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RÉÉDUCATION 34 Neurologies • février 2017 • vol. 20 • numéro 195 Reprendre la conduite automobile après un AVC constitué Conduite automobile et hémiplégie vasculaire La reprise de la conduite automobile par le pa- tient victime d’un accident vasculaire cérébral (AVC) constitué est régie par une réglementation et, depuis janvier 2016, son évaluation est gui- dée par des recommandations de la HAS. Toute personne victime d’un AVC, qu’il soit sévère ou mineur, est dans l’obligation de consulter un médecin agréé de la préfecture. Une évaluation préalable médicale, cognitive et de la conduite automobile en situation réelle s’impose pour enrichir l’information partagée avec le pa- tient et son entourage et pour lui faire prendre conscience de ses difficultés, de ses limites ou de ses capacités à reconduire. Charles Fattal*, Aline Fourmond*, Aurélie Humeau Aries*, Françoise Cottret*, Isabelle Caisez*, Hélène Duvernay*, Véronique Bourrat**, Michel Enjalbert**, Brigitte Lucas* INTRODUCTION La reprise de la conduite automo- bile dans les suites d’un accident vasculaire cérébral (AVC) offre aux patients un espace de liberté et de dignité retrouvées. Elle est souvent l’élément moteur d’une reprise d’une activité sociale (loisirs ou autre), voire d’un retour à une acti- vité professionnelle. Elle s’inscrit parmi les actions des unités Comète dont le maillage national est au- jourd’hui étendu et permet d’abor- der en même temps les questions de réinsertion et de réorientation professionnelles et la question de la conduite automobile. Les données de la littérature révèlent d’une étude à l’autre des taux de reprise après un AVC autour de 35 % (de 31 à 39 %) [1- 5]. Mazer [1] et Kiekens [6] dis- *CRF COS DIVIO, Dijon **USSAP CRF Bouffard-Vercelli, Cerbère tinguent les AVC droits et gauches et affichent des résultats plus importants (respectivement 74 et 69 % pour les AVC gauches et 52 et 70 % pour les AVC droits). La variabilité des taux de reprise est liée à celle des critères de sélec- tion des patients et des délais de reprise de la conduite automobile pris en compte dans l’analyse. En- fin, ces données ne disent rien sur la réalité de la reprise de conduite et sur l’accidentalité des patients victimes d’un AVC. Une méta-analyse sur 30 publi- cations de 1983 à 2010, incluant pour la grande majorité des études prospectives, dont trois randomi- sées, a permis d’isoler une cohorte de 1 728 patients parmi lesquels 54 % ont été autorisés à reprendre la conduite automobile. L’âge moyen de cette population était de 61,1 ans (51,4-71) et l’intervalle de temps moyen entre l’AVC et l’éva- luation de 8,8 mois (1,9-18,5) [7]. Dans ce contexte, les missions du neurologue ou du médecin de mé- decine physique confronté à une demande de reprise de la conduite automobile après un AVC relèvent de trois priorités : 1) Connaître la législation et les obligations réglementaires. 2) Identifier les instances agréées et les équipes cliniques suscep- tibles d’assurer une évaluation approfondie du patient cérébro- lésé vasculaire. 3) Informer le patient et son en- tourage. LA RÉGLEMENTATION FRANÇAISE, SON ÉVOLUTION ET SES LIMITES L’obligation de se soumettre à un contrôle médical si l’affection mé- dicale est référencée dans la liste

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Page 1: Reprendre la conduite automobile après un AVC … et...RÉÉDUCATION 34 Neurologies • février 2017 • vol. 20 • numéro 195 Reprendre la conduite automobile après un AVC constitué

RÉÉDUCATION

34 Neurologies • février 2017 • vol. 20 • numéro 195

Reprendre la conduite automobile après un AVC constituéConduite automobile et hémiplégie vasculaire

La reprise de la conduite automobile par le pa-tient victime d’un accident vasculaire cérébral (AVC) constitué est régie par une réglementation et, depuis janvier 2016, son évaluation est gui-dée par des recommandations de la HAS. Toute personne victime d’un AVC, qu’il soit sévère ou mineur, est dans l’obligation de consulter un

médecin agréé de la préfecture. Une évaluation préalable médicale, cognitive et de la conduite automobile en situation réelle s’impose pour enrichir l’information partagée avec le pa-tient et son entourage et pour lui faire prendre conscience de ses difficultés, de ses limites ou de ses capacités à reconduire.

Charles Fattal*, Aline Fourmond*, Aurélie Humeau Aries*, Françoise Cottret*, Isabelle Caisez*, Hélène Duvernay*, Véronique Bourrat**, Michel Enjalbert**, Brigitte Lucas*

INTRODUCTIONLa reprise de la conduite automo-bile dans les suites d’un accident vasculaire cérébral (AVC) offre aux patients un espace de liberté et de dignité retrouvées. Elle est souvent l’élément moteur d’une reprise d’une activité sociale (loisirs ou autre), voire d’un retour à une acti-vité professionnelle. Elle s’inscrit parmi les actions des unités Comète dont le maillage national est au-jourd’hui étendu et permet d’abor-der en même temps les questions de réinsertion et de réorientation professionnelles et la question de la conduite automobile.Les données de la littérature révèlent d’une étude à l’autre des taux de reprise après un AVC autour de 35 % (de 31 à 39 %) [1-5]. Mazer [1] et Kiekens [6] dis-

*CRF COS DIVIO, Dijon**USSAP CRF Bouffard-Vercelli, Cerbère

tinguent les AVC droits et gauches et affichent des résultats plus importants (respectivement 74 et 69 % pour les AVC gauches et 52 et 70  % pour les AVC droits). La variabilité des taux de reprise est liée à celle des critères de sélec-tion des patients et des délais de reprise de la conduite automobile pris en compte dans l’analyse. En-fin, ces données ne disent rien sur la réalité de la reprise de conduite et sur l’accidentalité des patients victimes d’un AVC. Une méta-analyse sur 30 publi-cations de 1983 à 2010, incluant pour la grande majorité des études prospectives, dont trois randomi-sées, a permis d’isoler une cohorte de 1 728 patients parmi lesquels 54 % ont été autorisés à reprendre la conduite automobile. L’âge moyen de cette population était de 61,1 ans (51,4-71) et l’intervalle de temps moyen entre l’AVC et l’éva-

luation de 8,8 mois (1,9-18,5) [7].Dans ce contexte, les missions du neurologue ou du médecin de mé-decine physique confronté à une demande de reprise de la conduite automobile après un AVC relèvent de trois priorités : 1) Connaître la législation et les obligations réglementaires.2) Identifier les instances agréées et les équipes cliniques suscep-tibles d’assurer une évaluation approfondie du patient cérébro-lésé vasculaire.3) Informer le patient et son en-tourage.

LA RÉGLEMENTATION FRANÇAISE, SON ÉVOLUTION ET SES LIMITESL’obligation de se soumettre à un contrôle médical si l’affection mé-dicale est référencée dans la liste

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cognitive est toujours marquée par un flou qui rend incontour-nable une évaluation approfondie.D’autres incompréhensions sub-sistent encore puisqu’il incombe au patient lui-même de déclarer sur l’honneur l’absence d’antécé-dents personnels, de pathologies ou de traitements en cours. «  Le patient prend connaissance du cour-rier, y fait figurer son paraphe, atteste qu’il accepte, après connaissance et obtention de toutes les explications et informations souhaitées, de les trans-mettre personnellement au médecin de la commission d’aptitude.  » La figure 1 rend compte de la nature des liens qui lient le médecin au patient, à sa famille, au médecin agréé et au préfet. Le secret médical – son ca-ractère absolu demeure opposable au médecin – fait du seul patient le porteur de l’information fournie au médecin agréé et, en cas de dange-rosité même avérée, prive le méde-cin d’un quelconque signalement auprès de la préfecture.Le devoir d’information va ainsi trouver dans ce domaine toute sa dimension médicolégale pour informer le sujet et son entourage sur la réglementation, les réper-cussions de l’AVC sur la conduite automobile, la démarche d’éva-luation, les conclusions de l’éva-luation et, le cas échéant, la dé-marche de régularisation. Pédagogie et traçabilité de-viennent les maîtres mots de la démarche d’accompagnement.

L’ÉVALUATION DE LA CONDUITE AUTOMOBILE EN SITUATION RÉELLEIl est clairement établi que cette évaluation situationnelle déter-mine et conditionne la décision finale [1, 2, 8-10]. Il s’agira d’éva-luer le comportement du sujet en

limitative des affections incompa-tibles avec la conduite automobile (arrêté du 31 août 2010) demeure incontournable. Le non-respect de cette obligation place le sujet à la merci d’un désengagement de son assurance en cas de sinistre.L’alignement aux directives euro-péennes (directive n°  2000/56/CE du 14/09/2000) est tracé par l’arrêté du 21 décembre 2005, récemment modifié en l’arrêté du 18 décembre 2015, qui rassemble dans la classe  IV, intitulée “Pra-tiques addictives, neurologie, psy-chiatrie”, toutes les pathologies susceptibles de concerner le cé-rébrolésé vasculaire, quel que soit son pronostic évolutif (Tab. 1). Cette rubrique y associe les dangers additionnels relatifs aux psycho-tropes, aux conduites addictives et au vieillissement, et y inclut une définition précise des incompatibi-lités liées aux épilepsies.Le décret n° 2012-886 du 17/07/2012 modifie l’organisation du contrôle médical de l’aptitude à la conduite automobile en distinguant :• les médecins agréés auprès de la préfecture, consultés en pre-mière ligne, qui émettront un avis d’inaptitude ou d’aptitude (défini-tive ou temporaire), avec ou sans restrictions ;• les médecins de la commission médicale préfectorale à la de-mande du médecin agréé ou inter-venant seulement si le permis est invalidé, annulé, suspendu.Enfin, l’arrêté du 20/04/2012 mo-difié par l’arrêté du 04/08/2014 introduit des restrictions addition-nelles envisageables (Tab. 2). La caractérisation des troubles cognitivo-comportementaux, des troubles du langage (notamment ceux relatifs à la compréhen-sion et/ou au canal écrits), de la conscience de soi et de la fatigue

TABLEAU 1 - LISTE DES AFFECTIONS DE LA CLASSE IV INCOMPATIBLES AVEC L’OBTENTION OU LE MAINTIEN DU PERMIS DE CONDUIRE APRÈS UN AVC OU POUVANT DONNER LIEU À LA DÉLIVRANCE D’UN PERMIS DE CONDUIRE DE DURÉE DE VALIDITÉ LIMITÉE (ARRÊTÉ DU 31.08.10 MODIFIANT L’ARRÊTÉ DU 21.05.2005).

4.4 Troubles neurologiques, comportementauxet cognitifs

Les troubles neurologiques, comportementaux, cognitifs ou les troubles de la sénescence, dus à des affections, des opérations du système nerveux central ou périphérique, extériorisés par des signes moteurs, sensitifs, sensoriels, trophiques, perturbant l’équilibre et la coordination, seront envisagés en fonction des possibilités fonctionnelles.

4.4.1 Troubles permanents de la coordination, de la force et du contrôle musculaire

• Incompatibilité temporaire. • Un avis médical est préalable à toute reprise de la conduite. Compatibilité temporaire : 1 an après avis spécialisé, test d’évaluation des capacités cognitives et comportementales, test de conduite.

4.4.2 Troubles cognitifs et psychiques• Compatibilité selon l’évaluation neurologique ou gériatrique. Incompatibilité en cas de démence documentée, après avis spécialisé si nécessaire.

4.6 Épilepsie Les crises d’épilepsie ou autres perturbations brutales de l’état de conscience constituent un danger grave pour la sécurité routière lorsqu’elles surviennent lors de la conduite d’un véhicule à moteur. Une personne est considérée comme épileptique lorsqu’elle subit deux crises d’épilepsie ou plus en moins de 5 ans. Une crise d’épilepsie provoquée est définie comme une crise déclenchée par un facteur causal identifiable qui peut être évité. Une personne qui est victime d’une crise initiale ou isolée ou d’une perte de conscience doit être dissuadée de prendre le volant. Un spécialiste doit produire un rapport mentionnant la durée de l’interdiction de conduite et le suivi requis. Il est extrêmement important que le syndrome épileptique spécifique et le type de crise de la personne concernée soient identifiés afin de pouvoir entreprendre une évaluation correcte de la sécurité de conduite de cette personne (y compris du risque de nouvelles crises) et de pouvoir mettre en place le traitement.

4.6.1 Le permis de conduire d’un conducteur du groupe 1 considéré comme épileptique fait l’objet d’un examen médical périodique tant que le conducteur n’est pas resté 5 ans sans faire de crise. En revanche, après une période de 5 ans sans crise, la délivrance d’un permis de conduire sans limitation de durée de validité pour raison médicale peut être envisagée. Si une personne souffre d’épilepsie, elle ne satisfait pas aux critères permettant d’obtenir un permis inconditionnel. Une notification est fournie à l’autorité délivrant les permis. 4.6.2 Crise d’épilepsie provoquée : le candidat ayant été victime d’une crise d’épilepsie provoquée par un facteur causal identifiable qui est peu susceptible de se reproduire au volant peut être déclaré apte à la conduite au cas par cas, après avis d’un neurologue : l’évaluation est faite, le cas échéant, conformément aux autres sections pertinentes de la présente annexe (relatives, par exemple, à l’alcool et à d’autres facteurs de morbidité). 4.6.3 Première crise non provoquée ou crise unique : le candidat ayant été victime d’une première crise d’épilepsie non provoquée peut être déclaré apte à la conduite après une période de 6 mois sans aucune crise, à condition qu’un examen médical approprié ait été effectué. Les conducteurs dont les indicateurs pronostiques sont bons peuvent être autorisés à conduire plus tôt, c’est-à-dire avant l’expiration de cette période de 6 mois, après un avis médical approprié. 4.6.4 Autre perte de conscience : la perte de conscience doit être évaluée en fonction du risque de récurrence lors de la conduite. 4.6.5 Épilepsie déclarée : les conducteurs ou candidats peuvent être déclarés aptes à la conduite après une année sans crise. 4.6.6 Crises survenant exclusivement durant le sommeil : le candidat ou conducteur qui a des crises uniquement pendant son sommeil peut être déclaré apte à la conduite si ce schéma de crises est observé durant une période ne pouvant être inférieure à la période sans crise requise pour l’épilepsie. Si le candidat ou conducteur est victime d’attaques/de crises lorsqu’il est éveillé, une période d’une année sans nouvelle crise est requise avant que le permis puisse être délivré (voir “Épilepsie”). 4.6.7 Crises sans effet sur la conscience ou la capacité d’action : le candidat ou conducteur qui subit exclusivement des crises n’affectant pas sa conscience et ne causant pas d’incapacité fonctionnelle peut être déclaré apte à la conduite si ce schéma de crises est observé durant une période ne pouvant être inférieure à la période sans crise requise pour l’épilepsie. Si le candidat ou conducteur est victime d’attaques/de crises d’un autre genre, une période d’une année sans nouvelle crise est requise avant que le permis puisse être délivré (voir “Épilepsie”). 4.6.8 Crises dues à une modification ou à l’arrêt du traitement antiépileptique ordonné par un médecin : il peut être recommandé au patient de ne pas conduire pendant 6 mois à compter de l’arrêt du traitement. Si, après une crise survenant alors que le traitement médicamenteux a été modifié ou arrêté sur avis du médecin, le traitement efficace précédemment suivi est réintroduit, le patient doit cesser de conduire pendant 3 mois. 4.6.9 Après une opération chirurgicale visant à soigner l’épilepsie : voir “Épilepsie”.

4.7 Accidents vasculaires cérébraux (cf. 5.4)

4.7.1 Hémorragiques et malformations vasculaires (anévrismes, angiomes)

• Incompatibilité temporaire selon la nature du déficit (cf. 4.4.1 ; 2.1.2). Avis spécialisé.

4.7.2 Accidents ischémiques transitoires • Incompatibilité temporaire. Avis médical préalable à toute reprise de la conduite ; compatibilité temporaire : 1 an.

4.7.3 Infarctus cérébral • Incompatibilité temporaire selon la nature du déficit (cf. 4.4.1 ; 2.1.2). Avis spécialisé si nécessaire.

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Reprendre la conduite automobile après un aVC constitué

Neurologies • février 2017 • vol. 20 • numéro 195 371

TABLEAU 1 - LISTE DES AFFECTIONS DE LA CLASSE IV INCOMPATIBLES AVEC L’OBTENTION OU LE MAINTIEN DU PERMIS DE CONDUIRE APRÈS UN AVC OU POUVANT DONNER LIEU À LA DÉLIVRANCE D’UN PERMIS DE CONDUIRE DE DURÉE DE VALIDITÉ LIMITÉE (ARRÊTÉ DU 31.08.10 MODIFIANT L’ARRÊTÉ DU 21.05.2005).

4.4 Troubles neurologiques, comportementauxet cognitifs

Les troubles neurologiques, comportementaux, cognitifs ou les troubles de la sénescence, dus à des affections, des opérations du système nerveux central ou périphérique, extériorisés par des signes moteurs, sensitifs, sensoriels, trophiques, perturbant l’équilibre et la coordination, seront envisagés en fonction des possibilités fonctionnelles.

4.4.1 Troubles permanents de la coordination, de la force et du contrôle musculaire

• Incompatibilité temporaire. • Un avis médical est préalable à toute reprise de la conduite. Compatibilité temporaire : 1 an après avis spécialisé, test d’évaluation des capacités cognitives et comportementales, test de conduite.

4.4.2 Troubles cognitifs et psychiques• Compatibilité selon l’évaluation neurologique ou gériatrique. Incompatibilité en cas de démence documentée, après avis spécialisé si nécessaire.

4.6 Épilepsie Les crises d’épilepsie ou autres perturbations brutales de l’état de conscience constituent un danger grave pour la sécurité routière lorsqu’elles surviennent lors de la conduite d’un véhicule à moteur. Une personne est considérée comme épileptique lorsqu’elle subit deux crises d’épilepsie ou plus en moins de 5 ans. Une crise d’épilepsie provoquée est définie comme une crise déclenchée par un facteur causal identifiable qui peut être évité. Une personne qui est victime d’une crise initiale ou isolée ou d’une perte de conscience doit être dissuadée de prendre le volant. Un spécialiste doit produire un rapport mentionnant la durée de l’interdiction de conduite et le suivi requis. Il est extrêmement important que le syndrome épileptique spécifique et le type de crise de la personne concernée soient identifiés afin de pouvoir entreprendre une évaluation correcte de la sécurité de conduite de cette personne (y compris du risque de nouvelles crises) et de pouvoir mettre en place le traitement.

4.6.1 Le permis de conduire d’un conducteur du groupe 1 considéré comme épileptique fait l’objet d’un examen médical périodique tant que le conducteur n’est pas resté 5 ans sans faire de crise. En revanche, après une période de 5 ans sans crise, la délivrance d’un permis de conduire sans limitation de durée de validité pour raison médicale peut être envisagée. Si une personne souffre d’épilepsie, elle ne satisfait pas aux critères permettant d’obtenir un permis inconditionnel. Une notification est fournie à l’autorité délivrant les permis. 4.6.2 Crise d’épilepsie provoquée : le candidat ayant été victime d’une crise d’épilepsie provoquée par un facteur causal identifiable qui est peu susceptible de se reproduire au volant peut être déclaré apte à la conduite au cas par cas, après avis d’un neurologue : l’évaluation est faite, le cas échéant, conformément aux autres sections pertinentes de la présente annexe (relatives, par exemple, à l’alcool et à d’autres facteurs de morbidité). 4.6.3 Première crise non provoquée ou crise unique : le candidat ayant été victime d’une première crise d’épilepsie non provoquée peut être déclaré apte à la conduite après une période de 6 mois sans aucune crise, à condition qu’un examen médical approprié ait été effectué. Les conducteurs dont les indicateurs pronostiques sont bons peuvent être autorisés à conduire plus tôt, c’est-à-dire avant l’expiration de cette période de 6 mois, après un avis médical approprié. 4.6.4 Autre perte de conscience : la perte de conscience doit être évaluée en fonction du risque de récurrence lors de la conduite. 4.6.5 Épilepsie déclarée : les conducteurs ou candidats peuvent être déclarés aptes à la conduite après une année sans crise. 4.6.6 Crises survenant exclusivement durant le sommeil : le candidat ou conducteur qui a des crises uniquement pendant son sommeil peut être déclaré apte à la conduite si ce schéma de crises est observé durant une période ne pouvant être inférieure à la période sans crise requise pour l’épilepsie. Si le candidat ou conducteur est victime d’attaques/de crises lorsqu’il est éveillé, une période d’une année sans nouvelle crise est requise avant que le permis puisse être délivré (voir “Épilepsie”). 4.6.7 Crises sans effet sur la conscience ou la capacité d’action : le candidat ou conducteur qui subit exclusivement des crises n’affectant pas sa conscience et ne causant pas d’incapacité fonctionnelle peut être déclaré apte à la conduite si ce schéma de crises est observé durant une période ne pouvant être inférieure à la période sans crise requise pour l’épilepsie. Si le candidat ou conducteur est victime d’attaques/de crises d’un autre genre, une période d’une année sans nouvelle crise est requise avant que le permis puisse être délivré (voir “Épilepsie”). 4.6.8 Crises dues à une modification ou à l’arrêt du traitement antiépileptique ordonné par un médecin : il peut être recommandé au patient de ne pas conduire pendant 6 mois à compter de l’arrêt du traitement. Si, après une crise survenant alors que le traitement médicamenteux a été modifié ou arrêté sur avis du médecin, le traitement efficace précédemment suivi est réintroduit, le patient doit cesser de conduire pendant 3 mois. 4.6.9 Après une opération chirurgicale visant à soigner l’épilepsie : voir “Épilepsie”.

4.7 Accidents vasculaires cérébraux (cf. 5.4)

4.7.1 Hémorragiques et malformations vasculaires (anévrismes, angiomes)

• Incompatibilité temporaire selon la nature du déficit (cf. 4.4.1 ; 2.1.2). Avis spécialisé.

4.7.2 Accidents ischémiques transitoires • Incompatibilité temporaire. Avis médical préalable à toute reprise de la conduite ; compatibilité temporaire : 1 an.

4.7.3 Infarctus cérébral • Incompatibilité temporaire selon la nature du déficit (cf. 4.4.1 ; 2.1.2). Avis spécialisé si nécessaire.

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RÉÉDUCATION

38 Neurologies • février 2017 • vol. 20 • numéro 195

voiture – situation connue pour accentuer certains traits cognitifs ou troubles instrumentaux – de suivre ses aptitudes d’autocorrec-tion et d’étudier l’aménagement technique le cas échéant. Lorsque le déficit moteur n’est pas systématisé, l’aménagement est adapté au cas par cas. S’il s’agit d’une hémiplégie, cet aménage-ment est quasi standardisé (Fig.  2). Chez l’hémiplégique droit, l’aména-gement associe une boîte automa-tique et une direction assistée, le report de l’accélérateur et du frein de parking à gauche et un pom-meau à 10 h sur le volant. Chez l’hé-miplégique gauche, l’aménagement se résume à la boîte automatique et à la direction assistée, le pommeau est à 2 h. L’accélérateur et le frein de parking demeurent à droite.Il n’existe pas de gold standard de l’évaluation de la conduite. Toutes les formes ont été étudiées. Celle qui prévaut aujourd’hui dans les pratiques associe d’emblée patient, moniteur et ergothérapeute en si-tuation réelle sur un parcours de 1 à 2 h, d’abord à faible trafic, puis à fort trafic. Très rares sont les équipes qui associent le neuropsychologue à l’évaluation en voiture. La reproductibilité d’une telle éva-luation situationnelle a été étudiée par Kewman [11] qui a retrouvé un niveau de corrélation entre deux évaluateurs de 0,97 avec un effet test-retest estimé à 0,84. Sa sen-sibilité est rarement mise à défaut eu égard à l’influence du comporte-ment dans l’élaboration d’une stra-tégie, dans les aptitudes d’autocor-rection et dans la gestion du stress. En revanche, l’âge, l’expérience an-térieure, le côté lésionnel, l’impor-tance de la déficience neurologique ou enfin la déficience visuelle ne discrimineraient pas bons et mau-vais conducteurs [7].

Médecin neurologue ou MPR

MÉDECIN TRAITANT

Devoir d’information

Secret médical

Liens réglementaires

FAMILLE

PATIENT

Préfet

Médecin agréé de la préfecture

FIGURE 1 - Nature des liens liant le neurologue et le médecin MPR à tous ses interlocuteurs engagés dans l’évaluation des aptitudes à la conduite automobile.

FIGURE 2 - Aménagements du véhicule automobile en cas d’hémiplégie droite et gauche.

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TABLEAU 2 - MENTIONS ADDITIONNELLES DE RESTRICTIONS LIÉES AU CONDUCTEUR, ENVISAGEABLES POUR RAISONS MÉDICALES (ARRÊTÉ DU 4 AOÛT 2014 MODIFIANT L’ARRÊTÉ DU 20 AVRIL 2012).

05.01 Restreint aux trajets de jour (par exemple : 1 h après le lever du soleil ou 1 h avant le coucher)

05.02 Restreint aux trajets dans un rayon de X km1 du lieu de résidence ou uniquement à l’intérieur d’une ville ou d’une région

05.03 Conduite sans passagers05.04 Restreint aux trajets à vitesse ≤ X km/h1

05.05 Conduite uniquement autorisée si accompagnée d’un titulaire du permis de conduire

05.06 Conduite sans remorque05.07 Pas de conduite sur autoroute05.08 Pas d’alcool

1X est laissé à l’appréciation du médecin agréé

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Reprendre la conduite automobile après un aVC constitué

Neurologies • février 2017 • vol. 20 • numéro 195 391

L’ÉVALUATION DES APTITUDES COGNITIVES À LA CONDUITE AUTOMOBILESi l’évaluation situationnelle de la conduite s’impose comme une évaluation incontournable, ce n’est pas pour autant qu’elle se suffit à elle-même ou qu’elle s’im-pose à tous.L’évaluation des aptitudes cogni-tives devrait en théorie permettre de réaliser une présélection des patients qui justifieraient une éva-luation sans faire courir de risques au moniteur et à l’ergothérapeute. Encore faudrait-il pouvoir compter sur une évaluation qui prédirait avec une sensibilité et une spéci-ficité suffisantes la capacité d’un sujet à bien ou mal conduire. L’évaluation cognitive se heurte aujourd’hui à trois limites :• Il n’existe pas de test univoque pour explorer individuellement chacune des facettes de la cogni-tion. Le recours à une batterie de tests ne se discute pas.• La meilleure batterie de tests co-gnitifs ne pourrait prétendre cou-vrir à elle seule tous les niveaux du modèle conceptuel de Michon (stratégie, tactique, opérationna-lité) [12]. Ce modèle, validé par l’usage, est empirique et demeure aujourd’hui le seul modèle apte à guider le choix des évaluations qui porteront surtout sur les capaci-tés d’attention/concentration, les fonctions exécutives, le traitement de l’information, la mémoire de travail et la compréhension orale et écrite.• Les normatives ne sont pas uti-lisables. Leur utilisation suppose-rait que la décision d’autoriser ou d’interdire la conduite est relative à une population dite normale pour laquelle aucun seuil de dangero-sité cognitive n’a jamais été établi.

Par conséquent, la démarche qui apparaît la plus raisonnable est guidée par :• une question  : À partir de quel seuil pathologique les tests cogni-tifs ont-ils la capacité de prédire une telle inaptitude à reconduire qu’elle contre-indiquerait l’évaluation en situation réelle ?• une remarque  : Il ne s’agirait plus de prédire si le patient sera un bon ou mauvais conducteur, mais seulement de déterminer la capacité du patient à assumer une évaluation malgré un certain niveau de troubles sans mettre en danger les examinateurs.De fait, il importe donc que l’uti-lisation d’une batterie de tests à des fins prédictives s’appuie sur la recherche de seuils (cut off) à par-tir desquels la sensibilité, la spé-cificité et la valeur prédictive posi-tive offrent chacune un taux d’au moins 80  % permettant d’appré-hender, avec une marge d’erreur acceptable, qui peut ou qui ne peut pas prétendre à une évaluation en situation réelle.

L’ÉVOLUTION DE L’ÉVALUATION VERS UNE STRUCTURATION ET UNE HARMONISATION DES PRATIQUESDepuis quelques années, l’asso-ciation Comète France a engagé une collaboration avec la SOFMER, la FEDMER et l’IFSTTAR1 autour de l’élaboration de recommanda-tions de bonnes pratiques validées par la HAS. Elles ont été publiées

1. SOFMER : société française de médecine physique et de réadaptation.FEDMER : fédération française de médecine physique et de réadaptationIFSTTAR : institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux.

début  2016. Elles s’appuient sur un argumentaire scientifique très approfondi, correspondant à une méta-analyse de la littérature scientifique. Ces recommanda-tions sont destinées à accompa-gner la démarche d’évaluation de personnes déjà titulaires de leur permis B “groupe léger” avant l’AVC. Les mots-clés de cette dé-marche y sont soulignés et sont nombreux (en gras) :• Les délais recommandés de reprise de la conduite après une cérébrolésion.• Les fonctions visuelles, sen-sitives et motrices à prendre en compte. La négligence spatiale unilatérale devient la première contre-indication clinique qui ex-clut d’emblée le patient de l’éva-luation neuropsychologique.• La nécessité de ne pas négliger l’évaluation des lésions céré-brales “mineures” de prime abord.• Le recours à une batterie de tests cognitifs validés et normés articulés à une évaluation sur route incontournable.• L’importance d’une démarche pluriprofessionnelle et d’une dé-cision collégiale.• L’importance du partage de l’in-formation avec le patient, de pré-férence en présence d’un proche, et de la traçabilité des informa-tions fournies.• La nécessité d’offrir des alter-natives à la conduite automobile pour les déplacements en cas d’avis négatif.

L’ÉVALUATION DE LA CONDUITE AUTOMOBILE AU CRF DIVIO (DIJON) EN PRATIQUELe chemin clinique s’appuie sur une démarche obligatoirement codifiée pour éviter toute “su-

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renchère” sur les conclusions de l’évaluation fournies à titre consultatif (Fig.  3). En revanche, l’avis du médecin MPR ou neuro-logue sur les inaptitudes médi-cales “éliminatoires” prévaut dès lors que le processus est entamé et évite d’entraîner le patient dans une évaluation qui, inévitable-ment, déboucherait sur un véto à la reprise de la conduite auto-mobile. Lorsqu’est constatée une négligence spatiale unilatérale avérée par l’examen clinique ou un test cognitif et/ou une épilepsie non contrôlée et/ou des troubles visuels incompatibles, le chemin de l’évaluation s’arrête. Adresser le patient au médecin agréé n’au-rait alors que valeur pédagogique dans le cas où celui-ci ne se laisse pas convaincre que la reprise de la conduite est contre-indiquée.Dans les autres cas, l’avis médical conduit à une évaluation cognitive complète, standardisée, faisant appel à des tests papier-crayon et des tests informatisés. Cette évaluation est calquée sur celle utilisée au centre Bouffard-Ver-celli (Cerbère) et est conforme aux recommandations de bonnes pratiques de la HAS publiées en janvier 2016 [13]. Les tests sont recensés dans le tableau 3. Le bilan de l’exploration visuospatiale est au minimum re-présenté par deux tests dédiés – le test de barrage des cloches et le test de bissection des lignes. Ils inaugurent la batterie de tests, car la détection d’une négligence vi-suospatiale constitue une contre-indication de facto à la poursuite de l’évaluation des aptitudes à la conduite. La mémoire visuelle à court terme, très sollicitée en voiture, est abor-dée aussi très tôt dans le bilan, car en utilisant le test de rétention

PROTOCOLE POUR L’ÉVALUATION DE LA CONDUITE AUTO POUR LES PATIENTS APRÈS LÉSIONS CÉRÉBRALES

DEMANDE DU PATIENT

CONSTITUTION DU DOSSIER(comptes rendus médicaux, ordonnance du traitement en cours, bilan ophtalmologique)

ENVOI DU DOSSIER PAR LE PATIENTau secrétariat médical du CRF DIVIO : 12 rue Saint-Vincent-de-Paul 21000 Dijon

CONSULATION MÉDICALE(convocation par le secrétariat médical)Validation pour démarrer le processus

Votre médecin traitant serainformé avec votre accord toutau long de ces démarches

PROGRAMMATION DE BILAN sur 2 demi-journées en ambulatoire(bilan fonctionnel en ergothérapie, bilan neuropsychologique)

COMMISSION INTERNEvalidant ou non la mise en situation de conduite

Avis favorable

Avis favorable

Avis défavorable

Avis défavorable

2e CONSULATION MÉDICALE(convocation par le secrétariat médical)

- Information et explications de la décision de la commission- Signature du compte rendu par le médecin et la personne- Éventuelles propositions en fonction de la situation observée

CONVOCATION POUR UNE MISE EN SITUATION DE CONDUITE

(moniteur d’auto-école et ergothérapeute - durée maximale 1 h)

En cas de nécéssité d’aménagement du poste de conduite, cette évaluation peut-être précédée

d’un apprentissage spécifique auprès d’une auto-école possédant un véhicule adapté

2e CONSULATION MÉDICALE(le même jour que la mise en situation)

- Information et explications de la décision de la commission- Signature du compte rendu par le médecin et la personne- Information des démarches administratives à effectuer- Remise du dossier au patient

FIGURE 3 - Le chemin clinique de l’évaluation de la conduite automobile au CRF Divio.

visuelle VRT de Benton en début d’évaluation et en le reproduisant en fin d’évaluation sous une autre forme, il est possible d’apprécier l’impact de la fatigabilité cognitive. Le VRT de Benton est complété par des tests d’empan visuel direct et inversé (subtests de l’échelle clinique de la mémoire Wechsler 3e édition).L’évaluation de l’attention – la plus approfondie – porte sur toutes les facettes qui mettent en jeu paral-

lèlement les stratégies exécutives. Elles sont abordées via une sélec-tion de tests perceptifs introduisant une contrainte temporelle. Les Trail Making Tests formes A et B, très répandus, couvrent les fonc-tions d’exploration visuospatiale et la rapidité perceptivo-motrice. Ils rendent compte du niveau d’altéra-tion de la flexibilité mentale lorsque la forme B est sélectivement ralen-tie et révèle des persévérations. Le test Stroop version Chatelois com-

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plète l’évaluation de cette flexibilité en précisant la capacité du sujet à inhiber une consigne antérieure et à se focaliser sur une nouvelle consigne ou à composer avec deux consignes associées tout en inhi-bant une consigne antérieure. Si l’attention focalisée est abordée dans le précédent test, la capacité à mobiliser les ressources atten-tionnelles autour d’items cibles est appréhendée par le test  D2-R qui intègre par la même occasion un facteur d’endurance. Plus exigeant et plus étendu est le territoire d’ex-ploration du test de double tâche de Baddeley qui évalue les capaci-tés de coordination de deux tâches simultanées. L’attention divisée est explorée, quant à elle, grâce aux subtests du TAP (Test of Attentional Performance). Les derniers tests de la batterie ont pour cible le traitement de l’infor-mation sous trois angles : celui de la vitesse de traitement, de l’inhibi-tion motrice, de l’alerte phasique et de la perception multimodale. L’évaluation cognitive, une fois terminée est, en l’état actuel de l’avancée de la démarche, complé-tée systématiquement par l’éva-luation de la conduite automobile en situation réelle sous la super-vision du moniteur d’auto-école et d’un ergothérapeute. L’objec-tif principal est de multiplier les différentes situations pour les évaluer dans des conditions se rapprochant de la conduite quo-tidienne. Trois mises en situation graduées en difficultés et en du-rées sont programmées (Tab. 4).Le bilan de compétences suit la trame de l’épreuve pratique de l’examen du permis de conduire de la catégorie B et couvre quatre rubriques principales :1) Connaître et maîtriser son véhi-cule.

2) Appréhender la route.3) Partager la route avec les autres usagers.4) Autonomie et conscience des risques.Deux items de bonification com-plètent la grille. Ils ont trait à la courtoisie au volant et à des consi-dérations écologiques. Dans la grille présentée (Fig.  4), un item “Effectuer des vérifications du véhicule en lien avec la sécurité routière” a été retiré de la grille du Certificat d’évaluation du per-mis de conduire (CEPC), car il semblait peu pertinent dans le contexte d’une régularisation du permis de conduire. La cota-tion est graduée de 0 à 1, 2 ou 3 selon l’item. L’erreur éliminatoire E résulte d’une “action, d’une non-action ou d’un comporte-ment dangereux du candidat”. Elle peut aussi faire référence à cinq infractions considérées comme graves entraînant obligatoirement l’échec à l’examen. Il s’agit de la circulation à gauche sur chaussée à double sens, du franchissement d’une ligne continue, de la circula-tion sur bande d’arrêt d’urgences

ou des voies réservées, du non-respect d’un signal prescrivant l’arrêt, de la circulation en sens interdit. L’objectif à terme sera d’établir le seuil pathologique de la batterie de tests à partir duquel la mise en situation réelle de conduite est contre-indiquée de manière for-melle et avec la plus faible marge d’erreur.

CONCLUSIONL’accompagnement à la reprise de la conduite automobile dans les suites d’un accident vasculaire cérébral constitué est guidé par un dogme incontournable qui stipule que nul ne peut être dispensé d’une visite médicale d’aptitude, aussi mineur soit en apparence l’AVC. Ce dogme renvoie le neurologue et le médecin MPR à deux obligations : celle d’évaluer pour mieux infor-mer et celle d’évaluer pour pro-mouvoir la reprise de la conduite automobile. Cette évaluation doit être réalisée sérieusement dans des établissements qui ont déve-loppé une démarche codifiée et

FIGURE 4 - Bilan de compétences de conduite automobile.

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TABLEAU 3 - Évaluation des fonctions cognitives.

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TABLEAU 3 - Évaluation des fonctions cognitives (suite).

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TABLEAU 3 - Évaluation des fonctions cognitives (suite et fin).

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TABLEAU 4 - Mises en situation réelle de conduite automobile selon un protocole gradué.

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Bibliographie

coordonnée. Juridiquement, elle n’a qu’une valeur consultative qui ne vaut pas interdiction, le médecin agréé de la préfecture étant le seul arbitre dans ce domaine. Psycholo-giquement, elle ne doit pas, en cas de véto, être présentée comme un verdict définitif et sans proposition alternative relative aux modalités de déplacements extérieurs dans la vie quotidienne. n

RemerciementsÀ M. Thierry Donzel, moniteur d’au-to-école (école de conduite de la Côte, Nuits-Saint-Georges) pour le prêt des documents et des icono-graphies relatifs aux aménagements techniques et à l’évaluation des com-pétences de conduite automobile. L’article a été écrit sur la base d’une réflexion partagée, entre autres, avec un moniteur d’auto-école.

CorrespondanceDr Charles FattalMédecin-chef d’établissementCRF La Châtaigneraie 95180 MenucourtE-mail : [email protected]

✖Charles Fattal déclare n’avoir aucun lien d’intérêts.

Mots-clés Accident vasculaire cérébral, Conduite automobile, Fonctions cognitives

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