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APPAREIL LOCOMOTEUR- Apport des techniques de médecine nucléaire 31/10/2013 LEVY Manon L3 Appareil locomoteur Pr. COLAVOLPE 10 pages Sémiologie générale et radiologique : apport des techniques de médecine nucléaire La médecine nucléaire est une technique d'imagerie dite fonctionnelle/métabolique/moléculaire, par opposition à la radiologie qui est une technique d'imagerie morphologique et anatomique. Elle consiste à imager un processus biologique. Pour cela on utilise un radio-traceur (ou radio- pharmaceutique) constitué par une molécule vectrice (ciblée en fonction du processus que l'on veut étudier) marquée avec un élément radioactif. Grâce à cette technique on peut théoriquement tout explorer. A. Scintigraphie osseuse I. Principe C'est un examen de médecine nucléaire/imagerie fonctionnelle. Le radio traceur utilisé est le disphosphonate marqué au technétium 99 métastable (Tc 99m), il est injecté par voie intraveineuse. Le disphosphonate se fixe spécifiquement sur le tissu osseux. Le Tc 99m est un émetteur de rayons gamma, il permet de visualiser la distribution du disphosphonate sur le squelette. La radioactivité (en méga Becquerel MBq) est déterminée en fonction du poids du patient : elle sera plus faible pour un enfant que pour un adulte. L'élimination se fait par voie urinaire, l'appareil urinaire est donc toujours marqué sur les images. La détection de la distribution est réalisée par une gamma caméra : il s'agit d'une radioactivité gamma. Le disphosphonate se fixe à l'os en fonction du remodelage osseux. La fixation suit le degré d'activité réparatrice de l'os = ostéoformation ostéoblastique, qui survient dès que l'os est agressé. Le Tc 99m a une énergie de 140 keV et une demi vie de 6H. La distribution se fait au niveau du squelette au pro-rata du débit sanguin local, mais surtout au pro-rata de l'activité ostéoblastique de remodelage osseux. La plupart des atteintes osseuses (infectieuses, traumatiques ou tumorales) vont se traduire par une accélération du remodelage osseux local. Toutes les atteintes osseuses vont se traduire sur l'image par une hyperfixation non spécifique, qui peut être la conséquence de différents phénomènes pathologiques : il faut 1/10 Plan : A. Scintigraphie osseuse I. Principe II. Précautions et contre-indications III. Déroulement de l'examen IV. Interprétation V. Exemples B. Imagerie TEMP/TDM C. Scintigraphie aux leucocytes marqués et infection D. Radiothérapie métabolique

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APPAREIL LOCOMOTEUR- Apport des techniques de médecine nucléaire

31/10/2013LEVY Manon L3Appareil locomoteurPr. COLAVOLPE10 pages

Sémiologie générale et radiologique : apport des techniques de médecine nucléaire

La médecine nucléaire est une technique d'imagerie dite fonctionnelle/métabolique/moléculaire, par opposition à la radiologie qui est une technique d'imagerie morphologique et anatomique.

Elle consiste à imager un processus biologique. Pour cela on utilise un radio-traceur (ou radio-pharmaceutique) constitué par une molécule vectrice (ciblée en fonction du processus que l'on veut étudier) marquée avec un élément radioactif. Grâce à cette technique on peut théoriquement tout explorer.

A. Scintigraphie osseuse

I. Principe

C'est un examen de médecine nucléaire/imagerie fonctionnelle.Le radio traceur utilisé est le disphosphonate marqué au technétium 99 métastable (Tc 99m), il est

injecté par voie intraveineuse. Le disphosphonate se fixe spécifiquement sur le tissu osseux. Le Tc 99m est un émetteur de rayons gamma, il permet de visualiser la distribution du disphosphonate sur le squelette. La radioactivité (en méga Becquerel MBq) est déterminée en fonction du poids du patient : elle sera plus faible pour un enfant que pour un adulte. L'élimination se fait par voie urinaire, l'appareil urinaire est donc toujours marqué sur les images.

La détection de la distribution est réalisée par une gamma caméra : il s'agit d'une radioactivité gamma.

Le disphosphonate se fixe à l'os en fonction du remodelage osseux. La fixation suit le degré d'activité réparatrice de l'os = ostéoformation ostéoblastique, qui survient dès que l'os est agressé.

Le Tc 99m a une énergie de 140 keV et une demi vie de 6H.La distribution se fait au niveau du squelette au pro-rata du débit sanguin local, mais surtout au pro-rata

de l'activité ostéoblastique de remodelage osseux.La plupart des atteintes osseuses (infectieuses, traumatiques ou tumorales) vont se traduire par une

accélération du remodelage osseux local. Toutes les atteintes osseuses vont se traduire sur l'image par une hyperfixation non spécifique, qui peut être la conséquence de différents phénomènes pathologiques : il faut

1/10

Plan :

A. Scintigraphie osseuse

I. Principe

II. Précautions et contre-indications

III. Déroulement de l'examen

IV. Interprétation

V. Exemples

B. Imagerie TEMP/TDM

C. Scintigraphie aux leucocytes marqués et infection

D. Radiothérapie métabolique

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s'aider d'autres éléments pour le diagnostic étiologique (données cliniques, imagerie morphologique).

Avantages :- information fonctionnelle métabolique- imagerie corps entier (pas en radiologie)- sensible et précoce : l'ostéoformation est précoce, en effet les modifications fonctionnelles précèdent

les modifications anatomiques et morphologiques. Par exemple devant une fissure occulte récente, la scintigraphie pourra être positive alors que radio sera encore négative

- non invasif

Inconvénients :- radiations ionisantes (mais dose faible)- peu spécifique (étiologies différentes)- faible résolution spatiale- coût

II. Précautions et contre indications

Les précautions à prendre sont liées à l'exposition aux radiations ionisantes, mais l'examen est faiblement irradiant : 4mSv. Pour comparaison la radioactivité naturelle annuelle moyenne en France est de 2,4 mSv. C'est un examen moins irradiant qu'un scanner ou qu'un TEP-scan.

Contre-indications formelles :- grossesse : les rayons ionisants ont des effets potentiels sur le fœtus- allaitement- les allergies mais elles sont exceptionnelles en scintigraphie osseuseLe produit n'a pas de toxicité rénale.

Précautions : il s'agit de consignes pour diminuer l'exposition. On administre le radio-pharmaceutique au patient : il est donc lui-même la source de radioactivité, il est faiblement radioactif pour lui-même et pour son entourage. On lui conseille de boire beaucoup d'eau et d'uriner fréquemment durant toute la journée de l'examen, d'éviter les contacts rapprochés avec les gens, particulièrement les femmes enceintes et les jeunes enfants.

III. Déroulement de l'examen

La réalisation nécessite une prescription médicale, selon le principe de justification (bénéfices > risques), il faut préciser l'indication.

On commence donc par mener un interrogatoire en demandant les antécédents, les symptômes, les traitements, les résultats des autres examens. On recherche surtout une possible contre-indication (recherche d'une grossesse chez la femme en âge de procréer : contraception, dosage de bêta-HCG au moindre doute)

On doit obtenir le consentement du patient après avoir délivré l'information, au cours de laquelle on donne les consignes de radio-protection.

Le produit est injecté par voie intraveineuse , chez un patient bien hydraté. On demande une miction complète juste avant de réaliser les images (sinon on aura un point chaud = zone d'hyperfixation sur la vessie qui gêne l'interprétation), puis on installe le patient sur la table.

On réalise systématiquement une image de temps tardif ou temps osseux : 2-3H après l'injection, qui reflète le remodelage ostéoblastique. On fait un balayage du corps entier en vue antérieure et postérieure. On peut réaliser si besoin des images complémentaires, dans d'autres incidences ou à des temps différents. La durée

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totale de l'examen est de 3H.

La caméra utilisée détecte la radioactivité gamma. La plupart sont des caméras double tête, avec deux détecteurs, une antérieur et un postérieur, qui balayent lentement le patient en sandwich de la tête aux pieds. On obtient ainsi une vue antérieure et une vue postérieure du squelette.

Caméra double tête

Sur une image normale la distribution du produit est homogène et symétrique. On observe des zones de points chauds naturels qui sont les zones de contrainte (les plus sollicitées) et surtout les zones les plus proches du détecteur (sternum, crêtes iliaques, symphyse pubienne, rachis dorsal, régions sacro-iliaques et ischions). Les reins et la vessie sont également marqués en raison de l'élimination urinaire. Le point le plus important sur un examen normal est la symétrie.

On peut réaliser d'autres incidences. Par exemple dans la tomoscintigraphie, les détecteurs tournent autour du patient. On obtient ainsi une image en volume avec une reconstruction en coupes dans les trois plans. On peut ainsi préciser la topographie d'une anomalie de fixation.

On peut réaliser l'acquisition à différents moments :- le temps osseux : 2-3H après l'injection, il est systématique- le temps vasculaire : immédiatement après l'injection- le temps précoce ou temps tissulaire : 3 à 5 min après l'injection, diffusion du produit dans les tissus,

montre surtout les tissus mous.On réalise le temps précoce quand on se pose la question de l'évolutivité ou du caractère inflammatoire

d'une lésion. Un temps précoce positif est en faveur d'une pathologie actuellement évolutive, en phase inflammatoire, récente.

IV. Interprétation

On parle d'anomalies de fixation. Ce sont majoritairement des hyperfixations, matérialisées par des zones plus noires, témoins d'une hyper-activité ostéoblastique.

On détermine si la topographie est plutôt osseuse ou articulaire, le côté, le caractère diaphysaire ou épiphysaire, si les lésions touchent le squelette axial ou appendiculaire, le caractère unique ou multiple des foyers d'hyperfixation, leur répartition... Il s'agit d'un vocabulaire de description sémiologique de l'image.

On détermine si les temps vasculaire et précoce sont positifs ou négatifs (s'ils sont réalisés).

Sur une image normale on observe une fixation du radiotraceur homogène et symétrique, plus marquée au niveau des zones de contraintes et des reliefs osseux (zones plus proches des détecteurs) avec une fixation physiologique de l'appareil urinaire.

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Chez l'enfant il y a une fixation physiologique des cartilages de croissance : activité des ostéoblastes importante.

Image normale chez l'adulte Image normale chez l'enfant

Ci-dessus un exemple de scintigraphie pathologique de l'adulte : foyers d'hyperfixation multiples, de répartition aléatoire et asymétrique, qui prédominent sur le squelette axial et le squelette appendiculaire proximal = suspicion de métastases osseuses (en fonction du contexte clinique, notamment cancer primitif connu).

Le squelette axial contient la moelle osseuse hématopoïétique/rouge, il est plus richement vascularisé, ce qui facilite le cheminement métastatique.

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Ci-dessus un exemple de scintigraphie pathologique de l'enfant : on observe une fixation physiologique des cartilages de croissance et un foyer d'hyperfixation intense, hétérogène, asymétrique, en métaphyse supérieure du tibia gauche, isolé = tumeur osseuse ou autre étiologie.

Sur le compte rendu d'examen doivent figurer les données administratives, l'indication (justification médicale), la technique (permet le calcul de dose et du degré d'irradiation), le résultat : description des anomalies et la conclusion : hypothèse diagnostique ou réponse à la question posée.

Indications : elles sont très diverses et peuvent s'adresser à beaucoup de pathologies, on peut avoir des indications en oncologie, traumatologie, rhumatologie, pédiatrie ou en cas d'ostéopathies métaboliques (pas à retenir en détail).

V. Exemples

• Ci-dessus un sujet avec un antécédent de cancer de la prostate présentant des douleurs osseuses (situation fréquente ++) : foyers d'hyperfixation multiples, hétérogènes, asymétriques, disséminés de façon aléatoire, qui prédominent sur le squelette axial et les parties proximales des membres = métastases osseuses.

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• Ci-dessus un enfant présentant une fracture atypique du bras droit, présenté pour un bilan de squelette complet : on voit les cartilages de croissance, hyperfixation sur plusieurs pièces osseuses, d'intensités variables qui signent des événements anciens et récents : fractures d'âge différent = enfant battu.

• Ci-dessus un sujet présentant des douleurs lombaires + fièvre + syndrome inflammatoire : hyperfixation en L4-L5, en sandwich de part et d'autre du disque = spondylodiscite.

• Un enfant présentant des douleurs à la cheville + fièvre + syndrome inflammatoire : hyperfixation métaphysaire du tibia, le temps précoce est positif, cela signe un processus évolutif = ostéomyélite aiguë de l'enfant.

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• Ci-dessus un sujet présentant une douleur + chaleur + œdème du poignet droit : hyperfixation articulaire diffuse vue au temps précoce (inflammatoire) = arthrite.

• Douleur de la cheville suite à un traumatisme mais radio normale : hyperfixation de la métaphyse distale du tibia, perpendiculaire à l'axe de l'os, vue au temps précoce = fracture de fatigue non vue en radiologie.

• Ci-dessus une personne âgée ayant de l'ostéoporose : hyperfixations multiples sur le rachis dorsal bas et lombaire haut (zone de fragilité du rachis) = tassements vertébraux.

• Ci-dessus un sujet âgé avec de l'ostéoporose présentant une douleur aux côtes après une chute : répartition non aléatoire, aspect aligné en pointillés = fissures des côtes.

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• Ci-dessus un sujet jeune sportif présentant des douleurs au dos : la tomoscintigraphie donne une image plus nette, des hyperfixations plus franches situées précisément au niveau des isthmes = lyse isthmique bilatérale.

B. Imagerie TEMP/TDM

Dans ce type d'imagerie la scintigraphie est couplée au scanner. On utilise donc une gamma caméra et un scanner. On réalise une tomoscintigraphie avec une image scanner de la même région, puis on fusionne ces images. On obtient ainsi une projection précise avec les anomalies anatomiques en regard, ce qui permet de poser un diagnostic. Cette technique permet d'augmenter la spécificité de l'examen.

Par exemple ci-dessus, dans le cadre d'un bilan d'extension initiale d'un cancer de prostate : on observe une hyperfixation au bord droit du rachis lombaire. Il peut s'agir d'une métastase ou d'arthrose. Grâce au scanner, on voit une fixation à l'espace intervertébral avec présence d'ostéophytes et de remaniements d'arthrose. On certifie donc qu'il s'agit d'arthrose.

NB : ostéophytes = production osseuse anormale au niveau des zones non contraintes de l'articulation, observée par exemple dans l'arthrose.

Dans le cas d'un cancer de la vessie, les anomalies métastatiques sont plus subtiles, il n'y a pas toujours de réaction ostéoblastique. En scintigraphie on observe un foyer hyperfixant discret à la partie droite de la symphyse pubienne. En TEMP, la tomoscintigraphie confirme mieux cette localisation, et on observe en plus des anomalies radiologiques : ostéolyse. Dans ce cas on suspecte une métastase ostéolytique.

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Chez un patient présentant une douleur de la cheville après un traumatisme et avec une radio normale, on observe une hyperfixation au niveau du tibia droit. La fusion des images permet de localiser la fracture.

C. Scintigraphie aux leucocytes marqués et infection

La scintigraphie osseuse classique n'est pas spécifique. La scintigraphie aux leucocytes marqués est plus spécifique de l'infection : les polynucléaires neutrophiles du patient sont marqués au Tc 99m et on voit où ils s'accumulent. On considère qu'ils vont s'accumuler de manière spécifique sur le site d'une infection bactérienne aiguë.

Les images sont réalisées 4H et 24H après l'infection. Si les polynucléaires ne s'accumulent pas, on considère qu'il n'y a pas d'infection bactérienne aiguë à cet endroit. S'ils s'accumulent et qu'ils augmentent entre les deux images, on considère qu'il y a une infection.

Exemple : devant une fracture avec défaut de consolidation (pseudarthrose), on se demande si ce défaut est lié à une infection. On réalise une scintigraphie osseuse qui montre une fixation au temps précoce et tardif (non spécifique). On réalise une scintigraphie aux leucocytes marqués et on constate qu'ils s'accumulent au niveau du foyer de fracture : il y a une infection bactérienne surajoutée.

D. Radiothérapie métabolique

Il s'agit de réaliser un traitement en médecine nucléaire en administrant le produit au patient : effet thérapeutique détruisant les cellules cancéreuses. On utilise ce type de traitement par exemple pour le cancer de la thyroïde, traité à l'iode 131.

Dans le cas de métastases osseuses, on peut proposer une administration intraveineuse de disphosphonate associé à un émetteur bêta moins (de forte énergie et de court parcours). Cet émetteur dépose un maximum d’énergie sur une petite distance, il a donc une action thérapeutique locale. On l'utilise essentiellement comme traitement palliatif des douleurs notamment dans les métastases d'un cancer de la prostate.

Au préalable la scintigraphie osseuse doit avoir montré des foyers hyperfixants.

D'autres images ainsi que des exemples de QCM sont disponibles dans le diaporama de la prof, sur l'ENT.

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