avril 2006 • n°100 mensuel édité par l’adcf - ... · « contrats de projets État-région »...

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Intercommunalités ADCF N°100-avril 2006 1 Le CPER, un CIACT en demi-teinte Finances Politique A VEC SEULEMENT 8 % du terri- toire national urbanisé, soit deux fois moins que dans de nombreux pays européens, la France ne connaît pas, à pro- prement parler, de pénurie foncière. Pour autant, la crise est réelle, palpable sur l’ensem- ble du territoire. Le déséquili- bre entre l’offre et la demande a diverses origines : insuffi- sante mobilisation des terrains disponibles, défaut de densi- fication urbaine contrairement aux préconisations de la loi SRU, détournement de des- tination des terres à des fins spéculatives… Résultat, ce qui est rare, ou présenté comme tel, devient cher. Entre rapports parlementai- res de décryptage des raisons de la crise, et adoption de la loi Engagement national De l’analyse de la crise foncière, ses causes et ses effets, au rappel des outils de politique foncière existants, mais peut-être sous utilisés. Lire page 9 Lire page 5 TPU et péréquation Claire Delpech SUR LE MODÈLE DE L ’ÉTUDE conduite par l’État sur les dota- tions qu’il verse aux collectivi- tés, l’Assemblée des communau- tés de France lance sa propre étude pour analyser l’effet péré- quateur de l’intercommunalité. avril 2006 • n°100 mensuel édité par l’ADCF - www.adcf.org 5,50 Dossier Quelle pénurie foncière ? pour le logement (ENL) et de son volet foncier, la volonté est aujourd’hui forte de mieux organiser les stra- tégies et les outils existants, afin de les rendre efficaces. L’intercommunalité est-elle aujourd’hui l’échelon d’in- tervention le plus pertinent ? La parole est donnée aux élus et aux experts. Lire page 2 Dossier Quelle pénurie foncière ? 9 Joseph Comby, directeur de l’ADEF (association des études foncières) analyse le contexte national de pénurie foncière. Les outils fonciers existent 12 Les communautés disposent de multiples outils pour afficher leur stratégie foncière. Il faut savoir les articuler entre eux… et le vouloir. (Re)découvrir les EPFL 15 Créé en 1991, remis au goût du jour en 2000, l’établissement public foncier local (EPFL) pourrait devenir enfin un outil foncier efficace. Claire Legoux LE COMITÉ INTERMINISTÉRIEL d’aménagement et de compétitivité des territoires (CIACT) du 6 mars dernier a présenté les orientations de la prochaine génération de contractualisation entre l’État et les régions. Ces contrats de projets prévoient une meilleure coordination avec la programmation européenne, que ce soit en terme d’objectifs ou de calendrier, autour de trois grands objectifs : compétitivité et attractivité, développement dura- ble et cohésion sociale et territoriale. Détail des principales mesures, de leurs avancées et des incertitudes qu’elles recèlent. Finances Péréquation et TPU 4 Quels sont les effets péré- quateurs de l’intercommu- nalité à fiscalité propre ? Pour les mesurer, l’ADCF lance l’étude. Territoires Les bistrots de Pays 6 Lieux de convivialité mais aussi d’animation locale, les bistrots de Pays s’organi- sent en réseau autour d’un label de qualité. Intercommunalités Changement de look 18 Pour son 100 e numéro, votre journal adopte une nouvelle maquette et un nouveau format. Modernité, praticité. Droit Bureau communautaire 21 Tout ce qu’il faut savoir sur le bureau communautaire, sa composition et la dési- gnation de ses membres… Institutions France-Japon 22 Un colloque de droit comparé a permis de mettre en évidence les points forts de deux modèles institutionnels dont l’objectif est semblable : pallier au nombre élevé de communes. DR BÉZIERS MÉDITERRANÉE

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Page 1: avril 2006 • n°100 mensuel édité par l’ADCF - ... · « Contrats de projets État-région » afin de mieux rendre compte de la nature juridique de cet accord. Ces contrats

Intercommunalités • ADCF • N°100-avril 2006 1

Le CPER, un CIACT en demi-teinteFinances Politique

AVEC SEULEMENT 8 % du terri-toire national urbanisé, soitdeux fois moins que dans denombreux pays européens, laFrance ne connaît pas, à pro-prement parler, de pénuriefoncière. Pour autant, la criseest réelle, palpable sur l’ensem-ble du territoire. Le déséquili-bre entre l’offre et la demandea diverses origines : insuffi-sante mobilisation des terrains

disponibles, défaut de densi-fication urbaine contrairementaux préconisations de la loiSRU, détournement de des-tination des terres à des finsspéculatives… Résultat, ce quiest rare, ou présenté commetel, devient cher.Entre rapports parlementai-res de décryptage des raisonsde la crise, et adoption de laloi Engagement national

De l’analyse de la crise foncière,ses causes et seseffets, au rappel desoutils de politiquefoncière existants,mais peut-être sous utilisés.

Lire page 9

Lire page 5

TPU et péréquationClaire Delpech

SUR LE MODÈLE DE L’ÉTUDE

conduite par l’État sur les dota-tions qu’il verse aux collectivi-tés, l’Assemblée des communau-tés de France lance sa propreétude pour analyser l’effet péré-quateur de l’intercommunalité.

avril 2006 • n°100 mensuel édité par l’ADCF - www.adcf.org 5,50 €

Dossier

Quelle pénurie foncière ?

pour le logement (ENL) etde son volet foncier, lavolonté est aujourd’hui fortede mieux organiser les stra-tégies et les outils existants,afin de les rendre efficaces.L’intercommunalité est-elleaujourd’hui l’échelon d’in-tervention le plus pertinent ?La parole est donnée aux éluset aux experts.

Lire page 2

Dossier

Quelle pénurie foncière ? 9Joseph Comby, directeur de l’ADEF (association des études foncières) analyse le contexte national de pénurie foncière.

Les outils fonciers existent 12Les communautés disposent de multiplesoutils pour afficher leur stratégie foncière.Il faut savoir les articuler entre eux… et le vouloir.

(Re)découvrir les EPFL 15Créé en 1991, remis au goût du jour en 2000, l’établissement public foncier local (EPFL) pourrait devenir enfin un outil foncier efficace.

Claire Legoux

LE COMITÉ INTERMINISTÉRIEL d’aménagement etde compétitivité des territoires (CIACT) du 6 marsdernier a présenté les orientations de la prochainegénération de contractualisation entre l’État et lesrégions. Ces contrats de projets prévoient unemeilleure coordination avec la programmation

européenne, que ce soit en terme d’objectifs oude calendrier, autour de trois grands objectifs :compétitivité et attractivité, développement dura-ble et cohésion sociale et territoriale.Détail des principales mesures, de leurs avancées etdes incertitudes qu’elles recèlent.

FinancesPéréquation et TPU 4Quels sont les effets péré-quateurs de l’intercommu-nalité à fiscalité propre ? Pour les mesurer, l’ADCFlance l’étude.

TerritoiresLes bistrots de Pays 6Lieux de convivialité maisaussi d’animation locale, lesbistrots de Pays s’organi-sent en réseau autour d’unlabel de qualité.

IntercommunalitésChangement de look 18Pour son 100e numéro, votrejournal adopte une nouvellemaquette et un nouveauformat. Modernité, praticité.

DroitBureau communautaire 21Tout ce qu’il faut savoir surle bureau communautaire,sa composition et la dési-gnation de ses membres…

InstitutionsFrance-Japon 22Un colloque de droit comparé a permisde mettre en évidence les points forts de deux modèles institutionnelsdont l’objectif est semblable : pallier au nombre élevé de communes.

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Politique

2 N°100-avril 2006 • ADCF • Intercommunalités

éditorial

Déjà100 numéros !Le lancement à l’automne1997 d’un mensuel sur abonnement uniquementdédié au champintercommunal constituait,pour nombre d’observateurs, un pari d’équilibriste.Pourtant, – est-ce laconjonction d’une solide dosede persévérance et d’une certaine insouciance ?– Intercommunalités a trouvéassez rapidement son public.Depuis neuf ans, guidés par une exigence d’ouverture et de pluralité, nous animonsdans ces colonnes un débat sans tabou sur la dynamiqueintercommunale et le développement territorial.Les objectifs sont atteints : les élus de l’Assemblée des communautés de Francedisposent de bien plus qu’unsimple vecteur de diffusion de leurs propositions : une tribune généraled’animation des enjeux propres à l’intercommunalité.Une première fois, en novembre 2000,Intercommunalités a fait peau neuve, prenant des couleurs en renonçant à son élégante, mais plutôtsévère, bichromie originelle.Par petites touches,régulièrement, maquette etrubriques ont évolué pourrépondre aux attentes deslecteurs : plus de photos, d’illustrations,un découpage plus dynamiquedes articles.Avec ce numéro 100, cette mueéditoriale, distillée jusqu’ici par touches discrètes, débouche et se concrétise par une nouvelle maquette, un nouveau format, bref… un nouveau souffle.Notre vœu le plus cher est quenos lecteurs adhèrent à cesorientations et que s’écrivelongtemps encore dans noscolonnes, numéro après numéro, la passionnantehistoire des communautés.

Un pas en avant, deu

Claire Legoux

LA FUTURE GÉNÉRATION DE CONTRATS entre l’État et les col-lectivités territoriales sera marquée par quelques évolutionsmajeures, au premier rang desquelles leur intitulé, qui devient« Contrats de projets État-région » afin de mieux rendre comptede la nature juridique de cet accord. Ces contrats de projets prévoient une meilleure coordinationavec la programmation européenne, que ce soit en terme d’ob-jectifs ou de calendrier, avec une durée qui sera de sept ans àcompter du 1er janvier 2007. Les projets de grandes infrastructures routières et ferroviairesseront extraits de cette contractualisation, ce qui permet deresserrer l’intervention de l’État autour de trois grands objec-tifs : la compétitivité et l’attractivité des territoires, la dimen-sion environnementale du développement durable, et la cohé-sion sociale et territoriale. Hors de ces axes prioritaires, desconventions spécifiques pourront être passées entre l’État et lescollectivités territoriales, mais seront considérées comme horscontrat de projets. Afin d’engager les crédits dès le premier trimestre 2007 etgarantir un bon niveau d’exécution des contrats, seuls les pro-jets techniquement et financièrement prêts pourront être pro-grammés. Cette exigence et l’annonce d’ajustements annuelsdes programmations semblent présager une plus grande rigueurbudgétaire durant la période 2007-2013. L’examen automati-que des projets en retard sur les prévisions pourrait indiquer quel’État s’engage dans des procédures financières proches de celles de Bruxelles et de son dégagement d’office, même si lespossibilités offertes par la LOLF devraient permettre des reportsde crédits mesurés. Si tous ces objectifs et orientations doivent être salués pour leur réalisme et leur rationalité, neprend-on pas le risque d’une déception du fait des délais rela-tivement restreints qui sont proposés pour l’exercice de lanégociation ?

De la sémantique à la stratégieDepuis quelques mois, la DATAR a changé de nom pourdevenir la DIACT, Délégation interministérielle à l’amé-nagement et à la compétitivité des territoires. Outre desobjectifs de travail marqués par les priorités du développe-

ment économique, cette modification consacre l’introduc-tion dans le langage de l’État de la notion de “territoires” (aupluriel). Ce premier CIACT pose donc les bases d’une poli-tique nationale d’aménagement renouvelée, puisqu’elle sepropose de soutenir les territoires et non plus d’engager un plan national. Les conséquences de cette évolution séman-tique sont difficilement prévisibles à ce jour, même s’il semble raisonnable de parier que l’État continuera de consi-dérer les territoires infra-régionaux dans un prisme secto-riel (urbain, grand urbain, littoral, montagne, rural, villesmoyennes…). À priori, l’impact sur la future contractualisation régionalepourrait être une très grande variété de contrats, que ce soiten termes financiers ou thématiques, d’autant que le CIACTne mentionne à aucun moment d’impératif de péréquationentre les régions.

Partenariat privilégié État-collectivitésUne nouveauté mérite également d’être soulignée dans ceCIACT : ces contrats de projets mettront en œuvre un « par-tenariat privilégié entre l’État et les régions, associant égale-ment les autres niveaux de collectivités ». Cette dispositionsignifiera-t-elle la signature de contrats tri-partites, par exemple avec un ou plusieurs départements ? Ou suppo-sera-t-elle que, dans l’hypothèse où la région ne serait pasprête à signer le contrat de projets dans les délais, l’Étatpourrait le signer avec les départements concernés ? Les pré-fets de région, réunis à la suite du CIACT, devront disposerde précisions sur ce point, sauf à recevoir des indicationscirconstanciées lorsqu’ils obtiendront leur mandat de négo-ciation au début de l’été. En tout état de cause, l’État réaffirme ici, sa compétence en matière d’aménagement duterritoire, ne prêtant à la collectivité régionale qu’un rôlede partenariat privilégié.Le « volet territorial » défini par le CIACT ne doit pas êtreinterprété à la lecture du volet territorial de la générationde contrats de plan en cours. Le futur volet est en effet trèsdifférent. L’État ne pose aucune obligation juridique d’exis-tence d’un volet territorial, et ne donne aucune indicationsur les territoires concernés. Si les parcs naturels régionaux

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Le 6 mars dernier, le Premier ministre a réuni un Comité interministérield’aménagement et de compétitivité des territoires (CIACT). Les orientations de la prochaine génération de contractualisation entre l’État et les régions ont, notamment, été présentées.

Contrat de projets État-région

Le partenariat État-région et autres collectivités est envisagé.

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Un rapportsans apport

● Dans la foulée de l’Acte II de la décentralisation, la HauteAssemblée a créé un Observatoirede la décentralisation. Nombred’élus locaux avaient alors rêvéd’un organisme indépendant, voué à leur cause, doté de moyensd’étude et de capacités d’expertisealternatives à celles desadministrations centrales. Laconfiguration retenue fut plusmodeste, les premières productions s’en ressentent.Le rapport d’information dusénateur Dallier consacré àl’intercommunalité à fiscalitépropre en est l’illustration(http://www.senat.fr/rap/r05-193/r05-193.html). Publié enfévrier, ce rapport d’unequarantaine de pages proposeessentiellement un long historiquede l’intercommunalité et de sonévolution. Il se contente d’effleurertrès à la marge les questions lesplus problématiques (statutjuridique des communautés, modede désignation des conseillerscommunautaires, nombred’échelons administratifs locaux),avant de mettre en avant lesconclusions très personnelles durapporteur : dérive supra-communale de l’intercommunalité,bilan préoccupant du point de vuede l’efficacité de la dépensepublique...Neuf mois après le rapport duConseil économique et social, cinqmois après celui de la Cour descomptes, l’Observatoire de ladécentralisation est loin de s’êtredonné les moyens d’apporter unecontribution significative au débatsur l’intercommunalité.

Une contribution de qualité !Rapport parlementaire

x pas en arrièreet les pays sont cités dans les documents d’orientation, ilsn’apparaissent plus comme les cadres d’appui privilégiés descontrats territoriaux. En revanche, les agglomérations bénéficient d’une citationexplicite, dans un intitulé d’action (“politique de développementdurable”) suffisament vague pour leur permettre de recon-duire sous une forme similaire leurs contrats en cours. Deuxième différence avec l’actuel volet territorial, une liste dethèmes est exposée qui peuvent donner lieu à une contractua-lisation infra-régionale. Mis à part « l’adaptation des servicesà la personne » et « le développement numérique des terri-toires », les thématiques ouvrant droit à la contractualisationpour les territoires péri-urbains et ruraux sont exclusivementd’ordre environnemental (changement climatique, ressourceen eau, prévention des risques naturels). Si cette future géné-ration de contractualisation infra-régionale a pu bénéficier del’expérience des contrats de pays et de parcs naturels régio-naux pour définir des thématiques prioritaires et prévoir lesvolumes financiers à y consacrer, il semblerait qu’elle n’ait paspris acte des aspects vertueux d’un projet global et partagé, nides innovations expérimentées dans le cadre de Leader +, dontla gestion par enveloppe globale. Pour éviter un rendez-vousmanqué entre l’État et les territoires organisés sous son impul-sion, la balle semble renvoyée dans le camp de chaque régionqui devra, soit compenser sur ses fonds propres l’absence de sou-tien de l’État sur des thématiques cruciales (telles que le déve-loppement économique ou touristique, l’emploi et l’insertionprofessionnelle, l’habitat, etc.), soit l’amener à modifier saposition en ouvrant sensiblement l’éventail de thématiques.À moins que l’on ne considère que l’expérience des pays etdes parcs naturels de ces vingt dernières années n’est pas assezprobante pour continuer de leur apporter une attention par-ticulière. Bien entendu, ces contrats pourraient faire partie de

ce que le CIACT nomme « les conventions spécifiques horsCPER », regroupant les actions n’entrant pas dans les champsprioritaires sur des échelles et des calendriers variés !

Les rendez-vous des communautésL’État, les régions et les communautés vont être amenés à secroiser à plusieurs reprises dans ce dispositif. Dès la fin dumois d’avril, les préfets de région devront élaborer un diag-nostic territorial, partagé avec les exécutifs locaux. Certainescommunautés seront peut-être appelées dans ce cadre àexprimer les priorités de leur territoire. Les grands équipe-ments métropolitains étant inscrits dans la cible prioritairedes contrats de projets. Enfin, les agglomérations pourrontrecevoir un soutien au titre du volet territorial, et les communautés de communes et les pays pourraient, souscondition, en faire de même. Toutefois, au vu de la contrac-tion budgétaire de l’État et du resserrement des thémati-ques soutenues, les communautés et les pays auront toutintérêt à cumuler systématiquement les fonds des contrats deprojets avec les fonds européens.En somme, le CIACT propose un ensemble de mesures quisemblent bien adaptées aux enjeux nationaux et des grandsensembles régionaux, mais marquées par une rigueur bud-gétaire plus importante que les précédentes générations decontrats entre l’État et les régions. Tous ces points positifsmasquent mal les imprécisions qui subsistent à ce stade,concernant la contractualisation infra-régionale.

Emmanuel Duru

LA COMMISSION DES LOIS de l'Assem-blée nationale a rendu public le rap-port d'information du député MichelPiron sur l'équilibre territorial des pou-voirs. Le rapport constate les risquesde blocage et explore de nouvelles pis-tes pour relancer la réforme engagéeavec l'Acte II de la décentralisation.Préalablement à la rédaction de ce rap-port, l’audition de l’ADCF avait été

l’occasion pour le président Marc Censiet pour Joseph Spiegel, président de lacommission Institutions de l’ADCF,d’insister sur les notions de fluidité et de subsidiarité entre les divers échelons territoriaux. À la lecture durapport, il semble qu’ils aient été pleinement entendus.

Organiser les niveaux En effet, Michel Piron revient longue-ment sur les notions de libre adminis-tration des collectivités locales, d’expérimentation, de chef de file, touten soulignant l’impérieuse nécessité declarification des compétences entreacteurs locaux. Il souligne le risque deparalysie qui pourrait résulter à la foisde la prolifération d'acteurs, tradition-nels (État, communes, départements,régions) ou nouveaux (intercommu-nalités, pays), mais aussi de principesjuridiques difficiles à concilier.

Cependant, loin de succomber à la ten-tation de la recherche du bouc émis-saire idéal (en l’occurrence, ces derniersmois, l’intercommunalité…), MichelPiron propose des solutions auxquel-les il convient de porter la plus grandeattention : donner un contenu à lanotion de chef de file, confirmer le rôlede l’intercommunalité, mutualiser lesmoyens, dissocier carte administrativeet carte locale, encourager le regrou-pement en grandes régions, favoriserles associations-fusions des communes,renforcer le cadre contractuel des rela-tions entre personnes publiques, etc.Nul doute que ce rapport, dont ilconvient de souligner la richesse,apportera de la matière à ceux qui souhaitent véritablement faire évoluer l’action publique locale.

LIRE LE RAPPORT : www.assemblee-nationale.fr/12/rap-info/i2881.asp

Intercommunalités • ADCF • N°100-avril 2006 3

+Savoir

• La politique de cohésionéconomique et socialeeuropéenne en France.

• L’anticipation des mutationséconomiques (filièreautomobile).

• Les pôles de compétitivité.• La mise en œuvre

du partenariat public-privé.

Autres dispositions du CIACT

Pour plus d’information, vous pouvez consulter ledossier de presse du CIACT sur le site internet dela DIACT (www.diact.gouv.fr).

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FinancesDotations et péréquation

4 N°100-avril 2006 • ADCF • Intercommunalités

Vers une évaluation de l’effet péréquateur de la TPUSi l’État a mené des études sur l’effet péréquateur de ses dotations vers les collectivités locales, en revanche, aucune étude n’a jamais évalué les effets de mutualisation et de redistribution, pourtant indéniables, de l’intercommunalité.Pour les mettre en exergue et les quantifier, l’ADCF prend l’initiative.

Claire Delpech

LA TAXE PROFESSIONNELLE UNIQUE est àl’origine d’amples effets péréquateurs deressources et de charges, à la fois verticale-ment entre la communauté et l’ensembledes communes membres, et horizontale-ment entre les communes associées au seindu territoire intercommunal. Ces effetssont encore mal évalués.Deux études importantes du Commissa-riat Général du Plan (en 2000-2001 eten 2004), portant sur l’évaluation deseffets péréquateurs des concours finan-ciers de l’État, ont fait le constat desinégalités de richesse et de pouvoird’achat entre collectivités et ont chiffré,au moyen de critères sophistiqués, la

performance péréquatrice des dotationsde l'État. Les résultats mettaient en avant une réduc-tion globale des inégalités de pouvoird'achat de l’ordre de 40 % pour les com-munes, de 51 % pour les départements etde 54 % pour les régions. Cette péréquation est de nature verticale,c’est-à-dire de l’État vers les collectivitéslocales, mais elle peut être également denature horizontale (entre les différentsniveaux de collectivités sur un territoire)par recyclage des mécanismes d’écrêtementet de compensations mis en place par l’État,par exemple. L’essentiel des redistributionsde richesse semble ainsi fonctionner dansun système plutôt centralisateur.

De plus, si l’effort de péréquation s’est accen-tué au cours des dernières années, commeen témoignent les études réalisées, il demeureencore insuffisant et n’est pas assez ciblé.

Qu’en est-ilde l’intercommunalité ?

L’intercommunalité n’a pas été abordéedirectement dans le cadre de ces études, dufait notamment de son caractère récent et dela spécificité de l’approche territoriale qu’ellepropose. Pour autant, l’intercommunalitéréalise sur son territoire une péréquation àdouble niveau : d’une part, elle met enœuvre une redistribution des richesses entreles communes au moyen de la taxe profes-sionnelle unique (TPU) en particulier ;

d’autre part, elle procède à une péréqua-tion des ressources au travers des dotationsde solidarité. Enfin, elle permet la mutua-lisation des moyens et des charges par ledéveloppement ou la création d’une offre deservices publics locaux sur le périmètre inter-communal. Ce rôle péréquateur de l’intercommuna-lité est mal pris en compte par les pou-voirs publics, en particulier dans la répar-tition de la DGF. Trop souvent, dotationd’intercommunalité et dotation de péré-quation communale sont mises en ten-sion. Non seulement les effets de correc-tion des inégalités de richesse descommunes ne sont pas reconnus, maisencore l’action péréquatrice de l’inter-communalité intervient fréquemment enlieu et place des mécanismes nationaux.Ainsi l’intercommunalité et la péréqua-tion qui lui est associée permettent finale-ment de dégager au niveau national d’au-tres priorités et d’autres champsd’intervention. Il semble essentiel que le

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+Savoir

L’ADCF a lancé, en partenariat avec Dexia Crédit Local, uneétude d’envergure confiée à deux universitaires spécialistes desfinances locales, Guy Gilbert et Alain Guengant, qui avaientréalisé pour le compte du Commissariat général du plan en 2002une étude sur l’évaluation les effets péréquateurs des concoursde l'État aux collectivités locales.L’étude se situe dans le prolongement de cette première missionqui s’était peu penchée sur le phénomène intercommunal. Aprèsun premier test sur un site pilote, une dizaine d’autrescommunautés ont été analysées, avant une généralisation duprotocole d’évaluation. Les résultats sont attendus pour l’été.

rôle péréquateur de l’intercommunalitésoit reconnu et pris en compte. Pour le moment, aucune évaluation satis-faisante n’a été réalisée, les récentes criti-ques envers l’intercommunalité se limitantà une analyse cumulative des charges etdes ressources prélevées.

Vers une évaluationPour mesurer ces effets, et évaluer l’ap-port spécifique de l’intercommunalité enmatière de correction des inégalités depouvoir d’achat entre les communes,l’ADCF vient de lancer une étude quiporte dans un premier temps sur un panelde communautés.Les premiers résultats sur le site piloteretenu démontrent très clairement,

d’une part, la possibilité de définir unprotocole de mesure des effets péréqua-teurs de l’intercommunalité en TPU et,d’autre part, un effet cumulatif crois-sant de la péréquation intra-commu-nautaire* réduisant les inégalités depotentiels fiscaux communaux de 75 %,dix ans après le passage en TPU. Surcette période, l’essentiel des effets redis-tributifs provient de la mise à disposi-tion d’une offre de services élargie. Lesperformances correctrices de la DSCsont plus nuancées au regard des iné-galités de charges entre les communes.Ces résultats sont encourageants etl’ADCF entend les valider en poursui-vant cette expérimentation sur un échan-tillon plus large de communautés.

Paroles

Les critères d’éligibilité àla DSU ont été conçus pourmieux accompagner lesterritoires porteurs de fortshandicaps socio-urbains.Quel bilan peut-on en faireaujourd’hui ?Le ralentissement de la création inter-communale permet d’aborder un nou-veau chantier, celui de la solidaritéfinancière. Après deux ans d’applicationde la réforme des critères d’attribution,les crédits de la DSU et de la DSRauront progressé de près de 40 %, soit400 millions d’euros au total, le tiers del’accroissement de la DGF des commu-nes et des groupements. Ces deux dota-tions de solidarité, qui représentaient7 % de la DGF des communes en2004, en représentent désormais 9,5 %.La progression de la dotation forfaitaire(2,2 % sur la période) aura été réduite demoitié par cette ponction avant répartitionde la DGF. Ce n’est pas trop cher payé.Concernant la seule DSU, l’effet attendude la réforme est bien au rendez-vous.La dotation aura progressé d’au moins10 % pour chacune des 800 communesurbaines qui sont, comme le précise laloi, confrontées à une insuffisance de res-sources et qui supportent des chargesélevées. Parmi celles-ci, une centaine en2005, plus de 250 cette année et près de500 au terme de la réforme verront leurscrédits multipliés jusqu’à quatre fois.Car l’enjeu est avant tout de replacer cescommunes à un niveau de ressources com-patible avec les compétences qu’elles doi-vent généralement assumer dans le champdes politiques urbaines. On ne peut pasleur demander d’assumer des chargessocio-urbaines lourdes, de porter la maî-trise d’ouvrage des opérations de rénova-tion urbaine et sociale, sans s’être assuréqu’elles auront bien les moyens deconduire ces opérations.Pour mieux fixer les idées sur les effets de la réforme, prenons la situation de Clichy-sous-Bois. En 2004, la ville dis-pose d’une ressource évaluée à 768 eurospar habitant, si l’on additionne le poten-tiel financier aux dotations de solidarités,fonds de solidarité Ile-de-France compris. Ce même indicateur de ressources estévalué à 1 225 euros par habitant enmoyenne pour les 20 communes d’Ile-de-France de même importance qui neperçoivent pas la DSU et qui n’ont pasde ZUS sur leur territoire. En 2009, àl’issue de la réforme, la DSU de Clichy-sous-Bois aura progressé de 7,7 millionsd’euros, portant l’indicateur de ressour-ces à 1 042 euros par habitant. Ce

constat est généralisable à la centaine decommunes qui se trouvent dans la situa-tion de Clichy-sous-Bois.Comme l’a dit Jean-Louis Borloo lorsdu débat législatif, la réforme des critèresd’attribution de la DSU conduit à unrattrapage des situations budgétaires descommunes les plus en difficulté. Ce n’est pas une réforme des solidarités,réforme qui reste encore à entreprendre.

La dimension redistributricede l’intercommunalité nesemble pas être prise encompte dans les critèresd’attribution de la DSUCS*.Comment l’expliquez vous ? Il y a tout lieu de penser que l’intercom-munalité peut produire les plus fortseffets de péréquation. À la condition tou-tefois que le territoire communautaireait le dynamisme nécessaire.Pour prendre en compte cette dimen-sion intercommunale dans la réformede la DSU, il aurait fallu s’inscrire dansun autre contexte, celui d’une réformeplus globale des solidarités, réforme quin’a pas suscité l’unanimité dans les tra-vaux préparatoires conduits par leComité des finances locales. La réformes’est donc appliquée aux seules disparitésde situation des budgets communaux.Le problème des solidarités est donc restéentier. La politique de la ville pâtit decette approche trop réductrice, centréesur la commune, alors que la résolutiondes problèmes urbains relève naturelle-ment de l’organisation des solidaritésd’agglomération et du renforcement del’intégration communautaire.

Que faudrait-il faire ?En premier lieu, fixer des objectifsconcrets et individualisés par collectivitéde réduction des écarts de richesse. Ensecond lieu, inverser l’application desfacteurs. La solidarité de l’État doit inter-venir en résultante, après la mise enœuvre des solidarités locales. Est-il acceptable, comme le constate leCommissariat général du plan qui aconduit des travaux sur l’évaluation deseffets péréquateurs des dotations, queplus de 20 % des effets redistributifstapent à côté de la cible (effets contre etsur-péréquateur) ? Le système mérited’être réformé. Dès lors, le centre de gra-vité sera déplacé vers les agglomérationset votre question sur le rapportDSU/intercommunalité pourra trouverde nouvelles applications. B.G.

* Dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale

« L’effet péréquateur dépend du dynamismedu territoire communautaire »

PATRICK JOYEUX >Chargé de mission à la Mission nationale des grands projets urbains. Délégation interministérielle à la ville

Comptes 2004

Annuaire financier des CommunautésPRÉSENTÉ LE 6 AVRIL, l'annuaire finan-cier et fiscal des communautés d'agglomé-rations et des communautés urbaines,réalisé par l'ADCF, Dexia Crédit Localet PLC Demeter, innove pour sa cin-quième édition : le lourd document

papier de335 pages devient un 24 pages quadri(synthèse), accompagné d'un CD-ROMcontenant l'intégralité des données chif-frées, qui deviennent ainsi plus faciles àconsulter et à comparer.

Intercommunalités • ADCF • N°100-avril 2006 5

L’intercommunalité permet la mutualisation des moyens et des charges par le développement ou la création d’une offre de services publics locaux. (Stade de la Méditerranée - Béziers.)

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* voir également Intercommunalités 99 sur les dotations.

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Territoires

Bistrots de PaysUn label qualité au service du développement local

Proximité et animation locale

En intégrant le réseau, ces bistrots se doi-vent de devenir les ambassadeurs de leurterritoire, des relais multiservices de proxi-mité, des carrefours d’idées, des lieux devie culturelle. Aussi, la Fédération a posé –dans le cadre d’une charte – un certainnombre de critères de qualité que les bistro-tiers se doivent de respecter : le bistrot doitêtre situé dans un village de moins de2 000 habitants et être l’un des dernierscommerces du village. Il doit offrir uneprestation de restauration et être – ou deve-nir – un lieu de bonnes chères. Pour cefaire, une formation peut être proposée parla Fédération pour que les bases de la gas-tronomie soient acquises dans le cadred’une tradition locale.

La force des réseaux locaux

Véritable lieu de vie, le bistrot doit égale-ment avoir une vocation d’accueil, d’infor-mation et d’animation. Multiservices, ildoit proposer au moins trois autres presta-tions en complément du débit de boissons :presse, dépôt de pains, tabac, épicerie,hébergement, gaz, cartes postales… Il peutégalement offrir des documents d’informa-tions touristiques, animer des manifesta-tions festives et culturelles et promouvoirles produits du terroir.Les « bistrots de pays » sont en effet conçuscomme une véritable action de développe-ment territorial. Il s’agit, à travers cette ini-tiative, de promouvoir sa région, ses pro-duits et sa culture locale, mais aussi dedynamiser une filière professionnelle. L’intégration des spécificités locales amorced’ailleurs une véritable stratégie de marke-ting : les bistrots deviennent ainsi des outilsde communication du territoire.Pour bénéficier du label, il est exigé unnombre minimal de cinq établissements

Bénédicte Mikaëlian

C’EST DANS LES ANNÉES 90, dans le Pays deForcalquier (Alpes de Haute-Provence),qu’est née l’idée des Bistrots de Pays. Uneinitiative originale et conviviale, portée parun Corrézien, Bernard Reynal, aujourd’huiprésident de la Fédération nationale desbistrots de pays. « Revenu au pays » aprèsplusieurs années d’absence, il est frappépar le repli progressif de la vie dans lemonde rural : fermeture de classes, voired’école, fermeture d’église, fermeture decommerces, suppression des services à lapopulation. Seul subsiste – dernier bastionde la vie du village –, le café-restaurant.C’est de lui, et de sa survie, que dépend le

maintien de la vie locale pense aussitôt Bernard Reynal. En pleine vague de tou-risme vert, il imagine alors une action visantà réhabiliter ce lieu singulier au sein detous les villages ruraux.

Création d’un labelSoutenu par Jean Maurizot, un élu dupays, il convainc rapidement le Sivom,celle de créer un réseau « labellisé » de bis-trots de pays, outils du développementd’activités économiques et touristiques enmilieu rural, bénéficiant dans ce cadre –grâce au Sivom – du programme euro-péen Leader 2. En 1993, les premiers bis-trots de pays voyaient le jour. Un réseau

qui ne cesse, depuis, de faire des émules. L’objectif du label est multiple : maintenirles bistrots dans les petites communes pourle bien-être des habitants, favoriser le métierde bistrotiers en lui apportant des critèresde qualité, donc de succès, et participer audéveloppement territorial.

Créée en 1993, dans le pays de Forcalquier (Alpes de Haute-Provence), la Fédération nationale des « Bistrots de Pays » rayonne aujourd’hui dans tout le sud de la France. Objectif du réseau de bistrots : revitaliser le monde rural en apportant animations et services à la population.

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Paroles

Comment vous est venue cette idée des bistrots de pays ?Il y a 30 ans, lorsque je suis revenu en Corrèze, j’ai été choqué de constater queles trois piliers du monde rural – l’église, l’école et le bistrot – étaient en train dedisparaître progressivement, et avec eux la vie des petites communes. Comme jen’ai ni la vocation du professeur, ni la foi du curé, le seul levier sur lequel j’ai pensépouvoir agir était le bistrot.L’idée a fait son chemin, et en 1988, alors que j’étais mandaté pour une mission dedéveloppement durable dans les zones touristiques au niveau national, j’ai proposécette idée de bistrots de pays au cours d’une réunion. L’idée a enthousiasmé, elle futadoptée et le réseau a commencé à exister dans le Pays de Forcalquier.

Comment obtient-on le label bistrot de pays ?Le but étant de briser l’isolement des bistrotiers dans leur région, il faut, pour obte-nir le label, constituer un réseau de cinq bistrots, pas moins. Au sein du réseau,le bistrotier renoue avec des pairs, ce qui est l’un des leviers d’animation dumonde rural. Pour constituer un réseau, il y a deux méthodes : le bouche àoreille, et le travail de prospect – et de mise en relation des gens – que fait la fédé-ration auprès des collectivités locales.

Les bistrots de pays doivent proposer des servicesparallèles à leur commerce.Comment se fait le choix de ces activités ?En concertation avec la mairie bien sûr ! On ne peut bien travailler qu’en concer-tation avec la commune. Il faut trouver les services dont a le plus besoin le vil-lage sans que cela n’empiète sur les autres commerces à proximité : dépôt depain, cartes postales, présentation de produits régionaux, relais multiservices.

La Fédération propose des formations pour améliorer le service des bistrots labellisés. Sur quoi portent-elles ?Elles portent sur des thèmes extrêmement variés : oenologie, décoration, hygiène,accueil, gastronomie... Nous les organisons au niveau local, à partir d’un appeld’offre ciblé. Les collectivités locales prennent, en général, en charge une partie descoûts de formation, mais leur implication est variable : tout se décide au cas par cas.

Quelle garantie doit apporter le label ?Ce label est celui d’une promesse pour le client : celle du bien-être et de lagrande qualité. Où que vous alliez, l’enseigne vous rassure sur le cadre, le serviceet le contenu de l’assiette. Vous savez ce qui vous attend, vous reconnaissez le style.

Vous voulez donc créer un standard de qualitépropre au monde rural?Mais oui ! L’objectif est de faire reconnaître l’enseigne « Bistrots de Pays », de valo-riser les savoir-faire et la qualité propres aux régions… Pour la Fédération, l’es-sentiel, c’est le maintien des bistrots : nous œuvrons ainsi à la survie des villages etau maintien des services à la population. Nos ambitions sont avant tout humaines.

Les bistrots de pays sont nés dans le Pays de Forcalquier avant de gagner progressivement le sud de la France. Quelles sont vos ambitionsau niveau national ?Pour rester efficace, inutile de céder à la folie des grandeurs. Nousvoulons déjà continuer de nous développer au sein des régionsdans lesquelles le label est déjà implanté, puis progresser à traverstoutes les régions situées au sud de la Loire. Bien sûr, à terme, notreambition est, petit à petit, de toucher l’ensemble du territoire natio-nal. Restons pragmatique…

Propos recueillis par Bénédicte Mikaëlian

Bernard Reynal >Président de la Fédération nationale des Bistrots de Pays.

« L’objectif est de valoriser les savoir-faire et la qualité propres aux régions »

par territoire. Ce système est un amplifi-cateur de l’offre de services, mais ausside la promotion du réseau, et constitueune véritable centrale d’achat. Ce pro-cessus méthodologique est ainsi capablede prendre en compte les spécificités loca-les tout en étant reproductible dans tousles lieux où il s’implante. Chaque « pays »joue avec son environnement, son histoire locale. En effet, si les réseaux debistrots permettent le développement etla concrétisation d’idées originales et spé-cifiques, la Fédération, en dépit du label,ne souhaite absolument pas la standar-disation, le modèle unique : au contraire,c’est dans les moindres détails que la for-mule est adaptée à la spécificité locale,l’enseigne par exemple est déclinée pourrefléter au mieux les codes esthétiques dechaque pays.Le concept a déjà prouvé sa pertinenceau regard des nombreux réseaux existants.Actuellement au nombre de quatorze dansle Pays de Forcalquier, les bistrots de paysont fait des émules dans d’autres régions :après les régions PACA et Midi-Pyrénées,

cinq bistrots viennent d’être créés en Corrèze, chacun avec sa propre thémati-que : ornithologie, années cinquante, l’airet l’eau... Le Sivom de Forcalquier a cédéà tous ces bistrots les droits d’utilisation dela marque « bistrot de pays » et du logo enleur apportant une assistance technique…Le succès grandissant des bistrots de paysdoit d’ailleurs beaucoup au principe dedélégation au plus près du terrain. Cetteingénierie de proximité est bien au cœurdu projet : les collectivités locales sontfortement impliquées, que ce soit pourdélivrer le label, pour participer aux fraisdes équipements ou pour cibler au mieuxles besoins de services annexes de la popu-lation locale. La Fédération nationale desbistrots de pays joue alors un rôle decoordination et de promotion en mobi-lisant fortement les collectivités locales. En alliant ambition locale et touristique,originalité et qualité des services, les bis-trots de pays contribuent, de façon origi-nale, au maintien des activités et de l’ani-mation en milieu rural.Une initiative à saluer…

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* Cotisation mensuelle TTC «Duxio Eco» au 01/04/2006.Tarif pour un conducteur fonctionnaire âgé de 40 ans suivant l’usage privé-trajet/travail-administratifavec bonus de 50%, 5% de réduction mutualiste et sans sinistre au cours des 36 derniers mois. Hors garantie conducteur, avec garage, avec franchise.Frais de mensualisation de 2,29 € TTC par mois en sus. Pour un 1er contrat à la GMF, le droit d’entrée est de 1,52 € TTC.La Garantie Mutuelle des Fonctionnaires et employés de l’Etat et des services publics et assimilés. Société d’assurance mutuelle. GMF Assurances - Société anonyme au capital de 181 385 440 € entièrementversé. RCS Paris B398 972 901- APE 660E. Entreprises régies par le Code des assurances. Sièges sociaux : 76 rue de Prony 75857 Paris cedex 17.

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Foncier

La France ne souffre pas d’un manque de terrains, mais d’une production de droits à bâtirinsuffisante pour répondre à l’inflation de la demande immobilière. Tout ce qui est rare est cher… les prix de l’immobilier flambent.

La valeur du terrain dépend de l’usage auquel on le destine et de sa situation économique et juridique.

Joseph Comby, directeur de l’Associationdes études foncières

À LIRE DANS LA PRESSE les commentairessur les causes de la hausse de l’immobi-lier, la question foncière semble d’une évi-dence aveuglante : « tout ce qui est rareest cher, donc le prix des terrains flam-bent »... Rien de plus redoutable que lejeu des évidences, même s’il est clair que lesterrains disponibles à la construction man-quent à Paris, à Lyon ou au Mont-Saint-Michel, et que leurs prix sont élevés. Celan’a pas toujours été vrai : au milieu desannées 1990, les quelques terrains pari-siens mis en vente1 avaient perdu environles trois quarts de leur valeur à la suite del’effondrement de la bulle spéculative, et lesprix de l’immobilier avaient été divisés pardeux en six ans. La surface de Paris n’avaitpourtant pas changé entre-temps. En réa-lité, l’espace n’est ni rare ni abondant, il

n’est pas extensible. La surface du terraindisponible est même pratiquement la seuledonnée véritablement immuable enmatière d’aménagement du territoire, saufà construire sur la mer…De même, les prix des terrains à bâtir –urbains ou agricoles – n’augmentent pasde façon continue. Sait-on, par exemple,qu’un hectare de prairie ou de terre labou-rable continue de valoir aujourd’hui nette-ment moins cher qu’à la fin du XIXe siècle,à pouvoir d’achat constant de l’unité moné-taire, et en dépit d’une augmentation desprix de l’ordre de 25 % au cours de la der-nière décennie ?

En ville, la valeur du foncierdépend du prix de l’immobilier

Par lui-même, un terrain n’est ni cher, nibon marché. Sa valeur dépend des usages– si possible les plus rentables – auxquels on

le destine, en relation avec la situation éco-nomique et juridique du terrain. C’est lecas d’un terrain à bâtir dont la valeurdépend à la fois de l’immobilier que l’on vaconstruire dessus et du COS autorisé. Ilen va de même d’un terrain agricole : lavaleur, par exemple, d’une prairie nor-mande dépend à la fois du prix du lait et del’existence de quota laitiers.Dans un quartier, où il est envisagé deréhabiliter quelques vieux bâtiments, onconstate que la valeur du foncier est laconséquence presque mécanique du prixde vente espéré de l’immobilier que l’onpeut y construire. La valeur du foncierest la différence entre le prix de sortie del’immobilier et le coût de l’opérationselon le principe dit du « compte àrebours ». Il ne s’agit donc pas d’une rela-tion proportionnelle.

DossierInterview de Antoine de Boismenu,directeur de la FNSAFER 9Maremne Adour Côte-Sud 11priorité au logement des jeunesLes outils fonciers des communautés 12Interview de Yves Jégouzo,conseiller d’État 13Béziers Méditerranée 14les missions du service foncierInterview de Marc Pigeon,président de la fédération des promoteurs constructeurs 14L’outil foncier EPFL 15La Haute-Savoie crée son EPFL 16l’habitat constitue l’un de ses quatre domaines d’intervention

Quelle pénurie foncière ?

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Un certain nombre d’éléments du coûtde l’opération sont d’ailleurs totalementindépendants du prix de sortie : ainsi, cen’est pas parce que les prix de l’immobilieraugmentent de 10 % dans un quartier,que les salaires des ouvriers du chantieraugmenteront d’autant. L’usage actuel du terrain a lui aussi unevaleur pour son propriétaire actuel : celui-ci n’a aucune raison d’accepter de vendreson bien tant qu’il ne lui est pas proposé unprix suffisant pour acheter ou construirel’équivalent ailleurs.

Il va donc en résulter un « effet de levier »de l’immobilier sur le foncier : une faiblehausse (ou une faible baisse) des prix desortie du quartier vont entraîner une hausse(ou une baisse) plus forte du prix du fon-cier ou, plus exactement, des valeurs fon-cières acceptables par l’acquéreur.Normalement, l’élévation des valeursimmobilières a donc pour effet de rendrepossible des opérations en tissu existantqui n’auraient pas pu être montées avec

des prix de sortie plus bas. La hausse del’immobilier favorise le renouvellementurbain si on ne l’entrave pas par ailleurs.

Le prix en périphérieEn périphérie, la mécanique n’est pas lamême qu’en ville, pour deux raisons :d’une part, les valeurs d’usage du foncier ysont pratiquement inexistantes. La valeurdes terrains bruts non aménagés est presqueexclusivement spéculative, fondée sur lacroyance des propriétaires que la conser-vation de leur bien sur plusieurs annéeslui fera prendre de la valeur. Cette croyancerepose sur la connaissance de transactionsavantageuses qui ont eu lieu dans les envi-rons au cours de la période précédente.La valeur des terrains bruts dépend doncessentiellement du laxisme ou de la fermetédes politiques foncières locales mais aussi desoutils juridiques qui sont mis à leur disposi-tion. Par ailleurs, en périphérie urbaine, sil’espace est abondant, en revanche les droitsà bâtir disponibles sur le marché ne le sontpas : ils sont la vraie matière première del’immobilier, un même terrain pouvant don-ner lieu à la délivrance d’une quantité extrê-mement variable de droits à bâtir. D’où proviennent ces droits à bâtir ?D’abord, bien sûr, d’une décision politi-que qui se traduit par l’adoption d’un cer-

tain droit des sols, mais aussi par la mise enœuvre de travaux d’aménagement dont lecoût sera financé pour partie grâce à la dif-férence entre le prix d’acquisition du terrainbrut et le prix de vente du droit à bâtir, etpour le reste avec de l’argent public.Que ce soit sur la formation de la valeur des

terrains bruts à aménager, sur l’organisationdes opérations d’aménagement ou sur levolume et la localisation des droits à bâtirqui, pour finir, seront mis sur le marché enpériphérie de nos villes, les politiques fon-cières publiques sont donc déterminantes.L’augmentation des prix du foncier apparaît

En périphérie, la valeur du bien dépend également de l'idée que s'en fait son propriétaire.

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Paroles

Que pensez-vous de la crise foncière actuelle ?Il n’existe pas, en France, de problème de disponibilitéfoncière : nous disposons encore d'espaces très impor-tants. Pour autant, nous sommes confrontés à une crise,liée à une hausse très importante du prix du foncierdans de nombreuses zones, largement due à un « brouil-lage » de l'affectation des sols. Le prix des terres agrico-les connaît une étonnante envolée dans un contexteagricole pourtant morose. Dans certaines régions, lesurbains achètent plus de terres agricoles que les agricul-teurs, et à des prix 1,8 fois supérieurs. Leur motivationest difficile à synthétiser : volonté de disposer de plus

d’espace, retour à la nature – avecde l’élevage de chevaux ou del'agriculture de loisirs –, anticipa-tions spéculatives sur des terrainspouvant changer de destina-

tion… Cette dernière hypothèsese vérifie dans de nombreuses péri-

phéries urbaines où jusqu'àparfois 20 % des terresagricoles sont en frichedans l'attente de deve-nir constructibles. Àl’origine de ce phéno-mène, on constatel'inorganisation glo-bale des politiques

foncières, au-delà des périmètres de planification pure-ment urbaine ! Or la désorganisation crée la pénurie, laflambée des prix et suscite les conflits d'usage.

Trouvez-vous utile la création desEPFL au niveau intercommunal ?Si les EPFL peuvent devenir des lieux de définition de lastratégie foncière, ou plus globalement de la stratégied'aménagement de l'espace, pourquoi pas ? Mais si l'onimagine régler un problème stratégique en créant unnouvel outil, on se trompe cruellement d'enjeu. Celadit, les EPFL devraient donner aux collectivités desmoyens, tant pour procéder à l'analyse des situations etdes besoins, que pour maîtriser les moyens financiersde l'action. Les EPFL sont en effet la seule solution pourconstituer – via la fiscalité prélevée sur les espaces urbainsautant que ruraux, d'ailleurs –, les ressources nécessairespour appuyer les politiques foncières.

Les SAFER peuvent-elles aider les communautés à mieux anticiperleur stratégie foncière ?Dans des situations où la reconstruction de la ville sur laville s'avère démesurément coûteuse – pour la réalisa-tion des grands ouvrages, par exemple –, les collectivitéstendent à vouloir gagner sur les espaces agricoles, consi-dérés comme vierges. Le rôle des SAFER est alors d'at-tirer l'attention des décideurs sur le rythme très élevé« d’artificialisation » d’espaces naturels qui, à raison

de 60 000 hectares par an, est le double de celui de l'Allemagne à taux de croissance égal. Nous apportons desconseils aux collectivités afin qu’elles mobilisent le fon-cier agricole sans perturber l'activité des agriculteurs, etnous pouvons agir à leur profit et constituer des réservesfoncières en organisant le maintien des exploitations, lacompensation des emprises, le réaménagement du par-cellaire agricole, etc. À travers nos interventions, nouscontribuons à la préservation de l’environnement, ducadre de vie, mais également de l'activité agricole dont ledynamisme est indispensable à l'économie des espacesruraux et périurbains.

Quels messages adresseriez-vous aux élus ?Mon message tient en deux mots : anticipons ensem-ble ! Bien gérés, nos espaces permettent largement derépondre à l'ensemble des demandes : nous ne sommespas le Japon ! Nous pouvons répartir de façon équili-brée l'ensemble des activités sur le territoire – agricul-ture, logements, infrastructures – tout en consommantmoins de foncier, à condition de positionner intelligem-ment les besoins sur le terrain, de prévoir à l'avance uneaffectation des espaces, tant urbains que ruraux, et derespecter ensuite sur le moyen et long termes les choix quiauront été faits. La qualité des paysages, à préserver ou àcréer, peut être une bonne clé d'entrée pour mettre enplace des projets de territoire… dont les générations quinous succéderont nous seront reconnaissantes. P. S.

« La crise foncière est due à un “brouillage” de l’affectation des sols »

Antoine de Boismenu > Directeur de la Fédération nationale des sociétésd’aménagement foncier et d’établissement rural (FNSAFER)

Suite de la page 9

La valeur du foncier n’estpas strictementproportionnelle au prix de sortiede l’immobilier ”

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Foncier

Intercommunalités • ADCF • N°100-avril 2006 11

alors comme la résultante d’un double proces-sus : d’une part, un accroissement des volumesfinanciers qui nourrissent la demande immo-bilière et, d’autre part, une insuffisante pro-duction de nouveaux droits à bâtir.

Trop d’argent pour l’immobilier

Depuis six ans, nous assistons à un affluxsans précédent de capitaux qui cherchent às’investir dans l’immobilier. Certains fac-teurs sont d’ordre international, d’autressont propres à la France.Le boom de l’immobilier est tout d’abordlargement international. À la base, les excé-dants monétaires sans précédent avec lesÉtats-Unis ont provoqué les taux d’inté-rêt bas que nous avons connu pendanttoute une période, et amené les banquesà « chercher des emprunteurs » : l’immo-bilier s’achetant à crédit, chaque acqué-reur, avec le même revenu et les mêmesremboursements, a vu augmenter de 40 %ses capacités d’acquisition.Il existe aussi des facteurs propres à laFrance, et en tout premier lieu, le soucides Français d’investir de façon sécuri-sée. Entre la crainte de voir leur retraiteremise en cause et la perte de confiancerelative dans la Bourse (après les expé-riences du Tunnel sous la Manche,d’Eurodisney ou de France Télécom),l’immobilier représente plus que jamaisune valeur refuge. L’arrivée sur le mar-ché des « jeunes retraités » disposant,pour certains, de disponibilités finan-cières importantes, accentue le « retourà la pierre » des investissements desFrançais. Troisième facteur : les mesuresgouvernementales destinées à inciter lesménages à investir encore plus dansl’immobilier (prêts à taux zéro, défis-calisations diverses) n’ont fait qu’am-plifier le dysfonctionnement du mar-ché de l’immobilier : faute de s’attaquersérieusement aux blocages qui entra-vaient l’augmentation de la productionimmobilière, elles ont seulement contri-bué à doper la hausse de l’immobilier.

Pas assez de droits à bâtirAssez paradoxalement, la crise actuelle tient,pour partie, à cet afflux d’argent qui s’esttraduit par une hausse sans précédent desprix immobiliers sans augmentation corré-lative du rythme des constructions2. L’augmentation du rythme de la construc-tion dépend du rythme des droits à bâtirmis sur le marché. Or, deux facteurs sesont conjugués, à la fin des années 1990,pour bloquer les mécanismes de produc-tion de nouveaux droits à bâtir. Le pre-mier avait pour origine un dysfonctionne-ment conjoncturel assez classique : lamontée de la bulle spéculative de la fin desannées 80 avait entraîné, au moins danscertaines régions, une surproduction deterrains aménagés. À l’éclatement de la

bulle, dans les années 90, ces terrains n’ontplus trouvé preneur : ZAC vides, coût élevédu logement social augmenté des chargesfoncières subventionnées, structures d’amé-nagement fonctionnant au ralenti… Lesecond facteur, qui commençait à peine àmontrer ses effets, était plutôt de naturepolitique : en raison même du discours del’administration contre l’étalement urbain– suite des débats sur la Loi SRU en 2000–, les opérations d’extension urbainen’avaient plus le vent en poupe. Impossible,pour un maire de première couronne, dedéfendre dans ce contexte « anti-béton », la moindre opération d’aménagement. Enparticulier, contre l’avis de ses citoyens -électeurs.La lutte contre l’étalement urbain fut endéfinitive la cause principale d’une extensiongéographique beaucoup plus importante,qui s’est traduite au-delà des frontières urbai-nes, par la multiplication de petits lotisse-ments dispersés.

Un dysfonctionnement institutionnel

La solution à la « crise de l’immobilier »réside donc beaucoup plus dans la mobili-sation du foncier brut, son aménagement,et la mise sur le marché de nouveaux droitsà bâtir que dans l’injection de moyensfinanciers supplémentaires dans l’immo-bilier. Mais la mise en œuvre d’un telschéma se heurte à un dysfonctionnementinstitutionnel propre à la France des36 000 communes. La production de nou-veaux droits à bâtir relève du pouvoir d’ur-banisme, lequel s’exerce, de fait, de manièrelargement autonome au niveau de la com-mune. Or le marché des droits à bâtir,comme le marché des logements, se noue,lui, à l’échelle de l’agglomération et mêmedu bassin d’habitat, et nullement à l’échellecommunale. D’ailleurs, aucun électeur ne songerait àreprocher à son maire le prix des logements,alors même que ce sont les actions cumu-lées des élus du bassin d’habitat qui en sontla cause. Tout ce qui contribuera à reporter, versl’échelle de l’agglomération large, l’orga-nisation d’une politique de productionmassive de droits à bâtir (à ne pas confon-dre avec une multiplication des surfacesde terrains constructibles) pour la cou-pler avec la politique du logement, serabénéfique à la résolution de la criseimmobilière.

Maremne Adour Côte-SudPermettre aux jeunes de rester sur le territoire

Philippe Schmit

TIRÉE PAR L’ACTIVITÉ TOURISTIQUE et l’at-tractivité du littoral, la côte landaiseconnaît aujourd’hui une hausse remar-quable des prix de l’immobilier. Pour lacommunauté de communes de MaremneAdour Côte-Sud, les prix sont désormaiscomparables à ceux rencontrés dans lesgrandes agglomérations. « Nous sommesconfrontés à un véritable enjeu : mainte-nir une offre immobilière accessible auxjeunes de nos communes rurales. Nousdevons, d’une part,leur permettre d’ac-céder à la propriétéet, d’autre part,multiplier les opé-rations de loge-ments sociaux. Les23 communes de la communautéentendent relever cedéfi et participer à l’effort général en dou-blant la part du logement social établieaujourd’hui à 5 % du parc locatif sur l’en-semble de la communauté », indiqueMichel Castets, président de la commu-nauté de communes Maremne AdourCôte-Sud.Tous les outils sont mobilisés. DeuxOPAH communautaires en cours visentla réhabilitation de 500 logements privésà loyers conventionnés. Le PLH récem-ment approuvé fixe un objectif deconstruction de 165 logements sociauxpar an, en encourageant dans les centresbourgs une densification du bâti respec-tueuse du paysage architectural. Les PLUen révision sur la quasi totalité des com-munes traduiront ce souci d’économiedu foncier, d’autant plus nécessaire que

les espaces protégés sont étendus (Espa-ces Naturels Sensibles, propriétés duConservatoire du Littoral, Natura 2000).Le SCOT en cours prônera égalementcet objectif de densification, y comprisdans les petits bourgs avec coupures d’ur-banisation.Le recensement des espaces urbanisablesou constructibles, opéré à l’échelle com-munautaire, permet de les juger suffisants(environ 50 hectares) pour répondre àcourt terme aux objectifs fixés dans le

cadre du PLH. Cetteévaluation est d’autantplus fondée que, par ail-leurs, le foncier maîtriséet à vocation économi-que semble aujourd’huibien dimensionné et quele rythme de construc-tion de résidences secon-daires baisse nettement.

« Les enjeux fonciers restent pour autantcruciaux, et nous nous devons d’être dansune logique d’anticipation maximale »,indique Michel Castets. « C’est dans cetesprit que nous adhérons, avec cinq autrescommunautés, à l’EP Landes Foncier ini-tié par le conseil général des Landes. L’en-jeu est important sur notre territoire dontla population croît de 2,5 % par an etest multipliée par six durant la périodeestivale. C’est une question d’équilibredans tous les aspects de notre développe-ment ». Le service urbanisme et foncierde la communauté sera, d’ailleurs, pro-chainement étoffé en vue d’apporter auxpetites communes tout le conseil qu’ellessollicitent (notamment pour leurs docu-ments d’urbanisme) pour atteindre cesobjectifs partagés.

La flambée des prix de l’immobilier rend impossiblele maintien des jeunes sur les communes des côteslandaises. Réflexion à l’échelle communautaire pourcréer une offre de logements diversifiée.

Notre enjeuprincipal :maintenir uneoffre immobilièreaccessible auxjeunes de noscommunesrurales ”

1 Chaque année, au moins une centaine de terrainssont vendus à Paris. Il ne s’agit évidemment pas deterrains nus, mais d’immeubles achetés pour êtredémolis, à un prix qui ne se justifie donc que par lavaleur du terrain qui sera dégagé, déduction faitedes coûts de libération et de démolition.

2 Une seconde cause de blocage est, dans une moin-dre mesure, le manque de main d’œuvre disposée àtravailler dans les métiers du BTP qui continuentd’être considérés comme pénibles et peu valorisants.

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offre la faculté à la commune « dedéléguer tout ou partie de ses compé-tences » qu’elle détient en matière deDPU, lorsqu’elle fait partie d’ungroupement « y ayant vocation », etavec l’accord de ce dernier. Passonssur le fait que le Code ne donneaucune précision sur la « vocation »correspondante. Ce qui est certain,c’est que cette formule est très souple,pouvant aller de la délégation de lacompétence, en tant que telle, à lasimple délégation de son exerciceaccordée soit sur certaines zones ter-ritoriales, soit au coup par coup, àl’occasion de l’aliénation d’un bien.Il faut également mentionner leDPU particulier, reconnu par l’ar-ticle 64 de la loi SRU au profit descommunautés, en vue de la mise enœuvre de la politique communau-taire d’équilibre social de l’habitat. Ilne s’exerce que dans les périmètresfixés par le conseil de communauté,« après délibération concordante de

Jean-Philippe BrouantMaître de conférences à l’Université Panthéon-Sorbonne, GRIDAUH

LES COMMUNAUTÉS DISPOSENT demultiples outils pour afficher leurstratégie foncière : ainsi, l’écrituredu volet foncier du contrat d’ag-glomération imposé par la loi Voynet constitue une étape impor-tante de définition d’une politiqueintercommunale dans ce domaine,de même que l’écriture du PLH1

qui, comme le prévoit l’articleL. 302-1 du Code de la construc-tion et de l’habitation, doit indi-quer les moyens fonciers qui serontmis en œuvre. Mais le passage à l’opérationnelpeut présenter un peu plus de dif-ficultés. En effet, les communautésne disposent pas à proprement par-ler d’une compétence « politiquefoncière » mais ont, virtuellement,à leur disposition une série d’ins-truments dont la clé de voûte, lePLU2, n’est pas toujours entre leurs

mains. Les choses sont, bien évi-demment, plus simples lorsqu’unecommunauté est titulaire de lacompétence PLU : elle pourra, àtravers cet instrument, utiliser lesmécanismes des différentes servi-tudes mentionnées à l’articleL. 123-2 du Code de l’urbanisme(périmètre d’attente, emplacementsréservés pour le logement…). Surtout, la détention de la com-pétence PLU permet à une com-munauté d’être compétente de« plein droit » en matière de DPU3,et de se substituer à ses commu-nes membres pour l’exercice decette compétence. Encore faut-il préciser que la com-munauté peut être contrainte d’enlimiter l’exercice à la seule pour-suite d’objectifs ou sur des zonesdéclarés d’intérêt communautaire.En dehors de cette compétence deplein droit, l’article L. 211-2 pre-mier alinéa du Code de l’urbanisme

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ESSi les communautés ne sont pas dotéesà proprement parler d’une compétence « politique foncière », elles disposent en revanche de multiples outils pour afficher leurstratégie foncière.

La détention de la compétence PLU permet à une communauté d’être compétente de « plein droit » en matière de DPU, et de se substituer à ses communes membres.

Les outils fonciers des communautés

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Foncier

Paroles

Le dispositif de planification et de programmation est-ilsatisfaisant ?A mon sens, on dispose actuellement d’unbon dispositif : le SCOT qui fixe les objectifsstratégiques pour l’agglomération, le PLH quiprécise la politique de l’habitat et sert de cadreau financement du logement, le volet foncierdu contrat d’agglomération qui devrait logique-ment dégager les moyens d’une politique fon-cière intercommunale soutenue par la région,et le PLU qui précise l’affectation des sols. Leproblème est plutôt de savoir ce que l’on fait dece dispositif. Existe-t-il une véritable volontépolitique communautaire ? Si c’est le cas, lesinstruments existent pour la traduire, sinon,rien n’est plus facile que de vider de contenuréel tous les outils mentionnés ci-dessus.

Les échelles d’élaboration deces différents documents vousparaissent-elle pertinentes ?Là réside sans doute le véritable problème.Dans un schéma idéal, une communautéfait son SCOT, adopte son PLH et gère lefinancement de l’habitat que lui délèguel’État, signe son contrat d’agglomération…La difficulté vient de ce que, très souvent,des périmètres différents ont été définis pourchacun de ces instruments : SCOT, PLH etcontrat d’agglomération ne sont pas régisdirectement par la communauté mais pardes syndicats mixtes avec des périmètres par-fois variables. Cette hétérogénéité des péri-mètres, jointe au fait que tout ce processuss’étale dans le temps, heurte la logique etn’est pas obligatoirement très pertinente surle plan opérationnel.

Pensez-vous que les commu-nautés sont juridiquementarmées pour participer à la mobilisation du foncier ?

Les communautés permettentde mutualiser les moyensdes communes membresalors que les cibles fonciè-res sont souvent concen-

trées sur un petit nombrede communes qui, faute

d e d i s p o s e rd’une surfacef inanc i è re

suffisante,d o i v e n tl a i s s e rjouer lemarché.

La communauté pourra faire ce que la com-mune n’a pas les moyens de réaliser. Elleconstitue un niveau d’administration suffi-samment éloigné de l’administré-proprié-taire. Ce que je vais dire n’est sans doute paspolitiquement correct, mais il est certainqu’une action foncière un peu énergique n’estpas obligatoirement très populaire : il fautsavoir exproprier, préempter, contrarier lemarché, heurter des propriétaires qui sontégalement des électeurs et qui, de plus, pro-fitant de l’air du temps, vont se draper dansla toge du défenseur du cadre de vie, etc. Lacommunauté est donc plus à l’aise que lacommune pour vaincre ce genre de résistance,d’autant plus que le droit positif lui permet dedisposer de la plupart des outils nécessaires.Reste le problème du PLU qui conditionnetoute politique foncière et qui reste généra-lement de la compétence de la commune :l’harmonie doit donc régner au sein du cou-ple communauté-commune.

La notion de « stratégie fon-cière » a-t-elle évolué depuisles années 80 ? Une des évolutions les plus évidentes tientà l’effacement de l’État. Dans les années1977 à 1981, l’État avait encore une straté-gie foncière qui consistait à inciter les com-munes à se regrouper pour mettre en œuvredes politiques foncières d’accompagnementdes schémas directeurs. A cet effet, il avaitdéveloppé une politique contractuelle assezambitieuse (les programmes d’action fon-cière) qui a poussé les communes à seregrouper pour pouvoir signer avec lui, etainsi bénéficier des aides financières qui yétaient attachées. Depuis, l’État s’est effacédu jeu sans avoir été remplacé, si ce n’estpar les établissements publics fonciers qui nesemblent pas, toutefois, avoir joué tout lerôle que l’on attendait d’eux. Cette jachère institutionnelle tient sansdoute aux spécificités des politiques fonciè-res. L’une de leurs cibles est de constituerdes acquisitions d’anticipation, seul moyende contenir la flambée des prix des terrains.Or, les résultats d’une politique de réservesfoncières à long terme ne sont pas immé-diatement mesurables. Politiquement, ilssont peu « rentables ». Mais si ces réservesavaient été constituées il y a 20 ou 25 ans,comme cela était prôné par tous, les pro-blèmes actuels liés à la pénurie du foncierseraient moins douloureux.

Propos recueillis par Philippe Schmit

« Le dispositif existe… mais existe-t-il une véritable volonté politique communautaire ? »

Yves Jégouzo >

Intercommunalités • ADCF • N°100-avril 2006 13

la ou des communes concernées ».Limité dans ses finalités et sonmode d’exercice, ce DPU susciteune interrogation : sur le périmè-tre défini, est-on en présence d’untransfert de DPU au profit de lacommunauté, ou la communeconserve-t-elle encore son DPUpour d’autres finalités ou objets que« l’équilibre social de l’habitat » ?Qu’elles soient ou non titulairesde la compétence PLU, les com-munautés peuvent, à travers lacompétence ZAC4, intervenir dansle domaine foncier. Certes, la déci-sion de création de la ZAC n’ou-vre pas en tant que tel de droit depréemption au profit de l’autoritéadministrative, mais elle peutdéclencher des instruments effi-caces (droit de délaissement,expropriation…). Enfin, la détention cumulée descompétences SCOT5, ZAC et PLHouvre la faculté aux communautés

de demander au préfet l’autorisationde création d’un établissement publicfoncier local (art. L. 324-2 c. urb.). Il faut toutefois rappeler que, surleur territoire, les communautésdoivent composer avec d’autresacteurs institutionnels qui dispo-sent d’un titre à agir dans ledomaine foncier : l’État toutd’abord, qui, grâce à la procédureZAD6, a le pouvoir de paralyser ledroit de préemption urbain, ledépartement enfin, puisqu’il béné-ficie, à la suite de la loi du23 février 2005 relative au déve-loppement des territoires ruraux,d’un droit de préemption pour laprotection des espaces agricoles etnaturels périurbains.

1. Plan local de l’habitat2. Plan local d’urbanisme3. Droit de préemption urbain4. Zone d’aménagement concerté5. Schéma de cohérence territoriale6. Zone d’aménagement différé

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Conseiller d’État, directeur scientifique de la revue AJDApassés à la loupe

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Béziers-Méditerranée

Les missions d’un servicefoncier communautairePhilippe Schmit

Le contrat d’agglomération de BéziersMéditerranée comportait un volet foncierqu’il convenait d’engager. Telle est, depuisoctobre 2004, la mission du service fonciercommunautaire. Bien qu’une seule per-sonne y soit aujourd’hui affectée, son inter-vention revêt un caractère stratégique pourla communauté d’agglomération, particu-lièrement dans le domaine de l’habitat, laréserve de foncier à destination économi-que étant actuellement jugée suffisante.Le service pilote la lourde étude de straté-gie foncière mentionnée dans le contrat.Réalisée avec l’appui d’un prestataire exté-rieur, elle vise, d’une part, à s’assurer que lesprojets communautaires et ceux des com-

munes membres sont bien anticipés enmatière foncière (sur le moyen terme) et,d’autre part, à faciliter la prise en considé-ration des objectifs bien territorialisés duPLH communautaire dans les documentsd’urbanisme que nombre de communesont récemment mis en révision.

Forte coopération locale Au-delà de la flambée du coût du foncieret des mécanismes de spéculation qu’ilmet largement en exergue (en étudiantfinement la localisation des transactions),le diagnostic de l’étude souligne la for-midable consommation foncière des cin-quante dernières années (quatre fois plusd’espaces urbanisés pour une population

qui n’a été multipliée que par 1,2). BéziersMéditerranée entend donc privilégier ladensification urbaine et multiplie, enusant de la délégation de l’exercice duDPU reçue des communes, les interven-tions foncières dans le tissu urbain consti-tué. Huit préemptions, motivées par lamise en œuvre du PLH, ont été réaliséesen moins de six mois. Ses relations trèsétroites avec les opérateurs lui permettentde limiter la durée de portage à six mois.« Ces interventions visent à distiller dansles centres anciens des petits programmesde logements sociaux. Il faut produire dulogement social là où il ne s’était jamaisfait », indique Christian Vincendet, chefdu service foncier. « Il est important de

travailler en très étroite coopération avecles communes membres qui restent compétentes en matière d’urbanisme etde participer aux réunions d’études desDIA* qui restent transmises en mairies. »Ces travaux conduits par le service fonciernourriront par ailleurs avec pertinence lestravaux qui s’engagent dans le cadre duSCOT. La gestion économe et efficace dufoncier y sera sans aucun doute l’un desaxes centraux de la réflexion entre les communautés impliquées.

Agglomération deBéziers Méditerranée /Consommation d’espace

Paroles

Quel regard portez-voussur la pénurie foncière ?Je n’aime pas parler de pénurie. Avec seu-lement 8 % du territoire national urba-nisé (soit deux fois moins que dans denombreux pays européens), nous ne pou-vons pas considérer que nous manquonsde terrains. Il existe, en revanche, unesérieuse difficulté foncière dont nous som-mes collectivement responsables sansqu’elle puisse être imputée à une quelcon-que conjoncture internationale : le terrainconstructible est rendu rare, donc cher.Mise en avant dans le cadre de la loiSRU, la reconstruction de la ville surelle-même faisait pourtant consensus etdevait se traduire par une densificationdes tissus urbains. Force est de consta-ter qu’aujourd’hui l’étalement urbain sepoursuit – en entraînant dans l’immé-

diat et à terme des investisse-ments lourds pour les col-

lectivités – et qu’unemajorité d’élus reste pro-fondément réticente àengager de véritables pro-grammes d’urbanisme. Ils

sont souvent tiraillés entreles demandes de logement

exprimées individuellement auquotidien et l’expression col-

lective des citoyens qui

veulent davantage d’équipements etmoins d’impôts, et souhaitent une forteproportion d’espaces verts, voire « uneville sans voisin »… Ce syndrome« Nimby » oblige le maire bâtisseur àcommuniquer largement et à faire preuved’une subtile pédagogie. N’oublions pasque le logement le moins cher – celuisitué en grande périphérie – est aussicelui qui coûte le plus à la collectivité.

L’augmentation de la chargefoncière et les obligations enmatière de logement socialpeuvent-ils compromettre la réalisation de nouveauxprogrammes ?Le terme « compromettre » sembleexcessif. L’activité des promoteurs estencore dans une phase de croissance.Pour autant, il est évident que le pro-blème est financier. Les exigences enmatière de logements sociaux, avecnotamment la recherche de mixitésociale – préoccupation à laquelle noussouscrivons –, ajoutées aux contraintesenvironnementales (HQE…) et archi-tecturales décidées localement, ont uncoût qui est de facto reporté sur le clientfinal. Celui-ci supporte tous les surcoûts,sans qu’il soit possible de direaujourd’hui si les limites de sa solvabilité

seront prochainement atteintes. Pourl’éviter, il est impératif de contenir lahausse du prix de l’immobilier : l’Étatet les collectivités territoriales doivent,d’une part, compenser financièrementcet effort social et environnemental quiprofite à tous, d’autre part, accroître lessurfaces constructibles. À ce titre, le voletfoncier du récent Engagement Natio-nal pour le Logement (ENL) me semblealler dans le bon sens.Il convient par ailleurs de coupler mixitésociale avec mixité de modes d’occupa-tion. Locataires et propriétaires équili-brent le fonctionnement des program-mes sur le long terme. Je me félicite à cetitre des récentes modifications législa-tives qui intègrent l’accession sociale dansle décompte des logements sociaux.

Pensez-vous qu’il seraitutile de mieux associer lespromoteurs à l’élaborationdes SCOT et PLH ?Je suis satisfait des réflexions qui s’en-gagent à l’échelle intercommunale et jerappelle aux présidents de communau-tés qui élaborent leur PLH que la Fédé-ration des Promoteurs Constructeursbénéficie d’antennes régionales, départe-mentales, voire d’agglomération, facili-tant cette nécessaire concertation. Le

temps où le promoteur restait à l’écartdes partenariats suscités par les collecti-vités locales est depuis longtemps révolu.Plus d’un demi million de personnespar an franchissent la porte de nosbureaux de vente et nombre de nosclients remplissent les questionnaires desatisfaction. Je suis alors bien certain quecela donne aux promoteurs des avis per-tinents, qui peuvent utilement nourrirles réflexions locales.

Des communautéss’engagent dans la créationd’EPFL. Quel jugementportez-vous sur cesinitiatives ? Je suis favorable à toute initiative qui apour but de mobiliser le foncier. Un por-tage par un EPFL, même sur le courtterme, peut être pertinent. Il est trop tôtpour juger de la réussite de ces initiatives,mais il nous faut préparer les grandsmouvements de population de demain.En 2030, il y aura 25 % de résidencesprincipales en plus sur l’ensemble denotre territoire. Les pressions serontencore très fortes, notamment sur le lit-toral (pour les seniors), les cœurs de vil-les (pour les jeunes) et elles seront exacer-bées en Ile-de-France et en PACA.

Propos recueillis par Philippe Schmit

« Un portage par un EPFL, même sur le court terme, peut être pertinent »

Marc Pigeon > Président de la Fédération des Promoteurs Constructeurs

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* DIA : déclaration d’intention d’aliéner.

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L’EPFL : un outil foncier à (re)découvrir…Institué en complément de l’établissement public foncier d’État par la loi d’orientation pour la ville (1991),elle-même complétée par la loi SRU (de 2000), l’établissement public foncier local (EPFL) revient sur ledevant de la scène après une longue période de latence.

Eric Weisman-MorelPLC-DEMETER

L’établissement public foncier local n’avait jusqu’alors pasréellement convaincu. Pourtant ses atouts sont réels : crééprincipalement à l’initiative des intercommunalités, l’EPFLest un outil souple et réactif d’acquisition et de portage, quivient en appui des politiques de réserves foncières ou d’amé-nagement. Il peut exercer les droits de préemption et agirpar voie d’expropriation. Son financement peut être assurépar une recette spécifique, la taxe spéciale d’équipement.

La constitution d’un EPFL Les intercommunalités dotées des compétences en matièrede SCOT, de ZAC et de PLH peuvent délibérer en vue dela création d’un EPFL (art. L. 324-2). Des communesnon membres d’un groupement intercommunal peuventégalement adhérer à l’EPFL. Le département et la régionpeuvent participer à la création de l’EPFL ou y adhérer.Enfin, les organismes HLM et les personnes qualifiées(agences d’urbanisme, chambres consulaires…) peuvent

être associés ou consultés en tant que partenaires exté-rieurs. Les statuts préciseront, le cas échéant, les modali-tés de cette association.Le périmètre peut comprendre une ou plusieurs inter-communalités et des communes non membres d’un grou-pement ; il peut être continu ou discontinu. L’EPFL n’in-tervient que sur le territoire des communautés et descommunes ayant délibéré favorablement, et ce, même si ledépartement ou la région adhèrent à l’EPFL. Il peut excep-tionnellement intervenir hors de ce territoire pour desacquisitions nécessaires à des opérations menées à l’intérieurdu périmètre.Chaque membre de l’EPFL est représenté au sein de l’As-semblée Générale, qui élit le conseil d’administration enson sein et vote la TSE, taxe spéciale d’équipement (art.L. 324-3 et 4). Il appartient à l’AG ou aux statuts de pré-ciser les règles de composition et de fonctionnement duconseil d’administration, qui fixe le programme plurian-nuel d’intervention (le PPI), vote l’état prévisionnel desrecettes et dépenses et nomme le directeur (art. L. 324-5).

Enfin, les recettes de l’EPFL sont principalement consti-tuées de la taxe spéciale d’équipement, si elle a été instituée,des contributions accordées par les collectivités et des pro-duits de ses interventions (art. L. 324-8).

Le fonctionnementLes compétences de l’EPFL sont exclusivement fonciè-res : achat, portage, gestion, remise en état, dépollution…jusqu’à la revente, et concernent tous types de fonciers :bâtis ou non, agricoles, friches… Il réalise les études etles travaux inhérents à ces actions (art. L. 324-1). Sonaction se situe donc entre celle d’organismes de planifica-tion qui élaborent les documents de programmation etles opérateurs qui viabilisent le foncier. Il agit pour soncompte ou celui de ses membres, et met son savoir-faire etses moyens d’intervention à la disposition des intercom-munalités et des collectivités, sans se substituer à elles.Aucune opération de l’EPFL ne peut être réalisée sansl’avis favorable de la commune sur le territoire de laquellel’opération est prévue (art. L. 324-1).

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Foncier

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Ses activités se situent principalement dansle cadre d’un programme pluri-annuel d’in-terventions foncières (PPI), élaboré en col-laboration avec les groupements, les collecti-vités et les acteurs de l’aménagement. Le PPIdéfinit les orientations de l’établissement, lesméthodes et les moyens de l’EPFL. Son éla-boration permet de réaliser à la fois un travailde prospective concerté et une hiérarchisa-tion des priorités.

Chaque membre peut également solliciter l’in-tervention de l’EPFL sur une opération particu-lière. Si le conseil d’administration donne sonaccord, une convention opérationnelle précisenotamment les conditions d’acquisition, deportage et de revente entre l’EPFL et la collec-tivité ou la communauté.Si l’on ne dénombre aujourd’hui que sept EPFL(Puy de Dôme, Argenteuil-Bezons, Guyane,Réunion, Région grenobloise, collectivités dela Cote d’Or, Haute-Savoie), les projets de créa-tion sont de plus en plus nombreux : agglomé-rations de Perpignan, de Toulouse, d’Amiens,régions Ile-de-France et Bretagne…

L’EPFL a une double mission : conseil et assistance, et négociation foncière.

La TSE est une recette propre et exclusive pour les EPFL. Elle est une possibilité de ressources offerteaux EPFL et ne constitue pas une obligation. Elle permet d’asseoir sa solidité financière et la pérennité de son action. Le produit global de cette taxe est arrêté chaque annéepar l’Assemblée générale de l’EPFLdans la limite de 20 euros par habitantrésidant sur le périmètre d’intervention(CGI art. 1607 bis). Son montant estréparti entre les personnes morales et physiques assujetties aux taxeslocales, proportionnellement au produit de l’année n-1 de chacune des taxes sur l’ensemble des communes et des communautésdu périmètre. Une fois déterminé lemontant par taxe, le taux effectif estcalculé sur l’assiette de chacuned’entre elles. À titre d’illustration, en Haute-Savoie ou dans le Puy-de-Dôme, elle représente moins de5 euros en moyenne par habitant.

La taxe spéciale d’équipement

Philippe Schmit

CONTRAINTES PAR LEUR RELIEF, sou-mises à la double influence – Genève etla dynamique du sillon alpin – les com-munautés de Haute-Savoie ont sou-haité créer un EPFL, afin de se doterd’outils susceptibles de résorber unecrise du logement particulièrement exa-cerbée sur cette zone frontalière. Aprèsdeux ans de travail préparatoireconduits sous l’impulsion de Jean-Claude Martin, président de la com-munauté de communes du Pays d’Alby,l’EPFL de Haute-Savoie est né endécembre 2003. Dix communautés decommunes, la communauté d’agglo-mération Annemassienne et une ving-taine de communes non intégrées dansle groupement en sont désormais mem-bres. L’EPFL dépassant le seuil des200 000 habitants ouvrant droit à laparticipation financière du départe-ment et de la région, ces deux collecti-vités sont également représentées ausein de l’Assemblée générale.« L’EPFL est un outil technique, juri-dique, financier, apte à porter le fon-

cier, à lever l’impôt, ce que ne peuventfaire les SAFER. Même s’il ne cherchepas à orienter la politique des collectivi-tés locales, il peut s’avérer particulière-ment pertinent, surtout lorsqu’un véri-table projet fédère l’intercommunalité »,souligne son président Jean-ClaudeMartin. Composé de deux personnes,l’EPLF a une double mission : le conseilet l’assistance en stratégie foncière descollectivités membres, et une missionopérationnelle portant sur la négocia-tion foncière, l’acquisition, la gestiondes biens jusqu’à leur intégration dans lepatrimoine de la collectivité ayantdemandé le portage. Douze millionsd’euros d’acquisition ont, déjà, été déci-dés par le conseil d’administration, dont80 % à destination de l’habitat (répartissur 23 sites). L’habitat constitue, en effet,l’un des quatre domaines d’interven-tions retenus par l’EPFL parmi lesquelsfigurent également les équipementspublics, le développement économique(activités industrielles et agricoles), laprotection des espaces naturels. En fonction de la destination finale des

terrains, la durée du portage varie de 4 à8 ans à un coût d’environ 3 % par an. Les politiques sont définies par chaquecommunauté à travers son programmed’action foncière (PAF). Ces élémentssont ensuite rassemblés au sein du pro-gramme pluriannuel d’intervention del’établissement (PPI sur cinq ans) quihiérarchise globalement les interventions,tout en respectant les choix prioritaires dechacun des membres.Bien que l’EPFL se soit engagé, dans sacharte, à garantir à chacun de ses mem-bres un minimum d’interventions àconcurrence de la fiscalité prélevée surson territoire (montant de la taxe spé-ciale d’équipement perçue), la mutuali-sation est au cœur de la démarche. Lamutualisation financière pour les acqui-sitions (la taxe spéciale d’équipement nereprésentant qu’un tiers de la capacitéd’intervention de l’établissement) et lamutualisation de moyens au travers duhaut niveau d’ingénierie foncière offerteà tous les membres. L’EPFL est laréponse locale à l’enjeu partagé par tous :le foncier.

EPLF de Haute-Savoie :Les missions du service foncier

Créé en 2003 par les communautés de Haute-Savoie, l’EPLF s’avère être unoutil pertinent au service des projets intercommunaux structurants.

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Son action se situedonc entre celled’organismes de planification qui élaborent les documents de programmation et les opérateurs qui viabilisent le foncier ”

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ADCFLe journal

18 N°100-avril 2006 • ADCF • Intercommunalités

NEUF ANS D’ANALYSES, DE DÉBATS, de convictions, de propositions ; neuf ans d’un ren-dez-vous mensuel pour scander et illustrer, en textes et en images, toute l’intercommu-nalité, ses petites et ses grandes avancées, ses initiatives locales et ses grandes évolutionslégislatives, parfois des déceptions… Intercommunalités feuillette ici son album souvenirs :

les « Unes » qui ont frappé les esprits, les évènements marquants pour le mouvement inter-communal et l’ADCF. Une rétrospective qui nous invite à poursuivre l’aventure enremerciant les acteurs et observateurs attentifs de la dynamique intercommunale quicomposent notre lectorat exigeant et fidèle.

Cent numéros d’Intercommunalités ! Votre journal fait peau neuve à l’occasion de cet anniversaire symbolique :un prétexte pour rouvrir les archives du journal et redécouvrir les numéros qui ont marqué son histoire…

Numéro 1 - Avril 1997L’Assemblée des Districts et des Com-

munautés de France abandonne sa lettreassociative pour publier le premier numérod’un mensuel à large diffusion : « Intercom-munalités ». Un pari ! La France comptealors 1 105 communautés de communes et316 districts. Une délégation d’élus del’ADCF rencontre Jean-Pierre Chevène-ment, ministre de l’Intérieur, pour lui pré-senter ses propositions de réforme, mûriesdepuis deux ans.

Numéro 2 – Mai 1997Marie-Christine Bernard-

Gélabert, (Ville de Paris) « Halte à l’inflation fiscale ! La TP inter-

communale, dernière chance avant la TPnationale ? Et non, ce ne sont pas les unesdu numéro 100 mais celles du numéro 2d’Intercommunalités, paru en mai 1997.Décidément, l’ADCF a toujours eu « uneintercommunalité d’avance » comme le pré-cisait son slogan en l’an 2000. Au cours de ces 99 premiers numéros, qui ontcouvert près de neuf ans d’histoire récentede l’intercommunalité, le journal a été letémoin d’une reconfiguration du territoirenational par les communautés. Anticiper les débats, mettre en perspectivepolitique les réformes techniques, fiscalesnotamment, promouvoir de nouvelles “thè-ses” juridiques celle du couple communes –communauté notamment, tel est le rôle

fondamental d’Intercommunalités, indis-pensable journal de la communauté inter-communale. »

Numéro 26 - Juillet-Aout 1999Au lendemain de l’adoption de la loi

« Chevènement », l’ADCF annonce « laNouvelle vague de l’intercommunalité ».Elle se félicite du consensus parlementaireautour du texte. En fait de vague, c’estune déferlante intercommunale qui s’ap-prête à entraîner les eaux calmes du pay-sage institutionnel local.

Numéro 29 - Novembre 1999L’ADCF fête ses dix ans et devient

Assemblée des communautés de France.

Pour l’occasion, la « Une » ne lésine passur la crème pâtissière et les bougies…L’hypothèse d’une réutilisation de ce visuelpour illustrer ce numéro 100 a été écartéed’emblée par la rédaction !

Numéro 31 - Janvier 2000Marc Censi, président de l’ADCF, se féli-

cite de la dynamique du nouvel élan inter-communal, notamment du succès rencontrépar la formule « communautés d’aggloméra-tion ». L’ADCF « troisième génération » pré-sente son nouveau logo et expose ses ambi-tions, sa nouvelle organisation. Elle serevendique comme association de l’« inter-communalité de projet », encourageant lapolitique de contractualisation territoriale.

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L’intercommunalité vue par « Int

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Intercommunalités • ADCF • N°100-avril 2006 19

Numéro 40 - Novembre 2000Intercommunalités change une pre-

mière fois de « look » et opte pour laquadrichromie. Ce premier numéro de lanouvelle formule propose un « jeu deloi » pour décrire le processus réglemen-taire complexe de reconnaissance des« Pays ». Quelques grimaces, beaucoupde sourires…

Numéro 55 - Mars 2002Intercommunalités l’affirme : « I LOVE

INTERCO ». La solution intercommu-nale est adoptée dans de nombreux territoi-res, élus et pouvoirs publics sont séduits,aucune réserve à l’horizon. Autres temps…

Numéro 82 - Novembre 2004Au lendemain de l’adoption de la loi

Libertés et Responsabilités Locales, Inter-communalités relaye les positions de l’ADCFqui mise sur le couple communes-commu-nauté et demande, d’ores et déjà, « unacte III de la décentralisation ». La périodeest aux grincements de dents.

Numéro 92 - Juillet-Aout 2005Jean-Claude Daniel, président

de la communauté de communes du Pays Chaumontais, vice-président de l’ADCF (États généraux des Pays - Lasaison des moissons) : « Les pays ont fait la preuve de leur qualitéd'ensemblier des politiques territoriales... :

Ces six dernières années, le suivi très régu-lier, presque pas à pas, des politiques terri-toriales contractualisées a été l'une des mar-ques de fabrique d'Intercommunalités.Alors que les contrats de projet s'apprêtentà succéder aux contrats de plan, pour l'in-térêt, l'importance et la pérennité des pro-jets de ces territoires, comment pourrait-on accepter que ces nouveaux contrats deprojet État-régions s'exonèrent d'un voletterritorial consistant ? Relisons Intercommunalités pour saisirla portée du travail accompli, la richessedes initiatives... »

Numéro 100 - Avril 2006L’ADCF a franchi en 2004 le cap

de ses quinze ans en proposant une «Charte pour l’avenir des communautés ».La vague consensuelle appartient aupassé. L’âge de raison est parfois celuides escarmouches, plus que jamais celuides convictions.Dans un climat plus hostile, quelle meil-leure arme qu’un journal pour poursui-vre la bataille des idées ? Intercommuna-lités se transforme une seconde fois sansrenier ses racines. Retour aux sources avecun bleu dominant : clin d’œil au bleu ori-ginel de la première maquette, au bleu« ADCF », le bleu de la confiance, celuidu ciel qui se dégage...

Marion Paraillous10

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Le CPER, un CIACT en demi-teinteFinances Politique

AVEC SEULEMENT 8 % du terri-toire national urbanisé, soitdeux fois moins que dans denombreux pays européens, laFrance ne connaît pas, à pro-prement parler, de pénuriefoncière. Pour autant, la criseest réelle, palpable sur l’ensem-ble du territoire. Le déséquili-bre entre l’offre et la demandea diverses origines : insuffi-sante mobilisation des terrains

disponibles, défaut de densi-fication urbaine contrairementaux préconisations de la loiSRU, détournement de des-tination des terres à des finsspéculatives… Résultat, ce quiest rare, ou présenté commetel, devient cher.Entre rapports parlementairesde décryptage des raisons dela crise, et adoption de la loiENL (volet foncier), la volonté

De l’analyse de la crise foncière,ses causes et seseffets, au rappel desoutils de politiquesfoncières quiexistent, mais qui sont parfoisnégligés. Suite page 9

Lire page 5

TPU et péréquationClaire Delpech

SUR LE MODÈLE DE L’ÉTUDE

conduite par l’État sur les dota-tions qu’il verse aux collectivitéslocales, l’ADCF lance sa propreétude pour analyser l’effet péré-quateur de l’intercommunalité.

avril 2006 • n°100 mensuel édité par l’ADCF - www.adcf.fr 5,50 €

Dossier

Quelle pénurie foncière ?

est aujourd’hui forte de mieuxorganiser les stratégies et lesoutils existants des politiquesfoncières, afin de les rendreefficaces. L’intercommunalitéest aujourd’hui désignéecomme l’échelon le plus perti-nent. L’ADCF revient sur cedossier d’actualité, et donne laparole à de nombreux élus etobservateurs.

Suite page 2

Dossier

Quelle pénurie foncière ? 9Joseph Combi, directeur de l’ADEF (association des études foncières) analyse le contexte national de pénurie foncière.

Les outils fonciers existent 12Les communautés disposent de multiplesoutils pour afficher leur stratégie foncière.Il faut savoir les articuler entre eux… et le vouloir.

(Re)découvrir les EPFL 15Crée en 1991, remis au goût du jour en 2000, l’établissement public foncier local (EPFL) pourrait devenir enfin un outil foncier efficace.

Claire Legoux

LE COMITÉ INTERMINISTÉRIEL d’aménagement etde compétitivité des territoires (CIACT) du 6 marsdernier a présenté les orientations de la prochainegénération de contractualisation entre l’État et lesrégions. Ces contrats de projets prévoient unemeilleure coordination avec la programmation

européenne, que ce soit en terme d’objectifs oude calendrier, trois grands objectifs s’organisentautour de : compétitivité et attractivité, dévelop-pement durable et cohésion sociale et territoriale.Détail des principales mesures, de leurs avancéesaux incertitudes qu’elles recèlent.

FinancesPéréquation et TPU 4Quels sont effets péréqua-teurs de l’intercommunalitéà fiscalité propre ? Pour les mesurer,l’ADCF lance l’étude.

TerritoireLes bistrots de Pays 6Lieux de convivialité maisaussi d’animation locale, lesbistrots de Pays s’organi-sent en réseau, autour d’un« label » de qualité.

IntercommunalitésChangement de look 18Pour son 100e numéro, votrejournal adopte une nouvellemaquette et un nouveauformat. Modernité, praticité.

DroitBureau communautaire 21Tout ce qu’il faut savoir surle bureau communautaire,sa composition et la dési-gnation de ses membres…

InstitutionsFrance-Japon 22Un colloque de droit comparé a permis de mettre en évidence lespoints forts de deux modèles institutionnelsdont l’objectif est semblable : réduire le nombre de communes.

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« CONTRATS DE PROJETS », c’est la nouvelle dénomination don-née à la prochaine génération de contrats territorialisés entrel’État et les régions. De fait, depuis l’abandon de l’exercice de pla-nification nationale, l’expression « contrat de plan », devenuecaduque, ne perdurait que par la force des habitudes.Mais la véritable évolution, annoncée par Christian Estrosiau Bureau national de l’Assemblée des communautés de France(ADCF), dépasse largement le champ de la sémantique. Leministre a effectivement annoncé que si l’une ou l’autre régionne souhaitait pas s’engager sur l’une des thématiques affichées

par l’État, celui-ci se réservait alors la possibilité de contractua-liser directement avec un conseil général ou une agglomération.Le ministre a ensuite affirmé sa volonté de tenir un calendrierpermettant une étroite articulation avec les futurs programmes,européens (2007-2013) et a confirmé un arbitrage visant àpréserver un « volet territorial » qui permettra aux acteursinfra-régionaux de s’inscrire dans les futurs programmes selondes modalités restant à préciser. Enfin, il a précisé que dans lecadre de l’acte II de la décentralisation, toutes les opérations rou-tières inscrites dans la programmation qui s’achève seronthonorées, même si cela suppose, sur ce volet précis, une pro-rogation exceptionnelle de plusieurs années.Au cours des échanges avec les membres du bureau, plusieursélus ont alerté le ministre sur le calendrier de négociation,qu’ils jugent « trop court » pour permettre, notamment, que lesacteurs infra-régionaux puissent exprimer leurs priorités etdéfinir leurs projets. D’autres ont souhaité que les précisionssoient apportées promptement sur la mise en œuvre du « voletterritorial » et, au-delà, ont exprimé leurs craintes face à l’éven-tuelle suppression de toute « ingénierie de projet » pour lesterritoires les plus fragilisés ou isolés.Le ministre délégué à l’Aménagement du territoire s’est déclaré« attentif à ces préoccupations et disposé à étudier, en liaisonavec les élus de l’ADCF, les réponses à leur apporter au coursdes prochains mois ». Rendez-vous a d’ailleurs été pris pour lemois de septembre.

Contrats de projets :accélération du calendrierChristian Estrosi, le ministre délégué à l’Aménagement du territoire, a présenté la prochaine génération des contrats État-régions au Bureau national de l’ADCF.

ADCFAménagement du territoire

Intérêt communautaire

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Enquêtes sur l’intérêtcommunautaire

C’est la dernière ligne droitepour les communautés dansl’exercice réputé « délicat » qui consiste à définir l’intérêtcommunautaire de leurscompétences.Les communautés membres de MARCO* l’ont bien compriset lancent des enquêtes sur lesujet depuis la création de l’extranet de l’ADCF. Enjouant le jeu de la mutualisationde l’information, elles joignent à leurs réponses leursdélibérations définissantl’intérêt communautaire(enquêtes, par exemple, sur lescompétences logement ou surle développement touristique,etc.). En complément de ceséchanges, la Bibliothèque de MARCO propose, dans sa rubrique dédiée, de nombreuses définitionsd'intérêt communautaire de compétences particulières.Certes, les projets politiques et stratégiques descommunautés dans lesquelless’inscrivent l’intérêtcommunautaire sont tousdifférents, mais se comparer à ce qui se fait ailleurs restetoujours enrichissant.

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Christian Estrosi accueilli par Marc Censi, président de l’ADCF etGérard Gouzes, président délégué.

LES COMMUNAUTÉS AUVERGNATES ont débattu de la réformede la taxe professionnelle et de l’avenir des finances intercom-munales, le 6 mars dernier. Nombreuses à répondre à l’invitation de l’agglomération dubassin d’Aurillac et de l’ADCF, elles ont pu bénéficier de l’ex-pertise de Michel Klopfer, fondateur du cabinet éponyme et deséclairages d’un membre du Comité des finances locales, en lapersonne de Marc Censi, venu en voisin de Rodez.

UNE QUARANTAINE DE COMMUNAUTÉS

de communes ont bravé les perturbations,dues à un mouvement social, pour répon-dre, le 7 mars, à l’invitation de l’ADCF etparticiper à une matinée d’étude etd’échange consacrée à la définition del’intérêt communautaire dans les com-munautés de communes. EmmanuelDuru, responsable des affaires juridiquesde l’association et maître Rey, avocat ducabinet Philippe Petit, ont exposé les prin-cipes juridiques relatifs à la définition del’intérêt communautaire et ont surtout

insisté sur les risquescontentieux sous-jacents.Parmi les interrogations lesplus fréquentes de la salle,on retiendra celles ayanttrait à l’interprétation du contenu de cer-taines compétences, telle que la voirie(panneaux de signalisation, éclairagepublic…), ainsi que celles relatives auxnouvelles dispositions de la loi du 13 août2004 en matière de conventionnementavec les communes membres. Des questionnements partagés en Artois

le lendemain, à l’occasion d’une manifes-tation régionale.Ces manifestations ont clos un cycled’interventions initié par l’ADCF surun an et demi, lequel a réuni près de1 500 praticiens de l’intercommuna-lité sur 23 dates.

Les questionss’affinent

L’ADCF anime la réflexion sur l’intérêt communautaire,CA de l’Artois Com.

26 avril • COMMUNAUTÉS D’AQUITAINE

CC du Luy-de-Béarn> L’évolution des ressources etde la fiscalité des communautésLieu : Serres-Castet.

4 mai • COMMUNAUTÉS DU CENTRE

CC de l’Est Tourangeau> Finances et fiscalité des communautés : Réformede la taxe professionnelle et loi de Finances 2006Lieu : Montlouis-sur-Loire.

10 mai • COMMUNAUTÉS DE

HAUTE-NORMANDIE

CC de Pont-Audemer> Les communautés et lesservices publics environ-nementaux : Eau, déchets,assainissement. Quels enjeux pour les communautés ?Lieu : Montlouis-sur-Loire.

Contact : Fabienne Boucher01 55 04 89 00

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Finances intercommunales : débat en Auvergne

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* Marco est une plate-forme d’échanges desavoir-faire entre les communautés del’ADCF. Tous les mois, intercommunalités sefera l’écho d’une problématique d’actualité.www.adcf.org > rubrique marco

L'extranet des communautés de l’ADCF

Rencontres de l’ADCF en région

Page 21: avril 2006 • n°100 mensuel édité par l’ADCF - ... · « Contrats de projets État-région » afin de mieux rendre compte de la nature juridique de cet accord. Ces contrats

Droit

Tout sur le bureaucommunautaire

Décryptage

Damien Christiany

LE BUREAU COMMUNAUTAIRE constitue l’un des trois orga-nes de l’établissement public de coopération intercom-munale, à côté du président et de l’assemblée délibérante(ou le comité syndical). La composition du bureau et ses attributions sont fixéesà l’article L. 5211-10 du CGCT. Si les références nor-matives demeurent isolées, le bureau n’est cependantpas dénué de tout encadrement juridique. Il se voitappliquer, par le jeu du renvoi des articles L. 5211-1et L. 5211-2 du CGCT, le contenu des dispositionsrelatives au fonctionnement du conseil municipallorsqu’il agit par voie de délégation d’attribution del’organe délibérant. Ainsi, par exemple, les règles relati-ves au quorum s’appliquent de la même manière pourle bureau. Lorsque le rôle du bureau demeure stricte-ment cantonné à la validation des décisions stratégi-ques, en amont de l’approbation en séance plénière,détenant ainsi un rôle d’arbitrage, seul le règlementintérieur lui est opposable (Rép. Min. n°5558, JOAN Q.29/12/1997). Il n’est pas inutile de rappeler à cetteoccasion que le juge administratif considère qu’un acteapprouvé en méconnaissance des dispositions du règle-ment intérieur sera frappé d’illégalité lors d’un recoursen annulation (CAA Nantes, 1er mars 2001, Ville deCholet, n°99NT02868).

La désignation des membresL’article L. 5211-10 du CGCT dispose brièvement que lebureau est composé du président, d’un ou de plusieursvice-présidents et éventuellement d’un ou de plusieursautres membres. Le nombre de vice-présidents ne peutêtre supérieur à 30 % de l’effectif total de l’organe délibé-rant. Ils sont élus au scrutin majoritaire.Si le président et les vice-présidents sont membres de droitdu bureau communautaire, cette instance peut égalementêtre composée d’autres membres ; il s’agit la plupart dutemps des maires qui ne détiennent pas de vice-présidenceou d’adjoints dans les communes importantes. Si initiale-ment, l’élection du président et des membres du bureauétait fondée sur les prescriptions de l’article L. 2122-7

Les structures intercommunales sont nombreuses à s’interroger sur lesprincipes juridiques qui président au fonctionnement interne du bureaucommunautaire, à la désignation de ses membres ainsi qu’à la facultépour cette instance d’agir par voie de délégation d’attributions de l’organe délibérant. Si les textes ne sont pas légion en la matière, il apparaît cependant que le bureau obéit à des règles juridiques éparsesdont certaines ont été précisées par le juge administratif.

CGCT, relatives à l’élection du maire et des adjoints, la loidu 12 juillet 1999, en intégrant l’article L. 5211-10 duCGCT, a seulement encadré la désignation du présidentet du ou des vice-présidents. Aussi, force est de constater qu’aucune disposition nor-mative ne prévoie désormais le mode de désignationdes autres membres du bureau. La communauté peutdonc déterminer librement les conditions dans lesquel-les les autres membres du bureau sont désignés. La doc-trine considère que si les statuts ne déterminent pas lesmodalités de désignation des membres du bureau, leprocédé de l’élection s’appliquera alors. La jurispru-dence est silencieuse sur ce point.

Le fonctionnement du bureauAvant toute chose, il faut noter que le jeu du renvoi auxprincipes qui président au fonctionnement du conseilmunicipal ne peuvent être totalement transposables auxconditions de délégation d’attribution de l’organe délibé-rant vers le bureau. En effet, d’une part, les délégations possibles du conseilmunicipal à l’égard du maire sont définies de manièrepositive ; il dispose ainsi d’une compétence d’attribu-tion en intervenant uniquement dans les domaines cou-verts par l’article L. 2122-22 du CGCT. D’autre part, lesdélégations d’attribution conférées au maire intéressent20 domaines pour lesquels certains d’entre eux sontexpressément indélégables au bureau ou au présidentde groupement. Un avis récent du Conseil d’État reconnaît cette contradic-tion juridique et considère que seul l’article L. 5211-10 estapplicable aux délégations de pouvoir, tant pour le prési-dent de communauté que pour le bureau (CE avis,17 décembre 2003 Préfet du nord, n°258816).

Les attributions du bureauLes attributions du bureau sont définies négativement à l’ar-ticle L.5211-10 du CGCT. Cette disposition fixe lesdomaines pour lesquels le bureau ne peut intervenir. Tou-tefois, malgré la présence d’une liste limitative pour laquellele bureau ne peut recevoir de délégation, nous pouvons

considérer que le juge administratif interprète de manièreextensive les affaires pour lesquelles le bureau ne peutintervenir. Ainsi, le juge pourrait rattacher aux domainesindélégables une attribution non prévue par les textes maiss’y rattachant indirectement.Il est possible d’établir un rapprochement entre le bureaucommunautaire et la commission permanente du conseilgénéral ou du conseil régional dans la mesure ou lesattributions respectives qui peuvent être déléguées à cesdeux instances sont également définies de manière néga-tive. Parmi les domaines non délégables, figurent ceuxayant trait à l’ensemble des questions budgétaires. Il enest notamment de l’impossibilité pour une commissionpermanente de déterminer les principes de mise enœuvre du régime indemnitaire en raison de l’incidencebudgétaire d’une telle décision (CAA Marseille, 20 jan-vier 2004, Sicard, n°03MA02023). Cette position dujuge administratif nous semble transposable au bureaucommunautaire.

Quelle représentativité descommunes ?

La question de la désignation des membres dubureau ne doit pas occulter celle relative à lareprésentativité des communes. A l’opposédes règles juridiques qui prévoient la présencede chaque commune membre du groupementau sein de certaines instances, telle que lacommission locale d’évaluation des transfertsde charge (CLETC), le droit del’intercommunalité est silencieux quant auxconditions de représentation des communesau sein du bureau. La jurisprudence laisse ainsile soin au règlement intérieur, au moins pourles groupements dont l’une des communesdétient une population supérieure à3 500 habitants, de fixer la représentation descommunes au sein du bureau (CE 9 février1979 Election des membres du bureau du SId’aménagement de l’agglomération nouvelled’Évry). Le droit accorde une liberté d’action àl’égard de la répartition des sièges au sein dubureau, celle-ci pouvant être fondée soit sur leprincipe de la pondération en fonction del’importance démographique des communes,soit sur le principe d’une répartition égalitairedes communes. Assez régulièrement, ce sontles statuts qui fixent la composition du bureauquand bien même l’article L.5211-5-1 duCGCT n’en impose pas une référenceobligatoire. Par ailleurs, le ministère del’Intérieur reconnaît que les communesmembres peuvent prévoir, lors de l’élaborationdes statuts de la communauté, lareprésentation au sein du bureau de chaquecommune sans en déterminer par avance lenombre de vice-présidents (Rép. min. n°08357,JO Sénat Q. 10/07/2003, p. 2205).

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Intercommunalités • ADCF • N°100-avril 2006 21

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Emmanuel Duru

JUSQU’À UNE ÉPOQUE RÉCENTE, les observateurs de la vielocale avaient coutume de dire que la France comptait à elleseule autant de communes que tous les autres états de l'UnionEuropéenne réunis, soit près de 36 500. Les élargissementssuccessifs de l’Europe font désormais mentir cet exemple. Iln’en demeure pas moins que l’émiettement communal conti-nue d’être présenté comme relevant de la fameuse « exceptionfrançaise ». Cette singularité, qui a représenté durant longtemps uncontrepoids à la tradition de centralisme, est progressive-ment devenue une source de complications en terme decohésion du territoire.Face à un tel morcellement, le législateur a tenté à deux repri-ses un remodelage de la carte des communes françaises par lebiais des fusions en 1959, puis en 1971. En dépit de ses diver-ses incitations, la réforme devait se révéler modeste : alors queles plans départementaux de fusions prévoyaient 3 482 fusions,il ne s'en réalisa que 581, intéressant 1 465 communes dans lesannées qui suivirent l'entrée en vigueur de la loi. Ainsi, alors que la France comptait, avant 1959, 38 500 com-munes, le résultat des deux réformes cumulées ne devaitaboutir dans un premier temps qu'à un abaissement du nom-bre des communes en dessous de 36 500.Dès lors, l’alternative intercommunale est apparue comme laseule solution de nature à permettre un aménagement harmo-nieux et dynamique du territoire, tout en préservant l’identitécommunale, si chère à l’élu et au citoyen français. D’abord cantonnée dans un cadre purement technique(SIVU, SIVOM…), la coopération intercommunales’est progressivement orientée vers un modèle fédéra-tif, permettant de se doter d’un véritable projet de ter-ritoire sur des périmètres élargis.Au même moment, et face au même problème, leJapon plébiscitait quant à lui la technique de la fusion,réalisant ainsi des réformes radicales, en passant deprès de 40 000 communes au 19e siècle à 1 821aujourd'hui. La volonté de l'État central japonais derationaliser l'organisation du territoire s'est accompa-gnée d'un transfert progressif de compétences aux com-munes, et demeure liée à une politique d’économiebudgétaire, rendue nécessaire par l’imposant déficit

japonais. A cet égard, force est de constater que l’État japo-nais, pour parvenir à ces fusions, n’a pas eu recours à la coerci-tion mais plutôt à l’arme budgétaire. Il perçoit, en effet, 60 %des recettes fiscales et assure 40 % des investissements. Le Japon et la France, au-delà de ce qui les différencie, sontconfrontés à des problèmes économiques et sociaux similaireset à des défis communs.Or, si en France la coopération intercommunale présentel'atout de pouvoir modifier le maillage territorial tout enconservant l'extraordinaire richesse en terme de démocratielocale que représentent les quelque 500 000 élus locaux, lemodèle français de répartition des compétences demeurecomplexe et lacunaire, dans la mesure où l'on ne s'est passoucié de la régulation et de la coordination des politiquesterritoriales menées par les différents échelons. La loi japo-naise de décentralisation de 1999 a entendu responsabiliserles communes et les mettre sur un pied d'égalité avec l'État,notamment via le principe de subsidiarité. Il s'est avéré tou-tefois que l'application de ce principe n'a pas toujours été évi-dente et s'est parfois heurtée aux réalités locales.Si les modèles français et japonais correspondent à des chemi-nements historiques différents, ils ont néanmoins pour pointscommuns la recherche d'une plus grande rationalité et d'unmeilleur service rendu au citoyen. Nul doute, à cet égard, quel’exemple japonais fournira aux décideurs français un pré-cieux témoignage à l’heure où la recherche de l’équilibre ter-ritorial des pouvoirs est devenu un enjeu majeur pour l’avenirde notre système institutionnel.

22 N°100-avril 2006 • ADCF • Intercommunalités

● VOIRIEDeux poids, deuxmesures…

Tels sont les premiers mots quiviennent naturellement àl’esprit à la lecture de la réponseministérielle publiée au JO Sénat du 23 février 2006 (Q 19713, rep. min JO Sénat23/ 02/ 2006, p. 549). En effet, s’appuyant sur unejurisprudence constante du jugeadministratif, le ministère del’Intérieur a toujours estimé ques'agissant des ouvragesconstitutifs des voies d'intérêtcommunautaire, il y a lieu deconsidérer qu'ils comprennentnon seulement la chaussée elle-même mais également leséléments accessoires, nécessairesou indispensables au soutien ouà la protection desdites voiespubliques (parmi lesquelles lestrottoirs, fossés, caniveaux,parapets, murs de soutènement,terre-pleins, talus, signalisationet équipements de sécurité, etc.). A cet égard, le ministre a eumaintes fois l’occasion d’affirmerqu’ « (…) ils constituent avec lachaussée l'emprise de la voie etsont, à ce titre, intégralementtransférés à la communauté (…)au titre de sa compétence“création ou aménagement” dela voirie. » (Cf. par exemple,Q 52821, rép. min. JOAN05/04/2005, p. 3529).Or, étrangement, ce qui vautpour les relations entrecommunes et communautés nesemble pas être applicable auxrelations entre État etcommunes. Interrogérécemment sur le point desavoir qui est responsable del'entretien de la voirie et de sesdépendances immédiates dansle cas d'une commune traverséepar une route nationale, leministre a considéré que s’ilappartient à l’État de veiller aubon entretien de la route et deses dépendances, il ressortait enrevanche de la compétence de la commune « de prendre à sa charge l'aménagement et l'entretien des dispositifs quisont utiles spécifiquement auxusagers locaux, comme parexemple les trottoirs, l'éclairagepublic ou les abris des usagersdes transports en commun ». Ce décalage dans l’interprétationdes textes en fonction de laqualité de la personne publiqueà laquelle ils sont appliqués(locale ou nationale) ne lasse pasde surprendre…

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Un problème identique, des solutions différentes…

Modèles institutionnels France Japon

Marc Censi, président de l’ADCF lors du colloque sur les institutions en France et au Japon

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Le Sénat et le Centre japonais des collectivités locales (CLAIR Paris), ontorganisé, le 23 février, un colloque de droit comparé sur les modèles françaiset japonais du regroupement intercommunal.

ChiffresFrance Japon

(Outre-Mer compris)

Population 61,7 126(en millions en 2001)

Superficie (en km2) 550 000 377 000

Régions 26 0Départements 100 47Communes 36 779 3 218

Droit

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Délégués communautairesIndépendance…Les conseillers communautairesbénéficient-ils d’une réelleindépendance organique vis àvis des communes dont ils sont les représentants, ou aucontraire le maire ou le conseilmunicipal a t-il la possibilité deleur fixer des orientations ou deleur donner des instructionslors des votes des organesdélibérants intercommunaux ?Juridiquement, « Aucunedisposition législative ouréglementaire n'offreexplicitement au maire ou auconseil municipal la faculté de fixer des orientations ou de donner des instructions auxdélégués de la commune lorsdes votes du comité d'unsyndicat intercommunal ou de l'organe délibérant de toutautre EPCI ». (Q 20252, rep.min. JO Sénat 16/02/2006,p. 434). …mais contrôlesCependant, dans la mêmeréponse, le ministre délégué aux Collectivités territoriales a précisé que les communes nesont pas pour autant dessaisiesde tout moyen de contrôle surleurs représentants. D’une part,l’article L. 5211-39 du CGCTprévoit des mesuresd'information, deux fois par an,des conseils municipaux surl'activité de la communautédont ils sont membres. D’autrepart, l'article L. 2121-33 ducode susvisé permet au conseilmunicipal de procéder à toutmoment, en cours de mandat,au remplacement de sesdélégués. Ce qui amène le ministre à considérer que « le pouvoir de contrôle (…)permet d'admettre la possibilitépour le maire et le conseil defaire connaître leurs attentesquant à la gestion des affairestransférées à la communauté ».

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Emmanuel Duru

LES ENJEUX TECHNIQUES ET FINANCIERS

liés à la question de l'assainissement noncollectif font apparaître l'intercommu-nalité comme un périmètre d'interven-tion pertinent. Un certain nombre decommunautés, statutairement compé-tentes en la matière, se sont d’ores etdéjà mises en conformité avec la loi, eninstaurant un service public d’assainis-sement non collectif (SPANC) au31 décembre dernier, ainsi que le pré-voient les textes. D’autres en sont encoreau stade de la réflexion quant à un éven-tuel transfert de cette compétence. Lorsqu’un tel choix a été opéré, la réali-

sation d'un schéma directeur d'assainis-sement à l'échelle intercommunale peutconstituer un point de départ idéal àcette démarche. L’article L. 2224-10 du CGCT imposel'établissement par les communautésd'un zonage d'assainissement qui doitfaire apparaître, sur les territoires corres-pondants, des zones d'assainissementcollectif, des zones d'assainissement noncollectif et des zones particulières lors-que les données spécifiques au domainepluvial doivent être prises en considéra-tion. En revanche, le schéma directeurd'assainissement, qui recouvre généra-lement les différentes phases de laréflexion en matière d'assainissement (enparticulier le zonage, le diagnostic et leprogramme) n’est prévu par aucun textelégislatif ou réglementaire et n'est doncpas en lui-même obligatoire. En toutehypothèse, aucune échéance n'est fixéepour cette délimitation.

Quelle redevance ?Par ailleurs, la mise en place d’unSPANC va générer l’institution de rede-vances d’assainissement non collectifafin de financer les prestations assuréespar ce service, le contrôle et éventuelle-ment l’entretien.Une question demeurait cependant ensuspens : une communauté peut-ellelégitimement instaurer une redevanced'assainissement non collectif alors queson schéma d'assainissement ne prévoitque de l'assainissement collectif ? Plusprécisément, la décision d'une commu-

nauté de communes d'instaurer uneredevance d'assainissement non collectifd'un montant de 0,5 euro par mètrecube est-elle légale ? Le ministre de l’Intérieur vient de répondre par l’affir-mative à ces questions (Q 70999, rép.Min. JO AN 28/02/2006). Les servicesde l’État considèrent que le zonage n’ad’autre but que d’identifier la vocationdes différentes zones du territoire concer-nées en matière d'assainissement, au vude deux critères principaux : l'aptitudedes sols et le coût de chaque option. Il ne fige donc pas une situation enmatière d'assainissement. Une commu-nauté peut donc légitimement instau-rer une redevance d'assainissement noncollectif, alors que son schéma d'assai-nissement ne prévoit que de l'assainis-sement collectif.Par ailleurs, une telle redevance com-prend une part destinée à couvrir lescharges de contrôle, calculée en fonc-tion de critères définis par l'organe déli-bérant concerné et tenant comptenotamment de la situation, de la natureet de l'importance des installations (art.R. 2333-126 CGCT). Ces opérationspeuvent donner lieu à une tarificationforfaitaire. Le lien existant entre laconsommation d'eau et le coût ducontrôle de bon fonctionnement de l'ins-tallation d'assainissement non collectifest relatif. Toutefois, les dispositions quiprécèdent laissent aux conseils commu-nautaires une certaine liberté pour fixerles tarifs en fonction du mode de calculqu'elles instituent.

Assainissement

Un schéma directeur : utile mais pas obligatoire…Même s'il n'est pas obligatoire, le schéma directeur d'assainissement peutnéanmoins être un outil utile. Par ailleurs, le SPANC donne lieu à l'instauration d'une redevance…

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