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TEMOIGNAGE D’UNE ANNEE SCOLAIRE ORGANISEE AUTOUR DE LA DEMARChE D’INVESTIGATION Exemple de parcours sur la myopie Laure GuErIN groupe PErMES Irem de Clermont Ferrand reperes - irem. N° 97 - octobre 2014 priée cette façon de travailler, par la des- cription d’un parcours sur les distances inac- cessibles ainsi que les différents changements qui me semblent inévitables à mettre en œuvre dans la classe. Cette envie de travailler avec les élèves à l’aide de la démarche d’investi- gation a été générée par l’appartenance au groupe PErMES (Parcours d’Etude et de recherche en Mathématiques dans l’Ensei- gnement Secondaire) de Clermont – Ferrand et ne cesse de grandir au fil du temps. I. — Introduction Cet article porte sur l’expérience d’une année organisée autour de la démarche d’investiga- tion en classe de troisième. L’objectif de cet écrit est de relater les ressentis, la perception des élèves autour de cette démarche, ainsi que l’organisation qu’il a fallu mettre en œuvre pour réaliser cette démarche au sein de la pratique de classe. Il s’agit d’un témoignage qui me semble intéressant pour les enseignants qui vou- draient se lancer dans une telle démarche. j’expliciterai donc la façon dont je me suis appro- 43 résumé : Cet article porte sur le témoignage d’un parcours d’étude et de recherche en classe de troisième sur la myopie. La pratique de la démarche d’investigation en classe, comme point d’appui de l’enseignement, nécessite une organisation matérielle, spatiale et temporelle différente de celle d’un enseignement classique. Elle suppose une organisation des traces écrites autres qu’en cha- pitres habituels. Elle oblige à gérer les transitions entre travail de groupes et travail en séance plénière de manière efficace. Elle permet de mettre en exergue la mise en activité et la recherche des élèves. A l’aide d’un exemple de parcours d’étude et de recherche sur l’œil réalisé avec des élèves de troisième, nous tenterons d’apporter des éléments sur cette démarche. Au fil de cette recherche, les élèves ont été amenés à s’autoriser à se poser des questions sur le problème du calcul des distances inaccessibles. théorème de Pythagore, théorème de thalès, trigonométrie seront alors des notions abordées au cours de cette recherche. Et dire que tout a commencé à partir de la simple question : « Moi, j’ai des lunettes et pas toi ! Pourquoi ? »

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TEMOIGNAGE D’UNE ANNEE SCOLAIRE ORGANISEE AUTOUR DELA DEMARChE D’INVESTIGATION

Exemple de parcours sur la myopie

Laure GuErIN groupe PErMES

Irem de Clermont Ferrand

reperes - irem. N° 97 - octobre 2014

priée cette façon de travailler, par la des-cription d’un parcours sur les distances inac-cessibles ainsi que les différents changementsqui me semblent inévitables à mettre en œuvredans la classe. Cette envie de travailler avecles élèves à l’aide de la démarche d’investi-gation a été générée par l’appartenance augroupe PErMES (Parcours d’Etude et derecherche en Mathématiques dans l’Ensei-gnement Secondaire) de Clermont – Ferrandet ne cesse de grandir au fil du temps.

I. — Introduction

Cet article porte sur l’expérience d’une annéeorganisée autour de la démarche d’investiga-tion en classe de troisième. L’objectif de cetécrit est de relater les ressentis, la perceptiondes élèves autour de cette démarche, ainsi quel’organisation qu’il a fallu mettre en œuvre pourréaliser cette démarche au sein de la pratiquede classe. Il s’agit d’un témoignage qui mesemble intéressant pour les enseignants qui vou-draient se lancer dans une telle démarche.j’expliciterai donc la façon dont je me suis appro-

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résumé : Cet article porte sur le témoignage d’un parcours d’étude et de recherche en classe detroisième sur la myopie. La pratique de la démarche d’investigation en classe, comme point d’appuide l’enseignement, nécessite une organisation matérielle, spatiale et temporelle différente de celled’un enseignement classique. Elle suppose une organisation des traces écrites autres qu’en cha-pitres habituels. Elle oblige à gérer les transitions entre travail de groupes et travail en séanceplénière  de manière efficace. Elle permet de mettre en exergue la mise en activité et la recherchedes élèves. A l’aide d’un exemple de parcours d’étude et de recherche sur l’œil réalisé avec desélèves de troisième, nous tenterons d’apporter des éléments sur cette démarche. Au fil de cetterecherche, les élèves ont été amenés à s’autoriser à se poser des questions sur le problème ducalcul des distances inaccessibles. théorème de Pythagore, théorème de thalès, trigonométrieseront alors des notions abordées au cours de cette recherche. Et dire que tout a commencé àpartir de la simple question : « Moi, j’ai des lunettes et pas toi ! Pourquoi ? »

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TemOiGNAGe D’UNe ANNee sCOLAire OrGANisee

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I.1. Motivation de l’étude

Le théorème de thalès, tel qu’il est ensei-gné en classe de troisième est souvent perçucomme compliqué et dénué de sens par nos élèves.rédiger les hypothèses leur paraît inutile etrébarbatif. En effet le calcul de longueurs parce biais est souvent le seul objet du chapitre.Ainsi l’écriture des hypothèses dans les exer-cices choisis par le professeur leur parait futi-le, car celles-ci sont toujours vérifiées. demême, l’activité préparatoire du chapitre est sou-vent vu comme un échauffement, mettant enscène des pré-requis et des quotients égaux quel’on calculerait, sans trop savoir pourquoi. Cetype d’«activité » d’ostension déguisée, faitapparaître des réponses à des questions que lesélèves ne se sont jamais posées. Il ne permet pasde générer le questionnement, source de moti-vation chez les élèves. « On ne connaît pas unsavoir si l’on ne connaît pas les raisons d’être,ou du moins quelques-unes d’entre elles, qui lerendent désirable. » Yves Chevallard

Le découpage en chapitres, et donc « enpetites marches », chacun traitant d’un thèmeparticulier, comme par exemple le théorème dethalès, tend à faire disparaître les questions sous-jacentes. L’enfermement dans un thème ou« autisme thématique » entraîne la perte de sens.

« Ce qu’un savoir permet de comprendre etde faire est son utilité : l’utilité d’un concept,par exemple, c’est sa capacité à permettre decomprendre et d’agir, à outiller la pensée etl’action. » Yves Chevallard

Notre point de départ est donc de placer les élèvesdans une situation de recherche dans laquel-le ils devront travailler sur le choix et la per-tinence des objets de savoirs à mettre en jeu.Calculer une longueur, oui ! Mais comment ?La séquence d’enseignement proposée par lasuite est constituée de deux activités d’étudeset de recherche (AEr) conçues pour des élèves

de troisième n’ayant révisé aucune propriétéportant sur les calculs de longueurs. Ils ont parconséquent comme point appui leurs seulssouvenirs de l’année de quatrième. Cetterecherche constitue un travail échelonné surplusieurs séances d’une heure et doit se visua-liser comme un fil rouge au cours duquel lesélèves progressent, chacun dans leurs groupesrespectifs, dans leurs recherches. on peut assi-miler les élèves à des chercheurs scienti-fiques et l’organisation de la classe à  «unesimulation de chercheurs en activités » (doua-dy, 1986). Nous envisagerons cette comparaisoncomme « un horizon que l’on n’atteindra pasmais vers lequel on peut se diriger. » (Colloqueinternational Formes d’éducation et processusd’émancipation, jamot, Hammoud, triquet, Gan-dit, Guillaud, Gueudet, 2012, p4).

Ce parcours constitue un parcours finali-sé dans lequel l’objectif est de réinvestir les notionsvues en classe de quatrième sur certains calculsde longueurs, telles que le théorème de Pytha-gore, le cosinus d’un angle aigu dans un trianglerectangle et le théorème de thalès dans sa ver-sion « quatrième» (triangles «  emboîtés » l’undans l’autre). Ces situations nous ont servi depoint d’appui pour introduire le théorème de tha-lès généralisé aux triangles dans une configu-ration « papillon » d’une part et la trigonomé-trie d’autre part : sinus et tangente d’un angleaigu dans un triangle rectangle.

I. 2. Choix du sujet

Le choix du parcours a pour support l’étudede la myopie.

En effet, l’optique géométrique consti-tue une niche écologique dans lequel lethéorème de thalès en configurat ion« papillon » s’épanouit. Par exemple, dansl’étude des lentilles minces, l’applicationdu théorème de thalès permet de trouver la

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formule suivante sur le grandissement :

de même, il permet de démontrer la relation deconjugaison :

où C est la vergence exprimée en dioptries.de plus les angles qui interviennent en optiqueamènent à des calculs de trigonométrie.

L’objectif du parcours reste modeste et nesera pas de faire démontrer aux élèves la rela-tion de conjugaison mais d’utiliser ce contex-te pour faire vivre la géométrie du triangle dela classe de troisième.

Par ailleurs, notons que les élèves peu-vent s’appuyer sur des connaissances anté-rieures dans d’autres disciplines. En effet, cetteinvestigation est en lien direct avec les Sciencesde la Vie et de la terre. En classe de quatriè-me, l’œil est étudié pour sa transmission d’infor-mations par le nerf optique dans l’étude de lacommunication nerveuse. L’œil peut être prisen exemple « comme organe sensoriel et étu-dié pour sa transmission du message nerveuxsensitif. » (Bulletin officiel spécial n°6 du 28août 2008, programme de sciences de la vie etde la Terre, quatrième). En Sciences Phy-

g 5A'B'

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1

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OA5 C

siques, les professeurs présentent «  les len-tilles convergentes qui concentrent pour unesource éloignée l’énergie lumineuse en sonfoyer. » Ils présentent « les éléments de l’œilsous une forme appropriée et pratiquent unedémarche expérimentale pour expliquer lesdéfauts de l’œil et leur correction (myopie,hypermétropie).  »Ils enseignent le fait que« la vision résulte de la formation d’une imagesur la rétine, interprétée par le cerveau.  »(Bulletin officiel spécial n°6 du 28 août 2008,programme de sciences Physiques quatrième)

II. — Déroulement du parcours et analyse

II.1 Situation et enclenchement de la situation

La séance commence par une remarque« toute simple » qui nous permet d’enclencherde manière efficace la recherche.

« Certains dans la classe ont des lunettes etd’autres non … pourquoi ? A quoi serventles lunettes ?  »

une discussion est alors entamée au sein de laclasse. Elle nous amène à discuter des pro-blèmes de vision et de la correction que permetle port des lunettes. Les mots «  myope »,« astigmate » sont alors prononcés mais sansque les élèves sachent réellement à quoi ils cor-respondent. Leur ignorance sur le sujet est frap-pante. Les lunettes permettent de « mieuxvoir », et voilà bien le seul élément de répon-se qu’ils peuvent dégager.

L’enclenchement est alors réalisé. Le besoinest né. Pour le cours suivant, je leur demandede réaliser une recherche documentaire auCentre de documentation et d’Information, surune encyclopédie ou sur internet sur le sujetsuivant : « Qu’est ce que la myopie ? Quellesen sont les causes ? ». on remarquera par rap-

Schéma de référence (lentilles minces)

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port au sujet de départ plus vaste, que la ques-tion est recentrée et volontairement limitée auseul cas de la myopie.

Cet enclenchement est une étape importan-te. Elle permet de créer une situation motivan-te pour les élèves et d’entamer un questionnement.retour en classe. Les résultats de la recherchedocumentaire sont assez pauvres. des pagesinternet copiées et imprimées ! des schémas oudes phrases compliquées ! Malgré la pauvreté desrecherches et le total désordre de ceux-ci, monobjectif est atteint : générer le questionnement.En effet, à l’issue du cours, ceux qui portaient deslunettes sont allés demander à leurs parents quelproblème de vision les affectaient et pourquoi.Pour certains ils découvrent alors qu’ils sontmyopes. Ils ont envie d’en savoir plus ! Et si lesmathématiques permettaient d’éclairer cette situa-tion  et de comprendre ces schémas si compliquéstrouvés sur internet. 

Ensemble, nous réalisons une mise en com-mun des phrases et des schémas recueillis parles élèves. Nous en formulons un bilan. Cetteétape de mutualisation est importante. Elle dureenviron vingt minutes je leur présente ensuiteun diaporama sur la myopie qui résume l’ensemblede leurs recherches documentaires et qui fait appelà leurs souvenirs. une image vue par un myopesans lunette, où les objets lointains sont flous,un schéma de l’œil, un texte expliquant lescauses de la myopie (Cf. annexes). Enfin, la situa-tion de recherche est armée, situation danslaquelle ils vont être plongés par groupes de troisou quatre pendant plusieurs séances.

Texte de bilan :• Si l’image projetée ne se forme pas au

niveau de la rétine alors l’image est floue.• La myopie est un défaut de vision dû à un

œil trop long. L’image se forme donc en avantde la rétine, ce qui entraîne une vision flouede loin tandis que la vision de près reste bonne.

Après l’observation en classe de ce sché-ma, la question est la suivante : « Expliquezles causes de la myopie de cet individu. Expli-quez votre raisonnement par des phrases et jus-tifiez par des calculs. » Les données numé-riques communiquées aux élèves sont   lesdistances suivantes  : oS (5,5 millimètres),A’B’ (0,5 millimètres), oF’( 16,5 millimètres)et or ( 27 millimètres). Cet énoncé fait appelà un libellé qui n’est pas du tout mathématique.Il s’agit ici de faire appel aux mathématiquespour nous aider à comprendre la situation.L’exercice se résume à une configuration «papillon » de thalès dans laquelle une distancemanquante est à trouver.

Situation n°1

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Le point r représentant l’emplacementde la rétine n’est pas placé sur la figure donnéeaux élèves. L’objectif de l’activité est de cal-culer F’A’, d’en déduire l’inégalité oA’ < oret par suite de conclure à la myopie de cet œilen utilisant le fait que l’image en A’ est placéavant la rétine r.

Les élèves se retrouvent face à une « confi-guration papillon » de thalès dans laquelle ilsdoivent calculer la longueur F’A’ à partir destrois données oS, A’B’ et oF’, situation rela-tivement simple pour un élève de troisièmequi aurait déjà étudié ce type de configuration.oui, mais rappelons nous qu’à ce moment pré-cis, les élèves plongés dans la recherche n’ontjamais étudié une telle configuration et ne peu-vent donc pas la reconnaître !

II.2. Le début des recherches des élèves

Le début de la recherche est difficile. Ils com-mencent par écrire au brouillon un discoursou des calculs incohérents. Cependant cetteétape me parait être indispensable pour dénouerl’enjeu de l’activité. Le premier jalon qu’ilsont à réaliser est d’identifier la question mathé-matique sous-jacente au problème. Nous ver-rons comment, au fil des recherches, le discoursévoluera. Voici un exemple de phrase et unexemple de calculs caractéristiques d’un essaide recherche par les élèves :

« La personne est myope car la flèche 0S = 5,5 mm A’B’ =0,5 mm. Il voit demoins en moins que le AB car la rétine mesu-re que 0,5 donc A’B il lui manque. »

ou encore les calculs de l’encadré ci-contre...

on remarque ici l’envie irrésistible desélèves à vouloir calculer à tout prix ! Quels cal-culs ? Ils ne savent pas ! Peut-être pourrions-nous interpréter cet écrit par le phénomène de

contrat didactique, mis en évidence par Guy Brousseau. Le comportement de l’élève n’estpas à inscrire simplement dans une logique dessavoirs mis en jeu dans ce problème mais aussidans une logique de la situation. Ainsi serait-ce l’effet de l’application par les élèves de larègle suivante « La réponse à un problème demathématiques est une série de calculs quirepose sur les nombres de l’énoncé ». « C’estce qui détermine explicitement pour une peti-te part, mais surtout implicitement ce quechaque partenaire (professeur et élèves) vaavoir à charge de gérer et dont il sera d’unemanière ou d’une autre comptable devantl’autre.» (Guy Brousseau)

Cependant, ils se rendent vite compte quecela n’a ni queue ni tête et barrent leurs essais !Ma position, en tant que professeur à ce momentprécis me semble primordiale. je pourrais lesguider en leur demandant d’encadrer ou desouligner les mots importants. Mon position-nement est tout autre. En effet nous pourrionsévoquer à ce moment précis le problème de lec-ture de consignes et l’échec des élèves qui nelisent pas correctement ou suffisamment lesénoncés. Cela serait bien les tromper de leur faire

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croire que leur difficulté vient uniquement d ‘unproblème de français. La prise d’informations,le tri et la mise en relation d’informations surdes documents ou lors de recherche va au-delà d’une simple difficulté de lecture aussiattentive soit-elle. Ma position est donc de leslaisser « patauger »  afin qu’ils construisent, pareux – mêmes et grâce au groupe, leur raison-nement. Mes interventions se résument à lesencourager à poursuivre, et à les rassurer. Nosélèves sont relativement inhibés et n’osent pasprendre d’initiatives de peur de faire « faux ».Il faut les pousser à produire et leur donnerl’autorisation de se tromper : le droit à l’erreur.Petit à petit, à force de tourner le sujet dans tousles sens, ils s‘orientent vers le calcul de longueurs,et notamment le calcul de F’A’.

II.3. Poursuite des recherches : vers le calcul de longueurs

Au bout d’une demi-heure, tous les groupescherchent à calculer oA’ ou F’A’ mais parquel moyen ? des idées fusent :

— le théorème de milieux oui mais il n’y a pasde milieux !

— le cosinus : bien trop compliqué !

— Pythagore mais c’est bien sûr !

Ils peuvent effectivement appliquer lethéorème de Pythagore dans le triangle SoF’rectangle en o mais la longueur qu’il per-met de calculer n’est pas la longueur cher-chée. Ils rayent donc leurs écrits. Notons quetous les groupes sont passés par cette étaped’application du théorème de Pythagore :théorème qui manifestement a marqué leurannée de quatrième !

un groupe part dans une tout autre voie, cellede réaliser la figure en vraie grandeur et detrouver la position du point r tout simplementen le plaçant sur la figure. Cependant les mesuresdonnées sont 5,5 millimètres, 0,5 millimètre…Bref, la figure réalisée en vraie grandeur est beau-coup trop petite et ne permet pas de voir quoiquece soit ! Ils poursuivent leur idée en prenantune échelle. Ils transforment les millimètres encentimètres : 0,5 centimètres ; 16,5 centimètresmais aussi 27 centimètres … Bref cette fois-cila figure est trop grande ! «  on a besoin d’unegrande feuille, madame ! ». Ce groupe, com-posé d’élèves faibles, réussira à conclure grâceà la figure réalisée sur une feuille A3. Certainsgroupes, après l’échec de l’utilisation du théo-rème de Pythagore, orientent leurs recherchesvers les agrandissements-réductions, de maniè-re plus ou moins bien exprimée.

ou encore

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d’autres essaient d’utiliser le théorème dethalès dans la version qu’ils connaissent de laclasse de quatrième. Leur souci est de trouverdans quels triangles l’appliquer : les trianglesdoivent être emboîtés l’un dans l’autre avec deuxcôtés parallèles. Ils tracent et construisent alorsdes triangles satisfaisant ces conditions.

Ils se retrouvent avec des quotients où seulun nombre est connu et ne peuvent pas ainsiconclure.

Ce sont ces essais non fructueux quidonnent du sens aux théorèmes qu’ils uti-lisent. Ils se rendent compte que pour pou-voir utiliser cette propriété non seulement lestriangles doivent être emboîtés l’un dansl’autre, avec présence de droites parallèlesmais aussi qu‘il faut connaître trois des lon-gueurs pour pouvoir conclure. La recon-naissance et la création de figures-clef ne suf-fit pas ici ! L’idée de la symétrie centrale surgitalors dans les différents groupes qui essaientd’utiliser le théorème de thalès, mais pas tou-jours exprimé avec les termes adéquats. ungroupe me demande un calque et fait faire undemi-tour à leur triangle afin d’« emboiter »

de manière pratique le « petit triangle » à l’inté-rieur du « grand ».

d’autres me diront dans le patois bour-bonnais cher à leurs racines : « On tourne le tri-angle et on y met dedans » et effectueront dela même façon une rotation de 180 degrés du« petit triangle » pour l’insérer dans « le grand »ou du « grand » pour l’insérer dans le « petit ».

Après ces recherches laborieuses les groupesfinissent par produire des résultats. trois pistespeuvent être dégagées :

— une figure à l’échelle sur une feuille A3.

— L’utilisation des agrandissements-réductions

— L’utilisation de la symétrie centrale (demanière plus ou moins explicite) puis del’égalité des quotients égaux dans deuxtriangles relevant d’une situation de tha-lès de quatrième.

III. 4. Productions finales

Voici des exemples de productions finales.

dans le premier exemple (encadré 1 de lapage suivante), notons que les élèves commen-cent par démontrer que les triangles oSF’ etF’A’B’ sont semblables, notion disparue du pro-gramme de collège mais dont il reste quelquesscories sous la forme de triangles agrandis ou réduits.Le triangle SoF est bien agrandissement dutriangle F’A’B’, les élèves s’en assurent.

Le deuxième exemple de production fina-le (encadré 2) met en jeu la symétrie centralepuis l’utilisation du théorème de thalès tels qu’ila été vu en classe de quatrième.

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Encadré 1

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Encadré 2

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Voici (ci-dessus) une autre version envisagéepar les élèves. Ils effectuent une symétrie cen-trale du « grand » triangle puis symétrisent letout par rapport à (oA’). Ils se ramènent éga-lement au théorème de thalès, vu en quatrième.

de cette recherche, découlera une phase debilan, où seront mises en avant les productionsdes groupes. on dégagera deux pistes de tra-vail au programme de la classe de troisième :les agrandissements-réduction et le théorèmede thalès. dans le bulletin officiel explicitantles programmes de mathématiques de la clas-se de troisième, on peut trouver : « Connaîtreet utiliser la proportionnalité des longueurspour les côtés des deux triangles déterminés pardeux parallèles coupant deux droitessécantes (Configuration de Thalès)» ainsi quela phrase suivante 

«  Il est attendu des élèves qu’ils sachentdans des situations d’agrandissement oude réduction retrouver des éléments (longueursou angles) de l’une des deux figures connais-sant l’autre. »

Cette phase de bilan permet de validercertains raisonnements par la classe et d’ins-titutionnaliser les savoirs. Notons qu’à cetteétape on reparle du cosinus d’un angle qui étaitapparu dans les pistes solutions mais qu’ilsn’avaient pas exploitées. de manière très spon-

tanée, on parle des définitions du sinus et de latangente à propos des touches de la calculet-te qui intriguent tant les élèves. La démonstra-tion du théorème de thalès dans le cahier de leçonà partir de la symétrie centrale et du théorèmedes quotients égaux vu en classe de quatrièmene pose aucun problème. Cette démonstrationqui d’habitude laisse les élèves perplexes ne sou-lèvera aucune difficulté. on notera de plus queles erreurs habituelles et classiques au niveaude l’écriture des quotients n’ont pas été rencontréesavec cette classe. Pas de moyen mnémotech-nique ! un simple retour à l’activité préalable,par l’utilisation d’une symétrie centrale deleurs points leur permet de trouver aisément lesquotients égaux.

Après cette phase de bilan et travail de latechnique, une deuxième activité leur est pro-posée. Ils sont plongés dans la même situa-tion, mais dans laquelle les données ont chan-gé. Cela a – t- il une influence ? Voilà bien laquestion que les élèves se posent.

III. — Relance de l’étude :vers la trigonométrie

III.1. Sujet et début des recherches

Voici l’énoncé de la deuxième activitéd’études et de recherche.

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Cette situation se ramène à celle de laconnaissance dans un triangle A’B’o rec-tangle en A’, d’un angle aigu et de la lon-gueur du côté opposé à cet angle. on veut cal-culer la longueur du côté adjacent. Il s’agit làd’une situation trigonométrique classique maisdont les élèves à cette étape de l’année igno-rent tout ! Ils connaissent cependant les défi-nitions du sinus et de la tangente, vues au détourdu bilan de la première situation. Ils ne l’ont cepen-dant jamais utilisé. Ils reconnaissent tout desuite la situation comme étant familière et sedemandent pourquoi on recommence ! Ils com-parent donc les données de la deuxième situa-tion avec celles de la première et repèrent unchangement, notamment en ce qui concerne ladonnée de l’angle. Ils supposent que cet anglea une influence sur l’outil à choisir. Ils prennent

conscience qu’il s’agit d’utiliser des outilsautres que ceux utilisés dans la première situa-tion et cherchent des pistes de solutions dansleurs livres. L’accès à internet, le tableur ou enco-re le manuel de la classe sont effectivement desressources autorisées durant toutes les rechercheset font partie intégrante des aides disponibles.

III.2. Trigonométrie et obstacles

tous les groupes s’orientent rapidement versla trigonométrie. La définition de cosinus, sinuset tangente pose problème. Ils s’exclament «  C’estquoi un cosinus ? ». des confusions apparais-sent entre le sinus de l’angle et la mesure de l’angle.Ils écrivent «  sin SoB = 1,6° ». Mais d’autresquestionnements surgissent. Faut-il utiliser lesinus, le cosinus, la tangente ? Faut-il en choi-sir deux ? ou un seul ? Et si oui, comment ? Voilàdes questions auxquelles je ne pensais pas aupa-ravant en enseignant la trigonométrie. Avant decomprendre comment choisir, il est incontour-nable de comprendre qu’il faut choisir. Pris dansnos habitudes, nous ne nous posons plus cer-taines questions qui sont pourtant belles et bienimportantes. Pour répondre à cette question, lesélèves mobilisent plusieurs stratégies. je leslaisse seuls face à leurs interrogations. La pre-mière consiste à vouloir tout utiliser. Ils écri-vent le cosinus de l’angle en jeu, le sinus et latangente et se rendent compte après coup quele cosinus et le sinus sont inutiles.

ou encore, ils utilisent une flèche pour mon-trer que c’est cette définition qu’ils utiliseront.

Les données sont les suivantes :

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d’autres encore décortiquent le problè-me et raisonnent : pour trouver la longueur

oA’, côté adjacent, en utilisant la lon-gueur du côté opposé, on utilise la tan-gente, qui fait intervenir ces deux longueursen jeu dans ce problème.

un autre groupe considère au hasardle sinus de l’angle et choisit de conclure grâceau théorème de Pythagore (ci-dessous).

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Ce groupe, grâce à l’utilisation du théo-rème de Pythagore m’offrira un magnifiquetremplin, sans le savoir, pour amener la rela-tion trigonométrique «  cos²x +sin²x= 1  ».tous les groupes finissent par trouver le résul-tat. La liaison avec le problème de départayant été déjà été traitée avec la premièresituation, les conclusions sont rapides et neposent pas de problème.

une phase de mutualisation des résultatsest alors entamée avec une restitution orale desgroupes et débat dans la classe. on revientsur les notions, sur les confusions qui ontémergées et le choix du sinus, cosinus ou dela tangente.

III.3. Conclusions des séances

dans ces deux situations, l’analyse des don-nées a permis aux élèves de prendre conscien-ce de l’importance des hypothèses. Elles pren-nent du sens et seront vécues, non pas commerébarbatives et inutiles mais comme une aideà la décision pour choisir les outils mathé-matiques à utiliser. Les savoirs ont été construits.Cette démarche s’inscrit dans une conceptiondans laquelle les élèves vis-à-vis du savoiren jeu ont des responsabilités importantes.Cette démarche implique la constructiond’un contrat spécifique dans la classe quioriente le professeur vers des «  objectifsd’autonomisation  des élèves ». (Colloqueinternational Formes d’éducation et processusd’émancipation, jamot, Hammoud, triquet, Gan-dit, Guillaud, Gueudet, 2012). Cette habitudede recherche pratiquée au quotidien permet auxélèves de s’engager dans des tâches mathé-matiques. Cette plus grande liberté permet defaire plus facilement des ponts entre lesnotions comme agrandissement-réduction etthéorème de thalès, ou encore trigonométrie,théorème de Pythagore et relation trigono-métrique «  cos ²x + sin ²x = 1 ».

IV. — Évolution de l’organisation de la classe et conclusion

IV.1. Les évolutions

d’un point de vue spatial, l’organisation destables en îlots (groupes de trois ou quatre élèves)permet une transition facile, simple entre lesséances plénières et les séances de recherche.La circulation du professeur y est aisée. deplus, cette disposition facilite la différenciationpédagogique.

Les traces écrites sont aussi amenées àévoluer. En effet, un tel enseignement reposesur des questions génératrices d’études. L’ins-titutionnalisation se base à partir de ces grandesquestions. Exemple : comment calculer unedistance inaccessible ? La leçon apparaît alorscomme une réponse, comme une solution à unproblème. un cahier de recherche est à la dis-position des élèves pour noter les avancées etles pistes de travail. d’autre part, la manipula-tion d’objets en lien avec le problème posépermet aux élèves de visualiser les situationset donc d’avoir une meilleure conceptualisation

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mathématique du problème. Au niveau temporel,la démarche d’investigation et les travaux derecherche nécessitent de laisser du temps auxélèves en classe pour s’approprier les pro-blèmes, dégager des pistes, qui d’ailleurs se révè-lent parfois infructueuses.

Il faut laisser de la place à l’erreur et sur-tout le droit à l’erreur. La prise en compte desconceptions des élèves me parait être un fac-teur décisif. Si certains élèves au départ éprou-vent de la réticence à entrer dans la complexi-té. « C’est trop dur, madame, c’est pas pour moiça ! »  me diront-ils. La lueur qui se dégage lors-qu’ils trouvent une piste suffit au professeur pourcontinuer dans cette voie.

Les obstacles à dépasser sont nombreux avantque les élèves se lancent dans une démarched’investigation. A la fois des obstacles provenantdu changement de contrat et des obstaclesinhérents à toute recherche. Il ne s’agit pasd’écrire ce que le professeur attend mais d’écri-re ce que le savoir commande. Cela génère audépart des angoisses chez les élèves et lesdéstabilise : « Il faut faire quoi ? Vous voulezquoi ? ». du point de vue du professeur, ilfaut savoir «se retenir» pour ne pas donner lasolution aux élèves tout de suite, savoir jouerle jeu et laisser ouvertes les investigations. Lerôle du professeur est changé. Il ne s’agit plus

d’être le seul détenteur du savoir mais d’êtrele directeur de l’étude.

Quant au vécu de l’erreur, il est aussi trans-formé. Lorsqu’un groupe se trompe, il ne s’agitpas de dire aux élèves «vous vous êtres trom-pés». Ils doivent comprendre qu’ils se sonttrompés parce que le savoir le leur montre et leurprouve. Autrement dit, il s’agit de pousser lesélèves à penser par eux-mêmes. tout ceci n’estpossible que si le professeur se sert du poids dugroupe et laisse les élèves aller jusqu’au boutde leurs pistes. Il est nécessaire de gérer les dif-férentes solutions trouvées par les élèves et desavoir rebondir pour les amener vers les fina-lités du parcours d’études et de recherches.

IV. 2. Conclusion

Ce parcours autour de l’œil a permis auxélèves de travailler autrement les théorèmesde géométrie inscrits au programme de la clas-se de troisième. La pratique de la démarched’investigation remet en cause nos pratiques ausein de la classe. Mais à en juger la motivationque les élèves ont montré tout au long de cetterecherche, on peut espérer qu’elle aura permisde changer pour certains le rapport qu’ils entre-tenaient avec les mathématiques. En tout cas,pour moi le rapport que j’ai avec l’enseignementa été aussi bouleversé.

Remerciements à Robert Noirfalise et Thierry Lambre.

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Bibliographie

Bulletin officiel spécial n°6 du 28 août 2008 Programmes de collège de mathé-matiques, Sciences physiques et Science de la Vie et de la terre. Ministè-re de l’E.N.

BrouSSEAu, G. (1998) Théorie des situations didactiques, La Pensée Sau-vage

CHEVALLArd, Y (1985) La transposition didactique : du savoir savantau savoir enseigné, La Pensée Sauvage

jAMot, HAMMoud, trIQuEt, GANdIt, GuILLAud, GuEu-dEt,(2012) Colloque international Formes d’éducation et processus d’éman-cipation, Actes en ligne http://cread.espe-bretagne.fr/spip.php?rubrique131

SAMAdI r. Cours d’optique géométrique : université Pierre et MarieCurie, Paris, p 20http://www.edu.upmc.fr/physique/lp103Electopt/doc_opt/optique.pdf

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La tour Eiffel vue par un myope sans correction

Schéma de l’œil vu en Sciences de la Vie et de la Terre

Schéma étudié en Sciences Physiques

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