À 36 ans, emmanuel macron devient ministre de l'Économie ......composition et la majorité...

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103 RUE DE LA BOETIE 75008 PARIS - 01 43 92 93 94 OCT 14 Mensuel Surface approx. (cm²) : 2353 N° de page : 70-74 Page 1/5 CROISSANCE3 0768171400509/GTG/OTO/3 Tous droits réservés à l'éditeur POLITIQUE, RÉGULATION & DROIT POLITIQUE Peur arriver a Bercy, Êmmanuel Macron a mené une campagne de réseaux et relais extrêmement efficace ou se déroule en fihgrpne le ftlmje son pâreours*tudiant et professionnel Ici a l'ENA en 2004. - "„ ~~*^ f^r^tt «/V " v . JlL^-Sl-.^ 1 '^-^> -* À 36 ans, Emmanuel Macron devient ministre de l'Économie dans le gouvernement remanié de Manuel Valls. Line consécration pour lejeune homme à la tête bien faite que tout son entourage juge « brillant ». G chez votre admiration s'il ousplaît. » Depuis son per- hoir à l'Assemblée, Claude lartelone tente de calmer ;s députés de l'opposition bien décidés à semer le chahut dans l'Hémicycle. Ce 10 septembre 2014, Emmanuel Macron qui vient de prendre le micro lors des tradition- nelles questions au gouvernement s'apprête à subir son bizutage. La f olle semaine Tout a commencé lundi 25 août, avec la démission du premier gouverne- ment de Manuel Valls au lendemain des déclarations fracassantes d'Arnaud Montebourg. Mardi après-midi, contre toute attente, Emmanuel Macron est nommé à sa place ministre de l'Éco- nomie, au sein d'un « gouvernement de clarté mr la Ligne, les comportements, hi composition et la majorité », précise le Premier ministre. Pour remplacer le truculent Monte- bourg, l'Elysée s'interroge, mais ne croule pas sous les candidatures. Cer- tains pronostiquent Michel Sapin, alors ministre des Finances, à la tête d'un grand et classique ministère de l'Economie, amputé du Redresse- ment productif. D'autres susurrent pourtant dans les couloirs du Palais le nom de Louis Gallois. Rien de très étonnant quand on se rappelle à quel point, en novembre 2012, la commis- sion sénatoriale a ovationné lors de son audition l'ex-patron de la SNCF et d'EADS, alors commissaire général à l'investissement, aux cris de « Gallois, Premier ministre ». La folle semaine continue mercredi 27, avec la passation d'armes à Bercy. Le même jour, le locataire de Matignon est acclamé au Medef après un dis- cours attendu et salué. Trois jours plus tard, il arrive encore seul à l'Université d'été dc son parti à La Rochelle. Tout le monde ne parle pourtant que du choix d'Emmanuel Macron à Bercy. L'anti-Montebourg Pour comprendre à quel point Arnaud Montebourg et son successeur se dis- tinguent, il faut avoir assisté à la céré- monie de transmission de pouvoirs et perçu le double langage permanent

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Page 1: À 36 ans, Emmanuel Macron devient ministre de l'Économie ......composition et la majorité », précise le Premier ministre. Pour remplacer le truculent Monte-bourg, l'Elysée s'interroge,

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POLITIQUE, RÉGULATION & DROIT POLITIQUE

Peur arriver a Bercy, Êmmanuel Macron a mené une campagne de réseaux et relais extrêmement efficaceou se déroule en fihgrpne le ftlmje son pâreours*tudiant et professionnel Ici a l'ENA en 2004. -

"„ ~~*^ f^r^tt «/V " v . JlL^-Sl-.^1 '^-^> -*

À 36 ans, Emmanuel Macron devient ministre de l'Économie dans le gouvernement remaniéde Manuel Valls. Line consécration pour lejeune homme à la tête bien faite que tout

son entourage juge « brillant ».

Gchez votre admiration s'ilousplaît. » Depuis son per-hoir à l'Assemblée, Claudelartelone tente de calmer;s députés de l'opposition

bien décidés à semer le chahut dansl'Hémicycle. Ce 10 septembre 2014,Emmanuel Macron qui vient deprendre le micro lors des tradition-nelles questions au gouvernements'apprête à subir son bizutage.

La f olle semaineTout a commencé lundi 25 août, avecla démission du premier gouverne-ment de Manuel Valls au lendemaindes déclarations fracassantes d'ArnaudMontebourg. Mardi après-midi, contretoute attente, Emmanuel Macron est

nommé à sa place ministre de l'Éco-nomie, au sein d'un « gouvernement declarté mr la Ligne, les comportements, hicomposition et la majorité », précise lePremier ministre.Pour remplacer le truculent Monte-bourg, l'Elysée s'interroge, mais necroule pas sous les candidatures. Cer-tains pronostiquent Michel Sapin,alors ministre des Finances, à la têted'un grand et classique ministère del'Economie, amputé du Redresse-ment productif. D'autres susurrentpourtant dans les couloirs du Palaisle nom de Louis Gallois. Rien de trèsétonnant quand on se rappelle à quelpoint, en novembre 2012, la commis-sion sénatoriale a ovationné lors deson audition l'ex-patron de la SNCF

et d'EADS, alors commissaire généralà l'investissement, aux cris de « Gallois,Premier ministre ».La folle semaine continue mercredi 27,avec la passation d'armes à Bercy. Lemême jour, le locataire de Matignonest acclamé au Medef après un dis-cours attendu et salué. Trois jours plustard, il arrive encore seul à l'Universitéd'été dc son parti à La Rochelle. Tout lemonde ne parle pourtant que du choixd'Emmanuel Macron à Bercy.

L'anti-MontebourgPour comprendre à quel point ArnaudMontebourg et son successeur se dis-tinguent, il faut avoir assisté à la céré-monie de transmission de pouvoirs etperçu le double langage permanent

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entre les deux hommes. « Tu ne peuxsavoir à quel point je suis heureux que cesoit toi qui me succèdes », entame l'ex-ministre du Redressement productif.Réponse empruntée à Oscar Wilde :« "Quand les gens sont de mon avis, j'ail'impression de m'être trompé." Tu m'asrassuré au quotidien a cet eyard. » Rires

I o

étouffés dans la salle. Et l'ancien avocatde conseiller en guise de conclusion :« La plus belle arme, cest la sincéritéBonne chance Manu ! »En réalité, Emmanuel Macron est unanti-Montebourg, non qu'il soit unanti-héraut du patriotisme hexagonalet du made in France, mais parce qu'ilest plus pioche de la réalité écono-mique actuelle. En arrivant à Bercy,Arnaud Montebourg est parti encroisade pour sauver les deux derniershauts fourneaux de Lorraine, à Flo-range. Emmanuel Macron préfere,lui, rendre visite à Acome, premièresociété coopérative et participa-tive (scop) de France, dont la deviserésume à elle seule la situation : « Dessolutions pour un monde en réseau ».C'est « Keynes et Colbert contre unancien Gracques [du nom du petitgroupe de personnalités, souventissues d'anciens cabinets socialistes,militant pour un renouveau intel-lectuel de la gauche] », résume unconseille! politique de l'Elysée quiconnaît bien les deux hommes.

Autre anecdote marquante, celle dc lataxe de 75 % sur les hauts revenus, pro-messe de François Hollande. Lorsqu'ill'apprend, Emmanuel Macron, quil'aide pourtant sur son programmeéconomique de campagne s'écrit :« C'est Cuba, sans le soleil ». Oblige àl'époque de la justifier, Arnaud Mon-tebourg préfere rappeler la période duNew Deal américain, durant laquellele Président « avait fait monter la taxesur les plus gros revenus jusqu'à 91 % ».

Parcours et réseaux

Pour en arriver là, et alors même qu'ilcomptait revenir dans le privé pourenseigner, le benjamin (36 ans) dugouvernement Valls II, a mené unecampagne de réseaux et relais extrême-ment efficace, où se déroule en filigranele film de son parcours étudiant et professionnel.Fils de médecins hospitaliers amié-nois, élevé che/ les Jésuites, Fmma-nuel Macron débarque au lycée

L'exceptionnelle promo Senghor de CEMAll y avait la promotion Voltaire (1980)de I EMA, connue pour avoir accouchede prestigieux cadres de la Republiqueparmi lesquels on trouve pêle-mêleFrançois Hollande, Segolene Royal,Henri de Castries, Dominique devillepin,Renaud Donnedieu de VabresMichel Sapin, Jean-Pierre Jouyetou Pierre-René Lemas ll y a maintenantla promotion Senghor, 2004 ou le défiledes noms et postes suffit a comprendre

le reseau maille par les liens étroitsentre anciens « Senghor » et l'ascensiondu jeune Macron

A Strasbourg, ils sont une bande resserréea passer du temps a lAcademiede la biere Emmanuel Macron, GaspardGantzer (conseiller communication al'Elysée), Frederic Mauget (conseillerBudget, Affaires financieres, Marchespublics auprès dAnne Hidalgo), Aurelien

Lechevallier (delegue general auxRelations internationales de lavillede Pans et conseiller international dAnneHidalgo), Sebastien Jallet (directeuradjoint du cabinet du ministre de la Ville,de la Jeunesse et des Sports) et AymericDucrocq (directeur des participationsau ministere des Finances)

Sans oublier Bons Vallaud (anciendirecteur de cabinet dArnaud Montebourg

et man de la ministre de l'Education),maîs aussi Sébastien Proto (conseillereconomique de Nicolas Sarkozy et

ancien associe-gérant chez Rothschild),Nicolas Namias (chez Natixis, ancien

conseiller de Jean-Marc Ayrault), AmelieVerdier (ancienne directrice du cabinetde Jerôme Cahuzac), Mathias Vicherat(directeur de cabinet dAnne Hidalgo) ouJulien Aubert (députe UMP du Vaucluse)Emmanuel Macron est un étudiant

sérieux et brillant, maîs aussi rieur, quin'hésite pas a imiter Sarkozy ou Balladur

Comment expliquer pareilles destinées?Pour Julien Aubert, « la promotion étaitassez politisée, connectée a la fois aNicolas Sarkozy et a François Hollande^alternance entre les deux a eterelativement rapide, ce qui explique quela même generation de l'ENA est

arrivée aux mêmes postes a de petitsintervalles » «ll y a une part de hasard etde circonstances », explique pour sa part

Gaspard Gantzer, tres proche d EmmanuelMacron durant leur scolarité a Strasbourg« Certains de notre promotion étaient agauche, même si cela n a pas empêched'autres de vivre des parcours adroitell y a aussi le fait que nous étions plusnombreux, 140 exactement, cè qui accro itfes chances cle réussite Et peut-être quele 21 avril 2002 a eu son importance.. »

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Secretaire general adjoint de I Elysee charge des Affaires economiques Emmanuel Macron appartientau premier cercle du President Hollande

Henri IV a Paris et v obtient unbac S mention nes bien Direction leconcouis de Noimale Sup ou il échouePeu importe, le jeune homme en pro-fite pour rejoindre l'université et obte-nir un DEA de philosophie II devientassistant de Paul Ricœur, qui cherche àl'époque un archiviste pour son ouvrageLa Memoire, l'histoire l'oubli À la diffe-rence du specialiste français de la phé-noménologie et de l'herméneutique,l'étudiant ne se voit pas attendre qua-rante ans avant de réaliser des choses«J'avais envie de vivre1 », explique-t-ilaujourd'hui au Nouvel ObservateurDiplôme de Sciences-Pô en 2001,il intègre l'ENA de 2002 à 2004Ses compagnons de promo se sou-viennent « Personnage un peu a part,il était tres apprécie, tout a la fois cha-leureux, humain, sociable et brillant »,se rappelle Julien Aubert « Humaine-ment exceptionnel, extrêmement ouvert

aux autres Et clairement tres brillant »,surenchérit Gaspard GantzerÀ sa sortie, Emmanuel Macron intègrelinspection des finances, consécrationpour les récents diplômés de l'Ecolenationale d'administration, a l'instardes Pascal Lamy, Jean-Claude Tnchet,Louis Schweitzer ou Jean-Pierre JouyetEn 2007, il devient la cheville ouvriereet le rapporteur de la commissionAttali pour la liberation de la crois-sance française L'ancien conseillerpersonnel de François Mitterrand enconserve un souvenir ému et lui pré-dit même un destin présidentiel « Onn'en voit pas un comme lui tous les dixans » Entre 2005 et 2007, c'est sous lesordres de Jean-Pierre Joli} et, revenu deBarclays France, et chef du service del'Inspection generale des finances, qu'iltravaille Naît alors une admirationréciproque Et avec elle dcs liens étroitsla commission Attali, les Gracques,

puis l'Elysée François Hollande estun vieil arm du haut fonctionnaireet le relais parfait pour introduire sonjeune protége au futur candidat socia-liste à la presidentielle

« Sans mandat local, pasde portefeuille de ministre »Sur le plan politique, EmmanuelMacron entre au PS a 24 ans S'iladmire Michel Rocard, il appartientdavantage à la gauche réformiste deTony Blair ou Gerhard Schroder Pourlui, le socialisme français n'a pas encoreopere son Bad-Godesberg, du nomdu congrès du parti social-démocrateallemand rompant là avec le marxisme« Le PS n'a toujoutspasfaitson aggioma-mento idéologique, il ny a jamais eu derenouveau idéologique profond »Un cerveau bien fait et des idées àrevendre, Emmanuel Macron en a Resteà se confronter au suffrage FrançoisHollande souhaite en effet un ancragelocal Le Président n'a pas oublié la leçonde son mentor, François Mitterrand, àSegolène Royal « Sam mandat local,pai de portefeuille de ministre » Après unpremier essai avorté en 2007 aux législa-tives, on propose au jeune homme unecandidature à Amiens aux dernieresmunicipales II décime Entre ces deuxtentatives, et pousse par l'arrivée aupouvoir de Nicolas Sarkozy qui lui faitde l'œil, Emmanuel Macron débarquechez Rothschild A 30 ans, et grâce àl'entremise de Jacques Attali, il mèneune carrière de « salopard de banquierd'affaires », comme il s'amuse à rappelerII pilote notamment le rachat par Nesde

Emmanuel Riviere directeurBusiness team Strategies d opinionde TNS Sofres constate i entreeremarquée du ministrede I Economie dans le barometre

18 % des Français souhaitent voir Emmanuel Macronjouer un rôle à l'avenir »

Décideurs. Comment est accueillie l'arri-vée d'Emmanuel Macron a Bercy?Emmanuel Rivière. Malgre les netsreculs des deux têtes de l'exécutif- seu-lement 13 % des Français font confianceà Francois Hollande (- 5 points par rap-port au mois de juillet) et 30 % à ManuelValls (-14 points en deux mois) -, la coted'avenir d'Emmanuel Macron presenteun score remarquable 18 % des Françaissouhaitent en effet lui voir jouer un rôleà I avenir

Le nouveau locataire de Bercy sort mêmeà 19 % chez les sympathisants de droite età 18 % chez ceux de gauche, laissant d'ail-leurs derrière lui quèlques ténors commeXavier Bertrand (15 %), Bruno Le Maire( 16 %) ou Stéphane Le Foil ( 16 %) Preuveque le casting du gouvernement Valls IIn'engendre pas tant de malaise que cela,Najat Vallaud-Belkacem devient la deu-xieme personnalité la plus populaire dubaromètre politique de septembre 2014(32 % de cote d'avenir, soit + 8 %) •

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Est-il le Mozart de la finance ou le Beethoven de l'économie? »

La vision du parti socialiste atravers son premier secretaireJean Christophe CambadelisUn PS qui lors de son universited ete du PS se questionnait sur< ce qu est le parti socialisteet les raisons d en etre membre »

Decideurs S'agissant d'Emmanuel Ma-cron, vous semblez mi-figue, mi-raisin,prévenant que « le PS ne sera pas social-libéral », maîs reclamant qu'on « ne luitire pas dessus».Jean-Christophe Cambadelis Oui,e est a peu pies cela Je n ai pas d apriori maîs des principes Fn effet je neconnais pas personnellement EmmanuelMacron Est il le Mozart de la finance oule Beethoven de I economie-1 Je n'en saisrien Je le jugerai sur ce qu'il fait Maîs jene tolérerai ni politique libérale, ni poli-tique versant vers I austérité

Je n ai pas ete prévenu de sa nomina-tion Et n'avais pas a l'êtreArnaud Montebourg ne fixait pas laligne economique du gouvernementII n'y a pas de raison qu'EmmanuelMacron la fixe davantage Laissons-le travaille!, maîs je foimule uneremarque generale le social-libéra-lisme ne fait partie ni de notre voca-bulaire, ni de notre traditionJe me suis oppose fermement à cer-taines dérives à la gauche du partisocialiste Je pourrais le faire vis-a-visd autres tentations •

d'une filiale de Pfizer pour un montantde neuf milliards d'euros Et empocheau passage un cheque de deux millionsd euros Ce n est pas Alain Mmc, quia perçu son potentiel politique, et dontil se murmure qu il lui aurait conseillede mettre ainsi de l'argent de côte, quidira l'inverseSurtout, il s'y forge un carnet d adressesen or massif De quoi donner envie aFrançois Hollande de faire une excep-tion I e President avait en effet refuseen mars dernier que le protege occupele poste de secretaire d Ëtat au BudgetII avait également recale sa candidatureun mois plus tard pour entrer dans legouvernement C est grace a « I estime »portée par Manuel Valls — « Un symbolede la réussite et de la lealite de la force dupays > —, et au nom de la « cohérence »de son gouvernement qu'il accepte,aide de surcroît par un reseau d amisinfluents Jean Pierre Jouyet et JacquesAttali bien sûr, maîs également BernardCazeneuve, Laurent Fabius, MichelSapin, Gaspard Gantzer, le thmk tankTerra Nova et même les reseaux de Ste-phane Fouks chez Havas Avec l'actuelministre des Finances et des Comptespublics, Emmanuel Macron a déjàforme un duo pour le moins efficacedans l'élaboration du programme economique du candidat socialiste lors dela derniere campagne presidentielleC'est aussi au nom d'une fidelité quele chef de I Etat l'a choisi Approche

par Nicolas Sarkozy des 2007, puis parDominique Strauss Kahn, EmmanuelMacron fait des 2008 le choix de soute-nir François Hollande Ce, alors mêmeque le premier secretaire du parti socia-liste cote tres bas dans les sondages24 % de confiance en moyenne, selonTNS Sofres

Social libéralLe 15 mai 2012, Emmanuel Macrondevient secretaire general adjoint del'Elysée charge des Affaires econo

«Un symbolede la réussiteet de la réalitéde la force du pays »

Manuel Vails

miques, rejoignant ainsi la garde rap-prochée du President Pierre-RenéLemas, secretaire general, Sylvie Hubac,directrice de cabinet, Nicolas Revel,secretaire general adjoint, Pierre Bes-naid, chef de cabinet, Paul Jean-Ortizconseiller diplomatique, PhilippeLeglise Costa, conseiller aux affaireseuropéennes et Aquilino Morelle,conseiller politique Si I ex-plume du

President—et ancien directeur de cam-pagne d Arnaud Montebourg - paraîtparfois sceptique à son endroit, e estavec lui qu'il rédige le discours des vœuxdu 31 decembre 2013I e plus jeune conseiller a beau tutoverle President, point de familiarité entreeux Iln'yaqu'àvoirdansledocumentaire de Patrick Rotman, Le Pouvoir(2013), le regaid empiemt d admira-tion et de respect du |eune conseillervis-a-vis de I ex-premier secretaire duPS Assis quasiment systématiquementà sa gauche, e est lui qui formule ses ele-ments de langage (EDL), poursuivantainsi avec succes sa ligne idéologiqueinstigation du pacte de responsabilite,vœux présidentiels, annonces écono-miques à tendance libérale À moinsde 35 ans, il s'affirme comme un social-libéral qui souffle la politique de l'offreau chef de l'Etat et opere l'inflexion versdavantage de rigueur budgétaireDurant deux ans, il joue en parallèlele rôle d intermédiaire privilégie entrele Château, son occupant et les diri-geants français Maîs aussi auprès dessyndicats avec lesquels il dit entretenirdcs relations « amicales » Contactes,la CGT, FO et la CFDT démententtoutefois étre tres «proches» del'actuel ministre L'homme fait sespreuves, avec humilité, sans tambourni trompette < Emmanuel Macronest quelqu'un qui attire les regards Sonintelligence est fulgurante et wn analyse

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profonde. Il ne parle jamais de luidirectement, maîs manœuvre pour qu'onle fasse », résume un ancien cama-rade de promo à l'ENA, aujourd'huitrès proche du pouvoir. « fl est certainqu'EmmanuelMacron avait dei, qualitéspour reussir un parcours politique, maîspas forcément à gauche !'Je n'imaginaistoutefois pas qu'il serait nommé aussirapidement à la tête d'un tel ministèreDu jour au lendemain, c'est du jamaisvu depuis Pompidou ' », résume JulienAubert, députe UMP du Vaucluse, etancien Senghor.Très discret dans la presse et sur lesréseaux sociaux, le nouveau ministrede l'Économie vient néanmoins des'entourer du jeune Ismaël Emelien.Un inconnu? Pas vraiment, le commu-nicant est issu de l'écurie Havas de Sté-phane Fouks - proche de Manuel Valls- et a collaboré avec la Fondation JeanJaurès, le thmk tank dirigé par GillesFinchelstein, à la direction d'un ouvrageintitulé Repenser l'action publique.

Symbole

Même dans son entourage politique,Emmanuel Macron ne suscite guèrede critiques. « Humain, chaleureux etmodeste » sont les épithètes les plusfréquentes à son endroit Mais en off,certains admettent malgré tout qu'« tlse protège et qu'il est beaucoup plushypocrite qu'il n'y paraît Ne révélantpas ce qu 'tlpense, il est ainsi apprécié detous, » D'autres évoquent une «gen-tillesse permanente qui ne peut allersans un jeu de théâtre » Peu importe,l'ambition a payé. « Emmanuel a tou-jours dit qu'il voulait s'engager en poli-tique Et il a beaucoup travaillé pourcela Les circonstances ont joue en safaveur. C'est une très bonne chose qu'ilsoit ministre Finalement, je ne suis pasplus surpris que cela », retorque sonami Gaspard GantzerToutefois, le symbole de la banqueRodischild, après le discours du Bourgetsur la finance abhorrée, a de quoi laisserperplexe C'est oublier qu'Henri Emma-

Emmanuel Macron rassules entrepreneurs

i

« Je te dis et/e l'assume la France a besoin de ses entreprises et mot,/'aime I entreprise »Le cri du cœur est celui de Manuel Valls en visite a I universite d'été du Medef au débutdu mois Pour un début c'est réussi Et la suite ne va pas tarder a tranquilliser le mondeentrepreneunal quèlques jours avant, le Premier ministre choisit Emmanuel Macron pourremplacer Arnaud Montebourg Mi-septembre, 75 % des chefs d'entreprise invitaienten effet le president de la Republique et son gouvernement a changer de ligne politiqueC'est le constat du barometre des TPE (Ifop - Fiducial) Et pour y parvenir, la majoritécroît davantage en les capacites de I UMP (41 %) et de l'UDI (33 %), qu en cellesdu parti socialiste (19%) ou du Front national (15 %)

Au lendemain de la nomination dArnaud Montebourg la Bourse de Paris dévissaitde 1,08 % Le soir même de sa demission, le 25 aoùt dernier elle clôturait en haussede 2,10 % Maîs c'est du côte des syndicats patronaux qu il faut aller recueillir les reactionsles plus probantes Car c'est avec le nouvel occupant de Bercy qu'ils ont par le passecollabore - pacte de responsabilite - et pu apprécier ses qualites

Du côte du Medef, Pierre Gattaz admet qu'« Emmanuel Macron a trois atouts il connaîtl'entreprise, il connaît I''economie de march e et il connaît la mondialisation Pour êtreministre de l'Economie, cela me parait intéressant d'avoir ces trois atouts en pocheet de les assumer, surtout par rapport a la situation de la France »

Chez Croissance Plus, on avoue être « plutôt rassures et satisfaits par cette nomination »Le nouveau ministre, avec lequel le syndicat a déjà travaille, est issu de la societe civile -ancien gerant de la banque Rothschild -, et « e 'est une bonne chose, ce pourquoi nousmilitons depuis des annees »

Au sein du Club des entrepreneurs - reseau de 18500 créateurs et dirigeants d'entreprise-, Guillaume Cairou, son president, déclare « // nous apparaît intéressant qu'unhomme de la qualite et du talent d'Emmanuel Macron puisse veiller a la pertinence et al'efficacité des reformes structurelles dont notre modele economique a besoin afinde lever les obstacles a notre competitivite f .) Cette nomination est un signal positifpour le monde des entrepreneurs »

L_ J

nuelli, aujourd'hui à la gauche du PS, apassé neuf ans à la Compagnie finan-cière Edmond de Rothschild «J'étaisdirecteur adjoint, salarié, lui associe gérant.La paye n'est pas la même », se défend ledéputé des Landes.Le soir même dc sa nomination,Manuel Valls a tenté de couper courtaux polémiques . « II y a des annéesqu'on crevé de debats idéologiques etd'étiquettes surannées » En écho,Jean-Christophe Cambadélis, rue deSolfénno, insiste: « Comme tous lessymboles, celui de la banque Rothschilddoit être dépassé. »Trop tard et trop facile. À gauchedu parti et à gauche de la gauche, lapilule a du mal à passer. « C'est loind'être un bon symbole pour la gauche »,se plaint Barbara Romagnan, dépu-tée du Doubs. Chez Un monded'avance, le courant de BenoîtHamon, on n'hésite pas à déclarer :«Jaurès aurait décidé d'aller se faireassassiner une deuxième fois au Cafédu croissant... » Chez les Verts, mêmeson de cloche. « Au Medef, ils ont aumoins le mérite de ne pas avancer mas-ques. Pas étonnant que sa nominationleur plaise », ironise l'eurodéputé Pas-cal Durand « Le côté liberal m'effraieII risque de continuer à appliquer uneméthode économique qui ne fonctionnepas la social-démocratie », ajoute lasénatnce Esther Benbassa.Peu importe les accusations, EmmanuelMacron reste concentré. Dans quèlquesjours, il présentera la nouvelle loi sur lacroissance et le pouvoir d'achat au Parle-ment. À la clé sur le papier six milliardsd'euros au profit des consommateurs, lacréation de deux cent mille emplois, uneouverture relative des professions régle-mentées, la faolkation d'implantationscommerciales et une simplification dudroit du travail.Retour en mai 2012, alors que les col-laborateurs politiques de François Hol-lande se trouvent pour la première foisréunis en groupe de travail à l'Elysée,et que le plan de table installe Emma-nuel Macron aux côtés du Président,ce dernier entame son discours par unavertissement pour le moins solennel :« Vous êtes les garants de ce que la Franceva être dans cinq ans. » Une phrase inau-gurale qui résonne aujourd'hui commeune prophétie. •

Julien Beauhaire, Camille Drieu

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