william price l. dechêne

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Institut d’histoire Thèse de Licence ès Lettres (histoire) Université Laval William Price 1810-1850 par Louise Dechêne Bachelière ès arts, bachelière en histoire avril 1964 Un document produit en version numérique par Michel Fortin, bénévole, Adjoint à la mairie, Ville de Saguenay Courriels: [email protected] ou [email protected] Dans le cadre de la collection: "Les classiques des sciences sociales" Site web: http://classiques.uqac.ca/ Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque Paul-Émile-Boulet de l'Université du Québec à Chicoutimi Site web: http://bibliotheque.uqac.ca/

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William Price L.

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  • Institut dhistoire Thse de Licence s Lettres (histoire)

    Universit Laval

    William Price 1810-1850

    par Louise Dechne

    Bachelire s arts, bachelire en histoire

    avril 1964

    Un document produit en version numrique par Michel Fortin, bnvole, Adjoint la mairie, Ville de Saguenay

    Courriels: [email protected] ou [email protected]

    Dans le cadre de la collection: "Les classiques des sciences sociales" Site web: http://classiques.uqac.ca/

    Une collection dveloppe en collaboration avec la Bibliothque

    Paul-mile-Boulet de l'Universit du Qubec Chicoutimi Site web: http://bibliotheque.uqac.ca/

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 2

    Cette dition lectronique a t ralise par Michel Fortin, bnvole, adjoint

    la mairie de Ville de Saguenay, partir de larticle de : Courriels: [email protected] ou [email protected]

    partir de : Louise Dechne, William Price 1810-1850. Thse de licence s lettres (histoire), Institut

    dhistoire, Universit Laval, avril 1964. [Autorisation formelle accorde par la fille de Mme Dechne, Mme Julie Mi-

    ville-Dechne, journaliste Radio-Canada, de diffuser cette thse le 3 octobre 2005.]

    Courriel : [email protected]

    Polices de caractres utilise :

    Pour le texte: Times New Roman, 14 points. Pour les citations : Times New Roman 12 points. Pour les notes de bas de page : Times New Roman, 12 points.

    dition lectronique ralise avec le traitement de textes Microsoft Word 2004 pour Macintosh. Mise en page sur papier format : LETTRE (US letter), 8.5 x 11) dition numrique ralise le 29 janvier 2005 Chicoutimi, Ville de Saguenay, province de Qubec, Canada.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 3

    Table des matires Avant-propos Table des tableaux et graphique Sigles et abrviations Bibliographie Monnaies, poids et mesures Introduction: Les origines du commerce du bois au Canada

    Historique de l'exploitation forestire avant le Blocus continental. Le commerce du bois et la politique tarifaire jusqu'en 1815.

    Chapitre I. Les dbuts de William Price

    Formation et milieu familial. William Price, commis de la maison Idle Qubec. Fondation de la compagnie Price. La conjoncture gnrale et les conditions du commerce du bois, 1815-1827. Le commerce de W. Price jusqu'en 1827.

    Chapitre II. William Price, marchand

    Les catgories des bois exports. Les prix du bois Qubec. Les activits au port de Qubec. Les contrats avec les entrepreneurs. Les contrats du Ministre de la Marine.

    Chapitre III. William Price, entrepreneur

    Les scieries achetes entre 1830 et 1838. Ouverture du Saguenay et expan-sion des tablissements de W. Price, 1838-1850. Valeur, rendement et ad-ministration des tablissements. Terres en franc-alleu et terres affermes.

    Chapitre IV. Les affaires de William Price, 1827-1850

    La conjoncture gnrale, tarifs et fluctuations du commerce du bois,1827-1850 Le financement des nouvelles entreprises de la compagnie. Volume et valeur de la production.

    Conclusion

    Orientation des entreprises de William Price aprs 1850. Portrait de Wil-liam Price.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 4

    Appendices

    A- Graphiques

    2. Pourcentage des importations de mts en Angleterre, 1799-1815

    3. Pourcentage des importations de chne en Angleterre, 1799-1815

    4. Pourcentage des importations de pin en Angleterre, 1799-1815

    4.1 Importations de pin et sapin en Angleterre 1799-1815 5. Volume des importations de sapin et de pin en Angleterre,

    1804-1841 6. Volume des exportations de pin du port de Qubec, 1804-

    1841 7. Volume des exportations de madriers du port de Qubec,

    1804-1841 8. Volume des exportations de pin du port de Qubec, 1840-

    1851 8.1 Volume des exportations de madriers du port de Qubec 1840-

    1851 9. Les investissements de la compagnie W. Price, 1830-1849 10. Chiffre des ventes de bois de la compagnie W. Price, 1827-

    1848 B- Tableaux statistiques

    9. Volume des importations de mts en Angleterre, 1799-1815 10. Volume des importations de chne en Angleterre, 1799-1815 11. Volume des importations de pin en Angleterre, 1799-1815

    C- Cartes

    1. L'Outaouais et le Haut-Canada en 1850 2. Les tablissements de W. Price sur le Saguenay 3. Les principaux tablissements et les terres possdes ou

    loues par la compagnie Price Brothers en bas de Qubec D- Projet de soumission pour un contrat de la Marine britannique pr-

    par par William Price l'intention de Brockelbank et Rolt Index

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 5

    Table des tableaux et graphique

    Retour la table des matires

    Tableau 1. Volume du bois expdi par W. Price, 1816-1828 Tableau 2. Moyenne des prix du bois Qubec, 1830-1850 Tableau 3. Les tablissements de la compagnie W. Price sur le Saguenay et la

    Cte Nord Tableau 4. Les tablissements personnels de W. Price sur le Saguenay et la

    Cte Nord Tableau 5. Bilan de l'tablissement de Grande Baie Tableau 6. Volume du bois quarri descendu Qubec et export, 1845-1848 Tableau 7. Volume des importations de bois dans le Royaume-Uni, 1850-1853 Tableau 8. Valeur de la production de madriers dans quelques tablissements

    de W. Price, 1839-1847 Graphique 1. Quantit de madriers correspondant aux totaux annuels du ta-

    bleau 8

    Sigles et abrviations AP Archives Price CGQ Cahiers de Gographie de Qubec Doc. const. Documents relatifs l'histoire constitutionnelle du Canada JALBC Journaux de l'Assemble Lgislative du Bas-Canada JALCU Journaux de l'Assemble Lgislative du Canada-Uni RCHA Reports of the Canadian Historical Association W.P. William Price

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 6

    INSTITUT DHISTOIRE

    THSE DE LICENCE ES LETTRES (HISTOIRE) Universit Laval

    William Price 1810-1850

    Louise Dechne Bachelire s arts

    Bachelire en h i s t o i r e

    AVRIL 1964

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 7

    William Price 1810-1850

    Avant-propos

    Retour la table des matires Le commerce du bois occupe la premire place dans l'conomie

    canadienne pendant presque toute la premire moiti du XIXe sicle. Il joue un rle prpondrant dans le dveloppement du crdit et des organismes bancaires, il facilite la transition entre une conomie es-sentiellement primaire et le dbut de l'industrialisation et contribue fixer certains traits de notre socit. Ce sont tous ces aspects que le professeur A.R.M. Lower a voulu circonscrire dans sa thse, The Trade in Square Timber et plusieurs ouvrages et articles subsquents. Cependant, il tait difficile de faire une telle synthse, sans disposer d'un grand nombre d'tudes au niveau de l'entreprise individuelle, lesquelles sont, malheureusement, encore trs rares.

    C'est avec l'espoir d'apporter des matriaux neufs, des prcisions

    utiles pour de futurs travaux que nous avons abord l'tude du com-merce du bois men par William Price dans le Bas-Canada, entre 1810 et 1850.

    Les archives de la compagnie Price Brothers sont suffisamment ri-

    ches pour faire l'objet d'un travail plus ambitieux. Mais dans le cadre de ce mmoire de licence, nous nous sommes surtout efforce de faire ressortir l'abondance de la documentation, de souligner les points qui mriteraient d'tre dvelopps. Ces archives contenaient de nombreu-

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 8

    ses rfrences aux conditions du march. Nous les avons utilises pour situer l'entreprise dans le vaste contexte conomique, colonial et imprial, ce qui nous a permis de mieux apprhender notre sujet.

    L'tude de la comptabilit soulevait de multiples problmes, aussi

    notre interprtation des chiffres demeure-t-elle prudente avant tout. Ajoutons que nous avons essay de traduire tous les textes cits, le plus fidlement possible.

    Nous voulons remercier Monsieur Fernand Ouellet qui accepta de

    diriger nos recherches, Messieurs Marcel Trudel et Jean Hamelin qui nous aidrent de leurs conseils. Nos remerciements aussi Monsei-gneur Arthur Maheux qui, il y a quelques annes, classa la masse de documents conservs par la famille Price, travail qui facilita beaucoup nos recherches. galement, aux directeurs et au personnel de la com-pagnie Price Brothers, grce qui nous avons pu consulter ces do-cuments.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 9

    William Price 1810-1850

    Bibliographie

    Retour la table des matires

    I- SOURCES A- Sources manuscrites:

    Ces sources se rsument essentiellement aux archives de la Compagnie

    Price Brothers, conserves aux bureaux de la compagnie, difice Price, 65 rue Sainte-Anne, Qubec.

    Srie A: les cahiers de comptabilit Ces cahiers n'ont pas tous t conservs. Pour la priode tudie, nous

    avons pu consulter les registres suivants: - Quatre grands livres, couvrant les priodes 1827-1833 et 1838-

    1849. - Les journaux pour 1833-1837, 1840-1842, 1844-1847 et 1849-

    1851. - Les livres des comptes et livres de caisse, pour 1830-1832, 1839-

    1840, 1842-1844 et 1847-1848.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 10

    Srie B: documents relatifs l'histoire de la compagnie Cette srie contient des documents disparates, des lettres surtout, des

    mmoires, des contrats, etc., tous classs par ordre chronologique. On en a fait une transcription incomplte, dont il existe une copie dans les archives du Sminaire de Qubec. Pour ce travail, nous nous sommes rfre aux originaux.

    B- Sources imprimes: Appendices des Journaux de l'Assemble Lgislative du Bas-

    Canada, 1810-1837. Nous y avons consult: - Les rapports annuels des importations et exportations. - Les rapports sur les droits perus pour la coupe du bois sur les

    terres de la Couronne, 1824, appendice Z, rapport du comit spcial sur la ptition de

    divers marchands se plaignant des abus dans le bureau du collecteur des douanes de sa Majest au port de Qubec; tmoignage du 10 f-vrier 1824.

    1829, appendice V, rapport des commissaires nomms pour ex-

    plorer le Saguenay. 1834, appendice A, minutes des tmoignages pris devant le comi-

    t spcial auquel ont t rfrs le bill pour rgler le commerce du bois: la ptition des habitants du comt de Saguenay demandant que l'acte des bois de la 9e George IV, chap. 11, soit amend - et la pti-tion de divers commerants de bois dans les paroisses de St-Jean, St-Pierre les Becquets. Rapport le 27 fvrier 1834.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 11

    Appendice des Journaux de l'Assemble Lgislative du Cana-da-Uni, 1840-1851

    Nous ajoutons ici les rapports en enqutes de la priode 1838-

    1840, durant laquelle la constitution du Bas-Canada fut suspendue. Ils ont t reproduits en partie dans les volumes intituls Journaux du Conseil Spcial du Bas-Canada.

    Les rapports annuels des importations et exportations. Les rapports sur les droits perus pour la coupe du bois sur les ter-

    res de la Couronne. Les rapports des bois mesurs et inspects Qubec et dans le dis-

    trict au-dessous de Qubec. Minutes des tmoignages pris devant la Commission gnrale

    d'enqute sur les terres de la Couronne et l'migration, nomme le 21 juin 1838, par son Excellence, le comte Durham, Haut-Commissaire de sa Majest.

    1844-1845, appendice O.O., rapport du comit spcial nomm

    pour enquter sur les requtes demandant des amendements la loi rglant le commerce. du bois.

    1846, appendice A., extrait du rapport du commissaire des terres

    de la Couronne, relativement son voyage au Saguenay, le 27 sep-tembre 1845.

    1847, appendice E.E.E., comit pour s'enqurir comment la Sei-

    gneurie de Lauzon a t gre depuis que la province en a fait l'acqui-sition.

    1849, appendice P.P.P.P., comit spcial du commerce du bois

    pour s'enqurir de l'tat du commerce des bois, des causes de sa d-pression actuelle, de la protection des forts contre les destructions injustifies et de toute autre affaire affectant les intrts du commerce du bois dans cette province, prsent les 18 et 19 avril 1849, avec les minutes des tmoignages.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 12

    Bouchette, Joseph. The British Dominions in North America, or a

    topographical and statistical descxiption of the Provinces of Lower and Upper Canada. 2 vol. Londres, Faden, 1832. En tout 793p. 28cm.

    Bouchette, Joseph. Description topographique de la Province du

    Bas-Canada, avec des remarques sur le Haut-Canada. Londres, Faden, 1815. 665p. 24cm.

    Bouchette, Joseph. A Topographical Dictionary of the Province of

    Lower Canada. Londres, Colburn and Bently, 1832. non pagin, 28cm. Le Canadien, 28 janvier 1846. Documents relatifs lhistoire constitutionnelle du Canada, 1759-

    1791, choisis et dits par Adam Shortt et Arthur G. Doughty. Ottawa, Thomas Mulvey, imprimeur du Roi, 1921. 2 vol. En tout, 1 064p. 24cm.

    Documents relatifs l'histoire constitutionnelle du Canada, 1819-

    1828, choisis et dits par Arthur G. Doughty et Norah Story. Ottawa, J.O. Patenaude, O.S.I., imprimeur du Roi, 1935. 534p. 24cm.

    La Gazette de Qubec, 1806-1821. 9 dcembre 1850, Effects of the

    abolition of the navigation laws . 12 dcembre 1850, Comparative sta-tement of the supply, export & stock lumber for the years 1846, 1847, 1848, 1849 et 1850.

    Langelier, J.C. List of Lands granted by the Crown in the Province

    of Quebec from 1763 to 31st december 1890. Qubec, C.- F. Langlois, 1891. 1 927p. 26cm.

    The Quebec Commercial List, 1816-1828, publication hebdomadaire

    de la Chambre de Commerce de Qubec. Qubec, Neilson and Cowan, la Gazette de Qubec.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 13

    Rosa, Narcisse. La construction des navires Qubec et ses environs - grves et naufrages. Qubec, imprimerie Lger Brousseau, 1897. 202p. 21cm.

    Select documents in Canadian Economic History 1783-1885, par

    H.A. Innis et A.R.M. Lower. The University of Toronto Press, 1933. 864p. 23cm.

    Smith, W.H. Canada, Past, Present and Future, being a historical,

    georaphical and statistical account of Canada West. 2 vol. Toronto, Thomas Naclear, Yonge Street, 1851. En tout 728p. 25cm.

    Smith, W.H. Smith's Canadian Gazetteer, comprising statistical:

    General information respecting all parts of the Upper Province. Toronto, 1846. 285p. 20cm.

    II - TUDES A- tudes spciales:

    Sous ce titre, nous numrons les ouvrages qui traitent spcialement du

    commerce du bois. Albion, Robert Greenhalgh. Forest and Sea Power. The Timber Pro-

    blem of theRoyal Navy, 1652-1862. Cambridge, Harvard University Press, 1926. 485p. 23cm. Index.

    Calvin, D.D. A saga of the St. Lawrence, Timber and Shipping

    through three Generations. Toronto, The Ryerson Press, 1945. 174p. 20cm. Index.

    Defebaugh, James Elliott. History of the Lumber Industry of America.

    2 vol. Chicago, The American Lumberman, 1906. En tout, 1 215p. 25cm. Lower, Arthur R.M., The Trade in Square Timber , dans Universi-

    ty of Toronto Studies in History and Economics. (Contributions to Cana-dian Economics) VI (1933) pp. 40-61.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 14

    Lower, Arthur R.M., Assault on the Laurentian Barrier 1850-1870 , dans Canadian Historical Review, X (dcembre 1929) pp. 294-308.

    Lower, Arthur R.M., The North American Assault on the Canadian

    Forest; a History of the Lumber Trade between Canada and the U.S. (Relations of Canada and the United States). Toronto, The Ryerson Press, 1938. 377p. 25cm. Index.

    Lower, Arthur R.M., Settlement and Forest Frontier in Eastern

    Canada. (Canadian Frontiers of Settlement, vol. IX) Toronto, The MacMillan Company of Canada, 1936. 424p. 26cm.

    Maheux, abb Arthur. Un marchand de Qubec: William Price

    , dans la Revue de l'Universit Laval, IX (1955) pp. 717-722.

    B- tudes diverses: Bertrand, Camille. Concession des terres du Bas-Canada, 1796

    1840 , dans The Canadian Historical Association, rapport annuel, 1928 , pp. 73-78 .

    Blanchard, Raoul. L'Est du Canada Franais - Province de Qu-

    bec. 2 vol. Montral. Librairie Beauchemin Limite, 1935. En tout 718p. 25cm.

    Brault, Lucien. Ottawa Old and New. Ottawa, Historical Institute,

    1946. 349p. 22cm . Buies, Arthur. Le Saguenay et la valle du lac Saint-Jean. tude

    historique, gographique, industrielle et agricole. Qubec, imprime-rie A. Ct et Cie., 1880. 337p. 19cm.

    Chambers, E.T.D. Forest Resources , dans Canada and its

    Provinces. XVI, Edingburg University Press, 1914. pp. 531-551. N.B. L'ouvrage le plus important sur le commerce du bois entre le

    Canada et l'Angleterre au XIXe sicle est la thse de A.R.M. Lower, Lumbering in Eastern Canada, prsente

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 15

    l'Universit Harvard en 1928. Nous avons fait venir cette thse sur microfilm mais elle est arrive trop tard pour nous tre utile dans ce mmoire.

    Clapham, J.H. An Economic History of Modern England - The Early

    Railway Age, 1820-1850. Cambridge, The University Press, 1959. 623p. 23cm. Index.

    Creighton, Donald G. The Commercial Empire of the St. Lawrence,

    1760-1850. (The Relations of Canada and the United States) Toronto, The Ryerson Press, 1937. 441p. 25cm.

    Creighton, Donald G. Dominion of the North; a History of Canada.

    Boston, Houghton Mifflin, 1944. 535p. 20cm. Crouzet, Franois. L'conomie britannique et le blocus continental

    1806-1813. 2 vol. Paris, Presses Universitaires de France, 1958. En tout, 949p. 25cm. Index.

    Currie, A.W. Canadian Economic Development. Toronto, The Hunter

    Rose Co. Ltd., 1942. 454p. 19cm. Index. Easterbrook, W.T., Aitken, Hugh G.J. Canadian Economic History.

    Toronto, The MacMillan Co. of Canada Ltd., 1958. 606p. 24cm. Index. Gayer, Arthur; W.W. Rostow; Anna Jacobson Schwartz. The Growth

    and Fluctuation of the British Economy, 1790-1850. 2 vol. Oxford, The Clarendon Press, 1953. En tout, 1028p. 24cm. Index.

    Graham, Gerald S. Sea Power and British North America, 1783-1820. A Study in British Colonial Policy, Cambridge, Harvard University Press, 1941. 302p. 22cm.

    Histoire du Saguenay depuis l'origine jusqu' 1870, (L'). Rdig en

    collaboration, Chicoutimi, dition du Centenaire, 1938. 325p. 21cm. Hind, H.T., Keefer, T.C. et Perley, M.H., Murray Wm. Eighty Year-

    s' Progress of British North America, Toronto, L. Stebbins, 1863. 776p. 23cm.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 16

    Innis, Harold A. Essays in Canadian Economic History. Toronto, The University of Toronto Press, 1956. 418p. 23cm.

    Innis, Mary Quayle. An Economic History of Canada. Toronto, The

    Ryerson Press, 1935. 302p. 23cm. Latham, Bryan. Timber; its Development and Distribution. A His-

    torical Survey. London, Harrap, 1957. 303p. 22cm. Leacock, Stephen. Economic Prosperity in the British Empire. Toron-

    to, The MacMillan Co. of Canada Ltd., 1930. 246p. 19cm. Lower, Arthur R.M. Colony to Nation, a History of Canada. Toronto,

    Longmans Green and Company, 1946. 600p. 23cm. Index. Lower, Arthur R.M. Canadians in the Making, Toronto, Longmans

    Green and Company, 1958. 475p. 23cm. Index. Lower, Arthur R.M. The Forest in New France, a Sketch of Lum-

    bering in Canada before the English Conquest , dans The Canadian His-torical Association, rapport annuel 1928. pp. 78-91.

    Ouellet, Fernand, Hamelin, Jean. La crise agricole dans le Bas-

    Canada , dans tudes Rurales. cole Pratique des Hautes tudes; Sixime section, octobre-dcembre 1962. 57p. 24cm.

    Ppin, Pierre-Yves. La mise en valeur des ressources naturelles de

    la rgion Gaspsie-Rive-Sud. Qubec, Ministre de l'Industrie et du Commerce, Bureau de recherches conomiques, 1962. 360p. 25cm.

    Rose, J. Holland, Newton, A.P., Benians, E.A. The Growth of the

    New Empire, 1783-1870. The Cambridge History of the British Em-pire, II, Cambridge University Press, 1940. 1069 p. 23cm. Index.

    Rousseau, Jacques. La fort mixte du Qubec dans la perspective

    historique , dans les Cahiers de Gographie de Qubec, no 13, (octo-bre 1962 - mars 1963) pp. 111-120.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 17

    Roy, J. Edmond. La Seigneurie de Lauzon, 5 vol. Lvis, 1904. Vo-lumes IV et V. 1812-1840. En tout 1 036p. 22 cm.

    Roy, J. Edmond. Voyage au pays de Tadoussac. Qubec, A. Ct et

    Cie, 1889. 235p. 23cm. Schuyler, Robert Livingston. The Fall of the Old Colonial System. A

    Study in British Free Trade, 1770-1870. Londres, Oxford University Press, 1945. 344p. 22cm. Index.

    Shirreff, Charles. A few reasons against change in the System of our

    Colonial Lumber Trade. Qubec, 1831. 22p. 18cm. Shortt, Adam et Doughty, Arthur G. General Economic History;

    Currency and Banking, 1760-1841. Canada and its Provinces. IV, 757p. 27cm.

    Strauss, Louis. Le Canada au point de vue conomique. Bruxelles,

    A. Lacroix Verboeckhoven et Cie, 1867. 280p. 23 cm. Ttu, Horace. Rsum de l'industrie et du commerce de Qubec de

    1775 1900. Qubec, 1899, 28p. 17cm. Wood, Co. William, Atherton, W.H., Lanklin, E.P. The Storied

    Province of Quebec. 4 vol. Toronto, Dominion Publishing Co. Ltd., 1931. IV, 529 p. 27cm.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 18

    William Price 1810-1850

    Monnaies, poids et mesures

    Retour la table des matires

    : livre s. ou / shilling (20 par livre) d: penny (12 par shilling)

    Lorsque nous utilisons le signe L dans le cours de cette tude, nous

    entendons la livre courante, ou monnaie d'Halifax, utilise dans les colonies d'Amrique du Nord. Nous prcisons lorsqu'il s'agit de la livre sterling qui a cours en Angleterre.

    1 pied cube de bois : 5 pieds mesure de planche 50 pieds cubes de bois : 1 load Les bois exports du port de Qubec sont mesurs en tonnes. Or

    nous ignorons s'il s'agit de la tonne d'encombrement ou du tonneau de mer ou d'affrtement. Celui-ci correspond au poids contenu dans un volume de 40 pieds cubes.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 19

    William Price 1810-1850

    Introduction

    LES ORIGINES DU COMMERCE DU BOIS AU CANADA

    Historique de l'exploitation forestire avant le Blocus continental. Le commerce du bois et la politique tarifaire jusquen 1815.

    Retour la table des matires On distingue deux types de fort dans l'est du Canada: la premire

    est la grande fort borale ou conifrienne du bouclier canadien, do-mine par l'pinette noire, le sapin baumier, le bouleau blanc. C'est le domaine actuel de l'exploitation du bois de pulpe. La seconde est la fort mixte, qui s'tend entre cette fort borale et la fort feuillue du sud. On y trouve une plus grande varit de conifres, soit l'pinette blanche, le cdre, les pins blanc et rouge, mls l'rable, l'orme, au frne, au chne et autres feuillus. La fort mixte correspond aux basses terres du Saint-Laurent, la majeure partie de la rgion appa-lachienne, l'exception des hauts plateaux de la Gaspsie et d'un sec-teur l'ouest de la rivire Matapdia. Sur la rive nord, on trouve des enclaves de fort mixte le long du Saguenay, autour du lac Saint-Jean, dans Charlevoix, et surtout le sud du bouclier, depuis Qubec

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 20

    jusqu'au cours suprieur de l'Outaouais 1. Aujourd'hui, sinon totale-ment dfriche, du moins appauvrie, cette fort fut la grande source de l'exploitation forestire au XIXe sicle.

    Les premiers colons dboisrent les terres seigneuriales en bordure

    du fleuve au moyen du brlis, souvent sans gard pour les ordonnan-ces royales visant rserver le chne et les grands pins. L'exploitation proprement dite, soit pour la construction navale, soit pour l'exporta-tion de bois brut, demeura trs limite sous le Rgime franais. Il est cependant intressant de noter que les techniques employes au XVIIIe sicle sont les mmes qu'au sicle suivant 2. Vers 1750, des cages de mts sont formes 35 lieues en haut de Montral, comme sur le lac Champlain et descendues Qubec. Il y a aussi des expdi-tions de bois quarri, de planches, de bardeaux et de douves en France et aux Antilles. Le marquis de Vaudreuil crit en 1716 qu'il y a abondance de scieries au Canada 3. Au moment de la Conqute, il semble que le chne ait peu prs disparu des basses terres du Saint-Laurent, mais il reste de vastes pineraies l'intrieur des Seigneuries. Les rgions du Haut-Canada, du lac Champlain et celles des princi-paux affluents de la rive nord sont peu prs intactes. Un commerce, toujours restreint, est amorc avec l'Angleterre et les Antilles britan-niques.

    L'Angleterre se ravitaille en bois dans la Baltique depuis le XVIIe

    sicle. Elle mprise la plupart des bois amricains et n'accepte de ses colonies que les mtures et les douves. Aprs la guerre d'Indpen-dance, elle commence encourager la coupe des mts dans le Nou-veau-Brunswick et envoie mme ses agents explorer les forts cana-diennes. On voit alors des marchands de Londres, ngociant dans la Province de Qubec, solliciter en leur faveur le renouvellement des primes l'exportation des bois, jadis accordes aux colonies amri-caines 4. La Grande Bretagne, ce pays sans fort, doit importer tout

    1 Jacques Rousseau, La fort mixte du Qubec dans la perspective historique,

    C.G.Q., XIII, octobre 1962, 114. 2 A.R.M. Lower, The Forest in New France, RCHA, 1928, 78 91. 3 Loc. cit. 4 Mmoire des marchands anglais Lord Sydney, Doc. Const., 1759-1791,

    781p.

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    son bois de construction et particulirement ses munitions navales, soit les articles ncessaires pour la construction, l'quipement, l'en-tretien des navires de guerre et de commerce. Ceci comprend les poutres et madriers pour les membrures et les quilles (sapin de la Baltique), les planches pour les bordages (chne ou orme) et les troncs de conifres pour la mture (23 pices pour un vaisseau de ligne). la fin du XVIIIe sicle, les besoins de la Marine sont va-lus 30,000 loads 5 et ceux des chantiers commerciaux quelque 20,000 loads 6. Durant les guerres de la Rvolution, les importations de bois coloniaux demeurent ngligeables. L'Europe fournit presque la totalit des munitions navales et le dficit commercial chronique enregistr par l'Angleterre dans les pays baltes s'accentue 7. D'autre part, un trust puissant contrle le ravitaillement des chantiers, fait monter les prix et retarde l'excution des contrats, lorsque le ministre de la Marine refuse de se plier ses exigences. Il en rsulte une p-nurie de bois, dont l'Angleterre mesure toute la gravit au moment de la rupture de la Paix d'Amiens 8.

    Face cette situation alarmante, cette saigne de capital, aux in-

    certitudes de la guerre, le Gouvernement est prt abjurer ses prju-gs et dpche des agents au Canada. L'un d'eux crira: Les mar-chands de bois d'Angleterre, soit cause de leurs intrts dans la Baltique, soit par aversion pour l'ingrence de l'tat dans leur com-merce, qualifient de visionnaire mon projet d'importer du bois cana-dien 9. Cependant, l'Amiraut a russi convaincre la maison Scott et Idle de Londres d'entreprendre le commerce des bois coloniaux, moyennant le monopole canadien des fournitures gouvernementales. Ce monopole soulve une telle hostilit, que cette socit demande au Gouvernement de ne pas rvler au public les termes de son contrat 10.

    5 Le load = 50 pieds cubes de bois. 6 G.G. Albion, Forest and sea power The Timber problem of the Royal Navy,

    1652-1862, 21ss. 7 Ibid., 162. 8 Ibid., 186ss. 9 Gerald S. Graham, Sea Power and British Noth America, 1783-1820, 146. 10 Archives du Canada, Q, vol. 106 II : 552-554, cit par Graham, op. cit., 147.

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    Mais la reprise des hostilits affecte peu les courants commer-ciaux dans la mer du nord et la Baltique et c'est encore vers Mmel et Riga que l'Angleterre se tourne pour regarnir ses arsenaux. Les faibles prfrences douanires accordes aux bois des colonies de 1802 1804 s'avrent insuffisantes pour inciter l'migration au Canada des capitaux britanniques. Il faudra la promulgation du dcret de Berlin en novembre 1806, pour que les bois des Maritimes et du Canada obtiennent vritable-ment une place sur le march britannique.

    Les graphiques 2, 3, et 4 11, prsentent une comparaison des impor-

    tations de bois en Angleterre, provenant de l'Europe du Nord, des Mari-times et du Canada, pour la priode 1800-1815. De 1807 1813, le Ca-nada est le premier fournisseur de bois de chne, premier fournisseur de mts galement de 1808 1813. Dans ces deux catgories mineures, les quantits expdies rpondent aux besoins de la Grande Bretagne. lui seul, le bois de sapin ou de pin 12 compte pour les 5/6 des bois im-ports en Grande Bretagne 13. Or durant toute la priode, le Canada n'en fournit qu'une trs faible quantit qui n'est pas compense par les expditions des Maritimes.

    Avec la fermeture des ports prussiens, le volume total des importa-

    tions reste bien en de du niveau de 1804, qui tait de 268,000 loads. Les fluctuations que l'on peut lire sur le graphique 4 ne refltent pas tant la demande, les conditions du march, que les pisodes du conflit europen.

    En 1806, avant mme l'imposition du Blocus, le commerce entre

    l'Angleterre et la Prusse avait t gravement atteint. Il renat en 1807, grce la protection que la flotte de guerre accorde aux navires mar-chands, mais les assurances et les taux du fret sont devenus prohibi-tifs. En 1808, le Blocus est appliqu avec plus de rigueur et les bois, trop volumineux pour tre objet de contrebande, s'en trouvent affec-ts. Ils le demeurent en 1809, alors que les dcrets sont inefficaces

    11 Voir appendice A, pages 68,69,70. 12 Le pin du Canada remplace le sapin de la Baltique. 13 Gayer, Rostow and Schwartz, The Growth and fluctuation of the British Econ-

    omy, l790-1850, II: 791.

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    pour des marchandises moins pondreuses 14. En mme temps, l'em-bargo amricain cre une pnurie de douves, qui menace l'important commerce mditerranen et sud-amricain dont vit l'Angleterre.

    eux seuls, les prix levs du bois ne peuvent dtourner vers le

    Canada les capitaux investis dans la Baltique. Les marchands prf-rent attendre la fin des difficults europennes, moins que le Gou-vernement ne leur offre des garanties srieuses. Ces garanties leur sont votes avec la loi de 1809 qui porte le tarif sur les bois trangers 27s. le load, et celle de 1810, qui le hausse 54s.

    En 1810, le commerce du bois europen reste entrav et le Canada

    accrot ses exportations de pin 15. Depuis le premier train de flottage descendu de l'Outaouais en 1808, le commerce s'organise, de nou-veaux comptoirs sont crs Qubec. Mais avant mme que le mou-vement ait pris une certaine ampleur, la conjoncture se dgrade brus-quement. La crise qui avait frapp la plupart des secteurs industriels britanniques l'anne prcdente, atteint la construction navale en 1812. Les investissements productifs ayant t trs faibles durant toute la priode domine par l'effort de guerre, nulle demande dans le secteur de la construction ne vient contrebalancer le marasme dans les arsenaux. Cette baisse de la demande sera suivie en 1814 et 1815 d'une brusque baisse des prix du bois. Avec le commerce libr, les craintes de disettes oublies, prend fin l'inflation 16.

    En plus de souffrir de la conjoncture du march anglais, le com-

    merce canadien subit le contrecoup de la guerre de 1812. Avec les risques de la navigation, les cots de fret et d'assurances sur l'Atlan-tique augmentent. Le marasme sera de longue dure, alors que, ds 1813, les bois de la Baltique reprennent la premire place sur le mar-ch britannique, pour la conserver jusqu'en 1816. Les taux de fret 14 Franois Crouzet, L'conomie Britannique et le Blocus Continental, I,

    deuxime partie. 15 En 1811, selon les statistiques britanniques, appendice B, tableau 11, p. 80, les

    exportations canadiennes auraient augment, tandis que les statistiques du port de Qubec enregistrent une baisse pour cette mme anne, (appendice A, gra-phique 6, p. 73).

    16 Ces problmes sont tudis fond dans les ouvrages de Gayer, Rostow et Schwartz, et de Franois Crouzet, prcdemment cits.

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    europens sont encore levs, mais dans l'euphorie spculative qui s'empare de l'Angleterre la fin des hostilits, les intrts de la Bal-tique esprent encore conserver leur march, malgr les rcents ta-rifs. Menacs, les importateurs de bois coloniaux lancent une nou-velle offensive et le gouvernement dj trop engag envers eux, doit consentir en 1814 porter le tarif 65s. le load. Les effets de cette politique, momentanment amortis par la conjoncture dfavorable, commenceront lentement se faire sentir dans les annes suivantes.

    Un commerce artificiellement fond en temps de guerre devait

    tenter de survivre la paix, parfaire ses techniques et conserver son march. Si l'on considre l'ensemble de la priode 1808-1815, on peut conclure que ce furent l des annes difficiles pour le marchand de bois de Qubec. C'est durant cette priode incertaine, que William Price fait au Canada l'apprentissage du commerce.

    * * *

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    Chapitre I

    Les dbuts de William Price

    Formation et milieu familial, William Price, commis de la maison Idle Qubec. Fondation de la compagnie W. Price. La conjonc-ture gnrale et les conditions du commerce du bois, 1815-1827. Le commerce de W. Price jusquen 1827.

    Retour la table des matires William Price est n Hornsey, dans le Middlesex, le 15 septem-

    bre 1789, le troisime d'une famille de huit enfants 17. On ignore la profession du pre qui meurt lorsque les enfants sont encore jeunes. La famille s'tablit Londres et les trois ans quittent tt leurs tu-des pour faire leur apprentissage dans le commerce. Les problmes d'argent seront souvent voqus par les frres et surs. Une des qua-tre filles sera gouvernante, la mre tient pension et les fils lui remet-tent une partie de leurs conomies. Famille appauvrie, mais non pas d'humble condition, car elle entretient des relations avec des gens haut placs dans le gouvernement et les affaires. Les surs crivent William des lettres qui tmoignent d'une excellente culture, d'une sensibilit raffine. Elles commentent la politique et jugent avec hu-

    17 The Storied Province of Quebec - Past and Present, IV: 403.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 26

    mour la socit londonienne. La famille est trs religieuse. C'est l'glise Mthodiste que William donnera sa contribution annuelle 18.

    quatorze ans, celui-ci entre l'emploi de la maison Christopher

    Idle o travaille dj son frre an, David. Les quelques lettres de cette priode rvlent un garon srieux, qui lit Socrate, Virgile ou Plutarque, prfrant ces classiques la littrature de son temps 19. La politique est pour lui un sujet dnu de tout intr 20. Il a vingt et un ans lorsque la socit Idle l'envoie sa succursale de Qubec o il arrive en mai 1810.

    Son frre David fait alors de nombreux sjours l'tranger pour le

    compte de la mme maison, notamment Fayal au Portugal. En 1812 ce dernier quittera Idle et, associ d'autres marchands, entreprendra des affaires fructueuses Rio-de-Janeiro. Un frre cadet s'tablira galement en Amrique du Sud, tandis qu'un autre travaillera quel-ques annes pour un oncle de Philadelphie. Malgr l'loignement, les liens entre les membres de la famille demeurent trs forts et leurs rapports chaleureux. David assume l'autorit paternelle toute sa vie, William sollicitera ses conseils et acceptera ses reproches. Sans rel-che, l'an exhorte la patience, la finesse en affaire, l'ambi-tion 21. Le succs qu'il souhaite William est envisag comme une ncessit. Il y va de l'honneur de la famille, de l'avenir de leurs surs. Si tu n'obtiens rien d'autre que ton salaire en allant Qu-bec, considre que ce dplacement ne te sert de rien... 22. J'ai confiance, crit encore David, que le Ciel nous accordera la force, pour que nous puissions russir, obtenir un jour une position ind-pendante 23.

    Les frres s'entraident volontiers. Encore simple commis, William

    prte 125 l'un d'eux, somme qui sera engloutie dans une faillite. Lorsque lui-mme sera en difficult en 1843, David lui avancera

    18 Livres de caisse, AP srie A. 19 W. Chesmer W. P., 29 juillet 1809, ibid. 20 Le mme au mme, 23 juillet 1809, ibid. 21 David Price W. P., 30 mars 1811, ibid. 22 Le mme au mme, 10 juin 1810, ibid. 23 Le mme au mme 20 octobre 1810, ibid.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 27

    6,000 24. Pour qui voudrait s'y arrter plus longuement, la correspon-dance familiale, trs volumineuse, apporterait des dtails intressants sur l'histoire sociale de l'Angleterre, celle des classes commerantes en particulier.

    La plupart des marchands de bois qui s'installent Qubec aprs

    1800 ne fondent pas des entreprises autonomes, mais reprsentent des maisons britanniques. Ce sont des succursales, diriges par des agents, qui achtent et expdient le bois en consignation Londres ou Liverpool. Il en est ainsi de la maison Idle. S'agit-il des mmes intrts qui, sous le nom de Scott Idle & Company, obtenaient au dbut de la guerre un contrat exclusif pour ravitailler la Marine en mts et bois canadiens ? 25 Tout semble l'indiquer. On sait qu'en 1807, Henry Usborne, dj tabli Qubec, aurait vainement tent de leur faire perdre ce monopole 26. Or, Idle considre les Usborne comme ses ennemis hrditaires 27. En outre, dans une lettre de 1812, David Price parle de faon assez confuse des dmls de la maison avec l'Amiraut, celle-ci ayant alors dcid de diviser les contrats entre divers soumissionnaires 28. C'est l'emploi de Idle, que Price acquiert l'exprience dans l'excution des contrats gouvernementaux. Il s'agit donc d'une maison trs puissante. Elle fait prsentement, crit David, des affaires de tous genres: contrats de mts, transport maritime, importation de vin et de brandy d'Espagne, comptoirs au Portugal, vente de porto et de rhum sur le march anglais; tout ceci reprsente une somme imposante d'activits 29.

    Cependant la succursale de Qubec ne semble pas occuper une

    place si importante sur le plan local et c'est en vain que nous avons scrut les journaux pour y trouver mention de ce monopole. Ses bu-reaux et son magasin sont situs sur la rue St-Pierre et nous relevons l'achat d'un terrain et d'une grve dans la paroisse St-Joseph-de-la-Pointe-Lvis 30. Nous ignorons si Idle possdait antrieurement une 24 Le mme au mme, 6 octobre 1843, ibid. 25 Robert G. Albion, Forest and Sea Power, 353. 26 Loc. cit. 27 William Chesmer W. P., 7 fvrier 1820, AP, srie B. 28 David Price W.P., 19 mars 1812, ibid. 29 Le mme au mme, 11 novembre 1811, ibid. 30 Contrat entre W. Oviatt et Benjamin Roberge, 19 dcembre 1809, ibid.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 28

    autre rade. La succursale importe des vins et autres marchandises, mais, contrairement Gilmour, Usborne ou Hamilton, fait trs peu de publicit dans les journaux. Elle n'accapare pas non plus une forte proportion du tonnage d'importation ou d'exportation.

    William Oviatt, grant Qubec, gagne 300 par an. Price, qui

    dbute au Canada comme premier commis, en gagne 135 31. David crit propos d'Oviatt: Mme s'il peut tirer des milliers et dizaines de milliers, passer des contrats, acheter, vendre et commander un grand nombre de personnes, il ne travaille en rien son propre avancement 32. Ds 1815, Oviatt s'tant retir en Angleterre pour des raisons de sant, Price assumera la direction de la succursale.

    Une fois install au Canada, Price ne semble jamais avoir song

    retourner en Angleterre ou chercher fortune ailleurs, bien qu'il ne cesse de dplorer son maigre salaire. C'est avec nergie et confiance que le jeune homme essaie de tirer le meilleur parti possible de son emploi chez Idle. Il ne fait pas qu'excuter les ordres, mais est libre de prendre certaines initiatives. Ainsi, ds sa premire saison Qu-bec, il expdie aux Antilles, un chargement de poisson, vin et jam-bon. La transaction se solde par une perte de 133 et David le blme svrement pour cette malheureuse spculation 33.

    En gnral, le travail consiste ddouaner, entreposer, vendre la

    marchandise importe, s'occuper de tous les aspects techniques de l'exportation du bois. Nous possdons trs peu de dtails sur ces premires annes hormis les conseils rpts de son frre, qui l'en-courage se familiariser avec les ressources du pays et tablir des contacts avec les fournisseurs de bois 34. On a crit que Price, nom-m major dans la cavalerie, aurait command une batterie d'artillerie durant la guerre de 1812 35, mais il n'y a rien dans les archives pour corroborer ces faits. Au printemps 1813, Price est charg par ses em-

    31 David Price W.P., 30 mars 1811, ibid. 32 Le mme au mme, 11 novembre 1811, ibid. 33 David Price W.P., 11 novembre 1811, ibid. 34 Le mme au mme, 30 mars 1811, ibid. 35 William Wood et alii, The storied province of Quebec Past and Present, IV :

    403.

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    ployeurs d'une mission assez dlicate Halifax. Il s'agit d'acheter pour la Marine britannique environ cinq navires. On s'attend payer ces vaisseaux moins cher qu'en Angleterre, soit de 5 6 le ton-neau, et les quiper de prisonniers anglais relchs par les Amri-cains, pour la livraison Londres 36. Voil donc tout ce que nous sa-vons des activits de Price avant qu'il assume la grance de l'tablis-sement de Qubec.

    La correspondance de ces annes se compose surtout des nom-

    breuses lettres de William Chesmer. Celui-ci est un Londonien, ami de jeunesse de Price, qui s'est lanc dans des aventures commerciales qui le mnent tantt sur la Mditerrane, tantt en Amrique du Sud, aux Antilles et au Canada. Price est son agent au Canada. Chesmer est bavard, fantaisiste, peu scrupuleux en affaires. Ses conseils im-portuns, ses exigences, voire sa dloyaut, finiront par lasser Price qui mettra brutalement un terme leurs relations en 1822 37.

    Pendant les annes de rcession, Price s'intresse au march des

    crales et au commerce du rhum, Nos affaires en ce pays, crit-il un marchand de la Jamaque, ont bien diminu depuis la paix, les besoins du gouvernement en mts et en bois ayant cess. J'ai attir l'attention de la maison sur la ncessit d'un commerce plus vari que celui que nous avons men jusqu'ici 38. Ailleurs Price se dit tonn des quantits extraordinaires de rhum qui ont t expdies de Qubec vers les tats-Unis et le Haut-Canada 39. Malgr tout, la so-cit Idle n'a jamais cess de s'occuper des achats de bois et lorsque la demande renat, on voit Price effectuer chaque hiver des voyages dans le Vermont et le Haut-Canada. Il achte les douves, le chne et le pin quarri sur la Rivire Trent, la Seigneurie de la Petite Nation, autour des lacs Champlain et Ontario. Il exporte galement des ma-driers qui sont scis Qubec avec le bois du Haut-Canada. D'autres commandes de madriers sont confies aux scieries de Saint-Thomas et de la Malbaie, d'o elles sont directement charges pour l'Angle-

    36 William Oviatt W.P., mars 1813, AP, srie B. 37 W. P. William Chesmer, 8 octobre 1822, Ibid. 38 W. P. John Reid, 29 octobre 1817, ibid. 39 W. P. Thomas Wright, 10 avril 1818, ibid.

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    terre 40. Durant l'hiver 1819-20, Price prpare des mts et des bois pour la Marine. Britannique 41. plusieurs reprises, Price essaie de convaincre Idle de construire une scierie dans l'anse de la rive sud, actionne soit vent, soit vapeur. Avec les quantits de bois non exportables qui restent sur le terrain, il parle aussi de faire construire des golettes. On ignore si Londres a fini par approuver ces pro-jets 42.

    La maison de Londres a perdu beaucoup de son prestige. Christo-

    pher Idle est mort et son fils George, qui lui succde, n'a ni l'exp-rience, ni les qualits ncessaires. Selon David, le capital qui aurait t de plus de 800,000 en 1812 est rduit 50,000 au moment du rglement de la succession 43. Des lettres d'amis et de parents affir-ment que l'entreprise est chancelante. Tous recommandent Price de quitter cette maison qui l'exploite.

    En fvrier 1819, George Idle donne ordre de liquider toutes ses

    affaires Qubec, mais quatre jours plus tard, il annule cet ordre, apparemment donn sans rflexion. En vain proposera-t-il plus tard Price une vritable association, avec pourcentage sur les profits, pour remplacer la grance salarie 44. Price a depuis longtemps dcid de rompre avec Idle et c'est ailleurs qu'il cherche activement des com-manditaires et des clients. Il retirera cependant son salaire jusqu' la rupture dfinitive en 1820. La succursale Idle Qubec ne survivra pas au dpart de Price. Celui-ci restera administrateur des biens que Idle possde au Canada et occupera leur terrain de l'anse Hadlow Lvis.

    Ainsi, fort de l'exprience acquise durant ces dix annes, William

    Price cherche une association avantageuse. Il ne possde que ses maigres conomies, mais il connat le pays, tout ce qui a trait au commerce en gnral et l'excution difficile des contrats gouver-nementaux. Il forme une socit avec le jeune George Usborne, esp-

    40 W. P. George Idle, 9 mars 1820, ibid. 41 George Idle W. P., 23 aot 1819, ibid. 42 W. P. William Chesmer, 1er mars 1817, ibid. 43 David W. P., 5 octobre 1819, ibid. 44 William Chesmer W. P., 7 fvrier 1820, ibid.

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    rant que la maison John Usborne d'Angleterre affrtera un grand nombre de vaisseaux pour le neveu tabli au Canada 45. Il est dj du par les Usborne, lorsqu'il reoit l'offre de Parker et Yeoman, importants courtiers en bois de Londres. Ceux-ci ont l'intention de supporter l'tablissement de Dowie et McCutcheon Montral et il leur est indispensable d'avoir un autre bureau Qubec. Ayant eu de bons rapports sur Price, ils lui proposent d'entrer dans la future com-pagnie 46. Peter McCutcheon est un importateur qui fait affaire dans le Haut-Canada depuis environ deux ans. Kenneth Dowie tait pr-alablement attach Parker et Yeoman Londres. Parker dsire que les deux nouveaux tablissements de Montral et Qubec soient sur un pied d'galit et que l'association soit tenue secrte pendant un an ou deux pour ne pas veiller la jalousie et la concurrence . Price n'apparatra aux yeux du public que comme leur agent 47. Facilement, Price se dfait de George Usborne et le premier mai 1820 le nouvel accord est conclu 48. L'tablissement de Montral continuera s'adon-ner surtout l'importation et au commerce des crales, tandis que Qubec s'occupera de la rception et de l'expdition des marchandises ainsi que des exportations de bois. Parker et Yeoman, crit Price son frre, nous donneront tout leur appui et nous procureront des affaires. J'ai des amis aux Antilles et en Angleterre sur qui je compte. Je te prie d'crire toutes tes connaissances qui pourraient m'tre de quelque service. C'est un grand avantage de pouvoir se recommander d'une mai-son aussi respectable 49. L'association n'est donc pas exclusive et Price reste libre de mener ses propres affaires.

    McCutcheon apporte dans la socit un capital de 5,220, soit la va-

    leur de son inventaire. Price fournit environ 1,000, qui sont investies dans une scierie 50. En 1823, il y a remaniement de la socit, avec la venue d'un nouvel associ, Nathaniel Gould, et le dpart de Kenneth Dowie, remplac par son frre James. Ce sera dsormais: la compagnie Wil-liam Price, Qubec; la compagnie McGill, Montral (McCut-

    45 W. P. David Price, 18 novembre 1820, ibid. 46 William Parker W. P., 5 fvrier 1820, ibid. 47 Le mme au mme, 25 mars 1820, ibid. 48 . P. David Price, 18 novembre 1820, ibid. 49 Loc. cit. 50 W. P. Gould et Bowie, 6 avril 1843, ibid.

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    cheon est devenu Peter McGill au cours de l'hiver 1821) ; et la com-pagnie Gould et Dowie, Londres.

    Nous sommes ici en prsence de l'organisation typique, telle que

    dcrite par Clapham 51. Parker, Yeoman apportent la rputation d'une maison bien tablie, un support financier sous forme d'avances sur la valeur des marchandises, avances verses Gould et Dowie. Leur rle est celui du banquier (crdit), du courtier (trouver les clients) et aussi du consignataire, l'occasion. Au-dessous, trois compagnies, qui comptent chacune quatre actionnaires. Comme dans toute com-pagnie, la responsabilit des actionnaires est limite leur mise de fonds. Chacun dtient le quart du capital dans chaque tablissement et a droit au quart des bnfices. En ralit, les associs ne souscri-vent pas au dbut un capital gal. Nathaniel Gould apporte une for-tune assez considrable dans l'affaire 52. Dowie a probablement fait de mme. McGill et Price sont choisis en vertu de leur situation au Canada, de leur valeur personnelle. Toute l'entreprise repose sur eux et c'est pour s'assurer de leurs services qu'on leur consent chacun le quart des actions. Price a en outre un atout spcial, car seul des qua-tre, il peroit une commission de 5% sur toutes les oprations qu'il effectue. Pour les bois, la commission est calcule sur le prix de re-vient au port de chargement. On peut considrer cette commission comme un salaire vers celui qui fait la majeure partie du travail 53. De part et d'autre, toutes les expditions se font en consignation, c'est--dire que les trois compagnies agissent comme agents les unes pour les autres. Gould et Dowie envoient des produits manufacturs McGill et ils reoivent les crales et les bois 54.

    William Price est autoris tirer des traites sur Gould et Dowie.

    Durant l'automne et l'hiver, Londres avance ainsi environ la moiti de la valeur probable du bois, (avances aux contracteurs et prpara-tion); une nouvelle somme est tire au printemps et l't (rglement final avec les contracteurs, cot du chargement). La somme des

    51 J. H. Clapham, An Economic History of Modern England, 255ss. 52 Kneth Dowie W. P., 24 mai 1823, AP, srie B. 53 W. P. Gould et Dowie, 20 fvrier 1845, ibid. 54 Nous navons rien trouv de prcis dans les archives sur les affaires de Peter

    McGill, non plus que sur les modalits de la vente du bois en Angleterre.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 33

    avances quivaut aux trois quarts, parfois la totalit du prix de re-vient 55. Gould et Dowie affrtent les vaisseaux et paient le fret, l'as-surance maritime, les droits d'entre en Angleterre et toutes les d-penses au port d'arrive. Ce n'est qu'au moment de la vente finale, dans le cours de l'hiver suivant, que toutes les avances et dbourss sont rajusts. C'est donc un capital considrable qui est immobilis au del d'un an. Price tire gnralement des traites court terme; les banques du Canada n'attendant pas toute une anne avant de les pr-senter Gould et Dowie.

    La fondation de la compagnie W. Price s'insre dans un climat

    commercial encore instable. Au lendemain des guerres de Napolon, l'conomie britannique est entre dans une phase dpressive. Toute la priode qui s'ensuit s'inscrit dans une baisse de longue dure qui ne s'achve qu'en 1850. Cependant, il ne faudrait pas voir dans cette chute des prix sculaire un indice de marasme ou de stagnation co-nomique car, bien au contraire, c'est une priode d'expansion ma-jeure pour l'industrie britannique. La baisse des prix n'est d'ailleurs pas aussi forte qu'on l'a souvent dit. Elle est trs apparente dans la courbe des importations britanniques, alors que les prix des produits domestiques demeurent peu prs stables dans l'ensemble. Les cau-ses de cette baisse de longue dure sont avant tout d'ordre montaire et technique. Avec l'adoption de l'talon-or, il y a rajustement de la rserve mtallique. Les innovations industrielles commencent por-ter fruit et les cots de production diminuent tandis que les chemins de fer, les progrs de la navigation font baisser les frais de transport. Alors que la priode prcdente tait domine par le commerce ext-rieur, celle-ci voit se dcupler les investissements domestiques de caractre productif: construction et agrandissement des usines et des chemins de fer, construction de maisons qui accompagne l'extraordi-naire expansion urbaine. Ce rythme acclr de croissance indus-trielle explique le dveloppement rapide et soutenu du commerce du bois canadien, qui demeure, durant toute cette priode, ax sur le march britannique 56.

    55 Gould et Dowie W. P., 4 janvier 1847, ibid. 56 Gayer, Rostow and Schwartz, The Growth and Fluctuation of the British

    Economy, II, Part I: general analysis.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 34

    La seule arrive des bois canadiens sur le march en 1809 avait suffi freiner l'inflation et, de 1814 1820, les prix du bois baissent sensiblement. Durant tout le reste de la priode, la baisse sera trs peu prononce et rompue par trois remontes passagres, soit 1820-25, 1833-39, et 1843-45. En 1850, les prix du bois auront peu prs rejoint le niveau de 1790. L'amplitude des mouvements cycliques demeure faible pendant la priode.

    Plus que les prix, le volume des importations de bois en Angleterre

    et ceux des exportations au port de Qubec nous permettent de dgager la trame du commerce 57. Pour l'tude qui suit, on se reportera aux graphi-ques 5, 6, et 7 58.

    La reprise des exportations canadiennes, lente aprs la fin de la

    guerre, s'acclre sous le coup de deux cycles de brusque spculation. En 1818-1819, les marchands de bois, misant sur l'expansion de la cons-truction, importent beaucoup plus que ne peuvent absorber les chantiers encore stagnants. Avec les stocks invendus, la chute des importations s'ensuit en 1820 59. Une lettre dans les archives Price corrobore ces faits. 1819, crit W. Chesmer, fut une anne de mvente, dsastreuse pour les importateurs de bois. Tous ont perdu et Idle se flicite d'avoir fait un profit de 2,000, alors que l'anne prcdente il avait ralis 18,000 60. On note ici que la crise se produit un an plus tard au Ca-nada, dans les expditions de bois brut. Par contre le mouvement des exportations de madriers (graphique 7) suit fidlement celui du total des importations en Angleterre.

    De 1821 1825, lAngleterre connat une vague prodigieuse d'in-

    vestissements, trop brusque pour tre saine. Le premier boom cycli-que dans l'conomie britannique, affirment plusieurs auteurs. Les prix et le volume des importations de bois montent en flche, jusqu' ce que la surproduction dclenche une panique financire, en dcem-

    57 Il ne sagit pas dune comparaison quantitative entre les bois canadiens mesu-

    rs en tonnes et le total des importations britanniques, mesures en loads, mais de ltude comparative des mouvements.

    58 Voir appendice A, pages 72, 73, 74. 59 Gayer, Rostow and Schwatz, op.cit., I: 140ss. 60 William Chesmer W. P., 7 fvrier 1820, AP, srie B.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 35

    bre 1825. Encore ici, le volume des exportations de madriers tombe en 1826, tandis que celui du bois brut se maintient jusqu'en 1827.

    Aprs cette crise retentissante, l'conomie britannique demeure

    branle jusqu'en 1832. D'autre part, on constate que le volume des importations de bois en Angleterre atteint en 1827 un palier qu'il gardera jusqu'en 1837. Mais les exportations canadiennes vont ds lors monter rgulirement durant les dix prochaines annes. Ceci indi-que que la proportion des bois imports de la Baltique ou des Mariti-mes a dcru considrablement durant la dcennie.

    Les bois europens tiennent encore une place importante sur le

    march britannique et on les utilise dans toutes les construct ions coteuses. Or, sitt la guerre termine, les libraux ont repris la lutte pour la libert de commerce. Leur cible prfre est le tarif exorbi-tant sur les bois trangers, dont le poids retombe sur le consomma-teur anglais. Ce commerce, dclare Ricardo aux Communes, est n d'une querelle entre l'Angleterre et les pays de la Baltique; il a sur-vcu son utilit 61. En 1821, un Comit de la Chambre tudie la question et la crainte s'empare des intrts nord-amricains. Price crit en 1820: Il y a trop de marchands dans ce pays. Tout irait mieux si la moiti d'entre nous dmnageait. Les affaires au Canada sont tombes et elles seront encore rduites des deux tiers si le tarif est modifi notre dsavantage, ce quoi nous nous attendons... Si le tarif demeure inchang, j'aurai toutes les chances de mon ct. S'il est modifi, les pertes seront invitables 62.

    Mais l'enqute ne donne lieu qu' un rajustement mineur, soit en

    1821, la rduction 55s. pour les bois trangers et l'imposition de 10s. sur les bois coloniaux. Ces derniers, compte tenu du fret, bnficient encore d'une prfrence relle de 30s. le load 63. On value dj 150,000 au moins les capitaux britanniques investis dans les forts cana-diennes, sans compter les intrts locaux 64. Le commerce est donc assez

    61 Gerald S. Graham, Sea Power and British North America, 1783-1820, 150. 62 W. P. David Price, 18 novembre 1820, AP, srie B. 63 R. L. Schuyler, The Fall of the Old Colonial System, a Study in British Free

    Trade, 1770-1870, 105. 64 Gerald S. Graham, ibid., 150.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 36

    solide pour supporter ce revers et rien, dans le mouvement des exportations, n'indique que la nouvelle loi l'ait affect profondment.

    En 1821, l'Angleterre a galement impos des droits sur les bois am-

    ricains qui, par le Richelieu, taient descendus Qubec et exports comme bois coloniaux. L'ouverture du canal Champlain en 1822 achve de dtourner les bois du Vermont du march canadien et cette source est compltement tarie partir de 1826-1827 65. Cette coupure dans l'approvisionnement a pu contribuer, sinon accentuer les chutes, du moins ralentir l'expansion.

    Sitt la nouvelle compagnie organise, Price part en Angleterre

    revoir sa famille et chercher des clients. C'est sa premire visite en onze ans. De retour Qubec en avril 1821, il reprend la direction de ses affaires.

    Les sries de cahiers de comptabilit ne commencent qu'en 1827,

    cependant que la correspondance d'affaire est peu prs inexistante entre 1820 et 1830. C'est dire que nous possdons trs peu de dtails sur les dix premires annes de la compagnie.

    Les bureaux et le magasin sont situs au numro 1 de la rue St-

    Pierre, un immeuble que Price loue 250 par an 66. Qubec gale-ment, il y a un entrept (Brewery premises) attenant un quai o les stocks de crales de McGill valant de 3 6,000, sont accumuls durant quelques mois chaque t 67. Dans le port de Qubec, sur la rive sud, Price occupe deux emplacements: il loue l'anse Hadlow de la succession Idle et y adjoint deux nouveaux lots, lous 30 chacun des habitants de la rive 68. Il y a l des quais, des cours bois, une forge et un atelier. Le second tablissement, celui de la Pointe Levis serait, croyons-nous, situ un mille environ l'est de Hadlow, l'embouchure du ruisseau Lamiot (d'Amyot, aujourd'hui). En 1821, Price a sign pour ce terrain un bail emphytotique avec Franois

    65 A.R.M. Lower, The North American Assault on the Canadian Forest, 94. 66 W. P. Blackwood et la Rocque, 9 mars 1820, AP, srie B. 67 Livres de caisse, AP, srie A. 68 Loc., cit.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 37

    Hall 69. Le contrat mentionne que Price se propose d'y faire cons-truire une retenue et une cluse. Il paiera 1 par an, 50 planches et 150 crotes. S'il ne scie point, il sera dcharg de cette dernire obligation . Dans les annes 40, il y aura une scierie vapeur instal-le cet endroit, mais nous ignorons ce qu'il advint du projet du ruis-seau d'Amyot.

    Nous savons d'autre part que Price fait construire sa premire scie-

    rie en 1820, laquelle dbite 300 madriers aux vingt-quatre heures 70, et sera emporte l'anne suivante par une inondation 71. Il est peu proba-ble qu'il s'agisse du maigre ruisseau de la Pointe Lvy, lequel d'ail-leurs ne fut lou qu'en 1821. Nous serions enclins situer l'tablisse-ment Saint-Thomas ou la Malbaie. La Pointe Lvis, avec ses quais, magasins et ateliers fait pendant Hadlow en attendant l'achat des grves de New-Liverpool en 1831.

    Le seul indice qui nous permet d'valuer le commerce de Price

    durant ces premires annes est une liste des divers chargements, tels qu'enregistrs par les autorits du port et reproduits dans le Qubec Commercial List 72. Nous en avons fait un relev que nous reprodui-sons ici sous toutes rserves, car il y a souvent plusieurs expditeurs pour un mme navire, ce qui rend la compilation difficile. D'autre part, il nous a sembl que souvent les chargements indiqus ne s'ac-cordaient pas avec le tonnage du navire. Enfin, puisque les bois sont mesurs en pices, il est impossible d'utiliser ces chiffres autrement que pour fins de comparaison. Price tant toujours l'expditeur, pour Idle ou pour sa propre compagnie, on a une liste ininterrompue des chargements pendant 13 ans 73.

    Il ressort de ce tableau que les expditions de bois effectues par

    Price jusqu'en 1824 sont peu importantes, trop peu pour reflter la courbe gnrale des exportations au port de Qubec. Le bond en

    69 Bail devant le notaire J. Blanger, original au Sminaire de Qubec, copie

    dans AP, srie B. 70 W. P. David Price, 18 novembre 1820, ibid. 71 W. P. David Price, 18 novembre 1820, ibid. 72 The Quebec Commercial List, 1816 1828. 73 Voir le tableau 1, page suivante.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 38

    avant produit en 1825, lorsqu'il charge sur 36 navires, 8% du chne, 4% des madriers et des douves expdis de Qubec. On sait par ailleurs que ces chiffres ne tiennent pas compte des madriers achets en bas de Qubec que Price expdie directement, en 1820, et probablement bien avant 74. La monte subsquente est spectaculaire. En 1828, il y a soixante-quinze chargements, soit le chiffre qui se maintiendra pendant toutes les annes 30.

    La correspondance nous fournit quelques autres indications. Ainsi,

    dans l'anne qui suit la fondation de la compagnie, Price fait environ 1,000 de commission 75, ce qui reprsente un chiffre d'affaires de 20,000. En outre, sa part de profit a t de 750 en 1820 et 1821 et de 3,500 en 1822 76. Tout ceci indique un dpart modeste. La Gazette de Qubec publie, partir de 1821, plusieurs annonces de Price, offrant, en vente rgulire ou aux enchres, divers produits imports: toiles, corda-ges, vin, rhum, raisins, sucre, noix, poterie, etc., ainsi que de la farine et du lard du Haut-Canada.

    74 W. P. George Idle, 9 mars 1820, AP, srie B. 75 W. P. David Price, 18 novembre 1820, ibid. 76 W. P. Gould et Dowie, 6 avril 1843, ibid.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 39

    Tableau 1

    Volume du bois expdi par W. Price 1816-1828 77

    Retour la table des matires

    Anne Pin Chne Madriers Mture Douves Navires 1816 121 413 20 251 1 529 25 975 10 1817 175 9 26 157 530 27 833 4 1818 2 690 273 29 592 725 72 153 13 1819 727 40 38 569 135 28 194 8 1820 969 763 29 901 191 41 375 10 1821 2 766 460 53 400 81 252 742 21 1822 2 668 328 36 557 289 199 482 18 1823 2 117 298 82 628 82 148 152 19 1824 2 379 428 76 557 36 158 145 16 1825 5 009 1 877 77 443 177 179 406 36 1826 -- -- -- -- -- 4 1827 -- -- -- -- -- 57 1828 -- -- -- -- -- 75

    Tous les bois sont mesurs en pices.

    Ce sont les affaires de Montral qui semblent surtout inquiter les associs de Londres durant ces .premires annes. Le commerce du Haut Canada est en mauvaise posture, crit Dowie en 1823. Les mar-chands n'ont pas pay la moiti des marchandises achetes l'an dernier et il n'y a peu prs pas de demande chez les consommateurs.. 78. Durant toute cette priode, Parker contrle svrement les commandes, donnant ainsi en 1823 permission d'acheter des bois jusqu' concurrence de 10,000 seulement.

    Durant quelques annes Price participe au commerce ctier interco-

    lonial men par les marchands de Qubec. Sur deux golettes, effectuant chacune environ quatre voyages par saison, il charge de la farine, du beurre, du porc et des pease destination de Halifax, Miramichi et St-Jean, Terre-Neuve. Les golettes reviennent sur lest. Qubec ambi-

    77 Nous avons interrompu notre compilation en 1826 car le nombre de charge-

    ments se multipliant, il aurait fallu consacrer trop de temps pour obtenir des statistiques qui demeurent approximatives.

    78 Kenneth Dowie W. P., 24 mai 1823, ibid.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 40

    tionne de concurrencer New-York et Liverpool dans l'approvisionne-ment des Maritimes 79, mais les marchands se plaignent des frais de sortie trop levs exigs par le Bureau des douanes 80. Nous ne retrouverons aucune trace de ce commerce intercolonial dans les cahiers de comptabili-t de 1827. On peut croire que les capitaux apports en 1823 par Na-thaniel Gould insufflent une vie nouvelle l'entreprise. L'expansion du march britannique jusqu' 1825 contribue lancer William Price sur la voie du succs, lui faire concentrer ses activits sur le seul commerce du bois.

    79 P. McGill W. P., 31 mars 1823, ibid. 80 JALBC, 1824, appendice Z, tmoignage de William Price.

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    Chapitre II

    William Price, marchand

    Les catgories des bois exports. Les prix du bois Qubec. Les activits au port de Qubec. Les contrats avec les entrepreneurs. Les contrats du Ministre de la Marine.

    Retour la table des matires Le commerce de W. Price porte sur diverses essences et catgo-

    ries de bois, sur lesquelles nous avons puis dans les archives de la compagnie plusieurs renseignements utiles.

    Pendant plusieurs annes, le bois quarri tient la premire place

    dans le volume et la valeur de ses exportations. L'arbre est coup en pices d'au moins 20 pieds de longueur, aplanies la hache sur qua-tre faces. Seuls les arbres absolument parfaits sont choisis et l'quar-rissage leur fait perdre le tiers de leur volume. L'unit de mesure est le pied cube, et, en Angleterre, le load de 50 pieds cubes.

    Le pin blanc, qui a remplac le sapin de la Baltique sur le march

    anglais, est le premier article d'exportation. La hauteur peut dpasser les cent pieds, mais tous les spcimens de grande taille sont en gn-

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 42

    ral rservs pour les mts, vergues et beauprs. La pice de pin quar-ri varie de 60 80 pieds cubes, un seul arbre fournissant de deux trois pices de 20 pieds de longueur par 2 pieds de diamtre. On ren-contre aussi un grand nombre de pices de 40 et 50 pieds cubes. Une loi fdrale de 1886 tablira le standard 20 pieds cubes 81. Dans lintervalle, les grands pins avaient disparu. Notons que Price fait couper ses mts dans les tats de New-York et du Vermont, parfois dans le sud du Haut-Canada. Plus au nord, les arbres n'atteignent sans doute pas les dimensions requises.

    Le pin rouge est un arbre plus petit qui donne des pices variant de

    30 45 pieds cubes. Les plus volumineuses sont transformes en es-pars pour la Marine britannique. Longtemps la cote du pin rouge sera trs leve sur le march. Mais partir de 1847, il tombe en dfa-veur, le volume des exportations s'effondre et, en 1852, sa valeur est la mme que celle du pin blanc 82. On trouvait du pin rouge en abon-dance sur le Saint-Maurice le Saguenay et dans certains districts du Bas du Fleuve.

    Par contre le chne provient presque exclusivement de l'Ou-

    taouais et des Grands Lacs. Les cahiers de comptabilit mentionnent des pices mesurant de 30 70 pieds cubes. On quarrit aussi des bois d'essences diverses, comme le merisier, le frne, l'rable, et sur-tout l'orme, largement utilis dans la construction navale. Aprs 1850, Price commencera exporter et vendre sur le march local le cdre et le mlze, sous forme de traverses de chemin de fer. Les anspects en noyer blanc, les avirons en frne sont des pices plus minces, d'environ 6 pieds de longueur, gnralement ouvres Qu-bec. Tout comme les pices de mture, elles sont mesures en pieds cubes.

    Price utilise les douves pour complter ses cargaisons, et en exp-

    die par golette dans tous ses tablissements. On les fabrique partir des merrains, pices de chne de 6 pouces d'paisseur, laisses aprs

    81 An Act respecting the cutting and measuring of Lumber in the Provinces of

    Ontario and Quebec, 49 Vict., chap. 3, cit par James E. Defebaugh, History of the Lumber Industry of America, I: 125.

    82 Ibid., I : 109.

  • Louise Dechne, William Price 1810 1850 (avril 1964, Universit Laval) 43

    l'quarrissage ou tailles dans des arbres imparfaits. Elles se prpa-rent en fort et dans les tonnelleries du Haut-Canada 83. Mais on constate que Price fait prparer presque toutes ses douves dans les ateliers de Hadlow et de New Liverpool. La douve standard mesure 5" x 11/2 x 31/2 ; la douve des Indes Occidentales, 4" x 3/4" x 31/2. L'unit est le mille ou M, soit 1,200 pices. Les bardeaux de c-dre ou de pruche se vendent aussi au mille . Les lattes en pin rouge ou en pinette sont mesures la corde. Ces deux derniers ar-ticles comptent peu dans le volume des exportations de Price.

    La catgorie de bois qui prend graduellement le plus d'importance

    dans le commerce de Price est le madrier. Il s'agit spcifiquement du deal anglais, soit une pice de 12 pieds de long, 9 11 pouces de large, 21/2 3 pouces d'paisseur. On a le madrier de pin rouge, blanc ou jaune 84 et le madrier d'pinette. Sur les terres de Price, un pin donne en moyenne trois billes de 12 pieds; si l'arbre est de bonne taille (22" de diamtre), chaque bille fournit 8 madriers. Un diamtre mdiocre donne seulement 2 madriers. La valeur de la bille est inf-rieure celle du pin quarri: volume gal la pice de pin vaudrait environ 1 et la bille 6 shillings. Dans la fabrication du madrier, le cot de la matire brute tant moindre, la marge de bnfice est plus lastique et comprend certains lments prvisibles, tels que les frais de fonctionnement de la scierie. L'exportation de bois quarri a un caractre plus spculatif car l'troite marge de bnfice dpend uni-quement des fluctuations du march. Price exporte des madriers d'pinette ds 1818. mesure que les rserves de pin diminuent, ces expditions deviennent plus importantes. En 1853, l'pinette repr-sente le tiers des chargements de madriers dans le Saguenay 85. Pour chaque essence de bois, il y a trois catgories de madriers, rparties selon la qualit. Il y a en outre les rebuts (culls) que Price exporte durant les bonnes annes. Le madrier est mesur en standard de 100 pices de 12' x 11" x 2 1/2. Toutes les pices de dimensions diffren-tes doivent tre ajustes ce standard. C'est le standard de Qubec

    83 Ibid., 91ss. 84 Il y a souvent confusion dans les livres des comptes entre pin blanc et le pin

    jaune. Nous croyons que le yellow pine correspond au pin gris ou cyprs, arbre plus chtif et de moins bonne qualit que le premier.

    85 Mmoire, 1853, AP srie B.

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    qui quivaut 2,750 pieds p. m. p. 86 En Angleterre, on utilise, selon les circonstances le standard de Qubec et le standard de Petersbourg (120 pices).

    Nous avons cru, au dbut de nos recherches, pouvoir tablir des

    sries de prix pour les bois. Mais nous nous sommes aperus que la chose est impossible partir d'une simple comptabilit prive. T. Tooke qui publia au milieu du XIXe sicle une Histoire des Prix, en 6 volumes, dclare n'avoir utilis que les prix du bois europen, le bois amricain comprenant une telle gamme de qualits, que les va-riations de prix rsultent souvent de la qualit qui domine sur le march tel ou tel moment 87. Les gouvernements du Bas-Canada et du Canada-Uni ont impos des dimensions rglementaires pour les bois exports, mais elles ont t peu ou pas suivies. Je pense, dclare Price une enqute en 1834, que l'inspection du bois est un rglement convenable, mais je suis certain que les personnes, qui il est consign en Angleterre, considrent le marchand comme respon-sable et ne portent aucune attention aux classifications des inspec-teurs de Qubec 88.

    Nous trouvons dans la comptabilit le prix pay pour une quantit

    de bois dtermine. Ainsi, 5,000 pieds de pin rouge 5d = 104.4.3 Mais comme nous ignorons la dimension des pices, le prix est inuti-lisable. En effet, le prix d'un pied cube de bois diffre selon qu'il s'agit d'une pice plus ou moins volumineuse. U n e pice de chne de 60 p. c. vaut 1/6 le p. c. alors qu'une pice de 30 p. c. ne vaut que 1s. Enfin, il y a toutes les variations qui se rapportent la qualit du bois. Ajoutons que Price passe des contrats avec ses fournisseurs du-rant l'hiver. Alors, le prix inscrit dans les livres en juillet est celui qui a t fix en janvier et non celui du march, mais il n'y a rien dans les livres qui nous l'indique.

    86 Le pied mesure de planche est aujourd'hui l'unit de mesure du bois

    duvre. Au XIXe sicle, on l'utilisait aux tats-Unis et la Marine britanni-que l'employait dans ses contrats.

    87 Cit par Gayer, Rostow et Schwartz, The Growth and Fluctuation of the Brit-ish Economy 1790-1850, II : 852.

    88 JALBC, minutes des tmoignages, 27 fvrier 1834.

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    Bref, il est impossible de faire un relev des prix du bois Qubec partir des sources dont nous disposions. Cependant l'tude des livres n o u s a permis de faire quelques observations: les pices de large diamtre se vendent plus cher mesure que les arbres de grande taille disparaissent. Ainsi, un mt de 30" x 99' ou 618 p. c. vaut, Qubec, 40 en 1833 et 60 en 1846. La baisse des prix est sensible dans toutes les catgories de bois en 1847 et 1848. Certaines catgories ne se relveront pas; tel, le pin rouge qui cesse d'tre en demande et le pin blanc, qui aprs avoir oscill autour de 5d. durant toute la priode, sem-ble vouloir plafonner 4d. Nous donnons ici une liste de la valeur moyenne du bois entre 1830 et 1850. Ces prix peuvent simplement servir d'chelle de comparaison entre les diffrentes catgories.

    Tableau 2

    Moyenne des prix du bois Qubec, 1830-1850

    Retour la table des matires

    Bois Unit de me-sure

    Prix de

    Chne p. c. 11d 1/6 selon les di-mensions

    Orme p. c. 7d 10d selon les di-mensions

    Pin rouge p. c. 8d 1sh. selon les di-mensions

    Pin blanc p. c. 3,5d 5d selon les di-mensions

    Frne p. c. 4d 6d selon les di-mensions

    Douves standard M 35 45 trs variable Douves Indes Occidentales M 16 20 trs variable Madrier, pin Cent 7,5 et 5,10 1re et 2e quali-

    ts Madrier, pinette Cent 6,10 et 4,6,8 1re et 2e quali-

    ts Lorsque Price dresse ses inventaires, il tablit le prix moyen du pin

    blanc quarri 5d le p. c. et il value globalement les madriers 6 le cent pour l'pinette, et 7,5s. pour le pin.

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    Au printemps 1831, William Price achte la rade de New-Liverpool pour laquelle il verse 66 en lods et ventes Sir John Caldwell 89. Ce sera son principal port de chargement. La valeur de l'tablissement serait de 6,000 et Price y aurait eu plus de 60 personnes sous ses ordres 90. Cer-taines gravures de Bartlett 91 illustrent bien le type d'occupation de ces rades. Chaque division rectangulaire est limite par deux longs quais pa-rallles; au large, on voit des postes d'ancrage et une estacade (baume) qui s'ouvre pour faire entrer les cages (dromes) qui sont dmembres l'intrieur. D.D. Calvin consacre plusieurs pages intressantes la des-cription des anses et la descente des cages depuis le lac Ontario et l'Outaouais jusqu' Qubec 92.

    Les madriers que Price achte dans les Seigneuries sont parfois empils

    sur des cages, plus souvent chargs sur des golettes. Molson a organis un service de remorqueurs vapeur pour touer les vaisseaux dans le port, ainsi que les cages et les golettes qui risquent de s'chouer ou sont immobilises en eau calme. Price a des actions dans l'entre-prise 93. C'est ainsi que les madriers de ses scieries de Batiscan et de Saint-Thomas sont charris Qubec 94.

    Des agents du gouvernement doivent en principe examiner et me-

    surer les bois, ce mesurage officiel servant dterminer le prix final entre acheteur et vendeur. Cependant il ressort d'une enqute mene en 1834, qu'il en est tout autrement dans la pratique 95. Les habitants se plaignent des taux d'inspections trop levs sur les madriers, des rejets injustifis, et surtout de l'habitude qu'ont les marchands d'en-gager leurs propres inspecteurs. William Price explique dans son t-moignage qu'il engage un inspecteur (culler) l'anne, qui est log et reoit 200 de gages, ainsi que cinq autres, la saison. Le vendeur peut surveiller leur travail et remet Price ce qu'il paierait un ins-pecteur indpendant. Toujours selon Price, cette procdure ne lse en rien le vendeur. Il ajoute qu'il ne faut pas exiger que les inspecteurs 89 Livre de caisse 1830-1832, AP, srie A. 90 Bryan Latham, Timber; its Development and Distribution, 204. 91 W.H. Bartlett (1809-1854) graveur anglais qui vient au Canada en 1838. 92 D.D. Calvin, A Saga of the St. Lawrence, 74ss. 93 Livres de caisse, AP, srie A. 94 Voir page 36. 95 JALBC, minutes des tmoignages, 27 fvrier 1834.

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    sachent bien lire, crire ou compter, car ceci liminerait les meil-leurs hommes parmi les Canadiens; menuisiers, tonneliers, charpen-tiers, qui ont appris leur mtier l'outil la main 96.

    Bien qu'en principe la prparation des bois doive tre excute

    par le vendeur, Price est souvent oblig de faire reprendre une partie du travail. Il faut parfaire l'quarrissage, prparer les douves, soigner la prsentation des pices de mture. La comptabilit contient un compte dtaill de toutes ces oprations, qui se poursuivent mme durant l'hiver. Le salaire des manuvres dans les cours bois est d'environ 2s. par jour. Celui des arrimeurs, de 3 et 4s.

    Price possde plusieurs golettes qui voyagent entre Qubec et

    ses tablissements du Bas du Fleuve. Il fait aussi construire des vais-seaux dans les chantiers de Qubec, soit 16 navires entre 1820 et 1850, selon les statistiques de Narcisse Rosa 97. Il y aurait deux trois mats de 700 et 800 tonneaux ainsi que des barques et des bricks de plus faible tonnage. Les arch ives ne nous fournissent aucun dtail sur cet aspect de l'entreprise et sur sa rentabilit. Il semble que Price au-rait espr un revenu de quelque 5,000 par an de l'armement de ses navi-res, mais, selon Gould et Dowie, ce n'est qu'une loterie et il serait sage d'y renoncer 98. Durant les annes 1845-1850, on voit Price essayer de vendre ses navires en Angleterre.

    La plupart des bois sont exports sur des vaisseaux affrts par

    Gould et Dowie. Le volume du chargement dtermine le cot du fret, ou prix du louage du btiment, lequel es t pay au por t d'arrive. Entre les annes 1820 et 1845, le fret varie entre 40s. et 50s. (sterling) le load. Plus la marchandise est pondreuse, plus il est relativement onreux. Sur 50 pieds cubes de pin blanc, par exemple, 40s. reprsente 200% du prix de revient Qubec. Sur un standard de madriers (quivalant 200 p. c.) le fret n'est que d'environ 100% de la valeur. Il nous a t impossible d'ta-blir une chelle tant soit peu exacte des fluctuations du fret. Cependant, il semble qu'il y ait eu, partir de 1848 et 1849, une baisse d'environ 10s.

    96 Loc. cit. 97 Narcisse Rosa, La construction des navires Qubec et ses environs. Grves

    et naufrages, non pagin. 98 Gould et Dowie W.P., 18 aot 1847, AP, srie B.

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    Ainsi la moyenne de l'anne au port de Qubec est de 31s, en 1849 et 26s. en 1850 99. La Gazette de Qubec attribue cette baisse l'aboli-tion des Lois de la Navigation et . la concurrence des navires tran-gers qui, en rsulte. Gayer 100 constate que le cot du fret est toujours directement li la conjoncture agricole, Lorsque les rcoltes sont mdiocres, un plus grand nombre de navires sont affrts pour l'impor-tation des crales, le fret monte et, consquemment, le prix du bois en Angleterre. Nous avons not que le fret sur les bois transports de la Baltique est assez lev. Ainsi, en 1845, il y a une diffrence de 12s. seulement en faveur des pays baltes 101.

    Si Price ne paie pas le fret proprement dit, il paie les frais de port et

    de pilotage. Les premiers ne sont imposs qu' Qubec seulement. Ce n'est qu'en 1845 que le gouvernement place des percepteurs Rimouski et Tadoussac, o tous les navires qui chargent dans les tablissements en bas de l'le d'Orlans sont tenus de s'arrter l'arrive et au dpart. Les frais y sont d'ailleurs minimes 102. Bouchette donne tous les d-tails sur les taux de pilotage 103.

    Chaque automne, Gould et Dowie dcident avec William Price

    des quantits de bois requises pour l'anne suivante. Celui-ci peut, ou bien attendre que le bois soit amen Qubec et l'acheter au prix du march, ou bien donner ses commandes des entrepreneurs (lum-bermen), qui les lui livreront un prix fix par contrat. Le contrat est souvent plus avantageux pour le marchand. Ici encore, Price procde de deux faons: souvent on le voit parcourir le Haut-Canada, en janvier et fvrier, et examiner les bois qui s'y coupent. Il achte alors sur place, en versant une avance pour aider l'entrepreneur sortir le bois de la fort et le descendre Qubec. Les prix du bois sont g-nralement plus bas cette saison 104. Mais quand la conjoncture est favorable, l'entrepreneur, qui a russi financer seul ses chantiers,

    99 La Gazette de Qubec, 9 dcembre 1850. 100 Gayer, Rostow and Schwartz, op. cit., I: 64. 101 Gould et Dowie W.P., 3 dcembre 1845, AP, srie B. 102 Mmo de W.P., aux capitaines, 1845, ibid. 103 Joseph Bouchette, Description topographique de la Province du Bas Canada,

    Appendice lxii. 104 W.P., George Idle, 26 fvrier 1820, AP, srie B.

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    prfrera attendre les prix du march, car les bois non rservs sont susceptibles d'tre en grande demande Qubec 105.

    Le contrat conclu l'automne, par lequel l'entrepreneur s'engage

    vendre telle quantit de bois, moyennant une avance substantielle, est plus frquent. En voici un exemple:

    William Spotswood de Kemptville, Haut-Canada, vend la Compagnie William Price et promet de leur livrer aussitt que possible, la saison pro-chaine, pas plus tard que le dix juin, 35,000 p. c. d'orme quarri, bien prpar, de bonne longueur et diamtre, soit 40' de longueur et 12" de ct, hormi[s] une partie qui peut tre de 11" de ct et 45' de longueur. Le prix sera 7d. le p. c., monnaie d'Halifax. William Price consent avancer au dit W. Spotswood la somme de 335 pour lui permettre de sortir le bois. L'avance est verse de la manire suivante: 25 comptant et une lettre de crdit tire sur M.G.R. Lang, agent de la banque de Bytown pour le reste 106.

    Ce contrat est sign devant deux tmoins, mais d'autres le sont devant

    notaire. Notons que l'avance est ici pour le tiers de la valeur du contrat. Price constate qu'une avance trop forte peut inciter l'entrepreneur rompre ses engagements 107. Pour les contrats plus importants, o les paiements anticips peuvent atteindre 1,000 et 2,000, l'entrepre-neur paie un intrt de 6% environ sur ces avances, jusqu' l'excu-tion du contrat. Le capital immobilis continue ainsi fructifier 108.

    Avant de conclure des contrats importants, Price entre en contact

    avec plusieurs entrepreneurs et leur demande des soumissions. Sou-vent Price fait des achats conjoints avec d'autres marchands de Qu-bec, tels Lemesurier, Gibb, Charles Symes, etc. Enfin, il achte fr-quemment son bois de ces mmes marchands. Il peut alors sagir de cages laisses en consignation dans les rades et vendues par le pro-pritaire de la rade. Un contrat non respect donne lieu d'intermi-nables poursuites judiciaires.

    105 W.P., George Idle, 9 mars 1820, ibid. 106 Contrat entre W.P. et William Spotswood, 21 octobre 1836, ibid. 107 Gould et Dowie W.P., 30 septembre 1837, ibid. 108 Contrat devant L.J Macpherson, N.P., Qubec, 2 novembre 1836, ibid.

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    Tous les entrepreneurs de bois quarri qui apparaissent dans les registres sont des Anglo-Saxons. Jusqu'en 1840 environ, Price achte galement beaucoup de madriers, Ici, les fournisseurs sont surtout des Canadiens franais et le montant des ventes est gnralement fai-ble, soit de 20 50. Il y a exceptionnellement de gros fournisseurs comme Toussaint Pothier et Nicolas Boissonnault de Saint-Thomas. Price achte aussi des billes, notamment le pin rouge du St-Maurice, partir de 1830.

    Les contrats de la Marine britannique jouent un rle important dans

    les affaires de Price. La documentation est abondante sur le sujet, aussi avons-nous cru bon de leur accorder une place part. Rgulirement le ministre de la Marine prpare une liste des quantits de bois requises par les chantiers royaux, pour lesquelles il demande des soumissions. Ces contrats sont pour un, parfois deux et trois ans. Les archives Price renferment une copie des diffrentes soumissions prsentes au ministre pour un contrat publi en 1829 109. Il y