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Jacques d'Andurain Étudiants pour le Maréchal - Collection Biographies / Témoignages - Retrouvez cette oeuvre et beaucoup d'autres sur http://www.inlibroveritas.net

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  • Jacques d'Andurain

    tudiants pour leMarchal

    - Collection Biographies / Tmoignages -

    Retrouvez cette oeuvre et beaucoup d'autres surhttp://www.inlibroveritas.net

  • Table des matirestudiants pour le Marchal.......................................................................1

    1 - tudiants pour le Marchal............................................................22 - Le vrai double jeu.........................................................................173 - Libration-Sud..........................................................................224 - L'homme se nommait Jean Moulin..............................................345 - Mon 18 juin 1940, moi..............................................................366 - Quarante millions de ptainistes..................................................427 - Ma carrire militaire - 1935-1945................................................468 - Dans l'arme d'armistice...............................................................499 - La coupe de La Vayssire ......................................................53

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  • tudiants pour le Marchal

    Auteur : Jacques d'AndurainCatgorie : Biographies / Tmoignages

    Aprs les manifestations du 11 novembre 1940 sur les Champs lyses, laseule vritable rpression avait t, dabord, larrestation de la majoritdes tudiants communistes organiss, nous lavions envisage, comme lapire consquence possible pour nous. Puis la punition collective la plusmanifeste et la plus pniblement ressentie par la totalit des tudiantsparisiens : la fermeture, sine die, de luniversit (o les tudiantscommunistes, lappel de lU.N.E.F. dirige par notre meilleursous-marin, Franois de Lescure, avaient appel la manifestation).

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  • 1 - tudiants pour le Marchal

    Aprs les manifestations du 11 novembre 1940 sur les Champs lyses, laseule vritable rpression avait t, d'abord, l'arrestation de la majorit destudiants communistes organiss, nous l'avions envisage, comme la pireconsquence possible pour nous. Puis la punition collective la plusmanifeste et la plus pniblement ressentie par la totalit des tudiantsparisiens : la fermeture, sine die, de l'universit (o les tudiantscommunistes, l'appel de l'U.N.E.F. dirige par notre meilleur sous-marin,Franois de Lescure, avaient appel la manifestation).Nous l'avions envisage comme le pige dans lequel nous esprions fairetomber les Allemands. Seront-ils assez cons pour fermer l'Universit comme Prague, aprs lesaccords de Munich et se mettre tout le monde dos, alors que nousvoyions tous les jours des tudiantes au bras d'officiers allemands enuniforme, disant partout : ils sont si corrects, ils sont si cultivs, potes,mlomanes.Parenthse : un ptard la bibliothque Sainte Genevive.Je n'tais pas encore inscrit en Sorbonne, mais j'allais la bibliothqueSainte Ginette, Place du Panthon feuilletant psychologie, ou sociologie,contactant les uns et les autres, toujours trs discrtement. Mes nouvellesconnaissances avaient remarqu, avec moi, depuis trois jours un pimpantofficier allemand, blond et dlicieux, au bras d'une jeune fille, elle aussitrs blonde et sexy ; sans leur avoir adress la parole nous avions dcidqu'elle tait franaise. En d'autres temps j'aurais jug trs progressiste et charmante cette fraternisation si internationaliste. Mais il portait ununiforme, celui de l'occupant National Socialiste. Donc pas fraternisation,mais trahison. Rassurez-vous : je n'allai pas chercher une tondeuse, commecertains, la Libration. Non, j'allai rue des Carmes, fouiller un magasinde Farces et Attrapes, qui existe toujours au xxie sicle. J'achetai uneamorce, une seule : ce genre de truc qu'on place sous un verre ou uneassiette, qui pte quand on les soulve. Dans l'entre de la bibliothque, il y

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  • avait une srie de casiers, avec les fiches des livres dont on devaitdemander la communication l'appariteur. Long stationnement deslecteurs dans un couloir bord d'une verrire qui le sparait de la salle delecture, o tout le monde pouvait voir les imptrants faire la queue. C taitl que les jours prcdents j'avais pu loisir observer le charmant, etscandaleux, couple collaborateur.Appuye tout au long de la verrire, une table de plus de deux mtres taitcouverte de dictionnaires de toutes les langues auxquels leur paisseurpermettait de tenir debout, mais dont chaque retrait pour consultation,faisait s'effondrer le bel alignement. Ces consultations et ces effondrementsse rptaient chaque instant. Vous l'avez devin : je plaai l'amorce entredeux dictionnaires ds que je vis mes blondeurs derrire la verrire, et peine revenu ma place, on entendit l'explosion.Ca fait beaucoup, beaucoup de bruit, une minuscule amorce, sous les hautsplafonds d'une bibliothque toute silencieuse ; tout le monde leva et tournale nez vers la verrire, et tout le monde aperut l'objet de ma farce. peinequelques instants aprs, tous refixaient leurs bouquins. Le couple, croyant une blague normale, avait souri, sans souponner ma vilenie. Lelendemain j'achetai une autre amorce, et quand les tourtereaux revinrent :rebelote.Re belote aussi des nez sur l'officier nazi, et long arrt de tous sur image :ils avaient compris, les lvres se fendaient, les yeux vrillaient. Ils avaientcompris. L'officier allemand aussi. Il rougit. Le sang de ses pommettes nevint pas sacraliser le plancher de Sainte Ginette. Le sacrifice fut le mme :il ne revint jamais, du moins sous l'uniforme.C'est ainsi que je me permets de revendiquer le titre d'acteur de la premiredculotte de l'arme allemande car le rire aussi, tue. N'est-ce pas, moncher Canard Enchan ?Fin de la parenthse. S'ils sont assez astucieux, ils n'en parleront pas et la censure empcheratout le monde, sauf les participants, de commenter ce non-vnement . Cefut la police franaise, dj collaborationniste, d'un Vichy bien dcid faire sa collaboration sa faon, se crer un tat fort, et fasciste, sur lemodle nazi : pur de tous Juifs, Communistes, Socialistes, Francs-Maons,et mme, simples rpublicains, ou dmocrates.

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  • Aucune sanction n'avait t prise contre les lycens, trs majoritaires,appels par Griotteray et les traditionnelles ligues d'extrme-droite, quitous les ans organisaient une clbration chauvine l'toile, non pourl'Armistice de 1918, mais pour la Victoire de 1918, sur les boches .La fermeture de l'Universit, que les autorits de Vichy affirmaient avoirt exiges par les Allemands, s'tait voulue une vritable brimade pour lestudiants.Tous les tudiants de province devaient quitter Paris, retourner dans leurprovince, perdant ainsi leur logement et parfois aussi, le petit boulot desubsistance que les plus dmunis avaient pu y obtenir ; tandis que lestudiants de Paris, qui auraient pu quitter Paris, prendre des vacances lacampagne, bien s'y nourrir, et mme rapporter quelques provisions pourleurs familles, avaient l'interdiction de quitter Paris, et l'obligation depasser tous les jours dans le commissariat de leur quartier, signer unregistre de contrle.Ces mesures avaient provoqu une immense hostilit chez tous lestudiants, punis pour une manifestation laquelle, trs peu d'entre euxavaient particip : un sentiment de totale injustice, ce sentiment d'trepunis, certes sans peine de mort, mais comme les otages d'une rpressionde guerre. C'tait ce que nous avions espr de mieux.Pendant cette fermeture, Vichy avait invit les tudiants parisiens unesorte de stage, dont j'ai oubli la date, comme l'intitul exact, mais quisignifiait quelque chose comme : les tudiants avec le marchal au chteaude SilleryJe n'avais pas encore rejoint une cellule prcise d'une fac, et Pierre Hervm'avait dit : va faire un tour dans ce truc, ta particule te permettra demontrer patte blanche, chez ces fascistes.Un Pasteur Jousselin nous accueillit, avec trs grande et trs manifestechaleur humaine, ds les premiers mots, totalement comprhensive de nossupposs motifs de mcontentements divers, complice, en un mot, detoutes nos rvoltes : complice et loyal, pour une confession de groupe. Jene le compris comme une mise en scne que beaucoup plus tard, et encoremaintenant, il m'arrive de me demander s'il n'tait pas rellement sincre :en tout cas, s'il ne l'tait pas, je plongeai tte baisse dans le pige desautorits de Vichy.

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  • La premire confrence dbat portait sur : la Question Juive dans laFrance d'aujourd'hui.En tant qu'Homme, en tant que Pasteur, en tant que Franais, je ne suisabsolument pas Antismite, nous clame Jousselin, comme entre enmatire. Violente interruption dans la salle, hurlements de colre, insultesen tous genres, de deux fanatiques qui s'adressaient au Pasteur Jousselin, etvoulaient nous appeler (nous, une quarantaine de participants) partagerleur virulente indignation ; Dans leur logorrhe, plutt confuse, j'avaiscompris qu'ils taient doriotistes, purs pro-nazis, et ne pouvaient admettrequ'un fonctionnaire de Vichy trahit ainsi la pense collaborationniste duMarchal, notoirement antismite, et affirm comme tel, quelquessemaines avant, avec le recensement des Juifs d'octobre. Trs intressantsondage pour moi : au diapason de leur violence, toutes sortes de rponsesjaillirent, et de plus en plus fortes et tout aussi intolrantes.Ce fut d'abord, assez timidement, l'hypocrite on n'est pas ici pour faire dela politique qui pour moi, caractrise habituellement les gens de droite,puis des on n'est pas nazis, on n'est pas des fascistes comme vous ,bande d'un tas de choses, une gnrosit d'insultes dans la plus bellegamme de grossirets de notre clavier, pour finir par : Dehors !sortez-les !!! qui devint vite notre slogan du plus unanime consensus.Le pasteur Jousselin s'approcha des odieux provocateurs, se mettant entreeux et des amateurs de lynchage, qui se sentaient monter des vellitsnouvelles. Le pasteur russit les calmer et les convaincre de quitter lasalle, sans esclandres plus pousses, pour leur bien et pour notre retour lasrnit.Une bizarre sensation d'tre enfin entre nous .Quand il les eut raccompagns au grand portail de la proprit, il revintvers nous dans la salle, puis, sans forfanterie aucune il enchana : Etmaintenant, en tant que fonctionnaire du gouvernement du Marchal, jevais vous exposer sa position sur la question Juive .L'un des deux gars ainsi chasss de notre assemble se nommait MarcAugier, connu l'poque dans les auberges de jeunesse comme un des trsrares militants d'extrme droite, s'affichant trs agressivement dans unmilieu populaire o se rencontraient seulement les diffrentes nuances dela gauche et de l'extrme gauche, des chrtiens genres Marc Sangnier, qui

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  • se disaient fondateurs du mouvement des auberges, des communistesjusqu'aux trotskistes et leurs innombrables fractions et aux sionistes quitrouvaient beaucoup de passerelles entre auberges et Kibboutzim, et noustous aussi.Je devrai attendre les annes soixante-sept, ou huit, pour voir des membresdu Btar vouloir y venir manger kasher, faire une vaisselle spare, etrompre cette institution de base des auberges : la collo, ce repas collectiflaque, excluant tout menu religieux.Pour s'excuser de rompre la lacit traditionnelle des auberges, leresponsable du Btar me dit que les repas Kasher taient entirement payspar une donation Rotschild. Nous verrons quand je serai en Syrie, etdcouvrirai l'trange paralllisme d'exploitation ptrolire et de Terresainte, les discrets achats des mmes Rotschild de quelques terres enPalestine, bientt Terres saintes, ouvrant des droits sur les gisements deptrole, dont les environs sont riches (dont les immigrants sionistesidalistes des kibboutzim deviendront les sentinelles bien involontaires,mais forces).Le mme Marc Augier sera l'un des premiers endosser l'uniforme desWaffens S.S., en s'engageant dans la Lgion Antibolchevique pour aller sebattre contre l'Union Sovitique ; il en reviendra et sous le nom de plumede Saint Loup, publiera, aprs guerre, mmoires et plaidoyers pour soncamp.La Question Juive dont voulait nous parler le Pasteur Jousselinm'intressait : je venais de devenir moi-mme chef de famille Juive suite un recensement des Juifs, organis au mois d'octobre par legouvernement de Vichy : ma femme, Ella Raitz, athe comme moi, ne seconsidrait pas plus juive que je n'aurais admis de me considrer commecatholique, mais m'avait-elle dit : puisqu'on veut emmerder les juifs, jene vais pas refuser de me solidariser avec eux, c'est--dire, ma famille .J'admirai l'lgance du geste, et l'approuvai entirement. Je pensais, et jepense toujours, que si j'avais vcu en Irlande du Nord, ou au Canada, oexiste une discrimination contre les catholiques, je me serais proclam desleurs, malgr mon athisme. Ce qu'exprimeront, moins de trois dcadesplus tard les tudiants parisiens en criant : nous sommes tous des JuifsAllemands.

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  • Ella tait revenue de la Mairie de Neuilly sur Seine, un peu confuse. Ilsexigent que ce soit le mari, le chef de famille, qui fasse la dclaration ; si lecouple n'a pas trois de ses parents catholiques, il est considr comme juif. C'est ainsi qu'un jour d'octobre 1940, j'tais devenu chef de famillejuive, en faisant, pour cela, la queue la Mairie, ou peut-tre uncommissariat.Une connerie de plus pour le Marchal, d'autant (je l'apprendrai plus tard)qu'aucune pression allemande ne l'avait contraint cette mesure. Elle allait,loin de protger les juifs, permettre de les recenser, pour les liminer detous les emplois publics, et voler leurs commerces, et plus tard, quand onvoudra livrer de rcents naturaliss, pour remplir encore quelques wagonsde dports, le travail des Bousquet ou Papon, ne sera qu'un jeu d'enfantprvoyant et persvrant.Je ne me souviens pas trs clairement de ce que nous a dit Jousselin, sinonque tout dcoulait de la dfaite, que Vichy ne pouvait plus assurer uneprotection territoriale aux juifs trangers, ressortissants de nationsoccupes par l'Allemagne, que, par contre, la cration, pour les juifsfranais, leurs frais, d'une sorte de caisse de solidarit, rtablirait unesorte de justice sociale. plusieurs reprises Jousselin avait insist pournous dire que ce n'tait que le point de vue du gouvernement de Vichy :autant dire qu'il ne fallait pas en croire un mot. Je n'ai jamais racont monpassage Sillery, peine quelques mots Herv.Seule marque dans ma mmoire : des commissions furent constitues :sports et loisirs, avec Claude Jouan, dont l'activit sera d'organiserquelques repas aux alentours du Panthon, tous, bien sr, avec unminimum de tickets d'alimentation (de bas prix de march noir) ; il y eutune sorte de commission d'action sociale, surtout axe sur les diffrentesaides matrielles aux tudiants.Une de nos chansons, notre ministre de la Jeunesse , Lamirand sur lesnavigations par calme plat :C'est l'aviron, qui nous mne, mne, mneC'est l'aviron qui nous mne au vent.C'est Lamirand, qui nous mne, mne, mneC'est Lamirand qui nous mne en rangs.

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  • Il y eut enfin une commission dite politique la tte de laquelle je crustrs habile de m'tre fait dsigner, en bon sous-marin coutumier. J'y avaist pouss par deux copains de ma chambre, deux jumeaux, qui nousamusaient beaucoup avec la narration trs enjoue de toutes les blaguesque permettait leur trs parfaite ressemblance, les meilleures tant,naturellement, en alternant leurs rendez-vous avec une mme fille, fortjolie, que je rencontrais par la suite, aux dners de Claude Jouan.Parenthse temporelle :Ayant cess de les voir depuis le coup du Palais de Justice, en 1941, jerencontrai l'un d'eux dans un bar, aux abords de l'lyse, plus de vingt ansplus tard : 1963, ou 1964 : nous avions encore bon il et bonne mmoire :- Tu es Andr, toi, Andr Ducret ?- Et toi, Jacques d'Andurain, tu te souviens de Sillery ?Je me souvenais parfaitement, alors, du nom de la fille, laquelle il jouaittant de blagues, qu'est elle devenue ?- Marie, trois enfants, je la vois toujours, je jouais au tennis avec elle,encore la semaine dernire.Aprs avoir clus un demi-ensemble, nos souvenirs, il me dit :- Viens dans mon bureau, on sera plus l'aise. Et la main sur l'paule il mefit entrer l'lyse, copieusement salu, avec lui, par les GardesRpublicains : il tait le chef des services de protection du Gnral deGaulle, l'lyse comme dans ses voyages ; il le sera encore lors del'attentat du Petit-Clamart ; il serait bientt le Prfet de police de Paris,sous Giscard d'Estaing, lorsque le Ministre de l'Intrieur, Poniatowski,ralisa ce record, digne du Guinness des records : l'enqute ficele envingt-quatre heures sur l'assassinat de son collgue, ministre et ami lePrince de Broglie ; l'un des grands tonnements de la prsidence deGiscard (Pour le Canard Enchan).Revenons Sillery : la commission politique nous avions commenter le texte d'un discoursdu Marchal, que l'on disait crit par Gaston Bergery, ancien protagonistedu Front Populaire, aprs avoir voulu lancer le mouvement Front Unique,sans trop de succs.Parenthse Bergery :

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  • Il tait, l'poque, mari Louba Krassine, fille du premier ministre desfinances des Soviets, et Ptain l'enverra, comme Ambassadeur de Vichy, Moscou. Aprs la guerre Emmanuel d'Astier divorcera de son AmricaineGrace, pousera Louba Krassine, ira Moscou, rencontrera Staline et toutela Nomenklatura Sovitique. Quand la fille de Staline s'chappera d'UnionSovitique, elle viendra se rfugier, en Suisse, chez Emmanuel d'Astier dela Vigerie qui me dira, peu avant sa mort : Je suis le Pre Joseph de deGaulle.Fin de la parenthse Bergery.Ce discours, message au peuple franais du 11 octobre 1940, visait justifier la trs rcente rencontre de Ptain avec Hitler Montoire, et sapoigne de main Hitler, l'occasion de laquelle il avait prononc un motqui lui sera toujours reproch, le mot collaboration, comme une trahison.Je choisis une seule phrase, cense rsumer le discours en forme deconclusion ; elle disait : En prsence d'un vainqueur qui aura su dominersa victoire, nous saurons dominer notre dfaite .Je fis remarquer que rien dans l'attitude des autorits allemandes, enversles tudiants, ne manifestait la moindre domination de leur victoire. Lafermeture de l'Universit, pour sanctionner la dj clbre manifestation du11 novembre 1940 l'toile, tait d'autant plus injustifie que tout lemonde savait, surtout nous autres ici prsents, que la participation destudiants avait t proportionnellement trs faible. Par consquent, nousautres tudiants, ne pouvons pas un instant penser que les conditions d'uneloyale collaboration puissent exister, mais bien plutt celles d'une totalersistance et cela, bien dans l'esprit de fidlit la pense de notreMarchal.Nous n'avons pas chant Marchal, nous voil , qui tait l'hymnehabituel de ce genre de runions, mais je n'en paraissais pas si loin ; etsurtout, pour ne pas avoir l'air de faire de la politique je n'avais pas ditun mot de tous les autres sujets possibles de rcriminations. Je fus applaudiet ma dclaration fut approuve l'unanimit, sans mme un vote.Je devenais le responsable politique des tudiants pour le Marchal . Jerencontrai peu aprs le colonel de Tournemire, (dont j'ignorais la hautesituation dans la hirarchie de la Cagoule, j'ignorais aussi presque tout,surtout le principal, sur la Cagoule) le reprsentant du Marchal pour cette

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  • propagande, et quand je rentrai Paris, raconter cette comdie PierreHerv on se tapa vigoureusement sur les cuisses, pour rythmer notrerigolade.J'avais dsormais une couverture, comparable celle de Franois deLescure, la tte de l'U.N.E.F. Et tous les deux avec notre particule. Aprsla guerre, Franois de Lescure, sacrifiera la sienne sur l'autel de la dictaturedu proltariat, doctrine encore en vigueur au Parti communiste, l'poque.Au Parti communiste actuel (aot 2001) qui vient de rhabiliter PierreHerv, (longtemps aprs sa mort en 1993) aprs lui avoir trs srieusementreproch ses relations avec moi, ainsi que mon choix, pour le remplacer la direction des tudiants communistes Paris, j'offre d'ajouter une pice son dossier : Je pense que s'il m'a choisi, ce fut, aussi, pour utiliserl'excellence de la couverture conquise Sillery, par un petit sous-marin,peu conscient de l'tre ce point, sur le moment.Si aujourd'hui, au xxie sicle je vous raconte tout a, c'est parce que jeviens de lire, en 2001, le dernier livre d'Henri Frenay, (que l'on titularisevolontiers de Fondateur de la Rsistance), sur Jean Moulin, qu'il intitule,l'nigme Jean Moulin, o il s'efforce de prouver que celui-ci tait uncryptocommuniste, c'est--dire un espion russe, effaant du mme coup lagravit de l'accusation, plus que prouve, porte contre son fidle etdvou Hardy (le dnonciateur de Jean Moulin) qui n'avait, en somme, queservi la France, en la librant de l'emprise sur de Gaulle et sur laRsistance, d'un trs dangereux sous-marin ; certes, il ne le dit pas, mais ane peut tre que le sens de son dernier livre.Je me permets de faire parler un mort, Henri Frenay, sans droit de rponse,bien sr, mais n'a-t-il pas fait de mme, avec Jean Moulin ?Alors que j'avais dit tout le mal que je pensais de Frenay, de son vivant, la personne qui m'enregistrait, pour Henri Nogures et sa monumentaleHistoire de la Rsistance en France en cinq volumes vol. II p. 345. N'enprenons, pour exemple que le tmoignage de d'Andurain qui, au dbut de1942, a rejoint Libration o il travaille avec Brunschwig-Bordier etavec Morandat. voquant vingt-cinq ans plus tard les souvenirs de cettepoque, voici ce qu'il nous a dit de Frenay et de Combat : Quand Frenay entra dans la Rsistance (sic) il a cr un mouvementavec un certain blanc-seing de Pucheu Ce que nous avons tous pu

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  • constater c'est que chaque fois que nous avons eu des agents doubles l'intrieur des mouvements de rsistance c'tait par Combat qu'ilstaient rentrs. Tous les mouchards, tous les types douteux qui sont rentrs l'intrieur des mouvements, nous n'en avons pratiquement pas eu Libration o il y avait une forte implantation communiste, il n'y en a paseu beaucoup Franc-Tireur, tandis que des pans entiers de rseaux sonttombs par Combat .On ne peut lire ces lignes sans avoir le double sentiment de leurinexactitude et de leur injustice : Frenay n'a pas rejoint la Rsistance c'estplutt la Rsistance, qui, en zone Sud a rejoint Frenay. Et Combat ou cequi l'a prcd n'a pas t cr avec un blanc-seing de Pucheu Il tait nanmoins intressant de citer ce jugement car, par son outrancemme, il est rvlateur de l'tat d'esprit que les dmarches effectues parFrenay Vichy ont pu faire naitre chez ceux qui en taient mal informs.Effectivement j'tais mal inform vingt-cinq ans aprs les faits, j'avaisquitt Paris et la France aprs la guerre, la suite des aventures etmsaventures de ma mre, Marga d'Andurain (accusation d'assassinat Paris en 1945, sur son filleul Raymond Clrisse, puis arrestation trstapageuse Nice en 1946, non-lieu en 1947, enfin son assassinat Tangeren 1948).Je ne lirai qu'au XXIime sicle quelques dtails sur l'affaire GrandClment en 1943 : un modle d'homme de droite Tratre et rsistant lafois. Mais vraiment tratre et d'extrme droite.Mais la lecture trs tardive du dernier livre de Frenay : l'nigme JeanMoulin. (Robert Laffont 1989). confirme et au-del, mon opinion d'alors ;non seulement elle me la confirme, mais elle me prouve la justesse de mes outrances . et les tout premiers dirigeants taient issus de l'arme (page 51).Comme il est par ailleurs connu que Frenay, officier de l'arme d'armistice,y tait affect au service de ce que l'on appelait les menes antinationales, qui depuis 1939 et l ' interdiction du parti communiste visaitessentiellement (et presque exclusivement) les activits communistes,comme on sait aussi que cette Arme d'Armistice avait t qumande auxAllemands par Weygand uniquement pour rsister aux communistes etlui permettre de capituler en toute srnit, sans la hantise de la Commune

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  • de Paris, ou de la Rvolution de 1917. Comme on sait que c'est endcembre 1940 que Frenay, et quatre officiers de ce mme service, ontcommenc la cration de ce qui deviendra combat, comme un papiertue-mouches pour attraper les communistes, les vritables rsistants, lesseuls organiss, depuis 1939 et bien avant. (Bien sr, je ne veux en aucunefaon dire que la quasi-totalit des adhrents de combat taientconsciemment des papiers tue-mouches, mais Hardy certainement, avecl'intention au dbut, d'affirmer sa fidlit Ptain, dont la popularitpatriotique a t trs entame par la poigne de main Hitler, et sademande de collaboration, il faut laisser entendre que Ptain joue le doublejeu. On cre un mouvement de Rsistance , confiant dans la volont deRsistance de Ptain, et cela, qui n'est certainement pas le hasard d'uneconcidence, la mme date o le Colonel de Tournemire, (un importantcagoulard) vient, Paris, prsenter son Pasteur Jousselin, aux tudiants, unpeu berlus, runis au chteau de Sillery. Et proclamant sa volont decoordination de tous les rsistants, on va bien finir par dcouvrir, au nomde l'unit, les vritables Rsistants, ceux qui sont contre Ptain et le Hitlerqu'il veut copier. Ainsi, moi qui croyais avoir trs subtilement noyaut lesptainistes, j'tais tomb dans le mme filet que celui tendu par Frenay, enzone Sud. Pour continuer de rpondre la critique de Nogures, et ce qu'ilnomme mes outrances, je dois expliquer pourquoi je dis : quand Frenayentra dans la Rsistance, c'est pour dire quand et quelles conditions ilcommena de ngocier sa fidlit de Gaulle et de recevoir les subsides dela Rsistance, subsides qui lui furent remis, non pas par Jean Moulinlui-mme, mais par Yvon Morandat, dont je jouais alors, de temps entemps, le garde du corps.En plus il se trompe sur la somme, soi-disant rapporte par Jean Moulin,c'tait six cent mille francs et non cinq cent mille ; et la rpartition fut 250000 pour Frenay, et 250 000 pour d'Astier de la Vigerie ; Morandat, avecd'Astier, tudia le montant de mon indemnit mensuelle de permanent :j'avais estim mes besoins de clandestin, sans carte d'alimentation, troismille, ils jugrent que j'avais au moins besoin de cinq mille, ce que jereus, ds lors, peu prs rgulirement. L'amusant dans cet argent, c'estqu'il tait vhicul par l'Intelligence Service, partir de la Suisse, (nonparachut comme le dit Frenay) et qu'il avait t remis Morandat Lyon

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  • par un socialiste allemand, membre de l'Intelligence Service ; c'estexactement ainsi que j'ai, plus tard, entendu dfinir le curriculum vitae du futur Chancelier d'Allemagne, Willy Brandt, avec lequel je bavardai unpeu ce jour-l.Et si je suis en fvrier 1942 garde du corps d'Yvon Morandat, dropp(parachut) le 7 novembre 41 soit moins de deux mois avant Jean Moulin,avec pour principale mission, de contacter les milieux syndicalisteschrtiens, c'est parce qu'on me crditera des bonnes leons que m'aprodigues le futur Colonel Fabien, qui Suzanne Djian, a confi sonanarchiste petit-bourgeois de copain, aprs son canular du Palais de Justicede Paris.Je suis all un soir d'hiver glacial, accompagner Morandat au bout del'avenue de la Rpublique, au coin de la place des Terreaux, Lyon, pourrencontrer les reprsentants (4) de Frenay (peut-tre les quatre fondateurs) dans un bistrot aux vitres embues, o je pouvais suivre les ombres,toutes grandes et imposantes qui avaient accueilli le tout petit Yvon (LonMorandat) si petit que je le dpassais du haut de mes 1 m 63. Il m'avaitdit : si je ne suis pas sorti, au bout de (j'ai oubli la dure exacte) tu rentres,et tu me cherches, c'est dire si la confiance rgnait, Je n'eus pas besoin d'enarriver l.Je le vis rapidement revenir, rayonnant de la satisfaction du maquignon (iltait issu d'une famille paysanne de l'Ain, de Pauillat, je crois) qui a bientortill sa ngociation.Au dbut ils m'ont dit n'avoir aucun besoin de de Gaulle comme Librateur de la France , ils avaient dj Frenay, pour ce rle sur lethtre des oprations, et n'avaient rien contre Ptain, bien au contraire.Aprs quelques minutes perdues, discuter tactique globale, vue mondialede la guerre, etc. je leur dis : nous n'avons aucune volont de supplanter, nivos chefs, ni vos prfrences, mais peut-tre pouvons-nous vous aider,peut-tre quelque argent ?Alors l, ils se dridrent compltement, me dit Morandat : l'affaire estdans le sac, et mme au fond du sac. Pour tre honnte, (peut-tre aussimdisant) je dois vous avouer que rencontrant Morandat, dans sa rcenteproprit de Ventabren, dans le midi, je lui dis, longtemps aprs guerre : tu te rappelles quand nous achetions Frenay, en 42 ? , Il me dvisagea,

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  • l'air trs honntement ahuri, et me dit : Je ne vois pas de quoi tu parles .Il faut dire, que nous tions aprs le retour de de Gaulle au pouvoir de1958, et qu'il soutenait trs activement le nouveau rassemblement de toutesles droites, autour du Gnral, auquel il venait de demander l'autorisationde publier ses propres mmoires.Compltes, elles auraient t passionnantes, mais je pense qu'il tait trsconscient de ce que l'on nomme aujourd'hui le devoir de rserve . Car ilavait beaucoup achet, je dis acheter. je dois prciser que je n'assistai pas la remise d'argent aux mains de Frenay, mais Morandat me l'avait dit, etattendait la parution du prochain numro de Combat, pour y constaterl'allgeance de Gaulle. Je ne me souviens ni de la date, ni du contenuprcis de cet exemplaire, mais je me souviens parfaitement de la trs viveindignation de Morandat pour l'insignifiance du rattachement de Gaulle,et de la rupture promise avec la thse du double jeu de Ptain. Il rdigeaalors, avec moi, un tlgramme pour Londres, clamant son indignation. Jene sais pas si ce tlgramme tait pour Londres mme, ou pour JeanMoulin, dj oprationnel en France. Mais je me souviens trs bien de sarvolte quand il reut l'ordre de persvrer dans son arrosage de Frenay.Ce fut sa premire leon de cynisme et il sut parfaitement l'assimiler, etFrenay, lui aussi, prendre quelques distances avec Ptain. (En toutehonntet, et dans l'honneur) Il n'eut pas les mmes difficults avecLibration, car d'Astier lui avait confi la charge de son dition,impression, et presque, diffusion, travaux sur lesquels je papillonnais. C'estainsi que le 12 mai 1942, j'allais avec mon ami Bocquet chez notreimprimeur, chercher le premier numro de la reparution du Populaire,(l'ancien quotidien du Parti Socialiste S.F.I.O.) qui allait faire la gloire deDaniel Mayer, et de la constitution du C.A.S. (Comit d'Action Socialiste,prlude la renaissance du Parti Socialiste de Lon Blum.)je remis ce premier numro, encore tout frais, Morandat, qui le donnatriomphalement Daniel Mayer. Si je sais, aujourd'hui, la date du 12 mai1942, c'est parce que je l'ai lue dans la biographie de Daniel Mayer laB.D.I.C. en 2001.Pour l'instant revenons en 1941, mon ami Claude Jouan et aux TUDIANTS POUR LE MARCHAL . Pas un seul de ses copains dubureau de tabac n'a mis la plus petite rserve sur les 21 communistes

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  • vads, alors que toute la presse, unanime, n'avait pas assez de mots pourles stigmatiser.Est-ce de ce jour-l que les quarante millions de Ptainistes, qu'un sondagede cette mme presse aux ordres a fait dcouvrir Henri Amouroux, vontfondre comme neige au soleil ?En tout cas pour les Ptainistes du quartier latin, pas de doute : la neigeavait fondu depuis longtemps.Du mme coup, la collaboration aussi ; qui va devenir un duo, malharmonis, de communiqus de police franaise et d'arme allemande, etde discours affols de ministres franais.Pour bien comprendre cela, je ferai appel un autre document, exhumaprs la guerre par mon cousin Arnaud d'Andurain de Matie, diplomate,qui tudiait, fort judicieusement, pour la France, les archives allemandes,lors du procs de Nuremberg :Nuremberg, le 10 fvrier 1948N 44/SC M. Arnaud d'Andurain de Matie Dlgu auprs du Tribunalamricain de Nuremberg Son Excellence le ministre des Affairestrangres Paris Secrtariat des Confrences)Communiqu Europe au Conseiller Politique Baden-Baden Ci-jointl'exemplaire pour le ministre de la justice(9 juillet 1940). Directive du Dpartement de la Presse du Reich au sujetdes relations franco-allemandesLe ministre public a, ces jours derniers, voqu dans le procs desministres le cas de l'ancien secrtaire d'Etat la Propagande, OttoDietrich. cet effet plusieurs sances ont t consacres l'ancienneorganisation de la propagande du Reich, des tmoins ont t entendus etde nombreux documents prsents au tribunal. Parmi ces pices je croisdevoir seulement signaler au Dpartement l'extrait suivant des dossiersBrammer .Charles-Auguste Brammer, qui a comparu la semaine dernire, a dirig,de 1933 1944, une agence d'information qui portait son nom. ce titre,i l ass is ta , pendant onze ans , la confrence de presse tenuequotidiennement au dpartement de la presse du Reich. la date du 9juillet 1940, il notait la direction suivante donne le jour mme midi, parle prsident de la confrence de presse :

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  • Directive n 490 (directive fondamentale)L'Allemagne ne conclut pas avec la France une paix chevaleresque .L'Allemagne ne considre pas la France comme son allie, mais seulementcomme un Etat avec lequel elle compte entretenir des relations paisibles.La France l'avenir jouera en Europe le rle d'une Suisse agrandie etdeviendra un pays de tourisme qui, ventuellement, pourra tre autoris produire, en quantit mdiocre, quelques articles.C'est pourquoi il n'y a pas lieu d'appuyer les efforts que fait legouvernement franais pour instaurer un Etat autoritaire. Toute forme degouvernement qui apparatra de nature restaurer la puissance de laFrance sera combattue par le Reich. En Europe, le pouvoir de dcisionn'appartient qu' l'Allemagne. Dans son rle dirigeant, l'Allemagne n'a (endehors de l'Italie qui dispose maintenant de son Lebensraum particulier) aucun alli ou partenaire qui soit mis sur le mme piedqu'elle-mme. Telle est la rgle de parole , officielle et bien claire, quidoit inspirer la rdaction de toute contribution que vous seriez amen fournir aux annonces ou art icles etc. consacrs aux relat ionsgermano-franaises, sans qu'il soit besoin d'noncer chaque fois cettebrutale dclaration de principe Extrait de : DPCHES DIPLOMATIQUES. 1938-1963 ARNAUDD'ANDURAIN DE MATIE Prface : Alain Peyrefitte, de l'AcadmieFranaise. J & D ditions. 64 200 Biarritz.J'ai soulign ce passage, mais il suscite en moi tant de rflexions que jeveux, bien le sparer : La France l'avenir jouera en Europe le rle d'une Suisse agrandie et deviendra un pays de tourisme qui, ventuellement,pourra tre autoris produire, en quantit mdiocre, quelques articles.O en est-on dans la France touristique de l'Europe du XXI sime sicle,telle que dessine par Hitler ? ? ?

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  • 2 - Le vrai double jeu

    Cette date du 9 juillet 1940, est pour moi, une date capitale pour touterflexion ultrieure sur l'ensemble du problme de la Collaboration et del'escroquerie du double jeu, laquelle le colonel de Tournemire, comme lecapitaine Frenay, vont tenter de donner une certaine vie, que reprendra plustard Rmy, avec la chevaleresque formule de l'pe et du Bouclier, ainsi,plus ou moins, que Franois-Georges Dreyfus dans son Histoire de laRsistance , p. 92. ditions de Fallois. Paris. Lequel Franois-GeorgesDreyfus reprend, sur un ton d'honntet intellectuelle presque outrage, lacritique de Nogures mon sujet : Il est vrai que quelques rsistantsragissent mal, comme le rappelle M. d'Andurain, membre de Libration, proche du PC, dans un texte que cite Nogures.Pour lui, quand Frenay a rejoint la Rsistance (sic), il a cr unmouvement avec un certain blanc-seing de Pucheu .On ne peut gure accumuler autant de contrevrits en quelques mots.Mais ce texte explique la profondeur des rivalits qui existent etpersisteront dans la Rsistance jusqu' la Libration. car le double jeu nel'tait qu' l'gard des seuls franais et de la rpublique Je l'avoue bien bas,cher grand historien, je n'ai aucune de vos rfrences pour parler de laRsistance, et le fait d'y avoir particip depuis les dbuts ne garantit en rienune vision panoramique ni objective : en effet, je n'y ai navigu, depuis ledbut, que comme sous-marin, et tellement autonome, que vos trs finslimiers, Frenay, ou Paillole, n'ont pas pu dterminer mon existence desous-marin communiste.Paillole que j'ai rencontr fin 1944, (et qui, comme Suzanne Djian meprenait pour un anarchiste petit-bourgeois ou quelque chose d'approchant)quelques jours seulement avant que le Gnral de Gaulle ne lui signifie soncong immdiat de la direction de nos services de renseignements. ! Et quis'en tonne, sans rapprocher de concidences.Peut-tre vous en parlerai-je, si je termine mes mmoires, avec lalibration de Toulouse, et vous parle de mes ballades dans la Montagne

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    2 - Le vrai double jeu 17

  • Noire, entre Revel, Mazamet et Carcassonne.Alors, si ce sont l, cher Professeur, vos rfrences pour prorer sur laRsistance, permettez-moi de ricaner (c'est un tic) mme si vous ajoutezaux grandes respectabilits de vos rfrences, un abb, Ren de Naurois,compagnon de la Libration. lui, comme Georges Bidault, et quelquesautres futurs M.R.P. que j'ai connus, aux tous dbuts chez Paul Parel (unetrs bonne table) : ce que vous pensiez, l'poque, de toute votre SainteMre l'glise, de toute sa hirarchie, de tous ses vques, dont vous guidezaujourd'hui les processions, n'est-il pas admirablement croqu dans lespremires strophes du Chant des Partisans :Ami, entends-tu, le vol noir, des corbeaux, sur la plaine ?Je vous en parlerai quand je vous raconterai mon 18 juin 1940, le mien.Le document d'Arnaud d'Andurain est trs intressant : l'essentiel duprocs de Ptain est bas sur l'accusation de trahison, pour action auservice de l'ennemi, par la collaboration ; si l'on peut prouver qu'il n'y a paseu de collaboration (puisque l'ennemi n'en voulait pas) il n'y a pas eutrahison, il n'y a pas eu d'action au service de l'ennemi.Au contraire, cette attitude, vue comme la volont de crer un tat fort, surles schmas d'alors, pour prparer la revanche, serait tout l'loge duMarchal.Ainsi les lois rpressives contre juifs, communistes, francs-maons, et tousdmocrates, ne seraient, comme en son temps l'Affaire Dreyfus, qu'unexcs de patriotisme. Ainsi la question de la prparation, et l'organisationde la dfaite ne pourraient pas se poser, alors le vol noir des corbeaux surla plaine ne serait qu'une mouvante image potique qu'Emmanueld'Astier de la Vigerie aurait propose Kessel et Druon, quelque peuanticlricaux et bien dpasss.Non, le seul procs qu'il fallait faire Ptain, c'tait exactement l'inversede celui que Vichy voulut faire Blum. Qui a prvu, voulu, et prpar ladfaite, celle du Front Populaire, de la Rpublique, et par l mme de laFrance. Qui dans ce but a complot, Madrid, Rome, Berlin, etpar-dessus tout, au Vatican et tout autant dans l'Arme contre Gamelin, cefranc-maon ?Question trs libre que je me pose, aprs lecture du livre de Pierre Miquel :les mensonges de l'histoire. (Perrin. Dcembre 2002). Lesquels dbutent

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  • par les Croisades. Et qu'il pourra illustrer dans les jours qui viennent parl'Irak. (21 fvrier 2003). La guerre 39/45 n'a-t-elle t que la dernire, trsmachiavlique croisade, prpare par Pie XI et Pie XII ?Hitler, tout le monde le sait clairement, par opposition au Trait deVersailles. Le Vatican, beaucoup plus discrtement, par opposition auTrait de Svres.Le Vatican veut annuler les effets de la dclaration Balfour de 1917 qui parla notion de terre sainte largie aux Juifs contre son monopolevaticanesque et militaire franais (fille ane de l'glise) dtruit tous lesacquis de toutes les Croisades. Depuis 1917 le Vatican lutte contre lecommunisme athe de l'U.R.S.S. Comme il combat partout les Serbes,orthodoxes. (par Oustachis Croates entre autres)Comme il combat partout les ides de la Rvolution franaise, celles dusicle des Lumires Hitler, en Ukraine, tendra le domaine des Uniatescatholiques. Qu'il prenne donc l'Ukraine. Hitler maintiendra le trsavantageux statut du clerg allemand, et l'tendra au monde : la Franceaprs 1919 a bien t contrainte de le conserver en Alsace ; d'ailleurs on enparle dj en filigrane de l'Europe du xxie sicle. Enfin la Croisade duChrist Roi en a dmontr la mthode, et la facilit, en Espagne de 1936 1939. (Combat commun de la Lgion trangre, des Tabors Marocains, del'aviation d'Hitler, des troupes de Mussolini, et des CatholiquesHystriques manuvrs par la naissante Opus Dei.C'est--dire faire combattre, pour les buts de sa Croisade, des troupes quin'en ont rien foutre.On envoie Ptain comme ambassadeur Madrid, en tudier le moded'emploi, et il contacte non seulement Franco, mais aussi le Vatican.Pourquoi le Vatican ? Le 9 octobre 1934 j'arrive Marseille, sur le bateau Providence des Messageries Maritimes. Passagers consigns bord ; laville de Marseille est en tat de sige : Le Roi de Yougoslavie, ainsi queLouis Barthou, notre ministre des Affaires trangres ont t assassins.L'enqute tablira que l'assassin est un Croate, membre des Oustachis,fanatiques de haine contre les Serbes de religion orthodoxe, tout aussifanatiques d'amour catholique, fanatiques du pape, (Pie XI l'poque) maisaussi instrumentaliss, pays et organiss par les services secrets Nazis.

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    2 - Le vrai double jeu 19

  • Fanatiques de Terre Sainte, qu'elle soit revendique par les orthodoxes, parles Turcs et toutes les varits d'Islam, ou par les Juifs, justifis en droitInternational par la Dclaration Balfour de 1917, justifis aussi par unecertaine lecture de l'Histoire, le droit du sol, vu comme le droit du premieroccupant ; ce qui, chez des tribus nomades, est illimit : entre Nil etEuphrate, mais sans exclusivit pour aucune transhumance.Ainsi peut-on dire que la deuxime guerre mondiale a commenc le 9octobre 1934 Marseille par une opration conjugue du Vatican et deHitler.Voir aussi, d'aprs Dominique Venner : Histoire critique de la Rsistance.(ditions Pygmalion page 120). o l'on voit l'Amiral Canaris, l'ex chef del'Abwher-le Service d'espionnage de l'Arme Allemande rfugi Paris, auCouvent de la Sainte Agonie (sans ironie de ma part) recherch par laGestapo, aprs le complot des gnraux contre Hitler, sr d'treincessamment captur, rpondre la question d'Arnoult :- Pourquoi avoir ainsi trahi votre patrie ?- Au-dessus de l'Allemagne, il y a la chrtient. Cela vaut bien un milliond'AllemandsTandis qu' Beyrouth, ds 1936, le Gnral Huntzinger, commandant enchef des troupes du Levant fait chouer, par les provocations de PierreGemayel et des Phalanges l ibanaises, le projet d ' indpendanceLibano-Syrienne.Projet que son propre Haut-Commissaire, le Comte Damien de Martel, surles directives du ministre des Affaires trangres du Front Populaire veutfaire aboutir.L e Haut Commissaire, qui viendra en 1937, accompagn de sonCommissaire aux affaires politiques, le Comte Ostrorog, (sans m'en avertir,prsider une runion que j'ai organise, avec l'Universit Amricaine deBeyrouth, Place des Canons) pour dire aux tudiants qu'il n'y avait pas deterre sainte au moyen orient, mais uniquement des terres ptrolires, et queseule la lacit pouvait la rendre la nation arabe quelles que soient sesreligions.Mon principal soutien, pour organiser cette confrence, s'appelait AbbasHoveida.Nous avons pass notre bac ensemble cette anne-l.

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    2 - Le vrai double jeu 20

  • Il sera douze ans premier ministre du Shah d'Iran, et sera fusill par lesPasdarans aprs la victoire de l'Ayatollah Khomeiny. Le public franais enentendra, la veille de son excution, une interview reste clbre, deChristine Ockrent en 1979.Le Gnral Huntzinger sera le dlgu franais la commissiond'armistice. Il sera le ministre de la Guerre de Ptain qui fera condamner deGaulle mort (par contumace).Il commandait aussi la deuxime arme, le 10 mai 1940, dont on a dit qu'ilavait les moyens, avec l'arme Corap de boucher la perce des panzers deSedan. Le gouvernement de Paul Reynaud dclara que des fautes avaientt commises (des fautes militaires) et que des sanctions seraient prises Ildmissionnait le lendemain, cdant le pouvoir Ptain, qui remplaaitGamelin par Weygand, pour demander l'Armistice, dont il chargeraHuntziger. Un cardinal dira bientt : Ptain c'est la France, la France c'estPtain.Sabre, goupillon et croix gamme.

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    2 - Le vrai double jeu 21

  • 3 - Libration-Sud

    Il faut maintenant vous dire dans quelles conditions j'ai rencontr lefondateur de Libration-Sud : Emmanuel d'Astier de la Vigerie.J'ai d'abord l'attestation de Lucie Aubrac. Contact Saint Jean Cap Ferrat par Emmanuel d'Astier, fondateur dumouvement .Ce n'est pas tout fait Saint Jean Cap Ferrat, mais Nice. Maiscomment ? Si je l'avais dit Henri Frenay, avant sa mort, nul doute qu'iln'y eut trouv la clef de son Graal : La preuve que Jean Moulin tait bienun cryptocommuniste. Eh, ma foi, je ne dirais peut-tre pas non, avecindignation, (car toute politique de vritable intrt national franais abesoin du contrepoids russe en Europe.)Au contraire, je serais trs fier de le voir rejoindre la phalange, de Sorge,ou Kim Philby, et de vous dire tout ce que je puis honntement affirmer : je lui ai serr la main sans savoir qu'il tait Jean Moulin, ni surtout qu'il ledeviendrait, ni qu'il venait d'tre parachut, avec le microfilm de samission pour de Gaulle. En esprant que cet pisode vous amusera,autant qu'il me plat de vous le raconter.Vers la fin novembre 1941, aprs les attentats de Nantes et de Bordeaux, etles trs lourdes excutions d'otages, celles de Chteaubriant surtout, quiavaient eu de terrifiants chos, Frdo, qui deviendra, pour la postrit, lecolonel Fabien, me dit : Il y a eu des chutes, nombreuses, certains ontparl ; pendant quelques jours on ne se voit plus, vite les lieux o tu peuxrencontrer des copains : comme je lui dis avoir rencontr Brustlein,l'auteur du coup de Nantes et dont tous les journaux prsentent la photo,avec l'annonce d'une prime de cinq millions, pour le dnonciateur, Fabienme dit, trs net : Surtout Brustlein ! Je plaisante quand mme : pour un attentat rat Rouen, je n'ai t mis prix que de dix mille francs, et dans l'anonymat le plus complet. AlorsBrustlein : Cinq millions ! Chapeau ! Avec son nom en grosses lettrespartout : je souffrais de l'anonymat. Dans cette guerre, comme dans ma vie,

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    3 - Libration-Sud 22

  • j'ai toujours eu beaucoup de chance : jusqu' maintenant. Touchons dubois.Vers le 24 novembre ? 1941 une lettre de mon oncle Jean d'Andurain nousconvoque, mon frre et moi, au Pays Basque, pour un hritage ; quandnous en revenons, la bonne me dit le rituel :- Deux messieurs sont venus vous demander pas l'air de copains.Elle, elle tait communiste.Le lendemain passe un autre flic ! tout seul. Renseignements gnraux ;Le moment de fuir tait venu ; et de fuir immdiatement, pas sur l'heure,mais la minute, et sans prvenir maman, qui tait sortie.La veille, je lui avais dit mes craintes, aprs le passage des deuxmessieurs , mais elle n'y croyait pas et pensait que je voulais vivre unefugue avec Lise D. une amie de la Sorbonne, tudiante en Histoire, venueplusieurs fois Neuilly.Seul mon frre tait prsent ; il prvoyait la mme conclusion maternelle.- Je vais lui envoyer des copains, qui joueront les faux policiers, commea, elle y croira.Ce disant je n'avais aucune ide des moyens d'excution, d'autant queFabien m'avait dit de rompre tous contacts ; mais j'avais demand monfrre de n'en rien dire. Un secret ! J'aurais d savoir que le charmeprincipal d'un secret est d'en faire cadeau la personne concerne.Deux jours plus tard, lorsque quatre trs jeunes membres de la toutenouvelle Brigade Antiterroriste cre spcialement pour nous, seprcipitrent de la porte d'entre la chambre de ma mre, en criant desordres, qui se voulaient terrifiants et comminatoires, du genre :- Haut les mains, les mains au mur, pas un geste etc. elle souleva peinela tte de son oreiller, pour leur dire avec la plus drisoire compassion :- Vous jouez trs mal votre rle, je sais trs bien que vous tes les amis demon fils. Dites-lui qu'il peut revenir, tranquille, vivre avec Lise. Il nerisque rien.- Mais madame, nous sommes des vrais policiers !- Bof ! Montrez-moi vos papiers.- Vous voyez bien qu'ils sont faux, ils sont tout neufs.- Mais nous sommes la toute nouvelle brigade antiterroriste.- coutez, finissons-en : appelons la police.

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  • - Bien sr, Madame, dit l'un d'eux, lui tendant l'appareil.Elle le prit, puis le reposa vivement :- Non, Jacques ne me le pardonnerait pas, si je vous faisais arrter.Et comme la jeune quipe semblait s'entter, elle leur lcha. Bon, faitescomme vous voulez, mais il n'est pas l, ni dans les armoires, ni dans lestiroirs, et moi, je dors.Quand je la revis, prs de deux ans plus tard, elle me dit :- Tu sais, j'ai vu tout de suite que c'taient tes amis ; ils taient timides,polis, dans ta bibliothque ils n'ont mme pas remarqu tes uvrescompltes de Lnine.- Elles sont en anglais Lenin, Lenin, Lenin, ils ne savaient pas l'anglais.Je ne russis pas la convaincre entirement. Pour ma part j'tais partipour Nevers l'adresse que m'avait donne Annie, pour le cas, o jevoudrais fuir en zone sud. Je sonnai au 3 rue des Rcollets, une dame endeuil ! en deuil caractris, longue, maigre et portant nergiquement, si l'onpeut dire, plutt assumant, toute la misre du monde, m'accueillit, avectoute la tendresse qu'elle tait capable d'offrir :Annie lui avait parl de moi, certainement avec beaucoup de chaleur, cartout de suite elle m'assura qu'elle me traiterait comme son fils son filsunique, disparu en 1940, disparu, pas tu, qu'elle attendait chaque jour.Depuis son dpart la mobilisation, en 1939, elle avait chaque jour, faitsa chambre , ouvert ses volets, essuy d'invisibles poussires, pour qu'ilpt, en rentrant, la retrouver dans l'tat o il l'avait quitte, cette chambrequi avait t leur chambre nuptiale, elle et son mari, avant la guerre de1914, qu'elle avait cess d'habiter quand elle avait appris sa mort au Front,chambre qu'elle avait prpare, telle une relique, pour le prochain orphelin naitre, de lui, cette chambre o son fils tait n et avait grandi. seul.Cette chambre serait la mienne, pour moi, moi comme son fils. Et ellem'ouvrirait tout grands les volets, pour moi, qui menais le mme combatque son fils et son mari. Mes yeux se voilent, ce souvenir.Deux jours plus tard ses amis me conduisirent de nuit, pour franchir laligne de dmarcation, dans une gare. d'o, aprs une nuit glaciale dans undemi-muid vide, je pus rejoindre, prs de Mailly, le piton de La Ripe, o lafamille d'Annie m'accueillit-on ne peut mieux, (sa mre, son pre, Octave,la tante Guitte) et me donna son adresse Clermont Ferrand. Partout

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    3 - Libration-Sud 24

  • intense affection. Inoubliable, qui m'meut encore, quand je vous en parle.De mon hritage, point venu, au pays Basque, j'avais emport quelquesbibelots de valeur, vendus illico par ma belle-mre Moussia, mre d'Ella,au March aux puces, pour me constituer un magot salvateur. Annie meproposa d'aller Saint-Gervais les Bains, o sa tante, Clmence, avait unhotel. Celle-ci nous conseilla une villa, haut dans les neiges, lesViollettes , dont Annie ne cessait de souligner l'orthographe fantaisiste ;mais nous trouvions du beurre volont, (et mme moins cher que leprix de la taxe car le ramassage ne montait pas jusque-l) des pommes deterre, et Annie nous prparait de succulentes pommes dauphines rgalinconnu dans les villes.Cette villa les Viollettes sera le point de dpart et de prparation d'uneextraordinaire expdition d'une quipe de 4 marins et 4 alpinistes pour laGorgie du Sud, une trentaine d'annes plus tard. Pour nous ce fut le pointde dpart d'une dbandade et de retrouvailles ultrieures.Par une inconsquence gravissime, mais frquente chez moi, j'ignoraisque les vrais policiers taient venus me chercher Neuilly, continuaientleurs poursuites, m'avaient cherch, au 11bis rue Jean Mermoz Paris VIIIme. chez ma cousine germaine, Franoise, et avaient appris qu'elleviendrait passer la Nol prs de Megve, Crest Volland, en zone nonoccupe.Une brigade antiterroriste, a flaire toutes les pistes, elle avait suiviFranoise. Quand, moi qui avais la mmoire de son tlphone, aprs Nol,je l'appelai, elle n'eut que le temps de me crier : Attention la police est l, et la communication fut interrompue.Pas un instant je ne ralisai que ce put tre pour moi. Je pensai march noirdu beurre, par Franoise.Pour la Messe de minuit nous tions descendus, Herv, Annie et moi dansle centre-ville de Saint Gervais o logeait son frre Pierre, avec Jeanine :pour mieux nous camoufler, Nol avait rejoint la chorale de la paroisse,malgr notre athisme, et avait fourni sa trs belle voix de basse pour le Minuit Chrtiens .Il avait t chaudement flicit par tous. Au lieu de remonter dans notrevilla des Viollettes, nous tions rests chez lui, et Pierre Herv me donnaitma premire leon d'checs de ma vie. Elle sera aussi la dernire. Lehman,

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  • l'ami de la tante Clmence, tout essouffl, accourait nous alerter : Lagendarmerie m'envoie vous prvenir : la Brigade Spciale de Paris vousrecherche. Ils ont dit que vous tiez de riches trafiquants d'or. Lesgendarmes, qui vous surveillent, depuis votre arrive, n'en ont pas cru unmot. La Brigade de Paris, c'est les Allemands : fuyez immdiatement. Nous saurons plus tard que les gendarmes, requis de conduire les hommesde la brigade spciale vers la villa les Viollettes , en ramenrent un surun brancard, l'autre boitant : ils avaient des chaussures basses cesParisiens, et je croirai toujours que les gendarmes ne leur avaient pasmontr les plus inoffensifs passages. Quand je vous dis que j'ai toujours eude la chance. !!!Nous voil notre tour dans la neige et la nuit, Herv, Annie et moi, avecnos sacs dos bourrs de lainages, et aprs un long arrt sur la terrassed'une maison inhabite, Annie revient de je ne sais o, avec du jambon, dupain et un splendide couteau.Certes les nuits dans la neige sont longues en hiver, et jusqu'au jour nousdvalerons, en crabe, la montagne, pour ne pas nous retrouver sur la route, la verticale de Saint Gervais. Des haltes sous les sapins les plus touffus,des tranches de jambon, du pain, de la neige volont laisser fondre enbouche. Puis tous les enfin : le jour, la route, l'autobus.Sparation : Pierre et Annie vont ensemble dans le fond du bus, moi toutseul vers le milieu ; c'est moi, nominalement, qui suis recherch, et je n'aipas de faux papiers. un carrefour, barrage de gendarmerie : Vospapiers . Je pense : c'est la fin. Je me retourne vers Pierre et Annie, aufond : un regard d'adieu, celui que durent avoir les innombrables dportsde cette guerre, que dis-je, de toutes les guerres. Adieu. Les gendarmesregardrent longtemps, ma carte, mon visage, ma carte encore, puis ilspassrent au suivant. Quand nous arriverons la gare, o nos chemins sespareront, Annie me dira : Quand tu t'es retourn vers nous, tu taisblanc .Quelques heures plus tard j'arrivais, par le train, chez Grace d'Astier de laVigerie, une Amricaine, amie de ma mre, Saint-Jean Cap Ferrat, dansles Alpes Maritimes. Srieusement poursuivi, ne sachant o me cacher, jela croyais capable de me donner une filire, pour passer en Angleterre, oupourquoi pas, aux tats-Unis, eux aussi en guerre, depuis moins d'un mois.

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  • (7 dcembre 1941)Je connaissais son adresse sur la cte parce qu' elle avait correspondu avecma mre depuis la dbacle de juin 1940, propos de ses chats siamois,abandonns dans son appartement du 10 rue des Saints Pres, Paris VIme.Cette correspondance se faisai t par cartes postales Interzone,pr-imprimes, peu prs ainsi : va bien , va mal , est prisonnier , est dcd .On avait juste le droit d'inscrire le nom de la personne, et de barrer lesmentions inutiles. Or l'un des chats de Grace s'appelait Tommy, ce qui taitle nom trs affectueux par lequel on dsignait les petits soldats anglais.J'avais plusieurs fois post la carte pour Grace, et ma mre s'attendaittoujours un quiproquo avec la censure. Mais Grace prsentait un autreintrt : elle s'tait appele Roosevelt, avant baronne d'Astier, pouse del'un des fils du Prsident des tats Unis ; elle avait gard d'excellentsrapports avec sa belle-mre d'alors, la trs populaire Eleanor Roosevelt,que l'on disait trs coute conseillre de son mari, plus prcisment pourses tendances de Gauche, et quand on dit gauche aux USA. !!! Trspeu avant la guerre elle tait venue en France, et le Gouvernement, sentantle conflit proche, avait voulu lui offrir une rception trs solennelle dansles Palais Nationaux. Elle avait choisi de descendre chez son anciennebelle-fille, 10 rue des Saints-Pres.Ainsi, Emmanuel d'Astier de la Vigerie, journaliste pigiste Marianne,opiomane, ml de toujours aux Surralistes, avait particip toutesrceptions et plus discrtes rencontres ; ceci d'autant plus facilement qu'ilavait t officier de marine, mais au service de renseignements ; son frreFranois, tait l'un des deux gnraux cinq toiles, qui commandaitl'Aviation Franaise.Quand Emmanuel d'Astier fut pass en Angleterre par sous-marin, l'accueilde de Gaulle fut immdiatement favorable, et je pense (je n'en sais rien, jen'en ai mme pas parl avec d'Astier) que beaucoup plus que pour sonprtendu mouvement de Rsistance il fut conquis par les perspectivesd'accueil par le Prsident Roosevelt avec lequel il n'arrivait pas prendrebon contact ; ma supputation est d'autant plus plausible, qu'aussitt, pluttque de lui demander de retourner illico en France, il lui demanda de partir

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  • immdiatement pour les tats Unis pour bnficier de son excellentcontact avec leanor Roosevelt.Me parlant plus tard d'une altercation avec le Gnral Catroux, en 1944, ausujet de ma mre o Catroux en conflit d'autorit avec d'Astier menaait dedmissionner, et que de Gaulle arbitra favorablement et ma mre, et d'Astier, Many m'expliqua : de Gaulle avait, ce moment, besoin de moiauprs des Amricains . Quand j'eus fini de raconter Grace et mesaventures et mes espoirs, elle me dit, aprs m'avoir flicit et avecbeaucoup d'autorit : Vous avez beaucoup mieux faire, ici, que dans une arme ; Many(diminutif anglais d'Emmanuel) fait quelque chose ici, en France : Il abesoin d'hommes comme vous .Moi qui me voyais toujours comme un enfant, surtout auprs des GrandesPersonnes amies de ma mre, je me sentis multipli par cet normecompliment, et renonais presque tout de suite l'ide de passer enAngleterre, acceptant aussitt de travailler avec son mari.Je l'avais rencontr peu de temps avant la guerre, au 63 avenue RaymondPoincar (XVI. ime) o j'habitais avec ma mre, avant d'tre rappel sousles drapeaux, d'abord Orly, puis au Ministre de l'Air, boulevard Victor ;elle avait lou ma chambre, suite une annonce dans Le Figaro unallemand nomm Paul Kreger, venu d'Angleterre, o il tait responsabledu Service des Allemands l'tranger. Il disait vouloir connaitre desFranais . Many tait venu le voir . Aprs une longue conversationpour sonder ses vues, ses convictions Nationales-Socialistes, ses doutesaussi, questionnaire dont j'avais beaucoup admir la finesse, la subtilit,autant que la profondeur, d'Astier nous avait dit : Il est du bureauRibbentrop J'ignorais alors totalement que cela signifiait un documentaliste de trshaut rang, du service diplomatique, qui s'occupait de bien autre chose quede runions folkloriques pour la fte de la Bire, ou de faire chanter laTyrolienne des jeunes gens en culotte de cuir, avec une plume auchapeau. Ribbentrop tait le ministre des Affaires trangres d'Hitler.Revenons Mme de Taillac, et sa Comtesse de Palmyre, et elle estcertainement bien informe, puisque, dans ses sources elle cite leGnral Aussaresses, qui, encore moins vieux que moi, n'a jamais connu

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  • ma mre, mais a peut-tre consult des archives du Service deRenseignements franais, dont il fut, un moment, le patron, et Ardisson,qui est bien jeune (pour moi).Supposition gratuite de ma part et fielleuse, d'accord. Peut-tre lemoment est-il venu de vous dire comment j'ai connu ( peine connu) unpersonnage qui dpasse tous ceux de la Rsistance, car il a dj jou unrle de tout premier plan lors de la premire guerre mondiale, lorsqueminuscule attach militaire Moscou en 1917, il a particip la naissancede la Troisime Internationale, la structuration de l'Arme Rouge, ladbacle des interventionnistes franais, avec les Mutins de la Mer Noire Andr Marty et Charles Tillon (qui sera en 1941 le chef des F.T.P.F. enFrance), et sera dlgu de Trotski, pour la bataille de Tsaritsyne, sur laVolga, auprs de Joseph Vissarionovitch, l'homme qui aprs avoir priscette ville sera mondialement connu sous le nom de Staline, et la villebaptise Stalingrad. Ce personnage tait le capitaine Jacques Sadoul.(1881/1956)Sa biographie que je tire de J. Maitron : Dictionnaire biographique dumouvement ouvrier franais (ditions de l'Atelier), tourne en grande partieautour de son oeuvre principale : notes sur la rvolution Bolchevique, dontje possde la rdition de 1971 chez Maspro.Je n'ai aucune autre documentation qui me permette de critiquer cettebiographie : pourtant elle parle de son fils unique Ari, dcd en 1936.Or j'ai appris ce dcs en 1939, par sa soeur, Moussia, laquelle j'endemandais des nouvelles, parce que j'avais connu Ari en 1934, Palmyre,chez nous l'Hotel Znobie, assistant metteur en scne de Epstein, venutourner un pisode de La Chtelaine du Liban, o jouaient les vedettesAnnabela et Jean Murat.Et papa m'avait abondamment parl du tratre Sadoul, version ActionFranaise, ce qui avait aviv chez moi, curiosit et immense sympathiepour le fils Sadoul ; cette date, juste devenue communiste, je prenais lecontre-pied de toutes les ides de mon pre.Donc je me permets de signaler Maitron que Jacques Sadoul avait unefille, Moussia marie avec Albert Elissalt, armateur la pche et vivantjusqu' l'an 2 000, Saint Jean de Luz (Pyrnes atlantiques). Je parlerai denouveau de Moussia Sadoul, quand je raconterai mon mariage blanc avec

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  • Ella Raitz, qui faisait partie de la bande J. P . (Vernant) qui pratiquaitle tout nouveau scandaleux nudisme, en 1939, l'le du Levant.).Durant l't 1917, Albert Thomas sous-secrtaire d'tat l'Artillerie et l 'quipement militaire dcida, en accord avec le gouvernementRibot-Painlev, de dtacher J. Sadoul auprs de la mission militairefranaise, comme observateur politique charg de transmettre sesobservations sur l'volution de la situation en Russie.Ainsi naquirent ces notes sur la Rvolution Bolchevique. les lire on peutpenser que ce fut un excellent document pour pousser le parti socialiste l'adhsion la Troisime Internationale, et l'on comprend trs bien queLnine, lui-mme, lui ait demand de le faire publier en France, et derompre avec le parti socialiste. Mais ce que l'on voit en permanence c'estaussi une dmonstration lumineuse de son dsir de tout faire, ou conseillerde faire, notre diplomatie, pour viter cette capitulation sans conditionsque fut la paix de Brest-Litovsk qui librait l'Allemagne sur tout son frontEst.Sadoul, de toutes ses forces, demandait de ne pas soutenir Les Blancs ; ceque persistaient faire, Mission Militaire et Ambassade Moscou, ainsique l'tat-Major Paris.Aprs la parution Paris de ses notes sur la Rvolution Bolchevique.(octobre 1919) avec une prface d'Henri Barbusse, J. Sadoul fut inculp dedsertion l'tranger en temps de guerre, d'intelligence avec l'ennemi, deprovocation de militaires la dsobissance, d'embauchage de militairesfranais dans une arme ennemie. Il fut condamn mort et ladgradation militaire le 8 novembre 1919 par le conseil de guerre de Paris.Pire que Dreyfus, mais par contumace et pour lui aussi a s'est arrang.Si je peux le rencontrer l'automne 1939, avec sa fille, Moussia, J.-P.Vernant, sa femme Lida, ma nouvelle pouse (blanche) Ella, Bordeaux,Grande rue Sainte Catherine prolonge, j'ai oubli le numro (je n'aiaucune note) c'est parce que depuis le dbut de la guerre, le 3 septembre1939 il multiplie les contacts pour rectifier les normes mensonges qui ontentour le pacte germano-sovitique, et que je suis mobilis, depuis aot1939, la base arienne de Bordeaux-Mrignac. J. Sadoul resta collaborateur des Isvestia (presse sovitique) jusqu'au 17aot 1939, date laquelle, d'aprs une note qu'il adressa le 26 aot 1939

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  • Marcel Cachin (et conserve dans les archives Morizet) la direction dujournal lui tlgraphia de cesser immdiatement sa collaboration ; il enconcluait que le gouvernement sovitique avait dcid de rompre ds le 16ou 17 aot les ngociations avec la France et l'Angleterre. Il assuraitCachin que le pacte tait provisoire et que le devoir des communistesfranais tait de rester sans merci contre l'hitlrisme et de faire blocderrire le gouvernement franais. Il critiquait svrement l'attitude de ladirection du parti franais.Ce sont ces mmes explications qu'il nous fournit avec grande vhmence, Bordeaux, je l 'coutais bouche be, nous assurer que le pactegermano-sovitique ne signifiait en rien une alliance, et ne nous obligeait,en rien, soutenir les nazis.J.-P. Vernant, seul, n'tait pas d'accord, et comme j'acceptais totalementSadoul, appelant les autres l'appui, il me glissa en apart : il y en a quiont des illres. Quelques jours aprs, heureux de mes certitudes, je me prcipitais Grenoble, pour rencontrer le groupe des lycens communistes que j'avaisconnu au lyce Champollion en fin 1937, pour les informer de ce que jepensais tre la vraie ligne du parti : j'y rencontrai Pierre Fugain, dont lenom est insparable de l'histoire de la Rsistance dans la rgion, et de sesvictoires. Je lui racontais cette rencontre avec JACQUES SADOUL Bordeaux.Nous tions l, presque toute la bande J.-P. qui taient runis en aot1939 l'le du Levant : signaler la prsence de Lopold Cdar Senghor,agrg de lettres, que mon pouse blanche Ella Raitz avait intgr augroupe avec une certaine dose d'ironie : elle se croyait la plus brune detoute la bande, triomphant trs volontiers de la pleur des autres ; un matin,de la fentre qui donnait sur la cour quelqu'un lui cria :- Il y a quelqu'un de plus noir que toi ! Viens voir ! Accourant du fond ducouloir elle hurlait :- Pas possible, il faut que je le tue.Mettant le nez la fentre elle clata de rire en voyant ce noir, vraimenttout noir, qui avait tout entendu : assis mme le sol, il tournait vers lafentre un visage plutt hilare, et fit ds lors partie de la bande J.-P.

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  • Il y avait eu Bordeaux aussi un change que tout le monde par la suiteretint avec beaucoup de sourires : Cdar m'avait demand, avec la trsgrande prcision qui le caractrisait, la signification exacte du terme mariage blanc en insistant sur la totale libert sexuelle de mon pouse blanche .Vous pouvez imaginer la suite mticuleuse que ce grand grammairienfranais apportera son tude pratique. La petite fille de Jacques Sadoul enrigole encore, Moussia, sa mre, lui avait racont mon mariage blanc etson tude par Cdar.Senghor, dput dans la premire Assemble Constituante, aprs laLibration, fut charg de contrler la rdaction de la Constitution de notrequatrime Rpublique : il tait le seul capable d'crire en bon franais.Quelques annes aprs il sera prsident de la Rpublique du Sngal etcrera le mot Ngritude.J.-P. Vernant a raison, je me suis toujours et partout prsent comme le filsde ma mre, et je continue ici, Saint Jean Cap Ferrat, chez Grace d'Astier.Et au fils de ma mre, elle propose immdiatement un contact avec sonmari, et cela, par un canal encore plus secret.Aprs deux ou trois nuits dans son hotel, interdit de toute sortie, maiscajol mieux que ses chats siamois par ma mre Paris, elle me donne unefilire Nice :Prs de la place Massna, au dbut de la Rue de France, il y a une galerielibrairie o je dois demander un Monsieur, dont j'ai oubli le nom, qui doitme mettre en contact avec Many. Tout ce que je peux en dire, c'est qu'ilarrive trs discrtement, il est sympathique, porte un grand chapeau mou,et un foulard autour du cou. Dehors il fait frisquet.Il m'accueille trs gentiment, ne me questionne pas : il suffit de me laisserparler, ce que trs naturellement je fais d'abondance, et sans discrtionaucune. N'est-il pas l'ami de Grace d'Astier ? Il regarde sa montre,m'explique sa mthode : il va sortir seul, le premier, et nous ne nousconnaissons plus ; je le suivrai dans la foule huit ou dix pas en directionde l'avenue qui, aujourd'hui s'appelle Jean Mdecin, comme si je voulaisaller m'attabler la grande terrasse d'une brasserie, qui, plus tard,deviendra Les Galeries Lafayette, l je croiserai la silhouette gante etdgingande d'Emmanuel d'Astier, que je connais trs bien, et, sans lui

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  • adresser la parole, aprs quelques pas je reviendrai sa suite, toujours petite distance ; s'il n'a rien remarqu de louche il rentrera dans labrasserie, je le suivrai et m'assoirai sa table.Des annes aprs, je verrai cette mme figure sympathique sur un bouquin,avec chapeau mou et foulard, et que la galerie du dbut de la rue de France,tait la Galerie Romanin, la sienne.

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  • 4 - L'homme se nommait Jean Moulin

    C'tait au tout dbut de janvier 1942, il venait d'tre parachut en France,avec son microfilm, par lequel de Gaulle lui donnait mission d'organiser laRsistance, il me prsentait d'Astier : ainsi pourrais-je vous dire que JeanMoulin m'avait fait entrer dans la Rsistance Gaulliste, avant mme qu'ellen'existt, premier minuscule sous-marin communiste, non homologu,plutt rejet, un vritable anarchiste petit-bourgeois .Si tu avais su Henri Frenay ! Toi qui cherchais un vague pasteur de ligueshumanitaires pour prouver les louches frquentations amricaines etcommunistes de Jean Moulin. Si tu avais pu papoter avec le Snateur MacCarthy sur Eleanor Roosevelt et ses rseaux communistes en Francemme et dcouvrir que Grace d'Astier n'tait pas seulement unemm-chat ; peut-tre aussi, depuis quand et comment elle connaissaitJean Moulin, en tout cas avant son dpart pour Londres et quel rle avaitt le sien dans mission et voyage.Avec d'Astier j'allais parler, beaucoup parler, j'allais tre son singe defoire, son premier terroriste de France, Qu'il allait, en cachette certes,montrer partout. Douzou m'a dit avoir retrouv dans les archives duB.C.R.A. (je crois) mention d'un commando ayant rejoint d'Astier cette date. Moi ? Un commando ! ! ! Plutt un blanc d'uf battu en neige.Dans le dsordre de mes inadmissibles (pour les contrleurs des cadres duparti, dont je ne suis pas) confidences, je vais essayer de mettre de l'ordre.Et en enfant bien lev, poliment curieux, je l'avais d'abord cout.Formidable : lui, fumeur d'opium (comme mon pre) s'tait sevr, sevrtout seul, sans aucune aide mdicale. Voulant faire quelque chose ilavait envisag le principal risque de la clandestinit : l'arrestation, latorture, et ce qui pouvait tout foutre en l'air : Les aveux.Une doctrine avait cours : compter les moutons, se concentrer sur lecomptage des moutons, sous les coups : un mouton, deux moutons, centdix-neuf moutons et la suite, dans le mutisme le plus complet. Une sorted'auto-hypnose, si l'on veut bien se rfrer la dfinition de l'hypnose par

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    4 - L'homme se nommait Jean Moulin 34

  • l'cole anglaise :L'hypnose est un dtournement de l'attention. Compter les moutons, pas lescoups.Many pensait pouvoir longtemps rsister ainsi aux coups, mais opiomanede longue date, il savait qu'il succomberait une privation d'opium, et, enloques, parlerait. Ainsi, seul, sans assistance aucune, il avait cess defumer, pour pouvoir agir. Il me disait a tout simplement, pour me montrerque je pouvais avoir confiance en lui.Il savait que mon pre, lui aussi opiomane, (Grace tait venue Palmyre,visiter avec ma mre, les tribus bdouines, o sa blondeur avait dchandes passions) m'avait offert de tirer sur la pipe, pour me rcompenser del'avoir, un jour, Palmyre en Syrie, aid planquer son kilo d'opium, lorsd'une perquisition de la police, et que j'avais trs vivement refus dedevenir esclave de cette drogue.Je crois qu'il tait plus fier de me dire son sevrage, dont mon pre avaittoujours t incapable, que sa cration d'un mouvement de Rsistance.Ainsi mis en confiance, moi de lui parler de moi.

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    4 - L'homme se nommait Jean Moulin 35

  • 5 - Mon 18 juin 1940, moi

    Ami, entends-tu le vol noir, des corbeaux, sur la plaine.Mut de Bordeaux-Mrignac, j'tais soldat de deuxime classe, dansl'escadrille de reconnaissance de l'Arme des Alpes.Aprs la chute de Paris (le 14 juin) notre unit s'tait replie, en bon ordre,sur le petit village de Sablet, dans le Vaucluse, deux pas de Vaison laRomaine, dans la dlicieuse rgion viticole de Gigondas, Vacqueiras, aupied de la chane des Dentelles de Montmirail : le Paradis ne fait pasmieux. Les cerises bigarreaux, mures clater.Le maire de Sablet, en cette priode o Henri Amouroux dcomptera 40millions de Ptainistes, (population totale de la France, en 1940) avait reudu mieux possible notre unit ; au commandant de la Vaissire, qu'ilaccueillait dans sa minuscule mairie, il avait prsent l'hospitalit duvillage : Craignant que votre intendance ne suive pas bien, pour ce soir,toutes les familles du village recevront dner, selon leurs moyens, un oudeux soldats, soldats seulement, pas un seul grad, ni sous officier, niofficier .Dans cette France, o l'Histoire d'Amouroux oublie qu'il y avait la censure,l 'opinion relle, l 'opinion publique, ne parlait que d'une dbacleinimaginable des cadres officiers de toute notre arme, fuyant les premiers,en Traction Avant (la Citron, dernier cri) et se saoulant au Champagne,alors qu'ils abandonnaient leurs hommes, qui eux, pied ou en camions, nese saoulaient qu'au Gros Rouge, les pauvres. Le lendemain, le mmemaire, avait pri les mmes soldats, de deuxime classe, de bien vouloirsoulager les cerisiers de leurs fruits trop mrs, les hommes du village tantau Front, ou dj prisonniers, ne pouvant faire l'indispensable cueillette ;mais encore une fois le maire demandait aux seuls simples soldatsd'assumer cette dlicieuse corve.Ordre pass de rentrer pour 17 heures : rassemblement dans la cour del'cole, on ne savait pas pourquoi. Nous revenions en dsordre, vivementindigns parce que, jaloux, plusieurs sous-officiers taient venus casser des

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  • branches de cerisiers, pour nous en faire porter la faute ; trs agits aussid'une imptueuse diarrhe que nous ne parvenions pas contenir, danscette petite cour qui ne comportait qu'un seul cabinet la Turque. Dsastredans toute la cour.Rassemblement dans la seule classe de l'cole, pour couter le MarchalPtain, parler de cesser le combat. J'en conclus, plus tard, que c'tait le 17juin 1940.En silence, plus ou moins au garde vous, nous avons cout. Un gars s'estmis pleurer. C'tait un boy-scout. Je ne disais rien. J'observais. Un garsdit : Qu'est-ce qu' on fout ici ? Quand est-ce qu'on s'en va ? Puis plusieurs voix : ouais, quand est-ce qu'on se tire ? Merde ici, merdeici. Se sentant interpell, la cantonade, l'adjudant-chef Deguines voulut nousfaire taire, peut-tre saluer au garde vous une triste Marseillaise. Ne croyez pas que vous serez mieux avec les Boches : ils vont vousmater, eux. oui, ils vont vous mater, les boches . Avec un rictus dejouissance.Comme s'il regrettait de ne pas avoir pu nous imposer une dictature,comme si dj, il reniflait des espoirs de collaboration , pour nousmater. Pour nous mater, on nous annonait, sur le champ, notre dpart deSablet, l'antimilitarisme dltre.Le soir mme on dmnageait pour une base dans la nature, Travaillan, jecrois, sans population, dans un camp abandonn prcipitamment par uneautre unit d'aviation.Au matin, branle-bas de combat : tenue N 1, (je ne l'avais jamais portedepuis 1938, pour saluer, sur les Champs lyses, le Roi et la Reined'Angleterre) chaussures astiques, molletires archicontrles, en rangs,pour assister la messe ; une messe pour demander pardon, pour nous,mais o l'glise semblait, elle, clbrer son Te Deum de victoire. Pour lapremire fois je m'aperois que nous avons un officier aumnier.Une, deux, une, deux, flanqus de nos sous-officiers on nous conduit versun autel install sur la queue d'un Potez 63, le dernier modle de notreaviation.

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    5 - Mon 18 juin 1940, moi 37

  • Garde vous, le commandant de la Vaissire nous passe lentement enrevue.

    Quand il arrive ma hauteur, je saute hors du rang, je salue le commandant six pas, garde vous impeccable, tte bien droite, le regard fix droitdevant moi : mon commandant, je ne dsire pas assister cette messe .Le commandant, un instant interloqu, couvre sa surprise, et d'un geste trsnoble, me montrant l'un des baraquements abandonns :- C'est ton droit, tu peux te retirer.Nouveau salut six pas, nouveau garde vous, demi-tour droite, droite,je m'loigne au pas gymnastique. De toute la guerre, je pense que c'est monseul vritable acte de courage, parce que spontan. Il ne m'a valu aucunedcoration.J'explique Many ma virulente indignation : depuis plusieurs jours, tousles journaux ne cessaient de nous comparer, nous les jeunes d'aujourd'hui, aux jeunes de 14 18, les poilus, les hros nous n'tions que desfainants, issus des premiers congs pays, fils aussi de l'cole sans dieu etdu Front Populaire.Voir ce prtre venir nous proposer de demander pardon, en nous montrantle chemin de l'glise, je comprenais Aubaine de la dfaite , jecomprenais charognards et corbeaux sur les cadavres des champs debataille. J'avais eu comme un flash d'un clbre tableau de Breughel, lescorbeaux sur la neige en hiver. Quand, dbut 1944, au maquis de laMontagne Noire, j'entendrai pour la premire fois, la Radio Anglaise, ceprambule de ce qui allait tre baptis : Le Chant des Partisans Ami, entends-tu, le vol noir, des corbeaux, sur la plaine Je fus emball, et m'empressai de faire partager, motion et jubilation mes copains : j e me souvenais , j e me sen ta i s avec des amis ,magnifiquement exprim, compris, aim : les auteurs de ce chant avaientressenti les mmes vibrations que moi, le 18 juin 1940. C'est nous, quibrisons, les barreaux, des prisons, pour nos frres. c'taient Blanchard etmoi, avec Herv, finissant le huitime barreau du Palais de Justice deParis. Oh les tueurs la balle et au couteau tuez vite C'taient Manuel et moi, presss de trouver notre premier officier nazi, sipresss que nous ne voyons pas venir l'heure du couvre-feu, et sommes

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    5 - Mon 18 juin 1940, moi 38

  • enferms dans le commissariat de la rue Bonaparte, lui avec son poignard,moi avec le 6, 35 de ma mre. Le chant des partisans, c'tait bien notrechant. L, dans la Montagne Noire, en 1944, avec le groupe Armagnac,dont j'tais un peu le cornac, trs local, nous l'avions adopt. Alors, enjanvier 1942, je racontais d'Astier, tout sur les dbuts du tout nouveau terrorisme dont parlaient presse et radio, et comme tout le monde,comme lui d'Astier aussi, j'exagrais bien inutilement mon propre rle, parexemple en affirmant avoir particip, moi-mme, certains coups dontj'avais seulement connu dans le dtail l'excution ; a faisait beaucoup,beaucoup. Il m'installa dans un premier temps Antibes, chez un peintrenomm Girard, qui avait cr , on dira plus tard imagin un rseauque l'on nommera Carte, dans l'Histoire de la Rsistance. (Voir :Histoire de la Rsistance en France. Nogures. Degliame. Vigier. ChezRobert Laffont. Tome ii) Mais les services anglais lui avaient quand mmedlgu un officier traitant, et pas mal de fric. (on retrouve le rseau Cartedans l'introduction de celui qui se fera appeler Guillain de Bnouville, etsera sur ses omissions au sujet de Hardy ; de plus Carte tait totalementcontre de Gaulle.).Totalement inculte en peinture, comme dans le reste, j'aimais pourtantbeaucoup ce qu'il faisait. J'admirais encore plus ses trois filles, trs belleset charmantes, mais auxquelles on avait dit que j'tais tellement secret,qu'il ne fallait pas me parler. Elles n'eurent de cesse de me prsenter leurcopine, la fille du docteur Lvy qui, lui, travaillait rellement, etefficacement avec les Anglais. Il y perdra la vie. Il m'avait propos dem'hberger quand Girard en aurait assez, mais j'tais une coqueluche ;l'une des filles Girard sera connue dans le cinma sous le nom de DanileDelorme. les autres aussi je crois, feront du cinma, mais j'ai oubli lesnoms.

    C'est curieux de devenir un singe de foire, bien poli, bien gentil. J'tais lepremier et le seul terroriste sur la cte d'Azur, mais si peu terrifiant.Girard, tout fier de sa capture, dcida de me montrer Henri Matisse,le parrain de tout ce qui se voulait artiste sur la cte. J'aimais bien a, enattendant que Many et trouv qui me montrer Lyon, qui sera lacapitale de la Rsistance Gaulliste, en cette anne 1942. (Yvon Morandat,Georges Bidault, les Aubrac, Pascal Copeau Ribire, etc.).

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    5 - Mon 18 juin 1940, moi 39

  • Au Cap d'Antibes, Matisse, Girard, et un autre peintre, invits partager leGrand Secret, sachant que j'tais recherch sur fiche par la police,voulurent jouer les experts maquilleurs, en modifiant les quilibres de monvisage, et par la mme action, participer une trs vibrante Rsistance.J'tais aux anges : maquill par Henri Matisse.Mais ce qui aujourd'hui, en mars 2000, me monte au znith de l'Histoire,c'est quand, de passage l'Assemble Nationale, (invit pour unecommmoration de copains fusills en 1942) au hasard d'une lecture, jevois que l'hymne Les Partisans, auquel chaque crmonie, les autorits serecueillent, a t crit par Joseph Kessel et Maurice Druon, d'aprs un texted'Emmanuel d'Astier de la Vigerie, lequel a su magnifiquement interprterla narration de son petit singe de foire, que j'intitule : Mon 18 juin 1940 moi. Le Chant des partisans, 30 mai 1943.Depuis 1940, Anna Marly chante en Grande Bretagne pour les soldats, enfranais, en anglais et en russe, sa langue maternelle.Emmanuel d'Astier de la Vigerie a crit, sur l'un de ses airs, les paroles deLa Complainte du Partisan, que je me permets, sans aucune concertationavec qui que ce soit, de rapprocher de la trs clbre complainte de makidont s'inspira en aot 1928, Bertolt Brecht, pour son Opra de quatre sousjou au Thtre am Schiffbauerdam. Il les a proposes Andr Gillois,responsable d'Honneur et Patrie, radio de la Rsistance franaise, pourl'indicatif de sa premire mission, prvue pour le 17 mai.Un air inspir du folklore russe fut prfr. Siffl et non chant,simplement accompagn par le bruit feutr des pas sur les cordesbloques de la guitare. C'est la premire version du Chant des PartisansAujourd'hui, le journaliste Joseph Kessel, d'origine russe, en a crit, avecson neveu Maurice Druon, une version franaise destine la chanteuseGermaine Sablon, pour le film de propagande Three Songs AboutRsistance.Les paroles nouvelles, plus denses, plus fortes que les premires, semblentmaner directement des maquis :Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux dans la plaine ?Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu'on enchane ?Oh ! partisans, ouvriers et paysans, c'est l'alarme !Ce soir l'ennemi connatra le prix du sang et des larmes.

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    5 - Mon 18 juin 1940, moi 40

  • Montez de la mine, descendez des collines, camarades !Sortez de la paille les fusils, la mitraille, les grenadesOh ! francs-tireurs, vos armes, vos couteaux ! tirez vite.Oh ! saboteur, attention ton fardeau : dynamite !C'est nous qui brisons les barreaux des prisons pour nos frres,La haine nos trousses et la faim qui nous pousse, la misre.Il y a des pays o les gens au creux des lits font des rvesIci, nous, vois-tu, nous, on marche, nous, on tue, nous, on crve.Ici, chacun sait ce qu'il veut, ce qu'il fait, quand il passeAmi, si tu tombes, un ami sort de l'ombre ta place.Demain, du sang noir schera au grand soleil sur les routes.Chantez, compagnons ! Dans la nuit la libert nous coute.Relisant le texte, Kessel murmure son neveu : c'est peut-tre tout ce quirestera de nous.

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    5 - Mon 18 juin 1940, moi 41

  • 6 - Quarante millions de ptainistes

    Comme veut bien le dire Henri Amouroux, qui n'tait pas l, et oublie qu'ily avait la censure. Mon 18 juin moi avait eu des tmoins, tous mes camarades aligns enrangs pour assister la messe, mais aussi l'officier, dont j'ai oubli le nom,avec lequel je travaillais habituellement tenir jour, sur une immensecarte de l'Italie, son dispositif militaire ; mon travail consistait poser despunaises multicolores, et des brins de laine coloris sur la carte, en accordsoit avec les comptes rendus de notre Escadrille de reconnaissance del'arme des Alpes , soit avec un bulletin quotidien que nous adressait leDeuxime Bureau.Je marquais ainsi toutes les installations militaires italiennes : casernes,cantonnements, hpitaux, bases de tir, hangars, approvisionnements,troupes, depuis les mulets, jusqu' la quintessence de l'arme italienne :Les Chemises noires fascistes. Sans m'tre jamais questionn sur ladfinition de la fonction de cet officier, je le considrais comme l'officierdu Deuxime Bureau de notre unit.Trs peu aprs ma sortie des rangs, avant la messe sur le Potez 63, il avait son tour salu le Commandant de la Vayssire, et venait me rejoindredans le baraquement o j'avais commenc consulter les documentsparpills terre : c'taient ceux de l'unit en dbacle qui nous avaitprcds, et surtout des documents Deuxime Bureau .Je bondis de curiosit sur l'un d'eux dont j'ai oubli le titre exact mais quitait la documentation du Deuxime Bureau sur les aviations trangres,que je pris trs au srieux parce que sur la couverture, en grosses lettresrouges, la consultation et la diffusion du contenu de ce bouquin tait interdite et punissable de la peine de mort. Plus aujourd'hui, j'espre : au xxie sicle. Vous comprenez ma joie. Il yavait des tas d'excellentes photos d'objectifs bombarder, en Allemagne etun peu partout, des chiffres sur le nombre d'avions et leurs marques, leursarodromes etc. En bon petit communiste curieux, je regardais ce qu'il y

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    6 - Quarante millions de ptainistes 42

  • avait sur l'Union Sovitique ; pas grand-chose qui m'intresst, part lechapitre sur les parachutistes Dans cette guerre que nous avions perdue ( croire Ptain) on avaitdcouvert des armes nouvelles et terrifiantes, auxquelles on attribuait lavictoire allemande : les chars groups des irrsistibles Panzer Divisions,ensuite les assourdissants bombardements en piqu des avionsMesserschmidt, les Schtukas, mais surtout les insaisissables parachutistesqui partout ouvraient la voie sans combat aux units blindes, opraient demiraculeuses descentes sur des postes cls sur les arrires des ennemis(prise de Rotterdam en 1940) : tous les ponts sauvs de la destructionplanifie, pris et gards ouverts par les parachutistes allemands.Mais une lgende ou une rumeur courait sur eux : on en avait vu partout,sous les dguisements les plus impensables : n'avait- on pas vu un bataillonde bonnes surs prendre une position difficile en Hollande ou enBelgique ? Cet article dont la lecture pouvait entraner la peine de mortdevait tre srieux. Il parlait de grandes ftes organises par l'ArmeRouge pour montrer d'immenses lchers de parachutistes, et concluait sontude par : Le parachutisme ne peut en rien tre considr comme unearme de guerre, ce n'est qu'une sorte de propagande juste bonne influencer les foules slaves .La peine de mort aurait d tre inflige celui qui avait crit cela, et l'tat-Major qui en avait fait sa doctrine. Car c'tait devenu la thorie denotre tat-Major : En 1935, quand j'tais soldat Orly, on avait demanddes volontaires pour une compagnie de parachutistes en cration, quioffrait quelques avantages ; un de mes copains y tait all. L'officier qui enavait pris le commandement tait le lieutenant Sauvaignac, que jeconnaissais de Palmyre en Syrie, o il venait trs souvent comme officierdu contrle bdouin en 1933. L'effectif ne devait pas dpasser les soixantehommes, et avait t baptis : infanterie de l'air.Lors de la dclaration de guerre, en 1939, la compagnie d'Infanterie del'Air fut dissoute, et tous ses hommes (qui avaient t slectionns dansl'Arme de l'Air) furent verss dans l'Infanterie (Reine des Batailles) sich