rencontrer en soirée la jeunesse en pied d'immeuble

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Médiation nomade 2016 1 Rencontrer en soirée la jeunesse en pied d’immeuble Paris, Juillet 2016 12/07/2016 Directeur : Yazid KHERFI 06 81 32 29 85, [email protected] Association Médiation nomade : www.mediationnomade.fr - Président : Edouard Zambeaux Chef de projet : Lakdar KHERFI 06 74 00 07 25, [email protected]

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Page 1: Rencontrer en soirée la jeunesse en pied d'immeuble

Médiation nomade 2016 1

Rencontrer en soirée la jeunesse en pied d’immeuble

Paris, Juillet 2016

12/07/2016

Directeur : Yazid KHERFI 06 81 32 29 85, [email protected]

Association Médiation nomade : www.mediationnomade.fr - Président : Edouard Zambeaux

Chef de projet : Lakdar KHERFI 06 74 00 07 25, [email protected]

Page 2: Rencontrer en soirée la jeunesse en pied d'immeuble

Presse et TV

• ARTE, le 12 juillet 2016• Le Monde, le 5 juillet 2016• Corse matin, le 24 juin 2016• M6, magazine « 66 mn » : le dimanche 10 janvier 2016• Marianne, le 8 janvier 2016

• Nouvel Obs, 12 novembre 2015

• Libération, double page, le 19 décembre 2014• Beur FM : la matinale, 8 décembre 2014• France Inter : 1e septembre 2014• Parisien 93, le 2 juillet 2014• Europe 1 : 20 décembre 2014• Radio Colmar : 25 septembre 2014• Quotidien l’Alsace : 26 septembre 2014• Journal de 20h de TF1 : le 8 Aout 2014

12/07/2016 2Médiation nomade 2016

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14 | france MARDI 5 JUILLET 20160123

L e camping­car, tout grafféde citations de MartinLuther King, est à peinegaré sur le terre­plein

qu’une nuée de gamins l’as­saillent. Casquette noire sur son crâne chauve, Yazid Kherfi sortpour les faire patienter. Il fautd’abord installer les tables plian­tes, les chaises et l’auvent pourdonner un soupçon de confort auterrain défoncé. Sur ce qui était censé être une aire de jeu, au bas des immeubles de la résidence La Bruyère, à Bondy, il n’y a rien,si ce n’est le contour d’un but des­siné sur la palissade.

C’est la 171e fois que le travailleursocial vient poser sa caravane aupied d’immeubles pour une mé­diation nomade. En ce début de nuit de ramadan, lundi 27 juin, il entame sa soirée dans cette co­propriété dégradée de Seine­Saint­Denis. Il a grandi au Val­Fourré, à Mantes­la­Jolie (Yveli­nes), il connaît la banlieue et tousses codes. Ancien braqueur etancien taulard, il a décidé de mul­tiplier les initiatives pour lutter contre la violence des jeunes etle mal­être des cités. Jusqu’à enfaire son métier.

« Il y a urgence à réinvestir l’es­pace public en soirée, là où il n’y a plus que la police qui intervient. Sinon ce sont des modèles négatifs– trafiquants ou religieux – quiopèrent », dit Yazid Kherfi. Le constat est partagé par LaurentMucchielli, sociologue spécialiste de la délinquance : « L’absence d’adultes la nuit et le week­end est dramatique dans les quartiers. Il y a eu une standardisation qui faitque toutes les structures n’ouvrent qu’aux heures de bureau. » A La Bruyère, c’est peut­être pire : il n’ya jamais eu de centre social ni d’animateur présent.

Spirale de la dégradationLa cité, accolée à la RN3 et au canalde l’Ourcq, inquiète la mairie de­puis quelques années. Ses quatre immeubles de 11 étages semblent à bout de souffle. Portes d’entrée dégradées, boîtes aux lettresdétériorées, murs tagués, carre­lage des escaliers arraché, tout yrespire le délabrement. Devant les fenêtres du rez­de­chaussée, un matelas et des palettes en vrac.Les anciens garages en sous­sol se sont transformés en dépotoirs.La classique spirale de la dégrada­tion s’est enclenchée depuis la findes années 1990 : impayés, ab­

sence d’entretien, dettes insolu­bles… jusqu’au placement sous administration judiciaire. Un ar­chétype de la copropriété partie à vau­l’eau.

Un premier plan de sauvegardeen 2009 a permis la réalisation detravaux d’urgence. Un second, de­puis 2015, doit entreprendre la ré­novation extérieure. Mais letemps de la réhabilitation semblebien long aux riverains etd’autres maux ont contribué à la dégradation du quotidien. L’ab­sence de commerces et de cafés,les jeunes qui tiennent les murs et dealent entre les épaves lais­sées à l’abandon sur le parking, les enfants qui jouent dehorsavec ce qu’ils trouvent. « Le centre social du centre­ville n’intervient qu’une demi­journée par se­maine l’été… », regrette Delphine Le Roch, assistante sociale. « Il faut pourtant d’urgence entrer aucontact de certains jeunes les plusen marge », constate Mahmoud

Bourassi, directeur de la maisonde la jeunesse de Bondy. C’est lui qui a fait venir Yazid.

Dès les beaux jours, au trafic decannabis qui squatte le parkings’ajoute le tapage nocturne. Musi­que trop forte et bruit des motos rendent la vie impossible aux ha­bitants. Jalila (elle a préféré garderl’anonymat comme beaucoup) habite dans ces barres ocre depuis2008 : « Ça va mal, mal, mal », dit­elle la voix lasse. « On a dû être en­sorcelés quand on a acheté, mais ce n’était pas cher », renchérit son amie Afef, devenue propriétaireun an plus tôt. Mmadi, résidente au bâtiment D, soupire quand on lui demande comment on vit à La Bruyère : « C’est difficile et la maison n’est pas terrible, mais jen’ai pas le choix », explique cettegrande femme en boubou aux tons pastel. Les trois mères de famille n’ont pas hésité quandYazid leur a demandé un coup de main pour organiser le repas du

ftour (rupture du jeûne). « Ça change, il n’y a rien ici », lâcheDjemila, une autre mère.

Voilà deux heures que les en­fants jouent avec des jeux de so­ciété. Pour les plus grands, Yazid met la sono. Et tout d’un coup, aux premières notes de MHD (un jeune rappeur qui fait un mal­heur sur YouTube), c’est toute la vingtaine de mômes qui se met­tent à danser, filles comme gar­

çons, mimant la chorégraphie du chanteur. Le travailleur social sourit : « A force de les rencontrer,je sais ce qui plaît aux minots.Mais ce serait bien que les plus grands s’approchent pour qu’on discute. » Les grands ados secontentent de lorgner le camion, de loin. L’un d’eux fait un tour en minimoto, en reconnaissance.

« Moments conviviaux »Une dizaine de parents sont des­cendus vers 22 h 10, heure de la rupture du jeûne. La chorba etl’harira arrivent fumantes etl’ambiance change autour de lagrande table, éclairée à la lueur d’un projecteur. Les langues sedélient, les voisins se chahutent. Les jeunes qui traînaient sur le parking se sont enfin approchés et sirotent un verre de thé à quel­ques mètres. « Ils tâtent le ter­rain », souffle Margot, étudianteen sciences de l’éducation, venue aider. Ce n’est pas encore ce soir

L’Assemblée contre le recours aux gifles et fessées sur les enfantsUn amendement adopté lors de l’examen de la loi Egalité et citoyenneté complète, dans le code civil, la définition de l’autorité parentale

U ne « étape majeure » dansla lutte contre l’utilisa­tion des châtiments cor­

porels sur les enfants vient d’êtrefranchie, salue le médecin Gilles Lazimi, l’une des chevilles ouvriè­res du groupe de militants oppo­sés au recours aux fessées et auxgifles dans l’éducation. L’Assem­blée nationale a adopté en pre­

mière lecture, dans la nuit du vendredi 1er au samedi 2 juillet, un amendement au projet de loi Egalité et citoyenneté, qui com­plète la définition de l’autorité pa­rentale dans le code civil.

Si le texte est définitivementadopté par le Parlement, l’arti­cle 371­1 précisera que les parents doivent s’abstenir « de tout traite­

ment cruel, dégradant ou humi­liant, y compris tout recours aux violences corporelles ».

L’amendement était présentépar les députés Marie­Anne Chapdelaine (PS, Ille­et­Vilaine, rapporteure thématique pour la dernière partie du texte), Edith Gueugneau (divers gauche, Saô­ne­et­Loire) et François­MichelLambert (écologiste, Bouches­du­Rhône). Les deux derniers avaientprésenté le 20 avril une proposi­tion de loi visant à abolir les puni­tions corporelles sur les enfants.

La formulation de l’amende­ment a été longuement négociée en amont avec la ministre desfamilles, de l’enfance et des droits des femmes, Laurence Rossignol, qui souhaitait éviter une allusion trop directe à la fessée, pour nepas polariser le débat.

Les termes punitions et châti­ments ont ainsi été écartés, au profit de violences. La ministre des familles a donné un avis de sagesse à l’Assemblée nationale.Ce qui laissait les députés libres

de leur vote. La rapporteure ayantcosigné l’amendement, l’avis de la commission était favorable.

Malgré la condamnation de laFrance par le Conseil de l’Europe, en mars, pour son absence d’in­terdiction suffisamment clairedes châtiments corporels, Lau­rence Rossignol s’était refusée jusqu’à présent à légiférer sur cesujet sensible, préférant miser surla pédagogie. Mais elle y est favo­rable sur le fond.

« Aucune sanction pénale »La ministre des familles s’est féli­citée, dans un communiqué, samedi 2 juillet, de cette nouvelle rédaction du code civil, qui « am­plifie le travail de conviction que [je] mène, avec les associations, de­puis deux ans, en faveur d’une édu­cation non violente ».

Il s’agit, selon Laurence Rossi­gnol, d’un « outil indispensable à la prévention de la maltraitance des enfants », qui « permet à laFrance de franchir une étape sup­plémentaire dans la mise en œuvre

de la Convention internationale des droits de l’enfant ».

La disposition ne s’accompagne« d’aucune sanction pénale nou­velle à l’encontre des parents »,prend soin de préciser la ministre des familles. Les violences sur les enfants sont en effet déjà punies par le code pénal. Dans les faits,seules les violences les plus gravessont réprimées.

La disposition, inscrite dans lecode civil, est symbolique. « Elle énonce un principe clair, qui a vocation à être répété aux pères et mères, et à imprégner leur comportement futur », affirmel’exposé des motifs de l’amende­ment. L’article relatif à l’autorité parentale est lu lors des cérémo­nies de mariage.

Il n’est cependant pas certainque tous les parents assimilent gi­fles et fessées à des violences. Pourtant, selon M. Lazimi, c’est bien « tout coup porté sur un en­fant », y compris ces dernières, quisont symboliquement proscrites.La disposition permettra égale­

ment, selon lui, de mettre fin au« droit de correction » coutumier, reconnu par certains tribunauxaux parents.

Très clivante et perçue commeune intrusion dans la sphère pri­vée, l’opposition aux punitions corporelles n’est pas populaire en France. Les pédiatres, psycholo­gues et spécialistes de la petite en­fance jugent pourtant quasi una­nimement que les châtiments corporels, y compris l’usage régu­lier de fessées et de gifles, n’ont pas de valeur éducative, et ne per­mettent pas de se faire obéir.

Ils ont plutôt tendance à ensei­gner l’usage de la violence et àenvenimer les relations entre les parents et les enfants, selon des études qui ont été menées dansles pays anglo­saxons.

« Ce texte est un point de départqui doit désormais être accompa­gné par beaucoup de pédagogie, poursuit M. Lazimi. C’est très diffi­cile d’être parents, il faut donnerdes alternatives. »

gaëlle dupont

« Médiation nomade » à Bondy (Seine­Saint­Denis), le 30 juin. GUILLAUME BINET/

MYOP POUR

« LE MONDE »

« Il y a urgence à réinvestir

l’espace public en soirée,

là où il n’y a plus que la police

qui intervient »YAZID KHERFI

travailleur social

Un bus nomade pour créer du lien dans les quartiersYazid Kherfi, ancien braqueur reconverti en travailleur social, lutte contre la violence dans les cités

qu’ils viendront se mêler auxadultes. « Il faut leur laisser un peude temps. Je reviendrai jeudi soir, plus tard », lâche M. Kherfi.

Le repas se termine et la petitefoule se disperse. « C’était génial,j’ai jamais vu ça », chuchote Mmadi en rentrant chez elle.Yazid Kherfi sait qu’il ne fait pas de miracle mais qu’il crée des mo­ments magiques, malgré tout.« J’essaie de montrer qu’il faut s’installer là où sont les jeunes, au pied des immeubles. Il y en a telle­ment qui ne vont pas bien, il nefaut pas les laisser seuls. C’est aux villes de rouvrir des lieux d’accueil la nuit et le week­end. » Laurent Mucchielli, qui a suivi le camion de Yazid Kherfi à Marseille, ap­prouve : « Ces moments convi­viaux qu’il crée sont formidables,mais il faut que cela se transforme en actions durables, sinon les habitants retournent à leur ennui et à leur silence. »

sylvia zappi

La SARL ALPHA VENDOME, dont le siège est à VENDOME (41100) 36 avenue deVerdun, a été déclarée en liquidation judiciaire par jugement rendu par le Tribunal de Com-merce de BLOIS le 13 mai 2016, le maintien de l’activité ayant été autorisé pour une pre-mière période de trois mois.Il est recherché la cession de son fonds de commerce de Conseil et de courtage en assurancesauquel se trouvent attachés sept contrats de travail.Les résultats comptables dégagés par la SARL ALPHA VENDOME depuis le 1er janvier2012 sont les suivants :• 2012 CA : 591 K€ - Résultat net : + 2.425 K€ (dont un résultat exceptionnel de 4.862 K€)• 2013 CA :615K€ - Résultat net : - 107 K€ • 2014 CA : 615 K€ Résultat net : - 64 K€

• 2015 CA : 470K€ - Résultat net : En cours de déterminationLa date limite pour l’envoi des offres à l’Etude de Me Gérald BUISSON, Mandataire Judi-

ciaire demeurant à BLOIS (41000) 26 avenue de Verdun, est fixée au :samedi 30 juillet 2016, le cachet de la poste faisant foi.

Me Gérald BUISSON : [email protected]

CESSION - FUSION - ACQUISITION - PARTENARIAT

01.49.04.01.85 - [email protected]

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N°880 - 24 juin 2016Pages 28-29

La rue comme terrain de jeux. Jeux de mains, jeux de vilains. La rue aujourd’hui au cœur de sa croisade contre la violence. Médiateur tout terrain, « repris de justesse », le quinqua régulièrement invité à intervenir en Corse pose un regard bienveillant, mais réaliste, sur une société insulaire où, comme ailleurs, il tente aujourd’hui de tisser des ponts entre des mondes qui s’affrontent

PortraitRitrattu

Les mauxpour le dire

Par Lisa [email protected]

Pas très grand, crâne rasé. Une tête de corse, la grande gueule en moins. De l’île, il ad-met qu’elle lui fait penser à la Kabylie, terre

d’ancêtres, terre de cavale, également. «  Votre métier, c’était voleur » résume un collégien à qui Yazid Kherfi demande ce qu’il a compris de son passé. Ex-délinquant aujourd’hui expert en pré-vention, mauvais élève désormais enseignant à la fac, ancien taulard invité dernièrement à Ajaccio et Porto-Vecchio par la Protection Judiciaire de la jeunesse…. Le parcours est étonnant, le discours bien rôdé. Une jeunesse pas dorée dans le quar-tier du Val Fourré à Mantes la Jolie, un premier «  job » de guetteur avant de glisser. Laisse pas traîner ton fils. Trop tard. Un braquage qui tourne mal, la prison, la double peine et l’expulsion qui menace. « On m’avait toujours dit que j’étais un bon à rien résume le quinqua. Et à ce moment-là, j’ai vu autour de moi des gens se mobiliser. » Une main tendue. Inespérée. Salvatrice.

Libérer la paroleC’est sans doute pour cela que depuis des an-nées Yazid Kherfi a choisi d’aller, à son tour, aux devants d’autres « mal-aimés ». « A 15 ans, je suis devenu délinquant à cause de mes rencontres ; à 31 ans, je suis sorti de la délinquance grâce à mes rencontres. Dans la vie, c’est toujours une question de rencontres ». Aux Jardins de l’Empe-reur, par exemple, cadre d’une crise « prévisible. Je savais que ce qui s’y est passé allait arriver. C’est ce qui se passe dans tous les quartiers. Au bout d’un moment, l’exclusion, la pauvreté, la précarité, le repli, y compris communautaire, font que les relations se tendent avec le reste de la ville. On y retrouve les mêmes problématiques que sur le Continent, dit-il. Une zone un peu iso-lée, refermée sur elle-même. Je n’y ai vu que des marocains. Pas de blancs ». Un cocktail explosif, « tout pour une paranoïa collective. On n’est pas « aimé ». C’est ce qu’ils m’ont dit. Et c’est ce que j’entends ailleurs. Le mot amour est très impor-tant. La présence sur le terrain également, his-toire d’ériger un pont entre des sociétés, parfois seulement voisines de quelques kilomètres, qui s’ignorent.  Les gens que je rencontre ont l’im-pression que je fais partie de leur monde. Toi, tu sais, me répètent-ils». Lui il sait, pourraient répondre en écho les institutions qui, régulière-ment, font appel au consultant.«  Sa présence déclenche une parole plus libre, reconnaît Martine Joly  ». Aujourd’hui

référente laïcité au sein de la Direction Ter-ritoriale de la PJJ de Corse, elle connaît Ya-zid Kherfi depuis des années. A souvent fait appel à lui. « Il fait passer des messages en apportant une plus-value, une expérience, très complémentaire avec des approches sociologiques. Et dès qu’on se perd de vue, il y a toujours un moment, une occasion, ou je me dis il faudrait que Yazid intervienne ». Dans des salles de classes. Mais pas que. « Il s’est par exemple rendu seul aux Jardins de l’Empereur à Ajaccio et à Pifano à Por-to-Vecchio. Dès qu’ il arrive et est présenté, tout de suite, les jeunes, mineurs ou adultes, viennent, assez admiratifs, le questionnent. Il a un charisme et une légitimité qu’à mon sens aucun éducateur n’aura jamais… En 5 minutes, avec Yazid, la parole est là  ». Les enfants et les ados aussi. « Il est remonté du city park du quartier porto-vecchiais avec 15 gamins qui ont participé à la rencontre or-ganisée en centre ville, posé des questions. Un gendarme était présent, un représentant du conseil citoyen, un directeur d’école éga-lement. Et tout ce monde là a pu discuter… Alors que nous, en tant qu’éducateur, on peut ramer pour embarquer les jeunes. Il a quelque chose que d’autres n’ont pas ».Un passé, d’abord, un présent, et un avenir. Un discours ferme, également. L’adulte, ré-férent et bienveillant, replacé sans cesse à une place essentielle. L’éducation, indispen-sable, la foi en la justice et la parole, « plus forte que la violence. A Sartène, lors d’une précédente visite, poursuit Yazid Kherfi, j’avais beaucoup entendu certains dire « on est des Corses  », sous entendu «  on a des armes, la vengeance fait partie de nous, nor-mal qu’au bout d’un moment on s’en serve ». Mais non c’est un crime. On ne peut pas répondre de cette manière. Il faut trouver d’autres moyens. Sinon on finit en prison ». De l’importance de parler. Même si c’est par-fois difficile.

Un pont entredeux mondesDernièrement, face à des ados por-to-vecchiais, peu loquaces, l’exercice a parfois montré ses limites. Les cités  ? la violence ? Non, pas ici, on se connaît tous. Esprit (de village) es-tu (encore) là ? A l’is-sue de la rencontre, pourtant, un collégien s’est dirigé, spontanément, vers Yazid. Et c’est seuls, dans un coin, loin des profs, des potes et des autres adultes, qu’ils ont pu

échanger. Dire, peut-être, l’inaudible. « Lors des derniers déplacements que nous avons fait avec Yazid en Corse, poursuit Mme Joly, nous nous sommes par exemple retrouvés face à des jeunes qui n’arrêtaient pas de dire, après ce qui c’était passé aux jardins de l’Empreur, « Quand même, les pompiers  ! ». Il n’y avait pas, de leur part, une légitima-tion du saccage des lieux de cultes, mais un ressenti très fort  ». Des mots pas toujours faciles à formuler, difficiles à entendre. « Je suis un intermédiaire pour les institutions qui sont en attente d’autres solutions, re-connaît le consultant également co-auteur de « Repris de justice » avec la sociologue et ethnologue Véronique Le Goaziou. Je leur dis voilà ce que j’ai vu, entendu, ce que j’ai com-pris. Les problèmes des jeunes sont un pro-blème d’adultes. Mais comprendre, insiste-t-il, n’est pas justifier ». Pas de victimisation, pas d’angélisme, donc, plutôt la volonté de «  montrer une manière d’aller vers l’autre. Quand je m’ installe, toujours en fin de jour-née, quand la nuit tombe, dans un quartier difficile avec mon camping car, je vais vers l’autre ». Quelques boissons posées sur une table, des jeux de société, doucement, des gamins qui arrivent, suivis de plus grands... Et la discussion qui s’engage. « Ce ne sont pas des monstres et même si on a peur, il faut aller au delà des préjugés, accepter le conflit, échanger. Les institutions, et les gens en général, ne vont pas dans les quartiers. Les Jardins de l’empereur ? Personne n’y va, personne n’y passe. Pourquoi faire ? Et on se retrouve avec une France d’un côté, une autre à part »... Des mondes qui s’ignorent. Puis s’opposent. Avec des risques. «  Il faut quand même faire attention. Ce qui s’est passé, la destruction d’un lieu de culte peut donner lieu à une radicalisation. Et plus on est stigmatisé, plus on se sent rejeté, plus on est violent. Quand je débarque, on me dit « Qu’est ce que tu viens faire ici ». Les gens sont étonnés que quelqu’un qui ne les connaît pas vienne les voir. Mais rien que de pouvoir déballer leurs sacs, leur fait du bien. Après l’étonnement, la méfiance du départ, il y a le plaisir et le besoin de se sentir aimer. Ce sont les « de toutes façon, personne nous aime », qui créent la radicalisation. Comme les gens d’en face peuvent se radicaliser aussi. »

Photo Pascal Villa

YAZID KHERFI

1958 : Naissance à Triel-sur-Seine (Yvelines).

Février 1967 : déménagement de la famille au Val-Fourré.

Juin 1977 : premier séjour de deux mois en prison pour vol de voiture.

1981 : cavale et fuite en Algérie, où il fait deux ans de service militaire, après un braquage raté.

1985 : condamné en France à quatre ans d’emprisonnement.

1987 : sorti de prison, il travaille dans le social, milite dans les associations et devient formateur.

1990 : il devient directeur d’une maison de jeunes, à Chanteloup-les-Vignes (Yvelines), une des cités les plus dures d’Ile-de-France, une structure dans laquelle il travaillera 10 ans.

2000 : parution de « Repris de justesse » (La Découverte).

Février 2002 : Yazid Kherfi est nommé comme membre du Conseil National des Villes par le Premier ministre Lionel Jospin.

Bio-Express

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12/07/2016 Médiation nomade 2016 1

Corse matin,

24 juin 2016La Provence,

4 avril 2016

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Y azid Kherfi a le CV plutôtcostaud. Tout simple-ment peut-être parce que

son boulot, c’est sa vie. Ou inver-sement. Ce père de trois enfantsest consultant en prévention ur-baine. Il est aussi président del’association Pouvoir d’agir 93,il enseigne les politiques dequartier à la fac, fait aussi de lapolitique. Tout court, surtoutpas "politicienne". Il a écrit un li-vre, Repris de justesse. Accessoi-rement, Yazid Kherfi a été un dé-linquant. Il a commis un braqua-ge et fait cinq ans de prison sil’on additionne les peines. Celuiqu’une partie de la société ju-geait "irrécupérable" bosseaujourd’hui avec une pochetteestampillée du sceau du Comitéinterministériel de préventionde la délinquance. De passage àAvignon la semaine dernière,où il a rencontré des jeunes sui-vis par la PJJ (Protection judiciai-re de la jeunesse), il y reviendrace jeudi pour une autre réunionen mairie. Puis peut-être finavril, avec son camping-car,pour rencontrer les jeunes dansles quartiers populaires.

"Avignon, je connais bien, j’aivécu quelques mois à Sainte-An-ne (l’ancienne prison, ndlr.) !",plaisante-t-il.

Ça, c’était à cause du braqua-ge qui a mal tourné, celui où il aperdu un pote et lors duquel ils’est fait arrêter, du côté de Bol-lène. "J’ai commencé par descambriolages puis, en prison,j’ai rencontré un braqueur, ilm’a appris comment faire. La

prison a un côté école du crime.C’est pour ça qu’il faut impérati-vement que la société civile puis-se entrer dans les prisons pourparler avec les détenus. On nepeut pas laisser les délinquantsentre eux. La fragilité de certainsest telle qu’ils vont écouter le lea-der".

Délinquant ordinaire. Bra-queur. Mais pas dealer. Dansson escalade, Yazid n’enfreint ja-mais certaines règles. "Je n’ai ja-mais bu d’alcool, jamais fuméde cigarette ou de joint, j’ai desvaleurs. Je n’aime pas les dealersqui revendent cette drogue à desgamins".

Yazid a 18 ans lorsqu’il entre

en taule pour la première fois. Ilen a 31 quand il en sort. Depuisplusieurs années, ce nomade dela prévention sillonne les quar-tiers au volant de son cam-ping-car. Cet "outil" est à la dis-position des municipalités pouraller à la rencontre des publics"que l’on ne voit que le soir", pré-cise-t-il, en pointant les dysfonc-tionnements du système dansun discours rodé mais sans ap-pel. "Quand un politique ne saitpas faire, il doit le dire. Il fautchanger certaines choses. Lanuit, il n’y a que les commissa-riats qui sont ouverts. Les centressociaux ont les mêmes horairesque Pôle Emploi, quelque chose

ne va pas, non ? C’est la nuit et leweek-end qu’il y a le plus de pro-blèmes, la prévention, c’est lesoir qu’elle doit se faire".

Seule solution, la parole. Pasbesoin de bureau. Lui, a pourseul décor une table et des chai-ses, sur le trottoir. "Ceux quifont le pas de franchir la portedes centres sociaux, c’est gagnépour eux. Mais beaucoup neviennent pas. C’est là que l’ondoit s’adapter. Il faut renouer lelien, remettre les adultes dansl’espace public. Moi, déjà, je com-mence par leur dire bonjour. Ona oublié la base. On ne considèreplus le délinquant comme un hu-main. On le traite par ses dé-

fauts et jamais par ses qualités.Il ne faut pas oublier que les dé-linquants sont des gens malheu-reux et en grande souffrance".

Il sait de quoi il parle : "Jen’étais pas à l’aise à la maison, jepréférais ma bande. Mon pèreme donnait une dérouilléequand je faisais une connerie,mais à côté de ça, il ne me par-lait pas. Les parents sont dépas-sés. Et puis, c’est la honte d’avoirun enfant qui fait des conne-ries". Un jour, une petite partiede la société a cru en Yazid et aévité qu’il ne soit expulsé vers lepays d’origine de ses parents. Ils’était juré de ne jamais les déce-voir. Mélodie TESTI

Les salariés de Médisud, entreprisede transport sanitaire qui compte 35 sa-lariés à Pertuis, ont lancé un mouve-ment de grève depuis hier matin. Unegrève qui est suivie par 90 % du person-nel à Pertuis, à 80 % sur l’ensemble duGroupement d’intérêt économique(GIE) A13, qui emploie environ 400 per-sonnes dans les Bouches-du-Rhône etle Vaucluse). Les revendications sontmultiples mais, comme l’explique PaulGloppe, délégué syndical CFDT, "ellesportent sur le salaire principalementcar, depuis 2012, nous n’avons eu aucu-

ne augmentation du taux horaire. Àl’heure actuelle, avec la baisse du prix ducarburant, la mise en place du CICE (Cré-dit d’impôt pour la compétitivité etl’emploi) et le Pacte de responsabilité, çanous semble le bon moment pour récla-mer une augmentation de salaire de5 %."

Et le syndicaliste de poursuivre : "Ilfaut savoir qu’il y a deux groupes dansles ambulances. Le groupe A, les auxiliai-res ambulanciers, qui gagnent le Smic,et les DEA, les ambulanciers, payés au ni-veau conventionnel 10,04 ¤ l’heure, soit

moins qu’une femme de ménage. Il fautsavoir aussi que les salariés de nuit nesont payés qu’à 75 % de leur temps et quepour le travail du dimanche, la primeest seulement de 19 ¤."

Les salariés ont donc arrêté leur tra-vail sur l’ensemble du réseau pour untemps encore indéterminé, même si,comme le glisse encore le délégué syndi-cal, "il semble que pour pallier à notremouvement de grève, notre employeurait fait appel à des ambulanciers venantde sociétés extérieures, notamment deToulouse et de Bourg-en-Bresse !" J.T.

Mobilisation généralepour les sans-abridans le sud LuberonLes associations Cimes Blan-ches de Beaumont-de-Pertuiset l’Amista Gramboudiano deGrambois unissent leurs ef-forts en organisant jeudi unecollecte de vêtements pour lessans- abri. Cette collecte seraorganisée simultanément sur4 lieux du territoire de la Com-munauté territoriale Sud Lube-ron (Cotelub) : de 9h à 11h àGrambois (place du Château etsur le parking du Moulin duPas), devant le club des CimesBlanches à Beaumont-de-Per-tuis, en face de la mairie à LaBastide-des- Jourdans et placedu Château à La Tour-d’Aigues.Les dons, qui seront remis auSamu Social, peuvent êtreconstitués de vêtements telsque couvertures, duvets, blou-sons, écharpes, bonnets,gants, etc. Les produitsd’hygiène pour hommes et fem-mes sont les bienvenus égale-ment.

Yazid Kherfi, "repris de justesse"en mission dans les quartiersEx-braqueur, il sillonne les zones sensibles avec son camping-car pour y prévenir la délinquance

Le patron du GIE A13, Thierry Schifa-no, a accepté de répondre à nos solli-citations pour tordre le cou au clichéselon lequel "l’ambulancier seraitforcément un entrepreneur qui ga-gne beaucoup d’argent (...) Une étu-de réalisée à la demande de la profes-sion met en exergue le fait que les en-treprises comme les nôtres décro-chent. Avant 2008, l’Assurance-ma-ladie compensait les hausses de sa-laire. Ce n’est plus le cas. Nos entre-prises ont des marges nettes compri-ses entre 0,1 et 0,8 %, CICE inclus. Enparallèle, nous avons enclenché unplan stratégique 2012-2015 pour op-timiser et organiser le transport sani-taire au sein de la filière santé".Il insiste aussi sur la transformationque connaît le secteur : "le transportsanitaire, pour certaines entrepri-ses, c’est une voiture, avec le patronqui conduit l ’ambulance." Unconstat, pas une critique, selonThierry Schifano, qui parle aussi destâches que doivent faire les ambulan-ciers "et qui ne sont pas de leur res-sort, comme faire le brancardierdans l’hôpital. Déposer un patient àl’hôpital, cela peut nous prendretrois heures..." S.P.-B.

Vaucluse

Le mouvement entamé hier matin est suivi à 90 % parmi le personnel de la société de Pertuis. / PHOTO J.T.

Âgé de 56 ans, cet ancien braqueur passé par la prison Sainte-Anne d’Avignon est le fondateur de la "médiation nomade". / PHOTO ANGE ESPOSITO

LES AMBULANCIERS DE L’ENTREPRISE PERTUISIENNE RÉCLAMENT UNE HAUSSE DE SALAIRE

Les salariés de Médisud ont cessé le travail

À suivre

"Nos entreprises ontdes marges nettesentre 0,1 et 0,8 %"

POLITICORAMA

"La nuit, il n’y a que lescommissariats qui sontouverts. Les centressociaux ont les mêmeshoraires quePôle Emploi."

DÉPARTEMENTALESAymeric Chaupradeinvité des candidats FNDans le cadre de la campagnedes élections départementales,les candidats des trois cantonsd’Avignon-Montfavet-Moriè-res organisent une conféren-ce-débat en présence du dépu-té européen Aymeric Chaupra-de, autour de la thématique "Ledépartement : l’enjeu de la proxi-mité face à la mondialisation".La soirée est programmée cevendredi à 19 heures au restau-rant "Les 2 J et Cie", à Agroparc.La veille c’est le conseiller géné-ral FN de Brignoles, Laurent Lo-pez qui sera présent à Monteuxpour une rencontre militante.

Nicolas Dupont-Aignanlance la campagne avecses candidats enVaucluseLe président de "Debout laF r a n c e " , N i c o l a s D u -pont-Aignan, sera en Vauclusece jeudi pour une présentationde ses candidats aux prochai-nes élections départementaleset des soutiens que le parti ap-portera, notamment dans lehaut Vaucluse. Le délégué dé-partemental Olivier Baudry de-vrait faire partie des préten-dants avec Martine Furioli --avec qui il avait monté une listepour les sénatoriales -- sur l’undes trois cantons avignonnais.Il se pourrait aussi que l’on re-trouve parmi les suppléants uncertain Patrick Bassot, élu en2011 conseiller général du can-ton de Carpentras Nord sousl’étiquette FN, qui n’est plus ad-hérent du parti et ne siège plusà l’assemblée départementale.

Le candidat AkimMimoun n’a pas été "misde côté" par Pape DioufDans le canton 1 d’Avignon,Akim Mimoun, contrôleurSNCF de son état, est candidatsous la bannière du mouve-ment citoyen "Changer la don-ne" fondé à Marseille par PapeDiouf. Lors des municipales demars 2014, Akim Mimoun figu-rait en 11e position sur une deslistes présentées par l’ex-pa-tron de l’OM dans les quartiersnord. Il n’a pas été mis à l’écart,comme nous avons pu l’écrire.Ce n’est qu’après le retrait dePape Diouf, au lendemain dupremier tour, que cet Avignon-nais est revenu dans le Vauclu-se pour faire pendant quelquesjours la campagne de l’UMPBernard Chaussegros, qui af-frontait Cécile Helle et PhilippeLottiaux en triangulaires à Avi-gnon. Akim Mimoun conservede bonnes relations avec PapeDiouf, qui devrait venir soute-nir sa candidature lors d’unmeeting en mars.

5Mardi 10 Février 2015www.laprovence.com

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Courrier de Atlas

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Courrier de Atlas

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Observatoire International

des prisons.

Dedans / dehors

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Octobre 2014

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En France, on a les jeunes qu’on mérite"

I N T É G R A T I O N S O C I A L E E T É C O N O M I Q U E / D I S C R I M I N A T I O N : : P O R T R A I T

Publié le 24/02/2015

Entretien avec Yazid Kherfi par Mustapha Harzoune

20h, un drôle de camping-car entre dans la cité. Chamarré de jaune, de vert et de rouge, de dessins et de citations, il se repère de loin.

On peut y lire "fraternité", "pouvoir d’agir", "non violence", "partage". On peut y voir deux poings, un noir et un blanc, se toucher. Sur

son flanc droit, une citation de Martin Luther King : "Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous allons

mourir tous ensemble comme des idiots".

Au volant, bonnet visé sur le crâne en ce début d’hiver, Yazid Kherfi cherche où stationner. Il lui faut aussi l’espace suffisant pour installer

trois grandes tables pliantes. En général, il est attendu par les services municipaux ou les animateurs d’un centre social de proximité.

Parfois par les responsables d’une association du cru. Les officiels viendront plus tard. Réglé comme une partition, il lui faut quelques

minutes pour exécuter son ballet : store du camion déployé, table et bancs alignés, plateau garni de plusieurs dizaines de verres à thé en

signe d’hospitalité, énorme thermos de thé à la menthe fait maison, sans oublier quelques sucreries et gourmandises, des jeux de société

et autre documentation. Avant tout, Yazid a pris soin de brancher sa puissante enceinte sono portable. Armé d’une demi-douzaine de clef

USB, il fera entendre tout au long de la soirée ses enregistrements, eux aussi faits maison : funk ou soul des années 70/80, chansons

françaises, raï ou kabyle, Zebda, HK et autres artistes nés à la confluence de plusieurs cultures et genres musicaux.

Yazid est prêt. Depuis 2012, plusieurs soirs par semaine, Yazid pose son "local à roulette" dans les cités de France, les plus chaudes comme

les plus tranquilles, autour de Paris ou en province

Les premiers curieux s’approchent, intrigués par cet OVNI qui a atterri au pied de leurs tours ou entre deux barres. "Un verre de thé ?"

propose Yazid. "Pourquoi pas ?" ou "oui merci" quand ce n’est pas les animateurs et autres éducateurs du lieu qui alpaguent le voisinage :

"Eh ! Mamadou vient prendre un verre" ou "Allez les jeunes, restez pas dans votre coin, venez !"… Et c’est parti jusqu’à minuit, parfois plus

tard. Ici on est obligé à rien. La discussion peut-être légère ou plus intime. On peut s’asseoir quelques minutes et siroter son verre de thé,

comme rester toute la soirée. Les plus à l’aise parlent devant tout le monde, d’autres préfèrent un aparté avec Yazid. Il y a les tchatcheurs,

les réfléchis, les "vedettes" locales, les nerveux que l’on reverra trois quatre fois dans la soirée, occupés par monts et par vaux, les sportifs

qui rentrent de l’entrainement, les rois de la débrouille et de l’embrouille, les timides qui repartent comme ils sont arrivés, sur la pointe

des pieds, les calmes, les "politiques" qui posent un regard affuté sur la situation, ceux qui travaillent et ceux qui galèrent, ceux qui passent

par la case prison et ceux qui regardent l’horizon, loin par dessus les murs de la cité. Il y a la force et l’énergie de la jeunesse, il y a aussi la

détresse et les ombres du désœuvrement et de l’abandon. Celles des désillusions, déjà ! Les plus jeunes entrent dans l’adolescence, les

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aînés viennent de dépasser la trentaine. En passant, quelques parents rejoignent le groupe. L’humanité ici est bigarrée. Pas de filles en

revanche, ou si peu.

Retisser du lien

L'affluence d’un soir peut laisser place, le lendemain, au turn-over. A Bondy, du côté de la cité Blanqui, les jeunes sont venus nombreux.

Soirée de ramadan oblige, la rupture du jeun s’est faite autour d’une chorba préparée par l’épouse d’un responsable de centre social. A

Villeneuve Saint Georges, la responsable d’une association locale a préparé quelques beignets façon africaine. L’hospitalité n’est pas à sens

unique. L’un des nombreux objectifs de cette médiation nomade consiste justement à (re)tisser du lien, d’abord en venant rencontrer des

jeunes qui sont parfois en rupture, en invitant aussi autour de la table des travailleurs sociaux, des étudiants, des journalistes, et même des

policiers. Retisser un lien entre les jeunes et les adultes, entre les jeunes et la société.

Il faut "créer des espaces de parole, occuper l’espace public, la nuit, quand les plus jeunes sont livrés à eux-mêmes et oublié des adultes"

martèle Yazid. De certains adultes du moins. D’où l’urgence de "mettre des gens honnêtes au milieu de personnes qui ne font pas très bien".

Et le faire la nuit. Pour cela il faut remiser ses préjugés et dompter ses peurs. "Pour vaincre la peur il faut y aller, c’est ce qu’on appelle le

courage. Et puis on s’aperçoit que les personnes qui occupent l’espace public ce ne sont pas des monstres, ce sont avant tout des humains".

"Il faut se méfier du silence" dit Yazid. Même "la violence est encore un signe d’espoir, une marque de volonté" alors que le silence cache le

réel, dissimule des drames humains et psychologiques lourds, maquille une détresse invisible. C’est à l’ombre du silence que croissent les

faux refuges et les vraies impasses. Le caïd comme l’extrémiste ne brûlent pas de voitures eux… Les politiques quantophrènes dressent des

autels au chiffre-roi mais restent aveugles. "Le thermomètre c’est le nombre de voitures qui brûle, mais ils n’ont pas compris [les élus] que

les jeunes vont beaucoup plus mal. On va vers une société où il y aura de plus en plus de silence et les gens se réfugieront dans un monde

parallèle. C’est là que le danger sera plus important. C’est ce qui peut développer du terrorisme, ou de l’extrémisme".

Parler, parler et… écouter

La médiation nomade n’a pas pour objectif de plomber l’ambiance, encore moins de charger les participants - habitants du lieu ou invités

d’un soir - du poids démesuré d’une quelconque responsabilité. Il s’agit plutôt de partager, le temps de deux ou trois rencontres, un

moment de convivialité, de découvertes, un moment où la parole, toutes les paroles, servent de ferments pour renouer avec l’autre. "Je

pars du principe que la parole c’est plus fort que la violence. Il y a souvent de la violence dans les quartiers parce qu’il n’y a pas de parole".

Parler pour changer les regards, pour se comprendre, pour agir autrement, pour faire reculer le silence. Parler, encore et toujours, mais

surtout… écouter ! "Je dis aux adultes "taisez-vous écoutez ce qu’ils ont à nous dire". Qu’on aime ou pas il faut d’abord écouter leur parole",

car "on ne nait pas délinquant, on le devient". A ce stade, Yazid Kherfi, renverse toutes nos certitudes : "J’ai compris qu’avant d’aider les

jeunes dans les quartiers, il faut d’abord aider les adultes. Tant qu’on a pas régler le problème chez les adultes, on ne règlera pas le

problème des jeunes. En France, on a les jeunes qu’on mérite".

Depuis 1988, au détour de la trentaine, Yazid Kherfi s’est donné pour mission d’aider les jeunes des cités et expliquer aux adultes le

cheminement de la violence et de la délinquance. Et Yazid Kherfi sait de quoi il parle, il en a goûté. Le gamin de Mantes-La-Jolie a joué avec

le feu. Dangereusement. Pour cela, il a écopé de plusieurs années de prison. Avec les vrais et les faux durs des cités, il n’affiche pas ce passé

au revers de sa boutonnière. Il n’en fait pas une gloriole. "On ne réussit pas dans la délinquance, on finit en prison" affirme t-il. Et pourtant,

"ce n’est pas parce que tu as été un ancien délinquant que tu ne peux pas t’en sortir. Il faut faire des choix. Après cela ne suffit pas, il faut

faire des études". La compétence et la légitimité, Yazid Kherfi les doit à son expérience professionnelle, en tant qu’animateur social,

éducateur, professeur et spécialiste des questions de sécurité : "Je n’ai pas besoin d’afficher que je suis un ancien détenu. Non, j’ai de

l’expérience, je connais les quartiers, je connais la nuit, je connais la violence, je connais les rapports jeunes/police…" Et s’il en vient à

évoquer son passé de délinquant, c’est pour responsabiliser les jeunes avec qui il discute, dire que chacun a le choix, à commencer celui de

refuser de jouer la victime. Il pousse les uns et les autres à recycler leurs compétences et à s’engager sur un chemin de résilience.

Pour poursuivre ce travail de fourmi, continuer à arpenter le terrain et se gorger de colère quand tout semble parfois se dégrader, "il faut

aimer les gens" dit Yazid Kherfi qui ose, comme un Toumi Djaïdja, évoquer "l’amour". L’un et l’autre ne cachent pas leur aversion pour le

système et les politiques. Ils continuent de "croire en l’être humain".

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