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18 BIS RUE VIOLET 75015 PARIS - 01 58 01 10 20 JUIL/AOUT 13 Mensuel Surface approx. (cm²) : 1581 Page 1/5 ARLEA 2544586300508/GTG/ARN/3 Eléments de recherche : ARLEA ou EDITIONS ARLEA : toutes citations bibliographiques Prendre le temps d'un regard indépendant ANGELISE HEURTIER SWEET SEXTEEN Annees 50 une Ame rique en noir et blanc, de la violence au courage SWEET SIXTEEN JACQUES FERRANDEZ L'ÉTRANGER Dëtranger Une adaptation réussie du célèbre roman d'Albert Camus --" ROOPA FAROOKI LES CHOSES COMME JE LES VOIS Une fratrie confrontée a la difference Du tonus a revendre JL www hebdodesnotes com BIBLIOTHEQUE TOUR TOUS Prix CBPPT SO 13 Marie Sizun p. 24 Prix LIVREJNJTETE p. 28

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Page 1: Surface approx. (cm²) : 1581Ce que j'avais d'abor d écrit était trop carica-tural. Disons qu e je réglais des comptes avec une façon de procéder dans l'enseignement qui n'était

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Eléments de recherche : ARLEA ou EDITIONS ARLEA : toutes citations

bibliographiquesPrendre le temps d'un regard indépendant

ANGELISE HEURTIER

SWEET SEXTEENAnnees 50 une Ame

rique en noir et blanc, dela violence au courage

SWEETSIXTEEN

JACQUES FERRANDEZ

L'ÉTRANGERDëtranger

Une adaptation réussiedu célèbre roman

d'Albert Camus --"

ROOPA FAROOKI

LES CHOSES COMME

JE LES VOIS

Une fratrie confrontéea la difference

Du tonus a revendre

JLwww hebdodesnotes com BIBLIOTHEQUE TOUR TOUS

Prix CBPPT SO 13Marie Sizunp. 24

Prix LIVREJNJTETEp. 28

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Gros plan Prix CHPT 2013 Adultes

Prix CHPT 2013Marie SizunVii léger déplacemenf

I Professeur de lettres venues sur le tard àl'écriture, lauréate du 33e prix CBPT pourson roman Un léger déplacement, MarieSizun répondait le 15 mai dernier, lors dela remise du prix, aux questions de Phi-lippe Delaroche*. L'occasion de découvrirune femme attachante, sensible, pleined'humour, très attachée à la beauté desmots et à la musique des phrases.

Marie Sizun, vous n'avez commencéà publier qu'en 2005. Pourquoi?Ce n'était pas une decision arbitraire de mapart Tout simplement, je n'étais pas capabled'écrire lorsque j'étais professeur J'ai beau-coup d'admiration pour les enseignants quiarrivent à écrire en pratiquant leur métier.

On croit sentir dans ce roman l'échode votre propre itinéraire?Non, mon livre n'est absolument pas autobio-graphique Parce que, contrairement a monhéroïne, je n'ai jamais vraiment quitte ParisJ'y avais un pied-à-terre pendant toutes mes

« Le premier chapitre, c'est mabase. C'est le ton, la musiquedu livre. C'est vraiment ce àquoi je tiens absolument, danstous mes livres »années « d'exil » et je ne me suis jamaissentie exilée comme peut l'être Hélène Quece soit en Allemagne ou en Belgique, oùj'ai enseigne pendant plusieurs années, jen'étais pas suffisamment éloignée de Francepour en ressentir cruellement l'absence. J'aiseulement rêvé à ce qu'aurait pu être un veri-table exil

Comment avez-vous reconstitué ledécalage, la surpriseque représentaitpour Hélène le retourdans ce Paris, trente-cinq ans après sondépart?Bien sûr, il y a une part desouvenir, maîs il y a aussil'imagination On peut très bien imaginer ceque ressent quelqu'un qui vient des États-unis, qui a pensé à la France, qui a pensé aumétro parisien du fond de sa petite librairie llne fallait pas un gros effort pour imaginer lerêve et la nostalgie qu'a pu éprouver Hélène.

Quel a été votre premier lecteur?Une amie qui est justement bibliothécaireJ'ai un grand amour pour les bibliothécaireset les libraires parce qu'ils sont nos passeursNous, les écrivains, que serions-nous sanseux? Cette amie a été ma première lectriceavant que j'ose remettre mon texte à Cathe-rine Guillebaud avec crainte et tremblementParce qu'on est toujours très ému quand onremet son manuscrit à l'éditeur.

Comment a-t-elle réagià cette lecture?Elle m'a dit1 «Marie, tu y vas'» Pour Unléger déplacement, elle n'a eu aucune réti-cence, elle a aimé tout de suite. Pour le sui-vant, celui qui va venir, elle en a eu quelques-unes et elle avait raison D'ailleurs, on m'a ditla même chose chez Arlea, et j'ai revu macopie1 J'ai besoin de l'œil d'un premier lec-teur, cela m'est absolument nécessaire Jen'ai pas assez confiance en moi. Apres cela,je peux avancer droit."Directeur adjoint du magazine Lire

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Quel est ce prochain livre à venir?Il s'appelle Un jour par la forêt Je suis encorehabitée par ce livre, et j'y tiens beaucoupparce que j'y ai mis mon experience de pro-fesseur devant les difficultés que peuventavoir certains enfants à approcher la cultureet notamment la poésie. Si je n'en avais pasparlé dans ce livre-là, j'aurais renié une partiede ma vie qui a consisté à jouer, moi aussi,les passeurs Loccasion m'a été offerte grâceà mon éditeur qui a accepté que je parle dece problème difficile à traiter pour bien desraisons.

Quels sont les travers que vous avezcorrigés?J'avais peut-être, au détriment de l'intrigueet de l'approfondissement des personnages,trop parlé de poésie, cité trop de poètesdans un roman, cela n'est pas absolumentnécessaire, je croîs D'autre part, j'avais lais-sé trop apparaître certains griefs à l'égard del'Éducation nationale qui s'intéresse selonmoi insuffisamment aux enfants en difficulté.Ce que j'avais d'abord écrit était trop carica-tural. Disons que je réglais des comptes avec

une façon de procéder dans l'enseignementqui n'était pas la mienne et que je réprouvaischez certains collègues.

À propos de quoi ?À propos de l'enseignement en géneral maîsen particulier de l'enseignement du français,de la littérature et de l'approche de la poésieavec des jeunes.

Ne pensez-vous pas que parfoisil faut savoir exagérer?Oui, maîs je croîs qu'on peut aussi faire leschoses avec délicatesse. Ma premiere ver-sion était simpliste la nuancer a été une trèsbonne chose et a rendu le roman plus équi-table, plus humain et je croîs plus touchant

Là, vous avez « retenu vos chevaux ».Mais avez-vous déjà eu l'occasiond'émettre en sourdine quèlquesopinions personnelles dans d'autreslivres?Toujours Moins peut-être dans Un légerdéplacement. Maîs dans La femme de l'Al-lemand, oui J'y ai parlé de la médecine, dutraitement que subissent certains malades etc'était là quelque chose qui me tenait à coeurparce que j'ai approche de tres pres ce pro-blème étant donne que ma mere était maladecomme a pu l'être mon héroïne Fanny.

Et ce qu'on appellerait l'aspect senti-mental? À chaque livre son idylle?L'amour est une chose qui fait partie de notrevie à tous et on peut difficilement, à proposde n'importe quel sujet, l'éviter On le ren-contre toujours Maintenant qu'il soit le centrede chaque livre, non ll est le centre du romanPlage et d'une certaine façon de La femmede l'Allemand Autrement, on le rencontreincidemment sous une forme curieuse dansLe père de la petite, puisqu'il s'agit d'une

« Pour moi le livre des livres,c'est Les Pensées de Pascal »

forme d'amour naissant entre une petite filleet son père Une sorte d'Œdipe que le lecteurdécrypte très bien, avec ses phases de jalou-sie, de colère et de folie Même quand on aquatre ans, on est déjà une petite femme1

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Pourquoi avoir intitulé votre romanUn léger déplacement?Dois-je vraiment le dire9 J'avais eu commemon héroïne un malaise nocturne, l'impres-sion de passer horizontalement d'un endroita l'autre Un sentiment tres curieux, pasdésagréable, celui d'un deplacement d'unmonde dans un autre l'autre, peut-être9

L'idée m'est alors venue d'écrire l'histoired'une femme qui aurait eu un malaise prémo-nitoire de sa mort Et puis il se trouvait queje venais de faire « un leger deplacement »a New York et j'étais encore toute pleine demon voyage new-yorkais J'avais tellement

« Ce que je reproche beaucoupaux romanciers, c'est d'êtreétrangers à la poésie »

aimé cet endroit, tellement aime le dépayse-ment total que j'avais trouve dans cette ville,la beaute du ciel, la beaute du froid, l'etran-gete des rues, que j'avais envie d'en parleret de faire de mon héroïne quelqu'un quivivait la entre deux mondes Alors Un legerdeplacement, c'est a la fois le petit malaise

« (...) donner toute sa valeurau mot et à la place des motsdans la phrase, comme on lefait en poésie »

prémonitoire - maîs cela, le lecteur ne peutpas s'en rendre compte avant d'avoir lu lesdernieres lignes -, et c'est bien sûr le depla-cement new-yorkais Maîs c'est surtout legrand deplacement dans le temps et dansles valeurs morales de cette femme qui vaêtre bouleversée par la redécouverte de sonpasse, la reviviscence de souvenirs assezviolents, assez intenses, assez beaux aussipour anesthesier l'idée de la vie « normale »qu'elle devrait retrouver a New York, a l'issuede cette étrange semaine C'était trop fortSon corps lui-même refuse ce retour

Et ce renversement qui va s'opérerétait-il dans vos papiers dès le départou vous est-il venu en progressantdans l'écriture? Ce personnages'est-il imposé à vous et la surprisequi l'attend a-t-elle été en mêmetemps une surprise pour vous?Non, je savais comment organiser monroman En general, je sais d'où je pars etje sais tres bien ou cela va Je sais aussiou va être l'acmé, le point le plus fort Entreles deux, tout peut arriver Tout a coup,j'avais envie de parler de ceci ou cela plusen détail, puis il y avait des personnages quisurgissaient Par exemple, il y en a un quej'ai bien aime et qui est arrive comme celac'est la vieille dame qui habite sur le mêmepalier qu'Hélène J'avais vraiment une ten-dresse pour ce personnage, pour le decordans lequel elle vit J'ai imagine et je garde

« Le Camus de L'Étranger estpour moi un sommet »

le souvenir de cet appartement qui était pourHelene un souvenir d'enfance ll y a des pas-sages qui ont surgi comme cela, par simplebonheur, par exemple la rencontre d'Yvan ala fm chez l'antiquaire J'étais tellement heu-reuse d'écrire ce passage-la De même, ledepart en taxi d'Hélène a travers Paris, cesderniers visages de Paris qu'elle emporte

Est-ce que cela vous arrive decouper, de biffer ou de changerl'équilibre des situations?Supprimer un episode quand je vois qu'iln'apporte rien au récit, oui Parfois intervertirl'ordre de certains chapitres

Saviez-vous que Flaubert disaitqu'il faut toujours supprimerle premier chapitre?Non, justement le premier chapitre, pour moi,c'est ma base C'est le ton, la musique dulivre C'est vraiment ce a quoi je tiens abso-lument, dans tous mes livres Ma premierepage est toujours revue, corrigée, reprise,c'est ce qui me donne presque le plus demal Ce depart dans l'avion d'Hélène parexemple J'écris, j'imprime, je corrige ce que

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j'ai imprime et puis je recommence tout J'aides liasses et des liasses qui s'amoncellent iMaîs Flaubert pensait aux premiers chapitresdescriptifs façon Balzac, il préférait entrer apieds joints dans son sujet action, commeau cinema i

Vous avez parlé de la griserie del'écriture, y a-t-il un livre ou un auteurqui vous procure la même ivresse,qui a pu être un germe de votrevocation ?Il y a tellement d'auteurs qui ont ete pour moides declics' Cela va vous sembler bizarreparce que cela n'a aucune espèce de rapportavec ce que j'écris, maîs pour moi le livredes livres, c'est Les Pensées de Pascal Lineautre façon d'envisager la vie

« Henry James, si fin,si profond, si merveilleuxromancier »

Autrement, il y a Camus, le Camus de L'Etran-ger, qui est pour moi un sommet Et en plus,c'est aussi un homme merveilleux Et c'esttres rare Les écrivains ne sont pas toujourstres sympathiques L'Etranger est magnifi-quement pense et écrit, parfois un veritablepoème Ce que je reproche beaucoup auxromanciers, sauf a certains comme Sylvie

« Proust a la grâce d'être poètepleinement »

Germain par exemple, c'est d'être étrangersa la poesie, de ne pas pouvoir écrire unephrase qui soit travaillée en sorte de donnertoute sa valeur au mot et a la place des motsdans la phrase, comme on le fait en poesieJ'aime aussi beaucoup aussi Henry James,si fm, si profond, si merveilleux romancier -La coupe d'or' Malheureusement, je ne lelis pas dans le texte, maîs ses romans m'onttransportée au sens romanesque du termell y a des scènes qui sont des images telle-ment fortes qu'on est, la aussi, proche de lapoesie

Comme vous parlez d'Henry James,on s'attend aussi à ce que vousparliez de Proust?Bien sûr, maîs vous m'aviez autorisée a troisnoms i Proust, bien évidemment ll a la grâced'être poète pleinement Chez lui vraiment,je trouve tout ce que je peux espérer Et puis,il y a derrière l'écriture de Proust une pen-sée sur des thèmes qui me sont tres chers,comme la memoire et la mortJe n'ai pas parle non plus de Virginia Woolfmaîs cela va de soi La promenade au phareest pour moi l'un des plus beaux textes dumonde On dirait un roman, maîs c'est unenouvelle On dirait une nouvelle, maîs c'estun roman Et c'est de la poesie pure d'un bouta l'autre' •

Retranscription de l'interview de MarieSizun par Philippe Delaroche lors de

la remise du prixM-MP

Repères

Nee en 1940 a Paris, agrégée de lettresclassiques, Marie Sizun, mere de troisenfants, a ete enseignante en Francepuis en Allemagne et en Belgiquejusqu'en 2000 Elle partage sa vie entreParis et la Bretagne dans sa maison del'île Judy En dehors de son travail d'écri-

ture entrepris depuis saretraite, elle s'adonne a lapeinture La femme de l'AI-

l*1 lemand (NE avril 2007), son^ deuxieme roman, lui a valu

le Prix des lectrices de Elle2008

Bibliographie, u»» 2005 Le pere de la petiteI M IA mm

(Arlea)2007 La femmede l'Allemand (Arlea)2008 Jeux croises (Arlea)2009 Eclats d'enfance(Arlea)2010 Plage (Arlea)

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