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Unité de Recherche 047 de l'IRD Réseau de Recherche sur les Politiques Economiques et Pauvreté
7èmes journées scientifiques du réseau « Analyse Economique et Développement de l’AUF »
Thème des journées « Institutions, développement économique et transition »
Paris Les 7 et 8 septembre 2006
Organisées et financées conjointement par L’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF, Paris)
Le Réseau Politiques Economiques et Pauvreté (PEP Université Laval Québec) Et
IRD, Paris, DIAL
CCOOMMPPEETTIITTIIVVIITTEE,, AAVVAANNTTAAGGEESS CCOOMMPPAARRAATTIIFFSS EETT QQUUAALLIITTEE :: UUNNEE AAPPPPLLIICCAATTIIOONN SSUURR LL’’AAGGRRIICCUULLTTUURREE MMEEDDIITTEERRRRAANNEENNNNEE
JJUUIINN 22000066
NADIA BELHAJ HASSINE Faculté des Sciences Economiques et de Gestion de Nabeul, LAREQAD.
8 rue el Maamoun, 1082 Mutuelle-ville, Tunis, Tunisie Tel : 00 216 22 200 757 e-mail : [email protected]
Résumé Nous tentons à travers ce travail de fournir une analyse de la compétitivité internationale de
l’agriculture de différents pays impliqués dans le partenariat Euro-méditerranéen. L’étude
repose sur deux volets. Le premier volet, descriptif, présente une analyse des structures de
spécialisation des pays méditerranéens dans le commerce international des produits agricoles
et une étude des déterminants de la compétitivité de leurs productions. Le deuxième volet,
empirique, repose sur l’examen de l’influence des dotations en ressources hydriques des
pays méditerranéens sur leur potentiel d’exportation agricole.
Il ressort de cette étude une forte spécialisation des pays méditerranéens dans l’exportation
des fruits et des légumes ainsi qu’une importante similarité de leurs structures d’exportation.
L’analyse révèle toutefois une grande diversité dans les formes de compétitivité de ces pays et
montre un effet prépondérant de la qualité dans l’échange international des produits
agricoles. Il apparaît à travers l’analyse empirique une forte spécialisation des pays
méditerranéens dans l’exportation des cultures intensives en eau. Les pays souffrant d’un
problème de rareté de leurs ressources pourraient être pénalisés par la libéralisation
agricole.
Mots clefs : Compétitivité, Avantages Comparatifs Révélés, Ressources en eau, Qualité,
Libéralisation agricole.
Abstract This study aims to analyze the competitiveness of the agricultural sector in different countries
involved in the Euro-Mediterranean partnership. The study uses two different approaches.
The first includes a descriptive analysis to investigate the patterns of trade specialization in
these countries and to examine the determinants of the competitiveness of their farming
exports. The second approach uses an empirical model to assess the influence of water
resources endowments on the Mediterranean agricultural export potentials.
The results show a strong specialization of the Mediterranean countries in the export of fruits
and vegetables as well as an important similarity of their agricultural export structure. The
analysis shows a high diversity in the sources of agricultural trade performances for the
concerned countries and reveals a notable role of quality in the farming products exchange.
3
It appears from the empirical survey a strong specialization of the Mediterranean countries in
the export of intensive water crops. Countries enduring problems of water resources scarcity
could be penalized by the agricultural liberalization.
Key Words: Competitiveness, Revealed Comparative Advantage, Water resources, Quality,
Agricultural Liberalization.
JEL Codes: C23, F10, F12, L15, Q17, Q25.
4
I - INTRODUCTION Le projet d’association Euro-méditerranéen lancé durant la conférence de Barcelone en
Novembre 1995, prévoit la création d’une zone de libre échange entre l’Union Européenne et
les pays du Sud de la méditerranée à l’horizon 2010. La libéralisation commerciale,
actuellement limitée aux produits manufacturés, devrait englober dans un avenir proche les
produits agricoles et agroalimentaires1. Le Maroc, la Tunisie, la Turquie, l’Egypte, Israël, le
Liban, la Jordanie et la Syrie ont signé leur adhésion au projet d’association Euro-
méditerranéen. L’agriculture, considérée comme un secteur stratégique pour ces pays, va subir
les conséquences de cette politique.
Les pays sud méditerranéens présentent un potentiel important dans le commerce agricole avec
l’Union Européenne, leurs productions jouissent d’un avantage comparatif lié aux facteurs
climatiques favorables, aux coûts de production compétitifs et à la proximité de plusieurs de ces
pays des marchés Européens. La libéralisation agricole offre des perspectives profitables pour
les exportations agricoles méditerranéennes qui pourraient bénéficier d’un meilleur accès au
marché mondial du fait de la réduction de la protection douanière. Différentes modélisations
prévoient un accroissement des exportations agricoles, notamment des fruits et légumes, des
pays tiers méditerranéens vers l’Union Européenne (Chemengui et Dessus, 1999 ; Corrons,
2000 ; Jabarin, 2001 ; Muaz, 2004). Les retombées positives du libre échange sont toutefois
souvent envisagées comme résultant principalement du simple fait de la réduction des barrières
douanières. Plusieurs éléments liés aux potentialités de production, aux structures de
commercialisation, à l’image des produits exportés et aux exigences de qualité vont
conditionner les possibilités de pénétration du marché européen et poussent à nuancer les
prévisions optimistes de la libéralisation agricole.
Par ailleurs, les pays du Sud de la méditerranée partagent, plusieurs traits communs liés à la
ressemblance de leurs conditions climatiques et de leurs pratiques culturales et font face aux
mêmes problèmes de rareté de certaines ressources telles que l’eau. La grande similitude de
leurs conditions de production et de leurs types de cultures a entraîné une très forte concurrence
entre leurs exportations agricoles sur le marché international. Les productions Sud
1 Des négociations visant une libéralisation progressive des échanges agricoles sont en cours (Corrons, 2000 ; Muaz, 2004).
5
méditerranéennes présentent, d'un autre côté, d’importantes similarités avec les types de
cultures de certains pays de l’Union Européenne. La libéralisation agricole risque, par ce fait,
d’intensifier la concurrence entre les pays du Sud et du Nord de la méditerranée et d’aggraver
la rivalité agricole qui les oppose déjà.
Malgré l’importance de cette rivalité, les potentialités de production, les dotations en ressources
et les règles de spécialisation dans les pays méditerranéens ne sont pas entièrement égales. Par
ailleurs, même si les pays méditerranéens jouissent d’un avantage comparatif pour des produits
similaires, ces pays offrent généralement des biens de qualités différentes. Cette différence
conditionne leurs rapports de concurrence à l’échelle internationale2 et leur aptitude à profiter
des opportunités offertes par la libéralisation agricole.
Nous essayons à travers cette recherche d’évaluer la compétitivité de l’agriculture des pays
méditerranéens impliqués dans le partenariat Euro-méditerranéen et d’appréhender leur
capacité de rivaliser sur le marché mondial. L’analyse s’articule autour de deux volets
essentiels. Dans un premier volet nous cherchons à examiner les structures de spécialisation de
ces pays dans le commerce international des produits agricoles et à évaluer l’intensité de leur
compétitivité qualité. Le deuxième volet porte sur l’analyse de l’influence des dotations en
ressources hydriques des économies méditerranéennes sur la structure de leurs exportations. Les
résultats de l’étude sont destinés à fournir quelques éléments d’analyse permettant d’apprécier
l’aptitude de ces pays à profiter des opportunités offertes par la libéralisation agricole.
L’évaluation de la compétitivité et l’investigation de ses déterminants ont reçu une attention
particulière dans la littérature récente. Généralement définie comme la capacité d’une firme ou
d’une industrie à améliorer sa part de marché (Pitts and Lagnevik,1998 ; Drescher and Maurer,
1999), la compétitivité a été mesurée dans les analyses empiriques en utilisant différentes
approches basées sur les théories microéconomique, macroéconomique et de commerce
international (Wziatek-Kubiac, 2005). L’approche privilégiée dans les études récentes3 repose
sur la mesure de la compétitivité en utilisant le concept de l’avantage comparatif révélé (ACR)
introduit par Balassa (1965). Malgré la popularité de cette approche, l’utilisation de l’ACR pour
évaluer la compétitivité est controversée dans la littérature économique du fait que cette mesure
reflète l’allocation des ressources vers les produits dont l’échange international est
2 Valceschini et Nicolas, 1995. 3 (Landesmann, 1996 ; Tefertiller and Ward, 1995 ; Ferto and Hubbard, 2001 ; Yilmaz, 2003 ; Polymeros, Tsakiridou and Mattas, 2005 ; Utkulu and Seymen, 2004 ; Lyford and Welch, 2004 ; Banterle, 2005).
6
économiquement avantageux et reste plus appropriée pour mesurer la spécialisation
internationale (Warr, 1984 ; Porter, 1986 ; Dobrinsky, 1995 ; Kannapiran and Fleming, 1999).
Par ailleurs, même si l’indicateur d’ACR éclaire sur le niveau et l’évolution de la compétitivité
des pays, il ne permet pas d’identifier les facteurs contribuant au maintien de la position
concurrentielle sur le marché international.
L’investigation des déterminants de la compétitivité a fait l’objet de nombreux travaux
empiriques. Les études récentes ont montré que même si les prix relatifs ou les dotations
factorielles restent la principale force motrice de l’échange international, la différenciation des
biens par leur qualité exerce un effet significatif sur les flux commerciaux (Crozet et Erkel-
Rousse, 2000 ; Erkel-Rousse et le Gallo, 2002 ; Hallak, 2003 ; Khandelwal, 2005 ; Hallak and
Schott, 2005).
Nous avons essayé d’étudier les profils de spécialisation internationale des pays méditerranéens
concernés par l’accord d’association en utilisant l’indicateur d’ACR. L’évaluation des
indicateurs de similarité entre ces pays nous a permis d’identifier les produits confrontant une
vive concurrence sur la rive méditerranéenne. La similarité des exportations agricoles
méditerranéennes ne témoigne toutefois que d’une ressemblance dans les catégories de produits
exportés et ne permet pas de saisir la différenciation dans la qualité des biens offerts. Pour
appréhender le rôle de la qualité dans les performances commerciales des pays concernés par
l’étude nous avons dressé une typologie des exportations agricoles de ces pays en fonction de
leur compétitivité qualité.
Le deuxième volet de notre étude est consacré à l’évaluation de l’influence de la disponibilité
des ressources en eau sur les structures de spécialisation dans les pays méditerranéens. Plusieurs
études ont démontré une forte spécialisation de ces pays dans l’exportation des cultures
fortement intensives en eau (Corrons, 2000 ; Jabarin, 2001 ; Muaz, 2004). L’eau représente donc
un facteur stratégique dans le développement de la capacité productive et l’amélioration du
potentiel d’exportation agricole des pays sud méditerranéens. Malgré la rareté des ressources
hydriques qui caractérise une grande majorité de ces économies, certaines régions comme la
Turquie, l’Egypte ou le Maroc restent relativement mieux dotées que d’autres. L’eau
interviendrait comme un facteur de discrimination entre les différents pays et la libéralisation
agricole pourrait pénaliser les pays possédant des ressources limitées.
Selon la théorie d’Hecksher-Ohlin, l’échange international des biens est déterminé par la
différence dans les dotations factorielles entre les nations et la disparité de l’intensité de
7
l’utilisation des facteurs entre les différents produits. En situation de libre échange les pays
tendront à exporter les produits contenant intensivement les facteurs dont ils disposent en
abondance. Si cette théorie est validée dans le contexte de cette étude, la libéralisation agricole
pourrait favoriser le développement et l’exportation des cultures intensives en eau dans les pays
disposants de ressources hydriques relativement abondantes, alors que les pays souffrant d’un
problème de rareté de l’eau seraient emmenés à réorienter leurs productions vers les cultures
économes en eau.
Afin d’évaluer l’influence de la disponibilité des ressources en eau sur les structures de
spécialisation dans chaque pays et d’appréhender l’effet de la libéralisation sur le
développement futur des productions agricoles, notre analyse porte une attention particulière à
l’investigation de la relation entre les besoins en eau des principaux produits d’exportation, la
dotation en eau et les niveaux de spécialisation internationale pour chacun des pays concernés
par l’analyse.
Notre étude a porté sur un groupe de pays sud méditerranéens concernés par une politique de
rapprochement avec l’Union Européenne, comme la Tunisie, le Maroc, la Turquie, l’Egypte, la
Jordanie, la Syrie, le Liban et Israël et certains pays de l’Union Européenne présentant un fort
potentiel en matière d’exportations agricoles tels que la France, l’Espagne, l’Italie, la Grèce, le
Portugal, les Royaumes Unis et les Pays Bas.
Nous avons mesuré les indices d’avantage comparatif révélé pour 28 des principaux produits
agricoles et agroalimentaires exportés par les pays inclus dans ce panel. Nous avons ensuite
estimé la relation entre les avantages comparatifs révélés, l’intensité de l’utilisation de l’eau par
ces produits et la disponibilité des ressources en eau pour chaque pays en utilisant un modèle
économétrique.
Ce travail est organisé en cinq sections. Nous présentons dans la deuxième section une analyse
des profils de spécialisation des pays inclus dans le panel. Dans la troisième nous dressons une
typologie du commerce agricole des pays méditerranéens en fonction des formes de leurs
compétitivités. La quatrième section est consacrée à l’étude de l’influence de la disponibilité
des ressources en eau sur les structures de spécialisation dans chaque pays. La cinquième
section résume les principales conclusions de l’étude.
8
II- AVANTAGES COMPARATIFS ET ANALYSE DES PROFILS DE
SPECIALISATION
Dans cette section nous cherchons à analyser la spécialisation internationale des différents pays
inclus dans l’échantillon. Nous commençons par déterminer les principaux produits pour
lesquels chacun de ces pays dispose d’un avantage comparatif et nous tentons d’évaluer
l’importance de la concurrence entre ces pays à travers l’analyse de la similarité de leurs profils
de spécialisation.
L’avantage comparatif est considéré par beaucoup d’économistes comme le déterminant clé de
l’échange international. Ce concept repose, à la base, sur l’existence d’une différence entre les
coûts comparés dans plusieurs pays, chacun de ces pays trouvant l’avantage à se spécialiser et
à exporter les biens pour lesquels il dispose du plus fort avantage comparé et à importer les
autres biens de ses partenaires (Lassurdie-Duchêne et Ünal-Kezenci, 2002). Il est toutefois
difficile de mesurer directement l’avantage comparatif. Un grand nombre d’études empiriques,
se réfère à des indicateurs d’ « avantages comparatifs révélés » pour mesurer de la spécialisation
internationale des pays.
La notion d’avantage comparatif révélé (ACR) a été introduite par B. Balassa en 1965, qui
stipule que les échanges internationaux des biens reflètent les différences de coûts entre les
pays et révèlent par conséquent les avantages comparatifs de ces pays. Les observations sur les
performances commerciales permettent par conséquent de mesurer les avantages comparatifs
révélés, plus la performance relative d’un pays est importante dans le commerce d’un bien
donné et plus son avantage comparatif dans la production de ce bien est important (Balassa,
1977).
Il existe différentes formules pour mesurer les indices d’avantage comparatif révélé, la plus
utilisées dans les travaux empiriques consiste à comparer la structure d’exportation de chaque
pays à celle d’une zone de référence, en l’occurrence le monde, à partir de la formule suivante :
(1)
)TX()(XTX(i)
)(X),(ACR
k
k
k
ww
iwi =
où ACRk (i,w) : représente l’avantage comparatif révélé, du pays i par rapport au reste du
monde, pour le produit k.
9
Xk (i) : exportations du bien k par le pays i au monde w.
Xk (w) : exportations du bien k par le monde.
TX (i) : total des exportations du pays i au monde.
TX (w) : total des exportations mondiales.
Un indice supérieur à 1 pour un pays donné déterminerait un avantage comparatif de ce pays
sur le commerce du produit en question. Ceci indique que la part des exportations de ce produit
dans les exportations totales du pays considéré est supérieure à la moyenne mondiale.
Nous avons calculé les indices d’avantage comparatif révélé pour les principaux produits
agricoles et agroalimentaires exportés par les pays inclus dans le panel. La sélection des
catégories de produits, à considérer dans cette analyse, a été réalisée en fonction de l’importance
que chacune d’elle représente sur le total des exportations agricoles des économies du sud de la
méditerranée4. Notre analyse a porté sur les produits suivants : Huile d’olives, Vins, Jus de
fruits, Dattes, Oranges, Citrons et Limes, Pommes, Abricots, Poires, Pêches et Nectarines,
Raisins, Figues, Pastèques et Melons, autres fruits5, Pommes de terre, Tomates, Poivrons, autres
légumes6, Amandes, Noisettes, Légumineuses sèches, Blé, Maïs, Orge, Riz, Crustacés,
Mollusques et Poissons et ce pour la période de 1970 à 2005.
Les résultats de l’analyse sont exposés dans le tableau suivant :
4 Nous nous sommes basés sur le travail de (Corrons, 2000) pour la sélection des produits. 5 Prunes, cerises… 6 Carottes, petits pois, artichauts…
10
TABLEAU I : AVANTAGE COMPARATIF REVELE (1970-2005)
H.Olives Vin Jus fruits Dattes Pommes Abricots Poires Pêches Raisins Figues A.Fruits Oranges Citrons Amandes Noisettes Espagne 30,1 7,0 1.80 0,15 0,44 16,2 3,04 10,9 2,88 4,60 8,48 29,1 19,9 2.40 0.40 France 0,5 7,3 0.35 1,79 3,64 4,67 0,93 1,73 0,20 0,61 1,12 0,20 0,11 0.05 1.98 Grèce 56,6 3,12 1.42 0,00 1,16 35,1 0,34 23,0 22,9 13,5 0,40 12,4 20,4 0.81 0.68 Italie 4,4 4,15 1.12 0,05 2,85 2,49 2,78 9,34 5,33 3,07 1,98 0,69 3,40 0.31 4.72 Pays-Bas 0,02 0,08 2.20 0,08 1,93 0,55 3,43 0,52 1,37 3,75 1,36 0,68 0,89 0.16 0.36 Portugal 6,8 17,0 0.27 0,01 0,23 0,02 2,59 0,09 0,04 0,05 0,66 0,05 0,09 2.25 0.11 Roy.Unis 0,22 0,20 0.13 0,12 0,12 0,02 0,05 0,02 0,06 0,12 0,08 0,08 0,06 0.07 0.10 Israël 0,34 0,30 5.88 6,59 0,01 0,01 0,00 0,06 1,94 0,00 2,01 21,6 4,66 0.11 0.10 Jordanie 11,1 0,00 0.37 5,32 1,07 2,10 0,12 1,50 1,43 18,3 0,65 28,9 16,6 0.76 0.65 Liban 3,16 0,83 1.43 0,72 35,8 48,9 13,4 5,8 14,6 22,3 32,7 28,8 24,4 1.12 2.12 Maroc 12,7 1,48 3.05 0,97 0,01 1,91 0,32 1,76 0,20 1,00 0,04 74,3 0,45 0.49 0.04 Syrie 3,81 0,00 0.32 0,49 1,88 41,2 9,2 3,89 9,4 1,90 23,0 2,88 0,37 120.3 0.28 Tunisie 162,7 2,9 0.03 151,6 0,00 2,44 0,12 0,04 0,01 0,00 0,04 4,89 0,29 4.96 0.40 Turquie 17,0 0,13 2.11 0,14 3,39 1,49 0,76 0,92 1,82 64,8 2,00 5,53 32,3 0.78 9.86 Égypte 0,05 0,09 0.60 3,39 0,01 0,35 0,00 0,48 0,41 0,48 0,65 18,4 2,37 0.02 0.01
Pas.-Mel. PDT Tomates Poivrons A.Légumes Lég.Secs Blé Maïs Orge Riz Crustacés Mollusques Poissons Espagne 14,6 2,42 12,6 15,4 4,40 0.19 0.56 0.20 1.30 1.15 0,25 0,18 2,21 France 0,22 1,71 0,27 0,26 1,64 1.69 2.76 2.72 4.03 0.14 0,20 0,06 0,33 Grèce 36,8 3,91 0,27 1,66 0,55 0.20 3.36 1.46 0.00 1.41 0,28 0,32 0,96 Italie 0,52 2,06 0,43 0,24 3,89 0.05 0.35 0.06 0.00 1.33 0,04 0,05 0,15 Pays-Bas 0,00 7,56 8,61 9,31 4,05 0.63 0.26 0.09 0.47 0.35 0,31 0,16 0,85 Portugal 0,17 0,75 0,15 0,10 0,45 0.39 0.12 0.04 0.04 0.27 0,41 0,42 2,51 Roy.Unis 1,82 0,76 0,09 0,01 0,36 0.49 0.68 0.01 1.60 0.09 0,45 0,09 0,44 Israël 0,21 1,81 1,16 3,11 2,53 0.02 0.00 0.01 0.00 0.01 0,01 0,08 0,07 Jordanie 27,1 3,41 49,6 12,4 0,14 1.51 0.19 0.01 0.19 0.40 0,00 0,01 0,00 Liban 1,65 45,6 3,36 2,34 2,83 3.70 0.14 0.27 0.03 0.73 0,09 0,07 0,00 Maroc 0,83 15,0 35,6 2,81 0,04 2.45 0.48 0.00 0.20 0.00 1,84 6,7 9,9 Syrie 22,9 10,2 17,0 0,00 0,00 21.5 2.91 0.00 6.71 0.01 0,06 0,00 0,00 Tunisie 0,98 1,02 0,16 0,14 0,00 0.19 0.75 0.13 0.45 0.00 4,3 2,8 1,9 Turquie 3,38 2,77 3,12 3,96 1,34 18.1 2.94 0.15 3.69 0.04 0,63 0,39 0,63 Égypte 4,18 24,2 1,80 0,21 0,05 3.19 0.06 0.08 0.01 12.9 0,04 0,09 0,09
Source : calculs à partir des données de la FAOstat
11
Le tableau I montre que les pays du sud de la méditerranée disposent d’un important avantage
comparatif dans l’exportation des fruits et des légumes frais. La majorité des ces pays, hormis la
Tunisie, présentent des moyennes supérieures à 1 pour la plupart de ces produits et des régions
comme le Liban, la Jordanie et la Syrie se distinguent par des degrés de spécialisation
remarquables. Parmi les pays de l’Union Européenne, l’Espagne, la Grèce et l’Italie dans une
moindre mesure, présentent également des performances notables dans le commerce des fruits et
des légumes frais. La Tunisie, à son tour, montre des résultats exceptionnels dans l’exportation
de l’huile d’olives et des dattes. Ses performances dans le commerce du vin et des produits de la
mer sont également appréciables. Soulignons enfin les fortes capacités exportatrices de la Turquie
et de la Syrie pour le blé et l’orge et de l’Egypte pour le riz, uniques pays dans la région Sud
méditerranéenne à disposer d’un avantage comparatif dans le commerce de ces produits.
Afin d’évaluer l’importance de la rivalité entre les pays sud méditérranéens et certains pays de
l’Union Européenne dans le commerce international des produits agricoles, nous avons tenté
d’analyser la similarité des structures d’exportations agricoles de ces pays.
Nous nous sommes basés sur deux approches différentes : la similarité des profils d’exportations
et la corrélation des indices d’ACR. La première approche consiste à mesurer les coefficients de
similarité des profils d’exportations à partir de l’évaluation de la proportion des exportations,
d’un pays donné, équivalente aux exportations de ses concurrents dans la même catégorie de
produits7. L’expression de l’indicateur de similarité est donnée par la formule suivante (Finger
and Kreinin, 1979):
(2) [ ]∑=i
ii bXaXabS 100*)(),(min)(
où )(aX i représente la part du produit i dans les exportations du pays a et )(bX i la part du
produit i dans les exportations du pays b. Le coefficient )(abS varie entre 0 et 100, une valeur
proche de 0 indique une dissimilarité totale entre les exportations des pays en question et une
valeur proche de 100 montre des exportations complètement identiques. Notons toutefois que ce
coefficient est sensible au niveau de désagrégation des données, plus les données de l’analyse
sont désagrégées et plus petite sera la valeur du coefficient.
Les résultats de l’estimation des coefficients de similarités sont résumés dans le tableau II.
7 Cette approche a été utilisée par (Yilmaz, 2003) pour comparer les profils de spécialisation de la Turquie à ceux de certains pays candidats à l’entrée dans l’UE.
12
TABLEAU II : EVALUATION DES COEFFICIENTS DE SIMILARITE DES PRINCIPALES EXPORTATIONS AGRICOLES ET AGROALIMENTAIRES
Esp. Fr. Grèce Italie P-Bas Port. R-Unis Israël Jord. Lib. Mar. Syrie Tun. Tur.
Fr. 44.4 Grèce 83.7 43.0 Italie 80.7 56.4 79.0 P-Bas 82.0 35.6 34.9 64.6 Port. 49.8 63.1 37.8 55.4 42.9 R-Unis 39.7 54.1 80.5 31.5 43.5 51.6 Israël 66.9 25.9 61.4 58.2 77.4 23.4 21.5 Jord. 69.3 26.3 64.2 59.7 78.4 24.5 23.2 94.1 Liban 73.1 29.5 47.1 64.4 77.4 29.4 23.4 92.3 93.3 Maroc 54.5 32.3 70.6 45.9 60.2 50.8 63.5 41.1 42.0 41.3 Syrie 70.2 35.2 29.1 61.9 78.1 24.3 31.7 84.6 88.8 87.7 40.9 Tun. 43.3 31.5 90.1 34.9 42.0 48.0 53.3 21.0 21.8 23.4 44.4 24.3 Tur. 73.5 38.6 72.5 66.0 82.4 28.3 34.3 83.9 85.6 85.6 45.0 94.1 28.4 Égyp. 69.2 26.8 63.4 63.6 70.2 24.5 23.2 67.8 69.0 67.7 42.1 67.1 21.6 69.5
Source : calculs à partir des données de la FAOstat Malgré la forte désagrégation des données, l’analyse révèle une importante similarité dans les
structures d’exportations agricoles et agroalimentaires des pays du sud de la méditerranée. Le
Liban, la Jordanie, Israël, la Syrie, la Turquie et l’Egypte, se distinguent par une forte
ressemblance de leurs profils d’exportations. Dans les pays de l’UE, l’Espagne, la Grèce, l’Italie,
les Pays bas et le Portugal dans une moindre mesure, présentent également une forte
ressemblance de leurs exportations agricoles. Il ressort de l’analyse une certaine similitude entre
les exportations agricoles des pays du Nord et du Sud de la méditerranée. Les résultats montrent
une importante ressemblance des structures d’exportations de la Tunisie et de la Grèce.
L’Espagne, la Turquie, le Liban, la Syrie et la Jordanie se distinguent également par une forte
similarité de leurs profils d’exportations.
Afin d’étayer notre analyse, nous avons essayé d’évaluer la corrélation entre les indices d’ACR8
des différents pays inclus dans l’échantillon :
8 Différentes analyses ont tenté d’étudier la similarité des profils d’exportations des pays tiers méditerranéens en se basant sur la corrélation des indices d’ACR (Havrylyshyn, 1997 ; Ghoneim, 2000 ; Leishman, Menkhaus and Wipple, 2003).
13
TABLEAU III : COEFFICIENTS DE CORRELATION ENTRE LES INDICES D’ACR Esp. Fr. Grèce Italie P-Bas Port. R-Unis Israël Jord. Lib. Mar. Syrie Tun. Tur. Fr. 0.17 Grèce 0.86 0.27 Italie 0.67 0.20 0.66 P-Bas 0.12 -0.13 -0.19 -0.09 Port. 0.34 0.63 0.24 0.76 -0.17 R-Unis 0.13 0.03 0.06 -0.35 -0.10 -0.29 Israël 0.17 -0.09 0.21 0.05 0.89 -0.05 -0.12 Jord. 0.47 -0.26 0.36 -0.10 -0.04 -0.16 0.59 0.31 Liban 0.50 -0.12 0.43 0.50 0.56 0.24 -0.20 0.67 0.42 Maroc 0.15 -0.40 0.19 0.10 0.37 0.01 -0.25 0.28 0.16 0.56 Syrie 0.35 -0.15 0.26 -0.01 -0.02 -0.09 0.45 0.38 0.48 0.37 0.26 Tun. 0.74 -0.21 0.78 0.71 -0.18 0.29 -0.23 0.10 -0.07 0.33 0.18 0.18 Tur. 0.43 -0.13 0.50 0.34 0.42 0.00 0.19 0.52 0.38 0.61 0.15 0.52 0.36 Égyp. 0.11 -0.29 0.27 -0.04 0.07 -0.19 -0.03 0.18 0.19 0.06 0.20 0.26 0.14 0.27
Source : calculs à partir des données de la FAOstat Les résultats du tableau III confirment l’importante similarité des structures d’exportations du
Liban, d’Israël, de la Turquie, de la Jordanie et de la Syrie d’une part, et de la Grèce, de l’Italie et
de l’Espagne d’autre part. L’analyse de la corrélation des indices d’ACR montre également une
certaine similarité entre les profils de spécialisation agricoles de certains pays de l’UE et des pays
sud méditerranéens. L’Espagne, la Tunisie, le Liban, la Jordanie et la Turquie semblent bénéficier
d’importants avantages comparatifs pour des produits similaires. La Grèce et l’Italie semblent
également présenter de fortes ressemblances avec la Tunisie et le Liban dans leurs exportations
agricoles.
Il ressort de cette analyse une importante similarité dans les structures des exportations agricoles
des pays du Sud et du Nord de la méditerranée. Une forte concurrence entre la Jordanie, la Syrie,
la Turquie, le Liban et Israël dans l’exportation des fruits et des légumes frais est révélée par
l’analyse. Le Maroc, la Turquie et l’Egypte dans une moindre mesure, semblent rivaliser dans
l’exportation de certains produits frais comme les pommes de terre, les agrumes et les tomates, et
dans le commerce des légumineuses sèches et des jus de fruits. Certains pays de l’Union
Européenne comme l’Espagne, la Grèce et l’Italie présentent également quelques ressemblances
avec les pays sud méditerranéens. La Grèce, l’Espagne et l’Italie concurrencent fortement la
Tunisie dans l’exportation de l’Huile d’Olives. Ces pays rivalisent également avec la Jordanie, le
Liban, la Turquie et dans une moindre mesure la Syrie et l’Egypte dans la commercialisation des
fruits et légumes frais. Notons enfin une certaine similitude entre L’Espagne et le Maroc du fait
de la forte spécialisation de ces deux pays dans l’exportation des agrumes et des tomates et à un
degré plus faible des produits de la mer.
14
III- COMPETITIVITE QUALITE DES EXPORTATIONS AGRICOLES
MEDITERRANEENNES
L’analyse des déterminants de la compétitivité a fait l’objet de nombreux travaux récents. Deux
démarches ont été notamment utilisées dans la littérature : la première repose sur l’estimation
économétrique d’une équation de parts de marché et la deuxième consiste à dresser une typologie
des flux commerciaux à partir d’une analyse croisée des indicateurs de parts de marché relatives
et des prix relatifs. Notre investigation du rôle de la qualité dans la compétitivité des pays
méditerranéens dans le secteur agricole repose sur cette deuxième approche.
L'étude du rôle de la compétitivité qualité à travers la classification des échanges internationaux
de biens a été proposée par K. Aiginger (1995, 1997). L’approche développée par Aiginger
utilise les valeurs unitaires et les soldes commerciaux en termes de quantités pour étudier la
position compétitive des pays en fonction de leur avantage prix et avantage qualité. Malgré sa
simplicité, cette méthode ne tient pas compte des prix et des performances des pays concurrents.
Erkel-Rousse et le Gallo (2002) ont adopté une méthodologie similaire pour dresser une
typologie des flux commerciaux de douze pays de l’OCDE selon leurs performances en terme de
compétitivité qualité et de compétitivité prix, à travers la comparaison des valeurs unitaires et des
parts de marché de chaque pays à la moyenne de ses principaux concurrents. La principale
insuffisance de cette approche réside dans le fait qu’elle omet les inégalités dans les possibilités
d’accès des différents pays au marché international. Par ailleurs, une analyse basée sur la
comparaison des soldes commerciaux pourrait s’avérer plus pertinente qu’une simple
comparaison des parts de marché à l’exportation.
Dans cette section nous avons développé une méthodologie similaire à celle proposée par Erkel-
Rousse et le Gallo (2002) pour opérer une classification des exportations agricoles des pays du
Sud de la méditerranée et de certains pays de l’Union Européenne en terme de leurs avantages
prix et qualité. Afin de prendre en considération l’effet des différences dans les possibilités
d’accès au marché international induit par les coûts de transport, les barrières tarifaires imposées
aux exportations agricoles des pays non communautaires et les concessions préférentielles
accordées à certains pays méditerranéens, nous avons augmenté les prix à l’exportation par un
tarif moyen. Ce tarif comprend les différentes taxes douanières imposées aux exportations
agricoles ainsi que et les coûts de transport.
Le calcul d’un tarif douanier moyen pour les produits agricoles est particulièrement difficile du
fait de la multiplicité des taux spécifiques, ad valorem, taux minimums et maximums imposés par
15
la PAC 9. Corrons (2000) a développé une approche permettant d’agréger les différentes taxes en
un tarif douanier équivalent10. Sa méthodologie prend en compte la saisonnalité de la tarification
et les avantages préférentiels concédés par l’UE et a permis de déterminer un tarif douanier
moyen pour différents produits agricoles et différents pays exportateurs11. Nous nous sommes
basés sur cette approche pour déterminer un tarif douanier moyen pour les divers produits inclus
dans l’analyse, auquel nous avons rajouté les coûts de transport12.
L’analyse de la segmentation des performances commerciales en terme compétitivité prix et
compétitivité qualité repose sur le principe suivant : Considérons un produit k et un pays i, deux
configurations favorables sont envisageables pour le pays i. Ce pays est un exportateur net du
produit k soit grâce à sa capacité de vendre ce produit à des prix suffisamment compétitifs, ou
d’offrir des variétés de ce produit qui soient de meilleure qualité que ceux de ses concurrents ce
qui lui permet d’écouler ses exportations à des prix plus élevés tant que leur rapport qualité/prix
reste attractif.
Il existe également deux configurations défavorables pour le pays i: ce pays est un importateur
net du produits k soit parce que ses exportateurs proposent le produit k à des prix trop élevés par
rapport à sa qualité et aux prix proposés par les pays concurrents, soit ce pays souffre de
problèmes structurels entravant ses possibilités d’accès au marché international malgré ses prix
compétitifs. Ce raisonnement conduit à la définition de quatre cas possibles pour les exportations
du produit k par le pays i : une bonne compétitivité prix, une bonne compétitivité qualité, une
faible compétitivité prix et des problèmes structurels.
Ces quatre cas sont résumés par les résultats de l’intersection de deux critères :
• Un critère prix qui consiste à comparer les termes de l’échange du pays i pour le
produit k (TEki) à la moyenne des termes de l’échange de ses principaux concurrents
( k.TE ) ;
• Un critère performance selon lequel la performance à l’exportation du pays i est jugée
bonne ou médiocre selon que son avantage commercial, relatif à celui de ses principaux
9 Cette difficulté a été soulevée par différents travaux empiriques portant sur l’analyse des exportations agricoles (Tangerman, 2001 ; Bureau et Salvatici, 2002). 10 Désigné par « tarif fantôme ». 11 Bureau et Salvatici (2002) ont également développé une approche permettant de déterminer une mesure agrégée des différents tarifs douanier TRI, la méthode de Corrons est toutefois plus appropriée pour les besoins de notre analyse. 12 Que nous avons approximés par les distances géographiques moyennes.
16
concurrents, sur le marché international du produit k (PMki) est supérieur ou inférieur à
son avantage commercial relatif13 moyen .iPM .
TEki < k.TE TEki > k.TE
PMki < .iPM S
Problèmes Structurels
M
Faible compétitivité prix
PMki > .iPM P
Bonne compétitivité prix
Q
Bonne compétitivité qualité
Les termes de l’échange pour chaque produit sont déterminés par le rapport des prix à
l’exportation et des prix à l’importation. La moyenne des termes de l’échange k.TE est définie
par :
∏∈
=''
aki'k.
ki'TETEIi
où I’ représente l’ensemble des pays concurrents au pays i et aki’ la part de marché relative du
pays i’ pour le produit k.
L’avantage commercial relatif du pays i sur le marché du bien k et son avantage commercial
relatif moyen sont définis par : ⎟⎠⎞⎜
⎝⎛
⎟⎠⎞⎜
⎝⎛
=
kI'ki
kI'ki
ki
MM
XX
PM et ⎟⎠⎞⎜
⎝⎛
⎟⎠⎞⎜
⎝⎛
=
.I'.i
.I'.i
.i
MM
XX
PM
Avec kiX et .iX les exportations du produit k et les exportations totales du pays i, kI'X et
.I'X les exportations des principaux concurrents du pays i, et Met M ,M ,M .I'kI'.iki les
importations.
Afin d’éliminer les biais résultant des effets climatiques sur les flux commerciaux d’une année
donnée, nous avons lissé les différentes valeurs sur trois ans14 .
L’analyse à porté sur les principaux produits agricoles et agroalimentaires exposés dans la
section précédente. Les résultats sont résumés dans le tableau IV :
13 Nous nous sommes basés sur l’indicateur de l’avantage commercial relatif défini par Voltrah (1991). 14Nous avons affecté les pondérations 0.3, 0.4 et 0.3 aux différentes années pour capter un effet structurel (Erkel-Rousse et le Gallo, 2002).
17
TABLEAU IV : PERFORMANCES COMMERCIALES SUR LE MARCHE EXTERIEUR Esp. Fr. Gr. It. P-B Port. R-Uni Isr. Jor. Lib. Mar. Syr. Tun. Turq. Égyp.FRUITS P Q P P M M M Q M P Q Q Q Q M Abricots P Q P M M M M M Q P Q Q Q Q M Dattes S S S S S S S Q M M M M Q M P Figues P M Q P M S S M P P Q P M Q M Pêches Q M P P M M M Q Q P Q Q Q Q Q Poires P S S Q Q Q S M M P Q Q P Q M Pommes S Q P P S S S M M Q M Q M Q M Prunes P P P P M M M Q Q S M Q Q Q S Raisins Q M Q P M M M Q M Q Q Q Q Q Q Prunes P P P P M M M Q Q S M Q Q Q S Maraîchages Q S P M P M M Q Q M P M Q P P Past. et Mel. P M P M M M M Q Q M Q M P Q P Poivrons Q S Q S P S M Q Q S P M Q Q P Pom. de Terre M P S M Q M S P M Q P M S P P Tomates Q S S S P M S Q P M P Q Q P P A. Légumes Q M Q P P M M Q Q M Q Q Q P P J. FRUITS P M S Q M S M Q M P M M M P M F. A COQUE M M S M P S M M M S M Q M Q M
Amande Q S S S S P S S S M S P P M M Noisettes M P S Q M M M M M S M M M Q M AGRUMES Q S P S S S S P Q P P Q P Q P Citrons P S S S S M S P Q P Q M P Q P Oranges Q S P S S S S P M Q P Q P Q P J. FRUITS P M S Q M S M Q M P M M M P M VINS P Q P P M Q M S M M M S P P S H. d’olives Q P P M S S S S Q P M P P P S Crustacés S M Q M P P P S S S Q M Q Q S Mollusques P S P S P M P M M S Q S Q P P Poissons P S P S Q S P M M M Q S Q Q M
Les résultats montrent une grande diversité dans les formes de compétitivité selon les groupes de
produits. La Turquie, la Tunisie, le Maroc et dans une moindre mesure L’Espagne et Israël
doivent leurs performances commerciales principalement grâce à leur compétitivité qualité. La
Syrie malgré son positionnement récent sur le marché international présente également une bonne
compétitivité qualité de ses productions. La Grèce et les Pays bas sont essentiellement compétitifs
par les prix. L’Egypte, le Liban et la Jordanie, malgré la compétitivité de leurs prix à
l’exportation, souffrent d’une faible pénétration du marché mondial pour certains de leurs
produits du fait de l’importance de la distance qui les sépare des marchés de destination et donc
des coûts de transport. Les Royaumes Unis et la France présentent une faible compétitivité prix
dans l’exportation de leurs produits agricoles et agroalimentaires. Les prix à l’exportation de ces
produits restant élevés par rapport à la qualité des produits offerts et aux prix proposés par les
pays concurrents. L’Italie et le Portugal souffrent de quelques problèmes structurels dans
l’exportation de certains de leurs produits.
18
Une analyse plus détaillée du tableau IV montre que la Turquie et Israël suivies par le Maroc,
l’Espagne, la Syrie, la Jordanie et la Tunisie se distinguent par la qualité de leurs exportations en
fruits et légumes. La Turquie est essentiellement compétitive dans l’exportation des figues, des
pommes, des raisins, des noisettes et des citrons. La Turquie a réussi une forte pénétration du
marché des agrumes grâce à une bonne technique des cultures, un important effort d’irrigation et
une récolte très étalée dans le temps15. Dans le secteur des fruits à coques, la Turquie est le leader
mondial de l’exportation des noisettes. Le soutien important de l’Etat pour développer cette
production a favorisé une nette croissance des exportations de noisettes turques au cours des vingt
dernières années.
Israël s’est favorablement positionnée sur le marché mondial des fruits et légumes grâce à la
bonne notoriété de ses exportations de tomates, de dattes et de raisins.
L’Espagne et le Maroc comptent parmi les principaux exportateurs mondiaux de tomates et
d’agrumes. L’Espagne offre des produits fortement compétitifs de par leur bonne qualité alors
que les performances du Maroc sont liées à la compétitivité de ses prix. Les exportations
Marocaines d’agrumes ont enregistré, au cours de ces dernières années, une dégradation de leur
qualité expliquée par le vieillissement des vergers. La tomate représente une culture importante
pour le Maroc, bien que la communauté européenne lui a imposé de fournir ses productions en
contre saison, le Maroc a réussi à négocier une importante réduction des prix d’entrée pendant
les basses saisons de production de l’UE16 ce qui lui a permis d’écouler ses exportations à des
prix plus bas que ceux de ses principaux concurrents.
La Jordanie et la Syrie ont réussi une forte pénétration du marché international des fruits et des
légumes au cours de ces dernières années. Malgré la distance qui les sépare des marchés de
destination, ces pays ont enregistré des performances relativement importantes dans l’exportation
des oranges, des tomates et des pommes pour la Syrie grâce à la bonne qualité de leurs
productions.
La Tunisie doit ses performances à l’exportation des fruits grâce à la qualité de ses dattes. Ce
pays compte parmi les plus importants exportateurs mondiaux de Dattes. Les efforts de la
Tunisie dans le développement des exportations de certaines cultures maraîchères comme les
tomates sont également appréciables.
L’Egypte, le Liban et la Grèce doivent leur positionnement sur le marché des fruits et des
légumes grâce à la compétitivité de leurs prix. L’Egypte dispose d’une grande capacité de
15 (Corrons, 2000). 16 (Corrons, 2000 ; CIHEAM, 2002)
19
production des tomates, des agrumes et des pommes de terre17. Les exportations égyptiennes
d’agrumes présentent toutefois une qualité nettement moindre que celle des produits espagnols et
marocains et des rendements relativement faibles. Leur positionnement sur le marché extérieur
est lié à un net avantage prix.
Dans l’exportation des jus de fruits Israël et l’Italie se distinguent par la qualité de leurs produits.
Ces pays présentent des performances notables dans l’exportation des jus de fruits. Notons, que
l’exportation de ces produits vers l’UE est soumise à une tarification douanière
exceptionnellement lourde qui pourrait en partie expliquer la faiblesse des volumes offerts par les
pays sud méditerranéens à l’exception d’ Israël.
L’Espagne, la Tunisie et la Grèce comptent parmi les leaders mondiaux dans l’exportation de
l’huile d’olives. L’Espagne, premier exportateur mondial, doit ses performances à la qualité de
ses produits alors que la Tunisie et la Grèce sont compétitives par les prix. La Tunisie, malgré
des problèmes de technicité et une forte dépendance du climat, jouit d’un potentiel d’exportation
très important qui la situe sur le deuxième rang du marché international de l’huile d’olives. Loin
derrière ces pays, la Turquie suivie par le Jordanie et le Liban ont réussi une timide pénétration
du marché mondial de l’huile d’olive grâce à la compétitivité de leurs prix.
Même si l’Italie, le Portugal et le Maroc dans une moindre mesure, possèdent des parts non
négligeables dans l’exportation de l’huile d’olives, ces pays restent des importateurs nets de ce
produit.
Dans l’exportation des vins et des vermouths, la France suivie par l’Italie, l’Espagne et le
Portugal présentent des résultats notables. Si les performances de la France et du Portugal sont
liées à la qualité de leurs produits, l’Italie et l’Espagne doivent leur positionnement à leur
avantage prix. Notons que parmi les pays tiers méditerranéens, la Tunisie et le Maroc ont réussi
une faible pénétration du marché mondial du vin grâce à la compétitivité prix de leurs produits.
En matière d’exportation des poissons, mollusques et crustacés, le tableau IV montre enfin que la
Turquie, la Tunisie et le Maroc se distinguent par la qualité de leurs produits. Les Pays Bas,
les Royaumes Unis et l’Espagne suivis par la Grèce qui comptent parmi les plus importants
exportateurs des produits de la mer, doivent leurs performances à leur compétitivité prix
principalement.
17 Les superficies allouées à la production des tomates sont trois fois plus importantes en Egypte qu’en Espagne et celles allouées aux agrumes sont deux fois plus importantes en Egypte qu’au Maroc.
20
IV- ANALYSE DE L’INFLUENCE DE LA DISPONIBILITE DES RESSOURCES EN
EAU SUR LES STRUCTURES DE SPECIALISATION : TEST DE LA THEORIE
D’HECKCHER-OHLIN
L’analyse dans la section II montre une importante similarité dans les profils de spécialisation des
pays du Nord et du Sud de la méditerranée, la libéralisation des échanges agricoles risque
d’intensifier la vive concurrence qui les oppose déjà. Pour profiter des opportunités offertes par la
réduction des protections douanières, les pays sud méditerranéens seraient emmenés à intensifier
leur agriculture irriguée pour promouvoir leurs exportations agricoles et assurer une meilleure
pénétration des marchés. L’agriculture irriguée exerce une forte pression sur les ressources en eau
qui sont de plus en plus rares et coûteuses dans ces pays. La dotation en ressources hydriques
représente un des principaux facteurs stratégiques dans le développement de la capacité
productive et l’amélioration des possibilités des pays sud méditerranéens à profiter des
opportunités offertes par le libre échange.
Les pays fortement spécialisés dans l’exportation des cultures intensives en eau et dont les
disponibilités sont relativement rares pourraient voir augmenter la pression sur leurs ressources
avec la libéralisation agricole. Ces pays risquent d’être fortement désavantagés par le libre
échange si des politiques assurant une meilleure utilisation des ressources et une meilleure
valorisation agricole, ne sont pas mises en place.
Selon la théorie d’Heckscher-Ohlin l’avantage comparatif d’un pays est déterminé par la
disponibilité relative de ses facteurs de production. L’échange international des biens est
déterminé par la différence dans les dotations factorielles entre les nations et la disparité de
l’intensité de l’utilisation des facteurs entre les différents produits. L’intuition de ce modèle est
que les pays exportent les produits contenant intensivement les facteurs dont ils disposent en
abondance et importent les biens qui nécessitent l’utilisation des facteurs dont ils sont en pénurie.
La théorie d’Heckscher-Ohlin prédit qu’une situation de libre échange favorise l’exportation des
produits utilisant les facteurs relativement abondants, et réduit les gains afférents aux produits
intensifs en ressources relativement rares (Sayan, 2001).
Si cette théorie est validée dans le contexte de la disponibilité relative du facteur eau, la
libéralisation agricole pourrait inciter les pays disposant de ressources hydriques relativement
abondantes à améliorer leur capacité productive et à renforcer leur potentiel d’exportation des
cultures intensives en eau, alors que les pays souffrant d’un problème de rareté de l’eau
devraient rechercher de nouveaux avantages et se spécialiser dans les productions économes en
en eau.
21
Afin de tester la validité de la théorie d’Heckscher-Ohlin dans ce contexte d’étude et d’évaluer
l’influence de la disponibilité des ressources en eau sur les structures de spécialisation dans
chaque pays pour appréhender l’effet de la libéralisation sur le développement futur de leurs
productions et de leurs exportations agricoles, nous avons utilisé un modèle économétrique
reliant la spécialisation internationale, les besoins en eau des principaux produits d’exportation
et la dotation en eau pour chacun des pays concernés par l’étude.
Plusieurs travaux ont cherché à tester la validité empirique de la théorie d’Heckcher-Ohline.
L’approche utilisée dans ces analyses repose sur la régression des flux commerciaux sur
l’intensité de l’utilisation des facteurs de productions18. Ces études ne permettent pas toutefois de
mettre en valeur l’effet de la dotation en ressources sur les flux commerciaux (Sayan, 2001).
Balassa (1979) a proposé l’utilisation d’une approche en deux étapes pour tester l’influence de la
dotation factorielle et de l’intensité de l’utilisation des facteurs sur les flux commerciaux. La
première étape consiste à estimer la relation entre les indicateurs d’avantage comparatif révélé et
l’intensité de l’utilisation des facteurs de production pour différents pays. La deuxième étape
repose sur la régression des paramètres obtenus de la première estimation sur la dotation en
ressources des pays19 (Kim, 1983 ; Balassa and Bauwens, 1988).
Nous avons adopté une approche similaire à celle développée par Balassa en considérant l’eau
comme facteur de production spécifique. La méthodologie utilisée consiste à estimer le système
suivant :
(3) ijijjjij uWCβ αRAC ++=
(4) jjj vbWE a ++=β
où ijRAC représente l’indice d’avantage comparatif révélé pour le pays j dans l’exportation du
produit i, ijWC l’intensité de l’utilisation de l’eau par le produit i dans le pays j, jWE la dotation
en eau du pays j, jα et jβ les paramètres à estimer pour chaque pays j, iju et jv des termes
d’erreurs.
L’estimation de la première équation permet d’évaluer l’influence de l’utilisation de l’eau sur les
exportations. Si la théorie d’Heckscher-Ohlin s’applique dans ce cadre d’étude, les paramètres
18 (Wood an Mayer, 2001 ; Hakimian, 2005). 19 (Sayan, 2001, 2003) a utilisé une approche similaire pour tester la validité empirique de la théorie d’Heckcher-Ohlin dans une étude reliant les dotations en ressources en eau à l’intensité de l’utilisation de l’eau dans différents secteurs des pays de la région MENA.
22
jβ devraient être négatifs pour les pays souffrant d’un problème de rareté des ressources
hydriques, indiquant une baisse des exportations (et par conséquent de l’avantage comparatif)
pour les productions ayant un besoin croissant en eau. La deuxième équation permet de vérifier si
l’influence des besoins en eau sur les exportations dépend des dotations en eau des différents
pays (Sayan, 2001, 2003).
Les données utilisées pour l’estimation du modèle proviennent de la base de données de la FAO
et de la banque mondiale. Nous avons résumé les observations sur les dotations en ressources
hydriques des différents pays inclus dans l’échantillon dans Le tableau I-A présenté dans
l’annexe.
TABLEAU V : RESULTATS DES ESTIMATIONS
Pays β
Espagne
France
Grèce
Italie
Pays Bas
Portugal
Royaumes Unis
Israël
Jordanie
Liban
Maroc
Syrie
Tunisie
Turquie
Egypte
0.00058**
0.0018**
0.023**
0.00078**
0.0024*
0.00045*
-0.00072
-0.0087*
-0.048**
0.039**
0.0016*
0.058**
-0.021**
0.00045**
0.0015**
a
b
-0.32*
0.035**
**significatif à 99%, *significatif à 95%.
Les résultats de l’estimation, exposés dans le tableau IV, montrent globalement une influence
significative de l’intensité de l’utilisation de l’eau sur les flux d’exportation. Les résultats
confirment également l’existence d’un lien significatif de la dotation en ressources hydriques des
différents pays sur leurs avantages comparatifs. Dans les pays disposant de ressources
23
relativement abondantes, on observe un effet positif de l’intensité de l’utilisation de l’eau par les
produits agricoles d’exportation sur les avantages comparatifs. Cet effet est relativement
important pour des pays comme la Grèce, le Liban et la Syrie, le volume de leurs exportations
par rapport à la moyenne mondiale tend à croître pour les cultures intensives en eau. La Tunisie,
la Jordanie et Israël, caractérisés par des ressources relativement limitées, voient leurs avantages
comparatifs baisser pour les cultures à forte consommation en eau.
Malgré la forte spécialisation d’un grand nombre des pays sud méditerranéens dans l’exportation
des cultures intensives en eau, les résultats empiriques montrent une baisse des avantages
comparatifs des pays souffrant d’un problème de rareté de leurs ressources pour les cultures à
forte consommation en eau. En dépit de l’importance des efforts déployés par des pays comme la
Tunisie et Israël pour assurer une plus grande mobilisation des ressources en eau et le recours
croissant à des systèmes d’irrigation sophistiqués, l’eau demeure un facteur limitant pour la
production irriguée dans ces pays.
Il semble à partir de cette analyse que des régions comme le Liban, la Syrie, la Turquie ou le
Maroc pourraient enregistrer une amélioration substantielle de leurs exportations agricoles avec
la libéralisation agricole. Ces pays fortement spécialisés dans l’exportation des fruits et des
légumes frais, disposent d’un important potentiel de croissance de leur agriculture irriguée.
L’abondance relative de leurs ressources hydriques pourrait les avantager sur un marché en libre
concurrence. La Tunisie, la Jordanie et Israël pourraient être pénalisés par leur faible dotation en
ressources. Ces pays devraient rechercher de nouveaux avantages, assurer une plus grande
diversification de leurs productions et développer des variétés ayant des calendriers de récoltes
complémentaires avec les productions européennes.
24
IV CONCLUSION
La libéralisation des échanges des produits agricoles et agroalimentaires dans le bassin Euro-
méditerranéen a suscité de nombreux débats. Des prévisions optimistes quant à l’essor de
l’agriculture irriguée dans les pays du sud de la méditerranée ont été apportées par différentes
modélisations. L’expansion des exportations agricoles dans ces pays résulterait essentiellement
de l’élimination progressive des tarifs douaniers et donc de la baisse des prix à l’exportation.
Les retombées positives du libre échange sont toutefois conditionnées par la capacité des
économies sud méditerranéennes à améliorer leurs potentialités de production et à satisfaire la
demande croissante, sur les marchés européens, des produits de grande qualité.
Nous avons essayé à travers cette analyse d’évaluer la compétitivité internationale de
l’agriculture des différents pays impliqués dans le partenariat Euro-méditerranéen et
d’appréhender la capacité de ces pays de profiter des opportunités offertes par la libéralisation
agricole. Notre étude repose sur deux volets : Dans un premier volet nous cherchons à comparer
les profils de spécialisation internationale de ces différents pays et à évaluer l’intensité de leur
compétitivité qualité. Le deuxième volet porte sur l’analyse empirique de l’influence de la
dotation en ressources hydriques des pays méditerranéens sur leur potentiel d’exportation
agricole.
Sans chercher à quantifier les effets de la libéralisation agricole sur les économies en question,
notre étude est destinée à fournir uniquement quelques éléments d’analyse permettant d’éclairer
sur les possibilités éventuelles de ces pays de profiter des opportunités offertes par le libre
échange.
Les résultats de cette recherche montrent une forte spécialisation des pays sud méditerranéens
dans l’exportation des fruits et des légumes frais. Des régions comme le Liban, la Jordanie et la
Syrie se distinguent par des degrés de spécialisation remarquables. La comparaison des
structures d’exportation des pays engagés dans le partenariat Euro-méditerranéen a fait ressortir
une forte similarité des profils de spécialisation de ces pays. Le Liban, Israël et la Turquie
ainsi que la Jordanie et la Syrie semblent bénéficier d’importants avantages comparatifs pour
des produits similaires. Certains pays de l’Union Européenne comme l’Espagne, la Grèce et
l’Italie semblent également présenter une forte ressemblance avec la Jordanie, le Liban, la
Tunisie et la Turquie.
25
Même si les pays sud méditerranéens disposent d’un potentiel important dans le commerce
international des produits agricoles et agroalimentaires leur possibilité d’améliorer leurs parts de
marché reste conditionnée par leur capacité de satisfaire les exigences croissantes du marché
européen sur les normes de qualité. La typologie des pays méditerranéens d’après leurs
performances dans le commerce international des produits agricoles montre que la qualité joue
un rôle prépondérant dans la compétitivité de ces pays. Les performances de la Turquie, de
l’Espagne, du Maroc, de la Tunisie et dans une moindre mesure d’Israël et de la Syrie semblent
liées à la compétitivité qualité de leurs exportations.
Avec la réduction des protections douanières, les pays sud méditerranéens seraient emmenés à
promouvoir l’exportation de leurs productions agricoles et donc à intensifier leur agriculture
irriguée pour assurer une meilleure pénétration des marchés. L’agriculture irriguée exerce une
forte pression sur les ressources en eau qui sont de plus en plus rares et coûteuses dans ces pays.
Les pays fortement spécialisés dans l’exportation des cultures intensives en eau et dont les
disponibilités hydriques sont relativement rares pourraient voir augmenter la pression sur leurs
ressources et risquent d’être désavantagés par la libéralisation agricole.
L’investigation de l’influence de la disponibilité des ressources en eau sur les structures de
spécialisation dans chaque pays a montré un effet significatif des besoins en eau des produits
agricoles d’exportations sur les avantages comparatifs révélés. Des pays comme la Tunisie, la
Jordanie et Israël pourraient être pénalisés par leur faible dotation en ressources. Malgré
l’importance des efforts déployés pour assurer une gestion plus efficace de l’eau d’irrigation,
cette dernière demeure un facteur limitant pour la production irriguée dans ces pays.
Le Liban, la Syrie, la Turquie ou le Maroc fortement spécialisés dans l’exportation des cultures
intensives en eau, pourraient être avantagés par l’abondance relative de leurs ressources
hydriques sur un marché en libre concurrence.
L’entrée des productions agricoles méditerranéennes en libre concurrence sur le marché
international, devrait à la lumière des résultats obtenus, favoriser les pays présentant une
spécialisation accrue dans l’agriculture, disposant d’un potentiel de production important et
jouissant d’une bonne notoriété de leurs produits. La Turquie, l’Espagne, le Maroc, la Grèce et
dans une moindre mesure la France et la Syrie ont de grandes chances d’être favorisés par le
libre échange. Les effets sur la Tunisie et Israël seraient contrastés. En dépit de l’importance
des efforts déployés par ces pays pour moderniser leur secteur agricole et améliorer la qualité de
leurs productions, la rareté de leurs ressources hydriques risque de réduire leurs chances à
26
profiter des opportunités offertes par le libre échange. Notons enfin que la Jordanie et l’Egypte,
pénalisés par la faible compétitivité qualité de leurs produits et l’importance de la rivalité qu’ils
affrontent de la part de la Syrie, du Liban et de la Turquie et de certains pays de l’Union
Européenne comme l’Espagne et la Grèce risquent de se retrouver dans une position
désavantageuse.
Malgré les risques inhérents à la libéralisation agricole, ce processus pourrait représenter une
source de gains pour de nombreux pays sud méditerranéens. Pour tirer un meilleur bénéfice du
libre échange, il semble toutefois nécessaire d’envisager de nombreuses adaptations de
l’appareil productif dans les pays les plus défavorisés. Le renforcement de la coopération entre
les pays du Nord de la méditerranée et ceux du Sud en vue d’une amélioration des techniques de
production, une modernisation du secteur agricole et la promotion d’une plus grande
complémentarité entre les agricultures des deux rives pourrait atténuer la rivalité agricole qui les
oppose et constituer une source de profit pour les différentes économies impliquées déjà dans les
accords de partenariats.
27
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31
TABLEAU I-A RESSOURCES EN EAU DES PRINCIPAUX PAYS MEDITERRANEENS Ressources en eau
par habitant (m3)
Population en 2003
(Millions)
Ressources en eau
totales (km3)
Espagne
France
Grèce
Italie
Pays Bas
Portugal
Royaumes Unis
Israël
Jordanie
Liban
Maroc
Syrie
Tunisie
Turquie
Egypte
2719
3406
6754
3321
562
6605
2478
254
170
978
963
1511
465
3243
863
41
59.8
11
57.6
16.2
10.4
59.3
6.7
5.3
4.5
30.1
17.4
9.9
70.7
67.6
111.5
203.7
74.3
191.3
91
68.7
147
1.7
0.9
4.4
29
26.3
4.6
229.3
58.3
Source : World Bank (2003), FAOstat.