[revistaenfrancés] el mensajero internacional ed.especial deporte & dinero el amor loco

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Hors-série Juin-juillet-août 2012 - 8,50 ¤ 3:HIKOMC=YU]ZUZ:?a@a@e@l@p; M 04224 - 41 H - F: 8,50 E - RD Afrique CFA : 6 000 FCFA - Allemagne : 9 € Antilles-Réunion : 9,50 € - Autriche : 9 € - Canada : 12,90 $ CAN Espagne : 9 € - Etats-Unis : 13,50 $ US - Grèce : 9 € - Italie : 9 € Japon : 1 400 ¥ - Liban : 18 000 LBP - Maroc : 85 MAD Pays-Bas : 9 € - Portugal cont. : 9 € - Suisse : 12 CHF TOM avion : 1 800 XPF - Tunisie : 15 DT Ronaldo JO de Londres Camorra Volants indiens Calendrier nippon Perle du Caucase Orgasme collectif Demi-dieux Championnes fauchées Fraudeurs Euro 2012 Propagande Police des marques Ennemis jurés Fièvre dépensière Golf urbain Caïds des stades Prime à la blessure Zéro pointé Sport et argent L’amour fou !

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Page 1: [RevistaEnFrancés] El mensajero Internacional ed.Especial Deporte & Dinero El Amor Loco

Hors-série Juin-juillet-août 2012 - 8,50 ¤

3:HIKOMC=YU]ZUZ:?a@a@e@l@p;M 04224 - 41 H - F: 8,50 E - RDAfrique CFA : 6 000 FCFA - Allemagne : 9 €

Antilles-Réunion : 9,50 € - Autriche : 9 € - Canada : 12,90 $ CANEspagne : 9 € - Etats-Unis : 13,50 $ US - Grèce : 9 € - Italie : 9 €

Japon : 1 400 ¥ - Liban : 18 000 LBP - Maroc : 85 MADPays-Bas : 9 € - Portugal cont. : 9 € - Suisse : 12 CHF

TOM avion : 1 800 XPF - Tunisie : 15 DT

RonaldoJO de LondresCamorraVolants indiensCalendrier nipponPerle du CaucaseOrgasme collectifDemi-dieuxChampionnesfauchéesFraudeursEuro 2012PropagandePolice des marquesEnnemis jurésFièvredépensièreGolf urbainCaïds des stadesPrime à la blessureZéro pointé

Sport et argentL’amour

fou !

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Editorial

C itius, altius, fortius. La deviseproposée par Pierre de Cou-bertin en 1894 est toujoursd’actualité. Mais ce ne sontpas seulement les athlètes

qui vont toujours plus vite, plus haut etplus fort. L’industrie du sport bat elleaussi régulièrement des records. Elleenregistrera 133 milliards de dollars dechiffre d’affaires dans le monde en 2013,selon le cabinet PriceWaterhouseCoo-pers. Une croissance de 47 % en dix ans !Quel autre secteur, à part les technologiesde l’information, peut en dire autant ?D’où provient cet argent ? De la vente desbillets, du merchandising et des droits deretransmission, bien sûr. Mais aussi, pourun quart, des sponsors, trop heureux des’emparer d’événements et de héros pouren faire leurs hommes-sandwichs. On serase, on déjeune, on se désaltère, on faitle plein avec les athlètes. Ils sont devenusdes produits, avec profil marketing et datede péremption. Mais il est une constante : le sport restetoujours un monde d’hommes. Parmi lescinquante sportifs les mieux payés aumonde, on ne trouvera qu’une seulefemme : la tenniswoman Maria Chara-pova, à la 29e place du classement établipar le magazine Forbes. Les autres, dansleur grande majorité, réussissent l’exploitde gagner des compétitions sans sponsors,sans équipement professionnel. On peutadmirer leur courage et leur ténacité, maison peut aussi souhaiter un peu plus deparité. Pour les sportives, à vot’ bon cœur,messieurs-dames… Virginie Lepetit

� En couverture : footballaméricain.Victoire pour les Seminoles de Floride etleurs supporters.

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Tous en pisteLa diversité sur la touche 50Essai transformé ! 52Jamais sans mes bâtons  54Le boxeur, la juge et Dieu 55Formule marketing 56La précarité guette les champions 57Khum Peseth Boxeur par nécessité 58Orgasme collectif 60Cherche financement pour Londres 61Le green des bidonvilles 62

Les bonnes recettesEn vacances avec les champions 66Zéro pointé en gestion 69Chiffres à l’appui ! 70Sachin Tendulkar Un dieu du cricket et des affaires 72Des universités prises en otages 74La tactique du président supporter 77Les volants de la colère 78La foire de la médecine du sport 79Marquer sa différence 81

Carton rougeLeurs têtes sont mises à prix 82Fraude au handicap 84Quelque chose de pourri dans l’empire du sumo 86Des caïds règnent sur les stades 88Javier Cantero dit non à la violence 90Blanchiment, mode d’emploi 92“Toutes les tares du football…” 93

A la uneKiosque international 94

SourcesDans ce hors-série 97

PortfolioDe sable et d’or 4

Le ballon d’orFauchées, mais numéro un 10Une perle dans le Caucase 12C’est le foot qui a coulé les Pigs ! 14Dettes de compétition 15Comment gérer son club ? 16La Pologne peut dire merci ! 18Trouver un billet ? Mission impossible ! 19Pagaille diplomatique sur le gazon 20Quand le patron s’appelle Ronaldo 22Eloge du foot amateur 23Gerritt Meinke murmure à l’oreille des commentateurs 24Des stars étrangères couvertes d’or 26Ennemis intimes 28

CartoonsVa y avoir du sport ! 30

La grand-messeSponsors, à vos marques ! 32Un nuage toxique obscurcit la fête 35L’important, c’est d’organiser 36Sebastian Coe Un sprinter aux commandes 38Riposte organisée 40Sponsors, j’abhorre ! 41Le fait du prince 42Merci, monsieur le banquier ! 43J’y vais ou j’y vais pas ? 44Trente ans de gueule de bois 46Espoirs déçus 47Investissements en série 48

Sommaire

Mâlesargentés

� Pictogrammes de MélanieGuéret,pour Courrierinternational,Paris.

Illustrations

Les cinq portraitsde ce hors-série ont été réalisés par Mikel Casal.Cet illustrateurespagnol travaillepour la presseespagnole et sud-américaine. Il a reçu en 2011 la médaille d’argentde la SNDE (Societyfor News Design),section illustration.

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Le photographe

Denis Rouvre est néen 1967 à Epinay-sur-Seine. Il vit ettravaille à Bagnolet. Ses portraits sont publiés dans la presse nationaleet internationale.Ses dernières sériespersonnelles– comme Lamb,dont nous publionsici quelquesphotos  – sont des recherches sur la puissance et la fragilité de l’homme. Elles sont exposées en France et à l’étranger. Il a étérécompensé pardes prix prestigieux – 2e prix WorldPress Photo 2010“Sports FeaturesStories” pour Lamb,2e prix Sony WorldPhotography Award2011 pour sa sérieAfter Meeting – et également par un HasselbladAward.

� Serign Ousmane Dia, dit Bombardier,est l’un desmeilleurs lutteursdu Sénégal. Il lutte ici avec un élève de son écurie à M’Bour.

Sénégal La lutte est sans conteste le sport le pluspopulaire du pays. Souvent apparentée – à tort – aucatch, la lutte avec frappe est un mélange de luttetraditionnelle et de boxe à poings nus. Les combats,organisés à l’origine pendant les moissons enCasamance et dans le Siné-Saloum, se sont dévelop-pés peu à peu dans tout le pays. Dans les salles obs-cures ou sur les plages, les jeunes s’entraînent sansrelâche dans l’espoir de remporter quelques combatset de faire peut-être un jour partie des plus grands.Les noms de leurs idoles s’apparentent à ceux desgladiateurs : Bombardier, Tyson, l’Equarrisseur, leTigre de Fass, l’Ouragan de Pikine…

Plus qu’un sport, la lutte – làmb ji en wolof – estun véritable état d’esprit. On attend fébrilement lemoment où il faudra combattre sous le soleil deplomb, dans l’arène de sable, devant des dizaines demilliers de spectateurs affamés. Ici, chacun aspire àdevenir un dieu vivant. Rien de moins. Pour leur don-ner la force d’affronter l’adversaire, le maraboutbaigne les corps des lutteurs d’une potion, verse du

lait sur les torses, les épaules, les têtes, et entonnedes formules rituelles pour éloigner le mauvais sort.Les grigris accrochés aux membres assureront leurprotection.

Ensuite, il faudra “terrasser l’adversaire”, commedisent les lutteurs dans leur jargon. Mettre les quatreappuis au sol, se coucher sur le dos ou sortir du cercleen tombant sera plus qu’un échec, la pire des humi-liations. En revanche, sortir de l’arène victorieux leurpermettra d’être acclamés comme des rois par unpublic endiablé et, pourquoi pas, de devenir un jourchampions, riches et quasi divins. Car à l’enjeu sportifet mystique du combat s’ajoutent des cachets, au -jourd’hui comptés en millions de francs CFA. Lesmeilleurs lutteurs peuvent ainsi gagner jusqu’à85 000 euros par combat. Une somme que beaucoupde Sénégalais ne parviendront pas à réunir au coursd’une vie. Denis Rouvre a suivi ces apprentis lutteursde plusieurs écuries pendant quatre mois, de dé cembre 2009 à avril 2010, de la banlieue dakaroiseà la région de la Petite-Côte.

De sable et d’or

Portfolio

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� Jeune lutteur du village de N’Dorong,dans la provincede Fatick.

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� Combattant de l’écurie de Palla M’Bengueà Rufisque. Le lait caillé sacréfait partie de la panoplie des lutteurs poureffrayer et défierl’adversaire.

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� Jeune lutteur du village de N’Guékokh,province de Djilor.L’arbitre demandeaux combattants de se couvrir de sablepour éviter toutetricherie – parexemple s’enduire le corps d’huile pourgêner son adversaire.

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� Jeune lutteur de l’écurie de Palla M’Bengue,à Rufisque.

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� Combattant duvillage de N’Dorong.Les cauris, coquillagescourants en Afriquede l’Ouest, sontconnus pour leurpouvoir divinatoire.Ils sont aussi une composanteessentielle des talismans des lutteurs.

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Japon Sans encadrement,sans sponsors, les Nippones ont remporté la dernière Coupe du mondedu football féminin et consolé leur pays meurtri.

Courrier international Paris

L Le 17 juillet 2011, pour la pre-mière fois dans l’histoire dufootball, des Asiatiques ontdécroché la Coupe du monde.Qui aurait cru que de petites

femmes menues renverseraient tour àtour les équipes d’Allemagne, de Suède etdes Etats-Unis, alors considérées commefavorites ? Dans un pays où le base-ballest le sport roi et le sumo empereur, lesimple fait d’accéder à la finale était déjàsurprenant. D’autant plus que l’équipemasculine japonaise, mieux encadrée,n’en aurait sans doute pas fait autant.

En effet, les joueuses de l’équipe fémi-nine ne bénéficient d’aucun dispositif leurpermettant de s’entraîner comme leurshomologues masculins : elles jouent enamatrices et perçoivent, dans le meilleurdes cas, un salaire d’environ 1 000 eurospar mois. La plupart vivent de petits bou-lots, certaines sont caissières, d’autresouvrières. Et elles ont beau avoir rem-porté la Coupe, leur train de vie n’a paschangé. “La récompense prévue par la Fédé-ration japonaise du football n’était que de15 000 euros par joueuse, soit trente fois moinsque pour l’équipe masculine. Ce n’est doncrien d’autre que l’amour du ballon qui a

amené ces femmes au stade ce jour-là”, sou-ligne le quotidien sportif Sport Hochi.

Baptisées “Nadeshiko”, terme quidésigne l’idéal féminin japonais alliantgrâce et humilité, ces footballeuses ontmis leur pays tout entier en émoi. “Leurvictoire a mis du baume au cœur desJaponais”, rappelle l’Asahi Shimbun.Ils en avaient grand besoin : l’archipel estmeurtri depuis la triple catastrophedu séisme, du tsunami et de l’accidentnucléaire. Et plusieurs des membres decette équipe sont justement originairesdu Tohoku, la région nord de l’île deHonshu, ravagée par la catastrophe. Ladéfenseuse Aya Sameshima travaillait àla centrale de Fukushima Daiichi avantl’accident. Elle culpabilisait de jouer aufoot pendant que ses collègues tra-vaillaient à la décontamination du site.Mais les matchs ont été très suivis, y com-pris par les sinistrés du tsunami et de l’ac-cident nucléaire qui se trouvaient encoredans des centres d’évacuation. Depuiscette Coupe du monde, les Nadeshikosont devenues le symbole du redresse-ment du pays.

Au lendemain de cette victoire, lapresse japonaise a unanimement loué lesmérites de l’équipe. Non seulement ellesont gagné, mais elles l’ont fait avec grâce.La capitaine de l’équipe, Homare Sawa,a été récompensée par le Ballon d’or etle Soulier d’or (en tant que meilleurebuteuse), et l’équipe a remporté le prixdu fair-play. Reste à voir comment lesNadeshiko vont se battre contre lesFrançaises le 19 juillet 2012 à Paris.

Ysana Takino

Fauchées, mais numéro un

Le ballon d’or

� Les“Nadeshiko”n’avaient commeressources que leur courage et leur techniquepour décrocher la Coupe. Ici, la milieu de terrain Aya Miyama lors des qualificationspour les JO de Pékin en 2008.

� C’est le sport roi.Celui qui fait battre le cœur des supporters,partout sur la planète.� C’est aussi, sans doute, l’un des plus mondialisés. Les footballeurs se négocientdésormais à prix d’ord’un continent à l’autre. Et quand ilschoisissent de resterau pays, comme le Brésilien Neymar,c’est parce qu’on leur fait un pont d’or.� Il y a pourtant desmatchs qui démententcette symbiose entrele foot et l’argent : ceuxde l’équipe fémininedu Japon, qui dominela Coupe du mondesans un liard en poche.Et ceux des joueurs du dimanche,pour lesquels le foot se résume à un terrain,un ballon, un arbitre et vingt-deux joueurs.

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Le ballon d’or

Reportage Makhatchkala, la capitale de la républiquedu Daghestan, dans le Caucase russe, disposedésormais d’un club de footde niveau européen, Anji,financé par un oligarquelocal. Mais il y a un mondeentre l’équipe et les habitants.

Ogoniok (extraits) MoscouDe Makhatchkala

P ierre, Fred et Etienne, troisétudiants camerounais, sup-porters passionnés du clubAnji [La Perle], se pressentdans la file d’attente qui

s’étire devant l’entrée du stade Dynamode Makhatchkala [20 000 places].Normalement, c’est leur compatrioteBenoît Angbwa – qui joue dans l’équipecomme défenseur – qui leur fournit desbillets, mais cette fois la “filière camerou-naise” n’a pas fonctionné, et les jeunesgens sont coincés au milieu d’une fouledense : la rencontre va opposer Anji auSpartak de Moscou !

Dans la tribune des supporters d’Anji,l’ambiance est assurée par RamazanGaziev, le chef de la “Division sauvage”.Il saute en rythme sur l’étroit gradin, agiteles bras et appelle les spectateurs à l’imi-ter : “Allez les gars, on se bouge !” Les garsse bougent effectivement, remuant encadence sur une musique endiablée, cra-chant sur les sièges des épluchures degraines. De toute façon, personne ne vas’asseoir de tout le match, car, dans cettetribune, on ne reste pas inactif une seuleseconde. La marque de fabrique des sup-porters locaux, c’est la lezguinka [dansetraditionnelle du Caucase]. En une mi-temps, ils en exécutent au moins six, dequoi rester chauds. Mais, ce soir-là, ni l’en-train de la lezguinka, ni les encourage-ments hurlés à l’équipe ne parviendrontà aider les joueurs d’Anji. Le matchs’achève sur le score de 0 à 0, au granddam des deux équipes.

Dès le coup de sifflet final, les joueurs,trempés, regagnent en courant les ves-tiaires, avant de remonter à toute vitessedans leur bus pour filer, escortés de véhi-cules à gyrophares, en direction de l’aé-roport, d’où ils s’envoleront pour leur based’entraînement située près de Moscou.Restés seuls, les supporters replient avec

amour la feuille de présentation de la soi-rée et la glissent dans leur poche, tout encommençant à discuter de la prochainerencontre, contre le club Kouban [deKrasnodar], un match à domicile prévule 25 mars. Des “C’est sûr, on va les battre”se répandent parmi la foule [Anji a effec-tivement gagné 2-0].

Il est 20 heures. Deux ou trois réver-bères éclairent une rue déserte prochedu centre-ville. Une enseigne annonce“Tchoudou”. Il y a là un local exigu, chauffépar un petit poêle. Deux femmes d’âgemoyen y préparent de petits pâtés daghes-tanais à la viande, au fromage blanc ouaux herbes, des recettes traditionnelles,le fameux tchoudou. De l’autre côté de larue, un immeuble est en chantier, et lestravaux semblent interrompus depuislongtemps. Une Lexus gris métallisé estgarée devant le portail voisin et une BMWapparaît au carrefour. Elle négocie son

chemin sur la chaussée défoncée, par-court 200 mètres et stoppe. Un hommeen descend, qui m’adresse un salut cordialde la main. C’est Makhatch Gadjiev,milieu de terrain de l’équipe d’Anji. Sondomicile se trouve dans cette rue sombre.C’est une spacieuse villa ornée de miroirs,dotée d’une immense cuisine, avec chauf-fage par le sol et canapés design. Tout àfait le type de maison que se doit de pos-séder un footballeur qui joue pour l’undes clubs les plus riches de Russie. Maisle contraste avec la réalité ambiante duDaghestan est cruel.

Ce genre de contraste est omnipré-sent à Makhatchkala, au point qu’on finitpar ne plus le remarquer. En lisière dela ville, l’hôtel cinq étoiles où descendl’équipe lors de ses rares séjours sur placejouxte une usine à l’abandon, un des mul-tiples chantiers en cours et un immenseparking où sont garés camions et béton-neuses. L’intérieur de l’hôtel, lui, estdécoré de photos des footballeurs et delustres clinquants. De lourds rideaux dis-simulent la vue peu ragoûtante sur l’en-vironnement immédiat. L’hôtel est dirigépar Théophile Pikoulik, un Slovaque arrivél’année dernière. Il semble s’être fixé pourbut de recréer un îlot d’Europe dans l’en-ceinte dont il a la charge, mais ceux qui

pourraient apprécier ses efforts restentrares. Le directeur et son équipe sont seulsdans l’hôtel, où il est impossible de réser-ver sans recommandation préalable.“Nous ne souhaitons recevoir que des hôtesde marque et des étrangers. Les gens d’icin’ont pas une attitude adaptée à ces lieux”,explique l’un des administrateurs.

Au Daghestan, si on aime l’équiped’Anji, c’est aussi parce qu’elle se fait beau-coup désirer. La Division sauvage, le plusgros effectif de supporters du club,déplore que, depuis plus d’un an, l’équipene soit jamais venue les saluer. Pour lesjoueurs vedettes, les journalistes locauxne semblent pas non plus exister.L’équipe passe le minimum de temps àMakhatchkala : elle arrive, joue son matchet s’empresse de reprendre l’avion pourMoscou. Seuls les joueurs daghestanaisrestent un jour de plus, une concessionaccordée pour qu’ils puissent embrasserleurs familles.

Pour les responsables du club, Anjia de bonnes raisons d’être basé près deMoscou. Makhatchkala ne dispose tou-jours pas des infrastructures nécessaires :ni camp d’entraînement ni stade adéquat.Mais, dans deux ou trois ans, lorsque leséquipements auront été construits, ilspromettent que les joueurs viendronts’établir sur place. Lorsqu’on demandeaux supporters de la Division sauvage cequ’un Samuel Eto’o pourra bien trouverà faire durant les longues soirées sansmatchs, ils commencent par rire, puisrétorquent : “On trouve bien de quoi s’oc-cuper, nous, tous les soirs !” Et MakhatchGadjiev, le coéquipier de la star camerou-naise, répond qu’il “tentera d’emmenerEto’o en virée”.

Il demeure toutefois difficile d’ima-giner les vedettes grassement rétribuéesd’Anji installées dans une République oùles salaires sont parmi les plus bas de toutela Fédération de Russie et qui est l’un desendroits les plus dangereux du pays.Quand on pose la question du danger, onne s’attire que des sourires condescen-dants : il n’y a que les visiteurs pour sou-lever le problème. Pour les habitants,les informations sur les terroristes et lesattentats ne sont que de simples commu-niqués sur l’état du rapport de forces ausein d’un petit groupe d’individu. Ainsi, àla mi-mars, le jour du match Anji-Spartak,lorsqu’une nouvelle opération antiterro-riste a été menée à Makhatchkala et quedeux rebelles ont été tués, personne enville n’y a prêté attention.

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Une perle dans le Caucase

L’équipe joue son matchet s’empresse de reprendre l’avion

millions de dollars

Voilà qui fait du footballeurThierry Henry le joueur le mieuxpayé de la MajorLeague Soccer, la ligue de footballaméricaine,rapporte TheWashington Post.Cette somme inclut le salaire fixe et les bonus, et le place à bonnedistance de ses dauphinsRafael Marquez(4,6 millions de dollars) et David Beckham(4 millions de dollars), deuxautres Européensqui terminent leur carrière dans le championnataméricain.

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La plupart des jeunes Daghestanais,qui adorent le foot et l’équipe d’Anji,se moquent éperdument de savoir siSouleiman Kerimov, son propriétaire, yengloutit des sommes astronomiquesjuste pour le plaisir ou si le financementdu club lui a été imposé [les oligarquesrusses se doivent d’obtempérer à cer-taines injonctions du pouvoir politiques’ils tiennent à garder leur position ; créerun grand club de foot dans le Caucase estun objectif clairement politique, mais quinécessite de lourds investissements quel’Etat ne peut financer directement]. Poureux, Kerimov reste un exemple. En févrierdernier, l’édition russe du magazineForbes a détaillé son parcours complexe.L’article, repris à Makhatchkala par unjournal local, a fait un tabac. Après la crisede 1998, Kerimov, qui avait tout perdu,est pratiquement reparti de zéro et il seretrouve aujourd’hui à nouveau parmi lesvingt plus grosses fortunes de Russie.En outre, contrairement à RomanAbramovitch, le propriétaire du clubanglais Chelsea, Kerimov investit danssa région d’origine.

Ramazan Gaziev, à la tête de laDivision sauvage, ne se prive pas de rap-peler qu’avant l’ère Kerimov Anji nepossédait que ses joueurs et un bus.Aujourd’hui, des clubs destinés aux pous-sins se créent dans tout le Daghestan ; lestade Khazar, proche de la capitale, esten reconstruction ; et le couronnementde ce chantier grandiose devrait être une

“Anji City”, avec un nouvel hôtel ultra-moderne, un camp d’entraînement etune arène de plus de 40 000 places.

Inutile d’évoquer les sentiments desjoueurs à l’égard de Kerimov : il a, au mini-mum, doublé leurs salaires, reconnaîtMakhatch Gadjiev, il a mis son avion privéà leur disposition, il leur a offert desséjours de préparation lors desquels ilsétaient logés dans les meilleurs hôtelsdu monde, distribué d’énormes cadeaux,et il s’intéresse à ce qui se passe dansl’équipe.

Alors, pour l’instant, il faut composeravec les réalités. Les supporters doiventse contenter d’admirer leurs idoles surles affiches placardées à travers la ville.Et puis ils peuvent toujours aller flânerdans le magasin du club et passer en revueles marchandises aux couleurs d’Anji.“Bien sûr, les gens n’en croient pas leurs yeuxquand ils voient des maillots à 2 100 roublespièce [environ 55 euros]”, avoue Eldar,le gérant. Avec un salaire moyen évaluéà environ 10 000 roubles dans la région,peu de gens peuvent consacrer autant àl’achat d’un maillot de foot. Les écharpes,bobs et casquettes sont heureusementplus abordables.

Pierre, Etienne et Fred, nos troissupporters camerounais, ne sont àMakhatchkala que depuis trois ans, maisse sont parfaitement imprégnés de lamentalité locale. Ils continuent à croireau succès, même dans les situations lesplus désespérées. S’ils se sont retrouvésau Daghestan, après une escale à Moscou,c’est que leur pays les a envoyés étudierà l’étranger. Dans deux ans, ils aurontterminé leur cursus, mais ils ne prévoientpas de quitter la Russie. Au total, legroupe de supporters camerounais deMakhatchkala compte déjà huit étu-diants, et ils sentent leur popularité aug-menter. De plus en plus, on les abordedans la rue pour se faire prendre en photoavec eux. Une fois, dans un café, quel-qu’un a désigné Pierre du doigt (il est leplus grand) en s’écriant  : “Mais c’estSamba !” [Christopher Samba, Françaisd’origine congolaise, qui joue commedéfenseur]. On l’avait pris pour la nou-velle étoile d’Anji, recrutée [fin février]par Guus Hiddink* en personne. Pierrea tenté d’expliquer qu’il n’était qu’un étu-diant camerounais, mais personne n’arien voulu entendre : tout le café étaittrop occupé à s’extasier de la rapidité aveclaquelle leur nouvelle idole du ballon rondavait appris le russe…

Alexandre Beliaev

* Cet ancien joueur néerlandais a été le sélection-neur de l’équipe nationale de Russie de  2006à 2010. Après un passage en Turquie, il est arrivéà Anji en février dernier.

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Des stars dans l’un des endroits les plusdangereux du pays

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� Le joueurcamerounaisSamuel Eto’opose avec une petite filledans une écolede Makhatchkala(Daghestan).

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Crise Le point commun entretous les maillons faibles de la zone euro ? Le ballonrond, constatait amèrementen 2011 l’essayiste espagnolVicente Verdú.

El País Madrid

L e football peut-il influer sur lasociété et son caractère, surses dépenses, ses investisse-ments et son mode de vie ?Quand le football, comme

c’est déjà le cas dans plusieurs pays, n’estpas seulement un sport de plus mais unepsychose collective permanente, com-ment n’aurait-il pas de profondes réper-cussions ? On peut mettre sur le comptedu hasard le fait que cette “grande crise”ait relégué l’Irlande, le Portugal, l’Italie,la Grèce et l’Espagne dans la catégorie desPigs [cet acronyme, composé de l’initialeen anglais de ces quatre pays, signifie lit-téralement “porcs”]. Mais il y a sans douted’autres explications.

Les Pigs ne sont pas que des pays depauvres gens, aux graves déficits, enfaillite ou pas loin de l’être. Ce sont tous

des exemples de sociétés bien plus mar-quées que d’autres par la spéculationimmobilière, la foi dans le hasard et l’ar-gent facile, le mépris de la justice, la tolé-rance envers les magouilles en tout genrepour gagner toujours plus.

Certes, les pays qui n’appartiennentpas à ce troupeau de porcs sont loin d’êtredes anges. Ils ne sont pas exemplaires àtemps complet, mais une chose est sûre :quand le spectacle du football, si souventmis sur le même plan que la vie, pénètresi profondément et importe à tant degens, il n’est pas exclu qu’il nous trans-mette ses valeurs et qu’on finisse parconsidérer non pas que le football imitela vie, mais que la vie imite le football. Sile théâtre a eu, à son âge d’or, la vocationet la volonté d’influer sur les comporte-ments et la moralité de la société de sontemps, on en voit le résultat glorieux dansl’actuel théâtre footballistique.

Corruption  ? Injustice des juges  ?Fortunes colossales dues au hasard  ?Drogue ? Sexe ? Malversations ? Evasionfiscale ? Tout est concentré là, dans lemonde protéiforme du football, avec unepuissance capable de mouvoir et d’émou-voir les masses, et de les mettre sens des-sus dessous. Il les rend violentes ou les

déprime, il leur donne des espoirs ou lesleur gâche. Violences domestiques ?Absentéisme ? Hausse ou baisse du moraldes ménages ? Optimisme ou pessimismedes entreprises ?

Le chômage, les entreprises qui met-tent la clé sous la porte, la dette souve-raine, la crise, la crise… Evidemment, unehécatombe de pareille ampleur s’expliquepar des facteurs très divers – des facteursliés bien sûr aux cycles de l’économie,mais aussi aux vices humains. Autrementdit, des facteurs liés au système, à ceuxqui le subissent ou qui le fabriquent, qu’ilssoient bons, mauvais ou moyens, intelli-gents ou bêtes, innocents ou pervers.

De ce fait, comment analyser la situa-tion des Pigs sans observer les compor-tements politiques, économiques etéthiques délirants induits par le football ?Et pas seulement à l’égard de l’injusticeou de la justice de ses résultats, mais ausside son immoralité, de son irrationalité,de son gaspillage, de ses présidents declubs magnats de l’immobilier, de sesicônes hédonistes, de sa soif de gagner etde gagner par tous les moyens, sans merci,sans fair-play, sans probité.

Vicente VerdúParu dans CI n° 1077, du 23 juin 2011

C’est le foot qui a coulé les Pigs !

Le ballon d’or

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� Dessin de Graff,Norvège.

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Espagne Les clubs ontdépensé sans restriction pour embaucher des stars et l’Etat s’est montré d’une indulgence coupable.Il est plus que tempsd’apurer les comptes.

Courrier international Paris

C ompter des joueurs trèsconvoités et remporter destitres prestigieux n’em-pêche pas le football espa-gnol d’être surendetté,

constate El País. La 1re division doit àelle seule 3,5 milliards d’euros à ses créan-ciers, dont 490 millions d’euros au fisc.Une situation surréaliste, où des joueursmultimillionnaires travaillent pour desentreprises au bord de la faillite. Quantaux clubs de 2e division, ils suivent lamême pente.

Si de nombreux plans d’étalement etd’assainissement – mais aussi la grandetolérance des administrations – leur ont

évité jusqu’à présent de s’acquitter deleur dû, cette situation ne pouvait pas seprolonger éternellement  : au total, ladette du football espagnol envers l’Etats’élève à 752 millions d’euros. Un scandalequi a d’ailleurs suscité des remous enEurope, comme la virulente réactiond’Uli Hoeness, le président du Bayern deMunich : “C’est impensable ! Nous payonsdes centaines de millions d’euros pour quel’Espagne sorte de la merde, et les clubs sontdispensés de payer leurs dettes ?”

Le gouvernement espagnol et lesclubs sont conscients du problème : lesdettes se creusent sans fin et nuisent àl’image du football. Un accord a donc étésigné le 25 avril dernier, qui prévoit l’apu-rement des dettes d’ici à 2020. Dès lasaison 2014-2015, la Ligue de football pro-fessionnel contrôlera 35  % des droitsaudiovisuels perçus par les clubs, qu’ellepourra saisir en cas de non-paiement. Leplan prévoit également de lourdes sanc-tions, comme l’exclusion de la compéti-tion ou l’obligation d’accepter le rachatd’un joueur.

Carole Lyon

Ces chiffres sont sujets à caution, étant donné que la Ligue de football professionnel espagnole ne divulgue que la dette totale, et pas les résultats individuels des clubs.

Granada CF(Grenade)

2

Levante UD23

FC Valencia6

Villarreal Majorque

Athletico de Madrid155

Rayo Vallecano21

Real Betis(Séville)

35

FC Sevilla18

FC Barcelona48

RCD Espanyol24

RCD Mallorca17

Málaga CF5

Total des dettes : 425 millions

Real Zaragoza33

CA Osasuna (Pampelune)28

Saint-Sébastien

Bilbao

RacingSantander 11

Gijón

Dettes des clubs espagnols envers l’Etat(en millions d’euros)

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L’Athletic Bilbao, Le Getafe CF (Madrid), le Real de Madrid,

le Real Sociedad de Saint-Sébastien, le Villarreal CF et le Real Sporting

de Gijón ne sont pas endettés.

Dans le rouge

Dettes de compétition

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Le ballon d’or

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et à ses 27 000 membres, en échange d’une cotisation annuellede 35 livres. Non seulement les membres élisent l’équipe dedirection, mais ils votent également sur des questions commele choix des joueurs, le prix d’un abonnement et la couleur dumaillot. Au départ, ils avaient même leur mot à dire sur l’équipeet ses tactiques de jeu, mais cela ne s’est pas révélé propice àune bonne gestion.

Pour Charles Webster, supporter de longue date d’Ebbsfleetet commentateur sportif, le club n’est rien d’autre qu’un “salonoù l’on cause” et souffre d’un excès de démocratie. En outre,comme la cotisation au MyFootballClub est annuelle, sesmembres se retrouvent sans rien s’ils cessent de la verser.Maintenant que l’enthousiasme des débuts est retombé, lenombre de membres a chuté de 32 000 à 1 400 et le budget adiminué d’autant : Jessica McQueen, la directrice, a annoncéque le club aurait besoin de 50 000 livres supplémentaires d’icià la fin de la saison. Dans les circonstances actuelles, un sauveurétranger sera sans doute le bienvenu. �

A L’ANGLAISEEn transformant les supporters en patronsQuand les caisses des clubs sont vides, tout est bon pour y remédier. Même faire participer les fans aux finances… et aux décisions.

The Economist Londres

L es clubs de football ont l’habitude de soutirer de l’ar-gent à leurs supporters en augmentant le prix desentrées, en changeant régulièrement le maillot de leuréquipe et en imposant des tarifs très élevés sur la res-tauration et les programmes. Il est en revanche plus

rare qu’ils leur demandent ouvertement de les renflouer. EnGrande-Bretagne – à la différence de l’Allemagne, par exemple –la plupart des clubs de foot sont des sociétés à responsabilitélimitée, les plus prestigieux appartenant souvent à de richesétrangers. Mais les supporters du club de Portsmouth espèrentbien changer cette tradition.

Après avoir été relégué en 2e division en 2010, Portsmouthest tombé en 3e division le 12 avril dernier. Il a été placé enredressement judiciaire en février 2010, puis à nouveau enfévrier dernier. Le Pompey [surnom du club] Supporters Trustsollicite aujourd’hui les supporters pour qu’ils rachètent leclub en versant chacun 100 livres [124 euros] sur un comptebloqué. S’ils répondent à cet appel en nombre suffisant, unplan d’actionnariat collectif sera mis en place, avec des actionsà 1 000 livres.

Tant que le club ne sera pas parvenu à un accord avec sescréanciers, on ne connaîtra pas le coût exact d’un tel rachat.Mais un sondage effectué à l’extérieur du stade lors d’un matchrécent a montré que les supporters avaient des intentions géné-reuses. Quand on leur demande combien ils comptent donner,beaucoup répondent : “1 000 livres”, voire : “Tout ce que j’ai.”Des opérations similaires sont en train de voir le jour dansd’autres clubs : les supporters de Darlington tentent d’éviterle redressement judiciaire à leur club avec l’aide de Crowdcube,un site de crowdfunding, c’est-à-dire de financement collectif.

Ce n’est pas la première fois qu’un club est géré par sessupporters. En 2002, des supporters du Wimbledon FootballClub, mécontents du transfert de leur club à Milton Keynes,ont créé l’AFC Wimbledon. L’équipe est aujourd’hui la pro-priété du Dons Trust, dont les membres versent une cotisationannuelle de 25 livres [30 euros] et peuvent participer auxvotes sur des questions importantes comme le transfert duclub ou la souscription d’un emprunt. Ils élisent égalementles entraîneurs de l’équipe. Pour faire l’acquisition d’un terrainde plus de 2 millions de livres, le club a eu recours à unemprunt et à un plan d’actionnariat collectif. Selon le prési-dent du Dons Trust, Matthew Breach, le financement collectifa permis d’apporter des capitaux au club et, de surcroît, derenforcer le lien de loyauté à son égard, jouant ainsi un rôleessentiel dans sa progression.

Un cas moins concluant est celui d’Ebbsfleet United. En2008, les trois quarts du club ont été vendus à MyFootballClub

Comment gérer son club ?

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� Portsmouth,relégué en 3e division,fait appel auporte-monnaie de ses fans.

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A L’ALLEMANDEEn cultivant le bon sens paysanBienvenue dans le club le plus sain d’Europe. Auxantipodes de son rival, le flambeur ManchesterCity, le Bayern Munich conjugue depuis toujoursambition sportive et équilibre économique.

Le Temps Genève

B âtir une équipe capable de remporter la Ligue deschampions tout en gagnant de l’argent… Un rêveinaccessible, une belle illusion ? Eh bien non. LeBayern Munich offre la preuve éclatante qu’un clubpeut amasser de confortables profits tout en battant

les plus grands, qui creusent pour leur part des déficits abyssaux.[Le 7 décembre 2011], les Bavarois se sont inclinés sur le terrainde Manchester City. Mais si les Anglais, aux mains de richissimeset dépensiers cheikhs émiratis, ont gagné la bataille, le Bayern,qualifié depuis le match précédent et d’une stabilité financièreà toute épreuve, a gagné la guerre.

L’an dernier, le club bavarois a réussi l’exploit d’aligner sondix-neuvième exercice bénéficiaire de suite. Ses profits netssont certes plutôt modestes, puisqu’ils n’ont pas dépassé 1,3 mil-lion d’euros pour un chiffre d’affaires total de 328,5 millions.Mais gagner de l’argent dans le football est déjà une performanceen soi. Le FC Bayern München, FCB pour les initiés, fait encoreplus fort en parvenant à accroître tous les ans ses réserves finan-cières. Ses coffres contiennent aujourd’hui la bagatelle de129,1 millions d’euros de liquidités.

De tels chiffres doivent laisser rêveurs un bon nombre declubs européens, qui devront bientôt se soumettre aux règlestrès strictes du “fair-play financier” dictées par l’UEFA. EnAngleterre, la dette cumulée de Manchester United, Arsenal,Chelsea et Liverpool dépasse à elle seule… 1,3 milliard d’euros.Et la Liga de las Estrellas, 1re division espagnole, croulait à lafin de la saison 2009-2010 sous 3,4 milliards d’euros de dettes.Six des vingt clubs de l’élite ibérique ont même été placés enredressement judiciaire après qu’ils se sont déclarés en cessationde paiement.

Le Bayern Munich aurait-il trouvé la recette miracle pouravoir une équipe compétitive sans dépenser plus que de rai-son ? Loin de là. Dans ce club, point d’oligarques ou d’émirsqui dépensent sans compter pour flatter leur ego…L’encadrement est juste composé d’hommes du cru au fortaccent bavarois et au bon sens paysan. “La philosophie du clubest très conservatrice et elle n’a jamais changé d’un iota : ne pasdépenser plus d’argent que l’on n’en gagne, résume HartmutZastrow, le cofondateur de l’agence d’étude et du conseil enmarketing sportif Sport�+ Markt. Cette politique les a beaucoupfait souffrir dans le passé, car ils n’arrivaient pas à avoir une équipesuffisamment forte pour pouvoir rivaliser avec les tout meilleursdans les compétitions européennes.” L’arrivée du Français FranckRibéry en 2007, suivie deux ans plus tard par celle duNéerlandais Arjen Robben, a marqué un pas important dansla politique du club, qui acceptait pour une des premières fois

de son histoire de délier les cordons de sa bourse afin des’offrir deux stars internationales.

Même si on reste bien loin des 94 millions d’euros engloutispar le Real pour arracher Cristiano Ronaldo à ManchesterUnited, ces deux transfuges en provenance de Marseille et duReal Madrid ont respectivement coûté 30 et 25 millions d’euros.Ces recrutements font toutefois presque figure d’exception àMunich, où on continue à privilégier la formation de jeunespousses telles que Holger Badstuber ou Thomas Müller.

Les étrangers tentés par l’aventure bavaroise ne doiventpas non plus s’attendre à recevoir des émoluments de vedettehollywoodienne. La masse salariale du club ne représente eneffet même pas 48 % de ses revenus. On est loin des extrêmesenregistrés à Manchester City (107 %), au Real Mallorca (124 %)ou au Real Zaragoza (145 %). Le FCB aimerait pourtant encoreréduire ses charges. Son directeur sportif, Christian Nerlinger,estime que “les salaires ont atteint un plafond, c’est pourquoi nousdevons savoir raison garder. Les joueurs […] ne doivent pas penserqu’une prolongation de contrat signifie automatiquement plus d’ar-gent.” De telles déclarations n’encouragent pourtant pas lesstars du club à s’expatrier.

“Les joueurs apprécient l’atmosphère familiale que le Bayernest parvenu à maintenir, assure M. Zastrow. Beaucoup d’ancienssportifs ont d’ailleurs été intégrés dans l’effectif de la société à la finde leur carrière ou quand ils ont connu des soucis.” L’ancien atta-quant vedette Gerd Müller est ainsi sorti de l’alcoolisme quile ravageait dans les années 1980 quand son ancienne équipel’a recruté dans son encadrement.

Frédéric Therin

Paru sur Courrierinternational.com le 8 décembre 2011

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Le Bayernest fier de sonatmosphèrefamiliale, qui déteintaussi sur les supporters.

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Le ballon d’or

Euro 2012 Avec des millionsd’euros investis dans les infrastructures, l’Euro 2012 devrait fournir un fameux coup de pouce à l’économie polonaise,estimait en 2011 ce quotidienroumain.

Gandul (extraits) Bucarest

A lors qu’en 2008 un rapportde l’UEFA s’inquiétait desretards des chantiers d’in-frastructures en Pologne,Varsovie, la capitale, s’est

effectivement dotée du Stade national,afin d’accueillir le premier match. Et troisautres stades ont été construits, à Gdansk,Poznan et Wroclaw. Mikolaj Piotrowski,directeur des communications de l’Auto-rité de mise en œuvre des travaux d’in-frastructure, expliquait [au printemps2011] que les projets ne souffriraientaucun retard et que tous les stadesseraient prêts à l’automne [ce qui a bienété le cas].

A l’en croire, l’annonce de l’organisa-tion de l’Euro 2012 par la Pologne etl’Ukraine a ravi tant les fans de foot queles économistes. “Beaucoup de gens seréjouissaient parce que la Pologne serait auto-matiquement qualifiée. Moi, je me réjouissaisparce que je savais l’impact qu’aurait le cham-pionnat sur l’économie. Ce qui compte encoreplus, c’est ce qui restera après : le pays toutentier va être modernisé.” Selon une étude,l’Euro 2012, qui durera trois semaines,générera 212 millions d’euros de profitspour l’économie polonaise. Les investis-sements dans les infrastructures – plusde 21 milliards d’euros – ont servi à affron-ter la crise économique : la Pologne est leseul pays européen à ne pas avoir subi derécession en 2009. En 2011, la croissanceéconomique a d’ailleurs été de 4 %.

“En ce moment, la Pologne est le plusgrand chantier d’Europe, comme l’étaitl’Allemagne dans les années 1990”, a déclaréSlawomir Majman, le président del’Agence polonaise pour les investisse-ments étrangers. Le pays est aussi le prin-cipal bénéficiaire des fonds de l’UE  :67 milliards d’euros en fonds structurels,à dépenser sur la période 2007-2013. “Il y

a suffisamment d’argent, mais nous avonsrencontré quelques problèmes juridiques”,déplorait Majman. Le principal étant liéà l’expropriation des terrains nécessairesà la construction de voies de chemin defer – les questions juridiques n’ont étérésolues qu’en 2010, et l’on estime que leprojet sera achevé d’ici à 2016.

La construction des autoroutes s’estdéroulée, elle, sans heurts : une loi spé-ciale a été adoptée en avril 2010 en vuedu championnat, afin de simplifier lesprocédures relatives à la constructiond’autoroutes et d’aéroports. Au prin-temps de l’année 2012, une autoroute doitêtre mise en service entre Varsovie etBerlin. Selon Mikolaj Piotrowski, lesdélais des travaux d’infrastructure ontété respectés dans près de 80 % des cas.Et la confiance des Polonais dans le suc-cès des projets s’est accrue. “Quand j’aicommencé à travailler, seuls 20  % desPolonais croyaient que nous serions prêts àtemps pour l’Euro 2012. Maintenant [auprintemps 2011], ils nous font confiance à65 %”, a conclu Piotrowski. �

Paru sur Courrierinternational.com le 16 mai 2011

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La Pologne peut dire merci !

A un mois du coupd’envoi de l’Euro 2012, MikolajPiotrowski, porte-parole du comitéd’organisationchargé des projetsliés aux transports,à l’hébergement et aux stades,annonçait : “Noussommes prêts à 98 %.” Le seulproblème,anticipait-il, c’est le risque debouchons auxabords de Varsovie.

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� Le chantier du Stade nationalà Varsovie, en février 2011.

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Euro 2012 Après avoir testétrente-six façons d’obtenirune place, un journalistepolonais se résigne : comme de nombreux fans de football, il risque de rester sur la touche.

Newsweek Polska Varsovie

Depuis l’élimination de la Po -lo gne par la Suède à l’Euro2004, je pensais être défini-tivement guéri de la dépen-dance qui consistait à vouloir

suivre tous les matchs de l’équipe natio-nale. Ma rechute date de mars dernier.

C’est le moment qu’a choisi l’UEFApour mettre en vente les premiers billetspour l’Euro 2012. Ainsi, 41 % des précieuxsésames, pour un total de 1,4 million debillets sur l’ensemble de la compétition,ont été proposés à 12 millions d’acheteurs,soit vingt candidats pour un ticket. Je neparle pas des 750 000 billets accordés auxfans de foot – sauf à moi – à l’issue d’untirage au sort.

Par ailleurs, l’UEFA a distribué 32 %des billets – soit 450 000 – aux fédéra-tions des pays participants. A ce titre, laPologne en a reçu 23 000, partagés selonun calcul dont elle seule détient le secret :deux tiers pour les membres de la fédé-ration, les partenaires publicitaires etleurs invités, le reste pour les inscrits auClub du supporter de la République polo-naise. La semaine dernière, notre fédé-ration a ainsi distribué 8 700 billets.Toujours rien pour moi.

Il me reste encore une petite chancede pénétrer dans un stade si la Pologneprend la tête du groupe. Chaque paysqualifié pour les quarts de finale auradroit à 10 % de places supplémentaires,que la fédération polonaise s’engage àrépartir par tirage au sort. Mais encorefaut-il que notre équipe arrive à ce stadede la compétition.

Jusqu’au mois de février, si l’on vou-lait éviter le tirage au sort, on pouvait tou-jours se procurer les billets en passantpar l’agence de voyages officielle del’UEFA. Pour deux nuits dans un hôteldeux étoiles de Varsovie, il fallait compter500 euros, match d’ouverture compris.J’ai refusé cette option, tout comme le

“packaging hospitalité” et ses places VIPpour un match, buffet compris, à partirde 800 euros.

Je continue ma quête auprès du Clubdu supporter. On m’envoie sur le serviceen ligne de l’UEFA de revente des billetsau prix d’achat. Après mon inscription,la déception. Sur 1,4 million de billets autotal, il y a seulement quelques dizainesde places disponibles pour le matchRépublique tchèque-Grèce, à Wroclaw[dans le sud-est du pays], quelquesdizaines pour les matchs en Ukraine,dont les demi-finales à Donietsk, à270 euros, ou encore pour la rencontreFrance-Angleterre, qui promet un grandspectacle, à 120 euros. Aucun billet pourVarsovie.

L’UEFA interdit la revente avec béné-fices (bien qu’elle touche elle-même10 % sur la transaction de ses billets endeuxième main). Je me dis qu’avec12 millions de clients il y a forcément une

solution. Je me lance sur les enchères enligne. Tout comme les internautes ven-dent des laisses à 500 euros en y ajoutantgratuitement un chien [leur vente eststrictement réservée aux éleveurs pro-fessionnels], les supporters cèdent desécharpes et breloques contre 250 à500 euros en y joignant gratuitement unbillet pour l’Euro 2012. Je trouve mêmeune annonce pour un dictionnaire polo-nais-russe, “particulièrement utile pendant

le match Pologne-Russie. Le mieux sera des’en servir le 12 juin à 20 h 45, dans les gra-dins du secteur 2. Vocabulaire conseillé :‘billet’, ‘Euro 2012’, ‘Russie’, ‘Pologne’”.

Plus loin, on propose un allerVarsovie-Kiev à 900 euros, soit cinq foisplus cher que le prix habituel. Le site d’en-chères en ligne Allegro bloquant les offressuspectes, le vendeur a placé son offredans la rubrique Voyages. En précisantqu’il s’agit d’un billet pour la finale.

Un autre vend au prix fixé par l’UEFAmais demande de le contacter par télé-phone. Le prix du billet est soudain mul-tiplié par quatre, sans compter qu’il fautaller le chercher en main propre àWyszkow [petite ville dans la région deVarsovie] – tous ces gens ne vendent pasde billets, mais plutôt le droit de les avoir.Mais, sachant que l’UEFA attendra débutmai pour présenter les tickets et fin maipour les envoyer aux acheteurs, que levendeur exige le paiement sous septjours, l’opération est risquée. Verrai-jeun jour mon vendeur ? Sans parler demon billet… Rien n’est moins sûr.

J’ai donc continué mes recherches surwww.worldticketshop.com et www.spor-tevents.com, sites spécialisés dans la ventede billets pour les matchs de football amé-ricain, de la NBA [basket] et de la PremierLeague anglaise. L’UEFA n’a pas réponduà ma question sur la provenance de cestickets, et l’on peut supposer qu’ils fontpartie de ces 14 % – 200 000 environ – quela Fifa a réservés aux grandes entreprises.

Radoslaw Omachel

Paru sur Courrierinternational.com le 22 mars 2012

Trouver un billet ? Mission impossible !

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Euro 2012

Sur le Net, une écharpeà 500 euros. Mais le billet, lui, est gratuit !

Dessin de BeppeGiacobbe, Milan.

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Le ballon d’or

En accédant à la présidence de laRépublique, Viktor Ianoukovitch tenaitabsolument à régler ses comptes avecIoulia. Lors de la “révolution orange”,Iouchtchenko et elle lui ont pris le pou-voir, l’ont accusé de fraude électorale etont ressorti son passé criminel. Son partiavait alors perdu sa position, son influenceet beaucoup d’argent. Cela ne s’oublie pas.Le procès Timochenko s’est déroulé dansune ambiance de scandale. Pourtant,Bruxelles n’a pas interrompu ses négo-ciations avec Kiev sur l’accord d’associa-tion, qui a fini par être paraphé en marsdernier. Aujourd’hui, la question de saratification n’est plus à l’ordre du jour.

Reste que Mme Timochenko n’est pasblanche comme neige. Elle a gagné sesmillions de la même façon que tantd’autres qui, au début de la transition, fai-saient des affaires avec l’Etat ou partici-paient à la privatisation. Ioulia et sa famillese sont implantés dans le secteur del’énergie, où coulait un flot d’argent inin-terrompu. En tant que chef du gouverne-ment, elle n’a pas hésité à distribuerl’argent public et à pratiquer un populismeextrême, avec le seul objectif de conserverle pouvoir. En même temps, elle incarnaitle nouveau visage de l’Ukraine, une belle

femme, reconnaissable, différente del’image soviétique austère et vieillotte.

Les dessous des cartesPourquoi est-ce seulement aujourd’huique le sort de Ioulia interpelle l’Occident ?Parce que Ianoukovitch a dépassé lesbornes : il a trompé les dirigeants occi-dentaux, en particulier Angela Merkel. Ilpouvait user d’un million de prétextespour sortir la tête haute de la situation ;au lieu de quoi, il s’est enfoncé, quitte àdiscréditer complètement l’Ukraine.

Les adeptes de la théorie du complotrestent pourtant convaincus que le boy-cott lancé à Berlin n’est qu’une tentativegermano-russe pour infléchir la stratégiede l’Europe et jeter l’Ukraine dans lesbras de Moscou après avoir sapé ses aspi-rations européennes. Sans parler de punirles efforts polonais en faveur du destineuropéen – plutôt que russe – del’Ukraine. Dans cette hypothèse, l’affaireTimochenko ne serait qu’un prétextepour lâcher l’Ukraine. Quoi qu’il en soit,le climat autour de l’Euro 2012 est belet bien pollué.

Jagienka Wilczak

Paru sur Presseurop.eu/fr le 15 mai 2012

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Pagaille diplomatique sur le gazon

Euro 2012

� Dessin de Medi,Tirana (Albanie).

Ukraine L’incarcération de Ioulia Timochenko a semé la zizanie : de nombreux pays européensmenacent de boycotterl’Euro 2012 côté ukrainien.Mais derrière la questiondes droits de l’homme se profilent d’importantsenjeux économiques.

Polityka (extraits) Varsovie

P lusieurs personnalités poli-tiques, à commenccer par lesAllemands, ont annulé leurdéplacement en Ukraine, ensigne de protestation contre

l’emprisonnement de l’ancien Premierministre Ioulia Timochenko et pourdénoncer les mauvais traitementsqu’elle a subis dans la colonie péniten-tiaire de Kharkiv.

Une véritable vague de colère atraversé Bruxelles : le président de laCommission, José Manuel Barroso, ainsique des commissaires européens, nemettront pas les pieds à Kiev. [Quant àFrançois Hollande, il a laissé entendre qu’ilboycotterait l’Euro 2012 en déclarant le24 mai : “J’aime beaucoup le football, maisce qui se passe en Ukraine est un problème.”]

“Ensemble, nous créons l’avenir”, tel estle slogan officiel de l’Euro 2012. Telleest également encore la conviction deGregory Surkis, le président de laFédération ukrainienne de football, pourqui l’Euro 2012 accélérera les change-ments [en Ukraine], avec ou sans les com-missaires bruxellois.

Des comptes à réglerEn Ukraine, le sport et la politique sontaussi entrelacés que la tresse de IouliaTimochenko. A tel point qu’on s’atten-drait à ce que les oligarques, qui ontinvesti des millions dans la constructionde nouveaux stades, fassent tout pour quele championnat soit un succès et un pasvers l’intégration à l’Union européenne,avec laquelle ils comptent bien faire desaffaires. Après tout, ce sont bien eux, lessponsors de la politique ukrainienne, quipourraient faire pression sur le présidentpour calmer l’affaire Timochenko. Alorspourquoi ne le font-ils pas ? Parce qu’ilssavent que Ianoukovitch peut, d’un cla-quement de doigts, couper les veines d’ordans lesquelles ils puisent.

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Le ballon d’or

Reconversion Un mois après sa retraite, annoncéeen février 2011, l’anciennestar du Brésil était devenuel’agent des principauxtalents du foot de son pays,au grand dam des poidslourds de la profession.

Istoé São Paulo

L ’un des meilleurs joueurs del’histoire du football, Ronaldo,surnommé “Il Fenomeno”, estaussi un champion du marke-ting. Peu de sportifs ont eu

autant de contrats de publicité et de par-rainage, et encore plus rares sont ceux quiont démontré un tel flair pour œuvrerdans le monde des affaires. Désormais,Ronaldo veut mettre à profit ses nom-breux talents en la matière pour veillersur la carrière des étoiles du football. Enun mois d’existence, son entreprise, la9ine, possède déjà dans ses tablettes lesprincipales figures de la nouvelle généra-tion du football brésilien. Neymar, la starde Santos [dans l’Etat de São Paulo], a étéofficiellement recruté par l’agence deRonaldo, et Lucas, devenu récemmentune idole à São Paulo, vient de l’être à sontour. Paulo Henrique Ganso, joueur deSantos et pour beaucoup futur numéro 10de la Seleção au Mondial 2014 [qui auralieu au Brésil], s’est réuni il y a peu avecRonaldo. Ils n’ont pas trouvé d’accord,mais ce n’est qu’une question de temps.On n’exagère donc pas en disant que laconstellation d’étoiles engagées par la9ine fait de Ronaldo le nouveau patrondu football brésilien. “La 9ine a un conceptfondé sur l’exclusivité, c’est-à-dire que l’ontravaille uniquement avec les meilleurs spor-tifs”, souligne le meilleur buteur de l’his-toire de la Coupe du monde.

Ronaldo n’est pas tout seul. On trouveà ses côtés la WPP, le plus grand groupede communication du monde, et MarcosBuaiz, un businessman de la nuit (Ronaldoet WPP détiennent chacun 45 % du totaldes actions et Buaiz possède le reste).Selon Ronaldo, la 9ine n’a rien à voir avecles agences et les imprésarios qui traitentles transactions entre les clubs et les foot-balleurs : elle s’occupe uniquement de lagestion de l’image des joueurs et attireles sponsors pour leurs poulains. “Noussommes un partenaire des agents et on ne vapas intervenir dans le même secteur qu’eux,

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Il Fenomeno

De son vrai nomRonaldo LuisNazário de Lima, le Brésilien est à 35 ans l’une deslégendes vivantesdu football. Il a évolué dansplusieurs grandsclubs européens,tels que le PSVEindhoven, le FC Barcelone,l’Inter Milan, le Real Madrid et le Milan AC, et il a enchaîné les transfertsjuteux. Il a aussicollectionné les coupes et les records : il a notamment étédeux fois championdu monde avecl’équipe nationaledu Brésil (en 1994et en 2002) et il détient le record de butsinscrits en Coupedu monde (15).Redoutableattaquant, il a marqué 62 buts en 98 sélectionsdans la Seleção, ce qui le place juste derrière Pelé en termes de réalisations.

Quand le patron s’appelle Ronaldo

Chelsea, le Real Madridet le Barça le voulaient.Mais Neymar juniorrestera au légendaireclub de Santos, celui où a joué Pelé. Il y estentré à l’âge de 14 ans, en 2006, pour 1 milliond’euros, une sommeastronomique pour unjoueur de cet âge. C’estson père qui, à l’époque,menait les négociations.Le jeune Neymar – deson vrai nom Neymar da Silva Santos junior –était alors sur le point de signer avec le RealMadrid, ce qui avaitévidemment fait monterles enchères. Depuis, les principaux clubseuropéens n’ont jamais

cessé de l’approcher.Pour le garder, sonéquipe a dû faire monterles enchères à presque2 millions d’euros,raconte le mensuelcolombien Gatopardo.Ces sommes sontdérisoires en regard de ce que lui rapportentles partenariats. Car Neymar junior,aujourd’hui âgé de20 ans, est devenu unemarque. Tout commeDavid Beckham, sonidole, il capitalise sur sonimage. En 2012, son clubespère gagner environ63 millions d’euros grâceà lui. Le contrat sur les droits de diffusion de ses matchs est

de 22 millions d’euros,une somme qui a doublédepuis l’arrivée deNeymar. Nike, nouveausponsor des tee-shirtsde l’équipe, a versé5 millions d’euros,deux fois plus que son prédécesseur. Bref, Neymar junior estune véritable machine à sous. Il y a dix ans, lejeune homme à la crêtede Mohican serait partivivre la belle vie en Europe. Aujourd’hui,il profite du booméconomique de sonpays. Le Brésil comptebien renforcer sonstatut de puissance dufootball en empêchantla fuite de ses joueurs.

Brésil

Un petit prodige du foot et du marketing

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Opinion Enlevez au footballses moyens gargantuesques,ses sponsors clinquants et les sirènes de la notoriété, il vous restera le jeu. Le vrai.

Linkiesta (extraits) Milan

F aire le tour des terrains deprovince est une expériencedivertissante, enrichissantesur le plan sportif, voire gro-tesque, lorsque les specta-

teurs arpentent les stades en beuglant :“J’ai payé mon billet, je dis ce que je veux.”Les tickets s’achètent généralementdevant l’entrée du stade, où des béné-voles se relaient hiver comme été. Dansles provinces les plus reculées, les tri-bunes sont de simples gradins de béton,quelle que soit la saison. Parfois, onassiste au match directement depuis lebord du terrain, un simple filet séparantl’aire de jeu des spectateurs.

Certaines équipes attirent des vil-lages entiers. D’autres ont beau être dedimension respectable et arborer unpassé plus ou moins glorieux, elles pei-nent à dépasser les 100 supporters. Mais,lors de ces matchs de province, le spec-tacle offert par le public constitue biensouvent l’attraction principale. Onappréciera les injures à l’encontre de l’ar-bitre, généralement traité de cocu, et lesaltercations entre supporters – souventles parents des joueurs –, qui offrent

également quelques perles dignes de lacommedia dell’arte.

Sur le terrain, 22 joueurs s’alignentsur la pelouse après une semaine d’en-traînement. Personne, ou presque, nejoue pour l’argent. Et, en temps de réces-sion, il devient même difficile de rameuterles 2 ou 3 sponsors habituels qui injectentquelques fonds pour permettre au clubde survivre.

Sur ces terrains comme ailleurs, onretrouve le buteur, le joueur le plus craintpar les défenses adverses. Il y a aussi lesgardiens illustres, qui auront peut-êtrejoué quelques matchs en Excellence ouen Promotion et qui sont considéréscomme des demi-dieux. Enfin viennentles “bouchers” : ce ne sont pas des com-merçants, mais des défenseurs qui onttendance à emporter la jambe de l’ad-versaire plus souvent que le ballon.S’ensuivent alors douleurs, contestationset cartons rouges.

Les compétitions de province sont àdes années-lumière du football doré desprofessionnels. Au regard de la technique,mais aussi de tous ces éléments qui fontque la Serie A [la ligue 1 italienne] tientdésormais moins du sport que d’un pro-duit marketing prêt à consommer. Lemonde du sport de province est à la foispetit et grand. Il suffit de le vivre et de leraconter pour envoyer un signal fort auxprofessionnels du ballon rond, et notam-ment aux dirigeants qui contrôlent cetunivers professionnel à coups de milliards.

Luca Rinaldi

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affirme-t-il. Notre objectif est de tirer le maxi-mum de la carrière du joueur.” C’est simpleà comprendre : si Barcelone veut recruterNeymar, il va contacter son agent, et nonpas Ronaldo. Ce dernier, de son côté, s’ef-force de décrocher des contrats de par-rainage pour Neymar et gagne ainsi unpourcentage chaque fois que sa démarcheest couronnée de succès.

L’arrivée de Ronaldo dans le milieu aprovoqué une certaine agitation. De nom-breux hommes d’affaires se sont sentismenacés. L’ancien gardien de la Seleção,Gilmar Rinaldi, aujourd’hui l’un desagents de joueurs les plus influents duBrésil, a même insinué que Ronaldo avaitappâté l’attaquant Adriano et que sonrecrutement aux Corinthians [club de SãoPaulo] avait été réalisé dans son dos (lesintérêts d’Adriano sont depuis de nom-breuses années gérés par Gilmar Rinaldi).Ronaldo s’est défendu : il est un ami delongue date d’Adriano et, grâce à sesbonnes relations avec les Corinthians,il a rapproché le joueur du club.

Un autre agent d’envergure, WagnerRibeiro, a, lui, adopté une attitude diffé-rente. Perspicace, il a évité d’entrer enconflit avec un personnage aussi influentque Ronaldo. En avril [2011], Ribeiro asigné un contrat permettant à la 9ine degérer l’image de près de 50 joueurs quisont sous sa coupe. “La 9ine va complétermon travail comme agent, estime Ribeiro.Nous serons de très bons partenaires.”

Ronaldo a de grandes ambitions poursa nouvelle entreprise. Reconnu et res-pecté dans de nombreux pays, il prétendy attirer des cracks du football mondial.L’un d’eux, le Néerlandais Seedorf, duMilan AC, négocie actuellement sontransfert aux Corinthians. Dans ce cas,Ronaldo agirait de fait comme un agent,contrariant le discours officiel selonlequel la 9ine est seulement un cabinetde marketing. D’autres sportifs sont danssa ligne de mire : le lutteur AndersonSilva, champion de l’Ultimate FightingChampionship (UFC), intègre la vitrinede la 9ine – une relation qui a déjà portéses fruits pour cet athlète. Récemment,Bozzano [une marque de produits debeauté pour hommes] a fait appel àl’image de Silva. Voilà un exemple de lapuissance du marketing de Ronaldo. Lemonde de l’entreprise est également unobjectif pour la 9ine : AmBev [l’un desprincipaux producteurs de boissons duBrésil] et GSK [numéro deux mondial del’industrie pharmaceutique] ont fait appelà l’agence de Ronaldo. Tout cela prouvequ’il continuera à être un “phénomène”du marketing.

Amauri Segalla

Paru sur Courrierinternational.com le 18 mai 2011

Eloge du foot amateur

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� La star s’est muée en consultant de luxe. Ici avec Neymar lorsd’une réunion de préparation de la Coupe du monde 2014.

� Des fansburkinabésadoptent les couleurs de ceux qui sont pour eux les meilleursjoueurs du monde.

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Le ballon d’or

Derrière chaquecommentateur vedette secache un super-expert. Celuiqui officie pour la chaîneallemande ARD s’appelleGerrit Meinke. Son métier ?Contrôleur de gestion. Saufles soirs de match, bien sûr.

Der Tagesspiegel Berlin

L a plupart des téléspectateursne soupçonnent même passon existence. On ne le voitpas, on ne l’entend pas, etpourtant Gerrit Meinke est

omniprésent. Il est en quelque sorte lefantôme du football moderne. Et, ce jeudisoir où le Hertha BSC Berlin affronteen match de relégation le FortunaDüsseldorf, club de Bundesliga 2 [2e divi-sion], il va une nouvelle fois hanter leposte de télévision.

Gerrit Meinke s’est installé à sa petitetable aux côtés de Tom Bartels [célèbrejournaliste sportif] avec une ribambellede fiches sous le nez. Il abreuve d’infor-mations le commentateur de la chaîneARD. Une bonne partie de ce que dit TomBartels pendant la retransmission endirect lui est soufflé par son assistant.Le public, lui, n’entend que la voix dureporter.

Le rôle d’associé de l’ombre nedérange pas Gerrit Meinke. “Je trouve celatout à fait normal. Je n’ai pas à me mettre enavant.” En tout cas pas pour ce qui n’estpour lui qu’une activité d’appoint. Car sonmétier principal est toujours directeurdes finances et du contrôle de gestion auSC Paderborn [un club de football deRhénanie-du-Nord-Westphalie], qui évo-lue en Bundesliga 2. Il s’en est fallu de peuque Gerrit Meinke n’analyse jeudi soir laprestation de son propre club. Mais le SCPaderborn a manqué la qualification et lequadragénaire (44 ans) a ainsi échappé àun dilemme. Il se serait évidemmentréjoui de la montée du SC Paderborn,mais sa tâche s’en trouve ainsi facilitée :son club ne jouant pas, il pourra analyserla rencontre de manière un peu plusimpartiale, un peu plus professionnellepeut-être aussi.

Il n’a pas besoin pour ce faire de sepréparer outre mesure. “La préparationen amont ne représente qu’environ 10 %du travail, confie-t-il. Les 90 % restants,c’est pendant le match que ça se passe.”Naturellement, Gerrit Meinke a égale-ment les statistiques à portée de main :distance parcourue, temps de possessiondu ballon, résultats des duels, etc. Maisc’est avant tout un tacticien. Il observe lacomposition des équipes et la façon dontelles se comportent sur le terrain, etsouffle ses observations à Tom Bartels parmicro interposé. “Il y a certaines choses quel’on ne peut tout simplement pas voir quandon n’a pas soi-même été professionnel, en bas,sur le terrain”, analyse Gerrit Meinke.

A l’époque où, joueur titulaire, il écu-mait les stades allemands, dans les années1990, il n’y avait pas de gens comme lui àla télévision. Mais, à l’heure actuelle, sonmétier fait partie du football au mêmetitre que la passe courte. Depuis 2000, laplupart des commentateurs de footballont un homme de l’ombre. Un expertsecondant l’expert, en somme, un com-parse invisible – tout au moins pour letéléspectateur.

Au départ, ce rôle était souvent tenupar des employés lambda de la chaîne– Gerrit Meinke les appelle “les compteursde corners” parce qu’ils ne savent pas aussibien analyser le jeu que des profession-nels. Mais maintenant le contrôleur degestion coiffe la casquette d’“assistant deTom Bartels” une dizaine de fois dans lasaison. Lors des rendez-vous importantscomme l’Euro ou la Coupe du monde, ilsacrifie ses vacances annuelles pour cettedeuxième activité. Un tel investissementest-il bien nécessaire ? Les chaînes en sontpersuadées. A leurs yeux, le sport estdevenu si complexe et évolue si vite qu’ilest difficile pour une personne seule degarder un œil sur tout. Par ailleurs, d’après

Gerrit Meinke, les attentes des téléspec-tateurs sont bien plus grandes qu’il y aencore quelques années. Ils s’intéressentau moindre événement, à la moindreémotion, au moindre geste des joueurs,y compris lorsqu’il a lieu loin du ballon.Pendant que Tom Bartels se concentresur le jeu, son acolyte suit sur son moni-teur ce qui se passe ailleurs sur la pelouse.

Ces derniers temps, de plus en plusd’anciens joueurs ou entraîneurs pren-nent place dans les tribunes de pressedes stades de foot. A côté du duo Bartels-Meinke, on trouve d’autres tandems toutaussi bien rodés. Ancien entraîneur duHambourg SV, Michael Oenning travaillepour Sky et [le commentateur sportif]Kai Dittmann, après avoir, pendant dixans, joué les souffleurs auprès de MarcelReif. Depuis 2010, l’homme qui secondele commentateur vedette de la chaîne Skys’appelle Christoph Biermann, il est l’au-teur d’une kyrielle d’ouvrages sur la dis-cipline et fait partie de la rédaction dumagazine de football 11Freunde. Depuis1994, Martin Schneider est le bras droitdu commentateur de la ZDF Béla Réthy.

Tom Bartels considère Gerrit Meinkecomme “le plus important de [ses] col-lègues”. Voilà déjà huit ans qu’ils prennentplace côte à côte lors des directs d’ARD.“Nous savons tous les deux comment l’autrefonctionne et nous n’avons pas besoin demots pour nous comprendre.” Ce qui n’estpas le moindre des atouts pour travailleren direct.

Il lui arrive de n’intervenir que deuxfois par mi-temps. D’autres fois, quandle rythme s’accélère, il souffle en perma-nence à l’oreille de Tom Bartels. Et puisil y a des phases de jeu au cours des-quelles Gerrit se contente de jouer lesgarde-fous et de contrôler ce que dit TomBartels. Il opine du bonnet, lève le pouceet donne au commentateur “le sentimentqu’il a vu juste”. Dans les dix premièresminutes d’un match, le souffleur ne pipegénéralement pas mot. Il observe, se faitune idée de ce qui se passe et se tient coi.De toute façon, il est la plupart du tempsplacide.

Un bon commentaire de match sereconnaît également aux brefs instantsde silence.

Katrin Schulze24

Gerrit Meinke

Dans les dix premièresminutes d’un match, le souffleur ne pipegénéralement pas mot.Il se contente d’observer

Bibliographie

1967 Naissance de Gerrit Meinke.

1988-1989 Il joue dans l’équipeamateur de TuRa Melle, en Basse-Saxe, aux côtés de son futur collègue Tom Bartels.

1989 Il rejoint le footballprofessionnel.

2000 Meinke met unterme à sa carrièrede footballeur. Il devientcontrôleur de gestion pour le SC Paderborn et expert dans les tribunes.

L’homme qui murmure à l’oreilledes commentateurs

� Dessin de Mikel Casal(Madrid) pourCourrierinternational.

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Le ballon d’or

Chine Les grands clubs,comme celui de Shanghai,paient plus de 10 millionsd’euros par an pour recruterdes footballeurs européenset sud-américains. De quoi faire pâlir d’envieles joueurs restés au pays, annonce fièrement ce site Internet.

Sina.com Shanghai

E n 1994, le joueur russe duShanghai Shenhua FootballClub, Vladimir Nakhratov,était le meilleur buteurétranger du championnat

chinois. Pourtant, son salaire annuel étaitseulement de 6 000 dollars (4 785 euros),alors qu’aujourd’hui, dans le même clubde Shenhua, Nicolas Anelka gagne10,7 millions d’euros par an. Le joueurfrançais a inauguré en Chine l’ère desfootballeurs de Super League payés plusde 10 millions d’euros.

Avant Anelka, c’est l’Argentin DarioConca qui avait fait parler de lui dans lemonde entier avec une rémunération àrendre jaloux les joueurs des grands clubseuropéens. “C’est pas vrai !” avaient réagi[ses compatriotes] Gonzalo Higuaín etAngel Di María en rencontrant Concalors de la venue à Canton de leur équipe,le Real de Madrid, en août dernier.

Le quotidien sportif brésilienGloboesporte avait fait sensation en révé-lant le salaire annuel que touchait cefootballeur dans le club de Canton, le

alors que hocher la tête, et Higuaín a faillitomber de sa chaise. Leurs salairesannuels étaient respectivement de 2 et3 millions d’euros, soit nettement moins.Cela a même fait dire à Iker Casillas, lecapitaine de l’équipe nationale d’Espagne,en déplacement en Chine, qu’il était prêtà venir jouer dans la Super League chi-noise pour un salaire équivalent à celuide Conca…

Mais Conca, qui n’a pas dépassé labarre des 10 millions d’euros par an,n’est que deuxième au classement desjoueurs les mieux payés de la SuperLeague chinoise : c’est Anelka, cet avant-centre de 33 ans, qui arrive en tête. Le12 décembre 2011, le club de Shenhuaannonçait avoir signé un accord avec lefootballeur français. Il n’a pas révélé lesalaire proposé au joueur, mais on a suqu’il s’élevait à 10,7 millions d’euros.Une somme qui le place au troisièmerang mondial, juste derrière le joueurdu club russe de l’Anzhi Samuel Eto’o(20 millions d’euros) et CristianoRonaldo (13 millions d’euros) – lequelne touchait que 5,8 millions d’euros paran à Chelsea.

Cependant, il est fort possible quele record établi par Anelka soit battu lorsdu mercato d’hiver. Une rumeur courtselon laquelle le Guangzhou Evergrandeaurait recruté le joueur de DortmundLucas Barrios, pour un salaire annuelqui n’aurait rien à envier à celui duFrançais. Quant à Didier Drogba, sijamais il rejoint le Shanghai Shenhua, sarémunération pourrait bien dépasser les20 millions d’euros par an, à en croirela presse étrangère. �

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Des stars étrangères couvertes d’or

Guangzhou Evergrande : 10,6 millionsd’euros, le troisième à l’échelle mon-diale, juste derrière ceux de CristianoRonaldo et Lionel Messi. Interviewé pardes médias argentins, Conca a reconnun’avoir jamais vu autant de zéros danssa vie : “Avec ça, je peux faire vivre mesparents, enfants et petits-enfants !”

Finalement, le Guangzhou Evergrandea arrêté son salaire annuel à 7 millions

d’euros, soit dix fois plus que ce quegagnait jusqu’alors le joueur argentindans le championnat brésilien. Sa rému-nération le plaçait quasiment au mêmerang que des stars du football mondialcomme Ronaldhino, Özil ou Agüero, luiqui n’arrivait à l’époque qu’en 43e positionau classement des meilleurs joueursmondiaux. “Il a vraiment de la chance !” aconfié Di María, avec une pointe d’envie,lors d’une interview. En fait, il n’y croyaitpas vraiment, jusqu’à ce que Conca luiconfirme lui-même le montant. Il n’a pu

Au Vietnam aussi, les transferts atteignent desmontants insensés, observele site VietnamNet Bridge.Alors qu’en 2003 le recordpour un rachat était de 400 millions de dongs(15 000 euros), il a étémultiplié par 30 en l’espacede huit ans, atteignant

12 milliards de dongs(451 000 euros). Pourtant, investisseurs et fédération vietnamiennede football s’accordent à trouver ces sommesdisproportionnées par rapport au niveau des joueurs. Pourquoi une telle explosion ? Elle

s’expliquerait en partie parl’intervention d’agents nonassermentés, qui gonflentles prix des transferts. Les investisseurs suivent,car pour réaliser des profitsils ont besoin de bonsjoueurs. Une denrée rare au Vietnam. La formation et l’entraînement manquent

tellement d’efficacité que nombreuses sont les équipes qui doiventacheter la totalité de leursjoueurs. Du coup, même si le pays compte peu de grands talents, la demande estextrêmement forte et les prix suivent.

Vietnam

Inestimables talents

� Dessin de Reumann,Suisse.

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Source : *Médiamétrie 126 000 cumul sept-déc 2010/2011– 13 ans et + / CSP+I - tris spécifiques issus de l’enquête 126 000**Médiamétrie Médiamat – Novembre 2011 – Couverture mensuelle 4 ans et + = 2 993 000 téléspectateurs

DeBonneville-Orlandini

BFM Business est la 1ère chaîne d’info économique et financière. Vous êtes 540 000 à l’écouter chaque jour à la radio.*Vous êtes près de 3 000 000 à la regarder à la télévision.**

François Lenglet7h15

Nicolas Doze“Les Experts”9h - 10h

Fabrice Lundy“Le Grand Journal”18h - 21h

Stéphane Soumier“Good Morning Business”6h - 9h

Hedwige Chevrillon“Le 12-15”12h - 15h

ON N’A JAMAIS AUTANTPARLÉ D’ÉCONOMIE.ON N’A JAMAIS AUTANT ÉCOUTÉ ET REGARDÉBFM BUSINESS.

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Le ballon d’or

Iran Dans la capitale, le derby entre le Persépoliset l’Esteghlal est aussi unelutte entre la classe ouvrièreet les puissants. En 2009, un journaliste britannique a assisté à une rencontre.

FourFour Two (extraits) Londres

Le championnat iranien re-groupe dix-huit clubs, dontseize vivent dans l’ombre desdeux clubs de la capitale. Lesdeux équipes de Téhéran

comptent des supporters non seulementparmi les quinze millions d’habitants dela ville, mais dans tout le pays, tout lecontinent, voire le monde entier. Si onaime le foot et qu’on réside en Iran ou endehors, il va pratiquement de soi qu’onest soit pour les rouges du Persépolis, soitpour les bleus de l’Esteghlal. On trouvedans les kiosques une vingtaine de jour-naux uniquement consacrés au football.Et l’Esteghlal et le Persépolis ont chacun

des publications qui leur sont consacrées.Quelque part dans cette ville étrange,accueillante et embouteillée qu’estTéhéran, un conflit fait rage : celui quioppose les rouges du Persépolis aux bleusde l’Esteghlal. Le jour du derby ne res-semble à aucun autre jour du calendriersportif. Vingt-quatre heures avant lematch, nous faisons la connaissance deHussein autour d’une tasse de thé sucré,

dans une boutique de tapis du bazar. C’estun rouge. “Ce qu’il faut que vous compreniez,c’est que, pour beaucoup de supporters duPersépolis, il n’y a qu’une chose qui compte :battre l’Esteghlal”, explique-t-il, la mainsur le cœur.“On peut être dans le milieu dutableau, ou même plus bas, mais, si on rem-porte le derby, on est content. Quand on jouecontre l’Esteghlal, c’est la folie. Il y a desémeutes, des magouilles, des bagarres. Vous

savez que le gouvernement a peur de la pas-sion des supporters ? Maintenant, il n’y a plusque 95 000 personnes qui ont le droit d’allerau stade.” “Que” ?

L’histoire du derby est liée à celle dupays. Le club qui porte aujourd’hui le nomd’Esteghlal a été fondé en 1945. Il a portéle nom de Taj [Couronne] pendant desannées. C’était l’équipe du chah et il étaitdevenu un club important. Mais il a prisle nom d’Esteghlal immédiatement aprèsla révolution [islamique, en 1979], quandles nouveaux dirigeants ont entrepris depurger le pays de l’influence de la familleroyale. Esteghlal signifie “indépendance”.Le club est toujours considéré commel’équipe des puissants. Il a remporté cinqfois le championnat iranien. Les rougesdu Persépolis ont en revanche une his-toire plus récente. Le club n’est né offi-ciellement qu’en 1963. Sa naissance acoïncidé avec la fin du Shahin FC, quiétait jadis le club dominant. Le Persépolisest l’équipe de la classe ouvrière. D’aprèsun sondage réalisé par une émission detélévision, 60 % des fans de foot consi-dèrent le Persépolis comme leur équipe

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Ennemis intimes

Si on aime le foot etqu’on réside en Iran, onest soit rouge soit bleu

Distance de sécurité : les supporters de l’Esteghlal et de Persépoliss’assoient de partet d’autre d’une “barrière”policière.

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peu scrupuleux affectés aux portillons,qui dans le passé laissaient entrer tousceux qui leur glissaient un billet, ce quisurchargeait le stade, les billets ne sonten vente que le jour même. Mais ce n’estpas le plus beau. La vente commence,tenez-vous bien, à 5 h 30 du matin, et l’im-mense majorité des supporters restentsur place toute la journée une fois qu’ilsont eu leur billet. A 5 h 45, ce n’est pas enmarchant mais en courant que ceux quifranchissent les portillons se dirigent versles tribunes.

“On s’est fait déposer en taxi à 5 h 30,mais en général on peut avoir un billet si onarrive avant 10 heures”, explique Kamyar,un supporter portant un chapeau bleu quirejoint les files d’attente. Ses amis et luiviennent d’acheter un fanion de soie por-tant les mots“Esteghlal Footbol Colup”. Ilsont une longue journée devant eux. “C’estbien d’arriver tôt, comme ça on peut se garderune place et goûter l’ambiance qui monte.”

Il y a déjà des groupes qui scandent desslogans. “On commence à chanter avec lesoiseaux”, commente Kamyar en riant.Chaque personne n’a droit qu’à un billet.Pas question d’en acheter pour sescopains.

Les premières impressions du stadeune fois rempli sont hallucinantes. Si lefait de rester assis pendant huit heures afatigué les supporters, ça ne se voit pas.Trente minutes avant le coup d’envoi,tambours, cornes de brume et slogansmènent un tapage infernal. Le paysageest divisé en pans de rouge et de bleu. Lessupporters du Persépolis sont plus nom-breux que leurs adversaires de deux tiers,mais les deux camps hurlent à s’en fairepéter les cordes vocales. Le soleil est brû-lant maintenant. Il y a des drapeaux, dessifflets et des policiers partout. Tout enhaut, des soldats sont disposés toutautour du stade, tandis que des photosgéantes des ayatollahs Khomeyni etKhamenei président la scène.

Les équipes sortent des vestiaires etpénètrent dans un chaudron de cou-leurs, de cris et de tension. L’arbitre al’air sûr de lui. Prière, hymne national,et le match commence. Les tribunessont couvertes de longues bannières.Les supporters du Persépolis déroulentun drapeau gigantesque portant l’ins-cription“Les imams nous aident” ; sur unautre on lit : “Les bleus sont nos larbins.”De l’autre côté du stade, le soleil tapesur des banderoles proclamant “Loué

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préférée. Le club est donc adoré ou haï.Il est aussi connu sous le nom semi-offi-ciel de Pirouzi [Victoire].

Le premier derby entre les deuxéquipes n’a eu lieu qu’en 1968, mais ilcompense la brièveté de son histoire parson intensité. “C’est une libération”, confieSaïd, un supporter de l’Esteghlal qui faitdes études d’ingénieur à l’université deTéhéran et vient d’une famille de bleus.“C’est un moyen d’évacuer ses frustrations.Cette atmosphère, j’adore. On peut crier, onpeut chanter de tout son cœur. Le derby, c’estcomme un long match qui dure depuis desannées. On perd, puis on gagne. Vous com-prenez ? Il y a une histoire.” Ces confron-tations n’ont pas manqué de déclencherdes controverses. Au début des années1970, le Taj avait obtenu la victoire par 3à 0, alors que le Persépolis avait refusé decontinuer à jouer au motif que l’arbitreétait partial. En 1973, le Persépolis a écraséson adversaire 6 à 0, un score qu’oncélèbre encore avec délectation aujour-d’hui : le slogan “Shh-shh-shish” (ss-ss-six)résonne encore régulièrement dans lesstades. En 1983, une foule de 125 000 per-sonnes a envahi le terrain, et les ren-contres de 1995 et de 2000 ont donné lieuà des émeutes. En 2000, alors que lematch s’était terminé, comme en 1995,sur le score de 2 partout, une bagarre aéclaté entre les joueurs sur le terrain,avant s’étendre aux tribunes et aux quar-tiers environnants. Des magasins et desbus ont été saccagés. La police a arrêtéplusieurs joueurs et supporters.

[Les accusations de partialité s’étantgénéralisées, les rencontres étaient arbi-trées depuis 1995 par des étrangers, mais],dans le but d’améliorer le standing desarbitres locaux sur la scène internationale,le 66e derby de Téhéran sera arbitré parun arbitre iranien, Mohsen Torki. Les par-ticipants aux forums d’avant-match surla Toile ne semblaient pas prêts à lui fairede cadeaux.“J’espère qu’il a envoyé sa femmeet ses sœurs dans un endroit sûr”, écrivaitun supporter.

Les quatre derniers derbys se sont ter-minés sur le score de 1 partout, ce quiapporte de l’eau au moulin de ceux quipensent que les résultats sont arrangéspour préserver le calme. Les supportersaffluent en masse vers l’Azadi, un stadeénorme mais sans charme situé à l’extré-mité occidentale de la ville. On est ven-dredi, le jour du match, à huit heures etdemie du coup d’envoi, et une très faiblelueur plane au-dessus du sol. Des policiersantiémeute armés surveillent les ténèbres.Et, parmi toutes les bizarreries qui entou-rent le 66e derby de Téhéran, voici ce quiest le plus étranger à la façon britanniquede faire les choses : pour contrecarrer lesrevendeurs à la sauvette et les employés

soit Dieu pour avoir créé l’Esteghlal !” et“Tous les cœurs aiment l’Esteghlal”.

Si les slogans écrits possèdent unetouche de poésie, ceux qui résonnent dansle stade ont une tonalité un peu plusabrupte. Alireza Nikbakht, ancien bleujouant désormais pour le Persépolis, estsalué par une série d’insultes mettant encause sa mère et sa sœur. Ceux duPersépolis leur répondent par des insultesdu même acabit. Charmant.

Pour être franc, la première mi-tempsn’est pas à la hauteur de l’affiche. La ner-vosité est évidente et le match se traîne.Jusqu’à la cinquante-sixième minute,où l’Esteghlal marque. La demi-heuresuivante est féroce. Les supportersconspuent l’arbitre et les joueurs, s’insul-tent mutuellement. Ceux du Persépolisdeviennent de plus en plus nerveux – çafait une journée entière qu’ils sont là, etils veulent des résultats. A quelquesminutes de la fin, Siavash Akbarpour, l’at-taquant de l’Esteghlal, se trouve seul faceau gardien. Les jeux semblent faits, maisla balle part dans les airs. Alors qu’on entredans les arrêts de jeu et que le désespoirs’installe, un corner du Persépolis trouvela tête de Karimi, puis la main tendue d’AliAlizadeh, un joueur de l’Esteghlal qui vientd’entrer sur le terrain. C’est un penaltybien net. L’arbitre n’a pas le choix. La balletrouve les filets, et le coup de sifflet finalretentit. Pour la cinquième fois d’affilée,le derby de Téhéran se termine sur unmatch nul 1 à 1.

Les seuls drapeaux qui s’agitent sontrouges. Les supporters de l’Esteghlal semettent à arracher les fauteuils et à leslancer sur le terrain. La police charge etles affrontements se poursuivent à l’ex-térieur. Si l’immense majorité des sup-porters se contentent d’exprimer leursémotions par la voix, il y a de nombreusesarrestations pour actes de violence (unecentaine, selon la presse du lendemain).“On veut du football, pas de la politique”,entend-on. Sur la grand-route qui mèneà la ville, des groupes de jeunes en scooterrèglent leurs comptes. Pour les supportersqui rentrent chez eux – en particulier lesbleus –, il ne fait pratiquement aucundoute qu’ils se sont fait avoir.

Le lendemain du match, nous retrou-vons Saïd, le fan de l’Esteghlal. C’est luiqui a le dernier mot, les yeux sur les unesdes journaux.“Si le match a été arrangé, ceserait terrible pour le championnat et pourle pays. Mais je préfère penser que ç’a été hon-nête. La passion des supporters ne disparaîtrapas, le derby ne disparaîtra pas. Je vousgarantis que la prochaine saison, nous seronstous là, à l’aube. C’est un truc trop gros.”

Ben Lerwill

Paru sur Courrierinternational.com le 10 décembre 2009

Des soldats sontdisposés tout autour du stade

200millions d’euros

C’est le budgetaccordé au PSG parses actionnairesqataris pour la saison 2012-2013.Une somme record,jamais atteinte parun club français, et qui représenteune hausse de 33 %par rapport à la saison écoulée.On est encore loin,malgré tout, des 500 millionsd’euros du RealMadrid et des 461 millions du FC Barcelone.Et, surtout, les comptes sonttoujours dans le rouge. Pour les redresser, les sponsors vontdevoir mettre la main au portefeuille.

Page 30: [RevistaEnFrancés] El mensajero Internacional ed.Especial Deporte & Dinero El Amor Loco

� Dessin de Danziger,Etats-Unis.

� Dessin de Martinera,Cuba.

Cartoons

Va y avoir du sport !Dopage, corruption et controverses… Quand l’argent mène la partie, les dessinateurs se défoulent.

� “Moi ? Dopé ? N’importe quoi !!”Dessin de Horschparu dansHandelsblatt,Düsseldorf.

Dessin d’Alex paru dans La Liberté,Fribourg.

CA

I NYT

Page 31: [RevistaEnFrancés] El mensajero Internacional ed.Especial Deporte & Dinero El Amor Loco

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Dessin de Chappatteparu dans Le Temps,Genève.

� Dessin de Burki paru dans 24 Heures,Lausanne.

Dessin de Hermannparu dans la Tribunede Genève, Suisse.

� Dessin de Mix & Remix paru dans L’Hebdo,Lausanne.

� Dessin de Côtéparu dans Le Soleil,

Québec.

Page 32: [RevistaEnFrancés] El mensajero Internacional ed.Especial Deporte & Dinero El Amor Loco

32

Londres 2012 En dehors des sponsors officiels, nul n’a le droit d’utiliser les logos des JO, ni mêmed’évoquer les Jeux pour attirer le chaland. Gare à ceux qui s’y essaient !

The Guardian (extraits) Londres

L a cycliste Victoria Pendletonne pourra pas tweeter sur lesWeetabix [marque de céréales]qu’elle a pris le matin ni pos-ter une vidéo à ses fans depuis

sa chambre du village olympique. Lespatrons de pub n’auront pas le droit deposter des annonces disant : “Venez suivreles Jeux de Londres sur notre grand écran !”Les supporters ne seront pas autorisésà télécharger des extraits de l’événementdu jour sur YouTube, ni des photos del’intérieur du village olympique surFacebook. Et le comité d’organisationdes Jeux, le Locog, a fait savoir qu’uneéquipe d’élite de la “police des marques”inspecterait tous les sanitaires des sitesolympiques afin de retirer ou de masquertous les logos des fabricants, y comprissur les distributeurs de savon, les lavaboset les toilettes.

A deux mois de l’ouverture des Jeuxde Londres, l’attention se porte de plusen plus sur des restrictions qui, aux yeuxde nombreux experts juridiques, appa-raissent comme les plus sévères jamaismises en place pour protéger les marquesdes sponsors et les droits de diffusion.

La Grande-Bretagne a déjà une pano-plie de protections juridiques pour lesmarques et les titulaires de droits d’au-teur, mais les Jeux olympiques ont leursrègles propres. Depuis les Jeux de Sydney,en l’an 2000, le Comité internationalolympique (CIO) exige des pays candidatsqu’ils s’engagent à adopter une législationad hoc pour fournir un train supplémen-taire de sanctions légales. En 2006, leParlement britannique a donc voté la Loisur les Jeux olympiques et les Jeux para-lympiques de Londres, qui, avec la Loi surla protection du symbole olympique de1995, offre un niveau supérieur de pro-tection aux Jeux et à leurs sponsors. Touteviolation de ces lois donnera lieu à uneplainte au civil et sera de plus considéréecomme un délit pénal.

Outre la protection supplémentaireaccordée au mot “olympique”, au symboledes cinq anneaux et à la devise des Jeux,le grand changement apporté par la nou-velle législation est l’interdiction des“associations” non autorisées. Les entre-prises qui ne comptent pas parmi lessponsors ne pourront pas employer desimages ou des termes évoquant un lientrop proche avec les Jeux. Toute formulecomportant au moins deux mots de laliste “Jeux, deux mille douze, 2012” pourraêtre considérée comme une infraction.

L’association de l’un de ces termesavec les mots “Londres”, “médailles”,“sponsors”, “été”, “bronze” , “argent” ou“or” sera également passible de sanctions.Mais la règle des deux mots n’est pas tou-jours suivie : l’an dernier, une manifesta-tion baptisée Grande Exposition 2012 a

Sponsors, à vos marques !

La grand-messe

� Le 6 juillet 2005,les Jeuxolympiques sont attribués à Londres.Trafalgar Squareest en liesse.

� “Plus vite, plus haut, plus fort”…et plus de sponsors,pourrait-onaujourd’hui ajouter à la devise olympique.Des partenaires trop présents aux yeux du public,mais pourtantindispensables vu les coûts exponentielsdes Jeux.� La frénésied’investissementsdans les infrastructures, les stades, les routeslaisse d’ailleurs un goût amer aux villesorganisatrices, une fois l’ivresseretombée. � Ce qui ne dissuadepas de nouvelles cités de poser leur candidature…

Page 33: [RevistaEnFrancés] El mensajero Internacional ed.Especial Deporte & Dinero El Amor Loco

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– davantage qu’Adidas, qui a déboursé100 millions de livres pour acquérirofficiellement les droits.

“Les petites entreprises n’ont pas lesmoyens de financer une campagne aussicréative, mais j’ai également le sentimentqu’elles n’osent pas se lancer en raison de lacomplexité du dispositif et de la multitude derègles à suivre, poursuit M. Moriarty. Ilserait vraiment honteux que [les PME] soienttrop effrayées pour tirer profit de la présenceà Londres du plus grand spectacle mondial.”Le CIM a d’ailleurs jugé les restrictions

sur les Jeux de Londres “trop draconiennes”et exprimé sa crainte qu’elles ne “créentun précédent qui empêche les entreprises detirer profit des manifestations nationales etsociétales ordinaires”.

L’une des principales inquiétudes duCIO, dans sa recherche d’une législationad hoc, porte, selon le Locog, sur l’ambushmarketing [le marketing en embuscade,consistant à tirer profit d’une manifes-tation sans en être partenaire], où lesentreprises tentent de contourner lerèglement. Selon des experts de l’indus-trie, le principal “terrain d’embuscade”,aux Jeux de Londres, devrait être lesréseaux sociaux. “Les meilleures aubainesseront sur Internet, où [la loi] est un peuplus floue, en particulier sur les réseauxsociaux”, indique Alex Brownsell, rédac-teur en chef de Marketing Magazine, “et

c’est là que le Locog s’attend à voir le plus deguerilla marketing [opérations de marketingnon conventionnelles à petit budget]. Il y estplus difficile de faire respecter les règles, et lasphère d’influence juridique y est plus vague.”

Plus de 2 milliards d’utilisateurs deréseaux sociaux s’intéresseront aux Jeuxde Londres. Le CIO déploie d’ailleurs desefforts héroïques pour nouer le dialogueavec eux. “Nous sommes à l’aube d’une nou-velle époque de partage et de communication”,observe Alex Huot, le responsable desréseaux sociaux du CIO, “et Londres 2012lancera les premiers Jeux olympiques com-mentés en direct par les internautes.” Lesorganisateurs des Jeux peuvent-ils contrô-ler les conversations sur les réseauxsociaux ? Twitter a déjà accepté de col-laborer avec le Locog pour empêcher lesentreprises non partenaires d’acheter desannonces sponsorisées avec des hashtagscomme #London2012.

Le comité d’organisation a égalementétabli, à l’intention des athlètes, des direc-tives sur l’usage des réseaux sociaux etdes blogs, de manière qu’ils ne trans-gressent pas les règles en tweetant parexemple sur une marque qui n’est pas unsponsor des Jeux. Comme pour tous lesJeux olympiques, il est strictement inter-dit aux participants de télécharger desenregistrements vidéo et audio, car, cefaisant, ils enfreindraient les droits desdiffuseurs payants.

Mais le Locog irait-il jusqu’à disqua-lifier Usain Bolt si celui-ci tweetait qu’ilest en train de boire un Pepsi (Coca Colaétant le principal sponsor des Jeux pourles boissons) ? Pour le spécialiste de mar-keting Paul Jordan, une telle mesure estinconcevable. “Comme avec beaucoup derègles et de règlements, certaines des sanctionssont rarement appliquées. Je ne crois pas que[les organisateurs] seraient très enclins à évo-quer ces sanctions incroyablement dures et àdisqualifier des athlètes en vue : ce serait àleurs yeux la dernière chose à faire.”

Selon Alex Brownswell, dans un envi-ronnement aussi contrôlé, les marketersseront toujours confrontés au risque devoir les entreprises considérer commeun inconvénient le fait de s’associer àune manifestation jugée trop commer-cialisée ou trop légaliste. Il cite l’exemplede Visa, critiqué à l’époque où sa carteétait le seul moyen de paiement autorisépour acheter des billets. Mais, au boutdu compte, dit-il, ces restrictions se jus-tifient, car, si les sponsors venaient àmanquer, il faudrait faire appel à desfonds publics. “Peut-être le Locog n’a-t-ilpas assez insisté sur le fait que ces entreprisesfinancent les Jeux olympiques et que, si ellesne payaient pas, c’est nous qui devrions lefaire”, souligne-t-il.

Esther Addley

34

Pour les athlètes• Bloguer sur lescéréales ou les barresénergétiques prises au petit déjeuner si ces produits ne sontpas commercialiséspar un sponsor officiel(pendant la périodedes Jeux, toutepublicité faite par despersonnes connuesest interdite).• Poster des vidéos de l’intérieur du villageolympique sur un blogou sur YouTube. Aucunenregistrement audioou vidéo effectué

à l’intérieur d’un siteolympique ne peutêtre téléchargé sur Internet.• Tweeter à la manièred’un journaliste. Les athlètes “nedoivent pas couvrir des épreuves ou commenter lesperformances desautres participants”.

Pour les entrepriseset les commerces qui ne sont paspartenaires des Jeux• Employer desformules comme

“Nous soutenons nos athlètes aux Jeux 2012 !” ou“Aidez-nous à avoirune année 2012 en or !”• Utiliser des imagesayant un lien avec les Jeux olympiques.• Offrir des billets dans le cadre d’une promotion.

Pour les spectateurs• Télécharger sur YouTube une vidéo de William ou de Katetrébuchant sur les marches du stadeolympique. En vertu

du règlement, “un détenteur de billetne peut diffuser ni publier sur des sites de réseaux sociaux ou sur Internet des enregistrementsaudio ou vidéo,ni autoriser une autrepersonne à le faire”.• Poster ses photos sur Facebook – celapeut relever de la même restriction.• Participer à desopérations d’ambushmarketing, qu’ellessoient individuelles ou de groupe.

Exclusivité

Des interdictions à la pelle

La grand-messe

été menacée de poursuites judiciaires enraison de ce seul “2012” (le Locog aensuite retiré son objection). Une séancephoto pour la promotion des nouvelleslignes d’easyJet au départ de l’aéroportde Londres Southend a également étéinterrompue par le Locog en raison dufait que l’athlète Sally Gunnell y tendaitun drapeau britannique au-dessus de sesépaules : selon certains comptes rendus,le Locog considérait que cette image pré-sentait une trop grande similitude avecla pose que l’athlète avait prise aprèssa victoire aux Jeux olympiques deBarcelone, en 1992 (or la compagnieaérienne partenaire de Londres 2012 estBritish Airways, et non easyJet).

Selon Chris Moriarty, du CharteredInstitute of Marketing (CIM), toutes cesdispositions obligent les marques qui nefont pas partie des sponsors à investir dessommes importantes pour obtenir desconseils pour ne pas transgresser la loi.Il cite comme exemple une campagne deMarks and Spencer, qui, avec son sloganOn your marks for a summer to remember(“A vos marques pour un été mémo-rable”) et ses images – des drapeaux bri-tanniques, une course à l’œuf et uneénorme médaille d’or –, jongle manifes-tement avec le règlement. La campagnede Nike Make it Count (“Marquez despoints, agissez”), à laquelle participentdes athlètes olympiques comme le cou-reur de fond Mo Farah et la maratho-nienne Paula Radcliffe, a obtenu encoreplus de succès : une enquête auprès d’uti-lisateurs de Twitter a montré que, mêmes’il ne sponsorise pas les Jeux, Nike estla marque qui leur est le plus associée

C’est sur Internet que la guerillamarketing fera rage

livres

… c’est-à-dire entre 12 et 18 euros. Voilà ce que les fans de cyclismes’apprêtent à payer,cet été, à Londres,pour un peu de place sur le bordde la route, relateThe Guardian.Difficile à avalersachant qu’admirerses champions étaitjusqu’à présentgratuit. Et qu’avecles 150 miles(environ 240 km)du parcours des hommes et les100 miles (160 km)du parcours desfemmes, il y auraitpourtant de la placepour tout le monde.Maigre consolation :15 livres, cela restebon marché à côtédes billets pour les autres épreuvesdes Jeux.

10 à 15

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Justice Pour les Indiens,Dow Chemical n’assume passa part de responsabilitédans la catastrophe deBhopal. Sa présence aux JOde Londres choque et soulève des questions surla sélection des partenaires.

The Hindu Chennai

L e groupe chimique américainDow Chemical s’est trompés’il a cru, en acquérant UnionCarbide, qu’il n’aurait pas àgérer les conséquences de la

catastrophe de Bhopal. En 1984, une fuited’isocyanate de méthyle d’une usinede pesticides avait provoqué entre15 000 et 25 000 morts, au centre de l’Inde.Pour les associations de défense des vic-times, Dow Chemical doit aujourd’huirépondre de la tragédie. A l’époque, l’usineétait gérée par Union Carbide, une sociétéaméricaine rachetée en 1994 par le chi-miste Dow Chemical. Pour les militantset les juristes indiens, c’est cette entre-prise qui est désormais responsable de la

pollution persistante de la nappe phréa-tique et de ses conséquences sanitaires.

Mais il est aussi important de rappelerle rôle des autorités indiennes dans cetteaffaire. Elles n’ont pas inspecté correcte-ment l’usine ; elles ont empêché les vic-times de poursuivre Union Carbide aprèsla tragédie et se sont arrogé le rôle denégociateur unique avec l’entreprise. Etfinalement, bien qu’elle ait été inculpéeen 1987, Union Carbide ne s’est jamais pré-sentée devant les tribunaux. Aujourd’hui,le site de l’usine de Bhopal n’est toujourspas décontaminé. Et l’indemnité de470 millions de dollars [360 millions d’eu-ros] négociée par le gouvernement estjugée insuffisante par plusieurs associa-tions indiennes de victimes.

[La participation de Dow Chemicalaux JO a donc soulevé] des questions plusgénérales. Certes, les grands événementssportifs coûtent de plus en plus cher etles contribuables ne veulent pas payerla facture. Les organisateurs n’ont pasd’autre possibilité que de se tourner versles grands groupes pour trouver un sou-tien financier. Mais dans le cadre de l’or-ganisation des Jeux de Londres, quellesprocédures aurait-on dû mettre en place

pour sélectionner les partenaires ? Doit-on ne choisir que des entreprises ayantune réputation irréprochable ? Et dans cecas, comment définir un tel critère ? Quidécide qu’une entreprise donnée est cou-pable de tel ou tel abus ? Les tribunauxou les associations issues de la sociétécivile ? Il ne suffit pas de vérifier la répu-tation d’une entreprise. Ce genre dechoses est notoirement subjectif. On nepeut pas non plus partir du principequ’une entreprise ayant une politique dedurabilité et de responsabilité agit néces-sairement en accord avec celle-ci. Lesprincipes directeurs des Nations unies surles entreprises et les droits de l’hommeconstituent une garantie, mais suffiront-ils à satisfaire la société civile ?

En dépit de ces difficultés, les organi-sateurs ne peuvent se dérober à leurs res-ponsabilités. La devise des Jeux est “Citius,Altius, Fortius” (plus vite, plus haut, plusfort). Il leur appartient donc de faire appelaux critères les plus exigeants pour sélec-tionner des partenaires dignes de cettecélébration de l’effort humain.

Salil Tripathi

Paru dans CI n° 1115, du 14 mars 2012

Un nuage toxique obscurcit la fête

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� Les militantsont organisé le 3o mars 2012une manifestationspectaculaire à l’occasion de la conférencede presse du CIO.

Londres 2012

Page 36: [RevistaEnFrancés] El mensajero Internacional ed.Especial Deporte & Dinero El Amor Loco

URUGUAY

ARGENTINE

CHILI

BRÉSIL

CANADA

ÉTATS-UNIS

MEXIQUE

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1968

1994

19882010

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1932196019802002

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19502014

2016

1978

1962 1930

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La grand-messeLa grand-messe

Quoi de plus valorisant pour un pays que d’accueillirun grand événementsportif ? Encore faut-il en avoir les moyens.

Courrier international Paris

T rente et un Jeux olympiques(été et hiver) en Europe, sixen Asie, aucun en Afrique :les chiffres parlent d’eux-mêmes. Les disparités sont

criantes, tant en ce qui concerne les JOque les autres grands-messes sportives.Mais, si l’organisation des événementssportifs majeurs a longtemps été l’apa-nage des pays “occidentaux” (Europe,Amérique du Nord et Japon), le change-ment est en marche. Selon une étude

danoise, la tendance est aux pays émer-gents, rapporte l’International HeraldTribune. Après la Chine, la Corée duSud et l’Afrique du Sud pour ces dernièresannées, voici venu le tour du Brésil, quiorganisera le Mondial de 2014 et les Jeuxolympiques de 2016, et de la Russie, quiaccueillera les JO d’hiver 2014 et la Coupedu monde de football 2018. Ces pays sontdésormais prêts à affronter de tels défiset ont bien conscience des répercussionsqu’auront ces événements sur leur imagecomme sur leur économie.

Quant aux pays en voie de dévelop-pement, ils risquent de rester encorelongtemps sur le carreau ! Il n’est pas sifacile, même avec l’appui des sponsors,d’aligner le nombre toujours croissantde milliards de dollars qu’exige l’orga-nisation des Jeux…

Carole Lyon

L’important, c’est d’organiser

Salaire annuel moyen au sein de chaque équipe (en millions de dollars)

L’élite des équipes

Sour

ce : S

port

Pro

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min

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Inco

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BarceloneReal MadridManchester CityChelseaLos Angeles LakersNew York Yankees

Football

Base-ball

Basket

AC MilanBayern MunichPhiladelphia PhilliesInternazionaleManchester UnitedSan Antonio SpursLos Angeles AngelsChicago BullsBoston Celtics

0 2 4 6 8 10

Les sportifs les mieux payés du monde* (en millions d’euros)

Top 10

Sour

ce : F

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s, ju

in 20

11

* Revenus annuels comprenant le salaire, les primes, les revenus provenant de la publicité et des sponsors, avant impôts.

112 3

Tiger Woods (golf)

Kobe Bryant (basket)

(La parité est loin d’être la norme dans le sport : la seule femme figurant parmi les cinquante sportifs du classement Forbes est la tenniswoman Maria Charapova. Elle est 29e avec 17 millions d’euros de revenus.)

LeBron James (basket)

36 32,551 4. Roger Federer (tennis) : 32 5. Phil Mickelson (golf) : 31,56. David Beckham (football) : 27 7. Cristiano Ronaldo (football) : 268. Alex Rodriguez (base-ball) : 23,9 9. Michael Schumacher (formule 1) : 23 10. Lionel Messi (football) : 22

Et dans un mouchoir de poche :

Sur le podium :

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RUSSIE

AUTRICHE

FINLANDESUÈDENORVÈGE

ITALIE

B-HGRÈCE

QATAR

CHINE

CORÉEDU

SUD

JAPON

AUSTRALIEAFRIQUE DU SUD

SUISSE

ESPAGNE

FRANCE

ROYAUME-UNI

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ALLEMAGNE

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2002

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1964

2002

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Pays ayant accueilli(ou qui va accueillir)

Légende de la carte

Ville olympique (passée ou future)

les JO d’hiver

les JO d’été

la Coupe du mondede football

Nombre de fois où ces manifestations ont eu lieu dans un même pays depuis leur création

0

1

2

3

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6

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Abréviations : BE. Belgique, B-H Bosnie-Herzégovine, P-B Pays-Bas* A euros constants, base 2012

Budget des Jeux olympiques et revenus du sponsoring (en millions d’euros*)

En %

Explosion des coûts

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Budget Part des sponsors dans le budget total (en %)

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Pour le spécialiste du demi-fond Sebastian Coe,la victoire se joue dans les derniers mètres. Une maxime qu’il applique à l’organisation des JO.

The Times (extraits) Londres

L a spécialité de Sebastian Coeen tant qu’athlète était lesprint final. A six mois de lacérémonie d’ouverture desJeux olympiques, il déclarait :

“C’est le dernier tour. Dans le 800 mètres,il y a ce qu’on appelle la killing zone. Elleva en gros de la moitié de la ligne droite oppo-sée jusqu’à la pointe du virage. La manièredont vous négociez cette partie de la coursedétermine la résistance dont vous ferez preuvedans la dernière ligne droite. Ces derniersmois sont les plus difficiles.”

Assis dans son bureau de CanaryWharf [quartier d’affaires de l’Est londo-nien], lord Coe ne sait pas encore s’il vadécrocher l’or pour ses dix années consa-crées à l’organisation des Jeux de Londresou s’il va s’écrouler sur la piste, mais ilpense avoir l’énergie nécessaire pouratteindre son but. “Les premiers à franchirla ligne sont ceux qui ralentissent le moins.Il est essentiel que nous ne nous essoufflionspas à ce stade.” L’homme qui a remportéquatre médailles olympiques [l’or sur1 500 mètres et l’argent sur 800 mètresà Moscou, en 1980, et à Los Angeles, en1984] et battu trois records du monde enquarante et un  jours a toujours aiméautant l’entraînement que la course. “Ceprojet me rappelle beaucoup les six mois quiprécèdent une course. On adapte son entraî-nement d’heure en heure. On vit un peu aujour le jour.”

Ce lord conservateur continue à cou-rir trois ou quatre heures par semaine.Mais, le reste de la journée, il est absorbépar la planification du plus grand événe-ment sportif du monde. Le comité d’or-ganisation qu’il préside emploie plus de80 nouvelles personnes par semaine. “Ily a à peine dix ans, nous étions trois, assisdans un pub à nous dire que c’était une bonneidée, raconte-t-il, et, lors de la cérémonied’ouverture, nous aurons une organisationde 6 000 personnes.” Parmi les gens qui luiécrivent, beaucoup se souviennent encoredes derniers Jeux olympiques de Londres.

“Il ne se passe pratiquement pas un seul joursans que je reçoive une lettre de quelqu’un quime parle de 1948. C’était manifestement untrès grand moment. Je ne vois pas pourquoice ne pourrait pas être la même chose pourles prochains Jeux.”

Pour pouvoir y assister, il faudra avoirla chance de détenir un billet. Le numéroun du comité d’organisation refuse dereconnaître que le système de billetterien’a pas fonctionné correctement, mêmesi les organisateurs ont dû fermer tem-porairement le portail de revente enraison d’une énorme demande. Lescontribuables britanniques sont aussimécontents de voir que de riches spon-sors obtiennent des tickets quand eux-mêmes n’en ont pas. “Un quota de 8 % desplaces est vendu aux sponsors, mais ils ontmis 2 milliards de livres dans les Jeux”, sou-ligne l’ancien athlète. Pour des compéti-tions où la demande excède l’offre, “je ne

vois pas de système plus équitable que le tirageau sort”. Il pourra également y avoir desbillets en vente le jour des compétitions.“Je ne veux pas de stades vides”, assure-t-il.

Durant les Jeux, Sebastian Coe ferala tournée des sites olympiques pour ren-contrer les sponsors, le personnel et lesvolontaires, mais, comme tout le monde,il a dû s’en remettre au tirage au sort poursa famille et n’a obtenu qu’une poignéede tickets, en particulier pour le hockeyet deux ou trois épreuves d’athlétisme.“Je verrai probablement moins de pistes et deterrains que jamais depuis les Jeux de 1976,dit-il. Si j’avais une épreuve à choisir, ce seraitla finale du 1 500 mètres hommes. Les pistesferont toujours partie de ma vie.”

C’est sur une piste de North Londonque Sebastien Coe a effectué la majeurepartie de son entraînement. “Au club d’ath-létisme de Haringey, la plupart des enfantsavec lesquels je m’entraînais venaient de lacité de Broadwater Farm, raconte-t-il. Ceclub ne s’est pas limité à diriger des genscomme moi vers les podiums olympiques.Ses séances d’entraînement représentaient

probablement l’unique point d’ancrage dansla vie de nombreux enfants, et leur entraîneurétait sans doute leur modèle d’homme. Pourmoi, le sport a toujours été le travailleur socialle plus efficace.”

Les parents jouent, selon lui, un rôlevital dans la création de champions. “Monpère était mon entraîneur, mais je n’ai jamaispensé qu’il se mettait trop en avant, dit-il. Lachose la plus importante qu’il ait sans doutejamais faite pour moi a été de me dire, quandj’avais 14 ans : ‘Il y a d’autres choses dansla vie, tu n’as pas besoin de courir 150 kilo-mètres par semaine, ralentis.’ Ma mère,qui était actrice, a elle aussi contribué à monéquilibre. Je me sens toujours un peu dépriméquand je me rends à une compétition et qu’iln’y a pas les parents.”

Selon lui, les employeurs devraientpermettre aux parents de prendre davan-tage de congés pour assister aux matchset aux journées sportives de leurs enfants.“Pour moi, c’est absolument primordial. Ilest essentiel pour les enfants d’être soutenuset c’est nécessaire pour notre sport. J’estimequ’on doit pouvoir dire à son employeur : ‘Jeveux voir mon enfant disputer une com-pétition.’” Lui-même s’efforce d’assisteraux matchs de ses quatre enfants. “Lesenfants s’en souviennent : vous faites partiede leur vie ou pas. Le fait que vous vous inté-ressiez à leurs efforts les pousse à donner lemeilleur d’eux-mêmes.” L’entraînementpeut “isoler” un enfant. “A 13 ans, je savaisque je voulais participer aux Jeux olympiqueset gagner une médaille. Ce n’est pas le genrede chose dont vous parlez à l’école, ce n’estpas facile à avouer. Pour ceux qui s’engagentdans cette voie, il est réconfortant d’être com-pris au moins par ses parents.”

Même s’il rêvait d’une médaille,Sebastian Coe n’a pas une vision roma-nesque de l’esprit des Jeux. “Les partisansde l’amateurisme le plus pur étaient généra-lement ceux qui se préoccupaient le moins del’origine de leurs prochaines chaussures d’en-traînement ou de leur prochain repas. Je n’aijamais trouvé à redire à ceux qui ont la capa-cité ou le talent de vivre du sport.”

Lord Coe a aussi été député conser-vateur pendant cinq ans et chef de cabinetde William Hague, quand celui-ci étaitchef de file de l’opposition. “Il y a beaucoupde similitudes entre le sport et la politique,observe-t-il. La seule grande différence estque, dans le sport, les blessures vous sont rare-ment infligées par votre propre équipe.”Rachel Sylvester & Alice Thomson

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Sebastian Coe

Biographie

29 septembre 1956Naissance à Londres

Juillet 1979Il établit les nouveauxrecords mondiauxdu 800 mètres et du 1 500 mètres à Oslo.

Juillet 1980Il remporte la médaille d’or sur 1 500 mètres et la médaille d’argentsur 800 mètres aux JO de Moscou.

Août 1984Il remporte la médaille d’or sur 1 500 mètres etla médaille d’argentsur 800 mètres auxJO de Los Angeles.

1990Elu députéconservateur à la Chambre descommunes. Il entreau Parlementanglais deux ansplus tard.

6 juillet 2005Le CIO donne sa faveur à la villede Londres pour les JO 2012.Sebastian Coe a étél’artisan et le chefde file de cette candidatureet prend la tête du comitéd’organisation.

Un sprinter aux commandes

La grand-messe

“Pour les compétitionsoù la demande excèdel’offre, il n’y a pas desystème plus équitableque le tirage au sort”

� Dessin de Mikel Casal(Madrid) pourCourrierinternational.

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Riposteorganisée

La grand-messe

La plus célèbre Occupy London

Qui sont-ils ? Un mouvementde protestation contre les inégalités économiques à Londres, devenu célèbre encampant devant la cathédraleSaint-Paul. A apporté son soutien aux associations

locales des résidents de Leyton Marsh, qui s’opposent à la construction d’un centretemporaire de basket-ball en prévision des Jeux olympiques. Assure disposer d’un noyau dur de 500 adhérents militants.Ils ont dit : “Agir pour que le mois de maidonne le coup d’envoi à un été que le ‘un pourcent’ ne sera pas près d’oublier.”Leur tactique : Non violente mais bienorganisée. A mené plusieurs manifestationsd’envergure pendant le mois de mai.

La plus en colère GreenwashGold 2012 Campaign

Qui sont-ils ? Unecoalition de trois grandsnoms de la contestation :London Mining Network,Bhopal Medical Appeal et UK Tar Sands Network, en colère

contre une “clique de sponsors ‘voyous’”.Ils ont dit : “Les entreprises les moinsrecommandables de la planète s’abritent derrièreles Jeux olympiques pour dissimuler les atteintesaux droits de l’homme et à l’environnement.”Leur tactique est bien rodée : une manifestation lors de l’assemblée généraleannuelle de BP. Une lettre au Comitéd’organisation des Jeux olympiques etparalympiques de Londres (Locog) pour queDow Chemical soit rayé de la liste des sponsors.

La plus locale Countering the Olympics

Qui sont-ils ? Un regroupement de militantsde quartier. Mettant en cause les projetsengagés à Greenwich Park, Wanstead Flats etLeyton Marsh, des groupes de travail s’élèventcontre l’opacité, l’absence de consultation et les problèmes de coût et de dette.Ils ont dit : “C’est le moment de nousrassembler. Les gens en ont assez d’êtresacrifiés au nom de cet énorme pactolequ’empochent les entreprises.”Leur tactique : Le groupe organise une“journée de préparation” olympique samediprochain à Bishopsgate. Tout est prêt pour“les grandes actions qui seront lancées aucours des prochains mois et pendant les Jeux”.

La plus équitable Playfair 2012

Qui sont-ils ? Un groupe qui dénonce les faibles salaireset l’exploitation des femmesemployées dans la confection de vêtements de sport,essentiellement dans le mondeen développement. Revendique des liens étroits

avec les organisations syndicales.Ils ont dit : “Nous intensifions les pressionssur le mouvement olympique et les marques de vêtements de sport pour que les travailleursqui fabriquent ces produits touchent un salairequi leur assure de quoi vivre et pour que leursdroits soient respectés.”Leur tactique : Une série de manifestationset d’événements à Londres et dans six autresvilles britanniques. Des pétitions ont été remisesà Adidas, à Nike et à Speedo en avril dernier.

La plus athlétique Athletes AgainstDow Chemical’s Sponsorship

Qui sont-ils ? Un grouped’athlètes menant une campagne de soutien à Bhopal Medical Appeal.Estime que Dow Chemicalest en contradiction flagranteavec la Charte olympique,

qui s’engage à protéger la santé des athlètes.Ils ont dit : “Dow Chemical ne nous paraît pas incarner l’esprit et les valeurs humanistesdu mouvement olympique.”Leur tactique : Lancement prévu d’une grande campagne de relations publiqueset de médias sociaux autour de ses adhérentsprestigieux, tels le champion paralympiquecanadien Walter Wu, la nageuse népalaiseKarishma Karki et la nageuse et militantecanadienne Nikki Dryden.

La plus ciblée Liberate Tate and Free Art From Oil

Qui sont-ils ? Un groupe de contestation artistique qui ne voit pas d’un bon œil le parrainage par BP de l’Olympiade culturelle

de Londres 2012 et qui a déjà mené plusieurscampagnes pour dénoncer les lienscommerciaux de BP avec la Tate Gallery.Ils ont dit : “BP est une entreprise qui se repaîtd’injustice et de la destruction de la nature.”Leur tactique : Au cours d’une campagneguérilla lancée en février, des dizainesd’emplacements publicitaires de BP ont étévandalisés et recouverts de peinture noire.Liberate Tate and Free Art From Oil prévoitd’organiser une galerie de protestationartistique baptisée Cultural or Vultural 2012(Culturel ou Cupide 2012).

Militants Les associationscontestataires sont mieuxpréparées que jamais. Leurs armes : la mobilisationet l’antimarketing.

Courrier international Paris

E n avril dernier, Campaign fora More Sustainable Olympics[Camsol], un groupe quimilite en faveur de l’écologie,a monté de toutes pièces un

faux site aux couleurs de Londres 2012.Celui-ci annonçait que les organisateursavaient retiré la compagnie pétrolière BPde la liste de ses “partenaires durables”. Lecanular a si bien joué son rôle que lesentreprises ont commencé à trembler,relatait The Daily Telegraph. Unecrainte tout à fait justifiée : selon le quotidien, Dow Chemical, qui a rachetél’usine chimique responsable de la catas-trophe de Bhopal (voir l’article p. 35), n’estplus la seule société dans le collimateurdes associations. Le mouvement concernedésormais des entreprises comme BP oule géant minier Rio Tinto – fournisseurofficiel des médailles olympiques. On luireproche des pratiques sociales et envi-ronnementales contestables. Lors d’unemanifestation devant le siège du CIO àLausanne, le 15 mai dernier, les représen-tants de deux fédérations syndicales inter-nationales, la Fiom (métallurgie) et l’Icem(chimie, énergie, mines), et du syndicatinterprofessionnel suisse Unia ont appeléle CIO à rompre ce partenariat et à “chasser du podium” l’entreprise australo-britannique, rappelle le quotidien suisseLe Courrier. Un violent conflit socialsecoue en effet depuis quatre mois le siteminier de Rio Tinto à Alma, au Québec.Et la société est aussi régulièrement cri-tiquée pour ses activités polluantes etpour son mépris des populations locales– comportement en contradiction avecles droits fondamentaux et les valeurs ins-crites dans la Charte olympique.

Les entreprises peuvent trembler, cardifférentes associations ont décidé de secoordonner pour mener des actions plusspectaculaires et efficaces : blocage desaxes de circulation par des groupes decyclistes, blocage des derniers chantiers…The Daily Telegraph a dressé le portraitde six d’entre elles. Virginie Lepetit

Six associations contestataires

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Opinion Le chroniqueurbritannique Charlie Brookerse penche sur cesentreprises qui dépensentsans compter pour pouvoirutiliser le logo de Londres 2012. Il y voit surtoutune pollution visuelle.

The Guardian Londres

L es Jeux olympiques appro-chent rapidement, et l’on per-çoit déjà l’excitation dans l’air– insufflée par de gigantesquesmachines à excitation. Mais

celles-ci ont beau faire, nous ne sommespas encore au bord de l’hystérie. Sur lepapier, il est pratiquement illégal de nepas s’exalter au point de se pisser dessusà l’idée de toutes ces heures de course,de saut, de nage, etc., qui vont bientôt etpendant des semaines emplir nos vies etnos écrans de télévision ; mais, dans laréalité, les prochains Jeux ne semblentinspirer à la majorité des Britanniquesguère plus qu’un haussement d’épaulesdésinvolte. C’est que nous nous en

fichons... pour le moment. Cela chan-gera dès l’instant où l’un de nos athlètess’approchera d’une médaille – nousaurons alors droit au montage d’imagesde liesse et de jubilation de la BBC –, mais,jusque-là, nous demeurerons très Britishface à la chose en choisissant de l’ignorer– sauf, parfois, pour râler mollement àpropos des problèmes de circulation.

La situation deviendrait préoccupantesi cette morne mauvaise humeur s’éten-dait aux Jeux : si la foule se mettait à expri-mer sa désapprobation dès qu’un autrepays remporte une victoire, si les médaillesétaient remises par une personnalité affi-

chant le même air vaguement contrariéqu’une hôtesse de caisse qui consent àvous donner un deuxième sac plastiquelorsque le premier s’est cassé. Espéronsque nous saurons feindre un sourire pouraccueillir nos visiteurs étrangers, qu’aubout de dix minutes nous oublierons que

nous faisons semblant et que nous com-mencerons à nous amuser. Mais si nousn’y arrivions pas ? Comment ferons-nouspour entrer dans l’esprit des Jeux ?

Eh bien, pour commencer, nous pour-rions donner à ce sourire forcé une blan-cheur immaculée en nous lavant les dentsavec une brosse électrique Oral-B. “Oral-Bsoutient les Jeux olympiques 2012 deLondres”, s’enthousiasme le site Internetde la droguerie Boots. “Il partage l’enthou-siasme olympique avec sa brosse à dentsélectrique Professional Care 500.” Oui, l’eu-phorie, l’angoisse, l’exaltation des athlètesau sommet de leur forme physique…,toutes ces émotions pourront être lesvôtres grâce aux vibrations de ce bout deplastique qu’il vous suffit de mettre dansla bouche.

Et, lorsque vous aurez fini d’astiquervos dents et votre salle de bains, vouspourrez vous imprégner un peu plus del’esprit des Jeux en avalant un Coca-Cola(boisson olympique officielle), suivi d’unebarre chocolatée Cadbury (fournisseurofficiel de snacks). Ou bien faire leschoses en grand en vous expédiant deuxou trois Egg McMuffin au McDo du coin(restaurant olympique officiel), après

Sponsors, j’abhorre !

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Les Jeux n’inspirent aux Britanniques qu’unhaussement d’épaules

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� Les stations de métrolondoniennessont envahies par les affichesdes sponsors.

Londres 2012

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quoi vous devriez être fin prêt à repré-senter la Grande-Bretagne dans la disci-pline diarrhée, catégorie 400 litres.

Je n’ai jamais compris pourquoi lesentreprises payaient des fortunes justepour pouvoir mentionner les Jeux olym-piques dans leur publicité, mais il est vraique la popularité du sport m’a toujourslaissé perplexe. Je n’ai jamais compris nonplus pourquoi Gillette avait payé TigerWoods – un homme qui a acquis sa célé-brité en faisant entrer des balles dans destrous – une somme phénoménale pour

faire la promotion d’une lame tranchante,pour ensuite le mettre sur la touche parcequ’en plus de faire entrer des balles dansdes trous il avait également un don pourintroduire son pénis dans autant defemmes qu’il le pouvait, aspiration vrai-semblablement partagée par la grandemajorité des clients de Gillette.

J’aurais naturellement tendance àtrouver la vague de sponsoring “officiel”vaguement sinistre, mais, à la réflexion,la façon dont toutes ces entreprises sem-blent croire sérieusement que leursclients en ont quelque chose à faire estplutôt touchante. Y a-t-il quelqu’un dansce pays pour acheter une barre DairyMilk juste parce que son emballage estestampillé avec les anneaux olympiques ?Finalement, maintenant qu’il figure surtout et n’importe quoi, le logo officiel desJO n’est plus qu’un élément parmid’autres de la pollution visuelle ambiante.

Si j’étais Adidas (habilleur officiel del’équipe olympique britannique), je seraisfurieux. Les vêtements de sport, eux aumoins – spécialement s’ils ont été fabri-qués dans un atelier d’Indonésie –, ont unlien avec l’idéal olympique traditionnelporté par des individus qui suent sanget eau pour gagner des clopinettes. Or lesanneaux olympiques ont vendu leur âmeà qui la voulait, au point de perdre toutevaleur : ils sont maintenant un statut sym-bole que quelques entreprises arborentcomme un badge pendant quelquessemaines, n’impressionnant quasimentpersonne, si ce n’est elles-mêmes. Ce phé-nomène curieux s’éloigne de plus en plusde l’événement réel, lequel, la dernièrefois que je l’ai observé, consistait essen-tiellement à courir autour d’une pisteet à sauter des obstacles. Et, pour lesBritanniques, à râler à propos des bouchons.

Charlie Brooker

Paru sur Courrierinternational.com le 27 avril 2012

Maroc Les boxeurs sont totalement dépendants des comités nationaux… et du roi, explique Abdelhak Achik, l’entraîneur de l’équipe nationale.

Le Soir Echos Casablanca

Sept Marocains vont participeraux JO de Londres : comment se passent les préparatifs ?Abdelhak Achik La concentration estexcellente. Cela fait trois ans que j’ai prisles commandes de cette équipe, nousavons participé à plusieurs compétitions.Nous avons fait le championnat d’Afrique,les Jeux méditerranéens, où nous avonsrécolté quatre médailles d’argent et deuxde bronze, et puis nous avons participé

au championnat arabe au Qatar, où nousavons été classés premiers. Après, noussommes partis en Azerbaïdjan concou-rir au championnat du monde. Nousavons fait quelques stages en Italie eten Ukraine. Toutes ces préparationsétaient destinées aux JO, et c’est en par-tie grâce au financement qu’on a eu duComité national olympique marocain(CNOM). Le comité de suivi des ath-lètes de haut niveau a consacré quelque33  milliards de centimes [29  millionsd’euros] à aider des athlètes de diverssports afin de mieux représenter leMaroc à Londres.

Expliquez-nous comment cet argent est réparti entre les boxeurs.Grâce à cet argent, des boxeurs ont amé-lioré leur qualité de vie, ils ont monté leurs

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La grand-messe

AbdelhakAchik

Abdelhak Achik a remporté lamédaille de bronze,dans la catégoriesuper-welters, en 1988, aux JO de Séoul. A 53 ans, il entraîneaujourd'hui la sélectionmarocaine en vue des Jeux de Londres.

Les anneaux olympiquesont vendu leur âme à qui la voulait

� Driss Moussaidfait partie de ces combattantsformés à l’écoled’Abdelhak Achik.Il a remporté unemédaille d’argenten 2009 aux Jeuxméditerranéens. G

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Le fait du prince

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Allemagne Dans lesdisciplines peu médiatisées,les sportifs de haut niveauont du mal à joindre les deux bouts. La Deutsche Bank a décidéde leur venir en aide.

Frankfurter AllgemeineZeitung Francfort

L a journée épuisante de KimBui, 23 ans, commence à7 heures par de la musculationet des exercices de coordina-tion et d’équilibre. Puis, à

10 heures, direction la salle. Elle fait parailleurs, depuis deux ans, des études debiologie technique à l’université deStuttgart. Mais, quand ses camarades pas-sent l’après-midi à la bibliothèque ou aucafé, elle a droit à sa deuxième ration debarres et de poutre. Ce n’est qu’au boutde treize heures, à 20 heures, que se ter-mine la journée de cette sportive de hautniveau. Même si Kim trime du matin ausoir et fait partie des meilleures d’Europe

aux barres asymétriques, elle est loin degagner assez pour vivre du sport. “Pourgagner 1 000 euros de prime, il faut être entête dans toutes les grandes compétitions”,confie-t-elle.

Si les footballeurs ou les tennismenprofessionnels amassent souvent des mil-lions sur leur compte en banque, le sportde haut niveau est pour la plupart desautres une entreprise déficitaire. Mêmepour Verena Sailer, la championned’Europe en titre du 100 mètres, il est“utopique de vouloir mettre quelque chose decôté pour l’après-sport pendant sa carrière”.

Il est donc d’autant plus importantpour les sportifs qui ne se trouvent querarement sous les feux de la rampe deposer très tôt la première pierre de leuravenir professionnel. La DeutscheSporthilfe [une fondation de soutien auxsportifs] aide des sportives comme KimBui et Verena Sailer à gérer leur doublecharge de travail, stade et études. Ellevient en cela de recevoir un apport bien-venu de la Deutsche Bank. “A partir de mai,nous verserons 300 euros par mois à 300 spor-tifs de haut niveau qui font des études”,a annoncé en avril, à Francfort, JürgenFitschen, le président de la banque. Celle-ci double ainsi son soutien à la Sporthilfe,qui passera à 1 million d’euros par an.

La Sporthilfe reçoit donc de laDeutsche Bank la plus grosse sommequ’une entreprise privée lui ait jamais ver-sée. “En soutenant en même temps leur car-rière sportive et professionnelle, nous donnonsaux jeunes sportifs la possibilité d’organiserleur avenir, ce qui est notre principal souci”,déclare Michael Ilgner, président de laDeutsche Sporthilfe. Au cours des cinqdernières années, cet organisme a pu fairefinancer aux deux tiers par le secteur privéson budget de 10 millions d’euros ; aupa-ravant, il tirait principalement ses res-sources des recettes de la Glückspirale[une importante loterie] et de la ventede timbres spéciaux.

Grâce à la bourse de la Deutsche Bank,qui s’ajoutera à celle de la Sporthilfe, KimBui va pouvoir se concentrer sur songrand objectif : les Jeux olympiques deLondres. Elle compte bien être présentequand l’équipe allemande défilera pour lacérémonie d’ouverture, le 27 juillet. “En2008, je n’étais venue à Pékin qu’en touriste.Je ne veux pas revivre ça.” Et après les Jeux ?“Je passe ma licence.” �

Merci, monsieur le banquier !

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projets, ont pu acheter des maisons. Lesboxeurs recevaient des salaires mensuels– par exemple, ceux qui boxent pourl’équipe A touchent un salaire de20 000 dirhams [1 800 euros], pour l’équipeB, ce sont 15 000 dirhams [1345 euros] etpour l’équipe C, 7 000 [627 euros]. Il y avaitégalement des boxeurs qui s’entraînaientavec nous et qui recevaient un salaire de2 000 à 3 000 dirhams [de 180 à 270 euros]de la fédération.

Qu’est-ce qui a changé dans votre vie après votre médailleolympique [à Séoul, en 1988] ?Il n’y a eu aucun changement. Commevous le savez, nous, les sportifs, on aimebien vivre. J’avais un petit boulot, au port,où je gagnais 3 000 dirhams, mais cesalaire ne me suffisait pas. J’ai vécu lamisère pendant dix ans, jusqu’à ce que leroi m’octroie un agrément de transport[une licence qui permet à son détenteurde travailler comme chauffeur de taxi oude bus et dont la délivrance est trèsopaque ; celle d’Abdelhak Achik concerneles autocars]. Depuis 1991, personne nes’est soucié de mon cas. J’avais créé uneécole de boxe à Larbi-Zaouli [stade deCasablanca], d’où sont sortis des cham-pions tels qu’Abdelhak Aatkani etAboubakr Lbida, qui sont qualifiés pourles JO. Il y a eu aussi Driss Moussaid, quia combattu à Pékin.

Un quotidien avait annoncé que vous vouliez vous immoler par le feu “si on [vous enlevaitvotre] agrément de transport”,est-ce vrai ?J’ai été mal compris. L’agrément m’a étéoctroyé par le roi et lui seul peut me l’en-lever. Ma famille vit de cet agrément, etquand ma mère a entendu cette annonceà la radio, elle est tombée malade. J’étaisen colère. J’avais fait une vidéo quandj’étais en Finlande où j’expliquais claire-ment la situation. J’ai reçu également descoups de fil de gens haut placés qui m’ontdit de ne pas m’inquiéter et de ne pasréagir à ce sujet, que tout allait rentrerdans l’ordre.

Je vois que vous portez un tee-shirt avec l’inscription “Mike Tyson”. Est-il votre idole ?Mike Tyson reste un grand champion quicherche toujours les KO, mais j’aime bienregarder Marvin Hagler. J’imitais aussibeaucoup Fraser, mais il m’était difficiled’imiter Mohamed Ali, parce qu’il étaitrapide et jouait plus la défense que l’at-taque. Moi, j’attaque plus que je ne meprotège, à cause de ma petite taille (rires).

Propos recueillis par Reda Halimi

� Kim Buireprésentaitl’Allemagne en 2005 auxChampionnats du monde de gymnastique, à Melbourne.

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Londres 2012

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Tout cela n’a qu’un seul but : faciliter la vie à cette élite pri-vilégiée qu’on appelle “la famille olympique”. Je ne parle pasdes sportifs. On conçoit parfaitement que les coureurs, les cava-liers et les rameurs soient choyés. Non, la “famille” comprendles 40 000 – vous avez bien lu : 40 000 – gros bonnets des JO,bureaucrates nationaux, partenaires, parasites et autres poli-tiques qui s’apprêtent à occuper les meilleures places de tousles meilleurs événements. Ces oligarques du sport ont déjà acca-paré la moitié des chambres d’hôtel à peu près décentes de lacapitale. Ils vont filer depuis leurs hébergements olympiquessur les 160 kilomètres de voies Zil [du nom des voitures desofficiels], réservées sur un réseau routier congestionné.

Il y a toujours, nous direz-vous, les retombées de l’événe-ment. On nous a promis que les milliards d’argent public déver-sés dans les Jeux contribueraient largement aux travaux derénovation, créeraient des débouchés pour les jeunes et déve-lopperaient le sport dans l’une des zones les plus déshéritéesde la capitale britannique. Ah ! les retombées… Le WellcomeTrust, une organisation caritative, a proposé un projet grandiosevisant à transformer le parc olympique en centre scientifiqueet technologique de classe internationale. Les autorités ne l’en-tendaient pas de cette oreille. Le site est en train d’être venduà des spéculateurs immobiliers.

J’espère avoir tort sur toute la ligne. Peut-être que tout vatrès bien se passer. Les routes seront vides, les trains à l’heure,et la police refusera d’appliquer des lois ridicules et répressives.Le spectacle sera mémorable, et le monde verra Londres sousson meilleur jour. La Grande-Bretagne pourrait même gagnerdes médailles. Oui, cela pourrait fort bien marcher. A condition,évidemment, que tout le monde se tienne à distance.

Philip Stephens

Paru dans CI n° 1098, du 15 novembre 2011

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NONLondres sera sous dictatureLes Jeux olympiques 2012 devraient donner uneimage vivante et moderne de Londres. Ils devraientaussi bénéficier aux populations locales. Il n’en serarien, d’après ce chroniqueur du Financial Times.

Financial Times Londres

Vous songez à visiter Londres l’été prochain ? Unconseil d’ami : réfléchissez-y à deux fois. La capitalede la Grande-Bretagne accueille les Jeux olym-piques (JO). A moins d’avoir des tickets pour lafinale du 100 mètres, vous feriez bien de vous tenir

à distance. On nous a présenté Londres 2012 comme la consé-cration de la vitalité, de la jeunesse et de la diversité qui ontfait de la ville un pôle d’attraction mondial. Le Londres multi-culturel a triomphé du Paris provincial. Toute trace d’un telromantisme a désormais disparu : il s’agit maintenant d’assurerles recettes et le confort des organisateurs des Jeux.

Londres est promis à un exercice d’élitisme autoritairedigne de l’Union soviétique à l’époque de Brejnev. Les jeux dupeuple sont transformés en JO des apparatchiks. Les stadesvont déborder de politiques, de bureaucrates, de partenairescommerciaux. Plus d’un million de familles ordinaires n’ontpu obtenir une entrée, même pour les épreuves d’ouverturedes sports olympiques les plus obscurs. Les libertés seront sus-pendues pendant la durée des Jeux. Le gouvernement de DavidCameron promet des pénalités draconiennes à quiconque oseracompromettre les droits exclusifs de sponsors commeMcDonald’s et Coca-Cola. Le bras de la justice olympiques’étendra bien au-delà des pistes d’athlétisme, des bassins etdes vélodromes. Les partenaires se sont vu promettre une “villepropre”, un terme qui fait froid dans le dos, et on leur a cédéla propriété sur tout ce qui est autour des stades, à portée descaméras. Ne vous avisez pas de porter un tee-shirt estampilléBurger King et Pepsi : vous risqueriez de finir dans la Tour deLondres [qui fut une prison].

Ceux qui ont la chance d’avoir obtenu des tickets lors dutirage public risquent fort de voir les infrastructures londo-niennes, déjà sursaturées, craquer sous le poids des visiteurs.Les voitures sont interdites pour tous, hormis les privilégiés,mais la municipalité reconnaît que les transports publics vontavoir du mal à répondre aux besoins des JO et de la vie quoti-dienne. Pour un mois d’août normal, pendant les vacances, lestrains sont déjà pleins à craquer. Les transports ne fonction-neront que si les Londoniens cessent de se rendre à leur travail.Ceux qui ne pourront pas prendre de congés à ce moment-làsont invités à travailler chez eux. Personne ne regrettera lesbanquiers qui habitent les tours scintillantes de Canary Wharf[quartier d’affaires], mais ce sera un peu dur pour les médecinsou les plombiers. Même dans ces conditions, les déplacementss’effectueront à une allure d’escargot. Le temps de voyagedepuis le centre-ville jusqu’au stade olympique devrait être detrente-cinq minutes en métro. Les autorités affirment qu’unefois les mesures de contrôle des foules et de sécurité en place,il faudra compter plus de deux heures.

La grand-messe

J’y vais ou j’y vais pas ?

Philip Stephens

Chroniqueurprincipal auservice politiquedu FinancialTimes, PhilipStephens y tientune tribunebihebdomadairesur les affairesbritanniques etinternationales. Il a reçu plusieursrécompenses,dont le prix du journalismepolitique aux British PressAwards de 2008.

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� Dessin de Côtéparu dans Le Soleil, Québec.

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OUIUne agréable parenthèseLes Britanniques cultivent le goût de l’échec et du désespoir. Si les JO étaient une réussite,certains risqueraient de ne pas s’en remettre,soutient avec ironie cette journaliste du Guardian.En attendant, autant profiter de la fête.

The Guardian Londres

A présent, il devrait être parfaitement clair que lepire scénario pour la Grande-Bretagne serait deréussir superbement ses Jeux olympiques, commeelle menace de plus en plus de le faire. Car si cesJeux sont un succès, comment ferons-nous pour

expliquer tous les échecs que notre pays accumule dans lesautres domaines ? Pour notre fragile sentiment d’inutilité, iln’y a pas de pire ennemi que la réussite. Il est une réplique deJohn Cleese dans le film Clockwise [1986] qui me paraît infini-ment mieux nous convenir que l’actuelle devise nationale [“Dieuet mon droit”] : “Ce n’est pas le désespoir que je ne peux pas supporter, c’est l’espoir.”

Le fait est que l’échec, les récriminations et les aveux d’im-puissance sont ce que nous faisons de mieux sur cette île desceptiques. Même le plus forcené des optimistes doit recon-naître qu’il nous faudra plus que deux semaines de réjouissances– payées au prix fort – pour inverser une tendance centenaire.Toute personne perspicace ne peut donc qu’envisager aveceffroi la gueule de bois psychologique avec laquelle l’Angleterrese réveillera au lendemain de la cérémonie de clôture.

Avant de poursuivre, je tiens à signaler que j’ai toujours étéde l’avis que ces Jeux olympiques seront une quinzaine deréjouissances absolument mémorables – volontaires ou non –et que bon nombre de sceptiques d’aujourd’hui se trouverontentraînés ou au moins divertis par un aspect de la fête.

Cela ne signifie certainement pas que ces deux semainesvaillent les 11 milliards de livres [13 milliards d’euros] queleur budget semble avoir atteint. Certains n’ont de toute évi-dence aucun problème à dépenser des milliards pour un évé-nement sportif et commercial tout en supprimant des servicesentiers dont dépendent les populations les plus fragiles. Nousles verrons d’ailleurs certainement resurgir pour savourerleurs moments de gloire. Fin août, la place sera pleine deministres faisant l’éloge de nos champions paralympiques,après avoir si bien réduit les aides aux personnes handicapéesqu’un achat de couches pour incontinence relève désormaisd’un luxe inaccessible.

Mais enfin, il semble que ce soit le genre de moments quirequièrent un brusque et joyeux “Tout cela étant dit !” – alors,allons-y. Tout cela étant dit, l’argent est déjà dépensé, alorsautant profiter de la fête. Peut-être, dans le sud et l’est du pays,le souvenir de cette quinzaine olympique nous aidera-t-il àpatienter pendant que nous ferons la queue à la pompe, mau-dissant la sécheresse que l’été menace de faire subir à notregrande nation [le sud-est de l’Angleterre est en effet menacéd’une grave sécheresse cette année, et le gouvernement a déjàpris des mesures d’économie d’eau]. Peut-être les citoyens

britanniques riront-ils de bon cœur à cette délicieuse ironiequi nous aura fait dépenser une fortune pour un centre aqua-tique à toit tripartite sans avoir eu l’idée ou le courage politiquede développer un réseau de distribution d’eau national, commecertains le suggèrent depuis 1973. Peut-être, dis-je.

Mais – pour être moins optimiste – comme ces Jeux olym-piques ne seront pas une renaissance mais le plus mélancoliqueet éphémère des réveils, l’analogie la plus pertinente semblese trouver dans un film intitulé Awakenings [L’Eveil]. RobinWilliams y parvient, en leur administrant du L-Dopa, à réveillercertains patients plongés dans un état catatonique depuis desdizaines d’années. Pendant une courte et enivrante période,Robert De Niro et ses comparses se réveillent et goûtent denouveau à la vie. Mais, à mesure que le temps passe, hélas, leurstics et leurs crispations reviennent, et ils retombent finalementdans un état catatonique. Et même si Robin Williams essaiede conclure l’histoire en happy end hollywoodien en expliquantque ces réveils leur ont permis de mieux apprécier leur exis-tence, certains continueront de soutenir que cette lueur d’espoirétait la pire des cruautés.

Il en va de même des Jeux olympiques de Londres, quiseront comme le plus miraculeux des réveils pour nous quisommes dans un état catatonique, nous pour qui, depuis desdécennies, la plus simple des entreprises est tout à fait hors deportée. Pendant dix-sept jours, la Grande-Bretagne revivra etsera ramenée au temps de sa splendeur, lorsque les yeux dumonde étaient tournés vers nous… jusqu’à ce que les dysfonc-tionnements réapparaissent. Le souvenir de cette quinzainehantera alors le pays jusqu’au bout de son crépuscule.

Marina Hyde

Paru sur Courrierinternational.com le 23 mars 2012

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MarinaHyde

Editorialiste pour le quotidienbritannique The Guardiandepuis 2000,Marina Hydepublie chaquesemaine troisarticles d’opinionau ton souventcaustique, dontune chronique sur le sport. En novembre 2011,l’une d’elles lui a valu d’êtrenommée marrained’une associationbritanniquecontre le racisme.Ce texte dénonçaitl’attitude duprésident de laFifa, Sepp Blatter,qui avait déclaréquelques joursplus tôt qu’il n’y avait pas de racisme dans le monde du football.

DR

Dessin de Martirena,Cuba.

Londres 2012

Page 46: [RevistaEnFrancés] El mensajero Internacional ed.Especial Deporte & Dinero El Amor Loco

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La grand-messe

Grèce Dans cet article paru en 2004, ce quotidienathénien augurait que la facture des Jeux allait être très douloureuse. Une prédiction qui s’est hélas réalisée.

Ta Nea Athènes

A vec la fin de l’année arrivel’heure des bilans. L’andernier à la même époque,nous nous demandionsavec angoisse comment

investir pour réussir les Jeux olympiques.Aujourd’hui, l’angoisse est toujours là,mais pour une autre raison : l’addition estvraiment trop salée. 2004 n’a pas été, pourles Grecs, une année comme les autres.Deux périodes bien différentes l’ont mar-quée : les sept mois et demi avant les Jeux,

et les quatre mois et demi qui ont suivi.Sur le coût total, qui atteint 9 milliardsd’euros, 7 milliards devront être payés parl’Etat – donc par les citoyens. Cela signifieque nous pourrons commencer à respirerdans trente ans. En attendant, pour avoirune idée de ce qui nous attend, il suffit dese remémorer la fameuse Olympiade cul-turelle grecque [une initiative du minis-tère de la Culture grec, en coopérationavec le Comité international olympiqueet l’Unesco, qui visait à promouvoir lesvaleurs universelles des diverses civilisa-tions du monde].

Démotivation généraleQuand les événements culturels de cettemanifestation ont commencé leur tourdu monde, en janvier 2000, les dépensesont été telles que les employés des admi-nistrations et des ministères n’ont pastouché leurs salaires pendant près de sixmois. Aujourd’hui, ils s’attendent au pire.

Et puis le coût de la vie a grimpé enflèche. Les sondages enregistrent déjà lespremières vagues de mécontentementcontre le nouveau gouvernement conser-vateur de Costas Caramanlis, arrivé aupouvoir en mars dernier [resté en postejusqu’à octobre 2009, date à laquelle lesocialiste Georges Papandréou lui a suc-cédé]. La période de grâce est terminée,l’économie a perdu sa fougue olympiqueet le Premier ministre est confronté à unedémotivation généralisée. Pour les pro-chains mois, aucune lueur d’optimismene vient éclaircir le tableau. A Athènescomme dans le reste du pays, le prix de laviande, par exemple, a fait un bond de10 %. Quant aux supermarchés, ils ontdéjà annoncé que les prix de leurs produitsaugmenteraient de 3 % à 12 % en 2005.Quatre mois après la fin des Jeux, les prixrestent toujours aussi élevés : dans la capi-tale, il faut maintenant débourser 3 eurospour boire un expresso à la terrasse d’un

Trente ans de gueule de bois Dessin de BeppeGiacobbe, Milan.

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café – et même pas dans un établissementde luxe. Le ronchonnement fait donc par-tie du quotidien. Les journaux, radios etchaînes de télévision débattent sans findu sujet et s’inquiètent de voir qu’Athènesest à présent la deuxième ville la pluschère d’Europe, après Londres. Et, si l’onfranchit les frontières européennes, onconstate qu’à New York les prix des pro-duits courants sont nettement inférieurs :un tee-shirt qui vaut là-bas 15 dollars estvendu 25 euros en Grèce.

Crédit quotidienRésultat, ceux qui vendent moins chersont les nouveaux rois. Les rayons d’Ikeaou des supermarchés Lidl sont dévalisés.Pour trouver son bonheur, il faut venirtôt le jeudi matin, le jour des livraisons.Quant aux boutiques chinoises – qui semultiplient à Athènes –, elles attirent uneclientèle de plus en plus nombreuse. Uneexpression résume parfaitement notrevie actuelle : “Paiement en plusieurs foissans frais”. Même si le salaire moyen pla-fonne à 600 euros, il faut bien célébrerNoël… Pour ne pas perdre leur clientèle,même les supermarchés offrent des faci-lités de paiement. La “dinde de Noël payableen vingt-quatre mois” fait un tabac. Mais ily a aussi la coiffure du réveillon (payableen quinze mois) et les jouets (en vingtmois). Plus de 600 000 commerçants pro-posent ce type d’arrangement, contre àpeine 100 000 en 2001. La toute dernièresurprise vient des pâtisseries, qui permet-tent de régler les gâteaux traditionnels endouze mois (pour un prix au kilo inférieurà 10 euros…), et des vendeurs de pizzas.Les cartes de crédit vont donc bon train.Il en existe pour les sociétés et pour lesgrandes écoles de façon que tout lemonde, salariés et étudiants, puisse s’en-detter ensemble. Les supermarchés, quiaugmentent leurs prix, ont parallèlementlancé leur propre carte. Et tout le mondesuit. Même les clubs de football, commel’Olympiakos, ont leur propre carte decrédit, pour que leurs supporters puissentacheter leurs places !

Au début de l’an 2000, quelque70 sociétés émettaient des cartes ; il y ena aujourd’hui plus de 200. En 2004, 28 %des ménages ont souscrit un emprunt, etles prochaines statistiques promettentd’être terrifiantes. Cela explique que laplupart des gens portent des vêtementsde luxe, alors même qu’ils ne touchentqu’un tout petit salaire. Le Grec moyen,qui avait pour habitude de sortir une liassede billets avant tout achat, compte à pré-sent ses cartes de crédit. Une nouvellemode, peut-être.

Christos Manolas

Paru dans CI n° 738-739, du 23 décembre 2004

Chine Au lendemain des Jeux de Pékin, c’est la déception : la ville a tourné au ralenti, constateun économiste chinois.

Jingji Guancha Bao (extraits)Pékin

L e marché nourrissait deuxgrandes attentes vis-à-vis desJeux olympiques : une bellesaison sur le plan touristiqueet une envolée des cours de la

Bourse. Mais, au fur et à mesure que desexploits sportifs étaient accomplis auxJO, ces espoirs se sont amenuisés. Pourexpliquer le phénomène, il convient toutd’abord de remonter six mois en arrière.

Au cours de l’année écoulée, en par-ticulier depuis le mois d’avril, beaucoupd’hommes d’affaires et de touristes n’ontplus eu la possibilité de se rendre enChine, faute de visa. De ce fait, depuisavril, de nombreux programmes de coopé-ration, d’investissement ou autres ont étésuspendus ou différés. Cette interruptionde près de cinq mois a sans aucun douteeu des effets très négatifs sur les expor-tations des entreprises chinoises et leurfaculté d’attirer des fonds.

Il est donc facile de comprendre àquel point les espoirs de l’industrie tou-ristique ont été déçus. On pensait que lesJeux olympiques insuffleraient un grandélan au secteur du tourisme en Chine età Pékin. En fait, un rude coup a été porté

à cette branche [les hôtels de luxe péki-nois n’ont pas fait le plein et ont mêmebaissé leurs prix pour attirer les clients].

D’autres secteurs ont été égalementtouchés. Dans le domaine des transports,à cause des Jeux olympiques [et des res-trictions de circulation destinées à limiterla pollution], beaucoup de camionneursont eu du mal à entrer dans Pékin. Despetits restaurants, hôtels et agences devoyages privés ont dû mettre provisoi-rement la clé sous la porte.

En résumé, la plus-value attenduedes Jeux olympiques a fait défaut, à causesurtout des préoccupations sécuritairesdu gouvernement. Au nom du maintiende l’ordre, celui-ci a limité strictementle nombre d’étrangers autorisés à serendre en Chine, craignant que ces étran-gers ne cherchent à manifester ou à orga-niser des attentats terroristes. Cela aempêché que de nouvelles demandes deconsommation et de nouveaux secteursd’activité se fassent jour. Avec des réper-cussions très négatives sur l’économiechinoise.

Après les Jeux, la politique de macro-régulation pourrait bien évoluer : alorsque l’objectif de ces huit dernières annéesétait de juguler l’envolée des prix, onpourrait désormais aller vers à la fois uncontrôle de l’inflation et un soutien de lacroissance économique afin d’éviter toutdérapage. Et ce double objectif devraitpeu à peu devenir le nouveau cap à suivre.

Chen Zhiwu

Paru sur Courrierinternational.com le 26 août 2008

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Espoirs déçus

� Dessin d’Alexparu dans Liberté,Fribourg.

Athènes 2004 – Pékin 2008

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Brésil Les préparatifs de la Coupe du monde de football 2014 et des Jeuxolympiques 2016 ont généréune cascade de projets. Maisle retour sur investissementest encore hypothétique.

Caras y Caretas Buenos Aires

L e Brésil a le vent en poupe,personne ne peut le nier.Désormais membre du clubtrès fermé des grandes puis-sances, sixième économie

de la planète, le leader indiscuté del’Amérique latine va, pour couronner letout, organiser à seulement deux ans d’in-tervalle deux des plus grands événementssportifs internationaux ordinairementréservés à quelques pays triés sur le volet :la Coupe du monde de football 2014 etles Jeux olympiques de 2016 à Rio. Enéchange de cette manne commerciale, leBrésil a promis d’opérer sa mutation àun rythme accéléré. Mais à quel prix ?

Les chiffres avancés ont de quoi faireperdre la tête. Des milliards de dollarsinvestis en période de crise alors que

l’économie marque son premier tempsd’arrêt (la croissance du PIB, de 2,5 % en2011, est en deçà des prévisions) : 14 mil-liards de dollars dans les chantiers néces-saires à l’organisation de la Coupe dumonde et 18 milliards pour les Jeuxolympiques ; 330 000 emplois fixes et380 000 emplois temporaires devraientêtre créés ; et il faut s’attendre à un affluxd’environ 3 millions de touristes, selonles estimations. Et, évidemment, tout lemonde veut sa part du gâteau.

“Ils vont s’en mettre plein les poches, sansle moindre scrupule”, prédit Romário DaSouza Faria, ancienne star de la sélection

brésilienne et aujourd’hui député [socia-liste], faisant allusion aux marchés publicsattribués pour la Coupe du monde defootball. “Je me suis rendu dans les douzevilles du Mondial : la construction de certainsstades est déjà suspendue pour pouvoir ensuiteles classer en ‘chantiers d’urgence’ et ainsiéchapper aux exigences des appels d’offres. Il

n’y aura donc plus la moindre limite, et jen’ose imaginer combien tout cela va nous coû-ter”, prévoit l’ancien footballeur.

Tout le monde craint en effet le retourdes “éléphants blancs”, ces constructionspharaoniques érigées à l’occasion des Jeuxpanaméricains de 2007 à Rio. Des sourcesd’irrégularités budgétaires et de surcoûts,qui sont devenus obsolètes une fois lesfestivités sportives terminées. Romárioet le Brésil ont de bonnes raisons de s’in-quiéter : les exonérations accordées auxentrepreneurs par Brasília depuis 2011font gagner du temps grâce à des contratsplus flexibles, mais sont la porte ouverteà une corruption généralisée.

Et la corruption est un mot qui fâchele gouvernement de Dilma Rousseff.Plusieurs des quatorze ministres et leshauts fonctionnaires de l’Etat invités parla présidente à quitter leur poste en raisonde scandales de corruption ont démis-sionné à la suite d’affaires directementliées aux juteux contrats du Mondial :Mario Negromonte, ex-ministre de la Ville[démissionnaire en février] et chargédes projets de liaison entre les sites, aété accusé de fraude par le quotidienO Estado de São Paulo ; Pedro Novais,ministre du Tourisme [démissionnaire en

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Investissements en série

La grand-messe

“Ils vont s’en mettreplein les poches, sans le moindre scrupule”

� 2 octobre 2009 :les Jeuxolympiques de 2016 sontattribués à Rio de Janeiro. LA

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septembre 2011], est accusé d’avoir favo-risé certaines entreprises dans le pro-gramme de formation du personnel deservice pour la Coupe du monde ; OrlandoSilva, ex-ministre des Sports [démission-naire en octobre 2011], est soupçonné luiaussi d’irrégularités, et même RicardoTeixeira [démissionnaire en mars 2012],qui depuis vingt-trois ans régnait enmaître sur le football brésilien [il était àla tête de la Confédération brésilienne defootball (CBF) et du Comité organisateurlocal (COL) brésilien du Mondial 2014],est accusé de malversations.

Dans le document “Grands événe-ments et violations des droits de l’hommeau Brésil”, les Comités citoyens de laCoupe du monde – des associations demilitants implantés sur les douze sites dutournoi [voir leur site : portalpopular-dacopa.org.br/index.php] – fustigentun modèle commercial économique quis’impose au Brésil et permet “aux entre-prises nationales et internationales de sou-mettre le pays et les citoyens à leurs caprices,ou plutôt à leurs intérêts”.

Le projet de loi pour la régulation dela Coupe du monde 2014 [approuvé le9 mai par le Congrès brésilien et en attentede signature présidentielle], que la Fifaimpose comme cadre économique légalau pays, va à l’encontre de la législationbrésilienne. Citons quelques exemples :vente d’alcool dans les stades – interditeau Brésil ; interdiction des tarifs préfé-rentiels aux étudiants, aux handicapés,aux bas revenus et aux retraités ; suspen-sion de la “loi Pelé”, qui distribue 5 % desdroits télévisés aux associations spor-tives… A l’heure des marchandages, lerayonnement mondial du Brésil passe for-cément par une série de compromis.Barack Obama a été clair. “Les Etats-Unisne veulent pas assister aux Jeux olympiquessur le banc de touche”, a-t-il déclaré lors desa dernière rencontre avec Dilma Rousseff.“Puisque le Brésil se prépare à organiser leMondial et les JO, nous voulons nous assurerque les entreprises nord-américaines jouerontun rôle actif dans le processus. Le Brésil abesoin de construire de nouvelles routes, desponts et des stades, et nos entreprises sontprêtes à les aider à relever le défi.”

“Quand les affaires prévalent sur l’intérêtcommun, la privatisation de l’espace publicn’a plus de limites”, regrette Carlos Vainer,professeur à l’Institut de recherche et deplanification urbaine et régionale del’Université fédérale de Rio de Janeiro,dans son article “Rio 2016 : les jeux (olym-piques ?) sont faits”. Pour cet universitaire,le concept qui définit le mieux le Brésild’aujourd’hui est celui de “ville-vitrine” :l’urbanisation encouragée dans les années1980 conçoit la ville comme un espacecommercial à exploiter, “où il faut cacher

tout ce qui n’a pas sa place dans une vitrine,comme la pauvreté et la misère”.

Au Brésil, les favelas nuisent à l’imagede marque du pays. Selon les Comitéscitoyens, près de 170 000 Brésiliens pour-raient être affectés par la construction denouvelles infrastructures sur les sites duMondial.

N’oublions pas non plus les bénéficescollatéraux réalisés depuis l’irruptiond’une police militarisée dans les favelasde Rio. “Les Unités de la police pacificatrice(les UPP) – conformes à la stratégie d’expul-sion des narcotrafiquants et d’occupation deleur territoire – sont au cœur de la politiquede sécurité, mais elles ne répondent pas àtoutes les questions. Ces unités ont été postées

dans 67 des 1 000 favelas de Rio, dans deszones qui bénéficient des investissements depromoteurs ou dans les environs. Mais il n’ya pas d’unités de ce genre dans les zonescontrôlées par les paramilitaires”, affirmeCláudio Souza Alves, sociologue et doyende l’Université fédérale rurale de Rio deJaneiro. “La délinquance a certes baissé, maiselle n’a pas été éradiquée. Une reconfigurationgéopolitique du crime organisé est en cours”,assure-t-il.

La sécurité sert de prétexte pourengranger de juteux bénéfices dans lesquartiers proches, où la peur d’une balleperdue était un frein aux investissements.Selon les informations fournies à la BBCpar José Conde Caldas, président del’Association des dirigeants d’entreprisedu marché immobilier de Rio de Janeiro(Ademi-RJ), les propriétés de SãoConrado, dans le sud de la ville, pourraientvoir leur valeur doubler grâce à la pré-sence policière dans la Rocinha, alors qu’àTijuaca, dans le nord, leur décote seraitde 70 %.

Par ailleurs, ces opérations de main-tien de l’ordre ont permis à une industriedu tourisme toujours plus cynique d’ex-ploiter au maximum cette niche commer-ciale. On voit ainsi fleurir au cœur mêmedes favelas des hébergements hôtelierstout confort, sans parler des excursionsorganisées dans les dédales des ruelles.Dans combien de temps verra-t-on lesgrandes chaînes internationales érigerleurs tours au milieu de pauvres bâtisses ?A trop vouloir se concilier les bonnesgrâces des multinationales, le Brésil a finipar devenir l’une de leurs filiales sans âme.

Mariano Beldyk

Paru dans CI n° 1124, du 17 mai 2012

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Est-il bien raisonnable pour Madrid,déjà endettée à hauteur de 1 milliard d’euros, de vouloirorganiser les JO de 2020 ? se demande l’hebdomadaire Actualidad Económica.

Quel serait le bénéfice  ?Il ne s’agit pas d’offrir un ravalement de façade à la ville, comme ce fut le cas pour Barcelone en 1992, mais plutôt d’améliorer la visibilité de Madrid et de ses entreprises. Outre le coup de pouce à l’activitééconomique et culturelle, les JO apporteraient un peud’enthousiasme en ces temps de pessimisme et de crise.

Combien coûteraient ces JO ?L’organisation proprement dite (plus de 1,6 milliard d’euros) n’est pasun problème : elle serait couverte par le merchandising, les droits de diffusion télévisuels et les entrées.Le véritable investissement, ce sontles infrastructures sportives et les transports, dont le coût est estiméà 3,4 milliards d’euros, rapporteActualidad Económica. Ces dépenses s’étaleraient sur septans et il faut les relativiser, car Madridest déjà bien équipée. Mais les Jeuxolympiques se révèlent souvent plus coûteux que prévu. Et, si Madrid n’est pas sélectionnée en septembre 2013, les 29,7 millionsd’euros investis pour sa candidature auront été gaspillés.

Qui paiera l’addition ?Austérité oblige, la participation du secteur privé à la constructiond’infrastructures sportives (environ à 1,9 milliard d’euros) serait particulièrement élevée. Mais le développement des transports(1,7 milliard d’euros), quant à lui, seraitentièrement à la charge du secteurpublic – dont 75 % pour l’Etatespagnol, déjà largement endetté.Pour les partisans de Madrid 2020, il ne s’agit pas là de dépenses mais d’un investissement : l’Etat en sortiraitbénéficiaire. Mais les Espagnols n’ont pas oublié les JO d’Athènesen 2004, régulièrement accusésd’avoir contribué à la crise grecque.

Madrid

Peut-on sepermettre les JO ?

La sécurité, prétexte à engranger de juteux bénéfices

Rio 2016 – Madrid 2020

En lice

Des cinq villesaspirant à l’organisation des Jeuxolympiques de 2020, le CIO n’a retenu, le 23 mai dernier,que trois candidatesofficielles : Madrid,Istanbul et Tokyo,tandis queles dossiers de Doha (Qatar) et de Bakou(Azerbaïdjan),pourtant dotés des deux plus grosbudgets, ont étéécartés. Le verdictfinal tombera dansquinze mois, à Rio.

Page 50: [RevistaEnFrancés] El mensajero Internacional ed.Especial Deporte & Dinero El Amor Loco

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Etats-Unis Les jeunesAfricains-Américains sont de moins en moins nombreux à jouer au base-ball. Trop cher, trop peu soutenupar les bourses d’études, ce sport ne les fait plus rêver.

Courrier international Paris

L e base-ball n’est plus ce qu’ilétait. La MLB (ligue nationalede base-ball) s’inquiète de lachute record de la proportionde joueurs africains-améri-

cains dans l’élite du base-ball nord-américain. Selon une étude publiée parle quotidien USA Today, ils représen-tent seulement 8 % de l’effectif de la liguecette saison, alors que la MLB en comptait27 % en 1975 et encore 19 % en 1995. Mêmeconstat dans les tribunes, dont une autreétude montre qu’ils n’occupaient que 9 %des sièges la saison dernière. Résultat :les équipes de la MLB sont aujourd’huicomposées d’environ 60 % de Blancs,de 30 % de Latino-Américains, de 8 %d’Africains-Américains et de 2  %d’Asiatiques (Japonais, Coréens, etc.).

Un comble, alors qu’il a fallu se battrepour qu’un joueur noir soit enfin autoriséà intégrer une équipe professionnelle.C’était en 1947 : Jackie Robinson entraitsur le terrain aux côtés des BrooklynDodgers, dans l’Etat de New York. Cetterégression fait donc couler beaucoupd’encre outre-Atlantique. D’après cer-tains observateurs, c’est l’investissement

financier que représente la pratique dubase-ball qui dissuade les plus démunis.Le base-ball reste un sport qui coûte cher,explique The New York Times. Lasituation économique des clubs de quar-tier est difficile, surtout dans les grandesmétropoles, là où résident la majorité desAfricains-Américains. Le faible nombrede bourses accordées par les universitésaux joueurs de base-ball serait aussi encause. Aux Etats-Unis, les universitésproposent sept fois plus de bourses auxjoueurs de football américain qu’auxfutures stars du base-ball : de quoiconvaincre un grand nombre d’athlètesd’abandonner la batte pour le ballon ovale.

Et quand ce n’est pas vers le footballaméricain, c’est vers le basket que se tour-nent les sportifs noirs. “Tous les jeunes dema génération rêvaient de devenir KobeBryant ou LeBron James”, explique JulianMcMillians, joueur de base-ball à l’univer-sité Temple de Philadelphie. “J’essaie derendre le base-ball cool aux yeux des Africains-Américains et de faire en sorte que les jeunessachent que ce sport offre les mêmes atoutsque le basket et le football : on gagne les mêmessommes d’argent, on conduit les mêmes voi-tures de luxe et on s’éclate autant que lesjoueurs de basket de la NBA ; on est juste unpeu plus discrets”, confie quant à lui MattKemp, joueur des Los Angeles Dodgers.

Au Japon, où ce sport est suivi trèsattentivement, cette situation a égale-ment alarmé le spécialiste japonais dubase-ball, Makio Mukai, professeur demédecine à l’université Keio. “Que la dis-crimination raciale soit l’une des raisons dela diminution des joueurs de couleur est une

La diversité sur la touche

Tous en piste� Des valeurs, de l’argent, les portesde l’intégration ou celles de la gloire...Quelle que soit la finalité, le sport vend du rêve.� De Rio à PhnomPenh, c’est sur le ring, à coups de poing, que l’on boucle ses finsde mois ou que l’onconquiert sa liberté.� Pour les jeunesAfghans, le rugby est la promesse de nouveaux horizonsau-delà de Kaboul.� Mais la réalité n’estpas toujours à lahauteur. Si le base-balla cessé de faire rêverles jeunes Africains-Américains, pourles sportifs chinois la désillusion est encore plus rude.Passé les années de gloire, ils finissentdans le ruisseau. Seuls.

� En 2002, il n’y a plus que10 % de joueursafricains-américains enligue nationale. Ici, deux jeunesjoueurs en ligue junior à Williamsport,Pennsylvanie.

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en plus nombreux. Leur nombre a doublé

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Afghanistan Le ballon ovaleest encore rare à Kaboul.Mais, comme un peu partouten Asie, les instancesmondiales, épaulées par un sponsoring généreux,l’aident à prendre son envol.

South China Morning Post(extraits) Hong Kong

I l y a quelques années, sur le terrainpoussiéreux et caillouteux du stadenational de Kaboul, on tranchait lesmains des petits voleurs et on exé-cutait les criminels. Aujourd’hui,

dans un pays déchiré par la guerre, cetancien lieu de mort est devenu un champde rêve pour les jeunes Afghans qui aspi-rent à devenir joueurs de rugby.

Quelques-uns, à l’occasion d’un dépla-cement à Dubaï fin avril, ont pu avoir unpremier aperçu de ce qu’est le rugby inter-national. Voilà quelques mois seulement,dans le bourdonnement des hélicoptèresmilitaires volant au-dessus d’eux, AzizAhmed et un petit groupe de jeunes gar-çons se concentraient sur l’enseignementdu jour, à savoir passer le ballon ovale àun coéquipier, tout en essayant d’oublierla sinistre époque où les talibans tenaientle pays par la peur. Ces jours sombresn’étaient plus qu’un souvenir lointainpour Aziz, le demi de mêlée de la toutejeune équipe nationale d’Afghanistan,quand il est entré sur le terrain face auxShaheen, l’équipe espoir des Emiratsarabes unis (EAU). Le cadre : une sériede trois matchs de rugby à sept disputésavant la rencontre du top five entre HongKong et les EAU, comptant pour le tour-noi HSBC des cinq nations asiatiques [lasélection afghane a réussi à gagner un deces trois matchs]. “Nous sommes honorésde jouer pour l’Afghanistan et, inch Allah,nous vaincrons et ferons la fierté de notrepays. Nous nous sommes beaucoup améliorésau cours des derniers mois, mais nous savonsqu’il nous reste beaucoup à apprendre”, adéclaré Aziz juste avant ce moment deportée historique pour son pays.

Alors qu’il ne comptait que troisjoueurs à la fin de l’année 2011, le rugbyafghan s’est épanoui comme ces fleurs dudésert qui, après chaque averse, éclosentpartout sur le sol aride. Aujourd’hui, oncompte plus de deux cents pratiquants.Aziz et neuf de ses coéquipiers furent lesheureux élus sélectionnés par la jeune

Fédération afghane de rugby (FAR) pourreprésenter le pays pour la toute premièrefois. “Il n’y avait que trois joueurs le premierjour, puis sept le deuxième et le troisième, etau total ils furent quinze à se présenter”, indi-quait le conseiller technique de la FAR,Steve Brooking, à la veille du déplacementà Dubaï. “Aujourd’hui, nous avons une équipenationale. Jusqu’à présent, nous avons jouésur la base de l’Otan à Kaboul, contre deséquipes militaires. C’est pourquoi ce dépla-cement à Dubaï est si important pour nous.Pour la première fois, ils verront du rugby àquinze, ils vont se mêler aux joueurs d’autrespays qui ont une meilleure connaissancedu jeu et je pense qu’ils vont énormémentapprendre. C’est une chance formidable poureux en tant que joueurs.”

De la chèvre au ballonMême si le pays a été un temps dirigé parles Britanniques, le rugby n’a jamais vrai-ment pris racine en Afghanistan commeil l’a fait en Inde ou à Ceylan (l’actuel SriLanka), où on le pratiquait dès le débutdu XIXe siècle. Non que les Afghans soientréticents à pratiquer un sport de contact.Au contraire, ils raffolent du côté physiquede leur sport national, le bouzkachi, unesorte de rugby à cheval – avec, commeballon, la carcasse fraîchement abattued’une chèvre décapitée… Le directeurgénéral de la FAR, Asad Ziar, confirme :“Nous sommes un peuple rude et dur. Noussommes physiquement aptes à ce jeu, qui esttrès rapide et demande une grande énergie.”

La guerre a compliqué les premierspas de la jeune équipe. Les attaques quiont pris pour cible la ville de Herat l’andernier ont contraint la FAR à annulerplusieurs stages d’entraînement. Mais lavie – et le rugby – continue. En novembredernier, l’Afghanistan est devenu membreassocié de l’Asian Rugby Football Union(Arfu) et a été chaleureusement accueillià son assemblée générale, qui s’est tenueà Vientiane, au Laos. C’est là qu’il a étédécidé que le nouveau membre aurait sonpremier contact avec le rugby internatio-nal à Dubaï. “Nous sommes très optimistesconcernant l’Afghanistan. Depuis que leschoses se sont un peu calmées dans le pays,le rugby a vraiment décollé”, indique lesecrétaire général de l’Arfu, Ross Mitchell.

L’organisme qui pilote le rugby asia-tique a été créé en 1968 avec huit membresfondateurs, parmi lesquels Hong Kong.En l’an 2000, il ne comptait que douzemembres. Mais, depuis lors, on a assistéà une expansion fulgurante  : l’Arfu

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Tous en piste

hypothèse que l’on ne peut écarter”, confie-t-il au Tokyo Shimbun.

D’ailleurs, le joueur africain-américainGary Sheffield avait suscité la polémiqueen déclarant : “C’est parce que les Blancsne savent pas comment traiter avec lesNoirs que ceux-ci sont de moins en moinsnombreux.” Toujours selon le Pr Mukai, l’atomisation des familles africaines-américaines – conséquence de l’augmen-tation du nombre de divorces et de foyersmonoparentaux sans père – est un autrefacteur expliquant le désamour des jeunesAfricains-Américains pour le base-ball.“C’est un sport qui commence souvent parl’échange de balles entre père et fils, et il sem-blerait que cet environnement se soit dégradédans cette communauté”, explique-t-il auTokyo Shimbun.

Mais, pour Dave Stewart, l’anciennegloire des Oakland Athletics reconvertieen agent de joueurs, c’est du côté dumanagement qu’il faut chercher l’expli-cation. La Ligue de base-ball devrait commencer, selon lui, par engager plusd’Africains-Américains au sein de sa direc-tion et par changer ses méthodes de recru-tement : cette saison, seuls les entraîneursdes White Sox de Chicago et des Marlinsde Miami sont noirs. Et si c’était le base-ball qui boudait les Africains-Américains ?

Simon Benoit-Guyodet Ysana Takino

Essai transformé !

La Ligue de base-balldevrait commencer par engager davantaged’Africains-Américainsau sein de sa direction

millions de dollars

Soit 41,2 millionsd’euros. C’est la somme que l’équipe debase-ball des TexasRangers a mise sur la table pourracheter le joueurirano-japonais YuDarvish. Et encorece pactole ne lui assurait-ilque l’exclusivité des négociationsavec le lanceurpendant trentejours. Passé ce délai, à défaut de propositionsatisfaisante,Darvish seraitretourné jouer au Japon, expliquel’hebdomadaireSportsIllustrated.Les deux partiessont finalementtombées d’accord le 19 janvier dernier,à deux doigts de l’échéance, sur la sommerondelette de 60 millions de dollars(47,8 millionsd’euros) sur six ans.

51,7

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regroupe aujourd’hui vingt-huit pays, donttrois, Liban, Jordanie et Afghanistan, ontle statut de membres associés. “Cela estessentiellement dû au désir de l’InternationalRugby Board d’accroître le nombre de sesmembres quand il cherchait à faire du rugbyune discipline olympique, observe Mitchell.Voulant montrer que le rugby était un sportmondial, l’IRB a augmenté le financementet les ressources allouées à ce sport en Asie.”

Soutien financierEntre 2009 et 2012, l’IRB a déversé plusde 11 millions d’euros en Asie. “Nousinvestissons afin qu’un nombre croissantd’hommes, de femmes et d’enfants puissent

profiter de ce sport qui rapproche les peuplesautour des valeurs d’intégrité, de respect etde solidarité”, souligne le président del’IRB, Bernard Lapasset. L’entrée en scène,en 2008, d’HSBC comme principal spon-sor du rugby asiatique – la banque spon-sorise également l’équipe nationale deHong Kong – a énormément contribué àl’implantation du rugby dans la région.La garantie d’un financement annuel afavorisé l’essor du jeu à tous les niveaux.“Nous ne dirons jamais assez combien le sou-tien d’HSBC a été important pour le déve-loppement du jeu en Asie, insiste Mitchell.Il y a quelques années encore, les pays parti-cipaient à des rencontres internationales où

ils jouaient les uns contre les autres au grédes circonstances ; aujourd’hui, il existe untournoi asiatique des cinq nations. Ce tournoioffre un système structuré de ligues grâceauquel chaque fédération asiatique peutdisputer un minimum de deux à quatre ren-contres internationales par an, toutes finan-cées par l’Arfu. On a un bon exemple du rôleque cela a joué dans le développement de lapratique du rugby avec l’ascension météo-rique des Philippines, qui, il y a quatre ansencore, vivotaient en 4e division et qui vien-nent tout juste d’intégrer le top five d’Asie.”Pour l’Afghanistan, l’aventure ne fait quecommencer.

Alvin Sallay

Le Super Rugby ou Super 15,ce sont trois pays, quinzeéquipes provinciales et plusieurs centaines derugbymen qui s’affrontentchaque année dans l’un des championnats les plusmédiatisés au monde. Cettecompétition printanière,créée en 1996 par la Sanzar(un consortium desfédérations australienne,néo-zélandaise et sud-africaine), est considérée

comme l’un des temps fortsdu rugby à quinze de l’hémisphère Sud. Ewen McKenzie, l’entraîneuraustralien des Reds duQueensland, a cependantquelques doutes sur l’égalité des chances au sein du Super Rugby. En effet, les règles ne sontpas les mêmes pour tout le monde : chaqueprovince est soumise à la réglementation

de sa fédération nationale.Par exemple, les équipesaustraliennes ne doiventpas compter plus de trentejoueurs dans leur effectif,alors qu’en Afrique du Sudchaque province a le droitd’utiliser soixante joueurs,explique-t-il dans lachronique qu’il publie dansle mensuel sud-africainSA Rugby. Avec deseffectifs plus importants,les provinces sud-africaines

bénéficient d’un réelavantage sur leurs rivales :les joueurs sont moinsfatigués et tous les postessont doublés, voirequadruplés, note McKenzie.Malgré cette concurrencedéloyale, les équipes sud-africaines n’ont réussi à remporter la compétitionqu’à trois reprisesseulement. Et les dernierschampions en date sont…australiens.

Calculs

Aux antipodes, une concurrence déloyale

Le premiertournoi officiel de rugbyd’Afghanistans’est déroulé le 23 décembredernier à Kaboul.

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Finlande Elle a été inventéepar de vieilles dames et ne nécessitait, à la base,rien d’autre que des bâtonset de bonnes chaussures.Depuis, la marche nordiquea conquis des millions de gens et les spécialistes de l’équipement de sport.

Ogoniok (extrait) Moscou

N os voisins finlandais ontune espérance de vie plu-tôt élevée, qui se situe enmoyenne à 75 ans pourles hommes et 82 pour les

femmes [contre respectivement 63 et 75ans en Russie]. Cela est certes dû en par-tie au souci de l’écologie et à la qualité del’environnement. Mais la raison princi-pale de cette longévité tient au soin quemettent les Finlandais à entretenir leurforme physique.

La première fois que je suis allé enFinlande, c’était dans les années 1980.A Porvoo, la ville où je me suis trouvé,j’ai été marqué par deux phénomènesétranges que j’observais tous les jours : lecomportement intrépide des lièvres etl’entrain des petites vieilles. En journée,les lièvres adoraient, en pleine ville, gam-bader sur une aire de jeu destinée auxenfants, tandis que les vieilles dames par-taient marcher dans la forêt en s’aidantde bâtons de ski. Le soir, c’était l’inverse,

les lièvres gagnaient la forêt, tandis queles vieilles dames rentraient chez elles,laissant leurs bâtons plantés au bord duchemin, ce qui me rendait perplexe. Pourmoi, il était évident qu’elles allaient se lesfaire voler. Et pourtant non, le lendemainmatin, les bâtons étaient toujours làoù leurs insouciantes propriétaires lesavaient laissés.

J’ignore encore ce qui attirait telle-ment les lièvres dans l’aire de jeu ducentre-ville, mais, en revanche, j’ai apprispourquoi ces grand-mères partaientse balader en forêt avec des bâtons. Laréponse est que ce type de marche permetde vivre plus longtemps.

Au début, les vieilles dames n’ensavaient rien. Elles aimaient tout simple-

ment déambuler dans les parcs, suivantles sentiers, sans le moindre bâton enmain. Mais, un été, l’une d’elles a remar-qué des skieurs à l’entraînement équipésde ces fameux bâtons. Elle a essayé, celalui a plu, elle en a parlé à une voisine, quia décidé de l’imiter, et l’idée s’est répan-due. Dès 1989, elle avait séduit trente milleFinlandais, et deux cent mille un an plustard. Aujourd’hui, selon le site russophoneFontanka.fi, le nombre d’adeptes auraitdépassé le million, ce qui est considérable

dans un pays qui ne compte guère plus decinq millions d’habitants. Pour simplifier,on peut dire que la plupart des seniorspratiquent quotidiennement la marcheavec bâtons.

Le phénomène a d’abord intéresséles chercheurs, puis les industriels. Lespremiers ont mené des études établissantque trois heures par semaine de ce genrede marche (soit environ une demi-heurepar jour) pouvaient diminuer le risquede maladies cardiaques de 30 à 40 %. Aubout de vingt-quatre semaines, la pres-sion artérielle est très nettement plusbasse. La “marche nordique” sollicite90 % des muscles du corps, brûle jusqu’à45 % des calories, améliore la façon de setenir, aide à perdre du poids. Une heurede ce sport équivaut à deux heures de fit-ness. Les scientifiques conseillent avanttout ce genre d’exercice aux personnesâgées, ainsi qu’à tous ceux qui passentleurs journées assis devant un ordinateurou à leur bureau. Tous ces gens souffrentde l’un des maux de notre époque, l’hypo -dynamie, le manque d’activité physique,qui, d’après l’OMS, constituerait la qua-trième cause de mortalité des personnesd’âge moyen.

A la suite des chercheurs, les indus-triels se sont penchés sur ce phénomènede masse et en ont conclu que les bâtonsde ski traditionnels n’étaient pas adaptés.C’est ainsi que les rayons des magasinsont vu apparaître des équipements spé-cialisés et variés, en métal, en graphite,de longueur fixe ou télescopiques, facilesà transporter dans un sac, destinés à lamarche sur un sol goudronné ou sur lespistes forestières. Pour savoir comments’y prendre, aucun problème, il existedésormais quantité de clubs, de cours,d’écoles d’amateurs. L’engouement desFinlandais a conquis le monde entier. Ace jour, la sauvakävely compte plus de cinqmillions d’adeptes à travers la planète, del’Europe à l’Australie et la Nouvelle-Zélande en passant par le Japon. La Russiecommence à s’y mettre à son tour.

La marche nordique est une inventiondu peuple, comme tout un tas d’autres“jeux fantaisie” qui ont fait la réputationde la Finlande : lancer de téléphones por-tables ou de bottes en caoutchouc, tra-versée de terrain accidenté en portant sonépouse, football dans les marécages. Ledernier amusement en vogue étant lachasse aux moustiques.

Valeri Mitenev** Correspondant du journal finlandais Suomenmaa.

Jamais sans mes bâtons !

La marche nordiquesollicite presque tous les muscles du corps

Tous en piste

� Dessin de Magee,Fashion Instituteof Technology,New York.

C’est la probabilitéque vous avez de décrocher une place dansla NBA si vousmesurez auminimum 7 pieds,c’est-à-dire 2,15 m.Entre 1,95 m et 2 mètres, voschances tombent à 0,07 %, selon des statistiquesétablies parl’hebdomadaireSportsIllustrated.Dommage : le salaire au sein de la NBA graviteautour des 5 millions de dollars(3,92 millionsd’euros) annuels.Mais, si le simplefait d’être un géantdépassant 2,15 mmultiplie par 243 la probabilité de devenirmultimillionnaire,ne faudrait-il pas taxer enconséquence ceuxqui dépassent2,15 m ? ironise The Atlantic.

17 %

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Brésil Après un parcoursmarqué par la délinquanceet la drogue, Fábio Leão s’en est sorti grâce à la boxethaïe, à Dieu et à l’aide d’unejuge. Il est aujourd’hui uneidole dans sa favela de Rio.

Revista Trip (extraits) São Paulo

S ous les acclamations, la têtehaute et la larme à l’œil, FábioLeão marche lentement endirection du ring pour dispu-ter le championnat du Brésil

de boxe thaïe des 70 kg. Le combat a lieuà Rio, à l’académie Delfim, où il donne descours. Mais, dès le deuxième round, uncoup de tête involontaire entaille profon-dément l’arcade sourcilière de Leão. Surdécision médicale, l’arbitre préfère arrêterle combat et déclarer vainqueur sonadversaire. Sa décision est huée parle public. Fábio demande le micro et lesilence. “Il faut respecter la décision médicale,mais ça [il montre sa blessure], c’est rien pourmoi. Ceux qui connaissent mon histoire le

savent. Je préférerais sortir d’ici la tête explo-sée, mais avec la ceinture de champion.”

Cette année, son histoire fera juste-ment l’objet d’un film. Et si Fábio pouvaiten choisir le titre, ce serait Entre la délin-quance et le ring. La délinquance est arrivéeen premier, quand il n’était encore qu’ungamin qui jouait aux billes dans la favelaVila Kennedy, à l’ouest de Rio, où il vittoujours aujourd’hui. Fábio Leão n’a pasconnu son père, et le salaire de secrétairede sa mère ne suffisait jamais à bouclerla fin du mois.

Les KO s’enchaînentIl commence donc par voler des sucreries,avant de devenir le chef d’une bande degamins qui s’adonne aux attaques à mainarmée et verse dans le trafic. A 13 ans, ildécouvre la boxe thaïe et achète sa pre-mière paire de gants avec de l’argent volé ;à 16 ans, il devient champion de Rio. Unan plus tard, il est blessé par balle à l’issued’un échange de coups de feu avecla police. Sa famille et Luciana, la femmede sa vie et sa petite amie depuis l’âgede 13 ans, tentent de l’aider à sortir dela délinquance. Sans succès.

A 19 ans, Fábio est emprisonné pourla première fois. Il sort huit mois plus tardet trouve un emploi dans une multinatio-nale, mais n’est pas embauché “à cause de[son] passage en prison”. Ce refus équivautà un KO ; il tombe à nouveau dans la délin-quance et repasse par la case prison. Là-bas, il s’associe avec un malfrat qui trempedans un trafic de véhicules et de drogueau Paraguay.

A sa sortie de prison, il repart à l’en-traînement, devient père d’une petiteHillary et achète une maison avec piscine,une moto, une voiture, ainsi qu’un garage.En  1999, Fábio devient champion duBrésil. Pour aller au Mondial, à Venise, illui faut 5 000 reais [1 961 euros], mais ilne parvient pas à trouver des sponsors etvoit celui qu’il a battu en finale remporterle titre mondial. Nouveau KO qui le faittomber dans la cocaïne. Du jour au len-demain, il devient accro et déserte sondomicile, jusqu’à ce que la police l’envoieune nouvelle fois derrière les barreaux.

A la prison de Bangu, Fábio prendla tête du Comando Vermelho [leCommando rouge, faction de narcotrafi-quants la plus puissante de Rio] pour les

Le boxeur, la juge et Dieu

� Le projet Fightfor Peace (Combatpour la paix)enseigne la boxeaux jeunes des favelas de Rio.K

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détenus de Vila Kennedy. “Quand je suisarrivé, ils étaient tous comme des mendiants.J’ai acheté des rasoirs électriques, des bou-teilles de whisky. J’ai payé des femmes pourles mecs”, raconte-t-il. Il est bientôt trans-féré à Muniz Sodré, où le directeur, GilsonNogueira, souhaite le voir. Il propose auchampion de donner des cours de boxeà condition de faire une prière avant etaprès. Leão accepte ; il entraîne, prie etcontinue à trafiquer. Et puis, un jour, Fábioa un échange avec un prisonnier. Il s’ensouvient encore.

“Putain, Fábio, tu connais que le NotrePère ? Dis-nous un verset de la Bible.— J’en sais rien, putain ! Vas-y, toi…— Jean, 8-32, putain ! ‘Et vous connaîtrezla vérité et la vérité vous libérera.’— C’est quoi cette vérité ?— La vérité, c’est la parole de Dieu. T’as pasla Bible ?”

En quête de reconnaissanceFábio se procure une Bible et commenceà étudier la “parole”. Un jour, lors d’unediscussion avec Dieu, il pousse un cri delibération : “Seigneur, je n’en peux plus !Aidez-moi à sortir de cette vie !” Il contactesa bande de Vila Kennedy et envoie unmessage aux leaders du ComandoVermelho pour leur dire qu’il arrête sacarrière de délinquant. Il ne se drogueplus, reprend l’entraînement, devientmembre d’une Eglise évangélique et par-vient même à convertir sa mère, qui étaitadepte de l’umbanda [religion syncrétiqueafro-brésilienne].

Puis Fábio reçoit en prison la visitede la juge Thelma Fraga, à l’origine d’unprojet de réinsertion sociale d’anciensprisonniers. Fábio s’entraîne sans gantssur un sac confectionné à partir de jeanset rempli de sable et de gravier. Il a lesgenoux abîmés et les mains en sang. “Lajuge a été touchée et m’a dit qu’elle m’aideraità retrouver la compétition”, se souvient-il.Pour Thelma Fraga, qui considère aujour-d’hui Leão comme un fils et voyage à tra-vers le pays avec lui pour des conférences,chaque prisonnier doit être acteur de sapropre réinsertion. “La reconnaissance estl’une des bases psychologiques du travaildéveloppé avec Fábio. Son absence réveilleen lui des fragilités ; sa présence génère unemotivation qui lui permet de surmonter lesobstacles”, explique-t-elle.

Fábio est sorti de prison il y a deuxans et a remporté trois titres de championdu Brésil, ainsi qu’une médaille d’argentau Championnat panaméricain. Notreboxeur continue à donner des cours auxprisonniers de Bangu et à des enfants deVila Kennedy, dans le jardin de l’EgliseAssemblées de Dieu [la principale Eglisepentecôtiste au Brésil].

Sara Stopazzolli56

Bahreïn Le Grand Prix a peut-être mieux faitconnaître le petit royaumeet les doléances de sa population réprimée.Mais il a été une catastrophepour l’image de ce sport.

The Independent (extraits)Londres

A présent que le Grand Prixle plus politiquementcontesté de l’histoire dela Formule 1 est passé etque la poussière est mo-

mentanément retombée sur leroyaume de Bahreïn – après une multi-tude d’arrestations liées à une manifes-tation prévue à Manama –, on peutaujourd’hui se poser deux questions.

La première : qu’a gagné la formule 1en allant à Bahreïn ? En termes de rela-tions publiques, l’objectif était considé-rable ; pourtant les médias internationauxne se sont pas gênés pour critiquer l’avi-dité des responsables de ce sport – BernieEcclestone et le président de la FIA, JeanTodt, ont été habillés pour l’hiver – et leprésenter comme un sport élitiste pourmultimillionnaires guère préoccupés dureste de l’humanité. Ces derniers jours,on a en effet beaucoup associé ce sportà des qualificatifs comme “abject”, “amo-ral” et “dépourvu de tout sens moral”.

La seconde question, tout aussiimportante, est : qu’a gagné Bahreïn enaccueillant ce Grand Prix de F1 ? Et nousne parlons pas ici que des dirigeantssunnites – qui tenaient tant à ce que la

compétition se déroule comme prévu –ou des manifestants chiites, dont tantde médias se sont faits l’écho durant leweek-end. Nous parlons aussi de la majo-rité silencieuse. “Les larmes me sont mon-tées aux yeux quand j’ai appris que Bahreïnallait accueillir son premier Grand Prix”,déclare Hasan Emad, agent immobilierd’origine sunnite. “Je suis fan depuis 1994,j’adore Michael Schumacher !”

“Nous avons vraiment besoin de ce GrandPrix, pour aider notre économie en incitantde nombreux Bahreïnis à acheter des billetsafin que cette première course soit un succèset pour montrer que les gens ne céderont pasface à ceux qui prétendent organiser des mani-festations pacifiques tout en appelant à la vio-lence”, ajoute Yaqoob Salman MohamedAl-Slaise, professeur de hautes technolo-gies à l’université, également sunnite. “Laviolence ne sert ni la démocratie ni les droitsde l’homme, pas plus que le sabotage d’unévénement sportif ne peut déboucher sur desréformes. Cela ne fait qu’alimenter la haineet prolonger l’impasse politique.”

La remarque la plus intéressante vientpeut-être de leur ami Ahmed Al-Mahri,chiite et donc présumé hostile à la F1. “LeGrand Prix a été un instrument marketingpour Bahreïn, explique-t-il. Personne neconnaissait ce pays auparavant. Le fait qu’ilsoit organisé cette année nous a aidés parceque des gens comme vous sont venus et ontvu ce qui se passait réellement ici [la répres-sion antichiite]. C’est également une sourcede revenus, non seulement pour les organi-sateurs, mais aussi pour les petites gens, leschauffeurs de taxi et les vendeurs de rue.”

David Tremayne

Paru dans CI n° 1122, du 3 mai 2012

Formule marketing

Tous en piste

� Dessin de Burki,paru dans 24 Heures,Lausanne.

L’événement

Le 22 avril dernier,le Grand Prix de Formule 1 sedéroulait à nouveauà Bahrein, après une annéed’interruption en raison de la révolte populairedans ce pays. Un retour trèscontesté alors quel’oppression deschiites se poursuit.A la veille de la course, le sited’opposition SawtAl-Bahraynrappelait les critiques de Human RightsWatch : cettemanifestation allait être utilisée par le régime pour accréditerl’idée d’un retour à la normale.

L’auteur

David Tremayne est le correspondantde TheIndependentpour la Formule 1.Ce journalistespécialisé dans les sportsmécaniques est également l’un des fondateurs de Grand PrixPlus, le premierwebmagazineconsacré à la F1outre-Manche.

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Chine Un éditorialistes’indigne des déclarationsofficielles qui prétendentque les athlètes chinois sontles plus heureux du monde.En réalité, ce bonheur est de courte durée.

Liaoning Ribao Shenyang

L e secrétaire d’Etat adjoint auxSports, Yang Shu’an, consi-dère que Zou Chunlan [halté-rophile médaillée d’or auxJeux olympiques, devenue

masseuse dans des bains publics de Jilin]ou Zhang Shangwu [champion du mondeuniversitaire de gymnastique, réduit à lamendicité à la suite d’une blessure autalon d’Achille], qui ont sombré dansla misère une fois leur carrière sportiveterminée, sont des cas exceptionnels. Ilestime en effet que, globalement, les spor-tifs chinois sont les plus heureux dumonde ! “De nombreux athlètes occidentauxles envient beaucoup…”, ajoute-t-il même.

Certes, dans le cadre du juguo tizhi[soutien de toute la nation au systèmed’élite sportive], les sportifs chinois béné-ficient d’un solide appui logistique : ilssont déchargés des tracas liés à leursconditions d’entraînement et de match ;en fait, ils n’ont besoin de se soucier dequasiment rien… Ils peuvent donc s’esti-mer “extrêmement heureux” comparésà leurs homologues étrangers qui doiventchercher eux-mêmes un entraîneur, sedébrouiller pour réunir les fonds néces-saires pour payer leurs entraînements etmême parfois acheter eux-mêmes leurtapis ! Cependant, combien de temps peutdurer un tel “bonheur” ?

Cela fait longtemps que le sort difficiledes anciens sportifs de haut niveau a attirél’attention des personnalités concernéesen Chine. Celles-ci appellent l’Etat àprendre au plus vite les mesures néces-saires pour fournir aux athlètes ayantterminé leur carrière des garanties enmatière de couverture sociale, de réinser-tion professionnelle et d’indemnités dedépart à la retraite. Elles demandent éga-lement une réforme du système actueld’entraînement hyperspécialisé, afin depréparer la reconversion des sportifsune fois leur carrière terminée. En effet,comme le montrent de plus en plusd’exemples concrets, c’est au prix du sacri-fice de l’acquisition de compétences qui

leur permettraient de subvenir à leursbesoins futurs que les athlètes paient ce“bonheur” durant leur carrière sportive.Une fois cette brève période heureuseterminée, ils se retrouvent seuls pouraffronter tout le reste de leur vie.

La précarité guette les champions

Même sans compareravec les revenusénormes de Li Na( joueuse de tennis,3,7 millions de dollarsen 2011) et de Liu Xiang(athlète chinois le plusconnu au monde,3,5 millions de dollarsen 2011), la pauvreté decertains sportifs – deschampions nationaux,voire mondiaux – a attristé et choqué

les Chinois. Selon le journal pékinoisBeijing Chenbao, 80 %des 300 000 sportifspris en charge par l’Etat sont frappésaprès leur retraite parla maladie, le chômage,la pauvreté et ontbesoin d’aide sociale.Parmi eux :Zhang Shangwu,ancien champion du monde de

gymnastique, a venduses médailles d’or en 2007. Il a étéemprisonné deux moispour vol. Il s’estretrouvé dans la rue, à Pékin, comme artistede cirque.Zou Chunlan,ancienne championnenationaled’haltérophilie, vitaujourd’hui commemasseuse dans un bain

public, avec 500 yuanspar mois [62 euros].Ai Dongmei, anciennechampionne dumonde de marathon, a été obligée de vendretoutes ses médaillespour survivre.Li Chaohui, ancienchampion national de lutte, a vendu sa médaille d’or pour payer ses frais médicaux.

Retraite

Un grand saut dans le vide

Fort heureusement, Yang Shu’an aégalement fait savoir que des solutionsétaient en train d’être mises en œuvre pourrésoudre le problème des athlètes rendusinvalides par leur pratique sportive. Lesystème permettant aux anciens sportifs[de haut niveau] de prétendre à uneretraite est également en cours d’amélio-ration : ceux-ci bénéficieront désormais,à la fin de leur carrière, d’une année detransition au cours de laquelle l’Etat finan-cera leur participation à différentes formations professionnalisantes ou tech-niques, qui faciliteront leur reconversion.

Il faut assurément qu’il en soit ainsi,car, si personne ne veut payer l’additionpour ces athlètes, qui voudra encorecomme eux sacrifier sa jeunesse à lagrande cause sportive ? Certes, ZouChunlan et Zhang Shangwu sont des casà part, mais les vies de Deng Yaping[championne pongiste élue déléguée offi-cielle de la Chine auprès du CIO] et LiNing [triple champion olympique de gym-nastique devenu un célèbre entrepreneurà la tête de sa marque de vêtements desport] font encore plus figure d’exception.En effet, la grande majorité des sportifschinois ne sont pas du tout secondés pourtrouver leur propre voie vers le salut, unefois qu’ils ont raccroché. Si l’on veut vrai-ment prendre en considération ces spor-tifs, il faut non seulement leur garantirune vie “heureuse” durant les quelquesannées de leur carrière sportive, mais sur-tout leur donner les compétences néces-saires pour forger leur bonheur une foiscette période terminée.

Zhao Yang

La lutte et riend’autre. C’estl’enseignementque reçoivent cesjeunes athlètes de Qingdao.

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Khum Peseth monte sur le ring depuis près de dix ans. Au total, 300 combats qui permettenttout juste à ce Cambodgien de boucler ses fins de mois.

Southeast Asia Globe Phnom Penh

L a flûte de roseau entame sonétrange mélopée. Khum Pesethet Prum Pheakdey se lancentdans l’antique rituel du kunkru[ils se présentent leurs res-

pects]. Les tambours et une cymbale sejoignent à la cacophonie pendant que lescombattants parcourent le ring en sau-tillant, s’agenouillent à chaque coin ets’inclinent en signe de prière à Bouddhaet de respect pour les juges, le public etles combattants du passé.

Dans les gradins, les bookmakers hur-lent leurs recommandations aux joueursde tout le pays par l’intermédiaire dedizaines de téléphones mobiles fixés surdu contreplaqué. La première reprisecommence. Peseth et Pheakdey tour-nent sur le ring, s’évaluant l’un l’autre.Pheakdey, 24 ans, est trapu et puissant ;Peseth, mince et sec. A première vue,Pheakdey ne devrait avoir aucune diffi-culté à pulvériser son adversaire. MaisPeseth compense son manque de puis-sance physique par une technique horspair : dès la première reprise, il passe àl’offensive et envoie coups de genou etjabs [directs du bras avant] fulgurants àl’estomac et à la tête de son adversairestupéfait. La foule pousse des huées. Lacloche sonne. Les combattants se reti-rent dans leur coin. Une bosse grossecomme une balle de golf pousse sur lefront de Peseth. “Je n’aime pas beaucoupcombattre, nous confie-t-il. Je ne le fais quepour nourrir ma famille.”

Quand nous le rencontrons, Pesethest assis devant chez lui, son fils de 2 anssur les genoux. Le petit s’amuse à lui tirerles cheveux. Peseth réagit avec un douxsourire. La patience dont il fait preuveavec ses enfants est bien loin de la férocitécalculée qu’il affiche sur le ring. Pesethvit avec neuf personnes dans une maisonde deux pièces située sur une piste étroitede la province de Kampong Speu [à l’estde Phnom Penh]. “J’ai commencé à com-battre quand j’avais 19 ans”, explique-t-il.

C’était en 2001. “Je venais de me marier.Des promoteurs sont venus dans notre vil-lage. Ils ont déclaré qu’on devait préserverles traditions khmères et ils ont demandé siquelqu’un voulait essayer la boxe pieds-poings. Je me suis porté volontaire.” Pesethrit en se remémorant son premier com-bat. “J’ai dû abandonner au bout de troisreprises. C’était épuisant.” On le paie alorsun peu plus de 3 dollars, soit plus qu’iln’a jamais gagné en une journée. A peineun an plus tard, Peseth s’entraîne avecun coach, tout en travaillant à temps par-tiel dans le bâtiment. Son envie se traduitpar un style rapide, sournois, qui lui vautde passer rapidement des tournois ama-teurs de province aux combats télévisés,qui lui rapportent aujourd’hui entre 15 et20 dollars par jour.

Peseth n’avait pas parlé à sa femmede sa jeune carrière de boxeur de peurqu’elle ne l’oblige à y renoncer. “Quelqu’unm’avait dit que mon mari était boxeur, mais

je ne l’avais pas cru”, raconte Chan Thon,27 ans. Quand elle finit par voir Pesethcombattre à la télévision, elle prend peur.“Je n’arrêtais pas de penser aux combats d’an-tan. Il n’y avait pas d’arbitre et on se battaitjusqu’à la mort d’un des adversaires.”

Peseth a été découvert dans la pro-vince de Prey Veng [dans le sud-est dupays] lorsqu’il était tout petit, enveloppédans une feuille de bananier. Il n’a aucunsouvenir de ses parents biologiques etaucune information sur leur sort. Il nesait même pas quel âge il a au juste – dansles 30 ans, pense-t-il. La famille qui l’atrouvé l’a recueilli à contrecœur. “C’étaientdes paysans, raconte-t-il. Ils étaient trèspauvres. Ils avaient onze autres enfants ànourrir. Quand j’ai eu 12 ans, je leur aidemandé de me payer un billet de bus pourPhnom Penh. Je ne voulais plus être un far-deau pour eux.”

Dans la capitale, Peseth commence àtravailler. Il ramasse des bouteilles et descanettes, puis vend des escargots à lavapeur, des nouilles sautées, de l’eau en

bouteilles et des gâteaux. Il ne gagnejamais plus de 1 ou 2 dollars par jour.Même s’il est bien payé désormais(depuis 2008, il récolte entre 60 et 85 dol-lars par match et combat une fois tous lesquinze jours), il a une famille à nourrir et,depuis son arrivée à Phnom Penh, il y après de vingt ans, il n’a pas d’autre choixque de pratiquer ce métier. Entre deuxséances d’entraînement, on peut voirPeseth vendre des petites bouteilles desauce de poisson à l’arrière d’un tuk tuk[tricycle à moteur] emprunté pour l’oc-casion ou hisser des sacs de ciment de50 kg sur des camions. Ces deux boulotsrapportent peu et le dernier est en trainde miner ses forces, déclare-t-il.

En dix ans de carrière, Peseth a faitplus de 300 combats et en a remporté plusdes deux tiers. Il reconnaît cependantqu’il n’est plus de la première jeunesse.“Combattre devient de plus en plus difficileavec l’âge”, confie-t-il. Il sera forcé deprendre sa retraite de boxeur d’iciquelques années. “Mon rêve serait de deve-nir juge ou arbitre.”

Au milieu du ring, l’arbitre réunit lesdeux combattants cabossés pendant queles juges délibèrent. Après quelquessecondes d’attente anxieuse, victoire àl’unanimité : on lève le bras de Peseth.Son homme de coin lui enlève ses gantset les essuie pour les passer au combat-tant suivant. Rares sont les boxeurs cam-bodgiens qui peuvent se permettre d’enacheter. Plusieurs parieurs s’approchentde Peseth et lui fourrent une partie deleurs gains dans ses mains bandées, tan-dis que le combattant victorieux s’in-cline humblement.

Un médecin lui pose quatre points desuture sur chacune des arcades sourci-lières. Le sang inonde les pansements enquelques secondes. Peseth se sèche etenfile un vieux tee-shirt et un jean. Ilattend timidement près du ring que lesjuges lui donnent sa paie de 85 dollars.Ensuite, il s’incline et quitte l’arène avecun groupe de supporters et d’amis quis’entassent à l’arrière du tuk tuk. Pesethfait rugir le moteur – les phares refusentde s’allumer – et commence le long trajetdans l’obscurité et la poussière qui leramènera à la maison, où il remettra sesgains à sa famille.

Daniel Otis

Paru sur Courrierinternational.com le 17 février 2012

Khum Peseth

Boxeur par nécessité

“Dans les combatsd’antan, il n’y avait pasd’arbitre et on se battaitjusqu’à la mort d’un des adversaires”

Tous en piste

�Dessin de Mikel Casal (Madrid) pour Courrierinternational.

Biographie

Vers 1982Naissance de KhumPeseth dans la province de PreyVeng, dans le sud-est du Cambodge.

1994 Il quitte ses parentsadoptifs pour s’installer à Phnom Penh.

2001 Peseth fait ses débuts dans la boxe pieds-poings.

2002 Des tournoisamateurs il passeaux combatstélévisés, plus prestigieux.

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Supporters Soutenir sonéquipe, hurler ses victoires,pleurer ses défaites… Ces transes sont inscritesdans nos gènes. Elles forgentle sentiment d’appartenanceà une tribu, à une société.

El Mundo Madrid

Depuis Darwin, nous savonsque l’animal humain des-cend du singe. Nous n’avonspourtant pas évolué autantque nous l’imaginons. Les

recherches de pointe de primatologuescomme Jane Goodall et Frans de Waal ontdémontré de manière indiscutable quenous partageons de nombreux aspectsde base de notre psychologie avec nosparents les plus proches. Et l’amour de latribu en fait sans doute partie. De fait,lorsqu’un conflit apparaît entre des

groupes rivaux de chimpanzés, chaquehorde peut en général compter sur sessupporters : ils ne participent pas direc-tement à la bataille, mais ne cessent decrier, de se frapper le torse et de hurlersur les leurs. Ça vous dit quelque chose ?Aujourd’hui, en plein XXIe siècle, l’or-gasme collectif que ressentent des mil-lions de personnes quand leur équipemarque un but contre le camp adversemontre à quel point ces émotions ata-viques sont toujours d’actualité pour lesprimates de l’espèce Homo sapiens. Freudl’avait déjà dit : l’estime de soi de chaque

être humain présente une composanteindividuelle, mais aussi collective, et c’estpour cela qu’il ressent de la fierté ou dela honte non seulement pour ses succèsou ses échecs en tant que M. Untel, maisaussi en tant que membre des sociétésauxquelles il appartient et se dévoue.Lors d’un événement sportif comme leMondial de football, les joueurs de la Roja,l’équipe espagnole, deviennent des icônesqui représentent l’ego collectif en arbo-rant le tee-shirt de leur tribu. Ainsi, tousceux qui s’identifient à ce “je” social (enchantant avec passion l’hymne “yo soyespañol…” [chant de supporter]) ressen-tent profondément en eux leurs victoireset leurs défaites. Comme le démontrel’étude publiée en avril dernier, c’est cequi explique que leurs organismes éprou-vent une décharge hormonale qui les metsur leurs gardes pour défendre la dignitéde leur horde. Alors, oui, nous avonsévolué. Mais pas beaucoup.

Pablo Jáuregui60

Orgasme collectifDéchargehormonale

Une étudescientifique vientde mettre en évidence qu’un supportersubit une montéed’hormones liée au stress sociallorsque son équipeest en difficulté. Le cortisol améliorela résistancementale etpermettrait de faireface aux sarcasmes.La testostéroneaugmente en situation de compétition et jouerait aussi sur le désir sexuel.

Nous partageons de nombreux traitspsychologiques avec les primates, dont l’amour de la tribu

Tous en piste

But ! La victoireest pour l’équipede foot de Newell(Argentine).

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Japon La sprinteuse Maya Nakanishi compte sur la vente de calendriersdans lesquels elle pose nuepour partir aux Jeuxparalympiques de Londres.

Courrier international Paris

P our financer ses prothèseset payer son coach, la belleJaponaise n’y est pas alléepar quatre chemins. Elle asimplement décidé de mon-

trer son outil de travail : son corps, dansun calendrier* sur lequel elle pose nue.Initiative audacieuse qui, depuis, attirel’attention de nombreux compatriotes.Alors même qu’elle compte dans son pal-marès des records nationaux (notammentpour le 100 mètres et le 200 mètres, ainsique pour le saut en longueur), MayaNakanishi n’a pas pu participer aux

championnats du monde d’athlétisme,l’année dernière, faute de moyens.Pourtant, en 2008, aux Jeux paralym-piques de Pékin, elle est arrivée quatrièmeau 200 mètres. Cette année, Maya comptebien se présenter à Londres.

Mais, comme l’explique le TokyoShimbun, il faut au moins trois pro-thèses pour pouvoir se présenter auxcompétitions, et une seule “jambe” coûtedéjà 12 000 euros. A cela s’ajoutentles frais d’entraînement spécialisé :50 000 euros par an. Nakanishi, qui vitde petits boulots, a eu beaucoup de malà rassembler cet argent. A tel point que,en juin 2011, son compte bancaire a finipar être dans le rouge. Elle s’est alorsdemandé quel était le meilleur moyenpour s’en sortir. “Il n’est pas normal quedes athlètes compétents ne puissent se pré-senter aux compétitions par manque d’ar-gent !” s’est-elle indignée. “J’ai pensé que,en ôtant tout artifice et en montrant mesmuscles galbés, je parviendrais à convaincre.

Je veux qu’un maximum de personnesconnaissent ma détermination. Je veuxqu’on m’aide à réaliser mon rêve !” explique-t-elle avec enthousiasme au journalistedu quotidien de Tokyo. Un pari aujour-d’hui gagné.

A la base, Maya redoutait pourtantque son calendrier ne soit mal accueillipar le public, et exposer au grand jour saprothèse lui a demandé du courage.“Lorsque j’ai perdu ma jambe [en 2006] surmon lieu de travail, je pratiquais le tennis àfond. Quand j’ai su qu’il fallait qu’on mecoupe la jambe, j’ai cru que j’allais mourir.Je l’ai finalement perdue, mais je n’ai pasperdu la vie, ni ma passion pour le sport.Je voulais montrer que je croquais la vie àpleines dents et dire qu’on y arrive quand ony croit coûte que coûte”, confie-t-elle surson blog, où affluent les commentairesd’encouragement.

Ysana Takino* Calendrier 2012-2013, 1 200 yens (12 euros, envente sur Amazon), www.m-nakanishi.com

Cherche financement pour Londres Le buzz a été tel sur Internetque le calendrierde MayaNakanishi s’esttrouvé en rupturede stock.

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Inde En 2009, le photographepolonais Tomasz Gudzowaty,qui s’est spécialisé dans la photographie sportive, a suivi pendant plusieursjours Raja, Viplav et Harish,trois adolescents golfeurs,dans les rues et sur les toitsdes bidonvilles de Bombay.

Courrier international Paris

L e golf passe pour un sport deriche, et ce cliché contient unebonne part de vérité. Pourtant,sa forme moderne et élitisteest issue d’un simple jeu rural.

L’équipement indispensable ? Il suffitd’un bâton courbé et de balles. Le terrainde golf ? N’importe quel endroit peut setransformer en green. Partant de là, legolf devient accessible à tous les milieuxsociaux. Et même aux enfants des bidon-villes. A Bombay, un groupe de garçons– dont certains ont été caddies sur unterrain de golf voisin – ont commencé ày jouer il y a quelques années, en créantleur propre variante du 18-trous. Troppauvres pour pouvoir s’offrir de vraisclubs et de vraies balles de golf, ils onttransformé des tiges de fer et utilisentdes balles en plastique bon marché qu’ilstrouvent dans des magasins de jouets.Mais, à part cet équipement peu conven-tionnel, ils respectent les règles du jeutraditionnel. Et tout le monde soigneson swing.

Virginie Lepetit

Le green desbidonvilles

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� Surplomb. Raja et Viplav en pleine action,maîtres de Bombay.

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Rassemblement.Ces golfeursurbains, mêmes’ils jouent en dehors descircuits officiels,rameutent les foules.

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� Echauffement.Raja s’entraînedans les canauxde la ville.

Mouvement.Raja vient deréussir un swingsous le regardattentif de Harish.

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Tourisme Deux anciensinternationaux de rugbyproposent des séjourssportifs pour les enfants. Les coachs : des “légendes”. Le décor : un luxueux hôtelde Sardaigne. Le plus : des parents comblés parla proximité de leurs idoles.

Financial Times Londres

S i vous vous êtes jamaisdemandé comment définir leterme “confusion”, observezdonc un groupe d’Italiens entrain de regarder des enfants

britanniques s’entraîner au cricket sur unterrain de football en AstroTurf [marquede gazon synthétique]. J’ai même entendul’un d’eux murmurer : “Confusionale…”,terme qu’il est inutile de traduire. Derrièretrois piquets en plastique jaune, l’anciencapitaine de l’équipe d’Angleterre, AlecStewart, faisait rouler une balle jusqu’àses protégés et encourageait l’un d’eux àla lancer avec force, tandis qu’un autre setenait prêt à intervenir en cas de balle perdue (fumble). Confusionale, en effet.

L’année dernière, j’ai emmené monfils de 12 ans à la nouvelle Super SkillsTravel Rugby Academy, un camp d’entraî-nement dirigé par les anciens internatio-naux anglais de rugby Will Greenwood etAustin Healey, au village de vacances ForteVillage, situé dans le sud de la Sardaigne.Cette année, nous y sommes retournés àPâques pour l’inauguration de la Cricket

Academy, une école de cricket appartenantau même groupe, qui s’enorgueillit d’uncorps d’entraîneurs tout aussi prestigieux.Aux côtés de Stewart figurent ainsi l’an-cien gardien de guichet (wicket-keeper)international Paul Nixon, l’analysteen chef et ancien entraîneur adjoint del’équipe d’Angleterre Mark Garaway et,cerise sur le gâteau, l’ancien capitaine del’équipe victorieuse de The Ashes, la mini-série de tests-matchs, Michael Vaughan.

A propos de cerise sur le gâteau, noussommes arrivés le jour du 49e anniversairede Stewart. Un détail qui n’aurait sansdoute pas mérité d’être relevé s’il ne l’avaitpas été par l’un des enfants, Sachin, 7 ans,qui s’en souvenait très bien, tant il s’étaitinformé sur l’homme dont la carrière dejoueur avait pris fin deux ans avant quelui-même, Sachin, ne soit né.

Tous les enfants n’en savaient pasautant, mais tous les papas et presquetoutes les mamans étaient bien conscientsde se trouver en présence de talents d’en-vergure internationale. Cela explique leléger frisson de nervosité qui parcouraitl’assistance lors de la réception de bien-venue. Mais Nixon s’est chargé de détendrel’atmosphère avec un charme irrésistible.Il a avoué le trac qu’il éprouvait devantun public aussi nombreux, car il n’étaitpas habitué aux grandes foules, ayant jouéde longues années dans le Leicestershire[un comté anglais connu pour être trèsrural], ce qui a provoqué l’hilarité géné-rale. La glace était rompue.

L’entreprise, fondée par Greenwoodet Healey, est née inopinément il y a deuxans. Les deux internationaux de rugby,

Les bonnes recettes

� La légende du cricket MichaelVaughan était l’un des coachs de la premièreCricket Academyen 2012.

En vacances avecles champions

� Bienvenue dans le monde des affaires !Le sport est unbusiness. � Un business qui se décline dans l’économielocale, le tourisme, la médecine, les statistiques…Un businessomniprésent dans les universitésaméricaines.� Mais un businessdont il faut maîtriserles codes, que ce soit pour recruterau meilleur prix les joueurs de la saisonou pour gérer les millions amassés. � Certains athlètesl’apprennent parfois à leurs dépens.

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amis depuis l’âge de 16 ans, prenaientcette année-là leurs vacances ensembleavec leurs familles au Forte Village. Unsoir, ils se sont retrouvés sur la scèneinstallée au centre du village. Ils ont pro-posé pour le lendemain un cours derugby destiné aux enfants, et juste pours’amuser.

Un vacancier nommé Ed Rusling y adûment emmené les siens. Il a intensé-ment savouré le spectacle des jeunes Maxet Isabella apprenant les finesses du jeuauprès d’un ancien champion du monde(Greenwood) et, à la grande joie de sa fille,d’un quart de finaliste (Healey) de StrictlyCome Dancing [émission de télé-réalitéanglaise consacrée à la danse]. Rusling ademandé aux deux hommes s’ils avaientpensé à faire un métier à part entière del’enseignement sportif de haut niveau àdestination des enfants, dans le cadre devacances familiales. Deux jours plus tard,les statuts de leur association étaient rédi-gés. Une fois réglés les arrangements avecForte Village, l’entreprise Super SkillsTravel pouvait démarrer, avec à sa têteRusling, Greenwood et Healey.

A l’évidence, la viabilité du conceptrepose non seulement sur les noms et lepouvoir d’attraction des instructeurs,mais également sur leurs rapports per-sonnels avec les enfants, petits et grands(âgés de 5 à 16 ans). Greenwood et Healey,qui sont eux-mêmes respectivementpères de trois et quatre enfants, incarnentla formule idéale : à la fois drôles, parfoismême indulgents, mais sachant fairepreuve d’autorité. Ils ont cherché d’autresrecrues possédant les mêmes qualitéset le même prestige sur le plan sportif,et ont trouvé Jason Robinson et JasonLeonard. De plus, l’été prochain, MartinJohnson lui-même (ancien capitainede l’équipe d’Angleterre, champion dumonde et manager) viendra renforcerle corps enseignant pour le rugby.

Disponibles et pédagoguesL’un des grands attraits de ces séjoursSuper Skills Travel tient au fait que les“légendes” – comme on appelle les ins-tructeurs, sans modestie mais non sansraison – sont toujours présentes pour lesenfants comme pour les parents, à touteheure de la journée et avec le sourire. Lelundi de Pâques, en début de soirée, j’étaisinstallé au bar depuis une demi-heure,discutant avec Alec Stewart (“Appelez-moi Stewie”) de la performance desAnglais aux derniers tests-matchs. S’ilmourait d’envie de se trouver ailleurs, iln’en a rien montré. Nixon, Garaway etVaughan n’étaient pas moins disponibles.Quant à leurs méthodes d’enseignement,c’est ce qu’il y a de plus impressionnantchez eux. Les enfants étaient répartis en68

Les bonnes recettes

trois groupes, selon l’âge et les capacités,et il est clairement apparu d’emblée qu’ilsse trouvaient entre les meilleures mainsqui soient. Stewart s’occupait des plusâgés, dont mon fils Jake et son copainWill. Parmi les nombreux exercices qu’illeur a demandé de faire, il en est un quiconsistait à attraper et à lancer en fer-mant un œil, d’abord le gauche, ensuitele droit. Stewart expliquait commentSherylle Calder, une ancienne interna-tionale de hockey sud-africaine qui avaitimaginé un programme d’entraînementfondé sur la vision, Eye Think [L’œilpense], avait amélioré de 30 % la couver-ture du terrain par l’équipe d’Angleterrede cricket en renforçant les muscles ocu-laires des joueurs. L’exercice avec un œilfermé entraîne le cerveau sur le plan dela profondeur et du rythme. La méthodedonne également de bons résultats avecles enfants.

Tous les instructeurs appliquent etadaptent leur expérience personnelleacquise en équipe d’Angleterre. Garaway,le spécialiste de l’analyse qui avait été lementor de Kevin Pietersen [le capitainede l’équipe d’Angleterre] pendant quatreans et qui est actuellement entraîneur

de cricket à la Millfield School, décom-pose méthodiquement les techniquesà la batte et au lancer.

Une inspirationA la Cricket Academy, si le moral vient àflancher, le charismatique Nixon est làpour le remonter. Au début de chaquecours, il rassemble les enfants – là encore,comme en équipe d’Angleterre –, et il estmerveilleux de voir des jeunes de 13 anss’accroupir et se mêler sans rechignerà des petits de 7 ans.

Les surprises agréables ne manquentpas non plus pour les parents (du moinspour ceux qui assistent au spectacle, carcertains, inévitablement, considèrent lesleçons comme un service de baby-sitting).Je suis revenu de mon séjour la tête pleinede nouvelles idées pour tonifier le cricketque je joue dans le jardin avec mes fils. Jegarde également à l’esprit ce que m’a ditNixon alors que nous regardions un talen-tueux garçon de 10 ans se préparer à lan-cer la balle. “La seule chose qui les empêcherade s’améliorer, ce sont leurs parents ou leursinstructeurs, en les poussant trop ou en semontrant trop critiques.”

Brian Viner

Apogée du stage pour les rugbymen en herbe, une dernièreséance sur la mythiquepelouse deTwickenham.

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110 000 euros de dédommagement : telle est la somme que Lalit Modi, ex-président de l’IPL [la ligueprofessionnelle de cricketindienne] a dû verser à l’ancienjoueur de cricket néo-zélandaisChris Cairns après l’avoiraccusé de truquer des matchssur Twitter. Sévère ?

Sans doute un peu. Modi necomptait que soixante-cinqabonnés sur le réseau social à l’époque et l’hebdomadairebritannique New Statesmanestime que seules millepersonnes ont pu lire le tweetdiffamatoire, repris pendantquelques heures sur le comptedu site spécialisé Cricinfo.

Le 26 mars 2012, la Haute Courde justice de Londres a pourtanttranché. “De nos jours, rien n’empêche le poison de se répandre”, a déclaré le juge. Ce cas constitue une première dans l’histoire de la justice britannique. Le monde du cricket ne s’en est toujours pas remis.

Réseaux sociaux

Le prix de la renommée

livres

Soit 5 480 euros.C’est ce qu’il fautcompter pour une famille dequatre personnespour une semaine à la CricketAcademy. Et c’est le prix du séjour effectuépar le journaliste Brian Viner.

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Finances Les grands sportifsbrillent sur le terrain, mais,lorsqu’il s’agit de gérer la fortune qu’ils ont amassée,ils perdent leurs moyens.

The Washington Post Washington

W arren Sapp, l’anciennegloire du football amé-ricain, s’est déclaré enfaillite. Et le plus frap-pant dans sa déclara-

tion d’insolvabilité, c’est la mention de lavaste demeure qu’il possède en Floride(près de 1 700 mètres carrés, d’après lecadastre) ou de sa collection de chaus-sures de sport de luxe (240 paires, dontbon nombre encore dans leur boîte). Mais,avec près de 6,5 millions de dollars [5 mil-lions d’euros] d’actifs et 6,7  millions[5,2 millions d’euros] de passif, Sapp esteffectivement insolvable.

Voilà encore un exemple des nom-breux sportifs et artistes qui se retrouventsur la paille après avoir gagné plus d’ar-gent que la plupart des gens n’en verrontau cours de leur vie. Sapp, qui travaillemaintenant comme commentateur spor-tif pour la chaîne NFL Network, déclaraitprès de 116 000 dollars [90 000 euros] desalaire moyen – par mois, s’entend.

Je n’ai pas à vous dire quelle leçontirer de l’affaire. Mais je vais le faire quandmême : lorsqu’on vit au-dessus de sesmoyens, on peut se retrouver ruiné mêmesi on touche des millions. Mais il y a aussiune morale à l’histoire : on peut égale-ment se ruiner en essayant de devenirriche (ou de s’enrichir encore davantage)en se lançant dans des placements risquésdont on ne sait pas grand-chose, voirerien du tout. J’appelle cela le syndromede l’entrepreneur. C’est une maladie quifait croire aux Américains que, s’ils nepossèdent pas leur propre affaire, ils n’ontpas réussi leur vie.

Des investissements risquésA l’époque où je couvrais les tribunauxspécialisés du Maryland, je voyais défilerles cas de personnes dont la débâclefinancière avait été provoquée par desopérations commerciales mal avisées.En 1991, j’ai révélé la mise en faillite deJohnny Unitas, un ancien quarterback[poste clé de l’attaque] de football amé-ricain qui avait joué pour les Colts deBaltimore et était entré dans le Hall of

Fame, le panthéon du sport américain.Cela était essentiellement dû à un mau-vais investissement : Unitas et ses asso-ciés étaient en défaut de paiement surprès de 4 millions de dollars [3,1 millionsd’euros] d’emprunts contractés pourl’acquisition d’une société productricede cartes de circuits imprimés. Unitass’était porté garant de ces crédits.

Quant à Sapp, c’est l’immobilier quia provoqué sa perte. Il voulait, a-t-ilconfié au Tampa Bay Times, construiredes logements destinés aux personnesà revenus modestes en Floride. Le plusintéressant dans son cas, c’est qu’ilaurait évité la déroute financière s’il nes’était pas endetté avec ses affaires : ildispose d’une épargne confortable poursa retraite, à laquelle ses créanciers nepeuvent pas toucher.

Durant sa carrière de joueur, il auraitamassé 60 millions de dollars [46,5 mil-lions d’euros]. Même soustraction faitedes impôts, des commissions d’agents etde frais divers, il n’avait pas à investir uncent ni à disposer d’autres revenus pourse mettre à l’abri du besoin pour le restantde ses jours.

Pendant quelques années, j’ai donnédes conférences sur la responsabilitéfinancière à de jeunes recrues de laNational Football League [Ligue natio-nale de football]. En regardant ces jeunesgens, je savais que nombre d’entre euxfiniraient sans le sou, à force de tropdépenser. Et que beaucoup dilapideraientleur fortune en investissant inconsidé-rément dans des restaurants (l’une des

activités les plus difficiles qui soient), desconcessions automobiles, des labels demusique ou des projets immobiliers…, serendant compte trop tard qu’ils étaientnettement plus habiles sur un terrain desport que dans les affaires.

Pourquoi les sportifs ne se conten-tent-ils pas de rendements corrects enfaisant des placements à long terme afinde se constituer un portefeuille diversi-fié ? Sans doute ce genre d’investissementn’est-il pas assez excitant.

Faillite en cinq ansIl y a quelques années, Sports Illustratedpubliait un article édifiant sur les raisonspour lesquelles les sportifs profession-nels se retrouvent si souvent ruinés.Selon les calculs du magazine, 78 % desanciens joueurs de la NFL deviennentinsolvables ou connaissent des difficultésfinancières deux ans après avoir pris leurretraite. Après cinq ans, 60 % d’entre euxsont sur la paille.

En 2010, l’ancien quart-arrière dela NFL Mark Brunell, qui avait joué danscinq équipes, s’est mis sous la protectiondu chapitre 11 de la loi sur les faillites, enpartie à cause d’investissements immo-biliers malheureux auxquels il avait, luiaussi, apporté sa caution personnelle.Quant à Deuce McAllister, ancien runningback [coureur arrière] des New OrleansSaints, c’était à cause de dettes contrac-tées pour une concession automobile.

Quand j’ai commencé comme jour-naliste, je suivais les petites entreprises.Beaucoup étaient prospères ; mais leséchecs étaient encore plus nombreux.Un grand nombre des chefs d’entrepriseque j’ai alors interviewés étaient abattus.Ils avaient perdu leur maison, ne pou-vaient plus se rémunérer ou devaienttravailler deux fois plus qu’à l’époqueoù ils étaient salariés.

Certes, vous pouvez faire fortunedans les affaires ou accroître votre patri-moine en investissant dans une entre-prise. Mais il ne faut pas que le statutd’entrepreneur vous monte à la tête aupoint de ne pas apprendre le métier etde vous dispenser d’un bon modèle d’en-treprise, de vous lancer dans une activitéoù vous n’avez guère d’expérience, detomber dans le surendettement ou, àl’image de Sapp et d’autres, de mettretrop de ressources personnelles sur latable. Bref, attention à ne pas succomberau syndrome de l’entrepreneuriat.

Michelle Singletary

Zéro pointé en gestion

� Dessin de Reumann,Suisse.

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Inde Moneyball est le livre de chevet des dirigeants de l’équipe de cricket des Rajasthan Royals. Cet ouvrage décrit commentutiliser les statistiques pour recruter des joueursdoués… au meilleur prix !

The Indian Express (extraits)Bombay

L orsque Michael Lewis publieMoneyballen 2003 [aux éditionsW. W. Norton & Company, nontraduit en français], il n’a pasla moindre idée de l’impact

qu’il aura. Son livre raconte l’histoire d’ungroupe de geeks de la statistique quia révolutionné la ligue majeure de base-ball aux Etats-Unis. Des années plustard, Hollywood comme Bollywood sesont emparés de l’ouvrage [le film LeStratège, sorti en 2011, avec Brad Pitt dansle rôle-titre, en est inspiré].

L’actrice Shilpa Shetty, qui détientune participation dans l’équipe indiennedes Rajasthan Royals, a récemment plai-santé : “J’aimerais croire que Moneyballest inspiré de notre équipe.” L’OaklandAs, l’équipe de base-ball décrite dansMoneyball – une bande de clampins dontpersonne ne veut –, est parvenue à vaincrecoup sur coup des franchises [clubs] dotéesde budgets nettement plus élevés. Il setrouve qu’en 2008 les modestes joueursdes Rajasthan Royals ont tenu en échec

des stars cotées à prix d’or. Mais la res-semblance s’arrête là.

Ce que Moneyball reproche fonda-mentalement au monde du base-ball, c’estde se fier uniquement au feeling de déni-cheurs et d’entraîneurs pour identifier lestalents. Mais à l’époque de sa publication,l’Oakland As faisait figure d’exception :sous la houlette du manager Billy Beane,l’équipe sélectionnait ses joueurs en sefondant sur une analyse statistique com-plexe, nommée sabermétrie.

Boudant les joueurs burinés quiretiennent l’attention des dénicheurs,Oakland choisissait les siens sur la basede statistiques inhabituelles – comme lamoyenne de présence sur les buts et lamoyenne de puissance. Et peu importequ’ils aient été lents ou grassouillets !

Moneyball a véritablement secoué lemonde du sport. En football, du jour aulendemain, on s’est arraché les milieuxde terrain affichant un bon taux de réus-site de passes. Stefan Szymanski et SimonKuper ont ainsi publié Soccernomics[“Economie du football”, non traduit],décrit comme le Moneyball du ballon rond.Quant à Damien Comolli, ancien direc-teur sportif de Liverpool, il est connu pourappliquer les principes de Soccernomicslorsqu’il achète et vend des joueurs.

Les statistiques ont depuis toujoursleur place dans le cricket. Mais elles selimitent souvent aux chiffres individuels,qui ne disent finalement rien de plusque “Thilan Samaraweera a une meilleuremoyenne à la batte que Viv Richards.”Alors, qui se sert des statistiques deMoneyball ?

S. Ramakrishnan, plus connu sousle diminutif de Ramky, a passé plus dedix ans aux côtés de l’équipe indienne decricket ; à l’origine simple analyste vidéo,il s’est rapidement aperçu que ses donnéespouvaient être utilisées dans d’autresdomaines. “Tout ce que nous faisons reposesur le Moneyball, reconnaît Ramky. Cetteexpression n’existait pas lorsque j’ai com-mencé, mais, depuis douze ans, nous regar-dons les statistiques différemment.”

Sports Mechanics, la société spécia-lisée en analyse qu’a fondée Ramky, tra-vaille avec presque toutes les équipes del’Indian Premier League (IPL). “Les vain-queurs des quatre saisons [écoulées depuisle lancement de l’IPL, en 2008] étaient nosclients”, s’enflamme Ramky. Il confie queles experts observent les performancesdes joueurs avec un regard nettementdifférent de celui des spectateurs. “Lesperformances doivent être associées à l’in-térêt de l’équipe, explique-t-il. Imaginezun lanceur à qui l’on demande de lancerla balle d’un piquet à un autre, de faire deslancers sans run, et un autre qui ne le faitpas et touche un tas de guichets. Si on lesjuge uniquement au nombre de guichets,on pénalise le premier, qui fait preuve d’es-prit d’équipe.”

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Chiffres à l’appui !

Les bonnes recettes

Base-ballSabermétrie Terme forgé à partir de l’acronyme SABR(Society for AmericanBaseball Research). La sabermétrie proposeune méthode d’analyse du base-ball reposant surdes mesures objectives.Quelques critèressabermétriques desélection des joueurs :• la moyenne de présencesur les buts (fréquence à laquelle un joueur atteint

une base, quelle qu’elle soit,par rapport au nombre de fois où il batte) ;• la moyenne de puissance(rapport entre le nombre de bases atteintes par un joueur et le nombrede présences à la batte).

CricketRun Au cricket, sportapparenté au base-ball,deux batteurs d’une mêmeéquipe se placent aux extrémités du pitch

(zone au centre du terrain)pour frapper la balle à l’aidede la batte (“batter”). Le run est réussi s’ilsparviennent à échangerleurs places avant que l’équipe adverse n’aitrattrapé leurs balles.Guichet Structure en boiscomposée de trois piquetssurmontés de deuxtémoins, que l’équipeadverse cherche à renverser pour éliminerles batteurs.

Moyenne à la batteMesure de performance d’un joueur, qui peut êtrecalculée sur la durée d’une manche commed’une carrière. Il s’agit du rapport entre le nombrede runs réussis et lenombre de fois où le joueura été éliminé.Cricket Twenty20 Type de cricket qui limitela partie à quatre heures.Autrement, une partie peutdurer plusieurs jours.

Glossaire

Bienvenue dans le monde de la batte

Le feeling joue un rôledémesuré dans la sélection des joueurs

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Mais les équipes de l’Indian PremierLeague utilisent-elles ce type de donnéesdans la présaison, lorsqu’elles dressent laliste des joueurs qu’elles veulent acheter ?“La plupart des équipes y jettent un œil. C’estun business, et il faut placer son argent intel-ligemment, répond Ramky. Nous faisonsdes suggestions aux franchises avant lesenchères, après cela dépend d’elles. Elles seservent de nos données, mais il y a une bonnepart de subjectivité aussi.” A en juger parles millions déboursés pour RavindraJadeja et Vinay Kumar – de bons joueurs,certes, mais ils sont loin d’avoir fait leurspreuves au niveau international –, le fee-ling semble effectivement jouer un rôledémesuré.

L’équipe des Rajasthan Royals se veutdifférente, elle se réclame de la stratégieMoneyball. “Nous l’avons beaucoup utiliséepour choisir nos joueurs, bien avant la sortiedu film [en 2011]”, reconnaît Raghu Iyer,le directeur général de l’équipe. “Nousavions tous lu le livre.”

Les Rajasthan se targuent d’avoirbattu en brèche la tradition à plus d’untitre. Warne avait déjà 38 ans lorsqu’il estdevenu pour la première fois capitainede l’équipe, et ce n’est que le premier dela brochette de trentenaires dont elle s’estdepuis attaché les services. Parmi lesjoueurs recrutés cette saison, signalonsBrad Hodge, 37 ans, et Brad Hogg, 41 ans.

“Ils ont bien joué pendant le Big Bash [com-pétition de cricket en Australie]. Hodge a étéaussi très bon pendant la Bangladesh PremierLeague, et il est en excellente forme, préciseRaghu Iyer. L’Indian Premier League a casséle mythe selon lequel le cricket T20 était unsport de jeunes.”

Dans Soccernomics, Szymanski etKuper dressent une liste de règles pourfaire de bons transferts, parmi lesquelles :

“Evitez les stars de tournois internationauxrécents” – en référence à Kléberson, cequasi-inconnu transféré à ManchesterUnited après avoir remporté la Coupe dumonde 2002 avec l’équipe du Brésil. Uneautre règle prescrit de se méfier de cer-taines nationalités : les joueurs hollandaiset brésiliens, par exemple, sont suréva-lués, de même que les Australiens, fortsde leurs récentes victoires et de la répu-tation de leurs matchs nationaux. Lesattaquants sont eux aussi souvent sur-estimés, constate Soccernomics. Pensezà latan Ibrahimovic et Fernando Torres !Dans le cricket, il y a aussi de ces suren-chères, et là ce sont plutôt les lanceurs

rapides jouant pour l’Inde [qui sont sur-évalués]. Ainsi, Ishant Sharma, IrfanPathan et R. P. Singh sont trois des joueursles plus chers de 2008.

L’équipe des Rajasthan a choisi la stra-tégie inverse. En 2012, elle fut la seule àfaire une offre pour Sreesanth, dont lesblessures et la vie en dents de scie onttenu les autres équipes à distance ; elle l’aobtenu pour le prix de base. Résultat : ellea décroché un lanceur aux qualités com-parables à celles de Vinay, mais deux foismoins cher. Ces choix vont dans le sensd’une autre règle de Soccernomics : “Achetezdes joueurs qui ont des problèmes personnels,puis aidez-les à les résoudre.” En général,les joueurs “à problèmes” attirent moinsd’offres et reviennent moins cher.

Dans le livre Moneyball, ce n’est quelorsqu’Oakland a affiché ses résultats queles autres équipes se sont aperçues de laprésence des statisticiens. Or, aujourd’hui,la sabermétrie s’est infiltrée dans presquetoutes les équipes de la ligue majeure, etle classement reflète une fois encore lesdéséquilibres financiers du base-ball. Avecle plafond qui limite les dépenses de l’IPL,les bonnes stratégies d’achat peuvent faireune sérieuse différence. L’IPL doit encoretrouver son Oakland, mais, lorsque ce serale cas, cette équipe aura de beaux joursdevant elle.

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Le joueur de cricket UmeshYadav s’étire, lors d’unentraînementprès de NewDelhi.

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Astuce : “Achetez des joueurs qui ont desproblèmes personnels”

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A 39 ans, ce joueur continuede faire vibrer toute l’Inde à coups de records plus fousles uns que les autres.Richissime, il a fait entrer le sport préféré des Indiensdans le monde du business.

Courrier international Paris

I l y a de ces pères qui n’en démor-dent pas : ils donneront à leurenfant un prénom de star. Et pasn’importe lequel : Sachin ! Il y a ceuxqui, tôt le matin, exécutent la prière

matinale, non pas devant l’effigie desdieux Krishna et Ganesh, mais devant laphoto du joueur, sa batte de cricket à lamain. Et il y a ceux, très riches, qui achè-tent pour des millions de roupies dixcopies de l’édition de luxe de sa biogra-phie, toutes signées du sang du sportif,comme le raconte le quotidien écono-mique Mint. Il y a encore ces “pèlerins”qui se rendent chaque jour devant sa nou-velle propriété, dans le quartier huppé deBandra, à Bombay, espérant l’apercevoir.Au pays du cricket, Sachin Tendulkar,39 ans, est une légende vivante. “Le cricketest ma religion et Sachin est mon dieu” peut-on lire sur les tee-shirts, les posters, lesautocollants des pare-brise. “L’Inde adoretransformer des gens en dieux. Dans le mondedu cricket, Sachin est l’équivalent de Gandhi”,ose le site spécialisé Cricinfo.

Imaginez-vous alors l’euphorie detout un peuple lorsque, ce 16 mars 2012,il a atteint le record que l’on attendaitdepuis un an : c’était la centième fois qu’ilatteignait 100 runs (100 courses, c’est-à-dire 100 points marqués en continu) danssa carrière. Un chiffre qui a enthousiasmétoute la presse indienne. Un record mon-dial, unique dans l’histoire du cricket.L’Inde adore les statistiques : 100 × 100,c’était parfait pour un demi-dieu.“Mathemagic”, a titré le quotidien IndianExpress au lendemain du record. Etqu’importe si l’Inde a finalement perdule match face au Bangladesh !

S’il était déjà, avant ce nouveau record,considéré comme le meilleur batteurde cricket de tous les temps, Tendulkara prouvé qu’il était plus que jamais ausommet de son art, alors même qu’ilapproche la quarantaine. En tant quecapitaine, il avait déjà mené son équipe

à la gloire en remportant en avril 2011la Coupe du monde de cricket. Ce jour-là, les livreurs se sont arrêtés de livrer,les routes se sont vidées, les télés étaienttoutes allumées, se rappelle le mensuelde New Delhi The Caravan. “Ceux quidécident du calendrier électoral prennent encompte le planning de Sachin : les hommespolitiques savent que les gens n’iront pasvoter si l’élection tombe un jour de match”,précise Cricinfo.

Sachin, plutôt petit pour un joueurde cricket (1,65  m), est né en  1973 àBombay. En 1988, il marque son premiercentury (100 runs) et devient le plus jeunejoueur à atteindre ce chiffre lors d’unmatch de ce niveau. Il a 15 ans. Un an plustard, il entre dans l’équipe indienne decricket. Il en devient le capitaine enaoût 1996. Depuis, il a explosé presque

tous les records mondiaux. Cricinfo a sonexplication : “Sa façon de batter est baséesur les plus purs des principes : équilibre par-fait, économie de mouvement, précision dansl’exécution du coup, et une qualité qui n’ap-partient qu’aux génies : l’anticipation.”

Une réussite sans fausse note qui n’apas manqué de donner des idées auxpublicitaires : Sachin est vite devenu lacoqueluche des sponsors. En 1995, il signeun contrat de 315 millions de roupies(4,5 millions d’euros) sur cinq ans avecl’entreprise de télécoms WorldTel parl’entremise de Mark Mascarenhas, quidevient son agent et en fait rapidementle joueur de cricket le plus riche au monde.“Ce qui était surprenant dans le contratde 1995 c’est que jusque-là les entreprises évi-taient de faire des promesses sans condition.Mais là où d’autres y voyaient un risque,Mascarenhas vit surtout l’athlète le plus ban-kable de toute l’Inde”, raconte The Caravan.La marque Tendulkar est née.

Aujourd’hui, Sachin assure la promo-tion de 17 marques différentes, d’Adidasà Toshiba en passant par Aviva LifeInsurance, dont il tire 8 millions de dollarspar an (6,3 millions d’euros), soit 80 % de

ses revenus. Il n’y a que Shah Rukh Khan,le roi de Bollywood, qui ait plus decontrats publicitaires en Inde.

Sachin a toutefois ses faiblesses.En 2003, Fiat lui offre une Ferrari 360Modena sans qu’il ait à s’acquitter dedroits de douane. Les fans sont persuadésqu’il finira par les payer, mais l’opinionpublique s’offusque du privilège. “La pirecontroverse de toute sa carrière”, écrit TheIndian Express. C’est finalement Fiat quiréglera la note. Mais le mal est fait. Pourle quotidien Mint, “il n’est qu’un opportu-niste fortuné […]. Il a ensuite vendu lafameuse Ferrari au prix de 212 000 euros,selon The Telegraph de Calcutta.”

De petits arrangements qui en rap-pellent un autre – lorsque, en avril 1999,juste avant la Coupe du monde, la voiturede Tendulkar en emboutit une autre, pro-voquant un accident. Aussitôt, Thackeraytéléphone au tabloïd Mid Day et faitpression pour que rien ne soit écrit là-dessus. “C’était surprenant étant donnéque personne n’avait été sérieusement blessédans l’accident. Thackeray s’est justifié enprétextant que cela pourrait écorner ‘l’in-térêt national’”, commente Mint, quis’alarme que l’on puisse un jour décorerSachin de la Bharat Ratna, la plus hautedécoration récompensant les citoyensindiens pour services rendus à la nation.Les règles d’attribution ont en effet étéassouplies pour permettre à Sachin d’ob-tenir cet honneur. Un peu comme s’il fal-lait commencer à penser à décorer levétéran, alors qu’il s’approche douce-ment de la retraite.

D’ailleurs, maintenant qu’il a atteintle record suprême, son centième century,va-t-il continuer à jouer ? C’est la questionque pose le Time américain en lui consa-crant sa une en mai dernier. Va-t-il se recy-cler, comme c’est la tradition en Inde ? Le26 avril, il a d’ailleurs été nommé au RajyaSabha, la Chambre haute du Parlementindien. Le début d’une carrière politique ?“Un milliard d’Indiens oublie ses problèmes,la pauvreté, la corruption, l’absence de placede parkings. au moment où Sachin arrive àl’écran. Comment pouvez-vous souhaiterqu’il arrête de jouer ? Nous voulons qu’il jouejusqu’à ses 58 ans, l’âge de la retraite des spor-tifs indiens !” s’écrie l’un de ses admirateursdans le quotidien DNA. Ça tombe bien,aux dernières nouvelles, il n’a pas encorel’intention de lâcher sa batte. Ouf.

Naïké Desquesnes et Raoul Roy

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Les bonnes recettes

Sachin Tendulkar

Un dieu du cricket et des affaires

Biographie

24 avril 1973Naissance à Bombay

1988Il marque sonpremier Century(100 runs) et intègre un anplus tard l’équipenationale.

1995Il signe un contratde 315 millions de roupies (4,5 millionsd’euros) avecl’entreprise de télécomsWorldTel. Le débutd’un florissantbusiness.

2 avril 2011Remporte avecl’Inde la Coupe dumonde de cricket.

16 mars 2012“100 × 100”. Il atteint pour la centième fois 100 runs.

21 mai 2012Il est en une de Time.

�Dessin de Mikel Casal (Madrid) pour Courrierinternational.

Certains exécutent la prière matinaledevant la photo du joueur, sa batte de cricket à la main

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Etats-Unis Retransmissionstélévisées obligent, les facsconsacrent d’énormes budgetsà leurs équipes de football etde basket. Résultat : le sportoccupe une place démesuréedans la vie des étudiants.

The New York Times (extraits)New York

C ’est le 10 novembre 2007que Josh Samuels a décidéde devenir un Buckeye [sur-nom des supporters du clubomnisports de l’université

d’Etat de l’Ohio (Ohio State) et, par exten-sion, des étudiants de cet établissement].Il se souvient encore des frissons qui l’ontparcouru ce jour-là, lorsque la fanfare afait son entrée sur le terrain avant unmatch de football américain contrel’équipe de l’université de l’Illinois. “Je mesuis tourné vers mon frère et je lui ai dit : ‘C’estici que je veux faire mes études’”, raconte

cet étudiant de troisième année. TimCollins, président de Block O, le club desupporters – qui compte 2 500 membres –,le comprend parfaitement. “Je dois recon-naître que, si je me suis inscrit à Ohio State,c’est à 60 % pour le sport. Et quand j’en parleautour de moi, beaucoup de mes camaradesme disent que cela a aussi beaucoup pesé surleur choix.”

Ohio State s’enorgueillit d’avoir formédix-sept membres de l’Académie améri-caine des arts et des sciences, trois PrixNobel, huit Prix Pulitzer, 35 boursiersGuggenheim et un Prix MacArthur. Maisc’est le sport qui y règne en maître.“Personne ne dit : ‘Ah oui ! Ohio State, c’estcette formidable faculté de physique.’ Non,c’est du football qu’on parle”, soupireGordon Aubrecht, professeur de physique.

En janvier, l’université a engagé l’entraîneur de football américain UrbanMeyer. Son salaire atteint 4 millions dedollars par an, primes non comprises, etil dispose d’un jet privé. En revanche, lebudget de M. Aubrecht ne lui permetmême pas d’assister à des conférences.

“D’un point de vue économique”, ce derniercomprend pourquoi M.  Meyer a étéembauché, mais, selon lui, la rémunéra-tion de l’entraîneur montre bien qu’“onmarche sur la tête”. Pour le meilleur oupour le pire, le sport de haut niveau estdevenu la vitrine de l’université, l’imagede marque vendue par les bureaux d’ad-mission et un outil de relations publiques.

L’année 2011 n’a toutefois pas étébrillante pour le sport universitaire.Les poursuites pour agressions sexuellesengagées contre l’ancien entraîneuradjoint de l’équipe de football de l’univer-sité d’Etat de Pennsylvanie [JerrySandusky] ont coûté leurs postes aucélèbre entraîneur principal de l’équipe[Joe Paterno, décédé en janvier dernier]et au président de l’université. Peu après,un entraîneur adjoint de basket-ball à l’uni-versité de Syracuse a été accusé de viol. Ily a eu aussi le scandale des rémunérationsillégales des joueurs d’Ohio State et,semble-t-il, de l’université de Miami. “Onen est arrivé au point où le sport interuniver-sitaire de haut niveau sape l’intégrité de nos

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Les bonnes recettes

Des universités prises en otages

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Le stade de football de Colombus(Ohio) accueilleles fans des OhioStates Buckeyes,venus soutenirleur équipe lorsd’une rencontreavec les ColoradoBuffaloes.

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institutions et détourne celles-ci, ainsi que lesprésidents d’université, de leur véritable voca-tion”, dénonce William Kirwan, respon-sable du réseau des universités duMaryland et codirecteur de la commissionKnight Intercollegiate Athletics [chargéede s’assurer que le sport est pratiqué demanière conforme à la mission éducativedes universités].

L’image des universités a été effec -tivement écornée. Selon une enquêtepubliée en novembre 2011 par WidmeyerCommunications, 83 % des personnesinterrogées jugent que c’est à cause dela “culture de l’argent” dans le sport uni-versitaire que les autorités de l’universitéd’Etat de Pennsylvanie (Penn State)n’ont pas dénoncé un cas présumé depédophilie aux autorités. Par ailleurs,40 % d’entre elles dissuaderaient leurenfant de choisir une institution dontl’équipe évolue en division  I [de laNational Collegiate Athletic Association,la NCAA, la plus grande organisationsportive universitaire au monde] et qui“accorde une grande importance au sport”.Enfin, 72 % reprochent aux sports de divi-sion I d’exercer “une trop grande influencesur la vie étudiante”.

“Le sport est devenu tellement importantque c’est désormais l’un des seuls moyens queconnaisse le monde étudiant pour exister en

tant que tel”, s’inquiète Allen Sack, prési-dent du Drake Group, réseau d’ensei-gnants qui défend l’intégrité académiqueau sein du sport universitaire. “En Chineet ailleurs dans le monde, il n’y a pas de stadesgigantesques au milieu des campus. La grandepriorité, c’est l’éducation. Alors qu’aux Etats-Unis nous jouons au football.”

Lors de la formation, en 1954, de l’IvyLeague [qui regroupe huit grandes univer-sités du nord-est du pays], les présidentsde ces institutions étaient conscients dela tournure que prenait le football améri-cain. Ils ont alors conclu un pacte visant à

garantir que les joueurs “pratiqueraientce sport dans le cadre d’une compétitionrécréative, et non comme des professionnelsse produisant dans des spectacles publics”.Aujourd’hui, la pratique au sein de la divi-sion I de football n’a rien de récréatif,souligne M. Sack, qui a joué pour l’uni-versité Notre Dame [Indiana] dans lesannées 1960. Depuis, les services des sportsont vu exploser leur budget et ressemblentdavantage à des entités indépendantes qu’à

des structures universitaires. C’est ce“truc commercial” au cœur de l’universitépour reprendre l’expression de CharlesClotfelter, professeur de politiquepublique à l’université Duke [Caroline duNord] que certains rendent responsabledu dérapage du système. De fait, les bud-gets consacrés aux sports les plus popu-laires ont augmenté deux ou trois foisplus que ceux des disciplines universi-taires. Le football et le basket de division Irapportent plusieurs millions de dollarspar an grâce aux ventes de billets, auxdonations des mécènes et aux contratsavec les chaînes de télévision par câble.Pour la Penn State University, le footballest une affaire très lucrative. D’après leministère de l’Education, l’équipe a affi-ché, pour l’année 2010, près de 73 millionsde dollars de recettes pour 19,5 millionsde dollars de dépenses, ce qui a permisde financer 29  disciplines sportives.Néanmoins, seuls la moitié des pro-grammes sportifs de haut niveau pré-sentent des comptes à l’équilibre. Biend’autres n’arrivent à couvrir leursdépenses que grâce aux frais de scolaritéou au budget général de l’université.

Par ailleurs, le fossé entre les disci-plines les plus prestigieuses et les autresne cesse de se creuser, les universitésrivalisant de moyens pour attirer lesJO

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Les supportersdes tribunesétudiantes sontpressés contre les barrières à Madison(Wisconsin).

“Le sport détourneles universités deleur véritable vocation”

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Entraîneurs de football Athlètes

111 620

Etudiants des

filières académiques

18 406

Présidents d’université Professeurs titulaires

Augmentation des salaires (entre 1985 et 2010)

Dépense par étudiant des universités de la Big Ten Conference (en dollars, en 2010)

Deux poids, deux mesures

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meilleurs entraîneurs et pour construireles installations les plus luxueuses dansl’espoir de séduire les meilleurs sportifset de recueillir les dons d’anciens élèves.

Mais le sport n’exige pas seulementtoujours plus d’argent. Il requiert égale-ment davantage d’attention de la part des supporters. Glen Waddell, maître deconférences en sciences économiques àl’université de l’Oregon, a planché sur laquestion. Dans une étude publiée en jan-vier, des chercheurs de cette universitéont comparé les notes de 29 700 étudiantsentre 1999 et 2007 à la performance del’équipe de football locale, les FightingDucks, vainqueurs du prestigieux matchuniversitaire Rose Bowl [le 2 janvier der-nier à Pasadena, en Californie]. “Lorsquel’équipe de football gagne, les études enpâtissent”, résume M.  Waddell. Pourtrois matchs gagnants, la moyenne desnotes pour les hommes baisse de 0,02,

accroissant l’écart entre les sexes de 9 %.Car les notes des femmes, elles, ne dimi-nuent pas. Selon une autre étude, les étu-diants ont consacré moins de temps auxétudes, consommé plus d’alcool et faitdavantage la fête. Tout en reconnaissantla nécessité d’approfondir ces recherches,M. Waddell estime que ces premiers résul-tats devraient faire réfléchir les respon-sables de l’université. “On ne peut plusfeindre d’ignorer le revers de la médaille.”

Pour Orin Starn, un professeur d’an-thropologie du sport qui critique depuislongtemps la participation de Duke auxsports de division I, le basket exerce une“pression anti-intellectuelle” et accaparetrop de temps et d’attention. Mais, en tantqu’anthropologue, il comprend pourquoi.“Le sport de haut niveau est devenu une reli-gion tribale moderne pour les étudiants”,explique-t-il. Une religion qui a ses sym-boles (le logo de l’équipe), son grandprêtre (l’entraîneur) et ses rituels (leschants et les visages peinturlurés). “Cettegénération adore le cérémonial et la tradition.Pour être branché, il faut appartenir à ungroupe, être supporter d’une équipe.” De plus,“ces gamins ont grandi dans l’idée que le sportest une composante vraiment importantede la société américaine”.

La télévision nourrit cette popularité.En dix ans, le nombre de matchs de foot-ball et de basket retransmis sur la chaînesportive ESPN est passé de 491 à 1 320. Etce chiffre ne comprend pas les matchs dif-fusés sur les réseaux concurrents, commeBig 10 Network, Fox, CBS and Turner,

Versus et NBC. De grands matchs sontprogrammés en semaine, ce qui se traduitpar une invasion des campus par leséquipes de télévision. “Comment pouvez-vous avoir un match de football un mercredisoir sans fermer l’université pendant un jourou deux ?” demande M. Sack, du DrakeGroup, avec une pointe d’ironie. De fait,au cours du semestre dernier, l’universitéde Central Florida a annulé les cours del’après-midi avant le match, retransmis àla télévision, contre l’université de Tulsa.L’université d’Etat du Mississippi a donnéun jour de congé aux étudiants avant ladiffusion, un jeudi soir, d’un match defootball contre l’université d’Etat de laLouisiane. La décision a d’ailleurs provo-qué une querelle sur Internet entre lessupporters et un blogueur qui suggéraitaux parents de réclamer le rembourse-ment des frais de scolarité.

Nombreux sont ceux qui doutent quel’on puisse revenir en arrière ; les pressionsextérieures et l’appât du gain sont tropforts. “Le sport suscite un intérêt démesuré,

insatiable, et le sport universitaire en fait par-tie”, estime Kevin White, directeur dessports à l’université Duke. Certaines déci-sions relèvent toutefois des universités.Malgré l’accession de Duke à l’élite du bas-ket-ball, le Cameron Indoor Stadium – qui,avec ses 9 300 places, reste l’une des pluspetites salles pour une équipe de ceniveau – donne toujours plusieurs milliersde ses meilleurs sièges aux étudiants.Ailleurs, les places les plus proches du parquet et les loges de luxe sont souventréservées aux mécènes. Mais ces dernierspeuvent avoir des exigences et influencerla manière dont une équipe s’intègre dansl’université. “Nous pourrions aisément dou-bler la capacité de notre salle de basket tout encontinuant à jouer à guichets fermés”, assureJames Coleman, un professeur de droitqui préside le conseil sportif de l’université.“Mais cela n’arrivera jamais. Car cela signi-fierait que Duke a basculé du mauvais côté.”

Laura Pappano

Paru dans CI n° 1116, du 22 mars 2012

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Les bonnes recettes

A l’université de Floride, mieux vaut préférer les ballons de basket aux ordinateurs. Le 22 avril 2012, l’établissementa annoncé son intention de supprimer sa filièreinformatique. Le but :économiser 1,4 million dedollars. Dans le même temps,le budget annuel alloué au sportpassait de 95 à 97,7 millions de dollars. Même si les budgetsde l’université et de sa sectionsportive sont indépendants, la nouvelle a suscitél’indignation sur le campus de Gainesville, dans le nord de l’Etat. Après plusieurs jours de négociations, les professeurs,

soutenus par leurs étudiants,ont trouvé un compromis avecla direction de l’université : la coupe budgétaire va êtrepartagée entre chaque filière dudépartement d’ingénierie, pourgarantir ainsi la survie de la filière informatique. Pour le magazine américain The Atlantic, le choix del’université est pragmatique : le sport rapporte bien plus quecertaines filières académiques.Les “Gators” (nom donné aux différentes équipes de l’université de Floride) ontreversé 61 millions de dollars à l’université depuis 1990.L’année dernière, leur

contribution au budget de l’établissement étaitestimée à plus de 6 millions de dollars. Cette année,l’université est confrontée à une coupe budgétaire de 38 millions de dollars. De son côté, le départementdes sports a réussi à générer36 millions de dollars de donations privées pour son propre compte. Le journals’interroge : “Peut-être qu’entemps de crise le départementdes sports et ses donateursdevraient faire plus pour la sauvegarde des programmesacadémiques de l’université.”Le débat reste ouvert.

Polémique

La révolte des étudiants en informatique

“C’est une religion tribale moderne pour les étudiants”

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Venezuela Passionné de sport, Hugo Chávez a largement contribué à la promotion de ce secteur.Et étendu le contrôle del’Etat par la même occasion.

The Economist LondresDe Caracas

L e président vénézuélien étaitun grand amateur de base-ballbien avant de se poser enchampion du socialisme. Danssa jeunesse, il avait pour idole

Néstor Isaías Chávez, un joueur vénézué-lien décédé à 21 ans dans un accidentd’avion. Et lorsque Hugo Chávez s’estengagé dans l’armée, c’était pour jouerdans la ligue de base-ball, comme lanceurgaucher. Devenu président, en 1999, il acopié son modèle en politique, le CubainFidel Castro, allouant d’importants fondspublics au sport, considéré comme unmoyen de renforcer le prestige du pays.

Le gouvernement a ainsi déboursé800 millions de dollars [625 millions d’eu-ros] pour neuf stades à l’occasion de laCopa América et mis en place un minis-tère des Sports. Il a lancé la construction

de plus de 2 000 nouvelles installationssportives, et octroyé des bourses d’étudeset des prêts immobiliers aux sportifs. Parailleurs, il a entrepris de promouvoir lessports des tribus indigènes, tels que lachasse au capybara (un gros rongeur) avecdes flèches à la pointe empoisonnée, quel’on tire en soufflant dans un tube. Quantaux entreprises, elles sont tenues d’ac-corder à leur personnel trente minutesd’exercice physique, trois fois par semaine.Une loi, adoptée en 2011, oblige les grossessociétés à verser 1 % de leurs bénéfices àun fonds officiel pour le sport.

Ces mesures ont porté leurs fruits :l’équipe nationale de football, qui a long-temps fait de la figuration, se défenddésormais fort bien, et le pays a décrochébeaucoup plus de médailles lors des deuxdernières éditions des Jeux panaméricainsque par le passé.

Chávez en tire également profit surle plan politique. L’entreprise publiquede pétrole PDVSA ainsi que l’Office dutourisme vénézuélien financent à hauteurde 36 millions de dollars par an l’équipede formule 1 de Pastor Maldonado – unpilote vénézuélien qui apparaît souventdans les événements officiels. Des sportifsayant bénéficié des largesses de l’Etat ontmême déclaré faire l’objet de pressions

pour qu’ils assistent aux rassemblementsde M. Chávez. Après avoir peaufiné sonimage de premier supporter du Venezuela,Chávez renforce sa mainmise sur le sport.En 2011, il a nationalisé une entreprise detransport qui possédait l’équipe de basket-ball des Guaiqueríes de Margarita [baséedans la ville d’Asunción], désormais placéesous le contrôle du ministère des Sports.Une ordonnance publiée en février dernieroblige les équipes à soumettre aux autoritésles contrats signés avec les membres dupersonnel et avec les entreprises sponsors.

En vertu de la loi sur le sport, les pou-voirs publics doivent valider tout contratconclu avec un sportif ayant entre 16 et18 ans. Or les clubs de la Ligue majeurede base-ball américaine (Major LeagueBaseball, MLB) embauchent régulière-ment des espoirs vénézuéliens âgés de16 ans. A en croire Miguel Bermúdez, ledirecteur de l’Institut national des sports,le gouvernement veut seulement s’assu-rer que les contrats comportent desclauses sur la scolarité des jeunes joueurset sur les indemnités en cas de blessure.Tout cela est somme toute légitime. Mais,si la loi freine le flot de Vénézuéliensvoguant vers la MLB, Chávez risque deperdre les bénéfices de sa politique spor-tive auprès des fans. �

La tactique du président supporter

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� Même encampagne pourréformerla Constitution en janvier 2009,Hugo Chávezcontinue à réceptionner la balle.

C’est la part de leurs bénéficesque les grandesentreprisesinstallées au Venezueladoivent verser pour le sport.

1 %

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Inde L’économie d’Uluberia,au Bengale, dépend des volants de badminton.Mais sa productionartisanale est menacée par la concurrence bonmarché ou le synthétique venu de Chine.

Mint New Delhi

L es chaussures de fabricationartisanale se vendent une for-tune et les saris brodés mainrelèvent de la haute couture.Si tous les produits fabriqués

manuellement étaient aussi prisés, lesfabricants de volants d’Uluberia ne setrouveraient pas dans une telle panade.

Le village de Jadurberia, dans la péri-phérie d’Uluberia – le centre de la pro-duction de volants de badminton enInde –, se trouve à quarante kilomètres

de Calcutta, de l’autre côté du Hooghly[branche occidentale du Gange]. Là, aumoins cinq mille personnes produisentdes volants de badminton, et ce depuisdes générations. Or, aujourd’hui, ellessont en train de perdre la partie face àl’automatisation.

“Nos enfants ne veulent plus fabriquerde volants de badminton”, témoigne TusharSasmal, 51 ans, qui depuis une trentained’années gagne sa vie en confectionnantdes volants. Son fils a quitté l’école et tra-

vaille dans une usine voisine pour aiderla famille à vivre. Hélas, les mains agilesde Tushar Sasmal ne font pas le poidsface aux installations de productionindustrielle chinoises : les volants chinois,

qui ne pèsent que 4,74 à 5,50 grammes, survivent des heures aux coups les plusviolents, propulsés à une vitesse frôlantles 300 kilomètres-heure.

Un volant est fait de seize plumes, decanard ou d’oie, de longueur identique,collées et liées ensemble avec un fil, etpiquées dans une tête en liège. Les producteurs d’Uluberia importent lesplumes du Bangladesh et le liège duPortugal, par l’entremise de commer-çants du Pendjab [nord de l’Inde]. A laplace du liège, ils utilisent parfois unetête synthétique produite en Chine.Aujourd’hui, quinze entreprises sont enactivité dans le village de Jadurberia.

Il faut généralement plusieurs heurespour fabriquer un volant : chaque plumedoit d’abord être lavée plusieurs fois avecun détergent, puis exposée quelquesheures au soleil pour sécher, avant d’êtretaillée aux deux extrémités, puis plantéedans la tête en liège. Dirigées par dessociétés comme DB Pandit ou S. Niyogi,

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Les bonnes recettes

Les volants de la colère

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Des ouvrierscollent une à uneles plumes sur les volants, à Calcutta.

Les plumes viennent du Bangladesh et le liège du Portugal

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à Jadurberia quatre-vingts petites unitésproduisent chaque jour des milliers devolants. Mais les affaires périclitent : lesventes à leur pic ont diminué de moitiédepuis deux ou trois ans.

De fait, les produits de la marque japo-naise d’articles de sport Yonex – fabriquésen Chine – grignotent le marché. Fondéen 1946, Yonex, grand sponsor del’Association indienne de badminton,estime que 80 % des professionnels uti-lisent ses raquettes dans le monde. SelonSekhar Chandra Biswas, secrétaire del’Association de badminton du Bengale-Occidental, les volants japonais sont fabri-qués avec des plumes plus solides etdurent plus longtemps. Sans oublier qu’ilsvolent mieux, ce qui augmente le niveaudu jeu. Depuis deux ans, ici [au Bengale-Occidental], on utilise des volants Yonexpour tous les tournois, régionaux et natio-naux – les professionnels s’en serventmême pour s’entraîner, précise-t-il.

Une boîte de douze volants Yonexcoûte environ 900 roupies [13 euros], unede dix volants produits à Uluberia,500 roupies [7 euros]. Les salaires desouvriers d’Uluberia – de 120 à 125 roupiespar jour [environ 1,70 euro] – ont du malà suivre l’inflation, et les jeunes s’en vont,en quête d’herbe plus verte.

Certes, Jadurberia produit encoreprès de mille boîtes par jour pendant lahaute saison, qui s’étend de décembre àjanvier. Mais celles-ci sont ensuite ven-dues [uniquement en Inde], fait savoirSankar Pandit, de DB Pandit, une entre-prise qui produit quelque 130 boîtes parjour durant la haute saison. A ses yeux,les producteurs indiens ne doivent s’enprendre qu’à eux-mêmes. S’ils ne sont pasparvenus à développer un marché au-delàdes frontières indiennes, c’est parce que,au début des années 2000, certainesentreprises ont exporté des produits demauvaise qualité dans le but d’engrangerdes profits rapides. Cette stratégie a coûtéaux producteurs indiens leur crédibilité,et les portes se sont fermées.

De surcroît, les Indiens doivent s’at-tendre à affronter un autre concurrent queYonex : le volant synthétique. S’il n’est pasencore arrivé en Inde, il gagne du terraindans d’autres pays. Moins cher, il supplan-tera sans doute le volant en plumes s’ilparvient à voler aussi bien. Et, si les Indiensl’adoptent, les producteurs d’Uluberiaauront de sérieux soucis à se faire.

Arnab Dutta

Les ventes ont diminuéde moitié depuis deux ou trois ans

en plein essor. Elle doit une part de sapopularité, tant auprès des patients quedes médecins, au fait que des sportifscélèbres, qui veulent à tout prix rejoueraprès une blessure, essaient des théra-pies à l’efficacité non démontrée, leurdonnant ainsi une sorte d’aura. Mais,aujourd’hui, des chercheurs remettenten question une bonne partie de ces trai-tements qui ne sont souvent étayés paraucune étude sérieuse.

“Tout le monde veut se lancer dans lamédecine du sport”, assure le Dr JamesAndrews, orthopédiste et médecin dusport à Gulf Breeze (Floride), et prési-dent de l’American Orthopaedic Societyfor Sports Medicine. Les médecins ado-rent cette spécialité et peuvent s’y lancerau bout d’un an seulement de formationaprès leurs années d’études spécialiséesde postinternat, contre deux ou quatreans pour la plupart des autres spécia -lisations. Ils constatent une fortedemande chez de nombreux patients,des athlètes de haut niveau aux sportifsdu dimanche, en passant par les retraitésfriands de golf ou de tennis. Or il setrouve que la plupart des blessures dusport, notamment les déchirures du ten-don [du biceps fémoral] – la lésion deTina Basle –, n’ont pas de thérapies bienétablies. Certes, les traitements de cer-taines lésions fonctionnent bel et bien :mettre un plâtre pour un os cassé ourecoudre un tendon d’Achille rompu.Mais, bien souvent, les patients dont lesblessures n’ont pas de traitement adé-quat ignorent que la médecine n’a rienà leur proposer. Et ils réclament desremèdes. “Ils regardent Grey’s Anatomy[série télévisée américaine mettant en scèneune équipe médicale] et s’imaginent quenous pouvons tout faire”, affirme leDr Raymond Monto, orthopédiste etmédecin du sport à West Tisbury(Massachusetts). “Et, dans une certainemesure, nous répondons à leur demande.”D’où le succès de thérapies à l’efficaciténon démontrée, peut-être inutiles etmême nocives.

Il existe ainsi une technique chirur-gicale à la mode, dont les effets ne sontpas prouvés, consistant à raboter l’osde la hanche pour prévenir l’arthrose.Certains traitements, comme l’injectiond’anabolisants dans les tendons blessésou le bandage d’une cheville foulée,

� Dessin de Reumann,Suisse.

Santé Après une blessure, les sportifs et les médecinsplébiscitent de plus en plusde coûteux traitementsmiracles. Leur efficacité resteà démontrer, mais le succès,lui, est au rendez-vous.

The New York Times New York

J usqu’au jour où elle s’estdéchiré un ligament, il y a unan et demi, Tina Basle couraitle marathon. Depuis lors, ellea multiplié les traitements.

Allant de spécialiste en spécialiste, ellea englouti des milliers de dollars pouressayer presque tout ce que propose lamédecine du sport : une IRM destinée àévaluer l’importance de la lésion, la kiné-sithérapie (avec notamment un traite-ment aux ultrasons et une lasérothérapie),la musculation, une injection de plasmaenrichi en plaquettes, une piqûre de cor-tisone, une nouvelle piqûre de cortisone.Enfin, en février, elle a laissé tomber.Résultat  : Mme Basle, 44 ans, a quandmême recommencé à courir. Elle a beau-coup perdu en vitesse et en endurance.Et “cette saleté de ligament ne va pas mieux”,ajoute-t-elle.

Pour les experts médicaux, le par-cours de cette patiente est loin d’être uncas isolé : il est révélateur de réels dys-fonctionnements dans la médecine dusport. Cette sous-spécialité médicale est

La grande foire de la médecine du sport

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Les bonnes recettes

effet. Des patients ont commencé à récla-mer le traitement, et les médecins dusport ne se sont pas fait prier, assurantqu’il accélérait la guérison des blessuresmusculaires et des tissus, consolidait lesfractures osseuses et même soulageaitl’arthrose. Les prix variaient considéra-blement – entre des centaines et des mil-liers de dollars par injection. Le coût du

matériel ne dépasse pas 150 à 200 dollars[108 à 145 euros]. Le reste revient aumédecin et à l’hôpital. Si une blessurene guérit pas, les médecins renouvellentles injections. Ces soins ne sont généra-lement pas remboursés, si bien que lespatients paient de leur poche, commeMme Basle, à qui une seule injection acoûté 1 500 dollars.

Tandis que des orthopédistes etd’autres spécialistes de la médecine dusport débattent [de l’efficacité réelle]du PRP, une autre technique à la mode

commence déjà à apparaître. Elle a attirél’attention des patients et des médecinscette année, quand Bartolo Colón, lan-ceur des New York Yankees [base-ball],a fait un come-back étonnant après desblessures au coude et une rupture dela coiffe des rotateurs [tendons del’épaule]. En mai, M. Colón et son méde-cin, Joseph R. Purita, chirurgien ortho-pédique de Floride, ont annoncé qu’ilavait été traité au PRP et aux cellulessouches – ses propres cellules graisseuses[adipocytes] et de moelle osseuse luiavaient été injectées. Une fois encore, ily a une logique derrière ce traitement,reconnaît Rocky Tuan, directeur duCentre d’ingénierie cellulaire et molé-culaire du Centre médical de l’universitéde Pittsburgh. La graisse et la moelleosseuse contiennent des cellules souchespeut-être susceptibles de se développerà l’intérieur de l’articulation ou du ten-don. Le mot clé, bien entendu, c’est“peut-être”. Pour l’instant, admet leDr Tuan, “aucune étude systématique surce traitement n’a été effectuée”.

Gina Kolata

Paru dans CI n° 1090, du 22 septembre 2011

peuvent ralentir le processus de guérison.Et il y en a, comme le traitement au PRPqu’a suivi Mme Basle, qui suscitent l’en-gouement alors même que les expertsdébattent de leur efficacité.

Pour le PRP (plasma enrichi en pla-quettes), il s’agit d’un véritable cas d’école.C’est ce que le Dr John Bergfeld, ortho-pédiste et médecin du sport à la ClevelandClinic, appelle la “triade orthopédique” :sportif célèbre, médecin célèbre, traite-ment non testé. Malgré l’absence de sta-tistiques officielles sur le traitement auPRP, force est de constater que celui-ciconnaît un succès phénoménal, alimenté

par les témoignages d’athlètes célèbres.Une part de son attrait vient du fait qu’ils’appuie sur un raisonnement logique.Le sang contient des plaquettes qui sécrè-tent des facteurs de croissance, lesquelspeuvent aider le tissu à se réparer.Résultat : si l’on injecte à un patient sespropres plaquettes dans la région de lablessure, il est possible qu’elles accélèrentle rétablissement. Et, comme il s’agit desplaquettes du patient, le traitement n’aguère de risques d’être nocif.

C’est à partir de l’hiver 2009 que lestémoignages des athlètes et de leursmédecins ont commencé à attirer l’atten-tion sur ce traitement. Deux grandsjoueurs de football américain desPittsburgh Steelers – Hines Ward, quis’était fait une entorse au genou, et TroyPolamalu, qui s’était claqué le mollet –ont subi un traitement au PRP, ont récu-péré rapidement, puis ont pu participerau Super Bowl [la finale du championnatde football américain]. Et lorsqu’unathlète annonce qu’un traitement a fonc-tionné, “c’est un coup de pub formidable”,commente le Dr Fred Azar, orthopédisteet médecin du sport à Memphis. Bienentendu, les recommandations des spor-tifs et de leurs médecins sont loin deconstituer des preuves. La plupart desblessures finissent par guérir d’elles-mêmes. Donc, si l’on traite un patient,puis qu’il récupère, comment savoir sison état ne se serait pas amélioré sansle traitement ? On ne peut pas répondreà cette question sans une étude endouble aveugle, comparant des patientsdésignés au hasard qui reçoivent le trai-tement avec des sujets désignés de lamême manière mais qui reçoivent untraitement placebo.

Reste que les témoignages – notam-ment ceux des célébrités – ont fait leur

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Examenmédical d’unboxeur à la sortiedu ring, à Lowell(Massachusetts).

Les témoignages des sportifs : un coup de pub formidable

Généralement les patients paient de leur poche

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Japon Les très nombreuxquotidiens sportifs sont frappés de plein fouetpar la concurrence du Net. Un journaliste vétéran livre ses idées pour que cette presse survive.

Mainichi Shimbun Tokyo

L es journaux et les magazinesimprimés sont dans unesituation plus critique quejamais. Outre la tendance,chez les jeunes, à lire de

moins en moins, le développementrapide d’Internet, des réseaux sociaux,de Twitter, etc., éloigne les lecteurs de lapresse papier. Les quotidiens sportifs nefont naturellement pas exception à larègle. L’époque où ils représentaient leseul moyen d’obtenir des informationssur le sport est bel et bien révolue, et denombreux lecteurs ont délaissé la presseimprimée pour celle en ligne. Tous lesprofessionnels concernés par la fabrica-tion des journaux sont aujourd’hui enproie à la même inquiétude : commentfaire pour que le lecteur reprenne entreses mains le journal sur papier ? La presseécrite peut-elle encore séduire les jeunesqui, visiblement, lisent moins que lesgénérations antérieures ?

Il est certain que la très grande vitesseà laquelle circulent les informations estun handicap pour les journaux sportifs.En publiant des articles sur les événe-ments de la veille, ils ne peuvent rivaliseravec le Net, qui retransmet le déroule-ment d’un match en temps réel.

En revanche, ils gardent indéniable-ment l’avantage quand il s’agit des prio-rités absolues : la qualité des articles et lecontenu des informations. Les coulisses,les points forts d’un match, le sentimentdes sportifs, rapportés par des journalistesspécialisés ayant une grande connaissancede ces sports, sont autant d’aspects queles dépêches de la télévision et du Net netraitent pas. Cette qualité restera toujoursle plus grand atout de la presse sportive,tant que celle-ci continuera à exister, danstrois ans comme dans dix.

1. Miser sur l’expertise Un autre phénomène intervient. Con-trairement à ce qui se passait auparavant,les lecteurs passionnés de “sport en géné-ral” sont devenus rares et ceux qui ne

s’intéressent qu’à leur sport favori, de plusen plus nombreux. Ceux qui aiment aussibien le base-ball que le football sont désor-mais minoritaires, et les lecteurs sont àla recherche d’informations d’autant plusspécialisées que leur champ d’intérêt s’estrestreint. Pour les journaux sportifsactuels qui couvrent non seulement lesdiverses disciplines sportives mais aussil’actualité des célébrités et les pronosticset résultats des courses, il est difficiled’être pointu dans tous les domaines.Les quotidiens sportifs devraientaccroître sensiblement le nombre de leurslecteurs en proposant des articles d’unniveau de spécialisation plus élevé. Si lapresse sportive décide de miser avant toutsur la qualité de ses articles, il lui faudrainévitablement abandonner l’immédia-teté. Les articles “classiques” qui attirentl’attention des lecteurs avec de gros titresannonçant une victoire ou une défaite etqui s’attachent à restituer l’ambiance dumatch tendent à diminuer pour laisser laplace aux analyses expliquant le pourquoiet le comment.

2. Personnaliser l’informationIl est certain que les journalistes enquê-teurs y gagneront une plus grande visibi-lité. D’ailleurs, les articles signés sont plusnombreux dans les quotidiens sportifsque dans les journaux d’actualité générale.De ce fait, les journalistes sportifs ontdavantage l’occasion de développer leurtouche personnelle. Ils ne se contenterontplus d’apporter une analyse objectivemais développeront leur propre point devue. Ils susciteront naturellement tantôtla sympathie des lecteurs, tantôt leurs

critiques. A travers les quotidiens spor-tifs, des discussions à bâtons rompuspourront se poursuivre et un nouveaucourant d’opinion pourra se dessiner.Devenir leader d’opinion dans le milieusportif est précisément la voie d’avenirpour cette presse.

3. Jouer localLes journaux sportifs ont également unautre créneau à exploiter : s’attacher auxdifférentes régions où ils paraissent. Lapresse sportive s’efforce déjà de couvrirl’actualité relative aux équipes locales,surtout lorsqu’il s’agit des régions d’oùsont originaires les équipes profession-nelles de base-ball ou de football. Parexemple, à Hokkaido, la première pageest systématiquement consacrée auxNippon Ham Fighters, à Osaka auxHanshin Tigers et à Kyushu aux SoftbankHawks [équipes professionnelles de base-ball, basées respectivement dans lesrégions évoquées]. Il arrive souvent que,pendant le tournoi estival interlycées debase-ball, la une change en fonction de larégion où le journal est vendu. Créerchaque fois des éditions différentesnécessite de gros efforts, mais ils sont lar-gement récompensés, car le besoin enpresse sportive est encore très fort dansles régions.

A notre époque les choses évoluenten permanence, et bien plus vite que cequ’on imagine. Si les quotidiens sportifs,loin de craindre le changement, se mon-trent résolument audacieux, nul doutequ’ils seront, dans trois ans, encore plusattractifs qu’aujourd’hui.

Kenji Fujiyama

� Dessin de Chapatte parudans Le Temps,Genève.

Marquer sa différence

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Etats-Unis La récompensepour assommer unadversaire ? 1 500 dollars.Ces primes à la blessure ont soulevé l’indignationOutre-Atlantique.

The Wall Street Journal (extraits)New York

L e football américain est un jeurude et physique. Violent,même. Mais il y a une limiteclaire entre comportement vio-lent et comportement vicieux.

Cette limite, l’ancien coordinateur de ladéfense des New Orleans Saints, GreggWilliams, l’a franchie lorsqu’il a instauréun système de primes récompensant lesjoueurs non pour avoir réussi des actionsrudes mais réglos, mais pour avoir blessédes joueurs adverses.

Coach de la défense des Saints aucours des trois dernières saisons, GreggWilliams versait des récompenses auxjoueurs qui contraignaient un adversaireà quitter le terrain sur blessure. La primes’élevait à 1 000 dollars [780 euros] si lejoueur touché était évacué sur une civière,et à 1 500 dollars s’il perdait connaissance.Pendant les play-offs [matchs à élimina-tion directe], ces primes étaient multi-pliées par deux ou par trois. Obéissantaux instructions de son entraîneur, ledéfenseur Jonathan Vilma promit unerécompense de 10 000 dollars au joueurdes Saints qui parviendrait à éliminerBrett Favre, le quarterback des Minnesota

Vikings, en demi-finale de la NFL 2009[National Football League].

Ces systèmes de primes sont mépri-sables. J’ai pratiqué le football profession-nel durant dix-huit ans, et j’ai joué contredes types parmi les plus coriaces qui soient.J’ai risqué plus de coups que n’importequel autre quarterback de l’époque. Versl’avant, l’arrière ou sur les côtés, personnene parcourait plus de terrain que moi.

Pourtant, durant ces dix-huit années,je n’ai manqué que cinq matchs pourcause de blessure. Mes adversaires vou-laient me battre, et ils avaient sans nuldoute envie de me frapper pour y parvenir– mais personne alors n’aurait blessé déli-bérément un autre joueur. Malgré le feude la compétition qui nous dévorait, et endépit de notre ardent désir de détruirenos adversaires, nous considérions qu’entant que professionnels de la NFL, nousfaisions tous partie de la même fraternité.Personne ne se réjouissait de voir unjoueur blessé sur le terrain, même si celadonnait à notre équipe plus de chancesde gagner. Avec le système de primes deM. Williams, c’est tout le football, en tantque compétition farouche mais hono-rable, qui est mis à mal.

Au cours des dernières semaines, denombreux joueurs et analystes de la NFLont déclaré qu’il était inutile de montercette histoire en épingle. Toutes leséquipes font ça, disent-ils. C’est ridicule !Les primes n’ont absolument rien à fairedans ce sport. Depuis que cette affaire aéclaté, début mars, j’ai parlé avec desdizaines d’anciens coéquipiers et adver-saires. Ils ont été unanimes : jamais ils

Leurs têtes sont mises à prix

Carton rouge

� Au footballaméricain, nul n’est censéplaquer un joueurqui n’a pas le ballon dans les mains. Ici, un match des Chicago Bearscontre les TampaBat Buccaneers,en exhibition à Wembley(Londres).

� Oublié, le fair-play !La tentation est grandede tricher pour obtenirplus. Plus de gloire,plus de médailles,plus d’argent. Quitte à simuler des handicaps que l’on n’a pas ou à payerpour gagner.� Et, à force debrasser des milliards, le sport a aussi éveillél’attention des professionnels de la fraude. Via les paris, les matchstruqués, les combatsclandestins, les mafias s’unissent pour blanchir leurs économies ou les faire fructifier.

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n’auraient mis à prix la tête d’un joueuradverse. Quant à ceux qui se livrent à cespratiques, ce ne sont pas des durs, maisdes lâches.

La blessure au cou qui a tenu PeytonManning éloigné du terrain pendant toutela dernière saison est peut-être le résultatd’un coup vicieux reçu au cours du matchcontre les Redskins de Washington, à unmoment où M. Williams était leur entraî-neur. Ce fut l’un des heurts les plus vio-lents que j’aie jamais vus  : un joueurtaclant Manning d’un côté pendant qu’unautre le percutait de plein fouet à la poi-trine avec la tête, le renversant en arrièreet lui arrachant son casque au passage.

Pendant les matchs de play-offs desSaints en 2009, les quarterbacks adversesKurt Warner et Brett Favre furent agres-sés à plusieurs reprises. M. Warner a faitun vol plané et perdu brièvement connais-sance après un choc particulièrementvicieux. Et ce fut la dernière compétitionà laquelle il participa.

Le football américain est un jeu violentet dangereux qui peut provoquer des bles-sures terribles, même lorsque les joueursne cherchent pas délibérément à mettreKO un adversaire. Comme tout un cha-cun, les joueurs réagissent aux incitations.Si vous les incitez à faire en sorte que cer-tains de leurs adversaires soient évacuésdu terrain sur un brancard, ils vont tenterd’infliger des blessures graves. Cela risqued’exposer la NFL à de graves poursuitesjudiciaires et de lui aliéner le public. Celui-ci adore la compétition franche et sansconcession, mais il ne veut pas voir deguerre des gangs sur le terrain.

Il est indispensable que la NFLréagisse avec fermeté à ce scandale afinqu’équipes, entraîneurs et joueurs com-prennent qu’un tel comportement estinacceptable. On ne devrait plus jamaisrevoir Gregg Williams dans la NFL. Quantaux autres membres de l’encadrementdes New Orleans Saints qui étaient aucourant de ces pratiques et n’ont rien faitpour les empêcher, ils devraient être euxaussi sévèrement punis. Y compris ledirecteur général Mickey Loomis et l’en-traîneur Sean Payton, deux hommes quej’apprécie et que je respecte. De même, ilfaut que les joueurs qui ont participé à cesystème assument leurs responsablilitéset les conséquences judiciaires. Quant àla victoire des Saints au Super Bowl 2009[finale de la NFL], elle devrait être mar-quée du sceau de l’infamie.

Ce sont là des mesures sévères, maisle football doit absolument se débarrasserde cet insidieux poison.

Fran Tarkenton*

* Légende vivante et très respectée du football amé-ricain, Fran Tarkenton a joué comme quarterbackdans la ligue professionnelle, la NFL, de 1961 à 1978.

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Sanction

Depuis la parutionde cet article, la National FootballLeague a suspenduGregg Williamspour une périodeindéterminée, ainsi que Sean Paytonet Mickey Loomis,respectivementpour un an et pour huitmatchs. L’équipedes New OrleansSaints s’est vuinfliger une amendede 500 000 dollars(391 000 euros).

Soupçons L’aura toujoursplus grande du handisport et de ses athlètes attireaussi son lot d’imposteurs.Un phénomène qui entachel’image de ce sport.

Der Spiegel Hambourg

P ouvez-vous vous lever ?”JürgenSchmid interroge l’hommeassis en face de lui le plusnaturellement du monde,comme si cette question était

normale. “Mais non*”, répond l’athlètefrançais, vêtu d’une veste de survêtementbleue. Bien sûr que non : il est paraplégiquedepuis une opération ratée, il y a onze ans.Jürgen Schmid mesure le diamètre de lacuisse de l’athlète : 50 centimètres. “C’estbeaucoup”, commente-t-il, avant de pinceret de malaxer son mollet. Il lui passe unstylo sous la plante des pieds. “Vous sentezquelque chose ?” Encore une fois, le Françaisrépond par la négative. “Vous avez de bonsmuscles dans les jambes, c’est bizarre”, pour-suit le médecin.

Nous sommes en avril, à Rosenau, enAlsace. Demain, c’est le coup d’envoi dela plus grande course de handbike aumonde. Les handbikes, ou vélos à main,sont des vélos à trois roues qui s’action-nent avec les bras. Des vélos pour lespersonnes à mobilité réduite. Avantle départ, Jürgen Schmid, un physiothé-rapeute venu de Hambourg, examine lesconcurrents dans la salle de conférencesd’un hôtel – des paralytiques, des handi-capés moteurs cérébraux, des personnesamputées d’une ou des deux jambes. Ilest là pour effectuer des contrôles médi-caux et repérer les sportifs qui tententde se faire passer pour des handicapés.Le Français aux cuisses fortes n’est pasun imposteur, tranche Jürgen Schmid. Etpourtant, il ne parvient pas à dissiperentièrement ses doutes ; il va l’observerpendant la course – peut-être le cyclisteest-il capable de faire davantage que cequ’il vient de lui montrer.

Les athlètes handisport exercent unefascination exceptionnelle sur le public.Parce qu’ils portent un message d’espoir.Et parce que ce sont des modèles àsuivre : non seulement ils surmontentleur handicap, mais, en dépit de celui-ci,ils réalisent des performances physiquesexceptionnelles. Des rencontres commeles Jeux paralympiques, qui se tiendront

prochainement à Londres, ont donc unattrait tout particulier ; elles mêlent com-pétition et foi. Car il ne s’agit pas uni-quement de médailles. Il s’agit avant toutde respect.

Reste que dans le handisport aussi ily a des magouilleurs et des imposteurs.Parmi les concurrents se cachent un tasde simulateurs qui, lors des contrôlesmédicaux, noircissent volontairement letableau de leur état de santé pour pouvoirparticiper aux compétitions, lesquellessont de plus en plus populaires et peuventrapporter gros.

La Néerlandaise Monique Van derVorst, par exemple, a été deux fois médailléed’argent lors des Paralympiques de 2008.Quelque temps plus tard, elle a servi aupublic l’histoire poignante d’une mira-culeuse guérison : pendant l’été 2010,elle a retrouvé une sensibilité dans lesjambes, après treize années passées enfauteuil ; depuis, elle peut de nouveaumarcher, courir et même faire du vélo.

Mais voilà que des concurrentes et desvoisins ont déclaré qu’avant sa “guérison”ils l’avaient souvent vue hors de son fau-teuil – sous la douche, et même en trainde danser. Et, il y a quelques semaines,la championne a fini par avouer qu’elleavait toujours été capable de se lever etde marcher. Aux Pays-Bas, Monique Vander Vorst était une star. Aujourd’hui, lesNéerlandais sont écœurés. Les journauxcrient à l’“arnaque” et au “mensonge”.

A Rosenau, les athlètes, entraîneurset employés parlent beaucoup de l’icônedéchue. Tous se demandent : “Mais com-ment a-t-elle pu tromper les classificateurspendant toutes ces années ?” La classificationforme l’épine dorsale des Jeux paralym-piques. Les athlètes devant tous bénéficierdes mêmes chances, ils sont examinés etrépartis dans différentes catégories. Lesmédecins et les physiothérapeutes éva-luent les capacités des sportifs lors d’unesorte de “contrôle technique”. Ils pren-nent des mesures de leur corps, contrô-lent leurs réflexes, leurs muscles, leurscapacités de coordination. Lors de cer-tains tests, les athlètes doivent montrerles mouvements qu’ils sont capables d’ef-fectuer sur un vélo, au lancer de javelot

Fraude au handicap

Il ne s’agit pas seulementde médailles, il s’agitavant tout de respect

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ou sur un bateau à voile, en fonction deleur discipline. A lui seul, l’athlétisme sedivise en 41 catégories – dont les contourssont mouvants.

“Nous faisons une batterie de tests, maisceux qui veulent vraiment faire croire qu’ilssont handicapés y parviennent”, confieJürgen Schmid, qui travaille depuis seizeans comme classificateur pour l’Unioncycliste internationale. “Certains athlètesse limitent volontairement lors de la clas-sification” – un peu comme si on tousso-tait vaguement dans le ballon lors d’uncontrôle d’alcoolémie.

Une fois, avant une compétition,Jürgen Schmid a examiné un concurrentde handbike en fauteuil qui se prétendaitparaplégique. En palpant sa colonne ver-tébrale et la musculature de son dos, lemédecin s’est vite aperçu de l’imposture.L’homme avoua son forfait : il venait d’em-prunter le fauteuil à un copain. Une autrefois, lors d’un championnat européen,M. Schmid a vu une athlète installée à latable du petit déjeuner, parfaitementassise. Or, lors du contrôle, quelques joursplus tôt, elle avait assuré ne pas être enmesure de se tenir correctement assise,ni de se plier au niveau des hanches. Uneautre fois encore, il a aperçu un cyclistetéléphoner en mangeant. Lors ducontrôle, celui-ci avait prétendu avoir unbras paralysé – bras avec lequel il tenaità présent son téléphone portable. Lorsque

les classificateurs ont des doutes, ils conti-nuent à surveiller les sportifs après lecontrôle. Ils observent leurs mouvementsdans l’hôtel, dans l’ascenseur ou au buffet.Parfois, leur travail est “aussi un peu celuid’un détective”, souffle Schmid.

Lors des Jeux paralympiques d’Atlanta,en 1996, onze athlètes avaient été ren-voyés chez eux parce qu’ils avaient trichépour se faire classer dans des catégories

“plus faciles” [que celles dans lesquellesils auraient dû participer]. En 2000, àSydney, l’équipe espagnole de basket adécroché la médaille d’or dans la catégo-rie handicapés mentaux. Quelque tempsplus tard, on découvrit que dix des onzejoueurs étaient parfaitement sainsd’esprit ; ils n’avaient jamais passé le testde QI, pourtant obligatoire.

La tentation de tricher est particuliè-rement forte lors des Jeux paralympiques,le principal rendez-vous mondial du han-disport. Ceux-ci ont été rendus célèbresdans le monde entier par des stars commele sprinter Oscar Pistorius, qui porte desprothèses de jambe et concourt désor-mais dans des compétitions pour non-

handicapés. A Pékin, les Jeux ont été suivispar quelque 3,8 milliards de téléspecta-teurs. Et, lors de la prévente de placespour la compétition de cet été, à Londres,plus de 1 million de billets se sont vendusen trois semaines.

Le Comité international paralym-pique (IPC) tente de mettre en place dessanctions aussi sévères que pour les spor-tifs convaincus de dopage : les imposteursrisquent jusqu’à deux ans de suspension.Non seulement ils obtiennent un avantageindu, mais – pis – ils salissent l’image duhandisport, qui risque de passer pour unemascarade grotesque.

Il y a quelques années encore, la clas-sification était une sorte de rendez-vousentre amis, se souvient Jürgen Schmid.On bavardait et on s’amusait un peu, etpuis on faisait quelques tests “à la cool”.“Aujourd’hui, certains cyclistes viennent avecleur avocat.”

Un jour, Jürgen Schmid a examiné unathlète irlandais qui voulait participer àun championnat du monde. Son handi-cap : une cheville raide. Mais il s’étaitbeaucoup entraîné, et sa blessure étaitguérie. Le physiothérapeute n’a pas auto-risé l’athlète à concourir. “Tu es en bonnesanté. C’est une victoire plus importantequ’une médaille.” Le cycliste s’est effondréen larmes.

Lukas Eberle* En français dans le texte.

Les imposteursrisquent jusqu’à deuxans de suspension

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� Mensonge :médailléed’argent aux Jeuxparalympiques de Pékin en 2008,Monique Van der Vorst était en fait valide.

10 %C’est l’acuitévisuelle au-dessousde laquelle, dans de nombreusesdisciplines, les athlètes sontconsidérés commenon-voyants. Maisles tests médicauxont révélé plusieurscas de fraude. La nageuseallemande YvonneHopf, qui apourtant remportécinq médailles d’orparalympiques, a dû cesser de concourir dansles compétitionspour handicapésaprès une série de tests. Elle a, depuis,passé son permis de conduire. D’autres “miracles”sont plusspectaculaires, tellel’explosion de joiede cette skieuserusse censémentaveugle à la lecturede son score… sur le tableaud’affichage.

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Carton rouge

Japon En 2011, plusieursscandales ont éclaboussé le sport national. Le journaliste MasayukiTamaki se demandait alorscomment réglementer une discipline qui relève à la fois du sport, duspectacle et du rite religieux.

Shinano Mainichi ShimbunMatsumoto

A près les scandales desmatchs truqués, la Fédé -ration japonaise de sumo(FJS) a décidé d’annuler letournoi qui devait avoir

lieu en mars à Osaka. Malgré les soup-çons de trucage qui planaient depuis

longtemps sur le sumo, la fédérationavait jusqu’ici toujours démenti lesrumeurs. Cette fois, les preuves maté-rielles existent. Il s’agit des SMS échan-gés entre certains rikishi [lutteurs] etdécouverts par la police lors de l’enquêtemenée l’an dernier sur des sumotorisayant participé clandestinement à unpari organisé par la pègre. Peu importede savoir si les enquêteurs ont eu raisonou tort de révéler au grand jour desinformations personnelles, la fédérationne peut plus reculer devant ses respon-sabilités. Ce n’est plus avec de bellesparoles du genre “La FJS s’engage à ceque cela ne se reproduise plus” que l’onpourra régler cette affaire.

Le sumo se fonde sur trois piliersessentiels : il relève à la fois d’une céré-monie shinto, du spectacle et du sport.Seuls les sumos ont été autorisés à

garder leur chonmage [chignons tradi-tionnels] à l’époque Meiji, lorsque legouvernement l’avait interdit à l’en-semble de la population, en 1871. Lechonmage est un symbole shinto, et lacérémonie d’ouverture des tournois – aucours de laquelle le yokozuna [grandchampion] lève alternativement sesjambes très haut avant de frapper le solavec ses pieds – n’est rien d’autre qu’uneprière pour obtenir de bonnes récoltes.De plus, avec ses chants et tambours, lesumo est aussi un spectacle. Les lut-teurs font tout leur possible pour ne pasmanquer un tournoi, et tâchent decontenter les fans. Dans le passé, il estarrivé que l’aspect sportif du sumoprenne le dessus sur les deux autres :de nombreux lutteurs se sont blesséset n’ont pu participer aux tournois, augrand désespoir du public.

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Quelque chose de pourri dans l’empire du sumo

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Quand c’était au contraire le côtéspectacle qui l’emportait, on assistait àdes luttes où les combattants, craignantde se blesser, s’engageaient peu dans lecombat, si bien qu’un ancien yokozunasurnommé dohyo no oni [le diable del’arène] avait fini par sermonner lesrikishi. C’est en préservant malgré toutl’équilibre entre ces trois piliers que sontle shinto, le spectacle et le sport que lesumo a traversé les âges.

Cependant, dans l’affaire en cours,il s’agit de lutteurs classés juryo [de la2e division], payés 1 million de yens[90 000 euros] par mois, qui ont misen place une sorte de système d’en-traide par trucages de manière à ne pasdescendre en division inférieure (quine donne pas droit à rémunération).Les lutteurs se mettaient d’accord parSMS sur les transactions, un vétérandu sumo jouait le rôle d’entremetteur,les échanges de victoires étaient deve-nus systématiques et un marché detransferts de fonds s’était établi. Il estdéplorable et inadmissible que l’histoiredu sumo, dont la première mentionremonte au Nihonshoki [écrit duVIIIe siècle], soit salie par des combats“arrangés” par des lutteurs corrompus.

Pour dire les choses franchement, ilarrive souvent que des rikishi gagnentleur dernier combat du tournoi. On leslaisse gagner exprès, pour qu’ils puissentaccéder à la division supérieure ou qu’ilsconservent leur salaire.

De même, il est fréquent de voir lesjeunes lutteurs en formation remporter

des combats lorsque leur famille yassiste. Ce sont des choses qui ont tou-jours été tolérées par le monde du sumoet par ses fans. C’est la marque d’unsumo “à visage humain”, qui fait siennela compassion. Cette “communicationtacite” fait partie intégrante du sumo.Si, en raison de cette fâcheuse affaire,on en vient, en réclamant la fin des tru-cages, à nier cet aspect humain dépeintsi souvent par le kabuki [genre théâtral]et les rakugo [contes humoristiques

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Il est déplorable et inadmissible que l’histoire du sumosoit salie par descombats “arrangés”

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� L’aspectspectacle du sumo etl’appât du gainont pris le pas sur le sport. Page de gauche,compétition à Tokyo. A droite, à Las Vegas.

traditionnels], le sumo ne sera plusqu’un sport ordinaire et insipide qui neméritera plus son nom.

Bien sûr, cela ne veut pas dire qu’ilfaille approuver les trucages. Mais lesumo ne peut être assimilé à une disci-pline olympique moderne. De ce pointde vue, la Fédération japonaise de sumodevrait peut-être envisager de prendreun nouveau départ en se réorganisanten confrérie religieuse. Non pas parcequ’elle risque de perdre son statut d’in-térêt public à cause de ce scandale, maisparce que cela correspond sans doutemieux à la nature de cet art traditionnel.La plupart des sports étant issus de ritesreligieux, on peut dire que le sumo, enraison des liens qu’il conserve avec leshinto, est le prototype du sport engénéral. Même si la mutation de la fédé-ration en confrérie religieuse est unesolution qui demande réflexion, il estcapital, si l’on veut aider le sumo à seredresser, de s’interroger sérieusementsur ce qu’il représente et doit représen-ter pour le Japon, les Japonais et la cul-ture japonaise.

Masayuki Tamaki

Paru dans CI n° 1060, du 24 février 2011

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Argentine La passion pourleur équipe n’est pas la seulemotivation des barrasbravas. Ces supportersgèrent un business de plus de 50 000 euros par mois et n’hésitent pas à faire usage de la violencepour le défendre.

MDZ OnLine Mendoza

O n les reconnaît aux cou-leurs et aux drapeaux duclub qu’ils soutiennent. Aleurs yeux, ce sont quasi-ment des symboles sacrés.

Ils utilisent des tambours, des trompetteset n’importe quel instrument qui permetde faire non pas de la musique, mais dubruit, beaucoup de bruit. Ils s’installentdans les gradins populaires ; jamais ilsn’iraient dans les loges. Ils ne restent pasnon plus assis confortablement pour voirle match et manger du pop-corn : ils doi-vent rester debout, sauter, agiter des

drapeaux, hurler des insultes et encou-rager leur club adoré.

Tout cela est pourtant de l’ordre duplatonique comparé au business quereprésente la direction d’une barra brava[organisation de supporters, “bande sau-

vage” en espagnol], surtout pour lesgrands clubs comme Boca Juniors et RiverPlate. Ces organisations non seulementsoutiennent leurs équipes, mais fontaussi un vrai commerce de ce fanatismeet réussissent à brasser chaque année descentaines de milliers de pesos argentins.Entre 200 000 à 300 000 pesos par mois[entre 35 500 et 52 600 euros], d’après lejournaliste spécialisé Gustavo Grabia :“L’argent n’est réparti qu’entre quelques

personnes, une dizaine tout au plus. Deuxd’entre elles en gardent l’essentiel, mais sixou sept membres vivent grâce à des revenusde 20 000 pesos [soit 3 500 euros] par mois”.

Gustavo  Grabia écrit dans Olé, lemagazine sportif de Clarín [et titre sportifde référence en Argentine]. Un peu parhasard, il est devenu le spécialiste desbarras bravas. Il a écrit un livre intituléLa Doce, la verdadera historia de las barrasbravas de Boca [La douze, la véritable his-toire des bandes sauvages de Boca], publiéen septembre 2009, où il analyse en détaill’histoire de cette organisation.

Les barras bravas sont nées dans lesannées 1950, mais leur essor n’a com-mencé que dans les années 1960. “La Docede Boca est capable de rassembler près de1 500 personnes dans un stade pour encou-rager son équipe”, affirme Gustavo Grabia.Ce chiffre n’a peut-être l’air de rien, étantdonné que ce genre d’endroit peutaccueillir au moins 20 000 personnes,mais ces 1 500 supporters sont capables,par exemple, d’entonner des chants quifont pression sur le directeur techniquepour l’obliger à “placer” tel ou tel joueur.

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Des caïds règnent sur les stades

Les “bandes sauvages”peuvent faire pressionsur un directeurtechnique pour l’obligerà placer tel ou tel joueur

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Et ces fans réussissent aussi à obtenir desentrées gratuites pour les matchs.

L’univers économique des barras estpourtant beaucoup plus large. Dans le casde La Doce, l’un de ces nombreux “fondsde commerce” sont les “Adrenalinatours”, une sorte d’excursion organiséepour les touristes étrangers. Les barrasles emmènent voir un match, les placentdans les gradins populaires et les protè-gent en faisant une barrière humaine pourqu’ils ne soient pas victimes de vols. Avantcela, ils font une escale à La Boquita, oùon leur fait goûter un choripán [sandwichtraditionnel argentin à la saucisse grillée]accompagné d’un verre de vin. On leurpropose également d’acheter des produitsdérivés aux couleurs [bleu et jaune] deleur équipe, qui sont souvent issus de lacontrefaçon, mais payés en dollars, selonGustavo Grabia.

Les barras bravas gagnent aussi de l’ar-gent grâce aux déplacements de l’équipedans d’autres villes argentines : sur place,elles organisent des fêtes et elles essaientde convaincre au moins 500 supporterslocaux d’acheter un billet à 50 pesos [soit8,70 euros]. La moitié de cette sommereviendra aux membres de la bande, quis’engagent à faire venir à ce rendez-vousamical une personnalité de l’équipe defootball [un joueur en général], qui passeradu temps avec les fans et sera pris en pho-tos avec eux, ce qui est bien sûr payé à part.

Pour multiplier leurs sources derevenus, les barras ne “travaillent” passeulement pour leur club favori, mais

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participent aussi aux meetings politiqueset aux manifestations. Les fans sont ainsiembauchés, régulièrement, par différentspartis politiques. Ils n’ont pas de talentsmusicaux particuliers, mais ils déploientleurs drapeaux et font du bruit avec lestambours et trompettes, ce qui est utilepour encourager le public lors des discoursclés. De nombreux présidents, dontRaúl Alfonsín [1983-1989], Carlos Menem

[1989-1999] et Néstor Kirchner [2003-2007], ont été associés aux barras bravas.Naturellement, ces bandes de supportersne sont affiliées à aucun parti : c’est l’ar-gent qui tranche.

Pour Gustavo Grabia, “la place des bar-ras bravas est la même depuis toujours, ilsprofitent de l’impunité que leur accordent lespouvoirs politiques, grâce à laquelle ils jouis-sent d’une grande liberté, et sont égalementprotégés par les dirigeants sportifs. C’est unproblème récurrent et il faut combattre le malà la racine”. Le journaliste soupçonne quele modèle de Buenos Aires est reproduitdans le reste de l’Argentine. “Ces bandesn’ont sans doute pas le même pouvoir écono-mique, mais elles ont de l’influence.”

Les places de parking aux alentours des stadesde football rapportentgros, et deux bandes se disputent leur contrôle.

Tous les supporters quiviennent en voiture voir un match de leur équipe à domicile savent qu’en plusdu prix du billet ils devrontaussi payer un supplément,une sorte de péage, s’ils souhaitent stationnerdans les rues qui entourentles stades.Les prix varient selonl’importance del’événement. Se garer près des stades lors d’unerencontre très attendue[River contre Boca, par

exemple] ne coûte pas lamême chose que lors d’unmatch contre un adversairede second plan. Il en est de même quand ces lieuxsportifs se transforment engrandes salles de concert :le prix pour stationner prèsdes lieux où jouent RogerWaters (Pink Floyd) ou PaulMcCartney (The Beatles) ne sera pas le même quepour un groupe de rock local.C’est notamment lors desmatchs de Boca Juniors[l’équipe où Diego Maradonaa joué dans les années 1980]que les trapitos [personnesqui signalent les placeslibres avec un petit chiffonpour que les conducteurssachent où se garer]

peuvent exiger les tarifs les plus élevés : ils gagnentau minimum 30 pesos[5 euros] par voiture. Lorsdes matchs qui ont lieu au stade La Bombonera,environ 5 000 voiturescirculent dans le quartier : ce commerce peut ainsi rapporter jusqu’à 500 000 pesos[87 000 euros] par mois.Tout cet argent est à l’origined’une lutte de pouvoir dansle club Boca Juniors, où fairepayer les places de stationnement est unsystème bien huilé, en placedepuis des années. Ce sontles membres de La Doce [la violente organisation de supporteurs de Boca

Juniors] qui contrôlaient la zone mais, à la suite de manœuvres politiques, une part du gâteau a été cédée à d’autresgardiens informels de voitures aussi présentsdans ce quartier.Le rapport entre ces deuxbandes était plutôt apaisémais, fin mars, au cours d’un dimanche de foot, un malentendu sur la délimitation des zones a dégénéré en affrontementarmé. Résultat : un blessé par balle, et pas de péage à payer pour le reste de la journée puisque tousles trapitos avaient disparu.Bernardo VázquezEl Cronista Buenos Aires

Enjeu

La guerre des parkings

Ce sont les barras quiont le plus de chanced’approcher les sportifsles plus célèbres et lespersonnes les plus riches

Tout cela à l’air d’être une bonneaffaire. Pourtant, être membre d’une barrabrava n’est pas si facile, il faut avoir denombreux contacts : au sein de la direc-tion du club, parmi les chefs d’entreprises,dans les services de police et, bien sûr,dans le monde politique. Il faut aussi êtresolidaire de ses camarades. Si un dépla-cement est organisé pour aller encouragerl’équipe, il faut y participer. Et le voyagea lieu dans un car de luxe, car il n’est pasquestion de chercher à faire des écono-mies. Le confort et le plaisir de voyageravec des hôtesses à bord garantissent lafidélité des membres du groupe.

Enfin, pour être un bon supporter, ilfaut avant tout être doué pour les négo-ciations, car ce sont les barras bravas quiont les meilleures chances de pouvoirapprocher les personnes les plus richeset les sportifs les plus célèbres, commeMartín Palermo, Diego Maradona et lesautres vedettes du football argentin.

L’Argentine exporte non seulementdu vin et des céréales, mais aussi le savoir-faire de la barra. C’est en tout cas ce quefait La Doce. Ses membres donnent descours pour façonner les fans des autrespays à son image. Les supporters mexi-cains, notamment, apprennent comment“faire pression sur un dirigeant ou surles joueurs”, explique Grabia. Commentmettre fin à cette situation ? “Le gouver-nement devrait prendre des initiatives en cesens, répond Grabia, car s’il décide d’inter-dire ces organisations, la question sera réglée.”

Viviana García Sotelo

� River Platecontre BocaJuniors, en 2010 à Buenos Aires.Les supporterstiennent les tribunes.

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Carton rouge

Elu en décembre dernierprésident de l’un des trois grands clubs de foot, Javier Cantero veutéradiquer les supportersviolents du football. Il ose dénoncer les liensobscurs entre les barrasbravas et les hautes sphèresdu pouvoir.

La Nación Buenos Aires

U ne ombre musclée apparaîtderrière l’homme auxlunettes et au blouson endaim marron. Elle ne cor-respond pas vraiment à

son apparence physique, mais elle estbien là, à la vue de tous sur le terrain duClub Atlético Independiente [son équipede football, la troisième en nombre detitres après River Plate et Boca Juniors].Javier Cantero, élu président du club le18 décembre 2011, est aujourd’hui ungéant aux yeux des supporters – de sonpropre club mais aussi des autres – quiidéalisent un combat de longue haleine[dès son accession à la tête du club,Cantero s’est lancé, comme promis,dans une croisade pour éradiquer la vio-lence des gradins].

Il ne connaît pas tout le monde, maisil est connu de tous à Avellaneda [dansla banlieue de Buenos Aires, où est situéle club de foot]. La Nación s’est plongéequelques heures dans la vie de ce prési-dent qui a décidé de faire face aux barrasbravas [bandes de supporters particu-lièrement violentes et soupçonnéesd’être impliquées dans toute sorte dedélits, voir page 88]. Il a accepté. Sonrythme est difficile à suivre. Et les cinqheures se transforment en périple.

Pas de grands préparatifs, pas dechangement d’habitude. Le dirigeant neveut pas entendre parler de gardes ducorps. La camionnette noire arrive auparking. Son épouse Claudia est auvolant. Elle assiste presque toujours auxmatchs. C’est Leandro, employé de sécu-rité du club, qui les accueille et proposede servir de guide au photographe et auchroniqueur. Avec un pied à peine posépar terre, le président assure : “Je suis unpeu plus nerveux que d’habitude en raisonde ce qui s’est passé. Les barras ne m’in-

quiètent pas. J’aime bien quand ils me fontchier : ça me prouve que nous faisons bienles choses” [lors de la guerre déclarée parle nouveau président du club aux “vio-lents du foot”, les barras bravas n’ontpas hésité à pénétrer dans son bureauet à le menacer brutalement, ce qui aprovoqué, le 11 mai, un rassemblementd’une centaine de supporters défendantl’initiative de Cantero].

Les gens le soutiennent. Ils l’ontdémontré lors du rassemblement ausiège, en agitant les drapeaux en sonhonneur. Et ils le prouvent au stade. Onl’arrête, on lui serre la main, on luiattrape le bras, on lui demande mêmeune photo. Son téléphone portable n’ar-rête pas de sonner. Il répond quand ilpeut. Il parcourt rapidement lesentrailles du stade Libertadores deAmérica, dont Independiente est le club

résident. Il dit qu’il a bien dormi. “J’aides insomnies à l’approche d’une échéance,ou quand j’ai besoin de sous, mais pas pources histoires…” Ils sont tous à sa disposi-tion. Des acteurs aux politiciens pur jus.Le gouvernement est là aussi : GustavoLópez le représente, en tant que sous-secrétaire général de la présidence.Cantero, c’est l’homme du moment.

Il va et vient. Cantero arrive sur lapelouse pour la première fois et salueson collègue de l’équipe des All Boys,Roberto Bugallo. Ils plaisantent. Ilsrient. Le président des Rojos [lesRouges, l’un des surnoms de l’équipe]avale sa salive. Il sait que le momentapproche. Il monte à la loge n° 21, maispasse d’abord par la n° 22 pour saluerl’entrepreneur et producteur de spec-tacles Daniel Grinbank, qui revient austade après une longue absence. Il volede nouveau au bas des escaliers. Déjàdans le match, la carte d’anniversairepour le coach de l’équipe, Cristian Díaz,à la main, il voit la file de joueurs. Sesyeux s’illuminent face à l’éclat des tee-shirts rouges.

En réalité, à ce moment-là, tout estrouge, plus rouge que jamais. Même sapeau, qui se hérisse pendant le match.“El club es de los socios, oh, oh, el club es delos socios [“Le club appartient à sesmembres”, slogan qui reprend une décla-ration de Cantero]”, entend-on. Ilregarde de tous les côtés. Et salue tousceux qui l’embrassent par leur chant.“L’hommage est très beau, mais il me gêne”,assure-t-il.

Les encouragements depuis les tri-bunes continuent malgré les buts des AllBoys. Cantero souffre. Il suit le match ensilence. Jamais d’insultes. Il regarde ducoin de l’œil quand il entend une phraseperdue. Les mouvements habituels desgradins le rassurent. Il n’y a ni drapeauxni grosses caisses, pour des raisons desécurité. C’est à peine si l’on voit un mes-sage écrit à la main réprouvant la menacede bombe reçue le 10 mai dans un lycée,et qui viendrait apparemment de la barrabrava. “Je n’aime pas l’absence de drapeaux.J’aime le folklore du football. Je crois que lesproblèmes du club viennent d’ailleurs”,affirme Cantero avec conviction.

Les premières vedettes sortent, et iln’y a aucun signe des barras bravas. Leprésident s’engouffre dans les vestiaires.Au passage, il salue quelques footbal-leurs et, les bras croisés, suit de près laconférence de presse de Cristian Díaz.Là, à voix basse, il décrit l’une de ses der-nières impressions. “On a mieux joué parle passé. C’est dommage. Je ne pars pas toutà fait content. J’avais besoin d’une victoirepour consolider la joie de ce qui s’est passéavant-hier [allusion au rassemblement du11 mai]. Mais elle va venir. Les supportersviolents ont mis tous leurs œufs dans le mêmepanier. Moi, j’en ai encore.” Il raconte puis,stratégiquement, se tait.

De loin, en pleine nuit, le portraitgéant de Bochini [Ricardo Bochini estl’un des joueurs emblématiques du club]semble lui faire un clin d’œil. Canteropart comme il est arrivé. Son épouseClaudia est de nouveau au volant. Pourjustifier sa place dans la voiture, elleassure conduire mieux que Javier. C’estun soulagement pour l’homme aux lu-nettes, qui choisit d’être Clark Kent plu-tôt que Superman. “C’est mieux que ce soitelle qui conduise. Je suis tout le temps accro-ché au portable”, explique-t-il. Il sait qu’ila encore un long chemin à parcourir.

Francisco Schiavo90

Javier Cantero

Il dit non à la violence

”Les supportersviolents ont mis tous leurs œufs dans le même panier. Moi, j’en ai encore”

Biographie

1957 Naissance le30 juillet à Quilmes,une banlieue au sud-est de Buenos Aires.

1984 Il épouse Claudia,son principalsoutien. Ils auronttrois enfants.

1999 Après une carrièredans l’informatiqueet dans le financement de projetsd’assainissement, il entre commeassocié dans un cabinet conseil.

2007 Membre depuistoujours (commetoute sa famille) du club de footballIndependiente, il propose de changer le nom de l’une des rues du stade par celuide Ricardo Bochini,l’un des joueursemblématiques du club. Son projetvoit le jour en novembre.

2011 En décembre, il devient présidentdu club de footAtléticoIndependiente. Il est élu avec 60 %des voix des plusde 11 600 membresélecteurs.

� Dessin de Mikel Casal (Madrid) pour Courrierinternational.

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Carton rouge

Italie La mafia napolitaine a trouvé un bon moyen de recycler l’argent qu’elle tire de ses activitéscriminelles : les parisillicites. Une activité pour laquelle elle s’associeaux criminels chinois.

Lettera 43 Milan

I vano est son nom de scène. Il estbookmaker à Secondigliano [quar-tier mafieux du nord de Naples] oùse trouve le centre de commandedes paris, de la drogue et de tant

d’autres vices. “Si on joue avec la tête et lecœur d’un supporter, on ne peut que perdre,raconte Ivano. Les matchs, c’est un businessqu’il faut gérer avec froideur et lucidité.”

Froideur, lucidité… C’est aussi ce quiprévaut dans la tricherie à grande échelle.Les enquêteurs italiens redoutent aujour-d’hui son retour. En ce moment, les magis-trats napolitains focalisent leurs effortssur Marjio Crtvak. Ce repenti, déjàcondamné à cinq ans et demi de prisonen Allemagne pour paris illicites, est entrain de faire la lumière sur d’inquiétantsmécanismes de triche. Mais c’est surtoutle Néerlandais Paul Rooij qui est au cœurde toutes les attentions : c’est lui quiaurait dit à Crtvak qu’une partie des gainsissus des paris illicites internationauxétait encaissée à Naples grâce aux“Chinois qui gèrent les paris truqués”. Resteà comprendre qui sont ces Chinois (ousupposés tels) et qui sont les Napolitainsavec qui Rooij aurait discuté régulière-ment au téléphone pour convenir descotes et parler magouilles.

Une trésorerie parallèleLe parquet de Naples sait que desgroupes de pseudo-entrepreneurs chi-nois font actuellement preuve d’intérêtpour “un nombre de paris important” etpour des matchs “à ajuster”. Ils viventprincipalement dans les quartiers situésautour de la gare de Naples ou dans lesvillages du Vesuviano [aux alentours duVésuve], où les Orientaux constituentdésormais la majeure partie des résidents.Bon nombre d’entre eux ont commencéà travailler il y a plusieurs années dansles ateliers en sous-sol pour une poignéed’euros par nuit. Puis certains ont réussià monter un petit commerce avant dedevenir de grands entrepreneurs.

Parmi eux, certains disposent désormaisde ressources considérables accumuléesnon par le travail légal, mais par le biaisd’activités peu recommandables.

Les Chinois servent ainsi la Camorraen gérant les trafics illicites, comme laprostitution de mineurs qui, chaque nuit,empoisonne les rues avoisinant la garecentrale de Naples. Ils représentent doncun véritable coffre-fort parallèle, riche enliquidités, et donc particulièrement utiledès qu’il est nécessaire de blanchir de l’ar-gent sale en vitesse.

C’est une véritable toile d’araignéecriminelle qu’il faut remonter. On saitdepuis toujours que les paris – toutcomme le trafic de drogue – sont au centrede l’activité criminelle des mafias, notam-ment depuis que Guglielmo Giuliano, unrepenti de la famille camorriste du quar-tier de Forcella [au centre de Naples], aexpliqué à Giuseppe Narducci, procureurgénéral de Naples, qu’avec “les paris illé-gaux et les matchs truqués, le cartel de laCamorra gère 120 milliards de lires [70,3 mil-lions d’euros] par an”.

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Blanchiment, mode d’emploi

Un pari sportif, cela peutsembler aussi inoffensifque miser une petitesomme sur son équipefavorite, explique lesecrétaire générald’Interpol, Ronald K. Noble,au New York Times.“Mais ces opérations sontsouvent contrôlées pardes réseaux criminels,qui ont recours auchantage, à l’intimidationet à la violence pourrécupérer leur dû. Si cela ne suffit pas, ils forcent leurs victimes,désespérées et endettées,à la prostitution ou au commerce de drogue.”

Chaque année,90 milliards d’euros sont dépensés dans des paris légaux sur le football, et au moinsautant en paris illégaux,indique le quotidien. Ce fléau a toujours existé. Mais, avec l’avènementd’Internet, il a pris uneampleur sans précédentet une dimensioninternationale qui le rendinsaisissable : en 2011, les paris sportifs sur la Toile ont généré500 milliards de dollarsde chiffre d’affaires,indique le documentaire“Sport, mafia etcorruption”, diffusé

le 8 mai 2012 sur Arte. La corruption et le truquage de matchss’inscriventrégulièrement dans des réseaux basés en Asie du Sud-Est,notamment à Singapouret en Malaisie ; c’est pourquoi la Fifa s’est engagée à financer à hauteur de 20 millionsde dollars (16,8 millionsd’euros) une unité au sein d’Interpolentièrement affectée au démantèlement de matchs truqués en Asie. Une paille en comparaison dessommes qui circulent !

Paris sportifs

Un marché d’avenir140milliardsd’euros

d’argent sale sontblanchis chaqueannée via les parissportifs.

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Mais on ne peut pas tout se permettre.Un autre repenti, Raffaele Giuliano, raconteainsi. “Un certain Ciruzzo, surnommé ‘oChianchiere’ [le Boucher], a gagné un jour500 millions de lires [293 millions d’euros].Mais on a découvert que le match était truquésans que les chefs en soient informés. Ciruzzoa été obligé de restituer tous ses gains et dedédommager le clan pour cette offense impar-donnable.” Le même Giuliano a déclaréqu’“en 1995 les revenus des paris clandestinss’élevaient à 2 milliards de lires [1,17 milliond’euros] par semaine. Le cartel disposait d’unecrédibilité à toute épreuve, une crédibilité quiservait de garantie pour le paiement des gainsde manière efficace, sérieuse et très rapide.”

Les Rolex de MaradonaD’autres repentis le résument fort bien :“les paris, c’est comme les machines à laver.Ça sert à blanchir l’argent de la cocaïne etdes meurtres.” Emanuele Lo Russo, du clandu même nom, a dessiné pour les magis-trats la carte précise des “centres de col-lecte” des gains des paris illégaux : leurnombre, leur répartition dans chaquequartier, le clan qui les contrôle. Un réseautentaculaire, qui englobe toute la ville etune partie de l’immense zone métropo-litaine. Contrairement aux années 1990,aucun clan ne possède la mainmise surles paris illicites. Ils sont nombreux à lespratiquer dans un univers privé de règlesrigides où règne la menace, et parfois lesfusillades et les meurtres. Tout en ayantdésormais la capacité, grâce aux nouvellestechnologies, d’élargir les affaires au-delàdes frontières nationales et continentales.

Ces dernières années, le clan deSalvatore Lo Russo, aujourd’hui repenti,a été l’un des plus actifs en ce qui concernela gestion des paris. Son chef est l’hommequi a permis à Maradona de retrouver lesRolex qu’on lui avait volées. Un faitd’armes accompli avec l’aide du quartierde Forcella et de Luigino Giuliano, sonallié. Récemment, son fils, Antonio LoRusso, a été reçu au domicile d’EzequielLavezzi [ joueur star du club de Naples],qui a déclaré que ce jeune homme était“simplement le supporter en chef”.

Le procureur Rosario  Cantelmo adonc découvert que les membres du clanD’Alessandro-Di Martino s’appuyaientsur un circuit officiel de paris anglais – desparis illicites en Italie – pour couvrir tousles résultats et être gagnant à tous lescoups : les gains attestés s’élevaient à10 000 euros par jour. Pour augmenterleurs revenus, ils avaient recours à l’astucedes “cinq minutes”, qui consiste à accep-ter d’augmenter les cotes de manièredémesurée pendant quelques minutesseulement. Juste le temps nécessaire pourque des complices placent leurs mises.

Enzo Ciaccio

Turquie Une épidémie dematchs truqués, de corruptionet de violence sévit dans lesclubs turcs. L’Etat, lui, restelaxiste. Ce qui scandalise les journalistes spécialisés.

Courrier international Paris

Depuis juillet 2011, le footballturc est secoué par unevague de scandales concer-nant des matchs truqués. Aupoint que la justice turque

a lancé une procédure qui a conduit à desarrestations visant plusieurs clubs, dontle célèbre club d’Istanbul Fenerbahçe,champion 2011. Il a, depuis, été déchu deson titre et privé de Ligue des championset des gains associés. Cela aurait pu êtreun exemple pour les autres clubs.

Mais le Parlement turc, dominé parl’AKP (Parti de la Justice et du dévelop-pement, islamo-conservateur), a quant àlui envoyé un message beaucoup moinsclair. Après avoir initialement voté deslois très sévères visant à punir les per-sonnes coupables d’influencer le résultatd’un match, il a considérablement adouciles peines en décembre 2011. Cette quasi-volte-face avait alors indigné le bouillantéditorialiste du quotidien indépendantTaraf, Ahmet Altan : “Au moment mêmeoù la justice rendait public son acte d’accu-sation établissant des liens entre ces matchstruqués et la pègre, le Parlement a adouci lespeines encourues par les fraudeurs ! Est-ceparce que, pour ce Parlement, l’accusation

de crime organisé n’a aucune importancequ’il a soudainement décidé de diminuer lespeines encourues par les tricheurs ? !”

Ahmet Çakar, dans le quotidien popu-laire Sabah,dresse quant à lui un portraitpeu glorieux de la situation du footballturc : “Nous cumulons toutes les tares que laFifa considère comme pouvant porter un coupfatal au football ! Imaginez en effet un paysoù au moins 30 responsables du monde dufootball sont poursuivis pour corruption derésultats et dont certains sont en prison.Imaginez un pays dont le président de la fédé-ration nationale de football est créditeur d’unesomme de plusieurs millions d’euros vis-à-visd’un des plus grands clubs du pays [Besiktas]”.De la prison où il purge sa peine depuisjuillet 2011, Aziz Yildirim, le président duclub de Fenerbahçe, vient pourtant d’êtrereconduit à son poste. Et la commissiondisciplinaire de la Fédération turque defootball a beau avoir condamné unedizaine de personnes, elle a aussi épargnéles nombreux clubs initialement soupçon-nés, souligne le grand quotidien Zaman,proche de l’AKP. La procédure pénale est,quant à elle, toujours en cours.

Et la situation est loin d’être calmée.Après avoir remporté le championnatnational au terme d’une finale très tendueface à Fenerbahçe, en mai dernier, le clubde Galatasaray aura eu besoin de l’inter-vention du Premier ministre Erdogan enpersonne pour que ses joueurs puissentrecevoir leur trophée, ce qui n’a pas man-qué de relancer le débat sur les relationstroubles entre monde politique et footballen Turquie.

Pierre Vanrie

“Toutes les tares du football…”

�� Dessins de Chappatte parus dansLe Temps,Genève.

19arrestations

C’est ce qu’a décidéle procureur deCrémone, RobertoDi Martino, chargéde l’enquête sur les matchs truquésen Italie. Parmi les 19 personnesinterpellées le lundi28 mai figurent 10 joueurs et notamment le capitaine de la Lazio de Rome,Stefano Mauri.

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A la

une

Le dénominateurcommun de nombreuxtitres de la pressesportive mondiale ? Lefootball. Mais, en dehorsdu ballon rond, chaquepays cultive sesspécificités : l’amour du base-ball au Japon,celui du cricket en Inde.Cette presse sert aussiparfois à contourner lacensure pour diffuserdes messagespolitiques, comme enBirmanie, ou à respirerune bouffée d’érotisme,comme au Moyen-Orient.

Il faut dire qu’avec ses pages roses,pourtant pas très masculines, il attire l’œil. La Gazzetta portequasiment toute son attention surle foot… et les femmes des joueurs.

Espagne

MarcaFondé en 1938, Marca est LAréférence en matière d’actualitésportive, mais aussi le plus lu desquotidiens espagnols, avec plus de deux millions de lecteurs (il estdiffusé à 264 780 exemplaires).C’est aussi un inconditionnel du Real de Madrid. Au début du XXe siècle, Marca est un journalsportif hebdomadaire ; en 1938, il se transforme en quotidien.Dans les années 1990, il créeplusieurs sites web et une stationde radio. Longtemps détenteurd’un quasi-monopole sur la pressesportive espagnole, Marcaest aujourd’hui de plus en plusconcurrencé, notamment par des journaux sportifs locaux.

Royaume-Uni

FourFourTwoFondé en 1994, FourFourTwoest parvenu à s’imposer outre-Manche comme le magazine du football “autrement”. Son titrefait référence à une dispositionstratégique au football, le 4-4-2(quatre défenseurs, quatre milieuxde terrain, deux attaquants). Laformule du mensuel est aujourd’huibien rodée, et sa diffusion s’élève à 110 000 exemplaires. Parmi les rubriques les plus appréciées,“More than a game” (Plus qu’unjeu) démonte les enjeuxpolitiques, culturels, économiquesou sociaux de certainesrencontres, illustrant ainsi leprofond enracinement du football

dans la société. FourFourTwoest devenu une référence dans le monde de la presse sportive et fait des émules. En 2005 ont vule jour Australian FourFourTwo,en Australie, et FireFireTo, en Norvège, bientôt suivis par d’autres déclinaisons, dont une brésilienne, une turque, une croate et une coréenne.

Russie

Sovietski SportFootball, échecs, hockey sur glace :les trois sports les plus populairesde Russie sont à la une de SovietskiSport, le plus vieux quotidien russeconsacré au sport (il est né en 1924), qui jouit d’une tellenotoriété qu’il n’a pas changé de nom malgré la disparition de l’URSS.

Suède

OffsideLancé en mars 2000, Offside(“Hors-Jeu”) est un magazinesportif de qualité, auquel son petitformat donne l’allure d’une revueintellectuelle plus que d’unmagazine classique. Bien écrits

Allemagne

11FreundeCréé en l’an 2000, 11Freunde (“11 Amis”)est consacré au football et à saculture. Il tire son nom du livre de tactique du football de SammyDrechsel, selon lequel “si vousvoulez gagner, vous devez être onzeamis”. Diffusé à 74 000 exemplaires,le mensuel relate l’actualité du football et de ses fans, souventavec humour. En octobre 2009,11 Freunde a lancé un supplémentconsacré aux footballeuses,11 Freundinnen, en prévision de la Coupe du monde de footballféminin 2011, organisée par l’Allemagne.

Italie

La Gazzetta dello SportFondée en 1896, peu avant les premiers Jeux olympiquesmodernes, La Gazzetta dello Sportest le premier journal sportif enItalie. C’est aussi le quotidien leplus lu : avec 4 millions de lecteurs(pour une diffusion d’environ300 000 exemplaires), c’est LAréférence de la presse italienne.

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et solides, les articles sont souventl’occasion d’explorer de nouvellesfacettes de la planète foot. L’image est très présente et les reportages photo sontsélectionnés avec un soin toutparticulier. Parmi ses lecteurs les plus fidèles figure notamment Sven-Göran Eriksson,le sélectionneur suédois de l’équipe d’Angleterre. Offside a obtenu plusieurs prix en Suède.

Etats-Unis

ESPNCette immense machine qu’estESPN propose des chaînes de télé,des sites Internet, une radio, desboutiques, des centres de sport et bien sûr un magazine, fondé en mars 1998. Le bimensuel, qui aréussi à se faire une place au soleildans un marché très concurrentieldominé par Sports Illustrated, sedistingue par une mise en pagesaérée et très graphique, ainsi que par des reportages variés et richement illustrés, qui lui ontvalu de nombreuses récompenses.Le groupe appartient à l’énormeconglomérat Disney, qui détientégalement la chaîne ABC.

Argentine

OléC’est le journal sportif argentin deréférence. Il a fait son apparitiondans les kiosques en 1996 etappartient au groupe de presseClarín. C’est le seul titre du paysconsacré exclusivement au sport :les autres journaux couvrent cetunivers en incluant l’informationdans leurs pages ou dans unsupplément quotidien. Olé utilisesouvent des jeux de mots pour sesunes. Il parle un langage proche decelui entendu dans les gradins. Cequi séduit les lecteurs ? L’informationde qualité et – il faut bien lereconnaître - les filles en maillotde bain présentes à chaque numéro.

Brésil

Lance !Sans lui, la plupart des fans defootball brésiliens se sentiraientorphelins : ce journal permet detout savoir sur le ballon rond dansun pays qui en a fait sa religion.Même s’il consacre quelques pagesà d’autres disciplines sportives,Lance ! accorde une large place au foot, analysant les matchs, lestactiques de jeu et les prestations

des joueurs. Les commentaires de ses chroniqueurs ou lescaricatures de Gustavo Duartesont des bonus essentiels. Sonsupplément du week-end, Revista A +,fait lui aussi la part belle auxphotos et à la mise en pages soignée.

Japon

Sports Hochi

Filiale du Yomiuri Shimbun, le principal quotidien japonais,Sports Hochi est le pendantpopulaire de cet illustre journal deréférence. Depuis son lancementen 1949, il s’intéresse principalementà l’actualité sportive et à celle dushow-business japonais. Ses titresaccrocheurs, sa mise en pagesfouillis (faite de gros caractères etde photos détourées) et son styleracoleur font le bonheur de seslecteurs. Sports Hochi est diffusé à 1 428 000 exemplaires.

Sports GraphicNumber

Fondé en 1981 et publié par le grand éditeur Bungei Shunju, ce titre est une référence dans le monde de la presse sportive etpeut se targuer d’avoir bouleverséla façon de parler et de présenter

Sports IllustratedLancé en 1954, le magazine dominela presse sportive outre-Atlantique,avec une diffusion de trois millionsd’exemplaires. Très porté sur les disciplines populaires commele base-ball et le basket, cethebdomadaire publie régulièrementde longues enquêtes. Propriété du groupe Time Warner, SportsIllustrated est célèbre aux Etats-Unis pour son numéro annuelconsacré aux maillots de bain.Faisant appel à de grands noms de la photographie, aux mannequins les plus célèbres,ainsi qu’aux sportives les plusséduisantes, ce numéro fait un tabac auprès du public.

Mexique

EstoImprimé en sépia, Esto faitexception dans le monde de la presse sportive. Ce quotidiense concentre sur le football, maisaccorde également beaucoupd’importance aux sportsnationaux, comme la charrería(proche du rodéo), ainsi qu’à d’autres disciplines, comme la tauromachie.

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le sport au pays du Soleil-Levant.Mettant l’accent sur la qualité del’image et de l’écriture, le bimensuela su séduire un public varié.

Birmanie

First Eleven SportJournalCréé en 2000, First Eleven SportJournal est le premier des quatrehebdomadaires du Media ElevenGroup. Le titre a rapidement acquisune forte notoriété en distillantsavamment des messagespolitiques dans ses comptesrendus sportifs. Il a eu maille àpartir avec la censure. Les sociétésprivées étant interdites depublication de quotidiens, MediaEleven a su jouer de cette règle enlançant au fil des ans trois autreshebdomadaires, dont PremierEleven Sport Journal en 2003.

Inde

CricinfoConsacré au sport national indien,Cricinfo est le principal site mondialde cricket. Il propose des résultatssportifs, des articles de fond et unecouverture live des grands matchs.Il comprend une base de donnéessur les joueurs célèbres et lesmatchs de légende. Fondé en 1993,Cricinfo appartient depuis 2007 au groupe ESPN et compte près de20 millions d’utilisateurs par mois.

Thaïlande

Siam KeelaSiam Keela ou Siam Sport est letitre emblématique du Siam SportGroup, fondé voilà trente ans.Alors qu’il ne publiait à ses débutsqu’un simple mensuel, le groupethaïlandais s’est transformé en véritable empire : il comptedésormais cinq quotidiens, dontun spécialisé dans le football et unautre dans la boxe – totalisant untirage de 400 000 exemplaires –,mais aussi des hebdomadaires et des mensuels spécialisés dans le sport et la détente. Siam SportGroup possède une radio, unechaîne de télé et a investi Internet.

Vietnam

Thê Thao & Van Hoa Titre historique parmi les médiassportifs vietnamiens, Thê Thao & Van Hoa (Sports & Culture) estédité par l’Agence vietnamienned’information (AVI), l’agenceofficielle. Publié au départ troisjours par semaine, le titre estquotidien depuis l’été 2007. Il suitles championnats de footballeuropéens (dont les Vietnamienssont friands, paris aidant...), mais aussi le sport vietnamien et la vie culturelle.

Afrique du Sud

SA RugbyConsacré au rugby et aux hommesqui le pratiquent, South AfricanRugby est né en 1995, peu avant la Coupe du monde organisée en Afrique du Sud. Le mensuels’appuie sur une solide équipe de contributeurs extérieurs pouranalyser les forces et les faiblessesdu rugby sud-africain, et celles desautres nations. La photographieest présente, mais elle ne bénéficiepas d’un traitement de faveur. Seuleexception : le poster qui accompagnechaque numéro. Pour le reste,mieux vaut apprécier les mots.

Algérie

Al-HeddafAl-Heddaf, journal sportifarabophone, paraît aussi en version française avec le titre Le Buteur. Ces deux quotidiens,numéros un de la presse sportiveen Algérie, sont spécialisés dans le football. En plus de l’actualitésportive, ils proposent des reportages et des interviews.Un magazine couvrant l’actualitésportive internationale en arabe a été récemment lancé par le même groupe de presse.

Moyen-Orient

Rares sont les pays arabes ou les groupes de presse arabes qui ne possèdent pas de magazine ou de supplément consacré au sport – sans parler du nombre croissantde sites sportifs en langue arabe.C’est ainsi que le prestigieuxgroupe de presse égyptien Al-Ahram publie au Caire Al-Ahram Al-Riyadi (“Al-Ahramsportif”). Le groupe saoudienAsharq Al-Awsat publie à DjeddahAl-Alam Al-Riyadi (“Le Mondesportif”). Le groupe Choueiri, du nom du grand magnat de la publicité au Liban, a son Al-Hadath Al-Riyadi (“LeFait sportif”) ; au Koweït, Al-Riyady Al-Arabi (“Le Sportifarabe”) subit la sévère concurrencedes magazines sportifs des Emiratsarabes unis, tel Al-Hadaf Al-Riyadi(“Le But sportif”) d’Abou Dhabi,plus connu sous le nom de Super.Toutefois, les qualités rédactionnellesde ces nouveaux médias laissent à désirer. La plupart se contentent de reprendre les compétitions qui se déroulent en Europe, déjà largement couvertes par lesmédias occidentaux. Et prêtentpeu d’attention aux événementssportifs locaux. Un élémentexplique toutefois l’engouementdu public pour ce type demagazines. Dans certains médiasarabes, on tricote des manches à l’encre de Chine sur les photosde femmes aux bras dénudés et, si le genou est bien voyant, on faitporter à la dame une jupe longue,alors que les magazines sportifs,eux, ne font qu’exhiber des corpsd’athlètes : un torse musclé, descuisses bronzées et des maillots de corps bien moulants. Une lecture qui console de nombreuses frustrations.

A la une

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Sources

Actualidad Económica22 500 ex., Espagne,hebdomadaire. “L’Actualitééconomique” est la publicationphare du groupe Recoletos,leader espagnol de la pressespécialisée. ActualidadEconómica a fait le pari d’offrirune information approfondie sur le monde des affaires, des finances et des marchés.Avec 55 % du marché, c’est le magazine le plus lu par les professionnels et les hommes d’affaires.

Caras y Caretas, Argentine,mensuel. Arrêté en 1941, “Visageset masques” resurgit en 2005,sous la direction de l’historienargentin Felipe Pigna. Proche du gouvernement kirchnériste, le titre est devenu un magazined’opinions et d’analyses.

El Cronista 10 000 ex.,Argentine, quotidien. Le titre, qui a fêté ses 100 ans en 2008, est la référence nationale dans le domaine de la finance. Il est aussi le premier quotidienéconomique du pays ; 80 % de ses lecteurs sont des abonnés.

FourFourTwo 73 000 ex.,Royaume-Uni, mensuel. Fondé en 1993, c’est le journalhaut de gamme du football. Il se distingue par ses enquêtesapprofondies et son traitementde l’économie du foot.

Gandul 35 000 ex., Roumanie,quotidien. Avec pour devise un vieux proverbe, “Personne nepense à ta place”, et pour logo la statue du Penseur d’Hamangia,“La Pensée” a été fondé en 2005par Mircea Dinescu, CristianTudor Popescu, Bogdan Chiriacet Lelia Munteanu.

The Hindu 700 000 ex., Inde, quotidien. Hebdomadairefondé en 1878, puis quotidien à partir de 1889. Publié à Madraset diffusé essentiellement dans le sud du pays, ce journalindépendant est connu pour sa tendance politique de centre gauche.

Lettera 43 (lettera43.it), Italie.Mis en ligne en octobre 2010, L43 est l’un des rares sitesd’information italiens fondé sur le modèle pure player (sansédition papier). Son nom vient de lettera (lettre) et du chiffre 43,car, selon le journaliste américainPhilip Meyer, la mort du journalpapier est prévue pour 2043.

The Independent 215 000 ex.,Royaume-Uni, quotidien. Créé en 1986, c’est l’un des grands titres de la pressebritannique de qualité. Il sedistingue de ses concurrents par son indépendance d’esprit,son engagement proeuropéen et ses positions libérales sur les questions de société.

The Indian Express550 000 ex., Inde, quotidien.S’autoproclamant “India’s onlynational newspaper”, The IndianExpress est le grand rival du Times of India. Il est connupour son ton combatif et son“journalisme du courage”, ainsique pour ses enquêtes sur des scandales politico-financiers. Son supplément SundayMagazine comported’intéressants articles culturels.

Jingji Guancha Bao380 000 ex., Chine,hebdomadaire. Cet “Observateuréconomique” se donne pour butde suivre l’actualité pour unlectorat doté d’un sens critique.Par sa volonté de participer à la réflexion des hommes quifont le dynamisme de l’économiechinoise, en proposant une ligne éditoriale “critique et rationnelle”, il se pose en concurrent des journaux lesplus avancés du sud de la Chine.

Liaoning Ribao 500 000 ex.,Chine, quotidien. Le groupeLiaoning possède 8 journaux et 3 magazines. Créé en 1954,  le Liaoning Ribao, comme la plupart des journaux officiels, compte son lectorat dans les services publics.Depuis 2005, il édite aussi une version coréenne.

Linkiesta (linkiesta.it), Italie.Mis en ligne depuis le 31 janvier2011, c’est l’un des rares sitesd’information italiens sur lemodèle pure player (sans éditionpapier). Formé à partir de la contraction des mots “link”(lien) et “inchiesta” (enquête, en italien), il se définit comme unmédia indépendant “sans idéesidéologiquement préconçues”.

Mainichi Shimbun3 960 000 ex. (éd. du matin),1 660 000 ex. (éd. du soir, aucontenu différent), Japon,quotidien. Fondé en 1872 sous le nomde Tokyo NichiNichi Shimbun, leMainichi Shimbunest le plus ancienquotidien japonais. Il a pris sa dénominationactuelle en 1943, lors d’unefusion avec l’Osaka MainichiShimbun. Centriste, le “Journal de tous les jours” est le troisième quotidiennational du pays par la diffusion.

MDZ OnLine (mdzol.com/mdz),Argentine. MDZ est le sigle de la ville de Mendoza (située à 1 000 km à l’ouest de BuenosAires). Le journal en ligne, fondé en 2007, a la particularitéde proposer à ses internautesdes sondages quotidiens.

Mint, Inde, quotidien. Fondéen 2007 par HT Media Ltd, l’une des plus importantessociétés de multimédiaindiennes, en collaboration avec The Wall Street Journal,le titre est le concurrent directdu plus vieux quotidienéconomique du pays, The Economic Times.Symbole de la Shining India, il se présente comme un journalacquis à la libéralisation et à l’économie de marché.

La Nación 185 000 ex.,Argentine, quotidien. Fondé en 1870 par l’ex-présidentBartolomé Mitre (1862-1868), le titre est une institution de la presse argentine destinée aux

élites. Il présente une rubriqueinternationale de qualité qui contribue à sa réputation.

Newsweek Polska 250 000 ex.,Pologne, hebdomadaire. Publiédepuis 2001, le titre est une deshuit éditions non anglophonesdu magazine américain. Réactifet professionnel, il utilise l’actualitépour révéler les tendances du monde contemporain

Ogoniok 67 000 ex., Russie,hebdomadaire. Après plus

d’un siècle d’une histoiremouvementée,

“La Petite Flamme”se présenteaujourd’hui

comme un magazined’informations

générales et dereportages richement

illustrés.

Polityka 230 000 ex., Pologne,hebdomadaire. Ancien organedes réformateurs du Partiouvrier unifié polonais (POUP),lancé en 1957, “La Politique”, qui appartient aujourd’hui à sesjournalistes, est devenu le plusgrand hebdo sociopolitique de Pologne, lu par l’élite politiqueet intellectuelle du pays.

Revista Trip 44 000 ex., Brésil,mensuel. Grâce à une ligneéditoriale fondée sur la diversitéet l’innovation, la revue est considérée comme la plusinfluente dans la formation del’opinion des jeunes Brésiliens.

Le Soir Echos, Maroc,quotidien. Ce titre francophonelancé en 2008 par le groupeAlmassae, dirigé par le journaliste Rachid Niny, traite de l’actualité nationale etinternationale, et propose uncahier économique quotidien.

Southeast Asia Globe15 000 ex., Cambodge, mensuel.Indépendance de vues, qualitéd’analyse et originalité des sujets :telles sont les ambitions de cetitre créé en 2007 et qui couvrel’actualité politique, sociale,

économique et culturelle de la partie continentale de l’Asiedu Sud-Est.

Ta Nea 77 000 ex., Grèce,quotidien. “Les Nouvelles” estun titre prestigieux appartenantau puissant groupe de presseLambrakis. C’est un quotidien de l’après-midi, proche du Mouvement socialistepanhellénique (PASOK).Populaire et sérieux, il consacreses pages à la politique intérieureet internationale, aux loisirs, au sport et aux petites annonces.

Le Temps 30 000 ex., Algérie.Créé en 2008, après avoir longtempsattendu l’autorisation d’être en kiosque, ce journal sérieux,fait par de jeunes journalistesd’Alger, est peu critique vis-à-visdu régime. Il est financé en partiepar des industriels kabylesproches de l’actuel Premierministre Ahmed Ouyahia.

Shinano Mainichi Shimbun483 000 ex., Japon, quotidien.Fondé en 1873, ce titre est le quotidien régional le plusimportant de la préfecture de Nagano (62 % des foyers le lisent). Malgré son nom, ce journal n’a aucun lien avec le quotidien nationalMainichi Shimbun.

Sina (news.sina.com.cn) Chine.Fondé en 1999 par WangZhidong, Sina est le troisièmesite le plus visité par les internautes chinois en 2010. Il propose un très bon serviced’information, grâce à desreprises d’articles de la pressenationale et à une équipe de rédacteurs spécialisés, et une traduction en anglais de la plupart des papiers.

Zuqiu 2 500 000 ex., Chine,bihebdomadaire. Coédité par le Guangzhou Ribao, le grandquotidien du sud de la Chine, et la commission sportive de la municipalité de Canton, Zuqiu(“Football”) propose un suivi de l’actualité du ballon rond auniveau national et international.

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Site webcourrierinternational.com Courriel [email protected] de la publicationAntoine LaporteDirecteur de la rédaction Eric Chol

Rédaction en chef Virginie Lepetit Rédaction Carole Lyon Direction artistique Sophie-Anne DelhommeMaquette Nathalie Le Dréau avec Mélanie GuéretRédaction en chef technique Nathalie PingaudIconographie Marion GronierColorisation Céline MerrienCartographie Thierry GauthéInfographie Valérie BrunissenPhotogravure Denis Scudelleret Jonnathan Renaud-Badet

Ont collaboré à ce numéroSimon Benoit-Guyod, Laura Diacono, François Gerles,Laurence Habay, Joanna Jullien,Nathalie Kantt, Julia Küntzle,Daniel Matias, Anne Proenza,Raoul Roy, Marc Saghié, Hoda Saliby, Ysana Takino, Zhang Zhulin, Naïké Desquesnes,Florencia Valdés Andino, Pierre Vanrie et l’équipe de Courrier international.Traduction et révisionL’équipe de Courrierinternational

Relations extérieuresSophie NézetPublicité M Publicité, 80, boulevard Blanqui,75013 Paris (01 40 39 13 13)Directeur de la publicité Alexandre Scher(01 40 39 14 01)Vente au numéro Hervé Bonnaud, assisté de Jérôme Pons (01 42 17 33 78)Réassorts Paris, 0 805 05 01 47Province, banlieue, 0 805 05 01 46

Fabrication Olivier Mollé (directeur de la production),Nathalie Communeau(directrice adjointe), Sarah Tréhin (01 48 88 65 35)Impression, brochage Maury, 45191 MalesherbesDépôt légal juin 2012 Commission paritaire72546ISSN 1 169-114X Imprimé en FrancePrinted in France

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