spectroscopie optique de nouveaux matériaux à base de (ga

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N° d’ordre : 01 ISAL 0055 Année 2001 THESE présentée devant L’INSTITUT NATIONAL DES SCIENCES APPLIQUEES DE LYON pour obtenir LE GRADE DE DOCTEUR FORMATION DOCTORALE : Dispositifs de l’Electronique Intégrée ECOLE DOCTORALE : Electronique, Electrotechnique, Automatique par Laurent GRENOUILLET Ingénieur INSA de Lyon SPECTROSCOPIE OPTIQUE DE NOUVEAUX MATERIAUX A BASE DE (Ga,In)(N,As) POUR LA REALISATION DE COMPOSANTS A CAVITE VERTICALE EMETTANT A 1,3 mm SUR SUBSTRAT GaAs Soutenue le 20 Novembre 2001 devant la Commission d’Examen MM. C. BRU-CHEVALLIER Chargée de recherche CNRS Directrice de thèse C. FONTAINE Directeur de recherche CNRS Rapporteur P. GILET Ingénieur de recherche CEA Examinateur G. GUILLOT Professeur Examinateur J.C. HARMAND Directeur de recherche CNRS Examinateur H. MARIETTE Directeur de recherche CNRS Rapporteur E. TOURNIE Chargé de recherche CNRS Examinateur Cette thèse a été préparée au Laboratoire de Physique de la Matière de l’INSA de LYON

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N° d’ordre : 01 ISAL 0055 Année 2001

THESE

présentée

devant L’INSTITUT NATIONAL DES SCIENCES APPLIQUEES DE LYON

pour obtenir

LE GRADE DE DOCTEUR

FORMATION DOCTORALE : Dispositifs de l’Electronique Intégrée ECOLE DOCTORALE : Electronique, Electrotechnique, Automatique

par

Laurent GRENOUILLET

Ingénieur INSA de Lyon

SPECTROSCOPIE OPTIQUE DE NOUVEAUX MATERIAUX A BASE DE (Ga,In)(N,As)

POUR LA REALISATION DE COMPOSANTS A CAVITE VERTICALE EMETTANT A 1,3 µµm SUR SUBSTRAT GaAs

Soutenue le 20 Novembre 2001 devant la Commission d’Examen MM. C. BRU-CHEVALLIER Chargée de recherche CNRS Directrice de thèse

C. FONTAINE Directeur de recherche CNRS Rapporteur P. GILET Ingénieur de recherche CEA Examinateur G. GUILLOT Professeur Examinateur J.C. HARMAND Directeur de recherche CNRS Examinateur H. MARIETTE Directeur de recherche CNRS Rapporteur E. TOURNIE Chargé de recherche CNRS Examinateur

Cette thèse a été préparée au Laboratoire de Physique de la Matière de l’INSA de LYON

A François, l’absent qui nous manque

REMERCIEMENTS

Ce travail de thèse a été réalisé au Laboratoire de Physique de la Matière (LPM) de l’INSA de Lyon, ainsi qu’au Laboratoire Infrarouge du LETI/CEA Grenoble.

Je remercie très sincèrement Monsieur Gérard Guillot, directeur du LPM, de l’intérêt qu’il a porté à mon travail, et d’avoir présidé le jury de soutenance. J’ai par ailleurs beaucoup apprécié le dynamisme qu’il insuffle au laboratoire.

Mes remerciements vont également à Madame Catherine Bru-Chevallier, qui a encadré ce travail. Sa disponibilité, ses compétences scientifiques, ses précieux conseils et les discussions ouvertes que nous avons eues ont permis de réaliser ce travail dans un climat très favorable.

Je suis très honoré que Madame Chantal Fontaine ait accepté de juger ce travail en tant que rapporteur. Sa vision globale du sujet a été pour moi très bénéfique.

J’exprime mes sincères remerciements à Monsieur Henri Mariette pour son rapport et l’intérêt qu’il a montré pour ce travail. Lors des quelques échanges, toujours fructueux, que nous avons eus pendant ma thèse, j’ai apprécié ses compétences en physique, et ses idées foisonnantes dans le domaine des alliages semiconducteurs.

J’ai grandement apprécié la présence au sein de mon jury de Messieurs Eric Tournié et Jean-Christophe Harmand. Leur connaissance des nitrures à faible bande interdite, notamment en terme de croissance, a été pour moi très enrichissante.

Un merci très chaleureux à Philippe Gilet pour ces trois années d’amicale collaboration. Au delà des structures d’études qu’il m’a fournies, j’ai apprécié sa bonne humeur, sa constante envie d’avancer, et ses qualités scientifiques. J’ai été touché par la confiance qu’il m’a accordée. Je remercie Francis Bertrand et Pierre Vaudaine de m’avoir accueilli dans de si bonnes conditions au sein du Département Optronique / Laboratoire Infrarouge du CEA Grenoble, ainsi qu’André Chenevas-Paule, qui est à l’origine de ce sujet de thèse. Un grand merci à l’ensemble des personnes du LIR, notamment les « métallurgistes », pour leur bonne humeur quotidienne. Je voudrais citer plus particulièrement Alain Million pour ses compétences, son sérieux, et sa relecture critique et rapide de mon manuscrit (malgré son emploi du temps surchargé), Philippe Duvaut pour sa sympathie, sa maîtrise de la machine d’épitaxie qui m’a permis d’avoir du matériau de bonne qualité, Philippe Ballet pour son aide extrêmement précieuse en simulation et sa disponibilité à répondre à mes questions, Véronique Rouchon pour l’institution de la traditionnelle pause café du matin, Jacqueline Bablet pour les discussions intarissables que nous avons eues, et aussi

Régis Hamelin, Astrid Bain, Charlie Cigna, Bernard Aventurier, Jacques Baylet, Nicolas Dunoyer pour leurs incursions récréatives dans mon bureau.

Un merci spécial à François Mongellaz pour son humour et sa joie de vivre. Il embellissait avec brio notre quotidien. Son décès prématuré nous a tous beaucoup affecté.

Je remercie également Guy Rolland et Michel Burdin pour leurs caractérisations

par diffraction de rayons X, Cyril Vannuffel pour ses clichés de microscopie électronique en transmission, Gilbert Gaude pour le polissage des plaques, Claudine Petitprez pour la découpe des plaques, Philippe Grosse pour les fructueuses discussions et Fabien Filhol pour son schéma du VCSEL. Du côté du LPM, je salue l’ensemble des permanents (secrétaires, techniciens, enseignants-chercheurs, chercheurs) pour leur disponibilité. Je pense particulièrement à Stéphanie Salager, Claude Plantier, Martine Rojas, Manuel Bérenguer, Philippe Girard, Jean-Marie Bluet, Régis Orobtchouk, Georges Bremond. J’ai pu bénéficier au cours de ma thèse des compétences multiples des membres de l’équipe. J’en profite pour remercier Taha Benyattou pour son esprit critique lors des présentations orales, et pour ses nombreuses idées de manips.

Je tiens à remercier l’ensemble des thésards pour l’ambiance complice, débridée, et conviviale qui a plané au LPM tout au long de ma thèse : les « vieux » ex-thésards : Agnès, Ronan, José, Karim, Anis, Paolo, Muriel … les « jeunes » futurs docteurs : Matthieu, Bassem, Sébastien, Aldrice, Ilham, Philippe … Je termine par le noyau dur, l’équipe de choc, les adeptes de la pause café pas toujours intelligible et assurément hilare : Stéphanie Périchon, Christophe Busseret (le multitache de talent), Nicolas Baboux (le looser cohérent), Stéphane Fanget (le voyageur impénitent), Lilian Masarotto (Red Lyons assurément), Nabil Sghaier (animateur de génie, yyaaaaaarr !) et Yohan Désières (fondateur du LDB !). Encore merci pour ces petits moments qu’on n’oublie pas. Pour finir, un petit clin d’œil à ma famille pour ses encouragements, et à mes amis pour leur soutien et leur joie de vivre !

TABLE DES MATIERES INTRODUCTION GENERALE 6

CHAPITRE I :

LES NITRURES A FAIBLE BANDE INTERDITE

POUR L’EMISSION DE LUMIERE A 1,3 µm

SUR SUBSTRAT GaAs

9

I.1 Situation du sujet : les interconnexions optiques 11

I.1.1 Croissance d’Internet 11

I.1.2 Augmentation de la fréquence des circuits intégrés 11

I.2 Les VCSELs à 1,3 µm 13

I.2.1 Fonctionnement et avantages des VCSELs 13

I.2.2 Pourquoi 1,3 µm ? 15

I.2.2.1 Avantages des émetteurs à 1,3 µm 15

I.2.2.1 Problèmes technologiques des VCSELs à 1,3 µm 17

I.2.3 Les différentes approches à 1,3 µm 18

I.2.3.1 Approche sur substrat InP 18

I.2.3.2 Approche hybride 18

I.2.3.3 Approche monolithique sur substrat GaAs 19

I.2.3.3.a Puits quantiques de GaAsSb/GaAs 19

I.2.3.3.b Boîtes quantiques d’In(Ga)As/GaAs 19

I.2.3.3.c Puits quantiques de GaInNAs/GaAs 20

I.2.3.3.d Synthèse 20

I.3 Les nitrures d’éléments III-V pour l’émission à 1,3 µm 21

I.3.1 L’alliage ternaire GaNxAs1-x 21

I.3.2 L’alliage quaternaire Ga1-yInyNxAs1-x 24

I.4 Conclusion du Chapitre I 25

I.5 Références du Chapitre I 26

CHAPITRE II :

OPTIMISATION DE LA CROISSANCE

POUR L’EMISSION A 1,3 µm

29

II.1 La croissance des alliages à faible teneur en azote 31

II.1.1 Croissance par épitaxie par jets moléculaires 31

II.1.1.1 Principes et avantages 31

II.1.1.2 La croissance en présence d’azote 33

II.1.1.2.a Epitaxie en source gaz 33

II.1.1.2.b L’incorporation d’azote 35

II.1.2 Structures épitaxiées 35

II.2 Techniques de spectroscopie optique utilisées 38

II.2.1 La photoluminescence : principe et dispositif expérimental 38

II.2.2 La photoréflectivité 40

II.2.2.1 Principe 41

II.2.2.1.a Transitions bande à bande 42

II.1.1.2.b Transitions sur des états liés 43

II.2.2.2 Dispositif expérimental 44

II.3 L’émission à 1,3 µm sur substrat GaAs 47

II.3.1 Un paramètre clé : la température de croissance 47

II.3.2 Décalage de la bande interdite vers les plus grandes longueurs d’onde avec

l’incorporation d’azote

52

II.3.3 Dégradation de l’intensité de photoluminescence avec l’incorporation d’azote 53

II.3.4 Emission à 1,3 µm sur substrat GaAs à température ambiante 55

II.3.5 Importance du recuit post-croissance 57

II.3.5.1 Type de recuit 58

II.3.5.1.a Recuit in situ 58

II.3.5.1.a Recuit ex situ 58

II.3.5.1 Augmentation de l’intensité de photoluminescence 59

II.4 Conclusion du Chapitre II 62

II.5 Références du Chapitre II 63

CHAPITRE III :

PROPRIETES OPTIQUES ET ELECTRONIQUES

DES NITRURES A FAIBLE BANDE INTERDITE

67

III.1 Un paramètre de courbure géant 69

III.1.1 Diminution de l’énergie d’émission avec l’incorporation d’azote 69

III.1.2 Origine physique du paramètre de courbure géant : plusieurs approches 72

III.1.2.1 Modèle d’anticroisement de bande 72

III.1.2.2 Passage progressif dopage-alliage 77

III.1.2.2.a Raies discrètes dans les spectres de photoluminescence 77

III.1.2.2.b Les raies discrètes se transforment en bandes 79

III.1.3 Coexistence d’états localisés et d’états délocalisés 79

III.1.4 Discussion 80

III.2 Détermination expérimentale des niveaux d’énergie 82

III.2.1 Levée de dégénérescence trous lourds – trous légers dans des couches de

GaNAs contraintes

82

III.2.2 Niveaux d’énergie dans un puits quantique 87

III.2.2.1 Formalisme des matrices de transfert 87

III.2.2.1 Détermination expérimentale des niveaux d’énergie dans des puits quantiques de

GaIn(N)As/GaAs

87

III.3 Conclusion du Chapitre III 93

III.4 Références du Chapitre III 94

CHAPITRE IV :

PHENOMENES DE LOCALISATION

99

IV.1 Introduction 101

IV.2 Variation de l’énergie de bande interdite avec la température

dans les nitrures à faible bande interdite

103

IV.2.1 Considérations générales 103

IV.2.2 Effet de l’incorporation d’azote 104

IV.3 Mise en évidence d’une forte localisation des porteurs à basse

température

110

IV.3.1 Evolution atypique de l’énergie, de l’élargissement et de l’intensité des

spectres de PL avec l’incorporation d’azote

110

IV.3.2 Interprétation qualitative 113

IV.3.3 Confirmation des résultats sur d’autres échantillons et par d’autres auteurs 114

IV.3.4 Synthèse des effets de localisation 116

IV.4 Analyse quantitative des effets de localisation 119

IV.4.1 Etats localisés à très basse température 119

IV.4.1.1 Queue d’états à basse énergie 119

IV.4.1.2 Origine physique des états localisés 121

IV.4.1.2.a Calcul approché des niveaux des excitons liés à des agrégats d’azote 122

IV.4.1.2.b Fluctuations de potentiel dans la bande de conduction 125

IV.4.1.3 Etude en puissance 126

IV.4.1.3.a Décalage énergétique vers le bleu 128

IV.4.1.3.b Augmentation de la largeur à mi-hauteur avec la puissance 129

IV.4.1.3.c Intensité 130

IV.4.1.4 Conséquence des états localisés à très basse température 131

IV.4.1.4.a Spectre de PR 131

IV.4.1.4.b Décalage énergétique entre émission et absorption 132

IV.4.1.4.c Durée de vie radiative des états excitoniques localisés 134

IV.4.1.5 Conclusion 135

IV.4.2 Transfert excitonique à basse température 135

IV.4.2.1 Décalage vers les basses énergies du pic de PL 135

IV.4.2.2 Forte chute de l’intensité de PL intégrée 137

IV.4.2.2.a Considérations générales 137

IV.4.2.2.b Cas classique dans un semiconducteur 137

IV.4.2.2.c Cas particulier des nitrures à faible bande interdite 139

IV.4.2.2.d Bilan 141

IV.4.3 Transition états localisés-états délocalisés 142

IV.4.3.1 Décalage vers les hautes énergies du pic de PL 142

IV.4.3.2 Intensité de PL intégrée 143

IV.4.3.3 Largeur à mi-hauteur 144

IV.4.3.3.a Considérations générales 144

IV.4.3.3.b Evolution de la largeur à mi-hauteur 145

IV.4.3.4 Etude en puissance 147

IV.4.3.4.a Energie du pic de PL 148

IV.4.3.4.b Diminution de la largeur à mi-hauteur avec la puissance 148

IV.4.4 Etats délocalisés 149

IV.4.5 Liens avec la littérature 150

IV.4.6 Conclusion-Bilan 151

IV.5 Modélisation des effets de localisation 152

IV.6 Références du Chapitre IV 156

CHAPITRE V :

EFFET DU RECUIT SUR LES PROPRIETES OPTIQUES

DES ALLIAGES A BASE DE (Ga,In)(N,As)/GaAs

161

V.1 Introduction 163

V.2 Effet du recuit sur la photoluminescence de puits quantiques de

GaIn(N)As/GaAs

164

V.2.1 Augmentation de l’intensité de photoluminescence 164

V.2.2 Diminution des phénomènes de localisation de porteurs 164

V.2.2.1 Diminution de Tloc/deloc 164

V.2.2.2 Diminution de la largeur à mi-hauteur des spectres 166

V.2.3 Décalage vers le bleu de la photoluminescence après recuit 166

V.2.3.1 Observation du décalage vers le bleu 166

V.2.3.2 Origine du décalage vers le bleu 168

V.2.3.2.a Interdiffusion In-Ga dans les puits quantiques de GaInAs/GaAs 168

V.2.3.2.b Cas des puits quantiques de GaInNAs/GaAs 171

V.3 Origine du décalage vers le bleu du pic de photoluminescence

après recuit : étude spécifique

172

V.3.1 Couches épaisses de GaNAs/GaAs 172

V.3.1.1 Décalage vers le bleu de la photoluminescence 172

V.3.1.2 Aucune mise en évidence d’exodiffusion d’azote par diffraction de rayons X 173

V.3.2 Puits quantiques de GaNAs/GaAs 174

V.3.2.1 Etude de la photoluminescence à très basse température 175

V.3.2.1.a Diminution des effets de localisation induite par le recuit 175

V.3.2.1.b Décalage vers les hautes énergies induit par le recuit 177

V.3.2.2 Etude de la photoluminescence à température ambiante 179

V.3.2.3 Diffraction de rayons X 181

V.3.2.4 Synthèse 182

V.4 Elaboration d’un modèle simple : fluctuations de composition

d’azote dans le plan de croissance et homogénéisation avec le recuit

186

V.4.1 Approche qualitative 186

V.4.2 Approche quantitative 188

V.4.2.1 Modèle simple 188

V.4.2.2 Prise en compte des effets de confinement 190

V.4.3 Confrontation avec l’expérience 191

V.4.3.1 Résultats sur un puits quantique de GaNAs/GaAs de la littérature 192

V.4.3.2 Résultats sur les puits quantiques de GaNAs/GaAs étudiés 193

V.4.3.3 Discussion et synthèse 195

V.4.3.4 Liens avec la littérature 197

V.5 Conclusion du Chapitre V 198

V.6 Références du Chapitre V 199

CONCLUSION GENERALE 201

7

INTRODUCTION GENERALE

Les domaines des télécommunications et de la microélectronique connaissent une

croissance très importante, motivée par l’augmentation incessante des quantités d’information

à traiter et à véhiculer de plus en plus rapidement. Aujourd’hui, les prévisions convergent vers

la même nécessité de développer des liaisons optiques pour remplacer les liens électriques

utilisés actuellement mais qui ne pourront pas supporter l’augmentation vertigineuse des

débits. Quelles que soient les options envisagées, la réalisation d’une nouvelle génération de

diodes laser à émission verticale (VCSEL) sur substrat GaAs, émettant dans la gamme de

longueur d’onde privilégiée pour les télécommunications par fibres optiques (1,3 – 1,55 µm),

reste un passage obligé pour des questions de coût et de performances.

En effet, les solutions actuelles sont basées soit sur une technologie InP relativement

chère, soit sur des technologies complexes faisant appel à des procédés coûteux de report de

couches. Les études portent donc actuellement sur la croissance d’un nouveau type de

matériau épitaxié sur GaAs et capable d’émettre dans la gamme 1,3 – 1,55 µm.

Le matériau probablement le plus prometteur pour l’émission à 1,3 µm sur substrat

GaAs est l’alliage semiconducteur quaternaire GaInNAs. L’élaboration de ce nitrure

d’élément III-V, à faible bande interdite, est extrêmement récente puisqu’elle a été réalisée

pour la première fois en 1996 1. La communauté scientifique s’est alors immédiatement

lancée dans l’étude expérimentale et théorique de ce matériau aux propriétés très particulières,

similaires à celles du GaNAs qui est connu depuis une dizaine d’années.

Très vite, le GaInNAs, utilisé comme couche active de dispositifs optoélectroniques, a

permis l’élaboration de diodes laser émettant par la tranche à 1,3 µm sur substrat GaAs 2. Plus

récemment, l’obtention de VCSELs fonctionnant en continu à cette longueur d’onde, capables

1 KONDOW, M., UOMI, K., NIWA, A., KITATANI, T., WATAHIKI, S., YAZAWA, Y. GaInNAs: A Novel Material for Long-Wavelength-Range Laser Diodes with Excellent High-Temperature Performance Jpn. J. Appl. Phys., 1999, vol. 35, Part 1, n° 2B, pp. 1273-1275 2 NAKAHARA, K., KONDOW, M., KITATANI, T., LARSON, M.C., UOMI, K. 1.3 µm continuous-wave lasing operation in GaInNAs quantum-well lasers IEEE Photonics Technol. Lett., 1998, vol. 10, n° 4, pp. 487-488

8

de transmettre des données à très hauts débits (10 Gbit/s) 3, a montré la potentialité de ce

matériau, qui devrait être commercialisé dès l’année prochaine 4.

Néanmoins, en marge de ces résultats prometteurs, la physique des matériaux GaNAs

et GaInNAs aux propriétés atypiques, offre encore un large champ d’investigation.

Ce travail de thèse s’inscrit dans ce contexte et porte sur l’étude des propriétés

optiques des nitrures à faible bande interdite. La thèse s’est déroulée au Laboratoire de

Physique de la Matière (LPM) de l’INSA de Lyon, et également au Laboratoire Infrarouge

(LIR) du LETI/CEA Grenoble pour permettre une meilleure interaction avec les personnes

élaborant les structures que nous avons caractérisées.

Dans le Chapitre I, les nitrures à faible bande interdite sont présentés dans la

perspective des dispositifs pour lesquels ils sont dédiés, à savoir les émetteurs de lumière à la

longueur d’onde de 1,3 µm, et plus particulièrement les diodes laser à cavité verticale

émettant par la surface.

Dans le Chapitre II, nous présentons succinctement l’épitaxie par jets moléculaires,

technique de choix pour la croissance des nitrures d’éléments III-V, ainsi que les techniques

de spectroscopie optique utilisées dans ce travail : la photoluminescence et la

photoréflectivité. Nous décrivons ensuite les difficultés posées par l’incorporation d’azote

ainsi que notre contribution à l’optimisation des conditions de croissance. Nous montrons

enfin que la diminution de l’énergie de bande interdite avec l’incorporation d’azote dans des

puits quantiques de GaInAs/GaAs, permet d’obtenir l’émission à 1,3 µm sur substrat GaAs, et

ce à température ambiante.

Le Chapitre III est consacré dans un premiers temps à la mise en évidence

expérimentale de la diminution drastique de l’énergie de bande interdite avec l’incorporation

d’azote dans l’alliage GaNAs. Nous nous interrogeons ensuite sur la physique à l’origine de

ce comportement, et sur les modèles qui le décrivent. Un modèle phénoménologique de la

3 STEINLE, G., MEDERER, F., KICHERER, M., MICHALZIK, R., KRISTEN, G., EGOROV, A.YU., RIECHERT, H., WOLF, H.D., EBELING, K.J. Data transmission up to 10 Gbit/s with 1.3 µm wavelength InGaAsN VCSELs Electron. Lett., 2001, vol. 37, n° 10, pp. 632-634 4 ELECTRONIQUE INTERNATIONAL, 12 Avril 2001, n° 429, p 22

9

littérature 5 est en particulier mis à profit pour expliciter les résultats obtenus en

photoréflectivité, tant sur des couches de GaNAs/GaAs que sur des puits quantiques de

GaInNAs/GaAs.

Dans le Chapitre IV, nous mettons en évidence, par spectroscopie de

photoluminescence et de photoréflectivité dans la gamme de température 8 K – 300 K, une

forte localisation des porteurs à basses températures dans des puits quantiques de

GaInNAs/GaAs. Après avoir montré que l’azote est à l’origine de ces effets de localisation,

nous nous attachons à expliciter l’ensemble des phénomènes optiques observés.

Enfin, le Chapitre V porte sur l’effet du recuit thermique sur les propriétés optiques

des nitrures à faible bande interdite. Le recuit permet d’augmenter de manière conséquente les

rendements radiatifs des structures, et induit un décalage vers le bleu des longueurs d’onde

d’émission. Un intérêt particulier est porté sur l’origine physique de ce décalage et un modèle

quantitatif simple est développé pour rendre compte des phénomènes observés.

5 SHAN, W., WALUKIEWICZ, W., AGER III, J.W., HALLER, E.E., GEISZ, J.F., FRIEDMAN, D.J., OLSON, J.M., KURTZ, S.R. Band Anticrossing in GaInNAs Alloys Phys. Rev. Letters, 1999, vol. 82, n° 6, pp. 1221-1224

Chapitre I :

Les nitrures à faible bande interdite

pour l’émission de lumière

à 1,3 µµm sur substrat GaAs

Dans ce chapitre, nous présentons les nitrures à faible bande interdite, matériaux

semiconducteurs III-V qui font l’objet de ce mémoire. Mais avant d’aborder de près la

physique de ces alliages à faible teneur en azote, nous tenons à les situer par rapport aux

dispositifs pour lesquels ils sont dédiés, à savoir les émetteurs de lumière à la longueur d’onde

de 1,3 µm épitaxiés sur GaAs, et plus spécifiquement les lasers à cavité verticale émettant par

la surface. Ces dispositifs attirent particulièrement l’attention dans un contexte

d’augmentation vertigineuse des débits pour transmettre toujours plus d’informations.

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

10

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

11

I.1 Situation du sujet : les interconnexions optiques

Les prévisions de croissance dans les domaines des télécommunications, et de la

microélectronique sont telles que les liens électriques utilisés actuellement devront être

remplacés par des liaisons optiques, qui permettent de satisfaire les nouvelles exigences de

hauts débits. L’émergence des interconnexions optiques impose de développer de nouveaux

émetteurs de lumière, comme nous allons le voir.

I.1.1 Croissance d’Internet

Le trafic Internet subit actuellement une très forte croissance : la capacité de

transmission dans les fibres optiques doit tripler chaque année. Par comparaison, cette

croissance est plus rapide que la fameuse loi de Moore utilisée en microélectronique, qui

stipule le doublement des performances des circuits intégrés tous les 18 mois. Cette

‘explosion’ d’Internet nécessite de transmettre des informations à des débits de plus en plus

élevés et sur des distances de plus en plus longues. Ces informations sont actuellement

véhiculées dans des réseaux de fibres optiques qu’on appelle aussi réseaux datacoms (qui

vient de l’anglais data-communication networks). A court ou moyen terme, chaque fibre

devra transmettre des informations à des débits de 160 Gbit/s. A plus long terme, les fibres

supporteront des débits de 1 Tbit/s ! De telles spécifications imposent d’avoir des émetteurs

rapides, compacts, non refroidis, peu onéreux et émettant dans la fenêtre de transmission des

fibres en silice (1,3 et 1,55 µm). Aussi, un fort potentiel de recherche est engagé dans de telles

sources de lumière, capables de fonctionner en format parallèle ou en multiplexage en

longueur d’onde pour augmenter les débits, tout en maintenant des coûts de production

faibles.

I.1.2 Augmentation de la fréquence des circuits intégrés

Les circuits intégrés de la microélectronique d’aujourd’hui utilisent des

interconnexions électriques pour véhiculer les signaux. Ces interconnexions seront, dans un

futur plus ou moins proche, un goulot d’étranglement pour la rapidité des circuits. En effet,

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

12

une distorsion des signaux électriques apparaît pour des fréquences de modulation élevées

(typiquement 10 GHz). De plus, deux signaux ne peuvent pas être véhiculés simultanément

dans un même canal. Les interconnexions optiques permettent de pallier ces inconvénients.

En effet, elles supportent des fréquences beaucoup plus élevées. De plus, l’immunité

électromagnétique entre différentes longueurs d’onde permet de les transporter

simultanément. Cependant, pour voir le jour, les sources de ces interconnexions optiques

doivent pouvoir être hybridées sur silicium et présenter des tensions d’alimentation

compatibles avec les filières CMOS avancées. Par ailleurs, le silicium doit être transparent à

ces longueurs d’onde, et les guides optiques en silice les absorber le moins possible.

Ainsi, on voit la nécessité de fabriquer des émetteurs rapides et peu onéreux pour

accélérer l’accès à l’information, que ce soit via la communication entre ordinateurs

(croissance d’Internet) ou via la fréquence de travail de ces derniers (croissance de la

Microélectronique). Nous présentons maintenant les lasers à cavité verticale émettant par la

surface (VCSELs pour Vertical Cavity Surface Emitting Lasers), qui sont des candidats de

choix pour de telles applications. Après avoir brièvement décrit leurs fonctionnement et

principaux avantages, nous discutons la longueur d’onde d’émission ainsi que le type de

substrat adéquat. Enfin, nous passons en revue les différentes approches existantes ou

envisagées en terme de matériau pour les faire émettre à 1,3 µm.

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

13

I.2 Les VCSELs à 1,3 µµm

I.2.1 Fonctionnement et avantages des VCSELs

La Figure I-1 montre schématiquement le principe d’un VCSEL. A la différence d’un

laser semiconducteur classique, qui émet par la tranche, un VCSEL possède une cavité Fabry-

Pérot qui est verticale et de faible épaisseur. A l’intérieur de cette cavité sont placés des puits

quantiques qui constituent le milieu actif et fournissent le gain optique. Le faible volume de la

couche active impose que les miroirs de la cavité aient de fortes réflectivités pour obtenir un

gain suffisant pour qu’il y ait émission stimulée. Ces réflectivités élevées sont obtenues avec

des réflecteurs de Bragg distribués, qui sont des empilements de bicouches constituées de

deux couches quart d’onde d’indices différents. La réflectivité des miroirs est d’autant plus

forte que le nombre de bicouches est élevé et que l’écart d’indice entre deux couches

adjacentes est grand.

Pour que le VCSEL fonctionne, il faut qu’il y ait accord entre :

• la longueur d’onde d’émission du milieu actif,

• la longueur d’onde de résonance de la cavité Fabry-Pérot, et

• le domaine de longueur d’onde pour lequel les miroirs de Bragg sont réfléchissants.

Ces conditions nécessitent un contrôle très fin de l’épaisseur (précision inférieure à 1 %) et de

la composition des couches, mais ces exigences peuvent être satisfaites par les techniques de

croissance actuelles, telles que l’épitaxie par jets moléculaires (EJM) ou l’épitaxie en phase

vapeur par organométalliques (EPVOM).

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

14

Figure I-1 : Schéma d’un VCSEL émettant à 850 nm sur substrat GaAs. Dans ce cas, la couche active est

composée de puits quantiques de GaAs/AlGaAs.

Mis à part ces contraintes sur la croissance, les VCSELs présentent de nombreux

avantages. D’abord, ils émettent par la surface, ce qui permet d’utiliser les procédés de

fabrication (et de test) collectifs peu coûteux de la microélectronique et d’envisager la

fabrication de matrices 2D, notamment pour les interconnexions optiques. Ensuite, en terme

de caractéristiques, le faisceau laser émis par un VCSEL est monomode longitudinal par

construction, du fait de la très faible longueur de la cavité. Cette propriété est nécessaire pour

espérer transmettre des informations à très hauts débits. Le faisceau est multimode ou

monomode transverse selon que la dimension latérale effective du VCSEL est importante (50

µm) ou faible (5 µm). En outre, il est de symétrie circulaire et à faible divergence

(typiquement 9°), ce qui permet de coupler 80 % de la lumière avec une fibre optique

monomode sans ajout d’optique de focalisation. De plus, le faible volume actif permet aux

VCSELs d’avoir des courants de seuil très faibles et d’être modulés à des fréquences élevées.

Enfin, un autre avantage est que la longueur d’onde d’émission de ces dispositifs

optoélectroniques varie relativement peu avec la température. Le packaging de ces lasers est

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

15

donc simple, puisqu’il n’y a besoin ni d’optique de focalisation, ni de régulation en

température.

Ainsi, les VCSELs présentent des avantages en terme de performances et en terme de

coût sur les lasers émettant par la tranche. Les premiers VCSELs ont été commercialisés en

1996. Ces VCSELs fonctionnant à 850 nm sont maintenant la technologie de choix pour

transmettre des informations à des vitesses allant jusqu’à 10 Gbit/s dans des fibres

multimodes et sur de relativement courtes distances (500 m environ). Cependant, de

nombreux aspects techniques, notamment les nouvelles contraintes de débits, favoriseraient la

longueur d’onde de 1,3 µm comme longueur d’onde d’opération de tels systèmes dans des

fibres monomodes (cf Figure I-2).

I.2.2 Pourquoi 1,3 µµm ?

I.2.2.1 Avantages des émetteurs à 1,3 µµm

Le minimum de dispersion chromatique des fibres optiques monomodes standard se

situe à 1,3 µm. Des VCSELs émettant à cette longueur d’onde permettraient donc des débits

plus élevés qu’à 850 nm et sur des distances plus longues, puisque la dispersion chromatique

limite la fréquence de modulation des signaux et la distance de transmission. En outre à cette

longueur d’onde l’atténuation du signal par la fibre est très faible, autorisant des distances de

transmission de l’ordre de la dizaine de kilomètres. La Figure I-2 résume ces propos et montre

que des VCSELs émettant à 1,3 µm seraient compatibles avec le standard ’10 Gigabit

Ethernet’.

Par ailleurs, les problèmes de sécurité oculaire entrent en jeu que ce soit pour les liens

par fibre ou a fortiori pour les liens dans l’espace libre (télécommande par exemple). A 1,3

µm, l’ œil peut tolérer environ 10 fois plus de puissance qu’à 850 nm pour un même seuil de

dangerosité oculaire. Ceci correspond à 15 fois plus de photons injectés dans une fibre, et

autorise des distances de transmission encore plus grandes.

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

16

0,1 1 10 100 1000 100000,01

0,1

1

10

100

1000

Limitation due à la dispersionLim

itatio

n du

e à

l'atté

nuat

ion

Distance de transmission dans une fibre optique

en fonction du débit

VCSEL 1310 nm,VCSEL 850 nm,fibre multimode

Laser Fabry-Perot 1310 nmfibre monomode

Laser DFB 1310 nmou VCSEL 1310 nm,fibre monomode

Laser DFB 1550 nm, fibre monomode

10 Gigabit EthernetGigabit Ethernet

Débit (Mbit/s)

Dis

tanc

e de

tra

nsm

issi

on (

km)

Figure I-2 : Distance de transmission dans une fibre optique en fonction du débit, pour différents types de

lasers et de longueurs d’onde d’émission [1].

De plus, la tension d’alimentation d’un émetteur est directement liée à l’énergie de

bande interdite du matériau émetteur, et donc à la longueur d’onde d’émission. A 1,3 µm, les

tensions d’alimentation seraient compatibles avec les faibles tensions utilisées dans les filières

CMOS, et les substrats de silicium seraient transparents à ces signaux. Ces conditions sont

nécessaires pour pouvoir hybrider les VCSELs sur les circuits intégrés.

La Figure I-2 montre aussi que la longueur d’onde de 1,55 µm est encore plus

favorable que 1,3 µm en terme de débit et distance de transmission. Elle correspond en effet

au deuxième minimum (minimorum) d’absorption et de dispersion dans les fibres optiques en

silice. Néanmoins dans la filière GaAs, la plus prometteuse pour la réalisation de VCSELs, la

longueur d’onde de 1,3 µm constitue déjà une grande percée technologique. C’est ce que nous

nous proposons maintenant de montrer.

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

17

I.2.2.2 Problèmes technologiques des VCSELs à 1,3 µµm

En dépit de la forte demande pour les VCSELs à grande longueur d’onde, la

technologie n’est pas simple à développer à cause de challenges fondamentaux au niveau du

matériau. En effet, le système de matériau le plus établi pour l’émission à 1,3 µm avec des

lasers classiques est le système InGaAsP/InP. Dans ce système, la différence d’indices de

réfraction est faible (0,3 contre 0,6 pour le système GaAs/AlAs) si bien qu’il faut un grand

nombre d’empilements pour réaliser des miroirs de Bragg de haute réflectivité. Encore plus

rédhibitoire, la conductivité thermique des miroirs à base de ce système est très médiocre, et

le confinement des électrons dans la région active est faible, ce qui engendre une très

mauvaise tenue en température des dispositifs actuels (cf Tableau I-1).

FILIERE

AVANTAGES

INCONVENIENTS

GaAs

Substrat GaAs : • faible coût • report du GaAs/Si maîtrisé

Miroirs de Bragg AlGaAs/GaAs : • bonne conductivité thermique • bonne qualité mécanique

⇒ capacité à réaliser des VCSELs

Emission à 850 – 980 nm : • perte dans la silice • absorption dans silicium • pas de sécurité oculaire • tension de seuil incompatible

avec filière CMOS avancée ⇒ bande spectrale inadaptée

InP

Emission à 1300 – 1550 nm : • absorption minimale de la

silice • transparence dans le silicium • sécurité oculaire • tension de seuil compatible

avec filière CMOS avancée Substrat InP :

• réalisation de MOEMS, de dispositifs accordables

⇒ bande spectrale adaptée

Substrat InP : • coût élevé • mauvais confinement

électronique Miroirs de Bragg InGaAsP/InP :

• mauvaise conductivité thermique

⇒ nécessité de stabiliser les lasers en température ⇒ difficulté à fabriquer des VCSELs

Tableau I-1 : Avantages et inconvénients des deux filières GaAs et InP pour la réalisation de VCSELs.

Quant au système AlAs/GaAs, il obtient tous les avantages pour les miroirs de Bragg

mais malheureusement il n’existe pas de matériau semiconducteur simple capable d’émettre à

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

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18

1,3 µm sur substrat GaAs. Aussi, différentes approches sont aujourd’hui étudiées pour

synthétiser des matériaux émettant à cette longueur d’onde sur ce type de substrat. Qui plus

est, les substrats GaAs existent en diamètres plus grands que les substrats InP et ils sont moins

coûteux. La filière GaAs devrait donc engendrer une baisse du coût des composants.

I.2.3 Les différentes approches à 1,3 µµm

Différentes approches sont aujourd’hui étudiées pour obtenir des VCSELs émettant à

1,3 µm. La filière InP conserve une petite avance en terme de maîtrise du matériau émetteur et

permet la réalisation de micro-systèmes électro-mécaniques (MOEMS). Si l’approche hybride

permet d’allier les avantages des deux filières grâce au report de couches, elle reste coûteuse

et complexe. Ce sont donc les nouveaux matériaux émettant à 1,3 µm sur substrats GaAs qui

attirent le plus l’attention.

I.2.3.1 approche sur substrat InP

La filière InP fut dans un premier temps la seule à permettre la réalisation de VCSELs

émettant à 1,3 µm [2]. Depuis, les performances se sont améliorées mais que ce soit avec des

miroirs à base de semiconducteurs ou de diélectriques, les résultats ne sont pas excellents à

cause des problèmes cités dans le Tableau I-1.

I.2.3.2 approche hybride

Cette approche tire partie des avantages des deux filières : elle utilise donc des miroirs

de Bragg GaAs/AlAs et des couches actives d’InGaAsP/InP [3,4]. En revanche, comme les

paramètres de maille de l’InP et du GaAs sont trop différents pour épitaxier le VCSEL de

manière monolithique, les miroirs et la couche active sont fabriqués séparément, puis

assemblés par collage moléculaire. Ces dispositifs présentent de bonnes caractéristiques mais

sont très lourds à fabriquer et coûteux, rendant la commercialisation très difficile.

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

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19

I.2.3.3 approche monolithique sur substrat GaAs

Trois types de matériaux sont actuellement étudiés pour obtenir l’émission à 1,3 µm

sur substrats GaAs :

• les puits quantiques de GaAsSb/GaAs,

• les boîtes quantiques d’In(Ga)As/GaAs,

• les puits quantiques de GaInNAs/GaAs.

Des approches plus exotiques qui combinent ces trois types de matériaux sont aussi à

l’étude, comme les boîtes d’InAs/GaInNAs [5] ou de GaInNAs/GaAs [6, 7] ou encore les

alliages GaAsSbN [8] et GaInAsSbN [9].

I.2.3.3.a Puits quantiques de GaAsSb/GaAs

Les antimoniures tels que GaAsSb sont capables d’émettre à 1.3 µm sur GaAs et

récemment les premiers VCSELs à 1,3 µm ont été réalisés [10]. Cette solution semble

prometteuse, en dépit d’une très forte contrainte présente dans les puits de GaAsSb/GaAs et

du fait que les hétérostructures GaAsSb/GaAs sont de type II.

I.2.3.3.b Boîtes quantiques d’In(Ga)As/GaAs

Les boîtes quantiques sont des objets tridimensionnels de taille nanométrique (10 nm

de hauteur, 30 nm de large) constitués par un matériau semiconducteur (InAs ou InGaAs)

dont l’énergie de bande interdite est plus faible que celle du matériau constituant la matrice

(GaAs). La formation de ces îlots cohérents provient de la relaxation élastique de la couche

d’In(Ga)As contrainte. Le confinement tridimensionnel des porteurs dans ces boîtes engendre

des objets extrêmement radiatifs et des lasers avec de très bonnes tenues en température et des

courants de seuil très bas. En effet, il est facile d’obtenir l’inversion de population du fait de

la faible densité d’états. Cependant, la densité de matière relativement faible avec ces objets

entraîne peu de gain optique et donc des puissances de sortie peu élevées. Leur réalisation

nécessite un contrôle très fin de la croissance, et notamment de la taille des boîtes qui

conditionne la longueur d’onde d’émission. Ceci pose des problèmes en terme d’homogénéité

et de reproductibilité.

Récemment, le premier VCSEL utilisant des boîtes d’InGaAs/GaAs et émettant à 1,3

µm a vu le jour [11]. Notons cependant qu’il ne fonctionne qu’en régime pulsé.

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

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20

I.2.3.3.c Puits quantiques de GaInNAs/GaAs

Le matériau GaInNAs est probablement le plus prometteur pour l’émission à 1,3 µm

sur substrat GaAs. Ce matériau, qui est constitué de GaInAs dans lequel est incorporé une

faible fraction d’azote (quelques pourcents), a été utilisé pour la première fois en 1996 [12].

Quatre ans plus tard, les premiers résultats de VCSELs à 1,3 µm sur substrats GaAs utilisant

ce matériau comme couche active sont déjà publiés [13]. Ce matériau est présenté plus en

détail dans le paragraphe I.3

I.2.3.3.d Synthèse

Le Tableau I-2 fait une synthèse exhaustive des premiers VCSELs émettant à des

longueurs d’onde proches de 1,3 µm sur GaAs à température ambiante, en utilisant les

nouveaux matériaux que nous avons présentés. Ce tableau montre que les 3 approches sont

d’une actualité brûlante : il est susceptible de changer à tout moment. Néanmoins, on

remarque que le quaternaire GaInNAs possède une certaine avance.

Date de publication

Matériau actif dans le VCSEL épitaxié

sur GaAs

Zone active

λλ émission laser

à 300 K

Densité seuil (électrique ou

optique)

Pompage

Références

04/1999 GaInNAs Puits quantiques 1,285 µm 1,6 kW/cm2 Optique, pulsé Ellmers et al. [14]

01/2000 GaInNAs Puits quantiques 1,266 µm 1,6 kW/cm2 Optique, pulsé Wagner et al. [15]

05/2000 GaInNAs Puits quantiques 1,200 µm 2,5 kA/cm2 Electrique, pulsé Coldren et al. [16]

08/2000 InAs-InGaAs Boîtes quantiques 1,301 µm 2,8 kA/cm2 Electrique, pulsé Lott et al. [11]

08/2000 GaInNAs Puits quantiques 1,294 µm 4 kA/cm2 Electrique, continu Choquette et al. [13]

11/2000 GaInNAs Puits quantiques 1,262 µm 7,6 kA/cm2 Electrique, continu Sato et al. [17]

12/2000 GaAsSb Puits quantiques 1,288 µm Equivalent à 25 kA/cm2

Optique, pulsé Quochi et al. [18]

01/2001 GaInNAs Puits quantiques 1,284 µm 6 kA/cm2 Electrique, continu Steinle et al. [19]

03/2001 GaInNAs Puits quantiques 1,262 – 1,305 µm

6,7 kA/cm2 et 38 kA/cm2

Electrique, continu Jackson et al. [20]

04/2001 GaAsSb Puits quantiques 1,295 µm 3,3 kA/cm2 Electrique, continu Anan et al. [10]

05/2001 GaInNAs Puits quantiques 1,303 – 1,306 µm

3 kA/cm2 Electrique, continu Steinle et al. [21]

Tableau I-2 : Synthèse des VCSELs émettant à λλ ≅≅ 1,3 µµm sur substrat GaAs à température ambiante.

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

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21

I.3 Les nitrures d’éléments III-V pour l’émission à 1,3 µµm

Nous présentons maintenant les nitrures d’éléments III-V, à faible bande interdite. Ces

alliages semiconducteurs à bande interdite directe, dont fait partie le GaInNAs, ouvrent la

voie à la réalisation de matériaux émetteurs ou détecteurs dans le proche infrarouge (1,3 µm)

épitaxiés sur substrats GaAs. Ils sont composés d’éléments III et V de la classification

périodique, un des éléments V étant l’azote en faible quantité (III-Nx-V1-x, avec x < 0,05).

I.3.1 L’alliage ternaire GaNxAs1-x

4,4 4,6 4,8 5,0 5,2 5,4 5,6 5,8 6,0 6,2 6,4 6,6-0,5

0,0

0,5

1,0

1,5

2,0

2,5

3,0

3,5

4,0

GaInAsGaNAs

GaInNAs1.3 µµm

c-GaN

InSb

GaPAlAs

Si

GeInAs

GaSb

InPGaAs

Ene

rgie

de

band

e in

terd

ite (

eV)

Paramètre de maille (Å)

Figure I-3 : Valeur de l’énergie de bande interdite en fonction du paramètre de maille pour les

semiconducteurs les plus usuels.

La Figure I-3 montre la valeur de l’énergie de bande interdite des principaux

semiconducteurs binaires III-V en fonction de leur paramètre de maille. La tendance générale

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

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22

qui apparaît est la suivante : plus le paramètre de maille est faible, plus l’énergie de bande

interdite est élevée. Ceci vaut également pour les alliages ternaires (GaInAs, InAsSb,

GaAsSb, …), dont l’énergie de bande interdite s’écarte peu de la moyenne pondérée des

bandes interdites des deux composés binaires les constituant. Ainsi, si un alliage ternaire est

composé des binaires A et B avec les fractions x et (1-x) respectivement, son énergie de bande

interdite s’exprime par :

( ) ( ) ( ) ( ) ( )x1xbBEx1AExBAE ggx1xg −⋅⋅−⋅−+⋅=− Équation I-1

où le dernier terme traduit l’écart à la loi d’interpolation linéaire, avec b coefficient de

courbure de l’alliage. Ce facteur est généralement de l’ordre de la fraction d’électronvolt et

indépendant de la composition. Par exemple pour le Ga1-xInxAs, b est égal à 0,45 eV.

L’origine physique du coefficient de courbure, qui représente la non-linéarité, est le

désordre. Ce désordre est échantillonné par la sonde, l’exciton. Plus l’exciton est localisé,

moins il traduit la composition moyenne de l’alliage, et plus il révèle sa composition locale.

Cet effet d’environnement local est encore appelé désordre d’alliage. Le coefficient de

courbure est donc d’autant plus important que le désordre d’alliage est grand et que la sonde

est petite.

En utilisant du GaAs et du GaN, tous les deux de bande interdite directe et d’énergie

respective 1,42 eV (proche infrarouge) et 3,4 eV (ultraviolet) à température ambiante, on

pouvait s’attendre à former un alliage GaNxAs1-x qui pouvait décrire tout le spectre du visible

selon les valeurs de x. Or, quand au début des années 1990 la synthèse des alliages GaNAs à

faible teneur en azote devint techniquement possible avec l’apparition des cellules plasma [22,

23], un fort décalage vers l’infrarouge des mesures d’absorption [24] et de photoluminescence

[22, 23, 24] fut observé, suggérant une diminution de l’énergie de bande interdite du

GaNxAs1-x avec l’incorporation d’azote. Ce résultat, bien que surprenant, fut rapidement

appuyé par des travaux théoriques [25] : l’alliage GaNxAs1-x (x < 0,05) possède en fait un

paramètre de courbure géant (cf Figure I-3). Ce paramètre varie avec la composition d’azote :

sa valeur est de l’ordre de 20 à 25 eV pour x < 1%, et de 15 à 20 eV pour x > 1% [26, 27].

La structure électronique de l’alliage GaNxAs1-x est donc très différente de celle de ses

binaires parents GaAs et GaN. L’origine de cet écart à la loi des mélanges réside dans la

grande différence entre l’atome d’azote et l’atome d’arsenic auquel il se substitue, en terme

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

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23

d’électronégativité et en terme de taille. Ceci est illustré dans la partie de la table de

Mendeleiev reproduite au Tableau I-3. L’exciton sera fortement localisé à l’azote dans les

alliages faiblement nitrurés, et donc très sensible à l’environnement local, induisant le

paramètre de courbure ‘géant’.

Les propriétés très particulières des alliages GaNxAs1-x et Ga1-yInyNxAs1-x que nous

développons dans les chapitres suivants découlent du désordre d’alliage important.

COLONNE II

COLONNE III

COLONNE IV

COLONNE V

COLONNE VI

Be (4) Rayon atomique (Å) 0.975

Electronégativité 1.5

B (5) 0.853 2.0

C (6) 0.774 2.5

N (7) 0.719 3.0

O (8) 0.678 3.5

Mg (12) 1.301 1.2

Al (13) 1.230 1.5

Si (14) 1.173 1.8

P (15) 1.128 2.1

S (16) 1.127 2.5

Zn (30) 1.225 1.6

Ga (31) 1.225 1.6

Ge (32) 1.225 1.8

As (33) 1.225 2.0

Se (34) 1.225 2.4

Cd (48) 1.405 1.7

In (49) 1.405 1.7

Sn (50) 1.405 1.8

Sb (51) 1.405 1.9

Te (52) 1.405 2.1

Tableau I-3 : Eléments de la classification périodique avec leur rayon atomique et leur électronégativité

selon Pauling.

A titre d’exemple, l’incorporation de seulement 2 % d’azote dans GaAs diminue

d’environ 200 meV l’énergie de bande interdite de l’alliage formé. Ainsi, le GaNAs permet

potentiellement de contrôler une gamme d’énergie importante dans l’infrarouge, tout en

variant peu le pourcentage d’azote incorporé c’est-à-dire en restant proche du paramètre de

maille du GaAs. Le faible désaccord de maille entre GaNAs et GaAs ouvre la voie à l’épitaxie

pseudomorphique de GaNAs/GaAs (cf Figure I-3). On notera par ailleurs que cet avantage

peut devenir un inconvénient si l’incorporation d’azote est mal contrôlée. En effet, une faible

variation sur l’incorporation d’azote entraînera des fluctuations importantes de la gamme

d’énergies de bande interdite.

La diminution de l’énergie de bande interdite avec l’incorporation d’azote est

également effective avec le matériau GaInAs.

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

24

I.3.2 L’alliage quaternaire Ga1-yInyNxAs1-x

L’alliage ternaire Ga1-yInyAs, qui présente d’excellentes propriétés optiques, ne permet

pas d’obtenir une émission au delà de la longueur d’onde de 1,2 µm sur substrat GaAs (100).

En effet, le désaccord de paramètre de maille entre le GaAs et l’InAs limite la croissance

pseudomorphique de Ga1-yInyAs sur GaAs à des épaisseurs faibles (puits quantiques) et des

pourcentages d’indium restreints (y < 0,4). Aussi, en 1996, Kondow et al. [12] proposèrent

d’utiliser conjointement l’azote et l’indium pour former l’alliage quaternaire Ga1-yInyNxAs1-x.

Cet alliage utilise l’effet cumulé de diminution de l’énergie de bande interdite par l’azote et

l’indium. Par ailleurs le GaNAs étant contraint en tension et le GaInAs en compression sur le

GaAs, il est possible de faire croître du matériau GaInNAs en accord de maille sur GaAs.

Ainsi, cet alliage permet la croissance pseudomorphique sur substrat GaAs d’un matériau

dont l’énergie de bande interdite est inférieure à 1 eV, comme l’illustre la Figure I-3. Qui plus

est, il autorise une grande flexibilité en terme d’énergie de bande interdite et d’état de

contraintes. C’est donc un candidat pour l’émission aux longueurs d’onde des

télécommunications optiques [12], jusqu’alors réservée à la filière InP, mais aussi pour la

réalisation de cellules solaires multispectrales sur substrats GaAs ou Ge [28, 29], de

transistors bipolaires à hétéro-jonctions [30], ou encore de photodiodes à avalanche à très

faible courant d’obscurité [31]. Par ailleurs, cette famille d’alliages semiconducteurs bénéficie

d’un large décalage de bande de conduction [12], ce qui permet un bien meilleur confinement

des porteurs de charge les plus légers, les électrons, dans la couche active (cf Figure I-4).

Figure I-4 : Illustration du meilleur confinement électronique attendu avec le matériau GaInNAs, par

rapport au matériau GaInPAs [12].

BC

BVBV

BC

Ga0.9In0.1P0.8As0.2 Ga0.7In0.3P0.4As0.6 Ga0.7In0.3N0.02As0.98 GaAs

BC

BVBV

BC

Ga0.9In0.1P0.8As0.2 Ga0.7In0.3P0.4As0.6 Ga0.7In0.3N0.02As0.98 GaAs

~ 100 meV

~ 500 meV

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

25

La réalisation de lasers avec de bonnes tenues en température, donc non refroidis, est

alors envisageable.

Le matériau GaInNAs a effectivement de réelles potentialités en optoélectronique,

puisque très vite des lasers à émission continue par la tranche, émettant à 1,3 µm [32], ont été

réalisés. Puis des VCSELs pompés électriquement, fonctionnant également en continu et à 1,3

µm [13, 19, 20, 21], ont vu le jour. Ce quaternaire a aussi permis l’obtention de diodes lasers

émettant à des longueurs d’onde aussi grandes que 1,52 µm sur substrat GaAs [33]. En terme

de durée de vie, des lasers fonctionnant plus de 1000 heures ont déjà été obtenus [34]. La

commercialisation de VCSELs à 1,3 µm sur substrat GaAs utilisant ce matériau comme

matériau actif a été annoncée par la société Infineon pour début 2002 [35]. Ceci montre

définitivement la potentialité de ce matériau pour les applications optoélectroniques visées.

I.4 Conclusion du Chapitre I

Ce chapitre permet de comprendre le besoin de réaliser des émetteurs lasers compacts

et bas coût aux longueurs d’onde stratégiques des télécommunications optiques, pour

satisfaire les exigences toujours accrues de débits dans les systèmes de transmissions de

données. Les lasers à cavité verticale émettant par la surface (VCSELs) sont des candidats

idéaux, mais nécessitent le développement de nouvelles couches actives. Le candidat le plus

prometteur pour l’émission à 1,3 µm sur substrat GaAs est actuellement l’alliage

semiconducteur quaternaire GaInNAs, qui devrait engendrer la commercialisation d’émetteurs

dans les prochains mois.

Néanmoins, en marge de ces résultats prometteurs, la physique de ces matériaux aux

propriétés très particulières offre encore un large champ d’investigation. Les chapitres

suivants sont donc principalement consacrés à l’étude des propriétés optiques des nitrures à

faible bande interdite.

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

26

I.5 Références du Chapitre I

1 HARRIS, J.S. A new Material in the Race for Long Wavelength VCSELs [on line] http://www-ee.stanford.edu/~harris/Agilent_Seminar.pdf, consulté le 21 juillet 2001

2 SALET, P., GABORIT, F., PAGNOD-ROSSIAUX, P., PLAIS, A., DEROUIN, E., PASQUIER, J., JACQUET, J. Room temperature pulsed operation of 1.3 µm vertical cavity lasers including bottom InGaAsP/InP multilayer Bragg mirrors Electron. Lett., 1997, vol. 33, n° 24, pp. 2048-2049

3 JAYARAMAN, V., GESKE, J.C., MACDOUGAL, M.H., PETER, F.H., LOWES, T.D., CHAR, T.T. Uniform threshold current, continuous wave, single mode 1300 nm vertical cavity lasers from 0 to 70°C Electron. Lett., 1998, vol. 34, n° 14, pp. 1405-1406

4 QIAN, Y., ZHU, Z.H., LO, L.H. Long wavelength (1.3 µm) vertical-cavity surface-emitting lasers with a wafer-bonded mirror and an oxygen-implanted confinement region Appl. Phys. Lett., 1997, vol. 71, n° 1, pp. 25-27

5 EGOROV, A.YU., BEDAREV, D., BERNKLAU, D., DUMITRAS, G., RIECHERT, H. Self-Assembled InAs Quantum Dots in an InGaAsN Matrix on GaAs Phys. Stat. Sol. (b), 2001, vol. 224, n° 3, pp. 839-843

6 BALLET, P., GILET, P., GRENOUILLET, L., DUVAUT, P., FEUILLET, G., MILLION, A. Self-assembled GaInNAs/GaAs quantum dots : the role of nitrogen incorporation Mat. Res. Soc. Symp. Proc., 2001, vol. 642, pp. J3.33.1-J3.33.6

7 MAKINO, S., MIYAMOTO, T., KAGEYAMA, T., NISHIYAMA, N., KOYAMA, F., IGA, K. GaInNAs/GaAs quantum dots grown by chemical beam epitaxy J. of Cryst. Growth, 2000, vol. 221, pp. 561-565

8 HARMAND, J.C., UNGARO, G., LARGEAU, L., LE ROUX, G. Comparison of nitrogen incorporation in molecular-beam epitaxy of GaAsN, GaInAsN, and GaAsSbN Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 77, n° 16, pp. 2482-2484

9 YANG, X., HEROUX, J.B., MEI, L.F., WANG, W.I. InGaAsNSb/GaAs quantum wells for 1.55 µm lasers grown by molecular-beam epitaxy Appl. Phys. Lett., 2001, vol. 78, n° 26, pp. 4068-4070

10 ANAN, T., YAMADA, M., NISHI, K., KURIHARA, K., TOKUTOME, K., KAMEI, A., SUGOU, S. Continuous-wave operation of 1.3 µm GaAsSb/GaAs VCSELs Electron. Lett., 2001, vol. 37, n° 9, pp. 566-567

11 LOTT, J.A., LEDENTSOV, N.N., USTINOV, V.M., MALEEV, N.A., ZHUKOV, A.E., KOVSH, A.R., MAXIMOV, M.V., VOLOVIK, B.V., ALFEROV, ZH.I., BIMBERG, D. InAs-InGaAs quantum dot VCSELs on GaAs substrates emitting at 1.3 µm Electron. Lett., 2000, vol. 36, n° 16, pp. 1384-1385

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

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27

12 KONDOW, M., UOMI, K., NIWA, A., KITATANI, T., WATAHIKI, S., YAZAWA, Y. GaInNAs: A Novel Material for Long-Wavelength-Range Laser Diodes with Excellent High-Temperature Performance Jpn. J. Appl. Phys., 1996, vol. 35, Part 1, n° 2B, pp. 1273-1275

13 CHOQUETTE, K.D., KLEM, J.F., FISCHER, A.J., BLUM, O., ALLERMAN, A.A., FRITZ, I.J., KURTZ, S.R., BREILAND, W.G., SIEG, R., GEIB, K.M., SCOTT, J.W., NAONE, R.L. Room temperature continuous wave InGaAsN quantum well vertical-cavity lasers emitting at 1.3 µm Electron. Lett., 2000, vol. 36, n° 16, pp. 1388-1390

14 ELLMERS, C., HÖHNSDORF, F., KOCH, J., AGERT, C., LEU, S.,KARAISKAJ, D., HOFMANN, M., STOLZ, W., RÜHLE, W.W. Ultrafast (GaIn)(NAs)/GaAs vertical-cavity surface-emitting laser for the 1.3 µm wavelength regime Appl. Phys. Lett., 2000,vol. 74, n° 16, pp. 2271-2273

15 WAGNER, A., ELLMERS, C., HÖHNSDORF, F., KOCH, J., AGERT, C., LEU, S., HOFMANN, M., STOLZ, W., RÜHLE, W.W. (GaIn)(NAs)/GaAs vertical-cavity surface-emitting laser with ultrabroad temperature operation range Appl. Phys. Lett., 2000,vol. 76, n° 3, pp. 271-272

16 COLDREN, C.W., LARSON, M.C., SPRUYTTE, S.G., HARRIS, J.S. 1200 nm GaAs-based vertical cavity lasers employing GaInNAs multiquantum well active regions Electron. Lett., 2000, vol. 36, n° 11, pp. 951-952

17 SATO, S., NISHIYAMA, N., MIYAMOTO, T., TAKAHASHI, T., JIKUTANI, N., ARAI, M., MATSUTANI, A., KOYAMA, F., IGA, K. Continuous wave operation of 1.26 µm GaInNAs/GaAs vertical-cavity surface-emitting lasers grown by metalorganic chemical vapor deposition Electron. Lett., 2000, vol. 36, n° 24, pp. 2018-2019

18 QUOCHI, F., CUNNINGHAM, J.E., DINU, M., SHAH, J. Room temperature operation of GaAsSb/GaAs quantum well VCSELs at 1.29 µm Electron. Lett., 2000, vol. 36, n° 25, pp. 2075-2076

19 STEINLE, G., RIECHERT, H., EGOROV, A.YU. Monolithic VCSEL with InGaAsN active region emitting at 1.28 µm and CW output power exceeding 500 µW at room temperature Electron. Lett., 2001, vol. 37, n° 2, pp. 93-95

20 JACKSON, A.W., NAONE, R.L., DALBERTH, M.J., SMITH, J.M., MALONE, K.J., KISKER, D.W., KLEM, J.F., CHOQUETTE, K.D., SERKLAND, D.K., GEIB, K.M. OC-48 capable InGaAsN vertical cavity lasers Electron. Lett., 2001, vol. 37, n° 6, pp. 355-356

21 STEINLE, G., MEDERER, F., KICHERER, M., MICHALZIK, R., KRISTEN, G., EGOROV, A.YU., RIECHERT, H., WOLF, H.D., EBELING, K.J. Data transmission up to 10 Gbit/s with 1.3 µm wavelength InGaAsN VCSELs Electron. Lett., 2001, vol. 37, n° 10, pp. 632-634

22 WEYERS, M., SATO, M. Growth of GaAsN alloys by low-pressure metalorganic chemical vapor deposition using plasma-cracked NH3 Appl. Phys. Lett., 1993, vol. 62, n° 12, pp. 1396-1398

Chapitre I : Les nitrures à faible bande interdite pour l’émission de lumière à 1,3µm sur substrat GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

28

23 SATO, M. Growth of GaAsN by low-pressure metalorganic chemical vapor deposition using plasma-cracked N2

J. of Cryst. Growth, 1994, vol. 145, pp. 99-103

24 WEYERS, M., SATO, M., ANDO, H. Red Shift of Photoluminescence and Absorption in Dilute GaAsN Alloy Layers Jpn. J. Appl. Phys., 1992, vol. 31, Part 2, n° 7A, pp. L853-L855

25 WEI, S.H., ZUNGER, A. Giant and Composition-Dependent Optical Bowing Coefficient in GaAsN Alloys Phys. Rev. Lett., 1996, vol. 76, n° 4, pp. 664-667

26 ONABE, K., AOKI, D., WU, J., YAGUCHI, H., SHIRAKI, Y. MOVPE Growth and Luminescence Properties of GaAsN Alloys with Higher Nitrogen Concentrations Phys. Stat. Sol. (a), 1999, vol. 176, pp. 231-235

27 GRÜNING, H., CHEN, L., HARTMANN, T., KLAR, P.J., HEIMBRODT, W., HÖHNSDORF, F., KOCH, J., STOLZ, W. Optical Spectroscopic Studies of N-Related Bands in Ga(N,As) Phys. Stat. Sol. (b), 1999, vol. 215, pp. 39-45

28 KURTZ, S.R., ALLERMAN, A.A., JONES, E.D., GEE, J.M., BANAS, J.J., HAMMONS, B.E. InGaAsN solar cells with 1.0 eV band gap, lattice matched to GaAs Appl. Phys. Lett., 1999, vol. 74, n° 5, pp. 729-731

29 FRIEDMAN, D.J., GEISZ, J.F., KURTZ, S.R., OLSON, J.M. 1-eV solar cells with GaInNAs active layer J. of Cryst. Growth, 1998, vol. 195, pp. 409-415

30 CHANG, P.C., BACA, A.G., LI, N.Y., XIE, X.M., HOU, H.Q., ARMOUR, E. InGaP/InGaAsN/GaAs NpN double-heterojunction bipolar transistor Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 76, n° 16, pp. 2262-2264

31 KINSEY, G., CAMPBELL, J.C. High-speed Photodiode Structures Summer School and European Optical Society Topical Meeting on Semiconductor Microcavity Photonics, 2000, 21-25 Octobre, Monte Verita, Ascona, Switzerland, 32 p, Présentation orale

32 NAKAHARA, K., KONDOW, M., KITATANI, T., LARSON, M.C., UOMI, K. 1.3 µm continuous-wave lasing operation in GaInNAs quantum-well lasers IEEE Photonics Technol. Lett., 1998, vol. 10, n° 4, pp. 487-488

33 FISCHER, M., REINHARDT, M., FORCHEL, A. GaInNAs/GaAs laser diodes operating at 1.52 µm Electron. Lett., 2000, vol. 36, n° 14, pp. 1208-1209

34 KONDOW, M., KITATANI, T., NAKAHARA, K., TANAKA, T. A 1.3-µm GaInNAs Laser Diode with a Lifetime of over 1000 Hours Jpn. J. Appl. Phys., 1999, vol. 38, n° 12A, part 2, pp. L1355-L1356

35 Infineon produira des diodes VCSEL 1300 nm à partir de 2002 ELECTRONIQUE INTERNATIONAL, 12 Avril 2001, n° 429, p 22

Chapitre II :

Optimisation de la croissance

pour l’émission à 1,3 µµm

Dans ce chapitre, nous présentons sommairement l’épitaxie par jets moléculaires, qui

est la technique d’élaboration des échantillons étudiés. Nous évoquons notamment

l’incorporation d’azote, spécifique à la croissance des alliages GaNAs et GaInNAs à faible

bande interdite. Ensuite, nous présentons les deux techniques de spectroscopie optique que

nous avons exploitées tout au long de cette thèse : la photoluminescence et la

photoréflectivité. Corrélées à des mesures de diffraction de rayons X et de microscopie

électronique en transmission, elles permettent d’optimiser les conditions de croissance des

alliages nitrurés. La diminution de l’énergie de bande interdite avec l’incorporation d’azote

est observée, et l’émission à 1,3 µm à température ambiante atteinte sur substrat GaAs.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

30

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

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31

II.1 La croissance des alliages à faible teneur en azote

A ce jour, de nombreuses techniques de croissance ont permis la réalisation de

structures à base d’alliages GaNAs ou GaInNAs. Parmi les plus courantes on citera le dépôt

en phase vapeur par organométalliques ou l’épitaxie par jets moléculaires. Dans la première

technique, le précurseur de l’azote est la diméthylhydrazine. Dans la seconde, l’azote

moléculaire est décomposé en azote atomique réactif à l’aide d’une cellule plasma. Les

échantillons que nous avons étudiés ont été épitaxiés par cette deuxième technique, au sein du

Laboratoire Infrarouge du CEA Grenoble.

II.1.1 Croissance par épitaxie par jets moléculaires

Bien que n’ayant pas travaillé directement sur la croissance, j’ai été en étroite

collaboration avec l’ingénieur et le technicien qui élaborent les structures, ce qui m’a permis

d’appréhender rapidement l’impact des différents paramètres de croissance sur les propriétés

optiques des nitrures à faible bande interdite. Avant de les étudier, il me semble nécessaire de

présenter brièvement la technique de croissance utilisée, notamment les spécificités par

rapport à l’introduction d’azote.

II.1.1.1 Principe et avantages

L’épitaxie par jets moléculaires est une technique de croissance qui permet de déposer

sur un substrat monocristallin des couches monocristallines de matériaux semiconducteurs,

dont l’épaisseur peut varier de quelques fractions de nanomètres à plusieurs microns. Le

principe consiste généralement à chauffer des espèces contenues dans des cellules et à les

évaporer dans une enceinte ultravide (pression résiduelle < 10-10 torr). Le vide est tel que le

libre parcours moyen de l’espèce évaporée est supérieur à la distance cellule-substrat. On

obtient ainsi des jets de molécules ou d’atomes qui viennent se condenser sur le substrat.

La température du substrat joue un rôle prépondérant : elle doit être relativement basse

pour permettre la condensation des espèces constituant les couches, mais néanmoins

suffisante pour que les atomes puissent migrer à la surface et rejoindre leur site

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

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32

d’incorporation. La basse pression résidant dans le bâti d’épitaxie, qui est nécessaire à

l’obtention des jets moléculaires ou atomiques, présente l’avantage de permettre l’utilisation

de la technique du RHEED (Reflection High Energy Electron Diffraction). Cette technique

consiste à faire diffracter des électrons accélérés sous 20 kV sur la surface en croissance, en

incidence rasante. Elle permet de déterminer les vitesses de croissance et de remonter à la

fraction des différents éléments III (oscillations RHEED). Elle donne aussi accès, en temps

réel, aux caractéristiques de la surface (diagramme RHEED), c’est-à-dire aux reconstructions

de surface qui renseignent sur le type et le mode de croissance.

Figure II-1 : Schéma de principe d’un bâti d’épitaxie par jets moléculaires.

La température de croissance, plus basse que dans les autres techniques de croissance telles

que le dépôt en phase vapeur par organométalliques ou le dépôt en phase liquide, permet de se

situer dans un domaine de croissance où les phénomènes de séparation de phase, très

récurrents lors de la croissance de GaNAs ou du GaInNAs, existent moins ou sont limités par

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

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33

une cinétique plus faible. De plus, elle minimise les problèmes d’interdiffusion lors de la

réalisation d’hétérostructures.

En épitaxie par jets moléculaires, la vitesse de croissance est de l’ordre de la

monocouche atomique (environ 0,2 nm) par seconde, ce qui permet de réaliser des structures

de très basse dimensionnalité telles que les puits quantiques, ou les boîtes quantiques. Par

ailleurs, devant chaque cellule se trouve un cache, qui autorise ou non le passage des espèces.

Il permet de changer de manière abrupte la nature du matériau épitaxié, donc de faire de la

véritable ingénierie de structure de bande et obtenir les structures relativement complexes que

sont les VCSELs.

II.1.1.2 La croissance en présence d’azote

II.1.1.2.a Epitaxie en source gaz

La machine qui est utilisée au LIR est une RIBER 32 P à source gaz (cf Figure II-2).

Les substrats utilisés sont des plaquettes de GaAs de 3 pouces de diamètre et d’orientation

cristalline (100), prêts à l’épitaxie (dits ‘epiready’). Les matériaux épitaxiés sont les

semiconducteurs III-V usuels GaAs, AlAs, InAs, GaInAs, AlGaAs, ainsi que les nitrures

d’éléments III-V GaNAs et GaInNAs.

La température du substrat peut monter jusqu’à 750 °C. Elle est contrôlée soit par un

thermocouple, soit par un pyromètre optique qui pointe sur l’échantillon.

Les éléments III (Ga, In, Al) sont évaporés à partir de sources solides ultra-pures (7N)

de Ga, In, Al respectivement chauffées autour de 950 °C, 790 °C, et 1120 °C. Ce sont les flux

d’éléments III, fixés par la température des cellules, qui donnent la vitesse de croissance. En

effet, leur coefficient de collage est égal à 1 pour la gamme de température de substrat

utilisée, ce qui signifie qu’un atome d’élément III qui arrive à la surface du substrat ne se ré-

évapore pas. En revanche, l’élément V arsenic, qui possède une pression partielle de vapeur

très élevée par rapport à celle du gallium, nécessite l’utilisation d’un flux d’arsenic très

supérieur à celui du gallium. Il est également possible de doper les couches soit de type n, soit

de type p, respectivement avec des cellules d’évaporation silicium et béryllium.

Les éléments V (As, N) sont obtenus à partir de sources gazeuses : le gaz arsine AsH3

est décomposé à l’entrée de l’enceinte à haute température (950 °C) sous forme d’As2 ; nous

présentons plus en détail l’incorporation d’azote dans le paragraphe suivant.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

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34

Figure II-2 : Photographie du bâti d’épitaxie par jets moléculaires avec, en premier plan, la partie

extérieure de la cellule radio-fréquence qui génère le plasma d’azote.

Figure II-3 : Photographie de la cellule plasma RF qui permet la décomposition de l’azote moléculaire en

azote réactif. L’azote dissocié sort de la cellule par 61 trous.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

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35

II.1.1.2.b L’incorporation d’azote

L’azote actif pour la croissance des nitrures est l’azote atomique N [1]. Il est obtenu

par décomposition d’azote diatomique N2. Cependant, l’énergie de liaison de cette molécule

étant de l’ordre de 7 eV, la décomposition thermique est exclue puisqu’elle nécessiterait des

températures beaucoup trop élevées. Aussi l’emploi d’une source plasma à résonance

cyclotron (cellule ECR) ou d’une source plasma radio-fréquence (cellule plasma RF) est-il

nécessaire. La source que nous utilisons est une cellule plasma RF (cf Figure II-2 et Figure

II-3). Dans une source RF, une onde électromagnétique de 13,56 MHz est injectée dans la

cellule dans laquelle arrive de l’azote N2 ultra-pur (7N). L’énergie transférée à l’azote

moléculaire conduit à l’excitation de la molécule puis à sa dissociation en 2 atomes d’azote

atomique, réactifs, qui vont pouvoir être incorporés sur la plaquette.

En fait, le plasma produit est un mélange complexe d’espèces atomiques ou

moléculaires, neutres ou ionisées. L’intérêt des sources RF par rapport aux sources ECR est

de produire plus d’espèces neutres que d’ions [1]. En effet, il est souhaitable d’avoir le

minimum d’espèces ionisées, ces dernières pouvant être accélérées par la différence de

potentiel entre le plasma et la masse, et donc endommager la surface en croissance ainsi

qu’affecter les propriétés optiques des nitrures épitaxiés.

Les paramètres sur lesquels il est possible de jouer dans notre cellule sont la puissance

du plasma et le débit d’azote entrant dans la cellule. Au cours de ma thèse, la ligne d’arrivée

d’azote a été perfectionnée, afin de pouvoir contrôler des flux d’azote plus faibles,

correspondant aux pourcentages d’azote incorporés pour atteindre les longueurs d’onde

désirées, typiquement de 1 à 3 %.

II.1.2 Structures épitaxiées

La croissance d’une structure se déroule comme illustré à la Figure II-4 : dans un

premier temps, il est nécessaire de désoxyder la surface du substrat en la chauffant à 580 °C.

Le contrôle de cette étape s’effectue grâce au diagramme RHEED : la diffraction du faisceau

d’électron passe d’un halo caractéristique d’un matériau amorphe aux taches de diffraction

bien structurées d’une structure cristalline, correspondant à une surface de GaAs reconstruite

de type 2×4, caractéristique d’une surface désoxydée. Ensuite, pour enterrer les défauts de

surface éventuels et commencer la croissance dans des bonnes conditions, une couche tampon

de GaAs d’environ 400 nm d’épaisseur est épitaxiée autour de 600 °C. Sur cette couche

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

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36

tampon on peut alors faire croître la couche active, qui se compose généralement soit d’une

couche de GaNxAs1-x d’environ 100 nm d’épaisseur, soit d’un ou plusieurs puits quantiques.

Les puits quantiques sont composés des ternaires GaNxAs1-x/GaAs ou Ga1-yInyAs/GaAs, ou du

quaternaire Ga1-yInyNxAs1-x/GaAs. Leur épaisseur ne dépasse pas 7-8 nm (cf Figure II-4).

L’épitaxie de la couche active nitrurée se fait à plus basse température (400 – 450 °C) comme

nous allons le voir. Enfin, une fine couche d’encapsulation de GaAs couvre les structures,

d’une part pour les protéger de l’oxyde natif, d’autre part pour placer la zone active à environ

100 à 200 nm de la surface afin de limiter les effets de recombinaison de surface en

photoluminescence. Dans le cas où la structure est recuite in situ, la température est

augmentée jusqu’à 650°C avec une contre pression importante d’arsenic pour éviter la

décomposition du GaAs de surface.

Figure II-4 : Schéma du type de structures épitaxiées.

L’épaisseur des couches de GaNxAs1-x n’excède pas 100 nm, celle des puits

quantiques de Ga1-yInyAs/GaAs, ou de Ga1-yInyNxAs1-x/GaAs n’excède pas 7-8 nm, car au-

delà le désaccord de paramètre de maille est trop important et les dépôts ne sont alors plus

pseudomorphiques. En effet, le dépassement de l’épaisseur critique génère des défauts et

entraîne une forte chute des rendements de photoluminescence.

substrat GaAs (100) ‘epiready’

couche tampon de GaAs40

0 nm

GaNAs

100

nm50

nm

GaAs

substrat GaAs (100) ‘epiready’

couche tampon de GaAs40

0 nm

GaNAs

100

nm50

nm

GaAs

substrat GaAs (100) ‘epiready’

couche tampon de GaAs40

0 nm

50 n

m GaAsGaNAs

Un ou plusieurs puits quantiques (Ga,In)(N,As)/GaAs

épaisseur ~ 7 nmEspacement interpuits : ~ 20 nm

Tem

ps

Température

Désoxydation

Cro

issa

nce

Recuit in situ (facultatif)

580°C 650°C400-450°C

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

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37

Par ailleurs, les structures étudiées sont toutes non-intentionnellement dopées. On

notera également que lorsque le cache de la cellule azote est fermé et que la cellule est en

marche, une incorporation résiduelle d’azote d’environ 0,3 % - 0,4 % a lieu dans le GaAs.

Ceci montre que le cache de la cellule azote ne joue pas totalement sont rôle. Cette donnée est

intégrée dans les calculs ultérieurs.

La technique de croissance ayant été décrite, il convient maintenant de présenter les

deux techniques de spectroscopie optique qui ont permis d’obtenir les principaux résultats

consignés dans ce mémoire : la photoluminescence et la photoréflectivité.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

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38

II.2 Techniques de spectroscopie optique utilisées

Dans ce paragraphe nous présentons de manière relativement succincte le principe des

techniques de spectroscopie optique utilisées pendant cette thèse. Les dispositifs

expérimentaux de photoluminescence et de photoréflectivité, schématisés respectivement à la

Figure II-5 et à la Figure II-9, sont situés au Laboratoire de Physique de la Matière (LPM) de

l’INSA de Lyon.

II.2.1 La photoluminescence : principe et dispositif expérimental

La photoluminescence (PL) est probablement la technique de spectroscopie la plus

couramment utilisée pour caractériser les propriétés optiques des semiconducteurs,

notamment à bande interdite directe. Elle permet de mesurer les recombinaisons radiatives au

sein d’un matériau, quand celui-ci est excité par des photons.

Dans le cas de la manipulation que nous avons le plus utilisée (cf Figure II-5) le

faisceau excitateur est issu d’un laser Ar de longueur d’onde 514,5 nm focalisé sur

l’échantillon à étudier. Le diamètre du spot sur l’échantillon est d’environ 200 µm. On peut

faire varier les densités de puissance d’excitation de 0,2 W/cm2 à 2000 W/cm 2. Il est possible

de placer l’échantillon dans un cryostat afin d’effectuer des mesures dans la gamme de

température 8 K – 300 K. Les photons issus du laser sont absorbés dans le matériau car leur

énergie est supérieure à l’énergie de bande interdite des semiconducteurs que nous étudions

(excitation intrinsèque). Leur profondeur de pénétration est de l’ordre de la centaine de

nanomètres. Chaque photon crée une paire électron-trou, dans la mesure où il existe des états

(places) disponibles pour chacune de ces particules. A une échelle de temps très courte les

électrons et les trous se thermalisent pour occuper les états disponibles permettant de

minimiser leur énergie, puis se recombinent, soit de manière non radiative avec émission de

phonons ou par effet Auger, soit de manière radiative avec émission de photons. Les photons

émis sont collectés à l’aide d’un système Casse-grain sur les fentes d’un monochromateur

(résolution 2,5 nm par mm de fente) et dispersés par un réseau de 600 traits/mm blazé à 1 µm.

Ils sont ensuite détectés avec une photodiode Ge refroidie à 77 K et polar isée à – 300 V. Le

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

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signal, extrait du bruit à l’aide d’une détection synchrone, est envoyé à l’ordinateur qui

enregistre le spectre.

Les spectres permettent d’obtenir des informations sur les propriétés intrinsèques

(énergie de bande interdite, transition excitonique, désordre d’alliage, qualité d’interfaces) et

extrinsèques (défauts légers ou profonds) du semiconducteur étudié.

Figure II-5 : Schéma du banc expérimental de photoluminescence.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

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40

Dans le cadre de cette thèse, nous avons également utilisé deux autres bancs de PL.

• Le premier est un banc de cartographie de photoluminescence, situé au Laboratoire

Infrarouge du LETI. Il permet de collecter le spectre de PL en chaque point (pas de 1

µm ou 50 µm) d’une plaque 3 pouces, et ainsi de récolter des informations sur

l’homogénéité du matériau ou sur la répartition spatiale d’éventuels défauts. Dans

cette manipulation, la PL est excitée avec un faisceau laser He-Ne (632,8 nm), et

collectée avec une photodiode InGaAs. Les mesures sont effectuées soit à 300 K, soit

à 77 K. La densité de puissance d’excitation est relativement élevée, de l’ordre de 10

kW/cm2. L’absence de détection synchrone ne permet pas l’acquisition de signaux

faibles.

• Le second banc est un banc de microphotoluminescence, situé au LPM. Il permet de

sonder la PL sur une surface très faible, de l’ordre d’une dizaine de microns carrés et

de visualiser le spot de PL à l’aide d’une caméra infrarouge. Les densités de puissance

d’excitations (~ 10 kW/cm2) et les spectres peuvent être obtenus dans la gamme de

température 4,2 K – 300 K.

II.2.2 La photoréflectivité

La photoréflectivité (PR), ou réflectivité photomodulée, est une technique de

modulation, qui permet de sonder les transitions optiques directes dans la structure de bande

des matériaux semiconducteurs. Elle présente l’avantage d’être non destructive et s’applique à

la fois aux matériaux massifs et aux structures de très faible dimension telles que les puits

quantiques. Par conséquent, elle est bien adaptée à l’étude des semiconducteurs III -V qui font

l’objet de ce mémoire (GaAsN, GaInAs, GaInNAs), tous de bande interdite directe et se

présentant soit sous la forme de couches épaisses, soit sous la forme de puits quantiques.

Cette technique est complémentaire de la photoluminescence. En effet, la PR permet

d’avoir accès aux énergies d’absorption des paires électron-trou dans le matériau, c’est-à-dire

typiquement à l’énergie de bande interdite d’un matériau massif ou aux énergies des niveaux

confinés dans un puits quantique. En revanche, la PL donne les énergies de recombinaison des

paires électron-trou dans le matériau, qui peuvent être différentes des énergies citées plus

haut.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

41

II.2.2.1 Principe

Le principe de la PR est le suivant : un faisceau lumineux de longueur d’onde variable,

le faisceau sonde, se réfléchit sur la surface de l’échantillon à étudier. Au même endroit, une

perturbation périodique extérieure, en l’occurrence un faisceau laser haché, vient moduler la

constante diélectrique relative εr du matériau, ce qui induit une modification du coefficient de

réflexion, qui est détectée en mesurant l’intensité du faisceau sonde réfléchi (cf Figure II-9).

En effet, la constante diélectrique complexe est directement liée à l’indice optique complexe,

à partir duquel est défini le coefficient de réflexion :

ε1 + iε2 = (n + ik)2 Équation II-1

avec n indice de réfraction traduisant la vitesse de propagation d’une onde dans le cristal, et k

coefficient d’extinction correspondant à l’atténuation de l’onde qui traverse le cristal.

Ainsi, au voisinage des transitions optiques où la fonction diélectrique est fortement

perturbée, on enregistre une forte variation du coefficient de réflexion. En PR, c’est la

variation relative ∆R/R qui est enregistrée, à l’aide d’une détection synchrone (cf Figure II-9).

L’avantage d’acquérir la dérivée du spectre de réflectivité est double : ceci permet d’une part

d’éliminer le fond continu, d’autre part d’augmenter la sensibilité au voisinage des points

critiques, c’est-à-dire aux énergies de singularité de la densité d’états conjointe.

Quant au mécanisme de modulation de la fonction diélectrique, il s’effectue par une

modulation du champ électrique de surface. En effet, les propriétés de la surface étant

toujours différentes de celles du matériau en volume, il existe un champ électrique et une zone

de charge d’espace à proximité de la surface des échantillons. Les photons issus du faisceau

laser haché génèrent périodiquement des paires électron/trou dans la zone de charge d’espace,

qui vont se déplacer sous l’action du champ électrique de manière à réduire son intensité (cf

Figure II-6).

Dans la zone de modulation du champ E ainsi créée, i.e. dans la gamme de profondeur

où la zone de charge d’espace existe et où les paires électron/trou sont photogénérées

(typiquement quelques dixièmes de micron), les paramètres intrinsèques du matériau tels que

l’énergie de l’exciton, la durée de vie des excitons ou des porteurs, la force d’oscillateur, vont

être perturbés, induisant les changements de la fonction diélectrique et donc du coefficient de

réflexion.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

42

Figure II-6 : Illustration de la réduction du champ électrique de surface sous photoinjection de porteurs.

Cependant, les mécanismes physiques responsables de la modulation de la fonction

diélectrique par la modulation du champ électrique diffèrent selon que l’on considère des

transitions bande à bande ou des transitions d’états liés.

II.2.2.1.a Transitions bande à bande

Dans le cas d’un matériau massif, la présence du champ E affecte la symétrie de

translation du réseau, et accélère les électrons et les trous libres. Si le champ est faible, la

perturbation de la fonction diélectrique est proportionnelle à la dérivée troisième de la

fonction diélectrique non perturbée [2]. Pour un élargissement lorentzien de la transition, la

PR peut être décrite sous la forme :

( )[ ]mg iEE)iexp(ARe

RR −Γ+−⋅φ⋅=∆ Équation II-2

où A est l’amplitude de la transition, liée à la force d’oscillateur, φ un facteur de phase, Eg

l’énergie de bande interdite du matériau, Γ l’élargissement de la transition, et m un facteur qui

dépend du type de point critique considéré, et qui, pour les structures blende de zinc à bande

interdite directe, est égal à 2,5 [3].

La Figure II-7 montre la forme d’un spectre de PR caractéristique d’une transition

bande à bande sur une couche de GaAs à 300 K, calculée à l’aide de l’équation II -2. On

pourra constater le changement de la forme du spectre en fonction des valeurs du paramètre

de phase. Pour un élargissement gaussien, la formule, plus compliquée, fait intervenir la

fonction hypergéométrique dégénérée [4].

Ec

Ev

Ef

Ec

Ev

Ef

Ec

Ev

Ef

E E-dE

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

43

1,3 1,4 1,5 1,6

Eg(GaAs) = 1.424 eV

Γ = 13 meVA fixe

φ variable

1.424 eV

∆ R/R

Energie (eV)

Figure II-7 : Forme d’un spectre de PR caractéristique d’une transition bande à bande sur une couche

épaisse de GaAs, pour différentes valeurs de la phase.

Si le champ est fort, les spectres sont plus complexes, car l’effet Franz-Keldysh (effet

tunnel assisté par photon) apparaît, induisant un décalage des transitions vers les basses

énergies, ainsi que des oscillations à hautes énergies.

II.2.2.1.b Transitions sur des états liés

Dans les systèmes confinés tels que les excitons ou les puits quantiques, les états liés

ne peuvent pas être accélérés par le champ électrique. Néanmoins, le champ électrique reste à

l’origine de la modulation de la fonction diélectrique, dont la perturbation est cette fois

proportionnelle à la dérivée première de la fonction diélectrique non perturbée [5]. La

modulation s’effectue en effet via :

i) une variation de l’énergie de l’état lié, c’est-à-dire par effet Stark dans le cas d’un

exciton ou effet Stark confiné quantiquement dans le cas d’un puits quantique,

ii) une variation de l’élargissement de la transition, inversement proportionnel à la durée

de vie de l’état lié, qui peut être modifiée par effet tunnel,

iii) une variation de l’intensité, c’est-à-dire de la force d’oscillateur de l’état lié

(modification du recouvrement des fonctions d’onde).

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

44

Figure II-8 : Illustration des mécanismes de modulation induits par la variation du champ électrique dans

un puits quantique : variation de l’énergie de transition, de l’élargissement, et du recouvrement des

fonctions d’onde. A gauche, structure de bande d’un puits en présence d’un champ électrique, à droite

structure de bande d’un puits sans champ électrique.

En général, parmi les trois effets cités plus haut (illustrés à la Figure II-8 pour un puits

quantique), un est prépondérant : dans un puits quantique de type I, le mécanisme principal

est la modulation de l’énergie de confinement ; pour les excitons dans un matériau massif, il

s’agit plutôt d’une modulation de la durée de vie. On notera que dans le cas d’un profil

lorentzien, ∆R/R peut s’exprimer à l’aide de l’équation II -2 en prenant m égal à 2.

II.2.2.2 Dispositif expérimental

Le banc expérimental est présenté à la Figure II-9. Le faisceau sonde est obtenu en dispersant

la lumière blanche issue d’une lampe quartz tungstène halogène, régulée en courant, à travers

un monochromateur Jobin-Yvon HR 640 équipé d’un réseau de 600 traits/mm blazé à 1 ou

1,5 µm. Il est ensuite focalisé sur l’échantillon à l’aide d’une lentille biconvexe. Il est possible

de placer l’échantillon dans un cryostat dont la température, mesurée à l’aide d’un

thermocouple, peut être régulée entre 8 K à 300 K. La modulation est produite par un faisceau

effet tunnel

E E’

Ec

Ev

Ec

Ev

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

45

laser He-Ne (632,8 nm) haché à une fréquence de 310 Hz. Le faisceau réfléchi est ensuite

focalisé à l’aide d’une autre lentille biconvexe sur une photodiode GaInAs ou Si (selon la

gamme d’énergies considérée) utilisée en mode photovoltaï que. Un appareil Keithley

convertit le courant de la photodiode en tension, avec un gain de l’ordre de 107 V/A. Deux

voies d’acquisition permettent ensuite d’acquérir le signal proportionnel à R, et le s ignal

proportionnel à ∆R (via la détection synchrone). Le rapport numérique des deux composantes

donne le signal de PR. La résolution des spectres est de l’ordre du meV.

Figure II-9 : Schéma du banc expérimental de photoréflectivité.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

46

Les deux techniques de spectroscopie optique, complémentaires, que sont la

photoluminescence (émission) et la photoréflectivité (seuil d’absorption), servent dans un

premier temps à des caractérisations relativement simples, effectuées à température ambiante,

des structures épitaxiées par jets moléculaires. Elles permettent, alliées à des techniques de

caractérisation structurale telles que la microscopie électronique en transmission ou la

diffraction de rayons X, d’optimiser la qualité optiques des nitrures à faible bande interdite,

pour obtenir l’émission de lumière à la longueur d’onde de 1,3 µm.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

47

II.3 L’émission à 1,3 µµm sur substrat GaAs

Lorsque la croissance de structures nitrurées à faible bande interdite a débuté au

Laboratoire Infrarouge, c’est-à-dire en janvier 1999, les plaques épitaxiées présentaient un

aspect laiteux et aucun signal de PL n’était détecté. Pourtant, l’incorporation d’azote fut mise

en évidence par diverses techniques telles que la spectroscopie de masse d’ions secondaires,

la spectroscopie Auger ou encore la diffraction de rayons X. La température de croissance des

couches actives était alors voisine de 500 °C. En fait, il est apparu rapidement que la

température de croissance des nitrures à faible bande interdite doit être beaucoup plus basse,

et qu’elle joue un rôle essentiel sur les propriétés structurales et optiques des nitrures.

II.3.1 Un paramètre clé : la température de croissance

En épitaxie par jets moléculaires, la température de croissance en-dessous de laquelle

la PL à température ambiante des couches actives est observée est typiquement 470 °C. Une

étude de la qualité cristalline et optique d’échantillons composés de trois puits quantiques de

Ga1-yInyNxAs1-x/GaAs est donc menée dans la gamme de température de croissance 400 °C –

450 °C. L’épaisseur des puits et des barrières est fixée à 7 nm et 18 nm, respectivement. Les

pourcentages d’indium et d’azote visés sont de 35 % et 2 %, respectivement. Le rapport

d’éléments V/III est fixé à 3. Des puits de référence sans azote sont étudiés en parallèle.

La Figure II-10 montre les spectres de diffraction X haute résolution obtenus sur ces

structures à multipuits quantiques pour des températures de croissance de 400 °C, 425 °C, et

450 °C. Sur chaque spectre, le pic le plus intense et le plus fin correspond au GaAs. Les pics

satellites traduisent les interférences dues aux différentes couches de la structure

multicouches. L’espacement angulaire entre les pics est lié à sa période. La position angulaire

de l’enveloppe englobant les franges est fonction de la composition en indium et en azote des

puits.

Au vu des figures, il apparaît clairement que les pics satellites sont d’autant mieux

définis que la température de croissance est faible, que ce soit pour les multipuits quantiques

de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs ou pour leurs homologues sans azote. Ceci indique que

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

48

l’interface entre les puits et les barrières est moins bien définie à 450 °C (morphologie

rugueuse), qu’à 400 °C. La morphologie relativement abrupte des interfaces à 400 °C est

vérifiée sur l’image de la Figure II-11 obtenue en microscopie électronique en transmission

sur les puits quantiques nitrurés. Les puits sont bien définis et on note également qu’aucune

dislocation n’est observée, ce qui indique que leur densité est inférieure à 108 cm-2.

Néanmoins, on constate que la planéité des interfaces se dégrade avec le nombre de puits : le

puits le plus proche de la surface présente des légères fluctuations d’épaisseur.

-12000 -10000 -8000 -6000 -4000 -2000 0 2000 4000 600010

-2

10-1

100

101

102

103

104

105

106

Tcroissance

= 425 °C

Tcroissance

= 450 °C

Tcroissance

= 400 °C

3 puits quantiques de Ga0.65

In0.35

N0.02

As0.98

/GaAs

Inte

nsité

(u.

a.)

Ω (arcsec)

-12000 -10000 -8000 -6000 -4000 -2000 0 2000 4000 600010

-2

10-1

100

101

102

103

104

105

106

Tcroissance

= 400 °C

Tcroissance

= 450 °C

Tcroissance

= 400 °C

3 puits quantiques de Ga0.65

In0.35

As/GaAs

Inte

nsité

(u.

a.)

Ω (arcsec)

Figure II-10 : Spectres de diffraction X haute résolution obtenus sur des échantillons composés de 3 puits

quantiques de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs ou de Ga0,65In0,35As/GaAs, élaborés à différentes températures.

Les spectres sont décalés verticalement par souci de clarté.

Figure II-11 : Photographie, obtenue en microscopie électronique en transmission, de 3 puits quantiques

de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs élaborés à 400 °C.

GaInAsN

GaAs

Epaisseurs des puits : 6,5 à 7 nm

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

49

L’amélioration des propriétés structurales des couches actives en abaissant la

température de croissance semble liée à l’amélioration des propriétés d’émission des puits,

comme le montre la Figure II-12. La photoluminescence des puits de GaInNAs/GaAs est 50

fois plus intense lorsque les structures sont élaborées à 400 °C que lorsqu’elles sont élaborées

à 450 °C, pour une longueur d’onde d’émission très proche. Les spectres de

photoluminescence obtenus au LIR sur les deux structures (avec et sans azote) élaborées à

400 °C sont tracés en encart de la Figure II-12. On constate le décalage vers les grandes

longueurs d’onde de l’émission du puits, consécutif à l’incorporation d’azote. On note

également une chute d’un facteur au moins 5 de l’intensité de PL des puits quantiques de

GaInNAs/GaAs par rapport à celle des puits quantiques de GaInAs/GaAs.

380 400 420 440 460

1

10

100

1000

0,8 0,9 1,0 1,1 1,2 1,3 1,40,00

0,25

0,50

0,75

1,00

1500 1400 1300 1200 1100 1000 900

Tcroissance

= 400 °C

300 K

X 6

Inte

nsité

de

PL

(u. a

.)

Energie (eV)

Ga0.65

In0.35

As/GaAs Ga

0.65In

0.35N

0.02As

0.98/GaAs

λ (nm)

Inte

nsi

té d

e P

L (

u.

a.)

Tcroissance

(°C)

Ga0.65

In0.35

As/GaAs Ga

0.65In

0.35N

0.02As

0.98/GaAs

Figure II-12 : Intensité de PL à 300 K sur des échantillons composés de 3 puits quantiques de

Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs ou de Ga0,65In0,35As/GaAs, élaborés à différentes températures de croissance.

L’encart montre les spectres obtenus pour les deux échantillons élaborés à 400 °C.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

50

Des simulations des spectres de diffraction X ont été effectuées sur ces deux structures

[6]. Sur les 3 puits de Ga0,65In0,35As/GaAs de référence, le pourcentage d’indium et

l’épaisseur des puits déduits des simulations sont en accord avec les valeurs visées. Sur les 3

puits de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs, en supposant que le pourcentage d’azote ne change pas

le pourcentage d’indium incorporé, ce qui semble le cas en épitaxie par jets moléculaires

(contrairement au dépôt d’organométalliques en phase vapeur), et en tenant compte d’une

incorporation résiduelle d’azote de 0,4 % dans les barrières (due à une efficacité du cache de

la cellule azote qui n’est pas totale, cf II.1.2), les simulations sont également en accord avec

l’expérience. Elles montrent en outre que l’incorporation de 2 % d’azote dans le Ga0,65In0,35As

permet de diminuer le désaccord de paramètre de maille avec le GaAs, puisque la position

angulaire de l’enveloppe englobant les franges se rapproche de celle du GaAs. Ce résultat est

attendu, puisque le GaInAs/GaAs est contraint en compression et que le GaNAs/GaAs est

contraint en tension (cf Figure I-3).

Pourtant, paradoxalement, l’incorporation d’azote ne permet pas de repousser la valeur

de l’épaisseur critique des puits quantiques mais au contraire semble favoriser l’apparition

d’une croissance tridimensionnelle, comme illustré à la Figure II-13 à l’aide de photographies

de microscopie électronique en transmission obtenues respectivement sur un puits quantique

de Ga0,72In0,28N0,028As0,972/GaAs et un puits quantique de Ga0,72In0,28As/GaAs, tous les deux

épitaxiés à 450 °C, c’est -à-dire à une température de croissance qui n’est pas optimale. Le

puits nitruré présente des fluctuations d’épaisseurs beaucoup plus importantes que sur le puits

sans azote. Le début de croissance tridimensionnelle observée sur l’échantillon nitruré

(fluctuations de l’épaisseur du puits), alors que la contrainte dans ce puits devrait être

moindre, indique la présence probable de fortes inhomogénéités de composition ou de

contraintes. De telles fluctuations peuvent éventuellement donner naissance à des structures

ressemblant à des boîtes quantiques [7]. A l’inverse, nous avons montré qu’en diminuant la

température de croissance il était possible de limiter l’apparition de ces fluctuations (cf Figure

II-11).

Nous pensons que la température de croissance des alliages III-V-N doit être basse

pour éviter les phénomènes de séparation de phase [8, 9]. En effet, la forte différence de

paramètre de maille (20 %) entre GaN et GaAs entraîne une immiscibilité extrême des atomes

d’As et d’N du sous-réseau des éléments du groupe V. L’obtention de l’alliage GaNAs (ou

GaInNAs) sans phénomènes de séparation de phase est probablement favorisée à basse

température de croissance (400 °C) car, d’un point de vue cinétique, cette dernière réduit la

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

51

mobilité de surface des atomes d’azote et minimise ainsi la formation d’agrégats de taille

importante.

Figure II-13 : Photographies, obtenues en microscopie électronique en transmission, d’un puits quantique

de Ga0,72In0,28N0,028As0,972/GaAs (haut) et de Ga0,72In0,28As/GaAs (bas) élaborés à 450 °C.

En conclusion, la croissance par épitaxie par jets moléculaires des nitrures à faible

bande interdite doit se faire à basse température (400 °C), tant pour optimiser les propriétés

structurales qu’optiques des couches actives.

GaAs

GaAs

GaInAs

20 nm20 nm

Puits quantique 7 nm Ga0.72In0.28As/GaAs

GaAs

GaAs

GaInAsN

50 nm

Puits quantique 7 nm Ga0.72In0.28N0.028As0.972/GaAs

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

52

II.3.2 Décalage de la bande interdite vers les plus grandes

longueurs d’onde avec l’incorporation d’azote

0,90 0,95 1,00 1,05 1,10 1,15 1,20 1,25 1,300

10

20

30

40

50

60

701.12 µm1.24 µm

28 meV 15 meV

X 30

T = 300 K

1 puits quantique GaInNAs/GaAs 3 puits quantiques GaInAs/GaAs

Inte

nsité

de

PL

(u.

a.)

Energie (eV)

1,35 1,3 1,25 1,2 1,15 1,1 1,05 1

Longueur d'onde (µm)

0,90 0,95 1,00 1,05 1,10 1,15 1,20 1,25 1,30-0,0004

-0,0003

-0,0002

-0,0001

0,0000

0,0001

0,0002

1.12 µm

1.24 µm

T = 300 K

1 puits quantique GaInNAs/GaAs 3 puits quantiques GaInAs/GaAs

∆R/R

Energie (eV)

1,35 1,3 1,25 1,2 1,15 1,1 1,05 1

Longueur d'onde (µm)

Figure II-14 : Spectres de PL (haut) et de PR (bas) obtenus à 300 K sur des puits quantiques de

GaInNAs/GaAs ou de GaInAs/GaAs, montrant le décalage vers les grandes longueurs d’onde (basses

énergies) consécutif à l’incorporation d’azote.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

53

La Figure II-14 montre les spectres de photoluminescence et de photoréflectivité

obtenus, à 300 K, sur un puits quantique de GaIn NAs/GaAs (environ 35 % d’indium et 1,5 %

d’azote) et sur trois puits quantiques de GaInAs/GaAs (environ 35 % d’indium). L’épaisseur

des puits est proche de 7 nm. La présence d’azote dans le puits augmente la longueur d’onde

d’émission de 1,12 µm à 1,24 µm. Elle induit une chute des rendements de PL ainsi qu’une

augmentation importante de la largeur à mi-hauteur du spectre. Le décalage vers les grandes

longueurs d’onde, ainsi que l’élargissement du signal, est également constaté en PR (cf Figure

II-14). Cette corrélation permet de montrer sans ambiguï té que l’augmentation de la longueur

d’onde d’émission est due à une diminution de l’énergie de bande interdite de l’alliage et non

à la présence de défauts radiatifs émettant à 1,24 µm. En effet, si la luminescence obtenue sur

l’échantillon nitruré provenait de défauts profonds, aucun signal de PR ne serait observé

puisque cette technique est sensible aux propriétés intrinsèques (et non extrinsèques) du

matériau.

II.3.3 Dégradation de l’intensité de photoluminescence avec

l’incorporation d’azote

L’augmentation d’incorporation d’azote dans GaAs ou GaInAs induit une diminution

de l’énergie d’émission. Cette diminution en fonction du pourcentage d’azote incorporé est

étudiée quantitativement au Chapitre III. Dans ce paragraphe, nous montrons que l’intensité

du signal de photoluminescence est affectée par l’incorporation croissante d’azote dans

l’alliage GaInNAs.

La Figure II-15 montre une cartographie de PL obtenue à température ambiante sur

une structure composée d’un puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs, ainsi que sur une

structure de référence, identique mais sans azote. Les deux structures sont élaborées à 400 °C.

Sur le puits quantique de référence, la longueur d’onde d’émission (de même que l’intensité

du pic de PL) est relativement homogène sur toute la plaque : sa valeur est de 1143 nm ± 5

nm. Cette homogénéité est attribuée à une très faible dérive de l’épaisseur du puits et du

pourcentage d’indium incorporé sur la plaque. En revanche, sur le puits de GaInNAs/GaAs, la

longueur d’onde d’émission augmente de 1324 nm au centre la plaque à 1358 nm en bord de

plaque. Au vu des faibles dispersions obtenues sur la structure de référence, la forte

inhomogénéité de la longueur d’onde d’émission est attribuée à une inhomogénéité du

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

54

pourcentage d’azote incorporé dans le puits : plus la longueur d’onde d’émission est grande,

plus le pourcentage d’azote incorporé dans le puits est élevé. L’inhomogénéité

d’incorporation d’azote se traduit également par une inhomogénéité du signal de PL : plus

l’incorporation d’azote est élevée, plus l’intensité de PL est dégradée.

Puits quantique de GaInNAs/GaAs Puits quantique de GaInAs/GaAs

Figure II-15 : Cartographies de photoluminescence obtenues, à 300 K, sur une plaque 3’’ comportant un

puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs (gauche) et sur une autre comportant un puits quantique de

Ga0,65In0,35As/GaAs (droite). Les cartographies du haut sont des cartographies de longueur d’onde

d’émission. Les cartographies du bas sont des cartographies d’intensité du pic de PL.

Ces propos sont également illustrés sur les spectres de la Figure II-16. On observe que

l’augmentation de la longueur d’onde d’émission et la chute d’intensité de PL avec

l’incorporation d’azote sont accompagnées d’un élargissement des spectres de PL.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

55

0,90 0,95 1,00 1,05 1,10 1,15 1,20 1,250

5

10

15

20

25

30

35

T = 300 K

Puits quantique GaInAs/GaAs

Puits quantiques GaInNAs/GaAs

X 300

X 20 X 10

X 1

Inte

nsité

de

PL

(u.

a.)

Energie (eV)

1,35 1,3 1,25 1,2 1,15 1,1 1,05 1

Longueur d'onde (µm)

Figure II-16 : Spectres de PL obtenus à 300 K sur des puits quantiques de GaIn(N)As/GaAs, montrant le

décalage vers les grandes longueurs d’onde, la diminution de l’intensité de PL, et l’élargissement des

spectres avec l’incorporation d’azote.

La diminution des rendements de photoluminescence avec l’incorporation d’azote,

systématiquement consignée dans la littérature, montre que l’incorporation d’azote

s’accompagne de la génération de défauts non radiatifs. La nature de ces défauts est discutée

au chapitre V. Cependant, ce résultat amène à la conclusion suivante : pour une application

optoélectronique visée, en l’occurrence la réalisation d’émetteurs à 1,3 µm, il est important

d’utiliser le minimum d’azote nécessaire à l’obtention de la longueur d’onde visée, puisque

l’incorporation de cet élément fait chuter les rendements radiatifs.

II.3.4 Emission à 1,3 µµm sur substrat GaAs à température ambiante

D’après la remarque précédente, pour atteindre la longueur d’onde de 1,3 µm avec une

intensité maximale avec des puits quantiques de GaInNAs/GaAs, il est préférable

d’incorporer le maximum d’indium et le minimum d’azote dans les puits [10]. Ceci est illustré

à la Figure II-17, où sont tracés les spectres de puits quantiques de Ga1-yInyNxAs1-x/GaAs

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

56

d’épaisseur 7 nm avec des pourcentages d’indium et d’azote différents. On constate que le

puits de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs a un signal de PL plus élevé que le puits de

Ga0,74In0,26N0,026As0,974/GaAs, alors qu’il émet pourtant à plus grande longueur d’onde (1,275

µm contre 1,2 µm).

0,9 1,0 1,1 1,2 1,30

3

6

9

12

15

T = 300 K

Pexc

= 10 kW/cm2

Puits quantique Ga1-y

InyN

xAs

1-x :

y=26%, x=2% y=26%, x=2.6% y=35%, x=2% y=35%, x=2.6%

Inte

nsité

de

PL

(u.

a.)

Energie (eV)

1,4 1,3 1,2 1,1 1

Longueur d'onde (µm)

Figure II-17 : Spectres de PL obtenus à température ambiante sur des puits quantiques de

GaInNAs/GaAs dont les compositions respectives d’indium et d’azote varient.

La cartographie de PL de la Figure II-15, les spectres de PL de la Figure II-16 et de la

Figure II-17 confirment que l’alliage GaInNAs, épitaxiable sur substrat GaAs, permet

d’obtenir une émission de lumière à 1,3 µm et même au-delà, et ce à température ambiante.

Néanmoins, l’obtention de telles longueurs d’onde se fait généralement aux dépens de

l’intensité du signal de photoluminescence, qui peut chuter de plus de 2 ordres de grandeur.

Cette diminution des rendements radiatifs est importante, mais peut être réduite à l’aide d’un

recuit post-croissance, comme nous allons le voir.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

57

II.3.5 Importance du recuit post-croissance

Dans les nitrures à faible bande interdite, l’incorporation d’azote s’accompagne d’une

chute importante des rendements de photoluminescence (cf II.3.3). Certes, une diminution de

la force d’oscillateur avec l’incorporation d’azote a été prédite [11], mais en pratique la chute

est beaucoup plus forte et donc plutôt imputable à la génération ou l’incorporation de défauts

non radiatifs pendant la croissance des nitrures. Aussi le recuit est-il utilisé de manière quasi-

systématique pour guérir les défauts. Les nitrures à faible bande interdite sont extrêmement

sensibles au recuit, qui permet notamment d’augmenter la photoluminescence des couches

typiquement d’un ordre de grandeur (cf Figure II-18). Un décalage vers le bleu du pic de PL

est également constaté après le recuit (cf Figure II-18). Cet effet indésirable limite l’obtention

de longueurs d’onde élevées avec des intensités acceptables. Il sera étudié en détail au

Chapitre V.

0,90 0,95 1,00 1,05 1,100,0

0,2

0,4

0,6

0,8

1,0

300 K recuit 5 min à 700 °C non recuit

Spectre PL puits quantique GaInNAs/GaAs

Inte

nsi

té d

e P

L (

u.

a.)

Energie (eV)

Figure II-18 : Effet typique du recuit thermique sur un spectre de photoluminescence.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

58

II.3.5.1 Type de recuit

Les échantillons ont été recuits soit in situ dans le bâti d’épitaxie, soit ex situ dans un

four thermique rapide, dit four RTA (pour Rapid Thermal Annealing).

II.3.5.1.a Recuit in-situ

Le recuit in situ consiste à élever la température de l’échantillon jusqu’à 650 °C

pendant une durée de 15 à 30 minutes. Ce recuit s’effectue dans le bâti d’épitaxie à la fin de la

croissance des structures (cf Figure II-4), sous une contre pression d’arsenic afin d’empêcher

toute dégradation de la couche de GaAs de surface. Il impose des rampes de montée en

température relativement lentes, et n’autorise pas des recuits à température élevée,

contrairement au recuit RTA.

Ce type de recuit préfigure l’histoire thermique que pourrait subir une couche de

GaInNAs dans le cas de la réalisation du miroir supérieur d’un VCSEL.

II.3.5.1.b Recuit ex situ

Le recuit thermique rapide (RTA) consiste à chauffer des lampes halogènes dans un

four, ce qui autorise des rampes de montée en température très raides. Il permet donc

d’effectuer des recuits très courts à des températures relativement élevées (cf Figure II-19), ce

qui ne dégrade généralement pas les propriétés structurales du matériau. Dans ce travail de

thèse, deux fours RTA ont été utilisés : un situé au LIR, dont la température maximale

d’utilisation est de 700 °C, l’autre situé au LPM, pour les recuits à plus hautes températures

(700 °C – 850 °C). Dans les deux cas, les recuits sont effectués sous flux d’azote.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

59

0 50 100 150 200 2500

100

200

300

400

500

600

700

800

900

Enregistrement température RTA 800°C, 30s

Tem

péra

ture

(°C

)

Temps (s)

Figure II-19 : Courbe de température enregistrée dans le four RTA lors d’un recuit RTA de 30 s à 800 °C.

II.3.5.2 Augmentation de l’intensité de photoluminescence

Dans un premier temps, nous confirmons que le recuit permet effectivement d’obtenir

un gain sur l’intensité de PL (notée IPL) de puits quantiques de GaInNAs/GaAs. Ensuite nous

essayons de l’optimiser en terme de température et en terme de durée. L’échantillon étudié se

compose de 3 puits quantiques de Ga0,62In0,38N0,015As0,985/GaAs, élaborés à 400 °C, dont

l’épaisseur est voisine de 7 nm. Les recuits ont été effectués dans le four RTA du LPM.

L’intensité de PL est mesurée au LIR à température ambiante et sous forte densité de

puissance d’excitation (~10 kW/cm2). Un échantillon identique mais sans azote est également

étudié comme référence.

La Figure II-20 montre l’évolution de l’IPL en fonction de la durée du recuit, pour

différentes températures de recuit, et sur chacune des deux structures. De manière générale, le

recuit améliore la luminescence d’un facteur 4 à 10 sur les puits quantiques azotés, alors qu’il

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

60

a tendance à dégrader la luminescence des puits quantiques de référence, sans azote.

L’augmentation la plus importante d’IPL a lieu dès les premières secondes du recuit, et ce

quelle que soit la température de recuit. En ce qui concerne les conditions de recuit, il apparaît

qu’il est préférable d’effectuer soit un recuit relativement long (5 minutes) à température

‘intermédiaire’ (700 °C), soit un recuit très court (10 s) à température élevée (800 °C à 850

°C). Néanmoins dans tous les cas, l’intensité du signal reste plus faible sur l’échantillon qui

comporte de l’azote.

0 100 200 300 400 500 6001

10

100

0 100 200 300 400 500 6001

10

100

0 100 200 300 400 500 6001

10

100

0 100 200 300 400 500 6001

10

100

700 °C

Inte

nsité

de

PL

(u. a

.)

3 puits quantiques Ga0.62

In0.38

As/GaAs 3 puits quantiques Ga

0.62In

0.38N

0.015As

0.985/GaAs

750 °C

800 °C

Sensibilité au recuit RTA

Inte

nsité

de

PL

(u. a

.)

Durée du recuit (s)

850 °C

Durée du recuit (s)

Figure II-20 : Intensité de PL à 300 K en fonction des conditions de recuit RTA sur 3 puits quantiques de

Ga0,62In0,38N0,015As0,985/GaAs et 3 puits de référence, sans azote.

La luminescence, comparativement faible, des puits nitrurés par rapport aux puits non

nitrurés, est généralement observée dans la littérature, particulièrement sur les structures non

recuites. Elle indique la création de centres de recombinaison non radiative avec

l’incorporation d’azote. Quant au recuit, il permettrait de réduire, au moins en partie, la

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

61

concentration de ces défauts non radiatifs. Rao et al. [12] furent les premiers à montrer

l’utilité des traitements thermiques pour accroître l’IPL de couches de GaNAs. Depuis, le

recuit thermique est le traitement de choix pour augmenter l’IPL, que ce soit sur le GaNAs ou

sur le GaInNAs [13]. Pour autant l’ambiguï té sur l’origine de l’augmentation des rendements

de luminescence avec le recuit n’a pas été clairement levée, même si la génération de défauts

non radiatifs est vraisemblablement plus à relier aux phénomènes d’incorporation d’azote

qu’aux basses températures de croissance utilisées. En effet, les échantillons de référence,

sans azote, sont élaborés dans les mêmes conditions et émettent une PL plus intense. De plus,

l’IPL chute avec l’incorporation d’azote, ce qui montre que l’incorporation des défauts

augmente avec le pourcentage d’azote [14]. Des études de spectroscopie de défauts profonds

(DLTS pour Deep Level Transient Spectrocopie) ont permis de mettre en évidence la

présence de centres situés en énergie dans la bande interdite des nitrures GaNAs [15] et

GaInNAs [16] non recuits. L’élimination [15] de certains de ces centres ou tout au moins la

diminution de leur signature [16] avec le recuit montre qu’ils jouent probablement le rôle de

défauts non radiatifs. La diminution des défauts non radiatifs avec le recuit a également été

mise en évidence par résonance magnétique détectée optiquement (ODMR) [17].

L’élimination de ces défauts non radiatifs, localisés spatialement [15], permettrait, outre le

gain sur l’IPL, une uniformisation de l’IPL à la surface des échantillon [18]. Quant à la nature

des défauts, elle est encore discutée actuellement. Il a souvent été proposé [12, 19, 20, 21] que

l’hydrogène, associé à l’azote sous forme de complexes, puisse jouer le rôle de défauts non

radiatifs dans les couches. L’élément hydrogène est en effet présent pendant la croissance par

épitaxie par jets moléculaires en source gaz, ou par dépôt en phase vapeur par

organométalliques. La diminution de la concentration d’hydrogène après recuit [20], corrélée

à l’augmentation d’IPL, permet d’argumenter en ce sens. Pourtant, le gain en IPL est également

constaté sur des échantillons élaborés par épitaxie par jets moléculaires en source solide, dans

lesquels l’incorporation d’hydrogène ne peut avoir lieu. Il faut donc chercher ailleurs l’origine

du gain de luminescence induit par le recuit. Les défauts présents dans les couches de nitrures

à faible bande interdite ont également été imputés à des ions énergétiques générés par le

plasma (dans le cas d’une décomposition d’azote par cellule plasma rf) et bombardant les

couches en croissance. Il a été montré [22] que l’application d’un champ magnétique à la

sortie de la cellule azote pour dévier les ions énergétiques résiduels, permet d’augmenter l’IPL

de puits quantiques de GaInNAs/GaAs. Les défauts ponctuels tels que les lacunes de gallium

ou les interstitiels d’azote [23] ou encore les antisites (arsenic en site gallium) [17] ont

également été évoqués comme cause possible de défauts non radiatifs. En particulier

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

62

l’incorporation d’azote en site interstitiel sur les échantillons non recuits semble très probable,

[23, 24] du fait de la petite taille de cet atome. Elle expliquerait par ailleurs les écarts à la loi

de Végard constatés dans l’alliage GaNAs [24, 25].

Le rôle premier du recuit thermique est donc d’augmenter d’environ un ordre de

grandeur l’IPL des nitrures à faible bande interdite, via la guérison de défauts non radiatifs

générés pendant l’incorporation d’azote.

II.4 Conclusion du Chapitre II

L’incorporation d’environ 2 % d’azote dans des puits quantiques de GaInAs/GaAs

riches en indium (35 à 39 % d’In) induit une diminution de l’énergie de bande interdite

d’environ 200 meV, et permet d’obtenir une émission de lumière à la longueur d’onde de 1,3

µm sur substrat GaAs à température ambiante. L’obtention de cette longueur d’onde

d’émission, stratégique dans le domaine des télécommunications, et qui n’était jusqu’en 1996

possible que sur substrat InP, ouvre la voie à la réalisation de composants optiques

monolithiques dans la filière GaAs. Cependant, l’élaboration de l’alliage quaternaire

GaInNAs avec de bonnes propriétés optiques et structurales nécessite de prendre certaines

précautions. En effet, l’incorporation d’azote dans le semiconducteur ternaire GaInAs, qui

devrait pourtant réduire les contraintes, favorise l’apparition d’une croissance

tridimensionnelle et fait chuter les rendements radiatifs des puits quantiques. Ces phénomènes

néfastes peuvent être réduits en diminuant la température de croissance à environ 400°C, puis

en effectuant un recuit thermique post-croissance. Néanmoins, autant que faire se peut, il est

préférable d’effectuer une croissance ‘riche indium pauvre azote’ plutôt que l’inverse pour

atteindre la longueur d’onde de 1,3 µm. Le chapitre suivant porte sur l’augmentation de la

longueur d’onde d’émission avec l’incorporation d’azote.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

63

II.5 Références du Chapitre II

1 DAUDIN, B., FEUILLET, G. EJM-assitée plasma des nitrures : problèmes spécifiques, cas de la phase cubique Cours donné dans le cadre de l’école thématique sur les composés semiconducteurs de la famille des nitrures d’éléments du groupe III, 7-10 juillet 1997, Montpellier, 28 p

2 ASPNES, D.E. Modulation spectroscopy – Electric field effects on the dielectric function of semiconductors In : Handbook on semiconductors, Balanski ed., Amsterdam : North Holland Publishing Company, 1980, vol. 2, pp. 109-154

3 POLLAK, F.H. Modulation spectroscopy of the group III nitrides In : Group III nitride semiconductor compounds : physics and applications, B. Gil ed., Oxford : Clarendon press, 1998, pp. 158-181

4 BRU-CHEVALLIER, C., BENYATTOU, T., BALTAGI, Y., MONEGER, S., GUILLOT, G. Photoreflectance as a tool for semiconductor material characterization In : Conference at SOTAPOCS XVIII, Honolulu, Hawaï (Proceedings Electrochem. Soc., R.E. Enstrom ed., 1993, vol. 93, n° 27, pp. 241-234)

5 DIMOULAS, A. Modulation spectroscopy and its application in III-V semiconductors grown by molecular beam epitaxy Ph. D. Thesis, University of Crete, 1991, 173 p

6 GILET, P., GRENOUILLET, L., DUVAUT, P., BALLET, P., ROLLAND, G., VANNUFFEL, C., MILLION, A. Growth and Characterization of GaInNAs/GaAs Multiquantum Wells J. Vac. Sci. Technol. B, 2001, vol. 19, n° 4, pp. 1422-1425

7 XIN, H.P., KAVANAGH, K.L., ZHU, Z.Q., TU, C.W. Quantum dot-like behavior of GaInNAs in GaInNAs/GaAs quantum wells grown by gas-source molecular-beam epitaxy J. Vac. Sci. Technol. B, 1999, vol. 17, n° 4, pp. 1649-1653

8 NEUGEBAUER, J., VAN DE WALLE, C.G. Electronic structure and phase stability of GaAs1-xNx alloys Phys. Rev. B, 1995, vol. 51, n° 16, pp. 10568-10571

9 GOLDMAN, R.S., FEENSTRA, R.M., BRINER, B.G., O’STEEN, M.L., HAUENSTEIN, R.J. Atomic-scale structure and electronic properties of GaN/GaAs superlattices Appl. Phys. Lett., 1996, vol. 69, n° 24, pp. 3698-3700

10 SUN, B.Q., JIANG, D.S., PAN, Z., LI, L.H., WU, R.H. Influence of dual incorporation of In and N on the luminescence of GaInNAs/GaAs single quantum wells Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 77, n° 25, pp. 4148-4150

11 BELLAICHE, L., WEI, S.H., ZUNGER, A. Composition dependence of interband transition intensities in GaPN, GaAsN, and GaPAs alloys Phys. Rev. B, 1997, vol. 56, n° 16, pp. 10233-10240

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

64

12 RAO, E.V.K., OUGAZZADEN, A., LE BELLEGO, Y., JUHEL, M. Optical properties of low band gap GaAs(1-x)Nx layers: Influence of post-growth treatments Appl. Phys. Lett., 1998, vol. 72, n° 12, pp. 1409-1411

13 BHAT, R., CANEAU, C., SALAMANCA-RIBA, L., BI, W., TU, C. Growth of GaAsN/GaAs, GaInAsN/GaAs and GaInAsN/GaAs quantum wells by low-pressure organometallic chemical vapor deposition J. of Cryst. Growth, 1998, vol. 195, pp. 427-437

14 XIN, H.P., KAVANAGH, K.L., KONDOW, M., TU, C.W. Effects of rapid thermal annealing on GaInNAs/GaAs multiple quantum wells J. of Cryst. Growth, 1999, vol. 201/202, pp. 419-422

15 TANAKA, S., MOTO, A., TAKAHASHI, M., TANABE, T., TAKAGISHI, S. Spatial distribution of deep level traps in GaNAs crystals J. of Cryst. Growth, 2000, vol. 221, pp. 467-474

16 KWON, D., KAPLAR, R.J., RINGEL, S.A., ALLERMAN, A.A., KURTZ, S.R., JONES, E.D. Deep levels in p-type InGaAsN lattice matched to GaAs Appl. Phys. Lett., 1999, vol. 74, n° 19, pp. 2830-2832

17 THINH, N.Q., BUYANOVA, I.A., HAI, P.N., CHEN, W.M., XIN, H.P., TU, C.W. Signature of an intrinsic point defect in GaNxAs1-x

Phys. Rev. B, 2001, vol. 63, n° 3, pp. 033203-1-033203-4

18 KITATANI, T., NAKAHARA, K., KONDOW, M., UOMI, K., TANAKA, T. Mechanism analysis of improved GaInNAs optical properties through thermal annealing J. of Cryst. Growth, 2000, vol. 209, pp. 345-349

19 SAITO, H., MAKIMOTO, T., KOBAYASHI, N. MOVPE growth of strained InGaAsN/GaAs quantum wells J. of Cryst. Growth, 1998, vol. 195, pp. 416-420

20 XIN, H.P., TU, C.W., GEVA, M. Effects of hydrogen on doping of GaInNAs grown by gas-source molecular beam epitaxy J. Vac. Sci. Technol. B, 2000, vol. 18, n° 3, pp. 1476-1479

21 GEISZ, J.F., FRIEDMAN, D.J., OLSON, J.M., KURTZ, S.R., KEYES, B.M. Photocurrent of 1 eV GaInNAs lattice-matched to GaAs J. of Cryst. Growth, 1998, vol. 195, pp. 401-408

22 PAN, Z., LI, L.H., ZHANG, W., LIN, Y.W., WU, R.H., GE, W. Effect of rapid thermal annealing on GaInNAs/GaAs quantum wells grown by plasma-assisted molecular-beam epitaxy Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 77, n° 9, pp. 1280-1282

23 LI, W., PESSA, M., AHLGREN, T., DECKER, J. Origin of improved luminescence efficiency after annealing of Ga(In)NAs materials grown by molecular-beam epitaxy Appl. Phys. Lett., 2001, vol. 79, n° 8, pp. 1094-1096

24 SPRUYTTE, S.G., COLDREN, C.W., HARRIS, J.S., WAMPLER, W., KRISPIN, P., PLOOG, K., LARSON, M.C.

Chapitre II : Optimisation de la croissance pour l’émission à 1,3 µm

_________________________________________________________________________________________________________________

65

Incorporation of nitrogen in nitride-arsenides: Origin of improved luminescence efficiency after anneal

J. of Appl. Phys., 2001, vol. 89, n° 8, pp. 4401-4406

25 LI, W., PESSA, M., LIKONEN, J. Lattice parameter in GaNAs epilayers on GaAs: Deviation from Vegard’s law Appl. Phys. Lett., 2001, vol. 78, n° 19, pp. 2864-2866

Chapitre III :

Propriétés optiques et électroniques

des nitrures à faible bande interdite

Ce chapitre porte sur la diminution de l’énergie de bande interdite des alliages

GaInNAs et GaNAs avec l’incorporation d’azote. Cette diminution très forte, atypique dans

les semiconducteurs III-V, est d’abord mise en évidence dans l’alliage GaNAs. Ensuite, son

origine physique est discutée à travers différents modèles théoriques et résultats

expérimentaux de la littérature. Parmi ces modèles, le modèle d’anticroisement de bande est

utilisé pour décrire de manière quantitative la diminution de l’énergie de bande interdite avec

l’incorporation d’azote dans le ternaire GaNAs et le quaternaire GaInNAs. La description

mathématique est mise à profit pour étudier la contrainte dans des couches pseudomorphiques

de GaNAs. Elle sert également à l’attribution des différents niveaux énergétiques confinés,

observés dans les puits quantiques de GaInNAs par photoréflectivité.

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

68

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

69

III.1 Un paramètre de courbure géant

Dans ce paragraphe, nous nous intéressons dans un premier temps à l’évolution

atypique de l’énergie d’émission de PL à 300 K de l’alliage GaNxAs1-x lorsque la fraction

d’azote augmente de 0 à 4 %. Nous quantifions la diminution drastique de l’énergie

d’émission avec l’incorporation d’azote et la comparons avec les résultats de la littérature,

tant expérimentaux que théoriques. Dans un deuxième temps, nous nous penchons sur les

effets physiques à l’origine d’un tel ‘paramètre de courbure géant’ [1]. En effet, la littérature,

bien que très récente sur ce type d’alliage, n’en est pas moins très riche et parfois

contradictoire. A notre connaissance, aucun modèle ne fait encore l’unanimité concernant la

physique à l’origine du comportement de l’alliage.

III.1.1 Diminution de l’énergie d’émission avec l’incorporation

d’azote

De nombreuses couches de GaNxAs1-x ont été épitaxiées en faisant varier le débit

d’azote dans la cellule plasma pour changer le pourcentage d’azote incorporé dans les

couches, ceci dans le but d’estimer le paramètre de courbure de l’alliage et ainsi calibrer la

diminution de l’énergie d’émission avec l’incorporation d’azote. Pour ce faire, chaque

échantillon est caractérisé par photoluminescence et par diffraction de RX haute résolution

afin de déterminer respectivement l’énergie d’émission à 300 K et le pourcentage d’azote

incorporé. La Figure III-1 illustre les spectres obtenus pour un échantillon dont le pourcentage

d’azote est estimé, par simulation, à 1,06%.

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

70

1,0 1,1 1,2 1,3 1,4 1,50,0

0,5

1,0

1,5

2,0

2,5

3,0

-500 0 500 1000 1500100

101

102

103

104

105

106

107

FWHM = 60 meV

1.244 eV

In

tens

ité d

e P

L (u

. a.)

Energie (eV)

expérience simulation : x = 0.0106GaAs

GaNxAs

1-x

Inte

nsité

(u.

a.)

ω (arcsec)

Figure III-1 : Spectre de photoluminescence (gauche) et de diffraction de RX haute résolution (droite)

obtenus à 300 K sur une couche de GaNAs/GaAs de 100 nm d’épaisseur.

La position angulaire du pic du GaNAs par rapport au pic du GaAs est directement

reliée au pourcentage d’azote. Les simulations sont effectuées en supposant que les couches

de GaNAs/GaAs sont pseudomorphiques, c’est-à-dire que la déformation de la couche

contrainte est tétragonale. Par ailleurs, le paramètre de maille de l’alliage est déterminé par

interpolation linéaire des paramètres des binaires le constituant (loi de Végard). Récemment il

a été montré que l’alliage GaNAs déviait de la loi de Végard [2], et que le pourcentage

d’azote incorporé était surestimé par rapport au pourcentage réel. Cet effet, qui demande

confirmation, n’est pas pris en compte dans nos simulations.

L’ensemble des couples ‘énergie d’émission à 300 K - pourcentage d’azote incorporé’

obtenus sur nos échantillons est tracé à la Figure III-2 (carrés pleins). La forte chute de

l’énergie d’émission avec l’incorporation d’azote est confirmée, puisque 4 % d’azote

induisent une diminution de l’énergie d’émission de PL à 300 K d’environ 400 meV, ce qui

représente une réduction de 30 % par rapport à l’énergie d’émission du GaAs. Ce

comportement est en bon accord avec les résultats expérimentaux de la littérature, obtenus par

PL [3] mais aussi par des mesures d’absorption [4] ou encore d’électroréflectivité [5] (cf

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

71

Figure III-2). A la température de mesure (300 K), on considère que l’énergie d’émission de

PL est assimilable à l’énergie de bande interdite de l’alliage, déterminée par absorption ou

électroréflectivité. Cette hypothèse semble justifiée au vu de la faible dispersion des mesures

de la Figure III-2, mais surtout au vu de la Figure II-14, où les spectres de PL et de PR à 300

K sont situés à la même énergie.

0 1 2 3 4 5

0,9

1,0

1,1

1,2

1,3

1,4

1,5300 K

PL 300K (notre travail) Mesures d'absorption (Uesugi et al.) PL 300K (Bhat et al.) Electroréflectance (CER) (Malikova et al.) Paramètre de courbure b=14,7 eV

Ajustement polynomial 110x2-15,2x+1,422 Modèle d'anticroisement de bande (Shan et al.)

Ene

rgie

(eV

)

Pourcentage d'azote

Figure III-2 : Paramètre de courbure ‘géant’ de l’alliage GaNxAs1-x (0<x<0,045), déterminé par différentes

techniques de spectroscopie optique, à 300 K. Les traits correspondent à différents ajustements.

L’évolution de l’énergie des points expérimentaux de la Figure III-2 avec

l’incorporation d’azote peut être approximativement décrite à l’aide de l’équation I-1, en

utilisant un paramètre de courbure ‘géant’ de 14,7 eV. On constate à la Figure III-2 que

l’approximation (tracée en pointillés) est grossière, ce qui montre que le coefficient de

courbure de l’alliage dépend de la concentration d’azote (comme explicité au Chapitre I) : il

diminue avec le pourcentage d’azote. Aussi, plutôt que d’attribuer un coefficient de courbure

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

72

à des gammes de composition très restreintes, il nous semble plus simple de décrire le

comportement optique de l’alliage par un ajustement polynomial du 2nd ordre :

EPL 300K = 110 x2 – 15,2 x + 1,424 Équation III-1

où l’énergie est exprimée en électronvolt et où x est la fraction d’azote (courbe discontinue de

la Figure III-2). Cet ajustement reste toutefois relativement imprécis pour les pourcentages

d’azote inférieurs à 1,5 %. En revanche, le modèle d’anticroisement de bande développé par

Shan et al. [6], et explicité dans les pages qui suivent, est beaucoup plus fidèle aux résultats

expérimentaux, comme le montre la courbe continue de la Figure III-2. Nous nous

interrogeons maintenant sur les phénomènes physiques à l’origine de cette très forte

diminution de l’énergie de bande interdite (et de l’énergie d’émission) avec l’incorporation

d’azote.

III.1.2 Origine physique du paramètre de courbure géant : plusieurs

approches

Dans ce paragraphe nous présentons différentes explications physiques proposées pour

rendre compte du paramètre de courbure géant observé sur les nitrures d’éléments III-V, ainsi

que d’autres propriétés caractéristiques de ces alliages.

III.1.2.1 Modèle d’anticroisement de bande

Lorsque l’on substitue de l’azote en faible quantité (dopage) à de l’arsenic dans GaAs,

le caractère très électronégatif de l’atome N introduit un niveau accepteur, c’est-à-dire un

piège (puits de potentiel) local pour les électrons. Ce niveau est appelé niveau isoélectronique

car la valence de l’atome d’azote est identique à celle de l’atome d’arsenic. Dans GaAs:N

ainsi créé, ce niveau d’impureté est résonnant avec la bande de conduction : il se situe à

environ 1,65 eV au-dessus du haut de la bande de valence, donc à 0,25 eV au-dessus du bas

de la bande de conduction du GaAs, comme l’ont mis en évidence des études en pression [7].

Ce niveau, très localisé dans l’espace réel, est donc très délocalisé dans l’espace des k (espace

réciproque), d’après la relation d’Heisenberg ∆x.∆k ≥ h.

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

73

Shan et al. [6] ont proposé que, dans l’alliage GaNAs, ces états localisés dus aux

atomes d’azote isolés dans la matrice soient couplés avec les états délocalisés (ou étendus) du

minimum Γ de la bande de conduction de la matrice GaAs. La description mathématique de

cette interaction [6] aboutit à deux solutions :

( )[ ]2

V4)k(EE)k(EE)k(E

2MN

2MNMN ⋅+−±+

=± Équation III-2

où EN est l’énergie du niveau de l’atome d’azote isolé, EM(k) est l’énergie de la bande de

conduction Γ du GaAs et VMN décrit l’interaction entre ces deux types d’états. Cette

interaction est d’autant plus forte que le nombre d’atomes d’azote dans la matrice de GaAs est

élevé. Il a été montré [8] que :

xCV MNMN ⋅= Équation III-3

où x est la fraction d’azote et CMN une constante. Finalement, on a :

( )[ ]2

xC4)k(EE)k(EE)x,k(E

2MN

2MNMN ⋅⋅+−±+

=± Équation III-4

Ainsi, l’interaction (le couplage) de EM(k) avec EN donne naissance à deux sous-

bandes non paraboliques E-(k) et E+(k) dont l’énergie dépend de la concentration d’azote,

comme montré à la Figure III-3. Plus la concentration d’azote augmente, plus ces deux sous-

niveaux se repoussent et donc plus le minimum de la bande de conduction E-(0) de l’alliage

formé diminue. D’après ce modèle, appelé modèle d’anticroisement de bande ou BAC (pour

Band Anticrossing Model), c’est donc la répulsion de EN et de EM(k) qui serait à l’origine de

la réduction de l’énergie de bande interdite avec l’incorporation d’azote et donc du fort

paramètre de courbure de l’alliage GaNAs. Un raisonnement identique peut être fait avec

l’alliage quaternaire GaInNAs, en prenant une matrice de GaInAs à la place de la matrice de

GaAs. Toujours d’après ce modèle, l’interaction de EN avec EM(k) induit un anticroisement de

E- et E+ et un mélange du caractère des états E- et E+ : les états E- sont principalement

délocalisés (nature proche de EM) pour 0≈k et très localisés en limite de zone de Brillouin

(nature proche de EN). Inversement, les états E+ sont très localisés pour k ≈ 0 et plutôt

délocalisés pour k élevé (cf Figure III-3).

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

74

-20 -10 0 10 20-0,5

0,0

0,5

1,0

1,5

2,0

2,5

3,0

Diagramme E(k) de GaNxAs

1-x

SO trous légers

trous lourds

E-(x

2)

E-(x

1)

E+(x

2)

E+(x

1) E

M(k)E

N

BC matrice GaAs N isolé GaN

x1

As1-x

1

avec x1=0,005

GaNx

2

As1-x

2

avec x2=0,025

Ene

rgie

(eV

)

Vecteur d'onde k (106 cm-1)

Figure III-3 : Diagramme E(k) montrant la répulsion entre la bande de conduction du GaAs et le niveau de

l’azote isolé, qui induit la création des deux sous-bandes non paraboliques.

Ce modèle, simple et esthétique, a été validé par la mise en évidence, par mesures de

photoréflectivité [6, 9, 10], électroréflectivité [11], et absorption [12], des niveaux E- et E+.

Leur répulsion lorsque le pourcentage d’azote augmente est également observée et bien

décrite par le modèle. Ces mesures montrent aussi que les bandes de valence ne sont, elles,

pas perturbées par la présence d’azote [11, 12].

Mais surtout, le modèle permet d’expliquer de nombreuses propriétés des nitrures à

faible bande interdite GaNAs et GaInNAs, que nous résumons brièvement :

i) Le paramètre de courbure de ces alliages est très bien décrit (cf Figure III-2) et

de manière simple, en utilisant l’équation III-4 avec comme seul paramètre

d’ajustement CMN = 2,7 eV. Il n’est donc plus nécessaire de considérer que le

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

75

paramètre de courbure est fonction de la concentration d’azote. Nous utilisons

donc ce modèle pour calculer l’énergie de bande interdite des alliages

GaNxAs1-x et Ga1-yInyNxAs1-x dans la gamme de composition 0<x<0,045.

ii) Le comportement en pression de l’énergie de bande interdite des alliages

nitrurés est lui aussi atypique. Au lieu d’augmenter de manière linéaire avec la

pression, E- augmente de manière sub-linéaire et finit par saturer pour des

pressions appliquées élevées, alors que l’inverse se produit pour E+ [6]. Le

modèle d’anti-croisement de bande décrit très bien ce phénomène en utilisant

la dépendance linéaire de l’énergie de bande interdite de la matrice lorsque la

pression augmente et la quasi-insensibilité du niveau isoélectronique de l’azote

avec la pression. De plus, le passage progressif d’états délocalisés (localisés) à

états localisés (délocalisés) pour E- (E+) lorsque la pression augmente, est mis

en évidence qualitativement [6] avec l’intensité des transitions observées en

PR.

iii) La masse effective des électrons 22

2

kEme ∂∂

=∗ h est inversement

proportionnelle à la courbure de la bande de conduction. Comme on peut le

constater à la Figure III-3, la bande de conduction E- des nitrures à faible bande

interdite est fortement non parabolique et de courbure plus faible que s’il n’y

avait pas d’azote. On s’attend donc à ce que la masse effective des électrons

dans ces alliages augmente fortement avec la concentration d’azote et ce

d’autant plus que la bande de conduction E-(k) est peuplée. Des résultats

expérimentaux mentionnent effectivement des masses très élevées, par

exemple 0,4 m0 dans du Ga0,92In0,08N0,033As0,967 [13]. Ces valeurs sont 5 fois

plus importantes que dans du GaAs et comparables aux valeurs de masse

effective des trous lourds dans les composés III-V. En outre, ces travaux

montrent que la masse effective des électrons dépend fortement du niveau de

dopage de type n, donc de la concentration des électrons dans la bande de

conduction. Ils confirment également une prédiction peu intuitive du modèle

d’anticroisement de bande, à savoir que pour une même concentration

d’électrons dans la bande de conduction, l’augmentation de la masse effective

est d’autant plus importante que la concentration en azote est faible. Une

diminution de la mobilité des électrons est aussi observée [14].

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

76

iv) Lorsqu’un semiconducteur est dopé, de type n par exemple, la concentration

d’électrons ne peut excéder une concentration maximale qui dépend de la

nature du matériau. Des études s’appuyant sur le modèle d’anticroisement de

bande ont montré que le décalage vers les basses énergies de la bande de

conduction E-(k) et l’augmentation de la masse effective, consécutifs à

l’augmentation de l’incorporation d’azote, induisaient une augmentation

importante de la concentration maximale d’électrons. Ainsi, l’incorporation

d’une faible fraction d’azote peut augmenter d’un ordre de grandeur la

concentration maximale d’électrons présents dans la bande de conduction [15].

v) La dépendance en température de l’énergie de bande interdite des alliages

nitrurés est plus faible que celle de leurs homologues sans azote [16, 17, 18,

19, 5]. Elle diminue d’autant plus que le pourcentage d’azote incorporé est

important. Cet effet est décrit par le modèle d’anticroisement de bande [17], en

considérant que le niveau des états localisés introduit par l’azote ne dépend pas

de la température. On obtient alors la formule :

( )[ ]2

xC4)T(EE)T(EE)x,T(E

2MN

2MNMN ⋅⋅+−±+

=± Équation III-5

En définitive, ce modèle permet de décrire de manière phénoménologique de

nombreuses propriétés des nitrures à faible bande interdite, et ce de façon simple. Néanmoins,

il ne fait pas l’unanimité car il soulève certains problèmes physiques :

• La bande E- a un caractère plutôt délocalisé d’après le modèle d’anticroisement de

bande. Or, des études, qu’elles soient théoriques [20] ou expérimentales [21], tendent

à montrer que cette bande présente un caractère très localisé. Par ailleurs, des calculs

menés par Mattila et al. [22] ont montré que la formation des bandes E- et E+ était

plutôt imputable à une interaction entre les bandes de conduction Γ et L, qui

augmenterait avec le pourcentage d’azote. En outre, Jones et al. [23] ont montré que la

faible dépendance en pression de la bande E- pouvait être expliquée par une interaction

entre les bandes de conduction Γ et X, sans nécessairement faire intervenir le niveau

de l’atome d’azote isolé. A la différence du modèle d’anticroisement de bande, dans ce

modèle, les états E- de l’alliage Ga(In)NAs sont localisés dans l’espace réel [24]. Des

études expérimentales [25, 26, 27] vont également dans le sens d’un mélange des états

des bandes de conduction Γ, L, et X, alors que d’autres [28, 29] montrent au contraire

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

77

que ces interactions jouent un rôle très peu significatif dans la modification de la

structure de bande par rapport à l’interaction entre les états étendus de la bande de

conduction Γ et les états localisés de l’atome d’azote isolé. En somme, les avis et

résultats divergent sur l’interprétation physique des phénomènes observés.

• Le modèle d’anticroisement de bande ne prend en compte, dans l’interaction avec la

bande de conduction de la matrice, que le niveau induit par l’atome d’azote isolé. Or, à

moins d’avoir des dopages très faibles, l’atome d’azote est rarement isolé :

statistiquement, dans son environnement local, se trouve un autre atome d’azote. La

présence des deux atomes d’azote va changer l’énergie du niveau isoélectronique

accepteur, ce qui n’est pas du tout pris en compte par le modèle d’anticroisement de

bande, et que nous décrivons dans le paragraphe suivant.

III.1.2.2 Passage progressif dopage-alliage

III.1.2.2.a Raies discrètes dans les spectres de photoluminescence

Imaginons un atome d’azote isolé se substituant à un atome d’arsenic dans une matrice

de GaAs. A basse température, l’atome d’azote, très électronégatif par rapport à l’atome

d’arsenic qu’il remplace, capture un électron pour devenir N-, puis un trou par attraction

coulombienne [30, 31]. L’association de l’électron et du trou forme un exciton [32]. Dans ce

cas, l’exciton est lié à l’atome d’azote isolé. L’atome d’azote constitue donc une impureté

acceptrice isoélectronique et crée un niveau excitonique (place disponible pour l’exciton). Le

niveau excitonique est, dans ce système, résonant avec la bande de conduction du GaAs et est

situé à 1,65 eV au-dessus de la bande de valence du GaAs, comme nous l’avons explicité au

III.1.2.1 (cf également Figure III-4).

Imaginons maintenant deux atomes d’azote (en position substitutionnelle) dans la

matrice GaAs. Si ces deux atomes sont infiniment éloignés l’un de l’autre, ils créent chacun

un niveau isoélectronique situé à la même énergie que celle de l’azote isolé. En revanche, si

les deux atomes d’azote se rapprochent l’un de l’autre, il va y avoir interaction des deux

niveaux isoélectroniques pour former un niveau énergétiquement plus favorable pour

l’exciton, un peu comme l’association de deux atomes d’hydrogène forme une molécule

stable H2. L’exciton sera alors lié à une paire azote-azote. Dans un réseau cristallin (en

l’occurrence zinc de blende), la position des cations est bien déterminée et la distance entre

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

78

deux atomes d’azote prend des valeurs discrètes 2ai2r 0i ×= où a0 est le paramètre

cristallin. Les atomes d’azote peuvent être plus proches voisins, on parlera alors de paires

NN1. Si les atomes d’N sont en position de 2nd, 3ème, ième voisins, on parlera respectivement de

paires NN2, NN3, NNi, jusqu’à N-N∞ = Nx (atome d’azote isolé). Chacun de ces défauts

isoélectroniques associé à une paire NN crée un état excitonique dont l’énergie est

caractéristique du type de paire considérée.

1,00

1,25

1,50

1,75

2,00

N-N3-N

1-N

2

N-N2-N

3

N-N1

N-N3

Nx = N-N∞∞

matrice GaAs

exciton lié à un défaut isoélectronique

atome N

BC matrice GaAs

Niveau énergétique d'excitons liés à des n-uplets d'azote

Ene

rgie

(eV

)

Vecteur d'onde k

Figure III-4 : Schéma montrant les excitons liés aux agrégats d’azote (droite) et leur énergie

correspondante par rapport à la bande de conduction ΓΓ de la matrice GaAs (gauche). L’indice i dans Ni

correspond au type de voisin considéré.

Généralement, plus la distance entre deux azotes est faible, plus l’exciton est lié

fortement à cette paire, et plus l’énergie du niveau associé ‘descend’ vers la bande de valence

du GaAs (cf Figure III-4). En continuant le raisonnement, on peut imaginer la création

d’agrégats d’azote (triplets, quadruplets, n-uplets, cf triplet NN2N3 et quadruplet NN3N1N2 de

la Figure III-4) auxquels se lient très fortement les excitons. Si les niveaux se situent dans la

bande interdite, la recombinaison d’excitons localisés sur ces paires est observable en

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

79

photoluminescence et se présente sous la forme de raies très fines (largeur à mi-hauteur < 1

meV à 8K) [7, 33] et intenses, dont l’énergie est caractéristique du type de paire auquel est lié

l’exciton [7]. Si les niveaux sont situés dans la bande de conduction du GaAs, l’application

d’une contrainte hydrostatique suffisante permet de faire apparaître les raies correspondantes,

leur dépendance en pression étant beaucoup plus faible que celle de la bande interdite du

GaAs [7]. De cette manière, Liu et al. [7] ont montré que Nx est situé dans la bande de

conduction du GaAs et que NN1 se trouve environ à 10 meV en-dessous de la bande de

conduction. Des raies très intenses ont également été observées en PL à basses températures

dans des couches de GaAs lorsque le dopage azote augmente (dopage en volume ou δ dopage)

[34, 33, 35]. Les raies sont situées de 40 à 90 meV en dessous du bord de la bande de

conduction de GaAs.

III.1.2.2.b Les raies discrètes se transforment en bandes

Cet ensemble de raies, observé à basses températures et attribué à la recombinaison

d’excitons liés à des agrégats d’azote ou à leurs répliques phonon [36, 37, 38], disparaît peu à

peu lorsque le pourcentage d’azote augmente. Il laisse place à une bande de

photoluminescence assez large à partir d’un concentration de 0,2-0,25 % d’azote (dopage

azote équivalent à 1019 et 1020 cm-3). Ce phénomène correspond au passage du dopage à

l’alliage. Il est explicité et discuté aux paragraphes qui suivent.

III.1.3 Coexistence d’états localisés et d’états délocalisés

Une publication théorique récente [39] donne une description de la formation de la

structure électronique des nitrures d’éléments III-V qui nous semble très intéressante. En

effet, la description de Kent et Zunger prend en compte à la fois le couplage entres les

différentes bandes, et la distribution statistique des différents agrégats d’azote. Leur calcul

montre que lorsque le dopage du GaAs:N augmente, apparaissent progressivement des raies

fines sous la bande de conduction du GaAs. Ces raies, qui correspondent aux excitons liés aux

agrégats d’azote (‘états agrégats’) et qui s’étendent progressivement à l’intérieur de la bande

interdite, n’interagiraient pas suffisamment pour former une véritable bande d’impuretés. En

revanche, les états du cristal hôte perturbé par l’azote, qui apparaissent comme des résonances

fines dans le continuum de la bande de conduction du GaAs (‘états hôtes perturbés’),

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

80

s’élargiraient et descendraient énergétiquement dans la bande interdite, recouvrant ainsi un à

un les ‘états agrégats’.

D’après ce modèle, dans la gamme de composition qui nous intéresse (0,5 %- 2 %

d’azote), le bas de la bande de conduction est un mélange ‘d’états agrégats’, localisés

spatialement, et ‘d’états hôtes perturbés’, plus étendus. Les états localisés, qui viennent juste

d’être recouverts, constituent principalement une queue à basse énergie, tandis que les

niveaux à plus haute énergie proviennent préférentiellement d’états plus étendus. Kent et

Zunger prédisent que cette dualité états localisés – états délocalisés dans le bord de bande doit

induire :

• une localisation des excitons dans les queues d’états à basses températures,

• un décalage énergétique entre l’absorption (sur les ‘états hôte perturbés’) et l’émission

(provenant des ‘états agrégats’),

• un décalage vers le bleu de la photoluminescence basses températures lorsque la

température augmente, due à un transfert thermique des excitons des états localisés

vers les états plus étendus.

Nous verrons au Chapitre IV que nos résultats expérimentaux vont tout à fait dans ce sens.

III.1.4 Discussion

Nous pensons que les résultats de la publication de Kent et Zunger, que nous

décrivons ci-avant, apparaissent comme une sorte de prise en compte d’une part du modèle

d’anticroisement de bande (‘descente’ progressive de la bande de conduction avec

l’incorporation d’azote, états plutôt délocalisés), d’autre part des excitons liés aux paires,

triplets, …, agrégats d’azote (‘descente’ discrète avec l’incorporation d’azote, états très

localisés dans l’espace réel).

On peut imaginer que la formation d’un agrégat d’azote crée un niveau liant dans la

bande interdite, auquel se lie un exciton, mais également un niveau anti-liant dans la bande de

conduction, qui interagirait avec les états de la bande de conduction pour donner lieu à

l’anticroisement décrit par le modèle d’anticroisement de bande.

Avant d’étudier expérimentalement de manière plus fine les propriétés optiques de ces

alliages aux caractéristiques surprenantes, et éventuellement de confirmer les prédictions

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

81

théoriques de Kent et al. [39], nous utilisons le modèle phénoménologique d’anticroisement

de bande et la technique de photoréflectivité à 300 K pour mettre en évidence d’une part la

dégénérescence trous lourds – trous légers dans un couche de GaNAs contrainte sur GaAs,

d’autre part pour accéder à l’énergie des niveaux confinés dans un puits quantique à base de

(Ga,In)(N,As)/GaAs.

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

82

III.2 Détermination expérimentale des niveaux d’énergie

III.2.1 Levée de dégénérescence trous lourds – trous légers dans

des couches de GaNAs contraintes

L’énergie de bande interdite d’un matériau semiconducteur dépend de son état de

contrainte, comme le montre la Figure III-5. Dans le cas de dépôt de couches

bidimensionnelles et pseudomorphiques sur un substrat, la contrainte est biaxiale et le tenseur

des contraintes peut toujours se décomposer selon :

• une composante hydrostatique, qui diminue l’énergie de bande interdite dans le cas

d’une augmentation de volume ou qui l’augmente dans le cas contraire,

• une composante de cisaillement qui a pour effet de lever la dégénérescence trous

lourds – trous légers du haut de la bande de valence (cf Figure III-5).

Figure III-5 : Evolution de l’énergie de bande interdite en fonction de l’état de contrainte d’une couche

déposée sur un substrat.

COMPRESSIONRELAXETENSION

BC

BV

BC

BC

trous lourds

trous légers

trous légers

trous lourds

cisaillement cisaillementcontrainte

hydrostatiqueen tension

contraintehydrostatique

en compression+ +

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

83

Dans le cas d’une couche de GaNAs de 100 nm d’épaisseur, pseudomorphique sur

GaAs, le GaNAs est contraint en tension (cf Figure I-3). La transition la moins énergétique est

donc la transition électrons de la bande de conduction – trous légers de la bande de valence

(notée E-LH), et la plus énergétique est la transition électrons – trous lourds (notée E-HH). La

Figure III-6 montre les spectres de PR obtenus en différents points d’une plaque composée

d’une couche de GaNAs pseudomorphique (épaisseur 100 nm) sur GaAs, c’est-à-dire pour

différents pourcentages d’azote. Chaque spectre présente deux composantes, que nous

attribuons aux transitions E-LH et E-HH à basses et plus hautes énergies, respectivement. Les

ajustements, également tracés à la Figure III-6, permettent de décrire convenablement les

deux transitions. Le Tableau III-1 illustre les paramètres d’ajustement obtenus sur le spectre

qui correspond à la composition x1 (cf Figure III-6).

0,90 0,95 1,00 1,05 1,10 1,15 1,20 1,25 1,30 1,35

-0,0002

-0,0001

0,0000

0,0001

0,0002 300 K

Plaque GaNxAs

1-x(100nm)/GaAs

GaNxAs

1-x

x1

x2>x

1

x3>x

2

ajustements

∆R

/R

Energie (eV)

Figure III-6 : Spectres de PR en différents points d’une plaque de GaNAs/GaAs, ainsi que les ajustements

correspondants.

L’attribution des transitions se justifie d’une part par l’état de contrainte dans lequel se

trouve la couche, d’autre part par le fait que l’amplitude de la transition E-LH est proche du

tiers de l’amplitude de la transition E-HH, ce qui est prédit théoriquement.

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

84

Paramètres 1ère transition : E-LH 2ème transition : E-HH

Energie (eV) 1,020 1,073

Elargissement (meV) 25 22

Amplitude 0,24 0,64

Phase 1,531 -0,019

Tableau III-1 : Paramètres d’ajustement du spectre de PR de la Figure III-6 correspondant à la

composition x1.

La couche étant pseudomorphique, la variation relative du paramètre de maille a0 dans :

• une direction parallèle à la couche est égale à

GaAs0

GaNAs0GaAs0para a

aae

−= Équation III-6

• une direction perpendiculaire à la couche est égale à

GaNAs11

GaNAs12paraperp C

Ce2e ⋅⋅−= Équation III-7

où les Cij sont les coefficients d’élasticité.

L’énergie de la transition E-HH est donnée par :

uhydgNCgHH EEEE ++= Équation III-8

avec EgNC valeur de l’énergie de bande interdite de l’alliage non contraint (donnée par le

modèle d’anticroisement de bande), Ehyd variation d’énergie due à la composante

hydrostatique (cf Figure III-5) donnée par :

)ee2(aE perpparahyd +⋅⋅= Équation III-9

et Eu variation d’énergie due à la composante de cisaillement (cf Figure III-5) donnée par :

)ee(bE paraperpu −⋅= Équation III-10

a et b étant les potentiels de déformation hydrostatique et de cisaillement, respectivement.

L’énergie de la transition E-LH est donnée par :

∆+= gHHgLH EE Équation III-11

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

85

avec

∆⋅+

∆⋅+−⋅∆⋅+⋅−=∆

2SO

2u

SO

uSOu

E9

E2115.0E5.1 Équation III-12

où ∆SO est le dédoublement spin-orbite.

EgNC, EgHH, et EgLH dépendent évidemment du pourcentage d’azote. En supposant que les

paramètres de GaNAs sont obtenus par interpolation linéaire des paramètres du GaAs et du

GaN consignés dans le Tableau III-2, les valeurs des énergies sont tracées à la Figure III-7,

ainsi que les points expérimentaux obtenus à l’aide des ajustements des spectres de la Figure

III-6. Le pourcentage d’azote (x1) correspondant au premier couple (E-LH, E-HH) de points

expérimentaux a été déterminé par RX et est égal à 2,7 %. L’incertitude sur les autres points

expérimentaux (provenant d’endroits plus éloignés du centre de la plaque, plus riches en

azote) est plus importante car le pourcentage d’azote n’a pas été estimé exactement aux

mêmes endroits.

Paramètres GaAs GaN

Paramètre de maille (nm) 0,565325 0,452

Composante C11 du module d’élasticité (GPa) 119 264

Composante C12 du module d’élasticité (GPa) 53,8 153

Potentiel de déformation hydrostatique a (eV) -8,16 -8,16

Potentiel de déformation de cisaillement b (eV) -1,7 -1,6

Dédoublement spin-orbite (meV) 341 341

Tableau III-2 : Valeurs des paramètres servant au calcul de l’énergie du bande interdite en fonction de la

contrainte.

Néanmoins, on constate que l’écart énergétique expérimental entre la transition E-HH

et la transition E-LH est supérieur aux prévisions théoriques. On peut minimiser l’écart entre

théorie et expérience si on suppose que le potentiel de déformation b du GaNAs est plus élevé

qu’une simple interpolation linéaire entre GaAs et GaN. Ce résultat est tout à fait en accord

avec une étude [40] qui arrive à la conclusion que la valeur absolue de b dans l’alliage GaNAs

augmente anormalement dans la gamme de pourcentages 1,5 % - 3,3 %.

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

86

0,000 0,005 0,010 0,015 0,020 0,025 0,030 0,035900

950

1000

1050

1100

1150

1200

1250

1300

1350

1400

1450

1500

0,026 0,028 0,030 0,032 0,034

1000

1050

1100 E-HH exp.

Ene

rgie

(en

meV

)

Fraction d'azote x dans GaNxAs

1-x

E-LH exp.

Ene

rgie

(en

meV

)

Fraction d'azote x dans GaNxAs

1-x

EgNC

EgHH

EgLH

Figure III-7 : Energie de bande interdite en fonction de la composition, pour du GaNAs non contraint

(EgNC), et contraint (EgHH et EgLH). L’encart est un zoom avec les points expérimentaux déterminés à partir

de la Figure III-6.

Dans ce paragraphe, le modèle d’anticroisement de bande a donc permis de quantifier

la levée de dégénérescence trous lourds – trous légers dans une couche de GaNAs/GaAs, et ce

en fonction du pourcentage d’azote, c’est-à-dire en fonction de l’état de contrainte de la

couche pseudomorphique. La mise en évidence expérimentale de cette levée de

dégénérescence à l’aide de la technique de photoréflectivité montre que l’écart énergétique

entre les deux niveaux trous lourds – trous légers est plus important que prévu par le calcul,

pour un pourcentage d’azote dans la couche contrainte proche de 3 %. Ces résultats,

relativement surprenants, sont pourtant en accord avec ceux d’une publication récente [40].

qui propose que le potentiel de déformation de cisaillement de l’alliage augmente

anormalement dans cette gamme de composition, et donc que l’incorporation d’azote dans

GaAs, perturbe non seulement la bande de conduction, mais également la bande de valence

[40].

Dans le paragraphe suivant, le modèle d’anticroisement de bande est utilisé pour le calcul des

niveaux dans des puits quantiques de GaInNAs/GaAs.

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

87

III.2.2 Niveaux d’énergie dans un puits quantique

III.2.2.1 Formalisme des matrices de transfert

Pour calculer les niveaux d’énergie dans un puits quantique fini de composition

constante et présentant des interfaces abruptes, le formalisme le plus simple est obtenu en

utilisant l’approximation de la fonction enveloppe [32]. La théorie de la fonction enveloppe

s’applique bien aux structures telles que les puits quantiques puisqu’elle traite le problème de

l’insertion, dans un cristal (matériau barrière), d’un potentiel perturbateur peu profond

s’étendant sur un grand nombre de distances interatomiques (puits quantique). Elle permet de

s’affranchir du problème du potentiel du à la périodicité du cristal. La fonction enveloppe est

déterminée avec une bonne approximation avec une équation du type équation de

Schrödinger :

)z(E)z()z(Udz

d

)z(m2 2

2

*

2

ϕ⋅=ϕ⋅

+−

h Équation III-13

où ϕ est la fonction d’onde enveloppe et U représente l’énergie du bas (du haut) de la bande

de conduction (de valence). Les conditions aux limites sont données par les continuités de la

fonction enveloppe ϕ(z) et de la densité de courant 1/m*(z)×(dϕ/dz) aux interfaces.

L’équation III-13 peut se mettre sous la forme :

0)z(k)z(dz

d2

2

=ϕ⋅+ϕ Équation III-14

avec 2

*2 )UE(m2

kh

−= Équation III-15

On recherche les solutions sous la forme d’ondes planes :

ikzikz eBeA)z( −⋅+⋅=ϕ Équation III-16

avec :

• E > U : k réel, onde propagative du type ϕ(z) = A cos(kz) + B sin(kz),

• E < U : k imaginaire, onde évanescente du type ϕ(z) = A ch(kz) + B sh(kz),

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

88

Plus généralement, pour déterminer les états électroniques d’une structure quantique

quelconque telle que celle de la Figure III-8, il est intéressant d’utiliser la méthode des

matrices de transfert [41, 42]. Cette méthode consiste à calculer la fonction enveloppe dans

chaque zone où le potentiel possède une valeur constante.

Figure III-8 : Schéma décrivant la bande de conduction d’une structure quantique complexe, dont les

états d’énergie peuvent être calculés à l’aide de la méthode des matrices de transfert.

Par exemple, dans la zone i, comprise dans l’intervalle [zi ; zi+1] d’épaisseur li, où U(z)

= Vi avec m* = mi, on a, d’après ce qui précède :

( )[ ] ( )[ ]iiiiiii zzksinBzzkcosA)z( −+−=ϕ si E > Vi Équation III-17

( )[ ] ( )[ ]iiiiiii zzkshBzzkchA)z( −+−=ϕ si E < Vi Équation III-18

avec 2

iii

VEm2k

h

−= Équation III-19

Les conditions de raccordement dans chaque zone sont données par :

)z()z( 1ii1i1i +++ ϕ=ϕ Équation III-20

1i1i z

i

iz

1i

1i dz

)z(d

m1

dz

)z(d

m1

++

ϕ

=

ϕ +

+

Équation III-21

Les deux dernières relations peuvent se mettre sous forme matricielle :

ϕϕ

=

⋅=

⋅=

ϕϕ

+

++

+

+

++

++

i

i'i

ii

i

i

i1

i

i

1i

1i1i

1i

1i

1i'

1i

1i1i

m

)z()z(

)E(Sm

kBA

)E(Sm

kBA

m

)z()z(

Équation III-22

U(z)

z

E1

E2

z1 z2 z3 zi zi+1 zn zn+1

V1

V2

Vi

V4

BC

(0) (1) (2) (3) (i) (i+1) (n) (n+1)

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

89

avec

−=

)lkcos()lksin(m

k

)lksin(k

m)lkcos(

)E(S

iiiii

i

iii

iii

i si E > Vi Équation III-23

ou

=)lk(ch)lk(sh

m

k

)lk(shk

m)lk(ch

)E(S

iiiii

i

iii

iii

i si E < Vi Équation III-24

si bien qu’on associe à chaque couche une matrice caractéristique de ses propriétés, appelée

matrice de transfert. La matrice de transfert totale,

∏=

=n

1ii )E(S)E(S Équation III-25

permet de relier les coefficients des fonctions enveloppe des deux extrémités de la structure :

=

+

++

+

1

11

1

1n

1n1n

1n

m

kBA

)E(Sm

kBA

Équation III-26

Les couches 0 et n+1 sont des barrières (ondes évanescentes), ce qui fixe les conditions aux

limites : A1=1, B1=m1k0/m0k1, et An+1=-Bn+1. Les énergies qui satisfont ces conditions sont

donc les énergies propres du système. Elles correspondent aux énergies des niveaux confinés.

Pour les déterminer, nous utilisons un programme écrit par P. Ballet pendant sa thèse [43], qui

consiste à balayer toutes les énergies entre le potentiel le plus bas et le potentiel le plus haut

de la structure, et d’extraire celles qui satisfont l’équation III-13. Nous avons adapté ce

programme au cas des nitrures à faible bande interdite, à l’aide du modèle d’anticroisement de

bande, et l’utilisons au paragraphe suivant pour la détermination des niveaux d’énergie dans

des puits quantiques de Ga(In)NAs/GaAs. Ce programme nous sert également au Chapitre V

pour décrire les phénomènes d’interdiffusion ou de fluctuation de compositions.

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

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90

III.2.2.2 Détermination expérimentale des niveaux d’énergie dans des puits

quantiques de GaIn(N)As/GaAs

Le formalisme des matrices de transfert est utilisé dans tous les calculs qui suivent.

Les effets de contrainte sont pris en compte. La détermination expérimentale, par

photoréflectivité, des énergies des transitions électron-trou dans un puits quantique de

GaInAs/GaAs (cf Figure III-9) et dans un puits quantique de GaInNAs/GaAs (cf Figure

III-10) est corrélée avec le calcul avec des valeurs de paramètres proches des valeurs visées

expérimentalement. Les puits quantiques de GaInNAs/GaAs sont supposés de type I, avec 0,8

comme valeur de ∆Ec/(∆Ec+∆Ev) [44]. La valeur de la masse effective des électrons dans ce

matériau est supposée égale à celle du GaNAs, c’est-à-dire égale à 0,19 m0 (cf Chapitre V).

La Figure III-9 montre le spectre de PR obtenu sur un puits quantique de GaInAs/GaAs non

recuit et épitaxié à 400 °C. Le pourcentage d’indium visé est d’environ 35 % et l’épaisseur de

7 à 8 nm. On observe distinctement deux niveaux confinés dans le puits, ainsi que la transition

bande à bande des barrières de GaAs. La simulation de la Figure III-9 permet de rendre

compte des transitions observées, en supposant que l’épaisseur des puits est de 7,4 nm et que

le pourcentage d’indium incorporé dans le puits est de 39 %. D’après le calcul, la transition la

moins énergétique est attribuée à la transition E1H1, la seconde à la transition E1L1. Les

transitions E2H2 et E2L2, indiquées par une flèche sur le spectre de PR, sont beaucoup plus

difficiles à distinguer.

Les paramètres déterminés sur le puits quantique de GaInAs/GaAs sont supposés

identiques dans un puits quantique de GaInNAs/GaAs, élaboré dans les mêmes conditions. Le

pourcentage d’azote visé est d’environ 2 %. La faible incorporation d’azote dans les barrières

(0,3 %) due à une mauvaise efficacité du cache de la cellule azote est prise en compte dans la

simulation. Le spectre de PR de la Figure III-10 montre la transition fondamentale E1H1 à

0,920 eV. Cette énergie est trouvée par simulation pour un pourcentage d’azote incorporé de

1,5 %. La deuxième transition qui apparaît sur le spectre est attribuée, d’après la simulation, à

E1L1. Il semble également qu’il y ait une troisième transition, attribuée à E2H2.

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

91

1,0 1,1 1,2 1,3 1,4 1,5

-0,0020

-0,0015

-0,0010

-0,0005

0,0000

0,0005

0,0010

-0,0020

-0,0015

-0,0010

-0,0005

0,0000

0,0005

0,0010

1.33 eV1.25 eV

E2L

2 :E

2H

2 :

1.205 eV

1.073 eV

bande interdite GaAs :

1.424 eVE1H

1 :

E1L

1 :

Puits quantique de GaInAs/GaAs

300 K

∆R/R

Energie (eV)

Figure III-9 : Energie des niveaux confinés dans un puits quantique de GaInAs/GaAs, déterminée par

photoréflectivité (haut) ou par le calcul (bas).

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

92

0.8 0.9 1.0 1.1 1.2 1.3 1.4 1.5-0.003

-0.002

-0.001

0.000

0.001

0.002

-0.003

-0.002

-0.001

0.000

0.001

0.002

1.068 eV

1.043 eV E2H

2 :

E1L

1 : 1.424 eV

bande interdite GaAs :E1H

1 :

0.920 eV

Puits quantique de GaInNAs/GaAs

X 6

300 K

∆ R/R

Energie (eV)

Figure III-10 : Energie des niveaux confinés dans un puits quantique de GaInNAs/GaAs, déterminée par

photoréflectivité (haut) ou par le calcul (bas).

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

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93

On constate que les valeurs simulées sont en relativement bon accord avec les valeurs

expérimentales, compte tenu d’une part des imprécisions sur les pourcentages incorporés et

d’autre part des valeurs relativement dispersées de la littérature en ce qui concerne le décalage

de bande entre les nitrures à faible bande interdite et le GaAs. Les simulations, corrélées aux

mesures de spectroscopie optiques, nous permettent donc d’avoir un retour sur la croissance,

par exemple pour calibrer les épaisseurs ou les compositions.

III.3 Conclusion du Chapitre III

Les propriétés optiques et électroniques des alliages nitrurés à faible bande interdite

sont très particulières, car l’atome d’azote est très différent de l’atome d’arsenic auquel il se

substitue (électronégativité, taille). Ces différences sont à l’origine de la diminution drastique

de l’énergie de bande interdite avec l’incorporation d’azote (paramètre de courbure géant), qui

permet notamment d’obtenir l’émission à 1,3 µm sur substrat GaAs. Le modèle

d’anticroisement de bande [6], bien que sujet à discussion, permet néanmoins de décrire

quantitativement l’évolution de l’énergie d’émission avec l’incorporation d’azote. Cette

description, associée au formalisme des matrices de transfert, permet d’estimer l’énergie des

niveaux dans une structure quantique à base de (Ga,In)(N,As) de forme quelconque. En

revanche, le modèle achoppe en ce qui concerne l’existence d’états localisés (induits par

l’azote) dans et/ou sous la bande de conduction. Cette existence est prédite par un modèle plus

complexe [39] et observée expérimentalement aux premiers stades de formation des alliages

nitrurés [7, 33]. Dans l’étude qui suit, nous utilisons la photoluminescence et la

photoréflectivité pour montrer ces effets de localisation de porteurs, notamment à basses

températures.

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

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94

III.4 Références du Chapitre III

1 WEI, S.H., ZUNGER, A. Giant and Composition-Dependent Optical Bowing Coefficient in GaAsN Alloys Phys. Rev. Lett., 1996, vol. 76, n° 4, pp. 664-667

2 LI, W., PESSA, M., LIKONEN, J. Lattice parameter in GaNAs epilayers on GaAs: Deviation from Vegard’s law Appl. Phys. Lett., 2001, vol. 78, n° 19, pp. 2864-2866

3 BHAT, R., CANEAU, C., SALAMANCA-RIBA, L., BI, W., TU, C. Growth of GaAsN/GaAs, GaInAsN/GaAs and GaInAsN/GaAs quantum wells by low-pressure organometallic chemical vapor deposition J. of Cryst. Growth, 1998, vol. 195, pp. 427-437

4 UESUGI, K., MOROOKA, N., SUEMUNE, I. Strain effect on the N composition dependence of GaNAs bandgap energy grown on (001) GaAs by metalorganic molecular beam epitaxy J. of Cryst. Growth, 1999, vol. 201/202, pp. 355-358

5 MALIKOVA, L., POLLAK, F.H., BHAT, R. Composition and Temperature Dependence of the Direct Band Gap of GaAs1-xNx (0≤x≤0.0232) Using Contactless Electroreflectance J. of Electronic Materials, 1998, vol. 27, n° 5, pp. 484-487

6 SHAN, W., WALUKIEWICZ, W., AGER III, J.W., HALLER, E.E., GEISZ, J.F., FRIEDMAN, D.J., OLSON, J.M., KURTZ, S.R. Band Anticrossing in GaInNAs Alloys Phys. Rev. Letters, 1999, vol. 82, n° 6, pp. 1221-1224

7 LIU, X., PISTOL, M.E., SAMUELSON, L. Nitrogen pair luminescence in GaAs Appl. Phys. Lett., 1990, vol. 56, n° 15, pp. 1451-1453

8 LINDSAY, A., O’REILLY, E.P. Theory of enhanced bandgap non-parabolicity in GaNxAs1-x and related alloys Sol. State. Comm., 1999, vol. 112, pp. 443-447

9 SHAN, W., WALUKIEWICZ, W., AGER III, J.W., HALLER, E.E., GEISZ, J.F., FRIEDMAN, D.J., OLSON, J.M., KURTZ, S.R. Effect of nitrogen on the band structure of GaInNAs alloys J. of Appl. Phys., 1999, vol. 86, n° 4, pp. 2349-2351

10 SHAN, W., WALUKIEWICZ, W., YU, K.M., AGER III, J.W., HALLER, E.E., GEISZ, J.F., FRIEDMAN, D.J., OLSON, J.M., KURTZ, S.R., XIN, H.P., TU, C.W. Band Anticrossing in III-N-V Alloys Phys. Stat. Sol. (b), 2001, vol. 223, pp. 75-85

11 PERKINS, J.D., MASCARENHAS, A., ZHANG, Y., GEISZ, J.F., FRIEDMAN, D.J., OLSON, J.M., KURTZ, S.R. Nitrogen-Activated Transitions, Level Repulsion, and Band Gap Reduction in GaAs1-xNx with x < 0.03 Phys. Rev. Letters, 1999, vol. 82, n° 16, pp. 3312-3315

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

95

12 PERLIN, P., WISNIEWSKI, P., SKIERBISZEWSKI, C., SUSKI, T., KAMINSKA, E., NSUBRAMANYA, S.G., WEBER, E.R., MARS, D.E., WALUKIEWICZ, W. Interband optical absorption in free standing layer of Ga0.96In0.04As0.99N0.01 Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 76, n° 10, pp. 1279-1281

13 SKIERBISZEWSKI, C., PERLIN, P., WISNIEWSKI, P., KNAP, W., SUSKI, T., WALUKIEWICZ, W., SHAN, W., YU, K.M., AGER III, J.W., HALLER, E.E., GEISZ, J.F., OLSON, J.M. Large, nitrogen-induced increase of the electron effective mass in InyGa1-yNxAs1-x

Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 76, n° 17, pp. 2409-2411

14 SKIERBISZEWSKI, C., PERLIN, P., WISNIEWSKI, P., SUSKI, T., WALUKIEWICZ, W., SHAN, W., AGER, J.W., HALLER, E.E., GEISZ, J.F., FRIEDMAN, D.J., OLSON, J.M., KURTZ, S.R. Effect of Nitrogen-Induced Modification of the Conduction Band Structure on Electron Transport in GaAsN Alloys Phys. Stat. Sol. (b), 1999, vol. 216, pp. 135-139

15 YU, K.M., WALUKIEWICZ, W., SHAN, W., AGER III, J.W., WU, J., HALLER, E.E., GEISZ, J.F., FRIEDMAN, D.J., OLSON, J.M. Nitrogen-induced increase of the maximum electron concentration in group III-N-V alloys Phys. Rev. B, 2000, vol. 61, n° 20, pp. R13337-R13340

16 UESUGI, K., SUEMUNE, I., HASEGAWA, T., AKUTAGAWA, T. Temperature dependence of band gap energies of GaAsN alloys Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 76, n° 10, pp. 1285-1287

17 SUEMUNE, I., UESUGI, WALUKIEWICZ, W. Role of nitrogen in the reduced temperature dependence of band-gap energy in GaAsN Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 77, n° 19, pp. 3021-3023

18 POLIMENI, A., CAPIZZI, M., GEDDO, M., FISCHER, M., REINHARDT, M., FORCHEL, A. Effect of temperature dependence on the optical properties of (InGa)(AsN)/GaAs single quantum wells Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 77, n° 18, pp. 2870-2872

19 CHOULIS, S.A., WEINSTEIN, B.A., HOSEA, T.J.C., KAMAL-SAADI, M., O’REILLY, E.P., ADAMS, A.R., STOLTZ, W. Effects of Confinement on the Coupling between Nitrogen and Band States in InGaAs1-xNx/GaAs (x ≤ 0.025) Structures: Pressure and Temperature Studies Phys. Stat. Sol. (b), 2001, vol. 223, pp. 151-156

20 ZUNGER, A. Anomalous Behavior of the Nitride Alloys Phys. Stat. Sol. (b), 1999, vol. 216, pp. 117-123

21 GRENOUILLET, L., BRU-CHEVALLIER, C., GUILLOT, G., GILET, P., DUVAUT, P., VANNUFFEL, C., MILLION, A., CHENEVAS-PAULE, A., Evidence of strong carrier localization below 100 K in a GaInNAs/GaAs single quantum well Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 76, n° 16, pp. 2241-2243

22 MATTILA, T., WEI, S.H., ZUNGER, A. Localization and anticrossing of electron levels in GaAs1-xNx alloys Phys. Rev. B, 1999, vol. 60, n° 16, pp. R11245-R11248

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

96

23 JONES, E.D., MODINE, N.A., ALLERMAN, A.A., KURTZ, S.R., WRIGHT, A.F., TOZER, S.T., WEI, X. Band structure of InxGa1-xAs1-yNy alloys and effects of pressure Phys. Rev. B, 1999, vol. 60, n° 7, pp. 4430-4433

24 BUYANOVA, I.A., CHEN, W.M., MONEMAR, B. Electronic Properties of Ga(In)NAs Alloys [on line] MRS Internet Journal of Nitride Semiconductor Research, 2001, vol. 6, article 2, pp. 1-26, http://nsr.mij.mrs.org/6/2/complete.utf.html, consulté le 30 janvier 2001

25 KOZHEVNIKOV, M., NARAYANAMURTI, V., REDDY, C.V., XIN, H.P., TU, C.W., MASCARENHAS, A., ZHANG, Y. Evolution of GaAs1-xNx conduction states and giant Au/ GaAs1-xNx Schottky barrier reduction studied by ballistic electron emission spectroscopy

Phys. Rev. B, 1999, vol. 61, n° 12, pp. R7861-R7864

26 CHEONG, H.M., ZHANG, Y., MASCARENHAS, A., GEISZ, J.F. Nitrogen-induced levels in GaAs1-xNx studied with resonant Raman scattering

Phys. Rev. B, 2000, vol. 61, n° 20, pp. 13687-13690

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28 SHAN, W., WALUKIEWICZ, W., YU, K.M., AGER III, J.W., HALLER, E.E., GEISZ, J.F., FRIEDMAN, D.J., OLSON, J.M., KURTZ, S.R., NAUKA, C. Effect of nitrogen on the electronic pband structure of group III-N-V alloys Phys. Rev. B, 2000, vol. 62, n° 7, pp. 4211-4214

29 LEIBIGER, G., GOTTSCHALCH, V., RHEINLÄNDER, B., SIK, J., SCHUBERT, M. Nitrogen dependence of the GaAsN interband critical points E1 and E1+∆1 determined by spectroscopic ellipsometry Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 77, n° 11, pp. 1650-1652

30 HOPFIELD, J.J., THOMAS, D.G., LYNCH, R.T. Isoelectronic donors and acceptors Phys. Rev. Lett., 1966, vol. 17, n° 6, pp. 312-315

31 FAULKNER, R.A. Toward a Theory of Isoelectronic Impurities in Semiconductors Phys. Rev., 1968, vol. 175, n° 3, pp. 991-1009

32 WEISBUCH, C., VINTER, B. Quantum semiconductor structures : fundamentals and applications Boston : Academic Press, 1991, 252 p

33 MAKIMOTO, T., KOBAYASHI, N. Extremely Sharp Photoluminescence Lines from Nitrogen Atomic-Layer-Doped AlGaAs/GaAs Single Quantum Wells Jpn. J. of Appl. Phys., 1996, vol. 35, n° 2B, pp. 1299-1301

Chapitre III : Propriétés optiques et électroniques des nitrures à faible bande interdite

_________________________________________________________________________________________________________________

97

34 MAKIMOTO, T., KOBAYASHI, N. Sharp photoluminescence lines from nitrogen atomic-layer-doped GaAs Appl. Phys. Lett., 1995, vol. 67, n° 5, pp. 688-690

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40 ZHANG, Y., MASCARENHAS, A., XIN, H.P., TU, C.W. Valence-band splitting and shear deformation potential of dilute GaAs1-xNx alloys

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43 BALLET, P. Spectroscopie d’hétérostructures piezo-électriques InGaAs/GaAs (111)B Thèse de doctorat, Université Blaise Pascal, Clermont-Ferrand, 1997, 202 p

44 HETTERICH, M., DAWSON, M.D., EGOROV, A.YU., BERNKLAU, D., RIECHERT, H. Electronic states and band alignment in GaInNAs/GaAs quantum-well structures with low nitrogen content Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 76, n° 8, pp. 1030-1032

Chapitre IV :

Phénomènes de localisation

Dans ce chapitre, les propriétés optiques des nitrures à faible bande interdite sont

étudiées, dans la gamme de température 8 K – 300 K. Un comportement atypique de

l’énergie, de la largeur et de l’intensité intégrée du pic de photoluminescence est mis en

évidence dans ces alliages, lorsque la température augmente de 8 K à 300 K. Nous montrons

que l’ensemble de ces phénomènes est du à l’incorporation d’azote, qui induit une forte

localisation des porteurs à basses températures.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

100

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

101

IV.1 Introduction

Pour mettre en évidence le rôle que joue l’azote sur les propriétés optiques des nitrures

à faible bande interdite, nous étudions une structure simple, à savoir un puits quantique de

Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs d’épaisseur 7 à 8 nm. Il contient suffisamment d’azote et

d’indium pour émettre au delà de 1,3 µm à l’ambiante, sans avoir subi de recuit (cf Figure

IV-1). Son homologue sans azote est étudié en parallèle, afin d’avoir une référence.

La Figure IV-1 montre les spectres de photoluminescence (PL) obtenus à 300 K et 8 K

pour chaque échantillon avec une densité d’excitation de l’ordre de 140 W/cm2.

L’incorporation de 2 % d’azote dans Ga0,65In0,35As s’accompagne d’un décalage du spectre de

150 meV vers les grandes longueurs d’onde, comme explicité au Chapitre II, si bien qu’à 300

K la longueur d’onde d’émission est de 1,35 µm.

1,00 1,05 1,10 1,15 1,200,0

2,0x104

4,0x104

6,0x104

8,0x104

1,0x1051,2 1,15 1,1 1,05

0,85 0,90 0,95 1,00 1,050

20

40

60

80

1001,45 1,4 1,35 1,3 1,25 1,2

12 meV

21 meV

Monopuits quantique Ga0.65

In0.35

As/GaAsnon recuit

69 meV

X 2000

Energie (eV)

8 K 300 K

Longueur d'onde (µm)

34 meV

58 meV

Monopuits quantique Ga0.65

In0.35

N0.02

As0.98

/GaAsnon recuit

31 meV

X 1000

Inte

nsité

de

PL

(u. a

.)

Energie (eV)

8 K 300 K

Longueur d'onde (µm)

Figure IV-1 : Spectres de PL obtenus à 8 K et 300 K sur le puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs

non recuit et sur le puits de référence, sans azote.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

102

Cependant, ce décalage vers les grandes longueurs d’onde s’accompagne de profondes

modifications des propriétés optiques du matériau considéré (cf Figure IV-1) :

• La présence d’azote dans le puits diminue l’écart entre l’énergie du pic de PL à 8 K et

l’énergie du pic de PL à 300 K. Cet écart est de 69 meV pour le GaInAs contre 31

meV pour le GaInNAs.

• Le spectre à 8 K sur l’échantillon nitruré présente une décroissance très progressive du

flanc à basses énergies.

• La largeur du pic de PL augmente considérablement sur l’échantillon nitruré : à 300

K, sa valeur passe d’environ 20 meV sur le puits de GaInAs à environ 60 meV sur le

puits de GaInNAs.

• L’incorporation d’azote s’accompagne également d’une chute de l’efficacité de PL :

elle génère donc des défauts non radiatifs.

Afin de comprendre comment et pourquoi ces modifications surviennent, une étude

complète en fonction de la température est menée. Nous nous intéressons bien sûr à la PL, qui

donne l’énergie de recombinaison des paires électron-trou, mais dans un premier temps

utilisons la technique de photoréflectivité (PR), qui permet de sonder l’énergie des niveaux

intrinsèques accessibles pour les électrons et les trous, en l’occurrence l’énergie des niveaux

confinés dans un puits quantique.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

103

IV.2 Variation de l’énergie de bande interdite avec la

température dans les nitrures à faible bande interdite

IV.2.1 Considérations générales

L’énergie de bande interdite d’un semiconducteur III-V diminue lorsque sa

température augmente. Les causes de cette diminution sont :

• La dilatation thermique : lorsque la température augmente, l’anharmonicité du

potentiel des atomes induit une augmentation de la distance interatomique.

L’augmentation consécutive du paramètre de maille diminue Eg.

• Les interactions électron-phonon : lorsque la température augmente, la densité de

phonons et leur couplage avec les électrons augmente, ce qui diminue Eg.

De ces causes, la seconde est responsable d’environ 75 % de la diminution de l’énergie de

bande interdite lorsque la température augmente.

Une relation semi-empirique a été proposée par Varshni [1] pour rendre compte de la

diminution de l’énergie de bande interdite avec la température :

( ) ( )T

T0ETE

2

gg +β⋅α

−= Équation IV-1

où α et β sont des constantes, β étant proche de la température de Debye.

Cette équation, qui reproduit bien le comportement de l’énergie de bande interdite à

hautes températures, est beaucoup plus approximative à basses températures, et il est difficile

d’obtenir une incertitude faible sur β. Aussi utiliserons-nous préférentiellement une autre

équation, qui décrit avec plus de précision le comportement de l’énergie de la bande interdite

avec la température. Elle a été proposée par Vina et al. [2] :

( ) ( )

−θ

+⋅−=1T/exp

21aETE

DBBg Équation IV-2

EB et aB sont des constantes telles que EB-aB = Eg(0K), aB représentant la force de l’interaction

électron-phonon ; θD est la température de Debye. Dans cette équation une statistique de type

Bose-Einstein est utilisée pour caractériser l’émission ou l’absorption de phonons.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

104

Dans un puits quantique, le confinement des électrons et des trous augmente l’énergie

des transitions inter-bande, mais l’évolution en température des transitions reste décrite par

une loi de ce type.

IV.2.2 Effet de l’incorporation d’azote

0,85 0,90 0,95 1,00 1,05 1,10 1,00 1,05 1,10 1,15 1,20 1,25

300 K

Energie (eV)

9 K

Monopuits GaInNAs/GaAs Non recuit

45 K

95 K∆R/R

300 K

Energie (eV)

9 K

45 K

∆R/R

95 K

Monopuits GaInAs/GaAs Non recuit

Figure IV-2 : Spectres de PR montrant la transition E1H1 du puits quantique Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs et

du puits de référence pour différentes températures ; les ajustements sont également tracés et l’énergie

qui en est déduite indiquée par une flèche.

La Figure IV-2 montre les spectres de PR obtenus pour différentes températures sur

les mêmes échantillons non recuits que ceux étudiés en PL à la Figure IV-1. Sur le puits de

référence, la transition correspondant à E1H1 est bien définie, et correctement décrite par un

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

105

ajustement utilisant la dérivée première de la fonction diélectrique non perturbée et en

considérant que le terme de modulation prépondérant correspond à une modulation de

l’énergie (cf paragraphe II.2.2.1). Son évolution avec la température est ajustée à l’aide de

l’équation IV-2. Les paramètres sont consignés au Tableau IV-1 et la courbe correspondante

tracée à la Figure IV-7.

Sur l’échantillon nitruré, les spectres obtenus sont ajustés avec le même formalisme.

En revanche, les signaux observés sont beaucoup plus bruités, particulièrement à basse

température (45 K et 8 K). La détermination de l’énergie E1H1 est donc plus difficile, et

l’incertitude sur cette valeur plus grande. Les paramètres d’évolution de l’énergie en fonction

de la température sont également consignés au Tableau IV-1 et la courbe correspondante

tracée à la Figure IV-7.

Une étude plus complète est présentée aux Figure IV-3 et Figure IV-4. Elle est réalisée

sur un puits quantique de Ga0,65In0,35N0,016As0,984/GaAs recuit in situ, c’est à dire dans le bâti

d’épitaxie sous flux d’arsenic après la croissance. Ce puits présente de très bonnes propriétés

optiques et émet à 1,24 µm à température ambiante. On observe pour toutes les températures

l’énergie correspondant aux deux premières transitions E1H1 et E1L1 entre les niveaux

confinés d’électrons et de trous dans le puits quantiques (cf paragraphe III.2.2.2). L’énergie de

la transition E1H1 diminue avec la température, en très bon accord avec l’équation IV-2,

comme le montre la Figure IV-4. Les paramètres de l’ajustement sont consignés au Tableau

IV-1.

On remarque, comme sur le puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs non recuit,

que les signaux sont relativement bruités à basse température. L’intensité du signal de

photoréflectivité est tracée en fonction de la température, dans l’insert de la Figure IV-4.

C’est dans une gamme de température intermédiaire (50 K – 150 K) que l’amplitude

de ∆R/R est la plus forte. Ce résultat, qui peut paraître surprenant, semble également visible

sur des spectres de PR obtenus sur un puits quantique de GaInNAs/GaAs et publiés

récemment [3]. Il sera discuté au paragraphe IV.4.1.4. Quant à la forme des signaux à basse

température, elle semble atypique et perturbée par une ligne de base qui n’est pas horizontale

au voisinage de la transition. Les spectres s’approchent même parfois d’une forme en marche

d’escalier [4].

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

106

0,9 1,0 1,1 1,2 1,3

235 K

170 K

Energie (eV)

295 K

200 K

135 K

85 K

∆R/R

65 K

50 K

105 K

14 K

30 K

24 K

8 K

Figure IV-3 : Spectres de PR obtenus sur un puits quantique de Ga0,65In0,35N0,016As0,984/GaAs recuit in situ.

Ces phénomènes ont déjà étés observés dans d’autres alliages semiconducteurs tels

que GaInP [5] et AlInAs [6], et attribués à des phénomènes de localisation de porteurs à basse

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

107

température. L’étude de photoluminescence qui suit va permettre de confirmer cette

hypothèse.

0 50 100 150 200 250 3000.99

1.00

1.01

1.02

1.03

1.04

1.05

1.06

1.07

1.08

1.09

0 50 100 150 200 250 3000

5

10

15

20

25

Inte

nsité

de

la tr

ansi

tion

PR

Température (K)

Puits quantique de Ga0.65

In0.35

N0.016

As0.984

/GaAs recuit in-situ

E1H

1 déterminée par PR

Ajustement du type Bose-Einstein

En

erg

ie (

eV

)

Température (K)

Figure IV-4 : Energie de la transition E1H1 en fonction de la température et ajustement correspondant,

sur le puits quantique de Ga0,65In0,35N0,016As0,984/GaAs recuit in situ ; en insert est tracée l’intensité de la

transition PR en fonction de la température

En ce qui concerne les paramètres d’ajustement du Tableau IV-1, la faible incertitude

sur les valeurs montre que l’évolution de l’énergie de bande interdite est globalement

‘classique’, que ce soit sur les puits avec ou sans azote. Sur les échantillons caractérisés, le

terme aB, qui traduit le couplage entre les porteurs et les phonons, augmente dans les puits

quantiques qui possèdent de l’azote. De même, l’incorporation d’azote semble augmenter la

température de Debye de l’alliage. L’augmentation conjointe de ces deux paramètres a pour

effet ‘d’aplatir’ la courbe EE1H1(T) aux basses températures, sans changer de manière

drastique la différence d’énergie entre basse température et température ambiante.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

108

Puits quantique EB (eV) aB (meV) ΘΘD (K)

Ga0,65In0,35As/GaAs non recuit 1,184 ± 0,004 28 ± 7 157 ± 30

Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs non recuit 1,040 ± 0,002 52 ± 2 276 ± 18

Ga0,65In0,35N0,016As0,984/GaAs recuit in situ 1,121 ± 0,004 47 ± 5 240 ± 16

Tableau IV-1 : Paramètres d’ajustement décrivant la variation de l’énergie E1H1 avec la température

Néanmoins, pour mieux appréhender un éventuel changement de la dépendance en

température de l’énergie de bande interdite avec l’incorporation d’azote, le décalage en

énergie entre la transition E1H1 à 8K et la transition E1H1 à 300 K est tracé en fonction de

l’énergie de la transition E1H1 à 300 K à la Figure IV-5. Les points ouverts correspondent aux

puits quantiques de GaInAs/GaAs, les points fermés (respectivement mi-ouverts mi fermés)

correspondent à des puits quantiques de GaInNAs/GaAs élaborés au LIR (respectivement

dans d’autres laboratoires).

Il apparaît à travers cette figure que l’incorporation d’azote s’accompagne en fait

d’une légère diminution de la dépendance en température de l’énergie de bande interdite.

Cette diminution a déjà été mise en évidence lors de l’incorporation croissante d’azote dans

GaNAs [7]. Elle a été récemment interprétée comme une manifestation de l’anti-croisement

de bande [8] et est mathématiquement décrite par ce modèle à l’aide de l’équation (III-5) [9].

La courbe discontinue de la Figure IV-5 correspond à cette équation adaptée au matériau

GaInNAs. Elle reproduit bien l’évolution suivie par les puits quantiques de GaIn(N)As/GaAs

lorsque l’énergie E1H1 diminue et montre que la tendance suivie sur GaNAs est également

valable sur GaInNAs.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

109

0,80 0,85 0,90 0,95 1,00 1,05 1,10 1,15 1,200

10

20

30

40

50

60

70

80

90

Synthèse de la variation de l'énergie de bande interdite

∆E

g(8

K-3

00

K)=

[E1H

1 8K -

E1H

1 30

0K] (

meV

)

EE

1H

1 300K

(eV)

Figure IV-5 : Etude de la dépendance en température de l’énergie de la transition E1H1 (mesurée en PR)

dans des puits quantiques de GaIn(N)As/GaAs en fonction de l’énergie de la transition à 300 K.

Ainsi, l’énergie de bande interdite des nitrures d’éléments III-V dépend moins de la

température que celle des semiconducteurs III-V traditionnels GaAs ou GaInAs. Néanmoins,

la diminution de cette dépendance reste relativement minime par rapport à celle suivie par le

pic de photoluminescence. Par exemple sur le puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs,

l’écart énergétique entre 8 K et 300 K subi par la transition E1H1 reste supérieur à 60 meV,

alors que celui subi par le spectre de photoluminescence est deux fois plus faible (31 meV, cf

Figure IV-1). L’origine du très faible déplacement du pic de PL avec la température ne peut

donc être attribuée à la diminution de l’énergie de bande interdite avec la température,

comparativement modeste. Une étude plus complète de photoluminescence est donc menée.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

110

IV.3 Mise en évidence d’une forte localisation des porteurs

à basse température

IV.3.1 Evolution atypique de l’énergie, de l’élargissement et de

l’intensité des spectres de PL avec l’incorporation d’azote.

La Figure IV-6 montre les spectres de photoluminescence obtenus sur les deux puits

quantiques non recuits de la Figure IV-1 (l’un avec 2 % d’azote, l’autre sans azote), pour

plusieurs températures.

1,00 1,05 1,10 1,15 1,200,85 0,90 0,95 1,00 1,05

Monopuits quantique Ga0.65

In0.35

As/GaAsnon recuit

8 K 19 K 35 K 56 K 76 K 106 K 133 K 189 K 237 K 298 K

Inte

nsité

de

PL

(éch

elle

liné

aire

)

Energie (eV)

8 K 19 K 34 K 55 K 79 K 104 K 133 K 186 K 235 K 298 K

Monopuits quantique Ga0.65

In0.35

N0.02

As0.98

/GaAsnon recuit

Inte

nsité

de

PL

(éch

elle

liné

aire

)

Energie (eV)

Figure IV-6 : Spectres de PL obtenus sur le puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs non recuit et

sur le puits de référence, dans la gamme de température 8 K – 300 K. Les spectres sont normalisés et

décalés verticalement pour plus de clarté.

Sur l’échantillon de référence en GaInAs, l’énergie du pic de PL augmente de manière

continue lorsque la température diminue de 300 K à 35 K. A 35 K et 8 K, un léger

‘décrochement’ est constaté. En revanche, sur l’échantillon de GaInNAs, on observe un

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

111

‘décrochement’ du pic à une température comparativement très élevée (80 K), comme si la

luminescence passait d’une transition à une autre. C’est semble-t-il ce ‘décrochement’ qui est

à l’origine du faible écart énergétique entre la PL à 8 K et la PL à 300 K sur les échantillons

nitrurés.

0 50 100 150 200 250 3000

20

40

60

80

100

0 50 100 150 200 250 3000

20

40

60

80

100

0 50 100 150 200 250 3001,06

1,08

1,10

1,12

1,14

1,16

0 50 100 150 200 250 300

1

10

100

1000

0 50 100 150 200 250 3001E-3

0,01

0,1

1

10

0 50 100 150 200 250 3000,90

0,92

0,94

0,96

0,98

1,00

Lar

geur

à m

i-hau

teur

(m

eV)

Température (K)

Température (K)

E1H

1 (PR)

max émission (PL)

Monopuits quantique Ga

0.65In

0.35As/GaAs

non recuit

Température (K)

Température (K)

Inte

nsité

de

PL

inté

grée

(u.

a.)

Température (K)

Ene

rgie

(eV

)

E1H

1 (PR)

max émission (PL)

Monopuits quantique Ga

0.65In

0.35N

0.02As

0.98/GaAs

non recuit

Température (K)

Figure IV-7 : Energie, largeur à mi-hauteur et intensité du pic de PL en fonction de la température pour

le puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs non recuit et le puits de référence, sans azote.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

112

Afin de mieux visualiser les phénomènes observés, l’énergie, la largeur à mi-hauteur

ainsi que l’intensité intégrée du pic de PL, sont représentées en fonction de la température

pour chaque échantillon sur la Figure IV-7. La variation de l’énergie de la transition E1H1

avec la température, déterminée au paragraphe précédent, est également tracée.

Sur le puits de GaInAs, le maximum du pic de PL suit la transition E1H1, sauf à très

basse température (8 K) où l’énergie de la PL se situe environ 10 meV en-dessous de

l’énergie E1H1. La largeur à mi-hauteur augmente quasi-continûment de 8 K à 300 K, à cause

de l’interaction des porteurs avec les phonons, qui augmente avec la température et qui élargit

le spectre.

L’incorporation de 2 % d’azote suffit à bouleverser complètement ces comportements

‘classiques’. En effet :

• A basse température (8 K), sur l’échantillon nitruré, le pic de PL se situe très en-

dessous de E1H1 (30 meV).

• Lorsque la température augmente de 8 K à 50 K, l’énergie du maximum du pic

diminue alors que la valeur de la bande interdite reste relativement constante dans

cette gamme de température, si bien que l’écart énergétique entre E1H1 et le pic de PL

augmente pour atteindre une valeur maximale de 40 meV autour de 50 K.

• Ensuite, de 50 K à 125 K, le pic se décale anormalement vers les hautes énergies et se

rapproche de l’énergie E1H1.

• Enfin, de 125 K à 300 K, l’énergie du pic de PL diminue à nouveau, selon une pente

similaire à celle suivie par E1H1.

Ainsi, l’énergie du pic de PL suit une forme dite ‘en S-inversé’, ce terme désignant le

décalage successif vers les basses – hautes – basses énergies subi par le pic lorsque la

température augmente de 8 K à 300 K. Ce comportement atypique transparaît également à

travers la largeur à mi-hauteur du spectre, dont l’augmentation n’est pas monotone avec la

température. En effet, un élargissement rapide et anormal de la largeur à mi-hauteur est

constaté entre 50 et 75 K, suivi d’une diminution tout aussi rapide entre 75 K et 125 K. Quant

à l’intensité intégrée de PL, elle chute beaucoup plus rapidement entre 8 K et 50 K sur

l’échantillon avec azote que sur l’échantillon de référence.

Ces phénomènes ont déjà été observés dans d’autres alliages tels que Ga0.5In0.5P [5] et

Al0.48In0.52As [10, 11, 12], mais également dans des multipuits quantiques d’InGaN/GaN [13]

et dans des superréseaux désordonnés AlAs/GaAs [14]. Très prononcés dans les nitrures

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

113

d’éléments III-V [4], ils sont caractéristiques de phénomènes de localisation de porteurs à

basses températures.

Nous expliquons qualitativement ces phénomènes dans le paragraphe qui suit.

IV.3.2 Interprétation qualitative

0 50 100 150 200 250 3000,86

0,88

0,90

0,92

0,94

0,96

0,98

1,00

BV

BC

BV

BC

BV

BC

BV

BC

BV

BC

BV

BC

E1H

1 (PR)

max émission (PL)

Monopuits quantique Ga0.65

In0.35

N0.02

As0.98

/GaAs

Ene

rgie

(eV

)

Température (K)

Figure IV-8 : Schéma explicatif du type de recombinaisons radiatives à différentes températures,

induisant le phénomène de ‘S-inversé’ sur les échantillons nitrurés

L’interprétation qualitative qui est suggérée pour expliquer la forme de ‘S-inversé’ est

illustrée à la Figure IV-8. A basse température, les excitons sont localisés dans des niveaux

dont la distribution énergétique s’étend dans la bande interdite du matériau. La nature de ces

niveaux sera discutée plus loin mais elle est liée à l’azote puisque l’échantillon de référence

ne présente pas de comportement anormal de l’énergie du pic de PL avec la température. Ces

niveaux, même en faible quantité, sont extrêmement radiatifs et permettent de minimiser

l’énergie des porteurs : les paires électrons-trous photogénérées s’y recombinent donc

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

114

préférentiellement. Lorsque la température augmente, les porteurs acquièrent de plus en plus

d’énergie thermique. A partir d’une certaine température (50 K sur la Figure IV-8), ils

commencent à s’échapper du piège pour rejoindre les états délocalisés (ou étendus) du

continuum et donnent lieu préférentiellement à des recombinaisons bande à bande, plus

énergétiques. Ce passage d’une recombinaison préférentielle sur des états localisés à basse

température à une recombinaison préférentielle sur des états délocalisés à haute température

induit le décalage vers le bleu du pic de PL. Il est observé entre 50 K et 125 K sur le puits

quantique de la Figure IV-8. Nous identifierons cette transition par une température

caractéristique, notée Tloc/deloc, pour laquelle les deux régimes de recombinaison participent de

manière égale au signal de PL. A la Figure IV-8, Tloc/deloc ≅ 75K. Lorsque la température

augmente encore, la grande majorité des porteurs est délocalisée et l’énergie de PL suit la

même évolution que celle de l’énergie de bande interdite du matériau.

On notera au passage que le puits quantique de référence, sans azote, présente des

effets de localisation à très basse température. Cependant, comparativement à son homologue

azoté strictement identique par ailleurs, les effets de localisation sont très faibles.

Nous revenons plus en détail sur l’ensemble de ces phénomènes dans le reste du

chapitre mais auparavant cherchons à confirmer que l’azote est bien la principale cause des

effets de localisation, puis à présenter une synthèse des effets observés sur le type d’alliage

GaIn(N)As.

IV.3.3 Confirmation des résultats sur d’autres échantillons et

par d’autres auteurs

Les premiers résultats dit ‘en forme de S-inversé’ que nous avons obtenus [4]

correspondaient à des puits quantiques élaborés dans des conditions non optimales (cf Figure

II-13) et présentaient des fluctuations d’épaisseur et de contrainte importantes, si bien que

nous ne pouvions pas déterminer si les effets de localisation étaient induits par l’azote ou par

des conditions de croissance défavorables pour l’incorporation d’azote. Les résultats que nous

présentons tout au long de ce chapitre correspondent à des puits optimisés (interfaces planes,

température de croissance optimale). Nous pensons donc que c’est l’azote dans le puits, bien

qu’en proportion relativement faible (typiquement 2 %), qui induit cette localisation.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

115

Néanmoins, pour avoir la certitude que ces effets ne sont pas dus à notre technique ou

nos conditions de croissance, nous avons caractérisé un échantillon provenant des laboratoires

de recherche d’Infineon, épitaxié par jets moléculaires avec une source d’arsenic solide et une

cellule azote fonctionnant sur le même principe mais d’une marque différente. Cet échantillon

est composé de 5 puits quantiques de GaInNAs/GaAs. Par ailleurs, l’échantillon constitué

d’un puits quantique de Ga0,65In0,35N0,016As0,984/GaAs recuit in situ et étudié en PR à la Figure

IV-3 et à la Figure IV-4 est étudié en parallèle dans des conditions de manipulation

(notamment d’excitation) exactement identiques. La Figure IV-9 montre pour chaque

échantillon et pour différentes températures le spectre de PL obtenu, l’énergie du maximum

du pic, sa largeur à mi-hauteur et son intensité intégrée.

0,95 1,00 1,05 1,10 1,15

0,90 0,95 1,00 1,05 1,10

0 50 100 150 200 250 30005

1015202530354045505560

0 50 100 150 200 250 3000,950

0,975

1,000

1,025

1,050

1,075

1,100

0 50 100 150 200 250 3000,1

1

10

100

1000

LIR

8 K 15 K 27 K 35 K 42 K 50 K 59 K 66 K 74 K 83 K 92 K 100 K 108 K 119 K 128 K 135 K 146 K 160 K 178 K 201 K 234 K 265 K 295 K

Inte

nsité

de

PL

(u. a

., éc

h. li

néai

re)

Energie (eV)

Infineon

Inte

nsité

de

PL

(u. a

., éc

h. li

néai

re)

Energie (eV)

7.9 K 15 K 27 K 37 K 45 K 53 K 61 K 70 K 79 K 88 K 98 K 107 K 117 K 125 K 135 K 144 K 157 K 169 K 182 K 202 K 259 K 296 K

Puits quantique LIR recuit in situ 5 puits quantiques Infineon

Larg

eur

à m

i-hau

teur

(m

eV)

Puits quantique LIR recuit in situ 5 puits quantiques Infineon

Ene

rgie

max

pic

PL

(eV

)

Puits quantique LIR recuit in situ 5 puits quantiques Infineon

Inte

nsité

de

PL

inté

grée

(u.

a.)

Température (K)

Figure IV-9 : Spectres de PL et paramètres caractéristiques obtenus en fonction de la température pour

l’échantillon nitruré d’Infineon et l’échantillon nitruré du LIR recuit in situ.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

116

L’ensemble des phénomènes atypiques décrits ci-avant, à savoir la forme de ‘S-

inversé’, l’élargissement anormal du pic, ainsi que la forte décroissance de l’intensité de PL

intégrée dans la gamme des basses températures, est à nouveau très visible, ce qui confirme

que l’azote est à l’origine des profondes modifications observées. Cependant, les phénomènes

sont beaucoup plus prononcés sur le puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs non recuit

(cf Figure IV-7) ou sur les cinq puits de GaInNAs/GaAs d’Infineon que sur le puits de

Ga0,65In0,35N0,016As0,984/GaAs recuit in situ. Il semble notamment que la température Tloc/deloc

est d’autant plus élevée que l’échantillon émet vers les grandes longueurs d’onde, ce que nous

allons vérifier au paragraphe suivant.

Par la suite, d’autres groupes ont mis en évidence le phénomène en forme de ‘S-

inversé’ sur les nitrures à faible bande interdite, confirmant la forte localisation induite par

l’incorporation d’azote, que ce soit sur des puits quantiques de GaInNAs/GaAs [15, 16, 17,

18, 3], des puits quantiques de GaNAs/GaAs [19] ou des couches plus épaisses de

GaNAs/GaAs [20], et ce indépendamment de la technique de croissance.

Nous présentons dans le paragraphe suivant une synthèse des effets de localisation mis

en évidence sur les échantillons du LIR et sur ceux de la littérature.

IV.3.4 Synthèse des effets de localisation

L’azote étant à l’origine des effets de localisation, on peut penser que le degré de

localisation augmente avec la fraction d’azote dans les puits. Certes la localisation dépend

probablement aussi des conditions de croissance, des techniques de croissance, de la méthode

de décomposition ou d’incorporation d’azote, mais nous supposons que ces conditions

interviennent au second ordre.

Nous essayons donc de dégager, si elle existe, une loi de variation qui permet

d’appréhender les phénomènes de localisation dans le GaInNAs. Pour ce faire, il semble

intéressant de tracer l’écart énergétique (E1H1 – EPL)8K, qui traduit le degré de localisation, en

fonction du pourcentage d’azote incorporé dans les puits de GaInNAs/GaAs. En pratique, ceci

est difficile car :

• Comme nous l’avons vu au IV.2.2, les signaux de PR à 8 K sont parfois faibles et de

forme telle qu’il est difficile d’en extraire une énergie E1H1 précise. Pour cette raison

nous choisissons plutôt de tracer en ordonnées (EPL 8K – EPL 300K). En effet, le spectre

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

117

de PL à 8 K est caractéristique d’une recombinaison d’excitons localisés et le spectre

de PL à 300 K est caractéristique d’une recombinaison de porteurs délocalisés dans les

bords de bande. La différence (EPL 8K – EPL 300K) est donc représentative du degré de

localisation des porteurs, qui sera d’autant plus fort que (EPL 8K – EPL 300K) est faible.

• Le pourcentage d’azote incorporé dans le GaInNAs est estimé et non pas mesuré de

manière précise, car il n’est pas possible, par diffraction de RX, de déterminer sans

ambiguï té à la fois le pourcentage d’indium et le pourcentage d’azote. De plus, les

phénomènes de localisation dans GaInNAs peuvent être exacerbés par la présence

d’indium, comme cela a été suggéré [18], et le pourcentage d’indium varie selon les

puits que nous considérons. Pour ces deux raisons nous préférons tracer en abscisses

l’énergie du pic de PL à 300 K, qui reflète l’incorporation d’azote et d’indium et

montre de quelle quantité l’énergie de bande interdite moyenne est tirée vers les

grandes longueurs d’onde (l’épaisseur des puits étant quasiment constante).

0,80 0,85 0,90 0,95 1,00 1,05 1,10 1,15 1,200

10

20

30

40

50

60

70

80

90

Nos échantillons ainsi que Pinault et al. Kaschner et al. Polimeni et al. Shirakata et al. éch. d'Infineon

Synthèse : effets de localisation sur puits quantiques de GaIn(N)As/GaAs

∆E

g(8

K-3

00

K)=

[E1H

1 8K -

E1H

1 30

0K]

(me

V)

∆E

PL(

8K

-30

0K

) = [

EP

L 8

K -

EP

L 3

00

K]

(me

V)

EPL 300K

~ EPR 300K

(eV)

Figure IV-10 : Synthèse des effets de localisation sur tous les puits quantiques que nous avons étudiés et

sur ceux de la littérature. Les puits ont typiquement une épaisseur de 7 à 8 nm. La densité d’excitation

pour l’acquisition des spectres de PL est inférieure à 200 W/cm2.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

118

La Figure IV-10 représente donc (EPL 8K – EPL 300K) = f (EPL 300K) pour l’ensemble des

puits quantiques de GaIn(N)As/GaAs caractérisés à basse température et température

ambiante. Les symboles ouverts (respectivement fermés) correspondent à des puits quantiques

de GaInAs/GaAs (respectivement GaInNAs/GaAs) élaborés au Laboratoire Infrarouge du

LETI. Les symboles mi-ouverts mi-fermés proviennent de résultats de la littérature, exceptés

le symbole ‘étoile’ qui a été élaboré dans les laboratoires d’Infineon mais caractérisé par nos

soins dans les mêmes conditions d’excitation que nos échantillons.

La tendance qui apparaît clairement est que (EPL 8K – EPL 300K) diminue fortement

lorsque l’énergie du spectre de PL à 300 K diminue. Ceci montre que le phénomène de ‘S-

inversé’ est d’autant plus prononcé, donc que le degré de localisation et la température

Tloc/deloc sont d’autant plus élevés que l’énergie d’émission à température ambiante est faible.

On remarque que l’ensemble de nos points est relativement bien décrit par une ligne (courbe

discontinue bleue de la Figure IV-10) sur laquelle se trouve l’échantillon Infineon et la

majorité des résultats de la littérature, élaborés dans des conditions différentes mais excités à

des faibles densités de puissance, comme nos échantillons. Seuls les résultats de Polimeni et

al. [15] s’écartent de manière significative de notre courbe. On notera cependant qu’ils sont

parallèles à celle-ci.

La courbe discontinue bleue de la Figure IV-10 permet donc de prédire, pour une

énergie visée dans un puits quantique de GaInNAs, l’importance des effets de localisation.

Elle nous renseigne sur la modification des phénomènes radiatifs qui entrent en jeu avec

l’incorporation d’azote et donc indirectement sur l’évolution de la structure électronique du

matériau quaternaire.

Sur la Figure IV-10 sont également tracés les résultats de la Figure IV-5, qui montrent

une légère diminution de (E1H1-8K – E1H1-300K) lorsque E1H1-300K diminue. Il apparaît que cette

diminution est beaucoup plus faible que celle subie par (EPL-8K – EPL-300K) lorsque EPL-300K

diminue. Cette comparaison montre que l’écart énergétique entre E1H1-8K et EPL-8K, donc les

effets de localisation, augmentent avec l’incorporation d’azote.

Nous allons dans la suite de ce chapitre essayer d’appréhender les phénomènes

physiques à l’origine des comportements atypiques observés. Cette compréhension conduit à

une modélisation mathématique des comportements observés.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

119

IV.4 Analyse quantitative des effets de localisation

IV.4.1 Etats localisés à très basse température

IV.4.1.1 Queue d’états à basse énergie

L’étude d’un spectre de PL à très basse température (8 K) permet d’obtenir des

informations sur l’origine de la luminescence.

Figure IV-11 : Densité d’états schématique pour un matériau massif dans lequel une queue d’états

localisés s’étend dans la bande interdite.

E étatsdélocalisés

étatslocalisés

Ec

N(E)

Ev

E étatsdélocalisés

étatslocalisés

Ec

étatsdélocalisés

étatslocalisés

Ec

N(E)

Ev

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

120

Sur les échantillons nitrurés (que ce soit du GaNAs ou du GaInNAs, en couche épaisse

ou en puits quantiques), le flanc à basses énergies d’un spectre de PL à 8 K est

systématiquement très peu abrupt [21, 22]. Ceci indique que les bords de bande sont mal

définis ou qu’il existe une distribution d’états dans la bande interdite. Cette queue

exponentielle de luminescence à basse énergie est caractéristique d’états localisés sous le bord

de bande et fortement radiatifs. L’origine de la présence de ces états peut être multiple,

comme nous allons l’évoquer, mais dans tous les cas elle est liée au désordre et traduit

généralement une localisation spatiale importante des électrons et/ou des trous. Il a été montré

[23, 24] que les perturbations introduites par l’azote affectaient principalement la bande de

conduction. C’est la raison pour laquelle nous considérons que la bande de valence est moins

perturbée par l’incorporation d’azote que la bande de conduction.

La Figure IV-11 illustre cette queue d’états localisés sous la bande de conduction dans

le cas d’un matériau massif. On définit Ec comme le seuil de mobilité : en-dessous de ce seuil,

les électrons sont localisés dans la queue d’états ; au-dessus, les électrons sont délocalisés

dans le continuum.

A très basse température, l’énergie thermique des porteurs est quasi-nulle, ils restent

donc gelés sur leur piège. Un éventuel transfert entre les différents états situés dans la queue

de bande est donc peu probable ou peu efficace. La queue de luminescence reflète donc la

densité de ces états localisés, densité qui prend la forme [25] :

( )

0loc E

EexpEN

avec E0 énergie caractéristique.

La Figure IV-12 montre le spectre de PL en échelle semi-logarithmique obtenu sur le

puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs non recuit et sur le puits de référence. On peut

vérifier que la queue de bande est effectivement exponentielle ; une énergie caractéristique E0

de 20 meV est déduite sur le puits quantique nitruré. Plus l’énergie caractéristique est élevée,

plus la queue d’états s’enfonce profondément dans la bande interdite, et plus les états sont

localisés. Sur le puits de référence, sans azote, E0 est trois fois plus faible, égale à 5,8 meV.

Notons que cette queue de bande a également été mise en évidence sur des spectres

d’absorption dans du GaNAs [26, 27]. Les énergies caractéristiques déterminées par

Buyanova et al. [21] sur des couches de GaNAs et par Mair et al. [22] sur des couches

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

121

GaInNAs en accord de maille sur GaAs sont de 9 meV. Dans des puits quantiques multiples

d’In0,06Ga0,94N, des valeurs aussi élevées que 35 meV ont été rapportées [28].

0,900 0,925 0,950 0,975 1,0001

10

100

1

10

100

Monopuits quantique Ga0.65

In0.35

N0.02

As0.98

/GaAsnon recuit

queue exponentielleà basses énergies

exp(E/E0)

E0 = 20 meV

T = 8 K

Inte

nsi

té d

e P

L (

u.

a.)

Energie (eV)

1,100 1,125 1,150 1,175 1,2001000

10000

100000

1000

10000

100000

T = 8 K

E0 = 6 meV

queue exponentielleà basses énergiesexp(E/E

0)

Monopuits quantique Ga0.65

In0.35

As/GaAsnon recuit

Inte

nsité

de

PL

(u. a

.)

Energie (eV)

Figure IV-12 : Spectre de PL à 8 K du puits quantique Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs non recuit (gauche) et de

son homologue sans azote (droite). Les spectres sont tracés en échelle semi-logarithmique.

Nous discutons maintenant plus précisément l’origine de cette queue d’états ainsi que

sa forme exponentielle.

IV.4.1.2 Origine physique des états localisés

Le désordre est généralement à l’origine de la présence des queues d’états. Par

exemple dans les semiconducteurs amorphes, où le désordre est très prononcé, le changement

de la longueur ou de l’angle des liaisons est à l’origine de queues d’états importantes [29].

Dans les semiconducteurs monocristallins, la queue d’états peut être créée par des fluctuations

de potentiel provenant de fluctuations de composition, de contrainte, voire d’épaisseur dans le

cas de puits quantiques. Dans le cas plus spécifique des nitrures à faible bande interdite, nous

avons vu au Chapitre III que l’azote constitue un défaut isoélectronique auquel se lie un

exciton [30] et que l’association de deux atomes d’azote (doublet), de trois (triplet), en somme

que la présence d’agrégats (n-uplets) d’azote, lie d’autant plus fortement les excitons que le

nombre d’atomes d’azote constituant l’agrégat est élevé et que la distance entre ces atomes est

faible. Les excitons, pour peu qu’ils soient suffisamment liés, créent des niveaux (états) sous

la bande de conduction. On imagine aisément que l’association de l’ensemble des

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

122

configurations possibles pour les agrégats d’azote crée une distribution d’états dans la bande

interdite et donc une queue d’états localisés.

IV.4.1.2.a Calcul approché des niveaux des excitons liés à des agrégats d’azote

Nous nous proposons de montrer à travers un calcul simple, inspiré d’une discussion

avec H. Mariette, la formation de la queue d’états dans la bande interdite du matériau

GaNxAs1-x.

Considérons un atome d’azote en position substitutionnelle dans un réseau blende de

zinc d’alliage Ga1-yInyNxAs1-x/GaAs. Cet anion possède n1=12 anions en premiers voisins,

n2=6 anions en seconds voisins, n3=24 anions en troisièmes voisins, n4=8 anions en

quatrièmes voisins. Ces anions sont soit des atomes d’arsenic, soit des atomes d’azote. Soit

)x(P jiN

la probabilité de former un j-uplet d’azote en ièmes voisins, ni étant le nombre de ièmes

voisins et x la fraction d’azote dans le réseau des anions. Cette probabilité est donnée par la

formule de Bernouilli :

( ) 1jn1j1jnN

i

iji

x1xC)x(P +−−− −⋅⋅= Équation IV-3

Les travaux de Liu et al. [31] ont permis de montrer qu’un exciton lié à un atome

d’azote isolé 1ix NN = introduit un niveau dans la bande de conduction de la matrice. Un

exciton lié à une paire 2ii NNN = sera plus fortement lié (cf Figure III-4). Cette paire introduit

un niveau dans la bande interdite ou résonant avec la bande de conduction selon la valeur de i.

En faisant l’approximation que la profondeur énergétique du niveau de l’agrégat jiN est égale

à (j-1) fois l’énergie ( 1iN - 2

iN ), on associe à chaque probabilité )x(P jiN

une énergie ( )jiNE du

j-uplet d’azote en ièmes voisins. On obtient alors une densité discrète d’états localisés qui

s’étend progressivement dans la bande interdite (cf Figure III-4). L’origine des énergies est

prise pour le niveau de l’atome d’azote isolé. Cette densité est tracée en échelle linéaire et

logarithmique à la Figure IV-13 pour x = 2 %. Nous avons choisi x = 2% car c’est une valeur

typique du pourcentage d’azote incorporé dans GaNAs ou GaInNAs. Elle correspond à une

distance moyenne entre deux atomes d’azote de 1,3 nm. Les probabilités pour les j-uplets en

2èmes voisins n’ont pas été calculées car d’après Liu et al. [31] il n’y a pas de niveau

excitonique associé à une paire NN2.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

123

700 600 500 400 300 200 100 00.0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0.9

1.0

EcGaAs

EN-N

1

= 156 meVE

N-N3

= 92 meVE

N-N4

= 58 meVd'après Liu et al.

PN

ij(x=

2%)

Energie (meV)

1ers voisins

3èmes voisins

4èmes voisins

700 600 500 400 300 200 100 01E-6

1E-5

1E-4

1E-3

0.01

0.1

1

Probabilité des j-uplets d'azote en ièmes voisins

EcGaAs

E0= 54 meV

PN

ij(x=

2%)

EN-N

1

= 156 meVE

N-N3

= 92 meVE

N-N4

= 58 meVd'après Liu et al.

Energie (meV)

1ers voisins

3èmes voisins

4èmes voisins

Figure IV-13 : Probabilité de former certains types d’agrégats d’azote auxquels peuvent se lier des

excitons (échelle linéaire et semi-logarithmique) en fonction de l’énergie approximative des niveaux créés.

Le niveau du bas de la bande de conduction du GaAs est indiqué à la Figure IV-13. On

peut vérifier que très vite l’association de plusieurs atomes d’azote, dont la probabilité est

souvent faible mais non nulle, permet de lier des excitons profondément dans la bande

interdite. Pour des niveaux beaucoup plus faibles d’incorporation d’azote dans GaAs (dopage

GaAs:N plutôt qu’alliage GaNxAs1-x), c’est-à-dire pour des dopages azote de l’ordre de 1019

cm-3, les raies de photoluminescence très fines associées à ces états excitoniques dominent le

spectre [32, 33], bien que leur probabilité soit encore plus ténue. C’est donc que ces niveaux

sont extrêmement radiatifs et que la majorité des excitons y sont transférés. Lorsque la

fraction d’azote augmente, les raies discrètes disparaissent peu à peu [34, 35, 36] au profit

d’une bande, car la diversité des agrégats et leur probabilité respective augmente. Dans le cas

qui nous intéresse, en l’occurrence l’alliage GaNxAs1-x (ou Ga1-yInyNxAs1-x), on peut imaginer

que le calcul simple que nous avons fait permet d’avoir une idée de l’enveloppe de cette

queue d’états. D’après la Figure IV-13, une exponentielle du type exp(E/E0) avec E0=54 meV

permet de décrire l’enveloppe.

Ce calcul est très approximatif pour plusieurs raisons :

• on ne considère que les agrégats ayant le même type de voisins ; les agrégats du type

N-Nα-Nβ, avec α≠β ne sont en effet pas pris en compte,

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

124

• l’écart énergétique des niveaux des j-uplets d’une même famille de ièmes voisins n’est

pas constant, comme nous l’avons supposé, à cause d’une énergie d’interaction qu’il

faudrait prendre en compte à chaque ajout d’un atome d’azote constituant l’agrégat,

• la position énergétique des excitons liés aux paires azote-azote, est très variable selon

les publications : par exemple, NN1 se situe environ 10 meV en dessous du bord de la

bande de conduction du GaAs d’après Liu et al. [31], alors que d’après Saito et al.

[33] et Kent et al. [37], NN1 se situe plutôt 90 meV sous la bande de conduction. Par

ailleurs, les structures que nous considérons sont en GaInNAs et non pas GaNAs. La

position du bord de bande n’est donc pas la même. De plus, il s’agit de puits

quantiques et non de couches épaisses. La position énergétique relative des excitons

liés aux agrégats par rapport au premier niveau confiné des électrons E1 est donc

probablement différente, même si elle semble peu dépendante des effets de

confinement [38].

Néanmoins, cette approche simple permet d’appréhender qualitativement une des origines

possibles de la présence de la queue de bande ainsi que sa forme, bien que l’énergie

caractéristique approximative déduite surestime la valeur que nous avons déterminée

expérimentalement.

Pour finir, une approche du même type est menée mais cette fois en considérant

simplement les atomes d’azote en premiers voisins et en faisant varier la fraction d’azote x

dans l’alliage. La probabilité d’occurrence d’un j-uplet est tracée en fonction de l’énergie

associée à ce j-uplet, pour différentes fractions d’azote, à la Figure IV-14. On observe un

décalage progressif vers les basses énergies de la densité d’états localisés lorsque le

pourcentage d’azote augmente. L’augmentation des phénomènes de localisation avec la

diminution de l’énergie d’émission, mise en évidence à la Figure IV-10, n’est probablement

pas étrangère à ces phénomènes.

On notera que ces calculs sont effectués en supposant implicitement que les atomes

d’azote dans l’alliage sont distribués de manière aléatoire et en position substitutionnelle. Si

l’azote a tendance à se regrouper sous forme d’agrégats, les effets seront encore plus

prononcés.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

125

700 600 500 400 300 200 100 01E-6

1E-5

1E-4

1E-3

0,01

0,1

1

10

N1

5 N1

4N-N

1-N

1=N

1

3 N-N1 N

EcGaAs

Probabilité de formation de j-uplets d'azote en premiers voisinslorsque la fraction d'azote dans l'alliage augmente

Pro

b(E

)

Energie des j-uplets (meV)

GaNxAs

1-x

x = 0.4% x = 0.8% x = 1.2% x = 1.6% x = 2.0% x = 2.4% x = 2.8% x = 5.0% x = 10% x = 15%

Figure IV-14 : Evolution de la probabilité de former des états localisés dans la bande interdite avec

l’incorporation d’azote dans GaNAs.

IV.4.1.2.b Fluctuations de potentiel dans la bande de conduction

La seule présence de fluctuations de potentiel dues à un désordre d’alliage

(fluctuations de compositions) naturel ou artificiellement créé à l’aide d’un superréseau

désordonné par exemple [14], ou à des fluctuations d’épaisseur ou de contraintes dans un

puits quantique, génère une fluctuation des niveaux d’énergie et donc la présence d’une queue

d’états sous la bande interdite ‘moyenne’.

Dans les puits quantiques de Ga(In)NAs/GaAs, de nombreuses études font état de

fluctuations de composition ou en évoquent la présence, comme nous le verrons au Chapitre

V. Les fluctuations de composition sont en effet très probables étant donnés les phénomènes

de démixion ou de séparation de phase rapportés dans ce type d’alliage.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

126

Dans les nitrures à faible bande interdite, les deux phénomènes que nous venons de

mentionner comme pouvant générer la queue d’états localisés peuvent coexister et

s’additionner : en effet, les régions de l’espace où le pourcentage d’azote est le plus élevé sont

celles où la bande interdite est la plus faible, mais également celles où les excitons sont le plus

liés car ils possèdent la probabilité la plus importante de créer des niveaux dans la bande

interdite. La Figure IV-15 illustre ce cas le plus général. Cependant, comme les phénomènes

de localisation sont plus importants dans les nitrures à faible bande interdite que dans d’autres

types d’alliages, on peut penser que ce sont les agrégats d’azote qui induisent le plus de

localisation.

Figure IV-15 : Schéma décrivant la création d’une queue d’états localisés sous la bande de conduction

moyenne, à cause des fluctuations de potentiel et d’états excitoniques liés à des agrégats d’azote.

IV.4.1.3 Etude en puissance

Une étude de PL en fonction de la densité de puissance d’excitation est menée à très

basse température (8 K). Cette étude est effectuée non pas sur l’échantillon nitruré non recuit

mais sur un échantillon identique recuit à 700 °C pendant 5 minutes (cf Figure IV-16 et

Figure IV-17) ou 10 secondes (cf Figure IV-18), ceci afin de bénéficier d’une plus forte

Ec

Ev

Fluctuations de potentiel

Excitons localisés à des agrégats d’azote

Ec

Ev

Fluctuations de potentiel

Excitons localisés à des agrégats d’azote

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

127

intensité du signal de PL (cf Chapitre V) et de pouvoir étudier ses propriétés de luminescence

sur plusieurs ordres de grandeur de puissance d’excitation. Nous verrons (cf Chapitre V) que

le recuit diminue le phénomène de ‘S-inversé’. En conséquence, la profondeur des états

localisés est moindre sur l’échantillon recuit. Les résultats présentés ci-après, déjà

significatifs, seraient donc exacerbés sur un échantillon non recuit.

0,95 1,00 1,05 1,100,0

0,2

0,4

0,6

0,8

1,0

Etude en puissancemonopuits quantique Ga

0.65In

0.35N

0.02As

0.98/GaAs recuit 300 s à 700 °C

14000 W/cm2, 4.2 K, µPL

700 W/cm2, 8 K

140 W/cm2, 8 K

40 W/cm2, 8 K

10 W/cm2, 8 K

0.15 W/cm2, 8 K

Inte

nsi

té d

e P

L n

orm

alis

ée

Energie (eV)

Figure IV-16 : Spectres de PL obtenus à 8 K pour différentes densités de puissance d’excitation sur le

puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs recuit. Le spectre en pointillé a été obtenu en µµPL à 4.2 K.

L’évolution du spectre de PL (intensité normalisée) lorsque la densité de puissance

d’excitation augmente est présentée à la Figure IV-16, à 8 K. Nous avons greffé aux résultats

obtenus sur le banc de photoluminescence ‘classique’ des résultats obtenus sur un banc dédié

à la microphotoluminescence, qui permet de focaliser le faisceau sur des dimensions

micrométriques et ainsi d’obtenir des densités de puissance d’excitation beaucoup plus

élevées (en traits discontinus sur la Figure IV-16).

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

128

0 500 1000 1500 2000 140001,025

1,030

1,035

1,040

1,045

0

10

20

30

40

50

8 K

Effet de la densité de puissance d'excitation sur l'énergie et la largeur du pic de PL

Ene

rgie

pic

PL

(eV

)

Densité de puissance d'excitation (W/cm2)

Lar

geur

à m

i-hau

teur

du

pic

(meV

)

Figure IV-17 : Evolution de l’énergie et de la largeur du pic de PL obtenu à 8 K sur le puits quantique de

Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs recuit, en fonction de la densité de puissance d’excitation.

IV.4.1.3.a Décalage énergétique vers le bleu

A 8 K, le spectre se décale vers le bleu lorsque la densité de puissance augmente, ce

qui est illustré également à la Figure IV-17. Ce décalage vers les hautes énergies traduit une

saturation progressive des états les plus localisés et un peuplement consécutif des états

localisés les plus proches du bord de bande. Lorsque la densité d’excitation devient très

élevée (microphotoluminescence), le signal provient presque exclusivement des états

délocalisés du continuum et la position du pic de PL est confondue avec celle de l’énergie

E1H1 (comme le montre la Figure IV-18). A une telle densité de puissance d’excitation,

l’énergie du pic de PL en fonction de la température ne suit pas la forme typique de ‘S-

inversé’.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

129

0 50 100 150 200 250 3000,93

0,94

0,95

0,96

0,97

0,98

0,99

1,00

1,01

Etude en puissance monopuits quantiqueGa

0.65In

0.35N

0.02As

0.98/GaAs recuit 10s à 700°C

Ene

rgie

(eV

)

Température (K)

14000 W/cm2 (µPL) 1400 W/cm2 (PL) 140 W/cm2 (PL) Energie E

1H

1 (PR)

Figure IV-18 : Energie du pic de PL obtenu sur un puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs recuit

10s montrant le S-inversé à faible densité de puissance d’excitation. Lorsque la densité de puissance

augmente, la PL rejoint le bord de bande E1H1 à très basse température

IV.4.1.3.b Augmentation de la largeur à mi-hauteur avec la puissance

A 8 K, l’augmentation de la densité de puissance d’excitation a pour effet de saturer

les états les plus localisés. La distribution énergétique d’états localisés participant au signal de

PL augmente, donc la largeur à mi-hauteur aussi (cf Figure IV-17). A très forte densité

d’excitation, les états localisés sont tous saturés et le spectre de PL reflète plus les états

délocalisés du continuum. La largeur à mi-hauteur traduit alors le désordre d’alliage et la

fluctuation éventuelle des bords de bande, c’est-à-dire la valeur Γ(0) de l’équation III-21

évoquée plus loin, qui pour l’échantillon recuit 300s est égale à 27 meV et pour l’échantillon

recuit 10s est égale à 36 meV (cf Figure IV-19).

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

130

0 50 100 150 200 250 30020

30

40

50

60

70

80

Etude en puissance monopuits quantiqueGa

0.65In

0.35N

0.02As

0.98/GaAs recuit 10s à 700°C

La

rge

ur

à m

i-h

au

teu

r d

u p

ic (

me

V)

Température (K)

14000 W/cm2

1400 W/cm2

140 W/cm2

Figure IV-19 : Largeur à mi-hauteur du pic de PL obtenu sur un puits quantique de

Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs recuit 10s.

IV.4.1.3.c Intensité

A 8 K, l’intensité intégrée du signal de PL augmente de manière linéaire avec la

densité de puissance d’excitation sur plus de 3 ordres de grandeur (cf Figure IV-20). La

densité d’états localisés est donc suffisante pour permettre la recombinaison de tous les

porteurs photogénérés. Le début de saturation observé à forte puissance d’excitation est

attribué à un effet thermique.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

131

0,1 1 10 100 1000

0,01

0,1

1

10

1008 K

Effet de la densité de puissance d'excitation sur l'intensité du pic de PL

Inte

nsité

inté

grée

(u.

a.)

Densité de puissance d'excitation (W/cm2)

Figure IV-20 : Evolution de l’intensité intégrée du pic de PL obtenu à 8 K sur le puits quantique de

Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs recuit, en fonction de la densité de puissance d’excitation.

IV.4.1.4 Conséquence des états localisés à très basse température

IV.4.1.4.a Spectres de PR

Forme des spectres à 8 K

La forme particulière des spectres de PR à basse température sur les échantillons

nitrurés a été constatée sur les échantillons les plus riches en azote. Elle prend parfois l’allure

d’une marche d’escalier. Ces phénomènes ont été étudiés dans la thèse de Y. Baltagi [39], et

attribués à des effets de localisation de porteurs à basse température. La PR est une technique

qui est sensible aux propriétés intrinsèques d’un matériau. Elle est donc a priori peu sensible

aux états localisés sous le bord de bande. Cependant, il est possible que les mécanismes de

modulation soient changés lorsque la densité d’états localisés devient suffisamment élevée,

créant ainsi les perturbations du signal observées à basse température. A basse température,

une sensibilité du signal de PR aux états localisés induirait une sous-estimation de l’énergie

E1H1 et par voie de conséquence ‘l’aplatissement’ observé dans l’évolution de l’énergie de

bande interdite à basses températures.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

132

Efficacité de modulation

Les signaux de PR sont toujours plus difficiles à acquérir sur les nitrures à faible

bande interdite que sur leurs homologues sans azote. De manière générale, la puissance du

laser de modulation doit être 10 fois supérieure pour espérer obtenir un spectre significatif, ce

qui peut être expliqué qualitativement de la manière suivante. La présence d’une densité

importante d’états localisés dans les échantillons nitrurés piège une partie des porteurs

photogénérés. La mobilité de ces porteurs est extrêmement faible ; ils ne peuvent donc

participer à la modulation du champ électrique dans la structure et donc à la création du

signal. Une augmentation de la puissance du laser de modulation permet de créer plus de

porteurs, ce qui compense le piégeage de certains d’entre eux.

Chute de l’intensité du signal à basse température

La chute de l’intensité du signal de PR à basse température pourrait être reliée au

phénomène de piégeage cité au-dessus. On remarquera d’ailleurs que la forme de la courbe

suivie par l’intensité de la transition E1H1 en fonction de la température (cf insert de la Figure

IV-4) est identique à celle suivie par la mobilité des trous rapportée par Li et al. [40].

IV.4.1.4.b Décalage énergétique entre émission et absorption

Décalage de Stokes

Quand les interactions électron-phonon sont significatives dans un matériau, le

processus de recombinaison peut faire intervenir l’émission d’un photon mais aussi de

phonons. Le diagramme de la Figure IV-21 explicite ce phénomène. Les énergies de l’état

fondamental et de l’état excité sont décrites en terme de coordonnées de configuration q

respectivement par :

( )( ) BqAqEqE

AqqE2

exc

2fond

−+=

=∗

où B est le potentiel de déformation linéaire qui représente la force d’interaction électron-

phonon.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

133

q0

0

Eém

Eabs

Efond

(q)

Eexc

(q)

E*

W

W

Ene

rgie

Coordonnée de configuration

Figure IV-21 : Schéma en coordonnées de configuration permettant d’expliquer le décalage de Stokes.

En posant W = B2/4A, on montre facilement que l’énergie d’émission est plus faible

que l’énergie d’absorption d’une quantité 2W :

W2EE absém −= Équation IV-4

Ce décalage énergétique entre émission et absorption est appelé décalage de Stokes. Il

est d’autant plus élevé que les interactions électron-phonon sont fortes.

Les nitrures à faible bande interdite présentent, comme nous l’avons vu, un décalage

important entre émission (PL) et absorption (PR). Cependant, ce décalage est important à

basse température et inexistant à haute température. Les interactions porteurs-phonons étant

plus importantes à hautes températures, on peut penser que le décalage observé n’est pas un

décalage de Stokes (bien que dénommé comme tel par abus de langage dans la littérature),

mais plutôt un phénomène de thermalisation de porteurs à basses températures.

Thermalisation de porteurs

La densité d’états (i.e. le nombre de places disponibles) est beaucoup plus élevée pour

les états délocalisés du continuum de la bande de conduction que pour les états localisés. Le

spectre d’absorption reflète donc principalement la distribution des états délocalisés. En

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

134

revanche lorsque les paires électrons-trous sont absorbées à très basse température, elles se

thermalisent, c’est-à-dire perdent très rapidement (à une échelle de temps très courte devant la

durée de vie radiative) des petites quantités d’énergie pour se retrouver sur les niveaux

énergétiques les plus bas, c’est-à-dire sur les états localisés, d’où elles se recombinent.

Ainsi, à basse température, l’absorption fait intervenir principalement les états

délocalisés et l’émission fait intervenir plutôt les états localisés, ce qui explique le décalage

énergétique observé dans les échantillons nitrurés.

IV.4.1.4.c Durée de vie radiative des états excitoniques localisés

La durée de vie radiative d’une paire électron-trou ou d’un exciton est d’autant plus

grande que l’électron et le trou sont spatialement séparés ou que le potentiel dans lequel ils

sont localisés est profond. D’après Street et al. [29],

( )R2expR λ∝τ Équation IV-5

où λ ≈1/R0 (R0 longueur de localisation) est un paramètre de localisation et R la distance qui

sépare l’électron et le trou.

On peut donc qualitativement prédire que la durée de vie des transitions radiatives est

plus élevée pour les basses énergies du spectre de PL, qui correspondent aux transitions

radiatives des excitons les plus localisés. Ceci a été montré expérimentalement à l’aide de

mesures de photoluminescence résolue en temps sur des couches de Ga0,97In0,03N0,01As0,99 en

accord de maille sur GaAs [22] et sur des puits quantiques de GaInNAs/GaAs [17]. Dans ces

études, la durée de vie des excitons, extraite à partir de IPL(t)=I0 exp(-t/τR), augmente au fur et

à mesure que les basses énergies du spectres correspondant aux états localisés sont sondées,

comme attendu avec le raisonnement simple présenté ci-dessus. La dépendance est typique

d’une distribution d’états localisés [22] :

( )( )

−+

τ=τ

0

c

RmR

E

EEexp1

E Équation IV-6

où Ec est une énergie pour laquelle le taux de recombinaison d’un état localisé est égal au taux

de transfert hors de cet état (seuil de mobilité), τRm est la durée de vie radiative maximale et

où E0, déjà défini au IV.4.1.1, traduit la profondeur des pièges. D’après les mesures de Mair et

al. [22], τR varie entre 0,07 et 0,34 ns. Des mesures similaires effectuées sur des multipuits

quantiques de GaNAs/GaAs [21] confirment la tendance de l’augmentation de la durée de vie

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

135

des excitons avec l’augmentation des effets de localisation, mais cette fois les durées de vie

radiatives rapportées sont un ordre de grandeur supérieures.

IV.4.1.5 Conclusion

A 8 K, la forme et l’intensité du spectre de PR, la forme et la position énergétique

relative du spectre de PL, son évolution lorsque la densité de puissance d’excitation augmente

ainsi que des mesures de durée de vie [21, 22] ont permis de montrer que la PL provient de la

recombinaison d’excitons localisés sous le bord de la bande de conduction des nitrures à

faible bande interdite. Ces excitons sont probablement localisés sur des agrégats riches azote

qui créent des fluctuations de potentiel profondes. Il convient maintenant de comprendre ce

qu’il se passe lorsque la température augmente, notamment la forme caractéristique dite en

‘S-inversé’ que suit le pic de PL de 8 K à 300 K.

IV.4.2 Transfert excitonique à basse température

IV.4.2.1 Décalage vers les basses énergies du pic de PL

Dans la gamme de température 8 K – 50 K, sur le puits quantique de

Ga0,65In0,35N0,02AsO,98/GaAs non recuit (cf Figure IV-7) par exemple, l’énergie de bande

interdite, et par conséquent celle de la transition E1H1, restent quasiment constantes, comme le

montrent les études de photoréflectivité (cf Figure IV-7). Or, l’énergie du spectre de PL

diminue à un taux d’environ 0.5 meV/K, si bien que l’écart entre la transition PR et la

transition PL augmente pour atteindre 40 meV à 50 K. La densité d’états localisés restant fixe,

ceci implique que la proportion de recombinaisons radiatives provenant des excitons localisés

sur les niveaux les plus profonds augmente.

Lorsque la température augmente, l’énergie thermique permet aux excitons,

auparavant figés sur leur niveau, de transférer sur les niveaux d’énergie minimale, soit par

saut direct entre états localisés, soit par piégeage multiple via les excitons libres [41, 42, 43,

44] (cf Figure IV-22). De proche en proche, ils vont avoir tendance à se retrouver sur les

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

136

niveaux les plus profonds, ce qui fait ressortir la partie la moins énergétique du spectre en

photoluminescence.

Figure IV-22 : Schéma illustrant les phénomènes de transferts excitoniques à basse température [45].

Par ailleurs, lors de ces transferts, les excitons peuvent être capturés par les défauts

non-radiatifs qui sont présents en grande quantité sur les échantillons non recuits. Les

excitons localisés qui transfèrent le plus étant ceux qui correspondent aux recombinaisons les

plus énergétiques dans le spectre de PL, on comprend également la raison pour laquelle ce

type de recombinaisons radiatives s’éteint préférentiellement. Ainsi, nous pouvons expliquer

qualitativement le décalage vers les basses énergies du spectre de PL dans la gamme de

température 8 K – 50 K.

BC

BV

E

x

BC

BV

E

x

BC

BV

E

x

E

x

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

137

IV.4.2.2 Forte chute de l’intensité de PL intégrée

IV.4.2.2.a Considérations générales

Sous injection de porteurs, la population qui gouverne une transition donnée est régie

par :

NRR

nnG

t

n

τ−

τ−=

∂∂

Équation IV-7

où n est la densité de porteurs minoritaires ou la densité d’excitons, G est le taux de

génération, τR et τNR sont les durées de vie radiative et non radiative, respectivement.

En régime permanent, on a 0t

n=

∂∂

d’où, à une température T donnée :

( ) ( ) ( )TIKTn

GTn

PLNRR

⋅=τ

−=τ

Équation IV-8

Les taux de recombinaison non radiatifs sont généralement thermiquement activés, d’où, à T

= 0K :

( ) ( )0IKG0n

PLR

⋅==τ

Équation IV-9

ce qui entraîne :

( ) ( ) ( ) ( )NRR

RPL

NRR

RPL

NR

R

PLPL pp

p0I

11

10I

1

0ITI

+⋅

=τ+ττ⋅

=

ττ

+= Équation IV-10

où pR et pNR sont les probabilités de recombinaison radiative et non radiative, respectivement.

IV.4.2.2.b Cas classique dans un semiconducteur

Dans un semiconducteur classique, le taux de recombinaison non radiative est

généralement thermiquement activé et le taux de recombinaison radiative est supposé constant

avec la température. On a donc :

⋅τ=τ

kT

Eexp a

0NR Équation IV-11

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

138

ce qui correspond soit à une dépopulation du niveau, soit à l’activation d’un centre de

recombinaison non radiatif, si bien que :

( )

−+

=

kT

EexpA1

ITI

a

0PL Équation IV-12

avec A = τR /τ0.

La Figure IV-23 montre l’allure typique de la diminution d’intensité de PL avec la

température pour plusieurs énergies d’activation. Clairement, à basse température, la courbe

débute toujours par un palier où l’intensité de PL est relativement constante. Plus l’énergie

d’activation est faible, plus le palier est court, et la chute d’IPL post-palier rapide. Ensuite à

partir de 150 K, l’intensité de PL décroît faiblement.

0 50 100 150 200 250 3001

10

100

1000

τR = 1000 τ

0

IPL int

(T) = I0 / [1+τ

R/τ

0*exp(-E

a/kT)]

Ea = 5 meV

Ea = 10 meV

Ea = 20 meV

Ea = 40 meV

I PL

int (

u.

a.)

Température (K)

Figure IV-23 : Illustration de la décroissance de l’intensité intégrée de PL dans le cas de transitions non

radiatives thermiquement activées.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

139

IV.4.2.2.c Cas particulier des nitrures à faible bande interdite

Dans les nitrures à faible bande interdite, comme par exemple dans le GaAs:N [46], la

chute d’intensité intégrée est très rapide à basses températures et sa forme ne comporte pas

vraiment de palier. Elle est donc mal décrite dans la gamme de température 8 K – 50 K par la

formule ci-avant (ou alors approximativement avec une énergie d’activation très faible). Ceci

provient du fait que dans ce type de système τR n’est pas constant : les excitons liés aux

agrégats d’azote ont des durées de vie d’autant plus élevées que l’exciton est profondément

lié. La description mathématique précise de l’extinction de PL à basse température résultant

de la variation de la durée de vie excitonique en fonction du type d’exciton considéré est

complexe. Une manière approchée plus simple de la décrire est d’utiliser une formule valable

dans les semiconducteurs amorphes, matériaux au sein desquels les porteurs sont fortement

localisés. L’expression est la suivante [47] :

( )

+

=

0

0PL

T

TexpB1

ITI Équation IV-13

Dans cette expression, le processus non radiatif est induit par une fuite des porteurs

des centres de recombinaison radiatifs vers les pièges non radiatifs par effet tunnel assisté par

phonon, comme nous l’explicitons ci-dessous.

Rcapture lors

du transit tunnelpar un centre

de recombinaisonnon radiatif

W

effettunnel

R0

Position

Ene

rgie

Figure IV-24 : Illustration d’une transition tunnel assistée par phonon entre deux fluctuations de potentiel.

La capture sur des pièges non radiatifs a lieu lors de la transition tunnel.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

140

Considérons deux fluctuations de potentiel adjacentes séparées d’une distance R0. On

décrit ces fluctuations par des paraboles [47]. La probabilité de transition tunnel entre deux

fluctuations est donnée par :

−λ−⋅υ=

kT

WR2expp ph Équation IV-14

avec λ paramètre de localisation, R distance tunnel, W énergie thermique à obtenir pour

pouvoir transiter par effet tunnel sur une distance R. R et W sont liés par :

W2RR 0 γ−= Équation IV-15

où γ définit la parabole.

La valeur de la probabilité p de transition tunnel passe par une valeur maximale notée pmax

obtenue pour ( )2max kT2W λγ= :

( )Texppp 0max β⋅= Équation IV-16

avec

( )

k4T

1

R2expp

22

0

0ph0

γλ==β

λ−⋅υ=

Équation IV-17

d’où :

( )

⋅⋅τ+

=

00R

0PL

T

Texpp1

ITI Équation IV-18

T0 est appelée température caractéristique : elle est d’autant plus grande que la fuite des

porteurs hors des fluctuations de potentiel pour se faire happer par des pièges non radiatifs est

difficile.

La Figure IV-25 montre l’allure typique de cette courbe pour plusieurs températures

caractéristiques. En échelle semi-logarithmique, l’extinction de la PL suit une pente constante,

et est d’autant plus rapide que T0 est faible. Un mini-palier existe à basses températures

lorsque le coefficient devant l’exponentielle est faible. Cette formule décrit de manière

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

141

satisfaisante l’extinction de la PL à basses températures que nous observons sur les nitrures à

faible bande interdite, mais pas du tout à plus haute température.

0 50 100 150 200 250 3000,1

1

10

100

IPL int

(T) = I0 / [1+τ

R*p

0*exp(T/T

0)]

T0 = 8 K, τ

R*p

0 = 10

T0 = 8 K, τ

R*p

0 = 0.01

T0 = 16 K, τ

R*p

0 = 10

T0 = 16 K, τ

R*p

0 = 0.01

I PL

int (

u. a

.)

Température (K)

Figure IV-25 : Illustration de la décroissance de l’intensité intégrée de PL dans le cas des semiconducteurs

amorphes ou des nitrures à faible bande interdite à basses températures.

IV.4.2.2.d Bilan

Nous avons donc décrit la chute rapide d’IPL dans la gamme de température 8 K- 50 K,

qui correspond à la recombinaison d’excitons localisés, par l’équation III-18, typique d’effets

de localisation. En revanche, à haute température, où les porteurs sont préférentiellement

délocalisés dans le continuum, la décroissance de l’intensité de photoluminescence devrait

suivre une évolution décrite par l’équation III-12.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

142

IV.4.3 Transition états localisés-états délocalisés

IV.4.3.1 Décalage vers les hautes énergies du pic de PL

Lorsque la température augmente encore, c’est-à-dire dans la gamme 50 K – 100 K, le

spectre de PL se déplace vers les grandes énergies (cf Figure IV-26). Ce brusque changement

de comportement indique un changement de nature du type de recombinaisons radiatives

prédominant.

0 50 100 150 200 250 300

0.92

0.94

0.96

0.98

1.00

localisés+

delocalisés

Température (K)

étatsdélocalisés

étatslocalisés

PL PR (E1H1) PR (ajustement)

Ene

rgie

(eV

)

Figure IV-26 : Evolution suivie par l’énergie du pic de PL en fonction de la température sur le puits

quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs non recuit (ronds pleins).

En fait, l’énergie thermique devient alors suffisante pour que les excitons, localisés

dans les queues de bande, accèdent aux bords de bande, où ils sont délocalisés dans le

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

143

continuum. C’est ce passage de recombinaisons d’excitons localisés dans la bande interdite à

des recombinaisons d’excitons délocalisés dans la bande de conduction qui induit le décalage

vers le bleu rapide et anormal du pic de PL.

IV.4.3.2 Intensité de PL intégrée

0 50 100 150 200 250 3001E-3

0,01

0,1

1

10

étatsdélocalisés

localisés+

delocalisés

étatslocalisés

IPL intégrée

(points expérimentaux) I

PL(loc)=I

0loc/(1+B.exp(T/T

0), T

0=20K

IPL(déloc)

=I0déloc

/(1+A.exp(-Ea/kT), E

a=55 meV

IPL(loc)

+ IPL(déloc)

Inte

nsité

de

PL

inté

grée

(u.

a.)

Température (K)

Figure IV-27 : Evolution suivie par l’intensité du pic de PL en fonction de la température sur le puits

quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs non recuit (carrés pleins). Cette évolution est décrite avec une

extinction de la luminescence typique d’effets de localisation à basse température, et par une décroissance

thermiquement activée à hautes températures. La somme des deux ajustements reproduit la décroissance

expérimentale.

Le comportement expérimental de la chute de l’intensité de PL intégrée sur les nitrures à

faible bande interdite est décrit par :

• Une extinction rapide de la photoluminescence dans la gamme des basses

températures où les recombinaisons radiatives proviennent exclusivement de la

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

144

recombinaison d’excitons localisés. L’équation III-18, explicitée au IV.4.2.2.c et

typique d’effets de localisation de porteurs, permet une bonne adéquation entre théorie

et expérience.

• Une décroissance thermiquement activée à hautes températures, où la recombinaison

d’excitons ou de porteurs délocalisés prédomine. Elle permet de rendre compte de la

diminution relativement faible de l’intensité de PL avec la température.

Dans la gamme de température intermédiaire où les deux régimes de recombinaisons

radiatives coexistent, en l’occurrence entre 50 K et 125 K sur la Figure IV-27, la contribution

cumulée des deux ajustements reproduit avec un bon accord l’évolution suivie par les points

expérimentaux, en particulier le changement de pente dans la décroissance d’IPL. Le

croisement a lieu à 75 K, température à laquelle l’intensité des deux régimes est identique. On

retrouve ici ‘mathématiquement’ la température Tloc/deloc définie en IV.3.2, qui correspond

aussi à la température à laquelle la remontée du pic de PL vers les hautes énergies est à mi-

parcours.

IV.4.3.3 Largeur à mi-hauteur

IV.4.3.3.a Considérations générales

D’une manière générale, les deux mécanismes qui influent sur la largeur d’un spectre

sont :

• L’interaction entre les porteurs et les phonons, qui dépend de la température. Elle est

exprimée par un terme d’élargissement noté ΓT. Ce terme est proportionnel à la

fonction d’occupation des phonons, qui suit une statistique de Bose-Einstein, et au

couplage entre les porteurs et les phonons. Il s’exprime donc par [39] :

1kT

Eexp ph

couplageT

Γ=Γ

Équation IV-19

• Le désordre, qui ne dépend pas de la température, et qui traduit la distribution de

l’énergie due au désordre d’alliage, aux fluctuations de compositions, voire de

contrainte ou de l’épaisseur d’un puits quantique par exemple. Dans le cas d’un alliage

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

145

ternaire comme GaNxAs1-x, le désordre d’alliage, pour l’exciton du bord de bande,

s’exprime par [48] :

⋅=ΓN

)x1(xSa Équation IV-20

où x

g

x

ES

∂= avec x composition moyenne en azote, et

où N est le nombre de sites anioniques dans le volume sondé. Dans un puits quantique, la

sonde est généralement l’exciton donc N représente le nombre d’atomes d’élément V dans le

volume excitonique. Notons que dans les nitrures à faible bande interdite, le paramètre de

courbure géant impose une valeur de S élevée, et donc un Γa important, ce qui explique que la

largeur à mi-hauteur des spectres augmente considérablement avec l’incorporation d’azote.

En considérant que les élargissements sont inhomogènes, l’élargissement total Γi(T), pour des

recombinaisons provenant du bord de bande, est donné par :

( )2T

2ai )T( Γ+Γ=Γ Équation IV-21

IV.4.3.3.b Evolution de la largeur à mi-hauteur

Comme nous l’avons déjà souligné, l’évolution de la largeur à mi-hauteur présente un

pic dans la gamme de température pour laquelle la luminescence provient à la fois de la

recombinaison d’excitons localisés et d’excitons délocalisés, dont les énergies respectives

sont différentes. Le pic doit se situer à la température Tloc/deloc, quand les deux composantes

sont égales en intensité, c’est-à-dire, pour l’échantillon nitruré non recuit, à 75 K d’après les

ajustements de l’intensité de chacun des régimes obtenu à la Figure IV-27. C’est bien ce qui

est observé à la Figure IV-28.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

146

0 50 100 150 200 250 3000

20

40

60

80

100

effet d'augmentationde la densité d'excitation

points expérimentaux (140 W/cm2) courbe théorique (rec. états déloc.)

Γi(T)=[Γ

a

2+ΓT

2]1/2

localisés+

delocalisés

étatsdélocalisés

étatslocalisés

Température (K)

La

rge

ur

à m

i-h

au

teu

r (m

eV

)

Figure IV-28 : Evolution suivie par la largeur à mi-hauteur du pic de PL en fonction de la température

sur le puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs non recuit (triangles pleins).

La relation monotone IV-21 (tracée à la Figure IV-28) ne décrit l’évolution de la

largeur à mi-hauteur avec la température que dans le cas où les recombinaisons radiatives

proviennent majoritairement de la recombinaison d’excitons délocalisés dans le bord de

bande. Sur les échantillons nitrurés, à faible densité d’excitation (cf points expérimentaux

Figure IV-28), il n’est donc pas surprenant que l’évolution de la largeur à mi-hauteur avec la

température – qui traduit la transition progressive des recombinaisons sur des états

excitoniques localisés à des recombinaisons d’excitons délocalisés dans le bord de bande

lorsque la température augmente – ne soit pas corrélée à la courbe théorique. En revanche, les

points expérimentaux se rapprochent de la courbe théorique (cf Figure IV-28) lorsque la

densité de puissance d’excitation augmente, c’est-à-dire lorsque la proportion de photons

provenant de la recombinaison radiative d’excitons délocalisés augmente (cf Figure IV-16,

Figure IV-17, Figure IV-29 et Figure IV-30).

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

147

IV.4.3.4 Etude en puissance

Nous rappelons que l’étude en puissance est menée sur l’échantillon nitruré recuit

300s à 700°C pour avoir plus de signal et que sur cet échantillon, la température à laquelle les

deux régimes de recombinaisons (localisé/délocalisé) coexistent, notée Tloc/deloc, est plus faible

que sur l’échantillon non recuit. Elle se situe à 55 K (cf Chapitre 4) au lieu de 75 K sur

l’échantillon nitruré non recuit car les effets de localisation sont plus faibles sur les

échantillons recuits. Les résultats présentés ci-après, certes significatifs, seraient exacerbés sur

l’échantillon non recuit.

0,95 1,00 1,05 1,100,0

0,2

0,4

0,6

0,8

1,0

Etude en puissancemonopuits quantique Ga

0.65In

0.35N

0.02As

0.98/GaAs recuit 300 s à 700 °C

14000 W/cm2, 61 K, µPL

700 W/cm2, 55 K

140 W/cm2, 55 K

40 W/cm2, 55 K

10 W/cm2, 55 K

0.15 W/cm2, 55 K

Inte

nsité

de

PL

norm

alis

ée

Energie (eV)

Figure IV-29 : Spectres de PL obtenus à Tloc/deloc (55 K) pour différentes densités de puissance d’excitation

sur le puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs recuit. Le spectre en pointillé a été obtenu en µµPL à

61 K.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

148

0 500 1000 1500 2000 140001,025

1,030

1,035

1,040

1,045

0

10

20

30

40

50

55 K

Effet de la densité de puissance d'excitation sur l'énergie et la largeur du pic de PL

Ene

rgie

pic

PL

(eV

)

Densité de puissance d'excitation (W/cm2)

Lar

geur

à m

i-ha

uteu

r du

pic

(m

eV)

Figure IV-30 : Evolution de l’énergie et de la largeur du pic de PL obtenu à Tloc/deloc sur le puits quantique

de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs recuit, en fonction de la densité de puissance d’excitation.

IV.4.3.4.a Energie du pic de PL

A contrario des phénomènes observés à 8 K (cf Figure IV-16 et Figure IV-17), à

Tloc/deloc, aucun décalage significatif vers le bleu de la partie la plus énergétique du spectre

n’est observé dans un premier temps, ce qui montre que la densité des états délocalisés est

élevée, alors que la partie à basses énergies du spectre, qui correspond à la recombinaison des

états localisés, sature très vite, traduisant la densité beaucoup plus faible de ces états. On

remarque qu’à très faible densité d’excitation (0,2 W/cm2), on commence à distinguer les

deux composantes correspondant aux deux régimes états localisés / états délocalisés (cf

courbe noire de la Figure IV-29).

IV.4.3.4.b Diminution de la largeur à mi-hauteur avec la puissance

A Tloc/deloc, la largeur à mi-hauteur est très importante à faible densité d’excitation, car

les deux régimes de recombinaisons participent en quantité égale au signal de luminescence.

L’augmentation de la densité de puissance d’excitation a pour effet de favoriser

progressivement le régime ‘recombinaison des porteurs sur les états délocalisés’, aux dépens

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

149

du régime ‘recombinaison des porteurs sur les états localisés’, dont la contribution relative au

signal de PL devient petit à petit négligeable. Ceci a pour effet de diminuer la largeur à mi-

hauteur jusqu’à une valeur de 27 meV, qui correspond à la valeur Γ(0) déterminée à 8 K à très

forte densité d’excitation (cf IV.4.1.3.b). Le fait de retrouver la même valeur de largeur à mi-

hauteur à très forte densité d’excitation à 8 K et Tloc/deloc n’est pas surprenant. En effet à très

forte densité d’excitation la PL provient de la recombinaison d’états délocalisés dans les bords

de bande, quelle que soit la température. Or, à Tloc/deloc, le couplage avec les phonons

intervient encore très peu d’après la forme de la courbe décrite par l’équation IV-21, et

Γ(Tloc/deloc) ≅ Γ(0) (cf Figure IV-28).

IV.4.4 Etats délocalisés

A température ambiante, la photoluminescence provient en majeure partie de la

recombinaison de porteurs délocalisés dans les bords de bande, comme nous l’avons déjà

amplement développé. Nous ferons donc dans ce paragraphe simplement quelques remarques.

A 300 K, nous constatons sur certains échantillons que l’énergie E1H1 déterminée par PR est

légèrement plus faible que celle du maximum du pic de PL à cette température. Ceci ne

signifie pas pour autant que les porteurs se recombinent au dessus de E1H1.

En effet, en supposant que les recombinaisons s’effectuent entre le premier niveau

confiné des électrons E1 et le premier niveau confiné des trous H1, la forme du spectre de PL

dans un puits quantique est donnée par l’équation suivante, qui est la convolution d’une

fonction erreur complémentaire traduisant la densité d’état bidimensionnelle ‘en escalier’

dans un puits quantique, et d’une fonction exponentielle décroissante qui traduit le

peuplement des états selon une statistique de Boltzmann :

( )

−⋅

σ×

−−∝

kT

HEEexp

2

EHEerf1EI 1111

PL Équation IV-22

où σ est une valeur indépendante de la température.

Une telle fonction permet de décrire correctement la forme d’un spectre de PL à 300

K. En outre, elle montre que E1H1 se situe en-dessous du maximum du pic de PL, ce qui lève

la contradiction apparente.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

150

L’élargissement de la largeur à mi-hauteur à hautes températures est en meilleur

accord avec une description considérant que les élargissements contribuant à l’élargissement

global sont gaussiens. Dans ce cas ce sont les carrés des élargissements qui s’additionnent,

comme le montre la Figure IV-28, où les valeurs des paramètres utilisés sur cet échantillon

non recuit sont : Γa = 41 meV, Γcouplage = 100 meV et Eph = 32 meV . La valeur traduisant

l’interaction des porteurs avec les phonons (100 meV) est donc très élevée. Une interaction

relativement forte des porteurs avec les phonons concorde avec les observations faites au

IV.2.2, où la dépendance de l’énergie de bande interdite dans les échantillons nitrurés est

décrite en augmentant le facteur de couplage porteurs-phonons par rapport aux échantillons

sans azote.

IV.4.5 Liens avec la littérature

Les conclusions des études expérimentales effectuées sur les nitrures à faible bande

interdite, dont celle réalisée dans ce chapitre, vont majoritairement dans le sens d’une forte

localisation des porteurs induite par l’incorporation d’azote [4, 15, 16, 17, 18, 19, 21, 22, 49,

50, 51], notamment à basse température. Or, le modèle théorique d’anticroisement de bande

[8], explicité au Chapitre 2, montre que la bande E- a un caractère principalement délocalisé,

et particulièrement à k=0 d’où la majorité des recombinaisons radiatives doit provenir. De

toute évidence, à basse température ce n’est pas le cas. On peut donc penser que même s’il

permet d’expliquer certains de phénomènes observés dans ce type de matériau, il comporte

néanmoins des lacunes.

En revanche, la publication théorique très récente de Kent et Zunger [37], dont nous

faisons également mention au Chapitre 2, permet un rapprochement très intéressant entre

théorie et expérience. Elle prédit que, pour les niveaux d’incorporation d’azote proches de

ceux utilisés dans nos couches, il y a une coexistence d’états localisés et d’états délocalisés.

C’est exactement ce que nous montrons tout au long de ce chapitre. Aussi pensons-nous que

nos résultats contribuent à la validation du modèle de Kent et al. [37].

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

151

IV.4.6 Conclusion-Bilan

Ce chapitre montre que l’incorporation d’azote dans les puits quantiques de GaInAs

perturbe fortement les propriétés de photoluminescence des échantillons. En particulier

l’incorporation de seulement 2 % d’azote induit une forte localisation des porteurs à basse

température. Une synthèse des effets de localisation observés sur les échantillons à notre

disposition et sur ceux consignés dans la littérature permet de mettre en évidence une

tendance générale suivie quelle que soit la technique de croissance et d’incorporation d’azote

utilisée : le degré de localisation des porteurs augmente lorsque l’émission se décale vers les

grandes longueurs d’onde. Une étude plus approfondie de l’évolution des propriétés optiques

avec la température aboutit à une description cohérente de la dépendance en température de

l’énergie du pic de PL, de sa largeur à mi-hauteur, et de son intensité intégrée. Ces

comportements atypiques s’expliquent par un changement dans la nature des recombinaisons

radiatives, qui ont lieu préférentiellement sur des états très localisés à basse température et

qui, lorsque la température augmente, transitent progressivement vers des états délocalisés.

Nous proposons maintenant une modélisation simple des phénomènes observés.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

152

IV.5 Modélisation des effets de localisation

Dans ce paragraphe, le but est de modéliser l’évolution, ‘en forme de S-inversé’, du

spectre de PL obtenu sur le puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs non recuit, lorsque

la température de l’échantillon augmente de 8 K à 300 K.

A basses températures, nous utilisons un modèle développé par Oueslati et al. [25] pour

rendre compte de la recombinaison des excitons sur des états localisés induits par

l’incorporation d’azote. Ce modèle a été initialement développé pour décrire la recombinaison

d’excitons localisés à basses températures par des fluctuations aléatoires de potentiel dans

l’alliage GaAs1-xPx.

Dans ce modèle, l’intensité de PL à basses températures est donnée par :

)E(

)T,E()

)T,E(t

exp()E(N)t,T,E(IR

tot

totlocloc τ

τ⋅

τ−⋅∝ Équation IV-22

avec Nloc(E) densité d’états localisés, proportionnelle à exp(E/E0) (cf IV.4.1).

Le produit des deux premiers termes correspond à la concentration d’états occupés à

l’énergie E et au temps t, le dernier terme est l’efficacité radiative. τtot est défini par :

1

NRRtot

11−

τ

=τ Équation IV-23

Le spectre de PL en régime permanent d’éclairement est obtenu en prenant la valeur

moyenne de I(E,T,t), entre 0 et un temps très long à l’échelle des durées de vie. Ceci donne :

[ ])E(

)T,E()E(NK)T,E(I

R

2tot

locloc ττ

⋅⋅= Équation IV-24

Comme nous l’avons montré à la Figure IV-12, E0 = 20 meV pour le puits quantique

de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs non recuit. Par ailleurs, on obtient la valeur τR(E) à l’aide

l’équation IV-6, que nous rappelons ici :

( ) ( )[ ]0c

RmR E/EEexp1

E−+

τ=τ

en prenant τRm = 0,345 ns, valeur déterminée expérimentalement par Mair et al. [22] sur des

couches de GaInNAs. L’énergie Ec correspondant au seuil de mobilité est identifiée à

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

153

l’énergie du bord de la bande de conduction à T = 0 K. D’après le tableau Tableau IV-1 cette

énergie est égale à 1,040 – 0,052 = 0,988 eV. En ce qui concerne le mécanisme de

dépopulation vers des pièges non radiatifs, nous considérons qu’il se produit

préférentiellement par excitation thermique des porteurs de l’énergie E à l’énergie Ec. à

laquelle ils deviennent mobiles et capturés par des pièges non radiatifs. Ceci donne :

)kT

EEexp( c1

nonrad

−−⋅ν=τ− Équation IV-25

où ν est une fréquence (paramètre ajustable).

A plus hautes températures, les porteurs sont délocalisés et les recombinaisons se font

préférentiellement entre E1 et H1. Pour la modélisation nous considérons que le spectre est

gaussien, d’une part parce que le désordre d’alliage est important dans les nitrures à faible

bande interdite, d’autre part parce que la formule suivante :

Γ

−⋅−⋅

π⋅

Γ=

2

11deloc

4ln)T(

)T(HEE2exp

24ln

)T(

1)T,E(I Équation IV-26

permet de faire varier l’élargissement du spectre avec la température. Cet élargissement est

donné par les équations IV-19 et IV-21 du paragraphe IV.4.3.3 Les paramètres déterminés

pour l’échantillon considérés sont (cf IV.4.4) : Γa = 41 meV, Γcouplage = 100 meV et Eph = 32

meV. Quant à la dépendance en température de E1H1, elle est donnée par l’équation IV-2 du

paragraphe IV.2.1.

Nous simulons le cas d’un puits quantique dans lequel les deux régimes de

recombinaison considérés participent de manière équivalente au signal de PL total à environ

75 K (cf Figure IV-27) :

∫ ∫ ⋅=⋅ dE)K75,E(IdE)K75,E(I delocloc Équation IV-27

Cette condition permet de déterminer la constante K. Les spectres simulés (valeur

prise pour υ : 3×1012 s-1), prenant en compte les deux composantes, sont tracés à la Figure IV-

31.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

154

0,85 0,90 0,95 1,00 1,05

Spectres simulés

Inte

nsité

de

PL

(u. a

.)

Energie (eV)

5 K 20 K 40 K 60 K 80 K 100 K 120 K 140 K 160 K 180 K 230 K 300 K

0,85 0,90 0,95 1,00 1,05

Spectres simulés

Inte

nsité

de

PL

(éch

elle

liné

aire

)

Energie (eV)

5 K 20 K 40 K 60 K 80 K 100 K 120 K 140 K 160 K 180 K 230 K 300 K

Équation IV-31 : Spectres simulés à partir des équations et paramètres consignés dans ce paragraphe. En

bas les spectres ont été normalisés et décalés verticalement pour plus de clarté.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

155

On constate la forte chute de l’intensité de PL quand la température augmente de 5 K à

100 K, ainsi que le décalage vers les basses énergies, caractéristiques de la recombinaison

d’excitons localisés. Lorsque la température augmente, la recombinaison des porteurs sur les

bords de bande, qui apparaît à 5 K sous la forme d’un épaulement peu intense, prend de plus

en plus d’importance pour devenir prépondérante à 300 K. Dans la littérature, un épaulement

similaire est souvent constaté sur le côté hautes énergies de spectres de PL obtenus à basse

température [21, 52, 20] sur du GaNAs.

La comparaison de ces simulations avec les spectres expérimentaux (tracés à la Figure

IV-6) montre qu’en fait la frontière entre les deux types de recombinaisons radiatives est

beaucoup plus ténue que celle calculée. En effet, sur les spectres de GaInNAs de la Figure

IV-6, il n’est pas possible de discriminer les deux composantes. L’origine de ce désaccord

provient du fait que la chute d’intensité de PL du régime de recombinaison d’excitons

localisés à basse température n’est pas assez élevée lorsque la température augmente. Pour

augmenter l’extinction de la PL à basse température, il faudrait prendre en compte dans ce

modèle les phénomènes de transfert excitonique, de même que la fuite des excitons vers des

centres non radiatifs par effet tunnel.

Néanmoins, ce modèle simple permet de rendre compte de l’évolution générale de la

photoluminescence lorsque la température augmente de 8 K à 300 K.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

156

IV.6 Références du Chapitre IV

1 VARSHNI, Y.P. Temperature dependence of the energy gap in semiconductors Physica, 1967, vol. 34, pp. 149-154

2 VINA, L., LOGOTHETIDIS, S., CARDONA, M. Temperature dependence of the dielectric function of germanium Phys. Rev. B, 1984, vol. 30, n° 4, pp. 1979-1991

3 SHIRAKATA, S., KONDOW, M., KITATANI, T. Photoluminescence and photoreflectance of GaInNAs single quantum wells Appl. Phys. Lett., 2001, vol. 79, n° 1, pp. 54-56

4 GRENOUILLET, L., BRU-CHEVALLIER, C., GUILLOT, G., GILET, P., DUVAUT, P., VANNUFFEL, C., MILLION, A., CHENEVAS-PAULE, A. Evidence of strong carrier localization below 100 K in a GaInNAs/GaAs single quantum well Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 76, n° 16, pp. 2241-2243

5 DRIESSEN, F.A.J.M., BAUHUIS, G.J., OLSTHOORN, S.M., GILING, L.J. Effects of confined donor states on the optical and transport properties of ordered GaInP2 alloys Phys. Rev. B, 1993, vol. 48, n° 11, pp. 7889-7896

6 BALTAGI, Y., BEARZI, E., BRU-CHEVALLIER, C., BENYATTOU, T., GUILLOT, G., HARMAND, J.C. Steplike lineshape of low temperature photoreflectance spectra of InAlAs Mat. Res. Soc. Symp. Proc., 1996, vol. 406, pp. 333-338

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9 SUEMUNE, I., UESUGI, WALUKIEWICZ, W. Role of nitrogen in the reduced temperature dependence of band-gap energy in GaAsN Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 77, n° 19, pp. 3021-3023

10 OLSTHOORN, S.M., DRIESSEN, F.A.J.M., EIJKELENBOOM, A.P.A.M., GILING, L.J. Photoluminescence and photoluminescence excitation spectroscopy of Al0.48In0.52As J. of Appl. Phys., 1993, vol. 73, n° 11, pp. 7798-7803

11 FERGUSON, I.T., CHENG, T.S., SOTOMAYOR TORRES, C.M., MURRAY, R. Photoluminescence of molecular beam epitaxial grown Al0.48In0.52As J. Vac. Sci. Technol. B, 1994, vol. 12, n° 3, pp. 1319-1327

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

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157

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13 CHO, Y.H., GAINER, G.H., FISCHER, A.J., SONG, J.J., KELLER, S., MISHRA, U.K., DENBAARS, S.P. ”S-shaped” temperature-dependent emission shift and carrier dynamics in InGaN/GaN multiple quantum wells Appl. Phys. Lett., 1998, vol. 73, n° 10, pp. 1370-1372

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16 POLIMENI, A., CAPIZZI, M., GEDDO, M., FISCHER, M., REINHARDT, M., FORCHEL, A. Effect of nitrogen on the temperature dependence on the energy gap in InxGa1-xAs1-yNy/GaAs single quantum wells Phys. Rev. B, 2001, vol. 63, pp. 195320-1-195320-5

17 KASCHNER, A., LÜTTGERT, T., BORN, H., HOFFMANN, A., EGOROV, A.YU., RIECHERT, H. Recombination mechanisms in GaInNAs/GaAs multiple quantum wells Appl. Phys. Lett., 2001, vol. 78, n° 10, pp. 1391-1393

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20 AUVRAY, L. EPVOM du matériau InGaAs/InP avec l’arsine ou le triméthylarsenic et du nitrure à petit gap GaAsN/GaAs. Utilisation de l’azote comme gaz vecteur Thèse de doctorat, Université Claude Bernard Lyon I, 2001, 220 p environ

21 BUYANOVA, I.A., CHEN, W.M., POZINA, G., BERGMAN, J.P., MONEMAR, B., XIN, H.P., TU, C.W. Mechanism for low temperature photoluminescence in GaNAs/GaAs structures grown by molecular-beam epitaxy Appl. Phys. Lett., 1999, vol. 75, n° 4, pp. 501-503

22 MAIR, R.A., LIN, J.Y., JIANG, H.X., JONES, E.D., ALLERMAN, A.A., KURTZ, S.R. Time-resolved photoluminescence studies of InxGa1-xAs1-yNy Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 76, n° 2, pp. 188-190

23 PERKINS, J.D., MASCARENHAS, A., ZHANG, Y., GEISZ, J.F., FRIEDMAN, D.J., OLSON, J.M., KURTZ, S.R.

Chapitre IV : Phénomènes de localisation

_________________________________________________________________________________________________________________

158

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24 PERLIN, P., SUBRAMANYA, S.G., MARS, D.E., KRUGER, J., SHAPIRO, N.A., SIEGLE, H., WEBER, E.R. Pressure and temperature dependence of the absorption edge of a thick Ga0.92In0.08As0.985N0.015 layer Appl. Phys. Lett., 1998, vol. 73, n° 25, pp. 3703-3705

25 OUESLATI, M., ZOUAGHI, M., PISTOL, M.E., SAMUELSON, L., GRIMMEISS, H.G., BALKANSKI, M. Photoluminescence study of localization effects induced by fluctuating random alloy potential in indirect band-gap GaAs1-xPx

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27 KONDOW, M., UOMI, K., HOSOMI, K., MOZUME, T. Gas-Source Molecular Beam Epitaxy of GaNxAs1-x Using a N Radical as the N Source Jpn. J. Appl. Phys., 1994, vol. 33, Part 2, n° 8A, pp. L1056-L1058

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29 STREET, R.A. Hydrogenated amorphous silicon

Cambridge : Cambridge University Press, 1991, 417 p

30 HOPFIELD, J.J., THOMAS, D.G., LYNCH, R.T. Isoelectronic donors and acceptors Phys. Rev. Lett., 1966, vol. 17, n° 6, pp. 312-315

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Chapitre IV : Phénomènes de localisation

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39 BALTAGI, Y. Spectroscopies de modulation optique : développement d’un ensemble experimental et application à la caractérisation de matériaux et d’hétérostructures du système GaInAs/AlInAs épitaxié sur InP Thèse de doctorat, Institut National des Sciences Appliquées de Lyon, 1995, 251 p

40 LI, J.Z., LIN, J.Y., JIANG, H.X., GEISZ, J.F., KURTZ, S.R. Persistent photoconductivity in Ga1-xInxNyAs1-y Appl. Phys. Lett., 1999, vol. 75, n° 13, pp. 1899-1901

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43 LEROUX-HUGON, P., MARIETTE, H. Stochastic transfer of excitations and enhancement of the NNα-pair luminescence in GaP:N

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46 ONABE, K., AOKI, D., WU, J., YAGUCHI, H., SHIRAKI, Y. MOVPE Growth and Luminescence Properties of GaAsN Alloys with Higher Nitrogen Concentrations Phys. Stat. Sol. (a), 1999, vol. 176, pp. 231-235

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Chapitre IV : Phénomènes de localisation

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48 DIMOULAS, A. Modulation spectroscopy and its application in III-V semiconductors grown by molecular beam epitaxy Ph. D. Thesis, University of Crete, 1991, 173 p

49 WAGNER, J., KÖHLER, K., GANSER, P., HERRES, N. GaAsN interband transitions involving localized and extended states probed by resonant Raman scattering and spectroscopic ellipsometry Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 77, n° 22, pp. 3592-3594

50 KURTZ, S.R., ALLERMAN, A.A., SEAGER, C.H., SIEG, R.M., JONES, E.D. Minority carrier diffusion, defects, and localization in InGaAsN, with 2% nitrogen Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 77, n° 3, pp. 400-402

51 MINTAIROV, A.M., KOSEL, T.H., MERZ, J.L., BLAGNOV, P.A., VLASOV, A.S., USTINOV, V.M., COOK, R.E. Near-Field Magnetophotoluminescence Spectroscopy of Composition Fluctuations in InGaAsN Phys. Rev. Letters, 2001, vol. 87, n°27, pp. 277401-1-277401-4

52 GRÜNING, H., CHEN, L., HARTMANN, T., KLAR, P.J., HEIMBRODT, W., HÖHNSDORF, F., KOCH, J., STOLZ, W. Optical Spectroscopic Studies of N-Related Bands in Ga(N,As) Phys. Stat. Sol. (b), 1999, vol. 215, pp. 39-45

Chapitre V :

Effet du recuit

sur les propriétés optiques

des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

Un recuit thermique est quasi-systématiquement effectué sur les nitrures à faible

bande interdite après croissance, car il permet d’obtenir un gain important sur la

photoluminescence des couches (cf Chapitre II). Dans ce chapitre, nous abordons les autres

changements qu’induit le recuit sur les propriétés de photoluminescence. En particulier,

l’accent est mis sur les mécanismes à l’origine du décalage vers le bleu du pic de

photoluminescence, très souvent observé après recuit, et qui va à l’encontre de l’obtention de

dispositifs émettant à plus grande longueur d’onde avec des intensités acceptables. Pour

l’expliquer, nous proposons une interprétation originale, dans laquelle le recuit a pour effet

d’homogénéiser les fluctuations de potentiel présentes dans le matériau non recuit.

L’interprétation est cohérente avec la manière dont évoluent les phénomènes de localisation

de porteurs rapportés au Chapitre IV. Elle contribue à une meilleure compréhension des

propriétés structurales des alliages GaNAs et GaInNAs recuits et non recuits, et devrait

permettre d’estimer la longueur d’onde d’émission en fonction de l’histoire thermique d’un

dispositif. Enfin, un modèle quantitatif simple est développé pour rendre compte de

l’évolution du décalage vers le bleu des spectres de photoluminescence à très basse

température.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

162

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

163

V.1 Introduction

Le recuit thermique permet d’augmenter de manière drastique l’intensité de

photoluminescence (PL) des échantillons nitrurés. En contrepartie, un décalage vers le bleu du

pic de PL est généralement constaté après le recuit (cf Figure II-18). Cet effet indésirable

limite l’obtention de longueurs d’onde élevées avec des intensités acceptables. L’attribution

de ce décalage à une interdiffusion In-Ga dans le cas de puits quantiques de GaInNAs/GaAs

[1] et à une interdiffusion N-As dans le cas de puits quantiques de GaNAs [2] nous a semblé

sujette à controverse. Nous orientons donc particulièrement ce chapitre vers la compréhension

des mécanismes à l’origine du décalage vers le bleu du pic de PL consécutif au recuit post-

croissance. Elle doit permettre d’une part de mieux appréhender les propriétés du matériau

non recuit et comment elles évoluent avec le recuit, et d’autre part de prédire les longueurs

d’onde d’émission en fonction des conditions de recuit. Ce dernier aspect est capital car le

matériau GaInNAs doit, à terme, être incorporé dans une structure VCSEL, qui subit une

histoire thermique susceptible de changer la longueur d’onde d’émission.

D’un point de vue pratique, pour étudier le rôle du recuit, nous procédons généralement

de la façon suivante : après la croissance d’une structure sur une plaque 3 pouces, nous

effectuons une cartographie de photoluminescence qui nous donne la zone la plus homogène

en terme de longueur d’onde d’émission et d’intensité de signal. Cette partie de la plaque, que

nous considérons en chaque point identique, est ensuite découpée en petits échantillons de

6×6 mm2, chacun subissant un couple température de recuit – durée de recuit différent. Les

températures de recuit varient entre 700 °C et 850 °C : c’est dans cette gamme de température

que les effets du recuit sont les plus bénéfiques. Les durées de recuit s’échelonnent de 10 s à

600 s. Lors du recuit, les échantillons sont recouverts d’un quart de plaque de GaAs pour

éviter la désorption d’arsenic et la dégradation de leur surface. Par ailleurs, les recuits ont lieu

sous flux d’azote.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

164

V.2 Effet du recuit sur la photoluminescence de puits

quantiques de GaIn(N)As/GaAs

V.2.1 Augmentation de l’intensité de photoluminescence

Cet effet a été évoqué à la fin du Chapitre II (cf Figure II-20). Nous avons en

particulier montré que le recuit sur les échantillons nitrurés permet d’obtenir un gain

d’environ un ordre de grandeur sur l’intensité de PL des couches actives. Il convient

maintenant d’étudier plus en détail l’effet du recuit, notamment sur l’énergie et la largeur des

spectres de PL, ainsi que sur les phénomènes de localisation rapportés au Chapitre IV. Pour ce

faire, une étude de photoluminescence dans la gamme de température 8 K – 300 K est

présentée, sur des échantillons ayant subi des conditions de recuit différentes.

V.2.2 Diminution des phénomènes de localisation de porteurs

Les spectres de PL sont acquis à faible densité de puissance d’excitation (~140

W/cm2) sur le monopuits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs et sa référence sans azote.

On reconnaîtra à la Figure V-1 l’étude en température effectuée au Chapitre IV sur les

échantillons non recuits, à laquelle s’ajoute une étude similaire sur des échantillons identiques

mais recuits à 700 °C pendant 10 s et 300 s dans le four RTA du LIR [3].

V.2.2.1 Diminution de Tloc/deloc

Comme le montre la Figure V-1, sur le puits quantique de GaInAs/GaAs de référence

(sans azote), la forme de l’évolution de l’énergie du pic de PL avec la température reste

quasiment inchangée quelles que soient les conditions de recuit. On constate néanmoins une

très légère diminution du faible effet de localisation à basse température sur l’échantillon

recuit 300 s. En revanche, sur le puits de GaInNAs/GaAs, l’amplitude de la forme ‘en S-

inversé’ diminue très nettement avec le recuit. Le ‘S-inversé’ étant la signature d’une

recombinaison d’excitons fortement localisés à basses températures (cf Chapitre III), ceci

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

165

montre que la profondeur des niveaux (par rapport au bord de la bande de conduction) dans

lesquels sont piégés les excitons diminue avec le recuit. En conséquence, la température à

partir de laquelle les excitons commencent à se ‘hisser’ dans les bords de bande diminue

lorsque la durée du recuit augmente. En effet, Tloc/deloc se situe à 75 K pour l’échantillon non

recuit et diminue jusqu’à environ 45 K pour l’échantillon recuit 300 s à 700 °C. La diminution

de la profondeur des états localisés avec le recuit se traduit également par une diminution de

la pente de EPL(T) entre 8 K et 25 K. Cette pente, caractéristique du transfert excitonique, est

de 0,43 meV/K pour l’échantillon non recuit, de 0,29 meV/K pour l’échantillon recuit 10 s à

700 °C et de 0,17 meV/K pour l’échantillon recuit 300 s à 700 °C.

0 50 100 150 200 250 3000

20

40

60

80

100

0 50 100 150 200 250 3000

20

40

60

80

100

0 50 100 150 200 250 3001,06

1,08

1,10

1,12

1,14

1,16

1,18

1,20

0 50 100 150 200 250 3000,92

0,94

0,96

0,98

1,00

1,02

1,04

1,06

Non recuit Recuit 700°C, 10s Recuit 700°C, 300s

Larg

eur

à m

i-hau

teur

(m

eV)

Température (K)

Non recuit Recuit 700°C, 10s Recuit 700°C, 300s

Température (K)

Puits quantique de Ga0.65

In0.35

As/GaAsPuits quantique de Ga0.65

In0.35

N0.02

As0.98

/GaAs

Recuit 700°C, 300s Recuit 700°C, 10s Non recuit

Recuit 700°C, 300s Recuit 700°C, 10s Non recuit

Ene

rgie

(eV

)

Figure V-1 : Evolution de l’énergie et de la largeur à mi-hauteur du pic de photoluminescence en fonction

de la température sur le puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs et sur le puits de référence sans

azote, pour différentes conditions de recuit.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

166

V.2.2.2 Diminution de la largeur à mi-hauteur des spectres

Sur le puits quantique de référence, le recuit n’a qu’un très faible effet sur la valeur de

la largeur à mi-hauteur du pic de PL. A contrario, la diminution de la largeur à mi-hauteur

avec le recuit est flagrante sur le puits de GaInNAs/GaAs, et ce dans toute la gamme 8 K –

300 K (cf Figure V-1). On observe que l’augmentation anormale de la largeur à mi-hauteur

avant 100 K, ainsi que la température (Tloc/deloc) à laquelle le maximum apparaît, sont

sensiblement réduits avec le recuit. Ceci montre que l’écart entre l’énergie de recombinaison

des excitons localisés et l’énergie de recombinaison des excitons délocalisés diminue avec le

recuit, et par voie de conséquence la température nécessaire aux porteurs pour transiter d’un

régime à l’autre. Dans la gamme 250 K – 300 K, la diminution avec le recuit de la largeur à

mi-hauteur et de son accroissement avec la température est attribuée respectivement à une

diminution du désordre d’alliage et à une réduction de l’interaction porteurs-phonons.

Par ailleurs, nous constatons à la Figure V-1 que l’énergie du pic de PL augmente très

rapidement sur l’échantillon avec azote, et ce dès les dix premières secondes du recuit. Nous

nous intéressons dans le paragraphe suivant à ce décalage vers le bleu induit par le recuit.

V.2.3 Décalage vers le bleu de la photoluminescence après recuit

V.2.3.1 Observation du décalage vers le bleu

La Figure V-2 montre l’évolution de l’énergie du pic de PL en fonction de la durée du

recuit, et pour différentes températures de recuit. Les deux structures étudiées sont composées

de 3 puits quantiques respectivement de Ga0,62In0,38N0,015As0,985/GaAs et de

Ga0,62In0,38As/GaAs. Les spectres ont été acquis sur la machine de cartographie du LIR à

température ambiante et à forte densité d’excitation.

Sur l’échantillon de référence, le décalage vers le bleu du pic de PL est d’autant plus

fort que la durée et la température du recuit sont élevées. Par exemple pour un recuit de 5

minutes, le pic de PL se décale de 14 meV, 19 meV, 37 meV et 70 meV pour des

températures de recuit respectivement de 700 °C, 750 °C, 800 °C et 850 °C (cf Figure V-2).

Sur l’échantillon avec azote, l’évolution du décalage vers le bleu est moins progressive. Ainsi,

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

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167

dès les 10 premières secondes de recuit, le pic se décale de 30 à 40 meV vers les hautes

énergies. Ensuite, deux cas de figure se présentent. Pour un recuit entre 700 °C et 800 °C, le

pic ne se décale quasiment plus, même pour des recuits aussi longs que 10 minutes : le

décalage vers le bleu sature à une valeur d’environ 40 meV (cf Figure V-2). Pour un recuit à

850 °C, le pic continue à se décaler vers le bleu, à la même vitesse que sur l’échantillon de

référence.

Avant d’essayer de comprendre les phénomènes a priori relativement surprenants

observés sur les puits quantiques de GaInNAs/GaAs, nous commençons par expliciter

l’origine du décalage vers le bleu observé sur les puits quantiques de GaInAs/GaAs.

0 100 200 300 400 500 600

0

20

40

60

80

100

0 100 200 300 400 500 600

0

20

40

60

80

100

Décalage vers le bleu surpuits quantique de Ga

0.62In

0.38N

0.015As

0.985/GaAs

850 °C 800 °C 750 °C 700 °C

Déc

alag

e ve

rs le

ble

u (m

eV)

Durée du recuit (s)

Décalage vers le bleu surpuits quantique de Ga

0.62In

0.38As/GaAs

850 °C 800 °C 750 °C 700 °C

Durée du recuit (s)

Figure V-2 : Décalage énergétique vers le bleu du pic de PL à 300 K en fonction des conditions de recuit

RTA sur 3 puits quantiques de Ga0,62In0,38N0,015As0,985/GaAs et 3 puits de référence.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

168

V.2.3.2 Origine du décalage vers le bleu

V.2.3.2.a Interdiffusion In-Ga dans les puits quantiques de GaInAs/GaAs

Le décalage vers le bleu du pic de photoluminescence observé sur des puits quantiques

de GaInAs/GaAs lors du recuit a fait l’objet de nombreuses études [4, 5]. Il est attribuable à

une interdiffusion indium – gallium : sous l’effet des gradients de composition opposés, les

atomes d’indium du puits quantique diffusent dans les barrières adjacentes, tandis que les

atomes de gallium des barrières diffusent dans le puits. Le profil du puits quantique,

initialement abrupt, s’adoucit progressivement. Il est régi par l’équation :

( )

+−

−+=

tD22

Lzerf

tD22

Lzerf

21

1t,zC Équation V-1

où z est la direction perpendiculaire au plan des couches, ‘erf’ la fonction ‘erreur’ définie par

( ) ( ) duuexpzerfz

0

2 ⋅−= ∫ Équation V-2

L est la largeur du puits quantique, DLtD =⋅ la longueur de diffusion et D le coefficient

de diffusion, thermiquement activé :

( )

−⋅=

kT

EexpDTD A

0 Équation V-3

Le formalisme des matrices de transfert exposé au Chapitre III nous permet de calculer

les niveaux d’énergie dans un puits quantique de forme quelconque. En assimilant l’énergie

du maximum du pic de PL de la Figure V-2 à l’énergie de la transition E1H1 (ce qui est un

traitement approché, cf Chapitre IV), on associe à chaque durée et température de recuit une

longueur de diffusion et donc un coefficient de diffusion. Les barrières de GaAs entre les 3

puits sont suffisamment épaisses (18 nm) d’une part pour que les puits soient découplés,

d’autre part pour que les phénomènes d’interdiffusion ne se perturbent pas. Par ailleurs, à la

température à laquelle les structures sont élaborées (400 °C), les phénomènes de ségrégation

d’indium sont très faibles. Les puits sont donc supposés de forme abrupte avant recuit.

La Figure V-3 montre la forme des puits et la position des niveaux d’énergie E1 (1er

niveau confiné des électrons) et H1 (1er niveau confiné des trous lourds) respectivement pour

un puits abrupt (LD = 0 nm) et pour un puits recuit 300 s à 800 °C (LD = 2,2 nm). Le

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

169

paramètre LD est ajusté pour que l’énergie de la transition E1H1 corresponde à l’énergie du

maximum du pic de PL à 300 K. La détermination de LD pour chaque durée et température de

recuit permet de remonter au coefficient de diffusion D, qui est tracé en fonction de l’inverse

de la température absolue à la Figure V-4.

Figure V-3 : Niveaux d’énergie dans un puits quantique de Ga0,62In0,38As/GaAs de 6,8 nm d’épaisseur, non

recuit (haut) et recuit à 800 °C pendant 5 minutes (bas).

Le coefficient de diffusion est effectivement thermiquement activé, avec une énergie

d’activation EA proche de 1,3 eV, comme le montre la droite discontinue de la Figure V-4. Par

ailleurs, on constate que le coefficient de diffusion dépend de la durée du recuit : il est plus

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

170

élevé pour les recuits très courts. Une explication possible serait que l’interdiffusion In-Ga est

accélérée dans les premières secondes du recuit par la présence de lacunes [5] ou par la

contrainte importante présente dans les puits riches en indium. Une autre explication, plus

pragmatique, serait que pour les recuits courts le budget thermique est plus important que

celui estimé, à cause de la descente en température relativement longue (cf Fig. II-16). La

durée de recuit effectif serait donc sous-estimée et le coefficient de diffusion sur-estimé.

0,00090 0,00095 0,00100 0,00105

1

10

EA = 1.3 eV

Puits quantique(s) de GaInAs/GaAs

10s 30s 90s 300s 600s

D (

x 1

0-16 c

m2 .s

-1)

1/T (K-1)

Figure V-4 : Coefficient de diffusion D tracé en fonction de l’inverse de la température absolue pour

différentes durées et températures de recuit.

En définitive, le déplacement du pic de PL vers les hautes énergies, induit par le recuit

sur les puits quantiques de GaInAs/GaAs, est bien décrit par l’interdiffusion In-Ga. Le

coefficient de diffusion est thermiquement activé avec une énergie d’activation proche de 1,3

eV. Nous avons vu que l’incorporation d’environ 2 % d’azote dans les puits change de

manière significative le phénomène de décalage vers le bleu (cf Figure V-2). Quelles en sont

les explications possibles ?

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

171

V.2.3.2.b Cas des puits quantiques de GaInNAs/GaAs

Dans les puits quantiques de GaInNAs/GaAs, le décalage vers le bleu a été attribué à

une interdiffusion In-Ga d’azote [1, 6, 7]. Si tel est le cas, la comparaison entre les puits avec

et sans azote de la Figure V-2 implique que dans un premiers temps l’interdiffusion In-Ga est

accélérée par l’incorporation d’azote (recuits courts), puis que dans un second temps elle est

bloquée (recuits longs), sauf à très haute température de recuit (850 °C). Ce scénario, qui

semble peu plausible, montre que vraisemblablement l’azote joue un rôle dans l’évolution

différente du décalage vers le bleu avec le recuit. Plusieurs indices nous permettent de le

supposer :

• Les phénomènes de localisation sont caractéristiques de l’incorporation d’azote (cf

Chapitre III). Or, la diminution significative de ces phénomènes (cf V.2.2) avec le

recuit tend à prouver que la concentration d’azote locale d’où provient la PL à basses

températures diminue, puisque l’émission se rapproche du bord de bande avec le

recuit.

• La diminution rapide de la largeur à mi-hauteur avec le recuit est une indication que le

désordre d’alliage diminue. Ceci indique que la distribution en taille des agrégats

d’azote s’affine.

Néanmoins, la diminution de la localisation et de la largeur à mi-hauteur peut être induite

soit par une diffusion d’azote hors du puits, soit par une réorganisation de l’azote au sein du

puits.

Pour statuer sur l’un ou l’autre des phénomènes, une étude plus approfondie est menée sur

des couches épaisses et des puits quantiques de GaNAs/GaAs, structures dans lesquelles

l’interdiffusion In-Ga lors du recuit ne compliquera pas l’interprétation des phénomènes.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

172

V.3 Origine du décalage vers le bleu du pic de

photoluminescence après recuit : étude spécifique

V.3.1 Couches épaisses de GaNAs/GaAs

V.3.1.1 Décalage vers le bleu de la photoluminescence

La Figure V-5 montre l’évolution de l’énergie du pic de PL obtenu à température

ambiante sur une couche de GaN0,026As0,974/GaAs de 100 nm d’épaisseur, lorsque la durée du

recuit, effectué à 700 °C, augmente. Le pic se décale de façon significative vers les hautes

énergies : 50 meV après 20 minutes de recuit.

0 200 400 600 800 1000 1200

1,05

1,06

1,07

1,08

1,09

1,10

1,0 1,1 1,2 1,3

PL 300K

Inte

nsité

(u.

a.)

Energie (eV)

700 °C, 20 min 700 °C, 10 min 700 °C, 5 min 700 °C, 30 s non recuit

Ene

rgie

du

pic

de P

L (e

V)

Durée du recuit (s)

Figure V-5 : Energie du pic de PL d’une couche de 100 nm de GaN0,026As0,974/GaAs, en fonction de la

durée du recuit effectué à 700 °C. Les spectres sont montrés en encart.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

173

Un décalage légèrement plus faible a été rapporté sur un puits quantique de

GaNAs/GaAs de 7 nm d’épaisseur et de composition comparable, par Li et al. [2]. Ils

l’attribuent à une diffusion de l’azote hors du puits. Les longueurs de diffusion qu’ils

calculent sont de quelques nanomètres c’est-à-dire très inférieures à l’épaisseur de la couche

de la Figure V-5, qui pourtant présente un décalage vers le bleu important. Si la diffusion

d’azote hors du puits était effectivement le principal effet induit par le recuit, le décalage vers

le bleu du pic de PL devrait être quasi-inexistant sur des couches épaisses. On peut donc

penser soit que l’azote ne fuit pas hors des couches, soit qu’il s’échappe des couches, mais

très rapidement. Pour choisir parmi les deux hypothèses, nous utilisons la diffraction des

rayons X haute résolution.

V.3.1.2 Aucune mise en évidence d’exodiffusion d’azote par diffraction de

rayons X

Dans cette étude, une couche de GaNxAs1-x/GaAs de 86 nm est caractérisée, à la fois

par photoluminescence à 300 K et par diffraction de rayons X haute résolution. L’acquisition

des spectres est effectuée avant et après un recuit d’une heure à 700 °C, sur le même

échantillon et exactement au même endroit sur l’échantillon.

Le recuit, qui permet d’augmenter l’intensité de PL d’un facteur 25, induit un décalage vers le

bleu du spectre de 28 meV (cf Figure V-6 (a)). Pour autant, aucun décalage angulaire du pic

satellite attribué au GaNxAs1-x n’est observé après recuit en diffraction de rayons X (cf Figure

V-6 (b)). La position angulaire de ce pic étant fonction du pourcentage d’azote incorporé dans

la couche, c’est que le recuit n’induit pas de fuite d’azote hors de la couche. Les simulations

(courbes pointillées de la Figure V-6 (b)) permettent d’appuyer cette affirmation. La première

courbe (pourcentage d’azote de 2,04 %) reproduit bien l’allure des deux courbes

expérimentales. En revanche, la seconde courbe (pourcentage d’azote de 1,80 %), qui aurait

pu rendre compte du décalage vers le bleu du pic de PL si l’exodiffusion d’azote en était la

cause, est en désaccord avec la courbe expérimentale de l’échantillon recuit. Après une heure

de recuit à 700 °C, le pourcentage d’azote dans la couche n’a donc pas changé à ± 0,02 %

près.

Ainsi, le décalage vers le bleu du pic de PL après recuit est probablement imputable à

une réorganisation des atomes d’azote au sein des couches lors du recuit.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

174

-1000 -500 0 500 1000 1500 2000 2500

1,0 1,1 1,2 1,3 1,4 1,50,0

0,4

0,8

1,2

1,6

(b)

Inte

nsité

(u.

a.)

ω (arcsec)

GaNxAs

1-x non recuit

pic du GaAs

pic du GaNAs

recuit 1H à 700 °C

simulation avec x = 0.0204

simulation avec x = 0.0180

PL 300 K

(a)

X 25

couche GaNxAs

1-x,

non recuite couche GaN

xAs

1-x ,

recuite 1H à 700 °C

Inte

nsité

de

PL

(u. a

.)

Energie (eV)

Figure V-6 : Spectres de PL à 300K (a) et de diffraction de rayons X (b) avant et après un recuit d’une

heure à 700 °C sur une couche de 86 nm de GaN0,0204As0,9796. En (b), les spectres discontinus correspondent

à des simulations.

V.3.2 Puits quantiques de GaNAs/GaAs

Nous poursuivons maintenant l’étude sur un échantillon composé de 3 puits

quantiques de GaNxAs1-x/GaAs de 7 nm, avec x ~ 1,7 %. En effet sur les puits quantiques le

signal de photoluminescence est généralement plus intense et les raies plus fines. Il est donc

plus facile de déceler le déplacement du pic de PL. L’étude est effectuée à très basse

température et à température ambiante pour la totalité des échantillons. L’échantillon recuit

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

175

30s à 850 °C a subi en plus une étude en fonction de la température dans la gamme 8 K – 300

K. Idéalement, l’étude aurait été plus simple sur un échantillon ne comptant qu’un seul puits

quantique, mais la seule structure alors à notre disposition était cette structure composée de 3

puits quantiques.

V.3.2.1 Etude de la photoluminescence à très basse température

La Figure V-7 montre les spectres de PL obtenus à 8 K et sous faible densité

d’excitation (~140 W/cm2), pour les échantillons non recuit et recuits à différentes

températures (a) et pour différentes durées (b). Les spectres possèdent tous 3 composantes,

chacune étant reliée à l’un des 3 puits quantiques. Ceci signifie que les puits diffèrent

légèrement par leur épaisseur ou leur composition. Nous optons pour la deuxième solution,

puisque la durée de croissance de chaque puits est identique et contrôlée avec précision.

L’écart de composition entre chaque puits est estimé à 0.34 %. Il est attribué à une mauvaise

stabilité du régulateur massique, qui opérait alors aux limites inférieures de sa plage de

fonctionnement.

V.3.2.1.a Diminution des effets de localisation induite par le recuit

Le pic de PL provenant de chaque puits quantique de GaNAs/GaAs se présente sous la

forme caractéristique déjà observée sur les puits quantiques de GaInNAs/GaAs. Il montre en

effet une décroissance abrupte à hautes énergies et une queue d’énergie exponentielle à basses

énergies, typique d’une recombinaison d’excitons localisés [8]. A très basse température, les

excitons sont donc piégés dans des fluctuations de potentiel (cf Chapitre III). Cependant,

l’intensité de la queue à basses énergies diminue quand la température (cf Figure V-7 (a)) ou

la durée (cf Figure V-7 (b)) du recuit augmente, indiquant que la nature localisée des excitons,

et par conséquent la profondeur énergétique des fluctuations de potentiel, tend à diminuer

avec le recuit.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

176

1,10 1,15 1,20 1,25 1,30 1,350

50

100

150

200

1,10 1,15 1,20 1,25 1,30 1,350

100

200

300

400

(a)

8 K

non recuit recuit 700°C, 90s recuit 750°C, 90s recuit 800°C, 90s recuit 850°C, 90s

Inte

nsité

de

PL

(u. a

.)

Energie (eV)

(b)

8 K

non recuit recuit 800°C, 10s recuit 800°C, 30s recuit 800°C, 90s recuit 800°C, 300s recuit 800°C, 600s

Inte

nsité

de

PL

(u. a

.)

Energie (eV)

Figure V-7 : Spectres de PL obtenus à très basse température sur la structure à 3 puits quantiques de

GaNAs/GaAs, pour différentes températures de recuit (a) et pour différentes durées de recuit (b).

L’augmentation de la puissance d’excitation permet de fournir un autre indice

concernant l’existence d’états localisés. Elle résulte en un décalage vers le bleu de chaque pic

et en une réduction de la contribution de la queue à basses énergies à chaque pic, comme on

peut l’observer à la Figure V-8.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

177

1,10 1,15 1,20 1,25 1,30 1,35 1,400,0

0,4

0,8

1,2 8 K

Inte

nsité

de

PL

norm

alis

ée

Energie (eV)

700 W/cm2

140 W/cm2

8 W/cm2

0.8 W/cm2

Figure V-8 : Intensité de PL normalisée, à 8K, sur la structure à 3 puits quantiques de GaNAs/GaAs

recuite 30 s à 850 °C, pour différentes densités de puissance d’excitation.

En effet, la saturation des états localisés est d’autant plus rapide que leur profondeur

est importante. Le décalage vers le bleu qui résulte du remplissage des états est d’environ 9

meV par décade, c’est-à-dire équivalent à celui observé dans la littérature sur des structures à

multipuits quantiques de GaNAs/GaAs [8].

V.3.2.1.b Décalage vers les hautes énergies induit par le recuit

La Figure V-7 présentée au paragraphe précédent montre aussi (et surtout) que le pic

de PL provenant de chaque puits à très basse température se décale vers le bleu avec le recuit.

Le décalage énergétique est d’autant plus grand que la température (a) ou la durée (b) de

recuit sont élevées. De plus, la largeur de chaque pic est réduite de manière significative avec

le recuit. Pour décrire de manière quantitative l’évolution de l’énergie et de la largeur à mi-

hauteur de chaque pic, les spectres sont ajustés par trois gaussiennes. On note que ces

ajustements ne permettent pas de prendre en compte la contribution de la queue d’états à

basses énergies, comme le montre l’encart de la Figure V-9. Les valeurs ainsi déterminées

sont présentées pour chaque pic à la Figure V-9 pour une température de recuit de 800 °C.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

178

0 100 200 300 400 500 6001,20

1,22

1,24

1,26

1,28

1,30

0 100 200 300 400 500 60010

15

20

25

30

35

40

1,10 1,15 1,20 1,25 1,30 1,35

8 K

Inte

nsité

de

PL

(u. a

.)

Energie (eV)

8 K

(a)

3ème pic

2ème pic

1er pic

Ene

rgie

du

pic

de P

L (e

V)

8 K

(b)

1er pic

2ème pic

3ème pic

Larg

eur

à m

i-hau

teur

(m

eV)

Durée du recuit (s)

Figure V-9 : Energie (a) et largeur à mi-hauteur (b) des 3 pics de PL obtenus à très basse température sur

la structure à 3 puits quantiques de GaNAs/GaAs, en fonction de la durée du recuit à 800 °C.

L’ajustement utilisant 3 gaussiennes est montré en encart de la figure (b).

Il apparaît que l’augmentation de l’énergie des pics et la diminution de la largeur à mi-

hauteur sont concomitantes. En outre, une tendance à la saturation de ces deux paramètres est

observée pour les recuits longs. La valeur des décalages vers le bleu entre l’échantillon recuit

pendant 600 s et l’échantillon non recuit dépend de l’énergie du pic considéré. Le pic le moins

énergétique, qui correspond au puits quantique avec la plus forte concentration d’azote, se

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

179

décale de 38 meV. A l’opposé, le pic le plus énergétique, qui correspond au puits quantique

avec la plus faible concentration d’azote, se décale seulement de 31 meV. Quant à la largeur à

mi-hauteur, elle passe de 27 meV sur l’échantillon non recuit à 15 meV sur l’échantillon

recuit 600 s.

En conclusion, le recuit thermique induit des changements importants dans la forme et

l’énergie des spectres de PL à très basse température (8 K). Qu’en est-il à température

ambiante ?

V.3.2.2 Etude de la photoluminescence à température ambiante

La Figure V-10 montre le spectre de PL obtenu à 300 K (a) sur 3 échantillons

respectivement non recuit, recuit 30 s à 800 °C et 300 s à 800 °C. Les spectres obtenus à 8 K

sont également tracés en encart pour comparaison. A température ambiante, les 3 pics ne

forment plus qu’un seul pic, très large. La discrimination entre les 3 pics provenant des 3 puits

quantiques est par conséquent difficile. Quoi qu’il en soit, la partie hautes énergies de ce large

spectre ne se décale pas vers le bleu avec le recuit, et la partie basses énergies se décale très

légèrement vers le bleu, mais sans commune mesure avec le décalage observé à 8 K. On

notera que pour l’échantillon non recuit, le spectre à 300 K et le spectre à 8 K se situent

quasiment dans la même gamme d’énergie, ce qui montre une très forte localisation des

porteurs sous la bande interdite à basse température. La Figure V-10 (b) montre l’énergie du

large pic de PL à 300 K à forte densité d’excitation pour toutes les conditions de recuit.

Clairement aucun décalage significatif du pic n’est observé à température ambiante,

contrairement à 8 K (cf Figure V-9).

Par ailleurs, la comparaison de l’effet du recuit, à 300 K, sur l’énergie de PL de ces

puits quantiques de GaNAs/GaAs (cf Figure V-10) et sur celle des puits quantiques de

GaInNAs/GaAs (cf Figure V-2) montre que la présence d’indium modifie la sensibilité au

recuit à température ambiante.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

180

1,10 1,15 1,20 1,25 1,30 1,35 1,40

1,10 1,15 1,20 1,25 1,30 1,35 1,40

0 100 200 300 400 500 600

0

20

40

60

80

100

Décalage vers le bleu surpuits quantiques de GaNAs/GaAs

850 °C 800 °C 750 °C 700 °C

Déc

alag

e ve

rs le

ble

u (m

eV)

Durée du recuit (s)

(b)

(a)

T = 300 K non recuit 800 °C, 30s 800 °C, 300s

Inte

nsité

de

PL

norm

alis

ée

T = 8 K non recuit 800 °C, 30s 800 °C, 300s

Energie (eV)

Figure V-10 : Spectres de PL à 300 K (a) et 8 K (encart) obtenus sur la structure à 3 puits quantiques de

GaNAs/GaAs pour différentes conditions de recuit. Energie du pic de PL à 300 K (b) obtenu à forte

densité d’excitation pour toutes les conditions de recuit.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

181

V.3.2.3 Diffraction de rayons X

La Figure V-11 montre les spectres de diffraction X haute résolution obtenus sur la

structure à 3 puits quantiques de GaNAs/GaAs, pour un échantillon recuit 600 s à 850 °C et

pour un échantillon non recuit, ainsi qu’un spectre simulé. Les spectres expérimentaux, très

semblables, ne permettent pas de mettre en évidence une diffusion importante de l’azote hors

du puits lors du recuit. Le spectre simulé (trait discontinu) a été obtenu en considérant 3 puits

de GaNAs/GaAs de 6,5 nm d’épaisseur, dont le pourcentage d’azote respectif est de 1,94 %,

1,76 % et 1,47 % (cf Tableau V-1 du V.4.3.2). Les puits sont séparés chacun de barrières de

17,6 nm de GaNAs avec une faible concentration d’azote résiduel (0,3%), et recouverts d’une

couche d’encapsulation de GaAs de 33 nm d’épaisseur. Le spectre ainsi obtenu reproduit

correctement l’allure des spectres expérimentaux.

-3000 -2000 -1000 0 1000 2000 3000 4000

Diffraction de RX sur 3 puits quantiques de GaNAs/GaAs

Inte

nsité

(u.

a.)

ω (arcsec)

non recuit simulation

recuit 600 s à 850 °C

Figure V-11 : Spectres de RX obtenus sur la structure à 3 puits quantiques de GaNAs/GaAs pour un

échantillon recuit 600 s à 850 °C et sur un échantillon non recuit. La courbe discontinue est une

simulation.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

182

V.3.2.4 Synthèse

De l’étude menée à 8 K et à 300 K, on peut donc conclure que sur les puits quantiques

de GaNAs/GaAs caractérisés :

• Le pic de PL à température ambiante ne se décale pas (ou très peu) avec le recuit.

• A l’inverse le pic de PL à très basse température se décale fortement vers les hautes

énergies et ce d’autant plus que la température ou la durée du recuit sont élevées.

Les porteurs étant majoritairement dépiégés des fluctuations de potentiel à température

ambiante et au contraire fortement localisés dans ces pièges à basse température, la

photoluminescence à 300 K reflète l’énergie de bande interdite moyenne, tandis que la

photoluminescence à 8 K reflète l’énergie des fluctuations de potentiel les plus profondes. Le

fait que le pic de PL à 300 K ne se décale quasiment pas montre que l’énergie de bande

interdite reste constante avec le recuit. L’absence de changement significatif du spectre de

diffraction X après un recuit long (600 s) et à température élevée (850 °C) semble confirmer

que le pourcentage d’azote à l’échelle de la sonde (quelques mm2) ne change pas dans les

puits. En revanche, le décalage significatif de la PL à 8 K vers le bleu montre que la

profondeur des fluctuations de potentiel diminue avec le recuit.

Une étude en fonction de la température est menée sur l’échantillon recuit 30 s à 850

°C, pour mettre en évidence la transition du régime de recombinaison d’excitons localisés au

régime de recombinaison de porteurs délocalisés. En effet, nous avons mis en évidence cette

transition sur des puits quantiques de GaInNAs/GaAs (Chapitre IV) mais pas encore sur des

puits quantiques de GaNAs/GaAs.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

183

1,15 1,20 1,25 1,30 1,35

295 K

196 K

171 K148 K

116 K

90 K

70 K

50 K

35 K

22 K

8 K

Inte

nsi

té d

e P

L (

éch

. lin

.)

Energie (eV)

Figure V-12 : Spectres de PL obtenus pour différentes températures sur la structure à 3 puits quantiques

de GaNAs/GaAs, montrant le phénomène de S-inversé suivi par l’énergie des pics.

Les spectres de la Figure V-12 et les points de la Figure V-13 (a) montrent, comme

prévu, la forme caractéristique de ‘S-inversé’ que suit chaque pic de PL lorsque la

température augmente de 8 K à 300 K. A la Figure V-13 (a), (b), et (c) sont tracées

respectivement l’évolution, avec la température, de l’énergie et de la largeur à mi-hauteur du

pic le plus énergétique, ainsi que la variation de l’intensité intégrée de la totalité du spectre de

la Figure V-12 en fonction de la température. On retrouve le comportement atypique de la

largeur à mi-hauteur autour de Tloc/deloc ainsi que la chute très rapide d’IPL dans la gamme de

température 8 K – Tloc/deloc, décrit en détail au Chapitre III. Pour ces puits quantiques de

GaNAs/GaAs, Tloc/deloc = 50 K.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

184

0 50 100 150 200 250 300

1,24

1,26

1,28

1,30

0 50 100 150 200 250 300

15

20

25

30

35

40

45

0 50 100 150 200 250 3001E-3

0,01

0,1

1

10

(a)

recuit 30s à 850 °C non recuit autres recuits ajustement Böse-Einstein

Ene

rgie

(eV

)

Température (K)

(b)

Larg

eur

à m

i-hau

teur

(m

eV)

Température (K)

(c)

Inte

nsité

de

PL

inté

grée

(u.

a.)

Température (K)

Figure V-13 : Evolution avec la température de l’énergie (a) et de la largeur à mi-hauteur (b) du 3ème pic

de PL de l’échantillon GaNAs/GaAs recuit 30 s à 850 °C ; l’intensité intégrée du spectre en fonction de la

température est tracée en (c). Egalement en (a) l’énergie du 3ème pic à 8 K et 300 K pour les autres

conditions de recuit. A 300 K, la barre verticale représente l’incertitude estimée sur l’énergie de ce pic,

quelles que soient les conditions de recuit.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

185

Notons que récemment, cette mise en évidence ‘macroscopique’ des effets de

localisation à très basse température et de délocalisation à température ambiante a été

confirmée par une étude de microscopie en champ proche [9]. Nous avons aussi rajouté sur la

Figure V-13 (a) la position du pic le plus énergétique de tous les spectres obtenus à 8 K. La

gamme d’énergie dans laquelle se situe le pic à 300 K quelles que soient les conditions de

recuit est indiquée par la barre verticale. On constate que le degré de localisation diminue

fortement avec le recuit, puisque la différence entre l’énergie du pic de PL à 8 K et 300 K

augmente avec le recuit.

Nous pensons que la diminution des effets de localisation avec le recuit, associée à

l’absence de décalage du pic de PL à 300 K, est une preuve que le recuit induit des

changements à l’intérieur des puits nitrurés plutôt qu’une simple diffusion d’azote hors des

puits. Le fait que sur des couches épaisses (~ 100 nm) de GaNAs/GaAs (cf V.3.1) un décalage

vers le bleu du pic de PL soit observé après recuit alors qu’aucune fuite d’azote hors de la

couche n’a pu être mise en évidence par diffraction de rayons X semble confirmer cette thèse.

De même, les spectres de diffraction X obtenus sur une structure à 3 puits quantiques ne

changent pas de manière significative après un recuit long (600s) effectué à haute température

(850 °C). Nous exposons au paragraphe suivant un modèle simple qui peut rendre compte des

observations expérimentales de ce chapitre.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

186

V.4 Elaboration d’un modèle simple : fluctuations de

composition d’azote dans le plan de croissance et

homogénéisation avec le recuit

V.4.1 Approche qualitative

L’explication que nous proposons pour rendre compte des phénomènes observés sur

les puits quantiques de GaNAs/GaAs lors du recuit, est illustrée à la Figure V-14. Dans ce

modèle, le recuit induit une homogénéisation de la composition d’azote dans les puits

quantiques de nitrures, plutôt qu’une diffusion de l’azote hors des puits.

recuit : durée t2 > t

1

recuit : durée t1

non recuit

E

X

∆E0

Homogénéisation des fluctuations avec le recuit

Ene

rgie

de

B.I.

loca

le d

u G

aNA

s (e

V)

2L

∆X0

Com

posi

tion

d'az

ote

(%)

Distance y dans le plan des couches (u. a.)

Figure V-14 : Description schématique du modèle d’homogénéisation d’azote avec le recuit dans le plan

d’un puits quantique de GaNAs/GaAs.

Nous avons vu en effet que l’émission à très basse température provient, sur les

structures non recuites, de la recombinaison d’excitons localisés dans des fluctuations de

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

187

potentiel profondes (cf trait plein de la Figure V-14) induites par l’incorporation d’azote. Le

recuit, en homogénéisant la composition d’azote, diminue la profondeur des fluctuations (cf

traits discontinus de la Figure V-14). Cette ‘remontée’ des pièges les plus profonds induit le

décalage vers le bleu du pic de PL observé à très basse température, et la saturation du

décalage pour des recuits longs, quand l’homogénéité est atteinte. Elle entraîne par

conséquent une diminution des phénomènes de localisation.

Cette explication est également en accord avec la réduction de la largeur à mi-hauteur

avec le recuit. Le rétrécissement du pic de PL est en effet attribué à une diminution du

désordre d’alliage plutôt qu’à une diffusion d’azote hors du puits. En effet, on peut penser

qu’une diffusion hors du puits, qui adoucit le profil du puits quantique, élargirait au contraire

le pic de PL, comme constaté dans l’alliage GaInAs [4].

Avec ce modèle, on comprend également pourquoi le décalage vers le bleu de la

photoluminescence à température ambiante est, s’il existe, beaucoup plus faible qu’à très

basse température. La composition moyenne d’azote restant constante, et les porteurs à

l’ambiante se recombinant à l’énergie de bande interdite moyenne, le recuit ne change pas

l’énergie du pic, mais simplement sa largeur (affinement de la distribution d’azote autour de

la composition moyenne).

Nous argumentons donc en faveur d’une diffusion de l’azote dans le plan du puits

plutôt que hors du puits : toutefois comme le gradient de concentration d’azote est plus fort

entre le puits et les barrières qu’au sein même du puits inhomogène, ceci implique que le

coefficient de diffusion d’azote est plus faible dans une direction parallèle à l’axe de

croissance que dans une direction perpendiculaire à l’axe de croissance. Une telle différence

pourrait être induite par exemple par une différence de contraintes locales dans le puits et dans

les barrières.

On notera que le modèle présenté est cohérent avec les observations faites par

Buyanova et al. en photoluminescence et excitation de photoluminescence [10], où dans des

couches de GaNAs un décalage du pic de PL à basse température est observé avec le recuit

sans changement de l’énergie du pic d’excitation de photoluminescence, c’est-à-dire sans

changement de l’énergie de bande interdite moyenne. Ils suggèrent donc que le recuit

améliore l’uniformité de la composition d’azote dans les couches.

Ce modèle est également susceptible de s’appliquer aux puits quantiques de

GaInNAs/GaAs, dans lesquels nous avons mis en évidence la diminution des effets de

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

188

localisation, de la largeur à mi-hauteur, le décalage vers le bleu et sa saturation avec le recuit

(cf V.2). En outre, des mesures d’ERD (pour Elastic Recoil Detection) sur des puits

quantiques de GaInNAs/GaAs ont montré que le recuit n’induisait pas de perte significative

de la composition d’azote dans les puits [11].

V.4.2 Approche quantitative

A partir de ce modèle, nous proposons maintenant une description quantitative qui

permet de rendre compte du décalage vers le bleu des spectres de photoluminescence à très

basse température sur les structures à puits quantiques de GaNAs/GaAs.

V.4.2.1 Modèle simple

Pour simplifier le formalisme mathématique, on suppose que le profil de concentration

d’azote dans le plan du puits est périodique selon une dimension de l’espace, et sinusoï dal.

Bien entendu le profil de concentration sur le matériau non recuit n’est probablement pas

sinusoï dal, mais il est toujours possible de le décomposer en une somme de fonctions

périodiques sinusoï dales de périodes et d’amplitudes variables (décomposition en série de

Fourier). In fine, c’est la sinusoï de de plus longue période (harmonique fondamental) qui va

imposer l’homogénéisation avec le recuit. Le profil sinusoï dal est par conséquent une bonne

première approximation :

( )

⋅π

⋅∆+=L

ysinXXyX 0 Équation V-4

où X(y) est la fraction locale d’azote, X la fraction moyenne d’azote, ∆X0 la demi-amplitude

des fluctuations initiales de composition d’azote, L la demi-période des fluctuations de

composition, et y une direction dans le plan des couches (cf Figure V-14). L’évolution de ce

profil avec la durée du recuit, t, est régie par la seconde loi de Fick :

∂∂

⋅∂∂

=∂∂

yX

Dyt

XN Équation V-5

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

189

qui peut être simplifiée, en supposant que le coefficient de diffusion d’azote DN ne dépend pas

de la concentration d’azote dans le domaine de concentration restreint (1.5 % - 2.5 %) qui

nous intéresse, par :

2

2

N y

XD

tX

∂∂

⋅=∂∂

Équation V-6

En utilisant les équations IV-4 et IV-6 et en résolvant on obtient :

( ) ( ) ( )t,yXXtexpL

ysinXXt,yX 0 ∆+=τ−⋅

⋅π

⋅∆+= Équation V-7

en posant

N2

2

D

L

⋅π=τ Équation V-8

τ étant une constante de temps.

Ainsi, l’équation IV-7 montre que l’amplitude des fluctuations de composition d’azote

∆X(y,t) diminue de façon exponentielle avec la durée du recuit. Au bout d’un temps

suffisamment long elle devient nulle de manière à ce que la concentration locale soit égale à

la concentration moyenne en tout point du puits.

Les changements locaux de l’énergie de bande interdite E(y,t) sont ensuite reliés aux

fluctuations de la composition d’azote ∆X(y,t) (cf Figure V-14) par :

( ) ( ) St,yXEt,yE ⋅∆+= Équation V-9

où S (<0) est le taux de diminution d’énergie de bande interdite par augmentation du

pourcentage d’azote, c’est-à-dire la dérivée de la courbe de la Figure II-18 du Chapitre II. Sa

valeur est de l’ordre de 100 meV / %N ; elle varie avec la composition. E est l’énergie de

bande interdite pour l’alliage homogène (concentration X ), i.e. l’énergie de bande interdite

moyenne.

A très basse température, les excitons sont piégés dans les fluctuations de potentiel,

l’émission vient donc des endroits où l’énergie de bande interdite locale est minimale, c’est-à-

dire où la composition d’azote locale est maximale ∆Xmax(t). Des équations IV-7 et IV-9, il

vient :

( ) ( ) ( ) StexpXEStXEtE 0maxPL ⋅τ−⋅∆+=⋅∆+= Équation V-10

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

190

D’après ce modèle simple, le pic de PL à très basse température se décale vers le bleu

lorsque la durée du recuit augmente, et ce de manière exponentielle.

V.4.2.2 Prise en compte des effets de confinement

Dans le paragraphe précédent, nous avons considéré que la photoluminescence à très

basse température provient du fond des fluctuations de potentiel locales. En fait, il nous faut

prendre en compte les effets de confinements dus au puits quantique (direction parallèle à

l’axe de croissance) et aux fluctuations de potentiel dans le puits (direction perpendiculaire à

l’axe de croissance). Dans les deux cas, les effets de confinements diminuent la valeur

apparente de S, comme illustré à la Figure V-15. En d’autres termes, pour une valeur fixée du

décalage vers le bleu du pic de PL, la variation correspondante de la composition d’azote

locale sera plus importante si les effets de confinements sont pris en compte, car les effets de

confinement ont tendance à lisser les inhomogénéités.

Figure V-15 : Schéma montrant la diminution des fluctuations de l’énergie d’un niveau confiné par

rapport aux fluctuations de l’énergie de la bande interdite, induite par les effets de confinement.

x

y

z

BC

x

y

z

x

y

z

BC

Le confinement selon z induit des fluctuations d’énergie du niveau confiné plus faibles que

celles de l’énergie de bande interdite du puits

Les fluctuations de potentiel selon y induisent un confinement des porteurs qui dépend de la

période spatiale des fluctuations

z y

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

191

Dans des puits quantiques de GaNAs/GaAs, contraints en tension (cf II-5-1), la

transition énergétique la plus faible a lieu entre le premier niveau des électrons E1 et le

premier niveau de trous légers L1. Donc dans notre modèle, S traduit maintenant le

changement de l’énergie E1L1 par changement du pourcentage d’azote.

La valeur de S a été estimée en utilisant le formalisme des matrices de transfert. Nous

avons considéré séparément le confinement dans la direction de croissance et dans une

direction du plan du puits. L’alignement de bande entre le GaNAs et le GaAs est supposé de

type I [12, 13, 14, 15, 16]. Dans le GaNAs, la masse effective des électrons est prise égale à

0,19 m0 [12] et supposée constante dans la gamme de composition d’azote 1,5 % - 2,5 %. La

valeur du décalage entre la bande de conduction du GaNAs et celle du GaAs est telle que

∆Ec/(∆Ec+∆Ev) = 0,7 [13]. Les effets de contraintes induits par la différence de paramètre de

maille entre le GaNAs et le GaAs sont pris en compte, en supposant que la loi de Vegard est

valide pour le GaNAs dans la gamme de composition considérée. Le modèle d’anticroisement

de bande présenté au Chapitre III est utilisé pour rendre compte de la diminution de l’énergie

de bande interdite avec l’incorporation d’azote, à 300 K, en prenant EN = 1,65 eV et CNM =

2,7 eV (cf Chapitre III). On suppose que la diminution de l’énergie de bande interdite avec

l’incorporation d’azote est identique à basse température, ce qui n’est vrai qu’en première

approximation (cf Chapitre IV).

Les résultats des simulations montrent que, autour d’un pourcentage moyen d’azote de

1,7 %, la valeur de S change approximativement de – 123 meV / %N dans une couche épaisse

de GaNAs/GaAs à –112 meV / %N dans un puits quantique de GaNAs/GaAs de 7 nm

d’épaisseur. L’ajout des effets de confinement dans le plan des couches à cause de la présence

des fluctuations de composition d’azote (effet superréseau) augmente la valeur ‘apparente’ de

S mais l’augmentation dépend de la valeur de L. Nous prendrons une valeur moyenne obtenue

pour L = 50 nm, qui donne une valeur globale de S égale à - 100 meV / %N.

V.4.3 Confrontation avec l’expérience

L’équation IV-10 est utilisée pour rendre compte de l’évolution, avec la durée du

recuit, de l’énergie du pic de PL obtenu à très basse température. Les paramètres d’ajustement

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

192

sont l’énergie ‘d’homogénéisation complète’ E , l’amplitude initiale des fluctuations de

composition d’azote ∆X0 et la constante de temps τ.

V.4.3.1 Résultats sur un puits quantique de GaNAs/GaAs de la littérature

Nous montrons à la Figure V-16 les résultats expérimentaux de Li et al. [2] obtenus

sur un puits quantique de GaNAs/GaAs recuit à 700 °C. Le décalage vers le bleu du pic de PL

à basse température, qu’ils expliquent quantitativement par une exodiffusion d’azote hors du

puits, est également bien décrit par notre modèle (courbe continue de la Figure V-16), qui

considère une diffusion d’azote au sein des puits. L’ajustement est optimal avec une

amplitude de fluctuation de composition d’azote ∆X0 de 0,33 % sur l’échantillon non recuit,

ce qui est plausible

0 200 400 600 800 1000

1,18

1,19

1,20

1,21

Confrontation modèle - expérience

E = (1.212 ± 0.006) eV∆X

0 = (0.33 ± 0.06) %

τ = (430 ± 180) s

Points expérimentaux Li et al., recuit 700 °C

Modèle

Ene

rgie

PL

à 8K

(eV

)

Durée du recuit (s)

Figure V-16 : Confrontation du modèle développé dans ce chapitre avec les résultats de la littérature

obtenus sur un puits quantique de GaNAs/GaAs recuit à 700 °C.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

193

V.4.3.2 Résultats sur les puits quantiques de GaNAs/GaAs étudiés

L’évolution de l’énergie de PL à très basse température lors d’un recuit à 800 °C (cf

Figure V-13) est ajustée pour chacun des 3 puits quantiques de GaNAs/GaAs à l’aide du

modèle (cf Figure V-17). Les valeurs des paramètres d’ajustement sont consignés dans le

Tableau V-1.

0 100 200 300 400 500 6001,20

1,22

1,24

1,26

1,28

1,30

Confrontation modèle - expérience

8 K

Points expérimentaux, recuit 800 °C

ModèleEne

rgie

du

pic

de P

L (e

V)

Durée du recuit (s)

Figure V-17 : Confrontation du modèle développé avec les résultats obtenus sur 3 puits quantiques de

GaNAs/GaAs recuits à 800 °C.

Puits quantique

Amplitude des fluctuations de

composition initiales : ∆∆X0 (%)

Constante de temps :

ττ (s)

E1L1 à 8 K (eV)

Concentration moyenne d’azote

(%)

Le – énergétique 0,34 ± 0,03 23 1,241 1,94

Intermédiaire 0,28 ± 0,03 23 1,261 1,76

Le + énergétique 0,27 ± 0,03 23 1,293 1,47

Tableau V-1 : Valeurs des paramètres d’ajustements du modèle pour un recuit à 800 °C sur 3 puits

quantiques de GaNAs/GaAs. La concentration d’azote moyenne dans chaque puits est également notée.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

194

On constate un très bon accord entre les points expérimentaux et le modèle. Les

valeurs de ∆X0 sont comparables à celle trouvée sur les puits de Li et al. Par ailleurs on

remarque au Tableau V-1 que ∆X0 est légèrement plus élevée pour le pic le moins

énergétique. Le fait que ce pic corresponde au puits quantique qui possède le plus d’azote

n’est pas surprenant, puisqu’on attend une augmentation du degré de localisation lorsque le

pourcentage d’azote augmente. En effet, la probabilité de former des agrégats d’azote qui

localisent les excitons augmente avec le pourcentage d’azote, comme nous l’avons vu au

Chapitre III.

Ces observations et explications sont en accord qualitatif avec les résultats de Asplund

et al. [17], qui montrent que le décalage vers le bleu du pic de PL avec le recuit est d’autant

plus élevé que le pourcentage d’azote incorporé dans des puits de GaInNAs/GaAs est élevé.

L’évolution du décalage vers le bleu de l’énergie des pics est ensuite ajustée pour les

autres températures de recuit. Les échantillons provenant de la même plaque, les valeurs de

∆X0 et de E sont fixées ; seul τ varie. Les résultats sont présentés au Tableau V-2, dans lequel

on a également placé la valeur de τ déterminée à l’aide des valeurs expérimentales de Li et al.

[2]. Cette dernière valeur est proche de celle déterminée sur notre échantillon à une

température de recuit identique.

Température de recuit

700 °C 750 °C 800 °C 850 °C

τ 400 s 426 s (Li et al.)

150 s 23 s 5 s

Tableau V-2 : Constante de temps ττ pour différentes températures de recuit.

En utilisant l’équation IV-6 et en supposant que le coefficient de diffusion d’azote

dans le plan des puits DN est thermiquement activé, i.e. :

−⋅=kT

EexpDD a

0N Équation V-11

il vient :

⋅π=τ

kT

Eexp

D

L a

02

2

Équation V-12

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

195

En traçant Ln(τ) en fonction de l’inverse de la température (absolue) de recuit, on

constate que l’ensemble des points est bien aligné (cf Figure V-18). La constante de temps qui

régit la vitesse d’homogénéisation est donc effectivement thermiquement activée. L’énergie

d’activation déterminée est de 2,8 eV.

0,00088 0,00092 0,00096 0,00100 0,001041

2

3

4

5

6

7

Energie d'activation dérivée du modèle

Ajustement sur nos échantillons Ajustement d'après valeurs Li et al.

Ea = 2.8 eV

Ln(τ

)

1/T (K-1)

Figure V-18 : Constante de temps du modèle développé dans ce chapitre, en fonction de l’inverse de la

température de recuit. Une énergie d’activation de 2,8 eV est déduite.

V.4.3.3 Discussion et synthèse

La valeur de l’énergie d’activation dérivée de notre modèle est proche de celle d’une

énergie de liaison. L’énergie d’activation pourrait donc correspondre à l’énergie nécessaire

pour casser une liaison Ga-N et ainsi permettre à l’azote de diffuser. Par ailleurs, l’ordonnée à

l’origine de la droite en pointillée de la Figure V-18 permet d’avoir accès à D0 (toujours en

prenant comme valeur typique de L : 50 nm). La valeur de D0 trouvée est 1,87 cm2.s-1, ce qui

permet de calculer les valeurs du coefficient de diffusion DN dans le plan des puits, aux

différentes températures de recuit à l’aide de l’équation IV-11. Les valeurs sont consignées au

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

196

Tableau V-3 et comparées aux valeurs obtenues par Li et al. [2], qui considèrent une diffusion

de l’azote hors des puits alors que nous considérons une diffusion d’azote au sein du puits

pour homogénéiser les fluctuations de compositions d’azote.

On constate que les constantes de diffusion obtenues à l’aide de notre modèle sont

plus grandes (et l’énergie d’activation plus faible) que celles obtenues avec le modèle de Li et

al. Ceci montre que les phénomènes décrits par notre modèle interviennent plus rapidement,

ce qui appuie notre interprétation.

Paramètres du modèle

Li et al. [2] Notre modèle []

Ea (eV)

6 - 7 2,8

DN (700°C-850°C) (cm2.s-1)

10-17 – 10-16 6×10-15 - 5×10-13

Tableau V-3 : Tableau comparatif des paramètres de diffusion d’azote hors d’un puits ou au sein d’un

puits.

Pour conclure, les études de photoluminescence effectuées sur des structures à puits

quantiques de GaNAs/GaAs nous ont permis de montrer [18] que :

• A très basse température, les excitons se recombinent préférentiellement dans des

fluctuations de potentiel, dont la profondeur énergétique diminue avec le recuit grâce à

une diffusion thermiquement activée de l’azote dans le plan des puits. Ce processus

d’homogénéisation de la composition d’azote induit le décalage vers le bleu du pic de

PL, réduit le désordre d’alliage et par conséquent la largeur à mi-hauteur des spectres,

et diminue les effets de localisation.

• A température ambiante, les porteurs sont délocalisés et leur recombinaison reflète la

composition moyenne de l’alliage. En effet à 300 K, leur énergie thermique est

d’environ 26 meV. Or, l’amplitude maximale des fluctuations de composition est de

0.3 % d’azote, sur l’échantillon non recuit. En terme d’énergie ceci correspond à des

fluctuations de potentiel inférieures ou égales à 30 meV. Donc quelles que soient les

conditions de recuit, les porteurs peuvent se délocaliser au niveau de l’énergie de

bande interdite moyenne.

• Dans la gamme de températures intermédiaires, l’augmentation de la température

permet au signal de PL de transiter du régime de recombinaison d’excitons localisés

dans les fluctuations de potentiel au régime de porteurs délocalisés se recombinant à

l’énergie de bande interdite moyenne de l’alliage. La température de délocalisation

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

_________________________________________________________________________________________________________________

197

complète dépend de la profondeur des fluctuations de potentiel, donc des conditions

de recuit.

A température ambiante, un point reste obscur : aucun décalage significatif du pic de

PL n’est mis en évidence sur les 3 puits quantiques, alors que sur des couches de

GaNAs/GaAs relativement épaisses, ce décalage existe (cf par exemple Figure V-6 (a)). Il est

en fait difficile de conclure puisque les pourcentages d’azote et les températures de croissance

sont différents. Cependant, à supposer que l’amplitude 2 ∆X0 et la période 2 L des

fluctuations de composition soient les mêmes dans un puits quantique et son homologue en

couche épaisse de GaNAs/GaAs, une telle observation pourrait s’expliquer de la manière

suivante : dans un puits quantique, les effets de confinement dans la direction de croissance

sont importants, car l’épaisseur du puits (typiquement 7 nm) est faible et les barrières

relativement élevées. En revanche dans la couche équivalente, le confinement existe dans la

direction de croissance, à cause des fluctuations de potentiel identiques à celles décrites dans

le plan des couches, mais les effets de confinement sont beaucoup plus faibles que dans le

puits, L étant supérieur à 7 nm et les barrières moins élevées. Or plus le confinement est fort,

plus la profondeur énergétique des fluctuations de potentiel ‘vues’ par les électrons est faible.

Ainsi, on peut comprendre que la délocalisation des porteurs dans le plan de croissance soit

plus facile dans le puits de GaNAs/GaAs que dans une couche plus épaisse. Ceci expliquerait

qu’à température ambiante on observe encore un décalage vers le bleu du pic de PL avec le

recuit sur des couches épaisses, alors que ce n’est pas le cas dans des puits quantiques.

V.4.3.4 Liens avec la littérature

Le modèle développé ci-avant est cohérent avec des études récentes qui ont permis de

mettre en évidence des fluctuations de composition dans l’alliage GaNAs [19, 9]. Des

modulations de composition ont également été observées sur le GaNAs par microscopie à

force atomique et par microscopie électronique en transmission [20]. La valeur de 2 L = 100

nm que nous avons prise dans le modèle pour estimer plus précisément la valeur de S est en

bon accord avec la période des fluctuations observées, qui est, dans la gamme de composition

d’azote 1,5 – 2,5 %, estimée autour de 50 – 150 nm [19, 20, 9].

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

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198

En ce qui concerne les puits quantiques de GaInNAs/GaAs, nous n’avons pas assez de

données à très basse température pour essayer de les ajuster avec notre modèle, d’autant plus

que la présence conjointe d’indium et d’azote accentue peut-être les phénomènes de

localisation [21]. En effet, à 300 K, le décalage vers le bleu imputable à la présence azote (cf

Figure V-2) n’est pas nul, ce qui semblerait confirmer cette information.

Néanmoins, dans des puits de GaInNAs/GaAs, d’importantes ondulations de

l’épaisseur ont été rapportées [1], dont la période avoisine 50 nm. De plus, le degré

d’ondulation semble diminuer avec le recuit. Si ces ondulations sont induites par une

fluctuation de composition d’azote dans le plan des puits, alors la diminution des ondulations

avec le recuit, de même que la période de ces ondulations, est cohérente avec notre modèle.

V.5 Conclusion du Chapitre V

Dans ce chapitre, après avoir montré que le recuit induit effectivement une amélioration

des propriétés optiques des couches de nitrures en terme d’intensité de photoluminescence,

nous avons focalisé notre propos sur le décalage vers les hautes énergies des spectres de

photoluminescence induit par le recuit. Nous attribuons l’origine du décalage vers le bleu à

une homogénéisation des fluctuations de composition d’azote présentes dans le matériau non

recuit, qui s’effectue grâce à une diffusion de l’azote dans le plan des couches. Cette

interprétation originale est cohérente avec l’observation, au cours du recuit, d’une diminution

des effets de localisation de porteurs à basse température (cf Chapitre III), d’une diminution

de la largeur à mi-hauteur des spectres de photoluminescence, et d’une saturation du décalage

vers le bleu pour des recuits longs. Un modèle quantitatif simple est développé pour rendre

compte du décalage vers le bleu, avec le recuit, du pic de photoluminescence à 8 K provenant

de puits quantiques de GaNAs/GaAs. Les valeurs extraites de ce modèle (amplitude initiale

des fluctuations de composition d’azote de 0,3 %, coefficient de diffusion d’azote de 10-16

cm2.s-1 à 10-13 cm2.s-1 dans la gamme de recuit 700 °C – 850 °C, énergie d’activation de 2,8

eV) sont tout à fait plausibles. Elles favorisent notre interprétation plutôt que celle d’une

diffusion d’azote hors des couches lors du recuit [2], que nous n’avons d’ailleurs pas pu

mettre en évidence par diffraction de rayons X haute résolution.

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

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199

V.6 Références du Chapitre V

1 XIN, H.P., KAVANAGH, K.L., ZHU, Z.Q., TU, C.W. Quantum dot-like behavior of GaInNAs in GaInNAs/GaAs quantum wells grown by gas-source molecular-beam epitaxy J. Vac. Sci. Technol. B, 1999, vol. 17, n° 4, pp. 1649-1653

2 LI, L.H., PAN, Z., ZHANG, W., LIN, Y.W., ZHOU, Z.Q., WU, R.H. Effects of rapid thermal thermal annealing on the optical properties of GaNxAs1-x/GaAs single quantum well structure grown by molecular beam epitaxy

J. of Appl. Phys., 2000, vol. 87, n° 1, pp. 245-248

3 GRENOUILLET, L., BRU-CHEVALLIER, C., GUILLOT, G., GILET, P., BALLET, P., DUVAUT, P., CHENEVAS-PAULE, A., MILLION, A. Effect of Thermal Annealing on the Photoluminescence Properties of a GaInNAs/GaAs Single Quantum Well Mat. Res. Soc. Symp.Proc., 2001, vol. 639, pp. G6.3.1-G6.3.6

4 GILLIN W.P., SEALY, B.J., HOMEWOOD, K.P. Thermal interdiffusion in InGaAs/GaAs and GaAsSb/GaAs strained quantum wells as a function of doping density Optical and Quantum Electronics, 1991, vol. 23, n° 7, pp. S975-S980

5 KHREIS, O.M., HOMEWOOD, K.P., GILLIN, W.P. Interdiffusion in InGaAs/GaAs: The effect of growth conditions J. of Appl. Phys., 1998, vol. 84, n° 1, pp. 232-236

6 XIN, H.P., KAVANAGH, K.L., KONDOW, M., TU, C.W. Effects of rapid thermal annealing on GaInNAs/GaAs multiple quantum wells J. of Cryst. Growth, 1999, vol. 201/202, pp. 419-422

7 KAGEYAMA, T., MIYAMOTO, T., MAKINO, S., KOYAMA, F., IGA, K. Thermal Annealing of GaInNAs/GaAs Quantum Wells Grown by Chemical Beam Epitaxy and Its Effect on Photoluminescence Jpn. J. Appl. Phys., 1999, vol. 38, Part 2, n° 3B, pp. L298-L300

8 BUYANOVA, I.A., CHEN, W.M., POZINA, G., BERGMAN, J.P., MONEMAR, B., XIN, H.P., TU, C.W. Mechanism for low temperature photoluminescence in GaNAs/GaAs structures grown by molecular-beam epitaxy Appl. Phys. Lett., 1999, vol. 75, n° 4, pp. 501-503

9 MATSUDA, K., SAIKI, T., TAKAHASHI, M., MOTO, A., TAKAGISHI, S. Near-field photoluminescence study of GaNAs alloy epilayer at room and cryogenic temperature Appl. Phys. Lett., 1999, vol. 78, n° 11, pp. 1508-1510

10 BUYANOVA, I.A., POZINA, G., HAI, P.N., THINH, N.Q., BERGMAN, J.P., CHEN, W.M., XIN, H.P., TU, C.W. Mechanism for rapid thermal annealing improvements in undoped GaNxAs1-x/GaAs structures grown by molecular beam epitaxy Appl. Phys. Lett., 2000, vol. 77, n° 15, pp. 2325-2327

Chapitre V : Effet du recuit sur les propriétés optiques des alliages à base de (Ga,In)(N,As)/GaAs

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200

11 GÖRGENS, L., DOLLINGER, G., BERGMAIER, A., PETROVA-KOCH, V., DUMITRAS, G., EGOROV, A., RIECHERT, H. Distribution and diffusion of In and N in InGaAsN/GaAs MQWs E-MRS IUMRS ICEM Strasbourg, 2000, Poster C/P17

12 BUYANOVA, I.A., POZINA, G., HAI, P.N., CHEN, W.M., XIN, H.P., TU, C.W. Type I band alignment in the GaNxAs1-x/GaAs quantum wells Phys. Rev. B, 2000, vol. 63, pp. 033303-1-033303-4

13 KLAR, P.J., GRÜNING, H., HEIMBRODT, W., KOCH, J., STOLZ, W., VICENTE, P.M.A., KAMAL SAADI, A.M., LINDSAY, A., O’REILLY, E.P. Pressure and Temperature Dependent Studies of GaNxAs1-x/GaAs Quantum Well Structures Phys. Stat. Sol. (b), 2001, vol. 223, pp. 163-169

14 GIL, B., BIGENWALD, P. Exciton Binding Energies and Oscillator Strengths in GaAsN-GaAs Quantum Wells Phys. Stat. Sol. (b), 2001, vol. 183, pp. 111-116

15 KRISPIN, P., SPRUYTTE, S.G., HARRIS, J.S., PLOOG, K.H. Electrical depth profile of p-type GaAs/Ga(As,N)/GaAs heterostructures determined by capacitance-voltage measurements J. of Appl. Phys., 2000, vol. 88, n° 7, pp. 4153-4158

16 BELLAICHE, L., WEI, S.H., ZUNGER, A. Localization and percolation in semiconductor alloys: GaAsN vs GaAsP Phys. Rev. B, 1996, vol. 54, n° 24, pp. 17568-17576

17 ASPLUND, C., FUJIOKA, A., HAMMAR, M., LANDGREN, G. Annealing studies of metal-organic vapor phase epitaxy grown GaInNAs bulk and multiple quantum well structures

EW MOVPE VIII, 1999, Prague, pp. 437-440

18 GRENOUILLET, L., BRU-CHEVALLIER, C., GUILLOT, G., GILET, P., BALLET, P., DUVAUT, P., ROLLAND, G., MILLION, A. Rapid thermal annealing in GaNxAs1-x/GaAs structures: effect of nitrogen reorganization on optical properties J. of Appl. Phys., 2001, soumis à publication

19 TAKAHASHI, M., MOTO, A., TANAKA, S., TANABE, T., TAKAGISHI, S., KARATANI, K., NAKAYAMA, M., MATSUDA, K., SAIKI, T. Observation of compositional fluctuations in GaNAs alloys grown by metalorganic vapor-phase epitaxy J. of Cryst. Growth, 2000, vol. 221, pp. 461-466

20 SUEMUNE, I., MOROOKA, N., UESUGI, K., OK, Y.-W., SEONG, T.-Y. Mechanism of wire-like surfaces and lateral composition modulation in GaAsN grown by metalorganic molecular-beam epitaxy J. of Cryst. Growth, 2000, vol. 221, pp. 546-550

21 PINAULT, M.A., TOURNIE, E. On the origin of carrier localization in Ga1-xInxNyAs1-y/GaAs quantum wells Appl. Phys. Lett., 2001, vol. 78, n° 11, pp. 1562-1564

201

CONCLUSION GENERALE

L'objectif de ce travail, motivé par l'obtention d'émetteurs lasers à la longueur d'onde

de 1,3 µm sur substrat GaAs, était d'étudier les propriétés optiques des alliages

semiconducteurs GaNxAs1-x et Ga1-yInyNxAs1-x à faible teneur en azote, épitaxiés sur GaAs.

En particulier, il convenait de préciser le rôle que joue l'azote sur les caractéristiques

d'émission de ces alliages.

Une première étude, menée en étroite collaboration avec les personnes en charge de la

croissance, a permis d'appréhender les effets de l'incorporation d'azote sur la

photoluminescence et la photoréflectivité des nitrures d'éléments III-V. Tout d'abord, la

température de croissance de ces alliages à faible bande interdite doit être relativement basse

pour éviter les phénomènes de séparation de phase et obtenir un signal de photoluminescence.

En épitaxie par jets moléculaires, une température de croissance de 400 – 425 °C permet ainsi

d'obtenir des couches nitrurées de très bonne qualité, tant optique que structurale. Ensuite,

nous avons vérifié que l'énergie de bande interdite de l'alliage, de même que l'énergie

d'émission, diminuent lorsque le pourcentage d'azote incorporé augmente. Enfin, le contrôle

de la diminution de l'énergie d'émission a permis d'atteindre l'émission à 1,3 µm sur substrat

GaAs à température ambiante, en utilisant un puits quantique de Ga0,65In0,35N0,02As0,98/GaAs.

Il a également été confirmé que l'incorporation d'azote s'accompagne d'une chute des

rendements radiatifs, qui peut être en partie compensée en effectuant un recuit thermique

adéquat après la croissance des échantillons. Les nitrures à faible bande interdite sont en effet

extrêmement sensibles au recuit thermique, qui permet d'augmenter les rendements radiatifs

typiquement d'un ordre de grandeur.

L'obtention d'échantillons de bonne qualité optique étant maîtrisée, une étude de la

photoluminescence et de la photoréflectivité a été menée sur des puits quantiques de

GaInNAs/GaAs, dans la gamme 8 K – 300 K. Elle a permis de mettre en évidence, pour la

première fois sur ce type d'alliage, une évolution atypique de l'énergie, de l'élargissement, et

de l'intensité du spectre de photoluminescence avec la température. Nous avons montré que

l'azote, en induisant de forts effets de localisation de porteurs à basse température, est à

l'origine de ces comportements anormaux. Ces derniers sont d'autant plus prononcés que le

pourcentage d'azote augmente dans l'échantillon. En effet, la présence d'azote crée une

202

distribution d'états localisés sous la bande interdite de l'alliage dans lesquels se piègent puis se

recombinent les excitons à très basse température. Une description cohérente de l'ensemble

des phénomènes observés est proposée. Dans cette description, l'augmentation de la

température permet une délocalisation progressive des excitons et ainsi un changement dans

la nature des processus radiatifs à l'origine de la photoluminescence. Les phénomènes

atypiques observés sont donc une conséquence du passage d'un régime de recombinaisons

d'excitons fortement localisés à basse température à un régime de recombinaisons de porteurs

délocalisés à température ambiante. Une description mathématique combinant les propriétés

de recombinaisons d’excitons localisés et de recombinaisons bande à bande permet de rendre

compte de l’évolution des spectres expérimentaux de photoluminescence en fonction de la

température entre 8 K et 300 K. Un approfondissement de ce modèle permettrait sans doute

d’améliorer son efficacité pour décrire la forme des spectres expérimentaux, en tenant compte

par exemple des phénomènes de transfert excitonique.

La dernière partie de ce travail a été principalement consacrée aux effets du recuit

thermique sur l'énergie des spectres de photoluminescence. Dans les nitrures à faible bande

interdite, le recuit induit généralement un décalage vers le bleu des spectres, dont l'origine est

aujourd'hui très discutée. Les résultats que nous avons obtenus lors d'une étude systématique

du recuit sur des puits quantiques de GaNAs/GaAs suggèrent que l'origine du décalage vers le

bleu avec le recuit est une homogénéisation des fluctuations de potentiel présentes dans le

matériau non recuit. Nous avons proposé un modèle quantitatif dans lequel le phénomène

d'homogénéisation s'effectue par une diffusion de l'azote dans le plan de croissance. Ce

modèle permet d'expliquer les phénomènes observés et de les décrire de manière quantitative.

L'ensemble de nos résultats contribue donc à une meilleure compréhension des

propriétés optiques, très particulières, des nitrures à faible bande interdite. Le matériau

GaInNAs étant un candidat de choix pour réaliser des VCSELs émettant à 1,3 µm sur substrat

GaAs, il serait intéressant, d'un point de vue à la fois expérimental et théorique, d'étudier en

perspective de ce travail les propriétés optiques de cet alliage dans une microcavité. Par

ailleurs, des études de microscopie en champ proche, certes déjà effectuées par une équipe

japonaise, devraient permettre d'en apprendre plus sur les états localisés et notamment leur

évolution avec le recuit thermique. En somme, l'investigation des nitrures à faible bande

interdite n'en est encore qu'à ses débuts !