résumé de l’acte iii -...

77

Upload: lamduong

Post on 13-Sep-2018

216 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Résumédel’acteIII:

Aprèsledépartd’AndrewBlakeduPeninsula,Katchoisitd’oublierleurbaiseretdeprivilégiersarelationavecDan.Pourtant,leurhistoireestvacillante,troubléeparlapossessivitédeDanetsarivalitéavec Andrew. Kat confie ses craintes à l’inconnu de l’annonce, qui la conseille et lui redonneinvariablementlesourire.

QuandDanannuleàladernièreminuteleursoiréeauthéâtrepourunmatchdebase-ballavecsonpère,Kat est unenouvelle fois déçue.La fois de trop ?AndrewBlake, qui a observé la scène, saisitl’occasionettentedesoutirerunenouvellesoiréeensacompagnie.MaisKattientbonetrefuse.

Pourtant, malgré cela, elle le retrouve , assis à ses côtés au théâtre. Cette dernière provocationannihile ses dernières résistances et elle accepte de passer la nuit avec lui.Mais Andrew refuse deprofiterdelasituation.

À son retour chez elle, et encore sous le charmede sa nuit auprès d’Andrew,Kat retrouveDan,furieux.

***

–J’avaistablésurunretourunpeumoinstardif.–Bonsang,Dan,tum’asfaitunepeurbleue!Qu’est-cequetufichesici?hurlai-jeenavançantvers

lui.–Jet’attendais.Soncalmem’effrayaitetjereculaidoucementjusqu’àlaporte.Ducoindel’œil, jevisunsacde

voyagebleu.JeprisconsciencequemasoiréepuismanuitavecAndrewBlakem’avaientfaitoublieruncertainnombredechoses,notammentmonprojetdeweek-enddans leNewJerseyavecmonpetitamiofficiel.

–Tuesentréchezmoienmonabsence?–Tongardienmetrouvesympathique.Oùétais-tu?demanda-t-ilsèchement.–Àl’hôtel,répondis-jeavecsincérité.–Aveclui,jeprésume.Ilselevaetavançaversmoi.Jefixaisonvisageimpassible,tropcalme,troplisse.Sesyeuxétaient

noirs,sespoingsserrésàs’enfairesûrementmal.Àlavuedescernessoussesyeux, jecomprisqu’iln’avaitpasdormidelanuit.

–Commentétaitlapièce?s’enquit-il.–Dan,ilfautqu’onparle.

–Jet’aivueaveclui.J’étaislà,avecmonpère,jet’attendaisàlasortieettuétaisaveclui.Ilavaitlamainsurtoi.Justelà,précisa-t-ilavantd’enroulerprestementsonbrasautourdemoipourappuyersurlebasdemondos.

Jem’écartaivivementetm’éloignaidelui.Jen’aimaispascequejeressentais.Peut-êtreétait-celaconversationavecGregoryquimetroublaittoujours,maisDanm’effrayait.

–Dan,jecroisquetoietmoidevrionsfaire…unepause,articulai-jedifficilement.–Unepause?–Unelonguepause,précisai-jeenagrippantlachaisederrièremoi.–Tumequittespourlui?s’esclaffa-t-il.–Non.C’estjustequejenesupporteplus…ta…jalousie, tacolèrecontreluietcontremoi.J’ai

l’impressiondepassermontempsàapaisertescraintes.Sonvisageseradoucitaussitôtetjedécrispaimesmainspourlesmettredevantmoi.–Jecraignaisdeteperdre.Enquoicelafait-ildemoiunmauvaispetitami?–Tun’aspasconfianceenmoi.–Tuaspassélanuitdehors,danslesbrasd’unautrehomme!ironisa-t-ilavecunsouriremauvais.Jebaissaileregardetmetriturailesmains.Certes,Danieln’avaitjamaiseuunegrandeconfiance

enmacapacitéàrésisteràBlake,maisj’étaiscellequiavaitcédé.Jel’avaisembrassé,j’avaisacceptédepasserlanuitaveclui,j’avaisoubliéDanieletluiavaisdonnéraison.Jeneméritaispassaconfiance.

–Tuneprendsmêmepaslapeinedenier!souligna-t-il.–Pourquoifaire?Jesuiscertainequetuaseutoutletempsdet’inventerunehistoireàcesujetet

quetun’endémordraspas.–Iltevoulaitdepuisledépart.–C’estfaux.C’estjuste…unconcoursdecirconstances.–J’aicruquetuétaisdifférente.J’aicruquesonargent,sonpouvoir,sesrelationsnet’atteindraient

pas.– Je me fiche de tout ça ! hurlai-je, détestant qu’il me considère comme une femme vénale et

matérialiste.–Voyons,Kat!J’aidéjàconnuça,murmura-t-il.–Dan,tuesuntypeformidable,tuesgentiletprévenant,mais…–…jenesuispaslui.Jeconnaislachanson,merci.Ilvatefairedumal,lança-t-ilaprèsuncourt

silence.Iltemanipule,ilsesertdetoi,detanaïveté,pourmieuxtelaissertomberensuite.–Manaïveté?MonDieu,Dan,maistunemeconnaisvraimentpas!–Jeleconnais,lui,etlestypesdanssongenre!cracha-t-il,pleindehargne.«AndrewBlake,roi

tout-puissantdesmédias…»Commentpeux-tucroirequ’ilpuisses’enticherd’unefillecommetoi?–Sorsdechezmoi!luiordonnai-jeenretenantmeslarmes.Son visage changea de nouveau, et il sembla prendre conscience de la portée de ses mots. Il

s’approchademoietposasamainsurmajoue.Jefermailesyeux,pascertainedepouvoirsupporterlasuite de cette conversation. Mon ventre se tordit douloureusement quand je compris à quel point jem’étaistrompéesurlui.

–Kat,cen’estpascequej’aivouludire.–Sorsdechezmoi,répétai-je.–Ilvatepiétiner.Ilvafairedetoiunefemmesansâme.Petitàpetit,tuneserasplustoi-même.Ou

alors,danslemeilleurdescas,ilsedésintéresseradetoidujouraulendemain.Mon cœur se serra dans une douleur atroce.Non seulementDanme considérait comme faible et

fade,maisiljugeaitAndrewsansleconnaître.LamaindeDanquittamajoue.Ilattrapasavesteposéeprèsdemoi.

–Lestypescommeluines’embarrassentpasdesétatsd’âme,dit-ilenrécupérantlesacdevoyage.

–Detouteévidence, tunet’embarrassespasdesmiens, lâchai-jealorsquejemesentaisvacillersurmesjambes.

–Tun’esqu’unpiondanssonunivers.Ilt’écrasera,sansmêmequetut’enrendescompte.Etquandilauraréussiàtecouperdumonde,àtevidertotalement,alorstucomprendrasquej’avaisraison.

Ilenfilasavesteet,aprèsundernierregard,quittamonappartement.Àboutdesouffle,lecœurenmiettesetlecorpspétridedouleur,jem’écroulaicontrelemurjusqu’àheurterlesol.Jem’octroyaideprofondesinspirationsetexpirationspourtenterdechassermonmal-être.Aprèsplusieursminutes,jemerelevaietallaidansmachambremechanger.J’enfilaiunpullépaisetunbasdejogging,espérantlimiterlefroidquis’insinuaitenmoi.

Je passai lamatinée dans le coton. Après l’euphorie dema nuit avecAndrew, l’atterrissage futdouloureux.LesmotsdeDanflottaientdansmoncrâne,provoquantmêmeunelégèrecrisedeparanoïa.Ets’il avait raison…Si j’avais cédé trop facilement…L’univers d’Andrew et lemien n’avaient rien encommun…Pourquoim’avait-ilchoisie?

Lajournéepassalentement,trèslentement.Malgrétoutemavolontéàm’occuperetàm’activerdansl’appartement,jemesentaispresquenauséeuse.Jen’avaisaucunregretconcernantmanuitavecAndrew,maisj’avaisl’impressiond’enpayerlesconséquencesdemanièredisproportionnée.

***

Finalement,c’estavecuncertainsoulagementquejeregagnailePeninsula.J’yretrouvaiSamavecune pointe d’anxiété. S’il me parlait de Blake, c’était que tout l’hôtel était au courant. Mais lestransmissionssepassèrentsansencombre.Oupresque.

–Blakealaisséunmotpourtoi,l’enveloppeestdanstabannette.–Oh…merci,murmurai-jeenrougissant.–Ilt’aimebien,ondirait,plaisantaSam.–Ondirait,oui,souris-je.Jemeperdis dans le souvenir de ses lèvres surmamain.QuandSamme ramena à la réalité en

claquantdesdoigts,jem’aperçusquejecaressaismapaumeensouriant.–T’esavecmoi,là?s’amusamoncollègue.–Humm…oui.Justeunpeudefatigue.–Lanuitaétécourte?Unsourireentendus’installasurseslèvreset,pendantuneseconde,jemedemandais’ilsavait.Ou

peut-êtrequ’ilnesavaitpas,etque,àl’instardeGregory,ilprêchaitlefauxpourobtenirlevrai.–Oui.Jesuisrentréetard,mentis-je.–Jevaisyaller,mafemmem’attendpourqu’onfêtesonanniversaire.–OK…Bonnesoiréealors,dis-jedistraitement.–Tuessûrequetoutvabien?–Oui,oui.Parstranquille.Jedormiraidemaintoutelajournée.L’esprit encore embrumé, j’occultai volontairement la lettre de Blake. J’avais déjà beaucoup de

difficultés à trouver lamotivation pour fairemon travail, il fallait que je la conserve aumoins pourexécuterlestâchescourantes.

Maisceque jepensaisêtreunchoix raisonnable futune torture.Mesmainsagissaient,maismesyeux fixaient la bannette où reposait l’enveloppe. Mon cerveau était en veille et c’est en modeautomatiquequej’expédiaislavalidationdesréservations.

Je repoussai le dossier et arrachai le tiroir contenant le courrier d’Andrew. Son écriture était àpeinelisible.Etenvoyantquesonmotavaitétéécritsurundespapiersàen-têtedel’hôtel,jedevinaisqu’ill’avaitrédigéjusteavantsondépart,defaçonunpeuprécipitée:

Ilyatellementdechosesquejeveuxtedire,ettellementdechosesauxquelles jepense.Ettoujourstroppeudetempspourlespartageravectoi.Maisj’aiprisunedécision.Maseuleexception,c’esttoi.Jet’embrasse,Andrew.P-S:Garde-moitasoiréedu15.

JefronçailessourcilsàlavuedesonP-S.Le15…Ilm’avaitdit«quinzejours»,etmaintenant,ilm’annonçaitsonretourdansplusdetroissemaines!Maismadéceptionsedissipatrèsvite.Jerelussonmot:

Maseuleexception,c’esttoi.

Unsourirediscret,maisheureux,s’étalasurmonvisage.Son«exception».Ceseulmotsignifiaittellementdechosesmaintenant.Jerepliailanoteetlaglissaidansl’enveloppeadresséeàmonprénom.Ce n’est qu’à cet instant que je sentis un poids presque imperceptible. Je retirai le mot et retournail’enveloppe.

L’allianced’AndrewBlakeatterritdanslecreuxdemamain.Éberluée,jeprislabague.C’étaitbienla sienne. Toujours aussi brillante, avec une simple phrase gravée à l’intérieur : « Je ne veux pourflambeauxquetesyeux.»Souslechoc,jem’assisdanslefauteuiletfixailebijousansvraimentlevoir.

Ilavaitretirésonalliance.Pourmoi.Poursonuniqueexception.«Maisj’aiprisunedécision»,m’avait-ilécrit.C’était cela : se défaire de son passé et me choisir. Décider de garder dans un coin de sa tête

l’amourqu’ilporteàsafemme,pourmoi.Leslarmesaffluèrentàmesyeuxetjelessentisroulerlelongdemesjoues,incontrôlables.Aprèsplusieurssecondesdeconsternation,jemeredressaietlesessuyai.J’étaisdeservice,jedevaismereprendre.

Avec précaution, je remis l’anneau dans son enveloppe. J’étais flattée. Plus que flattée même.Andrewmeconfiait sonalliance,mais jesavaisquecesquelques lignesallaientau-delàdecesimplebijou.

Jedevaisluiparler.Maintenant.Prise dans l’urgence, je cavalai jusqu’à mon vestiaire et récupérai mon téléphone portable. Je

trouvailenumérodesonbureausursondossier«client»et,aprèsavoirvérifiél’heure,lecomposai.Leconnaissant,ilavaitdûyallerensortantdel’avion.

–BlakeMedias,Laurenàvotreécoute,fitunevoixnasillarde.–Euh…Bonjour.J’aimeraisparleràAndrewBlake,soufflai-je,surprised’entendresonassistante

merépondre.–M.Blakeestenréunion.Puis-jeprendreunmessage?débita-t-ellerapidement.–Oh…Dites-luiqueKathleenDillonaappelé.–Unnumérooùilpeutvousjoindre?demanda-t-elleavecunepointed’énervement.–M.Blakeamonnuméro.Bonnesoirée,dis-jed’unevoixferme.Jeraccrochaisanslaisserletempsàcettepimbêchedemesaluer.Jepensaifurtivementàl’appeler

sursonportablemais,s’ilétaitenréunion,iln’apprécieraitpasd’êtredérangé.Jemedécidaifinalementpourunmessage:

Heureusedetadécision.Messoiréessontàtoi.Toutes.Sansconditions.K.

Je reposai mon portable dans un coin et, ragaillardie par cette bulle de bonheur que venait dem’offrirAndrew,jereprismesoccupations.

Mon téléphone sonna trois minutes plus tard. En voyant le numéro d’Andrew s’afficher, je risdoucement.

–Bonsoir,soufflai-je.–Jevoulaisentendretavoix.Pourquoin’as-tupasappelé?–Tonassistantem’aditquetuétaisenréunion.Jenevoulaispastedéranger.Jel’entendissoupirerlourdement,puisilappelaLauren.Intérieurement,jeressentaisuneformede

jubilation.Letonqu’avaitemployéAndrewétaitsecetmâtinédecolère.Detouteévidence,qu’ellefassebarrageneluiplaisaitpas.

– Lauren, quand Kathleen Dillon cherche à me joindre, vous me la passez, fit la voix étoufféed’Andrew.

–Mais…–Peuimporte.Nejouezpasavecmoi,Lauren,vousêtesàdeuxdoigtsdeperdrevotrejob.–Bien,monsieurBlake,murmura-t-elle.J’entendisunnouveausoupir,puisunbruitde frottement.Andrewdevait sûrementavoir retiré sa

maindumicro.–Préviens-moisicelasereproduit.–Cen’étaitrien,Andrew,soufflai-je,soudainementprisederemords.Tuesoccupé,c’estnormal

qu’ellefiltre.–Ellenetefiltrepas,toi!Jenetoléreraipasquetusoismisedecôté.–D’accord,chuchotai-jeavecdouceur.Mercipour…tonmot,lançai-jemaladroitement.Etpourle

resteaussi.– Ilétait tempsque je le fasse.Elle…Elleappartientaupasséet jenepeuxplusvivredansson

souvenir.–Andrew,jamaisjenetedemanderaid’oubliertafemme.Tul’asaimée.Etdetouteévidence,une

partiedetoil’aimetoujours.–Peut-être.Comments’estpasséetajournée?éluda-t-ilrapidement.–Bien.Je…J’aivuDan.–Oh…As-tupuluiparler?–Jen’aipaseulechoixàvraidire,ilm’attendaitchezmoi.–Cheztoi?s’écria-t-il.Commentest-ilentrécheztoi?–Legardien,expliquai-je.Mais,j’aimisleschosesaupointaveclui.Ilyeutuncourtsilence,etjemedemandaissijedevaisvraimenttoutluiraconter.Vulacolèrequ’il

avaitmanifestéeauprèsdeLauren, jen’osaisimaginersaragesi jeluiracontaismaconversationavecDan,ouàquelpointcelam’avaitsecouée.

–Ettajournée?demandai-jefinalement.–Longue…Chargée…Etloindetoi.J’aidûdécalermondéplacement.–J’aivu.Le15.C’estloin,avouai-jeenm’apercevantàquelpointjem’étaisattachéeàluietàsa

présence.–Vas-tuenfinreconnaîtrequetuespresséedemevoir?–Jamaisdelavie!ris-je.Tonegoestdéjàtellementmonstrueux!–Pasautantquetonentêtement!Cecidit,j’appréciequetuaiesappelé.–Oh,etpourquoi?l’interrogeai-jeensouriant.–Parceque,d’unepart,çaprouvequetutiensuntoutpetitpeuàmoiet,d’autrepart,çalimitela

casse.–Çalimitelacasse?répétai-jesanscomprendre.–Tucomprendrasdemain.–Andrew!râlai-je.Tusaisquejedétestequandtumecachesdeschoses.

–Jenetelescachequepourtonproprebien.Je grommelai, plus pour la forme que par volonté de vraiment savoir ce qu’il dissimulait.

ConnaissantAndrew,ilavaitencorefaitdansl’extrême.–Jedoistelaisser,murmura-t-il.–OK.Passeunebonnesoirée.–Jet’embrasse.Àplustard.L’instantsuivant il raccrochait,sansmêmemelaisser l’occasionderépondre.Unpeusurprise, je

regardaimontéléphoneavantdeleposerprèsdemoi.LerestedelanuitfutplutôtcalmeetjeprisplusdetempsquenécessairepourtraiterledossierdeBlakeMediasetfairelesréservations.Etcesmêmesréservationsmefirentréfléchiraugenredesoiréequ’Andrewvoudraitpasser.

Cet homme avait tout : l’argent, le pouvoir, la volonté. Mais je ne connaissais aucune de sespassions.Peut-êtrelepiano,songeai-jeenrepensantaufaitqu’ilavaitdemandédefaireaccorderceluidel’hôtel.Unconcert…Jesecouailatête.Ilvenaitdansquasimentunmois,etj’étaisdéjàentraindemerongerlessangs.

***

Le lendemain matin, Gregory arriva tout sourire à mon pupitre, m’apportant un café au lait. Cesimplefaitétaitsuspect.Etquandsonsourires’élargitàmesurequemesyeuxseplissaientdesuspicion,jepaniquaipresque.

– Gregory, tume fais peur, dis-je alors qu’il s’appuyait surmon comptoir, aussi silencieux quesouriant.Qu’est-cequetucaches?

–Moi?Rien!–Gregory!grognai-je.–Jeviensdem’apercevoird’untruc…SitucouchesavecBlake…–Jenecouchepasaveclui,lecoupai-jevivementenrougissant.–Oh…Bon,disonsquesitu«entretiensunerelationaveclui»,reprit-ilenmimantlesguillemets

avecunegrimaceexagérée,c’estqu’iln’entretientpasderelationaveclablonde.–Jepensaisquetulesavaisdéjà!–Jelesavais,maismaintenantçaveutdirequ’ilestdéfinitivementhorscourseetquecejolipetit

lotestàmoi.Une forme de fierté et d’excitation anticipée brilla dans ses yeux. Je le regardais, me retenant

d’exploserderire.–Gregory,jenevoudraispasruinertoustesespoirs,maisj’ail’impressionqu’ellenecôtoiepasle

mondedeshumains.–TuasréussiàattirerBlake…–Je…–Nedispaslecontraire!mecoupa-t-ilvivement.Donc,situaseuBlake,jepeuxavoirlablonde.–Meghan,corrigeai-je.MeghanStanton.Tonfantasmeaunnom,sifflai-je.–Eneffet,ettoi,tuasunemissionpourmoi.–Quelgenredemission?demandai-je,soupçonneuse.–M’aider.Jeveuxquecettefemmetombeàmespieds,sipossiblenue,etmedemandedel’honorer

jusqu’àlafindestemps,déclama-t-il.JepouffaiderireenvoyantGregorybomberletorse,convaincuparcequ’ildisait.Jerepensaià

Meghan,froide,distante,presquemesquine.ElleallaitécraserGregorycommeonécraseunmoucherongênant.

– Greg, arrête de regarder les péplums… Le gladiateur qui réussit à séduire la femme del’empereur,çaresteducinéma!

–Nesoispasdéfaitiste.Jecomptesurtoi!Ettuasséduitl’empereur!–Commentsuis-jecenséet’aider?–Tuasobtenusonnuméro?–Euh…non.–Tantpis.Ilfautquetumedisescequ’elleaime.Jesuiscertainquetuasdesinfos,ajouta-t-ilen

désignantl’ordinateurdevantmoi.–Jeneferaipasça,Gregory.–Ohnon,Kat…Pitié,nemefaispaslecoupdelafilleultraprofessionnelle!–Jevaismegêner!Situveuxluiparler,vas-y.Etamuse-toibiensurtout.Ellereviendrasûrement

avecAnd…avecM.Blake,corrigeai-jeenrougissant.–Talignededéfenseestmauvaise,Dillon.Tucouches…ahnon,pardon,tu«entretiensunerelation

privilégiée»avecunclient.Etfranchement,siturefusesdem’aiderspontanément,jevaisdevoiravoirrecoursàdesméthodeshonteusesetinavouables…

–Comme?demandai-je,soudainanxieuse.–Lechantage.Jemecrispai,songeantàtoutcequeGregorysavait.Lepire,évidemment,étaitcequ’ilnesavait

pas,maisquesonesprittorduimaginait.–Gregory,tuneferaispasça?murmurai-jeavecinquiétude.SiPerkinsapprendque…–Perkins?Maisenfin,Kat,tumeprendspourqui?–J’aicruque…–Kat,cequisepasseentreBlakeettoineregardequeBlakeettoi…Etmoiaussi,accessoirement,

maiscen’estqu’undétail.J’aimieuxpourtefairechanter…–Vraiment?Un sourire géant et effrayant s’étira sur ses lèvres. La phase de soulagement, que je venais de

ressentirenapprenantqueGregorynediraitrienàPerkins,s’effaçaaussitôt.Gregoryavaitétéflicdansuneanciennevie,ilsavaitcommentfairepressionefficacement.Ilretirauneenveloppedesapocheetlaposadevantmoi,laissantfermementsonindexdessus.

L’inconnu.

CHAPITRE14

–Lalettrecontretonaide.–Cen’estpasfair-play,Greg!–Jet’écoute,triompha-t-ilalorsquejepianotaissurmonclavier,défaite.Jesoupirai,àlarecherched’informationssurMeghanStanton.Sincèrement, jenecroyaispasune

secondequ’ellerespireraitneserait-cequelemêmeairqueGregory.Maisilavaitunelettrepourmoiet,malgrélesderniersévénements,jem’étaisattachéeàl’hommequim’écrivait.

–Ellearéservéuneséancedemassagelorsdesondernierséjour.Tudevraispeut-êtrecommencerparlà,suggérai-je.

–Parfait…Ilrelâchalalettreetjel’attrapaivivementavantdelafourrerdansmabannette.Gregory,heureux

commeunpape,s’éloigna.–Gregory?–Oui?–Faisdansleclassiqueavecelle:fleurs,dîner…flatteries,ajoutai-jeavecunepointed’ironie.–J’ypenserai!lança-t-ilavantderegagnersonbureau.Samarrivapourassurerlarelèvequelquesinstantsplustard.Cen’estqu’unefoisassisedanslemétro,bercéeparleronrondelarame,quejeressortislalettre

del’inconnu.Àl’intérieur,jetrouvailaphotod’uneville,baignéeparlanuitetseulementéclairéeparquelqueslumièresisolées.Jelaregardaiunlongmoment,laretournaimême,avantdelaglisserderrièrelalettre.

ChèreMarie,Merci. À l’exclusion dema famille, il est rare que je reçoive des cadeaux aussi… personnels. Je suisvraimenttouché.Unlivre…C’estplusqu’unlivre.Jemesouviensquedansvotrepremièrelettre,vousmeconseilliezdelire.J’aisuivicetterecommandationetjesuisheureuxqueceromanfassepartiedemeslecturesàvenir.Jenepeuxpascroirequevotreviesoitsicalme.Vousenviez lamienne,quand j’envie lavôtre.Vousavez du temps.Vous pouvez faire des choses,moi… je cours.Constamment.Après le temps qui file,après mon travail, après les gens que j’aime. Je n’ai pas assez d’heures pour faire les chosescorrectement.Néanmoins,j’essaye…Ledestinnevousapasoubliée.Sinon,jeneseraispasentraindevousécrirecettelettre.Vivezvotrevie,Marie.Nevousenlisezpasdanscequevousn’aimezpas…N’était-cepaslesbonsconseilsquevousmedonnieziln’yapassilongtemps?Vousvoulezêtrerassurée?J’ouvrevoslettresdanslesilencelepluscomplet.J’attendsd’êtreseul,jecoupelamusique,jefermelesfenêtres,j’éteinsmontéléphoneetjedécouvrevotrecourrier.Lebruitdupapiermerendheureux.Ouvrirvos lettres, c’est…excitant.C’estcommesi, lettreaprès lettre, jevousdécouvraisunpeuplus.Etj’aimeensavoirplussurvous.

Magrandepassionn’estpaspartageableparécrit.Jejouedupiano.Mallaplupartdutemps.Maismafamilletentedemefairecroirel’inverse.Dieumerci,jenedorsplusdansmachambred’enfant.J’aiunlitd’adultemaintenant!Vous souvenez-vous de votre premiermessage ? Il parlait du destin et d’unemain tendue. Je croisl’avoirtrouvée.Elleest…incroyable.J’ailasensationd’êtremoiquandjesuisauprèsd’elleet,quelquepart,jesaisquec’estgrâceàvous.Vousm’avezpousséàouvrirlesyeux,àmettredecôtémasolitude.Pourvousd’abord,etmaintenantpourelle.Vousn’avezpas idéeàquelpointvousécrirem’asauvé.Debiendes façons.J’oseseulementespérerquemeslettresvousapportentquelquechosed’aussifort.Jemesenspresqueredevableethonteuxdevousdevoirautant.Àdéfautdevous jouerdupiano, j’aiquandmêmeuncadeaupourvous.C’estceque jevoisquand jevousécris.C’estcequim’inspirequandjevousécris.Saufpourcettelettre…Maisc’esttoujourslanuitquejevousécris.Peut-êtredevrais-jechercheruneexplicationrationnelleàça?Jevousembrasse…Etsijepouvais,jevousenlacerais.Jenesaispassionpeutdirecegenredechosesdansunelettre,maisvousêtesimportantepourmoi.Votreinconnu.

Jereluslalettreplusieursfois,etmanquaideloupermonarrêt.Jesortisdumétroencourantavantdegagnermonappartement.J’ôtaimonmanteauetmonbonnet,etmeprécipitaidansmonlit.Lafatiguemegagnadèsquejeposailatêtesurl’oreiller.

***

Àmonréveil,enmilieud’après-midi, j’étaisencorecomateuse.Jemefisunthéetconsultaimontéléphoneportable.J’avaisunmessaged’Andrew:

Laplupartdesgenscomptentlesjours…Personnellement,jecomptelesnuitsquimeséparentdetoi.Prendssoindetoi.A.

Cettefois,jeneretinspasmonsourire.Monmugàlamain,jefixailavuebrumeusedevantmoi.Jepensaidenouveauànotrenuitensemble,àsonsourire,àsesmots,aufaitqu’ilvoulaitquej’oubliequiilétait.J’avaisdéjàoublié.Àmesyeux,AndrewBlaken’étaitplusunmillionnaireexcentriqueetarrogant,ilétaitjustel’hommeavecquij’avaisdormi,l’hommepourquij’étaisl’exception,l’hommepourquijecomptaislesjoursavantsonretour.

L’hommeàquijedevaisunesoirée.Voilà sur quoi j’allais devoir œuvrer. Furtivement, je songeai que je ne savais que très peu de

chosessurlui,etmêmepaslanourriturequ’ilaimait.Jefronçailessourcils,àlarecherched’uneidéeàlafoisoriginaleetàmaportée.Siluipouvaitsepermettred’êtreexcentrique,moi,jedevaisplutôtagirdanslamesure.

Perduedansmespensées,jefinismonthéetconsultaiencoreunefoismonportable.J’étaistentéedeluienvoyerunmessagepouravoirsonavis.Maisjesavaisqueceseraitpeineperdue.Ilprendraitunmalinplaisirànepasmerépondreet,parailleurs, jevoulais le surprendre.C’est la sonneriedemoninterphonequimetirademessonges.

–C’estMaria,chantalavoixdelafleuristedel’hôtel.Jelalaissaiaccéderàl’immeubleet,quelquessecondesplustard,ellesonnaàmaporte.Quandje

luiouvris,elleétaittoutsourire,lesmainsdanssondos.–Livraisonàdomicile,expliqua-t-elleenentrantdanslesalon.Andrew…Qu’avait-ilencoremanigancé?Jerefermailaportederrièreelleetluifisface.Deson

dos,ellesortitunelongueetsuperberoseblanche.–C’estsonassistantequiaappelémais,crois-moi,rienqu’àlacommande,jesavaisquec’étaitlui,

expliqua-t-elleenmetendantlafleur.

Je pris la rose d’entre sesmains et souris en la portant àmon nez. Son parfum était légèrementcapiteux,maisj’aimaisça.Jesavaisdésormaisqu’ilmeseraitimpossibledenepasassocierAndrewàcesroses.

–J’aipréférévenirtel’apportermoi-même,ditdoucementMariaenmetirantdemespensées.–Mercid’avoirfaitledéplacement.Cen’étaitpasnécessairepoursipeu.–Kat,jevoistonsourire,jesaisquecen’estpas«sipeu».–Cen’estpascequejevoulaisdire.Andrewm’ahabituée…–Andrew?Oh!Donccen’estplus«MonsieurBlake»?fit-elleavecunairfaussementétonné.–Leschosesontunpeu…évolué.–Oh…–Maisc’estencore tôt.Et je suis raviequ’ilait finipar seconteniretpar fairedans lamesure,

soulignai-jeendésignantmarosesolitaire.–Oh!Kat,tuestellementnaïve!ritMariasoudainement.Jefronçai lessourcils,cherchantuneexplicationàsonhilarité.Jereportai la fleursousmonnez,

m’enivrantdesonparfum.LeriredeMarias’éteignitetellemefixaunlongmoment.–Jenevenaispasquepourça,àvraidire,avoua-t-elledansunmurmure.–Vraiment?–Vraiment.J’auraistrèsbienputefairelivrercetterose,maisAndrewBlakeestdugenretêtuet

persuasif.Elle se dandina sur ses pieds et sembla soudainement mal à l’aise. Je l’invitai à s’asseoir et

m’installaiprèsd’elle.–Qu’est-cequ’ilt’ademandédefaire?soupirai-jeensongeantàsesmultiplesabusdepouvoir.–Ehbien…Ilyalarose…etilyaça,hésita-t-elleenposantunécrinsurlatable.Jefixailepetitcubedeveloursdevantmesyeux.J’auraisreconnulamarqueentremille:Cartier.

Lesbijoux.Lesouvenirdesapetitemascaradepourmefaireessayerlecadeaudesamèremerevintentête.Prèsdemoi,j’entendisMariasoupirerlourdementavantdesefrotterlesmainssursonpantalon.

–Oh!fis-je,tétanisée.–J’aidûallerlerécupéreràlaboutique.–C’est…impossible,murmurai-je.Rapidement,j’analysailatailledelapetiteboîteetconfrontaimesobservationsausouvenirdema

soirée dans sa suite. De toute évidence, il ne s’agissait ni d’un collier ni d’un bracelet. Je déglutisviolemment,prisedansuneformedetourbillondejoieetdepeur.Toutallaittropviteaveclui.Toutétaitdansl’excès,danslaviolence,danslapuissance.Jedétestaislafaçondontilimposaitsonpointdevue.

Je souris à cette pensée. C’était aussi son arrogance qui m’avait séduite. Son abnégation à mevouloir, samanièredemechambouler, rienqu’avec son regardétincelant…Sesbaisemainsm’avaientconquise.Etmaintenant,danslesilencelepluscomplet,auprèsdeMaria,jemedemandaissijedevaisouvrircetteboîteoufairecommesiellen’existaitpas.

–Tudevraisl’ouvrir,lâchaMariaprèsdemoi.–Tucrois?–Ehbien,jepensequ’ainsituarrêterasderegardercetteboîtecommesielleallaitexploserdansla

minute.–Ilfautquejeluidisedecesserça,soupirai-jeenprenantfinalementl’objetentremesmains.–«Ça»quoi?–Lesexcèsentoutgenre,précisai-jeenouvrantl’écrin.Unpeu tremblante, je découvris une sublimepaire debouclesd’oreilles. J’entendisMariagémir

d’aise. Je lui lançaiun regardet,d’unmêmemouvement,nousnousaffaissâmes toutes lesdeux sur lecanapé.

–Jecomprendsmieuxpourquoiiln’avaitpaslebudgetpourlesfleurs,ritMariaprèsdemoi.–Ilestdingue…Quelgenred’hommefaitcestyledecadeauàunefemmequ’ilconnaîtàpeine?–Legenrequialesmoyens.Etjedoisavouerqu’ilaplutôtbongoût.–Jenesaispassijedoisaccepter.–Ohque si, tu acceptes.Tu le remercieset tubénis le cielquecethommeveuille te couvrirde

bijoux.–Maria,c’estunclientdel’hôtel!–Demande-luidechangerd’hôtel.–Maria!râlai-je.–Kat,tunedevraispastefaireautantdesoucis.Tupeuxgérerça.–Lescadeauxhorsdeprix?–Lui.Ilteveut,constata-t-elleenselevantdemoncanapé.–Ilmeveutetdoncjedoisjusteêtred’accord?l’interrogeai-je,stupéfaiteparsonraisonnement.– Tu sais que ce n’est pas ce que je veux dire. Il ne te veut pas comme la plupart des hommes

veulentunefemme.Iln’estpas…vulgaireou…pressé.Kat,cetypeestsûrementprêtàtoutpourtoi.Tutrouvesquecesbouclessontexcessives?Sincèrement,jeparieraismaboutiquequ’ilnetrouverajamaisriendesuffisammentexcessifpourtoi.

–JeneremetspasencauseAndrewoucequ’ilpenseressentirpourmoi,expliquai-jeenmelevantàmon tour. Je dis juste que toute cette situation est étourdissante. J’aimerais prendre le temps de leconnaître… Tiens, je ne sais même pas quel genre de cuisine il aime, marmonnai-je en repensant àl’organisationdenotresoirée.

–Jedoisyaller,maispromets-moidenepasêtretropdureaveclui.Savourecequ’ilt’offre.–Maisilt’amisedanssapoche,ondirait!m’écriai-jeenriant.–Jet’aiditqu’ilaétépersuasif!Pourtouttedire,jeneluiaimêmepasfacturécettelivraison!

soupira-t-elle,commepresquedéçued’êtreaussifaibleaveclui.J’éclataiderireetl’embrassaifurtivementsurlajoue.Ellesedirigeaverslaporteets’éclipsaen

directiondesascenseurs.Jel’observaideloin,heureused’avoirunefemmecommeelleàmescôtés.Jerefermailaportedoucementetrécupéraimontéléphoneportable.

Ànousdeux,Andrew.–BlakeMedias,Laurenàvotreécoute.–Bonjour,KathleenDillonpourAndrewBlake,jevousprie.–Nequittezpas,m’intima-t-ellesèchement.Ilyeutunpetitsilencepuis,aprèsundéclic,lavoixd’Andrewmeparvint:– Ce que j’aime chez cette fleuriste, c’est qu’elle tient toujours parfaitement les horaires de

livraison,rit-il.–Tun’auraispasdû!legrondai-jegentiment.–Jesavaisquelaroseétaitdetrop.Toujourss’enteniràl’idéedebase!–Andrew!râlai-je.Cesbouclessontmagnifiques,vraiment,cen’étaitpasnécessaire.–Eneffet…Maisj’aitoujourscruqu’uncadeaunedevaitpasêtrenécessaire.Donc,jeterejoins

surcepoint.–Quesuis-jecenséefairemaintenant?interrogeai-je.–Est-cequepleurerenm’attendantseraittroptedemander?–«Tropmedemander»?Depuisquandt’inquiètes-tude«tropm’endemander»?plaisantai-je.–Jeneveuxpastefairefuir,répondit-ilavecsérieux.Lesilences’imposaentrenous.Letonlégerdenotreconversationétaitentraindelaisserplaceà

autre chose. Je sentis une boule se former dansma gorge et, brutalement, je n’eus plus la force de lecontredire.Detoutefaçon,jenevoulaispasluimentir:lafuitefaisaitpartiedemoi.

–Ellesteplaisent?s’inquiéta-t-ilfinalement.–Ellessontsuperbes.–Jemetargued’avoirungoûtcertainpourleschoses…précieuses,dit-ilavecunevoixchaude.Jeretinsunrirenerveux.Andrewavaitlechicpourmemettremalàl’aiseenunesimplephrase.–Tutravaillescettenuit?–Oui.Etlanuitprochaine.–J’espèrequetesclientssontsagesavectoi.–Oh…laroutine,certainsm’offrentdesfleurs,d’autresdesbijoux…Parfois,j’aidroitàunbillet

de5dollars,ris-je.–Tonrirem’avaitmanqué.Encore un silence. J’entendis sa respiration dans le combiné et, pendant une courte seconde,

j’imaginaiqu’ilétaitprèsdemoi,samaincaléedansmondos.Mariaavaitraison:jedevaissavourercesinstants-là.

–Jedoisadmettrequetumemanquesaussiunpeu.–Pourquoifais-tucegenred’aveuxquandjesuisàdeskilomètresdetoi?–Jeprésumequ’êtreautéléphonesimplifieleschoses.–Oh…Donc,jenedevraispastedirequecettelignerenvoiesurmonportable,etquejesuispeut-

êtreàNewYork.–Vraiment?m’écriai-jeensautillantdejoie.–Non,fit-ilenriant.Maisj’auraisaimévoirtatête!–Tuesméchant!grognai-je.–Jeneveuxquetonbien.Jet’assure,uniquementtonbien,ajouta-t-il.Jeneferaijamaisrienpour

t’embarrasser.–Oh…Doncmonbonheurpasseavant tout le reste, j’imagine,plaisantai-jeenespérantdétendre

l’atmosphère.–Kathleen,j’aiperdulafemmequej’aimais,jen’aipasvu…cequej’auraisdûvoir.Jenetiens

pasàrevivreçaencoreunefois.Savoixétaitlourdeetsérieuse.Jememordisleslèvres,meretenantdeluidemanderdesdétails.Sa

femme était morte dans un accident, il la regrettait, mais quelque chose dans sa conduite me laissaitpenserquejenesavaispastout.

–Est-ceque…Est-cequ’unjour,tumeparlerasd’elle?l’interrogeai-jeprudemment.–Jenecroispas,répondit-ilsèchement.Cen’estpascontretoi,reprit-ilplusdoucement,c’estjuste

quejeneveuxpasmereplongerdanstoutça.–D’accord,murmurai-je,unpeudéçue.Ilfautquejetelaisse,jedoismepréparer.–Tumeforcesàt’imaginernueoupresque,etc’estmoileméchant?sourit-il.–Andrew…,gémis-jedoucement,imagine-moidansmatenueduPeninsula,jesuiscertainequetes

fantasmesvontvites’éteindre.–Necroispasça…Tun’aspasidéedunombredefoisoùj’airêvédet’enlevercetrucimmonde.

Tun’espasfaitepourça!–«Ça»quoi?Lepolyester?–Exactement.–Alorspourquoisuis-jefaite?Lesatinetlasoie?–Mêmepas…Justenue.J’éclataiderire,m’imaginantentraindedéambulernuedevantlui.L’imagen’avaitfinalementrien

dechoquant,maisjedoutaisdepouvoirlefaireunjour.Nonseulementcen’étaitpastropmonstylemais,enplus,jen’étaispasspécialementàl’aiseavecmoncorps.

–Jedoisvraimenttelaisser,dis-jeentredeuxrires.

–Justequandlaconversationdevenaitenfinintéressante!–Jenecroispasquepoursuivrecettediscussionsoitvraimentutile,m’esclaffai-je.–Eneffet.Jepréféreraisl’avoirfaceàface.Peut-êtremêmequejetrouveraisunmoyenagréablede

tefairetaire!–Voilàquiestbienprésomptueux,monsieurBlake.Etcommentferiez-vousça?–Jecroyaisquetunevoulaispaspoursuivrecetteconversation?rit-il.–J’aimeraisjustesavoirjusqu’oùvonttescapacitésdepersuasion.–Plus loinque tune l’imagines.Peut-êtremêmeplus loinque jene l’imaginemoi-même. Il faut

croirequejesuisprêtàfairel’impossiblepourtoi.Je sentis mes joues se colorer vivement. Cette voix, cette façon de faire des promesses aussi

profondessansenavoirl’airmechamboulaienttotalement.Lemondecloisonnéquejem’étaiscrééétaitenpleineexplosion.Àcausedelui.Pourlui.

–Turedeviensprésomptueux,plaisantai-je.–Jesuistrèssérieux,Kathleen,murmura-t-il.Vraimentsérieux.Crois-moi,j’aimeraisêtreprèsde

toi. Être présomptueux au téléphone est nettement moins drôle. Je préférerais te voir, t’entendre, tetoucher…

–Etremettreencausenotrerelationprofessionnelle?–Kathleen!râla-t-il.– Pardon… Bientôt, soufflai-je. Bientôt tu pourras faire toutes ces choses. Me faire toutes ces

choses,précisai-jeenmemordantlesjouesd’anticipation.–Pasassezvite,approuva-t-ild’unevoixprofonde.–Bonnesoirée…Et…encoremercipourlesboucles,hésitai-je.–Monplaisir,mademoiselleDillon.Etpuislesondetavoixestlemeilleurdesremerciements.Jerougisdenouveauetfusheureusequ’ilsoitdel’autrecôtédupays.Iln’avaitpasbesoindevoir

l’adolescentequ’ilfaisaitressurgirenmoi.Ilenauraitététropheureuxetm’auraitrenduefolle.Aprèsunsilencesuccinct,ilrepritlaparole:

– Serait-ce présomptueux de t’embrasser avant que tu ne détales pour exaucer les vœux de tesclientsmillionnaires?

–Non,répondis-je,j’adoreraisça.Tupeuxcomptersurmadiscrétionprofessionnelle.– Et voilà qu’elle retrouve la raison, souffla-t-il comme un grand soulagement. Je t’embrasse,

Kathleen,termina-t-ildansunmurmure.Jefrissonnaietserrailetéléphoneavecforce.J’étaisàdeuxdoigtsdeperdrelecontrôle.Aurait-il

ditunmotquej’auraisrappliquéimmédiatementàsescôtés,laissantmaviederrièremoi.–Andrew?l’interpellai-jeavantqu’ilneraccroche.–Oui?–Concernantcetterelationprofessionnelle…–Oui,grogna-t-il,apparemmentpeuraviquejereviennesurcesujet.–Tuesmaseuleexception,soufflai-je.Je devinais son sourire et l’imaginais enfin détendu. Je n’avais pas vraiment eu l’occasionde le

côtoyer sansêtre en lutte contre lui.Mais l’entendre rire,voir sonvisagecalmeet serein,meplongerdanssonregardétincelantferaientdéfinitivementpartiedemesprioritéslorsqu’ilseraitderetour.

–Tun’imaginespas…combienjesuis…heureuxdel’apprendre.Plusqu’heureuxmême.–Jevoulaisjustequetulesaches.Jet’embrasse.Jeraccrochai,lesourireauxlèvresetunejoiedébordanteenvahissantmoncorps.

***

Enmilieud’après-midi,Lynnem’appelapourpasserunmomentavecPhilipetelle,etdiscuterdel’organisation de la cérémonie. Le mariage de mon amie était assez loin sur ma liste des priorités.AndrewBlakeavaitlittéralementtoutbalayésursonpassage.Soudain,jecomprisàquelpointmaviemesemblait terne, tristeetvide.Lemêmesentimentdesolitudeetderoutinequ’avaitgénérél’annoncedel’inconnumesaisit.

Il fallait que je le remercie dansma prochaine lettre. Sans lui, je n’aurais sûrement jamais oséfranchir le pas. Avec un sourire, je fourrai l’enveloppe dans mon sac, envisageant de lui répondrependantlanuit.Jequittail’appartementetm’engouffrairapidementdanslemétro.L’hiveravaitreprissesdroitsetlefroidmepénétraitjusqu’auxos.

JerejoignisPhilipetLynnedansunpetitcaféquisevoulaitêtreunerépliqueamélioréeduCaffèGreco.Lesfutursmariésdiscutaient,deuxtassesfumantesdevanteux.

–Bonsoir!dis-jejoyeusement.–Oh…Tevoilà.Cappuccino?proposaLynne.–Cappuccino,c’estparfait.Bonsoir,Philip.–Kat,mesalua-t-il froidementalorsqueLynnes’éclipsaitpourpassercommande.Commentvas-

tu?–Bien,jeteremercie.Commentvontlespréparatifs?–Çaavance.Lynneesttrèsorganisée.Ellegèreparfaitementlasituation.–Eneffet.Lacérémonieserasuperbe,jen’endoutepas.Philip me lança un sourire glacial. Ses yeux étaient sombres, inexpressifs, provoquant, comme

toujoursensaprésence,cesentimentdemalaise.Maiscommedenombreuxhommessurlepointdesemarier,jeprésumaisquelespréparatifsnel’intéressaientpas.Lynnerevintavecmoncappuccinoetjelaremerciai.

–J’aiunserviceàtedemander,hésita-t-elleavecunevoixdouce.–Jet’écoute,dis-jeenportantlatasseàmeslèvres.–J’aimeraisquetonpèremeconduiseàl’autel.–Quoi?m’écriai-je.Mais…Maismonpèreteconnaîtàpeine!Simessouvenirsétaientbons,ilss’étaientcroisésdeuxfois,aucoursdel’uniquevoyagedemon

pèreàNewYork.Jesavaisqu’ilavaittoutdesuiteappréciéLynneetsabonnehumeurpermanente,maisjenepensaispasqu’ilsétaientsiproches.

–Kat,tusais…pourmesparents,repritdoucementLynne.Jeneveuxpasremonterl’alléeseule.–Je…Enfin…Lynne,jenepeuxpasmeprononcerpourlui.Appelle-le.–C’estvrai?Tuescertainequecelanetedérangepas?JelançaiunregardenbiaisversPhilip.Jemedemandaispourquoicen’étaitpassonpèreàluiqui

accompagneraitLynne.Maisilauraitétémalvenud’engagerlaconversationsurcesujet.–Certaine,assurai-jeàmonamie.Appelle-le.Aumoins,çaluiferauneexcusepourvenirmevoir!–Super!Merci,Kat.Lynneretrouvainstantanémentsonsourireetsonvisageradieux.Ellen’avaitjamaiseulachancede

connaîtresesparentsetavaitétéballottéedefoyerenfoyeravantd’intégrerl’université.Jenepouvaispasluireprocherdevouloirunmariagedignedecenom,avecnonseulementlarobeetlaréception,maisaussiquelqu’unpour l’accompagner jusqu’à l’autel. J’avaisde la chanced’avoirmonpère, j’allais lepartager.

–Seras-tuaccompagnée?medemandabrutalementPhilip.–Je…Euh…,balbutiai-je.Je…Jenesaispas.–TuneveuxpasdemanderàDan?proposaLynne.–Danetmoiavonsrompuilyadeuxjours.–Oh…Ilmesemblaitpourtantquecelafonctionnaitentrevousdeux.

–Parfois,onfaitdemauvaischoix.L’amourn’estpasqu’unequestiondelogistique.LesouriredeLynnes’effaçaetses traitssedurcirent.Évidemment,maremarquevalaitavant tout

pour sonmariage précipité. J’aurais tellement aimé qu’elle le comprenne enfin et s’aperçoive qu’ellecouraitàsaperte.

–Donc,tuserasseule?s’inquiétaPhilip.–Jenesaispas.Peut-être.–Peut-être?Tusorsavecquelqu’und’autre?Jebaissailatête,fixantlatasseàmoitiévideentremesmains.Jenesavaispasvraimentcomment

qualifiermarelationavecAndrew.Etdesonpropresouhait,ilvoulaitpréserversavieprivée.MêmesiLynneétaitmonamie,mêmesijebrûlaisdeluifairepartagermonexpérience,jenepouvaispasvraimentenparler.

–Pasvraiment.C’estunpeu…compliqué,expliquai-je.–Compliqué?répétaPhilip,dubitatif.Tusorsavecunhommemarié?rit-il.Mes yeux s’agrandirent et mon regard navigua entre Philip, hilare, et Lynne, passablement

consternée. Elle savait. Je baissai les yeux de nouveau, ne supportant pas le rire gras de Philip.Nonseulement celamemettaitmal à l’aisemais, enplus, ilmedonnait l’impressionquema relation avecAndrewétaitchoquante.

–Unhommemarié?répétaLynne.–Jeneveuxpasenparler.Àvraidire,çaneregardepersonne.–Jecroyaisquelasituationétaitsouscontrôle?demanda-t-ellesèchement.–Certaineschosesnesecontrôlentpas,Lynne!Peut-êtredevrais-tu,toiaussi,t’enrendrecompte!–Jesaisoùjevais,merci.Maiscommentpeux-tucroirequ’il…?–Qu’ilquoi?Qu’ils’intéresseàmoi?–Quiest-ce?demandaPhilip.Tuleconnais,chérie?Ellesetournaversluiet,avantquejenepuissel’enempêcher,labombeexplosa:–AndrewBlake?s’étonna-t-ilalorsquesonsourires’effaçait.–C’estunclientdel’hôtel,précisaLynne.–Évidemmentquec’estunclient,iladespartsdanslachaîne!s’exclamaPhilip.Cetypechercheà

s’implanteràNewYorkdepuisaumoinscinqans!–Vraiment?m’étonnai-je.Tulesavais,Lynne?–Non…Non,biensûrquenon.Jemesuis toujoursappliquéeà leservircommeunclient.Tu le

connais?demanda-t-elleàsonfiancé.–Pasvraiment…Lemondedesaffairesestunpetitmonde.Maiscetypeestvraimentpuissant.Ce

n’estpasunsecret:ildétientunvéritableempireavecsesjournaux,maisjesaisqu’ilveutaussiinvestirdanslaconstruction,ici.Jeneseraispasétonnéqu’ilaitunprojetencours.

Il y eut un petit silence, presque gênant. Lynne était toujours sous le choc après avoir apprisqu’Andrewpossédaitenpartiel’hôtel.Quantàmoi,j’étaisabasourdie.Chaquefoisquejepensaisenfinvoir levéritableAndrewBlake, jedécouvraisunenouvelle facettede sapersonnalité.Philip finit soncaférapidementetmelançauncoupd’œildiscret:

–Jeprésumequ’ils’estremisdelamortdesafemme?lâcha-t-ilavecironie.– Sa femme estmorte ? s’exclamaLynne.Mais quand allais-tu enfin te décider àm’en parler ?

m’interrogea-t-elle,vexéed’avoirétémiseàl’écart.–Andrewveutresterdiscret.Personnen’abesoindesavoirça…nilereste,ajoutai-je.S’ilteplaît,

Lynne.–Est-cequec’estsérieuxentreluiettoi?–Çapeutledevenir,murmurai-je.Jenesaispastrop.

–Lamortdesafemmeaététerriblepourlui,expliquaPhilip.Pendantunmoment,onamêmecruqu’ilallaitseretirercomplètementdesaffaires.Maisc’estuncoriace,lessentimentsn’ontpasdeprisesurlui.

–Philip!m’exclamai-je,voulantprendreladéfensed’Andrew.–Oh,Kat,Philipasûrementraison,renchéritLynneenposantunemaincompatissantesurlamienne.

Tu ne devrais pas trop… t’emballer. Reste sur tes gardes. Tu es sûre pour Dan ? demanda-t-ellefinalement.

Jeretiraivivementmamain,mefaisantpresquemal.JetoisaiLynne,luilançantmonregardleplusmauvais.Commentosait-elle?C’étaitmesquin.

–Lynne,tun’espaslamieuxplacéepourlesconseilsrelationnels.Nedevions-nouspasparlerdecetincroyablemariagequetuprépares?grognai-je.

Elle se redressa légèrement, piquée au vif, et sortit des feuilles de son agenda. Je devinais deslarmesaubordde sesyeux,maisme refusais à la réconforter. J’aimaisLynne, elle était incroyable etpleined’énergie,maissonmariageétaitunevéritableerreur.

–EtçafaitlongtempsavecBlake?m’interrogeaPhilip,hermétiqueàmoncombatavecmonamie.–Jenecroispasquecelateregarde!ripostai-je.Ilsemblaétonnéparmacolèreetlevalesbrasdevantluiensignededéfense.Ils’enfonçadansla

banquetteetenroulasonbrasautourdeLynne.Sideprimeabord,celasemblaittendreetbienvenuentredeuxpersonnesquiallaientsemarier,jeconstataissurlevisagedePhilipuneabsencetotaled’émotion.Il agissaitmécaniquement, avecdistancemalgré leur apparenteproximité, son regardvide sebaladantautourdenous,nes’attardantjamaissursafuturefemme.

Montéléphonevibradansmapocheetjedécouvrisunmessaged’Andrew:

Nepourraipasserqu’unenuitàNewYork.Garde-la-moi.A.

Ladéceptionmegagna.Ilétaitloin,etjedoutaisd’êtresuffisammentrassasiéedeluienseulementunenuit.

–C’estlui?medemandaPhilip.–Oui…Il…Sonplanningestcompliqué.–Ilnevientpluslasemainedu15mars?demandaLynne,repassantainsienmodeprofessionnel.–Seulementunenuit,soupirai-jeavectristesse.Jesecouailatête,chassantcettedéconvenue.Lynnem’observa,sonplanningultraprécisentreles

mains,unsourirecompatissantsurleslèvres.–Bien.Sinousparlionsdel’organisationdecemariage?proposai-jepourchangerdesujet.–Parmitesnombreusesmissions,tudevraspréparerundiscours.–Undiscours?Undiscourssurlesjoiesdumariage?–Lesjoiesdunôtreenl’occurrence,rectifia-t-elledansunsourire.Jeluisourisàmontour,luisignifiantquemacolèrebrutaleavaitfinalementdisparu,heureusement

dissipéeparl’irruptioninattendued’Andrew.Jerelussonmessageencoreetencore.J’auraispuluirépondrequej’étaisdéçue,maisjenevoulais

pas l’accabler. J’espérais juste qu’il gérait au mieux ses priorités, mais une part de moi souhaitaitnaïvementêtre«sa»priorité.

–Hé!soufflaLynne,mesortantsoudaindematorpeur.Net’enfaispas,jesuiscertainequetoutvabiensepasser.

–Je…Jesuisjustedéçue,avouai-je.–Quedirais-tudefaireensortequecettesoiréesoitinoubliable?–Que…Quoi?

–Demain, shopping…Ça tombebien, ilme faut aussi certaines choses…pour la nuit de noces,ajouta-t-elleenjetantuncoupd’œilversPhilip.

Mais le souriredeLynnes’effondraaussitôtenvoyantqueson fiancépianotait sur son téléphoneportable.Unvoiledetristessepassadanssonregard,maisellelemasquaquandilsetournaenfinverselle:

–Désolé,chérie.Uneurgenceautravail,s’excusa-t-il.Tudisais?–Rien…rien.Tudoisretourneraubureau?demanda-t-elle.–Eneffet.Jesuisnavré,monange.Onpeutreparlerdetoutçacesoir?s’enquit-ilendésignantles

feuillesentreLynneetmoi.–Biensûr.Philipl’embrassafurtivementsurleslèvres.MalgrétousleseffortsdeLynnepourparaîtredétendue

etheureuse,sonregardrestaitsombre.Elleeutunsoupiràpeineperceptibleetseforçaàsourire.–Est-cequetoutvabien?l’interrogeai-je.–Je…Oui…J’auraisaiméqu’ilreste,c’esttout.–Lynne,soupirai-je.Quandvas-tuenfinouvrirlesyeux?–Ilaunposteàresponsabilité,l’excusa-t-elle.–Plus importantquevotremariage?Plus importantque toi?Voyons,Lynne, tu…tu te trompes!

lâchai-je,lasséedesonentêtement.Tutetrompessurtarelationaveclui.–Jel’aime,marmotta-t-elle.–Tucherchesàteconvaincredetonamourpourlui.Philipnet’aimepas,Lynne,ilsesertdetoi.Tu

esjuste…jolie,tuluidonnesl’imagequ’ilchercheàobtenir.–Philipn’estpascommeça.Nousavonsunerelationposéeetsincère.–Ettutecomplaisdanscegenredechoses?–Toutlemonden’apaslachancedes’envoyerenl’airavecunmillionnaire!lâcha-t-elleenfuyant

monregard.Estomaquée, je la toisai, me retenant presque de la gifler. Comment pouvait-elle juger notre

relation?Commentpouvait-ellemejuger,«moi»?L’argentd’Andrewnem’avaitjamaisintéressée,ellelesavait.

–Laseulechosequimeretientde tegifler,c’est l’amitiéqueje teporte.Je t’adore,Lynne,maisexplique-moid’oùsortcetteagressivité?demandai-jesèchement.Qu’est-cequiteposeproblème?QuejecouchepotentiellementavecBlakeouquejevivequelquechosequetuneconnaîtrasjamais?

–Commentpeux-tucroirequec’estsérieux?–Arrête !Tu ne sais rien, sifflai-je.Tu n’as aucune raison d’être jalouse…Sauf si, bien sûr, ta

relationidylliqueavecPhilipn’estfinalementqu’unmensonge.–Philip,lui,estréel.Tuvisdansuneespècedecontedeféessurnaturel.–Àtaplace,jenem’inquiéteraispasdemonmonde,maisplutôtdel’existencequit’attend.Tues

avecunhommeobsédéparsoncompteenbanque.Àsesyeux, tuesunobjetdedécoration,aumieux.Alorsjevissûrementdansuncontedefées,cequejefaistesemblesûrementcomplètementfou,maisjevis,Lynne.Jeviscedontj’aienvie.Jesuismoi-mêmeaveclui…

–…Etsonargent,finit-ellefroidement.–J’osecroirequ’ilpréfèreêtreobsédéparmoiplutôtqueparsonargent.Tupeuxdirecequetu

veux, rien neme fera changer d’avis surAndrew.Et il s’agit de toi. Tu vas dans lemur.Tu vas êtremalheureuse,tu…Bonsang,tun’espascettefilletristeetterne!

–Kat,aprèsquelquesannéesderelation,tuverrasquetouttourneainsi.Audébut,c’estl’extaseet,ensuite,ilterestejusteàsurvivreauquotidien.SiAndrewtientuntantinetàtoi,tun’échapperaspasàça,c’estinéluctable.

–Arrêtedecomparermavieàlatienne.Jesaiscequejeveux,etjesaisquejeneveuxpascequetupartagesavecPhilip.D’ailleurs,quepartages-tuexactementaveclui?

Ses yeux s’emplirent de larmes et je culpabilisai presque d’avoir été si rude.Notre amitié étaitforte.ElleavaitrésistéànosmultiplesprisesdebecausujetdesonmariageavecPhilipmais,sijamaisjedevaisfaireunchoix,jeleferaissanshésitation.Jenevoulaispascautionnercemariageetmonrôleétaitdelafaireréagir.Elleétaitcomateuse,triste,renfermée.Saufenprésencede…

– J’en étais certaine ! soufflai-je devant son éloquent silence. Lynne, la dernière fois que je t’aientenduerire,cen’étaitpasavecPhilip! lançai-jeenespérantluifairecomprendrecequ’ellerefusaitobstinémentdevoir.

Elle fronça les sourcils et chercha dans ses souvenirs. En vain. Elle secoua la tête et finit parreprendrelesfeuillesdepapierentrenouspourlesrassembler.

–NathanEvans,soufflai-je.Voilàledernierhommequit’afaitrire.–LecollaborateurdeBlake?–Lui-même.Etnemefaispascroirequetuessurprise!–Jelesuis!mentit-elleeffrontément.–Passe-moitontéléphone!luiordonnai-jeentendantlamain.–Quoi?–Passe-moitonfichutéléphone!–Pourquoifaire?demanda-t-elle,suspicieuse.Je…Iln’aplusdebatterie,mentit-elledenouveau.– Oh… Je présume que l’afflux de messages a fini par l’achever, plaisantai-je pour détendre

l’atmosphère.–Cen’estpascequetucrois,sedéfendit-elle.Cetypecroitque…Enfin,iltentedemedraguer.Je

luiaiditquej’étaisfiancée,mais…Ellesecoualatêteetjecomprisqu’elleétaitperdue.Quelquepart,ellecherchaitlasolution.Elle

avaitcettevietoutetracéeavecPhilip:sonmariage,desenfants,desréceptions.Unmondesanssaveurdanslequelellenedevraitqu’acquiescerdoucement.Etilyavaitl’autrevie,celleoùelleriait,celleoùellediscutaitdansuncoinsombre.

–Lynne,jevousaivuslesoirdelaréceptiond’Andrew.Tutecachais.Ilteparlait,ettutecachais!m’exclamai-je,victorieuse.Ettucontinuesdetecacheravectontéléphone!

–C’estfaux!s’écria-t-ellemollement.–Pitié,Lynne,cetypetefaitsentirbienet,pouruneraisonfoireuse,turefusesdel’admettre.–C’est…Cen’estpas…Je…,hésita-t-elleensepassantunemainsurlevisage.–Maisilsaitqueledestint’amisesursaroutepourunebonneraison,finis-jeenriant.–Ledestin?Pitié,Kat…Nemeressorspastessaladessurlesâmessœurs!Ellesoupiralourdement,évitantmonregard.Jesavaisquej’avaisréussiàlafairevacillersurce

qu’elle croyait juste et acquis.Elle ne pouvait pas épouserPhilip. Son téléphone sonna et je levai unsourcilmoqueur.

–Plusdebatterie,hein?–Laferme!sourit-elle,alorsqu’enfin,soulagée,jem’aperçusqu’elleavaitcompris.Elle prit son portable et lut lemessage. Jeme tordais le cou, espérant découvrir ce queNathan

pouvaitbienluiraconter.Ellecroisamonregardetrabattitl’appareilcontreelleensouriant.–Cetypeestfaitpourtoi!assénai-je,confiante.–Définitivement,répliqua-t-elleenriant.Ellemetenditsontéléphoneetjedécouvrisunmessaged’excusedePhilip,suivid’uneinvitationà

dînerpourcesoirdansunrestaurantchic.Jeréprimaiungrognementetacceptaimadéfaiteprovisoire.Jem’enfonçaidanslabanquettependantqueLynneluirépondait,unlargesourireirradiantsonvisage.

–Donc,cediscours,reprit-elle,plusdétendue.

Je poussai un profond soupir, abandonnant finalement toute idée de lui démontrer son erreur. Àregret,jeprêtaiuneoreilleattentiveàsespréparatifs.

Jel’écoutaisreligieusement,faisantfidesdoutessérieuxquej’avaissursonmariage.

CHAPITRE15

En sortant du café, je rejoignis immédiatement l’hôtel, permettant ainsi à Sam de gagner trenteminutessursonservice.Ilm’enremerciachaleureusementavantd’enchaînersurlespassations.Lenomd’Andrewsurlalistedesappelsretintmonattention.

–AndrewBlakeaappelé?–Justeavantquetuarrives.Apparemment,sonplanningestplutôtcompliqué.–C’est-à-dire?–Tudevraisnormalementrecevoirunfaxdesonassistante,maisilestpossiblequ’ildébarquela

semaineprochaine.–Lasemaineprochaine!m’exclamai-jevivement.–Celateposeunproblème?demandaSam,unpeusurprisparmaréactionviolente.–Je…Euh…Non…C’estjusteque…Enfin,cen’étaitpasprévu,bégayai-jeenrougissant.Sam fronça les sourcils, renonçant à comprendre mon excitation manifeste. J’avais un sourire

jusqu’aux oreilles, etme retenais presque de danser pour faire partagerma joie. Il venait la semaineprochaine!

Aprèsledépartdemoncollègue,jescrutainerveusementlefax,vérifiantqu’ilavaitbiendupapieret qu’il était convenablement branché. Quand, enfin, il émit un petit son strident, je sursautai sur machaiseetarrachaiquasimentlafeuilledel’appareil.Ilavaitconfirmé:unenuit,lasemaineprochaine!Jelâchaiunpetitcriextatiqueavantdesoupirercommeuneadolescentedevantlaphotodesonidole.Cethommeétaitentraindefairedemoiunepilehormonale!

Jenerésistaipasàcomposersonnuméroaubureau,espérantentendrelesondesavoix.Mais,denouveau,cefutLaurenetsavoixdétestablequim’accueillit.

–AndrewBlakepourKathleenDillon,dis-jeparautomatisme.–M.Blakeestendéplacementactuellement.Jeluiferaisavoirquevousavezappelé.–Merci,pourriez-vous…–Bonnefindejournée,mecoupa-t-ellefroidement.Garce!Pouruneraisonobscure,cettefemmenem’appréciaitpas.Unpeurefroidieparcetappel,la

joie que j’avais ressentie s’évapora petit à petit. J’envoyai tout de même un SMS sur le portabled’Andrew,luidemandantdemerappeler.

Manuitfutcalmejusqu’àl’arrivéedeLynne,àl’aube.Ilétaitàpeine7heuresquandellefranchitlaportetambour.Ellemelançaunregardtristeetdésemparéets’arrêtaàmonpupitre.

–Aurais-tuunpeudetempsàlafindetonservice?–Biensûr.Est-cequetoutvabien?l’interrogeai-je.Tuasl’air…–Jen’aipasfermél’œildelanuit,avoua-t-elle.Sûrementlestressdumariage.

–Sûrement,approuvai-jeavecunsourirecompatissant.Dès que Sam réapparut pour prendre le relais, je fonçai dans le bureau de Lynne. Je la trouvai

devantlaseulesourcedelumièredesonbureau:sonécrand’ordinateur.Sansdireunmot,ellem’invitaàm’asseoiretmetenditundossier.

– Séjour de Blake la semaine prochaine, lâcha-t-elle en guise d’explication. C’est son planningdétaillé.

–Oh…J’aireçulefaxhiersoir.J’ouvris le dossier, découvrant qu’Andrew ne restait effectivement qu’une seule nuit, mais qu’il

venaitavecMeghanetNathan.J’étaispresquedéçue.Ilyavaitdeforteschancesqu’ilnepuissepasmeconsacrer de temps. Égoïstement, j’aurais voulu qu’il vienne pour moi.Maintenant, je savais que cen’étaitpaslecas.

–Dequoivoulais-tumeparler?m’enquis-je.–Philipteproposeunevisited’appartementsceweek-end.Ilveutt’accompagner.–Philip?Lynne,jen’aipasbesoinqu’ilsoitlà.Jepensaisjustequ’ilallaitmemettreenrelation

avecdesagentsimmobiliers…–Ilyatroisappartementsqu’ilveuttefairevisiter,etilssonttousprochesdecheznous.Peut-être

pourras-tutejoindreànouspourledîner?–Oui…OK…Biensûr.Est-cequetoutvabien,Lynne?Vraiment,tum’inquiètes.–Philipestrentrétard,etjemesuiscouchéetard…Troptardsûrement,impossibledetrouverle

sommeil.Ducoup,j’aipenséquevenirtravaillerseraittoutaussibien.Elleportasonmugdecaféàseslèvres,fuyantmonregard.Jedevinailescernessoussesyeux,mais

l’expressiondesonvisagen’étaitpasdelafatigue.Elles’inquiétait.Quelquechoselatourmentait.–Lynne,situveuxmeparler,tusaisquetupeux.–Jeconnaisdéjàtonavissurlesujet.Soudain, son téléphone vibra et elle le chercha du regard quelques secondes, enfoui dans des

papiersetdesfactures.Elleeutunbrefsourire,puisleremitenveille.–ConcernantBlake…–Lynne,jeneveuxplusaborderlesujetavectoi…–Juste…Faisattentionàtoi,Kat.Pourl’instant, toutteparaîtbeauetfacile,maisjenevoudrais

pasqu’iltefassedumal.–Andrewn’estpascommeça.–J’espère,murmura-t-elle.Onsevoitceweek-endalors?termina-t-ellerapidement.–Sansfaute.RemerciePhilippoursontemps,c’estvraimentgentilàlui.–Jeleferai,assura-t-elle.Ce n’est qu’en regagnant mon appartement que je m’aperçus que j’avais oublié de répondre à

l’inconnu.Jemefustigeaid’êtreaussitêteenl’air,etce,justeparcequ’AndrewvenaitpasserunenuitàNewYork.

Cherinconnu,Mercipourvotrephoto.Cepaysageestsuperbeetmajestueux.Ettourmenté.Toutàfaitàvotreimagedonc.Lerefletd’unepartiedevotreâme,quevousm’ouvrezsivolontairement.Pouruneraisonidiote,jepensequevousentendrejouerdupianonedoitpasêtresiterrible.Etpouruneraisonencoreplusidiote, je sais que si cettephotom’ouvreunepartiede votre âme, le pianoenouvreune autre.Unepartieplussecrète,quevouscachez.Sûrementpourunebonneraison.Lamêmeraisonquifaitquevousm’écrivezlanuit.Seriez-vousinsomniaque?Depuis que je suis enfant, je crois au destin, aux rencontres, aux petits signes invisibles et pourtantimportantsquelavienousfaits.Laplupartdutempsjesuisseuleàycroire,parcequequandondevientadulte,ilsembleraitquecettepartdemagiedisparaisse.Ledestinoularaison,voilàleschoixquenoussommesamenésàfaireencoreettoujours.

Jenedoutaispasqueledestinfiniraitparvousfaireunsigne.Jesuistellementheureusequevousayeztrouvé cettemain tendue et qu’elle vous fasse sentir bien. J’aimerais vraiment que vousme parliezd’elle.Est-celabelleâmedontparlaitvotreannonce?Est-cedifférent?Jesaisquenousn’avonsencorejamais abordé le sujet, mais souhaitez-vous me parler de votre ancien amour ? Ce n’est pas de lacuriositémalsaine,c’estjustequejenecroispasavoirjamaisconnudansmonentourageunepersonnecapabled’aimerautant.Celam’intrigue.Jenesaisquidevousoumoiapporteleplusàl’autre.Toujoursest-ilquevoslettressonttoujoursunmomentdejoiedansmesjournées.Commevousmelefaisiezsipertinemmentremarquer,j’aisuivimespropresconseils.Jevis.J’ai,moiaussi,rencontréquelqu’un.Quelqu’underadicalementdifférent,etquimepousse,àchacunedenosrencontres,àêtreuneautre.Jenediraispasquejesuisuneautre,c’estjustequ’ilrévèleunefacettedemapersonnalitéquejeneconnaissaispas.Ilest…commentdites-vous?…incroyable.C’estça.Ausenspremier.Àvraidire,si jepouvais, jevous laisseraism’enlacer.Pas justepourvousfaireplaisir,maisaussipourvousremercierdevoslettres,delajoiequ’ellesm’apportent,delaforcequ’ellesmedonnent.Je ne sais pas non plus si cela se dit dans une lettre,mais vous êtes aussi important pourmoi, cherinconnu.Accepteriez-vousmaintenantdemedonnervotreprénom?Ondevientintimes,vousetmoi…Jevousembrasse,Marie.

Jemisl’enveloppesouspliet,l’instantd’après,gagnaimonlitpourunsommeilréparateur.J’enchaînai les deux nuits suivantes sur lemême rythme,mais l’absence de nouvelles d’Andrew

commençaitàm’inquiéter.Levendredisoir,alorsquejeprofitaisdemondébutdeweek-end,montéléphonesonnaenfinetje

meruaidessus.–Kathleen?fitlavoixd’Andrew.–Bonsoir,dis-jedansunsouffle.Àvraidire,j’avaiscavalédanstoutl’appartementpourêtrecertainedenepasloupercetappel.–Nouveaunuméro?l’interrogeai-jeenvoyantunnuméroinconnus’affichersurmonécran.–Excuse-moidenepasavoirappeléplustôt.Onm’avolémontéléphoneportableetmespapiers.–Quoi?m’exclamai-je.–J’étaisendéplacementàSacramentoetjemesuisaperçuhiersoirquejen’avaisplusrien.Jene

saismêmepasoùj’aipumefairedépouiller…Enfin,cen’estpasgrave,rassure-toi.–D’accord.Euh…Cenuméroest-ildéfinitif?–Tuenvisagesdemerappeler?plaisanta-t-il.–Maseuleexception,monsieurBlake…Ilmesemblaitquevouslesaviezdorénavant.–Mais c’est tellement bon de te l’entendre dire de nouveau.Et, oui, c’estmonnuméro définitif.

Justepourtoi.–Justepourmoi?J’aidroitàuneligneprivéeavectoi?souris-je.–Tuasdroitàbienplusqueça.Maisoui, tupeuxm’appelerquandtuveuxdirectementsurcette

ligne.–Bien.Mercidecettedélicieuseattention.J’apprécie.Il ne répondit pas et jem’inquiétai de nouveau. J’avais un pressentiment étrange et désagréable.

Mêmes’ilsemontraitdrôleetprévenant,ilyavaituneformedemalaise.–Aurais-jeleplaisirdetevoirmardisoir?demanda-t-ild’unevoixprofonde.–Çadépend.Veux-tumevoirautravailou…endehorsdutravail?–Oh…Attends,jeréfléchis…KathleenenpolyesterouKathleennue…Hummm…–Tevoilàredevenucethommeprésomptueuxetarrogant.–Nue,définitivement,m’ignora-t-il.Jerisdoucement,resongeantàlapropositiondeLynne.J’avaisvraimentbesoinderefairequelques

achats.Andrewmevoulaitnue,maisjemedoutaisqu’ilapprécieraitquelqueséléments…décoratifs.–Pouvons-nousdînerensemble?demanda-t-il.

–Euh…Àvraidire,j’aivuquetuvenaisavectescollaborateurs,donc…–Certes,maisj’aifaitlenécessairepouravoirmasoiréedelibre.–Tunereculesdevantaucunsacrifice.–Aucunpourtoi.Tudoislesavoir.Tues…importantepourmoi,avoua-t-ilaprèsavoircherchéle

motadéquat.Vraimentimportante,compléta-t-il.–Jesais,admis-je.Parfaitpourledîner,jedemanderaiàLynnedemodifiermonplanning.–Excellent.Italien,n’est-cepas?–Eneffet.Quelleexcellentemémoire!lefélicitai-je.–Iln’yapasundétailquej’aioubliéteconcernant.Aucun.Jesaisquetacouleurpréféréeestle

vert,etquetusaisfaireunnœuddecravate.TuaimesKeatsettuesattachéeauxvaleurséculées.Tunetelaissespasfaire,jamais.Tunesaispasdanser,maiscen’estqu’unadorabledétailcheztoi.Tunesaispasnonplusmentir…

–Je…–Jesaisaussiquetuascourupourprendrecetappel,parcequej’aientendutarespirationhachée.

Je sais aussi que ton corps est chaud sous les draps et, sincèrement, il me tarde de renouveler cetteexpérienceetdesentirtapeausurlamienne.

–Andrew,soufflai-je,lerougeauxjoues.–Dis-moiseulementsijemetrompe,murmura-t-il.–Non,avouai-je.–Jen’oublierienteconcernant,parcequetuesimportante.–Tues…dingue,souris-je.Vraimentdingue.–Seulementpartafaute.J’aihâtedetevoirmardi.–Moiaussi.Vraimenthâte.Tu…Je…Jet’embrasse,bégayai-je.–Àmardi.J’entendis un petit déclic et compris qu’il avait raccroché. Je restai plusieurs minutes interdite,

regardantsanslevoirmonécrandetéléphone.Ilavaitraison:ilmeconnaissait,maismoijenesavaisencoreriendelui.Dumoins,passuffisammentpourluitenirlemêmegenredediscours.

Jemepromis de creuser davantage le sujet dèsmardi soir.Quand jemeglissai dansmon lit, ladernièrepenséequimehantafutlaperspectivedesentirsapeausurlamienne.

***

Le lendemain, je me préparai activement dans l’attente de Philip. Ce dernier devait venir mechercherpourmeguiderdanslavisitedetroisappartements.Avecdixminutesd’avance,ilsonnaàmaporte.

–Désolé,jesuisunpeuenavance,lacirculationaétéplusfluidequecequejecroyais.–Pasdeproblème.Entre,jet’enprie.Ilmefitunebiserapidesurlajoueetpénétradansmonsalon.Sonmétierdepromoteurimmobilier

repritledessusetjelevisregarderrapidementautourdelui.–Jesais,jesais…C’estloind’êtreleplusbelappartementducoinmais,quandj’aiaménagé,je

n’avaispasvraimentlesmoyens.–J’imagine,murmura-t-il.–Jefinisdemepréparer,j’enaipourdeuxminutes.Jem’éclipsai en direction de la salle de bains, retenantmes cheveux dans une queue-de-cheval.

J’enfilaiungiletetrassemblaimesaffairesdansmonsacàmain.Quelquesminutesplustard,jeretrouvaiPhilipsuspenduàsontéléphone,parlantvisiblementaffaires.

–Parfait.Oui, j’aifait lenécessaire.Lecontratestdetoutefaçonconformeàcequenousavionsprévu.

Philipmejetauncoupd’œilet,d’unmouvementdetête,m’informaqu’ilavaitquasimentterminésaconversation.

–Ledélai?Commetoujours,leplusviteseralemieux…Jesais,sourit-il.Pourquoipas?Jevaissûrementavoiruncréneaudanslasemaine.

Iléclataderireets’éloignademoi.Jel’observaideloin,finissantmonmugdecafépresquefroid.Jen’avaisjamaisétéréellementprochedePhilip.Jesavaisqu’ilétaitpromoteur,maisjeprisconsciencequejeneconnaissaispasvraimentlatailledesonempire.

–Jedoistelaisser,dit-ilaprèsunnouveaurire.Toujoursunplaisirdebosseravectoi.Commeladernièrefois,crois-moi,j’engardeunsouvenirimpérissable.Siseulement…

Brutalement,ilsetournaversmoiet,presquesurpris,semblasesouvenirqu’iln’étaitpasseul.Ilmitfinàlaconversationetraccrocha.

–Unerelationdetravailsurlacôteouest,expliqua-t-ilrapidement.–Oh…Tubossessurlacôteouestaussi?–Depuispeu…Jeprospecte.Lesopportunitésseprésententàmoietjen’aipasl’intentiondeles

laisserfiler,sourit-il.–Jecomprends.–Tuesprête?Onpeutyaller?demanda-t-il.–Parfaitement.Nous rejoignîmes levéhiculedePhilip,unevoiturenoire surpuissantequi, àelle seule, endisait

suffisamment sur l’homme orgueilleux qu’il devait être. Il m’ouvrit la portière avec une étonnantegalanterieetjem’installai.

LaconduitedePhilipétaitviveetbrutale.Jefuspresqueraviedelafluiditédelacirculation,tantjesouhaitaissortirauplusvitedecettevoiture.

–Lynnem’aditque tucherchaisundeuxpièces.Jeneconnaissaispas tonbudget,alors j’ai tapédanslamoyenne.

–C’esttoutàfaitça.Cesontdeslogementsneufs?l’interrogeai-je.– Neufs, oui. Trois programmes différents, mais si tu es vraiment intéressée par un de ces

appartements,jeferaiensortequetunepayespaslevraiprix.–Uneristourne?plaisantai-je.–Exactement!C’estbienlemoinsquejepuissefaire.EtLynnevametuersijenefaisrienpour

t’aider.Ilsortitdelavoitureet,denouveau,fitpreuvedegalanterieenm’aidantàm’extirperduvéhicule.

JecomprisàcetinstantcommentLynneétaittombéedanslepanneau.Philipdonnaitlechange.Ilétait,deprimeabord,drôle,gentlemanetprévenant.Maisquelquechoseclochaitdans toutecette liste.Parfoismême, la façon dont il regardait Lynne était suffisamment parlante. Il ne la voyait pas vraiment, secontentantd’enfaireunaccessoiredanssaquêtederéussiteetdepouvoir.

Le premier appartement était lumineux et situé à un étage élevé.Comme de nombreux logementsneufs, il était avant tout fonctionnel et le moindre mètre carré avait été optimisé. J’en fis le tourrapidementpendantquePhilip,enretrait,attendait.

Ledeuxièmeressemblaitentoutpointaupremier,hormislebruitpermanentdelacirculation.Etletroisièmefitmonbonheur,iln’avaitriendeceslieuxmodernesetfroids.Larésidenceenelle-

même avait gardé l’ancienne façade en pierre et en briques, lui conférant un peu de chaleur.L’appartementétaitsimple,avecunechambreassezpetitemaisbaignéedelumière.J’observailavuesurNewYorkàtraverslabaievitrée.J’étaisconquise.

–C’estcelui-ci,affirmai-jeavecforceàPhilip.

–Vraiment?Tuescertaine?–Certaine.J’aimecetendroit.Jem’yvoisdéjà.–Oh…OK,balbutia-t-il.Ilseradisponibledébutavril,certainstravauxdeplomberiedoiventêtre

encoursdefinition.Jet’envoieuncontratdèsdemain.–Aveclaristourne?–Aveclaristourne,assura-t-il.Jesuiscontentquecelat’aitplu.Jeteproposequ’onaillefêterça.–Lynnedoitnousattendre,murmurai-jeenconstatantqu’ilétait18h30passées.–Sûrement.Etdenouveau,jedussubirsaconduitesportivedanslesruesdeNewYork.Nous arrivâmes rapidement à leur domicile etLynne sortit le champagnequand je lui appris que

j’avaistrouvél’appartementdemesrêves.Simonaprès-midis’étaitpassésansaccroc,lasoiréemedéplutrapidement.Aprèsavoiravaléd’un

traitsaflûteàchampagne,Philips’exiladanssonbureaupourytravailler.–Parlonsdetoi…Alors,leretourdeBlake?–Mardi,normalement.Etilnevientpasseul.–Oh!fitLynneens’affaissantsursachaise.Est-ceque…–Oui,soncollaborateurseralà.Ellerougitviolemmentavantdebaisserlesyeuxverssonassiette.Jesourislargement,secouantla

têtetellementlasituationétaitirrésistiblementdrôle.–Maisjeprésumequetuétaisdéjàaucourant?m’enquis-jepourlatester.–Je…Oui.Enfin,tusais,leplanningquesonassistantenousenvoieesttoujourscomplet…donc…–Oui.Leplanning,dis-jeenlevantlesyeuxauciel.Brutalement,uneidéemevint.Évidemment,celan’allaitpasplaireàAndrew,maisquelquechose

medisaitquejedevaistenter.–Andrewetmoiprévoyonsdedînerensemblemardisoir.Quedirais-tudetejoindreànous?–Pourtenirlachandelle?– J’étais prête à proposer àNathan de nous rejoindre. Il est de bonne compagnie, tu sais. Plutôt

sympamême.Elle leva les yeux surmoi, puisme regarda avec suspicion…ou jalousie peut-être.En tout cas,

quelquechoseneluiconvenaitpas.–Sympa?répéta-t-ellesanscomprendre.–J’aidéjàeul’occasiondedîneraveclui.Ilm’aracontéuntruchilarantsurunbœufquil’a…–…piétinéà15ans,finit-elledansunsourire.Ilfaitdurodéo.Je levai un sourcil, attendant une explication. Lynne remuait toujours sa nourriture et se rendit

comptedecequ’ellevenaitdedireencroisantmonregard.–Enfin…C’estcequ’ilditsursapageFacebook,balbutia-t-elle,gênée.Je…Jesuistombéedessus

parhasard.Jecherchaisdesinfos…surBlake,expliqua-t-ellepiteusement.–Andrewn’apasdepageFacebook…EtjenecroispasqueNathanenaitune.–Ah?–Lynne,j’aiétéjournalistedansuneanciennevie.J’aidéjàfaitmesrecherchessurAndrew,etil

n’apasdepage…Maintenant,jeveuxbienlavraieexplication.–Je…Onparle,unpeu,luietmoi.–Vousparlez?–Ilm’envoiedesSMSetparfois…jeréponds.–Parfois?–Souvent,avoua-t-elle.

Jesourislargementetmecalailatêtedanslecreuxdemamain.Lynnecommençaitenfinàs’ouvriretlavoirainsi,àlafoisperdue,heureuseetcoupable,étaitjouissif.

–Donc…Enfin,arrête-moisijemetrompe,laseulechosequit’empêchededîneravecnous,c’estPhilip?Tupeuxluidirequec’estundînerd’affaires,soufflai-jeenhaussantlesépaules.Jedoutequ’ilvérifie…

–Kat!s’écria-t-elle.Jenevaispasluimentir!–Doncilsaitausujetdetes«discussions»avecNathan?– Non ! Bien sûr que non ! Il imaginerait le pire ! De toute façon, nous avons prévu de dîner

ensemble,Philipetmoi.Mardi,c’estl’anniversairedenotrerencontre.–D’accord,Lynne,dis-jeavecunsourire.Jecomprends,mentis-je.Nousfinîmesnotrerepasensilence,maislesraresfoisoùjelevailesyeuxsurLynne,c’étaitson

téléphonequ’elleregardait.Avant de quitter son appartement, je lui demandaimon changement de planning pourmardi. Elle

acceptasansrienajouter.Cefutlàmadernièresoiréederépit.

***

Lelendemainmatin,jecomprispourquoiAndrewvoulaittellementpréserversavieprivée.Lechocfutrudeet,mêmesijeneleperçuspassurl’instant,mavieallaitchanger.

–Allô?fis-jeenrépondantàmalignefixe.–KathleenDillon?medemandaunevoixmasculine.–C’estmoi,oui.–Bonjour, jesuis journalisteauPost,nousaimerionsvousparlerdevotre relationavecAndrew

Blake.–Commentavez-vouseumonnuméro?m’enquis-je,lecœurbattant.–Donc,vouslaconfirmez?Jeraccrochaiaussitôtpuis,deuxheuresplustard,aprèshuitappelsidentiques,jedébranchaimon

téléphoneetmedécidaiàprévenirAndrew:

Lapressevientdem’appelerànotresujet.K.

Jesais.Nedisrien.Toutvabien?A.

Toutvabien.J’aicoupémaligne.K.

Parfait.Jet’appelledèsquepossible.A.

***

Aprèsplusieursjoursd’hésitations,jerebranchaimontéléphone.Jesavaisqu’ilmefaudraitchangerdenuméro.Danslasemi-obscuritédel’appartement,jemesentisbrutalementseule.Jerestaidevantla

baievitrée, réfléchissant auxdernières semaines, àAndrew,àmoi, àmavied’avantet à celleque jemenaismaintenant.

C’estdenouveaulasonneriedutéléphonequimesortitdematorpeurdansunsursaut.Lenumérod’Andrew s’afficha sur mon portable : l’ancien numéro. Je décrochai et, après un faible « allô »,n’entendisqu’unerespirationsifflante.

–Quiêtes-vous?criai-je,lecœurbattant.Mais très vite, la communication fut coupée. Quand je tentais de rappeler, une voix métallique

m’annonçaquelalignen’étaitplusattribuée.Lapaniquemegagnatotalementquand,quelquessecondesplustard,lenumérod’Andrew,lenouveaucettefois,apparutsurmonécran.

–Allô?fis-jed’unevoixtremblante.–Kathleen?MonDieu,est-cequetoutvabien?–Je…Oui…Quelqu’unvientd’appeler.Surtonancienneligne.–Monancienneligne?s’étonna-t-il.Jel’aipourtantfaitdésactiver.Jevaismerenseigner.J’aifait

lenécessairepourquetunesoisplusimportunée.Nathanarédigéuncommuniquédepressequiparaîtrademain.J’oseespérerquecesvautourscesserontdetetournerautour.Toutvas’arranger,assura-t-il.

Avantquejenecomprennepourquoi,jesentisleslarmescoulersurmesjoues.Quelquechoseavaitcédéenmoi.Cescoupsdefilde lapresse,puiscetappelétrange…Lesimplefaitd’entendre lavoixd’Andrewm’assurerquetoutiraitbienétaitlagoutted’eau.Parcequej’avaisdéjàentenducediscoursetquec’étaitlaplusfaussedesassertions.

–Kathleen?S’ilteplaît…S’ilteplaît,nepleurepas.Jeteprometsdefairel’impossiblepourtoi.Tulesais,n’est-cepas?

–C’est…C’estjusteque…Tun’espaslà,avouai-jed’unevoixétranglée.Et…Etmêmesi jetecrois,jesaisaussique…ilsn’arrêterontpas.Onnecesserademedireetdemerépéterquej’aieuunerelationavectoi,articulai-jeentredeuxsanglots.

–Quetuaseu?répéta-t-ild’unevoixblanche.Kathleen,jeneveuxpas…teperdre.Nimaintenantnijamais.Tunepeuxpasfaireça!s’écria-t-ilsoudain.

–Moi,non,maistoi,oui.–Tu…Tucroisquejevaistequitter?Tucroisque…Kathleen,n’as-tudoncriencompris?N’as-tu

doncaucuneconfianceenmoi?Je reniflai lourdementetessuyaimes jouesd’unreversdemain.Mapetitecrisedenerfsétaiten

traindeprendredesproportionsdésastreuses.– Ils vont se calmer, assura-t-il. Parce qu’ils tiennent sûrement plus à leur argent qu’à écrire un

articlecroustillant.–OK,soufflai-jeenmecalmant.–Kathleen, j’ai conscience que notre… relation n’est pas simple. Elle temet dans une position

ambiguëetjerefusequetusoisunevictimedeplus.J’aidéjàvécuça.Lamortd’Eleanoraétélapirechosedemavie.Lapire.Maisjesaisaussiquetues,toi,lameilleurechosequimesoitarrivéedepuis…longtemps.Jet’aidéjàditquejeferaitoutpourtepréserver,etjeleferai,sansaucunerestriction.

–D’accord.Je…Excuse-moi,c’est justeque…leschosesprennentuneproportionmonumentale,alorsque…

–J’ailuttépourtoi,etjecontinuerai.Nemelaissepas,ajouta-t-ildansunmurmure.–Jenesuispasunefillequiabandonnefacilement,souris-jeenespérantallégerl’atmosphère.Ilsoupira,évacuantainsilatensiondecetteconversation,etjedevinailatraced’unsourire.–Çameva…Lecommuniquéparaîtrademain.Ya-t-ilautrechosequejepuissefaire?–Non…Tuenasdéjàfaitbeaucoup,ilmesemble.Faisjusteensorted’êtrelàmardi.–Jenemanqueraisçapourrienaumonde…Surtoutque…,commença-t-ilavantdes’arrêter.–Surtoutquequoi?

–Commentdire?Jecroissavoirquetuasfaitdes…préparatifsenvuedemavisite.–Lynne…etNathan,conclus-je,presquemortifiée.J’entendislerired’Andrew,heureuxetléger.Jememordisfortementlalèvre,réprimantlahonteet

lerougequigagnaitmesjoues.–Génial!maintenantjemesensridicule,grognai-je.–Tun’asaucuneraisonde tesentir ridicule.Àvraidire, j’apprécie tongeste.Mais laprochaine

fois,j’espère…pouvoirt’accompagner.–Oh…Vraiment?Jepensaisquetuétaisplutôtdugenreàfairevenirlaboutiqueàtoi.De nouveau son rire résonna, mais il s’arrêta très vite. Je tendis l’oreille et compris que notre

conversation avait été interrompue. Je devinai la voix de Lauren, et fus surprise de constater qu’elletravaillaitundimanche.

–Laurenestavectoi?m’inquiétai-je.– Je l’ai fait revenirpourdiffuser lecommuniquédepresse.Ne t’inquiètepaspourelle,elleest

grassementrémunéréeencontrepartie.–Àvraidire,jem’inquiétaisplutôtpoursaviefamiliale.Onestdimanche,Andrew!N’as-tudonc

aucunepitié?m’exclamai-je.–Elleétaitlibrederefuser.Jen’imposeàpersonnequoiquecesoit…Saufpeut-êtreàtoi.Jedois

couper,éluda-t-il.JeprendsunvoldemainpourSacramento,etensuiteunautremardimatinpourNewYork.OnserejointauPeninsulavers20heurespuisjet’emmènedîner.

–Cetteorganisationmeconvienttoutàfait.–Trèsbien.Àmardialors…Ilmetarde,ajouta-t-ildansunmurmureàpeineaudible.–Moiaussi.Àmardi.Jeraccrochaietpassaiunemainsurmonvisageravagéparleslarmes.Parleravecluiavaitapaisé

certainesdemescraintes,maispastoutes.Quoiqu’ilfasse,quoiqu’ildise,ilyauraittoujoursunrisqueouunjournalisteunpeutropzélépouraffronterAndrewetsonarméed’avocats.Aprèsm’êtreassuréequemonappartementétaitbienferméàclé,jemecouchaietm’enroulaidansmacouette.

***

Àmonréveil,vers10heures,toutmesemblaplus…calme.NewYorkétaitbienréveillée,sij’enjugeaisparlebruitdelacirculationetlahargnedesautomobilistesenversleurklaxon.Jeprisletempsdemefaireunthéavantdem’apercevoirquejedevaisallerfairedescourses.

Cettenormalitéauraitdûm’inquiéter.Ausupermarché,aumomentderéglermesachats,lacaissièreme fixa avec intensité, scrutant mon visage. Je baissai le regard, gênée par cet examen un peu tropminutieux.

–Vousêteslafilledujournal?s’enquit-ellealorsqu’ellevérifiaitmonnomsurlacartedecrédit.–Jevousdemandepardon?– Le journal d’aujourd’hui. Z’êtes dedans ! expliqua-t-elle en saisissant un exemplaire du rayon

pourmemontrerlaphotoquiavaitétépriselorsdelaréceptiond’Andrew.J’arrachailejournaldesesmainsetmesyeuxparcoururentlapagedevantmoi.Ilyavaitunarticle

surAndrew,unephotodemoiet,justeaprès,lecommuniquédepresse.Incrédule,jerepliailejournaletleglissaidansmonsac.

–Fautpayer,madame!crialajeunefemmeoutrageusementmaquillée.–Oui…Oui,biensûr.Ellemerenditmacarte,etjeluitendisunbilletde5dollarspourréglerlejournal.–Alors,c’estbienvous,non?–Mamonnaie,jevousprie,luidemandai-jeunpeusèchement.

Elle me la posa brutalement sur le comptoir et haussa les épaules. Je ramassai aussi vite quepossible les pièces éparpillées devantmoi et, armée demes deux sacs de courses, je courus presquejusque chez moi. Je rangeai rapidement mes achats avant de me concentrer sur l’article consacré àAndrew. De toute évidence, le journaliste ne s’était pas foulé, reprenant juste des informationsbiographiquespuismaprésenceàsescôtés.

Ensuite,ilyavaitlecommuniquédepresse:

Mesdames,Messieurs,Nousavonsétéavisésd’agissementsdéplorablesenversKathleenDillon, en raisonde ses liensavecAndrewBlake,présidentdeBlakeMedias.AndrewBlakeserefuseàcommentertoutesassertionsourumeurss’agissantd’unepotentiellerelationamoureuse avec Mlle Dillon. Sa présence à la réception donnée lors du lancement du magazinePowerfullnedoitdonnerlieuàaucuneinterprétationautrequesonamitiéavecAndrewBlake.Comme depuis de nombreuses années, nous vous saurions gré de respecter la vie privée d’AndrewBlake,desafamilleainsiquecelledeKathleenDillon.Les méthodes de harcèlements, d’enquêtes et de filatures récemment constatées doivent cesserimmédiatementsouspeinedepoursuitesimmédiatesdevantlestribunauxcompétents.De lamême façon, toute photo non officielle d’AndrewBlake ou deKathleenDillon publiée dans lapressedonneralieuàunedemandedeconfiscationdetouslesexemplairesparus.Ce communiqué vaut avertissement. Des plaintes seront déposées immédiatement en cas de non-respectdecesdemandes.

Je repliai le journal. Curieusement, je n’étais ni heureuse ni triste, juste estomaquée. J’avais lasensationdeperdrelecontrôledemavie,den’êtrequ’unpantindansdesmainsmalavisées.JevoulaisjusteêtreavecAndrew,devais-jevraimentsubir toutça?Lapresse, lescommuniqués, les regardsenbiaisausupermarché…Sousprétextedevouloiràtoutprixgardernotrerelationcachée,nousétionsentraindenousexposerauxyeuxdetous.Mêmesi jecomprenaislechoixd’Andrew,jenesavaispassij’étaiscapabledesurvivreàlalamedefondBlake.

Je finis par me décider à débrancher définitivement ma ligne fixe. Je passai la journée entièrecloîtrée chezmoi,œuvrant àmechanger les idées.Mêmesi le tempsmeparut long, cene fut rienencomparaisondumardi.

Je regardais l’heure toutes les dix minutes, espérant arriver à 20 heures, comme par magie. Jen’arrivais pas à définir si j’étais anxieuse, ou simplement nerveuse. Je sentais juste cette bouledésagréabledanslecreuxdemonventre,quigrossissaitaufuretàmesurequelajournéeavançait.

Aumilieudel’après-midi,alorsquejesirotaisunthéententantd’oublierAndrewBlakeetcequesaseuleprésencedanslamêmevillequemoiprovoquait, lasonnettedemaporteretentit.Jesursautaiavant de vérifier l’identité de mon visiteur à travers le judas. Maintenant que les journalistesconnaissaientmonnumérodetéléphone,ilyavaitfortàparierqu’ilsavaientaussimonadresse.

Mais très vite, un sourire remplaça le masque d’anxiété et mon visage se détendit totalement.J’ouvris au livreur attitré deMaria – un jeune homme un peu lunaire, mais souriant. Je le remerciairapidementavantdeporterladizainederosesblanchesàmonnez.Divines.

Enattendantcesoir,avectoutemonaffection(etmonempressement…).Andrew.P-S:Unevoitureviendratechercherà19h30.Rendez-vousdirectementdansmasuite.

À18heures, jem’enfonçaidansunbainmoussant…Mabaignoireétait ridiculementpetiteetmeforçaitàgarderlesjambeslégèrementrepliées,maisj’avaisbesoindemedétendre.Évidemment,celanefonctionnapas.

À19heures,j’enfilaiunerobebleueetdesescarpinsnoirs,réprimantlestremblementsintempestifsdemesmains.Assisedansmoncanapé,j’attendisqueletempspasse…avant,finalement,decesserdelutteretdequittercetendroit. Jepatientaidans lehall,guettant l’arrivéed’unedesvoituresde l’hôtel

devantlaporte.Etenfin,unpeuavantl’horaireconvenu,undenoschauffeursseprésenta.Jefronçailessourcilsalorsqu’ilm’ouvraitlaportière.AndrewBlakesavait-ilfairedanslasimplicité?Cetteberlinesombre,auxvitresteintées,étaitsûrementunedesplusluxueusesduparcàladispositiondesclients.

Soudain, un élémentme revint à l’esprit :AndrewBlake n’est pas qu’un client. Il était aussi enpartiepropriétairedelachaînegérantlePeninsula…Forcément,celaluioctroyaitcertainsprivilèges.Jem’installaisurlabanquetterecouvertedecuir,cherchantunmoyenefficacedemedétendre.L’habitacleétaitsilencieuxet,trèsvite,jemeperdisdanslacontemplationdelaville,desruesgrouillantesetdeslumièresmulticolores.

Cen’estqu’en longeant lePeninsulaque jem’aperçusquenousneprenionspas l’accèshabituelmaisgagnionsdirectementlegarageausous-sol.Aprèss’êtregaré,lechauffeurvintm’ouvrirlaportièreetm’escortajusqu’àl’ascenseur.Mestalonsclaquaientbruyammentsurlebétonpeintet,mêmesij’étaisdans un endroit connu, éclairé et sûrement ultra sécurisé, je ne pouvaism’empêcher de ressentir unepointed’angoisse.

Jeremerciaipolimentlechauffeuretappuyaisurleboutonmenantau19eétage.Toutenregardantleschiffresdéfiler,jetrituraimapochette,lamaltraitantpresqueentremesmains.

Jeréajustaimongilet,espérantqueleredouxdelamétéo,entamécettesemaine,nemefassepasdéfaut.Enarrivantàl’étagedelasuite,alorsquemesescarpinss’enfonçaientdanslemoelleuxdelamoquette,jecomprisquecethôtelavaitdéfinitivementquelquechosedemagique,etlasoiréeàvenirnefaisaitquerenforcercetteprofondeconviction.

CHAPITRE16

Aprèsavoirprisuneprofondeinspiration,jetoquaiàlaportedelasuite.Celle-cis’ouvritdansunpetit déclic, et un sourire se dessina automatiquement sur mes lèvres quand je croisai le regard grismétalliquedeNathan.

–Bonsoir,Kathleen,dit-ilens’effaçantpourmelaisserentrer.–JusteKat,corrigeai-je.–Laissez-moivousaider,proposa-t-ilenm’aidantàretirermongilet.Ilm’indiqualechemindusalonetjelesuivis,cherchantunetracedelaprésenced’Andrewdansla

suite.Ilm’invitaàm’asseoirsurlecanapé,faisantdosàlachambre,avantdes’installerfaceàmoidansundesfauteuils.

–Andrewnedevraitpastarder,ilavaituneconfcallavecSanFrancisco.–Oh…Pasdesoucis.Jesuisunpeuenavancedetoutefaçon,souris-je.–Ilm’achargédevousaccueilliret,pourêtrehonnête,c’estlapremièrefoisquej’appréciequ’il

merefilesontravail.–J’imaginequ’ildoitêtreexigeant.–Ill’est.Maisilestincroyablementloyal,çacompense.–Vousêtesaussichargédesacommunication?m’enquis-je.–Jeluiavaisditquevousleremarquerieztoutdesuite!Jenesuispasdouépour…lasubtilité.–Oh…– Donc vous m’excuserez d’avance, mais je me dois de vous dire que vous êtes absolument

sublime!commenta-t-il.–C’esttrèsgentil.Allez-vousmeforceràvousretournerlecompliment?plaisantai-je.–Non…Pourdeuxbonnesraisons:lapremière,c’estqueledécalagehorairevasûrementfinirpar

metuer.–Çaoulanourrituredel’avion?souris-je.Ohnon…Çaouleshôtessesdel’air?corrigeai-je.–Kat,jesuis…blessé!s’écria-t-il,lamainsurlecœur.Jelevaiunsourcil,meretenantderire.–Vraiment?demandai-je,dubitative.–Non…En fait, je suis flattéquema réputation soitvenue jusqu’àvousetquevousayez retenu

toutescesinformationssurmatrépidantevieprivée.Maisofficiellement,vuqu’onseconnaîtdepuispeu,jemedoisd’êtreblessé!

–Etlaseconderaison?repris-je.–Laseconderaisonpayemonsalaireetdébouledroitsurnous.S’ilvousposedesquestions,dites

quej’aiétéunvraigentleman,chuchota-t-ilrapidementavantdedirigersonattentionderrièremoi.

Même si j’avais deviné qu’Andrew arrivait, il me sembla que tout mon corps avait senti saprésence.Mes muscles tendus se dénouèrent brutalement, son parfum frappa mes narines et la bouledésagréableaufonddemonestomacsedésagrégeadanslaseconde.Andrewpassaàmescôtésetsaisitmamaindroitequireposaitsurl’accoudoir.

Nosregardssecroisèrentet je l’observaiportermamainàseslèvreset l’embrasserfurtivement.Monbrasretombamollement,moncorpsliquéfiéparcetextraordinaireregard.Ilmefitunbrefsourireavantdesepencherversmoietdedéposerunchastebaisersurmajoue.

–Tuesabsolumentdivine,murmura-t-ilsurmapeau.Ils’assitprèsdemoi,soncorpsaussiprochequepossibledumien.Jerougisviolemmentetfermai

lesyeuxpourlimiterlebourdonnementdematête.Denouveau,ilrepritmamainetnouasesdoigtsautourdesmiens.Jeleregardaisfaire,presqueincrédule.

–Commentvas-tu?s’enquit-il.–Je…Bien…Jevaisbien,marmonnai-je.–Je tepriedem’excuserpour le retard,mais jedevais impérativement finiravantdepouvoir te

consacrerlerestedemasoirée.J’espèrequeNathanaétéàlahauteur.–Ilaététrèsprévenant.Nathan m’adressa un sourire heureux, puis un clin d’œil. Andrew se tourna vers moi, ignorant

presquelaprésencedeNathanenluifaisantdos.–J’aiprissoind’elle,ajouta-t-ilavecjoie.–Jecroyaisquecegenredeprérogativem’étaitréservé,souffla-t-ilenmefixantavecintensité.–Prendresoindemoi?–J’envisagedeprendresoindetoicesoir…Cesoiretlesautressoirsquetum’accorderas,dit-il

avecunedésarmanteassurance.Moncœurtressautadansmapoitrinetandisquejemecalaisaufondducanapé.Andrewrepritune

position neutre et enroula son bras autour demes épaules. Je fixai son visage, le dessin de sa barbenaissante, sesmèches de cheveux un peu trop longues qui lui retombaient sur le front, sesmâchoiressaillantes…Toutescespetitestouchesdeluiquim’avaientmanqué.

–CedéplacementàNewYorkn’étaitpasprévu?l’interrogeai-jesoudain.–En effet.Mais il semblerait que cette ville ait un étrange pouvoir addictif surmoi, répondit-il

tandisquesesyeuxmeparcouraient.–Oh…Beaucoupdetravailalors?– Énormément. Mais je refuse que nous passions la soirée à parler travail. J’ai un programme

nettementplusalléchantetdivertissantpourcesoir.Jebaissailesyeuxsurmesgenoux,chassantletremblementdemesjambes.Jesavaisquelerevoir

mechamboulerait,maisjen’avaispasprévuqu’ilsoitsi…démonstratif.–Tum’asmanqué,murmura-t-ilàmonoreille.Je tournai la tête, retrouvant ses yeuxbrillants.Denouveau, j’eus la sensationquemon corps se

liquéfiaitdansunocéandedésirchaudetbrûlant. Je levoulais.Physiquementetmaintenant.Sonbrastoujours enroulé autour de moi, je sentis la pulpe de ses doigts effleurer ma peau et un frisson metraversa.Àsonregard,jecomprisqu’ill’avaitsenti.

–Froid?demanda-t-ilavecunsourirearrogant.–Unpeu,mentis-jesciemment.Ilréitérasongeste,appuyantunpeusurlehautdemesbras,pendantquesongenoutouchaitpresque

lemien.Jehoquetaiensilence,maisnepusempêchermagorgedeseparerderouge.–Nememenspas,ordonna-t-ilavecunregardsévère.Jamais,ajouta-t-ild’unevoixaffreusement

basse.–Tum’asmanquéaussi…Toiettonarroganceperpétuelle,murmurai-je.

–Jenevoisaucunearrogancedanstoutça!Et,unefoisdeplus,sesdoigtscaressèrentmonbras,allantetvenantavecdélicatessesurmapeau.

Je frissonnaidenouveau, lui jetantun regardmi-amusé,mi-perplexe.Sonsourires’élargit, satisfaitdesoneffetsurmoi.

–Tonsourireestarrogant,expliquai-jeavecdouceur.–Aucunearrogance…Cen’estpascommesijeconvoitaislebiend’autrui,murmura-t-il.N’est-ce

pas,Nathan?ajouta-t-ild’unevoixforteensetournantverssoncollaborateur.Je sursautai légèrement,m’apercevant que j’avais oubliéNathanpendant notre échange et que ce

dernier,muetcommeunetombe,consultaitsontéléphoneportable.Andrews’écartaunpeu,laissanttoutdemêmesonbraspossessifautourdemoi,etfixasoncollaborateur.

–Quellessontlesnouvelles?l’interrogea-t-iltrèssérieusement.–Toujoursrien.JevaisrelancerJim.Qu’est-cequ’onfaitpourLauren?Andrewmejetaunregardenbiaistandisquej’observaisl’échangeentreeux.Ilsepassaunemain

surlevisageetmarmonnadanssabarbe.–Lauren?luidemandai-jeavechésitation.–Lesfuitesàtonsujet,expliqua-t-ilsimplement.Tulavires!grognaAndrew.–Andrew…,soufflaNathan,àlafoisdéconcertéetsurprisparsadécision.–Etjenereviendraipaslà-dessus!Elleestincapabledetenirsalangue!–Andrew,jesuiscertainequ’ellenevoulaitpas…–Kathleen,jetiensàmavieprivée.Ettuesmavieprivée.SiLaurenavaitsusetaire,plutôtquede

donnerdesinformationsàmonsujet,jen’auraispasétéobligédetefaireescorterjusqu’ici!lâcha-t-ilaveccolère.

Jemedétachailégèrementdelui,surpriseparsonchangementdeton.Jel’observaiunmomentet,alorsqu’ilmejetaitundernierregard,jecomprisquequelquechoselecontrariait.

–Vire-la,répéta-t-ilàNathan.Fais-luiunchèqueassezimportantpourqu’ellesetaise.Etrappelle-luilaclausedeconfidentialitédesoncontrat.

–Commetuveux,acquiesçaNathan.–Quesepasse-t-il?demandai-je.–Ilssavent,ditAndrewd’unevoixbasse.Pourtoietmoi.Ilssaventquetun’espasqu’uneamie,

précisa-t-il.Il se tourna versmoi et je remarquai le changement dans son regard. Ses yeux d’un vert brillant

s’étaientassombris.Ilétaitinquiet.Jerisquaiunsourirerassurantavantdeserrersamaintoujoursposéesurmonbras.Seslèvress’étirèrentdoucementetilsemblarassuréparmaréaction.

–Jeteprometsdetoutarranger,murmura-t-ilàmonintention.–Toutirabien,soufflai-jeenréponse.Situmeparlaisplutôtdufameuxprogrammealléchantdece

soir?l’interrogeai-jeavecjoie.–Ehbien,jevaiscommencerpart’inviteraurestaurant.Jeme levaiducanapéet récupéraimongilet.Andrewme lepritdesmainsetm’aidaà l’enfiler.

Maistoutcequemoncorpsenregistrait,c’étaitlapetitesensationélectrisantedesesdoigtssurmapeau.Ilcalaletissusurmesépaulesavantdesouleverlamassedecheveuxretenueparlegilet.Denouveau,jesentislereversdesamainpassersurmanuque,etilrabattitmacheveluredansmondos.

Jemetournaiverslui,lesjoueslégèrementrosies.–Tuasmislesboucles,remarqua-t-il,appréciateur.–Jenepouvaispasmanquerunetelleoccasiondelesmettre.Àcesujet,merciencore.–Ellessontàl’imagedelafemmequilesporte:précieuseetsublime.Ileutencorecepetit sourire irrésistibleetarrogant.Derrièremoi, j’entendisNathandemander la

miseàdispositiond’unevoitureaugarage.

–Jevaisprendremonmanteau,m’indiquaAndrewens’éclipsantverslachambre.–Çat’ennuiesij’empruntelamêmevoiturequevous?demandaNathanàtraverslachambre.–Donne-moiunebonneraisond’accepter!criaAndrew.–Jevaisprendreuntrucàemporter,ettravaillersurlegroschèquedeLauren.–Faiscommetoutlemonde,utiliseleroomservice!–S’ilteplaît,Andrew!–Roomservice!répétaAndrewensortantdelachambre.Ilavaitenfiléunevestenoireetsoncabanbleumarine,etjedevaisavouerqu’ilétaitsuperbeainsi.

Il s’approcha demoi, ajustant son col en faisant non de la tête àNathan. Instinctivement, je l’aidai às’habiller.Sesmainsretombèrent,melaissantresserrersacravateetlissersoncol.

–Tucommandesauroomserviceet,situveux,jetepayemêmeundecesmassagesquitefaisaienttantenvieladernièrefois!

–Tucherchesàmecorrompre?s’offusquaNathanavecunepetitevoixaiguë.–Tucherchesàt’incruster!–Laisse-levenir,plaidai-je.Ilveutjustepartagerlavoiture.Andrewbaissalesyeuxversmoialorsquej’apportaisladernièretoucheaucoltrèslargedeson

caban.–Tucroisça…Maisunefoissurplace,ildiraqu’ilneveutpasmangerseul,etils’incrusteraau

dîner.Jenelelaisseraipasfaireça!Roomservice!répétaAndrewenpointantsonindexsurNathan.–Cen’estpastrèssympa,boudaNathan.–C’estvrai,Andrew,approuvai-jeenattrapantmapochettesurlecanapé.–Allons-y,éluda-t-ilrapidement.Ilposaunemaindans lebasdemondos,réveillantcettezonenouvellementérogènechezmoi,et

nous dirigea vers la sortie de la suite. Je lançai un regard d’excuse à Nathan, réellement désolée. Ilhaussalesépaulesavantderécupérerundossiersurlebureauderrièrelui.

–Cen’est«vraiment»passympa,chuchotai-je.–Jenesuispasuntypesympa,Kathleen.Jesuis…arrogant,c’estça?–C’esttoncollaborateurleplusproche…Jemedemandemêmes’iln’estpastonmeilleurami!Andrewsecoualatêteetouvritlaportedevantnous.– Je n’ai pas d’ami dans le travail… Juste des gens qui bossent pour moi et sont payés en

conséquence.–Oh…Uniquementdesrelationsprofessionnellesalors?demandai-jeenm’arrêtantnetdevantla

porte.–Kathleen,soupira-t-il.–Laisse-levenir avecnous !Ona toute la soiréepournousensuite…alorsqu’ilva rester là, à

bosserpourtoi!Ilsoupiradenouveau,partagéentrel’agacementetl’enviedemefaireplaisir.Jemurmuraiun«s’il

teplaît»etillevalesyeuxauciel.–Allez,Nat,cria-t-il.Viens,ont’emmène!Unsouriregéants’étirasurmonvisageetNathandéboulacommeunfoufurieuxderrièrenous.–Merci,Kat,dit-ilavecunsourireheureux.–Etmoi,non?protestaAndrew.– Je sais qu’elle est définitivement meilleure que toi ! Tu n’es qu’un cœur de pierre, avide de

travail!–Àcesujet,j’attendsunretoursurJim,demainàmidi,dernierdélai.–Allonsdîner,proposai-jeenfranchissant laporte.Et,commetuledisais,parlonsd’autrechose

quedetravail.

Nous gagnâmes l’ascenseur pour rejoindre la voiture. Le même chauffeur que celui qui m’avaitconduiteicinousattendait.IlnousouvritlaportièreetNathan,justedevantmoi,esquissaunmouvementpours’asseoirsurlabanquette.

–Nathan,tuvasdevant…Etnecomptepassurmoipourt’ouvrirlaportière,grondaAndrew.Nathansefigeaet,aprèsunbrefregard,contournalevéhiculepourseplaceràl’avant.Jem’assis

surlabanquette,suivieparAndrew.Lavoituresortitdugarageet,dèsquenousfûmessurlaCinquièmeAvenue,Andrewpritmamaindanslasienneetlaportaàseslèvres.

–Continueàagirdelasorteetjeneseraiplusjamaiscrédibleenredoutablehommed’affaires.Jemefigeai,etcen’estqu’envoyantunsourires’affichersursonvisagequejecomprisqu’ilne

m’envoulaitpas.–Quelgenredepouvoiras-tusurmoi,Kathleen?m’interrogea-t-il.Il embrassa de nouveaumamain, gardant ses yeux plongés dans les miens. Je sentis mon cœur

bondirdansmapoitrinependantquemarespirationsesaccadait.Et à cet instant précis, aumilieu de la CinquièmeAvenue, je sus que j’étais en train de tomber

éperdumentamoureusedelui.Moncorpsétaitengourdi,presquecrispé,focaliséuniquementsurlui.La soudaineté et la violence de cette découverteme firent presque vaciller. Je clignai des yeux

plusieurs fois avant d’affronter de nouveau le visage d’Andrew. Il fronça les sourcils et un soupçond’inquiétudevintassombrirsonbeauregard.Leslumièresdelavilleéclairaientàpeinesonvisage,lesombresalternantavecleslueursvives.

–Est-cequetoutvabien?demanda-t-il.–Je…Oui.Je…Jerougisviolemment,lesangenébullitiondansmesveines.Jesavaisqu’iln’yavaitaucunechance

que je rende à cet homme ce qu’ilm’offrait actuellement. Je sentis ce picotement agréable dansmonventre,etlevailesyeuxsurlui.C’étaitlui…L’âmesœuràlaquellej’avaisenviedecroire,l’hommequime comprendrait enun seul regard, le destin auquel j’étais sûrement liée.Lentement, j’approchaimonvisagedusienetmeredressaipourarriveràlahauteurdeseslèvres.

Ilcomblal’espaceentrenouset,doucement,posasabouchesurlamienne.Cecontactdouxetfermeachevaleprocessus.

Jepassai,enuneseconde,deKatDillon,amieproched’AndrewBlake,àKatDillon,amoureusedel’hommeleplusarrogantqu’elleconnaisse.

Nouséchangeâmesunsourirepuis,ensilence,finîmesparrejoindrelerestaurant.Ànotrearrivée,je constatai qu’une fois deplus,Andrewn’avait pas fait dans la simplicité.Le restaurant italienqu’ilavaitchoisi–leVesuvio–était l’undespluschicdelaville.Nathannousdevançaitnettement.Ilétaitsimplement content d’avoir pu profiter de la voiture et semblait avoir compris qu’Andrew n’ensupporteraitpasdavantage.

Aunomde«Blake», l’hôtessedétaillaAndrewavecun large sourire et l’invita à la suivre. Jesaluai rapidementNathan pendant qu’il parcourait la carte. Je contenais un rire. Je n’étaismême pascertainequecerestaurantoffraitdu«àemporter»,maisaveclenomd’AndrewBlake,ilsemblaitqueleschosesimpossiblespourl’humainordinairedevenaienttoutàfaitnormales.

Perdue dansmes pensées, je constatai que nous passions devant la salle principale sans nous yarrêter.Puis,nousgrimpâmesunescalieretnousretrouvâmesdevantlasecondesallederéception,pluspetiteet…vide.

–MonDieu,tuasréservél’étageentier?m’écriai-je,stupéfaite.–Jerefusequ’unhomme,autrequemoi,poselesyeuxsurtoi.–N’est-cepasunpeu…excessif?Jeveuxdire…–Maseuleexception,Kathleen,mecoupa-t-il.–Tunepourraspasteservirdecetargumentpourjustifiertoustesexcès!lemenaçai-jegentiment.

–Jenem’ensersquepourjustifiermesexcèsavectoi!contra-t-iltoutsourire,toutenmeguidantversl’uniquetable.

–Tudevraistoutdemêmegardercetargumentpourleschosesvraimentessentielles…Paspour…unrestaurant,précisai-je,presquedépitée.

–Quandvas-tucomprendrequetoutcequitoucheàtapersonneestvraimentessentiel?Jemefigeaietmetournaiverslui.–Tun’assûrementpas idéedeceque tuprovoques…maisréserverunesallederestaurant juste

pourêtreseulavectoi…Commenttefairecomprendre?sedemanda-t-ilensoupirant.–Mais…–Kathleen,murmuraAndrewenmettant sonvisageà lahauteurdumien, réserver cette salle, ce

n’estrienpourmoi.Mêmecesboucles,ajouta-t-ilendégageantmonoreilledroite,mêmecesbouclesnesontrien.Toutcela,cen’estquedel’argent…

–Jenecroispasquejem’yhabitueraiunjour,avouai-je.–Jenetedemandepasdet’yhabituer.Surtoutpas.Jeneveuxpasquetoutcelatesemblenormal

et…dû.Jeveuxqueturestestoi,quetuteplaignesdemesexcès,queturâlesquandjesuisunêtresanscœur.Si…Lejouroùtut’habituerasàça…Non,jepréfèrenepasl’envisager.Allonsdînermaintenant,m’ordonna-t-ilenmepoussantdoucementendirectiondenotretable.

Jelesuivisavecplaisir,maissecouéeparcequ’ilvenaitdemedire.J’avaisl’espritencoretropembrumé, mais j’espérais, une fois revenue au calme routinier de ma vie, pouvoir réfléchir avecapaisementàtoutça.

Arrivésprèsdenotretable,lesouriantmaîtred’hôteltiralefauteuiloùjedevaism’installer.–Laissez-nous,luiintimaAndrewd’untonquinesouffraitaucuneréponse.Lepauvrehommesursautaets’écarta.Andrewpritsaplaceet,aprèsm’avoiraidéeàretirermon

gilet,m’installaànotre table. Ilôtasoncabanpuissavesteet,d’unsignede tête, fit revenir lemaîtred’hôtelversnous.

–Votremeilleurchampagne,jevousprie.–Andrew!râlai-je.–Jesais,maist’entendrerâlern’avraimentpasdeprix.Quedésires-tumanger?Je consultai la carte rapidement, arrêtantmonchoix surun risotto aux truffes.Andrewavait déjà

posésonmenuquandjerefermailemien.–Risottoauxtruffes.Qu’as-tuchoisi?–Jecroisquejevaismelaissertenterpardeslasagnes.Montéléphonevibradansmapochette,etjemedétestaiden’avoirpassongéàlecouper.Andrew

fronçalessourcilstandisquejedéchiffraislenomdeLynnesurl’écran.–Excuse-moi,dis-jependantqu’ilselevaitpolimentdesachaise.–Tuvasrevenir?s’inquiéta-t-il.–Oùveux-tuquej’aille?souris-je,attendrie.–Dîneravecunautre?suggéra-t-il.–Essayes-tudemefairecroirequetumelaisseraisfairesic’étaitlecas?Unsourires’étirasurseslèvresetsesyeuxs’illuminèrent.–Reviensvite,murmura-t-ilavecdouceurenattrapantmamainpourlapresserdanslasienne.Jedescendislentementlesescalierspourtrouverunendroitàl’abridesoreillesindiscrètes.Nathan

étaittoujoursàlaréception,passantsacommandeensouriantàlajeunefemmequinousavaitaccueillis.Un voile d’inquiétude inonda son visage,mais je le rassurai d’un sourire. Il était définitivement plusqu’unsimplecollaborateurpourAndrew…

–Quesepasse-t-il,Lynne?luidemandai-je,reclusedansuncoinducouloir.

–Désoléedetedéranger…Philipvientdem’appelerpourmedirequ’ilnerentreraitquedemain.Sonvolaeuduretard…Bref,jesuischezletraiteurchinoisetj’aipenséqu’onpourraitpeut-être…

–Lynne,lacoupai-jevivement,jedîneavecAndrew!–Oh…Merde!Désolée…Oùêtes-vous?m’interrogea-t-elle,extrêmementcurieuse.–AuVesuvio,et…–LeVesuvio ? hurla-t-elle.Mais il faut réserver desmois à l’avance pour y dîner ! Philip n’a

jamaisréussià…–Lynne!grognai-je.Jesentisunemainseposersurmonépaule,etjesursautai.Jemetournaiversl’importun,ettrouvai

Nathan.–Est-cequetoutvabien?demanda-t-ilalorsquejedevaissûrementavoircriécommeunefolle

furieuse.–Je…Oui…toutvabien,murmurai-je.Ilopinaetretournaàlaréceptionavantdereprendresaconversationavecl’hôtesse.–Jedoistelaisser,Lynne.–Onsevoitdemain?–Je…Oui…sûrement.–Parfait!Débriefingdemain!Mondînerestprêt,jevaismangerensolitaire,maisjedoutequetu

t’enpréoccupes,gémit-elle.Soudain,moncerveauseremitenmarche.Jeréfléchisàtoutevitesseetmetournaidenouveauvers

laréception.Ilétaittoujourslà,souriant.–Lynne?Oùes-tuexactement?l’interrogeai-je.–SurlaCinquante-Septième.Pourquoi?–Hummm,écoute,jenesuispasàl’aiseavecl’idéequetusoisseulecesoir.Quedirais-tudete

joindreàAndrewetmoi?Elleéclataderireet,derrièreelle,j’entendislavoixaiguëetàfortaccentdutraiteurchinois.–Kat,jenevaispastenirlachandelle!rit-elle.Enplus,tuesvraimentunemauvaisementeuse.–Biensûrquenon…Nathanestici.Jesuiscertainequ’ilseraravidedîneravectoi.Sonrires’éteignit,etilyeutunlongetpéniblesilence.Intérieurement,jepriaipourqu’elleaccepte.

Ce dîner était la chance deNathan.Quelque choseme disait que je neme trompais pas et queLynnecomprendraitenfinquesarelationavecPhilipétaitvouéeàl’échec.

Detoutefaçon,jen’avaisjamaisvuPhilipregarderLynnecommeNathanl’avaitfait.–Kat,murmura-t-elle.Jeneveuxpasfaireça…SiPhilipl’apprend…–Commentl’apprendrait-il?Philipestàl’autreboutdupaysettuesseulecesoir.Justeundîner,

Lynne.Jel’entendissoufflerlourdement,tirailléeentresonenvieetsondevoirdefemmebientôtmariée.–D’accord,abdiqua-t-ellesansjoieaucune.–Super!m’exclamai-je.Ilestàlaréceptiondurestaurant,jemechargedeleprévenir.Oubliele

chinois,cesoirc’estVesuviopourtoi.Jel’entendisrireetjeraccrochaiavantdemeprécipiterversNathan.Sonregards’illuminaquand

jeluiparlaideLynneet,trèsvite,ilignoralasuperbebruneàpeaumateavecquiildiscutaitjusteavant.Jeluifispartdemon«plan»,etilreculad’unpaspuissecoualatête.

–Horsdequestion!lança-t-il.Horsdequestion,Kat!Ilvametuersi…–Biensûrquenon!–Bien sûr que si ! s’exclama-t-il. Jamais il n’acceptera. Etmême s’il accepte, ilme virera dès

demainparcequej’auraisgâchévotredîner.–Nathan,nousavonstoutl’étage.Ilsuffitdevousinstalleràuneautretable!

–Parcequevouscroyezvraimentqu’Andrewvouslaisserafaire?Vouscroyezqu’ilvaencaisserçaaveclesourire?

–Qu’est-cequejesuiscensélaisserfaire?grondalavoixd’Andrewderrièrenous.Jemepétrifiai,fixantleregardperdudeNathan.Ilnaviguaalternativementd’Andrewàmoi,tandis

quelapaniquepeignaitsonvisage.Jesecouailatête,incrédule.Ilavaitvraimentpeurdesonpatron.–Nathan,jesaisqu’habituellement,cesontlesfemmesdéjàprisesquiteplaisent,maisj’aimerais

autantquetazonedechassenes’étendepasjusqu’àcequim’appartient,railla-t-il.–Andrew…Commentpeux-tucroire?bégayaNathan.–Kathleen,monte!ordonna-t-il.Àcetinstantprécis,Lynne,toutsourire,franchitlaportedurestaurant.CommeNathanunpeuplus

tôt,sesyeuxpassèrentsurchacundenous.Jemepostaiprèsd’Andrew,espérantpouvoirleconvaincre.–Kathleen?murmura-t-ilsèchement.–Je…Lynneétaitseule…et…–Etnousétionsseulsaussi,normalement,mecoupa-t-il.Quedois-jefaireaujustepourm’assurer

queriennipersonnenenousparasitera?D’abordlechiendegarde,ensuitelafuturemariée…–Katn’yestpourrien,medéfenditdoucementNathan.–C’estmoiquil’aiappelée,jecherchaisdelacompagnie,s’interposaLynne.–Votrecharmant futurépouxvousaurait-il fait fauxbond?claquaAndrewavecunbrind’ironie

danslavoix.Je levai les yeuxvers lui, constatant qu’il était effectivement en colère.Lynnebaissa les yeux et

reculaverslaporte.Jefisunpasverselle,maisAndrewplaçasonbrasdevantmoipourm’enempêcher.–Tasoiréeestàmoi!siffla-t-il.–Etc’estmameilleureamie!ripostai-jeavantdemedébattrepourrejoindreLynne.–Nathan,occupe-toid’elle!ordonnaAndrew.Jetournaileregardverslui,estomaquéeparcetteméchancetégratuite.Ilneconnaissaitmêmepas

Lynneetsepermettaitd’êtreodieux.Nathanmerejoignitet,d’ungestedelatête,m’intimaderetrouverAndrew. J’opinai doucement, espérant que sa petite scène n’avait pas ruiné tout ce que j’espérais.Lorsquejerevinsversl’escalier,cedernieravaitdéjàdisparu.

Furieuse, jemontai àmon tour, prête à endécoudre avec lui. Il était à table, tout sourire, la têtereposantsursesmainscroiséessoussonmenton.

–Enfin!J’aifailliattendre!plaisanta-t-il.–Tuasétéodieux!Vraimentodieuxavecelle!–Jen’aipasétéodieux.J’ai faitvaloirmapriorité. Je t’aidemandé tasoiréeet tudevaisme la

garder.–Tun’avaispasàêtresidésagréableavecelle!Jel’aifaitveniricietsituveuxt’enprendreà

quelqu’un,soisodieuxavecmoi,pasavecelle!–Crois-moi, elle a l’habitude de gérer les types odieux.La seule différence, c’est que j’assume

pleinement.Maintenant,pouvons-nousreprendrenotresoirée?demanda-t-ilensouriantlargement.Lespoingsserrés,jeleregardainousservirduchampagne.Illevalesyeuxversmoi,puisseleva

desachaiseetseplaçaderrièrelamiennepourlatirer.–Sinonquoi?Vas-tuêtreodieuxavecmoi?– Si tu ne le fais pas pour moi, fais-le au moins pour ton risotto qui va arriver d’ici quelques

minutes.Vienst’asseoir!–EttureprochaisàMeghansesécartsdelangageavecmoi!sifflai-je,àboutdenerfs.Situveux

quenousayonscegenrederelation,jecroisquejedevraismecantonneràmonrôledeconcierge!Ilmelançaunregardetjelesoutins.J’étaisdéterminéeànepaslelaissermarchersurlesautres,ou

surmoi.

–Tuasraison,admit-ildoucementtoutenseredressant.Jehaussaiunsourcil,fièredemoi,maisespérantmieuxdesapart.–S’ilteplaît,Kathleen,veux-turevenirt’installeràcettetable?Je restai silencieuse, croisant les bras surmapoitrine.Des excuses, riendemoins, voilà ce que

j’attendais.Ilsecoualatête,réprimantunrire–mefâchantdoncencoreplus–avantdes’approcherdemoi.Sansriendire,lesyeuxfixéssurlesmiens,ilmefitdécroiserlesbrasetattrapamamainpourlaporteràseslèvres,ilenembrassaledosavecunelenteurexagérée,etjelâchaiunsoupir,vaincue.

–S’il teplaît,répéta-t-il.Jesaisquej’aiétéunincroyablegoujat,maisjenesupportepasqu’onempiètesurmontemps,surtoutquandjelepasseavectoi.J’aiattenducettesoiréetoutelasemaine.

–Ettu…–Etjesuisentraindelagâcher…Maissituveuxm’octroyerunepetitechance,jeprometsdenous

fairepasserunexcellentmoment.Ilembrassadenouveauledosdemamain,etcefutmaperte.Jemedécidaiàl’écouter,nonsans

continuer à luimontrermonagacement. Ilm’aida àm’installer, poussant doucementma chaisevers latable.

–Jenecherchepasàêtreodieux,dit-ilens’asseyantàsontour.Jesuisjuste…possessif,jecrois.–C’étaitLynne!Sûrementcequiserapprocheleplusduconceptde«meilleureamie».Jevaisêtre

sademoiselled’honneur…–Tuvasaumariage?mecoupabrutalementAndrew.–Oui.–Jet’escorte,affirma-t-ilavecvéhémence.–Mais…–Quandest-ce?–Le25avril,débitai-jeenlefixantpendantqu’ilnotaitladatedanssontéléphone.Andrew,tun’es

pasobligédevenir.Jeveuxdire,c’estencorerécentet…–Etquoi?Crois-tuquejevaistelaisserallerseuleàcemariage?sourit-il,soudainplusdétendu.Jesecouailatête,cherchantcommentmacolèrecontreluis’étaitdissipée.Safaçondechangerde

conversation,depasserdel’autoritélaplusforteàunsourireirrésistible,medésarmaitcomplètement.Ildéfiait toutesmesstratégiesdedéfenseetd’attaque,mettantàmallamoindredemesremarques,et lesretournaitcontremoi.

–Jenepensaispasquecegenred’événementst’intéressait.–Honnêtement,jetrouveçasansintérêt.Laplupartdutemps,Meghanmereprésenteetsechargede

féliciterlesheureuxépouxpourmoi.–Cesontlesmariagesquiterebutentoul’idéed’apparaîtreenpublic?demandai-jeenportantla

coupedechampagneàmeslèvres.–Lesdeuxsûrement.DanslecasdeMlleHoffman,c’estlaperspectivedetesavoirseulelà-basqui

memotive,dit-ilencontinuantàpianotersursontéléphone.–Oh!Cen’estdoncpasleplaisirdem’yaccompagner,raillai-je.–IlesthorsdequestionquejetelaisseseuleentrelesmainsdelafamilleKingston.–TuconnaislafamilledePhilip?m’enquis-je,stupéfaite.–Leur réputation les précède.Et elle n’est vraiment pas en leur faveur, ajouta-t-il en levant son

regardversmoi.–Monpèreseralà…Etilestflic,jeterappelle,souris-je.–Cen’estpasçaquilesarrête,conclutAndrewenbuvantsonchampagne.Etcen’estpasçaqui

m’arrêtenonplus,continua-t-ilavecunlégersourire.Leserveurapportanosplatset remplitnosverresensilence. Ils’écartadoucement, restantàune

distancerespectabledenotretable.Jeluijetaiuncoupd’œilavantdemeconcentrersurmonassiette.Le

risottoétaitdivin,commejem’yattendais.Jerispresqueensongeantquec’étaitsûrementunnouvelabusdepouvoird’Andrewquimepermettaitdeledéguster.

–Qu’ya-t-ildesidrôle?s’enquit-ilenmevoyantsourire.–Rien.Jemedemandaisjustequelgenredesoiréej’allaispouvoirtefairepasseraprèsça…–Tupeuxtoujoursmelaisserl’organiser.–Horsdequestion!Tesabusdepouvoirontassezduré!–Mes abus de pouvoir ? s’étonna-t-il.Est-cemal de vouloir faire en sorte que cette soirée soit

aussiinoubliablepourtoicommepourmoi.–Tun’aspasbesoindefairetoutça…Ellel’estdéjà,crois-moi!m’esclaffai-jeenrepensantaux

événementsdudébutdesoirée.Et tuviensdet’inviteraumariagedeLynne…Franchement, jenevoispascommentjepourraisoubliercettesoirée!

–Jenevoispascommentnonplus,murmura-t-ilenmefixantavecintensité.Je baissai les yeux, cachant un nouveau rougissement. Quand je les relevai, je fixai ses mains,

soigneusementliéesautourdesonverredechampagne.Unsouvenirprécismerevintentêteetlesmotssortirentnaturellementdemabouche:

–Parle-moid’elle.–Non,grogna-t-il.–Andrew…–Non.Jeneveuxpas.Pasavectoi.–Andrew,tunepeuxpas…Tudisquejeneteconnaispas,maistupassestontempsàéluderle

sujet.Il sembla réfléchir intensément, pesant le pour et le contre. Je voulais qu’il s’ouvre, je voulais

connaîtresaversion–uneversionsûrementplusjuste–del’histoire.C’étaitsafemme,unepartiedesavie…Jevoulaissavoir.

–Tu…Tum’asconfiétonalliancedernièrement.Tulaportaisencoreaprèstoutcetempsettunedémentaispasêtremarié.Jeveuxquetumeracontestaversion,plaidai-je.

– Ma version ? Oh… Je comprends, tu as eu la version officielle. Pourquoi veux-tu que nousparlionsd’elle…?Surtoutcesoir?Jenesuispeut-êtrepastaprioritédelasoirée,maistueslamienne!asséna-t-il.

–S’ilteplaît.Jenepeuxpasfairecommesi…ellen’avaitjamaisexisté.–Ellen’existeplus.Etjemedemandemêmesicequej’airessentipourellearéellementexisté.Il y eut un long silence,mais je gardaismes yeux rivés aux siens. Je voulais savoir. Je trouvais

mêmequ’ilme«devait»uneexplicationàsonsujet.Sonvisages’affaissa,etjecomprisqu’ilabdiquait.–Tun’abandonnespas?sourit-il.–Pasavectoi!–Tun’aspasmaténacité…Dois-jeterappelercettehistoirederelationstrictementprofessionnelle

entretoietmoi?–Ne tente pas de dévier le sujet ! ripostai-je.Ma relation professionnelle avec toi était le seul

bouclierquej’avaispourmedéfendre.–Jesais,avoua-t-il.C’étaitassezdrôlede tevoir tedébattre!Mêmesi j’enconnaissais l’issue.

Riennepeutm’empêcherd’êtreavectoi!asséna-t-ilavecuneconfianceabsolue.–Voilàquiestbienprésomptueux,monsieurBlake.–Peut-être,maisc’estlaréalité.–Parle-moid’elle,répétai-jeavecdouceur.Ilsoupiradenouveau,melançaunregardrésignéetselança:–J’airencontréEleanoràl’université,encoursd’économie.Ellevenaitdel’Oregon.Noussommes

trèsvitesortisensemble.C’était…évidentenfait,expliqua-t-ilenjouantavecsacoupedechampagne.

–Etensuite?Aprèsl’université?–J’ai rachetéunpremier journal.C’était…unesortededéfi, sourit-il,perdudanssessouvenirs.

Eleanorétaitlà,participaitauxréunionsdebouclage,travaillaitjouretnuit.Curieusement,mêmeaprèstoutcetemps,aprèstoutcetravail,jecroisquec’estàcetteépoquequejesuisvraimenttombéamoureuxd’elle.

–Parcequ’elletecomprenait?lecoupai-je.–Parcequ’elleétaitlà.Toutletemps.Jeposaisunequestion,elleavaitlaréponse.Toutétaitfluide,

facile.Onserendaitensembleaujournal,onrentraitlesoir,onbossaittoutletemps,maisjel’aimais.Lejournal amarché et j’ai épouséEleanor. Peu de temps après, j’ai racheté un deuxième journal et j’aifondéBlakeMedias.

Il fronça les sourcils et sembla faire le tri dans ses souvenirs. Peut-être que je ne pouvais pasvraimenttoutentendredesonpassé.

–BlakeMediasestunevraieréussite,l’encourageai-je.– En effet, murmura-t-il. J’ai proposé à Eleanor d’être responsable de la communication de

l’entreprise.Detoutefaçon,jenemevoyaispasbossersanselle.Etnousavonsreprisunrythmeinfernal.J’aimaismontravail,maisj’aimaisEleanorprofondément.Elleétaitmaforcedanstoutceprojet.

–Ques’est-ilpassé,Andrew?–J’aivoulum’implanteràNewYork.Ellen’apascomprismesmotivations.Enfin,ça,jenem’en

suisaperçuqu’après.Nousnetravaillionsplussurlesmêmessujets,ellerestaitactivesurSanFranciscoquand, moi, je prospectais ici. Je présume que, fatalement, nous nous sommes éloignés,professionnellementparlant.

–Mais…–Oui,c’étaitilyalongtemps.M’implantericin’apasétésimple.Jen’avaispaslesbonscontacts,

paslesbonnesrelations.Onm’amisdesbâtonsdanslesroues,onatentédemedissuader.J'aitenubon,maisEleanorafiniparmeconvaincre.JepassaismontempsiciquandellesedémenaitàSanFrancisco.

–Ellet’aconvaincud’abandonner?–Pasvraiment…Jene sais pas comment les choses se sont enchaînéesmais, un soir,Eleanor a

décidédenepluspartagernotrechambreet,effectivement, j’aimisdecôtéNewYork,pourelle.Pourqu’ellemerevienne.Parcequ’elleétaitplusimportantequetoutlereste.

Ileutunbrefsourire,illuminantsonvisageconcentré,puisancrasonregardaumien.–À l’époque, je neme voyais pas faire sans elle, nous étions liés.Nous avions vécu un tas de

choses.Deschosesimportantes,etdeschosesmoinsimportantes.Nousétionsheureux.Aprèsl’épisodedeNewYork,noussommespartisenvoyage,loindetoutecettepression.C’estunpeuavantnotredépartquej’aiembauchéNathan.

–EtMeghan?–Meghan était avecmoi à l’université, elle était brillante, niveau finances. Elle a tout de suite

adhéréàBlakeMedias.SansMeghan, jen’aurais jamais réussi à tenir cette entreprise.Elle estd’uneincroyableforce.

–Donc…levoyage?lecoupai-jepourrevenirausujetquim’intéressait.–Levoyage…Parfait.Idyllique.J’airetrouvélafemmequej’aimais.Etjeluiaidemandédeme

faireunenfant,parceque…jenesaispas,c’étaitparfaitementévidentpourmoiqu’elledevaitêtre lamèredemesenfants.Etelleaditoui,sanssurprise.C’était…commeunnouveauprojetàdeux.

Encoreunsourireheureux.Pourtant,sesyeuxsevoilèrentetjesentisquelaversionidylliquequ’ilpartageaitavecmoin’étaitpassiparfaite.

–Noussommesrentrésunpeuavantjuillet.J’aireprislerythmeavecNathan.J’aiencoreachetéunjournal.Lessemainesontpassé,lesmoisaussi…

–Pasdebébé?

– Pas de bébé. Eleanor gardait le moral et je la rassurais. Nous étions jeunes, rien ne pouvaitréellement nous arriver, n’est-ce pas ? Un peu après Thanksgiving, j’ai eu des informations sur NewYork:unmagazinequipériclitait.Jen’étaispascertaindevouloirça.

–Àcaused’Eleanor?–Àcausedumagazineenquestion.Monmariageétait solidemais,aprèsenquête, j’ai suquece

journalnevalaitrien.–Commentça«rien»?–Nousn’avionsaucuneidéedunomdespropriétairesnidesinvestisseurs,lesiègesocialétaitbasé

àlaBarbade…–…dansunparadisfiscal,finis-je.Ilmefitunsourireentendu.Ilopinatandisquemoncerveaurepassaitenmode«investigation».– Malgré toutes nos recherches, cette histoire n’a pas abouti. Nous n’avions aucun nom, mais

Meghanestimaitquecelapouvaitêtrerentable.J’aifaituneoffre.–Et?– L’affaire était en cours. Nous avions signé un préaccord. J’ai fait plusieurs allers-retours,

rencontré leséquipes,montéunprojetéditorial.Meghanavaitbudgétisépourparaîtreenmars,Nathanavait des bureaux. Jeme souviens quenous avons fêté ça à lamaison, c’était énorme…Eleanor étaitheureuse,j’étaisheureux.

–Était-elleenceinte?–Oui. De peu. Le jour où ellem’amontré le test de grossesse restera à jamais gravé dansma

mémoire.Jemesouviens,quelelendemain,nousavonsécumélesboutiques.Iléclataderire,prisdanssespensées.Ilsecoualatête,etfinalementsonvisagesereferma.– L’accident a eu lieu deux semaines après. En une seconde, mon monde s’est écroulé. J’avais

tout…etàsamort,c’estcommesi jen’avaisplusrien.L’accidentm’a…court-circuitéd’uncoupetacoupémonmondeendeux:ilyavaiteulebonheur…etaprès,lenéant.

Jetentaid’imaginerAndrew,heureuxavecsafemmeetcebébéàvenir.Ilavait tout : laréussite,l’amour,lafamille.Ildevaitsesentirinvincible.Machinalement,etsûrementpourévacuersanervosité,jelevistriturersesmains,frottantlecercledepeauoùétaitencoreincrustéelatracedesonalliance.

–Etpuis ilyaeu toi, souffla-t-ilpresque timidement.Après touscesmoisdesolitude, ila fallurefairesurface,revenirauvraimonde.Et,commeledituneamieàmoi,ledestint’amisesurmaroute.

–Tonamieest…pertinente,remarquai-je.Jepartagecetétatd’esprit.Quisaitoùcertainscheminsnousmènent…Enfin,tuavaisl’airdetrèsbient’ensortir.Ques’est-ilpassépendant…tonabsence?

–Après les funérailles, tout a été plus difficile. Je n’avais plus envie deNewYork, je voulaisvendrel’entreprise.Jesuisrestécloîtréchezmoipendantdessemainesentières,refusantmêmel’idéedesortirprendresimplementl’air.Toutmerappelait…elle.Notreviedevaitêtreparfaite.

–Jenecomprendspas…Quandtuasfaitallusionàelle, tusemblais tellement loin…decetétatd’esprit.

–Eleanorm’aimait.Etjel’aimaisprofondément.Jel’aiperdue,çaaétél’épreuvelaplusterribledemavie,maisdécouvrir,aprèssondécès,qu’ellemementait,aétépirequetout.

–Àquelsujettementait-elle?–Nous.Notremariage.J’aicherchéàcomprendrependantdesmois,jel’aihaïeautantqu’aimée.

Maisellevoyaitunautrehomme.Sesyeuxseplantèrentdanslesmiensetjesentislacolèrevibrerenlui.Sespropossurlemensonge

etsurlesqualitésdesafemmemerevinrent.–Unautrehomme?Quetuconnaissais?demandai-je.–Non.C’estplutôtunebonnechosepourlui.Jen’aijamaissuquiilétait.Uneâmecharitablem’a

envoyé des photos floues. J’ai nié en bloc qu’elle pouvait avoir fait ça, mais il a fallu me rendre à

l’évidence,jen’étaispasleseul.Jen’étaisplus…sapriorité,murmura-t-ilenmefixant.Je déglutis lourdement, encaissant le flot d’informations. Maintenant, je connaissais enfin toute

l’histoire.Machinalement,jeposaimamainsurlasienneetlapressaidoucement.Lesépaulesd’Andrewserelâchèrent,commes’ilselibéraitenfind’unlourdfardeau.

–Jesuisdésolée,soufflai-jeencherchantàcaptersonregard.–C’estdel’histoireancienne.–Non,pourtoutàl’heure.Jen’avaispascomprisàquelpointcettesoiréeétaitimportantepourtoi.–Cen’estpascettesoiréequiestimportante,c’estd’êtreavectoi.Jeneveuxpas…passeraprès

Lynneou…tonpère.–Tuveuxêtreprioritairesurl’uniquehommedemavie?plaisantai-je.–Non.Jeveux«être»l’uniquehommedetavie.Ilsouritdoucementetjesentismoncorpsfondreetcrépiteràlafois.Cesourire,ceregard,savoix

profonde,sesaveux…Pourlapremièrefoisdepuisquejeleconnaissais,jemesentaisenconfiance.–Tuvasencoretrouverçaprésomptueux?rit-il.–Non…Jetrouveça…plutôtagréableàentendre.C’estmoioutucherchesàmeséduire?–Kathleen,jepensequ’iln’yapasuninstantoùjen’aipascherchéàteséduire…Etjecrainsque

celaresteprioritairesurlereste.Jememordis l’intérieurdes joues,à la foisheureuseetgênéepar sadéclaration.Nous reprîmes

notrerepas,discutantessentiellementdesonmétier.Alors que le serveur nous amenait nos desserts, et que j’étais pleinement détendue grâce à la

quantitéimportantedechampagnedansmonorganisme,Andrewmepritàmonproprepiège.–Tuconnaismessecrets,vas-tuenfinmedévoilerlestiens?–Queveux-tusavoir?m’enquis-je,incertaine.–Jenesaispas…Quepeux-tuvraimentmeconfier?J’aiparlédemavieprivée.Parle-moidela

tienne.–Jecrainsdenepastenirlacomparaisonavectoi.–Pasdemariagedonc?s’amusa-t-il.–Pasdemariage.Pasd’enfantsnonplus,complétai-je.Leseulhommedontjesoisvraimenttombée

amoureuses’estrévéléêtre…Disonsquec’étaituneimposturemanifeste.–Ilt’amenti?–Ilm’atrahie.Cequiestpire…sionenjugeparlesconséquencessurmavieactuelle.–C’estpourçaquetuaschangédemétier?Mesmusclessetendirenttousdanslamêmesecondeetunpicotementdésagréables’emparadema

nuque.–Cen’estpasimportant.–Çal’estpourmoi.–Ça…Çan’avraimentaucunintérêtetçafaitpartiedemonpassé.–Tuconnaismonpassé,j’aimeraisconnaîtreletien.–Andrew, tu connaismon passé !m’écriai-je enme souvenant de nos premières et déroutantes

conversations.–Certes,mais je n’ai pas réussi à élucider certainsmystères.Celui-ci, enparticulier,m’intrigue

beaucoup.Jesoupirailourdement.Jen’avaispasenviederessassermonpasséetmesidéauxmalmenés.Les

derniersévénements–lescoupsdefildelapresse,lapression,lesregardsextérieurs–avaientsuffiàréveillercesdouloureuxsouvenirs.

– J’ai toujours voulu être journaliste, commençai-je. J’aime… les recherches et recouper lesinformations.

–As-tufaitdesrecherchessurmoi?– Oui. Mais je dois admettre que tu as été meilleur que moi. Difficile de trouver des sources

crédiblesetdesinformationsavéréessurtoi.–Pourquoiavoirarrêtédefairecemétieralors?–J’yaiétécontrainte.–Parcethomme?m’interrogea-t-il,lesmâchoirescrispées.–Sionveut.Jen’étaispastrès…futée,jepense.Jen’aipasvuleschosesvenir.Unjour,j’aiété

convoquéedanslebureaudemonrédacteur,etleschosesquejepensaisacquises,lesvaleursauxquellesjecroyaissesontécroulées.Jen’aipaseulechoix.Jedevaispartir.

–Quelgenredepatronaputevirer?Certainsn’ontvraiment…– J’ai démissionné. Parfois, il faut savoir admettre qu’on a eu tort. Et je crois que je me suis

trompéedemétier.J’étaissûrementtropnaïve,maislaréalitéaétéplusviolentequecequej’imaginais.–Kathleen,murmura-t-ilavecdouceurencroisantsesdoigtsaveclesmiens,tun’espasnaïve…–Alors,disonsquejesuisidéaliste,contrai-je.Lerésultatestlemême…Cequejevoulaisfairene

coïncidaitpasaveccequevoulaitmonpatron.–Etcethomme?–Iladisparuenmêmetempsquelaplupartdemesrelationsdanslemétier.Jeneleregrettepas,

certaineschosesparaissentbellesde loin, et se révèlent finalementassez laides. Jen’envisagepasderevenirsurmadécision.Lejournalismeestderrièremoi.

Jevislessourcilsd’Andrewsesouleveràunehauteurhallucinante,atteignantquasimentlaracinedesescheveux.

–Tudevraisretentertachance.LeDCDailyest…particulier,souritAndrewaprèsavoircherchélequalificatifadéquat.

–Commentsais-tuquej’aibossépourleDC…?– Je connais ton passé, sourit-il.Mais j’ai dumal à croire que tu aies bossé pour ce repère de

technocrates ! C’estmême une planque tout court ! Le seul but de ce… truc est de faire du lobbyingauprèsduSénat.C’estpurementpolitique,etsij’osais,jediraismêmequec’estlebrasarmémédiatiquedesrépublicainsàWashington.

–Jesais,avouai-je.Maisjen’aipaseulechoix.–Tul’asmaintenant.Monoffretienttoujours.Tupeuxbosserpourmoi.–Etcoucheravecmonpatron?lâchai-jeavantdeprendreconsciencedel’énormitédemariposte.Mesjouessecolorèrentimmédiatement.Jebaissailesyeuxsurmonassiette,triturantmondessert.–Tuasdesprojets?souritAndrewalorsquejerougissaisencoreplus.–Cen’estpascequejevoulaisdire!medéfendis-je.–«J’ai»desprojets,dit-ilenignorantmaremarque.JeviraipivoineetfistoutmonpossiblepouréviterdefixerAndrew.Jetrouvaiunintérêtsoudainà

mon dessert, raclant le fond de mon assiette à la recherche des dernières traces d’un tiramisu déjàquasimentdisparu.Soudain,Andrewselevaetcontournalatablepourseplacerderrièremoi.

–Tuaslechoix,murmura-t-ilàmonoreille.Tul’aurastoujours.–Entrequoietquoi?soufflai-je,haletante.–Entrelepatronoumoi.Mais,eneffet…jenecouchepasavecmesemployées.–Donc,conclus-jeenexhalantunsoupirbruyant,jen’aipasvraimentlechoix.–Si…Réfléchisbien.Jemetournaiverslui,complètementperdue.Dequoiétait-ilentraindemeparler?Soudain,iltira

machaiseetmefitmelever.–Lavoiturenousattend.Mais,réfléchisàtoutcequejeviensdetedire.–Jenecomprendspas,Andrew,avouai-je,unpeuchancelante.

–Lechampagne,sûrement.Tuferaslelienplustard.Ilpressaseslèvressurmonfront,dansungestetendre,puism’aidaàremettremongilet.Ilenfila

soncaban,etpritsavestepourlaposersurmesépaules.–Allons-y.Sanspartagerunmotdeplus,ilnousguidaàlavoitureetnousrejoignîmeslePeninsula.Durantle

trajet, ilposadoucementsamainsur lamienne,etcen’estqu’à l’arrivéedans legaragesouterraindel’hôtelqu’ilosaposerlaquestionquimehantait:

–Veux-turentrercheztoi?

CHAPITRE17

Jesecouailatêteetunbrefsourires’étirasurseslèvres.Ilsortitduvéhiculeetm’ouvritlaporte.Toujoursensilence,nousgagnâmeslaPeninsulaSuite.Enentendantlaporteserefermerderrièremoi,jerelâchailavested’Andrewetlaposaisurunedespatèresdansl’entrée.Andrewretirasoncabanetjelesuivisjusquedanslesalon.

Le cœur battant, je détaillai ses gestes : il défaisait le haut de sa chemise, révélant le bas de sagorge, puis déboutonnait ses manches et les remontait doucement sur ses avant-bras. L’anticipation,l’anxiétéetledésirbrûlaientdansmesveines,merendanthermétiqueàcequinousentourait.Ilsetournaversmoi,etlesouvenirdenotrepremièrenuitensemble,ici,bourdonnadansmatête.Lesoufflecourt,jevisseslèvresbouger,maisnecomprispasunmotdecequ’ilmedemandait.

–Je…Euh…Pardon?fis-je,l’espritembrumé.–Serais-tutentéeparunbain?proposa-t-ilavechésitation.Jerestaiimmobilequelquessecondes,scrutantsonvisage.Ilsemblaitsifragileetsipeuconfiant.Je

pensaisavoirdécouvertlevéritableAndrewpendantnotredîner,leAndrewsansmasquemais,enfait,ilétaitlà,maintenant,devantmoi,incertainethésitant.

–Je…Unbain?répétai-je,toujoursdansleslimbes.–Tuneconnaisdoncpasmeshabitudes?–Oh…Lapiscine!m’écriai-jesoudain.–Situveux,l’hôtelaprévudesmaillots…,débita-t-ilendésignantlasalledebainsderrièrelui.

Enfin,jeprésumequetuesaucourant.Jesourislargement,hochantlatêteavantd’avancerverslui.– C’est une bonne idée, approuvai-je. Le maillot est-il de soie ou en satin ? plaisantai-je pour

cachermonanxiété.–Tuconnaismonavissurlesujet,non?–Eneffet,avouai-je.–Prendstontemps,etrejoins-moiquandtuserasprête.Unelueurd’amusementéclairasonregardet,danslasecondequisuivit,ildéfitunautreboutonde

sa chemise. Je fixai ses mains, ses doigts, les pans de sa chemise à peine écartés et qui, pourtant,révélaientsuffisammentdeluipourquetoutmoncorpss’embrase.Sansvoixetlesoufflecourt,jepassaiprèsdelui,lefrôlantàdessein,avantderefermerlaportedelasalledebainsderrièremoi.

Jeconnaissaissuffisammentl’hôteletcettesuitepoursavoiroùsetrouvaientlesmaillotsdebainetlespeignoirs.Jeretiraimesvêtementsàlahâteetenfilailespetitsmorceauxdetissunoir.Lanervositénem’avait pas quittée et, avant de sortir, jeme regardai rapidement dans lemiroir pour évaluer les

dégâts. Je frottai les paumesmoites demesmains sur le tissu-éponge demon peignoir et sortis de lapièce.

Aprèsavoirempruntél’ascenseur,jemefaufilairapidementparlesescaliersetrejoignislapiscineparl’accèsdesecours.Àmonarrivée,Andrewnageaitdéjà,étirantsoncorpsmusclésousl’eaudansdesmouvementsfluides.Ilmesurpritens’arrêtantnet,avantd’appuyersesavant-brassurlerebord.

–Tuasteshabitudesaussi,constata-t-ilavecunsouriresatisfait.–Je…Euh…Probablement,balbutiai-jealorsquesonsourires’élargissait.–Vas-tufinirparvenirmerejoindreouresteràm’observer?Il reculadoucement,bougeant lentement sesbrasdans l’eaupour reculeraumilieude lapiscine.

Son regardnemequitta pas, et je retiraimonpeignoir en tremblant presque.Malgrémaquasi-nudité,Andrewnecillapas,restantconcentrésurmonvisagetandisquejemedirigeaisverslesquatremarchesd’accès.

Mon corps s’immergeait progressivement. Le contact de l’eau apaisa ma peau brûlante et lepicotementd’enviequimeparcouraitdepuisnotrearrivéeàl’hôtel.J’avançailentementverslui,presqueavecprudence,jaugeantcommejelepouvaissesimprévisiblesréactions.Ilavaitcessédebouger.L’eauarrivaitàlahauteurdesatailleetilm’attendait.

Quandenfinjel’atteignis,illevalamainetrepoussamescheveux,dontlespointesétaienthumides,derrièremonépaule.Brutalement,leslumièresautourdenouss’éteignirent.Jesursautai,surpriseparlebruitsecdel’interrupteur.Seulesleslampessousl’eaurestèrentallumées,formantautourdenousunhalobleutéapaisant.

Mais très vite j’oubliai l’endroit, j’oubliai l’eau, j’oubliai même mon propre nom. La maind’Andrewremontasurmanuqueetilm’attiracontreseslèvrestoutenreculantdansl’eau.Jetrébuchaidoucement,etposaimesmainssursontorsepourmemaintenir.Moncorpsglissadansl’eaupendantqueleslèvresd’Andrewtravaillaientsurlesmiennes.

Il reculait toujours,nousentraînantvers la zone laplusprofondede lapiscine.Mesmouvementsn’était plus coordonnés, sûrement parce que mon cerveau ne savait plus comment donner les ordresadéquats.Jemeperdistotalementquandlalangued’Andrewquémandal’accèsàmabouche.J’enroulaimesbrasautourdesanuque,meredressantpourpouvoirprofiterdesonbaiser.

Ilme relâcha, avant d’enfoncer sesdoigts dansmeshanchespourmemaintenir contre lui. Jemecollaicontresoncorps,répondantardemmentàsonbaiser.Quandlaprofondeurdubassinmefitperdrepied,jerelâchaiseslèvresetsanuquepourmemaintenirhorsdel’eau.

–Jetetiens,murmura-t-ilenm’enlaçantbrutalementcontrelui.Satêtes’enfonçadansmoncouet,instinctivement,mesjambess’enroulèrentautourdesataille.Je

croisai mes chevilles dans son dos et l’entendis gémir contre ma peau. Je posai mes mains sur sesépaules,mestabilisantpendantqu’ilreculaittoujours.

Ensentantsabouchecontremapeau,jecomprisqu’ilétaitentraindememarquer.Maisc’étaitsansimportance.J’étaisheureused’êtreàlui,d’êtreaveclui.Jeremuaidoucementmonbassin,luiindiquantquej’appréciaiscequ’ilmefaisait,etilgrognaenretour.

Il releva la têteet,denouveau,dégageamescheveuxégarésautourdemonvisage.Sesdoigts seposèrentsurmajoueetjeremarquaisarespirationrapide.

–J’aiattendutoutelasoiréepourfaireça,murmura-t-ilavantdem’embrasserencorecommesisavieendépendait.

L’eauclapotaitautourdenous,brisantlesilencedecathédralequirégnaitdanslapièce.Maistoutcequejesentais,c’étaientseslèvresdoucesetmagiquessurlesmiennes.Jeremontaimesmainsdanssachevelure trempée,m’enfonçant entre lesmèches pour caresser son cuir chevelu. Il grogna contremaboucheetsedétachademeslèvresavantdesoudersonfrontaumien.

Larespirationhachée,lesyeuxclos,ilgémitdoucementavantdebougerlatêtepourquej’amplifiemongeste.J’esquissaiunsourire, raviedevoirquemescaressesavaientautantd’effetsur luiquesesbaiserssurmoi.Sesmainsremontèrentdemesgenouxàmescuisses,puismesfesses.Illespressa,mefaisantbougercontrelui.

–Commentfais-tuça?demanda-t-ilenembrassantlehautdemapoitrine.–«Ça»quoi?–Mefaireressentirtoutesceschoses…Jenepensaispasrevivreçaavecquelqu’un.Je me sentis frissonner malgré l’eau chaude et la température de la pièce. Il y avait un tel

soulagementdanssavoix,untelbesoindesesentir«normal»quej’enétaisvraimentémue.D’autantplusquej’enétaisàl’origine.

–Jenesaispas,bégayai-je.Jefaisseulement…cequimesemble…juste.–Resteainsialors,sourit-il.Denouveau il pressames fesses,mais cette fois pourmecoller unpeuplus contre lui, avant de

revenir torturer mes lèvres. Un gémissement m’échappa alors que je me soulevais légèrement, ledépassantunpeu.Saboucheglissademeslèvres,longeamonmenton,lalignedemamâchoire,avantdedescendredanslecreuxdemoncou.

Soudain,jesentisdumouvementetcomprisqu’Andrews’étaitmisàbougerafindenousemmeneràl’autreextrémitédelapiscine.Moncorpsglissalelongdusien,etmonempriseautourdeluiserompitpourmepermettrederetrouverlesoldubassinsousmespieds.

–Net’avisepasdefuiràtoutesjambes,meprévint-ilenmerepoussantverslesmarches.–Pourquoiferais-jeça?l’interrogeai-jeavecsérieux.Ilavançait toujours,meforçantà reculerunpeuplusvite.Sonregardpénétrantmefixaavecune

intensitérareetilpenchalatêtesurlecôté.–Tunet’enrendspasvraimentcompte,n’est-cepas?Jeheurtailesmarchesettombaiàladeuxième,meretrouvantassisedevantlui.Ils’approchademoi

et,mueparunautomatismeétrange,jel’accueillisentremesjambes.Ilplaquasesmainssurlecarrelagedepartetd’autredemeshanchesetplaçasonvisageàquelquescentimètresdumien.

–Kathleen…Tues…Tueslapremière,depuis…Eleanor,avoua-t-ild’unevoixrauque.–Oh…–Aprèscesoir,jenecroispluspouvoirtelaisserdenouveaulivréeàtoi-même.–Çanemeposepasdeproblème,dis-jeensoutenantsonregard.– Ça ne m’en pose pas non plus. Au contraire. Crois-tu pouvoir te contenter d’une relation

compliquéeavecunhommecommemoi?–Andrew,jemecontenteraiden’importequelgenrederelationavectoi…–Mêmequandjesuisprésomptueux?–Jen’abandonnepas.Jamais.Ileutunsourirequivalait,àmesyeux,toutl’ordumonde,puisilsepenchaversmoietm’embrassa

encore. Cette fois, la passion dévorante des instants précédents laissa place à plus de douceur. Jem’allongeai comme je pouvais, le haut de mon dos heurtant douloureusement l’arête de la marchesupérieure.

Andrews’installasursesgenoux,rampantau-dessusdemoncorpsavantdelerecouvrir.Sesmainslongèrentmescôtesetilremontaunedemesjambesautourdelui.Cettepositionfamilièremefitsourire,etjesentis,contremeslèvres,queluiaussi.

Nos corps collés l’un à l’autre, il frotta involontairement son bassin contre le mien afin de seréajuster.Ledésirqu’ilressentaitpourmoinefitalorsplusaucundoute.Jeremuaiàmontour,toutàfaitvolontairement,espérantqu’ilcomprennequesonenvieétaithautementpartagée. Ilgrognacontremoi,

laissant ses lèvres traîner surmapeau. Je réitéraimongesteplusieurs fois,obtenant toujours lemêmerésultat:ils’éloignaitdemoidansunpremiertemps,avantderevenircontremoncorps,lesoufflecourt.

Mesmainsseperdirentdenouveaudanssescheveuxalorsquelessiennescaressaientmescuisses.Je tentai de capter son regard, mais Andrewm’évitait, préférant naviguer sur mon cou, mes épaulesdénudéesetlehautdemapoitrine.

Soudain,ilremontasesmainssurmescôtesavantdelesplacerdepartetd’autredemapoitrine,etungémissementlourdsortitdemeslèvres.Enréaction,Andrewpressadurementsesmainscontremoietlesremontasurmesseinsavecunelenteurhorrible.

Jemecambrai,oubliantlecontactdésagréabledelamarchederrièremoi.Ilmassadoucementmesseins tandis que sa bouche continuait de faire desmerveilles surma peau, réveillant chacune demesterminaisonsnerveusesetprovoquantunincendieravageurdanslebasdemonventre.Jefermailesyeux,savourantladouceuretlaprévenancedecesgestes.Finalement,ilpritmesseinsencoupeetpassasonpoucesurlespointesdouloureusementérigées.

–S’ilteplaît,gémis-je,pantelanteetavidedeplus.–Kathleen,murmura-t-ild’unevoixrauqueavantdepressersonbassincontrelemien.–S’ilteplaît,répétai-je…S’ilteplaît,touche-moi,implorai-je.Ilserelevalégèrementetsondamonregard.Jehochaidoucementlatête,lefeuauxjoues.Ilpouvait

le faire. Son regard sombre m’indiqua que j’avais raison sur ses intentions. Il me voulait. Ses yeuxquittèrentmonvisageetparcoururentmoncorpsjusqu’àmapoitrine.Sesmainsglissèrentdutissunoiretseposèrentjusteendessous,avantdelerepousser.

Jehoquetaienvoyant son regards’enflammer. Il fixaitmapoitrinedénudéeavecadoration,alorsquematenueétaitplutôtdécadente.Sespoucesrepassèrentsurmestétons,etilmesemblaqu’ilprenaitunplaisirsadiqueàmetorturer.Moncœurfrappaitàunevitessefollecontremacage thoraciqueet jegémissaisdefaçonindécente.

Sans jamais quittermes seins des yeux, il pencha enfin la tête et prit un demes tétons entre seslèvres.Je refermaiviolemment les jambesautourde lui, sifflant ledésir fulgurantquime traversaitdepart en part. Il malmena mon sein encore et encore, ne se laissant aucunement perturber par lesmouvements saccadés et frénétiques de mon corps. Il prodigua le même traitement à mon autre seinpendantquejem’autorisaisàlegardercontremoi,plaquantmesmainscontresatête.

Aprèsuneéternité,illevalesyeuxversmoietfronçalessourcils.–Montons.–Que…Quoi?balbutiai-je,toujoursprisedanslemoment.–Montonsdanslasuite.Jeteveux,maispasici.Lasuitemesemblenettementplusappropriée.Nous rejoignîmesnos peignoirs, etAndrew se posta derrièremoi.Alors que jeme rhabillais en

tremblant,jesentissesdoigtscaressermanuque,puislesbretellesdemonmaillotdebaintombèrent.–Retire-le,murmura-t-il.Jem’exécutaiet,aussitôt,ils’enemparapourlefourrerdanssapoche.–Jeteretirerailerestelà-haut,promit-il.–Ettoi,tun’asencorerienretiré,répliquai-je,presqueboudeuse.–Veux-tulefairemaintenant?Jemetournaipourluifaireface.Sonpeignoirouvertlaissaitvoirunepartiedesontorse.Mesyeux

descendirent plus bas, suivant la ligne parfaite de sa musculature. Je me mordis la lèvre, prenantconscience d’à quel point il était superbe. Et à moi. Je levai un sourcil amusé en voyant la bossedéformersonboxernoir.

–Maissitupréfèrespatienter,metaquina-t-ilenrefermantlespansdesonpeignoir.–Non…non…Attends!luiordonnai-jeenm’approchantdelui.

Jeplantaimesyeuxdanslessienset,déterminée,passaimespoucesdanslaceinturedesonmaillot.Jeleglissailelongdesesjambes,mebaissantaumêmerythmependantlamanœuvre.Illevalespiedspours’endébarrasseretjelemisdansundespaniersprévusparl’hôtel.Quandjemeretournaiverslui,iln’avaitpasrefermésonpeignoiretsonérections’offritàmesyeux.

Jelâchaiunsoupiravantdecollermoncorpscontrelesienpourl’embrasser.Ilposasamainsurmanuque,m’attirantdurementcontreseslèvrespendantqu’ildéfaisaitlenœuddemonpeignoir.Lecontactdemapoitrinenuecontresontorsechaudnousfitgémirdanslamêmesecondeetunedemesmainssefrayauncheminentrenoscorpspourlecaresser.

Àpeinemesdoigtsl’avaienteffleuréquejesentissonsexetressauterdansmapaume.Ilrelâchameslèvresetbaissalesyeuxsursonentrejambe.Jem’arrêtai,pascertained’agiraumieux.Maistrèsvite,ilrécupéramamainetlareposasurlui.

–Continue,m’intima-t-il.–Jecroyaisque…Enfin…Sionallaitdanslasuite?proposai-je.Ilclignadesyeux,s’apercevantquenousn’avionspasbougédelapiscine.Ilrepoussamamainet

refermasonpeignoir,avantdemepousserverslesescaliersdesecours.Nousgagnâmesl’ascenseuret,dès que les portes furent refermées, Andrewme plaqua contre la paroi,m’embrassant comme un foufurieux.

–Tun’aspasidéedecequetumefais,Kathleen,murmura-t-ilens’écartantdemoi.Brutalement, il rouvrit mon peignoir et se dirigea directement vers ma poitrine, embrassant et

pétrissantmes seins.Mais ce ne fut qu’une étape. Ses lèvres glissèrent surmon estomac et, très vite,arrivèrentàlahauteurdemonentrejambe.Illevalesyeuxversmoi,quémandantmonassentiment,avantderetirer lemorceaude tissu.Sesmainscaressèrentmes jambeset,commepour lehaut, ilplaçamonmaillotdansunedesespoches.

Agenouillé devantmoi, il fit le chemin inverse, embrassant l’intérieur demes genoux, puismescuisses.Destremblementsterriblesmeparcoururentpendantquesesmainsremontaientsurmesfesses.Ilposa ses lèvres furtivement surmon entrejambe, grognant un peu quand j’écartai les cuisses, avant deremontersurmonventre,puisdedéposerunbaisersurlesillondepeauentremesseins.

Le « ding » de l’ascenseur retentit et Andrew me couvrit rapidement. Il prit ma main et nousgagnâmessasuite.Unefoislaporterefermée,ilyeutuninstantétrange,oùjemedemandaissicequej’étaisentraindevivreétaitbienréel.Andrewétaitdevantmoi,m’observantavecuneétincellededésirdansleregard.

–Allonsdanslachambre,ordonna-t-ilenprenantmamain.Ilm’entraînaderrièrelui,sansquejen’offreunequelconquerésistance,etmefitasseoirsurleking

size.Jemesentaisencorepluspetite,encoreplusfaiblesurcetimmenselit,pendantqu’Andrewallumaitles spots au-dessus de la tête de lit. Alors que je pensais le voir revenir devant moi, je perçus lemouvement du matelas qui s’enfonça, puis le bout de ses doigts effleura ma nuque. Il repoussa mescheveuxhumidessurlagauche,embrassantlacourbemenantdemoncouàmonépaule.

Jebasculailatêteenarrière,m’adossantpresquecomplètementàlui.Continuantàm’embrasseretàexplorermapeaudeseslèvres,ilpassasesmainsautourdemataille,dénouantmonpeignoiravantdel’écarter doucement. La seconde suivante, il en agrippa le col et le fit glisser demes épaules. Jemedégageaiduvêtement.Maintenantnuecontrelui,jetournailatêtepourtrouversabouche.

Je remuai et le repoussai gentiment avant dem’installer à genoux entre ses cuisses.Àmon tour,j’entreprisdeluiretirersonpeignoir,bataillantaveclenœudfermementnouéautourdeseshanches.Jerâlaiunpeu,peufièred’êtremiseenéchecparmanervosité.

–Laisse-moifaire,murmuraAndrewenposantsesmainssurlesmiennes.D’ungesterapide,ilouvritsonpeignoir,etjeprisunplaisirnondissimuléàcollermoncorpsnu

contre le sien. J’enroulaimesbrasautourde sanuque, l’embrassantàperdrehaleinependantquemes

mainspassaientsursesépaulespourluienlevercomplètementsonpeignoir.Quand,enfin,ilfuttotalementnu,ilm’attiracontreluietnousbasculâmessurlelit.Jecaressaison

torse, appréciant les petits grognements qui lui échappaient. Très vite,mamain glissa le long de sonventreetretrouvasonsexeérigé.Lecorpsenfeu,jelecaressaiaveclenteur.

–Tellementbon,murmura-t-ilenfermantlesyeux.Continue.Jepoursuivismongeste,observantsonvisagesecrisperàchaqueva-et-vientdemapaumecontre

lui.Illuttait,ilbataillaitmême.Jetentaidel’apaiser,picorantsontorse,soncou,seslèvresetmêmesonvisage,maisilgémissaitdeplusenplusfort,amplifiantd’autantmonenvie.Jem’allongeaisurlui,monentrejambefrottantcontresacuisse.

Brutalement, il attrapa mes mains et me retourna sur le lit. Il flotta au-dessus de moi quelquessecondes, sa virilité caressant la peaudemonventre. Je l’encourageai avecun sourire que j’espéraissexy,etilsedécalapours’allongerprèsdemoi.J’amorçaiunmouvementdehanchepourleretrouver,maisilmerepoussa.

–Laisse-moiteregarder.Jem’étendisànouveausurledos,immobile,tandisqueledésirbrûlantetdévastateurmenaçaitde

mefaireexploser.Sesyeuxbalayèrentmoncorpsdebasenhaut,nes’attardantnullepartenparticulier,mais semblant tout demême enregistrer lemoindre détail.Quand il retrouvamon regard, je perçus ànouveaucetteétincellepresquedémoniaquedanssesdeuxémeraudes.Ilportasesdoigtsàmeslèvres,lescaressantdoucement.Jeparvinsàprendresonpoucedansmabouche,lesuçantfortafind’atténuerlesflammesquimeravageaient.Andrewm’observafaire,sesmâchoiressecrispantaurythmedemeslèvres.

–Desprojets,mademoiselleDillon?sourit-ilenretirantsonpoucedemabouche.–Lesmêmesquelesvôtres,monsieurBlake.Ilréprimaunrire,heureuxetsatisfait,etabaissasamainpourlaposersurlehautdemapoitrine.

J’exhalaiunsoupird’anticipation.Et,avecunelenteurinsupportable,ilcaressamoncorps.Lapulpedeceslongsdoigtstraînasurmapeau,passantentremesseins,surmonestomac,puissurmeshanchesavantdefinirsurunedemescuisses.Avoirsesmainssurmoiétait,sansaucundoutepossible,lameilleuredessensations.

–Définitivementnue,affirma-t-ilavecconviction.–S’ilteplaît,geignis-je.Cettefois,jen’euspasàrenouvelermarequête.Ilposasamainsurmonsexechaudethumideetle

caressadoucement.Jecriaideplaisiretmecambraipourprolongerce légercontact.Jemurmuraisonnomet,trèsvite,saboucheétouffamesgémissements.Duboutdesdoigts,ilécartamesplisetsefrayaunchemindansmeschairshumides.

Jemecambraidenouveau,sentantdestremblementsprendrepossessiondemesjambes.Jesavaiscequ’annonçaitcesignechezmoi:unorgasmefulgurantallaitmeravageràlaminuteoùilseraitenmoi.Andrewseserracontremoi,nichantsatêtedansmoncou.

–Tuestellementbelle,murmura-t-il.–Andrew…,râlai-je,nepouvantplusattendre.Etdansl’instant,ilinséraundoigtenmoi,mefaisantainsiperdretoutcontrôle.Moncorpssetendit

soudainement,avantdeseramollirtoutaussivite.Jegrognaideplaisir,maisAndrewentrepritunva-et-vientenmoi,faisantfidemonorgasme.

–Encore,murmura-t-ileninsérantunseconddoigt.Àpeineremisedemesémotions,labouledechaleurétaitdéjàentraindesereformerdanslecreux

demonventre.Ilallaitetvenaitavecfrénésie,haletantdansmoncou.Jerelevailesjambes,luioffrantunmeilleuraccès,l’encourageantparmesgémissementsàpoursuivresonagréabletorture.

–Viensenmoi,luiintimai-je,àboutdesouffle.–Jesuisentoi,sourit-ilenlevantlevisageversmoi.

–Non…Ça,expliquai-jeenpassantmamainsursonsexetendu.Ilretiradoucementsesdoigtsetlaseulesensationdevidemecontraria.–Préservatif?demanda-t-il.–Non,balayai-jerapidement.Je…Enfin,jeprends…cequ’ilfaut,bégayai-je.Unsourires’étirasurseslèvresetilm’embrassatoutens’installantentremesjambes.J’étaisdéjà

pantelante,etcefutencorepirequandsonsexeeffleuralemien.–Tuestellement…chaude,commenta-t-ilsurmeslèvres.–Àcausedetoi!–Àcause?–Grâce,corrigeai-je.Grâceà…Mesmotsmoururentdanssaboucheetils’enfonçaauplusprofonddemoi.Denouveau,mesjambes

tremblèrentetjemesentispartirloin,emportéeparunevaguegéantedeplaisir.Andrewplaçasesmainsdepartetd’autredemoncorpsetsesouleva,atteignantlepointleplussensibledemonanatomie.Jemesentais…bien,vraimentbien,baignantdansuncotondouillet,chaud,imprégnéduparfumd’Andrew.Sescheveuxhumidesretombaientsursonfront,voilantunpeusonregard.Maisc’estlaseulesensationdelui,complètementetparfaitementenmoiquicanalisaittoutemonattention.

–Andrew!criai-jeensaisissantlesdrapsdansmespoings.–Encore,murmura-t-ilenrefaisantlemêmemouvement.J’entouraiseshanchesdemesjambes,cherchantà leretenircontremoi.Mais ilétaitplusfortet,

quandilrépéta«encore»,unnouvelorgasmes’abattitsurmoi,mecoupantlesouffle.Jemurmuraisonnom une nouvelle fois, encore et encore et, après s’être immobilisé en moi, il commença à bougerlentement.

–J’aimequandtum’appellesAndrew…surtoutcommeça,dit-ildansunmurmurerauque.–Andrew,répétai-jesurlemêmeton.–Bonsang!grogna-t-ilenaccélérantlemouvement.Jeprononçaidenouveausonnomet,pourtouteréaction,ilselovacontremoi,serrantsoncorpsau

plusprèsdumien.Sesmouvementssefirentplusampleset,denouveau,jememisàtrembler.Jefermailesyeux,jen’avaisjamaisressentiçaavecquelqu’und’autre.Moncœurs’emballa,battantàunrythmechaotique,pendantqu’Andrewbougeaitenmoi.

–Redis-le!m’ordonna-t-il.–Andrew,haletai-je.–Tellement…bon,Kathleen.Jamaisétéaussi…fort,avoua-t-il.Sonrythmes’accéléradeplusenplus,cadencéparnosgémissementsmutuels.Alorsquej’étaissur

lepointdetomberunenouvellefoisdanslevide,ilcollasonfrontcontremonfrontetplongeasonregarddanslemien.Ilportasamainàmajoue,effleurantàpeinemeslèvres.

–Kathleen,murmura-t-ilcommeuneprière.Ettoutsoncorpssetenditcontrelemien.Jemeresserraiautourdelui,explosantàmontourdansun

cri de joie sans fin. Je tremblai dans ses bras et ilme serra aussi fort quepossible, les yeux clos, lesourireauxlèvres.

Quand il se retirademoietseplaçaàmescôtéspourmeprendredanssesbras, jecomprisquej’avaisfranchiplusieurslimites:lalimiteentremacarrièreetmavieprivée,lalimiteentresonpasséetsonprésent,etuneautre,moinsévidentemaisqui,maintenant,alorsquematêtereposaitsursontorse,mesautaitauxyeux,j’étaistombéeamoureusedelui.

Je frissonnai un peu et Andrew écarta les draps pour pouvoir nous installer dans le lit.Machinalement,jeregardail’heure:1heuredumatin.Jen’avaisaucuneenviederentrer,encoremoinsquandmonamantembrassamonfrontavectendresse.

–Turestes?demanda-t-il,incertain,encaressantmondos.

–Tumechasses?plaisantai-jeenmeredressant.–Non.Aucontraire,jeveuxqueturestes.Jemesens…bienquandtueslà.Vraimentbien.–Moiaussi,avouai-je.–Et…enfin,pourêtretotalementhonnêteetprésomptueux,j’envisagevraimentderenouvelercette

expérience.Jelefixailonguementavantdeposermeslèvressurlessiennes.–J’aiquelquechosepourtoi,dit-ilensortantdulit.Jelesuivisdesyeuxalorsqu’ilquittaitlachambre,admirantlerésultatdesesséancesdenatation:

ledessinparfaitdesesépaules,lamusculaturefinedesondos,sessuperbesfesses.Ilétait…sublime.Jerécupérailachemisequ’ilportaitendébutdesoiréeetl’enfilaipourlerejoindre.Jeleretrouvaidanslesalon.Toujoursnu,ilsetournaversmoietunsouriresedessinasursonvisageenvoyantsonhabitsurmoi.

–Jenepensaispasquemesvêtementsteplaisaientàcepoint!railla-t-il.–Çatedérange?demandai-je,inquiète.–Aucunement.J’avançaivers lui,cherchantàcontrôlermesyeuxquinecessaientd’alleretvenirsursoncorps,

surtoutsurlapartielaplus…intéressante.–Voilà pour toi,murmuraAndrew enme tendant une enveloppe. J’ose espérer que cette fois, tu

accepteras.Je la lui pris des mains et, pendant qu’il se plaçait derrière moi pour me serrer contre lui, je

l’ouvris.Lebonpourleslivres,lecadeaudeNoëlquej’avaisrefusé.–Tun’asaucuneraisondelerefusermaintenant,mesouffla-t-ilenembrassantmoncou.–C’estvrai.Maisjen’aimepaslasensationd’êtretoujourscellequireçoitlescadeaux.–J’aiautrechoseàtedemander.Çadevrait…rétablirlabalance«cadeaux».–Ahoui?fis-je,heureusedepouvoirluirendreunpeudecequ’ilm’offrait.–J’aiuneréception,dansunmois,àSanFrancisco.Jemefigeaidanssesbrasetposail’enveloppesurunetableprèsdemoi.–Jeveuxquetuviennes,finit-il.– Et la presse ? murmurai-je, hésitante. Je ne veux pas… Je ne veux pas que ma présence

provoque…–Riend’officiel,assura-t-il.J’aienviequetusoislà,maissitutesensmalàl’aise,neteforcepas.

Jeneveuxpas…Jeveuxquetuviennesparcequetuenasenvie,paspourmefaireplaisir.–D’accord,murmurai-je.Jeviendrai.–Vraiment?s’étonna-t-il.–Vraiment. J’ai envie d’être avec toi, et si cette réceptionm’offre cette opportunité, alors je la

saisis.Ilmefitpivoterentresesbrasetposasabouchefermementcontrelamienne.Seslèvresattaquèrent

lesmiennesavecavidité,etlesoufflememanquatrèsvite.Jemereculaietcroisaisonregardsombre.–Ilyauntrucquej’aimequandtuportesmesvêtements,commenta-t-ilensaisissantlebasdela

chemisepourmelapasserpar-dessuslatête.–Ahoui?exhalai-je.–Jesaisquetuesàmoi.Ilenroulavivementunbrasautourdematailleetm’attiracontrelui.Nousheurtâmeslecanapéetje

meretrouvaiau-dessusdelui,unejambedechaquecôtédesescuisses.–Àmoi,répéta-t-ilenembrassantmapoitrine.–Andrew,murmurai-jeaveccetteintonationqu’ilappréciaittant.

Ilm’attiraunpeupluscontre lui, et se soulevapourprendreundemes seinsdans sabouche. Jem’entendisgémir lourdement,moncorpsse réveillantdesoncourtengourdissement.Ledésirgalopantreprit possession de moi, et je me retrouvai en train d’onduler au-dessus d’Andrew. Mes mainsagrippèrentlehautducanapéderrièrelui,leserrantàm’enfairemal,quandAndrewenfonçaunpremierdoigtenmoi.

–Parfaite,murmura-t-il.–Àtoi,soufflai-jesurseslèvres.–Entoi,grogna-t-ilenretirantsamainpourm’attirersursonsexe.Lasensationm’arrachauncrideplaisir.Jerestaiimmobilequelquessecondesavantdesentirses

mains sur mes hanches. Je bougeai doucement, allant et venant sur sa longueur. Il bascula la tête enarrière,gémissantmonprénom.

Je remuai sur lui, en avant, en arrière, alternant un rythme rapide et un rythme plus doux. Jemeconcentraissurlevisaged’Andrew,admirantlacrispationdesesmâchoiresalliéeauquasi-abandondelui-mêmedevantmoi.

C’étaitpourlui,uniquementpourluiquejebougeais.Monplaisirn’avaitaucuneimportance,seulscomptaientsesgémissementsetsesdoigtsquis’enfonçaientunpeuenmoipourm’indiquerlacadenceàsuivre.

Brutalement, il se redressa,meserrantcontre lui.Sabouche retrouvamapoitrineet remonta trèsvite,ilmordillamalèvreinférieureet,soudain,toutcequejeretenaislâcha.Moncœurfrappadansmapoitrine à une vitesse hallucinante et mon bas-ventre se contracta dans un orgasme fulgurant. Jem’effondraidanssesbrasavantdelesentirsecrispersousmoietselaisseremporteràsontour.

Après quelques minutes où seules nos respirations haletantes se faisaient entendre, je me sentissoulevée.J’enroulaimesjambesautourdelui,lespaupièrescloses,bercéeparsesbraspuissants.

Cefutl’étrangeetbrutaleclartéquimefitouvrirlesyeux.Jelesclignaiplusieursfois,cherchantàrepéreroùnousétions.

Lasalledebains.–Qu’est-ceque…–Unedouche.Etsansmelâcher,nousentrâmesdanslagigantesquecabinededouche.L’eau,déjàtiède,commença

àcoulersurnous,etjeglissailentementlelongdesoncorps.Ildégagealesmèchesquicollaientàmonvisageetmefittourner.Aprèsuninstant,sesdoigtsseposèrentsurmatêteetilmelavadoucementlescheveux.Aprèslesavoirlonguementrincés,ilentrepritdemesavonner,passantsesmainsblanchesdemoussesurchacunedespartiesdemoncorps.

Lasensationétaitàlafoisgrisanteetrelaxante.Andrewétaitdoux,délicat,sespaumesépousaientparfaitementchacunedemescourbes,nelaissantaucunendroitinexploré.Quandsesmainsremontèrentdemonventreversmapoitrine,jem’appuyailargementsurlui,mesfessesfrottantcontresonbas-ventre.

Ilpassasurmesseinscommesurlerestedemoncorps,m’arrachantungémissementdefrustration.Jedevinaissonsourireetsesmainsseposèrentsurmesépaules,memassantlonguementenrevenantseplacersurmanuque.

–Jevaist’offrirundecesmassagesdontMeghanraffole,murmura-t-ilenpétrissantmesépaules.–Pourquoidépenserdel’argentquandtulefaissibienetgratuitement?–Pourtefaireplaisir…– Oh… Prenons le problème autrement : l’équipe de masseurs est exclusivement masculine,

soufflai-je.Sesmainssefigèrentsurmoietjemepinçaileslèvrespourcontenirmonrire.–JecomprendspourquoiMeghanaimetantçafinalement!plaisanta-t-il.–Ilfaudraitêtredifficile!

–Teconcernant,jevaism’octroyerceprivilège.–Larègledel’exception,jeprésume.–Monexception,confirma-t-ilenmetournantfaceàluipourm’embrasser.Àmontour,jeprislegeldouchedel’hôteletlefismousserentremesmains.Jelesposaisurson

torse,lesavonnantdoucement.Larespirationd’Andrews’accéléraitàmesurequejedescendaisverssonentrejambe.Maiscommeill’avaitfaitavecmoi,jepassaisursonsexesansm’yappesantiretdescendissursescuisses.

–Tourne-toi,luidis-jedoucement.Il s’exécuta, et je repris lechemin inverse, remontant le longde ses jambes, caressant ses fesses

avantderetrouversondosfinementmusclé.–Depuisquandnages-tu?demandai-jeenlongeantsacolonnevertébrale.–L’université.Çamepermetd’évacuerlestensionsaccumulées.Je le rinçai rapidement et nous sortîmes de la cabine de douche. Andrew m’enroula dans une

serviette immense et moelleuse avant de se frictionner rapidement. De retour dans le grand lit, alorsqu’Andrew, dans mon dos, me serrait contre lui, j’en profitai pour aborder de nouveau le sujet«Eleanor»:

–Andrew?–Humm?fit-ilderrièremoi.–Est-ceque…Enfin,toutàl’heuretuasditquej’étaislapremièredepuisEleanor.Est-ceque…

Est-cequ’elleetmoi,nousnousressemblons?–Jenesaispas…Vousêtesdifférentes,maisvousêtesaussidéterminéesl’unequel’autre.Eleanor

était…plus agitée, toujours dans l’action.Elle prenait ses décisions en fonction de son ressenti, sansparfoissepréoccuperdecequepensaientlesautres.Ellesuivaitsoninstinct.

–Tumetrouvesplusréfléchie?–Plusposée.Tuesapaisante,sereine.Jemetournaiverslui,plaquantmesmainssursontorse.Jemeperdisdansleregardd’Andrewet

constatai,eneffet,quesonvisageétaitdétendu,quesesgestesétaientdoux,tendres,faciles.–Necherchepasàêtrecommeelle,murmura-t-il.–Cen’estpas…cequejeveux.Jecrois…C’estbizarre,maisj’auraisaimélaconnaître,souris-je.–Eleanor…Commentdire…Imagineunetornadedébarquerunjourdevanttoi,s’installersurton

pupitreettedirequ’elleauneidéeformidable.J’aimaisçachezelle.Cettecapacitéàs’enthousiasmerdetoutetderien.

–Tuluienveuxtoujours?demandai-jedoucement.–Parfois.Maispeut-onvraimentenvouloiràquelqu’unqu’onaaimésiprofondément?Meghana

étéplus…vindicative.Ellerefusedeparlerd’Eleanor,elles’estsentietrahie.–Cequiexpliquequ’elleveuilleteprotégerdemoi?– En partie, sûrement. Elle veut aussi te protéger. L’accident de voiture a tué Eleanor, mais sa

liaisonduraitdepuisquelquesmois.Quelquepart,notrecoupledevaitcertainementêtredéjàmortàsesyeux.Meghanpensed’ailleursquecetteaventureétaitliéeànotremodedevie,quel’argentaprislepassurnotrehistoire.Possible,maisjeneluienveuxpasd’avoireuuneliaison.

–Vraiment?m’étonnai-je.– Vraiment. Parce que je pense qu’elle m’aimait. J’ai envie de croire qu’elle avait juste envie

d’autrechose,dequelquechosededifférentdemoietdenotreviedecouple.Jeluienveuxdem’avoirmenti.J’auraispréféréqu’ellemequitte,qu’elleassumeêtrepasséeàautrechose.

–Commentaurait-ellepu?lâchai-je.Commentaurait-ellepuquitterl’hommeàquielleavaitdonnétantdesavie?

–Jenesaispas…Maisjepréfèrel’honnêteté.Toujours.

Il posa légèrement sa bouche sur la mienne et m’embrassa. Ce n’est qu’à ce moment que notreconversationaurestaurantmerevintenmémoire.Jemedétachaideseslèvres,espérantdémêlerlesujet.

–Cequetuasdit…cesoir.–J’aiditpasmaldechoses,sourit-il.–Ausujetdetoietmoi…Enfin,surlefaitquetusoismonpatron.–Oh…Ça…Lechampagneaurait-ilfinalementcesséd’agirsurtoncerveau?Tuesd’habitudesi…

perspicace!–Mais…tuasditquetunecouchaispasavectesemployées.–Eneffet.Jen’aijamaisconsidéréEleanorcommeuneemployée.–Elleétait…–…Mafemme,oui.Lapaniquemegagnaitetmoncœur,battantàunrythmebientroprapide,menaçaitdelâcherdansla

seconde.Jesentislamaind’Andreweffleurermajoue.–Tun’espasentrainde…–Kathleen,sij’avaisvoulutedemanderenmariagecesoir,j’auraistrèscertainementmisungenou

àterreetglisséundiamantaussigrosquemonpoingàtondoigt.–Mais…–Etj’auraisappelétonpèreavant,évidemment,ajouta-t-il,unsourireauxlèvres.–Onseconnaîtàpeine,contrai-je.–C’est vrai. Je veux juste que tu te fasses à l’idée…Tu as parfois tellement demal à accepter

l’évidence.–Entoutcas,j’acceptetrèsbientoncôté…excessifetprésomptueux!ironisai-jeenmecalantdans

sesbras.–C’estundébut.La conversation était finie, etmême si j’avais eu des réponses à certaines demes questions, de

nouvellesfleurissaientdansmatête.Aumatin,àmonréveil,Andrewmerefitl’amour.Cetteétreinte-làneressemblaitpasàcellesdela

nuitpassée.Luicommemoivoulionsnousrassasierl’undel’autre.IlrepartaitdanslajournéepourSanFranciscoet,moi,j’allaisreprendremonrôledePénélopeattendantleretourdesonaimé.

Alorsquenouspartagions lepetit déjeuner copieuxqu’Andrewavait commandépournousdeux,nousréglionsl’unetl’autrenosimpératifsd’agenda.

–Quandseras-tuderetour?demandai-jetandisqu’ilconsultaitsontéléphone.–Jereviensle20.Justepourunenuit.Laréceptionestle10avrilàSanFrancisco,jet’enverraiun

billetd’avion.–Andrew,jepeuxm’offrirmon…– Je demanderai à Nathan de t’escorter à la sortie de l’aéroport, compléta-t-il en ignorant ma

remarque.Ensuite,jeviendraipourlemariagedeLynne,le25.Jeresteraisûrementquelquesjours.Jenotaiprécieusementlesdatessurunmorceaudepapier,mepromettantdebouclermonplanningà

veniravecLynneenfonctiondelaprésenced’Andrew.–Euh…Dois-jeprévoirunhôtelàSanFrancisco?demandai-jeavantdeportermoncappuccinoà

meslèvres.–LaréceptionalieuauSheraton.Onaquasimentréservétoutl’hôtel.–Oh…–Tudormirasdansmasuite.–Oh…Etoùdormiras-tu?souris-je.–J’espérais,àvraidire,partagercettesuiteavectoi,murmura-t-ilavantdepassersonpouceau-

dessusdemabouche,retirantainsilesurplusdecrème,etdelefourrerdanslasienne.

–Sansmedemandermonavis?risquai-je,lesoufflecourt.– Je neme préoccupe généralement pas vraiment de l’avis des gens…Toutefois, te concernant,

l’exception est et sera toujours demise.Donc,Kathleen, accepteriez-vous de partagerma suite à SanFrancisco?

–Jeprendslelit,tuprendslecanapé!déclarai-je,hilare.Il eut un sourire heureux, presque soulagé, quime surprit. Ilme regarda rire avec cette attention

particulièreetsoutenue.–J’aimetonrire,commenta-t-il.Je rougisviolemment.Andrewsavaitcomplimenter,maiscegenredephrase, lâchéeauhasardet

incroyablementintime,memettaittoujoursmalàl’aise.J’avaislasensationdevolerlebiend’uneautre,enl’occurrence,Eleanor.Etl’amourqu’Andrewluiportaitoccupaittoujoursmonesprit.

–Àquelleheureesttonvol?demandai-jepourchangertrèsvitedeconversation.–Versmidi.D’ailleurs,jevaisdevoiryaller,ajouta-t-ilenregardantsamontre.Prendstontemps,

jevaismechangeretpréparermesaffaires.Trenteminutesplustard,Andrewetmoiétionshabillésetéchangionsundernierbaiser.–Turejoinsleparking,unevoitureteramènecheztoi.–D’accord,murmurai-je.–Situaslemoindreproblème,ousicesvautoursappellentencorecheztoi,tumeledisetjeferai

lenécessaire.–Andrew,jevaismedébrouiller.–Kathleen,promets-moid’appeler.Jeneveuxpasquecettehistoire…tedéstabilise,etjeneveux

pasquecelanousdéstabilise.Teperdremaintenant,aprèscettenuit,seraitterriblepourmoi.–Pourmoiaussi,avouai-je.–Bien.Maintenant, rentrechez toi, je t’appelledans lasoirée.Etsoisprudente,ajouta-t-ilenme

fixantavecintensité.Ilembrassadoucementmeslèvresetouvritlaporte.S’assurantquepersonnenerôdaitàl’étage,je

quittailasuiteetgagnail’ascenseur.

CHAPITRE18

Àpeineavais-jefranchilaportedemonappartementquejemesentisvide.Àvraidire,masoiréepuismanuitavecAndrewm’avaientpsychiquementépuisée.Ilétaitàpeinemidi,etjenedevaisrevoirAndrewquedansquinzelonguesjournées.Etautantdenuits.Jesoupirai,déjàlassequenosviessoientsicompliquées,luilà-basetmoiici.

Leretouràlanormalefutexpéditif.J’avaisquelquescoursesàfaire,quelquesfacturesàpayer,etdevaismemettreencontactavecmabanquepouracterlasignaturedemonnouvelappartement.Quandtoutfutenfinterminé,jem’effondraidansmoncanapéetilétaitquasiment17heures.Fortheureusement,jen’étaispasdeservicecettenuit,maisreprenaislanuitsuivante.Jedevaismeremettredanslerythme,etdevaisencoretenirunpeupournepasêtrelessivéelelendemain.

Etjesavaisdéjààquoij’allaismettreàprofitmasoirée:EleanorBlake.Pouruneraisonétrange, lesaveuxd’Andrewsursonamourpourelle,sursoncaractèreetsursa

liaison clandestine avec un autre homme m’avaient bouleversée. Je ne comprenais pas comment unefemmequiavaittoutpouvaitenvouloirencoreplus.Elleavaitl’argent,laréussite,l’amour…Pourquoiallerchercherailleurs?Pourquoivouloirmieux?

Mon ordinateur sur les genoux, je me décidai à lancer mes recherches sur elle.Mes premièresinvestigations surAndrewn’avaientpasété couronnéesde succès,mais j’espéraisqu’il restait encoreunetraced’Eleanorquelquepart.

Sanssurprise,jedécouvrisqu’Eleanorétaitessentiellementprésentéecommeétant«lafemmede».Celamesurprenaitd’autantplusque,d’aprèsAndrew,elleétaitune femmedecaractère,et jedoutaisqu’elle soit capable de se réduire à ce seul rôle. Finalement, un article qui lui était dédié dans unmagazinefémininattiramonattention.

Avantd’êtreEleanorBlake,elleétaitEleanorCummings,débarquantdel’Oregon,desétoilesdanslesyeuxetdesrêvespleinlatête.Silaplupartdesgensl’assimilentàsonmari,AndrewBlake,stratègedesmédias,ellenesecontentepasdel’affichageetrevendiquesonrôled’amante,defemme,d’amieetdedirectricedecommunication.

La journaliste,AnnaKlein, avait alorsdébuté son interviewsur l’adolescenced’Eleanor, sur sesrêvesderéussite.Aînéedelafamille,elleavaitdébarquéàSanFranciscosansbeaucoupd’argent,maisavecl’enviederéussir.

Je cliquai sur le lien me renvoyant vers l’article, espérant compléter ce qu’Andrew m’avaitesquissé.

AK :AndrewBlake,votreépoux,parle toujoursdevouscommed’uneévidencedans savie.Pouvez-vousnousdonnervotreversion?

EC:J’airencontréAndrewàlafaculté.Jecrainsdenepasêtreoriginale.Noussommesd’aborddevenusamis,jecroisque je suis tombéeamoureusede luiaumomentdeceprojet,enéconomie. Je l’écoutaisparler,décrirecetteentreprisefictivequenousdevionsmonter…C’étaitincroyable(sourire).Andrewacettevolontéférocedevouloirfaireparticiperlesgens.Iladituntrucdugenre«Eleanor,peux-tucompléterlepointmarketing?»et,jenesaispas,peut-êtrequec’estàcemomentque l’évidences’estproduite.Etpuisunsoir,nousnoussommesembrassés.Ilestdifficiledenepastomberamoureused’unhommecommeAndrew.

Je souris largement. Je devais l’admettre : lui résister avait été compliqué et épuisant.Apparemment, Eleanor ne s’était pas battue contre ce qu’Andrew éveillait en elle. Il parlaitd’«évidence»,j’auraispresquepréféréleterme«facilité»tantleurrelationsemblaitavoirétésimpleàgérer.

AK:Beaucoupvouscantonnentàunrôled’accessoire,est-cequecelavousblesse?EC:J’avouequejemesensàl’étroitdanslerôledelajoliefillequisourit.Jenesaispasd’oùvientcetteimageun peu réductrice. Le monde de l’entreprise, de la très grande entreprise, je veux dire, est assez masculin.AndrewestleP-DGdelasociété,maisjamaisiln’apasparticipéàcetteimage.Aucontraire…Ilatoujoursétéd’uneprévenancesansfaille.C’estunhommeloyal.

Je songeai furtivement à la réception à laquelleAndrewm’avait demandéde participer.Avec lerecul, jedoutaisd’avoireuunregard,ouunsourire franc. Je représentais ladistractionpourAbby, lamauvaisepressepourMattetpresqueuneintruseauxyeuxdeMeghan.Eleanorfaisaitpartieintégrantedel’entrepriseetsubissaitdéjàcegenredequolibetsetdecommérages…Jesavaisàprésentquecequej’allais affronter allait être encore plus violent. J’étais concierge de nuit, journaliste ratée, pasfranchementunefemmed’affairesaccompliepouvantrivaliseravecAndrew.

AK:Pouvez-vousnousdirecommentsedéroulentvosjournées?EC:Nousavonsunevieplutôtnormale.Andrewfaitpasmaldedéplacements,surlacôteest,àNewYork,pourfinaliserl’acquisitiond’unnouveaujournal.C’estunprojetauqueliltientetjeluiapportetoutmonsoutien.AK:Sesabsencesdoiventêtredouloureuses,non?EC:J’ysuishabituée.Mêmesi,parfois,j’aimeraisavoirunhommequirentreàuneheuredécenteàlamaison,j’aimemon époux…Nous nous attachons à communiquer chaque jour. Évidemment, ça ne remplace pas saprésence,mais il fautsavoirfairedescompromis.J’aidesamis,unmétier…toutcelam’aideàcompensersesabsences.Jen’aipaspourhabitudedemelaisserabattre.AK:Etdonc,quandest-illà?EC : La plupart du temps, nous nous croisons le matin, avant le début de ses réunions. Nous déjeunonsensembleassezsouvent.Lesoir,ilrentretard,maisnoustenonsàgarderunmomentpournous.Jevousl’aidit,nous avons une vie assez normale. Le plus difficile est de faire coïncider nos emplois du temps.Mais nousrecevonsdesamisàdînerleweek-end,nousavonspassénosdernièresvacancesausoleil…

Je recoupai les informationsde l’articleaveccequem’avaitditAndrew.Lesvacancesausoleilpoursauversoncoupleàladérive,l’acquisitiondujournalàNewYork.Jebaissailesyeuxenbasdel’articlepourtrouverladate:18novembre,quelquessemainesavantsamort.

Elle avait appris à gérer la solitude, l’absence, les déplacements. Et pourtant, malgré tous cescompromis, malgré les vacances, malgré le bébé, elle avait une liaison. J’imaginais sa double vie,presqueschizophrène:ellecroisaitparfoissonépoux,travaillaitpourlui,l’aimait,ettrouvaitletempspour rejoindre un autre homme. Je comprenais alors qu’effectivement, faire coïncider les emplois dutempsavaitdûêtreplutôtardu.

AK:Votremarifaitpartiedelafameuselistedeshommeslesplussexy…Pouvez-vousbriserlemythe?EC:Quepourrais-jevousdire?Andrewnecuisinepas,etilpeutserévélervraiment…bordélique.Ilaperdusonpasseportdernièrement, etmême les clés de sa voiture.C’est unmystèrepourmoi : cethomme retientunetonned’informations,maisoublie leschoses lesplusbasiques. Iln’offreque rarementdes fleursetoublie lesdatesd’anniversaire.Ça,c’estdifficile.J’aimeraisqu’ilsoitplusjaloux.Nousnousconnaissonsparfaitementet,mêmequandilrefusedel’admettre,jesaisquandiln’aimepasquelquechose.Mais,sincèrement,jecomprendsqu’Andrewsoitunhommeconvoité.

Jesourisenvoyantcedescriptifpeuflatteurd’Andrew.Jemedemandaismêmesielleparlaitbiendel’hommequim’offraitdesroses,quiretenaitchacundesminusculesdétailsdemavieetquiavaitfaitmontred’unepossessivitéassezdémonstrativedepuisquenousnousconnaissions.Detouteévidence,ilavaitchangé.

Oualors,était-celeurrelation?Elles’échinaitàdécrireunbonheursansfaille,ànousfairecroireà laperfectiondesavie,mais ilyavaituneformederésignationdanssesmots.Cesentimentcurieuxperduraquand jedécouvris lapremièrephotoquihabillait l’article.Eleanorapparaissait souriante,enmouvement, assise dans un fauteuil en cuir noir. Ses cheveux ramenés en arrière lui donnaient un airsérieux,presqueexagérémentautoritaire.Ellenevoulaitplusêtrel’épouse,justeunefemme.

AK:Etvous?Êtes-vousconvoitée?EC:Parfois…Audépart,j’avaislasensationqueleshommesn’osaientmêmepasmeregarderparcequej’étaislafemmede…Maintenant,c’estdifférent.Ilyadelacuriositéàmonsujet.Lesgensdécouvrentquejetravaille,quej’aidesenvies,desgoûts,quejenesuispasquelafemmede…Àvraidire,c’estflatteur.AK:Avez-vous,avecvotremari,leprojetd’avoirdesenfants?EC :Quin’apasceprojet?Maintenant, il fautparfoissavoirattendreetêtrepatiente,commepourtous lessujetsd’importance.C’estuneenvieplutôtrécente.

Peut-êtreétait-elledéjàenceinteàcemoment-là.Paradoxalement,alorsqu’elleparlaitmaternitéetenfant,unechosemefrappa:elleétaitseule.Elleneparlaitpasd’enviecommune,nid’Andrewentantque père. Le simple fait de rappeler que les choses changeaient à une vitesse effrayante résumait lasituation:mêmesielleétaitenceinte,mêmesielleétaitprête,elleavaitexclul’hommedontellevoulaitdesenfants.

AK:Sij’encroislesrumeurs,voscollaborateursfontpartdevotreenviepermanented’agir.Seriez-vousboulimiquedetravail?EC : Non. Le travail n’est pas toutema vie. Je suis une passionnée, je vis les choses. Onme reprochemonenthousiasme?Peuimporte…Onmereprochedevivreunpeubrutalement?Peuimporte…Jenem’attachepasàcegenredecommentaires.Jen’aimepas…laroutine,oucequicommenceàs’yapparenter.Parfois,uneidéevousvientet il faut lasuivre.Lavieesttellementcourte, jenevoispaspourquoi jemerefrénerais.Rienn’estécrit.Gamine,oui,jevoulaisréussir…Maissionm’avaitditquej’enseraislà…jen’yauraisjamaiscru.Toutestquestiond’opportunité.

Pour lapremière foisdepuis ledébutdema lecture, je retrouvai la femmedontAndrewm’avaitparlé.Elleétaitimpulsiveetinstinctive.Elleavaitcetenthousiasmedébordantpourlavieetcequ’ellenousapporte.J’imaginaisfurtivementEleanoretAndrewensemble,l’alliancedufeuetdelaglace.Peut-êtreavait-elleconsidéréAndrewcommeuneopportunité?

AK:Vousnevousinquiétezpasdesimpératifs?EC : Jene connaispas cemot (rire).C’estd’ailleursun termeque je tentede faireoublier àmonmari qui atoujoursdes«impératifs».Ceciétantdit,mêmesi laplupartdesgensmeprennentpouruneexubérante,j’aicertainesvaleursauxquellesjetiens:êtrehonnêteavecsoi-même,êtreheureux,oublierlesrumeurs.AK:Lesjournauxspécialisésdisentquel’empiredevotremaripourraits’écrouleràcausedelachutedesventes.EC:BlakeMediasseportebien.Etsicen’étaitpaslecas,AndrewneseraitpasàNewYorkentraindenégocieruncontrat.AK:Desphotosrécentesvousmontrentavecunautrehomme.Avez-vousdescommentairesàfaireàcesujet?EC: (Rires)J’aimemonépoux.Éperdument.Chaque jour, jesavoure lachanceque j’aid’êtreavecunhommecommelui.Jevousl’aidit,jenem’intéressepasauxrumeurs.

Je trouvaiunesecondephoto, sur laquelleEleanorapparaissaitplusdroite,plus figée.Lesmainscroisées, elle fixait avecobstination l’objectif. Il n’y avait pas le sourire lumineuxdupremier cliché,justel’alluredelafemmed’affaires,déterminéeàréussir.

Encoreune fois, je relus sesmots.Elledisait l’aimer.Sansdoutenementait-ellepas, sansdoutel’aimait-elle,maisjedoutaisdelaforcedesessentimentspourlui.Elleledisaitelle-même:lasolitudeluipesait,maisellecompensait.Elleparlaitdespetitsdéfautsd’Andrew,sansjamaiss’enattendrir.

AK:Etvotreépoux,qu’enpense-t-il?EC : Je ne suismêmepas certaine qu’il ait vu ces photos (rires).Quand je vousparlais de la jalousie tout àl’heure…Peut-êtredevrais-jelesluimontrerfinalement,histoiredeflattermonegoetmefaireoffrirunbijoumagnifiquequimeferaoubliersonagendasurchargé.AK:Dernièrequestion:voussembleztoujourssûredevous,confianteenlavieetenl’avenir,ya-t-ilunechosequipourraitvousmanquer?EC : Jenesaispas.C’estunequestiondifficile. Jeveuxdire, j’aipleindechoses :montravail,monmari,desprojets…Mais peut-êtremanque-t-il quelque chose que j’ignore ?Ou peut-être que j’ai tout ça,mais que jepourraisenavoirplusencore…Alors,oui,ilmanquesûrementquelquechoseàmavie,resteàdéterminerquoi.

Àpeine,avais-jebouclécesderniersmotsquejeretournaisurmapagederecherchesetrécupéraila fameuse photo floue. À la lumière des mots d’Eleanor et de la description d’Andrew, je comprismaintenantque l’hommeà côtéd’elledevait être son amant. Je rapprochai laphotoplusprèsdemoi,maisonnedistinguaitvraimentrien.Lephotographedevaitsûrementêtretroploinpourespérerunvraiscandale.

Jeretrouvaid’autresclichés,encoreplusflous.Deprimeabord,Eleanoretcethommesemblaientsetenirlamainmais,enexaminantdeplusprès,ilauraitputoutsimplements’agirdedeuxamismarchantl’unprèsdel’autre.Enfin,surladernièrephoto,unmicroscopiqueentrefiletdonnaituneinterprétation:

EleanorBlake,femmed’AndrewBlakeetdirectricedelacommunicationdeBlakeMedias,sortantd’unrestaurantencompagnied’unhomme.D’aprèslestémoins,lesdeuxamantsétaientàl’écartdelafouleetsesonttenuslamainpendanttoutledîner.Malgrélesdémentisd’EleanorBlakesurlesphotosaveccemêmehomme,ilyadixjours,ilsembleraitquel’idylleseconfirme.D’aprèsnosinformations,l’homme,dontl’identitéesttoujoursinconnue,aétévu,dernièrementetàplusieursreprises,sortantetentrantdudomiciledesBlake.

Je regardai longuement la photo. Jeme posais encore et toujours lamême question : pourquoi ?Pourquoiavait-elletournéledosàAndrew?Pourquoicettefemmequidisaitaimersonmariluimentait-elle?

Jesursautaiàlavibrationbruyantedemonportablesurlatablebasse.Andrew.–Bonsoir,murmurai-jeenm’installantconfortablementsurlecanapé.–J’espèrequejeneteréveillepasaumoins.–Je…Euh…Non…Ilestsitardqueça?demandai-jeenjetantunœilsurl’horloge.–Presque2heuresdumatincheztoi.–Jen’aipasvul’heuretourner,admis-je.Je…lisais.–Livre?–Presse.–Dois-jecomprendrequeturéfléchisenfinsérieusementàmonoffre?–Non.J’aidéjàunmétier,Andrew!Comments’estpassétonvol?demandai-jepourchangerde

sujetauplusvite.–Triste,longetennuyeux.Etjecroisquetumemanques.–Tudevraist’occuperl’esprit,pourlimiter…ça.–Peut-êtremais, àvrai dire, j’aimeassezquandmonesprit est occupépar toi.Tues…presque

aussiapaisantequelanatation.–Presque?–Tusaiscequejeveuxdire.Tuveuxquejetedisecequiestleplusironique?

–Dis-moi,soufflai-je.– Pendant desmois, je ne voulais pas sortir de cettemaison, pour ne pas affronter la réalité…

Maintenant…depuistoi,murmura-t-il,jen’aimêmeplusenvied’ymettrelespieds.–Andrew,cettemaison…tuytiens,tuyasdessouvenirs.– Alors, comment expliquer que je sois plus attaché à ma suite au Peninsula ? Je préfère les

souvenirsquisontlà-bas.Ettoi,ajouta-t-iluntonplusbas.Jechangeaimontéléphoned’oreille,àlafoisgênéeetheureuse.Andrewsavaitcommenttrouverles

motspourmechambouler.Silequittercematinavaitétédifficile,lelaisserdenouveaucettenuitseraitencoreplusdur.

–Tumemanquesaussi,avouai-je.Moiaussijecomptelesnuits.–Enfin!seréjouit-ildansunrire.Enfin,tul’admets!–Jenepensaispasquetonegoavaitbesoind’êtreglorifié.–Kathleen,jenemesuisjamaissentiaussidémuni,aussiimpuissantquedevanttoi.Alors,oui,mon

egoabesoind’êtreglorifié!–Tumemanques,répétai-je.Tumemanquesbeaucoup,assurai-je.Etj’aivraimentenviequenous

partagionsunenouvellesoirée.–Tuneveuxtoujoursrienmedire?–N’as-tujamaisrienfaitderéellementimprévisibledanstavie?–Tuveuxdireàpartt’avoirrencontrée,êtretombésoustoncharmemaléfiqueetavoirfaillitefaire

l’amouraumilieud’unepiscine?Non,rien!–Jesuismaléfique?dis-jeenfaisantsemblantdem’offusquer.–Danslebonsensduterme!C’estuncompliment,précisa-t-il.–Mercidemerassurer.Maismalgrétout,jegardelasurprise.Je l’entendis soupirer de lassitude.Ceque j’interprétai naïvement commeun signed’abandonde

toutelutteétaitenfait…autrechose.– Kathleen, il faudra que tu m’en parles, que tu le veuilles ou non, dit-il avec une froideur

effrayante.–Pourquoi?– Je ne peux pas… faire ce que je veux. Pas àNewYork.Etmême si je veux bien prendre les

risqueslesplusfouspourêtreavectoi,jeneveuxpasquetusois…undommagecollatéral.–Andrew,qu’est-cequ’ilsepasse?Lapresse,encore?–Pasquelapresse…NathanetMeghanontreçudescoupsdefilétranges.Monemploidutempsest

connupartoutdansSanFrancisco.–Lauren?–Jenesaispas.Maisilesthorsdequestionquetusoismêléeàça.Onpeutmepourrirlavie,mais

jeneveuxpasquelatiennechange.–Elleadéjàchangé,murmurai-je.Jesuisavectoimaintenant.Jesuismêléeàça,quetuleveuilles

ounon.–Kathleen…Tu…–Andrew…s’ilteplaît.Jepeuxgérerça!Jetediraicequ’onfait,maisjeveuxquetusoishonnête

avecmoisurlesujet.Denouveau,ilsoupira,vaincu.–Quandjedisaisquetuétaismaléfique!riposta-t-ilavecunetracederire.–Jesaisquetuveuxmeprotéger,maisilnem’arriverarien.Etàvraidire,laseulefaçonquetu

auraisdemeprotégerefficacementseraitsûrementdemequitter,plaisantai-je.–Inenvisageable,rétorqua-t-ilaussitôt.Vraiment,inenvisageable.Dieuseulsaitdansquellesmains

tutomberais…

–Jesais…Sij’encroismonpère,meschoixconcernantleshommesonttoujoursétédouteux.–Ilestflic,ils’yconnaît,approuvaAndrew.J’aimeraisconnaîtresonavissurmoi.Surtoutquandil

sauraquejet’empêched’allerdormirlanuit!–Que…Quoi?–Jeparledececoupdefil,Kathleen…Quelgenred’idéesavais-tuencoredanslatête?Sûrement

deschosesimpuresetpeuchastes.–Toi,soufflai-je.Deschosesimpuresettoi.–Mevoilàrassuré.Nousavonsexactementlemêmegenred’idées.Maintenant,fileaulit.–Celanem’aiderapasàlimiterlespenséesimpures,plaisantai-je.–Unjour,nousseronstouslesdeuxdanscelit,ettumedirasexactementlegenredepenséesquite

hantent.–Toutes?–Uneàune…Encoreetencore,ajouta-t-il.J’étouffaiungémissementà lamentiondeson«encore»,merappelantprécisémentdusondesa

voixetdesonregardsombrelorsqu’ill’avaitprononcépourladernièrefois.Jedéglutisavecdifficulté,sentantmoncorpss’embraserdoucement.

–Passeunebonnenuit,maléfiqueKathleen,murmura-t-il.–Jamaissanstoi,avouai-je.–Jamaissanstoinonplus.Jet’embrasse.Jeraccrochailasecondesuivanteetlafatiguepritfinalementlepassurmonorganisme.Aprèsdeux

bâillements, je décidai de suivre le conseil d’Andrew et d’aller me coucher. Avant de rejoindre machambre,jeplaquaiunPost-itsurl’écrandemonordinateurpourmesouvenirdemapremièremissionàeffectuerlelendemain:appelermonpère.

***

Àmonréveil,enfindematinée,j’avaislasensationd’avoirdormidesjoursentiers.Rarementmonsommeil avait été aussi apaisant et reposant. Comme un automate, je me glissai sous la douche et,quelquesminutesplustard,j’étaisdansmapetitecuisineàmeverserunetassedethébrûlant.

Versmidi,alorsquejem’apprêtaisàappelermonpère,lasonnettedemaporteretentit.Jecollaimonœilaujudasavantd’étoufferunrirequitenaitplusdugloussement.

–KathleenDillon?fitlejeunelivreurdevantmoi.–C’estmoi,acquiesçai-jeenrécupérantlesrosesblanches.Jesignailebondelivraisoncommejelepouvais,avantderefermerlaporte.Jeplongeailesfleurs

dansunvasepuiscomposailenumérod’Andrew.–BlakeMedias,bonjour,ditunevoixdouce.–Bonjour,KathleenDillonpourAndrewBlake,jevousprie.– Mademoiselle Dillon, M. Blake est en déplacement aujourd’hui. Son vol doit atterrir à

Sacramentodansenvironvingtminutes.–Oh…J’étaislégèrementsurprised’entendreunevoixsichaleureuse,encomparaisondecelledeLauren,

cettedernièreayantpasséleplusclairdesontempsàmefiltrer.–Bien.Jel’appelleraidirectementdanscecas.Mercidevotreaide.–Jevousenprie,mademoiselleDillon.J’allaisraccrocherquandlavoixdel’assistantecriamonnomdanslecombiné:–MademoiselleDillon?fit-elleunetroisièmefois.M.Evanssouhaiteraits’entreteniravecvous.–Aucunsouci.

–Jevousmetsenrelation.Bonnefindejournée.Ilyeutunpetitdéclicet,toutdesuiteaprès,l’accenttexandeNathanrésonnadansletéléphone:–Kat!seréjouit-il.Techniquement,jesuiscensévousdétesterpourm’avoirmisàdosl’hommequi

signemonchèqueàlafindumois…Mais,jesuisprêtàfairepreuvedemansuétude!–Ilavraimentétésiterrible?demandai-je,inquiète.–Non…d’oùmamansuétude.Ceciétantdit, j’aiunevague idéedecequiapu lui faireoublier

toutesarage.Jetenaisdoncàvousremercier.–Jenesaispassijedoisêtre…choquéeouflattée,ris-je.– Flattée… Je tenais à vous remercier à plusieurs titres…Hormis le fait de m’avoir sauvé du

licenciement et d’unemort certainement douloureuse, je tenais à vous dire que vous avez vraiment uneffetbénéfiquesurAndrew.

Jeréprimaiunrireenjetantunœilaubouquetdefleurssurlatable.Quelétaitlemotqu’Andrewavaitemployé…Ahoui…«Maléfique».

–Je…J’ensuisravie,balbutiai-jefinalement.Ilyeutunpetitsilence,etj’eussoudainuneidée.Andrewcraignaitvisiblementpoursavieprivée

etmasécurité.Etmoi,jetenaisàcequenotresoiréesoitunevraiesurprise.–Nathan,pouvez-vousmerendreunservice?–Kat,messervicesnesontjamaisgratuits.–JepensaispourtantquevousaviezpasséunebonnesoiréeavecmonamieLynne,soulignai-je.–Je…Euh…Oui.Eneffet.Quepuis-jepourvous?–AndrewrevientàNewYorkd’iciquelquesjours.Jelui«dois»unesoiréeenfait.–Règle numéro 1,Kat : ne jamais rien devoir à cet homme…C’est l’histoire de toutemavie !

plaisanta-t-il.–J’imagine!Jetiensàgarderlasurprise,maisAndrewsembletrèsinquiet.Sijevousexpliquece

quej’aiprévu,pourrez-vousprévoirlenécessaire?–Sijerésumebien:vousmedemandezdecacherunsecretàAndrew?s’enquit-il,trèssérieux.Je

veuxdireAndrew,l’hommequipeuttuerrienqu’aveclaforcedesonespritretors?–JesuiscertainequeLynneapprécieracegeste…courageux!–Dites-moitout!Jeluiexpliquaidanslesgrandeslignesmonplan.Detoutefaçon,lalogistiqueétaitassezlimitée.Je

n’avaispasprévuquenoussoyonsaucontactdupublic.Cettesoiréen’étaitqu’ànous,etjenevoulaispaslapartager.Nathanm’interrompituneàdeuxfois,defaçonextrêmementprofessionnelle,et,àlafindemonexplication,résumacequ’ildevaitprévoir.

–Pasdesoucis,Kat. Jem’occupedeça.MaissiAndrewsoupçonnequelquechose, jenieraienbloc!

–Jecomprends.Serez-vousaussidudéplacement?demandai-je.–Jenesaispas.J’aimebeaucoupNewYork,mais…–C’estLynne?–Andrewm’avaitditquevousétiezperspicace.–Jenelesuispastantqueça,ripostai-jeenrepensantaufaitquejelecroyaismarié.Maisj’aivu

quelquechoseentrevouslorsdelaréception.–Ellevasemarier.–Depuisquandcelavousarrête-t-il?souris-je.–Cen’estpastantlemariagequelefuturmarié.PhilipKingstonestredoutableenaffaires.Jedoute

qu’ilapprécieraitd’apprendrequej’aidînéavecsafutureépouse.–Nathan,vousvoulezvraimentmonavissurlesujet?–Çadépend…Est-cequeçarisquederuinerlepeud’espoirqu’ilmereste?

–JecroisqueLynnefaituneerreuraveccemariage.–Vraiment?s’étonna-t-il.–Philipn’estpas…désagréable.C’estjustequ’ilnelaregardepascommeildevraitlefaire.Ilne

laregardepascommevous,vouslefaites.IlyeutunsilencependantlequeljedevinaiqueNathanréfléchissaitintensément.J’avaisdansl’idée

del’encourager,maisjenevoulaispasallercontreLynne.Ilmefallaitêtreplussubtiledansmafaçond’agir.Jemarchaienlongetenlargedansmonsalon,cherchantlameilleuredesattaques.

–Kat,jesaisqu’Andrewadû…attendreavantquevousleconsidériezcommeillesouhaitait.JenecrainspaslerefusdeLynne.Je…Commentvousdire?Nousnoussommesrentrésdedansetj’aisuquec’étaitellequejevoulais.Ettoutétaitparfaitet,après,j’aiapprisquielleétait.

–LafiancéedePhilip,finis-jepourlui.–Safiancée,oui.J’aimiscelasurlecompted’uneerreurdejugementpersonnel.Voustrouvezque

Philipn’estpasdésagréable?Àmesyeux,c’estsûrementletypeleplusdéloyalquejeconnaisse.Ilestredoutableettravailleàunepossiblecarrièreenpolitique.

–Lynnen’estpascommelui!m’exclamai-je,presquechoquée.–Jelesaismaintenant.MaisnousvenonsenfindeperceràNewYork,toutroule…Jenetienspasà

fairescandaleenm’affichantaveclafiancéed’untypequiseracertainementsénateurdanscinqans!–Alorsvousbaissezlesbras?soufflai-je,tristeetdésemparéedelaisserLynneavecPhilip.–Jenepeuxrienfaired’autre.–Malgrévosconversations?–Nos conversations sont cequimemaintient la têtehorsde l’eau.Mais je n’ai aucundoute sur

l’issuedenotre…relation.EllesemarieraavecPhilip.–Laissez-moiluiparler.Jesuiscertaine…quetoutn’estpasréellementécrit.–Jesuiscertaindel’inverse,Kat.Jedoisfilerenréunion,merciencorepour…Andrew.–Merciàvousdegarderlesecret.–Àbientôt,Kat.Je raccrochaiavec lasensationque tousmes idéauxavaientétésauvagementpiétinés.Pendantun

instant, j’avais cru que Lynne verrait ce que j’avais vu, j’avais imaginé qu’elle comprendrait qu’ellefaisaitfausseroute…Etj’avaisnaïvementcruqueNathanm’aiderait.Maisaulieudeça,ilabandonnait.Illalaissait.

Unpeumalmenéeparcettediscussion,jemedécidaiàappelermonpère.Vul’heure,ildevaitdéjàêtre au commissariat.Assise sur le canapé, je fixai les fleurs devantmoi.Avec un peu de chance, jeréussirais à parler à Andrew dès que son avion aura atterri. Je lançai mon ordinateur, espérant mereplongerauplusvitedansmesrecherchessurEleanor.

–Bailey!criaunevoixforte,érailléeparletabac.–Bailey,bonjour.C’estKat…KatDillon…–Kat!Sacrénomd’unchien!seréjouit-il.Commentvas-tu?–Bien…Jevaisbien.Est-cequepaparôdedanslecoin?–Entournéepourlamatinée.Jeluidiraiquetuasappelé.–OK…J’espèrequetafillevabien.J’eusunsourireensongeantaunombreincalculabledefoisoùmonpèrem’avaitconfiéeàCarrie,la

femmedeBailey,pendantqu’ilpartaitpouruneurgence.Annieétaitdevenuecommeunesœur.–Annievabien.Ellevasemarierd’iciquelquesmois.–Oh…Génial !m’enthousiasmai-je. Je suisheureusepourelle. Jevais sûrementvenirvoirmon

père d’ici quelques semaines, j’irai l’embrasser et la féliciter personnellement.Comment vaCarrie ?m’enquis-je.

–Unejambedansleplâtredepuisdeuxjours.Elleabêtementglissésurduverglas.

–Zut!Dis-luiquejepenseàelleetquejecompatis.Laconversationquej’avaiseueavecmonpèrequelquessemainesavantmerevintentête.–Bailey?Je…Jefaisunarticle…surBlakeMedias,mentis-jeeffrontément.–Jecroyaisquetun’étaisplusundecescharognardsdejournalistes?–C’est juste…un article.En free lance, précisai-je.Papam’adit que tu avais été en chargede

l’enquêtesurlamortdesafemme.–L’accident?fit-ilavecétonnement.Lavoitureaglissésurduverglasetafinidansunarbre.Triste

maisfréquent.Cepauvrehomme,Blake,ilétait…presquemort.–Ilétaitlà?–Iladéboulépeuaprèsmonarrivée.Jeluiaidemandéd’identifierlecorps.Ilasimplementhoché

latêteavantd’allervomirunpeuplusloin.Ensuite…Ilestrestéavecuneautrefemmeànousregardertravailler.Iln’avaitpasl’airdes’enrendrecompte.Jeluiaiposédesquestions,maisiln’apasrépondu.

–Etensuite?Qu’adonnél’enquête?–Riendeplus.Lesconditionsmétéoétaientvraimentdésastreuses…Blaken’avaitaucuneidéede

cequ’ellefaisaitsurcetteroute,ilrépétaitsanscessequ’ellen’auraitpasdûêtrelà.J’aibouclél’affaire.Iln’yavaitriendeplusàsavoir.

–C’esttout?fis-je,stupéfaite.–C’esttout…Situveux,jet’envoiemonrapport.Tuverras,riendecroustillant.Unaccidentparmi

tantd’autres.–Jeveuxbien,s’ilteplaît.Mon cerveau fonctionnait à toute vapeur. J’avais ce curieux pressentiment, cette sensation

indéfinissable de louper quelque chose. J’entendaisBailey s’activer sur son ordinateur,maudissant aupassagelalenteurdel’appareil.Ilmedemandamonadressemailet,quelquesinstantsplustard,sonnomapparutdansmaboîtederéception.J’ouvrisrapidementledossieravantderéagirsurledétailquimechiffonnait:

–Bailey?–Oui?–C’étaitle25décembre,c’estça?–Lanuitdu25au26…Généralement,c’estplutôtcalmeàcettepériode,lesgensrestentchezeux.–Blakea-t-ilditpourquoielleétaitsurlarouteenpleinenuit?Allait-ellechercherquelqu’un?–Blakeajusteditqu’ilarrivaitdel’aéroport.Iln’avaitpasvusafemmedepuisdixjours.–OK…Merci,Bailey.EmbrassebienCarrieetAnniepourmoi.–Sansfaute.Jediraiàtonpèredeterappeler.Et…pourlerapport…–Çaresteentretoietmoi,Bailey.Jeraccrochailasecondesuivanteetmejetailittéralementsurlalecturedurapportdepolice.Ilétait

conformeàcequeBaileym’avait raconté.Aucuneautopsien’avaitétémenée.Lacausedudécèsétaitévidente.Jemefisunthé,réfléchissantàcequejevenaisd’apprendre.

L’imaged’Andrew,dévastésur leborddecetteroute,sûrementavecMeghan,mevinten tête.Enlieuetplacedel’appelquej’avaisd’abordenvisagé,jepréféraiunmessage:

Vas-tum’offrirdesfleurschaquefoisquenousnousvoyons?Merci,ellessontmagnifiques.K.

J’arpentaimon salon en réfléchissant, relisant le rapport, relisant l’interviewd’Eleanor. Je tentaid’imaginerlesévénements,detrouverunenchaînementcohérent,maisriennemevint.Monportablerestamuet durant une partie de l’après-midi, et je n’eus la réponse d’Andrew qu’à mon départ pour lePeninsula:

Tuesmagnifique.Jet’offriraislaboutique,siçapouvaitmepermettrederesterprèsdemoi.A.

Toujourslesmotspourmefairefondre,songeai-jeavecunsourire.JerassemblaimesnotessurEleanorainsiquel’impressiondurapportdepolicepourlesemporter

avecmoiàl’hôtel.J’arrivaiauPeninsulaunpeuplustôtqu’habituellementettoquaiàlaportedeLynne.–Entrez!cria-t-elle,encolère.–Lynne?soufflai-jeenpassantlatêteparl’entrebâillement.–Oh,c’esttoi!Entre…Désolée,s’excusa-t-ellerapidement,jeviensdemedisputeravecPhilip!–Riendegrave,j’espère?–Ilestencoreabsentceweek-end.Sonpèreleréquisitionnepouruneréunionjenesaisoù.–Désolée,Lynne.Jem’installai dansundes fauteuils face à sonbureau et, enun instant, sa colère sedissipapour

laisserplaceàunlargesourire.–Dis-moitout,souffla-t-elle,conspiratrice.–Àquelsujet?–AndrewBlake!–Onadîné,avouai-jeenrougissant.–Bonsang !Nathanavait raison, tuascouchéavec lui ! s’écria-t-elle, incrédule.Kat !C’estun

client!–Jesais,Lynne…Jesaisquejen’auraispasdû.Maiscen’estpascommesijepouvais…fuir.–Tupeuxtefairevirerpourça!–C’estmadémissionquetuveux?laquestionnai-jedurement.Elles’appuyalourdementcontreledossierdesonfauteuiletsemblamejauger.Ellemefixaavec

intensitépendantquejemecrispais.–Tuveuxpartir?demanda-t-ellesérieusement.–Non.J’aimecetendroit.Mecrois-tuincapabledefairemonmétierparcequejesuisaveclui?–Jenesaispas,Kat…J’aipeurpourtoi,peurdecequipourraitarrivers’ilchangeaitd’avis.Tuas

l’air…tellementéprise.Jeneveuxpasquetusouffres.–TucomprendsenfincequejeressensausujetdetonmariageavecPhilip,ripostai-je,agacée.–JeconnaisPhilipdepuisplusdedeuxans!TuconnaisBlakedepuisdeuxmois!–Tuasraison,Lynne,admis-jeenmelevantdufauteuil.Tuasraison,jeneleconnaispasdepuis

longtemps.Mais,curieusement,simavieendépendait,jepréféreraismillefoislaplacerentrelesmainsd’Andrewqu’entrecellesdePhilip.

Ellesefigea,stupéfaite.Jemedirigeaiverslaporteet, justeavantdelaclaquerderrièremoi, jedécidaid’enfoncerleclou,histoiredemettreuntermedéfinitifàcetteconversation:

–Nathant’aime.Etjesaisqu’unepartdetoil’aimeaussi…Sinon,tuneseraispasconstammententraindesurveillertontéléphone.

–Je…–Dis-moi que j’ai tort ! lui ordonnai-je. Dis-moi que j’ai tort de sortir avec un homme que je

connaisàpeinequand,toi,tuesamoureused’unhommeavecquituasunerelationtéléphonique.Ellebaissaleregard,fautiveethonteuse,etjeclaquailaportederrièremoi.Malgrétousmesefforts

pourrestercalme,Lynnem’horripilaitdeplusenplus.Ellefaisaitcommetous lesautres :elle jugeaitAndrewsansprendreletempsdeleconnaître.

Passablementénervée,jegagnaimonposteenécoutantàpeinelestransmissionsdeSam.J’avaislasensationdésagréablequeLynne avait percémabulledebonheur et, pour ça, je la détestais.Gregoryarrivadevantmonpupitrepeuaprèsmaprisedeservice.

–Toncourrier,commenta-t-ilsimplementenmetendantunelettre.–Merci,murmurai-jeavantdeprendrel’enveloppe.Gregoryfronçalessourcilsetjem’étonnaidesoncalmeinhabituel.

–Unproblème,Greg?–Jeréfléchis.–Oh…Vas-ydoucement,souris-je.–Onm’afaituneproposition,lâcha-t-ilsoudain.–Tuveuxchangerdetravail?m’étonnai-je.–Jenesaispas…Peut-être.Ilfautquejepèselepouretlecontre.Jedoisfiler.Passeunebonne

nuit!–Merci, toi aussi, répondis-je, un peu perturbée à l’idée queGregory ne travaille plus pour le

Peninsula.J’élaguai aussi vite que possible les tâches courantes, y compris la validation de la réservation

d’Andrew pour sa prochaine visite. Je m’apprêtais à ouvrir l’enveloppe de l’inconnu quand montéléphonevibrasurlebureau.

Jet’appelledemaindansl’après-midi.Passeunebonnenuit.A.Jet’embrasse…Encoreetencore.K.

Aprèsavoirattenduunehypothétiqueréponse,jereposaimontéléphoneetdécouvrisunenouvellelettre.

ChèreMarie,Jenesuispasinsomniaque.Ilsembleraitjustequel’inspirationmevienneplusfacilementlanuit,quandmonespritsevidedetoutesobligationsprofessionnelles.Toutefois,cettenuitestdifférentedesautres.Commentpourrais-jevousexpliquercequemoi-mêmej’aitantdemalàcomprendre?Pendantlongtemps,j’aiaiméunefemme.Elleétait,sansnuldoute,monâmesœur,maforce,mavietoutentièremême.Etunjour,toutcelaesttombéenmorceaux,commeunchâteaudecartes,lachutedespremièresentraînantcelledesautres.Unàun,lespansdemaviequejecroyaissiparfaite,siréussie,sesonteffondrés.Mavien’étaitplusparfaite,justevideetincomplète.Maiscettenuit,j’aicomprisàquelpointj’avaiseutort.J’aiaimécettefemmedetoutesmesforces,detoute mon âme, mais ce n’est rien par rapport à ce que je ressens maintenant pour elle. Elle dortactuellement,aussipaisiblequ’unlac,etpourtant,enellerésideunetellevolonté,unetellerage…C’estcommesiellem’avaitsortid’unsommeilprofond.C’estincomparableetstupéfiant.Est-cedifférent?Jedirais…bouleversant.Ausensnobleduterme,elleachamboulémonmonde.Ellefaitdemoiunautrehomme.Différentetmeilleur.Enpaixavecmoi-même.Elle est ma perfection dans ma vie imparfaite. Elle est mon océan de calme dans mon monde enmouvement.Elleest…incroyablementréelle.Manouvelleréalité.J’ose espérer que l’hommeque vous avez rencontré vous apporte autant qu’ellem’a apporté. Jemedemande ce qu’elle penserait de notre relation. À vrai dire, je ne crois pas que je pourrais la luiexpliquer.Commentdit-on à quelqu’unqu’on se confie à uneparfaite inconnue ?Commentdit-on àquelqu’unquecetterelationestimportante?Vousêtesimportante.Sansvous,elleneseraitpasentraindedormir.Jevaisdevoirvouslaisserpourlarejoindre,maisj’avaisbesoindevousdiremercipourtout.Jevousembrasse,Votreinconnu.P-S:Connaîtremonprénomest-ilsiimportant?

Je repliai la lettreaprès l’avoir relue trois fois.Moncœur frappaitdansmapoitrineàun rythmehallucinant.Commentfaisait-il?Malgrécequ’ildisait,j’avaislasensationderessentirchacunedesesémotions. Il aimait cette femme, il l’adoraitmême.Denouveau, cette silhouettemasculine et virile sedessinadansmatête.Jel’imaginaisentraind’écrire,admirantlafemmeendormiedanssonlit.

CHAPITRE19

Cettelettreeutleméritedechassermesdémons…J’oubliaimaragecontreLynneetmastupéfactionenversGregory.Laseulechosequimehantait,c’était lemanqued’Andrew.Sûrementparceque jemeretrouvaisdanslesmotsdel’inconnu.Andrewm’avaittiréed’unsommeilprofond,etilavait,defaçonplusqu’évidente,chamboulémonmonde.

Jerécupéraiunefeuilleblancheetentreprisdeluirépondre:

Cherinconnu,Mathéories’effondre.Vousn’êtesnitourmenté,nisecret,ni…sombre.Etvousavezréussivotredéfi:vousavezposédesmotssurvossentimentspourelle.Jepensequevousl’aimez.Mêmesivousneleditespasfranchement, lafaçondontvousparlezd’elle,votreadmirationpourelleprouventquevousl’aimez.Jesuisheureusepourvous.Cependant,jedouted’yêtrevraimentpourquelquechose.Cettefemmeseseraitpeut-êtreprésentéeàvoussansmeslettres.J’espèrequ’elleprendrasoindevousetdelapartiedevotreâmequevousluiconfierez.Dites-luid’yfaireattention,j’ytiensparticulièrement.Concernantl’hommequej’airencontré…jenecroispaspouvoirfairecommevousetmettredesmotssurmessentimentspourlui.C’estviolentetincontrôlable.Làoùvoussemblezmaîtriservosémotions,j’avouequejesuisplutôtdanslasituationinverse.Leslimitesquejem’imposaisdepuissilongtempsontexplosé,commes’ilm’ouvraitlesyeuxsurunmondenouveaudontj’ignoraistout.Pour être honnête, ce nouveaumondeme pose un problème : jem’inquiète de ce que je pourrais ydécouvrir. Et jem’inquiète encore plus des conséquences possibles de sa disparition.Curieusement,mêmesijetiensàluiplusquejenelepensaispossible,j’aicesentimenthorribleetsurpuissantquejevaisleperdre.Jenesaispassijesuisassezforte,sijesuisassez«magnétique»pourlegarderavecmoi.C’estau-delàdetoutcequejepouvaisimaginer…Jen’arrivemêmepasàcroirequ’unefillecommemoiaitpul’intéresser.Est-cedifférent?C’esttotalementdifférentdecequej’aidéjàvécu.Ilm’attireetmefascineàlafois.J’aienvie de lui poser mille questions, mais les réponses qu’il me donne entraînent de nouvellesinterrogations.Sielleestvotreperfectiondansvotreuniversimparfait,jenesauraisquoidiredelui…J’aime l’hommequ’ilest…J’aimequ’il soitconfiant, têtu,prévenantethorripilant. J’aimesesdéfauts,peut-êtreplusquesesqualités,parcequ’ilsendisenttellementplussurlui.Je crois que j’ai trouvé ce qui résume le mieux ma relation avec lui : il est ma force d’attraction,imprévisibleetcontinue.Jen’aipas lachancedepouvoir lerejoindre,nidepouvoirdormirdansson litet,rienquepourça, jevousenvie.Jevousembrasse,Marie.P-S:Cachervotreprénomest-ilsiimportant?

Unefoismalettreachevée,j’euslesentimentd’avoiravancé,d’avoirmisunnomsurmarelationavecAndrew.Mêmesijem’enréjouissais,j’avaiscepincementlancinantdanslecreuxdemonventre.

Toutétaitparfait…Mais,d’unecertainefaçon,jeredoutaiscequel’avenirnousréservait.

Pourconnaîtrecequel’avenirréserveàKatetAndrew,rendez-vouslemoisprochainpourl’acteVdeDearyou!

Tabledespersonnages

Kathleen–Kat–Dillon:Aprèsavoirabandonnésacarrièredejournaliste,Kathleen,jeunefemmede 25 ans, est devenue concierge de nuit dans un palace new-yorkais, le Peninsula. Romantique etprofondémentattachéeàl’importancedudestindanssavie,elleespère,unjour,sereconnaîtredansunedespetitesannoncesduNewYorker.Prenantconsciencedelamonotoniedesonexistenceethantéeparune annonce qui l’a bouleversée, elle finit par y répondre. C’est également au Peninsula qu’ellerencontreAndrewBlake,puissantmagnatde lapresse, clientde sonhôtel, unhommeséduisant et quitroublelaroutineprofessionnelledeKat.

AndrewBlake:ClientduPeninsulaetchefd’entreprisepuissant.Magnatdelapressesurlacôte

ouest,AndrewBlakeestaussiarrogantqueriche.Ilalimentelesrumeurs,attiselesconvoitises,maispeutsemontrerparticulièrementfragilequandons’attaqueàceuxqu’ilaime.

LynneHoffman : Collègue de Kat, en charge de l’événementiel, Lynne est très terre à terre et

raisonnable.TroppourKatquiluireprocheunevieterneetsanspassion.FiancéeàPhilipKingston,elleprépareassidûmentsonmariage.

NathanEvans : Bras droit dévoué d’Andrew Blake, Nathan est un charmeur, bourré d’humour.

C’estauPeninsula,àl’occasiond’unerencontrefortuiteetbrutale,qu’ils’éprenddeLynne,collèguedeKat.

DanielCooper:EngagécommebarmanintérimaireauseinduPeninsula,Danielserapprochetrès

vitedeKathleen.Gregory :Ancienpolicier,GregaconnuKathleenquandelleétaitencore journaliste.Désormais

responsabledelasécuritéduPeninsula,ilagitcommeungrandfrèreavecelle.MeghanStanton:Belle,brillanteettoutàfaitconscientedel’être,Meghanpeutsembler,deprime

abord,glaciale,voiremêmepédante.ElleserévèlechaleureuseetsensibleaucharmedeGregoryaufuretàmesuredel’évolutiondelarelationd’AndrewavecKathleen.

Maria:Fleuristeofficielledel’hôtel.TrèsliéeàKathleen,ellesontunerelationdetypemère-fille

quicompenselamèreabsentedeKathleen.Debonconseiletdouce,elleesttoujoursprêteàl’aider.M.Perkins:Directeurdel’hôtel.

Sam:CollèguedejourdeKathleen,c’estluiquil’aforméeàsonposte.Ilssonttrèsamis.JimCooper:PèredeDan.MattetAbby:Collèguesd’Andrew.Mattsemontreparticulièrementdésagréableetdubitatifsurla

relationentreAndrewetKathleen.Walt Dillon : Père de Kathleen, policier. Éloigné géographiquement, il demeure pourtant très

protecteurenverssafille.Ilespèrelafairereveniràsonmétierdejournaliste.EleanorBlake :Décritecommeétantenthousiasteetpétillanteparsonmari,Eleanorestdécédée

dansunaccidentdevoiture,laissantAndrewdansl’incompréhensionetlechagrin.PhilipKingston : Fiancé de Lynne, riche grâce à sa réussite dans l’immobilier et la finance, il

entretient le doute sur sa véritable personnalité. Son père, sénateur, lui assure un avenir politique.Désagréable quand il s’agit d’Andrew et dumonde des affaires, il ne cache pas son antipathie et sajalousieenverslaréussitedecelui-ci.

Bailey:CollèguedupèredeKathleen,Walt.IlconnaîtKatdepuisqu’elleestpetiteetluidonnera

desinformationsprécieusesconcernantledécèsd’Eleanor.Lauren:Assistanted’AndrewBlake.

HarlequinHQN®estunemarquedéposéeparHarlequinS.A.

Conceptiongraphique:AliceNUSSBAUM

©2013HarlequinS.A.

ISBN9782280300513

Cetteœuvreestprotégéeparledroitd'auteuretstrictementréservéeàl'usageprivéduclient.Toutereproductionoudiffusionauprofitdetiers,àtitregratuitouonéreux, de tout ou partie de cetteœuvre, est strictement interdite et constitue une contrefaçon prévue par les articles L 335-2 et suivants duCode de laPropriétéIntellectuelle.L'éditeurseréserveledroitdepoursuivretouteatteinteàsesdroitsdepropriétéintellectuelledevantlesjuridictionscivilesoupénales.

83-85boulevardVincentAuriol-75646ParisCedex13

Tél:0145824747

www.harlequin-hqn.fr