roques - valde artificialiter
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VALDE ARTIFICIALITER :
LE
SENS D UN CONTRESENS
Dans sa traduction de la
Hirarchie cleste
du pseudo-Denys,
Jean Scot rigne, entre autres inexactitudes plus ou moins graves,
a rendu par un contresens
absolu
l'adverbe aTE^v (valde arti-
ficialiter) qui constitue un hapax dans
le
corpus dionysien et
propos duquel semble se manifester une divergence
assez radicale
entre les deux auteurs. On voudrait prsenter rapidement
le
pas
sage
et
sa
traduction, s'interroger
sur
les
positions
doctrinales
rellement
impliques par
l'adverbe
dionysien, montrer
comment
Jean Scot a
essay
d'expliquer la pense de Denys sur ce point,
souligner enfin que cette interprtation est destine confirmer
l'une des thses
majeures
de Jean Scot.
*
*
II
s'agit
d'une
phrase de Hirarchie cleste
II.
Le
chapitre
est
consacr expliquer
et
justifier l'emploi des symboles
par l cri
ture. Plus prcisment, Denys veut y
prouver
que
c'est
en toute
convenance que l'criture recourt aussi des symboles di
ssemblables ^. Mais l'ensemble du
chapitre,
comme le trait
(1) C'est le
titre
mme de ce
chap.
II de Hirarchie
cleste
:
xt
7TpSTr6vTto
x
6eta xocl
opdcvia
xod
8i xcov
vofiolcov
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lui-mme,
se propose en ralit de lgitimer et d'interprter toute
la symbolique biblique, qu'il s'agisse des reprsentations de
Dieu
ou des
anges
ou des
ralits
divines , et quels que soient la nature
et
le
niveau de
ces reprsentations.
Dans
ce
contexte
nous
sont
proposs la phrase et l'adverbe
qui vont
nous
retenir.
En voici la
teneur,
avec
la
traduction
correspondante de
Jean
Scot
:
DENYS JEAN SCOT
Kal yp aTE^v r\ 0so- Etenim valde artificialiter
Xoyia Tat
7noi7)Ttxat
lepo- theologia factitiis sacris for-
inl Tiv
o^Tjfxa- mationibus in non
figuratis
vocv s^pTjaaTO, tv intellectibus
usa
est, nos-
xaG'
yjfxa,
w ep7)Tai,
vouv trum, ut
dictum
est,
animum
3,
xal
tyj
ofocsia
revelans,
et
ipsi
propria
et
xal
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selon laquelle
l'criture
(OeoXoYia) ^ reprsente les intelligences
sans figure
que
sont
les anges
(tv t,ayyi\x.fi,
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emprunts directement
aux
plus belles ralits de
l'univers
et l'art humain n'y intervient aucunement. Entre ces deux
de
symboles,
ressemblants et dissemblables,
Denys
bien une sorte de distinction logique, reprise d'ailleurs
Jean Scot. Mais il
ne
s'agit
en
ralit
que
d'une rpartition de
empirique,
plus ou
moins
flottante,
qui
n'est
mme
pas
par l'criture et
qui correspond
simplement
une classi
ication
commode pour
l'intelligence
qui s'applique
comprendre
La
mme
remarque s'impose pour une seconde rpartition qui
rdonne
les symboles selon trois
niveaux
: les symboles qui
parais
ent e haut prix (tcov covic[jt,aai)j
d'nigmes
difficiles dchiffrer (SuaOewpyjTOi alv^y^aai) et de figures dont
on ne discerne le sens qu'avec peine (ttoi ox
eSidcxpixov
&/p\jai),
diffusant une
lumire
proportionne
nos
faibles regards pour
ne les point
blesser
(J>
aSevaiv 6tysaiv
6Xa6 l7uX[jii{>aaa)
(EH V, 501
BC)
cf.
L'univers dionysien, p. 171-174. Mais l'humanit est
en
tat ou
en
acte cons
tant
d'ducation
:
celle-ci
est commence par
le
catchumnat
prparatoire
au
baptme,
dont
l'enseignement
de
base
est
l'criture,
avec
ses
symboles notamment
(cf. L'univers dion., p. 184-186
et
192-196); elle est
poursuivie
au cours de cha
cune des actions
sacramentaires
o
l'criture et
la symbolique scripturaire
tiennent
une
place
qui n'est
certes
pas exclusive, mais qui reste importante
(EH,
ch.
II
VII;
cf.
L'univers dion., p. 246-302).
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symbolique.
A cette fin,
l'criture
procde avec soin (fj)
\
en
toute
sagesse
(irvcrotpo) ^. Et ceux qui sont nourris 'de
l cri
ture
t forms
par
elle, les moines
en
tout premier lieu,
ont
atteint
la
philosophie
trs parfaite
(TeXeiorr/jv
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* *
En traduisant dcTS/v par valde artificialiter, Jean Scot
trans
forme un adverbe ngatif en une formule adverbiale superlative de
sens rigoureusement oppos. L'imagerie biblique, trangre
l'art
et simple, au jugement de Denys,
devient ainsi,
pour Jean
Scot, une uvre de grand art, une prsentation extrmement ing
nieuse, un
montage des mieux
russis.
La contradiction
ne
peut
pas tre
plus absolue.
La mprise d'rigne, si mprise
il
y a, ne
saurait tre
explique
par une variante ou un tat dfectueux du manuscrit
grec
BN 437 ^\
sur lequel Jean Scot, aprs Hilduin, a traduit l'uvre
de
Denys :
le manuscrit, trs clair et
parfaitement
lisible dans ce passage,
porte
bien octs^voo
^2^. De plus, Hilduin
traduit
ici parfaitement par
inartificiose
^3\ et
nous
savons
que
Jean Scot disposait,
pour sa
propre
traduction,
de la traduction d'Hilduin (4) :
ce
qui rend
le
contresens
encore
moins explicable. Sans doute, comme
beaucoup
de traducteurs
l'gard
de
leurs
devanciers, Jean Scot
prouve-t-il
en maints passages un plaisir
certain
traduire
autrement qu'Hil-
duin
et
le
corriger
. Mais,
outre
que ces corrections sont
souvent
minimes,
il
ne
les
fait
pas, du
moins
sciemment, contre
le
sens
vident du
grec. Peut-tre pourrait-on
suggrer
avec Thry
qu'il
a pu
lire suts^v (sic), au
lieu
de rs/v
(5).
Mais si la
d.
cit., Introd., p.
LXIV-LXXI;
E.
Corsini,
II trattato
De
divinis nominibus
dello pseudo-Dionigi e i
commenti
neoplatonici
al
Parmenide , Turin,
1962.
Rappelons,
en
revanche, qu'on a faussement attribu Denys des
traits
de
mtorologie et d'astronomie (Structures
thologiques,
p. 116, n. 1).
(1) Sur
ce
ms., voir G. Thry, Scot rigne traducteur de
Denys,
dans Bulle
tin
u
Cange
VI,
1931,
p.
9;
tudes
dionysiennes
I,
p.
4-9
et
63-100.
(2)
Fol. 3
v, 1. 10.
Signalons
toutefois que le ms. porte xt/y^C, (driv de
cTexvo), sans art, au hasard, grossirement, et
non
pas dCTexv;
(driv
de
dCTSXV7))> simplement, sans artifice, d'o, par extension : rellement, absolu
ment.
Ce
dtail n'importe gure la signification du terme. Beaucoup plus i
portant est le fait que l'dition critique de Heil ne relve
ici
aucune variante
pour
le mot lui-mme.
(3) Thry, tudes dion., II, p. 10, 1. 6. C'est un
procd
de traduction familier
Hilduin de
rendre l'alpha
privatif par le in- prfixe.
(4) Thry, Jean Scot traducteur de Denys, p. 9 :
De
plus, Scot
avait
sous les
yeux
la
premire traduction
de
Denys
faite
par
Hilduin.
Une
comparaison minut
ieuse entre les
deux
textes le prouve
l'vidence ;
illustrations
de cette affi
rmation dans tudes dion. I, en particulier p. 162-167.
(5) Thry, tudes dion. II, p.
10,
n. 2. Liddell Scott
donne
seulement la forme
exxvto (drive de
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confusion entre les deux
adverbes est
possible
phontiquement, on
doit rappeler
que
l'excellente graphie de BN
grec
437
ne
peut ici
laisser aucune
espce
d'hsitation
un
lecteur
moyennement
attentif.
Il ne semble donc pas possible d'expliquer le contresens de Jean
Scot
par
la
prcipitation
ou
par
une
lecture matriellement
inexacte.
L'
erreur pourrait bien, au contraire, manquer de spontanit
et rsulter
d'une
prise de position trs
consciente,
trs
mrement
rflchie, devant un
texte jug
doctrinalement inadmissible dans
sa
littralit
et
qui
ne pouvait
devenir acceptable
qu en y
changeant
un
adverbe
litigieux. Jean Scot est en effet un lecteur
attentif et
un traducteur intelligent .
A
l'inverse d'Hilduin qui ne s'lve
gure au-dessus d'un mot mot courte vue, il s'interroge con
stamment
sur
les
implications
et
les
consquences
des
termes
et
des phrases qu'il
traduit.
Lorsqu'il les reprend et les utilise lui-
mme,
il les
explique
et
indique en quel
sens il les retient.
Et sa
rflexion sur
les
textes traduits
et emprunts
devient videmment
plus attentive s'il estime que, directement ou indirectement, ses
propres positions s'y trouvent confirmes ou menaces. Or, de ce-
point de vue, la
phrase
de
Denys
ne pouvait que l'inquiter. L ad
verbe T/vw
voquait
ncessairement
aux yeux de Jean Scot
une
certaine doctrine
des
arts
libraux
(artes
librales,
te^voci).
La manire ngative
dont
cet adverbe qualifie la
fonction
symbol
ique e la GsoXoyia impliquait sans aucun
doute,
pour lui, une
disjonction, voire une opposition entre l'criture
et les artes
l ib
rales,
et,
par voie de consquence, entre l'criture
et l'intelligence
elle-mme, si l'on admet que les
art
es librales
entrent
dans l'essence
mme de Yintellectus. Toutes implications qui, nous allons le voir,
contredisent directement
des positions
centrales et
des principes
fondamentaux
du
systme rignien.
S il se ft agi d'un autre pre ou,
plus forte raison, d'un auteur
profane, il est trs
probable que
Jean Scot
aurait traduit
littralement,
sans se
proccuper autrement d'un
sens qu'il
pouvait,
selon ses
propres dclarations
de
mthode,
accepter ou
rejeter au
nom de la
recta
ratio
&K Et nous
savons
qu'en fait il a choisi entre
des auto
rits discordantes ou contradictoires, et qu'il s'est cart avec
fermet de plusieurs d'entre elles sur tels
problmes
prcis ^2).
(1) Voir sur ce point les dclarations de DDN I, 513 AC.
(2) M. Cappuyns,
Jean
Scot rigne :
sa
vie, son uvre,
sa pense,
Paris-
Louvain,
1933,
p.
280-290, apporte
plusieurs exemples
qui illustrent la
prise
de
oosition
de Jean Scot sur
ce point.
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Mais,
avec Denys, la
position
de
Jean Scot
est plus dlicate.
Ce
pre est vnrable
et
respectable entre tous, puisque,
selon
la
lgende accrdite en
Occident
par la
Passio
d'Hilduin (1)
et
reprise par Jean Scot &\ il fut le converti et le disciple de Paul,
le disciple de Hirothe, un autre personnage des temps aposto
liques.
Ses
crits,
tenus
pour
presque
contemporains
des
livres
du
nouveau testament, bnficient
ce titre d'un
crdit
excep
tionnel,
presque gal celui dont
bnficie l'criture
elle-mme.
C'est la raison
pour
laquelle
Jean Scot
n'a jamais voulu
se mettre
en
contradiction avec
Denys. Lorsque, pour expliquer sa
propre
laboration doctrinale, il ne peut pas suivre la lettre un ense
ignement dionysien, il en propose une explication plus ou moins
ingnieuse, qui
n'est d'ailleurs pas
toujours dpourvue de justesse,
et
qui
lui permet
de
penser autrement
que
le
texte
invoqu
sans
paratre s'opposer
lui
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puisqu'il
suffit
de
substituer mentalement
st^vw
Tels nous semblent avoir pu tre, pour l'essentiel, le processus
psychologique et le raisonnement au terme desquels Jean Scot
s'est rsolu faire
son
contresens. Nous voudrions
confirmer
l'hypothse
en
examinant d'abord quelques prsentations par
Jean
Scot
de
textes
diony
siens
qu'il
estime
relatifs
au
prsent
sujet,
en
proposant ensuite quelques
passages
de Jean Scot lui-mme
sur
les arts
libraux
dans leurs rapports avec
Yintellectus
et,
par
Y intellectus, avec
l'criture.
Quinze
ans
environ aprs
avoir
traduit la
phrase
de Denys que
nous
venons
de rapporter,
Jean
Scot
en
propose l'explication dans
ses Expositiones in ierarchiam caelestem ^. II convient donc
d'examiner ce
passage
par priorit. En
voici
le
dbut
: C'est
en
effet, dit [Denys], avec un grand art (multum
artificiose) que
la parole de
Dieu
(theologia = soXoyta), c'est--dire cette vertu
inhrente
par nature
aux
intelligences humaines (Ma videlicet
virtus,
quae
naturaliter
humanis
inest mentibus) et
qui doit
les
faire rechercher,
scruter,
contempler
et
aimer
les raisons
divines
(ad divinas
rationes
quaerendas, investigandas, contemplandas,
amandas), a recouru
de
saintes images fabriques, c'est--dire
modeles (factitiis, hoc est, fictis imaginibus... usa est = rcd
7toi7)Tt,xoa tspo7T;Aacmat ^piQ^aTo) pour symboliser les intel
ligences
divines qui sont dpourvues de toute figure et de toute
forme
circonscrites
et sensibles (ad significandos
divinos
intellectus
qui
omni
figura et
forma
circumscripta et sensibili
carent
= ztz\
tc5v a3(Y)|Aa'rfoT6)v vocov) ^2K
De
cette paraphrase assez banale,
on
peut cependant
dgager
deux
points
propos
desquels
se rvlent
dj
les options propres
rigne. C'est videmment d'abord l'expression adverbiale :
multum artificiose, qui correspond
l'rs^vco de
Denys,
et qui
est
rigoureusement
quivalente du valde artificialiter de la tra-
(1)
Selon
M.
Cappuyns, la
Versio
Dionysii vit probablement
le jour
entre
860 et 862 (o. c, p.
158), c'est--dire
avant la composition du De divisione
naturae
dont les
dates
extrmes
seraient
862-866
(ibid.,
p. 189) les
Expositiones
super
ierarchiam caelestem,
postrieures
au
DDN,
auraient
t
composes
entre
865-870 {ibid., p. 220).
(2) Exp., II, 146 A. Au lieu de
circumscripta
(= ms. Douai Bibl.
mun.
202),
Migne donne ici
scripta : le
texte de Douai 202
nous a
t communiqu par
Mlle
J. Barbet
qui
prpare l'dition critique
des
Expositiones.
-
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40
&\
En second lieu, Jean Scot donne une dfinition de la
qu'on ne
trouve nulle part chez Denys. Il
ne
la conoit
ni peut-tre essentiellement comme venant de
et propose du dehors,
historiquement,
par
l'intermdiaire
porte-parole de Dieu (OsoXoyoi). La OeoXoya, parole de Dieu
parole
sur
Dieu,
est
d'abord
dans l'intelligence humaine ^2^.
apparat ainsi plutt comme une parole de l'homme lui-mme,
est
prsente
comme une
vertu
ou un pouvoir
qui se trouve naturellement dans l'intelligence (naturaliter
inest mentibus) et
par
lequel l'intelligence
cherche,
contemple
et aime les raisons divines
. Il est
clair
que
Scot
envisage ici l'intelligence
(vou)
au
niveau
des
causes
ou
des raisons
divines qu'il
mentionne express
'intelligence
est
dans
le
Verbe;
elle
connat
dans
le
Verbe
qu'elle
peut connatre de Dieu et des tres crs; cre sans
mais aussi cratrice, ternelle et une dans le Verbe, elle
une
connaissance une,
indivise, parfaite
(3). C'est
l la
originelle de l'intelligence et
ce
sera
sa condition finale;
ce n'est pas sa condition prsente.
On sait que ces deux conditions contraires sont rattaches la
de
la double cration : la premire, selon l'image de
{ad
imaginent),
et
la seconde, selon
les
sexes (masculum
et
creavit eos) (4). Or si, par la
premire cration,
l intell
onnat de plein droit toute chose et cre tout , y compris
propre science de Dieu
(OsoXoyta),
dans
l'indivisible
unit
u Verbe auquel elle s'identifie
(5),
par
la seconde
cration, en
elle se
trouve
affaiblie
et
limite dans
son
pouvoir de
raison
du pch originel; sa connaissance
est
soumise
rgime
des
sens et de la raison discursive, dans la dispersion
la
division
inhrentes
au
monde de
l'espace
et
du
temps
qui
est
le sien ^6'.
Et
si, dans son premier
tat,
l'intelligence tait
(1) Cf.
l'expression
: artificiosa Scriptura de DDN I, 512
A.
(2) Jean Scot
traduit le
terme voo par plusieurs
synonymes
:
vou a Graecis,
nostris intellectus, velanimus,
vel
mens
dicitur
(DDNH, 574
B).
On
ne s'ton
as de voir employer indiffremment dans
3a
suite l'un ou l'autre de ces
termes.
(3)
Sur
la
doctrine
des
causes
primordiales,
voir
Remarques
sur
la
signif
de
J.
S.
.,
dans Mlanges
A.
Combes (= Divinitas, 1, 1967), p.
270-291.
(4) Cf. Remarques, p. 300-307.
(5) Remarques, p.
310-315.
(6) Remarques, p.
296-297.
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4.1
elle-mme sa propre GeoXoyta, dans le
second,
au contraire,
elle a
perdu
l'essentiel de sa science de Dieu et
des tres
crs, et
elle ne peut tenter de le retrouver qu'avec
l'aide
extrieure d'une
criture qui lui est
empiriquement
propose.
La suite du passage insiste prcisment sur
1' art
et
1'
ing
niosit
(arte...,
ingeniose)
avec
lesquels
l'criture
relve
les
intelligences
dchues.
Paraphrasant
ici encore
Denys,
Jean Scot
souligne de nouveau
le
caractre naturellement adapt de cette
symbolique. Mais il
laisse
aussi clairement
entendre
que
ses
l
ments et illustrations, emprunts aux
ralits
de l'univers des sens,
ne
nous sont connaturels
que pour un temps (adhuc)
:
le temps
de la
condition
charnelle
que nous ont value
nos
pchs ^K Cette
remarque est de la plus haute importance pour l'valuation du rle
rel de
l'criture,
qu'on
va
lire
la
fin
de
ce
dveloppement.
Mais avant d'en
venir
cette conclusion, Jean Scot insiste de
nouveau
sur
la liaison trs troite entre les artes et
l'criture dont
la fonction et les procds sont mis en parallle avec ceux de la
posie moralisatrice, didactique ou pique. Comme la posie,
l cri
ure oit duquer des
intelligences en tat
d'enfance et les conduire
leur
maturit.
Cette
maturit toutefois
n'est rien
d'autre
pour
une
intelligence que
son
retour sa condition premire o elle
trouve et
cre en
elle-mme sa propre
science
de
Dieu
et
de
tout,
et
o,
par
consquent, elle peut se
passer
d'une
GsoXoyta offerte
dans
l his
toire et du dehors.
Mais on doit rapporter ici les propres termes de Jean Scot :
C'est
comme si [Denys] s'exprimait clairement de la manire
suivante : de mme que l'art de la posie (ars poetica), par des
contes invents ou des comparaisons allgoriques (perfictas fabulas
allegoricasque similitudines), labore un enseignement d'ordre
moral
ou physique
(moralem
doctrinam
seu physicam
componit)
(2)
pour former
les
intelligences humaines
(ad humanorum animorum
(1) Exp. II, 146 AB :
tali
namque arte fictarum imaginum animum nostrum
relevons
(ou : revelans),
velut
expressius transferri
potest,
animo nostro
consu-
lens, ipsique animo
propria et
connaturali
rductions,
quae videlicet ingeniose
in
imaginibus
rerum
sensibilium formatur, quae nobis adhuc
in
carne constU
tutis
connaturales
propter
delicta nostra
sunt,
providens ad ipsum,
hoc est,
ad
ipsius
animi
reductionem,
sanctas
Scripturas
anagogicas,
sursum
scilicet
animum
ducentes,
conformavit
.
On
notera
combien la paraphrase
est
proche
des termes
mmes
de Denys; mais on relvera
aussi
les
termes
: arts,
ingeniose
qui font
cho au valde artificialiter de la
traduction.
(2) Quelques
mss : componunt.
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exercitationem),
et c'est bien l
ce que
font les potes piques
{heroicorum
poetarum) dont l'art consiste louer
les
exploits et
la conduite de
leurs
hros
{virorum
fortium facta et
mores figurate
laudant)
(1)
de mme
l'[art] thologique, la
manire
d'un
pote {ita theologica ^
veluti quaedam poetria), modle
la sainte
criture
selon des images fabriques {sanctam
Scripturam
fictis
imaginationibus . . . conformt) pour l'adapter notre intelligence
{ad
consultum
nostri animi
= rv
xa0
7)(x
vouv vacrxet];a(xv7))
et lever
{reductionem
= vaycoy^v) [cette intelligence]
partir
des
sens corporels
extrieurs,
comme
partir de la
condition imparfaite
de
l'enfant
{veluti ex quadam imperfecta pueiitia), jusqu la
connaissance parfaite des
ralits
intelligibles {in rerum intelligi-
bilium
perfectam cognitionem), qu'on peut comparer
la pleine
maturit
de
l'homme
intrieur
{tanquam
in
quamdam
interioris
hominis grandaevitatem) (3\
Telle est la
fonction
empirique et prsente
de
la BsoXoyia :
elle doit duquer des intelligences affaiblies, selon les rgles mmes
de l'intelligence que sont les artes, la posie par exemple; mais
cette tche provisoire accomplie, l'intelligence seule
subsiste,
et
(1)
Sur
cette
fonction
de
la
posie
profane,
voir,
par ex.
:
F.
Buffire,
Les
mythes d'Homre
et
la
pense grecque,
Paris, 1956; J. Ppin, Mythe
et
allgorie :
les
origines
grecques
et
les contestations
judo-chrtiennes, Paris,
1958. Ajoutons
que Jean Scot a eu
au moins
un
prcurseur pour
l'interprtation de
ce passage
de
Denys.
Maxime le Confesseur (ou
Jean
de Scythopolis?), Scholia in
librum de Coelesti Hierarchia
(PG
4, 36 CD)
commente ainsi
l'adjectif
tcoiyjti-
xa du texte de
Denys
: "Oti
xal
7roi7)Tixa x opvia cni(ji6oXa
o Trap 7row}Ta't
avTocofjtivoi, >
iepo vJjp ox cpjai (7roi)T
-
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43
la
QeoKoyioL
devient
inutile, comme
elle
l'et
t
sans
le
pch :
L'intelligence
humaine
(humanus animus)
n'a pas t cre
cause de (propter) la
divine criture
dont elle n'aurait
aucun besoin
sans son
pch (cujus nullo modo indigeret, si
non
peccaret) ;
mais
c'est
cause de
l'intelligence humaine
que la sainte criture a t
compose
(contexta) selon la
diversit
de
ses
symboles
et
de ses
enseignements, pour que, par cette
initiation
(introductionem),
notre nature rationnelle
(rationalis
nostra
natura), que sa
propre
faute avait fait dchoir de la contemplation de la vrit, ft
ramene
vers le
sommet
de la
contemplation
pure
dont elle jouissait
son
origine (iterum in pristinam
suae
contemplationis
reduceretur
altitudinem) ^\
En fait, le commentaire
direct
de la
phrase
de Denys a
li
de
manire
extrmement
troite
la
fonction
de l'criture aux
arts
l ib
raux et spcialement, pour les
passages
bibliques ici
voqus,
la posie : c'est l pour le moins une manire surprenante de com
menter
YGKjrzyytc,
de
Denys. En deuxime lieu,
contre
Denys
encore, Jean Scot
subordonne
fondamentalement la GsoXoyta
l'intelligence.
Celle-ci est chronologiquement
et axiologiquement
suprieure
l'criture, puisqu'elle possde
ternellement, dans
l'unit et dans sa
totalit,
la science que l'criture propose dans
le temps,
l'tat
divis
et
partiel.
Sans
doute, dans la
condition
prsente (adhuc), l'criture est bien
1'
ducatrice qui relve
l'intelligence
dchue.
Mais, apparemment
du
moins,
elle ne
peut
accomplir
sa fonction
qu'en se conformant aux disciplines
ou aux
arts libraux.
On
peut donc se
demander si cette
liaison de fait
entre
artes et 0soXoyia
se
double
d'une liaison de droit,
s'interroger
sur
la
vraie nature
des
artes selon Jean
Scot
et sur
leur rapport
avec Vintellectus, essayer de voir,
enfin,
les consquences qui
peuvent
en
dcouler
pour
l'criture
elle-mme
et
pour
son
inter
prtation.
* *
La premire
question
reoit une rponse affirmative dans
Expo-
sitiones
I.
Jean
Scot
y explique
encore
une formule de
Denys
:
Les enseignements sacrs que l'criture donne d'une
manire
discursive
{ou
:
tale)
sont
l'image
de
la
plnitude
que
la contemp
lation
apporte
l'intelligence : -nj xonr vouv
(1) Exp.
II, 146 C.
-
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44
Up
L'adjectif Sis^oSixo voque tout de suite pour le comment
ateura doctrine des sept arts libraux : septem disciplinas,
quas
philosohi librales appellant
^2^.
Et, aprs un court
dveloppement sur
l'unit de
tous
les arts dans
le
Christ,
source
de
toute
sagesse
^, Jean Scot conclut par ces formules
dcisives:
Tous les
arts naturels
[= libraux] concourent
signi
fier
e Christ de manire symbolique, [ces arts] dans les limites
desquels
est
inclue
la totalit de
l'criture
divine (... Christus...,
in cujus significationem typicam omnes naturales artes, intra
quarum terminos tota divina concluditur
Scriptura,
concurrunt).
Car il n'existe aucun passage de
l'criture dont
soient absentes
les rgles des arts
libraux
(Nulla
enim
sacra Scriptura est,
quae
regulis
liberalium careat
disciplinarum)
(4>.
Ainsi
les
arts
sont
non seulement
prsents la totalit
de l'criture, mais celle-ci
est
pour
ainsi dire
enferme
dans leurs
limites .
C'est dire,
quivalemment, qu'il est impossible qu'existe une
criture
en
dehors des rgles des artes.
L'affirmation
est aussi hardie que
nette.
Elle est
d'ailleurs taye sur
un rapprochement qui donne aux
artes une condition analogue
celle de vou. De mme
en effet
que
le
voG
est
une
image
de
Dieu
et
de la
Trinit,
pareillement
les artes
sont
une
image du Christ.
Le rapprochement parat
inspir
par l'ide de cours, de
course
ou de
courant
(cours d eau,
en particulier)
dans
laquelle
on
trouve la
signification
la plus
connue de
l'adjectif
Ste^o&x : Aiso8ix item disc
plinas
notiore interpretatione decursativas possumus accipere (5).
Or,
comme
les
eaux multiples venues de sources
diverses confluent
et
s'coulent
dans
le
lit
d'un
fleuve unique,
pareillement
les arts
libraux
et
naturels
s'unissent
dans
le sens
un
et
identique de la
contemplation
intrieure,
que le Christ,
source suprme de
toute
(1)
CH
1,
121
D, comment par
Exp.
1, 139 C-140
A.
(2) Exp. I, 139 C. La
liaison
qu'tablit Jean Scot
entre
les
deux
notions appar
at ncore dans la
traduction
de l'adverbe SteoSixco de DN
VII,
868
B, par
artificiose
(Versio,
1154 A);
le mme
adverbe de DN II,
637 B,
est traduit
par
decursim
(
Versio,
1120
B)
qui
est
l'un
des
synonymes latins
du
terme grec
pro
poss par Exp. I, 139 C.
(3) Exp.
I, 139
C-140 A. Nous allons revenir
sur
ce
thme.
(4)
Exp.
1, 140
A.
(5) Exp. 1, 139 C.
-
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4e
sagesse,
insinue de toutes parts, grce
aux
[disciplines]
diverses
qui scrutent l'criture (1). Et, estime Jean Scot, l'explication est
peut-tre confirme par le Psaume I, 3, o il est prcisment
question de
decursus
aquarum, toc Sis^oSoo
-r&v
Srcov
(2).
Une
image semblable est
applique, ailleurs et
plusieurs
reprises,
au
Verbe
lui-mme,
dont
la
course
est
et
cre tous les
tres
^3^.
Sous
ce
rapport, il existe donc une
similitude assez troite entre le
Christ-Verbe, source de toute
sagesse,
et
les arts
libraux qui
confluent,
concourent
et s'unissent dans le
Christ,
que le Christ
rpand dans la totalit de l'criture dont ils constituent les normes
constantes, ou, pour reprendre les
termes
de Jean Scot, les
bornes,
les limites , la clture {terminos... concluditur).
Ainsi les artes entrent dans l'criture, dans la totalit de
l cri
ture,
comme des disciplines
rgulatrices
qu'impose
la sagesse
du
Christ. Et
cette
rgulation
est
universelle et ncessaire.
Deux affi
rmations
qui
dpassent
singulirement
la porte de la
phrase ano
dine
de Denys sur l'enseignement tal ou discursif de l'criture
(tix
* *
On le voit, Jean Scot
commentateur
s'attache surtout prsenter
un Denys rignien . Les
positions
qu'il expose, propos ou
l'occasion d'une indication assez frle et vague (Expositiones I,
139 C-140
A),
ou par l' artifice
d'un contre-sens caractris
(Expositiones
II,
146 AC), sont
en
ralit les positions mmes qu'il
dveloppe
dans
le
reste de son uvre
o
sont constamment
dfen
dues a lgitimit
et
la
ncessit des artes
librales, soit dans l'cri-
(1) Exp. I, 139 C-140
A
: Ut
enim
multae
aquae ex diversis fontibus
in
unius
fluminis alveum confluunt
atque decurrunt, ita naturales
et
librales
disciplinae
in una eademque internae
contemplationis
significatione adunantur,
quam summus fons
totius
sapientiae, qui est
Christus,
undique per diversas
theologiae
speculationes
insinut
.
(2)
Exp.
I, 140
A.
(3) Cf. Remarques, p.
274.
Dans ce sens, Jean Scot utilise frquemment Psaume
147, 15
:
Velociter
currit
sermo
ejus
,
et
aussi
Sag.
VIII,
1
:
attingit
a
fine
usque ad finem
(voir, par
ex., les
dveloppements
de DDN
III,
642 C-643 B).
Ajoutons que l'tymologie 8s6-8ev est
aussi
reprise
par
Jean Scot
pour carac
triser la course
du
Verbe
travers la
cration,
cette course tant elle-
mme
l'acte
crateur
(cf. DDN
I, 452 BD, 453 BC, 460
A, par ex.).
-
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46
ture elle-mme, soit chez les exgtes de l'criture &K
Cette
attitude
est commande par
la
dignit
mme
que Jean
Scot recon
nat ux artes.
Les arts libraux, en effet, ne sont pas le rsultat d'une invention
humaine plus ou moins
fantaisiste,
imaginative ou irrationnelle.
Ils ont t crs par Dieu dans la nature mme des choses ,
comme il est dit propos de la dialectique, mais avec l'intention
vidente d'inclure
tous
les arts : Ac per
hoc
intelligitur, quod
ars
Ma, quae...
&iaXexTix7)
dicitur, non ab humanis machina-
tionibus sitfacta,
sed
in natura rerum, ab
auctore
omnium artium,
quae vere
artes
sunt, condita, et a
sapientibus
inventa, et
ad uti-
litatem solerti rerum
indagine usitata ^2\ L'art ne
saurait
tre,
en particulier, une humana machinatio, dans la mesure o le
deuxime
terme,
souvent
pjoratif chez
Jean
Scot,
impliquerait
une faute, une intention mauvaise, un manque d'intelligence, ou
ces
trois
inconvnients runis W. Il appartient de plein droit
l'ordre des
natures
cres par Dieu, et c'est pourquoi on
parlera
indiffremment Partes librales
ou H
artes naturales,
les deux
(1)
Signalons
seulement,
entre autres,
deux passages o
sont
prsents
les
artes, leurs dfinitions globales
ou
respectives
et
leurs
fonctions
:
DDN
1, 475
AB;
V, 868 D-870 C;
cf.
DDN III, 651 A-652 D,
pour
l'arithmtique; DDN
I,
463 B
et
IV,
749
A, pour la
dialectique. On ngligera
ici les
prsentations, vrai
dire
nombreuses,
que
Jean
Scot
propose
des
divers arts.
(2) DDN IV, 748 D-749
A. Le
inventa
ne
doit pas s'entendre, semble-t-il,
d'une
dcouverte
l'extrieur de
soi, mais
plutt
d'une prise
de conscience des
artes par le
voO
et dans le vou, ainsi qu'il est prcis
en
DDN III, 658 B (ci-
dessous, p. 49, n. 2).
(3)
De
praed. I, 4, 359 C ( propos de Godescalc) : nova
nunc
machinamento
murum
munitae
fidei
solvere temptat
;
Exp.
IX,
215
D
:
miserrimarumque
rationabilium animarum
irrationabilia machinamenta
; DDN III, 724 C (
propos des conjectures humaines et du recours immodr
l'explication
par
le miracle)
: Plus ergo
tenet
divina
virtus et
naturarum ratio, quam quod
machi-
natur
humana cogitatio
; V,
870
B (opposition irrelle des artes la natura) :
si
[artes] secundum
naturam
non
sunt, sed secundum
humana
machinamenta ;
873 D ( propos
du
diable) : malitiae suae machinamenta ; 970
A
: quod
vanissimis mortalium
opinionibus
machinatum est ;
973
C : superstitiosa
falsissimaque machinamenta ;
1019
D : diabolicae
astutiae
machinamenta .
En revanche, nous
relevons
quelques emplois o le terme signifie,
sans
note pjo
rative,
l'ingniosit de l'intelligence
ou
de
l'instinct
animal
:
Exp.
XV (Dond.,
p. 296, 1.
5
et 11, propos de l'aigle et des intelligences clestes dont il est le sym
bole :
bene
machinatur quo argumento
predam
qua vivat rapere valeat...; agi-
liter divina
mysteria
penetrare
machinantur; DDN
I,
512 B :
Quid tibi viderer
his
argumentationibus
machinari .
-
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47
caractrisant d'ailleurs
souvent
la fois
le substantif (1).
n tant
que natures,
les artes subsistent ternellement dans les
primordiales
cres par
Dieu, et
elles-mmes
cratrices. Mais
de prciser les conditions et les
modalits
de cette
C'est dans
l'intelligence
qui est, pour ainsi dire, leur lieu ,
tous les arts subsistent dans l'unit. Les dfinitions que donne
qui sont dans l'intelligence et sont cres par elle,
en effet
d'un art dtermin;
ce
titre,
elles
sont inclues
cet art qui
ne
peut tre
lui-mme
qu'inclus dans
l'intelligence.
e
disciple d'rigne
en convient en ces termes
:
His rationibus
fateri
non
esse locum [artium liberalium] nisi in
animo
vco, intellectu, mente]. Si enim definitio omnis in
disciplina
et disciplina in animo, necessario locus omnis, quia
definitio
non
alibi
nisi in
animo
erit ^2'.
L'inclusion
des arts dans l'intelligence
n'est pas adventice ou
mais essentielle, et c'est pourquoi
ils
sont ternels et
l'intelligence
elle-mme : Ne te semble-t-il
et conforme une raison certaine , demande
son disciple qui va l'approuver, d'estimer que toutes
disciplines librales rsident dans cette partie de l'me
qu'on
vpyst.a,
c'est--dire
acte
(omnes
librales
disciplinas
ea
parte, quae vlpysia,
id est operatio animae dicitur,
(3). Car
c'est
en toute vrit que
les
recherches
des
ont abouti cette
dcouverte
(a
philosophis
veraciter
repertumque est) que les arts sont ternels {artes esse
et qu'ils
tiennent
toujours
l'me
de
manire
immuable
immutabiliter animae adhaerere), non pas d'une manire
les ferait apparatre comme de
simples
accidents {quasi acci-
quaedam
ipsius
esse
videantur),
mais
bien comme des
vertus
(1) Exp. I, 139 C : naturales et librales disciplinae ; 140 A :
naturelles
liberalium disciplinarum ; DDNlll,
658
B : ars
naturalis...; naturalium
; III,
651 D
( propos de l'arithmtique) :
M. Est ergo
ars Ma
natu
D. Etiam et nulla naturalior (suit,
ibid.,
652 A, une allusion justificative
Sag. XI, 21 : -omnia
in
mensura et numro et pondre disposuisti);\ , 749 A :
ira
natura
rerum
condita (dialectique et
autres arts) ; 774 C :
naturalium
quas
librales
appellant .
(2) DDNl,
475 B;
cf. la
dmonstration
pralable
d'rigne,
ibid.,
474
B-475
B.
(3) Jean Scot
vient
de rappeler la division
en
oota,
Svafii,
vpyeia
I, 486 BC), avec
rfrence
Denys (cf. CH XI, 284 C-285 A) qui applique
cette division aux intelligences
clestes.
-
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48
-
et des
actes
naturels (sed naturales virtutes actionesque) qui en
aucune faon
ne
s'cartent ni
ne
peuvent s'carter
d'elle
(nullo
modo
ab ea recedentes, nec recdere valentes),
qui ne lui
viennent
pas d'ailleurs (non aliunde venientes)
mais
se trouvent en elle
au
titre de la nature (sed naturaliter ei insitas) si
bien
qu'on pourrait
hsiter dcider
si
ce
sont
les
arts
eux-mmes qui confrent l ter
nit
l'me
(utrum ipsae
aeternitatem
ei
praestent),
puisqu'ils sont
ternels et qu'ils tiennent toujours l'me, en sorte qu'ils la ren
draient
ternelle (quoniam aeternae sint, eique semper adhae-
reant,
ut aeterna sit);
ou
si, [au
contraire], c'est en raison
de leur
sujet
d'adhsion qui
est l'me,
que
l'ternit est confre aux arts
(an ratione
subjecti,
quod est anima,
artibus aeternitas
adminis-
tratur),
car l'ouata de l'me, sa puissance [S6va[xt]
et son
acte
[vpysia]
sont ternels
(ocria
enim
animae
et
virtus et
actio
aeternae sunt); ou si, [enfin], les arts et l'me sont si fortement
attachs entre eux, tant tous ternels, qu'on
ne
peut
pas
les dis
joindre l'une des autres (an ita
sibi invicem
coadhaereant,
dum
omnes aeternae sint, ut
a
se
invicem segregari
non
possint)
^K
Le
fait que Jean
Scot
mette, sans
la
repousser
expressment,
l'explication, ses
propres
yeux hardie, selon
laquelle l'ternit
des
artes pourrait tre
l'origine
de l'ternit de l'intelligence,
est
extrmement rvlatrice
de la
trs
haute
dignit
que
l'on
doit
accorder aux
artes.
Mme
si les deux autres explications, la deuxime
surtout, lui
semblent plus
probables, et quelle
que
soit
d'ailleurs
celle des trois
explications proposes
que
l'on voudrait
retenir,
il reste
que
les
arts sont ternels et immuables comme l'me, qu'ils lui
sont unis, non pas comme
des accidents
mais au titre
de
la nature,
non pas du dehors mais du dedans, et cette union est ternelle,
immuable, indissociable (aeternas... immutabiliter... nec recedere
valentes).
*
* *
Cette condition des artes dans l'intelligence est encore prsente
au livre III du De divisione qui dcrit
en
outre leurs
fonctions
diver
ses
t hirarchises comme rigoureusement accordes,
concomit
antest unies
aux
fonctions,
parties ou niveaux
de
l'me que sont
le
vou
(intellectus,
animus,
mens), le
Xoyo
(ratio)
et
la
Stvota
(1) DDN
I,
486
CD.
-
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(sensus
interior; ici, memoria), avant leur
commune
expansion dans
l'univers des sens. Le texte met
en
parallle la
procession
gnrale
des artes,
qui est
la
procession
mme
du
vou, avec la
procession
particulire
de la
monade
qui se
manifeste
progressivement dans
les nombres et qui correspond, elle aussi, la procession du
vou
W.
Nous
retenons seulement
le
premier
terme du
parallle :
Tout
art naturel, en tant qu'il est contenu dans le sein trs secret de
la nature
intellectuelle
(in secretissimis intellectualis naturae
[= vou] sinbus continetur), subsiste
en
un
seul
acte (simul est);
il est une ralit une et simple (et [est] unum quoddam
simplex),
sans parties
ni divisions,
sans
quantit ni
qualit, sans lieu
ni
temps, parfaitement
affranchi
de tout accident
et
peine
connu
de la seule
intelligence (omnino omnibus
aecidentibus absolutum,
ac
vix
soli
intellectui
cognitum);
car
l'intelligence
ne
cre
pas
les
arts naturels, mais elle les dcouvre, et cette dcouverte, elle ne la
fait pas hors
d'elle-mme,
mais bien en elle (non enim intellectus
naturalium artium
factor
est, sed inventor, non tamen extra se,
sed
intra eas invenit)
^\
mais, en
tant
que cet
art sort lui-mme
de son propre secret
o
il subsiste
en
un
seul acte,
dans l intell
igence
ui le contient
(dum vero
ipsa
ars ab arcanis suis, in quibus
simul in animo
[=
vw, mente,
intellectu],
in
quo
est),
il
commence
descendre dans la raison selon une procession
intelligible
(in
rationem
[=
Xoyov] intelligibili progressione incipit descendere),
et aussitt il
commence
dvoiler peu
peu
ses
normes caches
en
des divisions et des
diffrences
manifestes (mox paulatim suas
occultas rgulas apertis divisionibus atque differentiis inchoat
aperire), mais
ces
normes restent encore trs pures et trangres
toute image
(adhuc tamen
purissimas,
omnique
imaginatione
alinas)
; et cette premire procession de l'art
partir
de
la
science
qui
mrite
ce
nom,
dans
laquelle
il
subsiste
originellement,
s a
ccomplit dans un passage de l'intelligence dans la raison et par un
acte de l'intelligence elle-mme (et haec processio prima
artis
ab
ipsa scientia, in qua primitus subsistit, per
intellectum
in rati
onem ipsius intellectus actu perficitur), car tout ce qui passe des
(1) DDN III, 658 B-659 B.
(2) Quelques
mss omettent
:
sed
intra. Cette
prcision n'est
pas
indispensable
au
sens
de la phrase. Le
vou,
qui
pourtant cre
tout, ne
cre par
les artes; il
les dcouvre seulement,
en
ce sens que les artes sont dans le vou? et sont le vou
lui-mme. Explication semblable
pour
le
inventa
de DDN IV, 749
A (ci-dessus,
p. 46, n- 2).
-
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50
secrets de la nature
la
raison,
y parvient par l'action de
l intell
igence omne
siquidem,
quod
ex
secretis
naturae in rationem
pervertit, per intellectus actionem accedit) ; mais nouveau, comme
en un deuxime [moment de sa] descente [processive], ce mme art,
descendant de la
raison
dans la mmoire, s'ouvrant peu peu
davantage dans des
reprsentations
images
comme
dans des
formes, se manifeste lui-mme de manire plus claire
(iterum
veluti
secundo
descensu eadem
ars
ex
ratione
in memoriam
des-
cendens, paulatim apertius in
phantasiis, veluti
in
quibusdam
formis
seipsam luculentius dclart) et dans un troisime
[moment
de sa] descente, il se rpand dans les sens corporels o il manifeste
son pouvoir par
des signes
sensibles
travers les
genres et
les
espces,
toutes leurs divisions, subdivisions et rpartitions {tertio vero
des
censu
ad
corporales
sensus
diffunditur,
ubi
sensibilibus signis
virtutem suam per gnera et species, omnesque
divisiones suas
et
subdivisiones
et partitiones exerit). Pareillement les
nombres
intellectuels se rpandent
partir de la monade...)
&\
Les moments
de la
procession
des
artes qui
les font passer
progressivement
de l'absolue
simplicit
l'extrme
division
qui
caractrise l'univers des sens, sont, on le voit, rigoureusement iden
tiques aux moments de la procession du vou lui-mme. Ce qui
ne
doit
pas
tonner,
puisque
la procession des
arts
s'effectue
dans
et par le vou, les arts subsistant eux-mmes dans le vou
auquel
ils
appartiennent par
nature,
de manire ternelle, immuable,
indissociable. Et si
l'on
rappelle que les fonctions du
vou sont
elles-mmes
assimiles
aux relations intrieures
de la
Trinit,
dont le
vou
est l'image (2), on doit convenir que la dignit
des
artes, confondue avec celle du vo, ne peut pas tre plus grande.
Le vous
en
effet, par son acte mme de
connaissance,
est,
son
niveau,
c'est--dire
dans
le
Verbe,
crateur
de
tout,
comme
Dieu
lui-mme ^; les artes, par consquent, le sont aussi.
(1)
DDN
III, 658 BC. On note dans
tout
ce passage,
comme
dans plusieurs
des
passages
cits dans la prsente tude, le
caractre
typiquement et essentie
llement thophanique ou photophanique ou noophanique de la pro
cession rignienne.
(2) Remarques, p. 310-315, spcialement 312-315,
pour
les rapprochements :
voo intellectus Pater;
Xoyo
ratio
Filius; Sivota
sensus
interior
-
Spiritus.
(3) Cf. DDN IV, 778
D-779
A : Ut enim sapientia creatrix, quod est Verbum
Dei,
ornnia,
quae
in
eafacta sunt, priusquam firent, vidit, ipsaque visio
eorum,
quae, priusquam firent, visa sunt,
vera
et incommutabilis aeternaque essentia
est, ita creata sapientia, quae est
humana natura,
omnia,
quae
in sefacta sunt,
-
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21/42
C.4
II se
trouve mme quelques
passages qui paraissent attribuer
aux
artes une espce de
priorit
ou
d'excellence
causale sur le
vou. Jean Scot,
nous
l'avons vu,
a
dj suggr, avec, il est vrai,
deux autres explications qui ont sans doute sa prfrence, que
l'ternit
de l'intelligence
pourrait
driver
de
l'ternit
des
artes
(1).
Paralllement et
sous
forme
interrogative
encore, il suggre une
priorit
semblable sous le
rapport
du mouvement que
les
intell
igences recevraient galement des artes
: Et que
dire des arts
que les sages nomment
disciplines
librales et
dont,
bien qu'ils
demeurent
en eux-mmes et par eux-mmes dans la
plnitude,
l'intgrit et
l'immutabilit (dum
in
semetipsis
per semetipsas
plenae,
integrae,
immutabilesque permanent)
^2\ on dit pourtant
qu'ils sont soumis au mouvement (moveri tamen dicuntur),
lorsqu'ils incitent
le
regard de l'intelligence rationnelle
les recher
cher t
les dcouvrir et qu'ils
l'attirent
les contempler
eux-
mmes
(quando rationabilis animi contuitum
ad se quaerendas
inveniendasque permovent, et
ad
se considerandas attrahunt),
en sorte que ces arts eux-mmes
qui,
nous l'avons dit, sont par
eux-mmes immobiles, paraissent cependant subir un mouvement
dans l'intelligence des sages, alors que [ce sont] les arts [qui]
meuvent ces intelligences
(moveri
tamen in mentibus sapientum
videantur,
cum
eas
moveant)?
^.
Le
mouvement
de l'intelligence serait
ainsi,
malgr les appa
rences contraires, impos
l'intelligence
par
les artes, et non
pas, inversement, aux artes par
l'intelligence.
Par ce mouvement,
l'intelligence
serait
tourne
vers la recherche, la
dcouverte
et
la
pleine
connaissance
des
arts immuables et ternels qu'elle porte
en elle-mme, sous l'impulsion ou l'attrait de ces mmes arts. Cette
manire de voir
donne
encore plus de relief
l'excellence des
artes.
Et
l'on
ne
peut
pas
s'tonner,
ds
lors,
que
Jean
Scot
leur
priusquam firent, cognovit, ipsaque cognitio eorum, quae, priusquam firent,
cognita sunt,
vera
essentia et inconcussa est ; paralllisme
semblable
au 779 BC.
Sur cette position essentielle
du
systme, voir encore
Remarques,
p. 311-312.
La diffrence
entre
la
condition
du Verbe et
celle
de l'intelligence humaine est
que les tres
crs
subsistent et sont
crs
dans le premier titre de causes (cau-
saliter), et que la seconde, au contraire, les
cre
seulement
titre d'effets
(effec-
tualiter)
(DDN
IV,
779
BC).
(1) DDN I, 486 CD. Texte dj cit.
(2) Soulignons cette
espce d'autonomie totale
des
artes,
implique
par
la
rptition du rflchi : in semetipsis, per
semetipsas.
(3) DDN I, 521 B.
-
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Oi
assigne,
comme
l'intelligence,
un rle de tout premier plan, en
quelque
manire
exclusif, dans la conception et dans la composition
de
l'criture,
d'une part,
et,
d'autre part, dans toute entreprise
humaine de connatre et d'expliquer en profondeur cette mme
criture &K
*
*
Ngligeant l'analyse des procds rels de l'criture, ngli
geant mme peu prs le dtail des explications notiques qu'en
propose
Jean Scot, on voudrait
indiquer
comment la doctrine des
artes,
jointe
au principe de leur prsence
rgulatrice toute l cri
ture,
pouvait
apparatre
comme la
condition
ncessaire
et
suff
isante
d'une hermneutique.
En droit le vou et les artes qu il contient sont donc premiers.
Ils subsistent ternellement au niveau des causes primordiales,
dans le Verbe-Sagesse. Ils sont l'image ou
l'
expression la plus
acheve
de Dieu, la
plus
leve et la
plus
parfaite des
natures,
celle en qui
et par
qui
sont comprises et
cres
toutes
les
autres
natures.
De
ce point de
vue et
ce
niveau, l'intelligence et
les
artes
dpassent
certainement
en dignit
et
l'criture
et
la
cration
des
effets
(en dessous
des
causes
primordiales et
partir
de ces causes),
qu'il s'agisse de
l'univers des
sens ou de l'univers des intelligences
sortis de leurs causes. La connaissance par le vou et ses artes,
dans
leur
puret originelle,
a
dj compris avec beaucoup plus
d'ampleur, de
profondeur
et de
sret
tout
ce que
peuvent
rvler
et la nature et
l'criture;
et
c'est
pourquoi Jean Scot
a pu affirmer
que,
sans le pch,
l'homme
n'aurait eu aucun
besoin
de l cri
ture
2>.
Cette vidence permet de prciser la porte d'une
affirmation
plusieurs fois reprises, selon laquelle la cration et l'criture
constituent les deux domaines o Dieu s'est rvl. Cette pense
est illustre par plusieurs mtaphores. La cration (surtout l uni
vers
sensible)
et
l'criture
sont les
deux
vtements du
Christ ,
et
nous ne
pouvons
pas
ngliger la
premire
au profit de la seconde,
(1) Exp.
I, 140 A
:
intra
quorum
[artium]
terminos tota
divina
concluditur
Scriptura .
(2) Exp. II, 146 C : cujus [Scripturae] nullo modo
indigeret
[homo] si
non
eccaret
.
Texte
dj
cit.
-
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53
car
toutes les deux doivent nous instruire
un
titre gal &K A il
leurs,
cration
visible
et criture sont prsentes
comme la
rv
lation
de la robuste stature
du Christ (veluti quaedam
corpu-
lentia Christi) qui nous permet de comprendre
tout
ce que nous
pouvons
comprendre
^2^.
La
mme
signification
est
attribue
la
chaussure
du Christ ou ses
pieds
, propos
de
Jean I,
27 ^. Les traces des deux pieds, leurs vestiges , corre
spondent
la nature et
l'criture
^4^. Mais on doit observer
que
toutes
ces
mtaphores se
rapportent
deux ordres de
ralits
qui
ne
sont
pas
ternels et
o
apparaissent
l'vidence des limi
tations
multiples
: le monde sensible est divis, successif,
pris
sable; l'criture a t compose dans le temps, elle ne dit pas tout,
et
mme ce
qu'elle
dit est
soumis aux lois
empiriques
du
langage
qui
empchent
plus qu'ils ne
favorisent
une expression adquate
et totale.
Aussi bien, dans les passages
que nous venons
d'voquer,
Jean Scot souligne-t-il l'insuffisance de ces deux sources de
connaissance.
A propos de la
nature,
il parle dj de la raison
naturelle
qui
l'interprte;
et
propos de
l'criture,
il voque
sa signification
intellectuelle
ou
spirituelle : & Duo pedes Verbi
(1) DDN III,
723
D :
-Et
si duo vestimenta Christi sunt...,
divinorum
vide-
licet eloquiorum
litera,
et
visibilium
rerum
species
sensibilis, cur jubemur unum
vestimentum [se.
.
Scripturam]
diligenter
tangere,
ut
eum,
cujus vestimentum
est, mereamur invenire,
alterum vero,
id
est, creaturam
visibilem,
prohibemur
inquirere?
(2) DDN V, 1005 B : Mis
enim
duobus, litera videlicet
et
visibili creatura,
veluti quaedam corpulentia Christi apparet, quoniam
in
eis
etper
eas
intelligitur,
quantum
intelligi potest
.
(3) Jean Baptiste y dit de
Jsus
: cujus
ego non
sum dignus ut solvam ejus
corrigiam
calceamenti
.
(4) Aprs
une premire interprtation
o Jean Scot
voit
dans
l'action
de
dlier
la
courroie
de la
chaussure l'explication
des
mystres
relatifs
l'humanit
et
la divinit du Christ, il ajoute
en
effet : Potest etiam per
calceamentum
Christi
visibilis creatura et
sancta
Scriptura
significari
:
in
his
enim vestigia
sua veluti
pedes
suos
infigit
{Comment., 307 A).
La
suite
immdiate
reprend la
mtaphore
du
double
vtement , qui sera remplace,
en
cours d'explication, par celle des
deux pieds , et applique l'une et l'autre au Verbe :
Habitus
quippe Verbi
est
creatura visibilis,
quae eum aperte praedicat,
pulchritudinem
suam
nobis
manifestans. Habitus quoque
ejus
facta est Scriptura, quae
ejus
mysteria conti-
net,
quorum
omnium,
id
est,
creaturae
et
litterae corrigiam, hoc
est,
subtilitatem
solvere
indignum
se
praecursor existimat. Duo
pedes Verbi
sunt,
quorum
unus
est
naturalis ratio
visibilis creaturae,
alter spiritualis intellectus divinae Scrip-
turae. Unus tegitur sensibilis mundi sensibilibus formis,
alter
divinorum api-
cum,
hoc
est, Scripturarum superficie
(ibid.,
307 AB).
-
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54
surit,
quorum unus est naturalis
ratio
visibilis creaturae, alter
spiritualis intellectus divinae
Scripturae^.
C'est
introduire
dans ces deux domaines,
en
principe privilgis, de la
rvlation
divine, Yintellectus
ou
la ratio naturalis.
Or, par
ces termes, on
doit entendre l'activit naturelle du vou, c'est--dire celle
dont il dispose dans sa condition essentielle et ternelle, au
ni
veau
des
causes ou
des
natures pures. Ce n'est donc qu'en rf
rence
au vou, par la lecture
interprtative
du vou, que nature
et criture peuvent remplir leur fonction rvlatrice.
Des indications semblables accompagnent le premier texte
rela
tif ux deux
vtements du
Christ
.
Jean Scot
s'y explique
de la
manire suivante :
De mme
que par les
sens on
parvient l i
ntelligence ainsi par
la
cration
on
retourne Dieu. Car
nous
ne
devons
pas,
comme
les
animaux dpourvus
de
raison
(irrationa-
bilia animalia), limiter notre regard la seule apparence des ralits
sensibles
(solam superficiem rerum visibilium... intueri);
nous
devons en outre donner la raison de ce que nous percevons par
nos sens corporels (de his, quae
corporeo
sensu percipimus, ratio-
nem reddere debemus). L'aigle voit avec plus
d'acuit (acutius)
l'apparence (speciem) du
soleil l'homme sage
voit
avec
plus d'acuit
sa
position et son
mouvement dans
l'espace et
dans le temps
(situm
...
et
motum
per
loca
et
tempora). Et
si
l'homme
ne vivait
pas sous le rgime du pch et de la chute qui le fait ressembler
aux btes de somme,
ignorerait-il
les limites parfaites de ce monde
qui lui appartient en propre, qu'il gouvernerait de manire trs
juste selon les lois de la nature (numpossessionis suae, mundi hujus,
perfectos
terminos
ignoraret,
quos naturae legibus
justissime
regeret)
?
^2'. Il
fallait en effet
une seconde
[crature] ang-
lique
^ qui
lout
Dieu dans la
cration sensible, et
cette
[crature],
mme aprs
sa
faute,
n'a
pas compltement perdu la
dignit
de
sa nature
(qui nec
post
delictum
naturae dignitatem
omnino
perdidit). Il reste en
effet
dans l'homme le mouvement de la
raison
qui lui fait dsirer la connaissance des choses (rationbilis motus,
quo
rerum
notitiam apptit), et il
ne
veut pas tomber dans l'erreur,
bien
qu'il
y
tombe
en
maintes occasions, mais non dans toutes
(1)
Comment.,
307 B.
(2) Cf. Gre. I, 28-29.
(3)
Le
thme de
l'galit
de
l'homme
avec l'ange
(aequalitas angelorum)
est
frquent chez
Jean Scot ; cf. par ex.,
pour
le seul chap. 1er des Exp., 137 B, 138 BC,
140 BC,
142
C-143
A.
-
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oo
(neque
falli
vult, quamvis
in multis fallatur, non tamen in
omnibus)
(1).
Mme dchue, l'intelligence n'a pas totalement
perdu
sa dignit
de nature; elle
garde
sa fonction de connaissance; elle doit seul
ement
se dfendre
de
l'erreur
et
retrouver
ainsi
le
plus
complte
mentossible
l'
infaillibilit de sa condition originelle. D ail
leurs, mme dans leur condition
prsente,
des hommes
sages,
comme Abraham et
Platon, ont
pu
en
fait, par leur seule
intell
igence et
sans
l'aide de l'criture, retrouver
Dieu
dans la
nature;
ce
qui,
avant toute theologia, vaut
Abraham
le titre
de
magnus
et
sapiens
theologus :
Abraham
a reconnu
Dieu, non
pas
grce
la lettre de l'criture qui n'avait pas
encore
t compose,
mais
par le mouvement circulaire
des
astres (non per literas Scripturae,
quae
nondum
confecta
fuerat,
verum
conversione siderum
Deum
cognovit). Pourrait-on se risquer dire que, comme les autres
tres anims
(sicut
et cetera
animalia),
il regardait,
sans
plus, la
seule
apparence
des astres
(simpliciter
...
solas
species siderum
aspiciebat), et qu'il
ne
pouvait
pas parvenir en comprendre
les
raisons (non
autem rationes eorum
intelligere
poterat) ? Je n'aurais
pas
l'audace d'affirmer cela
de ce
grand sage
en science divine
(Non
tamen
hoc de magno et sapienti theologo
ausim dicere)
^2^.
Par
l'exemple
d'Abraham,
Jean
Scot s'estime personnellement
justifi de recourir des arguments philosophiques (philosophicis
ratiocinationibus) (3).
Et
si les
sages
de ce monde (mundanae
sapientiae periti) se sont tromps
en ne poussant pas
leur
tude
de la cration
assez loin pour y
retrouver
le Crateur, Platon du
moins y est
parvenu (quod
solus Plato
legitur fecisse)
^K
Mme
dans
sa condition prsente
et mme
sans
criture, l'intelligence
peut donc
encore
trouver, ou retrouver ,
la vrit
sur
Dieu,
bien
que
la chose
soit
assez
exceptionnelle
(Abraham,
solus
Plato).
Mais elle ne retrouve Dieu et sa rvlation que dans la mesure
o elle se retrouve elle-mme, dans sa
puret,
c'est--dire dans
sa propre
nature,
c'est--dire encore dans l'activit
stricte
et vraie
du vou originel et de ses artes.
*
* *
(1)
DDN
III,
723
CD.
(2)
DDN
III, 724
A.
(3)
DDN
III, 724 A qui invoque aussi la
justification classique des Hbreux
emportant les dpouilles des gyptiens.
(4) DDN
III, 724 AB.
-
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__
56
En un sens,
l'activit
du vou
devant
la nature est plus directe et
plus simple qu en face de l'criture. Celle-ci, en
effet,
s'exprime
dans un langage discursif, invitablement plus
prcis,
plus strict
et
plus
difficile
comprendre
que le
tmoignage silencieux ou,
du
moins, non formul, de
l'univers
sensible.
L'intelligence
et
les
artes doivent,
d'une
part, s'assimiler
le langage de la
OsoXoyta,
s'en
nourrir pour leur
ducation spirituelle
, et, d'autre part,
confronter
en permanence ce langage
avec
la science
et
les
normes
propres
leur
nature qu'ils redcouvrent progressivement grce
l'criture, saisir le biais souvent subtil par lequel vou et OeoXoYta
peuvent et doivent se rejoindre et concider.
Car pour Jean Scot,
vera
religio et
vera
philosophia se confon
dent
.
Cette conviction
lui
donne
une belle
confiance,
puisqu'elle
l'assure au
dpart
que
l'intelligence
et
les
arts,
dans
leur
accep
tion a plus vraie, ne sauraient trouver nulle
part,
dans l'criture,
une
assertion
qui
les
contredise vraiment
eux-mmes. D o la
formule
pleine
d'optimisme par laquelle il rassure
son
disciple :
Qu'aucune autorit ne t'effraie s'il
s'agit
de connaissances que
les considrations droites de la raison t'ont fait accepter.
L'autorit
vraie
ne
s'oppose
pas
la
droite
raison, ni la droite
raison
l au
torit
vraie.
(2). Or,
il
faut le
souligner,
V
auctoritas
dont
il
est
ici
question
n'est
ni
celle
des
Pres
ni
celle
des
auteurs
profanes,
mais bien
l'autorit mme de
l'criture.
Toutefois,
du
principe absolu
de l'accord entre
criture et
raison
la mise en vidence de cet
accord,
propos de
chacun
des
passages de
l'criture,
il y a une distance incertaine et variable.
criture et vou sont d'autant plus
malaiss
rapprocher que,
dans la condition
prsente,
ni l'une ni l'autre
ne reprsente
un
terme
fixe et absolu. Pour l'criture,
nous
savons qu'elle est
un acte
de
condescendance
de
Dieu
en
faveur
des
intelligences
dchues, provisoirement
incapables
de
percevoir
directement et
en totalit les vrits divines
qu'elles
ont
dj
connues de
manire
parfaite
et une,
leur
origine,
au
niveau
des
causes. Cette
condes
cendance peut tre reprsente comme une
espce
de
compromis
(1)
De
Praed.
I,
1, 358
A
: Conficitur inde,
veram
esse philosophiam
veram
religionem, conversimque veram
religionem
esse veram
philosophiam
; sur le
sens
de
ces
formules,
voir
M. Cappuyns,
o.
c,
p.
304,
n.
1
et
Remarques,
p.
263-
265.
(2) DDN I, 511 B :
Nulla
itaque
auctoritas te
terreat
ab
his, quae
rectae
contemplationis
rationabilis
suasio edocet. Vera
enim auctoritas
rectae
rationi
non obsistit, neque recta
ratio
verae auctoritati .
-
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57
ou d'attitude provisoire, destins
rtablir ce qui est
considr
comme
normal,
naturel et
juste.
Elle est d'abord un compromis
en
tant qu'expression, dans
ce
sens fondamental qu'elle
tente
d'exprimer l'inexprimable : Dieu et ses mystres. Ensuite, dans
l'ordre mme de l'expression,
elle
pousse
le compromis aussi loin
ou
aussi
bas
que
possible,
puisqu'elle
ne s'exprime pas seulement
selon
les
lois du
discours
rationnel,
mais
recourt en outre
aux
procds les plus
humbles,
les plus matriels, voire les plus
vils,
pour se
rendre
accessible
aux
intelligences dchues comme telles (
xaG'-yjjxa vou).
Elle le fait par une manifestation ou une dgradation
progres
sivees arts qui
passent ou descendent
de leur
tat
indivis
au niveau des causes, dans
l'univers du Xoyo, puis
dans
l'univers
de la
Sivoia
(ou
de
la
memoria),
enfin
dans l'univers
des
sens.
Au
terme
de leur
course ou
de leur
descente
processive,
les
arts
ont ainsi
perdu leur puret originelle, et
c'est
pourquoi
ils s'expriment dans cette bigarrure (7coixtXia) de symboles,
ressemblants ou dissemblables, nobles ou monstrueux, raisonnables
ou passionnels, que commentent Jean Scot et
Denys,
et qui figurent
en effet
dans
l'criture. On
peut donc affirmer de
l'criture
qu'elle
est
un compromis
d'ordre expressif, progressivement dgrad, et
qui
entrane
une
dgradation
parallle
des
arts
par
lesquels
elle
s'exprime.
Ce compromis a d'ailleurs suivi la dgradation du vou
qui,
provisoirement
dpourvu de sa connaissance totale et une,
provi
soirement
engag
dans l'histoire, ne saurait retrouver sa plnitude
et sa puret premires autrement que par les moyens de sa condi
tion
rsente : les sens et la raison discursive. Comme expression
discursive et
sensible
de
Dieu
et de ses mystres,
l'criture
constitue
pour
le
vou
dchu
l'instrument
le
mieux
adapt
de
ce retour.
C'est
l
toute sa fonction, essentiellement pdagogique,
au
service
de
l'homme :
propter
humanum
animum
sacra
Scriptura, comme
dit rigne, dans
le
passage
de Expositiones II que nous avons
comment. Encore faut-il que l'homme
puisse,
sache et veuille
lire cette
criture.
Ici prend place un nouveau compromis qu'on pourrait appeler
initiatique et hirarchique. Jean Scot sait, par la tradition de l'glise
et
mme,
de
manire
trs
prcise, par
l'enseignement de
Denys
(1),
(1) Cf. L'univers dionysien, p. 184-186 et 192-196.
-
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58
qu'il existe pour tout chrtien une
phase
initiatique o on lui
dcouvre l'Ecriture. Des prtres, des diacres ou des chrtiens
dj forms
l'instruisent,
pour ainsi dire du dehors, au nom
d'une
hirarchie
qui
les
mandate. Mais cette
initiation
constitue
elle-mme un
nouveau
compromis par
rapport au texte et au sens
de
l'criture
qui est dj elle-mme un
compromis.
Ainsi,
pour
s'ouvrir
l'intelligence
dchue et
y
pntrer, l'criture
doit en
quelque sorte
tomber
au-dessous d'elle-mme
et
parvenir, par
l'
ingniosit
des ministres
qui la proposent, jusqu au niveau
prcis de dchance o l'intelligence, telle
qu'elle
est
mainte
nant, ourra la recevoir.
Cette condition infra-scripturaire est proprement celle
des
profanes et restera la leur aussi longtemps qu'ils
ne
s'ouvriront
pas
l'criture.
Leur
faute
ou
leur
malheur
est
de
ne
pas
s'lever
au-dessus
des perceptions brutes des sens corporels : sicut et
multi
(=
la foule
des profanes)
carnaliter
spiritualia cogitantes,
et ultra ea, quae
sensu corporeo percipiunt, nihil esse
immundis
suis
cogitationibus
putantes
^. C'est mme, entre autres inten
tions,
pour viter le
traitement
indiscret ou la profanation
des
profanes, que l'enseignement de l'criture est propos dans des
images
difficiles,
voire
nigmatiques ^2^. Car l'intelligence de l cri
ture
rsuppose
modestie,
respect
et
docilit.
En revanche, l'accueil ardent et
humble
de l'criture est pour
le
vou l'amorce de son retour
lui-mme.
Il la reoit d'abord
du
dehors,
telle
qu'elle lui
est propose
et
explique;
mais
cette
att
itude
plus ou
moins
passive
se
transforme progressivement en
une dmarche plus personnelle qui assimile, de manire pour ainsi
dire
plus autonome,
les
enseignements
reus.
La contemplation et
la rflexion parfont constamment les lments de l'initiation, pour
(1) Exp. II, 144 C; 147 AB : carnaliter ac turpiter
accipiunt [symbola],...
ita
ut nullum
in
ipsis apparitionibus mysticum
et
allegoricum
inquiratur,
sed
veluti
nuda quaedam
et simplex
historia rerum naturaliter
factarum...
(147 A;
notons qu'ici naturaliter est seulement synonyme
de carnaliter
et
ne
se rfre
aucunement
la
condition
des natures
pures
dans
leurs
causes); cf.
149 B-150 A;
151 B-152 A.
(2) Exp. II,
151
B-152 C :
... sacrant
secretamque
veritatem... occultare,
inviamque multis (=
profanes)
ponere per
incomprehensibilia
et divina aenig-
mata
(151
BC).
Mme
attitude
secrte
des
ministres
l'gard
des
profanes
:
ut [ministri] in
secretis
animi sancta
mysteria circumtegant,
et
ex
immunda
carnaliter cogitantium
spiritualiaque penitus ignorantium multitudine..., cus-
todiant mysteria (Exp. II, 173 C-174 A). Dans ces passages. Jean Scot
se
fait
dire
ctement l'cho de Denys dont il
commente
le texte.
-
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atteindre le sens le plus total et le plus
profond
de
l'criture
:
c'est
ce que
rappelle maintes fois Jean Scot
en
citant la phrase
paulinienne
sur
la lettre
qui
tue et
l'esprit qui
vivifie
&K
Mais,
quels qu'en soient les
aspects
et les
tapes, la
dcouverte
de l cri
ture
e
poursuit essentiellement par
les
arts
qui,
en
mme
temps,
se
ressaisissent eux-mmes,
arrtent leur
course
descendante et
s'orientent nouveau vers l'intgrit de leur premire condition.
Leur tche
comporte
ainsi deux fonctions solidaires : reprer
dans l'criture les formes de langage, les procds, les figures,
en d'autres termes, les artes
qu'elle
met en uvre; par l-mme,
dterminer
le sens et la porte du texte sacr. Les arts du vou
deviennent les
corrlats
exacts et
adapts
des arts de l'criture,
et il s'tablit une sorte de dialogue ou d'preuve rciproque
entre les arts
qui expriment
(criture) et les arts
qui
dcouvrent
et
comprennent
(vou).
La
redcouverte progressive et la reprise
de possession
du
vou
par lui-mme vont
ainsi de
pair
avec
un
approfondissement
progressif
de l'criture. Et c'est
pourquoi on
ne
saurait
assigner un niveau unique et
stable ni au
sens de l cri
ture&\ ni l'hermneutique du vou,
ni
leurs arts respectifs.
On ne suivra pas ici dans
toutes
ses applications
ni
dans
son
ensemble la dmarche notique par laquelle
les
artes
dcouvrent
l'criture. C'est l une tche aussi vaste que varie.
Du
moins
peut-on en relever
quelques
aspects. Pour l'enseignement imag ou
symbolique
de la Bible d'abord. Bien que, dans
ce
domaine, Jean
Scot reprenne
l'essentiel
de l'hermneutique dionysienne
dont
la
dmarche anagogique n'est au fond qu'une mise en uvre
(1)
2
Cor. II, 6, cit, par ex., par
Exp.
II,
171
A; DDN IV, 841 C; Comment.,
318 B.
(2) La
multiplicit
des sens de
l'criture
fait l'objet de plusieurs dveloppe
mentsu applications. L'Esprit saint,
crateur
infini de
l'criture,
y
a fait entrer
une
infinit
de sens :
Infinitus siquidem conditor
sacrae Scripturae
in mentibus
prophetarum, Spiritus sanctus, infinitos
in
ea constituit intellectus, ideoque
nullius expositoris sensus sensum alterius aufert, dummodo
ut
sanae fidei
catholicaeque professioni conveniat, quod
quisque dicat,
sive
aliunde accipiens,
sive
a
seipso,
a Deo tamen
illuminatus,
inveniens
(DDN III, 690
BC)
cf.
696 A
:
dum
sit
divinorum
eloquiorum
multiplex
interpretatio
;
IV,
749
C
:
Est enim multiplex et infinitus divinorum
eloquiorum intellectus. Siquidem
in penna
pavonis
una eademque
mirabilis ac
pulchra innumerabilium colorum
varietas conspicitur in
uno
eodemque loco ejusdem pennae portiunculae ; Exp.
XIII, 245 D; multiplex
interprtation
( propos des six ailes
du
Sraphin).
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systmatique de Romains
I, 20 (1), il
dgage
avec beaucoup de
vigueur et de nettet deux procds de l'criture qui doivent
commander l'art
corrlatif de l'exgte : la
symbolique
contraire;
la t