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twen Thèmes d’actualité pour les jeunes Liberté et responsabilité La bonne décision Les sentiments et la pensée doivent correspondre. Nous n’achetons pas le meilleur, mais ce que tout le monde a. Tirer ou passer? Ainsi décide le buteur de la Nati.

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La bonne décision Les sentiments et la pensée doivent correspondre. Nous n’achetons pas le meilleur, mais ce que tout le monde a. Tirer ou passer? Ainsi décide le buteur de la Nati. Thèmes d’actualité pour les jeunes Liberté et responsabilité

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twenThèmes d’actualité pour les jeunes

Liberté et responsabilité

La bonne décisionLes sentiments et la pensée doivent correspondre.Nous n’achetons pas le meilleur, mais ce que tout le monde a.Tirer ou passer? Ainsi décide le buteur de la Nati.

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Le bon choix Souvent, nous disposons de suffisamment de temps pour prendre nos décisions. Mais comment font les personnes obligées de décider sur-le-champ? Par exemple, les arbitres d’un match de foot?

Marco Streller, buteur de la Nati

... et déjà leballon s’envole!Faire une passe? Tirer soi-même? «Face aux buts, c’est le feeling qui parle; surtout ne pas réfléchir trop longtemps», déclare l’attaquant Marco Streller.

La saison dernière, Marco Streller (29 ans) a été le meilleur buteur à passeport rouge et croix blanche de l’AXPO Super League, sur­

classé uniquement par l’Ivoirien Doumbia. En 2009/2010, il a marqué 21 buts et fait une dizaine de passes décisives. Son bilan de la saison en cours est tout aussi honorable: jusqu’à la pause de l’hiver, il a huit buts et six passes décisives à son actif.

Tirer ou passer le ballon, comment ce footballeur titularisé 35 fois au niveau international décide­t­il? «Il faut faire confiance à l’intuition du moment et oublier les procédures mille fois répétées.» En tant qu’attaquant, il sait que s’il réfléchit trop longtemps, le ballon s’envole. Surtout dans les matchs au rythme soutenu, par exem­ple en Champions League. «Ballon au pied, tu entres dans les 16 mètres, tu as une intuition et tu fonces. Si tu réfléchis trop longtemps devant les buts, cela signifie que tu n’es pas en forme.»

L’expérience est bien sûr déterminan­te: «Tu connais les procédures et tu as une plus grande maîtrise de toi. Avant un match, les joueurs expérimentés ne sont pas spécialement nerveux; la routine donne une certaine assuran­ce». Et quand on joue le tout pour le tout et qu’on rate son coup alors qu’un joueur était mieux placé? Ça doit être rageant, non? «Effectivement, et on accuse un manque de pot! Au niveau international, tu as une ou deux occa­sions par match. Si tu rates la premiè­re, il faut vite oublier, rester concentré et espérer que la deuxième se présen­tera.»

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Décider en quelques minutes

«Le corps ne ment jamais.»

Erreur d’arbitrage ou non:

concentration absolue

René Mägli sait relativement vite s’il va engager une personne ou non. Patron de MSC Mediterranean Shipping Agency Suisse, la deuxième compagnie maritime du monde, il conduit lui-même les entretiens d’embauche.

René Mägli a la décision rapide. Parfois, tout est déjà joué à peine un candidat a-t-il franchi la porte de son bureau. Par exemple, mi-janvier, il avait convoqué une candidate pour un entretien. «J’ai su d’emblée

que c’était un bon élément et, le lendemain, elle prenait son service.» «Je pense avoir une bonne connaissance de l’être humain; je prends des décisions intuitivement. Je ne peux pas en dire davantage.» Cette intuition se trouve générale-ment confortée par le langage du corps: «Je suis convaincu que le corps ne ment jamais.»

Pour René Mägli, il importe avant tout qu’une personne ait le profil MSC et qu’elle corresponde à l’équipe avec laquel-

Elle est certainement la plus jeune arbitre de Suisse, ou parmi les plus jeunes: Iris Schürch vient d’avoir 16 ans, est collégienne et habite Küttigen, dans le canton d’Argovie.

Depuis l’année dernière, elle arbitre des matchs de juniors C et D, donc de jeunes de 14 ans voire moins. Elle a suivi les pas de son père, également arbitre. «J’ai décidé de m’inscrire au cours d’arbitre car j’y voyais comme un défi. C’est une véritable école de vie. J’apprends à m’imposer et à faire

preuve de courage.» Comment un arbitre fait-il pour être rapide et juste dans ses décisions? «Sur le terrain, je dois pouvoir me concentrer pleinement, du début à la fin de la partie», déclare Iris qui évolue aussi en tant que joueuse au BSC Zel-gli Aarau. «Il faut aussi avoir une bonne condition physique et, bien sûr, connaî-tre les règles du jeu.» Craint-elle les erreurs d’arbitrage? «Les erreurs existent, surtout en fin de ren-contre, quand l’issue d’un match est incertaine, que la tension monte et que cha-

que équipe s’accroche pour gagner». Les erreurs d’arbitrage sont fréquentes; il y en a pratiquement à chaque match, également en Coupe du monde, donc à un niveau élevé. Rappelons-nous l’été dernier! «Lors d’un match, un hors jeu m’a échappé; il était pourtant évident», dit la jeune arbitre. «J’ai très vite réalisé mon erreur, mais il était trop tard. Il fal-lait ne plus y penser, évacuer, enchaîner et garder toute ma concentration.»

Rien à décider

Manger ce quel’on nous sert

Express, renversé, cappuccino? Café du Guatemala, du Costa

Rica ou de Colombie? Des hauts plateaux ou de la région côtière? Le pauvre bougre de la pub pour les assurances réalisée par Dani Levy reste perplexe devant un tel choix, lui qui voulait un simple café! Les choses se passent tout autrement au restaurant «Bonvivant» que tient Andreas Schürmann à Bâle, dans le quartier de Gundeldingen. Ici, les clients n’ont rien à choisir car lui seul décide de ce qu’ils mangent! Andreas, qui peut se flatter d’avoir obtenu la note 20 au Gault-Millau et une étoile au guide Michelin, ne propose pas de carte. Son établis-sement sert un seul menu, midi et soir. La seule décision à prendre par le client: aller ou non au «Bonvivant»!

le elle est appelée à travailler. «La plupart des entreprises recherchent des personnes bardées de diplômes, s’amuse-t-il. Bien sûr qu’il faut avoir un minimum de connaissances commerciales et parler plusieurs langues, mais le reste, le savoir-faire et la technique, cela s’apprend sur place.»

Il est une chose que René Mägli n’a pas eu à décider depuis fort longtemps: l’engagement d’un homme. MSC emploie 90 personnes, toutes des femmes, jusqu’au chef. C’est ainsi depuis une dizaine d’années, ce qui lui a valu de faire la une des journaux. «Je ne dis pas que je n’engagerais pas un homme; je pense néanmoins que les femmes ont davantage le sens de l’équipe et qu’elles travaillent mieux. Selon lui, elles consacrent leur énergie au bien de l’entreprise alors que les hommes passent une bonne partie de leur temps à élaborer des stratégies pour accéder à une position de rang supérieur.

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Pourquoi est-il souvent si difficilede prendre une décision?

Plus on a de choix, plus il est diffi-cile de prendre une décision. Il y a aussi le fait que décider, c’est renoncer à d’autres possibilités. On se trouve comme à un carrefour. Si je décide d’épouser mon amie australienne qui n’imagine pas un instant venir s’ins-taller en Suisse, je me décide contre la Suisse. Ce type de perte peut déclen-cher des angoisses. La psychologie cli-

nique nous apprend que la difficulté à décider peut également être le symp-tôme d’une dépression. La faculté de décider est souvent amoindrie chez les personnes qui n’éprouvent plus aucu-ne envie, qui n’ont plus de plaisir, qui dorment mal et n’ont plus d’appétit. Que penser de l’attitude consistant à vouloir garder ouvertes le plusgrand nombre d’options?

De manière générale, les possibili-

tés sont nettement plus nombreuses aujourd’hui qu’aux siècles précédents. Je pense toutefois que notre manière de décider n’a pas tellement changé par rapport aux générations d’avant. Vou-loir garder toutes les options ouvertes demande une grande énergie. On cher-che à rater le moins de choses possi-bles, on a peur de décider, mais on n’est pas plus satisfait pour autant.Et si je repousse constamment lemoment de prendre une décision?

S’il s’agit d’une décision impor-tante, vous ferez du sur-place et vous vous empê-cherez d’évoluer. Imaginez que vous envisagiez

de vous perfectionner après votre ap-prentissage, mais que vous n’arriviez pas à vous décider. Vous continuerez à faire un job qui, peut-être, ne vous sa-tisfait plus.Si je ne décide pas, les circonstan-ces décident-elles pour moi?

On peut le voir comme ça. En ne décidant pas, on rate le coche et le mo-ment venu, on décide moins libre-ment.

Donc, mieux vaut une mauvaisedécision que pas de décision dutout?

Effectivement; de toute façon, on ne sait qu’après-coup si une décision a été la bonne. D’ailleurs, les décisions ab-solument justes n’existent pas; certai-nes sont meilleures, d’autres moins.Comment fonctionne la prise dedécision?

Prenons un exemple typique: une personne éprouve des besoins, subit une pression extérieure et a des sou-haits divers, tous ces éléments entrant en concurrence. Quand un souhait gagne en importance par rapport aux autres paramètres, il devient volonté. Et quand un souhait devient volonté, on parle de décision. On franchit une espèce de frontière au-delà de laquelle il n’y a plus à penser, mais à concréti-ser la décision.Comment le cerveau participe-t-ilau processus? Et les tripes?

C’est compliqué. Commençons par les tripes. On dit couramment décider avec ses tripes et qu’une décision fait mal au ventre. On voit là que notre cer-veau et notre corps sont liés de façon très complexe. Les besoins physiques que l’on éprouve interfèrent dans nos

Manuel Trachsel, psychologue

«Ecouter lelangage du corps»Une décision ne devrait jamais être prise d’un point de vue purement rationnel. Il faut aussi écouter son ressenti, estime le psychologue Manuel Trachsel.

Entretien

«Vouloir garder toutes lespossibilités ouvertes demandeune grande énergie.»

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Manuel Trachsel, psychologue FSPManuel Trachsel a fait des études de psycho-logie et de philoso-phie. Il a participé à différentes études consacrées à la pro-

blématique de la décision, notamment à l’ambivalence relationnelle. Il poursuit actuellement des études de médecine. Il vit à Berne, a 29 ans, est marié et est père d’une petite fille.

décisions sans même que nous nous en rendions compte. Ce qu’il faut retenir, c’est que si les tripes et le cerveau concordent au moment de prendre une décision, par la suite, nous aurons da-vantage le sentiment d’avoir fait le bon choix.Pourquoi?

On peut bien sûr prendre une déci-sion d’un point de vue purement ra-tionnel, en établissant une liste des pour et des contre. Il arrive alors sou-vent que cela crée en nous un conflit et que la raison et les sentiments s’oppo-sent. Même si d’après la liste des pour et des contre, la réponse est évidente. Si, rationnellement, tout parle en fa-veur d’une décision, nous éprouvons un mal-être intérieur et l’on sent que quelque chose ne va pas. Très souvent, les décisions prises intuitivement s’avèrent être justes.Comment fonctionne l’intuition?

Si l’on pouvait définir précisément cette notion, ce ne serait plus de l’in-tuition! L’intuition est une sorte de

connaissance immédiate qui ne re-court pas au raisonnement, une per-ception basée sur différents signaux. Toute expérience se grave dans le cer-veau et ne s’efface plus jamais. L’expé-rience marque notre manière d’appré-hender la situation suivante. L’intuition est la somme de tous ces éléments et nous donne le sentiment du juste ou du faux.Arrive-t-il que l’on doute d’unedécision encore après l’avoir prise?

Même très fréquemment. La psy-chologie nous enseigne qu’un méca-nisme nous protège et nous empêche de toujours revenir sur une décision qui a été prise. L’être humain est ainsi fait qu’après une décision, il a tendan-ce à se souvenir uniquement des mo-tifs qui ont joué en faveur de la déci-sion et à occulter les autres.La prise de décision s’exerce-t-elle?

Notre manière de décider dépend

de traits de notre personnalité qui res-tent relativement immuables. Certains schémas peuvent toutefois s’exercer. Dans les entretiens psychologiques et en psychothérapie, nous nous effor-çons de donner aux patients les outils qui leur permettent de mieux décider. Une liste de pour et de contre peut aider une personne dont la pensée est mal structurée. Dans les cas plus com-plexes, nous faisons appel à l’imagi-naire, qui est en lien direct avec les émotions. Nous demandons de décrire ce qui représenterait une situation idéale dans cinq ou dix ans et quelles mesures permettraient de s’en appro-cher. Pouvez-vous nous donner unexemple?

Dans une étude scientifique que j’ai effectuée auprès de personnes qui n’arrivaient pas à prendre la déci-sion de se séparer ou non de leur conjoint, nous avons pu démontrer pour 50 d’entre elles que des exercices ciblés permettaient de réduire de

manière significa-tive le sentiment d’ambivalence.A l’heure ac-tuelle, de nom-breuses choses sontfixées à l’avance.

Décidons-nousencore librement?

Nous sommes certainement bien mois libres que nous le pensons. Ce qui compte, c’est d’avoir le sentiment intérieur d’avoir pris une décision en toute liberté. C’est précisément ce sen-timent qui nous permet de concrétiser une décision et de l’assumer.

Enlever le poids d’une décisionallège la souffrance

Certaines décisions nous affectent moins quand nous n’avons pas à les prendre nous-mêmes. C’est ce que révèle une étude consacrée à une maladie héréditaire réalisée

aux Etats-Unis et en France. Un enfant né avec la maladie en question n’a aucune chance de survie. La décision à prendre:

opérer pour prolonger quelque peu la vie de l’enfant ou laisser l’enfant mourir. Aux

Etats-Unis, la décision incombe aux parents; en France, ce sont les médecins qui déci-

dent. Dans les deux cas, l’enfant est condamné. Ce qui diffère, c’est la manière dont les parents vivent cette perte. Selon l’étude, le ressenti des parents américains est plus douloureux que celui des parents français. Pour le psychologue américain Barry Schwartz, la possibilité de décider

n’apporte aucun bénéfice aux parents amé-ricains; au contraire, elle leur occasionne

une plus grande souffrance.

«Il n’existe pas de décisionsabsolument justes; certainessont meilleures, d’autres moins.»

Quid des décisions inconscientes?Il paraîtrait que l’être humain prend

jusqu’à 20 000 décisions par jour, la plupart étant inconscientes. Certains vont même

jusqu’à avancer 100 000 décisions par jour. Ce qui revient à dire que nous prendrions – inconsciemment – une décision au moins toutes les cinq secondes. Est-ce possible? D’accord, nous clouons le bec au réveil qui

nous agresse, freinons au feu rouge, versons (ou pas) du lait dans notre café, mettons un pied devant l’autre en marchant. Automati-quement, par habitude. S’agit-il vraiment de

décisions? «Je ne pense pas. Nombreux sont les philosophes et les psychologues à réfuter l’idée de décision inconsciente. Il

s’agit là d’une vieille querelle de spécialis-tes. A mon sens, il n’y a pas de décision sans

conscience.»

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Comment fonctionne la décisiond’achat face au choix de produitsdont nous disposons actuelle-ment? Karin Frick: Pour les achats d’une cer-taine importance, le consommateur fait beaucoup de recherches. Il s’infor-me sur Internet et auprès d’amis et de connaissances. Il se renseigne jusqu’au dernier moment. Il utilise aussi Inter-net pour comparer des prix et se réfère aux études réalisées par des sociétés de défense des consommateurs.Pourquoi se faire conseiller pardes amis plutôt que par le person-nel de vente?Dans les magasins, la tendance va tou-jours davantage vers le libre-service et il devient de plus en plus difficile de trouver du personnel qualifié. On part aussi du principe que nos amis sont

objectifs et qu’ils ont pour seul souci de bien nous conseiller. La plupart du temps, nous ne recherchons pas le meilleur produit ou un produit uni-que, nous voulons juste ce que les autres ont.Nous ne cherchons pas le meilleurproduit?Absolument. Nous achetons constam-ment des choses dont nous n’avons pas vraiment besoin. La décision d’achat relève souvent de l’émotif. Nous ache-tons pour nous récompenser, pour nous sentir bien sur le moment. Nous satisfaisons notre envie d’être plus beau, plus tendance ou plus fort. Ce n’est pas un produit que nous ache-tons, c’est une émotion.Pourquoi achète-t-on ce que lesautres ont alors que nous revendi-quons notre originalité?

Même si après-coup, nos décisionsd’achat s’expliquent rationnellement,au départ, elles résultent d’un choixbasé sur l’émotion, déclare KarinFrick, responsable de rechercheauprès de l’Institut GottliebDuttweiler. La plupart du temps,on ne choisit pas le meilleur produit,mais celui que les autres ont.

C’est ce que les gens prétendent, mais je n’y crois pas. Regardez autour de vous. Les différences entre les gens ne portent que sur des détails. Ce que l’on veut, au fond, c’est être comme les autres. Il n’y a pas que les enfants dans les cours de récréation qui ne veulent surtout pas avoir quelque chose qui les distinguerait des autres! On observe actuellement un grand besoin d’atten-tion et de respect. Le phénomène consistant à adopter un look très per-sonnel pour mieux se faire remarquer a déjà été plus prononcé. Vous dites que la décision d’ache-ter est rarement rationnelle. Leconsommateur en est-il conscient?Toute décision est émotive, même si un achat a été préparé rationnellement. La justification rationnelle d’un achat ne vient qu’après-coup. Si on est sincère,

Nous achetonsce que les autres ont.

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on le sait. On justifie un achat en di-sant que c’était une affaire. Evidem-ment, moins on a d’argent plus la déci-sion d’achat sera rationnelle, car la personne ne peut pas se permettre de trop dépenser.Comment décidons-nous pour leschoses courantes, comme la nour-riture?Au quotidien, il y a la routine. On prend ce que l’on a l’habitude d’ache-ter. De plus en plus, on décide seule-ment une fois arrivé au magasin ce que l’on va acheter et cuisiner. Or, plus une décision est situationnelle, plus elle est émotionnelle. C’est pour cette raison que les couleurs, les odeurs et l’emplacement des produits sont pré-vus de manière à favoriser ce type de décision. Ainsi, on achète davantage que le strict nécessaire.

Un tropgrand choixrend dépressif.

Quel bonheur de faire ses coursesdans un supermarché qui proposede multiples sortes de yogourts,de déodorants et de confitures!L’équation plus de choix/plus deliberté est-elle vraiment exacte?

Faux, estime le psychologue américain Barry Schwartz. «Cette hypothèse

parfaitement plausible de prime abord est tout à fait erronée. Face à trop de choix, on perd une part de liberté. Il devient plus difficile de décider et, dans le pire des cas, on devient même incapable de décider de quoi que ce soit. C’est exactement comme si l’on était privé de la liberté de choisir», déclarait-il en 2009. Conséquence: écrasé par le poids des décisions, l’être humain deviendrait dépressif, dit l’auteur de The Paradox Of Choice: Why More Is less. Il préconise de ramener les possibilités de choix à une dimension plus raisonnable.

Un choix pléthorique esteffectivement trop exigeant pourles consommateurs, c’est ce quemontre une expérience réaliséepar Sheena Iyengar, psychologueà New-York.

Dans un supermarché, Sheena Iyengar a installé un stand de dégustation de

confitures. Une première fois, elle a présenté vingt-quatre confitures, une autre seulement six. Résultat: les clients ont été plus nombreux à s’attarder au stand mieux achalandé, mais seulement trois sur cent ont acheté des confitures alors qu’au stand à six confitures, un client sur trois est reparti avec au moins un produit!

Karin Frick, responsable de rechercheauprès de l’Institut Gottlieb Duttweiler

Pourquoi y a-t-il souvent desstands de fruits et de légumesfrais à l’entrée des magasins?La fraîcheur incite un client à venir dans un magasin. C’est donc un point important pour un commerce. La fraî-cheur est un gage de qualité, elle parle aux sens et est une raison de faire ses courses plus souvent.Parlons bonnes affaires: pourquoicraquons-nous si souvent pour desarticles qui ne figurent pas surnotre liste de courses?La société d’abondance est récente. Nos parents ont encore connu le man-que. Avant, tout faisait défaut. Résul-tat: quand un bien était disponible, il fallait l’acquérir. Je dirais que c’est un comportement d’homme des cavernes! Les bonnes affaires éveillent en nous des instincts primitifs.

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Grimper où personne n’a encore été: «Pour un alpiniste, c’est toujours un grand challenge car il ne peut pas savoir si l’expédition réussira.»

L’expérien-ce aideà décider.

Un alpiniste doit constamment se poser les bonnesquestions, déclare Samuel Anthamatten, 24 ans,guide de montagne basé à Zermatt. Lui qui a graviles montagnes les plus redoutables du monde saitqu’il faut parfois se résoudre à renoncer, même siun sommet est à portée de piolet.

Il y a un peu plus d’une année, trois alpinistes suisses ont réussi un exploit que personne avant eux n’avait tenté: vaincre par la face sud le Jasemba, un sommet de 7350 mètres à la frontière du Népal et de la Chine. Jus-

que là, ce géant n’avait été vaincu qu’à quatre reprises, la première fois en 1986, mais toujours par la face nord, moins raide, ou l’arête sud. Les héros de cette grande pre-mière: Samuel Anthamatten, alors âgé tout juste de 23 ans, son frère Simon et Michael Lerjen.L’exploit des Valaisans a fait le tour des cabanes du monde entier. Partout il était question de la nouvelle «Swiss Route», les magazines spécialisés ont consacré des articles aux Valaisans et l’on a pu lire sur «www.up-climbing.com»: «Anthamatten Bros and Michael Lerjen established a new route»!

Jusqu’au bout, l’éventualité de devoir renoncerLes Valaisans ont consacré six semaines à cette expédition, l’essentiel de ce temps étant réparti entre une préparation minutieuse et l’acclimatation. Partant du camp de base à 5200 m d’altitude, accessible uniquement à pied, ils ont gravi un 6000 et ont bivouaqué trois nuits. Donc un temps de préparation relativement long pour vaincre un seul sommet, avec, jusqu’au dernier moment, l’éventualité de devoir renoncer.Motif: les conditions météo. Il faisait beau temps certes, mais un vent fort, de 90km/h, balayait la montagne. «Quand la tempête s’y met, impossible de grimper, impos-sible d’avancer». L’incertitude a duré jusqu’au bout. L’idée d’abandonner si près du but doit être frustrante, non? «Bien sûr, mais rien ne sert de forcer si tu risques d’y rester.»

Le doute, toujours le douteDans le cas de cette première, les trois Valaisans ont volon-tiers assumé le risque de devoir renoncer. Pour un alpiniste comme Samuel Anthamatten, les expéditions les plus exal-tantes sont précisément celles qui le placent constamment face à des choix. Par exemple, les sommets encore invain-cus, les voies que personne n’a encore empruntées. «Ce sont les défis les plus importants pour un alpiniste; tu ne sais jamais si ton projet est faisable», dit Samuel visible-ment enthousiaste.Les questions décisives s’agissant d’un massif inconnu: les difficultés de l’expédition, la route la plus indiquée, le matériel à emporter, le choix des pitons, etc. «Chaque roche est différente. Tu n’utilises pas le même matériel au Cervin et sur la face nord de l’Eiger», précise Samuel. Pour les Alpes et des montagnes comme l’Everest, on dispose de nombreuses informations et de témoignages d’alpinistes,

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Samuel et sa passion pour la montagneCharpentier de formation, Samuel travaille, tout comme son frère Simon, comme guide de montagne. Il est également bien connu dans le milieu de l’escalade de glace puisqu’il a disputé plusieurs années de suite la Coupe du monde. Samuel a fait ses débuts en escalade de glace à seize ans et s’est mesuré aux meilleurs de la discipline. «Certains sportifs avaient 35 ans et une solide expérien­ce; cela a été un super challenge!» Il a raccroché ses piolets à glace l’hiver dernier pour se tourner vers le freeski. En janvier, il s’est entraîné pendant trois semaines en France et participera au free­skitour. «Je ne me suis pas lassé de l’escalade de glace, d’ailleurs on me verra encore lors de dé­monstrations, mais j’aime bien me fixer de nouveaux objectifs.www.anthamattens.ch

Prendre la bonne décision

Que choisir: le studio avec balcon ou lacolocation avec jardin? Un job ici ou àMilan? Le mariage ou le concubinage?Un VTT ou un bon vélo de randonnée?Il n’existe pas de recette toute faite surla manière de prendre rapidement labonne décision. Quelques conseils toutde même qui pourront t’aider:

Pense à l’avenir.Une décision ne change pas le présent mais l’avenir. Suzy Welch, écrivaine, dit: «Quand on prend une décision importante, il faut toujours se demander comment on réagirait dans dix minutes, dix mois et dix ans».Décide pour toi-même.Oublie la pression du groupe, ignore les «ça se fait». Si une décision ne vient pas vraiment de toi, tu risques fort de mal la vivreLa nuit porte conseil.Ne jamais prendre de décision à la va­vite. En cas de doute, la nuit porte conseil. Le cerveau travaille aussi la nuit et, au matin, les décisions peuvent se présenter sous un jour nouveau.Avantages, inconvénientsTu dois prendre une décision importante? Pense à l’analyse SWOT, soit Strengths, Weaknesses, Opportunities and Threats. Ce qui veut dire forces, faiblesses, opportunités et risques. Pour chaque point, inscris sur un papier ce qui te vient à l’esprit, par exemple à propos d’une éventuelle spécialisation, d’un nouveau job ou d’un nouvel appartement et prends ta décision.Cela semble bien?Ferme les yeux et imagine comment se présente ton nouvel appartement ou ton nouveau job. Cela ressemble­t­il à ce que tu attendais?Renseigne-toi!Ne décide pas seul. Interroge des amis, des connais­sances, si nécessaire des professionnels pour obtenir le maximum d’informations.Ne pas craindre ce que l’on perdPrendre une décision signifie renoncer à une autre possibilité. Si tu penses à ce que tu perds plutôt qu’à ce que tu gagnes, tu auras de la peine à décider.Pourquoi ne pas se satisfaire du suffisant?L’appartement doit­il être absolument parfait? Le psychologue Barry Schwartz estime qu’il faut cesser de chercher lorsque ce que l’on a trouvé semble correct.Mieux vaut se tromper que ne rien décider!Surtout ne pas avoir peur de se tromper. Les erreurs d’appréciation aident aussi à progresser.

ce qui n’était pas le cas pour le Jasemba. «Tu ne connais de la roche que ce que tu peux voir de loin. Pour prendre les bonnes décisions dans le cas d’une expédition inconnue, il n’y a que l’expérience. «Tu observes la montagne, tu la com-pares à d’autres, tu estimes la roche au vu de ton expérien-ce et tu sais, en général, le matériel que tu dois emporter.» Expérience: malgré son jeune âge, le Valaisan peut être fier de celle qu’il a déjà acquise sur les parois les plus rai-des, que ce soit en Alaska, en Californie ou en Patagonie. «En montagne, tu dois constamment prendre des décisions; tu n’as pas une minute de répit», souligne Samuel. Sécuri-té: une sécurité absolue signifierait planter des pitons tous les deux mètres. Mais là, on n’avance pas! «Pour m’assurer correctement, je dois analyser tous les paramètres.» En montagne, il faut aussi choisir les vêtements adaptés et la nourriture que l’on emporte. «Pour cuire un demi-litre d’eau, il faut vingt minutes. Pour la cuire, il faut des car-touches de gaz, ce qui représente un certain poids à trans-porter. Parallèlement, tu dois veiller à rester léger.» Pour leur expédition au Jasemba, les Valaisans ont surtout em-porté des repas lyophilisés en sachets, de la viande séchée, du fromage et des barres énergétiques.

Une mauvaise décision peut coûter la vie.Samuel & Co. ont vaincu le Jasemba. Dans d’autres situa-tions, il leur est déjà arrivé de devoir prendre la décision de renoncer. «Cela arrive souvent, et parfois très brusque-ment. Lorsque les conditions se détériorent – météo, risque d’avalanche ou autre – tu dois te décider très rapidement et faire demi-tour. Décider d’abandonner est toujours diffici-le, mais toute autre décision serait du suicide.»

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Twen Décider est un numéro spécial euro26 joint au magazine Twen 1, Printemps 2011, www.euro26.ch Editeur SJAG, Berne Idée/Coordination gedankensprung, Berne Concept/Réalisation Basel West, Bâle Texte/Rédaction Stephan Lichtenhahn, Bâle Adaptation française Bernadette von Arx, Genève Impression Büchler Grafino AG, Berne Photos Frédéric Giger pages 2, 3, 6, 7; Michael Portmann pages 10, 11 Illustrations Joel Büchli pages 1, 12 Responsabilité SJAG n’assume aucune responsabilité pour les prix, offres et contenus rédactionnels de tiers

Ont permis la réalisation de Twen Décider

Twenty n’arrive pas à …… décider. Choisir est une vraie torture: tant de possibilités, tant de choses auxquelles il faut renoncer! Faut-il toujours décider? Si vite? Si définitivement? Oui, non, peut-être, non: qu’il te soit facile ou non de décider, discutes-en sur www.facebook.com/euro26.

Un ciné, enfin! Bon, mais quel film? Le nouveau avec Nicole Kidman?

Ou alors Die Hard VII?

Adjugé, le dernier Woody Allen a de

bonnes critiques …

Rango serait pas mal

non plus. J’hésite …

Hé! C’est quoi le film qu’il faut

absolument avoir vu? On va voir True Grit,

paraît que c’est pas mal. Mais Rango, c’est

trop top!

Désolé, complet! Tous les autres films aussi, à part Heidi en V.O.

Une fois Rango, s’il vous

plaît. Et des pop-corns.

Non, des cacahuè-

tes. Finale-

ment, ce sera un Mars.

Oh non … Heidi! Pierre le chevrier! Je le connais par cœur. Si seule-ment je m’étais décidé avant! …