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1 UNIVERSITE PARIS DIDEROT - PARIS 7 FACULTE DE CHIRURGIE DENTAIRE 5, rue Garancière 75006 PARIS Année 2011 Thèse n° : N° attribué par la bibliothèque : THESE pour le DIPLOME D’ETAT DE DOCTEUR en Chirurgie Dentaire présentée et soutenue publiquement le par CORVISIER Marie-Aude née le 18/01/1986 COINCIDENCE OU NON DE L'OCCLUSION DE RELATION CENTREE ET DE L'OCCLUSION D'INTERCUSPIDIE MAXIMALE? Directeur de thèse : M. le Docteur S. Le Texier JURY M. le Professeur B. TAVERNIER Président M. le Docteur Ph. GATEAU Assesseur M. le Docteur S. LE TEXIER Assesseur M. le Docteur S. ESCURE Assesseur M. le Docteur T. MOUSQUES Assesseur

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  • 1

    UNIVERSITE PARIS DIDEROT - PARIS 7

    FACULTE DE CHIRURGIE DENTAIRE

    5, rue Garancière 75006 PARIS

    Année 2011 Thèse n° :

    N° attribué par la bibliothèque :

    THESE

    pour le DIPLOME D’ETAT DE DOCTEUR

    en Chirurgie Dentaire

    présentée et soutenue publiquement le

    par

    CORVISIER Marie-Aude

    née le 18/01/1986

    COINCIDENCE OU NON DE L'OCCLUSION DE RELATION CENTREE ET DE

    L'OCCLUSION D'INTERCUSPIDIE MAXIMALE?

    Directeur de thèse : M. le Docteur S. Le Texier

    JURY

    M. le Professeur B. TAVERNIER Président

    M. le Docteur Ph. GATEAU Assesseur

    M. le Docteur S. LE TEXIER Assesseur

    M. le Docteur S. ESCURE Assesseur

    M. le Docteur T. MOUSQUES Assesseur

  • 2

    UNIVERSITE PARIS DIDEROT – PARIS 7

    Président : M. le Professeur Vincent BERGER

    Doyen de la Faculté de Chirurgie Dentaire : M. le Professeur Robert GARCIA

    Secrétaire Général : M. Denis GUILLAUMIN

    JURY

    M. le Professeur B. TAVERNIER Président

    M. le Docteur Ph. GATEAU Assesseur

    M. le Docteur S. LE TEXIER Assesseur

    M. le Docteur S. ESCURE Assesseur

    M. le Docteur T. MOUSQUES Assesseur

  • 3

    M. le Professeur B. TAVERNIER Docteur en Chirurgie Dentaire Diplôme de Doctorat

    Professeur des Universités – Praticien Hospitalier

    A la faculté de Chirurgie Dentaire de l’Université

    Paris Diderot – Paris 7

    Pour l’honneur que vous me faites en acceptant la présidence du jury de cette thèse, je vous prie de trouver ici

    l’expression de ma respectueuse considération.

    M. le Docteur P. GATEAU Docteur en chirurgie dentaire Diplôme de Doctorat

    Maître de Conférences – Praticien Hospitalier

    A la faculté de Chirurgie Dentaire de l’Université

    Paris Diderot – Paris 7

    Vous me faites l'honneur de siéger dans ce jury, veuillez trouver ici l’expression de mes sincères remerciements.

    M. le Docteur S. LE TEXIER Docteur en Chirurgie Dentaire Docteur en Sciences Odontologiques

    Maître de Conférences – Praticien Hospitalier

    A la faculté de Chirurgie Dentaire de l’Université

    Paris Diderot– Paris 7

    Vous m’avez fait l'honneur d’accepter la direction de cette thèse.

    Pour m’avoir aidée tout au long de l’élaboration de ce travail, pour vos conseils, votre patience et votre disponibilité,

    soyez assuré de ma gratitude et de mon plus profond respect.

    M. le Docteur S. ESCURE Docteur en Chirurgie Dentaire Maître de Conférences – Praticien Hospitalier

    A la faculté de Chirurgie Dentaire de l’Université

    Paris Diderot– Paris 7

    Pour l’honneur de vous voir siéger au sein de ce jury, je vous prie de trouver ici l’expression de mes sincères

    remerciements.

    M. le Docteur T. MOUSQUES Docteur en Chirurgie Dentaire Postgraduate in Periodontology University of

    Pennsylvania

    Maître de Conférences – Praticien Hospitalier

    A la Faculté de Chirurgie Dentaire de l’Université

    Paris Diderot – Paris 7

    Vous me faites l’honneur de siéger dans ce jury, veuillez trouver ici l’expression de mon profond respect.

  • 4

    A mes parents, ce travail est l'aboutissement des études que vous m'avez aidée à entreprendre,

    merci pour tout

    A mon frère, pour sa participation à mon étude

    A mon fiancé, pour son soutien tout au long de ma thèse,

    sa patience et son aide technique

    A Baptiste Cédard, pour ses précieux conseils

    A Raphaël Cohen, pour sa participation à mon étude

    A toute l'équipe du cabinet de M. le Docteur S. Le Texier, pour leur aide

  • 5

    TABLE DES MATIERES

    INTRODUCTION ............................................................................................................................... 7

    I. REVUE DE LITTERATURE........................................................................................................... 8

    I.1. Introduction ............................................................................................................................ 8

    I.2. Réalisation de la revue de littérature ....................................................................................... 9

    I.3. Occlusion de relation centrée et occlusion d'intercuspidie maximale ................................... 10

    I.3.1. Occlusion de relation centrée : définition ....................................................................... 10

    I.3.2. Occlusion d'intercuspidie maximale : définition ............................................................. 14

    I.3.3. Occlusion de relation centrée et occlusion d'intercuspidie maximale : non coïncidence 14

    I.4. Occlusion de relation centrée ou occlusion d'intercuspidie maximale pour le traitement des

    patients? ....................................................................................................................................... 16

    I.4.1. Choix de l'occlusion d'intercuspidie maximale .............................................................. 17

    I.4.2. Choix de l'occlusion de relation centrée: motifs ............................................................. 17

    I.4.2.1. Le caractère inutilisable de l'occlusion d'intercuspidie maximale en prothèse fixée . 17

    I.4.2.2. La relation centrée comme référence intermaxillaire ................................................. 18

    I.4.2.3. La présence des contacts prématurés .......................................................................... 20

    I.4.2.4. Les mouvements induits par ces contacts ................................................................... 22

    I.4.3. Conclusion et discussion ................................................................................................. 23

    I.5. Les contacts prématurés : physiologiques ou pathogènes? ................................................... 24

    I.5.1. La capacité d'adaptation aux contacts prématurés........................................................... 24

    I.5.2. Le caractère pathogène des contacts prématurés ............................................................. 30

    I.5.2.1. En occlusion de relation centrée ................................................................................. 30

    I.5.2.2. En occlusion d'intercuspidie maximale ...................................................................... 38

    I.5.3. Conclusion ....................................................................................................................... 39

    I.6. Coronoplasties des points de contacts prématurés ou abstention? ........................................ 40

    I.6.1. Attitude thérapeutique des auteurs .................................................................................. 40

    I.6.1.1. Abstention ................................................................................................................... 40

    I.6.1.2. Coronoplastie des points de contacts prématurés ....................................................... 41

    I.6.1.2.1. Étudiés en occlusion de relation centrée............................................................... 41

    I.6.1.2.2. Étudiés en occlusion d'intercuspidie maximale .................................................... 46

    I.6.1.2.3. Conclusion ........................................................................................................... 48

    I.6.2. Protocole et techniques d'équilibration occlusale ........................................................... 48

    I.6.2.1. Obtention de la détente neuromusculaire ................................................................... 48

    I.6.2.2. Analyse de la position articulaire obtenue après la détente neuromusculaire ............ 55

    I.6.2.3. Analyse occlusale et techniques d'équilibration occlusale ....................................... 58

    I.6.2.3.1. En occlusion de relation centrée ........................................................................... 58

    I.6.2.3.2. En occlusion d'intercuspidie maximale ................................................................ 60

    I.7. Conclusion et discussion ....................................................................................................... 61

  • 6

    II. PROPOSITION DE PROTOCOLE CLINIQUE D'EQUILIBRATION OCCLUSALE ET D'UN

    PROTOCOLE D'ETUDE IN VITRO ................................................................................................ 64

    II.1. Matériel et méthode du protocole clinique d'équilibration occlusale mis au point par

    l'enseignant référent ..................................................................................................................... 64

    II.1.1. Examen clinique ............................................................................................................ 64

    II.1.1.1. Interrogatoire ([4]) .................................................................................................... 64

    II.1.1.2. Palpation musculaire ([8], [32], [44], [4]) ................................................................. 65

    II.1.1.3. Palpation et auscultation articulaires ([8], [32], [44], [4]) ........................................ 65

    II.1.1.3.1. Palpation articulaire ........................................................................................... 65

    II.1.1.3.2. Auscultation articulaire ....................................................................................... 66

    II.1.1.4. Étude de la cinématique mandibulaire ([8], [52], [4]) .............................................. 66

    II.1.1.5. Test de mobilisation de la mandibule ([4]) ............................................................... 67

    II.1.1.6. Examen dentaire ([8], [12], [4]) ................................................................................ 67

    II.1.1.7. Test de convergence oculaire ([25], [4]) ................................................................... 68

    II.1.1.8. Examen en position orthostatique ([25], [4]) ............................................................ 68

    II.1.2. Prise d'empreinte maxillaires et mandibulaire et coulée des modèles d'étude .............. 69

    II.1.3. Conception d'une orthèse de détente neuromusculaire .................................................. 69

    II.1.4. Pose et équilibrations de l'orthèse .................................................................................. 71

    II.1.4.1. Conditions du port de l'orthèse ................................................................................. 71

    II.1.4.2. Pose et conditions d'équilibration ............................................................................. 72

    II.1.4.3. Séances d'équilibration .............................................................................................. 73

    II.1.4.3.1. Eléments à noter à chaque rendez-vous d'équilibration ...................................... 73

    II.1.4.3.2. Chronologie des rendez-vous d'équilibration ...................................................... 74

    II.1.5. Analyses occlusales ........................................................................................................ 74

    II.1.6. Coronoplasties sur modèle des points de contacts prématurés ...................................... 75

    II.1.7. Report des coronoplasties en bouche ............................................................................. 76

    II.2. Matériel et méthode du protocole d'étude mis au point par l'enseignant référent ............... 76

    II.2.1. Analyse de la position articulaire initiale avant coronoplasties ..................................... 77

    II.2.2. Analyse de la position articulaire après coronoplasties ................................................ 78

    II.3. Résultats obtenus par l'enseignant référent après l'application du protocole clinique sur un

    échantillon de 23 patients ............................................................................................................ 79

    II.3.1. Présentation des résultats ............................................................................................... 79

    II.3.2. Analyse des résultats ...................................................................................................... 84

    II.4. Résultats personnels obtenus après l'application du protocole clinique sur un échantillon

    de 9 patients ................................................................................................................................. 84

    II.4.1. Présentation des résultats ............................................................................................... 84

    II.4.2. Analyse des résultats ...................................................................................................... 87

    II.5. Résultats personnels obtenus après l'application du protocole d'étude sur un échantillon de

    9 patients ...................................................................................................................................... 87

    II.5.1. Présentation des résultats ............................................................................................... 87

    II.5.2. Analyse des résultats .................................................................................................... 117

    II.6. Conclusion et discussion .................................................................................................... 117

    II.6.1. Conclusion ................................................................................................................... 117

    II.6.2. Discussion .................................................................................................................... 118

  • 7

    CONCLUSION ................................................................................................................................ 120

    ABREVIATIONS ............................................................................................................................ 123

    BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................................... 124

  • 8

    INTRODUCTION

    Lorsqu'il soigne un patient, le chirurgien-dentiste est constamment amené à cautionner une

    occlusion dans son traitement. Il se trouve confronté au choix de l'occlusion d'intercuspidie

    maximale ou de l'occlusion de relation centrée, parce qu'il est admis qu'elles ne coïncident pas sur la

    base d'une simple observation d'un auteur renommé, Ulf POSSELT, qui n'a pourtant jamais énoncé

    que cette non-coïncidence était physiologique.

    Ainsi dans la littérature, tous les auteurs partent du principe que physiologiquement ces deux

    occlusions ne coïncident pas. Néanmoins, un débat s'engage sur le choix de l'occlusion à cautionner

    pour traiter les patients: occlusion de relation centrée ou occlusion d'intercuspidie maximale? Une

    partie des auteurs estime que l'on peut cautionner l'occlusion d'intercuspidie maximale du patient,

    mais la majorité estime qu'il est préférable de placer les articulations temporo-mandibulaires du

    patient en position de relation centrée et de cautionner l'occlusion de relation centrée qui en dépend.

    Cependant, certains parmi les partisans de l'occlusion de relation centrée estiment qu'il est

    souhaitable qu'elle coïncide avec l'occlusion d'intercuspidie maximale, même si leur non-

    coïncidence est admise comme étant physiologique.

    Cette incohérence nous a poussés à mener dans la première partie de notre travail une revue

    de littérature visant à reprendre l'étude de ces deux occlusions, afin de déterminer si elles peuvent

    ou non coïncider et si cela est toutefois bénéfique.

    Dans notre deuxième partie, nous proposerons un protocole clinique et un protocole d'étude mis au

    point par notre enseignant référent, qui permettent d'obtenir la coïncidence de l'occlusion de relation

    centrée et d'intercuspidie maximale et d'en étudier le caractère bénéfique. Cet enseignant référent

    applique le protocole clinique depuis des années sur ses patients et nous analyserons les résultats

    qu'il en obtient. Enfin, nous appliquerons personnellement ce protocole clinique et le protocole

    d'étude sur un échantillon de patients, dans le but de constater par nous-mêmes si faire coïncider

    l'occlusion de relation centrée et d'intercuspidie maximale est bénéfique ou non.

  • 9

    I. REVUE DE LITTERATURE

    I.1. Introduction

    En 1952, POSSELT U. [39] publie un travail intitulé « Étude de la mobilité de la mandibule

    humaine », qui présente d'abord une revue de littérature sur le sujet, puis expose les expériences

    qu'il a menées sur 65 étudiants masculins en odontologie afin de mesurer l'amplitude des différents

    mouvements mandibulaires. Le but de notre travail n'est pas d'étudier la méthode employée par

    POSSELT, mais nous avons relevé un résultat : POSSELT déclare avoir mesuré sur 88% de ses

    patients que la relation centrée et l'intercuspidie maximale ne coïncidaient pas.

    En 1958, POSSELT U. [38] publie le diagramme qui résume l'ensemble des mouvements de la

    mandibule, issu des observations de ses patients. Il matérialise cette non-coïncidence de la relation

    centrée et de l'intercuspidie maximale : en effet, sur le schéma ci-dessous issu de cet article, la

    position 1 « position de contact en rétrusion », qui correspond à l'occlusion en relation centrée, ne

    coïncide pas avec la position 2 « position intercuspidienne », qui correspond à l'occlusion en

    intercuspidie maximale.

  • 10

    Une vingtaine d'années plus tard, SALOMON J.A. et coll. (1979) [46] ont réalisé une

    étude sur un nombre non précisé de patients, qui visait à enregistrer les mouvements mandibulaires.

    Pour cela, ils ont adapté les techniques de détection utilisées en médecine nucléaire. Une source

    radioactive et un capteur sont reliés au patient, qui est invité à décrire les mouvements fonctionnels

    d'ouverture et fermeture de la mandibule. Ce capteur enregistre la radioactivité détectée à chaque

    composante des mouvements. Il est relié à son autre extrémité à un ordinateur qui convertit ces

    enregistrements en courbes. Là encore, le but de notre travail n'est pas d'étudier la méthodologie

    utilisée par les auteurs ni le niveau de preuve discutable de l'étude, mais seulement de relever leurs

    conclusions: les courbes obtenues par cette expérimentation confirme l'exactitude du diagramme de

    POSSELT U..

    De ces articles, nous avons tiré ces constatations:

    La grande réputation de POSSELT U. et des études comme celle de SALOMON J.A. et coll. qui, des années après, valident son diagramme, ont permis d'ériger les observations

    de POSSELT U. en principes de normalité.

    Ces principes ont fait foi pendant plusieurs décennies et de simples constatations comme la différence entre l'occlusion de relation centrée et l'occlusion d'intercuspidie maximale

    chez 88% de ses patients ont été elles aussi établies en principes, alors que POSSELT U.

    n'a jamais déclaré que cette différence était physiologique.

    Ainsi, au travers de notre revue de littérature, nous nous proposons de reprendre l'étude de la

    coïncidence ou non de l'occlusion de relation centrée et de l'occlusion d'intercuspidie maximale.

    Nous commencerons par faire un bilan des définitions de chacune de ces deux occlusions. Puis nous

    étudierons si dans la littérature, ces deux occlusions coïncident ou non; si elles ne coïncident pas

    nous chercherons s'il existe un paramètre qui explique leur non coïncidence et s'il est possible et

    physiologiquement souhaitable de le supprimer.

    I.2. Réalisation de la revue de littérature Afin de présenter une revue de littérature pertinente, nous avons décidé de suivre les règles de l' « evidence-based dentistry ».

    Mais à la lecture des articles, notamment dans leurs parties « Matériel et Méthodes », nous avons

    découvert que la majorité ne correspondait pas à ces règles. Trouver des articles qui réunissaient à la

    fois une sélection randomisée des patients de l'étude, une taille et un nombre d'échantillons

    suffisants, un protocole et des variables testées pertinentes, et une méthode statistique fiable était

    extrêmement difficile.

    Nous avons alors décidé dans un premier temps de rassembler un grand nombre d'articles tirés de la

    base de données informatiques Pubmed et du catalogue de la Bibliothèque Inter-Universitaire de

    Médecine, et dans un deuxième temps de faire nos choix parmi ces articles afin de se rapprocher au

    maximum d'une étude de haut niveau de preuve.

    Pour déterminer nos critères de choix, nous avons étudié l'ouvrage de NORDENSTROM J. (2007)

    [33], qui définit quatre niveaux de preuves (A, B, C, D) à accorder aux études, selon le type mais

    aussi le mode de réalisation de l'étude.

  • 11

    Grade du

    niveau de

    preuve

    Signification Contexte expérimental

    A Fort niveau de preuve scientifique Preuve obtenue par méta-analyses, revues systématiques ou par des essais cliniques randomisés bien conçus.

    B Niveau de preuve modéré Preuve obtenue par des essais randomisés de conception contestable, par des études non randomisées (études de cohortes), par des études cas-contrôle, ou par des études transversales

    C Faible niveau de preuve Opinions d'experts, rapports de consensus, de cas, ou autres études descriptives

    D Absence de preuve scientifique Pas d'études répondant aux critères de qualité.

    Nous avons alors décidé d'éliminer toutes les études de grade D, de n'utiliser qu'au minimum des études de grade C, et de se concentrer sur celles de grade A et B.

    I.3. Occlusion de relation centrée et occlusion

    d'intercuspidie maximale

    I.3.1. Occlusion de relation centrée : définition

    L'occlusion de relation centrée est la position d'occlusion obtenue lorsque la mandibule est

    en relation centrée.

    Il est difficile de donner une unique définition de la relation centrée, étant donné l'absence de

    consensus et ce depuis plusieurs décennies.

    JASINEVICIUS T.R. et coll. (2000) [19] ont d'ailleurs réalisé une étude sur sept écoles

    dentaires américaines, visant à évaluer ce niveau de consensus. Un questionnaire proposant

    plusieurs définitions issues du glossaire des termes prothétiques a été envoyé à des facultés et à

    des étudiants de quatrième année, dans le département de prothèse, de dentisterie opératoire et

    générale. Les participants devaient choisir une définition parmi les six proposées. Le taux de retour

    a été de 85% pour les facultés et de 75% pour les étudiants. Les définitions proposées étaient les

    suivantes:

  • 12

    la première définition proposée par le glossaire des termes prothétiques en 1956, c'est à dire: « Relation maxillo-mandibulaire la plus reculée, lorsque les condyles sont dans la

    position la plus postérieure non contrainte dans les fosses glénoïdes à partir desquelles

    un mouvement latéral peut être mené, à un degré donné de séparation des mâchoires »

    la troisième définition proposée par le glossaire des termes prothétiques en 1968, c'est à dire: « Relation maxillo-mandibulaire physiologique la plus reculée pour et à partir de

    laquelle l'individu peut mener des mouvements latéraux. Cela peut exister à des degrés

    variables de séparation des mâchoires. »

    la cinquième définition proposée par le glossaire des termes prothétiques en 1994, c'est à dire: « Relation maxillo-mandibulaire dans laquelle les condyles s'articulent, par le biais de la plus fine partie avasculaire de leurs disques respectifs, avec le complexe dans la portion antéro-supérieure contre les parois des éminences articulaires. Cette position est indépendante des contacts dentaires. Cette position est cliniquement discernable quand la mandibule est dirigée supérieurement et antérieurement. Elle est restreinte à un mouvement de rotation pure autour d'un axe transversal horizontal. »

    la sixième définition proposée par le glossaire des termes prothétiques en 1999, c'est à dire: « Relation maxillo-mandibulaire quand les condyles sont dans la position la plus haute et la plus en arrière dans leurs fosses glénoïdes. Cette position peut être impossible à enregistrer en présence de dysfonctions du système masticatoire »

    la définition issue de la communication personnelle de ASH M.M. de 1993, notée en 1994 dans le glossaire des termes prothétiques, c'est à dire: « Relation maxillo-mandibulaire dans laquelle les condyles et le disque sont dans la position la plus médiane et la plus haute. Cette position a été difficile à définir anatomiquement, mais est déterminée cliniquement en évaluant quand la mâchoire est sur l'axe charnière terminal fixe (jusqu'à 25mm). C'est une relation maxillo-mandibulaire déterminée cliniquement lorsque les assemblages condyle-disque sont positionnés dans leur position la plus supérieure dans la fosse mandibulaire et contre la pente distale de l'éminence articulaire »

    la définition issue de la communication personnelle de RAMSFJORD S.P. de 1993, notée en 1994 dans le glossaire des termes prothétiques, c'est à dire « Une position cliniquement déterminée de la mandibule, plaçant les deux condyles dans leur position antérieure la plus haute. Elle peut être déterminée chez les patients sans douleur ou dérangement de l'articulation temporo-mandibulaire »

    Les résultats montrent un faible niveau de consensus, non seulement entre les différentes facultés et

    étudiants rattachés, mais aussi au sein des facultés entre les professeurs et les étudiants.

    les enseignants de la première école penchent pour la première définition proposée ci-dessus et leurs étudiants pour la cinquième

    les enseignants et les étudiants de la deuxième école penchent tous deux pour la troisième

  • 13

    les enseignants et les étudiants de la troisième école penchent tous deux pour la première

    les enseignants et les étudiants de la quatrième école penchent tous deux pour la troisième

    les enseignants et les étudiants de la cinquième école penchent tous deux pour la troisième

    les enseignants de la sixième école penchent pour une autre définition non citée et leurs étudiants pour la première

    les enseignants de la septième école penchent pour la troisième définition et leurs étudiants pour la cinquième.

    Par contre, il n'y a pas de différence statistique (utilisation du test du chi deux) relevée entre les

    spécialistes et non spécialistes de la prothèse dans le choix de leurs définitions.

    Au final, c'est la troisième définition décrite ci-dessus, c'est à dire la cinquième proposée par le glossaire des termes prothétiques en 1994, qui est la plus choisie mais le consensus est loin d'être établi.

    De même, TRUITT J. et coll. (2009) [49] ont publié une étude qui consistait à demander à

    73 stomatologistes et chirurgiens maxillo-faciaux, et à 64 orthodontistes de choisir une définition de

    la relation centrée parmi cinq définitions raccourcies provenant du glossaire des termes

    prothétiques.

    Les définitions proposées étaient « quand le(s) condyle(s)...

    sont dans leur position la plus postéro-supérieure dans leurs fosses »

    sont dans leur position la plus antéro-supérieure dans leur fosses »

    s'articulent par le biais de la plus fine partie avasculaire de leurs disques respectifs et avec le complexe, dans une position antéro-supérieure, avec les parois des éminences

    articulaires »

    est dans sa plus haute position sur la surface postérieure de leur éminence avasculaire »

    est dans sa position la plus supérieure sans contraintes »

    Les résultats mettent en évidence une réponse statistiquement différente (utilisation du test du chi

    deux et d'un intervalle de confiance de 95%) non seulement entre les chirurgiens et les

    orthodontistes, mais aussi au sein même des chirurgiens d'une part, et d'autre part des

    orthodontistes. La définition choisie par le plus de chirurgiens et d'orthodontistes est la première

    (78% des chirurgiens et 34% des orthodontistes) et celle choisie par le plus petit nombre est la

    troisième (3% pour les chirurgiens et les orthodontistes). Ceci laisse entendre qu'un consensus est

    loin d'exister à propos d'une définition de la relation centrée parmi les praticiens de ces différentes

    spécialités.

    Les résultats de cette étude qui montrent que la troisième définition, issue de la cinquième notée en

    1994 dans le glossaire des termes prothétiques, est la moins choisie va d'ailleurs à contrario des

    résultats de l'étude précédente qui décrivaient cette définition comme la plus choisie.

    Cette difficulté à trouver une définition unique de la relation centrée peut trouver une

    explication.

    En effet, MARGUELLES-BONNET R. et YUNG J.P. [27] expliquent dans leur livre le concept

  • 14

    de relation centrée. « C'est à l'origine une notion clinique correspondant à un besoin thérapeutique »

    face à un patient présentant des dysfonctions oro-faciales ou nécessitant un traitement prothétique et

    la création ou recréation d'une fonction occlusale. Cette notion clinique la définit comme étant

    « une relation de référence », qu'on pense obtenir lorsque le système neuromusculaire qui anime la

    mandibule est amené dans des conditions d'équilibre physiologique. La relation centrée est donc

    « une relation fonctionnelle », qu'on pourrait qualifier de « physio-déterminée », qui assure

    un état de relaxation neuromusculaire, garante de sa possibilité d'enregistrement.

    La relation centrée correspond à un rapport mandibulo-crânien se référant à l'articulation temporo-

    mandibulaire, qui lui permet de respecter

    son anatomie, c'est à dire la coaptation des pièces articulaires, dans une position haute et reculée

    sa dynamique, c'est à dire son rôle de point d'appui dans ces conditions anatomiques

    sa physiologie, c'est à dire la stabilité articulaire pour le minimum de dépense d'énergie

    sa cinématique, c'est à dire la rotation « pure » sur un petit arc d'ouverture, seul mouvement permis par l'articulation temporo-mandibulaire en relation centrée, nous

    permettant une référence stable.

    Ainsi pour eux, il s'agit d'une « position physiologique confortable pour toute personne exempte de

    pathologie méniscale et présentant une bonne coordination neuromusculaire », qui « concilie les

    nécessités biologiques et les impératifs mécaniques d'un traitement prothétique ». Par contre, ils

    précisent bien que parce que « le concept de relation centrée doit être basé sur ce que l'on peut saisir

    aujourd'hui du fonctionnement de l'appareil manducateur, […] c'est une conception évolutive et

    pragmatique ».

    Il devient donc évident que la définition de la relation centrée est difficile à cadrer dans un contexte

    anatomique: en effet, la relation centrée provient au départ d'une notion clinique, et non

    anatomique, d'une relation de référence physiologique, issue d'un besoin thérapeutique. Cette

    définition ne peut être unique, puisque la notion clinique de relation centrée évolue avec les

    connaissances scientifiques.

    Citons à titre d'exemples quelques définitions chronologiques proposées par des auteurs:

    MARGUELLES-BONNET R. et YUNG J.P. [27] citent la définition proposée par LEE R.L. en

    1969, avec laquelle ils sont en accord, qui définit l'occlusion de relation centrée comme « une

    position sur le trajet de fermeture correspondant à des condyles situés bilatéralement dans leur

    rapport le plus crânien, en contact intime avec le ménisque dans la cavité glénoïde, lorsqu'aucune

    force latérale n'est exercée ».

    Pour CRAWFORD S.D. (1999) [9], « la relation centrée décrit la position des condyles dans leurs fosses glénoïdes quand ils sont dans leurs positions la plus antéro-supérieure contre l'éminence, avec les disques articulaires correctement interposés ».

    En 2007, DAWSON P.E. [11] décrit la relation centrée comme « la relation de la mandibule avec le maxillaire quand les deux ensembles condyle-disque sont parfaitement alignés dans la position la plus supérieure contre les éminences articulaires, indépendamment de la dimension verticale ou de la position des dents. »

    La définition que nous choisissons de retenir dans notre travail est celle proposée

  • 15

    par le Collège National d'Occlusodontologie [6] en 2001, définition qui a fait suite à un consensus. Cette décision nous paraît plus cohérente que de choisir la définition proposée par un

    auteur.

    Ainsi, lorsque dans la suite de notre travail nous parlerons de relation centrée, il s'agira de « la

    position condylienne de référence la plus haute, réalisant une coaptation bilatérale condylo-disco-temporale, simultanée et transversalement stabilisée, suggérée et obtenue par contrôle non forcé, réitérative dans un temps donné et pour une posture corporelle donnée et enregistrable à partir d'un mouvement de rotation mandibulaire sans contact dentaire. ».

  • 16

    I.3.2. Occlusion d'intercuspidie maximale : définition

    La définition de l'occlusion d'intercuspidie maximale, également appelée intercuspidation

    maximale, est beaucoup moins sujette à controverse que celle de la relation centrée. L'intercuspidie

    maximale est définie communément comme le rapport d'engrènement dentaire se caractérisant par

    le maximum de contacts inter-arcades. Ce rapport est indépendant de la situation des condyles dans

    les fosses mandibulaires et fixe la position occlusale de déglutition.

    Citons quelques auteurs à titre d'exemples:

    RINCHUSE D.J. et coll. (2006) [43] citent la définition de l'intercuspidie maximale comme

    étant « la complète intercuspidie des dents opposées indépendamment de la position condylienne ».

    Cela dit, il n'est pas précisé que cette position n'engendre pas de contraintes articulaires.

    MARGUELLES-BONNET R. et YUNG J.P. [27] en parlent comme d' «un rapport

    particulier d'occlusion assurant le maximum de contacts interdentaires », l'accent étant mis sur les

    rapports morphologiques des surfaces occlusales.

    Ils rappellent qu'il ne faut pas confondre l'intercuspidie maximale avec l'occlusion habituelle du

    patient ou l'occlusion de convenance. L'occlusion habituelle du patient est « la position retrouvée

    spontanément par le patient »; l'occlusion de convenance est une « occlusion sans contrainte […]

    qui dépend de l'activité neuromusculaire et de la morphologie occlusale. C'est une occlusion

    d'adaptation à une situation donnée […], l'accent étant mis sur la notion subjective de confort et de

    stabilité perçue par le patient ».

    MARGUELLES-BONNET R. et YUNG J.P. [27] citent également Fabien TAIEB pour sa thèse

    de deuxième cycle de 1982, intitulée « Étude comparative sur 30 adultes, des occlusions dentaires

    de convenance, d'intercuspidation maximale et d'engrènement des modèles ». TAIEB F. parvient en

    effet à la conclusion que si l'intercuspidie maximale est souvent assimilée à l'engrènement des

    modèles, cette assimilation comporte une marge d'erreur: en effet, « l'engrènement des

    modèles est plus serré » que l'intercuspidie maximale, c'est à dire que le nombre de contacts

    occlusaux en engrènement des modèles est plus important que celui en intercuspidie

    maximale.

    I.3.3. Occlusion de relation centrée et occlusion d'intercuspidie maximale : non

    coïncidence

    Nous venons de définir l'occlusion de relation centrée et l'occlusion d'intercuspidie

    maximale: il est évident que ces deux définitions sont nettement différentes. L'occlusion de relation

    centrée correspond à une occlusion définie cliniquement, qui dépend d'un rapport articulaire

    physiologique. L'occlusion d'intercuspidie maximale correspond à un état de fermeture buccale qui

    dépend des rapports dento-dentaires et fixe la position de déglutition.

    Cette différence des définitions va dans le sens des constatations de POSSELT U. (1952) [39] qui,

    rappelons le, déclare que chez 88% de ses patients, l'occlusion de relation centrée et l'occlusion

    d'intercuspidie maximale ne coïncident pas.

  • 17

    Dans la lignée de POSSELT U., de nombreux auteurs notent dans leurs articles cette non-

    coïncidence entre ces deux occlusions, qui caractérise le plus grand nombre de patients.

    Citons-en quelques exemples:

    HÜE O. (1994) [16] note que « dans le sens antéro-postérieur, la coïncidence entre la

    position de relation centrée et l'occlusion d'intercuspidie maximale ne s'établit que dans 15% de la

    population»

    ORTHLIEB J.D. et coll. (1996) [36] expliquent que le décalage entre l'occlusion de relation centrée et l'occlusion d' intercuspidie maximale est “ généralement de 3 à 4 dixièmes de millimètres dans le plan strictement horizontal, mais il semble qu'il puisse varier physiologiquement de 0 à 2 millimètres. ”. Ceci est à souligner, parce que les auteurs déclarent qu'il semble physiologique que ces deux positions ne coïncident pas.

    CORDRAY F.E. (2006) [7] quant à lui, écrit qu'en denture naturelle, il existe une différence entre les relations tridimensionnelles interarcades lorsque les arcades sont placées en occlusion d'intercuspidie maximale et en occlusion de relation centrée. On observe aussi un déplacement condylien entre les positions condyliennes lorsque l'occlusion est celle d'intercuspidie maximale ou celle de relation centrée.

    OLTRAMARI P.V. et coll. (2007) [35] déclarent que 90% des patients présentent une

    déviation allant jusqu'à 1,75 mm entre les positions condyliennes en occlusion de relation centrée et

    en occlusion d'intercuspidie maximale.

    ROZENCWEIG D. [45],lui, estime que personne ne présente une occlusion de relation centrée correspondant à l'occlusion d'intercuspidie maximum.

    Présentons maintenant une étude publiée en 1995 par UTT T.W. et coll. (1995) [51]. Ils ont comparé sur un échantillon de 107 patients avant traitement orthodontique les positions condyliennes en trois dimensions entre l'occlusion de relation centrée et l'occlusion d'intercuspidie maximale. Les différents opérateurs ont utilisé pour cela le même protocole concernant d'une part les montages des modèles maxillaires à l'aide de l'arc facial SAM sur l'articulateur SAM, et d'autre part concernant les enregistrements des occlusions de relation centrée et d'intercuspidie maximale qui ont permis les montages des modèles mandibulaires. Les auteurs ont également calibré le protocole d'utilisation du Mandibular Position Indicator (M.P.I.) pour repérer les positions condyliennes de ces patients. Les mesures ont été faites à 0,25 mm près. Afin de vérifier la reproductibilité inter-opérateurs des manipulations, les auteurs ont sélectionné au hasard 15 patients sur les 107 initiaux sur lesquels ils ont répété les mesures données par le M.P.I., afin de vérifier la fiabilité de leurs mesures. Deux semaines après, ils ont à nouveau refait leurs mesures sur les 15 patients sélectionnés. Sur les 60 enregistrements articulaires effectués, seulement 22 mesures différaient de

  • 18

    0,25 mm des positions initiales et 2 de 0,5 mm, ce qui ne montre aucune différence significative. Les auteurs ont donc validé leur protocole d'utilisation du M.P.I..

  • 19

    Les résultats montrent que:

    0,9% des patients avaient une différence non mesurable entre les deux positions condyliennes, dans les trois plans de l'espace

    5,6% des patients présentaient un déplacement transverse entre les deux positions condyliennes, sans déplacement mesurable dans le plan sagittal

    18,7% des patients présentaient un déplacement supéro-inférieur et antéro-postérieur entre les deux positions condyliennes d'au moins 2mm, du côté droit et/ou du côté gauche.

    15,9% présentaient un déplacement transverse entre les deux positions condyliennes d'au moins 0,5 mm

    le test statistique Student's n'a pas révélé de différence entre les 31 patients en classe I d'Angle et les 72 patients en classe II d'Angle en ce qui concerne la quantité ou la direction du déplacement condylien : la classe d'Angle n'a donc pas d'impact.

    Les auteurs en ont conclu qu'il n'y avait pas de coïncidence entre l'occlusion en relation centrée et en intercuspidie maximale. Notons que cette étude est correctement menée: en effet, le nombre de sujets est assez important, la méthodologie, bien que non décrite en détail est calibrée, la reproductibilité inter-opérateurs est validée et les outils statistiques bien utilisés. Par contre, la sélection initiale des sujets se fait au sein d'un groupe particulier de patients nécessitant un traitement orthodontique: le critère de randomisation de cette sélection n'est donc pas respecté. De même, la reproductibilité intra-opérateur n'est pas estimée. Nous pouvons néanmoins accorder un bon niveau de preuve à cette étude. En conclusion, nous pouvons dire que les faits énoncés par les précédents auteurs sont en accord avec les résultats obtenus par une étude de bon niveau de preuve. Il semble donc cohérent de conclure que, dans la littérature, l'occlusion de relation centrée et l'occlusion d'intercuspidie maximale ne coïncident pas ou presque jamais. Dans la logique de notre démarche, nous devons chercher si les auteurs mentionnent un paramètre qui empêche cette coïncidence. Pour ce faire, nous allons étudier quelle est parmi ces deux occlusions celle choisie par les auteurs dans leurs écrits et si les raisons de ce choix peuvent nous guider vers ce paramètre.

    I.4. Occlusion de relation centrée ou occlusion

    d'intercuspidie maximale pour le traitement des

    patients?

    Lors de nos recherches bibliographiques, nous avons été confrontés à un grand nombre d'articles

    d'occlusodontie. Nous avons constaté que très peu d'auteurs choisissent de mener leurs études en

    occlusion d'intercuspidie maximale, et que pour la plupart ils ne justifient pas ce choix. La majorité

    des auteurs préfèrent utiliser l'occlusion de relation centrée pour traiter leurs patients et nous avons

  • 20

    dégagé quatre raisons expliquant ce choix.

  • 21

    I.4.1. Choix de l'occlusion d'intercuspidie maximale

    Citons quelques auteurs qui choisissent d'utiliser l'occlusion d'intercuspidie maximale pour

    traiter leurs patients.

    PLANAS P. a décrit une méthode de meulages sélectifs pratiqués en réhabilitation neuro-occlusale,

    après analyse de l'occlusion centrique, c'est à dire de l'occlusion d'intercuspidie maximale du

    patient. MARTIN E. (2000) [28] présente dans son article le modus operandi de cette technique,

    qui vise à libérer et équilibrer les mouvements de latéralités mandibulaires, pour un meilleur

    développement du complexe stomatognathique. Notre but n'est pas de discuter la technique

    employée, mais uniquement de citer deux auteurs qui analysent et traitent leurs patients en

    occlusion d'intercuspidie maximale, sans pour autant expliquer ce choix.

    IKEDA T. et coll. (1998) [18] et KERSTEIN R.B. (2008) [21] identifient certains contacts qu'ils

    nomment « prématurés » en occlusion d'intercuspidie maximale. Comme ils entraînent des

    douleurs, les auteurs décident de diminuer ces contacts par des meulages, jusqu'à la suppression de

    la douleur. Là encore, il ne s'agit pas d'évaluer dans cette partie de notre travail le bien-fondé de leur

    diagnostic et traitement, nous y reviendrons par la suite, mais de noter que ces auteurs ont choisi

    d'analyser ces contacts et de pratiquer un ajustement occlusal en occlusion d'intercuspidie

    maximale, sans justifier le choix de cette occlusion pour mener leur étude.

    Par ailleurs, RINCHUSE D.J. et coll. [43] ont publié un article en 2006, dans lequel ils se montrent

    très critiques vis à vis du concept de relation centrée. Ils déclarent qu'il n'y a pas une mais plusieurs

    positions physiologiques de l'articulation temporo-mandibulaire et qu'il y a une tolérance dans les

    plans horizontal, vertical et transverse. Par conséquent, ils considèrent qu'on peut choisir l'occlusion

    d'intercuspidie maximale, guidée par les rapports dento-dentaires et non articulaires, tant pour

    réaliser des études que pour traiter les patients. Nous développerons leurs arguments ultérieurement.

    Ce que nous retenons dans l'immédiat, c'est que ces auteurs choisissent l'intercuspidie maximale et

    justifient leur choix.

    I.4.2. Choix de l'occlusion de relation centrée: motifs

    I.4.2.1. Le caractère inutilisable de l'occlusion d'intercuspidie maximale en prothèse

    fixée

    Lorsque nous sommes confrontés à une situation nécessitant le choix de l'occlusion, il s'agit

    en général de restaurations à réaliser, en particulier dans le cadre d'un traitement prothétique par

    prothèse fixée. D'où l'importance du caractère utilisable de l'occlusion choisie, notamment en

    prothèse fixée.

    MARGUELLES-BONNET R. et YUNG J.P. [27] se sont ainsi posés cette question: « peut-on

    analyser une occlusion et réaliser des restaurations en utilisant comme référence l'intercuspidation

    maximale ou doit-on chercher un autre système de référence? »

  • 22

    Leur réponse à cette question se résume en trois arguments:

    L'enregistrement de l'occlusion d'intercuspidie maximale est difficile. En effet, MARGUELLES-BONNET R. et YUNG J.P. [27] expliquent que le

    maximum de contacts exige un certain effort des muscles élévateurs et que sous cet

    angle l'occlusion d'intercuspidie maximale est une position d'occlusion forcée. En

    fonction de la pression exercée, le nombre de contacts interdentaires varie suivant la

    réponse du parodonte de chaque dent. Ainsi, l'appréciation de l'intensité de la pression

    exercée rend difficile l'enregistrement de l'occlusion d'intercuspidie maximale.

    L'occlusion d'intercuspidie maximale disparaît lors des préparations des dents en prothèse fixée, puisqu'il est obligatoire de détruire les surfaces occlusales afin de laisser

    la place nécessaire au matériau de reconstruction prothétique

    L'occlusion d'intercuspidie maximale n'est pas réellement utilisée par le laboratoire mais assimilée à l'engrènement des modèles, qui prend en compte les rapports entre les

    surfaces occlusales mais non les modifications des contacts en fonction du degré de

    pression musculaire; par conséquent cette approximation rend presque obligatoire les

    ajustements occlusaux des prothèses lors de l'insertion.

    Ainsi, les auteurs concluent que l'occlusion d'intercuspidie maximale ne peut être utilisée de

    manière fiable en prothèse fixée et qu'un autre système de référence est nécessaire, lié à un besoin

    thérapeutique. Cette notion de « besoin thérapeutique » se retrouve dans leur définition de la

    relation centrée: « C'est à l'origine une notion clinique correspondant à un besoin thérapeutique

    [qui] s'impose chaque fois qu'il est nécessaire de créer ou de recréer une fonction occlusale ». C'est

    donc cette occlusion de relation centrée qui pour ces auteurs doit être choisie pour le traitement des

    patients.

    Ce que nous devons retenir de cette partie de notre travail, c'est le choix justifié d'éviter l'occlusion

    d'intercuspidie maximale, et donc d'utiliser une occlusion de référence, c'est à dire l'occlusion de

    relation centrée.

    Nous en venons alors au deuxième motif du choix de l'occlusion de relation centrée: la notion de

    référence intermaxillaire.

    I.4.2.2. La relation centrée comme référence intermaxillaire

    Pour de nombreux auteurs, la relation centrée est une position articulaire de référence, permettant d'obtenir une occlusion de référence.

    Pour CORDRAY F.E. (2006) [7] « la relation centrée est anatomiquement déterminée, répétable et reproductible. Elle est la plus stable position de la mandibule, du point de vue orthopédique et musculo-squelettique. C'est le point de référence le plus fiable pour enregistrer précisément les relations entre maxillaire et mandibule. » Il considère sa détermination comme un pré-requis pour l'analyse des relations interarcades, de la position condylienne et des relations squelettiques. L'auteur considère donc que la relation centrée est une relation intermaxillaire de référence. Tempérons néanmoins ses propos sur le caractère anatomiquement déterminée de la relation centrée: nous avons déjà discuté de la difficulté de donner un cadre anatomique à

  • 23

    sa définition.

  • 24

    OLTRAMARI P.V. et coll. (2007) [35] ont étudié l'importance des aspects occlusaux dans l'achèvement d'un traitement orthodontique sur 20 femmes, en classe II d'Angle initiale. Les auteurs précisent que les patientes ont été diagnostiquées en relation centrée, étant donné que « malgré la grande variété des définitions, la relation centrée est considérée comme la situation intermaxillaire où les condyles sont une position stable du point de vue orthopédique ». Pour eux, il est évident que le diagnostic et le plan de traitement orthodontique doivent être basés sur l'examen des patients en relation centrée. En effet, ils expliquent que l'occlusion d'intercuspidie maximale et celle de relation centrée ne coïncident presque jamais et qu'environ 90% des patients présentent une déviation allant jusqu'à 1,75mm entre les positions condyliennes de ces deux occlusions; cette déviation altérant les relations interarcades dans le plan sagittal, ils leur semble logique de choisir la position de référence intermaxillaire. Ils traitent donc leurs patientes en respectant les six clés permettant d'aboutir à une occlusion statique et dynamique normale : relation centrée, dimension verticale, guide latéral et antérieur, contacts occlusaux simultanés et direction contrôlée des forces appliquées sur les dents. A la fin du traitement, les patientes ont porté une contention pendant deux ans et les auteurs étudient la stabilité des paramètres occlusaux, trois ans après le retrait de la contention. Lors de leur examen clinique qui utilise un papier à articulé, ils constatent que les contacts occlusaux au niveau molaire sont satisfaisants en intensité, répartition et simultanéité des côtés droit et gauche; le surplomb, le guide antérieur, le schéma occlusal choisi et la dimension verticale sont restés corrects. Les auteurs concluent donc sur la stabilité du traitement orthodontique lorsqu'il est mené en relation centrée. Nous pouvons cependant noter que la période de trois ans entre le retrait de la contention et l'étude de la stabilité de l'occlusion choisie est un peu courte. Cette étude gagnerait en fiabilité à être reconduite après une période plus longue. DAWSON P.E. (1979) [10] a publié un article sur les effets de la relation centrée sur l'harmonie occluso-musculaire. Il y explique qu'une dysharmonie entre la position des condyles en relation centrée et les rapports occlusaux en intercuspidie maximale conduit souvent à des douleurs dans la région de l'articulation temporo-mandibulaire et à des tensions musculaires. Les relations intermaxillaires étant le point de départ des contacts occlusaux et la relation centrée la position intermaxillaire la plus stable, il s'agit de la déterminer précisément et de la vérifier. Une fois obtenue sur le patient, il sera possible de supprimer les douleurs articulaires et musculaires. Là encore, l'auteur choisit cette relation intermaxillaire de relation centrée pour traiter ses patients. En effet, étant donné que l'occlusion est guidée non par les dents mais par les muscles et l'articulation temporo-mandibulaire (A.T.M.), il est possible de s'affranchir des rapports dentaires en intercuspidie maximale en choisissant la position condylienne de référence, la relation centrée, qui permet de supprimer les symptômes douloureux des patients.

  • 25

    Nous pouvons cependant noter que si la position d'occlusion dépend de l'A.T.M. et des muscles du complexe masticatoire lors de la fermeture et jusqu'au premier contact dento-dentaire, c'est ensuite les relations dento-dentaires qui guident l'occlusion jusqu'à la fermeture complète des arcades. Si cette occlusion d'intercuspidie maximale ne coïncide pas avec l'occlusion de relation centrée, on peut se demander si, entre ce premier contact dento-dentaire et la fermeture complète, l'intercuspidie maximale n'induit pas des mouvement articulaires qui déplaceraient l'A.T.M. de cette position dite idéale de relation centrée. Car rappelons le, nous avons mentionné dans la partie de définition de l'occlusion d'intercuspidie maximale que si elle est indépendante de l'A.T.M., il n'est nulle part énoncé qu'elle n'induit pas de contraintes articulaires. Nous reviendrons ultérieurement sur cette discussion.

    A ces auteurs, nous pouvons ajouter ceux qui, considérant que la relation centrée est une relation intermaxillaire de référence, commencent par placer leurs patients en relation centrée avant

    de réaliser les soins de leurs études.

    A titre d'exemple, citons BARKER D.K. (2004) [3] qui a mené une étude sur 60 patients visant à déterminer le rôle des interférences occlusales sur l'existence des signes et symptômes des dysfonctions temporo-mandibulaires. Les auteurs expliquent que la relation centrée est obtenue lorsque les articulations temporo-mandibulaires peuvent être mobilisées librement sans signes cliniques de tensions ou d'inconfort signalé par le patient. Par conséquent, ils considèrent que cette position condylienne doit être choisie. Dans une première phase de traitement, ils l'obtiennent par le port de gouttière occlusale puis s'autorisent à réaliser la deuxième phase de leur plan de traitement. Nous reviendrons ultérieurement sur cet article, et notamment sur la possibilité d'obtenir la relation centrée par le port de gouttière occlusale.

    I.4.2.3. La présence des contacts prématurés

    Certains auteurs parlent de « contacts prématurés » qu'il faudrait éviter, le plus souvent sans

    prendre la peine ni de les définir ni de justifier cette volonté de s'en affranchir.

    Reprenons l'étude de BARKER D.K. (2004) [3] que nous venons de citer. Cet auteur

    explique que si les gouttières occlusales permettent de réduire les symptômes de tensions

    articulaires et musculaires par l'obtention de la relation centrée, ce qui a été mis en évidence sur

    95% de leurs patients, c'est parce qu'elles permettent l'élimination de l'influence des contacts

    prématurés. Mais les auteurs ne définissent pas ces contacts prématurés ni en quoi ils sont liés à des

    symptômes douloureux.

    Commençons donc par définir ces contacts prématurés.

    En 1984, MARGUELLES-BONNET R. et YUNG J.P. [27] décrivent le contact prématuré comme

    étant « un contact interdentaire qui se produit avant l'intercuspidation lors du mouvement de

    fermeture ». Les auteurs précisent que plusieurs contacts prématurés peuvent coexister, simultanés

  • 26

    ou successifs.

    C'est cette définition que nous retiendrons dans toute la suite de notre travail. De cette définition,

    nous pouvons retenir que les contacts prématurés ne sont pas identifiables en intercuspidie

    maximale, puisqu'elle les intègre. La question est de savoir si on peut les identifier en relation

    centrée.

  • 27

    CORDRAY F.E. (2006) [7] nous propose une étude menée sur 596 patients

    asymptomatiques, suivis pour un traitement orthodontique de routine. L'article porte sur l'analyse

    tridimensionnelle de leurs modèles, montés sur articulateur en occlusion de relation centrée après

    déprogrammation neuromusculaire.

    Cet article très riche sera détaillé partiellement dans la partie suivante de notre travail, puis

    davantage dans une autre. Dans l'immédiat, nous mentionnons uniquement les résultats concernant

    la présence des contacts prématurés.

    L'auteur a étudié les contacts occlusaux de ses patients en occlusion de relation centrée.

    Pour cela, il a monté sur l'articulateur semi-ajustable Panadent les 596 modèles maxillaires à l'aide

    de l'arc facial Panadent. Il a enregistré les relations intermaxillaires de relation centrée en utilisant la

    technique d'enregistrement modifiée de ROTH R.H., qui a permis le montage des 596 modèles

    mandibulaires sur cet articulateur.

    Cette technique est décrite dans l'article: elle consiste à enregistrer l'occlusion de relation centrée

    immédiatement après une technique de détente neuromusculaire. Le praticien place une première

    cire de double épaisseur au niveau du secteur incisivo-canin, le patient ferme la bouche sans

    manipulation forcée de la mandibule par le praticien et sans percer la cire, et les contacts incisivo-

    canins sont enregistrés; le praticien place ensuite deux cires de simple épaisseur au niveau des

    secteurs postérieurs et repositionne la première cire au niveau du secteur antérieur, le patient ferme

    la bouche doucement jusqu'à retrouver les contacts antérieurs dans la cire puis fermement jusqu'à

    marquer dans les cires postérieures les contacts postérieurs sans percer les cires.

    L'auteur a ensuite marqué à l'aide du papier à articulé de type GHM de chez Hanel le premier

    contact occlusal en occlusion de relation centrée; celui-ci empêchait d'atteindre l'occlusion

    d'intercuspidie maximale. Il a donc identifié ces contacts comme des contacts prématurés, selon la

    définition précédente.

    Les résultats montrent que chez 94% des patients de son étude, le premier contact prématuré était

    situé sur les dent les plus postérieures.

    Ce résultat est confirmé par OLES R.D. (1990) [34], qui précise que 90% des 80 patients

    patients d'âge moyen 22 ans qu'il a inclus dans son étude présentent des contacts prématurés en

    relation centrée.

    De ces deux articles, nous pouvons conclure que les contacts prématurés peuvent être

    identifiés en occlusion de relation centrée et qu'ils concernent la presque totalité des patients, les

    nombres de patients inclus, 596 et 80, étant suffisamment représentatifs.

    Il est utile de faire une parenthèse: il ne faut pas confondre les contacts prématurés qui

    concernent les relations occlusales statiques et les interférences occlusales, qui se définissent

    comme « des contacts dentaires modifiant le trajet de la mandibule au cours des mouvements

    excentrés » selon MARGUELLES-BONNET R. et YUNG J.P. [27]. Il serait intéressant d'étudier

    également l'influence de la présence de ces interférences occlusales, mais notre travail se limitera

    aux contacts prématurés exclusivement.

    Revenons à la présence de ces contacts prématurés: l'utilisation de l'occlusion de relation

    centrée permet de s'affranchir de ces contacts, puisqu'elle ne les intègre pas: ceci semble être un

    facteur du choix de l'occlusion de relation centrée pour le traitement des patients.

    Voyons ce que ces contacts provoquent dans le système stomatognathique.

  • 28

    I.4.2.4. Les mouvements induits par ces contacts

    MARGUELLES-BONNET R. et YUNG J.P. [27] complètent leur définition du contact

    prématuré en notant qu' « à partir de ce contact que la neuromusculature n'a pas pu éviter,

    l'intercuspidie est atteinte par glissement interdentaire ». Cette définition décrit la notion clinique de

    contact déflecteur. Mais le terme « contact prématuré » étant plus communément utilisé, c'est lui

    que nous retiendrons.

    En accord avec eux, DAWSON P.E. (1979) [10] écrit qu'un contact prématuré peut souvent

    faire glisser les dents et dévier la mandibule.

    De même, OLES R.D. (1990) [34] décrit ce mouvement induit par les contacts prématurés

    qu'il nomme le « slide-in-centric » (glissement en centrée). Il explique que lorsque la mandibule est

    placée en relation centrée, avec des contacts légers sur les dents, et qu'on demande au patient de

    serrer les dents, la mandibule glissera antérieurement, verticalement et peut être latéralement de

    l'occlusion de relation centrée à l'occlusion d'intercuspidie maximale: c'est la manifestation clinique

    du contact prématuré.

    Revenons à l'article de CORDRAY F.E. (2006) [7]. Cet article est intéressant parce qu'il fait

    le lien entre ce mouvement de glissement interdentaire induit par les contacts prématurés et un

    mouvement condylien tridimensionnel.

    En accord avec les auteurs qu'il cite, SEARS V.H. (1952) et OKESON J.P. (1993), il rapporte qu'un

    contact prématuré postérieur contraint le condyle à un déplacement puisque la mandibule est

    obligée de pivoter pour passer du contact prématuré à la position d'intercuspidie maximale.

    Cela dit, le glissement apparent au niveau occlusal ne reflète pas précisément la nature

    tridimensionnelle du déplacement condylien. Il cite à l'appui:

    HODGE L.C. Jr. et MAHAN P.E. qui ont montré en 1967 que seulement une petite partie de la composante horizontale du glissement interdentaire entre occlusion de

    relation centrée et occlusion d'intercuspidie maximale est du au déplacement de

    translation horizontale des condyles.

    ROSNER D. qui en 1982 a abouti à la même conclusion au niveau du plan sagittal.

    ROSNER D. et GOLDBERG G.F. qui en 1986 ont également conclu qu'il était difficile de déterminer le mouvement condylien par l'observation et la mesure du changement de

    la position des milieux inter-incisifs entre l'occlusion de relation centrée et

    d'intercuspidie maximale: la façon dont le mouvement occlusal est transmis aux

    condyles est trop complexe, et peut se faire sous la forme combinée d'inclinaison ou de

    mouvements de quantité variable d'une part de rotations verticale et horizontale, d'autre

    part de translations médiale ou distale, associés à un degré de liberté variable de

    l'articulation temporo-mandibulaire.

    Cependant, il semble que le déplacement condylien dans le sens vertical résulte de contacts

    prématurés postérieurs. L'auteur cite à l'appui un certain nombre d'auteurs qui ont mis en évidence

    cette observation: GIRARDOT R.A. (1987 et 2001), SLAVICEK R.J.(1988), WOOD D.P. et

    KORNE P.H. (1992), WOOD D.P. et ELLIOTT R.W. (1994), SHILDKRAUT M. et coll. (1994),

    UTT T.W. et coll. (1995) [51] (cf. I.3.3), CRAWFORD S.D. (1999), KARL P.J. et FOLEY T.F. (1999), et enfin HIDAKA O. et coll. (2002).

  • 29

    Nous n'avons pas exploité toute l'étude de l'auteur, nous y reviendrons ultérieurement, mais de cette

    partie nous pouvons conclure que:

    les contacts prématurés induisent un glissement interdentaire repérable au niveau occlusal, qui provoque un déplacement condylien dans les trois sens de l'espace

    le mouvement induit par les contacts prématurés ne nous donne pas la direction du déplacement condylien, mais les contacts prématurés postérieurs semblent provoquer un

    déplacement vertical des condyles

    Ainsi, nous avons mis en évidence un quatrième motif qui explique pourquoi les auteurs choisissent préférentiellement l'occlusion de relation centrée à celle d'intercuspidie maximale pour traiter leurs patients: les contacts prématurés provoque un glissement occlusal et un déplacement condylien.

    I.4.3. Conclusion et discussion

    Cette quatrième partie avait pour but de répondre à la question « occlusion de relation centrée ou occlusion d'intercuspidie maximale pour le traitement des patients? ». Il est clair

    maintenant que l'occlusion la plus choisie dans la littérature est celle de relation centrée, car elle est

    une occlusion de référence dont l'utilisation n'est pas perturbée par la présence des contacts

    prématurés et les mouvements qu'ils induisent.

    Mais ce que nous devons surtout comprendre, c'est que nous avons trouvé un paramètre qui explique que l'occlusion de relation centrée et d'intercuspidie maximale ne coïncident pas chez la majorité des patients. En effet, il suffit de laisser glisser la mandibule selon le mouvement induit par les contacts prématurés en occlusion de relation centrée pour atteindre l'occlusion d'intercuspidie maximale. Ce paramètre explique les résultats obtenus par POSSELT U.: chez 88% de ses patients, l'occlusion de relation centrée et d'intercuspidie maximale ne coïncident pas. Cela dit, il n'est pas énoncé que cette non-coïncidence est physiologique, contrairement à ce qu'on a fait dire à POSSELT U..

    D'ailleurs, MARGUELLES-BONNET R. et YUNG J.P. (1984) [27] tentent de répondre à

    la question: « L'intercuspidation maximale peut-elle se situer sur l'arc de relation centrée? ».

    Selon eux, « pour une dimension verticale d'occlusion acceptable, il n'y a pas d'incompatibilité

    structurale ni fonctionnelle: l'intercuspidation maximale en relation centrée est une position précise

    de la mandibule, point de départ et d'arrivée de tous les mouvements fonctionnels.

    Ceci tend à dire que la non-coïncidence des occlusions de relation centrée et d'intercuspidie

    maximale n'est pas physiologique, et qu'elle peut être envisageable.

    De même, ALVAREZ M.C. et coll. (2009) [2] nous rapportent que pour plusieurs

    praticiens, une occlusion idéale serait celle qui ne comporterait ni points de contacts prématurés ni

    mouvements induits lors de la fermeture, et que dans ce cas, l'occlusion de relation centrée et

    d'intercuspidie maximale coïncident. Ceci est cohérent, étant donné que le mouvement induit par les

    contacts prématurés a pour objectif de faire passer la mandibule d'une position à l'autre.

  • 30

  • 31

    De son côté, YAFFE A. et coll. (1996) [54] parlent d'une occlusion qui serait stable, si les

    forces pouvaient être distribuées simultanément à la fermeture sur le nombre maximum de dents en

    contact, sans prématurités entre l'occlusion de relation centrée et d'intercuspidie maximale.

    Ceci revient à souhaiter la coïncidence des deux occlusions pour obtenir une occlusion stable avec

    le maximum de points de contact, coïncidence que l'on sait maintenant pouvoir être obtenue par

    l'élimination des contacts prématurés. Il s'agit donc par leur élimination d'amener une augmentation

    des contacts en occlusion de relation centrée jusqu'à en obtenir le maximum pour obtenir une

    occlusion stable: c'est à dire d'avoir une occlusion d'intercuspidie maximale en position de relation

    centrée.

    Ainsi, pour ces auteurs, cette coïncidence serait possible et souhaitable, à condition de

    supprimer ces contacts prématurés et les mouvements qu'ils induisent.

    Mais avant de penser à leur suppression, il nous semble logique de déterminer si les contacts

    prématurés sont physiologiques ou pathogènes.

    I.5. Les contacts prématurés : physiologiques ou

    pathogènes?

    De manière logique, dans notre quête scientifique de preuves concernant la physiologie ou la

    pathogénie des contacts prématurés, nous allons être au cœur du débat concernant le choix de

    l'occlusion d'intercuspidie maximale ou de relation centrée. Car si nous avons vu que la majorité des

    auteurs prend part pour l'utilisation de l'occlusion de relation centrée pour le traitement des patients,

    certains restent partisans de celle d'intercuspidie maximale. Nous ne pourrons faire abstraction de ce

    débat dans notre travail.

    I.5.1. La capacité d'adaptation aux contacts prématurés

    WALLACE B. (1961) [53] nous explique que le terme adaptation est fréquemment utilisé, en référence aux changements physiologiques et morphologiques au sein d'un organisme. L'organisme s'adapte pour répondre au mieux aux nouvelles conditions environnementales. Selon MARGUELLES-BONNET R. et YUNG J.P. (1984) [27], « un certain niveau d'adaptation de la fonction aux structures constitue la normalité ». L'adaptation se définit comme une « altération de la fonction ou de la structure pour favoriser la survie dans un environnement perturbé ». Lorsque les capacités d'adaptation du système sont dépassées, nous pénétrons dans la pathologie. Les auteurs exposent alors les capacités d'adaptation du complexe stomato-gnathique.

  • 32

    Le complexe stomato-gnathique comporte trois éléments:

    L'articulation temporo-mandibulaire, qui possède une capacité de remodelage de ses surfaces articulaires; le disque articulaire ne présente pas cette capacité et peut subir des

    dommages irréversibles.

    L'adaptation de l'articulation est précédée par une hyperactivité musculaire du système

    neuromusculaire, puis elle se modifie par apposition/résorption. Le système

    neuromusculaire revient au calme, si l'adaptation structurelle est suffisante (MC

    NAMARA J.A. (1975) [29]).

    Le système neuromusculaire, qui possède une capacité d'adaptation structurelle par le biais du tissu musculaire (PETROVIC A. et coll. (1973) [37]). Celui-ci interagit en permanence avec les tissus durs de la face (MC NAMARA J.A. (1981) [30]).

    Les dents, qui ne possèdent pas de capacité adaptative et subissent des altérations irréversibles, et leurs tissus de soutien, qui s'adaptent à ces altérations.

    Un certain nombre d'auteurs estime que ces capacités d'adaptation décrites sont suffisantes pour se

    passer de l'utilisation de la relation centrée pour traiter les patients. Par conséquent, ils décident de

    se servir de l'occlusion d'intercuspidie maximale, considèrent par là que les contacts prématurés

    sont physiologiques et que le complexe stomato-gnathique s'y adapte. Nous allons développer leurs

    arguments.

    RINCHUSE D.J. et coll. (2006) [43] que nous avons cités précédemment (cf. partie I.4.1.)

    se montrent très critiques vis à vis du concept de relation centrée.

    En effet, ils considèrent qu'il est inutile de rechercher une position condylienne unique, surtout si

    elle place l'articulation temporo-mandibulaire (A.T.M.) dans une position forcée, étant donné qu'elle

    tolère des déplacements dans les plans horizontal, vertical et transverse. Il est donc superflu de

    chercher la coïncidence entre les positions condyliennes en relation centrée et en intercuspidie

    maximale, et donc la coïncidence des deux occlusions correspondantes, sachant que de toute façon

    les patients, après un traitement orthodontique qui a fait coïncider les deux positions, continuent à

    utiliser l'occlusion d'intercuspidie maximale (voir critiques ci-dessous).

    Par ailleurs pour eux, l'utilisation de l'articulateur pour discerner les divergences entre les

    occlusions de relation centrée et d'intercuspidie maximale chez les patients traités pour un problème

    orthodontique ne présente aucun intérêt. En effet trop d'erreurs s'accumulent, entre l'enregistrement

    de l'occlusion de relation centrée et le réglage de l'articulateur (voir les critiques formulées ci-

    dessous), et nous conduisent à penser à tort qu'il y a une vraie divergence entre la relation centrée et

    l'intercuspidie maximale. Cette divergence est en réalité minime et peut être due à la santé

    stomatognathique des patients. De toute façon, l'articulateur ne permet pas de placer l'A.T.M. dans

    une position déterminée. Ils citent d'ailleurs LINDAUER S.J. et coll., qui les rejoint sur l'idée que

    l'articulateur n'est pas un bon instrument pour répliquer les mouvements précis des patients et

    identifier les interférences occlusales (ici, le terme interférence occlusale est utilisé de manière

    générique et regroupe les contacts prématurés et les interférences occlusales précédemment définis).

    Enfin, les auteurs déclarent que la relation centrée, concept éronné et arbitraire, a provoqué plus

  • 33

    d'éliminations de mouvements induits que vingt ans d'étude des concepts gnathologiques, tout cela

    sur la base fausse qu'un condyle distalé provoque un déplacement du disque articulaire. Aujourd'hui,

    il est dit qu'une position antérieure du condyle est préférable, par conséquent que l'intercuspidie

    maximale serait physiologique: en effet cette dernière réduit les mouvements induits (voir critiques

    ci-dessous). Quoiqu'il en soit, les points de contact prématurés ne provoquent pas de pathologies au

    niveau des A.T.M., puisqu'ils sont retrouvés chez des patients asymptomatiques aussi bien que chez

    des non asymptomatiques.

    Ainsi, nous pouvons conclure que pour ces auteurs, les contacts prématurés ne sont pas considérés

    comme pathogènes.

    Nous pouvons néanmoins émettre quelques critiques sur le raisonnement de ces auteurs.

    Ils déclarent qu'après un traitement orthodontique qui a fait coïncider l'occlusion de relation centrée

    et d'intercuspidie maximale, les patients continuent à utiliser l'occlusion d'intercuspidie maximale.

    Ils prennent ceci pour un argument justifiant qu'il est inutile de créer cette coïncidence, alors qu'il

    est logique que les patients après traitement utilisent l'intercuspidie maximale, celle-ci ayant été

    équilibrée en relation centrée.

    Ensuite, ils estiment que trop d'erreurs s'accumulent entre l'enregistrement de la relation centrée et

    le réglage de l'articulateur. Mais à aucun moment ces auteurs ne mentionnent la pratique d'une

    détente neuromusculaire visant à obtenir la position articulaire de relation centrée et garantissant la

    reproductibilité de l'enregistrement de l'occlusion de relation centrée. Cette reproductibilité permet

    de limiter les erreurs que mentionnent les auteurs et d'exploiter correctement l'articulateur. Nous

    reviendrons sur ce point dans la partie suivante de notre travail (cf. I.5.2.1.).

    Et enfin, ils notent que l'occlusion d'intercuspidie maximale est physiologique étant donné qu'elle

    réduit les mouvements induits. Au vu des explications données dans la partie précédente, il est

    évident qu'elle réduit ces mouvements, étant donné qu'elle intègre les contacts prématurés qui les

    induisent. Ces mouvements se situent dans le champ situé entre l'occlusion de relation centrée et

    d'intercuspidie maximale, et non en occlusion d'intercuspidie maximale qui les rend non

    détectables, donc « réduits ».

    TÜRP J.C. et coll. (2008) [50] à leur tour critiquent les anciens concepts occlusaux et les

    simplifient, refusant de placer l'A.T.M. dans la position forcée qu'impose la relation centrée. C'est

    donc l'occlusion d'intercuspidie maximale qui doit être utilisée pour traiter les patients. La notion de

    position « forcée » sera discutée en partie I.5.2.1..

    Les auteurs évoquent la reconnaissance du potentiel adaptatif du système masticatoire, notamment

    de l'A.T.M.. Il faut garder en tête la continuelle variabilité intra et inter individus; par conséquent si

    les patients présentent des variations par rapport aux principes occlusaux idéaux, il n'est pas

    nécessaire de les traiter et elles ne sont pas forcément associées à des maladies parodontales ou

    articulaires.

    D'ailleurs, les auteurs citent l'étude randomisée en double aveugle menée par LE BELL Y. et coll.

    (2002) [24], qui ont montré que les sujets sans historique de dysfonctions temporo-mandibulaires

    montraient une bonne adaptation aux interférences occlusales artificielles.

    Nous avons étudié de plus près cet article.

    LE BELL Y. et coll. (2002) [24] mènent une étude sur deux populations de patients randomisées, à

    savoir d'une part sur 31 étudiantes volontaires de l'école d'infirmière sans historique de dysfonctions

  • 34

    temporo-mandibulaires, et d'autre part sur 21 femmes envoyées dans un centre hospitalo-

    universitaire pour leur dysfonctions temporo-mandibulaires.

    Leur étude cherche à évaluer si de faibles interférences occlusales de taille standardisée introduites

    en occlusion de relation centrée et du côté non travaillant provoquent des signes et symptômes

    signalant une mauvaise adaptation à ces interférences dans les deux populations.

    Afin de lever le biais dû à la connaissance de la création de ces interférences par les populations

    étudiées et par les opérateurs, les auteurs ont décidé qu'un certain nombre de patients au sein de

    chacune des populations étudiées recevraient réellement la création de ces interférences et un

    certain nombre un traitement placebo, sans que ni les patients ni les opérateurs ne sachent le

    traitement reçu. Il s'agit bien d'une étude en double aveugle.

    Les interférences artificielles ont été supprimées au bout de deux semaines par un opérateur qui

    n'évaluait pas les signes et symptômes.

    Les résultats montrent que dans la population des patients sans historique de dysfonctions temporo-

    mandibulaires, les signes et symptômes n'étaient pas statistiquement différents (utilisation du test

    chi-square) selon qu'ils avaient reçu les interférences artificielles ou le traitement placebo,

    contrairement à la population des patients avec historique de dysfonctions. Les patients sans

    historique semblent donc s'adapter à ces interférences artificielles, mais non les patients avec

    historique.

    Cette étude est correctement menée en regard de la randomisation des sujets inclus, de son caractère

    en double aveugle, et de la fiabilité de l'outil statistique utilisé. Mais cette étude comporte deux

    biais importants: d'une part, la taille des interférences artificielles est faible et les auteurs pensent

    même que cela explique les résultats d'adaptation obtenus au sein des patients sans historique de

    dysfonctions; et d'autre part, avec des interférences faibles, une période de deux semaines d'étude

    n'est pas suffisante pour tirer des conclusions, surtout sur un débat aussi controversé. Nous ne

    pouvons donc pas accorder un bon niveau de preuve à cette étude.

    Reprenons l'article de TÜRP J.C. et coll. (2008) [50] qui citait LE BELL Y. et coll. (2002)

    [24]. Ils citaient cette étude dans le but de prouver que les patients s'adaptaient aux interférences

    occlusales. Le terme « interférence occlusale » est ici un terme générique incluant les contacts

    prématurés. Mais nous venons de mettre en évidence que les résultats de cette étude ne peuvent être

    pris comme arguments, étant donné son faible niveau de preuve.

    TÜRP J.C. et coll. (2008) [50] citent également une autre étude randomisée en double aveugle

    réalisée par MICHELOTTI A. et coll. (2005) [31] qui ont démontré que les interférences

    occlusales expérimentales n'augmentent pas l'activité habituelle des muscles masticatoires et ne

    créent pas de signes et/ou symptômes de dysfonctions temporo-mandibulaires.

    Là encore, nous avons étudié de plus près cette étude.

    MICHELOTTI A. et coll. (2005) [31] ont en effet réalisé une étude randomisée sur 11 patients en

    double aveugle.

    Leur étude cherche à évaluer si de faibles interférences occlusales (terme générique) introduites en

    occlusion d'intercuspidie maximale provoquent une augmentation de l'activité musculaire du

    masséter, évaluée par des enregistrements électromyographiques. Les patients recevaient au hasard

    pendant une semaine soit une interférence artificielle, soit un traitement placebo, qui une fois retiré

  • 35

    au bout de 8 jours était remplacé par le traitement qu'ils n'avaient pas reçu la première semaine, mis

    en place durant une semaine. Ni les patients ni les opérateurs ne connaissaient les traitements reçus,

    et l'opérateur qui plaçait les traitements ne figurait pas parmi les opérateurs qui évaluaient l'activité

    musculaire.

    Les enregistrements électromyographiques étaient réalisés de 10h à 19h les 3 jours consécutifs qui

    précédaient un quelconque traitement, puis 5 jours sur les 8 pendant lesquels le premier traitement

    était reçu et 5 jours sur les 8 pendant lesquels le deuxième était reçu, et enfin les 3 jours consécutifs

    suivant l'arrêt des traitements.

    Les résultats montrent qu'il n'y a pas d'augmentation significative de l'activité musculaire du

    masséter liée à la présence d'interférences artificielles, et que celles ci n'ont pas créé de signes ou

    symptômes de dysfonctions.

    Mais cette étude, quoique randomisée en double aveugle, ne peut être considérée comme de bon

    niveau de preuve, étant donné qu'à la fois le nombre constituant l'échantillon (11 patients), la

    période de port de l'interférence occlusale artificielle (8 jours) et la période d'enregistrements

    électromyographiques (3 jours avant le port de l'interférence artificielle , 5 jours pendant, 3 jours

    après) sont trop faibles pour pouvoir en tirer des conclusions.

    Notons en plus que dans cette étude le terme « interférence occlusale » est utilisé comme un terme

    générique incluant les interférences occlusales proprement dites et les contacts prématurés, étant

    donné que les auteurs ne donnent pas les définitions indispensables pour spécifier s'ils parlent des

    uns ou des autres. Mais cette étude de l'influence des interférences occlusales artificielles en

    occlusion d'intercuspidie maximale ne pouvait de toute façon être prise en compte comme une

    preuve de l'adaptation du complexe manducateur aux contacts prématurés, étant donné que ces

    contacts ne peuvent être analysés qu'en occlusion de relation centrée.

    Revenons à l'article de TÜRP J.C. et coll. (2008) [50] qui citait MICHELOTTI A. et coll.

    (2005) [31]. Ils citaient cette étude dans le but de prouver que les patients s'adaptaient aux

    interférences occlusales, étant donné qu'elles n'induisaient ni une augmentation de l'activité

    musculaire du masséter ni des signes et symptômes de dysfonctions temporo-mandibulaires. Mais

    nous venons de mettre en évidence que les résultats de cette étude ne peuvent être pris comme

    arguments, étant donné son faible niveau de preuve.

    Ainsi, TÜRP J.C. et coll. (2008) [50] estiment avoir prouvé que les patients peuvent s'adapter aux

    contacts prématurés qui ne sont donc pas considérés comme pathogènes, mais d'un point de vue

    scientifique nous ne pouvons pas accepter ses arguments.

    Enfin, OLES R.D. (1990) [34] présente un article dont nous allons tenter de dégager les

    grandes lignes. Nous avons déjà cité son travail pour sa définition correcte des mouvements induits

    par les contacts prématurés, qu'il nomme « slide-in-centric » (cf. partie I.4.2.3. et I.4.2.4.).

    Dans un premier temps, il rappelle que, par définition, les contacts prématurés et les interférences

    occlusales sont des interférences morphologiques communes: 90% des patients issus d'un groupe de

    80 adultes, de 22 ans d'âge moyen, présentent des contacts prématurés en occlusion de relation

    centrée, qui provoquent un glissement dentaire asymétrique: le « slide-in-centric ».

    Puis il écrit qu'un « slide » ou « glissement » symétrique, facile, largement horizontal réduit les

  • 36

    effets d'un déséquilibre de la balance musculaire et diminue la probabilité d'effets traumatiques sur

    les A.T.M. et les structures associées.

    Ainsi pour lui, les contacts prématurés et les mouvements asymétriques qu'ils induisent sont

    physiologiques, et les patients s'y adaptent bien. Ils s'adaptent également aux glissements

    symétriques, qui assurent des contacts bilatéraux: il ne s'agit alors plus de contacts prématurés et on

    peut concevoir que ces glissements symétriques ne sont pas pathogènes.

    Dans un deuxième temps, il note que les contacts prématurés peuvent devenir préoccupants car,

    associés au stress, ils peuvent produire une activité para-fonctionnelle dans le champ situé entre

    l'intercuspidie maximale et la relation centrée, provoquant des effets défavorables sur les tissus

    mous et durs: