 14.

AURES HABET, ET NON AUDIET

« Le vieillard restait immobile. Il ne pensait pas ; à peine songeait-il. Autour de lui tout était sérénité,

assoupissement, confiance, solitude. Il faisait grand jour encore sur la dune, mais presque nuit dans la

plaine et tout à fait nuit dans les bois. La lune montait à l’orient. Quelques étoiles piquaient le bleu pâle du

zénith. Cet homme, bien que plein de préoccupations violentes, s’abimait dans l’inexprimable mansuétude

de l’infini. Il sentait monter en lui cette aube obscure, l’espérance, si le mot espérance peut s’appliquer aux

attentes de la guerre civile. Pour l’instant, il lui semblait qu’en sortant de cette mer qui venait d’être si

inexorable, et en touchant la terre, tout danger s’était évanoui. Personne ne savait son nom, il était seul,

perdu pour l’ennemi, sans trace derrière lui, car la surface de la mer ne garde rien, caché, ignoré, pas

même soupçonné. Il sentait on ne sait quel apaisement suprême. Un peu plus il se serait endormi.

Ce qui, pour cet homme en proie au-dedans comme au-dehors à tant de tumultes, donnait un charme

étrange à cette heure calme qu’il traversait, c’était, sur la terre comme au ciel, un profond silence.

On n’entendait que le vent qui venait de la mer, mais le vent est une basse continue et cesse presque

d’être un bruit, tant il devient une habitude.

Tout à coup, il se dressa debout.

Son attention venait d’être brusquement réveillée ; il considéra l’horizon. Quelque chose donnait à son

regard une fixité particulière.

Ce qu’il regardait, c’était le clocher de Cormeray qu’il avait devant lui au fond de la plaine. On ne sait quoi

d’extraordinaire se passait en effet dans ce clocher.

La silhouette de ce clocher se découpait nettement ; on voyait la tour surmontée de la pyramide, et, entre

la tour et la pyramide, la cage de la cloche, carrée, à jour, sans abat-vent, et ouverte aux regards des

quatre côtés, ce qui est la mode des clochers bretons.

14–5

Or cette cage apparaissait alternativement ouverte, et fermée, à intervalles égaux ; sa haute fenêtre se

dessinait toute blanche, puis toute noire ; on voyait le ciel à travers, puis on ne le voyait plus ; il y avait

clarté, puis occultation, et l’ouverture et la fermeture se succédaient d’une seconde à l’autre avec la

régularité du marteau sur l’enclume.

Le vieillard avait ce clocher de Cormeray devant lui, à une distance d’environ deux lieues ; il regarda à sa

droite le clocher de Baguer-Pican, également droit sur l’horizon ; la cage de ce clocher s’ouvrait et se

fermait comme celle de Cormeray.

Il regarda à sa gauche le clocher de Tanis ; la cage du clocher de Tanis s’ouvrait et se fermait comme

celle de Baguer-Pican.

Il regarda tous les clochers de l’horizon l’un après l’autre, à sa gauche les clochers des Courtils, de

Précey, de Crollon et de la Croix-Avranchin ; à sa droite les clochers de Raz-sur-Couesnon, de Mordrey et

des Pas ; en face de lui, le clocher de Pontorson. La cage de tous ces clochers était alternativement noire

et blanche.

Qu’est-ce que cela voulait dire ?

Cela signifiait que toutes les cloches étaient en branle.

Il fallait, pour apparaître et disparaître ainsi, qu’elles fussent furieusement secouées.

Qu’était-ce donc ? Évidemment le tocsin.

On sonnait le tocsin, on le sonnait frénétiquement, on le sonnait partout, dans tous les clochers, dans

toutes les paroisses, dans tous les villages, et l’on n’entendait rien.

Cela tenait à la distance qui empêchait les sons d’arriver et au vent de mer qui soufflait du côté opposé et

qui emportait tous les bruits de la terre hors de l’horizon.

Toutes ces cloches forcenées appelant de toutes parts, et en même temps ce silence, rien de plus

sinistre.

Le vieillard regardait et écoutait. Il n’entendait pas le tocsin, et il le voyait. Voir le tocsin, sensation étrange.

À qui en voulaient ces cloches ?

Contre qui ce tocsin ? »

Victor Hugo, Quatrevingt-Treize, (Livre quatrième, chapitre II).

Question : Quelles similitudes observez-vous entre ces deux extraits ?

La promenade d’Anthime

Cette activité analogique permettra aux élèves non seulement de réactiver leurs connaissances sur la

métaphore, voire de se l’approprier, mais aussi à l’amorce d’un récit sur la Grande Guerre de

recontextualiser celle-ci.

14 –6

4

Contexte de la guerre 1914-1918 La promenade à vélo

Après la guerre de 1870

La Belle Époque = prospérité économique, paix et

joie de vivre

L. 1 à 6 : relevez quatre mots ou expressions qui

vous paraissent évoquer la Belle Époque.

« merveille, profiter du soleil, prendre un peu

d’exercice, lire allongé ».

Les signes avant-coureurs

Un monde fragilisé par :

la poudrière des Balkans ;

la course aux colonies ;

l’attentat de Sarajevo ;

le jeu des alliances se met en place.

Les Européens croyaient-ils que la guerre allait

éclater ?

Beaucoup d’Européens ne se sentaient pas

concernés par ces événements lointains et ne

pensaient pas que la guerre fût aussi imminente.

Un premier signe : un volume trop massif

cycliste fragilisé

Puis, des turbulences météorologiques (« un coup

de vent tapageur s’est brusquement levé » l. 14-15)

Les signaux sont visibles alternance de carrés

noirs et blancs figurant un échiquier (politique)

(l. 48-49).

Anthime ne sait pas interpréter ces signes.

La mobilisation Qu’est-ce qui représente cet événement dans le

passage étudié ?

Le tocsin.

Le monde sombre dans une guerre mondiale. L. 70 à 75 : quels mots appartiennent au champ

lexical de la guerre ? « cahot, tombé, chute »

Les nations n’entendent pas, ne comprennent pas

l’ampleur du désastre à venir.

Le chapitre de Quatrevingt-treize de Victor Hugo

Chapitre intitulé « Aures habet, et non audiet »

(« Avoir des oreilles et ne pas entendre » en latin)

La mobilisation

5 Le sujet de ces lignes est la mobilisation et ses conséquences dans la ville où habite Anthime.

6 La liesse, « joie débordante et collective » (selon le Petit Robert), est illustrée par le procédé de

l’accumulation présent dans la phrase : « Tout le monde avait l’air très content de la mobilisation : débats

fiévreux, rires sans mesure, hymnes et fanfares, exclamations patriotiques striées de hennissements. » Ce

procédé permet d’évoquer les notions de débordement et de collectivité données par la définition.

Les champs lexicaux du mouvement (« fébriles, se tournaient, faisaient des gestes, s’agitaient,

brandissant, gesticulant et se pressant »), du bruit festif (« s’interpellant, débats fiévreux, rires sans

mesure, hymnes, fanfares ») ou encore de la collectivité (« s’assembler, les hommes, mouvement

général ») sont également autant de réponses possibles.

7 L’auteur mêle les exclamations patriotiques aux hennissements des chevaux ce qui crée par contraste

un effet comique.

14–7

8 La description de la mobilisation est relativement courte alors même qu’elle est le sujet du chapitre.

9 La mobilisation est un événement qui a déjà été « décrit mille fois ». Faut-il encore la décrire une

nouvelle fois ? Peut-on d’ailleurs la décrire comme il y a 100 ans ? Jean Echenoz répond : « Ce que je

pense, c’est que l’on écrit pas de la même façon dans les années 2010, sur un sujet comme la guerre

comme sur tous les autres sujets, comme on faisait de la prose il y a 50 ou 100 ans. L’écriture a changé. »

C h a p i t r e 1 ( f i n )

Réponses aux questions

Deux mobilisés

Ici, il est intéressant d’attirer l’attention des élèves sur une particularité narrative de l’extrait, à savoir

l’absence d’information sur la nature réelle du lien qui existe entre Anthime et Charles.

Au-delà d’une réflexion sur les règles du récit réaliste qui se poursuivra aux questions 4 et 5, il s’agit de

piquer la curiosité des élèves sur la question « Mais que sont-ils l’un pour l’autre pour se comporter de la

sorte ? », de les inviter donc à lever le mystère en analysant les indices donnés par le texte et à proposer

plusieurs hypothèses…

1 Il se nomme Charles, travaille dans une usine mais n’est pas un ouvrier (comme l’indiquent le costume

et l’appareil photographique).

« Charles posait son regard inaffectif sur la presse. » (l. 95-96) ; « Ah oui, a condescendu Charles. »

(l. 106) ; « Charles clignant l’un de ses yeux froids pour coller l’autre à son viseur. » (l. 117-118). Charles

apparaît comme un personnage froid, méprisant et antipathique.

2 Ils semblent bien se connaître, leur relation paraît néanmoins difficile, compliquée et marquée par un

sentiment d’infériorité d’Anthime envers Charles.

Ces personnages ne sont donc pas amis pourtant un lien étroit les unit puisque c’est la première personne

qu’Anthime cherche du regard à son arrivée en ville. Charles serait-il le chef d’Anthime à l’usine ? Un autre

lien serait-il envisageable ? un lien familial ?

3 Au vu des circonstances, le dialogue paraît très décalé. En effet, ni la guerre ni la mobilisation ne sont

explicitement mentionnées, les deux personnages s’entretiennent d’abord de tout autre chose puis

évoquent rapidement, sans les nommer, les événements du jour.

Activité supplémentaire Transposer la rencontre de Charles et d’Anthime en scène de théâtre.

Cette activité permettra de faire réfléchir les élèves sur la relation entre Charles et Anthime et sur la nature

particulière de leur conversation.

14 –8

L’incipit de 14 : entre tradition et renouvellement

4 Pour rendre plus aisé le travail des élèves, on pourra ne demander qu’un seul élément de réponse pour

chaque ligne.

Les éléments d’un récit classique de la Grande Guerre

Dans l’incipit de 14

point de vue du personnage Anthime a laissé traîner un coup d’œil sur le

panorama.

description des lieux Il a considéré le paysage autour de lui : villages

éparpillés alentour, champs et pâturages à volonté.

nom de la rue Rue Crébillon

ce que l’on croyait en 1914 lors de la mobilisation C’est l’affaire de quinze jours au plus

les personnages sont identifiés Non, il manque des informations importantes sur

eux.

description de l’événement primordial Oui, mais de manière succincte.

dates précises Non, il manque la précision cruciale de

l’année. « Nous étions au premier jour d’août » ne

constitue pas une date à proprement parler.

5 Il s’agit de la ligne portant sur l’identification des personnages et celle concernant les dates précises.

Le lecteur n’a accès à aucune pensée des personnages, leur identité est donnée de manière parcellaire et

curieusement ce roman historique ne comporte pas de dates précises. Dans ces différents parti-pris

narratifs, on peut voir une volonté exprimée par l’auteur dans son interview d’écrire autrement ce qui a

déjà été écrit tant de fois ou plus exactement l’impossibilité d’écrire comme cela a déjà été fait.

Revenons à nos classiques !

Cette production écrite permettra de faire converger et de transcender le sens des activités et questions

précédentes dans un travail créatif.

Vous pourrez inviter les élèves à se détacher du texte tout en leur rappelant, pour les aider, l’importance

par exemple de l’affiche de la mobilisation.

Le tableau précédent et sa colonne de gauche constituera un mémento des critères de réalisation d’un

récit de guerre réaliste.

6 Exemple d’incipit :

« Ce samedi 1er

août, alors qu’il avait choisi de se balader en vélo pour occuper sa journée de liberté,

Anthime arrivé en haut d’une éminence comme il s’en trouve en Vendée, entendit le tocsin. Il sut d’emblée

de quoi il s’agissait : la mobilisation. Il décida alors de revenir en toute hâte en ville. Le livre qu’il avait

apporté tomba brusquement sur le sol, ouvert au chapitre « Aures habet, et non audiet ». En temps

normal, peut-être se serait-il penché sur cet incident véniel et y aurait-il vu un signe funeste. Mais son

empressement et son agitation étaient incompatibles avec une telle pensée. La mobilisation ! La guerre !

On y était !

14–9

En ville, il laissa son vélo et se mêla à un groupe d’hommes qui se dirigeait avec allégresse vers la place

Royale. Il les connaissait. Il avait joué avec certains d’entre eux dans la cour de récréation et travaillait

aujourd’hui dans la même usine. Il les connaissait personnellement c’est-à-dire dans l’intimité propre de

leur individualité qui en faisait des êtres profondément distincts les uns des autres. Pourtant, en les

regardant à cette heure, il lui sembla ne plus les reconnaître. Transportés dans un même mouvement

violent et irrépressible, ils ressemblaient à des pantins gesticulant et vociférant. Et il sentait confusément

qu’il faisait lui aussi partie de cette masse humaine de la même façon que les autres. Il ne s’appartenait

plus. Ils ne s’appartenaient plus. Quelque chose de monstrueux approchait qui allait tous les happer et qui

les rendait tous fous. Sur la place Royale, la liesse et le désordre étaient à leur comble. L’affiche de la

mobilisation était placardée sur le grand portail de la mairie. La foule était particulièrement dense à cet

endroit. Certains ne bougeaient pas, captés par l’annonce comme s’ils ne pouvaient y croire, d’autres s’en

détournaient vivement pour rejoindre ceux qui commentaient bruyamment l’événement.

Les chevaux hennissaient avec une stridence inhabituelle comme s’ils se mettaient au diapason de

l’événement du jour et de l’humeur exceptionnelle des hommes avec qui ils compagnonnaient en cette

heure, sans distinction de race ou d’espèce. Les charrettes encombraient la place, scindant la marée

humaine en petits groupes disparates. Les enfants couraient, rieurs et frondeurs en tous sens sans que

personne n’y trouvât à redire. Anthime porta un moment son attention sur une vieille femme qui semblait

lire éperdument l’affiche de la mobilisation mais son regard allait bien au-delà et son expression était

sombre et désespérée. Il frissonna comme s’il eût vu l’ange de la mort.

De l’autre côté de la place, il vit Charles. Ces deux-là ne s’entendaient guère. Quoi qu’il fasse Anthime se

sentait toujours écrasé par la présence de son frère. Celui-ci ne se départait jamais d’un air supérieur qui

accablait quiconque l’approchait. L’appareil de photographie, sa dernière et coûteuse acquisition qu’il

arborait autour de son cou depuis quelques temps, accentuait encore sa morgue naturelle. Anthime vint à

lui, contraint, et ils échangèrent froidement leur point de vue sur la mobilisation et la guerre. Charles y

voyait une affaire de quinze jours. Anthime était,quant à lui, bien plus circonspect sur la question. »

C h a p i t r e 4

Réponses aux questions

L’arrivée

1 Ces hommes, tous venus de Vendée, arrivent par train dans les Ardennes.

2 Des représentants de l’armée les reçoivent, des sergents et un capitaine.

3 Les phrases « à peine a-t-on eu le temps de se faire à ce nouveau paysage sans même savoir le nom

du village » (l. 39-41) et « en regardant les arbres d’un genre qu’on n’avait jamais vu » (l. 46-47) suggèrent

le dépaysement de ces hommes qui n’avaient jamais, pour la plupart, quitté leur région natale.

Des futurs soldats

Inviter les élèves à faire l’analogie entre la vision de l’armée par Voltaire dans Candide et la vision d’un

auteur contemporain, c’est leur faire percevoir les liens qui existent entre les différents objets d’étude de

leur programme de français, mais c’est aussi les faire réfléchir de manière à la fois philosophique et

transhistorique sur un même thème.

14 –10

4

Sujet principal Complément

d’objet

Le lexique de

l’oppression

Candide

On l’armée Lui, le

Candide

Sur-le-champ

Mettre les fers

aux pieds

14

Les sergents, le

capitaine l’armée

Les hommes à peine […], à

peine a-t-on eu le

temps

Des sergents ont

mis les hommes

en rang

5 Le champ militaire devient un lieu de coercition où l’homme perd fondamentalement sa liberté et son

libre-arbitre.

6 « On » désigne les hommes qui partent à la guerre. Le pronom « ils » auraient pu le remplacer. Mais

l’utilisation de ce pronom indéfini permet à l’auteur d’universaliser l’expérience humaine vécue et de la

rendre ainsi plus proche du lecteur qui peut s’identifier à ces derniers.

7 L’évocation de la croix, de la fin du jour sont autant de signes funestes qui annoncent la fin d’un monde

et la tragédie à venir.

Activité supplémentaire Sujet : Candide fait un saut dans le temps et se retrouve soldat dans le train qui emmène Anthime et Charles à

la guerre. Vous réécrirez l’extrait suivant du point de vue de Candide.

Remarque : Si vos élèves ont étudié Candide en première, vous pourrez les inviter à réfléchir sur les liens qui

pourraient être établis entre 14 et Candide sur l’ensemble des deux œuvres. Ainsi, la question « Anthime, un

nouveau Candide ? » inciterait les élèves à mener une réflexion ou un débat.

Chapitre deuxième

Ce que devint Candide parmi les Bulgares

Candide, chassé du paradis terrestre1, marcha longtemps sans savoir où, pleurant, levant les yeux au ciel,

les tournant souvent vers le plus beau des châteaux, qui renfermait la plus belle des baronnettes ; il se

coucha sans souper au milieu des champs entre deux sillons ; la neige tombait à gros flocons. Candide,

tout transi2, se traîna le lendemain vers la ville voisine, qui s’appelle Valdberghoff-trarbk-dikdorff

3, n’ayant

point d’argent, mourant de faim et de lassitude4. Il s’arrêta tristement à la porte d’un cabaret.

Deux hommes habillés de bleu5 le remarquèrent : « Camarade, dit l’un, voilà un jeune homme très bien

fait, et qui a la taille requise. » Ils s’avancèrent vers Candide, et le prièrent à dîner très civilement6.

« Messieurs, leur dit Candide avec une modestie charmante, vous me faites beaucoup d’honneur, mais je

1 Paradis terrestre : allusion au jardin d’Eden d’où Adam fut chassé.

2 Transi : gelé.

3 Valdberghoff-trarbk-dikdorf : lieu imaginaire, on reconnaît les mots allemands Wald (« forêt »), Berg (« montagne »),

Hof (« cour »), Trabkf (« gageure dérisoire »), dick (« épais »), Dorf (« village »). 4 Lassitude : fatigue.

5 Deux hommes habillés de bleu : soldats prussiens chargés du recrutement.

6 Civilement : poliment.

14–11

n’ai pas de quoi payer mon écot7. – Ah ! monsieur, lui dit un des bleus, les personnages de votre figure et

de votre mérite ne payent jamais rien : n’avez-vous pas cinq pieds cinq pouces8 de haut ? – Oui,

messieurs, c’est ma taille, dit-il en faisant la révérence. – Ah ! monsieur, mettez-vous à table ; non

seulement nous vous défrayerons9, mais nous ne souffrirons

10 jamais qu’un homme comme vous manque

d’argent ; les hommes ne sont faits que pour se secourir les uns les autres. – Vous avez raison, dit

Candide ; c’est ce que monsieur Pangloss m’a toujours dit, et je vois bien que tout est au mieux. » On le

prie d’accepter quelques écus, il les prend et veut faire son billet11

, on n’en veut point, on se met à table.

« N’aimez-vous pas tendrement ?... – Oh ! oui, répond-il, j’aime tendrement mademoiselle Cunégonde. –

Non, dit l’un de ces messieurs, nous vous demandons si vous n’aimez pas tendrement le roi des

Bulgares12

? – Point du tout, dit-il, car je ne l’ai jamais vu. – Comment ! c’est le plus charmant des rois, et il

faut boire à sa santé. – Oh ! très volontiers, messieurs. » Et il boit. « C’en est assez, lui dit-on, vous voilà

l’appui, le soutien, le défenseur, le héros des Bulgares ; votre fortune est faite, et votre gloire est

assurée. » On lui met sur-le-champ les fers aux pieds, et on le mène au régiment. On le fait tourner à

droite, à gauche, hausser la baguette, remettre la baguette13

, coucher en joue, tirer, doubler le pas, et on

lui donne trente coups de bâton ; le lendemain, il fait l’exercice un peu moins mal, et il ne reçoit que vingt

coups ; le surlendemain, on ne lui en donne que dix, et il est regardé par ses camarades comme un

prodige14

.

Titres des parties

Acteur / sujet

dominant

Champ lexical

dominant

Temps

verbal

dominant

Bilan

Partie I « Seul au monde »

(du début à « cabaret »

Candide Détresse Passé

simple

temps des

péripéties

Chassé de son paradis,

Candide commence son

périple dans des conditions

épouvantables.

Partie II « L’enrôlement »

(de « Deux hommes » à « votre

gloire est assurée. »)

Les deux

soldats

La flatterie

« Les

personnages de

votre figure et

de votre

mérite »

« Vous voilà

[…] le héros des

Bulgares »

Présent Candide est confronté à un

mal qui avance masqué. Les

deux recruteurs tentent de le

séduire grâce à des paroles

trompeuses qu’il accueille

sans méfiance (manipulation

sectaire).

Partie III « L’instruction

militaire de Candide »

(de « On lui met sur le champ » à « comme un prodige. »)

On (pronom

indéfini)

l’armée, les

chefs…

collectif

inquiétant et

coercitif

Violence Présent

de narration

et verbes à

l’infinitif

Après avoir été embrigadé,

Candide subit les violences

de l’armée qui lui fait perdre

sa liberté et son identité.

7 Payer mon écot : payer ma part.

8 Cinq pieds cinq pouces : environ 1,80 m.

9 Nous vous défrayerons : nous payerons vos dépenses.

10 Nous ne souffrirons pas : nous ne supporterons pas.

11 Faire son billet : signer une reconnaissance de dette.

12 Bulgares : ce nom renvoie à des tribus installées en Turquie et en Russie. Il ne désigne pas un pays en particulier.

13 Hausser la baguette, remettre la baguette : manœuvres consistant à charger le fusil à l’aide d’une tige d’acier que l’on

entre dans le canon. 14

Un prodige : un être extraordinaire.

14 –12

Un drôle d’orateur…

8 Le capitaine Vayssière est un homme d’apparence frêle, dont la voix ne porte guère. Son physique

évoque la faiblesse et la fragilité à contre-courant de l’image de l’officier, fort et charismatique, présente

dans l’inconscient collectif.

9 a. Pour le capitaine, la propreté et l’hygiène seraient une garantie de survie. Point de vue absurde !

b. Le capitaine Vayssière est ridicule car son apparence physique ne s’accorde pas avec sa fonction. De

surcroît, son discours absurde renforce le ridicule de sa personne et confère à ces lignes une tonalité

comique.

La guerre est une chose sérieuse

10 Exemple de texte décrivant le capitaine Vayssière :

« Ce capitaine, nommé Vayssière, était un jeune homme grand, robuste, l’air vaillant. Ses yeux bleus

brillaient d’un éclat farouche. Sa voix, terrible, roulait et tonnait dans la campagne tranquille et

crépusculaire. Quel magnifique guerrier !

Les hommes semblaient subjugués par la force combative qui émanait de ce jeune Mars et ils écoutèrent

fascinés ses paroles d’airain : “Pourquoi êtes-vous ici ? commença-t-il la mine sévère. Pour faire la

guerre ? Par devoir ? Pour devenir des héros ? Non ! Vous êtes ici pour la France car elle est la seule

mère qui compte aujourd’hui et il faut la défendre de toutes vos forces. Elle vous a tout donné, vous lui

devez tout et le sacrifice de vos vies est le prix ultime à payer. Je ne vous le cacherai pas. Il faudra être

braves ; de la faim, du froid, de la peur vous souffrirez car vous êtes des hommes à la chair tendre. Mais

parce vous êtes des hommes, votre cœur et votre âme se devront de rester inaltérables. Il ne faudra pas

sous-estimer l’ennemi infâme qui nous menace, ce serait une erreur fatale même si toujours il nous faudra

être convaincus de notre supériorité car notre cause est juste et Dieu est avec nous.”

À ces paroles pas un qui ne fut emporté sur les chars glorieux des combats à venir !

C h a p i t r e 6

Réponses aux questions

La routine

1 On peut distinguer trois parties dans cet extrait :

Partie 1 : Où dormir ? (l. 96 à 107)

Partie 2 : Avant la nuit. (l. 108 à 122)

Partie 3 : Le sac du soldat. (l. 123 à 145)

2

Sujet Temps dominant Moment de la journée

Partie 1 On conditionnel Les soirs

Partie 2 On / Arcenel / Anthime imparfait Avant la nuit

Partie 3 Le sac Imparfait / conditionnel /

présent

Le matin

14–13

3 L’imparfait est employé pour les actions répétées dans le passé, ce qui justifie son emploi ici.

4 Le conditionnel exprime un état ou une action subordonnée à quelque condition. Exemple : Je partirais

s’il ne pleut pas.

5 Mais ici, le conditionnel possède une autre valeur. C’est un futur dans le passé qui permet d’amplifier la

perspective temporelle entre deux pôles, a priori opposés, le passé et le présent.

Histoire ou littérature ?

6 Éléments littéraires à relever :

Jeu sur les temps : l’alternance conditionnel / imparfait.

Lexique littéraire : « meule de foin providentiel » l. 105, « Où qu’on échouât » l. 106, « obvier à

l’entrechoc » l. 145

Jugement de l’auteur : « ce serait souvent toute une affaire » l. 96, « Tout cela semblait déjà pas mal

pour un seul sac » l. 140

Un oublié de la Littérature : le sac du soldat

Ce passage sur le sac du soldat est intéressant car il vous permettra de faire comprendre aux élèves le

rapport essentiel en littérature entre la forme et le fond. L’écoute du passage lu par Echenoz lui-même

peut être d’ailleurs éclairante (cet extrait est disponible sur notre site biblio-hachette.com).

7 Il y a d’abord le « lot de fournitures réglementaires » (l. 124) puis les « accessoires » (l. 142).

8

Fournitures

réglementaires

– aliments

–vêtements

– produits

d’entretien

–effets de

toilette

Objets

personnels

– tabac et

papier à rouler

–allumettes et

briquet

Toile de tente

Couverture

Gamelle

14 –14

9 La longueur de la description est à mettre en relation avec l’importance que le sac avait pour le soldat.

Plutôt que de décrire le sentiment qui attachait chaque homme à son sac, Echenoz, fidèle à son

esthétique, préfère se focaliser sur la description du sac.

10 Il faut surligner presque l’intégralité des lignes 126 à 139. Les listes d’objets occupent une grande place

relativement à l’économie générale du passage. Elles procèdent du principe de l’accumulation et

expriment le poids du sac.

11 Le sac ne pesait d’abord, vide, que six cents grammes. Mais il s’alourdirait vite […] et l’ensemble de cet

édifice avoisinerait alors au moins trente-cinq kilos par temps sec.

Activité supplémentaire Les élèves décriront le sac dont ils se servent pour le lycée à l’aide du procédé d’accumulation.

Paroles de poilus

Exemple de dialogue entre Anthime et Arcenel :

Arcenel Encore de la paille en guise de lit ! Ai-je jamais dormi dans un lit ?

Anthime Trouvons-nous encore heureux de cette couche ! Nous sommes des soldats, les chauds petits

bonheurs de la maison sont loin de nous. Inutile d’y penser !

Arcenel Oui, n’y pensons pas, chassons ces souvenirs cruels à force de douceur et occupons-nous ! Je

dois laver ma veste, elle est couverte de boue… Et la semelle de ma godasse gauche est en train de me

lâcher…

Anthime Soyons nos domestiques, il n’y a plus que cela…

Arcenel Rien d’autre …

Anthime (Soupir)

Arcenel Ferons-nous une partie de dames ? Diantre, un petit jeu nous fera du bien !

Anthime Moi, cela ne me fait pas du bien. Il me semble être un de ces petits pions si vite mangés et

sortis du jeu…

Arcenel Je n’ai pas l’intention de me faire manger moi ! D’ailleurs, je vais graver mon nom sur cet arbre !

Anthime Oui, chacun laissera la trace qu’il pourra…

Arcenel Et toi, Anthime ?

AnthimeQuoi, moi ?

ArcenelTu laisses quoi ?

Anthime Mon frère avec ses photographies se charge de notre postérité…Et il a Blanche… Allez, je vais

ranger mon sac, peut-être sera-t-il moins lourd ! Je crois que les allumettes ont pris l’eau ce matin, faut qu’

je trie…quelques allumettes de moins, quel soulagement… J’ai cru tomber tout à l’heure, avec ce sac

transformé en éponge…J’avais l’impression de porter mon poids et le poids de tout le malheur de cette

guerre d’ailleurs…Pourtant ce sac, c’est notre vie concentrée et résumée, notre vie passée, présente,

hélas notre vie à venir car quand cela cessera-t-il…

Activité supplémentaire Il pourra ensuite être demandé aux élèves de mettre en scène leur dialogue.

14–15

C h a p i t r e 1 0

Réponses aux questions

Un récit de guerre

1 Ça, pronom démonstratif, désigne l’événement terrible du jour, un combat dans la première guerre

moderne de l’humanité mais aussi la difficulté de le décrire car un certain degré d’horreur relève de

l’innommable.

2 Les champs lexicaux liés à la guerre :

celui des armes : « canon, obus, balles, mitrailleuses, grenades, lance-flammes » (l. 116 à 119) ;

celui de la mort : « anéantir » (l. 125), « putréfaction » (l. 129), « cadavres pourrissants » (l. 136).

Les champs lexicaux liés aux sens humains :

celui de l’ouïe à travers celui de la musique (« tonnerre polyphonique » l. 115, « percutant », l. 117,

« sifflent » l. 117, « opéra » l. 144) et du bruit ou des sons (« tonnant, claquent, soupirent, miaulent ») et le

verbe « entendre » l. 122 ;

celui de l’odorat (« air empesté » l. 128, « effluve » l. 132, « sent le renfermé » l. 134), énumération

d’odeurs plus délétères les unes que les autres (« l’odeur de leur pisse et de leur merde et de leur sueur,

de leur crasse et de leur vomi » (l. 131-132) ;

celui du toucher (« grand froid » l. 115, « gelé » l. 127) ;

celui de la vue (« luit » l. 127, « éclat, éclairantes » l. 128).

Mais la prédominance des deux premiers champs lexicaux indique aux lecteurs que l’ouïe et l’odorat sont,

avant tous les autres sens, ceux qui sont le plus affectés par la violence des combats.

3 Ces indices spatiaux sont des locutions adverbiales ou des adverbes : « d’en haut » l. 119, « sous »

l. 119 ; d’en face l. 120, « au fond de » l. 122, « au-dessous » (2 fois) l. 124.

La multiplication de ces indices spatiaux exprime la violence du combat et renvoie surtout à son amplitude,

à son caractère multidimensionnel, total qui la dissocie définitivement des guerres d’autrefois. Ils illustrent

alors avec force l’effroi épouvantable des hommes menacés de toutes parts et précipités dans un chaos

infernal.

4 Les soldats sont désignés par le pronom indéfini « on ». Ici, le « on » renvoie à l’universalité de

l’expérience vécue mais plus profondément c’est aussi une manière d’exprimer la déshumanisation de ce

combat où l’homme devient non plus un sujet doué de conscience et de libre-arbitre mais un objet voué à

la destruction.

5 Ces sujets apparaissent à la fin du paragraphe, à deux reprises et de manière brève (« on tente de

dormir, on entend l’ennemi » l. 122). Notons que ces sujets sont passifs ; les verbes signalés

s’apparentent plus à des verbes d’état qu’à des verbes de d’action. Le véritable sujet du paragraphe est le

ça, l’indicible horreur de la guerre que tente de décrire 14.

Les armes de destruction occupent la majeure partie de ce paragraphe, reléguant les hommes en toute fin

de lignes, à la portion congrue et à l’inaction. Les objets dominent et les sujets sont anéantis, eux-mêmes

ravalés au rang d’objets.

6 Le temps verbal qui domine est le présent de narration. Ce combat de 1914 est décrit à la lumière d’un

présent qui a pour fonction de le rendre plus réel, plus terrible, plus présent précisément.

14 –16

Une guerre totale et inhumaine

7 Ce paragraphe argumenté peut être considéré comme un entraînement à la production écrite de type

délibératif demandée au Bac. Savoir construire un paragraphe est donc une compétence primordiale. Pour

aider les élèves, vous pouvez leur donner l’entame du paragraphe, récapituler à l’oral les réponses aux

questions précédentes et leur rappeler l’importance des connecteurs dans l’organisation de la pensée.

Exemple de paragraphe argumenté :

« La Première Guerre mondiale a été la première guerre moderne.

Dans 14, Anthime et ses camarades, puceaux de l’horreur, connaissent un baptême du feu

particulièrement terrifiant qui ne peut se comparer à rien de ce que connurent leurs aînés des temps

anciens.

En effet, la mort est présente partout, elle arrive avec fracas et sans crier gare de tous les points de

l’espace (par voie terrestre, céleste, souterraine) de sorte que le soldat ne sait qui ou quoi combattre et se

sent totalement impuissant face à ce déchaînement technologique infernal.

De plus, le sens de l’initiative, qui permettait au soldat de jadis de s’illustrer héroïquement grâce à un fait

d’armes, devient absurde dans ce contexte. Le soldat n’est plus un acteur de la guerre, un sujet agissant

mais un objet de guerre aléatoire et exterminable. Les objets, les armes puissantes et sophistiquées,

triomphent. L’être est déchu. C’est le règne d’un monde inhumain. »

Un récit de guerre peu classique

Ici, il s’agit à nouveau de faire comprendre aux élèves que l’on n’écrit pas en 2014 comme en 1914.

8 Ces adjectifs pourraient être original, singulier, novateur, neuf…

9

Les points communs entre Le

Feu et 14

Les différences

Le Feu 14

Les champs lexicaux de la

guerre et des sens

Présence du pronom on

Utilisation du présent de

narration

Présence d’images

pronoms personnels vous et

nous

Le lecteur et l’auteur sont

impliqués.

épopée de l’horreur

tonalité lyrique du texte

L’auteur arrête le déroulement

du récit de guerre pour

commenter le récit en cours.

peu voire pas d’éléments

lyriques le lyrisme est tourné

en dérision

14–17

Activité supplémentaire Vous pouvez aborder ces deux textes et le travail de comparaison à l’aide de ce tableau.

Les différences

caractéristiques

entre Le Feu et 14

Le Feu 14 Citations Visée / effet

recherché

Un auteur qui a fait la

guerre

Présence des

pronoms personnels :

vous, je, nous

« nous traversons… »

« je lâche mon fusil »

« Les stridences des

éclats qui passent vous

font mal aux oreilles. »

Implication et

empathie du

lecteur

Verbes d’action

nombreux

« Nous traversons, on

se reforme, on s’arrête,

on trébuche, on bondit »

Les soldats sont

des sujets

agissants.

Verbes d’action

absents : rares verbes

« d’inaction »

« on tente de dormir,

on entend »

« on s’accroche à son

fusil »

Sujets passifs et

annihilés par les

événements

Langage familier

stylisé (avec procédés

d’écriture tels

l’anaphore et

l’accumulation)

« du côté de ceux qui

tiennent encore à peu

près droit dans la boue,

l’odeur de leur pisse et

de leur merde et de leur

sueur, de leur crasse et

de leur vomi »

Effet de réel

Expression de

l’abjection de la

guerre

Une image : guerre et

opéra

« Cet opéra sordide et

puant. »

Évocation de la

guerre en tant que

spectacle

polyphonique.

Une image : la guerre

et le rideau.

« C’est un effroyable

rideau qui nous sépare

du monde, nous sépare

du passé et de

l’avenir. »

Isolement absolu

des hommes et

renvoi au théâtre

de la guerre.

L’auteur arrête le

cours de son récit

pour commenter le

genre du récit de

guerre.

« Tout cela ayant été

décrit mille fois, peut-

être n’est-il pas la peine

de s’attarder encore sur

cet opéra sordide et

puant. »

Utiliser un angle

neuf , être à

distance des

événements

racontés

14 –18

Le lyrisme guerrier est

tourné en dérision.

« Peut-être n’est-il

d’ailleurs pas bien utile

non plus, ni très

pertinent, de comparer

la guerre à un opéra,

d’autant moins quand

on n’aime pas l’opéra,

même si comme lui

c’est grandiose,

emphatique, excessif,

plein de longueurs

pénibles, comme lui

cela fait beaucoup de

bruits et souvent, à la

longue, c’est assez

ennuyeux. »

Ridiculiser les

effets esthétiques

dans le récit de

guerre (celle-ci

étant tellement

immonde qu’il est

absurde de

l’esthétiser)

En résumé…

10 Exemple de texte complété :

« Ce passage de 14 obéit à certaines règles classiques du récit de guerre. Ainsi, il montre la violence des

combats, la puissance terrifiante des armes nouvelles utilisées, l’impuissance et la terreur des hommes, la

mort surgissant partout, le carnage universel.

Mais c’est aussi un récit écrit cent ans après la Grande Guerre, à distance donc de celle-ci, et qui cherche

également à mettre en avant une vision originale des événements. Par exemple, l’auteur arrête le cours

de l’histoire racontée estimant que cela ayant déjà été décrit mille fois, il est inutile de poursuivre

davantage le récit. Cette réflexion ainsi exprimée constitue donc une singularité.

Il en est de même avec la comparaison entre la guerre et l’opéra faite sur un ton subtilement

humoristique ! »

C h a p i t r e 1 1

Réponses aux questions

Une chance ?

1 Exemples de titres :

1er

paragraphe : L’obus

2e paragraphe : Une bonne blessure…

2 Anthime a eu le bras sectionné par un obus.

3 Cette blessure est qualifiée de « bonne » car elle va lui permettre d’échapper à la vie des tranchées et à

la guerre, de rester en vie. De plus, cette mutilation n’est pas aussi atroce que d’autres blessures (les

gueules cassées, les amputés des jambes…).

Les blessures de la Première Guerre mondiale sont souvent inédites et monstrueuses car causées par

des armes nouvelles. Aussi, la notion de « bonne » blessure, a priori absurde, apparaît-elle lors de ce

conflit.

14–19

Une arme moderne

4

Caractéristiques de l’obus Comparaisons

Cruel « Comme s’il s’agissait de régler une affaire

personnelle…sans discuter. » (l. 46 à 48)

Barbare « éclat de fonte en forme de hache polie

néolithique » (l. 43-44)

Précis et meurtrier « […] non moins affûté qu’un gros éclat de verre.

[…] il a directement fendu l’air vers Anthime et […]

lui a sectionné le bras droit tout net. »(l. 45-49)

Sournois / pervers « […] un éclat d’obus retardataire a surgi, venu d’on

ne sait où et on se demande comment, bref comme

un post-scriptum. » (l. 41-43)

5 L’obus est le sujet de ce paragraphe et il occupe huit des dix lignes consacrées au sectionnement du

membre d’Anthime. Alors qu’il lui arrive quelque chose de grave qui va changer le cours de sa vie et du

récit, le personnage principal du roman ne devrait-il pas être le principal sujet de ses lignes ?

Anthime, un jouet de la guerre moderne

La réflexion sur la question précédente devrait amorcer et compléter celle sur Anthime, un jouet de la

guerre moderne.

6 La nature de cette blessure, mutilante et irréversible, rend l’enthousiasme qu’elle provoque choquant car

absurde.

7 Les mots et expressions qui montrent qu’Anthime n’est plus maître ni de lui-même, ni de la situation

sont :

« Anthime n’a presque pas osé se plaindre ni crier de douleur, ni regretter son bras dont il n’avait

d’ailleurs pas bien conscience de la disparition. Pas bien conscience en vérité non plus de cette

douleur. » ; (l. 57-60) ;

« Il lui a juste semblé sans trop savoir pourquoi » (l. 65) ;

« sans bien savoir pourquoi non plus » (l. 67-68) ;

« comme s’il réagissait mécaniquement aux ovations de l’infirmerie » (l. 68-69) ;

« avant qu’une solide injection de morphine le ramenât à l’absence des choses » (l. 71-72).

8 La résolution des questions précédentes doit amener les élèves à comprendre qu’Anthime est le jouet

de la guerre moderne c’est-à-dire qu’il est un homme privé de son libre-arbitre à qui on a enlevé ce qui

constitue profondément son humanité.

Il n’est plus maître ni de lui ni de sa destinée, il est manipulé et déchu au rang des « objets obusables ».

Activité supplémentaire Comparez le texte de Jean Echenoz et celui de Blaise Cendrars.

14 –20

« Le ciel était noir. Il pleuvait sans discontinuer.

Il pouvait être neuf, dix heures du soir. C’était le 1er ou le 2 octobre.

Le pilonnage et la mousqueterie du front nous parvenaient tout proches et derrière moi, une pièce de 75

tirait à bout portant sur les avions ennemis dont les vrombissements qui rasaient les toits de l’us ine

faisaient encore plus peur que les lourdes explosions qui à gauche et à droite écrasaient ce qui restait des

ruines de Somme-Py. Et mon bras coupé me faisait si mal que je me mordais la langue pour ne pas

gueuler, et de temps en temps de longs frissons me secouaient car j’avais froid, sous la pluie, ainsi, tout

nu, allongé sur mon étroit brancard, immobile, ankylosé, ne pouvant faire un mouvement gêné que j’étais,

comme une accouchée par son nouveau-né, par l’énorme pansement, gros comme un poupon, qui se

serrait contre mon flanc, cette chose étrangère que je ne pouvais déplacer, sans remuer un univers de

douleurs, ni prendre dans ma main valide sans voir ce gros tampon blanc s’imbiber de rouge, ressentir

une brûlure atroce et me rendre compte que ma vie m’échappait, s’en allait, goutte à goutte, sans que je

ne puisse rien pour la retenir car on ne peut arrêter son cœur, et mon cœur, qui battait régulièrement, à

chaque coup envoyait une refoulée de sang que je sentais, comme si je l’avais vue, gicler par le bout de

mon bras coupé, et ces pulsations, moralement et physiquement insupportables, me permettaient de

compter le temps qui seul dans la mêlée furieuse de cette nuit horrible, dont j’enregistrais tous les détails,

s’écoulait inexorablement, ce qui dans sa véritable nature de secondes, de fractions de secondes,

d’éternité. »

Blaise Cendrars, La Vie dangereuse, « J’ai saigné », 1938.

Les guerres d’autrefois

Invitez vos élèves à prendre connaissance d’un compte-rendu de la bataille de Waterloo pour écrire ce

texte.

9 Exemple de récit :

« Julien venait de se réveiller. Sans son bras gauche. Il avait été opéré par Dominique Jean Larrey, le

meilleur chirurgien de Napoléon.

À Ligny, lors de la bataille de Waterloo, sa petite division avait fait reculer les soldats prussiens,

redoutables tant par leur détermination que par la précision et la portée de leur fusil. Le vieux maréchal

Blücher, il fallait bien l’avouer, avait fière allure sur son cheval, il ne ménageait pas ses efforts et ne

cherchait pas à se réfugier dans l’Olympe protégé des officiers. Et lorsque son cheval avait été abattu, il

s’était relevé vaillamment et avait défendu chèrement sa vie. Son courage avait été communicatif et il avait

pu s’enfuir mettant à l’abri ses hommes des assauts d’une armée française enhardie par ses premiers

succès.

Julien avait tiré avec son mousquet sur un Prussien grand et intrépide mais la pluie avait rendu inefficace

son tir d’autant que la fumée noire qui se dégageait des autres armes assombrissait tout et invalidait ses

chances d’atteindre un homme. Il avait alors décidé d’en découdre avec la baïonnette et de tuer cet

ennemi sans coup férir. Il s’était approché à découvert, il avait la pugnacité rageuse et inconsciente de la

première fois. En s’avançant, il vit que le Prussien le visait avec son fusil. Pourtant, il ne s’arrêta pas dans

son élan. Il se sentait invulnérable porté par sa foi en l’Empereur. L’autre tira à bout portant plusieurs

balles qui allèrent se ficher dans son bras gauche. Qu’à cela ne tienne, il lui restait le bras droit et faisant fi

d’une douleur qui restait encore tapie en lui, il planta son arme dans le cœur de l’ennemi. Il s’évanouit.

Parfaitement éveillé et lucide, il contemplait les visages inquiets et désolés autour de lui. Il entendit une

voix qui regrettait la perte d’un bras. Parlait-on de lui ?

Il reconnut le fameux chirurgien Larrey qui sauvait tant de vies et cela lui fut d’un certain réconfort.

14–21

Ce ne fut qu’à ce moment qu’il constata l’absence de son avant-bras gauche et il comprit la raison de cette

douleur qui diffusait de son bras coupé et irradiait dans tout le corps. Les effets de la morphine

s’estompaient cruellement.

Pourtant, il se sentait bien vivant et vigoureux. Il était atterré non pas tant de perdre son bras après tout il

lui restait le droit, cela suffirait bien pour vivre mais de ne pouvoir rester au service de l’empereur et de

ne pouvoir combattre.

C h a p i t r e 1 2

Réponses aux questions

Les oubliés de la Grande Guerre

1 Le terme « bestiaire » s’impose car nous avons ici une description du règne animal pendant la guerre.

2 Les hommes et leur souffrance sont au centre du récit de guerre. Un tableau aussi complet du monde

animal est tout à fait inédit.

3

Catégorie d’animaux Espèces

Les animaux utilitaires bétail, animaux de la basse-cour

Les animaux domestiques chiens, chats, oiseaux, paon

Les animaux indépendants lièvres, chevreuil, gibier, poissons

Les marginaux et immangeables renard, corbeau, belette, taupe, hérisson

Les incomestibles chevaux guerriers, pigeons voyageurs

Les parasites insectes, poux et rats

La guerre : un retour à la sauvagerie

4 La loi naturelle qui régit la relation entre les hommes et les animaux est celle de la faim et du plus fort,

elle se réduit donc au champ alimentaire. Les animaux qui y échappent sont, non pas, comme on pourrait

le croire, les incomestibles définis dans le tableau (car ils finissent par ne plus l’être tant que cela) mais les

animaux qui servent l’effort de guerre, comme le pigeon voyageur.

5 Le champ lexical qui domine est celui de la nourriture (festin, faim, vocation bouchère, dévorer).

6 Ce retour à la sauvagerie est signalé par les expressions : « livrés à eux-mêmes, bovidés en

déshérence, retour à l’état sauvage, vagabonder, les porcs à la dérive, les canards, poules, poulets et

coqs en voie de marginalisation, les lapins sans domicile fixe ».

7 Les hommes eux-mêmes, poussés par la faim, retournent à l’état sauvage comme le montre la scène où

Arcenel et Bossis taillent des côtes à un bœuf vivant. (l. 29 à 33).

14 –22

Un miroir de la société des hommes

8 Le procédé de la personnification humanise les animaux les rendant proches des hommes qui, à revers,

ont des comportements relevant de la sauvagerie.

Exemples :

« chevaux désœuvrés, désemparés […] privés de but dans la vie » (l. 34-35) ;

« les paons, […] vu leur sale caractère et leur foutu narcissisme » (l. 45-47) ;

« des animaux indépendants […] pour quelque temps encore vivaient ces francs-tireurs » (l. 55-60).

9 Le décalage entre le traitement cruel dont les chevaux sont les objets et les qualités humaines que

l’auteur leur prête avec humour est ironique. La réponse « humour noir » peut être validée aussi.

10 Ici, pas de réponses ni de listes exhaustives, tout reste ouvert. Cette question est prétexte à une

réflexion sur la société humaine, son fonctionnement, ses membres et sa hiérarchie.

Les animaux domestiques Les valets, les bonnes, les serveurs…mais aussi les représentants

politiques, les professeurs.

Les animaux indépendants les professions libérales, les artistes…

Les marginaux les artistes, les SDF, les aliénés…

Les incomestibles les grands chefs d’entreprise, les hommes politiques influents…

Les parasites Pour cette catégorie, les réponses qui ne manqueront pas d’être données seront pour

certaines provocatrices (les chômeurs, les étrangers…). Dans une perspective citoyenne et philosophique,

n’hésitez pas à ouvrir le débat, à le rattacher à l’actualité ou à des événements historiques et à rappeler

les valeurs humanistes.

Activité supplémentaire Lecture en réseau :

Dans la Bible, Les animaux purs et impurs.

Jean de La Fontaine, Les Animaux malades de la peste.

George Orwell, La Ferme des animaux.