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Livre du professeur par Sylvie Coly professeur de Lettres Les Misérables Victor Hugo Classiques & Patrimoine

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Page 1: Victor Hugo Patrimoine Les Misérables - Editions Magnard · Les enfants du XIXe siècle 1. Roman, ... Il a une attitude à la fois maternelle et paternelle : il aime tendrement l’enfant

Livre du professeur par

Sylvie Colyprofesseur de Lettres

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Sommaire

Étude de l’œuvre : toutes les réponses aux questionsSéance 1 Jean Valjean, un héros ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

Séance 2 Les petits misérables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

Séance 3 L’âme dévoilée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

Séance 4 Un roman engagé contre l’injustice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

Séance 5 Les mauvais pauvres et autres méchants . . . . . . . . . . . . 22

Séance 6 Petites histoires dans l’Histoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

Séance 7 Un roman total et foisonnant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

Autour de l’œuvre : toutes les réponses aux questionsLes enfants du XIXe siècle

1. Roman, Hector Malot . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

2. Texte de loi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

3. Image d’Épinal, Le Départ des petits Savoyards . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

Héros en difficulté : de l’Histoire à la parodie

1. Poésie, Victor Hugo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

2. Roman, Alexandre Dumas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

3. Roman, Émile Zola . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

4. Théâtre, Alfred de Musset . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

Pour aller plus loin : documentation et informations complémentairesTextes complémentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38

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Jean Valjean, un héros ? ➤ LIVRE ÉLÈVE P. 177Séance 1

LECTURE

Lecture du texte

La conversion

1. P. 11-12 : résumez en quelques mots l’aspect du personnage arrivant à Digne.

C’est un homme pauvre, d’âge mûr : il voyage « à pied » (p. 11, l. 2), il est « misérable » (p. 11, l. 6). Il paraît assez dangereux : on le regarde avec une « sorte d’inquiétude » (p. 11, l. 5).

2. P. 11-12 : de quel point de vue le narrateur trace-t-il ce portrait ?

Le narrateur se met à la place des « rares habitants qui se trouvaient en ce moment à leurs fenêtres ou sur le seuil de leurs maisons » (p. 11, l. 4-5), des « femmes de l’ancien bourg » (p. 12, l. 25) et « des enfants qui le suivaient » (p. 12, l. 28).

3. P. 12-18 : à quels endroits de Digne le voyageur s’arrête-t-il ?

Le voyageur s’arrête :– à la mairie (p. 12, l. 32) d’abord ;– à l’auberge de La Croix-de-Colbas (p. 13, l. 40) ensuite ;– puis dans un « cabaret », « rue de Chaffaut » (p. 15, l. 99-100) ;– à la prison, chez un artisan et dans la niche d’un chien (résumé page 16) ;– et enfin dans une « petite maison basse à côté de l’évêché » (p. 16, l. 135-136), qui est la demeure de « l’évêque » (p. 18, l. 22).

4. P. 12-17 : l’entrée du vagabond dans la mairie est-elle importante pour la suite du récit ? Qu’a-t-il mon-tré aux fonctionnaires ?

À la mairie, il a montré son « passeport jaune » (p. 17, l. 13), sur lequel est mentionné que c’est un « for-çat libéré » (voir note 7, page 17). Ce détail est important car, en envoyant un laquais en « direction de la mairie » (p. 14, l. 70), le premier aubergiste se renseigne sur l’identité du voyageur, et l’information de sa récente libération du bagne se propage ensuite dans la ville entière, conditionnant son arrivée chez l’évêque.

5. P. 12-18 : à qui le voyageur révèle-t-il son nom ? Pourquoi cette révélation intervient-elle si longtemps après le début du roman ?

« Jean Valjean » (p. 17, l. 8) révèle son identité à l’évêque. D’une part, Monseigneur Bienvenu est le seul homme qui reconnaît Jean Valjean pour lui-même et non simplement comme un ancien forçat, et d’autre part Victor Hugo crée ainsi un effet d’attente, faisant monter le suspens.

6. P. 18-20 : qu’apprend-on dans le chapitre VI sur l’histoire du personnage ?

Nous apprenons que Jean Valjean vient d’une famille de paysans pauvres de la Brie (l. 2, p. 18), qu’il a élevé les enfants de sa sœur (p. 19, l. 16-19), qu’il a volé du pain pour nourrir ces enfants affamés, mais a été pris et condamné aux travaux forcés (p. 19-20, l. 20 à 34) et qu’il s’est évadé à trois reprises, ral-longeant sa peine de plusieurs années (p. 20, l. 43-56).

7. P. 19-21 : Jean Valjean était-il mauvais avant d’entrer au bagne ? Et à sa libération ? Selon vous, quelles sont les raisons de ce changement ?

Jean Valjean ne cherchait pas à faire le mal en volant du pain : les enfants avaient faim (p. 19, l. 21). Il est d’ailleurs entré au bagne « sanglotant et frémissant » (p. 20, l. 55). Lorsqu’il est libéré en revanche, il est devenu « impassible » (p. 20, l. 56), « sombre » (p. 20, l. 56), très fort (p. 21, l. 2), et laisse entendre un rire de « démon » (p. 21, l. 8).

ÉTUDE DE L’ŒUVREtoutes les réponses aux questions

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Après presque vingt ans de prison, c’est un homme mauvais, qui ne croit plus en la société, ne peut plus dormir dans un lit (chapitre X, p. 21, l. 3), ne sait plus rire : la dure vie du bagne l’a transformé en bête ; il a perdu ses qualités d’homme.

8. P. 21-22 (chapitres X et XI) : l’évêque a-t-il eu raison d’offrir l’hospitalité à l’ancien forçat ?

L’évêque semble avoir eu tort d’offrir l’hospitalité à Jean Valjean, car celui-ci en profite pour voler les couverts en argent.

9. Cherchez la définition du terme « conversion ». P. 23 : par quelles phrases l’évêque pousse Jean Valjean à la conversion ? À quoi le forçat est-il converti ?

Une conversion est un changement, une transformation. L’évêque pousse le bagnard à changer (p. 23, l. 37 à 39). L’évêque lui dit qu’il n’appartient « plus au mal, mais au bien ». Jean Valjean est converti à la bonté. Il doit maintenant s’employer à faire le bien.

Le père protecteur

10. P. 26-27 : lisez le portrait du « père Madeleine », nom d’emprunt de Jean Valjean. En quoi peut-on dire qu’il réalise le souhait de Monseigneur Bienvenu ?

Jean Valjean fait maintenant le bien : il est devenu riche (p. 27, l. 25) et « tout fait riche autour de lui » (p. 27, l. 26) : les gens, la ville, et même l’industrie.

11. P. 30-32 (chapitre VI) : qu’est-ce qui montre que Jean Valjean utilise désormais ses dons pour faire le bien ?

Dans cet épisode, Jean Valjean sauve un « vieux homme » (p. 30, l. 3) : il fait donc preuve de charité. Il utilise la force acquise au bagne (p. 30-31, l. 12-39) sous les yeux d’un représentant de l’ordre capable de le renvoyer en prison. Jean Valjean est devenu un héros. Il en possède en effet toutes les qualités : la force, le courage, l’absence de peur, la capacité à agir.

12. Quels personnages vulnérables Jean Valjean sauve-t-il encore, page 36 tout d’abord, et pages 49 à 59 ? En quoi est-ce symbolique ?

Après avoir sauvé le vieillard, Jean Valjean sauve Fantine des griffes de la police et Cosette de celles des Thénardier : il sauve donc d’abord la mère, une femme seule, sans ressource et malade, puis l’orpheline, pauvre enfant sans défense.

13. P. 60-62 : quel rôle joue Jean Valjean auprès de Cosette ?

Il a une attitude à la fois maternelle et paternelle : il aime tendrement l’enfant (p. 60, l. 10-11) et lui enseigne « à lire » (p. 62, l. 43).

Le don de soi

14. Dans la cinquième partie du roman, le chapitre XIX (p. 151) s’intitule « Jean Valjean se venge ». Est-ce le cas ?

Jean Valjean sauve Javert de l’exécution. Il lui sauve donc la vie, et de ce point de vue ne se venge pas. Cependant, étant donné le cas de conscience qu’il pose au policier, si intense qu’il le conduit au suicide (p. 160 à 163), on peut dire malgré tout que Jean Valjean a paradoxalement réalisé sa vengeance par trop de bonté.

15. P. 164-169 : pour quelles raisons Jean Valjean dévoile-t-il son identité de forçat à Marius dans le livre septième ?

Jean Valjean révèle son identité « par honnêteté » (p. 167, l. 86). Il ne peut pas se mentir à lui-même (p. 168, l. 109-111) : c’eut été alors de la complaisance et sa « conscience » (p. 168, l. 113) le lui interdit. Tout au long du roman, l’ancien forçat n’a révélé son identité que trois fois : chez l’évêque de Digne, à l’assem-blée présente lors du procès Champmathieu et à Marius, après son mariage avec Cosette.

16. Comparez le premier portrait de Jean Valjean (p. 17-18, chapitre III) et l’analyse qu’il fait de lui-même (p. 168, lignes 111 à 135). Le regard que porte le personnage sur lui-même a-t-il évolué ?

Lors du premier portrait, Jean Valjean se dit rejeté de la société, mais cherche tout de même à en faire partie. Il veut dormir dans une auberge, mais semble résigné au fait que les gens n’aient pas pitié de lui. Il subit son destin, balloté de lieu en lieu et toujours expulsé, jusqu’à ce qu’il parvienne à la maison de l’évêque.Dans le second texte, il s’exclut lui-même de la famille de Marius, conscient de ne pas pouvoir accepter la société telle qu’elle est. Il ne subit pas son destin, il agit selon la condition d’homme honnête qu’il s’est

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choisie. Il n’est « d’aucune famille » (p. 168, l. 100), il est le « malheureux », il est « dehors » (p. 168, l. 103). Il personnifie le misérable, le monstre que les autres ne reconnaissent pas, celui qui est « hors de la vie » (p. 169, l. 124). Ce n’est pas sa place au sein des hommes qui lui importe, mais son propre regard sur lui-même. Il est donc devenu humain, alors qu’au début il était presque bestial : il a trouvé sa conscience, et c’est elle qui dicte ses actes.

17. P. 176 : le roman se conclut par un poème, à la gloire de Jean Valjean. Quels personnages du récit peuvent incarner « son ange » (l. 15) ?

L’ange de Jean Valjean est à la fois Mgr Myriel, l’évêque qui lui a permis de passer du Mal au Bien et qui semble veiller sur sa conscience, et Cosette qui lui a appris qu’il était capable d’aimer.

18. P. 174-176 : la mort de Jean Valjean est-elle, selon vous, en accord avec sa vie ?

Jean Valjean a fait le vœu de vivre selon sa conscience, en assumant ses erreurs et son identité. Il meurt dans un dénuement total, offrant la charité aux pauvres à qui il donne le « billet de cinq cents francs » auquel il n’a « pas touché » (p. 175, l. 10), mais il garde l’amour de ses enfants, et particulièrement de Cosette. L’amour est devenu la chose la plus importante à ses yeux (p. 175, l. 22).

19. Quelles qualités font de Jean Valjean un héros ? Qu’est-ce qui en fait un homme ordinaire ?

Jean Valjean est un héros car il a des qualités hors du commun : – il est fort ;– il est dévoué, et prend soin des faibles et des déshérités : vieillards, enfants, femmes perdues ;– il fait preuve d’honnêteté envers les autres et envers lui-même ; – il montre une immense pitié, même pour ses ennemis, que ce soit Javert ou Thénardier.C’est un homme ordinaire car :– il est issu du peuple ;– il a commis des fautes : il a volé du pain et les couverts en argent, il s’est évadé du bagne, il a menti pour entrer au couvent ;– il est très souvent en proie au doute ;– il avoue ne pas avoir aimé Marius tout de suite.

Lecture d’image

20. Qui est Auguste Rodin ? Est-ce un contemporain de Victor Hugo ?

Auguste Rodin est né en 1840 et mort en 1917. Il a vécu en même temps que Victor Hugo, même s’il était son cadet de trente-huit ans. Lorsque paraissent Les Misérables, Rodin a 22 ans et Victor Hugo est âgé de 60 ans.Rodin est l’un des plus grands sculpteurs français. Son style, si vivant qu’il est accusé au début de sa carrière de mouler ses œuvres sur des modèles humains, lui vaut une reconnaissance tardive mais immense. Amant de son élève Camille Claudel, il côtoie les impressionnistes (et notamment Monet et Cézanne).Il moule Le Penseur en bronze en 1902. L’œuvre est présentée au public en 1904. La sculpture, propriété de la ville de Paris, est placée devant le Panthéon en 1914, puis au musée Rodin en 1922. Il existe une vingtaine d’exemplaires du Penseur (appelé tout d’abord Le Poète), de dimensions variables, répartis dans le monde.

21. Jean Valjean est-il un « penseur » ?

Jean Valjean est un penseur car il accorde beaucoup d’importance à sa conscience, qui détermine ses choix.

Étude de la langue

Grammaire

22. Page 11, des lignes 1 à 5, relevez les compléments circonstanciels et donnez leurs fonctions. Pour quelles raisons y en a-t-il autant ?

– « Dans les premiers jours du mois d’octobre 1815 », « une heure environ avant le coucher du soleil » sont des compléments circonstanciels de temps ;– « à pied » est un complément circonstanciel de moyen ;

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– « dans la petite ville de Digne », « à leurs fenêtres ou sur le seuil de leurs maisons » sont des complé-ments circonstanciels de lieu ;– « avec une sorte d’inquiétude » est un complément circonstanciel de manière.D’une part l’auteur veut être précis et ancrer son récit dans des circonstances réelles (historiques et géographiques), d’autre part il a le souci de décrire une situation claire que le lecteur peut imaginer sans peine, et enfin il réussit ainsi à peindre un climat permettant au lecteur de ressentir une émotion particulière.

Lexique

23. Selon vous, Jean Valjean est-il un « misérable » ? Précisez la signification de ce mot.

Le misérable est à la fois celui qui inspire la pitié par la misère dont il témoigne et celui dont la conduite suscite le mépris et l’indignation. Jean Valjean est au début du roman un misérable car sa conduite envers Mgr Bienvenu, et particulièrement le vol des couverts en argent, suscite le mépris. Mais c’est aussi un misérable car il inspire la pitié de l’évêque.

24. P. 32, l. 53 : Jean Valjean a sur le visage une expression de « souffrance heureuse ». Le sens de ces deux mots peut-il coexister ? Comment se nomme cette figure de style ?

Ces mots ont un sens contraire et forment un oxymore qui montre la complexité des sentiments de Jean Valjean.

Étymologie

25. Cherchez dans le chapitre VI (pages 18 à 21) d’où vient le nom Jean Valjean. Que pensez-vous de cette façon de nommer un enfant ? Est-elle encore d’actualité ?

Jean Valjean porte le nom de son père (p. 19, l. 5-6), qui est un surnom. Sa famille n’a pas de nom véri-table. Ce phénomène était courant sous l’Ancien Régime : les pauvres ne savaient ni lire ni écrire.Les consonances de ce nom, qui peut se traduire ainsi : « Jean, voilà les gens », font de Jean Valjean l’emblème des « petites gens » et la personnification du peuple tout entier.

26. P. 171, l. 2 : quelle est l’étymologie du terme « admirable » ? Qu’entend Marius par ce mot ?

« Admirable » est emprunté au latin admirabilis, dérivé d’admirari, signifiant « s’étonner ». Marius consi-dère donc Jean Valjean à la fois comme un être étrange et comme quelqu’un digne d’être considéré avec émerveillement.

Patrimoine

27. P. 20, l. 53 : Jean Valjean est entré au bagne en 1796. Il avait 25 ans. Sous quel régime politique est-il né ? Est-ce le même, lorsqu’il sort de prison en 1815 ?

Jean Valjean est né sous l’Ancien Régime, en 1771, sous le règne de Louis XV, dix-huit ans avant la Révolution française. Il a donc vécu la proclamation de la première République en 1792, après la chute de Louis XVI, et la rédaction de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.Pendant que Jean Valjean était au bagne, s’est déroulé le règne de Napoléon Ier : il a pris le pouvoir pendant la première République (le 9 novembre 1799, dit coup d’état du 18 Brumaire), a été couronné empereur en 1804, a mené plusieurs campagnes en Europe, a abdiqué en 1814, et a été exilé à l’île d’Elbe. Louis XVIII lui a succédé, mais l’empereur est revenu en 1815 pour les Cent-Jours, et a débarqué à Golfe Juan (voir p. 13, l. 35). Après la défaite de Waterloo contre les Prussiens et les Britanniques, Napoléon est renvoyé en exil, sur l’île de Sainte Hélène cette fois. Il meurt en 1821.

EXPRESSION

Expression écrite

Synthèse

28. P. 169, l. 4 : un journaliste demande à Jean Valjean, âgé de « quatre-vingts ans », d’écrire son histoire pour la publier dans un quotidien. Rédigez ce texte.

Quelques étapes s’imposent :– la rencontre avec Mgr Myriel et la conversion de l’ancien forçat du Mal au Bien ;

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– la transformation de Jean Valjean en respectable M. Madeleine, directeur de la fabrique de verroterie et maire de Montreuil-sur-Mer ;– le sauvetage de Fauchelevent et de Fantine agonisante ;– la révélation de sa véritable identité au procès Champmathieu ;– le retour au bagne et la nouvelle évasion ;– le sauvetage de Cosette ;– la traque de Javert, qui le conduit au couvent du Petit-Picpus sous le nom d’Ultime Fauchelevent ;– l’éducation de Cosette ;– l’embuscade tendue par Thénardier et le Patron Minet ;– Marius sauvé des barricades et rendu à son grand-père ;– le mariage de Cosette et Marius et la solitude retrouvée ;– enfin la mort, rendue plus douce par l’amour de ses enfants.

Écrit d’invention

29. L’évêque de Digne rencontre Jean Valjean vivant sous l’identité de M. Madeleine, à Montreuil-sur-Mer. Imaginez le dialogue entre les deux hommes.

Ce travail est l’occasion de vérifier si les élèves ont bien compris le rôle joué par Mgr Myriel dans la vie de Jean Valjean.– L’évêque se montrera de toute évidence satisfait de la conduite de Jean Valjean et ce dernier ne man-quera pas de le remercier d’avoir cru en lui. – Jean Valjean pourra également, si les élèves ont été attentifs à ce détail, rendre les chandeliers en argent à Mgr Bienvenu.– L’évêque, quant à lui, pourra cependant émettre une réserve sur le changement d’identité du forçat.

Expression orale

30. Jean Valjean est souvent comparé à la figure du Christ, car il en porte les symboles. Répondez orale-ment à ces questions :

– Quel fait important dans la vie de Jean Valjean a lieu le jour de Noël ?

Il adopte Cosette (p. 59).

– Dans quelles circonstances est-il enterré dans un cercueil, avant de ressusciter ?

Il est enterré pour entrer au couvent du Petit-Picpus (p. 70).

– Qui porte-t-il sur ses épaules le long d’un chemin comparable au calvaire ?

Il porte Marius dans les égouts (p. 153-158).

– Punit-il ses ennemis, Javert et Thénardier ?

Il leur pardonne (p. 151-153 et p. 175, l. 15) sans les punir pour leurs offenses.

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Les petits misérables ➤ LIVRE ÉLÈVE P. 181Séance 2

LECTURE

Lecture du texte

Fragile Cosette

1. P. 24-26 : de qui Cosette est-elle la fille ?

Cosette est la fille de Fantine, une jeune femme sans ressource, et de Tholomyès, un bourgeois sans scrupule.

2. P. 25, l. 9 : pourquoi Fantine raconte-t-elle son histoire « un peu modifiée » aux Thénardier ?

Elle ne peut pas avouer qu’elle a eu sa fille hors mariage : elle serait déshonorée aux yeux des gens.

3. Le lecteur peut-il oublier Cosette entre la page 26 et la deuxième partie, qui lui est consacrée ?

Cosette est présente « en creux », par les difficultés que les Thénardier causent à Fantine.

4. P. 44-47 : quel âge a Cosette lorsque le lecteur la retrouve chez les Thénardier ? A-t-elle des activités normales pour son âge ?

Cosette a « huit ans » (p. 46, l. 1-2). Elle travaille dur (p. 45, l. 43-45). Sa vie est beaucoup plus difficile que ne devrait être celle d’une enfant de cet âge.

5. P. 47-50 : dans quelles circonstances Cosette fait-elle la connaissance de Jean Valjean ? Celui-ci sait-il dès leur rencontre qui elle est ?

Cosette rencontre Jean Valjean près de la fontaine, dans la forêt, à l’extérieur du village (p. 49, l. 45-57). Jean Valjean ne sait pas qui elle est : il a, quand elle lui dit son nom, comme « une secousse électrique » (p. 50, l. 16) : il est très surpris.

6. P. 47-50 : pourquoi la rencontre de Cosette avec Jean Valjean semble-t-elle marquée par le destin ?

Cette rencontre est marquée par le destin car :– Jean Valjean trouve celle qu’il vient chercher (le lecteur sait qu’il a fait une promesse à Fantine) sur son chemin, avant d’entrer chez les Thénardier ;– la petite fille était en train d’en appeler à Dieu (p. 49, l. 49) pour qu’il l’aide à porter son seau, quand Jean Valjean apparaît ;– il fait nuit, le lieu est isolé, Cosette ne distingue qu’une « grande forme noire » (p. 49, l. 52) et pourtant elle n’a « pas peur » (p. 49, l. 57).

7. P. 51-53, l. 21-58 : le portrait de Cosette est esquissé. Quelle partie de ce portrait semble être tracée par Jean Valjean ? et par le narrateur ? À quoi le voyez-vous ?

Jean Valjean, qui « considérait l’enfant avec une attention étrange » (p. 51, l. 25), semble être à l’origine des deux premières phrases du portrait (p. 51, l. 26). Le narrateur prend ensuite le relais, en intervenant à la première personne du pluriel (p. 51, l. 26), rappelant qu’il a « déjà » été question de l’enfant.

8. Dans quel ordre sont évoqués les éléments du portrait de la petite fille ? Quel élément psychologique transparaît dans ce portrait physique ?

Les éléments sont évoqués de la tête aux pieds, puis le narrateur parle de l’attitude générale de Cosette. Il insiste sur les traces laissées par la « crainte » (p. 52, l. 45), réaction psychologique qui habille les atti-tudes de l’enfant.

9. P. 57-59  (chapitre IX) : de quelle manière Jean Valjean enlève-t-il Cosette aux Thénardier  ? Cette méthode vous semble-t-elle acceptable aujourd’hui ?

Il la rachète 1 500 francs (p. 59, l. 57). Cette méthode est bien entendu inacceptable, car elle fait de l’enfant une marchandise ou un animal que l’on peut vendre.Pour plus d’informations sur l’enfance dans la littérature au XIXe siècle, consultez le dossier « Récits d’en-fance et d’adolescence », pages 6 à 11, disponible sur le site http://www.classiquesetcontemporains.com dans la rubrique « dossiers thématiques ».

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10. Lisez les pages 60 à 71 : comment Jean Valjean réussit-il à donner une éducation à Cosette, sans se séparer d’elle ?

Jean Valjean s’introduit par hasard dans le couvent du Petit-Picpus, où travaille le vieux Fauchelevent. Il se fait passer pour son frère et œuvre en tant que jardinier, pendant que Cosette suit l’éducation de l’école du couvent.

11. Après l’enfer des Thénardier, Cosette connaît le paradis avec Jean Valjean, puis au couvent. Quels effets ont sur elle les deux environnements ? Pensez-vous que son destin aurait été le même si elle était restée chez les Thénardier ?

Cosette n’est que crainte en enfer, alors qu’elle devient un ange au couvent. Si elle était restée chez les Thénardier, elle n’aurait jamais appris à lire et se serait probablement enfuie, à moins qu’elle n’ait subi le même destin qu’Éponine.

Gavroche gouailleur

12. P. 73 : à quoi le gamin de Paris est-il comparé ? Pour quelles raisons ?

Le gamin est comparé à un oiseau, car il est « petit » (l. 3), « joyeux » (l. 3), « il n’a pas de toit sur la tête » (l. 5), « vit par bandes », et « loge en plein air » (l. 7). La ville est ainsi une métaphore de la forêt nourricière.

13. P. 75, l. 40 : comment se nomme la famille du « joyeux va-nu-pieds » ? Où vit-elle ? Cet endroit a déjà été mentionné dans le roman. Qui l’habitait ? Combien de temps auparavant ?

La famille de Gavroche se nomme « Jondrette » (p. 75, l. 39), mais on se doute que c’est un nom d’em-prunt (il s’agit en réalité de la famille Thénardier). Elle habite la masure Gorbeau (p. 75, l. 28), occupée il y a « huit ou neuf ans » de cela  (p. 74, l. 1) par Cosette et Jean Valjean.

14. P.  74-75, l.  1-49  : Gavroche est-il décrit comme un mauvais garçon  ? Quels traits de caractère dominent son portrait ?

Gavroche n’est pas décrit comme un mauvais garçon. Il est « innocent » (p. 73, l. 16) : – il est rieur (p. 74, l. 5), « goguenard » (l. 17), « chantait, jouait à la fayousse » (l. 18), « il était joyeux » (l. 22), c’est un « joyeux va-nu-pieds » (l. 40) ;– il est « digne de pitié » (l. 11-12), n’en veut à personne (l. 48) ;– il ne vole que pour se nourrir, à la manière des « chats » et des « passereaux » (l. 19-20) ;– il est moralement convenable : il se fâche quand on l’appelle « voyou » (l. 21), et n’oublie pas sa mère (l. 24).Ce sont sa gaieté naturelle et sa désinvolture qui dominent.

15. P. 74-75 : relevez le vocabulaire qualifiant l’attitude des Jondrette envers leur fils. Que pensez-vous d’eux ?

Les Jondrette sont peu généreux, voire cruels : ils n’ont pas habillé leur fils (l. 6-9) et l’ont « jeté dans la vie d’un coup de pied » (l. 15). Ils sont peu aimants (l. 11) : ils ont « le froid » dans le cœur (l. 42), renvoient leur fils à la rue (l. 45), choisissent les enfants qu’ils aiment (l. 50) dans la fratrie. Ce sont « les plus misérables » (l. 33) des habitants de la masure. Ils vivent dans un « extrême dénuement » (l. 38).

16. P. 131-134 : Gavroche prend sous son aile deux petits garçons jetés à la rue. Qui sont-ils ?

Gavroche recueille ses propres frères sans le savoir.

17. P. 131-134 : par quels mots Gavroche désigne-t-il les enfants ? Quelle langue parle-t-il ? Cette langue est-elle un trait important du personnage ?

Gavroche appelle les enfants « moutards » (p. 132, l. 3 ; p. 133, l. 32), « momacques » (l. 9), « momi-gnards » (l. 39), « mioches » (l. 41) et « mômes » (p. 134, l. 71). Il parle l’argot. Le langage est un usage social, qui donne des indications sur le milieu social du personnage. Gavroche vit dans la rue, il est donc normal qu’il parle argot. C’est un élément constitutif de son portrait.

18. Montrez de quelles qualités Gavroche fait preuve :

– en établissant son logis dans l’éléphant et en recueillant ses frères (p. 131-134) ;

Gavroche se montre débrouillard et généreux.

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– en démasquant Javert (p. 137-138) ;

Il est observateur et perspicace.

– en dérobant des cartouches aux soldats morts devant la barricade (p. 147-149).

Il est courageux, voire inconscient du prix de sa vie.

19. P. 147-151 : Gavroche meurt. Cette fin correspond-elle à la vie du personnage ? Quelle émotion se dégage de ce récit ?

Gavroche meurt en conservant sa gaieté et sa désinvolture. Le récit est pathétique : le lecteur éprouve de la pitié pour le garçon.

20. Gavroche représente aujourd’hui un mythe. Que symbolise-t-il, selon vous ?

Gavroche incarne le gamin de Paris, la langue bien pendue, qui flâne dans les rues, empli d’une gaieté désinvolte, sans un sou en poche.

Lecture d’image

21. Quelle partie du visage de Gavroche paraît disproportionnée ? Pour quelle raison ?

Gavroche a une bouche immense, qui reflète sa gouaille. Dans le roman, il a réponse à tout.

Étude de la langue

Grammaire

22. P. 45, l. 42-45 : onze verbes se suivent. Comment appelle-t-on cette figure de style ? Quel effet a voulu créer l’auteur ? À quel temps sont ces verbes ? Quelle valeur ce temps a-t-il ?

Victor Hugo fait ici une énumération. Il veut montrer l’intensité du travail de Cosette et l’indécence du nombre de tâches accomplies par l’enfant. Les verbes sont de plus à l’imparfait, qui a ici valeur de répé-tition et qui renforce encore l’idée de la surcharge de travail.

Lexique

23. P. 150, l. 87 : que signifie l’expression « la face camarde du spectre » ? À propos de quelle partie du visage emploie-t-on souvent le terme « camard » ? Trouvez d’autres adjectifs qualifiant cette région du visage.

« Camarde » signifie « aplatie ». Cet adjectif est utilisé en général pour décrire le nez.Le nez peut être court, camus, mince, allongé, saillant, droit, aquilin, proéminent, busqué, écrasé, épaté, crochu, pointu, etc.

Étymologie

24. Que signifie « parvulus » (p. 73) en latin ? Pourquoi, selon vous, Victor Hugo a-t-il choisi ce titre ?

Parvulus est un adjectif qui signifie « très petit ». Les gamins de Paris sont les « atomes » de Paris, ville assimilée à la mère nourricière. Ce sont de tout petits éléments qui évoluent au sein de « l’énorme ville » (p. 74, l. 17).

Patrimoine

25. En 1850, Victor Hugo affirme que son « idéal » est « l’instruction gratuite et obligatoire » pour tous. A-t-il été celui qui a mis cette réforme en place ? De quand date-t-elle ?

Cette réforme date de lois initiées par Jules Ferry, ancien ministre de l’Instruction publique et président du Conseil, créateur des écoles normales d’instituteurs (1879) : – la loi du 21 décembre 1880 ouvre l’accès de l’enseignement public secondaire aux filles ; – celle du 16 juin 1881 instaure la gratuité de l’enseignement primaire ; – et un an plus tard, grâce à la loi du 29 mars 1882, l’enseignement est rendu public, laïc et obligatoire. Ces réformes sont alors guidées principalement par la volonté des élites d’unifier le pays pour profiter d’un électorat stable et d’estomper les cultures provinciales. Hugo est donc un précurseur, voire un idéaliste, puisque ces lois interviennent plus de trente ans après son discours.

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EXPRESSION

Expression écrite

Synthèse

26. Rédigez la biographie de Gavroche, de sa naissance à sa mort.

Gavroche est le fils des Thénardier. Rejeté par ses parents cruels, il a grandi à Paris, dans les rues. On ne sait rien de sa vie jusqu’à ce qu’il ait onze ans, hormis le fait qu’il est habillé de nippes que d’autres lui ont données ou qu’il a trouvées. Lorsqu’il atteint onze ans, il rencontre par hasard ses deux frères dont il ignore le nom et l’existence, abandonnés eux aussi par les adultes. Il les prend sous sa protection et les amène là où il vit, à l’intérieur de la statue de l’éléphant en plâtre du jardin des Plantes. Débrouillard, généreux et gouailleur, Gavroche les nourrit et les met hors de danger jusqu’au matin. Réveillé par les bandits du Patron-Minet qu’il aide occasionnellement, il perd la trace des deux garçons.Au courant des émeutes qui sévissent dans Paris, il se rend utile sur la barricade des amis de l’ABC, portant des messages, repérant Javert qui s’est introduit dans le cabaret, constituant des cartouches. Au plus fort de la bataille, il meurt en chantant, tentant de récolter des munitions près des lignes ennemies.

Écrit d’invention

27. P. 66 : Cosette est en sécurité dans la maison du père Fauchelevent, après sa fuite de la maison Gor-beau. Cependant, triste d’avoir abandonné sa poupée, elle la décrit au jardinier.

Les élèves pourront s’aider des pages 56-57 où Cosette reçoit la poupée des mains de Jean Valjean. On précisera aux élèves que les poupées de l’époque étaient pour la plupart en porcelaine et se rappro-chent de ce qu’on appelle aujourd’hui des « poupées de collection » à valeur essentiellement décorative.On appréciera que la description comporte un vocabulaire précis et approprié, se rapportant aux diffé-rentes parties du corps et des vêtements de la poupée.

28. Vous avez rencontré un gamin des rues, comme on en croise encore parfois aujourd’hui. Racontez cet épisode, en dressant de ce Gavroche moderne un portrait en mouvement.

On attend des élèves qu’ils se mettent en scène et décrivent ce « gamin des rues » de leur propre point de vue.

Expression orale

29. Exposé : Les enfants miséreux abondent dans la littérature du XIXe siècle. Choisissez une œuvres parmi les romans cités ci-après, et présentez-la à vos camarades : Oliver Twist de Charles Dickens, Sans famille d’Hector Malot, L’Enfant de Jules Vallès, Les Aventures de Tom Sawyer de Mark Twain, Le Petit Chose d’Alphonse Daudet.

Oliver Twist a été écrit en 1837. Ce roman évoque l’histoire d’un jeune orphelin, Oliver, chassé de l’or-phelinat pour avoir demandé une ration de nourriture supplémentaire. Après de nombreuses errances et privations, il rencontre Fagin, brigand des bas-fonds londoniens, pour le compte duquel il apprend à voler. Il sera enfin recueilli par M. Brownlow, un homme riche et généreux.

Dans Sans famille, en 1878, Hector Malot évoque le destin de Rémi, un jeune orphelin élevé par la mère Barberin, sa nourrice. Le garçon est vendu à l’âge de 7 ans par le méchant mari de la mère Barberin, à un musicien ambulant, le seigneur Vitalis, avec qui il va parcourir les routes de France, accompagné du singe Joli-Cœur et du chien Capi. Recueilli par la famille Acquin à la mort de Vitalis, il rentre finalement chez la mère Barberin qui lui apprend qu’il est recherché par sa véritable mère, la très riche Britannique Mme Milligan, à qui il a été enlevé bébé.

L’Enfant, écrit en 1889, est une autofiction dédiée « à tous ceux qui crevèrent d’ennui au collège ou qu’on fit pleurer dans la famille, qui pendant leur enfance, furent tyrannisés par leurs maîtres ou rossés par leurs parents ». Jules Vallès y raconte, à travers la voix de Jaques Vintgras, le personnage princi-pal, fils d’une mère paysanne injuste et violente et d’un père professeur sans envergure, son enfance martyre.

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L’Américain Mark Twain évoque, dans Les Aventures de Tom Sawyer en 1876, la vie de Tom, un orphelin élevé par sa tante Poly dans le Mississippi. Roublard et débrouillard, épris de la jolie Becky Thatcher et aimant l’école buissonnière, Tom Sawyer est aujourd’hui le symbole de la jeunesse libre et anticonformiste américaine. Le récit, assez dense, en fait le témoin d’un meurtre impliquant Joe l’Indien, Muff Potter et le docteur, et l’acteur d’une chasse au trésor menée avec son ami Huckleberry Finn.

Alphonse Daudet publie Le Petit Chose en 1868. Ce récit autofictionnel évoque la jeunesse de Daniel Eyssette, surnommé « le petit chose » par sa famille. Victime de la faillite de l’entreprise familiale, Daniel est contraint d’occuper pour son grand malheur le poste de surveillant dans un collège de campagne, avant d’être recueilli par son frère à Paris. Il tente d’être poète, et se voit entraîné vers une mauvaise vie par une femme de basse morale. Endetté, il retrouve son frère Jacques, qui meurt peu après, ainsi que son amour de jeunesse, Camille, et prend finalement la direction de la manufacture de porcelaine du père de celle-ci.

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L’âme dévoilée ➤ LIVRE ÉLÈVE P. 185Séance 3

LECTURE DU TEXTE

Marius et Cosette amoureux

1. P. 88, l. 20 à p. 93, l. 46 : Marius et Cosette tombent-ils amoureux lors de leur première rencontre ?

Marius ne tombe pas immédiatement amoureux de Cosette. Il remarque tout d’abord Jean Valjean, dont il fait le portrait (p. 88, l. 27 à p. 89, l. 37), et côtoie le couple toute une année, avant de s’interrompre « près de six mois » (p. 90, l. 4). C’est seulement par la suite qu’il remarque que Cosette est devenue une « grande et belle créature ayant toutes les formes les plus charmantes de la femme à ce moment précis où elles se combinent avec toutes les grâces les plus naïves de l’enfant » (p. 90, l. 13-15).

2. P. 91-95 (chapitres VII et IX) : de quelle manière Marius obtient-il des informations sur la jeune fille qu’il aime ? Ces informations sont-elles fiables ?

Marius ramasse un mouchoir oublié sur le banc occupé auparavant par M. Leblanc et Mlle Labrune, portant les initiales U. F. Il s’imagine ainsi que la jeune fille se nomme « Ursule » (p. 93, l. 41). Pour en savoir plus, enfin, il la suit jusque chez elle, et interroge le « portier » (p. 94, l. 20). Il y a donc une part d’imagination et une part d’enquête véritable dans la démarche de Marius.

3. P. 92, l. 21-36 : relevez les mots qui montrent que le narrateur porte un jugement sur l’attitude de Marius. Ce jugement est-il positif ou négatif ?

On peut relever les expressions « il faut croire » (l. 21), « Marius ne comprit point » (l. 25), « autre faute » (l. 28), « Marius ne prenait pas garde à ces symptômes » (l. 29), « progrès naturel et fatal » (l. 30), « redoublement de ténèbres sur ses yeux » (l. 32-33).Le jugement du narrateur est délibérément négatif. Il prépare ainsi le lecteur à la péripétie suivante : le déménagement du vieux monsieur et de sa fille et la déconvenue du jeune homme.

4. P. 122-123, chapitre VI : qu’apprend-on sur les sentiments de Cosette à l’égard de Marius ? Selon vous, pourquoi le narrateur a-t-il attendu si longtemps pour nous révéler le point de vue de la jeune fille ?

Cosette est amoureuse de Marius (p. 123, l. 11-13). L’annonce des sentiments de Cosette est retar-dée pour créer un effet d’attente et de suspens et pour initier un effet de concurrence avec le person-nage d’Éponine, sorte d’ange noir qui se construit en contrepoint du personnage de Cosette.

5. P. 129-131 : de quelle façon Marius déclare-t-il son amour à Cosette ? Que pensez-vous de ce procédé ?

Marius dépose sur le banc du jardin de la maison de la rue Plumet un cahier où sont consignés des poèmes qu’il a écrits lui-même. Il apparaît d’abord comme une ombre (p. 129), puis Cosette l’aperçoit (p. 130). C’est un procédé de séduction très romantique.

6. P. 130-131  : relevez les mots du texte décrivant l’apparence et les émotions des deux jeunes gens lorsqu’ils se parlent pour la première fois. Quel champ lexical domine ? Selon vous, pourquoi ?

Cette scène est très romantique et l’émotion déborde littéralement les jeunes gens : Marius est « pâle et amaigri » (l. 2), Cosette est « prête à défaillir » (l. 8). On repère le champ lexical de la mort associé à celui de la nuit : « amaigri », « vêtement noir », « crépuscule », « jour qui se meurt », « âme qui s’en va », « défaillir », « triste », « elle fût tombée », « n’ayez pas peur », « elle s’affaissa », « comme si elle se mourait », « d’une voix si douce que ce n’était plus qu’un souffle ».

Éponine éconduite

7. P. 95-99, chapitre IV : Marius rencontre Éponine pour la première fois. Que ressent-il pour la jeune fille ? Justifiez votre réponse en relevant le vocabulaire du texte.

Marius éprouve de la pitié pour cette enfant envoyée par son père porter des lettres à ses « risques et périls » (p. 97, l. 42). Il éprouve de la compassion pour Éponine et sa sœur, deux « misérables êtres qui n’étaient ni des enfants, ni des filles, ni des femmes, espèces de monstres impurs et innocents produits par la misère » (p. 97, l. 49-51). Son regard est « étonné et douloureux » (p. 97, l. 53).

8. P. 98 : quels sont les sentiments d’Éponine pour Marius ?

Éponine tombe amoureuse de Marius, qu’elle trouve « très joli garçon » (p. 98, l. 71).

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9. P. 107 : qu’obtient Marius d’Éponine ? En est-elle heureuse ?

Marius obtient d’Éponine l’adresse de Cosette et Jean Valjean. Éponine en est malheureuse, mais semble placer quelque espoir dans le fait que le jeune homme lui rendra son service.

10. P. 142-144 : de quoi Éponine meurt-elle ? Que montre le geste qu’elle accomplit à l’égard de Marius ?

Éponine meurt en sauvant Marius : elle fait rempart de son corps pour le protéger du fusil qui le « cou-chait en joue » (p. 142, l. 28). Cet acte montre qu’elle était prête à donner sa vie pour Marius, qu’elle aime profondément malgré la non-réciprocité des sentiments du jeune homme.

11. P. 143 : que pense Éponine du sort réservé à Marius, lorsqu’elle ne sera plus là pour le protéger ? Comment l’aide-t-elle pourtant une dernière fois ?

Éponine pense que plus personne « ne sortira vivant de la barricade » (p. 143, l.47-48). Mais elle aide pourtant Marius une dernière fois en lui donnant la lettre de Cosette qu’elle gardait dans sa « poche » (p. 143, l. 53). Le jeune homme écrit un mot en retour à Cosette (p. 145). C’est après avoir intercepté ce message que Jean Valjean se rend sur la barricade (p. 146) et sauve Marius d’une mort certaine (p. 153).

12. Pensez-vous qu’Éponine soit un personnage négatif, comme ses parents ou les hommes du Patron-Minet ? Pourquoi ?

Éponine est une jeune fille victime de la misère, mais dont les sentiments ne sont pas corrompus. Elle aime profondément Marius, se montre généreuse et le protège en toutes circonstances : contre les exactions du Patron-Minet et de Thénardier, et contre les armes des gardes royaux.

Lecture d’image

13. À quel mouvement pictural appartient Auguste Renoir ? Dressez une rapide biographie de ce peintre.

Auguste Renoir est né en 1841 et mort en 1919. Il a peint environs six mille tableaux, dont la plupart sont des nus et des portraits. Son style se distingue par des touches fluides et colorées et des effets de texture et de lumière. Inspiré par Raphaël et Degas, il appartient pour un temps au mouvement impres-sionniste, mais finit par s’en désolidariser pour des raisons financières. Renoir se tourne alors vers une peinture plus en accord avec les directives académiques. Il connaît un succès longtemps attendu à partir de 1900.

14. Dans le tableau, l’homme et la femme sont-ils également représentés ? Selon vous, pour quelle raison ? Justifiez votre réponse.

Les amoureux ne sont pas représentés sur un pied d’égalité  : la femme est le personnage central du tableau, c’est elle qui occupe le plus d’espace, traçant un axe vertical qui partage la toile en deux et dévoile son visage. L’homme, au visage caché, au corps rejeté sur le côté, semble lui faire une cour assidue.

Étude de la langue

Grammaire

15. P. 96, l. 5-12 : quels éléments syntaxiques manquent à cette phrase décrivant Éponine ? Quel effet cette ellipse produit-elle ?

Il manque le sujet et le verbe principal. Cette phrase pourrait ainsi commencer par « elle avait pour cein-ture une ficelle » (l. 5). Sont omis également les deux groupes verbaux qui suivent les points-virgules : « c’était cinquante ans » (l. 10), « c’était un de ces êtres » (l. 11).L’ellipse de ces groupes verbaux permet la construction non verbale de la phrase, et le portrait n’est plus qu’une succession de touches juxtaposées, « impressionnistes » pourrait-on dire.

16. P. 99, l. 84-85 : dans la proposition : « Je crois que c’est un monsieur », le mot « que » est-il un pronom relatif ou une conjonction de subordination ? Justifiez votre réponse.

« Que » est ici une conjonction de subordination, suivant un verbe d’opinion et annonçant un complé-ment d’objet direct.Le pronom relatif annonce une subordonnée relative, expansion d’un nom ou d’un pronom.

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Lexique

17. P. 103, l. 8-9 : lorsque Marius voit paraître Cosette chez les Jondrette, il reste sans voix. Trouvez trois adjectifs permettant de traduire l’émotion du jeune homme.

Marius ressent à la fois de la joie et de la surprise. Il est donc « joyeux », « réjoui », « heureux », « com-blé » ou bien « surpris », « stupéfait », « déconcerté », « ébahi », voire « estomaqué ».

18. P. 107, l. 21-22 : expliquez le changement d’humeur d’Éponine, exprimé à travers les adjectifs de la phrase : « L’œil de la Jondrette, de morne, était devenu joyeux ; de joyeux il devint sombre. »

Éponine est d’abord triste, car c’est un état naturel chez elle, dû à la misère, à la faim et au désœu-vrement. Le narrateur évoque déjà son « œil morne » (l. 8, p. 107) lorsqu’elle entre dans la pièce. Puis elle est « joyeuse » en apercevant Marius. Cependant, son regard devient « sombre » lorsqu’elle com-prend que Marius lui demande de chercher l’adresse de la femme dont elle devine qu’il est amoureux. « Sombre » signifie donc ici en colère : Éponine est jalouse.

Étymologie

19. Éponine mourant dans les bras de Marius (p. 142-144) est une scène « pathétique ». Cherchez l’éty-mologie de ce terme. Définissez ensuite ce qu’est le « registre pathétique ».

« Pathétique » vient du grec pathêtikos, signifiant « capable de fortes émotions ». Une situation pathé-tique est donc une situation qui suscite la pitié. On dit qu’un texte appartient au registre pathétique lorsqu’il provoque la compassion du lecteur pour les personnages.

Patrimoine

20. Au CDI, lisez le poème d’Alphonse de Lamartine intitulé « Le Lac », publié en 1820 dans le recueil Méditations poétiques. En quoi le lac évoqué par Lamartine rappelle-t-il les jardins du Luxembourg et de la rue Plumet ?

Le lac et les jardins sont des lieux naturels, propices à l’épanouissement de l’amour romantique. Le poème de Lamartine est reproduit dans la partie « Pour aller plus loin : documentations et informations complémentaires » de ce livret, p. 41-42.

EXPRESSION

Expression écrite

Argumentation

21. En observant la destinée de Cosette et d’Éponine, pensez-vous, comme Victor Hugo l’aurait affirmé, « qu’ouvrir une école, c’est fermer une prison » ?

Il faut replacer cette phrase dans son contexte du XIXe siècle. L’instruction n’était pas encore obligatoire, ce qui entraînait plusieurs conséquences :– des enfants errant dans les rues ;– des enfants ne sachant ni lire ni écrire, donc peu aptes à trouver du travail en grandissant ;– des enfants employés très jeunes dans les industries, voués à la fatigue, au manque d’hygiène et à la maladie. L’exemple d’Éponine mène à l’évidence : – ses parents lui ont donné le minimum d’instruction, elle sait lire et écrire, mais n’est pas cultivée ;– les Thénardier sont de « mauvais pauvres », comme ils étaient de mauvais riches lorsqu’ils avaient encore leur auberge et martyrisaient Cosette. Ce sont des personnages à la morale douteuse, malhon-nêtes et peu aimants ;– Éponine n’est pas une mauvaise fille : ses sentiments à l’égard de Marius sont purs et la conduisent à se sacrifier pour lui. On peut penser que si, comme Marius et Cosette, elle avait reçu non seulement de l’instruction, mais également une culture, à l’image de Cosette restée cinq ans au couvent, elle aurait probablement eu une autre destinée. Cependant, l’éducation que reçoit Cosette au couvent n’est pas la seule raison de sa réussite sociale : l’environnement que lui offre Jean Valjean, qui lui procure un gîte, un train de vie honorable et une rela-tive sécurité, contribue pour beaucoup à son insertion dans la société. Ils sont, en tout cas, le gage de

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l’attention que lui porte Marius au jardin du Luxembourg. N’oublions pas que le jeune homme ne consi-dère même pas Éponine, gouailleuse et vêtue de haillons, comme une femme.

Écrit d’invention

22. P. 135, chapitres I à V : Marius a découvert le manège d’Éponine. Dans une lettre, il lui écrit qu’il ne l’aime pas et ne l’aimera jamais, et lui demande d’abandonner son poste derrière la grille de la rue Plumet.

Les élèves devront respecter la mise en page de la lettre et le système d’énonciation qui lui est propre. Marius s’exprime à la première personne et vouvoie Éponine afin de mettre la distance qui convient entre eux.

23. Alors qu’elle sort de chez Jondrette et monte dans le fiacre (p. 106), Cosette aperçoit Marius. Décrivez la scène et les émotions qui agitent la jeune fille.

Il est important que les élèves ne détachent pas la description des émotions ressenties par la jeune femme de la situation dans laquelle elle se trouve : elle monte dans le fiacre, puis s’assoit aux côtés de Jean Valjean. On pourra demander aux élèves de chercher au préalable quelles émotions Cosette ressent à cette vision : – de la surprise, probablement ;– de l’inquiétude de trouver Marius dans un quartier si peu convenable ;– de la honte d’éprouver du plaisir à le revoir ;– l’envie de savoir comment il se nomme et où il vit ;– de l’amour pour ce jeune homme qu’elle a déjà vu si souvent, etc.Afin de faciliter la rédaction, les élèves pourront s’aider de l’encadré « Méthode » de cette séance (p. 188).

24. Avant de mourir, Éponine raconte sa vie à Marius. Elle évoque son enfance à Montfermeil, sa vie à la masure Gorbeau, et sa jalousie envers Cosette.

Au moment de sa mort, Éponine sait qui est Cosette. On pourra donc, en guise de correction, relire les passages plus particulièrement consacrés à Éponine, notamment lors de la visite de Jean Valjean à Montfermeil, p. 53-57 et lors de sa rencontre avec Marius, p. 96.On demandera aux élèves de décrire la misère dans laquelle Éponine a vécu et de comparer sa vie à celle de Cosette.Enfin, ce serait une erreur de décrire la jalousie d’Éponine comme destructrice. La jeune femme montre des sentiments purs envers Marius et souhaite son bonheur, même si elle doit pour cela être malheu-reuse. C’est la forme de générosité la plus patente du personnage, qui incarne une fleur éphémère s’élevant au-dessus de la misère morale dont elle est issue.

Expression orale

25. Racontez la rencontre de Marius et Cosette.

Marius et Cosette se rencontrent au jardin du Luxembourg tous les jours durant un an. D’abord juste intrigué par ce vieux monsieur et cette toute jeune fille, Marius tombe finalement amoureux, lorsque après avoir cessé ses promenades durant six mois, il revient au jardin. Sans se parler, les jeunes gens apprennent à se connaître et tombent sous le charme de leurs regards mutuels. Un mouchoir oublié fait s’imaginer à Marius que la jeune fille se nomme Ursule. Afin d’en savoir plus, le jeune homme la suit jusque chez elle et interroge le portier. Méfiant, Jean Valjean déménage alors et Marius perd la trace de celle qu’il aime, pour la retrouver enfin chez les Jondrette des mois plus tard.

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Un roman engagé contre l’injustice ➤ LIVRE ÉLÈVE P. 189Séance 4

LECTURE

Lecture du texte

La déchéance de Fantine

1. P. 24 : qui est Tholomyès ?

Tholomyès est un bourgeois qui a séduit la jeune et innocente Fantine et l’a abandonnée sans ressources avec sa fille, Cosette.

2. P. 24-25 : pour quel motif Fantine abandonne-t-elle Cosette aux Thénardier ? Est-ce parce qu’elle ne l’aime pas ?

Fantine abandonne Cosette pour trouver du travail afin qu’elles puissent vivre toutes les deux. Fantine aime sa fille : elle l’appelle son « pauvre trésor » (l. 22, p. 25) et lui fournit des robes de soie par « dou-zaines » (l. 24).

3. P. 32, chapitres VII à IX : Fantine peut-elle travailler à Montreuil-sur-Mer comme elle l’espérait ? Pourquoi ?

Fantine travaille dans un premier temps, mais une femme de l’atelier découvre qu’elle a un enfant sans être mariée et elle est renvoyée de la fabrique.

4. P. 32 à 35 : pour entretenir son enfant, à quels sacrifices consent la jeune mère harcelée par les Thénar-dier ? Pourquoi se trouve-t-elle réduite à cette extrémité ?

Fantine consent à se couper les cheveux pour les céder au barbier (p. 33, l. 13) et à vendre ses dents (p. 35, l. 63-80). Elle est réduite à cette extrémité car elle ne possède plus rien que son propre corps.

5. P. 36 : pour quelle raison M. Madeleine sauve-t-il Fantine ?

M. Madeleine sauve Fantine car il comprend qu’il est la cause de sa déchéance : si la jeune femme avait pu garder son travail à l’usine, elle ne serait sans doute pas tombée dans cette extrême misère du corps et de l’âme.

6. P. 175, l. 41-42 : à l’agonie, Jean Valjean révèle à Cosette le nom de Fantine, qui a « eu en malheur » ce que Cosette a « eu en bonheur ». Est-ce vrai selon vous ?

Fantine a eu une vie essentiellement malheureuse, dès l’instant où Tholomyès l’a abandonnée. Elle a vécu la misère la plus terrible qui soit, obligée de céder des parties de son propre corps. Cosette a été malheureuse le temps de son enfance, mais a connu le bonheur par la suite, lorsqu’elle a rencontré Jean Valjean. En outre, Cosette a réussi là où sa mère a échoué, en épousant un bourgeois qu’elle aimait, Marius.

7. Pensez-vous que Fantine a été pour Cosette une « bonne » mère ?

Fantine a fait ce qu’elle croyait le mieux pour Cosette. En ce sens, elle a été la meilleure mère possible : – elle ne se doutait pas que les Thénardier martyriseraient sa fille, ni qu’ils la harcèleraient de façon mal-

honnête. On peut cependant dire en ce sens qu’elle a manqué  de discernement ; – elle a toujours essayé de pourvoir aux besoins de sa fille, allant jusqu’à sacrifier son propre corps ; – elle ne souhaitait qu’une seule chose : revoir Cosette avant de mourir.

L’idée de la « bonne » mère est un concept assez difficile à définir. On peut cependant dire que de toute évidence, Fantine a été pour Cosette une mère aimante, malgré ses maladresses et les difficultés auxquelles elle a dû faire face.

L’apprentissage de Marius

8. Qui sont le père et le grand-père de Marius, présentés pages 76 à 79 ? Dans quel milieu politique et familial Marius grandit-il ?

Le grand-père de Marius est M. Gillenormand, un grand bourgeois royaliste désargenté (p. 76). Son père, le colonel Pontmercy, est un officier de l’armée de Napoléon (de mouvance plutôt républicaine : Napo-léon, avant d’être sacré empereur, a été élu à la tête de la première République). Marius grandit dans un milieu bourgeois monarchiste.

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9. P. 79 : quel événement pousse Marius à s’intéresser à la personnalité de son père ?

Marius rencontre à l’église le père Mabœuf, un marguillier ami du colonel Pontmercy, qui lui apprend l’affection que son père lui portait en secret. Marius change alors d’opinion politique pour épouser celle de son père (p. 79). Il fait imprimer des cartes portant le titre de baron de l’Empire (p. 79). Il se dispute avec son grand-père (p. 80).

10. P. 80-81 : quelle est la réaction de M. Gillenormand ? Cherche-t-il à comprendre les changements qui agitent son petit-fils ? Relevez le vocabulaire justifiant votre réponse.

Monsieur Gillenormand est en colère, il reste sur ses positions, sans laisser Marius s’expliquer et sans expliquer non plus son propre avis. La communication est alors impossible entre eux, comme le montrent les expressions du texte : « c’était plus que M. Gillenormand n’en pouvait entendre » (l. 21), « il s’était […] dressé debout » (l. 22). Le vieil homme n’est plus rouge mais « flamboyant » (l. 26) de colère et crie finalement à Marius de s’en aller (l. 45, p. 81).

11. P. 82-87 : la misère de Marius est-elle aussi grande que celle de Fantine ? Selon vous, pourquoi ? La misère a-t-elle les mêmes conséquences pour les deux personnages ?

La misère de Marius n’est pas aussi grande que celle dans laquelle tombe peu à peu la jeune femme : il est jeune, célibataire, a des amis, refuse les dettes et montre une volonté sans faille (p. 85, l. 48-54). Il n’est pas obligé de vendre son corps pour subvenir aux besoins de sa famille. Il vend ses vêtements et sa montre (p. 82, l. 11-13), qui sont probablement de bonne facture, car ils ont été fabriqués alors qu’il était encore chez son grand-père. Il est sauvé par ses amis, et particulièrement Courfeyrac, qui lui offre un travail grâce à ses relations (p. 84, l. 10). N’ayant aucune dépense autre que celle que demandent ses besoins propres (ce qui n’est pas le cas de Fantine, harcelée par les Thénardier), le jeune homme parvient à économiser (p. 84, l. 15 à p. 85, l. 57). Ainsi, là où la misère entraîne Fantine dans la spirale de la déchéance physique et morale la plus complète, elle conduit Marius à acquérir davantage de force morale. La misère de Marius est donc un apprentissage et non une déchéance.

12. P. 83 : quelle phrase établit une « loi de la misère » ? À quel temps sont les verbes ? Quelle valeur a ce temps ? En quoi la syntaxe de cette phrase est-elle particulière ?

« Admirable et terrible épreuve dont les faibles sortent infâmes, dont les forts sortent sublimes » (l. 12-13) : les verbes de cette phrase sont au présent de vérité générale. Cette phrase sans verbe principal (la proposition principale offre une ellipse du sujet et du verbe) com-porte un parallélisme composé de deux propositions subordonnées relatives complément du nom « épreuve » qui comparent les « forts » et les « faibles ».

13. P. 10 : relisez la citation liminaire. Quels personnages selon vous incarnent dans le roman les « trois problèmes du siècle » ?

– La « dégradation de l’homme par le prolétariat » est incarnée par Marius, qui malgré son travail, ne mange pas à sa faim. – La « déchéance de la femme par la faim » est incarnée par Fantine, obligée de vendre des parties de

son corps pour nourrir et vêtir sa fille. – « L’atrophie de l’enfant par la nuit » se retrouve dans les personnages de Cosette enfant, de Gavroche

et d’Éponine.

Lecture d’image

14. Qui était Gargantua ? Quelle caractéristique de ce personnage le caricaturiste prête-t-il ici à Louis-Philippe ?

Gargantua est un personnage créé par Rabelais en 1534. Géant, c’est le père de Pantagruel, héros épo-nyme d’un premier livre. Gargantua a un appétit féroce : 17 913 vaches s’emploient à l’allaiter lorsqu’il est enfant. Honoré Daumier compare l’appétit de Louis-Philippe pour l’argent, prélevé sous forme de taxes et d’im-pôts, à celui de Gargantua. Pour davantage d’informations sur la caricature, consulter le site :http://www.bnf.fr/documents/biblio_presse_satirique.pdf

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15. La Caricature est un journal « satirique » de l’époque. Cherchez le sens de ce terme : en quoi peut-on l’appliquer au dessin d’Honoré Daumier ?

Une satire est une œuvre dont l’intention est de critiquer de façon moqueuse le sujet dont elle parle. Un journal satirique est donc un journal qui cherche à se moquer des sujets sociaux et politiques à travers les articles et les dessins qu’il publie. La caricature d’Honoré Daumier est ainsi une satire de la politique de Louis-Philippe, représenté en géant immobile se nourrissant de l’argent des citoyens.

Étude de la langue

Grammaire

16. P. 87, l. 14 : la phrase « ce marguillier avait été décisif » :– est-elle à la forme passive ? – comporte-t-elle un adjectif attribut du sujet ?– contient-elle un verbe à l’imparfait ?

L’adjectif « décisif » est attribut du sujet « ce marguillier » et le verbe « être » est conjugué au plus-que-parfait de l’indicatif. Il n’y a donc dans cette phrase ni forme passive (le verbe « être » est attributif et n’accepte pas la construction transitive/intransitive), ni imparfait de l’indicatif (hormis dans la construction du plus-que-parfait, mais il s’agit ici de considérer le temps verbal pour lui-même).

17. P. 80, l. 27 à 31 : quels types et quelles formes de phrases dominent la prise de parole de M. Gillenor-mand ? Pourquoi ?

Les paroles de M. Gillenormand sont dominées par des phrases exclamatives et négatives. Le grand bourgeois est en colère et refuse d’entendre son petit-fils.

Lexique

18. Qu’est-ce qu’une « caricature » ? Expliquez ce terme. Certains personnages du roman vous semblent-ils caricaturaux ?

L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert définit la caricature comme « la représentation […] d’une personne ou […] d’un sujet, dans laquelle la vérité et la ressemblance exacte ne sont altérées que par l’excès du ridicule ».Une caricature est donc un portrait, écrit ou dessiné, mettant l’accent de façon exagérée sur certains traits du personnage, afin de provoquer le rire ou les moqueries du spectateur ou du lecteur. On peut dire que Gavroche est une caricature du gamin de Paris et que les Thénardier sont des carica-tures de « méchants ». En effet, l’auteur insiste sur l’accent gouailleur et la légèreté de Gavroche, tout comme il grossit les traits immoraux des Thénardier. Ces personnages semblent très éloignés de la réalité, dont la représentation n’était pas précisément le but de Victor Hugo. Ils incarnent en effet avant tout des types romanesques au service d’une thèse à démontrer.

19. P. 80, l. 29 : quel sens M. Gillenormand accorde-t-il au terme « misérables » ?

Par « misérables », le vieil homme entend « méprisables », « ignobles », « infâmes ». Mais le « misé-rable » est aussi celui qui, d’un aspect pauvre et sans ressource, est digne de pitié. C’est là toute l’am-biguïté du titre du roman.

Étymologie

20. P. 80, l. 13 : Marius dit que son père était un homme « humble ». De quel nom latin est dérivé ce terme ? Quel éclairage l’étymologie apporte-t-elle sur la situation du colonel Pontmercy par rapport à celle de M. Gillenormand ?

« Humble » vient du latin humilis, qui signifie « près de la terre, faible, modeste ». Ce terme est dérivé de humus, qui signifie « la terre ». Le colonel Pontmercy est dans une position d’infériorité par rapport à M. Gillenormand.

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Patrimoine

21. Au XIXe siècle, de nombreux romans paraissent dans la presse sous forme de « feuilletons ». Que dé-signe ce mot dans le vocabulaire du journalisme ? Cherchez les titres de romans célèbres publiés ainsi. Lisez la présentation pages 4 à 9. Les Misérables en font-ils partie ? Pourquoi ?

Le mot « feuilleton », dans le vocabulaire du journalisme, désigne le bas des pages d’un journal. De nombreux romans ont été publiés en feuilletons : – Les Trois Mousquetaires et Le Comte de Monte Cristo d’Alexandre Dumas ; – Les Mystères de Paris d’Eugène Sue ; – La Vieille Fille et Splendeurs et misères des courtisanes d’Honoré de Balzac ; – La Mare au diable de George Sand ; – Oliver Twist de Charles Dickens, en Angleterre.

Les Misérables n’ont pas été publiés en feuilleton : Victor Hugo tenait à ce que chaque partie de son roman paraissent en une fois et en intégralité, de façon à éviter la censure. Pour davantage d’informations sur les romans-feuilletons, consulter le volume 7 (novembre 2007) de la revue universitaire Belphégor : http://etc.dal.ca/belphegor/vol7_no1/fr/main_fr.html

22. Victor Hugo a lui-même fait l’objet de nombreuses caricatures. Cherchez-en quelques-unes au CDI ou sur Internet. Sur quels traits de sa personnalité les caricaturistes insistent-ils ?

Pour davantage d’informations, consulter l’excellent dossier du CNDP sur le sujet :http://www.cndp.fr/presence-litterature/fileadmin/fichiers/Hugo/Caricature.pdfLes caricaturistes insistent particulièrement sur le front et la tête de l’homme de lettres, souvent pen-chés en avant, pour signifier son génie, son orgueil et sa pugnacité politique.

EXPRESSION

Expression écrite

Argumentation

23. Vous êtes journaliste. À l’occasion de la mort de Fantine, devenue célèbre depuis son altercation avec Javert et l’intervention du maire, vous rédigez un article destiné à alerter l’opinion publique sur l’utilité de lutter contre la misère.

La rédaction de cet article pourra être précédée par la lecture du Discours sur la misère prononcé par Victor Hugo en 1849, dont un extrait est reproduit dans la partie « Pour aller plus loin : documentations et informations complémentaires » de ce livret, p. 39.L’article pourra commencer par le récit de l’altercation entre les trois personnages.Ensuite, le registre pathétique sera de bon ton pour décrire l’histoire de Fantine, sa déchéance progres-sive et le manque d’aide dont elle a été victime avant l’intervention de Jean Valjean.Un éloge de la générosité de Jean Valjean, maire de la commune, connu sous le nom de M. Madeleine, sera ensuite le bienvenu, et on pourra terminer l’article par des considérations plus générales sur l’état du pays, qui au XIXe siècle grouillait d’enfants incultes et miséreux et de mères affamées.

Écrit d’invention

24. P. 77 : Marius rend visite à son père défunt qu’il n’a jamais vu. Racontez cette scène du point de vue de la « femme » qui l’accueille (p. 77, l. 10-11), servante du colonel Pontmercy.

La servante évoquera l’amour inconditionnel du colonel Pontmercy pour ce fils ingrat, vêtu comme un bourgeois, élevé dans un milieu royaliste dédaigneux de la République.

25. P. 81 : après avoir été chassé de la maison, Marius repense à la colère de son grand-père et dresse de lui un portrait caricatural.

Marius insistera sur l’orgueil démesuré de ce grand-père royaliste, sur sa richesse et ses privilèges prove-nant de l’asservissement des pauvres gens et du prolétariat, sur son manque de discernement à l’égard de son père et de ses actions et sur son égoïsme envers ce gendre qu’il a laissé mourir dans la misère.

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Expression orale

26. Cherchez sur Internet des informations sur la comédie musicale Les Misérables, créée en 1980, et pré-sentez-la à vos camarades.

La comédie musicale en deux actes de Claude-Michel Schönberg, Alain Boublil et Jean-Marc Natel a été mise en scène par Robert Hossein à Paris en 1980, puis adaptée en anglais en 1985. Elle a connu un succès mondial.Elle a été adaptée au cinéma par Tom Hooper en 2013.

27. Débat : pensez-vous que la misère, aujourd’hui en France, soit comparable à celle que décrit Victor Hugo dans le roman ?

Afin d’alimenter le débat, on pourra : – consulter le site de l’Observatoire des inégalités : http://www.inegalites.fr ; – demander aux élèves de mener une enquête sur la politique sociale des gouvernements actuels ; – se renseigner, par exemple auprès de la mairie, sur les actions menées dans la ville en faveur des

populations défavorisées ; – sélectionner dans la presse nationale des articles évoquant le problème ; – consulter les sites Internet d’associations caritatives comme :

• Les Restos du cœur : http://www.restosducoeur.org/• La Fondation Abbé Pierre : http://www.fondation-abbe-pierre.fr• Emmaüs France : http://www.emmaus-france.org

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Les mauvais pauvres et autres méchants ➤ LIVRE ÉLÈVE P. 193Séance 5

LECTURE

Lecture du texte

Patron-Minet et fourbes Thénardier

1. P. 24-25 : quelle impression produit le premier portrait de la Thénardier ? Que pense-t-on de son mari ?

La Thénardier paraît effrayante. Son mari semble avare et cruel.

2. P. 44 : par quelle phrase le narrateur indique qu’il va décrire en détail le couple d’aubergistes ? Quel effet produit cette annonce ?

Le narrateur prévient le lecteur l. 1 à 3. Il crée ainsi un effet de suspens.

3. Appelée «  madame Thénardier  » (p. 24, l.  1 et p. 44, l. 4) au début, le personnage est bien vite dénommé « la Thénardier » (p. 45, l. 35). Quel rôle joue ce glissement dans la perception du personnage par le lecteur ?

Le nom propre précédé d’un article montre un manque de respect du narrateur pour ce personnage. Il insiste ainsi sur la vulgarité de la femme et du milieu dans lequel elle vit.

4. P. 44 : relevez les termes qui servent à décrire la Thénardier. Quels champs lexicaux apparaissent ?

– Champ lexical de l’animal monstrueux : « grande », « énorme et agile », « sauvagesse », « un élé-phant », « il lui sortait de la bouche une dent » comparable à une défense. – Champ lexical de la brute humaine : « rouge », « grasse », « charnue », « carrée », « colosses », une

grosse « voix », « elle avait de la barbe », « fort de la halle », « gendarme », « charretier », « bourreau ».

5. P. 45 : quels mots évoquent l’apparence de Thénardier ? Quels sont ceux qui montrent sa véritable na-ture ? En quoi le mari et la femme sont-ils complémentaires ?

D’apparence, Thénardier est « petit », « chétif », il a « l’air malade », il est souriant, « poli » et semble « savant ». Il parle bien.En réalité, il se porte « à merveille », il est avare, curieux comme « une fouine », menteur, rempli de « fourberie ».C’est un hypocrite, un escroc, un être double.Le mari est rusé et la femme est brutale : ils forment à eux deux la force de l’esprit et du corps.

6. Les Thénardier changent leur nom au cours du roman. Comment se font-ils appeler ? Usent-ils de ce procédé pour la même raison que Jean Valjean ?

Les Thénardier se font appeler les Jondrette dans la troisième partie (p. 73-118). Ils échappent ainsi à leurs créanciers. Jean Valjean utilise les noms de M. Madeleine et d’Ultime Fauchelevent pour échapper à la police.

7. Combien les Thénardier ont-ils d’enfants ?

Les Thénardier ont deux filles, Éponine et Azelma, et trois garçons : Gavroche et ses deux petits frères, abandonnés à Mme Magon et recueillis par Gavroche un soir (p. 131-134).

8. P. 104, l. 5-10 : relevez le vocabulaire qu’emploie Thénardier pour parler à Jean Valjean. À quel registre de langue appartient-il ? Utilise-t-il le même registre lorsqu’il s’adresse à Éponine ?

Thénardier utilise un vocabulaire courant, voire soutenu lorsqu’il s’adresse à Jean Valjean : il le nomme ainsi son « angélique bienfaiteur » (l. 5), mais lorsqu’il s’adresse à sa fille, il emploie le terme familier « nippes » (l. 9).

9. P. 109, l. 26 : à quelle bande appartiennent « les gens » que Thénardier doit rencontrer pour piéger Jean Valjean ? À quels autres mauvais coups, évoqués page 135, va-t-elle participer ?

Ce sont les bandits du Patron-Minet. Ils vont également aider Thénardier à s’échapper de prison et tenter d’entrer dans la maison de la rue Plumet.

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Javert, l’implacable

10. Qui est Javert ? Dans quels lieux, mentionnés pages 28 à 32 et page 109, a-t-il exercé ? Qu’y fait-il ?

Javert est un policier. D’abord garde-chiourme au bagne de Toulon (p. 29, l. 21), il est ensuite inspecteur à Montreuil-sur-Mer (p. 28, l. 14-15), puis à Paris (p. 109).

11. P. 29, l. 24-36 : à quoi est comparé Javert ? Quels autres éléments du portrait convergent dans le même sens ? Qu’indique ce rapprochement sur le personnage ?

Javert est comparé à « un dogue » (l. 31) et à « un tigre » (l. 32). Plusieurs autres éléments alimentent cette métaphore : on voit « ses dents » et « ses gencives » (l. 29) quand il rit, il est tout en « mâchoire » (l. 32), a un « mufle de bête fauve » (l. 31) et il a l’air « féroce » (l. 36).Javert est un prédateur redoutable qui, lancé sur la piste de sa proie, ne va pas l’abandonner.

12. P. 37-40 : quels sentiments poussent Javert à dénoncer le père Madeleine aux autorités ? Se trompe-t-il en l’accusant ? Pourquoi revient-il sur son acte ?

Javert dénonce le père Madeleine car il le soupçonne d’être un forçat depuis longtemps : il ne connaît pas son passé, il a été au bagne de Toulon et connaît le forçat Jean Valjean et sa force prodigieuse. De plus, il est en colère : le père Madeleine a bafoué son autorité en sauvant Fantine. Il ne se trompe pas en l’accusant ; le lecteur a compris que Jean Valjean et M. Madeleine ne faisaient qu’un. Il revient sur ses actes parce que la justice lui apporte la preuve qu’il s’est trompé et parce qu’il a agi sous l’emprise d’un sentiment (on pourrait même dire d’une « passion » au sens classique du terme) et non en utilisant ses facultés de raisonnement, ce qui constitue pour lui, incarnation d’une justice objective, une erreur.

13. P. 152, l. 32 : pourquoi Javert dit-il à Jean Valjean : « vous m’ennuyez » ? P. 161, l. 28 : pour quelle raison pense-t-il qu’il « avait […] le droit d’être tué » sur la barricade ?

Javert s’attendait à ce que Jean Valjean le tue. Or Jean Valjean le relâche. Il a donc une dette envers celui qu’il considère comme un criminel, ce qui est moralement inacceptable. Le verbe « ennuyer » traduit un cas de conscience. S’il avait été tué sur la barricade, il serait mort en héros, en accomplissant son devoir.

14. P. 161 : comment se traduit physiquement, chez Javert, l’émotion qui l’agite ? Relevez les mots du texte. Quelle est cette émotion ?

Javert marche « tête baissée, les mains derrière le dos » (l. 2), il appuie « ses deux coudes sur le parapet, son menton dans ses deux mains » (l. 10), « ses ongles » se crispent « machinalement dans l’épaisseur de ses favoris » (l. 10-11). Javert doute.

15. P. 162, l. 34-46 : Javert prononce-t-il les questions qu’il se pose avant de mourir ? Est-ce un discours rapporté au style indirect par le narrateur ? Pourquoi ? Quel est l’effet produit ?

Javert ne prononce pas les questions qui lui viennent à l’esprit. Il n’y a pas de guillemets. Il reste silen-cieux, accoudé au parapet. Nous ne sommes pas non plus en présence d’un discours indirect, car s’il y a bien le verbe introducteur « il se demandait » (l. 36), le deux-points ne joue pas le rôle de la conjonc-tion « si » introduisant une subordonnée interrogative indirecte. Il s’agit ici de discours indirect libre, qui supprime la distance que le lecteur pourrait ressentir avec l’utilisation d’autres formes de discours rapporté. La proximité du lecteur avec les pensées de Javert en est accrue.

Lecture d’image

16. Quelle atmosphère se dégage de cette scène d’intérieur ?

L’intérieur semble sombre et exigu. Les mangeurs de pommes de terre, des paysans ou des ouvriers, sont trop nombreux et trop serrés autour de la table carrée, les chaises sont trop hautes. La table, située sous les genoux de la femme de droite, à qui l’on tend une pomme de terre à main nue, accentue l’ani-malité à laquelle semble réduite ces personnages. Cette scène de genre dégage donc une atmosphère assez oppressante, gagnée par la misère et une certaine bestialité.

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Étude de la langue

Grammaire

17. Dans le portrait de Thénardier page 45, par quelle autre conjonction de coordination peut-on rempla-cer le terme « et », lignes 23, 26 et 29 ? Pourquoi ?

On peut remplacer le « et » par « mais » ou toute autre conjonction de coordination indiquant une oppo-sition : Thénardier est un être double et son apparence s’oppose à sa véritable nature.

Lexique

18. Trouvez les adjectifs qui correspondent aux traits de caractère de Thénardier :

– il a « l’air malade » mais se porte « à merveille » (p. 45, l. 23) : il est menteur, hypocrite ;– il sourit « par précaution » (p. 45, l. 24) : il est lâche ;– il refuse « un liard » au mendiant (p. 45, l. 25-26) : il est avare.

19. P. 101, l. 15 : Thénardier nomme Jean Valjean « le philanthrope ». Ce terme vous paraît-il lui convenir ? Pourquoi ? Quel est l’antonyme de ce mot ?

Ce terme convient bien à Jean Valjean, qui dévoue entièrement son existence aux pauvres, auxquels il fait la charité, mais aussi à Cosette, qu’il élève. L’antonyme de « philanthrope » est « misanthrope ». Le misanthrope est celui qui fuit le genre humain, par haine ou dégoût.

Étymologie

20. P. 152, l. 12 : Javert n’est pas un homme facile à « étonner » : quelle est l’étymologie de ce terme ? Est-il approprié à l’attitude de Javert à ce moment du récit ?

« Étonner » vient du latin adtonare qui signifie « frapper du tonnerre ». Ce terme convient parfaitement à l’état de Javert, qui est victime d’une « commotion » (l. 13) et reste « béant et immobile » (l. 13-14) à l’annonce de sa liberté.

Patrimoine

21. Les personnages du roman ne cessent de changer de nom. Quelle institution est garante de l’identifi-cation de chacun aujourd’hui en France ? Comment les choses se passaient-elles auparavant ?

Jean Valjean est né juste après la Révolution. Les naissances étaient déclarées dans les paroisses. Les gens pauvres étaient souvent illettrés et ne portaient pas toujours de noms de famille. Ce n’est qu’en 1792 qu’un décret a rendu obligatoire l’usage du nom et du prénom, et non plus seulement de ce dernier. C’est l’état civil qui assure l’identification des personnes aujourd’hui. On y inscrit, jusqu’en 1897, la date de naissance et les actes de mariage et de divorce. Le livret de famille apparaît en 1884. Y sont reportés, dès 1897, la date et le lieu de la mort, ainsi que la date et le lieu de naissance des parents pour le livret des enfants.

EXPRESSION

Expression écrite

Argumentation

22. P. 160 : dans le fiacre, Jean Valjean laisse éclater sa colère, demandant à Javert pourquoi il s’acharne contre lui. Rédigez cette scène d’affrontement.

Deux idéaux s’opposent à travers ces deux personnages :– Javert prône une justice sèche, sans souvenir ni sentiment. Pour lui, Jean Valjean a troublé l’ordre, il doit donc être puni, quels que soient ses autres agissements. La justice pour lui s’oppose à la bonté et à la subjectivité. Il a une vision conservatrice du monde et de la loi ;– Jean Valjean, quant à lui, est l’exemple même de la conversion possible. L’être humain, selon lui, peut s’améliorer, être perfectible, devenir bon, et en cela racheter ses fautes. Il prône la bonté comme loi et guide. Le dialogue entre les deux hommes devra opposer ces deux argumentaires. Des phrases exclamatives et interrogatives rendront leurs colères sensibles.

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Écrit d’invention

23. P. 118 : Javert vient d’arrêter Thénardier. Mécontent d’avoir laissé échapper le prisonnier, il interroge l’ancien aubergiste, qui évoque alors « Urbain Fabre ». Rédigez ce dialogue, en respectant les niveaux de langue propre à chacun.

– Les élèves devront se rappeler que Thénardier ne connaît pas le véritable nom de Jean Valjean, ni son passé de forçat. En effet, lorsque le bagnard a pris Cosette, il s’est bien gardé de montrer son passeport. – Javert est un homme tenace, perspicace et professionnel, qui n’hésitera pas à employer tous les

moyens légaux à sa portée pour faire parler Thénardier : Jean Valjean est sa cible principale. – Thénardier est un être fourbe et malin, qui ne se laisse pas décontenancer facilement. – Thénardier s’exprimera volontiers en langage familier, voire argotique. – Javert, homme d’action, s’exprimera quant à lui dans un langage courant.

24. P. 135 : récemment évadé de prison, Thénardier rencontre Marius. Il lui explique un plan qu’il a mis au point pour se venger de Javert. Le jeune homme doit y jouer un rôle.

On veillera à ce que les élèves respectent le niveau de langue propre à chacun des personnages. Marius se montrera évidemment méfiant : il ne tient pas à troubler les forces de l’ordre, ni à provoquer Thénardier, qu’il sait dangereux.Thénardier agira comme le fourbe qu’il est, tentant par tous les moyens de tromper le jeune homme pour le ranger à sa cause.

Expression orale

25. Relisez les pages 161 à 163 (jusqu’à la ligne 66). Après avoir cherché le sens de ce terme, expliquez le « dilemme » qui agite Javert.

Pour la première fois de sa vie, Javert doute et ne sait pas quoi faire. Il est au même niveau qu’un malfrat devant la justice, puisqu’un malfrat vient de lui rendre un service. Il n’a donc pas accompli son devoir qui était de le mettre en prison : pour la première fois, sa conscience personnelle est passée devant sa conscience professionnelle. Il est donc face à un dilemme, c’est-à-dire un choix dont aucune des alter-natives n’est satisfaisante : s’il enferme Jean Valjean, il agit mal envers sa conscience personnelle, son honneur, et s’il le laisse partir, il agit mal envers sa conscience professionnelle.

26. Débat : Javert, instrument implacable de la justice, s’en veut d’avoir fait preuve de bonté envers Jean Valjean (p. 162, l. 31-33). Selon vous, être bon empêche-t-il d’être juste ?

La bonté est la qualité de ce qui est bon ou de ce qui est conforme aux valeurs morales. C’est donc la capacité à être charitable, compatissant, bienveillant. C’est également l’attribut de Dieu (on parle de la bonté céleste ou de la bonté divine), considéré comme l’être suprêmement bon. Pour sensibiliser les élèves à la notion de justice, on pourra leur proposer une représentation allégorique et consulter le site :http://www.justice.gouv.fr/histoire-et-patrimoine-10050/les-symboles-de-la-justice-21974.html.La justice est un principe moral qui se rapporte au droit. Ses allégories sont souvent représentées avec un glaive, un bandeau sur les yeux en signe d’impartialité, ainsi qu’une balance pour maintenir l’équilibre du jugement. La main symbolise le châtiment.La justice est également souvent représentée avec le genou dénudé, qui atteste de la clémence envers le genre humain. Ce symbole n’est pas inclus dans le personnage de Javert, qui se contente d’être aveugle à toute bonté et ne propose que le châtiment des coupables.Ainsi, la justice aveugle et sans bonté, purement mécanique, selon la thèse d’Hugo, est vouée à l’échec, car elle ne prend pas en compte la réalité de la société à laquelle elle s’adresse. Le suicide de Javert peut donc s’expliquer ainsi : il a lui-même renié sa condition humaine en condamnant aveuglément Jean Valjean.On pourra ouvrir le débat en s’inspirant de l’actualité et des débats de société concernant les prisons, la réinsertion et la peine de mort.

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Petites histoires dans l’Histoire ➤ LIVRE ÉLÈVE P. 197Séance 6

LECTURE

Lecture du texte

La déroute de Napoléon

1. P. 11 à 13 : Napoléon est-il encore au pouvoir lorsque Jean Valjean arrive à Digne ? P. 12, l. 33 : pourquoi selon vous l’auteur mentionne-t-il cette date et « ce banc de pierre » ?

Il s’est passé sept mois depuis la proclamation du Golfe-Juan, le « 4 mars 1815 » (p. 12, l. 34). Napo-léon abdique le 6 avril 1814 et a été exilé à l’île d’Elbe. Le 1er mars 1815 vers 15 heures, il débarque à Golfe-Juan avec ses fidèles généraux Drouot et Cambronne et 1 100 hommes de la vieille garde et de la garde corse pour reprendre le pouvoir. Louis XVIII est alors roi de France. Le 20 mars, Napoléon forme un nouveau gouvernement, qui sera opérationnel un peu plus de trois mois. Il abdique pour la deuxième fois le 22 juin.Victor Hugo écrit un roman à thèse, qui évoque les problèmes de la société dans laquelle il vit. L’ancrer dans l’histoire semble donc indispensable. De plus, le roman é été commencé pendant la période roman-tique, où la vague du roman historique instaurée par Walter Scott connaît un bel essor.

2. P. 76 : que signifie le titre du chapitre II ? Quel symbole se cache plus particulièrement derrière la couleur « rouge » ? M. Gillenormand est-il un « rouge » ?

Le « spectre rouge » de ce temps-là est le « fantôme de la République ». En effet, la première République a été instaurée après la Révolution française et la seconde sera proclamée en 1848. C’est Napoléon Ier qui a mis fin à la première République en proclamant l’Empire en 1804. Les monarchistes n’avaient pas tous pris la fuite pendant et après la Révolution. La République, la perte des privilèges et le désordre qui, selon eux, en découlaient, était un sujet de crainte, car elle symbolisait aussi la période de la Terreur et Robespierre. Le rouge est la couleur symbolique de la République, alors que le blanc est celle de la monarchie. M. Gillenormand n’est évidemment pas un rouge, mais un blanc.

3. P. 76-81 : pourquoi M. Gillenormand a-t-il une telle haine du titre de baron acquis par le colonel Pont-mercy ? Cet élément politique de l’intrigue est-il indispensable au roman ?

M. Gillenormand a pris Napoléon en haine car il a été premier consul de la République, alors que le vieux bourgeois est royaliste. Même empereur, Napoléon n’a aucune légitimité à ses yeux. Le titre de baron du colonel Pontmercy est un titre militaire (qui a été acquis au mérite et non par le sang), donné par Napo-léon. Il n’a donc aucune valeur aux yeux de Gillenormand, si ce n’est lui rappeler le règne de Napoléon. Cette intrigue politique est indispensable au roman puisque c’est elle qui plonge Marius dans la misère.

4. P. 81, l. 37 : qui sont les « Bourbons » dont parle Marius ? Pourquoi Marius les rejette-t-il ?

La famille des Bourbons est une dynastie de rois de France, dont Louis XVIII et Charles X, qui ont suc-cédé à Napoléon, font partie. Pour Marius, ils incarnent l’ordre ancien. À ce moment de sa vie, il est en effet bonapartiste.

5. P. 81, chapitre I : pourquoi les « amis de l’ABC » sont une société tenue « secrète » ?

C’est une société républicaine, qui craint la répression du gouvernement.

Les barricades de 1832

6. Pourquoi le règne de Louis-Philippe d’Orléans débute-t-il par « la révolution de Juillet » ? Quel âge avait Victor Hugo à l’époque ?

La monarchie de Juillet a été proclamée le 9 août 1830, après trois jours d’émeutes à Paris, les 27, 28 et 29 juillet. 10 000 insurgés font face à 8 000 soldats. Le drapeau bleu-blanc-rouge a été à nouveau brandi et la garde s’est trouvée vaincue par le peuple. Charles X a quitté la France. Le souverain constitutionnel désigné est alors Louis-Philippe. La noblesse et la hiérarchie catholique sont exclues de l’État. Les grands bourgeois, industriels, banquiers et hommes d’affaires prennent la direction de cette monarchie modérée. Victor Hugo avait 28 ans.

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7. P. 136 : combien de temps s’est écoulé entre la révolution de Juillet et l’épisode des barricades auquel prend part Marius ?

Il s’est écoulé presque deux ans.

8. P. 136 à 139 : qui sont les émeutiers du roman ? Quel âge ont-ils ? À quel milieu social appartiennent-ils ?

Les émeutiers sont pour la plupart, comme Courfeyrac, l’ami de Marius, des étudiants. Il y a aussi Éponine, Gavroche et des ouvriers (l. 40, p. 139). Ils sont donc assez jeunes. Ce sont des pauvres gens ou des esprits neufs (venant d’un milieu bourgeois cultivé, à l’image de Courfeyrac et Enjolras) qui sou-haitent changer le système politique.

9. P. 138, l. 18-21  : que pensez-vous des métaphores utilisées pour décrire le sentiment de Gavroche découvrant Javert dans le cabaret alors que l’insurrection se prépare ?

Ces métaphores sont comiques, notamment grâce à l’emploi des termes familiers, voire enfantins « dondons » et « croûtes ». Elles conviennent bien au personnage de Gavroche, âgé de 11 ans.

10. P. 147 : qu’est-ce qui cause la perte des insurgés ?

C’est le manque de munitions, la faim et l’infériorité numérique qui causent la perte des insurgés. En effet, ils sont bloqués à l’intérieur du cabaret et ne peuvent se ravitailler.

11. Gavroche est « le nain de la géante », l’enfant de Paris : il est le symbole du peuple révolté. À quel autre événement évoqué page 153 sa mort (p. 151) fait-elle écho ?

Sa mort fait écho à la mort de l’insurrection : le pouvoir en place a gagné et le peuple a échoué.

12. Relisez les pages 136 à 145 : quelle est l’attitude de Marius par rapport à la politique ? Prend-il part au combat par conviction, comme son ami Courfeyrac ?

Marius est un jeune homme emporté, romantique et mélancolique. Il espère mourir au combat, puisqu’il ne peut se marier avec Cosette. Il s’engage donc sur la barricade pour des raisons totalement person-nelles : sauver Gavroche et Courfeyrac (p. 141) tout d’abord, et mourir ensuite.

Révolution industrielle et malaise social

13. P. 26-27 : Jean Valjean, sous l’identité de M. Madeleine, fait fortune grâce à une usine. Cette situation ancre-t-elle le roman dans la réalité de l’époque ? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur la présen-tation (p. 4-9).

Le XIXe siècle est celui de la révolution industrielle : les usines se multiplient. C’est effectivement un élément qui concorde avec la réalité.

14. P. 105 : quel mensonge utilise Thénardier pour expliquer la blessure de sa fille ? Cela vous paraît-il plausible ? Qu’indique ce détail sur le travail des ouvriers à l’époque ?

Thénardier dit qu’Azelma s’est blessée « en travaillant sous une mécanique » (l. 24-25). Les conditions de travail des ouvriers ne ressemblent pas à celles que nous connaissons aujourd’hui. Ils travaillent souvent sans protection, douze à quatorze heures par jour, avec le dimanche pour seul repos hebdomadaire. On remarque également que les hommes, les femmes et les enfants travaillent indifféremment.

15. Selon vous, l’histoire politique, industrielle et sociale des années 1815 à 1835 constitue-t-elle seule-ment un décor pour le roman ou a-t-elle plus d’importance ?

L’Histoire est indissociable des Misérables, car c’est un roman à thèse visant à faire changer la société contemporaine de Victor Hugo. Elle constitue donc le décor indispensable à l’ancrage du roman dans la réalité et revêt également une importance pour l’intrigue elle-même : le père de Marius a pris part à la bataille de Waterloo, M. Gillenormand est royaliste, Jean Valjean fait fortune grâce à la révolution industrielle. Seuls les personnages sont inventés, ce sont des « types » construits pour servir le roman grâce à des modèles réels.

Lecture d’image

16. À quel mouvement artistique appartient le peintre Eugène Delacroix ? En vous aidant de l’encadré « Histoire des arts » p. 187, dites pourquoi ce tableau s’inscrit dans ce courant.

Delacroix est un romantique. L’élan et l’exaltation qui se dégagent de sa toile en témoignent.

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17. Où se passe cette scène ? Quels indices vous permettent de le savoir ? Observez les couleurs du ciel. Que rappellent-elles ?

– La scène se passe à Paris : on aperçoit Notre-Dame en arrière-plan. – Les couleurs du ciel rappellent celles du drapeau : bleu, blanc, rouge.

Pour davantage d’informations sur le tableau, consulter : – le site du musée du Louvre :

http://www.louvre.fr/oeuvre-notices/le-28-juillet-la-liberte-guidant-le-peuple?selection=44717 – le site très détaillé évoquant le contexte historique :

http://hist-geo.ac-montpellier.fr/v1/IMG/pdf/Eugene_Delacroix_ligne.pdf – l’explication en vidéo des différents éléments qui composent le tableau :

http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=234 – l’animation numérique ludique proposée par le site :

http://www.educationnumeriquepourtous.com/new/ressources/Ressources/flash_resources/4_hist_eur19_delacroix_anim.swf

18. Le personnage central est une « allégorie » de la liberté. Que signifie ce terme ? Quels sont ses attri-buts ? Selon vous, qui sont les autres personnages ?

Une allégorie est une image. La liberté porte le bonnet phrygien et le drapeau tricolore (interdit en 1815).Les autres personnages debout sont, de gauche à droite : un ouvrier (béret, pantalon à bretelles et tablier), un bourgeois en redingote, cravate et chapeau haut de forme, un étudiant portant le bicorne de Polytechnique, un travailleur journalier en blouse bleue et un gamin en gilet et béret, qui aurait inspiré à Hugo le personnage de Gavroche.Morts ou couchés, on trouve des soldats du roi : un suisse et un cuirassier.

Étude de la langue

Grammaire

19. P. 96, l. 23-26 : reformulez la phrase de Thénardier en utilisant un langage courant et clair, approprié à la demande qu’il fait à Marius.

Correction : « Je place en vous mes espérances : je pense que ce que je viens d’écrire suffira à alerter votre générosité, et j’ai la faiblesse de croire que vous voudrez bien me venir en aide. »

Lexique

20. P. 75, l. 38 : à quelle classe grammaticale appartient le terme « dénuement » ? Citez trois termes de la même famille.

« Dénuement » est un nom commun. Termes de la même famille : « dénuer », « nudité », « nu », « dénuder », « nudisme ».

Étymologie

21. P. 97, l. 38  : quelle est l’étymologie du terme «  industrie » ? Comment expliquez-vous son sens moderne ?

Le terme « industrie » est emprunté au latin industria, qui signifie « application, activité, assiduité ». Au sens figuré, ce terme désigne l’ingéniosité, le savoir-faire. Par métonymie, il s’est mis aussi à désigner les métiers manuels ou mercantiles qui demandaient une certaine ingéniosité ou un certain savoir-faire. Le sens moderne désigne un secteur d’activité où l’on transforme les matières premières en un produit fabriqué.

Patrimoine

22. Cherchez sur Internet le texte de La Chanson des canuts. Qui sont les canuts ? Pourquoi sont-ils cé-lèbres ?

Cette chanson a été écrite par Aristide Bruant en 1910. Au XIXe siècle, les canuts sont les ouvriers, femmes, hommes et enfants, qui tissent la soie dans les fabriques de Lyon pour un maigre salaire. Ces tisserands se sont regroupés et se sont révoltés pour que leurs gages soient augmentés. Ils obtiennent un accord du gouvernement, mais finalement les fonction-naires se dédisent. La première grande insurrection éclate en 1831, la seconde en 1834. L’État envoie ses troupes contre les ouvriers et réprime la révolte dans le sang.

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Le texte de la chanson est reproduit dans la partie : « Pour aller plus loin : documentations et informations complémentaires » de ce livret, p. 40-41.

23. Quels romans d’Émile Zola, évoquant pour l’un le travail de la mine et pour l’autre la construction d’un grand magasin, parlent de ces changements de société qui s’opèrent au XIXe siècle ? En quelle année ont-ils été écrits ?

Il s’agit bien évidemment de Germinal (1885) et du Bonheur des dames (1883).

EXPRESSION

Expression écrite

Argumentation

24. En publiant Les Misérables, Victor Hugo veut combattre la misère et changer la société dans laquelle il vit. Pensez-vous que l’on puisse faire évoluer la société grâce à un roman ?

Cette œuvre est un bel exemple de l’interaction de la littérature romanesque sur la société. Le roman de Victor Hugo a eu en effet une action positive sur le changement des mentalités du XIXe siècle, même si bien sûr, on ne peut pas l’imputer à cette seule voix. On pourra également évoquer, toujours de Victor Hugo, Le Dernier Jour d’un condamné.D’autres romans ont eu un impact fort sur la société dans laquelle ils ont été écrits : on pensera par exemple à La Peste et à L’Étranger d’Albert Camus, écrits après la Seconde Guerre mondiale. On pourra aider les élèves à définir le concept de « littérature engagée », en donnant également en exemple la mise en perspective des questions sociales et la dénonciation des injustices dans les contes philosophiques de Voltaire ou les œuvres de Diderot.

Écrit d’invention

25. P. 153 : sur les barricades, Marius est touché. Racontez la douleur physique et morale qu’il éprouve avant de s’évanouir.

On travaillera auparavant le champ lexical de la douleur physique et particulièrement des sensations qui y sont associées (brûlure, chaleur, sang, etc.) et de la douleur morale (désespoir, tristesse, décourage-ment, abattement, accablement, etc.).Le point de vue de Marius est essentiel : il a l’habitude de souffrir de la faim et du froid. Mais cette bles-sure est pour lui nouvelle et inattendue. De plus, c’est un jeune homme romantique, dont les sentiments exacerbés se porteront facilement vers Cosette ou vers Dieu.

26. P. 147 : arrivé rue de la Chanvrerie, Jean Valjean aperçoit les barricades et les insurgés retranchés. Décrivez cette scène.

On pourra s’inspirer de tableaux représentant les barricades et de l’iconographie de couverture du roman représentant le tableau de Delacroix.Jean Valjean doit percevoir les choses à sa manière, selon son propre système de référence : le souvenir du bagne et de la violence des hommes, le trouble de l’ordre, sa bonté naturelle, son envie d’aider ces hommes et son besoin de ne pas prendre part à un combat dont la violence lui est étrangère.

Expression orale

27. Cherchez au CDI ou sur Internet le Discours sur la misère prononcé par Victor Hugo à l’Assemblée nationale le 9 juillet 1849. Lisez-en un extrait à la classe, en employant le ton qui convient.

Un extrait du Discours sur la misère est reproduit dans la partie : « Pour aller plus loin : documentations et informations complémentaires » de ce livret, p. 39.

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Un roman total et foisonnant ➤ LIVRE ÉLÈVE P. 201Séance 7

LECTURE

Lecture du texte

Un roman d’aventures policières

1. De quelles qualités fait preuve Jean Valjean en s’évadant du bagne après la mort de Fantine (p. 43), en échappant à Javert (p. 62 à 65) et en sortant du couvent (p. 68 à 71) ? À quel type de héros romanesque appartiennent-elles d’ordinaire ?

Jean Valjean fait preuve de rapidité, d’ingéniosité, de courage et d’une force physique extraordinaire. Ce sont les qualités d’un héros de roman d’aventures.

2. P. 62, l. 1 à p. 65, l. 10 : quels champs lexicaux sillonnent le passage de la poursuite de Jean Valjean par Javert ? À quel genre romanesque appartient cette scène ?

– Champ lexical de la lumière et de l’obscurité : « nuit », «  lune », « d’ombre et de lumière », «  le côté sombre », « le côté clair », « onze heures », « la lanterne du commissaire », « côté ténébreux », « l’heure », « vive lumière », « très bien voir », « clarté », « parurent », « marche sinistre dans les ténèbres », « quatre spectres », « vaste espace découvert et éclairé », « étroite, obscure », « quatre ombres », « aperçu », « la grande place éclairée », petite rue silencieuse », « le ciel ». – Champ lexical de la bête traquée : « se glisser le long des maisons et des murs », « il se hâta », « il fit un

circuit », « tourna », « s’enfonça dans la rue », « s’embusqua », « ces hommes le suivaient », « de gros bâtons à la main », « dépistés », « s’échapper », « s’évader », « un filet qui se resserrait lentement ».Cette scène appartient au roman policier.

3. P. 155-156, l. 1-20 : quel sentiment étreint Jean Valjean lorsqu’il chemine dans les égouts ? Quel type de phrase le montre particulièrement ? Qu’éprouve alors le lecteur ?

Jean Valjean est anxieux, il doute, même s’il reste calme (l. 6). Ce sont les phrases interrogatives qui se suivent (l. 15-18) qui témoignent de ces conjectures et créent un effet de suspens provoquant une certaine tension de l’intrigue.

4. P. 171-173 : qui est à l’origine du retournement de situation qui permet à Marius de changer d’opinion sur Jean Valjean ? Était-ce dans l’intention du personnage ?

C’est grâce à Thénardier que l’opinion de Marius change à propos de Jean Valjean. Ce n’était pas du tout ce que cherchait à obtenir l’ancien aubergiste. Il souhaitait au contraire que le jeune homme fasse condamner l’ancien forçat. Il ne savait pas que le corps inerte était en réalité celui de Marius.

5. P. 171-173 : en quoi ce dénouement est-il digne d’un roman policier ?

C’est la preuve que Thénardier apporte, le bout de tissu appartenant à la redingote que Marius portait ce jour-là, qui permet au jeune homme de comprendre quel rôle a joué Jean Valjean lors de son sauve-tage. De la même façon, c’est la preuve qu’apportent les coupures de presse qui montre à Marius que M. Madeleine et Jean Valjean ne sont qu’une seule et même personne, et que Javert s’est suicidé. C’est donc à la manière d’un roman policier que se résout l’intrigue.

Un roman réaliste ? De curieux hasards…

6. P. 30-32 : dans quelles circonstances Jean Valjean fait-il la connaissance du père Fauchelevent ?

Le père Fauchelevent a eu un accident de charrette. Coincé sous la voiture, il ne peut se dégager. Il est voué à une mort certaine. Jean Valjean, grâce à sa force prodigieuse, réussit à soulever la charrette et à sauver la vie du vieil homme.

7. P. 65-66 : par quelle expression le narrateur justifie-t-il la coïncidence qui place le père Fauchelevent une nouvelle fois sur la route de Jean Valjean ? Pourquoi cette rencontre est-elle une aubaine ?

Lignes 14-18 : le narrateur parle « du hasard » et même de la « providence ». Cette rencontre est une aubaine car le vieil homme doit la vie à Jean Valjean. Il est donc obligé de lui rendre service. Faire le bien engendre donc le bien.

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8. P. 66 : par quel terme le père Fauchelevent poursuit-il cette métaphore de l’intervention divine ? Relevez les mots qui composent ce champ lexical (l. 14 à 22).

Le vieil homme appelle Jean Valjean « un saint » (l. 22). Le champ lexical du divin se poursuit grâce aux mots « couvent » (l. 19), « diable » (l. 20), et dans une moindre mesure « homme » (l. 22).

9. Jean Valjean fait connaissance avec les Thénardier à Montfermeil. Quelle coïncidence les réunit à nou-veau, huit ans après ? Où ? Les reconnaît-il ? Est-ce plausible, selon vous ?

Jean Valjean retrouve Thénardier à Paris (p. 103-118), sous le nom de Jondrette, dans la masure Gor-beau, que Jean Valjean a lui-même habitée, huit ans auparavant. Il ne les reconnaît pas tout de suite : c’est Thénardier qui se dévoile, et Thénardier encore qui identifie l’ancien forçat. Toutes ces péripéties sont purement romanesques et permettent à Victor Hugo de n’utiliser que peu de personnages afin que son roman, très long, gagne en clarté.

10. Dans quelle autre situation Thénardier ne reconnaît-il pas Jean Valjean ? Pour quelle raison ? Est-ce vraisemblable ? P. 171-172 : quelle réponse apporte d’ailleurs l’aubergiste à cette interrogation ?

Thénardier ne semble pas reconnaître Jean Valjean dans les égouts (p. 157-158), car il est très sale, ayant circulé dans l’eau et la boue avec Marius sur le dos. C’est à peine plausible cependant : la voix même de Jean Valjean aurait dû le trahir. Le lecteur apprend par ailleurs de la bouche de Thénardier que c’est parce qu’il ne voulait pas être mêlé à l’affaire (ou parce qu’il savait Jean Valjean supérieur à lui en force et en courage ?) qu’il a fait comme s’il ne le connaissait pas (p. 173, l. 38-41).

11. Pensez-vous que ce roman soit réaliste ? Aidez-vous, pour répondre, de l’encadré « Histoire des arts » p. 187.

Les Misérables ne sont pas à proprement parler une œuvre réaliste. C’est un roman historique par cer-tains aspects, mais le réalisme, s’il affleure parfois dans la description des conditions de vie des person-nages pauvres, leur langage argotique ou la description du cadre parisien, reste une préoccupation de second plan, qui cède la place à l’expression de la thèse soutenue par l’auteur.

Un roman d’idées

12. P. 36 à 42 : dressez un rapide portrait de Champmathieu. Peut-on dire qu’il ressemble à Jean Valjean au moment du procès ? Et au moment de son propre procès, lorsqu’il avait 25 ans ?

Champmathieu est une sorte de double de Jean Valjean : il ne ressemble pas à Jean Valjean au moment de son procès, car contrairement à ce pauvre homme, Jean Valjean sait lire et écrire et il occupe une position sociale bien plus élevée : il est en effet maire de Montreuil-sur-Mer, propriétaire d’une fabrique et a en dépôt une somme confortable à la banque. C’est un bourgeois, un notable. Champmathieu ressemble cependant étrangement à Jean Valjean lorsqu’il part pour le bagne, âgé de 25 ans : à ce moment-là du roman, il ne sait ni lire, ni écrire, et vit très pauvrement aux côté de sa sœur et de ses enfants.

13. La justice et la prison sont représentées dans le roman sous la forme du procès Champmathieu (p. 40-42) et des forçats partant pour Toulon (p. 124-128). Quelle image Victor Hugo donne-t-il de ces institutions ?

Ces institutions sont redoutables et sans discernement : Champmathieu est innocent, mais sans l’in-tervention héroïque de Jean Valjean, il aurait probablement été emprisonné. De plus, le bagne a rendu Jean Valjean mauvais.

14. De quel côté le narrateur se place-t-il pour évoquer l’épisode des barricades (p. 137-153) et sa répres-sion ? Du côté des insurgés ou du côté de la garde ? Pourquoi ?

Le narrateur se place assurément du côté des insurgés : le lecteur vit la mort d’Éponine et de Gavroche avec tout le pathétique de leurs descriptions, alors que les morts de la garde ne sont évoqués que pour justifier le courage de Gavroche venant les dépouiller. Victor Hugo veut faire évoluer l’ordre établi et critique la société du XIXe siècle.

Lecture d’image

15. À quel mouvement pictural appartient Édouard Manet ? Quels autres peintres y participent ?

Édouard Manet (1832-1883) est un impressionniste, comme Monet, Renoir, Cézanne, Pissarro et Degas. Ce mouvement pictural se manifeste à la fin du XIXe siècle (1875-1886) et se caractérise par l’application

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de petites touches de peinture sur la toile, afin de matérialiser la lumière et le mouvement des paysages, particulièrement marins.

16. Qui est Rochefort ? Quel point commun a-t-il avec Jean Valjean ? Est-ce le seul tableau de Manet sur ce sujet ?

Rochefort est un journaliste condamné au bagne pour son rôle durant la Commune de Paris en 1871. Il s’évade par la mer en 1874.Rochefort est donc un forçat, comme Jean Valjean.Manet a peint deux versions de ce tableau, dont l’une est conservée au musée d’Orsay.Pour plus d’information, consulter le site du musée d’Orsay  : http://www.musee-orsay.fr/index.php?id=851&L=0&tx_commentaire_pi1[5BshowUid]5D=315&no_cache=1

Étude de la langue

Grammaire

17. « Un incendie de ricanements, de jurements et de chansons fit explosion », écrit le narrateur à la page 126, l. 44-45. Quelle est la fonction grammaticale des termes suivant la préposition « de » ?

Les trois noms communs sont compléments du nom « incendie ».

Lexique

18. P. 66 : le narrateur évoque « le hasard » (l. 14) et même la « providence » (l. 15). Quelle différence de sens y a-t-il entre ces deux termes ? Trouvez trois synonymes pour chacun.

Le hasard indique que la cause des événements n’est pas intentionnelle. L’enchainement des événe-ments est imprévu. Il peut donc être heureux ou malheureux. Synonymes : coïncidence, imprévu, circonstances, conjonctures.La providence est une puissance divine qui veille sur le destin des individus. Synonymes : chance, sort, ciel, dieu, les dieux, destin.

19. P. 124 : le chapitre VIII s’intitule « La cadène ». Que signifie ce mot ?

La cadène est la chaîne qui relie les forçats entre eux pendant le transport au bagne.

Étymologie

20. P. 126, l. 43 : quelle est l’origine du mot « farouche » ? Comment apparaissent les forçats ?

« Farouche » est issu du bas latin forasticus qui signifie « extérieur, étranger », puis « sauvage ». Les forçats semblent d’une violence bestiale.

Patrimoine

21. Quels romans de Victor Hugo évoquent la prison et la peine de mort ? Rédigez un rapide résumé de ces deux œuvres. Sont-ils parus avant ou après Les Misérables ? Quelles idées y défend l’écrivain ?

Il s’agit du Dernier Jour d’un condamné, écrit en 1829, trente-trois ans avant Les Misérables, et de Claude Gueux, écrit en 1834. Le chapitre XIII du premier roman, évoquant le départ des forçats, est reproduit dans la partie « Pour aller plus loin : documentations et informations complémentaires » de ce livret, p. 40. Claude Gueux (Classiques & Contemporains n° 2) est un prisonnier, incarcéré pour avoir volé. Victime de mauvais traitements, il tue un autre prisonnier et se voit condamné à mort.Le Dernier Jour d’un condamné (Classiques & Patrimoine n° 12) est le journal des derniers jours de la vie, du procès jusqu’à l’exécution, d’un condamné à mort. Le lecteur ne connaît ni son nom, ni les détails de son crime. Ce long monologue intérieur, qui est un témoignage des souffrances des prisonniers, décrit également le départ d’autres prisonniers au bagne de Toulon. Victor Hugo y offre un plaidoyer contre la peine de mort.

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EXPRESSION

Expression écrite

Synthèse

22. En prenant soin de lire l’encadré « Méthode » ci-dessous, résumez le roman.

Jean Valjean est libéré du bagne de Toulon. Rejeté par tous à Digne, où il arrive à pied un soir, il est finalement recueilli par Mgr Bienvenu. L’évêque lui offre le gîte et le couvert, en toute confiance. Cepen-dant, l’ancien forçat vole des couverts en argent et s’enfuit avant le matin. Reconduit manu militari chez l’homme d’Église, Jean Valjean se croit perdu. Pourtant, avec une grande bonté, Mgr Bienvenu assure les autorités de l’innocence de son hôte et engage ce dernier à faire le bien.Pendant ce temps, Fantine, une jeune mère célibataire, est abandonnée par le père de son enfant, un bourgeois sans scrupule. Obligée de trouver du travail, elle confie sa fille Cosette contre rétribution à un couple d’aubergiste, les Thénardier, puis se rend à Montreuil-sur-Mer, où un certain M. Madeleine dirige une fabrique de verroteries noires. Employée, elle contracte des dettes afin de s’acheter des meubles, espérant pouvoir rapidement reprendre Cosette auprès d’elle.Le mystérieux M. Madeleine sauve un jour un vieil homme, le père Fauchelevent, d’un accident de charrette. Aimé des habitants, il est élu maire et devient un notable respecté. Fantine est, quant à elle, harcelée par les Thénardier, qui réclament toujours plus d’argent pour l’éducation de Cosette. Elle est finalement mise à la porte de l’usine lorsqu’on apprend qu’elle a eu un enfant hors mariage. La misère physique et morale s’abat sur la jeune mère, réduite à vendre ses cheveux et bientôt ses dents pour sub-venir aux besoins de sa fille. Alors qu’elle manque d’être arrêtée par l’inspecteur Javert, elle est sauvée in extremis par M. Madeleine, au grand déplaisir du policier. Ce dernier a, en effet, mené son enquête car il soupçonne M. Madeleine d’être en réalité un ancien forçat. L’inspecteur demande toutefois son renvoi au maire, car il pense s’être trompé. La justice a finalement arrêté Champmathieu, pauvre errant coupable de vol, et l’on pense qu’il s’agit de Jean Valjean.M. Madeleine, qui a recueilli Fantine, est préoccupé par cette affaire. Il décide de se rendre à Arras, au procès de Champmathieu. Il y avoue, à la stupéfaction de tous, qu’il est le véritable Jean Valjean. Revenu à Montreuil-sur-Mer, il est arrêté par Javert, devant Fantine à l’agonie. La jeune mère meurt sans avoir revu son enfant. Renvoyé au bagne, Jean Valjean s’évade en travaillant sur un navire de l’Arsenal et passe pour mort.Jean Valjean se rend bientôt chez les Thénardier et leur rachète Cosette. Il vit quelque temps reclus avec la petite fille qu’il aime tendrement, dans la maison Gorbeau à Paris. Mais Javert retrouve sa trace. Il fuit donc avec Cosette une nuit, poursuivit par Javert, et entre dans l’enceinte du Petit-Picpus, un couvent tenu par d’austères religieuses. Il y retrouve le père Fauchelevent, placé là depuis son accident et qui fait office de jardinier. Aidé du vieil homme, il devient jardinier à son tour sous le nom d’Ultime Fauchelevent, tandis que Cosette grandit sous la protection des sœurs.Cosette devenue une jeune fille, il est temps de quitter le couvent pour s’établir dans un appartement rue de l’Homme-Armé. Se promenant chaque jour au jardin du Luxembourg, Jean Valjean et la jeune fille rencontrent Marius. Le jeune homme tombe éperdument amoureux de Cosette dont il ne connaît pas le nom. Marius est le petit-fils d’un grand bourgeois royaliste, M. Gillenormand, avec qui il a rompu toute relation pour une divergence politique. Le jeune homme a en effet découvert que son père défunt avait été rejeté par son grand-père pour avoir été officier lors des campagnes napoléoniennes. Marius vit donc pauvrement dans un réduit de la masure Gorbeau, d’un travail de libraire et fréquente Courfeyrac, un étudiant impliqué dans une société républicaine, les amis de l’ABC. Ayant perdu la trace de Cosette, il désespère. Se sachant suivi par un inconnu, Jean Valjean et la jeune fille ont préféré déménager rue Plumet.Marius retrouve cependant la trace de celle qu’il aime lorsqu’elle vient donner la charité à ses voisins, les Jondrette, une famille de misérables, elle aussi installée dans la masure Gorbeau. Comprenant que les Jondrette fomentent un mauvais coup à l’égard de Jean Valjean, qu’il surnomme M. Leblanc, Marius sollicite l’aide de l’inspecteur Javert. M. Leblanc et Cosette sont ainsi sauvés des Jondrette, qui se révèlent n’être autres que les Thénardier, ayant pris un nom d’emprunt pour échapper à leurs créanciers.Marius obtient d’Éponine, la fille des Thénardier, l’adresse de Cosette, à qui il fait désormais une cour assidue en secret. Cosette annonce cependant au jeune homme son prochain déménagement. Déses-péré, Marius demande l’autorisation de se marier à son grand-père qu’il n’a pas vu depuis plusieurs

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années. Celui-ci refuse. Marius décide alors de mourir sur les barricades qui se dressent dans Paris. Il rejoint son ami Courfeyrac et le gamin Gavroche, le fils rejeté des Thénardier, qu’il sauve d’une mort cer-taine par un geste héroïque. Cependant, Éponine tombe mourante dans ses bras : amoureuse éconduite, elle a fait rempart de son corps pour le protéger du feu ennemi. Elle lui donne avant de trépasser la lettre de Cosette qui le rassure sur ses sentiments. Marius griffonne une réponse qu’il confie à Gavroche.Le billet est cependant intercepté par Jean Valjean qui, intrigué, se rend à son tour sur la barricade. Il y trouve Javert ligoté : reconnu par Gavroche alors qu’il tentait de s’infiltrer parmi les révoltés, le policier attend son exécution. Jean Valjean sollicite la permission de le tuer lui-même. Elle lui est accordée. L’an-cien forçat conduit l’inspecteur loin des barricades et le relâche. Il retourne ensuite auprès des insurgés, affamés et harassés. Lorsque la garde prend la barricade, Jean Valjean saisit Marius, qu’il sait mainte-nant être l’amoureux de Cosette, et organise sa fuite par les égouts. Au terme d’un dangereux périple souterrain, l’ancien bagnard tombe nez-à-nez sur Thénardier, qui lui promet de lui ouvrir la porte vers la liberté s’il lui donne de l’argent. Jean Valjean obtempère, mais lorsqu’il parvient à l’air libre, il retrouve Javert, décidé à l’arrêter. Il obtient le droit de régler ses affaires : il conduit Marius toujours inconscient chez son grand-père et s’arrête prévenir Cosette. Mais le policier le laisse finalement libre et, en proie à un cas de conscience insoluble, se jette dans les eaux tourbillonnantes de la Seine.Cosette et Marius se marient. Grâce à Jean Valjean, la jeune fille est richement dotée et le couple peut vivre un bonheur sans nuages. Cependant, l’ancien forçat avoue tout de son passé à Marius, afin de ne pas le tromper, puis s’en va finir sa vie pauvrement, rejeté par le jeune homme, qui pense douteuse l’origine de l’argent de Cosette. Thénardier quant à lui se rend chez Marius : il pense pouvoir obtenir de l’argent en lui avouant un secret. Il n’est pas sans ignorer que Jean Valjean est un assassin. Marius l’inter-rompt : il sait que l’ancien forçat a tué M. Madeleine et Javert. Thénardier le détrompe quant au sort des deux hommes. Ce n’est pas de cela qu’il s’agit. Selon lui, Jean Valjean a transporté le corps d’un jeune homme probablement mort dans les égouts et il en apporte pour preuve un bout de sa redingote. Marius comprend alors que c’est Jean Valjean qui l’a sauvé de l’enfer de la barricade. Il renvoie Thénardier et se rend avec Cosette chez leur bienfaiteur, qui meurt dans leurs bras.

Écrit d’invention

23. Observez attentivement le tableau de Manet reproduit p. 203. Racontez l’évasion de Rochefort.

On veillera à ce que les élèves s’inspirent des codes du roman d’aventures et du roman policier, en maîtrisant le système des temps imparfait/passé simple. On se rappellera que Jean Valjean s’est évadé en travaillant sur l’Arsenal, et l’on pourra envisager des conditions similaires, propices à la fuite.

24. P. 158-159 : devant la grille de sortie des égouts, Javert surprend Jean Valjean et Thénardier négociant à l’intérieur, l’un pour avoir la clé, l’autre pour obtenir de l’argent. Il décide d’intervenir. Racontez cette scène du point de vue du policier.

On relira attentivement les pages 158 et 159 et on veillera à ce que les élèves adoptent le point de vue de Javert, qui représente la justice, en proie au cas de conscience qui est le sien : il vient d’être sauvé d’une mort assurée par l’homme qu’il s’apprête à arrêter.

EXPRESSION

Expression orale

25. Exposé : pensez-vous que, de nos jours, nous sommes tous égaux devant la justice ?

– La loi française est claire sur ce point : tous les citoyens français naissent libres et égaux en droit. – Cependant, la justice est rarement aveugle, et certaines affaires démontrent que le jeu des avocats

peut permettre des interprétations parfois étonnantes de la loi. On rappellera ainsi l’habileté rhétorique des plaideurs, antiques ou modernes. – De plus, la loi française ne s’applique qu’en France, et dans nombre de pays, certains citoyens

conservent des privilèges sur les autres. – On peut également évoquer le fait que la justice est souvent plus favorables aux personnes instruites :

on prendra pour exemple le procès Champmathieu dans le roman : la défense du pauvre homme est inconsistante, car il ne maîtrise pas les rouages de la machine judiciaire et n’a pas l’instruction nécessaire pour répondre aux accusations.

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AUTOUR DE l’ŒUVRE :toutes les réponses aux questions

TEXTES ET IMAGES DANS LE CONTEXTE

Les enfants du XIXe siècle1. RomanSans famille, Hector Malot.

1. Pour quelles raisons le père Barberin veut se débarrasser de Rémi ?

Le père Barberin souhaite que Rémi « ne mange plus » son pain, c’est-à-dire ne lui coûte plus d’argent. Il veut même en recevoir en le vendant : c’est pour cela qu’il discute du physique du garçon.

2. Quelles qualités possède Rémi selon le père Barberin ?

Rémi est bon pour travailler : fort comme un homme, solide et sain, les jambes droites.

3. À quel genre de commerce s’apparente, dans la bouche des deux hommes, la vente de l’enfant ?

L’enfant est vendu comme un animal de travail, une bête de somme.

2. Texte de loiLoi du 19 mai 1874 sur le travail des filles et des garçons mineurs dans l’industrie.

1. Quelle est la nature de ce texte ?

Ce texte est un texte de loi qui régit le travail des enfants.

2. Combien de temps travaille un enfant de moins de douze ans à l’époque ? Combien de temps lui reste-t-il pour fréquenter l’école ?

Un enfant de moins de douze ans travaille six heures par jour : c’est le temps qu’il passe aujourd’hui à l’école. Il lui reste donc très peu de temps pour s’instruire.

3. Quels types d’emplois sont occupés par les enfants au XIXe siècle ?

Tous les métiers peu qualifiés peuvent être exercés par des enfants : artisanat, ouvriers dans les manu-factures, les usines, les ateliers ou même les chantiers de construction.

3. Image d’ÉpinalLe Départ des petits Savoyards, XIXe siècle.

1. Que sont les images d’Épinal ? Quels indices évoquent la Savoie ?

Ces images sont des impressions fabriquées dans la ville d’Épinal, dans les Vosges, qui reprennent la tradition d’imagerie que distribuaient les colporteurs dans les campagnes illettrées. Leur sujets sont pittoresques et populaires (histoire, religion, artisanat) ou issus des romans à succès. L’industrie de l’imprimerie qui se développe au XIXe siècle permet une plus grande diffusion et une meilleure qualité de dessins. Plus d’informations sur le site : http://www.imagerie-epinal.com/index/Plusieurs indices clairs et simples rappellent la Savoie : le paysage montagneux, les costumes tradition-nels, la marmotte tenue par le petit garçon et l’instrument de musique dans les mains de la petite fille.

2. Pourquoi les petits Savoyards, au XIXe siècle, sont obligés de partir chercher du travail dans les grandes villes ?

Au XIXe siècle, la Savoie est une province partagée entre la France et l’Italie. C’est une région monta-gneuse, au climat rude et au sol difficile à travailler. Les populations y vivent dans des conditions de misère extrême, isolées dans des villages reculés. Les familles sont nombreuses et les enfants sont donc obligés de partir très tôt gagner leur pain. En ville, les populations sont plus riches.

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3. Traditionnellement, à l’image de Petit-Gervais dans Les Misérables (p. 24), quel métier exercent-ils ? Sur le document, quel âge ont-ils ? Quel rapport ce métier a-t-il avec leur âge ?

Les petits Savoyards sont ramoneurs de cheminée : il est important qu’ils soient de petite taille pour pouvoir se glisser dans les conduits. Sur l’image, ils semblent avoir entre six et treize ans.

Héros en difficulté : de l’Histoire à la parodie1. Poésie« Expiation », Les Châtiments, Victor Hugo.

1. De quelle ville les soldats reviennent-ils ? Ont-ils gagné ou perdu ?

Les soldats reviennent de Moscou. Ils ont failli gagner et conquérir la Russie, mais les conditions cli-matiques extrêmement rudes ont eu raison de leurs forces. En effet, après avoir pris la ville que les Russes ont vidé de toute provision, l’Empereur ne parvient pas à signer d’accord de paix : les Russes savent que les grands froids chasseront les Français. En septembre, de grands incendies déclenchés par les habitants ravagent la ville essentiellement construite en bois. À partir du 18 octobre, les armées napoléoniennes, affamées et glacées, se replient.

2. De quelle manière le poète insiste sur le froid polaire qui s’abat sur la retraite des armées napoléoniennes ?

– Les répétitions du groupe verbal « il neigeait », à l’imparfait, accentuent l’idée que la neige tombe de manière continue et illimitée. – Le champ lexical du froid se retrouve dans le poème entier : « il neigeait », « en avalanche », « l’âpre

hiver », « plaine blanche », « s’abritaient », « gelés », « blanc de givres », « flocons blancs », « trem-blants », « froide bise », « pieds nus », « verglas », « brume », « la neige épaisse ».

3. Quelles expressions montrent, malgré la déroute, la valeur de l’armée jusque-là héroïque ? La défaite vient-elle d’une faute des soldats ?

« Pour la première fois l’aigle baissait la tête », « des clairons à leur poste gelés,/Restés debout, en selle », « les grenadiers, surpris d’être tremblants,/Marchaient, pensifs, », « des cœurs vivants, des gens de guerre », « cette immense armée ». Les termes sont souvent laudatifs (l’aigle, les clairons restés debout) et montrent la perplexité de cette armée qui ne parvient pas à croire à la déroute dont elle est victime. Les soldats n’ont pas perdu à cause de leurs erreurs aux combats, mais à cause du froid.

2. RomanLe Comte de Monte Cristo, Alexandre Dumas.

1. Pourquoi Edmond Dantès ne peut-il pas voir ce qui se passe ? Quels autres sens lui permettent de com-prendre où il se trouve et ce qui se produit ?

Edmond Dantès est enfermé dans le sac mortuaire du défunt abbé Faria. – Il entend ce que disent les porteurs, devine la nature du sol sous leurs pieds et entend également que

l’un des fossoyeurs dépose quelque chose de lourd sur le sol. – Il sent le mistral et la corde lui lier les pieds.

Il utilise donc principalement l’odorat et le toucher pour collecter ces indices.

2. De quel point de vue est décrite la scène ? Quel effet obtient ainsi le narrateur ?

Le narrateur se place du point de vue de Dantès, privé de la vue. Ses perceptions sont donc tronquées, faisant monter le suspens quant à la suite des événements. Il garde la révélation de l’explication de la situation pour la fin de l’extrait, reprenant son rôle de narrateur omniscient : il n’y a pas de cimetière au château d’If.

3. À quel moment des Misérables Jean Valjean utilise le même subterfuge qu’Edmond Dantès pour se sortir d’un mauvais pas ?

Jean Valjean prend la place de la religieuse défunte pour sortir du couvent sans se faire remarquer (p. 68-70).

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3. RomanGerminal, Émile Zola.

1. Où se trouvent Catherine Maheu et Étienne Lantier ? Pourquoi le temps presse-t-il ?

Ils se trouvent dans la mine de charbon. L’inondation et l’éboulement menacent et ils ne peuvent pas sortir.

2. Quelle métaphore rend les événements qui se produisent dans la mine terrifiants et inhumains ?

« C’était le terrifiant vacarme des cataclysmes intérieurs, un coin de la bataille ancienne, lorsque les déluges retournaient la terre, en abîmant les montagnes sous les plaines. »Les événements de la mine sont comparés au Déluge décrit dans la Bible.

3. Quelles qualités héroïques Étienne Lantier montre-t-il dans ce passage ? Dans quels épisodes des Misé-rables Jean Valjean fait-il preuve de qualités identiques ?

Lantier est fort : il porte Catherine. Il est aussi courageux et tenace : il rassure la jeune femme et n’aban-donne pas. Jean Valjean fait preuve de qualités similaires lorsqu’il échappe à Javert, en escaladant les murs du cou-vent avec Cosette ou lorsqu’il fuit les barricades par les égouts en portant Marius.

4. ThéâtreOn ne badine pas avec l’amour, Alfred de Musset.

1. Quels sont les privilèges de l’homme important pour maître Bridaine ? En quoi est-ce comique ?

Selon maître Bridaine, l’homme important doit avoir la place d’honneur à table, être servi le premier en vin de Málaga et avoir les meilleurs morceaux des plats : perdreaux, choux et carottes.Ces privilèges sont comiques car ils ne concernent que le contenu du dîner. La bassesse du quotidien évoqué contraste avec le ton tragique et emphatique du monologue, créant une situation grotesque.

2. Le monologue se divise en plusieurs parties. Lesquelles ? Donnez un titre à chacune d’elles.

– De « cela » jusqu’à « carottes » : le curé imagine le repas du soir. – De « ô sainte Église » jusqu’à « poulets » : il se souvient de la soirée de la veille. – De « Je ne souffrirai pas » jusqu’à la fin, il fait des adieux pathétiques et tragiques à la table.

3. Quel type de phrase montre le dépit du religieux ? Que pensez-vous de la comparaison qui conclut la dernière phrase prononcée par le personnage ?

Le dépit est évoqué par une succession de phrases exclamatives, qui débutent par l’anaphore du terme « adieu ».La dernière phrase est profondément comique, car elle propose une comparaison grotesque entre César, dont les faits héroïques et guerriers sont reconnus, et ce curé de campagne intéressé par les repas.

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POUR ALLER PLUS LOIN :documentation et informations

complémentaires

Victor Hugo et l’enfance misérable « Souvenir de la nuit du quatre », Les Châtiments, 1852.L’enfant avait reçu deux balles dans la tête.Le logis était propre, humble, paisible, honnête ; On voyait un rameau bénit sur un portrait.Une vieille grand-mère était là qui pleurait.Nous le déshabillions en silence. Sa bouche, Pâle, s’ouvrait ; la mort noyait son œil farouche ; Ses bras pendants semblaient demander des appuis.Il avait dans sa poche une toupie en buis. […]L’aïeule regarda déshabiller l’enfant,Disant : « Comme il est blanc ! approchez donc la lampe !Dieu ! ses pauvres cheveux sont collés sur sa tempe ! »Et quand ce fut fini, le prit sur ses genoux.La nuit était lugubre ; on entendait des coups De fusil dans la rue où l’on en tuait d’autres.– Il faut ensevelir l’enfant, dirent les nôtres.Et l’on prit un drap blanc dans l’armoire en noyer.L’aïeule cependant l’approchait du foyer, Comme pour réchauffer ses membres déjà roides. […]« Est-ce que ce n’est pas une chose qui navre !Cria-t-elle ! monsieur, il n’avait pas huit ans !Ses maîtres, il allait en classe, étaient contents.Monsieur, quand il fallait que je fisse une lettre, C’est lui qui l’écrivait. Est-ce qu’on va se mettre À tuer les enfants maintenant ? Ah ! mon Dieu !On est donc des brigands ? Je vous demande un peu, Il jouait ce matin, là, devant la fenêtre !Dire qu’ils m’ont tué ce pauvre petit être !Il passait dans la rue, ils ont tiré dessus.Monsieur, il était bon et doux comme un Jésus.Moi je suis vieille, il est tout simple que je parte ; Cela n’aurait rien fait à monsieur Bonaparte De me tuer au lieu de tuer mon enfant ! »Elle s’interrompit, les sanglots l’étouffant, Puis elle dit, et tous pleuraient près de l’aïeule : « Que vais-je devenir à présent, toute seule ?Expliquez-moi cela, vous autres, aujourd’hui.Hélas ! je n’avais plus de sa mère que lui.Pourquoi l’a-t-on tué ? Je veux qu’on me l’explique.L’enfant n’a pas crié vive la République. » Nous nous taisions, debout et graves, chapeau bas, Tremblant devant ce deuil qu’on ne console pas.

« Melancholia », Les Contemplations, 1856.Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ?Ces doux êtres pensifs que la fièvre maigrit ?Ces filles de huit ans qu’on voit cheminer seules ?Ils s’en vont travailler quinze heures sous des meules.Ils vont, de l’aube au soir, faire éternellement

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Dans la même prison le même mouvement.Accroupis sous les dents d’une machine sombre,Monstre hideux qui mâche on ne sait quoi dans l’ombre,Innocents dans un bagne, anges dans un enfer,Ils travaillent. Tout est d’airain, tout est de fer. Jamais on ne s’arrête et jamais on ne joue.Aussi quelle pâleur ! la cendre est sur leur joue. Il fait à peine jour, ils sont déjà bien las.Ils ne comprennent rien à leur destin, hélas !Ils semblent dire à Dieu : – Petits comme nous sommes,Notre père, voyez ce que nous font les hommes !Ô servitude infâme imposée à l’enfant !Rachitisme ! travail dont le souffle étouffantDéfait ce qu’a fait Dieu ; qui tue, œuvre insensée,La beauté sur les fronts, dans les cœurs la pensée,Et qui ferait – c’est là son fruit le plus certain ! –D’Apollon un bossu, de Voltaire un crétin !Travail mauvais qui prend l’âge tendre en sa serre,Qui produit la richesse en créant la misère,Qui se sert d’un enfant ainsi que d’un outil !Progrès dont on demande : Où va-t-il ? que veut-il ?Qui brise la jeunesse en fleur ! qui donne, en somme,Une âme à la machine et la retire à l’homme !Que ce travail, haï des mères, soit maudit !Maudit comme le vice où l’on s’abâtardit,Maudit comme l’opprobre et comme le blasphème !Ô Dieu ! qu’il soit maudit au nom du travail même,Au nom du vrai travail, sain, fécond, généreux,Qui fait le peuple libre et qui rend l’homme heureux !

Victor Hugo, extrait du Discours sur la misère prononcé à l’Assemblée nationale, le 9 juillet 1849 La misère, messieurs, j’aborde ici le vif de la question, voulez-vous savoir où elle en est, la misère ? Voulez-vous savoir jusqu’où elle peut aller, jusqu’où elle va, je ne dis pas en Irlande, je ne dis pas au Moyen Âge, je dis en France, je dis à Paris, et au temps où nous vivons ? Voulez-vous des faits ?Mon Dieu, je n’hésite pas à les citer, ces faits. Ils sont tristes, mais nécessaires à révéler ; et tenez, s’il faut dire toute ma pensée, je voudrais qu’il sortît de cette assemblée, et au besoin j’en ferai la proposition formelle, une grande et solennelle enquête sur la situation vraie des classes laborieuses et souffrantes en France. Je voudrais que tous les faits éclatassent au grand jour. Comment veut-on guérir le mal si l’on ne sonde pas les plaies ?Voici donc ces faits :Il y a dans Paris, dans ces faubourgs de Paris que le vent de l’émeute soulevait naguère si aisément, il y a des rues, des maisons, des cloaques, où des familles, des familles entières, vivent pêle-mêle, hommes, femmes, jeunes filles, enfants, n’ayant pour lits, n’ayant pour couvertures, j’ai presque dit pour vêtements, que des monceaux infects de chiffons en fermentation, ramassés dans la fange du coin des bornes, espèce de fumier des villes, où des créatures humaines s’enfouissent toutes vivantes pour échapper au froid de l’hiver. Voilà un fait. En voici d’autres : Ces jours derniers, un homme, mon Dieu, un malheureux homme de lettres, car la misère n’épargne pas plus les professions libérales que les professions manuelles, un malheureux homme est mort de faim, mort de faim à la lettre, et l’on a constaté après sa mort qu’il n’avait pas mangé depuis six jours. Voulez-vous quelque chose de plus douloureux encore ? Le mois passé, pendant la recrudescence du choléra, on a trouvé une mère et ses quatre enfants qui cherchaient leur nourriture dans les débris immondes et pestilentiels des charniers de Montfaucon !Eh bien, messieurs, je dis que ce sont là des choses qui ne doivent pas être ; je dis que la société doit dépenser toute sa force, toute sa sollicitude, toute son intelligence, toute sa volonté, pour que de telles choses ne soient pas ! Je dis que de tels faits, dans un pays civilisé, engagent la conscience de la société toute entière ; que je m’en sens, moi qui parle, complice et solidaire, et que de tels faits ne sont pas seulement des torts envers l’homme, que ce sont des crimes envers Dieu !

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Victor Hugo, Le Dernier jour d’un condamné, 1829 (extrait du chapitre XIII), Classiques et Patrimoine n° 12, p. 60-62En un clin d’œil le préau se vida de tout ce qui n’était pas argousin ou galérien. Les curieux de Paris allèrent s’abriter sous les auvents des portes.Cependant la pluie tombait à flots. On ne voyait plus dans la cour que les forçats nus et ruisselants sur le pavé noyé. Un silence morne avait succédé à leurs bruyantes bravades. Ils grelottaient, leurs dents claquaient ; leurs jambes maigries, leurs genoux noueux s’entrechoquaient ; et c’était pitié de les voir appliquer sur leurs membres bleus ces chemises trempées, ces vestes, ces pantalons dégouttant de pluie. La nudité eût été meilleure.Un seul, un vieux, avait conservé quelque gaieté. Il s’écria, en s’essuyant avec sa chemise mouillée, que cela n’était pas dans le programme ; puis se prit à rire en montrant le poing au ciel.Quand ils eurent revêtu les habits de route, on les mena par bandes de vingt ou trente à l’autre coin du préau, où les cordons allongés à terre les attendaient. Ces cordons sont de longues et fortes chaînes coupées transversalement de deux en deux pieds par d’autres chaînes plus courtes, à l’extrémité desquelles se rattache un carcan carré, qui s’ouvre au moyen d’une charnière pratiquée à l’un des angles et se ferme à l’angle opposé par un boulon de fer rivé pour tout le voyage sur le cou du galérien. Quand ces cordons sont développés à terre, ils figurent assez bien la grande arête d’un poisson.On fit asseoir les galériens dans la boue, sur les pavés inondés ; on leur essaya les colliers ; puis deux forgerons de la chiourme, armés d’enclumes portatives, les leur rivèrent à froid à grands coups de masses de fer. C’est un moment affreux, où les plus hardis pâlissent. Chaque coup de marteau, assené sur l’enclume appuyée à leur dos, fait rebondir le menton du patient ; le moindre mouvement d’avant en arrière lui ferait sauter le crâne comme une coquille de noix.Après cette opération, ils devinrent sombres. On n’entendait plus que le grelottement des chaînes, et par intervalles un cri et le bruit sourd du bâton des gardes-chiourme sur les membres des récalcitrants. Il y en eut qui pleurèrent ; les vieux frissonnaient et se mordaient les lèvres. Je regardai avec terreur tous ces profils sinistres dans leurs cadres de fer.Ainsi, après la visite des médecins, la visite des geôliers ; après la visite des geôliers, le ferrage. Trois actes à ce spectacle.Un rayon de soleil reparut. On eût dit qu’il mettait le feu à tous ces cerveaux. Les forçats se levèrent à la fois, comme par un mouvement convulsif. Les cinq cordons se rattachèrent par les mains, et tout à coup se formèrent en ronde immense autour de la branche de la lanterne. Ils tournaient à fatiguer les yeux. Ils chantaient une chanson du bagne, une romance d’argot, sur un air tantôt plaintif, tantôt furieux et gai ; on entendait par intervalles des cris grêles, des éclats de rire déchirés et haletants se mêler aux mystérieuses paroles puis des acclamations furibondes ; et les chaînes qui s’entrecho-quaient en cadence servaient d’orchestre à ce chant plus rauque que leur bruit. Si je cherchais une image du sabbat, je ne la voudrais ni meilleure ni pire.On apporta dans le préau un large baquet. Les gardes-chiourme rompirent la danse des forçats à coups de bâton, et les conduisirent à ce baquet dans lequel on voyait nager je ne sais quelles herbes dans je ne sais quel liquide fumant et sale. Ils mangèrent.Puis, ayant mangé, ils jetèrent sur le pavé ce qui restait de leur soupe et de leur pain bis, et se remirent à danser et à chanter. Il paraît qu’on leur laisse cette liberté le jour du ferrage et la nuit qui le suit.

Aristide Bruant, La Chanson des canuts, 1910Pour chanter Veni CreatorIl faut avoir chasuble d’orPour chanter Veni CreatorIl faut avoir chasuble d’orNous en tissons pour vous, Grands de l’Église, Et nous, pauvres canuts, n’avons pas de chemises !

C’est nous les canuts, Nous allons tout nus !

Pour gouverner, il faut avoirManteau et rubans en sautoirPour gouverner, il faut avoirManteau et rubans en sautoirNous en tissons pour vous, Grands de la Terre,Et nous, pauvres canuts, sans drap on nous enterre !

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C’est nous les canuts, Nous allons tout nus !

Mais notre règne arrivera Quand votre règne finira.Mais notre règne arrivera Quand votre règne finira.Nous tisserons le linceul du vieux monde,Car on entend déjà la révolte qui gronde !

C’est nous les canuts,Nous n’irons plus nus !

Alphonse de Lamartine, « Le Lac », in Méditations poétiques, 1820Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages,Dans la nuit éternelle emportés sans retour,Ne pourrons-nous jamais sur l’océan des âgesJeter l’ancre un seul jour ?

Ô lac ! l’année à peine a fini sa carrière,Et près des flots chéris qu’elle devait revoir,Regarde ! je viens seul m’asseoir sur cette pierreOù tu la vis s’asseoir !

Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes,Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés,Ainsi le vent jetait l’écume de tes ondesSur ses pieds adorés.

Un soir, t’en souvient-il ? nous voguions en silence ;On n’entendait au loin, sur l’onde et sous les cieux,Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadenceTes flots harmonieux.

Tout à coup des accents inconnus à la terreDu rivage charmé frappèrent les échos ;Le flot fut attentif, et la voix qui m’est chèreLaissa tomber ces mots :

« Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !Suspendez votre cours :Laissez-nous savourer les rapides délicesDes plus beaux de nos jours !

« Assez de malheureux ici-bas vous implorent,Coulez, coulez pour eux ;Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent ;Oubliez les heureux.

« Mais je demande en vain quelques moments encore,Le temps m’échappe et fuit ;Je dis à cette nuit : Sois plus lente ; et l’auroreVa dissiper la nuit.

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« Aimons donc, aimons donc ! de l’heure fugitive,Hâtons-nous, jouissons !L’homme n’a point de port, le temps n’a point de rive ;Il coule, et nous passons ! »

Temps jaloux, se peut-il que ces moments d’ivresse,Où l’amour à longs flots nous verse le bonheur, S’envolent loin de nous de la même vitesseQue les jours de malheur ?

Eh quoi ! n’en pourrons-nous fixer au moins la trace ?Quoi ! passés pour jamais ! quoi ! tout entiers perdus !Ce temps qui les donna, ce temps qui les efface,Ne nous les rendra plus !

Éternité, néant, passé, sombres abîmes,Que faites-vous des jours que vous engloutissez ?Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimesQue vous nous ravissez ?

Ô lac ! rochers muets ! grottes ! forêt obscure !Vous, que le temps épargne ou qu’il peut rajeunir,Gardez de cette nuit, gardez, belle nature,Au moins le souvenir !

Qu’il soit dans ton repos, qu’il soit dans tes orages,Beau lac, et dans l’aspect de tes riants coteaux,Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvagesQui pendent sur tes eaux.

Qu’il soit dans le zéphyr qui frémit et qui passe,Dans les bruits de tes bords par tes bords répétés,Dans l’astre au front d’argent qui blanchit ta surfaceDe ses molles clartés.

Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire,Que les parfums légers de ton air embaumé,Que tout ce qu’on entend, l’on voit ou l’on respire,Tout dise : Ils ont aimé !

© Éditions Magnard, 2013www.magnard.fr

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