séminaire national des inspecteurs de l’éducation

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Proposition de compte-rendu (DH académie d’Aix-Marseille) Page 1/23 Séminaire national des inspecteurs de l’éducation nationale Enseignement technique Enseignement général Renforcer l’accompagnement par les IEN ET/EG des formations professionnelles sous statut scolaire ESEN Poitiers, 8 & 9 juillet 2014 Ce séminaire a pour but de renforcer l’accompagnement par les IEN ET/EG des formations professionnelles sous statut scolaire. Il s’agit plus particulièrement de se réapproprier les marges de manœuvre dans les formations et les certifications professionnelles : - Marges de manœuvre dans l’organisation pédagogique des établissements telles que : les rythmes d’alternance (répartition des périodes de formation en milieu professionnel), le regroupement d’élèves de spécialités différentes en seconde professionnelle pour aider au choix d’orientation, la mixité des publics ; - Souplesse dans l’organisation de la classe : utilisation de la grille horaire, accompagnement personnalisé, enseignements généraux liés à la spécialité, répartition des horaires en groupes à effectifs réduits ; - Marge de manœuvre dans la mise en œuvre des certifications ; - Pilotage de la rénovation et accompagnement des établissements : comment faciliter l’utilisation de ces marges de manœuvre ? Quel accompagnement par les corps d’inspection pour aider à la mise en place d’une construction collective ? « Mots choisis » du séminaire L’objectif du séminaire est de renforcer l’accompagnement des établissements par les inspecteurs territoriaux, et les aider par là-même à se réapproprier les marges de manœuvre à leur disposition (…) Ce séminaire intervient à une période charnière, après un premier bilan de la rénovation de la voie professionnelle qui montre sans conteste des réussites, mais également ici ou là des imperfections qu’il nous revient ensemble de corriger (….) par exemple en CAP où on note un décrochage de 17,7 % en 2012, ce qui est considérable (…) Face à ces constats, des pistes d’amélioration existent : - Sur le terrain de l’enseignement et de la formation (…) - Sur le terrain de l’évaluation. Le sujet principal est le CCF (…) Il faut peut être penser que c’est une occasion de refonder le CCF en le rendant plus souple et plus efficace. (…) L’inspecteur est un acteur clef de la réussite de la rénovation de la voie professionnelle. Il faut accompagner les établissements dans des actions innovantes et ambitieuses, afin d’offrir aux élèves et aux apprentis des parcours diversifiés répondant à leurs aspirations, leurs besoins. Il est attendu des inspecteurs qu’ils fassent preuve d’audace dans les conseils à apporter aux chefs d’établissement. (…) Il faut que chacun d’entre nous « change son disque dur » pour penser différemment l’enseignement professionnel (…) « Il est clair que le risque est grand si nous n’arrivons pas à faire bouger ces lignes ! Les EGLS sont des grands absents. Il n’y a rien de plus violent que de proposer deux mondes enseignement général et enseignement professionnel différents, séparés, .. la tête et les jambes ». (…) Une autre dualité perdure : théorie et pratique, savoirs et compétences. Il faut dire et répéter à l’envi que la théorie et la pratique, les savoirs et les compétences ne s’opposent pas, qu’un lieu de formation (l’établissement ou l’entreprise) ne cultive pas l’un au détriment de l’autre … Réinventer l’alternance est un point majeur. La valorisation de l’enseignement professionnel se traduit le plus généralement par des dispositifs de « lutte contre » (le décrochage, les sorties précoces, …). Le cœur même de l’enseignement professionnel est assez peu questionné finalement.

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Proposition de compte-rendu (DH – académie d’Aix-Marseille) Page 1/23

Séminaire national des inspecteurs de l’éducation nationale

Enseignement technique – Enseignement général Renforcer l’accompagnement par les IEN ET/EG

des formations professionnelles sous statut scolaire

ESEN Poitiers, 8 & 9 juillet 2014

Ce séminaire a pour but de renforcer l’accompagnement par les IEN ET/EG des formations

professionnelles sous statut scolaire.

Il s’agit plus particulièrement de se réapproprier les marges de manœuvre dans les formations et les certifications professionnelles :

- Marges de manœuvre dans l’organisation pédagogique des établissements telles que : les rythmes d’alternance (répartition des périodes de formation en milieu professionnel), le regroupement d’élèves de spécialités différentes en seconde professionnelle pour aider au choix d’orientation, la mixité des publics ;

- Souplesse dans l’organisation de la classe : utilisation de la grille horaire, accompagnement personnalisé, enseignements généraux liés à la spécialité, répartition des horaires en groupes à effectifs réduits ;

- Marge de manœuvre dans la mise en œuvre des certifications ; - Pilotage de la rénovation et accompagnement des établissements : comment faciliter

l’utilisation de ces marges de manœuvre ? Quel accompagnement par les corps d’inspection pour aider à la mise en place d’une construction collective ?

« Mots choisis » du séminaire L’objectif du séminaire est de renforcer l’accompagnement des établissements par les inspecteurs territoriaux, et les aider par là-même à se réapproprier les marges de manœuvre à leur disposition (…) Ce séminaire intervient à une période charnière, après un premier bilan de la rénovation de la voie professionnelle qui montre sans conteste des réussites, mais également ici ou là des imperfections qu’il nous revient ensemble de corriger (….) par exemple en CAP où on note un décrochage de 17,7 % en 2012, ce qui est considérable (…) Face à ces constats, des pistes d’amélioration existent :

- Sur le terrain de l’enseignement et de la formation (…) - Sur le terrain de l’évaluation. Le sujet principal est le CCF (…) Il faut peut –être penser que

c’est une occasion de refonder le CCF en le rendant plus souple et plus efficace. (…) L’inspecteur est un acteur clef de la réussite de la rénovation de la voie professionnelle. Il faut accompagner les établissements dans des actions innovantes et ambitieuses, afin d’offrir aux élèves et aux apprentis des parcours diversifiés répondant à leurs aspirations, leurs besoins. Il est attendu des inspecteurs qu’ils fassent preuve d’audace dans les conseils à apporter aux chefs d’établissement. (…) Il faut que chacun d’entre nous « change son disque dur » pour penser différemment l’enseignement professionnel (…) « Il est clair que le risque est grand si nous n’arrivons pas à faire bouger ces lignes ! Les EGLS sont des grands absents. Il n’y a rien de plus violent que de proposer deux mondes enseignement général et enseignement professionnel différents, séparés, .. la tête et les jambes ». (…) Une autre dualité perdure : théorie et pratique, savoirs et compétences. Il faut dire et répéter à l’envi que la théorie et la pratique, les savoirs et les compétences ne s’opposent pas, qu’un lieu de formation (l’établissement ou l’entreprise) ne cultive pas l’un au détriment de l’autre … Réinventer l’alternance est un point majeur. La valorisation de l’enseignement professionnel se traduit le plus généralement par des dispositifs de « lutte contre » (le décrochage, les sorties précoces, …). Le cœur même de l’enseignement professionnel est assez peu questionné finalement.

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« Penser transforme l’action. Aucune discipline ne peut, ne doit à l’écart de cette réflexion. Etre à coté, conseiller, soutenir, c’est aussi accepter de ne pas exister ». (…) Une seule préconisation est faite dans le rapport : « Les espaces d’autonomie doivent exclusivement viser l’amélioration des modalités d’enseignement dans le cadre d’un projet construit au servie de la réussite des élèves sans augmenter leur nombre d’heures de cours ». (…) Les choix d’orientation relèvent exclusivement des familles et des proches. A aucun moment, les acteurs de l’orientation ne sont cités. On est dans un système d‘influences diverses, pour des considérations très pragmatiques (la situation géographique, un évènement survenu dans un établissement, etc.). Ce n’est pas un processus rationnel. Il se révèle même complètement aléatoire. La manière de hiérarchiser les vœux est également aléatoire, questionnant par la même la notion même de taux d’attractivité. Tous sont marqués scolairement dans ces phases d’amorce, et notamment par les résultats scolaires (le niveau en mathématiques est cité dans la majorité des cas, également en français mais dans une moindre mesure). Ces marqueurs viennent du plus profond d’eux-mêmes, et les élèves ont du mal à s’en détacher. Le projet de l’élève n’existe pas quand on écoute les élèves (…) Elle suscite même de l’aversion (…) Le projet de l’élève devient surtout le projet de l’institution. Si les élèves n’ont pas de projet, ils ont par contre des attirances vers des grands domaines de prédilection, n’ayant aucune relation avec un quelconque métier. Les élèves ont tous l’impression d’être très mal informés (…) L’ensemble des dispositifs d’orientation (stages, forums, découverte professionnelle, rencontres, …) sont perçus par les élèves comme une juxtaposition d’évènements, qui ne font pas sens. Les élèves choisissent en fonction de la proximité et la notoriété de l’établissement. (…) Les premiers pas dans l’enseignement professionnel : De manière claire, il s’opère lors de ces premiers pas des phases de reconstruction avec des phénomènes de réassurance et de reprise de confiance en soi (…) Il s’agit d’une véritable rupture pédagogique, dans laquelle les élèves retrouvent confiance en eux et le goût de la réussite (…) Qui plus est, les élèves semblent pouvoir à ce moment se détacher de leurs marqueurs scolaires (…) Ils font tous état du comportement des enseignants, des enseignants plus proches et à l’écoute. Les enseignements sont plus concrets, et ils se sentent selon leurs mots « enfin dans la vraie vie ». Les environnements professionnels leur permettent également d’adopter un autre comportement (une mobilité en classe, une autonomie dans les ateliers). Finalement, ils expriment le fait qu’ils s’approprient leurs parcours car ils se sentent mieux considérés, y compris s’ils sont dans des voies non choisies. (…) Mais la rupture pédagogique concerne uniquement les enseignements professionnels, et non les enseignements généraux. Pratiquement aucun élève n’a parlé d’une discipline générale ou il excellerait et qui serait devenue le pilier de son projet. De ce fait, une certaine dualité s’instaure, entre les enseignements, et des formes de repoussoir, de rejet s’opèrent à l’égard de l’enseignement général. (…) Il faut également noter que les enseignants restent peu mobilisés par la thématique de l’alternance école entreprise. (…) Au final, cette poursuite d’études est relativement vécue comme anxiogène de la part des élèves Ils ne se sentent pas suffisamment préparés à la poursuite d’études. (…) Le système devrait s’inspirer de 5 principes :

1- Toujours placer l’élève au centre des préoccupations (…) 2- Le changement de la posture pédagogique, à côté et non en face à face. 3- La logique de parcours repose sur les responsabilités individuelles, mais avant tout collectives.

Le système est fissuré de toutes parts par chacun des acteurs, par des visions parcellaires, limitées. Cela nous impose une vigilance accrue quant aux discours que nous portons, sur l’amont, les autres ….

4- Il faut installer une fluidité, une réversibilité des parcours (…) 5- Il faut travailler le concept de développement des compétences tout au long de la vie. Le

travail sur l’expérience, la réflexivité sur son travail, l’explicitation en sont les clefs. (…) « S’agissant de la professionnalité des enseignants, l’enseignement en formation continue, et en apprentissage constituent de réelles opportunités de renouveler les pratiques des enseignants en formation initiale ». (…) Les corps d’inspection ont aussi pour mission de formes les PLP aux enjeux didactiques et pédagogiques disciplinaires ainsi qu’à la capacité d’identifier les points en tension pour faire réussir les élèves. Trois chantiers sont majeurs :

- la lutte contre l’absentéisme,

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- la formation des enseignants, - la synergie LP / apprentissage en alternance.

(…) « Il n’y a pas assez de révolutionnaire dans les établissements … » (…) La généralisation de l’AP et de l’EGLS s’impose à tous les cadres. (…) « L’autonomie ne se décrète pas, elle s’apprend » (…) Le parcours personnalisé n’interdit pas le collectif. L’élève apprend aussi et surtout avec les autres. Beaucoup d’élèves ont un déclic dans l’enseignement professionnel du fait aussi des travaux menés dans le cadre de travaux de groupe, et d’identification à un groupe (…) Les dispositifs, les outils existent mais très peu s’en saisissent (…) La rénovation de la voie professionnelle a ouvert des espaces (AP, EGLS …) qu’il convient aujourd’hui d’investir pédagogiquement. L’accompagnement personnalisé a montré que les enseignants n’étaient pas équipés dans leur pratique courante dans le montage des modules (…) « Il faut les équiper, les accompagner … ». (…) Il existe une pédagogie des épreuves à mettre en œuvre. L’idée de justice est essentielle, renvoyant à l’idée de confiance et de légitimité de chacun des enseignants. Les inspecteurs doivent rassurer les enseignants dans leur professionnalité, dans leurs référents, en établissant presque un contrat de confiance certificative de nature à aborder des marges de manœuvre. (…) On peut très bien admettre que chaque enseignant ait son style d’évaluateur. (…) « Le rôle de l’harmonisation est essentiel, soit en amont, soit en aval. Cette phase est souvent sous-estimée, parfois malmenée ». (…) Ce que disent les textes : ils précisent ce qui est obligatoire et est interdit. Ce qui n’est ni obligatoire ni interdit, est possible (mais pas toujours souhaitable). C’est la marge de manœuvre des acteurs. (…) Dans les textes, il n’est pas dit que cela ne concerne que les enseignements professionnels. (…) On ne s’est pas réellement interrogé sur la légitimité de généraliser le CCF à toutes les disciplines, ce qui peut justifier les difficultés rencontrées. (…) Les textes aussi bougent, car les pratiques des acteurs font bouger les textes …. (…) le CCF permet d’évaluer des compétences que le ponctuel ne permet pas (« le CCF est un enrichissement »). (…) le retour en épreuves ponctuelles terminales est acté pour la PSE, l’économie droit, la GBPI. (…) Un point clef de la réforme était de laisser des marges d’autonomie aux acteurs. A propos des réformes, le risque, après un temps fort et sous la pression du conservatisme pesant, que le système revienne à son état actuel. « Il faut être tout le temps vigilant ! ». (…) Dans quel cadre doivent s’exercer les missions des inspecteurs ? Elles doivent s’exercer dans le cadre du pilotage partagé, inspecteurs – personnels de direction et encadrement administratif. Ce pilotage partagé doit se faire en reconnaissant les responsabilités et les compétences de chacun, et dans le cadre d’une ouverture d’esprit (reconnaitre les contraintes de chacun également). « Il n’y a que comme çà que nous pourrons avancer ! » (…) Elle doit s’exercer dans la manière dont je définis le métier d’enseignant, c’est-à-dire autour de trois lettres : ERC. Ecouter – Rassurer – Conseiller. C’est bien ce qui définit la mission d’un inspecteur, et encore plus dans le cadre de la mise en œuvre des réformes. (…) C’est un point clef des réformes de laisser ainsi des marges de manœuvre aux équipes. « Si on arrive à cela, alors nous aurons réussi à faire avancer notre système, d’un pas majeur ! Cela vaut pour l’accompagnement personnalisé, pour les EGLS, …. » Mais ne pas normer ne veut pas dire se désintéresser. Il faut accompagner les équipes de manière à s’adapter au contexte local. « Il y a sans doute mieux à faire sur le plan pédagogique que de faire du dédoublement des classes ! » (…) La non normalisation doit être un leitmotiv dans le travail. (…) Autant il faut conserver les marges, autant il faut créer la souplesse, localement, dans les organisations pour prendre en compte les spécificités (des élèves plus jeunes, un système de formation en trois ans, …) (…) exemple dans l’académie de Nantes des pôles métiers en bac pro (neuf pôles métiers au total dans l’académie), et sur le niveau V, des pôles de qualification ont été créés (…) Il faut concevoir des systèmes simples et sérieux. « Le CCF est une avancée, mais pour autant prenons garde à ne pas le transformer en X examens terminaux ! ». Il faut aussi chercher à mettre en cohérence la formation et la certification, et un lien plus fort entre la certification intermédiaire et bac pro.

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(…) Ne pas hésiter à diffuser les bonnes pratiques et il revient aux inspecteurs en tant qu’expert de la discipline de les recenser (…) Il faut chercher la proximité avec les établissements (car c’est une forte attente des chefs d’établissement) (…) L’enseignement professionnel peut être à bien des égards un modèle pour d’autres voies de formation. (…) Il faut laisser du temps aux enseignants pour réfléchir, et ne pas surajouter aux référentiels des notes de cadrage. Il ne faudrait pas que les enseignants s’exonèrent de la réflexion que suppose l’exercice de ce métier. (…) A ce sujet, il faut questionner le principe de parler systématiquement de « manques » pour le titulaire d’un baccalauréat professionnel dans son accès aux études supérieures. C’est nier ses forces et ses points d’appui …. (…) Il faut réfléchir à la construction de parcours mixtes, car les chiffres d’insertion au niveau V par apprentissage sont bien supérieurs à ceux sous statut scolaire (…) « Il va falloir faire violence au terrain, avec des enseignants finalement si peu formés à l’alternance ». (…) Le séminaire visait à explorer toutes les marges de manœuvre à la disposition de tous les acteurs de la formation. A la conclusion de ce séminaire, force est de constater que nous avons tous notre part de responsabilités dans les contraintes données aux enseignants : les IG, la DGESCO, les IEN …. Des millefeuilles se constituent, freinant par la même la liberté, les initiatives des acteurs de terrain. (…) « Faut-il penser que le système soit immobile, incapable d’évoluer ? » (…) « Il faut sortir des caricatures. Le terrain n’attend pas les rénovations pour s’adapter aux évolutions économiques ».

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Table des matières

1 Propos liminaires : ............................................................................................. 6

1.1 Accueil des participants par Jean-Marie PANAZOL, IGEN Directeur de l’ESENESR ............................................................................................................. 6

1.2 Introduction générale : Comment penser ensemble l’enseignement professionnel. Intervention de Didier Michel, IGEN, assesseur du Doyen de l’IGEN 6

2 Introduction de la 1ère thématique : Marges de manœuvre dans l’organisation pédagogique des établissements et souplesse dans la classe ... 8

2.1 Clef de voûte de l’exercice de l’autonomie et du projet pédagogique au collège. Intervention de Marie-Pierre LUIGI, IGAENR ............................................ 8

2.2 Que nous enseigne l’enquête menée par l’IGEN sur les parcours des jeunes dans la voie professionnelle ? Expérience scolaire ou d’apprentissage et identification des défis à relever. Intervention d’Aziz JELLAB, IGEN .................... 10

3 Ateliers thématiques ........................................................................................ 13

3.1 Atelier thématique 1 : les marges de manœuvre dans l’organisation pédagogique des établissements : les PFMP, la période de détermination, la mixité des publics ............................................................................................................ 13

3.2 Atelier thématique 2 : l’utilisation de la grille horaire, l’accompagnement personnalisé, les EGLS, les effectifs réduits, les regroupements d’élèves, la mobilité.................................................................................................................. 14

3.3 Retour des ateliers par Aziz JELLAB, IGEN ................................................ 15

4 Introduction de la deuxième thématique : marges de manœuvre dans la mise en œuvre des certifications, modes d’évaluation dans les diplômes professionnels ........................................................................................................ 16

4.1 Intervention de Patrick VENEAU, du CEREQ ............................................. 16

4.2 Les marges de manœuvre offertes par les textes réglementaires. Intervention de Brigitte TROCME, chef du bureau des diplômes professionnels et Maryannick MALICOT, adjointe à la sous-directrice des lycées - DGESCO ......... 18

4.3 Atelier : mise en œuvre des évaluations certificatives ................................. 20

5 Introduction de la 3ème thématique : comment faciliter l’utilisation de ces marges de manœuvre ? Quel accompagnement par les corps d’inspection pour aider à la mise en place d’une construction collective ? .................................... 20

5.1 Intervention de William MAROIS, recteur de l’académie de Nantes ............ 20

5.2 Table ronde : Quels rôle et place pour l’inspecteur, acteur d’un système qui tout à la fois impose des contraintes et préconise l’autonomie ? Quels axes d’évolution du métier ? Intervention de Brigitte DORIATH, IGEN - sous directrice des lycées et de la formation professionnelle tout au long de la vie – DGESCO, et de Didier MICHEL, IGEN assesseur du doyen de l’IGEN ..................................... 21

6 Conclusion. Intervention de Brigitte DORIATH IGEN - sous directrice des lycées et de la formation professionnelle tout au long de la vie, DGESCO ...... 23

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1 Propos liminaires :

1.1 Accueil des participants par Jean-Marie PANAZOL, IGEN Directeur de l’ESENESR

La capacité de s’approprier les marges de manœuvre dans les formations et les certifications professionnelles qui est l’objet de ce séminaire est une compétence distinctive d’un cadre, au-delà de la maitrise des textes réglementaires « Un cadre efficace et compétent, est capable de prendre des décisions, de les légitimer, de les faire admettre, de cultiver l’autonomie des établissements et des équipes dans le respect des orientations fixées par la Nation » indique Jean-Marie PANAZOL. Le développement de cette « autonomie » est au cœur de la mission de l’ESENESR.

1.2 Introduction générale : Comment penser ensemble l’enseignement professionnel. Intervention de Didier Michel, IGEN, assesseur du Doyen de l’IGEN

Ce séminaire marque d’emblée sa singularité par la volonté commune, Inspection générale et DGESCO, de parler ensemble et d’une même voix de la question de la voie professionnelle. Au nom de Florence ROBINE, Directrice de l’Enseignement Scolaire L’objectif du séminaire est de renforcer l’accompagnement des établissements par les inspecteurs territoriaux, et les aider par là-même à se réapproprier les marges de manœuvre à leur disposition. Ce séminaire intervient à une période charnière, après un premier bilan de la rénovation de la voie professionnelle qui montre sans conteste des réussites, mais également ici ou là des imperfections qu’il nous revient ensemble de corriger. Quelles réussites par exemple ?

- le nombre de bacheliers professionnels (+50 % entre 2007 et 2013), - le nombre de décrocheurs, qui contrairement à ce qui était annoncé, n’a pas connu une réelle

augmentation (- 2,4 points en seconde). Mais des points noirs perdurent : par exemple en CAP où on note un décrochage de 17,7 % en 2012, ce qui est considérable (NB : l’objectif est de diminuer ce taux à 10% à court terme). Exemple également des résultats aux baccalauréats professionnels inférieurs à ceux des baccalauréats généraux et technologiques. Didier MICHEL note toutefois que les premiers résultats de la session 2014 laissent à penser que ce sont les baccalauréats professionnels qui « tirent vers le haut » les autres baccalauréats. Face à ces constats, des pistes d’amélioration existent :

- Sur le terrain de l’enseignement et de la formation. Quid des marges de manœuvre apportées par les nouvelles grilles horaires (qui ne sont plus hebdomadaires), l’organisation des PFMP, la taille des groupes à effectifs réduits notamment ?

- Sur le terrain de l’évaluation. Le sujet principal est le CCF. Si le CCF n’est pas remis en cause dans son principe fondateur, il l’est aujourd’hui et de manière flagrante dans son organisation. Le Ministre va engager une concertation sur l’évaluation. Il faut peut –être penser que c’est une occasion de refonder le CCF en le rendant plus souple et plus efficace.

L’inspecteur est un acteur clef de la réussite de la rénovation de la voie professionnelle. Il faut accompagner les établissements dans des actions innovantes et ambitieuses, afin d’offrir aux élèves et aux apprentis des parcours diversifiés répondant à leurs aspirations, leurs besoins. Il est attendu des inspecteurs qu’ils fassent preuve d’audace dans les conseils à apporter aux chefs d’établissement. Le rôle de la DGESCO est d’accompagner ces changements. Au nom du Doyen de l’Inspection générale Le Doyen se réjouit que la DGESCO soit associée à ce séminaire, et que plus de vingt inspecteurs généraux soient présents tout au long de cette rencontre.

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Il faut se rappeler qu’à l’initiative du Ministre PEILLON, tous les inspecteurs territoriaux ont été réunis début 2014 à Paris, à La Mutualité, et ce rendez-vous unique a donné lieu à la formalisation de ce qui est défini comme étant l’axe 2 du travail des inspecteurs généraux. Cet axe de travail marque un changement profond dans la manière de conduire et d’accompagner les réformes. Le lien qui unit le corps des IGEN avec les inspecteurs territoriaux est très fort. Ce thème sur les marges de manœuvre s’inscrit dans un changement de perspective dans les modes de management, redéfinissant par la même les périmètres de gouvernance dans la voie professionnelle. Didier MICHEL ajoute : « moins dans le descendant, plus proche des réalités du terrain, des réalités économiques, des contextes locaux ». L’enseignement professionnel est complexe. Il est diversifié, très difficile à appréhender comme une globalité. Il faut peut-être même penser que le système ne dispose pas de toutes les clefs pour appréhender cette complexité, d’autant plus que les premiers capteurs sont les inspecteurs territoriaux. Ils ont un rôle essentiel à jouer. A noter : l’IGEN s’est doté d’une charte de déontologie, dans laquelle il est question de l’exercice d’un magistère intellectuel fort (didactique, pédagogique, intellectuel) et de son mode de fonctionnement basé sur la collégialité.

Au nom de l’assesseur, chargé des parcours et de l’enseignement professionnel Comment penser ensemble l’enseignement professionnel ? L’inspection générale tient à cœur à cet axe 2. Il renverse un peu les modalités de travail « traditionnels » entre l’inspection générale et les inspecteurs territoriaux. Cet axe part du principe fondateur qu’il existe sur le terrain des réponses aux grandes questions, problématiques du moment. Le travail consiste donc à en faire l’inventaire et à les promouvoir. Des thématiques ont été ainsi retenues par chacun des Recteurs, des travaux menés par des équipes inter catégorielles dans chaque académie, et les résultats de ces travaux seront communiqués en septembre prochain. Il faut penser que l’enseignement professionnel promeut un véritable projet éducatif, partagé au sein de’ l’Ecole de la République, et est très spécifique dans ses missions. Par exemple,

- Il faut enfin reconnaitre la très grande diversité de l’enseignement professionnel. - Il faut ne pas vouloir reproduire à tout prix ce qui se passe dans les autres voies, car ces

processus de transfert peuvent s’avérer dangereux. A l’inverse, il ne faut pas ghettoïser l’enseignement professionnel, et s’intéresser de près à la porosité qui doit exister entre la voie professionnelle et les autres voies de formation.

- Il faut que chacun d’entre nous « change son disque dur » pour penser différemment l’enseignement professionnel.

Ainsi, la nomenclature des formations (qui scinde les formations tertiaires de celles de la production) pose la question des liens qui doivent s’organiser entre elles, la distinction entre enseignement général et enseignement professionnel est malmenée. Didier MICHEL ajoute : « Il est clair que le risque est grand si nous n’arrivons pas à faire bouger ces lignes ! Les EGLS sont des grands absents. Il n’y a rien de plus violent que de proposer deux mondes enseignement général et enseignement professionnel différents, séparés, .. la tête et les jambes ». Une autre dualité perdure : théorie et pratique, savoirs et compétences. Il faut dire et répéter à l’envi que la théorie et la pratique, les savoirs et les compétences ne s’opposent pas, qu’un lieu de formation (l’établissement ou l’entreprise) ne cultive pas l’un au détriment de l’autre … Réinventer l’alternance est un point majeur.

- La valorisation de l’enseignement professionnel se traduit le plus généralement par des dispositifs de « lutte contre » (le décrochage, les sorties précoces, …). Le cœur même de l’enseignement professionnel est assez peu questionné finalement.

Le projet éducatif repose sur trois concepts clefs. Ces trois processus semblent être un triangle assez fort de l’enseignement professionnel :

- Un processus de socialisation. - Un processus de professionnalisation.

A ce sujet, les remontées des académies sont parmi les plus nombreuses. Se pose la question de l’alternance, de la co-construction des savoirs et des compétences qui reste aujourd’hui un enjeu fort.

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Cela questionne le statut des PFMP : faut-il s’en tenir à un « suivi des PFMP », ou piloter une réelle ingénierie de formation entre l’établissement et l’entreprise ? Il ne faut pas omettre que les PFMP reste un élément fort discriminant, qui impose de tous les acteurs une vigilance constante. Il faut enfin penser qu’il existe des alternances in situ, comme par exemple en hôtellerie restauration avec la présence de restaurants pédagogiques dans les établissements de formation. La question des PFMP pose également la question du suivi, en termes de traçabilité (portfolio, livret de compétences, …) pour réinstaller la continuité des apprentissages. Enfin, l’excellence professionnelle, par les concours mis en œuvre participent de la valorisation de l’enseignement professionnel, même si pour Didier MICHEL, elle reste encore restreinte à quelques individualités quand elle devrait rejaillir sur l’ensemble de la classe et de l’établissement.

- Un processus de scolarisation voire de rescolarisation. Il faut apprendre ce métier d’élève, écrire, écouter, apprendre à apprendre pour des élèves très attirés par l’activité et moins par les tâches plus solaires. Des ruptures pédagogiques sont fondamentales, et l’enseignement professionnel en constitue une essentielle. La poursuite d’études ? Il ne faut pas penser cet objectif par les lacunes à combler, mais plutôt en partant des atouts de ces élèves qui peuvent être réinvestis dans les études supérieures. Didier MICHEL conclut en ces termes : « Penser transforme l’action. Aucune discipline ne peut, ne doit à l’écart de cette réflexion. Etre à coté, conseiller, soutenir, c’est aussi accepter de ne pas exister ». Aujourd’hui, comment déplacer nos curseurs ? Les résistances sont fortes sur le terrain, les enseignants sont en attente de la norme. Ce travail sur les marges de manœuvre est un véritable combat, qui va s’installer dans la durée. « Il va sans doute déstabiliser, mais l’inspection générale sera aux côtés des inspecteurs territoriaux pour relever ensemble ce challenge essentiel (vital ?) pour l’enseignement professionnel ! ».

2 Introduction de la 1ère

thématique : Marges de manœuvre dans l’organisation pédagogique des établissements et souplesse dans la classe

2.1 Clef de voûte de l’exercice de l’autonomie et du projet pédagogique au collège. Intervention de Marie-Pierre LUIGI, IGAENR

L’intervention rend compte d’un rapport au Ministre sur les marges de manœuvre dans les établissements. Si l’Inspection générale a été missionnée par le Ministère sur cette question, elle a très vite restreint son champ d’investigation à un seul périmètre, le collège. Dans quel contexte se situe cette enquête ? On constate globalement une baisse des marges horaires, en lycées généraux et technologiques directement corrélée à une baisse du taux d’encadrement. Dès lors, il s’agissait d’étudier de quelles marges de manouvre pouvaient disposer les collèges, et comment s’en saisissaient-ils ? Quid de l’origine des marges ? Il en existe trois sortes :

- Les horaires réglementaires. Il s’agit de libertés pédagogiques, qui existent sous la forme des horaires non affectés (par exemple en 5

ème et en 4

ème, une demi-heure hebdomadaire), de l’aide et l’accompagnement personnalisé

(notamment en 6ème

, de deux heures hebdomadaires) et des itinéraires de découvertes.

- Les stratégies académiques et départementales. On constate que dans la répartition des moyens, les collèges sont plutôt protégés. Seules neuf académies dégradent leur classement avec les taux d’encadrement de collèges. La majorité des académies réservent des marges de manœuvre aux collèges pour qu’ils puissent exprimer leur autonomie. Au-delà des stratégies académiques, il existe des stratégies départementales : la richesse de l’offre de formation, les modes de calcul des dotations (calcul à la structure, ou au taux d’encadrement), la discrimination positive (plus ou moins bien traitée selon les contextes et sur la localisation, l’effet territoire), les critères de calcul des dotations. Un exemple des écarts constatés :

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Les écarts de dotation ECLAIR : de 553,5 h à 635 h hebdomadaire sur une simulation de dotation entre dix départements. Idem : de 5,79 à plus de 8% d’HSA. De même dans le cas de dotations hors ECLAIR. Donc, les marges de manœuvre commencent à être très différentes selon les contextes, les stratégies, les modes de calcul des dotations. Tout ceci restreint ou augmente les marges. Quid du montant des marges ? De 2 à 22 % de la dotation notifiée, de 9 h à 176 h hebdomadaires (soit un équivalent de 10 postes !). En ECLAIR : de 578 à 176 h, hors éclair : de 9 h à 65 h avec des modes de notifications très différents. En effet, les inspecteurs ont pu consulter de grandes différences en la matière : une notification horaire très laconique (avec mention simple de la DHG et du nombre d’heures supplémentaires), une notification avec indication du montant « au titre de votre marge d’autonomie d’établissement », une notification de plusieurs pages précisant les modalités de calcul. Rappel de la définition de la marge La marge correspond à toute heure de la dotation qu’elle relève de la réglementation ou de stratégies académiques pour sa mise en œuvre dans laquelle l’établissement a la choix de l’organisation et/ou des contenus.

- L’effet établissement, extrêmement important. L’établissement fait significativement bouger les marges. L’effet pilotage pédagogique est essentiel : le chef d’établissement contextualise, explicite, propose, responsabilise. Le projet d’établissement est l’expression d’une stratégie d’établissement. Les modes de dialogue et de concertation internes varient. Il existe de grandes différences en termes de mobilisation des personnels de direction. Souvent un mode de discussion au sein des établissements est mis en avant : l’assemblée générale. Or, l’assemblée générale n’est pas le meilleur moyen pour se concerter, et questionne la place même des dispositifs existants (quid du conseil pédagogique ?). Comment s’opèrent les choix ?

- sur les modes d’organisation des enseignements. Mais ils se perdent d’année en année ….par souci de conservatisme souvent …

- sur la récupération d’horaires non affectés, non remise en question …. - sur l’effet « itinéraires de découverte ». On a constaté que ce dispositif n’existait pratiquement

plus, ou seulement dans les établissements ECLAIR. Il existe une marge conséquente : la « boîte noire des HSE ». Le montant peut aller jusqu’à 20 h semaine. Et pourtant, force est de constater que le retour de ces heures sur leurs utilisations est loin d’être automatique et systématique. Comment sont utilisées les marges ? Elles vont généralement sur des organisations spécifiques :

- allègement du groupe classe (objectifs : sérénité et proximité) - soutien individualisé - des projets spécifiques : plutôt en HSE et en ECLAIR - de très rares projets inter disciplinaires (souvent des projets de vie scolaire) - et sur des disciplines et niveaux d’enseignement : souvent les langues vivantes, les disciplines

scientifiques et maths – français (surtout en 6ème

). Ces dédoublements existants sur une classe du collège sont généralement reproduits dans les autres classes.

- Hors ECLAIR, les marges de manœuvre servent majoritairement à la classe de 3ème

, alors qu’en ECLAIR, elles concernent tous niveaux d’enseignement.

Ces marges ne sont pas perçues par les équipes comme très significatives. Hors, il s’agit au mieux de l’équivalent de 10 postes ! Au final, quel bilan faire ?

- Le rapport pédagogique du chef d’établissement est très peu lu …. et non destiné à rendre compte auprès de l’autorité académique/ Pourrait-il le devenir ?

- Le dialogue stratégique est le bon niveau de questionnement. Ce dialogue devrait aller vers la pluri annualité.

- L’outil informatique « structures et services » : le regard est pour le moment très critique … Pour autant, cet outil devrait devenir un véritable outil de pilotage

Une seule préconisation est faite dans le rapport : « Les espaces d’autonomie doivent exclusivement viser l’amélioration des modalités d’enseignement dans le cadre d’un projet construit au servie de la réussite des élèves sans augmenter leur nombre d’heures de cours ». Peut-être avoir des modules à 60 pour avoir des modules à 10….

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Cette préconisation est assortie de quelques conditions : - La globalisation des dotations et l’identification des marges « nettes » - Un dialogue stratégique systématisé (important d’associer les inspecteurs aux dialogues

stratégiques) - Un accompagnement des EPLE cohérent et coordonné - Le chef d’établissement réaffirmé « pilote pédagogique de l’établissement » - Un accompagnement de l’évolution des métiers de l’encadrement.

2.2 Que nous enseigne l’enquête menée par l’IGEN sur les parcours des jeunes dans la voie professionnelle ? Expérience scolaire ou d’apprentissage et identification des défis à relever. Intervention d’Aziz JELLAB, IGEN

La notion de parcours se substitue sans la minorer à celle de projet de l’élève. La fluidité des parcours est en question. Croisement des interventions d’Aziz JELLAB (séminaire ESEN – 8 et 9 juillet 2014) et de Didier MICHEL (séminaire national des IGEN du groupe économie gestion, des 26, 27 et 28 mars 2014 - Paris). Le propos prend appui sur un rapport qui devrait être remis au Ministre après une enquête conduite auprès de jeunes (élèves, apprentis, étudiants) au collège, au lycée professionnel et dans l’enseignement supérieur (BTS, IUT, faculté, …) sous la forme de 160 histoires de vie mises à jour à partir d’entretiens individuels. Quelle conclusion en guise de couperet ? La vision du système éducatif des élèves n’est pas forcément la nôtre … Plusieurs phases du parcours ont été identifiées :

- L’amorce des parcours à l’épreuve de l’orientation en fin de collèges synonymes pour ces jeunes scolairement fragilisés, en prenant appui sur des pratiques pédagogiques différentes.

- Les premiers pas dans l’enseignement professionnel - La classe de première qui apparait comme au carrefour de tous les parcours car y émerge un

projet professionnel plus ou moins consolidé. Une véritable métamorphose s’opère, avec des nouveaux rapports qui s’instaurent, par exemple vis à vis de l’enseignement général.

- La quatrième phase correspond à une poursuite du parcours dans les études supérieures (rappelons que de 56% des jeunes interrogés par P-Y. Bernard et V. Troger déclarent avoir le projet de poursuivre des études à l’issue du bac pro). La logique de niveau persiste, le bac pro est construit comme une étape vers les études supérieures.

De la compilation des différents entretiens, il ressort des invariants :

- Le premier tient à l’existence de quatre grands facteurs de détermination des parcours :

1- L’amorce des parcours et l‘orientation Les enseignants pointent des paradoxes, entre d’un côté la dénonciation du manque d’ambition chez les familles et la propension à convoiter une orientation vers la 2GT Les choix d’orientation relèvent exclusivement des familles et des proches. A aucun moment, les acteurs de l’orientation ne sont cités. On est dans un système d‘influences diverses, pour des considérations très pragmatiques (la situation géographique, un évènement survenu dans un établissement, etc.). Ce n’est pas un processus rationnel. Il se révèle même complètement aléatoire. La manière de hiérarchiser les vœux est également aléatoire, questionnant par la même la notion même de taux d’attractivité. Tous sont marqués scolairement dans ces phases d’amorce, et notamment par les résultats scolaires (le niveau en mathématiques est cité dans la majorité des cas, également en français mais dans une moindre mesure). Ces marqueurs viennent du plus profond d’eux-mêmes, et les élèves ont du mal à s’en détacher. Le projet de l’élève n’existe pas quand on écoute les élèves. La notion de projet ne semble pas pertinente pour la plupart d’entre-eux. Elle suscite même de l’aversion …. Certains élèves déclarent même : « On n’en peut plus de cette idée de projet ».

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Le projet de l’élève devient surtout le projet de l’institution. Or toute l’orientation est construite tout autour de la notion de projet. Le paradigme du projet n’existe pas. Par contre, des relations, des rencontres aussi fugitives soient-elles ont constitué des amorces. Le paradigme du projet doit laisser place au paradigme de la relation (avec des anciens élèves, des parents d’élèves, des professionnels, …). La question de l’attirance vers des modèles est posée. On note une évolution positive de l’image de la voie professionnelle chez les élèves et leurs familles Si les élèves n’ont pas de projet, ils ont par contre des attirances vers des grands domaines de prédilection, n’ayant aucune relation avec un quelconque métier. Les COP et les professeurs principaux confirment que les élèves ont très souvent une attirance pour un domaine de prédilection. Les élèves peuvent parfois revenir vers ces champs et ces domaines d’attirance par des parcours détournés. Il serait intéressant de lister l’ensemble de ces champs, afin de contrôler que tous les niveaux de diplômes soient représentés pour constituer une offre de formation pertinente et complète sur un territoire donné (par exemple sous la forme d’une « cartographie »). Les élèves ont tous l’impression d’être très mal informés. Ils n’ont surtout pas l’information au moment où il le faut. Passer d’une formation asynchrone à une formation synchrone en lien avec un besoin ponctuel constitue un enjeu. L’ensemble des dispositifs d’orientation (stages, forums, découverte professionnelle, rencontres, …) sont perçus par les élèves comme une juxtaposition d’évènements, qui ne font pas sens. Les élèves choisissent en fonction de la proximité et la notoriété de l’établissement.

2- Les premiers pas dans l’enseignement professionnel : De manière claire, il s’opère lors de ces premiers pas des phases de reconstruction avec des phénomènes de réassurance et de reprise de confiance en soi. C’est le cas notamment en seconde CAP et en seconde baccalauréat professionnel. Il s’agit d’une véritable rupture pédagogique, dans laquelle les élèves retrouvent confiance en eux et le goût de la réussite. Un demi-point de plus par rapport au collège parfois même peut en être un élément déclencheur. Les personnels paraissent davantage préoccupés par l’accueil des élèves, l’instauration d’un cadre de travail favorable aux apprentissages. Qui plus est, les élèves semblent pouvoir à ce moment se détacher de leurs marqueurs scolaires. Que nous apprennent les élèves pour justifier ces changements ? Ils font tous état du comportement des enseignants, des enseignants plus proches et à l’écoute. Les enseignements sont plus concrets, et ils se sentent selon leurs mots « enfin dans la vraie vie ». Les environnements professionnels leur permettent également d’adopter un autre comportement (une mobilité en classe, une autonomie dans les ateliers). De nouveaux comportements scolaires apparaissent également avec moins d’absences par exemple. Pratiquement tous les élèves rencontrés manifestent leur appétence pour le faire, l’action, les réalisations. Mais « faire ne signifie pas forcément apprendre » ajoute Aziz JELLAB. Finalement, ils expriment le fait qu’ils s’approprient leurs parcours car ils se sentent mieux considérés, y compris s’ils sont dans des voies non choisies. Mais la rupture pédagogique concerne uniquement les enseignements professionnels, et non les enseignements généraux. Pratiquement aucun élève n’a parlé d’une discipline générale ou il excellerait et qui serait devenue le pilier de son projet. De ce fait, une certaine dualité s’instaure, entre les enseignements, et des formes de repoussoir, de rejet s’opèrent à l’égard de l’enseignement général. Dès lors qu’une certaine alchimie se fait avec l’enseignement professionnel (des élèves citent des exemples en anglais, en histoire géographie, …), le bénéfice est réel. Les professeurs ont tout à gagner d’une intégration fine des expériences professionnelles des élèves dans les enseignements car c’est cette alchimie qui fait sens pour les élèves dans la construction de leur parcours. Curieusement, les classes surchargées, la lourdeur des programmes ne sont pas mis en avant directement par les élèves, ou plutôt, ils émergent des discussions car ils sont véhiculés par les enseignants eux-mêmes. Il faut également noter que les enseignants restent peu mobilisés par la thématique de l’alternance école entreprise. Il apparait clairement que du point de vue des parcours, il serait dommageable de ne

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pas consolider la dynamique de partenariats avec les milieux professionnels, compte tenu de leur importance fondamentale pour les destins des jeunes.

3- L’ancrage des parcours dans un projet professionnel (en particulier au cours de l’année de première professionnelle)

Ce passage du scolaire au professionnel s’opère dans la voie professionnelle en classe de terminale CAP ou encore au cours de la classe de première professionnelle. Ce sont des périodes clefs, charnières au cours desquelles les élèves se responsabilisent progressivement, se « prennent en mains » et sont très sensibles à la découverte professionnelle. De fait, le décrochage est moindre, les élèves étant bien installés dans leurs parcours avec la construction de leurs premiers projets et l’émergence des premières ambitions. La classe de première est marquée également par une grande sinuosité des parcours. Les élèves sont issus soit de terminale CAP, soit de la voie technologique ou générale. Il arrive également de rencontrer des adultes en reconversion. Si des accompagnements sont à mettre en place, c’est au cours de cette période qu’il faut la privilégier.

4- La poursuite d’études supérieures : la construction fragile d’une ambition Les bacheliers professionnels de plus en plus nombreux à vouloir poursuivre leurs études, en STS dans leur grande majorité, sont au fond très emblématique à la fois de la fonction sociale de la structure STS et d’un profil de nouveaux étudiants qui la caractérise. Quelques chiffres : près de 40% poursuivent (dont environ 78% en STS), 14% des bacheliers inscrits en première année de BTS arrêtent … Il n’existe pas de relation mécanique entre orientation choisie / orientation subie et le type de parcours Les projets de poursuite d’études dans le supérieur sont manifestes chez les élèves surtout à partir de la classe de première mais sur fond d’inquiétudes quant à leur capacité de réussir. La poursuite d’études ne vient pas d’une demande sociale, mais d’une pression du système. Des élèves expriment des fragilités face au discours porté par l’institution sur le « tout BTS » (traduction de la poursuite d’études perçu comme obligatoire en BTS). Les choix vers l’enseignement supérieur ne reposent pas sur une volonté d’élever le niveau de qualification professionnelle, mais simplement sur le fait d’avoir un meilleur salaire, de meilleures chances d’avoir un emploi et la volonté d’être plus autonome. La majorité des élèves expriment le souhait de poursuivre leurs études en apprentissage (interrogeant par la même notre carte des formations).

Au final, cette poursuite d’études est relativement vécue comme anxiogène de la part des élèves. Ils se sentent parfois surévalués, et ont du mal à se situer et à situer leurs niveaux en BTS, dans un monde associé à une certaine « normalité » (la voie professionnelle étant perçue comme un système à part, un « cocon » dans lequel ils ont été préservés ...). En outre, les élèves ne comprennent pas généralement ce qui est attendu d’eux en BTS : que veut dire être plus curieux ? Avoir une plus grande capacité d’analyse ? Fournir un plus grand travail personnel ? Ils ne se sentent pas suffisamment préparés à la poursuite d’études. Le problème également est le rapport au savoir, ajouté au travail personnel. Il faut que les élèves qui investissent l’enseignement supérieur apprennent à investir sur des savoirs différés, non utilitaristes.

- Le système est-il finalement prêt à prendre en compte la logique de parcours ? Le système devrait s’inspirer de 5 principes :

6- Toujours placer l’élève au centre des préoccupations. A noter que le vécu par les élèves du dispositif de l’accompagnement personnalisé est particulièrement troublant. Ce qui est fait est globalement incompris.

7- Le changement de la posture pédagogique, à côté et non en face à face. 8- La logique de parcours repose sur les responsabilités individuelles, mais avant tout collectives.

Le système est fissuré de toutes parts par chacun des acteurs, par des visions parcellaires, limitées. Cela nous impose une vigilance accrue quant aux discours que nous portons, sur l’amont, les autres ….

9- Il faut installer une fluidité, une réversibilité des parcours. Il faut prendre conscience que c’est aux élèves les plus fragiles que l’on impose un « projet personnel et professionnel », et ce très tôt dans leurs parcours !

10- Il faut travailler le concept de développement des compétences tout au long de la vie. Le travail sur l’expérience, la réflexivité sur son travail, l’explicitation en sont les clefs.

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Quid des enseignants de lycée professionnel ? Il s’avère nécessaire de les accompagner et de légitimer leur travail Le travail des enseignants de LP est toujours à réinventer car ils doivent concilier bienveillance à l’égard des élèves et exigence intellectuelle. Aziz JELLAB déclare : « s’agissant de la professionnalité des enseignants, l’enseignement en formation continue, et en apprentissage constituent de réelles opportunités de renouveler les pratiques des enseignants en formation initiale ». Conclusion : La voie professionnelle a connu une mutation : un accroissement du nombre de bacheliers professionnels, une intensification de l’évaluation (CCF notamment) et une polarisation des publics (bac pro versus CAP). La logique de parcours permet de mieux prendre en compte la diversité des publics mais à la condition d’assurer un accompagnement exigeant invention, travail collectif et analyse plus nuancée de la problématique de l’orientation. Les corps d’inspection ont aussi pour mission de formes les PLP aux enjeux didactiques et pédagogiques disciplinaires ainsi qu’à la capacité d’identifier les points en tension (comme par exemple l’alternance LP / milieux professionnels, la transition bac / STS) pour faire réussir les élèves. Trois chantiers sont majeurs :

- la lutte contre l’absentéisme, - la formation des enseignants, - la synergie LP / apprentissage en alternance.

3 Ateliers thématiques

3.1 Atelier thématique 1 : les marges de manœuvre dans l’organisation pédagogique des établissements : les PFMP, la période de détermination, la mixité des publics

Animation par Jean-Pierre COLLIGNON, IGEN groupe STI. Présentation d’un exemple de mise en œuvre de l’organisation d’une période de détermination en seconde professionnelle Cette expérimentation est inscrite dans le cadre de l’article 34. Il s’agit d’une seconde professionnelle commerciale (bac pro vente, commerce, ARCU) avec un seul code MEF commun – en lien avec la certification intermédiaire BEP MRCU, pour aider les élèves à s’orienter plus facilement et en toute connaissance de cause en première professionnelle (orientation choisie). Objectifs :

- Disposer des connaissances nécessaires afin de solliciter une orientation choisie (travailler sur les représentations …) ;

- Contribuer à la lutte contre le décrochage scolaire et l’absentéisme ; - Pallier aux difficultés de recrutement.

Résultats attendus / obtenus :

- Une orientation cohérente avec le profil et les projets professionnels des élèves ; - Une limitation du décrochage scolaire ; - La réussite au baccalauréat choisi ; - Un avenir professionnel réfléchi notamment pour une poursuite d’études ; - Une implication des équipes et des familles dans la construction du projet professionnel de

l’élève ; - Un rééquilibrage relatif des flux entre les diplômes.

Modalités de mise en œuvre :

- Mise à plat tous les référentiels, organisation de visites d’entreprises du secteur, construction d’un tronc commun ;

- Construction d’une stratégie globale de formation adaptée ; - Mise en place des grilles d’évaluation en entreprise adaptée en classe de seconde ;

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- Organisation de l’alternance des deux spécialités par quinzaine (en production graphique / production imprimée).

Conditions de transférabilité :

- Mise en place d’un suivi individualisé qui réponde au projet de l’élève notamment dans le cadre de l’accompagnement personnalisé ;

- La construction d’indicateurs permettant de déterminer l’investissement des élèves et leur capacité à assimiler le contenu de formation.

Autres leviers : une communication faite aux familles (sur le contenu de la seconde, sur les projets proposés …), des dérogations dans la répartition des PFMP (avec des 14 semaines en terminale par exemple, des réductions de la durée des PFMP pour des élèves souhaitant poursuivre en STS). Rappel : la répartition 6/8/8 vient d’une simple circulaire … Cette expérimentation repose sur un principe de fond : savoir ce qu’un élève de troisième sait du métier qu’il veut faire est un non-sens. En outre, le projet professionnel se construit par l’action également, et par conséquent, en confrontant l’élève à des situations professionnelles réelles. La modularisation des formations est possible. Elle est même une opportunité de mixer les publics, et les parcours. Elle reprend pour ainsi dire le concept des champs professionnels proposés dans le cadre de la rénovation de la voie professionnelle, et abandonnée peu à peu … A ceux qui craignent une perte en compétences des élèves si la formation « spécifique » ne se réduit qu’à deux années ? Il faut déjà préciser que la première année cible des compétences (notamment communes). Par ailleurs, il faut également se rappeler que nombre d’élèves arrivant en première par des passerelles réussissent en baccalauréat professionnel … Quid des CAP ? Les CAP accueillant majoritairement les SEGPA, il y aurait peut-être une réelle opportunité de prolonger les champs professionnels des SEGPA en CAP … « Il n’y a pas assez de révolutionnaire dans les établissements … » (Jean-Pierre COLLIGNON).

3.2 Atelier thématique 2 : l’utilisation de la grille horaire, l’accompagnement personnalisé, les EGLS, les effectifs réduits, les regroupements d’élèves, la mobilité

Animation par Dominique TARAUD, IGEN groupe STI. Présentation d’un exemple de mise en œuvre du dispositif de l’accompagnement personnalisé par Serge Bravo IEN IO, Doyen dans un lycée professionnel en Martinique Dès le début de l’année, trois actions clefs sont proposées aux élèves : tests de positionnement (au cours d’une semaine banalisée pour l’accueil des élèves, sous forme de tests, de QCM numériques et en particulier dans les disciplines fondamentales), entretiens individualisés, tutorat pour certains élèves. Les objectifs sont de favoriser l’intégration en lycée professionnel, et d’aider à finaliser le projet professionnel. La difficulté a été de prévoir l’organisation horaire : en barrettes, mutualisation d’une heure pour trois heures de prise en charge par cycles de 6 semaines pour organiser la concertation. Des activités ont été proposées : théâtre, décor, musique, …. avec la participation de partenaires extérieurs. Une évaluation a été conduite : au niveau des élèves, des enseignants, de la vie du lycée.

Cet exemple, au-delà de la réussite dont elle peut se prévaloir, nous interroge sur le sens donné à l’accompagnement personnalisé par les équipes : s’agit-il d’accompagnement personnalisé, ou d’activités de projet ? Dans certaines académies, le dispositif est relativement figé, et ciblé (sur quelques enseignements), majoritairement sous une forme de soutien, avec un livret personnel de compétences peu mobilisé. Ce dispositif sert encore de variable d’ajustement. Les débats portent sur la possibilité d’inspecter en AP : les avis divergent. Il reste que ce dispositif nécessite un pilotage fort, par le Recteur et les DASEN. Dans tous les cas, le risque est grand d’externaliser par ce dispositif la difficulté ou la différenciation pédagogique, sans modifier en profondeur les enseignements. La généralisation de l’AP et de l’EGLS s’impose à tous les cadres.

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3.3 Retour des ateliers par Aziz JELLAB, IGEN

Les questions de la souplesse et des marges de manœuvre dans l’établissement, dans la classe sont extrêmement reliées. Ce qui apparait clairement, c’est un le rôle pédagogique de l’établissement. La question de l’expérimentation revient souvent dans les dialogues. Quid de l’expérimentation et de l’innovation ? Quid de l’évaluation ? Le risque serait de croire que l’innovation consiste à apporter des modifications dans la forme, sans apporter de modifications sur le fond et le renouvellement des pratiques pédagogiques. Qu’appelle-t-on expérimentation et autonomie des établissements dès lors que des injonctions existent ? Comment s’autoriser aussi à sortir du cadre, respectueux des attentes institutionnelles et en étant dans l’innovation ? « L’autonomie ne se décrète pas, elle s’apprend » rappelle Aziz JELLAB. On a pu voir dans les différents ateliers, plusieurs cas de secondes dites « indifférenciées » présentées : peuvent-elles être des réponses aux besoins des élèves ? Les interrogations portent le plus souvent sur la rigidité du système : est-il possible de disposer d’espaces moins normalisés ? La notion de parcours individualisée interroge sur la rigidité du système. Le parcours personnalisé n’interdit pas le collectif. L’élève apprend aussi et surtout avec les autres. Beaucoup d’élèves ont un déclic dans l’enseignement professionnel du fait aussi des travaux menés dans le cadre de travaux de groupe, et d’identification à un groupe.

L’inspecteur est régulièrement évoqué dans les débats, avec des missions qui évoluent nettement vers des postures de conseils et d’accompagnement. Se pose la question de sa légitimité dès lors que sa posture oscille entre disciplinaire et transversal. L’évaluation par compétences est sans doute une manière de sortir de cette compartimentation entre savoirs et compétences, et dans l’organisation même du travail en collège.

Les dispositifs, les outils existent mais très peu s’en saisissent (LPC, la liaison collège – lycée, AP, EGLS, …) La réussite et le parcours des élèves, c’est aussi la manière dont s’approprient les acteurs de la formation. Et souvent, il existe des conflits d’interprétation sur un même texte. Il y a sans doute des difficultés à situer des injonctions car elles ne sont pas clarifiées. Il est nécessaire que se travaillent ces questions dans une grande collégialité. A l’exemple de l’AP et de l’EGLS…. Sur l’AP, il est finalement une manière de faire : s’agit-il de travailler sur le soutien, sur l’approfondissement, sur l’orientation ? Et est-il si personnalisé que cela ? En pratique, l’accompagnement personnalisé constitue encore des variables d’ajustement, ou se restreint à des projets, des ateliers déconnectés des apprentissages … S’agissant des EGLS, quelle est sa visibilité ? L’EGLS doit être l’occasion de travailler des compétences qui ne sont pas dans les programmes, mais qui apparaissent essentielles dans la construction de la professionnalité des élèves. Comment se positionner entre le contenu des programmes et les compétences à acquérir ? Il y a un grand besoin de travailler sur l’évaluation par compétences, en tant que levier d’amélioration des apprentissages (modèle évaluation formative).

Qu’appelle-t-on professionnalisation en LP ? Cela réinterroge les relations avec les entreprises (avec les tuteurs), avec les autres manières d’apprendre (l’apprentissage). L’enjeu est comment mobiliser tous les acteurs ? S’est posée la question de la continuité et de la modularisation des PFMP de façon à casser cette tension entre établissement et entreprise. Comment mettre en œuvre une meilleure individualisation de la formation ? par l’alternance avec l’entreprise, mais également l’alternance in situ (au sein même de l’établissement, et de ses espaces professionnels). A ce sujet, la mixité des publics (adultes, apprentis, élèves), le tutorat, le parrainage à l’interne mais également à l’externe (association d’étudiants …) sont autant d’appui pour renforcer la professionnalisation.

Face à l’hétérogénéité des publics, le risque est grand d’adopter des postures différentes en fonction des publics, entre des élèves de CAP pour lesquels l’objectif se restreint à de la socialisation, et des élèves de bac pro pour lesquels l’enjeu peut être l’insertion ou la poursuite d’études. Les études montrent que les élèves de CAP vivent majoritairement l’entrée en voie professionnelle comme une ascension, même si le taux d’absentéisme est le plus élevé en CAP.

Se pose la question de la place du lycée professionnel au sein du système : voie technologique vs voie professionnelle. Quelle fonction attribuer à la filière technologique ? Les élèves de la voie technologique sont plus nombreux à être inscrits en IUT et en université. La voie technologique constitue sans doute une sorte « d’anomalie » au niveau européen. Par contre, quand on interroge les parcours, et leur réussite avec une insertion au niveau III, II ou I, qui prendrait le risque de supprimer cette voie ?

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Didier MICHEL note que la voie technologique est inscrite au programme de travail de l’inspection générale l’année prochaine.

Pour conclure, y-a-t-il un risque de déprofessionnalisation des bac pro ? Leur finalité est-il l’insertion, ou la poursuite d’études ? La valorisation de l’enseignement professionnelle doit-elle venir de ses chiffres (taux d’insertion professionnelle, taux de poursuite d’études …) ? Seulement ? Les questions se centrent beaucoup sur les baccalauréats professionnels, mais quid des CAP ?

Didier MICHEL conclut : quand on interroge généralement les personnels de direction sur leur autonomie, ils évoquent souvent des arrangements, des adaptations à la marge, des « bricolages » … La rénovation de la voie professionnelle a ouvert des espaces (AP, EGLS …) qu’il convient aujourd’hui d’investir pédagogiquement. L’accompagnement personnalisé a montré que les enseignants n’étaient pas équipés dans leur pratique courante dans le montage des modules. Didier MICHEL insiste : « Il faut les équiper, les accompagner … ».

4 Introduction de la deuxième thématique : marges de manœuvre dans la mise en œuvre des certifications, modes d’évaluation dans les diplômes professionnels

4.1 Intervention de Patrick VENEAU, du CEREQ

L’intervention se base sur un travail commandé par la DGESCO portant sur les modalités de certification entre 2010 et 2012 c’est-à-dire au moment où se mettait en forme la rénovation de la voie professionnelle. Il s’agissait de questionner le caractère certificatif des évaluations proposées par les enseignants. S’agit-il d’ailleurs d’une évaluation certificative ? Le travail s’est restreint à trois académies, et trois diplômes (un CAP, et deux baccalauréats professionnels). Il s’est construit à partir de l’analyse de quatre épreuves pratiques (maintenance, mise en service), et les observations d’évaluation de PFMP et de jurys d’oraux de présentation des dossiers. Il s’est porté sur quatre temps d’investigation : un entretien avec les enseignants, une observation des travaux pratiques, une observation des CCF et un entretien de post-évaluation. Sur le déroulement et l’organisation des CCF Il existe peu de textes pour définir le CCF (texte de 1997). Il reste un flou et parfois des propos contradictoires. Deux principes régissent le CCF et sont profondément liés entre eux :

- Evaluer des élèves quand ils sont prêts ou quand ils atteignent le niveau requis ; - Ne pas interrompre le processus de formation.

Ce qu’en disent les enseignants … Le CCF repose sur une mise en œuvre contraignante. Le CCF, « c’est de la paperasse » disent-ils. Sur le plan matériel, la mise en œuvre des CCF requiert du temps, au détriment souvent du temps de la formation. Il ne favorise pas les apprentissages selon les enseignants. Quid de la reconquête du mois de juin par le CCF ? Le CCF soulève des problèmes d’équité et de justice. La notation reste centrale. On n’est pas dans une approche de la compétence en termes de performance. Les enseignants préfèrent enseigner, et moins évaluer. Pour autant, les propos restent contradictoires. Au-delà des critiques formulées en l’encontre du CCF, il permet toutefois de mieux évaluer. « Il y a moins de surprise ! ». Pour autant il est difficile d’être juge et partie, et notamment par rapport aux élèves en difficulté avec des problèmes d’objectivité pas simple à gérer pour les enseignants. Il existe également une disparité des situations d’évaluation, avec des évaluateurs plus ou moins exigeants, ce qui renforce l’idée d’une différence en termes d’équité. Une demande est forte en matière d’harmonisation, d’échanges. NB : Les enseignants restent selon Patrick VENEAU « justes et équitables ».

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S’agissant du premier principe (« Evaluer des élèves quand ils sont prêts ou quand ils atteignent le niveau requis »), les enseignants mettent ce principe rarement en œuvre, car contraints par des fourchettes de date, soumis à une certaine spontanéité des élèves, une rigidité du système. Comment procède-t-il ? Les enseignants bloquent des dates (type semi ponctuel) pour un groupe d’élèves (quid des autres ? absents, ou laissés en relative autonomie ou semi dirigée). L’évaluation prend le pas dans ce cas sur la formation. Ils positionnent généralement les CCF au plus près de la fin de la formation. Les choix des élèves s’opèrent par d’autres processus : par tirage au sort, à l’initiative des élèves, … Un contre-exemple vu dans les observations : un enseignant procède par projet, et les élèves passent à tour de rôle en CCF. S’agissant du deuxième principe « Ne pas interrompre le processus de formation », les enseignants disent ne pas pouvoir évaluer et former, même s’ils restent de bonne volonté. Ces épreuves mobilisent énormément les enseignants : les épreuves sont ponctuées par un grand nombre d’interactions avec les élèves, souvent imprévus, sont plus ou moins longues, plus ou moins fréquentes, avec des changements de posture de l’enseignant (d’évaluateur à formateur). Au cours de ces évaluations, les enseignants adoptent le rôle de conseiller, le client ou le béotien, le contrôleur et l’enquêteur, mais également l’entraineur et formateur. Selon le cas, les enseignants aident les élèves, les guident, les accompagnent, les motivent, voire secouent ceux qui sont à la traine ou les font avancer sans qu’ils se fourvoient. Les interactions permettent l’aide et l’évaluation. Les enseignants observent ce que font les élèves, et sont obligés de maintenir une observation permanente sur les activités des élèves, et cette observation se traduit par des prises de note qui servent à l’évaluation. C’est une évaluation en temps réel, et en cela elle s’apparente beaucoup à de l’oral. L’évaluation se fait en cours d’épreuve, et non à la fin sous la forme par exemple d’un contrôle de conformité. Parfois, en binôme, chacun des enseignants prend en charge soit l’évaluation, soit la formation. Quid du caractère certificatif des CCF ? Des référents servent de repère pour l’évaluation à la différence des référentiels (qui constituent la « norme »). Que sont ces référents ? Il s’agit de ce que les enseignants construisent, en termes d’invariants pérennes qui désignent ce qui est attendu des élèves au cours de l’épreuve. Quels sont ces référents ? Ils sont très instables et flous pour les PFMP (« on ne sait pas qui a mis la note, comment a été mise la note … »). « C’est au-delà de l’opacité de la note ! » ajoute Patrick VENEAU. Les enseignants ont les mêmes référents : ils regardent les mêmes choses, ils ont les mêmes attentes quelle que soit la nature de l’épreuve (CCF ou ponctuel). Deux principaux référents existent : la sécurité (des biens, des personnes …) et la méthode de dépannage (la démarche, l’analyse, …) dans le cas de l’épreuve de maintenance. Les enseignants déplacent la focale. Ils s’intéressent généralement au processus, et non au résultat. Ce qu’évaluent les enseignants est plus en rapport avec le contenu de la formation (et se rapproche de l’évaluation formative, de ce à quoi on a formé). Les enseignants sont dans la compétence en termes de mobilisation des connaissances, et non en termes de performance. Didier MICHEL conclut. Il s’agit à travers cette étude, d’une tentative d’entrer au cœur même du processus de l’évaluation (regard « clinique » de l’activité). Il faut retenir de l’intervention de Patrick VENEAU le problème des contraintes, et cette forme d ‘injonction paradoxale (« quand l’élève est prêt, … »). Pour Didier MICHEL, il existe une pédagogie des épreuves à mettre en œuvre. L’idée de justice est essentielle, renvoyant à l’idée de confiance et de légitim ité de chacun des enseignants. Les inspecteurs doivent rassurer les enseignants dans leur professionnalité, dans leurs référents, en établissant presque un contrat de confiance certificative de nature à aborder des marges de manœuvre. Les enseignants vivent souvent très mal « cette obligation de résultats » ajoute Patrick VENEAU. Faut-il à présent entrer dans la boite noire de l’évaluation ? Pour Didier MICHEL, on peut très bien admettre que chaque enseignant ait son style d’évaluateur. Didier MICHEL ajoute : « Le rôle de l’harmonisation est essentiel, soit en amont, soit en aval. Cette phase est souvent sous-estimée, parfois malmenée ».

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4.2 Les marges de manœuvre offertes par les textes réglementaires. Intervention de Brigitte TROCME, chef du bureau des diplômes professionnels et Maryannick MALICOT, adjointe à la sous-directrice des lycées - DGESCO

Du texte à l’action…. La problématique de la certification et du cadrage national. Qu’est ce qui cadre l’action des enseignants au niveau le plus haut, celui de la loi ? En préambule : le référentiel n’est pas toujours le référent pour les enseignants. Ils se créent leurs propres référents. « Faut-il croire qu’il y existe un delta important entre leurs référents et le référentiel ? », s’interroge Maryannick MALICOT. Les textes relatifs à la certification : pour quoi faire ?

- Pour garantir le caractère national de la certification. - Pour garantir l’égalité entre les candidats. - Pour rendre l’action possible. Le texte produit du possible, et non des contraintes.

Ce que disent les textes : ils précisent ce qui est obligatoire et est interdit. Ce qui n’est ni obligatoire ni interdit, est possible (mais pas toujours souhaitable). C’est la marge de manœuvre des acteurs. La hiérarchie des normes : L’obligatoire et l’interdit sont définis :

- par la loi ; les articles en L du Code de l’éducation - par la réglementation : les décrets (codifiés dans les articles en R - en conseil d’état et en D -

articles simples - du code de l’éducation, ou non codifiés) - par les arrêtés.

Il reste le cas particulier des circulaires - Elles ne sont pas normatives. Elles ne créent pas de réglementation. - Elles guident l’action : elles explicitent le comment défini par la réglementation. - Elles s’imposent lorsqu’elles figurent sur le site du Premier ministre.

L’évaluation certificative : ce que dit la Loi

Article L331-1 : « En vue de la délivrance des diplômes, il peut être tenu compte éventuellement en les combinant, des résultats d’examens terminaux, des résultats des contrôles en cours de formation, des résultats de contrôle continue des connaissances et de la validation des acquis de l’expérience »

Article D337-67 (bac pro) : « L’examen … valide les capacités, compétences savoirs et savoirs faire …. »

Article D337-38 (le CAP) : « L’examen … valide les connaissances et compétences générales et professionnelles … »

Pour chaque spécialité, l’arrêté établit le référentiel d’activités professionnelles, le référentiel de certification et le règlement particulier qui fixe les conditions de délivrance des diplômes. Ce que disent d’autres textes, parfois transversaux (notamment ceux du CCF)

- Naissance officielle du CCF à la création du bac pro (PFMP, participation du tuteur à la formation et à l’évaluation avec la recherche de nouvelles modalités d’évaluation certificative) ;

- Mention du CCF dans les décrets relatifs à chacun des diplômes ; - Circulaires et notes de services, dont celle du 18 mars 1997 (mise en œuvre du CCF au

brevet de technicien supérieur, au baccalauréat professionnel et au brevet professionnel). La définition d’épreuves : Les textes réglementaires sont peu diserts sur ce qu’est la définition des épreuves et la situation d’évaluation. Note de service du 18 mars 1997 : A la différence du contrôle continu, la mise en œuvre du CCF s’’appuie sur une situation d’évaluation (..) C’est une situation qui permet la réalisation d’une activité dans un contexte donné. Son objectif est l’évaluation des compétences et des savoirs mis en œuvre dans une situation donnée, et requis pour la délivrance de l’unité. La délivrance d’une unité peut rendre nécessaires plusieurs situations d’évaluation.

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(…) le CCF suppose une approche globale dd l’évaluation qui conduit à rejeter l’évaluation de compétences isolées. L’évaluation par CCF ne doit pas être réduite à une variante de l’examen traditionnel avec éclatement des épreuves. Quelles marges de manœuvre ?

- En premier lieu pour les concepteurs du diplôme dans la définition des épreuves et des situations d’évaluation

- « L’IEN veille au bon déroulement de l’évaluation organisée sous la responsabilité du chef d’établissement ».

Maryannick MALICOT questionne l’organisation sur le terrain de « semaine de CCF blanc ». Comment l’inspecteur peut-il veiller au bon déroulement de l’évaluation ?

- Avant ? Par un rôle d’animation des équipes enseignantes pour la préparation des situations d’évaluation (cadrage variable selon les disciplines).

- Pendant ? Veiller, est-ce contrôler ? et sur quoi ? - Après ? Lors de la réunion des jurys ? A l’issue de la session ? A partir du recueil des

informations, des résultats, des difficultés sous la forme de bilan, d’ajustements, d’améliorations …) type processus qualité ?

Dans les textes, il n’est pas dit que cela ne concerne que les enseignements professionnels. A l’origine, le CCF a été conçu pour l’EPS, la partie pratique et les PFMP. On ne s’est pas réellement interrogé sur la légitimité de le généraliser à toutes les disciplines, ce qui peut justifier les difficultés rencontrées. Les textes aussi bougent, car les pratiques des acteurs font bouger les textes …. Exemple sur les PFMP Les PFMP sont régies par l’article L335-2 du code de l’éducation : « Les formations … comportent un stage d’initiation ou d’application en milieu professionnel. Ce stage fait l’objet d’un contrat entre l’établissement d’enseignement et l’entreprise ». L’article L331-4 précise : « la scolarité peut comporter … des périodes de formation dans des entreprises, des associations, des administrations ou des collectivités territoriales en France ou à l’étranger … elles sont obligatoires dans les enseignements conduisant à un diplôme technologique ou professionnel ». L’appellation « PFMP » n’apparait pas actuellement dans la partie législative du code de l’éducation. Mais elle apparait dans le décret portant règlement général de chaque diplôme professionnel. Elle apparait aussi dans les arrêtés en application de l’article D37-4, les arrêtés de création des diplômes professionnels comportent une annexe spécifique qui décrit les objectifs et les modalités de réalisation des PFMP … et dans la circulaire n°2000-095 du 26 juin 2000. La loi tenant au « développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires » votée le 26 juin 2014 mais pas encore promulguée va modifier sensiblement le statut des PFMP. La loi ajoute une nouvelle partie au code de l’éducation. Elle rassemble stages (enseignement supérieur) et PFMP (voie professionnelle). Elle sera codifiée à l’article L124-1 du code de l’éducation « Les PFMP … au cours desquelles l’élève ou l’étudiant acquiert des compétences professionnelles et met en œuvre les acquis de sa formation en vue d’obtenir … le stagiaire se voit confier une ou des missions conformes au projet pédagogique défini par son établissement d’enseignement et approuvés par l’organisme d’accueil ». Des dispositions passent du rang réglementaire voire du rang de recommandation à un rang législatif

- Les obligations pour chacune parties engagées dans la réalisation des PFMP ; - Les documents contractuels ; - Les possibilités de mobilité.

En conclusion, Brigitte DORIATH insiste sur le fait que le CCF permet d’évaluer des compétences que le ponctuel ne permet pas (« le CCF est un enrichissement »). Interrogée sur la question soulevée par les difficultés rencontrées par la généralisation du CCF en baccalauréat professionnel, Brigitte DORIATH indique que le retour en épreuves ponctuelles terminales est acté pour la PSE, l’économie droit, la GBPI.

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4.3 Atelier : mise en œuvre des évaluations certificatives

Animation par Jean-Michel PAGUET, IGEN économie gestion. Présentation d’une application numérique pour un livret individuel numérique de suivi de formation et d’évaluation par les compétences, utilisable à partir de l’ENT En débat : Quelle culture commune autour du CCF ? Qu’entend-on par situation d’évaluation ? Les aspects organisationnels : les sujets pourraient-ils être collégiaux, académiques, nationales ? La note de 0 est-elle possible ? Quel rôle de l’inspecteur dans le cadre des CCF ? Il s’agit généralement de ponctuel déguisé. Il est difficilement possible de l’organiser en dehors des apprentissages, en dehors d’une séance de cours (le cas en lettres – histoire). Des divergences s’amenuisent, mais persistent au sein du collège des inspecteurs. Il existe autant de mise en œuvre du CCF qu’il existe de disciplines Les débats restent houleux, en particulier au sein du groupe STI. Le fait de parler de sujets, d’épreuves entretient l’idée même du ponctuel. Dans certains cas (langues), le nombre de situation d’évaluation n’autorise pas vraiment de sortir de l’emprise du ponctuel : une seule situation en bac pro (comportant trois parties indissociables), un jury pouvant être un enseignant différent de celui ayant mis en œuvre la formation. Il n’existe pas de situation d’évaluation dans toutes les épreuves, à l’exemple du bac pro gestion administration. Il n’existe pas dans ce cas de situation d’évaluation, puisque le support de l’évaluation repose sur des activités mises en œuvre par l’élève et consignées dans un passeport professionnel, et des commentaires des tuteurs en entreprise.

5 Introduction de la 3ème

thématique : comment faciliter l’utilisation de ces marges de manœuvre ? Quel accompagnement par les corps d’inspection pour aider à la mise en place d’une construction collective ?

5.1 Intervention de William MAROIS, recteur de l’académie de Nantes

« Je ne suis pas comme vous, un spécialiste de l’enseignement professionnel et un expert de la diversité des filières. Je suis simplement un recteur, qui a participé comme d’autres à un temps fort, la rénovation de la voie professionnelle ». Il faut rappeler la réforme de la voie professionnelle, car elle est au cœur des missions des inspecteurs de l’éducation nationale. Le bilan apparait globalement positif, avec des points relativement marquant. C’est une réforme qui a été préparée, avec un passage d’un système de 2+2 à un système de 3 ans anticipé. Quand on regarde sa mise en place, elle s’est déroulée sur deux rentrées, avec des accords préalables obtenus au préalable par des commissions de travail. Un point clef de la réforme était de laisser des marges d’autonomie aux acteurs. A propos des réformes, le risque, après un temps fort et sous la pression du conservatisme pesant, que le système revienne à son état actuel. « Il faut être tout le temps vigilant ! ». Dans quel cadre doivent s’exercer les missions des inspecteurs ? Elles doivent s’exercer dans le cadre du pilotage partagé, inspecteurs – personnels de direction et encadrement administratif. Ce pilotage partagé doit se faire en reconnaissant les responsabilités et les compétences de chacun, et dans le cadre d’une ouverture d’esprit (reconnaitre les contraintes de chacun également). « Il n’y a que comme çà que nous pourrons avancer ! » insiste William MARROIS. Elle doit s’exercer dans la manière dont je définis le métier d’enseignant, c’est-à-dire autour de trois lettres : ERC. Ecouter – Rassurer – Conseiller. C’est bien ce qui définit la mission d’un inspecteur, et encore plus dans le cadre de la mise en œuvre des réformes. Trois points :

- L’utilisation des marges Pour l’avoir vécu, c’est un point clef des réformes de laisser ainsi des marges de manœuvre aux équipes. Il a été compliqué de ne pas faire de circulaires, et laisser les établissements utiliser les

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marges en fonction de leurs propres caractéristiques. La tendance naturelle est de normaliser les choses. « Si on arrive à cela, alors nous aurons réussi à faire avancer notre système, d’un pas majeur ! Cela vaut pour l’accompagnement personnalisé, pour les EGLS, …. » Mais ne pas normer ne veut pas dire se désintéresser. Il faut accompagner les équipes de manière à s’adapter au contexte local. « Il y a sans doute mieux à faire sur le plan pédagogique que de faire du dédoublement des classes ! » déclare William MARROIS ; La non normalisation doit être un leitmotiv dans le travail. La nomination d’inspecteurs référents par établissement est sans doute une bonne occasion de garantir cet accompagnement.

- L’organisation des formations Autant il faut conserver les marges, autant il faut créer la souplesse, localement, dans les organisations pour prendre en compte les spécificités (des élèves plus jeunes, un système de formation en trois ans, …). Un exemple dans l’académie de Nantes : le champ des métiers de la menuiserie Entre les deux bacs pro (agenceur et fabricant), il existait des différences en termes de flux et de taux d’insertion professionnelle. A été créé une seconde indifférenciée, et des pôles métiers (9 pôles métiers au total dans l’académie). Ailleurs, ces périodes sont plus réduites (6 mois). Sur le niveau V, des pôles de qualification ont été créés : 12 pôles au total (par exemple un pôle tertiaire – vente – commerce). C’est une manière de se donner de la souplesse. Le mixage des publics constitue une autre piste. Ces questions ne sont pas toujours acceptées par tous, et par tous les conseils régionaux. Une autre possibilité est sans doute de faire jouer les passerelles. Cela nécessite plus de personnalisation (2

nde GT – bac pro et CAP – bac pro notamment), en visant notamment les places

vacantes.

- Le volet certification « Je suis parfois inquiet de la lourdeur de certaines des propositions faites par le terrain ». Il faut concevoir des systèmes simples et sérieux. « Le CCF est une avancée, mais pour autant prenons garde à ne pas le transformer en X examens terminaux ! ». Il faut aussi chercher à mettre en cohérence la formation et la certification, et un lien plus fort entre la certification intermédiaire et bac pro. Pour conclure :

- Il faut que l’on sache tous ensemble passer de prescripteur à accompagnateur … ; - Ne pas hésiter à diffuser les bonnes pratiques et il revient aux inspecteurs en tant qu’expert

de la discipline de les recenser ; - Il faut jouer beaucoup sur la formation ; - Il faut chercher la proximité avec les établissements (car c’est une forte attente des chefs

d’établissement) ; - Ecouter – Rassurer et Conseiller.

L’enseignement professionnel peut être à bien des égards un modèle pour d’autres voies de formation. En débat Le rôle des inspecteurs dans les relations avec les collectivités territoriales : ils ont un rôle d’expertise, en matière d’ouverture des formations et des équipements.

5.2 Table ronde : Quels rôle et place pour l’inspecteur, acteur d’un système qui tout à la fois impose des contraintes et préconise l’autonomie ? Quels axes d’évolution du métier ? Intervention de Brigitte DORIATH, IGEN - sous directrice des lycées et de la formation professionnelle tout au long de la vie – DGESCO, et de Didier MICHEL, IGEN assesseur du doyen de l’IGEN

Les questions en suspens : le rôle en mutation de l’inspecteur, la position particulière de l’inspecteur à l’interface des dispositifs nationales et des réalités du terrain.

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Les points de discussion :

- Le constat du rôle de l’inspecteur au sein du système

Régis BICHARD pour l’académie de Poitiers évoque le réseau ECLORE. L’idée était de faire évoluer la notion de bassin pour constituer des réseaux géographiques plus restreints, en intégrant le premier degré (réseau école – collège – lycée et de réussite éducative), avec un gain significatif en matière de vision plus systémique et transversale. Régis BICHARD retrace également le suivi qui est fait depuis trois ans d’une cohorte d’élèves, avec un accompagnement spécifique par les corps d’inspection. La vision au travers du cycle est souvent absente. Ce travail a permis de réinterroger le travail en équipe au sein du collège des inspecteurs. Michèle SENDRE pour l’académie de Versailles relate son expérience sur les ateliers rédactionnels, et le travail mené en direction des chefs de travaux pour réussir son déploiement. Les ateliers rédactionnels consistent à travailler 17 genres d’écrits en lien avec l’enseignement professionnel pour améliorer les performances langagières des élèves. Michèle SENDRE traite également du socle commun. Dans les ateliers rédactionnels, le rôle du professeur de français est de travailler des compétences transversales, définies dans le socle. Le lien avec l’enseignement professionnel peut être vu depuis le socle. Dominique VASSAL évoque la mise en place du bac pro Gestion Administration, mais également la dynamique de réflexivité proposée aux enseignants dans le cadre de leur inspection à partir du référentiel du métier d’enseignant. Dominique VASSAL relate également les interviews menés de candidats à l’issue de leurs épreuves, tant en CCF qu’en épreuves ponctuelles de manière à s’en servir pour les questionner en présence d’autres enseignants et d’élèves. Lionel VARICHON pour l’académie de Rennes présente un exemple novateur d’accompagnement des établissements. La démarche est partie du constat suivant : méconnaissance des besoins des établissements, absence de parole portée par un collectif, interrogation quant à la valeur des actions ponctuelles des inspecteurs, accompagnement centré sur les enseignants et non sur les élèves. Une stratégie a été alors proposée : une rencontre de chaque inspecteur référent avec chaque chef d’établissement, une collecte, une analyse et une hiérarchisation sous forme de cartographie. Dix établissements ont été ciblés, une problématique commune définie et une volonté affichée de suivi des élèves en s’interrogeant sur leurs difficultés, leurs besoins tout au long de leurs parcours. Des formateurs ont été formés à l’analyse des pratiques.

- La certification L’évaluation par compétences n’est pas encore comprise par tous pour Lionel VARICHON. Selon Régis BICHARD, il faut que les inspecteurs n’hésitent pas à faire émerger les différences en matière de référents dans l’acte d’évaluation. Les professionnels ont des référents centrés sur des résultats, alors que les enseignants disposent de grilles de compétences portant sur des compétences plus larges intégrant le processus, la démarche, … Dominique VASSAL relate le groupe de travail qu’elle a mis en place en appui de l’IFé et du CARDIE de Lyon pour développer une culture commune autour de l’évaluation. La notation crispe les élèves, et met en tension les élèves et les enseignants. Elle évoque également la surprise de constater de la part de certains enseignants, une relative incompétence à créer des situations d’évaluation. A ce sujet, les manuels ont leur part de responsabilités, sur le fait que les enseignants perdent de plus en plus l’habitude de réfléchir sur leurs métiers, et l’exercice de leurs enseignements.

- Les perspectives : Pour Régis BICHARD, il faut laisser du temps aux enseignants pour réfléchir, et ne pas surajouter aux référentiels des notes de cadrage. Il ne faudrait pas que les enseignants s’exonèrent de la réflexion que suppose l’exercice de ce métier. Michèle SENDRE insiste sur le rôle de la formation dans l’accompagnement des enseignants vers de nouvelles pratiques. La réforme de la formation professionnelle, en consacrant les actes de décentralisation donne aux Régions un poids important sur la formation et l’orientation. Incidemment, cette évolution a des conséquences sur le rôle des inspecteurs. Cela renforce l’expertise des inspecteurs, mais en change la posture. Quels axes d’évolution ? A quand un séminaire qui traite des relations entre l’enseignement général et professionnel ?

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Michèle SENDRE ajoute : « J’ai beaucoup apprécié les ateliers rédactionnels, car les objets d’étude étaient très ciblés et permettaient de mobiliser réellement les compétences langagières des élèves ». Sur le continuum bac – 3 bac + 3, « faut-il maintenir deux corps, IEN et IA-IPR ? » s’interroge Régis BICHARD. Enfin, Lionel VARICHON met en avant les difficultés des enseignants, et les incohérences qui perdurent dans le vocable, à l’exemple du seul terme « compétence ». Il faut clarifier cette notion phare de compétences.

6 Conclusion. Intervention de Brigitte DORIATH IGEN - sous directrice des lycées et de la formation professionnelle tout au long de la vie, DGESCO

Des remerciements sont adressés à l’ensemble, et aux Recteurs qui ont permis l’organisation de cette manifestation. Nous sommes dans un système très complexe. La formation professionnelle est souvent associée à ces termes de complexité, de contraintes fortes. L’origine de cette complexité est diverse :

- Chaque spécialité a ses spécificités. Il est de ce fait difficile de pouvoir établir des conclusions valables pour toutes les dimensions de la voie professionnelle.

- La voie professionnelle a un objectif d’insertion, mais également celui d’une élévation du niveau de qualification professionnelle.

A ce sujet, Brigitte DORIATH questionne le principe de parler systématiquement de « manques » pour le titulaire d’un baccalauréat professionnel dans son accès aux études supérieures. C’est nier ses forces et ses points d’appui …. C’est un sujet complexe, comme l’est le développement de l’apprentissage. L’objectif de passer de 40 000 à 60 000 apprentis (voire à 70 000) est un enjeu majeur pour le système éducatif. A cette fin, il faut réfléchir à la construction de parcours mixtes, car les chiffres d’insertion au niveau V par apprentissage sont bien supérieurs à ceux sous statut scolaire Brigitte DORIATH insiste : « Il va falloir faire violence au terrain, avec des enseignants finalement si peu formés à l’alternance ». Le séminaire visait à explorer toutes les marges de manœuvre à la disposition de tous les acteurs de la formation. A la conclusion de ce séminaire, force est de constater que nous avons tous notre part de responsabilités dans les contraintes données aux enseignants : les IG, la DGESCO, les IEN …. Des millefeuilles se constituent, freinant par la même la liberté, les initiatives des acteurs de terrain. « Faut-il penser que le système soit immobile, incapable d’évoluer ? », s’interroge Brigitte DORIATH. Elle répond : « Il faut sortir des caricatures. Le terrain n’attend pas les rénovations pour s’adapter aux évolutions économiques ». Le sujet de la formation des jeunes reste un enjeu essentiel. Par exemple, sur le droit de retour en formation, 640 000 jeunes entre 16 et 25 ans ni en formation ni en entreprise sont potentiellement concernés. Brigitte DORIATH conclut : « Guettez la publication des résultats de la conférence sociale ! ».