un adénome hypophysaire atypique

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Un adénome hypophysaire atypique Service d’Endocrinologie Métabolisme – Pr Eric Bruckert Camille SERGEANT – DES Endocrinologie 5 juin 2015 Hôpital Pitié Salpetrière

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Page 1: Un adénome hypophysaire atypique

Un adénome hypophysaire atypique

Service d’Endocrinologie Métabolisme – Pr Eric BruckertCamille SERGEANT – DES Endocrinologie

5 juin 2015Hôpital Pitié Salpetrière

Page 2: Un adénome hypophysaire atypique

CAS CLINIQUEMonsieur L., 21 ans, Camerounais, adressé dans le service du Pr Bruckert

- 2003 : hypercalcémie sévère à 3.11mmol/L, diagnostic d’hyperparathyroïdie primaire (élévation de la PTH à 218 pg/mL) par hyperplasie des quatre glandes parathyroïdes

- à l’interrogatoire, découverte de lourds antécédents d’ulcères gastro-duodénaux dans l’enfance (épigastralgies et hématémèses)

- son père présentait les mêmes symptômes…

ASSOCIATION hyperparathyroïdie primaire + ulcères gastro-duodénaux sévères à répétition chez un homme jeune + contexte familial

RECHERCHER Néoplasie Endocrinienne Multiple de type 1 (NEM 1)

Page 3: Un adénome hypophysaire atypique

NEM 1

Tumeurs endocriniennes multiples, au moins 2 localisations

Transmission autosomique dominante

Mutations inactivant le gênesuppresseur de tumeurs MEN1

Chromosome 11q13

* Vergès et al., 2002 : 324 patients

95% *

42% *

54% *

Adrenal

Page 4: Un adénome hypophysaire atypique

Bilan exhaustif :

- Gastrinome duodénal responsable d’un syndrome de Zollinger-Ellison

- Tumeur neuro-endocrine pancréatique non sécrétante (pas d’anatomopathologie)

- Adénome surrénalien 30mm unilatéral non sécrétant (notamment absence d’hypercorticisme)

- Double adénome hypophysaire: prolactinomes (prolactinémie à 350ng/mL, N < 20) sans co-sécrétion de GH, cortisol et ACTH 8h normaux .

- Chez le père : prolactinome, gastrinome et hyperparathyroïdie

Prise en charge :

- Parathyroïdectomie subtotale et thymectomie prophylactique en mars 2003 => hypoparathyroidie plusieurs années puis normalisation du bilan phophocalcique sans récidive

- IPP forte dose

- Surveillance en écho-endoscopie de la TNE pancréatique et de l’adénome surrénalien (stables)

- Agoniste dopaminergique: Parlodel® 5mg/j puis Dostinex® jusqu’à 5 cp/sem avec normalisation de la prolactinémie mais stabilité des lésions radiologiques

Page 5: Un adénome hypophysaire atypique

Génétique :

Mutation de l’exon 6 du gène de la ménine : mutation de type décalage du cadre de lecture

entraînant un codon STOP

Confirmant le diagnostic de NEOPLASIE ENDOCRINIENNE MULTIPLE DE TYPE 1

Imagerie 2003 :

IRM hypophysaire en coupe coronale (A) T2 (B) T1 (C) T1 avec gadolinium

Deux adénomes de part et d’autre de la selle turcique, envahissement des deux sinus caverneux

Stabilité des lésions – pas de régression de taille

Page 6: Un adénome hypophysaire atypique

- En 2013, prise de poids inexpliquée (+ 22kg), découverte d’un diabète de type 2 (HbA1c=8.4%)

- Hypercortisolisme biologique ACTH dépendant :

- FLU élevés à 111µg/24h et 93µg/24H (n<60)

- Cycle cortisol et ACTH aboli avec ACTH non freinée à 22,4pg/ml à 8h, cortisolémie à minuit élevée à 159ng/ml

- pas de freinage de la cortisolémie au freinage standard (32ng/mL)

- Tests dynamiques en faveur d’une maladie de Cushing: réponse explosive ACTH après CRH et Minirin, et freinage au freinage fort

- Confirmation de l’origine hypophysaire par cathétérisme des sinus pétreux : deux adénomes, absence de diminution de taille (peu fréquent en cas de prolactinome) (gradient centro-périphérique à droite) : Maladie de Cushing

Page 7: Un adénome hypophysaire atypique

Prise en charge :

- 17 décembre 2013 : chirurgie transphénoïdale avec résection complète des deux lésions

- Arrêt du Dostinex®

Anatomopathologie :

- Microadénome corticotrope (marquage ACTH positif)

- Tumeur en collision : gangliocytome incluant un prolactinome

- Marquage exceptionnel des cellules neuronales pour certaines hormones ante-hypophysaires

Page 8: Un adénome hypophysaire atypique

Réflexions autour de cette exception anatomopathologique

• Association exceptionnelle d’un double adénome hypophysaire et d’un gangliocytome dans un contexte de NEM 1

• Habituellement dans la NEM1 (vs patients non NEM1) : – sex ratio en faveur des femmes, patients plus jeunes

– plus de macroadénomes, plus invasifs, risque de récurrence supérieur

– plus d’adénomes multiples, plus de « plurihormonaux »

– prolactinomes > somatotropes > non sécrétants > corticotropes

– moins bon contrôle de l’hypersécrétion

• Gangliocytome : tumeur neuronale rare et bénigne, formée de neurones matures, possible association à un adénome hypophysaire, fréquents facteurs hypothalamiques (surtout GHRH ou CRH)

• Stimulation des cellules hypophysaires par facteurs hypothalamiques sécrétés par le gangliocytome ?

• Origine commune des cellules neuronales et adénomateuses ?

Page 9: Un adénome hypophysaire atypique

Evolution :

- Pas d’insuffisance corticotrope post opératoire mais normalisation des FLU, du cycle du cortisol et de l’ACTH

- Prolactine normalisée sans traitement

→ Surveillance régulière des FLU+++: normaux (18 mois post op)

IRM hypophysaire en coupe coronale (A) T2 (B) T1 (C) et axial (D) T1 avec gadoliniumDeux reliquats adénomateux autour des sinus caverneux

Page 10: Un adénome hypophysaire atypique

CONCLUSION

• La plupart des prolactinomes répondent aux agonistes dopaminergiques par une diminution de la prolactinémie et par une régression de taille de l’adénome

• En cas de discordance entre baisse de la prolactinémie et stabilité de la tumeur à l’IRM, évoquer une co sécrétion, penser à un autre type de lésion

• Cas exceptionnel d’anathomopathologie hypophysaire dans une NEM de type I

• Dans le contexte de NEM 1, adénomes plus invasifs à risque de récurrence, surveillance prolongée