2000 mai, protegez vous

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O n peut se passer de bien des choses dans la vie. Mais pas d’eau, du moins pas plus que quelques jours. Une éviden- ce, certes, mais une évidence qu’il faut rappeler à l’occasion quand on habite un pays qui possède d’im- menses réserves d’eau potable. Parce que même si elle est recouverte aux trois quarts d’eau, la terre n’en a pas à gaspiller: à peine 2,5 % de cette eau est potable. Potable peut-être, mais pas nécessairement facile d’accès: 75 % est glacée, emprisonnée à l’un ou l’autre des pôles. En bout de ligne, seulement 0,007 % de l’eau sur terre est potable et aisément accessible, rap- pelle le Courrier de l’Unesco dans son édition de février 1999. On ne peut pas dire, non plus, que le précieux liquide soit réparti de façon très équitable. À eux seuls, les neuf pays les mieux desservis possè- dent 60 % de l’eau. À l’autre extrémi- té, 80 pays n’ont pas d’eau en quanti- té suffisante alors qu’ils comptent 40 % de la population mondia- le. À l’intérieur même des pays, l’iniquité frappe dure- ment: en Afrique du Sud, par exemple, 600 000 fermiers blancs utilisent 60 % des res- sources en eau du pays, pen- dant que 15 millions de leurs concitoyens noirs n’y ont même pas accès. Chaque jour, près de 34 000 personnes meurent parce qu’elles n’ont pas accès à une eau de qualité suffisante en quantité nécessaire. Pour un total annuel d’environ 10 millions de décès: plus que la population du Québec! Si la tendance se maintient, pour utiliser l’expression consacrée, la situation ira en se dété- riorant, et, d’ici à 2025, on pourrait compter trois milliards de personnes touchées par des pénuries d’eau. Parce que la demande ne cesse d’augmen- ter et que les réserves, elles, ne ces- sent de diminuer. Depuis le début du siècle, pendant que la population s’est multipliée par trois, la demande d’eau se voyait multiplier par sept. Au Québec, terre d’abondance s’il en est une, les manques d’eau potable sont relativement fréquents et le prin- temps 1999 a vu le niveau d’eau du Saint-Laurent et des Grands Lacs bais- ser de façon inquiétante. Quand on sait C’est devenu un cliché de dire que son omniprésence nous fait oublier son existence. Pourtant, selon les cris d’alerte lancés d’un peu partout sur la planète, le jour n’est pas tellement loin où il faudra s’inquiéter de son absence. par Pierre Frisko 14 PROTÉGEZ-VOUS MAI 2000 0 L 100 L 200 L 300 L 400 L 500 L États-Unis Canada Royaume-Uni Suède France Israël Utilisation domestique de l’eau par personne par jour

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On peut se passer de bien deschoses dans la vie. Mais pasd’eau, du moins pas plus quequelques jours. Une éviden-ce, certes, mais une évidence

qu’il faut rappeler à l’occasion quandon habite un pays qui possède d’im-menses réserves d’eau potable. Parceque même si elle est recouverte auxtrois quarts d’eau, la terre n’en a pasà gaspiller: à peine 2,5 % de cette eauest potable. Potable peut-être, maispas nécessairement facile d’accès: 75 %est glacée, emprisonnée à l’un oul’autre des pôles. En bout de ligne,seulement 0,007 % de l’eau sur terreest potable et aisément accessible, rap-pelle le Courrier de l’Unesco dans sonédition de février 1999.

On ne peut pas dire, non plus, quele précieux liquide soit réparti defaçon très équitable. À eux seuls, lesneuf pays les mieux desservis possè-dent 60 % de l’eau. À l’autre extrémi-té, 80 pays n’ont pas d’eau en quanti-té suffisante alors qu’ils comptent

40 % de la population mondia-le. À l’intérieur même despays, l’iniquité frappe dure-ment: en Afrique du Sud, parexemple, 600 000 fermiersblancs utilisent 60 % des res-sources en eau du pays, pen-dant que 15 millions de leursconcitoyens noirs n’y ontmême pas accès.

Chaque jour, près de 34 000personnes meurent parcequ’elles n’ont pas accès à uneeau de qualité suffisante enquantité nécessaire. Pour untotal annuel d’environ 10millions de décès: plus que lapopulation du Québec! Si la tendancese maintient, pour utiliser l’expressionconsacrée, la situation ira en se dété-riorant, et, d’ici à 2025, on pourraitcompter trois milliards de personnestouchées par des pénuries d’eau. Parceque la demande ne cesse d’augmen-ter et que les réserves, elles, ne ces-sent de diminuer. Depuis le début du

siècle, pendant que la population s’estmultipliée par trois, la demande d’eause voyait multiplier par sept.

Au Québec, terre d’abondance s’ilen est une, les manques d’eau potablesont relativement fréquents et le prin-temps 1999 a vu le niveau d’eau duSaint-Laurent et des Grands Lacs bais-ser de façon inquiétante. Quand on sait

C’est devenu un cliché de dire que son omniprésence nous fait oublier son existence. Pourtant, selon les cris d’alerte lancés d’un peu partout sur la planète, le jour n’est pas tellement loin où il faudra s’inquiéter de son absence.

par Pierre Frisko

14 PROTÉGEZ-VOUS MAI 2000

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ël

Utilisation domestique de l’eau par personne par jour

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que la moitié de la population de laprovince tire son eau du fleuve…

Voie de discordeNon seulement les ressources dimi-

nuent, mais on gère toujours l’eaucomme s’il s’agissait d’une ressourceillimitée. Par exemple, l’irrigationagricole, qui est la principale sourcede consommation d’eau sur la planè-te, voit 40 % de ses prélèvements dis-paraître en pure perte à cause du piè-tre état des conduites.

Encore plus indispensable que lepétrole, l’eau est source de convoitiseet, par conséquent, de conflit.D’amont en aval, on se dispute le droitd’utiliser l’eau des grands fleuvescomme le Nil, le Jourdain, le RioGrande ou le Mékong. La Turquie, parexemple, a déjà menacé la Syrie deréduire le flux de l’Euphrate pour laconvaincre de retirer son appui auxpopulations kurdes armées qui récla-ment l’indépendance.

Depuis la fin de la Deuxième Guer-re mondiale, pas moins d’une trentai-ne de querelles politiques ou militai-res ont éclaté à propos de l’eau auxquatre coins du globe. Et selon denombreux spécialistes des relationsinternationales, la diminution rapidedes ressources pourrait provoquerplus que sa part de conflits au coursdu nouveau siècle.

Privatiser?À une autre époque, chaque fois

que la demande grandissait, il suffi-sait d’augmenter l’offre. Unementalité qui a guidé nos pasjusqu’à tout récemment, alorsque pour pallier d’éventuellespénuries, on songeait à remor-quer des morceaux d’iceberg.Cette époque est révolue. Ilfaut désormais apprendre àmieux gérer ce que nousavons, tout simplement.

À ce chapitre, deux ten-dances se dessinent. D’uncôté, profitant du courantactuel de déréglementation etde privatisations, certains pro-posent de considérer l’eaucomme n’importe quel autreproduit et de laisser les loisde l’offre et de la demande endéterminer le prix. C’est ensubstance la position du

Conseil mondial de l’eau, un orga-nisme parrainé par la Banque mon-diale et le Fonds monétaire interna-tional (FMI). C’est cette même posi-tion qui, il y a quelques années, avaitamené le Groupe Jean Coutu à pro-poser l’exportation de notre eau parnavires entiers vers les pays lesmoins bien nantis. Considéréecomme le pétrole du XXIe siècle, l’eauallait faire de nous les Arabes dufutur.

Une approche qui soulève sa partde critiques, notamment du côté duGroupe de Lisbonne (composé d’unevingtaine de personnes de différentesrégions du monde et qui évalue lesenjeux de la mondialisation) et de sonprésident Riccardo Petrella. Un grou-pe qui prône la mise en place d’uncontrat mondial de l’eau et réfutel’argumentation strictement économi-que: «Les principes fondamentaux dela Banque mondiale et du FMI, c’estque l’augmentation de la populationet les besoins agricoles feront en sorteque l’eau deviendra une ressourcerare et que le seul moyen de la gérerest de la soumettre aux lois du mar-ché. Ce que nous proposons, plutôt,c’est un parlement mondial de l’eauqui serait l’expression de la partici-pation de différents peuples, groupeset citoyens à l’usage, à la conserva-tion et à la promotion de l’eau, dansun cadre de développement durablede ce bien commun, patrimoine del’humanité», dit Riccardo Petrella.

À une autre époque, chaque fois que la demandegrandissait, il suffisait d’augmenter l’offre. Une men-talité qui a guidé nos pas jusqu’à tout récemment,alors que pour pallier d’éventuelles pénuries, onsongeait à remorquer des morceaux d’iceberg.

À une autre époque, chaque fois que la demandegrandissait, il suffisait d’augmenter l’offre. Une men-talité qui a guidé nos pas jusqu’à tout récemment,alors que pour pallier d’éventuelles pénuries, onsongeait à remorquer des morceaux d’iceberg.

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Soixante-quinze pour cent de l’eau est gla-cée, emprisonnée à l’un ou l’autre des pôles.Ainsi, seulement 0,007 % de l’eau sur terreest potable et aisément accessible.

Soixante-quinze pour cent de l’eau est gla-cée, emprisonnée à l’un ou l’autre des pôles.Ainsi, seulement 0,007 % de l’eau sur terreest potable et aisément accessible.

«Les principes fondamentaux dela Banque mondiale et du FMI,c’est que l’eau deviendra uneressource rare et qu’il faudra lasoumettre aux lois du marché.Nous proposons plutôt unparlement mondial de l’eau quiserait l’expression de laparticipation de différentspeuples, groupes et citoyens dansun cadre de développementdurable.»

— Riccardo Petrella, président du Groupe de Lisbonne et auteur duManifeste de l’eau

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Malgré les souhaits deRiccardo Petrella etdu groupe de Lisbon-ne, l’eau ne fait tou-jours pas partie du

patrimoine mondial et n’est pasgérée comme telle. Au Canada,ce sont les gouvernements pro-vinciaux qui sont propriétairesdes terres et des ressourcesnaturelles. Ainsi, selon le Codecivil du Québec, «l’État est pro-priétaire du lit des lacs et descours d’eau navigables et flot-tables jusqu’à la ligne des hau-

tes eaux». Subtilité: propriétai-re du lit, ça ne signifie pas pro-priétaire de l’eau. Parce quecomme l’air, l’eau ne serait passusceptible d’appropriation.Sauf, bien sûr, lorsqu’elle estmise dans un récipient.

Le portrait est différent dansle cas des eaux souterraines.Selon l’article 980 du code civil,c’est le propriétaire du terrainqui possède les droits sur l’eauqui s’y cache. Il peut donc ensoutirer autant qu’il le souhaite,pourvu qu’il n’épuise pas la

nappe ou qu’il ne nuise pasaux autres utilisateurs dela source souterraine. Et

même s’il en abusait, le fardeaude la preuve reviendrait à

ceux qui se sentiraient lésés.Voilà peut-être pourquoion se bouscule pour met-tre notre eau en bouteilles.Ce qui n’est pas sans irri-ter la coalition Eau-Secours, dont fait partie

Louise Vandelac, professeu-re au département de socio-

logie de l’Université du Qué-

bec à Montréal: «C’est quandmême assez incroyable qu’ondonne littéralement notre eau etqu’on la rachète pour près de200 millions de dollars parannée pour la boire dans des

petites bouteilles en plastique.»Eau-Secours n’est pas touteseule dans son camp, si on sefie aux propos du président dela Commission sur la gestion del’eau (qui remet son rapportincessamment), André Beau-champ: «Tout le monde est venunous dire, au cours des consul-tations, qu’il fallait que l’eausouterraine soit considéréecomme un bien patrimonial,

Si plusieurs veulent la mettre en bouteilles, d’autres désirent en gérer la distribution. Notre eau est-elle à vendre?

93 %Eau de source

Eau traitéeEau minérale4 % 3 %

Le marché de l’eau au Québec

Photo:R

éjean Poudrette

L’industrie embouteille trois catégories d’eau (gazéifiée ounon): l’eau de source, minérale et traitée. Pour l’instant,les prélèvements d’eau à des fins commerciales corres-pondent à 0,08 % de l’eau captée au Québec.

Page 4: 2000 mai, protegez vous

appartenant à la collectivité. C’est àpeu près unanime.»

Il n’y a pas de doute que notreeau est fortement convoitée, notam-ment du côté des États-Unis qui,depuis longtemps, cherchent àl’importer. L’existence de l’Accord delibre-échange nord-américain (Aléna)rend cependant l’exportation pé-rilleuse pour le Canada. Car si onpeut sans problème marchander del’eau en format de quatre litres oumoins, il faut éviter de l’exporter envrac, soutient Louise Vandelac: «Çapermettrait de considérer l’ensembledes eaux comme une marchandise etde pouvoir y appliquer le traité del’Aléna. Ce qui signifie, pour lesÉtats-Unis, la possibilité de prendreun contrôle extrêmement significatifsur nos eaux et soumettre toutes nosréglementations d’ordre environne-mental, voire de santé publique, àdes préoccupations d’abord économi-ques, de commerce.»

Fuite vers le privéSi l’eau est convoitée, il y a aussi

sa gestion qui fait l’envie de quel-ques sociétés. On se rappellel’empressement des entreprises lors-que le maire de Montréal, PierreBourque, a suggéré de privatiser leréseau de distribution montréalais. Etce n’est assurément pas par philan-thropie que les trois géants français

Vivendi, Bouygues et la Lyonnaisedes eaux tentent de mettre le pieddans la porte. De la cinquantaine demunicipalités qui, au Québec, ontconfié la gestion de leurs stationsd’épuration au privé, les trois quartssont liées à une des trois entreprisesfrançaises.

L’exemple britannique montrepourtant que les consommateurs n’ygagneraient pas au change. LesAnglais ont en effet vu leur factured’eau grimper de 55 % entre 1990 et1994. De quoi se méfier un peu, rap-pelle Louise Vandelac: «Il s’agit desavoir si on laisse certaines firmess’approprier de façon absolumentéhontée le bien commun, si on conti-nue par l’incurie des pouvoirspublics à laisser des firmes privéesse faire un fric incroyable à partird’un bien essentiel. Il faut voir queles marges de profit après impôt pourles compagnies de l’eau sont, danscertains pays comme l’Angleterre, del’ordre de 30 %. Et cet argent qu’ellesfont comme de l’eau, littéralement,elles l’utilisent pour investir, progres-sivement, l’ensemble des servicespublics et des télécommunications.»

Et l’exemple de Vivendi ne contre-dit pas pareille affirmation. Avec unchiffre d’affaires d’environ 60 mil-liards de dollars, l’entreprise a le ventdans les voiles. Outre son implica-tion dans la gestion et la distributionde l’eau, elle œuvre, entre autres,dans l’immobilier, l’électricité, leschemins de fer et les télécommunica-tions, en plus de contrôler Havas, unimportant groupe de presse qui pos-sède notamment Larousse-Bordas etLe Robert.

PROTÉGEZ-VOUS MAI 2000 17

«C’est quand même assezincroyable qu’on donnelittéralement notre eau et qu’on larachète pour près de 200 millionsde dollars par année pour la boiredans des petites bouteilles enplastique.»

— Louise Vandelac, professeure au département de sociologie de l’Université du Québec à Montréal

«Tout le monde est venu nous direqu’il fallait que l’eau souterrainesoit considérée comme un bienpatrimonial, appartenant à lacollectivité. C’est à peu prèsunanime.»

— André Beauchamp, président de la Commission sur la gestion de l’eau

Selon le Code civil du Québec, «l’État est propriétaire du lit des lacs et descours d’eau navigables et flottables jusqu’à la ligne des hautes eaux». Subtili-té: propriétaire du lit, ça ne signifie pas propriétaire de l’eau. Parce quecomme l’air, l’eau ne serait pas susceptible d’appropriation. Sauf, bien sûr,lorsqu’elle est mise dans un récipient.

Selon le Code civil du Québec, «l’État est propriétaire du lit des lacs et descours d’eau navigables et flottables jusqu’à la ligne des hautes eaux». Subtili-té: propriétaire du lit, ça ne signifie pas propriétaire de l’eau. Parce quecomme l’air, l’eau ne serait pas susceptible d’appropriation. Sauf, bien sûr,lorsqu’elle est mise dans un récipient.

Photo:R

éjean Poudrette

Page 5: 2000 mai, protegez vous

Les chiffres sont presquegênants: au Canada, la consom-mation quotidienne moyenned’eau est de 325 litres par per-sonne, soit environ le double

de ce qu’on utilise en Europe, etplus de 15 fois la consommationafricaine. Seuls les États-Unis, avecune moyenne de 425 litres par jour,font pire.

Mais pour savoir qui gaspilleréellement l’eau, il faut savoirqui la consomme. Or, au Québeccomme au Canada, les chiffresprécis sur la consommation d’eausont inexistants. Hubert Demart,président du Programmed’économie d’eau potable duRéseau environnement qui,chaque année, fait une campagnede sensibilisation contre le gaspillage,constate: «Il n’y a pas de bilan, il n’y apas de compteurs, donc on ne sait pas

Photo: Caputo/Liaison USA/Ponopresse

Qu’on soit pour ou contre leur installation dans nos maisons, les compteursd’eau nous rappelleraient que l’eau gaspillée quand on se brosse les dents le robinet ouvert équivaut à ce dont dispose, en un jour, un Malgache vivant en zone rurale.

... 23 % par l’industrie.Ce qui en laisse environ 8 % pour les ménages.

35 %Bains

et douches

30 %Chasse d’eau

20 %Lessive

10 %Cuisine

et boisson

5 %Nettoyage

Utilisation de l’eau par les ménages

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18 PROTÉGEZ-VOUS MAI 2000

À l’échelle mondiale, on estime que 69 % de l’eau est absorbée par l’agriculture...

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où passe l’eau. Ce serait mieux si on avait des chiffres plusprécis, pour savoir si notre problème est causé par des fui-tes, par la consommation domestique, etc.»

À l’échelle mondiale, on estime que 69 % de l’eau estabsorbée par l’agriculture, 23 % par l’industrie. Ce qui enlaisse environ 8 % pour les ménages. Et lorsqu’on parled’une moyenne canadienne de 325 litres par personne, oninclut l’eau utilisée par l’agriculture et l’industrie. Ce quinous laisse complètement dans le brouillard. D’où, selonM. Demard, la nécessité d’installer des compteurs: «Quand

vous avez un compteur, vous provoquezdeux choses. D’abord, une connais-

sance de la consommation, ce quipermet de savoir où passe

votre eau et qui vous met enposition de gérer comme ilfaut. Ensuite, ça nous rap-pelle qu’on paie en fonctionde la consommation.»

Il est évident qu’un comp-teur vous rappellerait que,

lorsque vous laissez coulerl’eau en vous brossant les

dents, vous gaspillez plus d’eauque ce dont dispose, pour une jour-

née, un Malgache vivant en zone rura-le.

Et il rappellerait aux construc-teurs autos que la production d’une seule voiture nécessiteautant d’eau que ce dont disposent, pour une année com-

plète, 110 Malgaches vivant enzone rurale.

Photos:R

éjean Poudrette

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éjean Poudrette

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Vuesur l’avenir

U n peu partout dans le monde, on s’entend mainte-nant pour promouvoir la gestion de l’eau par bassinversant. Il en va de même au Québec. Relativement

récente, cette approche considère l’ensemble d’un territoi-re drainé par un cours d’eau principal, ainsi que tous lescours d’eau secondaires et autres eaux souterraines quil’alimentent. On pourrait considérer le Saguenay et tousses affluents — dont le lac Saint-Jean —, par exemple,comme un bassin versant.

Une façon de faire qui comporte de nombreux avan-tages, dont celui d’impliquer des gens de tous les milieux— citoyens, industries, agriculteurs et autres MRC —dans la gestion de l’eau. De plus, en découpant le terri-toire en fonction du mouvement des eaux, on évite lessituations absurdes où une ville située en amont d’unerivière rejette ses eaux usées sans traitement au détri-

ment de ses voisines situées en aval.Pour l’instant, une seule expérience du

genre a été menée au Québec, autour dubassin de la rivière Chaudière. Mais

selon André Beauchamp, présidentde la Commission sur la gestion del’eau, il reste encore un bout dechemin à faire avant d’implanter lemodèle à toute la province:«Toutle

mondeest

d’accordpour dire

qu’on doitmaintenant

gérer les plans d’eauselon l’approche des bassinsversants. Mais une fois qu’ona dit ça, il y a probablementautant de définitions de lagestion par bassin versantqu’il y a de courants de pen-sée. Il y a des divergencesassez considérables sur lamanière dont cela doit êtremis en route et financé.» v

Pour l’instant, une seuleexpérience de «gestionpar bassin versant» a été menée au Québec,autour du bassin de la rivière Chaudière.

Pour l’instant, une seuleexpérience de «gestionpar bassin versant» a été menée au Québec,autour du bassin de la rivière Chaudière.

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