analyse théorique et numérique des équations de saint-venant

74
Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant Arnaud Duran Institut Camille Jordan Université Claude Bernard Lyon1 [email protected] Khaled Saleh Institut Camille Jordan Université Claude Bernard Lyon1 [email protected]

Upload: others

Post on 24-Nov-2021

11 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Analyse théorique et numérique des équations deSaint-Venant

Arnaud Duran

Institut Camille Jordan

Université Claude Bernard Lyon1

[email protected]

Khaled Saleh

Institut Camille Jordan

Université Claude Bernard Lyon1

[email protected]

Page 2: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Contents

1 Analyse théorique des lois de conservation scalaires 31.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31.2 Etude des solutions régulières (d=1): méthode des caractéristiques . . . . . . 51.3 Solutions faibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121.4 Solutions entropiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151.5 Résultats d’existence et d’unicité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191.6 Le problème de Riemann en 1d . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

1.6.1 La condition d’Oleinik . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221.6.2 Résolution pratique des problèmes de Riemann . . . . . . . . . . . . 23

2 Schémas numériques pour les lois de conservation scalaires 292.1 Rappels sur les différences finies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 292.2 Stabilité L2 dans le cas linéaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 312.3 Schémas conservatifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 352.4 Schéma de Godunov . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 412.5 Variantes du schéma de Godunov . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

2.5.1 Schéma de Roe-Murman. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 432.5.2 Schéma de Enquist-Osher. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 442.5.3 Solveurs de Riemann approchés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

2.6 Schémas monotones et entropiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 472.6.1 Schémas monotones - schémas TVD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 472.6.2 Schémas entropiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

3 Problème de Riemann pour les systèmes hyperboliques 563.1 Systèmes hyperboliques unidimensionnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56

3.1.1 Hyperbolicité, symétrisabilité et solutions fortes . . . . . . . . . . . . 563.1.2 Solutions faibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 583.1.3 Inégalités d’entropie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

3.2 Problème de Riemann . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 633.2.1 Champs caractéristiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 633.2.2 Courbes intégrales - Ondes de détente . . . . . . . . . . . . . . . . . . 643.2.3 Discontinuités de contact . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 653.2.4 Solution du problème de Riemann . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

1

Page 3: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

4 Résolution pratique du problème de Riemann 674.1 Equations de Saint-Venant 1d . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

4.1.1 Caractérisation des chocs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 674.1.2 Ondes de détente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 694.1.3 Bilan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 704.1.4 Un exemple : rupture de barrage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

4.2 Le cas 2d . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 724.2.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 724.2.2 Champs caractéristiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 734.2.3 Problème de Riemann . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 744.2.4 Caractérisation des chocs et des détentes . . . . . . . . . . . . . . . . 744.2.5 Discontinuité de contact . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75

5 Résolution numérique des équations de Saint-Venant 765.1 Exemples de schémas numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76

5.1.1 Schéma de Godunov . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 765.1.2 Schéma de Rusanov . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 775.1.3 Schéma HLL (Harten - Lax - Van Leer) . . . . . . . . . . . . . . . . . 77

5.2 Stabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 795.2.1 Positivité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 795.2.2 États stationnaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 805.2.3 Stabilité L2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

6 Complément - Aspects physiques - Dérivation des équations 876.1 Dérivation des équations SW . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87

6.1.1 Conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 886.1.2 Adimensionnement des équations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 896.1.3 Équation de la masse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 906.1.4 Equation de quantité de mouvement . . . . . . . . . . . . . . . . . . 916.1.5 Équation d’énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94

6.2 Analyse linéaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 946.2.1 Relation de dispersion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 946.2.2 Ondes de gravité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 966.2.3 Ondes inertie-gravité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96

2

Page 4: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Chapter 1

Analyse théorique des lois de

conservation scalaires

1.1 Introduction

On considère des problèmes d’évolution d’inconnue upx, tq, où t P R` désigne la variable detemps et x P Rd la variable d’espace. On a u : Rd ˆ R` Ñ K avec K Ă R un sous ensembleconvexe de R. K est communément appelé l’ensemble des états admissibles. On considèrel’EDP du premier ordre:

Btu ` divpfpuqq “ 0 ô Btu `dÿ

i“1

Bxifipuq , t P R

` , x P Rd , (1.1)

où f : R ÝÑ Rd est de classe C8.

Exemple 1.1.1. Obtention d’une loi de conservation. Considérons un fluide compressiblede densité ρpx, tq, se déplaçant à la vitesse upx, tq. Considérons un volume matériel Ω sedéplaçant à la vitesse du fluide, délimité par x1ptq et x2ptq (voir Figure 1):

x1ptq x2ptq

Ωptq

Figure 1: Volume matériel Ω se déplaçant à la vitesse du fluide.

La masse totale de ce volume est donnée par

mptq “ż x2ptq

x1ptq

ρpx, tqdx . (1.2)

3

Page 5: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Remarque 1.1.1. La formule (1.2) peut être vue comme la limite de la somme de Riemannassociée à une subdivision x0 ă ¨ ¨ ¨ ă xn de l’intervalle px1ptq, x2ptqq. Pour n P N et t P R`

fixé, la masse totale est la somme des masses dans chaque rectangle, c’est à dire ρpxi, tq∆x.Cette quantité converge vers mptq lorsque n tend vers `8.

La conservation de la masse s’écritdm

dt“ 0. Or on a:

dm

dt“ż x2ptq

x1ptq

Btρpx, tqdx ` Btx2ptqρpx2ptq, tq ´ Btx1ptqρpx1ptq, tq ,

et en utilisant Btx2ptq “ upx2ptq, tq et Btx1ptq “ upx1ptq, tq:ż x2ptq

x1ptqBtρpx, tqdx `

ż x2ptq

x1ptqBxpρuqpx, tqdx “ 0 .

Par suite, l’intervalle rx1ptq, x2ptqs étant arbitraire:

Btρ` Bxpρuq “ 0 . (1.3)

Un autre point de vue consiste à fixer deux points x1, x2 (ils ne dépendent plus de t), etd’étudier la variation de la masse dans le volume V délimité par x1 et x2 (voir Figure 2)induite par une petite avancée en temps ∆t:

x1

x1 ` ∆tu1 x2 ` ∆tu2

x2

Vupx1, tq upx2, tq

Figure 2: Variation de masse dans le volume fixe V .

En notant Mptq “ż x2

x1

ρpx, tqdx la masse dans le volume fixe V , on a : Mpt ` ∆tq “

Mptq ` ∆tupx1, tqρpx1, tqlooooooooomooooooooonVariation de masse en x1

´ ∆tupx2, tqρpx2, tqlooooooooomooooooooonVariation de masse en x2

. On en déduit:

dM

dt“ lim

∆tÑ0

Mpt ` ∆tq ´ Mptq∆t

“ ρupx1, tq ´ ρupx2, tq “ ´ż x2

x1

Bxpρuqpx, tqdx ,

et l’on retrouve (1.3).

Terminologie

‚ ρ est appelée variable conservative.

‚ fpρq “ ρu est appelé le flux.

4

Page 6: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

‚ On dit que Btu ` Bxfpuq “ 0 est la forme conservative de l’équation.

‚ On dit que Btu ` f 1puqBxu “ 0 est la forme non conservative de l’équation.

Remarque 1.1.2.

‚ Ces équations seront dans la suite associées à un problème de Cauchy à travers ladonnée d’une condition initiale upx, 0q “ u0pxq.

‚ Dans toute la suite, on choisira x P R ou x P Rd de sorte que nous d’aborderons pas leproblème des conditions aux limites.

Exemple 1.1.2. Autres exemples.

‚ Transport linéaire. On se donne a P R˚, et on considère fpuq “ au. L’équation (1.1)s’écrit:

Btu ` aBxu “ 0 ô Btu ` Bxau “ 0 . (1.4)

‚ Equation de Burgers. La fonction de flux est définie par fpuq “ u22, ce qui donne lieuaux équations suivantes:

Btu ` Bx

ˆu2

2

˙“ 0 pforme conservativeq

Btu ` uBxu “ 0 pforme non conservativeq

‚ Modèle de trafic routier. On cherche à modéliser un flot de véhicules sur une routerectiligne sans intersections. On introduit upx, tq la densité linéique de véhicules, etV puq la vitesse de circulation. Un choix possible pour définir V est le suivant: V puq “

Vm

ˆ1 ´

u

um

˙, avec Vm la vitesse maximale et um une densité critique. La conservation

des véhicules peut alors s’écrire:

Btu ` Bx pV puquq “ 0 pforme conservativeq

Btu ` Vm

ˆ1 ´

u

2um

˙Bxu “ 0 pforme non conservativeq

A noter que les formes conservative et non conservative ne sont équivalentes que pour dessolutions régulières. Or, en général, les solutions ne le sont pas.

1.2 Etude des solutions régulières (d=1): méthode descaractéristiques

On considère le problème de Cauchy suivant:"

Btu ` Bxfpuq “ 0 ,upx, 0q “ u0pxq , (1.5)

5

Page 7: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

avec u0 de classe C1.

Définition 1.2.1: Solution régulière

Une solution régulière est une solution de classe C1 sur R ˆ R`.

Dans toute la suite, on notera apuq “ f 1puq.Définition 1.2.2: Courbe caractéristique

Soit upx, tq une solution régulière de (3.2). On appelle courbe caractéristique lafonction t ÞÝÑ xptq où xptq est solution du problème de Cauchy:

"x1ptq “ apupxptq, tqq , t ą 0 ,xp0q “ y .

(1.6)

y est appelé pied de la caractéristique.

Remarquons que si u est solution régulière, on a px, tq ÞÑ apupx, tqq P CpR ˆ R`q. Lethéorème de Cauchy-Lipschitz assure l’existence d’une solution maximale unique sur unintervalle du type r0, T ˚r.

Proposition 1.2.1

Soit x : r0, T ˚rÝÑ R une courbe caractéristique. Alors:

1. Le long de la courbe caractéristique t ÞÑ xptq, la solution u est constante.

2. La courbe t ÞÑ xptq est une droite.

Proof. On s’intéresse au premier point, et on va montrer que t ÞÑ upxptq, tq est constante.

d

dtupxptq, tq “

dxptqdt

Bxupxptq, tq ` Btupxptq, tq

“ a pupxptq, tqq Bxupxptq, tq ` Btupxptq, tq“ Bxf pupxptq, tqq ` Btupxptq, tq “ 0 .

On aborde le second point. Pour tout t P r0, T ˚r, upxptq, tq “ upxp0q, 0q “ upy, 0q “u0pyq. Donc l’équation de la caractéristique devient: x1ptq “ apu0pyqq, et donc xptq “y ` tapu0pyqq.

Ainsi, pour connaitre upx, tq, il faut trouver y, le pied de la caractéristique qui passe parle point xptq, comme illustré dans la Figure 3.

Exemple 1.2.1. Transport linéaire. On considère le problème de Cauchy:"

Btu ` Bxpcuq “ 0 ,upx, 0q “ u0pxq ,

avec fpuq “ cu et c P R˚. On a apuq “ c. L’équation des caractéristiques s’écrit x “y ` ct ô y “ x ´ ct. Pour tout px, tq P R ˆ R`, la caractéristique qui passe par px, tq

6

Page 8: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

x

t

y

px, tq

pente1

apu0pyqq

Figure 3: Caractéristique de pied y associée au point px, tq: on a upx, tq “ u0pyq.

a pour pied y “ x ´ ct. La solution étant constante le long de la caractéristique, on aupx, tq “ u0pyq “ u0px ´ ctq. La condition initiale est transportée à la vitesse c (voir Figure4).

x

t

y “ x ´ at

x

u0pxq u0px ´ ctq

u

px, tq

ct

Figure 4: Caractéristique de pied y associée au point px, tq: on a upx, tq “ u0pyq.

Exemple 1.2.2. Equation de Burgers. On considère l’équation de Burgers avec la conditioninitiale suivante:

$’’’’&

’’’’%

Btu ` Bx

ˆu2

2

˙“ 0 ,

upx, 0q “

$&

%

1 si x ď 0 ,1 ´ x si x P r0, 1s ,0 si x ě 1 .

7

Page 9: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

On a fpuq “ u22, apuq “ f 1puq “ u. L’équation des caractéristiques est donnée parxptq “ y ` apu0pyqqt “ y ` u0pyqt.

‚ Si y ď 0, alors xptq “ y ` t.

‚ Si y P r0, 1s, alors xptq “ y ` p1 ´ yqt.

‚ Si y ě 1, alors xptq “ y.

Par conséquent, les pentes des droites caractéristiques dépendent de y, et peuvent se couper(voir Figure 5). A leur intersection, la solution régulière n’est plus définie (elle est multivar-iée).

1 x

t1

x1

u0pxqupx, tq

u

Figure 5: Caractéristiques pour l’équation de Burgers.

Le problème illustré dans l’exemple précédent est générique. En réalité, dès lors que fn’est pas linéaire, et même si la donnée initiale est aussi régulière que l’on veut, les solutionsrégulières ont en général une durée d’existence finie.

8

Page 10: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Théorème 1.2.1

On se place dans le cas d “ 1. Soit u0 P C1pRq une condition initiale bornée avec u10

bornée.

i) Si a ˝ u0 est croissante, alors il existe une unique solution régulière sur R ˆ R`.

ii) Si a ˝ u0 n’est pas croissante, il existe y tel que pa ˝ u0q1pyq ă 0. On note alors

T ˚ “ ´1

infyPRpa ˝ u0q1pyq. (1.7)

Alors il existe une unique solution classique au problème de Cauchy sur R ˆr0, T ˚r.

iii) Pour t ě T ˚, il n’y a pas de solution régulière.

Proof. i) : Supposons a ˝ u0 croissante. Soit px, tq P R ˆ R`. La fonction y ÞÑ y ` a ˝ u0pyqtest strictement croissante sur R, et donc bijective. Il existe donc un unique y P R tel quexptq “ y`a˝u0pyqt “ x, que l’on notera ypx, tq. En revenant à l’équation y`a˝u0pyqt “ x,on a:

Bty ` Btypa ˝ u0q1pyqt ` a ˝ u0pyq “ 0 ñ Bty r1 ` pa ˝ u0q1pyqts “ ´a ˝ u0pyqBxy ` Bxypa ˝ u0q1pyqt “ 1 ñ Bxy r1 ` pa ˝ u0q1pyqts “ 1

Par suite, en définissant u par upx, tq “ u0pypx, tqq pour tout px, tq P R ˆ R`, on obtient:

Btu ` Bxfpuq “ Bty u10pyq ` a ˝ u0pyq Bx pu0pyqq

“ Bty u10pyq ` a ˝ u0pyq Bxy u

10pyq ,

(1.8)

et en multipliant par 1 ` pa ˝ u0q1pyqt ą 0:

r1 ` pa ˝ u0q1pyqts pBtu ` Bxfpuqq

“´

Bty r1 ` pa ˝ u0q1pyqtsloooooooooooomoooooooooooon´a˝u0pyq

`a ˝ u0pyq Bxy r1 ` pa ˝ u0q1pyqtsloooooooooooomoooooooooooon1

¯u10pyq

“ 0 .

(1.9)

Ceci garantit l’existence d’une solution globale u sur R ˆ R`.Concernant l’unicité, si u est une solution régulière, la Proposition 1.2 garantit que upx, tq “u0pyq, où y est le pied de la courbe caractéristique qui passe par le point px, tq, c’est à direypx, tq.

ii) : Soit t P r0, T ˚r. On considère la fonction ft : y ÞÑ y`a˝u0pyqt. On a limyÑ˘8

ftpyq “ ˘8car u0 est bornée. Par ailleurs, en vertu de la Définition 1.7:

f 1pyq “ 1 ` pa ˝ u0q1pyqt ą 0 ,

9

Page 11: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

et donc ft est strictement croissante. On en déduit qu’il existe un unique réel y “ ypx, tq telque ftpyq “ x, c’est à dire tel que xptq “ y ` a ˝ u0pyqt “ x. Muni de ce résultat, on conclutexactement comme dans le point précédent, à la différence près que la solution u est cettefois définie sur R ˆ r0, T ˚r.

iii) : Considérons à présent t ą T ˚. On a donc t ą ´1

infyPRpa ˝ u0q1pyq, et il existe y˚ P R tel

que1 ` pa ˝ u0q1py˚qt ă 0 .

Revenons à la fonction ft : y ÞÑ y`a˝u0pyqt. Nous avons vu que si la solution est régulière,elle s’écrit forcément upx, tq “ u0pyq où y est le pied de la caractéristique passant par px, tq.On a toujours lim

yÑ˘8ftpyq “ ˘8, avec cette fois f 1

tpy˚q ă 0. Ces éléments fournissent des

indications utiles sur le comportement de ft, illustré à travers la représentation graphiqueproposée dans la Figure 6:

y

x

x0

y1 y˚ y2

Figure 6: Représentation graphique de la fonction ft.

Pour x0 bien choisi, l’équation ftpyq “ x0 admet donc trois racines distinctes, dont l’uneest égale à y˚. Ainsi: "

x0 “ y1 ` pa ˝ u0qpy1qt ,x0 “ y˚ ` pa ˝ u0qpy˚qt , (1.10)

ce qui implique y1 ´ y˚ “ pa ˝ u0qpy˚qt ´ pa ˝ u0qpy1qt. Par conséquent:

y1 ‰ y˚ ñ pa ˝ u0qpy˚q ‰ pa ˝ u0qpy1q ñ u0py˚q ‰ u0py1q ,ce qui implique que upx0, tq est multivaluée.

Exercice 1.2.1. Explosion en temps fini (1). Soit u “ upx, tq une solution régulière définiesur R ˆ r0, T r avec T P R`. Montrer que

Bxupx, tq r1 ` pa ˝ u0q1pyqts “ u10pyq ,

où y désigne le pied de la caractéristique passant par px, tq. En déduire que si a ˝ u0 n’estpas croissante, alors T ď T ˚.

On a upx, tq “ u0pyq, où x “ y ` pa ˝ u0qpyqt, avec y “ ypx, tq. Il en résulte:

Bxupx, tq “ Bx rx ´ pa ˝ u0qpyqtsu10pyq .

“ r1 ´ Bxy pa ˝ u0q1pyq tsu10pyq

“ u10pyq ´ pa ˝ u0q1pyq t Bxy u

10pyqlooomooon

Bxpu0pyqq

,

10

Page 12: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

et doncBxupx, tq p1 ` pa ˝ u0q1pyqtq “ u1

0pyq , @px, tq P R ˆ r0, T r . (1.11)

Supposons que a ˝ u0 n’est pas croissante. On a donc T ˚ “ ´1

infyPRpa ˝ u0q1pyqă `8.

Supposons T ą T ˚. Alors il existe un réel t tel que T ˚ ď t ď T et t “ ´1

pa ˝ u0q1py0qavec

y0 P R, et donc le membre de droite dans (1.11) est nul. Notons que pa ˝ u0q1py0q ă 0 ñu10py0q ‰ 0, ce qui est incompatible avec (1.11).

Exercice 1.2.2. Explosion en temps fini (2). On considère une solution régulière de classeC2 définie sur R ˆ r0, T r avec T P R`. On pose:

vpx, tq “ pa1 ˝ uqpx, tq Bxupx, tq , @px, tq P R ˆ r0, T r ,

et pour toute courbe caractéristique Xptq de pied y, on définit wyptq “ vpXptq, tq.

1. Montrer que wy satisfait l’équation de Ricatti:

d

dtz “ ´z2 , (1.12)

Rappelons que la caractéristique Xptq de pied y est définie par Xptq “ y ` pa ˝ u0qpyqt.On a:

d

dtwy “

d

dtrpa1 ˝ uqpXptq, tq BxupXptq, tqs

“d

dtXptqBx rpa1 ˝ uq ˆ Bxus pXptq, tq ` Bt rpa1 ˝ uq ˆ Bxus pXptq, tq

“ pa ˝ u0qpyqloooomoooonpa˝uqpXptq,tq

“a2 ˝ u ˆ pBxuq2 ` pa1 ˝ uq ˆ B2

xu‰

pXptq, tq

`“a2 ˝ u ˆ pBxuBtuq ` pa1 ˝ uq ˆ B2

xtu‰

pXptq, tq“ pa2 ˝ uq Bxu rpa ˝ uqBxu ` Btus ` pa1 ˝ uq

“pa ˝ uqB2

xu ` B2xtu

‰.

On a pa ˝ uqBxu ` Btu “ 0 car u est solution régulière, ce qui entraîne la nullité dumembre de gauche dans la dernière égalité. Concernant l’autre membre:

B2xtu “ Bx pBtuq “ ´Bx ppa ˝ uqBxuq

“ ´pa ˝ uqB2xu ´ pa1 ˝ uq pBxuq2 ,

et doncd

dtwy “ ´pa1 ˝ uq ˆ pa1 ˝ uq pBxuq2 “ ´pwyq2 .

2. Montrer que wyptq “v0pyq

1 ` tv0pyq, où v0pyq “ vpy, 0q.

Un calcul élémentaire donne que toute fonction de la forme zptq “α

1 ` αtavec α ą 0,

t P r0, 1αr est solution de (1.12). On conclut avec wyp0q “ vpXp0q, 0q “ vpy, 0q “v0pyq.

11

Page 13: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

3. En déduire que si a ˝ u0 n’est pas croissante, alors T ď T ˚. Comme précédemment, sia ˝ u0 n’est pas croissante, on a T ˚ ă `8 et pour tout T ą T ˚, il existe y0 P R tel que

pa ˝ u0q1py0q ă 0 et T ď t “ ´1

pa ˝ u0q1py0qď T . Considérons la caractéristique X0ptq

issue de y0. En revenant à (1.11), on a BxupX0p0q, 0q “ u10py0q, et donc

vpX0p0q, 0q “ pa1 ˝ uqpX0p0q, 0q ˆ BxupX0p0q, 0q“ pa1 ˝ u0qpy0q u1

0py0q “ pa ˝ u0q1py0q ,

de sorte tv0py0q “ ´1, et on conclut comme dans l’exercice précédent.

Dès lors le problème est de trouver une stratégie pour définir les solutions au delà dutemps T ˚. A cet effet, on introduit la notion de solution faibles, c’est à dire de solution ausens des distributions.

1.3 Solutions faibles

Revenons au problème "Btu ` Bxfpuq “ 0 ,upx, 0q “ u0pxq . (1.13)

Pour simplifier l’analyse et les notations, on se placera dans le cadre d “ 1, en gardant àl’esprit que les prochains développements se généralisent en dimension supérieure.

Définition 1.3.1: Solution faible

Soit u0 P L8locpRq. On dit que u est solution faible de (1.13) sur R ˆ r0, T r si u P

L8locpRˆs0, T rq et

ż T

0

ż

R

puBtφ ` fpuqBxφq dxdt `ż

R

u0pxqφpx, 0qdx “ 0 , @φ P DpR ˆ r0, T rq .

Remarque 1.3.1.

‚ Si T “ `8, on dit que la solution est globale sur R ˆ R`.

‚ Dans la définition Supppφq Ă R ˆ r0, T r et non pas Supppφq Ă Rˆs0, T r, sinon lacondition initiale ne serait pas prise en compte à travers le terme:

ż

R

u0pxqφpx, 0qdx .

Proposition 1.3.1

Si u est régulière, alors u est solution faible si et seulement si u est solution classique.

12

Page 14: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Proof. Supposons u régulière. Pour tout φ P DpR ˆ r0, T rq, on a:

ż T

0

ż

R

puBtφ ` fpuqBxφq dxdt `ż

R

u0pxqφpx, 0qdx

“ż T

0

ż

R

pBtu ` Bxfpuqqφdxdt `ż

R

pu0pxq ´ upx, 0qqφpx, 0qdx .

ð: Supposons que u soit solution classique. Alors le membre de droite dans l’égalité précé-dente est nul pour toute fonction φ P DpR ˆ r0, T rq. Ceci implique la nullité du membre degauche, et donc u est solution faible.ñ: Supposons que u soit solution faible. Cette fois, le membre de gauche est nul pour toutφ P DpR ˆ r0, T rq. En particulier, pour tout φ P DpRˆs0, T rq, on a:

ż T

0

ż

R

pBtu ` Bxfpuqqφdxdt ,

ce qui implique Btu ` Bxfpuq “ 0 pour tout x P R et tout t ą 0. Par suite, on aż

R

pu0pxq ´ upx, 0qqφpx, 0qdx “ 0 pour tout φ P DpR ˆ r0, T rq, et donc:

ż

R

pu0pxq ´ upx, 0qqψpxqdx “ 0 , @ψ P DpRq . (1.14)

Par conséquent u0pxq “ upx, 0q pour tout x P R, ce qui permet de conclure que u est solutionrégulière de (1.13).

La définition précédente donne la possibilité de considérer des solutions faibles discontin-ues. Cependant, ces solutions n’admettent pas n’importe quelle discontinuité. La théorèmequi suit précise les conditions que doit vérifier une solution faible régulière de part et d’autred’une courbe régulière de discontinuité.

Théorème 1.3.1

Soit u P L8locpRˆs0, T rq de classe C1 en dehors d’une courbe régulière Γ séparant

Rˆs0, T r en deux composantes connexes Ω´ et Ω`. Alors il s’agit d’une solutionfaible si et seulement si:

‚ C’est une solution régulière dans Ω´ et Ω`.

‚ Le long de Γ, les sauts rus de u et rfpuqs de fpuq sont reliés par la relation deRankine-Hugoniot:

ntrus ` nxrfpuqs “ 0 , (1.15)

où %n “ pnx, ntq est un vecteur unitaire normal à Γ qui pointe vers la droitepnx ą 0q.

Proof. Voir cas système

13

Page 15: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

x

nx

nt

%n

ΓΩ´

Ω`

t

Figure 7: Relation de Rankine-Hugoniot: séparation du domaine en deux composantes con-nexes Ω´,Ω` par une courbe de discontinuité Γ.

Remarque 1.3.2. Comme f est de classe C1, si u est bornée (à valeurs dans un intervallera, bs par exemple), alors il existe M ą 0 tel que pour tout u P ra, bs, on a |fpuq| ď M |u|.Alors, par la relation (1.15), en tout point px, tq P Γ, on a

|ntpx, tq| ď M |nxpx, tq| , (1.16)

Si la courbe est définie par l’ensemble des points du plan Mpx, tq tels que Γpx, tq “ 0,la normale au point px, tq est donnée par %n “ tpnx, ntq “ ∇Γpx, tq. Or %n, la normale aupoint px, tq, étant un vecteur unitaire, la relation (1.16) assure que BxΓpx, tq ‰ 0. Uneapplication directe du théorème des fonctions implicites assure que Γpx, tq “ 0 ô x “ Xptqavec X 1ptq “ ´

nt

nx

. La relation (1.15) s’écrit alors:

rfpuqs “ σptqrus , σptq “ X 1ptq “ ´nt

nx

. (1.17)

Exemple 1.3.1. Equation de Burgers. On considère à nouveau l’équation Btu`Bx

ˆu2

2

˙“ 0.

On cherche une solution sous la forme:

upx, tq “"

uL si x ă σt ,uR si x ą σt ,

avec uL, uR P R et σ P R, c’est à dire une discontinuité entre deux états constants sepropageant à une vitesse constante σ. La relation (1.17) donne:

ˆu2R

2

˙´

ˆu2L

2

˙“ σ puR ´ uLq ñ σ “

uL ` uR

2.

La solution est donc un choc se propageant à vitesse σ “uL ` uR

2.

14

Page 16: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Le principal problème avec l’introduction de solutions faibles est que l’on perd l’unicité

des solutions. Par exemple, si l’on revient à l’équation de Burgers Btu ` Bx

ˆu2

2

˙“ 0, avec

la condition initiale upx, 0q “ 0, on peut aisément vérifier que pour tout s ą 0, la fonction

upx, tq “

$’’&

’’%

0 si x ă ´2s ,´2s si ´ 2s ă x ă 0 ,2s si 0 ă x ă 2s ,0 si x ą 2s ,

est solution faible. On démontre ainsi qu’il y a une infinité (non dénombrable) de solutionsfaibles. Nous allons voir que l’on peut récupérer l’unicité des solutions à travers le conceptde solution entropique.

1.4 Solutions entropiques

On cherche un critère qui va permettre de sélectionner l’unique solution physique parmitoutes les solutions faibles. Les lois de conservation du type Btu ` Bxfpuq “ 0 sont souventdes approximations de lois du type

Btu ` Bxfpuq “ εBxxu , (1.18)

où l’on a négligé le terme de diffusion εBxxu (viscosité physique). On peut considérer que les"bonnes" solutions faibles sont celles qui sont limites de solutions uε de (1.18) lorsque ε tendvers 0. Il semble donc pertinent d’identifier une information propre aux solutions de (1.18)qui persiste lors du passage à la limite uε Ñ u.

Soit E : R ÝÑ R une fonction convexe de classe C2 (on a donc E2 ą 0). En multipli-ant (1.18) par E 1puεq:

E 1puεqBtuε ` E 1puεqf 1puεqBxuε “ εE 1puεqBxxuε ,

puis en définissant F puq telle que F 1puq “ E 1puqf 1puq, on obtient:

BtEpuεq ` BxF puεq “ εBxx pEpuεqq ´ εpBxuεq2E2puεq , (1.19)

et donc BtEpuεq`BxF puεq´εBxx pEpuεqq ď 0. Cette forme conservative nous permet d’espérerpasser à la limite dans une forme faible. Formellement, en passant à la limite ε Ñ 0:

BtEpuq ` BxF puq ď 0 .

Définition 1.4.1: Entropie

Soit E une fonction strictement convexe de R dans R de classe C1. On dit que E estune entropie de l’équation Btu` Bxfpuq “ 0 s’il existe une fonction F de R dans R declasse C1 telle que F 1 “ E 1f 1. La fonction F est appelée flux d’entropie.

15

Page 17: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Remarque 1.4.1. Cette définition s’étend aux fonctions E qui sont seulement continues.Dans ce cas, on peut définir un flux F via l’introduction de suites régularisantes.

Exemple 1.4.1. Entropies de Kruzkov. Les entropies de Kruzkov sont définies parEpuq “ |u ´ k| pour tout u P R, où k est une constante réelle. Si on pose F puq “

f 1puqEpuq´f 1pkqEpkq´ż u

k

f 2pyqEpyqdy, on peut montrer que F puq “ pfpuq´fpkqqsgnpu´kq.

Définition 1.4.2: Solution entropique

Soit u P L8locpRˆs0, T rq. On dit que c’est une solution entropique du problème de

Cauchy "Btu ` Bxfpuq “ 0 ,upx, 0q “ u0pxq , (1.20)

si pour toute entropie continue convexe E associée à un flux F , on a:

ż T

0

ż

R

pEpuqBtφ ` F puqBxφq dxdt`ż

R

Epu0pxqqφpx, 0qdx ě 0 , @φ P DpRˆr0, T rq ,φ ě 0 .

La notion de solution entropique contient la notion de solution faible:

Proposition 1.4.1

Soit u P L8locpRˆs0, T rq une solution entropique de (1.20), avec u0 P L8pRq. Alors u

est solution faible de (1.20).

Proof. Supposons que u et u0 soient à valeurs dans un intervalle borné ra, bs Ă R. Ecrivonsl’inégalité d’entropie pour Epuq “ |u ´ a|.

ż T

0

ż

R

ppu ´ aqBtφ ` pfpuq ´ fpaqqBxφq dxdt `ż

R

pu0pxq ´ aqφpx, 0qdx ě 0

ñż T

0

ż

R

puBtφ ` fpuqBxφq dxdt `ż

R

u0pxqφpx, 0qdx

´

¨

˚˝a

ż T

0

ż

R

Btφdxdt ` fpaqż T

0

ż

R

Btφdxdt ` a

ż

R

φpx, 0qdxlooooooooooooooooooooooooooooooooomooooooooooooooooooooooooooooooooon

“0

˛

‹‹‚ě 0 .

Un calcul analogue impliquant Epuq “ |u´ b| donne l’inégalité dans l’autre sens. On obtientdonc:

ż T

0

ż

R

puBtφ ` fpuqBxφq dxdt `ż

R

u0pxqφpx, 0qdx “ 0 , @φ P DpR ˆ r0, T rq ,φ ě 0 ,

Pour étendre ce résultat à φ P DpR ˆ r0, T rq quelconque, on écrit φ “ φ` ´ φ´ avec φ` “|φ| ` φ

2ě 0 et φ´ “

|φ| ´ φ

2ě 0, et on conclut avec la linéarité de l’intégrale.

16

Page 18: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Remarque 1.4.2.

‚ Les inégalités d’entropie pour les seules fonctions de la forme Epuq “ |u ´ k| suffisentà obtenir toutes les inégalités d’entropie. Nous ne démontrerons pas ce résultat ici.

‚ La définition des solutions entropiques introduit de l’irréversibilité: si upx, tq est unesolution faible entropique sur R ˆ r0, T s, alors vp´x, T ´ tq est solution faible de

"Btv ` Bxfpvq “ 0 ,vpx, 0q “ upx,´T q , (1.21)

mais ce n’est pas une solution entropique, car on a BtEpuq ` BxF puq ě 0 au sens faible(sauf si bien sûr ces inégalités sont des égalités).

Théorème 1.4.1: Solutions entropiques discontinues

Soit u P L8locpRˆs0, T rq de classe C1 en dehors d’une courbe régulière Γ. Alors u est

solution faible entropique si et seulement si:

‚ C’est une solution classique

‚ Le long de Γ on a l’inégalité:

σrEpuqs ě rF puqs (1.22)

pour toute entropie E et flux associé F , avec σ “ ´nt

nx

et %n qui pointe vers la

droite pnx ą 0q.

Exercice 1.4.1. Cas où f est strictement convexe. Considérons le cas d’un flux f strictementconvexe. Pour un couple entropie/flux pE, F q, on considère la fonction définie sur Rz tu´u.

Zpuq “fpuq ´ fpu´q

u ´ u´

`Epuq ´ Epu´q

˘´

`F puq ´ F pu´q

˘. (1.23)

1. Montrer que Z peut être prolongée par continuité en u´.On a:

limuÑu´

fpuq ´ fpu´qu ´ u´

“ f 1pu´q ,

limuÑu´

Epuq ´ Epu´qu ´ u´

“ E 1pu´q

limuÑu´

F puq ´ F pu´qu ´ u´

“ F 1pu´q “ f 1pu´qE 1pu´q ,

ce qui permet de conclure en posant Zpu´q “ 0.

17

Page 19: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

2. Montrer que Z est décroissante. Le calcul donne:

Z 1puq “f 1puq pu ´ u´q ´ pfpuq ´ fpu´qq

pu ´ u´q2`Epuq ´ Epu´q

˘

`fpuq ´ fpu´q

u ´ u´E 1puq ´ F 1puq .

“f 1puq pu ´ u´q ´ fpuq ` fpu´q

pu ´ u´q2`Epuq ´ Epu´q

˘

`fpuq ´ fpu´q ´ f 1puqpu ´ u´q

u ´ u´E 1puq .

“pf 1puq pu ´ u´q ´ fpuq ` fpu´qq pEpuq ´ Epu´q ´ pu ´ u´qE 1puqq

pu ´ u´q2.

Par suite, f et E étant strictement convexes:

fpu´q ď fpuq ``u´ ´ u

˘f 1puq et Epu´q ď Epuq `

`u´ ´ u

˘E 1puq ,

de sorte que les deux termes du produit au numérateur sont de signe opposé, d’où lerésultat.

3. Montrer qu’un choc impliquant deux états pu`, u´q est une solution faible entropiquesi et seulement si Zpu`q ě 0. En déduire que ce choc est admissible si et seulement siu´ ą u`.

Nous avons vu via (1.22) qu’un tel choc correspond à une solution faible entropique siet seulement si

fpu`q ´ fpu´qu` ´ u´

“ σ et σ`Epu`q ´ Epu´q

˘ě

`F pu`q ´ F pu´q

˘,

où σ est la vitesse du choc. En d’autres termes, un choc est admissible si et seulementsi:

fpu`q ´ fpu´qu` ´ u´

`Epu`q ´ Epu´q

˘´

`F pu`q ´ F pu´q

˘ě 0 ,

c’est à dire Zpu`q ě 0. Par suite, Z étant décroissante et Zpu´q “ 0, on aboutit à lacondition nécessaire et suffisante u` ă u´. A noter que cette condition est indépen-dante du choix du couple pE, F q dans la définition de Z.

4. En déduire que l’inégalité d’entropie au sens faible pour un seul couple entropie/fluxsuffit à obtenir toutes les inégalités d’entropie.

Supposons que la solution u soit entropique au sens faible pour un couple entropie/fluxpE0, F0q. Si u est régulière, alors elle vérifie toutes les inégalités d’entropie au sens fort,c’est à dire qu’on a BtEpuq ` BxpF puqq pour tout couple entropie/flux. Supposons quela solution consiste en un choc séparant deux états u`, u´ à travers une courbe Γ.Considérons alors la fonction Z0 définie par (1.23) construite sur la base du couplepE0, F0q. L’inégalité d’entropie étant vérifiée au sens faible pour ce couple particulier,on a u´ ą u`. Par suite, en vertu de ce qui précède, Zpu`q ě 0 pour tout coupleentropie/flux pE, F q, c’est à dire que (1.22) est vérifiée pour tout couple entropie/fluxpE, F q.

18

Page 20: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Nous avons donc la propriété suivante:

Proposition 1.4.2: Cas d’un flux strictement convexe

Si f est strictement convexe, l’inégalité d’entropie au sens faible pour une seule entropiestrictement convexe E suffit à obtenir toutes les inégalités d’entropie. En particulier,la condition de choc entropique est équivalente à u´ ą u` le long de toute courbe dediscontinuité Γ.

Exemple 1.4.2. Equation de Burgers. Revenons à l’équation de Burgers Btu ` Bx

ˆu2

2

˙,

avec des solutions faibles de la forme:

upx, tq “"

uL si x ă σt ,uR si x ą σt ,

avec σ “uL ` uR

2. D’après le résultat précédent, on sait déjà que la solution est entropique

si et seulement si uL ą uR. On peut vérifier ce résultat directement, en revenant à (1.22),

avec par exemple Epuq “ u2 et F puq “2

3u3. On a:

´σrEpuqs ` rF puqs ď 0 ô ´uL ` uR

2

`u2R ´ u2

L

˘`

2

3

`u3R ´ u3

L

˘ď 0

ô1

6

`u3R ´ u3

L

˘ď 0 .

Cette inégalité est vérifiée ssi uL ą uR.

1.5 Résultats d’existence et d’unicité

Commençons par introduire l’espace fonctionnel des fonctions à variation bornée: Soit Ω unouvert de Rd. Pour u P L1

locpRq, on définit la variation totale de u par:

TVΩpuq “ sup

Ω

u divpϕq , ϕ P C1c pΩqd , ϕL8pΩqd ď 1

*.

Définition 1.5.1

Une fonction u P L1locpΩq est dite à variation bornée sur Ω si TVΩpuq ă `8. On note:

BV pΩq “"u P L1

locpΩq , TVΩpuq ă `8(. (1.24)

Nous admettrons les trois résultats fondamentaux suivants:Théorème 1.5.1: Unicité

Pour toute donnée initiale u0 P L8pRdq, il existe une unique solution entropique de(1.13) u P L8pRd ˆ R`q X C0pr0, T s, L1

locpRdqq.

19

Page 21: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Théorème 1.5.2: Existence

Soit u0 P pL8 X L1 X BV q pRdq. Alors il existe une solution faible entropique u duproblème (1.13), avec u P L8pRd ˆ R`q X C0pr0, T s, L1

locpRdqq pour tout T ą 0. Cettesolution vérifie les estimations suivantes:

i) up., tqL8pRdq ď u0L8pRdq p.p. t ě 0.

ii) up., tq P BV pRdq et TV pup., tqq ď TV pu0q p.p. t ě 0.

iii) up., tq ´ up., sqL1pRdq ď C TV pu0q|t ´ s|, avec t, s ě 0.

iv)ż

Rd

upx, tqdx “ż

Rd

u0pxqdx p.p. t ě 0.

Théorème 1.5.3: Unicité (Kruzkov)

Soient u et v deux solutions entropiques de donnée initiale u0 et v0 danspL8 X L1 X BV q pRdq. On pose M “ max|λ|ďuL8

|λ|ďvL8

|f 1pλq|. Alors, pour tout R ą 0

et tout t ě 0:ż

xďR

|upx, tq ´ vpx, tq|dx ďż

|x|ďR`Mt

|u0pxq ´ v0pxq|dx . (1.25)

Remarque 1.5.1.

‚ Si u0 “ v0, alors u “ v p.p. : c’est une conséquence importante du théorème, qui assurel’unicité des solutions (p.p.) pour une condition initiale donnée.

‚ Les domaines d’intégration dans (1.25) font ressortir le cône d’influence : la solution au pointpx, tq ne peut être impactée que par les valeurs comprises dans l’intervalle sx ´ Mt, x ` Mtrau temps 0 (M majore la vitesse de propagation de l’information).

‚ Ce résultat se démontre en utilisant les entropies de Kruzkov.

‚ L’existence est assurée par u0 P L8pRdq, et l’unicité par u0 P pL8 X L1 X BV q pRdq.‚ L’opérateur solution est contractant dans L1pRdq. Si u0, v0 P L8pRdq et u0 ´ v0 P L1pRdq,alors up., tq ´ vp., tq P L1pRdq et:

up., tq ´ vp., tqL1pRdq ď u0 ´ v0L1pRdq .

Rappelons aussi que dans ces conditions on a la conservation de la masse (il suffit d’intégrerl’équation (1.13) en espace):

ż

Rd

pupx, tq ´ vpx, tqq dx “ż

Rd

pu0pxq ´ v0pxqq dx,

ce qui implique, en particulier que si u0 P L1pRdq, alors up., tq P L1pRdq et

up., tqL1pRdq ď u0L1pRdq ,

ż

Rd

upx, tqdx “ż

Rd

u0pxqdx .

20

Page 22: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

‚ On déduit de ce qui précède le principe du maximum:

u0 ď v0 p.p. ñ uptq ď vptq p.p. . (1.26)

En effet:

up., tq ´ vp., tqL1 ď u0 ´ v0L1 “ż

Rd

pv0 ´ u0qdx “ż

Rd

pvp., tq ´ up., tqqdx ,

et d’autre partż

Rd

pvp., tq ´ up., tqqdx ď vp., tq ´ up., tqL1. On en déduit queż

Rd

”|vp., tq ´up., tq| ´ pvp., tq ´up., tqq

ı“ 0, c’est à dire vp., tq ´up., tq “ |vp., tq ´up., tq| p.p.,

ou encore vp., tq ě up., tq p.p.

1.6 Le problème de Riemann en 1d

On s’intéresse à l’unique solution entropique du problème de Cauchy suivant (appelé prob-lème de Riemann): $

&

%

Btu ` Bxfpuq “ 0 ,

upx, 0q “"

uL si x ă 0 ,uR si x ą 0 .

(1.27)

Définition 1.6.1

‚ On appelle onde de choc une solution de (1.27) composée de deux états con-stants uL, uR séparés par une discontinuité de vitesse σ P R:

upx, tq “"

uL si x ă σt ,uR si x ą σt .

‚ On appelle onde de détente une solution continue de (1.27) et C1 par morceauxdu type upx, tq “ vpxtq.

Lemme 1.6.1

Les ondes de détente sont du type upx, tq “ cte ou bien upx, tq “ vpxtq, où vpξq “pf 1q´1pξq.

Proof. Soit upx, tq “ vpxtq une solution. On injecte dans l’équation (1.27):

´x

t2v1pxtq ` f 1pvpxtqq

1

tv1pxtq “ 0 , @px, tq P pR ˆ R

˚`q .

par suite, soit v est constante, auquel cas upx, tq “ cte, ou bien pf 1 ˝ vqpξq “ ξ pour toutξ.

Remarque 1.6.1. Une solution qui ne dépend que de xt est dite auto-semblable ouauto-similaire.

21

Page 23: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

1.6.1 La condition d’Oleinik

Il s’agit d’un critère graphique pour savoir si une discontinuité entre deux états distincts u´

et u` se propageant à la vitesse σ est bien entropique. Rappelons que par la condition deRankine-Hugoniot (1.17), on a:

´ σrus ` rfpuqs “ 0 . (1.28)

D’autre part, la solution est entropique si et seulement si

@k P R , ´σr|u ´ k|s ` rsgnpu ´ kqpfpuq ´ fpkqqs ď 0 . (1.29)

Considérons alors l’intervalle I d’extrémités u´ et u`.

‚ Si k R I, alors on a (1.29) grâce à (1.28).

‚ Si k P I, alors k “ au´ ` p1 ´ aqu` avec a P r0, 1s. On a:

r|u ´ k|s “ |u` ´ k| ´ |u´ ´ k| “ |apu´ ´ u`q| ´ |p1 ´ aq pu` ´ u´q |“ p2a ´ 1q|u´ ´ u`| .

D’autre part,

rsgnpu ´ kqpfpuq ´ fpkqqs “ sgnpu` ´ kqpfpu`q ´ fpkqq ´ sgnpu´ ´ kqpfpu´q ´ fpkqq“ sgnpu` ´ u´qpfpu`q ´ fpkqq ´ sgnpu´ ´ u`qpfpu´q ´ fpkqq“ sgnpu` ´ u´q pfpu`q ` fpu´q ´ 2fpkqq .

Ainsi, la solution est entropique si et seulement si:

´rfpuqs

rusp2a ´ 1q |u` ´ u´| ` sgnpu` ´ u´q pfpu`q ` fpu´q ´ 2fpkqq ď 0 ,

ou encore:

sgnpu` ´ u´q p2a ´ 1q rfpuqs ě sgnpu` ´ u´q pfpu`q ` fpu´q ´ 2fpkqq .

On vérifie que cette condition s’écrit:Si u´ ă u` : fpau´ ` p1 ´ aqu`q ě afpu´q ` p1 ´ aqfpu`q.Si u` ă u´ : fpau´ ` p1 ´ aqu`q ď afpu´q ` p1 ´ aqfpu`q.

Ces deux configurations sont représentés dans la Figure 8. On en déduit la propositionsuivante:

Proposition 1.6.1: Critère d’Oleinik

Une discontinuité pu´, u`q est entropique ssi:Si u´ ă u` : le graphe de f|ru´,u`s est au dessus de sa corde.Si u` ă u´ : le graphe de f|ru`,u´s est au dessous de sa corde.

22

Page 24: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

uu`

admissible

non admissible

u´ u´

fpuq

uu`

admissible

non admissible

u´ u´

fpuq

Figure 8: Critère d’Oleinik. Les cas u´ ă u` (gauche) et u` ă u´ (droite)

On déduit de ce critère le critère de Lax (exercice):

Proposition 1.6.2: Critère de Lax.

Si Γ est une discontinuité entre u´px, tq et u`px, tq se propageant à la vitesse σptq,alors:

f 1pu`px, tqq ď σptq ď f 1pu´px, tqq . (1.30)

Ces conditions sont communément appelées inégalités de Lax.

1.6.2 Résolution pratique des problèmes de Riemann

Théorème 1.6.1

L’unique solution faible entropique des problèmes de Riemann (1.27) est constituée desdeux états constants uL et uR, séparés par des chocs et des détentes. Cette solutionest auto-similaire.

Proof.

i) Cas d’un flux strictement convexe.

‚ Si uR ă uL, f étant convexe, le graphe de f|ruR,uLs est en dessous de sa corde. Il

s’agit donc d’un choc admissible qui se propage à la vitesse σ “fpuRq ´ fpuLq

uR ´ uL

:

c’est l’unique solution.

‚ Si uL ă uR, on établit que la solution est une onde de détente. Notons que commef 2 ą 0, f 1 est monotone et est donc inversible. On pose alors:

upx, tq “

$’&

’%

uL si x ă σLt ,

pf 1q´1

´x

t

¯si σLt ă x ă σRt ,

uR si x ą σRt ,

23

Page 25: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

avec la condition de continuité uL “ pf 1q´1pσLq et uR “ pf 1q´1pσRq, c’est à direσL “ f 1puLq et σR “ f 1puRq. Notons que l’on a bien σL ă σR car f 1 est croissante.

ii) Cas d’un flux strictement concave. Si f est strictement concave (donc f 2 ă 0, f 1

décroissante), un raisonnement analogue donne un choc admissible dans le cas uL ă uR

et une onde de détente si uL ą uR.

iii) Cas général. On supposera ici que f admet un nombre fini de points d’inflexion.

‚ Si uL ă uR, on construit l’enveloppe convexe inférieure fc de f sur le segmentI “ ruL, uRs. Par définition:

fc “ supg convexe sur I

gďf sur I

g .

Là où f ” fc, on a une détente, et là où f ą fc, on a un choc admissible. Uneillustration est donnée en Figure (9).

uuRuLu1 u2 u3

fpuq

détentechoc

détentechoc

x

uL

u1

u2

u3

uR

u

Figure 9: Résolution pratique du problème de Riemann dans le cas général (uL ă uR). Con-struction de l’enveloppe convexe inférieure fc (gauche), et connexion des états intermédiaires(droite).

‚ Si uR ă uL, on construit l’enveloppe concave supérieure f c de f sur le segmentI “ ruR, uLs:

f c “ supg concave sur I

gěf sur I

g .

Là où f ” f c, on a une détente, et là où f ą f c, on a un choc admissible. Uneillustration est donnée en Figure (10).

Exemple 1.6.1.

24

Page 26: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

uuLuRu1 u2 u3

fpuq

détentechoc

détentechoc

x

uR

u1

u2

u3

uL

u

Figure 10: Résolution pratique du problème de Riemann dans le cas général (uR ă uL). Con-struction de l’enveloppe concave supérieure f c (gauche), et connexion des états intermédiaires(droite).

Cas d’un flux strictement convexe : équation de BurgersOn considère l’équation de Burgers associée à la donnée initiale suivante:

$’’&

’’%

Btu ` Bx

ˆu2

2

˙“ 0 ,

upx, 0q “"

2 si x ă 1 ,´1 si x ą 1 .

(1.31)

Un calcul préliminaire donne que les caractéristiques sont données par

xptq “ y ` u0pyqt “"

y ` 2t si y ă 1 ,y ´ t si y ą 1 .

Le flux f est strictement convexe, et on a uL “ 2 ą uR “ ´1. On sait donc que l’on peut

connecter ces deux états par un choc admissible de vitesse2 ` p´1q

2“ 12, centré en x “ 1.

L’équation de l’onde de choc est donc donnée par γptq “ 1`1

2t. La solution est donnée par:

upx, tq “

$’&

’%

2 si x ă 1 `1

2t ,

´1 si x ą 1 `1

2t .

La Figure (11) illustre les caractéristiques de part et d’autre de la courbe de choc.On considère à présent la condition initiale:

upx, 0q “"

´1 si x ă 1 ,2 si x ą 1 .

25

Page 27: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

1

t

x

γptq “ 1 ` t2

Figure 11: Caractéristiques et courbes de choc.

On est dans la configuration uL ă uR avec f convexe: la solution est donc une onde dedétente reliant uL à uR. On a fpuq “ u, de sorte que pf 1q´1puq “ u, σL “ f 1puLq “ ´1 etσR “ f 1p2q “ 2. La solution est donc:

upx, tq “

$’&

’%

´1 si x ă 1 ´ t ,x ´ 1

tsi 1 ´ t ă x ă 1 ` 2t ,

2 si x ą 1 ` 2t .

Cas d’un flux strictement concave.On considère l’équation suivante:

$&

%

Btu ` Bx pfpuqq “ 0 ,

upx, 0q “"

1 si x ă 1 ,0 si x ą 1 ,

(1.32)

avec fpuq “up2 ´ uq

2. Le flux f est concave pf 1puq “ 1 ´ u, f 2 “ ´1q. Les caractéristiques

sont données par:

xptq “ y ` f 1pu0pyqqt “"

y si y ă 1 ,y ` t si y ą 1 .

(1.33)

On a uL “ 1 ą uR “ 0 avec f concave: la solution est une onde de détente centrée en x “ 1.On a pf 1q´1puq “ 1 ´ u, σL “ f 1p1q “ 0 et σR “ f 1p0q “ 1, de sorte que:

upx, tq “

$’&

’%

1 si x ă 1 ,

1 ´x ´ 1

tsi 1 ă x ă 1 ` t ,

0 si x ą 1 ` t .

Considérons à présent la condition initiale

upx, 0q “"

0 si x ă 1 ,1 si x ą 1 .

(1.34)

On vérifie que la solution est un choc de vitesse σ “ 12 reliant uL “ 0 à uR “ 1.

26

Page 28: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Cas d’un flux ni convexe ni concave. On considère l’équation Btu ` Bxfpuq “ 0, avecfpuq “ sinpπuq. On considère dans un premier temps la condition initiale suivante:

upx, 0q “"

1 si x ă 0 ,´1 si x ą 0 ,

fc

f c

´u˚ u˚

Figure 12: Enveloppe convexe inférieure fc et enveloppe concave supérieure f c associée à fsur r´1, 1s.

On a uL “ 1 ą uR “ ´1, donc on considère l’enveloppe concave supérieure f c associéeà f sur r´1, 1s. En notant u˚ le point où f c coïncide avec f (caractérisé par f 1pu˚q “fp´1q ´ fpu˚q

´1 ´ u˚, c’est à dire π cospπu˚q p1 ` u˚q “ sinpπu˚q), on a f ą f c sur l’intervalle

r´1, u˚s et f ” f c sur ru˚, 1s. Dans un premier temps, un choc admissible de vitesse

σ˚ “fp´1q ´ fpu˚q

´1 ´ u˚va connecter uR “ ´1 à u˚. Par suite, on connecte l’état u˚ à uL “ 1

par une détente délimitée par les ondes σ˚ “ f 1pu˚q et σL “ f 1puLq “ π cospπq “ ´π. Anoter que l’on a pf 1q´1pξq “ arccospξπqπ pour tout ξ Ps0, πr. Au final, la solution estdonnée par:

upx, tq “

$’&

’%

1 si x ă ´πt ,1

πarccos

´ x

¯si ´ πt ă x ă σ˚t ,

´1 si x ą σ˚t ,

avec σ˚ “ π cospπu˚q “fp´1q ´ fpu˚q

´1 ´ u˚. On vérifie que

1

πarccos p´1q “ 1 “ uL et

1

πarccos

ˆσ˚

π

˙“ u˚, de sorte que la relation de continuité est satisfaite pour l’onde de

détente. Enfin, on a que uR “ ´1 et u˚ sont bien connectés par un choc admissible devitesse σ˚.Considérons à présent la condition initiale:

upx, 0q “"

´1 si x ă 0 ,1 si x ą 0 ,

On a uL “ ´1 ă uR “ 1, et on considère donc à présent l’enveloppe convexe inférieurefc sur r´1, 1s (la position du point ´u˚ se déduit de l’imparité de f). La solution seraconstituée dans un premier temps d’une détente entre uL “ ´1 et ´u˚, impliquant lesvitesses σL “ f 1p´1q “ π cosp´πq “ ´π et σ˚ “ f 1p´u˚q “ π cospπu˚q. On a ensuite un

27

Page 29: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

choc reliant ´u˚ à uR “ 1 de vitessefp´u˚q ´ fp1q

´u˚ ´ 1“

sinpπu˚qu˚ ` 1

“ σ˚. En notant que

pf 1q´1pξq “ ´ arccospξπqπ pour tout ξ Ps ´ π, 0r, la solution est donc:

upx, tq “

$’&

’%

´1 si x ă ´πt ,´1

πarccos

´ x

¯si ´ πt ă x ă σ˚t ,

1 si x ą σ˚t ,

avec σ˚ “ π cospπu˚q.

28

Page 30: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Chapter 2

Schémas numériques pour les lois de

conservation scalaires

2.1 Rappels sur les différences finies

On considère le problème suivant:"

Btu ` Bxfpuq “ 0 ,upx, t “ 0q “ u0pxq . (2.1)

On introduit un maillage de R ˆ R` en notant ∆t ą 0 le pas de temps et ∆x ą 0 le pasd’espace. Pour tout n P N, on note tn “ n∆t le temps discret et pour tout j P Z, on notexj “ j∆x les noeuds du maillage. On note un

j l’approximation de upxj, tnq : un

j « upxj, tnq.

Dans un premier temps, une solution simple consiste à approcher les dérivées par différencesfinies, par exemple:

Btupxj , tnq «

un`1j ´ un

j

∆t,

Bxfpupxj, tnqq «

fpunj`1q ´ fpun

j´1q2∆x

,

ce qui donne le schéma explicite centré:

un`1j ´ un

j

∆t`

fpunj`1q ´ fpun

j´1q2∆x

“ 0 , (2.2)

mais nous verrons plus tard que cette option n’est pas convenable. Le schéma implicitecentré fournit un autre exemple

un`1

j ´ unj

∆t`

fpun`1

j`1 q ´ fpun`1

j´1 q2∆x

“ 0 ,

qui possède de meilleures propriétés, mais plus difficile à mettre en oeuvre.

29

Page 31: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Définition 2.1.1: Schéma numérique

Un schéma numérique est une formule`F pum

j q˘0ďmďn`1

jPZ

“ 0 qui permet de calculer les

valeurs pun`1j qjPZ en fonction des valeurs connues aux temps

`pum

j q˘0ďmăn`1

jPZ

. On dit

que le schéma est consistant au sens des différences finies si l’erreur de troncatureE “ F puptm, xjqq tend vers 0 lorsque ∆t et ∆x tendent vers 0 (éventuellement avecdes conditions du type ∆t∆x fixé) si et seulement si u est solution régulière de (2.1).

On se restreindra ici à l’étude des schémas à deux niveaux en temps, c’est à dire de laforme:

`F pum

j q˘0ďmďn`1

jPZ

“un`1j ´ un

j

∆t“ Gpun

j qjPZ (schémas explicites) ,

ou`F pum

j q˘0ďmďn`1

jPZ

“un`1

j ´ unj

∆t“ Gpun`1

j qjPZ (schémas implicites) .

Si G ne dépend que des punj1q pour |j ´ j1| ď K, on dit que le schéma est à 2K ` 1 points.

Par convention, on écrira les schémas sous la forme:

F punj q “ un`1

j ´ unj ` ∆tG

´unpou n`1qj1

¯

j1PZ

. (2.3)

Attention, avec cette écriture, l’erreur de troncature devient E “1

∆tF pupxj, t

nqq.

Exemple 2.1.1. Autres exemples de schémas numériques:

‚ Schéma de Lax-Friedrichs.

un`1

j ´ˆunj´1 ` un

j`1

2

˙` ∆t

ˆfpun

j`1q ´ fpunj´1q

2∆x

˙“ 0 .

A titre d’exercice, on pourra mettre ce schéma sous la forme (2.3).

un`1

j ´ unj ` ∆t

„fpun

j`1q ´ fpunj´1q

2∆x´

unj´1 ´ 2un

j ` unj`1

2∆t

“ 0 .

‚ Schéma de Lax-Wendroff. Soit u, la solution de (2.1). On a:

upx, t ` ∆tq “ upx, tq ` ∆tBtupx, tq `1

2p∆tq2B2

t upx, tq ` Op∆t3q .

“ upx, tq ´ ∆tBxfpupx, tqq `1

2p∆tq2Bt p´Bxfpupx, tqqq ` Op∆t3q .

On a: Bt p´Bxfpuqq “ ´Bx pf 1puqBtuq “ Bx pf 1puqBxfpuqq. On en déduit le schémasuivant:

un`1j “ un

j ´ ∆t

ˆfpun

j`1q ´ fpunj´1q

2∆x

˙

`1

2p∆tq2

f 1puj`12qfpun

j`1q´fpun

j q

∆x` f 1puj´12q

fpunj q´fpun

j´1q

∆x

∆x,

30

Page 32: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

avec plusieurs choix possibles pour f 1puj`12q, par exemple:

f 1puj`12q “ f 1

ˆunj`1 ` un

j

2

˙, f 1puj`12q “

f 1punj`1q ` fpun

j q2

.

Définition 2.1.2: Ordre d’un schéma

On dit que le schéma est d’ordre p en temps et q en espace si pour la solution régulièrede l’équation on a:

E “ Op∆tpq ` Op∆xqq .

Exemple 2.1.2. Montrons que le schéma explicite centré (2.2) est d’ordre 1 en temps et 2en espace. L’erreur s’obtient en remplaçant un

j par upxj, tnq dans le schéma:

E “upxj , t

n`1q ´ upxj, tnq

∆t`

fpupxj`1, tnqq ´ fpupxj´1, t

nqq2∆x

“ 0 .

On effectue alors des développements de Talyor:

upxj , tn`1q “ upxi, t

nq ` ∆tBtupxj, tnq ` Op∆t2q ,

f ˝ upxj`1, tnq “ f ˝ upxj, t

nq ` ∆xBxpf ˝ uqpxj, tnq `

∆x2

2B2xpf ˝ uqpxj , t

nq ` Op∆x3q ,

f ˝ upxj´1, tnq “ f ˝ upxj, t

nq ´ ∆xBxpf ˝ uqpxj, tnq `

∆x2

2B2xpf ˝ uqpxj , t

nq ` Op∆x3q ,

de sorte que:E “ pBtu ` Btpfpuqqq pxj , t

nq ` Op∆tq ` Op∆x2q .

On en déduit que E ÝÑ∆t,∆xÑ0

0 si et seulement si u est solution et dans ce cas E “ Op∆tq `

Op∆x2q.

A titre d’exercice, on pourra montrer que le schéma de Lax-Wendroff est d’ordre 2 entemps et en espace.

Voir examen.

2.2 Stabilité L2 dans le cas linéaire

Considérons le cas particulier de l’équation linéaire"

Btu ` aBxu “ 0 , a P R ,upx, t “ 0q “ u0pxq . (2.4)

Dans cette section on se limite à l’analyse de schémas explicites à trois points:

un`1

j`1 “ c´1unj´1 ` c0u

nj ` c1u

nj`1 .

31

Page 33: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

L’erreur de troncature est donnée par:

E “upxj , t

n`1q ´ c´1upxj´1, tnq ´ c0upxj, t

nq ´ c1upxj`1, tnq

∆t. (2.5)

Après développement de Taylor:

E “1 ´ c´1 ´ c0 ´ c1

∆tupxj, t

nq ` Btupxj, tnq ` pc´1 ´ c1q

∆x

∆tBxupxj , t

nq ` O

ˆ∆x2

∆t

˙.

On supposera dans la suite le rapport ∆t∆x fixe et on notera λ “∆t

∆x. On déduit de

l’égalité précédente que :

ˆE ÝÑ

∆t,∆xÑ00 ssi u est solution

˙ô

#c´1 ` c0 ` c1 “ 1

c´1 ´ c1 “ a∆t

∆x“ aλ .

Ceci permet de paramétrer les schémas consistants par q P R en posant:

c0 “ 1 ´ q , c´1 “1

2pq ` aλq , c1 “

1

2pq ´ aλq , (2.6)

de sorte que:

un`1j “ un

j ´aλ

2

`unj`1 ´ un

j´1

˘`

q

2

`unj`1 ´ 2un

j ` unj´1

˘(2.7)

On se pose alors la question de savoir si cette classe de schémas fournit des approximationsconvenables de la solution, le sens du mot "convenable" étant bien sûr à définir. Une premiercritère essentiel est la notion de stabilité Lp. qui garantit un contrôle de la norme Lp de lasolution discrète. Nous nous intéresserons ici à la stabilité L2. Comme nous le verronsplus tard, ce critère peut généralement s’interpréter d’un point de vue physique par unedécroissance de l’énergie discrète associée au schéma.

Définition 2.2.1: Stabilité L2

On définit unj L2 “

˜ÿ

jPZ

∆x|unj |2

¸12

la norme L2 de la solution approchée (constante

par morceaux) au temps tn. On dit que le schéma est stable en norme L2 s’il existeune constante c ą 0 indépendante de ∆t et ∆x telle que:

unj L2 ď c u0

jL2 , (2.8)

pour tout ∆t,∆x (avec ∆t∆x fixé), tout n P N, et toute donnée initiale pu0jq.

Proposition 2.2.1

Le schéma (2.7) est L2 stable ssi λa2 ď q ď 1.

32

Page 34: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Proof. On utilise la transformée de Fourier pϕpξq “1?2π

ż

R

e´ixξϕpxqdx. Rappelons que si

l’on note τh l’opérateur de translation défini par pτhφqpxq “ φpx`hq, alors yτhφpξq “ pφpξqeihξ.Notons unpxq la solution constante par morceaux égale à un

j si x Psxj´12, xj`12r, où l’on aposé xj`12 “ pj ` 12q∆x pour tout j P Z. Le schéma se réécrit sous la forme:

un`1pxq “ unpxq ´aλ

2pτ∆xu

npxq ´ τ´∆xunpxqq `

q

2pτ∆xu

npxq ´ 2unpxq ` τ´∆xunpxqq .

En passant en Fourier:

pun`1pξq “ punpξq ´aλ

2

`eiξ∆x ´ e´iξ∆x

˘punpξq `

q

2

`eiξ∆x ´ 2 ` e´iξ∆x

˘punpξq ,

c’est à dire:pun`1pξq “ hpξqpunpξq , (2.9)

avec hpξq “ 1 ´ aiλ sinpξ∆xq ` q pcosp∆xq ´ 1q. Par le théorème (égalité) de Plancherel, ona:

unj L2 “ unL2pRq “ punL2pRq ď max

ξPR

|hpξq|npu0L2pRq

ď maxξPR

|hpξq|nu0jL2 .

On en déduit la condition suffisante de stabilité: maxξPR |hpξq| ď 1. On a:

|hpξq|2 “ λ2a2 sin2pξ∆xq ` p1 ` q pcospξ∆xq ´ 1qq2 .

En posant y “ sin2pξ∆x2q, on obtient |hpξq|2 “ 4λ2a2yp1´yq`p1´2qyq2. Après une étudede fonctions sur r0, 1s, on aboutit à:

`|hpξq|2 ď 1 , @ξ P R

˘ô λ2a2 ď q ď 1 . (2.10)

Remarque 2.2.1. En fait, cette condition est nécessaire car s’il existe ξ0 tel que |hpξ0q| ą 1,on peut construire une condition initiale u0pxq dont l’un des modes de Fourier est aussiproche de ξ0 que l’on veut pour ∆x petit.

Remarque 2.2.2.

‚ La condition nécessaire de stabilité maxξPR |hpξq| ď 1 est communément appelée con-dition CFL (Courant, Friedrichs, Lewy). Cette condition s’écrit:

λ|a| ď 1 ô ∆t ď∆x

|a|.

Elle peut s’interpréter de la manière suivante. En un point pxj, tn`1q, on définit le cône

de dépendance numérique comme le plus petit cône de sommet pxj, tn`1q contenant les

points pxj , tnqjPZ impliqués dans le calcul de un`1

j (voir Fig. 1).

33

Page 35: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

∆t

∆x

xjxj´1 xj`1tn`1

tn

Figure 1: Cône de dépendance numérique en pxj, tn`1q.

Dans ce cas, s’agissant d’un schéma à trois points, ce cône doit avoir pour autres som-

mets pxj´1, tnq et pxj`1, t

nq. La pente du cône numérique est donnée par ˘∆t

∆x.

Rappelons que la solution exacte en pxj , tn`1q n’est affectée que par les valeurs com-

prises dans le cône de dépendance exact, de pente ˘1

|a|(le cône de dépendance exact

se déduit directement la méthode des caractéristiques; en effet, on a upx, tq “ fpx´atq,de sorte que l’information se propage à la vitesse a - voir Fig. 3).

∆t

∆x

´1

|a|1

|a|

xjxj´1 xj`1tn`1

tn

Figure 2: Cône de dépendance exact en pxj , tn`1q.

La condition CFL exprime que le cône de dépendance numérique doit contenir le cônede dépendance exact. En d’autres termes, pour calculer une approximation un`1

j deupxj, t

n`1q, les approximations disponibles au temps tn doivent recouvrir la zone quiaffecte la solution exacte en pxj , t

n`1q

‚ Le schéma centré explicite (2.2) correspond au cas q “ 0: ce schéma est donc instable.

‚ Le cas q “ 1 correspond au schéma le plus diffusif (ou visqueux) possible: c’est leschéma de Lax-Friedrichs, qui est donc stable ssi λ|a| ď 1.

34

Page 36: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

‚ Le schéma de Lax-Wendroff correspond au cas q “ λ2a2. Il s’agit du schéma le moinsdiffusif que l’on puisse construire dans ce contexte. Ce schéma est également stablesous la condition λ|a| ď 1.

‚ Le schéma décentré amont (ou upwind) en anglais s’écrit:

un`1

j “ unj ´ λa

`unj ´ un

j´1

˘si a ě 0 ,

un`1

j “ unj ´ λa

`unj`1 ´ un

j

˘si a ď 0 ,

correspond au cas q “ λ|a|. Il est stable sous la condition λ|a| ď 1.

Remarquons que l’on peut écrire:

un`1j ´ un

j

∆t` a

unj`1 ´ un

j´1

∆x“ q

∆x

unj`1 ´ 2un

j ` unj´1

∆x2. (2.11)

On peut dégager de cette analyse qu’on a toujours besoin d’introduire un peu de viscositénumérique afin d’assurer la stabilité des schémas.

L’analyse de stabilité L2 que nous venons de voir, appelée analyse de stabilité au sensde Von Neumann ne se limite pas au cas du transport linéaire et aux schémas explicites àtrois points. Nous verrons plus tard dans quelle mesure cette analyse peut s’étendre au casdes systèmes d’équations non linéaires.

2.3 Schémas conservatifs

Pour traiter le cas non linéaire, une première approche naïve consiste à généraliser les schémasqui précèdent. Considérons par exemple l’équation de Burgers:

Btupx, tq ` Bxpupx, tqq2

2“ 0 , (2.12)

avec donnée initiale u0pxq “"

1 si x ă 0 ,0 si x ě 0 .

Ecrivons formellement Btupx, tq`upx, tqBxupx, tq “

0, et essyons le schéma upwind pour cette équation. On a:

un`1j “ un

j ´∆t

∆xunj

`unj ´ un

j´1

˘.

On vérifie alors que:

u0j “

"1 si j ă 0

0 si j ě 0ùñ un

j “"

1 si j ă 0

0 si j ě 0, @n P N .

La solution numérique consiste donc en un choc stationnaire (i.e. de vitesse σ “ 0). Or, la

solution exacte est un choc de vitesse σ “1

2. Tentons alors une autre approche, en fixant

λ “∆t

∆x“ 1 et avec la donnée initiale u0pxq “

"1 si x ď 0 ,0 si x ą 0 ,

un`1j “ un

j ´∆t

∆xunj´1

`unj ´ un

j´1

˘.

35

Page 37: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

on vérifie (exercice) que la solution est un choc se propageant à la vitesse σ “ 1.On a u1

0 “ u00 ´ u0

´1

`u00 ´ u0

´1

˘“ 0 ´ 1p0 ´ 1q “ 1 et u1

1 “ u01 ´ u0

0 pu01 ´ u0

0q “ 1. Onmontre par récurrence que:

u0j “

"1 si j ă 0

0 si j ě 0ùñ un

j “"

1 si j ă n0 si j ě n

, @n P N .

Conclusion : Pour calculer les solutions faibles (discontinues), il faut abandonner cer-taines idées des différences finies, valables uniquement pour les solutions régulières.

Définition 2.3.1: Schéma conservatif

Un schéma explicite à trois points est dit conservatif s’il existe une fonction continueg : R ˆ R Ñ R telle que le schéma s’écrive:

un`1

j “ unj ´

∆t

∆x

`gnj`12 ´ gnj´12

˘, (2.13)

avec gj`12 “ gpunj , u

nj`1q. On dit qu’un tel schéma est consistant au sens faible si

gpu, uq “ fpuq pour tout u P R. On dit alors que le flux numérique g est consistant.

Remarque 2.3.1.‚ Le flux numérique g est défini à une constante additive près.

‚ÿ

jPZ

un`1j “

ÿ

jPZ

unj “

ÿ

jPZ

u0j : cette quantité est conservée. Ce résultat est le pendant

discret du résultat: ż

R

upx, tqdx “ż

R

u0pxqdx , (2.14)

pour toute solution u du problème"

Btu ` Bxpfpuqq “ 0upx, 0q “ u0pxq avec u0 P L1pRq.

‚ La formule (2.13) est une formule de Volumes Finis. Le principe de constructiond’un schéma de type Volumes Finis est le suivant: on intègre l’équation sur la maillesxj´12, xj`12rˆstn, tn`1r

ż tn`1

tn

ż xj`12

xj´12

pBtu ` Bxfpuqq dxdt “ 0

ôż xj`12

xj´12

upx, tn`1qdx ´ż xj`12

xj´12

upx, tnqdx

`ż tn`1

tnfpupxj`12, tqqdt ´

ż tn`1

tnfpupxj´12, tqqdt “ 0 .

On pose alors unj “

1

∆t

ż xj`12

xj´12

upx, tnqdx et on définit gnj`12 comme une approximation

de1

∆t

ż tn`1

tnfpupxj`12, tqqdt calculée à partir de un

j et unj`1. On obtient alors:

∆x`un`1

j ´ unj

˘` ∆t

`gnj`12 ´ qnj´12

˘“ 0 .

36

Page 38: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Notons qu’aucune hypothèse sur la régularité de u n’est nécessaire pour dériver un telschéma (si ce n’est l’intégrabilité locale de u).

Définition 2.3.2: Définition plus générale

Un schéma explicite à p2K ` 1q points est conservatif s’il s’écrit

un`1j “ un

j ´∆t

∆x

`gpun

j´K`1, ¨ ¨ ¨ , unj`Kq ´ gpun

j´K, ¨ ¨ ¨ , unj`K´1q

˘,

Le schéma est dit consistant si gpu, ¨ ¨ ¨ , uq “ fpuq pour tout u P R.

Proposition 2.3.1

Tout schéma explicite consistant est au moins d’ordre 1 au sens des différences finies.

Proof.

E “upxj , t

n`1q ´ upxj, tnq

∆t`

g pupxj, tnq, upxj`1q, tnq ´ g pupxj´1, t

nq, upxj, tnqq

∆x.

Notons que

g pupxj, tnq, upxj`1, t

nqq “ g pupxj, tnq, upxj ` ∆x, tnqq

“ g`upxj, t

nq, upxj, tnq ` ∆xBxupxj , t

nq ` Op∆x2q˘

“ gpu, uq ``∆xBxu ` Op∆x2q

˘Bygpu, uq

“ gpu, uq ` ∆xBxuByg ` Op∆x2q ,

et un calcul similaire donne:

g pupxj´1, tnq, upxj, t

nqq “ gpu, uq ´ ∆xBxuByg ` Op∆x2q

On en déduitE “ Btu ` pBxg ` Bygq Bxu ` Op∆xq .

Or, gpu, uq “ fpuq ùñ f 1puq “ Bxg ` Byg, et par conséquent E “ Op∆tq ` Op∆xq si u estsolution.

Le théorème suivant montre que les schémas conservatifs sont adaptés au calcul dessolutions faibles.

37

Page 39: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Théorème 2.3.1: Théorème de Lax-Wendroff

Si un schéma conservatif consistant converge, alors il converge vers une solution faiblede l’équation (en particulier, les conditions de Rankine-Hugoniot sont vérifiées). Plusprécisément:Soit pεkq une suite de R` qui tend vers 0. On considère une suite de solutions discrètesukpx, tq calculées avec le maillage ∆x “ εk et ∆t “ λ∆x avec λ ą 0 fixé. On a:

ukpx, tq “ unj pour xj´12 ă x ă xj`12 et tn ă t ă tn`1 , .

La donnée initiale discrète est u0j “

1

∆x

ż xj`12

xj´12

u0pxqdx. On suppose que:

i) ukL8pR,R`q ď c pour tout k P N.

ii) Du t.q. uk ÝÑ u dans L1locpR,R`q et p.p. dans R ˆ R`.

Alors u est solution faible.

Proof. Nous aurons besoin des deux Lemmes suivants:

Lemme 2.3.1

Soit u˘k px, tq “ ukpx ˘ ∆x2, tq. Alors u˘

k ÝÑ u dans L1loc.

Proof. Soit K un compact de R ˆ R`. On a:ż ż

K

|u˘k ´ u|dxdt “

ż ż

K

|ukpx ˘ ∆x2, tq ´ upx, tq|dxdt

“ż ż

K 1:“K¯∆x

|ukpx1 tq ´ upx1 ¯ ∆x2, tq|dx1dt

ďż ż

K 1

`|uk ´ u| ` |upx1, tq ´ upx1 ¯ ∆x2, tq|

˘dx1dt .

Le premier terme tend vers 0 car uk ÝÑ u dans L1locpR,R`q. Concernant le 2e terme, on sait

que u P L1locpR,R`q, et par un argument de densité de C1

c pR,R`q dans L1locpR,R`q, on obtient:

ż ż

K 1

|upx1, tq ´ upx1 ¯ ∆x2, tq|dx1dt ÝÑ 0 ,

d’où le résultat.

38

Page 40: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Lemme 2.3.2

Soit ϕ P C1c pR,R`q. On pose, pour k fixé, ϕn

j “ ϕpxj , tnq. Soit ϕkpx, tq la fonction

constante par morceaux définie par ϕkpx, tq “ ϕnj pour xj´12 ă x ă xj`12 et tn ă t ă

tn`1. Alors:

i) ϕk ÝÑ ϕ uniformément sur tout compact de R ˆ R`.

ii)ϕkpx, t ` ∆tq ´ ϕkpx, tq

∆tÝÑ Btϕpx, tq uniformément sur tout compact de RˆR`.

iii)ϕkpx ` ∆x2, tq ´ ϕkpx ´ ∆x2, tq

∆tÝÑ Bxϕpx, tq uniformément sur tout compact

de R ˆ R`.

Proof. La démonstration est laissée à titre d’exercice.

Passons à la preuve du théorème. Considérons une fonction ϕ P C1c pR,R`q quelconque.

On définit ϕnj “ ϕpxj , t

nq comme dans le Lemme précédent. On multiplie le schéma (2.3)par ϕn

j puis on somme sur j et sur n:

ÿ

nPNjPZ

”∆xϕn

j pun`1j ´ un

j q ` ∆tϕnj pgnj`12 ´ gnj´12q

ı“ 0 .

On a :ÿ

nPNjPZ

∆xϕnj u

nj “

ÿ

nPNjPZ

∆xϕn`1j un`1

j `ÿ

jPZ

∆xu0jϕ

0j ,

ÿ

nPNjPZ

∆tϕnj g

nj´12 “

ÿ

nPNjPZ

∆tϕnj`1g

nj`12 ,

(2.15)

de sorte qu’une intégration par parties discrète donne:ÿ

nPNjPZ

∆xun`1

j pϕnj ´ ϕn`1

j q ´ÿ

jPZ

∆xu0jϕ

0j `

ÿ

nPNjPZ

∆tgnj`12pϕnj ´ ϕn

j`1q “ 0 .

En introduisant la fonction constante par morceaux gkpx, tq “ gnj`12 pour xj ă x ă xj`1,tn ă t ă tn`1, l’égalité précédente se réécrit:

ż

RˆR`

ukpx, t ` ∆tqϕkpx, tq ´ ϕkpx, t ` ∆tq

∆tdxdt ´

ż

R

ukpx, 0qϕkpx, 0qdx ,

RˆR`

gkpx, tqϕkpx ´ ∆x2, tq ´ ϕkpx ` ∆x2, tq

∆xdxdt “ 0 .

(2.16)

39

Page 41: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Le premier terme de cette égalité se réécritż

Rˆr∆t,`8s

ukpx, tqϕkpx, t ´ ∆tq ´ ϕkpx, tq

∆tdxdt

“ż

RˆR`

ukpx, tqˆ

1r∆t,`8sϕkpx, t ´ ∆tq ´ ϕkpx, tq

∆t` Btϕpx, tq

˙dxdt

´ż

RˆR`

pukpx, tq ´ upx, tqq Btϕpx, tqdxdt ´ż

RˆR`

upx, tqBtϕpx, tqdxdt .

En utilisant u bornée et le point iiq du deuxième Lemme, on obtient la convergence dupremier terme du membre de droite vers 0. Concernant le second terme:

ˇˇż

RˆR`

pukpx, tq ´ upx, tqq Btϕpx, tqdxdtˇˇ ď BtϕL8pKquk ´ uL1pKq ÝÑ 0 ,

où l’on a noté K “ Supppϕq. On a donc établi la convergence du premier terme de (2.16)

vers ´ż

RˆR`

upx, tqBtϕpx, tqdxdt.

Par des arguments analogues, on montre queż

R

ukpx, 0qϕkpx, 0qdx ÝÑż

R

u0pxqϕpx, 0qdx.

Concernant le troisième terme de (2.16), on remarque que gkpx, tq “ gpukpx`∆x2, tq, ukpx´∆x2, tqq. En utilisant la consistance du flux, et en supposant la fonction de flux g Lipschitzi-enne par rapport à chacune de ses variables, il existe une constante C ą 0 (indépendante deu et de k) telle que:

|gkpx, tq ´ gpukpx, tq, ukpx, tqqloooooooooomoooooooooonfpukpx,tqq

| ď C|u`k px, tq ´ ukpx, tq| ` C|u´

k px, tq ´ ukpx, tq| . (2.17)

On a donc:ż

RˆR`

gkpx, tqϕkpx ´ ∆x2, tq ´ ϕkpx ` ∆x2, tq

∆xdxdt

“ż

RˆR`

fpukpx, tqqϕkpx ´ ∆x2, tq ´ ϕkpx ` ∆x2, tq

∆xdxdt

RˆR`

pgkpx, tq ´ fpukpx, tqqqϕkpx ´ ∆x2, tq ´ ϕkpx ` ∆x2, tq

∆xdxdt .

On montre alors que le premier terme converge vers ´ż

RˆR`

fpupx, tqqBxϕpx, tqdxdt et le

second vers 0 en utilisant (2.17) avec la convergence uniforme de u˘k vers u. Au final, (2.16)

donne:ż

RˆR`

´upx, tqBtϕpx, tq ` fpupx, tqqBxϕpx, tq

¯dxdt `

ż

R

u0pxqϕpx, 0qdx “ 0 ,

qui n’est autre que la forme faible de l’équation pour u.

Exercice 2.3.1. Les schémas centré, de Lax-Friedrichs et de Lax-Wendroff se réécriventsous forme de schémas conservatifs. Trouver ces écritures.

40

Page 42: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

2.4 Schéma de Godunov

Définition 2.4.1: Schéma de Godunov

Le schéma de Godunov est donné par

un`1

j “ unj ´

∆t

∆x

`gnj`12 ´ gnj´12

˘, (2.18)

avec les flux d’interface gnj`12 “ gpunj , u

nj`1q définis par la fonction gpu, vq telle que

gpuL, uRq “ fpu˚q, où u˚ “ up0, tq avec upx, tq la solution entropique exacte du prob-lème de Riemann entre uL et uR.

Remarque 2.4.1.La solution du problème de Riemann est auto-similaire : upx, tq “ vpxtq, donc up0, tq “ vp0qest indépendant de t. Si uL “ uR, alors u˚ “ uL “ uR donc le schéma de Godunov estconsistant. La fonction ξ ÞÑ fpvpξqq est toujours continue en 0 (exercice).Voir examen.

Ce schéma peut se définir d’une autre manière, qui se décompose en deux étapes:

i) On résout des problèmes de Riemann indépendants à chaque interface xj`12, avec ladonnée initiale un

j si x ă xj`12 et unj`1 si x ą xj`12.

ii) Après un pas de temps ∆t (à préciser), on moyenne les solutions exactes sur chaquemaille pour obtenir une nouvelle donnée initiale constante par morceaux un`1

j .

∆t

t

xxjxj´12 xj`12

Figure 3: Construction du solveur de Godunov : problème de Riemann en xj´12 et xj`12.

On choisit ∆t de telle manière que les problèmes de Riemann n’interagissent pas: simaxjPZ |un

j | ď M alors les vitesses d’onde σ sont plus petites que c :“ max|u|ďM |f 1puq| où uest solution exacte. On suppose donc la condition CFL

∆t ď∆x

2c. (2.19)

41

Page 43: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Sous cette condition, la solution dans la maille (xj´12, xj`12) est

upx, tq “"

uj´12px, tq si x ă xj ,uj`12px, tq si x ą xj ,

avec uj´12px, tq solution du problème de Riemann en xj´12 entre unj´1 et un

j et uj`12px, tqest solution du problème de Riemann en xj`12 entre un

j et unj`1. Ainsi, u étant solution

exacte, on a:ż tn`1

tn

ż xj`12

xj´12

pBtu ` Bxfpuqqdxdt “ 0 ôż xj`12

xj´12

upx, tn`1qdx ´ż xj`12

xj´12

upx, tnqdx

`ż tn`1

tnfpupx, tqq|xj`12

dt ´ż tn`1

tnfpupx, tqq|xj´12

dt “ 0 .

Or, on a fpupx, tqq|xj`12“ f

`uj`12pxj`12, tq

˘, et cette quantité ne dépend pas de t à

cause du caractère auto-similaire de la solution. Ainsi, en posant unj “

1

∆x

ż xj`12

xj´12

upx, tnqdx,

l’égalité précédente se réécrit:

un`1j ´ un

j `∆t

∆x

`fpu˚

j`12q ´ fpu˚j´12q

˘“ 0 ,

et on retrouve le schéma (2.3) avec gpunj , u

nj`1q “ fpu˚

j`12q où u˚j`12 est la solution du prob-

lème de Riemann en xj`12 entre unj et un

j`1.

Remarque 2.4.2.

‚ D’un point de vue pratique, on programme la première définition du schéma.

‚ Supposons f convexe. On rappelle que:

- Si uR ă uL, la solution exacte du problème de Riemann est une discontinuité se

propageant à la vitesse σ “fpuRq ´ fpuLq

uR ´ uL

.

La solution du problème de Riemann en 0 est donc u˚p0, uL, uRq “ uL si σ ą 0(c’est à dire si fpuRq´fpuLq est de signe opposé à uR´uL, autrement dit fpuLq ąfpuRq), et u˚p0, uL, uRq “ uR si σ ă 0 (c’est à dire fpuLq ă fpuRq).

- Si uR ą uL, la solution est une onde de détente définie par:

upx, tq “

$&

%

uL si x ă σLtpf 1q´1pxtq si σLt ă x ă σRtuR si σRt ă x

où σL “ f 1puLq et σR “ f 1puRq.On en déduit:

u˚p0, uL, uRq “

$&

%

uL si 0 ă f 1puLqpf 1q´1p0q si f 1puLq ă 0 ă f 1puRquR si f 1puRq ă 0

42

Page 44: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Par conséquent:

gpuL, uRq “

$’’’’’’&

’’’’’’%

fpuLq si

#uL ą uR (choc) et fpuLq ą fpuRq pi.e. σ ą 0quL ă uR (détente) etf 1puLq ą 0

fpuRq si

#uL ą uR (choc) et fpuLq ă fpuRq pi.e. σ ă 0quL ă uR (détente) etf 1puRq ă 0

f ˝ pf 1q´1p0q si uL ă uR (détente) et f 1puLq ă 0 ă f 1puRq

En particulier, si f est de plus monotone, on a u˚p0, uL, uRq “"

uL si f 1 ě 0uR si f 1 ď 0

, et le

schéma de Godunov se confond avec le schéma upwind.

Le schéma de Godunov est difficile à implémenter en pratique, car il requiert la connais-sance de la solution exacte du problème de Riemann à chaque pas de temps et à chaqueinterface du maillage. Ceci motive l’introduction de méthodes plus simples permettantd’approcher la solution du problème de Riemann.

2.5 Variantes du schéma de Godunov

2.5.1 Schéma de Roe-Murman.

C’est une simplification du schéma de Godunov par linéarisation. On introduit:

apu, vq “fpuq ´ fpvq

u ´ vsi u ‰ v , apu, uq “ f 1puq . (2.20)

On remplace le "vrai" problème de Riemann par sa version linéarisée, c’est à dire:$&

%

Btu ` apuR, uLqBxu “ 0 ,

upx, 0q “"

uL si x ă 0 ,uR si x ą 0 .

(2.21)

Il s’agit d’une équation de transport dont la solution est très simple:

upx, 0q “"

uL si x ă apuR, uLqt ,uR si x ą apuR, uLqt . On en déduit le schéma suivant:

un`1

j “ unj ´

∆t

∆x

`gRoepun

j , unj`1q ´ gRoepun

j´1, unj q

˘,

avec gRoepuL, uRq “"

fpuLq si apuR, uLq ą 0 ,fpuRq si apuR, uLq ă 0 .

Ainsi, si la solution du problème de Riemann

est un choc, le schéma de Roe donne la solution exacte. Par contre, sans correction, le schémade Roe peut converger vers des solutions non physiques (c’est à dire non entropiques).Par exemple, supposons f strictement convexe, et uL ă uR (la solution exacte est donc unedétente) et fpuLq “ fpuRq. Cependant apuL, uRq “ 0, donc gRoe “ fpuLq “ fpuRq, et parsuite les quantités gnj`12 ´ gnj´12 sont nulles pour tout n P N et tout j P Z: la solutionnumérique est un choc stationnaire.

43

Page 45: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Remarque 2.5.1. A noter qu’avec (2.20), on a:

gRoepuL, uRq “1

2pfpuRq ` fpuLqq

loooooooooomoooooooooonpartie centrée

` |apuL, uRq|uL ´ uR

2looooooooooomooooooooooonviscosité numérique

,

et le schéma s’écrit:

un`1

j “ unj ´

∆t

∆x

”12

`fpun

j`1q ` fpunj´1q

˘´

1

2|anj`12| pun

j`1 ´ unj qlooooomooooon

∆xBxuj`12

`1

2|anj´12| pun

j ´ unj´1qlooooomooooon

∆xBxuj´12

ı.

On reconnaît une partie centrée d’ordre 2 en espace (instable) et une viscosité numériqueportée par Bxp|a|Bxuq de l’ordre de ∆x. Lorsque |a| “ 0, le schéma de Roe n’a pas deviscosité numérique et il peut ne pas converger, ou bien converger vers une solution nonentropique. Pour corriger ce problème, on peut remplacer |a| par une version régularisée aεqui ne s’annule pas.

2.5.2 Schéma de Enquist-Osher.

Ce schéma s’écrit sous la forme suivante:

un`1

j “ unj ´

∆t

2∆x

´fpun

j`1q ´ fpunj´1q

¯`

∆t

2∆x

´ż unj`1

unj

|f 1pξq|dξ ´ż un

j

unj´1

|f 1pξq|dξ¯.

Il s’agit d’un schéma conservatif dont le flux numérique est donné par:

gpu, vq “1

2

ˆfpuq ` fpvq ´

ż v

u

|f 1pξq|dξ˙

. (2.22)

Dans les domaines en u où le signe de f 1 est constant, on retrouve le schéma upwind.

2.5.3 Solveurs de Riemann approchés

On cherche à construire une solution approchée auto-similaire du problème de Riemann entredeux états uL et uR, que l’on notera pupx, tq “ pupxt, uL, uRq. On demande à ces solveursapprochés de satisfaire certaines propriétés de consistance:

Définition 2.5.1: Consistance intégrale

Un solveur de Riemann approché pupxt, uL, uRq est dit consistant avec la formeintégrale de la loi de conservation si la relation suivante est vérifiée:

1

∆x

ż∆x2

´∆x2

pupx∆t, uL, uRqdx “1

2puL ` uRq ´

∆t

∆xpfpuRq ´ fpuLqq , (2.23)

où ∆t est déterminé via la condition de non interaction∆t

∆xmax|u|ďM |f 1puq| ď

1

2, avec

M “ maxjPZ |unj |.

44

Page 46: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Cette relation garantit que le schéma ainsi obtenu est conservatif et consistant (au sensde la Définition 2.3). Plus précisément, on a le résultat suivant:

Proposition 2.5.1

On considère pupxt, uL, uRq un solveur de Riemann approché consistant avec la formeintégrale de la loi de conservation. Alors le schéma:

un`1j “

1

∆x

ż xj

xj´12

puˆx ´ xj´12

∆t, un

j´1, unj

˙dx `

1

∆x

ż xj`12

xj

puˆx ´ xj`12

∆t, un

j , unj`1

˙dx

est conservatif et consistant. Plus précisément, on a:

un`1j “ un

j ´∆t

∆x

`gnj`12 ´ gnj´12

˘,

avec

gnj`12 “ fpunj q `

∆x

2∆tunj ´

1

∆t

ż xj`12

xj

puˆx ´ xj`12

∆t, un

j , unj`1

˙dx

“ fpunj`1q ´

∆x

2∆tunj`1 `

1

∆t

ż xj`1

xj`12

puˆx ´ xj`12

∆t, un

j , unj`1

˙dx .

Exemple 2.5.1. Schéma de Godunov.Le schéma de Godunov vérifie la consistance intégrale. En effet, que l’on soit en présence

d’un choc ou d’une détente, la solution exacte uR du problème de Riemann entre deux étatsuL, uR vérifie:

uRpxt, uL, uRq “"

uL si xt ă σ´ ,uR si xt ą σ` ,

avec σ´ ď σ` la vitesse des ondes. uR étant solution exacte, on a:ż

∆t

0

ż∆x2

´∆x2

rBtuR ` BxfpuRqs dtdx “ 0 .

Le calcul donne:

ż∆t

0

ż∆x2

´∆x2

BtuRpx, t, uL, uRqdtdx “ż

∆x2

´∆x2

puRpx,∆t, uL, uRq ´ u0pxqq dx

“ż

∆x2

´∆x2

uRpx∆t, uL, uRqdx ´∆x

2puL ` uRq .

ż∆t

0

ż∆x2

´∆x2

BxfpuRpx,∆t, uL, uRqqdt

“ż ∆t

0

”fpuRp∆x2, t, uL, uRqq ´ fpuRp´∆x2, t, uL, uRqq

ıdt .

45

Page 47: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

x

tσ´

∆tσ´ ∆tσ`

σ`

∆t

uLuR

x´∆x2 ∆x2

Figure 4: Intégration du solveur sur r´∆x2,∆x2s.

Rappelons que∆t

∆xmax |f 1puq| ď 12, et par conséquent ∆x2 ě ∆tσ` ě tσ` pour tout

t P r0,∆ts (voir Figure 4). Il vient uRp∆x2, t, uL, uRq “ uR pour tout t P r0,∆ts, et de mêmeuRp´∆x2, t, uL, uRq “ uL pour tout t P r0,∆ts. Ces quantités sont donc indépendantes det, et la quantité précédente s’écrit:

ż ∆t

0

ż ∆x2

´∆x2

BxfpuRpx,∆t, uL, uRqqdt “ ∆t pfpuRq ´ fpuLqq .

On en tire:ż ∆x2

´∆x2

uRpx,∆t, uL, uRqdt “∆x

2puL ` uRq ´ ∆t pfpuRq ´ fpuLqq ,

et on retrouve bien (2.23).

Exemple 2.5.2. Schéma de Rusanov. On pose λ “ maxminpuL,uDqďvďmaxpuL,uDq |f 1pvq|, et onintroduit le solveur approché:

puRpxt, uL, uRq “

$&

%

uL si xt ă ´λ ,u˚ si ´ λ ă xt ă λ ,uR si xt ą λ .

On choisit l’état intermédiaire u˚ de sorte que puR satisfasse la relation de consistance. Ense basant sur la Figure (4) avec σ˘ “ ˘λ, et l’état intermédiaire u˚ dans le cône centralséparant uL et uR, on a:

ż ∆x2

´∆x2

puRpx,∆t, uL, uRqdx “ˆ∆x

2´ λ∆t

˙uL ` 2λ∆tu˚ `

ˆ∆x

2´ λ∆t

˙uR

“∆x

2puL ` uRq ` λ∆t p2u˚ ´ puL ` uRqq .

La définition (2.23) impose:

λ p2u˚ ´ puL ` uRqq “ ´ pfpuRq ´ fpuLqq ô u˚ “uL ` uR

1

2λpfpuRq ´ fpuLqq .

46

Page 48: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Ainsi, avec cette définition de u˚, le schéma est conservatif et consistant d’après la Proposition(2.5.3), et s’écrit:

un`1

j “ unj ´

∆t

∆x

`gnj`12 ´ gnj´12

˘,

avec gnj`12 “ fpunj q `

∆t

2∆xunj ´

1

∆t

ż xj`12

xj

puR

ˆx ´ xj`12

∆t, un

j , unj`1

˙dx. On pourra vérifier,

à titre d’exercice, que:

gnj`12 “1

2

`fpun

j`1q ` fpunj q

˘´ λ

ˆunj`1 ´ un

j

2

˙.

Nous avons vu que la consistance seule ne suffit pas à garantir la convergence des schémas.De plus, même en cas de convergence, certains schémas peuvent converger vers une solutionnon physique (non entropique). Ceci nous incite à dégager un ensemble de critères permettantde garantir de "bonnes" propriétés de convergence, que nous allons préciser maintenant. Acet effet, les notions de monotonie et de schéma TVD jouent un rôle central dans l’analysedes schémas numériques.

2.6 Schémas monotones et entropiques

2.6.1 Schémas monotones - schémas TVDDéfinition 2.6.1

Un schéma explicite du type un`1j “

´Hpun

j1q¯

j´Kďj1ďj`Kest dit monotone si la

fonction H est croissante par rapport à chacun des ses arguments.

Proposition 2.6.1

Un schéma un`1j “

´Hpun

j q¯

est monotone si et seulement si:

´u0j ě v0j , @j P Z

¯ùñ

´unj ě vnj , @j P Z , n P N

¯. (2.24)

Proof. Le sens direct est immédiat puisque u1j “ Hpu0

jq ě Hpv0j q “ v1j pour tout j P Z et onconclut par récurrence.Considérons un schéma explicite un`1

j “ Hpunj´K, ¨ ¨ ¨ , un

j`Kq qui satisfait le principe decomparaison (2.24). Fixons alors j P Z et 2K réels aj´K`1, ¨ ¨ ¨ , aj`K. Considérons deuxréels u, v tels que u ě v, et des données initiales discrètes pu0q et pv0q telles que:

u0j1 “ aj1 si j ´ K ă j1 ď j ` K , uj1 “ u si j1 “ j ´ K ,

v0j1 “ aj1 si j ´ K ă j1 ď j ` K , vj1 “ v si j1 “ j ´ K .(2.25)

47

Page 49: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Le principe de comparaison donne :

u1j “ Hpu, aj´K`1, ¨ ¨ ¨ , aj`Kq ě Hpv, aj´K`1, ¨ ¨ ¨ , aj`Kq “ v1j , (2.26)

ce qui permet d’établir que H est croissante par rapport à sa première variable. Un raison-nement analogue donne la croissance de H par rapport à toutes ses variables.

Proposition 2.6.2

On considère un schéma explicite conservatif à 3 points:

un`1j “ un

j ´∆t

∆x

`gpun

j , unj`1q ´ gpun

j´1, gnj q

˘,

avec g de classe C1. S’il est monotone alors u ÞÑ gpu, vq est croissante et v ÞÑ gpu, vqest décroissante.Réciproquement, si u ÞÑ gpu, vq est croissante et v ÞÑ gpu, vq est décroissante, alorssous condition CFL le schéma est monotone.

Proof. On a Hpu, v, wq “ v ´ λ pgpv, wq ´ gpu, vqq avec λ “∆t

∆x. Notons tout d’abord que

BuHpu, v, wq “ λB1gpu, vq et BwHpu, v, wq “ ´λB2gpv, wq, de sorte que:ˇˇ u ÞÑ Hpu, v, wq varie comme u ÞÑ gpu, vq ,w ÞÑ Hpu, v, wq varie comme w ÞÑ ´gpv, wq ,

ce qui permet d’établir le sens direct.Supposons à présent u ÞÑ gpu, vq croissante et v ÞÑ gpu, vq décroissante. D’après ce quiprécède, on a la croissance de H par rapport à u et w. D’autre part:

BvHpu, v, wq “ 1 ´ λ pB1gpv, wq ´ B2gpu, vqq . (2.27)

En supposant u, v, w P K Ă R avec K compact, on a |B1gpv, wq´B2gpu, vq| ď M avec M ą 0.

Donc, sous la CFL∆t

∆tď 1M on a le résultat.

Proposition 2.6.3

Si un schéma conservatif est monotone, alors l’opérateur H vérifie le principe dumaximum discret:

maxkPtj´1,j,j`1u

punkq ď un

j ď maxkPtj´1,j,j`1u

punkq .

Exemple 2.6.1.

48

Page 50: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

‚ Schéma de Lax-Friedrichs:

un`1

j “ un`1

j ´ λ`gpun

j , unj`1q ´ gpun

j´1, gnj q

˘,

avec gpu, vq “1

2pfpuq ` fpvqq ´

1

2λpv ´ uq. On a:

Bug “1

2f 1puq `

1

2λ ě 0 si ∆t ď

∆x

maxuPK |f 1puq|avec K compact, (2.28)

et Bvg “1

2f 1pvq ´

1

2λ ď 0 sous la même condition, ce qui donne la monotonie sous

condition CFL.

‚ Schéma de Lax-Wendroff :Ce schéma n’est pas monotone. Considérons par exemple l’équation Btu ´ Bxu “ 0,

avec la condition initiale discrète u0j “

ˇˇ 0 si j ď 0 ,1 si j ě 1 ,

Nous avons vu que le schéma est

donné par:

un`1

j “ unj `

λ

2

`unj`1 ´ un

j´1

˘`λ2

2

`unj`1 ´ 2un

j ` unj´1

˘,

stable sous la condition 0 ď λ ď 1. Or, le calcul donne:

u11 “ 1 `

λ

2`λ2

2p1 ´ 2 ` 0q “ 1 `

λ

2p1 ´ λq ą 1 si λ ă 1 . (2.29)

Le principe du maximum discret n’est pas respecté, donc le schéma n’est pas monotone.

‚ Schéma d’Enquist-Osher :La fonction de flux numérique associée au schéma s’écrit:

gpu, vq “1

2

ˆfpuq ` fpvq ´

ż v

u

|f 1pξq|dξ˙

, (2.30)

d’où Bug “1

2pf 1puq ` |f 1puq|q ě 0 et Bug “

1

2pf 1pvq ` |f 1pvq|q ě 0 et le schéma est

monotone.

‚ Schéma de Godunov :On montre que ce schéma vérifie le principe de comparaison discret (2.24). Rappelons quece schéma peut être construit en deux étapes:

i) Résolution exacte de problèmes de Riemann à chaque interface du maillage.

ii) Moyennisation des solutions sur chaque maille.

Considérons deux données initiales pv0j qjPZ et pu0jqjPZ telles que u0

j ě v0j pour tout j P Z. Rap-pelons que la solution u associée à la condition initiale pu0

jqjPZ dans la maille (xj´12, xj`12)est

ujpx, tq “"

uRp0, u0j´1, u

0jq si x ă xj ,

uRp0, u0j , u

0j`1q si x ą xj ,

49

Page 51: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

avec uR

ˆx ´ xj´12

t, u0

j´1, u0j

˙la solution exacte du problème de Riemann entre les états

u0j´1 et u0

j au niveau de la maille xj´12 et uR

ˆx ´ xj`12

t, u0

j , u0j`1

˙la solution exacte du

problème de Riemann entre les états u0j et u0

j`1 au niveau de la maille xj`12. On définitde même vjpx, tq la solution associée à la condition initiale pv0j qjPZ. D’après le principe decomparaison des solution exactes, la condition u0

j ě v0j pour tout j P Z implique

uR

ˆx ´ xj´12

t, u0

j´1, u0j

˙ě uR

ˆx ´ xj´12

t, v0j´1, v

0j

˙,

avec une inégalité similaire à l’interface xj`12, et par suite ujpx, tq ě vjpx, tq. Par suite:

un`1

j “ż xj`12

xj´12

ujpx, tqdx ěż xj`12

xj´12

vjpx, tqdx “ vn`1

j ,

de sorte que le principe de comparaison discret (2.24) est satisfait.

Introduisons à présent quelques notations. Pour une suite discrète´unj

¯nPNjPZ

, on définit:

u∆px, tq “ unj si tn ď t ă tn`1 et xj´12 ď x ă xj`12 .

On introduit les normes et semi-normes discrètes suivantes:

u∆p., tnqL1pRq “ÿ

jPZ

∆x|unj | ,

u∆p., tnqL8pRq “ maxjPZ

|unj | ,

TV pu∆p., tnqq “ÿ

jPZ

|unj`1 ´ un

j | .

On notera parfois formellement un “ u∆p., tnq.Définition 2.6.2: Schéma TVD

Un schéma est dit TVD (Variation Totale Décroissante) si on a TV pun`1q ďTV punq pour tout n P N. Un schéma est dit Stable L8 s’il existe c ą 0 indépendantde n et de ∆t tel que u∆p., tnqL8pRq ď c.

Nous allons voir que de tels schémas sont bien adaptés au calcul de solutions entropiques.Avant d’aller plus loin, nous aurons besoin du lemme suivant.

50

Page 52: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Lemme 2.6.1: Crandall-Tartar-Majda

Soit (Ω, µ) un espace mesurable et C un sous-espace de L1pΩq tel que pf, g P Cq ùñmaxpf, gq P C. Soit

T : C ÝÑ L1pΩqf ÞÝÑ T pfq

un opérateur vérifiantż

Ω

T pfqdµ “ż

Ω

fdµ pour tout f P C. Alors les trois propriétés

suivantes sont équivalentes:

i) @f, g P C , f ě g ùñ T pfq ě T pgq ,

ii)ż

Ω

pT pfq ´ T pgqq` dµ ďż

Ω

pf ´ gq` dµ ,

iii)ż

Ω

|T pfq ´ T pgq|dµ ďż

Ω

pf ´ gq dµ .

Proof. iq ñ iiq : On écrit maxpf, gq “ g ` pf ´ gq` ě g. Par suite, T pmaxpf, gqq ě T pgq,et de même T pmaxpf, gqq ě T pfq et par conséquent T pmaxpf, gqq ě maxpT pfq, T pgqq. Onretranche alors T pgq:

T pmaxpf, gqq ´ T pgq ě max pT pfq, T pgqq ´ T pgq “ pT pfq ´ T pgqq` .

On intègre: ż

Ω

pT pfq ´ T pgqq` dµ ďż

Ω

rT pmaxpf, gqq ´ T pgqs dµ ,

et on conclut avecż

Ω

pT pmaxpf, gqq ´ T pgqqdµ “ż

Ω

maxpf, gq´ż

Ω

gdµ car T est conservatif,

etż

Ω

maxpf, gq ´ż

Ω

gdµ “ż

Ω

pf ´ gq`.

iiq ñ iiiq : On utilise |f ´ g| “ pf ´ gq` ` pg ´ fq`. D’où:

ż

Ω

|T pfq ´ T pgq|dµ “ż

Ω

pT pfq ´ T pgqq` dµ `ż

Ω

pT pgq ´ T pfqq` dµ

ďż

Ω

pf ´ gq` dµ `ż

Ω

pg ´ fq` dµ “ż

Ω

|f ´ g|dµ .

iiiq ñ iiq : On utilise la relation pf ´ gq` “1

2p|f ´ g| ` pf ´ gqq et la conservativité de

l’opérateur T :ż

Ω

pT pfq ´ T pgqq` dµ “1

2

ˆż

Ω

|T pfq ´ T pgq|dµ `ż

Ω

pT pfq ´ T pgqqdµ˙

ď1

2

ˆż

Ω

|f ´ g|dµ `ż

Ω

pf ´ gq dµ˙

“ż

Ω

pf ´ gq` dµ .

51

Page 53: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

iiq ñ iq : Supposons f ě g, c’est à direż

Ω

pg ´ fq` dµ “ 0. On a donc:

0 ďż

Ω

pT pgq ´ T pfqq` dµ ď 0 ùñ T pgq ď T pfq .

En particulier, pour un opérateur qui conserve la masse dans L1pωq, la monotonie estéquivalente au caractère contractant L1. Munis de ce Lemme, on établit un premier résultatimportant.

Théorème 2.6.1

Soit un schéma explicite conservatif et monotone. Alors il est TVD et stable L8, et ilvérifie:

i) u∆p., tqL8pRq ď u∆p., 0qL8pRq ,

ii) u∆p., tqL1pRq ď u∆p., 0qL1pRq ,

iii) TV pu∆p., tqq ď TV pu∆p., 0qq ,

iv) u∆p., tq ´ v∆p., tqL1pRq ď u∆p., 0q ´ v∆p., 0qL1pRq ,

v) Si g est Lipschitz-continue, alors:

‚ u∆p., tnq ´ u∆p., tmqL1pRq ď c|n ´ m|∆tTV pu∆p., 0qq ,

‚ u∆p., tq ´ u∆p., sqL1pRq ď c p|t ´ s| ` ∆tqTV pu∆p., 0qq .

Proof. iq : Il s’agit d’établir que

minjPZ

u0j ď un

j ď maxjPZ

u0j , @j P Z , @n P N .

On note formellement un`1j “ Hjpunq “ Hpuj´K, ¨ ¨ ¨ , uj`Kq avec H monotone et conservatif.

Notons M “ maxjPZ u0j . Considérons la solution initiale définie par v0j “ M pour tout j P Z

On a:`u0j ď v0j , @j P Z

˘ñ

¨

˝u1j “ Hjpunq ď HjpMq “ Mloooooomoooooon

Hconservatif

, @j P Z

˛

‚ , (2.31)

et on montre de même que u1 est minorée par m “ minjPZ u0j . On en déduit la stabilité L8.

iiq : Ce point est une conséquence immédiate de (iv) avec v∆ “ 0.iiiq : On montre que le schéma est TV D. Soit t tel que tn ď t ă tn`1. On a:

TV pu∆p., tqq “ TV pu∆p., tnqq “ÿ

jPZ

|unj`1 ´ un

j | “1

∆xu∆p. ` ∆x, tnq ´ u∆p., tnqL1pRq .

52

Page 54: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

On applique alors (iv) en t “ tn:

1

∆xu∆p. ` ∆x, tnq ´ u∆p., tnqL1pRq ď

1

∆xu∆p. ` ∆x, 0q ´ u∆p., 0qL1pRq “ TV pu∆p., 0qq

ivq : On utilise le Lemme précédent dans L1pRq avec C “ tf P L1pRq , constante par mailleu et

l’opérateur T “ Hn. En effet, cet opérateur est conservatif: la relationÿ

jPZ

un`1j ∆x “

ÿ

jPZ

u0j∆x

pour toute donnée initiale pu0jq garantie par la conservativité du schéma peut se réécrire

ż

R

Hnpu0pxqqdx “ż

R

u0pxqdx pour tout u0 P C .

Ainsi, la monotonie de Hn (qui se déduit immédiatement de celle de H) implique que Hn

est un opérateur contractant dans L1. Ainsi, pour tout t tel que tn ď t ă tn`1:

u∆p., tq ´ v∆p., tqL1pRq “ u∆p., tnq ´ v∆p., tnqL1pRq

“ Hn pu∆p., 0qq ´ Hn pv∆p., 0qq L1pRq

ď u∆p., 0q ´ v∆p., 0qL1pRq ,

ce qui donne le résultat.vq : Soit m,n deux entiers avec n ą m. En utilisant (iv), on a:

u∆p., tnq ´ u∆p., tmqL1pRq ďn´1ÿ

p“m

u∆p., tp`1q ´ u∆p., tpqL1pRq

ď |n ´ m|u∆p.,∆tq ´ u∆p., 0qL1pRq .

D’autre part:

u∆p.,∆tq ´ u∆p., 0qL1pRq “ÿ

jPZ

∆x| Hjpu0qloomoonu0j´ ∆t

∆xpg0j`12´g0j´12q

´u0j | “

ÿ

jPZ

∆t|g0j`12 ´ g0j´12| .

On a g0j`12 “ g`u0j , u

0j`1

˘, et en utilisant g Lipschitz-continue:

ÿ

jPZ

∆t|g0j`12 ´ g0j´12| ď κ∆tÿ

jPZ

`|u0

j`1 ´ u0j | ` |u0

j ´ u0j´1|

˘

ď 2κ∆tTV pu∆p., 0qq ,

et on conclut le premier point avec c “ 2κ.Pour s, t quelconques, on considère n,m entiers tels que tn ď s ă tn`1 et tm ď t ă tm`1.Il est alors aisé de vérifier que |n ´ m|∆t “ |tn ´ tm| ď |s ´ t| ` ∆t et u∆p., tq ´ u∆p., sq “u∆p., tnq ´ u∆p., tmq, d’où le résultat.

53

Page 55: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

2.6.2 Schémas entropiques

Définition 2.6.3: Entropie et consistance

Soit la condition d’entropie BtEpuq ` BxGpuq ď 0, avec E une fonction convexe et Gle flux d’entropie associé.

‚ Un schéma explicite du type un`1

j “ Hpunj´1, u

nj , u

nj`1q est dit consistant avec

la condition d’entropie s’il existe une fonction Gpu, vq:

i) consistante avec le flux d’entropie, c’est à dire Gpu, uq “ Gpuq pour toutu P R.

ii) vérifiant l’inégalité d’entropie discrète:

Epun`1

j q ´ Epunj q `

∆t

∆x

`G

`unj , u

nj`1

˘´ G

`unj´1, u

nj

˘˘ď 0 .

La fonction G est appelée flu d’entropie.

‚ Si le schéma est consistant avec toutes les conditions d’entropie, on dit que ceschéma est entropique.

Théorème 2.6.2

Un schéma explicite, conservatif, consistant et monotone est entropique.

Proof. Nous admettrons la démonstration. Notons qu’en pratique, il suffit de démontrer laconsistance avec les entropies de Kruzkov

Epuq “ |u ´ k| et Gpuq “ sgnpu ´ kq pfpuq ´ gpuqq ,

avec k P R.

On déduit de ce théorème que les schémas de Godunov, Lax-Friedrichs, Enquist-Oshersont entropiques (éventuellement sous CFL). Le schéma de Roe peut-être corrigé de manièreà être entropique.

La notion de consistance intégrale (2.23) introduite pour les solveurs de Riemann ap-prochés s’étend aux schémas entropiques. Plus précisément:

Définition 2.6.4

On dit qu’un solveur de Riemann approché pupxt, ul, uRq vérifie la consistance inté-grale avec l’inégalité d’entropie si la relation suivante est satisfaite:

1

∆x

ż ∆x2

´∆x2

E ppupxt, ul, uRqq dx ď1

2pEpuLq ` EpuRqq ´

∆t

∆xpGpuRq ´ GpuLqq . (2.32)

54

Page 56: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Théorème 2.6.3

Soit pupxt, ul, uRq un solveur de Riemann approché vérifiant (2.23,2.32), c’est à direvérifiant la consistance intégrale de la loi de conservation et la consistance intégraleavec l’inégalité d’entropie. Ce schéma vérifie l’inégalité d’entropie discrète:

Epun`1j q ´ Epun

j q `∆t

∆x

`G

`unj , u

nj`1

˘´ G

`unj´1, u

nj

˘˘ď 0 ,

avec

G`unj , u

nj`1

˘“ Gpun

j q `∆x

2∆tηpun

i q ´1

∆t

ż xj`12

xj

E

ˆpu

ˆx ´ xj`12

∆t, uL, uR

˙˙

“ Gpunj q ´

∆x

2∆tηpun

j`1q ´1

∆t

ż xj`12

xj

E

ˆpu

ˆx ´ xj`12

∆t, uL, uR

˙˙ (2.33)

Théorème 2.6.4: Consistance avec les inégalités d’entropie

On considère un schéma explicite conservatif, consistant et entropique. On suppose

que lorsque ∆x tend vers 0, avec λ “∆t

∆xfixé, la suite de solutions discrètes u∆ vérifie:

1. u∆L8pRq ď c

2. u∆ ÝÑ u dans L1locpR ˆ R`q et p.p. dans R ˆ R`.

Alors la limite u est solution faible entropique de l’équation

Proof. La preuve est calquée sur celle du théorème de Lax-Wendroff : on multiplie l’inégalitéd’entropie discrète par ϕn

j , on effectue une intégration par parties discrète et on passe à lalimite.

Théorème 2.6.5: Convergence des schémas

On considère un schéma explicite conservatif, consistant et monotone (il est donc

entropique). Soit u0pxq P pL1 X L8 X BV q pRq, et soit v0pxq “ v0j “1

∆x

şxj`12

xj´12u0pxqdx

dans chaque maille (xj´12, xj`12q. On considère une suite de pas d’espace ∆x qui

tend vers 0 avec λ “∆t

∆xfixé et on note u∆ la suite de solutions discrètes associée.

Alors il existe une solution faible entropique u de donnée initiale u0 telle que, pourune sous-suite, u∆ Ñ u p.p. et dans L8 pR`, L1

locpRqq

55

Page 57: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Chapter 3

Problème de Riemann pour les systèmes

hyperboliques

3.1 Systèmes hyperboliques unidimensionnels

Ce chapitre vise à établir certains résultats généraux sur les lois de conservation en 1d. Onconsidère dans cette section des systèmes d’équations aux dérivées partielles du premier ordres’écrivant sous la forme suivante :

Btwpx, tq ` Bx pF pwpx, tqqq “ 0 , (3.1)

où w : RˆR` Ñ Rp est le vecteur d’état, et F : Rp Ñ Rp le flux correspondant. Le problèmede Cauchy associé à (3.1) s’écrit:

"Btwpx, tq ` Bx pF pwpx, tqqq “ 0 , x P R, t ą 0 ,

wpx, 0q “ w0px, 0q , x P R .

(3.2a)(3.2b)

Dans la suite, on supposera que la solution vit dans un ensemble convexe d’état admissibles,noté Ω.

3.1.1 Hyperbolicité, symétrisabilité et solutions fortes

Définition 3.1.1: Solutions fortes

On appelle solution forte (ou solution classique) du problème de Cauchy (3.2) surR ˆ r0, T s une fonction w P C1pR ˆ r0, T sq qui vérifie (3.2a) et (3.2b).

Remarque 3.1.1. Si w est une solution forte du système (3.1), alors c’est aussi une solutiondu système suivant, appelé forme quasi-linéaire ou forme non conservative du systèmedu lois de conservation:

Btw ` ApwqBxw “ 0, (3.3)

où Apwq “ ∇wF pwq est la matrice jacobienne de l’application w ÞÑ F pwq.

56

Page 58: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Une notion importante pour la construction de solutions fortes (comme de solutionsfaibles) au problème de Cauchy (3.2) est la notion d’hyperbolicité.

Définition 3.1.2: Systèmes hyperboliques

Le système (3.1) est dit hyperbolique si la matrice jacobienne Apwq “ ∇wF pwq estdiagonalisable et à valeurs propres réelles pour tout w P Ω. Si les valeurs propres sonttoutes distinctes, le système est dit strictement hyperbolique

Dans la suite, nous noterons ces valeurs propres pλipwqq1ďiďp, et les ordonnerons par

ordre croissant:λ1pwq ď λ2pwq ď ¨ ¨ ¨ ď λppwq . (3.4)

Remarque 3.1.2. L’hyperbolicité garantit la stabilité linéaire des constantes. Un étatconstant w˚ est solution de (3.1). Cette solution est dite linéairement stable si toute per-turbation w0 P L2pRq de cette donnée initiale constante conduit à une solution bornée dansL2pRq, uniformément en temps, pour le système linéarisé autour de w˚:

"Btw ` Apw˚qBxw “ 0 , x P R, t ą 0 ,

wpx, 0q “ w0px, 0q , x P R.

(3.5a)(3.5b)

Autrement dit, Apw˚q est R-diagonalisable si et seulement si (3.5) est bien posé dans L2,c’est-à-dire si et seulement si pour tout w0 P L2pRq, (3.5) admet une unique solution w PCpR`,L

2pRqq qui dépend continûment de w0: il existe C ą 0 telle que

suptPR`

‖wp., tq‖L2pRq ď C ‖w0‖L2pRq.

Une propriété pratique pour vérifier l’hyperbolicité d’un système est la suivante:

Proposition 3.1.1

La propriété d’hyperbolicité est invariante par changement de variable.

Proof. Soit w “ φpvq un changement de variable admissible. La matrice ∇vφpvqq est doncinversible pour tout v. La fonction w est solution forte de (3.3), si et seulement si, v estsolution forte de

∇vφpvqBtv ` Apφpvqq∇vφpvqBxv “ 0

ðñ Btv ` BpvqBxv “ 0,

avec Bpvq “ p∇vφpvqq´1Apφpvqq∇vφpvq. Les matrices Bpvq et Apφpvqq sont semblables.Ainsi, Apwq est R-diagonalisable pour tout w si et seulement si Bpvq est R-diagonalisablepour tout v.

En pratique, on s’efforce de privilégier un changement de variable rendant la diagonali-sation de la matrice Bpvq la plus simple possible.

57

Page 59: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Exemple 3.1.1. En 1d, en regroupant les variables d’écoulement dans la quantité w “ph, qqT avec q “ hu, les équations de Saint-Venant sur fond plat s’écrivent sous la forme:

Btw ` Bx pF pwqq “ 0 , (3.6)

avec F pwq “

¨

˝q

q2

h` g

h2

2

˛

‚. L’ensemble des états admissibles est le sous-ensemble de R2

caractérisé par Ω “ tph, qq , h ą 0 , q P Ru. On vérifie que la jacobienne associée au flux estdonnée par:

Apwq “ˆ

0 1

´ q2

h2 ` gh 2 qh

˙. (3.7)

Les valeurs propres associées sont λ1pwq “ qh

´?gh,λ2pwq “ q

h`

?gh. On en déduit que le

système est hyperbolique, et même strictement hyperbolique lorsque h ą 0.

En fait, l’hyperbolicité d’un système ne suffit pas à garantir l’existence de solutions fortesmême localement en temps. Pour ce faire, on introduit la notion de symétrisabilité:

Définition 3.1.3: Système symétrisable

Le système (3.1) est dit symétrisable si pour tout w P Ω, il existe une matrice Spwq,symétrique, définie, positive telle que la matrice SpwqApwq soit symétrique.

3.1.2 Solutions faibles

Rappelons qu’une solution w de (3.2) est appelée solution classique (ou solution solutionforte) si w P C1pR ˆ R`q et satisfait l’équation (3.2) en tout point.Comme dans le cas scalaire, les solutions des systèmes hyperboliques peuvent développer desdiscontinuités en temps fini, d’où la nécessité donner du sens à la notion de solution pourdes fonctions non régulières. Dans un premier temps, si l’on suppose w P C1pR ˆ R`q, onpeut multiplier (3.2) par une fonction test φ P C8

0 pR ˆ R`q et intégrer sur R ˆ R`. Aprèsintégration par parties:

ij

RˆR`

pwBtφ ` F pwqBxφq dxdt `ż

R

w0φpx, 0qdx “ 0 .

58

Page 60: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Notons qu’alors la dérivabilité de w n’est plus requise pour donner sens à la formule précé-dente. Ceci motive la définition suivante:

Définition 3.1.4: Solution faible

On dit que w P L1locpR ˆ R`q est solution faible de (3.2, 3.2b) si w vérifie:

ż ż

RˆR`

pwBtφ ` F pwqBxφq dxdt `ż

R

w0φpx, 0qdx “ 0 , @φ P C80 pR,R˚

`q . (3.8)

Nous venons de voir que toute solution classique de (3.2) était une solution faible au sensde (3.8). Réciproquement, si l’on considère une solution faible w (3.8) de classe C1pR ˆ R`q,alors on vérifie aisément que w est une solution classique de (3.2).

Dans le cas d’une discontinuité, nous allons voir à présent que les valeurs de w et F pwqsont reliées par une relation, appelée relation de Rankine-Hugoniot. Plaçons nous dansun ouvert Σ Ă RˆR` et supposons que la solution w soit séparée en deux solutions régulièreswG et wD par une courbe de discontinuité paramétrée par une fonction Γ : t ÝÑ pγptq, tqde classe C1pR`q (Figure 1). L’ouvert Σ se partitionne alors en deux ouverts Σ´ et Σ` surlesquels évoluent respectivement wG et wD. En tout point px, tq de la courbe Γ, on note:

wGpx, tq “ limpy,sqÑpx,tq

wGpy, sq et wDpx, tq “ limpy,sqÑpx,tq

wDpy, sq . (3.9)

En premier lieu, il convient de rappeler que w est solution classique en tout point où elleest C1. En d’autres termes, wG est solution classique sur Σ´ et wD est solution classiquesur Σ`. On s’intéresse à présent au comportement de la solution au niveau de la courbe dediscontinuité. w étant une solution faible, on a:

ż

Σ

pwBtφ ` F pwqBxφq dxdt “ 0 , @φ P C80 pΣq ,

ce qui se réécrit:ż

Σ´

pwBtφ ` F pwqBxφq dxdt `ż

Σ`

pwBtφ ` F pwqBxφq dxdt “ 0 , @φ P C80 pΣq . (3.10)

Après application de la formule de Green 1

ż

Σ´

pwBtφ ` F pwqBxφq dxdt “ ´ż

Σ´

pBtw ` BxF pwqqφ dxdt

Σ´XΓ

`wGn

´t ` F pwGqn´

x

˘φ dxdt ,

ż

Σ`

pwBtφ ` F pwqBxφq dxdt “ ´ż

Σ`

pBtw ` BxF pwqqφ dxdt

Σ`XΓ

`wDn

`t ` F pwDqn`

x

˘φ dxdt ,

(3.11)

1şΣupx, tqdivpvpx, tqqdν “ ´

şΣupx, tqdivpvpx, tqqdν`

şBΣ upx, tqvpx, tq.ndσ, appliquée ici avec upx, tq “ φ

et vpx, tq “ pw, F pwqqT .

59

Page 61: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

où %n˘ “ pn˘x , n

˘t qT désignent les vecteurs normaux extérieurs à Γ relativement à Σ˘ (Figure

1). La solution étant régulière sur Σ˘, les intégrales de surface disparaissent dans l’équationprécédente, pour donner:

ż

Σ´XΓ

`wDn

´t ` F pwDqn´

x

˘φ dxdt `

ż

Σ`XΓ

`wDn

`t ` F pwDqn`

x

˘φ dxdt “ 0 , (3.12)

ou encore ż

ΣXΓ

`pwG ´ wDqn´

t ` pF pwGq ´ F pwDqqn´x

˘φ dxdt “ 0 . (3.13)

Finalement, en utilisant le fait que la direction normale à la courbe Γ est portée par le vecteurp1,´γ1ptqqT , on obtient les relations de Rankine-Hugoniot:

γ1ptq pwD ´ wGq “ F pwDq ´ F pwGq , (3.14)

ou de manière plus compacte:γ1ptqrrwss “ rrF pwqss , (3.15)

La quantité γ1 est appelée vitesse de propagation de la discontinuité, et usuellement notéeσ dans la littérature. Nous venons d’établir le résultat suivant:

t

x

Σ´

Σ`

wG

wD

Γ

%n´

Figure 1: Relation de Rankine-Hugoniot : séparation des états le long de la courbe de dis-continuité γ.

Théorème 3.1.1: Théorème de Rankine Hugoniot

w est une solution faible de (3.1) si et seulement si w est solution classique là où elleest de classe C1, et vérifie la relation

σrrwss “ rrF pwqss , (3.16)

le long de la discontinuité Γ.

60

Page 62: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Remarque 3.1.3. Cas d’un choc à vitesse constante On suppose la courbe de discon-tinuité caractérisée par γptq “ σt. Dans ce contexte, la solution s’écrit

w “ wG ` pwD ´ wGqHpx ´ σtq , (3.17)

où H désigne la fonction de Heaviside :

Hpxq “"

0 si x ă 0 ,1 si x ą 0 .

(3.18)

Une démonstration rapide consiste à dériver (3.17) par rapport au temps (au sens des dis-tributions)2, pour obtenir:

Btw “ BtwG ` pBtwD ´ BtwGqHpx ´ σtq ´ σ pwD ´ wGq δx´σt . (3.19)

D’autre part :F pwq “ F pwGq ` pF pwDq ´ F pwGqqHpx ´ σtq ,

et par un raisonnement analogue:

BxF pwq “ BxF pwGq ` pBxF pwDq ´ BxF pwGqqHpx ´ σtq ` pF pwDq ´ F pwGqq δx´σt . (3.20)

En sommant (3.19) et (3.20), et en utilisant (3.2), on obtient immédiatement:

pF pwDq ´ F pwGqq δx´σt “ σ pwD ´ wGq δx´σt ,

d’où l’on tire les relations de saut.

3.1.3 Inégalités d’entropie

Comme dans le cas scalaire, la problème de Cauchy peut admettre une infinité de solutionsfaibles. Afin de sélectionner les solutions physiquement admissibles (en d’autres termes, les"bonnes" solutions), on adjoint le problème d’une nouvelle condition, communément appeléeinégalité d’entropie. Nous commençons par la définition générale suivante:

Définition 3.1.5: Entropie

Une fonction convexe η P C1pΩq est une entropie du système (3.1) s’il existe unefonction ψ P C1pΩq appelée flux d’entropie telle que

Btηpwq ` Bxpψpwqq “ 0 (3.21)

pour toute solution classique w de (3.1) .

2On rappelle que la dérivée de la fonction H est la distribution de Dirac δ et que si τx,σ désigne lechangement de variables t ÞÑ x ´ σt alors on a pT ˝ τx,σq1 “ ´σ.T 1 ˝ τx,σ pour toute distribution T .

61

Page 63: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Remarque 3.1.4. Dans le cas des équations de Saint-Venant 1d, l’équation d’énergie (6.26)est donnée par:

Bt

ˆgh2

2`

1

2hu2

˙` Bx

ˆgh2u `

1

2hu3

˙“ 0 . (3.22)

La fonction définie par ηpwq “ gh2

2`

1

2hu2 est une entropie du système, associée au flux

ψpwq “ gh2u `1

2hu3. La définition précédente s’étend de manière naturelle aux systèmes

2d. Par exemple, nous avons vu que pour toute fonction régulière w, l’énergie totale ηpwq “1

2gh2`

1

2hu2 du système de Saint-Venant 2d satisfaisait l’équation Btηpwq`divpψpwqq “ 0,

où ψpwq “ˆgh2 `

1

2hu2

˙u. Dans les deux cas évoqués précédemment il reste bien sûr à

s’assurer que η est convexe, ce qui revient à montrer que sa Hessienne est définie positive.

Cette notion s’étend au cas des solutions faibles à travers la définition suivante:Définition 3.1.6: Solution faible entropique

Une solution faible de (3.1) est dite entropique si pour tout couple entropie/flux pη,ψqon a l’inégalité d’entropie suivante:ij

RˆR`

pηpwqBtφ ` ψpwqBxφq dxdt `ż

R

ηpw0pxqqφpx, 0qdx ě 0 , @φ P C80 pR,R˚

`q , φ ě 0 .

Remarque 3.1.5. Cette définition se réécrit au sens faible:

Btηpwq ` Bxpψpwqq ď 0 . (3.23)

Ce critère peut se justifier rigoureusement d’un point de vue physique, par le biaisd’approches avec viscosité evanescente.3 Considérant la remarque précédente (3.1.4), cecritère admet une interprétation simple d’un point de vue physique: il garantit que l’énergiedu système est dissipée à travers les chocs. Dans le cas scalaire, on peut montrer que cecritère garantit l’unicité des solutions, mais à ce jour ce résultat est seulement conjecturé dansle cadre général des systèmes hyperboliques. Nous verrons toutefois qu’il garantit l’existenceet l’unicité de la solution entropique du problème de Riemann sous certaines conditions. Enpratique, on utilise le critère de Lax pour caractériser les solutions faibles entropiques:

3L’idée est de de montrer (3.23) en voyant les solutions faibles de l’EDP comme limites de solutions d’unsystème visqueux Btpwεq ` BxpF pwεqq “ ε∇w.

62

Page 64: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Définition 3.1.7: Conditions d’admissibilité de Lax

Une discontinuité séparant des états wG et wD se propageant à une vitesse σ est unechoc physiquement admissible si et seulement s’il existe un indice k associé à un champvraiment non-linéaire tel que:

λkpwGq ě σ ě λkpwDq ,λjpwGq ď σ et λjpwDq ď σ , @j ă k ,

λjpwGq ě σ et λjpwDq ě σ , @j ą k .

(3.24)

La démonstration de ce résultat général est assez technique et dépasse le cadre ce cecours. Nous verrons toutefois dans quelle mesure ce critère assure le caractère entropiquedes solutions faibles pour le problème de Riemann dans le cas des équations de Saint-Venant.

3.2 Problème de Riemann

Dans la perspective de la construction de schémas numériques, il est essentiel de caractériserles solutions du problème de Riemann, qui correspond à un problème de Cauchy (3.2),(3.2b) avec donnée initiale discontinue:

$’&

’%

Btw ` Bx pF pwqq “ 0 , x P R, t ą 0 ,

wpx, 0q “"

wG si x ă 0wD si x ą 0

(3.25a)

(3.25b)

La construction de la solution du problème de Riemann se base sur le résultat général (3.2.4),que nous verrons à la fin de ce chapitre. Il est d’abord nécessaire d’introduire les notionssuivantes.

3.2.1 Champs caractéristiques

Dans la suite, on appellera kième champ caractéristique la donnée du tripletpλkpwq, rkpwq, lkpwqq, où lkpwq, rkpwq sont les vecteurs propres à gauche et à droite associésà la valeur propre λkpwq. Nous verrons ultérieurement que la donnée des ces champs estcruciale dans la construction de la solution du problème de Riemann, à la base des méthodesnumériques que nous allons considérer.

Définition 3.2.1: Nature des champs caractéristiques

On dit que le kième champ caractéristique est vraiment non linéaire s’il vérifie:

∇λkpwq.rkpwq ‰ 0 , @w P Ω . (3.26)

On dit que le kième champ caractéristique est linéairement dégénéré s’il vérifie:

∇λkpwq.rkpwq “ 0 , @w P Ω . (3.27)

63

Page 65: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Remarque 3.2.1. Revenons à l’exemple des équations de Saint-Venant. Les vecteurs pro-pres à droite associés aux valeurs propres λ1pwq “ u´

?gh et λ2pwq “ u`

?gh sont donnés

par:

r1pwq “ˆ

1u ´

?gh

˙et r2pwq “

ˆ1

u `?gh

˙. (3.28)

Il est alors aisé de vérifier que pour k “ 1, 2, ∇λkpwq.rkpwq ‰ 0 et ∇λkpwq.rkpwq ‰ 0 pourtout w P Ω, de sorte que les deux champs caractéristiques sont vraiment non linéaires. Atitre d’exercice, on pourra vérifier que les équations de Saint-Venant avec traceur passif:

Bth ` Bx phuq “ 0 ,

Bthu ` Bx

ˆhu2 ` g

h2

2

˙“ 0 ,

Bthϕ ` Bx phuϕq “ 0 ,

(3.29)

donnent lieu à un troisième champ caractéristique linéairement dégénéré. Nous verrons plustard que dans le cas des équations de Saint-Venant 2d, il existe aussi un troisième champcaractéristique linéairement dégénéré.

3.2.2 Courbes intégrales - Ondes de détente

Une courbe intégrale associée à rk est une courbe c : ξ P R ÞÝÑ cpξq P Ω de classe C8

vérifiant:c1pξq “ αpξqrkpcpξqq . (3.30)

En d’autres termes, la tangente à la courbe c en tout point est colinéaire à rk. On définitles invariants de Riemann associés au champ caractéristique comme étant les fonctionsdifférentiables Ik : Rp Ñ R telles que ∇Ikpwq.rkpwq “ 0 pour tout w P Ω, que l’on appellerak-invariants dans la suite. La terminologie “k-invariants” de Riemann tient du fait que cesfonctions sont constantes le long des courbes intégrales de rk. En effet:

d

dξpIkpcpξqqq “ c1pζq.∇Ikpcpξqq “ αpξqrkpcpζqq.∇Ikpcpξqq “ 0 . (3.31)

Il est alors important de préciser que dans le cas d’un champ linéairement dégénéré k (3.27),la valeur propre λk est nécessairement un k´invariant de Riemann.

De manière générale, lorsqu’un choc n’est pas admissible, on peut tenter de relier deuxétats wG et wD avec une solution régulière de la forme:

wpt, xq “

$’’’&

’’’%

wG six

tď σG ,

νpx

tq si σG ď

x

tď σD

wD si σD ďx

t,

(3.32)

En revenant à la forme quasi-linéaire Btw ` ApwqBxw “ 0, on a alors:´

´x

t2

¯ν 1

´x

t

¯` A

´ν

´x

t

¯¯ ˆ1

t

˙ν 1

´x

t

¯, (3.33)

64

Page 66: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

d’où l’on tire, en posant ξ “x

t:

pApνpξqq ´ ξIqν 1pξq “ 0 .

Si l’on s’intéresse aux solutions non triviales, ceci implique que ξ est une valeur propre dusystème associée au vecteur propre ν 1pξq. En d’autres termes, il existe k tel que:

ν 1pξq “ αpξqrkpνpξqq et ξ “ λkpνpξqq , (3.34)

et ν est alors une courbe intégrale associée à rk. On remarque alors qu’en dérivant ladeuxième équation: ν 1pξq.∇λkpνpξqq “ 1, et donc:

αpξq∇λkpνpξqq.rkpνpξqq “ 1 ,

ce qui ne peut se produire si le champ est linéairement dégénéré. L’équation précédente seréécrit:

αpξq “1

∇λkpνpξqq.rkpνpξqq,

et en revenant à la première équation de (3.34):

ν 1pξq “rkpνpξqq

∇λkpνpξqq.rkpνpξqq, (3.35)

système qu’on peut alors résoudre en s’aidant des conditions initiales. Notons aussi que ladeuxième relation de (3.34) impose σG “ λkpνpσGqq “ λkpwGq et de même σD “ λkpwDq.Ainsi, nous venons de voir que deux états wG et wD peuvent être reliés par une solutionrégulière si et seulement s’ils sont situés sur la courbe intégrale associée à un champ vraimentnon linéaire, avec la condition λkpwGq ă λkpwDq.

3.2.3 Discontinuités de contact

Supposons à présent le kième champ caractéristique linéairement dégénéré, et cherchons àconnecter un état wD à un état wG donné. Nous avons vu que dans ce cas il n’est paspossible de connecter ces deux états par une courbe régulière de la forme (3.32). Considéronsune une courbe intégrale c : ξ ÞÝÑ cpξq passant par wG associée à rk:

"c1pξq “ αpξqrkpcpξqq ,c1p0q “ wG .

(3.36)

Notons que λk étant un k´invariant de Riemann, on a λkpwGq “ λkpcpξqq. Le calcul donne:

d

`F pcpξqq ´ F pwq ´ λkpwGq pcpξq ´ wq

˘“ Apcpξqqc1pξq ´ λkpwGqc1pξq

“ αpξq`Apcpξqq ´ λkpcpξqqI

˘rkpcpξqq

“ 0 ,

(3.37)

65

Page 67: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

ce qui signifie que la quantité F pcpξqq ´ F pwGq ´ λkpwGq pcpξq ´ wGq est constante. Con-sidérant qu’elle s’annule en 0, on a donc:

F pcpξqq ´ F pwGq “ λkpwGq pcpξq ´ wq , (3.38)

ce qui signifie que les relations de Rankine-Hugoniot sont vérifiées le long de cette courbeintégrale, avec une vitesse de propagation égale à λkpwGq. On en déduit que l’ensemble desétats pouvant être connectés à wG sont situés sur cette courbe intégrale. Par ailleurs, pourtout état wD situé sur cette courbe, on aura σ “ λkpwDq “ λkpwGq, ce qui proscrit d’unepart une construction de la forme (3.32) (comme nous l’avons déjà évoqué). Il résulte decette analyse que la solution définie par

wpx, tq “

$&

%wG si

x

tă λkpwGq ,

wD six

tą λkpwGq,

est une solution faible du problème, qui peut être vue comme une version dégénérée de (3.32)avec σG “ σD “ λkpwGq. Il convient enfin de préciser que les k´invariants de Riemann sontpréservés à travers cette discontinuité, car ils sont constants sur les courbes intégrales.

3.2.4 Solution du problème de Riemann

Théorème 3.2.1: Théorème local d’existence et d’unicité (Lax)

On considère le problème de Riemann (3.25a,3.25b). Alors, si wG est suffisammentproche de wD, et si le système n’admet que des champs vraiment non linéaires oulinéairement dégénérées, il existe une unique solution faible entropique composée de pondes simples (choc, détente ou discontinuité de contact), séparant p ` 1 états con-stants.

66

Page 68: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Chapter 4

Résolution pratique du problème de

Riemann

4.1 Equations de Saint-Venant 1d

On rappelle que le système de Saint-Venant sur fond plat s’écrit:

Btw ` Bx pF pwqq “ 0 , (4.1)

avec w “ˆ

hhu

˙et F pwq “

¨

˝hu

hu2 ` gh2

2

˛

‚.

D’après le théorème (3.2.4), on sait que la solution du problème de Riemann consisteraen trois états constants séparés par deux ondes simples correspondant à des chocs ou desdétentes (il n’y a pas de discontinuité de contact), comme illustré dans la Figure 1.

wG

ˆhG

huG

˙

ˆh˚

hu˚

˙wD

ˆhD

huD

˙

1-onde(Détente ou choc)

2-onde(Détente ou choc)

Figure 1: Problème de Riemann - Connexion des états wG et wD .

4.1.1 Caractérisation des chocs

Pour fixer les idées, on s’intéresse aux chocs associés au premier champ caractéristique (onrenvoie à l’exemple (3.2.1) pour l’expression et la nature des champs). En d’autres termes,on s’intéresse à caractériser les états w˚ pouvant être reliés à wG par un 1-choc admissible.

67

Page 69: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

Par les relations de Rankine-Hugoniot, on a:

σph˚ ´ hGq “ h˚u˚ ´ hGuG ,

σph˚u˚ ´ hGuGq “ h˚pu˚q2 `1

2gph˚q2 ´ hGu

2G ´

1

2gphGq2 .

(4.2)

La première équation donne σ “h˚u˚ ´ hGuG

h˚ ´ hG

, et en injectant dans la deuxième:

pu˚q2 ´ 2u˚uG `ˆu2G ´

1

2g

ˆhG

h˚´

h˚h

˙phG ´ h˚q

˙, (4.3)

ce qui permet d’exprimer u˚ en fonction de h˚:

u˚ “ uG ˘

dg

2

ˆhG

h˚´

h˚hG

˙phG ´ h˚q . (4.4)

La théorie linéaire1 permet alors d’identifier la solution affectée du signe “-” comme cellecorrespondant au premier champ caractéristique. Le calcul donne:

σG “ uG ´ sgnph˚ ´ hGqc

ghG ` h˚

2

hG

, (4.5)

Par ailleurs, les conditions d’admissibilité de Lax (3.24) imposent λ1pwGq ě σ ě λ1pw˚q,c’est à dire:

uG ´a

ghG ě σ ě u˚ ´agh˚ ,

d’où l’on déduit δ “ 1 et la condition nécessaire et suffisante h˚ ě hG. La relation (4.4) seréécrit alors de la façon suivante:

u˚ “ C1ph˚q :“ uG ´ ph˚ ´ hGq

dg

2

ˆ1

h˚`

1

hG

˙. (4.6)

Par un raisonnement analogue, on montre qu’un 2-choc connectant un état w˚ à un état wD

se caractérise par :

u˚ “ C2ph˚q :“ uD ` ph˚ ´ hDq

dg

2

ˆ1

h˚`

1

hD

˙, (4.7)

à travers un choc se propageant à la vitesse

σD “ uD `c

ghD ` h˚

2

hD

, (4.8)

sous la condition d’admissibilité h˚ ě hD.Les relations (4.6) et (4.7) définissent des courbes C1, C2 dans le plan ph, uq caractérisant

l’ensemble des états pouvant être respectivement connectés à wG et wD. Ces courbes sontcommunément appelées courbes de Hugoniot et représentées sur la Figure 2. Lorsque cescourbes s’intersectent, ceci signifie que les états wG et wD peuvent être connectés via unétat intermédiaire w˚ par le biais de deux chocs admissibles (Fig. 2 gauche), mais ce n’estpas toujours le cas (Fig. 2 (droite)).

1Il s’agit en fait d’étudier le comportement de la solution autour de petites perturbations hG “ h˚ ` αet choisir un signe approprié pour observer la convergence vers w

˚ dans une direction tangente au vecteurpropre r1pw˚q lorsque α tend vers 0.

68

Page 70: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

h

u

wG

1 ´ choc pC1q

wD

2 ´ choc pC2q

h

u

wG

C1

wD

C2

Figure 2: Courbes de Hugoniot pour les 1-choc et 2-choc. Cas de deux chocs admissibles(gauche) et d’un choc non admissible (droite).

4.1.2 Ondes de détente

Lorsqu’un choc n’est pas admissible, on cherche à connecter un état w˚ à wG par une 1-ondede détente. Rappelons que pour tout vecteur d’état w “ ph, huqT on a ∇λ1pwq.r1pνpwqq “´3

2

agh de sorte que l’équation (3.35) s’écrit:

ν 1pξq “ ´2

3

ahg

ˆ1

u ´?gh

˙. (4.9)

La première équation donne h1pξq “ ´2

3

ahpξqg, dont la solution générale est donnée par

hpξq “1

9gpA ´ ξq2, avec A une constante réelle2. On utilise alors la condition hpξq “ hG

pour ξ “ σG. En exploitant (3.34) et plus particulièrement σG “ λ1pνpσGqq “ uG ´?ghG,

on en déduitA “ uG ` 2

aghG . (4.10)

Ceci permet de déterminer h en fonction de ξ. Il suffit alors d’exploiter l’expression desinvariants de Riemann afin de déterminer la vitesse:

uG ` 2a

ghG “ u˚ ` 2agh˚ ,

ce qui peut se réécrire:

u˚ “ D1ph˚q :“ uG ` 2´a

ghG ´a

gh˚¯. (4.11)

Notons enfin que la condition λ1pwGq ď λ1pw˚q doit être satisfaite pour pouvoir connecterces deux états, c’est à dire:

uG ´a

ghG ă u˚ ´agh˚ ,

2Il s’agit d’un cas particulier d’une équation de Bernouilli : y1 ` aptqy ` bptqyα “ 0, où a, b sont deuxfonctions continues et α P Rzt0, 1u, qui peut se résoudre en introduisant le changement de variable z “ y1´α.

69

Page 71: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

ou encore, avec (4.11):

uG ´aghG ă uG ` 2

´aghG ´

agh˚

¯´

agh˚ , (4.12)

ce qui revient à avoir h˚ ď hG. De manière similaire, les états w˚ pouvant être connectés àwD à travers une 2-onde sont caractérisés par le biais des invariants de Riemann:

uD ´ 2a

ghD “ u˚ ´ 2a

gh˚ , (4.13)

c’est à dire:u˚ “ D2ph˚q :“ uD ´ 2

´aghD ´ 2

agh˚

¯, (4.14)

sous la condition h˚ ď hD. Une nouvelle fois, l’ensemble des états intermédiaires pouvantêtre connectés à wG et wD par ces ondes de détentes peuvent être représentés dans le planph, uq par les deux courbes de Hugoniot D1, D2 définies par les relations (4.11) et (4.14).

h

u

wG

C1

wD

C2

x

t

σGσD

wG

wD

Figure 3: Cas choc - choc. Représentation dans le plan ph, uq (gauche) et dans le plan px, tq(droite). Les vitesses des chocs σG, σD sont données par (4.5) et (4.8).

4.1.3 Bilan

Au final, il existe quatre cas possibles pour connecter wG et wD, selon si les 1-ondes et2-ondes sont des détentes ou des chocs. Ces différents cas sont représentés dans les Figures3 à 6 dans le plan ph, uq (gauche) ainsi que dans le plan px, tq (droite)

4.1.4 Un exemple : rupture de barrage

Il s’agit d’un cas d’étude très classique, correspondant à un cas particulier de problème deRiemann pour lequel uG “ uD “ 0. Pour fixer les idées, considérons le cas hG ą hD ą0. Nous savons que la solution du problème de Riemann va être constituée de trois étatsconstants reliés par deux ondes simples (choc ou ondes de détente). En d’autres termes, ils’agit de déterminer un état intermédiaire w˚ permettant de relier wG à wD, soit par des

70

Page 72: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

h

u

wG C1

wD D2

x

t

σGλ2pw˚q λ2pwDq

wG

wD

Figure 4: Cas choc - détente. Représentation dans le plan ph, uq (gauche) et dans le planpx, tq (droite). La vitesse du 1-choc σG est donnée par (4.5). La deuxième onde est une2-détente se présentant sous la forme (3.32) avec les vitesses λ2pw˚q et λ2pwDq.

chocs, soit par des détentes, portées par le premier et le deuxième champ caractéristique.Concernant le premier champ caractéristique, l’étude générale nous a permis de dégager desdépendances entre h˚ et u˚, plus précisément:

u˚ph˚q “

$’’&

’’%

D1ph˚q “ uG ` 2`?

ghG ´?gh˚

˘si h˚ ă hG (onde de détente)

C1ph˚q “ uG ´ ph˚ ´ hGq

dg

2

ˆ1

h˚`

1

hG

˙si h˚ ą hG (choc)

(4.15)De manière similaire, les états pouvant être connectés à wD sont caractérisés par:

u˚ph˚q “

$’’&

’’%

D2ph˚q “ uD ´ 2`?

ghD ´?gh˚

˘si h˚ ă hD (onde de détente)

C2ph˚q “ uD ` ph˚ ´ hDq

dg

2

ˆ1

h˚`

1

hD

˙si h˚ ą hD (choc)

(4.16)Il s’agit donc de déterminer h˚ de manière à rendre compatible les relations (4.15) et (4.16).Après une étude de cas basique, ceci n’est possible que si hG ą h˚ ą hD, ce qui signifie quela solution sera composée d’une 1-onde de détente et d’un 2-choc (cas de la Figure 5). Onest donc ramenés chercher la solution h˚ de l’équation non linéaire suivante :

2´a

ghG ´a

gh˚¯

“ ph˚ ´ hDq

dg

2

ˆ1

h˚`

1

hD

˙. (4.17)

71

Page 73: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

h

u

wG

D1

wD

C2

x

tλ1pwGq λ1pw˚q σD

wG

wD

Figure 5: Cas détente - choc. Représentation dans le plan ph, uq (gauche) et dans le planpx, tq (droite). La première onde est une 1-détente se présente sous la forme (3.32) avec lesvitesses λ2pwGq et λ2pw˚q. La vitesse du 2-choc σD est donnée par (4.8).

4.2 Le cas 2d

4.2.1 Généralités

En regroupant les variables d’écoulement dans la quantité w “ ph, hu, hvqT , supposée ap-partenir à l’ensemble (convexe) des états admissibles:

Ω :“"

ph, hu, hvqT , h ą 0, hu, hv P R(

Ă R3 ,

les équations (6.21) se reformulent sur fond plat sous la forme compacte:

Btw ` div pGpwqq “ 0 , (4.18)

où la fonctions de flux G : Ω ÞÝÑ R3 ˆ R3 est définie par:

où Gpwq “

¨

˚˚

hu hv

hu2 `1

2gh2 huv

huv hv2 `1

2gh2

˛

‹‹‹‚ . (4.19)

Comme dans le cas 1d ces équations peuvent se réécrire sous forme quasi-linéaire:

Btw ` AxpwqBxw ` AypwqByw “ 0 , (4.20)

où les matrices Axpwq, Aypwq sont données par:

Axpwq “

¨

˝0 1 ´uv

gh ´ u2 2u v0 0 u

˛

‚ , Aypwq “

¨

˝0 0 1

´uv v ugh ´ u2 0 2v

˛

‚ . (4.21)

72

Page 74: Analyse théorique et numérique des équations de Saint-Venant

h

u

wG

D1

wD D2

λ1pwGq λ1pw˚q λ2pw˚q λ2pwDq

x

t

wG

wD

Figure 6: Cas choc - choc. Représentation dans le plan ph, uq (gauche) et dans le plan px, tq(droite). Les vitesses des chocs σG, σD sont données par (4.5) et (4.8).

Le système de Saint-Venant 2d (4.18) est strictement hyperbolique. Plus précisément, onpeut montrer que pour tout vecteur %n “ pnx, nyq, la matrice A%npwq “ nxAxpwq ` nyAypwqest diagonalisable et admet trois valeurs propres distinctes si w P Ω. Cette analyse peut sepoursuivre en dimension quelconque et permet d’étendre la notion d’hyperbolicité au cas dessystèmes multi-dimentionnels.

De façon similaire, notons aussi que les notions de solutions fortes et solutions faibles, ainsique les définitions de solutions entropiques s’étendent au cas de 2d de manière naturelle.

Dans la perspective de l’étude du problème de Riemann, nous nous placerons dans un con-texte "pseudo-1d", en supposant l’écoulement constant selon l’axe y, et noterons

F pwq “ˆhu, hu2 `

1

2gh2, huv

˙T

(4.22)

la composante horizontale du flux G, de sorte que le problème de Chauchy correspondants’écrit:

Btw ` BxpF pwqq “ 0 , x P R, t ą 0 . (4.23)

Remarque 4.2.1. Il est important de préciser ici que cette cette stratégie d’analyse trouveses motivations d’un point de vue numérique, car même en deux dimensions, la constructionde schémas s’effectue en se ramenant à des problèmes de Riemann 1d dans une directionspatiale privilégiée (portée par la direction normale à l’interface séparant les états "gauche"wG et "droit" wD).

4.2.2 Champs caractéristiques

La matrice jacobienne associée au problème (4.22), (4.23) est donnée par:

Axpwq “

¨

˝0 1 0

gh ´ u2 2u 0´uv v u

˛

73