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Unité de Recherche 047 de l'IRD Réseau de Recherche sur les Politiques Economiques et Pauvreté 7 èmes journées scientifiques du réseau « Analyse Economique et Développement de l’AUF » Thème des journées « Institutions, développement économique et transition » Paris Les 7 et 8 septembre 2006 Organisées et financées conjointement par L’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF, Paris) Le Réseau Politiques Economiques et Pauvreté (PEP Université Laval Québec) Et IRD, Paris, DIAL

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Unité de Recherche 047 de l'IRD Réseau de Recherche sur les Politiques Economiques et Pauvreté

7èmes journées scientifiques du réseau « Analyse Economique et Développement de l’AUF »

Thème des journées « Institutions, développement économique et transition »

Paris Les 7 et 8 septembre 2006

Organisées et financées conjointement par L’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF, Paris)

Le Réseau Politiques Economiques et Pauvreté (PEP Université Laval Québec) Et

IRD, Paris, DIAL

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Journées scientifiques du réseau « Analyse Economique et développement »

7 et 8 Septembre 2006 – Paris

₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪₪

FACTEURS EXPLICATIFS DE L’INVESTISSEMENT DES ENTREPRISES PRIVEES AU BENIN

Sosthène Ulrich GNANSOUNOU● FASEG/UAC, Cotonou Bénin

(Juillet 2006)

Résumé

L’investissement privé stagne au Bénin alors que son augmentation est l’une des conditions pour l’accélération de la croissance économique dans ce pays. Il est nécessaire de chercher les causes de cette stagnation de l’investissement privé et d’identifier les leviers permettant de le promouvoir. La présente étude analyse les déterminants de l’investissement des entreprises privées béninoises. A cet effet un modèle d’analyse du comportement d’investissement des entreprises privées a été développé. Les données, couvrant la période 1996-2003, d’un panel de plus d’une centaine d’entreprises (108 entreprises) privées du secteur industriel béninois ont permis la validation empirique de ce modèle. Nos résultats montrent que l’incertitude sur la demande a un effet négatif sur les investissements des entreprises privées quand bien même l’accroissement des ventes est un motif de réalisation de ces investissements. Le comportement d’investissement des entreprises béninoises dépend aussi fortement du coût d’usage du capital dont le niveau élevé pèse négativement sur l’achat et l’installation de nouveaux équipements de production. Seules les entreprises dont les activités subissent moins d’incertitude, comme les entreprises du secteur des BTP, bénéficient d’un financement bancaire pour la réalisation de leurs investissements. Nos résultats suggèrent un allégement des coûts d’acquisition et d’utilisation des équipements de production et un assainissement de l’environnement des affaires par l’élimination de toutes sortes d’incertitudes. La conquête des marchés régionaux notamment celui du Nigeria et des autres pays de l’UEMOA ainsi que la disponibilité de financement pour les activités industrielles devraient aussi permettre l’augmentation des dépenses d’investissements des entreprises privées au Bénin.

• Enseignant/Chercheur à la Faculté des Sciences Economiques et de Gestion (FASEG) de l’Université d’Abomey-Calavi (UAC) du Bénin. Tél : (229) 97 44 71 93 E-mail : [email protected] 10 BP 288 Cotonou, Bénin

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INTRODUCTION La réduction de la pauvreté est l’objectif principal des politiques économiques des pays en développement comme le Bénin. Elle passe d’abord par une croissance économique soutenue. Cette croissance économique résulte de la conjonction de plusieurs facteurs dont l’un des plus importants est la bonne tenue des investissements (O’Connell et Ndulu, 2000 ; Veganzones, 2000). La volatilité dans le temps des dépenses d’investissement étant la principale composante des cycles de l’économie (Epaulard, 2001), l’investissement est donc au cœur du phénomène de développement économique. En effet, les investissements ont un effet, à long terme, sur la capacité de production de l’économie. Par ailleurs, les dépenses d’investissement constituent aussi une composante de la demande globale et elles affectent le niveau de l’emploi. Ainsi l’offre et la demande sont sensibles aux modifications des investissements. Après la proclamation du libéralisme comme doctrine économique dans la plupart des pays en développement et la mise en application des Programmes d’Ajustement Structurel (PAS), l’augmentation des investissements dépend principalement des dépenses en capital productif du secteur privé. On a observé au Bénin, au cours des trois années après 1989 (année de mise en application du premier PAS), une baisse des investissements publics. La formation brute de capital fixe du secteur public est passée de 4,1% du PIB en 1990 à 3,7% et 3,5% respectivement en 1991 et 1992 (source : INSAE). Mais, une légère hausse de l’investissement public a suivi cette période de baisse. La part de la formation brute de capital fixe du secteur public représente, en moyenne, environ 7% du PIB pour la période 2000-2004 alors que ce taux n’était que d’une moyenne de 4,3% entre 1990 et 1994. Les politiques économiques mises en application dans ce pays, qui se traduisent essentiellement par une modification des structures incitatives et la suppression de diverses barrières tarifaires et administratives, ont entraîné un plus grand dynamisme du secteur privé avec une augmentation des investissements de ce secteur. La formation brute de capital fixe de ce secteur est passée d’une moyenne de 9,5% du PIB pour la période 1990-1994 à une moyenne de 11,7% du PIB entre 1995 et 1999. Malheureusement, on remarque qu’au cours des années suivantes l’investissement privé a stagné ; car, la formation brute de capital fixe de ce secteur est restée presque inchangée avec une moyenne de 11,8% du PIB pour la période 2000-2004. La question que l’on se pose est de savoir ce qui explique la stagnation de l’investissement privé au Bénin. L’importance de cette interrogation découle du rôle actuellement dévolu au secteur privé. La réponse à cette interrogation passe par l’identification non seulement des déterminants de l’investissement des entreprises privées mais aussi des mécanismes par lesquels les politiques économiques peuvent influencer le comportement d’investissement des entreprises. Cette préoccupation, d’expliquer le comportement d’investissement des entreprises, a fait l’objet de plusieurs travaux théoriques et empiriques (Jorgensen, 1971 ; Serven et Solimano, 1992 ; Chirinko, 1993 ; Carruth et Al., 1998). Après Keynes (1936), pour qui l’investissement dépend de la productivité du capital qui doit être comparée au coût d’opportunité (le taux d’intérêt) de ce dernier, l’évolution des dépenses d’investissement des entreprises a été expliquée, pendant longtemps, à travers le prisme de la théorie dite de ‘‘l’accélérateur’’ selon laquelle il y a une relation très forte et stable entre l’investissement et la croissance de la production1. Mais, on s’est vite rendu compte que cette relation exprimait plus un lien technique incontournable (pour produire plus, il faut investir) qu’un comportement économique. Pour mieux comprendre et expliquer le comportement d’investissement des entreprises, trois voies de recherche ont été suivies dans la littérature théorique et empirique sur le sujet. La première consiste à expliquer l’investissement par d’autres variables différentes de la variation de la production (l’accélérateur). Le taux de profit a été l’une des variables explicatives joint souvent de façon ad hoc à l’accélérateur (Mairesse et al. 2001). Mais, le modèle accélérateur – profit a au moins deux insuffisances à savoir la non prise en compte de l’effet des coûts des facteurs 1 La théorie de l’accélérateur précède celle de Keynes car elle commence avec les travaux de Aftalion (Aftalion Albert "La Réalité des surproductions générales: Essai d'une théorie des crises générales et périodiques", 1909, Revue d'Economie Politique) et de Clark (Clark John Maurice "The Basis of War-Time Collectivism", 1917, American Economic Review). Mais l’utilisation de la théorie de l’accélérateur a vraiment commencé avec les modèles de croissance de type Harrod-Domar des années 50 et 60.

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et surtout, l’interprétation de la présence du taux de profit (Epaulard, 2001). En effet il paraît cohérent, à première vue, de dire qu’un taux de profit élevé incite à investir davantage. Cependant la variable pertinente pour juger de la rentabilité n’est pas le taux de profit mais plutôt la différence entre ce dernier et le coût d’opportunité des fonds. De plus, le profit courant ne suffit pas pour renseigner sur les perspectives de profits futurs. Jorgensen (1963), dans une formulation néoclassique de la fonction d’investissement, fait intervenir comme déterminants de l’investissement soit le coût du capital et le coût du travail soit le coût relatif capital/travail. Dans ce cas, l’investissement dépend aussi de l’élasticité de substitution entre ces deux facteurs de production. Mais, le problème de la prise en compte des anticipations des entreprises demeure posé dans la mesure où les décisions d’investissement sont fondamentalement tournées vers le futur. Tobin (1969) propose une manière de résoudre ce problème en supposant que l’ensemble des anticipations pertinentes pour les entreprises est résumé dans la valeur que le marché boursier accorde à leurs actifs. Le rapport entre la valeur boursière des actifs et leur coût de remplacement (Q de Tobin) est selon Tobin le déterminant principal qui guide l’investissement. Mais, cet apport n’est pas d’une grande utilité dans l’explication de l’évolution des dépenses d’investissement des entreprises dans les pays comme le Bénin où il n’y a pas de marché boursier. La deuxième voie d’explication du comportement d’investissement des entreprises a consisté en l’étude des interactions entre les décisions d’investissement et de financement. Les tenants de cette voie de recherche pensent, contrairement à Modigliani et Miller (1958), que les entreprises subissent des contraintes financières ; celles-ci pouvant provenir d’un contrôle des taux d’intérêt, d’un rationnement du crédit et/ou d’un mauvais fonctionnement des marchés financiers. Le théorème de Modigliani – Miller stipule qu’en absence d’imperfections des marchés financiers et de fiscalité, il est indifférent pour une entreprise de financer son investissement par endettement, rétention de profit ou émission d’actions. Dans ces conditions, les décisions financières et réelles des entreprises sont séparées et la capacité d’autofinancement et donc le profit ainsi que les autres variables financières ne devraient être utilisés pour expliquer l’investissement des entreprises. Ces hypothèses étant trop restrictives voire inappropriées (absence de fiscalité), on peut déduire que les conditions financières des entreprises ont un impact sur leurs décisions d’investissement. L’existence de contraintes financières pour certaines entreprises ou à certaines périodes a été prouvée dans la littérature empirique (Fazzari et al. 1988 ; Mauer et Triantis, 1994). Hubbart (1998) montrent les deux sources de financement, internes (rétention de profit) et externes (crédits bancaires, émission d’actions et/ou d’obligations), ne sont pas substituables. La troisième voie d’amélioration de la compréhension du comportement d’investissement des entreprises est celle qui explore le lien entre l’incertitude et les décisions d’investissement. La question centrale est de savoir si les investissements des entreprises sont affectés par l’incertitude. Si tel le cas, quelle est alors l’ampleur de cet effet ? Cette question n’aurait pas de sens si les dépenses en capital des entreprises étaient réversibles sans coût. Mais une partie, plus ou moins grande selon la nature des industries, du capital des entreprises est spécifique. En d’autres termes, elle ne peut être vendue sans coût ou perte de valeur. Il est donc nécessaire d’étendre les modèles explicatifs de l’investissement des entreprises en prenant en compte l’incertitude et l’irréversibilité (Pindyck, 1989). Leur prise en compte permet de comprendre les réactions tardives voire ambiguës des entreprises suite à une modification des variables comme la demande, le taux d’intérêt ou un changement de politique fiscale. Un autre intérêt de cette approche est qu’elle permet d’étudier les différentes situations dans lesquelles peuvent se trouver les entreprises. Il y a en effet, plusieurs formes d’incertitude (sur les prix, sur les débouchés, sur le taux d’intérêt, etc.). Cette approche ouvre ainsi des perspectives intéressantes à la recherche empirique. Notre thèse s’inscrit dans cet axe de recherche en cherchant à expliquer l’influence de l’incertitude sur les dépenses d’investissement des entreprises qui sont généralement irréversibles. Sur le plan théorique, les analyses traditionnelles des décisions d’investissement postulent qu’un projet est réalisé si la somme de la valeur actuelle des recettes attendues de ce dernier dépasse son coût. Mais il faut se rendre compte que plusieurs paramètres entrant dans le calcul de la valeur

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actuelle nette ne sont pas connus avec certitude. Il s’agit notamment des niveaux futurs de la demande, du prix de vente et du taux d’intérêt qui sert de taux d’actualisation. En dehors de la non prise en compte de l’incertitude liée à ces paramètres, les analyses traditionnelles supposent implicitement que l’investisseur ne peut choisir qu’entre réaliser immédiatement le projet ou y renoncer définitivement. Les modèles à valeur d’option permettent de dépasser ce choix binaire en étudiant les possibilités de report de la réalisation du projet ; report qui permet de mieux observer les paramètres incertains et d’adapter la décision en fonction de ce supplément d’information. Outre les modèles à valeur d’option, les modèles explicatifs du comportement d’investissement des entreprises intègrent aussi l’influence de l’incertitude associée à la nature irréversible des dépenses d’investissement. Malinvaud (1987) explique, par exemple, l’importance de la profitabilité dans les décisions d’investissement par les éventuelles contraintes de débouchés. Sur le plan empirique, les entreprises béninoises subissent plusieurs formes d’incertitudes (notamment celle liée aux débouchés) qu’il est nécessaire d’intégrer à l’analyse de leur comportement d’investissement. En effet, les entreprises béninoises subissent la concurrence des produits importés du Nigeria, de la Côte d’Ivoire, du Ghana ou même d’Europe ou d’Asie. Le Bénin partage sa frontière Est avec le Nigeria. Il est à un peu plus d’une centaine de kilomètres des autres puissances économiques de la sous région que sont la Côte d’Ivoire et le Ghana. Il est donc facile d’importer des produits de ces pays. La façade maritime au sud facilite (grâce au port de Cotonou) l’importation des produits d’Asie et d’Europe. Cette facilité d’importation rend disponibles sur le marché béninois des produits qui concurrencent ceux fabriqués sur place. En effet, les consommateurs trouvent presque toujours des produits substituables à ceux fabriqués par les entreprises béninoises. Ce qui diminue la part de marché des entreprises locales et rend incertaine la demande résiduelle qui s’adresse à elles. Le développement du secteur informel amplifie cette concurrence (qui prend même une forme déloyale) car les produits importés sont dans la plupart des cas écoulés par le secteur informel qui échappe aux différentes formes de taxation. Ces produits importés ne viennent pas en flux continu sur le marché béninois et les fluctuations de l’approvisionnement extérieur créent des variations importantes et erratiques de la demande résiduelle qui s’adresse aux entreprises locales. En dehors des conditions de financement de l’investissement et de l’influence de l’incertitude deux autres facteurs peuvent expliquer le faible niveau de l’investissement privé dans les pays comme le Bénin : la faiblesse de la demande, le niveau des coûts des facteurs. En effet, au Bénin, la demande intérieure potentielle est relativement faible car le pouvoir d’achat demeure relativement bas. Le PIB réel (constant 1995) par tête n’a jamais atteint US$500, il est estimé en 2002 à US$442,76 (Banque Mondiale, World Bank Africa Database 2004). De plus, les coûts des facteurs de production sont en dehors du carburant plus élevés que ceux des pays de la sous région. Le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG), par exemple, est de 27.500 FCFA au Bénin alors qu’il est de 18.898 FCA au Niger, de 21.694 FCFA au Togo et de 24.118 FCFA au Mali. Le coût de l’énergie électrique est plus élevé au Bénin par rapport au Togo alors que les sociétés distributrices d’énergie des deux pays ont les mêmes fournisseurs. En effet, au Togo, le prix du kilowattheure est de 72FCFA pour les petites et moyennes entreprises et de 54 FCFA pour les grandes entreprises. Au Bénin, le kilowattheure coûte 88 FCFA aux petites et moyennes entreprises et 56 FCFA aux grandes entreprises. Le prix (hors TVA) du mètre cube d’eau de la première tranche, est à 198 FCFA (hors TVA) au Bénin alors qu’il est à 121 FCFA au Niger, 113 FCFA au Mali, 188FCFA au Burkina Faso et 190 FCFA au Togo2. Quelle est l’ampleur de ces facteurs (incertitude sur la demande faiblesse de la demande et niveau des coûts des facteurs) sur les dépenses d’investissement des entreprises privées au Bénin ? A partir d’une approche microéconomique, notre étude se propose de trouver une réponse à cette question. Notre objectif principal est d’étudier le comportement d’investissement des entreprises béninoises. De façon spécifique, il s’agira de :

- évaluer l’impact de l’instabilité de la demande sur l’investissement des entreprises béninoises ;

2 Source des données : www.izf.net (investir en zone franc).

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- analyser l’effet des coûts des facteurs de production sur l’évolution des dépenses d’investissement des entreprises ; et

- étudier l’influence des conditions financières sur les variations de l’investissement de ces entreprises.

La présente communication est organisée autour de six sections. La première présente l’environnement économique dans lequel se réalise l’investissement des entreprises privées au Bénin, les développements récents de l’économie béninoise et les mesures publiques d’accompagnement de l’investissement privé. Quelques analyses théoriques et empiriques des décisions d’investissement sont ensuite exposées (2). La méthodologie adoptée (3) et le panel d’entreprises (4) qui permet de la mettre en œuvre sont décrits avant l’analyse des nos résultats empiriques (5) et la présentation des enseignements en terme de politique économique (6) qui découlent cette analyse.

1- SITUATION ECONOMIQUE ET STRATEGIES D’ACCOMPAGNEMENT DE L’INVESTISSEMENT PRIVE AU BENIN L’évolution générale de l’économie béninoise est d’abord exposée. Ensuite une analyse des politiques d’accompagnement d’investissement et leurs impacts sur l’économie béninoise est faite. 1.1.- L’évolution de la situation économique béninoise Comme la plupart des pays d’Afrique au Sud du Sahara, le Bénin a connu à la fin des années 80 une crise économique aiguë. La situation était caractérisée par :

- des déficits budgétaires importants et structurels, - l’incapacité de l’Etat à assurer le service de la dette, - la prépondérance du secteur public avec de nombreuses entreprises publiques en difficultés, - un effondrement du système bancaire avec la faillite de toutes les banques de second rang, et - le non paiement de plusieurs mois de salaires aux fonctionnaires (Cellule Macro-

Economique de la Présidence de la République du Bénin, 1999). C’est dans ce contexte que le premier programme d’ajustement structurel (PAS) a été conclu en 1989 avec les institutions de Bretton Woods. Deux autres programmes d’ajustement structurel (PAS) ont été signés respectivement en 1991 et en 1995. Ces programmes avaient pour objectifs de corriger ces déséquilibres économiques. Le troisième PAS avait aussi pour objectifs la diminution de la dépendance de l’Etat par rapport à l’aide extérieure, la réduction de la pauvreté et la protection des groupes vulnérables. Ces programmes d’ajustement structurel ont, comme va le voir, permis le rétablissement des grands équilibres macroéconomiques. C’est la persistance de la pauvreté qui justifie l’élaboration en décembre 2002, avec la Banque mondiale et le Fonds Monétaire International, du document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP). En effet, 38,5% de la population béninoise souffraient en 2001 de pauvreté humaine3 (PNUD, 2003). Après l’élaboration du document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP), le Fonds Monétaire international a accordé au Bénin pour la période 2002-2004 une facilité pour la croissance et la réduction de la pauvreté (FCRP). Un nouveau programme du même type, pour la période 2005-2007, vient d’être signé entre le Fonds Monétaire international et les autorités béninoises. Sur le plan macroéconomique, une croissance économique régulière (avec un taux de croissance réelle annuel moyen de 4,5% entre 1990 et 2004) s’observe depuis 1990. Entre 1995 et 1999 la croissance s’est même accélérée avec un taux annuel moyen de plus de 5%. Ce taux est tombé à 4,4% entre 2000 et 2004. Mais cette croissance n’a pas entraîné une industrialisation de l’économie béninoise car l’agriculture et le commerce demeurent les principales activités participant à la production intérieure. Cette croissance économique n’a pas profondément modifié la structure du

3 L’Indicateur de Pauvreté Humaine (IPH) est calculé, dans les pays en développement, à partir : de la probabilité à la naissance de décéder avant 40 ans, du taux d’analphabétisme des adultes, du pourcentage de la population privée de points d’eau aménagés et du pourcentage d’enfants de moins de 5 ans souffrant d’insuffisance pondérale.

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PIB du Bénin avec une contribution moyenne sur la période (1990-2004) de 34,4% pour le secteur primaire, 13,0% seulement pour le secteur secondaire et 35,3% pour le secteur tertiaire. Mais il faut noter que la part du secteur primaire dans le PIB a baissé en passant d’une moyenne de 35,4% pour la période 1995-1999 à une moyenne de 33,4% entre 2000 et 2004. Les difficultés de la filière coton expliquent cette situation. En effet, la production de coton graine est passée de 412 mille tonnes pour la campagne 2001/2002 à 330 mille tonnes pour la campagne 2002/2003 soit une baisse de presque 20% (OCDE, 2005). En plus de la baisse des prix internationaux de coton, les difficultés de la filière découlent de sa désorganisation et de son mauvais fonctionnement. Après la totale libéralisation de la filière coton en 2000, ses nouveaux acteurs (distributeurs d’intrants et égreneurs) ne respectent pas les règles de son bon fonctionnement. Par exemple, dès la campagne 2000/2001 certains distributeurs d’intrants ont écoulé leurs produits alors qu’ils n’avaient pas été sélectionnés. La fixation des prix aux producteurs se fait largement après la période prévue. On observe aussi augmentation sensible de la part du secteur secondaire dans le PIB qui est passée de 12,5% pour la période 1990-1994 à 13,1% pour 1995-1999 et 13,5% pour 2000-2004 (voir tableau ci-après). Cette augmentation explique l’amélioration de la contribution du secteur secondaire à la croissance qui est passée de 0,5% à 0,8% de période 1995-1999 à celle de 2000-2004 alors que, dans le même temps, le rythme de la croissance diminuait avec la baisse de la contribution des autres secteurs (primaire et tertiaire) à la croissance. Tableau 1 : Variations de la structure du PIB par période

Source des données brutes : INSAE (*moyenne sur 1991-1994) Cette augmentation de la contribution du secteur secondaire à la croissance économique est due, entre autres, à un effort d’investissement. La formation brute de capital fixe est passée d’une moyenne de 13,8% du PIB entre 1990-1994 à une moyenne de 18,8% du PIB entre 2000 et 2004 (voir tableau ci-après). Tableau 2 : Evolutions de la structure des emplois du PIB

Structure des emplois du PIB (en % du PIB courant)

Période Consommation Finale

Formation brute de capital fixe Exportations Importations

Solde courant de la balance

commerciale (en % du PIB courant)

1990-1994 93,8 13,8 22,8 31,9 -9,0 1995-1999 86,9 17,3 27,4 33,1 -5,7 2000-2004 88,6 18,8 22,2 30,3 -8,1

Global (1990-2004) 89,8 16,6 24,2 31,8 -7,6 Source des données brutes : INSAE (*moyenne sur 1991-1994) S’agissant de la consommation, elle a repris après une baisse entre 1995 et 1999. Les exportations, qui sont largement tributaires de la production et de la commercialisation du coton, ont baissé après

Contribution à la croissance réelle Structure des origines du PIB (en % du PIB courant) Période

Taux moyen de croissance réelle(en %) Secteur

primaire Secteur

secondaireSecteur Tertiaire Autres Secteur

primaire Secteur

secondaire Secteur Tertiaire Autres

1990 – 1994 3,8* 2,0* 0,6* 0,7* 0,6* 34,0 12,5 36,6 16,9 1995 – 1999 5,1 2,2 0,5 1,5 0,8 35,4 13,1 34,4 17,1 2000 – 2004 4,4 1,6 0,8 1,3 0,8 33,4 13,4 34,9 18,2

Global (1990 – 2004) 4,5 1,9 0,6 1,2 0,7 34,3 13,0 35,3 17,4

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1999 à cause de la crise (internationale et nationale) de la filière coton. Les exportations de coton constituaient les trois quarts des exportations totales de bien (OCDE, 2005). La part du coton (avec la crise de la filière) décroît ; le coton (graine et fibre) ne représente en 2002 que 50% des exportations. Cette baisse des exportations s’est traduite par une augmentation du déficit de la balance commerciale, les importations ayant moins décrue que les exportations. Toutefois, les statistiques du commerce extérieur sont à analyser avec précaution. Elles ne prennent pas en compte la réexportation vers les pays frontaliers notamment le Nigeria auquel est destinée une bonne partie des marchandises débarquées au port de Cotonou. Il s’agit en fait d’un transit des importations nigérianes par le Bénin qui s’explique par l’encombrement des ports du Nigeria et des différences de tarifs douaniers entre les deux pays. Cette réexportation se fait par le secteur informel avec le contournement des frontières officielles. Les marchandises qui ont l’objet de ce commerce informel de réexportation varient selon la législation douanière nigériane. Mais il s’agit principalement des véhicules d’occasion, du riz et des friperies (Soulé et Obi, 2001). Les véhicules d’occasion font aussi l’objet d’un commerce informel vers le Niger et le Burkina Faso. Ces marchandises sont prises en compte dans les importations (officielles) mais ne sont pas intégrées aux exportations (officielles). La part des importations béninoises ainsi réexportées est difficilement mesurable. Mais, par exemple, les immatriculations de voitures ne représentent que 15% des importations de voitures d’occasion. Il faut aussi préciser que la grande partie des biens en provenance du Nigeria et des autres pays de la sous région notamment la Côte d’Ivoire, à cause du commerce informel, n’est pas intégrée aux statistiques officielles relatives aux importations du Bénin. La croissance économique que connaît le Bénin a été obtenue avec une certaine maîtrise de l’inflation. En effet, en dehors de l’année de la dévaluation du FCFA (1994) et des deux ans qui l’ont suivie (1995 et 1996), le taux d’inflation (mesuré par la variation du déflateur du PIB, base 100 en 1985) est inférieur à 5%. Il a fortement baissé au cours des cinq dernières années passant de 4,5% en 2000 à 0,4% en 2004. Le tableau suivant retrace l’évolution de l’indice harmonisé des prix à la consommation dont le calcul et la publication ont commencé en 1997. On constate aussi une baisse sensible de taux de variations des prix à la consommation. Tableau 3 : Variation des prix à la consommation au Bénin

Année 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 Indice des Prix à la consommation

(base 100 en 1996) 100,0 103,7 109,7 110,0 114,7 119,2 122,2 124,0

Variation annuelle - 3,7% 5,8% 0,3% 4,2% 4,0% 2,4% 1,5% Source : INSAE En dehors de cette maîtrise de l’inflation, on observe, à partir du tableau ci-après, une amélioration de la situation des finances publiques avec une augmentation des recettes fiscales. La part des recettes fiscales consacrée aux salaires et traitements a baissé en passant de 39,0% en 1997 à 31,9% en 2002. Mais elle a connu une augmentation depuis 2003 à cause des mouvements sociaux de la fin de l’année 2002 et probablement de la proximité des élections législatives. Un effort de réduction de la dette publique a été possible sur la période et s’est traduit notamment une baisse du ratio dette extérieure sur PIB. En effet, la maîtrise des grands équilibres macroéconomiques a permis au Bénin de bénéficier, à partir de juillet 2000, de plusieurs allègements de sa dette extérieure au titre de l’initiative pays pauvre très endetté (PPTE). Au 30 juin 2003, le Bénin a obtenu grâce à l’initiative PPTE un allégement de plus de cinquante cinq milliards de francs CFA de sa dette bilatérale et multilatérale (OCDE, 2005). Un peu plus de 3% des recettes d’exportations (soit moins de 1% du PIB) sont consacrées en 2004 au service de la dette qui représentait plus de 10% des exportations et près de 3% du PIB en 1997.

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Tableau 4 : Quelques statistiques sur les finances publiques du Bénin

ANNEES 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004

Recettes fiscales (en% du PIB courant) 12,0 12,6 13,0 13,9 13,5 14,4 14,9 14,6

Salaires et traitements (en % des recettes fiscales) 39,0 35,4 33,3 31,0 32,0 31,9 33,5 38,0

Encours de la dette publique (en % du PIB courant) 65,3 60,6 58,9 57,5 56,1 49,4 41,1 45,3

Encours de la dette extérieure (en % du PIB courant) 56,5 53,3 54,9 54,2 53,2 48,1 40,3 38,6

Service de la dette (en % du PIB courant) 2,9 2,0 2,3 2,0 1,7 1,8 1,4 0,8

Service de la dette (en % des exportations) 10,8 7,3 8,0 7,8 7,7 8,3 6,5 3,2

Source : UEMOA Enfin, il faut préciser que l’économie béninoise est aussi caractérisée par l’importance du secteur informel. En 2004, selon l’Institut National de Statistiques et de l’Analyse Economique (INSAE), le secteur informel est à l’origine de 67,1% du PIB courant. Si pratiquement, en 2004, l’ensemble (99,56%) des activités du secteur primaire se déroulait dans l’informel, 63,74% des activités du secteur secondaire étaient informelles contre 75,05% des activités du tertiaire. Le secteur informel a pris cette importance après la crise économique de la fin des années 80 avec le non paiement des salaires des fonctionnaires, les licenciements des entreprises publiques en faillite, les départs ‘‘volontaires’’ de la fonction publique et l’arrêt des recrutements d’office à la fonction publique. Malgré le manque à gagner fiscal et la concurrence déloyale livrée au secteur formel, ce secteur est considéré comme une soupape de sécurité et un modérateur des tensions sociales.

1.2- Les politiques d’accompagnement de l’investissement privé au Bénin L’économie béninoise a conservé, au cours de la première décennie d’indépendance, les caractéristiques d’une économie de traite avec une agriculture prédominante orientée vers les cultures de rente et la quasi inexistence d’entreprises industrielles. Ce n’est que dans les années 70, après l’avènement de la révolution socialiste, qu’une politique d’industrialisation par substitution aux importations (ISI) a été mise en œuvre. Il s’agissait de produire sur le territoire national des biens qui étaient jusqu’alors importés. D’importants investissements ont été réalisés au cours de cette période. Durant cette période, la part de la formation brute de capital fixe dans le PIB a presque doublé, passant de 10,28% en 1971 à plus de 19% en 1979 (Banque Mondiale, 2004). Cet effort d’investissement a permis la création de plus d’une centaine d’entreprises publiques ou semi-publiques dont les industries de fabrication de textiles, de ciment, d’engrais, d’huiles, de sucre, de farine, de savon, etc. … Ces entreprises ont connu, à l’abri de barrières tarifaires, de restrictions quantitatives d’importations et grâce à des conditions internationales favorables, un début prometteur. Mais avec la concurrence des produits venant de la sous-région, notamment du Nigeria et de la Côte d’ivoire, et le renchérissement des prix des matières premières importées dû à l’inflation dans les pays fournisseurs, ces entreprises ont commencé à enregistrer des contre – performances dès 1982. De plus, la chute des prix des produits agricoles exportés par le Bénin a mis en difficulté l’Etat actionnaire qui ne pouvait plus venir au secours de ces entreprises. Il a donc été nécessaire de procéder à des restructurations qui ont commencé dès 1982 avec la loi (82-008 du 30 novembre 1982) régissant les rapports entre l’Etat et les entreprises publiques. Mais cela n’a pas suffi. En 1989, l’Etat béninois a eu recours au PAS pour résoudre ses problèmes. De plus, à la Conférence Nationale de février 1990, le libéralisme a été proclamé comme doctrine

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économique. Depuis, presque toutes les entreprises publiques ont été liquidées ou privatisées. Il ne restait, en décembre 1999, dans le patrimoine de l’Etat que moins d’une dizaine d’entreprises en voie de privatisation (Cellule Macro-Economique de la Présidence de la République du Bénin, 1999). Les services d’utilités publiques (électricité, eau, télécommunications) demeurent, en 2004, sous le contrôle de l’Etat. Mais le gouvernement béninois a annoncé depuis plusieurs années son intention de les privatiser. Dans cette optique l’Office des Postes et Télécommunications a été scindé en deux entités : Bénin Télécom et la Poste du Bénin. Il est prévu une ouverture de capital de Bénin Télécom avec un partenaire stratégique (à hauteur de 40%) ; l’Etat ne conservant que 15% du capital. La Société Béninoise d’Electricité et d’Eau a aussi subie une scission en deux entités : l’une s’occupant de l’électricité et l’autre de l’eau dans l’optique d’une privatisation prochaine de la compagnie d’électricité4. Les politiques d’industrialisation et de promotion des investissements s’appuient actuellement sur les privatisations qui devraient permettre aux repreneurs d’investir et sur la prise de mesures réglementaires, institutionnelles et financières incitatives. La restructuration économique et l’assainissement des finances publiques entrepris après la signature du premier PAS et le désengagement de l’Etat, ont entraîné une baisse des investissements publics. C’est ce qui explique le faible taux d’investissement public dans la période 1990-1994 (voir tableau ci-après). Tableau 5 : Evolution de la part de la formation brute de capital fixe dans le PIB

Formation brute de capital fixe (en % du PIB courant) Période Privée Publique Totale

1990-1994 9,5 4,3 13,8 1995-1999 11,7 5,5 17,3 2000-2004 11,8 7,0 18,8

Global (1990-2004) 11,0 5,6 16,6

Source des données brutes : INSAE

L’Etat béninois poursuit actuellement une stratégie d’accompagnement du secteur privé à partir d’une politique des grands travaux (routes, hydraulique villageoise, barrages électriques, etc.). L’objectif est de mettre à la disposition du secteur privé les infrastructures nécessaires à son développement. Ces grands travaux sont financés par les dons, les prêts mais aussi sur fonds propres et entraînent une augmentation (légère mais sensible) de la part des investissements publics dans le PIB. Le tableau ci-après montre l’évolution (croissante) de la part des recettes fiscales consacrées aux dépenses en capital. Tableau 6 : Part des recettes fiscales consacrées aux dépenses en capital

ANNEES 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 Dépenses publiques en capital sur financement interne (en % des recettes fiscales)

7,5 8,2 11,0 12,4 18,9 19,3 23,2 18,5

Source : UEMOA Pour permettre au secteur privé de prendre le relais, plusieurs concertations avec les acteurs de ce secteur ont eu lieu dont notamment la Table Ronde sur la Relance du Secteur privé en 1994 et la Conférence Economique Nationale en 1996. Des programmes d’appui institutionnel ont été initiés à

4 Il est plus réaliste de prévoir que ces privatisations n’auront lieu qu’après les élections présidentielles de mars 2006.

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ces occasions et ont été développés. Il s’agit principalement de création d’institutions d’encadrement et de promotion du secteur privé comme :

- le Fonds de Promotion Economique ; - le Centre de Formalités des Entreprises ou Guichet Unique ; - le Centre d’Accueil et d’Informations des investisseurs ; et - l’Observatoire des Opportunités d’Affaires.

Des mesures réglementaires ont été aussi prises à travers la révision des textes existants comme le code du commerce, le code des marchés, le code des investissements, le code des douanes et le code des sociétés. Il est à noter que plusieurs de ces textes sont en voie d’harmonisation dans le cadre de l’Union Economique qui est en train de se mettre en place dans la zone UEMOA. La politique de promotion des investissements, qui se traduit essentiellement par la poursuite des privatisations et la mise en place d’un cadre (réglementaire, institutionnel et financier) incitatif, a permis une augmentation des investissements privés. Mais on observe (tableau 5) une certaine stagnation de l’investissement privé. En effet, après la hausse de la part des investissements privés dans le PIB qui est passée d’une moyenne de 9,5% pour la période 1990-1994 à une moyenne de 11,7% pour la période 1995-1999, ce taux est resté pratiquement inchangé pour 2000-2004 en s’établissant à 11,8%.

2- QUELQUES ETUDES THEORIQUES ET EMPIRIQUES SUR LES DETERMINANTS DE L’INVESTISSEMENT PRIVE Nous présentons ici quelques analyses théoriques des décisions d’investissements irréversibles en environnement incertain avant d’évoquer certains résultats empiriques que propose la littérature sur les déterminants des investissements privés. 2.1- Analyse théorique des déterminants des investissements irréversibles en situation d’incertitude La notion d’irréversibilité a été introduite par Arrow (1968) sous la forme d’une impossibilité de désinvestir dans un programme intertemporel de production. Il a montré que dans ce cas il existe un écart entre le coût du capital et sa contribution marginale au profit. Mais ces résultats n’ont pas eu une très grande portée probablement à cause de l’absence de la prise en compte de l’incertitude. Les résultats de la théorie des décisions en environnement incertain et de la théorie financière ont permis l’éclosion des analyses théoriques sur les investissements irréversibles en situation d’incertitude. L’un des premiers travaux dans ce domaine est celui de Henry (1974) qui analyse de façon explicite l’effet de l’irréversibilité dans les décisions d’investissement en présence d’incertitude. Il associe l’irréversibilité à une croissance de l’information sur les états de la nature c’est à dire « qu’on en saura plus demain sur après demain que ce que l’on sait aujourd’hui ». L’irréversibilité ayant pour conséquence la réduction du domaine des choix possibles une fois l’investissement entrepris, il y a un gain à attendre pour en savoir plus en vue de prendre une meilleure décision. Les coûts associés à cette attente sont : le risque d’entrée sur le marché d’un concurrent et l’excédent de cash-flow (auquel on renonce automatiquement en retardant la mise en œuvre de l’investissement) qu’aurait entraîné l’investissement. Il y a donc une analogie entre entreprendre un investissement et exercer une option financière. L’entrepreneur doit faire un arbitrage entre les profits liés à un investissement immédiat et le coût lié à la perte de l’opportunité de prendre la décision à un meilleur moment : c’est la valeur d’option de l’investissement. En réalisant un investissement irréversible, l’entreprise exerce (ou perd) cette option. En d’autres termes, elle renonce à la possibilité d’attendre et d’avoir d’autres informations. Ce coût d’opportunité s’ajoute au coût de l’investissement et le rendement espéré avant d’entreprendre l’investissement sera d’autant plus élevé que l’attente est intéressante. Les travaux de Henry (1974) n’ont pas entraîné des applications directes dans le domaine de l’investissement mais dans celui de la théorie de la décision dans l’incertain (Galiègue, 1996). Il

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faut attendre les travaux de Bernanke (1983) et de McDonald et Siegel (1986) pour que les modèles à valeur d’option intègrent la théorie de l’investissement irréversible en situation d’incertitude. Avant d’exposer le modèle le plus usité dans la littérature, celui de McDonald et Siegel (1986), rappelons que Pindyck (1991) propose un exemple plus simple sur deux périodes dont une version plus formalisée est présentée par Serven (1996). McDonald et Siegel (1986) présentent le cas d’une entreprise voulant réaliser un projet d’un montant I dont le revenu attendu X est aléatoire et supposé suivre un mouvement brownien avec tendance de la forme suivante : dX/X = αdt + σdW avec dW = ε(t)(dt)½ ; où ε(t) est une variable aléatoire non corrélée suivant une loi normale. Autrement dit, le revenu du projet est affecté de façon permanente par des chocs (positifs ou négatifs) autour d’une tendance α. Le problème de l’entreprise est de déterminer à quel moment investir sachant que l’investissement est irréversible (c'est à dire que I est irrécupérable), que le report de la réalisation du projet permet d’avoir des informations supplémentaires sur son revenu qui demeure incertain et que ce report a un coût d’attente (cash-flows et réalisation du projet par un concurrent). Pour McDonald et Siegel (1986), il faut comparer le coût total de l’investissement (coût direct I et coût d’attentes) à la valeur présente du revenu attendu après la réalisation de l’investissement. Tant que le coût total est supérieur à la recette attendue, il n’est pas intérressant d’investir. Le projet d’investissement est réalisé à la période T où ces deux grandeurs s’égalent. Ce modèle permet de conclure que le seuil de déclenchement d’un investissement irréversible est plus élevé que celui d’un investissement réversible et ce seuil est d’autant plus élevé que l’incertitude est forte. En situation d’irréversibilité, le revenu d’un projet d’investissement doit non seulement couvrir le coût du capital mais aussi le coût lié au risque de se retrouver en surcapacité en cas de conjoncture défavorable. Mais les modèles à valeur d’option sont basés sur la réalisation d’un projet unique alors que les décisions d’investissement des entreprises portent le plus souvent sur l’augmentation ou non du capital existant. Il faut de ce fait prolonger l’analyse à des modèles plus réalistes d’accumulation du capital. Dixit et Pindyck (1994), ainsi que Galiègue (1996) proposent un point sur la littérature relative aux modèles à valeur d’option et les investissements irréversibles en situation d’incertitude. En dehors des modèles à valeur d’option, nous présenterons un modèle sans coûts d’ajustement, mais avec une contrainte d’impossibilité de désinvestissement en dehors de l’usure (l’amortissement) du capital (Bertola, 1998), et un modèle introduisant des coûts d’ajustements propres à l’hypothèse sous jacente d’irréversibilité (Abel et Eberly, 1997). Ces modèles prennent en compte l’incertitude en supposant que les variables aléatoires suivent un mouvement brownien. Nous exposerons aussi un modèle qui prend en compte l’incertitude à travers une fonction de densité mais sans référence explicite à l’irréversibilité (Zeufack, 1996). Bertola (1998) étudie le cas d’une entreprise dont la technologie de production est représentée par une fonction de type Cobb-Douglas. Elle est confrontée à une demande à élasticité constante mais dispose d’un pouvoir de marché. Après avoir calculé le profit opérationnel (qui dépend des conditions de marché : demande et coût du travail) de cette entreprise en déduisant des recettes totales seulement les charges liées au facteur travail, Bertola (1998) résout le programme de l’entreprise qui consiste à maximiser sa valeur actualisée (profit opérationnel moins les coûts d’éventuels investissements) sur un horizon infini sachant qu’elle ne peut désinvestir autrement que par le non remplacement d’équipements amortis et que les conditions de marché sont aléatoires (incertitude sur la demande, sur le coût du travail et/ou sur le coût d’achat d’une unité de capital) mais sont supposées suivre un mouvement brownien. Il obtient une fonction de demande de capital dont les facteurs explicatifs sont : la demande, le coût de travail, le coût d’usage du capital et les paramètres représentant l’incertitude sur la demande. Abel et Eberly (1997) utilisent la même méthode d’analyse (cependant la fonction de production est à rendements d’échelle constants et l’entreprise n’a pas de pouvoir de marché) mais, dans la maximisation de sa valeur, l’entreprise intègre, en plus du coût d’acquisition des biens d’équipements, un coût d’ajustement convexe. Ils trouvent dans le cas des investissements irréversibles que l’entreprise investit si l’augmentation de la valeur de l’entreprise due l’installation

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de l’unité additionnelle de capital est supérieure ou égale au coût d’achat de cette dernière et n’investit pas dans le cas contraire. En s’inspirant de Malinvaud (1987), Zeufack (1996) fait une analyse différente : l’objectif de l’entreprise est de maximiser son profit et non sa valeur. L’entreprise, à cause des contraintes de débouchés, ne produit la quantité optimale que si celle-ci est inférieure ou égale à la quantité demandée. La demande est incertaine et est supposée distribuer selon une fonction de densité log-normale. Zeufack (1996) utilise une fonction de production putty-putty de type Cobb-Douglas contrairement à Malinvaud (1987) qui, en considérant que la décision de l’entreprise porte sur son intensité capitalistique et non sur le niveau du capital, représente la technologie de production par une fonction putty-clay qui permet de modéliser l’irréversibilité des dépenses d’investissement. En résolvant dans ces conditions le programme de l’entreprise, la fonction de demande de capital obtenue dépend de la demande qui s’adresse à l’entreprise, du coût relatif du capital et surtout de la profitabilité. 2.2- Quelques études empiriques des déterminants de l’investissement privé Une bonne partie des études empiriques relatives aux déterminants des investissements privés a suivi une approche macroéconomique. Serven et Solimano (1992) ont fait une synthèse des études empiriques sur les facteurs explicatifs (au plan macroéconomique) de l’investissement privé dans le cadre des pays en développement en situation d’ajustement structurel. Nous nous appesantirons ici sur les travaux qui ont suivi une approche microéconomique. Reiffers (1995) a mis en évidence le rôle des facteurs comme ‘‘l’accélérateur’’, le taux de profit, le taux d’intérêt, la fiscalité et le Q de Tobin dans l’explication des l’investissement en France entre 1972 et 1991. L’analyse a été faite à partir de relations coïntégrantes et des modèles à correction d’erreurs. Les résultats de l’analyse à long terme montrent le rôle prépondérant des variables financières (taux de profit et taux d’intérêt). La variable d’accélérateur5 a aussi une influence sur le taux d’accumulation du capital, mais cette influence est instable. Le test de stabilité de Cusum a permis de distinguer trois sous périodes (1972-1982, 1983-1987, 1988-1991). Pour la première sous période, la variable d’accélérateur tient la première place au rang des variables explicatives du taux d’accumulation du capital suivie du taux d’intérêt réel. Sur la deuxième sous période où on a observé une envolée des cours boursiers, le ratio Q de Tobin est explicatif du taux d’accumulation du capital au même titre que le taux de profit et la variable d’accélérateur. Les résultats obtenus sur la troisième sous période, qui correspond à l’après Krack boursier d’octobre 1987, montrent que le Q de Tobin n’a plus une valeur explicative significative contrairement aux variables financières et à la variable d’accélérateur. Reiffers (1995) déduit donc qu’il y a eu à partir de 1988 une modification des comportements d’investissement. Les entreprises n’ont plus tenu compte de leur valorisation boursière comme critère dans leur décision d’investissement alors que ce critère a été pris en compte dans la période précédente. C’est ce qui explique, selon Reiffers (1995), le maintien du niveau d’investissement des entreprises françaises après l’effondrement boursier d’octobre 1987. Samuel (1996) fait une étude comparative de plusieurs modèles qui expliquent l’évolution des dépenses d’investissements des entreprises. Les estimations ont été faites à partir des données d’un panel de 331 entreprises manufacturières américaines pour la période 1972-1990. Selon ses résultats, le principal déterminant de l’investissement est le cash flow. Les dirigeants d’entreprise font aussi plus attention à la disponibilité des sources internes de financement et au coût du capital qu’à l’évolution du cours des actions de leur entreprise en bourse. Les fondamentaux seraient donc plus importants que les perceptions du marché boursier. Legendre et Paretti (1997), constatant que le modèle de l’accélérateur n’est pas très pertinent dans l’explication de l’évolution des investissements en France depuis 1970, ont développé, dans une perspective néoclassique et sous l’hypothèse de rendements d’échelle constants et de coûts d’ajustement convexes, un modèle qui introduit comme argument de la décision d’investissement la profitabilité. Le modèle n’a pas été complètement résolu mais il a conduit à la mise en évidence 5 L’expression de l’accélérateur est [Yt – (1-δ)Yt-1] / Yt-1 ; Yt étant la production de l’entreprise au temps t et δ le taux de dépréciation du capital

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d’une relation d’Euler. Cette relation a été estimée (par la méthode des moments généralisés) à partir des données annuelles de dix huit branches industrielles françaises de 1970 à 1987. Les estimations ont permis d’invalider le modèle pour cinq branches alors que pour deux autres branches les résultats obtenus sont peu vraisemblables. Mais pour les onze branches restantes les résultats ne remettent pas en cause la pertinence du modèle proposé. La profitabilité est donc un des facteurs explicatifs de l’investissement des entreprises industrielles françaises au cours de la période. Zeufack (1997) a étudié le comportement d’investissement des entreprises manufacturières camerounaises entre 1988 et 1992. Ses résultats révèlent une influence négative de l’incertitude sur l’investissement, une vitesse d’ajustement élevée et une forte élasticité capital – profitabilité. La demande semble aussi avoir joué un rôle déterminant dans l’accumulation du capital. En séparant son échantillon de 68 entreprises en deux sous échantillons : celui des entreprises dont l’actionnaire majoritaire est camerounais (privé local) et celui des entreprises dont la majorité des actions est détenue par des étrangers (privé étranger), il montre que les comportements d’investissement des entreprises diffèrent selon qu’elles soient locales ou étrangères. En effet les entreprises privées locales ont une plus grande vitesse d’ajustement que les entreprises privées étrangères. Un des résultats les plus intéressants de cette comparaison est la perception plus forte de l’incertitude par les entreprises privées étrangères. Zeufack explique ce résultat par la non homogénéité des contraintes institutionnelles perçues et subies par les deux catégories d’entreprises en raison des asymétries d’information. On devrait donc faire attention à cette différence de réaction et la prendre en compte de façon explicite dans les politiques visant à promouvoir l’investissement privé. Pattillo (1998), utilisant un modèle inspiré de Bertola (1988) et un panel de 200 entreprises manufacturières du Ghana sur deux ans (1994-1995), montre que, à cause de l’incertitude sur la demande, les entreprises attendent que la productivité marginale du capital dépasse un seuil spécifique à chaque entreprise avant d’investir. Le niveau de ce seuil s’élève quand l’incertitude augmente. Pattillo (1998) montre que l’incertitude a un effet négatif sur le niveau de l’investissement et que cet effet est plus important pour les entreprises dont l’investissement est irréversible. Sène (2000), étudiant un panel de 30 entreprises sénégalaises sur neuf ans (1988 – 1996), montre que l’investissement privé est surtout influencé par le phénomène d’accélérateur. Les entreprises sénégalaises investissent le plus souvent en fonction des fluctuations de la demande. Ces entreprises ont aussi une grande vitesse d’ajustement, c’est à dire que le délai nécessaire pour adapter leur capacité de production est relativement court. Gnansounou (2001) dans une étude du comportement d’investissement des grandes entreprises béninoises montre que celui-ci est plus influencé par le coût relatif du capital et les variations de la demande auxquels sont plus sensibles les entreprises manufacturières par rapport aux entreprises commerciales. Il trouve un délai moyen d’ajustement du capital très court (moins de 7 mois pour les entreprises manufacturières et 8 mois pour les entreprises commerciales). Herbet (2001), travaillant sur des données agrégées des sociétés non financières et entrepreneurs individuels français, trouve qu’au cours de la décennie des années 90, l’accélérateur et le taux de profit sont les seules variables explicatives du comportement d’investissement des entreprises françaises. Les autres variables (taux d’intérêt, Q de Tobin et taux d’utilisation des capacités de production) ne sont pas pertinentes.

3- METHODOLOGIE DE L’ETUDE DU COMPORTEMENT D’INVESTISSEMENT DES ENTREPRISES BENINOISES 3.1 Le modèle Notre objectif est d’analyser l’impact des fluctuations de la demande et des coûts des facteurs sur la variation des dépenses d’investissement des entreprises béninoises. Un accent particulier doit être mis sur l’impact de l’incertitude sur la demande qui s’adresse aux entreprises. Dans cette optique

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nous utiliserons une fonction de demande de capital issue de la résolution du programme décrit ci-après. La technologie de production est représentée par une fonction de type Cobb-Douglas qui prend la forme suivante :

( )[ ]ϕαα −= 1LAKQ tttt 0 < α < 1 ; ϕ > 0 (1)

où Qt est la quantité produite et vendue de l’output, ϕ le rendement d’échelle de la production6, Kt est le stock de capital, Lt représente le travail supposé parfaitement flexible et rémunéré au taux wt, At étant un indicateur de progrès technologique. La demande est supposée à élasticité constante et est décrite par l’équation suivante :

QDp ttt

1−=

µ 0 < µ < 1 ; 0 < ϕµ < 1 (2)

avec pt le prix de l’output, Dt la demande et µ l’inverse du pouvoir de monopole de l’entreprise. Pour µ = 1 on retrouve le cas d’une entreprise en situation de concurrence parfaite ; µ tend vers 0 quand le pouvoir de monopole de l’entreprise s’accroît. La prise en compte du pouvoir de marché de l’entreprise permet de modéliser la situation de concurrence imparfaite dans laquelle se trouvent les entreprises industrielles du Bénin. En effet, en dehors des activités nécessitant peu d’équipements industriels comme la boulangerie, il n’existe qu’un petit nombre d’entreprises par branche d’activité. Pour un niveau donné du stock de capital (Kt), le profit opérationnel de l’entreprise est la différence entre la recette totale et l’ensemble des coûts salariaux :

ttttttLtt ZKLwQpMaxZKt

β

βπ +

+=−= 1

11)(),( (3)

avec ϕµα

ϕµβ)1(1

1−−−

= ; Zt représente les paramètres de la conjoncture économique et est une

fonction croissante de la demande Dt et décroissante du prix unitaire du travail wt. L’objectif de l’entreprise est de maximiser l’espérance mathématique de la valeur actualisée des cash flows attendus

⎭⎬⎫

⎩⎨⎧ −∫

+∞−− ])([)(

τττττ τπ dXcdZKeEMax

t

trtXt

sous les contraintes suivantes :

dWdtD

dD

t

t σθ += (4)

dKτ = -δKτ + dXτ ; ∀τ (5) dXτ ≥ 0 ; ∀τ (6) où Xt représente le processus d’investissement, ct le prix d’une unité de capital, δ le taux de dépréciation et r le taux d’actualisation. Les équations (5) et (6) signifient que l’entreprise ne peut pas désinvestir : son stock de capital ne peut baisser que par le non remplacement d’équipements amortis. L’équation (4) signifie que la demande Dt est incertaine et suit un mouvement brownien de moyenne θ et d’écart type σ. En d’autres termes, que la demande est affectée de façon permanente par des chocs (positifs ou négatifs) autour d’une tendance θ. En résolvant7 ce programme, on obtient la demande optimale de capital de l’entreprise :

βθδβδφ1

* ) (r ⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛ − −+=

t

tt Z

cK (7)

6 Pour ϕ = 1 on retrouve une fonction de production à rendement d’échelle constant. 7 La résolution du programme est présentée dans Bertola (1998).

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où φ est fonction de la moyenne θ et de l’écart type σ de l’équation représentant le mouvement brownien. φ est une mesure de l’incertitude de la demande (mid). On remarque que ) (r θδβδ − −+tc représente le coût d’usage du capital (cuct). En tenant compte du fait que Zt dépend de la demande (Dt) et du coût unitaire du travail (wt), on obtient :

β

σθ

1

*

),(),( ⎥

⎤⎢⎣

⎡=

ttt

tttt

wDZcucmidK (8)

Le stock optimal de capital dépend du niveau de la demande, du coût d’usage du capital, du coût du travail et de l’incertitude sur la demande. En utilisant le logarithme népérien, on déduit une fonction linéaire de demande de capital qui prend la forme suivante : lnk*t = α1lncuct + α2lnDt + α3lnwt + α4lnmidt + α0 (9) Il convient ici de prendre en compte le fait que le stock effectif de capital (kt) de l’entreprise s’ajuste généralement à son niveau optimal de façon partielle. On adoptera, à cet effet, un processus autorégressif d’ordre 1. Nous utiliserons des données de panel. Donc la première forme explicite de la fonction de demande de capital à estimer, dans sa forme autorégressive8 est : lnkit = λ lnkit-1 + α1lncucit + α2lnDit + α3lnwit + α4lnmidit + α0 + uit (10) avec uit = ηi + εit On suppose dans cette présentation, la présence d’effets individuels (fixes ou aléatoires). Le test de Hausman (1978) permettra de connaître la nature exacte des effets individuels.

3.2- La mesure des variables, les signes attendus et la source des données. Le capital (kt) sera mesuré par les immobilisations corporelles figurant au bilan de l’entreprise ; la demande (dt) par le chiffre d’affaires réel ; le prix du travail (wt) par la moyenne des charges de personnel. Le coût total d’usage du capital sera la somme du coût d’opportunité réel du capital et des dotations aux amortissements ; le coût d’opportunité réel du capital étant le montant qu’aurait rapporté le capital s’il était placé à un taux égal à la différence entre le taux d’intérêt sans risque et le taux d’inflation. Nous utilisons comme taux d’intérêt sans risque le taux d’escompte de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Le taux de variation du déflateur du PIB (base 100, 1996) représente le taux d’inflation. Le coût d’usage d’une unité (cuct) de capital est le coût total d’usage du capital divisé par le capital. La mesure de l’incertitude sur la demande (midit) est le rapport de la moyenne et de l’écart type des douze indices mensuels de l’année t des prix à la consommation du secteur d’activité de l’entreprise i. L’augmentation du coût d’usage du capital devrait avoir un effet négatif sur la demande de capital ; donc α1 devrait être négatif. On attend un signe positif pour le paramètre lié à la demande (α2) ; la littérature est unanime sur la positivité de l’effet d’accélérateur (Jorgensen, 1971 ; Chirinko, 1993 ; Samuel, 1996). Selon le modèle théorique exposé plus haut, α3 devrait être négatif. Mais, à cause de la mesure du coût du travail qui ne prend pas en compte le progrès technologique qui affecte la productivité du travail At (progrès technologique labour augmenting), on trouve dans la littérature empirique un signe positif pour le coût du travail mesuré par les charges moyennes de personnel ou un signe négatif pour le coût relatif du capital (qui est le rapport du coût d’usage du capital et du coût du travail), ce qui suppose un signe positif pour le coût du travail car on a un effet négatif du coût d’usage du capital sur l’évolution de ce dernier (Zeufack,1997 ; Crépon et Gianella ; 2001). On attend donc que α3 soit positif. On attend un effet négatif de l’incertitude de la demande sur l’investissement. Les signes obtenus dans la littérature empirique ne sont pas toujours négatifs mais Carruth et Al (1998), en faisant une revue de la littérature empirique, trouvent que la plupart des travaux (sur données macroéconomiques ou microéconomiques) aboutissent à un impact négatif de l’incertitude sur l’investissement.

8 On va recourir à un modèle à correction d’erreur sur données de panel si les séries sont non stationnaires. Mais en raison de la dimension temporelle faible (sept ans) de nos données, on pense que les séries seront stationnaires.

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On utilisera comme variables de contrôle des variables financières, notamment le résultat avant impôt (rai) et la dette à moyen ou long terme (dmlt)9. Notre objectif est de voir si leur introduction améliore le pouvoir explicatif du modèle et d’étudier l’impact des conditions de financement sur l’investissement des entreprises. Dans ce cas, l’équation à estimer est : lnkit = λ lnkit-1 + α1lncucit + α2lnDit + α3lnwit + α4lnmidit + α5raiit + α6dmltit + α0 + vit (11) On attend un signe positif du paramètre lié au résultat avant impôt (α5). L’effet de la dette à moyen ou long terme sur l’investissement est indéterminé car il dépend du niveau d’endettement de l’entreprise et surtout de ce qu’il permet de financer. En fait, l’effet des variables financières dépend du fonctionnement du marché financier local et surtout des méthodes de financement que choisissent les entreprises. Cela est dû à l’existence d’asymétries d’information entre l’entreprise qui recherche un financement et son prêteur potentiel. Ceci entraîne une variation de l’intensité des contraintes financières au cours du temps pour une entreprise donnée (Rosenwald, 2001). La collecte des données a été faite à la Direction des Impôts à partir des déclarations fiscales. Le tableau qui a servi à cette collecte des données est annexé à la proposition de recherche. Nous disposons d’une base de données de plus d’une centaine d’entreprises sur sept (7) ans10. Nous utiliserons la série d’indice mensuel de prix publié depuis janvier 1997 par l’Institut National de la Statistique et de l’Analyse Economique (INSAE). La méthode de calcul de cet indice est harmonisée avec les autres pays de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA).

4- LE PANEL ET LE CHOIX DE LA METHODE D’ESTIMATION DU MODELE Les méthodes d’estimations des modèles linéaires sur données de panel varient selon le degré d’homogénéité de ce dernier. Des tests de spécifications permettent d’appréhender ce degré d’homogénéité. Avant d’effectuer ses tests nous présentons le panel d’entreprises qui servira de base aux différentes estimations économétriques. 4.1- La présentation du panel Notre échantillon est composé de cent huit (108) entreprises privées du secteur secondaire. Ces entreprises ont rempli et déposé pour chaque année de la période 1996-2003 les déclarations d’impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux. Il s’agit donc d’entreprises formellement établies et tenant une comptabilité selon les réglementations en vigueur. Il serait peut être souhaitable d’intégrer les entreprises du secteur informel dans l’échantillon. Mais il est impossible d’obtenir les informations nécessaires à la présente étude (voir tableau de collecte des données en annexe) sur une période de huit ans car la plupart de ces entreprises ne tiennent pas de comptabilité. Il s’agit d’un panel cylindré par construction. Les entreprises formelles crées au cours de la période 1997-2004 dont les activités relèvent du secteur secondaire n’ont pas été prises en compte. Nous avons préféré un panel cylindré à cause de la qualité des estimateurs qu’il permet d’obtenir. Le panel est constitué de petites, moyennes et grandes entreprises. Le graphique ci-après représente la structure de l’échantillon selon l’effectif du personnel en 2003. 9 On n’utilise pas le logarithme népérien du taux de profit et du taux d’endettement. Le taux de profit prend souvent des valeurs négatives alors que le taux d’endettement est parfois nul. 10 Nous sommes obligés de ne pas considérer les années qui précédent 1997 à cause de la non disponibilité pour ces années d’un indice mensuel de prix.

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Graphique 4 : Répartition du panel selon l’effectif du personnel en 2003

Moins de 20

62.04%n=67

De 20 à 10023.15%n=25

Plus de 100

14.81%n=16

Sources des données brutes : nos enquêtes 2005

Plus de 62% des entreprises de notre échantillon ont moins de 20 employés. Vingt cinq entreprises (soit 23,15% de l’échantillon) ont, en 2003, un personnel dont l’effectif varie entre vingt et cent. Les entreprises ayant plus de cent employés en 2003 représentent 14,81% (soit seize entreprises) du panel. Malgré cette grande proportion de petites entreprises, les très grandes entreprises sont à l’origine de l’essentiel de la valeur ajoutée produite par l’échantillon. Comme le montre le graphique ci-après, 86,48% de la valeur ajoutée totale, en 2003, des entreprises de l’échantillon provient de celles qui ont un effectif de plus de cent employés. Les entreprises de vingt à cent employés représentent moins de 10% de la valeur ajoutée totale créée en 2003 par l’ensemble des entreprises du panel. Moins de 5% de cette valeur ajoutée totale est l’œuvre des entreprises de moins de 20 employés. Graphique 5 : Part relative des immobilisations corporelles, de la valeur ajoutée et du chiffre d’affaires selon la taille des entreprises du panel en 2003

Source des données brutes : nos enquêtes 2005

7.32

3.91

4.38

10.67

9.61

14.35

82.00

86.48

81.28

Pourcentage du Chiffre d'affairestotal en 2003

Pourcentage de la Valeur ajoutéetotale en 2003

Pourcentage des Immobilisationscorporelles totales en 2003

Moins de 20 De 20 à 100 Plus de 100

Ces pourcentages sont dans le même ordre de grandeurs pour les immobilisations corporelles totales et le chiffre d’affaires total du panel en 2003. Le tableau 6 donne pour l’année 2003 les moyennes par type d’entreprise de quelques statistiques recueillies par entreprise du panel.

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Tableau 6 : Moyenne en 2003 de quelques statistiques des entreprises du panel selon leur taille

51.1671 247.1454 22.8562 .8160 6.51

449.2131 965.5201 150.5757 1.4045 38.76

3976.6093 11589.464 2117.7346 1.8737 316.94

724.8544 2093.7794 362.7732 1.1089 59.97

Effectif du personnelpar catégorieMoins de 20

De 20 à 100

Plus de 100

Total

ImmobilisationCorporellesBrutes enmillions de

FCFA

Chiffred'affairesen millionde FCFA

Valeur Ajoutéeen millions de

FCFA

Frais depersonnel

moyen par an(en millionsde FCFA)

Effectif dupersonnel

Source des données brutes : Nos enquêtes 2005 On remarque la grande hétérogénéité du panel. Les moyennes pour les très grandes entreprises sont largement supérieures à celles des petites entreprises. Mais l’écart n’est plus le même en ce qui concerne les frais moyens de personnel, quand bien même ces frais moyens de personnel sont plus élevés dans les grandes entreprises. Les entreprises du panel opèrent dans divers types d’activités industrielles. Le tableau qui suit récapitule les entreprises du panel selon leur secteur d’activité et l’effectif de leur personnel en 2003. Tableau 7 : Secteur d’activité des entreprises du panel

4.6% 4.6% 7.4% 16.7%

9.3% 5.6% .9% 15.7%

39.8% 9.3% 3.7% 52.8%

8.3% 3.7% 2.8% 14.8%

62.0% 23.1% 14.8% 100.0%

Industries Alimentaires

Imprimeries, fabriquesd'ouvrage en bois etassimilés

Fabrication de matériauxde contruction et BTP

Fabrication de produitchimique et autresindustriesmanufacturières

Secteurd'activité parcatégorie

Total du tableau

% tableau

Moins de20

% tableau

De 20 à100

% tableau

Plus de100

Effectif du personnel par catégorie

% tableau

Total dutableau

Source des données brutes : Nos enquêtes 2005 Les industries alimentaires, les imprimeries et fabriques d’ouvrages en bois et assimilés, les industries chimiques et autres industries manufacturières représentent chacune environ 15% de l’échantillon. On remarque une forte présence des entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de Bâtiments et travaux publics (BTP) qui représente plus de 52% de l’effectif des entreprises de l’échantillon. C’est le lieu de collecte des données et la nature des entreprises du panel qui justifient ce résultat. En effet, les entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP sont obligées d’avoir une existence légale et formelle pour souscrire aux appels d’offre qui sont, en général, le mode de passation de commande dans le secteur des BTP. De plus les prestations que les entreprises de BTP sont amenées à fournir sont exonérées de plusieurs taxes surtout si le commanditaire est l’Etat (ou ses démembrements : ministères, office ou entreprise publique, etc.), une municipalité ou un organisme international. De ce fait les entreprises de fabrication de matériaux de constructions sont obligées d’avoir aussi une existence légale et formelle pour pouvoir fournir leurs matériaux aux entreprises de BTP. La valeur ajoutée totale créée en 2003 par l’ensemble des entreprises du panel (39179,51 millions de FCFA selon nos enquêtes) représente 13,82% de la valeur ajoutée du secteur secondaire. Mais il

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faut préciser que 62,69% de la valeur ajoutée du secteur secondaire était produite par les entreprises du secteur informel (source INSAE). La valeur ajoutée totale produite par les entreprises de l’échantillon représente 37,03% de la valeur ajoutée créée par les entreprises formelles du secteur secondaire. On peut donc dire que le panel est assez représentatif de l’ensemble des entreprises industrielles du secteur formel au Bénin. 4.2- La spécification du modèle et le choix de la méthode d’estimation La méthode d’estimation des modèles linéaires sur données de panel dépend du degré d’homogénéité du panel. Ce degré d’homogénéité est constaté après les différents tests de spécifications. Nous avons choisi de modéliser l’ajustement du capital à son niveau optimal par un processus autorégressif (d’ordre 1). Mais il existe une spécification alternative : le modèle à correction d’erreur. En effet, le processus autorégressif ne permet la convergence de la variable dépendante (ici le capital) vers son niveau optimal que si les différentes variables du modèle sont stationnaires. Dans le cas contraire, il faut recourir au modèle à correction d’erreur. Les tests de stationnarité de Levin Lin et (1992), de IPS (2002) et de Maddala-Wu (1999) ont été effectués sur chacune des variables du modèle. Les résultats montrent que toutes nos séries d’observations sont stationnaires en niveau. Ce résultat n’est pas surprenant si nous savons que la dimension temporelle de nos données de panel est très faible ; sept (07) pour les variables explicatives et huit (08) pour la variable expliquée. La spécification autorégressive de l’ajustement du capital à son niveau souhaité est acceptable. Notre modèle prend donc la forme d’un modèle dynamique (autorégressif) sur données de panel. Il faut maintenant vérifier le degré homogénéité de ce panel d’entreprise. C’est un test de Fisher qui permet de vérifier la présence d’une certaine hétérogénéité dans le comportement des entreprises du panel. Il consiste à discriminer entre la spécification relative à l’homogénéité totale et celle relative à l’hétérogénéité (partielle) à travers les constantes individuelles. Ce test a été effectué11 sur la forme simple (non autorégressive) du modèle. Les résultats de ce test conduisent au non-rejet de l’hypothèse de présence d’hétérogénéité individuelle. Ce résultat est prévisible dans la mesure où il est difficile de supposer une homogénéité totale du comportement d’investissements des entreprises béninoises. En effet, les différences de productivités sont à la base des différences des niveaux d’investissements. Mais il faut aussi vérifier si ces effets individuels dans sont fixes ou aléatoires. C’est le test de Hausman qui permet faire cette vérification. Ce test réalisé12 sur la forme simple (non autorégressive) du modèle ne permet pas de rejeter l’hypothèse de présence d’effets fixes individuels. Nous avons aussi fait le test de Hausman sur la forme autorégressive du modèle. Dans ce cas nous avons utilisé la méthode Arrelano-Bond pour estimer le modèle autorégressif avec présence d’effets aléatoires et la méthode Blundell-Bond pour estimer le modèle autorégressif avec présence d’effets fixes. Le résultat du test de Hausman confirme la présence d’effets fixes. Ce résultat permet de conclure qu’il existe des spécificités propres à chaque entreprise qui influent sur la détermination du niveau optimale du stock de capital nécessaire à l’entreprise pour réaliser son plan de production. Ces spécificités peuvent provenir des différences de productivités (du travail et/ou du capital) et de la perception des conditions du marché (incertitude politique ou sociale par exemple) ou des contraintes institutionnelles (exposition à la corruption, composition de l’actionnariat, types de partenaires, etc.). Ce sont ces spécificités qui justifient les différences de comportements des entreprises malgré qu’elles aient les mêmes sensibilités (ou élasticités) par rapport aux facteurs structurels que sont le niveau de la demande, du coût d’usage du capital, du coût du travail. Nous devons donc estimer un modèle autorégressif sur données de panel avec présence d’effets fixes et d’erreurs de mesure sur certaines variables notamment le coût d’usage du capital. 11 La procédure de réalisation de ce test a été présentée dans Sevestre (2000) 12 La procédure de réalisation de ce test a été présentée dans Sevestre (2000)

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L’obtention de bonnes estimations d’un modèle autorégressif à effets fixes n’est pas aisée (Sevestre, 2000). Il est donc utile de préciser la méthode d’estimation que nous avons utilisée dans la présente étude. Les méthodes usuelles d’estimation des modèles linéaires sur données de panel (LSDV et MCG) ne permettent pas d’obtenir les estimateurs convergents pour les modèles autorégressifs sur données de panel à cause de la présence de la variable endogène retardée comme variable explicative. Nous avons donc eu recours à la méthode des moments généralisés avec des variables instrumentales. Comme nous l’avons rappelé plus haut, deux types de méthodes sont utilisés dans la littérature empirique : la première a été proposée par Arrelano-Bond (1991) et la seconde par Blundell-Bond (1998). La méthode Arreleno-Bond (1991) n’a pas donné un résultat satisfaisant. En effet, les coefficients des variables explicatives importantes comme le niveau de la demande et le coût du travail ne sont pas significatifs. Le test de sur-identification des instruments de Sargan et Hansen ne permet pas d’accepter la validité des instruments utilisés. Cette inefficacité de la méthode Arrelano-Bond (1991) est courante pour l’estimation des fonctions d’investissement ou de demande de capital sur un petit échantillon (Zeufack, 1996). Elle provient (en partie) du fait que la différence première du logarithme népérien des variables les transforme en taux de croissance. L’équation en différences première est une relation entre les taux de croissance des différentes variables ce qui réduit la significativité des coefficients estimés. De plus il est difficile de faire une analyse économique des résultats de l’estimation économétrique d’une telle équation. La méthode Blundell-Bond (1998) nous a permis d’avoir des résultats acceptables. A cause de la colinéarité entre la variable endogène et sa valeur décalée nous avons utilisé la différence première décalée d’ordre 2 ou plus de la variable endogène comme instrument de la variable endogène décalée. Les erreurs liées à la mesure du coût d’usage du capital nous ont amenées à utiliser sa différence première et leurs valeurs décalées comme instrument suivant en cela les indications de Sevestre (2000). C’est la différence première décalée d’ordre 2 ou plus de la mesure de l’incertitude de la demande (mid) qui a servi d’instrument à cause des erreurs de mesure et de la nature non exogène de l’incertitude dans les décisions d’investissement. Les valeurs en niveau de la demande réelle et du coût du travail ont aussi été utilisées comme instruments. Les résultats du test de Sargan et Hansen ont permis de valider ces instruments. On observe, à partir des résultats du test d’autocorrélation de Arrelano-Bond, une absence d’autocorrélation des erreurs du modèle en niveau. Ce sont les résultats obtenus à partir de la méthode Blundell-Bond (1998) que nous exposons ci-après. Ils serviront de base à nos analyses économiques.

5- ANALYSE DU COMPORTEMENT D’INVESTISSEMENT DES ENTREPRISES BENINOISES Le panel qui a servi de base aux estimations économétriques est composé à 52,8% d’entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP. Les autres entreprises (industries alimentaires ; imprimeries, fabriques d’ouvrages en bois et assimilés ; fabrications de produits chimiques et autres industries manufacturières) représente 47,2% du panel. Notre analyse des facteurs explicatifs de l’investissement des entreprises béninoises se fera dans un premier temps sur les résultats des estimations économétriques liés à l’ensemble du panel. Dans un second temps nous procéderons à une analyse comparative du comportement d’investissement des entreprises en distinguant les entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP des autres entreprises industrielles. 5.1- Facteurs explicatifs de l’accumulation de capital dans les entreprises béninoises Les résultats de l’estimation de l’équation (10) par la méthode des moments généralisés avec les variables instrumentales citées plus haut (méthode Blundell-Bond, 1998) sont résumés dans le tableau ci-après.

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Tableau 8 : Résultats de l’estimation de la fonction de demande de capital sur l’ensemble du panel

Variables explicatives

Capital décalé (L1

lnkm*)

Coût d’usage du

capital (lncuc)

Niveau de la

demande réelle

(lndmr*)

Coût du travail

(lnwm*)

Incertitude sur la

demande (lnmid)

Constante (_cons)

Paramètres 0,666 -0,725 0,163 0,331 -0,154 0,176 t de Student 5,84 -7,28 2,68 2,69 -1,97 0,43 Probabilité

associée 0,000 0,000 0,007 0,007 0,049 0,668

Quelques tests de

significativité

Test de significativité

globale : F(5,750) =

651,97

Test de Validité des instruments : chi2(15) =

15,16

Test d’autocorrélation des résidus AR(1)

: z = -5,03

Test d’autocorrélation des résidus AR(2)

: z = -1,44

Probabilité associée 0,000 0,440 0,000 0,149

Source : Nos estimations 2005 (*exprimé en millions de FCFA) Sur le plan économétrique, cette estimation est satisfaisante car les instruments sont valides et le modèle est globalement significatif au regard du résultat du test de Fisher. Il existe, pour le modèle en différence première, une autocorrélation des résidus à l’ordre 1 mais cette autocorrélation disparaît à l’ordre 2. L’absence d’autocorrélation d’ordre 2 des résidus du modèle en différence première prouve une absence d’autocorrélation des résidus pour le modèle en niveau (Arellano-Bond, 1991). Les paramètres estimés, au regard des t de Student et des probabilités associées, sont significatifs à l’exception de la constante. Tous ces paramètres ont aussi respectivement les signes attendus. Le paramètre lié au capital décalé (λ) est égal à 0,666. Il représente l’inertie de l’investissement. Le paramètre d’ajustement (1-λ) est : 0,334. On en déduit un délai moyen d’ajustement du capital ( λ

λ−1 ) de 1,99. Ceci traduit une vitesse d’ajustement très faible. Les entreprises béninoises

mettent deux ans pour ajuster leur stock de capital effectif à son niveau souhaité. Cela signifie qu’en cas de reprise de l’activité économique ou de mise en œuvre de mesures incitatives l’investissement tardera à répondre positivement. De même, en cas de mauvaise conjoncture économique, le désinvestissement se fera avec un certain retard. Ce résultat s’explique par le fait que les entrepreneurs s’accordent un délai d’observation pour vérifier si les changements de l’environnement économique sont transitoires ou si les mesures incitatives prises sont crédibles et en bien appliquées. Ce délai d’ajustement peut aussi s’expliquer par la période qui sépare la décision d’investissement et la réalisation de ce dernier. Après la prise de la décision d’investir, il faut rechercher et obtenir le financement (si l’investissement n’est pas autofinancé), commander les équipements, les recevoir et les installer. Le délai d’ajustement élevé peut aussi supposer l’existence de difficultés de réalisation de l’investissement après la prise de décision. La valeur estimée du paramètre α1 est -0,725. C’est l’élasticité du capital par rapport à son coût (unitaire) d’usage. La valeur élevée de cette élasticité traduit une grande sensibilité de l’investissement des entreprises au coût d’usage du capital. En effet, une baisse du coût d’usage d’une unité de capital de 10% entraîne, toutes choses égales par ailleurs, une augmentation du stock de capital des entreprises de 7,25%. Le coût d’usage du capital est donc l’un des déterminants importants de l’investissement des entreprises au Bénin. Mais il faut remarquer que le capital étant irréversible, le désinvestissement n’est pas toujours possible en cas hausse du coût d’usage du capital. Dans ce cas on assiste à une sous-utilisation du stock du capital. En absence de statistiques sur le taux d’utilisation des équipements de production dans les entreprises béninoises, le coût

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d’usage du capital a été calculé comme si tout le capital était utilisé. Cette non-prise en compte des taux d’utilisation du capital peut entraîner dans certains cas une surévaluation du coût d’usage du capital. Ceci peut expliquer la valeur relativement élevée de l’élasticité du stock capital par rapport à son coût (unitaire) d’usage. Quant à l’autre facteur de production (le travail), la valeur estimée du paramètre qui lui est associé est 0,331. Une augmentation de 10% du coût unitaire du travail entraîne une augmentation du stock de capital de 3,31%. Ceci traduit une substitution du facteur travail par le facteur capital. En effet, bien qu’on n’ait pas étudié ici l’effet d’une augmentation du coût du travail sur la demande de travail des entreprises, on peut dire, toutes choses égales par ailleurs, que cette demande va baisser suite à une augmentation du coût unitaire du travail. Le travail étant devenu plus cher, pour un niveau constant du coût d’usage du capital, le coût relatif du capital par rapport au travail va diminuer. Pour produire une même quantité d’output, l’entreprise va remplacer du travail par du capital. Le signe du α3 permet de dire que c’est ce phénomène qui se produit dans les entreprises béninoises. La faible valeur de ce coefficient montre que la substitution du travail par du capital n’atteint pas le tiers du pourcentage d’augmentation du coût unitaire du travail. Le coefficient d’accélérateur (α2) est estimé à 0,163. C’est l’élasticité du stock de capital par rapport à la demande. La stagnation de l’investissement des entreprises privées au Bénin s’explique aussi par le ralentissement de la croissance économique au Bénin qui a entrainé une inertie de la demande. Le niveau de la demande est dans la littérature économique le premier déterminant identifié de l’investissement. Le principe de l’accélérateur remonte à Albert Aftalion (1909) et John-Maurice Clark (1917). Mais la relation entre le stock de capital et la demande reflète à la fois un comportement économique et une liaison technologique entre le capital et la production. Cependant, il faut remarquer que l’accumulation de stock de capital par les entreprises dépend de leur anticipation de l’évolution future de la demande et non de son niveau actuel. Cela explique en partie la faible élasticité du stock du capital par rapport au niveau de la demande. Les incertitudes de l’environnement économique (économique, sociale, politiques, etc.) rendent difficile une bonne anticipation du niveau future de la demande. C’est ce qui explique le rôle de l’incertitude notamment celle liée aux fluctuations de la demande dans l’explication des dépenses d’investissement des entreprises. Un des résultats de notre étude est l’identification d’un effet négatif significatif de l’incertitude de la demande sur le stock de capital effectif des entreprises béninoises. En effet la valeur estimée du paramètre lié à notre mesure de l’incertitude sur la demande est de -0,154. La volatilité de la demande a donc un effet dépressif sur l’investissement des entreprises béninoises. L’incertitude sur la demande explique dans une certaine mesure la stagnation de la part de la formation brute de capital fixe du secteur privé dans le PIB. En effet ce chiffre est passé d’une moyenne de 9,5% du PIB entre 1990-1994 à une moyenne de 11,7% pour le période 1995-1999. Mais il est resté presque inchangé pour 2000-2004 avec une moyenne sur cette période de 11,8% du PIB. Entre 1995 et 2004, on observe une croissance de l’activité économique au Bénin avec une augmentation régulière du PIB. Mais on assiste à un fléchissement du rythme de cette croissance. Le taux de croissance réel moyen était de 5,1% pour la période 1995-1999. Ce taux est tombé, pour la période 2000-2004, à 4,4%. Ce chiffre cache un ralentissement de taux de croissance des activités économiques. En effet le taux de croissance réelle du PIB est passé de 6,2% en 2001 à 4,4% en 2002, 3,9% en 2003 et 2,7% en 2004. Cette instabilité du taux de croissance de l’activité économique constitue une des sources de l’incertitude sur la demande. Cette incertitude n’encourage pas les entreprises privées à investir. On peut aussi dire que toutes les autres formes d’incertitude ne sont pas, à l’instar de l’incertitude sur la demande, bénéfiques pour l’investissement privé. Dans le but d’analyser l’impact des conditions de financement sur l’investissement des entreprises nous avons ajouté de façon ad hoc au modèle d’analyse du comportement d’investissement des entreprises béninoises deux variables : le profit avant impôt et la dette à moyen et long terme. Les résultats de l’estimation économétrique du modèle ainsi spécifié sont résumés dans le tableau ci-après.

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Tableau 9 : Résultats de l’estimation de la fonction de demande de capital avec les variables « financières » sur l’ensemble du panel.

Variables explicatives

Capital décalé

(L1.lnkm*)

Coût d’usage du

capital (lncuc)

Niveau de la

demande réelle

(lndmr*)

Coût du travail

(lnwm*)

Incertitude sur la

demande (lnmid)

Résultat avant impôt

(raim*)

Dette à moyen ou long terme (dmltm*)

Constante (_cons)

Paramètres 0,635 -0,692 0,183 0,366 -0,14 -5,50.10-5 1,29.10-6 0,199 t de Student 5,02 -6,61 2,64 2,6 -1,9 -0,37 0,01 0,53 Probabilité

associée 0,000 0,000 0,008 0,010 0,058 0,710 0,989 0,593

Quelques tests de

significativité

Test de significativité globale :

F(7,748) = 210,16

Test de Validité des instruments :

chi2(27) = 13,06

Test d’autocorrélation des résidus AR(1) :

z = -4,40

Test d’autocorrélation des résidus AR(2) :

z = -1,54 Probabilité

associée 0,000 0,989 0,000 0,125 Source : Nos estimations 2005 (*exprimé en millions de FCFA) Cette estimation est satisfaisante sur le plan économétrique. En effet, les instruments utilisés sont valides. De plus il n’existe pas d’autocorrélation des résidus à l’ordre 2 pour le modèle en différence première. Ce qui signifie, selon Arrelano-Bond (1991), une absence de corrélation des résidus pour le modèle en niveau dont nous utilisons les résultats. Le résultat des tests de Student permet de constater que les variables « financières » introduites de façon ad hoc dans le modèle n’ont pas un effet significatif sur le stock effectif de capital des entreprises béninoises. Les coefficients estimés ont une valeur très faible et le coefficient lié au résultat avant impôt n’a pas le signe attendu. De plus, même si la probabilité associée au test de Fisher est nulle, la faible valeur de la statistique de Fischer (par rapport à celle obtenue pour le modèle sans les variables « financières ») montre une baisse de la significativité globale du modèle suite à l’introduction de ces variables « financières ». On remarque aussi que la significativité de la variable qui mesure l’incertitude sur la demande s’est très légèrement dégradée. Ce résultat indique l’absence de la prise en compte des contraintes financières dans les décisions d’investissement des entreprises béninoises. Ceci peut s’expliquer par le recours à d’autres formes de financement comme l’emprunt sur le marché informel ou le financement des investissements par la fortune personnelle des dirigeants (et souvent actionnaire majoritaire) des entreprises béninoises. En tout cas il faut remarquer que la majorité (61,1%) des entreprises n’avait pas de dette à moyen ou long terme en 2003. La non pertinence de ces variables « financières » peut aussi s’expliquer par le fait que le coût du capital tel que nous l’avons mesuré prend en compte les conditions du marché financier. En fait, en dehors des dotations aux amortissements, le coût du capital dépend du taux moyen de dépôt à terme que nous avons mesuré ici par le taux d’escompte de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Ce taux servant de base à la détermination des taux débiteurs et créditeurs des banques de second rang peut être aussi utilisé comme instrument de mesure des conditions de financement des entreprises. Ce taux permet donc de capter l’effet des contraintes existant sur le marché financier. Selon la théorie keynésienne de l’investissement, l’entreprise n’investit que dans le cas où l’efficacité marginale du capital est supérieure au taux d’intérêt. La présence du taux d’escompte de la BCEAO permet de capter ce phénomène. Notre mesure du coût d’usage du capital prend donc aussi en compte l’effet des contraintes de financement que subissent les entreprises béninoises. Ceci peut expliquer la non significativité des variables « financières » (notamment du résultat avant impôt) introduites de façon ad hoc dans le modèle.

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5.2- Analyse du comportement d’investissement des entreprises béninoises selon la nature de leurs activités Dans le but d’identifier d’éventuelles différences dans l’ampleur de l’effet des déterminants de l’investissement des entreprises béninoises selon la nature de leurs activités nous avons distingué les entreprises de fabrication des matériaux de construction et de BTP des autres entreprises manufacturières. Les résultats des estimations économétriques réalisées à partir des deux sous-échantillons ainsi constitués sont présentés dans le tableau ci-après. Tableau 10 : Résultats de l’estimation de la fonction de demande de capital selon la nature de l’activité des entreprises du panel

Entreprises de fabrication de matériaux de construction ou BTP Autres entreprises manufacturières

Variables explicatives Paramètres t de

Student Probabilité

associée Paramètres t de Student

Probabilité associée

Capital décalé (L1 lnkm*) 0,557 5,36 0,000 0,623 4,80 0,000

Coût d’usage du capital (lncuc) -0,914 -7,62 0,000 -0,434 -2,27 0,024

Niveau de la demande réelle (lndmr*) 0,144 4,32 0,000 0,289 2,26 0,025

Coût du travail (lnwm*) 0,493 3,56 0,000 0,207 1,99 0,048

Incertitude sur la demande (lnmid) 0,009 0,16 0,871 -0,180 1,78 0,075

Constante (_cons) -0,316 -0,92 0,358 0,332 0,49 0,622 F statistic F(5,393) = 293,05 0,000 F(5,351) = 273,41 0,000

Test de Validité des instruments Chi2(15) = 13,38 0,573 Chi2(15) = 11,99 0,680

Test d’autocorrélation des résidus AR(1) Z = -4,06 0,000 Z = -3,43 0,001

Test d’autocorrélation des résidus AR(2) Z = -1,72 0,086 Z = -0,80 0,424

Source : Nos estimations 2005 (*exprimé en millions de FCFA) Précisions que les estimations réalisées à partir des deux sous-échantillons ont été faites avec les variables instrumentales utilisées pour l’estimation sur l’échantillon global. Les résultats des tests de significativité globale, de validité des instruments et d’absence d’autocorrélation des résidus sur le modèle en niveau montrent que les estimations économétriques sont satisfaisantes. Mais il faut noter qu’en ce qui concerne les entreprises manufacturières (hors BTP) le coefficient lié à l’incertitude est significatif à 10% alors que celui des entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP n’est pas significatif. Les autres coefficients sont, en dehors de la constante, significatifs à un risque d’erreur de 5%. En faisant une comparaison de la valeur des différents coefficients on peut faire les constats suivants.

• Les entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP ont un délai moyen d’ajustement moins élevé que les autres entreprises manufacturières. En effet, le coefficient lié au capital retardé prend la valeur 0,557 pour les entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP et 0,623 pour les autres entreprises manufacturières. C'est à dire une vitesse d’ajustement respectif de 0,443 pour les premières et de 0,377 pour les secondes.

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Soit un délai moyen d’ajustement respectif de 1,26 ans pour les entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP et de 1,65 ans.

• Les entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP ont une forte sensibilité aux coûts des facteurs. Les élasticités par rapport aux deux facteurs de production (capital et travail) des entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP sont supérieures au double des valeurs respectives de ces élasticités pour les autres entreprises manufacturières. L’élasticité du stock effectif du capital par rapport à son coût (unitaire) d’usage est de -0,914 pour les premières et de -0,434 pour les secondes. L’élasticité du stock effectif du capital par rapport au coût unitaire du travail est de 0,493 pour les entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP et de 0,207 pour les autres entreprises manufacturières.

• Mais, en ce qui concerne l’effet du niveau de la demande, les entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP sont moins sensibles que les autres entreprises manufacturières. Le coefficient d’accélérateur de ces dernières est le double de celui des entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP qui ne semble pas subir d’incertitude sur la demande.

Notre modèle d’analyse postule, à cause de l’irréversibilité des dépenses d’investissement, que l’ajustement à la baisse du stock effectif du capital ne peut se faire que par l’amortissement ou l’usure des équipements (équation 5). La vente d’équipements de production spécifiques ne peut se faire qu’à perte. Le plus faible délai d’ajustement du capital des entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP s’explique par le taux d’amortissement élevé de leurs équipements de production qui passent ainsi moins de temps dans le processus de production. Comme de montre le tableau ci-après, le taux d’amortissement moyen des équipements des entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP en 2003 est de 28,39%. Il dépasse de presque 10% celui des autres entreprises manufacturières dont le taux d’amortissement des équipements en 2003 n’est que de 18,53%. Les taux d’amortissement sont fixés par la législation fiscale. Un taux d’amortissement élevé dans le secteur des BTP reflète le fait que leurs équipements de production sont composés, par rapport aux autres entreprises manufacturières, d’immobilisations corporelles dont le taux d’amortissement autorisé est plus élevé. Il s’agit probablement de la possession d’un fort pourcentage de matériel de transport amorti à un taux de 20%. En dehors des frais d’établissement et autres charges immobilisées dont le taux d’amortissement autorisé est de 33%, les autres immobilisations corporelles (hors matériel de transport) sont amorties à un taux de 10%. Tableau 11 : Taux d’amortissement moyen par type d’industrie (2003)

,1853

,2839

,2373

type d'industrieAutres Industries(manufacturières)

Fabrication de matériauxde construction et BTP

Total

Tauxd'ammortissement

Source des données brutes : Nos enquêtes 2005 En amortissant plus rapidement leurs équipements de production, les entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP ajustent plus facilement leur stock de capital effectif à son niveau souhaité. Ainsi, en cas d’anticipation d’une conjoncture favorable, ces entreprises investiront plus rapidement que les autres entreprises manufacturières. On retrouve ainsi le fait que la reprise dans le secteur des BTP annonce une reprise prochaine dans les autres secteurs de l’économie.

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C’est aussi ce taux d’amortissement élevé qui explique la forte sensibilité des entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP aux variations du coût d’usage du capital. Par construction le coût d’usage d’une unité de capital est la somme du taux d’amortissement et du taux d’intérêt réel qui représente le coût d’opportunité réel de cette unité de capital. Le taux d’intérêt réel étant commun à toutes les entreprises, on ne peut retenir que le niveau élevé du taux d’amortissement comme l’explication de forte sensibilité des entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP aux fluctuations du coût (unitaire) du capital. En ce qui concerne l’effet du coût unitaire du travail, la valeur élevée du coefficient qui lui est associé pour les entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP s’explique par le fait que les activités de ces entreprises sont à « haute intensité de main d’œuvre ». Le rapport de la masse salariale et du capital donne ce qu’il faut dépenser en main d’œuvre pour utiliser une unité du capital. Le tableau ci-après donne la moyenne de ce chiffre en 2003. Tableau 12 : Coût moyen de la main d’œuvre par unité de capital selon les types d’industrie (2003)

,4911

,7015

,6022

type d'industrieAutres Industries(manufacturières)

Fabrication de matériauxde construction et BTP

Total

Masse salariale parunité de capital

Source des données brutes : Nos enquêtes 2005 Les entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP dépensent largement plus en main d’œuvre que les autres entreprises manufacturières pour utiliser dans leur processus de fabrication une unité de capital. Ces entreprises ont donc recours à un nombre élevé d’ouvriers. Ce qui justifie leur forte sensibilité aux variations du coût unitaire de la main d’œuvre. Les dépenses d’investissement des entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP dépendent peu du niveau actuel de la demande mais surtout de leur carnet de commandes. Ceci s’explique par le fonctionnement particulier du secteur des BTP. La demande résiduelle qui s’adresse à chaque entreprise de ce secteur dépend des appels d’offres qu’elle a « gagnés ». De plus il existe un délai relativement important entre le choix de faire réaliser des travaux par une entreprise donnée et le moment où elle commence effectivement ces travaux. A contrario, les autres entreprises manufacturières déterminent selon leurs anticipations la demande résiduelle qui leur sera adressée, produisent et comptent sur le circuit de distribution pour écouler les produits fabriqués sans connaître leur client. Les entreprises de fabrication de matériaux de construction ou de BTP connaissent sur une certaine période leur demande résiduelle et leurs clients. Ce fonctionnement particulier du secteur des BTP explique la faible sensibilité de ses entreprises au niveau courant de la demande et surtout le fait qu’elles ne subissent pas une incertitude sur la demande. Les entreprises du secteur des BTP subissent d’autres formes d’incertitudes que nous n’avons pas modélisées ici. Elles subissent plus que les autres entreprises les incertitudes politiques car la plupart des travaux qu’elles réalisent sont des travaux entièrement ou partiellement publics. Par exemple, les retards dans le vote, par l’Assemblée Nationale, du budget de l’Etat ont des impacts immédiats sur l’activité des entreprises du secteur des BTP : ralentissement des travaux en cours faute de décaissement de fonds ou retard dans le commencement des travaux prévus dans l’année suivante. Pour appréhender l’impact des conditions de financement sur l’accumulation de capital par chaque type d’entreprise, nous avons introduit de façon ad hoc deux variables « financières » : le résultat avant impôt et la dette à moyen ou long terme. Les résultats des estimations économétriques qui en découlent sont résumés dans le tableau ci-après.

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Tableau 13 : Résultats de l’estimation de la fonction de demande de capital avec les variables « financières » selon la nature de l’activité des entreprises du panel

Entreprises de fabrication de matériaux de construction ou BTP Autres entreprises manufacturières

Variables explicatives Paramètres t de

Student Probabilité

associée Paramètres t de Student

Probabilité associée

Capital décalé (L1 lnkm*) 0,579 5,94 0,000 0,630 5,37 0,00

Coût d’usage du capital (lncuc) -0,909 -7,80 0,000 -0,444 -2,37 0,018

Niveau de la demande réelle (lndmr*) 0,126 4,12 0,000 0,299 2,42 0,016

Coût du travail (lnwm*) 0,409 3,27 0,001 0,246 2,09 0,037

Incertitude sur la demande (lnmid) 0,006 0,12 0,901 -0,150 -1,50 0,134

Résultat avant impôt (raim*) 2,61.10-4 0,55 0,580 -1,45.10-4 -0,81 0,417

Dette à moyen ou long terme (dmltm*) 6,29.10-4 1,78 0,075 -7.20.10-6 -0,07 0,945

Constante (_cons) -0,358 -1,08 0,279 0,109 0,16 0,877 F statistic F(7,393) = 136,90 0,000 F(5,351) = 273,41 0,000

Test de Validité des instruments Chi2(27) = 17,45 0,919 Chi2(27) = 12,67 0,991

Test d’autocorrélation des résidus AR(1) Z = -4,10 0,000 Z = -3,55 0,000

Test d’autocorrélation des résidus AR(2) Z = -1,48 0,139 Z = -0,81 0,416

Source : Nos estimations 2005 (*exprimé en millions de FCFA) On remarque que, comme dans le cas de l’échantillon global, l’introduction des variables « financières » n’a pas amélioré le pouvoir explicatif du modèle. On observe une dégradation de la significativité du coefficient lié à l’incertitude sur la demande pour les entreprises manufacturières (hors BTP). Mais les coefficients liés au capital retardé, au coût du capital, au niveau de la demande et au coût unitaire du travail sont significatifs à 5% et leur valeur relative demeure sensiblement la même. Le résultat qu’il faut noter, en ce qui concerne les variables « financières », est la significativité à 10% (malgré sa valeur très faible) du coefficient lié à la dette à moyen ou long terme pour les entreprises du secteur des BTP. Ce coefficient pour les autres entreprises manufacturières et ceux liés au résultat avant impôt pour les deux types d’entreprises ne sont pas significatifs. La significativité de l’impact des dettes à moyen ou long terme pour les entreprises du secteur des BTP peut s’expliquer par la relative facilité qu’elles ont pour obtenir des prêts bancaires. En effet, leur activité ne subit pas d’incertitude sur la demande. De plus, dans le cadre de travaux précis qui leurs sont confiés, elles peuvent bénéficier de crédits bancaires car la banque est presque assurée du remboursement. Le paiement des frais des prestations liés aux travaux se fait dans la plupart des cas directement dans le compte bancaire des entreprises concernées. Encore une fois, la très bonne organisation ou coordination des activités et des procédures du secteur des BTP profite aux entreprises du secteur.

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6- IMPLICATIONS DE POLITIQUES ECONOMIQUES Après cette analyse du comportement d’investissement des entreprises béninoises, nous allons tirer les enseignements et les mesures de politiques économiques pouvant promouvoir l’investissement privé. Nos propositions permettront de relancer ou de promouvoir l’investissement des entreprises industrielles au Bénin. 6.1- Relancer l’investissement des entreprises par une maîtrise du coût d’usage du capital et une augmentation de la demande L’un des résultats auxquels notre étude a abouti est la forte sensibilité des entreprises au coût d’usage du capital. L’autre conclusion qu’on peut tirer de notre travail est qu’une augmentation de la demande a un effet positif sur l’investissement des entreprises alors qu’une grande fluctuation de cette demande n’incite pas les entreprises à investir. Les premières implications de notre étude de comportement d’investissement des entreprises privées seront donc d’alléger les coûts d’acquisition et d’utilisation de leurs équipements et de créer les conditions d’une augmentation stable de la demande.

Alléger les coûts d’acquisition et d’utilisation des équipements productifs La baisse des taux d’intérêt est une des conditions d’une baisse du coût d’usage du capital et d’une relance de l’investissement privé. En effet, les entreprises ont recours souvent aux crédits bancaires pour financer l’achat de leurs équipements de production. La baisse des taux d’intérêt entrainerait, à partir de la baisse du service de la dette qu’elle induit, une réduction du coût de revient des biens équipements. La réduction du montant du service de la dette augmente la solvabilité des entreprises car il allège la contrainte qu’il fait peser sur la trésorerie et le profit des entreprises. En effet la baisse des taux d’intérêt réduit le coût d’opportunité du capital et donc le seuil de déclenchement du processus de réalisation de l’investissement. L’entrepreneur compare le taux de rendement de l’investissement au taux d’intérêt. Un faible taux d’intérêt augmente le nombre de projet d’investissement réalisable. La première proposition que nous faisons est la réduction des taux d’intérêt notamment ceux de long terme auxquels se financent les entreprises productrices. A l’instar des crédits de campagne pour l’agriculture, nous proposons la création de crédits spécifiques pour le secteur industriel avec un taux d’intérêt relativement faible et une période de remboursement de plusieurs années. Nous proposons également, pour réduire les coûts d’acquisition des équipements de production, une exonération des droits et taxes perçus à l’entrée sur les machines, matériels et outillages destinés à la production manufacturière. Cette exonération est actuellement prévue pour les programmes agréés aux différents régimes du code des investissements. Nous pensons que cette exonération doit être liée aux secteurs d’activités et non un programme d’investissement spécifique. En effet l’agrément est soumis à des conditions comme le montant de l’investissement ce qui pénalise les petites entreprises. L’objectif devrait être de soutenir les secteurs dont les coûts sont élevés ou qui peuvent exporter leurs productions vers les marchés sous-régionaux. Nous proposons aussi d’autoriser la déduction du résultat avant impôt d’une partie des dépenses d’investissement de l’exercice. La législation fiscale du Sénégal prévoit une déduction du bénéfice de 50% du montant des investissements représentant un réinvestissement du profit antérieur dans la limite de 50% du bénéfice de l’exercice. De telles déductions fiscales permettent de réduire le coût de revient de l’achat d’équipements nouveaux.

Créer les conditions d’une augmentation stable de la demande Il est difficile de proposer une politique de promotion de l’investissement privé basé sur le soutien de la demande. En effet, si l’augmentation de la demande a un effet positif sur l’investissement, sa fluctuation erratique a un effet dépressif sur la demande. Les mesures de soutien de la demande,

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pour influencer positivement l’investissement privé, ne doivent pas être transitoires ou entrainer une augmentation des dépenses publiques. La maîtrise actuelle de l’inflation au Bénin permet de stabiliser le pouvoir d’achat des consommateurs. Il est donc utile de continuer à maîtriser l’augmentation des prix à la consommation. L’essoufflement du rythme de la croissance économique au Bénin a entraîné une stagnation des investissements privés. Une accélération de la croissance économique devrait créer l’augmentation de la demande nécessaire à l’accroissement des investissements privés. L’une des manières d’augmenter la demande qui s’adresse aux entreprises manufacturières béninoises est de créer les conditions pour qu’elles profitent de la demande potentielle existant dans les autres pays de l’UEMOA. Les activités économiques, en dehors des besoins domestiques, sont actuellement orientées vers les besoins du grand voisin nigérian. Or les relations avec ce pays sont essentiellement commerciales avec notamment la réexportation de produits importés d’Europe ou d’Asie. En outre, l’appréciation de l’Euro auquel est lié le franc CFA ne permet pas aux produits manufacturiers fabriqués au Bénin d’être compétitifs au Nigéria. Ce problème ne se pose pas avec les autres pays de l’UEMOA avec lesquels le Bénin partage le franc CFA. Les organes de promotion du secteur privé et les services des ministères du commerce et de la promotion des petites et moyennes entreprises doivent aider les entreprises manufacturières du Bénin à placer leurs produits sur les marchés sous-régionaux notamment ceux des autres pays de l’UEMOA. Mais il faut que ces entreprises soient compétitives. La compétitivité de ces entreprises passe, entre autres, par la disponibilité de services comme l’électricité, l’eau et les télécommunications. Les prix de ces services sont actuellement plus élevés que ceux pratiqués dans les autres pays de la sous-région. La fourniture de ces services est encore gérée par des entreprises publiques dont la privatisation est en cours. Les pouvoirs publics doivent veiller à ce que ces privatisations entraînent une amélioration de la qualité de ces services et une baisse des prix que devrait entraîner une augmentation des abonnés à ces services. En effet, les privatisations devront permettre, à partir des investissements des différents repreneurs, l’agrandissement de l’espace géographique dans lequel ces services sont disponibles et donc une augmentation des abonnés. Même s’il est difficile de contrôler les prix des opérateurs privés, il est possible de mettre en œuvre un tarif préférentiel pour les entreprises industrielles. En dehors de l’accompagnement nécessaire pour l’accroissement de la compétitivité des entreprises, l’organisation de foire des produits béninois dans les pays de l’UEMOA peut permettre de gagner des parts de marché dans ces pays. Le Bénin ne participe ou n’organise que des foires artisanales ou culturelles. Ce n’est qu’après les restrictions nigérianes sur leurs importations en provenance du Bénin (réexportations) et l’autorisation d’exportation des produits fabriqués au Bénin vers ce pays que les autorités béninoises ont organisé une foire industrielle au Nigeria. Il est plus que nécessaire d’organiser ces foires au Nigeria mais aussi dans les pays de l’UEMOA. Les organes de promotion du secteur privé doivent aussi aider les entrepreneurs béninois à obtenir l’agrément de l’UEMOA pour leur produit.

6.2- Promouvoir l’investissement privé par la création des conditions de financement et d’un bon environnement des affaires Nos résultats montrent que les entreprises du secteur des BTP dont le fonctionnement est « plus organisé » subissent moins d’incertitudes et bénéficient de financement pour leurs activités. Notre étude suggère donc qu’un assainissement de l’environnement des affaires et une facilitation du financement des entreprises permettent de promouvoir l’investissement privé.

Assainir l’environnement économique et juridique des affaires Pour créer un environnement porteur pour l’investissement, les pouvoirs publics doivent avoir des politiques économiques stables (et crédibles) et créer un système impartial de règlements des litiges. L’objectif est de réduire ou d’éviter les incertitudes créées, par exemple, par les changements de

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politiques fiscales et garantir un règlement équitable des éventuels litiges entre opérateurs économiques. Dans cette optique, la législation fiscale doit être stable. Les calculs de rendement net d’impôt des investissements dépendent des règles fiscales et surtout des incitations fiscales proposées. Les mesures fiscales que nous proposons ici, pour entraîner l’effet escompté, ne doivent pas être transitoires. Nous proposons la création au Bénin d’un tribunal de commerce pour connaître des différends entre entrepreneurs ou entre les entrepreneurs et les autres partenaires de l’entreprise notamment les banques. Il est indispensable pour une banque qu’un tribunal statue rapidement sur la solvabilité d’une entreprise ou décide de sa liquidation. Les structures représentatives du secteur privé et les différents organismes de promotion de ce secteur doivent être associés à la rédaction des lois et règles devant régir ce tribunal de commerce. L’indépendance et la crédibilité de ce tribunal doit être garanties par la qualité et la probité de son personnel. Ce tribunal permettra d’assainir les relations entre opérateurs économiques et surtout de garantir l’exécution des différents contrats. Actuellement c’est une chambre de la cour d’appel de Cotonou qui est saisie des différends entre opérateurs économiques. Notre proposition met l’accent sur la création d’une entité juridique spécifique avec un personnel spécialisé. Il est aussi urgent de finaliser la législation foncière car les terrains servent largement de garanties dans la mise en place des crédits bancaires. La difficulté d’établir la propriété des terrains empêchent les banques (et les institutions de microfinance) de faire valoir ces garanties en cas de défaut de paiement. Les différentes stratégies de lutte contre la corruption doivent être poursuivies et renforcées. Elles permettent aussi d’assainir l’environnement des affaires. En effet, la corruption entraîne une augmentation des charges pour les entreprises et, surtout, crée des distorsions qui défavorisent la plupart des entreprises.

Faciliter le financement des activités des entreprises industrielles Pour faciliter le financement des activités des entreprises privées, il faut commencer par accroître leur capacité d’autofinancement en diminuant le taux de l’impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux (BIC). Ce taux est de 38% au Bénin alors qu’il est de 35% au Mali, en Côte d’ivoire et au Burkina Faso. Au Togo, il est de 37% pour les entreprises industrielles et de 40% pour les entreprises commerciales. Au Sénégal, l’impôt sur les sociétés (l’équivalent de l’impôt BIC) est actuellement de 33%. Le Conseil des ministres (du gouvernement du Sénégal) du 22 juin 2005 a pris la décision, pour la promotion de l’investissement privé, de baisser le taux de l’impôt sur les sociétés qui passera à partir de 2006 de 33% à 25%. Le Bénin, pour encourager les activités industrielles, peut adopter un traitement différencié en maintenant le taux de 38% pour les entreprises commerciales mais en appliquant un taux de 35% (voire 30%) pour les entreprises industrielles. La disponibilité de financement interne qu’entraîne cette baisse de l’impôt BIC ne permettra pas de financer les investissements importants. Mais elle améliore, en cas de recours au financement bancaire, la part de fonds propres qui est nécessaire pour ce type de financement. La promotion de l’investissement privé notamment dans le secteur industriel passe aussi par la disponibilité des crédits à long terme. Il existe actuellement des institutions de micro-finance qui font des prêts à partir de fonds mis à leur disposition par les pouvoirs publics et les partenaires au développement comme la Banque Mondiale. Ces institutions ne font que des crédits de court terme pour des activités agricoles ou commerciales. Les banques malgré leur surliquidité ne font pas beaucoup de crédits à long terme parce qu’elles ont des dépôts à vue ou à court terme. Nous proposons la mise en place, par les pouvoirs publics et les partenaires au développement, de fonds de garantie ou de lignes de refinancement pour les activités industrielles. Cela permettra aux banques de faire des crédits de long terme malgré leur dépôt à vue. Les crédits à long terme que pourront accorder les banques dans ce cadre ne doivent pas dépasser un plafond égal à un pourcentage de la moyenne (sur les trois dernières années) de leur dépôt à vue et à court terme non retirée. Cette solution est préférable à un financement direct des activités industrielles par le secteur

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public. En effet les fonds prêtés sont la propriété des banques et elles doivent exercer les contrôles habituels (avant et après l’octroi des crédits) pour se faire remboursé. Le système ne servira qu’à mettre à leur disposition des fonds au cas où les déposants effectuent (plus que d’habitude) des retraits ; les dépôts étant à vue ou à court terme. L’objectif est de convertir les dépôts à vue en des crédits à long terme.

CONCLUSION Dans le but de mieux comprendre nos résultats empiriques, nous avons commencé cette étude par une présentation de la situation économique du Bénin. Cette présentation de l’évolution récente de l’économie béninoise nous a permis de constater que ce pays connaît depuis 1990 une croissance économique régulière avec un taux de croissance réelle moyen de 4,5% entre 1990 et 2004. Cette croissance n’a pas été suivie d’une trop grande augmentation du niveau des prix. Les prix à la consommation ont connu, sur la période 1999-2003, une augmentation annuelle moyenne de 2,5%. Le secteur secondaire contribue de plus en plus à la production la valeur ajoutée totale. Mais il représente moins de 15% du produit intérieur brut. Malheureusement on remarque un ralentissement de cette croissance économique et une stagnation des investissements privés. Pour appréhender les facteurs explicatifs de l’investissement privé au Bénin nous avons développé un modèle d’analyse, inspiré de Bertola (1998) du comportement d’investissement des entreprises privées. Nous avons aussi précisé la manière dont on a mesuré les différentes variables de ce modèle ainsi que la source des données qui seront utilisées pour les estimations économétriques. Les résultats de nos estimations économétriques ont permis d’identifier les déterminants de l’accumulation de capital des entreprises privées au Bénin et d’évaluer leur part respective dans l’explication du comportement d’investissement de ces entreprises. Les coûts des facteurs notamment celui de capital sont, en termes de sensibilité, les premiers facteurs explicatifs de l’investissement des entreprises privées au Bénin. L’augmentation de la demande explique aussi l’accroissement des dépenses d’investissement mais sa fluctuation erratique a un effet négatif sur l’accumulation de capital productif. En distinguant les entreprises du secteur des BTP des autres entreprises manufacturières, nous nous sommes rendu compte du fait que les entreprises du secteur des BTP ont une plus grande sensibilité aux variations du coût des facteurs. Les autres entreprises sont affectées par l’incertitude sur demande que les entreprises du secteur des BTP ne semblent pas subir. Nous avons proposé une explication des différences de l’importance de chacun de ces déterminants dans l’accumulation de capital par ces deux types d’entreprises. En tenant compte de nos résultats nos suggestions et propositions ont pour objectif : - de réduire les coûts d’acquisition, d’installation et de détention de capital productif, - de créer les conditions d’une augmentation de la demande en diminuant les facteurs pouvant

entraîner une augmentation de l’incertitude associée à cette demande, - de faciliter le financement des investissements des entreprises privées et - de promouvoir des pratiques transparentes pour un bon fonctionnement des différents marchés.

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ANNEXE : Tableau de collecte des données

N° d’identification de l’entreprise13 : ……………..

ANNEE Immobilisation Corporelles (IC)

Dotations aux amortissements (DP)

Charges de Personnel (CP)

Masse salariale (MS)

Effectif du Personnel (EP)

Chiffre d'affaires(CA)

Valeur Ajoutée (VA)

Excédent Brut d’Exploitation

(EBE) Résultat avant

Impôt (RAI) Dette à Long Terme (DLT)

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

13 Des numéros ont été attribués aux entreprises, la publication d’informations pouvant permettre l’identification des entreprises étant interdite.