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Université Lumière Lyon 2 Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ? Mémoire pour le master professionnel Management du Secteur Public : Collectivités et Partenaires Soutenu par Sylvie FREY-GAUTIER Le 6 septembre 2007 JURY : Anne BLANC-BOGE Maître de conférences de sciences de Gestion à l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon Président du jury, Directeur de mémoire, Pascal FORTOUL Directeur Général Adjoint du Pays Voironnais Maître de stage Norbert HEKIMIAN Consultant, Maître de conférences associé à l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon

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Université Lumière Lyon 2

Le manager territorial comme levier deperformance de l’organisation ?

Mémoire pour le master professionnel Management du Secteur Public : Collectivités et PartenairesSoutenu par

Sylvie FREY-GAUTIERLe 6 septembre 2007

JURY : Anne BLANC-BOGE Maître de conférences de sciences de Gestion à l’Institut d’EtudesPolitiques de Lyon Président du jury, Directeur de mémoire, Pascal FORTOUL Directeur GénéralAdjoint du Pays Voironnais Maître de stage Norbert HEKIMIAN Consultant, Maître de conférencesassocié à l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon

Table des matièresRemerciements . . 4INTRODUCTION . . 5PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION . . 13

I - UNE FONCTION ET DES PRATIQUES EN CONSTANTE EVOLUTION . . 131. Quel est l’Environnement professionnel du cadre territorial ? . . 132. La nature des compétences attendues au regard d’une fonction en pleinemutation . . 203. Les pratiques managériales : méthodes et outils de gestion . . 264. La culture de résultats se substitue progressivement à une culture de moyens . . 32

II – A QUELLES DIFFICULTES UN CADRE DOIT IL FAIRE FACE ? . . 371. Le système politique et administratif . . 372- Les limites en termes de gestion des ressources humaines . . 423. Les limites dues au manque de formation en management . . 48

PARTIE 2 : LE MANAGER TERRITORIAL EST- IL EN MESURE DE DEVELOPPER LARICHESSE HUMAINE ? . . 54

I. Piloter la performance au sein du secteur public local . . 541. Pilotage et évaluation des performances . . 542. L’évaluation des performances individuelles et collectives . . 63

II - Mettre en oeuvre une communication efficace . . 671. Quel est le sens du terme communication et quelles en sont les bases ? . . 682. Comment construire une communication efficace ? . . 71

III. Construire l’amélioration en créant de la valeur . . 761. Le leader comme catalyseur d’énergie, pourvoyeur de sens et d’adhésion autourd’une vision collective . . 762. La création d’un climat propice à la valorisation des compétences et àl’implication des acteurs . . 80

CONCLUSION GENERALE . . 88BIBLIOGRAPHIE . . 91DOCUMENTATION . . 92SITES INTERNET . . 94NORMES JURIDIQUES . . 95SCHEMAS . . 96ANNEXES . . 98

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

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RemerciementsJe dois des remerciements particuliers à Madame Anne BLANC-BOGE, Maître de conférences deSciences de Gestion à L’Institut d’Etudes Politiques de Lyon, pour son soutien sans failles tout aulong de mes deux années de formation continue.

J’adresse aussi mes remerciements à Monsieur Pascal FORTOUL Directeur Général Adjointdu Pays Voironnais et à Monsieur Norbert HEKIMIAN, Consultant et Maître de conférencesassocié à L’Institut d’Etudes Politiques de Lyon pour la qualité de leurs enseignements, ainsi qu’àMonsieur Daniel DONZEL Directeur des Ressources Humaines à Cran-Gevrier pour ses précieuxconseils.

Je témoigne toute ma reconnaissance à l’ensemble des Cadres qui ont bien voulu m’accorderdu temps et qui m’ont parlé de leur métier avec sincérité : Mesdames, Béatrice IMHOFF, JocelyneLUCET, Marie-Paule FAYOLLE, Annie HERITIER et, Messieurs, Gérard BERRODIER,Frédéric BROCARD, Jean-Luc POULET, Thierry RASPAIL, Dominique PRÊTE, StéphaneAUBERTHIER

Je voudrais exprimer enfin toute ma gratitude à Frédéric CASTOLDI Cadre dirigeant, pourle temps qu’il m’a consacré, et qui, sans jamais se mettre en avant, m’a donné envie d’exercer cemétier et de progresser.

INTRODUCTION

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INTRODUCTION

Les deux dernières décennies ont été marquées par la montée en puissance des réformesau sein de l’administration publique. Les gouvernements successifs ont eu la mêmepréoccupation consistant à améliorer la performance de l’action publique afin de réagir auxgraves critiques portées sur le système classique de l’administration bureaucratique et ainsimaîtriser la dépense publique.

En l’espèce, le pilotage par la performance représente le levier le plus puissant de laréforme de l’Etat qui a pour ambition de passer d’une logique de moyens à une logiquede résultats. Cet objectif, a conduit les gouvernants à concevoir différemment les politiquespubliques en transférant les compétences de l’Etat à d’autres structures, les collectivitéslocales, dotées d’une autonomie juridique, financière et de moyens en personnel. Ladécentralisation, l’optimisation des moyens, l’attente toujours plus forte des usagers sontdonc autant de défis à relever pour les trois fonctions publiques qui s’attachent à initier etconduire le changement dans leurs organisations en s’appuyant sur de nouvelles méthodesde management, le plus souvent issues du secteur privé.

La culture de résultat place, en premier lieu la nécessité d’avoir une véritable gestiondes ressources humaines, qui, à l’intérieur du secteur public à toujours été très décriée.De ce fait, elle constitue le chantier le plus important à mettre en œuvre d’autant qu’ellereprésente « la clé de voûte » de la modernisation de la fonction publique devenue vitaleaujourd’hui au regard des dernières statistiques. En effet, comptant cinq millions d’agentsau total, la fonction publique emploie un cinquième de la population et représente 44 %1

du budget de l’Etat. Cependant, l’évolution des effectifs ne progresse pas de la mêmemanière dans les trois fonctions publiques. La croissance de l’emploi repose sur celle de lafonction publique territoriale qui enregistre 31% à elle seule des effectifs, soit 1,8 millionsd’agents. 55% des emplois publics ont été crées entre 1984 et 20042. Ces premièresdonnées chiffrées permettent de comprendre rapidement les enjeux à atteindre d’un point devue économique. En effet, comparées à l’Etat, les collectivités locales sont actuellement trèspeu endettées. La dette des administrations publiques3 représente 10% de la dette publiquetotale contre 78% pour l’Etat. Néanmoins, Les collectivités sont complètement concernéespar la gestion de la dette publique car l’Etat finance 37% de leurs recettes. L’enjeu nationalest simple à déterminer. Afin de sortir le pays de son endettement progressif, l’Etat doitimpérativement travailler de concert avec les instances locales.

La progression des frais de personnel, poste budgétaire majeur des communes, maissous peu, des régions et des départements (transfert des techniciens et ouvriers deservices) impacte fortement les budgets de fonctionnement. Les transferts de compétencesde l’Etat vers les collectivités territoriales ne sont pas totalement compensés et grèvent leursbudgets. Les collectivités perdent ainsi en autonomie financière car les dotations de l’Etatse stabilisent. Dès lors, une culture de gestion s’impose de plus en plus pour les collectivitésqui doivent faire mieux avec moins de moyens.

1 Rapport site Minefi « solidarité et performance » Pierre Richard - décembre 20062 La documentation française/dossiers/fonction publique/évolution effectifs 21/08/20063 Rapport site Minefi « Solidarité et performance » Pierre Richard – décembre 2006

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En conséquence, il est essentiel d’innover, afin d’assurer une réelle gestion desressources humaines, premier facteur de performance et de conférer aux agents et auxcadres, autonomie et responsabilité. Nous comprendrons, que seule une organisation moinsrigide, plus ouverte au changement et capable de professionnaliser ses agents sera enmesure d’assurer la qualité des services publics et donc d’accéder à un certain niveau deperformance, ce thème représentant désormais la priorité des organisations qu’elles soientprivées ou publiques. « La performance est la capacité à atteindre un résultat attendu avecdes ressources identifiées, «pour le secteur public elle consiste en la réalisation de la qualitévoulue au juste coût4 ».

Peter Drucker5, dans son ouvrage « à propos du management », soutient que laperformance est avant tout externe à l’organisation, « Le résultat d’une entreprise est unclient satisfait. Le client d’un hôpital est un malade guéri. Le résultat d’une école est unétudiant qui a appris quelque chose et qui l’applique dans sa vie professionnelle dix ansplus tard. A l’intérieur d’une entreprise, il n’y a que des centres de coût. Les résultats sontà l’extérieur6 ». La performance renvoie en premier lieu à la finalité de l’organisation.

Pour les collectivités locales, la performance, consiste à améliorer la qualité desservices publics, maîtriser les coûts et respecter les délais. Ces organisations deviennenttrès attentives à la performance de leurs actions afin de répondre aux exigences croissantesdes citoyens en termes d’utilisation des fonds publics. A l’instar de l’Etat avec la miseen place de la LOLF7, elles tentent d’introduire une culture nouvelle, celle du résultatpour gagner en qualité, en efficacité et en efficience : « La qualité constitue l’ensembledes caractéristiques d’une entité lui conférant l’aptitude à satisfaire des besoins expriméset implicites, l’efficacité constitue un rapport entre les objectifs visés et les résultatseffectivement atteints et l’efficience représente un rapport entre les résultats obtenuset les moyens consentis8». Ainsi, les marges de manœuvre des collectivités reposentpour l’essentiel sur ces trois notions qui caractérisent la qualité du management publicet particulièrement, la qualité du management des ressources humaines. Pour ce faire,elles développent des méthodes et outils d’analyse de gestion comme les diagnosticset le contrôle de gestion interne qui leur permet d’identifier leurs dysfonctionnements etd’évaluer correctement leurs résultats. Le contrôle de gestion ne se limite pas à l’aspectcomptable, mais il représente avant tout une démarche managériale. Nous retiendronsla définition donnée par Olivier Demeestère dans son ouvrage, le contrôle de gestiondans le secteur public : « Le contrôle de gestion est une démarche permettant àune organisation de clarifier ses objectifs de performance et d’en piloter la réalisationprogressive, en assurant la convergence des actions engagées par les différentes entitésqui la composent ». Les méthodes et les outils utilisés tels que les tableaux de bord,les bilans d’activité, la comptabilité analytique, l’évaluation du personnel, le pilotage deprojet apportent un éclairage aux différents acteurs et particulièrement aux cadres en quêted’évaluation de résultats. A ce titre, le contrôle de gestion les aide à orienter et suivreleurs actions, notamment celles de leurs collaborateurs en pilotant leurs performances.L’utilisation des outils RH telle que l’évaluation individuelle permet aux cadres d’apprécier«la valeur professionnelle » de leurs collaborateurs en leur fixant des objectifs mesurables et

4 Evaluer la qualité et la performance publique» France Qualité Publique - La documentation française5 Peter DRUCKER né en 1909 Théoricien de l’école Néoclassique6 Serge HUTEAU « Le management public territorial » Editions PAPYRUS7 Loi organique relative aux lois de finances du premier août 20018 «Evaluer la qualité et la performance publique» France Qualité Publique - La documentation française

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accessibles sur le plan individuel. L’évaluation permet de les responsabiliser, de les motiveret de les impliquer plus fortement.

La ressource humaine représentant l’unique ressource vivante de l’organisation,créatrice de valeur, nous comprendrons que sa gestion est en conséquence primordiale.C’est sur ce point précis que l’organisation publique est en attente de compétences. Lecadre doit être en mesure de manager la ressource humaine, de la valoriser. Il joue unrôle moteur en termes de développement des compétences en repérant les potentielshumains en encourageant l’initiative et les idées d’amélioration. Nous le verrons au coursde l’étude, le cadre peut faire effet de levier sur la performance humaine en activantles énergies humaines bien qu’il soit quelquefois limité par des problématiques d’ordreculturelle, politique et financière.

La fonction publique territoriale, forte de sa diversité est considérée comme la plusdynamique et la plus attrayante actuellement. Malgré tout, la gestion des ressourceshumaines reste une problématique constante dans la mesure où la situation financière estencore bien inégale d’une collectivité à l’autre, nonobstant les transferts de moyens et lapéréquation financière. Le législateur de 1982 a fait le choix d’une véritable fonction publiqueterritoriale fondée sur la logique de la fonction publique d’Etat. Ainsi, les nouveaux préceptesissus de la décentralisation, et notamment, le principe de « libre administration » ontpermis aux collectivités locales de progresser considérablement. Cependant, l’univers de lafonction publique locale, empreint de règles et de coutumes, difficiles à réformer constitue unensemble complexe à l’intérieur duquel s’efforcent d’évoluer les différents acteurs. En effet,la rigidité du statut, le mode organisationnel, la nécessaire maîtrise des coûts budgétairesajoutée à l’exigence accrue des usagers et des élus limitent l’autonomie des collectivitésnonobstant les principes fondateurs des lois décentralisatrices et viennent à l’encontre d’unegestion autonome et performante.

Face à ce constat, les collectivités tentent d’atteindre les objectifs locaux inhérentsaux compétences qui leurs sont dévolues par la loi. Leurs missions sont relativementcomplexes et consistent en tout premier lieu à satisfaire « l’intérêt général 9». Cette notionreprésentant une valeur essentielle pour l’administration, il convient de l’appréhender, ladéfinition donnée par Jacques Chevallier, prise dans l’ouvrage de Serge Huteau « lemanagement public territorial » permet de la délimiter, « L’intérêt général est le conceptcentral autour duquel se structure traditionnellement l’idéologie administrative : placée ducôté de l’Etat, l’administration participe par projection de sa rationalité, garantissant à la foisle total « désintéressement » des fonctionnaires et leur aptitude à tenir la balance égale entreles divers intérêts sociaux, l’intérêt général apparaît comme un mythe indispensable pourétablir la spécificité de l’institution administrative, ancrer sa légitimité sur des fondementssolides, assurer sa cohésion interne, obtenir l’adhésion des administrés ».

L’intérêt général se décline en plusieurs principes relatifs aux relations avec l’usageret au service public : l’égalité d’accès des usagers aux services publics, la continuité duservice public correspondant au fonctionnement régulier des services et enfin l’adaptationdes services publics aux évolutions technologiques et sociales. Ce sont sur ces valeursfondamentales que repose l’objectif des collectivités locales et c’est en cela que participele cadre territorial en termes de pilotage d’une organisation ou d’un service. Il convientdésormais de déterminer la notion de cadre, nous retiendrons celle donnée par le BureauInternational du Travail qui stipule, « un cadre est une personne qui a terminé unenseignement et une formation professionnelle de niveau supérieur ou qui possède une

9 Jacques CHEVALLIER « La gestion publique à l’heure de la banalisation » Revue Française de Gestion n°115 septembre,octobre 1997

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expérience reconnue équivalente, dans un domaine scientifique, technique ou administratifet qui exerce en qualité de salarié des fonctions à caractère intellectuel prédominantcomportant l’application à un haut degré des facultés de jugement et d’initiative et impliquantun niveau relativement élevé de responsabilités. Cette notion englobe également toutepersonne répondant aux caractéristiques ci-dessus évoquées qui détient, par délégationde l’employeur et sous son autorité, la responsabilité de prévoir, diriger contrôler etcoordonner les activités d’une entreprise ou d’une organisation, avec le pouvoir decommandement correspondant, à l’exclusion des cadres dirigeants ayant une largedélégation de l’employeur10».

Le statut de la fonction publique territoriale fait référence à l’emploi, mais pas auxfonctions. La notion de cadre territorial n’est pas expressément définie, néanmoins, certainséléments du cadre d’emplois permettent d’apporter un éclairage. Le cadre territorial cumuledeux métiers dans ses fonctions, un métier technique, par exemple juriste ou ingénieur etun métier de manager, le cadre est, dans cette hypothèse, responsable d’une organisation,de moyens financiers, de personnel requérant des compétences spécifiques. Ses missionsconsistent à impulser et réguler son environnement, à produire de l’énergie pour donnerou redonner une stabilité au système en rappelant constamment les contraintes. Pris entredeux forces : les objectifs des élus et les procédures administratives, ils doivent avant toutêtre capables de s’adapter et de gérer les équilibres. En ce sens, la seule expertise ne suffitplus, le cadre doit apprendre à décider alors qu’il n’a pas l’expertise, mais surtout à oubliersa propre expertise afin d’appréhender le système dans sa globalité et en comprendre lesdifférentes dimensions et en premier lieu, connaître les valeurs de la collectivité. Pour autant,la bonne connaissance d’une organisation ne saurait être suffisante, un cadre doit compterégalement et surtout sur sa capacité à déceler les structures informelles, la place desdifférents acteurs et leurs jeux de pouvoirs au sein de celle-ci. A cette fin, la compréhensionmécanique du système est une première étape, mais il est nécessaire ensuite, de visionnerles interactions, les réseaux d’influence et leurs conséquences sur l’organisation formelle.Eu égard à la complexité de la fonction, piloter une zone d’activités et une équipe représenteun véritable sacerdoce pour le cadre qui ne parvient pas à lâcher prise en s’appropriant lesnouveaux concepts du management.

Nous l’aurons compris, pour réussir dans sa mission et atteindre les objectifs quilui ont été assignés, un cadre devra essentiellement pouvoir s’adapter aux différentscontextes et personnalités qui l’entourent. C’est sur ce point qu’il sera d’ailleurs attendu,car la parfaite maîtrise des outils et méthodes devra nécessairement s’accompagner d’uneréelle aptitude à gérer les relations humaines. Les difficultés et écueils à éviter en cedomaine ne sont pas moindres. C’est, sur ses capacités à comprendre ses différentsinterlocuteurs, à communiquer clairement, à coordonner les actions et définir les prioritésqu’il sera ou non légitimé dans sa fonction. Car, nul n’est dupe, et nous le verrons aucours de l’étude, la qualité primordiale d’un manager ne repose pas sur la détention deconnaissances aussi importantes soient-elles, mais sur ses qualités humaines. Manager,c’est avant tout visionner ses objectifs, donner du souffle à l’action, convaincre, entraîneret responsabiliser ses collaborateurs. A cette fin, le cadre doit pouvoir activer et encadrerles énergies humaines à l’origine des performances. Mais, pour diriger une collectivité ouun service, il faut avoir reçu en amont une marque de confiance. Qu’elle provienne desélus pour l’encadrement de premier niveau ou de l’équipe de direction pour l’encadrementintermédiaire, l’adhésion de la hiérarchie est l’élément fondateur à toute prise de fonction.Ensuite, pour travailler efficacement, il est nécessaire de bien identifier les objectifs

10 Serge HUTEAU «Le management public territorial » Editions du PAPYRUS

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politiques et les axes stratégiques, d’avoir une idée précise des moyens, du fonctionnementde la collectivité et particulièrement en matière de management des ressources humaines.

Sur ce point, au regard du contexte spécifique des collectivités locales et à sa position,le cadre territorial peut-il faire effet de levier sur l’organisation en activant les énergieshumaines ? Quels sont ses marges de manœuvres et à quelles limites est il confronté ?Loin d’être une évidence pour certains acteurs, le développement de la ressource humaine,donc de la valeur professionnelle d’un individu représente néanmoins, le moyen d’agir leplus puissant d’une organisation. C’est donc bien sur ses capacités à manager son unité etses équipes en créant de la valeur que l’encadrant est attendu. L’encadrement est apparuavec l’ère industrielle. A cette époque, de nombreux ouvriers travaillaient sur un même sitede production. La nécessité d’avoir un personnel spécifique, capable de transmettre desdirectives et de contrôler l’exécution du travail se fit sentir. Au début du XXème siècle, en1911 Frédéric W.Taylor11 jetait les premières bases de la théorie des organisations lorsqu’ildéfendit l’idée que la conduite de l’entreprise était une science à part entière. L’autorité pourlui, devait s’exercer à travers la science. Pour Frédéric W Taylor, le rôle de l’encadrementconsistait à indiquer aux employés la meilleure manière de réaliser une tâche, de leurfournir les outils et formations appropriés et de leur fixer des objectifs en vue d’atteindreune certaine performance. Celle-ci étant récompensée. L’organisation qui découla dumanagement scientifique préconisa trois principes fondamentaux : l’établissement destandard de production, l’expertise des ingénieurs du bureau des méthodes et un systèmehiérarchique contraignant avec plusieurs chefs pour un seul ouvrier. L’autorité étant issue dela spécialité. Chaque membre de l’encadrement (contremaître, chef d’équipes, ingénieur)n’était responsable que d’un seul domaine.

Puis, parallèlement, Henri Fayol12 s’intéressa aux questions « d’administration » c'est-à-dire à la conduite de l’organisation dans son ensemble. Ses études représentèrentune avancée considérable, puisqu’il se préoccupa non seulement du travail, mais ausside l’organisation humaine et de la direction des entreprises. Son travail concernaparticulièrement le monde des dirigeants, il plaida pour que la « capacité administrative » soitreconnue au même titre que la capacité technique et qu’elle fasse l’objet d’enseignementsspécifiques. Henri Fayol énonça un certain nombre de principes visant à développer lafonction « management » dont les concepts sont très actuels. Parmi ces quatorze principes,nous pouvons citer tout d’abord, l’initiative dans la conception et l’exécution d’un plan. HenriFayol note de façon très intéressante que c’est une des satisfactions les plus aiguës qu’unhomme intelligent puisse expérimenter et que les supérieurs doivent sacrifier leur vanitépersonnelle pour permettre à leurs subordonnées de la connaître. Nous pourrions releveraussi un autre principe, celui de l’esprit de corps ou l’union du personnel rappelant quel’union fait la force et que tous les efforts doivent tendre vers un seul but, mais c’est aussi enun sens beaucoup plus moderne la mise en avant de l’importance du travail d’équipe et dela communication. Pour lui, « l’activité administrative » telle qu’il l’a conçue est une fonctionprivilégiée qui nécessite de dresser un programme général d’actions de l’entreprise, deconstituer le corps social, de coordonner les efforts, et d’harmoniser les actes13. Henri Fayoldécomposa la fonction d’administration en cinq missions : la prévoyance, l’organisation, lecommandement, la coordination et le contrôle. Le rôle du cadre, tel que nous l’entendonsaujourd’hui s’inscrit dans la même logique puisqu’il consiste à piloter globalement une zonede responsabilités et une équipe afin d’atteindre les objectifs locaux qui lui ont été assignés,

11 Frédéric W. Taylor, 1856-1915 théoricien de l’école classique début XXème Siècle à l’origine du management scientifique12 Henri Fayol, 1841-1925 théoricien de l’école classique début XXème Siècle, Apparition du management13 Marie Georges FILLEAU- Clotilde MARQUES RIPOULL » Les théories de l’organisation et de l’entreprise » Edition Ellipses

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à ceci près que diriger ne signifie plus « commander », les donneurs d’ordre n’ont plus leurplace, aujourd’hui les cadres, doivent avant tout entraîner, animer leurs équipes, insufflerl’énergie nécessaire à la réalisation des projets politiques. La fonction d’encadrant nécessitedonc, deux qualités essentielles, pouvoir s’adapter et optimiser l’unité de travail, développerla ressource humaine en utilisant l’ensemble des compétences des collaborateurs, aussibien les compétences révélées et les compétences qu’il paraît nécessaire « de faire sortir del’ombre ». Par voie de conséquence, les cadres sont soumis à une exigence grandissanted’efficacité pour améliorer la performance. Savoir agencer l’action collective devient unecondition nécessaire à la performance des organisations. Mais, sur quels critères est baséela performance d’une organisation publique telle qu’une collectivité locale ? Contrairementau secteur privé en recherche de rentabilité, le secteur public a pour objectifs principaux, laqualité des services rendus aux usagers et la maîtrise des coûts. Afin d’atteindre un certainniveau de performance, l’organisation doit être structurée, pilotée, efficace et efficiente etsatisfaire l’ensemble de ses partenaires. Pour les collectivités locales, il s’agit des usagersqui attendent une bonne qualité de service, des élus qui souhaitent voir la mise en œuvrede leurs politiques et les agents qui attendent une certaine qualité de vie au travail. Le cadredoit donc jouer sur plusieurs leviers pour piloter la performance d’une organisation, mais, sil’un d’eux est prioritaire, c’est bien celui du développement de la ressource humaine.

Ainsi, le cadre représente un des éléments fondateurs de la performance d’uneorganisation. Son rôle consiste à optimiser la richesse humaine, facteur clé de réussite.Par voie de conséquence, les axes de progression reposent sur sa maturité professionnelleet psychologique. Porteur de la mise en action, c’est par sa motivation, ses compétencesprofessionnelles et ses facultés personnelles à comprendre et appréhender les relationshumaines, à s’adapter pour faire face à la complexité qu’il permettra à l’organisationd’améliorer son niveau de performance. Cependant, il ne peut agir seul, c’est bien parl’action collective qu’il parviendra à obtenir des résultats. Ses moyens d’actions reposentessentiellement sur sa capacité à conduire et développer la performance humaine enplaçant ses collaborateurs au centre de ses préoccupations. Les marges de manœuvred’un cadre sont réduites à la fois par des obstacles d’ordre contextuel et culturel. Eneffet, l’environnement politico administratif dans lequel gravitent les cadres, génère parfoisdes difficultés importantes en terme d’autonomie et de prise de responsabilités, pourtantessentielle au développement de la performance individuelle et collective. Par ailleurs,la culture du résultat n’est pas suffisamment introduite auprès des différents acteurs,élus, cadres et agents, cet état de fait représente une difficulté essentielle, bien que lescollectivités territoriales ont démontré depuis un certain nombre d’années leur capacité às’auto gérer de manière efficace et à prendre en charge le développement de leur territoire.La culture de la performance renvoyant à la notion de qualité, d’efficacité et d’efficiencene s’est pas encore généralisée. A cet égard, deux autres facteurs sont à l’origine de lanon performance. Tout d’abord, l’inégalité des ressources financières des collectivités quifavorise davantage la concurrence que la performance (régime indemnitaire) et ensuite,les contraintes liées au statut de la fonction publique territoriale, notamment, l’applicationde ce statut. Pour autant, malgré les difficultés contextuelles, le cadre territorial peutfaire progresser l’organisation en s’investissant dans l’acquisition de nouvelles pratiquesmanagériales et en priorisant la dimension humaine dans sa conduite d’actions, car lepilotage et l’animation d’équipe ne s’improvisent pas, en ce sens, outre une certaine vocationà exercer ce métier, il faut pouvoir en mesurer les contours avant de s’engager. «Managerest une véritable aventure humaine et nécessite une certaine dose de courage ».

Sensibilisée par l’exercice de cette mission, j’ai choisi de porter ma réflexion surl’évolution de la fonction de cadre territorial. Encadrant de proximité depuis plus de sept

INTRODUCTION

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ans, j’ai débuté ma carrière au sein de la fonction publique d’Etat en 1978, puis, j’ai intégréla fonction publique territoriale en 1983. Ces presque trente ans de carrière au sein dusecteur public m’ont conduit à m’interroger de nombreuses fois quant au rôle d’un cadre,manager d’équipes. J’ai eu l’occasion de muter quelques fois, et, lorsque l’opportunité s’estprésentée, je me suis engagé à encadrer une équipe de onze collaboratrices auprès d’unservice accueillant du public. Cette expérience professionnelle riche d’enseignements, lesentretiens que j’ai eues avec différents cadres m’ont permis d’alimenter ma réflexion etappréhender de façon plus globale l’environnement professionnel dans lequel j’évolue afinde déterminer ce qui représente à mes yeux un enjeu important, à savoir, le managementdes hommes comme clé d’amélioration de la performance au sein du secteur public, ouplutôt l’utilisation intelligente du potentiel humain en tant que moyen. A cet égard, aucours de ma mission (CF rapport et guide d’entretien en annexe), je me suis intéresséeparticulièrement à certains aspects de la fonction et aux représentations des encadrants,puis aux leviers et aux freins conditionnant le pilotage de la performance humaine.Afin d’introduire un maximum d’objectivité dans ma réflexion, j’ai utilisé une partie de laméthodologie du diagnostic organisationnel14 qui m’a été enseignée à l’Institut d’EtudesPolitiques de Lyon afin de synthétiser les entretiens semi directifs15 réalisés auprès de dixencadrants, cadres dirigeants et cadres intermédiaires dans six collectivités, des communespour la plupart ayant une démographie différente.

La méthodologie de collecte des informations repose sur des entretiens auprès desacteurs, dirigeants et cadres intermédiaires, chargés d’animation d’équipes, qui se sontexprimés sur leur fonction.

Dix cadres ont été interviewés au sein de six collectivités :

∙ Directeur Général des Services : collectivité de 22 000 habitants∙ Directeur Général des Services : commune de 5785 habitants∙ Directeur Général des Services : commune de 7582 habitants∙ Directeur Général des Services : mairie d’arrondissement 33 781 habitants∙ Directeur Général des Services : commune de 30 630 habitants∙ Directeur des Ressources Humaines : commune de 121 821 habitants∙ Directeur des Ressources Humaines : commune de 22 000 habitants∙ Directeur des Ressources Humaines : commune de 30 630 habitants∙ Cadre intermédiaire : commune de 22 000 habitants∙ Cadre intermédiaire : région Rhône-Alpes 5.65 millions d’habitants

L’analyse des entretiens, l’identification des points forts et des points faibles relatifs aumanagement et à la performance m’ont permis de répondre à la problématique posée etproposer une hypothèse selon laquelle le cadre représente un des éléments fondateurs dela performance d’une organisation en tant que développeur de la richesse humaine.

Dans un premier temps, nous démontrerons que le cadre est au cœur du systèmede pilotage d’une organisation, que son environnement professionnel, sa fonction et lespratiques managériales qui y sont attachées ont considérablement évolué ces dernières

14 Méthodologie du diagnostic organisationnel proposée par Anne BLANC-BOGE, Maître de conférence de sciences deGestion à l’institut d’Etudes Politiques de Lyon,, démarche s’appuyant sur « le diagnostic d’entreprise » Jean-Pierre THIBAUTEditions SEDIFOR 1989 & sur le Diagnostic socio-économique proposé par l’institut de Socio-économique des Entreprises et desOrganisations crée et dirigé par Henri SAVALL.

15 CF rapport de mission « Le cadre comme levier de performance de l’organisation »

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

12 Sylvie Frey-Gautier - 2007

années. Nous étudierons le contexte professionnel, la nature des compétences quel’organisation publique attend actuellement d’un cadre, les méthodes et outils de gestion surlesquels il peut s’appuyer, puis la prépondérance de son rôle en ce qui concerne le passaged’une culture de moyens à une culture de résultats.

Ensuite, nous tenterons de déterminer et d’expliquer pourquoi ses marges demanœuvre peuvent dans certaines situations être réduites et quelles sont les difficultésspécifiques auxquelles il doit faire face dans l’exercice de ses fonctions au sein d’un systèmehybride. Notamment, le manque d’autonomie, les problèmes liés à la gestion des ressourceshumaines et les limites dues au manque de formation managériale.

Dans un second temps, nous tendrons à établir que le cadre territorial représenteun levier de performance pour l’organisation en tant que développeur de la performancehumaine. Tout d’abord, en apprenant à manager la richesse humaine et à conduire l’actioncollective par le pilotage de la performance au sein d’un système particulier avec desattentes spécifiques.

Mais aussi, par sa capacité à comprendre et à se faire comprendre de ses différentsinterlocuteurs en construisant une communication efficace au sein de sa zone deresponsabilité. Enfin, nous montrerons comment l’encadrant peut améliorer la performancehumaine, en créant de la valeur, c'est-à-dire en trouvant tout d’abord un style deleadership qui permette d’être clair quant aux finalités et aux objectifs de la collectivité,puis ensuite en s’intéressant réellement à la personne qu’il encadre et qu’il doit faireprogresser, en encourageant ses initiatives et ses idées d’amélioration et en développantses compétences.

Sur ces différents points, il s’agira pour l’encadrant de démontrer toutes ses aptitudesà gérer les relations humaines et à s’enrichir au contact de ses collaborateurs, car pourmanager, il faut faire preuve de pragmatisme et de générosité.

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

Sylvie Frey-Gautier - 2007 13

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEURDU SYSTEME DE PILOTAGE DEL’ORGANISATION

Dans cette première section, nous mettrons tout d’abord en évidence l’évolution permanentede la fonction et des pratiques managériales au sein d’un environnement professionnelrelativement complexe.

Ensuite, nous étudierons la nature des compétences que l’organisation publique attendactuellement d’un cadre manager, les méthodes et outils de gestion sur lesquels il peuts’appuyer afin d’introduire une culture différente axée sur les résultats à obtenir.

I - UNE FONCTION ET DES PRATIQUES ENCONSTANTE EVOLUTION

1. Quel est l’Environnement professionnel du cadre territorial ?Le cadre territorial évolue au sein d’une organisation récente, relativement complexe, maisdynamique et en pleine transformation.

L’environnement interne des collectivités locales empreint de règles et de contrainteslimite la réactivité de ces organisations qui rencontrent des difficultés à s’adapter àleur environnement externe. En effet, les enjeux sociaux, économiques et urbains, ladécentralisation, ajoutés aux attentes d’un service public de proximité toujours plusperformant génèrent des problématiques multiples qu’il faut pouvoir résoudre par desapproches transversales et globales.

1.1 Le cadre territorial évolue dans un environnement juridique internecontraignantIssue des lois de décentralisation dont la locomotive est la loi Defferre de 1982, lescollectivités locales communes, 36782, départements, 100 dont 4 d’outre mer, régions 26dont 4 d’outre mer et leurs groupements dont les plus connus sont les établissements publicsintercommunaux, 19 000, sont régis par la loi du 26 janvier 198416. Les collectivités localessont, en conséquence des organisations récentes.

Ces collectivités s’administrent librement par des conseils élus et dans les conditionsprévues par l’article 72 de la constitution française du 4 octobre 1958.

16 Loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la Fonction Publique Territoriale

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

14 Sylvie Frey-Gautier - 2007

Le principe de libre administration signifie que les collectivités locales bénéficient deressources qui leur sont propres, elles disposent donc de moyens matériels et de moyenshumains.

Caractérisées par une organisation de nature hybride, politique et administrative, lescollectivités sont composées d’un nombre important d’élus locaux17 illustrant la vitalitédémocratique, à savoir 497 188 conseillers municipaux, 4212 conseillers généraux et 1829conseillers régionaux d’une part et d’agents titulaires et non titulaires de droit public et privéd’autre part, soit 1 607 825 personnes.

Les mouvements de décentralisation opérés par la loi du 2 mars 198218 ont supposéque l’Etat renonce à remplir lui-même certaines tâches et transfère une partie de sescompétences aux collectivités locales. Néanmoins, l’Etat conserve le domaine régalienque constituent la police, la justice et les finances, pour l’essentiel. Le premier actede décentralisation de 1982 a profondément transformé le quotidien des fonctionnairesterritoriaux et des élus locaux, et particulièrement dans les petites collectivités, fortementsoumises à la tutelle de l’Etat.

De ce fait, les compétences transférées par l’Etat ont conduit les élus locaux a recrutéun personnel qualifié afin de répondre aux missions diversifiées de service public.

En effet, la fonction publique locale intervient dans de nombreux domaines, qu’ils’agisse d’éducation, de culture, de politiques sociales, d’aménagement du territoire,d’environnement, de sport, de transport ou de développement économique.

Ainsi, pour faire face aux missions qui lui ont été assignées, la fonction publiqueterritoriale emploie 1,6 million de personnes avec une proportion plus importante d'agentsde catégorie C (78,2 %), 13,8 de catégorie B et seulement 8% de cadres A19.

Les agents exercent 270 métiers de terrain, de conception, de gestion, et demanagement afin d’assurer la qualité des services publics de proximité.

La spécificité organisationnelle et le déroulement de carrière des agents est adaptéeaux métiers et aux besoins des collectivités, l’organisation de la fonction publique territorialeprésente des particularités et repose en partie sur le rôle d’organismes nationaux etdépartementaux de gestion chargés des affaires communes aux collectivités et des organesde participation destinés à associer les élus et les agents aux décisions relatives à la fonctionpublique locale ou à l’organisation des carrières.

La fonction publique locale est organisée 20selon une nomenclature fondée sur desfilières, des catégories et des cadres d’emploi : les huit filières de la fonction publiqueterritoriale regroupent des métiers exercés par secteur d’activité, à savoir, les filières :administrative, technique, culturelle, sportive, animation, médico-sociale, sécurité, sapeurspompiers.

Au sein de chaque filière, les agents publics sont répartis en trois grandes catégories :A, B, C

- Les agents de catégorie C occupent des emplois d’exécution- Les agents de catégorie B occupent des postes d’encadrement intermédiaire

17 « Les collectivités territoriales en France » Pierre CHAPSAL Editions VUIBERT18 Loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des commune des, départements et régions19 Source Insee : mars 200720 Guide pratique CNFPT « Centre National de la Fonction publique Territoriale » Le paysage administratif français

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

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- Les agents de catégorie A occupent des postes d’encadrement et de directionA l’intérieur de chacune des huit filières et pour chaque catégorie, les agents sont

répartis en cinquante neuf cadres d’emploi regroupant des agents dont les emplois et lesmétiers sont proches.

Enfin, chaque cadre d’emploi est divisé en grade, distinguant les agents en fonction deleur ancienneté, de leur expérience, de leur qualification ou de leur responsabilité.

La carrière des fonctionnaires territoriaux repose sur un mode de recrutement trèsprécis, des possibilités d’évolution et une rémunération comprenant une part fixe et unepart variable.

Le concours constitue la règle de recrutement dans la fonction publique, ils sontorganisés par le Centre National de la Fonction Publique Territoriale et par les Centresdépartementaux de Gestion, soit dans certains cas directement par les collectivités. Nousverrons que l’accès à la fonction publique par la voie du concours pour les agents decatégorie A et B pose un certain nombre de problèmes, notamment en ce qui concernela formation continue. Le statut de la fonction publique territoriale est très structuré et peumalléable, il comporte en effet de nombreuses normes juridiques. Destiné à l’origine àgarantir l’emploi des fonctionnaires, et à les protéger des pressions politiques et sanctionsarbitraires, il conduit quelques fois à produire des inégalités et des contre performances.Nous verrons notamment pourquoi, dans la section qui suit. Ses principes fondateursengrangent un manque de souplesse dans la gestion des hommes. Nous évoquerons lesvoies d’accès bien souvent limitées à celle du concours et la difficulté pour les cadresà mobiliser le capital humain et ainsi optimiser le potentiel et les compétences de leurscollaborateurs.

Mais, l’environnement juridique interne ne se limite pas au statut, il ne constituepas le seul frein à la modernisation, d’autres règles et procédures directement liées àl’environnement juridique interne des collectivités limitent leur réactivité et par voie deconséquence, leurs performances. Le point d’accroche provient essentiellement du régimejuridique auquel sont soumises les collectivités locales. En effet, leur champ d’actions sesitue dans le prolongement du droit constitutionnel, au cœur du droit public, qui se composede plusieurs branches, notamment, le droit administratif, l’urbanisme, les finances publiqueslocales pour ne citer que les principaux régimes intéressant l’activité des collectivités locales.L’ensemble des règles et des procédures contraignantes qui en découlent ralentit l’activité.A titre d’exemple, une procédure de recrutement peut durer plusieurs mois selon que l’ondécide de recruter un fonctionnaire qui doit respecter un délai minimum de trois mois pourquitter son ancien poste. Quant aux règles concernant l’urbanisme, les finances locales etla comptabilité publique, nous ne saurions pas très loin de la réalité, en affirmant qu’ellesparalysent complètement le système. Les procédures relatives aux nombreux contrats quepassent les collectivités locales pour assurer la gestion de leurs services témoignent dela rigidité du droit qui les gouverne. Les procédures relatives à la passation des marchéspublics, des délégations de service publique et autres contrats de partenariat public et privésont la preuve de l’extrême pesanteur du régime juridique, canalisé pour l’essentiel sur lanotion d’intérêt général. En effet, le droit administratif a pour objectif de satisfaire l’intérêtgénéral, « clé de voûte du système bureaucratique », il est un droit de déséquilibre, quiproduit des inégalités dans les rapports sociaux, c'est-à-dire entre personnes publiquesd’une part et personnes privées d’autre part. La primauté de la notion d’intérêt généraldans le système de valeurs de l’administration est un concept pouvant être appréhendésous l’angle du droit administratif. Le droit administratif est un droit d’exception en ce qu’ilpermet aux personnes publiques, Etat, collectivités locales et leurs groupements d’exercer

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

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des prérogatives de puissance publiques se traduisant par exemple, par la possibilitéd’exproprier une personne privée ou d’intégrer des clauses particulières dans un contrat,qualifié à ce titre de contrat administratif, comprenant des dispositions beaucoup plusavantageuses pour la personne publique et la préservant notamment de certains risques.

Vu sous cet angle, nous comprenons facilement que l’administration ait le devoird’assurer l’intérêt général en s’appuyant sur ses principes fondateurs que sont l’égalitédes usagers devant les services publics, la continuité et l’adaptation des services publics.Néanmoins, la légitimité du fonctionnement de l’administration basée sur la notion d’intérêtgénéral déclinée en principes ayant une valeur fondamentale génère un mode defonctionnement purement bureaucratique qui, à l’excès, produit des dysfonctionnementset entrave la modernisation des services. Par ailleurs, nous verrons plus tard au cours del’étude que l’organisation administrative française se situe dans le prolongement de sesinstitutions politiques et que les collectivités locales sont à la fois des autorités politiqueset administratives. En l’espèce, la France est un état atypique eu égard à son histoire et àsa culture imprégnés d’un Etat fort et centralisateur. Malgré tout, les lois décentralisatricesde 1982 ont permis la création d’entités autonomes, les collectivités territoriales et leursgroupements afin de rapprocher les centres de décisions au plus près de la réalité citoyenne.La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 a confirmé le principe de libre administrationdes collectivités territoriales qui était déjà inscrit dans la constitution. Ce principe signifie quel’Etat ne peut plus s’ingérer dans la vie politique et administrative des collectivités locales,et qu’il n’exerce plus de contrôle à priori, c'est-à-dire que le seul contrôle qu’il peut exercer,est un contrôle à postériori. Les collectivités peuvent donc décider librement de l’opportunitéde leurs politiques locales. Néanmoins, la voie de la décentralisation est très étroite21 dansla mesure où le législateur a été soucieux de préserver la conception française de l’Etatunitaire. En effet, les collectivités locales peuvent agir librement, mais dans le strict respectdes règles et prérogatives fixées par le législateur. Par voie de conséquence, leur autonomieest relativement limitée, leurs actes et contrats administratifs sont soumis au contrôle delégalité de l’Etat, ce qui paraît normal sur le fond, mais sur la forme, ce dispositif génère desdélais importants. En sus, leurs marges de manœuvre financière sont fonction en grandepartie des décisions législatives, puisque ce sont les lois de finances qui déterminent chaqueannée le montant de leurs recettes, celles-ci s’élevant en moyenne à 37%.

Nous pourrions en conclure que les normes et contraintes juridiques bien qu’utilesà la régulation des rapports sociaux et au fonctionnement des organisations localesentravent considérablement leur conduite d’actions. Les collectivités locales ne sont pascomplètement libérées du modèle centralisateur, et rencontrent encore beaucoup dedifficultés pour s’adapter à leur environnement externe du fait de leur manque de réactivité.En conséquence, l’une des problématiques majeures du cadre territorial repose sur sacapacité à conjuguer expertise et management alors que l’organisation pour laquelle iltravaille est encore enkystée dans un modèle classique caractérisé par des principesanciens et des règles complexes.

1.2 L’environnement externe : des enjeux et problématiques multiplesNous l’avons dit, le concept d’intérêt général détermine le fonctionnement bureaucratiquedes organisations soumises à la rigidité des règles et procédures du droit public. Cette notionrenvoie également à la gestion publique et particulièrement aux prestations de servicepublic. Il convient tout d’abord de connaître l’origine du terme bureaucratie pour ensuitecomprendre les limites de ce concept en termes de fonctionnement au sein du système

21 http://www.vie-publique.fr

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actuel. Aujourd’hui, la notion de bureaucratie a une connotation péjorative, mais cela n’apas toujours été le cas. L’approche de Max Weber consistait à remplacer la faveur par larègle, pour lui, il s’agissait d’un progrès certain sur le passé. Dans le modèle bureaucratique,l’autorité découle de la légalité des ordres et de la légitimité de ceux qui les donnent àl’opposé du bon vouloir d’un individu. Le modèle bureaucratique ou rationnel légal à l’opposédes modèles charismatique ou l’organisation fonctionne par dévouement de ses membresou à un héros, ou au modèle traditionnel où elle fonctionne par obéissance de ses membresaux croyances et au caractère sacré de ceux qui les gouvernent ; Max Weber proposa unmodèle plus efficace et plus adapté reposant sur un système bien structuré fait de normeset de règles où l’autorité est légitimée par l’obéissance aux règles et non pas à un individu.Depuis, cette conception a été fortement décriée. Les principales critiques concernent ledéplacement des buts, les règles deviennent des objectifs. Pour illustrer ce propos, nouspouvons nous rapprocher de notre propre expérience. Qui n’a jamais été stupéfait par lacapacité de certaines administrations publiques à se délester d’une demande sous prétexteque les documents fournis n’étaient pas conformes à la procédure ou à la règle ? En fait, lecœur de la problématique se situe à ce niveau, les organisations publiques sont encore tropsoumises à la règle et n’ont pas pu faire évoluer leur fonctionnement. Elles se retrouventdonc aujourd’hui face à une multitude de problématiques à gérer avec le même typed’organisation qu’au début du siècle. Néanmoins, les collectivités ont pris conscience de leurmanque d’efficacité et cherchent à se moderniser depuis un certain nombre d’années. C’estpourquoi, elles remettent en cause leur système et tente de s’ouvrir sur leur environnementexterne. Cette ouverture s’accompagne d’une inversion de leur logique d’action22. La logiquede l’offre qui prévalait jusqu’ici est remplacée par une logique de territoire et de réponseaux besoins des populations. L’intérêt général renvoyant à une conception abstraite baséesur un raisonnement uniforme où la règle s’applique « à tout un chacun » nous passons àun raisonnement différencié ou la règle n’est plus mise en avant, l’intérêt général renvoiedans ce cas, à une notion de personnalisation des services publics ou l’usager est aucentre des préoccupations. Pour ce faire, les organisations doivent mettre en œuvre unevéritable stratégie et changer leur mode de gestion et notamment le mode de gestion dupersonnel. En effet, la gestion des ressources humaines est encore purement administrativeet statutaire et ne permet pas d’adapter les compétences aux évolutions de l’environnement.La formation initiale et continue des agents est par excellence l’arme du renouveau23,elle doit préparer les agents aux changements, les adapter aux nouvelles activités et à ladéconcentration des responsabilités. A cet effet, les collectivités doivent évaluer, repenseret axer leurs politiques relatives au management des ressources humaines. D’autant,que l’élévation du niveau de formation est une chance à ne pas manquer qui pousse àmoderniser l’administration publique, ce nouveau levier est à exploiter car il conjugue àla fois les aspirations des agents qui souhaitent sortir de leur routine quotidienne et celuides collectivités qui ont grand besoin de potentiel pour atteindre leurs objectifs, qui sontpour certaines organisations surdimensionnés. La recherche d’efficacité économique estaussi une préoccupation majeure si l’on considère la part financière consacrée au personneldans les budgets de fonctionnement qui avoisinent les 50%. Par ailleurs, les collectivitéslocales ne doivent plus tout simplement se porter garante d’une utilisation rationnelle desressources, mais, elles doivent aussi rapporter la preuve de leur efficience. C'est-à-direétablir un rapport entre la part du budget consacré au personnel et les résultats obtenus.Ces résultats étant évalués au regard d’objectifs locaux prédéfinis. Pour les collectivitéslocales la recherche d’efficacité passe inévitablement par une approche stratégique. Nous

22 Serge HUTEAU « Le management public territorial » Editions PAPYRUS23 François de CLOSETS « Le pari de la responsabilité » Petite bibliothèque Payot

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retiendrons la définition de Henri Bouquin 24 tirée de l’ouvrage de Serge Huteau, quienvisage le management stratégique sous cet angle « Le management stratégique chercheà développer chez les divers décideurs une vision claire de ce que l’entreprise doit devenir ».« C’est également l’art d’employer les méthodes, les modèles, les théories, en un mot lesarmes qui peuvent aider les dirigeants lorsqu’ils effectuent des choix dans le cadre d’unepolitique générale ».

Pour Jacques Orsini25, la stratégie peut également s’entendre comme « la manière dontl’entreprise investit ses ressources au mieux de ses avantages compétitifs et de la finalitéqu’elle poursuit, compte tenu des changements attendus dans son environnement ».

Les collectivités doivent donc s’inscrire dans une nouvelle logique consistant à penserl’avenir de leur organisation pour s’adapter à un environnement turbulent et développer leurterritoire afin de répondre aux enjeux sociaux, économiques et urbains, et ainsi faire faceau désengagement de l’Etat qui leur confie des compétences sans prendre en compte leursréels moyens d’action. Face à l’envergure, à la nature, et à la complexité des différentsproblèmes soulevés, aucune collectivité locale, aucun acteur politique, ne peut décideret agir seul. La recherche de nouveaux modes d’organisation et de gestion est un défipour les collectivités confrontées aux problématiques sociales, économiques, urbaineset environnementales. Ainsi, les problèmes ne peuvent plus être appréhendés par desapproches analytiques, mais requièrent des démarches globales renvoyant à l’analysesystémique26 « le concept de système » définition proposée à l’origine par Ludwig VonBertalanffy27« Analyse de phénomènes complexes dont les composantes sont reliées entreelles et dont les comportements sont orientés dans un but ou une direction ». L’analyse dusystème met l’accent sur le tout plus que sur les parties. L’analyse systémique envisage lestotalités complexes et non leurs éléments, même additionnés.

Afin de construire un management public performant, les collectivités doivent changerleurs comportements et leur mode de gestion en passant d’un mode de gestion classiqueà un mode de gestion participatif et transversal. A cet égard, elles doivent mobiliser leursressources et leurs compétences spécifiques pour apporter des réponses plus efficaces etinnovantes aux problèmes posés localement. En ce sens, les collectivités s’organisent pourdévelopper leurs territoires et répondre aux attentes de proximité des usagers. La questionde la gouvernance territoriale prend ici toute sa dimension. Nous retiendrons la définitionissue du rapport sur la gouvernance territoriale28« En sciences politiques, l’usage du termede gouvernance se répand à la fois dans le cadre de l’analyse du gouvernement local etdans une perspective normative en relations internationales et management des affairespubliques. Dans le cadre de l’analyse du gouvernement local, l’usage du concept entendsouligner la participation de divers intérêts notamment privés au système de décisionspubliques et qui régissent les villes et les régions ». « La gouvernance repose sur unedénonciation du modèle politique traditionnel descendant et centralisé. Elle met l’accent surla multiplicité et la variété, de nature, de niveau, de statut des différents acteurs locaux,publics et privés associés à la définition et à la mise en œuvre de l’action publique ». Pour

24 Henri BOUQUIN « Contrôle de gestion » Editions PUF 199125 Jacques ORSINI « Management stratégique » Editions VUIBERT 199026 Théorie des organisations Jacques ROJOT Editions ESKA27 Ludwig Von BERTALANFFY28 Rapport « la gouvernance territoriale comme nouveau mode de coordination territoriale » Par Fabienne LELOUP, Laurence

MOYART Bernard PECQUEUR (Université J. Fourrier, Grenoble) 4 ème journée de la proximité 17 et 18 juin 2004

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illustrer ce concept, nous présenterons brièvement, l’expérience à l’échelle d’un territoire,celle du « pays de Chaumont29 ». Le pays de Chaumont, regroupe huit communautés decommunes et trente cinq communes. La création de ce pays a pour objectif de développerson territoire en s’appuyant sur un réseau de partenaires composés d’élus locaux et demembres de la société civile. Le contrat passé entre les différents acteurs locaux consiste aadopté un programme territorial de développement des services. Ce programme d’actionss’articule autour de divers projets dont la création d’un réseau de Maisons de pays qui devracontribuer à apporter aux habitants une offre de service complète et accessible, notamment,des services commerciaux, des services publics et sociaux et des espaces d’animation.

Ce type d’expérience innovante permet aux acteurs locaux de sortir de leur logiqueclassique pour passer graduellement vers une logique de gestion globale et transversale.Fort de leurs résultats, les acteurs locaux finiront par adopter de nouvelles stratégies. Pourl’instant, les communes, ont encore bien du mal à rentrer dans le champ de la gouvernanceterritoriale, qui se traduit pour elles, par la création d’entités distinctes et autonomes, telleque la communauté de communes ou la communauté d’agglomération. Les élus municipauxcraignent surtout de perdre leur légitimité et de voir leur pouvoir se diluer à travers uneentité recouvrant un territoire plus important. De ce fait, l’intercommunalité, pour les élusmunicipaux n’est pas une véritable aubaine. Elle sert surtout à contrarier leurs ambitionspolitiques. Cependant, la réalité économique et sociale l’emporte actuellement.

D’ailleurs, lorsque l’on se rapproche du terrain, des citoyens et de leur milieu de vie,il semble évident que les problèmes à traiter ne peuvent plus faire l’objet d’une offre deservice public segmentée. C’est pourquoi, il faut pouvoir désormais conjuguer des politiquesdifférentes à l’échelle d’un territoire. Par exemple, les politiques d’insertion professionnelledestinées au retour à l’emploi doivent intégrer la politique du logement, des transports,l’action sanitaire afin d’espérer un minimum de résultat.

En outre, la question de la qualité du service public est très présente actuellement etdépasse l’idée reçue selon laquelle les Français s’intéressent avant tout à la hausse de lafiscalité.

En effet, une enquête récente réalisée par l’institut IPSOS, révèle que 55% des françaisinterrogés souhaitent que leur commune donne la priorité à l’amélioration de la qualitédu service public et pensent que l’amélioration des services offerts à la population doitconstituer l’objectif principal de leur municipalité contre 40% qui considèrent que la prioritéest la baisse des impôts30. Les enjeux sont bien connus, au plan social, le citoyen entant qu’électeur, usager et administré attend une plus grande proximité, « dans la sphèrepublique, l’exigence de proximité est très souvent appréhendée à travers sa dimensionphysique, spatiale, territoriale et géographique, c’est une demande de facilité, de fluidité, decommodité ». « Elle recèle également une dimension d’immédiateté et renvoie à un besoinde compréhension, de reconnaissance de participation et de sens ». « Le rapport au territoireest bouleversé car la prédominance du sentiment d’appartenance laisse progressivementplace à une vision plus consumériste de la cité, certains espaces constituent des milieuxsur lesquels l’individu n’investit pas affectivement ». « Le ciment communautaire n’est plusl’appartenance à une entité géographique identique, mais l’adhésion à une communautéde valeurs partagées31 ». Le rapport au territoire ayant changé, les exigences des usagers

29 La gazette « Politiques en faveur de l’innovation dans les petites villes» cahier détaché n°3-7 / 1873-12février 200730 « La gazette » 2 octobre 2006 Gestion locale, article de Jacques PAQUIER.31 Pascal FORTOUL, Directeur Général Adjoint, communauté d’agglomération du Voironnais, Intervenant à l’Institut d’Etudes

Politiques de Lyon sur le thème de « La gouvernance territoriale : concepts et théorie

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sont de plus en plus difficiles à satisfaire. De ce fait, le champ d’action des collectivitésest beaucoup plus large et change complètement la donne des collectivités locales quis’unissent désormais pour apporter plus de cohérence à leurs politiques et ainsi répondreà la demande de qualité des services publics toujours plus forte.

Sur le plan institutionnel, se pose aussi, la question de l’articulation des compétencesde l’Etat avec les collectivités territoriales qui, face au processus de décentralisationrenforcée32 s’interrogent quant à leurs capacités à conduire efficacement l’action publique.Les régions et les départements absorbent désormais des compétences étenduesnécessitant des moyens considérables. Aussi, les collectivités locales mettent en exergueles problématiques qu’elles devront résoudre suite au transfert de compétences de l’Etatvers l’initiative locale. Les difficultés d’évaluation à moyen et long terme génèrent desincertitudes pour l’avenir. Celles-ci sont liées aux perspectives d’évolution des dépensessociales pour le département, à titre d’exemple. De nombreuses disparités existent déjàd’une collectivité à l’autre, mais avec les transferts de compétences, les écarts risquent dese creuser encore un peu plus.33En effet, les collectivités locales, émettent des réservesquant à la pertinence du périmètre de compétences transférées, quant à l’équité du partagede l’effort financier avec l’Etat, et craignent que leur charge devienne vite très lourde àsupporter.

Toutes ces problématiques à résoudre convergent vers la nécessité de changer enprofondeur nos modes de fonctionnement et surtout de pensée. Mais, passer d’une logiquelinéaire à une logique systémique présente de sérieuses difficultés pour les acteurs locaux.

Les collectivités locales doivent s’adapter à un environnement turbulent et développerleur territoire pour répondre aux enjeux sociaux, économiques et urbains, et faire faceau désengagement de l’Etat qui leur confie des compétences sans prendre en compteleurs réels moyens d’action. La gestion publique locale se complexifie, donc pour faireface aux nouveaux enjeux, que représentent les problématiques sociétales et la montéeen puissance de la décentralisation opérée par la loi du 13 août 2004, les cadres doiventdévelopper leurs capacités d’adaptation de façon permanente au regard des relationsexternes que les collectivités locales entretiennent avec leur environnement et au niveauinterne avec les élus d’une part et les agents d’autre part.

2. La nature des compétences attendues au regard d’une fonction enpleine mutation

Nous verrons que pour piloter une zone de responsabilité et atteindre les objectifs locaux,les cadres doivent tout d’abord être en capacité d’aider les élus ou la direction à prendredes décisions, puis à établir des plans d’actions et les suivre tout en encadrant leurséquipes. Leur fonction est en pleine mutation et nécessite une approche différente dumétier. La légitimité de la fonction n’est plus issue de l’expertise. La capacité à mobiliser, àcommuniquer et à entraîner les hommes est avant tout recherchée.

Par voie de conséquence, les compétences que l’on attend d’un cadre aujourd’huireposent à la fois sur ses capacités à comprendre l’environnement juridique sans pourautant tomber dans une expertise à « tous crins » qui ne leur permettrait pas de développerleurs compétences managériales et notamment prendre en compte la dimension humaine

32 Loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales « Acte II de la décentralisation »33 « La Gazette » cahier détaché n°3- 22janvier 2007 « Les transferts de compétences de l’Etat aux collectivités »

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

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puisque leur rôle consiste pour l’essentiel, non plus à donner des ordres et à contrôler, maisà animer les équipes.

2.1 Le rôle du cadre en tant que pilote d’une zone de responsabilité Le management public territorial comprend deux dimensions, la première envisage lemanagement public dans sa globalité, nous parlons dans ce cas du management del’ensemble de la collectivité ou, le management d’un service qui repose sur la structurationdu système, la seconde, est liée à une fonction dont la responsabilité relève des cadres.« La fonction34 correspond aux activités qui concourent à une même finalité dans uneorganisation donnée, la fonction a un caractère collectif. La fonction est transverse àplusieurs métiers ou emploi. Un même emploi peut recouvrir plusieurs fonctions ». Lestextes spécifiques à la fonction publique territoriale ne font pas référence à la notion mêmede cadre territorial, car le modèle est fondé sur la catégorie d’emploi, néanmoins, certainséléments issus des cadres d’emploi peuvent apporter un éclairage sur les fonctions quepeuvent exercer les cadres territoriaux.

En effet, les fonctions d’encadrement sont en règle générale confiées aux agents decatégories A, la catégorie A correspond aux fonctions de conception et de direction, lescadres A exercent des fonctions d’expertise ou d’encadrement, mais il arrive souvent detrouver des agents de catégorie B sur des fonctions d’encadrement, surtout au sein despetites collectivités. La catégorie B correspond aux fonctions d’application en temps normal.Donc, le statut ne donne pas de véritable définition à la notion d’encadrement, néanmoins,il convient de bien faire la distinction entre la fonction de cadre et celle de manager. Nousmettrons en évidence la fonction de manager qui nous intéresse en tout premier lieu pourcette étude. Le bureau international du travail propose une définition de la notion de cadrequi repose sur deux catégories de critères, les critères relatifs au niveau de qualificationou d’expertise et les critères relatifs à l’exercice de certaines responsabilités. La fonctiondu cadre territorial qui manage une organisation et une équipe s’inscrit dan le même ordred’idée, à ceci près qu’il s’avère nécessaire de privilégier la fonction d’encadrement sur lestatut de cadre pour plus de cohérence avec la réalité. Le cadre territorial cumule deuxmétiers dans ces fonctions35 :

- un métier technique, le cadre est chargé d’un domaine d’intervention requérantdes savoir faire ou des compétences techniques particulières, un directeur des servicestechniques peut avoir une formation initiale d’ingénieur ou bien d’architecte, mais en toutétat de cause, il détient des connaissances et des savoir faire techniques.

- Un métier de manager, le cadre est responsable le plus souvent d’une organisation,de personnel, de moyens financiers requérant des compétences supplémentaires, bienspécifiques.

En l’espèce, quelque soit son niveau hiérarchique, le cadre exercera deux métiers, prisdans des proportions différentes eu égard à son niveau hiérarchique et l’étendue de sa zonede responsabilité. C'est-à-dire que le niveau de compétences managériales sera fonctiondu niveau hiérarchique.

Figure n°1 : les différents niveaux d’encadrement / Nature du management

34 Guide méthodologique - Référentiel /Emploi/Activités/Compétences CNFPT juin 200135 Serge HUTEAU «Le management public territorial » Editions PAPYRUS

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

22 Sylvie Frey-Gautier - 2007

Niveau supérieur Cadres de Direction Management stratégiqueNiveau intermédiaire Responsables d’unités Management opérationnel et

StratégiqueNiveau technique Cadre de proximité Management opérationnel

La nature du management est donc différente qu’il s’agisse d’un cadre de direction,d’un cadre intermédiaire, ou bien d’un cadre de proximité. Par voie de conséquence, la partde management varie selon que l’on appartienne à l’une ou l’autre de ces catégories. SergeAlecian et Dominique Foucher 36proposent 3 profils qui sont fonction du niveau hiérarchiqueet des fonctions exercées :

- Les cadres de 1er niveau qui doivent animer une équipe, organiser le travail, décider,négocier, améliorer son efficacité personnelle.

Les cadres de 2nd niveau qui doivent décliner la stratégie, répartir les tâches etcoordonner, concevoir un système de pilotage et des tableaux de bords, évaluer lesperformances de chacun des cadres, assurer le rôle de représentation et de communication.

- Les cadres de 3ème niveau qui doivent donner du sens, restructurer les services,définir une politique de communication interne, assurer la représentation interne et externe,savoir constituer et animer une équipe de direction performante.

Il convient de relativiser cette description dans la mesure où les attributions dévoluesaux cadres et la nature du management dépendent également du nombre de niveauxhiérarchiques souhaité par la collectivité et de la taille de la structure. A titre d’exemple, larégion Rhône-Alpes emploie pour l’instant une majorité de cadres de catégorie A alors queles communes positionnent des cadres B sur des postes d’encadrement intermédiaires. Aucours de la deuxième section nous tenterons d’en expliquer les causes.

Nous le constatons, la fonction de management revêt différents aspects. Mais, avantd’évoquer les fondamentaux, il convient de définir le concept de management, ce terme,est employé couramment, cependant il reste difficile à définir, pour certains le terme« manager » à une origine anglaise, manier diriger, pour d’autres, elle pourrait provenir duvieux français « ménagement » qui signifiait l’art de conduire, de diriger et de manier.

Aujourd’hui, le management prend une dimension importante pour les collectivitéslocales. Le domaine « pilotage, management et gestion des ressources » s’élevait à 33,7%au 1er trimestre 200537. Le management est un processus de conduite d’une organisation,le cadre se situe au cœur de ce processus par l’exercice de ses responsabilités. Son rôleconsiste à piloter sa zone de responsabilité et atteindre les objectifs locaux. Pour ce faire, ilassure deux missions majeures, d’une part, la construction des plans d’actions et leur suiviet d’autre part le management de son ou ses équipes.

Le tableau suivant38 nous permettra de visualiser l’ensemble des compétences « savoiret savoir faire » qu’une organisation attend d’un encadrant, responsable d’équipes.

Figure n°2 : le Rôle du Manager

36 Serge ALECIAN et Dominique FOUCHER « Guide du management dans le service public » op.cit37 Baromètre des offres d’emploi n°5 produit et édité par l’observatoire du Centre National de la Fonction Publique Territorial38 Annie BARTOLI « le management dans les organisations publiques » Editions DUNOD 2005.

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

Sylvie Frey-Gautier - 2007 23

Définir lesobjectifs

Organiser Allouer lesmoyens

Activer et animer Evaluer et contrôler

Adapter etoptimiserl’unité detravail

*Stratégie *Programmation

*Répartitiondesmissions etactivités *Coordination

*Budgétisation *Affectationdes priorités

*Communicationinterne *Actualisationdes méthodesde travail

*Evaluation desrésultats (biland’activités)

Utiliser etdévelopperlaressourcehumaine

*Objectifsindividuels

*Elaborationréférentielde poste *Délégation

*Condition detravail *Moyensmatériels

*Entretiensindividuels *Motivation

*Appréciation/notation * Suivi/assistance *Recadrage * Sanction

La conduite d’objectifs doit être défini en cohérence avec la stratégie politique, c'est-à-dire du plan de mandat pour les collectivités locales, par ailleurs, le cadre manager doit avoirune connaissance précise des décisions afin de pouvoir établir au sein de l’organisationou de l’unité dont il a la charge son propre plan d’actions et suivre sa réalisation. Acet égard, il doit établir une communication efficace avec ses différents interlocuteurs, etnotamment avec les élus. Son rôle consiste à savoir filtrer les informations qu’il reçoit desélus car leurs objectifs sont parfois implicites et manquent de clarté, c’est à lui de les rendrecompréhensibles, de les structurer. Il faut donc bien comprendre toute la dimension dupouvoir et la gérer, car la sensibilité des élus est très souvent exacerber, c’est pourquoi,ses qualités personnelles et particulièrement son sens de la diplomatie, l’aideront à sepositionner. En ce sens, l’aide à la décision pour le cadre manager est un domaineparticulièrement délicat. Il doit se méfier de son expertise et s’en servir uniquement pourconseiller l’élu et l’amener à prendre une décision, l’intelligence émotionnelle, c'est-à-dire lacapacité à gérer sereinement ses relations représente un véritable atout. Les cadres sontplacés à la charnière de la réflexion et de l’action, leur rôle est par voie de conséquencetrès important. Mais nous verrons que sa bonne volonté n’est parfois pas suffisante etque l’efficacité de son pilotage découle en priorité des dimensions culturelles et politiquesinhérentes à l’organisation.

Par ailleurs, le point le plus sensible de sa mission se situe au niveau du managementdes hommes. Cet aspect de sa fonction est un des plus importants, et c’est ici que sefera la différence entre un cadre manager et un leader, nous le verrons plus tard au coursde l’étude, si la gestion des ressources humaines n’a pas toujours été une priorité pourles organisations, elle l’est devenue aujourd’hui. Même si « le nerf de guerre » est surtoutéconomique, il permet au moins de réfléchir à une meilleure gestion de la richesse humaine.Les cadres, sont attendus sur ce point et doivent être en capacité de développer cetteressource, à leur niveau, il doivent optimiser leur zone de responsabilité en préparantsoigneusement leurs recrutements, en repérant les potentiels, en gérant les compétences,en évaluant leurs collaborateurs, en stimulant les énergies, en construisant des plans deformations qui rentrent en adéquation avec les objectifs de l’organisation et les attentesde leurs collaborateurs. Le rôle du cadre est de faire le point et prévoir des actions deformation, au moment des évaluations mais également en cours d’année lorsque l’un deses collaborateurs rencontre des difficultés à résoudre un problème d’ordre technique oulorsqu’il n’a pas pu gérer un différend avec un usager, ou un autre membre de l’équipe.

Le pilotage d’une organisation et d’une équipe gagne en complexité, c’est pourquoi, lescadres doivent être en mesure de repenser l’organisation du travail au sein de leur zonede responsabilité. Nous verrons que l’introduction de la polyvalence peut, si elle est bienajustée permettre d’accroître la qualité des services.

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

24 Sylvie Frey-Gautier - 2007

2.2 La polyvalence pour optimiser l’organisation du travailLa polyvalence, consiste pour un agent à pouvoir occuper plusieurs postes de niveauxcomparables. La polyvalence est aux antipodes du taylorisme, puisque le personnel n’estpas spécialisé dans l’exécution d’une tâche, mais, au contraire, peut travailler sur différentsdomaines d’activité. L’instauration d’une organisation polyvalente exerce une influence surl’encadrement, traditionnellement le rôle de l’encadrement consistait à donner des ordres,à en contrôler l’exécution et à en maîtriser les détails. Ce type de fonctionnement impliquaitla nécessité d’une connaissance approfondie du travail à effectuer. Les exécutants ausens taylorien, n’avaient aucune marge de manœuvre et devaient suivre les directives àla lettre39. Depuis, une quinzaine d’années, les comportements ont changé, la politiquesociale se développe, elle est fondée sur l’adhésion, la coopération et non plus surl’obéissance40. Dans le cadre de ses travaux, Max Weber, approcha les organisations, parles traits des structures qui les régissent. De manière innovante, il renversa la situation etplutôt que de se poser la question de savoir pourquoi les hommes désobéissent parfois,il s’est poser la question de savoir pourquoi au contraire ils obéissent. Sa recherche aabouti à distinguer trois modèles liés au type de structure. Nous ne reviendrons pas surla description de ces trois types de modèle, que nous avons précédemment évoqués,le modèle charismatique, le modèle traditionnel et enfin le modèle rationnel légal oubureaucratique.

Cette vision de l’obéissance, est heureusement dépassée, les organisations etl’encadrement cherchent avant tout à valoriser la richesse humaine. C’est pourquoi, lemode d’organisation retenu peut agir favorablement sur le comportement des agents etdes cadres et ainsi faire progresser l’organisation. Dans les faits, la mise en place de lapolyvalence n’est pas toujours aisée, car elle demande des efforts supplémentaires entermes de formation et de réactualisation des connaissances pour les agents, mais aufinal, ce mode d’organisation leur permet d’enrichir leur travail, de casser la routine etsurtout de développer et valoriser leurs compétences. Cependant, pour le cadre, il s’agitde bien évaluer le degré de polyvalence au sein de son service afin de ne pas mettre sescollaborateurs en échec. Ce fonctionnement nécessite en amont une évaluation sérieusequi porte sur les conséquences du travail de l’équipe, sur les aptitudes des collaborateurset sur la qualité du service rendu aux usagers. L’organisation actuelle du service que jedirige repose essentiellement sur la polyvalence de mes collaboratrices. Nous travaillonsen permanence sur notre fonctionnement, à savoir, jauger le degré de polyvalence eu égardà la nature des tâches, à la possibilité des agents. A titre d’exemple, nous ne pouvonsenvisager de pratiquer une polyvalence complète sur certaines activités comme la gestiondu cimetière communal au risque de commettre des erreurs. Au contraire, pour l’exécutionde tâches plus simples comme la rédaction des actes de naissances ou l’établissement destitres d’identité, l’ensemble de l’équipe est à même de répondre à la demande des usagers.La polyvalence comporte de nombreux avantages en directions des agents, nous l’avonsvu, mais aussi pour l’organisation qui devient plus performante. En effet, le décloisonnementde l’activité réduit les temps d’attente, et permet ainsi d’accroître l’efficacité des servicesrendus aux usagers.

39 Frédéric W. TAYLOR - école classique - la théorie des organisations « L’organisation scientifique du travail »40 Max WEBER école classique - la théorie des organisations « La Bureaucratie » rationalisation de l’organisation et le travaild’employé

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

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La mise en place d’une organisation de travail est une des nombreuses compétencesque l’organisation attend d’un cadre aujourd’hui, nous verrons plus particulièrement, que sapersonnalité et son comportement sont des atouts précieux dans la gestion d’équipes.

2.3 Les qualités et compétences attenduesLa nature des compétences que les organisations attendent d’un encadrant actuellementsont multiples et variées, néanmoins, nous avons vu qu’elles reposaient pour l’essentiel surses capacités à piloter sa zone de responsabilité et notamment ses équipes, c’est sur cepoint essentiellement que le cadre manager pourra asseoir sa légitimité. Cependant, il doitêtre également en mesure de comprendre et de s’adapter à son environnement. Il doit doncconnaître ses fondamentaux de gestion sans tomber dans l’expertise au risque de devenircomplètement inefficace, s’il privilégie ses connaissances techniques au détriment de sonmétier de manager.

La relation hiérarchique classique décision/ exécution a montré ses limites, lesévènements de mai 1968 les projets d’entreprises ont fondé les bases d’une véritabledémocratie d’entreprise et les administrations ne sont pas en reste d’autant qu’elles ne sontpas en mesure de jouer sur la précarité de l’emploi comme certaines entreprises du secteurprivé.

L’élaboration de démarches stratégiques et de leur pilotage dépend essentiellement dela volonté des collaborateurs qui ont appris à refuser l’autorité. Le processus de décisiona changé, et quelque soit le bien fondé, si les collaborateurs n’ont pas été consultés oumal consultés, la mise en œuvre de nouvelles actions sera tout simplement impossible.41Dece fait, pour progresser, l’organisation via le rôle du cadre, doit développer la confianceet l’autonomie de ses collaborateurs en construisant la décision collective, en donnant dela cohérence aux projets. Les cadres sont donc attendus sur leur capacité à entraîner etanimer leurs équipes et doivent développer principalement leurs aptitudes personnelles àgérer les relations humaines. Les caractéristiques de leur personnalité prennent une placeimportante et conditionnent en grande partie la réussite d’une équipe. Le management estune fonction à part entière nécessitant des connaissances techniques, qui pour être misen mouvement, devront s’accompagner d’aptitudes particulières liées à la personnalité ducadre manager.

Le schéma présenté en page suivante42 permet de visualiser l’ensemble des capacitésliées à l’exercice du management, mais comme nous venons de le dire, les capacités ducadre reposent autant sur l’appropriation des savoir faire et connaissance techniques, quesur ses capacités à mettre ses compétences techniques en action. La différence reposantsur son comportement.

Figure 3 : Les capacités liées à l’exercice du managementA consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut

d'Etudes Politiques de LyonL’interprétation de ce schéma, fait apparaître deux notions, celle de maturité

professionnelle et de maturité psychologique43 ; Ces notions s’entendent comme le réservoir

41 La Gazette 12 avril1999 « Il faut parier sur l’autonomie des agents » Marc SCHPILBERG, Consultant42 « Pilotage de l’action collective », cours dispensé par Norbert HEKIMIAN, Consultant, Maître de conférences associé à

l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon43 Etude RH &M N°26 Juin/Juillet 2007

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

26 Sylvie Frey-Gautier - 2007

de compétences techniques spécifiques, à savoir (gérer un budget, déléguer, évaluer sescollaborateurs, négocier, prendre des décisions, motiver, atteindre des objectifs) qui, croiséau réservoir des sources psychologiques, ( motivation, innovation, résistance au stress,gestion des émotions) conditionnent l’exercice de ce métier. Le niveau de maturité étantvariable d’une personne à l’autre.

Actuellement, l’expertise, la connaissance d’un métier technique, est moins recherchéechez un cadre manager que son aptitude à mobiliser, à communiquer et à entraînerles hommes et les femmes. En effet, l’encadrant, doit pouvoir mettre de côté sa propreexpertise, l’utiliser en cas de besoin, mais surtout savoir puiser dans ses ressources,réseaux, études, collaborateurs. La maîtrise complète des procédures n’est pas utile,cependant, le cadre doit connaître ses fondamentaux de gestion afin d’être en mesured’apporter une aide à la décision. En conséquence, il s’agit pour lui de se former (marchéspublics, finances, RH, urbanisme..) afin d’apporter un soutien à ses différents interlocuteurs,élus, agents, usagers, autant sur le plan technique que sur le plan managérial (gestion deprojet, évaluation…). Ses compétences doivent être complémentaires. En fait, il est un bongénéraliste, mais pas un expert, il doit même mettre son expertise de côté afin d’assurer unegestion globale de sa zone de responsabilité. Nous l’avons expliqué, l’exercice simultané dedeux métiers rend parfois difficile le métier d’encadrant et ce d’autant plus pour les cadresintermédiaires qui ont une part équivalente de métier technique et de métier de manager44.

En l’espèce, nous rencontrons assez souvent dans nos organisations, des cadres,juristes ou ingénieurs de formation qui consacrent une grande partie de leur temps detravail à leur métier initial et ne n’investissent que très peu dans le management de leur(s) équipe (s). De ce fait, ce mode de fonctionnement est à l’origine de certaines difficultésrencontrées par leurs collaborateurs qui se trouvent ainsi délestés d’une partie de leurstâches. L’inconvénient est de deux ordres : les collaborateurs perdent en compétences etl’organisation perd en qualité. Dans les faits, le glissement de fonction déresponsabilise etdémotive les agents. Au bout du compte, le rôle de coordinateur n’est plus assuré car lecadre manager est trop pris dans son expertise. Néanmoins, ce type de fonctionnementprovient directement de la culture des collectivités qui, jusqu’à présent, ont toujours mis enavant l’expertise individuelle comme critère de compétence, contre l’efficacité collective45.En conséquence, pour obtenir la reconnaissance professionnelle de leur travail et undéroulement de carrière satisfaisant, les encadrants, se canalisent en priorité sur leurexpertise.

Les collectivités locales misent sur les compétences et les qualités personnelles desresponsables d’encadrement, ceux-ci en retour, ont besoin de s’appuyer sur des méthodeset outils gestion qui les aident dans leurs actions quotidiennes et leur permettent de seprofessionnaliser davantage, donc de gagner du temps en structurant leur organisation. Letemps gagné étant ainsi consacré à une gestion qualitative des ressources humaines, plusproche de l’individu.

3. Les pratiques managériales : méthodes et outils de gestionLes critiques principales qui sont faites à l’administration aujourd’hui, encore, reposent surses capacités à se remettre en cause, son manque de dynamisme, ses difficultés à sortir

44 Serge HUTEAU « Le management public territorial » Editions PAPYRUS45 Frédéric PETITBON « Le guide du manager public » Editions d’Organisation

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d’une organisation classique au sens Wébérien46 du terme pour passer à une organisationparticipative permettant de fédérer et d’associer les acteurs à l’origine des performancesd’une organisation. Nous verrons que la mise en œuvre d’une gestion participative demandebeaucoup de réflexion et ne se décide pas subitement. La conduite du changement reposesur les capacités du cadre manager à en mesurer toutes les dimensions. Mais, une foisque ce travail est réalisé, il peut s’appuyer sur des méthodes et outils tels que la gestion deprojet, la délégation, la communication, qui , alliés à son style de management permettentd’assurer des marges de progression intéressantes. Par ailleurs, ils donnent une cohérenceet du sens à l’action individuelle et collective.

3.1 La mise en oeuvre d’une gestion participativeLes cadres managers ont en effet ce privilège exceptionnel de pouvoir imposer à leurscollaborateurs la mise en œuvre d’un management participatif alors qu’eux-mêmes parfoiscontinuent de suivre leurs penchants naturels. Il nous arrivera donc de trouver descollectivités qui pratiquent la participation, sauf au niveau de leur direction47…..

Le chemin qui conduit à la participation est long et difficile ; La mise en œuvre d’unegestion participative ne se décrète pas, elle se vit. L’acteur principal, c'est-à-dire le dirigeantdoit, avant de conduire le changement, faire une introspection en s’interrogeant sur sapropre motivation et sur la faisabilité de cette entreprise, au risque de commettre desdégâts. En effet, comment conduire le changement si nous ne sommes pas réellementconvaincus de sa nécessité ? C’est bien ici que se situe le cœur du problème, toutes lesbonnes intentions, méthodes et outils ne serviront à rien, si, à la base, le cadre managern’est pas convaincu de son utilité et n’a pas pris la mesure des choses. En effet, lapersonnalité du manager pèse de tout son poids dans ce genre d’initiative. Il serait doncutile qu’il s’interroge sur son propre style de management avant de vouloir en adopterun autre. Car, cela semble assez évident, le style de direction émane de la personnalité,donc, nous ne voyons pas comment l’on peut passer d’un style à l’autre (passage d’unstyle autoritaire ou permissif à un style participatif) sans avoir au minimum fait l’effortde se remettre en cause. Ce genre d’action ne s’improvise pas, il convient d’évaluer lesavantages d’un management participatif, mais également d’en percevoir les contraintes afind’être en mesure de les assumer par la suite. En effet quelle sera notre réaction face à ladécision collective ? Serons-nous prêts à arbitrer ? Car, ne nous leurrons pas, les difficultésne sont pas moindres. Le travail de groupe, s’il est bénéfique n’emporte pas moins deproblématiques à résoudre. La délégation, par ailleurs, implique une préparation soigneuse,qui requière de la clarté quant au transfert de responsabilités. D’où la nécessité de nepas changer brutalement de mode de gestion, ni de comportement, personne ne croirait ànotre métamorphose et l’adhésion de nos collaborateurs, serait au plus bas niveau. Mais,peut être faut-il procéder en douceur et en toute authenticité. L’un des cadres interviewélors de la préparation de mon rapport de mission suggérait ce comportement qu’il adoptalui même pour son organisation. Dans les faits, il a procédé par incrémentation, dès lorsqu’une idée émergea, le Directeur général des services tenta de la faire partager par lesdifférents acteurs, élus, cadres, techniciens et collaborateurs concernés. Ensuite, partant duconstat que l’équipe rencontrait des difficultés à conduire les projets, les cadres suivirent uneformation de cinq séances en méthodologie de projet qui permit de fédérer et d’introduire

46 Max WEBER école classique - la théorie des organisations « La Bureaucratie » rationalisation de l’organisation et le travaild’employé47 Serge ALECIAN et Dominique FOUCHER « Guide du management dans le service public » op.cit Robert LAPIN « L’art de diriger »Editions DUNOD 2006

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

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une culture commune. Désormais, chaque année, le bilan et l’évaluation des projets sontprésentés aux différents acteurs qui se sentent ainsi complètement impliqués. Cet exempleillustre la nécessité de ne pas bousculer les comportements mais d’essayer au contraire deles modifier doucement.

Nous présenterons les outils et méthodes inhérents à la mise en œuvre d’une gestionparticipative qui permettent au cadre manager de piloter plus sereinement sa zone deresponsabilité. Car nonobstant les difficultés énoncées, la gestion participative présente unintérêt certain dès lors qu’elle permet de stimuler les énergies humaines.

3.2 Méthodes et outils de gestions générant une organisation participativeLe tableau synoptique présenté ci-dessous synthétise certaines méthodes et outils degestion permettant à un cadre responsable de mettre en place un mode d’organisationfondé sur la participation des acteurs. Etant entendu que le style de management doitaccompagner le mode d’organisation.

Figure n°3 : méthodes et outils de gestion de type participatif

Communication interneDélégation Gestion de Projet Style demanagement

Organisationparticipative

*Groupesde travail/réunions *Supportsdecommunication *Nouvellestechnologies

*Confier desmissionsintéressantes

* Motiver leséquipes autourd’un projet

*Participatif *Leaderhipdémocratique

L’introduction progressive de nouvelles méthodes permet d’accompagner la conduitedu changement organisationnel, nous développerons ci-après les fondamentaux inhérentsà la gestion de projet, à la délégation, aux moyens de communication internes et enfin austyle de management approprié.

La gestion de projet est une démarche méthodologique qui a été introduitestructurellement dans l’entreprise au milieu du 20ème siècle pour conduire de grandsprojets. On admet que son origine date de la Renaissance italienne48 et qu’elle ne cessadès lors de s’enrichir et de s’adapter aux réalités économiques et technologiques. Il existeun lien étymologique et sémantique entre les mots projet et problème. On pourrait endéduire qu’il n’y a pas de projet sans problème ou que le projet doit donner une réponseà un problème posé. Le concept de projet49représente une action spécifique, nouvelle, quistructure méthodiquement et progressivement une réalité à venir pour laquelle, on n’a pasd’équivalent exact. Les trois sens du mot projet :

-Fonction de pilotage ou direction de projet

48 Roger AÏM « L’essentiel de la Gestion de Projet » GUALINO Editeur49 Enseignements « Gestion de projets » Martine CONCI, Jean Pierre CLAVERANNE, Université Lumière

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

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- Le programme de réalisation lui-même- L’objet final de la réalisation, le résultatLe projet permet de répondre à une demande élaborée pour satisfaire au besoin

d’un maître d’ouvrage. La demande peut concerner un objet physique, (équipement), ouun objet intellectuel, (une démarche qualité sur un service). Il permet de satisfaire unbesoin spécifique singulier et particulier par opposition à une production en série, l’objectifcomprend des délais, un début et une fin, le projet est plus ou moins innovant suivant les cas.

Il convient de préciser le contexte du terme « gestion de projet », pour Roger Aïm,« La gestion de projet est la terminologie utilisée pour caractériser l’ensemble des outils degestion qui doivent être mis à la disposition du groupe de projet pour conduire le projet, entermes : de performances techniques, de contrôle des coûts, de qualité, de maîtrise desdélais ». »En d’autres termes, c’est l’approche méthodologique qui permet au chef de projetde piloter le projet en ayant à tout instant la meilleure visibilité de l’avancement du projetet de ses points critiques ».

Le projet 50est une démarche généralement collective visant à atteindre un objectifdéterminé, à une certaine échéance et sous certaines contraintes, en mettant en œuvredes ressources financières, humaines, techniques, au travers une succession de tâches oud’opérations à réaliser. Chaque projet est spécifique.

En pratique, les collectivités locales introduisent progressivement la gestion de projet,mais rares sont les cadres qui connaissent la méthodologie. En conséquence, ils s’appuientgénéralement sur l’expertise des consultants. Pour autant, la gestion de projets a faitl’unanimité auprès des encadrants avec lesquels je me suis entretenue. Tous reconnaissentqu’il représente un levier efficace en ce qu’il permet de s’affranchir du système classiqueafin de passer à une organisation participative.

L’idée qu’il faille déléguer et responsabiliser les individus dans leur travail est diffuséeen France à la faveur des évènements de mai 1968. Depuis, la délégation est utiliséerégulièrement au sein du secteur public et privé. Mais, pour en entrevoir les bénéfices, ilest nécessaire de passer par la case formation. La délégation est un outil efficace dansla mesure où le délégant a mûrement réfléchi sa décision. Le cadre ne doit pas fairel’économie d’une préparation sérieuse intégrant plusieurs aspects. Une délégation doit êtrecorrectement structurée pour être efficace, le cadre manger doit notamment :

- Présenter la mission et les enjeux afin de mesurer le degré d’accord du délégataire,- Expliquer les raisons de notre choix : pourquoi cette mission, pourquoi lui ou elle,- Préciser l’objectif à atteindre et le niveau d’exigence qui s’y rattache, bien vérifier la

compréhension,- Définir le champ de la délégation, les limites, le pouvoir de décision, les délais,- Prévoir la collaboration : nature et fréquence des informations en retour,- Demander au collaborateur comment il compte s’y prendre pour aboutir, ce qui permet

d’enrichir la délégation,- Définir les moyens nécessaires,- Alerter quant aux difficultés rencontrées,

50 « Pilotage de l’action collective sur un territoire » cours dispensé par Norbert HEKIMIAN, Consultant, Maître de conférencesassocié à l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

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- Enfin prévoir un bilan.La définition des voies de délégation doit être claire et nette. Elle nécessite avant tout

de recueillir l’adhésion du collaborateur concerné. La mise en place nécessite un contact,une présence, un échange régulier. Le système fait que l’on a toujours besoin d’un retourne serait-ce que pour vérifier que les actions soient en cohérence avec la mission déléguéeou à un niveau plus élevé avec la politique de la collectivité.

Une délégation bien construite représente un effet de levier autant sur le plan humainque sur le plan organisationnel, car d’un côté, elle permet à l’agent délégataire de gagneren autonomie, de valoriser ses compétences et à l’organisation d’utiliser le temps de travaildu cadre pour d’autres actions à mettre en oeuvre.

La communication prend de plus en plus de place que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieurde nos organisations, la capacité à comprendre ses interlocuteurs et à se faire comprendredevient une priorité. La performance d’une organisation dépend en majeure partie de laqualité de sa communication qui contribue à renforcer le lien social et coordonner les actionsvisant à atteindre les objectifs locaux. Les outils de communication nombreux et variés neremplaceront jamais la volonté de s’exprimer ou de prendre le temps d’écouter autrui.

De ce fait, une des missions essentielle d’un cadre responsable d’équipes consisteà établir une communication efficace au sein de son organisation ou de son unité encréant les conditions nécessaires. D’un point de vue humain, la tâche n’est pas aisée,nous verrons dans la seconde partie de l’étude comment y parvenir. Pour l’instant, nousnous contenterons de passer en revue quelques outils de communication, qui, s’ils sontbien utilisés peuvent réduire les dysfonctionnements et aider à la mise en place d’uneorganisation participative.

La création de groupes ou réunions de travail, qu’il s’agisse de projets importants pourla collectivité ou de réunions de service internes, représente un moyen de communicationtrès pertinent en ce qu’il permet d’obtenir un niveau d’informations équivalent. Le travaildu cadre est encore une fois essentiel, son rôle est de donner du sens, de s’assurer de lacompréhension des acteurs et de rechercher leur l’adhésion en les associant au processusde prise de décision.

Dans le même ordre d’idée, les supports de communication internes au service (fichesde procédures), ou, à l’organisation (livret d’accueil, journal interne) puis, les nouvellestechnologies comme la messagerie interne permettent aux différents acteurs de posséderl’information, de la traiter et ensuite de l’exploiter.

A partir des années 30 «l’Ecole des ressources humaines » s’est développé en réactionà la conception taylorienne de l’entreprise. En effet, la fin du 19ème, et le début du20ème siècle, furent marqués par l’influence de cette théorie qui proposait un managementscientifique où l’autorité s’exerçait à travers la science. On parlait alors de l’Organisationscientifique du travail. L’entreprise devait, dans son organisation, se reposer sur uneapproche scientifique et rationnelle. C’était le rôle des ingénieurs dans leur bureau d'étude,de la hiérarchie, que de concevoir des systèmes de production efficaces. L’homme étaitalors considéré comme un outil de production. Face à cette vision beaucoup trop réduite del'être humain, des recherches ont mis en valeur les aspects psychologiques liés au travail.Les apports de Kurt Lewin51permirent d’aborder la conduite d’un individu ou d’un groupedans son « champ », cette notion, supposa que l’objet de l’étude soit appréhendé au traversdes relations qu’il entretenait avec les autres objets de son environnement psychologique.

51 Kurt LEWIN, 1890-1947, Directeur du centre de recherches pour la dynamique de groupe au Massachusetts Institue ofTechnology de 1944 à 1947

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L’idée centrale était que les phénomènes psychologiques devaient être conçus commes’exerçant dans un champ, l’individu était considéré comme étant plongé dans un « champsocial » identique à ce que serait un champ électrique en physique. Un des élémentsessentiels du champ social d’un individu étant le groupe auquel il appartenait. Les études deKurt Lewin sur le mode d’encadrement52 ont mis l’accent sur le fait que la relation supérieur/subordonné évolue avec l’interaction des individus concernés. Il mit ainsi en valeur le faitque l’homme développait, au sein de son organisation, des représentations sociales. Le lieude travail n'étant pas seulement un lieu de production, c'est aussi un lieu de significationspour les individus. A partir de cette période, se développe l'école des Relations Humainesqui dépassa une vision de l'homme comme outil et proposa une vision de l'homme commeun « être pensant ». Cette nouvelle vision de l'homme amène les théoriciens de cetteécole comme Douglas Mac Gregor53 et sa théorie X et Y, X pour l'entreprise autocratiqueet Y pour l'entreprise participative à affirmer l'importance de la prise en compte de la« dimension humaine de l'entreprise ». Pour que l'individu au travail soit plus performant,pour que le nombre de conflits diminue et que les objectifs personnels et organisationnels serapprochent, il faut développer un nouveau management qui respecte le besoin de chacund'être reconnu en tant qu'être humain. Nous assistons alors à la naissance du managementparticipatif. De nombreuses études ont montré l'influence de la collaboration entre dirigeantset collaborateurs sur les résultats. Une collaboration efficace implique l’intégration et laparticipation de tous les collaborateurs. Un dirigeant réussit d'autant mieux qu'il parvient àfaire participer ses collaborateurs dans l’élaboration des objectifs. En d'autres termes, uncadre manager qui réussit est celui qui pratique un "style de direction" participatif. Une étuderéalisée auprès de trois groupes d’enfants par Lippit et White54 permet de conforter cetteapproche. En effet, ils formalisèrent une typologie des différentes formes de leadership dansles organisations pour conclure que le leadership démocratique était supérieur au leadershipautoritaire et au leadership permissif. Le leader démocratique fait des propositions et lesnégocie avec les membres du groupe. Rensis Likert55 considéré comme le successeur deKurt Lewin poursuivi ses recherches dans plusieurs directions et proposa un modèle plussophistiqué de la gestion des organisations. Il lista cinquante et un traits caractérisant uneorganisation, sur chacun desquels se différenciaient quatre systèmes ou styles de gestion,à savoir, le système exploiteur autoritaire, le système autoritaire bienveillant, le systèmeconsultatif et enfin le système participatif de groupe56, dans ce dernier, la prise de décisionse fait réellement au sein des groupes de travail. Les enquêtes qu’il fit sur le terrain tendirentà démontrer la supériorité du style participatif. Si ces approches théoriques permettent dedémontrer que certains styles de management, et notamment les styles démocratiqueset participatifs permettent de dynamiser le groupe et d’impliquer ses collaborateurs. Ilconvient tout d’abord, comme nous l’avons précédemment évoqué de bien prendre encompte la personnalité du leader chargé d’encadrer l’équipe, car pour intégrer un stylede management participatif, il faut tout d’abord en mesurer les contours et être en phaseavec sa propre personnalité. En effet, le manque d’authenticité est le pire des maux.Les collaborateurs ne s’y trompent pas. Nous pourrions en conclure, qu’il n’existe pas de

52 Jacques ROJOT “La théorie des organisations Editions ESKA53 Douglas Mac GREGOR, 1906-1964, La théorie des organisations, Ecole des ressources humaines « Modèles de

management» Théorie X contre Théorie Y54 White, R and R. Lippit, Autocracy and Democracy, An experimental Inquiry ,Yorrk, Harper, 196055 Rensis LIKERT 1903-1981 La théorie des organisations, Ecole des ressources humaines « Les relations chefs/

subordonnés »56 Jacques ROJOT “La théorie des organisations Editions ESKA

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

32 Sylvie Frey-Gautier - 2007

style idéal de management, celui-ci émane de la personnalité du leader, de celle de sescollaborateurs et du groupe en son entier. Mais, par contre, il est nécessaire d’introduire lemanagement participatif au gré des moyens dont nous disposons.

Les méthodologies et outils ne doivent pas représenter la finalité de l’action mais lesmoyens pour la conduire. L’appropriation des outils, dispensée par une formation spécifiqueest essentielle, ensuite ce sont les aptitudes à mettre en musique qui feront la différence.

Par ailleurs, la mise en place d’une organisation de type participatif ne dépendpas uniquement de la motivation et de la volonté du cadre responsable, nous verronsplus tard dans le second chapitre que les dimensions politiques et culturelles ont uneinfluence majeure sur le changement organisationnel. Cependant, un réel changements’accompagne souvent par petites touches. L’expérimentation de ces méthodes et outilsde travail constituent en conséquence la première étape d’un long processus pour lescollectivités territoriales qui souhaitent progresser et changer de logique. A l’instar de l’Etat,elles s’engagent aujourd’hui à modifier leur comportement culturel en passant peu à peud’une culture de moyens à une culture de résultat.

4. La culture de résultats se substitue progressivement à une culturede moyens

S’approcher, puis s’imprégner d’une nouvelle culture ne s’improvise pas, il ne suffit pas dedécider pour que les résultats suivent. Nous verrons malgré tout que le cadre peut faireprogresser l’organisation ou tout au moins, à son échelle, une partie de l’organisation ens’appuyant tout d’abord sur des études qui permettront de déterminer les faiblesses et lesforces de sa zone de responsabilité afin d’introduire le changement s’il est nécessaire. Etensuite nous démontrerons comment il peut parvenir à piloter efficacement l’organisationou l’unité dont il a la charge en instaurant le contrôle de gestion.

4.1 Passer d’une logique de moyens à une logique de résultats

Les collectivités locales à l’instar de l’Etat aujourd’hui avec la LOLF57 s’attachent à initier etintroduire une culture nouvelle, celle du résultat. La LOLF58 est une loi organique relativeaux lois de finances, elle réforme en profondeur le budget et la gestion de l’État. Elle meten place des lois de finances plus lisibles et plus transparentes qui détaillent les moyensdes différentes politiques publiques présentées en missions et en programmes ainsi qu’unegestion plus performante par l’introduction d’objectifs et d’indicateurs de performances. Endéveloppant une culture de résultats, la LOLF permet de dépenser mieux et d’améliorerl’efficacité de l’action publique pour le bénéfice de tous : des citoyens, des usagers desservices publics, des contribuables et des agents de l’État.

Jusqu’à présent, les organisations publiques se préoccupaient davantage des volumesfinanciers qui étaient consacrés aux politiques publiques qu’aux résultats obtenus grâceà ces moyens. Désormais, les débats portent non seulement sur les moyens affectés,mais aussi sur l'efficacité des dépenses, par rapport à des objectifs définis pour chaqueprogramme politique. En s’inscrivant dans une logique de pilotage par la performance,ou en d’autres termes, en cherchant à améliorer l'efficacité de la dépense publique enorientant la gestion vers des résultats prédéfinis, l’administration publique s’engage à

57 La loi organique relative aux lois de finances du premier août 200158 Définition site du Ministère de l’économie des finances et de l’emploi

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

Sylvie Frey-Gautier - 2007 33

réformer sa culture et son fonctionnement. Le problème qui se pose aux administrations estcelui du difficile passage d’un fonctionnement basé sur une expertise juridique à l’exerciced’une compétence managériale59. Nous soulèverons ce problème récurrent au secondchapitre. Le défi qui se présente aux cadres responsables d’organisations publiques estbien d’appréhender et de se former au management public afin d’améliorer leurs résultatspuisque c’est sur ce point qu’ils sont attendus.

La culture du résultat monte graduellement en puissance bien que les collectivitéslocales au regard de la sensibilité des acteurs, élus, dirigeants mais aussi de la populationplus ou moins exigeante selon les territoires, n’en sont pas encore toutes arrivées aupilotage global par la performance. Mais l’exemple vient la plupart du temps par le haut,donc si l’Etat par la mise en place de la LOLF parvient à changer les comportementsculturels, il y a fort à parier que les collectivités locales qui ne sont pas en reste, tenteront detransposer ce dispositif en l’adaptant à leurs fonctionnement. D’ailleurs, plusieurs retoursd’expériences tendent à démontrer que, bien qu’elles ne soient actuellement pas contraintespar la loi, certaines collectivités essaient tout de même de l’expérimenter. La ville deLyon60, par exemple présente et vote son compte administratif en conseil municipal pargrandes missions. Ce qui a permet de ramener les débats sur les stratégies politiques.Ainsi, plutôt que de discuter le budget ligne par ligne, les élus lyonnais prennent désormaisdes décisions à partir des missions. La refonte de l’architecture budgétaire lancée en 2000a pour finalité de passer d’un environnement purement comptable à un cadre de gestionqui soit un véritable outil de management, permettant aux cinquante directions de déclinerleurs missions en programmes puis en opérations. Cette nouvelle structure budgétaire créeles conditions du pilotage des activités selon la logique Missions→ Objectifs→ Moyens.Au moment de la préparation du budget primitif chaque direction opérationnelle travaillede concert avec le service de gestion afin de définir les éléments d’aide à la décision.Cependant, l’envergure de la tâche nécessite plusieurs années de travail. Néanmoins,cette expérimentation crée les conditions d’une responsabilisation des acteurs et engagela collectivité dans la voie du changement de culture. Si ce changement est mis en avantactuellement, il convient de remarquer que les collectivités locales n’ont pas attendu l’Etatpour se préoccuper de leur gestion financière qui d’ailleurs est tout à fait saine. Depuisde nombreuses années, par l’effet des lois décentralisatrices, proximité, exigence desusagers, elles se sont inscrites dans des démarches d’amélioration de leurs servicespublics. Les thèmes d’efficacité, d’efficience et de qualité ne sont pas nouveaux pour cesorganisations. Cependant, elles doivent encore progresser car le déficit budgétaire del’Etat les concerne directement. En effet, l’Etat finance plus d’un tiers de leurs recettes,par ailleurs comme nous l’avons constaté plus haut, les transferts de moyens associésau transfert de compétences risquent fort de grever leurs budgets, notamment avec letransfert du personnel de la fonction publique d’Etat. En conséquence, les collectivitéslocales n’ont que le choix d’améliorer leurs performances si elles veulent garder uneimage dynamique et attractive, comme c’est le cas actuellement. C’est bien aux managers,qu’incombe la lourde responsabilité d’agir en conséquence. Donc, de conduire efficacementleur zone de responsabilité. Afin d’atteindre les résultats programmés, le cadre doit êtreen mesure d’intégrer toutes les dimensions du pilotage, à savoir la dimension stratégique,organisationnelle, la dimension économique et la dimension humaine. A cette fin, les outilscomme le diagnostic organisationnel et le contrôle de gestion interne vont lui permettre de

59 Evaluer la qualité et la performance publique » France Qualité Publique - La documentation française60 La Gazette, article du 26 septembre 2005 « Les collectivités qui adoptent la LOLF »

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

34 Sylvie Frey-Gautier - 2007

discerner et d’identifier les risques en temps réel et de mesurer les écarts entre les objectifsfixés et leur réalisation.

4.2 L’analyse de gestion : le diagnostic organisationnel comme outil dechangementDifférentes méthodes d’analyse de gestion peuvent soutenir l’encadrement dans saconduite d’actions. Nous présenterons, sur ce point l’intérêt de l’outil et les objectifs dudiagnostic organisationnel sans rentrer dans la méthodologie générale.

Le diagnostic61 a pour objectif de déterminer les dysfonctionnements représentant dessymptômes, d’en analyser les causes et de proposer des solutions.

La conduite de diagnostic s’inscrit dans un processus comprenant quatre étapes :- L’analyse- Le projet-La mise en œuvre- L’évaluationLe diagnostic organisationnel permet d’améliorer la compréhension d’un système.

Il s’adresse aux entreprises ou collectivités en difficulté. Il existe deux catégories dediagnostic :

Le diagnostic organisationnel tel qu’il a été conçu permet d’étudier demanière approfondie le fonctionnement d’un système en mettant en évidence lesdysfonctionnements inhérents à toute organisation. L’analyse des causes et de leursconséquences sur la qualité des services rendus et sur la performance économique etsociale donne un éclairage pertinent qui conduit à préconiser des actions correctives et àinitier le changement. Le diagnostic organisationnel interne s’attache à étudier plusieursdimensions :

- La stratégie et les résultats- Les moyens de l’organisation : humains, matériels, financiers- Le fonctionnement et le pilotage de l’activité : organisation du travail ; circuit

information /communication/ décision, méthodes de gestion et dispositif de contrôle interne- Le management des ressources humainesNous évoquerons à l’aide du schéma qui suit l’une des dimensions majeures de

l’organisation : le management des ressources humaines. En effet, il s’agit d’apporterune attention toute particulière à la dimension humaine du pilotage qui constitue une desconditions essentielle du changement culturel.

Figure n° 5 : Management des ressources humainesA consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut

d'Etudes Politiques de LyonEn seconde partie, nous développerons plus précisément la dimension du pilotage par

la performance et le rôle de l’encadrant.

61 Cours méthodologie du Diagnostic Organisationnel dispensé par Madame Anne BLANC-BOGE Maître de conférences deSciences de Gestion IEP de Lyon

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

Sylvie Frey-Gautier - 2007 35

4.3 Le contrôle de gestion interne au cœur du management

Nous retiendrons la définition du Professeur R. N. Anthony62, « père » de la disciplinequi indiquait en 1988 « Le contrôle de gestion est le processus par lequel les managersinfluencent d’autres membres de l’organisation pour mettre en œuvre les stratégies del’organisation ». En fait, il s’agissait pour lui d’une seconde approche, qui nous permetde comprendre l’évolution de la matière. En effet, en 1965, le professeur Anthony donnaitune définition quelque peu différente du contrôle de gestion : « le contrôle de gestionest le processus par lequel les managers obtiennent l’assurance que les ressources sontobtenues et utilisées de manière efficace et efficiente pour les objectifs de l’organisation ».

Le contrôle de gestion ne se réduit donc pas à une vision comptable, mais il s’adresseaux managers, en quête de résultats, qui pour les atteindre fixent des objectifs à leurscollaborateurs. A cet effet, il constitue un soutien pour les encadrants, il leur permet decomprendre l’avenir et agir en conséquence. Le contrôle de gestion aide aussi les cadresà orienter et maîtriser les actions de leurs collaborateurs et partenaires car il exige dedéterminer les missions des entités qui forment l’organisation et les moyens qui leur sontutiles. Donc, l’image du contrôle de gestion réduite aux outils utilisés, c'est-à-dire, tableauxde bord, gestion budgétaire, suivi de projets, planification des activités, règles et procéduresest faussée, car le contrôle de gestion interne est avant tout une démarche managérialeau service de la performance engageant la totalité de la structure et non pas seulementles contrôleurs de gestion. Les composantes du contrôle de gestion permettent au cadreresponsable de piloter efficacement l’organisation ou l’unité dont il est chargé. Il peut ainsi,

- maîtriser les coûts- aider à la décision (planification, mise en œuvre évaluation des objectifs)- connaître la qualité du service rendu- connaître le rapport entre la gestion des ressources humaines et les objectifs politiques- accompagner les démarches d’amélioration de l’action publique- communiquerSans faire l’inventaire des nombreux outils, nous citerons ceux qui sont le plus souvent

utilisés : les tableaux de bord, les bilans d’activités (CF annexe), les contrats d’objectifs, lacomptabilité analytique, la conduite de projet.

Nous ne reviendrons pas sur la conduite de projet précédemment évoquée, ni surles contrats d’objectifs qui seront traités au cours de la seconde partie de l’étude, maisnous présenterons le tableau de bord de pilotage intégrant différents indicateurs dontle bilan d’activités. Le tableau de bord est un outil d’aide au management qui regroupeles informations nécessaires à la coordination et à la synchronisation des activités d’unepart et, à la collaboration des différents interlocuteurs internes et externes d’autre part.Il permet au cadre manager de prendre des décisions fondées sur des éléments fiables.L’efficacité de cet outil dépend du choix de ses indicateurs qui devront prendre en compteles objectifs locaux assignés au service ou à l’organisation et délivrer les informations entemps réel. De ce fait, les informations doivent être mise à jour régulièrement. L’indicateurdoit être facile à réaliser et inciter à l’action. Le mode de présentation retenu tiendra comptedes préférences de l’utilisateur (données chiffrées, tableau, graphique, courbe….) et desdonnées qualitatives, (plan d’actions, fiche de décision...). L’indicateur sert à anticiper lesdysfonctionnements ou à les corriger en fonction des objectifs fixés. Un indicateur n’a de

62 Pr ANTHONY de HARVARD définition tirée de l’ouvrage d’Henri BOUQUIN Gestion PUF « le contrôle de gestion »

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

36 Sylvie Frey-Gautier - 2007

sens que s’il correspond à un objectif. Il permet de mesurer les écarts entre les objectifsprévus et les objectifs réalisés et surtout de contrôler leur trajectoire afin de prendre desdécisions d’ajustement en temps voulu. Le tableau de bord facilite le pilotage d’une zonede responsabilité, il permet d’avoir une vision globale de l’organisation et de croiser lesdifférents indicateurs pour prendre des décisions, mais aussi, pour communiquer. Lorsd’une nouvelle prise de fonctions, le cadre manager aura tout intérêt à prendre le temps deconstruire son tableau de bord. Le temps qu’il passera à choisir des indicateurs pertinentspour suivre l’activité de l’organisation ou de l‘unité dont il a la charge sera rapidementrécupérer. En effet, l’élaboration du tableau de bord comprenant la sélection d’indicateurset le recueil de données lui permettra d’intégrer plus vite les différents segments del’activité qu’il aura à gérer. Le tableau de bord et de pilotage de surveillance d’une zonede responsabilité peut contenir de nombreux indicateurs. Cependant, pour plus de lisibilité,le cadre manager devra les limiter, car le travail de mise à jour en temps réel risque dene pas être effectué faute de temps. A titre d’exemple, le cadre pour piloter son unité peutsélectionner la catégorie d’indicateurs suivants :

Gestion du personnel : répartition des tâches, fiches emploi/métier, congés, suivide l’absentéisme, grilles de compétences, plan de formation, dossiers d’évaluation dupersonnel, recrutements, comptes rendus de réunions de service.

Statistiques : bilans trimestriels, N/N-1, bilan annuel, calendrier prévisionnel.Budget du service : définition des priorités, préparation budget primitif, section

fonctionnement/section investissement N-1/N, décisions modificatives ou autorisationsspéciales, suivi de l’évolution, compte administratif N-1.

Plan d’actions : démultiplication des actions au niveau du service, planning prévisionnel,budget prévisionnel, suivi de la réalisation.

Dossiers en cours : courriers particuliers en attente, instructions dossiers transversaux,comptes rendu des décisions.

L’analyse et le contrôle de gestion sont couramment utilisés, surtout au sein desgrandes structures. L’analyse de gestion est le plus souvent confiée à un consultant externe.Ce choix représente un avantage dans la mesure où le consultant a plus de recul surla situation. Pour autant la connaissance de la méthodologie du diagnostic est un atoutprécieux lorsque l’on a en charge d’un service.

Le contrôle de gestion est un socle indispensable à la conduite d’une organisation, eneffet pour progresser, les différents acteurs ont besoin d’avoir une vision claire des niveauxde performances de leur unité de travail et de leur collectivité. Ces outils bien qu’ils semblentau premier abord réservés aux dirigeants doivent au contraire permettrent un partage desconnaissances et des informations entre les différents acteurs car c’est bien sur cette notionde partage et d’appartenance à une entité que se joue le changement de culture.

Nous consacrerons une part importante à l’étude du pilotage par la performance dans laseconde partie. Les termes performance et résultats se rejoignent quelque peu, à ceci prèsque pour faire être qualifié de performante une organisation doit obtenir de bons résultats,alors que le passage d’une culture de moyens à une culture de résultats ne signifie pas queles résultats atteints sont forcément bons.

La première section de l’étude nous a permis de démontrer que le cadre territorialse situe en première ligne et que l’organisation publique locale dans laquelle il évolue ade nombreuses attentes auxquelles il doit pouvoir répondre. L’environnement externe enperpétuel mouvement, les spécificités de l’organisation interne ont complexifié sa tâche. De

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

Sylvie Frey-Gautier - 2007 37

ce fait, la vision statique que l’on avait d’un encadrant, maître des lieux, donneur d’ordre etcontrôleur au sens strict de la gestion est aujourd’hui dépassée.

Pour assumer son rôle, aujourd’hui, le cadre doit s’adapter en permanence, intégrertoutes les dimensions de sa fonction et ne pas rester sur son expertise. Pour progresser etfaire en sorte que l’organisation suive, il doit miser avant tout sur ses propres facultés à initierle changement en puisant dans ses ressources l’énergie nécessaire à la compréhensiondu système afin de piloter sa zone de responsabilités, qui consiste pour l’essentiel, à aiderà la décision, à bâtir et assurer le suivi des plans d’actions tout en mobilisant la ressourcehumaine, seule ressource vivante, de l’organisation.

Face à l’envergure de ses missions, il n’est pas vain de dire que l’apprentissageaux méthodologies et outils de travail lui faciliteront sa tâche et permettront d’initierprogressivement le changement culturel pour passer d’une culture de moyens à uneculture de résultats. Mais, nous le verrons au cours de l’étude, le passage d’une logiquejuridico administrative à une logique managériale ne s’inscrit pas dans le bouleversement,synonyme de révolution, mais au contraire, par l’apprentissage graduel de nouvellespostures.

Nous avons vu que la fonction publique territoriale était une organisation récente,empreinte de dynamisme, et que l’image qu’elle rendait d’elle, actuellement, était plutôtpositive. Cependant, il reste encore des progrès à accomplir, car, nous le verrons, il existedes difficultés qu’il est utile de prendre en compte.

En effet, les dimensions politiques et culturelles tiennent une place prépondérante danstoute organisation. Mais, au sein des collectivités locales, elles sont encore beaucoup plusmarquées. De ce fait, les moyens d’actions des cadres peuvent être limités dans certainscas. Nous porterons tout d’abord une attention particulière à la nature du système politiqueet administratif, qui engendre certains dysfonctionnements. Ensuite nous démontrerons quele modèle juridico administratif, à l’opposé du modèle managérial participe d’une gestionrétrograde des ressources humaines. Enfin, nous mettrons en évidence les causes quisont à l’origine du manque de formation des cadres, nous retiendrons quelques initiativesactuelles permettant de pallier cette difficulté.

II – A QUELLES DIFFICULTES UN CADRE DOIT ILFAIRE FACE ?

Dans cette seconde section, nous tendrons à démontrer que les marges de manœuvre ducadre territorial peuvent être parfois réduites, voire anéanties dans certains cas.

En effet, la nature de l’organisation à la fois politique et administrative, l’ancraged’une culture par essence juridique générant une gestion des ressources humainespurement administrative dans certaines collectivités, conjuguées au manque de formationen management peuvent fortement entraver la conduite d’actions des cadres et ainsi limiterla performance des collectivités locales. Les difficultés que nous évoquerons ne constituentpas une généralité, néanmoins, elles existent et doivent être intégrées pour une meilleurecompréhension.

1. Le système politique et administratif

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

38 Sylvie Frey-Gautier - 2007

La nature hybride de l’organisation des collectivités locales, communes, départementsrégions et leurs groupements, provoque quelques fois une dualité hiérarchique63 qui placeles encadrants dans une situation très inconfortable, voire difficile. En effet, l’exercice del’autorité politique induit dans certaines situations un manque d’autonomie pour les cadres.Les élus confondent parfois leur rôle et s’ingèrent directement dans les services. Par ailleurs,nous examinerons la situation des cadres dirigeants, et notamment celle des DirecteursGénéraux des Services qui sont parfois à la merci du pouvoir politique eu égard à la précaritéde leur emploi.

Nous étudierons tout d’abord la structure hiérarchique des collectivités locales, et plusparticulièrement celle de la commune, pour ensuite comprendre pourquoi les cadres danscertaines situations rencontrent des difficultés. Nous évoquerons notamment le phénomèneque Stéphane Dion a appelé « la politisation fonctionnelle » c'est-à-dire l’interventionnismedes élus, problème délicat que nous aborderons avec le plus d’objectivité possible, mais quimérite d’être traité eu égard aux difficultés qu’il peut générer.

Enfin, nous aborderons le thème de la technocratie municipale décrite par StéphaneDion comme la possibilité pour l’encadrement administratif de concurrencer les élus etqui conduit certains dirigeants de premier niveau, notamment les Directeurs générauxdes services nommés sur des emplois fonctionnels64 à se retrouver face à une situationinextricable débouchant parfois sur une décharge de fonction. Cette situation renvoie àl’étude du pouvoir dans les organisations, l’ouvrage de Henry Mintzberg65 « Le pouvoirdans les organisations »66 permet de mettre en lumière certains modèles dominants. Nousretiendrons pour notre part, le modèle du pouvoir lié aux compétences spécialisées.

1.1 La structure hiérarchique des collectivités locales : éclairage sur lacommuneL’organisation des collectivités locales se caractérise par l’existence de deux filières l’unepolitique et l’autre administrative.

La première filière est composée d’élus locaux, les conseillers régionaux pour larégion, les conseillers généraux pour le département et les conseillers municipaux pour lacommune. La seconde composée du personnel administratif est placée sous l’autorité desDirecteurs Généraux des services.

Nous étudierons plus spécifiquement le cas de l’administration communale, car c’esttrès souvent au sein de cette organisation que naissent les différends liés à « la dualitéhiérarchique ». En effet, les relations entre les élus et les responsables administratifssont souvent en cause eu égard à la taille de ces structures. Malgré tout, des situationsidentiques à celles que nous allons évoquer existent également au sein des régions et desdépartements.

Figure n° 6 : la dualité hiérarchique à l’échelle municipaleA consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut

d'Etudes Politiques de Lyon

63 Stéphane DION « La politisation des mairies » Préface de Michel CROZIER Editions ECONOMICA64 Loi du 26 janvier 1984, décret du 30 décembre 1987 et du 9 février 199065 Ingénieur, est professeur de management à l’université Mc Gill de Montréal.66 Henry MINTZBERG « Le pouvoir dans les organisations » Editions d’Organisation

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

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Les rapports entre la structure administrative et la composante politique del’organisation municipale peuvent revêtir deux formes, l’une fermée, dans ce cas, l’éludélégué n’est pas autorisé à communiquer avec les services et il doit obligatoirement passerpar le Directeur Général des services. L’autre ouverte, ici, l’élu a toute liberté pour exercersa délégation en collaboration avec le personnel administratif.

La relation fermée correspond au modèle autocratique67 signifiant « une forme degouvernement où le souverain exerce lui-même une autorité sans limite » selon ledictionnaire. Cette forme d’autorité fait du Maire et de son Directeur Général des Servicesles gardiens du temple, chacun dans un rôle bien déterminé, le Maire est au centre de la viepolitique, il formule les demandes politiques et le Directeur Général des Services les traduiten termes de possibilités juridiques.

Le Directeur Général des services dirige les services, gère les équilibres et réguleles relations entre les élus et le personnel administratif, tout passe par lui, il détient uneconnaissance approfondie de tous les dossiers.

Le modèle autocratique nécessite une entente absolue entre les deux protagonistesMaire/Directeur Général des Services, l’essentiel des responsabilités s’exerce au sommetde la pyramide.

A l’inverse, le modèle collégial réduit le Maire à celui d’animateur d’une équipe d’éluset de fonctionnaires. Les missions du Directeur Général des Services se limitent à lagestion des services et plus particulièrement à la gestion du budget. Dans ce cas, il nefait plus l’intermédiaire, les responsables de l’administration sont conviés à participer auxcommissions d’études et aux réunions avec le maire et les adjoints concernés. Ils seréunissent régulièrement entre eux afin de rompre avec le cloisonnement des services.

Les difficultés du modèle collégial proviennent du fait que les filières politiques etadministratives risquent de se court-circuiter.

Les cadres peuvent occulter les élus au niveau décisionnel et les élus délégués peuvents’immiscer, voire diriger les services correspondant à leur délégation.

1.2 L’interventionnisme des élusDans certains cas, les élus placent aux points clés de l’administration des sympathisantspolitiques qui sont aussi des gestionnaires de confiance, ce phénomène caractérisé parStéphane Dion de politisation fonctionnelle, est assez bien accepté par les fonctionnaires àpartir du moment où il se limite aux échelons supérieurs de la hiérarchie.

La politisation fonctionnelle est impulsée par les élus afin de faire de l’administrationun instrument plus malléable, moins bureaucratique. Mais, ils se heurtent parfois à unerésistance interne. En conséquence, les élus essaient d’agir par le bais de différentesméthodes. La politisation fonctionnelle peut être intégrée soit par le biais des cabinetspolitiques, soit par des gestionnaires de confiance placés dans la hiérarchie administrative,ou par les élus eux mêmes. Nous laisserons de côté les deux premiers cas, qui, à la vuedes entretiens, et de la recherche documentaire nous conduisent à penser que la dernièresituation est plus souvent rencontrée, pour illustrer ce propos, nous nous inspirerons de laréponse apportée par Joseph Carles, Maître de conférences à Institut d’Etudes Politique deToulouse, dans un article paru dans la Gazette des communes68. A la question de savoir« Comment recadrer les élus qui ont tendance à se comporter en chef de service ? »

67 Stéphane DION « La politisation des mairies » Préface de Michel CROZIER Editions ECONOMICA68 La Gazette des communes, 19 février 2007, « Que Faire quand des élus ses prennent pour des chefs de service ? »

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

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Joseph Carles répond : « Lorsque les élus agissent tels des chefs de service, cela créeun vide politique généralement aussitôt comblé par le responsable administratif, d’où, uneinversion des rôles. Toutefois, la vision d’une séparation étanche, selon laquelle l’élu faitde la politique et le professionnel de la technique, est totalement inappropriée. Le schémapar lequel, l’élu ordonne et le chef de service exécute fait désormais place à une véritabledémarche de partage et à l’émergence d’espaces de gouvernance interne. Le chef deservice n’est plus seulement un maître d’œuvre, mais il devient aussi l’assistant maîtred’ouvrage assuré par l’élu. Cependant, lorsque l’élu est enclin à ne rien partager, il devientnécessaire de lui redonner envie de faire de la politique ! Il appartient alors au chef de servicede construire un dispositif visant à interpeller l’élu sur les valeurs et les finalités de l’actionpublique à entreprendre. Ce passage du mode de gouvernement ancien à la démarchede gouvernance est certainement le meilleur moyen de réduire les visions analytiques dufonctionnement des organisations pour ouvrir la voie à des approches plus systémiques ».Cette analyse très pertinente, envisage une solution idéale que les cadres n’ont pas toujoursla possibilité d’appliquer eu égard au contexte organisationnel et à la personnalité des élus.

L’interventionnisme des élus est une réalité à laquelle certains cadres managers sontquelquefois confrontés. Le changement d’attitude des élus, est une nécessité avérée, maiselle n’en demeure pas moins difficile à gérer pour les responsables de services qui ne sontpas toujours en mesure de faire adopter une autre vision à leur élu de tutelle. Effectivement,si l’on considère la mentalité et le fonctionnement de certains élus, nous sommes loinde pouvoir insuffler un autre mode de raisonnement (systémique plutôt qu’analytique).Une bonne partie de la solution, repose encore une fois sur le savoir être du cadremanager. Mais, pour l’élu, d’autres critères sont à prendre en compte, et notamment, lephénomène du « clientélisme ». En effet, la marge de manœuvre d’un cadre est parfoisconsidérablement réduite. Par exemple, lors des recrutements ou lors de la fameusenotation. L’élu, dans certains cas, dispose de toute latitude pour décider. Donc, mêmesi le responsable de service et la direction des ressources humaines considèrent danscertains cas que le recrutement de telle ou telle personne peut s’avérer infructueux d’unpoint de vue professionnel, l’élu à son mot à dire. Ce genre de situation, se reproduit encoreassez fréquemment et s’explique par la proximité et l’enjeu politique pour les élus. En effet,un résident employé dans une commune, peu se démultiplier en X électeurs potentiels.A titre d’exemple, un Directeur Général des Services intervenant auprès d’un organismede formation exposait que, dans la commune où il avait pris ses fonctions récemment,petite commune du sud de la France, plus des trois quarts de la population résidente étaitemployée au sein de la collectivité. Le Maire de cette commune l’avait justement recrutépour réformer complètement le fonctionnement interne des services. Plein d’ardeur et decourage au départ, il s’est vite trouvé confronté à des situations surréalistes provenant dela résistance du personnel. Malgré le soutien du maire, il se trouva à plusieurs reprises ensituation d’échec et envisageait une mutation. Ce cas, même s’il représente une caricatureet une exception reflète tout de même une certaine image de la réalité. Une réflexionplus poussée nous renverrait à l’analyse de l’histoire institutionnelle française. Mais, nousne sommes pas en mesure d’approfondir ce thème au cours de cette étude. Nous leverrons dans le prochain paragraphe, la dualité hiérarchique peut générer aussi une autreproblématique, celle du pouvoir des cadres issus de leur spécialité. Cette situation seconstruit à partir de l’hypothèse où se forme un conflit de pouvoir entre élus et fonctionnaires.Ce phénomène peut se retrouver à tous les niveaux hiérarchiques de l’organisation c'est-à-dire au sein du binôme, responsables de service/ élu en charge d’une délégation spécifique,mais elle est beaucoup plus marquée au dernier étage de la hiérarchie entre le Maire et leDirecteur Général des Services, car, à ce niveau, il n’y a plus d’autorité pour arbitrer. Cet

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

Sylvie Frey-Gautier - 2007 41

autre aspect des relations entre cadres et élus au sein des communes, peut être envisagésous l’angle de la technocratie municipale.

1.3 La technocratie municipaleSelon Stéphane Dion, « La technocratie municipale est un terme qui, dans son acceptionlarge renvoie au gouvernement de la société fondé sur une autorité froide et distante croyantdétenir le monopole de la connaissance ». « Mais, elle peut également être définie commeune relation de pouvoir entre l’élu et le haut fonctionnaire qui se joue de l’avantage de cedernier, au point qu’il se trouve en mesure d’investir le domaine de décision publique et demarginaliser l’élu ».

Cette situation crée un mouvement inverse à celui de la politisation fonctionnellepuisque le Directeur Général des Services ou plus largement, les différents niveauxd’encadrement peuvent tenter d’investir la sphère politique. Nous observons quelquefois,au gré des retours d’expériences de terrain ou à la lecture de certains articles professionnelsissus du contexte des collectivités locales, des faits, qui méritent d’être soulignés danscette étude, tant ils démontrent l’extrême fragilité des relations humaines à l’originedes dysfonctionnements. Pour expliquer ces problématiques, nous nous appuierons, surla situation des Directeurs Généraux des Services, situés au sommet de la hiérarchieadministrative qui travaillent en direct avec les Maire placés au sommet de la hiérarchiepolitique dans leur collectivité et qui sont également chefs du personnel municipal.

Les Directeurs Généraux des Services des communes de plus de 3500 habitants, sontplacés sur des emplois fonctionnels. En règle générale, ils occupent un cadre d’emploide catégorie A et bénéficient d’un détachement sur un emploi fonctionnel. Ces emploissont distincts des emplois occupés par les titulaires de la fonction publique territoriale.Le mode de recrutement peut être direct et se faire par voie contractuelle, donc sansconcours pour les emplois de direction générale des communes de plus de 80 0000habitants. Les intéressés doivent être titulaires au minimum d’un diplôme égal au bac +5. Ce mode de recrutement est également possible aux fonctionnaires placés en voiede détachement69. Cette possibilité est réservée à certains emplois statutaires au regardde la strate démographique de la commune. Le détachement est prononcé pour unedurée limitée, qui sans clauses spéciales est limité à cinq ans renouvelables. L’autorité,c'est-à-dire, le Maire, dispose d’une grande liberté pour mettre fin au détachement d’unfonctionnaire bénéficiant d’un emploi fonctionnel. Celui-ci peut intervenir en l’absence d’unefaute ou d’une insuffisance professionnelle. La procédure prévoit un entretien préalableet une information à l’assemblée délibérante du Centre National de la Fonction PubliqueTerritoriale, cette information doit citer le motif, mais, ce motif n’est pas attaquable.

En effet, les Directeurs Généraux des Services au sein des collectivités locales sontchoisis par le pouvoir exécutif, donc le Maire pour les communes. Ce choix reste àl’appréciation du Maire, et il est fondé sur une relation de confiance. En conséquence, c’estsur cette relation de confiance que reposent le recrutement et le cas échant, la fin de contrat.Souvent, la relation entre un Maire et un Directeur général des Services commence à sedétériorer lorsque l’élu craint que son plus proche collaborateur devienne trop puissant eu

69 « Procédure de détachement », Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et n° 84-53 du 26 janvier 1984, décret n°86-68 du 13janvier 1986.

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

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égard à ses compétences spécialisées70 car, il risque ainsi de lui faire perdre son influenceauprès des différents acteurs.

En effet, le pouvoir du dirigeant administratif est fondé en partie sur ses compétencesspécialisées. Au cours de ses recherches, Henri Mintzberg a formulé la thèse selon laquellel’influence d’un acteur dans la coalition interne était directement liée à ses compétencesspécialisées, du fait tout d’abord, de leurs complexités, elles ne pouvaient pas faire l’objetd’un contrôle, et ensuite, elles représentaient une nécessité absolue pour l’organisation.

Pour notre démonstration, nous pourrions dire que le Directeur Général des Servicesdispose dans la majorité des cas de compétences spéciales lui permettant d’avoir unevision globale sur l’ensemble des dossiers. Ses compétences, peuvent dans certainescirconstances, et notamment, lorsque la relation s’étiole avec l’élu, limiter l’autorité du maireet ses marges d’actions.

Dans cette hypothèse, l’élu craint la puissante de son collaborateur et commence àse défier de lui, c’est sur ce point que réside la problématique. La situation d’un DirecteurGénéral des Services est donc très délicate et son comportement n’est parfois pas du touten cause. En effet, le jeu et la personnalité des différents acteurs internes peuvent entraînerun conflit de pouvoir entre les deux protagonistes. Il semble donc urgent de donner unvéritable statut aux Directeurs Généraux des Services qui font preuve d’un investissementimpressionnant lorsque l’on connaît l’envergure des défis à relever actuellement, car ilsrisquent à tout moment d’être limogés sans motif valable.

La diarchie du pouvoir au sein des collectivités locales place les acteurs, élus et cadres,parfois, dans des positions très délicates qui ne permettent pas à l’organisation de conduiredes actions pérennes. Alors que l’on attend des cadres qu’ils prennent leurs responsabilitéset qu’ils s’engagent, on introduit ainsi des comportements contraires qui se traduisent par undéficit de management voire une déresponsabilisation des cadres territoriaux qui cultiventainsi le doute et la résistance et perdent toute leur énergie et leur motivation.

La politisation fonctionnelle et la technocratie ne sont pas non plus légion dans nosorganisations, mais lorsqu’elles s’instaurent, elles produisent des contre-performances.

Toute la difficulté pour l’encadrant intermédiaire se situe dans sa capacité à sepositionner entre la hiérarchie et les élus dans un contexte autocratique générant un manquede communication, ou collégial, impliquant trop de proximité.

Les cadres dirigeants quant à eux, n’ont d’autre choix qu’apprendre à trouver un justeéquilibre dans leurs relations à l’élu en faisant preuve de tact et de diplomatie.

2- Les limites en termes de gestion des ressources humainesLa gestion des ressources humaines représente le levier le plus puissant de lamodernisation des organisations publiques et notamment des collectivités locales.Cependant, elle est encore insuffisamment développée.

En effet, La culture juridico administrative n’a pas encore fait place à une véritableculture managériale.

Les directeurs des ressources humaines ne se sont pas encore affranchis d’une gestionpurement administrative et n’accompagnent pas suffisamment les services, et notamment

70 Henri MINTZBERG « Le Pouvoir dans les organisations » ; « Le système des compétences spécialisées » Editionsd’organisation

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Sylvie Frey-Gautier - 2007 43

les cadres chargés de manager des équipes. Les professionnels du management desressources humaines manquent de formation, ils ne se sont pas appropriés les processusqu’il convient de bien comprendre et maîtriser pour manager au mieux ces ressources queconstituent les hommes et les femmes qui composent l’organisation et qui permettent dela rendre plus performante.

Par ailleurs, les contraintes liées au statut limitent le champ d’action des cadres, en effetles modalités d’accès à la fonction publique territoriale manquent de pragmatisme malgréles incidences de la nouvelle réforme.

2.1 Difficile passage d’une gestion purement administrative à une gestionmanagérialeLes Directions des ressources humaines passent le plus clair de leur temps dans la gestionadministrative alors qu’ils devraient mettre en place un management stratégique. L’enquêteréalisée par le Cegos indique que dans les collectivités importantes les tâches sont répartiespour 46% à la gestion du service « paie et carrières », 22% à la formation, 17% auxconditions de travail et relations paritaires et seulement 15 % aux recrutements et à lamobilité. Cet état des lieux concerne principalement les organisations importantes quidisposent en règle générale de moyens en personnel suffisant, pour les petites et moyennescollectivités la situation est encore plus difficile.

La faiblesse de la fonction ressource humaine est très souvent mise en exergue, lesétudes renvoient à une gestion trop administrative, à un défaut de prospective et à unefaiblesse de l’évaluation individuelle.

L’origine de ces dysfonctionnements repose sur plusieurs axes. Tout d’abord, lemanque de vision stratégique, les élus ne définissent pas ou peu leur politique RH, ensuite,la culture des collectivités locales est marquée par une rationalité juridique au détrimentd’une culture managériale. En effet, le volet managérial est insuffisamment développé,notamment en ce qui concerne la formation des gestionnaires RH qui ne parviennentpas à se départir de la gestion juridique et administrative. Pour autant, nous verrons àtravers certains exemples, que les collectivités locales commencent à prendre la situation ausérieux, quelques unes sont d’ailleurs très en avance et font de leur GRH un véritable défi.

Cependant, dans l’ensemble, les collectivités locales, particulièrement les communes,nous l’avons évoqué précédemment rencontrent encore beaucoup de difficultés à réduireleur masse salariale. Celle-ci, représente en effet, plus de 50% en moyenne des budgetsde fonctionnements. Les collectivités essaient de réguler la part de budget consacrée aupersonnel par des micros actions, mais celles-ci restent trop marginales et ne parviennentdonc pas à résorber les dépenses de façon significative.

L’axe politique, de manière générale est insuffisamment développé, en effet les élus sepréoccupent surtout de savoir comment ils vont bien pouvoir diminuer le coût du personnel,mais sans véritablement en faire une priorité. Les raisons sont de deux ordres, tout d’abord,il y a cette problématique commune qui consiste peu ou prou à faire des recrutements auchoix. Comme nous l’avons évoqué, les élus sont tenus par l’aspect électoral, en prioritédans les petites communes ou le lien entre élus et usagers est très étroit du fait de laproximité. Ensuite, nous le verrons dans la seconde partie de l’étude, l’introduction d’uneculture managériale implique de définir clairement les orientations politiques, mais surtoutd’évaluer leurs résultats ; Or, en France et surtout à l’échelon communal, l’évaluation despolitiques publiques n’est pas encore rentrée dans les mœurs. Les élus décident le plus

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

44 Sylvie Frey-Gautier - 2007

souvent dans l’urgence et font fi des rapports et études qui les aideraient à prendre desdécisions.

Ce défaut de vision prospective génère des difficultés au niveau de l’encadrementet particulièrement au niveau de la gestion des ressources humaines. Les Directions desressources humaines naviguent à vue, sans objectifs prédéfinis, elles n’ont pas les moyensde gérer efficacement leurs ressources. De ce fait, elles ne sont pas en mesure d’évaluerles actions des agents puisqu’elles ne peuvent pas les relier à des objectifs clairementdéterminés.

Par ailleurs, l’histoire administrative française est marquée par une culture purementjuridique et administrative. A ce sujet, François de Closets dans son ouvrage, « Le pari dela responsabilité » souligne l’inflation de normes de plus en plus complexes et précises, quirendent la règle incompréhensible et inefficace et la maîtrise des procédures très malaiséepour les administrations. Ce qui, pour lui, réduit considérablement l’efficacité de l’actionpublique. En effet, il ne se passe pas un jour sans que l’on reçoive de nouveaux textes.De ce fait, les services, et notamment les GRH se retrouvent submergés par la productionnormative qu’elles interprètent avec beaucoup de difficulté.

Nous le constatons, nos administrations parviennent difficilement à intégrerd’autres modèles, que le modèle juridique au détriment du modèle managérial quis’impose actuellement au regard des exigences économiques et de la complexité desproblématiques. Nous présenterons dans le tableau ci dessous deux modèles classiquesde rationalité et de pilotage71 qui nous permettrons de comprendre les différences entre« rationalité juridique et rationalité managériale ».

Figure n° 4 : Deux modèles classiques de rationalité et de pilotage

Rationalité juridique Rationalité managériale Fondements Conformité à la loi Efficacité des actions Atteinte des

objectifs fixés Priorités Utilisation des

moyens Stabilité desstructures

Réalisation desobjectifs Valorisation du changement, de l’innovation, de lamobilité

Raisonnement Analytique/linéaire/déductif Synthétique/systémique Points d’application Ecarts à la conformité Problèmes : Obstacles/atouts Contrôle /Evaluation Respect des règles/contrôle

des programmes Résultats atteints/Evaluation desstratégies

Produit Application/sanction Organisation/performance/conseil

Cette représentation nous permet d’appréhender la logique de ces deux modèles etde comprendre l’utilité du modèle managérial. Nous constatons que le modèle juridiquese caractérise par le contrôle dans un environnement stable, il structure toutes lesbureaucraties. Le modèle managérial se traduit par l’évolution des pratiques et du pilotageau sein d’un environnement en constante transformation.

Dans les années 1980, pour le secteur privé et plus récemment pour les collectivitéslocales, la fonction Personnel, se transforme en fonction Ressources Humaines. Lechangement d’appellation constitue un changement de perspectives et de pratiques. La

71 CHEVALIER J, LOSCHAK D (1982) : Rationalité juridique et rationalité managériale dans l’administration française. Revuefrançaise d’administration publique, n°24.

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

Sylvie Frey-Gautier - 2007 45

conception d’un personnel considéré comme une source de coûts laisse place à laconception d’une ressource dont il faut optimiser l’utilisation72. Si cette vision représentedésormais une réalité contemporaine et partagée, toutes les collectivités n’ont pas encoreréussi à la concrétiser. Pourtant, nous l’avons constaté, une nouvelle approche de la fonctionressources humaines est réellement indispensable eu égard aux défis futurs. En effet, lesperspectives démographiques du secteur public à l’instar du secteur privé annoncent denouvelles problématiques qu’il faudra résoudre : la population en âge de travailler (entre16 et 64 ans) diminuera en France dès 2010, soit 40% des fonctionnaires73. Le besoin demain d’œuvre qualifié va également se faire ressentir si l’on considère les enjeux de plus enplus ardus auxquels les collectivités ont à faire face ; Par ailleurs, les attentes des agentssont aussi très variées, leur âge, leur niveau de qualification, leur ancienneté, leur parcoursprofessionnel impose une approche personnalisée de la gestion des ressources humaines.Puis, nous l’avons vu, les défis réglementaires ne cessent de progresser.

En conséquence, les directions des ressources humaines doivent être en mesured’adopter de nouvelles logiques, et notamment, s’adapter à leur environnement, mobiliserla ressource humaine, (nous développerons, ce thème à travers le rôle du cadre managerdans la seconde partie de l’étude), puis partager avec les différents niveaux d’encadrementla responsabilité sociale. Ces logiques sont fondées sur une réflexion stratégique qui setraduira pour les Directeurs des ressources humaines par la nécessité de procéder à uneprojection dans le futur de la situation actuelle de la collectivité en préparant les évolutionssociales.

Il convient, en conséquence, que les professionnels du management des ressourceshumaines travaillent sur la prospective par le biais de la gestion prévisionnelle des effectifset des compétences. La gestion prévisionnelle des effectifs et des compétences répondde plus en plus à la nécessité de prévoir les métiers où la pénurie d’agents guette afin demettre en place les dispositifs de recrutements et de formations ; Elle permet également deprendre en compte la pénibilité du travail et d’anticiper les reconversions, de repérer lespotentiels. Le Larousse définit la notion de potentiel comme « L’ensemble des ressourcesde tous ordres que possède en puissance un pays, un groupe humain une personne, unêtre vivant ». La notion de potentiel est inséparable de la notion d’évolution, en ce sens,nous retiendrons l’approche du courant théologique, pour qui, la notion de potentiel s’entend« comme le potentiel d’évolution ou le potentiel ultime d’un individu. La mobilité verticale etles promotions témoignant de l’existence du potentiel 74».

La GPEC permet d’assurer une veille prévisionnelle, puis d’alerter les élus lorsquecertains secteurs risquent de se retrouver en difficulté. Elle vise aussi à anticiper les coûtséconomiques et la mobilité professionnelle. La majorité des cadres interviewés se sontaccordés à dire que la mobilité représentait pour les organisations et les agents un puissantlevier de performance. Cependant, les collectivités ne sont pas toutes en mesure d’actionnerce levier. Effectivement, il existe des écarts considérables en termes de moyens d’actionsd’une collectivité à l’autre, selon que l’on se place du point de vue, d’une commune de petiteou moyenne importance, d’une région, d’un département ou d’une communauté urbaine,comme le « Grand Lyon ». En ce sens, les centres de gestion départementaux peuventapporter des solutions aux collectivités de petites tailles, puisqu’ils gèrent la bourse de

72 Jean-Marie PERRETTI « Ressources Humaines » EDITIONS VUIBERT73 Source CNFPT Formation interne74 Jean-Marie PERETTI « Ressources Humaines » Editions VUIBERT

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

46 Sylvie Frey-Gautier - 2007

l’emploi, mais leur soutien auprès des différents acteurs et notamment auprès des agentspublics en recherche de mobilité n’est pas suffisant pour l’instant.

Afin de mettre en mouvement les politiques sociales : gestion des compétences,dispositifs de formation, de rémunération, d’évaluation et de promotion, de mobilité, lesresponsables des ressources humaines doivent pouvoir s’appuyer sur des méthodes etoutils de gestion. Pour illustrer notre propos, nous présenterons succinctement, le bilan-diagnostic75 comme outil d’analyse d’une situation existante. Il consiste à effectuer untravail d’analyse et de description des fonctions existantes actuellement en se demandant,pour chacune d’entre elles, si les objectifs de la collectivité, par exemple la création denouveaux services destinés à la population (équipements petite enfance, développement dela culture….) peuvent être atteints avec les postes restant en l’état où, s’il est utile de les faireévoluer au niveau des compétences de leurs titulaires. Un autre outil, permet aujourd’hui degagner considérablement en efficacité, il s’agit de l’e-administration, c'est-à-dire de la miseen ligne des tâches et procédures administratives. Ainsi certaines collectivités commencentà travailler sur la dématérialisation des paies et des procédures telles que la transmissiondes arrêtés au contrôle de légalité en préfecture.

D’autres collectivités, comme le conseil général de Mozelle, déploient actuellementdes systèmes d’informations des ressources humaines pour obtenir une meilleure visibilitéet faciliter la gestion prévisionnelle des effectifs. Les services informatiques et ressourceshumaines travaillent au même rythme sur ce projet sur la base de la rédaction d’un cahierdes charges.

Les systèmes d’informations permettent d’avoir des éléments fiables en temps réel qu’ilest possible de croiser. Les collectivités ont recours à des assistants maîtres d’ouvrage pourmettre en place ce type de projet qui demande une certaine expertise, néanmoins, ce genred’outils est encore peu répandu, au sein des petites collectivités. En effet, aujourd’hui seules37%76 d’entre elles disposent de logiciels de gestion de carrière et de formation.

L’amélioration de la fonction RH passe par le développement de certains outils, maiselle repose en grande partie sur la professionnalisation des responsables des ressourceshumaines. Leur rôle, actuellement, consiste à conduire la politique de transversalité etd’avoir une approche globale des fonctions. Les défis à relever se situent sur la valorisation,la mobilisation et la capitalisation des richesses humaines plus que sur la gestion desressources humaines car il est utile de se projeter dans l’avenir et d’anticiper les besoins.

2.2 Les contraintes liées au statut limitent le champ d’action des cadresLe statut de la fonction publique est un des plus critiqués. Il était à l’origine destiné àprotéger les fonctionnaires des pressions politiques et des sanctions arbitraires. Mais,dans le contexte économique actuel, il permet essentiellement de leur garantir l’emploi.Cependant, cette protection prend parfois l’allure d’un privilège. D’autant que certainsagents publics savent tout à fait faire valoir leurs droits, mais, oublient quelques fois leursdevoirs. Le statut n’est pas propice à la prise de responsabilité et à la mobilité fonctionnelledes agents. Il génère parfois des inégalités. A titre d’exemple, le principe de séparationdu grade et de l’emploi ne favorise pas la prise d’initiative et contraint souvent des agentssurqualifiés, possédant un très bon niveau de formation initiale à se cantonner dans des

75 Jean-Marie PERRETTI « Ressources Humaines » EDITIONS VUIBERT Nicole AUBERT « Diriger et Motiver » Editionsd’Organisation

76 La gazette des communes, article du 23 octobre 2006

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

Sylvie Frey-Gautier - 2007 47

tâches routinières. Cette situation alimente la frustration des agents sous-employés et lesdémobilise. D’autre part, elle ne permet pas à l’organisation d’exploiter cette richesse77.

Par ailleurs, les agents qui rentrent parfois en phase de démotivation peuvent y resterde nombreuses années sans être réellement inquiétés. Ces situations provoquent desinégalités dans la répartition de la charge de travail et lorsque les cadres managers tententde recadrer la situation, ils le font souvent à leurs risques et périls. En effet, les responsablesn’ont pas de réels leviers d’actions et doivent parfois endurer des comportements inadaptésqui sont acceptés par la collectivité. Ces situations bien qu’elles restent à la margeparalysent l’action de l’organisation ou de l’unité de travail et desservent complètementl’agent concerné qui pourrait, par le biais d’un bilan de compétences, le suivi d’une nouvelleformation, envisager de se reconvertir ou d’évoluer au sein d’un autre service, ou d’uneautre organisation. Ce premier point mériterait d’être bien réfléchi. D’autant qu’il alimenteles conflits au sein d’une équipe, lorsque l’on sait que les agents sont très sensibles àla notion de contribution-rétribution et admettent difficilement l’injustice. Le statut permetconcrètement de sanctionner de tels comportements. Mais la sanction disciplinaire n’est pasla solution requise en pareil cas. Il faut au contraire pouvoir aménager le statut de façon àprovoquer la mobilité, car il est inconcevable aujourd’hui de laisser un fonctionnaire passerplus de quarante ans de carrières sur un même poste. Les cadres doivent pouvoir mobiliserle capital humain afin de ne pas encourager les agents à s’enfermer dans leurs habitudes.

Le recrutement par voie de concours produit aussi des contre performances. Ala base, il permet dans un souci de neutralité de vérifier les compétences des futursagents. Néanmoins, il favorise également l’inertie en matière de formation continue car lescompétences détenues à l’entrée dans l’administration, sont assez rapidement périmées, sil’on considère la rapidité des évolutions liées à l’environnement professionnel. La réussited’un concours, peut valider à vie les aptitudes d’un fonctionnaire ; Ce principe va à l’encontrede la responsabilisation des agents publics. Les concours sont par ailleurs, un frein à ladiversité, car en incluant des épreuves de cultures générales ils ne permettent pas toujoursde sélectionner des savoir-faire qui correspondent au travail réel des agents78.

Le statut ne facilite pas la gestion des compétences et produit trop d’inégalités,cependant, la réforme statutaire79 devrait permettre de dynamiser et assouplir un peu lesystème en donnant aux collectivités une plus grande capacité de gestion des ressourceshumaines afin qu’elles puissent faire face à leurs nouvelles responsabilités et au défidémographique qui s’annonce.

L’incidence de la réforme porte sur l’amélioration du déroulement de carrièredes agents, en leur permettant de valoriser leurs efforts de formation. L’expérienceprofessionnelle est aussi mieux reconnue et l’accent est mis sur la formation continue toutau long de la vie. Elle se concrétise par un droit individuel de formation le « DIF » sous laforme d’un crédit de 20 heures par an pour suivre des formations qualifiantes, à l’instar dusecteur privé.

Les agents de catégories C qui représentent les trois quarts des fonctionnairesterritoriaux vont désormais bénéficier de formations initiales relativement courtes quine présenteront pas de caractère scolaire et qui seront centrées sur l’environnementprofessionnel. Pour rendre la fonction publique territoriale plus attractive, la réforme va aussi

77 François de CLOSETS « Le pari de la responsabilité » Petite bibliothèque PAYOT78 Patrick AYACHE DGS Besançon la gazette 19 février 2007.79 LOI n° 2007-148 du 2 février 2007

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

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permettre aux collectivités de taille réduite de recruter des cadres confirmés et ainsi pouvoirleur proposer, sans qu’ils soient contraints de rejoindre une autre collectivité, une évolutiondans leur carrière. Le recours à des cadres administratifs et techniques de haut niveausera rendu possible dans les collectivités de moyenne importance afin de rendre la gestionpublique locale plus efficace. A cet égard, les petites communes, à partir de 2000 habitants,pourront recrutés sur des emplois fonctionnels, c'est-à-dire des Directeurs choisis librementpar le Maire.

L’accès à la fonction publique territoriale pour les personnes venant du secteurprivé sera également facilité grâce à la prise en compte au plan des rémunérations, del’ancienneté et de l’expérience acquise dans le secteur concurrentiel.

Le législateur n’a pas pu pallier toutes les difficultés inhérentes à la gestion desressources humaines au sein des collectivités locales, néanmoins cette réforme a le mérited’engager le changement.

Pour mobiliser le capital humain, les cadres doivent pouvoir travailler de concert avecla direction des ressources humaines. Cependant, ces services comme l’organisation touteentière d’ailleurs sont encore beaucoup trop submergés par la gestion administrative etparviennent difficilement à s’en départir, la culture juridique et administrative l’emporteencore sur la culture managériale, bien que certaines collectivités s’investissent beaucoupdans ce domaine. Le manque de formation des professionnels chargés du managementdes ressources humaines constitue une première cause, mais la raison du déficit de gestionrepose sur l’absence de stratégie politique. Les collectivités prises dans leur ensemble,ne définissent pas clairement leurs objectifs dans ce domaine, donc les directions desressources humaines ne peuvent pas déterminer de projet, assigner des objectifs et enévaluer les résultats.

Par ailleurs, les contraintes statutaires paralysent l’action de l’organisation et des cadresqui, pour répondre à la demande croissante de compétences spécifiques doivent pouvoirouvrir plus largement l’accès à la fonction publique. La réforme a quelque peu améliorél’évolution des carrières et les conditions de recrutement, néanmoins, il reste encore desefforts à fournir.

3. Les limites dues au manque de formation en managementLe manque de formation en management concerne tous les niveaux d’encadrement,nous le verrons, cette problématique renvoie à plusieurs causes, tout d’abord, la fonctionpublique locale et particulièrement les communes accusent un déficit sérieux en termes deressources humaines. En effet, le taux d’encadrement est très faible avec une moyenne de8% pour l’ensemble des collectivités et 6,6% pour les communes80, par ailleurs, il existeune forte disparité d’une commune à l’autre en ce qui concerne les marges de manœuvrefinancières qui contraignent les collectivités à maîtriser leur masse salariale, donc à fairedes choix qui pour le moment consiste à recruter très peu de cadres de catégorie A.

Cette situation récurrente génère des difficultés en termes de management. En effet,les cadres peu nombreux en poste au sein des collectivités de petite ou moyenneimportance ne peuvent se dégager facilement de leurs obligations professionnelles. Parvoie de conséquence, ils disposent d’un temps très limité pour se former. Lorsque l’onconnaît l’envergure de leurs missions et l’exigence accrue des différents acteurs, élus,collaborateurs et usagers, nous comprenons aisément que le manque de formation des

80 Source INSEE première n° 1056 Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

Sylvie Frey-Gautier - 2007 49

cadres est un obstacle sérieux pour les collectivités concernées qui voient ainsi leur niveaude performance, et au final la qualité de leurs services publics diminuer.

Par ailleurs, les différents acteurs, cadres dirigeants et cadres intermédiaires ont suivides parcours différents eu égard à leur âge et à leur formation initiale. Le concours constituela règle de recrutement dans la fonction publique qui permet d’accéder à un emploi,cependant, par nature, très généralistes, ils n’intègrent pas dans leur préparation le thèmedu management.

Nous tenterons de recenser en partie les causes du déficit de formation managériale etd’en évaluer les conséquences pour ensuite soutenir que les cadres responsables d’équipesdoivent pouvoir disposer du temps nécessaire pour se former aux pratiques et posturesmanagériales avant de prendre en charge la responsabilité d’une organisation ou bien d’uneéquipe.

3.1 Les communes accusent un déficit managérial sérieuxLe taux d’encadrement est déficitaire au sein des communes, en effet, les cadres decatégorie A exerçant des fonctions d’encadrement et de Direction sont en sous effectif,comparés aux structures comme les régions. De ce fait, les communes positionnenttrès souvent des cadres intermédiaires sur leurs services. Cette possibilité ne comportepas d’inconvénient majeur dès lors que les cadres de catégorie B qui ont en charge lemanagement d’un service disposent d’une formation managériale suffisamment solide.Mais, c’est assez rarement le cas. Cette catégorie d’agents assume parfois des chargestrès lourdes sans enseignements et formation appropriés.

Nous l’avons compris, le fait de placer des cadres intermédiaires sur des servicesrelativement importants, n’est pas une décision visant à promouvoir les agents de catégorieB, mais, ce choix d’opportunité provient essentiellement d’exigences budgétaires. Commenous l’avons évoqué au cours de l’étude, la part du budget de fonctionnement dévolu auxfrais de personnel, s’élève à plus de 50% pour les communes, par ailleurs, malgré la mise enœuvre de la péréquation, il existe de fortes disparités en termes de ressources financièresd’une collectivité à l’autre. Le raisonnement consistant à maîtriser les coûts économiquespesant sur la collectivité semble par conséquent logique. Néanmoins, la nécessité accruede s’entourer de cadres bien formés aux nouvelles pratiques managériales pourrait êtreenvisagée par les décideurs locaux, d’autant que le contexte des collectivités nécessite deplus en plus d’expertise au regard de sa complexité. Mais, le besoin d’encadrement est trèspeu évoqué lors des débats d’orientations budgétaires au sein des conseils municipaux. Ceproblème ne fait pas partie des préoccupations majeures. Donc, si la maîtrise des dépensesest un argument qui ne fait pas débat, il pourrait faire néanmoins l’objet d’autres stratégiesque celle communément employée par la majorité des communes consistant à compresserla masse salariale en réduisant le personnel d’encadrement.

Par ailleurs, les cadres managers, sont en prise direct avec les élus, leurscollaborateurs, leurs interlocuteurs externes et accumulent ainsi très souvent un niveaude stress important qu’ils parviennent difficilement à maîtriser. De ce fait, la gestion dutemps devient une priorité pour eux. Un Directeur Général des Services avec lequel jeme suis entretenue, exposait que sa fonction exigeait une présence permanente au seinde sa collectivité (8000 habitants), qui ne lui permettait pas de se former aux nouvellespratiques managériales. Pour illustrer ce propos, nous retiendrons l’avis d’un expert quiexplique la situation des Directeurs Généraux « Je note un déficit de management dansles collectivités, il s’explique en partie par le peu de formation reçue par les élus, malgré

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

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leurs responsabilités. Cela a un impact : ils usent les Directeurs Généraux81 ». Néanmoins,certaines collectivités locales, prévoient une ligne budgétaire consacrée à la formation desélus. Ce qui ne signifie pas, bien évidemment, que ceux-ci suivent des formations. En effet,pour une grande partie d’élus locaux retraités, la formation présente un problème, ce quipeut se comprendre, car s’engager dans un cycle d’enseignements spécifiques passé uncertain âge peut se révéler compliqué pour certaines personnes. Par ailleurs, les élus actifsmanquent de disponibilité.

En outre, le parcours des différents cadres managers d’équipes est très différentqu’il s’agisse de la jeune génération ou de cadres ayant une expérience professionnellenotable. Les premiers, lauréats de concours sont quelquefois recrutés sur des postes àforte responsabilité sans formation managériale préalable. Les concours, très généralistes,ne comportent pas d’épreuves relatives au management public. Ainsi, ces jeunescollaborateurs pleins de bonne volonté rencontrent tout de même un certain nombre dedifficultés à s’adapter à la réalité du terrain.

Pour une autre génération de cadres managers, la réactualisation des connaissanceset l’acquisition de nouvelles pratiques restent difficiles à programmer eu égard à leur chargede travail. La plupart des Directeur Généraux des Services interviewés sont juristes deformation et n’ont pas bénéficiés d’enseignements spécialisés relatifs au métier de managerlors de leur prise de fonction.

Donc, il ne s’agit pas de dire que les cadres managers ne sont pas formés, mais, il estutile de souligner que le déficit en formation managériale est important.

Au cours des entretiens, les seuls cadres qui ont eu un écart de vision entre ce qu’ilspensaient vivre sur le terrain et ce qu’ils ont vécus réellement, sont ceux qui ont suivi desenseignements spécifiques dans une école de management. Les autres se sont acclimatéset se sont formés « sur le tas ». Si, cette situation était presque normale, il y a quelquesannées, aujourd’hui, elle accentue les difficultés pour l’encadrant et pour l’organisation. Eneffet, au regard de la demande interne et externe, la formation constitue l’un des leviers deperformances qu’il ne faut surtout pas négliger.

3.2 Les cadres doivent se former préalablement à leur prise deresponsabilitéAu regard des problématiques diverses et variées mais surtout très complexes, les cadresdoivent pouvoir se former aux pratiques et postures managériales avant de prendre encharge une zone de responsabilité. A ce titre, les lauréats des concours de catégorie A ausein des huit filières, devraient pouvoir bénéficier d’un cycle d’enseignements spécifiquesavant d’intégrer un premier poste, à l’instar des administrateurs ; L’accent devrait êtremis sur le management des hommes et des femmes qui constitue une des donnéesessentielles. En effet, les cadres peuvent faire des dégâts involontairement, c’est doncsur cet aspect fondamental du management qu’il faut travailler en amont. Une préparationadéquate, diminuera les risques et mettra le cadre manager en position de confiance, carla connaissance permet de propager un comportement rassurant au sein des équipes.Ce qui positivera le climat social, en effet, les cadres managers peu sûrs d’eux diffusentinconsciemment leurs doutes et leurs craintes. Cette attitude génère très souvent descomportements inadaptés au management d’équipes. Les conséquences sur l’ambiancesont bien connues et se traduisent par un taux d’absentéisme et un taux de rotation marqués

81 La gazette des communes, 28 août 2006, article rédigé par Bruno LEPRAT, « Des directeurs généraux usés par les élus »Gilles WALLIS, consultant en management

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

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voire un désengagement total de la part de certains collaborateurs. Il n’existe pas de recettesmiracles, car les cadres managers sont seuls en mesure de remettre en cause les qualitésintrinsèques à leur personnalité, mais, des enseignements adaptés, suivis de mise ensituation permettraient aux cadres d’avoir les bons réflexes par la suite.

Nous retiendrons les actions entreprises par le Centre National de la Fonction publiqueTerritoriale et l’exemple d’une collectivité locale.

Certaines écoles de management, participent au développement des territoires82 etproposent des partenariats au Centre National de la Fonction Publique Territoriale. Celui-ci accepte volontiers, car ce type d’action correspond parfaitement aux objectifs nationauxconsistant à rapprocher le CNFPT des grandes écoles. Les conventions signées portent surdes masters « systèmes d’information et management » et « marketing des territoires ». Cesprogrammes sont compatibles avec une activité professionnelle et comprennent désormaisdes modules « management public ». Cette formation continue entend répondre d’une partaux besoins accrus de nouvelles compétences et d’autre part aux besoins en mobilité. Si, cegenre d’initiative est à souligner puisqu’elle permet de professionnaliser les agents, elle n’enreste pas moins difficile à envisager pour certaines collectivités qui n’ont pas la possibilitéde la financer. En effet, le CNFPT ne joue qu’un rôle de prescripteur et ne participe pas aufinancement de ce programme.

En conséquence, certaines collectivités locales mettent en œuvre, elles mêmes, desdémarches de formations internes à destination de l’encadrement. A titre d’exemple, leconseil général du Val d’Oise83 s’est lancé dans une démarche participative en initiantun nouveau dispositif visant à donner une « culture maison » avec pour fil conducteur,une charte de valeurs consensuelles, déclinées en attitudes managériales. L’ensemble del’encadrement a rédigé une charte commune qui contient des préconisations concrètes dansun document, par exemple, le respect de l’intégrité revient à « écouter, être disponible, avoirune communication explicite, partager l’information, mettre en valeur les résultats et progrèsdes collaborateurs ».

Cette initiative s’appuie également sur une étude comportementale, pour la conduire,le conseil général du Val d’Oise a fait appel à un cabinet spécialisé en ressources humainesdans la fonction publique. La formation a permis d’optimiser les comportements sansqu’intervienne un quelconque jugement et a permis aux cadres de progresser en confrontantleurs pratiques, construites, pour la plupart d’entre eux sur des mécanismes empiriquesrelatifs aux méthodes et concepts de management. Ils ont ainsi été en mesure de validercertains de leurs acquis et d’en modifier d’autres.

L’évaluation de cette démarche a montré que plus de 80% des managers sur unebase de 270 cadres, ont utilisé les outils d’objectivation des compétences (définition depostes, fiches métiers…) 65% d’entre eux considèrent que la délégation permet d’optimiserla compétence des collaborateurs; Le management par projets accroît l’autonomie, laresponsabilité et la motivation. Enfin, le développement du management par objectifs estdésormais reconnu comme prioritaire et donne de la lisibilité au lien entre les activités etles orientations stratégiques.

Ce type d’initiative permet à la majorité des cadres formés préalablement ou non aumanagement d’accroître leurs compétences globales « savoir faire et savoir être ».

82 La gazette 10 juillet 2006, article rédigé par Martine DORIAC83 La gazette 13 mars 2006, article rédigé par Martine DORIAC

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

52 Sylvie Frey-Gautier - 2007

Les collectivités à l’origine de ce type de démarche son très souvent des structuresimportantes. Pour les petites communes, il existe des solutions de formation pluspersonnalisées permettant aux cadres de bénéficier d’une prise en charge individuelle.Le « coaching » n’est ni du conseil, ni de la formation, ni une thérapie, mais cet outilpermet d’accompagner les cadres à l’évolution managériale en rapport avec l’exigenced’adaptabilité. Cet accompagnement, permet d’accélérer l’intégration des comportementset des compétences. Ce dispositif s’inscrit par voie de conséquence dans une logique dedéveloppement sur la base du volontariat84.

Le « Coaching » qui correspond à un accompagnement personnalisé, représente uneréponse pertinente aux nouvelles pratiques managériales et permet aux petites collectivitésde faciliter l’intégration de leurs cadres managers et de faire progresser ceux qui rencontrentdes difficultés particulières à gérer leur équipe de travail.

Pour les jeunes cadres préalablement formés au management il semble qu’un soutien,que l’on pourrait envisager sous la forme d’un tutorat serait très utile lors de leurprise de fonctions pendant quelques temps. En effet, eu égard à l’envergure de leursresponsabilités, les cadres dirigeants qui occupent, immédiatement après leur sortie d’uncursus universitaire, des fonctions importantes ont besoin de puiser dans l’expérience desplus aguerris.

Au regard de la diversité et des contraintes des différentes collectivités locales, il seraittrès utile de prévoir des formations préalables à la prise de fonction, basées essentiellementsur la psychologie du management et notamment sur des actions de formations permettantaux cadres managers de s’approprier les concepts liés au management opérationnel dansun premier temps, tels que, la communication, la gestion des conflits, la délégation etla responsabilisation des collaborateurs, la gestion du temps et du stress ; Puis dansun second temps, il serait indispensable qu’ils puissent appréhender les fondamentauxrelevant du management stratégique, à savoir, comment améliorer la performance d’uneorganisation ? Comment favoriser l’innovation et la créativité ? Comment motiver sescollaborateurs ? Comment développer son savoir être ? Comment devenir un cadremobilisateur ? Comment optimiser le travail d’équipe ? Comment évaluer et fidéliser lestalents de ses collaborateurs ?

L’expérience, montre que les erreurs managériales peuvent se payer pendantlongtemps car il existe un effet de mémoire collective au sein des organisations. C’estpourquoi, la formation en psychologie du management fait partie intégrante du métier decadre manager et devrait en ce sens, faire l’objet d’enseignements avant toute prise defonctions. La formation représente « la clé de voûte » de l’amélioration de la performanced’une organisation et plus encore pour l’encadrant qui se trouve en position de management.

Les collectivités locales doivent faire des choix d’opportunité. Combler leur déficitmanagérial constitue une priorité pour elles, et notamment pour les communes qui doiventpouvoir définir la stratégie, mettre en œuvre leurs projets politiques et les évaluer.

Par voie de conséquence, la fonction de management est centrale et relève dela responsabilité des cadres. Elle porte essentiellement sur le pilotage global d’uneorganisation ou d’un service et sur le développement des ressources humaines. Lemanagement est certes une question de compétences et s’apprécie comme un métier à partentière, mais c’est aussi une question de comportement, c'est-à-dire de qualités humainesde celui qui l’exerce. Un parcours de formation, plus orienté vers un accompagnement enpsychologie du management est sans nul doute un soutien nécessaire à tout cadre manager

84 La lettre du cadre territorial n°308, 15 décembre 2005.

PARTIE 1 : LE CADRE AU COEUR DU SYSTEME DE PILOTAGE DE L’ORGANISATION

Sylvie Frey-Gautier - 2007 53

d’équipes. Les collectivités ne peuvent pas faire l’économie de formations adéquates endirection de leur personnel, et particulièrement en direction des cadres qui ont à assurerdes responsabilités très importantes. Leur formation est donc une condition sine qua nonà la performance collective.

La première partie de l’étude a permis de mettre en évidence les problématiquesinhérentes au système public local et plus largement aux politiques publiques. Nous l’avonsvu, la fonction publique territoriale est en pleine transformation, car le management publicprend une importance considérable eu égard aux enjeux de société toujours plus prégnants.La fonction de cadre a dû accompagner cette mutation, de ce fait elle a considérablementévolué et se situe au cœur du système de pilotage des organisations. L’exercice de ce métierà part entière fait appel à de nombreuses compétences. Pour se réaliser dans sa fonction,le cadre manager doit pouvoir assumer librement ses responsabilités, être accompagnéet formé. Or, nous l’avons constaté, il rencontre parfois quelques difficultés à managerl’organisation ou l’unité dont il a la charge.

En effet, on attend des cadres qu’ils prennent des initiatives, qu’ils fassent preuvede pragmatisme et insufflent l’énergie nécessaire à la conduite de l’action collective,mais en contre partie, l’organisation ne leur donne pas toujours les moyens d’agir.L’interventionnisme des élus, le déficit en gestion des ressources humaines, leur manquede formation ne contribue pas à passer d’une culture de moyens à une culture de résultat.

Malgré tout, les difficultés énoncées dans la première partie du mémoire nereprésentent pas une constante. Dans leur ensemble, les collectivités essaient au contrairede moderniser leur organisation et de conduire le changement. Elles laissent aux cadresune certaine liberté d’actions en instaurant des relations de confiance. Les cadres eux aussipour la plupart, s’inscrivent dans une logique de changement car pour eux, le fait d’évoluerau sein d’organisations en pleine mutation représente une réelle opportunité.

Nous soutiendrons, dans la seconde partie de l’étude que le cadre peut améliorerla performance d’une organisation et faire effet de levier sur la performance humaine enapprenant à manager la richesse humaine. Mais il ne doit pas être animé uniquementpar une logique de résultats qui conduirait inévitablement à l’échec. Le cadre managerdoit établir des relations de confiance, basées sur le respect mutuel, et développer lescompétences de ses collaborateurs afin d’optimiser l’action individuelle et collective.

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

54 Sylvie Frey-Gautier - 2007

PARTIE 2 : LE MANAGER TERRITORIALEST- IL EN MESURE DE DEVELOPPERLA RICHESSE HUMAINE ?

Dans cette seconde partie, nous soutiendrons que le cadre manager joue un rôle moteur etqu’il peut parvenir à développer la richesse humaine, facteur primordial de réussite.

Dans un premier temps, nous étudierons la notion de pilotage et de performance ausein du système public local afin d’en comprendre les finalités. Ensuite, nous démontreronsque le cadre territorial peut se donner les moyens d’agir en instaurant une communicationefficace au sein de son ou ses équipes.

Enfin, nous verrons comment construire l’amélioration en créant de la valeur, entrouvant un style de leadership qui permette d’être clair quant aux finalités et aux objectifs dela collectivité, en créant un environnement interne propice à la réalisation de ces objectifs.

I. Piloter la performance au sein du secteur publiclocal

1. Pilotage et évaluation des performancesDans un premier temps, nous tenterons d’appréhender et de définir la notion deperformance, sa signification pour les collectivités locales et ses différentes dimensions, puisnous aborderons le thème du pilotage, c’est à dire le dispositif d’actions, qui, conçu au regardde la notion de performance, permettra d’atteindre les objectifs stratégiques prédéfinis parl’organisation. Nous verrons comment déterminer et décliner les objectifs stratégiques enles traduisant en plans d’actions par direction et/ou par service pour enfin s’exprimer enobjectifs individuels. A cet égard, nous évoquerons, le contrat d’objectifs personnalisés,outil d’évaluation, permettant d’activer et encadrer les énergies humaines à l’origine desperformances individuelles de l’organisation.

Puis dans un second temps, nous essaierons de définir et comprendre la nécessitéd’évaluer les performances individuelles et plus globalement, l’évaluation des politiquespubliques.

1-1 La notion de performance

Le concept de performance renvoie à plusieurs approches : pour Philippe Lorino85, « estperformance dans l’organisation tout ce qui, et seulement ce qui, contribue à atteindre lesobjectifs stratégiques ».

85 Philippe LORINO : « Méthodes et pratiques de la performance. Le guide du pilotage » les Editions d’Organisations, 1997

PARTIE 2 : LE MANAGER TERRITORIAL EST- IL EN MESURE DE DEVELOPPER LA RICHESSEHUMAINE ?

Sylvie Frey-Gautier - 2007 55

Dans le langage courant86, la performance est le fait d’obtenir un résultat, l’évaluations’effectue à deux niveaux : l’efficacité et l’efficience.

L’efficacité, se définissant comme le degré d’atteinte des objectifs fixés quels que soientles moyens utilisés, par exemple, réduire le taux d’absentéisme, respecter les échéances,l’efficience, se définit comme le rapport entre résultats obtenus et moyens engagés, elle estbasée sur deux indicateurs : le rendement, mesure en volume, par exemple traitement Xdossiers par jour, et la productivité qui exprime la performance en terme économique, et setraduit comme la valeur de la production par rapport à la valeur du travail mis en œuvre.

La performance ne s’inscrit pas dans une logique de rentabilité pour les collectivitéslocales, mais dans une logique de contrôle de gestion, le service public n’a pas de prix, masil a un coût qu’il convient de maîtriser.

La performance renvoie à la finalité de l’organisation, elle est étroitement liée à laconception du service public.

La performance Publique est une notion difficile à cerner, les objectifs des collectivitéslocales consistent à améliorer la qualité de leurs services, à maîtriser les coûts, à respecterles délais. Pour France Qualité Publique la notion de performance publique, c’est « réussirà obtenir la qualité voulue au juste coût ».

L’évaluation de la performance est relativement compliquée pour les collectivitésterritoriales. La capacité à la mesurer dépend de la fiabilité des outils, et notamment duchoix des indicateurs. La performance attendue d’une collectivité publique est différente decelle d’une entreprise du secteur privé, qui mesure facilement ses performances puisqu’ils’agit de performances financières.

En tout état de cause, la performance renvoie tout d’abord au système de valeurs età la finalité de l’organisation. La notion de performance d’une collectivité locale différerafondamentalement de la performance d’une entreprise du secteur concurrentiel. En effet,la première est guidée par la qualité de ses services, la seconde, par l’atteinte de résultatséconomiques.

Ainsi, il semble utile d’apporter un éclairage pour les collectivités locales et de bienassimiler ce que cette notion comporte comme nuance, selon que l’on que l’on se placedu point de vue du bénéficiaire, c'est-à-dire de l’usager, ou du point de vue du prestataire,la collectivité. En effet, la perception entre performance réalisée pour les collectivités etperformance ressentie pour les usagers est loin de toujours converger.

De ce fait, cette divergence de perception entrave le développement de la performanceet renforce encore la difficulté à définir ce terme87, car chaque acteur se trouve face à sapropre réalité. Par ailleurs, les agents publics locaux ne se sont pas encore approprié cettenotion, certains la rejettent complètement ; La plupart des agents sont encore imprégnésde la culture classique et ne veulent pas entendre parler des concepts émanant du secteurprivé. Les notions de performance renvoyant à la productivité, à l’efficience, à l’efficacité necorrespondent pas à leur idéologie. Pour eux, la différence de culture entre sphère publiqueet sphère privée est fondamentale et ne saurait emporter leur conviction, selon laquelle, lesecteur public ne peut être géré de la même manière que le secteur concurrentiel. Ensuite,le système public local devient compliqué à appréhender, les politiques publiques sont loin

86 Enseignements « Motivation - performance- Rémunération » dispensés par Madame Anne BLANC-BOGE Maître deconférences de Sciences de Gestion IEP de Lyon

87 La GAZETTE – Cahier détaché n°27/1893 du 2 juillet 2007 « L’amélioration des performances des collectivités territoriales »Etude réalisée par trois élèves administrateurs territoriaux.

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

56 Sylvie Frey-Gautier - 2007

d’être toujours claires. Donc, les cadres managers rencontrent des difficultés à donner dusens à l’action car sans objectifs correctement déterminés, ils ne peuvent pas piloter l’actionpublique et la mesurer.

La performance des collectivités locales peut être analysée selon plusieurs approchesqui tendent toutes vers la notion de qualité. Parmi les différentes définitions de la qualiténous retiendrons celle-ci : « La qualité est l’aptitude à satisfaire les besoins ou attentesexprimés ou implicites 88». La démarche qualité oriente toutes les activités de service ou deproduction vers un bénéficiaire ; Qu’il soit usager, client, citoyen, contribuable, particulier,professionnel, un autre service de la même structure, par exemple, les agents publics parrapport au service des ressources humaines ou de l’informatique, ce destinataire est à lafois la cible et le juge final de la qualité. Son avis prévaut sur celui du producteur, bienque ce dernier garde toute sa pertinence. La formulation la plus simple de l’évaluation dela qualité consiste à demander au destinataire s’il est satisfait de la prestation ; de ce fait,l’appréciation de la qualité comporte toujours une part de subjectivité qu’il est utile de retenir.

Pour France Qualité Publique, la qualité publique repose sur l’aptitude à satisfairele besoin d’intérêt général coproduit, à savoir, « L’aptitude d’une société à répondre auxbesoins implicites et explicites d’intérêt général des citoyens au juste coût », il s’agit doncde ne pas dépenser plus que nécessaire pour ne pas gaspiller l’argent public.

Par voie de conséquence, ce sont les décideurs locaux qui déterminent le niveau debesoin qu’ils peuvent ou veulent satisfaire et les moyens qu’ils affectent sachant que lalégitimité politique des élus est fondée, sur un régime représentatif. Les citoyens participentà l’élaboration de l’intérêt général en élisant leurs représentants aux différents échelons. Enoutre, ils participent à la démocratie en militant au sein des syndicats, des partis politiques,des associations. Le citoyen usager peut donner son avis dans différentes instances tellesque les conseils de quartiers organisés par les municipalités.

Selon France qualité publique, la qualité correspond à l’adéquation de l'action publiqueà la demande sociale. La qualité publique répond à l’intérêt général et à certainesspécificités.

- Elle concerne notamment les besoins d’une population identifiée sur un territoireidentifié.

- Elle est définie et évaluée du point de vue de l’usager/client/citoyen- Elle prend en compte le besoin global de l’usager/client/citoyen- Elle est coproduite avec les citoyens usagers et les agents publics- Elle prend en compte les effets induits sur l’environnement et sur la société- Elle évolue dans le temps- Elle intègre des intérêts contradictoires, des contraintes de moyens et suppose des

arbitrages.L’amélioration de l’action publique dépend essentiellement de l’évaluation qui permet

de mettre en lumière les points forts et les points faibles, à savoir, les insatisfactions, lesdéfauts, leur fréquence, par exemple le délai de traitement d’un dossier, le goût de l’eau, lesheures d’ouverture des services à la population, la qualité des repas servis au restaurantscolaire…..

88 « Evaluer la qualité et la performance publique ». La documentation française.

PARTIE 2 : LE MANAGER TERRITORIAL EST- IL EN MESURE DE DEVELOPPER LA RICHESSEHUMAINE ?

Sylvie Frey-Gautier - 2007 57

Les décideurs locaux recherchent ce qui satisfait, ce qui fonctionne et quelles sontles causes et les conditions de la réussite afin de pouvoir les reproduire ou les transposeret ainsi installer un cycle d’amélioration continue, par exemple, la mise en place d’unepermanence hebdomadaire en soirée d’un service destiné à la population dans une villecomprenant une forte majorité de personnes actives ou la mise en place d’un accueilenfance avant l’heure légale d’ouverture d’un groupe scolaire.

Le schéma89 présenté en page suivante permet de montrer les moments où lesdifférents acteurs peuvent juger de la qualité.

Figure n° 8 : types de résultats en fonction des acteurs impliqués dans la qualitéA consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut

d'Etudes Politiques de LyonL’action publique produit quatre types de résultats selon l’acteur qui en juge, il faut les

confronter pour mesurer et corriger les écarts.Du point de vue des bénéficiaires :- Le résultat attendu est ce que le citoyen souhaite trouver pour satisfaire son besoin,

par exemple, attendre moins de 10 minutes à l’accueil d’un service public, obtenir une placeen crèche ou un logement social…

- Le résultat perçu est la perception de ce qu’il a reçu, par exemple, il croit avoir attendumoins de 10 minutes, il a obtenu un logement en 10 mois, il a été bien accueilli. Maisces perceptions peuvent variées d’un citoyen à l’autre. Quoiqu’il en soit, il ne retiendrapas forcément l’expérience positive, mais se souviendra plus précisément d’un évènementnégatif.

Du point de vue des prestataires publics :- Le résultat voulu est la réponse que le service public se propose d’offrir suite à une

décision de la collectivité, par exemple, offrir une place à l’accueil enfance du matin ou dusoir aux familles monoparentales, réduire les délais d’attente au maximum à 15 minutes lesamedi matin pour un service population…….

- Le résultat réalisé est le résultat effectivement obtenu après mise en œuvre del’action publique, donc, il s’agit sur ce point de mesurer les résultats, par exemple, 98%des usagers ont attendu moins d’un quart d’heure à l’accueil, seulement 30% des famillesmonoparentales ont obtenu une place à l’accueil du matin.

Les bénéficiaires seront satisfaits si le résultat perçu correspond à leurs besoins, maissi à l’inverse, leurs besoins ne sont pas satisfaits, il conviendra de bien communiquer etrépondre clairement à leurs interrogations en démontrant qu’une action a été entreprise etque la collectivité s’engage à la faire aboutir.

L’évaluation d’une action publique ne peut donc pas porter uniquement sur le résultatde l’action et ses effets. Pour progresser, elle doit inclure le processus d’élaboration de ladécision. Nous aborderons ce thème par la suite, pour l’instant, il convient de porter notreattention sur le système de pilotage permettant de conduire l’action publique.

1-2 Le pilotage de la performance

89 « Le cycle de la qualité» Bernard AVEROUS, expérience déployée à la RATP. « Evaluer la qualité et la performancepublique ». La documentation française.

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

58 Sylvie Frey-Gautier - 2007

Le pilotage de la performance correspond au dispositif d’actions, qui, conçu au regard dela notion de performance, permettra d’atteindre les objectifs stratégiques de l’organisation.Nous retiendrons la définition de Philippe Lorino « le pilotage est une boucle entre stratégieet opérations : piloter, c’est déployer la stratégie en règles d’actions opérationnelles etcapitaliser l’expérience acquise dans l’action».

Le système de pilotage est donc fondé sur l’ensemble des actions, des moyenset méthodes qui permettent d’assurer une liaison dynamique entre la stratégie etl’opérationnel. Le pilotage présente deux volets, le volet déclinaison des objectifs et le voletretour d’expériences qui correspond à la capitalisation des expériences et à l’actualisationde la stratégie.

La notion de performance comporte différentes dimensions et s’articule autour dequatre pôles Territoire, objectifs, ressources et résultats90.

Figure n° 9 : les différentes dimensions de la performanceA consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut

d'Etudes Politiques de LyonLe territoire se trouve au centre de la notion de performance, car, c’est par rapport au

territoire que se justifie la finalité de l’action collective. La performance renvoie également àla conduite d’actions, c'est-à-dire aux objectifs définis par rapport aux besoins d’un territoireet aux résultats de l’action. Elle fait également référence aux moyens consacrés à l’actionpublique, et enfin au rapport entre ressources et résultats.

C’est autour de ces quatre pôles, territoire, objectifs, ressources et résultats quechacune des cinq dimensions, cohérence, impact, pertinence, efficacité et efficience vonts’articuler.

- Cohérence : réalisme des objectifs stratégiques définis au regard des besoins dedéveloppement du territoire,

- Impact : influence réelle de l’action de la collectivité sur les préoccupations dedéveloppement et les enjeux liés au territoire,

- Pertinence : adéquation des moyens mis en œuvre au regard des objectifs,- Efficacité : capacité à atteindre les objectifs locaux préalablement définis, qu’il s’agit

de comparer aux résultats obtenus.- Efficience : rapport entre les moyens mis en œuvre pour arriver à ces résultats et

ressources engagées.Pour piloter la performance d’un territoire, il convient tout d’abord de définir les objectifs

locaux pour les inscrire ensuite dans une démarche générale consistant à déployer lastratégie à tous les niveaux de l’organisation.

La définition et la déclinaison des objectifs locauxLes objectifs locaux se rapportent tout d’abord, aux compétences dévolues à chaque

échelon territorial, communes, départements et régions et ensuite aux besoins exprimés ousous-jacents des acteurs vivants sur ce territoire.

90 Schéma présenté page 388 « Le management public territorial », les différentes dimensions de la performance, SergeHUTEAU Editions PAPYRUS

PARTIE 2 : LE MANAGER TERRITORIAL EST- IL EN MESURE DE DEVELOPPER LA RICHESSEHUMAINE ?

Sylvie Frey-Gautier - 2007 59

Cependant, la finalité de l’action publique locale ne peut se concevoir qu’à travers l’offrede service destinée à satisfaire au maximum les usagers/consommateurs, mais, elle doitégalement prendre en compte, plus largement, l’intérêt général.

Pour les élus locaux, il s’agit en conséquence de concilier ces deux visions que sontl’intérêt général et l’offre de services plus personnalisés, correspondant à la demande desusagers/consommateurs. L’axe politique devra en conséquence se construire sur la basede ces deux exigences. Néanmoins, les caractéristiques de l’intérêt général vont obligerles décideurs locaux à prendre de la distance pour agir de façon durable et globale. Donc,nonobstant les problématiques liées à la durée des mandats locaux, il s’agit pour les élusde définir leurs objectifs à moyen terme et de manière globale, c'est-à-dire dans tous lesdomaines et dans la limite géographique de leur territoire.

Les élus locaux sont en charge du développement de leur territoire, mais pour que leursorientations politiques se concrétisent, ils doivent nécessairement définir leur stratégie etla formaliser afin qu’elle puisse être démultipliée à tous les niveaux de l’organisation, sansquoi, les résultats ne seront pas probants. Mais, l’absence de stratégie est encore le lot denombreuses collectivités locales.

En conséquence, comme nous l’avons évoqué au cours de l’étude, le cadre managerdétient un rôle prépondérant. En effet, il se situe à la jonction de la mise en œuvre de l’actionpolitique et administrative. Il est à ce titre un « acteur clé » et doit aider les élus locauxà définir clairement les besoins territoriaux en puisant dans ses ressources au moyen dedifférents outils permettant d’initier la prospective territoriale. Le cadre manager s’appuieranotamment sur des études comparatives, des enquêtes de satisfaction, des comptes rendude réunions de quartiers, des formations qu’il aura suivies, de sa participation à différentesconférences, de la lecture des différentes documentations........ Bref, il devra se tenir informéet formé en permanence afin « de ne pas perdre le fil » eu égard à la rapidité des évolutions.

De cette manière, il aidera les élus à définir les besoins et prendre des décisionsstratégiques compatibles avec les possibilités de la collectivité, en termes de ressources etde cohérence. Ensuite, au regard de sa place au sein de l’organisation, il s’agira pour lui detraduire les décisions stratégiques en objectifs puis en activités à mettre en œuvre dans sazone de responsabilité. Cette démarche aboutit à une gestion par objectifs. Chaque niveaud’encadrement participe pleinement à la déclinaison stratégique des décisions au sein deson unité, s’il est cadre intermédiaire ; Ou bien de l’organisation toute entière s’il fait partiede la Direction générale.

Dans l’hypothèse où l’action ne concerne qu’une seule unité de travail, une directionou un service, les objectifs intermédiaires et activités à mettre en œuvre seront déclinésau sein de chaque unité de travail. Par contre, si l’action concerne plusieurs services oudirections, ou associe des services de la collectivité avec des partenaires extérieurs, ilsera nécessaire de passer d’un mode de gestion hiérarchique classique, à un mode degestion par projet. La construction d’un ouvrage, par exemple, un équipement destiné à lapetite enfance, sollicite de nombreux partenaires, techniques, administratifs, sociaux (maîtred’œuvre, caisse d’allocations familiales, services sociaux du département, région ….). Entout état de cause, qu’il s’agisse d’une gestion hiérarchique traditionnelle ou d’une gestionde processus par projet, il conviendra de mettre en place une démarche descendante dedéclinaison d’objectifs afin d’en assurer la convergence.

Le schéma suivant permet de visualiser la démarche globale visant à décliner lesobjectifs par niveau et montre que les cadres dirigeants et intermédiaires aident à ladécision, coordonnent et démultiplient les objectifs en plans d’actions et en actions

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

60 Sylvie Frey-Gautier - 2007

concrètes au sein de leur zone de responsabilité et auprès de leurs collaborateurs au moyende contrat d’objectifs personnalisés.

Figure n°10 : démarche globale de déclinaison des objectifsA consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut

d'Etudes Politiques de LyonLe programme d’actions politiques est lié aux compétences et contraintes de la

collectivité, il est formalisé en objectifs à moyen et long terme (1)Ensuite, la Direction met en place des processus de gestion, la réflexion porte sur

les moyens d'actions, c'est-à-dire des études d’opportunité et de faisabilité qui devrontprendre en compte toutes les dimensions. C'est-à-dire, les dimensions organisationnelles,humaines, juridiques, techniques y compris la dimension économique (2)

A ce stade, les élus arbitrent, dégagent des priorités et planifient leurs objectifsstratégiques au moyen de plan d’actions stratégiques (3)

La Direction démultiplie ces objectifs en actions concrètes à court terme au niveau desdirections et des services (4)

Ensuite, ces actions concrètes sont déclinées en plan d’actions par direction ou parservice (5) et font l’objet de contrats d’objectifs personnalisés (6)

Chaque direction et service déterminent les moyens à mettre en œuvre à son niveau etparticipe à l’élaboration des projets. A partir d’un objectif général, sont définis les conditionset moyens d’actions associés à cet objectif. Cependant, la démarche de déclinaison desobjectifs n’est pas seulement liée au système organisationnel, elle dépend également dusystème d’animation.

1-3 Le contrat d’objectifs personnalisés comme outil de gestion desressources humainesNous l’avons vu, les plans d’actions stratégiques correspondant au programme politiquesont déployés au sein de toutes les directions et services concernés par des objectifs àatteindre. Néanmoins, les actions rentrant dans ce processus doivent pouvoir s’exprimer enobjectifs opérationnels par direction ou par service eu égard à l’importance de la collectivité.Si les objectifs stratégiques peuvent faire l’objet d’une définition globale, la déclinaison enobjectifs opérationnels par service devra obligatoirement se traduire en plans d’actions,c'est-à-dire à l’ensemble des actions élémentaires permettant d’atteindre ces objectifs.

Cette démarche de déclinaison des objectifs constitue également un dispositif d’actions,appelée « Direction par Objectif ». La Direction par objectif introduite par Peter Druckerdans les années 1950 est fondée sur la démultiplication des objectifs qui doivent avant toutêtre compréhensibles. La Direction par Objectif est un style de management qui nécessitela mise en place d’un dispositif de coordination horizontale pour plus de cohérence. PeterDrucker, insista particulièrement sur l'importance du rôle des managers dans la réussite del'entreprise avec cinq points principaux : fixer des objectifs, organiser le travail, motiver etcommuniquer, mesurer la performance, former les salariés. Dans le cadre de la Directionpar Objectifs, chaque collaborateur et son hiérarchique discute de l’atteinte des objectifssans outils précis avec l’idée sous-jacente d’un contrat signé ou d’un engagement formalisépar objectif.

Le mécanisme de démultiplication des objectifs permet aux cadres de managerla performance individuelle de leurs collaborateurs. En ce sens, le contrat d’objectifs

PARTIE 2 : LE MANAGER TERRITORIAL EST- IL EN MESURE DE DEVELOPPER LA RICHESSEHUMAINE ?

Sylvie Frey-Gautier - 2007 61

personnalisés est un outil pertinent de gestion des ressources humaines qui permet destimuler, d’encadrer et de piloter la production des performances. Le contrat d’objectifspersonnalisés n’entre pas dans la logique statutaire basée uniquement sur les procédurestraditionnelles de notations administratives91 qui aboutissent, à ce que, sauf faute lourde,chaque agent se voit gratifié d’une note élevée qui garantit uniquement l’avancement. Lecontrat d’objectifs personnalisés représente au contraire un outil dynamique permettantau cadre manager d’évaluer les performances individuelles de ses collaborateurs et à lacollectivité d’asseoir la notation traditionnelle, l’avancement et le régime indemnitaire surles performances réalisées.

Le statut de la fonction publique territoriale, très conservateur, comporte des procéduresd’évaluation des personnels complètement dépassées, qui génèrent un managementégalitaire basé sur le système de notation formelle, distinguant normalement la valeurprofessionnelle de l’agent, mais en pratique il distingue surtout l’ancienneté au détrimentdes performances. En effet, les règles de notation sont de nature statutaire et il n’est paspossible de s’y soustraire. De nombreuses collectivités se sont interrogées sur la pertinencedes critères réglementaires pour évaluer les agents. Mais, tous les contentieux ont concluà l’illégalité des systèmes imaginés, même avec l’accord des différents partenaires sociaux(ville de Chambéry, Saint Denis, Nantes par exemple)92. La notation est une appréciationportée sur la valeur professionnelle du fonctionnaire, elle se compose d’une appréciationgénérale et d’une note chiffrée établie selon une cotation de 0 à 20. La notation influesur les avancements d’échelon et de grade, elle peut également jouer un rôle dansle cadre d’une procédure disciplinaire. A cet égard, le conseil de discipline s’attacheratoujours à connaître la personnalité de l’agent incriminé en s’appuyant sur les fiches denotation antérieures et particulièrement sur les appréciations non chiffrées. La compétenceappartient à l’autorité territoriale, mais pour tenir compte des considérations pratiques dansune grande collectivité, des délégations de compétences sont accordées aux élus et auxdirecteurs généraux et leurs adjoints, cette habilitation leur permet de noter les agents.

La notation des fonctionnaires territoriaux ne favorise pas l’équité et ne permet pasaux cadres managers d’évaluer véritablement les performances humaines. Lors d’uneformation collective relative à l’évaluation des personnels, dispensée par le Centre Nationalde la Fonction Publique Territoriale, nombreux sont les cadres managers d’équipes quiont fait part de leurs remarques voire de leur consternation face à cette procéduredevenue complètement inappropriée et désuète. En effet, nous retrouvons des notesallant jusqu’à 19, qu’il s’avère très difficile de réviser. En effet, depuis l’arrêt Camara93 lesnotes sont des décisions faisant grief, et à ce titre, elles sont susceptibles de recours. Lejuge administratif n’exerce qu’un contrôle restreint comprenant l’erreur de droit et l’erreurmanifeste d’appréciation. A ce titre, il examine la concordance entre la note chiffrée etl’appréciation générale, puis la réalité des faits qui ont prévalu à la notation ainsi que lesconséquences sur la carrière de l’agent.

Dans les faits, le système de la notation ne laisse pas beaucoup de marge demanœuvre aux responsables et en pratique l’agent qui ne donne pas satisfaction obtiendrala même note régulièrement chaque année.

91 Le principe de notation est posé par le statut général des fonctionnaires (titre I, article 17 de la loi du 13 juillet 1983 portantdroits et obligations des fonctionnaires).

92 La gazette 8 novembre 2004 « La notation des fonctionnaires territoriaux »93 Conseil d’Etat, 23 novembre 1962, AJDA 1962, page 666 à 687

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62 Sylvie Frey-Gautier - 2007

La procédure formelle de la notation traditionnelle méritait d’être explicitée et nouspermet maintenant de mettre en exergue la pertinence du contrat d’objectifs personnalisésqui introduit la notion d’équité, de reconnaissance et se concrétise par le développement durôle des cadres en termes d’évaluation de leurs collaborateurs.

En outre, il est un outil de mise en œuvre des stratégies et de communication permettantla décentralisation coordonnée des objectifs et la mise en œuvre des politiques et desstratégies de gestion des ressources humaines94.

Les objectifs individuels sur lesquels pourront être basés une partie de l’évaluationannuelle des agents devront être précisément définis. Il est utile de définir lescaractéristiques d’un objectif avant de présenter la procédure d’évaluation des agentsrentrée en vigueur avec la loi du 2 janvier 2002.

Un objectif renvoie à deux notions : une notion de commande passée et une notion deperformance. Définir un objectif suppose donc une réflexion préalable sur les contraintes detravail et les moyens à mettre en œuvre. L’objectif doit ensuite pouvoir être exprimé dansdes termes permettant de suivre le niveau de réalisation de la commande passée95.

Avant de contracter avec son collaborateur, le manager devra avoir mûrement réfléchiaux conséquences de l’engagement bilatéral. En effet, un objectif doit être compréhensiblepour le collaborateur, réalisable et mesurable. Le but est de faire progresser l’organisationpar le biais de ses acteurs. De ce fait, le cadre manager doit co-élaborer le contrat avecson collaborateur afin de ne pas mettre celui-ci en difficulté. La vigilance d’un cadre doitporter sur plusieurs critères, et notamment sur l’environnement de travail et les moyensnécessaires à la réalisation des objectifs, à savoir :

- La vérification des contraintes matérielles : organisation du temps de travail ;équipement nécessaire.

- L’analyse des compétences requises : aspect qualitatif, quelles sont les compétencesindividuelles à améliorer et les formations éventuelles à prévoir.

- définition des objectifs du collaborateur à partir des objectifs de l’unité de travail etde son profil de poste.

Les objectifs doivent être libellés très précisément et très clairement de manière à nelaisser place à aucune ambiguïté quant aux résultats attendus. De ce fait, ils doivent êtremesurables.

Nous porterons notre attention sur la notion de mesure des performances individuellesdans le cadre de la procédure d’évaluation que nous allons présenter dans le prochainparagraphe.

L’engagement des acteurs sur une base contractuelle permet aux cadres managers defiabiliser le management d’équipes. En effet, le contrat d’objectifs personnalisés instaureplus d’équité, cette notion représentant une valeur fondamentale pour les agents. Parailleurs, il permet de piloter efficacement la production de la performance humaine lorsqu’ilest lié à l’obtention de primes, à l’avancement et à la notation. Les cadres disposent d’unoutil contractuel qui dynamise les énergies humaines, ce contrat, peut aussi parvenir, d’unecertaine manière à débloquer certains comportements figés ou inadaptés que l’on rencontrequelquefois au sein de nos organisations.

94 Cours dispensé par Anne BLANC-BOGE, Maître de conférence de sciences de Gestion à l’institut d’Etudes Politiques deLyon « Motivation – Performance – Rémunération »

95 Serge HUTEAU « Le management public territorial » page 396

PARTIE 2 : LE MANAGER TERRITORIAL EST- IL EN MESURE DE DEVELOPPER LA RICHESSEHUMAINE ?

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La notion de performance pour les collectivités locales reste difficile à déterminer. Ellerenvoie essentiellement à la qualité des services publics sur un territoire géographiquedonné. Cependant, l’évaluation de la qualité des services publics s’établit au regard desrésultats attendus et perçus par les usagers et de ceux souhaités et réalisés par leprestataire, qu’il est ensuite nécessaire de confronter pour une meilleure compréhension etpour plus d’objectivité.

La clarté de la définition des objectifs locaux conditionne le pilotage de la performancequi s’inscrit dans une démarche générale consistant à déployer la stratégie à tous lesniveaux de l’organisation au moyen de plans d’actions. Les cadres managers, au regard deleur position au sein de l’organisation participent à la définition des objectifs en aidant lesélus à prendre des décisions et en déclinant les projets en actions concrètes à l’intérieurde leur zone de responsabilité. Le contrat d’objectifs personnalisés bien construit, basé surl’atteinte de résultats est un outil pertinent en ce qu’il permet de responsabiliser les acteurs.

2. L’évaluation des performances individuelles et collectivesNous porterons une attention particulière à la notion de mesure des résultats, et notammentà la procédure d’évaluation individuelle des fonctionnaires territoriaux instaurée depuis peudans les organisations publiques. L’évaluation des agents est nécessairement à relier auxobjectifs locaux et aux plans d’actions mis en œuvre dans le cadre des politiques publiques.Par voie de conséquence, nous évoquerons la nécessité d’évaluer les politiques publiqueset nous verrons que la culture du résultat n’est pas suffisamment introduite en France.La notion de mesure est bien acceptée des décideurs locaux à partir du moment où lesrésultats ne sont pas publiés. Il reste en conséquence un travail important à faire en termesde formation et de culture.

2.1 La procédure annuelle d’évaluationLe contrat d’objectifs personnalisés est à dissocier de la procédure d’évaluation annuelle,bien qu’il puisse y être relié. Le décret n°2002-682 du 29 avril 2002 relatif aux conditionsgénérales d’évaluation, de notation et d’avancement des fonctionnaires de l’Etat offre unnouvel outil qui a trouvé toute sa place dans le contexte de la gestion publique locale.A cet égard, l’évaluation des fonctionnaires territoriaux participe d’une même logiqued’engagement et de retour sur des objectifs préalablement fixés. La recherche d’unearticulation et d’une mise en cohérence de cette démarche d’évaluation par la déclinaisondes objectifs collectifs du service au niveau individuel est un moyen de donner un sens àl’action publique et de responsabiliser plus fortement les acteurs. Sur le principe, l’évaluationdonne lieu à un entretien annuel entre chaque agent et son supérieur hiérarchique direct.Au cœur de cet entretien se trouve l’examen des résultats obtenus par l’agent au regarddes objectifs fixés. Cet examen doit évidemment tenir compte du contexte de réalisationdes objectifs au travers des conditions d’organisation et de fonctionnement du service. Lamesure des résultats suppose que les objectifs individuels aient été définis au préalable, etsurtout que les indicateurs de résultats aient été bien choisis. Ce qui présente souvent desérieuses difficultés. Lors de la mise en œuvre d’une procédure d’évaluation, les questionsqui se posent à la collectivité reposent essentiellement sur les critères d’évaluation à définir.C'est-à-dire sur le système de valeurs partagées par les différents acteurs, leur permettantde se repérer et de comprendre le sens de leurs actions. Les valeurs d’une collectivitédiffèrent du fait des politiques générales, des projets, des logiques de management etd’organisation. L’évaluation permet à chacun de se situer sur une même échelle de valeurs

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mais à des niveaux différents et dans des termes différents96. En règle générale, les éluset cadres dirigeants suivent une formation spécialisée avant la mise en œuvre de cetteprocédure, puis travaillent en concertation avec l’ensemble des évaluateurs sur la mise enplace d’indicateurs communs, mais adaptables aux différents corps de métiers exercés ausein de la collectivité. De ce fait, le choix des indicateurs de mesure varie d’une collectivitéà l’autre. Les cadres managers sont donc préalablement formés et disposent quelquefois,d’un guide pour les soutenir (CF exemple d’un guide de l’évaluateur en annexe).

La mesure des résultats est basée sur des critères prédéfinis par la collectivité, ensuite,c’est au cadre manager, supérieur hiérarchique direct de l’agent, qui le connaît et suitson action au quotidien, qu’il revient de définir des objectifs au terme d’une discussionapprofondie menée avec l’agent au cours d’un entretien individuel. Ceux-ci doivent êtreconcrets, rattachés directement au travail de l’agent, pour qu’il puisse se les approprier.Ils doivent être mis en cohérence avec les objectifs définis dans le cadre de l’activitérégulière du service ou d’un projet collectif, c'est-à-dire un objectif stratégique ou un projet deservice. Il s’agit en conséquence de déterminer la contribution de chaque collaborateur auxobjectifs collectifs déclinés au niveau individuel. La fixation des objectifs sera facilitée par ladéfinition préalable des missions de l’agent, au moyen d’une fiche de poste ou d’une ficheemploi métier (CF annexe). Par rapport aux objectifs, qui donnent un contenu dynamique àl’action de l’agent, la fiche de poste ou la fiche emploi métier, se caractérise davantage entermes d’attributions, de missions, dans le cadre desquels les objectifs peuvent être mis enmouvement. En conséquence, l’entretien d’évaluation a un caractère global. En effet, au-delà des seuls résultats obtenus, il porte sur les compétences, la formation, les perspectivesde carrière et de mobilité des collaborateurs. Il permet donc d’envisager une perspectiveà moyen et long terme. L’entretien d’évaluation ne se substitue pas encore à la procédurede notation traditionnelle, mais il la complète. Par ailleurs, il génère en principe l’attributionde primes à nature variable. A titre d’exemple, au sein de certaines collectivités, l’entretiend’évaluation déclenche un régime indemnitaire fondé sur deux éléments, le présentéisme etla manière de servir. A l’instar du contrat d’objectifs personnalisés, il permet de dialoguer, deconstruire l’amélioration. Hormis, l’aspect individuel, l’évaluation permet au cadre managerde faire un point sur le fonctionnement de son service. En effet, les discussions avec sesdifférents collaborateurs peuvent mettre en évidence des atouts dans le fonctionnementcomme des propositions d’évolution qui permettront de lancer des idées d’amélioration.

Afin d’illustrer notre propos, nous retiendrons l’expérience de la commune d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis)97 80 021 habitants et 2560 agents qui s’est engagée dansun chantier d’envergure consistant à initié une nouvelle procédure d’évaluation fondée surla définition d’objectifs individuels. Pour entreprendre cette démarche, les élus et dirigeantsont eu recours à la méthodologie de projet. Par ailleurs, la Directrice Générale des Servicesa su fédérer tous les acteurs, le Maire, l’élu en charge des ressources humaines, l’ensemblede la Direction générale et toute la collectivité. L’engagement des différents acteurs surce projet a permis de porter l’action. Le rôle de la Direction des Ressources Humainesa été prépondérant. Par ailleurs, la formation des 250 évaluateurs formés à la fixationd’objectifs a également permis la réussite de cette démarche, selon la Directrice Généraledes Services, « Les agents ont très bien accueilli cette réforme et de nombreux cadresétaient demandeurs d’un changement de système de notation ».

L’évaluation, considérée globalement, est un véritable levier d’action comparé ausystème de notation administrative classique, mais c’est surtout un acte de management

96 http://journal.coherences.com/article.php3?id_article=15897 La gazette 25 septembre 2006 « A Aulnay, chaque agent sera évalué en fonction d’objectifs individuels »

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très sensible qu’il est nécessaire de bien préparer. Ainsi, le cadre manager devra s’organiseren conséquence, et se préparer matériellement et psychologiquement à cet entretien98,c'est-à-dire croire à l’utilité de cet acte et en faire un moment privilégié qu’il sera nécessaired’anticiper. Cependant, nous l’avons vu, pour être pertinente, cette démarche nécessited’être reliée à une forte volonté politique des décideurs locaux. Sur ce point, ce typed’initiative est parfois rendu particulièrement difficile, car la notion d’évaluation a bien dumal à prendre place dans la réalité, et surtout l’évaluation des politiques publiques, car pourévaluer le personnel, il faut tout d’abord pouvoir lui fixer des objectifs, qui devront émanerdirectement des orientations stratégiques. Ces orientations auront elles mêmes fait l’objetd’une évaluation préalable.

2.2 L’évaluation des politiques publiquesLes élus sont favorables à l’évaluation qui consiste pour eux à mesurer l’efficacité publique,mais ils en craignent les résultats qui risquent de les renvoyer à leurs propres défaillances99.La culture du résultat ne reporte pas encore un grand succès en France. L’introductiond’indices de performances provoque des inquiétudes bien naturelles de la part des différentsacteurs : élus, dirigeants, services, qui se demandent, qui sera rendu responsable en casd’échec d’une action publique. En fait, ce qui perturbe les élus, c’est plus la transparencede l’évaluation et non l’évaluation en elle-même100. La connaissance que leur apportel’évaluation leur est fort utile, par contre, s’ils ont fixés des objectifs politiques, parexemple la mise en œuvre d’une politique sociale, et que les résultats atteignent 50% desobjectifs escomptés, les élus considèrent qu’ils ont échoué. Pour autant, ces résultats nereprésentent pas un échec et il ne faut pas systématiquement rechercher un responsable. Lafinalité de l’évaluation des politiques publiques consiste en fait à rechercher l’amélioration.« Evaluer une politique publique consiste à mettre en regard ses intentions, sa mise enœuvre et ses résultats. L’évaluation d’une politique publique doit être distinguée clairementdu contrôle (vérification de régularité) et de l’expertise (analyse technique). «Evaluer lespolitiques publiques consiste à mesurer les effets qu’elles engendrent et à chercher si lesmoyens juridiques administratifs et financiers mise en œuvre produisent les effets que l’onattend ». « L’évaluation d’une politique publique doit également permettre d’en infléchir lecontenu et l’orientation101 ». Les politiques d’évaluation ont tout d’abord été conçues dansles pays anglo-saxons, elles portaient sur des programmes d’armement, d’emploi ou deformation. Mais en France, le concept d’évaluation a mis beaucoup de temps à émerger,c’est à la fin des années 1980 que l’évaluation est présentée comme l’un des axes de lapolitique dite « de renouveau du service public102 ».

Au moment où la décentralisation et la LOLF imposent le recours à l’évaluation au seindes collectivités locales, la professionnalisation des acteurs et le partage des expériencesne sont pas encore tout à fait à la hauteur des défis. En effet, pour être sensibilisés à cettenouvelle culture, les élus et les cadres managers doivent la comprendre et la partager. Mais,

98 Le pilotage de l’action collective sur un territoire « Le contrat d’objectifs personnalisés » cours dispensé par NorbertHEKIMIAN, Consultant, Maître de conférences associé (Institut d’Etudes Politiques De Lyon).99 La lettre du cadre N°323-15 septembre 2006100 La lettre du cadre N°323-15 septembre 2006 Jean-Marc CORNU, responsable de l’évaluation des Politiques Publiques, ConseilGénéral de la Drôme.101 Jean-Luc BŒUF « L’évaluation des politiques publiques » Problèmes politiques et sociaux, N°853 23 février 2001- LaDocumentation Française.102 « Le renouveau du service public » Politique engagée par le gouvernement ROCARD.

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nous l’avons évoqué au cours de l’étude, le déficit de formation constitue un réel obstacleà la modernisation des services et par voie de conséquence aux nouvelles pratiques tellesque l’évaluation au sens large. Le pilotage de la performance d’une collectivité s’effectueà deux niveaux : au niveau externe de la collectivité, c'est-à-dire au niveau stratégique etau niveau interne par le contrôle de gestion. Nous ne reviendrons pas sur ce thème quia préalablement été traité dans la première partie de l’étude. Mais, nous porterons notreattention sur l’évaluation de la performance externe de la collectivité qui ne correspond pasuniquement à la mise en évidence des véritables effets de l’action publique, mais qui permetaussi d’intégrer d’autres finalités et notamment, le processus d’élaboration de la décision.

Le conseil scientifique d’évaluation propose quatre finalités principales d’uneévaluation :

- Une finalité déontologique, c'est-à-dire rendre des comptes aux responsablespolitiques et aux citoyens sur les manières dont une politique a été mise en œuvre et surles résultats qu’elle a obtenus.

- Une finalité gestionnaire, c’est-à-dire le fait de répartir plus rationnellement lesressources humaines et financières entre différentes actions.

- Une finalité décisionnelle, c’est-à-dire, le fait de préparer des décisions concernant lapoursuite, l’arrêt ou la refonte d’une politique.

- Une finalité d’apprentissage et de mobilisation, c’est-à-dire, le fait de contribuer àla formation et à la motivation des agents publics et de leurs partenaires en les aidant àcomprendre les processus auxquels ils participent et à s’en approprier les objectifs.

L’évaluation diffère selon que l’on souhaite apprécier une action à postériori, à priori, ouau cours de l’action. Dans l’hypothèse d’une évaluation à postériori, l’évaluation porte surdes statistiques, il s’agit en fait de constater les résultats d’une action. L’évaluation effectuéea priori permet aux décideurs politiques et aux différents acteurs de débattre des finalitésde l’action et d’aider à la prise de décision.

Lorsque l’évaluation a lieu en cours d’action, elle assure une fonction de régulationdu processus en cours et une fonction de contrôle du degré de réalisation d’un objectifprogrammé.

Afin d’améliorer les performances, les décideurs locaux peuvent utiliser certains outilsde pilotage comme le tableau de bord stratégique qui, au même titre que le tableau debord de gestion permet d’avoir une vue d’ensemble sur les politiques mises en oeuvre.Cet outil construit sur la base d’indicateurs doit être simple à l’usage et lisible. Il permet desuivre de manière centralisée les effets des décisions prises pour chaque segment politique(politiques sociale, économique, urbaine….).

Le tableau de bord synoptique regroupera les informations nécessaires au suivi despolitiques mises en œuvre et permettra au responsable de prendre des décisions fondéessur des éléments fiables. L’efficacité de cet outil dépend du choix de ses indicateurs quidevront prendre en compte les objectifs stratégiques et délivrer des informations en tempsréel. Les indicateurs du tableau de bord stratégique devront pouvoir mesurer tout d’abord,les effets réels de l’action politique, ils mesureront par exemple, l’impact de la politiqueéconomique de la collectivité : conséquence de la mise en place d’une zone d’activitéséconomiques sur l’emploi. Ensuite, ils mesureront les résultats de la politique mise enœuvre, c'est-à-dire le coût, les délais de réalisation et le degré de satisfaction. En dernierlieu, les indicateurs permettront d’apprécier l’évolution de la situation du territoire concernéafin de modifier les objectifs stratégiques, le cas échéant.

PARTIE 2 : LE MANAGER TERRITORIAL EST- IL EN MESURE DE DEVELOPPER LA RICHESSEHUMAINE ?

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L’évaluation, au sens large, comprend deux niveaux :- Le niveau stratégique, c'est-à-dire l’évaluation des politiques publiques, avant la prise

de décision, au cours de l’action et après sa réalisation,- Le niveau opérationnel, c'est-à-dire le contrôle de gestion interne comprenant

également l’évaluation du personnel.Figure n°11 : évaluation globale des performancesA consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut

d'Etudes Politiques de LyonL’évaluation globale des performances apporte le discernement nécessaire aux

décideurs politiques et administratifs. L’évaluation permet non seulement de constater etanalyser les résultats, mais surtout, d’obtenir les informations nécessaires au processus deprise de décision et aux éventuelles modifications de trajectoire des objectifs territoriaux. Lasensibilisation des décideurs locaux à ce type de démarche passe par le partage et le retourd’expériences. Pour l’instant, l’évaluation est encore mal perçue, elle renvoie à la notionde contrôle, de faute. Plutôt que de penser à évaluer les réussites et d’en rechercher lescauses, nous focalisons sur les erreurs. Pourtant, la mise en valeur de certaines pratiquespermettrait de généraliser l’évaluation et la faire rentrer progressivement dans les mœurs. Lechangement de culture repose sur l’ouverture d’esprit des hommes et des femmes chargésde piloter les organisations.

Toute organisation a des objectifs qu’ils soient explicites ou implicites, ils se traduironten tous états de cause par des actions. Cependant, si les objectifs ne sont pas fixésclairement, les acteurs vont « naviguer à vue », et les résultats ne pourront pas être évalués.Le rôle du cadre, est donc de bien comprendre les objectifs politiques pour les exprimerensuite à son niveau en plans d’actions qui devront être suivis et se traduiront en résultats.La performance d’une collectivité locale se définit par rapport à son territoire et notammentà la qualité de ses services publics qui dépendent essentiellement de l’action individuelle.Par voie de conséquence, c’est bien sur la volonté d’agir que repose la performance. Toutle travail du cadre manager d’équipes consistera à trouver les moyens de déployer lesénergies humaines. Nous le verrons, c’est en se recentrant principalement sur l’individu,qu’il parviendra à faire progresser l’organisation.

II - Mettre en oeuvre une communication efficaceDire que la communication est vitale, est une banale évidence, pour autant, le manqueou le défaut de communication est un véritable fléau pour l’homme. Les moyens decommunications pléthoriques et notamment les nouvelles technologies sont un atoutprécieux en ce qu’ils permettent de gagner en efficacité et diffuser l’information au plus grandnombre d’acteurs, néanmoins leur utilisation n’est pas gage de communication, c'est-à-direde compréhension, car c’est bien en cela que réside le problème. Comment comprendreet se faire comprendre ? Comment prêter véritablement attention à l’autre ? L’exigencede performance, justement, conduit souvent l’individu à passer à côté d’informationsimportantes qui génèrent des contre performances. C’est sur ce point que le cadremanager doit travailler, en effet la recherche de résultats a tendance à mettre de côté lacommunication directe qui, pourtant, fait partie intégrante des compétences qu’un cadre doit

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développer pour manager son ou ses équipes. Nous essaierons tout d’abord de donner unsens au terme communication pour ensuite en connaître les bases.

Nous verrons également comment construire une communication efficace par le biaisde l’appropriation de méthodes et outils comme la « Process communication » au servicedes cadres managers.

1. Quel est le sens du terme communication et quelles en sont lesbases ?

La communication est au cœur du management d’autant plus qu’aujourd’hui l’organisationdu travail est plus participative et transversale. Les nouvelles technologies modifient aussiconsidérablement les logiques hiérarchiques classiques pour tendre progressivement versun modèle managérial qui se traduit par la nécessité d’aborder différemment les pratiquesde pilotage au sein d’un environnement en profonde mutation. Ainsi, les cadres managerspris dans la tourmente du changement organisationnel et confrontés à la complexité doiventêtre capables d’adapter leurs comportements aux nouvelles donnes et formes de travail.Une des composantes primordiales de leur fonction consiste à communiquer efficacementet relayer l’information à tous les niveaux de l’organisation. Nous tenterons tout d’abord dedonner un sens au terme communication, puis nous en définirons les bases.

1.1 Donner un sens au terme communicationMalgré la profusion des outils et l’importance que l’on accorde à la communication, lesentiment de solitude n’a jamais été aussi profond dans nos organisations. Ainsi, trèssouvent animés par une logique de performance, nous en arrivons à négliger les chosesles plus importantes et les plus vitales, c'est-à-dire la construction du lien social, la relationà l’autre qui permet à tout être humain de vivre tout simplement. Cachés derrière nosécrans de contrôle, nous perdons l’essentiel de nos richesses. Donc, avant de rentrer dansl’explication des différentes formes de communication et la nécessité pour le cadre managerd’en identifier les bases et les pièges. Il semble nécessaire de savoir ce que l’on met sousle terme de communication et d’en comprendre véritablement le sens. Nous retiendrons ladéfinition tirée de l’ouvrage de Nicole Aubert103 « La communication est un processus quiconsiste à instaurer une relation d’échanges, créatrice de valeur entre des personnes et/ou des groupes. » « Pour que cette création de valeur soit effective, l’échange doit nonseulement porter sur un contenu (des messages, des informations) mais aussi sur desrelations (des sensibilités, des modes de pensée et des visions du monde).

Il est donc nécessaire de ne pas confondre communication et information, ces deuxnotions se complètent mais n’ont pas la même acception. L’information est centrée surle contenu alors que la communication est basée sur la relation. Il ne suffit donc pas detransmettre une information pour que celle-ci soit comprise. Donc, la tendance à envoyerdes messages via intranet est loin de suffire à la compréhension et suscite même parfoisdes résistances. En ce sens, le cadre manager doit véritablement adapter son modede communication et ne pas utiliser à outrance la messagerie interne pour animer etmanager l’organisation ou l’équipe dont il a la responsabilité. En effet, il est nettementplus facile de transmettre par exemple une disposition législative par mail à l’ensemblede ses collaborateurs que de prendre une heure ou deux, selon les cas pour expliciter laportée d’une nouvelle norme. Le cadre manager doit en priorité, trouver un équilibre entre

103 Nicole AUBERT « Diriger et Motiver » Art et pratique du management – Editions d’Organisation

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l’effet facilitateur des nouvelles technologies et le besoin d’échanges et de relations deses collaborateurs, car le risque de démotivation est important. Par voie de conséquence,la difficulté pour un cadre est de trouver un juste milieu entre la recherche d’efficacitéet le maintien des relations humaines au sein de son ou ses équipes. Les nouvellestechnologies utilisées intelligemment peuvent soutenir considérablement l’organisation dutravail, la suppression de certaines tâches, par exemple, les photocopies en grand nombre,à faire, puis à relier et à distribuer permet un gain de temps considérable qui peut êtreutilisé autrement. Les systèmes d’informations comme les logiciels métiers permettentaussi d’introduire plus de performance. L’exploitation optimale des fonctionnalités deslogiciels, « courriers » par exemple ou « passeports/cartes d’identités » au sein d’un servicepopulation permet d’améliorer la qualité des services rendus. Les temps d’attente sont ainsiréduits (traitement des courriers et accueil physique des usagers) et peuvent être mis auprofit d’une meilleure communication au sein de l’équipe (échanges formels et informels)ou à destination des usagers (les collaborateurs chargés de l’accueil du public auront plusde temps à consacrer à l’explication de certaines démarches administratives).

Savoir communiquer et informer efficacement est une compétence primordiale pourun cadre manager. En l’espèce, cette aptitude que l’on croît posséder naturellement serévèle parfois difficile à mettre en œuvre surtout en situation de management. De ce fait,le cadre manager ne doit pas faire l’économie de formations spécifiques qui lui permettrontd’optimiser sa capacité à communiquer simplement et à informer ses collaborateurs defaçon pragmatique ; C'est-à-dire en évitant de les submerger d’informations pour aucontraire sélectionner les données qui lui paraîtront les plus pertinentes, et ainsi, ne pasparasiter l’organisation du travail de ses collaborateurs.

Quelque soit les modifications contextuelles, il faut que les managers aient bienconscience que les techniques de communication dont ils disposent ne doivent rien changerà la nécessité de communiquer avec leurs différents interlocuteurs internes et externesafin d’échanger des idées, des expériences et de les confronter. La rencontre, voire laconfrontation à la différence d’opinions est nécessaire à la construction de la relation.Communiquer pour tout un chacun et quelque soit la nature de l’échange, familial, amical,ou professionnel, c’est en quelque sorte prendre « l’autre » en considération, c’est se centrersur ses besoins sans s’affranchir des nôtres. Si nous ne sommes pas décider à prendre desrisques, la relation ne peut pas avoir lieu. C’est pourquoi, il est beaucoup plus facile d’utiliserle contact virtuel lorsque les situations se gâtent. Mais, pour manager une équipe d’hommeset de femmes, il faut être en mesure de prendre des risques et avoir le courage d’accepterla confrontation qui peut conduire le cas échéant à une remise en cause personnelle ouorganisationnelle.

1.2 Les fondements de la communicationLes bases de la communication reposent en partie sur les moyens techniques, téléphone,messagerie, écrits, puis sur la relation vivante entre les personnes et l’envie qu’elles ont des’investir dans une rencontre. En conséquence, c’est de la conjonction de ces deux niveauxque dépendra la qualité de la communication.

La communication n’a de sens que si elle trouve un équilibre entre son contenu, c'est-à-dire « Ce qui se dit et ce qui ce vit » et sur son processus, c'est-à-dire sur la manière donton s’y prend pour échanger. Comment est-ce que l’on gère l’échange ? Quelles sont les

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réactions provoquées par la transaction ? Le schéma suivant104 permet de visualiser le lienentre le contenu et le processus de communication :

Figure n° 12 : contenu et processus dans la communicationA consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut

d'Etudes Politiques de LyonLe contenu de la communication est fondé sur la clarté, la compréhension des propos

de chaque interlocuteur et sur l’argumentation qu’ils développent. Mais, le contenu recouvreégalement des signaux non verbaux qui permettent de faire passer des messages ; nosgestes, nos intonations, nos postures révèlent nos pensées profondes que « l’autre »est capable de détecter avec sa sensibilité et son intelligence. C’est pourquoi, la qualitéd’un entretien, d’une prise de parole en public lors d’une réunion ou toute action decommunication dépend de ce que les acteurs expriment et de ce qui est perçu parl’interlocuteur ou par l’assistance.

En conséquence, en situation de management, le cadre doit être en capacité decomprendre ses collaborateurs et de se faire comprendre d’eux, c'est-à-dire de se mettreà leur portée et établir un échange positif et continue avec chaque membre de l’équipeet l’équipe toute entière. Cet exercice n’est pas facile si l’on compte la variété descomportements, certains sont plus réservés, il faudra donc les faire passer en positiond’acteur, d’autres monopolisent toutes les conversations, donc sans les neutraliser, il faudrafaire preuve de diplomatie pour recentrer leurs propos. Bref, le cadre manager devra mettrebeaucoup de tact et d’énergie dans tous les actes de management qu’il aura à effectuerau sein de sa zone de responsabilité : entretiens individuels d’évaluation, définition desobjectifs individuels dans le cadre d’un projet, d’une réunion de service, d’une délégationde responsabilité à l’un de ses collaborateurs, aux échanges qu’il peut avoir en termesd’organisation du service, plannings de travail, congés. Mais, nous l’avons évoqué au coursde l’étude, le manager territorial travaille aussi de concert avec les élus. De ce fait, laqualité de l’aide à la décision qu’il apporte aux décideurs locaux dépend beaucoup de sescapacités à communiquer. Certains cadres ont beaucoup de talent et savent faire passerles choses plus facilement. Cette aisance naturelle n’est pas l’apanage de tous, néanmoins,l’apprentissage des fondamentaux de la communication permet de progresser et d’éviterles erreurs qui restent parfois longtemps ancrées dans la mémoire individuelle et collective.C’est pourquoi, avant toute transaction, le cadre manager doit avoir une vision claire dece qu’il veut dire exactement, et au moment de l’échange, il doit pouvoir s’assurer queson interlocuteur a bien compris ce qu’il voulait faire passer. A cet égard, il devra solliciterun retour, couramment appelé « feed-back », que lui-même renverra à son tour. Cettereformulation permet en fait d’engager la communication et de la poursuivre de manièreà ce que chacun des protagonistes échange leur point de vue et qu’aucun d’eux ne restesur une impression négative. Sur ce point, le cadre manager devra éviter certains écueilsafin de ne pas tomber dans les pièges de la communication. En effet, la communicationvue sous l’angle du processus, met en mouvement toutes les sensibilités, les énergieshumaines qui en constituent « la partie engloutie » en quelque sorte. Chaque personne seforge sa propre réalité à travers l’ensemble des expériences vécues depuis sa naissance.Ce capital d’expériences accumulées permet à chacun de se construire sa propre réalitéqui nous empêche parfois inconsciemment de communiquer avec succès. De ce fait, ilnous arrive souvent de tomber dans les pièges de la communication car nous n’avons passuffisamment pris en compte l’élément émotionnel qui se cache derrière une apparenteraison. En effet, chaque individu à un degré plus ou moins important, est régit d’une certaine

104 Nicole AUBERT « Diriger et Motiver » Art et pratique du management – Editions d’Organisation, page 95

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façon par ses émotions et par sa raison, l’une n’allant pas sans l’autre, c’est pourquoi, il esttrès important d’intégrer ces deux facteurs dans toute transaction. Nous l’avons compris,pour toute personne, la principale difficulté réside dans l’écart entre ce qui est vraiment, cequ’elle perçoit et ce que son interlocuteur perçoit. Donc, à chaque fois que nous abordonsune situation nouvelle, nous la considérons à travers notre réalité, construite sur la base depréjugés qui nous conduisent à généraliser et à nous fier à nos impressions, nos préjugéssont donc le premier piège de la communication. Ensuite, l’éducation que nous avons reçueet les valeurs morales auxquelles nous sommes attachés constitue le second piège de lacommunication en ce qu’il nous pousse à porter une appréciation sur les autres qui estfonction de ce que nous croyons être bien ou mal, c'est-à-dire, nos jugements de valeurs.Comme nous pensons déjà tout connaître, nous avons tendance à anticiper ce que notreinterlocuteur pense et nous ne le laissons pas s’exprimer librement. Les préjugés nousempêchent d’être véritablement à l’écoute de l’autre. Dans ses rapports professionnels, uncadre manager peut par exemple manquer de disponibilité à l’égard de ses collaborateurset se fier à ses préjugés lorsqu’il aura à le rencontrer pour un entretien professionnel ; Avantmême de le recevoir il se dira « Je vais encore perdre mon temps à l’écouter exposer ledossier X pendant une heure alors qu’il faut quinze minutes à tel autre collaborateur pourrapporter le même type d’informations ! Le jugement de valeur possible du cadre seraalors « Il n’est pas capable de synthétiser ». Persuadé d’avoir tout compris ou de détenirla vérité, nous formulons des conclusions beaucoup trop hâtives et souvent erronées. Nosjugements de valeurs transparaissent autant dans nos paroles que dans le ton que nousemployons et les attitudes que nous prenons. Nos préjugés et jugements de valeur nousmettent parfois dans des positions de supériorité ou d’infériorité, par exemple lorsque nouspensons que telle personne est très compétente et que nous ne sommes pas en mesure delui apprendre quoique ce soit, le jugement de valeur que nous aurons à son égard sera « Ilva me démontrer que je n’ai rien à lui apprendre ! ». L’influence de nos préjugés et de nosjugements de valeurs est préjudiciable au développement d’une communication positive.

Face à son équipe, s’il veut éviter les différents pièges de la communication, le managerdoit commencer par apprendre à lire les signes, à écouter en profondeur ses collaborateurset ne pas se fier à son propre jugement, c’est à dire à développer son intuition en s’ouvrantaux autres, en se laissant aller à plus de générosité. Etre capable de se remettre en causeet vouloir comprendre l’autre constitue déjà une forme de générosité. Nous le verrons, c’esten se recentrant sur ses collaborateurs, en cherchant à comprendre leurs comportementsqu’un cadre manager parviendra à instaurer des relations humaines de qualité.

2. Comment construire une communication efficace ?Les principes d’actions pour le cadre manager consistent tout d’abord à réfléchir puis déciderdu type de relation qu’il est en mesure d’instaurer avec ses collaborateurs. Pour ce faire,il peut s’appuyer sur des techniques de communication simples, comme savoir écouter,poser des questions, reconnaître et informer. Ensuite, pour améliorer encore ses capacitésrelationnelles, il peut s’inspirer d’outils tels que la « Process communication » mis au pointpar Taibi KALHER105 dans les années 1970 et présenté par Gérard Collignon dans sonouvrage « Comment leur dire ».

2.1 Techniques de communication

105 Taibi KAHLER, Docteur en psychologie, conseil en entreprises

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Etablir une communication efficace avec ses collaborateurs est un gage de réussite pourun cadre animateur d’équipe (s). Pour autant, la réalité est souvent marquée par l’absencede dialogue au quotidien ; Certains cadres en surcroît de travail mènent une courseeffrénée pour parvenir à gagner en performance et occultent tout simplement le besoinfondamental de dialogue dans leurs relations avec leurs collaborateurs. Au sein de certainesunités, les acteurs ne parlent pas en dehors des échanges sur les dossiers en cours.Dans un pareil contexte de travail, la politique sociale de la collectivité, comme l’entretienannuel d’évaluation est parfaitement inutile et présente uniquement un caractère formel,s’il ne s’appuie pas sur un dialogue quotidien entre le cadre responsable d’équipes et sescollaborateurs106. La difficulté, pour un cadre consiste à savoir gérer son temps et privilégierle dialogue au sein de son unité. Ce qui signifie qu’il doit être accessible, disponible etconsacrer une partie de son temps à l’écoute ; Par exemple, en instaurant des momentsde convivialité au sein de son service, un « briefing hebdomadaire autour d’une tassede café, des visites informelles, des rencontres individuelles avec ses collaborateurs pourtraiter certains dossiers, des réunions en cas de problème particulier. Cette façon d’agirpermet d’humaniser le travail, d’appréhender les difficultés, de comprendre les besoins etles attentes des collaborateurs. Ce qui ne signifie pas, bien évidemment, de passer sontemps à se balader d’un bureau à l’autre et se transformer en « assistant social ». Mais, ilest nécessaire pour un cadre d’introduire de la souplesse dans son style de managementsans s’affranchir de ses contraintes et ainsi instaurer un climat social propice aux échanges.Ceux-ci sont basés sur des techniques de communication bien connues, comme l’écoute, lequestionnement, la reconnaissance, l’information, mais qui sont quelquefois, mal utilisées etmal vécues. A cet égard, le principal blocage dans la communication repose sur l’incapacitéd’une personne à écouter une autre personne avec patience et compréhension. Pourconstruire une écoute active, il s’agit tout d’abord d’avoir envie de rentrer en relation,d’être disponible intellectuellement. « Savoir écouter en profondeur, est rarement uneaptitude spontanée, les managers tournés vers l’action (la grande majorité et de plusen plus) pensent que chaque minute consacrée à l’écoute est une minute enlevée à laréalisation107 ». Pour bien écouter, et donc être en mesure de répondre, il convient d’êtreattentif, c'est-à-dire de chercher à comprendre ce que notre interlocuteur perçoit et ressent etne pas se contenter « d’entendre » ce qu’il dit. En situation d’entretien professionnel, formelou informel, le cadre manager doit prêter attention à tout ce qui dit son collaborateur et passeulement à ce qui l’intéresse. Bien sûr, nous ne pouvons pas écouter en profondeur tousles sujets, à toutes occasions, mais, il faut se tenir prêt à pratiquer une écoute active dans lescirconstances qui nous semblent importantes. Etre à l’écoute, c’est aussi observer, c’est àdire être capable de déterminer l’état d’esprit de son collaborateur afin de savoir si le momentest bien choisi pour échanger. Si le dialogue est bien engagé, écouter, c’est aussi, marquerdes pauses en cours d’entretien afin de pouvoir réfléchir et permettre au collaborateur deréfléchir afin d’éviter de répondre trop rapidement ou à côté. L’écoute permet de prendrede la distance et de mettre en place un dialogue positif fait de respect mutuel. Parmi lestechniques de communication, pour le cadre, il y a aussi le questionnement qui lui permettrade s’assurer de la compréhension du point de vue de son collaborateur et de disposer desinformations nécessaires pour prendre une décision ou agir de façon appropriée. Il s’agitpour lui, de poser la bonne question au bon moment et de garder à l’esprit ce qu’il poursuitcomme objectif, autrement dit, ce qu’il souhaite savoir et quelle est la meilleure façon del’obtenir. Pour ce faire le cadre pourra utiliser deux types de questions, les questions ferméeset les questions ouvertes, par exemple lors de la mise en œuvre d’un contrat d’objectifs

106 Frédéric PETITBON « Le guide du manager public » Editions d’Organisations »107 Henry RANCHON « Construire votre management d’équipe » Sept leviers d’action pour une équipe performante, esf EDITEUR

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personnalisés, le cadre manager pourra demander à son collaborateur « pourquoi, selonlui, il ne pourra pas prendre en charge tel dossier ? ». Les questions ouvertes encouragentles collaborateurs à s’exprimer, à l’inverse les questions fermées limitent la réponse à oui ounon ; par exemple, si le cadre demande à son collaborateur s’il pense que les usagers sontsatisfaits des services rendus ? Celui-ci pourra se contenter de répondre par l’affirmative oula négative sans développer une argumentation. Dans tous les cas, le cadre doit contrôlersa compréhension afin d’éviter les erreurs ou bien manquer des opportunités. Cela permetaussi de montrer au collaborateur qu’il a été réellement écouté, ce qui ne signifie pasque le cadre est d’accord avec ce qu’il a dit, mais qu’il a compris ce qui a été dit. C’estpourquoi, comme nous l’avons précédemment évoqué, il est nécessaire de reformuler lespropos du collaborateur avec ses propres mots afin de bien assimiler et éviter ainsi lesmalentendus. Par ailleurs, la reconnaissance permet aussi d’établir un dialogue constructifet de valoriser la performance d’un collaborateur ou calmer un collaborateur sous l’emprised’une émotion. Encore une fois, la reconnaissance ne signifie pas donner raison, mais ellepermet de considérer la situation du point de vue du collaborateur. Cette technique consisteen fait à accuser réception de ce qui est dit ou ressenti, par exemple, « je comprends quele nombre d’usagers que vous avez reçus cette semaine, ne vous a pas permis de traitertel dossier». De la même façon, lorsqu’un collaborateur se trouve sous l’emprise d’uneémotion, il est nécessaire pour le cadre de se montrer compréhensif et reconnaître que lasituation qu’il vit génère de la colère ou du dépit, par exemple, s’il vient d’être provoquépar un usager ou un collègue de travail. La communication, nous l’avons évoqué, ne doitpas être confondue avec l’information. Une des missions essentielles d’un cadre managerest de relayer l’information, c'est-à-dire fournir à ses collaborateurs, à sa hiérarchie, lesélus avec lesquels il travaille, un contenu (nouvelles normes, difficultés particulières sur unepartie de l’activité, organisation du service…). Son objectif est par conséquent de fournirune information efficace, logique et claire. De ce fait, qu’il s’agisse d’un compte rendu deréunion, d’une synthèse réglementaire, d’une simple note de service, le contenu devra êtrerédigé de façon concise et simple, c'est-à-dire dans un langage courant et compréhensible.Qu’il s’agisse de communication écrite ou orale, le cadre devra se mettre à la portée de tous,car la manière d’informer a un impact sur la motivation des collaborateurs et conditionne enpartie l’adhésion aux suggestions. Ainsi, la façon dont sont présentées les informations estaussi importante que l’information elle-même. Donc, il est inutile de rentrer dans les détails,il suffit de se concentrer sur l’essentiel sans se perdre dans des digressions. L’appropriationdes différentes techniques de communication constitue un soutien mais elles ne sont pasle seul gage de réussite. Pour être ou devenir un bon communicateur, le cadre managerdoit se faire entendre de tous, savoir parler aux hommes et aux femmes qu’il encadre, maisaussi écouter leurs langages et prendre en compte les sensibilités et les susceptibilités dechacun108. Bien communiquer c’est produire du sens et conduire l’ensemble de son équipevers des objectifs communs. Cependant, la tâche n’est pas facile, un cadre doit compter sursa capacité à comprendre le fonctionnement de ses collaborateurs, c'est-à-dire à identifierleur personnalité, la fonction et l’environnement qui leur convient.

2.2 Un outil pertinent : la Process CommunicationL’apprentissage de certaines méthodes permet, non pas de tout résoudre, mais au moinsd’éviter certains écueils. La Process Communication est un outil mis au point par TaibiKahler, Docteur en psychologie et développée en France par Gérard Collignon109. Les

108 Meryem Le SAGET « Le manager intuitif » Une nouvelle force - Editions DUNOD109 Gérard COLLIGNON « Comment leur dire…. » La Process Communication, InterEDITIONS

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recherches effectuées par Taibi Kahler ont permis d’établir que dans la communication,c'est plus la manière de dire les choses, que le contenu lui-même qui est le plus souventà l'origine des conflits, des incompréhensions, des mésententes, ou des blocages. Laméthode qu’il a élaborée progressivement a montré comment construire un bon processusde communication permettant d’établir une relation constructive, de réduire la pressionambiante, de développer la motivation et de libérer le désir de coopérer. La « processcommunication » se base sur le concept de besoins psychologiques, que nous cherchonsà satisfaire depuis l’enfance à travers différentes stratégies. Cette méthode d’analyse despersonnalités et de leurs échanges permet de résoudre les conflits et les incompréhensions.Dans les années 1960, la NASA a initié cette méthode en étudiant les différents profils depersonnalité en vue de faciliter la vie en promiscuité que peuvent représentés certains volsspatiaux. La « Process communication » distingue six personnalités, toutes présentes enchacun de nous, mais qui s’expriment à des degrés différents110 :

- L’empathique est la personnalité la plus répandue et représente 30% de la populationdont les trois quarts sont des femmes ; les personnes empathiques sont sensibles,chaleureuses et compatissantes. Elles sont douées pour créer l’harmonie et sont surtoutattentives au besoin des autres. Elles aiment évoluer dans un environnement accueillantet confortable. Leur mode de perception est basé sur le ressenti, elle cherche à créeret à encourager les relations. Leurs besoins psychologiques reposent sur des signes dereconnaissance positifs concernant leur personne et sur un environnement agréable propiceà leurs besoins sensoriels.

- Le travaillomane place la qualité de ses réalisations au premier plan. Ils formentenviron 25% de la population dont les trois quarts sont des hommes. Les travaillomanessont logiques, responsables et organisés. Ils considèrent que l’expression des sentimentsest inappropriée dans le travail. Ils apprécient un environnement fonctionnel, ordonné. Ilspensent et réfléchissent d’abord, puis classent les personnes et les choses par catégories.Le plus important pour eux est d’être reconnus pour leur réflexion et leurs réalisations.Leurs préoccupations tournent autour de la reconnaissance. Ils recherchent les échangesd’information et préfèrent la relation à deux au groupe.

- Le rebelle est estimé à 20% de la population dont 60% sont des femmes. Les rebellesexercent généralement des professions artistiques et tous les métiers qui font appel àla créativité personnelle. La personnalité rebelle se caractérise par sa spontanéité, songoût du jeu. L’expression des sentiments est souvent aisée et se traduit par des émotionsinstinctives. Les rebelles aiment évoluer dans un environnement original qui les stimule.Les rebelles perçoivent les personnes et les choses au travers de leur émotivité ; sansjuste mesure, elles adorent ou elles détestent. L’ambiance de groupe leur convient, elles necréent pas le contact, mais elles saisissent la moindre occasion de le vivre. Leurs besoinspsychologiques reposent sur l’interaction ludique.

- Le persévérant représente 10% de la population dont 75% d’hommes. Lespersévérants sont des êtres d’engagement dans la vie sociale comme dans la vieprofessionnelle, ils sont consciencieux et observateurs. Ils se caractérisent par leur capacitéà formuler des opinions, des convictions et des jugements. Leur attitude est réservée,comme les travaillomanes, ils jugent l’expression des sentiments inappropriée dans letravail. Leur environnement est fonctionnel et traditionnel. Leur mode de perception estfondé sur le jugement, ils évaluent les personnes et les choses en fonction de leurs opinionset occupent souvent des postes à responsabilité. Ils aiment prendre les commandes et

110 Définition des personnalités tirées de l’ouvrage de Gérard COLLIGNON « Comment leur dire…. »

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recherchent plus volontiers la relation à deux que le groupe, sauf en tant que leader. Lespersévérants ont besoin d’être reconnus pour leurs convictions et pour leur travail accompli.

- Le promoteur constitue une minorité de la population, seulement 5% dont 60%d’hommes. Ce sont des êtres adaptables, persuasifs et charmeurs, ils sont fermes et directset expriment rarement leurs sentiments car ils considèrent que c’est un signe de faiblesse.Leur environnement est luxueux. Les promoteurs sont orientés vers l’action et aiment agirseuls. Leur besoin psychologique est fondé sur l’excitation dans un minimum de temps.

- Le rêveur forme 10% de la population dont 60% de femmes. Le rêveur est douépour l’introspection, il apprécie les tâches concrètes. Ses points forts sont la réflexion,l’imagination, le calme. Les rêveurs aiment évoluer dans un environnement simple et sobre,propice à la vie intérieure. Ses activités préférées sont la recherche, l’écriture, le travailmanuel, la psychologie. En groupe, ils se montrent réservés et ont besoin de préserver leurintimité, ils leur faut du temps et de l’espace.

Chaque individu dispose dans différentes proportions, une certaine dose de chaquepersonnalité, néanmoins, il possède généralement les caractéristiques dominantes d’unou deux types seulement. En « process communication », la structure de la personnalitéest représentée par un immeuble à six étages, à chaque niveau correspond une quantitéd’énergie possible. Le taux maximum se trouvant à la base.

Figure n°5 : la structure d’une personnalité111.

Rebelle 20%Rêveur 28%Promoteur 40%Travaillomane 63%Empathique 75%Persévérant 100%

Gérard Collignon explique que plus la personne prend connaissance des différentstypes de personnalité, plus elle est apte à communiquer avec son entourage sur tousles modes. Chaque personne possédant l’ensemble des personnalités, plus ou moinsdéveloppées, il est donc préférable d’activer le même type de personnalité que soninterlocuteur pour communiquer. Pour un cadre manager, l’utilisation de la « processcommunication » implique un apprentissage sérieux et la volonté de développer sescompétences relationnelles. Donc, sans rentrer dans une explication exhaustive de ceprocessus, nous comprendrons que cet outil permet au cadre manager de rentrervéritablement en communication avec ses différents interlocuteurs et notamment sescollaborateurs. En effet, une meilleure connaissance de soi et d’autrui ne peut que renforcerla capacité à communiquer. L’intérêt de cette démarche est d’être accessible au plusgrand nombre et de se prêter à la gestion d’une équipe. L’identification des différentespersonnalités permet au cadre de différencier son style de management et de l’adapterà chaque personne. Dans l’hypothèse où le cadre manager se caractérise par unepersonnalité à dominante « persévérant », il risque de se trouver en difficulté face à uncollaborateur dont la base est « rebelle ». De ce fait, la connaissance de ses propres besoinspsychologiques et de ceux de son collaborateur lui permettra d’éviter les incompréhensionset d’aller à la rencontre de l’autre.

111 Exemple tiré de l’ouvrage de Gérard COLLIGNON.

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La connaissance des techniques et outils de communication ne suffit pas à construire unvéritable échange, encore faut-il prendre le temps de les mettre en application. Les différentsstages et formations ne produiront aucun effet s’ils ne sont pas suivis d’une réelle volontéde rentrer en contact avec autrui. L’accès à la connaissance passe par la curiosité et laconcrétisation des théories enseignées.

Pour un cadre manager d’équipes, apprendre à communiquer est sans nul doute lacompétence la plus importante à développer. Cette aptitude innée pour certains, et plusdifficile à mettre en œuvre pour d’autres est une composante essentielle de la fonction. Surce point, tous les actes de management sont concernés de la préparation d’un projet, àl’entretien de management. Le défaut de communication fait naître des incompréhensionset des différends qui minent les relations professionnelles et aboutissent à produire desdysfonctionnements majeurs au sein des organisations. C’est pourquoi, connaître lesfondamentaux d’une bonne communication et savoir utiliser certains outils permettrontau cadre de comprendre ses collaborateurs et de se faire comprendre d’eux pour ainsiaméliorer la performance humaine.

III. Construire l’amélioration en créant de la valeurLes agents publics sont la véritable richesse des collectivités locales, c’est sur leur volonté,leur force d’action que reposent la performance des services publics, pour eux, l’avènementd’une nouvelle culture est une chance à ne pas manquer, mais faut-il encore leur donnerl’envie de s’inscrire dans cette dynamique de changement.

Le leader, tient ici toute sa place, c’est par sa personnalité, son comportement qu’ilparviendra à entraîner ses équipes et à démultiplier les énergies humaines.

Cependant, l’introduction d’un leadership112 ne dépend pas des formations, ni même del’expérience, cette capacité à se projeter dans l’avenir, à visionner les défis futurs, à donnerdu sens à l’action collective ne fait pas appel à la rationalité, elle s’apparente au contraireà des notions comme la créativité, l’émotion. Le cadre manager doit en fait puiser dansses propres ressources les moyens d’affirmer son leadership et se positionner entre le rôlede cadre manager, gestionnaires de ressources, animateur d’équipes et le rôle de leadercapable de remettre en cause le système, de rassembler tous ses collaborateurs autourd’une vision clairement dégagée des objectifs collectifs vers lesquels tendre.

Nous porterons une attention particulière à la notion de leadership et au rôle du leaderen tant que catalyseur d’énergie, capable d’agir sur le comportement de ses collaborateursen créant les conditions de la motivation au sein de son équipe. Puis nous étudieronsl’impact que peut générer le leader en créant un climat propice, au sein duquel lescollaborateurs auront envie d’apprendre et de développer leurs compétences et en finalitéqui servira la cause individuelle et collective.

1. Le leader comme catalyseur d’énergie, pourvoyeur de sens etd’adhésion autour d’une vision collective

112 Vocabulaire emprunté à la langue anglaise signifiant « Direction » ROBERT COLLINS Dictionnaire français-anglais

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Nous l’avons vu, depuis une quinzaine d’années, la politique sociale se développe, elleest désormais fondée sur l’adhésion, la coopération des hommes et des femmes et leurvolonté de se mettre en mouvement. Les acteurs revendiquent le droit de s’exprimer etd’être respectés. De ce fait, les organisations n’ont plus besoin de dirigeant au sens strictet classique du terme mais elles sont à la recherche de « leaders113 » s’intéressant à ladimension humaine des organisations. Nous commencerons par définir les caractéristiquesd’un leader et ce qui le différencie d’un manager, pour ensuite nous interroger sur la qualitédes styles de leadership.

1. Quelles sont les caractéristiques d’un leader ?Placé au sommet de la hiérarchie ou bien au sein d’une unité de travail, le leader, tel qui

l’a été caractérisé par certains auteurs est plus qu’un manager. Nous retiendrons la définitionde Michel Crozier 114et Hervé Sérieyx115 qui différencie les managers des leaders, « Entrele gestionnaire, qui gère, et le leader, qui dirige, la distinction n’a rien de sémantique : elleest capitale ! Le leader sait ce qu’il faut faire, tandis que le gestionnaire sait comment bienle faire (…). Voilà certes deux rôles essentiels, mais profondément différents l’un de l’autre.« Do the rings things » renvoie au rêve, à la vision, à la direction à prendre, aux objectifs àatteindre, au long terme. Autant d’idées et de notions qui tablent sur l’avenir. Le visionnaireest donc une personne résolument tournée vers le futur. Il donne de la cadence générale.En d’autres termes, le leader, en canalisant l’attention d’une vision, exploite les ressourcesémotionnelles et spirituelles de l’organisation, ses valeurs, ses engagements et sesaspirations. En revanche, le manager exploite les ressources physiques de l’organisation,son capital, ses compétences humaines, ses matières premières et sa technologie (…). Leleader serait centré exclusivement sur l’humain tandis que le manager l’aurait en aversion…D’où son incessant désir de tenir les employés sous harnais. Le secret tient peut-être en unsavant dosage de leadership et de gestion. Aucun ne doit primer sur l’autre116 ».

Cette différenciation est importante en ce qu’elle permet de cerner les composantesde la fonction de leader de celle de manager. La représentation suivante permet de lesdistinguer :

Figure n° 14 : manager/ leader : Opposition ou complémentarité117

1. Deux points de vue de la réalité- Le manager gère la complexité- Le leader produit des changements2. Deux types de ressources- Le manager met de l’ordre et de la cohérence- Le leader crée du sens, de l’énergie et de l’adhésion3. Deux logiques d’action- Le manager fait ce qu’il doit faire- Le leader fait ce qu’il faut faire

113 Vocabulaire emprunté à la langue anglaise signifiant « Chef, dirigeant, meneur » ROBERT COLLINS Dictionnaire français-anglais114 Michel CROZIER né le 6 novembre 1922, Sociologue français, chercheur au CNRS115 Hervé SERIEYX, né le 13 juillet 1937. Homme d’affaires français116 Serge HUTEAU « Le management public territorial » Editions PAPYRUS117 Nicole AUBERT « Diriger et Motiver » Art et pratique du management – Editions d’Organisation

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En théorie, le manager est plus cantonné dans la conduite et la réalisation des objectifs,il gère l’équipe, les projets et le quotidien de l’organisation dans sa complexité ; le leaderdéveloppe une vision stratégique de l’organisation et remet en question les processus,encourage ses collaborateurs et les pousse à travailler ensemble.

En pratique, tous les cadres managers ne sont pas dépourvus de leadership, ettout leader détient une dose de pragmatisme qui lui permet de réaliser ses objectifsdans de bonnes conditions. Néanmoins, par nature, certaines personnes détiennent unleadership qui leur permet de se distinguer des autres et qui, dans leur sphère sociale ouprofessionnelle leur permet de s’accomplir plus facilement. Mais, quelles sont ses qualitéset comment s’expriment-elles dans leur vie professionnelle ?

La terminologie du mot « leader » correspond à la notion de « chef » de « dirigeant »,mais il convient de bien en comprendre le sens car l’interprétation qui en est faite peut êtreerronée. La notion de leader peut renvoyer à celle de « chef tout puissant », qui a le pouvoirde dominer et développe son emprise sur autrui pour que les autres se rallient à son pointde vue. Néanmoins, l’expression d’un besoin de pouvoir est un signe de fermeture118, alorsque dans la réalité au contraire, un vrai leader puise sa légitimité dans son état d’esprit etdans son comportement. L’ouverture aux autres, la capacité à gérer ses émotions, à prendrede la distance sur les évènements, la tolérance et le courage, le sens de la mesure, sontdes qualités, qui, par essence, permettent l’évolution. La personnalité d’un cadre managermarquée par un leadership prononcé conditionne en grande partie la réussite des équipescar elles permettent l’instauration d’un climat de confiance.

Par sa maturité psychologique le leader s’inscrit naturellement dans un mouvementperpétuel, pour lui rien n’est figé, les situations, le niveau de compétences, tout bouge. Parsa curiosité, son sens de l’écoute, de l’observation, il parvient à discerner, sans jugement,sans a priori. Son objectif est d’innover, de créer, en utilisant tout le potentiel de sescollaborateurs. Il n’a pas dans l’idée d’exclure les moins performants, pour lui tout seconstruit dans la différence, chaque collaborateur est capable d’apporter sa pierre à l’édifice.Les situations conflictuelles ne le désarment pas, il sait prendre du recul, et ne reste pasdans le « non dit ». En fait, le leader ne contourne pas les difficultés, il les vit et recherchedes solutions novatrices.

Lorsque l’un de ses collaborateurs pose des problèmes, il sait entendre, comprendreet envisager des perspectives. La confiance qu’il porte à autrui le conforte dans l’idéequ’une personne peut toujours évoluer. En effet, nous rencontrons parfois, des situationscomplètement bloquées, telle ou telle personne, s’est forgé une réputation négative ausein d’un service pour des raisons qui échappent parfois à toute logique. Ces personnes,ainsi stigmatisées ont parfois du mal à s’extirper de leurs difficultés, le leader, dansce cas précis, essaiera de repérer les compétences sous jacentes et tentera de lesexploiter pour les transposer ailleurs, dans un autre service. Cette projection, se fera bienévidemment sur la base d’un consensus avec le collaborateur concerné. C’est donc parsa capacité à encourager, à trouver un consensus, et enfin décider le cas échéant d’uneautre affectation que le leader fera progresser son collaborateur, qui, par ailleurs pourradevenir très performant dans un tout autre contexte. Pour le leader, la remise en question,l’expérimentation, le changement sont des constantes qu’il a intégrées.

La structure mentale d’un leader, lui permet de penser différemment, il ne s’enferre pasdans des certitudes, son expertise, il sait s’en servir à bon escient et s’en distancier pourporter un regard global sur les situations.

118 Meryem Le SAGET « Le manager intuitif » Une nouvelle force - Editions DUNOD

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1.2 Existe-il un style de leadership supérieur à un autre ?Nous l’avons évoqué dans la première partie de l’étude, certains auteurs ont analysé lesdivers styles de leadership, notamment Lippit et White à travers une expérience conduiteau sein d’un groupe d’enfants dans un cercle de loisirs. Trois types de leader ont ainsi étéidentifiés : le leader autoritaire, le leader permissif et le leader démocratique. L’expériencea permis de conclure à la supériorité du leader de type démocratique, ces résultats furentconfirmés par d’autres études menées par Kurt Lewin en matière de changement dans leshabitudes alimentaires en 1943119. Néanmoins, la classification de ces styles trouva trèsvite ses limites.

Ainsi, plus tard, d’autres chercheurs sont allés plus loin et leurs contributions ontdémontré que l’impact d’un style de leadership était fonction de plusieurs critères etnotamment de la situation à laquelle le leader devait faire face et à la personne à laquelleil s’adresse.

La question que l’on se pose actuellement n’est donc plus de savoir s’il existe un stylede leadership optimum supérieur aux autres, mais, celle de savoir faire varier son style augré des situations, des circonstances et des personnes que l’on doit motiver et manager.Fiedler120 montra comment la performance d’un style de leadership était étroitement liée àla situation et identifia trois facteurs :

- Le pouvoir réel détenu par le leader, c'est-à-dire sa position hiérarchique forte ou faible,ses ressources plus ou moins abondantes en matière de récompenses ou de sanctions.

- La nature de la tâche à accomplir, structurée ou non structurée, c'est-à-dire planifiableen séquences ou non.

- Les relations entre lui et les membres de son équipe, bonnes ou mauvaises.La combinaison de ces trois facteurs conduit à déterminer des situations très favorables

au leader, d’autres défavorables et des situations intermédiaires121.Fiedler démontra en effet, qu’un style centré sur la tâche donnait de meilleurs résultats

qu’un style « humain », en cas de situation très favorable, il est inutile de « faire du social »et le différentiel de performance est obtenu par ceux qui canalisent toute leur énergie etcelle des membres de leur équipe sur la tâche à accomplir.

Dans l’hypothèse d’une situation très défavorable, une situation d’urgence ou de crisepar exemple, nécessitant une solution appropriée dans un temps très court, il faut là aussiconcentrer toute l’énergie sur le problème à résoudre.

Par contre en cas de situation intermédiaire, un style centré sur les relations, prenanten compte les problèmes autres que la productivité obtenait de meilleurs résultats.

Cette première approche fut complétée par d’autres recherches, nous retiendrons cellede Hersey et Blanchard122, dont le concept est fondé sur la dynamique du leadership, qui

119 Lewin K « Forces behind foods habits and méthods of change » NRC Bulletin n°108, 1943 « la théorie des Organisations »Jacques Rojot – Editions ESKA

120 FIELER (P) « Une question de personnalité ou de circonstances ? Comment devient-on leader ? Psychologie Mars 1972,n°26

121 Nicole AUBERT « Diriger et Motiver » Art et pratique du management - Editions d’Organisation122 HERSEY, «Le leader situationnel» Paris Editions d’Organisation, 1989- BLANCHARD «Le leader et la minute de succès »,

Paris, Inter Editions 1986.

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passe d’un mode statique à un mode de mise en action, l’idée était de démontrer qu’unleader devait se montrer avant tout adaptatif. Ils dégagèrent ainsi quatre modes de miseen actions du leadership :

- Le mode diriger, dans lequel le leader donne des instructions précise et surveille deprès l’exécution des tâches.

- Le mode entraîner dans lequel le leader continue à diriger et à surveiller de prèsl’exécution des tâches mais en plus, explique les décisions, sollicite les suggestions etencourage les progrès.

- Le mode épauler dans lequel le leader facilite et encourage les efforts de sessubordonnées dans l’accomplissement des tâches, il partage avec eux la responsabilité dela prise de décision.

- Le mode déléguer dans lequel le leader transmet à ses subordonnés la responsabilitéde la prise de décision et de la résolution des problèmes.

Les auteurs Hersey et Blanchard, au travers de leurs recherches ont tenté de prouverque le style de leadership était fonction du degré de maturité de la personne, qu’il dépendaiten fait du niveau de compétences, de la connaissance des exigences de leur travail etde leur degré de motivation. A titre d’exemple, le style entraîner s’imposera lorsque lecollaborateur rentre en phase de démotivation.

Ces approches laissent à penser que le profil du leader idéal n’existe pas, tout commeil n’existe pas de prescription médicamenteuse supérieure l’une à l’autre, puisque que leseffets thérapeutiques varient en fonction des individus. Le style de management s’inscrit enconséquence dans la même logique, il convient de l’adapter aux différentes situations etaux différents interlocuteurs.

Les aptitudes naturelles d’un leader consistent à savoir animer des hommes et desfemmes dans des situations variables pour les aider à réaliser les objectifs fixés au regardde leur personnalité, de leurs compétences et de leur degré de motivation. Le leader doit eneffet, être en mesure d’ajuster en permanence son comportement. Car c’est bien de celadont il s’agit, comment un leader peut-il par son attitude, sa personnalité donner envie d’agir,donner envie d’apprendre et devenir plus performant ?

Il convient, à cet égard de ne pas se leurrer, les solutions « prêtes à l’emploi n’existentpas », la qualité première d’un leader est l’humilité face à la complexité de la nature humaineet à la dimension imprévisible des circonstances.

C’est pourquoi, il est inutile de faire une description des attributs du « parfait leader ».Nous l’avons vu, c’est plus par son état d’esprit et sa capacité à discerner une situation etla personnalité de ses collaborateurs qu’un leader peut ouvrir la voie à l’action.

Le leader est quelqu’un de simple, d’équilibré, qui dégage de l’assurance. Il croit à laréussite de ses collaborateurs, à l’intelligence des groupes et à leur capacité à s’inscriredans le changement. Pour ce faire, il crée les conditions de la motivation nécessaires à lamobilisation des acteurs.

2. La création d’un climat propice à la valorisation des compétenceset à l’implication des acteurs

Nous soutiendrons dans ce paragraphe que le manager territorial possédant une certainecapacité à guider et orienter ses collaborateurs, peut par son mode d’action, susciter l’envie

PARTIE 2 : LE MANAGER TERRITORIAL EST- IL EN MESURE DE DEVELOPPER LA RICHESSEHUMAINE ?

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de progresser en créant les conditions favorables à la motivation, puis encourager lesdémarches de progrès en lançant des idées d’amélioration.

2-1 Le manager territorial peut faire effet de levier sur la performancehumaine en créant un climat favorable

La performance d’une collectivité est générée par l’efficacité123 et la volonté d’agir despersonnes qui la composent. Or, l’efficacité, qu’elle soit individuelle ou collective dépend detrois composantes. Tout d’abord, le degré de motivation des individus, nous verrons quece mécanisme est très complexe à appréhender, ensuite les compétences qui renvoient ausavoir faire aux connaissances et à l’expérience, puis au comportement, qui est en fait uneattitude face à une situation de travail.

Nous soutiendrons que le cadre manager qui possède un bon leadership peut faire effetde levier sur ces trois composantes. Si, comme nous l’avons démontré précédemment, ildétient cette capacité à visionner les défis futurs, à clarifier les objectifs de la collectivitéet ainsi donner du sens à l’action, il peut entraîner ses collaborateurs en mobilisant leursénergies, en les incitant à accroître leurs compétences qui leur permettront d’obtenir uneplus grande confiance en eux.

La création d’un climat favorable à l’implication des acteurs, et à leur envie deprogresser est à la base des performances individuelles et collectives. Car, nous savonsfort bien qu’un climat social perturbé génère des dysfonctionnements qui sont souvent trèsdifficile à corriger. L’absentéisme, la rotation, le manque de productivité sont des symptômesqui permettent d’alerter une organisation. A ce stade d’ailleurs, se pose la question duchangement.

De ce fait, le rôle du cadre manager est de susciter et maintenir un contexte detravail favorable au développement personnel de ses collaborateurs. Mais, cette dispositionn’est pas l’apanage de tous, et présente des difficultés nombreuses et variées rendantla tâche très ardue. C’est pourquoi, la priorité du cadre manager, consiste, comme nousl’avons évoqué dans la première partie de l’étude à suivre des formations spécifiquesparticulièrement basées sur la psychologie du management.

Cependant, nous l’avons également développé, certains cadres manager possèdentdes aptitudes naturelles qui facilitent leurs missions et sont capables, non pas de motiverleurs collaborateurs, mais de les mobiliser, c’est à dire créer des conditions favorables àla motivation.

Le mécanisme de la motivation est un système très complexe qui dépend de nombreuxressorts. En conséquence, nous ne sommes pas en mesure de faire une présentationexhaustive des sources de la motivation. Cependant nous présenterons les principes quinous paraissent les plus simples, issus de l’Ecole des ressources humaines, courant quis’est développé dans les années 30 à partir de la critique du système Taylorien dont l’objectifétait de réintroduire l’homme au sein de l’organisation.

Nous utiliserons « la théorie des besoins » conceptualisée notamment par AbrahamMaslow124 et Frédéric Hersberg125 pour démontrer que le cadre manager peut faire effetlevier sur la performance humaine s’il prend en compte les besoins de l’individu.

123 Serge HUTEAU « Le management public territorial » Editions PAPYRUS- Efficacité, motivation, compétences et comportement.124 Abraham MASLOW, 1908-1970, psychologue célèbre considéré comme l’un des principaux meneurs de l’approche

humaniste, connu pour son explication de la motivation par la pyramide des besoins.125 Frédéric HERZBERG « Le Travail est la nature de l’homme » Entreprise moderne d’édition, 1971

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

82 Sylvie Frey-Gautier - 2007

Partant du principe que tout homme a des besoins qu’il cherche à satisfaire et qui lepousse à agir, Abraham Maslow, établit en 1943 une échelle des besoins, connue sousle terme de « pyramide de Maslow ». Son point de vue est relativement simple, pour lui,l’homme chercherait au cours de sa vie à satisfaire différents types de besoins, qu’il classeen cinq catégories, chaque nouvelle catégorie n’apparaissant qu’après que la précédenteait été satisfaite, pour l’aspect managérial, cela suppose que le besoin le plus important entermes de motivation est celui qui n’est pas encore satisfait.

Figure n° 15 : PYRAMIDE DE MASLOWA consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut

d'Etudes Politiques de Lyon

Cette pyramide bien connue a été souvent discutée126 eu égard à l’ordre précisd’apparition des différents types de besoins. Ainsi, chez certaines personnes, les besoinsd’estime passent avant les besoins de sécurité. De même les facteurs culturels, les effetsde groupes, comme la comparaison, celle-ci pouvant être envieuse, mais qui peut aussirésulter de comportements d’identification à une classe supérieure par exemple, ou à unepersonnalité publique. Ces facteurs conduisent à remettre en cause cette hiérarchie carles besoins sont pondérés différemment. Nous retiendrons néanmoins cette approche quipermet de définir trois enseignements relatifs à la motivation 127:

- Le comportement est guidé par le besoin ressenti par l’individu comme le plus intensedans la situation présente et ce quelque soit l’ordre des différents besoins.

- Un besoin satisfait ne motive plus de la même façon- Si l’on examine la progression des besoins, du bas vers le haut de la pyramide, on

voit que l’on passe du registre de « l’Avoir », besoins physiologiques au registre de « l’Etre »besoins sociaux d’appartenance au niveau de l’épanouissement de l’être, être accepté,être reconnu….Les besoins d’accomplissement se situent également sur le registre dudéveloppement de l’être, mais dans une dimension plus collective, on désire organiser,créer, inventer…

Nous nous appuierons également sur l’approche de Frédéric Herztberg, pour conforternotre position quant à la nécessité de prendre en compte les besoins de l’individu pourcréer les conditions de la motivation. L’objectif de Frédéric Herzberg était de déterminer lesfacteurs qui influencent la satisfaction au travail. Il ressort de son étude que les causes desatisfaction et d’insatisfaction ne sont pas du même ordre et il identifie ainsi deux sources :

- Les facteurs d’hygiène relatifs à l’environnement et au contexte de travail du salarié(rémunération, conditions de travail)

- Les facteurs relatifs au contenu du travail (intérêt, responsabilisation, initiative,relations avec l’environnement, la progression dans son métier)

L’analyse de Frédéric Herzberg a permis de mettre en évidence l’impact de cesdeux facteurs et démontre que les facteurs d’hygiène comme la rémunération ne jouentpas forcément un rôle positif et limite simplement le mécontentement alors qu’un travailintéressant qui permet d’obtenir des responsabilités et de se réaliser va réveiller lamotivation.

126 Marie Georges FILLEAU- Clotilde MARQUES RIPOULL » Les théories de l’organisation et de l’entreprise » Edition Ellipses127 Nicole AUBERT « Diriger et Motiver » Art et pratique du management - Editions d’Organisation

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Au regard de ces deux théories, nous conclurons donc, que pour être efficace,l’organisation doit contribuer à la réalisation personnelle de ses salariés au travail et quele comportement du cadre est une variable très importante en ce qu’elle permet auxhommes et aux femmes qu’il manage d’avoir envie de progresser et d’améliorer leur niveaude compétences et leur comportement pour répondre à leurs besoins sociaux d’estime,d’appartenance et de réalisation.

La « compétence » est une notion qui renvoie au savoir faire, aux connaissances et àl’expérience. Nous retiendrons la définition du Bureau International du Travail qui stipule que« La compétence professionnelle est une aptitude à exercer efficacement un métier, unefonction ou certaines tâches spécifiques, avec toutes les qualifications requises à cet effet ».

Le « comportement » est une attitude face à une situation de travail. Le comportementsera déterminant dans les situations de travail en équipe où le savoir être compte autant quele savoir faire. La compétence peut s’améliorer, mais le comportement est plus difficilementinfluençable128. Le schéma présenté en page suivante, pris dans l’ouvrage de Serge Huteau« Le management territorial » permet de déterminer les liens entre motivation, compétenceset comportement.

Figure n° 16 : les trois leviers de l’efficacitéA consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut

d'Etudes Politiques de LyonNous verrons dans quelle mesure les managers territoriaux peuvent aider leurs équipes

et leurs collaborateurs à développer leurs compétences et quels sont les outils qu’ils peuventutiliser.

Le processus de développement des compétences est géré de façon globale par lesdirections des ressources humaines au moyen d’un plan de formations construit à partir del’analyse des besoins qui découle des besoins de l’agent et de ceux de l’organisation. Pourune collectivité locale, les besoins de compétences reposent sur les objectifs stratégiquesclairement définis dont les plans d’actions sont démultipliés au niveau de chaque divisionou unité. Mais, en l’espèce, les collectivités locales n’ont pas toutes décidé de mettre enplace une politique de formation. De ce fait, les cadres managers d’équipes, bien qu’ilsconnaissent les orientations stratégiques de la collectivité qui consistent la plupart du tempsà réduire la masse salariale, n’ont parfois pas de projet précis pour leur service.

Néanmoins, même dans les collectivités où le volet managérial des ressourceshumaines n’est pas ou peu développé, les cadres ont intérêt d’établir leur plan de formationspour leur unité en lien avec la direction des ressources humaines. Nous présenterons lesméthodes d’analyses des besoins centrés sur l’expression des attentes individuelles puissur celles de l’organisation ou du service.

La formation représente le levier le plus simple de développement des compétences,elle est par ailleurs, une des composantes majeures de la fonction d’un cadremanager d’équipes. La formation s’impose comme une nécessité notamment, lorsquel’organisation doit dans un souci de continuité du service public s’adapter aux nouvellestechnologies de l’informatique. Dans cet exemple, le schéma directeur informatiqueintégrera nécessairement un plan de formation spécifique permettant aux agents d’acquérirle savoir-faire technique indispensable à l’exécution de ses tâches.

A ce titre, le cadre responsable d’équipes doit s’assurer que ses collaborateursdisposent des compétences suffisantes pour accomplir leurs missions, il est donc chargé

128 Serge HUTEAU « Le management public territorial » Editions du PAPYRUS

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

84 Sylvie Frey-Gautier - 2007

d’analyser les besoins au fur et à mesure qu’ils se font sentir, c’est à lui d’apprécier lasituation et d’identifier les besoins collectifs au niveau du service et pour chaque personne.

Pour ce faire, il dispose d’un certain nombre d’outils qui vont du questionnaire àl’entretien individuel qui peut avoir lieu au moment de l’évaluation annuelle et permetau collaborateur de s’auto évaluer en exprimant ses besoins, le responsable, devraà son tour confronter les besoins attendus et les besoins qu’il perçoit pour l’agent etpour l’organisation ou l’unité de travail. L’encadrant pourra également s’appuyer sur desoutils plus sophistiqués, tels que le bilan de compétences ou le bilan professionnel dansl’hypothèse où le collaborateur arrive en phase de démotivation et qu’il ait émis le souhaitde s’inscrire dans une démarche d’évolution professionnelle. Le bilan de compétencespermettra à l’agent d’identifier ses compétences professionnelles et personnelles ainsique ses aptitudes et ses motivations afin de définir un projet professionnel et le caséchéant un projet de formation. Le bilan professionnel est un diagnostic de carrièreet peut éventuellement s’asseoir sur un bilan de compétences. Ces outils s’adressentparticulièrement aux collaborateurs qui se situent au sommet de la courbe d’occupationd’un emploi129 et risquent dans un délai plus ou moins long d’être démotivés ou souhaitentsimplement faire évoluer leur carrière. Il va de soi que ces outils ne sont pas utilisés parle cadre manager, mais, en règle générale par un psychologue. Le schéma présenté ci-dessous permettra de visualiser les différentes étapes relatives à l’occupation d’un emploiqui s’échelonnent sur une moyenne de quatre à six ans. Un cadre manager bien avisé pourraainsi comprendre et anticiper le besoin de changement de ses collaborateurs qui s’inscritdans un ordre naturel d’évolution. En pratique, les collectivités locales et les responsablesde zone se tournent vers la mobilité interne lorsque cela s’avère possible.

Figure n° 17 : la courbe d’occupation à l’emploiA consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut

d'Etudes Politiques de LyonNous présenterons également une grille de lecture (CF annexe), qui permettra au cadre

manager d’identifier les besoins collectifs et les besoins individuels au sein de sa zone deresponsabilité et d’évaluer le rapport entre les compétences requises pour la réalisationde l’activité, et les compétences du collaborateur, le cadre manger disposera ainsi d’unoutil synthétique permettant de connaître à la fois le degré de vulnérabilité du service et ledegré de polyvalence de ses collaborateurs. La grille de compétences130met en évidenceles opérations courantes et les opérations à développer qui sont fonction des besoins del’organisation, elle permet également de déterminer les comportements, c'est-à-dire lescompétences transversales utiles à la réalisation des opérations. Enfin, elle permet aucadre responsable de réaliser une cotation de façon à évaluer la qualité de réalisationeffective d’une opération. Les grilles de compétences sont nécessaires à la conduite d’unezone car elles peuvent être utilisées comme support à l’évaluation des agents, mais aussicomme outil de prévision et d’aide à la décision, car le cadre manager doit aussi avoir unevision à court et moyen terme des possibilités de ses collaborateurs, les outils présentés luipermettront d’anticiper le changement.

Pour un cadre manager, une grande partie des solutions se trouve dans sa capacitéà gérer les relations humaines, à s’intéresser réellement à la personne qu’il encadre et

129 Schéma proposé par Simon MOVERMANN Directeur des Ressources Humaines à la Région Rhône Alpes- intervenantsur le thème du Management des ressources Humaines à l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon

130 Outil présenté par Anne BLANC-BOGE, Maître de conférences de sciences de Gestion à l’institut d’Etudes Politiques deLyon

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qu’il peut faire progresser, parfois quelques mots suffisent pour encourager. Les cadresinterviewés qui, pour la plupart d’entre eux ont une grande expérience ont reconnu que laprise en compte de la dimension humaine était un facteur primordial dans l’exercice de leurfonction et représentait 80% de leur temps de travail. Leur principale préoccupation consistedonc à mobiliser leurs collaborateurs, ils reconnaissent que leur rôle n’est pas simple car,de nombreux facteurs influencent la motivation et il n’existe pas de solution universelle.Par voie de conséquence, ils reconnaissent que c’est à eux d’adapter leur comportement àchaque individu selon le contexte et les circonstances afin d’optimiser au mieux la ressourcehumaine. Leur disponibilité, leur force de conviction fondée sur un système de valeurs,le respect qu’ils témoignent à chacun de leurs collaborateurs permettent de créer lesconditions de la motivation et ainsi démultiplier les énergies humaines, déclencher l’envie des’engager dans la cause collective. L’engagement se traduira par le souhait de progresser,d’acquérir d’autres compétences ou tout au moins, de les développer afin de devenir plusefficace.

Le rôle du cadre manager est de veiller au développement de sa zone de responsabilitéen instaurant des méthodes de travail axées sur une plus grande liberté d’actions.

L’organisation du travail, notamment l’auto contrôle, l’élargissement des tâches oul’introduction de nouvelles tâches, le fait d’atteindre un bon niveau de maîtrise sur un postede travail donne confiance et répond au besoin de sécurité et d’estime des acteurs, quipeuvent ainsi envisager de prendre des responsabilités.

Une équipe formée, qualifiée et volontaire peut devenir une équipe performante,mais pour se faire, le cadre doit ici encore stimuler les énergies en lançant des idéesd’amélioration qui vont permettre de libérer les initiatives et de valoriser l’équipe et les agentsqui la compose.

2.2 Encourager les idées d’amélioration autour d’un projet collectifNous l’avons évoqué en première partie, les projets permettent de fédérer et apportent unecertaine cohésion s’ils sont bien conduits. A cet égard, les démarches de progrès constituentdes puissants leviers de motivation à partir du moment où elles ont un sens et qu’ellescontribuent à développer l’esprit d’équipe. En tout état de cause, la co-élaboration131 estune condition essentielle, la conception d’un projet de service devra être nécessairementparticipative, et doit être co-élaborée par l’équipe de travail au sein de réunions de services.A ce titre le leadership du cadre manager tient une place prépondérante. Ce sera à lui deporter l’action, de communiquer, de rassembler.

Nous présenterons ici une idée d’amélioration qui, nous le verrons a permis d’une partde mobiliser les acteurs et d’autre part, d’améliorer la performance individuelle et collective.Ce projet est un retour d’expérience (CF annexe).

Une nouvelle prise de fonctions représente souvent l’occasion de porter un regardnouveau sur le service que l’on intègre. Donc, le rapport que je devais établir dans lecadre de la formation initiale consécutive à un détachement sur un poste de rédacteur,responsable adjoint, dans une autre collectivité en juin 1999, m’a permis de réfléchir quantà l’amélioration de l’activité du service population dans lequel j’étais affectée et à la qualitéde l’information destinée aux usagers. L’expérience acquise auprès d’un service similairedans une collectivité plus importante et organisée différemment m’a permis de faire des

131 La Gazette, 11 septembre 2006 « Le projet de service, levier de changement » article rédigé par Maud PARNAUDEAU, interviewde Jacques DURANTON.

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

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comparaisons et de réfléchir à la façon dont on pouvait améliorer l’efficacité de cetteunité. Pour ce faire, j’ai commencé par rentrer en phase d’observation tout en pratiquantpendant quelques mois. Ensuite, au regard des stages d’immersion au sein d’organisationspubliques différentes : Tribunal de Grande instance, Préfecture du Rhône, communes,service funéraires, puis, du dialogue instauré avec la responsable du service de l’époque etavec mes collaboratrices, j’ai pu mûrir ma réflexion et proposer une idée d’amélioration. Lesmoyens d’actions que j’avais entrevus reposaient sur le développement de la polyvalenceet sur la création de supports de communication internes au service et à destination desusagers.

Pour développer la polyvalence, nous avons dans un premier temps recensé lesbesoins de nos collaborateurs. Pour ce faire, nous avons évalué les connaissancestechniques et les possibilités de chaque personne, puis nous avons mis en œuvre un plan deformation interne au service qui consista à développer les compétences sur plusieurs tâchesliées à l’activité du service, essentiellement des formations juridiques portant sur l’acquisitiondes bases et la réactualisation des connaissances en droit de la famille, en droit électoral eten législation funéraire. Les formations théoriques ont été dispensées par le Centre Nationalde la Fonction publique territoriale. Des formations internes fondées sur la pratique ont étéassurées au sein du service, puis auprès d’autres organisations publiques avec lesquellesnous avons beaucoup échangé. Le deuxième axe d’amélioration portait sur la créationde supports de communication. Nous avons donc élaboré un guide de procédures endirection des administrés puis, nous avons crée un répertoire des cas difficiles, consultableen interne et mis à jour régulièrement. Ces deux projets, n’ont pas fait l’objet d’une évaluationspécifique, cependant, nous attachons toujours beaucoup d’importance à la formation et àla communication au sein du service et nous recevons très souvent des retours positifs dela part des usagers, qui représentent une source de satisfaction et permettent de mobiliserencore plus nos ressources. Ce projet, fruit d’une concertation avec tous les acteurs, apermis de dynamiser le travail de l’équipe et d’améliorer l’information diffusée aux usagers.

Le projet de service, intitulé différemment suivant les collectivités, démarche de progrèsou plan d’actions, est un levier de changement pour les collectivités locales qui l’utilisent deplus en plus. Le projet de service est avant tout un outil de management et un moyen pour lecadre de manager et d’animer son équipe, en l’élaborant ensemble et en le partageant avecelle. Pour que cette démarche soit constructive, les cadres doivent apprendre à écouteret prendre en compte les idées de leurs collaborateurs. L’expression des acteurs sur labase du volontariat permet d’enrichir la réflexion. En effet, les agents sont en prise directeavec la réalité du terrain, ce sont eux qui sont les mieux placés pour relayer l’informationet identifier certains dysfonctionnements. Lorsque les agents sont impliqués et reconnusdans un projet, qu’ils participent aux groupes de travail, non seulement, ils ajoutent de lavaleur à la réflexion, mais, ils peuvent aussi représenter la collectivité dans ses démarchesde progrès. Les cadres managers parviendront à initier le changement et à modifier lescomportements en mettant en œuvre un management de type participatif, car le sentimentd’appartenance à un groupe et le fait de se sentir utile à la cause commune constituentpour les hommes et les femmes qui font vivre l’organisation des facteurs de motivation trèspuissants.

Par l’expression de sa personnalité et de sa maturité psychologique le cadre managerpeut faire émerger un style de leadership lui permettant de faire effet de levier sur laperformance humaine. En effet, c’est en mobilisant les ressources émotionnelles de sescollaborateurs et pas seulement les connaissances et savoir faire techniques qu’un cadrepeut parvenir à déclencher l’envie d’agir. Par ses capacités à visionner l’avenir, à convaincre

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de l’utilité des actions futures, à rassembler autour de valeurs communes, il est en mesured’instaurer les conditions de la motivation, non pas en poussant ses collaborateurs dans telleou telle direction, mais en répondant à leurs besoins fondamentaux d’appartenance et dereconnaissance. C’est donc en adaptant son style de leadership aux différentes situationset à ses différents interlocuteurs qu’un cadre manager peut provoquer l’action. Ainsi, sescollaborateurs, concentrés sur une vision, claire, cohérente et dynamique du futur aurontla volonté de s’engager, de progresser en développant leurs compétences, en prenantdes responsabilités, en faisant preuve de créativité pour atteindre les objectifs fixés parl’organisation. Le leadership n’est pas inné, cependant, l’homme a les capacités de seremettre en cause, c’est donc en développant son propre potentiel qu’un cadre peut valorisercelui des ses collaborateurs et permettre à la collectivité d’atteindre un certain niveau deperformance.

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

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CONCLUSION GENERALE

Pris dans les remous d’un environnement externe plus qu’incertain, le manager territorial setrouve confronté à des problématiques de tout ordre qu’il doit être en mesure d’appréhender.En effet, les enjeux des collectivités locales prennent une dimension qui dépasse l’approcheclassique de la résolution de problèmes vue sous l’angle de l’analyse des causes à effets.Désormais, la recherche de solutions fait appel à un raisonnement de type systémiquerequérant un traitement global des différents problèmes. Par voie de conséquence, lemanager territorial doit mettre en mouvement toutes ses aptitudes pour se fondre dans cetunivers.

Les collectivités locales ne s’inscrivent pas dans une logique de rentabilité, malgrétout, elles participent activement à la vie économique du pays. En ce sens, les actionsqu’elles mettent en œuvre contribuent à réguler le système économique national. Leurvocation principale inspirée par l’intérêt général, principe profondément ancré dans la culturefrançaise, qui se conçoit en quelque sorte comme la somme des intérêts particuliers,commence quelque peu à s’estomper et à prendre une forme différente qui se caractérisepar la demande ou le besoin des usagers plutôt qu’à l’offre de prestations juridiques. De cefait, le management public local doit nécessairement amorcer une rupture avec le systèmebureaucratique traditionnel et rentrer dans une nouvelle phase de son existence qui passepar un changement de culture.

Cependant, pour introduire de nouvelles logiques et de nouveaux comportements, lescollectivités locales doivent pouvoir compter sur les hommes et les femmes qui composentleurs organisations. De ce fait, pour réussir à passer les différentes étapes du changementculturel et organisationnel, tous les acteurs de la chaîne humaine doivent être pris en compteet impliqués. A cet égard, le manager territorial placé au cœur de l’organisation occupeun rôle clé. Ses missions principales consistent à piloter une zone de responsabilité, c'est-à-dire établir des plans d’actions, les suivre et surtout animer leurs équipes de travail. Ilsdoivent également être en mesure d’aider les élus ou la direction à prendre des décisions.Les compétences que l’on attend d’un cadre manager aujourd’hui vont au-delà de l’expertiseet se situent sur ses capacités à envisager globalement les problématiques qui lui sontsoumises. Il doit en conséquence connaître ses fondamentaux de gestion sans focalisersur l’expertise qu’il peut détenir de sa formation initiale. L’exercice de son métier reposeessentiellement sur sa capacité à développer ses compétences managériales et notammentà intégrer la dimension humaine dans sa conduite d’actions. Pour optimiser le pilotage desa zone de responsabilité, le manager territorial doit réfléchir à la mise en place d’uneorganisation de travail efficace et s’appuyer sur des outils de gestion de type participatifqui lui permettront de mobiliser les énergies humaines, seules ressources vivantes del’organisation.

Néanmoins, avant toute tentative de changement, c'est-à-dire avant de mettre en placeune organisation participative, le cadre manager devra être réellement convaincu de sonutilité et s’assurer de la faisabilité de son initiative. En tout état de cause, l’ensembledes méthodes et outils de gestion n’auront que l’efficacité de celui qui les met en œuvre.En effet, les qualités humaines du manager comptent infiniment plus que l’ensemble desconnaissances techniques dont il peut se prévaloir. Ainsi, pour passer d’une culture de

CONCLUSION GENERALE

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moyens à une culture de résultat, concourrant à l’activité et à la qualité des servicespublics sur leur territoire, les collectivités locales devront compter essentiellement sur lescompétences de leurs managers chargés de conduire la performance, intégrant toutesles dimensions du pilotage, la dimension stratégique décidée par les élus, la dimensionorganisationnelle, la dimension humaine, la dimension économique consistant à maîtriserles coûts. Les outils comme l’analyse et le contrôle de gestion qui ne s’entendent pasuniquement comme la gestion financière d’une organisation, mais plus largement commedes outils qui s’emploient à articuler l’ensemble des processus permettent aux cadresmanagers d’obtenir une vision dégagée et claire des niveaux de performances, en tempsréel.

Cependant, la voie qui conduit le manager territorial à produire et obtenir des résultatsest quelquefois obstruée par la nature de l’organisation formée par un double systèmepolitique et administratif au sein duquel il doit pouvoir se positionner.

Par ailleurs, la fonction ressource humaine n’a pas encore réussi à intégrer la dimensionprospective nécessaire au pilotage de l’organisation et souffre encore trop souvent d’unegestion purement administrative au détriment d’une gestion managériale. De ce fait, lescadres territoriaux se trouvent parfois seuls à devoir résoudre des problématiques humainescomme l’usure professionnelle sans soutien des directions des ressources humaines, elles-mêmes confrontées au manque de stratégie politique. La faiblesse de la fonction ressourcehumaine rejaillit fortement sur le travail des managers qui se sentent parfois lâchés parl’organisation.

En outre, les cadres, managers d’équipes ne sont pas suffisamment préparés àl’exercice de cette fonction, qui, comme l’avait très justement soutenu Henri Fayol au débutdu 20ème Siècle est un véritable métier qui doit faire l’objet d’enseignements spécifiques.Un parcours de formation orienté vers un apprentissage en psychologie du managementconjugué à l’acquisition de connaissances techniques nécessaires au pilotage global d’uneorganisation éviterait bien des écueils aux managers qui assument des responsabilitéslourdes et délicates, particulièrement en termes de gestion des hommes et des femmesqu’ils encadrent au quotidien.

Nonobstant ces difficultés, le manager territorial par sa force de conviction et l’énergiequ’il est prêt à déployer pour se projeter dans l’avenir, peut faire progresser la performancede l’organisation. Mais, la performance, pour lui, dépasse la seule cible des résultats àatteindre. Si cette notion le renvoie à une exigence de pilotage, il accorde encore plus devaleur à la qualité de ses rapports avec ses collaborateurs, à sa capacité à conduire l’actionindividuelle et collective. Son rôle, il l’a compris, consiste à mobiliser ses collaborateursautour d’une vision créatrice pour l’organisation et épanouissante pour ses acteurs. Ainsi, lemanager territorial, s’attache à clarifier les objectifs politiques, à les rendre compréhensibles.Il sait trouver un juste équilibre entre rationalité et intuition. Le contrôle de gestion interneen tant qu’outil de pilotage et de communication est incontournable pour lui, mais il sait allerau-delà des représentations rationnelles et conçoit la performance comme une dynamiqueindividuelle et collective qu’il doit mettre en action. A cet effet, il s’attache à comprendre lefonctionnement de ses collaborateurs et instaure des relations humaines de qualité. Pour cefaire, il met en œuvre une communication efficace, c'est-à-dire un échange qui soit clair surle contenu et qui prenne en compte le côté émotionnel de chaque personne. Le managerterritorial possède quelque part l’étoffe d’un leader, il éprouve et suscite autour de lui l’enviede progresser par sa capacité à mobiliser les hommes et les femmes avec qui il travaille.Il sait se remettre en cause et adapter son attitude afin de trouver un juste milieu entredétachement et implication. Il est un fervent partisan du progrès et du changement, il sait

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

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que rien ne s’inscrit dans la durée et qu’il est sage d’anticiper. A cet égard, il construit l’aveniravec ses collaborateurs, il détecte leurs potentiels et les met en action, il tente de développerleurs compétences et ne laisse personne au bord de la route. Bref, il a compris que la cléde l’action se situe à l’intérieur de la ressource vivante, les hommes et les femmes quicomposent l’organisation en l’occurrence, et que pour produire de meilleures performances,il faut établir des relations humaines tout simplement.

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Sylvie Frey-Gautier - 2007 91

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Henri BOUQUIN « Contrôle de gestion » Editions PUF 1991 - 508 pages

Jacques ORSINI « Management stratégique » Editions VUIBERT 1990

Jacques ROJOT « Théorie des organisations » Editions ESKA - 541 pages

Roger AÏM « L’essentiel de la Gestion de Projet » GUALINO Editeur - 105 pages

Stéphane DION « La politisation des mairies » Préface de Michel CROZIER EditionsECONOMICA - 213 pages

Henri MINTZBERG « Le Pouvoir dans les organisations » Le système descompétences spécialisées - Editions d’organisation - 688 pages

Serge ALECIAN et Dominique FOUCHER « Guide du management dans le servicepublic » op.cit

Jean-Marie PERRETTI « Ressources Humaines » EDITIONS VUIBERT- 565 pages

Nicole AUBERT « Diriger et Motiver » Art et pratique du management - Editionsd’Organisation - 355 pages

Frédéric PETITBON « Le guide du manager public » Editions d’Organisations - 208pages

Henry RANCHON « Construire votre management d’équipe » Sept leviers d’action pourune équipe performante, esf EDITEUR - 240 pages

Meryem Le SAGET « Le manager intuitif » Une nouvelle force - Editions DUNOD - 269pages

Gérard COLLIGNON « Comment leur dire…» La Process Communication, InterEDITIONS 204 pages

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

92 Sylvie Frey-Gautier - 2007

DOCUMENTATION

Rapport site Minefi – Ministère de l’économie et des finances « solidarité etperformance » Pierre Richard - décembre 2006

La documentation française « Dossiers fonction publique » évolution des effectifs 21août 2006

Jacques CHEVALLIER « La gestion publique à l’heure de la banalisation » RevueFrançaise de Gestion n°115 septembre, octobre 1997

Guide pratique CNFPT « Centre National de la Fonction publique Territoriale » Lepaysage administratif français

Rapport « La gouvernance territoriale comme nouveau mode de coordinationterritoriale » Par Fabienne LELOUP, Laurence MOYART Bernard PECQUEUR(Université J. Fourrier, Grenoble) 4ème journée de la proximité 17 et 18 juin 2004

Guide méthodologique - Référentiel /Emploi/Activités/Compétences CNFPT juin 2001

Baromètre des offres d’emploi n°5 produit et édité par l’observatoire du Centre Nationalde la Fonction Publique Territoriale

Etudes Ressources Humaines RH&M, N°26 Juin/Juillet 2007

CHEVALIER J, LOSCHAK D (1982) : Rationalité juridique et rationalité managérialedans l’administration française. Revue française d’administration publique, n°24

Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques, source INSEE première n° 1056

Jean-Luc BŒUF « L’évaluation des politiques publiques » Problèmes politiques etsociaux, N°853 - 23 février 2001- La Documentation Française

Denys LAMARZELLE « Le Management Public en Europe », Docteur en sciences deGestion, Directeur de collectivités locales

La Gazette « Politiques en faveur de l’innovation dans les petites villes» cahier détachén°3-7 / 1873 – 12 février 2007

La Gazette des communes, 2 octobre 2006 Gestion locale, article de JacquesPAQUIER

La Gazette - cahier détaché n°3- 22janvier 2007 « Les transferts de compétences del’Etat aux collectivités »

La Gazette des communes, 12 avril1999 « Il faut parier sur l’autonomie des agents » Marc SCHPILBERG, Consultant

La Gazette des communes, article du 26 septembre 2005 « Les collectivités quiadoptent la LOLF »

La Gazette des communes, 19 février 2007, « Que Faire quand des élus ses prennentpour des chefs de service ? »

DOCUMENTATION

Sylvie Frey-Gautier - 2007 93

La Gazette des communes, 28 août 2006, article rédigé par Bruno LEPRAT, « Desdirecteurs généraux usés par les élus » Gilles WALLIS, consultant en management

La Gazette des communes, 28 août 2006, article rédigé par Bruno LEPRAT, « Desdirecteurs généraux usés par les élus » Gilles WALLIS, consultant en management

La Gazette des communes 10 juillet 2006, article rédigé par Martine DORIAC

La Gazette des communes 13 mars 2006, article rédigé par Martine DORIAC

La Gazette, cahier détaché n°27/1893 du 2 juillet 2007 « L’amélioration desperformances des collectivités territoriales » Etude réalisée par trois élèvesadministrateurs territoriaux.

La Gazette des communes 8 novembre 2004 « La notation des fonctionnairesterritoriaux »

La Gazette des communes 25 septembre 2006 « A Aulnay, chaque agent sera évaluéen fonction d’objectifs individuels »

La Gazette des communes, 11 septembre 2006 « Le projet de service, levier dechangement » article rédigé par Maud PARNAUDEAU, interview de JacquesDURANTON.

La lettre du cadre territorial n°308, 15 décembre 2005

La lettre du cadre N°323-15 septembre 2006

La lettre du cadre N°323-15 septembre 2006 Jean-Marc CORNU, responsable del’évaluation des Politiques Publiques, Conseil Général de la Drôme.

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

94 Sylvie Frey-Gautier - 2007

SITES INTERNET

www.legifrance.fr

Site http://www.vie-publique.fr

www.colloc.minefi.gouv.fr/

www.insee.fr/

NORMES JURIDIQUES

Sylvie Frey-Gautier - 2007 95

NORMES JURIDIQUES

Loi organique relative aux lois de finances, LOLF du premier août 2001

Loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la FonctionPublique Territoriale

Loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des commune des,départements et régions

Loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales « ActeII de la décentralisation »

La loi organique relative aux lois de finances du premier août 2001

Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et n° 84-53 du 26 janvier 1984, décret n°86-68 du 13janvier 1986 « Procédure de détachement »

Loi du 26 janvier 1984, décret du 30 décembre 1987 et du 9 février 1990

Loi n° 2007-148 du 2 février 2007

Loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires).

Le principe de notation est posé par le statut général des fonctionnaires (titre I, article17 de la Conseil d’Etat, 23 novembre 1962, AJDA 1962, page 666 à 687

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

96 Sylvie Frey-Gautier - 2007

SCHEMAS

∙ Figure n°1 : Les différents niveaux d’encadrement / Nature du management∙ Figure n°2 : Le rôle du manager, Annie BARTOLI « le management dans les

organisations publiques » Editions DUNOD 2005.∙ Figure n°3 : Les capacités liées à l’exercice du management « Pilotage de

l’action collective », cours dispensé par Norbert HEKIMIAN, Consultant, Maître deconférences associé à l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon

∙ Figure n°4 : Méthodes et outils de gestion de type participatif∙ Figure n° 5 : Management des ressources humaines, cours méthodologie du

Diagnostic Organisationnel dispensé par Madame Anne BLANC-BOGE Maître deconférences de Sciences de Gestion IEP de Lyon

∙ Figure n°6 : La dualité hiérarchique à l’échelle municipale, Stéphane DION « Lapolitisation des mairies » Préface de Michel CROZIER Editions ECONOMICA

∙ Figure n°7 : Rationalité juridique et rationalité managériale, CHEVALIER J, LOSCHAKD (1982) : Rationalité juridique et rationalité managériale dans l’administrationfrançaise. Revue française d’administration publique, n°24.

∙ Figure n°8 : Types de résultats en fonction des acteurs impliqués dans la qualité, « Lecycle de la qualité» Bernard AVEROUS, expérience déployée à la RATP. « Evaluerla qualité et la performance publique », schéma présenté page 33 La documentationfrançaise.

∙ Figure n°9 : Les différentes dimensions de la performance, schéma présentépage 388 « Le management public territorial », les différentes dimensions de laperformance, Serge HUTEAU Editions PAPYRUS

∙ Figure n°10 : Démarche globale de déclinaison des objectifs∙ Figure n°11 : Evaluation globale des performances∙ Figure n°12 : Contenu et processus dans la communication, Nicole AUBERT « Diriger

et Motiver » Art et pratique du management. Editions d’Organisation, schémaprésenté page 95

∙ Figure n°13 : Exemple, structure d’une personnalité, Gérard COLLIGNON « Commentleur dire…. » La Process Communication, page 30, Inter EDITIONS

∙ Figure n°14 : Manager/ leader : Opposition ou complémentarité, Nicole AUBERT« Diriger et Motiver » Art et pratique du management, page 72, Editionsd’Organisation

∙ Figure n°15 : Pyramide de MASLOW∙ Figure n° 16 : Les trois leviers de l’efficacité, Serge HUTEAU « Le management

public territorial » schéma présenté page 333, Editions du PAPYRUS∙ Figure n°17 : La courbe d’occupation à l’emploi, schéma proposé par Simon

MOVERMANN Directeur des Ressources Humaines à la Région Rhône Alpes,intervenant sur le thème du Management des ressources Humaines à l’Institutd’Etudes Politiques de Lyon

SCHEMAS

Sylvie Frey-Gautier - 2007 97

∙ Ces figures sont à consulter sur place au Centre de Documentation Contemporainede l'Institut d'Etudes Politiques de Lyon

Le manager territorial comme levier de performance de l’organisation ?

98 Sylvie Frey-Gautier - 2007

ANNEXES

∙ Guide d’entretien∙ Bilan d’activités∙ Grilles compétences∙ Fiche emploi/métier∙ Bilan social∙ Rapport /Idée d’amélioration

Ces annexes sont à consulter sur place au Centre de Documentation Contemporainede l'Institut d'Etudes Politiques de Lyon