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BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2003, N° 277 (3) 19 PRÉSERVATION DES BOIS / BOIS DOSSIER Photo 3. Fructification du champignon de la pourriture sur grume, en Guyane. Slash rotting fungus brackets on a log, Guyana. Photo S. Elsner. Les régions tropicales humides sont propices au développement des agents de détérioration du bois, tels que les insectes, champignons et mollusques foreurs. Si des traitements chimiques préventifs et curatifs existent, qu’il s’agit d’adapter à ces régions en respectant l’environnement, la protection des bois et des ouvrages peut également être renforcée grâce au choix d’essences naturellement durables et par une conception architecturale judicieuse des constructions. Daniel Fouquet Cirad-forêt TA 10/16 73, rue Jean-François Breton 34398 Montpellier Cedex 5 France Agents de détérioration et préservation des bois en milieu tropical humide

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Page 1: Agents de détérioration et préservation des bois en …BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2003, N 277 (3) 19PRÉSERVATION DES BOIS / BOISDOSSIER Photo 3. Fructification du champignon

B O I S E T F O R Ê T S D E S T R O P I Q U E S , 2 0 0 3 , N ° 2 7 7 ( 3 ) 19PRÉSERVATION DES BOIS / BOIS

DOSSIER

Photo 3. Fructification du champignon de la pourriture sur grume, en Guyane. Slash rotting fungus brackets on a log, Guyana. Photo S. Elsner.

Les régions tropicales humides sont propices au développementdes agents de détérioration du bois, tels que les insectes, champignons etmollusques foreurs. Si des traitements chimiques préventifs et curatifs existent, qu’ils’agit d’adapter à ces régions en respectant l’environnement, la protection des bois etdes ouvrages peut également être renforcée grâce au choix d’essences naturellementdurables et par une conception architecturale judicieuse des constructions.

Daniel FouquetCirad-forêt TA 10/16 73, rue Jean-François Breton 34398 Montpellier Cedex 5 France

Agents de détérioration et préservation des bois

en milieu tropical humide

Page 2: Agents de détérioration et préservation des bois en …BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2003, N 277 (3) 19PRÉSERVATION DES BOIS / BOISDOSSIER Photo 3. Fructification du champignon

RÉSUMÉ

AGENTS DE DÉTÉRIORATION ET PRÉSERVATION DES BOIS EN MILIEU TROPICAL HUMIDE

La préservation du bois en Europesubit actuellement une profondemutation liée, en particulier, à desconsidérations environnementales.De nouvelles matières actives appa-raissent et de nouveaux moyens delutte sont mis en œuvre. Ces tech-niques sont, ensuite, introduites dansles pays de climat tropical humidesans être adaptées aux réalités deterrain. Dans ces régions à forte plu-viosité, où l’humidité de l’air estimportante et les températuresconstamment élevées, les agents dedétérioration du bois – insectes xylo-phages, champignons lignivores oumollusques foreurs – trouvent lesconditions de vie idéales pour leurdéveloppement. La virulence desattaques est sans commune mesureavec celles rencontrées dans nosrégions. En conséquence, la protec-tion des bois et des ouvrages doitêtre renforcée par des choix judicieuxd’essences naturellement durables,ce qui ne manque pas dans cesrégions, et par une conception archi-tecturale des constructions qui soitadaptée aux conditions climatiqueslocales. En cas de nécessité, des trai-tements chimiques peuvent êtreemployés, en respectant les critèresde protection de l’environnement, quisont identiques à ceux dont bénéfi-cient les états industrialisés d’Europede l’Ouest.

Mots-clés : champignon, insecte,mollusque, durabilité, préservation,traitement.

ABSTRACT

FACTORS OF TIMBER PRESERVATIONAND DETERIORATION IN HUMIDTROPICAL REGIONS

Timber preservation techniques areevolving rapidly in Europe, especiallyas a result of environmental con-cerns. New active substances areappearing, along with new pathogencontrol techniques. Although theseare being introduced in humid tropi-cal environments, they are not beingadapted to their very different condi-tions. With their high rainfall, highambient humidity and constant hightemperatures, these regions provideideal conditions for the developmentof timber pathogens such as wood-devouring insects, wood-rotting fungiand boring molluscs. Attacks are farmore virulent than in temperate cli-mates. As a result, measures to pro-tect timber and timber constructionsneed to be backed up by the rightchoice of naturally durable timberspecies, which are common in theseregions, and by architectural designsthat are well suited to local climaticconditions. Chemical treatments maybe applied if absolutely necessary,provided that the same environmen-tal protection criteria are observed asthose applying to the industrialisednations in western Europe.

Keywords: fungus, insect, mollusc,durability, preservation, treatment.

RESUMEN

AGENTES DE DETERIORO Y PRESERVACIÓN DE MADERAS EN MEDIOS TROPICALES HÚMEDOS

La protección de la madera en Europaexperimenta actualmente un pro-fundo cambio ligado, en particular, aconsideraciones medioambientales.Aparecen nuevas materias activas yse aplican nuevos medios de control.Posteriormente, se introducen dichastécnicas en países de clima tropicalhúmedo sin adaptarlas a estos nue-vos medios. En estas regiones conprecipitaciones, humedad del aire ytemperatura elevadas, los agentes dedeterioro de la madera –insectos xiló-fagos, hongos que pudren la maderao moluscos perforadores– encuentrancondiciones de vida propicias para sudesarrollo. Los ataques en estaszonas son mucho más virulentos quenuestras regiones y, por ello, la pro-tección de maderas y construccionesdebe completarse mediante la elec-ción acertada de especies natural-mente duraderas, algo que no faltaen estas regiones, y por una concep-ción arquitectónica de las construc-ciones adaptada a las condiciones cli-máticas locales. Si fuera necesario,se podrían emplear tratamientos quí-micos respetando los criterios de pro-tección del medio ambiente; es decir:los mismos que se aplican en los paí-ses industrializados de Europa occi-dental.

Palabras clave: hongo, insecto,molusco, durabilidad, preservación,tratamiento.

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TIMBER / TIMBER PRESERVATIONDOSSIER

Daniel Fouquet

Page 3: Agents de détérioration et préservation des bois en …BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2003, N 277 (3) 19PRÉSERVATION DES BOIS / BOISDOSSIER Photo 3. Fructification du champignon

Le climat des régions tropicaleshumides favorise le développementdes insectes xylophages, des champi-gnons lignivores et des térébrantsmarins (mollusques ou crustacés).

Les dégâts provoqués par cesagents de détérioration sont beau-coup plus importants que ceuxconstatés en zone tempérée. On peutles rencontrer à tous les échelons dela chaîne de production. D’abord enforêt, ensuite au cours de l’exploita-tion, puis des transports. On doitencore en tenir compte au cours de lapremière transformation, lors desstockages intermédiaires, et aumoment de la mise en œuvre. Enfin,une fois l’ouvrage achevé, celui-cidoit être protégé par des traitementspréventifs adaptés et, si besoin est,par la suite, par des traitements cura-tifs. Outre les considérations environ-nementales, d’autres facteurs facili-tent les infestations et multiplicationsde ces organismes.

En effet, la qualité des bois utili-sés dépend souvent plus d’une dis-ponibilité immédiate que d’un choixavisé lié à la durabilité naturelle del’espèce choisie. Les procédés de

construction sont souvent peu adap-tés car copiés sur les modèles euro-péens ou américains, qui ne prennentpas en compte les risques biolo-giques et climatiques de ces régions.

La prolifération des agentspathogènes est, de plus, accrue parl’absence de règles d’hygiène et deprotection de l’environnement àproximité des habitations. Les traite-ments préventifs et curatifs pour lesbois mis en œuvre sont rares, voireinexistants.

Dans toutes ces zones, on ren-contre de nombreux agents destruc-teurs provoquant, en gros, les mêmestypes d’attaques quel que soit lecontinent, de la forêt jusqu’à l’utilisa-tion finale. Des solutions peuventêtre apportées, d’une part, pour pro-téger les essences fragiles pendantleur transport et, d’autre part, pourpréserver les ouvrages en bois afind’assurer une longue durée de ser-vice.

Nous étudierons donc, dans cequi suit, les principaux types de dété-rioration rencontrés et les moyens delutte les mieux adaptés en fonctiondu milieu et du type d’utilisation.

Grumes en forêt

Les champignonslignivores (photos 1 à 3)

En forêt naturelle, comme enplantation, les grumes fraîchementabattues peuvent être rapidementaltérées par des champignons de dis-coloration qui provoquent des chan-gements de couleur nuisant à l’as-pect du bois : c’est le phénomène dubleuissement. Ces champignons infé-rieurs, Fungi imperfecti pour lesfeuillus, ascomycètes pour les rési-neux, s’attaquent aux aubiers depresque toutes les espèces maisaussi, et surtout, à un grand nombred’essences de bois blanc très exploi-tées, comme l’obeché (Triplochitonscleroxylon), les aniegré (Aningeriasp.).

D’autres sortes de discolorationpeuvent apparaître comme la« queue-de-vache » et les échauf-fures, qui donnent au bois une colo-ration violacée. Dans ces cas précis, ily a action de plusieurs champignonsà la fois. Les dégâts sont uniquementd’ordre esthétique.

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Introduction

Photo 1. Attaques de champignons sur grumes, en Guyane. Logs damaged by fungus, Guyana. Photo D. Fouquet.

Page 4: Agents de détérioration et préservation des bois en …BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2003, N 277 (3) 19PRÉSERVATION DES BOIS / BOISDOSSIER Photo 3. Fructification du champignon

Si le bois reste stocké trop long-temps en forêt, une destruction par-tielle due à des champignons depourriture peut modifier les proprié-tés physiques et mécaniques.L’importance de ces dégâts dépendrade la durabilité naturelle desessences (Fougerousse, 1965).

Les insectes

Les piqûres noires (photo 4)Certains insectes, scolytes et pla-

types, creusent des galeries cylin-driques plus ou moins ramifiées de 0,5à 3 mm de diamètre. Les galeries pré-sentent généralement, en section, uneauréole noirâtre, due à la présence dechampignons spécifiques déposés surles parois par l’insecte adulte et ser-

vant de nourriture aux larves après laponte. La sciure est rejetée vers l’exté-rieur et apparaît à l’emplacement dechaque orifice pendant la périoded’activité de l’adulte, qui dure jusqu’àce que le bois soit sec. Les dégâts peu-vent être très importants sur lesespèces fragiles, comme par exemplel’aniegré (Aningeria sp.), l’obeché(Triplochiton scleroxylon) ou l’ilomba(Pycnanthus angolensis), qui peuventêtre totalement dégradées, alors que,chez la plupart des autres essences,seul l’aubier est attaqué.

La résistance plus ou moins éle-vée des bois est liée à des facteursspécifiques d’attraction chimique quidéterminent l’intensité des piqûres.Cependant, d’autres paramètresentrent en jeu, telle l’influence de lasaison (les attaques sont les plus viru-lentes juste avant la saison des pluies).

Les grumes abîmées ou écor-cées sont attaquées plus rapidement.

Le « mulotage » (photo 5)Lorsque les grumes restent trop

longtemps en forêt, de gros coléo-ptères cérambycides peuvent provo-quer des dégâts importants, de par lataille des galeries (plusieurs centi-mètres de diamètre) atteignant lebois parfait.

Les moyens de lutte(photos 6 à 9)

Si un débardage rapide est pos-sible, pour les essences susceptiblesd’être attaquées, les billes doiventêtre évacuées dans la journée, stoc-kées sur un parc à bois propre et biendrainé ou immergées dans l’eaudouce et transformées rapidement.

Si un débardage rapide estimpossible, il faut faire appel à la pro-tection chimique des billes, c’est-à-direun traitement temporaire efficace à lafois contre les insectes et les champi-gnons, le plus proche possible del’abattage. Ce traitement consiste enune pulvérisation uniforme sur l’en-semble du roulant et sur les sectionsdes billes. Des traitements de rappeldoivent avoir lieu en cas de stockageprolongé (efficacité maximale : 2 mois).

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TIMBER / TIMBER PRESERVATIONDOSSIER

Photo 4. Piqûres noires actives sur grume d’obeché, en Côte-d’Ivoire. Active black spot holes on an obeche log, Côte-d’Ivoire. Photo M. Fougerousse.

Photo 5. Section de galerie de coléoptèrescérambycides sur du Manilkara, en Guyane. Section of a gallery made by cerambycidbeetles in a Manilkara log, Guyana. Photo D. Fouquet.

Photo 2. Bleuissement sur grume de virola, en Guyane. Log blue on a virola log, Guyana. Photo Cirad-forêt.

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Sciages frais et placages

déroulés

Les champignons

Dans les sciages frais tirés del’aubier, pour les essences à bois par-fait distinct, ou de toute la masse dubois, pour celles à aubier non diffé-rencié, on peut observer des attaquesde champignons du même type quecelles qui se développent dans lesgrumes. Il en va de même pour lesplacages déroulés, issus le plus sou-vent d’espèces fragiles (Deon, 1986).

Les insectes (photos 10, 11 et 25)

Les scolytes et platypes sontsusceptibles de poursuivre leursattaques après débit si le bois estencore humide, mais d’autresinsectes plus redoutables peuventinfester le bois, au cours du séchageà l’air libre et après. Parmi cesespèces, on trouve certains coléo-ptères, bostryches ou lychnides, dontles larves poursuivront leur actionune fois le bois mis en œuvre.

Les essences à bois clair doiventabsolument être protégées pour évi-ter ces infestations. Citons, parmielles, l’ilomba (Pycnanthus angolen-sis), l’obeché (Triplochiton scleroxy-lon), le koto (Pterygota sp.), le ramin(Gonystylus sp.), l’eyong (Eribromaoblonga), le fuma (Ceiba pentandra),le virola (Virola sp.).

Les moyens de lutte

Le séchagePlus le séchage est effectué

rapidement après débit, moins lesrisques d’infestation ou de contami-nation sont importants. Le séchage àhaute température est le plus efficacepour éliminer les œufs d’insectes.

Le traitement chimiqueLa plupart des entreprises ne

possèdent pas d’unité de séchage. Ilfaut donc traiter le bois par trempagecourt et choisir un produit à la fois

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Photo 8. Stockage en milieu aquatique,constitution d’un radeau, enRépublique centrafricaine. Assembling a timber raft for storage inwater, Central African Republic. Photo G. Deon.

Photo 9. Flottage du bois dans le port d’Abidjan, en Côte-d’Ivoire. Floating timber in the port of Abidjan, Côte-d’Ivoire. Photo Cirad-forêt.

Photo 7. Mauvais stockage de bois sur parc. Badly stacked timber. Photo Cirad-forêt.

Photo 6. Traitement temporaire des grumes par pulvérisation, au Gabon. Temporary spray treatment of logs in Gabon. Photo Cirad-forêt.

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insecticide et fongicide. Les placagespeuvent subir une aspersion, justeaprès le déroulage. Dans tous les cas,il ne s’agit que d’un traitement tem-poraire.

Bois mis en œuvre

Les êtres vivants capables dedétériorer ou de détruire le bois misen œuvre peuvent être regroupésessentiellement en quatre catégories.

Les champignonslignivores (photos 12 et 13)

Ils sont responsables de nom-breux types de pourritures. Celles-ciconsistent en des altérations pro-fondes et irréversibles de toutes lespropriétés du bois, couleur, dureté,propriétés mécaniques.

Pour être en mesure de mener àbien son œuvre de destruction, lechampignon a besoin que soientréunies en permanence les condi-tions suivantes, par ordre décroissantd’importance :▪ être assuré d’un approvisionnementen eau suffisant ;▪ être assuré d’un approvisionnementen oxygène suffisant ;▪ bénéficier d’une température favo-rable.

Dans le cas des pourritures clas-siques, à savoir la pourriture cubiquequi s’attaque à la cellulose ou la pour-riture fibreuse qui dénature la lignine,on considère que c’est à une humiditéde 35-40 % que le bois est le plusexposé. À une humidité inférieure à20 %, le bois est totalement à l’abri deces infestations (Deon, 1986).

La biologie des champignons depourriture molle est très différente.Ces champignons qui attaquent lesbois au contact du sol, en dénaturantla cellulose et la lignine, tolèrent unehumidité beaucoup plus élevée et lesbesoins en oxygène sont moinsimportants. Assuré d’une alimenta-tion convenable, le champignondégradera l’ouvrage à une vitessedépendant de la températureambiante, la température optimale sesituant entre 30 et 35 °C.

Il faut noter que, si un bois secne risque aucune attaque de champi-gnon, il faut cependant se méfier desréhumidifications accidentelles pro-pices à l’installation de pourritures.

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TIMBER / TIMBER PRESERVATIONDOSSIER

Photo 10. Déroulages d’obeché gravement altérés par despiqûres noires. Serious black spot damage in rotary-cut obechewood. Photo M. Fougerousse.

Photo 11. Ponte de scolyte. Scolytidae eggs. Photo Cirad-forêt.

Photo 12. Altérations fongiques sur du grignon utiliséen extérieur, en Guyane. Fungus damage to exterior louro red,Guyana. Photo D. Fouquet.

Photo 13. Attaque de pourriture fibreuse sur un élément de traverse, en Guyane. Stringy rot on a cross-tie piece,Guyana. Photo D. Fouquet.

Page 7: Agents de détérioration et préservation des bois en …BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2003, N 277 (3) 19PRÉSERVATION DES BOIS / BOISDOSSIER Photo 3. Fructification du champignon

Les termites (photos 14 à 19)

Dans les pays tropicauxhumides, une des menaces princi-pales pour les constructions estconstituée par les termites, dont l’ac-tivité est, comme pour les champi-gnons, favorisée par la chaleur etl’humidité. En ce qui concerne leurmode d’attaque, il est nécessaire dedistinguer deux cas.

Les termites de bois sec (genrele plus fréquent dans toutes lesrégions tropicales : Cryptotermes) secaractérisent par le fait que les colo-nies s’installent directement dans lebois et s’y développent sans aucuneliaison avec le sol. Leurs besoins eneau sont limités, et celle du bois leursuffit. Bien que formant des coloniescomprenant peu d’individus, ces ter-mites sont des destructeurs du boistrès actifs. Les symptômes externessont assez évidents pour un observa-teur attentif ; en effet, la colonierejette à l’extérieur des excrémentssous forme de petits amas poudreux,chaque grain ayant la forme d’unpetit prisme hexagonal de la couleurdes bois attaqués, très facilementreconnaissable à la loupe (Deon,Fouquet, 1993).

Les termites souterrains sontreprésentés par de nombreusesespèces encore mal identifiées appar-tenant aux familles des rhinotermiti-dés (principaux genres : Hetero-termes, Coptotermes) et destermitidés (principaux genres : Micro-cerotermes, Macrotermes, Odonto-termes, Nasutitermes…) (Harris,1971). Ils forment des colonies qui nesont pas installées que dans le bois.On les trouve le plus souvent dans lesol, où leurs besoins en eau sontgénéralement satisfaits. Les coloniespeuvent également s’établir hors dusol, mais toujours à un endroit oùelles seront assurées d’un apport suf-fisant en eau (Mathews, 1977 ; Bec-ker, 1977 ; Durand, Lâm Binh Loi,1971).

Les termites souterrains sont deplus lucifuges et, exception faite del’époque où ils quittent la coloniepour en créer une autre par essai-

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Photo 18. Soldat de termite du genre Nasutitermes,de Guadeloupe. Termite soldier of the genus Nasutitermes,Guadeloupe. Photo G. Deon.

Photo 14. Termite de Guadeloupe du genreHeterotermes. Guadeloupe termite of the genusHeterotermes. Photo G. Deon.

Photo 19. Maison détruite par les termites, en Guyane. House destroyed by termites, Guyana. Photo M. Vernay.

Photo 17. Œufs et larves de termites. Termite eggs and larvae. Photo G. Deon.

Photo 15. Galerie de termite du genre Nasutitermes, en Guyane. Gallery made by termites of the genusNasutitermes, Guyana. Photo D. Fouquet.

Photo 16. Larve de termite de bois sec du genreCryptotermes, de Guadeloupe. Dry wood termite larva of the genusCryptotermes, Guadeloupe. Photo G. Deon.

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mage, ils ne se trouvent jamais à l’airlibre. Leurs déplacements s’effec-tuent toujours dans les galeries outunnels construits de débris divers,de terre, d’excréments, de salive, cesconstructions étant révélatrices d’uneattaque et de leur présence. En plusdes périodes d’essaimage, la plupartde ces espèces peuvent également sereproduire par bouturage, si unnombre suffisant d’individus est éloi-gné du nid principal, soit en créantdirectement une nouvelle colonie(Heterotermes), soit en constituantdes nids intermédiaires (Nasuti-termes). Pour parvenir à un matériaunutritif essentiellement à base de cel-lulose comme le bois du papier, dulinge, etc., les termites sont capablesde franchir de grandes distances etde pénétrer des matériaux très divers,tels le plâtre, certains ciments, le Pvcet autres matières plastiques. Destraces de pénétration dans certainsmétaux ont même été observées. Lesdégradations provoquées sont dedeux types, soit des perforations cor-respondant au cheminement des ter-mites en quête de nourriture, soit unedestruction partielle ou complète desaliments eux-mêmes comme le bois(Fouquet, 2000).

En milieu tropical humide, l’im-portance des champignons de pourri-ture fibreuse, qui libèrent la cellulose,favorise les attaques de termitesmême sur des essences considéréesa priori comme résistantes.

Les autres insectes debois secs (photos 20 et 21)

Parmi les insectes s’attaquantaux bois secs, il faut distinguer deuxtypes d’attaques.

Attaques provoquées par les insectes larvaires

On rencontre de nombreusesespèces de coléoptères xylophagespouvant provoquer de très grosdégâts.

Les résineux sont attaquésessentiellement par des céramby-cides, proches du capricorne, qu’onobserve dans nos régions, les gale-ries étant nettement plus grandes etles dégâts plus importants.

Les bois feuillus possèdent éga-lement des ennemis redoutablescomme les lyctus et les bostryches(Lesne, 1924).

Dans le cas des lyctus, seulesles larves, issues des œufs ponduspar les femelles, attaquent le bois.Chez les bostryches, la plupart desespèces attaquent le bois, aussi biensous forme de larve qu’à l’état d’in-secte adulte. Ce dernier type de per-foration correspond, pour de nom-breuses espèces, au forage d’unegalerie où la femelle déposera desœufs. Mais, en tout état de cause, lesdégâts sont surtout le fait d’insectesà l’état larvaire.

La biologie des lyctus et desbostryches permet d’affirmer queleurs attaques sont essentiellement

liées à la teneur du bois en amidon.Presque tous les aubiers de feuillustropicaux sont donc susceptiblesd’être détériorés par ces insectes.

Les dommages les plus impor-tants concernent les essences fragilesà aubier non différencié (tableau I), oùtoute la masse du bois est soumise àun risque d’attaque certain si desprécautions ne sont pas prises (Deon,1986).

Attaques provoquées par des insectes nidificateurs

Les attaques les plus fréquenteset les plus importantes sont provo-quées par des insectes hyménoptèresdu genre Xylocopus, plus couram-ment connus sous le nom d’« abeillecharpentière ».

Comme l’indique le qualificatif« nidificateur », ce ne sont pas desinsectes xylophages mais des intrusqui s’installent dans le bois, et plusparticulièrement dans les charpentes,pour y nicher et pondre. Les nids sontconstitués d’alvéoles de plusieurscentimètres carrés de surface, sépa-rées par une fine lamelle de bois.Quand l’insecte a pris l’habitude des’installer dans une charpente, ilrevient périodiquement au momentdes pontes, sauf si un produit répulsifa été utilisé.

À noter que certaines espècesde fourmis peuvent s’installer dansdes ouvrages déjà attaqués par lestermites pour y faire leur nid et contri-buer à la poursuite des dégradations.

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TIMBER / TIMBER PRESERVATIONDOSSIER

Photo 20. Attaque de bostryche sur Khayasenegalensis (acajou). Auger beetle attack on Khayasenegalensis (mahogany). Photo Cirad-forêt.Photo 21.

Attaque de lyctus sur un échantillon de virola. Lyctus beetle attack on a virola sample. Photo D. Fouquet.

Page 9: Agents de détérioration et préservation des bois en …BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2003, N 277 (3) 19PRÉSERVATION DES BOIS / BOISDOSSIER Photo 3. Fructification du champignon

Organismes marins et salissures marines

(photos 22 et 23)

Les régions tropicales sont bor-dées par des mers chaudes et salées,favorables au développement d’unefaune aquatique importante. De nom-breux organismes ou micro-orga-nismes prolifèrent en s’attaquant auxouvrages en bois (pontons, wharfs,piliers, etc.) et aux coques de bateauxde pêche ou de plaisance.

Les principales altérations sontdues à des térébrants ou mollusquesforeurs appelés « tarets », dénomina-tion qui regroupe de nombreusesvariétés (les plus fréquentes étantBankia et Teredo). Ce sont les orga-nismes marins les plus redoutables.Ils se rencontrent dans les eauxsalées et saumâtres (estuaires,lagunes, etc.). Ils pénètrent dans lebois à l’état de jeunes larves, doncpar un très petit orifice, puis ils s’ydéveloppent et peuvent y passer leurvie entière.

La durée de vie hors de l’eaun’excède pas une heure, mais lesréinfestations sont fréquentes. Lalongueur des galeries, tapissées parun manchon calcaire, peut dépasserle mètre et leur diamètre atteindrel’épaisseur du pouce.

Il existe de nombreuses espècesde tarets, chacune ayant ses propresconditions optimales de vie. Les fac-teurs les plus importants pour leurdéveloppement étant la salinité et latempérature de l’eau (Ocde, 1968).

D’autres dégâts sont causés parles pholades. Caractéristiques desmers tropicales, ces mollusques res-semblent à de petites moules qui sefixent sur les éléments en bois etcreusent des loges d’habitation pou-vant entamer le bois sur plus de10 cm de profondeur. Les genres lesplus fréquents sont Martesia (danstoutes les mers chaudes), Ligno-pholas (dans l’océan Indien), Barnea(sur les côtes des Caraïbes et del’Amérique du Sud).

Photo 22. Salissures marines sur une éprouvette d’essai, en Guyane. Fouling in test tube, Guyana. Photo D. Fouquet.

Appellation Atibt

Abura

Ako

Akossika

Andoung

Benuang

Couroupita

Duabanga

Ekoune

Emien

Essessang

Eyong

Fuma

Geronggang

Hévéa

Ilomba

Jelutong

Kondroti

Koto

Limba

Machang

Marupa

Medang

Meranti white

Obeché

Ohia

Onzabili

Parapara

Pulai

Ramin

Sepetir

Seraya white

Sesendok

Virola

Nom scientifique

Mitragyna sp.

Antiaris toxicaria

Scottellia sp.

Monopetalanthus spp.

Octomeles sumatrana

Couroupita sp.

Duabanga moluccana

Coelocaryon preussii

Alstonia boonei

Ricinodendron heudelotii

Eribroma oblonga

Ceiba pentandra

Cratoxylon arborens

Hevea brasiliensis

Pycnanthus angolensis

Dyera costulata

Rhodognaphalon sp.

Pterygota sp.

Terminalia superba

Mangifera sp.

Simarouba sp.

Dehaasia sp.

Shorea sp.

Triplochiton scleroxylon

Celtis sp.

Antrocaryon klaineanum

Jacaranda copaia

Alstonia sp.

Gonystylus sp.

Sindora sp.

Parashorea sp.

Endospermum sp.

Virola sp.

Famille

Rubiacées

Moracées

Flacourtiacées

Césalpiniacées

Datiscacées

Lécythidacées

Sonneratiacées

Myristicacées

Apocynacées

Euphorbiacées

Sterculiacées

Bombacacées

Hypericacées

Euphorbiacées

Myristicacées

Apocynacées

Bombacacées

Sterculiacées

Combretacées

Anacardiacées

Simaroubacées

Lauracées

Diptérocarpacées

Sterculiacées

Ulmacées

Anacardiacées

Bignoniacées

Apocynacées

Gonystylacées

Césalpiniacées

Diptérocarpacées

Euphorbiacées

Myristicacées

Provenance

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Am

Tableau I. Principales essences fragiles nécessitant un traitement.

Af : Afrique ; Am : Amérique du Sud ; As : Asie.

B O I S E T F O R Ê T S D E S T R O P I Q U E S , 2 0 0 3 , N ° 2 7 7 ( 3 ) 27DOSSIERPRÉSERVATION DES BOIS / BOIS

Page 10: Agents de détérioration et préservation des bois en …BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2003, N 277 (3) 19PRÉSERVATION DES BOIS / BOISDOSSIER Photo 3. Fructification du champignon

Certains crustacés appartenant auxgenres Limnoria et Chelura peuventcreuser des galeries dans des boistendres ou très altérés. Le bois en sur-face prend un aspect spongieux avecdes galeries de quelques millimètresde diamètre. Ces organismes marinscausent des dégâts superficiels maisparfois importants sur les coques desembarcations. D’autres crustacéscomme les balanes se fixent sur touttype de support et peuvent, aprèsfrottements, provoquer des cassuressur des ouvrages en bois. La carapacedes espèces tropicales est beaucoupplus solide que celle des espèces tem-pérées.

De nombreux micro-organismes(bactéries, champignons, algues,etc.) peuvent se développer en sefixant sur le bois immergé ou périodi-quement découvert (marées). Lesaltérations constatées sont unique-ment superficielles.

En revanche, des dégradationsbiologiques importantes peuvent semanifester sous l’action de pourri-tures molles, provoquées soit par desascomycètes, le plus souvent dugenre Corollospora, soit par des Fungiimperfecti du genre Cirrenalia (Hyde,2000). Les bois sont infestés pendantles périodes d’émersion. Selon cer-taines observations faites en Côte-d’ivoire, il y aurait dans certains caspréconditionnement des bois par ceschampignons avant les attaques deLimnoria et de Teredo

Les moyens de lutte

Précautions élémentaires (photo 24)

Précautions d’ordre architectu-ral. Il serait trop long d’énumérer icitoutes les mesures et tous les détailsde construction nécessaires à mettreen œuvre pour empêcher le dévelop-pement des agents de détériorationdu bois en zone tropicale humide.Nous citerons seulement quelquesprécautions élémentaires indispen-sables pour limiter ces attaques(Deon, 1986 ; Fougerousse, 1966).

Dans ces régions, il faut :▪ isoler la construction du sol aumoyen de pilotis en béton pour dimi-nuer les risques d’infestation par lestermites souterrains ;▪ assurer une bonne ventilation detoute la maison et éviter des concen-trations d’humidité dans certainespièces (cuisines, salles de bains…) ;▪ éviter les assemblages inadaptés,comme les tenons et mortaises enextérieur ;▪ ne pas encastrer le bois directementdans le béton ;▪ faire des débords de toiture suffi-samment larges pour empêcher laréhumidification des menuiseriesextérieures et des parois ;▪ respecter les règles de mise enœuvre des matériaux de toiture pouréviter les infiltrations par le haut ;

▪ débarrasser les pourtours de la mai-son des vieux débris de bois et autresmatériaux cellulosiques ;▪ éviter le stockage de bois de chauf-fage trop près des habitations ;▪ construire sur un sol bien drainé ;▪ choisir un système constructifadapté au climat du pays, en évitantplus particulièrement le panneau-sandwich et les « doubles peaux » ;▪ employer des bois naturellementdurables (tableaux II, III, IV).

La plupart des régions concer-nées par ce climat chaud et à fortepluviosité sont peuplées de forêtsriches en essences variées, dont lespropriétés physiques et mécaniquesainsi que la durabilité naturelle per-mettent d’envisager de multiplesusages, notamment en construction,sans aucune protection chimique(Vernay, Fouquet, 1993).

Ces nombreuses espèces ontfait et font toujours l’objet d’étudesapprofondies, afin de déterminer leurmeilleur emploi possible compte tenudes conditions d’exposition desouvrages.

Il est donc nécessaire de dresserune classification de ces différentespossibilités, de la manière suivante :

1) Bois au contact direct avec lesol et soumis aux intempéries

Principaux risques biologiques :termites, insectes xylophages, tousles types de pourritures dont princi-palement la pourriture molle.

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TIMBER / TIMBER PRESERVATIONDOSSIER

Photos 23. Attaque de tarets en Guyane. Vues extérieure �et intérieure �. Shipworm damage, Guyana. Exterior view � andinterior view �. Photo D. Fouquet.

Page 11: Agents de détérioration et préservation des bois en …BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2003, N 277 (3) 19PRÉSERVATION DES BOIS / BOISDOSSIER Photo 3. Fructification du champignon

B O I S E T F O R Ê T S D E S T R O P I Q U E S , 2 0 0 3 , N ° 2 7 7 ( 3 ) 29DOSSIERPRÉSERVATION DES BOIS / BOIS

Photo 24. Choisir le bon bois pour la bonne utilisation, un exemple en Guyane. Choosing the right kind of timber for the purpose,example in Guyana. Photo M. Vernay.

Tableau II. Afrique : bois résistant naturellement en usage extérieur.

Essences courantescommercialisées

Essences dont l’aspect esthétiquepermet d’autres utilisations

plus valorisantes*

Essences à fort potentiel, peu commercialisées

Autres essences peu connues

Nom pilote ou à usage courant Nom scientifique Famille

Azobé Lophira alata Ochnacées

Bilinga (badi) Nauclea diderichii Rubiacées

Padouk Pterocarpus soyauxii Fabacées

Tali Erythrophleum sp. Césalpiniacées

Niové Staudtia kamerunensis Myristicacées

Bubinga Guibourtia sp. Césalpiniacées

Ovengkol Guibourtia ehie Césalpiniacées

Doussié Afzelia sp. Césalpiniacées

Moabi Baillonella toxisperma Sapotacées

Makoré - Douka Tieghemella africana Sapotacées

Wengé Millettia laurentii Fabacées

Afrormosia Pericopsis elata Fabacées

Muninga Pterocarpus angolensis Fabacées

Congotali Letestua durissima Sapotacées

Mukulungu Autranella congolensis Sapotacées

Okan Cylicodiscus gabunensis Césalpiniacées

Monghinza (fou) Manilkara sp. Sapotacées

Landa Erythroxylum mannii Erythroxylacées

Kanda Beilschmiedia mannii Lauracées

Nganga Cynometra sp. Césalpiniacées

Ogouomo (okolangouma) Lecomtedoxa klaineara Sapotacées

Rikio Uapaca sp. Euphorbiacées

Oboto Mammea africana Clusiacées

Vésambata Oldfieldia africana Euphorbiacées

* Ébénisterie, décoration.

Photo 25. Pirogue en bois. Canoe in wood. Photo M. Vernay.

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TIMBER / TIMBER PRESERVATIONDOSSIER

Tableau III. Amérique du Sud : bois résistant naturellement en usage extérieur.

Essences courantescommercialisées

Essences dont l’aspect esthétiquepermet d’autres utilisations

plus valorisantes*

Essences à fort potentiel, peu commercialisées

Autres essences peu connues

Nom pilote ou à usage courant Nom scientifique Famille

Tatajuba Bagasse Bagassa sp. Moracées

Greenheart Ocotea rodiaei Lauracées

Ipé (ébène verte) Tabebuia sp. Bignoniacées

Maçaranduba (balata franc) Manilkara sp. Sapotacées

Quebracho colorado (pau mulato) Schinopsis sp. Anacardiacées

Angelim vermelho Dinizia excelsa Mimosacées

Wacapou Vouacapoua americana Césalpiniacées

Pau amarelo Euxylophora paraensis Rutacées

Tonka (gaïac de Cayenne) (cumaru) Dipteryx sp. Fabacées

Pau santo Zollernia sp. Césalpiniacées

Itauba Mezilaurus sp. Lauracées

Peroba rosa (komati kopi) Aspidosperma sp. Apocynacées

Walaba (wapa) Eperua sp. Césalpiniacées

Andira (saint-martin rouge) Andira sp. Fabacées

* Ébénisterie, décoration.

Tableau IV. Asie : bois résistant naturellement en usage extérieur.

Essences courantescommercialisées

Essences dont l’aspect esthétiquepermet d’autres utilisations

plus valorisantes*

Essences à fort potentiel, peu commercialisées

Autres essences peu connues

Nom pilote ou à usage courant Nom scientifique Famille

Billian Eusideroxylon zwageri Lauracées

Padauk Pterocarpus sp. Fabacées

Balau yellow (bangkiraï) Shorea section Eushorea DiptérocarpacéesShorea laevis

Kapur Dryobalanops sp. Diptérocarpacées

Merbau Intsia bijuga Césalpiniacées

Chengal Neobalanocarpus heimii Diptérocarpacées

Pyinkado Xylia spp. Mimosacées

Giam Hopea sp. Diptérocarpacées

* Ébénisterie, décoration.

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2) Bois isolés du sol, mais expo-sés aux intempéries

Principaux risques biologiques :termites, insectes xylophages, pourri-tures sauf pourriture molle.

3) Bois sous abri, mais aucontact permanent d’une sourced’humidité (mêmes risques qu’en 2,mais moins prononcés pour lesattaques cryptogamiques)

4) Bois immergés dans l’eaudouce

Si le bois est complètementimmergé, il n’a rien à redouter desattaques de champignons et d’in-sectes. S’il est en partie immergé, lazone émergée se trouve fortementexposée à la pourriture.

5) Bois immergés en eau saléeou saumâtre

Risques biologiques : térébrantsmarins, salissures marines, pourri-tures molles.

Remarque : pour les bois immer-gés en milieu marin, il est préférable,pour des considérations environne-mentales, d’utiliser des essencesnaturellement durables (tableau V).

B O I S E T F O R Ê T S D E S T R O P I Q U E S , 2 0 0 3 , N ° 2 7 7 ( 3 ) 31DOSSIERPRÉSERVATION DES BOIS / BOIS

Tableau V. Essences résistantes aux tarets.

Essence Nom scientifique Continent Critère de Familledurabilité

Alep Desbordesia glaucescens Afrique 1 Irvingiacées

Angélique Dicorynia guianensis Amérique du Sud 1-2 (1) Césalpiniacées

Azobé Lophira alata Afrique 1 (2) Ochnacées

Balata Manilkara sp. Amérique du Sud 1-2 Sapotacées

Bangkirai Shorea laevis Asie 1-2 Diptérocarpacées

Bilinga Nauclea diderichii Afrique 1 Rubiacées

Billian Eusideroxylon zwageri Asie 1-3 Lauracées

Congotali Letestua durissima Afrique 1-2 Sapotacées

Douka Thiegemella africana Afrique 1-2 Sapotacées

Eyoum Dialium sp. Afrique, Asie 2 Césalpiniacées

Gaulette Licania sp. Amérique du Sud 2 Chrysobalanacées

Grapia Apuleia leiocarpa Amérique du Sud 3 (3) Césalpiniacées

Greenheart Ocotea rodiaei Amérique du Sud 1-3 Lauracées

Ipé Tabebuia sp. Amérique du Sud 1 Bignoniacées

Itauba Mezilaurus itauba Amérique du Sud 1-3 Lauracées

Moabi Baillonella toxisperma Afrique 1-2 Sapotacées

Monyhinza Manilkara obovata Afrique 1-2 Sapotacées

Muhimbi ou ngany Cynometra alexandri Afrique 1-2 CésalpiniacéesCynometra sp.

Mukulungu Autranella congolensis Afrique 1-2 Sapotacées

Okan Cylicodiscus gabunensis Afrique 1 Césalpiniacées

Padouk Pterocarpus soyauxii Afrique 1-3 (4) Fabacées

Sougué Parinari sp. Afrique 2 (5) Chrysobalanacées

Tatajuba Bagassa spp. Amérique du Sud 2 Moracées

Teck Tectona grandis Asie 2 Verbenacées

Wacapou Vouacapoua americana Amérique du Sud 1-3 Césalpiniacées

Walaba Eperua sp. Amérique du Sud 1 Césalpiniacées

Wamara Bocoa provacensis Amérique du Sud 1 Césalpiniacées

(1) Seulement en milieu marin. (2) Seulement sous climat tempéré. (3) En construction navale seulement.(4) En Europe seulement. (5) Peu durable hors de l’eau.

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Il existe trois critères pour expli-quer la résistance naturelle aux xylo-phages marins et en particulier auxtarets :▪ critère 1, bois très dense à grain finou très fin ;▪ critère 2, taux de silice élevé ;▪ critère 3, huiles essentielles oucontenus répulsifs.

Traitements préventifs (photos 26 et 27)

Bois. Préserver un bois préven-tivement, c’est lui assurer, par le tru-chement de produits chimiques, fon-gicides ou insecticides, la résistancequ’il n’a pas naturellement, cela pourune durée aussi longue que possible,liée à la durée de service de l’ou-vrage. On parle alors de durabilitéconférée.

Le produit et le procédé de trai-tement dépendront des conditionsd’emploi et d’exposition du matériauen service. Ils devront être adaptésaux spécificités climatiques et biolo-giques des régions tropicaleshumides tout en préservant l’environ-nement. Le laboratoire de préserva-tion du Cirad-forêt et son homologuedu Ctba travaillent pour mettre enservice des produits et des procédéscertifiés respectant ces impératifs.

D’une manière générale, lesbois exposés en extérieur devrontsubir un traitement en autoclave parvide et pression (procédé Bethell).Les bois utilisés sous abri devrontêtre traités par trempage.

Les produits utilisés devrontsatisfaire aux mêmes exigences d’ef-ficacité et de préservation de l’envi-ronnement qu’en Europe, là où lestests et contrôles sont les plus effi-caces. Ces produits pourront êtreobtenus par synthèse chimique, àpartir de matières actives fabriquéespar les grands groupes de l’industriechimique, mais aussi à partir d’ex-traits de plantes ou d’essences conte-nant des molécules ou des groupesde molécules naturellement insecti-cides, fongicides ou répulsives.

Autres matériaux de construc-tion. Il est recommandé d’utiliserpour les différents panneaux, cloi-sons, murs, tuyauteries et canalisa-tions des matériaux préalablementtraités antitermites par injection deproduit ou greffage chimique.

Sols. Dans ces pays infestés parles termites souterrains, il est impéra-tif de traiter préalablement les solsavant toute construction, soit parépandage d’un produit antitermitessous le bâti et dans les fondations,soit par l’installation d’une barrièrephysico-chimique (films polyanes avecgreffage de molécules insecticides) ousimplement physique, comme enAustralie (concrétions siliceusesempêchant le passage des termites).

Traitements curatifs

Si l’ouvrage a subi des dégâtsdus à des attaques d’insectes ou dechampignons, des traitements cura-tifs peuvent être envisagés lorsqueles détériorations ne sont pas tropimportantes.

Dans un premier temps, il fautnettoyer les pièces attaquées dessciures et vermoulures présentes surles lieux. Il faut ensuite supprimer lespièces fortement endommagées etles remplacer par des bois durablesou préalablement traités.

Selon l’essence, le produit devraêtre injecté si le bois est imprégnableou administré par aspersion ou badi-geonnage dans le cas contraire. Lesproduits sont du même type que ceuxutilisés en traitement préventif, géné-ralement à la fois fongicides et insec-ticides.

Les traitements antitermitesposent un cas particulier. En effet,dans les pays tropicaux, les termitesconstituent un véritable fléau pour lesconstructions. Les nombreusesespèces ne se comportent pas de lamême manière vis-à-vis des traite-ments chimiques préventifs et curatifs.Les surdosages en matières actives(doublement des valeurs critiques) nesont que des pis-aller insuffisants pourassurer une protection sur le longterme. Les fortes pluies et la faibleimprégnabilité des bois s’opposent àune fixation à long terme des produits.Les procédés de traitement en profon-deur sont hors de prix et difficiles àmettre en œuvre. Actuellement, seulesles essences naturellement durablespeuvent être utilisées raisonnable-ment, en s’assurant bien de leur résis-tance à la fois aux champignons depourriture fibreuse et aux termites.

De nouvelles techniques sontactuellement à l’étude pour enrayerles attaques de termites souterrainsquand ceux-ci sont installés dans lesconstructions. Ces techniques consis-tent à installer des pièges sur le par-cours habituel des termites. Lesouvriers transmettent à la reine lesmatières toxiques contenues dansces appâts. Ce sont soit des inhibi-teurs de synthèse de chitine, soit desmatières toxiques qui empoisonnentla reine au cours de sa digestion.

Les essais menés actuellementpermettent d’affirmer une certaineefficacité de ce type de lutte exclusi-vement pour certaines espèces de lafamille des rhinotermitidés. Or il estfréquent, en zone tropicale, d’avoirplusieurs espèces de termites infes-tant une même habitation.

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TIMBER / TIMBER PRESERVATIONDOSSIER

Photo 26. Autoclaves pour le traitement des bois en profondeur. Cylinders for deep timber treatment. Photo Cirad-forêt.

Page 15: Agents de détérioration et préservation des bois en …BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2003, N 277 (3) 19PRÉSERVATION DES BOIS / BOISDOSSIER Photo 3. Fructification du champignon

Conclusion

Les forêts tropicales humidessont riches en espèces variées per-mettant de nombreuses utilisationsdans l’habitat et la construction. Unebonne évaluation des risques biolo-giques et climatiques et une concep-tion architecturale judicieuse doiventconduire à un choix d’essences adap-tées aux ouvrages, en tenant comptede leur durabilité naturelle. Lesrecherches dans ce domaine doiventêtre poursuivies et renforcées, car denouvelles espèces arrivent toujourssur le marché. Une meilleure compré-hension de ces phénomènes liés à lacomposition chimique des bois amè-nera à trouver des solutions moinspolluantes pour conférer une durabi-lité suffisante aux bois les plus fra-giles.

Les produits commercialisésdans ces régions doivent répondreaux mêmes exigences de respect del’environnement qu’en Europe. Lespays tropicaux ne doivent pas devenirle « déversoir » des produits périmésdes pays industrialisés.

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B O I S E T F O R Ê T S D E S T R O P I Q U E S , 2 0 0 3 , N ° 2 7 7 ( 3 ) 33DOSSIERPRÉSERVATION DES BOIS / BOIS

Photo 27. Traitement de sciages par trempage. Treating saw wood by soaking. Photo M. Vernay.

Page 16: Agents de détérioration et préservation des bois en …BOIS ET FORÊTS DES TROPIQUES, 2003, N 277 (3) 19PRÉSERVATION DES BOIS / BOISDOSSIER Photo 3. Fructification du champignon

SYNOPSIS

FACTORS OF TIMBERPRESERVATION ANDDETERIORATION IN HUMIDTROPICAL ZONES

Daniel FOUQUET

Because of their climate,the humid tropical regions of Africa,South America, Asia and Oceania areconducive to the development ofpathogens involved in the deteriora-tion of timber. With air humidity vary-ing from 70 to 100 % and ambienttemperatures above 25°C, theseregions provide optimal conditionsfor the development of wood-devour-ing insects, wood-rotting fungi andboring molluscs.Deterioration can be extensive andeven catastrophic throughout theprocess, from logging through to finaluse.

Damage within forestsTimber stacked in forest sites is oftenattacked by discolouring or suffocat-ing fungi, and even by rot when lefttoo long on the spot. Depending onthe season, bark beetles (insects ofthe family scolytidae) will bore moredeeply and more actively. Logs mayalso be downgraded because of theextensive galleries bored by ceramby-cid beetles, even though damage ofthis kind is localised. With suscepti-ble species, effective remediesinclude speedy removal and floatingor, at the very least, chemical spray-ing.

Damage to newly cut timber After sawing or rotary cutting, freshlycut wood is also susceptible to dam-age from these pathogens.Deterioration can be halted by kilndrying at high temperatures of byapplying temporary chemical treat-ments.

Damage to timber used in construction In this case, the quality of construc-tion work and the choice of speciesare essential. Because such a widerange of species is available in humidtropical zones, it is possible to makea careful selection taking into accountthe natural durability of timberaccording to the type of exposure.Failing such precautions, damage isinevitable and substantial. Termitesare the main cause of damage tobuildings and construction timber.The numerous termite species arefound in every continent, whetherunderground, like rhinotermitidae, orin construction timbers, like kaloter-mitidae. Given that termites alsodevour cellulose, the damage towood is deep and irreversible. Otherinsect larvae will attack cambiumwood and fragile timber species thatare often used for plywood panels.Wood-rotting fungi, which mainlydamage either cellulose (cubical rot)or lignine (stringy rot), or both at once(soft rot) proliferate in countries withextremely humid climates.Wooden structures that are partiallyor completely submerged in the seaor lagoons are exposed to wood-bor-ing molluscs like shipworms, as wellas to attacks by crustaceans and softrot fungi living in these environments. Methods of control that are effectivein Europe do not always work in trop-ical regions, and research is neededto find appropriate solutions. As inEurope, any preventive and curativechemical treatments that are recom-mended as a last resort have to beenvironmentally sound, both in natu-ral and urban environments.

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