sur la bourgeoisie

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RECHERCHES SUR LA BOURGEOISIE ET LÀ COMMUNE MUNICIPALE DE LA CITÉ DU MANS DU , Xit SIftG LE AU XVI' I État de la Question. -Acte de 131.4. Louis XI octroya à la ville du Mans une charte do commune en février 1481 ( y . s.) 1482 (N. s.). Voilà la date certaine de la création de l'hôtel de ville, dont Je personnel tout électif se composa de six pairs, l'un des- quels eût le titre de maire, et de six conseillers. Ces offi- ciers réunis devaient choisir un secrétaire ou greffier, un receveur des deniers communs, et un certain nombre do sergents. Il faut lire au reste l'ouvrage de feu Cauvin, de l'Adrninislralioft municipale dans la province du Mairie, pour connaître toute l'histoire de cette importante insti- tution et des étranges modifications qu'elle a subies de— puis son origine jusqu'à nos jours. Malgré les dates positives et l'authenticité des docu- ments historiques de nos archives, on se demande en- core aujourd'hui quelle était la nature titi régime munici- pal sous lequel vivaient les citoyens du Mans avant 1482; surtout à partir du commencement du Nue siècle, siit pendant la domination des ducs de Normandie, soit après que Philippe-Auguste, vers 1204, eut réuni à la cou- D Document - - IIIIIII!III!IHHl IIIIID II 0000005610846 -. 7 w0

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RECHERCHES

SUR LA BOURGEOISIEET

LÀ COMMUNE MUNICIPALE DE LA CITÉ DU MANS

DU, Xit SIftG LE AU XVI'

I

État de la Question. -Acte de 131.4.

Louis XI octroya à la ville du Mans une charte docommune en février 1481 ( y . s.) 1482 (N. s.). Voilà ladate certaine de la création de l'hôtel de ville, dont Jepersonnel tout électif se composa de six pairs, l'un des-quels eût le titre de maire, et de six conseillers. Ces offi-ciers réunis devaient choisir un secrétaire ou greffier,un receveur des deniers communs, et un certain nombredo sergents. Il faut lire au reste l'ouvrage de feu Cauvin,de l'Adrninislralioft municipale dans la province du Mairie,pour connaître toute l'histoire de cette importante insti-tution et des étranges modifications qu'elle a subies de—puis son origine jusqu'à nos jours.

Malgré les dates positives et l'authenticité des docu-ments historiques de nos archives, on se demande en-core aujourd'hui quelle était la nature titi régime munici-pal sous lequel vivaient les citoyens du Mans avant 1482;surtout à partir du commencement du Nue siècle, siitpendant la domination des ducs de Normandie, soit aprèsque Philippe-Auguste, vers 1204, eut réuni à la cou-

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Document --

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-4--ronfle de France les provinces du Maine et de l'Anjou.Que faut-il entendre par ces expressions (le citoyen duMans, de bourgeois du Mans, simultanément employéespendant la période de quatre siècles que nous venons designaler?

La plupart des historiens admettent en 1071 l'établis-sement d'urne commune par les habitants du Mans, enrévolte contre leur comte, Guillaume- le-Bûtard, duc deNormandie. Cette émeute ne produisit qu'une sanglanteanarchie et n'eut pour les Manceaux que de funestes ré-sultats : il n'y a pas lieu de tirer de là quoi que ce soit debien glorieux. Les Anglo-Normands revinrent vers 1072,soumireni la Ville et le pays; Guillaume leur roi, ayantreçu le serment de fidélité des Bourgeois, leur promit,dit-on, de conserver leurs anciennes coutumes c'est-à-dire, sans doute, qu'il les traita en peuple conquis, neleur faisant que le niai qui ne compromettait pis sespropres intérêts. Pour voir dans ces tristes faits, mal-heureusement trop fréquents alors, une commune, la pre-mière de sou genre connue en France, et introduire'Jans nos annales ce vocable, qu'on est disposé à prou-(Ire dans le sens qu'il a eu beaucoup plus tard, vers laseconde moitié du %tte siècle, il a fallu le tirer par unetraduction un peu forcée du mot latin comrnunioucrn ein -ployé par un ou deux chroniqueurs. Si 011 l'eût traduitsimplement par association, ligue, communauté, on au-rait peut-être été plus dans le vrai, eu égard aux idées etaux usages du temps. Nos courageux et téméraires coin-patriotes, en se concertant, eu se donnant des chers etune organisation quelconques, ont agi comme les révol-tés de toutes les époques. Au reste, qu'il y ait eu com-mune ou non, il me semble assez oiseux tic s'arrêter àun accident mal connu qui n'a pas laissé d'autres tracesdans les souvenirs que celles que je viens (le rapporter:il y a peu de provinces qui ne pourraient pas, à ce titre,réclamer aussi une priorité.

En l'absence de témoignages certains sur le sujet enquestion, on ne peut cependant s'empêcher de soupçon-ner qu' une ville comme LB Mans, enceinte de murs for-midables, siège d'un évêché, chef-lieu d'un riche comté,remarquable par des monuments qui accusent chez seshabitants des ressources et des industries nombreuses,a dû avoir un corps de citoyens, de chefs de familles no-tables, qui ne sont pas restés tout à fait étrangers à l'ad-ministration (le leur cité, et n'ont pas été exclusivementgouvernés par des agents du pouvoir royal ou seigneu-

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-5—rial. Suivant l'auteur de l'Histoire du Droit municipal, pu-b'iée en 1829,M. Raynouard, avocat un peupassionné deson objet, le droit des citoyens dune cité française, desurveiller, gérer et détendre les intérêts locaux com-muns, est un droit primitif, imprescriptible, qui, dès laplus haute antiquité, n été reconnu par les diverses po-pulations et tous les pouvoirs souverains du Royaume.Cela est vrai au point de vue de l'équité; mais, dans lapratique, ce même droit, si fortement senti et avoué parla conscience humaine, est au. moins à l'extérieur très-compressible, pour ne pas dire annulable.

On dit encore, avec autant de raison, que l'exercicedos droits municipaux a eu lieu avant et sans les chartesde commune, qui. n'ont fait souvent que d'en régler lesconditions d'exécution c'est ainsi qu'au Mens nous con-naissons des échevins en 174, plusieurs années avantles lettres patentes de louis Xi. Il est donc probable

'que peu à peu, selon l'état des esprits, les comtes duMaine, par bienveillance, par politique ou d'autres mo-tifs, ont permis la renaissance, le développement de l'in-tervention des bourgeois du Mans dans la gestion desaffaires publiques, jusqu'à ce qu'enfin leur droit et leurpossession aient reçu la confirmation de l'autorité su-prême. Mais il n'en faut pas conclure qu'auparavantcette possession n'a pas été restreinte à des proportionsexcessivement minimes,, ni que les traces en sont facilesà retrouver. La recherche de ces veniges, très-activeaujourd'hui, est un devoir et un plaisir. Du xii' au xv'siècle., il s'est fait de grandes choses dans notre ville etaux environs: quelle part y ont prise les trois classes dela population le clergé, les seigneurs féodaux, la bouç-geoisie ? Ces questions ne sont pas près d'être résolues:les ouvrages généraux, ceux même des écrivains les plusvantés, niais étrangers à notre pays, ne sont ici que d'unetrès-médiocre utilité ; les faits locaux les démentent àchaque instant, parce que, pendant la période dont nousparlons, l'inconstance et la diversité locales rendent lePplus souvent illusoires les résultats attendus de toutecomparaison, de toute induction. Et il n'en pouvait êtreautrement; la société était alors travaillée par l'élémentchrétien qui détruisait l'ancien ordre de choses, avecplus ou moins de vitesse et de succès, selon les temps etles lieux, pour y substituer une nouvelle civilisation.

Au moyen âge le sens des mots change et leurs formespersistent ainsi, on voit chez nous des maires, desconseillers, des prudhommes, des honorés, des barons.

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-6—Ces titres peuvent être ceux do fonctionnaires munici -paux eut certains lieux, mais en d'autres et surtout auMans,la preuve (le l'élection populaire et des attributionsdes officiers du même nom n'est point faite; souvent, aucontraire, les documentsanciens font présumer qu'ils ap-partiennent à l'organisation féodale dont l'unité et l'inté-grité furent longtemps nécessaires,.à cause des circons-tances critiques ou s'est trouvé le pays.

Est-ce en effet, sous la domination anglo-normandequ'il aura été donné une large part de libertés et d'in-fluence aux Bourgeois, toujours prêts à se soulever pours'affranchir du joug étranger? Quand l'histoire parle deleurs coutumes, de leurs priviléges conservés, il est pro-bable qu'il s'agit seulement de quelque modération d'im-pôts et d'obligations personnelles accordée À des vain-cus. On leur promettait de ne pas leur enlever la totalitéde leurs biens, et de ne pas les livrer à une législationcivile et pénale absolument nouvelle; mais, pour le-reste, ils demeuraient sous une rigoureuse tutelle.

Est-ce même immédiatement après l'expulsion des An-glais par Philippe-Auguste, durant les premières annéeslu ,ciit' siècle, que ce prince guerrier et fin politique au -ra été tenté de partager son autorité dans une ville oùl'étranger pouvait avoir laissé beaucoup de ses créatu-res ? Ce n'est pas admissible. Alors l'évêque du Mans,ilanielin, dévoué aux Anglais, refusait de prêter le ser-ment de fidélité au roi de France bien plus, Bérengère,la veuve du roid'Angleterre, avait reçu pour son douaire,en vertu d'une transaction, la jouissance des droits decomtesse sur la ville et les quintes du Mans, sinon sur laprovince entière.

Au point où sontchez nousles études sur cette obscu-ro matière, le douce est non-seulement permis, maisconseillé par la sagesse. Défions-nous des inductionsforcées, des jugements précipités, et continuons l'ins-truction de la cause en vulgarisant la connaissance despièces propres à l'éclaircjr. Je respecte les opinions deceux de nos érudits modernes qui semblent disposés àvoir une administration municipale au Mans pendant lesquatre derniers siècles du moyen-âge; mais, pour y croi-re, j'attendrai la démonstration historique d'actes évi-demment émanés de fonctionnaires municipaux, c'est-à-dire d'officiers librement élus par le corps de leurs con-citoyens, des bourgeois de la Cité, et chargés de les re-présenter, de gérer les affaires publiques et de défen-dre leurs droits et leurs intérêts communs , indépen-

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-7-damnient des agents de l'autorité royale otiseigneuriale'et même contre eux.

4f Il ne faut pas s'abandonner sans réserve au sens quelés noms ministériels font d'abord concevoir; cependanton doit y avoir égard et s'assurer s'ils sont l'expressionde ta réalité des fonctions et des attributions quo l'onrecherche. D'après le glossaire de 1)ucange, les princi .

-paux signes d'une commune du moyen-âge sont l'échevi-nage, l'assemblée (coUegiurn), la mairie, le sceau, la clo-che, le beffroi, la juridiction. Ces mots, comme nous l'a-vons vu, ont pu correspondre à l'exercice dedroits mu-nicipaux quelconques avant même octroi des chartesde commune. Quant aux noms de bourgeois (burgensis),et de citoyen (civis), ils sont fort ancien, et ont eu unefoute d'acceptions subordonnées aux changements qu'é-prouvaient les personnes dans leurs domiciles, leurs po-sitions sociales, leurs droits municipaux.

En général, le mot bourgeois désignait originairementl'habitant dun bourg ou d'un village fermé; on t'a rué-me dit des mêmes lieux non fermés. Quand tes bourgsformés s'élevèrent au titre de ville, tes habitants conser-vèrent encore le nom de bourgeois. Lorsque ces villesobtinrent des privilèges pour leurs habitants réunis encorps, le nom devint propre aux individus de ce corps,

l'exclusion des non privilégiés; ainsi, il avait expriméd'abord une idée de position, il reçut ensuite une idéedo privilée c'et la connaissance précise des privilé"ges, dont jouissait un bourgeois à une époque donnée,qui détermine alors le vrai sens do sa qualification.(Voyeh de Brequigny Ordonnances des rois de Fronce, pré-face du tome XII). -

Le mot de citoyen a souvent eu dans notre pays lamême signification que celui de bourgeois. Il est possibletoutefois que certains écrivains ne les aient pas toujoursemployés indifféremment. La cité en effet était tout lépays, dont les habitants vivaient à peu près sous le mô-me régime. Au Mans, on a aussi appelé la cité l'espacecompris dans l'enceinte murée; le surplus de la ville for,mait les faubourgs.

Pendant la 'période gallo-romaine, tes peuples (lesGaules, surtout depuis qu'un décret de Caracalla les dé-clarait citoyens romains, jouirent d'institutions munici-pales assez étendues qu'ils conservèrent plus ou moinssous les rois de France des deux premières races. Ilsparvinrent, par l'ascendant de leur religion et de leurcivilisation, maintenir chez eux le droit de suffrage,

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-8—qui avait son principe et son type les plus respectablésdans le concours du peuple à l'élection des papes et desévêques. Au xxi' siècle, celte base importante des liber-lés municipales était depuis longtemps déjà fort ébran-lée par la faute d'une bonne partie des membres de lasociété de cette époque; les conséquences ne pouvaienttarder à s'en faire sentir dans l'ordre civil. Bientôt (lestroubles, des dissensions,des dangers de toute espècene donnèrent à la féodalité que trop d'nccasions'de fairedominér avec excès sa dictature, sa force de compres-sion et de défense, et de la conserver au-delà (le la du-rée des circonstances qui l'avaient rendue nécessaire.Combien compterait-on d'années tIc paix dans le Maine,pendant les quatre siècles antérieurs A 1482? Ne nousétonnons donc pas si les institutions municipales, ces li-bertés publiques, fruits de la concorde spontanée parmiles citoyens, et de la confiance réciproque entre eux etle souverain, ne sont pas au Mans reconnaissables pourtous aux caractères ci-dessus spécifiés. Au reste, voiciquelques-uns des principaux témoins à interroger sur cesujet.

Vers le tir siècle et le tut', les abbayes, les chapi-tres, les établissements religieux du Mans et de la Pro-vince, toujours conservateurs et modèles des traditionsd'ordre et d'administration, composent de volumineuxregistres appelés Cartulaires, avec des milliers de copiescollationnées des actes constatant leurs privilèges, leursacquisitions, ventes, baux, etc.; leurs débats, leurstransactions dans lesquels sontnommées et qualifiées despersonnes appartenant à tous les rangs de la société;c'est une source inépuisable de renseignements authenti-ques sur les moeurs de cette période, si mal connue doses détracteurs, intéressés à la peindre beaucoup plusvicieuse qu'elle ne l'était. Je ne crois pas qu'on y ait re-marqué rien de concluant en faveur dune réponse affir-mative à notre question. On y trouvera donc cités tousles genres de professions; tous les degrés des pouvoirset ces corps ecclésiastiques si nombreux, si influents,n'auront eu aucuns rapports avec nos administrateursmunicipaux, aucun débat ne se sera élevé entre les unset les autres au sujet de leurs droits et de leurs pro-priétés respectifs I C est vraiment une persistance mira-culeuse des relations amicales et de bon voisinage 1 Espé-rons que nous finirons par surprendre quelque part cescontemporains récip roqueraient moins pacifiques: ce seraplus humain.

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-9-Une-contestation surgit entre te Chapitre de la cathé-

draie et l'abbaye de la Couture relativement à la juridic-tion du premier sur la Ville et surla Province.Une enquêteest ouverte au Mans, te 12 février 12%5 (y . s.), sous tadirection d'un cardinal délégué par le Pape; Nous possé-dons une copie manuscrite, sur 253 pages in-folio, de cecurieux document, digne tous égards de la publicité.Des témoins, au nombre de 97 . sont entendus, savoir62 ecclésiastiques, 4 avocats à la cour du Roi; 4. citoyensdu Mans; 2 vayers, I officier du Roi, 3 chevaliers, 21individus non qualifiés. Les dépositions prolixes, minu-tieuses, relatent les faits locaux depuis une soixantaineSd'années.On estétonné de la puissance morale qu'exercele Chapitre en vertu des privilèges de juridiction que luia conférés l'évêque Hamelin, non-seulement sur le peu-ple, mais aussi sur les plus puissants seigneurs féodaux,sans épargner davantage ta reine Bérengère, et surtoutleurs officiers sans exception, aussitôt qu'il leur arrivede commettre quelque injustice contre tes membres de laclasse nombreuse des cultivateurs, des marchands, desindustriels qui habitent ou fréquentent les vastes do -maires du Chapitre, qui ne sont peuplés que de mansion-nains et de gens libres. Les fauteurs, en grand nombre,sont cilés devant ce tribunal électif, populaire, impartial,qui n'inflige que des peines spirituelles pour obtenir aréparation des dommages causés. Personne ne déchire sacompétence il y a des murm ures , des entêtements plusou moins prolongés, mais on finit par se soumettre, ré-parer largement les exactions, les violences, et pro-mettre publiquement d'observer une loi si imposante parses principes inébranlables, son équité et son égalité

-pour tous. Parmi les noms et les qualifications trôs-mul--upliés dans l'enquête, je n'en aperçois pas qui puissentconvenir à des officiers municipaux; c'était pourtant lecas d'invoquer leur témoignage et de s'appuyer de leurhonorabilité. S'il en existait alors au Mans, il faut qu'ilsaient été d'une conduite exemplaire et d'une ortho-doxie parfaite ; je ne demande - pas mieux que de lecroire, s'il n lieu. (Archives communales, dossier 834.)

Philippe Vide Valois, comte du Maine, 4e 1317 'n1328, fit, pour la police des diverses industries de la vil-le du Mans, des ordonnances fort intéressantes, qu'ilfaut étudier avec attention pour tâcher d'en compren-dre la portée par rapport à notre sujet. On y voit lapreuve de la réserve méticuleuse avec laquelle le comteconfie aux Bourgeois quelques commissions faciles. Tout

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- 10 -ce qui concerne la fabrication, la vente, la consomma-tion des subsistances et des choses les plus usuelles, estréglementé et taxé par le comte exclusivement et à sonprofit, à très-peu d exceptions près les infracteurs sontpoursuivis et punis par le bailli, le voyer au le procureur deMonseigneur. Quelques bourgeois cependant, sous les ti-tres vagues (je prudhommes, de jurés, de gens suffisants,semblent destinés A être consultés en certains cas, parexemple, lorsqu'il s'agit d'apprécier les qualités du pain,de la viande, du vin ce n'est peut-être qu'un mandatqfficiel, temporaire, révocable à discrétion; mais enfin

.c'est au moins un premier rapprochement entre le pou-voir féodal et les administrés. La disposition suivante,concernant le pain, mérite d'être remarquée o Quo à

castes ordrenances ygarder, soient établis deux ou• trois prudes hommes jurez avec un sergent qui sou-• ventes fois visiteront les houlangiers, et le pain que ils• trouveront non suffisant, ils le jugeront et condemp-• neront par leur serment. Et leur Jugement et sentence• porteront au vaier et aux bourgeois qui la conforme-• Font à leur serment si rnestier est selon raison et ton-• tes voies. u Nous avons la copie de cette ordonnance,délivrée le 18 septembre 1535. conforme à l'original,beaucoup plus ancien, appelé la quaterne de la prévôtéet vaine duMaas, à la requête du procureur du Roi pourles affaires (le ce siége. (Archives communales, dossier 514.)

Ces prudhommes, ces jurés, ces bourgeois étaient-ilschoisis et élus aux voix par leurs pairs, ou bien étaient-ils seulement appelés arbitrairemeni et assermentés de-vant le bailli, le voyer ou le procureur de Monseigneur? Lesdésastreuses guerres dont notre province eut tant àsouffrir pendant la seconde moitié du xtv' siècle et unepartie du xve, laissaient peu de chances à la liberté et àla stabilité des institutions municipales.

Nos archives offrent encore d'assez nombreuses piècesanalogues aux précédentes, par leur âge et leur nature.Les érudits les consultent journellement, mais je n'ai pasappris qu'ils y aient découvert des textes plus explicitessur la participation indépendante des Bourgeois du -MansA l'administration de la Ville aux temps dont nous par-lons. M. de Lestang n'a pas été plus heureux dans sesconsciencieuses recherches sur la topographie Fi la po-pulation du Mans au xiv' et au x'° siÈcles. On en a pujuger par les résultats de son savant mémoire inséré autome xvn du Bulletin de la société d'Agriculture de litS'enlie,

r-

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— t' —- A mesure qu'on pénètre plus avant dans la mine his-torique, la vraie lumière neo se fait pas, les incertitudesPersistent et les fruits du travail semblent devoir se ré-,duirè à des rroba hiliUts , à des aperçus indécis propresà féconder certaines imaginations. Mais quant à unecommune caractérisée.orgaflisàe au. Mans, quelque chosede plus qu'un corps nébuleux, embryonnaire, innommé,je crains qu'on ne parvienne pas A l'établir sur des fon-dements solides longtemps avant 1482. Voici un nouvelélément d'instruction plein d'intérêt, qui me fait un de-voir (l'adresser de nouveaux remerctments à l'auteur del'ouvrage, auquel je viens de rendre un juste hommage.

Ayant remarqué dans les Archives d'Anjou éditées parM. Paul Marchegay. en 185, l'analyse d'un acte duxiv e siècle où figurent, plus ou moins corrompus, lesnoms de plusieurs citoyens du Mans, j'en parlai à M. deLestang, qui avait fait la mémo remarque, et me promitde retrouver l'original A Paris. Je transcris ici la copielittérale qu'il m'en a envoyée, avec les indications ajoutées, et les diverses leçons proposées par bi, lesquellesressortiront en caractères italiques.

Trésor des Chartes, J. 179, numéro 85. Archives de l'Em-pire, section historique.

ii Sachent tous présent; et avenir que en noire courto endroit etablis Guillaume Lecirier, Jacquet Boju, Mi-o chiel Turpin, Jèhan de Segraye. Perrot Ligier, Ger-et Iiougué, Alart fioul ou lteoul ou B,'etd, mais plu-• tôt Rioul. khan Quarré, Michiel Ascelin, Jouffrey As-• colin, Guillot Ami, Macé Guoupil, Gilet Pasquier,• Jouffrey ijehucliet, Guillaume Fier de la Hache, Bu-• rand Pian, Main de Maip,né, Guillaume de Segraye,o Jelian flomin (ou Doucin ?), Guillaume Hainel, Heme-o ri Genis, Simon Voier, Estienne [,cure ou Levreou Lois-• ré. Raout de la Fousse, Pierre lioju, Jehan Bugtier, Es-• tienne Melet, Jehan Poupin, Guillaume de la Curiste,• Jouffroy Tierry, Olivier Jouce, Jeliai' Gales ou Ciles,• Guillaume de la Basoge, Jean de Redey ou Ridey,o Guillaume Guoupil, Colin Behuchet, Pierre Le Bai-ce hier, Guillaume Rogeré, Renaut Lesenier, Guerin Le-« requoquillie, Perrot Larcevesque, Gervese de Cou-(I Ions, Guerin Beyrnel, Raout de Monblanc, Dyonise• Ladeffiarle, Macé Geraut, khan Voier, Pierre Jalan• ou Salait, Ernoul de la Ch'rgerie, Colin Quarré. Jehan• Rousset, André Le Taillandier, André Soirant ou Foi-o rani ou Joirant, Micltiel Lepeletier, Robin de Sois, Guil-ç laume ltubescheau, Guillaume Roulant dit le Restif de

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-12-e Coefort, Jouffrey de Larche, Chotard Lefevre, Jehan• Lefevre de Saint Vincent, Jehan Moucheron, Chotard• Lomaçon, Estienne Doju, Jehan Loferait dit Hache-le• plus Vie!, Pierre Leferon, Estienne Chereau ou Tho-• noir, Lorens de Chateaufort, Herbert Deschamps,çi Jehan Chartrain, Clément Lehaudroier, citeiens Oit ci-(i toyeizs don Mans et la plus front et la plus saine partieu des autres citoiens de la dite ville firent et establiren to et enqunres establissent Michiel Turpin, Durant Piao,• Macé Lespecier, Guillaume de La Couste, Ernoul de• la Clergerie, Pierre Dojo, Pierre et Cervese dis Per-• reins, .Jouffrey Rire Veiau on fRet Veron, Jehan do• Vaege, Guillaume Hameau, Jehan Bugtier, Michiel As-

celin et André Guoupil. citeiens de la dite ville et deuso diceux pour le tout cinsi que la condition de I'occu -o pain ne soit pas la meillour et ce qui sera commence• pas deus diceux puisse estre poursev et acheve par• deus des autres leurs procuratours et leurs especlaus• rnessagiers a aparoistre tille fois ou plusiours et toute-o fois qu'il verront qu'il avendra n fera par devant nous• Challes conte (l'Anjou et du Maine et par dosant castre• conseil et pardevant nos commissaires deputes de par

u• nous a non diceux citeiens et pour iceux et prur• chacun diceux et en tant comme il touche iceux et« ehescun diceux et comme il puet touchier le negoce(t qui est a trester et n rlespeschier entre nous et iceux

citoyens et a procéder par devant nous et par devant• quelconques commissaires deputes et n deputer de« nous en negoce de susdit segouc ce que reson devra et« a deffeiidre. tous iceux et chescun diceux par devantn nous et pur devantnauix commissaires tic nous deputesu et a deputer si comme doses est dit et a propousero leurs resons leurs deffenses et lors exceptions et deu chescun diceux et les propouses a poursieuvre en ma-(t more deue jusques afin n oir sentences delflnitives et« interlocutoires d'apelcr de griefs et de sentence deu poursieuvre lapel en les apeaux que ils feroient et de« les renos'eler de cornprometre de fere compositions eto transactions et a fere toutes autres chouses et ches-u cunes que les dis citeiens et chescun diceux feroientu ou pourroient fere se eux et chescun diccux estoient

presens et a fere et establir en leur leu lieu les deuse autres procuratours ou plusieurs qui oient semblable

poair en toutes les chouseset chescutie devant diteso et n les casier et rapeler toutes fois que ils voudronte et ont les dis citeiens et clacundiceux promis et pro-

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- 13 -o metent eux avoir ferme etestable tout qtianque par leso dis produratours et par deus diceux et par leurs sus- -o titus sera feit et procure es dites chouses tant pour« eux comme contre eux et prometent sus l'obligation« de tous lors biens rendre et paier si mestier estoit pouro les dis procuratours et par deus diceux por le tout ci« pour tours sustitus quanque sera juié contre eux Eto tout ice nous fesons assavoir a ceux a qui il appartient« et puet appartenir par cestes presentes lettres scelleeso a la requeste et a la suplication des citeiens de sus dis

du sciau de notre court don Matis en tesmoing de ve-« rite ce fut donne ait de samedi apres la festeu saint Gervese deste en leu de greice (sic) mil trois cente et quatorsi'.

s Moeson XII d. u« Au dos est écrit e La procur. de cents de la ville du

s Mans. LXXI. MCCCXIII. »Voici maintenant le résumédes observations contenues

dans la correspondance de M. de Lestang1° L'écriture de l'acte original est sur un parchemin

parfaitement conservé; les lettres cursives, mal formées,peu caractérisées, les abréviations nombreuses, souventnon signalées, en rendent la lecture fort difficile.

20 Le scel de la Cour du Mans est de......semé defleurs de lis à l'orle de..... - Le contre-scel estde.....6 fleurs de lis, 3, 2, I • à l'orle de.....- Exergues illi-sibles, - Cire verte. - Lanières en parchemin.

30 Dans cette charte le comte du Maine approuve lechoix qu'ont fait les notables citoyens du Mans, de14 délégués pris parmi eux, qui seront dorénavant char-gés deux par deux (à tour de rôle, sans doute) de com-muniquer avec le conseil ou les commissaires du comte,pour traiter des affaires de la ville.

4' L'acte n'est pas assurément un établissement decommune ni de municipalité, puisque les délégués ne.jouissent d'aucuns privilèges; maison pourrait peut-êtreles considérer comme marquant le commencement de ceque plus tard on a appelé l'Election? D'après la teneur dola pièce les élus n'ont pas d'autre mission que de plaiderles intérêts de la Ville devant le conseil 'lu comte. En314, ce dernier reconnaît pour les intérêts de la Ville

des défenseurs, nommés par leurs concitoyens. C'est unprogrès niais ces élus ne paraissent pas encore avoird'autre autorité que celle de la parole : s'ils sont privésde juridiction, ils ne peuvent que discuter avec les com-missaires, se soumettre à leur décision, ou en appeler au

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tribunal supérieur, la cour conitale, sans doute, qui lesJuge en dernier ressort.

5°Pas un seul des comparants n'est qualifié ; en devra-t-on conclure que tous n'étaient revêtus d'aucune fonctionpublique? Non certes; ce serait abuser d'un argumentnégatif; toutefois, chez eux, s'il existait Lin pOUVOIt muni-ipal, convenons qu'il devait être singulièrement restreint.

Restons dans le doute conseillé par la prudence; at-tendons avec confiance l'avis des personnes studieusesque ce document inédit ne manquera rias d'intéresser, etaussi les communications postérieures de notre infatiga-ble compatriote qui poursuit ses recherches dans l'im-mense recueil, le Trésor des Charles, dont la minute de la -pièce ci-dessus fait partie, et où malheureusement lesdocuments de toutes les provinces sont confondus sansaucune classification.

Un mot cependant sur quelques légers détails. Lechiffre LXXI écrit au verso de l'acte exprime, sans doute,le nombre des citoyens comparants, quoique je n'encompte que 70. Celui de MCCCXLII, est le résultat d'uneautre étourderie du scribe ; la vraie date de l'année est àla fin, en toutes lentes, 1314, après la Saint-Gervais d'été,c'est-à dire quelques jours après le 19 iuin. Le motMoegon XII d., signifie, je crois, les frais sont de 12 de-nicrs. Enfin, le comte du Maine devait être Charles-III,prince dont l'histoire ne dit pas trop de niai; c'est cetroisième fils de Phulippe-Ic-Hardi, qui venait souvent sedélasser à son château du Gué-de-Maulay, sous le pou- -tificat de Pierre deLongneuil.

Il est assez, rationnel do penser aux origines (lel'Election, institution fiscale, en lisant la procuration dejuin 1314. Vraisemhlalslcment le Négoce à (rester entre lecomte et les citoyens du Mans était une affaire d'aides etde contributions. En effet, le recueil précité de M. Mar-chegay nous fait connajtre un autre acte du 4 novem-bre 4310, par lequel 231 citoyens d'Angers nommentsept des leurs qu'ils chargent de transiger avec le pro-cureur du comte d'Anjou, au sujet des quatre aides ré-clamées pour ce dernier, et pour lesquelles fi y avait eudéjà un accord de la part des barons et des nobles d'An-jou et du Maine. Le comte prétendait avoir le droit delever ces aides1° quand il faisait son fils chevalier;2° quand il mariait sa fille alitée; 3° s'il achetait uneterre, une fois en si vie; 4' lorsqu'il y avait lieu de leracheter de captivité. L'original latin de cette transac- -tien est aussi au 'I'résot' des Chartes.

-t-,

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En quoi consistait donc la représentation des citoyensangevins et. manceaux (le I30 à 1314, s'il tour fallaitalors des mandataires spéciaux? S'ils avaient eu un con-seil, un corps de ville, un syndic, un procureur du géné-ral des habitants, la présence en aurait été manifestée. Ilsemble, aicontraire, que la seule autorité qui enlève àl'Assemblée son caractère anarchique, soit celle ducomte, lequel, conformément à d'anciens usages, permetà ses subordonnés d'émettre leurs observations.

Ici, le sujet en délibération importe moins que la ma-nière de procéder. Le peuple de notre province n pres-que toujours victorieusement défendu son droit de soi-frage, ou du moins celui d'être consulté dans les ques-tions importantes, surtout en matière de levée et d'aug-mentation d'impôts : c'est l'un de ses privilèges que sesdivers souverains ont le plus respecté dans tous lestemps. Les deux assemblées d'Angers et du Mans, aucommencement du xiv' siècle, ont sûrement le mêmebut, et ne doivent pas être les premières de leur Genre;car elles répondent aux traditions nationales séculairesdont on voit les applications diversement modifiées, soitaux affaires générales du Royaume, soit à celles des pro-vinces, des villes et desplus simples paroisses. Si elles ontété entravées ou suspendues quelquefois, les exemplesen sont rares, et accusent des circonstances anormalescontre lesquelles proteste Le sentiment populaire. Cessortes de comices, où les citoyens font; à un certain de-gré, acte d'hommes libres, ne supposent pas nécessaire-ment une commune, ni une organisation municipâle per-manente, puisque la question qui y donne lieu, une foisrésolue, les membres ne font plus corps; ils se disper-sent, les individuà demeurent isolés, attendant une nou-velle convocation dont ils n'ont pas toujours l'initiative.

jYLe droit et le fait de pareilles rétiniens, usitées dès l'on-"-? gine de la nation, n'en sont pas moins très-considéra-

bles. Ces assemblées ont eu lieu indépendamment d'uneadministration municipale quelconque, avant elle, ouconcurremment, et même avec une influence supérieure,car elles ont pu en provoquer la formation. Il s'agissaitlà, en effet, non d'un coneil formé 4e quelques bour-geois ayant une modeste tâche définie A remplir, mais dela participation dei divers ordres et de toute la hiérarchiésociale aux affaires publiques, aussi bien dans le do-maine civil que dans 10 domaine temporel ecclésiastique.Nous n'avons pzis leur histoire complète, mais à toutesles époques jusques à La fin du xvut' siècle, nous les te.

1b

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-16 -trouvonsen pleine vigueur, ou au moins nous en suiv,onsles traces d'autant plus marquées que les habitudes na-tionales, depuis les Francs, ont été moins compriméesToujours, soit avant, soit après ta création des commu-nes, elles conservent ce caractère essentiel qui les dis-tingue profondément de toutes celles postérieures; c'estqu'elles ne font jamais d'abdications temorairs de leurhaute autorité, et qu'elles la gardent • intacteç soit poursurveiller, donner leur avis, discuter tes comptes des dé-légués, soit pour nommer des commissions spéciales,quand il y a lieu; parce que les affaires importantes .etimprévues de la communauté doivent être appréciées, àmesure qu'elles se présentent, par tous les coïntéressés,qui snntalorsùméme de choisir à chaque fois les déléguésles plus aptes à résoudre la question pendante Les com-missions administratives permanentes; les officiers ordi-naires de la commune ou de l'hôtel de ville, après sacréation, n'étaient point compétents-dans ces causes ex-ceptionnelles ou réservées, ils n'étaient que tes exécu•Leurs de certaines décisions des assemblées génératos, etn'avaient de gestion discrétionnaire que sur un nombredéterminé à t'avance d'opérations coutumières, qui leuravaient été attribuées avec mesure et discrétion- Lespreuves de ce régime, qui a duré si longtemps, et qui se-rait aujourd'hui radicalement impraticable, surabondentdans nos archives, dont toutes ces paroles ne sont qu'unécho très affaibli nous y reviendrons.

H

131s-s31;.

La digression dont nous sortons nous servira à mieuxcomprendre les témoignages écrits que nous allons con-sulter, et à éclairer ta marche tente mais progressive dela bourgeoisie mancelle vers l'organisation municipale etla possession d'un hôtel de ville-

Après 431$, il se fait un long silence dans nos archi-ves communales. La féodalité régnait et gouvernaitnous avons vu quo tes règlements attribués à Philippe deValois (1317-131[8) laissaient peu de place à l'actioncommune desbourgeois dota Cité, et d'ailleurs, tes mat-

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- -17heurs qui fondireut sur la Fronce et sur le Maine pen-dant les calamiteux règnes de Jean Il et do Charles Vi,furent trop favorables à la dictature militaire. Néanmoins,i'ers la fin du xiv 0 siècle, selon de vagues traditions, lesbourgeois-du Maris auraient été chargés de l'entretiendes murs et des fossés servant aux fortifications de laVille. Quand n commencé pour eux cette obligation?quelle en était d'abord l'étendue et le modo d'exécution ?Il est regrettable de ne pouvoir répondre à ces questionsautrement que par des conjectureset des inductions très-1)011 satisfaisantes.

F résulte damé ordonnance du roi Jean datée de Saint-Ouen près Saint-Denis, en juillet 1355, qu'à sa demande,une aide lui avaitété accordée par les Etats d'Anjou etdu Maine. D'après les tèrmes de celte pièce, insérée autome III des Ordonnances des Rois de France, le consente-ment acluel des Etats n'établit pas un droit nouveaucontre eux pour l'av-anir ; les deniers doivent être re-cueillis par six receveurs et collecteurs élus par les év'-ques d'Angers et du Mans, le seigneur de Craon, en sonprivé nom et nullement comme lieutenant du roi; Pierre etGuillaume de Craon et Brient, seigneur de Mont-Jean,chevaliers ; deux bourgeois, l'un d'Angers, l'autre duMans, et par ceuix d'euke touz qui s'en voudront enti'ernelreles collecteurs rendent compte de leurs recettes et misesauxdits évêques, chevaliers- et bourgeois, ou à ceul,zqu'ils y députeront, ou à yceulx d'eulx qui s'en voudront cii-trenietre; lesdits évêques, barons et bourgeois, ou d'iceulxd'eulx qui de ce se voudront, s'entendent avec le capitainedu roi pour employer la totalité des sommes reçues à ladéfense des deux provinces, et surtout des châteaux doleurs frontières. Plusieurs passages de cette ordon-nance, mal rédigée, sont peu intelligibles; nousy voyonsl'infidèle et infâme Pierre de Craon, et des signes de lafaiblesse deplorablc du règne de ce pauvre roi surnomméle Don.

Suivant Chalmel ((Histoire de Touraine, 11, 132 et 133)les habitants de l'ours obtinrent du roi Jean l'autorisa-lion de fortifier leur ville et de la renfermer avec cellede Chateauneuf au moyen d ' une enceinte de murs dé-fensables. Le Roi fit une partie de la dépensé, le surplusrestait à la charge des habitants. Par lettres patentes du30 mars I 35% (1355 N. Sl, « il étàit ordonné d'élire tous• les ans six bourgeois des plus notablés de la ville, ou• même un plus grand nombre, si en le jugeait à pro-• pos, pour avoir la direction de tous ces ouvrages. Ces

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—.48-« èlus.avaient le pouvoir d'imposer et de lever sur lese propriétaires des maisons de la Ville, et môme sur leso paroisses voisines, toutes les sommes nécessaires ala

perfection de ces travaux. Les habitants eurent enco-« re la faculté de s'assembler en corps dans les cas deu nécessité, en appelant à leurs assemblées les princi-« paux officiers du Bailliage, auxquels il fut enjoint doo donner main forte à l'exécution des ordonnances des

élus. 'fol est le principe du gouvernement des villes den Tours et do Chateauneuf, qui, dèsce moment, ne firent« plus qu'une seule et môme ville, et qui se maintintic jusqu'au régime municipal institué par Louis XI. »

Dans son Dictionnaire Topographique, tome IV, l'esche,dit que sous le pontificat de Pierre de Savoisy (13S5-1398)le roi Charles VI établit un impôt-sur la vente 'lu vin auMains pour servir « à réparer, fouiller et mestre en état« de défense les murailles et tes fortifications de la Ville,« Cité, Tannerie et rue Dorée, et quo cet impôt devenu•intolérable au peuple fut remplacé par une taxe sur le• sel. » L'auteur, comme à son ordioaire, appuie son (lire(l'une injustifiable citation.

La Biographie du Maine, du même écrivain, attribueaussi à Louis I d'Anjou. comte du Maine (1356-138%),une maltôte sur le vin, dans la ville du Mans, et deslevées considérables de deniers destinés pour remplacer.les sommes nécessaires aux besoins de la guerre, - quePierre deCraon avait dissipées.

Le Corvaisier avait déjà avancé, sans meilleures preu-ves, que Charles VI octroya aux bourgeois du Mans lapermission d'exposer pendant dix ans du sel en vente, etde le rendre marchand au prix qui serait ordonné, afinque des deniers en provenant ils se pussent acquitter des'Jettes par eux contractées à cause des grandes dépensesoccasionnées par la réparation des fortifications de leurville, et l'achat des grains, etc.: cette permission, suivantlui, serait de lan 4383.

Au milieu de toutes ces obscurités, on aperçoit çà etlà quelques traits de lumière. Le pouvoir souverain, me-nacé par I étranger, fait appel au patriotisme, aux talentsdes bourgeois, qui répondent immédiatement à sa con-fiance, et continuent de la mériter de plus on plus. Leprincipo de la concession légitime des aides est admis,les bourgeois contribuent à régler la forme de la per-ception, et l'emploi des deniers reçus c'en est assezpour faire présumer le reste. Quoi qu'il en soit, vers lalin du xv' siècle, Flous verrons au àlans les Bourgeois

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- 19 -fournir le sel au Grenier de la Ville et profiter du béné-fice de la revente en détail; outre cela, prélever undixième sur la vente des vins et autres breuvages;enfin, aux dépens de cesmodiques revenus • rem-plir l'obligation de réparer les rossés, ponts, portes etmurailles (le leurs fortifications.

Voilà donc, avant 1(82, (les bénéfices et des chargesqui accusent une gestion quelconque des affaires cour-tonnes par les citoyens. Ce sont de premiers pas peu as -surés, il est vrai, guidés et surveillés avec soi!) par desagents officiels ; mais enfin, il n'y n plus d'interdictionabsolue, la minorité tend à cesser, et l'émancipation, Acommencer,

1406-1172. - Louis XI.

Le règne de Louis XI (1461-483) a été-fécond ongraves événements : certaines classes de la Nation y ontbeaucoup gagné, d'autres y ont autant perdu; celles-ci,comme il arrive toujours, ont fait entendre plus de plain-tes que les premières n'ont donné de louanges. A pa-reille distance de notre civilisation, rien n'est plus facileque de trouver l'occasion de louer sans discernement,ou (le blâmer avec passion. Louis XI

'trop maltraité par

plusieurs historiens, fut au reste très-favorable aux dé-veloppeinents du pouvoir municipal, moins peut-être àcause de sa légitimité, que parce qu'il lui apparaissaitcomme l'ennemi 'le ses ennemis; il en avait beaucoup,dont la plupart valaient moins que lui. Chez nous, il lefit grandir, le confirma légalement, et en assura la posi-tien politique.

Dès lu 22 septembre 1466, il octroya la charte sui-vante, que je crois inédite « Loys par la grâce de Dieur roy do France, au Bailly de Touraine ci des ressortso et exemptions d'Anjou et du Mairie, ou à son lieute-s nant. salut. N'z bien aurez les boum'goys, mamans et« habitans de la ville du Mans, nous ont fait exposer quer pour les affaires et eniparemens de lad, ville, et leo bien, utilité et entretenement d'icel le, leurest besoing

d'eulx assembler et de mectre et imposer sur eulx jus-o ques A la somme de cent livres tournois pour couver-

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-20-e tir es affaires d'ic.elle ville tant en voyages, poursuites« de procès que autres choses. Laquelle chose ils noe vouldroient ne oseraient faire sans en avoir de nous« congé et licence, humblement requétant iceulx. Pour-« quoy, nous, les choses dessus dites, considérées, qui« ne voulons pas faulte dudit congé, les besongnes et af-n Paires de ladite ville demourer arrière, ne aucun dom-o marge en avenir auxdits habitants, vous mandons et« pour ce que ladite ville esten votre Bailliage, ou es« ressorts et exemptions d'icelui, comme l'en dit, coin-et mectons par ces présentes que ausdit(manans, bour-o gays et habitans d'icello ville du Mans, vous donnezrr de par nous congé et licence deulx assembler ensem-

hie, et de mectre et imposer sur eulx par manière doo taille jusques à la somme de cent livres tournoys, et« icelle somme faire cueillir et lever par telle personneQ ou personnes que bon leur semblera, pour estre con-et et employés en ladite conduite de leurs procès,« emparemens, voyages et autresaffaires d'icelle ville,o pourvuen que 4 ce consente La plies grant et seine partieo d'iceulx habituas, et que à icelle assiète faire, soit ap-o pelié l'un de nos officiers, que nos deniers n'en soiento diminuez, et que cellui ou ceulx qui recevront laditeu taille seront tenus en rendre compte et reliqua où età quart il appartiendra. Car ainsi le voulons et nous

plaist - estre fait. Donné à Estempes, le 22e jour doe septembre l'an de grâce 1466, et de notre règne le« sixième. Par le Roy à la relation du Conseil. Robant. e

(Scel perdu.)-Le vidimus de René Dreux, lieutenant du bailli de

Touraine, d'Anjou et du Maine, est daté au Mans du7 novembre1466. Le premier sergent royal (lu Bailliageest commis pour assister à l'assemblée et aux opérationsprévues. Cette pièce est signée De votre commandement:Bechebien. Scel perdu.

Ne perdons pas de vue ces conditions de l'état desbourgeois du Mans pas d'impositions sans le consente-ment de la plus grande et saine partie d'entre eux; usagede s'assembler et de délibérer, avec un congédu souve-rain, et la surveillance d'un officier royal sur tous leursactes publics. Tels sont leurs droits les plus constate]-ment avoués; si des circonstances impérieuses en euttemporairement suspendu l'exercice, hors de là, il a toutjours paru inique et dangereux de le leur refuser troplongtemps.

Pendant le même règne, le 30 octobre l%71, la ville

C -

t

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- -du Mans reçut la Visite de Charles, le iv' de ses comtesde ce nom, et que, par d'autres considérations, ou a ap-pelé aussi Charles III. Cent pipes de vin, cent septiorsde froment furent votés pour lui, par une assemblée gé-nérale des gens d'église et des bourgeois, tenue dans lagrande salle du palais épiscopal. Leurs ressources nesuffisant pas aux dépenses de ce cadeau, ni à celles dola réception solennelle projetée, il leur fallut emprunter.Le Prince donna au chapitre de Saint-Julien dix vasesd'or destinés à renfermer les saintes reliques. Les pa-rbissicns de Saint-Pierre-de la-Cour eurent la dis-position d'un autel, et ceux de Saint-Benoli, la conces-sion de quelques toises carrées d'un terrain vacant situéentre leur église et les anciens murs de, la Cité. Enfin lesmanants et habitants de -la Ville obtinrent l'abandonperpétuel du porche nommé la Porte-Ferrée, dont ils•avaient besoin pour y déposer leurs papiers, et le peud'armes qu'ils possédaient. Ces faits forment la matièred'un mémoire publié, en 1846, dans le tome vii duBulletin de la Société d'agriculture de la Sarthe, par M. Lan-ilel, qui les devait aux secrétariats de Saiift-Pierre-de-la-Cour, des années 1471 et 1472. Ce mémoire est suivid'une copie de l'acte de donation de la Porte-FerréeI original est aux Archives Communales, dossier o n .393.Il suffit, par conséquent, d'en reproduire ici seulementles principaux 'passages, et, les nouveles leçons de cer-tains mots peu importants.

e Charles......Receu avons l'amble supplicacion deo nez très chiers et bien amez lcs,bourgeoys et habitans« de notre ville et cité du Mans contenant que comme de

long temps ilz ayent grant besoing et nécessité d'avoir' lieu propre ou quelilz• puissent •mectro en seureté lescop-o FRES où sont leurs chartres, lettres et autres enseigne-

ments, et d'artillerie, pouidre et autres choses à eulx« nécessaires servant à la tuicion et . deffense de notreo d', ville, et que par deffault d'icelu .y lieu ilz ont eu et• souffert de grans pertes et dommages. Et soit ainsi• que ayons en notre d. ville un portal assis comme ou

•o millieu d'icelto appellé la Porte-Ferrée, lequel est fort« chou en ruyne et à ce qu'il ne tuurnast en plus granto pour l'avenir. Les gens de nez comptes l'ayent fait« crier et bannir au plus offrant conime ..ilz client, du-« quel ilz n'ont trouvé-qui en ait voulu paier que xxxu sols de rente par chacun an à la charge de le remectreo sus et tenir en repparacion. En nous requérant queo eu esgard et considéracion Ù ce que dessus notre plai-

'E

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- 22 -• sir feust à cestuy notre joyeux advenement en notre• dite ville leur en faire don perpétuel. Pourquoy savoir• faisons que nous les choses dessus dites considérées« et mesmement la gtant et lionnesco récepcion que lesu diiz supplianà nous ont faicte à notre présente entréeci et iceulx suppliants pour les d. causes et autres à cer nous mouvans avons donné.., à perpétuité de «raceu especiai par ces présentes le dit portai autrement ap -u pellé la porte ferrée à nous appartenant par moyen• queles d. supplians tiendront icelui portai de noirs• et en payeront chacun an en chacune feste de peu-• thecoste un chappeau d,ü roses ou dix deniers tournoys• pour icelui à notre recette ordinaire du Maine seule-« ment. Si donnôns en mandement.....Donné à notre« ville du Mans le iiii' jour de novembre Van de grace

-a iccccixxi. 1

Seul en cire rouge brisé. - Au dos duparchemin, une main du XV0 siècle a écrit: uLettre etexécutoire du don fait par monseigneur â la Ville duportau et paveillon de la porte ferrée, registrée en lachambre des comptes. I'

L'exécutoire du le; avril après Pâques 1472, signéDecostes, désigne ainsi l'objet: o Ung portail assis comme« au inylieu de la ville du Mans, appellé la porte fer-a rée..... contient de longueur par le hault comprins la« saillie cinq toises et ong quart et de largeur troys toi-t ses, joignant d'un bout aux maisons Micheau Le

Clerc et Jianimonier, boulanger, et d'autre bout à lao maison khan Chereau et la place de Saint-fie-

twist. » -Il est dit aussi que les Bourgeois en jouiront « pour-

u veu qu'i!z n'y lacent chose qui tourne cii diininucidu• de la décoracion et fortiflicacion de la cité du• Mans. »

Pour le coup nous avons titi représentatifd'un hôtel de ville à l'&at rudimentaire, un coffre conte-nant la Minerve bourgeoise : Omnia ex ovo, ou mieux àprésent ex arS. D'abord nomade, ce coffre citoyen,d'après Ni. Lande.l, s'était réfugié tantôt dans l'église deSaint-Julien, tantôt dans la chapelledu Gué-de-Maulny,et ailleurs encore, peut-être, ce qui prout?au moins sonexistence et son droit de cité, ainsi que ceux de sesfidèles. Maintenant, grâce, à ses loyaux services et à lamunificence de Charles 1V, le voilà A même de s'installeravec les poudres et l'artillerie populaires, vllinza ratioplehis, dans un donjon à tU deniers de loyer. Patience etattention à son avenir 1 Cette arche municipale renferme

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- 23 -et attire des éléments d'une vitalité puissante: après unnouveau déluge, elle n'aura point sombré, elle se trans-formera en palais, et verra naître une société nou-velle t

Iv1474. - Jacques Vaujon.

Parvenus à l'époque véritablement historique de labourgeoisie du Mans, n'oublions pas que jusqu'ici nousn'avons rencontré que des traditions peu favorables à lapreuve (te l'ancienneté de son organisation communale.Ce sont, dira-t-on, des feuilles détachées du recueil pré-sumé de ses annales, il en sera recouvré de plus expli-cites. Je le souhaite! Les témoignages de la dernièreheure pourront-ils donc détruire complétement les pre-miers, ceux que j'ai relatés avec impartialité ? J'endoute: mais, en histoire, je suis pour les sages réserves.Dorénavant les documents officiels, chronologiques, pres-que complets, seront sous nos yeux, la plupart ont étépubliés in extenso par M. Cauvin, dans son livre del'Administration municipale de la province du Maine, je neproduirai que ceux qui peuvent servir de transition et depréparation à la lecture de cet ouvrage.

Parmi les registres manuscrits de l'hôtel de ville,échappés aux incendies et aux désordres de toute es-pèce, il en reste un qui, tout mutilé qu'il ests suffit pourfaire apprécier rétat de l'administration municipale duMans pendant les 7 ou 8 années d'avant la charte decommune de 1482. Jacques Vaujon, qu'on a aussi appeléVaulon par suite d'une fausse lecture du manuscrit, n étéreceveur, des deniers communs, et procureur du généraldes habitants de la Ville. Ses comptes de recettes et dedépenses correspondent à la période de 4474 à 1480,niais plusieurs cahiers en ont été lacérés, car il dit qu'ilétait receveur depuis le 30 avril 4470, Grâce à sa pro-lixité, l'écrivain iaconsigné d'utiles détails dans les 95feuillets de son registre in-4', le premier en date du petitnombre de ceux de la même classe sauvés de la destruc-tion. Quant aux secrétariats, ayx collections des pro-cès-verbaux des assemblées délibérantes, ils n'existentplus qu'en séries largement interrompues et seulement àpartir du 31 juillet 161 't.

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Au printemps" 1115, survient l'annonce de la prochainearrivée, au Mans, de Charles Y, comte du Maine, et deJeanne de Lorraine, sa femme, qui entrèrent en ville. ledimanche 23 avril 1475, et non le 18, comme on l'a sou-vent répété. De même qu'à l'êntrée de Charles IV, il

'fallut faire du bruit, des présents, des fêles et des dépenses dépassant les revenus communs des citoyens, quifurent encore obligés de subir un emprunt considérable.Voyez leur manièrede procéder danscette circonstance.Notez aussi que plusieurs de nos historiens n'ont parléque de l'une ou de l'autre de ces deux réceptions rap-prochées, mais distinctes, comme s'il leur était arrivé do

les confondre. -Le 18 avril 1475,le clergé, tes bourgeois et habiiants

r du Mans se réunissent dans la grande salle du palaisépiscopal où ils nomment des délégués qui se renient,Io surlendemain, dans la chambre du conseil du Comte,afin d'aviser avec tes officiers de ce dernier, les gensd'église et ungrand nombre de bourgeois et d'habitantsappelés ad hoc, sur la réception à faire aux deux person-nages attendus. L'assemblée décide qu'il leur sera offertcent pipes de vin et cent setiers de froment, valant en-semble 900 livres, avec une haquenée de 59 écus d'or,couverte d'une manthe de trois écus,pour la comtesse.Ensuite, il fut fait, sous le nom d'emprunt, un appelaux bourses citoyennes, et, entr'autres, à colle du rece-veur \Taujon.

Le nom d'échevins n'avait pas encore paru, je crois,dansnos archives, je vois pour la première fois deuxboureois revêtus de ce titre figurer au compte do 4474-147, qui les montre chargés uniquement de surveillerl'emploi, déterminé à l'avance, des deniers communs.Volet le rôle des souscripteurs à- l'emprunt; leurs noms,dont beaucoup sont conservés dans les familles duMaine, ne sont pas dépcurvus de tout enseignement.Alors l'écu d'or valait 30 sous 3 deniers; pendant :la re-cette la valeur en fut élevée à 32 snus I denier, ce à quoion eut égard pour le -remboursement.

RUE DE LA CITÉ: le juge du Maine, 3 écus d'or; Ro-ger Lejarriel, 1/2 écu d'or; Jehan ,e Royer, id.; M'Guillaume Tliibergoau, 2 écus; lichel Perot, iii. ;-m' Re-né Dreslay, 3; me Nicolle Lechat, 'I ; Jehan Conué, Ime Germain .Lambert, ! ; m' Raoul Querlavoyne, 2; Mi-che! Legras, 2; Noirniort, 4/2; La Binette, 1; Jeh. Letonnellier, 1; m' Pierre Mono, 3 ; :l'ie1'1'0 de Lannoy, 2;Uille Gervaiso et son gendre, 112 ; Guillaume Leballeurs,

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-25—en questeur, 2; .Jeh. Eliant, 2 ; RegnuWBalay, 112;Elienne Coquillart, 1; lIcols Floté. I ; Vincent Blanchot,1; Guillaume Ligier, 1; La Guill(inne, 1/2; AlexandreMenarl, 2; Joli. Danvers, 2; Macé Richier et son fils, 3;La Chapelaine et son fils, 4; Jeh. Seigneur, 3; GuilI.Gonnet. -1; Raoullin Yen, i ; Joli. Yeluet, 3-; AmbroisBrissart, 2; me René Gasteau, 4J2; Colin Thelier, IPierre Veluet, 1; Joli. Chimbart, 1; Jeh. Fournier,marchand, 2; Jeh. Ntartiii,1/2; la veuve Videgrain. 112;me Pierre Ligier, 2 ; Phtlippot Pastiz, I ; m' Joli. Hom-mode, 2; mb. de Lunoy, 1; m Jeh. Bellenger, seigrdeThorigné, 1; La Cherorles, 112; Joli. Veaudelle, 2 .; layeuve feu Colin Dutemple, 3; Gobin Maresehé, 40 sous,;.Joli. Alole, 40 sous. = Le Juge, Ireslay, Thibergeau,Perot , Le Chat , Lambert, Querlavoine, Leballeurs,Eliant, .iehan Veluet, sus-nommés, ne payèrent qu'a-près l'augmentation des écus d'or.

RUE DORÉE; les bourses sont -lin peu moins gar-nies ou moins ouvertes Jean- Legeart, 30 sous deuxdeniers; Adam Brissart, 30 s:, 3 d.; Jehan Robelier, -idem Michau -Du-breil, 28 s., 4 d.; Michel Rose, 15 s.;Robin Leconte, 15 s.; Etienne Jarriay, 45 s. 3 d. oh.;Jehan -Menault, 45 s., 3 d.; Mery Coqu, 30 s.; Etienne --Guillon, 45 s.,, 4 d. oh.; André Joullier, 15 s., I d. oh.;Joli id.; Joli. Jardrin.gantier, id.; Joli. Che-reau, le jeune, hi.; GuilI. Barré, hi.; Gervaise Delivre,45 s., 4 d. oh. (c'est .à-dir sans doute têtu et 112 de 30- s.,3d.); Gabriel Leboulleurs, 45 s. ' 1 d., oh.; Joli. .Jariay,15 s.; .lehan Poytein, id.; Jeh. Savary, 30 s., 3 d.; Nia-cé Buot, 15 g., I d. oh.; Jaquet Lemoulnier, id; Antoi-ne Gilles, 30 s., 3d.; Joli. Robillart, 15 s.; Benoit Cha-mot, 15 s-.; Jehan Feloys, 13 s,, 9 d.; Jeh. Huart, 15 s.,I d. oh.; Joli. Fontaine, id.; Etienne Aimant, id.; Lau-rens Guynard, Id.; Pierre de Mozé, 30 s., 3 d.; Joli. --Carré, 15 s., 1-d. Ob.; EtienneSuet, 30 s., 3 d.;-RichartSavary, 22 s., 6-d.; hichart Papeillon, 45 s.; Joli. Hardy,.id..Maheet Neoncourt,id;; Joli. Lefevre. 45 s.,, 4 d.oh.; Pierre Rualain, id.; Thomas Courbelin, Id.; La Pa-.risete,30 s. 3 d.; Regnault Savary, 45 s., 4 d. oh.;GuilI. Choplin, 45 s., I il. oh.; André Begnart, id; Jeb.de La Fontaine, id.; Michel Leclerc, Id.; Joli. Chapelain,43 s., 4 d.; Joli. Leboucher, 30 s.; Maté Aveline , 15s.; Macé des Rayes, 15 s., I d. oh.; Maté Veau,idem. -

La Tênnerie; le maximum y est d'un écu d'or: -Jean Jardrin, le jeune, 1/2 écu; Joli. Vayer, 1 écu;

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-26-Jeh. Chopelin,j /2; GuilI. Forget, 1; Jeh. Courbefosseet sa mère, 1; Jeb. Moreau, l'ahié, I; Guili. Fermyn, I;Robin Berruyer, 1/2; Denis Chesneau, 1; Là Marcha n-de, 112; Jeh. Sableau, I; me Jeh. Le Joyant, 1; PierreLe Boulieurs, 2; Michel Jardrin, 1/2; Jeh. Rondeau 1/2Julien Mailloche, 1/2; Gervaise Vincent, 1/2; Jehan Le-long, 1/2; la veuve feu Chopelain, 112;.Jeh. Bougler, 1;Joli. Guymoot, 1; Jeb. Vayer, le jeune, 4/2; VincentChapelain, I ; Jeh. Lentoulnier., 1; Joli. Jardrin, ten -fleur, 1/2; Thomas Le Vasseur, I; Michel Huteau, IPierre Le Royer, 1; Jeb. Fermyn, 1/2; Macé Bouvery, IGuilI. Punit, I -,Bertrand Pavy, 1; Jeh.Baudoyn, 1/2;Urban Loyé, 1/2; Simon Penlou, 1; m' Simon Chape-Ton, 1; Joli. Maceron, 1/2; Joli. Paytrineau, 4/2 ; Gui]].Engoulveni, 1/2: m e Pierre Thomas, 4/2; Jeh. Pohier, 1/2.

RUE SAINT-VINCENT Jeh. Cheval, 2 écus; Jacques deGlennes, 4; Macé Coudelou, 15 s,; Joli. Aude, id.

PARÙIS5E DU Pn Jehan Jardrin, 2 écus; le sieur dela Cr.,ix-Biancho, 112; Jeh. Renier, 4 écu 1/2; Joli. Cha-peInt, 7 s., 7 d.

DIvERS -Loys Bruneau, 2 écus; Colin de La- Mote,I écu. -

Cès différentes sommes réunies ne composaient qu ' en-viron 229 livres, lesquelles ajoutées aux 650 liv. du droitde dixième sur le -vin vendu dans la Cité seulement,et aux 100 livres gagnées par la revente du sel , auMans, faisaient 979 livres, tond de l'actif constaté ancompte du Receveur, du 4 niai 1474 au 30 avril 4475;c'est le premier du registre, les précédents sont tousperdus. Le passif y est ausfi peu imposant, le voici20 livres, reliquat du prix de 2 pipes (le vin d'Orléansenvoyées au comte du Maine à Chûteau-du-Loir, en R73;900 livres payées à Jeluan Leboucher, Guyon Iloudry etEstienne Coquillart, pour les 100 pipes de vin et les100 setiers de froment offerts à Charles V; 50 écus d'orenviron 75 liv. 12 s. 6 d.), prix de la haquenée venduepar 'Officiai du Mous; 3 écus d'or, pour la tnanthe;53 I. 5 s.11 d., dépensés en spectacles publics; 10 livresdonnées au père Thomas Myseri, prédicateur du carême;le surplus rie comprend que des menues dépenses, no-tamment celles des réparations des murs de ville. Il n'estaucunement parlé (le propriétés immobilières possédéesen commun par les habitants,

Malgré l'extrême simplicité de ces éléments (le compta-bilité, le règlement s'en fit attendre plusieurs années; ilse rencontra des tâtonnements, des lenteurs telles qu'il

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- 27.—Fallut invoquer l'autifité du ioi. Les échevins n'avaiStâ cet égard qu'une influence imperceptible, tout appar-tenait aux assemblées générales.

L'assemblée générale du O mii 1476, offre un curieuxexemple des formes administratives d'alors, les échevinsn'y interviennent même pas en leur qualité. La réunionn lieu air du conseil du comte CharlesY, où se pi'é-sentent: honorables hommes et sages Laurens de Cour-hefosse, président du conseil, lieutenant du Sénéchal, etde Pierre de Courthardy, juge ordinaire du MaineJ4e Jacques ileullant, procureur du comte; René Breslay,avocat; Nicolas Lechat; Jehan Guymont, lie. ès loixJehan -Le Fournier, seigneur de Placé; Guill. Le Bal-leur, enquêteur du Maine ; Pierre de Lannoy ; khanThomas Guili. Liger ; Jehan Conué Jacques Seigneur;Guyon Hoûdry ; M' Jehan Guymont: M° René BreslayCardin Métaïer; khan Alote; Jehan Bougler ; Jehan Le-boucher; Etienne Coquillart ; Jehari Guymont ; PierreRuallain; Guill. Forget; Antoine Gilles Loys BruneauJacques Lemouinier ; Jehan Menault ; khan SabeauGuill. Fouet ; Jacques Dubreil : Etienne Guillon ; JulienMailloche ; khan .!ardrin ; Etieune tarriay; BichartSavary; Jehan Lemarehant; Regnault Savary-;JelianBuchetier ; khan Rousseau Jehan Jardrin Etienne,Suet; Jehan Savary ; Jehan Baurlouiti Jehan Le Mou[-nier ; Utban Loyé ; Nlichau Rose Jehan LefèvreErienne Fournier; Pierre Savary Jehan Pohier; SymonPenlou ; Etienne Le Maçon Emery Coqun ; ElienneLèboulleurs; Jehan Chambellan; Alexandre MenartM' Germain Lambert ; Jehaii Bouteiller ; Hervé Moy-taut. ; khan Le Vavasseur; Jehan Chapelain Jehan Re-nier ; Jehan Le Royer, l'aîné ; Jehan Le Royer, le jeune;Jehan Fergeot ; Pierre Vernier ; André BoullierAmbrais Brissart ; Philippot Patiz ; Jehan Piau ; PierreJ)uboys ; Jehan Legeart ; Michau Dubreil ; Jehan Jar-riay ; Macé Aveline ; M' Jehan Le Joyant ; Pierré LeRoyer : tous habitants en cette ville du Mans.

Devant cet imposant comice de 77 citoyens, les pères,les gardiens des libertés populaires, dont il faut au moinsconserver les noms, et le souvenir des incessantes et pa-triotiques tendances vers un ordre meilleur, le receveurVanjon ixplique les raisons et les détails de sa conduite;ses fonctions lui sont encore concédées pour un an, maisses auditeurs ne s'empressent pas de lui voter, de con-fiance un bill d'indemnité, ils sont trop prodigues de leur

temps et de leurs soins envers la chose publique, pour

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- 28 -négliger aucune précaution. Ils choisissent, séance te-riante, des commissaires spéciaux munis du plein pouvoird examiner, de discuter et d'affiner les comptes de Van-ion, concernant leurs quartiers respectifs, savoir : pourla rue de- la Cité, Colis Richier, khan Francboucher,Cardin MétaYer, Jacques Seigneur, et en leur absence,Jehan Cliambart et Loys Bruneau ; pour la rue Dorée,khan deBeaumont, Macé Aveline, eu leur absence,Guyon Houdry et Richart Savary; pour !a rue de la Tan-nerie, M' khan Guymont, Jehan Bougler, et en leurabsence M' -Pierre Thomas. Enfin, M' Jacques Heullauf.procureur du comte, est adjoint aux commissaires.Le procès-vérbal est signé do greffier de la cour,Crespin.- -

Tout cola ressemble-t il à un échevinage oligarque,à une mairie, à une commune représentée par quelquesélus omnipotents et parfois inamovibles qu. l'on cherchevainement chez nous dans ces temps si peu connus duplus grand nombre, et si différents de ceux qui,plustard, les ont suivis? N'y-voit-on pas plutôtla manifesta-tion de l'antique et large régime populaire, je diraispresque du véritable gouvernement monarchique, enlouré d'institutions démocratiques,* dont les principes etles formes répondaient si bien i l'esprit franc de laNation, età ses idées chrétiennes sur la justice absolueet sur ses droits imprescriptibles 1 Tant que la paix in-térieure et les circonstances sociales l'ont permis, lesmêmes sentiments se sont fait jouir, se sont . réalisés, etont pu produire des actes, remarquables au moins parleur durée, jusqu'à ce que le fond commun des fortes

- croyances qui leur servait de base ait été ébranlé et pul -vérusé; après quoi toutes les -institutions antérieures du-rent, par nécessité, être profondément modifiées, sou-vent même remplacées, et soutenues , les anciennescomme les nouvelles, par une grande force matérielle;car la Société demande le salut à tout prix.

La suite des tableaux -de notre vieux registre, vraiechronique contemporaine, confirme ces appréciationsLe compte du fer mai 1475 au 30 avril 4476 suit le plandu précédent môme recette des droits sur le vin et lesel.; dépenses analogues; mais - on trouve ici entier lechapitre des gages et pensions, tandis quecelui du pre-mier est lacéré. On y voit qu'il était annuellement préle-vé -sur la caisse certaines sommes fixes payées, savoir:à l'évêque du Mans. 50 livres; au Chapitre de la catlté-draIe, 70 livres ; à Pierre Marin, receveur du Comte, 40

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- 29 -liv.; lesquels contribuaient aux fortifications de la villechacun en droit soi; le Chapitre était chargé des murs durempart, jusques à la tour du Pied'Doré; à la veuve deGuillaume Bouchet connétable de la Ville dont il gardaitles clefs, pour 10 mois de gages à raison de 35 liv. paran; à Loys du llestray, capitaine de la Ville, 100 liv. degages; à Laurens de Courbefosse et Jehan Thomaséchevins et commissaires à la distribution des deniersconiinuns de la Ville (c'est leur seule et invariable qualifica-tion), chacun 5 liv. de gages; à Gervais Lambert, atrernp-teur de l'horloge de MW saint Julien, 12 liv.; àJacquesVaujon, comme receveur, 30 liv., et comme procureurdu général des habitants, 10 livres.

Il n'est fait aucune mention de revenus d'immeublesni de juridiction attribuée, soitaux deux bouigeois ap-pelés échevins, soit au receveur et au procureur,les-quels no sont en effet que les mandataires spéciauxdesassemblées générales, leurs agents d'exécution, fonction-nant d'ailleurs sous la surveillance des officiers royaux.du connétable et du capitaine, deux personnages plus,militaires que civils.

Tout n'était pas roses et lauriers dans 16 domainecommun de nos bourgeois; les ronces et les exhalaisonsvénéneuses n'y manquaient pas. Si leurs labeurs y ontprospéré, les succès leur ont coûté beauéoup d'or et desoucis, sans que le courage et la persévérance au travailles oient jamais complétement abandonnés. Le royaume,sous Louis XI, ne jouissait pas d'une paix bien assu-rée, son chef avait souvent besoin d'argent pour sesgrandes et profitables entreprises, on s'en aperçoit auxattaques dont les revenus de la ville furent le but, de' lapart de ses traitants et desautres rongeurs retranchésdans les abus surannés de tous les dégrés' de sa hiéràt-chie, qu'il n'eut pas le loisir de réfôrmer tout-à-fait coin.me il l'eût voùiù.

Lui-même ne s'avisa-t il pas, en février 1478 (N. S.),de blâmer l'emploi de ces modiques revenus et de re-proche avec menaces aux Bourgeois de ne les avoir pastous dépensés à entretênir en meilleur état les murs etfossés de la Ville t Plusieurs assemblées générales et denombreux voyages eurent lieu à cette occasion; l'affairefut arrangée pat L'entremise du Ceinte, dent l'entrée auMans avait été la cause principale de l'inopportunité etde ],exagération des dépenses. LI en coûta à la Ville424 écus d'or dont le roi voulut bien id contenter. Ceprince, considérant toutefois les brillantes réceptions

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- 30 -faites au Mens, à sa cousine, Marguerite d'Anjou, reined'Angleterre, à Edouard son fils, prince de Galles, et aucomte de \Varwich, pardonna aux Bourgeois l'abominableméfait par eux commis, et prorogea en leur faveur pen-dant dix ans la jouissance de la revente en détail du seldugrenier du Mans, CL la perception du droit sur le vin,non seulement dans la Ville, comme auparavant, maisencore dans les faubourgs et les Quintes. Les lettres -pa-tentes des 22 et 26 février 1478 (N. S.), ne partent pasde la finance qui fut le prix do cette gracieuseté, pour-tant les 424 écus d'or furent bel et bien délivrés, savôir:224, achetés pour de la monnaie, à 5 deniers de perte,et valant par conséquent, à l'égard de la caisse, 32 s.,6 d. la pièce; et les 200 restants, soldés en monnaie, surle pied de 32 s., t d. chacun, formaient ensemble un te-tel de 680 liv., 16 s., 8 d. Que d'illusions masquant detristes réalités, sont ainsi passées du théâtre du mondedans l'histoire officieuse des monarchies et des démô-cm tics I

Do mai 1477 à mai 1478, les mômes fonctionnaires mi.litaires et citoyens sont à leurs postes respectifs, à peu

f de différence près Philippin de Brayteau, écuyer. estconnétable; Cardin Métaier est second échevin, et JeanEliant est procureur. Les gages n'ont pas varié.

Le bail du 3 avril 1479 (N. S.), de la marchandise dusel, sur la vente duquel la Ville percevait 45 sous parmuid, dessine encore cri traits très-visibles tes positionsrespectives du Conseil général et de ses commis les éche-vins, le procureur et le receveur. Comparaissent en effetpersonnellement honorables hommes et sages Pierre deCourtliardy, juge ordinaire du Maine, Adam Houdon,président de la chambre des comptes au Mans; Laurentde Courbefosse, lieutenant du Sénéchal du Maine et l'undes. maîtres 'le la même chambre; François Le Chat,

- procureur ; René Breslay, avocat dudit lieu du MoineJehan-Guillart, maître aussi de la chambre des comptes;Jehan de Beauinont, contrôleur du grenier à set duflans; khan Guniont, bailli de la prévôté et vaine duMans; Jacquet Hcllant, licencié ès-loix; Cardin Métaieret khan Thomas, échevins; m' Pierre Ligier, GuillaumeLebreton, Jetian Ligier, Jehan Cordon, avec 25 autresbourgeois, et khan Eliant, procureur, tous habitants dela Ville, lesquels afferment l'octroi, relatif au sel à Ja-quet Seigneur et à Robert Vemon, marchands domiciliésau Matis. Le nom du notaire attestateur et le lieu de laréunion ne sont pas indiqués..-

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-Les 3030 avril et 3 mai de la môme année, le droit d'a-

pétissement de dixième sur les vins et autres breuvagesvendus dans la Ville et les Quiutes, est adjugé après en-chères publiques par les Echevins et le Procureur, enprésence et par l'ordonnance de mess. Jehan Ferrant,l'un des élus du Maine, (les juge, procureur et officiersdemonsg. le comte du Maine, et de plusieurs des autreshabilants de la Ville. C'est toujours, on le voit, la mêmecondition passive, chez les Echevins.

V

lut). - Faux-Sauniers,

De temps à autre, il tombait des hauteurs gouverne-mentales d'alors quelque lourde ruile â l marque dumoyen-Age sur la tête (le flOS bourgeois. Pendantl'annéo1479, il leur survint une grosse affaire qui eut pour eux•des suites qui rappellent, avec une effrayante exagéra-tion, celles de la fable du paysan invitant son seigneur àvenir tuer un lièvre qui mangeait ses choux. Les faitsn'ont pas besoin de commentaires, et Vont montrer lesrapports existant alors entre les habitants du Mans etles Gens dejusiice.

Des faux-sauniers du Maine et des provinces voisinesavaient causé, par leurs importations et distributions il-légales de sel, un certain préjudice aux droits de la Ville:voilà le premier délit. Recherchés, attaqués, ils se dé-fendirent et su rendirent coupables de violences, de ra-pines et d'homicides sur les personnes de jehan et JehanDelahaye, et de Raoulin Chandelier, commissaires duRoi. Ces expressions, invariablement répétées, suppo-sent trois meurtres, trois crimes irrémissibles. La socié-té de cette époque, attaquée avec violence se défendaitavec une impitoyable énergie; tel était l'usage. On fitaux faux-sauniers une chasse générale ; plusieurs furentsaisis, condamnés, décapités, écartelés; leurs têtes furentmises sur des lances et leurs membres pendus à des po-tences placées sur les voies et les lieux publics Les plusagiles des coupables se sauvèrent et furent déclarés ban-nis. Tous les biens de ces misérables devaient être ven-dus au profit de quelques victimes, et notamment [Jourcouvrir les énormes frais dont la Ville resta chargée et

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*- 32 -

très probablement fort mal récompensée. Voici un aper-çu des sommes que notre \Taujou, après des démarchesinfinies, paya aux ci-dessous désignés

4° Taxes faites au Matis, Iô (I mai 1479, par de Mai-gné et autres commissaires du Roi.

Les deux exécuteurs de la haute justice qui exécutè-rent quinze hommes, 30 livres.

Chacun dés cinq sergents du prévôt des maréchaux,20iivres, = 100 liv.

Les trois écrivains des pièces d'information, 60 livres.Jean Fergeot et dix sergents du comté du Maine, gar-

diens des prisonniers du Mans, 20 liv.Jacques Manceau et Etienne Pairy, sergents à cheval

du Roi au châtelet de Paris, pour leurs courses â la récherche de diverses pièces, 15 liv.

Guillaume Jarroceau, secrétaire du Roi, greffier de laCommission, qui fit plusieurs voyages à l'effet (le consul-ter le Rai sur l'affaire en question, 100 livres.

Etienitelloiisseau, et Guillaume Siquart, écuyer, lieu-tenants du: Prévôt-des maréch g ux de France, pour leurs

•vacations à la Commission, 200 liv.Pierre Arbaleste, conseiller du Roi, maire de Beaune,

- . pour ses vacations à la Commission, 23 liv.Jehan Guyton, contrôleur du grenier à sel d'Alençon,

pour même cause, 22 liv. -Guillaume deCerisay, conseiller du Roi, maire d'An

Gers, pour même cause, 60 liv. -Thomas de Cartigny, élu de Chinon, idem, 25

livres.Les quatre archers de Jelian Delaltayo, qui I'accom -

pagnèrent à la recherche desmeurtriers de JehanDe-lahaye i 150 liv.

2d Taxes selon les ordres du s do Màigné et des au-tres commissaires du Roi, données à Tours: le 19niai 4479.

Les quatorze envoyés, Dofi qualifiés, qui parcouru-rent, pendant deux moi les pàys du Maine, de l'Anjou,d'Alençon, du Perche et de la Beauce, pour arrêter lesfaux-sauniers, 700 livres,

Les vingt -deux archers occupés avec ces derniers à lamême poursuite, 200 livres.

Josselin- Le Bigot, lieutenant de flomfront, 200 livres,même cause.

Ilenry Bonnet et François do Marant, écuyers, 100 li-vues, ideui

Jehan de Saiuit-Aignan, écuyer, 100 livres, idem.

.-

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-33—.Bertrand de Mauny, .30 livres, idem.

Girard du Bouclier, et Pierre d'Avaugour, écuyers, 60 -livres, idem.-.

Philippe de Ilaffors, (lit de Cayon i et Matlïtriu Carré,archer, 60 livres, idem.

Faites-voitsuneirléedela va leur d'échange (le la monnaiede ce temps en vous rnppelaiit que la haquenée qui vau-drait aujourd'hui 2 à 800 francs avait coûté 75 livres, etles 200 basses de vin avec les 100 septiers de froment,900 livres. Suivant nos textes, 300 boisseaux d'avoinevalent '15 livres 60 ouvriers fabriquant de la poudregagnent 3 sous parjour et se nourrissent; 240 journéesemployées aux terrassements des douves de la Vieille-Porte, sont payées 2 sous 7 et 8 deniers chacune salaireCI nourriture compris..

A la suite de cette sanglante. expédition judiciaire, laville du Mans resta chargée des frais et des démarchesà faire pour tenter, à travers les lieux éloignes et le cahosdes juridictions, d'en -recouvrer une partie sur les biensconfisqués. Le-receveur Vaujon chevaucha dans la pio_&vince et ailleurs, -fit plusieurs -voyages à Tours, à Paris, setreicontra des résistances et na mauvais vouloir in-croyables. Les hoberaux de bas vol qui avaient si biendéchiqueté les faux-sauniers, s'étaient ensuite abattussur leurs dépouilles, et les gardaient, unguibus et rostro,contre les -réclamations de notre député, qui même dédemandeur fut obligé de se faire défendeùr n un certainmoment, et de soustraire ses meubles aux poursuites dessergents et desarchers. Heureusement des mains igno-rantes ou infidèles net déchiré la suite de son registre, cequi nous épargne la lecture de la fin do ce -honteuxépisode..-Il .valait beaucoup mieux avoir affaire à Louis XI;

quand ce roi rusé avait joué quelque bon tour aux bour-geois et àleurs écus d'or, au tnouis il les en dédouima- -geait souvent, comme il le fit en 1418, en donnant dol'extension à leur recette sur la ventedu vin nous avonsplusieurs exemples de ce genre

D'après le Compte-Chronique de Vaujon, arrêté et mu-tilé vers le 30 avril 1480 j la liste des échevins et officiersde bourgeoisie du Mans, telle qu'elle- a été publiée. pàrM. Cauvin, doit être rectifiée ainsi -

Connétable dé la ville du Mans Guillaume Boucher,écuyer, jusques vers le 1er mars 1%75. Aprèi lui, Philip-pot de Brayteau, écuyer; puis Emar Muré, est installé àsa place le 3 septembre 1478..-

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r

Capitaine de la ville du MansLoys du Hestray,écuyer.

Ces officiers représentaient l'autorité royale qui lesnommait, et s'occupaient de la défense militaire de-laVille.

Ou 1 1, mai 1474 au 30 avril 1476.Echevins : Laurent de Courbefosse et Jehan

Thomas.Receveur et Procureur: Jaquet.Vaujon.

Du t el mai 4%76 ait30 avril 1480.--Echevins : .Jehan Thomas et Cardin Métaier.Procureur : Jehan Eliant. -Receveur Jaquet Vaujout.

En 1480 et.......Echevins René Gasteau et Guyon Houdry . tl

avaient toujours été deux; Jacqées Reniant ou Reliantn'a été introduit dans les listes imprimées (lue daprèsune interprétation douteuse des ternies du bail ci dessusrelaté du 3 avril 1479 : c'est à examiner?

Demandons-nous enfin ce que l'Arche bourgeoise étaite devenue? Rien n'a jusqu'ici prouvé sa translation dans

• le pavillon de la Porte-Ferrée, qui sans doute n'avait pasencore été dignement approprié aux réunions des Eche-vins, Receveur et Procureur, que demandait l'expéditiondes affaires quotidiennes. La vie nomade des Archives etdu Bureau continuait-elle? Quant à leur itinéraire, je netrouve dans Vaujon que cette simple note n Le 3 niaio 4478, en présence des Echevins, en l'église de mon-• seigneur saint Julien, a été baillé par te ileceveur, à• Pavy, Leperrier, et Colin, maçons/ pour avoir visité• l'arche sur laquelle a été assis M nouvel, nu Pônt• Perrin, une petite maison; 5 sous 6 deniers, D

Cela suppose une station quelque part dans la Cathé-drale? Ajoutez, en faveur de celte induction, la remar-que d'un écusson sculpté au-dessus de la porte, de styleancien, d'un petit escalier peu éloigné du transept àdroite, et conduisant de la nef aux voûtes. Toute muti-lée qu'elle est, un oeil exercé reconnaît, dans cette sculp-ture, la croix chargée des trois chandeliers des armes dela Ville avant qu'elles eussent été- ornées du chef fleur-delisé z il y a là quelque chose à expliquer. Au moyen-â g e, on ne plaçait pas tin écusson armorié dans -uieéglise sans un motif grave, parce que le fait supposaitun droit, une possession réelle ou honorifique, ou aumoins un souvenir reconnaissant. Ces rapprochement;au reste, et les conjectures qu'ils autorisent n'ont rien

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- -d'étrange le Chapitre et l'Hôtel de ville ont entretenuentre eux (les rpports sympathiques qu'ils n'avaient pasail même degré avec les autres Corps. Les tLchevins onttoujours mi (les places réservées à la Cathédrale; ils oc-cupaient-un rang distingué aux processions publiques;la grosse horloge de la Tour leur appahenait, etc. Ilavait d'ailleurs entre ces deux corps une communautéd'origine et d'intérêts qui les disposait à se prêter réci -proquement aide et protection.

VI

1482. - Charte de Louis XI,

Vers la fin du printemps-de l'année 1480, la série desregistres communaux s'interrompt et ne recommencequ'au 1 11 mai 1486.-Pendant cet intervalle, il s'opère, ausein de la bourgeoisie mancelle, une tentative (je trans-formation importante, dont les instigateurs, les luttes etles accidents ne sont que très-imparfaitement connusles appréciations sur cetobscur sujet ont grand besoinde nouvelles lumières et d'un sérieux examen.-

Charles Y, comte du Mairie, mort sans enfants, le Ildécembre 1481, avait institué pour son universel héritierle roi Louis XI, qui réunit à sa couronne le duché d'An-jeu et le comté du Maine, dont il prit grand soin de s'as-surer la • paisible possession, laissantà ses -inhabiles- etfrivoles suècesseurs la folie d'aller réclamer les trônesde Naples et de Sicile; folie qui coûta A la France deshontes indicibles, quoi qu'en aient pu penser les histo-riens courtisans ou ihiléressés à- pallier les énormesfautes de ces princes dont le luxé et les plaisirs étaient leprincipal mobile.

Ce fut quelques mois après sa prise de possesion, enfévrier 1482 (n. s.) que Louis XI S'empressa 'l'octroyeraux habitants du Mans ce que l'aria appelé une charte decommune,, la création d'un hôtel de ville, etc., que per-seime, parait-il, ne songeait à lui demander. Tout aucontraire, cette charte fut plus que froidement accuei-llie'; après d'interminables pourparlers, elle ne fut ac-ceptée 'qu'avec des changements qui en altérèrent nota-blement le caractère dQminant: Nons possédons. un desexemplaires manuscrits originaux de celte pièce connue.

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généralement et plusieurs ' fois reproduite par l'impres-sien. Elle contient, entre autres, une disposition remar-quable par sa nouveauté et l'atteinte profonde qu'elleapportait aux droits de la bourgeoisie.; la voici (elle queje crois la voir au travers des vaines . foi'mules et de l'arn-biguité du style de l'époque. .lo ne conçois pas qu'onait pu avancer que cette chatte confirmait le mode d'ad-ministration alors • en usage: pour moi, j'y trouve touteune iévolution.

Le roi commence par déclarer que jamais la ville duMatis n'a été gouvernée par des maires, des pairs et desconseillers, puis il dit à peu près en ces termes

« Les habitants laïques du Mans élisent parmi eux sixa pairs et six conseillers à vie. Tous les trois ans, un« maire est choisi parmi les pairs, après son remplace-

ment, il prend rang après le maire-et ainsi successi-f vement. A la mort de chaque pair, un des conseillers« le remplace, ale nombre de ces derniers est complét.t par l'élection de nouveaux conseillers. Ces élections ets ces choix sont faits par la plus grande et la plus saine

p ' e partie des h:ihitants s-u Les maire, pairs. et conseillers sont anoblis, eux et

o leur postérité. Ils -jouissent des mêmes privilèges queles autres nobles du royaume, et peuvent prétendre

• en temps M lien à Petit de chevalerie pourvu qu'ils• n'exercent pas de fonction mécanique, et qu'ils possé-iç dent dans la Ville ou la Province des héritages valant« I 00-livres de rente. o

Malgré les quelques avantages qui donnaient à cettenouveauté une apparence de bienfait, les Manceaux nes'y laissèrent pas prendre, et y virent une tentative dan-gereuse pour ce qui leur restait de libertés; Je n'admetspas même que Louis XI ait pu lui-même s'abuser sur laportée de son oeuvre; il voulu indubitablement substi-tuer à l'ancien régime populaire, une oligarchie plus fa-cile â manier et plus prête à répondre à ses desseins se-crets. Le Maris, comme Paris, Reims et. la plupart desvilles de Franco, aurait pu se passer d'une charte decommune; le droit municipal que ces villes exerçaient,plus ou moins conforme à ce que nous venons de voir,résultait d'un principe antérieur et d'une loi générale.Laissons donc certaines cités se glorifier de leurs con-cessions royales de chartes de cornmune,.de leur mairat,de leurs grands échevinages, etc., etc. Sans y regarderde trop . près, on y apercevrait quelques traits de la fa;hIe du chien et du loup. N'est-il pas plus honorable et

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MWMplus utile pour nos concitoyens d'avoir fait eux mêmesleurs affaires communes dont la gestion les tenait enéveil, développait leur intelligence et nourrissait leurpatriotisme? Constater 1ii'ils ont pu maintenir cette in-dépendance, n'est-ce pas faire l'éloge le plus vrai et leplus flatteur de leur caractère?

Quoi qu'il en soit, l'ordonnance de Louis XI excita ungrand mécontentement et personne n'en voulut. Indé-pendamment des restrictions qu'elle apportait aux droitsdes assemblées générales, à la vente des vins et à l'as-siette de l'impôt, l'anblYlissenlent du nouveau corps- mu-nicipal fut considéré comme l'origine d'abus insuppor-tables, blessant les idées d'égalité et de confraternité re-connues et pratiquées de temps immémorial dans la Cité.Cette source inépuisable de parvenus,- de privilégiés,d'exempts des obligations publiques, qui s'ouvrait dansle cénacle municipal, ne pouvait que rendre celui-ci aussiridicule aux yeuxde l'ancienne noblesse, qu'à charge etodieux au clergé -et aux bourgeois, deux classes ayant àpeu près le même intérêt à repousser cette entreprisesuspecte..-.

Instruit de l'état des esprits, le roi fit faire une enquêteau Mans vers le mois de mars 1483, par Guillaume--t

Aymeret, conseiller au Parlement,- par suite de laquelleil envoya ses lettres-patentes du 17 juillet suivant. L'ano.blissenient fut abandonné, tuais il tint bon. -pour sonmnaire,ses pairs et ses conseillers dont il commanda l'é-lection. La mort l'ayant surpris le 30 août 14S3, les cho-ses demeurèrent dans une sorte de situation transitoirejusqu'en septembre 4488, -sous le règne de Charles VIIIqui réglementa aussi de- son côté; de tout quoi, il sortit- -enfin la constitution que je crois pouvoir réduire ausommaire suivant, sauf nouvelle étude des manuscrits.

Les affaires de la Ville sont gouvernées par quatreéchevins, un procureur, un receveur, un clerc de ville,et deux sergents que nomment les habitants, et par deuxgens d'église commis et députés, l'un par I'Evéque, l'an-tre par ]ô Chapitre de-la Cathédrale. Ces fonctionnairessont changés tous les deux ans, excepté les échevins quine sont renouvelés que par moitié, do deux en deux ans.

Les échevins -et commis peuvent assembler avec euxd'autres habitants do la Ville, jusqu'au nombre de 21 per-sonnes. Ils convoquent aussi

les assemblées -générales,

une au moins chaque année, le jer ou le 2-mai. flans tousles cas, ils appellent à leurs réunions les èffleiers du Roi,

Le Receveur des deniers communs est obligé; tous les

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38 -rois ans, (le leur rendre ses comptes, qu'ils entendent et

arrêtent avec le concours (le tels autres délégués, queles habitants veulent• leur adjoindre, et en présence duSénéchal ou de son lieutenant, et du procureur du Roi.Il en est de même à l'égard du maître des pavage et bar-rage. Les deniers disponibles sont employés aux répa-rations et affaires communes.

Les Gouverneurs (c'est ainsi que Charles VIII qualifie lanouvelle commission municipale) ont autorité en matière depolice dans la Ville, et peuvent requérir les officiersroyaux d'y pourvoir. Ils soumettent à la jurande cer-tains métiers jusqu'alors exempts, et corrigent l es bou-langers, bouchers, poissonniers, meuniers et poulaillers.-La connaissance des causes civiles des marchands pourfaits de la profession dans la Ville et les Faubourgs, leurappartient; ils les jugent sommairement, sauf l'appel de-vant le Juge ordinaire.

Les charretiers et voituriers entrant en ville, mêmeceux 'les gens d'église et de tous autres privilégiés, doi-vent les droits dé pavage et de-barrage, dont-les denierssont consacrés à l'entretien des pavés de la Ville et deses avenues.

La commission municipale peut acheter une maisonpour y tenir ses séances,. et des emplacements destinésau dépôt des inirnondices:de la Ville, sans payer aucunefinance d'amortissement, francs fiefs, ventes ou autrestaxes. La Ville et les faubourgs doivent être maintenuspropres; les habitants, chacun en droit soi, sont ohliêstic se conformer à cet égard aux injonctions des Gouver-neurs, ou de payerd, en cas 'omission, les 'amendes qu'ilsleur imposent au profit de la caisse commune.

Ces mêmes Gouverneurs sont autorisés à faire net-toyer; curer erdécombrer la Sarthe et l'Uuisne, de ma-nière à les rendre navigables en amont et en aval .de laVille, et à user pour cet effet de contrainte par l'autoritédu Sénéchal ou du Juge du Maine

Les habitants de la Cité et des. faubourgs, de quelqueétat qu'ils soient, nonobstant leurs privi!éges .et'exemp-tions, contribuent aux charges de la Ville, ayant pourobjet l'entretien de ses fortifications.

Ceux des habitants de la Ville qui possèdent chacunune valeur de 500 livres tournois, soit en meubles, soiten immeubles, peuvent acquérir des fiefs et autres cho-ses , nobles, lesquels, ainsi que ceux qu'ils ont actuelle-ment, sont exempts de tout paiement do franc fief ou donouvel acquêt.

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39 -Tous sont affranchis daller ou d'envoyer aux hans et

arriêre-bn us, osts, chevauchées et armées, qui pourrontêtre ordonnés pour le fait de la Guerre ou autrement,sans être tenus de se présenter aux revues, ni de payeraucunes aides ou compositions, quand même ils possé-deraient des fiefs et des seigneuries nobles à ce obligés,(Auparavant les possesseurs roturiers de ces terres et seigneuries nobles, valant au moins 50 livres de revenu, devaient Uneforte lare, ou ménie le service militaire, personnellement et tleurs frais, comme tes nobles, lesquels, il ne faut pas l'on-Miei', s'ils avaient des priviléges et des bénéfices, avaient aussides charges et payaient l'impôt du sang, qui ne leur était pasépargné dans ces temps de guerres continuelles.)

Les mê m es habitants ne sont cités en pre.rière ins-tance, devant aucune juridiction hors de la Ville, si cen'est pour les affaires des commensaux de la maison duRoi, de ses enfants, et de la Reine.

Ils vendent des vins de tout cru, au prix fixé par lesGouverneurs ; et des vins du pays , sans demandercongé.-

Aucunes tailles ou subventions ne sont imposées surla Ville sans le consentement des habitants, convoquésexprès; à moins qu'il n'en soit autrement ordonné parle Roi.

Les draps de laine vendus en détail Jans la Ville et lesfaubourgs, sont vendus mouilles, retraits et aimés par lefest, comme à paris.

A la requête de la commission municipale, toutes leschoses usurpées sur les tours, murs, boulevards, fosséset autres dépendances des fortifications de la Ville, sontrendues à la Communauté, par chacun do ceux qui lesont indûment envahies.

Les habitants des faubourgs du Mans jouissent desmêmes privilèges que ceux de la Cité.

Enfin, le Sénéchal du Maine est gardiateur des privialéges de la Ville. (Clause captieuse qui ménage au Sénéchalou au Lieutenant son immixtion dans les affaires communes, etpeut amener une sorte de mairat.)• Nous ne savons ces dispositions, comme je l'ai dit,que par le texte des lettres-patentes manuscrites ou- ici-primées, dans lesquelles une partie de la vérité n'est pastoujours facile à découvrir, sous les équivoques du style,et l'appareil des phrases pompeuses. Mieux aurait valuconsulter les procès-verbaux des nombreuses assem-blées délibérantes des habitants , tenues dans cettegrave circonstance, et qui leur procurèrent au moins un

t;-

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-r- 40--succès relatif, preuve de leur prévoyance et di) sentimentprofond- qu'ils avaient de leur dignité. C'est là ipie nousverrions les vrais motifs (le l'attaque et de la résistance;mais les documents paraissent définitivement perdus;

VI1480. ,- Jeaij Cositard,

Ce n'est qu'à partir du (c mai 1486 qu'il est possi-ble de ressaisir-le fil historique de la bourgeoisie man-celle essayant sa nouvelle constitution municipale. Le re-ceveur Jean Cosnrd a rédigé aussi les annales de sacomptabilité; les articles en sont plus multipliés etmoins détaillés que -ceux des comptes deVaujon. Sonre-gistre manuscrit de 169 feuillets relate les faits de la pé-riode du 1" mai 1486 au- 1er octobre 1495; c'est le der-nier du Xv. siècle.

D'après les dix comptes annuels y- contenus, voici l'é-tat du personnel administratif de la communauté:-

Du premier mai 1486 au 30 avril 1487 : Adam Dugué,Simon Chaperon, Louis Morin et Bonis Drouet, sontéchevins et cenleniers, tel est le double titre dont cesfonctionnaires sont décorés; Jean Hagobet est -procureur des habitants; Jean Cosnard receveur, -il avaitremplacé' Jean l3ellenger; EtienneColleau, aternpteur del'horloge; Pierre Dugué, licencié ès lois, est solliciteuret conseiller du corps de ville, aux ga ges de 5 livres paran ; Bertrand Pavy, maître juré do maçonnerie, c'est leVitruve de la cité, aux gages de 5 liv. par an ; EtionneChallet, canonnier de la ville, aux gages de 5 livres cha'que année, et de deu aunes dé drap valant 3 livrespour la robe que de temps en temps reçoit madame tacauouniàrc : c'était l'ordonnateur du matériel de l'artille-rie urbaine. Les citoyens réparaient les murs et les for-tifications de leur cité; à eux pareillement incombait lesoin de lesdéfendre et d'en armer les tours, les cré-neaux et les meurtrières de fauconneaux,de coulevrines,,le courtau%, de serpentins, de hacquebuttes (arquebuses)simples, doubles, à crochet et à la. main ; de mitraille, deploinbets,de pierres à bombardes. Le-charbon, le sou-fre,- le-salpêtre servaient à la compositioti de la poudreâ canon, dont la fabrication et la vente étaient libres,

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- —4-1—ou 'l'chetait clatis toutes les boutiques des apothicaireset des épiciers. Comment donc la paix publique, s'ac-commodait-elle de coi libertés et de beaucoup d'autres?Plusieurs écrivains de foi suspecte ont trouvé plus tacitede nier le fait que de l'expliquer.

Du 1° mai 4487 au 30 avril 1488, les fonctionnairessont les mômes, sauf que Guillaume Bellenger remplaceAdam Dagué, et que Pierre Maceot est cité comme clercet greffier du conseil des Habitants, aux gages de 10 li-vres'par an.

Du lr n'ai 1488 au 30 avril 1%89 échevins et cente-niers : Guillaume Bellenger, Guillaume Forget, nouveaunom 'à inscrire aux listes de VEchevinage; Robert Four-nier, lieds Drouet. Procureur . : Julien Breslay. Pas d'au-tres changements.. . .

Du I" mai- 1489 au 30 avril 1490, échevins et conte-mers Simon Chaperon, Denis Drouet , Jacques Sei-gneur, Denis Floté. Procureur : Etienne Leljoulleurs.Pierre Delafosse et Thomas Fontaine ont fait l'office dosergents à la requête des habitants. Les quatre échevinsétaient taxés à la taille ensemble pour 8 livres, 7 sous, 6deniers, dont, la caisse commune leur tenait compte,

•ainsi que de . leurs gages invariables de 5 livreschacun.

Du 4'° mai 1490 au 30 septembre suivant, même, per-sonnel. Les deux sergents sont Pierre le Sainturier etJean. Fontaine, aux gages d'un écu chacun.

Du i l, octobre 4490 air septembre l fe93 j niénieagents, sauf que le gouverneur de' l'horloge est SimonDupin, qualifié de serrurier et d'horloger.

Du l°'° octobre 1493 au 30 septembre t495, échevins,:Simon Chaperon, Louis Tiercelin, Robert Vernir, DenisDrouet, Procureur : Denis Dodier.

Pendant toute cette période, Jean Baucher est capi-taine de la Ville et château du Mans, François l'rieur estconnétable. Ces officiers sont à la nomination du Roi.

Le 28 juin 1496, les comptes de Jean Cosnart sont en-tendus, discutés, *affinés par Jean Boursart, lieutenant duSénéchal, commis par le Roi, avec le concours des Eche-vins, d'AUnant Métaier, chanoine de l'église du Mans,député du Cardinal-Evéque et du Chapitre, et de plu-sieurs notables habitants de la Ville.

La communité, la communauté, le collége, et enfin, si l'onveut, la commune, selon l'expression moderne;, mais avecun sens tout différent, se formait peu à peu dans lemoule de la nouvelle constitution, sans que les assem

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blées générales, toujours appelées- le Conseil de Ville,eussent encore presque rien perdu de leur autorité. Lysrevenus et les dépenses, et avec cela les occupations setnuhiplient. Les recettes annuelles do 1490 11495 s'é-lèvent en moyenne à 44 011 1 ,500livres produites exclu-sivement par la vente du vin et du sel, car il ne paraitpas que les murs et fossés des fortifications donnassenta1cuns loyers. ---

C'est avec ces faibles ressources que la commune rem-plit les obligations des lettres de Louis XI et de Chai -les VIII, et qu'elle défend lés privilèges qu'elle à méritéspar son constant dévouement aux princes français. Mal-gré la protection royale, les vieilles institutions sèmentles écueils sur sa route; elle ne petit -faire un pas enavant sans rencontrer les exacteurs officiels, les fermiersdés deniers royaux qui lui disputent ses octrois sur levin et le sel, ses exemptions des droits d'amortissement,-de francs-fiefs-et d'arrière-ban. Elle éprouve, d'un autrecôté, les résistances des usurpateurs qu'elle veut fairedéguerpir des murs, tours et fossés de l'enceinte de for-tification, et les chicanes des officiers de la sénéchaussée,qui contestent son droit de visite sur certains métiers etsa juridictiôn en matière commerciale et de -poice etc.Toutes ces-questions étaient encore pendantes en 1495,treize ans après la charte de. Louis XI! Pour sortir deces mille ambages, il n fallu aux citoyens du Mans, in-dépendamment d'une grande mise de fonds,- une in-croyable patience et un savoir-faire surprenant.

Ce n'est pas tout; pendant la même période, la Villefut visitée par-Charles VIII, le 5 septembre 1488.. Le roiy séjourna jusqu'au 10, et y occasionna une dépense de656 livres,' 18 s. en vins, avoine, -draps dc soie et dolaine; bonnets, banneroles, éclissons, franges, rubans,or fin, soies, capiton, azur, bougran, ainsi qu'en travauxdes couturiers, des menuisiers etdes peintres employésaux décors de l'intéressant spectacle de- l'entrée royale.Le prince se rendait en Bretagne pour y combattre le - -duc d'Orléans et le comte de Dunois. Le pays souffritbeaucoup du passage des gens de guerre de cette armée;et rie ceux qui marchèrent contre les Anglais débarquésà la Hogue, pendant l'été de 4490.

Les délégués du Conseil descendirent la Sarihe duMans à Malicorne pour étudier le projet de la rendrenavigable. Enfin, ce même conseil vota de-beaux présentsà l'évêque Philippe de- Luxembourg, et, en outre, le 18avril 1495, 2t poinçons de vins divers à l'occasion de

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--43—l'arrivée au Mans du légat, venant de Home présenter àl'Evéque le chapeau de cardinal.

Malgré ces échecs successifs, la balancedu compte deCosoard, le dernier connu du siècle, constate, en 1&96,sinon un 'boni, au moins un équilibre -sàtisûisant. Il estprésumable toutefois que Charles VIII, à l'exemple deLouis XI, aura étendu le bénéfice des octrois munici-paux, notamment sur le sel; car, en 1489, le receveurcomptait déjà 20,dcniers par minet de sel vendu au gre-nier de la baronnie de Mayenne. -

Ce comptable, moins prolixe que son prédécesseur,.plus éconônie de détails et de copies in extensode procès-verbaux, n'a cependant pas toutS fait négligé de signalerles étapes du coffre communal voyageant A la recherched'une position convenable. En 1489, il était au domiciledu procureur Etieune Leboulleurs, chez lequel on ap-perla des papiers qui étaient restés chez Vaujon. L'an-née 'suivante, la commune avait lotié dans la paroisse dela Cité (sic, gansdonte uint-Paviwde la Cité), une portionde maison pour y faire les assemblées de ville; le coffrepeut aussi y avoir été transféré? Puis, le '25 mars 1493,il stationne dans la chapelle du Gué-de-Maulny. CesMages, ces secousses -répétées auront promptementépuisé ses forces;, aussi, en 1495, le menuisier MichauMirant en construisît un autre d'une grande capacité,garni de deux serrures, de liens de fer et de clous, quilui fût payé 3 livres.

Les cadeaux ont eu aussi une mission diplomatique Aremplir. Outre cela, leur nature, leur variété, leur pro-variance Journissent d'utiles - renseignements sur lesgoûts, l'industrie et les moyens de transport au xv' siè-cle. Le pot, de vin était en première ligue de -toutes lessolennités ; ce n'était pas, comme maintenant, une fie-Lion, nie figure; le pot était un élégant vase d'étain fin,façonné par Denis • Lelièvre. piotier (4493 1494)_ lIeu-roané, armorié par Pierre Delafosse, graveur. Voyezquelques-uns de ces pots aux arnica de la Ville dans leMusée. On les appelait aussi estatnaux les petits conte-naient une pinte et demie.; les moyens, trois pintes; lesgrands, quatre pintes et demie. Le vin était le vrai jusde la -treille sur le secours duquel les Echevins comp-taient plus que sur celui de leur artillerie, pour renver-ser les obstacles. Il est plaisant de voir avec quelle naï-veté Vaujoti et Cosnart parlent de ces friandes amorces,et de l'intention des -Echevins en pratiquant la générositéet la munificence.-

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- 44 . —

La carte de leurs liquides précieux n'est pas longuevins blanc, rouge, vermeil, clairet, bâtard, d'Orléans,enfin ]'hypocras, liqueur, dont la base était l'eau et lemiel, mais dont la composition devait 'être savante et re-cherchéepiisqu'elle valait dix sous le pot, quand la méme mesure de vin se vendait deux ou trois sous. -

Après le vin le gibier connins (lapins et lièvres -sansdoute), perdrix, tissées (bécasses). Il n'est jamais questionde gallinacés de basse cour ; les poulardes et les cha-pons du Mans n'étaient-ils donc pas encore honorable -ment cultivés et présentables? -

Puis les poissons turbots, raies, soies, plies (et pro-bablement les autres.genres et espèces ordinaires dé la mêmefamille); rouget (muttus barbatus); goumnauls (ou grondins;tri gta lyra, etc.); congre (muroena con ger); vive ' (trachinusvividus, dragon de mer, e.'pèee estimée très-i-are sur notremarché); merlus (gadus rnertuccini, et sous ce nom sas douteles merlands, le lieu, le tacaud; etc., toutes espèces communes);le breton (inconnu, ce devait être une espèc'e'voisine -du me:' -lus ?); lamproie (la lamproie de mer, fort rare au- Mans);marsouin (il doit y avoir ici confusion; cette espèce n'est pascomestible, c'était plutôt une sorte de roussette, 'abondante au

• marché, sous le nom de chien de-mer, il y e nue ein4uantained'années, et aujourd'hui presq1ïintrouvable); harengs frais;aloses; carpes de rivière; béquets (brochets); percbesbarbeaux; truites (probablement saunions, foreilis et truitesvulgaires). Cette classe de subsiswiices n&essitaitun -ser-vice de transports actifs et prompts.- Enfin on donnait encore dôs pains blancs, des pâtésde' coings, des oranges, de grands Fromages, des ctinfi-tores, des cassettes d'épices, des dragées, perles et ma-dri ans, c'est-à-dire, je crois, des.prépai-atioiis d'amandeset'de fruits confits reçus d'Espagne, avec ou sans le su-cre, qui était-fort rare. Les torches et les flambeaux decire ne se présentaient qu'aux personnages les plus con-sidérés.--Si l'on s'en rapporte au sens littéral des textes, ces ca-

deaux diplomatiques étaient présentés à domicile, et ilIl e se passait guère de semaine ou au plus (le quinzainesans qu'il en Fût exigé par la coutume. On sait d'ailleursque, vu la rareté de la monnaie, les présents faisaient bprincipal revenu de certaines fonctions publiques; c'est -'le là qu'est resté dans le langage popu'aire, même-aprèsleur conversion en argent, les mots de pots (le vin etd'épices. Qui-lIe était donc la forme du cérémonial? Sansdoute les Echevins Centeniers ne portaient pas de leurs

"A

-s

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- 4S -propres mains, les estamaux ciselés remplis d'ypocras etde vin d'Orléans, ni- les cassettes de dragées et d'épices?Les Sergents dont la sobriété était la mieux éprouvée etla marche la plus ferme, revêius de leurs robes de drapmoiré, â manches ornées de feuillages ct.d'écussons enbroderie, devaient être les messagers effectifs des offran-des, sous l'oeil vigilant des Echevins, qui se réservaientla harangue et les sup'iilications..

VIII.Solutions proposées.

A chaque temps ses , us et coutumes qu'il ne faut passe hâter de condamner- avant un consciencieux examen.Les hommes du moyen-âge ont-ils pu relever avec plusde promptitude et de bonheur les immenses ruines faitespartout en Franco par les invasions barbares des pre-miers siècles de notre ère et l'anarchie des x° et Lit siè-cles? Alors succombaient honteusement les derniersCarlovingiens, et les premiers Capétiens subissaient laredoutable concurrence des seigneurs féodaux qui, neleur laissant que le nomde rois, régissaient souveraine-ment, chacun dans son fief, la part qu'il s'était attribuée,avec les infinies variétés résultant de son caractère etdes circonstances eu l'absence de l'autorité centrale,la force en tenait lieu dans chaque localité? Quoi qu'ilen soit, distinguons avec soin les époques, et tenonscompte de tous les agents de justice et d'ordre, notam-ment de l'idée et des institutions chrétiennes, au moyendesquelles la- civilisation a fini par retrouver sa routeplus belle,- plus féconde qu'autrefois, et sans autres li-mites que celles du monde entier. Sommes-nous bienconvaincus que ce qui n été fait, pouvait l'être autre-ment? Ne refusons donc pas aux travailleurs de chaqueportion du territoire national la- part qui leur revientdans les résultats dont nous jouissons; ils sont assez glo-rieux pour commander, non pas l'oubli des fautes-coni-mises, l'histoire doit conserver ses enseignements, maisl'appréciation calme et loyale des obstacles vaincus. Ta-cite: parlant des choses anciennes de. sa patrie, ditŒ Animus fit,antiquus. n Belle et grande expression, re-marque un écrivain moderne4 «. il faut en effet , que le

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- 46 -t coeur devienne ancien parmi les anciennes choses; lad plénitude de l'histoire ne se révèle qu'à-celui qui- des-« end ainsi disposé dans le passé. o

La commune -du Maris nous est jusqu'ici- apparue àdeux états distincts dont chacun mérite un nom spécial.Auxxit° tilt' et xiv' siècles les habitantscia la cité for-ment une communauté urbaine, sans organisation cou-nué, et administrée par des officiers civils ou ecclésiastiques de l'ordre féodal ; du moins ce n'est que sous desqualifications équivoques qu'on peut soupçonner dansson sein l'action d'administrateurs qui lui appartiennent:nous avons examiné quelques-unes des causes présuméesdo cette privation. Cependant il ne-n faut pas induireque la communauté urbaine ait perdu totitesses libertés,tons ses priviléges. Quoiquayant souvent été traités eupeuple conquis,lcs citoyens du Mans ne sont ni esclaves,ni serfs; la conscience, l'opinion publique conserve -dessouvenirs vagues, mais vivaces, d'anciens droits tfinni-cipaux qui sont plutôt à restituer qu'à créer. Il est vraiaussi que, longtemps avant le in' siècle, des coutumesétranges et nouvelles leur ont été imposées ou inspiréespar les hommes d'outre-Rhin, et que -les révolutions,bouleversant le sol et les idées, ont presqu'anéanti lesvestiges des institutions romaines. Toutefois la féodalité,suppléant par la force matérielle à la loi, qui' na plus niauteurs ni interprètes autorisés, ne -nie pas constammentles franchises de la cité, tout en les comprimant et ens'efforçant de les restreindre par mesure d'intérêt gêné'rai, prétexte dont - elle abuse trop fréquemment, afind'exércer un pouvoir arbitraire. Voyons enfin l'opi-nion- d'auteurs souvent cités sur cet obscur et intéres'sant sujet.- --- -- M. Augustin Thierry (introduction à l'histoire de lacommune d'Amiens) signale -la grande révolution qui

• s'opéra dans le régime municipal romain après la chutede l'empire. Attribuant à Charlemagne la création- desscabins, il démontre que l'institution de ces scabins, desjuges élus, après l'étàblissement du régime féodal, futusurpée tout entière par les comtes et devint l'une desbases de- la souveraineté locale qu'ils s'attribuèrent;alors disparut tout vestige d'une constitution municipale,Li dit encore que le x° siècle vit se terminer par unegninde révolution la lutte intestine des moeurs romaineset des moeurs germaniques, et- que ces dernières l'em-portèrent définitivement. Nous avons -vu au commenceS.ment de ce mémoire que rien chez nous ne contredit

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- 41 -les conclusions de l'éminent écrivain. Voici des citationsqui nous touchent dé plus près. -

Le même auteur (Préface du tome III des documentsrelatifs- h l'Histoire du tiers -état), après avoir exposé lesdifficultés qu'il n éprouvées pour trouver des traces decommunes dans les régions du centre, mentionne les ma- —lencontreuses tentatives des Manceaux au xi- siècle(4070), et ajoute e Dès lors on ne voit plus au Mansque

le régime des municipes abâtardis, privés de toutoju-e -ridiction propre jusqu'à Louis XI. La juridiction etla

police des villesétaient tout entières aux mains d'unu prévôt, d'abord seigneurial, puis royal. »

Dans Orderic Vital, livre X (page 30 de la traductionfrançaise de Ale Guizot) on lit ce passage « Le lende-« main (1098)- Guillaume le Roux fit suivre le chef de« son armée par mille cavaliers, et ayant donné des lois« à son .gré,prit possession de toute la ville du Mans. o

Croira-t-on maintenant que ces lois di son gré procé-daient du droit romain? Ce sciait trop préjuger de làgénérosité d'un Normand du 110 siècle, qui vient dé s'em-parer par la force d'une ville rebelle. Aux te et xi' siè-cles -appartiennent la diversité, le mouvement de mal enpis, les contrastes les plus in6uïs.Que pouvait-il rester dupassé dans l'ordre politique? A peine s'il est soutenableque, le régime romain supposé n'avoir jamais existé, lasociété eût suivi une marche différente dé celle d'àlors.Reconnaissons quo nus compatriotes ont subi des défai-tes et des pertes exceptionnelles; la haine de l'étranger,leur patriotisme ardent, les n peut-être portés trop sou-vent à avoir recours à l'insurrection, à la violence; parlà, ils ont attiré sur eux de cruelles représailles, la dé-fiance, d'injustes et de longues privations de la part deleurs vainqueurs; les conséquences s'en sont fait ressen-tir pendant les siècles suivants. Il faut donc, jusqu'ànouvel ordre, n'accepter qu'avec là plus sévère réserveles explications tirées d'analogies et de rapprochementstels que ceux qu'il est toujours facile de voir entre leschoses humaines; ce qui se passait dans une pro-vince voisine ou dans une ville de nos environs, pouvaitêtre tout différent dans les nôtres, qui ontplus souffertque beaucoup d'autres.

Nous avons parlé de tyrannie et de contrastes à pro-pos de ces temps déplorables dit règne de la force sansfrein; demandons-nous pourquoi les dernières libertésciviques •n'ont pas succombé? Quel élément de salut apréservé la société des t° et xr siècles, au milieu de ses

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-48—ruines, de descendre tout entière au degré d'asservisse-ment et d'abrutissement comparable à celui de l'Orient?Je n'ai pas la prétention de résoudre ces questions - àl'honneur d'une seule cause, après que de grands écri-vains ont proposé diverses solutions que cornait le lec-teur instruit. Qu'il inc soit toutefois : permis de revenir àl'enquête de 1245, ouverte au Mans, sous la directiondu cardinal P. de Saint-Georges-au-Voile-d'cr, envoyépar le Pape pour juger un procès relatif aux droits dejuridiction du chapitre de la Cathédrale sur: l'abbaye dela Couture, Le Chapitre s'y présente en possession de-puis longtemps d'un pouvoir moral qui donne lieu -à desérieuses réflexions. Tout 1e clergé n'avait donc pasfléchi comme la plupart des hommes; il avait lutté avecconstance et conquis une position intermédiaire et pro-tectrice-entre le seigneur féodal et le pauvre peuple.Nous ne ly voyons pas les armes à la main, mais il as-siège la conscience du fort, il fait naître de mystérieusesémotions sous les armures de fer et fait pacifiquementcourber la tête orgueilleuse des fils des Sicambres et desGermains; l'autorité de sa science, divine et humaineleur impose son arbitrage et ses applications du codechrétien. Voici quelques exemples abrégéset traduitsur -le manuscrit de là relation latine de ces curieuses

victoires du du-oit sur la force matérielle. ---- « Maître Le Royer (Raherius), doyen de Tours, cha-

ri noire (lu Mans, sexagénaire, dépose que depuis une temps immémorial les évêques du Mans, jusqu'à lin-« melin (1120-I 214), et, après ce prélat,. le chapitre de• la Cathédrale, exercent la justice canonique et la cen-• sure ecclésiastique dans la Ville et le Diocèse, sur les• abbés, les sénéchaux, les baillis, les vayersdu Roi,• ainsi que sur les autres principaux officierset-les ha-

rons, quand ils commettent des délits envers le Cita-(; - pitre, les clercs du Choeur et ses hommes -tant do la• Ville que du Diocèse. A cet effet, ils peuvent citer, in-• former, procéder juridiquement, exiger le serment• produire, recevoir, notifier des térnoignges; juger• définitivement les causes; donner des avertissements• imposer des suspenses et des interdits; aggraver les• sentences et agir en toutes choses analogues comme• il appartient à mi jupe ecclésiastique. [I rappelle que• dès l'origine de cette juridiction exercée par le Cha-• pitre, les barons et les nobles du Diocèse, coitsultè-• rent Philippe-Auguste sur cette innovation. Le RoiS« ayant appris qu'elle était une concession de Vèvêque

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-49_a.:• diocésain, approuvée par le Saint-Siège, répondit aux• barons qu'il ne se niil p rait - pas de l'affaire, le Pape et« l'Evéqiie pouvant déIi11uer li-ur juridiction, comme le« Roi est libre (10 SC mire substituer clans l'exorcice den la sienno. Enfin que les mérites coutumes avaient cours

Chartres, à Tours,à Angers, et dans tous les die-o e èses connus dii 'lén;,iin. u

Un au ire chanoine, Gu lIa unie CIa roi, èé do 55 ans,déclare que n vers 1231, il fi entendu prononcer 'cx-t Cll'flifluiuiCauiofl aprésI'Evangiln, sur le -Jubé, contree Pierre Bouin, Iiuteuiarit du bailli du ri,iet contre Guil-« Intime Lochai et Gooffroy Chenu; vayers du Mails,• parce clic ils n'avaient Pas li v ré In cire (111e au Liioii-• nuire polir raison de leur vaii-ie du Mans. Plus -tard,s il les vit apporter, sur leurs épaules, leur cuntiihut-« lion 'lopuis la maison de hait lapouhtcaire jusqu'à« I'élise, et absoudre devant la Flore de in saPe tapi-« hilaire. Une autre fois, Pierre Le Ber, bailli du roi, fut« excommunié flic la même manière, pour défaut (leu paiementt ifune redevance ana liq'ue ; il résista long-s temps le chapitra d'Angers lui notifia la sentence;« enlin, il coumparmul, s';iin''ntIa,- reçut l'iibsimluiion de-« vaut la porte (le la Cathédrale de Saint-Julien, et prêta« le serinent accoutumé. ii -- Le môme témoin rapporte aussi que u noble hdmrno« lia»ul, seiçoeiir de Fuupèros (de Fougeriix), cité de-ci vont li Chapitre, vers H38, par . M' Guitiaime (lu

Temple, arc hi lia e re- ii n Sablé, refusa du - resUt n o r cer-e- -laines choses qu'il—avait fait saisir sur le dnmiiirie (lue' Cha pitre un Préjudice de ses h om meslues .1 A sa ièrès,« L'excounmn,uuicati), t fut lancée Contre lui et Cintre l'uno de ses officiers, et fut publiée à Sablé. A deux ouo trois mois de-là, ce R;oul - vint demander au Chapitre« son absolution; qu'il reçut après avoir promis d'obéirii aux I èglemmnts ecclé.iasti,1ues ,par serment, la main« levée vu,t-s l'autel de Saint-Julien. Euisuitei'ol'ficier queu Ci' chevalier avait préposé à la garde- des objets saisis,« vint eu pleurant demander aussi la même grâce, disant« qu'il n'avait pas, le moyen de payer les fi-ais faits il

cette occasion dansie viFage. d'Asnières. Le Chapitre« y con sui tit, mais le délinquant mur su bic une t ' pa -• rence de correction corporelle (Verberari in absolu-• tione). » L'archidiacre, en effet, ou sou délégué f(ap-pu i t lô ère mn en t le- cou n bI e -deux auj t rois rois avec, unebaguette; la vraie peine, le châtiment redouté n'étaitplus là. --

el

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De quelle époque rimait l'autorité morale qu'on vientde voir à l'oeuvre, montrant, au xtir siècle, le type,l'exemple de la justice ? Où sont sen auteur et son ori-gine? Etait-il possible que ce régime né des décisions(les conciles, avec l'assentiment do la chrétienté , bienplus que des codes romain et germain, n'eût pas eu surl'arbitraire et la violence une influence décisive? Quoiqu'il en soit, il ne pouvait pas rester stationnaire ildevait périr étouffé par les mauvaises passions, ou sedévelopper à l'abri, d'une protection invincible la èausequi l'a maintenu dut être une grande puissance, lunede celles qui ont le plus concouru â (aire rentre! «ra-duellernent, en approchant du xve siècle, les citoyens desvilles, et aussi ceux du Mens, dans la jouissance de leursdroits naturels et des libertés compatibles avec •l'ordrepublic; ces droits ne leur ont jamais été contestés enprincipe, et semblent toujours inhérents â leur com -munauté; ils sont suspendus pendant les troubles civils,mais ils reparaissent plus ou moins semblables: on ne lescrée pas..

'Les historiens expliquent fort diverseniènt le principegénérateur de ces faits, car il en faut un proportionné, àla grandeur du résultat, qui n'est point le produit èontauté de quelques inventeurs. Tous,h un raisonnements,quant à notre cité, ne me semblentfondés sur rien deprécis, sur aucun document spécial, authentique; ilsinvoquent des généralités et isiaginent des systèmes qu'ilest aussi facile de renverser que d'élever..

Les uns font sortir ces mêmes faits, sous le nomgénérique de communes, dénomination assez moderne,(!U régime des municipes , romains. Le. présent, il estvrai, est toujours un peu fils du passé; mais quand on y.réfléchit avec calme, on n'aperçoit plus là que des rap-ports éloignés analogues à ceux qu'avec un peu de bonvouloir, il est immanquable de saisir entre toutes lesinstitutions publiques d'un-ordre élevé.' Au reste, nousavons vu le cas qu'Augustin 'l'hierrv faiu, quand. il luiplaît, de ces aperçus. Avait-on parlé beaucoup au Mans,avant un siècle ou deux, des municipes romains?

Les autres, trop généreux envers la royauté, ont faithonneur aux rois , de Fronce, notamment à Louis-le-Gros (1100-1137) ,'de l'établissement des communes.Nous - demandons encore le nom du roi créateur dela commune duMans, avant Louis Xi, qui la relevée,dotée, organisée, mais ne l'a pas créée. -

Enfin, il en est encore qui, s'inspirant outre mesure

JIIIIIIIIII

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- -des idées démobratiques, ont avancé qde les communessont dues à dès insurreciions populaires, en quelquesorte spontanées. Augustin Thierry est de cet avis; Citeznous pourtant, comme il la dit lui-mérite, les municipesétaient tout il abâtardis sous l'oppression féodale; ilsDélaient guèrè en état de combattre cette dernièrepuisflnce. tans un secours que l'illustre auteur mécon-naît, au milieu des agitations de foule espèce qui Jes onttourmentés -et affaiblis jusqu'au xv 0 siècle. Outre cela,on opposé Ason jugement une objection générale sansréplique, à' laquelle il n'a pas pensé : c'est que. dansbeaucoup de provinces, plusieurs communes ont étéfondés au sein de petites villes et de simples bourgadesOÙ les seigneurs auraient eu bon marché des insurrec-tions. L'explication n'est pas convaincante.

Écoutons à ce propos M. Elias Regnault que nousavons connu greffier de la mairie du Mans. Dans le jour-nal la Presse (lu mois de juillet 186-2. ce publiciste dirtin-gtié, parlant (l'un ouvrage de M. hâtiez, dit « Notre• auteur nous semble confondre deux systèmes bien dis-o tincts celui 'le la niunicipalité'romaine et celui do la• commune. »

.« flans le mouvement général d'affranchissement qui• s'accomplit aux Xil e etxlnc siècles, il n'y n rien qui• ressemble à l'organisation des anciennes municipalités

romaines. La commune ne.se fonde pas sur des lliéo-« ries politiques, mais sur les nécessités (lu mllleur;« .A près les (léchiçemeiits de la dynastie ca rioviigien te,o les ravages des Normands, les guerres (les seigneurs,o il n'y eut plus ru gouvernement, ni autorité, ni sécuri-o té pour les personnes ou lesbiens. Les sei g neurs se• défendaient dans l'isolement de leurs châteaux ;mais• les habitants ries villes et des campagnes étaient 'A la

niesci de tous les dépr.dateurs, soit étui ogers, toit• barons du voisinage. Ils cherchèrent leur sécurité• dans l'association, et cette association était si bien• dans la nature même des choses, qu'entons iiéux, lesu mêmes circonstances produisirent les mêmes effets.• L'oppression était partout, la pi OtCC don mi lle part.• L'insurrection se fit partout, sans entente préalable• entre les lcrcaliiLs insurgées, par la seule initiative 41esn souffrances communes, et encore le mot insurrection• n'est pas exact; c'était une col,vcntiorz, na contratt' d'assurance mutuelle, tantôt sous le sceau du senr,r.nt,• tantôt sur pièce écrite revêtue de signatures: c'est ce• qu'on appelait Conjuration ou commune jurée.

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De IÛ naquit une communauté sociale fondée sur uno conirat, un lien politique formé par un acte civilo cest un fait entièrement nouveau dans l'histoire.

u On voit donc toute la différence qui se trouve entren la commune nouvelle et l'ancien municipe. La coin-

morte n'est pas une division territorialé, mais un ento semble d'hommes unis pour la défense du droit par la• garantie naturelle de leurs personnes et de leurs biens.• L'ancien municipe n'était qu'un faisceau aclminbtratif•subordonné, aux volontés du pouvoir central. La coin-

mune se fait puissance Souveraine, proclamant son« indèpendauce, ayant sa bannière, sa milice, ses magis-o irais, ses impôts. »

Il y a beaucoup de vrai dans cette manière de voir,toute bornée qu'elle est aux résultats matériels du xii'siècle ; car, au delà, elle, laisse 'dans l'ombre le .leyierqui fait avancer ce mouvementgénéral d'af[ranchisse-ment. Avec M. Itegnatilt noussuivons les bords d'unfleuve imposant dont la source nous est inconnue, ou,mieux peut-être, n'est qu'entrevue; pourquoi l'investiga-teur s'est-il arrêté si tôt? Avant lui, des historiens demérite nous avaient déjà renseigné sur ce précieux cou-rant, et avaient même essayé de nous en montrer lesaccidents de beaucoup 'lus haut, sinon do son point dedépart unique.. '

N&js cherchons 'toujours 'le moteur primitif do lamarche ascendante denotre commune, institution toutefrançaise, toute locale, qui n'a , ses plus fécondes racinesni dans le paganisme, ni dans la philanthropie philosophi-que de la féodalité et de la royauté, ni mémo toujoursdans la force'exclu'siv,ement matérielle. C'est une oeuvredu temps, laborieuse, complexe; le pissé et le p,résenion ont fourni les «léments en 'proportions diverses; ellea progressé avec les sentiments, les idées, les cotitumès,sous une influence propice au développement du sensmoral et du droit naturel, qui consiste en politique, pourchaque, indivJqt , â jouiç de toùte la liberté possible sqnnuire à autrui t à là société,:

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lx

iommiines dioèésaines, - Associations de la paix.

Depuis quélqdéi ànnéei, il se présentè une solûtionnôuvélle qui coriespond AUX temps et à tOUS les doutes,et signale ail moins, au *1e siècle, une large baie, unfoyer, une dirè.ction, au moyen de quoi s'établissentl'association des villes et des e rnpagnes,le contrat d'as-àurànce mutuelle, la conjutation ou commune jutée,i étranges, si étonnants, quand il faut les supposer pro-

duits spontanément savs entente préalable. Voyon doncce qu'on propose

M. Ernst Semichon, évocat, membre du Conseil géné-rai de la Seine-inférieure et

dé la société de l'Histoire

do Franco, ii publié, en 4857, un livre intitulé La Paixet la Trêve de Dieu; histoire des premiers développementsdu tiers-état pdr (Egiise et tes Associdtions. L'auteurvoit, comme les écrivains précédemment cités, la sociétéfrançaise,' des x' et 11 siècles, s'àblmant sous l'anarchiede la fSdalité, qui se fait, tyrannique, dé protectricequ'elie aurait dûcohiinuer d'être. L'oppreésion, devenueintolérable Aux populations, lei fait songer à la défensé.Seules, abàndonhées de, la royauté, il leur est fort dif-ficile de téunir les conditions d'une résistance duiable;tatitlis quo, près d'elles, l'organiskion, l'autôrité, uncode, une jurisprudence qui leur manquent, sontdépuièlongtemps en la possession des évêques ci de leur clergé.lassés ausi des'niênies désordres que l'intérêt et ledevoir leur éomniaùdént de combattre au prix des pltigrànds sacrifices. N&st-ce pas là tout S qu'il faut pourformer la tète et rârné d'une vaste asociation défeniivèentre les habitants dé chaque dibdèse?

L'existence en effet de ces 3Ssociatio, qui reçûrentle' hôm dé commune, de commune jurée, cà commu-nié,

comm-nié, déuominition peu ancienne, est évidemment prou-'ée en beaucoup dô lieut;' elles e composèrent, sous lépatronage et la juridiction des éyêques, d'hommes détoutes les classes, noblês, bôurgeoi.os ârtisans, liés parUri. serment', s'enajjeaM à e prêter un thiittiel secoués,iiièziïè 15' armés â la niiain, pôut assurer à tous lé sééti-

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- 54 - -i'ité possible, notamment aux églises, aux ecclésiasti-ques, aux laboureurs, aux marchands, aux voyageurs;les statuts conservés de plusieurs de ces contrats d'as-surance mutuelle ne laissent aucûn doute sur l'initiative(lu clergé ni sur le but qu'il s'était proposé.

Les préparatifs de cette lutte suprême sont déjà aperçusen 988. L'histoire 'le Limoges parle du Pacte de la paixet de justice, consacré, en 094, par le duc et les princi-paux seigneurs du pays. C'est 1a première fois qu'unconcile prononce sur le mot de Pacte de la paix qui,pendant les doux siècles suivants, deviendra le motd'ordre des peuples et sera le titre d'un grand nombre dechartes communales. Le Midi avait donné l'exemple; lecentre, l'archevêché de Bourges surtout, l'avait suivi. Ils'agissait de substituer à la Guerre immédiate, à larapine, à l'incendie, un exposé pacifique préalable desgriefs, en présencè de l'évêque, souvent du cornue, etordinairement des principaux membres de l'union, allad'amener les adversaires à une transaction équitable, cequi démontre une fois de plus qu'il n'y avait pas alorsd'autre magistrature respectée, ou bien que soitétait purement nominale, auprès des seigneurs toujoursprêts à recourir à la violence. C'était déjà beaucoupdemander; aussi ou doit concevoir les obstacles quedurent rencontrer de pareilles mesures. L'Eglise fut obli-gée de proportionner le remèdeau mal. De 1027 A !040,elle institua la trêve de Dieu; la Cu-erré n'était pas abso-lument défendue, mais sa durée était limitée à certainstemps de l'année, hors desquels les violateurs du Pacteétaient sévèrement biSés et punis. La lettre I 33e d'Yvesde Chartres explique clairement la nature et les gai an-ties de la trêve.

Au milieu du xue siècle, l'institution n pénétré au seinnombreprovinces. Un grand nombre de dincès, ceux (Jela Normandie notamment, ont leur union dont l'évêqueest le chef; les statuts, suivant Ducange, eu sont juréspar des chevaliers, (les citoyens des villes et des hotu-mes de la campagne; plusieurs conciles provinciaux lesrecommandent, les sanctionnent, et proclament A cetégard une jurisprudence spéciale. Le concile de Rouende 1096 exige des hommes, depuis leur Age de 12 ans,l'obligation par serment d'obéir à la constitution de latrêve, et de la soutenir par les armes contre les infrac-tours, quels qu'ils soient, à la requête de l'évêque ou dol'archidiacre c'etla croisade du droit contre la force.Les maisons religieuses, les ecclésiastiques, les bout-

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— au —geois, les paysans, commencent û faire respecter tes per-sonnes et les propriétés; l'église use contre tes coupa-hIes des censures canoniques; à sa voix, la communeemploie les armes, quelquefois le château qui rompt latrêve est pris et rasé. 0e là, à l'établissementde la coin-marie jurée particulière aux villes, il n'y avait qu'un pas,qui fut un peu plus tard aisément franchi.

X

Louis le Cros protége les Communes diocésaines.

Louis le Gros (1100-1437), qui redoutait aussi la féo-dalité, s'empara du mouvement d'émancipation qui avaitrempli le Nie siècle sous l'inspiration du clergé, et se mità la tête (les associations; mais il n'en fut point l'auteur,pas plus qu'il n'a été, comme on l'a dit, le créateur descommunes, postérieures, il en profita seulement avecbonheur pour atigmenter l'autorité de la royauté. Dèslors, les communes diocésaines, reconnues, protéf,éespar le Roi, le secondèrent dans ses entreprises. Après sadéfaite, à Brenneville, en 1419, oIes marchèrent aveclui, sous leurs bannières respectives, contre les Nor-manda rebelles, et commirent, dit Orderic Vital avec sapartialité ordinaire, toutes sortes d'excès que leur per-mirent leurs chefs pour les intéresser au succès.

Au xiit siècle, les associations de la paix sont à leurapo 1 ée; leurs bienfaits sont attestés par les monumentsde l'histoire et des beaux-arts; qui accusent à cette épo-que une admirable renaissance. La royauté et 1e peupleauièrent des droits plus étendus et plus stables. L'aféo

cqdalité contenue, les institutions judiciaires, ecclésias-

tiques et laïques multipliées, sous la protection du pou-voir central régénéré, rendent peu à peu moins néces-saire 1e maintien des communes diocésaines. Commetoutes les choses humaines, Je lien qui les unit se cor-rompt, quelques-unes même font acte de turbulence etencourent les censures ecclésiastiques; ceux des sei-.gneurs qui n'ont pas cessé de les voir avec jalousieréagissent contre elles et tâchent de les opprimer. Auxiue siècle, elles sont en décadence manifeste; leur mor-cellement ne tardera pas à s'opérer.

Toutefois les diverses classes de la société n'en con-

A

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- 56 -serteront pas moins des' idées de justice, des garantiesd'ordre, des -usages -respeciés, conquêtes dont -le - pactede l it le principe et le titre primitif. Les coule.nies locales, les bourgeoisies, les communautés, les c*.rn-murees municipales; avec tous les accidents do circons-tance et leurs variétés propres, sont ;ippa rues :i)irè,s lefia ctj on ne nie ut (les Communes diocésaines , dont ellessunt-lcs descendantes et les héritières;

Telle est l'opinion de l'auteur de la Paix el de la Trêvede Dieu, travail qu'il est indispensable (lit consulter, sil'on veut examiner avec impartialité la question qui nousoccupe. Dans le Mairie, j'avoue n'avoir pas aperçu rIeliens directs, ni de ni iation positive entre les associationsdiodésaittes et nos communautés citoyennes; argumentpurement négatif, car rirn non Plus de toutes les partiesde notre régiine .-conimiunal ne repousse absolument laprésomption de leur lé8itirne descendance de cette-sou-che primitive. Quoi d'étonnant si quelques échelonsgénéalogiques ont péri au milieu de nos troubles (lu XI' etdu xiu'siècles? J tisqit'ù ce jour, nos historiens distraitsPar - des préoccupations contraires ont lu omettre quel-ques ténioinages favonlbtes;avertis désormais, Es con-sulteront plus scr u puleusement nos annales, l)ùton enfinne rencontrer aucune, mention explicite du fait doit ils'agit, serait-il possible d'ail neti re ijure, pressés de t' ' u tespat ts par l'esprit et la force lihéraurice de l'opinion etde l'exemple, nos compati iotes ou leurs seigneurs tri eus-sent empêché tooteinOltration chez eux? Notre provincefût-elle restée inaccessible et imniobjie aumilieu del'immense agitation manifestée autour d'ellè ?- Je ne lecrois Iras. Dans leur infructueuse tentative de 4070, lesManceaux ne s'inspirèrent-ils point 'le-l'exemple oie cer-tains. diocèses voisins, espérant, comme les habitants deceux-ci, former une -aociarion contre les usurpationsdes seigneursféodaux? Il eut complot, serments piétés;mais leur entreprise ayant été étouffée dans le sang, l'his-loire n'en n été écrite que par leurs vainqueurs ou parceux qui n'avaient pas cru devoirItts seconderC'est de cepoint de vue qu'il faut. étudier l'origine des privilègesecclésiastiques et des droits fa!orabes aux communesmunicipales, soit dans les viVes, soit dans les simplesvilages, selon la part faite à chacun, ô titre de transac-tion, de coucou-dat, par les succès ou les revers de lalutte.

D'après ce qui précède, on voit combien de conjec-litres réclament une place dans l'histoire des citoyens du

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M -Mans, avant le 1yt siècle, La féodalité a régné sur euxsouverainement, le clergé seul a gardé le dépôt des Ira-diiions légitimes et des espérances de l'avenir, qui ontcommencé à se réaliser iles la fin du in' siècle. A quelleautre infl'iônce, en effet, nitrihuer l'ordnelègat, la civili-sation renaissante do cotte époque? Huirs 4e là, lapériode brillainie de la constriiciinu i de notre magnifiquecathédrale devient une énigme historique où une gloirede ta féodalité. -

Au xv' siècle, les relations du comte avec les bour-geois di Mans sont devenues de plus en plus libérales,affeetant même des tortues singulièrement rapprochéesdu régime républicain. La communauté tend A se per-sonnifi.'r dans quelques représentants élus et à devenirune commune mvii cipaie. Les cttiyens (le la Ville et desfauI.ncirgs, prêtres, nobles et du mers état, sont égauxdevant la coutume locale qui leur donne le droit il0 suf-frage dans I'adnnirustratiou de la cité ils forment, quandils s'assenib'ent.- le conseil de ville, un sénat pnputaire,qui décide de tous les intét éts communs. Les échei inset leurs autres agents sont de impes membres de ciim-missions exi'cutives. C'est A ce moment (I 474) que nousavons rencontré les documents Contemporains qui nousrévèlent les détails de la vie du corps municipal A unAge déterminé; nous avons insisté sur ces détails, Afindaider aux recherches et aux conjectures relatives à sesaùlécédenrs; eu allant du connu à l'inconnu.

 la ho du xv' siècle, après les chartes de Louis XI etet do Charles VIII (1482-1496), la bourgeoisie du Mansjouit d'un régime cons t itutionnel assez nettement aceusé,second état dans lequel elle s'est offerte à nos recher-ches. Il y n véritabenient alors commune municipale,self governement, suffrage presque uiiversel, budget,force armée, etc.': beaux privilèges dont les élémentslongtemps dispersés ou inertes semblent sortir de la nuitde son passé. S'ils n'ont pas leur modèle dans la puis-sante administration urbaine confiée aux évêques detouté annqiuiié. jusque vers la fin de la seconde racede nos rois; s'ils ne sont pas les bénéfices trop long-temps attendus des associations de ta paix des tié etXII' siècles, ils ne sont pas davantage les conquêtes desinsurrections, et leur renaissatice parait plutôt la récura-peine de services rendus à In Patrie, et -le. résultat de labienveillance réciproque des princes et des sujets.

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XI

XVI' siècle. - Comptes d'Ernault. - Coutume dunaine.

Quoi qu'il en soit, voyons encore à l'oeuvre, fa nou-velle commune constituée pendant les premières annéesdu xvi0 siècle, afin d'en mieux apprécier le caractère etla vitalité. Les registres du Conseil de ville, qui,.avant laRévolution de 89. commençaient en1553, et dont il nereste qu'un maigre extrait imprimé dans l'Annuaire, de1835, sont presque tous perdus. Quelques documents d'unordre secondaire • des comptes de deniers, des notesinformes sont ici, comme précédemment, les seuls témoinsà consulter. Ainsi, au sujet de ces comptes de deniers dereceveurs, il nous Faut, pour en rencontrer un posté-rieur à celui do Jéàn Cosnard, aller jusqu'en 1527.

Pendant cet inteiwalfe, un événement d'une grande im-portance, qui n'est Nis sans rapports d'origine avec laconstitution municipale, eut lieu dans la Prodnce, savoir;la codification des coutumes du Maine, qui furent.pro-mulguées le 15 octobre 1508. Quant aux formes observéesafin d'arriver à ce résultat,, nous y retrouvons l'usage dusuffrage de la population représentée par un très-grandnombre d'hommes compétents des trois ordres de lasociété, avec le concours et l'assentiment desquels les arti-cles sont choisis, formulés et définitivement arrêtés. Letiers-état y intervient par six officiers du Roi et environsoixante citoyens tant de la ville que du comté, au nom-bre desquels sont nommés François de Courbefosse etJean de Saint-Denis, échevins de la Commune, avecPierrb Le Pelletier, procureur.

Quant au fond, au droit coutumier, il est, comme lenom l'indique, la constatation des .droits et des devoirscivils les plus généralement reconnus et les plus ancien-nement pratiquésdans la Province.La sourcedes coutumesqui faisaient loi est très-voisine de celle des communes;peut-être même y a t-i1 lieu de les assimiler. Les dévelop-pements heureux des unes et des aulres ont marché assezparallèlement sous la même influence; c'est dans l'ex-

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cellent ouvrage de La Trêve de Pieu.qfii faut lire les sa-vantes considérations de l'auteur sur cet intéressant sujet.

Le recueil des coutumes du Mairie nous doSe occa-sion de remarquer combien, en 1508, les institutionsféodales, quoique beaucoup améliorées, étaient encoremêlées aux actes de Ui vie. sociale. Représentons-nousdonc ce quelles avaient dû être trois ou quatre sièclesauparavant, et alors il deviendra dihicile,je crois, de dé-terminer la place quelles laissaient au régime municipal.

La commune du Mans profita indirectement, il faut lecroire, des avantages que les intérêts privés recueillirentde la codification des coutumes, car autrement on nevôit pas que rien de notable lui en soit échu immédiate-ment. En présence du clergé, de la noblesse, de la ma-gistrature, du barreau, ayant entre eux, pour la plupart,des rapports d'intérêts assez nombreux, les représen-tants de la commune n'eurent sans doute pas uneinfluence très-prépondérante, et puis déjà les esprits ten-daient à la diviiou. Il ne parait pas, notamment, qu'elleait recouvré sa juridiction, si même elle a pu jamais enobtenir une quelconque, comme la lui avaient concédée1escfrartes de LouisXl et de Charles VIII; je n'en vois pasde traces dans le dernier compte do deniers qui me resteà examiner.-

Guillaume Ernault a été receveur des deniers communsdu 1 11 octobre 1521 au 10 shptembre 1530. Après samort, ses héritiers rendirent ses comptes en avril' 1538.Quelle pouvait être la cause d'un pareil retard? Les Zone-lioniaires, pendant cette période de trois années, sont,savoir, échevins Jacques Breslar, lieutenant particu-lier en fa sénéchaussée, qui fut remplacé, le 10 juillet1530, par François Bouju, licencié ès-lois, lieutenantgénéral en la judicature du Maine ; Gervaise Le Saige,marchand et bourgeois dû Mans, remplacé, le même jour,par Vincent Chevalier, écuyer, sieur du Buisson; Jehanileurtier, licencié ès-lois; Baptiste Vassè, sieur de Cou-laines, qui fut aussi pourvu de l'office do connétable dela Ville par le Roi et Madame, le 27 avril 1530; procu-reur Guillaume Le Balleur, remplacé depuis par khanDenizot, lejeune, licencié; receveur Guillaume Ernault;controlleur des deniers communs sire Pierre Gouzeau;clerc de ville Nicolas Lepelletier.

Les recettes comprenaient toujours le 10° des vinsvendus au Mans et dans les quintes; 50 sols par muid.mesure de Paris, du sel vendu au Mans,dans la ville et sesquintes, Ballon, Château-du-Loir, Loué, Sillé; puis 'une

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- 6Ô -rente dû 5 s. léguée par GIJifI. Le àlletir,. de Sàifit-G&*gês, pÔÛt l'eiutetiên dù la fontaine dû délité; ùnôautre reine de 6 t 8 d., léguéè Pae Gertaisé Le Fébvresut Une vigne en Saint•Hhlàiré

Enfin pour la première fois, les formages prove-nant de [,a des immeubles de la cornmùne sontcomptés; mais on voit que lés haut avaient déjà plu-sieurs années de date la loge sur le bout duPont-Neufest louée à Mérillon pour 50 s. par an depuis le i le août1523; la tour du Bourreau, à Vincent Chevalier, de-puis ISIS, pour S s. 6d.; la loge sur le pont du CM-tenu, mitre les ponts levis, à Mcty Chevalier, 35 s.; laloge ail boulevard du Pont-Ysnir. à Noël Souesvé. 20 s.;la tour du Pied-Doré, à Guillaume Ernault, 6 livres; làtoge sur le dôme de la Vieille-Porte, à la veuve Dubois,15 s.; la loge en appentis au boulles'ard de la Vieille-Porte, à Simon Pineau, 30s. Les autres loges et tours sontVacantes; la Tour-Vineuse est à réputer pour yrenfernierles munitions de guerre. Quant à celle de la Porte-Ferrée,elle est sans emploi, il est enjoint au procurent de faireexécuter les conclusions du Conseil qui la concernent.

Remarquons le passage suivant : Nicole Lepolletiet,• clerc CL greffier du conseil des habitants, porte les ar-

ticles aux paroisses de [il et des faubourgs pour• délib6rer au conseil fée &ral de la Ville le 17 mai 1528;• ces articles montent à 63 feuilles de papier. » C'esttoujours l'appel au suffrage des citoyens pour les affai'tès importantes ou imprévues. Où se faisaient alors lesréunions? Probablement au Palais. Le coffre, jOque-làsigne unique de l'hôtel do ville, était encore dans làCathédrale le 17 avril 1538, comme le prouve cette notémarginale au feuillet 66 du Registre François Boujui,• Denis Heullant, Vincent Chevalirt et Robert Delaunay,• échevins présents à de compte (c'est-àdire à sa reddi-• tien en 4538), ont rapporté qu'il y n un coffre en lE• glise du Mans, fPmant à 4 clefs différentes et 3 ser-o vitres; quelles clefs sont cri la garde de chacun des« échdvins, et ont Accoutumé d'y enfermer leé comptes,r lettreset enseignements au moyen de quoi n été ôta« donné qu'inventairê sera fait par Mery Dubois et Guy« Bouvet, notaires royaux, présents ou appelés lé Prô-• cureur du roi et les échevins, ou deux d'iceux, et sera• faittaxe aux assistants. o Ainsi l'échevinage continuaitsa vie nomade, recevant l'hospitalité, comme les pèle-tids, dans la basilique dé Saint4ulien. Le temps apprôchait néanmoins où il allait avoir pignon sUr rue.

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Salie de Bretagne. -, Donjon de la Cigogne.

En vertu d'une concession do Roi et de sa mère, lacommune fut mise, le vendredi 22 avril 1530, en pusses-sioui de la place et de la maison (Je la Monnaie appeléela Salle de Bretagne. situées près du palais. Ce dort

à ses voeux si souvent exprimés de posséder unhôtel rie ville: il fut fait clans des formes gracieuses,niais les nombreux agents qui s'enreni-tuaient de sadélivrance, étaient moins désintéressés; ils tirèrent ducoffre municipal I à 800 livres d'épices sous une infinitéde noms.

Cette mise extraordinaire, jointe, aux 1,200 livres quele roi demandait à la Ville pour les Irais de la guerre;déterminèrent leirdé.putés auditeurs du compte d'Ernault à suspendre les travaux d'appropriation et à mon-trer leur circonspection en attendant que le déficit de lacaisse se comblât. Il fut ordonné aux Echevins et Pro-cureur de louer les immeubles ait profit de la Vile sa" 1s ybâtir, Pt il leur fut défendu de délivrer dorénavant desmandements de dépenses si grossies et non accoutumées,sans le consentement de l'assemblée générale et des 24 dé-putés chargés de pourvoir aux affaires de conséquence.Les 1,200 livres durent être levées sur les habitants poursolder 50 hommes de pied et 5,000 livres de salpêtré.J» ces délibérations, le clerc de ville dressa un procès-verbal destiné à être présenté à la prochaine assembléeGénérale. -- Les nombreux articles de dépenses d'Ernault font déjàpenser aux 'guerre intérieures qui f ndront bientôtsur notre ville et la province. Cette prévisioù seni»le&être emparée des esprits les fortifications sont répa,Fées avec une extrêinè ardeur; • Mery Chevalier placel'artillerie-au Pont-Perriti, au Pont-Ysouart, au. Pont-Neuf et ailleurs; on achète du salpêtre et du soufre; onfait fabriquer des armes, de la poudre, dei juasses.deprojectiles. Des aventuriers sont signalés du côté de LaFerté-Dernard; il y s de l'inquiétude, des alertes. Leroi'surnommé le père des lettres laisse crottre les gerrpe

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- 62 -d'horribles discordes dont son imprévoyante vanité nesalira pas arrêter les conséquences.

Les travaux tic réparation n'eurent lieu qu'en 1531 àla tour de la Porte-Ferrée, qui reçut alors la forme quenous lui avons vue. Simon Le Mercier, maçon, reçut.80 livres pour la façon d'une voûte et d'autres chosesde son état qu'il avait dû construire d'après son traitédu 14 mars 1531.(V.S.) On peuitadmettreque cette voiofut réédifiée en ogive d'après le plan etavec une partie desmatériaux de la première construction. Simon Patin etGuyon Gervaise reçurent 170 livres, prix de la char-pente de la tour, suivant un mandement du 4avril 1532.Thihault Chaoveau et Marin -Lejay, qui couvrirent lepavillon, eurent un à-compte de 30 livres par mande-ment du 43 avril 1532.

Enfin la commune fit apposer, vers -1571,sur la Porte-Ferrée, par René i%lasnier, ni d. maignan, moyennant 22livres. 10 sois, un panonceau ('airain et une plaque demême métal présentnt l'image en relief d'une cigogne.Le premier de cesinsignes était nécessairement l'ébus-son arm g 'l iè de la ville municipale; le second avait aussi,sans doute, un aspect en harmonie avec l'importancedu donjon, ce monument historique dont on regretteaujourd'hui la démolition consommée en 1832. Pour-quoi la Ville avait-elle choisi cette de'ise qui réponditsi bien au sentiment populaire que la porto en n retenule nom jusqu'à nos jours? M. l'abbé Voisin pense quece fut un hommage à ladresse de Catherine de Médicisqui avait adôpté la même devise. S'il en est ainsi, il y au-rait eu là une flatterie conformeaux moeurs du temps et.beaucoup plus excusable que celle qui consista, uï,èmeau Mans, à placer les croissants de fleuri Il et de Dianedo Poitiers sur les édifices privés et publics ; impudentelâcheté de fort mauvais augure. La cigogne était lesym-bole de la piété, de ].a de la protectioncontre les morsures des serpents venimeux. Après lespillages de 1562 par les protèstants, entrés au Mansgrâce à leur coulnivence.avec plusieurs officiers royaux,lescitoyens. toujours menadés .par les mêmes ennèmis,peuvent avoir conçu l'idée de placer sur la principaleporte rie la cité l'emblème de leur énergique résolutionde résister à L'hérésie età ses sectaires.

Jusqu'en 4538, le donjon de la Cigogne ne dut passervir aux réunions des échevins puisque leur coffreétait encore dans la cathédrale avec leurstitres et leursdeniers; probablement on y plaçait, comme dans la

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j —63-Tour-Vineuse, les armes et les munitions. Quoi qu'il en -soit.deux intéressants objets nous en ont été conservésapréssa destruction en 1832.

La clef de voûte du porche a été sauvée par un voi-sin, M. .Gadois, pharmacien, qui l'a donnée au Muséecommunal. C'est une forte pierre de calcaire blanc surla face saillante et inférieure de laquelle est sculpté enrelief un écusson cordiforme, allongé, à cinq lobesaigus; deux de chaque côté, le dernier très-prolongé, à lapointe. On le voit figuré dans les Eludes sur l'Histoire ettes Monuments de la Sarthe, de- M. Hucher; il- porte3 chandeliers posés 2 et 1, avec 3 clefs posées 4 et 2 ;-la premiéretournée à gauche, les deux dernières tour-néer, l'une à gauche, l'autre à droite: il n'y a ni croix nicouleurs. Ce sont évidemment les armes de la Ville,mais au type unique le plus extraordinaire et le plus an-cien qui soit connu. Je suis tenté de croire que cettescu!pture est antérieure à la reconstruction de 1531, oùelle a pu être remployée, et qu'elle date de la concession(le la tour, en 1471.-

flans cette même tour, il y avait une bonne horlogeappelée depuis longtemps lhorloge de la Cigogne, etqui meuble à présent-l'humble clocher de l'église parois-siale de Saint-Benolt, où j'ai constaté la- curieuse anti-quité de son excellent timbre que m'avait signaléM. l'abbé Voisin. Ce timbre,remarquable par la beautéduson, est une cloche de bronze de 96 centimétres deilargeur sur 80 de hauteur, sans les anses. Vers le haut,on voit le relief d'une croix latiile suivie de cette inscrip--(ion en lettres minuscules gothiques: «En L. MV C XXXllit,e les échevins de la -vile m'ont f. faire : 211° J. Heurt jar,u. J1JC F. Uouju, M' B. Vasse, V. Chevalier, échevins'.g Po r le temps. u Il faut lire 4534, parce que les échevinssont de cette époque; mais si l'on voyait un y dans -lesquatre -unités, on aurait 4537, ce qui est peu vraisem-blable. Sous la petite croix latine, est représentée en re-lief un bel écusson triangulaire, à côtés arrondis, ayantun chef cousu de trois fleurs de lis de face, ét portantdans le champ une croix cantonnée, au premier et ausecond, de deufchand p liers, et chargée sur sa hamped'un chandelier en haut, avec uneclef tournée à gauche,en bas; Voilà l'écusson fleurdelisé de la Ville de la plusancienne - date connue; auparavant, il parait - toujours.sans chef. -- Quant, à l'âge, le- timbre-cloche de Saint - Benoit nele cède ici, je créis,- qu'à celui de l'horloge d-o Saint-

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— 64 —Julien, qui pèse S à 900 kilo8, et mesure! mètre 28 cenli•mètres de diamètre. La "oix.de ce dernier, en fade l'an.clou dia pa soi,, est du puis imposantt effe t. Ce urne ni sefait-il que ce timbre campaniforme, qui n'a pas s e rvi docloche, appartienne â la commune? la piissessi'iri deceFeci est constante, d'oricine inconnue , et doit re-flouer au temps où la poptilaiioii aimait A niatiifesterDit dévouemcnt effectif nus choses publiques. Les I os-cripi ions sujivauttes. en lettres ,,ncial ,s de '2 ccitt. 1/9 dehauteur, le front présumer: u SANTÉ DE COttPS ET P4-0 IIADIS A LAME I)OINT 311V CIIIST A TOUT HOME ETu YAME QUI POlIS MOI FAIiE DE SES BtES DONrÉ A ETci MON SON MAINTENIR PENSERA. o Ces ines, a ce lesMOIS o S.tCTA MARIA tWA PRO NØS DEUM, n 111011lés1iluis.haut, sont les seuls signes parlants qit'Ofl aperçoit à lasut face du bronze. Eu dedans, nue boucle cri Ii'sauigeli été, ntétuagéi' piler y suspendre tin battant, si 'iii avaitvoulu. soiuu'er le tocs u; tuais aucune marque de frappeD ' )' est vlsi be, tondis qu'i'tu-dessus, le marteau o creuséde si nombreuses et si larvs dépressions, qu'il n fa lutourner ri uustru ment plusieurs fous. M. l'abbé Lottin, àl'ubligeaiuçs- de qui je dois cette intéressante indication,.n'est; uns éloigné de croire quo ce bronza n été façonnépendant la p'riut'le de 4380 à 4415.

S'il était possible , ajouterai-je, de 10 faire remonterencore plus haut; si, In considérant leniplacemeuut,.lapossession immémoriale,, la soit éclatant, on lui assituueun caractère municipal. D'y art-ii las lieu tic conjecturerque ce timbre, ou ceux qu'il n pu remplacer, ont eupolir destination primitive le servir aussi de cloche de

ibèIfroi aux hatiuu,ts de la Cité, quand le clergé et lesI) ourg eois , sous l'autorité des évéquies, étaient étroite-

.jlnent unis de pensées et d'intéré:s contre tom cmi coin-441fluo? Sortons des conjectures et revenons aux faits:auhniquu.s,..t

Le reliqtuat des comptes d'Ernault arrêiés,'comtne nousrayons vu, le 17 avril 4538, était de 345 liv., 11 s., 9 Il,,dont 300, liv, durent être, versées â compte sur les 1,200liv, demandées par le Roi. L'examen et in clôture eureuttlieu en présence , de Jacques Tahureatu, lietttenautt #néu'alsoin Sénéchaussée; M Jehacu ]3rouiller, chanoine, députéde l'E.véque; Charles Bordier, chantr p.: Jacques Diulinis,chanoine, procureur du Clin pu re; et Fliuriunond Ogier,chanoine, dépotés du Chopin e Philippe Queriaviineavocat, et Mathurin Qdetain, procureur du roi; Fran-çois Bouju, Dents ileullafit, Vincent Chevalier et Robert

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de Launay, échevins; M' Jehan Denisot, le jeune, pro-cureur des Habitants ; khan Bellaager, contrôleur desdeniers communs; Baptiste Vesse, connétable, garde desperles de la ville; Jacques Richomme, receveur; OlivierGauquclin, sergent; W Nicole.Lepqt°r, clerc de ville.Toujours la même publicité dans'hJministration et lemême concours des représentants,d'u clergé, de la pa-gistrature, du commerce et de la bourgeoisie,t

Après Ernault, les archives présentent encore une la,cane de 13 années, celles des temps postérieurs no for-ment pas non plus de séricompiète; mais l'histoire deces temps est moins incertaine et ne donne lieu qu'à desquestions d'ordre secondaire. La commune du Mans, àquelques modifications près conserve son organisationpendant plus d'un siècle; malgré les jours orageux qu'elletraverse, elle ne reste, sous aucun rapport, inférieure àcelles des villes de son rang ; dans son ressort, les éta-blissements de charité et d'instruction progressent avecles arts et les entreprises économiques. L'époque dite dela Renaissance, depuis longtemps préparée, n'est pasmoins remarquable au Mans qu'en beaucoup d'autreslieux par ses oeuvres d'art et malheureusement aussi parses téméraires innovations, qui causeront parmi nos con-citoyens des dissentiments profonds, fort dangereuxpour leurs antiques libertés. -

La longue stabilité des priviléges et du régime libéraldont les Manceaux ont joui, était due à leur persévérantaccord dans la notion fondamentale du juste et de l'in-juste en religion, en économie, en politique. Ce faisceaud'opinions et de volontés que n'avaient pas entièrementdissous les déplorables inhabilités des derniers succes-seurs de Louis XI, Henri IV le trouva en voie de dé-composition et déjà alTaibH par les trahisons et les dé-sertions, nais cependant encore assez confiant en sondroit et en ses forces pour oser lui résister, en invoquantle pacte social et les traditions nationales. Le.Guerrier lerompit par la violence, mais il sentit que la force desarmes ne constitue pas le droit. Son grand sens ne luipermettait pas de confondre toujours les motifs des ci-toyens du Mens avec ceux des hommes, la plupartb'rbitieux et versatiles, qui le suivaient. Il fit aux habitanidu Mans et de la Province tout le mal qu'apportaientluttes de ce temps, et dont les suites ne leur furent épar.gnées qu'aux dépens de leur fortune et de leurs ancienneslibertés.

Le vaiaquaur s'efforça, dit-on, je ne veux pas soutenirV

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- 86 -le contraire de modérer les excès de cette guerre fratri-cide, dont les fêrmerus existaient avant lui, c'est très-vrai, mais qu'il entretint trop longtemps; et d'ailleurs,était-il bien le mature des vengeances et des détestablesprojets de la partie révolutionnaire de son armée, quicomptait dans ses rangs les envahisseurs de 1562, et leshommes tels que La Mothe-Tibergeau. qui avaient étécondamnés juridiquement comme coupablesdu pillage etde la dévastation de nos plus beaux monuments? Quen'aurait pas dit une impartiale histoire, si elle euh pu êtreécrite, non après la victoire du Béarnais, mais après sadéfaite I

Cu prince, qui avait tout-d'abord privé le Mans de sonadministration municipale et de ses privilèges, ne tarda'pas k les lui rendre, destinés toutefois â vivre désormaisdans un milieu vicié. Il ne les augmenta pas, bien en-tendu ; M. de Carné tait même remarque r , au tome Jet

de la Revue des Deux-Mondes de 18$5, qu'en général ilse montra fort peu libéral à cet endroit, et qu'à sort

se rattache la chute du régime municipal, dont ilavait éprouvé la résistance â ses caprices. Lavallée, dansson Histoire des Français, suivant le même aperçu, datedu règne de Ilenri IV l'établissement de la monarchieabsoue. Enfin, revenu à des sentiments plus équitables,il finit bientôt par où il aurait dû commencer, en parta-geant les convictions qu'il avait eu le tort de combattre.M n'est donc pas très-convenable, ce semble, de tropmontrer en public son épée que tacha tant de sang fran-çais qu'il aurait pu épargner

Au reste ces mêmes convictions furent au Mans ]acause unique de la prise d'armes contre lui en 1598;elles furent communes à la plus honorable partie des ci-toyens tic la Ville et des faubourgs, qui n'entrèrent dansaucune conspiration antinationale avec 'étranger: c'esten que j'ai cherché à faire connaitre par l'analyse deplusieurs procès-verbaux manuscrits, contemporains etofficiels, conservés dans les Archives communales, et quej'ai présentés à la Société d'Agriculture de [Sarthependant la tenue de ses séances générales, le 29 juin1860. De son côté, M. Lépeletier a parfaitement dé-montré le même proposition dans son Histoire complètedu Maine.

On se plaint souvent aujourd'hui de l'effacement descroyances et des caractères personnels; on blâme l'in-certitude des jugements, la mobilité des opinions, signesd'un effrayant égoïsme; les citoyens du Mans de 1589

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étaient loin de cette dégradation ils restèrent, en majo-rité, inébranlables dans leur foi, sans marchander le prixdes sacrifices nécessaires à sa défense, sous la devisechevaleresque: Fais ce que dois, advienne que pourra. ilne leur a manqué que le succès plus prompt et des histo-riens impartiaux pour mettre en évidence leur mérite etla justesse de leurs vues.

Le sort en était jeté cependant; le Roi, vainqueur parles armes d'une granite partie de ses nombreux sujets;ne pouvait se séparer ostensiblement et entièrement deses premiers auxiliaires mécontents de sa conversion,contre les conséquences de laquelle ils exigeaient impé-rieusement des garanties qui n'allaient A rien moins qu'àmaintenir constamment deux armées hostiles en présence;aussi fut-il obligé de faire sauter plusieurs tétes et plu-sieurs eltûteatix calvinistes.

Une sorte de pacification, relativement heureuse, maispeu sincère, couvrait de profonds dissentiments qui dejour en jour s'envenimaient. Le Souverain était lai-mêmeun mélange indéfinissable de velléités bienveillantes et de.passions ardentes qui lui nuiront beaucoup, au pointqu'au moment d'entreprendre une de ses guerres les plusimpopulaires, parce que les causes en étaient en partiesuspectées d'injustice, notamment de couvrir de honteuxprojets sur la femme du premier prince du sang, qui s'é-tait réfugiée à Bruxelles pour échapper à ses poursuites,il se sentait haï, abandonné, découragé. Ce fut alorsqu'un exécrabe assassin vint frapper un prince que l'ex-périence instruisait, et qui flurait pu, avec le temps,achever l'oeuvre commencée de ].a intérieure, rele-ver bien des ruines, et réparer leii fautes que ses gran-des qualités et ses malheurs ont disposé la postérité à luiPardonner.

Api-ès cette mort déplorable, les ambitions, les hainesse montrèrent plus hardiment et se convertirent en faits.Plusieurs seigneurs féodaux, sous le prétexte de réfor-mes religieuses, cherchèrent à se dédommager do leurspertes, se retranchèrent dans leurs chàteau, à peuprès comme au xi' siècle, et s'allièrent avec les protes-tants de l'Allemagne et de l'Angleterre, pour troubler,ravager le pays et ruiner l'autorité royale, tout en seposant en victimes. Partout éclata la guerre civile avecses excès de part et d'autre. De pareils désordres, dontles germes dataient de loin déjà, devaient, comme tou-jours, Faire arriver au pouvoir des hommes énergiques,comme les Richelieu et les Mazarin, A système dictato-

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ria1, ruineux pour les finances et les libertés provirichi-les. C'est ce qui arriva ; Sully avait imaginé la multipli-cité et la vénalité des offices ; il avait pratiqué tous lesexpédients tendant à augmenter la puissance et les plai.sirs de son maftre. La commune du Mans subit le sortde beaucoup d'autres; ravagées par la peste qui sévitdès la fin du xvi' siècle, par la Cu ?rre civile, par lafiscalité, une incroyable décadence de l'agriculture, laprovince du Maine et sa capitale, réduites en quelquequelquesorte au rôle de vassales de Paris où tout était resplen-dissant, perdirent graduellement, aux XVII' et xviii' siè-cles, leur initiative et la plupart de leurs franchises poli-tiques et administratives en compensation certainesindustries urbaines, avec le goût du luxe et des nouveau-tés, y firent assez de progrès.-

Le flans. - !nlpr. Ed. Monnoyer, place clos Jacobins.