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Page 8 Du 20 au 26 octobre 2011 - N° 460 Pays des Alpes-Maritimes

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Les sciencesversion marine

Pour la fête de la science, l'Observatoire océanologique de Villefranche-sur-Mer a ouvert ses portes aux scolaires et au grand public. Une occasion rare de

découvrir ce qu'abrite ce centre de recherches en sciences marines qui tra-vaille aussi bien sur des études de renommée internationale que sur desprojets locaux tels que la météo-méduse ou l'impact du carbone suie des

bateaux de croisière.Marjorie Biran

Journéeslabos ouverts !

La rencontre oursin-enfants semble soulever de piquantes inquiétudes bien vitebalayées par le chercheur-animateur !

Pendant trois jours, dans lecadre de la fête de la science,les chercheurs de l'OOV, Ob-servatoire océanologique deVillefranche-sur-Mer, ont dé-laissé ordinateurs, microsco-pes, pipettes et éprouvettespour expliquer au grand publicles choses de la vie marine.

Vendredi 14 octobre, Aurélien etLoréna, élèves d'une classe deCE2 de Villefranche-sur-Mer, at-tendent à l'entrée de l'Observa-toire océanologique, curieux etimpatients. "On va voir des our-sins et des méduses vivantes maisje ne veux pas qu'elles me pi-quent". "C'est la première fois queje viens, on dirait un château".

Une méduse Pelagianoctiluca vivante àvoir de très très près.Un exercice quiremporte un francsuccès.

Difficile de décoller lesgarçons de cette "torpillejaune", robot destiné à la

surveillance du milieu marin.Le développement de

nouveaux instrumentstechnologiques d'observation

et de collecte des donnéesest l'une des missions de

l'Observatoire océanologiquede Villefranche-sur-Mer.

Les commentaires vont bon trainen attendant l'ouverture des nom-breux ateliers tenus par les cher-cheurs de l'Observatoire."C'est un site naturellement peu

ouvert au public malgré les deman-des car les travaux scientifiquesmenés ici ne se prêtent pas auxvisites", explique Mariam Cousin,directrice de la communication."Donc, nous ouvrons les portes aupublic et aux scolaires une fois paran, lors de la fête de la science".Un film sur l'acidification diffusé

dans la salle historique des filetspour commencer et, ensuite, lesenfants passent dans les jardins del'OOV. Tandis que la classe de CP/CE1 de Capucine, 6 ans, s'informesur les oursins dont le développe-

ment embryonnaire rapide inté-resse beaucoup les scientifiquesde l'observatoire, Louise, 7 ans,s'inquiète ! On vient de lui expliquerque l'étoile de mer qui évolue dansle bassin tactile raffole des oursinset il lui semble que cette dernières'apprête à passer à table !Juste à côté, c'est le préoccupant

sujet de l'acidification qui est aucœur d'une expérience de chimiede base. Prenez deux béchersd'eau de mer, ajoutez un peu decolorant et l'eau devient bleutée.Ajoutez du vinaigre, connu pourson acidité, et l'eau de mer se teinteen jaune. Sur la table, des coquilla-ges, composés de calcaire, qui nefiniront pas dans les béchers. C'estde la craie que la scientifique del'Observatoire glisse dans le mé-lange d'eau de mer vinaigrée. "Çapétille", s'exclament les enfants quivoient la craie se désintégrer etcomprennent le sort peu enviableque l'acidification des océans ré-serve aux organismes marins àsquelette calcaire. Capucine, sou-dain grave, ajoute : "Nous, les en-fants, on doit protéger la mer et seshabitants".Quelques mètres plus loin, c'est

un public de garçons qui s'inté-resse beaucoup à une sorte detorpille jaune. Ce robot sous-marin,

baptisé planeur des mers car il selaisse dériver entre deux eaux à1 000 m de profondeur, est un outildéveloppé à l'observatoire pourmesurer la température de l'eau, lasalinité et le taux de chlorophylle.Certains de ces robots planeurspeuvent être équipés de capteurspermettant de surveiller et de car-tographier des nuisances marines,en particulier d'ordre biologique,comme les pullulations de médu-ses. Les méduses, justement, autresecteur où l'Observatoire océano-logique de Villefranche est à lapointe de la recherche. C'est ici etnulle part ailleurs que l'on a réussià étudier en laboratoire le cycle devie de ces championnes de la sur-vie et de la biodiversité. Le nez surles aquariums, les enfants exami-nent attentivement la Pelagianoctiluca et ses beaux reflets mau-ves. Juste à côté, c'est le zooplanc-ton, repas des méduses qu'ils peu-vent examiner, à l'œil nu ou à laloupe. Ornella Passafiume, ingé-nieur en étude hydraulique eau demer, se fait un plaisir de répondreaux questions des enfants. Pourelle, ces journées porte ouverte sontun moment de partage vraimentappréciable. D'ailleurs, il n'est pasrare que ces visites suscitent desvocations de chercheur !

DOSSIER

Pays des Alpes-Maritimes Du 20 au 26 octobre 2011 - N° 460 Page 9

Les missionsde l'OOV

Ecole interne de l'UniversitéPierre et Marie Curie, placéeégalement sous la tutelle duCNRS, l'ObservatoireOcéanologique de Villefranche-sur-Mer constitue l'un desprincipaux campus français ensciences de la mer.Il rassemble environ 180

personnes, chercheurs,ingénieurs, techniciens etdoctorants.Les trois missions principales

de l'observatoire sont :- l'enseignement avec l’équipe

pédagogique composéed’enseignants-chercheurs del’Université Pierre et Marie Curyqui encadre de nombreuxstages en océanographie etgéologie pour des étudiantsfrançais et étrangers inscritsprincipalement en master;- la recherche avec deux

laboratoires reconnus par leCNRS et dont les thématiquessont la biologie cellulaire etl'océanologie pélagique,biologique, biochimique,physique et chimique;- l'observation avec des

mesures systématiques etrégulières effectuées aubénéfice de la communautéscientifique dans le milieulittoral (site de la rade deVillefranche-sur-mer) et enhaute mer (site DYFAMED à 28milles du Cap Ferrat). L'obser-vatoire participe ainsi audéveloppement de nouvellestechniques d'observation(gliders et flotteurs) et àl'élaboration de nouveauxprogrammes.

Des clichésde toute beauté

David Luquet, responsable dela plongée à l'Observatoireocéanologique de Villefranche-sur-Mer, est également unphotographe sous-marin depremier ordre. Quelques-uns deses clichés du petit peuple de lamer dont les couleurs et lesformes constituent un bestiaireféérique sont notammentexposés dans la salle historiquede l'OOV.Pour vous offrir une balade

sous-marine dans ce mondemagique, vous pouvez aussivous consulter le site de DavidLuquet, www.davidluquet.comet découvrir une impression-nante collection de photosdédiées à la Méditerranée, saflore et sa faune sous-marines.

Les pieds dans la rade...La renommée des travaux scien-

tifiques menés par l'Observatoireocéanologique de Villefranche-sur-Mer dépassent largement lesfrontières de l'hexagone et mêmede l'Europe. Mais la stationvillefranchoise revendique aussison ancrage local.

L'Observatoire océanologique deVillefranche-sur-Mer est un site in-ternationalement reconnu de re-cherche et d'enseignement dont lesscientifiques font partie des cher-cheurs les plus cités dans le monde.Des exemples ? A l'OOV, on déve-loppe des planeurs-capteurs sous-marins de très haute technologie."Observer la mer, c'est comme ob-server l'espace", explique HervéClaustre, directeur de rechercheau CNRS rattaché à l'observatoire."Les machines envoyées sous lamer doivent répondre à des con-traintes énormes avec une pres-sion qui double tous les 10 mètres".De la technologie donc, mais aussi

des études génomiques pointuessur six à sept sortes d'animaux dela rade. Un grand projet qui vapermettre des débouchés dans ledomaine thérapeutique. L'OOV estpar ailleurs leader en matière derecherche sur l'acidification desocéans et publie de nombreuxouvrages scientifiques sur cethème. Des exemples encore avecun partenariat avec la Nasa. Cesont des chercheurs de Villefran-che qui ont rédigé le cahier descharges pour les satellites améri-cains observant l'océan. "Un de noschercheurs est leader d'un groupesur l'étude des virus marins", ajoute

Une longue histoireLa richesse des eaux de la rade

de Villefranche-sur-Mer est con-nue depuis le début du 19e siè-cle.En 1882, un premier laboratoire

est installé par les scientifiquesBarrois et Fol afin d'étudier leplancton et son développement.En 1885, le professeur Alexis

de Korotneff crée une stationzoologique dans l'ancien bagnedes Rois de Sardaigne. Le finan-cement des recherches est assurépar la Russie. En 1900, la stationachète son premier bateau, laVelella, et installe un système depompage d'eau de mer pour ali-menter ses aquariums.Le laboratoire connaît ensuite une

période difficile avec la mort d'Alexisde Korotneff, en 1915, et la Révolu-tion russe qui prive les chercheursd'une grande partie de leurs res-sources financières. MichelDavidoff, directeur adjoint de la sta-

tion, se démène pour obtenir desdotations qui vont permettre de te-nir. En 1925, les difficultés financiè-res sont surmontées, un nouveaucanot à moteur est acheté et, en1927, la station russe publie le 1er

recueil de ses travaux.En 1931, après quatre ans de trac-

tations, le laboratoire est officielle-ment affecté au ministère de l'Edu-cation nationale, rattaché au Labo-ratoire Arago, à Banyuls-sur-Mer.Grégoire Tregouboff, proche colla-

borateur de Michel Davidoff,prend la direction de la station.Fermé pendant la SecondeGuerre mondiale, le laboratoireest remis en état entre 1945 et1950. A la fin des années 1950,la zoologie et la biologie des-criptive sont progressivementabandonnées au profit de l'éco-logie marine et de l'océanogra-phie pélagique.Les années 1960 voient se dé-

velopper les recherches dans di-vers domaines. En 1971, la stationde Villefranche devient officiellementindépendante de Banyuls et re-groupe trois laboratoires dépendantde l'Université Pierre et Marie Curie(Paris V) sous le nom de stationmarine de Villefranche. Après l'im-plantation de nouvelles équipes plu-ridisciplinaires, l'ensemble des la-boratoires est élevé en 1985 aurang d'Observatoire océanologiquedes sciences de l'univers.

Etablissement pluridiscipli-naire en sciences marines,l'Observatoireocéanologique deVillefranche-sur-Mer mènedes travaux dans denombreux domaines.

aussi Gaby Gorsky, directeur del'OOV. Mais "si l'OOV se trouve àVillefranche, c'est que les organis-mes vivants à étudier se trouventau pied du labo et que cette radepermet un accès à la mer profondeen 5 mn", explique encore GabyGorsky. Un ancrage local essentielpour le directeur de l'Observatoirequi précise que les conditions detravail des scientifiques sont gran-dement facilitées par le soutien dela municipalité villefranchoise et duconseil général des Alpes-Mariti-mes qui a financé, par exemple,une vaste étude sur les méduses,mystérieuses et fascinantes créa-tures. Si les travaux en recherchefondamentale paraissent un peuabstraits pour le grand public carles applications sont encore lointai-nes, certains travaux ont des appli-cations immédiates. L'étude desméduses devrait ainsi permettre dèsl'été prochain de prévoir les pério-des d'arrivée massive des ombrel-les urticantes sur nos plages. Autrerecherche dont les résultats vontconcerner directement les habitantsde Villefranche, celle de la mesurede l'impact des émissions de car-

bone suie des bateaux de croisièresur la santé humaine et sur le milieumarin.Du virus marin au réglage des sa-

tellites, de la recherche fondamen-tale internationale aux études loca-les, l'OOV, c'est tout cela à la fois.Et comme plus les scientifiquesavancent dans la connaissance desocéans, plus ils soulèvent de nou-velles questions sur les mystèresde la vie sous-marine, l'Observa-toire a un bel avenir devant lui !