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1 REDECOUVRONS L’EGLISE UNIVERSELLE George Winston INTRODUCTION

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Page 1: REDECOUVRONS L’EGLISE UNIVERSELLE · 2011. 11. 9. · 2 Du petit commencement à l’universel! La première mention dans le Nouveau Testament du mot "Eglise" (ekklesia - Mat.16:18)

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REDECOUVRONS L’EGLISE UNIVERSELLE

George Winston INTRODUCTION

Page 2: REDECOUVRONS L’EGLISE UNIVERSELLE · 2011. 11. 9. · 2 Du petit commencement à l’universel! La première mention dans le Nouveau Testament du mot "Eglise" (ekklesia - Mat.16:18)

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Du petit commencement à l’universel! La première mention dans le Nouveau Testament du mot "Eglise" (ekklesia - Mat.16:18) fut cette prédiction étonnante de sa construction, faite il y a deux mille ans par un homme de naissance obscure dans un coin retiré de l'empire romain, en présence d'un petit cercle d'amis, "hommes du peuple sans instruction". Paradoxalement, au moment-même de leur dire: “Je bâtirai mon Eglise, et les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle”, Jésus prédit aussi sa mort prochaine. Et, en effet, quelques mois plus tard, l'opposition des milieux religieux conduirait à son exécution par les autorités civiles. Tout s'opposait, à ce moment-là, à l'accomplissement de cette prophétie, présomptueuse en apparence. Du vulnérable à l’indestructible! Mais Jésus tiendrait promesse, appellerait cette Eglise à être et, malgré ces petits commencements, mènerait à bien dans le monde un rassemblement invincible par la mort et l’enfer. Aujourd'hui, vingt siècles plus tard, des chrétiens se réunissent dans les endroits les plus reculés de tous les pays de notre boule terrestre. Le christianisme est le seul mouvement, l’unique religion à compter des adhérents dans les 238 pays du monde. L’Eglise exerce une influence sur un tiers de la population du globe. Deux des six milliards de ses habitants se réclament d'une façon ou d'une autre du christianisme (David B. Barrett dans l'I.B.M.R., janvier 2002). Mais cette différence entre l’ensemble des chrétiens qui partagent une vie communautaire d’une part et les nombreux millions qui se bornent à subir une influence chrétienne d’autre part, pose d’emblée la question d’une définition de ce qu’est l’Eglise. Qu’est-ce que l'Eglise? Escamoter cette question provient, soit de l'impression d'en connaître la réponse considérée comme évidente, soit du désespoir d'arriver jamais à une définition satisfaisante. Certains pensent que leur Eglise correspond au modèle biblique. D'autres diront avec le pasteur J.P. Benoît: ""A notre connaissance, jamais personne n'a défini ce qu'est l'Eglise" (Dénominations et Sectes, Ed. Les Bergers et les Mages (1965, p.7). On a cherché, par le passé, à résoudre le problème sur des bases pragmatiques. Et on demande encore aujourd'hui quelles structures seraient les plus aptes à arriver aux fins qu'on se propose. Notre propos dans cet ouvrage sera double: d'abord de réexaminer ce que le Seigneur de l'Eglise en dit dans l'Ecriture pour nous faire une idée qui corresponde le mieux aux données bibliques. Mais en même temps de voir comment cette révélation rend compte de la réalité sociologique qu'est la collectivité chrétienne dans sa totalité. Il faut considérer la scène religieuse dans le monde du point de vue de Dieu pour y voir clair et pouvoir agir en conséquence. Certes, un tel effort n'en vaudrait pas la peine si notre seul but était d'être théologiquement correct ou de prouver la justesse d'un modèle existant. Par contre, il se justifierait largement s'il pouvait contribuer à faire prospérer l'Eglise universelle et en resserrer les liens véritables, ainsi qu'à implanter de nouvelles communautés locales là où il en manque. Les épîtres du Nouveau Testament s’adressent directement aux croyants des Eglises et accessoirement à leurs conducteurs. Pour que les vérités qu’elles contiennent aient leur effet, il fallait que chacun se sache concerné par cet enseignement et que tous puissent le comprendre. C’est ainsi que nous adressons la doctrine de l’Eglise développée dans ces pages aux membres de l’Eglise plutôt qu’aux théologiens. Nous voulons ce livre rigoureux, mais aussi accessible et pratique. L'Eglise est-elle donc: - tous les baptisés? - les élus à travers les âges? - le prolongement et le remplacement d’Israël? - le Conseil Mondial des Eglises? - la chrétienté? - une institution ecclésiastique particulière?

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- l'assemblée locale? - la hiérarchie catholique romaine? - une réalité mystique et intangible? - l'une ou l'autre dénomination ou secte? - etc. Donner au mot «ekklesia» un sens autre que sa signification biblique sera toujours au détriment de la vie de l'Eglise et de l'accomplissement de sa mission dans le monde. Nous entendons par le mot “institution”, souvent repris dans cet ouvrage, les superstructures ecclésiastiques permanentes, au dessus du niveau de la communauté locale. C’est à dire. les confessions ou dénominations catholique, orthodoxe, anglicane, luthérienne, réformée, baptiste, méthodiste, pentecôtiste, etc. Il ne faut pas confondre le terme “institution” avec le mot “office” qui désigne une fonction spéciale, une charge ecclésiale. Notre propos, dans cet ouvrage, n’est pas de remettre en question les charges officielles, organes de direction au sein des Eglises locales. Au contraire, nous confirmons ceux-ci dans les attributions que leur confère l’Ecriture. Leurs prérogatives ont été largement usurpées par les hiérarchies institutionnelles. En même temps, ces dernières, véritables pyramides de pouvoir, ont profondément divisé la chrétienté. Pourquoi certaines Eglises sont-elles telles qu'elles sont? L'Eglise des premières générations n'a pas cherché à formuler une définition claire de ce qu'elle était. Elle se satisfaisait de prospérer et de grandir. Elle était consciente d'elle-même comme une personne en bonne santé est consciente de son corps. Mais, au gré de son expansion, elle s'est trouvée confrontée à une variété de milieux, de cultures et de peuples. Elle a dû chaque fois tenir compte des divers lieux où elle s'implantait par une multitude de réglages et d’accommodements différents. Il fallait qu'elle devienne autochtone dans toutes les cultures où elle s'implanterait, qu'elle trouve la parade à des attaques diverses contre la vérité en provenance de l'extérieur, et à la menace de divisions et d'entorses à la moralité à l'intérieur. En général, ces ajustements ne découlèrent guère d'une réflexion théologique, d'une induction tant soit peu complète des déclarations de Jésus et de ses apôtres au sujet de l'Eglise. Elles furent le fruit d'improvisations plus ou moins heureuses. Par conséquent, il n'est guère surprenant que, très tôt, des différences de pensée importantes sont apparues quant à la nature, les formes et la vie de l'Eglise, différences qui ne firent que s'accentuer et se multiplier à travers le monde et au cours des siècles jusqu'à ce jour. CHAPITRE 1 L’APPROCHE

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Comment a-t-on parfois procédé pour formuler une doctrine de l'Eglise? Plus tard, quand on a traité de l'Eglise dans la théologie, une tendance fréquente s'est révélée de prendre comme modèles, les Eglises dont les divers auteurs faisaient eux-mêmes partie. Ils ont écrit des ecclésiologies qui se résumaient à des descriptions et des justifications de leur type d'Eglise à eux. D'ailleurs, proposer un autre modèle aurait manqué de loyauté de leur part envers une institution à laquelle ils étaient attachés par les sentiments, voir par la rémunération. Certains théologiens en vinrent même à prétendre que, l'Esprit Saint étant agissant dans l'Eglise, leur institution telle qu'elle était, était forcément l'Eglise telle qu'elle devait être. Il s'en suivit qu'il existe aujourd'hui plusieurs milliers de dénominations chrétiennes différentes dans le monde, chacune défendant ses propres particularités. La difficulté est devenue grande de trouver une unité de pensée sur la question. Comment donc avoir une discussion fructueuse sur l'Eglise quand les interlocuteurs se font chacun une représentation mentale différente tout en prononçant le même mot «Eglise». D'autres ont prétendu qu'en fin de compte, l'Ecriture n'a pas tant que cela à dire sur l'Eglise; qu'il n'était aucunement dans l'intention de Dieu de révéler un modèle unique d'application universelle à travers les siècles; mais qu'il a voulu laisser à l'Eglise la liberté de développer ses propres formes au gré des circonstances et des époques. On entend généralement une telle remarque dans la bouche de celui qui cherche à faire accepter une idée ou une pratique dans l’Eglise qui va manifestement à l’encontre de l’une ou l’autre donnée biblique. Il est une évidence: Jésus n'a laissé ni plan ni organigramme pour une institution à l'échelle mondiale. Pourtant, il ne s'en suit pas que la Bible est silencieuse, avare de détails ou imprécise sur la constitution de l’Eglise. Il suffit de commencer par une exégèse des 117 mentions du mot ekklesia dans le Nouveau Testament et de poursuivre par une étude des huit images principales par lesquelles celle-ci y est représentée, pour se rendre compte à quel point l'Ecriture présente une révélation abondante et précise concernant la nature, la structuration, le développement, le rôle, la vie et la destinée de l'Eglise. La façon d'édifier l'Eglise est-elle laissée à la discrétion des bâtisseurs? Dieu se révèle en être le Créateur, et également l’architecte. Il s'est proposé, à quatre occasions, de se faire bâtir une habitation sur la terre. Trois de ces édifices sont décrits dans l'Ancien Testament: le tabernacle au désert, le temple à Jérusalem et le temple prédit par Ezéchiel. Si ces trois maisons devaient être différentes l'une de l'autre, leur construction a suivi un même processus: 1) Ces édifices furent tous les trois l'objet d'une révélation divine et non le fruit ni d'une initiative ni d'une conception humaine. «L'Eternel parla à Moïse et dit...vous ferez le tabernacle...d'après le modèle que je vais te montrer» (Ex.25:9). «David donna à Salomon le plan de tout ce qui lui avait été révélé par l'Esprit touchant...la maison de l'Eternel» (1 Chron.28:12). «L'Eternel dit à Ezéchiel:..montre ce temple à la maison d'Israël; qu'ils en mesurent le plan» (Ez.43:7,10). Dans les trois cas, Dieu donna un seul projet, par avance. 2) Cette révélation prenait chaque fois la forme d'un modèle, d'un plan détaillé dont la description s'étalait sur plusieurs chapitres dans les contextes de chacun des trois passages cités plus haut. 3) Les plans furent révélés une fois pour toutes à des entrepreneurs, à Moïse, à David et à Ezéchiel. La construction n'était pas laissée au bon gré des nombreux bâtisseurs qui oeuvreraient par la suite. 4) Ces édifices devaient tous les trois permettre à Dieu d'habiter parmi son peuple et devaient être dignes de lui. L'Eternel parla à Moïse et dit: Ils me feront un sanctuaire et j'habiterai au milieu d'eux» (Ex.25:8). Pour le temple de Salomon, voir 1 Rois 8:11-12 et pour celui d'Ezéchiel, Ez.43:4,7). 5) Un ordre formel fut donné de se conformer au plan dans l'exécution de ces ouvrages. «Tu

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dresseras le tabernacle d'après le modèle qui t'est montré sur la montagne» (Ex.26:30). «L'Eternel dit à Ezéchiel:..Mets la description de cette maison sous leurs yeux, afin qu'ils gardent tous ses dessins...et qu'ils s'y conforment dans l'exécution» (Ez.43:7;11). Il en est de même de la quatrième habitation de Dieu sur terre, mentionnée dans la Bible, l'Eglise de Jésus-Christ. Elle fit l’objet d’une révélation, consignée dans l’Ecriture, confiée à des entrepreneurs, qui devaient suivre le plan pour la constuction de la maison de Dieu. 1) Le Nouveau Testament étant d'inspiration divine (2 Tim.3:16; 2 Pi.1:21; 3:15,16), tout ce qu'il enseigne au sujet de l'Eglise est une révélation de l'Esprit Saint quant à sa constitution. 2) Des prescriptions détaillées sur l'Eglise nous sont données par le biais des paroles de Jésus, de la façon dont les apôtres implantaient de nouvelles Eglises, des enseignements des épîtres sur la vie des Eglises locales auxquelles elles étaient adressées, de la vie communautaire des premiers chrétiens, des relations de ces communautés entre elles et avec le monde qui les entourait, etc. Près d'un cinquième du texte du Nouveau Testament y est consacré et permet de se faire une idée précise de l'intention de Dieu à son égard. 3) Les plans de l'Eglise furent confiés dès le début à des entrepreneurs choisis par Jésus, lui-même étant le Maître d'oeuvre. Ce furent ses apôtres ainsi que les autres auteurs inspirés du Nouveau Testament. 4) L'Eglise devait permettre à Dieu d'habiter parmi son peuple et serait, de ce fait, inviolable. L'apôtre Paul s'en prenait aux divisions qui menaçaient l’Eglise à Corinthe. Il écrivait à cette communauté: «Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l'Esprit de Dieu habite en vous? Si quelqu'un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira; car le temple de Dieu est saint, et c'est ce que vous êtes» (1 Cor.3:16-17). 5) Un ordre formel fut donné à cette même Eglise de se conformer aux instructions données au sujet de la tenue dans les réunions (1 Cor.11:2-16), de la célébration du repas du Seigneur (11:17-25), de l’exercice des dons spirituels (12-14), de l'amour à entretenir entre frères (13:1-13), et de l'ordre à maintenir dans les cultes (14:1-39). Paul boucle tout cet enseignement sur l’Eglise par un avertissement à ceux qui penseraient pouvoir agir autrement: «Si quelqu'un se croit prophète ou inspiré par l'Esprit, qu'il reconnaisse que ce que je vous écris est un commandement du Seigneur» (14:37 Jérus). “Mais s’il ne le reconnaît pas, qu’on ne tienne pas compte de lui” (v.38 BFC). 6) Paul donne également des ordres aux implanteurs d’Eglises, Timothée et Tite, au sujet des structures à mettre en place en établissant des personnes compétentes dans les charges ecclésiastiques d’ancien et de diacre (1 Tim.3:1-15; Tite 1:5-9). Il ne les laisse pas organiser les Eglises au gré des circonstances du moment, des cultures locales ou de leur propre jugement. Il précise à Timothée la raison de tous ces impératifs: “Je t’écris ces choses, avec l’espérance d’aller bientôt vers toi; mais si je tarde, tu sauras comment il faut te conduire dans la maison de Dieu, qui est l’Eglise du Dieu vivant” (v.15). Et à Tite: “Je t’ai laissé en Crète afin que tu achèves d’organiser ce qui doit l’être encore et que tu établisses des anciens d’Eglise dans chaque ville. Rapelle-toi les instructions que je t’ai données” (v.5). Il s’agit donc bien d’instructions concernant l’organisation des Eglises locales. Ces instructions ne sont pas facultatives et ne changent donc pas selon le contexte socio-culturel. C'est dans l'Ecriture que Dieu a consigné les détails de chacun des modèles à suivre pour bâtir ces quatre temples. Par conséquent, nous chercherons à nous conformer aux plans pour l'Eglise que nous propose la Bible, à l'exclusion de toute autre dessin. Nous considérons l’Ecriture comme divinement inspirée, entièrement digne de foi dans les textes originaux, autorité souveraine en matière de doctrine et de pratique. Nous sommes en bonne compagnie dans cette conviction:

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Tertulien (160-230): “Dieu nous a donné l’Ecriture afin que nous parvenions à une connaissance plus farfaite et plus pénétrante, tant de lui-même que de sa volonté”. Origène (185-254): “Dieu veut que nous accomplissions tout ce qui est écrit: Sondez les Ecritures”. Athanase (296-373): “Les Ecritures saintes et divines sont suffisantes pour démontrer la vérité”. Basile (329-379): “Rejeter quelque chose qui se trouve dans l’Ecriture, ou admettre des choses qui n’y sont pas, c’est une marque évidente d’infidélité; c’est un acte d’orgueil”. Jerôme (331-420): “Les livres canoniques nous transmettent la doctrine de l’Esprit...Tout ce qui s’enseigne sans l’autorité et sans le témoignage des Ecritures sous prétexte de tradition apostolique, est frappé de l’épée de Dieu”. Ambroise (340-397): “Qui osera parler quand l’Ecriture se tait?... Si vous y ajoutez, ou en ôtez quelque chose, vous êtes coupable de prévarication”. Chrysostome (347-407): “Ceux qui veulent connaître quelle est la vraie Eglise ne le peuvent que par les Ecritures”. Augustin (354-430): “La foi périclite sitôt que l’autorité de l’Ecriture chancelle...Ne nous basons pas, ni sur ce que je dis, ni sur ce que vous dites; mais sur ce que dit le Seigneur...Lorsque les évêques catholiques émettent une opinion qui va à l’encontre des Ecrits canoniques de Dieu, il n’est pas nécessaire de penser comme eux”. LEglise serait-elle sa propre norme? Mais plus tard, l’institution ne suivra pas les pères de l’Eglise dans leur soumission à l’Ecriture. Elle avancera plusieurs prétentions au sujet de la relation entre l’autorité de la Bible et celle de l’institution romaine. Les sept revendications suivantes sont tirées du Catéchisme de l’Eglise Catholique de 1992 et de Bellarmin: Lib. II, de Conciliis, c.12 . (1) L’institution catholique, en les personnes des apôtres, a précédé la Bible. Mais les apôtres, évidemment, n’ont pas précédé l’Ancien Testament. Aussi, Jésus a donné une partie importante de son enseignement avant de choisir les apôtres et indépendamment d’eux (Mat.1-9; Luc 1:1-6:11). L’institution romaine en tant que telle ne peut guère être rendue identique aux apôtres. Pour affirmer sa priorité, Rome s’appuie à sa façon sur les paroles des apôtres. Mais où va-t-elle chercher le rapport incontestable des paroles apostoliques, sinon dans les Evangiles et les Epîtres, c.à.d. dans la Bible? (2) L’Ecriture est le produit de l’institution Romaine, qui a priorité sur elle Mais “Les révélations de Dieu ont été confiées aux Juifs” (Rom.3:2 TOB). Il s’agit de l’Ancien Testament. Celui-ci n’a donc pas été produit par l’institution romaine. Des parties importantes du Nouveau Testament tels Marc, Luc et Actes, n’ont pas été écrites par un apôtre. Elles tiennent leur autorité de leur inspiration par l’Esprit Saint (2 Tim.3:16), non pas de l’institution. On peut dire, tout au plus, que les paroles du Christ ont été transmises par les apôtres et non pas qu’elles ont été produites par eux ou émanaient d’eux. Les sept lettres du Christ adressées directement aux sept Eglises d’Asie Mineure et recueillies dans le dernier livre de la Bible (Apoc. 2:1-3:22), n’étaient pas des émanation ou le produit de ces Eglises et encore moins de celle de Rome. (3) C’est donc l’institution qui confère légitimité et autorité à l’Ecriture et non le contraire Luc fait l’éloge des Béréens parce qu’ils soumettaient les paroles de l’apôtre Paul au test des Ecritures de l’Ancien Testament. “Ceux-ci avaient de meilleurs sentiments que les Juifs de Thessalonique; ils reçurent la parole avec beaucoup de bonne volonté. Chaque jour ils étudiaient les Ecritures pour vérifier l’exactitude des propos de Paul”(Act.17:11 BFC). C’est donc l’A.T. qui devait confirmer la légitimité de la parole apostolique et non le contraire. A plus forte raison l’institution devrait-elle dépendre de la Bible pour pouvoir prétendre à une autorité quelconque.

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(4) L’autorité des apôtres est transmise aux évêques sans interruption, par imposition des mains Les institutions romaines, orthodoxes et anglicanes se prévalent toutes les trois de cette même “succession apostolique” sans être d’accord entre elles sur la doctrine. Mais l’apostolicité n’est pas authentique, sinon dans la mesure où elle est fidèle aux paroles certaines des apôtres. La notion institutionnelle d’une succession de personnes ne vient pas du Christ, mais de la conception juridique romaine qui fait de la succession légitime dans l’office, la marque de la continuité légale. Mais il suffit d’un seul chainon manquant ou déficient pour que tout l’échaffaudage s’écroule. L’histoire de l’institution montre à l’envi le caractère précaire de cette construction. Papes et anti-papes, appuyés par collèges de cardinaux rivaux s’excommunient mutellement, etc. (5) L’institution ne peut donc errer et il appartient à son seul magistère d’interpréter la Bible Pierre a erré plus d’une fois sur “la vérité de l’Evangile” (Mat.16:22,23; Gal.11-14). Paul avertit l’Eglise: “Du milieu même de vous se lèveront des hommes qui tiendront des discours pervers” (Act.20:30 Jérus.) Le catholicisme ferait-il exception à cette prophétie? Le Christ adresse des reproches à six des sept Eglises d’Asie et signale la présence parmi elles de faux docteurs et de “ceux qui se disent apôtres et ne le sont pas” (Apoc.2-3). Comment une institution imparfaite serait-elle infaillible dans ses déclarations et dans ses interpretations de l’Ecriture? Ses errements moraux et doctrinaux incontestables n’entameraient-ils en rien l’autorité de son prétendu “magistère”? (6) La tradition repose sur les paroles du Christ non-consignées dans l’Ecriture mais confiées oralement aux initiés, les apôtres. Elle fut infailliblement transmise de génération en génération dans la tradition devenue écrite et le consensus de l’institution. Est tradition ce que le pape déclare l’être. En vertu de cette reconnaissance, toute tradition a une autorité égale à celle de l’Ecriture. Mais l’enseignement du Christ n’avait rien d’ésotérique pour les seuls initiés. Il déclare: “J’ai parlé ouvertement au monde...je n’ai rien dit en secret” (Jean 18:20). Ses apôtres suivirent son exemple: “Ils ne cessaient d’enseigneur chaque jour dans le temple” (Act.5:42) et Paul décrit son ministère à Ephèse: “Je ne vous ai rien caché de ce qui vous était utile et je n’ai pas craint de vous prêcher et de vous enseigner publiquement” (Act.20:20,21). Prétendre qu’il éxistait un corpus doctrinal apostolique secret hors Nouveau Testament ne repose sur aucun fait. Toutes les nouveautés, tels les dogmes de l’assomption de Marie et de l’infaillibilité pontificale promulgés au 19e siècle, seraient- elles donc venues en droite ligne des apôtres et sans modification aucune au cours de vingt siècles, par le bouche-à-oreille? (7) La doctrine de l’institution au sujet de l’Eglise est la seule vraie parce que c’est l’institution qui l’enseigne. Ces affirmations du catholicisme présument ce qui est encore à prouver. Il s’agit d’un argument circulaire. C’est l’exemple-type de la pétition de principe, de l’arbitraire. Situer l’Eglise sous l’Ecriture favorise un retour aux sources permanent, permet à l’Eglise de se laisser juger par l’Ecriture et à préserver la simplicité évangélique. Situer l’institution au-dessus de l’Ecriture la rend orgueilleuse, inaccessible aux vérifications et remises en question, et imperméable à tout examen ou contrôle impartial et extérieur à elle-même. Mais les institutions romaine, orthodoxes et anglicanes ne sont pas les seules à imposer à l’Eglise les normes de leurs propres traditions. La notion-même d’institution ecclésiastique a été reprise du catholicisme par plusieurs mouvements issus de la réforme, sans discernement. Certaines dénominations se réfèrent à leurs fondateurs (Luther, Calvin, Wesley, etc.) en plus de l’Ecriture pour justifier la forme de leur organisation. Quand les thèses de licence et de doctorat en théologie portent d’avantage sur l’enseignement de tel fondateur, de tel théologien, ou sur les décisions de tel

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synode, plutôt que sur le texte Biblique lui-même, les traditions théologiques s’interposent entre l’Ecriture et l’Eglise. Les pratiques vénérables qui en découlent deviennent tenaces. Elles constituent à la longue une autorité incontestée au sein de telle ou telle institution protestante ainsi qu’un des plus grands obstacles à l’unité entre vrais chrétiens. Les Pays-bas comptent 29 dénominations réformées différentes (sans compter les luthériennes, baptistes, pentecotistes, etc) qui chacune justifie son existence propre et ses particularités par un appel à tel synode ou tel théologien. La Corée du Sud compte 37 dénominations presbytériennes différentes, chacune ayant ses propres particularités. Quelle démarche adopter pour découvrir l’enseignement de l’Ecriture sur l’Eglise? La question n’est donc pas: “Qui interprète? Mon institution, ou ton institution?” Mais comment interprète-t-on? Pour dégager le témoignage biblique sur cette question, de la façon la plus fidèle, complète et profitable possible, nous nous sommes efforcés de: - Nous en tenir autant que possible aux déclarations explicites des textes; laisser parler la Bible. - Eviter d’avoir recours à des déductions, des analogies, des abstractions, des spéculations. - Respecter le vocabulaire biblique; ne pas donner à un terme un sens autre que celui qu’il a dans son contexte. Se placer sous la Bible; ne pas la prendre de haut. Faire de la théologie exégétique. - Rechercher l’intention de l’auteur et non pas tout sens que le texte pourrait supporter. - Eviter de faire intervenir des présupposés philosophiques, dogmatiques, herméneutiques, etc. - Interpréter selon une méthode historico-grammaticale. Traiter comme historiques, à l’exemple de Jésus et les apôtres, les récits qui se présentent comme tels dans l’Ecriture. - Eviter une lecture “bêtement” littérale. Mais ne pas traiter hâtivement de “symbolique” une déclaration gênante avant d’avoir bien déterminé le style du texte, en se basant sur des critères littéraires objectifs. Est-il historique, épistolaire, allégorique, apocalyptique, didactique, parabolique, etc.? En l’absence d’une figure de style évidente, lui laisser son sens propre. - Lire la Bible comme Jésus lisait l’Ancien Testament. Faire un usage biblique de la Bible. -Chercher dans l’Ecriture la totalité des affirmations directes sur la question selon l’analogie de la foi. - Tenir compte des interprétations des docteurs qui furent des hommes de Dieu et édifièrent l’Eglise. - Découvrir une vue d’ensemble cohérente sur chaque sujet, en puisant, comme Jésus, dans toutes les différentes parties de l’Ecriture (Luc 24:27,44), étant convaincu, comme lui, de l’unité de la Bible. - Savoir que “nous connaissons en partie”(1Cor.13:9). Ne pas “aller au-delà de ce qui est écrit”(4:6). - Tirer de chaque enseignement une application pratique valable. Lire humblement, à genoux, en dépendant des lumières du Saint-Esprit (1Cor.2:9-12). Faire de la théologie de piété, du coeur et de terrain - non en chambre. Tirer des conclusions qui tiennent la route dans la vie et le ministère. L'Eglise universelle et unique peut-elle légitimement se manifester en divers lieux et à diverses époques sous des formes différentes? Cette question est importante étant donné le grand nombre d’aspects sous lesquels les Eglises chrétiennes peuvent se présenter de par le monde. Dieu a voulu que l'Eglise puisse prendre racine dans n'importe quel sol culturel dans le monde entier, tout en restant elle-même. Les diverses manifestations locales de l’Eglise universelle devaient pouvoir se fondre dans les contextes de tous les peuples de la terre et de toutes les époques de l'histoire. Ainsi elles revêtiraient un caractère vraiment indigène et contemporain, partout où elles s'implanteraient et en tout temps . Paul,

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exprimait ce principe missionnaire en ces termes: "Avec les Juifs, j'ai été comme Juif, afin de gagner les Juifs...Avec ceux qui sont sans loi, comme sans loi (quoi que je ne sois point sans la loi de Dieu, étant sous la loi de Christ), afin de gagner ceux qui sont sans loi. J'ai été faible avec les faibles, afin de gagner les faibles. Je me suis fait tout à tous, afin d'en sauver de toute manière quelques-uns" (1 Cor.9:20-22). Comment donc l’apôtre met-il en pratique ce principe sur le terrain? Il parcourt les villes du monde connu, et partout, il loge, mange, travaille et parle longuement avec les gens de l’endroit. Il se conforme autant que possible à leur langue, à leurs coutumes, à leur mentalité. Il s’adresse aux juifs dans la synagogue comme “frères” (Act.13:15) et aux païens à Lystre comme “hommes” (14:15). Il cherche à réduire à zéro la distance culturelle entre lui et eux. Il n’impose pas sa culture à lui. Sécurisé par son identité en Jésus-Christ, il peut devenir un caméléon culturel. Il tient aux Athéniens un discours dépourvu de toute résonnance sémitique et appuye son message par une citation d’un de leurs propres poètes, Aratus (Act.17:28). On dirait aujourd’hui qu’il contextualise son approche. Mais comment fait-il pour éviter le syncrétisme? Le fond doctrinal de ce message, au milieu de l’Aréopage, demeure en tout point biblique (Act.17:22-31). Paul sillonne l’empire romain, mais son message et sa théologie restent les mêmes partout où il va. Où qu’il aille, il “ne veut savoir autre chose que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié” (1 Cor.2:2). L’essence unique et universelle de l’Eglise ne devait être ni altérée ni diluée dans ses innombrables manifestations nationales et locales. Le Juif comme le païen qui reconnaissaient Jésus-Christ comme Seigneur, cessaient, l’un et l’autre d’être ce qu’ils avaient été auparavant. Ils acquéraient une nouvelle identité, car en Christ, il n’y a plus ni Juif ni païen, mais tous sont un Jésus-Christ (Gal.3:28). Pour préserver intact cette identité chrétienne, les églises locales ne pouvaient adopter que ces éléments de la culture ambiante qui seraient doctrinalement, spirituellement, moralement et structurellement compatibles avec la révélation biblique. Paul se borne à adapter sa propre personne, en tant que messager, aux divers contextes culturels (1 Cor.9:20-22). En aucun cas il n’est question pour lui d’une contextualisation de son message, de sa doctrine, de son éthique ou de l’organisation des Eglises locales. En se faisant tout à tous, il ne s’est jamais fait païen au païens, ni idolâtre avec les idolâtres. Il ne modifie aucunement l’Evangile pour le rendre plus acceptable, même quand celui-ci heurte. La Bonne Nouvelle ne ferait qu’y perdre sa puissance: “Nous, nous prêchons Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les païens, mais puissance de Dieu” et cela “sans une supériorité de language ou de sagesse” (1Cor.1:23,24; 2:2). S’il le faut, il n’hésite pas à susciter chez ses auditeurs les réactions et les reproches que tout missionnaire cherche d’habitude à prévenir (“Scandaleux! Une folie! C’est simpliste!”). Car il tient, à tout prix, à préserver l’intégrité du message. Malgré une grande flexibilité dans leur travail d'implantation, les apôtres fondaient de nouvelles communautés qui maintenaient les éléments du modèle de l'Eglise révélés par le Seigneur. Par la suite, l'Eglise a été forte, a prospéré et s'est étendue quand elle est restée intransigeante quant à son essence interne, sa doctrine, sa morale, et les structures des Eglises locales, tout en faisant preuve d'une grande flexibilité sur le plan culturel et des formes extérieures. Les apôtres respectaient les cultures sans les vénérer. Ce christianisme-là ne s’est aucunement accommodé des éléments les moins recommandables des cultures qu’il rencontrait. Il a souvent fait oeuvre de paix parmi des peuplades guerrières, a libéré des esclaves à l’encontre des coutumes, a combattu la pauvreté, les castes, la maladie, le cannibalisme, l’immolation des veuves, la prostitution, l’infanticide, l’analphabétisme, etc.

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Mais les chrétiens n’ont pas toujours su faire la distinction entre l’essence de l’Eglise et ses formes. L’Institution s'est sclérosée quand elle a voulu maintenir à tout prix les traditions religieuses d'une époque révolue ou imposer des modèles juifs, latins, orientaux, ascétiques ou mystiques à des cultures en terre de mission. Ce christianisme-là peut être négatif, intolérant, étroit, misogyne, élitiste, opulent, légaliste. Quand les Eglises ont permis à la succession de courants de pensée, de philosophies, et de structures nouvelles, de porter atteinte à leur essence théologique, spirituelle et dynamique, elles se sont affaiblies, ont perdu leur spécificité et leur moral; elles ont dépéri . L'histoire de l'Eglise nous montre que cet équilibre délicat a été difficile à maintenir. L'Evangile, semence parfaite de l'Eglise universelle, est toujours tombé dans des sols rendus imparfaits par la nature humaine faillible. Le résultat en a été, partout, des Eglises plus ou moins imparfaites. Pourtant, ces différents sols ethniques et culturels ont aussi permis à l'essence unique et universelle de l'Eglise de se manifester d'une grande variété de façons différentes - parfaitement légitimes malgré tout. Voilà ce qui a fait la grande richesse du christianisme, mais aussi sa capacité de tenir et de grandir à travers tous les changements politiques, économiques, philosophiques, sociaux et culturels qui se manifestèrent à travers les siècles. Pour que les Eglises d'aujourd'hui prospèrent et se multiplient, il faut qu'elles soient à la fois doctrinalement et spirituellement immuables et culturellement contemporaines. Ouvertes aux personnes, inaccessibles à l’erreur. Par contre, l'institution ecclésiastique est trop souvent restée culturellement et socialement immuable et fermée, tout en créant de nouveaux dogmes, des structures toujours plus lourdes ou en s’ouvrant à des théologies modernistes ou post-modernes. Les prêtres ouvriers ont voulu rapprocher l’Institution romaine des classes laborieuses et ont reçu un coup de crosse. Jacques Ellul, sociologue, se plaisait à répéter que les classes laborieuses ne se sentiraient jamais chez elles dans l’Eglise Réformée de France parce que celle-ci était et demeurait une institution intellectualiste et de classe. Voyons quelques-unes des différentes formes sous lesquelles les Eglises chrétiennes se sont présentées au cours des siècles. L'Eglise à Jérusalem prit racine dans le sol du judaïsme. On y pratiquait la circoncision (mais non comme nécessaire au salut), on y observait le sabbat ainsi qu'un certain nombre de lois diététiques et cérémonielles de l'Ancien Testament. On y célébrait des fêtes du calendrier juif et certains y faisaient le voeu du naziréat. Elle fut le précurseur des différentes églises sabbatistes et légalistes jusqu’aux communautés de juifs messianiques actuelles. Les Eglises à Rome (Rom.16:5,14,15) auxquelles Paul écrivit, prirent racine dans la capitale de l'empire, pouvoir absolu, hiérarchisé et pyramidal, coiffé par le Pontifex maximus. Au fil du temps, elles prirent tout naturellement la même structure monarchique ainsi qu'un Souverain Pontife presque toujours Italien. Le romanisme finit par englober sous sa tutelle presque toutes les Eglises situées à l'intérieur des frontières de l'empire et leur inculqua la culture latine. Par la suite il étendit son pouvoir en “christianisant” des princes et des rois et en établissant ainsi des Eglises d’Etat. Corinthe était une ville prospère, où foisonnaient philosophies et cultes en tous genres. L'Eglise qui y prit racine connaissait les «enthousiasmes» de ceux-ci et se fit énergique, turbulente, avide de manifestations et de dons spirituels, spontanée dans ses expressions de piété et sensible au monde invisible. Elle annonçait de la sorte le montanisme, les divers courants de prophétisme à travers les siècles jusqu'au mouvement charismatique de nos jours et les Eglises exubérantes d'Afrique. L'Eglise à Thessalonique fut fondée dans une atmosphère d'émeute et de persécution. Il n'est pas étonnant que les deux lettres que Paul lui adressa par la suite furent pleines d'enseignements sur le retour du Christ, dans le but de les encourager à persévérer dans leurs épreuves. A travers les siècles, de nombreuses Eglises minoritaires, persécutées et clandestines - mais non pas uniquement

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celles-là - ont eu une espérance vivante, eschatologique et millénariste, annonçant le retour du Christ pour juger les vivants et les morts à un moment inattendu et sans avertissement, ainsi que l'établissement du règne messianique. En Asie Mineure, les religions de mystère se mélangeaient dans la mouvance du gnosticisme pour la recherche d'une expérience mystique. C'est dans ce terreau que prit racine l'Eglise à Colosse. Paul y oppose un enseignement clair. Mais la doctrine n'a pas empêché les Eglises d'Orient d'être marquées à travers les siècles par le mysticisme, la contemplation et la recherche de l'émotion. L'orthodoxie jusqu'à ce jour a préféré l’insondable en Dieu à sa révélation, sa crainte respectueuse à son amitié, le quiétisme à l'activisme. Jésus dit à l'Eglise à Philadelphie: «Tu as gardé ma parole» (Apoc.3:8). Elle fut le précurseur de tous ses disciples qui s’assirent aux pieds du Maître pour écouter son enseignement: depuis les Eglises biblicistes Lyonnaises sous Irénée, en passant par certaines communautés Augustiniennes jusqu'au moyen âge, mais aussi de dissidents Vaudois, Lollards et Hussites avant la Réforme, ainsi que des Eglises doctrinales Protestantes, piétistes et évangéliques. Les grecs de l'Eglise à Corinthe aimaient la philosophie (1 Cor.1:17-25). Deux siècles plus tard, l'école d'Alexandrie cherchait à marier théologie et philosophie pour les Eglises en Egypte. Platon, Aristote et la Scolastique au Moyen Age, ont profondément marqué le Catholicisme. Et le libéralisme théologique est le fruit de l'influence dans de nombreuses Eglises de systèmes successifs de pensée modernes et d’un certain intellectualisme. Les Mages adorèrent Jésus et s'en retournèrent en Perse, et les Mèdes présents à la Pentecôte rentrèrent chez eux. Ces pays étaient le berceau du dualisme de Zoroastre qui situait le mal dans le corps et le bien dans l'esprit. Les Eglises qui s'y implantèrent en gardèrent une tendance à l'ascétisme et au manichéisme. Celle-ci se répandit à l'Ouest dans le monachisme célibataire, mortifiant et flagellant jusqu'au Carmel, la Trappe et l'Opus Dei, ainsi que dans un certain puritanisme protestant. L’Eglise à Antioche fut le berceau du mouvement missionnaire parmi les païens (Act.13:1-4). De là, Paul et ses collaborateurs, touchèrent en une génération, une grande partie du monde connu. Les Eglises qu’ils fondèrent comme celles à Philippes et à Thessalonique reprirent le flambeau et furent les précurseurs d’une succession d’Eglises à vocation missionnaires à Edesse, Lyon, Alexandrie, Carthage, Milan, Constantinople, Poitiers, et Tours, ainsi que des Eglises syriennes, perses et celtes. Entre les années 500 et 1700 les avancées de la chrétienté furent surtout territotiales. Mais la vision missionnaire fut rallumée parmi certains ordres catholiques, le piétisme allemand, les communautés moraves, les évangéliques en Grande Bretagne et suite aux réveils en Amérique et en Europe. Tous ces mouvements furent marquées par un esprit de volontarisme, de générosité et d’organisation. L'Eglise à Jérusalem à ses débuts comptait de nombreux démunis. Une certaine communauté de biens (Act.2,4) et l'établissement du diaconat (6:1-6) donna le ton pour une action sociale en faveur d'Eglises en régions défavorisées ou hostiles au Christianisme et à l'établissement d'ordres et d'organisations à vocation caritative. Au 20ème siècle certaines Eglises ont apporté un «christianisme social». Et ainsi de suite. Si les différences entre ces manifestations peuvent être grandes, elles ne sont pas toutes, illégitimes ni contradictoires. Des Eglises locales ressemblant à ces expressions diverses, pourraient bien être réunies dans une grande métropole multiculturelle moderne. Une telle variété servirait certainement la cause de l’Eglise universelle, pourvu que ces communautés veillent à tisser entre elles les relations explicitement décrites dans le Nouveau Testament sans créer des

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institutiuons qui les sépareraient d’autres chrétiens encore. Car une telle diversité permettrait à tous ceux qui se convertissent au Christ de trouver une famille spirituelle plus ou moins compatible avec leur arrière-plan culturel. On se sent confortable dans un milieu où les autres vous ressemblent, parlent et agissent comme vous. Il ne faudrait jamais, cependant, faire d'aucune de ces manifestations l’unique norme pour les autres, ni chercher à faire d’elles un amalgame qui serait forcément insipide. La révélation biblique sur l'essence universelle de l'Eglise et les structures de l’Eglise locale, est la seule norme qui soit valables pour n'importe quelle Eglise. Et c'est uniquement l'Ecriture qui nous permet de distinguer l'essentiel de l'accessoire. Mais dans quelle mesure une Eglise locale peut-elle s’adapter au contexte culturel particulier d’une époque ou d’un lieu, sans porter atteinte à l’essence universelle? . Toutes les Eglises locales manifestent-elles dans la même mesure l'essence unique de l'Eglise universelle? Le caractère nécessairement imparfait de toute Eglise locale, signifie-t-il que toutes les Eglises se valent? Et sinon, qui serions-nous pour porter un jugement quelconque sur une seule d'entre elles? Par contre, le Christ, «celui qui a les yeux comme une flamme de feu» (Apoc.2:18) et ses apôtres, fondateurs d'Eglises, n'ont pas hésité à porter des jugements de valeur sur les différentes communautés décrites dans le Nouveau Testament. Ils n'étaient pas des détracteurs qui critiquaient de l'extérieur, mais ceux qui étaient solidaires des Eglises, les aimaient le plus et s'étaient sacrifiés pour elles. On peut avoir confiance en la justesse de leurs appréciations: 7) L'Eglise à Sardes était morte, bien qu'elle avait la réputation d'être vivante (Apoc.3:1). 6) L'Eglise à Laodicée était tiède et donnait envie à Jésus de la vomir de sa bouche. Elle était spirituellement pauvre, nue et aveugle bien que matériellement prospère et, bien que Jésus l'ait aimée, il s'était retrouvé un jour à l'extérieur de l'Eglise cherchant à y entrer en frappant à la porte (Apoc.3:16-20). 5) Les Eglises en Galatie s'étaient promptement détournées de Dieu qui les avaient appelées par la grâce de Christ et étaient passées à un autre évangile, qui n'en était pas un (Gal.1:2,6,7). 4) L'Eglise à Corinthe n'était pas spirituelle, mais charnelle (1 Cor.3:1). 3) L'Eglise à Thyatire laissait une femme qui se disait prophétesse, enseigner et séduire les serviteurs du Christ, pour qu'ils se livrent à la débauche (Apoc.2:20). 2) L'Eglise à Ephèse n'aimait plus Jésus comme au commencement et, malgré de bonnes oeuvres et avoir gardé sa parole, elle était tombée de haut. Le Seigneur risquait de devoir venir à elle et lui enlever le chandelier de son témoignage (Apoc.2:4). 1) L'Eglise à Philadelphie n'avait que peu de force (Apoc.3:8). 1) L'Eglise à Colosse était fidèle (Col.1:2). 2) L'obéissance des Eglises à Rome était connue de tous (Rom.16:19). 3) Les Eglises démunies en Macédoine s'étaient montrées très généreuses envers les Eglises pauvres en Judée (2 Cor.8:2). 4) L'Eglise à Pergame persécutée était fermement attachée au Christ et n'avait pas renié la foi en lui (Apoc.2:13). 5) L'Eglise à Philippes avait participé avec l'apôtre Paul à la diffusion de l'Evangile depuis le premier jour de sa fondation (Phil.1:5). 6) L'Eglise à Smyrne était spirituellement riche (Apoc.2:9). 7) La foi de l'Eglise à Thessalonique s'était fait connaître en tout lieu. Elle était pour l'apôtre un sujet de gloire et de joie dont il pouvait être fier devant le Seigneur (1 Thes.1:8; 2:19; 3:6). Ces évaluations ne sont jamais données à des institutions ecclésiastiques, mais uniquement à des Eglises locales. La raison en est, sans doute, que ni Jésus, ni les apôtres ne réfléchissaient en fonction d’une dénomination. Cependant, à l'intérieur de chacune des principales branches de la

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chrétienté actuelle, il existe des communautés correspondant à toutes les nuances énumérées ci-dessus - depuis les Eglises locales mortes jusqu'aux plus vivantes. Cependant, on peut supposer que certaines dénominations chrétiennes comptent une proportion plus importante de communautés vivantes - et moins de mortes - que d'autres confessions. Mais le Christ ne s’adresse pas aux institutions en tant que telles. Le caractère imparfait des Eglises locales du Nouveau Testament et toutes les différences entre elles ne nous permettent donc pas d’idéaliser “l’Eglise primitive”. Nous chercherons surtout à découvrir l’intention de Dieu pour son Eglise dans les nombreuses prescriptions de Jésus et des apôtres à son sujet et dans les différentes figures et images qu’ils en donnent. Les sections narratives de la Bible ne sont pas purement descriptives et, comme toute Ecriture, sont utiles pour enseigner (2 Tim.3:16; Rom.15:4; 1 Cor.10:6). Cependant, toute Eglise décrite dans la Bible n’est pas, de ce fait, un modèle à suivre. Elle doit être jugée par l’ensemble de la révélation biblique. Quelle importance faut-il attacher à l'Eglise? Quand Jésus annonça à ses disciples: «Je bâtirai mon Eglise» (Mat.16:18), il levait le voile sur la prochaine grande étape dans la marche de l'histoire de l'humanité. L'édification de l'Eglise occuperait le premier plan du dessein de Dieu entre la première et la deuxième venue du Christ sur terre. Il s'agirait d'une entreprise de portée cosmique. Au moment de cette prédiction du Seigneur, Pierre et les autres disciples n'en saisirent guère toutes les conséquences. Mais avec le temps, ils comprendraient qu'être pêcheur d'hommes serait autrement important que de diriger une entreprise de pêche en Galilée. Matthieu préférerait le service du Seigneur à l'enrichissement qu'il connaissait comme collecteur d’impôts. Simon le Zélote renoncerait à conduire un mouvement nationaliste et à chasser l'occupant romain, pour poser avec les onze autres les fondement d'un édifice universel. Et Jacques conduirait l'Eglise persécutée de Jérusalem plutôt que de devenir lui-même un chef religieux persécuteur. Et Jésus d'ajouter à cette prophétie: "...et les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle" (v.18b). En d'autres termes, l'édification de l'Eglise constituerait une entreprise indestructible dans laquelle il serait possible de s'engager sachant que ses efforts garderaient toute leur validité jusque dans l'au-delà. Cet édifice tiendrait bon contre les attaques de la mort, de Satan et de l'enfer. Et les bâtisseurs, quels qu'ils soient, engageraient leurs forces, leurs dons et et leurs biens dans un dessein noble et éternel qui donnerait tout son sens à leur existence. Toute l'importance de savoir ce que Jésus-Christ pense de l'Eglise devient désormais évidente. Et nous, qu'en pensons-nous? "Christ a aimé l'Eglise" (Eph.5:25a). Quelle place occupe-t-elle dans mon coeur? "Christ s'est acquis l'Eglise par son propre sang" (Act.20:28). Quel est le prix que je lui attache? Jésus l'appelle "Mon Eglise" (Mat.18:16). Aurai-je peur de m'identifier avec elle? "Christ s'est livré lui-même pour l'Eglise" (Eph.5:25). Ne consentirai-je pour elle aucun sacrifice? "Christ nourrit et prend soin de l'Eglise" (Eph.5:29). Est-ce-que je m'en occupe? "Dieu a donné Jésus-Christ comme chef suprême à l'Eglise" (Eph.1:22). Ne m'engagerai-je pas sous sa bannière? "Christ fera paraître devant lui cette Eglise glorieuse, sans tache, ni ride ni rien de semblable, mais sainte et irréprochable" (Eph.5:27). Suis-je obnubilé par le fait qu'elle n'est pas encore parfaite? "A Dieu soit la gloire dans l'Eglise, dans toutes les générations, aux siècles des siècles! Amen!" (Eph.3:21). Aurai-je honte de m'en glorifier maintenant? L'Eglise est "un temple saint... une habitation de Dieu" (Eph.2:21,22). Quel est le respect que je lui témoigne? Paul déclare: “Je suis devenu serviteur de l’Eglise” (Col.1:25 BFC). Suis-je trop bon pour en faire autant?

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Quelle place l'Eglise occupe-t-elle actuellement dans le monde? Pour la première fois depuis quinze siècles, le centre de gravité de l'Eglise s'est déplacé. Aujourd'hui, 40% seulement de ceux qui se disent Chrétiens habitent en Europe et en Amérique du Nord, et 60% dans les pays que l’Occident se plait à appeler “le tiers monde”. Monde qui, en fait, est “le monde majoritaire” si bien par l’importance de sa population que par celle de l’Eglise qui s’y trouve. L'eurocentrisme n'est plus de mise. Les institutions ecclésiastiques de la chrétienté occidentale ne sont plus la norme. On ne peut plus écrire des ecclésiologies en regardant à travers les lunettes des confessions chrétiennes historiques. La déchristianisation de l'Europe a miné leur crédibilité aux yeux du reste du monde. Elles sont en perte de vitesse et ont désormais plus à apprendre des communautés en pleine expansion du Sud et de l'Orient que celles-ci n'ont à apprendre d'elles. Les nations dites "chrétiennes" s'entre-déchirent depuis des siècles; nombre de leurs missionnaires étaient liés au colonialisme. La société occidentale, perçue par les autres comme chrétienne, s’est rendue coupable de racisme, d’exploitation et de décadence. Tout cela nous oblige à prendre du recul par rapport aux institutions ecclésiastiques établies et traditionnelles. Nous devrions nous demander plutôt, si la vitalité et la prolifération des jeunes Eglises ne provient pas d'un attachement plus authentique chez elles au Christ de l'Ecriture; si cette impulsion créatrice qui a toujours été présente à l'intérieur même du christianisme n'est pas issue chez elles d'une foi plus vivante en Jésus. Il suffit pour s’en convaincre de faire une étude tant soit peu sérieuse du christianisme non occidental au Brésil, en Corée du Sud, au Kenya, aux Philippines, en Amérique centrale, au Tchad méridional, à Singapour, etc. Le Christ de l'Ecriture répond à des questions et des préoccupations asiatiques, latino-américaines et africaines auxquelles les églises européennes n'ont jamais pensé tant elles étaient imbues de leur propre histoire et de leur culture. Elles pourraient se trouver enrichies en se posant les mêmes questions et en ayant les mêmes préoccupations. Ces considérations préliminaires nous conduisent tout naturellement à entrer dans le vif du sujet et d'examiner ce que recouvre la notion "Eglise" dans l'Ecriture. CHAPITRE 2 LE SENS DU MOT “EGLISE” Par où commencer pour déterminer ce que Jésus entendait par “mon Eglise” (Mat.16:18)? Certains abordent la question à partir de l’institution. D’autres prennent comme point de départ la notion d’élection ou de salut; d’autres encore voient l’Eglise en fonction de la création, ou du concept “alliance”. Certes, il est important de comprendre le rapport qui peut exister entre l’Eglise et les différentes confessions, entre elle et le salut, entre elle et la création, entre elle et les alliances avec Abraham et Moïse. Mais en commençant l’étude de l’Eglise par autre chose, on risque d’aboutir aussi à autre chose que l’Eglise. On aura fait de la sociologie, de la sotériologie, de la politique. On n’aura pas nécessairement fait de l’ecclésiologie. Si on examine d’abord les 117 emplois du mot ekklesia dans leurs contextes respectifs, on constatera les nombreux rapprochements que l’Ecriture en fait avec ses autres grands thèmes. Cependant, on situera aussi l’Eglise à la place qui lui revient en propre, dans le cadre de la totalité de la révélation biblique. Etymologie du terme “ekklesia”

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Quel fut le sens du mot ekklesia à son origine? Il figurait parmi les termes communs du grec classique bien avant Jésus-Christ et le Nouveau Testament. Il désignait, selon Trench: “L’assemblée légitime, dans une ville libre de Grèce, de tous les détenteurs du droit de cité réunis pour traiter des affaires publiques. La dernière partie du mot (-klesia) exprime leur qualité de convoqués. Sa première partie (ek-) souligne leur convocation hors de la totalité de la population, pour en être une partie choisie, ne comprenant ni la populace, ni les étrangers, ni les déchus de leurs droits civiques....Le mot revient, une fois dans le Nouveau Testament, dans son sens primitif (Act.19: 32,39,41).” (R. C. Trench, Synonymes du Nouveau Testament (Eerdmans, Grand Rapids, 1880, p.1,2). L’Eglise, dans ses spécificités chrétiennes, retient ces trois caractéristiques fondamentales de l’ekklesia grecque. Elle est (1) une assemblée, (2) de citoyens convoqués, (3) hors de la multitude. Mais, en fin de compte, ce n’est pas l’étymologie d’un mot qui en détermine les sens, mais son usage. Le Nouveau Testament confirme-t-il le sens étymologique du terme ekklesia par des déclarations explicites? 1. L’Eglise est une assemblée, un rassemblement “Jésus devait mourir...pour rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés” (Jean 11:51,52 Jérus). “Pendant toute une année, Paul et Barnabas se réunirent aux assemblées de l’Eglise” (Act.11:26). Ils ne se contentaient pas de l’unité spirituelle, mais recherchaient aussi le rapprochement des corps. Paul écrit à l’Eglise à Corinthe: “J’apprends que, lorsque vous vous réunissez en assemblée, il y a parmi vous des divisions” (1 Cor.11:18). La proximité physique ne prévenait pas les clans. “N’abandonnons pas notre assemblée, comme c’est la coutume de quelques-uns; mais exhortons-nous réciproquement” (Héb.10:25 etc.). Quelle est donc l’importance actuelle de cette notion de rassemblement? Dieu sauve les hommes un à un. Cependant, ce n’est pas pour qu’ils restent solitaires et isolés. Etre “en Christ” c’est être en son corps, l’Eglise. La Bible ne sait rien d’une religion individualiste. Tous les enfants de Dieu ont été régénérés pour faire partie de sa famille, l’Eglise. Avoir besoin d’être entouré d’autres croyants en Christ est un des premiers impératifs de la vie nouvelle. Et l’Eglise constitue le moyen indispensable, établi par Dieu, pour entretenir et développer cette vie. Un christianisme vivant n’a jamais longtemps subsisté sans avoir trouvé son expression dans la vie communautaire, dans l’Eglise. Le mal-être de notre époque est dû, en grande partie, à son individualisme exacerbé et au déficit du lien social qui en résulte. Une vie spirituelle authentique débouche toujours dans la communauté. Dieu a créé l’homme un être religieux, mais aussi social. L’Eglise répond à ses besoins les plus fondamentaux. Malheureusement, on a parfois dû quitter l’institution pour retrouver la communauté. 2. L’Eglise est composée d’ “appelés”, de “convoqués” L’Eglise du Christ n’est pas une bande, une foule, une troupe ou une masse. La terminaison -klesia vient du verbe kaleo, “appeler”. Les citoyens grecs se voyaient convoqués par un héraut pour qu’ils se rassemblent sur la “pnyx”. Les citoyens du ciel sont “appelés”, invités par Jésus-Christ et ses serviteurs à s’assembler dans l’Eglise. C’est cet appel de Dieu dans l’Evangile du Christ qui suscite ce rassemblement et crée son Eglise. Toute assemblée réunie suite à un appel autre que celui-là n’est pas l’Eglise de Jésus-Christ. “Le bon berger appelle par leur nom les brebis qui lui appartiennent , et il les fait sortir” (Jean 10:3). “Les douze convoquèrent alors l’assemblée des disciples” (Act.6:2 Jérus). “Paul et Barnabas convoquèrent l’Eglise (Act.14:27).

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“Paul, ainsi que Sosthène, le frère, à l’Eglise de Dieu établie à Corinthe, à ceux qui ont été appelés à être saints” (1 Cor.1:2 Jérus). “Vous avez été appelés pour former un seul corps” (l’Eglise - Col.3:15). Paul écrit à l’Eglise à Thessalonique: “Dieu vous a appelés par notre Evangile” (2 Thes.2:14). “Jésus-Christ vous a appelés...vous qui maintenant êtes le peuple de Dieu” (1 Pi.2:9-10). L’identité des “appelés”, mentionnés dans ces déclarations de l’Ecriture, suggère déjà le type de personnes dont l’Eglise doit être constituée. Il s’agit de “brebis qui appartiennent à Jésus”, de “disciples”, de “saints”, du “peuple de Dieu”. Il n’y avait pas d’ekklesia grecque tant que les personnes convoquées n’avaient pas répondu à l’appel des hérauts pour se réunir sur la terrasse où se tenaient les assemblées de la cité. Il n’y a pas d’ekklesia chrétienne tant que les auditeurs de l’appel de Dieu dans l’Evangile n’y ont pas répondu pour être rassemblés en Jésus-Christ et avec les autres. Il ne faut exclure de l’Eglise personne qui aurait répondu à l’appel du Christ, ni inclure ceux qui n’y auraient pas répondu. 3. L’Eglise est extraite de la multitude des incroyants Le préfix ek- signifie “hors de”. Les citoyens grecs répondaient à la convocation des hérauts et sortaient du milieu de (hors de) la populace composée d’esclaves et d’étrangers. Les citoyens du ciel ont répondu à l’appel de Dieu dans l’Evangile. Dieu les retire et ils se séparent eux-mêmes moralement du monde des esclaves du péché et des étrangers à la vie de Dieu, pour être distincts d’eux et pour s’assembler dans l’Eglise. Pierre prêche le Christ pour fonder l’Eglise à Jérusalem et s’écrie: “Sauvez-vous de cette génération perverse” (Act.2:40). “Dieu a pris soin de tirer d’entre (ek) les païens un peuple réservé à son Nom” (Act.15:14 Jérus). “Paul discourut sur les choses qui concernent le royaume de Dieu...Mais, comme quelques-uns restaient endurcis et incrédules,... il se retira d’eux, sépara les disciples, et enseigna chaque jour dans l’école d’un nommé Tyrannus” (Act.19:8-9). “Paul,...aux Eglises de la Galatie:...Jésus-Christ s’est donné lui-même pour nos péchés, afin de nous arracher du (ek) présent siècle mauvais” (Gal.1:1,2,4). “Ne formez pas avec des infidèles d’attelage disparate. Quel rapport en effet entre la justice et l’impiété? Quelle union entre la lumière et les ténèbres? Quelle entente entre le Christ et Bélial? Quelle association entre le fidèle et l’infidèle? Quel accord entre le temple de Dieu et les idoles? Or, c’est nous qui sommes le temple du Dieu vivant, ainsi que Dieu l’a dit...Sortez donc du (ek) milieu de ces gens-là et tenez-vous à l’écart, dit le Seigneur” (2 Cor.6:14-17 Jérus). De cette extraction et de cette séparation morale émergent deux groupes distincts. Dieu décrit le contraste entre ces deux entités par les divers termes employés dans les textes cités plus haut. D’une part: “les païens...endurcis...incrédules...le présent siècle mauvais...les infidèles ...l’impiété...les ténèbres...les idoles”. D’autre part: “un peuple réservé à son Nom...les disciples...les Eglises de la Galatie...la justice...la lumière...le fidèle...le temple de Dieu”. Il existe une différence entre l’Eglise et le monde. Certains en sont arrivés à parler avec ironie de cette différence morale entre les chrétiens et les non-chrétiens. Mais on avait christianisé des peuples entiers, en surface et souvent par la contrainte, de sorte que le monde était devenu l’Eglise et l’Eglise le monde. Dans la chrétienté médiévale l’Eglise et la société furent coextensives. L’Eglise ne se bornait pas à être dans le monde, elle en était venue à être du monde. Le bateau était dans l’eau; mais l’eau était aussi dans le bateau. On en vient inévitablement à cette situation dangereuse pour l’Eglise quand on veut que le peuple de Dieu comprenne toute la société. Il faut préciser que cette séparation devait se faire par rapport à l’infidélité, l’impiété, et les idoles

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des incrédules; il ne fallait pas se séparer de leurs personnes. Jésus demandait à son Père: “Je ne te prie pas de les ôter du monde, mais de les préserver du mal” (Jean 17::15). Le “peuple de Dieu”, son “temple”, ne devait pas sortir, s’isoler physiquement du monde des hommes. Mais l’Eglise devait refuser toute “union”, “association” ou “accord” compromettants avec ceux dont les principes et les pratiques l’entraîneraient à s’emmêler avec le mal. Le croyant en tant qu’individu doit maintenir les contacts amicaux (comme le fit Jésus) avec les incrédules, les gens de mauvaise vie et les infidèles de son entourage pour leur apporter une “guérison” (Marc 2:15-17). Il doit être bon et loyal citoyen du pays dont il est citoyen et, autant que possible, vivre en harmonie avec l’identité culturelle et sociale de ses origines ou de l’endroit qu’il habite. Par contre, l’Eglise en tant que collectivité, doit éviter toute alliance comportant privilèges, obligations ou actions communes avec des pouvoirs économiques ou politiques. Les dirigeants de ceux-ci ne sont pas nécessairement des chrétiens authentiques et poursuivent des objectifs forcément différents de ceux de l’Eglise. Des conflits d’intérêts deviennent inévitables. Quelle est donc l’importance de cette extraction? C’est un fait de l’histoire: plus la ligne de démarcation spirituelle et morale entre chrétiens et non-chrétiens a été clairement tirée, plus le christianisme s’est montré dynamique et entreprenant. Plus les croyants authentiques se sont fondus dans la grisaille des chrétiens purement sociologiques, moins ils ont eu de vigueur et de rayonnement. Cette tendance s’est manifestée avant la Réforme dans la différence frappante entre l’activité débordante des ordres religieux missionnaires et la passivité des “laïcs” superficiellement “christianisés”. Ensuite, dans les pays dits protestants, on a observé ce même contraste entre les adhérents des Eglises libres ou “de professants” et la masse des non-pratiquants des Eglises officielles. L’étymologie du mot ekklesia permet donc d’esquisser un début de définition. “L’Eglise de Jésus- Christ est (1) l’assemblée (2) de ceux qui ont répondu à l’appel de Dieu dans l’Evangile et qui, (3) de ce fait, se distinguent du monde des “infidèles”. Il faudra ensuite examiner les 117 emplois du mot dans le reste du Nouveau Testament pour confirmer, préciser, compléter ou modifier cette définition dérivée de l’étymologie. On constatera aussi que l’Ecriture établit un rapport objectif entre ce terme et un certain nombre d’images ou figures qui servent à l’illustrer. Celles-ci permettront de compléter de manière sûre l’idée qu’on se fera de l’Eglise. L’utilisation du mot “ekklesia” dans le Nouveau Testament Le Nouveau Testament emploie le mot ekklesia dans quatre sens différents: 1. L’assemblée politique des citoyens de la cité à Ephèse “Le désordre régnait dans l’assemblée...D’autres objets se régleront dans une assemblée légale...Il congédia l’assemblée.” (“ekklesia” Act.19:32,39,40). Ce passage n’ajoute rien aux indications notées plus haut au sujet de l’Eglise du Christ. Le terme n’est employé dans ce sens politique dans aucun autre passage du Nouveau Testament. Il ne s’agissait pas d’un rassemblement religieux ni, à plus forte raison, de l’Eglise de Jésus-Christ. 2. Un rassemblement en un même lieu des enfants d’Israël avant Jésus-Christ “L’assemblée au désert” du peuple juif sorti d’Egypte au moment où Moïse promulgait la loi (“ekklesia” Act.7:38). C’est l’unique passage où le terme a trait aux Juifs en tant que tels sous l’ancienne alliance de la loi. Il ne s’agissait pas de l’Eglise du Christ. Jésus n’était pas encore venu. Il l’appelait “mon Eglise”; il allait la bâtir lui-même (“je” bâtirai); sa fondation était encore future (noter le temps futur du verbe “bâtirai”- Mat.16:18) et elle comprendrait des Gentils par tout

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le monde et non seulement des Juifs. Ce rassemblement d’Israélites au désert ne répondait à la description ci-dessus ni par le moment de sa convocation, ni par l’auteur de celle-ci, ni par son fondement, ni par sa composition, ni par son étendue, et n’était donc pas l’Eglise de Jésus-Christ. Et l’Eglise, en tant que telle n’est jamais désignée par le nom propre “Israël”. Les deux utilisations du mot ekklesia cités plus haut ne se réfèrent donc pas de manière spécifique à l’Eglise du Christ. L’usage fréquent de l’article “l”’Eglise (e ekklesia) sert désormais à inclure dans le terme le contenu chrétien, tandis qu’au départ il fallait toujours un qualificatif. L’article distingue de la sorte l’assemblée chrétienne de toute autre assemblée. Par conséquent, il faut chercher le sens particulier et chrétien du mot dans les 113 autres occasions où il se présente. Les divers lexiques et dictionnaires grecs du Nouveau Testament sont aussi unanimes sur les deux sens suivants: 3. L’Eglise chrétienne locale - marquée par une unité spirituelle ainsi qu’un rassemblement physique “Paul...à l’Eglise de Dieu qui est à Corinthe” (1 Cor.1:2). La notion combine unité spirituelle (“Dieu”) et rassemblement physique en un même lieu (“à Corinthe”). “Toutes les Eglises de Christ vous saluent” (Rom.16:16). La formule exprime le lien spirituel chrétien unique (“Christ”) et une pluralité de rassemblements de personnes physiques en divers lieux (“les Eglises”). Le Nouveau Testament cite nommément une douzaine de localités où se réunissait une “Eglise” chrétienne: à Jérusalem (Act.8:1), à Antioche (Act.13:1), à Ephèse (Act.20:17), à Cenchrées (Rom.16:1), à Corinthe (1 Cor.1:2), à Smyrne (Apoc.2:8), à Pergame (Apoc.2:12), à Thyatire (Apoc.2:18), à Sardes (Apoc.3:1), à Philadelphie (Apoc.3:7), à Laodicée (Apoc.3:14). Il n’est jamais question de l’Eglise “de” Jérusalem, “de” Corinthe, “de” Smyrne, etc. L’Eglise locale ne correspond jamais à une circonscription politique, grande ou petite. Le mot ekklesia revient à 35 occasions au pluriel. La multiplicité des Eglises locales est une réalité à laquelle il faut donner toute la place que lui accorde l’Ecriture. Au lieu de nuire à l’unité de l’Eglise universelle, cette pluralité, bien comprise, est indispensable à cette unité car elle permet une diversité légitime sans division. Cependant, la localité constitue la seule et unique base scripturaire pour la pluralité des Eglises. Une multiplicité de dénominations ou d’institutions ecclésiastiques, basées sur des apôtres différents (pétriniennes, pauliniennes), des nations différentes (arméniennes, anglicanes), des fondateurs différents (nestoriennes, luthériennes), des confessions différentes (réformées, remontrantes), des types d’organisation ecclésiastique différentes (épiscopales, presbytériennes), des doctrines différentes (baptistes, charismatiques), etc. n’a aucune justification philologique dans le Nouveau Testament. Tout élément aboutissant à une pluralité d’Eglises, autre que celui de la localité, introduit un facteur de division et constitue un élément sectaire. Même les Eglises situées dans une même contrée sont mentionnées au pluriel pour bien marquer leur individualité: “...les sept Eglises qui sont en Asie” (Apoc.1:4); “...les Eglises de Galatie” (1Cor.16:1); “...les Eglises...qui sont dans la Judée” (1 Thes.2:14); “...les Eglises de la Macédoine” (2 Cor.8:1). Il n’est jamais question de “l’Eglise” (au singulier) d’Asie, de Galatie, etc. Il ressort de l’expression “chaque Eglise” (Act.14:23) qu’il faille considérer individuellement toute communauté locale. Toutes les Eglises (au pluriel) mentionnées dans l’Ecriture sont des Eglises locales. C’est pour cela que la Bible ne parle jamais d’Eglises d’Etat, d’Eglises provinciales, régionales ou nationales. Les Eglises locales sont bien plus que de petits rouages dans une vaste machine ecclésiastique. A peu près une centaine des mentions du mot ekklesia (sur les 117; +- 80%) ont trait aux Eglises locales. Celles-ci occupent la place prépondérante dans la pensée des

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auteurs bibliques. Il est essentiel qu’il y ait un rassemblement physique des croyants. Il ne suffit pas que ceux- ci soient présents “en esprit”. La vie communautaire est au coeur de l’ecclésiologie. 4. L’Eglise chrétienne universelle - marquée par une unité spirituelle, mais sans rassemblement physique “Jésus dit...je bâtirai mon Eglise, et les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle” (Mat.16:18). Le singulier est frappant: “mon Eglise”; non pas “mes Eglises”. Il n’y en a qu’une seule. S’il s’agissait de l’une ou l’autre Eglise locale, de laquelle s’agirait-il? S’il s’agissait de l’une ou l’autre institution ecclésiastique ou union d’Eglises, de laquelle s’agirait-il? Il faut comprendre le singulier comme un singulier collectif. La deuxième partie de cette déclaration de Jésus affirme la résistance de l’Eglise à toute attaque, sa permanence, sa perpétuité. Elle sera invincible, indestructible. Or, au cours de deux mille ans d’histoire, d’innombrables Eglises locales et d’institutions ont été balayées, sont mortes, ont disparu. Les portes du séjour des morts ont prévalu contre elles. Il n’y a que l’Eglise universelle qui soit toujours là. Son essence spirituelle unique ne dépend d’aucun rassemblement de personnes physiques. Paul a “persécuté l’Eglise de Dieu” (1 Cor.15:9; Phil.3:6); il “ravageait l’Eglise” (Gal.1:13). Or, quand Paul s’en prenait à elle, celle-ci n’était pas une assemblée en un même endroit: “Saul ravageait l’Eglise; pénétrant dans les maisons, il en arrachait hommes et femmes, et les faisait jeter en prison” (Act.8:3). L’Eglise ravagée était les chrétiens dans leurs maisons et en prison. Paul précise encore où se trouvait cette Eglise (singulier) persécutée: “J’ai souvent châtié les saints dans toutes les synagogues...je les persécutais même jusque dans les villes étrangères (Act.26:11) - dont Damas (Act.9:1-2). Sur le chemin de cette ville, Jésus lui-même souligne pour Paul l’unité spirituelle de son corps, l’Eglise, bien que celle-ci soit dispersée physiquement: “Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu?...Je suis Jésus que tu persécutes” (Act.9:4,5). Les croyants étaient persécutés parce qu’ils étaient rassemblés “en Christ” - mais sans l’être en un même endroit. Et Jésus était persécuté en la personne de son Eglise en divers lieux. “L’Eglise (singulier) était en paix dans toute la Judée, la Galilée, et la Samarie, s’édifiant et marchant dans la crainte du Seigneur, et elle s’accroissait par l’assistance du Saint-Esprit” (Act.9:31). Une seule et même Eglise est présente, agissante et croissante dans trois régions différentes en même temps. Il s’agissait de l’Eglise “dans” ces régions, non des Eglises “de” ces régions comme s’il y aurait eu des Eglises régionales. Et l’assistance du Saint-Esprit unifiait l’Eglise sans qu’il ne soit question d’un quelconque rassemblement physique de ses membres, ni de structures institutionnelles pour les chapeauter. “Ne soyez en scandale ni aux Grecs, ni aux Juifs, ni à l’Eglise de Dieu” (1 Cor.10:32). Paul répartit le genre humain en trois groupes qui, tous les trois se rencontrent partout. L’Eglise est donc, avec les Juifs et les Gentils, une des trois grandes divisions de l’humanité, unie du fait d’être “de Dieu”, mais ne pouvant pas être rassemblée physiquement. La première lettre de Paul “à l’Eglise de Dieu qui est à Corinthe” (1 Cor.1:2a) ne fut pas adressée à cette Eglise locale uniquement, mais aussi “à tous ceux qui invoquent en quelque lieu que se soit le nom de notre Seigneur Jésus-Christ” (v.2b). Il s’agissait de l’Eglise universelle, car il précise plus loin à leur sujet et au sien (lui qui, à ce moment-même, était à Ephèse): “Nous (vous et moi) avons tous, en effet, été baptisés dans un seul Esprit, pour former un seul corps” (12:13); et encore: “Vous êtes le corps du Christ” (12:27). “Jésus-Christ est la tête du corps, l’Eglise” (Col.1:18) et il n’a qu’un seul corps (Eph.4:4). Ce corps était composé de Paul à Ephèse, des saints de l’église locale à Corinthe et de ceux qui, en tous lieux invoquaient le nom du Seigneur. Ils avaient tous, du fait d’avoir invoqué le nom du Seigneur à salut, été baptisés dans un seul Esprit pour intégrer ce corps

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qui est l’Eglise universelle. Il y avait union spirituelle sans rassemblement des personnes physiques concernées. Une Eglise locale n’est pas le corps du Christ. “Maris, que chacun aime sa femme, comme Christ a aimé l’Eglise, et s’est livré lui-même pour elle” (Eph.5:25). Quand Jean Baptiste parle de Christ et de l’Eglise, il déclare: “Celui à qui appartient l’épouse, c’est l’époux” (Jean 3:29). Or Christ ne peut avoir plus d’une épouse. C’est par le don de lui-même en sacrifice que Christ s’est acquis l’Eglise. Etre au bénéfice de ce sacrifice est le lien spirituel qui unit tout membre de cette Eglise à tout autre, où qu’ils se trouvent dans ce monde. On adore Jésus au ciel par ces paroles: “Tu as été immolé, et tu as racheté pour Dieu par ton sang des hommes de toute tribu, de toute langue, de tout peuple, et de toute nation” (Apoc.5:9). C’est l’Eglise universelle. Il est important de noter que l’Eglise universelle est toujours conçue comme étant composée d’individus et non d’Eglises locales ou nationales (voir plus haut): “des hommes de toute tribu...” (Apoc.5:9); “Ceux qui invoquent en quelque lieu que ce soit le nom de notre Seigneur Jésus” (1 Cor.1:2); “des hommes et des femmes” persécutés en tous lieux par Paul (Act.8:3), etc. L’Eglise de Polycarpe envoya, à la mort de ce dernier en l’an 156, un message: “A toutes les Eglises de l’Eglise sainte et katholikos, où qu’elles soient.” (Martyre de Polycarpe, 41). Le mot grec katholikos (“général”, “total”, “universel”) ne se trouve pas dans le Nouveau Testament. Il faut donc être prudent si on veut l’appliquer à l’Eglise. Mais la dérive est claire quand on conçoit l’Eglise “générale” ou “totale” comme étant composée, non de personnes individuelles, mais d’Eglises locales ou de dénominations. Les conséquences pratiques en sont considérables. Aucune fusion entre toutes les institutions ecclésiastiques ne pourrait jamais créér l’Eglise universelle. “Vous vous êtes approchés...de l’assemblée (l’Eglise - ekklesia) des premiers-nés inscrits dans les cieux” (Héb.12:23). Cette Eglise est composée, non d’Eglises locales, mais de personnes individuelles régénérées, de premiers-nés. Jésus posait la nouvelle naissance comme condition pour entrer dans le royaume de Dieu (Jean 1:3,5). Nous verrons plus loin que les Eglises locales ne sont pas composées uniquement de personnes nées de nouveau, mais aussi de chrétiens de nom, qui disent bien “Seigneur, Seigneur”, mais “n’entrent pas dans le royaume des cieux” (Mat.7:21) et dont Jésus déclarera: “Je ne vous ai jamais connu, retirez-vous de moi” (v.23). Les destinataires de l’épître aux Hébreux s’étaient approchés de cette Eglise de régénérés. Il est ajouté au sujet des membres de celle-ci qu’ils “ont été inscrits dans les cieux”. Il s’agit d’un participe parfait. Cette inscription est conçue comme un fait accompli et non un événement futur. Cette Eglise-là dont le registre est tenu au ciel n’a jamais jusqu’ici été réunie sur terre. Il y a unité de la nouvelle vie spirituelle sans rassemblement physique. Le mot ekklesia est employé une douzaine de fois pour désigner l’Eglise unique et universelle. Les principaux dictionnaires grecs du Nouveau Testament attestent les quatre sens du mot ekklesia mentionnés ci-dessus, dont deux seulement ont trait à l’Eglise de Jésus-Christ. Aucun de ces ouvrages ne donne au terme ekklesia le sens de “institution ecclésiastique” ou “union d’églises” ou “dénomination chrétienne”, tandis que ce sens est courant dans le discours théologique et oecuménique. Il est aussi source de malentendus importants. (M. Carrez et F. Morel, Dictionnaire grec-français du Nouveau Testament, Labor et Fides, 4e éd. 1998. G. Abbott-Smith, Manual Greek Lexicon of the New Testament, T. & T. Clark, Edinburgh, 1950. W. Bauer, Griechisch-Deutsches Wörtenbuch zu den Schriften des Neuen Testaments, Berlin, 1952. G. Kittel, Theologische Wortenbuch zum Neuen Testaments, Stuttgart: Kohlhammer, 1954. J. H. Moulton & G. Milligan, The Vocabulary of the Greek Testament, Londres: Hodder & Stoughton, 1930). L’un ou l’autre de ces dictionnaires mentionnent encore les significations suivantes comme d’autres sens du mot ekklesia ayant trait à l’Eglise chrétienne:

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(5) Les rassemblements de l’Eglise locale pour le culte (1Cor.11:18; 14:19 - Abbott-Smith). Mais cette signification est comprise dans le sens de l’Eglise locale et ne constitue pas un sens distinct et supplémentaire. Les rassemblements de l’Eglise locale à Corinthe pour le culte ne faisaient-ils donc pas partie intégrante de la vie de cette Eglise locale? Comment une Eglise locale pourrait-elle exister sans se rassembler pour le culte? L’expression “dans l’Eglise” (1Cor.14:19,28) signifie “dans les réunions de l’Eglise. Il n’est donc pas indiqué de retenir le rassemblement pour le culte comme un sens différent et supplémentaire du mot ekklesia dans le Nouveau Testament. (6) On a aussi vu un sens distinct du mot ekklesia dans “les Eglises dans les maisons” (Rom.16:5; 1Cor.16:9; Col.4:15 - Bauer). Pourtant, aucune trace d’un lieu de culte spécialement construit à l’intention d’une Eglise locale n’existe avant le troisième siècle. Pendant deux siècles, rarissimes étaient les Eglises locales qui n’étaient pas en même temps des Eglises de maison. Les locaux dans lesquels se réunissaient les Eglises étaient, en général des chambres hautes dans des domiciles privés (Act.1:13; 20:8). Les Eglises étaient nombreuses et leurs assistances, en général, réduites car les fidèles devaient pouvoir y accéder à pied. Elles étaient le plus souvent des Eglises de voisinage. L’idée que les Eglises de maison du Nouveau Testament constituent un sens distinct de la notion “d’Eglise locale” semble découler de l’habitude qu’on aurait de la situation actuelle en occident où les Eglises locales disposent en général d’un édifice spécialement conçu pour le culte. Les gens peuvent venir de loin en voiture ou par les transports publics, et les assistances sont souvent importantes. Tel n’était pas le cas au premier siècle. Il n’est donc pas indiqué de retenir “les Eglises de maison” comme un sens du mot ekklesia distinct de celui “d’Eglises locales”. D’autant plus que les Eglises locales n’étaient pas désignées comme étant “de” Jérusalem ou “de” Corinthe, mais “à” Jérusalem ou “à” Corinthe. Sommaire Il faut donc conclure que le Nouveau Testament connaît deux sens du mot ekklesia ayant trait à l’Eglise chrétienne, et deux seulement: (1) les multiples Eglises chrétiennes locales et (2) l’unique Eglise chrétienne universelle. Deux écueils sont à éviter: premièrement, de mélanger les deux sens bibliques pour n’en faire qu’un seul et de se retrouver avec un amalgame qui ne correspond ni à l’un ni à l’autre, et qui déforme les deux. La plupart des définitions qu’on a données de l’Eglise au cours de l’histoire des dogmes n’ont pas respecté cette distinction fondamentale faite par le Nouveau Testament et attestée par les exégètes et les lexicographes. On a favorisé la confusion dans le paysage ecclésiastique en voulant toujours exprimer en une seule notion ce que l’Ecriture exprime en deux. Le deuxième écueil est celui d’ajouter aux deux sens bibliques d’autres significations du terme. On a employé le mot “Eglise” pour désigner des choses qui ne sont pas l’Eglise. On a fait entrer dans la notion “Eglise” des éléments qui n’ont rien à y voir. En pensant s’occuper de l’Eglise on s’occupe d’autre chose. Nous traiterons d’abord des distinctions entre l’Eglise universelles et les Eglises locales ainsi que tout ce qui unit ces deux réalités. Ensuite nous devrons considérer quelques usages abusifs ajoutés aux deux sens bibliques. Tout emploi du mot dans un sens autre que ces deux-là, doit être considéré comme inexact, non-biblique et source de confusion, d’erreur et de pratiques nuisibles au bien-être et à l’édification de l’Eglise dans le monde. L’intention de Dieu pour son Eglise est donc qu’elle soit à la fois universelle et locale, une et diverse. Ce livre traitera principalement de l’Eglise universelle et incidemment de l’Eglise locale. Cette dernière a fait l’objet de nombreux ouvrages au cours des dernières années.

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CHAPITRE 3 DIFFERENCES ET CONCORDANCES ENTRE L’EGLISE UNIVERSELLE ET LES EGLISES LOCALES Nous avons constaté l’accord général parmi les exégètes et les lexicographes pour distinguer entre ces deux sens du mot “Eglise”, quand il s’agit de l’Eglise de Jésus-Christ. Il nous reste à examiner de plus près la nature de cette distinction. En outre, il faut veiller à ne pas “séparer” ces deux réalités, mais aussi d’en comprendre toutes les concordances. Quels sont ces deux aspects de l’Eglise, l’universel et le local, mais aussi, qu’ont-ils en commun? Ces précisions devraient nous permettre d’éviter bon nombre de pièges et de résoudre certains problèmes dans notre vie d’Eglise. A. Différences entre l’Eglise universelle et les églises locales L’Eglise Universelle Les Eglises locales (1) EST UNIQUE: (1) SONT MULTIPLES: “Il y aura un seul troupeau, un seul berger” (Jean “Toutes les Eglises de Christ vous saluent” (Ro. 10:16). “Il y a un seul corps” (Eph.4:4). “Celui à 16:16). “J’enseigne partout dans toutes les qui appartient l’épouse, c’est l’époux (Jean 3:29) Eglises” (1Cor.4:17). “Jean, aux sept Eglises qui sont en Asie” (Apoc.1:4). (2) EST UNIVERSELLE: (2) SONT LOCALES: “Paul...à tous ceux qui invoquent en quelque lieu “L’Eglise à Jérusalem” (Act.8:1).

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que se soit le nom de notre Seigneur Jésus-Christ” “L’Eglise qui est dans leur maison” (Rom.16:5). ...Vous êtes le corps de Christ” (1Cor.1:2; 12:27) “L’Eglise des Thessaloniciens” (1Thes.1:1). “Ne scandalisez ni les Juifs, ni les non-juifs, ni “Après leur arrivée (à Antioche), ils l’Eglise de Dieu” (1Cor.10:32). convoquèrent l’Eglise” (Act.14:27). (3) EST INVINCIBLE ET ETERNELLE: (3) SONT FRAGILES ET PASSAGERES: “Mon Eglise...les portes du séjour des morts “A l’ange de l’Eglise à Sardes...tu passes ne prévaudront point contre elle” (Mat.16:18). pour être vivant et tu es mort. (Apoc.3:1). “A lui soit la gloire dans l’Eglise...dans toutes Les sept Eglises en Asie Mineure (Apoc. les générations, aux siècles des siècles” (Eph. 1:4 - la Turquie) ont disparu. 3:21). “A l’ange de l’Eglise à Laodicée...je te “Ne crains point, petit troupeau, car votre Père vomirai de ma bouche” (Apoc.3:14,16). a trouvé bon de vous donner le royaume” “A l’ange de l’Eglise à Ephèse...j’ôterai (Luc 12:32). ton chandelier de sa place” (Apoc.2:5). (4) ON Y ENTRE PAR LA FOI ET L’ACTION (4) ON Y ENTRE PAR UNE PROFESSION DU SAINT-ESPRIT: DE FOI ET LE BAPTEME D’EAU: “Le nombre de ceux qui croyaient au Seigneur, “Ceux qui acceptèrent sa parole furent augmentait de plus en plus” (Act.5:14). baptisés, et, en ce jour-là, le nombre des “Nous avons tous été baptisés dans un seul Esprit disciples augmenta d’environ trois mille âmes” pour former un seul corps” (1Cor.12:13). (Act.2:41). “Plusieurs Corinthiens, qui avaient “L’Eglise s’accroissait par l’assistance du Saint- entendu Paul, crurent et furent baptisés” Esprit” (Act.9:31). (Act.18:8). (5) DIEU Y “AJOUTE” CEUX QUI SONT (5) LES CROYANTS “S’Y JOIGNENT” SAUVES: EUX-MEMES: “Le Seigneur ajoutait chaque jour à l’Eglise “Lorsqu’il se rendit à Jérusalem, Saul tâcha ceux qui étaient sauvés” (Act.2:47). “Dieu a de se joindre aux disciples” (Act.9:26). placé chacun des membres dans le corps” “Quelques-uns d’entre eux furent persuadés et (1 Cor.12:18). “Une grande foule fut ajoutée se joignirent à Paul et à Silas, ainsi qu’une au Seigneur” (Act.11:24). grande multitude” (Act.17:4 Darby). (6) EST COMPOSEE UNIQUEMENT DE (6) PEUVENT COMPRENDRE AUSSI CROYANTS AUTHENTIQUES: DES CHRETIENS DE NOM: “Christ est la tête de l’Eglise qui est son corps, et “Revenez à la raison...Je le dis à votre honte: dont il est le Sauveur...l’Eglise est soumise à Christ” certains d’entre vous ne connaissent pas Dieu (Eph.5:23,24). “Vous vous êtes approchés... de l’ (1Cor.15:25 FC). “Ces gens nous ont quittés, Eglise des premiers-nés inscrits dans les cieux” mais ils n’étaient pas vraiment des nôtres; en (Héb.12:22,23). “Pierre...à ceux qui sont élus... effet, s’ils avaient été des nôtres, ils seraient Vous-mêmes, comme des pierres vivantes, édifiez- restés avec nous. Mais ils nous ont quittés afin vous pour former une maison spirituelle...Vous êtes qu’il soit évident qu’aucun d’eux n’était vrai- un race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, ment des nôtres” (1Jean 2:19 FC). “Des faux un peuple acquis” (1Pi.2:5,9). “Mes brebis me frères s’étaient glissés parmi nous” (Gal.2:4). connaissent...entendent ma voix...me suivent... Je “Ils font profession de connaître Dieu, mais ils leur donne la vie éternelle” (Jean 10:14,27,28). le renient par leurs oeuvres” (Tit.1:16). (7) SES “MEMBRES” SONT CONNUS DE (7) LEURS “ADHERENTS” PEUVENT DIEU SEUL: AUSSI ETRE RECONNUS ET “Je suis le bon berger. Je connais mes brebis, et COMPTES PAR LES HOMMES:

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elles me connaissent...Vous n’êtes pas de mes brebis. “Ils reconnurent Pierre et Jean pour avoir été Mes brebis entendent ma voix; je les connais et avec Jésus” (Act.4:13). “C’est vous (l’Eglise elles me suivent” (Jean10:14,27). à Corinthe) qui êtes notre lettre...connue et “Hyménée et Philète se sont écartés de la vérité... lue de tous les hommes” (2 Cor.3:2). Cependant les solides fondations posées par Dieu “Le nombre des disciples augmenta tiennent bon...: Le Seigneur connaît les siens” d’environ trois mille âmes” (Act.2:41). (2Tim.2:17-19 FC). “L’Eglise des premiers-nés “Le nombre des disciples augmentait inscrits dans les cieux” (Héb.12:23). beaucoup à Jérusalem” (Act.6:7). (8) EST DIRIGEE PERSONNELLEMENT PAR (8) SONT AUSSI DIRIGEES PAR DES JESUS-CHRIST: SOUS-BERGERS, CONDUCTEURS: “Il est la tête du corps qui est l’Eglise” (Col.1:18 FC). “Paul dit aux anciens de l’Eglise à Ephèse...: “Le Souverain Berger” (1Pi.5:4). “Il y aura un seul Prenez donc garde...à tout le troupeau au troupeau, un seul berger” (Jean 10:16). “Nous avons milieu duquel l’Esprit Saint vous a établis un souverain sacrificateur établi sur la maison de surveillants pour paître l’Eglise de Dieu” Dieu” (Héb.10:21). (Act.20:17,18,28). “Obéissez à vos conducteurs” (Héb.13:17). (9) EST UN “ORGANISME” VIVANT: (9) SONT AUSSI DES “ORGANISA- “Organisme” (selon Robert): “Ensemble des organes TIONS” STRUCTUREES: qui constituent un être vivant”. “Nous formons un seul “Organiser” (selon Robert): “Doter d’une corps en Christ, et nous sommes tous membres les structure, d’un mode de fonctionnement”. uns des autres” (Rom.12:5). “Je suis le cep, vous “Paul...à tous ceux qui, à Philippes, apparti- êtes les sarments. Celui qui demeure en moi et en ennent au peuple de Dieu...aux dirigeants de qui je demeure porte beaucoup de fruit” (Jean 15:5). l’église et aux diacres”(Phil.1:1). “Lorsque “C’est de Christ, et grâce à tous les liens de son assis- vous vous assemblez....que tout se fasse tance, que tout le corps, bien coordonné et formant un avec bienséance et avec ordre” (1Cor.14: solide assemblage tire son accroissement selon la 26,40). “Quelques mots encore à propos force qui convient à chacune de ses parties, et s’édifie de la collecte...Agissez conformément aux lui-même dans l’amour” (Eph.4:16). instructions que j’ai données” (1Cor.16:1). “Si ton frère qui a péché refuse aussi d’écouter l’Eglise, qu’il soit pour toi comme un païen” (Mat.18:17). (10) EST INDIVISIBLE: (10) SONT SUJETTES A DIVISION: “Il y a des rivalités parmi vous...Pensez-vous qu’on “Je vous exhorte, frères, à prendre garde à puisse diviser le Christ? “(1Cor.1:13FC). “Ainsi, il ceux qui causent des divisions” (Rom.16: n’y a pas de division dans le corps” (1Cor.12:25FC). 17). “J’apprends que, lorsque vous vous “Toute maison divisée contre elle-même ne peut réunissez en assemblée, il y a parmi vous subsister” (Mat.12:25). des divisions” (1Cor.11:18). (11) EST UNIFORME DANS SES ELEMENTS (11) SONT MULTIFORMES DANS ESSENTIELS: LEURS MANIFESTATIONS: La prédication et l’enseignement de la parole de Selon leurs différentes ethnies, langues, Dieu, le baptême, la table du Seigneur, la commu- époques, régions, races, cultures, contextes nion fraternelle, les prières en commun, les oeuvres économiques, politiques, religieux, intellec- sociales, le travail pastoral, la sainteté, l’évangéli- tuels, etc., les Eglises auront une diversité sation, les charismes, l’amour, la libéralité, l’action de méthodes de travail; de fréquences, lieux missionnaire, le service, la bienséance et l’ordre, et genres de réunions; de pratiques et de les réunions au nom de Christ, l’édification, la coutumes; de liturgies, d’abstinences, de croissance, chants et louanges, défense et protec- façons de prêcher et de prier en public, d’ad-

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tion, conducteurs et autorité spirituels. ministrations, de pédagogies, de tenues et de stations aux réunions, d’expressions de piété, de rémunérations pastorales, de lieux de ren- contre, de styles et d’instruments de musique, de cérémonies, de fêtes, de formes d’aide sociale et d’évangélisation, etc. Nous avons découvert ce qui distingue les Eglises locales de l’Eglise universelle; il nous reste à voir ce qui les unit. B. Concordances entre l’Eglise universelle et les Eglises locales 1. L’Eglise universelle et les Eglises locales s’interpénètrent et sont inséparables Le jour de la première Pentecôte chrétienne, l’Eglise Universelle et l’Eglise locale à Jérusalem furent toutes les deux fondées au même instant suite à la venue du Saint-Esprit et la prédication de l’évangile. Il existait au départ l’unique Eglise universelle et une seule Eglise locale. Pendant une courte période, on pouvait difficilement distinguer l’une de l’autre. Plus tard, Paul pouvait parler de “l’Eglise de Dieu”, au singulier (1Cor.10:32) et également des “Eglises de Dieu”, au pluriel (1Thes.2:14). Elles dépendaient totalement, l’une comme les autres, de l’élément divin pour leur existence, et toutes appartenaient à Dieu. C’est pour cela que l’Ecriture parle de “l’Eglise de Dieu qui est à Corinthe” (1Cor.1:2) et non de l’Eglise de Corinthe. Cette règle est respectée dans le texte original partout ailleurs, quand l’Eglise est mise en rapport avec un lieu. Il ne s’agit jamais de l’Eglise de Jérusalem, de Pergame, d’Antioche de Thyatire, d’Ephèse, de Philadelphie, etc. (de génitifs), mais toujours des Eglise à ou en ces diverses localités. Les figures et images de l’Eglise universelle, même celles qui représentent celle-ci comme étant unique, sont également appliquées aux différentes Eglises locales: L’Eglise universelle est l’unique épouse de Christ (Jean 3:29; Eph.5:25,29,32; Apoc.19:7), mais Paul écrit à l’Eglise locale à Corinthe: “Je vous ai fiancés à un seul époux, pour vous présenter à Christ comme une vierge pure” (2Cor.11:2). La qualité général d’”épouse” se trouve aussi concrétisée dans les Eglises locales particulières. Jésus prédisait: “Il y aura un seul troupeau, un seul berger” (Jean 10:16), mais Paul parle de l’Eglise à Ephèse comme “le troupeau sur lequel le Saint-Esprit vous (les anciens) a établis surveillants pour paître l’Eglise de Dieu” (Act.20:28). Ce qui est vrai de l’unique troupeau l’était aussi de l’Eglise à Ephèse et de bien d’autres Eglises locales encore. L’Eglise universelle est présente dans les Eglises locales en la personne du Saint-Esprit qui les habite et de tous les chrétiens authentiques qui s’y trouvent. Les Eglises locales n’ont d’ailleurs pas d’existence en dehors de l’Eglise universelle et de ceux qui en font partie. Si une Eglise locale ne comptait plus aucun vrai croyant, elle seraient une Eglise “morte” comme celle de Sardes (Apoc.3:1). 2. L’Eglise universelle est l’essence dont les Eglises locales sont les manifestations Mais ne s’agit-il pas d’une contradiction de dire que l’Eglise est à la fois une et multiple et, en même temps universelle et locale? En effet, il serait contradictoire de le prétendre si on insistait que l’Eglise est une dans le même sens qu’elle est multiple, et universelle dans le même sens qu’elle est locale. Mais la contradiction n’existe pas quand on comprend que l’Eglise est unique et universelle sous un certain rapport, et multiple et locale sous un autre rapport. La Suisse est une sous son

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aspect national, et multiple sous son aspect cantonal, sans contradiction. Les 22 cantons correspondent à la nation et vice-versa. Dieu est un quant à son essence divine, et trois quant à ses personnes, sans contradiction. De même, l’Eglise est une et universelle sous un aspect, et multiple et locale sous un autre. Quels donc sont ces deux aspects de l’Eglise? L’essence unique de l’Eglise est la même où qu’elle se trouve; elle est universelle. Les Eglises locales manifestent cette essence dans une multiplicité de lieux. Elles sont autant de pendants, sur le plan local, de l’Eglise universelle, même si la symétrie n’est pas parfaite. Elles sont des modes d’expression particulièrs plus ou moins exacts, de la substance générale. Il peut y avoir d’innombrables différences extérieures sans que soit porté atteinte à l’essence intérieure de l’Eglise en chacune d’elles. Par contre, les Eglises locales ne doivent pas être conçues comme les parties composantes de l’Eglise universelle, car cette dernière ne leur doit pas son existence. Elles ne sont pas non plus des fractions de l’unique Eglise, car celle-ci ne peut ni ne doit être divisée. L’Eglise, corps de Christ n’est jamais représentée dans les textes comme ayant pour membres des Eglises locales, mais bien des croyants individuels. Il n’y a donc pas d’Eglises locales membres de l’Eglise universelle. La relation des Eglises locales à l’Eglise universelle n’est pas non plus une relation du réel à l’idéal. Premièrement parce que l’Eglise universelle est tout aussi réelle que les Eglises locales; mais encore parce que les croyants authentiques dont elle est exclusivement composée, sont eux-mêmes encore imparfaits. D’ailleurs, ces notions de “l’idéal” et du “réel” sont davantage philosophiques que bibliques. Aussi, leur relation n’est pas celle des nombreuses copies à un seul original, car toutes les Eglises locales sont légitimement différentes les unes des autres. Elles sont de multiples manifestations dissemblables et locales d’une seule et même essence universelle. 3. Une Eglise locale peut demeurer Eglise de Jésus-Christ, malgré bien des imperfections Toutes les différences entre Eglises locales ne sont pas légitimes. Il n’est pas possible d’appliquer sans distinction aux Eglises locales toutes les qualités qui appartiennent à la seule Eglise universelle. Les communautés locales ne manifestent pas toutes, avec la même fidélité, l’essence unique de l’Eglise universelle. Dans l’introduction à cet ouvrage, nous avons énuméré nombre d’ appréciations, positives et négatives, faites par Jésus et ses apôtres, au sujet de diverses Eglises locales du Nouveau Testament. Une Eglise est en bonne santé dans la mesure où elle manifeste les caractéristiques et les qualités de l’Eglise universelle. Ces qualités peuvent être présentes à des degrés divers. Elle est souffrante et faible dans la mesure où l’essence-même de l’Eglise s’y manifeste moins. La toute première Eglise locale à Jérusalem était imparfaite dès ses débuts. Le deuxième chapitre du livre des Actes nous relate sa fondation. Le chapitre cinq (1-11) nous parle déjà d’Ananias et de Saphira dont Satan avait rempli le coeur pour qu’ils mentent au Saint-Esprit et commettent un grave péché d’hypocrisie pour lequel ils furent châtiés par le Seigneur. Le chapitre six (1-6) nous relate la triste dispute dans cette Eglise, entre les croyants d’origine grecque et ceux d’origine hébraïque au sujet des veuves du premier groupe qui étaient négligées dans les distributions quotidiennes de nourriture. Nous voyons ensuite la réaction des croyants d’origine juive de cette Eglise quand ils apprennent que Corneille, un Romain et les siens avaient aussi reçu la parole de Dieu, suite à la prédication de Pierre. Au lieu de s’en réjouir, ils se mettent à critiquer Pierre parce qu’il était entré chez eux, des non-juifs, et avait mangé avec eux (Act.11:1-3). Finalement, d’autres judaïsants de l’Eglise à Jérusalem prennent sur eux, sans que les apôtres ni les anciens ne leur en donnent l’ordre, d’aller à l’Eglise à Antioche. Là, ils diront aux non-juifs qui s’étaient convertis qu’ils ne pouvaient pas être sauvés s’ils ne se faisaient pas circoncire

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(Act.15:1,24). En l’an 70, pour un moment, cette Eglise disparaît, quand Jérusalem est assiégée et rasée par le général romain Titus. La communauté avait vécu 37 ans à peine. En ce court laps de temps certains de ses adhérants s’étaient rendus coupables d’hypocrisie, de querelles, de racisme, d’hérésie et peut-être d’autres péchés encore. Et cependant, cette première Eglise locale était une Eglise du Christ dans toute l’acception du terme. L’Eglise à Corinthe était aussi, incontestablement, une Eglise chrétienne authentique. “Paul...à l’Eglise de Dieu qui est à Corinthe” (1Cor.1:1; 2Cor.1:1). “Le témoignage de Christ a été solidement établi parmi vous” (1Cor.1:6). “Vous êtes fermes dans la foi” (2Cor.1:24). “Ne savez-vous pas que vous êtes (collectivement) le temple de Dieu et que l’Esprit de Dieu habite en vous... le temple de Dieu est saint, et c’est ce que vous êtes” (1Cor.3:16,17). Mais, que de problèmes, que d’imperfections dans cette Eglise! Imperfections morales “De la débauche...l’un de vous a la femme de son père” (1Cor.5:1); “Plusieurs de ceux qui ont péché précédemment ne se sont pas repentis de l’impureté ...et des dérèglements auxquels ils se sont livrés” (2Cor.12:21). “L’orgueil” (1Cor.5:2; 4:6,18; 5:6; 2Cor.12:20); Conduite “charnelle” (1Cor.3:3); Problèmes relationnels “Divisions”(1Cor.1:10; 11:18); “Rivalités” (1:11; 2Cor.12:20); Clans (1:12; 3:4); “Sectes” (11:19); “Médisances...calomnies” (2Cor.12:20); “Vous avez des différends pour les choses de cette vie...Vous dépouillez...des frères” (1Cor.6:4,8); Erreurs doctrinales “Pourquoi quelques-uns parmi vous disent-ils qu’il n’y a point de résurrection des morts?...Si les morts ne ressuscitent point, Christ non plus n’est pas ressuscité...Et si Christ n’est pas ressuscité, votre foi est vaine, vous êtes encore dans vos péchés” (1Cor.15:12,16). “Nous ne falsifions point la parole de Dieu comme le font plusieurs” (2Cor.2:17); “Je crains que vos pensées ne se corrompent...Si quelqu’un vient vous prêcher un autre Jésus...un autre évangile...vous le supportez fort bien...Ces hommes-là sont de faux apôtres” (2Cor.11:3,4,13). Fronde ecclésiale “Il m’importe fort peu d’être jugé par vous” (1Cor.4:3); “Ne suis-je pas apôtre?...N’êtes-vous pas mon oeuvre dans le Seigneur?...Vous êtes le sceau de mon apostolat...C’est là ma défense contre ceux qui m’accusent (de ne pas être apôtre)” (1Cor.9:1-3). “Votre coeur s’est rétréci pour nous” (2Cor.6:12). “Que Timothée soit sans crainte parmi vous..Que personne ne le méprise” (1Cor.16:10,11). Désordre aux réunions “Si donc dans une assemblée de l’Eglise entière, tous parlent en langues, et qu’il entre de simples auditeurs ou des non-croyants, ne diront-ils pas que vous êtes fous? (1Cor.14:23). “Lorsque vous vous réunissez...quand on se met à table, chacun commence par prendre son propre repas, et l’un a faim, tandis que l’autre est ivre...ou méprisez-vous l’Eglise de Dieu? (1Cor.11:20-22). Infidélité spirituelle et religieuse “Si quelqu’un te voit, toi...assis à table dans un temple d’idoles...” (1Cor.8:10).

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“Que dis-je donc? Que la viande sacrifiée aux idoles est quelque chose? Nullement. Je dis que ce qu’on sacrifie, on le sacrifie à des démons et non à Dieu; or, je ne veux pas que vous soyez en communion avec les démons...Vous ne pouvez participer à la table du Seigneur et à la table des démons. Voulons-nous provoquer la jalousie du Seigneur? (1Cor.10:19-22). “Je suis jaloux de vous d’une jalousie de Dieu, parce que je vous ai fiancés à un seul époux, pour vous présenter à Christ comme une vierge pure. Toutefois, de même que le serpent séduisit Eve par sa ruse, je crains que vos pensées ne se détournent de la simplicité à l’égard de Christ (2Cor.11:2,3). Composition mélangée: “Je le dis à votre honte: certains d’entre vous ne connaissent pas Dieu” (1Cor.15:34 FC). “Examinez-vous vous-mêmes, pour savoir si vous êtes dans la foi; éprouvez-vous vous-mêmes...A moins peut être que l’épreuve ne soit en votre défaveur” (2Cor.13:5 Mar). C’est beaucoup d’imperfections pour une seule Eglise! Combien d’entre nous, confrontés à une telle Eglise locale près de chez nous, ne la classifierions-nous pas, sans autre forme de procès, comme: “apostate”, “infidèle”, “mondaine”, “hérétique”, “impure”, “sectaire” etc. et ne nous garderions-nous pas d’avoir des contacts avec elle? Paul évite deux pièges. D’une part, il ne lui dénie en rien son statut d’Eglise de Jésus-Christ à part entière, et affirme ce statut avec vigueur. D’autre part, il ne s’accommode d’aucune de ses imperfections, mais reste engagé avec elle dans le processus de discipline, d’affermissement, d’édification, de sanctification et de perfectionnement. Si tous ces manquements ne lui ôtaient pas son statut d’Eglise de Jésus-Christ aux yeux de Dieu, ils minaient incontestablement sa vitalité, affaiblissaient son témoignage et, à long terme, mettaient en danger son existence-même. Parmi les Eglises décrites dans le Nouveau Testament, celle à Corinthe constituait certainement un cas d’imperfection extrême. Heureusement, la fidélité, la pureté et la vitalité se manifestaient aussi à des degrés divers dans des Eglises comme celles à Philippe, à Philadelphie et à Thessalonique. Mais une Eglise gravement malade ne doit pas présumer de son statut d’Eglise du Christ. Il y a des limites à ne pas dépasser. 4. Une Eglise locale peut mourir, c.à.d. ne plus manifester l’essence de l’Eglise Universelle L’Ecriture décrit de plusieurs manières les divers degrés de déliquescence pouvant frapper une Eglise locale: Jésus dit à l’Eglise à Ephèse: “Souviens-toi donc d’où tu es tombé , repens-toi...Sinon, je viendrai à toi, et j’ôterai ton chandelier de sa place, à moins que tu ne te repentes” (Apoc.2:5). Il est donc possible que Jésus lui-même vienne à une Eglise locale qui est tombée, pour la juger. Dans ce cas, il ne se borne pas à éteindre la flamme, à priver l’Eglise de lumière et de chaleur. Il va jusqu’à ôter tout son chandelier de sa place, supprimer à l’Eglise locale sa qualité-même d’Eglise. Mais Dieu ne se laisse jamais sans témoignage. L’histoire de l’Eglise a été marquée par le transfert de la présence de l’Eglise universelle vers d’innombrables Eglises locales nouvelles. Jésus-Christ ne laisse pas à d’autres de juger l’Eglise qui refuse de se repentir, mais ce jugement ne menace en rien l’Eglise universelle dans son essence. Jésus dit à l’Eglise à Laodicée: “Parce que tu es tiède, et que tu n’es ni froid ni bouillant, je te vomirai de ma bouche. Parce que tu dis: je suis riche et je n’ai besoin de rien, et parce que tu ne sais pas que tu es malheureux, misérable, pauvre, aveugle et nu” (Apoc.3:16). Jésus rejette cette Eglise matériellement prospère avec dégoût parce que sa suffisance aveugle devant sa misère spirituelle provoque chez lui la nausée. Il la rejette, en tant qu’Eglise, parce qu’elle l’avait relégué à l’extérieur. Le Christ est obligé de frapper à la porte pour avoir accès à l’Eglise qui devait être la sienne. Malgré ce jugement sur la collectivité, il sollicite encore les individus qui s’y trouvent pour qu’ils se repentent et lui ouvrent la porte de leur vie (3:19-20). Les Eglises matériellement riches

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peuvent facilement se placer sur le même plan que n’importe quelle organisation humaine avec leurs édifices, commissions, budgets, publications, dotations, etc. et oublier qu’en tant qu’Eglises, elles sont d’origine et d’essence spirituelles et divines. Une telle Eglise locale peut poursuivre les affaires courantes tandis que Dieu a écrit en grand sur elle “Ikabod” - “la gloire a quitté” (1Sam.4:21,22). Jésus dit à l’Eglise à Sardes: “Je sais que tu passes pour être vivant , et que tu es mort...Cependant, tu as à Sardes quelques personnes qui n’ont pas souillé leurs vêtements...Celui qui vaincra, je n’effacerai point son nom du livre de vie” (Apoc.3:1,4,5). Ici encore, l’Eglise en tant que telle, malgré sa réputation et son apparence d’Eglise vivante, est spirituellement morte; son nom est effacé du livre de vie. Mais quelques individus dans la localité ne se sont pas laissé souiller et seront sauvés malgré le caractère moribond de l’Eglise. De nombreuses communautés, autrefois vivantes, ont dépéri, tout en s’appuyant sur une réputation passée et en se réclamant d’un nom qui représentait jadis d’incontestables richesses spirituelles. Les Eglises sont comme les hommes: quand l’Esprit quitte le corps, elles meurent. Mais quand une Eglise locale meurt-elle? Quand cesse-t-elle de manifester l’essence de l’Eglise universelle du Christ? Les appréciations mentionnées ci-dessus viennent toutes de Jésus-Christ lui-même. Nous devons les prendre au sérieux pour notre propre Eglise locale. Mais notre rôle n’est pas de porter des jugements sur les communautés des autres. Il ne nous est pas permis d’affirmer comme lui, d’une Eglise particulière: “Je connais tes oeuvres” (Apoc.2:2); “Je connais ta foi” (2:19); “Je sais que...tu es mort” (3:1). Ceci n’empêche que tous les manquements reprochés aux diverses Eglises locales dans les épîtres que les apôtres leur ont adressées, ainsi que tous les travers des sept Eglises en Asie mineure dénoncés par Jésus, tous ces maux, lorsqu’ils se sont accumulés, ont causé la mort d’innombrables Eglises locales. C’est le témoignage de 2000 ans d’histoire. Combien de cas d’inconduite, sans repentir ni discipline d’Eglise, faut-il pour qu’une Eglise décline moralement et perde son témoignage? Surtout si ces écarts concernent ses conducteurs! Combien de rivalités entre petits chefs de cliques et de clans faut-il pour qu’une Eglise se disloque? Combien d’autres jésus, d’autres évangiles peuvent être apportés par des faux docteurs et acceptés par les adhérents (2Cor.11:4) sans qu’une Eglise se retrouve sans fondement? Combien de mépris les personnes en vue d’une Eglise locale peuvent-elles avoir pour celui qui l’a implantée, pour ses émissaires et pour les pauvres de la communauté, sans se dissocier de l’Eglise universelle? Combien d’idoles les adhérents d’une Eglise peuvent-ils avoir - que ce soient l’argent ou des statues - sans que le mélange des spiritualités ne menace le culte qu’elle doit à Dieu seul? Quelle proportion des adhérents d’une Eglise locale peut être composée de chrétiens de nom, sans foi personnelle, pour que l’essence de l’Eglise universelle n’y soit plus valablement représentée? Quelle combinaison de plusieurs ou de tous ces éléments mènerait une communauté à la ruine? Dieu seul a le droit de répondre à ces questions, mais toute Eglise locale doit y réfléchir. Si une Eglise locale meurt, il vaut mieux qu’elle disparaisse et qu’elle n’encombre plus le paysage. Malheureusement, la notion territoriale de l’Eglise, concrétisée dans les pays dits chrétiens par la notion de “paroisse”, n’a pas permis à de nombreuses Eglises locales de disparaître. Elles l’auraient dû, étant donné que depuis longtemps elles avaient croulé spirituellement sous l’accumulation des inimitiés, des faux cultes et des scandales. Elles sont mortes, mais le cadavre est toujours là, gagné graduellement par la putréfaction. L’Amérique du Nord a connu maintenant 400 ans de christianisme (1600 - 2000). Tout le territoire de ce continent n’a jamais été divisé en paroisses. Une étude sociologique de la longévité moyenne de toutes les Eglises locales qui y ont été implantées pendant ces quatre siècles démontre que leur durée moyenne a été de 80 ans, après quoi elles disparaissaient. C’est probablement une des raisons de la vitalité que le Christianisme a connu sur ce continent.

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Au moment où commencèrent à apparaître les institutions (copte, arménienne, romaine, celte, montaniste, nestorienne, visigothe, etc.) et où on commença à lier le salut à l’appartenance à l’institution, on éprouva le besoin de distinguer entre l’institution considérée comme “vraie” et celles considérées comme “fausses”. On en arriva donc à vouloir définir quelles seraient les “marques” (notae) de la “vraie” Eglise, car on estimait que le salut en dépendait. Celles qui ont été le plus souvent retenues sont les suivantes. L’Eglise “vraie” serait: (1) “une” (2) “sainte” (3) “apostolique” et (4) “universelle”. Un certain nombre d’autres “marques” ont été proposées au cours de l’histoire tels: la pure prédication de la parole, l’administration valable des sacrements, la discipline, et d’autres encore. Cependant, ces considérations semblent être à côté de la question pour plusieurs raisons: (a) Ces marques n’ont jamais servi à définir l’Eglise de manière satisfaisante étant donné qu’on donnait souvent un contenu différent aux notions de “sainteté”, “unité”, “apostolicité” et “universalité, etc. (b) L’Ecriture parle de “faux christs et de faux prophètes” (Mat.24:24), de “faux apôtres” (2 Cor.11:13), de “faux frères” (Gal.2:4) et de “faux docteurs” (2 Pi.2:1) mais jamais ni de “fausse Eglise”, ni de “vraie Eglise”, mais seulement d’Eglises locales “mortes” (Apoc.3:1), “tièdes” (3:16), “charnelles” (1 Cor.3:1), “fidèles” (Col.1:2), “riches” (Apoc.2:9), etc. (c) L’Eglise n’est jamais présentée comme pouvant sauver, mais comme étant sauvée (Eph.5:23). Le salut dépend donc encore moins de l’appartenance à une institution quelconque. (d) Ces marques ne devraient donc jamais servir à comparer une institution avec une autre, mais tout au plus comme un test auquel une institution pourrait elle-même se soumettre . Aucune institution existante ne pourrait répondre à tous ces critères, peu importe l’interprétation qu’on en donnerait. Sommaire S’il est important de respecter les distinctions entre l’Eglise universelle et les Eglises locales, il faut également comprendre à quel point il est imposible de les séparer. Une vue juste de l’Eglise de Jésus-Christ en dépend. Cette insistance nous mène à constater qu’il existe aussi des conceptions de l’Eglise qui ne correspondent pas à la réalité biblique. Un souci de clarification nous oblige à examiner diverses notions fausses au sujet de l’Eglise.

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CHAPITRE 4 CE QUE L’EGLISE N’EST PAS Emil Brunner écrivait: “On a, pendant des siècles, ouvertement appelé Eglise quelque chose qui n’est pas l’Eglise” (Le Renouveau de l’Eglise, Labor et Fides, Genève, 1935 p.10). Procéder par élimination peut apporter un début de clarification. A. L’Eglise universelle n’est pas la chrétienté Au Moyen Age, la chrétienté était considérée comme l’ensemble de tous les pays ou de tous les peuples dits chrétiens. Plus récemment, on la conçoit comme tout ce qui, dans le monde, se donne pour chrétien ou ce que s’attribuent les différentes institutions. Peu importe la définition, les deux notions, Eglise universelle et chrétienté, ne se recouvrent pas. 1) Tous les habitants des pays dits chrétiens n’ont jamais été des croyants authentiques tandis que l’Eglise universelle est l’ensemble de ceux-ci. “Tous ceux qui me disent: Seigneur, Seigneur, n’entreront pas dans le Royaume des cieux” (Mat.7:21 Maredsous). 2) L’Eglise est le rassemblement hors de la populace, de ceux qui ont répondu à l’appel du Christ par l’évangile. Ils ont été extraits de peuples dont aucun n’a jamais été composé intégralement de vrais chrétiens. 3 Il ne suffit pas de se donner pour chrétien ou d’avoir été enrégimenter par l’une ou l’autre institution ecclésiastique pour faire partie de l’Eglise universelle. Il faut y avoir été introduit par l’action du Saint-Esprit. 4) Toutes les parties de la chrétienté ne sont pas animées d’une vie spirituelle commune comme l’est l’Eglise, corps de Christ. 5) La chrétienté dans toutes ses parties ne manifeste pas les éléments qui constituent l’essence-même de L’Eglise universelle: le rassemblement, l’ouïe de la parole de Dieu, le baptême, la participation à la table du Seigneur, l’exercice des charismes, les prières en commun, la sainteté, la communion fraternelle, etc. 6) La chrétienté englobe un nombre beaucoup plus important de personnes que l’Eglise. B. L’Eglise universelle n’est pas “l’ensemble des élus à travers les âges” On tient parfois le raisonnement suivant: “Si l’Eglise est composée d’élus, il s’en suit que l’Eglise

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universelle doit être la totalité des élus”. Selon cette idée, l’Eglise comprendrait tous les élus depuis Adam et Eve, jusqu’à nous qui, maintenant, avons la foi en Jésus-Christ. Mais si tous les membres de l’Eglise universelle sont des élus, il ne s’en suit pas nécessairement que tous ceux qui, depuis toujours, sont élus au salut, aient fait partie de ce que l’Ecriture décrit comme “l’Eglise du Christ”. Il est certain que le salut d’un homme pécheur a toujours été le même, depuis la chute, à travers tous les âges, sous les deux Testaments et qu’il le sera jusqu’à la fin. La bonne nouvelle de la rédemption par Jésus Christ est “un Evangile éternel” (Apoc.14:6). En effet, cette justification du pécheur a toujours été: - par la grâce seule, y compris pour ceux qui ont vécu avant Jésus-Christ et sous la loi de Moïse, comme David (Rom.4:5-8). - en vertu du seul sacrifice de Christ à la croix, y compris pour les péchés des hommes qui ont vécu dans les siècles passés, avant sa mort (Rom.3:25); mort préfigurée dans les sacrifices sanglants dès l’Eden (Gen.3:21b). - par la foi seule, comme celle d’Abraham (Gen.15:6), en ce qui avait été révélé au sujet du Messie aux différents moments de l’histoire du salut, à commencer, en Eden par l’annonce de sa victoire finale sur Satan (Gen.3:15). - L’élection individuelle des croyants, dès avant la fondation du monde (2 Thes.2:13; Eph.1:4), pour le salut personnel (2 Tim.2:10) a précédé l’élection collective d’Israël aux privilèges du peuple des alliances (Gen.17:7,8; 1 Chron.16:13; Rom.9:4)). La preuve en est la justification par la foi de Noé (Héb.11:7) et bien d’autres comme Abel, Seth, Enoch, Sem, Melchizédek et Job, au cours des siècles avant Abraham. D’ailleurs, l’élection d’Israël pour qu’il joue un rôle dans l’histoire de l’humanité ne garantissait pas, comme la première, le salut personnel de tout Juif (1Rois 19:18; Mat.10:6; 23:15,33; Rom.9:27-29, etc.). Le plan immuable de Dieu pour le salut des pécheurs, si important soit-il, n’est pas l’unique but que Dieu poursuit dans le monde. Outre le salut des pécheurs (Rom.1-8), Il cherche surtout à glorifier son grand Nom dans le plan qu’il a conçu pour le déroulement de l’histoire de l’humanité (Rom.9-11). L’humanité entière, dont il s’occupe, est constituée actuellement de trois groupes d’hommes: “les Juifs, les non-Juifs et l’Eglise de Dieu” (1Cor.10:31 FC). Pourquoi la théologie n’a-t-elle pas toujours tenu compte de ces distinctions? . La définition de l’Eglise en fonction de l’élection est apparue au moment de la Réforme quand la question du salut était au centre des préoccupations. C’est aussi une des raisons pour lesquelles le protestantisme a éprouvé des difficultés par la suite a formuler une théologie cohérente de l’Eglise. Au lieu d’élaborer une doctrine de l’Eglise à partir des données bibliques sur le salut, il aurait fallu le faire à partir des données bibliques sur l’Eglise. Ce fut une approche toute aussi mauvaise que celle qui avait prévalu avant la Réforme, à savoir de formuler la doctrine du salut en fonction de l’Eglise. Le témoignage explicite de l’Ecriture sur l’Eglise est suffisamment abondant et clair pour permettre qu’on en esquisse des traits précis, sans avoir recours à des déductions indirectes, à une construction basée sur la doctrine du salut. L’ecclésiologie est une discipline de la théologie de son propre chef. Les textes montrent que l’Eglise de Jésus-Christ a commencé avec lui et n’existait pas avant lui. Jésus déclarait: “Je te dis que tu es Pierre, et que sur ce roc je bâtirai mon Eglise” (Mat.16:18). (1) “Je”: Jésus, Dieu devenu homme, affirme qu’il serait lui-même le bâtisseur de l’Eglise. Celle-ci aurait-elle été bâtie par Jésus avant son incarnation? (2) “Mon”: Jésus appelle l’Eglise son Eglise à lui. Aurait-elle appartenu à Jésus avant que Jésus ne soit venu? (3) “Bâtirai”: Le temps du verbe demande que cette édification soit encore future par rapport au moment où Jésus prononçait ces paroles. Ce serait forcé d’interpréter sa déclaration comme

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signifiant: “Je continuerai de bâtir l’Eglise que j’ai fondée avant mon incarnation et dès le salut des premiers rachetés”. C’était bien la fondation de l’Eglise qui était encore future et non la reconstruction ou l’achèvement de celle-ci. (4) “Pierre”: Que l’Eglise soit fondée sur Pierre lui-même ou sur sa déclaration au sujet de Jésus ne change rien au fait qu’on ne peut concevoir la fondation de l’Eglise sans lui. Le rôle fondamental de Pierre n’est ni fortuit ni facultatif. D’où tient-on une Eglise qui existerait depuis toujours et sans Pierre? Les apôtres ont confirmé cet enseignement du Seigneur. “Le Christ a voulu créer en lui-même avec les deux, Juifs et païens, un seul homme nouveau, en établissant la paix, et les réconcilier avec Dieu, l’un et l’autre en un seul corps, par la croix” (Eph.2: 15,16). (1) Il s’agit du corps de Christ, l’Eglise. Ce corps, en vertu de la mort du Christ sur la croix est maintenant composée si bien de juifs que de païens. Avant la croix, ce ne fut pas le cas; Juifs et païens étaient à couteaux tirés (v.11-14). Pourquoi cette inimitié? - ce seul corps, l’Eglise qui devait les unir, n’avait pas encore été constitué. (2) Cette Eglise, Christ l’a créée en lui-même”. Une création, c’est du neuf. Elle n’existait pas en dehors du Christ et avant sa mort sur la croix. L’apôtre confirme en parlant de “L’Eglise que Dieu s’est acquise par la mort de son propre Fils” (Act.20:28 FC). (3) Ce “seul corps” de Christ est aussi appelé “un seul homme nouveau”, (non pas des hommes nouveaux). S’il avait existé avant Jésus-Christ, il n’était pas nouveau. Le mot est kainos - “neuf quant à sa nature”, “inconnu jusqu’alors”, et non pas neos - “jeune”, “récent”. Ce n’était pas le salut des païens qui était nouveau, car leur salut fut prédit dans l’Ancien Testament (Gen.22:18; Esa.49:6; 62:2; Zach.2:11; etc.) Ce qui était inconnu jusqu’alors, c’était leur union avec les juifs en un seul corps, par leur foi commune au Christ. Eph.3:4-6 et Jean 10:16 parlent également d’une entité nouvelle. Mais ce n’est pas uniquement l’oeuvre du Christ qui fit de l’Eglise une chose nouvelle. Il y eut aussi une action nouvelle du Saint-Esprit: “Nous avons tous, en effet, été baptisés dans un seul Esprit, pour former un seul corps, soit Juifs, soit Grecs” (1 Cor.12:13). L’Eglise, corps du Christ fut constituée à partir du moment du baptême dans l’Esprit Saint. Juste avant son ascension, Jésus déclare à ses disciples qu’ils devaient encore attendre avant d’être baptisés dans le Saint Esprit, mais qu’ils le seraient “dans peu de jours”. (Act.1:5). Ce baptême n’ayant pas encore eu lieu, l’Eglise, corps de Christ, n’avait pas encore été constitué. Il le fut, dix jours plus tard à la Pentecôte (Act.2) et, dès lors “Le Seigneur ajoutait chaque jour à l’Eglise ceux qui étaient sauvés” (2:47). Au début, à Jérusalem, ce furent surtout les Juifs qui croyaient au Christ qui étaient ajoutés à son corps. Mais il devait aussi y avoir des Grecs (des non-Juifs) dans cette Eglise. Plus tard, Pierre annoncera aussi l’Evangile aux païens, dans la maison de Corneille (Act.10:1- 11:18). Il décrira les suites de cette première prédication: “Lorsque je me fus mis à parler, le Saint-Esprit descendit sur eux, comme sur nous au commencement. Et je me souvins de cette parole du Seigneur (Act.1:5): Jean a baptisé d’eau, mais vous, vous serez baptisés dans le Saint-Esprit” (11:15,16). Cette parole de Pierre renvoie au jour de la Pentecôtre où, pour la première fois lui et les autres disciples furent baptisés dans le Saint-Esprit, et où fut constitué, de ce fait, le corps de Christ. Et Pierre d’appeler cela “le commencement”. Le commencement de quoi? Celui de L’Eglise. Sans cette action de l’Esprit Saint, pas d’Eglise. Augustin appelait le jour de l’effusion du Saint-Esprit le dies natalis, le jour de la naissance de l’Eglise. Karl Barth écrivait: “L’origine et la fondation de l’Eglise réside en le fait que l’Esprit Saint fut répandu sur les apôtres le jour de la Pentecôte” (“Le symbole des apôtres” p.167). Hans Kung déclare: “L’Eglise doit son origine, son existence et la suite de sa vie, à l’Esprit. En ce sens, l’Eglise est une création de l’Esprit” (“L’Eglise”, p.228)

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Il est significatif que Luc ne mentionne pas une seule fois le mot ekklesia dans son Evangile, mais qu’il le fait à 23 reprises dans son deuxième livre, le livre des Actes; et celà, après le récit de l’effusion de l’Esprit Saint à la Pentecôte. Ce même terme, ekklesia, revient encore à 116 reprises dans le reste du Nouveau Testament. C. “L’Eglise universelle n’est pas “l’Israël spirituel” qui aurait ‘remplacé’ la nation juive: Cette notion conçoit l’Eglise comme le prolongement et le développement du judaïsme authentique. L’Eglise se substituerait ainsi, dans le plan de Dieu, à la nation juive qui a rejeté son Messie et qui, par conséquent, aurait été rejetée par Dieu pour toujours. L’Eglise succéderait donc à l’Israël national qui n’aurait plus d’avenir en tant que tel. La première venue de Jésus se serait bornée à assurer une continuité spirituelle à ce qui avait commencé sous l’Ancienne Alliance, tout en l’élargissant pour inclure les Gentils. On a prétendu que les 77 fois que le mot hébreux “qahal”, dans l’Ancien Testament, a été traduit par le mot grec ekklesia dans la version des Septante (LXX), prouverait qu’Israël était “l’Eglise vétéro-Testamentaire”. Les considérations suivantes ne nous permettent pas de tirer cette conclusions: 1) Qahal est un terme très général pour un rassemblement, entre autres: judiciaire (Prov.5:14), de méchants (Ps.26:5), d’anges (Ps 89:6), d’une armée païenne (Ezech.38:4), d’Israël (Deut.31:30), etc. Le sens du terme dépend entièrement de ceux dont le rassemblement est composé et n’a pas en lui-même un sens religieux. 2) Qahal est aussi traduit dans la version des Septante par six mots grecs autres que ekklesia; ce qui montre qu’il s’agit d’un terme au sens large et non-spécifique. 3) Ekklesia dans la version des Septante désigne sans exception un rassemblement de personnes physiquement présentes. Il fallait être corporellement sur place pour en faire partie. Les absents n’étaient pas du nombre. Elle n’a pas d’existence en dehors d’une rencontre dans un lieu. Qahal n’exprime donc pas l’idée d’une unité spirituelle en divers lieux et à travers les âges. Quand le mot s’applique à des Juifs, il ne s’agit pas de la totalité de la nation par delà la Palestine et à travers les siècles. Par conséquent, on ne peut lui donner une signification technique pour désigner “l’Eglise de l’Ancienne Alliance” ou “l’ensemble des rachetés avant Jésus-Christ”. 4) Il aurait été simple pour les auteurs du Nouveau Testament, s’ils avaient voulu décrire l’Eglise comme le prolongement de l’assemblée religieuse juive, d’employer le terme “synagogue”, car ce mot signifie aussi “rassemblement” et revient 34 fois dans les Evangiles. S’ils ne s’en sont pas servi, c’est qu’ils tenaient à montrer la discontinuité entre l’Eglise du Christ et toute rencontre religieuse juive antérieure. La notion de “l’Israël spirituel” est une expression absente du texte de l’Ecriture. Elle est bien plus une construction théologique que le fruit de l’exégèse. Une simple tentative de remplacer le mot “Israël” par le mot “Eglise” dans le Nouveau Testament, ou le mot “Eglise” par “Israël”, démontre d’emblée les non-sens et la confusion qui en résultent. Ils ne sont jamais synonymes et ne peuvent être substitués l’un à l’autre. Aucune mention du mot “Israël” ne s’applique de manière évidente à des Gentils, c.à.d. à des personnes qui ne sont pas physiquement de race juive, tandis que l’Eglise est constituée majoritairement de non-juifs. L’expression: “l’Israël de Dieu” dans Gal.6:16 a trait uniquement aux Juifs qui étaient venus à Jésus-Christ (Berkouwer, Zahn, Burton, Dahl, Saucy, etc.). D’ailleurs, la nation d’Israël est encore reconnue comme peuple de l’Alliance, après avoir rejeté son Messie et après l’établissement de l’Eglise (Act.3:12,15, 25; Rom.9:3-4; 11:1,2,15,23,25,26,29; 1Cor.10:32). Il est inexact et abusif de déposséder le peuple de Dieu de l’Ancienne Alliance du nom “Israël” et de l’appliquer sans plus au peuple de Dieu de la Nouvelle Alliance. Israël n’a pas été remplacé par l’Eglise à cause de son rejet du Christ. Cette idée à été une des sources de l’anti-sémitisme au sein de la chrétienté.

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D’ailleurs, cette perennité du peuple d’Israël fut prédite longtemps avant son rejet du Christ. “Si j’admets un jour que ces lois de la nature sont devenues périmées, dit le Seigneur, alors j’admettrai aussi que les Israélites cessent pour toujours de former une nation!...Si quelqu’un parvient à mesurer la hauteur du ciel...alors je rejetterai l’ensemble des Israélites à cause du mal qu’ils ont commis” (Jér.31:36,37BFC). En d’autres termes: jamais! Le retour des Juifs en Palestine après 19 siècles et cela, malgré leur persistance à rejeter Jésus comme leur Messie, ne serait-ce qu’une péripétie de l’histoire sans aucun rapport aux promesses faites à cette nation dans l’Ancien Testament? N’aurait-il aucune signification théologique? D’ailleurs, l’idée que l’Eglise est la continuation du judaïsme à eu des conséquences néfastes pour celle-ci, sur le plan pratique. Sa vie en a été déformée et rétrécie et son expansion freinée. Karl Barth écrivait: “La confusion néfaste et fatidique...consiste dans le fait que l’Eglise chrétienne a recommencé de se comprendre et de se comporter comme une sorte de continuation ou de réédition du peuple d’Israël” (Dogmatik III,2,2 p.280). Mais trouvons-nous cette discontinuité dans l’enseignement de Jésus? Le Seigneur lui-même avait montré par deux images éloquentes (reprises dans les trois synoptiques) que le christianisme serait radicalement neuf par rapport au judaïsme et incompatible avec lui (Mat.9:14-17; Mc.2:18-22; Luc 5:33-39). Les pharisiens et les scribes (Luc 5:30) firent le reproche à Jésus: “Les disciples des pharisiens jeunent fréquemment et font des prières, tandis que les tiens mangent et boivent” (5:33). Le Seigneur explique la conduite différente des siens en ces termes: “Personne ne met une pièce de drap neuf à un vieil habit; car elle emporterait une partie de l’habit , et la déchirure serait pire” (Mat.9:16). Luc précise: “...et le morceau qu’il a pris n’est pas assorti au vieux” (5:36). Les lois du jeune, les temps de prière imposés, le discipulat ascetique codifiant le manger et le boire, les reproches légalistes des scribes adressés à Jésus, l’intolérance des pharisiens envers ses disciples, tout cela constituait la trame du judaïsme que Jésus traite de vieux vêtement dont le tissu est usé. Le drap neuf, par contre, c’est le christianisme, une tout autre étoffe, faite de la puissance de l’Evangile, de la motivation de la grâce, de la liberté de l’Esprit. Il ne faut pas, dit Jésus, chercher à réparer le judaïsme désuet en lui attachant des éléments extraits du tissage autrement fort du christianisme. Tenter déjà de le faire provoquerait la déchirure du judaïsme. Et sa destruction serait due, aussi bien à l’imperfection du vieux qu’à la force du neuf. Le christianisme n’est pas un raccommodage du judaïsme fatigué. Il est radicalement nouveau. La précision rapportée par Luc dit qu’il “n’est pas assorti au vieux” (5:36). En d’autres termes, les deux sont incompatibles, ils ne s’accordent pas, il ne faut pas les ajouter l’un à l’autre, les mélanger. Le christianisme n’est ni la continuation, ni le prolongement, ni une reconstruction ni une reconstitution du judaïsme. Mais Jésus ira encore plus loin dans une deuxième image: “Et personne ne met du vin nouveau dans de vieilles outres, car le vin nouveau fait rompre les outres, il se répand , et les outres sont perdues; mais il faut mettre le vin nouveau dans des outres neuves. Et personne, après avoir bu du vin vieux, ne veut du nouveau, car il dit: Le vieux est bon” (Luc5:37,38). Il est question de deux contenus, deux sortes de vin, le vieux et le nouveau; et aussi de deux contenants, deux sortes d’outres, les vieilles et les neuves. Le premier contenu, le vin vieux , c’est Moïse et son alliance, la loi écrite sur la pierre, les sabbats, les sacrifices sanglants, les dîmes, les oeuvres mortes (Héb.6:1), “les traditions des anciens” (Mat. 15:2), toutes les coutumes de la religion d’Israël. Le deuxième contenu, le vin nouveau correspond au drap neuf de la première image; c’est le breuvage rafraichissant du joyeux message, d’une nouvelle alliance par le sang du Christ, d’une révélation plus grande de vérité, d’une vie par la grâce, de la plénitude de l’Esprit. Le premier contenant, les vieilles outres, ce sont les structures, le cadre à l’intérieur desquels se gardait le vin vieux de l’ancienne religion: les outres de la nation juive, d’un seul pays, de l’ancien

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régime théocratique, d’un temple en un seul lieu, de la prêtrise hierarchisée, des formes désuètes, des lourdeurs institutionnelles, etc. Ces structures étroites et rigides ne pourraient contenir le vin nouveau et pétillant du Saint-Esprit et de l’Evangile, sans se rompre. Ce serait la destruction d’Israël. Mais sans contenant nouveau, sans cadre adapté à la puissance d’expansion de l’Esprit, ce serait l’épanchement du vin nouveau, la dissipation de l’Evangile. Il fallait des structures neuves, souples, larges, légères, flexibles, permettant l’annonce de l”Evangile à toutes les nations jusqu’aux extrémités de la terre, aptes à préserver et favoriser l’action puissante de l’Esprit. Il fallait le cadre de l’unique Eglise universelle, habitation de Dieu en Esprit, accueillante aux hommes de tous horizons. Il fallait aussi la variété des formes de la vie communautaire au sein d’Eglises locales pouvant se contextualiser dans les différentes cultures humaines, sans se laisser déterminer par elles. Dieu a voulu qu’on “connaisse aujourd’hui par l’Eglise la sagesse infiniment variée de Dieu” (Eph. 3:10). Il fallait aussi que ces Eglises puissent se multiplier à l’infini sans contraintes légalistes. Pourquoi donc certaines personnes continuent-elles à préférer les vieilles outres et le vieux vin? Dire que l’Eglise est le nouvel Israël favorisera toujours l’Institution nationale, territoriale, cléricale, théocratique, traditionnaliste et formaliste. Autant d’entraves qui empêchent l’Eglise d’être pleinement l’Eglise et de remplir sa mission dans le monde entier et pour toutes les classes de la société. Mais le vin vieux judaïsant, garde, pour ceux qui en ont goûté, un attrait certain. Jésus termine l’image par une constatation: “Personne ne veut du vin nouveau après en avoir bu du vieux. On dit en effet: “Le vieux est meilleur” (5:39 FC). Voilà qui explique la tentation des destinataires de l’épître aux Hébreux de retourner au judaïsme après être devenus chrétiens ainsi que le combat d’arrière-garde que Paul a dû livrer jusqu’à la fin de sa vie contre les chrétiens judaïsants. Cela explique aussi l’attachement aux habitudes de la religion vénérable, sacerdotale, sacramentelle, liturgique et officielle chez tous ceux qui ont connu celles-ci depuis toujours. Ce vin vieux, riche en culture, a meilleur goût pour ceux qui n’ont connu que cela. Mais il ne sera pas nécessairement du goût de l’homme post-chrétien ou des adeptes de religions païennes qui, eux aussi ont besoin d’entendre l’Evangile et de goûter au salut. Le vin nouveau sera toujours à l’étroit dans un prolongement d’Israël. Ce dernier veut toujours conserver; Dieu veut renouveler. Par contre, il serait insensé de nier l’utilité de certaines traditions qui ont traversé les siècles de l’Eglise universelle, comme il serait ridicule pour une Eglise locale ayant, ne fusse que quelques années d’existence de prétendre être libre de toute tradition. On ne lit jamais la Bible tout seul, mais dans la communion des pères et des docteurs de l’Eglise. On peut distinguer les faux docteurs de ceux qui sont vrais (sinon infaillibles) par les bons fruits qu’ont porté ces derniers (Mat.7:15-20), dans leur vie personnelle (Gal.5:22,23) et dans leur ministère (Rom.1:13). Et beaucoup de façons de faire dans la vie communautaire ont démontré leur utilité à travers les années et méritent d’être respectées et préservées. Une saine approche des traditions apporte équilibre doctrinal, enrichis- sement de la vie, transmission de vraies valeurs et crainte du traditionnalisme. L’éminent historien des dogmes Jaroslav Pelikan a formulé comme suite la distinction entre tradition et traditionnalisme: “La tradition est la foi vivante des morts; le traditionnalisme est la foi morte des vivants”. D. Aucune des institutions ecclésiastiques, confessions ou dénominations chrétiennes n’est l’Eglise universelle. Elles ne sont pas non plus des Eglises locales Aucune d’entre celles-ci ne peut prétendre être “la seule vraie Eglise”.Le Nouveau Testament ne dénomme jamais un groupe d’églises locales une Eglise, au singulier. Il n’est pas bibliquement correct de parler de “l’Eglise Catholique, Luthérienne, Nationale, Anglicane, Réformée, Apostolique, de France, Méthodiste, Chinoise”, etc. On ne trouve dans la Bible aucune trace

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d’organisations ecclésiastiques dotées de structures de pouvoir supra-locales permanentes. Rien ne se situe entre l’Eglise universelle et les églises locales, qui n’est ni vraiment universel, ni strictement local. L’Ecriture ne leur accorde aucun statut et Dieu n’en tient pas compte. Bien entendu, l’institution ecclésiastique, comme toute autre parcelle de réalité, n’échappe pas à la providence divine, mais elle ne figure pas, en tant que telle, dans le programme et les projets de Dieu pour son Eglise. En France et aux Pays-Bas, après la Réforme, on a choisi comme noms au départ: “Les Eglises Réformées (pluriel) de France”et “Les Eglises Réformées Néerlandaises”. Mais avec le temps, la tendance centralisatrice présente dans toute organisation humaine a conduit au changement de ces noms en “L’Eglise (singulier) Réformée de France “ et “L’Eglise Réformée Néerlandaise”. Institutions et dénominations sont des entités hybrides qui divisent l’Eglise universelle et constituent des menaces pour le statut légitime des Eglises locales. Cela veut-il dire que chaque Eglise locale est condamnée à vivre dans l’isolement? Les Actes des apôtres et les épîtres décrivent avec force détails les relations fraternelles entretenues par les Eglises locales entre elles d’égales à égales. Nous approfondirons plus loin le témoignage biblique au sujet de l’unité de l’Eglise. Ces relations entre Eglises locales projettent, à plusieurs égards, l’image d’un tissu, d’un réseau plat. Mais ni exemple ni commandement biblique ne suggèrent des superstructures permanentes de pouvoir supra-locales, avec configurations synodales, nationales, hiérarchiques, pyramidales, multinationales ou autre. Aucune institution ecclésiastique, ni même la totalité des dénominations réunies ne correspondent à l’Eglise universelle, car le Catholicisme regroupe moins de la moitié des chrétiens dans le monde et le “Conseil Mondial des Eglises” moins d’un tiers de ceux-ci. On a pensé contribuer à l’unité entre Eglises locales en les groupant et en les organisant en associations ou synodes. L’Eglise n’est pas une chose, mais des gens. Pire, ces milliers d’organisations supra-locales qui prétendent unir, sont devenues le grand symbole de la division du christianisme. Tout ce qui est ajouté à la révélation biblique finit par séparer les croyants au lieu de les unir. Mais comment la plus grandes des institutions, le Catholicisme Romain, a-t-il vu le jour? L’empereur Constantin fit du christianisme la religion officielle de l’empire romain et celle-ci vint à en épouser les structures. Le droit romain en fit une entité juridique, l’administration de l’empire en fit une hiérarchie et les légions en firent une puissance militaire. A partir de ce moment l’institution et la société ne firent qu’un. L’homme christianisé devint imprégné de l’institutionnel: droit canon, réflexes cléricaux, liens sociaux anodins en apparence, rites de passage, modes de pensées religieuses, vocabulaire ecclésiastique, relations d’influence, références culturelles, impressions psychologiques indélébiles et irréversibles, une toile d’araignée, l’atmosphère qu’on respire sans s’en rendre compte. L’institution sacralisée fait partie depuis le 5e siècle de l’inconscient collectif en Occident. Et la plupart des chrétiens et des non-chrétiens se montrent incapables aujourd’hui encore, de penser à l’Eglise en des termes autres que ceux de l’institution. Celle-ci fait partie de leur culture, ayant été déterminée en grand partie par leur culture. On n’arrive pas à se défaire de ces catégories-là et à respecter les catégories révélées dans l’Ecriture. Malgré le poids et l’omniprésence des principales branches de la chrétienté, nous chercherons à ne réfléchir en fonction d’aucune d’elles et ainsi à éviter le piège du sectarisme. Nous voulons, avant tout, considérer toutes les Eglises locales, que celles-ci se trouvent à l’intérieur de ces branches du christianisme ou en dehors d’elles. Nous réfléchirons aussi en fonction de l’Eglise universelle à laquelle aucune des institutions ne correspond. Bien entendu, il nous faudra pouvoir parler des différentes confessions, étant donné qu’elles font partie de la réalité sociologique qu’est la chrétienté et dont doit rendre compte toute ecclésiologie sérieuse. Cependant, en l’absence d’un troisième sens du mot “Eglise” dans l’Ecriture, nous éviterons d’attacher d’aucune manière le mot “Eglise” au singulier à un groupement d’Eglises ou à des structures supra-locales, et chercherons

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plutôt à parler de Catholicisme, d’Orthodoxie, d’Anglicanisme, de Protestantisme, de Méthodisme, de “mouvements” réformés, évangéliques, pentecôtistes, etc. Ces étiquettes comportent de plus en plus d’inconvénients pour les Eglises nouvelles qui voient le jour dans un occident déchristianisé et dans un tiers-monde non-chrétien. Environ 1600 communautés locales nouvelles se créent actuellement chaque semaine dans le monde (K. B. Mulholland, E.M.Q., juillet 1999). Les conducteurs de ces Eglises trouvent peu intéressant de se voir coller des noms provenant de l’histoire et de divisions dans d’autres pays à d’autres époques. Quand ils sont confrontés à une société sécularisée, à l’Islam ou aux religions des Indes, le label “anglican” ou “baptiste” comporte plus d’inconvénients que d’avantages. Ils préfèrent se démarquer du monde et trouver une identité commune sous le nom de Jésus Christ, sans plus. Leslie Newbigin déclare dans son plaidoyer pour une ré-évangélisation de l’Occident: “J’affirme la nécessité d’une rupture radicale avec cette forme du christianisme qu’on appelle la dénomination...Ni séparément ni ensemble les dénominations ne peuvent devenir la base d’une rencontre authentiquement missionnaire avec notre culture” (“Can the West be Converted”, I.B.M.R. Jan. 1987). Par contre, la “théologie de la libération” en Amérique latine entre les années 1970 et 1985 fut à la base de la formation d’une multitude de “communautés chrétiennes de base”. Favorisées par certains évèques catholiques, mais opposées par d’autres, elles avaient pour but de conscientiser les pauvres, leur apprendre à lire et les aider à défendre leurs droits civils. Avec le temps, cette alphabétisation et la multiplication des traductions de la Bible en langues vernaculaires, conduisirent ces communautés à fonctionner comme des cercles d’étude biblique et à déveloper une spiritualité propre plus intense. Mais cette vitalité nouvelle était de moins en moins bien contenue à l’intérieur des structures institutionnelles et théologiques du catholicisme. Par surcroît, la pénurie de prêtres et l’habitude de lire la Bible entre soi, amenèrent un nombre grandissant de ces communautés à se constituer en Eglises locales et à se séparer du romanisme. Certaines d’entre elles dirent ne plus être Catholiques Romaines, mais “catholiques hispaniques”. Leur contextualisation dans les diverses cultures, leurs Bibles en langues indigènes, leurs conducteurs issus et reconnus de la base ont apporté une croissance exponentielle du christianisme. Celui-ci, à son tour, favorise des familles stables, du courage au travail, des solidarités communautaires, un niveau de vie en hausse et des droits civils retrouvés. Cependant, ce mouvement n’est pas limité à l’Amérique latine. Il est un nombre grandissant de chrétiens sincères en Occident, qu’ils soient Catholiques, Protestants ou autres, à rejeter “l’institution”. Ils aiment et suivent Jésus et sont convaincus de l’importance de la communauté. Mais ils ne voient plus la nécessité d’une hiérarchie ou d’une bureaucratie cléricale dont le poids accumulé au cours des siècles est vécu par eux comme paralysant, écrasant, inefficace et dépassé. Ils ne veulent pas se séparer du peuple de Dieu, mais d’institutions qui ont cessé d’être au service de l’Eglise et qui en déforment le visage. Ils aspirent à un retour à la simplicité de l’Evangile. Le nombre de catholiques en Europe qui se réunissent en communautés parallèles pour lire la Bible, prier et agir, libres de toute intervention du clergé, va grandissant. Ce mouvement se trouve encouragé, même par certains prêtres. Le chanoine belge Pierre de Locht déclarait: “C’est à la base que se trouvent les intuitions fondamentales...Le véritable centre de l’Eglise, ce sont les communautés de base...Il y a chaque samedi, depuis 1973, une “paroisse libre” avec des chrétiens en recherche au-delà des fausses hiérarchies et des étiquettes collées par elles...Je pousse les chrétiens à oser être adultes et responsables. Et qu’ils créent partout ce dont ils ont besoin pour vivre l’Evangile sans autorisation d’en haut” (“Le Soir” de Bruxelles du 30 oct. 1999). Le mouvement “Oasis” en Pologne qui compte actuellement plusieurs centaines de milliers

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d’adhérents parmi les catholiques est un exemple frappant de cet affranchissement en Europe. La croissance du Protestantisme dans le monde se situe aussi au niveau des Eglises locales autonomes et non à celui des grandes dénominations, généralement en régression. Le gigantisme des conglomérats de la religion ne répond plus aux besoins des fidèles et n’a aucun attrait pour les non-croyants. L’avenir de l’Eglise universelle se situe dans les Eglises locales qui ressemblent d’avantage à des P.M.E. de la foi et du service. Elles sont de taille modeste, flexibles, agiles, motivées, pouvant s’adapter rapidement aux changements et mettant au travail nombre de chrétiens précédemment au chômage spirituel. Elles forment facilement avec d’autres communautés proches et lointaines, des réseaux de colaboration, d’entre-aide et de partenariat, qui se font et se défont selon les besoins et les circonstances. Des murs entre institutions, artificiellement dressés, tombent ou se voient contournés. Nous entrons dans une ère “post-dénominationnelle”. David Barrett déclare que le bloc chrétien actuellement le plus important, après le Catholicisme, est celui qu’il appelle “les indépendants”. Ils sont les seuls à grandir à un rythme supérieur à celui de la croissance démographique dans le monde. (The Statistical State of the Missionary Enterprise” , Michaël Jaffarian; Missiology 30, no.1 - Jan.2002). Le mouvement oecuménique a raison de dire que le scandale du christianisme ce sont les dénominations. Mais la solution du problème n’est pas celle qu’il propose, c’est-à-dire de créer des institutions toujours plus grandes par des fusions. Au contraire, il faut tenir de moins en moins compte d’entités qui sont surtout culturelles et ne jouissent d’aucun statut biblique. Il serait préférable de les laisser disparaître parce qu’elles font obstacle aux relations vraies entre Eglises locales et, par conséquent à une unité authentique au sein de l’Eglise universelle. Même si toute la chrétienté fusionnait en une seule immense organisation mondiale, celle-ci ne serait toujours pas l’Eglise une, sainte, universelle et apostolique. Et elle ne tarderait pas à se livrer à des brimades, voir à des persécutions de certains dont la seule hérésie serait de ne pas se rattacher à elle. Les exemples de cette tendance ne manquent guère dans les diverses institutions d’Etat orthodoxes, catholiques ou protestantes dites “Eglises officielles”. Celles-ci ont toujours été tentées de faire valoir leur statut privilégié au désavantage des autres chrétiens du pays, relégués d’office au statut de “sectes”. Mais on n’arrive pas à penser à l’unité de l’Eglise en termes autres que ceux de l’organisation. Malgré la multiplication sans précédant des Eglises locales autonomes dans le monde, on persiste à déplorer cette “prolifération” comme étant un “morcellement” de l’Eglise. La création d’une communauté locale non-affiliée à une institution, est interprétée d’office comme une scission. Ne pas se joindre à une dénomination existante, de préférence ancienne et occidentale, est taxé de “schisme” ou tout au moins d’une ecclésiologie déficiente. Un example de plus de l’aveuglement de la pensée institutionnelle. Cela revient encore à concevoir “l’institution” et l’Eglise universelle comme étant identiques et d’oublier que la pluralité des Eglises locales est une donne biblique importante, le terme “les Eglises”, au pluriel, y figurant plus d’une trentaine de fois. Leur multuplication et leur autonomie, en elles-mêmes, ne nuisent en rien à l’unité vraie de l’Eglise Universelle. C’est précisément leur adhésion à l’une des institutions, qui dresse une barrière entre elles et toutes les autres églises du monde et constitue une tendance sectaire. E. Les ordres religieux, oeuvres, mouvements et groupements catholiques et orthodoxes et les organisation para- ou inter-ecclésiastiques protestantes et anglicanes ne sont pas des Eglises locales Jésuites, Dominicains, Bénédictins, Augustins, Rédemptoristes, Capucins, mouvements de jeunesse, oeuvres sociales, groupements professionnels, etc. constituent-ils, au sein du Catholicisme ou de l’Orthodoxie, des Eglises locales au sens biblique?

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Les sociétés bibliques et missionnaires, les associations humanitaires et caritatives, les mouvements d’étudiants et de jeunesse, les organisations chrétiennes pour les média, au sein du protestantisme et de l’anglicanisme, peuvent-ils être considérés et gérés comme des Eglises? 1) Ils ne sont pas des Eglises locales, car tous ceux qui en font partie ne sont jamais physiquement réunis en un seul lieu. 2) En général ils sont internationaux et non locaux, en ce qu’ils recrutent leurs collaborateurs dans plusieurs pays et qu’ils déploient leurs activités dans d’autres pays encore. 3) La plupart d’entre eux n’administrent ni le baptême ni la table du Seigneur - comme doit le faire une Eglise. 4) La plupart se consacrent à un ministère spécialisé et ne cherchent pas à voir s’exercer en leur sein la diversité des charismes représentés dans les Eglises. 5) Tous ne sont pas à même de pourvoir à long terme une vie communautaire et les soins pastoraux dont tout croyant a besoin. 6) Ces organisations peuvent avoir une justification biblique de principe dans les équipes spécialisées décrites dans le livre des Actes et les épîtres. Celles-ci étaient composées de disciples d’Eglises locales et de pays différents sous la conduite d’un apôtre et se consacraient à l’évangélisation, à l’encadrement d’Eglises naissantes et à l’enseignement. Mais elles ne devaient jamais se substituer aux Eglises locales duement constituées. Et l’engagement d’un chrétien en leur sein ne devait pas prendre la place de son engagement à long terme dans une Eglise locale. F. Les édifices consacrés au culte chrétien ne sont pas des Eglises locales “Je passe devant l’église en allant à mon travail”. “Je voyais l’église par dessus les toits”. Ce sens apparaît pour la première fois en français au 11e siècle. Il prête à confusion en faisant oublier que l’église est constituée de personnes, qu’elle est un rassemblement de chrétiens, non pas un bâtiment de pierres ou de briques dans lequel se rassemblent les chrétiens. Les croyants de l’Eglise à Ephèse étaient “édifiés pour être une habitation de Dieu” (Eph.2:22). Il faut donc affirmer avec Paul que “Dieu n’habite point dans des temples faits de mains d’hommes” (Act.17:24). Il n’y a pas Eglise là où un lieu de culte est vide de croyants. Aucune trace d’une dédicace d’un tel lieu pour en faire un “sanctuaire” n’existe dans le Nouveau Testament, ni même dans la chrétienté avant le 6ème siècle. Jésus annonce un cadre nouveau pour le culte: “Crois-moi, l’heure vient où ce ne sera ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père...mais en Esprit et en vérité” (Jean 4:21,23). Des rassemblements réguliers de chrétiens dans les catacombes ou dans un lieu du désert, au nom du Christ, étaient des Eglises locales parce que Jésus était au milieu d’eux. Après avoir appelé le bâtiment “l’église”, certains ont décidé qu’aucune “église” ne pouvait être ouverte aux fidèles sans la permission de l’évêque diocésain. L’adoration en commun en dehors d’un édifice consacré n’était plus admis. Par conséquent, l’édification de basiliques et de cathédrales prit bientôt le pas sur l’édification de la “maison spirituelle” constituée de “pierres vivantes” (1 Pi.2:5). En français, la convention moderne veut que le bâtiment, dénommé “église” s’écrive avec un petit “é” et l’assemblée des chrétiens avec un “E” majuscule. Rien dans cette convention, ne permet de distinguer l’Eglise universelle de l’Eglise locale et ajoute à la confusion dans les esprits. G. Nimporte quel cercle, groupe, communauté ou rassemblement chrétien n’est pas forcément une Eglise locale Si plusieurs des éléments constitutifs ou essentiels d’une Eglise locale venaient à manquer à un collectif chrétien, celui-ci, malgré l’utilité qu’il pourrait avoir, n’aurait pas la qualité d’Eglise locale aux yeux de Dieu. Ces éléments constitutifs sont: des réunions régulières en un même lieu au nom

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de Jésus-Christ, un nombre chiffrable d’adhérents, de l’organisation, des conducteurs, la pratique du baptême, la célébration de la table du Seigneur, le ministère de la parole, les prières en commun, l’action missionnaire, l’administration des libéralités, la communion fraternelle, l’exercice des charismes, les oeuvres sociales, le travail pastoral, l’ordre et la discipline. H. Conclusions pratiques 1. On trouve aujourd’hui un certain nombre d’Eglises locales, authentiques aux yeux de Dieu, dans toutes les principales branches du christianisme (catholique, protestante, orthodoxe, anglicane, etc.) et aussi en dehors de celles-ci. Une communauté ou une paroisse chrétienne est une Eglise locale aux yeux de Dieu a) - à condition de compter au moins un certain nombre d’adhérents baptisés ayant personnellement répondu à l’appel du Christ par la foi en la bonne nouvelle du salut par sa mort et sa résurrection, b) - à condition d’avoir des rencontres régulières en un même lieu au nom de Jésus-Christ sous la conduite de bergers, pour rendre un culte à Dieu, écouter sa parole, célébrer la cène, et se préparer à le servir, c) - à condition de se distinguer du monde des non-croyants en comptant un certain nombre d’adhérents qui ne se livrent pas à de faux cultes, à l’inconduite ou à des enseignements portant atteinte aux fondements de la foi, d) - si elle est un couvent, considéré individuellement (son ordre religieux n’est pas une Eglise locale. Voir plus haut). Le mot français “couvent” vient du latin conventus qui signifie “assemblée”. Et tout couvent est tenu d’avoir un lieu de culte, des offices, un supérieur et des oeuvres de service. Cependant, il n’est une Eglise locale authentique que si au moins un certain nombre de ses religieux ou religieuses y sont pour avoir répondu personnellement à l’appel du Christ et se séparent de faux cultes comme celui de Marie et des saints, d’inconduite comme les pratiques homosexuelles et de vues théologiques modernistes ou libérales. e) - à condition de répondre aux points a, b, et c de la description plus haut. Elle peut aussi être une Eglise dans toute l’acception du terme, sans pour cela être affiliée à l’une ou l’autre institution ecclésiastique, confession, dénomination ou association chrétienne. 2. N’importe quelle Eglise locale chrétienne authentique devrait pouvoir entretenir des relations fraternelles avec n’importe quelle autre Eglise locale authentique dans le monde a) - sauf si elle appartient elle-même à une institution ou une secte qui interdit de telles relations. b) - sauf si le but de ces relations était d’attirer l’autre Eglise locale à se joindre à l’institution ou dénomination dont elle-même ferait partie. Ce manque de franchise nuirait forcément aux relations. c) - à condition qu’elle évite de fraterniser avec tout individu se donnant pour chrétien, en son sein ou dans l’autre Eglise locale, qui crée des divisions (Tit.3:10), qui fait chuter les gens par l’erreur qu’il enseigne (Rom.16:17), qui est immoral, idolâtre, ivrogne, ou voleur (1Cor.5:11). Quand le Nouveau Testament demande aux chrétiens de se séparer, il ne s’agit jamais de se séparer d’une Eglise, mais de personnes individuelles dans l’une ou l’autre Eglise. Ces personnes sont donc uniquement celles qui prétendraient être chrétiennes. (Il ne s’agit pas de se séparer des adeptes de

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religions ou de philosophies non-chrétiennes, ni de personnes immorales ne faisant aucune profession de foi en Christ. Sinon, il faudrait sortir du monde (1 Cor.5: 9-13). Il ne faut ni juger ces dernières, ni se séparer d’elles, ni les combattre, mais entretenir avec elles de bonnes relations (pour autant que cela dépende de nous), en vue de les servir et de leur présenter Jésus). d) - si elle comprend que les vrais chrétiens dans les Eglises locales authentiques au sein du catholicisme, de l’orthoxie ou du protestantisme actuels ne peuvent être tenus personnellement responsables des violences contre d’autres croyants lors des schismes, des croisades ou des guerres de religion qui parsemèrent les siècles passés. Nombreuses sont les divergences et les querelles d’antant qui, pour la plupart aujourd’hui, ne sont plus que des souvenirs imprécis. Mais les positions prises jadis par les institutions, subsistent longtemps après que les causes des antagonismes ont disparu. Les institutions semblent souvent servir à entretenir les préjugés et les rancoeurs du passé. On n’est pas obligé d’en tenir compte. 3. On trouve aujourd’hui un certain nombre d’églises locales mortes aux yeux de Dieu, dans toutes les branches du christianisme (catholique, protestante, orthodoxe, anglicane, etc.) et aussi en dehors de celles-ci. Une communauté ou une paroisse chrétienne est une Eglise locale “morte” comme celle de Sardes (Apoc.3:1) a) - si l’essence de l’Eglise universelle s’y trouve si peu présente que l’Eglise locale ne constitue plus un organisme viable - même si elle “passe pour être vivante” (Apoc.3:1). Ce seuil minimum de vie est atteint quand elle ne compte plus de croyants authentiques mais uniquement des chrétiens de nom, purement “sociologiques”. b) - si les maladies qui la rongent deviennent à tel point nombreuses, graves et généralisées, sans que personne n’y apporte remède, que Jésus en vient à la “vomir de sa bouche” (Apoc.3:16). Ces maladies sont principalement, la négation des vérités fondamentales de la foi, l’inconduite morale, le mélange religieux et spirituel (syncrétisme, occultisme), les rivalités et les divisions ainsi que le mépris des conducteurs et des autres croyants en Christ. Ces avertissements solennels du Christ, Tête de l’Eglise, ne sont pas de vaines menaces. Des Eglises mortes existent - même si certaines d’entre elles ont un semblant de vie (Sardes) et une prospérité matérielle (Laodicée). Trois des évangiles contiennent un enseignement de Jésus sur un figuier qui ne portait pas de fruit. Le fait d’avoir des feuilles - une apparence de vie - n’empêche pas le verdict du Maître de tomber: “Coupe-le; pourquoi épuise-t-il le sol?” (Luc 13:7 Jérus., TOB). Une Eglise morte mais encore présente a des effets nuisibles - elle est en scandale et “elle épuise le sol”, c.à.d.. elle empêche la croissance d’autres Eglises. Si elle est morte, il vaut mieux qu’elle disparaisse. Nous avons évoqué plus haut la saine disparition au cours des quatre derniers siècles, de milliers d’Eglises locales en Amérique du Nord où “l’Eglise officielle” et ses paroisses séculaires sont inconnues. Bien pire est la décomposition de paroisses d’Eglises d’Etat, mortes depuis longtemps, mais dont les corps sans vie sont entretenus artificiellement à perpétuité. Egalement inadmissible est leur prétention à être des chasses gardées dont le “territoire” serait violé si une autre communauté chrétienne venait à y naître. Sommaire Nous avons examiné plusieurs significations qu’on donne parfois au mot ekklesia, qui sont dépourvues de fondement biblique. Nous pouvons maintenant aborder le témoignage explicite du Nouveau Testament se rapportant à l’Eglise. Malheureusement on a parfois laissé entendre qu’il

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n’était pas possible de tirer du Nouveau Testament un seul témoignage concordant sur l’Eglise. La notion que les différents auteurs humains en présentent des conceptions différentes a semé la confusion et a nui à son édification. Le but du chapitre suivant, de sa présentation schématique et de sa trame trinitaire, est de faire ressortir la cohérence de l’Ecriture sur la question . CHAPITRE 5 L’EGLISE ET LA TRINITE Le Nouveau Testament propose-t-il plusieurs ecclésiologies différentes, l’une Pétrine, l’autre Johanienne, une troisième Paulinienne, etc.,comme le prétendent certains? Ni les textes, ni les auteurs bibliques ne doivent être lus isolément. Les apôtres ont puisé à la même source et eurent par la suite des échanges et des contacts suivis entre eux. Le principe de l’analogie de la foi veut que tout texte et tout auteur soit compris dans le cadre de la totalité de la révélation biblique. On évite de la sorte les déséquilibres et on perçoit l’harmonie de l’Ecriture. Celle-ci est mise en évidence de manière frappante par le cadre trinitaire dans lequel Matthieu, Pierre, Jean, Luc, Paul et l’auteur de l’épître aux hébreux situent tous l’Eglise. Cette trame révèle d’emblée l’unité de leur enseignement sur la question. Ils attribuent l’existence, la vitalité et l’avenir de l’Eglise à l’action conjugée du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Ils ne présentent pas des théologies de l’Eglise divergeantes. Ce chapitre aura nécessairement un caractère schématique pour faciliter les comparaisons entre l’action des trois Personnes par rapport à l’Eglise et pour faire ressortir la cohérence de l’Ecriture. Ce schéma permettra d’éviter les répétitions et les citations inutiles. Il permettra aussi de constater qu’il existe, au-delà des différences d’accents que placent les auteurs humains, une harmonie profonde que seule explique l’action de l’unique Inspirateur divin de l’Ecriture, . Dieu le Père Le Père et l’Eglise Il est l’unique Père pour la totalité des membres du corps (Eph.4:4,6a) Il appelle son peuple ses fils (Rom.9:25,26) et ses filles (2 Cor.6:16-18) Passé: Il a fait miséricorde à son peuple (1 Pi.2:10) Il lui a donné d’être un peuple qui porte son nom (Act.15:14) Il a donné le Christ comme tête sur toute l’Eglise (Eph.1:22) Il a placé chacun des membres dans le corps comme il a voulu (1 Cor.12:18) Il a disposé le corps de manière à donner plus d’honneur à ce qui en manquait (1 Cor.12:24) Il a établi dans l’Eglise des personnes dotées de dons différents (1 Cor.12:28) Présent: Il est au-dessus de tous les membres du corps (Eph.4:4,6b) Il est parmi l’ensemble des membres du corps (Eph.4:4,6c) Il appelle son peuple “bien-aimé” (Rom.9:25,26) Il habite en elle comme dans un temple (2 Cor.6:16) Il appartient à son peuple (1 Cor.6:16,18) Il marche au milieu de son peuple (2 Cor.6:16) Le Père du petit troupeau lui donne le royaume (Luc 12:31) L’Eglise et le Père Indicatifs: Elle est la famille de Dieu (Eph.2:19) Elle est l’Eglise de Dieu (1 Cor.10:32; 1 Tim.3:15) Elle est l’édifice de Dieu (1 Cor.3:9), son temple (1Cor.3:16; 2 Cor.6:16)

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Elle est le champ de Dieu (1 Cor.3:9) L’Eglise fait connaître aujourd’hui aux dominations la sagesse infiniment variée de Dieu (Eph.3:10) Elle est composée de sacrificateurs pour Dieu (Apoc.5:10) et de Dieu (20:6) Impératifs: Le peuple de Dieu doit être bien préparé pour lui (Luc 1:17) Le temple de Dieu ne doit pas être détruit par des divisions (1 Cor.3:16,17) Le temple de Dieu ne doit avoir aucun accord avec les idoles (2 Cor.6:16) L’Eglise doit apporter gloire à Dieu dans toutes les générations (Eph.3:21) Elle est un sacerdoce royal qui doit annoncer les vertus de Dieu (1 Pi.2:9) L’Eglise de Dieu ne doit pas être persécutée (1 Cor.15:9; Gal.1:13; Phil.3:6) L’Eglise de Dieu ne doit pas être méprisée (1 Cor.11:22) Dieu le Fils Le Christ et l’Eglise Il est le sauveur de l’Eglise (Paul - Eph.5:23) Il est le souverain berger du troupeau (Pierre - 1 Pi.5:2,4) Il est la pierre angulaire du temple (Paul - Eph.2:20-22) Il est l’unique fondement de l’édifice (Paul - 1 Cor.3:9-11) Il est la tête de toute l’Eglise, son corps (Paul - Eph.1:22,23; Col.1:18) Il est le grand prêtre sur la maison (famille) de Dieu (Héb.10:21) Il est l’époux de sa fiancée (Paul - 2 Cor.11:2), de son épouse (Jean - Jean 3:29) Passé: Il a aimé l’Eglise (Paul - Eph.5:25a) Il s’est livré lui-même pour l’Eglise (Paul - Eph.5:25b) Il s’est acquis l’Eglise par son propre sang (Luc - Act.20:28) Il s’est fait un peuple qui lui appartient (Paul - Tit.2:14) Il a sanctifié le peuple par son propre sang (Héb.13:12) Il a créé en un seul corps, avec des Juifs et des Gentils, un seul homme nouveau (Paul -Eph.2:15,16) Il a fait de l’Eglise un royaume (Jean - Apoc.1:4-6,9; 5:10) Présent: Il bâtit l’Eglise (Matthieu - 16:18) Il est l’unique berger du troupeau (Jean 10:16) Il ajoute chaque jour à l’Eglise ceux qui sont sauvés (Luc - Act.2:47 Texte reçu) Il sanctifie l’Eglise, la purifie, la lave par l’eau de la parole (Paul - Eph.5:26) Il nourrit et prend soin de l’Eglise (Paul - Eph.5:29) Il marche au milieu des sept Eglises (Jean - Apoc.1:4,12,13,20; 2:1) Futur: Il fera paraître devant lui l’Eglise glorieuse, sans tache ni ride mais sainte et irréprochable (Paul - Eph.5:27) Il s’attachera et sera uni à l’Eglise (Paul - Eph.5:31,32) L’Eglise et le Christ Indicatifs: L’Eglise appartient au Christ, qui la bâtit (Matthieu 16:18) Le temple se construit, s’ajuste et grandit en Christ (Paul - Eph.2:21) Elle est l’unique troupeau du bon berger (Jean 10:16) Elle a été fiancée à un seul époux, le Christ (Paul - 2 Cor.11:2) L’épouse appartient au Christ, l’époux (Jean 3:29) L’Eglise est subordonnée au Christ (Paul - Eph.5:24) Elle est le corps du Christ (Paul - Eph.1:23; 4:12; 5:23; Col.1:24; 1 Cor.12:27 ) Le corps est en Christ (Paul - Col.2:17) et tient son unité en lui (Rom.12:4,5)

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Le corps tire sa croissance du Christ (Paul - Eph.4:16; Col 2:19) Elle est un peuple qui appartient à Jésus-Christ (Paul - Tit.2:14) La fiancée sera présentée au Christ son seul époux, comme une vierge pure (Paul - 2 Cor.11:2) Impératifs: L’Eglise doit marcher dans la crainte du Seigneur (Luc - Act.9:31) La fiancée doit vivre dans la simplicité à l’égard du Christ, son seul époux (Paul - 2 Cor.11:3) Il faut être prêt à souffrir en faveur du corps du Christ, qui est l’Eglise (Paul - Col.1:24) Le corps doit tenir ferme à la tête (Paul - Col.2:19) Tous ont été appelés à la paix du Christ, en un seul corps (Paul - Col.3:15) Le peuple de Jésus-Christ doit être purifié par lui et zélé pour les bonnes oeuvres (Paul - Tit.2:14) Dieu le Saint Esprit L’Esprit-Saint et l’Eglise Passé: L’Esprit est celui en qui tous les membres ont été baptisés par le Christ pour former un seul corps (Paul - 1 Cor.12:13) L’Esprit-Saint est celui en qui Christ baptise des hommes pour rassembler son blé dans son grenier (Luc 3:16,17; Matthieu.3:11-12) L’Esprit de Dieu habite dans le temple de Dieu (Paul - 1 Cor.3:9,16), l’habitation de Dieu (Eph.2:22) Un seul Esprit fait qu’il existe un seul corps (Paul - Eph.4:4) Présent: L’Esprit-Saint se manifeste en accordant des dons spirituels différents à chaque membre de l’Eglise (Paul - 1 Cor.12:4,7-11) L’Esprit-Saint remplit l’Eglise persécutée pour qu’elle annonce la parole de Dieu avec assurance (Luc - Act.4:29-31) L’Esprit-Saint aide l’Eglise à s’accroître (Luc - Act.9:31) L’Esprit-Saint dit à l’Eglise de mettre à part des apôtres pour l’oeuvre à laquelle il les a appelés et, de la sorte, il les envoie (Luc - Act.13:1-4;14:4) L’Esprit-Saint conduit l’Eglise dans ses décisions (Luc - Act.15:28) L’Esprit-Saint établit des anciens comme surveillants parmi le troupeau pour paître l’Eglise de Dieu (Luc - Act.20:17,28) L’Esprit parle aux Eglises (Jean - Apoc.2:7,11,17,29; 3:6,13,22) L’Esprit dit à Jésus, de concert avec l’épouse: “Viens” (Jean - Apoc.22:17). L’unité du témoignage biblique sur l’Eglise ressort également des images que le Nouveau Testament nous présente de celle-ci. Les six auteurs bibliques qui traitent explicitement de l’Eglise (Matthieu, Luc, Jean, Paul, Pierre et l’auteur de l’épître aux Hébreux) se servent des mêmes figures pour en parler. Ils nous présentent de la sorte une seule et même ecclésiologie. Tous les six comparent l’Eglise à un édifice, à un troupeau, à un peuple, à une famille. Quatre des six la comparent à une prêtrise (Pierre, Jean, Paul, l’auteur de l’épître aux Hébreux). Et quatre à une épouse (Matthieu, Luc, Jean, Paul). Ces mêmes images, qui traversent leurs écrits sur l’Eglise comme autant de fils lumineux, ne remonteraient-elles pas toutes à Jésus dont ils avaient tous reçu l’enseignement? Ne serait-ce pas de lui qu’ils ont appris qu’il serait le fondement, le souverain berger, le roi, le frère ainé, le grand-prêtre, l’époux de l’Eglise? Paul ne se contente pas de reprendre les images développées par les autres; il en ajoute deux qui lui sont propres: le corps et le champ cultivé. N’en avait-il pas reçu la révélation particulière de la part du Christ ressuscité (Eph.3:3- 6,9; Col. 1:24- 27)? Comme il n’y a qu’une seule Eglise (voir plus loin), il n’y a aussi qu’une seule ecclésiologie. C’est donc avec confiance que nous puiserons dans les écrits des divers auteurs bibliques pour découvrir l’unique profil de l’Eglise de Jésus-Christ.

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CHAPITRE 6 LES ATTRIBUTS DE L’EGLISE UNIVERSELLE Prendre l’Eglise universelle pour ce qu’elle n’est pas, ou ne pas la prendre pour ce qu’elle est, voilà des attitudes fâcheuses. L’Ecriture attribue à l’Eglise certaines qualités qui lui sont propres et qui la distinguent de toute autre réalité. Etre au clair sur ces particularités, sur ses caractéristiques essentielles, doit nous permettre de reconnaître sa présence dans une communauté quelconque et d’éviter les méprises sur son identité. De fausses attentes ou un aveuglement inutiles peuvent ainsi nous être épargnés . L’Eglise est unique La multiplicité des institutions ecclésiastiques d’une part, et l’ambiguité des définitions de l’Eglise universelle d’autre part, montrent toute l’importance qu’il y a à savoir en quoi consiste l’unicité de L’Eglise. Jésus annonce sa mort prochaine: “Je donne ma vie pour mes brebis” (Jean 10:15). Puis il enchaîne en parlant de deux types de brebis: celles de “cette bergerie”, celles d’Israël d’une part (10:16a), et d’autre part: “J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie (des non-Juifs); celles-là, il faut aussi que je les amène...et il y aura un seul troupeau, un seul berger” (10:16b). Il prédit que son sacrifice à la croix supprimerait la possibilité qu’il y ait encore deux types de brebis parmi les siennes. Sa mort assurerait désormais l’unicité du troupeau, de l’Eglise universelle. Il ne pourrait y avoir qu’un seul troupeau, comme il n’y avait qu’un seul Berger. Logiquement, aucune institution ecclésiastique qui prétendrait correspondre a l’unique troupeau de l’unique Berger, ne pourrait se permettre de reconnaître l’existence ou l’authenticité d’aucune autre institution ecclésiastque dans le monde entier. Nous ne parlons pas encore de l’unité de l’Eglise, mais uniquement de son unicité. Mais l’Eglise n’est pas qu’un troupeau. “Le Christ a voulu...réconcilier Juifs et non-Juifs avec Dieu, l’un et l’autre en un seul corps, par la croix” (Eph.2:15,16). Jésus, par sa mort, crée avec des Juifs et des Gentils un corps unique, l’Eglise. “Nous avons tous été baptisés dans un seul Esprit pour former un seul corps” (1 Cor.12:13). “Il y a un seul corps et un seul Esprit” (Eph.4:4). Comme l’unicité du Berger assure l’unicité du troupeau, ainsi l’Esprit Saint est le seul être spirituel qui puisse, par son action, assurer la constitution et l’unicité du corps du Christ qu’est l’Eglise. Des esprits humains ou démoniaques peuvent constituer des corps ecclésiastiques, mais ces derniers ne seront jamais l’unique corps du Christ. “Comme nous avons plusieurs membres dans un seul corps, et que tous les membres n’ont pas la même fonction, ainsi, nous qui sommes plusieurs, nous formons un seul corps” (Rom.12:5). “Tous les membres du corps, malgré leur nombre ne forment qu’un seul corps...Il y a plusieurs membres, et un seul corps” (1 Cor.12:12,20). La pluralité et la diversité des chrétiens authentiques et des Eglises locales, malgré leur grand nombre et l’importance de leurs différences, ne nuisent en rien à l’unicité du corps qu’est l’Eglise universelle. Cette unicité entraine des obligations. Tout membre du corps du Christ, peu importe l’institution ecclésiastique ou l’Eglise locale à laquelle il pourrait appartenir, doit reconnaître comme tel tout autre personne, membre authentique du corps de Christ, peu importe l’institution ecclésiastque ou l’Eglise locale à laquelle ce dernier pourrait appartenir. Ce serait la fin de l’esprit sectaire. Le Christ, pourrait-il être polygame, ou l’Eglise polyandre? L’unicité de l’Eglise est encore assurée par: - L’unicité de l’Epoux: “Je vous ai fiancé à un seul époux, pour vous présenter à Christ comme une

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vierge pure” (2 Cor.11:2). Un seul Epoux - une seule épouse. Leur union est monogame. - L’unicité de la vocation: “Vous avez été appelés pour former un seul corps”. - L’unicité du pain de la communion: “Puisqu’il y a un seul pain, nous qui sommes plusieurs, nous formons un seul corps; car nous participons tous à un seul pain” (1 Cor.10:17). Si l’organisation était de l’essence de l’Eglise, l’unique forme légitime que celle-ci pourrait prendre serait celle d’une institution à l’échelle mondiale au sein de laquelle disparaîtraient toutes le confessions et dénominations. Mais tous les membres du corps de Christ n’ont jamais été réunis dans une seule organisation ecclésiastique. Et chaque organisation ecclésiastique a toujours été composée, en plus de chrétiens authentiques, également de chrétiens de nom, de personnes n’ayant pas été ajoutées au corps du Christ par l’action de l’Esprit Saint. Par conséquent, toute prétention du Catholicisme, des Témoins de Jéhovah ou de toute autre dénomination, d’être “la seule vraie Eglise du Christ” est fausse et présomptueuse. Une compréhension de l’enseignement biblique sur l’unicité de l’Eglise universelle est de nature à prévenir le sectarisme sous toutes ses formes. Et cette unicité ne contredit en rien la multiplicité des Eglises locales car celles-ci relèvent du deuxième sens biblique du mot ekklesia. Il ne pourrait exister plusieurs Eglises en dehors de cette multiplicité-là. L’Eglise est secrète Comment éviter, d’une part, de concevoir l’Eglise universelle et unique comme incorporelle, nébuleuse, voir occulte, et d’autre part de la matérialiser, la concrétiser et l’identifier à une entité perceptible? Il faut déterminer en quels termes l’Ecriture parle de son apparence. “Voici ce secret (musterion): Par le moyen de la bonne nouvelle, les non-Juifs sont destinés à recevoir avec les Juifs les biens que Dieu réserve à son peuple, ils sont membres du même corps” (Eph.3:6 FC). Ce secret concerne donc l’Eglise, peuple de Dieu et corps du Christ, dans sa composition faite de Juifs et de Gentils. Paul entend par “secret” (musterion) un fait caché avant Jésus-Christ, et maintenant révélé en lui (3:5), mais qui comporte encore un élément caché pour l’entendement purement humain, particulièrement pour celui de personnes endurcies (Rom.11:25). La composition de l’Eglise universelle, qui supprime en son sein toute distinction entre Juifs et Gentils, ne peut être appréhendée sous tous ses aspects, même par ceux qui en font partie. Le monde des incroyants y restera aveugle. “Ce secret (musterion) est grand; je dis cela par rapport à Christ et à l’Eglise” (Eph.5:32). Ce secret concerne la relation intime de salut entre Christ et l’Eglise décrite dans les versets précédents et illustrée par la relation entre le mari et sa femme: “Le mari est le chef de la femme comme Christ est le chef de l’Eglise qui est son corps et dont il est le Sauveur”(5:23) . Ce secret est grand parcequ’il est merveilleux, non parcequ’il est mystérieux. Un secret est quelquechose de caché, non d’énigmatique. L’Eglise demeure secrète, dans sa relation intime de salut avec le Christ. Jésus seul peut dire avec certitude à quelqu’un(e) et devant tous: “Ta foi t’a sauvé(e)” (Luc 7:50). Dieu seul connaît le coeur des hommes et ceux qui lui appartiennent (2 Tim.2:18-19; Jean 10:14; 1 Rois 8:39). Par contre, quand “l’Esprit lui-même témoigne à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu” (Rom.8:16), nous pouvons “crier: Abba! Père!” (8:15), “le prêcher sur les toits” (Mat.10:27), “annoncer la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne” en posant le geste visible de la communion (1 Cor.11:26), “montrer notre foi par nos oeuvres” (Jac.2:18), “afin que les hommes voient nos bonnes oeuvres et glorifient notre Père qui est dans les cieux” (Mat.5:16). Si l’identité précise de l’Eglise sauvée est secrète et ne se prête pas à être institutionnalisée, son témoignage vécu et parlé et son service sont manifestes et publics aux yeux de tous. Nous avons constaté ailleurs que l’Eglise universelle, dont Jésus est le Sauveur (Eph.5:23),

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composée en vertu de l’action de l’Esprit-Saint (1 Cor.12:13), est identique au royaume de Dieu sous sa forme présente. Tous deux correspondent au domaine du salut et sont composés de personnes régénérées. Tous deux sont aussi de nature cachée et secrète. Par conséquent, les précisions suivantes au sujet du royaume de Dieu actuel décrivent également l’Eglise universelle: “Le royaume de Dieu ne vient pas de manière à frapper les regards. On ne dira point: Il est ici, ou: Il est là” (Luc 17:20,21). L’Eglise universelle n’est pas non plus sujette à observation (paratereo), elle n’est pas discernable. Elle n’est pas non plus localisable à tel ou tel endroit; on ne peut la situer dans des limites géographiques ou ecclésiastiques, à Jérusalem, à Rome. “Jésus répondit aux douze: Vous avez reçu, vous, le secret (musterion) du royaume de Dieu; mais les autres...peuvent bien regarder mais sans vraiment voir” (Mc.4:10-12 FC). Les vrais disciples du Christ comprennent trop bien la nature cachée de l’Eglise universelle que pour chercher à en déterminer les limites exactes ou à prétendre en distribuer des cartes de membres. Les autres ne comprennent rien à cela. Jésus déclare à ses disciples qu’en écoutant ses paraboles (reprises dans Mat.13), ils recevaient “la connaissance des secrets du royaume des cieux” (13:11 FC). La deuxième de ces paraboles (13:24-30), décrit le monde comme un champ dans lequel le Christ a semé du blé, les fils du royaume (l’Eglise universelle). Mais le diable a semé, dans ce même champ du monde, et parmi le blé, de la mauvaise herbe, les fils du Malin (13:24-26). Dans un premier stade de leur croissance, et mêlées l’une à l’autre dans le champ, la bonne et la mauvaise semence peuvent se ressembler à s’y méprendre. Elles ont ensemble l’aspect d’une étendue vert-tendre et uniforme. Quand les serviteurs du Christ s’aperçoivent, que les vrais et les faux chrétiens se trouvent côte à côte dans le monde, ils peuvent être tentés de demander: “Veux-tu que nous allions enlever la mauvaise herbe? Non, répondit-il, car en l’enlevant vous risqueriez d’arracher le blé” (29). Jésus déclare qu’il est impossible pour les hommes, de distinguer maintenant de façon infaillible entre un hypocrite aux apparences chrétiennes et un chrétien authentique. Ce sont des anges, non des hommes, qui opéreront plus tard cette séparation (13:41). Et les justes ne “resplendiront” pas de façon perceptible (13:43) avant la “moisson”, avant la fin de l’ère présente. On ne doit pas chercher à ôter les hérétiques du monde car on risquerait de supprimer en même temps des croyants authentiques. C’est ce qu’a fait l’inquisition. La composition exacte de l’Eglise universelle demeure indiscernable. Luther parlait de “l’Eglise invisible.” Plusieurs autres passages bibliques soulignent également le caractère secret de l’Eglise universelle sans pour autant contenir le terme musterion”. “Vous vous êtes approchés...de l’Eglise (ekklesia) des premiers-nés inscrits dans les cieux”(Héb. 12:23). Le registre de cette Eglise de personnes régénérées est tenu au ciel, non sur la terre. Le temps du verbe “inscrits” indique que leur incription est un fait accompli. Ils sont déjà citoyens du ciel de plein droit, même si certains d’entre eux sont encore sur terre. Jésus déclare que les noms de ses disciples devaient être écrits “dans les cieux” (Luc 10:20). Le livre de vie de l’Agneau (Apoc.13:8) dans lequel sont écrits les noms de ceux qui vaincront (3:5), ne sera pas ouvert avant le jugement dernier (Apoc.20:8). La tenue “dans les cieux” du registre de l’Eglise universelle, et le fait que ce livre reste encore fermé, ne permet pas que les hommes puissent déjà en prendre connaissance sur la terre. Voilà ce qui explique pourquoi la réalité la plus importante au monde puisse passer inaperçue, ne jamais faire la une des journaux, résister à tous les efforts de la cerner, de l’identifier. Les membres de ce corps ne portent pas un badge. Mais ce fait a une conséquence. “La création entière attend avec impatience le moment où Dieu révélera ses enfants”(Rom.8:19 BFC). Les enfants de Dieu sont, pour le moment, cachés aux yeux de toute créature qui subit, tant soit peu, les effets de la chute et de la malédiction. Que les croyants en Christ soient des enfants de Dieu est loin d’être manifeste pour notre monde. Leur identité, leur participation à la nature divine

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et leur gloire future ne sautent pas maintenant aux yeux. Et le monde, qu’il soit conscient ou non de cette imperceptibilité de l’Eglise, souffre de la confusion spirituelle qu’elle engendre. Il aspire à il ne sait quoi. Il ne sait pas qu’il a besoin de voir clair dans le brouillard religieux qui règne partout. Il n’en ressent pas moins un malaise. Le verbe traduit “attendre avec impatience” revient sept fois dans le Nouveau Testament, chaque fois en rapport avec le retour du Christ. “Quand Christ, votre vie, paraîtra, alors vous paraîtrez aussi avec lui dans la gloire” (Col. 3:4). Ce jour-là, tout oeil le verra (Apoc.1:7), et l’ambiguité des spiritualités, les prétentions des institutions et la concurrence des religions cesseront. Personne ne pourra nier la Seigneurie de Jésus. Tout genoux fléchira et toute langue la confessera (Phil.2:10,11). La composition et l’identité de l’Eglise universelle deviendra une évidence. Mais entre temps, elle court toujours de grands dangers quand elle veut se montrer, manifester son importance, exhiber devant le monde qu’elle embrasse toute l’oikoumene. Mais l’Eglise est-elle totalement invisible? Ce caractère secret se limite cependant à l’Eglise universelle. Les Eglises locales, au contraire, sont visibles, identifiables. Etant locales, on peut dire: “elles sont ici”, ou “elles sont là”. On peut consulter leurs registres qui sont tenus ici sur la terre, et compter le nombre de leurs adhérents - 3000 (Act.2:41), 4000 (Act.4:4). Dans les pays libres, leurs cultes sont publics, ouverts à tous, leurs lieux de cultes frappent souvent les regards et leur évangélisation se sert des médias (presse, radio, TV, internet, traduction de la Bible, etc.). Ce ne sont pas des sociétés secrètes qu’on pourrait taxer de subversives - à moins qu’elles servent des influences étrangères ou qu’elles aient des visées politiques. Elles ne sont pas, forcément, des Eglises de croyants (la foi étant invisible), mais des Eglises de professants, la confession de la foi des adhérents étant publique. Elles sont la lumière du monde, des villes situées sur des montagnes, et qui ne peuvent être cachées (Mat. 5:14). Les incroyants et les endurçis les voient tout aussi clairement que les vrais disciples du Christ. Malheureusement leur visibilité ne lève pas encore le brouillard de la confusion religieuse qui règne dans le monde. L’Eglise est éternelle “Je bâtirai mon Eglise, et les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle” (Mat.16:18 - “...La mort elle-même ne pourra rien contre elle” BFC - “...la puissance de la mort n’aura pas de force contre elle” TOB). Le sheol (A.T.), le hades (N.T.) était le royaume de la mort. Celle-ci est représentée ici et ailleurs (Job 38:17; Esa.38:10) comme une ville forte munie de portes qui s’ouvrent pour engloutir les vivants. Le Christ lui-même, les apôtres, et l’Eglise qui était sur le point d’être fondée, risquaient d’en devenir la proie. Mais ces portes n’auraient pas un pouvoir suffisant pour engouffrer l’Eglise. “Dieu a ressuscité Jésus, en le délivrant des liens de la mort, parce qu’il n’était pas possible qu’il soit retenu par elle” (Act.2:24). Le Christ, par sa résurrection, ferait triompher la vie de la mort. L’Eglise, le règne de la résurrection, remporterait la victoire sur le règne usurpé de la mort. Parce que Jésus ressusciterait, tous ceux qui seraient en lui revivraient (1 Cor. 15:22). Et l’Eglise, composée de ceux-ci, serait immortelle dans le temps et pour l’éternité. Le Christ ressuscité est le garant de la pérennité de l’Eglise. Deux milles ans d’histoire en fournissent un début de preuve. Toute vie, tout effort, tout argent, tout temps, tout sacrifice consacrés à l’édification de l’Eglise acquièrent, de ce fait, une valeur éternelle. Il n’est pas insensé de céder ce qu’on ne pourra garder, pour gagner ce qu’on ne pourra perdre. Il faut investir dans les valeurs sûres et durables. “Hyménée et Philète, qui se sont dérournés de la vérité...renversent la foi de quelques-uns. Néanmoins, le solide fondement posé par Dieu subsiste, avec ces paroles qui lui servent de sceau: Le Seigneur connaît ceux qui lui appartiennent...Dans une grande maison...”(2 Tim.2:17-20). La

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grande maison, dont le fondement fut posé par Dieu, et qui comprend ceux qui lui appartiennent est manifestement l’Eglise. A première vue, cet édifice semblait menacé parce que certains théologiens se détournaient de la vérité et que la foi de quelques-uns de leurs adeptes s’en trouvait renversée. L’apôtre ne cherche pas à minimiser la gravité de ces défections. Mais il réagit avec vigueur contre la pensée que ces détournements et ces renversements puissent en rien porter atteinte à l’Eglise. Jésus-Christ, le fondement de l’édifice, posé par Dieu, subsiste et tient bon. Et puis, cette Eglise universelle, étant secrète, Dieu seul sait avec une absolue certitude quels sont ceux qui en font vraiment partie. Ces deux faux docteurs et ceux qui les ont suivis ont sans doute, à un moment donné, adhéré à une Eglise locale. Mais Dieu ne les reconnaît peut-être pas comme les siens. Paul ne porte pas un jugement péremptoire sur des cas particuliers. Aucune des innombrables hérésies qui ont été enseignées durant l’histoire de l’Eglise, pas plus que les millions d’hommes qui, à divers moments, ont apostasié des diverses Eglises locales et institutions ecclésiastiques n’ont pu effleurer l’Eglise universelle ni son solide fondement. Elle a été et demeure indestructible. “Les choses créées seront ébranlées et disparaîtront, afin que seul demeure ce qui est inébranlable. Soyons donc reconnaissants puisque nous recevons un royaume inébranlable” (Héb.12:27,28 BFC). L’Eglise reçoit dès maintenant ce royaume inébranlable parce que, entre les deux avènements du Christ, elle est l’expression de ce royaume. Le monde présent sera ébranlé, mais l’Eglise ne sera en rien menacée par la disparition des choses visibles. “Les choses visibles sont passagères, et les invisibles sont éternelles” (2 Cor.4:18). Tout ce qui dans la chrétienté frappe l’oeil, qui relève du domaine purement physique, qui fait partie du royaume de ce monde, disparaîtra. Tout ce qui appartient aux réalités spirituelles de l’Eglise secrète est impérissable. L’Eglise peut, dès lors en être reconnaissante et rester confiante, malgré la disparition d’Eglises locales et d’appareils ecclésiastiques, et tous les bouleversements qu’elle est appelée à traverser avant le retour du Christ. L’homme cherche la permanence dans l’organisation institutionnelle; Dieu situe la continuité dans l’organisme spirituel. “A Dieu soit la gloire en Jésus-Christ, et dans l’Eglise, dans toutes les générations, au siècle des siècles” (Eph.3:21). Si Dieu sera glorifié dans l’Eglise dans toutes les générations de l’histoire de l’humanité, c’est que l’Eglise fera partie de l’histoire de notre monde tant que durera celui-ci. Si elle contribuera à la gloire divine aux siècles des siècles, c’est qu’elle existera tout aussi longtemps. La glorification éternelle de Dieu dans l’Eglise demande aussi l’éternité de l’Eglise. Le temps peut menacer les organisations institutionnelles, mais ne pourrait porter atteinte à l’organisme spirituel. Le clergé quitte le ministère ou connaît des écarts d’ordre moral, le peuple ne fréquente plus les lieux de culte, les vocations tarissent à la source et les institutions sont mises en péril. Mais la vie jaillit en d’autres milieux et dans d’autres parties du monde et l’Eglise universelle subsiste et grandit. Mais ce n’est pas tout. “Le Seigneur lui-même, à un signal donné, à la voix d’un archange, et au son de la trompette de Dieu, descendra du ciel, et les morts en Christ ressusciteront premièrement. Ensuite, nous les vivants, qui seront restés, nous serons tous ensemble enlevés avec eux sur des nuées, à la rencontre du Seigneur dans les airs, et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur”(1 Thes.4:16,17). Après les noces de l’Agneau, l’épouse demeurera avec l’Epoux pour toujours. L’Eglise est sainte La théologie dépend de l’exégèse, et l’exégèse de la grammaire. Il est important, pour aborder correctement la question de la sainteté de l’Eglise, de respecter dans les textes, la différence entre le mode indicatif et le mode impératif. Certains passages déclarent que l’Eglise est sainte et d’autres qu’elle doit être sainte. L’idée de base du verbe “sanctifier” (hagiazo) est celle d’une “mise à part”, d’une “séparation” (voir les lexiques). Les déclarations à l’indicatif parlent d’une Eglise qui est sainte parce que, en Jésus-Christ, elle a été “mise à part” pour Dieu, consacrée à lui. Il s’agit d’une

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sainteté objective, d’un fait accompli, d’un statut en Christ. Les impératifs, par contre, réclament une Eglise qui, parce qu’elle est consacrée à Dieu, doit aussi être sanctifiée en se séparant de la fausseté religieuse et des souillures morales. Il s’agit d’une sainteté subjective, vécue, d’une responsabilité, d’une progression. Or, il ne faut pas mettre en doute les indicatifs, pas plus qu’il ne faille considérer les impératifs comme allant de soi. Ni fausse modestie, ni triomphalisme. Les indicatifs: l’Eglise est sainte, elle a été mise à part pour Dieu Elle est un temple saint: “Le temple de Dieu est saint et ce temple, c’est vous” (1 Cor.3:17 TOB). “En Jésus-Christ, tout l’édifice, bien coordonné, s’élève pour être un temple saint” (Eph.2:21,22). L’Eglise universelle, édifice composé exclusivement de pierres vivantes, est un “sanctuaire”, une maison spirituelle, mise à part pour Dieu. Cette consécration de fait demande qu’on respecte l’Eglise à cause de Celui qui l’habite. Et Paul de s’exclamer: “Ou méprisez-vous l’Eglise de Dieu? Lui porter atteinte c’est commettre un sacrilège (voir le chap.4). Mais cette sainteté-là ne signifie pas absence de péché. Elle est un peuple saint: “Vous êtes une nation sainte” (1 Pi.2:9). “Jésus aussi, afin de sanctifier le peuple par son sang, a souffert hors de la porte (de Jérusalem- Héb.13:12). C’est en vertu de la mort du Christ pour l’Eglise universelle que celle-ci devient une nation consacrée à Dieu. Cette mise à part des rachetés qui fait d’eux un peuple saint est une réalité objective dont il peut prendre conscience. Ce nouveau statut a pour but de motiver ce peuple à vivre en conséquence, bien qu’il ne le fasse pas toujours (voir le chap.7). Elle est une sainte prêtrise: “Vous-mêmes, comme des pierres vivantes, entrez dans la construction de la Maison habitée par l’Esprit, pour constituer une sainte communauté sacerdotale”(1 Pi.2:9 TOB; “...un groupe de prêtres consacrés” BFC; “...un saint sacerdoce” Seg.). Cette réalité consiste en la consécration de tous les membres authentiques de l’Eglise universelle au service de Dieu, avec toutes les responsabilités et les privilèges y afférant (voir le chap.6). Elle fonde et valorise tous les ministères dans l’Eglise. Les impératifs: l’Eglise doit être sainte, se séparer du mal Se séparer des systèmes religieux incompatibles Des cultes idolâtres: “Quel rapport y a-t-il entre le temple de Dieu et les idoles? Car nous sommes le temple du Dieu vivant, comme Dieu l’a dit...ils seront mon peuple. C’est pourquoi, sortez du milieu d’eux, et séparez-vous dit le Seigneur” (2 Cor.6:16,17). L’Eglise, temple et peuple de Dieu, doit se séparer (sanctifier) des cultes idolâtres. Le préfixe ek- du mot ekklesia, “Eglise” signifie “hors de” et suggère que celle-ci est appelée à une extraction, une séparation. Paul exhorte l’Eglise à Corinthe: “Fuyez l’idolâtrie” (1 Cor. 10:14). Et Jean écrit à la famille chrétienne: “Gardez-vous des idoles” (1Jean 5:21). Pas de syncrétisme. Mais l’Eglise n’est pas une théocratie qui penserait devoir interdire les cultes d’autres religions. Ni un ghetto qui s’isolerait de leurs adeptes, les considérerait comme des ennemis, les mépriserait, les diaboliserait. Il n’est pas dit: “Fuyez les idolâtres”. La séparation d’avec les cultes païens ne doit pas entraîner une séparation physique d’avec les personnes païennes. Du judaïsme qui rejette le Messie: “Jésus aussi, afin de sanctifier le peuple par son propre sang, a souffert hors de la porte (de Jérusalem). Sortons donc pour aller à lui, hors du camps (du judaïsme), en portant son opprobre” (Epître précisément aux Hébreux.12:13). L’Eglise, nouveau peuple de Dieu, doit se séparer d’un judaïsme qui rejette Jésus et méprise son peuple. L’épître aux Hébreux messianiques leur interdit de retourner au culte de l’Ancienne Alliance. Pierre, le jour de la

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Pentecôte, devant la foule à Jérusalem, “...leur parla en ces termes: Hommes Juifs...Sauvez-vous de cette génération dévoyée. Ceux qui acceptèrent sa parole furent baptisés: et, en ce jour-là, le nombre des disciples augmenta d’environ trois mille âmes” (Act.2:14,40, 41). La naissance de l’Eglise signifie la séparation religieuse de la part de ceux qui acceptent la parole de l’Evangile, d’avec un judaïsme qui ne voit pas en Jésus son Messie. Paul, à son tour, annonce l’Evangile à répétition aux Juifs d’Ephèse (Act.18:19). “Paul entra dans la synagogue. Pendant trois mois, il discourut sur les choses qui concernent le royaume de Dieu, s’efforçant de persuader ceux qui l’écoutaient. Mais comme certains restaient endurçis et incrédules et se moquaient devant l’assemblée de la voie du Seigneur, il se retira d’eux et sépara les disciples” (Act.19:8,9). L’apôtre ne fréquente plus la synagogue d’un judaïsme endurci, incrédule et moqueur, mais réunit la nouvelle Eglise dans les locaux d’une école. Mais cette séparation d’avec le judaïsme ne doit pas entraîner une inimitié envers les Juifs. Pas d’anti-sémitisme. Paul continue de les fréquenter (Act.28:17-30), de les protéger (Act.18:1-3), de les évangéliser (Rom.1:16), de prier pour leur salut (Rom.10:1), en appelant le jour où ils se convertiront tous (Rom. 11:12 voir plus loin). De la pseudo-Eglise: “Sortez du milieu d’elle (de “Babylone”, “la grande prostituée”), mon peuple, afin que vous ne participiez point à ses péchés, et que vous n’ayez point part à ses fléaux” (Apoc. 18:4). L’Eglise, peuple de Dieu, doit se séparer d’une religion institutionnalisée, multinationnale, syncrétique, infidèle et mondialisée, qui pratique ce que l’Ecriture appelle péché, et est en danger des jugements de Dieu (voir le chap.11). Comment une institution qui englobe les 95% de la population d’un pays pourrait-elle être “sainte”. De quoi aurait-elle donc été “mise à part” ou “séparée”? Pas de dialogue inter-religieux de mauvais alloi! Mais se démarquer du système ne doit pas entraîner une séparation d’avec tous ceux qui s’y trouvent. Certains d’entre eux deviendront des croyants authentiques, frères et soeurs en Christ avec lesquels nous avons le devoir d’entretenir une communion sur le plan individuel. D’autres auront encore besoin d’entendre l’Evangile de notre bouche et de s’attacher, non plus à l’appareil, mais au Christ. Se séparer de l’impureté morale “Christ a aimé l’Eglise, et s’est livré lui-même pour elle, afin de la sanctifier en la purifiant et en la lavant par l’eau de la parole, pour faire paraître devant lui cette Eglise glorieuse, sans tache, ni ride ni rien de semblable, mais sainte et irréprochable” (Eph.5:25-27). La sainteté de l’Eglise dont il est question dans ce passage est une séparation progressive d’avec les souillures qui peuvent encore l’entacher. Cette sanctification ne constitue pas un fait accompli ou ponctuel. Elle ne se réalisera pas complètement avant la glorification de l’Eglise au moment ou elle sera présentée au Christ comme son épouse irréprochable. En attendant, cette purification est vécue en vertu d’un lavage par la parole annoncée (rema) à l’Eglise dans les assemblées. Cette sanctification progressive sous-entend que l’Eglise n’est pas encore parfaite et ne le sera pas avant le retour de l’Epoux. Il y a donc lieu d’affirmer sans la moindre réserve que cette Eglise universelle, unique, secrète et éternelle, composée uniquement de croyants authentiques, a encore maintenant des taches, des rides et des choses semblables, qu’elle a continuellement besoin d’être purifiée et lavée par la prédication de la parole, car elle est encore loin d’être irréprochable et glorieuse. A plus forte raison en est-il ainsi des Eglises locales au sein desquelles se trouvent aussi de “faux frères”. Paul déclare à l’Eglise à Corinthe: “Je vous ai fiancés à un seul époux, pour vous présenter à Christ comme une vierge pure. Toutefois, de même que le serpent séduisit Eve par sa ruse, je crains que vos pensées ne se corrompent et ne se détournent de la simplicité à l’égard de Christ” (2 Cor. 11:2,3). L’Eglise, épouse du Christ, est en danger d’une corruption qui menace sa pureté. La prédication de l’apôtre avait pour but, qu’au moment où cette fiancée serait présentée à l’Epoux, elle soit vierge et pure. Entretemps, elle devait se séparer de tout amant, de tout “autre Jésus”

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(11:4) et de toute impureté morale. (voir chap.11). Il en est de même pour l’Eglise, peuple de Dieu. “Je serai leur Dieu et ils seront mon peuple. C’est pourquoi...séparez-vous, dit le Seigneur; ne touchez pas à ce qui est impur” (2 Cor.6:16,17). Jésus-Christ s’est donné lui-même pour nous, afin de...se faire un peuple qui lui appartienne, purifié par lui” (Tit.2:14). Mais se séparer de toute souillure morale ne doit pas entraîner le peuple de Dieu à se séparer dans l’espace de toute personne immorale, ni même de les juger (1 Cor.5:12,13). L’Eglise doit encore moins vouloir combattre les débauchés et les impies notoires ni imposer une purification à un monde pour qui ni le Christ, ni elle ne signifient rien. Sommaire Celui qui étudie les attributs de l’Eglise en voit se profiler une image claire. L’Eglise est unique, éternelle, secrète, sainte et en voie de sanctification. Cette image, à son tour, suscite une interrogation au sujet de ses origines et de se sa composition. CHAPITRE 7

LA CONSTITUTION DE L’EGLISE UNIVERSELLE

Avant de se joindre à quelque chose, il est utile de savoir en quoi elle consiste. La constitution

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d’une chose est “l’ensemble de ses éléments essentiels” (Larousse). Deux verbes décrivent la constitution de l’Eglise universelle, assurée par Dieu: “Dieu a disposé (sugkerannumi) le corps”(1 Cor.12:24- “composé le corps” TOB). Et: “En Christ tout l’édifice, bien ajusté ensemble (sunarmologeo) croît pour être un temple saint” (Eph.2:21). L’Eglise, corps du Christ et temple de Dieu, a fait l’objet de sa part d’une “disposition”, d’un “bon ajustement ensemble”, d’une “constitution”. Ce chapitre traitera de (1) l’instauration de l’Eglise universelle, (2) de l’accès à elle, (3) de sa composition, et (4) de sa direction. Nous rappellons qu’il n’est pas encore question ici des Eglises locales qui, elles, ont leur propre constitution. La leur est parfaitement compatible et complémentaire avec celle de l’Eglise universelle, mais en est différente. La constitution de l’Eglise universelle correspond à l’essence de l’Eglise; celle des Eglises locales, aux manifestations de l’Eglise (voir le chap.2). L’instauration de l’Eglise Nous avons déjà souligné l’importance pratique qu’il y a, pour la vie et la mission de l’Eglise, à déterminer à quel moment celle-ci a commencé. Etait-ce à la création de l’homme, après la chute, à la vocation d’Abraham, à la venue du Christ, ou à la Pentecôte? Nous avons aussi montré l’intérêt qu’il y a à privilégier les considérations exégétiques plutôt que les déductions dogmatiques, et avons déjà tenté un début de réponse à cette question (voir chap.3b et 3c). Ces conclusions se trouvent confirmées par les éléments exégétiques suivants: L’édifice de l’Eglise fut fondé sur la personne de Jésus et non pas avant lui “Personne ne peut poser un autre fondement que celui qui a été posé, savoir Jésus-Christ” (1 Cor. 3:11). Le fondement étant la première partie d’un édifice à être bâti, on peut se demander comment l’Eglise aurait pu être un édifice bâti sur Jésus-Christ, avant Jésus-Christ. Et si Pierre en a posé le fondement par sa confession, elle ne pouvait non plus exister avant Pierre et cette confession. D’ailleurs, elle n’avait pas encore été bâtie quand le Christ en avait parlé cette première fois. “Jésus dit:...Je bâtirai (verbe au futur) mon Eglise” (Mat.16:18 - voir le chap.4). Pour que l’Eglise devienne vraiment universelle, il fallait comprendre qu’en Jésus-Christ, Dieu créait une humanité nouvelle, dont l’identité ne dépendrait pas d’une quelconque race, langue ou nationalité existante. L’Eglise s’étendrait à toutes les ethnies du monde parce qu’elle ne serait plus liée à Israël et à sa culture (Actes 15). Celle-ci ne serait pas imposée aux peuples du monde touchés par l’Evangile. Le troupeau de l’Eglise ne put exister sans la mort et la résurrection de Jésus, le Messie Le Christ déclarait que le rassemblement du troupeau unique, composé de Juifs et de Gentils était encore futur: “J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie; celles-là, il faut aussi que je les amène...et il y aura (verbe au futur) un seul troupeau, un seul berger” (Jean 10:16 - voir le chap.5). “Jésus dit:...Je donne ma vie pour mes brebis...Je donne ma vie afin de la reprendre” (Jean 10: 15,17,18). Quand Jésus déclare qu’il faisait sortir ses brebis de la bergerie du judaïsme (10:3), les pharisiens (9:40) “ne comprirent pas de quoi il leur parlait” (10:6). Quand il dit qu’il a des brebis qui ne sont pas de cette bergerie (des non-Juifs), s’en était trop. “Certains des Juifs disaient: Il a un démon, il est fou” (10:20). Jésus leur répond qu’ils ne croient pas qu’il est le Messie et qu’ils ne sont pas de ses brebis (24,26). “Alors les Juifs prirent de nouveau des pierres pour le lapider”(31). Que Jésus était Messie pour toute l’humanité et non seulement pour Israël, semblait nouveau et inacceptable pour ceux dont la nation et la religion ne faisaient qu’un. Mais il fallait du neuf pour que l’Eglise soit universelle. Pour qu’il y ait un seul grand troupeau pour tout le monde, il fallait que ceux qui étaient dans la bergerie de leur identité culturelle orgueilleuse, en sortent pour prendre une nouvelle identité. Celle-ci serait basée sur la mort et la résurrection du Messie pour les péchés

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de toute l’humanité. “Le Dieu de paix a ramené d’entre les morts le grand berger des brebis, par le sang d’une alliance éternelle” (Héb.10:20). Sa mort assure le rachat du troupeau; sa résurrection assure la continuation de son ministère pastoral en sa faveur. Comment le troupeau de l’Eglise universelle put-il exister avant ces faits? La prêtrise de l’Eglise (dont Jésus est le grand-prêtre) est nouvelle par rapport à celle d’Aaron “Le Père dit au Christ: tu es sacrificateur pour toujours selon l’ordre de Melchizédec” (Héb.5:5,6). “Jésus est donc le grand-prêtre qu’il nous fallait” (Héb.7:26 FC). “Le Christ s’est offert lui-même à Dieu comme sacrifice parfait” (Héb.9:14 FC). Il fut à la fois, sacrificateur et sacrifice. Au moment- même de sa mort, le voile du temple se déchira (Mat.27:51), et la prêtrise d’Aaron, qui limitait l’accès au lieu saint à son seul souverain prêtre, cessa. L’Eglise dont tous les membres maintenant sont prêtres fut établie sur des bases nouvelles, inexistentes auparavant. “Nous avons au moyen du sang de Jésus, une libre entrée dans le sanctuaire par la route nouvelle et vivante qu’il a inaugurée pour nous au travers du voile, c’est-à-dire de sa chair” (Héb.10:19,20). Il y eut “inauguration”, par la mort du Christ, d’une prêtrise “nouvelle”: l’Eglise. Tous les membres de celle-ci ont accès au lieu saint et sont chargés d’un ministère religieux (voir le chap.6). Le sacerdoce d’Aaron regardait vers l’intérieur, vers le temple et déservait un seul peuple. Il était essentiel, pour assurer l’extension de l’Eglise jusqu’aux extrémités de la terre, qu’une prêtrise d’un type nouveau soit instaurée, tournée vers l’extérieur et comptant un nombre infiniment plus grand de prêtres. La prêtrise du catholicisme s’est inspirée du sacerdoce révolu d’Aaron. Son ministère, devenu clérical, en a été déformé et sa portée a été limitée. Les conséqences pour la vie de l’Eglise sont graves. L’Eglise, peuple de Dieu, est composée de gens qui, avant Jésus, n’étaient pas son peuple “Ainsi il nous a appelés (kaleo), non seulement d’entre (ek) les Juifs, mais encore d’entre (ek) les païens, selon qu’il le dit dans Osée: J’appellerai (kaleo) mon peuple celui qui n’était pas mon peuple” (Rom.9:24,25). L’Eglise, l’ekklesia (ek-kaleo), peuple de Dieu “appelé hors de” l’ensemble des païens (et non pas composée uniquement de Juifs, comme le peuple d’Israël) constitue une entité nouvelle qui, avant le venue de Jésus, n’était pas le peuple de Dieu. Comment dire plus clairement que ce nouveau peuple a commencé à être rassemblé en vertu de l’appel de l’Evangile du Christ. Pierre le confirme: “Vous êtes...un peuple acquis...vous qui autrefois n’étiez pas un peuple, et qui maintenant êtes le peuple de Dieu” (1 Pi.2:9,10). Le contraste: “autrefois” - “maintenant” montre bien que l’Eglise est un peuple nouveau par rapport à Israël (voir le chap.7). Il fallait que les païens puissent devenir “peuple de Dieu” sans d’abord devenir juifs. Aujourd’hui il faut que les africain, les asiatiques et les autochtones des Amériques qui, autrefois n’étaient pas peuple de Dieu, puissent le devenir authentiquement sans se voir imposer une culture judéo-chrétienne, voir une théologie occidentale. Trop longtemps une tradition théologique européenne, cérébrale, professionalisée, académique, issue du siècle des lumières a pesé sur les peuples en terre de mission. Cette tradition s’était imaginé que la science et la modernité étaient destinéss à faire de la culture occidentale, la culture universelle. Elle ne concevait pas que des peuple païens puissent devenir authentiquement chrétiens sans elle, et sans adopter une chrétienté occidentale. Elle a fondé dans le Sud des dixaines d’écoles de théologie dont les programmes se basent sur les écrits de Tillich, Bultmann, Robinson et d’autres du même type. Mais ni ces écoles, ni les institutions occidentales dont elles émanent, ne sont aujourd’hui à la pointe des avancées du christianisme dans le tiers monde. En s’attendant à voir se développer un mouvement politique, ces dernières ont à peine remarqué

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l’émergence discrète d’un large mouvement spirituel populaire. Il existe maintenant dans le monde, d’innombrables Eglises issues d’un contact direct avec la Bible en langue vernaculaire. Comme du temps de la réforme en Europe, l’Ecriture devient le livre du peuple. Leur théologie de terrain n’en est, peut-être, que plus biblique. Il ne leur arrive pas, en tout cas, malgré quelques dérives, de nier la naissance miraculeuse, la mort expiatoire, la résurrection corporelle et le retour eschatologique du Christ, comme le font certains des théologiens les mieux cotés des institutions officielles. Souvent, ces Eglises, vraiment autochtones, ne sont issues d’aucune mission, institution ou dénomination occidentale. Ce simple fait en a amené certains à hativement les traiter de “sectes”. Mais il en existe des dixaines de milliers fondées en Amérique latine, en Afrique et en Asie, par des latins, des africains et des asiatiques, pour leurs propres peuples. Et au 21e siècle, la plus grande partie du peuple de Dieu ne se trouve plus dans le Nord dit: judéo-chrétien, mais dans le Sud. Le journal “Le Soir” de Bruxelles, le 7 septembre 2001, signalait la distribution de la Bible par milliards d’exemplaires et sa traduction en 2.261 langues. Il cite Jean-Louis Schlegel, éditeur au Seuil qui “voit dans cet engouement biblique le signe que les textes fondateurs ont définitivement échappé aux institutions religieuses”. Ceux qui n’étaient pas le peuple de Dieu, le deviennent. Et, maintenant, le message de la parole de Dieu devient aussi porteur de l’Esprit de Dieu. L’Eglise, corps du Christ, dépend pour son existence, d’une action nouvelle de l’Esprit Saint “Christ est, lui, la tête du corps, qui est l’Eglise” (Col.1:18 TOB). “Nous avons tous, en effet, été baptisés dans un seul Esprit pour former un seul corps, soit Juifs, soit Grecs” (1 Cor.12:13). Avant son ascension, le Christ annonçait ce baptême spirituel comme étant encore futur (Act.1:5). Ce corps ne fut donc pas formé avant la venue de l’Esprit à la Pentecôte. Et avant la venue du Christ et de l’Esprit, Juifs et Gentils ne formaient aucunement un seul corps au sein the la communauté d’Israël (voir le chap.8). Il fallait une action nouvelle de l’Esprit Saint, par rapport à son action sous l’ancienne alliance. L’Esprit devait créer une entité nouvelle, l’Eglise, pour que, en son sein, toutes les anciennes différences de race, de classe, de nationalité, de sexe et d’âge ne comptent plus. Sans cela, il ne serait pas possible de faire de vrais disciples du Christ parmi toutes les nations de la terre. Cependant, ces éléments humains et culturels ne devaient pas forcément être abolis chez un peuple. Mais, dans l’Eglise, on n’en tiendrait plus compte; ils seraient relativisés et transformés par l’oeuvre du Christ. L’oeuvre du Saint-Esprit qui forme l’Eglise reste supraculturelle, ne privilégie aucune culture par rapport à une autre. L’Esprit, qui veut continuellement réformer l’Eglise, permet que toute culture, même celle de l’institution, même celle du missionnaire, soit jugée par le Christ. L’accès à l’Eglise En vertu de quoi entre-t-on dans l’Eglise? Les Eglises n’ont pas toujours donné une réponse claire à cette question pourtant fondamentale. On a parfois cultivé le flou en prétendant que l’Eglise est “tout le peuple” et à refuser d’affirmer que certaines personnes seraient certainemant dans l’Eglise, tandis que d’autres se trouveraient en dehors. Paul s’adressait à l’Eglise à Corinthe et à l’Eglise universelle, “...à tous ceux qui invoquent en quelque lieu que se soit le nom de notre Seigneur Jésus-Christ, leur Seigneur et le nôtre” (1 Cor.1:2). Au chapitre 5, il met en contraste “ceux du dehors” (tous exo) et de “ceux du dedans” (tous eso -5:12). Il précise que ceux du dehors sont “de ce monde” (5:10), qu’il “n’a pas à les juger” (12) mais que “Dieu les juge” (13). Par contre, ceux du dedans “se nomment frères” (11) et doivent être jugés par leurs frères pour conduite immorale (12). Il écrira encore deux fois au sujet de “ceux du dehors” en insistant sur la nécessité d’une bonne conduite à leur égard de la part des croyants (Col.4:5; 1 Thes.4:12). Car une telle exclusion n’est pas inéluctable. Ceux du dedans doivent bien se conduire afin de persuader ceux du dehors de les

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rejoindre à l’intérieur. Il ne faut pas les inclure tels qu’ils sont et sans condition. mais les persuader d’entrer pas la porte: Jésus-Christ. Car Jésus multiplie les paraboles qui parlent d’invitations à entrer. Celles-ci sont adressées à des personnes se trouvant à l’extérieur de la maisons, du repas, des noces, du royaume, etc. Et il déclare: “Je ne mettrai pas dehors (exo) celui qui vient à moi” (Jean 6:37). Le refus de reconnaître la distinction (faite par l’apôtre dans ce chapitre 5 sur la discipline ecclésiastique) entre “ceux du dehors” et “ceux du dedans”, a amené des effets pervers. Ceux qui insistent que toute la société est “peuple de Dieu” ne respectent pas la différence de traitement destiné aux incroyants et celui qu’il faut réserver aux croyants. Ils ne laissent pas à Dieu le soin de juger “ceux de ce monde, ceux du dehors” (5:10,12). Et contre l’ordre de Paul, ils prennent sur eux-mêmes de les juger en cherchant à leur faire respecter la morale, les normes et les valeurs chrétiennes appliquées à toute la gamme des problèmes de société. Ils justifient leur action en insistant qu’elle est “salutaire” pour toute la société. Mais ils ne font qu’irriter les incroyants et les immuniser contre l’unique réalité salutaire pour l’homme, qui est d’être réconcilié avec Dieu. En même temps ils découvrent que la discipline d’Eglise préconisée par l’apôtre dans ce chapitre pour “les frères” est inapplicable à toute la société. Et ils finissent par ne plus l’appliquer à personne, pas même à “ceux du dedans”. Et l’Eglise devient ainsi en scandale au monde, qui y voit une raison de plus pour ne pas accepter la bonne nouvelle de la grâce de Dieu. Il faut avant tout montrer à “ceux du dehors” comment entrer dans le royaume de Dieu, comment accéder à l’Eglise. L’accès par la clé de la connaissance sur le Christ Jésus dit à Pierre: “Je bâtirai mon Eglise, et...je te donnerai les clés du royaume des cieux” (Mat.16: 18,19). Ces clés qui donnent accès à l’édifice de l’Eglise, furent données à celui qui, le premier, proclamait que Jésus était le Messie, le Fils du Dieu vivant (16:16). Cette proclamation qui donne aux hommes la connaissance sur Jésus, est aussi la clé qui leur donne accès au royaume de Dieu. Jésus dit encore: “Malheur à vous, docteurs de la loi, vous qui avez pris la clé de la connaissance, ...vous qui fermez devant les hommes l’entrée du royaume des cieux!” (Luc 11:52; Mat.23:13). Les scribes avaient enseigné aux gens tout ce qui se trouvait dans l’Ancien Testament, sauf l’essentiel, ce qui concernait le Messie. Tandis que c’était uniquement cette connaissance-là qui pouvait leur donner accès au royaume de Dieu. Jésus lui-même établit le contraste entre “ceux du dedans” et “ceux du dehors: “Les secrets du royaume de Dieu vous ont été confiés (à ceux qui l’accompagnaient”-Mc 4:10); mais à ceux du dehors (tois exo), tout est présenté au moyen de paraboles” (4:11). Ceux qui recevaient l’enseignement de Jésus était “ceux du dedans” parce qu’ils s’étaient servi de la clé de la connaissance sur lui. Ceux qui n’avaient pas d’oreilles pour entendre étaient “ceux du dehors” qui n’avaient pas accès à son royaume. La première chose à faire pour amener des gens à entrer dans l’Eglise, c’est de leur faire connaître la personne de Jésus. L’accès au prix du sang de Jésus “Frères, nous avons, au moyen du sang de Jésus, une libre entrée dans le sanctuaire...et nous avons un souverain sacrificateur établi sur la maison de Dieu” (Héb.10:19,20). On accède librement à l’Eglise, maison de Dieu parce que Jésus a payé le prix d’entrée. “Si votre justice ne surpasse celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux” (Mat.5:20). Le propre juste qui pense avoir accès au royaume par ses propres prestations morales, en sera exclu. La

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justice supérieure est pour ceux qui sont “justifiés par le sang du Christ” (Rom.5:9), qui ont reçu “le don de la justice (5:17). Tous doivent “connaître” cette justice que Dieu veut leur accorder et s’y “soumettre” (Rom.10:3,4). Elle surpasse de loin en valeur toutes les observances légalistes, et ouvre les portes de l’Eglise à ceux qui la reçoivent. L’accès par une action de l’Esprit Saint “Vous vous êtes approchés...de l’Eglise (ekklesia) des premiers-nés inscrits dans les cieux” (Héb. 12:23). Ce n’est pas une naissance physique qui permet qu’on s’approche de l’Eglise ou qui assurerait une telle inscription au ciel. Ce n’est pas l’appartenance ou la loyauté vis-à-vis d’un groupe ethnique, d’un clan, d’une institution ou d’une vie associative sur la terre. Seule la régénération, la réalité intérieure, donne accès à l’Eglise. Bien entendu, Dieu veut que tous ceux qui s’approchent de l’Eglise universelle, adhèrent également à une Eglise locale. “Jésus répondit:...personne ne peut entrer dans le royaume de Dieu s’il ne naît pas d’eau (de naissance naturelle) et de l’Esprit. Ce qui naît de parents humains est humain; ce qui naît de l’Esprit de Dieu est esprit. Ne sois pas étonné parce que je t’ai dit: “Il vous faut tous naître de nouveau” (Jean 3:5-7 BFC). L’essence de ce royaume, entre les deux venues du Christ, est spirituelle. Jésus insiste qu’on n’y accède pas sans une naissance spirituelle, malgré l’étonnement que suscite chez Nicodème une déclaration aussi tranchée. En général, il faut être aussi tranché que le Christ dans l’annonce de l’Evangile, pour que l’auditeur soit convaincu que la régénération est la seule porte d’entrée. En ce qui concerne l’Eglise locale, par contre, on peut y accéder par une profession de foi, le baptême d’eau et la participation à la vie communautaire. Mais si importante que soit l’affiliation ecclésiastique, elle ne pourrait assurer à elle seule, l’accès à l’Eglise universelle. Seule une action divine permet l’introduction d’un homme à l’Eglise. “Le vent souffle où il veut, et tu en entends le bruit; mais tu ne sais d’où il vient ni où il va. Il en est ainsi de tout homme qui est né de l’Esprit”(3:8). Cette action ne vient pas de l’homme. Elle est mystérieuse, spontanée, de sorte que la vie nouvelle jaillit de façon perceptible là où on l’attend le moins et même quand tout semble mort. L’accès par la foi en Jésus-Christ Paul écrit aux croyants des Eglises de la Galatie (Gal.1:2): “Car vous êtes tous fils de Dieu par la foi en Jésus-Christ; vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu Christ” (Gal.3:26,27). On entre dans la famille de Dieu, l’Eglise, en devenant un de ses fils par la foi en Jésus. On est baptisé par le Christ dans l’Esprit pour être ajouté à son corps, en réponse à une foi vivante en lui. Il s’agit d’un engagement personnel, un acte de liberté par lequel on se choisit chrétien et qui permet la distinction entre l’Eglise et le monde des non-croyants. “Mais à ceux qui l’ont reçu (le Christ), à ceux qui croient en son nom, il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu. Ceux-là ne sont pas nés...d’un vouloir d’homme, mais de Dieu” (Jean 1:12,13 TOB). Le droit d’accéder à l’Eglise, famille de Dieu, par la nouvelle naissance spirituelle, est accordé en réponse à la foi en Christ. La nature de cet acte de foi est précisée. Elle consiste à “recevoir” personnellement le Christ. Cet accès n’est pas assuré par la naissance naturelle à une chrétienté socio-culturelle qui agirait pour et sur les gens. Jésus dit: “Si vous ne changez pas pour devenir comme des petits enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux” (Mat. 18:3). Que font donc précisément les adultes qui “changent pour devenir comme des petits enfants” afin d’entrer dans le royaume de Dieu? L’adulte “s’abaisse” et

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devient comme cet enfant” (v.4) “qui croit en Jésus” (v.5). Ce “changement” est donc un abaissement et une foi intérieure. Pour avoir accès à l’Eglise universelle, il s’agit de remplacer une attitude d’orgueil et de méfiance à l’égard du Christ par l’humilité et la confiance en lui. La composition de l’Eglise universelle L’identité de ceux dont l’Eglise est composée, découle logiquement des moyens mentionnés plus haut, par lesquels ils y ont eu accès. Il s’agit donc de personnes qui ont des connaissances sur le Christ, qui sont rachetées, régénérées et croyantes. Mais, étant donné la divergence de vue sur la composition de l’Eglise, et les dangers pratiques que comporte une confusion à ce sujet, il n’est pas inutile d’avoir également recours à des déclarations explicites de l’Ecriture, et non seulement à des déductions. L’Eglise universelle est composée de rachetés “Tu as été immolé, et tu as racheté pour Dieu, par ton sang des hommes de toute tribu, langue, peuple et nation” (Apoc.5:9). L’Eglise universelle, peu importe la provenance de ces membres, est entièrement composée de rachetés de Jésus. “Le Christ s’est donné lui-même pour nous, afin de nous racheter de toute iniquité, et de se faire un peuple qui lui appartienne. (Tite 2:14). Cette rédemption n’ajoute pas d’office au peuple de Dieu tous les citoyens d’une nation, y compris ceux en elle qui n’en veulent pas. Il ne faut pas brouiller la distinction que Dieu fait entre le croyant et le non-croyant et impose aux masses une religion que beaucoup refusent. La rédemption de toute la création attend le retour du Christ, et est précédée par le jugement. De personnes ayant reçu la vie éternelle L’Eglise, “troupeau du bon Berger”, est composée de brebis qui entendent la voix de Jésus (Jean 10:16), qui le suivent (10:27), et auxquelles il “donne la vie éternelle et qui ne périront jamais” (Jean 10:28). L’Eglise, “maison spirituelle” est composée uniquement de “pierres vivantes” (1 Pi.2:5), c.à.d. de personnes ayant reçu la vie nouvelle en Christ. Elle est le domaine de la réalité spirituelle, la totalité secrète des authentiques disciples du Christ. Il ne s’agit pas de prétentions dont pourrait se targer l’une ou l’autre institution ecclésiastique, car aucune dénomination ne pourrait être identique à ce “troupeau”, à cette “maison spirituelle”. D’élus L’Eglise est un “sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis, une race élue” (1 Pi.2:9). Paul déclare au sujet de l’Eglise et de lui-même: “En Christ, Dieu nous a élus avant la fondation du monde (Eph.1:4). Ceux qui veulent inclure dans l’Eglise toute la population d’un pays et n’en exclure personne traitent cette restriction biblique de “dualiste”, de “fausse dichotomie entre le sacré et le profane”, de “puriste”, de “moraliste”, etc. Mais rien n’exclu autant le moralisme que l’élection. De croyants “L’Eglise à la Pentecôte est définie comme “tous ceux qui croyaient” (2:44), et “la multitude de ceux qui avaient cru” (4:32). Mais très vite, l’Eglise locale à Jérusalem ne fut plus une Eglise de croyants exclusivement, car des pseudo-chrétiens, des chrétiens de nom s’y attachèrent (5:1-11). Actuellement, les Eglises locales composées uniquement de croyants authentiques sont rarissimes et forcément petites. Et même si certaines paressent pures, on ne saurait dire avec certitude qu’elles le sont effectivement. Il vaut toujours mieux parler d’Eglises locales “de professants”. Si donc

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l’’Eglise universelle est composée de personnes ayant reçu la vie éternelle et qui ne périront jamais, qui ont été élues avant la fondation du monde, et qui sont des disciples ayant vraiment cru au Seigneur Jésus, il s’en suit nécessairement que toute autre personne, ne répondant pas à cette description, ne pourrait faire partie de cette Eglise. Mais il est évident que Dieu seul en est juge. La direction de l’Eglise universelle Jésus-Christ est le souverain berger de son troupeau, l’Eglise: “Il y aura un seul troupeau, un seul berger”(Jean 10:16). “Le grand berger des brebis...notre Seigneur Jésus” (Héb.13:20). “Et quand le Chef des bergers paraîtra, vous (les sous-bergers-5:2) recevrez la couronne glorieuse” (1 Pi. 5:4 FC). “Un seul berger!” A-t-il été prévu un deuxième souverain berger à Rome? Et s’il existe de nombreux sous-bergers, en quoi le Pape serait-il souverain? Jésus-Christ est le grand- prêtre souverain de sa prêtrise royale, l’Eglise: “Nous avons, en effet un grand-prêtre souverain...Jésus, le Fils de Dieu” (Héb.4:14 FC). Y aurait-il donc deux “grands-prêtres souverains”, dont l’un, sur la terre, ne serait pas le Fils de Dieu? “Jésus est donc le grand-prêtre qu’il nous fallait... sans défaut, sans péché” (Héb.7:26 FC). Nous faut-il vraiment, en plus de Jésus, un grand-prêtre “avec défauts, et avec péchés”? Comment le grand-prêtre pécheur pourrait-il être “le remplaçant visible du Christ sur terre” sans déformer l’image du Christ et le discréditer aux yeux des hommes? (Voir aussi Héb.5:5; 8:1; 10:21). Jésus-Christ est la tête de son corps, l’Eglise: “Dieu a constitué le Christ, au sommet de tout, Tête pour l’Eglise, laquelle est son corps” (Eph.1:22 Jérus. Voir aussi 5:23; Col.1:18). Une deuxième tête pourrait-elle être introduite entre le Christ et son corps comme intermédiaire entre lui et l’Eglise? Jésus-Christ est le chef de son épouse, l’Eglise: “Le mari est le chef de sa femme, comme le Christ est le chef de l’Eglise” (Eph.5:23). L’Eglise aurait-elle plus qu’un seul époux, comme chef? Un époux serait-il le remplaçant de l’autre? Que penser de la prétention romaine que le Pape est le vicaire de Jésus-Christ, c.à.d. son unique remplaçant visible sur terre, de sorte que la soumission au Christ exigerait la soumission au Pape? (1) Jésus a déclaré qu’il était possible d’agir en son nom, sans suivre les apôtres, dont Pierre “Jean lui dit: Maître, nous avons vu quelqu’un expulser des démons en ton nom, quelqu’un qui ne nous suit pas, et nous avons voulu l’en empêcher, parce qu’il ne nous suivait pas. Mais Jésus dit: Ne l’en empêchez pas...Qui n’est pas contre nous est pour nous” (Mc.9:38-40 Jérus.). L’homme en question n’était pas un imposteur. Jean ne dit pas qu’il ne suivait pas Jésus (il expulsait des démons en son nom), mais qu’il ne le suivait pas, lui, Jean et les autres apôtres. Si jamais il y eut une société de chrétiens dans ce monde, autorisés à réduire au silence ceux qui ne leur reconnaissaient pas l’exclusivité du nom de Jésus, c’était bien les douze. Mais l’ordre du Maître tombe sec: “Ne l’en empêchez pas”. Pour Jésus, leur attitude était l’essence-même du sectarisme, de l’esprit de parti. Les apôtres (Pierre inclus) avaient interdit à cet homme de faire du bien au nom de Jésus, s’il ne suivait pas leurs personnes. Ils supposaient que cet homme était dans l’illégalité parce qu’il agissait sans autorisation apostolique officielle. Leur était-il indifférent que le pauvre démoniaque continue dans son esclavage spirituel? Ils étaient d’autant plus mal placés de le lui interdire, qu’ils venaient de se montrer incapables eux-mêmes de chasser un démon (9:14-29). Ce qui ne les empêchaient pas de s’ériger en seuls représentants du Christ et de prononçer l’exclusive contre quelqu’un sans même consulter le Seigneur.

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Même s’il ne suivait pas Jésus exactement de la même manière que les apôtres, cet homme le suivait quand même véritablement et s’opposait avec puissance à Satan. Et Jésus leur déclare qu’il lui accorde la permission et le pouvoir d’agir en son nom, sans eux. L’Esprit du Christ souffle où il veut. Le Seigneur ajoute en outre qu’il est “pour nous”, c.à.d. pour Jésus et, malgré leur parti-pris, pour les apôtres aussi. En même temps le Christ enseigne à tous ceux qui veulent s’arroger le monopole de son nom, que d’autres peuvent très bien le servir sans leur permission. Ils ne doivent pas considérer de tels hommes comme étant nécessairement contre eux ou sectaires par rapport à Jésus. Le Seigneur proscrit de la sorte toute tentative d’enfermer tous ses serviteurs dans un seul cercle visible de disciples. Toutes les chasses gardées, les harcèlements et les mépris pour des serviteurs du Christ non-officiels sont interdits. L’apôtre Paul montre bien qu’il avait appris la leçon à cet égard. Il écrit à l’Eglise à Philippes concernant certains qui “annoncent le Christ par jalousie, avec des intentions polémiques à mon égard...dans un esprit de rivalité. Leurs motifs sont troubles ...Peu importe! Que leurs intentions soient inavouables ou sincères, le Christ est de toute façon annoncé, et je m’en réjouis. Je continuerai même à m’en réjouir” (Phil.1:15-18BFC). Cette parole du Christ à elle seule (et telle que Paul l’avait comprise) rend insoutenable toute théorie de succession apostolique qui ferait du Pape, ou de tout autre chef religieux, l’unique représentant autorisé du Christ sur terre. (2) Jésus a nommé l’Esprit Saint comme son représentant sur terre avec fonction de magistère “Mais le Paraclet, l’Esprit Saint, que le Père enverra en mon nom, vous enseignera tout” (Jean 14:26BFC). Celui qui est envoyé au nom de quelqu’un d’autre est envoyé comme son représentant. Le Père a envoyé le Saint-Esprit “à la place de” Jésus et “pour” lui. C’est l’interprétation de la grande majorité des exégètes. En l’absence du Christ au ciel, l’Esprit est son vicaire, son suppléant sur la terre. Jésus, “Saint, innocent, sans tache, séparé des pécheurs” (Héb. 7:26), ne pouvait être dignement représenté par un homme pécheur et impur. L’histoire de la papauté en est la triste preuve. Il fallait l’Esprit Saint. C’est d’ailleurs lui qui entreprend d’enseigner le lecteur de sa parole inspirée, à condition que ce dernier reste humble, réceptif et soumis. “Nous n’avons pas reçu l’esprit du monde, mais l’Esprit qui vient de Dieu, afin que nous connaissions les choses que Dieu nous a données par sa grâce” (1 Cor.2:12). Le Pape usurpe les fonctions du Saint-Esprit au sein du catholicisme. Par le magistère qu’il s’est arrogé, il empêche l’Esprit, Envoyé de Dieu, Suppléant du Christ, d’accomplir son ministère d’enseignement et de direction en faveur des croyants, comme il le voudrait. (3) L’Ecriture ne présente pas l’autorité de Pierre dans l’Eglise comme étant celle de l’unique vicaire visible du Christ sur la terre: Pierre écrit à son propre sujet: “J’exhorte donc les anciens qui sont parmi vous, moi qui suis ancien avec eux (lit. “coancien” sumpresbuteros). Le préfix “co” (sun-) écarte toute idée de primauté. Et cette lettre aurait été l’endroit normal pour lui de se présenter à ses lecteurs avec les prérogatives que lui attribue le Catholicisme, si du moins celles-ci lui avait effectivement été accordées par le Christ. Les Papes, dans leurs encycliques, ne s’en sont pas privés par la suite. Et Paul appelle Pierre, au même titre que Jacques et Jean, une “colonne” de l’Eglise, non son fondement (Gal.2:9; 1Cor.3:11). Dieu est propriétaire et habitant de son temple l’Eglise: “Nous sommes le temple du Dieu vivant” (2 Cor.6:16). “Vous êtes des gens de la maison de Dieu ...En Christ, tout l’édifice, bien coordonné, s’élève pour être un temple saint...une habitation de Dieu” (Eph.2:19-22). Aucune des pierres vivantes qui constituent l’Eglise ne peut agir comme si

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l’Eglise lui appartenait. Dieu est le Père de sa famille, l’Eglise: “Petits enfants...Voyez quel amour le Père nous a témoigné, pour que nous soyons appelés enfants de Dieu!” (1 Jean 2:28,3:1). “Dieu l’a dit:...Je serai pour vous un Père, et vous serez pour moi des fils et des filles, dit le Seigneur” (2 Cor.6:16-18). Jésus donne l’ordre formel: “N’appeler personne sur la terre votre “Père”, car vous n’en avez qu’un seul, le Père céleste” (Mat.23:9). Comment donc appeler le Pape (nom qui signifie “père”): “le saint père” sans désobéir au Christ et saper aux yeux des hommes l’autorité de la paternité unique de Dieu? Sommaire Ayant décrit l’instauration de l’Eglise et déterminé quelle en était l’accès, la composition et la direction, il est maintenant possible d’aborder dans de bonnes conditions la question de sa croissance. Car il sera tout aussi important d’éviter, d’une part, une restriction illégitime de son expansion, et d’autre part, une croissance débridée. CHAPITRE 8 LA CROISSANCE DE L’EGLISE “Nous ne sommes pas très grands, mais nous sommes spirituels”. Que penser d’une telle remarque? Quand Jésus prédit qu’il bâtirait une Eglise indestructible (Mat.16:18), outre la fondation de celle-ci, il envisageait aussi l’édification sur cette fondation de la structure proprement dite. S’il en entreprenait lui-même la constitution, il en assurerait aussi le développement. L’Ecriture présente la croissance de l’Eglise sous plusieurs aspects. “Nous (le corps) grandirons de toutes manières vers Celui qui est la Tête, le Christ” (Eph.4:15 Jérus.). Cette croissance peut se faire de diverses “manières”: en qualité, en quantité. Mais le grand nombre n’est pas le premier souci de Dieu. Il

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veut, tout d’abord, l’édification spirituelle. “Edifiez-vous pour former une maison spirituelle” (1 Pi.1:5). Une saine croissance en nombre suivra normalement la croissance en qualité. Le développement de l’Eglise est fonction de l’attachement de celle-ci au Christ. Les segments de la chrétienté qui décroissent sont ceux dont l’attachement effectif à Jésus est défectueux. L’apôtre nous explique: “Ils ne restent pas attachés au Christ qui est la tête. C’est pourtant grâce au Christ que le corps...grandit comme Dieu le veut” (Col.2:19 FC). La croissance de l’Eglise en qualité: Les critères de qualité: En maturité: “Il a rendu le peuple de Dieu apte à accomplir son service pour faire croître le corps du Christ. De cette façon,...nous deviendrons des adultes dont le développement atteindra à la stature parfaite du Christ. Alors nous ne serons plus des enfants” (Eph.4:12-14BFC). Les petits enfants ont des sautes d’humeur, ne supportent pas la nourriture solide, se disputent, sont influençables, alternent rires et pleurs, sont incapables de prendre soin des autres. Toute immaturité freine la croissance en nombre. En foi: Paul écrit aux croyants dans les églises: “Nous devons sans cesse remercier Dieu à votre sujet, frères, car votre foi fait de grands progrès” (2 Thes.1:3 BFC). “Nous espérons que votre foi augmentera” (2 Cor.10:15 FC). Il est à la mode de douter, de toujours tout remettre en question, de ridiculiser les certitudes. C’est ainsi que l’Eglise décroît. En sainteté: “En Jésus-Christ, tout l’édifice, bien coordonné, s’élève pour être un temple saint” (Eph.2:21). L’édification spirituelle de l’Eglise augmente sa sainteté, c.à.d. sa consécration à Dieu et sa séparation d’avec le péché. Toute croissance numérique par des procédés purement humains, qui fait décroître la consécration et le niveau moral de l’Eglise, est un danger pour l’intégrité de celle-ci. Dans la crainte du Seigneur: “L’Eglise, sur toute l’étendue de la Judée, de la Galilée et de la Samarie, s’édifiait et marchait dans la crainte du Seigneur” (Act.9:31a TOB). Un sain respect pour le Christ, une soumission effective de l’Eglise à sa seigneurie, favorisent l’édification spirituelle de celle-ci. Jésus-Christ super-star, Jésus démythologisé, Jésus-copain, Jésus création de la communauté primitive, un “autre Jésus” (2 Cor.11:4), ne feront guère croître l’Eglise en qualité. Dans l’amour: “C’est du Christ, que tout le corps...tire son accroissement...et s’édifie lui-même dans l’amour (Eph. 4:16). “Que le Seigneur fasse croître et abonder l’amour que vous avez les uns pour les autres”(1 Thes.3:12). “La connaissance enfle, l’amour édifie” (1 Cor.8:1). Il s’agit de l’amour qui vient de Dieu, en actes, même envers ceux qui ne sont pas aimables. Il se donne, par obéissance. On comprend que la croissance dans cet amour-là entraîne une édification solide. C’est l’effet contraire du gonflement par un intellectualisme orgueilleux et creux. En unité: “...faire croître le corps du Christ. De cette façon, nous parviendrons tous ensemble à l’unité de la foi dans la connaissance du Fils de Dieu” (Eph.4:12,13 BFC). S’unir en faisant fi d’une foi basée sur la connaissance du Christ, sera une unité fausse. On peut s’unir entre soi, sans connaître le Fils

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de Dieu tel qu’il est, ni même croire vraiment en lui. Mais tous ceux qui se rapprochent réellement du Christ se rapprochent forcément les uns des autres. Et une Eglise unie attire du monde. Qui assure cette croissance en qualité? Dieu lui-même: “On nourrit et on prend soin de son propre corps, comme le fait le Christ pour l’Eglise” (Eph.5:29). “Dieu a fait croître...C’est Dieu qui fait croître” (1 Cor.3:6,7). Sans lui, tous les efforts sont vains. Chaque croyant est appelé à contribuer, là où il est, à l’édification spirituelle de l’Eglise universelle. Mais c’est l’intervention personnelle, active et constante de Dieu qui donne efficacité à ses efforts, et assure la croissance de cet organisme vivant, en stature, en force et en fécondité. “Nous sommes des collaborateurs de Dieu” (1 Cor.3:9) - ni plus ni moins. C’est son action à lui qui explique que son Eglise, après 2000 ans, est présente dans tous les pays du monde. Ce qui n’exclut pas la responsabilité humaine. Chaque membre du corps: “Encouragez-vous mutuellement et édifiez-vous les uns les autres” (1 Thes.5:11). C’est réciproque. “Tout le corps...s’édifie lui-même”(Eph.4:16). “L’Eglise...s’édifiait”(Act.9:31). Si le Christ est en elle, elle s’auto-édifie. Elle n’a aucun besoin des non-croyants pour croître spirituellement. Ni de leur argent, ni de leur influence, ni de leur art, ni de leur pouvoir, ni de leur pensée. C’est à dessein, et non par inattention, que l’Ecriture, dans l’image de l’édifice, présente les croyants, à la fois comme bâtisseurs et comme pierres vivantes ajoutées à l’édifice. Il n’y a pas contradiction. Les membres de l’Eglise sont, à la fois ceux qui édifient et ceux qui sont édifiés. Cette mutualité montre en même temps que ce ne ce ne sont pas les seuls conducteurs de l’Eglise qui édifient les autres membres. Les dirigeants ont eux-mêmes besoin d’être édifiés à leur tour, par ceux qui ont d’autres charismes. C’est l’exercice des charismes qui assure la progression de l’Eglise en qualité: “Puisque vous aspirez aux dons spirituels, cherchez-en l’abondance en vue de l’édification de l’Eglise” (1 Cor.14:12 Mar.). Le plein exercice de l’un ou l’autre des charismes, par chacun des membres du corps du Christ, a pour but l’édification spirituelle de l’Eglise, sa croissance en qualité. “Celui qui prophétise parle aux hommes, les édifie, les exhorte, les console...celui qui prophétise édifie l’Eglise” (1 Cor.14:”3,4). Une prédication équilibrée, qui dépend de l’Esprit Saint et alterne exhortation et consolation, contribue à l’édification spirituelle de l’Eglise. “Lorsque vous vous assemblez, les uns ou les autres parmi vous ont-ils un cantique, une instruction, une révélation, une langue, une interprétation, que tout se fasse pour l’édification” (1 Cor.14:26). Toutes ces interventions possibles aux assemblées de l’Eglise, petites ou grandes, visent la croissance de celle-ci en qualité. Tous ceux, à Corinthe, qui prenaient la parole dans les assemblées, ne respectaient pas, semble-t-il, cette finalité, d’où la recommandation de l’apôtre de toujours viser le but, qui est l’édification de l’Eglise. “Qu’il sorte de votre bouche quelque bonne parole, qui serve à l’édification et communique une grâce à ceux qui l’entendent” (Eph.4:29). Ces propos bienfaisants peuvent aussi s’échanger entre membres de l’Eglise en dehors des réunions. Paul parlait de: “L’autorité que le Seigneur nous a donnée, autorité qui a pour but de faire progresser (lit. “l’édification de”) votre communauté et non de la détruire” (2 Cor.10:8 FC). Chaque apôtre, implanteur d’Eglises, a reçu du Christ, avec ce don, l’autorité nécessaire pour assurer l’édification spirituelle de toute Eglise locale qu’il implante. Et ceux qui, après l’implanteur, exercent l’autorité d’une charge officielle dans l’Eglise, le font également en vue de sa progression

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en qualité. La croissance de l’Eglise en nombre: Jésus-Christ, en nous proposant différentes images pour décrire l’Eglise universelle, nous enseigne que son intention pour elle est qu’elle prenne de l’extension. Elle est un troupeau auquel doivent s’ajouter d’autres brebis (Jean 10:16). Elle est un peuple qui doit devenir innombrable (Apoc.5:10). Elle est une famille qui grandit par des naissances (1 Pi.2:2).. Elle est un champ dont la culture se lève jusqu’à la moisson (1 Cor.3:9). Elle est un édifice qui s’élève parce que toujours plus de pierres vivantes y sont ajoutées (1 Pi.2:5). Elle est un corps qui doit croître toujours plus en stature (Eph.4:15,16). Toutes ces figures de l’Eglise laissent entendre qu’il est de son essence-même de prendre de l’ampleur. Il serait anormal qu’elle ne grandisse pas. Mais K.S. Latourette déclare dans son ouvrage: “Une histoire de l’Expansion du Christianisme”: “Il se peut bien qu’en 1500 le nombre de chrétiens était effectivement plus petit qu’il le fut un millénaire auparavant” (Tôme II , p.2). En d’autre termes, malgré une croissance démographique considérable dans le monde entre l’an 500 et l’an 1500, l’institution catholique n’a pas grandi en nombre d’adhérents. Elle connut cependant durant cette période, l’apogée de son développement institutionnel, de son extension territoriale, de son pouvoir politique, de l’édification de ses cathédrales, de son influence culturelle, de sa main-mise sur la société et de son avoir. Malgré cela, pendant ces mille ans, la croissance en nombre de l’Eglise universelle a stagné. Qui assure la croissance de l’Eglise en nombre? “Le Seigneur ajoutait chaque jour à l’Eglise (ekklesia- Textus Receptus) ceux qui étaient sauvés (Actes 2:47). “Une foule de plus en plus nombreuse d’hommes et de femmes croyaient au Seigneur et s’ajoutaient (lit.“étaient ajoutés”) à leur groupe” (5:14 BFC). C’est Dieu qui doit agir pour sauver un homme et ainsi l’incorporer à l’Eglise universelle. Il n’est pas écrit: “Le Seigneur sauvait chaque jour ceux qui étaient ajoutés à l’Eglise”, comme le veut la doctrine romaine. Celle-ci prétend qu’il faut entrer dans l’institution catholique, en dehors de laquelle il n’y aurait pas de salut, afin, d’être sauvé par cette adhésion. D’où la méprise généralisée, que l’essentiel pour être sauvé est de se retrouver dans la bonne Eglise, même si on ne croit pas à grand-chose et qu’on en pratique encore moins. Le catholicisme donne de la sorte une fausse sécurité à des millions de personnes simplement “christianisées” en son sein, et elle donne l’impression d’exclure du salut des millions de vrais croyants en Christ, non-catholiques. Le texte est clair: le croyant est d’abord sauvé par Dieu qui, de ce fait, l’ajoute à l’Eglise. La différence est fondamentale et touche au salut éternel des hommes. “Nous avons tous, en effet, été baptisés dans un seul Esprit, (eis -“dans avec mouvement”) pour être intégrés à un seul corps” (1Cor. 12:13). De nouveaux membres se voient ajoutés à l’Eglise universelle, corps unique du Christ, en vertu de leur baptême dans un seul et même Esprit Saint (Voir le chap.8). Sans cette action spirituelle, il n’y a pas d’organisme vivant, pas d’Eglise universelle. Mais celle-ci n’est pas moins réelle pour être spirituelle. Les hommes ont parfois ajouté des personnes à l’institution sous la menace de l’épée comme au temps de Charlemagne, ou par le baptême d’eau sans leur en laisser le choix (pédobaptisme), ou en leur offrant des avantages matériels comme sur certains champs missionnaires, ou par des menaces économiques ou des pressions sociales comme dans certains Etats dits chrétiens, voir par des pressions psychologiques comme le pratiquent nombre de sectes. Mais ajouter des membres au corps du Christ est une oeuvre divine et spirituelle qui accompagne l’appel de l’Evangile et la réponse de la foi. Voyons le témoignage biblique sur sa croissance numérique:

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Pourquoi l’Eglise au premier siècle grandissait-elle en nombre de membres? “Ce jour-là, environ trois mille personnes s’ajoutèrent au groupe des croyants” (Act.2:41 BFC). “Parmi les auditeurs de la Parole, beaucoup étaient devenus croyants; leur nombre s’élevait à environ cinq mille personnes” (Act.4:4 TOB). “La multitude de ceux qui avaient cru n’était qu’un coeur et qu’une âme” (4:32). “Des multitudes de plus en plus nombreuses d’hommes et de femmes se ralliaient, par la foi, au Seigneur” (Act.5:14 TOB). “En ce temps-là, le nombre des disciples augmentait” (Act.6:1). “Le nombre des disciples augmentait beaucoup à Jérusalem, et une grande foule de sacrificateurs obéissaient à la foi” (Act.6:7). “L’Eglise s’accroissait par l’assistance du Saint-Esprit” (Act.9:31). “Tous les habitants de Lydde et du Saron...se convertirent au Seigneur” (Act.9:35). “Cela fut connu de tout Joppé, et beaucoup crurent au Seigneur” (Act.9:42). “Le Seigneur leur prêtait main forte, si bien que le nombre fut grand de ceux qui se tournèrent vers le Seigneur, en devenant croyants” (Act.11:21 TOB). “Une foule assez nombreuse se joignit au Seigneur” (Act.11:24). “La parole de Dieu se répandait de plus en plus, et le nombre des disciples augmentait” (Act.12:24). “Ils parlèrent de telle manière qu’une grande multitude de Juifs et de Grecs crurent” (Act.14:1). “Ils dirent à Paul: Tu vois, frère, combien de milliers de Juifs ont cru” (Act.21:20). “La Bonne Nouvelle se répand et porte des fruits dans le monde entier” (Col.1:6 BFC- d’où déjà, au premier siècle, le caractère “universel” de l’Eglise). Quand on se pose la question des raisons de cet accroissement remarquable en nombre, un examen des contextes immédiats de toutes ces déclarations révèlent plusieurs facteurs de croissance. Des mentions explicites et répétées d’au moins cinq éléments sautent aux yeux: (1) La parole de Dieu est annoncée - neuf mentions (2:41; 4:4; 4:32; 6:1; 6:7; 11:21; 12:24; 14:1; Col.1:6): au portique de Salomon, en prison, dans les rues, devant le sanhédrin, dans le temple, dans les maisons, vous avez rempli Jérusalem de votre enseignement, dans la synagogue). (2) Des hommes et des femmes croient en Christ - neuf mentions (2:41; 4:4; 4:32; 5:14; 6:7; 11:21; 14:1; 21:20; Col.1:6). (3) Les croyants connaissent une vie communautaire de qualité - huit mentions (2:47; 4:32; 5:14; 9:31; 9:42; 11:24; 16:5; Col.1:6): rencontres chaleureuses, maisons et coeurs ouverts, entre-aide généreuse, simplicité dans les rapports humains, agapes joyeuses, discipline d’Eglise, refus du légalisme, amour sincère. Le rapport est évident entre les croissances qualitative et quantitative. (4) Conséquence de l’attrait de cette vie communautaire: l’Eglise jouit de la faveur du peuple non-chrétien - cinq mentions (2:47; 4:32; 5:13; 9:31; 16:5: trouver grâce, respect, louange). (5) Dieu agit directement - quatre mentions (2:47; 9:31; 11:21; 14:1,3: “le Seigneur ajoutait”; “l’assistance du Saint-Esprit”; “la main du Seigneur était avec eux”; “appuyés sur le Seigneur qui rendait témoignage à la parole”. Le christianisme évangélique et charismatique est le mouvement religieux dans le monde, toutes religions confondues, qui connaît actuellement la croissance la plus rapide. Il grandit plus rapidement que la population du monde, et est le seul de ces mouvements à grandir en vertu de conversions et sans contrainte (d’après les sociologues David Barrett et Patrick Johnstone). Les cinq facteurs ci-dessus sont présents de façon évidente au sein de ce christianisme-là. Mais la croissance de l’Eglise ne se manifeste pas uniquement par l’adjonction de personnes individuelles. Comment le nombre des Eglises locales grandissait-il? “Les Eglises devenaient plus fortes dans la foi et croissaient en nombre de jour en jour” (Act.16:5

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TOB). Outre la croissance en nombre des membres de l’Eglise universelle décrite plus haut, il se produisait aussi une croissance dans le nombre des Eglises locales elles-mêmes. A mesure que celles-ci devenaient plus fortes dans la foi, elles commencèrent aussi à se multiplier. Une Eglise locale n’est pas de nature à grandir à l’infini en nombre d’adhérants. Toute forme de croissance naturelle atteint des limites naturelles. Un arbre ne connaît pas une croissance illimitée, mais il sème des graines qui produisent de nouveaux arbres. Le véritable fruit d’une vigne n’est pas uniquement le raisin, mais surtout une autre vigne. Le fruit de l’église à Ephèse et de son école (Eph.19:9), n’était pas seulement de nouveaux adhérents, mais bien les nombreuses églises nouvelles en Asie mineure (Act.19:10; Apoc.2-3). Après quelques années, un nombre important des croyants de l’Eglise à Jérusalem furent dispersés par la persécution (Act.8:1). Quelle en fut la conséquence? “Ils allaient de lieu en lieu, annonçant la bonne nouvelle de la parole” (8:4). “Ils allèrent jusqu’en Phénicie, dans l’île de Chypre, et à Antioche, annonçant la parole” (11:19). Le résultat en fut des Eglises en Phénicie à Tyre (21:3-5,7), à Ptolémaïs (21:7) et à Sidon (27:3), ainsi qu’à Antioche (11:20-26). Cette action s’est poursuivie au IIe siècle quand des commerçants chrétiens d’Asie mineure s’établirent dans la vallée du Rhône à Vienne et à Lyon. Des émigrations de chrétiens, forcées ou spontanées, ont été, au cours de toute l’histoire de l’Eglise, une raison importante de la création de nouvelles communautés dans des contrées non encore évangélisées. Aujourd’hui encore il arrive couramment qu’une partie des adhérents d’une Eglise locale quittent celle-ci pour former une Eglise nouvelle dans un autre quartier de la ville ou dans une localité voisine. Ou encore, des Eglises enverront au loin en terre de mission un(e) ou plusieurs missionnaires pour collaborer avec d’autres à l’implantation d’Eglises nouvelles. Une compagnie de missionnaires se rassembla autour de Paul, l’apôtre des païens. Celle-ci ainsi que d’autres sociétés similaires contribueront de façon marquante, à travers les siècles à la croissance de l’Eglise en nombre. Serait-il donc possible de calculer les dimensions de l’Eglise? Les dimensions de l’Eglise universelle: Dieu fit cette promesse à Abraham: “Regarde vers le ciel, et compte les étoiles si tu peux les compter...Telle sera ta postérité” (Gen.15:5). Et encore: “Je te rends père d’une multitude de nations” (Gen.17:5). L’apôtre Paul reprend ces prédictions dans son épître aux Romains: “Telle sera ta postérité” (Ro.4:18) et “Je t’ai établi père d’un grand nombre de nations” (Ro.4:17). Et il les applique, dans ce même passage, outre au peuple d’Israël, également à tous les non-Juifs qui croiraient en Christ, c.à.d. à l’Eglise universelle: “L’héritage du monde a été promis à Abraham et à sa postérité par la justice de la foi...Les héritiers le sont par la foi...afin que la promesse soit assurée à toute la postérité, non seulement à celle qui est sous la loi (les juifs), mais aussi à celle qui a la foi d’Abraham, notre père à tous” (l’Eglise - Ro.4:13,16). Comme on ne peut compter les étoiles, la postérité spirituelle d’Abraham, l’Eglise, sera innombrable. Et comme elle sera issue de toutes les nations du monde, elle sera universelle. Cette vérité, annoncée dans le premier livre de la Bible, est reprise et confirmée dans le dernier. Nous y trouvons la chorale céleste autour du trône et de l’Agneau. “Ils chantaient un cantique nouveau en disant: tu es digne de prendre le livre, et d’en ouvrir les sceaux; car tu as été immolé, et tu as racheté pour Dieu par ton sang des hommes de toute tribu, de toute langue, de tout peuple, et de toute nation” (Apoc.5:9). Et que les rachetés seraient innombrable est repris plus loin: “Voici, il y avait une grande foule, que personne ne pouvait compter, de toute nation, de toute tribu, de tout peuple et de toute langue. Ils se tenaient devant le trône et devant l’Agneau, revêtus de robes blanches...Et ils criaient d’une voix forte, en disant: Le salut est à notre Dieu” (Apoc.7:9,10). L’Eglise est donc universelle de par sa provenance de toute ethnie, et innombrable dans son

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importance. Ces notions demeurent, malgré tout assez vagues et doivent être modulées par d’autres déclarations de l’Ecriture. “Entrez par la porte étroite. Car large est la porte, spacieux le chemin qui mènent à la perdition, et il y en a beaucoup qui entrent par là. Mais étroite est la porte, reserré le chemin qui mènent à la vie, et il y en a peu qui les trouvent” (Mat.7:13,14). Les termes “beaucoup” et “peu” sont peu précis. La seule conclusion claire consiste à dire que la majorité des hommes sera perdue et une minorité seulement connaîtra la vie éternelle. L’Eglise universelle, malgré son importance, sera toujours une minorité par rapport au nombre total des humains. Jésus établit encore un contraste entre les païens qui s’inquiètent d’abord de s’assurer nourriture et vêtement, et ses disciples qui cherchent d’abord le royaume de Dieu (Luc 13:29-31). Il rassure alors ces derniers en disant: “Ne crains point, petit troupeau; car votre Père a trouvé bon de vous donner le royaume” (13:32). L’Eglise universelle sera toujours un petit troupeau, par rapport à la majorité des hommes qui s’inquiètent de façon païenne du côté matériel de la vie. “Quelqu’un dit à Jésus: Seigneur, n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés? (Luc 13:23). Le contexte montre qu’il s’agissait d’un curieux qui cherchait confirmation de sa théorie que seuls les Juifs seraient sauvés (13:24-30). Jésus l’enmène loin de ces considérations théoriques et l’oblige à se situer sur le plan pratique et personnel: “Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite. Car, je vous le dis, beaucoup chercheront à entrer, et ne le pourront pas...Quand vous, étant dehors, vous commencerez à frapper à la porte...Il vous répondra: Je ne sais d’où vous êtes” (24, 25). Jésus affirme donc que beaucoup, dont des Juifs, seraient exclus de son royaume. Mais il s’empresse d’ajouter que si les hommes en majorité seront “jetés dehors”, outre Abraham, Isaac, Jacob et les prophètes, il y aurait aussi des non Juifs venus de l’orient et de l’occident, du nord et du midi qui se mettraient à table dans le royaume de Dieu (28,29). La réponse de Jésus à la question du départ, sur le nombre de gens qui seraient sauvés, se résume donc à ceci: L’Eglise sera numériquement minoritaire, mais universelle quant à sa provenance. L’Ecriture présente par ailleurs, un témoignage abondant au sujet des personnes qui prétendent être chrétiennes sans l’être vraiment, qui fréquentent une église locale ou font partie d’une institution ecclésiastique, sans pour cela faire partie de l’Eglise universelle: “Ceux qui me disent: Seigneur, Seigneur! n’entreront pas tous dans le royaume des cieux” (Mat.7:21). L’ivraie se trouve dans le même champ “parmi” le bon grain et les deux “croissent ensemble”, l’un à côté de l’autre (Mat.13:25, 30) de sorte qu’on risque de s’y méprendre en cherchant à les séparer avant la moisson, la fin du monde (13:29). “Ils garderont les apparences de la piété, mais en auront renié la puissance” (2 Tim.3:5 TOB). “Ils font profession de connaître Dieu, mais ils le renient par leurs oeuvres” (Tit.1:16). “Ils sont sortis du milieu de nous (ils avaient fréquenté notre communauté), mais ils n’étaient pas des nôtres (n’appartenaient pas avec nous au Christ)...Mais cela est arrivé afin que soit manifeste que tous ne sont pas des nôtres” (1 Jean 1:19). On peut cotoyer extérieurement les chrétiens sans avoir d’appartenance intérieure avec eux. Jésus décrit certains adhérents de l’Eglise locale à Laodicée (Apoc.3:17-20): Ils étaient spirituellement aveugles et nus (17), avaient à se repentir (19), et Jésus se trouvait à l’extérieur de leur vie et frappait pour pouvoir y entrer (20). Ils n’étaient que des “chrétiens sociologiques”, des “pseudos chrétiens”. Une partie de la “chrétienté” est constituée de non-chrétiens. Des statistiques récentes des sociologues David Barrett et Todd Johnson (I.B.M.R. Janvier 2003) nous donnent les indications suivantes. Nous les transmettons à titre indicatif et en chiffres ronds: Total des personnes se réclamant du christianisme: 2 milliards sur les 6 milliards de la population du monde, soit un tiers. (Le total de ceux qui se réclament de l’Islam est de l,25 milliard; d’aucune

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religion: 900 millions; de l’Hindouisme: 840 millions, du Boudhisme 370 millions, etc). Total des personnes qui fréquentent une Eglise chrétienne: 1,4 milliard. Membres d’Eglise de toute affiliation, actifs dans la cause du Christ: 0,67 milliards (670 millions). Si on considère d’une part, que tous ceux qui fréquentent une Eglise (1,4 milliards) ne sont pas forcéments des chrétiens authentiques, mais qu’il y aurait d’autre part, plus de chrétiens authentiques que les seuls qui sont actifs dans la cause du Christ (0,67 milliards), on pourrait en conclure que le nombre de chrétiens authentiques dans le monde se situerait entre ces deux chiffres, soit aux environs de 1 milliard. La moitié à peu près de ceux qui se réclament du christianisme feraient donc effectivement partie de l’Eglise universelle. Et celle-ci renfermerait environ la sixième partie de la population du monde. Elle serait “innombrable”, mais une minorité. La parabole des dix vierges (Mat.25:1-13) établit un contraste entre la chrétienté (les dix vierges, dont cinq folles et cinq sages) et l’Eglise universelle (les cinq sages). Toutes les dix sont des vierges, c.à.d. des jeunes filles convenables. Toutes désirent participer à la fête (v.1). Toutes ont des lampes, symboles des supports extérieurs de la religion (v.3). Toutes pensent avoir le droit d’être admises à la fête; car même les folles diront: “Seigneur, ouvre-nous” (v.11). Il ne vient pas à l’idée de celles-ci qu’elles puissent être exclues. Mais ces cinq folles n’ont pas d’huile (symbole de l’Esprit Saint - la réalité spirituelle intérieure) pour leurs lampes (les dehors de la religion). Avant le retour du Christ (v.10), la différence entre les deux groupes n’est pas claire. Mais sa venue révèle que les dix ne forment pas un groupe homogène. Et il se fait une séparation au sein de cette entité mixte, entre les insensées et les prévoyantes. La raison de l’exclusion des cinq folles? “Je ne vous connais pas” (v.12). Elles n’avaient pas une relation personnelle avec le Christ. Sans qu’une parabole n’ait pour but d’établir des statistiques, elle nous permet de noter que les cinq vierges sages qui sont admises à la fête (l’Eglise universelle), constituent la moitié du groupe des dix qui représentent la chrétienté au sens large. La croissance de l’Eglise sera mise à l’épreuve: L’Ecriture nous détaille les critères de qualité auxquels doit être soumise toute croissance de l’Eglise. (1Cor.3:9-13) Elle souligne d’une part la responsabilité de chaque croyant d’exercer ses dons spirituels pour édifier les autres membres. Et d’autre part celle de contribuer à une vie communautaire qui sera de nature à accueillir dans l’Eglise tous ceux qui sont sauvés. Paul résume le tout par cette parole: “Vous êtes l’édifice de Dieu...Il faut que chacun prenne garde à la manière dont il bâtit...Certains utiliseront de l’or, de l’argent ou des pierres précieuses pour bâtir sur ces fondations. D’autres utiliseront du bois, du foin ou de la paille. Mais la qualité de l’ouvrage de chacun sera clairement révélée au jour du Jugement. En effet, ce jour se manifestera par le feu, et le feu éprouvera l’ouvrage de chacun pour montrer ce qu’il vaut.”(1 Cor.3:9-13 BFC). On ne bâtit pas l’Eglise n’importe comment. Il y a aussi la manière. Il faut s’y prendre avec réflexion, avec méthode. Un tas de pierres n’est pas l’Eglise. Jésus, le grand Architecte et Maître d’oeuvre avait un plan en tête, assorti de critères de qualité. Il a tout mis sur papier. Il a donné des indications aux ouvriers pour sa mise à exécution, et les avertit: “Que chacun prenne garde à la manière dont il bâtit”. L’or, l’argent et les pierres précieuses, dans l’image ci-dessus, parlent de la solidité, de la durabilité et de la beauté de l’Eglise. Et tant mieux s’il s’y trouve beaucoup de ces matériaux de qualité et si, par surcroît, l’Eglise grandit en nombre. Le bois, le foin et la paille, par contre, parlent de l’apparence de quantité et de volume que peut avoir la chrétienté ici sur terre, tandis qu’il en restera

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peu de chose dans l’au-delà après le jugement par le feu. Il ne faut donc pas rechercher une croissance purement numérique, au dépend de l’authenticité et de la qualité. Au moyen âge, on a fait entrer des nations entière dans l’institution d’un seul coup. Aujourd’hui encore, les procédés abondent, qui font entrer dans les Eglises locales des quantités de gens qui ne font pas partie de l’Eglise universelle. Mais ne méprisons pas le grand nombre, et ne nous vantons surtout pas de la petite taille d’une Eglise locale qui ne grandit pas, comme si le petit nombre en soi était une preuve de qualité. En effet, l’Ecriture enseigne qu’une vie d’Eglise de qualité engendrera aussi et forcément le nombre. Toute croissance en nombre a un effet centrifuge. Comment l’Eglise universelle peut-elle donc grandir sans se disperser? Quelle est le type d’unité qui pourrait convenir à un organisme universel? - à une Eglise locale? CHAPITRE 9 L‘UNITE DE L’EGLISE L’unité est une valeur universelle. Dieu a placé dans le coeur de l’homme, et dans le coeur de ses enfants en particulier, une aspiration à l’unité. Le cadre obligé de toute réflexion sur l’unité de l’Eglise est fixé par Jésus dans son intercession pour elle dans Jean 17:1-23. Le cadre identique est repris par Paul dans le passage-clé sur cette question dans les épîtres: Ephésiens 4:1-16. Nous relèverons d’abord les principaux éléments de ce cadre, esquissé dans ces deux passages, pour y situer ensuite l’ensemble de l’enseignement de l’Ecriture sur la question de l’unité. Quelle sorte d’unité Jésus et ses apôtres avaient-ils en vue? Qui étaient ceux qui devaient être un? On sous-entend souvent, dans la réflexion sur l’unité, qu’il s’agit forcément d’une unité d’organisation. On ne s’imagine pas être unis si on ne se trouve pas dans les mêmes structures institutionnelles. Il faut voir si cette supposition se trouve confirmée dans les textes de l’Ecriture. Qu’en est-il d’une unité spécifiquement chrétienne? L’unité que Jésus demande à son Père de réaliser, n’existait pas encore au moment, à la veille de sa passion, où il formulait ces requêtes. Peu après, “Tous les disciples l’abandonnèrent et prirent la fuite” (Mat.26:56), Thomas fut incrédule (Jean 20:25,27) et Judas le trahit (Mat.26:14-16; 47-50). Si cette unité existait déjà, au moment de sa prière, il était inutile pour lui de la réclamer. Celle pour laquelle il priait etait entièrement future. Par contre, il s’agissait d’une unité qui serait certainement réalisée dans tous ses aspects. “Marthe dit à Jésus: Seigneur...je sais que tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te le donnera” (11:22).

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“Jésus leva les yeux et dit: ‘Père... je savais bien que tu m’exauces toujours” (Jean 11:41,42). “Au cours de sa vie terrestre, il offrit des prières et des supplications...et il fut exaucé.” (Héb.5:7 -voir aussi Jean 12:28; Mat.26:53). Tous les aspects de l’unité que Jésus demandait seraient réalisés. Non pas tous à la fois, mais en trois temps: L’UNITE EN TROIS ETAPES D’abord, à la Pentecôte: une unité de nature “Père Saint, garde en ton nom ceux que tu m’as donnés, afin qu’ils soient un comme nous” (Jean 17:11). Cette phrase: “Qu’ils soient un comme nous” est souvent sortie de ce contexte pour en faire une exhortation adressée aux hommes. Comme s’il était de leur devoir de créer l’unité. On ne comprendra Jean 17 qu’en se souvenant qu’il s’agit d’une prière adressée par Jésus à son Père. Et le Seigneur ne prie pas qu’ils soient unis, mais qu’ils soient un. De quelle type d’unité s’agit-il donc? Les mots “Un comme nous” parle d’une unité semblable à celle qui existe entre le Père et le Fils. Les personnes de la Trinité, sont unies par une même nature, une même essence divine. Certains n’ont vu dans cette unité qu’une harmonie de volonté et d’amour. Mais ce serait là affaiblir la relation entre le Père et le Fils. Dieu est Esprit (Jean 4:24), et l’unité entre le Père et le Fils est d’abord celle d’une même nature: spirituelle, immatérielle. Ceux qui auront cru (2Pi.1:1) aux promesses de Dieu (1:3) sont devenus, par l’action du Saint-Esprit, des “participants de la nature divine” (1:4). “Celui qui s’unit au Seigneur devient spirituellement un avec lui” (1 Cor.6:17 BFC). L’humain qui “participe à la nature divine”, participe en même temps à l’unité de cette nature. Celui qui n’est pas “spirituellement un” avec le Seigneur ne sera jamais “spirituellement un” avec les vrais chrétiens. L’unité que Jésus réclame pour ses disciples, dans un premier temps, est donc d’essence divine, spirituelle, en elle-même invisible, comme Dieu. Cette unité-là fut créée pour l’Eglise par Dieu le Saint-Esprit lors de sa venue le jour de la Pentecôte. Elle fut, dès ce moment, un fait réalisé par Dieu, sans intervention humaine. Elle était une unité entre croyants individuels touchés par l’Esprit. On ne peut l’interpréter aujourd’hui comme une unité entre institutions ecclésiastiques. Car celles-ci contiennent toutes un certain nombre de chrétiens de nom qui n’ont pas été touchés par l’Esprit. L’unité pour laquelle Jésus prie, existe encore aujourd’hui et rien ne pourra la rompre. La première partie de la prière de Jésus pour l’unité connut son exaucement ce jour-là. Ce fut une unité réelle, durable, mais incomplète. Il ne s’agit pas d’une unité à laquelle les croyants devraient tendre. Jésus ne s’adresse aucunement à ses disciples dans ce chapitre. Avant même de formuler cette prière, Jésus avait prédit la venue de cette unité nouvelle: “J’ai d’autres brebis qui ne sont pas de cet enclos (des non-Juifs) et celles-là aussi, il faut que je les mène; elles écouteront ma voix et il y aura un seul troupeau et un seul berger” (Jean 10:16 TOB). Ceux qui écouteraient la voix de Jésus deviendraient ses brebis, qu’ils aient été issus de l’enclos d’Israël ou non. A l’avenir, ils formeraient tous ensemble un nouveau troupeau, un seul, unissant Juifs et non-Juifs. Et cette unité serait assurée par le fait qu’il n’y aurait qu’un seul berger pour toutes les brebis, peu importe leur provenance. Il ne s’agissait pas d’une unité entre plusieurs troupeaux (religions, dénominations), mais entre brebis considérées individuellement. Et ce serait une unité essentielle car le troupeau serait formé uniquement de ceux qui auraient la même nature, celle de brebis. Pas une seule chèvre. Ils auraient tous écouté la voix de l’unique bon berger et l’auraient suivi. Mais les chrétiens, peuvent-ils, ou doivent-ils se satisfaire de cette unité-là? Ensuite, une unité visible, tant que l’Eglise sera dans le monde:

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Jésus poursuit sa prière dans 17:20-21: “Ce n’est pas pour eux seulement que je prie, mais encore pour ceux qui croiront en moi par leur parole...afin qu’eux aussi soient un en nous, pour que le monde croie que tu m’as envoyé”. Pour Jésus, l’unité de son Eglise est aussi un moyen d’amener les gens à la foi. C’est l’oecuménisme de l’évangélisation. Si Jésus voulait que le monde croie, c’est qu’il y avait une multitude de personnes dans ce monde d’incrédules, qui devaient encore être amenés à la foi en lui. Quelle type d’unité entre ses disciples serait donc de nature à amener d’autres personnes à croire? Elle serait forcément visible, car elle devait servir à les persuader que Jésus a été envoyé du ciel par son Père. Cette unité-là, qui dépend de l’unité de nature citée plus haut, commence à être réalisée dès après l’effusion du Saint-Esprit. Nous en trouvons la description dans les versets qui suivent le récit des événements de la Pentecôte. “Tous ceux qui croyaient étaient dans le même lieu, et ils avaient tout en commun...Ils étaient chaque jour tous ensemble assidus au temple, ils rompaient le pain dans les maisons, et prenaient leur nourriture avec joie et simplicité de coeur, louant Dieu, et trouvant grâce auprès de tout le peuple. Et le Seigneur ajoutait chaque jour à l’Eglise ceux qui étaient sauvés...La multitude de ceux qui avaient cru n’étaient qu’un coeur et une âme...Ils se tenaient tous ensemble au portique de Salomon...le peuple les louait hautement. Le nombre de ceux qui croyaient au Seigneur, hommes et femmes, augmentait de plus en plus.” (Act.2:44-47; 4:32; 5:12-14). Ces déclarations décrivent deux choses: Une unité entre chrétiens, visible pour le peuple des non-chrétiens d’une part et, d’autre part, l’effet de cette unité sur un grand nombre de ces non-chrétiens - leur foi en Jésus et leur salut. Quel donc était le type d’unité qui amena le monde à croire en Jésus de la sorte? Elle était premièrement locale, car les croyants et les non-croyants qui les observaient, étaient tous dans la même localité: Jérusalem. La vie de cette Eglise locale était marquée par des rencontres fréquentes de la communauté entière (2:46; 5:12), par une entre-aide matérielle, un partage des biens (2:45,46), par des repas en commun (agapes) dans la joie (2:46), par des rencontres dans les maisons pour la louange (2:46,47), et par une unité de coeur et d’âme (4:32). Ce sont ces éléments d’unité là, visibles dans les localités, dans les voisinages à travers le monde et les générations, qui ont fait impression sur les non-chrétiens et ont suscité leur respect. Des millions ont ainsi été persuadés que Jésus était le Fils de Dieu envoyé dans le monde par le Père, et ont cru en lui à salut. Cette unité est réelle, visible en de multiples endroits, mais encore imparfaite. Elle ne s’organise pas, mais est favorisée par la conscience commune d’un attachement personnel à Jésus-Christ. Les discussions oecuméniques, conciliaires, entre cléricaux persuadent peu de monde sur la personne de Jésus. Mais, dans ce bas-monde, il manquera toujours quelque chose, même à l’unité la plus chaleureuse au sein d’une communauté locale. A la fin: une unité parfaite Jésus conclut sa prière pour l’unité de l’Eglise dans 17: 22-24: “Qu’ils soient un comme nous sommes un, moi en eux, et toi en moi, afin qu’ils parviennent à l’unité parfaite, et qu’ainsi le monde puisse connaître que c’est toi qui m’as envoyé et que tu les as aimés comme tu m’as aimé. Père, je veux que là où je suis, ceux que tu m’as donnés soient eux aussi avec moi, et qu’ils contemplent la gloire que tu m’as donnée.” (TOB). Cette prière a donc son prolongement jusque dans l’éternité. Trois éléments nous font penser à l’unité eschatologique: Jésus parle d’abord d’une “unité parfaite”. La perfection n’est pas de ce monde. Ensuite, il n’a plus en vue une unité pour que le monde “croie”, mais une unité pour que le monde “reconnaisse” que Dieu l’a envoyé et que Dieu a aimé l’Eglise comme il a aimé Jésus. Un jour “tout genoux fléchira et toute langue confessera que Jésus-Christ est Seigneur” (Phil.2: 10,11). Mais ils le feront forcés et contraints, car ce sera une évidence. Ce ne sera plus à salut, mais pour le jugement. Cette unité parfaite sera la seule qui puisse contraindre le monde entier à

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reconnaître que Dieu a aimé l’Eglise comme il a aimé son Fils. Le monde méprisera l’Eglise jusqu’à la fin. Jésus enchaîne enfin en demandant que les siens soient réunis avec lui dans le ciel pour partager sa gloire. Unité réelle, complète, parfaite, future et certaine. L’unité qui a commencé avec l’effusion du Saint-Esprit à la Pentecôte, connaîtra son plein accomplissement dans le siècle à venir. Voilà l’unité selon Jésus. Et cette même unité en trois temps se trouve reprise en d’autres termes par l’apôtre Paul. Dès la Pentecôte - l’unité qui existe: celle du corps Le Nouveau Testament ne connaît qu’une seule ecclésiologie. Nous retrouvons ce même cadre, les mêmes étapes, dans le passage-clé de Paul dans Ephésiens 4:1-16. L’apôtre décrit une unité qui existait déjà au moment où il écrivait son épître. Dans les versets 4-6 du chapitre 4, il s’exprime au mode indicatif et constate ce qui est. Il n’use pas de l’impératif, comme si cette unité dépendait de ses lecteurs et devait encore être réalisée. Il décrit les bases de l’unité de l’Eglise fondée sur sept faits objectifs: “Il y a un seul corps” L’apôtre reprendra la même déclaration à six reprises (Rom.12:4,5; 1Cor. 10:17; 12:13,20; Eph.2:16). Jésus n’a pas d’autre corps ici-bas que celui-là. L’apôtre déclarera aussi “le corps est un”(1Cor.12:12). L’Eglise est unique et indivisible. L’unité est organique, celle d’un corps dont une même vie coule dans tous les membres. On constate qu’un corps existe et fonctionne, sans qu’on sache forcément comment. L’existence de l’Eglise, corps du Christ, est un fait à reconnaître. “...et un seul Esprit” L’apôtre veut souligner cette unité du corps, assurée par le Saint-Esprit, avant d’aborder la diversité des dons de l’Esprit (4:7-12). Il établit le même équilibre ailleurs: “Il y a diversité de dons, mais le même Esprit...Un seul et même Esprit opère toutes ces choses” (les charismes -1Cor.12:4,11). Aucun membre authentique de ce corps n’est sans l’Esprit. “Si quelqu’un n’a pas l’Esprit du Christ, il ne lui appartient pas” (Rom.8:9). Cette unité est donc spirituelle, intérieure. Assurée par le Saint-Esprit lui-même, elle ne pourrait être le produit d’un quelconque effort humain. La reconnaître permet d’équilibrer l’effet centrifuge des charismes. “...une seule espérance” Paul la décrit ailleurs: - l’espérance de la gloire (Rom.5:2); l’espérance de la vie éternelle (Tit.1:2); l’espérance de la manifestation de la gloire de notre Sauveur Jésus-Christ (Tit.2:13). L’unité réside aussi dans une même destinée. Les membres de l’Eglise sont un maintenant parce qu’ils le seront dans le siècle à venir et pour toujours. “...un seul Seigneur” “Paul...à tous ceux qui invoquent en quelque lieu que ce soit le nom de notre Seigneur Jésus-Christ, leur Seigneur et le nôtre...Le Christ est-il divisé?” (1Cor.1:2,13). L’unité de l’Eglise universelle est dans la reconnaissance de la seigneurie unique de Jésus. Il est la tête du corps. “Le Christ est la tête. C’est grâce à lui que le corps forme un tout solide, bien uni” (Eph.4:15,16 BFC). Encore faut-il, pour être un en Christ, être d’accord sur qui est Jésus. Peut-on être un avec ceux qui nient que Jésus est Dieu, qu’il est né d’une vierge, qu’il est ressuscité corporellement des morts, qu’il est monté au ciel, et qu’il reviendra en personne pour juger le monde? Pour être un, il ne suffit pas de réciter le Symbole des Apôtres, il faut croire (credo) ce qu’il déclare, sans arrière-pensée. C’est là un minimum irréductible sans lequel le terme “chrétien” n’a pas de se sens. Et plus la seigneurie de Jésus se réalise dans la vie de ses disciples, plus ceux-ci sont unis entre eux. “...une seule foi” Pour Paul, c’est le même acte de foi qui unit Juifs et non-Juifs: “Il y a un seul Dieu, qui justifiera par la foi les circoncis, et par la foi les incirconcis” (Rom.3:30). L’unité découle d’une même démarche de foi personnelle en Jésus de la part de chacun, peu importe ses origines.

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“Car vous êtes tous fils de Dieu par la foi en Jésus-Christ” (Gal.3:26). Il existe des types d’unité qui découlent d’une même affiliation ecclésiastique. Mais adhérer à une même institution chrétienne n’est pas forcément avoir une même foi personnelle en Jésus-Christ. “...un seul baptême” L’apôtre précisera: “Nous avons tous été baptisés dans un seul Esprit pour former un seul corps, Juifs ou Grecs, esclaves ou hommes libres et nous avons tous été abreuvés d’un seul Esprit” (1Cor.12:13). L’unité de personnes d’origines diverses au sein de l’unique corps du Christ, est réalisée par un même baptême dans l’Esprit. Le baptême d’eau n’a guère apporté d’unité. Certains baptisent par aspersion, d’autres par immersion, d’autres encore par effusion. Certains baptisent des nourrissons, d’autres uniquement des adultes. Certaines Eglises reconnaissent tous les baptêmes, d’autres uniquement celui administré par un des leurs, etc. “...un seul Dieu et Père de tous” L’unité est aussi dans le monothéisme et la nouvelle naissance. Certains ont pour père le diable (Jean 8:44) et sont des “enfants de colère” (Eph.2:3). Voilà donc sept réalités existantes et uniques (“un(e) seul(e) “- 7 fois). Ce sont elles qui constituent la base effective de l’unité de l’Eglise, corps du Christ. Un corps est un organisme, c’est-à-dire une entité dont tous les membres partagent une même vie. Ce qui n’est pas vivant de cette vie-là ne fait pas partie de ce corps. Aucune affiliation ecclésiastique ne pourrait l’assurer. Et il suffit à quelqu’un d’être spirituellement vivant en Jésus-Christ, pour être un avec tous ceux qui le sont également. Aucune désaffiliation ecclésiastique ne pourrait y porter atteinte. Il est important de reconnaître cette unité chrétienne qui existe (plutôt que d’en créer une d’un autre type), et d’agir en conséquence de ce qui est. Toute unité extérieure et visible doit être l’expression naturelle d’une unité intérieure existante, sans quoi, elle est factice. Mais Dieu ne se satisfait pas de l’unité du corps, car des chrétiens authentiques, membres de ce corps, peuvent se disputer entre eux. Tant que l’Eglise sera dans le monde - l’unité à garder: celle de l’Esprit

Paul ne se contente pas, dans ce chapitre, de constater ce qui est. Il va plus loin: “Je vous exhorte donc dans le Seigneur...: accordez votre vie à l’appel que vous avez reçu; en toute humilité et douceur, avec patience, supportez-vous les uns les autres dans l’amour; appliquez-vous à garder l’unité de l’Esprit par le lien de la paix” (4:1-3 TOB). Un impératif! Une responsabilité qui nous incombe. Certes, le fondement de cette unité est la réalité de l’Esprit qui existe, sans quoi l’unité ne pourrait être gardée ou maintenue. Mais il faut qu’elle soit préservée, qu’elle se manifeste. Il s’agit d’une unité visible, extérieure, vécue, qui aidera le monde à croire en Jésus. C’est dans les centaines de milliers de communautés chrétiennes de par le monde que “l’humilité”, la “douceur”, la “patience”, le “support” réciproque, “l’amour” et la “paix” frapperont le plus les non-croyants. Le “lien de la paix” peut très bien être maintenu entre des personnes qui n’appartiennent pas à une même organisation ecclésiastique. Et une telle appartenance à une même institution ne garantit pas forcément la paix entre ses adhérents.

Autant de conditions à remplir pour garder l’unité de l’Esprit. Et quand l’Esprit est à l’oeuvre, il ne tient

pas compte des appartenances, des barrières institutionnelles. Les grands mouvements de réveils ont tous été marqués par une communion et une collaboration retrouvées entre croyants remplis de l’Esprit, issus de dénominations différentes . Certes, cette unité visible sera toujours vécue de façon imparfaite. Pourtant, le monde n’attend pas vraiment la perfection, mais un minimum de crédibilité. Il n’est pas question ici de créér une unité d’administration et d’autorité mondiales, mais de maintenir l’unité de l’Esprit dans tous les contacts entre chrétiens authentiques quelles que soient leurs appartenances.

Les impératifs que Paul multiplie concernant l’unité, nous permettent de préciser la sorte d’unité qu’il est

de la responsabilité de chacun(e) de maintenir:

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...afin que, d’un même coeur et d’une seule voix, vous rendiez gloire à Dieu” (Rom.15:6). “Je vous exhorte, frères...à tenir tous un même language, et à ne point avoir de divisions parmi vous, mais à

être parfaitement unis dans un même esprit et dans un même sentiment” (1Cor.1:10). “Ayez un même sentiment, vivez en paix” (2Cor.13:11; Rom.12:16; 15:5). “Que...j’entende dire de vous que vous demeurez fermes dans un même esprit, combattant d’une même

âme...ayant un même sentiment, un même amour, une même âme, une même pensée” (Phil.1:27; 2:2; 4:2). “Je veux qu’ainsi leurs coeurs soient...étroitement unis dans l’amour (Col.2:2).

Toutes ces exhortations sont adressées à des croyants en Christ pour préciser le type d’unité qui doit être

maintenue parmi eux. C’est le monde dans leurs voisinages respectifs qui pourra remarquer cette entente entre eux, cette solidarité, cette collaboration dans une cause commune. Il s’agit aussi d’une harmonie dans les relations personnelles, une unité entre croyants individuels, non pas entre institututions ou entre confessions. Nous aborderons plus loin l’enseignement de l’Ecriture sur les relations à développer entre Eglises locales. Mais les fusions institutionnelles, et le dialogue inter-religieux persuadent peu le monde des incrédules à croire que Jésus est le Fils de Dieu envoyé par le Père. Et il est frappant que l’Ecriture ne contient pas d’exhortation à prier pour l’unité. Est-ce parce que la prière de Jésus suffisait? Ou parce que prier pour l’unité dispense parfois d’obéir aux commandements ci-dessus de la maintenir. Plus les membres du corps sont soumis à la Tête, plus ils vivent une unité et une coordination entre eux, et plus le corps est efficace dans son action. Plusieurs autres termes bibliques nous permettent de décrire l’unité de l’Esprit qui est à garder:

homothumadon: “d’un commun accord”, “unanimement”, “d’un seul coeur”: Etre “d’un commun accord” dans la prière” (Act.1:4; 4:24) et la louange (Rom.15:6) Etre “d’un seul coeur” dans les assemblées de l’Eglise (Act.2:46; 5:12) Etre “d’un commun accord” dans l’attachement à la parole de l’Evangile (Act.8:6) Etre “unanime” dans le choix de délégués (Act.15:25) koinonia: “communion”: La base et le cadre indispensables d’un communion vraiment chrétienne sont: “la communion avec son Fils

Jésus-Christ” (1Cor.1:9), “une foi commune” (Tit.1:4), “un salut commun” (Jude 3). Toute communion n’est pas forcément chrétienne. Jean précise l’ordre des choses: “Nous sommes en communion avec Dieu...Nous sommes en communion les uns avec les autres” (1Jean 1:6,7). La communion verticale précède l’horizontale. Il est possible de se rapprocher l’un de l’autre sans se rapprocher de Dieu; ce n’est pas forcément une communion chrétienne. Mais plus l’un et l’autre s’approchent du Christ, plus ils s’approchent entre eux. L’unité entre chrétiens n’est pas une fin en soi, mais le sous-produit de la communion avec le Christ. Sans le salut par la foi en Christ, et une intimité avec lui partagée par toutes les parties, il n’y a que convivialité, dynamique de groupe, camaraderie, sociabilité humaine. Rien de plus que ce qui est vécu par n’importe qui dans le monde.

La communion chrétienne n’est pas non plus une notion abstraite, mystique ou sentimentale, ni un simple

regroupement administratif entre Eglises ou institutions. Elle est vécue concrètement par des personnes en chair et en os et consiste à faire et à vivre des choses ensemble. C’est l’Esprit Saint qui en est le moteur: Paul souhaite aux Corinthiens: “Que...la communion du Saint-Esprit soit avec vous tous” (2Cor.13:13).

La “communion” dans la célébration de la table du Seigneur (1Cor.10:16,17; Act.2:42). La “communion” dans les souffrances (Héb.10:32-34; Apoc.1:9). La “communion” dans l’entre-aide matérielle (Rom.15:26; 2Cor.8:4; 9:13; Héb.13:16; Act.2:44). La “communion” dans l’annonce de l’Evangile (Phil.1:5; 2Cor.8:23). La fusion administrative de vingt institutions ecclésiastiques ne crée pas la communion décrite dans

l’Ecriture.

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allelon - eauton: “les uns les autres” - mutualité, réciprocité: Cette mutualité existe dans les faits au sein du corps du Christ, car il est déclaré (au mode indicatif): “Nous

sommes membres les uns des autres” (Rom.12:5; Eph.4:25). Les autres occurences de cette expression sont à l’impératif et décrivent cet aspect de l’unité qui doit être gardée:

Ayez du souci les uns des autres (1Cor.12:25) Soyez bons les uns pour les autres (Eph.4:32) Ne parlez pas mal les uns des autres (Jac.4:11) Accueillez-vous les uns les autres (Rom.15:7) Soyez en paix les uns avec les autres (Mc.9:50) Saluez-vous les uns les autres (1Pi.5:14) Conseillez-vous les uns les autres (Rom.15:14) Soumettez-vous les uns aux autres (Eph.5:21) Ne vous jugez pas les uns les autres (Rom.14:13) Consolez-vous les uns les autres (1Thes.4:18) Mettez-vous au service les uns des autres (Gal.5:13) Edifiez-vous les uns les autres (Rom.14:19) Portez les fardeaux les uns des autres (Gal.6:2) Aimez-vous les uns les autres (Jean 13:34)

Ne vous enviez pas les uns les autres (Gal.5:26) Supportez-vous les uns les autres (Col.3:13) Soyez hospitaliers les uns envers les autres (1Pi.4:9) Revêtez-vous d’humilité les uns envers les autres (1Pi.5:5) Vivez en bon accord les uns avec les autres (Rom.15:5) Un examen de toutes ces exhortations dans leurs contextes respectifs permet de comprendre la richesse de

l’unité qui intéresse Dieu. L’unité visible de l’Eglise, souhaitée par le Seigneur, est dans les relations personnelles, plutôt que dans les hierarchies institutionnelles. Malgré la richesse d’une telle unité vécue ici-bas entre frères, il y aura toujours un goût de trop peu.

A la fin - l’unité à venir: celle de la foi et de la pleine connaissance du Fils de Dieu Après avoir traité des fonctions des membres du corps par les dons de l’Esprit (Eph. 4:7-12), Paul achève

son enseignement sur l’unité de l’Eglise universelle au v.13. Il écrit: “...jusqu’à ce que nous parvenions tous à l’unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, à l’homme fait, à la mesure de la stature de la plénitude du Christ” (Darby). Voyons le détail:

“...Jusqu’à ce que nous parvenions...”. “Jusqu’à ce que” (mexri) dénote le but final, le plus élevé comme

devant être atteint. Le verbe katantao signifie “arriver au but, ou à destination” (voir Act. 27:12: arriver au port de Phénice; Phil.3:11: parvenir à la résurrection d’entre les morts). En ce qui concerne l’unité de l’Eglise, nous ne pourrons jamais dire, dans cette vie, que nous sommes arrivés à ce but là. Il s’agit, cependant d’un but vers lequel il faut tendre sans cesse.

“Nous...tous”. Il s’agit de Paul et tous les autres individus, membres du corps du Christ, sans exception et

celà, “ensemble”. La TOB et BFC traduisent “tous ensemble”. Il s’agit donc d’une unité au sein de la collectivité des membres du corps dans sa totalité. Il n’est aucunement question d’un stade de maturité personnelle que certains croyants, comme l’apôtre, atteindraient sans, ou avant les autres.

“L’unité de la foi.” Paul pense-t-il à la foi dans son sens subjectif, à l’acte de foi qui sauve et par lequel le

croyant est ajouté au corps du Christ? C’est peu probable, car l’unité en question concerne uniquement des personnes qui sont déjà membres de ce corps. Pour eux, l’unité dans la foi personnelle qui sauve existe déjà (4:5). Il s’agit ici du stade le plus avancé de la foi, non celui des débuts. L’autre sens bien attesté du mot “foi”, et qui convient mieux, est celui de: “ce qui est cru”, objectivement, son contenu: “la foi” (Gal.1:23; Jac.2:14,19; Jude 3,20, etc.). L’unité à atteindre est donc une unité sur ce qui est à croire, une unité doctrinale. Même entre vrais chrétiens, dans le monde présent, il est utopique d’espérer qu’on s’accorde sur toutes les questions théologiques, même si une telle unité est infiniment souhaitable.

“L’unité... de la vraie connaissance du Christ”. Le mot employé n’est pas celui pour une simple

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connaissance (gnosis), mais epignosis, une connaissance vraie, exacte et pleine. Paul précise ailleurs: “A présent, je connais (ginosko) en partie, alors je connaîtrai complètement (epiginosko) comme j’ai été complètement connu (epiginosko -1 Cor.13:12b). Il prévoit le moment où il verra le Christ “face à face” (12a). L’Eglise arrivera à “l’unité de la vraie connaissance du Christ”, à l’unité doctrinale et théologique, quand tous ses membres verront Jésus face à face et auront de lui une connaissance vraie et pleine comme la sienne. C’est l’unité dans laquelle les divergences de vues disparaîtront.

“Jusqu’à ce que nous parvenions...à l’homme fait” (eis andra téleion) ou “à l’homme (masc.sing.) ayant

atteint le but”. Non pas “à des humains faits”. Le singulier souligne l’unité de l’Eglise qui s’édifie pour devenir un homme parfait. Paul prolonge ainsi l’image d’unité qu’il proposait déjà dans Eph.2:15, où l’inimitié entre Juifs et non-Juifs est remplacée par la paix entre eux “en un seul homme nouveau”. Il n’est pas question ici de nombreux individus, spirituellement adultes, parvenus, dans cette vie, à la mesure de la stature de la plénitude du Christ. Qui donc oserait prétendre y être arrivé ici-bas? Pas de perfectionnisme! Il s’agit d’une perfection collective plutôt que d’une maturité individuelle. Paul a en vue le corps du Christ, conçu comme un organisme, unique ayant atteint sa pleine croissance, auquel aura été ajouté le dernier de ses membres. L’Eglise universelle sera au complet, parfaite, unie et aura atteint la taille du Christ dans sa plénitude. Mais tant que l’enfant de Dieu-individu sera dans ce monde, il aura besoin de grandir. Mais bien que cette unité parfaite ne sera jamais atteinte dans l’ère présente, cela veut-il dire qu’il faille s’incliner et se satisfaire de tout ce qui divise actuellement l’Eglise sur le plan doctrinal?

Comment donc s’entendre sur la doctrine? Paul poursuit, dans les versets suivants (4:14-16) en nous

proposant les moyens de grandir ensemble pour nous approcher le plus possible de cette unité de la pleine connaissance: “Mais, confessant la vérité dans l’amour, nous grandirons à tous égards vers celui qui est la tête, Christ. Et c’est de lui que le corps tout entier, coordonné et bien uni grâce à toutes les articulations qui le desservent...réalise sa propre croissance.” Confesser la vérité (qui, pour beaucoup, n’est pas importante ou même qui n’existe pas), et la confesser dans l’amour (qui, pour d’autres, se perd dans les polémiques) est le seul moyen d’arriver à l’unité de la vraie connaissance du Christ. L’unité authentique dépend donc d’un respect total pour la vérité de l’Ecriture. Il ne s’agit pas d’éviter la doctrine, ou de la minimiser en faveur de l’amour. On ne peut aimer vraiment que dans la vérité. Par contre: “Si vous avez dans votre coeur un zèle amer et un esprit de dispute, ne vous glorifiez pas et ne mentez pas contre la vérité” (Jac.3:14). On ne connaît vraiment la vérité que dans l’amour.

Que faire quand l’entente doctrinale se fait attendre? L’apôtre Paul nous propose la bonne attitude à avoir:

“Non que j’aie déjà obtenu tout cela ou que je sois déjà devenu parfait; mais je m’élance pour tâcher de le saisir, parce que j’ai été saisi moi-même par Jésus-Christ. Frères, je n’estime pas l’avoir déjà saisi. Mon seul souci: oubliant le chemin parcouru et tout tendu en avant, je m’élance vers le but, en vue du prix attaché à l’appel d’en haut que Dieu nous adresse en Jésus-Christ. Nous tous, les ‘parfaits’ (arrivés à une pleine maturité chrétienne), comportons-nous donc ainsi, et si en quelque point vous vous comportez autrement, là dessus aussi Dieu vous éclairera. En attendant, au point où nous sommes arrivés, marchons dans la même direction” (Phil.3:12-16 TOB).

Certains prétendent qu’il est prétentieux de dire qu’on peut connaître la vérité. “Jésus a dit: “Vous

connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres” (Jean 8:32 BFC). Ils disent qu’on ne pourrait formuler la vérité en propositions qui seraient valables pour tous: “A chacun sa vérité”. Jacques déclare que la vérité peut à ce point être déterminée, qu’il est possible de “mentir contre la vérité” (Jac.3:14) et qu’on peut savoir quand quelqu’un “s’est éloigné de la vérité” (Jac.5:19). On avance que l’évangile ne pourrait être défini. Paul dit qu’il est possible de “passer à un autre évangile. Non pas qu’il y en ait un autre” (Gal.1:6,7 TOB). L’Ecriture est “utile” tout d’abord “pour enseigner et

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réfuter” (2 Tim.3:16). Les conciles oecuméniques des premiers siècles (Nicée, Ephèse, Constantinople, Chalcédoine) se préoccupaient de préciser la doctrine et de dénoncer l’erreur. Le Conseil oecuménique moderne est marqué par l’indifférentisme, le relativisme et le pluralisme doctrinal. C’est une conception molle et sentimentale de l’unité. Celle-ci n’est qu’apparente et de façade. Le vieil adage est toujours d’actualité: “Dans les choses essentielles unité, dans les choses secondaires liberté, en toutes choses charité.”

Voilà donc le cadre que nous proposent Jésus et l’apôtre Paul, dans lequel il convient de situer

l’enseignement de la Bible sur l’unité de l’Eglise universelle. Nous abordons maintenant d’autres questions fondamentales pour cette unité. Qui est inclus dans cette unité, et qui ne l’est pas?

“QUE TOUS SOIENT UN” - QUI DOIVENT ÊTRE UN? Qui est inclus dans le “tous”? Jésus, dans sa prière pour l’unité (Jean 17:1-26), ne laisse aucun doute sur

l’identité de ceux qui doivent participer à cette unité. Il ne nous appartient pas d’exclure une seule personne du cercle de ceux que Jésus veut unir; ni d’inclure une seule personne que Jésus n’inclut pas dans sa prière pour l’unité. Voici la description que Jésus donne de ceux qu’il demande à son Père d’unir:

Ceux à qui Jésus “donne la vie éternelle” (17:2) Ceux qui “connaissent le seul vrai Dieu et Jésus-Christ” (v.3) Ceux que Dieu a “tirés du monde” (v.6); qui “ne sont pas du monde” (v.14,16) Ceux qui ont “reçu les paroles que Dieu a données à Jésus” (v.7) Ceux qui “ont cru que Dieu a envoyé Jésus” (v.8) Ceux que “Jésus a gardés et dont aucun n’a été perdu” (v.12) Ceux qui “ont été haïs par le monde” (v.14) Ceux que “Jésus a envoyés dans le monde” (v.18) En résumé, ceux qui doivent être unis sont des vrais disciples de Jésus, au contraire de Judas, fils de la

perdition” (v.12) qui n’était qu’un chrétien de nom. Mais Jésus n’en reste pas là. Il ajoute: “Je ne prie pas seulement pour eux (pour les premiers disciples), je

prie aussi pour ceux qui, grâce à leur parole, croiront en moi” (v.20). Ces derniers ne constituent donc pas un groupe, séparé des apôtres bénéficiaires de la prière de Jésus rapportée dans les versets précédents (1-19).

(1) Le Seigneur englobe en une même intercession les premiers croyants en lui et tous ceux qui auront la même foi qu’eux, à travers les générations, jusqu’à la fin de l’ère. Il a prié pour nous tous, dès avant notre naissance, pour que nous soyons un aujourd’hui.

(2) Ce sont des personnes qui, à l’avenir,“croiront en Jésus”, qui mettront leur confiance en lui. (3) Ils croiront en Jésus “grâce à la parole des apôtres”. Leur foi sera basée sur l’enseignement apostolique

à son sujet. Ces vérités sur le Christ sont accessibles aujourd’hui dans les écrits des apôtres. Ils nous rapportent ce que Jésus disait de lui-même: “Il appelait Dieu son propre Père, se faisant ainsi l’égal de Dieu” (Jean 5:18). Il disait de lui-même: “Que tous honorent le Fils comme ils honorent le Père” (5:22). “Moi et le Père nous sommes un” (10:30). “Celui qui m’a vu a vu le Père” (14:9, etc.). Il n’y a pas d’unité chrétienne authentique en dehors d’une foi commune en la divinité parfaite de Jésus. Cette parole apostolique est la seule qui puisse unir vraiment tous les croyants du passé et de l’avenir en l’unique corps du Christ. Mais il y a une différence entre “accueillir tout le monde” et “inclure tout le monde”.

Exclusion Morale populaire: “Il faut combattre l’exclusion sous toutes ses formes.” En même temps que Jésus parle

de ceux qui sont inclus dans cette unité, il précise qu’il existe un monde de personnes qui n’y sont

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pas inclus. C’est lui, et non ses disciples, qui détermine cette exclusion: C’est le “monde” hors (ek) duquel Dieu a tiré ceux qui lui appartiennent (v.6); le “monde” pour lequel Jésus ne prie pas (v.9); le “monde” qui hait ceux qui ont cru en lui (v.14a); le “monde” dont les croyants en lui ne font pas partie (v.14b); le “monde” qui est le domaine du Mauvais (v.15); le “monde” de ceux qui ne reconnaissent pas encore que Dieu a envoyé Jésus (v.23); le “monde” de ceux qui n’ont pas connu le Père (v.25). Judas, “fils de la perdition”(v.12). Cependant, Judas faisait partie du groupe visible des disciples. Il n’y a pas d’unité sans exclusion - exclusion par le monde de ceux qui appartiennent à Jésus (17:6,

14a,b,23); exclusion par Jésus de ceux qui ne le reconnaissent pas, lui, et qui ne reconnaissent pas ceux qui ont cru en lui (v.9,12). Jésus ne parle pas ici d’une exclusion quelconque opérée par ses disciples.

Division On entend dire: “Tout ce qui divise les hommes entre eux est mauvais - y compris la religion.” Jésus

déclarait: “Pensez-vous que ce soit la paix que je suis venu mettre sur la terre? Non, je vous le dis, mais plutôt la division. Car désormais, s’il y a cinq personnes dans une maison, elles seront divisées: trois contre deux” (Luc 12:51,52 TOB). Sur quelle question cette division allaient-elle donc s’opérer? “Parmi les gens de la foule qui avaient écouté les paroles de Jésus, les uns disaient:...‘Le Christ, c’est lui’. Mais d’autres encore disaient: ‘Le Christ pourrait-il venir de la Galilée?...C’est ainsi que la foule se divisa” (Jean 7:40-43 TOB). La question: “Qui est Jésus” est donc celle qui apporte une division légitime. Il n’y a pas d’unité chrétienne sans une division entre ceux qui croient que Jésus est le Christ, le Messie promis à Israël, et ceux qui ne le croient pas.

Inclusion L’apôtre, à son tour, décrit avec précision dans ses épîtres qui sont ceux auxquels il destine son

enseignement et ses exhortations sur l’unité. L’adresse et la salutation de ses lettres ne laisse aucun doute à ce sujet. “A l’Eglise de Dieu qui est à Corinthe, à ceux qui ont été sanctifiés dans le Christ Jésus, appelés à être saints avec tous ceux qui invoquent en tout lieu le nom de notre Seigneur Jésus Christ, leur Seigneur et le nôtre...Vous êtes le corps de Christ et vous êtes ses membres, chacun pour sa part” (1Cor.1:2; 12:27).

(1) C’est “l’Eglise de Dieu”, “le corps du Christ” et “chacun de ses membres”. Il est important de noter que les membres de l’Eglise universelle, sont des personnes individuelles, non pas des Eglises.

(2) Ce sont des “croyants en Jésus-Christ” (Eph.1:1). Le mot pistos peut être traduit “croyant” ou “fidèle”. Il signifie plus qu’être “croyant mais non-pratiquant”.

(3) Ce sont tous ceux, en tout lieu, qui invoquent (font appel à) Jésus-Christ comme leur Seigneur. “Nul ne peut dire: ‘Jésus est Seigneur’, si ce n’est par l’Esprit Saint” (1Cor.1:2; 12:3). (4) Ce sont ceux qui, de ce fait sont “en Christ” (1 Cor.1:2; Eph.1:1). (5) Ce sont ceux qui “ont été sanctifiés dans le Christ Jésus, appelés à être saints”(1Cor.1:1; Phil.1:1). Etre

un “sanctifié”, un “saint”, c’est avoir été “mis à part à une fin sacrée”. Tous ceux qui sont “en Christ” ont été, de ce fait, mis à part pour Dieu et mis à part du monde de ceux qui ne croient pas en Jésus-Christ et ne l’invoquent pas comme Seigneur.

Le pseudo-chrétien existe. Cette description précise et détaillée ne permet pas de considérer d’office

comme membre de l’Eglise universelle toute personne de bonne volonté, ni tous ceux qui se disent

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chrétiens, ni tous les citoyens d’un pays dit chrétien, ni tous ceux qui sont nés de parents chrétiens, ni tous les baptisés d’eau, ni tous ceux qui sont affiliés à une dénomination affiliée au Conseil Mondial des Eglises. Il ne faut pas confondre accueil chaleureux de tout visiteur, et inclusion aveugle de n’importe qui comme membre . En voulant inclure tout le monde, on risque de perdre l’identité chrétienne. Une Eglise sans contours ni limites n’a plus “d’intérieur” auquel inviter “ceux du dehors” (Col.4:5; 1 Thes.4:12). Si on déplace trop les limites, on devient autre chose que l’Eglise du Christ. On risque aussi de créér de nouvelles divisions avec des frères et soeurs en Christ voulant s’en tenir aux normes bibliques pour l’inclusion. Et une “Eglise” sans convictions, sans valeurs, sans exigences d’engagement et de loyauté, sans éléments qui la distinguent du monde, n’attire personne. Les grandes dénominations qui veulent inclure tout le monde, sont en régression.

Séparation Jésus, le grand rassembleur? Le Seigneur déclarait: “Je suis venu séparer l’homme de son père, la fille de

sa mère, la belle-fille de sa belle-mère: on aura pour ennemis les gens de sa maison (Mat.10:35,36 TOB). Tout comme Jésus, les apôtres ont tiré des lignes de séparation claires entre l’Eglise et le monde de ceux qui le rejettent. Pierre, à la Pentecôte, annonce l’Evangile de Jésus crucifié, ressuscité, Seigneur, Messie d’Israël, et appelle la foule à la conversion. Il ajoute: “Sauvez-vous de cette génération dévoyée” (Act.2:40 “perverse” Seg.; “tordue” Carrez; “gens perdus” BFC). Ceux qui croyaient en Jésus devaient se séparer de ceux qui s’endurcissaient et refusaient de l’accepter comme leur Messie et Seigneur. “Ce jour-là, environ trois mille personnes s’ajoutèrent au groupe des croyants” (2:41 BFC). Ceux-ci constituèrent à partir de ce moment l’Eglise de Jésus-Christ. Celle-ci fut désormais séparée des chefs religieux et du reste des habitants de Jérusalem, et elle eut par la suite à subir une opposition et même un persécution de leur part. Mais cette séparation ne devait pas constituer un isolement du monde des non-croyants.

Jésus et Pierre n’étaient pas seuls à dire qu’une séparation devenait inévitable. Paul exhorte “tous les

saints” : “Ne formez pas d’attelage disparate avec les incrédules...Quelle union peut-il y avoir entre la lumière et les ténèbres...Quelle relation entre le croyant et l’incrédule?... Sortez-donc d’entre ces gens-là, et mettez-vous à l’écart (litt. “séparez- vous”), dit le Seigneur”. (2Cor.1:1; 6:14-17 TOB). L’union entraîne une séparation. Paul joint l’acte à la parole. Il annonce l’Evangile et enseigne pendant trois mois dans la synagogue à Ephèse. Mais quand il y rencontre l’endurcissement, l’incrédulité et les calomnies, “...il se retira d’eux, sépara les disciples, et enseigna chaque jour dans l’école d’un nommé Tyrannus” (Act.19:8,9). Il se crée une Eglise chrétienne en marge de la synagogue. Il ne s’agissait pas d’une fuite ni d’une retraite hors du monde. Mais il ne fallait pas mélanger les genres, ni se compromettre dans une même entreprise religieuse avec ceux qui refusaient Jésus-Christ.

Est on tenu de fraterniser avec tous les chrétiens sans exception? Une séparation, même d’avec certaines

personnes qui se disent croyantes, est parfois nécessaire. (1) De ceux qui vivent dans l’immoralité: “Ce que je vous ai écrit, c’est de ne pas avoir de relations avec

quelqu’un qui, se nommant frère est débauché, ou cupide, ou idolâtre, ou outrageux, ou ivrogne, ou ravisseur, de ne même pas manger avec un tel homme...Otez le méchant du milieu de vous” (1Cor.5:11-13). Paul ne dit pas que le chrétien doit se séparer des gens immoraux de ce monde, qui ne prétendent pas être chrétiens. Il dit, non sens ironie: “autrement, il vous faudrait sortir du monde” (5:10). Il y en a tant! Si on n’a pas de contacts avec eux, comment leur apporter la Bonne Nouvelle?

(2) Il faut se séparer de ceux qui créent des divisions: “Je vous exhorte, frères, à prendre garde à ceux qui

créent des divisions et des scandales...Eloignez-vous d’eux...Par des paroles douces et flatteuses, ils séduisent les coeurs simples” (Rom.16:17,18). “Eloigne de toi, après un premier et un second

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avertissement, celui qui provoque des divisions” (Tit.3:10). (3) Il faut se séparer des enseignants qui se présentent comme chrétiens, mais qui s’écartent de la doctrine

concernant Jésus-Christ: “Quiconque va plus loin et ne demeure pas dans la doctrine de Christ n’a point Dieu...Si quelqu’un vient à vous et n’apporte pas cette doctrine, ne le recevez pas dans votre maison, et ne lui dites pas: Salut!” (2 Jean 9,10).

Les raisons de ces séparations sont évidentes: Pour que l’Eglise ne soit pas contaminée (1 Cor.5:6; 15:33; Mat.16:11,12). Les pommes saines

n’assainissent pas la pomme pourrie. Pour que les “faux frères” soient reconnus comme tels (Apoc.2:2; 1 Jean 2:18,19; 1 Cor.11:19). Judas le fut

finalement. En attendant, il a fait des dégats. Il faut qu’on y voit clair. Pour que celui qui s’écarte puisse être ramené dans le bon chemin (2 Thes.3:14,15; 2 Cor.2:6-7). Parfois, la

manière forte est le dernier espoir. Pour que tous, dans l’Eglise et à l’extérieur, aient crainte et respect (1 Tim.5:20; Act.5:11). L’Eglise doit

rester crédible devant le monde. Il est important de noter que la Bible ne parle jamais d’une séparation d’avec une Eglise locale, ou entre

Eglises locales, mais uniquement d’avec des individus. (Bien entendu, le simple fait de ne pas faire partie de la même institution ou dénomination ne constitue pas une “séparation” au sens biblique du terme, ni pour des Eglises locales, ni pour des individus). Dans presque toutes les Eglises et dénominations, il existe des chrétiens authentiques qui ne ne vivent pas dans l’immoralité, qui ne créent pas des divisions et qui croient aux vérités fondamentales de l’Ecriture concernant Jésus-Christ. Il ne faut pas se séparer de ces personnes individuelles, quoi qu’on puisse penser de leur Eglise. De nombreux croyants, affiliés à des Eglises qui professent officiellement des erreurs, ne souscrivent pas forcément à ces erreurs. Malheureusement, faire partie d’une institution oblige parfois à être associé à certaines personnes desquelles la Bible nous ordonne de nous séparer. Les dénominations mélangent souvent ce qui ne doit pas être mélangé.

LA FORCE DE L’UNITE EN CHRIST L’unité au sein de l’Eglise y annule les divisions religieuses Paul écrit aux non-Juifs qui étaient devenus croyants en Jésus-Christ à Ephèse: “Souvenez-vous donc

qu’autrefois, vous qui portiez le signe du paganisme dans votre chair, vous que traitent d”incirconcis” ceux qui se prétendent les “circoncis”, à la suite d’une opération pratiquée dans la chair...Mais maintenant, en Jésus-Christ, vous qui jadis étiez loins, vous avez été rendus proches par le sang du Christ. C’est lui, en effet, qui est notre paix: de ce qui était divisé, il a fait une unité. Dans sa chair, il a détruit le mur de séparation: la haine. Il a aboli la loi et ses commandements avec leurs observances. Il a voulu ainsi à partir du Juif et du païen, créer en lui un seul homme nouveau, en établissant la paix, et les a réconciliés avec Dieu tous les deux en un seul corps” (Eph.2: 11-16 TOB). Ce texte ne traite pas des différences raciales entre Juifs et Grecs, comme le fait l’apôtre dans d’autres passages (voir plus loin). Il aborde ici les différences religieuses. Il décrit d’une part les adeptes de religions païennes, spirituellement éloignées du seul vrai Dieu et méprisées par les Juifs. Et, d’autre part, le peuple d’Israël, dont la circoncision et les pratiques de la loi de Moïse érigeaient un mur religieux qui les séparait des païens et entretenait une haine entre ces deux.

En Christ, les païens ne deviennent pas Juifs car, en Jésus, le style de vie de la loi et de la circoncision ont

été abolis. Les Juifs deviennent encore moins des païens, pour s’éloigner de Dieu. Les deux religions ne se mélangent pas non plus dans un syncrétisme mou. Mais Juifs et païens cessent tous

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deux d’être ce qu’ils étaient auparavant. Jésus-Christ, par sa mort, a créé des deux une entité neuve: “un seul homme nouveau”. Il a “réconcilié les deux en un seul corps”, l’Eglise. Ils ont tous les deux quitté les religions de leurs origines: le paganisme et le judaïsme. “De ce qui était divisé, il a fait une unité”. La haine entre gens de religions différentes ne disparait vraiment qu’en Jésus-Christ. Les uns et les autres doivent d’abord être réconciliés avec Dieu avant de pouvoir connaître la paix entre eux. L’inimitié entre les hommes et Dieu est fondamentale; l’inimitié des hommes entre eux est accessoire. Leur unité ne se réalise qu’au pied de la croix et ensuite au sein du corps du Christ, l’Eglise. Ils y deviennent égaux. Tous les avantages et les désavantages religieux, vrais ou imaginaires, y sont annulés. Actuellement, chrétiens palestiniens, harcelés par la société musulmane qui les entoure, et Juifs messianiques désavantagés au sein de l’Etat Israëlien, se réunissent paisiblement entre eux et s’encouragent mutuellement.

L’unité de l’Eglise y annule les divisions raciales et nationales “Là (en Christ), il n’y a plus Grec et Juif” (Col.3:11; 1 Cor.12:13; Gal.3:28). L’Eglise est interraciale,

internationale, inter-ethnique. Il s’agit d’un fait évident et incontestable dans l’Eglise universelle. Il s’agit en même temps d’un idéal qui est baffoué quand les chrétiens blancs sont condescendants vis-à-vis de leurs frères de couleur; quand une Eglise locale favorise ou admet une ségrégation raciale, quelle qu’elle soit; quand une Eglise permet à une nation de se servir d’elle pour promouvoir l’unité nationale au détriment de l’unité avec les croyants d’une autre nation; quand une ethnie se sert d’une institution chrétienne particulière à des fins identitaires.

Et jamais une Eglise ne pourrait être formée de toute la population d’une nation. Toutes les supériorités et

les infériorités raciales et nationales, vraies ou imaginaires, nuisent à l’unité de l’Eglise. Il n’est pas nécessaire de se ressembler pour être un. En Christ, tous sont égaux aux yeux de Dieu. Malgré les imperfections de l’Eglise, le racisme et l’Esprit nationaliste y sont moins présents que dans le monde. Certaines dénominations libérales claironnent leur anti-racisme mais sont blanches comme neige le dimanche matin. On n’est pas disposé à modifier sa vie d’Eglise pour accommoder des personnes de couleur

L’unité de l’Eglise y annule les divisions sociales “Vous avez revêtu Christ. Il n’y a plus ni esclave, ni homme libre”(Gal.3:28; Col.3:11; 1Cor.12:13). Le

statut social des membres ne doit pas être pris en compte dans l’Eglise. On ne peut y faire valoir ni des avantages, ni des désavantages de classe. L’Eglise universelle compte plus d’ouvriers et d’employés que d’indépendants et de patrons. Car “un riche entrera difficilement dans le royaume des cieux” (Mat.19:23). Par contre, les classes laborieuses sont sous-représentées dans certaines Eglises en Occident où l’on courtise l’avoir et le pouvoir. Tout discours politique dans l’Eglise tend à y ré-introduire des divisions qui y sont extérieures, et étrangères à son essence. Malgré tout, la lutte des classes et les clivages dûs au statut social sont moins présents dans l’Eglise que dans le monde.

L’unité de l’Eglise y annule les divisions culturelles “Là, il n’y a plus...barbare et Scythe” (Col.3:11). Bengel écrivait: “Les Scythes étaient plus barbares que

les barbares”. L’homme arrive toujours à trouver une culture inférieure à la sienne. De nombreuses églises locales réunissent des personnes d’horizons culturels différents. Ils ont des habits, des goûts, des musiques, des régimes alimentaires, des coiffures, des habitudes, des tempéramments, des âges, des traditions et des accents différents. Il n’est pas nécessaire que cette diversité nuise à l’unité de l’Eglise. Les meilleurs missionnaires chrétiens apprennent les langues du pays, y traduisent la Bible,

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s’adaptent aux coutumes de l’endroit et y établissent des Eglises autochtones. Celles-ci lient, à leur tour, des relations avec d’autres Eglises à l’étranger, sans renier leur identité culturelle propre. Le Judaïsme, l’Hindouisme, l’Islam et l’Animisme s’identifient d’avantage à des cultures particulières et, par conséquent, n’ont pas le même rayonnement universel que le Christianisme. Les différentes expressions culturelles du Christianisme sont légitimes tant qu’elles ne véhiculent pas des éléments contraires à l’Ecriture. Seules l’erreur sur Jésus-Christ et l’inconduite nuisent à l’unité de l’Eglise.

L’unité de Eglise y annule les divisions de sexe “Il n’y a plus l’homme et la femme; car tous, vous n’êtes qu’un en Jésus Christ” (Gal.3:28). L’Evangile a

été une bonne nouvelle pour les femmes du monde païen depuis le premier siècle jusqu’à nos jours. Cependant, le sexe de ses membres a souvent été pris en compte dans la vie et le ministère de l’Eglise, à tort. Le machisme est un reliquat du paganisme qui a nuit à l’unité dans les relations et le service chrétiens. L’unité de fait entre hommes et femmes dans l’Eglise (“vous n’êtes qu’un en Jésus Christ) doit y éliminer tous les privilèges et tous les désavantages liés au genre. L’égalité en Christ met chacun(e) dans l’Eglise sur un même pied quant à l’exercice des charismes et la possibilité d’accéder à une charge officielle.

L’unité de l’Eglise n’est pas compromise par la multiplicité de ses membres ni par la diversité de

leurs charismes Comment les centaines de millions de chrétiens de l’Eglise universelle pourraient-ils être un? “Tous les

membres du corps, malgré leur nombre, ne forment qu’un seul corps” (1Cor.12:12). La multitude des membres du corps du Christ dans ce monde ne nuisent en rien, de par leur grand nombre, à l’unité essentielle de l’Eglise. N’importe quel contact qu’ils auraient entre eux, par une rencontre, par courier, par téléphone, par internet, par une entre-aide, etc. peut avoir une dimension spirituelle et manifester l’unité de l’Eglise universelle. Combien de chrétiens en voyage ont rencontré fortuitements d’autres chrétiens qu’ils n’avaient jamais connus auparavant, pour sentir immédiatement la profondeur des liens spirituels qui les unissaient. Des liens institutionnels n’y ajouteraient rien et risqueraient d’introduire un élément de division dans les relations.

Comment rester unis quand on a des capacités et des ministères tellement différents? “Comme nous avons

plusieurs membres en un seul corps et tous ces membres n’ont pas la même fonction, ainsi, à plusieurs, nous sommes un seul corps en Christ, étant tous membres les uns des autres, chacun pour sa part. Et nous avons des dons différents” (Rom.12:4-6). “L’oeil ne peut pas dire à la main: ‘Je n’ai pas besoin de toi’, ni la tête dire aux pieds: ‘Je n’ai pas besoin de vous’...Mais Dieu a composé le corps en donnant plus d’honneur à ce qui en manque, afin qu’il n’y ait pas de division dans le corps, mais que les membres aient un commun souci les uns des autres” (1Cor.12:21,24,25).

La diversité des charismes a parfois été source de division entre les membres de l’Eglise. La doctrine que le

don des langues est le signe nécessaire du baptême dans le Saint-Esprit a créé des schismes dans des Eglises et des séparations dans des oeuvres chrétiennes. L’unité du corps, bien comprise, bannit toute attitude de suffisance, de supériorité ou d’infériorité entre des membres aux dons différents. Car Dieu, en composant le corps, y a introduit des compensations qui doivent empêcher les charismes de semer la division au sein de l’Eglise universelle ou locale. Il accorde un honneur particulier aux dons moins frappants et, par conséquent, moins courus. En fait, la diversité dans l’Eglise est indispensable. Heureusement que tous les membres du corps ne sont pas bouche, ou pied, ou oeil. La bonne santé et l’action efficace du corps dépendent des identités et des individualités différentes de ses membres. Celles-ci doivent être respectées, voir mises en valeur.

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Les premières Eglises furent souvent des modèles en matière d’unité-diversité. Dans l’Eglise à Antioche (Act.13:1-3), il y avait Siméon (surnommé le Noir), un autre africain, Lucius de Cyrène; un aristocrate, Manaën (companion d’enfance du roi Hérode), un Juif pharisien, Paul, un Chypriote, Barnabas, ainsi que des prophètes et des enseignants (v.1). Leur unité se manifestait dans la célébration du culte, dans le fait que le Saint-Esprit leur parlait et était entendu (v.2), et dans la prière et le jeûne en commun (v.3).

Paul cite les noms de 26 personnes de l’Eglise à Rome dans un seul court passage (Rom.16:3-16): Ce

paragraphe dénombrait des hommes et des femmes, des esclaves et des hommes libres, des Romains, des Juifs et des Grecs, des apôtres et des enseignants et sans doute encore d’autres diversités qu’il n’est pas possible de démontrer par le texte. L’apôtre termine cette liste de croyants par une exhortation à l’unité (v.16): “Saluez-vous les uns les autres par un saint baiser”. Mais il n’envisage pas qu’il y ait parmi eux une diversité doctrinale, car il enchaîne au verset suivant (v.17): “Je vous exhorte, frères, à prendre garde à ceux qui causent des divisions et des scandales, au préjudice de l’enseignement que vous avez reçu. Eloignez-vous d’eux”. S’il y avait des divisions, c’était la faute des faux docteurs, non pas de ceux qui étaient fidèles à l’enseignement de l’apôtre. Et ces derniers avaient l’ordre de s’éloigner, de s’écarter des premiers-nommés. Cette séparation n’était pas une dissidence, un schisme ou une secte, mais un devoir.

Mais le slogan: “l’unité dans la diversité” recouvre souvent autre chose que la question de la diversité des

races, des nationalités, des classes, des cultures, des sexes et des charismes . Il est aussi employé abusivement pour justifier une diversité de vues dans une même institution ecclésiastique quant aux bases-mêmes de la foi chrétienne: concernant la création, le péché, la naissance virginale du Christ, sa résurrection corporelle, sa rédemption, son retour et le jugement. Cette “diversité” permet ainsi d’inclure l’hérésie et d’introduire le pluralisme dans l’Eglise. La dénomination maintient parfois une unité extérieure dans les formes (structures, liturgie, hiérarchie) tout en étant profondément divisée quant au fond (la personne de Jésus; l’autorité de la Bible). L’Eglise doit être une dans l’essentiel et diverse dans l’accessoire, plutôt que le contraire; être une sans être uniforme. Mais l’unité au sein de l’Eglise universelle ne se limite pas à l’unité entre personnes, elle s’étend à l’unité entre Eglises locales.

LES RELATIONS BIBLIQUES ENTRE EGLISES LOCALES Le monde est axé sur le pouvoir, l’organisation, les structures, l’institution, l’administration, les

hiérarchies. Il est humain de penser à l’unité chrétienne en fonction de ces choses. Si Jésus et les apôtres avaient conçu l’Eglise en ces termes et avaient proposé le schéma d’une grande organisation mondiale, nous n’aurions qu’à suivre leurs directives. Nous avons constaté plus haut que les membres de l’Eglise, corps unique du Christ, sont présentés comme des personnes individuelles qui croient en lui. Leur grand nombre ne nuit en rien à l’unité de ce corps. D’autre part, le mot “Eglise” (ekklesia) est aussi employé une trentaine de fois au pluriel pour désigner les Eglises locales. Au début de cet ouvrage nous avons vu les différences et les concordances entre l’Eglise universelle et les Eglises locales. Par conséquent, il n’est pas possible de parler de l’unité de l’Eglise universelle sans aborder la question des relations entre les communautés locales. En quoi doit consister, concrètement, selon le Nouveau Testament, l’unité qui est à maintenir entre celles-ci? Nous ne devons rien présumer à ce sujet, rien supposer à partir d’une situation existante, mais rechercher d’abord dans les textes toutes les déclarations et les allusions portant sur la question.

Ce ne sera pas chose facile, car la tendance de tout groupe social humain le porte naturellement vers la

centralisation. Ce penchant s’était déjà manifesté à la tour de Babel (Gen.11:1-9) quand les hommes, par orgueil, ont refusé la dispersion sur toute la terre voulue par Dieu. Le verbe “disperser” revient trois fois dans ce passage. Quand, sous Constantin, le christianisme devint la

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religion officielle de l’empire Romain, l’Eglise épousa tout naturellement les contours et les structures de cet empire. Depuis lors, l’organisation de la chrétienté doit beaucoup plus à la constitution de l’empire Romain et au penchant organisateur de l’homme qu’à l’exégèse des textes bibliques. C’est pourquoi le monde aujourd’hui, ainsi que beaucoup de chrétiens, ont de la peine à concevoir un christianisme qui n’est pas institutionnel. Tout ce qui n’est pas officiellement reconnu, qui ne se situe pas dans une hiérachie est considéré d’office comme suspect, sectaire, quantité négligeable. Mais avant de considérer les relations entre Eglises locales, il convient de déterminer le statut que l’Ecriture accorde à chacune d’elles.

Statut biblique de l’Eglise locale Dans le N. T., le mot “ekklesia” au singulier n’a jamis le sens de “groupe d’Eglises” Les dictionnaires grecs du Nouveau Testament s’accordent pour ne retenir que deux sens du mot ekklesia

pour l’Eglise chrétienne: l’Eglise Universelle unique et les Eglises locales multiples. (voir les chap.1 et 2). Le sens hybride d’“institution ecclésiastique” ou de “dénomination chrétienne”, qui ne serait ni vraiment universelle ni locale, est absent du texte biblique. S’il est question (Act.9:31) de “L’Eglise (au singulier) dans toute la Judée, la Galilée et la Samarie...”, il ne s’agit pas d’une dénomination qui englobait les Eglises locales de ces trois régions, mais bien de l’Eglise universelle qui y était présente. Il n’existe donc aucune organisation permanente intermédiaire entre le local et l’universel que l’on pourrait appeler “Eglise”. L’Ecriture accorde à l’Eglise locale un statut qui lui est propre. La communauté qui ne souhaite pas faire partie d’une dénomination n’a donc pas à justifier son existence ou son autonomie. Nous verrons plus loin que ce fait ne dispense pas une Eglise locale d’entretenir des relations avec d’autres Eglises locales proches et lointaines.

Chaque Eglise locale doit entretenir des relations directes avec Jésus-Christ Après avoir parlé de l’Eglise (“Dis-le à l’Eglise” Mat.18:17), Jésus déclare au sujet de ceux qui prient

ensemble: “Là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux” (v.20). La communauté des croyants, réunie autour du Christ et de sa parole pour prier c’est l’Eglise locale, même si elle est petite. La présence-même du Christ dans l’assemblée est la source de toute l’autorité de celle-ci. Le Seigneur adresse des louanges, des réprimandes, des exhortation et des promesses différentes à chacune des sept Eglises locales à Ephèse, à Smyrne, à Pergame, à Thyatire, à Sardes, à Philadelphie, et à Laodicée (Apoc.2-3). Il s’adresse et s’intéresse à chacune d’elles individuellement. Elles ont des forces, des faiblesses et des besoins qui leur sont propres. A leur tour chacune d’elles doit obéir à des ordres différents leur venant directement de la Tête. Toutes étaient égales devant lui. Il ne traite pas indirectement et globalement avec elles par l’entremise d’un “évêque” ou d’un quelconque diocèse d’Asie. Aucune trace non plus d’un synode qui rassemblerait les délégués des Eglises pour décider ce qu’elles doivent faire. Timothée doit exhorter l’Eglise à Ephèse “en attestant devant Dieu” (2Tim.2:14). Aucun appel à l’autorité de l’apôtre et encore moins à celle d’un “évêque” d’Asie. Pour que l’autorité de Dieu sur les Eglises locales soit effective, celles-ci doivent se sentir directement redevables à lui seul.

Chaque Eglise locale doit avoir ses propres anciens/episcopes “Paul et Barnabas firent nommer pour eux des anciens dans chaque Eglise” (Act.14:23 NBS note). Si ces communautés avaient le statut d’“Eglises” avant-même d’avoir des anciens dûment établis, sans

ceux-ci pourtant, elles ne pouvaient être considérées comme pleinement adultes. Paul écrit à Tite: “Si je t’ai laissé en Crète, c’est pour que tu y achèves l’organisation et que tu établisses dans chaque ville des anciens, suivant mes instructions” (Tit.1:5 TOB). Le fait que l’apôtre avait donné des “instructions” à ce sujet, montre que la manière d’établir des personne dans les offices

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ecclésiastiques n’était pas laissée à l’improvisation. De nos jours, nous appellerions ces “villes” de l’île de Crète, des villages. L’Eglise à Philippe avait aussi des “anciens et des diacres” (Phil.1:1) Si chaque Eglise locale doit avoir ses propres anciens, c’est qu’aucun ancien n’a d’autorité dans une Eglise autre que la sienne. Pas de cumuls. Et si l’apôtre Paul faisait établir pour chaque Eglise des anciens dans leur charge officielle, c’est qu’il n’entendait plus y exercer lui-même une responsabilité officielle. On ne pouvait appeler les Eglises fondées par un apôtre “les Eglises de Paul”, ou “les Eglises de Pierre”, ou “les Eglises d’Apollos” sous peine d’être sectaire (1Cor.1:11-13).

Chaque ancien/épiskope d’une Eglise locale est directement redevable à Jésus-Christ L’apôtre Pierre, implanteur d’Eglises, écrit: “Voici les exhortations que j’adresse aux anciens...Paissez le

troupeau de Dieu qui est sous votre garde...étant les modèles du troupeau. Et lorsque le souverain berger paraîtra, vous obtiendrez la couronne incorruptible de la gloire” (1Pi.5:1-4). C’est des mains du Christ lui-même qu’ils recevraient leur récompense. Pierre ne leur dit pas que c’est à lui, un apôtre, qu’ils doivent rendre compte de leur travail. Il ne se voyait pas comme le premier pape.“Vos conducteurs veillent sur vos âmes dont ils devront rendre compte.” (Héb.13:17). “Chacun rendra compte à Dieu” (Rom.14:12). Aucune trace d’un supérieur hiérarchique entre un conducteur de l’Eglise locale et le Seigneur. Tout ancien était aussi épiskope, “surveillant” (Act.20:17,28; Tite 1:5,7; 1 Pi.5:1,2). Il n’y avait donc pas d’”évêque” au sens “épiscopal” catholique ou anglican, à qui il devait rendre compte. Jésus adresse une réprimande aux apôtres parce que ceux-ci voulaient empêcher quelqu’un d’agir en son nom à lui, parce qu’il ne les suivait pas, eux (Luc 9:49-50 voir plus haut). Il est donc possible de suivre Jésus sans suivre un apôtre.

C’est l’Eglise locale qui est chargée d’établir les serviteurs dans leurs ministères Dieu dit à l’Eglise à Antioche “Mettez-moi à part Barnabas et Saul pour l’oeuvre à laquelle je les ai

appelés...ils leur imposèrent les mains” (Act.13:2-3). Même les apôtres (Act.14:14) avaient été “mis à part” pour leur ministère par l’Eglise locale. Quand il fallait établir des diacres, les apôtres dirent à l’Eglise à Jérusalem: “Frères, choisissez parmi vous sept hommes...Cette proposition plut à toute l’assemblée. Ils élurent Etienne...etc. (Act.6: 3,5). Ce ne sont pas les apôtres qui les ont “bombardés” diacres, même si, après leur élections ils leur ont imposé les mains avec prière. Paul écrit au sujet d’un de ses collaborateurs: “Tite...a été choisi par les Eglises pour être notre compagnon de voyage” (2Cor.8:19). Paul écrit à Timothée: “Ne néglige pas le don qui est en toi, et qui t’a été donné par prophétie avec l’imposition des mains de l’assemblée des anciens” (1Tim. 4:14). Aucune trace d’un “sacrement de l’ordre”, monopole d’une autorité épiscopale supra-locale, ni d’une quelconque succession apostolique.

La discipline ecclésiastique est confiée à l’Eglise locale Jésus rend le chrétien individuel responsable de reprendre son frère si celui-ci a péché (Mat.18:15);

ensuite, il doit prendre avec lui une ou deux personnes (v.16); finalement l’Eglise locale doit être impliquée dans la discipline (v.17), même si celle-ci est très petite (v.20). Paul ne prend pas les choses en main à l’Eglise à Corinthe quand il s’y manifeste une faute morale grave. Ce n’est pas à l’apôtre d’intervenir auprès de la personne en question, mais à la communauté locale (1Cor. 2,7, 11-13). Il se bornait à éveiller les consciences, à exhorter. Il ne disposait d’aucun moyen de pression lui permettant de commander. Pour des questions doctrinales, c’était aux personnes responsables de la communauté locale de refuser accès aux séducteurs (2Jean 7,10,11). L’essence-même de la discipline et toute son efficacité, siègent dans la désapprobation sociale de la communauté. Une sentence venue de l’extérieur sera rarement comprise de toute l’Eglise et deviendra plutôt source de division. Bien entendu, il est toujours possible que le Christ lui-même frappe souverainement celui qui pèche (1Cor.11:30-32; Apoc.2:22,23). Mais il n’y a aucune trace de tribunaux diocésains ou

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d’excommunications papales. Les Eglises locales gèrent leurs propres finances “Les chrétiens de Macédoine et d’Achaïe ont décidé de faire une collecte en faveur des pauvres de la

communauté de Jérusalem. Ils l’ont décidé eux-mêmes...” (Rom.15:26,27 BFC). Paul précise pour l’Eglise à Corinthe que ce sont: “ceux que vous aurez choisis” qui porteraient leur don à

Jérusalem (1 Cor.16:3 BFC), entre autres, celui qui “a été désigné par les Eglises” (2Cor.8:19 BFC). L’apôtre ne prétendait pas avoir le moindre droit de disposer des finances d’une Eglise locale: “Pendant que je me trouvais chez vous, je n’ai été à la charge de personne quand j’étais dans le besoin” (2Cor.11:9). “Vous le savez bien vous-mêmes, Philippiens:...Vous avez été la seule Eglise à m’aider, vous seuls avez participé à mes profits et pertes” (Phil.4:15). Aucun moyen de pression. Il n’existait aucune institution pour prélever “le denier de Saint Pierre”.

Voilà donc le statut que l’Ecriture accorde à l’Eglise locale. Aucun des mots grecs pour “diriger”,

surveiller”, “conducteur”, “gouvernement”, etc., quand il a trait à l”Eglise, n’est jamais attribué à quelqu’un en dehors des anciens de l’Eglise locale. On ne peut parler de “l’indépendance” de l’Eglise locale, car tout chrétien et toute communauté chrétienne dépendent de Jésus-Christ et des autres membres de son corps. Il faut plutôt parler de “l’autonomie” de l’Eglise locale par rapport à toute autre autorité humaine. (Larousse: autonomie - “Droit de se gouverner ou de s’administrer librement”). Le fait que Jésus-Christ peut adresser directement des reproches et des exhortations à chaque communauté (comme aux sept Eglises de l’Apocalypse), permettrait même de parler de la “Christonomie” ou de la “Christocratie” de l’Eglise locale - son gouvernement par le Christ. Cette possibilité et ce statut doivent être respectés dans toutes les relations entre Eglises locales. Ils constituent en même temps le point de départ de toute étude sur les relations et la solidarité entre Eglises.

Nous chercherons tout ce qui est explicite dans le Nouveau Testament sur les liens concrets qui doivent

unir celles-ci. Le souci de cohésion est évident dans la pratique et dans les écrits des apôtres. Si les responsabilités que Dieu délègue aux Eglises locales montrent l’autonomie de chacune d’elle, les relations qu’elles doivent entretenir entre elles montrent leur interdépendance. Aucune communauté locale ne peut vivre en autarcie. Pas d’isolationnisme! La vérité première est celle de l’Eglise universelle. Tout vrai chrétien, à quelqu’Eglise locale qu’il appartienne, est, avant tout, membre du corps du Christ. De ce fait, il est uni à tout autre vrai chrétien dans le monde. Il est appelé à reconnaître cette union et à agir en conséquence. Son appartenance à une Eglise locale particulière ne doit jamais entraver sa communion fraternelle avec de vrais chrétiens d’autres milieux.

Liens de cohésion entre Eglises locales - explicites dans l’Ecriture Entre-aide matérielle humanitaire Lors de la grande famine, “Les disciples (de l’Eglise à Antioche) résolurent d’envoyer, chacun selon ses

moyens, un secours aux frères qui habitaient la Judée. Ils le firent parvenir aux anciens (de l’Eglise à Jérusalem) par les mains de Barnabas et de Saul” (Act.11:28-30; 24:17). Les Eglises de la Macédoine et de l’Achaïe firent de même en faveur des “pauvres parmi les saints de Jérusalem” (Rom.15:25,26; 1 Cor. 8:1-5; 16:3). Les Eglises à Corinthe et de Galatie firent de même (1Cor.16:1-4; 2Cor.8:6-24; 9:1-13). Outre le soulagement des besoins physiques, ces actions caritatives contibuèrent à unir les Eglises dites “pagano-chrétiennes” aux “judéo-chrétiennes” pour en faire un seul grand mouvement dont on a pu écrire, par la suite, 2000 ans d’histoire.

“Que les membres aient également soin les uns des autres. Et si un membre souffre, tous les membres

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souffrent avec lui” (1Cor.12:25,26). Les exemples ne manquent pas d’actions humanitaires de la part d’Eglises en pays riches en faveur de celles en régions sinistrées ou défavorisées. Ces élans de solidarité servent encore aujourd’hui à unir les Eglises du Nord à celles du Sud. Pour autant que cette aide demeure ponctuelle, elle permet d’éviter des dépendances malsaines et infantilisantes. Les aides permanentes de la part d’Eglises-institution ont souvent eu pour conséquence de transposer en terre de mission les divisions ecclésiastiques de l’Occident.

Des partenariats flexibles et temporaires qui répondent à des besoins spécifiques peuvent se créer et se défaire au gré des circonstances, sans effets pervers.

Echanges de correspondance Les frères à Ephèse écrivent aux Eglises en Achaïe de bien recevoir Apollos (Act.18:24-27). Les Eglises

échangeaient des lettres de recommandation au sujet de prédicateurs itinérants, mais non au sujet d’un apôtre. Paul demande aux Corinthiens: “Avons-nous besoin, comme quelques-uns, de lettres de recommandation auprès de vous, ou de votre part?” (2Cor:3:1). Elles devaient faire suivre des lettres qu’elles avaient reçues d’un apôtre. Paul écrit à l’Eglise à Colosse: “Lorsque cette lettre aura été lue chez vous, faites en sorte qu’elle soit aussi lue dans l’Eglise des Laodicéens, et que vous lisiez, à votre tour celle qui vous arrivera de Laodicée” (Col.4:16).

Plusieurs épitres du N.T. étaient des lettres circulaires qui devaient passer d’une église à l’autre, dont celle

de Paul “aux Eglises (pluriel) de Galatie” (Gal.1:2), ainsi que les épîtres dites “générales” de Jacques et de Pierre. L’Eglise à Jérusalem, ses anciens et les apôtres qui s’y trouvaient écrivent une lettre contenant des recommandations aux Eglises à Antioche et en Syrie et en Cilicie (Act.15:20,22,23; 21:25). Depuis l’imprimerie, la multiplication des traductions de la Bible en langue vernaculaire a été un facteur de cohésion entre les Eglises du monde et a réduit l’influence des cloisonnements confessionnels. La libre circulation parmi les Eglises de l’ensemble de la littérature chrétienne contribue à un enrichissement généralisé et constitue un patrimoine commun qui unifie.

Emulation réciproque Pour Paul, la façon de faire dans “toutes les Eglises” devait servir d’exemple pour celle à Corinthe. “Si

quelqu’un désire encore discuter à ce sujet, qu’il sache simplement ceci: ni les Eglises de Dieu, ni nous-mêmes n’avons d’autre coutume dans le culte” (1Cor.11:16 BFC). “Car Dieu n’est point un Dieu de confusion mais un Dieu de paix, comme on le voit dans toutes les Eglises des saints” (14:33 Ostervald). A son tour, l’Eglise à Corinthe est donnée en exemple par l’apôtre, à d’autres Eglises: “Il est vraiment inutile que je vous écrive au sujet de l’aide destinée aux croyants de Judée...J’ai exprimé ma fierté à votre sujet auprès des Macédoniens en disant: Les frères d’Achaïe sont ptêts à donner depuis l’année dernière. Votre zèle a stimulé la plupart d’entre eux” (2Cor.9:1,2 BFC).

Paul montre aussi aux Thessaloniciens que l’émulation n’est pas à sens unique: “Vous êtes devenus un

modèle pour tous les croyants de la Macédoine et de l’Achaïe...Vous, frères, vous êtes devenus les imitateurs des Eglises de Dieu qui sont en Jésus-Christ dans la Judée” (1Thes.1:7; 2:14). De nos jours encore, les Eglises locales apprennent les unes des autres dans des domaines divers de l’action sociale, de l’évangélisation, de l’éthique, du travail pastoral, de la pédagogie, des charismes, des réunions de maison, de l’action missionnaire, etc. Profiter de l’expérience d’Eglises prospères et une sensibilité à ce qui se fait ailleurs tend à réduire l’esprit de clocher.

Actions missionnaires communes L’évangélisation et la fondation de l’Eglise à Corinthe (Act.18:1-18) fut assurée par une équipe

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interecclésiastique composée des membres suivants: Paul, envoyé par l’Eglise à Antioche (Act.13:1-4), Silas par l’Eglise à Jérusalem (Act.15:22), Timothée par celle à Lystre (16:1-3) et Priscille et Aquilas de Rome (18:1-3). Quatre Eglises collaborent à cette action.

L’évangélisation et l’implantation de l’Eglise à Ephèse se fit par les cinq membres de l’équipe cités plus haut, accompagnés d’Aristarque de l’Eglise à Thessalonique (20:4), d’Eraste de l’Eglise à Corinthe (Rom.16:23; 2 Tim.4:20), de Sosthène également de Corinthe (Act.18:17; 1Cor.1:1) et de Gaïus de Macédoine (Act.19:29). Au moins six Eglises différentes s’associent pour cette mission.

Paul fait une tournée d’affermissement parmi les Eglises à Troas, Ephèse-Milet, Tyr, Ptolémaïs, et Césarée

et achemine la collecte à Jérusalem (Act.20:4-21:29). “Il avait pour l’accompagner Sopater de Bérée, fils de Pyrrhus, Aristarque et Second de Thessalonique, Gaïus de Derbe, Timothée ainsi que Tychique et Trophime (de l’Eglise à Ephèse 21:29) originaires d’Asie” (Act.20:4). Cette équipe est composée de Juifs et de Gentils, venus de quatre pays et de sept Eglises locales différentes.

On peut multiplier les exemples. Paul dirigeait une société missionnaire à laquelle une quarantaine de

personnes différentes ont collaboré à long terme, à moyen ou à court terme, pour des périodes allant de 17 ans à quelques mois. Ces 40 missionnaires venaient de vingt et une Eglises différentes dont les localités sont nommées dans les textes. Certaines Eglises en envoyèrent plusieurs. Ceux-ci sillonnèrent le monde connu et eurent des contacts avec la plupart des Eglises établies au premier siècle. Ils assuraient une liaison spirituelle et d’amitié pour les Eglises entre elles. Les Eglises qui envoyaient des missionnaires tissaient des liens entre elles dans un une action commune. Elles tissaient des liens avec les nouvelles Eglises implantées par ceux et celles qu’elles y envoyaient. Depuis toujours, la vision et l’action missionnaire a constitué un puissant facteur d’unité au sein de l’Eglise universelle. La société missionnaire, composée d’équipes interecclésiastiques et dirigée par un apôtre était l’unique structure intermédiaire entre l’Eglise universelle et les Eglises locales.

Salutations et reconnaissance mutuelles Les Eglises d’Asie et celle qui est dans la maison d’Aquilas et Priscille à Ephèse saluent l’Eglise à Corinthe

(1Cor.16:19,20). Paul transmet à l’Egl;ise à Rome les salutations de “toutes les Eglises du Christ” (Rom.16:16; voir Col.4:15). A leur tour, les croyants de l’Eglise à Rome saluent ceux de l’Eglise à Philippe (Phil.4:22). L’Eglise à Jérusalem salue “les frères d’origine païenne qui sont à Antioche, en Syrie et en Cilicie” (Act.15:23). Ces salutations ne sont pas de simples formules de politesse. Elles constituent une reconnaissance mutuelle de la part des Eglises d’origine juive et celles d’origine païenne de sorte que la multiplicité des nouvelles Eglises locales et leur diversité ethnique ne nuisent pas à l’unité de l’Eglise universelle. Le manque d’égards entre Eglises, les excommunications mutuelles, le fait de ne pas accorder à d’autres communautés le statut d’Eglise en les qualifiant uniquement de “frères séparés”, et la mentalité qui veut que “les sectes ce sont les autres” nuisent tous à l’unité de Eglise universelle. D’ailleurs, des contacts fraternels entre les Eglises locales du monde entier seraient facilités s’il n’existait pas des institutions ecclésiastiques qui découragent de telles relations. Paul pouvait transmettre les salutations de “toutes les Eglises du Christ” parce que, à l’époque, il n’y avait pas encore de dénominations.

Intercession Paul écrit à l’Eglise à Corinthe au sujet des Macédoniens: “Ils prient pour vous, parce qu’ils vous aiment”

(2Cor.9:2,14). Il adresse une exhortation à l’Eglise à Ephèse: “Et priez pour tous les saints” (Eph.6:18). Quel souci de l’Eglise universelle et quels liens spirituels entre Eglises locales!

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Visites et échanges d’enseignants et de prédicateurs Timothée, originaire de l’Eglise à Lystre visite l’Eglise à Thessalonique pour “fortifier” les chrétiens et les

“encourager dans leur foi” (1Thes.3:1-3). Il visite l’Eglise à Corinthe pour y rappeler “comment l’apôtre Paul enseignait partout dans toutes les Eglises” (1Cor.4:17).

Tychique, “collaborateur fidèle” de Paul, visite l’Eglise à Ephèse pour y donner des nouvelles de l’apôtre et pour “réconforter” les croyants (Eph.6:21,22).

Tite, de l’Eglise à Antioche, visite l’Eglise à Corinthe pour y encourager les membres à participer à la collecte en faveur des chrétiens démunis en Judée (2Cor.8:6).

Epaphras, de l’Eglise à Colosse, s’était “donné beaucoup de peine pour ceux des Eglises de Laodicée et de Hiérapolis” (Col.4:12,13).

Il est bienfaisant pour les Eglises de profiter du ministère de la parole de la part de personnes venues d’ailleurs. Celles-ci, en remplaçant le ou les prédicateurs habituels, apportent une variété de thèmes, d’accents et de points de vue qui sont raffraichissants et élargissent les horizons de chacun. De la sorte, les petites Eglises se trouvent aussi aidées et encouragées par les plus grandes. L’unité de l’Eglise universelle trouve ainsi son expression au niveau local et prévient la créations de cloisonnements et de ghettos. Et l’unité demeure d’ordre spirituel plutôt qu’administratif.

Consultations et concertations Une controverse éclate dans l’Eglise à Antioche autour d’une question doctrinalement et physiquement

sensible, propre à déchaîner les passions: Les non-juifs peuvent-ils être sauvés, oui ou non, sans avoir été circoncis? (Act.15:1). Des chrétiens juifs venus de Jérusalem , mais sans avoir reçu de mandat de la part de cette Eglise, avaient troublé les chrétiens d’origine païenne en leur disant que le rite de la circoncision était indispensable au salut (15:24). L’Eglise à Antioche envoie donc une délégation à Jérusalem (d’où venait le problème) pour y traiter de ce désaccord avec les apôtres, l’Eglise locale et ses anciens (15:2-4). Après “une grande discussion” (15:6), l’assemblée écoute dans le silence (15:12) les exposés des apôtres Pierre, Paul, Barnabas et Jacques (15:7-21).

Une décision est prise qui “parut bonne” au Saint-Esprit (15:28), aux apôtres, aux anciens et à toute

l’Eglise à Jérusalem (15:22). Ils désavouent les Juifs de Jérusalem qui étaient allés semer le trouble dans l’Eglise à Antioche (15:1,5,24). Cette décision est communiquée à cette l’Eglise, mais aussi à celles, composées principalement de non-Juifs, en Syrie et en Cilicie (15:23; 16:4,5). La communication se fait par lettre (15:20,23) et par des délégués “bien considérés parmi les frères” (15:22,25). Ceux-ci remettent la lettre à l’Eglise à Antioche, réunie en assemblée (15:30), ce qui est pour tous un sujet de réjouissance et d’encouragement (15:31). Paul et Silas font une tournée parmi les Eglises composées de non-Juifs pour y recommander qu’on observe les décisions des apôtres et des anciens de Jérusalem de ne pas exiger la circoncision.(16:4,5). L’unité est rétablie.

Ce compte-rendu est riche en enseignements: Une consultation doit se faire avec beaucoup d’égards et une

grande sensibilité. Un vif désaccord peut aboutir à l’unité par l’action du Saint-Esprit, plutôt que par des manoeuvres politiciennes. Les missionnaires fondateurs d’Eglises (apôtres) sont les meilleurs traits-d’union entre Eglises, car ils connaissent de première-main les points de vue divergents. Les missionnaires n’agissent pas sans les Eglises, ni les Eglises sans les missionnaires. L’unique structure intermédiaire entre l’Eglise universelle et les Eglises locales était la société missionnaire groupée autour de l’apôtre, implanteur d’Eglises. Celle de l’apôtre Paul, a compté plusieurs dizaines de collaborateurs. On ne peut concevoir une consultation qui ne comprenne aucun missionnaire. Les décisions doivent être sans ambiguïté et être soigneusement formulées par écrit. La communication par lettre ne suffit pas; il faut aussi des délégués jouissant d’une grande crédibilité pour assurer le

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face-à-face. L’unité est à ce prix. Cette consultation est ponctuelle et unique dans le témoignage biblique. On ne peut en déduire un synode

général permanent. D’ailleurs, seules deux Eglises locales y furent représentées: Antioche et Jérusalem. Il faut plus que deux Eglises pour qu’il y ait “synode”. Une Eglise établie, qui envoie des missionnaires, ne dicte pas sa loi à des Eglises nouvelles, qui les reçoivent. Les pratiques qui vont dans le sens du caractère ethnique, national ou culturel d’une Eglise ne doivent pas être exportées. On ne peut pas non plus déduire que l’Eglise “mère” à Jérusalem, composée majoritairement de Juifs, imposait aux autres Eglises, par ses directives, les sensibilités culturelles qui lui étaient propres. C’est tout le contraire qui s’est passé. La décision de cette consultation est allée dans le sens de la situation des Eglises composées majoritairement de croyants d’origine paënne.

Loin d’être prédominante, l’Eglise à Jérusalem se plie aux intérêts de l’ensemble des Eglises et de l’action

missionnaire de Paul. Celui-ci, dans son épître aux Galates, commente le rôle joué par les autres apôtres dans cette décision: “Ceux qui sont les plus considérés ne m’imposèrent rien” (Gal.2:6). Si l’Eglise à Jérusalem avait été consultée, ce n’était pas qu’elle était supérieure à celle d’Antioche ou qu’elle avait une autorité sur les autres Eglises. C’était parce que ceux qui avaient enseigné l’erreur à Antioche venait de l’Eglise à Jérusalem. Il fallait résoudre le problème là où il avait eu son origine. Une fois ramenée à sa source l’affaire fut vite réglée. Et le Nouveau Testament ne contient aucune trace d’une autre consultation de ce type, qui pourrait faire penser à des réunions à répétition comme celles d’un synode.

Résumons. Tous les liens, mentionnés ci-dessus, qui peuvent assurer la communion entre les Eglises

locales du monde entier, ne constituent pas une pyramide, mais un tissu, un réseau plat. Les relations entre communautés doivent demeurer horizontales et ne jamais devenir verticales, l’une au-dessus de l’autre. La seule relation verticale est avec Jésus-Christ, la Tête. De telles relations fraternelles existent souvent entre des Eglises locales de dénominations différentes, et sont souvent absentes entre Eglises locales d’une même confession. L’institution ne peut ni créer, ni toujours empêcher l’unité visible préconisée dans l’Ecriture. On peut constater qu’un corps fonctionne, sans pour cela savoir précisément comment. Il en est ainsi du corps de Christ. Moins il y a de structures contraignantes, plus il y a de communion spontanée, vraie et joyeuse. Jésus n’avait pas prévu pour son Eglise une organisation générale centralisée; et les Eglises apostoliques n’en étaient pas dotées. Il est faux de dire que là où il n’y a pas de lien institutionnel, il n’y a pas d’unité. Il est dangereux de s’aventurer sur un terrain où la Bible est silencieuse. On risque de ne faire qu’oeuvre humaine.

Si parfois plusieurs Eglises locales sont mentionnées ensemble, c’est qu’elles étaient situées dans une

même région ou qu’une même lettre circulaire leur était adressée par un apôtre. Il ne faut pas y voir l’existence de structures hiérarchiques, épiscopales ou synodales permanentes. Et ni les dons spirituels, ni les charges officielles ne sont présentées comme constituant une administration au-dessus du niveau local. Les Eglises autonomes qui foisonnent actuellement un peu partout dans le monde sont parfois traitées de “post-institutionnelles”. En fait, elles ne font que rejoindre les Eglises “pré-institutionnelles” du premier siècle. Les considérations suivantes ne visent aucune dénomination en particulier, mais seulement l’institutionnalisme dans son principe.

Inconvénients liés aux institutions ou dénominations: Les institutions sont des facteurs de division Sous le prétexte d’unir entre elles des Eglises locales, les structures supra-locales permanentes défont

“l’unité de l’Esprit” qui doit être “gardé par le lien de la paix” (Eph.4:3). C’est avec raison que le mouvement oecuménique a dénoncé les différentes confessions chrétienne comme étant un scandale, le symbole de la désunion de la chrétienté. Celles-ci constituent des cloisonnements qui

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freinent et faussent les relations entre croyants et entre communautés. En s’associant avec certaines Eglises, on se dissocie d’office d’autres. L’institution ecclésiastique est sectaire dans son principe.

Depuis toujours, les confessions ont été sources d’animosités et de conflits. Dieu veut-il des millions d’Eglises locales amies ou des milliers de dénominations rivales? La solution serait-elle donc de fusionner toutes celles-ci dans une seule organisation ecclésiastique mondiale? Mais le corps du Christ, l’Eglise universelle, n’étant pas une organisation, ce corps ne pourrait être divisé par l’absence d’une organisation mondiale. D’ailleurs, les institutions qui prétendent à l’universalité ne sont pas du tout universelles. Rome ne groupe pas la moitié des chrétiens pratiquants dans le monde, et le Conseil mondial des Eglises moins d’un tiers de ceux-ci.

Aucune organisation ecclésiastique mondiale n’englobera jamais toutes les Eglise locales et tous les

chrétiens authentiques. Et si une Eglise tant soit peu mondiale devait un jour voir le jour, ne deviendrait-elle pas d’office intolérante vis-à-vis du reste des chrétiens qui ne voudraient pas se joindre à elle? Il y aurait désormais une division encore plus profonde entre elle et tous les autres croyants. Tout monopole constitue un danger pour la liberté. L’histoire de l’Eglise nous en a donné suffisamment d’exemples affligeants. Une Eglise locale qui se détache d’une institution ou dénomination n’est, de ce fait, ni schismatique ni dissidente, ni sectaire à moins qu’elle se lie dans des structures permanentes avec d’autres Eglises locales. Ensemble, elles ne constitueraient alors qu’une dénomination de plus. La floraison d’Eglises de maison et de communautés autonomes, allant de paire avec la désertion par les adhérents des offices dominicaux des institutions, a inspiré cette constatation à un ecclésiastique: “L’Eglise s’échappe de l’institution pour aller vivre ailleurs”. Un autre admet que: “L’Eglise réelle ne coïncide plus avec l’Eglise légale”. Bien entendu, toute vitalité doit être structurée pour survivre, mais la structure nécessaire et suffisante est celle de l’Eglise locale.

L’union institutionnelle est un semblant d’unité Pourquoi se donner la peine de développer les relations vraies entre Eglises locales, décrites dans l’Ecriture

(voir plus haut), quand, quoi qu’on fasse, on se croit unis par l’institution? L’affiliation et les structures remplacent facilement la communion. On dépend de l’administration au lieu de tisser des liens de vie commune. En refusant les liens institutionnels, une Eglise locale, au lieu d’être sectaire, préserve la possibilité d’entretenir les liens bibliques vrais avec n’importe quelle autre Eglise locale dans le monde. C’est l’oecuménisme de la reconnaissance mutuelle, de la collaboration, de la prière, de l’entre-aide, bref: l’oecuménisme du coeur. Des Eglises locales peuvent très bien vivre entre elles une unité totalement biblique, sans être unies administrativement le moins du monde.

Par contre, au sein-même de l’institution, il est nécessaire de maintenir l’unité structurelle entre des entités

disparates et souvent discordantes. La hiérarchie finit par tolérer des énormités morales et doctrinales pour maintenir à tout prix l’unité administrative; ce qui mène aux compromissions et aux accords de surface. Les dirigeants institutionnels sont passés-maîtres dans l’usage d’un language ambigu qui n’engage à rien. On développe l’art de ne rien dire tout en ayant l’air de tout dire sur une question. On couche sur papier des formulations permettant toutes les interprétations. Ces textes ne font que camouffler des divergences profondes sous un semblant d’unité. L’unique hérésie devient celle de ne pas se joindre à l’institution nationale ou mondiale.

Les liens administratifs tendent à remplacer les liens fraternels et spirituels Le temps et les énergies des cléricaux se perdent dans une multitude de réunions administratives régionales,

nationales et mondiales, aux dépends des contacts entre communautés, et des soins à apporter aux brebis. Les luttes d’influence et la politique d’Eglise remplacent la communication et la libre concertation. Les divergences, même légitimes, deviennent des courants qui traversent l’institution,

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et il s’y créent des “ailes” et des “pôles” aux intérêts opposés. Au lieu d’être libres et chaleureuses, les relations deviennent tendues. Jacques Ellul fit le constat suivant: “Je n’ai jamais fait l’expérience de la communauté au niveau du Conseil Mondial des Eglises. Pendant trente ans j’ai participé au Synode national de l’Eglise Réformée de France. Et pendant vingt ans j’étais membre de son conseil national. Mais je rentrais toujours chez moi très malheureux après les réunions de ces groupes.”

Les institutions tendent à usurper l’autorité de la Tête de l’Eglise Avec le temps, il se crée une bureaucratie, un fonctionnariat, une hiérarchie. Celle-ci, au lieu de

promouvoir les buts dans lesquels l’Eglise fut établie, tend à favoriser ses propres intérêts, à assurer sa propre survie et à asseoir son pouvoir. Sa voix devient, pour les Eglises locales, la voix de Dieu et celles-ci se trouvent au service de la hiérarchie, plutôt que le contraire. Elles sont réduites à l’état de petits rouages dans une vaste machine ecclésiastique. Celle-ci sape leur sens des responsabilités et les infantilise. Elles regardent vers les supérieurs hiérarchiques au lieu de regarder au Seigneur. Ceux-ci ont usurpé une partie de l’autorité effective du Christ sur les Eglises locales. Son autorité

à lui permet à l’essence de l’Evangile de s’enraciner dans n’importe quelle culture, dans une variété enrichissante d’expressions et de formes. L’autorité de l’institution tend à standardiser et appauvrir la vie des Eglises locales en y imposant des formes communes. Paradoxalement, il arrive à la hiérarchie de permettre des déviations doctrinales et morales sur le fond, pouvu que les formes et son autorité soient respectées.

L’institution n’est pas source de réveil Les structures ont tendance à s’alourdir et favoriser la passivité chez les gens d’Eglise. Quand l’institution

se charge de tout, les ouailles ont tendance à dépendre d’elle pour leur relation avec Dieu. Certains ne se doutent même pas qu’ils sont eux-mêmes responsables de leur vie spirituelle. Ils attendent que tout leur vienne du haut de l’échelle. Or, au cours de l’histoire de l’Eglise, les renouveaux spirituels se sont manifestés à la base et à la périphérie de l’institution, plutôt qu’à son sommet et son centre. Il ne reste alors au siège du pouvoir qu’à chercher à contenir et à récupérer tout ce qui échappe à son contrôle et qu’il considère comme débordement. Il faut la permission de plusieurs niveaux de pouvoir avant de lancer une nouvelle initiative, de répondre à de nouveaux besoins.

C’est par l’Eglise nouvelle à Antioche que l’Esprit Saint donne l’ordre de lancer la mission parmi les

nations païennes (Act.13:1-4). Qu’en serait-il advenu de cette mission si on avaient dû obtenir préalablement la permission de l’Eglise à Jérusalem, parfois judaïsante et méfiante quant à l’évangélisation des païens? Pierre n’avait pas voulu annoncer l’Evangile aux païens de la maison de Corneille (Act.10:9-16,28) et quand il le fit, suite à un vision (10:29,34-48), les croyants de l’Eglise à Jérusalem lui en firent le reproche (11:1-3). Aujourd’hui, les grandes dénominations hiérarchisées sont partout en régression, tandis que les communautés autonomes prolifèrent partout. Les fusions entre institutions ne créent pas les nouvelles dynamiques escomptées. On prétendait que 1+1 feraient 3. Tandis que l’histoire des fusions ecclésiastiques, depuis un demi-siècle, montrent qu’à la longue, 1+1 font plutôt 1.

L’institution crée un pouvoir ecclésiastique qui corrompt Le pouvoir attire les hommes charnels et repousse les hommes spirituels. Et ce pouvoir corrompt ceux qui

le détiennent. Rares sont ceux qui peuvent y résister. La corruption morale et doctrinale se

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développe le plus facilement au sommet de la pyramide ecclésiastique et finit par influer sur la base restée plus longtemps fidèle. L’Eglise-institution se coupe de ses racines qui avaient germé dans un réveil ou une réforme. Elle finit, en général, par se compromettre avec le monde: socialement, ethniquement, économiquement, ou politiquement. Elle devient un groupe de pression parmi d’autres qui défend ses propres intérêts, et ne devient, aux yeux des non-chrétiens, qu’une institution de la société parmi toutes les autres. Etant devenu “du monde”, son témoignage n’est plus pris au sérieux. S’il y a un changement de régime et que l’Etat devient persécuteur, l’institution est la première visée parce qu’elle constitue une menace aux yeux du pouvoir politique. Dans les bouleversements, elle est plus vulnérable que les communautés locales autonomes et les Eglises de maison, plus modestes et, de ce fait, plus corriaces.

Ecoutons encore Jacques Ellul, sociologue et professeur d’université, qui fut haut-placé dans l’Eglise

Réformée de France: “Je crois qu’actuellement, si on veut redonner une chance à l’Eglise Réformée, il faut repartir de la base (qui n’existe presque plus, mais qui est étouffée par l’institution), il faut libérer l’initiative individuelle dans toutes les directions...il faut désinstitutionnaliser au maximum. Il faut faire disparaître le problème de l’argent qui finit par devenir le problème absolu...et cela ne peut se faire que par la disparition de l’institution. Il faut faire disparaître toutes les commissions nationales, régionales, etc. et tous les conseils...L’Eglise meurt de trois fléaux - une organisation qui devient de plus en plus complexe...- une obsession financière... - une disparition des fidèles...parce qu’ils se trouvent dans un grand corps vide, où ils ne reçoivent rien. La preuve, c’est qu’ils se réunissent ailleurs, dans des groupes et des sectes où ils retrouvent une vie spirituelle qui, chez nous, est étouffée par l’institution....

...Bien entendu, on va alors crier au congrégationnalisme. Eh bien oui, je pense, après avoir travaillé plus

de vingt ans pour la meilleure organisation de l’Eglise, que c’est finalement un échec, et qu’il faut risquer l’expérience congrégationnaliste...et développer les Eglises locales seules et les Eglises de maison (là où on ne pourrait pas entretenir un pasteur)...Donc Eglise locale souveraine dont les représentants se réuniraient une fois tous les deux ans...Seraient traitées les grandes orientations et les questions théologiques communes. Je sais que cette proposition paraîtra scandaleuse à la majorité... La seule issue, c’est le retour à la paroisse, aux communautés...cellules de base...Je ne condamne nullement ce qui a été fait, je pense seulement que, dans la vie de l’Eglise, comme dans toute vie, il y a un temps pour se rassembler et un temps pour se séparer...(Dans “La Besace”, journal protestant d’information religieuse, Novembre 1983).

Quels motifs sont évoqués pour justifier la création de structures supra-locales? De par le monde, il se constitue continuellement de nouvelles dénominations. Pourquoi ce réflexe de

fédérer les Eglises implantées par une même société missionnaire? Pourquoi une Eglise locale nouvelle en Occident doit-elle forcément s’associer à une dénomination existante? Pourquoi des structures institutionnelles permanentes sont-elles nécessaires? l’Ecriture ne donne aucun ordre explicite ni d’exemple clair qui irait dans le sens d’une association d’Eglises. On avance, malgré tout, plusieurs raisons.

On prétend que: “L’Eglise non-affiliée tend à être égocentrique et individualiste. Elle bâtit sa propre

petite Eglise dans son petit coin, sans se soucier d’autre chose. Elle doit entrer dans un projet plus vaste.”

Ce sont, en général, les fonctionnaires de la hiérarchie qui font ce reproche. Les relations entre Eglises

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locales explicites dans l’Ecriture décrites plus haut (entre-aide, mission, émulation, concertations, intercession, correspondance, échanges de prédicateurs, etc.) sont largement suffisantes pour écarter les dangers du repli sur soi. Et le projet plus vaste préconisé par le Nouveau Testament c’est l’Eglise universelle, non pas la dénomination. Cette dernière n’est pas à l’abri de l’égocentrisme institutionnel, ni d’une méconnaissance du projet plus vaste de l’Eglise Universelle. Les Eglises autonomes tissent plus facilement des liens directs avec une Eglise à l’étranger que celles qui sont affiliées à une association nationale. Bâtir une union d’Eglises ne garantit guère qu’on bâtira l’Eglise universelle. Et les commissions, les administrations et les rouages de l’appareil détournent les meilleurs éléments et les forces vives qui devraient servir à édifier les Eglises locales et à faire un travail pionnier.

On prétend que: “Les Eglises autonomes risquent l’isolement; elles ont besoin les unes des autres; elles

sont membres les unes des autres. L’autonomie est une faiblesse” La dépendance peut aussi être une faiblesse. Les structures administratives supra-locales permanentes ne

sont pas seules à pouvoir conjurer l’isolement, et elles ont des effets pervers que les relations prônées par la Bible n’ont pas. Elles peuvent favoriser une mentalité d’assistés chez les Eglises faibles. Les huit (8) aspects des relations entre Eglises locales préconisés par l’Ecriture (voir plus haut) sont amplement suffisantes pour prévenir tout isolement. D’ailleurs, dans l’image biblique du corps du Christ, les membres de ce corps ne représentent pas les Eglises locales, mais les croyants individuels. La solidarité et la collaboration entre Eglises ne dépend pas d’une union d’Eglises. Et si une Eglise forte aide une Eglise faible, cette assistance ne doit pas porter atteinte à l’autonomie de l’Eglise faible.

Des communautés qui sont géographiquement proches peuvent collaborer ponctuellement à des projets

communs comme des campagnes d’évangélisation ou des grands rassemblements. A plus long terme, mais sur des plans limités, elles peuvent faire ensemble des choses qu’elles pourraient difficilement faire seules: certaines activités pour jeunes, la formation de moniteurs d’école du dimanche, l’aide sociale spécialisée, les échanges de prédicateurs, des camps, des maisons d’accueil pour personnes agées, etc. Si des “commissions” se constituent pour gérer ces différentes activités pour plusieurs Eglises, il faut veiller cependant qu’à la longue, elles ne deviennent pas un pouvoir qui usurpe l’autorité de l’Eglise locale, et mine son sens des responsabilités. Les “caisses centrales”, les réunions régulières de délégués qui prennent des décisions qui engagent l’ensemble des Eglise, ainsi que les commissions permanentes qui assument un rôle d’arbitrage, sont autant d’éléments qui vont dans le sens de la constitution d’une dénomination. Les Eglises fortes collaborent. Les Eglises faibles veulent se fédérer. Une union d’Eglises faibles ne fait pas une dénomination forte.

On prétend que: “Les Eglises autonomes risquent d’avantage le dérapage doctrinal, l’hérésie. L’Eglise à

Antioche n’a pas réglé le problème de la circoncision toute seule, mais a consulté celle de Jérusalem; sans quoi elle risquait de rompre l’unité doctrinale”.

L’unité doctrinale règne-t-elle au sein de toutes les grandes institutions ecclésiastiques? Ce raisonnement a

abouti à la constitution des “confessions” chrétiennes (Catholique, Orthodoxe, Luthérienne, Anglicane, Réformée, etc.) dans le but d’assurer l’unité doctrinale entre Eglises locales. En même temps, tous reconnaissent que ces “confessions” rompent l’unité de l’Esprit au niveau de l’Eglise universelle. Qui plus est, elles n’assurent aucunement la pureté doctrinale en leur sein. Les confessions catholiques n’ont pas écarté le culte de Marie et des saints, les images taillées, la transsubstantiation, les indulgences, le purgatoire, etc. Bon nombre de confessions protestantes ont été rongées par le libéralisme théologique le plus radical. Et l’hérésie s’est d’avantage concentrée au sommet des pyramides institutionnelles, parmi les cadres et les théologiens, qu’à la base.

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Quand les Eglises conservent leur caractère local, les hérésies se propagent plus difficilement. Si une Eglise, gagnée par l’hérésie, est locale, l’hérésie restera plus longtemps locale également. Le professeur A. de Chalandeau de L’institut Pastoral Baptiste d’Algrange a écrit une thèse de doctorat sur les Eglises clandestines en URSS au temps du communisme. Il ressort de cette étude que l’accord entre ces assemblées sur le plan doctrinal fut profond et étendu, malgré l’absence de liens administratifs et le peu de contact entre elles. Le creuset de la persécution, l’obligation de s’en référer presqu’uniquement à la Bible (vu le peu de ressources disponibles en ouvrages théologiques) et les lumières du Saint-Esprit, suffirent à réduire le nombre et la gravité des dérapages doctrinaux.

Par contre, rien n’empêche des Eglises locales d’organiser des concertations ponctuelles et ciblées sur les

questions de théologie et d’éthique qui les concernent. Ces consultations s’avèrent plus utiles que des réunions synodales où interviennent toujours des considérations de politique d’Eglise qui faussent la recherche de la vérité biblique. La concertation à Jérusalem (Actes 15) n’a pas abouti à une “confession” (voir plus haut). Le Nouveau Testament ne décrit aucune Eglise locale comme étant ni supérieure, ni subordonnée à une autre. Paul prédit aux anciens de l’Eglise à Ephèse, qu’après son départ, il s’élèverait parmi eux des loups cruels qui n’épargneraient pas le troupeau, en enseignant des choses pernicieuses (Act.20:29-30). Il avance deux solutions: “Veillez donc” (v.31), et: “Je vous recommande à Dieu et à la parole de sa grâce” (v.32). La vigilance et le respect de la parole de Dieu leur permettraient de résoudre les problèmes doctrinaux sur le plan local. Aucune allusion à une union d’Eglises pour faire respecter la pureté doctrinale. On prétend par ailleurs que:

“Les écarts moraux, les conflits, le désordre et les abus de pouvoir qui peuvent surgir dans toute Eglise

locale sont mieux résolus par l’intervention d’une autorité ecclésiastique supérieure.” Voyons comment s’exerçait l’autorité ecclésiastique de l’apôtre Paul. Il enseigne clairement la nécessité

d’une discipline d’Eglise. Mais dans un cas d’immoralité chez une personne en vue de l’Eglise à Corinthe, il appartenait aux croyants de l’endroit de prendre leurs responsabilités. L’apôtre leur écrit: “Otez le méchant du milieu de vous” (1Cor.5:13). Dans le cas d’un conflit entre deux personnes influentes de l’Eglise à Philippe, Paul demande à un responsable sur place: “Cher collègue, oui, je te prie de les aider” (Phil.4:2,3). Dans l’Eglise à Rome, il y avait “ceux qui causent des divisions” (Rom.16:17). La solution se trouvait chez les “frères”: “Je vous exhorte, frères, à prendre garde...Eloignez-vous d’eux.” Paul ne préconise aucune solution extérieure à l’Eglise locale. L’apôtre ne dit pas qu’il viendrait régler lui-même le problème, ni qu’il enverrait un nonce apostolique pour le faire. L’hisoire de l’Eglise nous enseigne que les abus de pouvoir et les écarts moraux n’ont pas été moins grands au sommet de l’échelle hiérarchique qu’au niveau local.

Si le dynamisme y est, on peut tolérer un peu d’amateurisme et quelques ratés. Il faut accorder le droit à

l’erreur. La pire des erreurs est de vouloir rendre l’erreur imposssible. Et, en cas de difficultés, rien n’empêche une Eglise autonome de faire appel à un ou plusieurs conseillers ou médiateurs de l’extérieur, qui ont la confiance de toutes les parties. Tous, dans l’Eglise, n’accorderont pas forcément leur confiance à un supérieur hiérarchique. La persuasion et l’exhortation spirituelles sont plus efficaces en la matière que les contraintes officielles ou financières. Si, après deux mille ans, les portes du séjour des morts n’ont pas prévalu contre l’Eglise, c’est que Jésus avait entrepris de la bâtir lui-même (Mat.16:18). Et le Saint-Esprit dirige encore les Eglises (Act.13:1-4). C’est à chaque Eglise locale, non à la hierarchie, d’écouter ce que l’Esprit dit aux Eglises (Apoc.2:7,11,17,29; 3:6,13,22). L’institution ne doit pas se substituer à ces actions divines.

Mais les institutions, les confessions, les dénominations existent par milliers. Elles sont des réalités

incontournables de la chrétienté. Quelle attitude une Eglise locale, ou un croyant individuel, doivent-ils donc adopter à leur égard?

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Il n’est pas question de les abolir ni de s’y opposer. On ne peut pas non plus reprocher à ceux qui en font partie de dire: “Je suis de Paul” ou “Je suis de

Céphas” (1Cor.1:11,12) tout en disant de soi-même: “Je suis de Christ” (2Cor.10:7). Ceux à Corinthe qui disait “Je suis de Christ” laissaient entendre que l’apôtre Paul n’était pas de Christ; et ils étaient, de ce fait, les pire sectaires de tous. Le “non-sectarisme” devient ainsi un sectarisme de plus.

Il faut maintenir la communion, sur le plan personnel, avec tous ceux qui sont vraiment du Christ, peu

importe leur affiliation ecclésiastique ou leur non-affiliation. Des croyants authentiques en Jésus qui ne fréquentent aucune Eglise locale, existent. Ils sont membres de l’Eglise universelle sans être membres d’une Eglise locale. Cette situation est peu recommendable et dangereuse pour eux. A la rigueur, elle pourrait être compréhensible dans certains pays où les chrétiens sont persécutés.

Il est difficile pour une Eglise locale qui fait partie d’une dénomination de s’en détacher. Bien que, porter

atteinte à l’institution n’est pas forcément porter atteinte à l’unité de l’Eglise universelle. Si une Eglise quitte une institution, elle doit résister à la tentation de se joindre à une autre dénomination, ou d’en créer une nouvelle avec d’autres Eglises dissidantes.

Par conséquent, il est souhaitable de simplement tenir compte le moins possible des institutions

ecclésiastiques - à l’exemple de Dieu. Mais, en même temps, de développer toutes les relations préconisées par l’Ecriture (et elles seulement) avec un certain nombre d’autres Eglises locales. Celles-ci pourraient faire partie de plusieurs confessions différentes, ou être autonomes.

Sommaire Nous avons examiné les stades successifs de l’unite chrétienne, ses caractéristiques, ses limites et ses

conséquences pour les relations inter-Eglises. Ce cadre nous permet d’aborder dans de bonnes conditions le rôle et les fonctions de l’Eglise.

CHAPITRE 10 RÔLE ET FONCTIONS DE L’EGLISE L’Eglise, pour quoi faire? Avant de demander: “Seigneur, que veux-tu que je fasse?”, un disciple du Christ, devrait interroger la Tête de l’Eglise en ces termes: “Seigneur, que fais-tu dans ce monde?” La chrétienté n’a pas toujours compris quelle était la vocation réelle de l’Eglise, ni respecté, dans son action, le rôle que le Seigneur lui avait confié ici-bas. Elle s’est tantôt aventurée dans des entreprises pour lesquelles le Christ ne lui avait accordé aucun mandat, tout en négligeant de remplir certaines fonctions essentielles du corps. Pourquoi ces méprises, cette confusion? L’Eglise

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s’est laissé influencer par l’agenda du monde. Elle a voulu rivaliser avec lui dans des domaines où elle n’avait rien à faire. Elle a négligé des tâches, importantes aux yeux de Dieu, auxquelles la société n’accorde que peu de crédit. Ou elle a couru trop de lièvres à la fois. L’Eglise qui n’est pas au clair sur sa fonction, ne remplira pas celle-ci comme il se doit. Elle ne peut permettre aux circonstances du moment, aux besoins urgents ou aux pressions de la société de déterminer son agenda. Sous quelle forme l’Ecriture nous présente-t-elle l’Eglise en action? Elle emploie l’image d’un corps, d’un organisme vivant, un ensemble de membres agissants. L’Eglise universelle est l’organe de l’action du Seigneur dans ce monde. Il suffit donc de déterminer quelles sont les fonctions que Dieu attribue aux différents membres de ce corps, pour découvrir le rôle que ce corps, dans son ensemble, est appelé à jouer sur terre. Cinq des contextes qui traitent du corps du Christ et des fonctions de ses membres, contiennent aussi une listes de dons spirituels. Dans cette image, les membres du corps représentent les croyants, c’est-à-dire ceux qui ont été incorporés par la foi et l’action du Saint-Esprit à l’Eglise universelle (1Cor.12:13). Et les charismes qui leur ont été accordés correspondent aux différentes fonctions qu’ils sont appelés à exercer dans le monde sous la direction de la Tête. Ces cinq listes de dons spirituels permettent d’en distinguer une vingtaine en tout qui, à leur tour, se groupent naturellement en les quatre fonctions principales que le corps du Christ est appelé à remplir. L’Eglise a une fonction missionnaire, cultuelle, sociale et pastorale. La fonction missionnaire de l’Eglise Trois des fonctions de l’Eglise, corps du Christ, ont une portée spécifiquement missionnaire. Elles s’exercent par les charismes d’apôtre, d’évangéliste, et celui de faire des miracles. La finalité de ces trois charismes est que le salut soit apporté à ceux qui sont perdus. L’apostolat est une des fonctions du corps du Christ selon plusieurs passages (1Cor.12:28-29; Eph.4:11). Le nom grec “apostolos” est dérivé du verb “apostello” : “envoyer avec mandat”. Le croyant qui a le don d’apôtre est envoyé en mission par le Christ (Mat.10:5) pour annoncer la bonne nouvelle (Mc3:14), parmi toutes les nations (Mat.28:19) jusqu’aux extrémités de la terre (Act.1:8), là où le Christ n’a pas encore été nommé (Rom.15:20), pour fonder de nouvelles Eglises locales (1Cor.3:10,11), les édifier (2Cor.10:6-8) en perfectionnant les nouveaux croyants pour le service du Christ (Eph.4:11,12). L’évangélisation est une des fonctions du corps du Christ selon Eph.4:11; Act.21:8 et 2Tim.4:5. “L’évangéliste” est le membre de l’Eglise particulièrement doué pour annoncer la Bonne Nouvelle de Jésus de manière efficace à ceux qui ne la connaissent pas, de sortent qu’ils croient en lui (Act.8:12), se fassent baptiser (8:38) et soient ajoutés à une Eglise existante. Ils perfectionnent les autres croyants au travail d’évangélisation (Eph.4:11-12) car ceux-ci ont aussi la responsabilité de témoigner de leur foi (Jean 4:39; Apoc.6:9), sans pour cela être spécialement doués pour évangéliser. Le don de faire des miracles est une des fonctions du corps du Christ selon 1Cor.12:10, 28. Les miracles faits au nom de Jésus (Act.4:10) sont des “signes”, des manifestations de puissance extraordinaires, étonnantes et visibles, apportant des transformations physiques soudaines et radicales (Act.3:8; 8:13; 14:8,10). Ils ont pour but d’accréditer la personne du Christ aux yeux des incroyants (Act.2:22), de confirmer la vérité de la prédication des missionnaires (Mc16:20), d’attester la parole de Dieu (Act.14:3), d’amener les païens à l’obéissance à Dieu (Rom.15:18,19) et d’appuyer le témoignage de Dieu au sujet du salut (Héb.2:3,4). Leur fonction missionnaire parmi les non-croyants est évidente, ce qui explique qu’ils se manifestent surtout aux avant-postes de l’action pionnière où les moyens ordinaires ne répondent pas aux besoins de la situation.

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Pierre résume la fonction missionnaire de l’Eglise universelle dans son ensemble: “Vous êtes la race élue, la communauté sacerdotale, la nation sainte, le peuple que Dieu s’est acquis pour que vous proclamiez les hauts faits de celui qui vous a appelés” (1Pi.2:9 BFC). C’est cette Eglise universelle, ce peuple de Dieu tout entier qui a été racheté dans le but d’annoncer tout ce que le Christ a fait pour le salut des hommes. Ce rôle prend le pas sur toute autre fonction de l’Eglise en faveur des hommes incroyants car: “Que servirait-il à un homme de gagner tout le monde, s’il perdait son âme?” (Mat.16:26). La fonction cultuelle de l’Eglise

Tous les croyants en Christ sont appelés à prier et à louer Dieu (Ps.22:4;66:2,8; Eph.5:19). Une des figures de l’Eglise est entièrement consacrée à décrire son rôle cultuel. C’est l’image de l’Eglise comme une prêtrise, une communauté de sacrificateurs, dont le rôle consiste à apporter un culte à Dieu. L’Eglise est aussi un “temple”, un lieu de culte (1Cor.3:16,17; Eph.2:21,22). L’Eglise n’a pas uniquement une fonction horizontale vis-à-vis de ses semblables, mais également une fonction verticale vis-à-vis de Dieu.

Jean écrit: “aux sept Eglises de la province d’Asie:...”Le Christ a fait de nous un royaume de prêtres pour servir Dieu” (Apoc.1:4,6 BFC). Ce même livre décrit les “rachetés” de toute tribu, langue et nation en ces termes: “Tu as fait d’eux un royaume de prêtres pour servir notre Dieu” (5:9,10). Pierre écrit aux “élus” (1Pi.1:1): “Vous formerez un groupe de prêtres consacrés à Dieu, vous lui offrirez des sacrifices spirituels, qui lui sont agréables par Jésus-Christ...Vous êtes la race choisie, les prêtres du Roi, la nation sainte, le peuple qui appartient à Dieu” (1Pi.2:5,9 BFC). Ce peuple de prêtres, c’est l’Eglise universelle.

Quels donc sont ces “sacrifices spirituels” que la communauté de sacrificateurs qu’est l’Eglise est appelée à

offir à Dieu? Notre propre personne: “Je vous exhorte donc frères...à offrir vos corps comme un sacrifice vivant, saint,

agréable à Dieu, ce qui sera de votre part un culte raisonnable” (Rom.12:1). Notre argent: “N’oubliez pas la bienfaisance et la libéralité, car c’est à de tels sacrifices que Dieu prend

plaisir” (Héb.13:16). Notre louange à haute voix: “Présentons sans cesse notre louange comme sacrifice, c’est-à-dire l’offrande sortant de lèvres qui célèbrent son nom” (Héb.13:15 BFC). Selon l’image du corps et de ses membres, un certain nombre de ces derniers ont reçu le don particulier de prier et de louer Dieu en langues (1Cor.14:2,14-17, 27,28). Il s’agit d’un charisme doxologique qui montre également que l’Eglise a une fonction cultuelle.

La fonction sociale de l’Eglise Quatre membres du corps du Christ ont, de par leurs charismes, une fonction spécifiquement sociale: Ceux

qui ont le don du service d’entre-aide, le don de pratiquer la miséricorde, un don de guérison et un don de générosité. L’Eglise a une fonction diaconale en faveur de ceux qui sont dans le besoin.

Le service d’entraide est une fonction du corps du Christ selon Rom.12:7 et 1 Cor.12:28. Le mot diakonia, qui a souvent trait à un service social (Act.6:1,2), revient deux fois dans Rom.12:7 Il se

situe dans une liste de charismes. Une liste similaire dans 1 Cor.12:28 contient le terme antilempseis qui signifie “assistance”, “aide” ou “entraide”. Il a trait à une aide matérielle accordée à des personnes faibles et dans le besoin (Act.20:34,35), et à un tel secours apporté par bonté (Luc 1:53,54). Pour Jésus, les “justes” c’est-à-dire les “brebis” de son troupeau (l’Eglise) sont ceux qui portent assistance à ceux qui ont faim ou soif, aux étrangers, aux dévêtus, aux malades et aux prisonniers (Mat.25:35, 36). Paul dit aux Eglises à Rome d’aider les pauvres (Rom.15:26). Et pour

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Jacques, la vraie religion c’est secourir les veuves et les orphelins (Jac.1:27). Et l’Eglise, peuple de Dieu, doit être zélée pour les oeuvres bonnes” (Tit.2:12-14).

La pratique de la miséricorde est une fonction du corps du Christ selon Rom.12:8. Le mot eleos

(miséricorde) est employé pour décrire la pitié, la compassion du bon Samaritain qui s’engage personnellement en faveur d’une personne en difficulté (Luc 10:33-37). Ce terme a une charge émotionnelle. Pour Jésus, le “bienheureux” est celui qui est miséricordieux pour soulager ceux qui sont dans la douleur et la détresse physique ou morale (Mat.5:7).

La guérison est une fonction du corps du Christ, selon 1Cor.12:9,28,30. Le pluriel: “des dons de guérisons”

dans chacun de ces versets, laisse entendre qu’il y aurait plusieurs dons de guérison différents, ainsi que différents types de guérisons opérés. Jésus a donné à certains “le pouvoir de guérir les malades” (Mat.10:1). Il ne s’agit pas de guérisons qui sont dues à la foi des malades mais au charisme de celui qui guérit.

La libéralité ou la générosité est une fonction du corps du Christ selon Rom.12:8 et 1Cor.13:3.

L’expression peut être traduite “partager avec largesse” ou “répartir avec générosité”. L’identité des bénéficiaire n’est pas précisée. Le témoignage général du Nouveau Testament en indiquerait deux: les pauvres (Jac.1:27; 2:15-17) et les missionnaires et les pasteurs (1Cor.9:14; Gal.6:6; 1Tim.5:17, 18). Celui qui a ce charisme partage ses biens de façon discrète, judicieuse et généreuse. Il répond aux vrais besoins des gens plutôt qu’à leurs fantaisies.

Tout le rôle social de l’Eglise tient à un contact personnel et à des relations proches. L’aide impersonnelle,

le “projet” social à distance n’est pas de la diaconie chrétienne. Il faudra passer du temps avec des individus, ne pas soccuper de leurs corps sans se soucier de leur âme - et vice versa.

La fonction pastorale de l’Eglise Quatre membres du corps du Christ ont, de par leurs charismes, une fonction spécifiquement pastorale: les prophètes, les enseignants, les dirigeants et les bergers. Ces quatre dons ont pour but d’apporter divers soins aux brebis du troupeau, en particulier à celles qui sont jeunes, faibles, égarées ou malades. Cette fonction n’est ni un repli sur soi, ni de l’égoïsme de la part de l’Eglise. Car, de la maturité, de la force et de la bonne santé de l’Eglise universelle dépendent tous les bienfaits qu’elle doit apporter au reste de l’humanité. La prophétie “Celui qui prophétise...parle aux hommes, les édifie, les exhorte, les console... Celui qui prophétise édifie l’Eglise” (1Cor.14:3,4). La prophétie est donc la prédication, et est une des fonctions du corps du Christ selon Rom.12:6; 1Cor.12:10,29; 13:2; Eph.4:11. Le prophète “encourage et fortifie l’assemblée” pour qu’elle s’engage dans l’action (Act.15: 30-32). Il ne s’adresse pas aux non-croyants (1Cor.14:22-24). Tous peuvent prophétiser (1Cor.14: 24,31), mais “tous ne sont pas prophètes” (1Cor.12:29) pour en avoir reçu le charisme. Ils sont donnés par le Christ à l’Eglise pour équiper les croyants pour le service (Eph.4:11,12). L’enseignement est une des fonctions du corps du Christ selon Rom.12:7; 1Cor.12:8,28; Eph.4:11. L’Eglise a une fonction éducative. Tous peuvent enseigner (Mat.5:19; Héb.5:11,12) mais tous ne sont pas “enseignants” pour en avoir reçu le charisme (1Cor.12:29). Ceux-ci enseignent “la foi et la vérité” (1Tim.2:7) pour ceux qui sont dans l’erreur. Ils inculquent ce qui est à connaître (Act.28:31) et à pratiquer (Tit.2:12); une doctrine “pure” (Tit.2:7), “saine” Tit.1:9; 2:1) et “utile” (Act.20:20), basée sur l’Ecriture (2Tim.3:16) pour affermir les croyants. Ils perfectionnent ceux-ci pour qu’ils puissent enseigner à leur tour (Eph.4:11,12). Il existe aussi un don “de parler selon la connaissance” et un autre “de parler selon la sagesse” (1Cor.12:8 BFC). La connaissance de ce qui compte dans

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l’existence, qui donne son sens à la vie, est un des besoins fondamentaux de l’humanité. “L’Eglise du Dieu vivant est la colonne et le soutien de la vérité” (1Tim.3:15). Le don d’être berger est une des fonctions du corps du Christ selon Eph.4:4,7,11,16. Ce don est étroitement lié à celui d’être enseignant. “Le Christ a fait des dons aux hommes...il a donné les uns comme...bergers (poimen) et enseignants” (Eph.4:8,11). Une des fonctions, si bien du berger que de l’enseignant, est de rendre accessible aux brebis une nourriture spirituelle consistante, variée, équilibrée et appétissante (Jean 21:15,17). Le cahier des charges des bergers du troupeau de Dieu est détaillé dans Ezéchiel 34. Ils doivent veiller et prendre garde (v.12,13), panser et guérir (v.4,16), ramener et rassembler (v.4,5,11,12,16; Luc 15:3,4), protéger et défendre (v.5,8,10,22-25; Act.20:28-31), conduire et guider (v.6,24; Jean 10:4) les brebis. Le don de présider ou de diriger est une des fonctions du corps du Christ selon Rom.12:4,8 et 1Cor.12:28. “Que celui qui...préside le fasse avec zèle” (Rom.12:8 BFC). “Dans l’Eglise, Dieu a établi...ceux qui ont le don de diriger les autres” (1Cor.12:28 BFC). Ce charisme est d’un autre ordre que celui d’une charge officielle au sein de l’Eglise locale. Il apporte une autorité spirituelle, un dynamisme pour motiver, conduire et montrer la marche à suivre au sein du troupeau de l’Eglise en général. Une des fonctions de l’Eglise universelle est donc son propre développement: “C’est du Christ que le corps tout entier, coordonné et bien uni...réalise sa propre croissance pour se construire lui-même dans l’amour” (Eph.4:16 TOB). Pour remplir son rôle dans le monde comme il se doit, l’Eglise universelle doit faire plus qu’exister. Elle doit avoir une taille et une force suffisante pour que son action, son rayonnement se fassent sentir partout. C’est son rôle pastoral qui doit assurer cet auto-développement. Par conséquent, l’Eglise, corps du Christ doit veiller à s’en tenir au rôle décrit en détail ci-dessus. Ces fonctions diverses sont celles que Dieu lui confie et qui sont importantes aux yeux de son Seigneur. L’Eglise en tant que collectivité doit se garder de vouloir rivaliser avec le monde dans les domaines du divertissement, du commerce, de la culture, de l’intellect ou de la politique. Il est concevable qu’un corps amuse, marchande, se farde, spécule ou domine. Mais là n’est pas la vocation du corps du Christ, et ce n’est pas dans de telles entreprises que sa Tête le conduira ou le bénira. En outre, le rôle missionnaire et le rôle social de l’Eglise demandent qu’elle ait des contacts soutenus avec des personnes non-chrétiennes. C’est ainsi que l’enseignement de l’Ecriture sur les relations personnelles à entretenir avec les non-croyants est d’une importance primordiale. CHAPITRE 11 L’EGLISE ET LES PERSONNES INCROYANTES LEglise n’est pas seule sur terre et n’est pas appelée par son Seigneur à vivre en vase clos. Elle aura constamment des relations avec des personnes extérieures à elle-même. Elle aura des rapports avec des fonctionnaires de l’Etat, avec des relations professionnelles et d’affaire. Elle côtoiera les adeptes des diverses religions non-chrétiennes et sera en interaction avec toutes les cultures au sein desquelles elle est appelée à vivre. Il convient donc d’examiner le témoignage biblique au sujet des relations à entretenir avec n’importe quelle personne individuelle non-chrétienne. Le Nouveau Testament n’est pas avare de précisions à ce sujet. Il désigne ces hommes et ces femmes par plusieurs expressions différentes: “ceux du dehors” (Mc.4:11;1Cor.5:12; Col.4:5; 1Thes.4:12), “les païens” ou “gentils” (Eph.3:1 ethnos), “les incroyants” (2Cor.6:14), “les adversaires” (1Tim.5:14), “les fils de la désobéissance” (Eph.5:7), “celui qui n’est pas de Dieu” (1Jean 4:6); “tous” ou “tous les hommes” (2 Tim.2:24), etc. Il peut s’agir de proches, de voisins, de collègues, de n’importe

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quelle personne qui ne connaît pas Jésus-Christ. L’Ecriture décrit les dispositions qu’un membre du corps de Christ doit avoir envers eux, sa conduite devant eux, ses relations avec eux, et les paroles qu’il doit leur adresser. Les dispositions à avoir envers “ceux du dehors” “Que votre douceur soit connue de tous les hommes” (Phil.4:5). “Soyez patients envers tous...Que personnne ne rende le mal pour le mal, mais cherchez en tout temps à faire le bien...envers tout le monde” (1Thes.5:14,15 BFC). “Que le Seigneur fasse croître l’amour que vous avez...envers tous les humains” (1Thes.3:12BFC). “Un serviteur du Seigneur ne doit pas se quereller. Il doit être aimable evnvers tous” (2Tim.2:24 BFC). Ce ne sont pas des dispositions à avoir uniquement envers les frères en la foi ou les incroyants aimables. La création de l’homme par Dieu fonde la dignité de la personne humaine quelle qu’elle soit. Celui qui ne croit pas en Dieu a, malgré tout, de la valeur à ses yeux et doit en avoir à nos yeux également. Certes, l’Eglise se trouve souvent dans un milieu hostile au Christ. Ses membres peuvent être tentés de rendre la pareille, de réagir avec dureté. Il ne s’agit pas d’une douceur servile mais d’une amabilité forte. Que de victoires ont été remportées par la douceur! On est loin de l’esprit des croisades et des guerres de religion. L’action à déployer en leur faveur “Moi je vous dis: aimez vos ennemis et priez pour ceux qui vous persécutent” (Mat.5:43). On n’est pas totalement à la merci de ceux-ci, car Paul demande aux croyants de Rome:“Priez pour que j’échappe aux incroyants de Judée” (Rom.15:31 BFC). De toute façon, c’est une autre disposition à avoir envers les incrédules, que d’avoir recours aux armes. “Je recommande que l’on adresse à Dieu des demandes, des prières...pour tous les êtres humains...voilà ce qui est bon et agréable à Dieu notre Sauveur, qui veut que tous les humains soient sauvés” (1Tim.2:1,3,4 BFC). On peut prier pour leur salut et spécialement pour celui de nos proches. “Ce que je demande à Dieu pour les Juifs, c’est qu’ils soient sauvés” (Rom.10:1 BFC). Ne pas combattre ceux qui s’opposent, mais les gagner. Parler des hommes à Dieu avant de parler de Dieu aux hommes. Le style de vie à avoir devant “ceux du dehors” “Ayez à coeur de vivre dans le calme, de vous occuper de vos propres affaires, et de travailler de vos mains...pour que votre conduite soit honorable au regard des gens du dehors et que vous n’ayez besoin de personne” (1Thes.4:11,12 TOB). Ne pas vivre aux dépens de personnes non-croyantes. “Conduisez-vous avec sagesse envers ceux du dehors, et rachetez le temps” (Col.4:5). Ne pas gaspiller son temps, glander, être oisif. Saisir les occasions d’être utile. “Ayez au milieu des païens une bonne conduite afin que, là même où ils vous calomnient..., ils remarquent vos bonnes oeuvres, et glorifient Dieu, au jour où il les visitera” (1Pi.2:12). Gagner leur estime. “Il faut aussi qu’il mérite le respect des non-chrétiens, afin qu’il ne soit pas méprisé” (1Tim.3:7). Au départ, l’incroyant est plus sensible à ce qu’il voit, qu’à ce qu’il entend. Calme, travail sérieux, conduite honorable, oeuvres bonnes; ne pas être mêle-tout, ni dépendant de la société, ni perdre son temps à des futilités. Bref, une vie empreinte de sérieux désarmera la critique et préparera les gens au jour où ils seront interpellés par le Seigneur. Tout dans notre style de vie doit gagner la considération de ceux qui auraient un préjuger défavorable vis-à-vis de l’Eglise.

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Les relations à entretenir avec “ceux du dehors” “Beaucoup de publicains et de gens de mauvaise vie vinrent se mettre à table avec Jésus et avec ses disciples. (Mat.9:10). Le Seigneur rejette les reproches des pharisiens au sujet de telles fréquentations. Ce ne sont pas les justes, mais les pécheurs qui ont besoin de salut. En d’autres termes, le disciple du Christ ne doit pas se tenir à l’écart de ceux que les propre-justes considèrent comme peu fréquentables. Ce serait les priver de la possibilité de connaître le Sauveur. Par contre, si un croyant se rend compte qu’il préfère “manger et boire” avec les incroyants qu’avec ses frères et soeurs en Christ, il doit comprendre qu’il est en danger car: “Les mauvaises compagnies corrompent le bonnes moeurs” (1Cor.15:32,33). Mais, outre les relations de simple convivialité, il existe aussi des liaisons qui comportent un engagement compromettant. “Ne formez pas avec les non-croyants un attelage disparate. En effet, quelle association peut-il y avoir entre la justice et le mal? Quelle communion entre la lumière et les ténèbres?...Quel contrat pour le Temple de Dieu, avec les idoles? Car nous sommes le temple de Dieu...Aussi sortez du milieu d’eux et séparez-vous, dit le Seigneur” (2Cor.6:14-17). Un croyant qui est engagé comme associé (non comme simple employé) dans une même entreprise avec un incroyant, devient complice, malgré lui, des agissements malhonnêtes ou peu sages de son associé. Quand les deux ne sont pas d’accord entre eux, il s’en suit des tiraillements, comme ceux entre un boeuf et un âne sous un même attelage (Deut.22:10; Lév.19:19). C’est le contrat qui lie les associés qui engage la responsabilité du croyant. Que ce soit par les statuts d’une société commerciale, par l’alliance du mariage, ou dans une association sans but lucratif, le croyant doit s’abstenir. S’il s’était engagé avant de devenir chrétien, il fait bien d’en sortir et de se séparer sans tarder - sauf en ce qui concerne le mariage. Le principe est tout aussi valable pour l’Eglise en tant que collectivité. L’allusion, au v.l6, au “Temple de Dieu” ainsi que le pluriel “nous sommes le Temple de Dieu”, désignent l’Eglise en tant que collectivité. Elle doit s’abstenir de tout lien contractuel avec l’Etat ou toute autre instance constituée d’incroyants. Les paroles à adresser à “ceux du dehors” “Trouvez la juste attitude à l’égard des non-chétiens;...Que vos propos soient toujours bienveillants, relevés de sel, avec l’art de répondre à chacun comme il faut” (Col.4:5,6 TOB). “Soyez toujours prêts à justifier votre espérance devant ceux qui vous en demandent compte. Mais que ce soit avec douceur et respect (1Pi.3:15,16 TOB). Notre conversation doit être propre à susciter des interrogations au sujet de notre foi chrétienne. Quelle joie de répondre à des questions sincères au sujet de Jésus-Christ. Le style de vie attrayant du croyant peut susciter des questions. Toute conversation avec un incroyant doit rester agréable, positive, et sans rudesse. On évitera la discussion, les fadaises, l’amertume et les commérages. Il faut aussi pouvoir répondre aux objections dans les meilleures conditions pour, en fin de compte, en arriver, à l’essentiel. L’apôtre écrivait: “Ce n’est pas mon affaire, en effet, de juger les non-chrétiens. Dieu les jugera” (1Cor.5:12 BFC). Tout discours réprobateur ou moralisateur adressé aux incroyants ne fait que les dresser contre l’Eglise et les empêche d’entendre le message du salut. On n’écoute pas volontier les donneurs de leçons. Les “valeurs” et les “normes” chrétiennes ne sont que de bons conseils, mais ne sont pas la Bonne Nouvelle. La raison, donnée par l’apôtre, pour ne pas juger les incroyants, c’est que le Seigneur lui-même s’en chargera. Il les jugera peut-être ici-bas déjà, par sa providence. Il le fera certainement lors de son retour pour juger les vivants et les morts. On peut donc lui faire confiance sur ce point. Paul rappelle aux croyants de Corinthe comment il les avait abordés, eux, avant leur conversion. “Quand je suis allé chez vous, frères, pour vous révéler le plan secret de Dieu...j’avais décidé de ne rien savoir d’autre...que Jésus-Christ et, plus précisément, Jésus-Christ

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crucifié” (1Cor.2:1,2 BFC). Il aurait pu dénoncer la conduite immorale des païens de Corinthe ou suggérer quelques améliorations à apporter à leur société, sans que, pour cela, un seul d’entre eux ne passe “des ténèbres à la lumière et de la puissance de Satan à Dieu” (Act.26:18). On parle parfois de “la voix prophétique de l’Eglise”, que celle-ci serait appelée à faire entendre à un société incroyante. Mais l’apôtre pécise: “La prophétie est un signe, non pour les non-croyants, mais pour les croyants” (1Cor.14:22). Il est vrai, que, sous l’ancienne alliance, les prophètes adressaient leurs messages à la nation et à ses conducteurs. Mais Israël était une théocratie, ce qui n’est pas le cas de l’Eglise. Le croyant doit éviter d’entrer en discussion avec ceux du dehors sur des questions de moralité personnelle ou de société. Il aura certainement sa propre idée sur la politique. Mais il suffit que l’incroyant ait une autre idée que la sienne, pour que ce dernier pense que, pour être chrétiens, il faudra changer d’opinion ou de parti. L’incroyant doit être confronté, en fin de compte, à une seule question, à l’exclusion de toute autre: “Que faire de Jésus-Christ?” Rien, dans la conversation, ne doit être une entrave à ce qu’il en vienne à cette question. Quand l’incroyant se sera converti à Dieu et aura pris sa place dans l’Eglise, il sera temps de lui enseigner “tout le conseil de Dieu” et tout ce que comporte être un disciple de Jésus-Christ, dans tous les domaines de sa vie. Les paroles que les incroyants ont besoin d’entendre par dessus tout, sont celles de la Bonne Nouvelle du salut par la foi en Jésus-Christ. Dans les contacts personnels, il faut en arriver à ce message le plus tôt possible, mais pas trop tôt. Si c’est un moineau qu’on cherche à nourrir, il ne faut pas l’effrayer, sans quoi il s’envolera. L’annonce publique peut être immédiate et directe. “Le Christ...a été annoncé parmi les païens” (1Tim.3:16). “J’ai été... chargé d’instruire les païens dans la foi” (1Tim.2:7). ”Les Juifs...nous empêchent de parler aux païens pour qu’ils soient sauvés” (1Thes.2:16). “Comment croiront-ils en lui sans en avoir entendu parler? Et comment en entendront-ils parler si personne ne l’annonce?” (Rom.10:14). Mais toutes les relations de l’Eglise ne sont pas avec des personnes individuelles. Elle a aussi à faire avec des collectivités: l’Etat, le peuple d’Israël, et “le présent monde mauvais” (Gal.1:4). L’Eglise n’a pas toujours su comment se positionner vis-à-vis de ces collectivités . CHAPITRE 12 L’EGLISE ET L’ETAT Jacques Rollet, théologien et politologue, écrivait: “Le rapport religion-politique est rarement l’objet d’un traitement théorique”; (“Religion et politique - Le Christianisme, l’Islam, la Démocratie”, Paris, Grasset, 2001, p.10). Bernard Huck, professeur à la Faculté Libre de Théologie Evangélique de Vaux-sur-Seine ajoute, au sujet de la laïcité: “Une réflexion théologique solide sur ce sujet semble manquer, une réflexion clarifiant les rapports entre la foi, l’engagement social et l’évangélisation,...l’engagement politique, économique dans le monde”; (“Laïcités - Enjeux théologiques et pratiques”, Vaus-sur-Seine, coédition Excelsis et Edifac, 2002, p.202). Il ne sera donc pas inutiles d’engager une réflexion de base sur ces questions. Nous avons déja parlé de l’Eglise; nous abordons maintenant l’enseignement de l’Ecriture sur l’Etat; avant de pouvoir considérer les rapports entre ces deux collectivités. QU’EST-CE QUE L’ETAT? L’Etat est une institution divine

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On pourrait s’en étonner si la Bible ne l’enseignait pas. “Que tout personne soit soumise aux autorité supérieures; car il n’y a point d’autorité qui ne vienne de Dieu, et les autorités qui existent ont été instituées de Dieu? C’est pourquoi celui qui s’oppose à l’autorité résiste à l’ordre que Dieu a établi” (Rom.13:1,2). En l’occurence, il s’agissait de l’autorité de l’empire romain. Il suffisait que ces autorités soient “supérieures” (litt. “au-dessus de”) au croyant, et qu’elles “existent” pour qu’il doive s’y soumettre. Leur légitimité réside dans le fait “d’exister”. Rome était, à ce moment-là, pour les chrétiens qui s’y trouvaient, “l’ordre que Dieu avait établi”. Cette soumission est donc due à n’importe quel pouvoir sous lequel le chrétien se trouve physiquement présent. Il n’y a aucune exception à cette règle car toutes ces autorités, si mauvaises soient-elles, viennent de Dieu, c’est-à-dire de sa permission souveraine. S’il se trouve hors de son pays d’origine, le chrétien ne doit pas la soumission à sa patrie qu’il a quittée, mais aux autorités “qui existent au-dessus de lui” là où il se trouve. Elles viennent tout autant de Dieu que celles de sa patrie. Pierre emboîte le pas à Paul: “Soyez soumis, à cause du Seigneur, à toute autorité établie parmi les hommes...aux gouverneurs comme envoyés par lui” (1Pi.2:14). Pierre écrivait cela “aux élus qui vivent en étrangers dans la dispersion, dans le Pont, la Galatie, la Capadoce, l’Asie et la Bithynie” (1 Pi.1:1TOB). “Toute autorité”, signifiait donc pour eux: “n’importe laquelle”. Une soumission à l’autorité “à cause du Seigneur” montre que, derrière l’Etat, quel qu’il soit, se trouve Dieu qui lui délègue une autorité. Que les gouverneurs sont “envoyés par lui” souligne aussi l’origine divine de leur autorité. Dieu appelle Nebucadnetsar, roi de Babylone: “Mon serviteur” (Jér.24:9). Le roi païen, Cyrus est appelé “l’oint de l’Eternel” (Esa.45:1): “Ainsi parle le Seigneur à son messie, à Cyrus” (TOB). C’est le même titre (oint) que recevaient les rois de Juda. Dieu est “le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs” (lit. “le Roi des régnants et le Seigneur des dominants” (1Tim.6:15). Il est la source de toute autorité politique. Pierre aurait-il entendu la réponse de Jésus à Pilate? Pilate dit à Jésus: “Ne sais-tu pas que j’ai le pouvoir de te crucifier?...Jésus répondit: Tu n’aurais sur moi aucun pouvoir, s’il ne t’avait été donné d’en haut” (Jean 19:10,11). Jésus admet que Pilate a un pouvoir sur lui. Mais il précise que ce n’est pas un pouvoir qu’il détient de lui-même. L’autorité effective de Pilate pour infliger la peine de mort à Jésus lui fut accordée par Dieu. Si Jésus se soumet, ce n’est pas parce qu’il est impuissant. Il pouvait disposer, à l’instant-même, pour le protéger, de “plus de douze légions (72 000) d’anges” (Mat.26:53). Mais une autorité est illusoire si elle n’est pas fondée sur une force et une puissance réelle. Dans le cas de Pilate, il s’agissait du pouvoir de l’envahisseur romain qui occupait le pays promis à Israël. Jésus ne répond pas à Pilate que Rome y détenait un pouvoir illégitime. Pour Dieu, le seul pouvoir qu’il reconnait est le pouvoir “de facto” (celui de Rome) et non un pouvoir prétendument “de jure” (le droit du sol d’Israël) mais qui n’est pas capable de s’imposer par l’épée. Jésus et ses parents se sont soumis, à Bethléhem, au recensement ordonné par un édit de César Auguste (Luc 2:1-5). Mais que l’Etat est institué de Dieu, ne signifie pas qu’il gouverne par “un droit divin” comme l’ont prétendu de nombreuses monarchies. On ne divinise pas l’Etat ni les rois souverains. Ils sont simplement la conséquence de la providence divine. “Le coeur du roi est un courant d’eau dans la main de l’Eternel; il l’incline partout où il veut” (Prov.21:1). Que des rois païens sont appelés “serviteurs de Dieu” (Esa.44:28; 45:1; Jér.25:9; 27:6) ne signifie pas qu’ils sont des robots, mais que Dieu se sert d’eux, les “canalise” comme des cours d’eau et impose une direction et des limites à leur action. Et les autorités qui ont été élues démocratiquement ne doivent pas s’imaginer que leur légitimité leur vient “d’en bas” selon l’idée du “contrat social” cher à Rousseau. “Vox populi, vox dei” - “la voix du peuple est la voix de Dieu”, c’est l’idolâtrie de la nation souveraine. Mais Dieu canalise aussi le processus démocratique.

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La sphère de l’Etat n’est pas l’unique domaine dans lequel Dieu a établi une relation d’autorité et de soumission. L’Etat ne doit donc pas empiéter sur ces autres autorités qui elles, jouissent d’un statut tout aussi explicite dans l’Ecriture: Dans la famille, les parents ont autorité sur leurs enfants (Gen.18:19; Prov.19:18; Eph.6:4; Héb.12:9) et ces derniers leur doivent soumission (Ex.20:12; Lév.19:3; Luc 2:41,51; Eph.6:1; Col.3:20). Certains Etats, par leur législation, minent l’autorité des parents. Dans l’Eglise locale, les conducteurs ont autorité sur les adhérents (1Thes.3:12; Tit.1:3; 2:15; Héb.13:7,17) et ces derniers leur doivent soumission (1Cor.16:15,16; 1Pi.5:5; Héb.13:17). Cette soumission se limite à la sphère de la vie d’Eglise. Mais les régimes totalitaires ont souvent cherché à restreindre les activités légitimes de l’Eglise. Dans le mariage, le mari a autorité sur sa propre femme (Eph.5:23; 1Cor.11:3) et celle-ci lui doit soumission (Eph.5:22,24; Col.3:18; Tit.2:4,5; 1Pi.3:1,5; 1Cir.14:34,35; 1Tim.2:11,12). Le Code Napoléon et d’autres législations ont accentué le devoir de soumission de l’épouse au-delà de la norme biblique. La séparation des pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire) est un gage de liberté au sein de l’Etat. De même, la séparation des autorités dans les sphères de la famille, de l’Eglise, du mariage et de l’Etat sont des gages de liberté dans la société en général. Les dictatures ont toujours cherché à s’immiscer dans la famille, dans l’Eglise et dans le couple. Tout Etat est fonction d’un territoire L’Ecriture contient d’autres précisions qui définissent ce qu’est l’Etat. La notion de l’Etat est indissociable de celle d’un territoire. A la tour de Babel, Dieu confondit le language des hommes et, par ce moyen, “les dispersa loin de là sur la face de toute la terre” (Gen.11:7,8). Que s’est-il passé quand l’humanité fut divisée en groupements linguistiques et dispersée de par le monde? “Le Très-Haut donna aux nations leur patrimoine quand il sépara les humains, il fixa le territoire des peuples” (Deut.32:8TOB). Paul ajoute ces précisions: “Dieu a fait que tous les hommes, sortis d’un seul sang, habitent sur toute la surface de la terre, ayant déterminé la durée des temps et les bornes de leur demeure” (Act.17:26). Dieu, par son pouvoir souverain partage l’humanité en nations dotées de langues et donc de cultures différentes. Il détermine deux choses à leur sujet: les temps (kairoi - “époques déterminées”) pendant lesquels elles occupent un certain territoire, ainsi que les limites géographiques de ces territoires pendant ces périodes. En d’autres termes, Dieu dirige l’histoire de toutes les nations en variant dans le temps les territoires qu’elles occupent. La Bible nous en donne des exemples frappants. “Le Seigneur livra Jojakim, roi de Juda, entre les mains de Nebucadnetsar, roi de Babylone.” (Dan.1:2). “Que les vivants sachent que le Très-Haut domine sur le règne des hommes , qu’il le donne à qui il lui plaît” (Dan.4:17,32). Le pouvoir de Nebucadnetsar, sous lequel se trouvait le prophète Daniel en exil à Babylone, avait été institué par Dieu. Derrière ce roi païen et son empire, se tenait Dieu qui les avait institués comme détenteurs du pouvoir. Daniel n’est plus soumis à sa patrie, au royaume du pays de Juda, ni à son roi Jojakim. Dieu avait prédit la chose par son prophète Jérémie en ces termes: “Je donne la terre à qui cela me plaît. Maintenant je livre tout ce pays entre les mains de Nebucadnetsar, roi de Babylone, mon serviteur” (Jér.27:5,6). Le croyant n’est jamais appelé à statuer sur la légitimité d’un pouvoir sous lequel il se trouve, même sur celle d’un envahisseur de sa patrie. Un soi-disant “gouvernement en exil” n’est pas un Etat parce qu’il n’a pas de territoire. Il est évident que les sentiments patriotiques en prennent un coup.

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“Dieu délie la ceinture des rois...Il fait tomber les puissants...Il donne de l’accroissement aux nations, et il les fait périr; il les étend au loin, et il les ramène dans leurs limites” (Job 12:18-23). Les défaites d’un roi au profit du pouvoir d’un autre; les pertes de territoires, comme leurs conquêtes découlent de la providence divine et déterminent quels sont les gouvernants auxquels les disciples du Christ sont tenus de se soumettre. Il ne faut pas sous-estimer le rôle de Dieu dans les changements de régimes: “Il a renversé les puissants de leurs trônes, et il a élevé les humbles” (Luc 1:52). Un sentiment patriotique ne doit pas conduire le croyant dont la patrie a été envahie à se joindre à la résistance. L’histoire du monde n’est qu’une succession d’invasions et de reconquêtes, de pouvoirs qui montent et d’empires qui déclinent, de révolutions et de contre-révolutions. Dieu a voulu que son Eglise et les membres de celle-ci, restent détachés de tous ces mouvements afin qu’elle puisse survivre sous tous les régimes et à tous les régimes. “Je vis une femme assise sur une bête écarlate...ayant sept têtes et dix cornes...Les dix cornes qui tu as vues sont dix rois...Dieu a mis dans leur coeur d’exécuter son dessein et de donner leur royauté à la bête” (Apoc.17:3,12,16,17). Même le pouvoir politique de l’antichrist, qui s’étendra sur toute la terre, lui viendra, en fin de compte, de Dieu. Ce texte n’est pas une critique de l’Etat en tant que tel, mais seulement de l’Etat totalitaire qui s’arroge ce qui appartient à Dieu. Mais ces diverses considérations soulèvent des questions. Quelle donc fut l’utilité de tous ces gouvernements humains? Leur utilité éventuelle, justifie-t-elle tous les abus de pouvoir, toutes les guerres, les invasions et le déportations, toutes les violences, y compris la condamnation à mort du Christ par le pouvoir romain? L’Etat a été établi par Dieu pour préserver l’humanité de l’auto-destruction Dieu n’a pas établi le gouvernement humain parce que c’était là son idéal dès la création. Au début, avant l’entrée du péché dans le monde, prévalait le règne personnel et direct du Dieu entièrement bon, juste et sage sur l’homme innocent, et cela dans un paradis terrestre. Dieu n’avait pas établi l’Etat dès la création, parce que son règne personnel et direct suffisait, et que le gouvernement humain n’était pas encore nécessaire. L’entrée du péché dans le monde avait rendu invivable l’existence sur terre A peine Adam et Eve eurent-ils désobéi, qu’un de leur fils “Caïn se jeta sur son frère Abel, et le tua” (Gen.4:8). Quand Dieu chasse Caïn de ses terres, ce dernier lui répond: “Quiconque me trouvera me tuera. Meurtre. “L’Eternel lui dit: Si quelqu’un tuait Caïn, Caïn serait vengé sept fois” (Gen.4:14,15). “Lémec dit à ses femmes:...’J’ai tué un homme pour ma blessure...Caïn sera vengé sept fois , et Lemec soixante-dix-sept fois (4:23,24). Vengeance. “L’Eternel vit que la méchanceté des hommes était grande sur la terre, et que toutes les pensées de leur coeur se portaient chaque jour uniquement vers le mal. L’Eternel se repentit d’avoir fait l’homme sur la terre, et il fut affligé en son coeur (Gen.6:5,6). Mal et grande méchanceté. “La terre était corrompue devant Dieu, la terre était pleine de violence. Dieu regarda la terre, et voici elle était corrompue; car toute chair avait corrompu sa voie sur la terre”. Corruption du genre humain et violence. “Alors Dieu dit à Noé: la fin de toute chair est arrêtée devant moi; car ils ont rempli la terre de violence” (Gen.6:11-13). La seule loi était celle du plus fort: vengeance personnelle, représailles, rétorsion. Violence généralisée. La démonstration est faite que la nature humaine déchue a une capacité illimitée de nuire. L’humanité était sur le point de s’auto-détruire. Que faire? Dieu décide de tout nettoyer

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“Et l’Eternel dit: J’exterminerai de la face de la terre l’homme que j’ai créé...Alors Dieu dit à Noé:...Je vais détruire les hommes avec la terre” (Gen.6:7,13). “Mais Noé trouva grâce aux yeux de l’Eternel...Noé était un homme juste et intègre en son temps; Noé marchait avec Dieu...Alors Dieu dit à Noé:...Fais-toi une arche de bois de gopher...J’établis mon alliance avec toi; tu entreras dans l’arche, toi et tes fils, ta femme et les femmes de tes fils avec toi...C’est ce que fit Noé: il exécuta tout ce que Dieu lui avait ordonné...Et Noé entra dans l’arche...pour échapper aux eaux du déluge...Puis, l’Eternel ferma la porte sur lui...Tout ce qui se mouvait sur la terre périt...Il ne resta que Noé et ce qui était avec lui dans l’arche” (Gen.6:8,9,14,18,22; 7:7,16,21,23). L’histoire d’un déluge universel existe dans les traditions babylonniennes (3000 av.J.C.), égyptiennes, védiques, chinoises, grècques, druidiques et celles des Massaïs d’Afrique et d’un grand nombre de peuplades des Amèriques. ...et de recommencer sur de nouvelles bases “L’an six cent un, le premier mois, le premier jour du mois, les eaux avaient séché sur la terre... Alors Dieu parla à Noé en disant: sors de l’Arche...Et Noé sortit, avec ses fils, sa femme et les femmes de ses fils...Dieu bénit Noé et ses fils, et leur dit: Soyez féconds, multipliez et remplissez la terre” (Gen.8:13,15,18; 9:1). Ce fut le même ordre que Dieu avait donné à Adam et Eve à la création. Mais il ne fallait pas que recommence le carnage inauguré par leur fils, Caïn, lorsqu’il tua son frère Abel. Chasser, excommunier Caïn le meurtrier (Gen.4:13,14) n’avait pas été une mesure suffisante. C’est ainsi que Dieu institue un nouvel ordre de choses qui doit empêcher la race humaine de s’auto-détruire. Car, sans tarder, a lieu le triste épisode qui entoure l’ivrognerie de Noé (9:20-27). Celle-ci suffit de montrer que, même parmi un reste pieux, comme celui des huit qui avaient survécu au déluge, rien n’avait changé quant à la déchéance de la nature humaine. La vengeance personnelle devait donc être exclue, avec la spirale de violence qu’elle entraînait. La loi de Moïse l’a confirmé: “Tu ne te vengeras point” (Lév.19:18). La grâce l’a expliqué: “Ne vous vengez pas vous-mêmes, mes bien-aimés, mais laisser agir la colère de Dieu, car il est écrit: à moi la vengeance, c’est moi qui rétribuerai, dit le Seigneur” (Rom.12:19 TOB). Mais exclure la rétorsion ne pouvait en aucun cas signifier l’impunité pour le meurtrier. La vengeance personnelle était remplacée par la “colère”, la “vengeance” et la “rétribution” de Dieu. A la base de toute intervention contre le meurtre devait se trouver la justice de Dieu et son droit divin d’intervenir. Dieu dit: “A moi la vengeance et la rétribution” (Deut.32:35; Héb.10:30). Mais Dieu n’entend plus intervenir contre la race dans son ensemble, et il fait alliance avec Noé pour ne plus détruire l’humanité par un déluge (Gen.9:11-17). Il n’entend pas non plus venger lui-même directement tout meurtre par une sorte de justice immanente. Il va déléguer la vengeance et la rétribution. A peine sorti de l’arche après le déluge, l’homme reçoit de Dieu un ordre, des directives qui doivent remplacer, outre les représailles personnelles, toute destruction future de l’humanité entière: “Et de même, de votre sang, qui est votre propre vie, je demanderai compte à toute bête, et j’en demanderai compte à l’homme: à chacun je demanderai compte de le vie de son frère. ‘Qui verse le sang de l’homme, par l’homme son sang sera versé;’ car à l’image de Dieu, Dieu a fait l’homme” (Gen.9:5,6TOB). Dieu répète trois fois: “Je demanderai compte de votre sang” (9:5) pour bien montrer que c’est, en dernière instance, à lui que tout homme demeure redevable et que c’est de lui que vient l’autorité qui justifiera toute vengeance judiciaire. La punition du crime est voulue par Dieu et l’homme qui l’inflige n’est pas coupable de violence personnelle. Le fait que Dieu demande des comptes au meurtrier souligne également qu’il considère ce dernier comme une personne responsable et non

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comme un simple produit de son milieu ou de son passé. Ni victimisation du meurtrier, ni mépris pour les vraies victimes. Toute rétribution contre le crime de sang est également justifiée par la valeur et la dignité de la personne humaine, car celle-ci est présentée comme “créée à l’image de Dieu” (9:6b). Il s’agit là d’une réalité objective qui distingue l’homme de la bête (9:5a). Tous reconnaissent qu’on peut tuer une bête, mais pas un homme. La vie humaine est sacrée, inviolable. Il ne s’agit pas d’une représaille personnelle de la famille ou des amis de la victime, mais la rétribution divine d’une offense contre Dieu parce qu’on a tué une créature, créée à son image. Le respect chrétien de l’individu est un des fondements du gouvernement humain. Et en précisant que c’est “de la vie de son frère” (“de ton semblable” BFC) que Dieu demandera compte, Dieu situe le fondement moral de la rétribution dans la “fraternité” qui existe entre tous les humains créés à son image (9:5b). Dieu, en déclarant au sujet du meurtrier: “par l’homme son sang sera versé”, donne un ordre à l’humanité au sujet du meurtre. Le verbe au futur: “son sang sera versé” a la force d’un impératif. Dieu délègue son pouvoir à l’humanité en lui accordant le droit de vie et de mort sur celui qui verse le sang de l’homme. Jésus reprend cette vérité à son compte, quand Pierre tire l’épée pour le défendre contre les soldats romains. Il lui dit: “Remets ton épée à sa place; car tous ceux qui prendront l’épée périront par l’épée” (Mat.26:52). Jésus condamne comme illégal, l’usage personnel de l’épée, même pour le défendre, lui. En même temps, il rappelle à Pierre qu’il s’expose à périr par la force supérieure de l’épée du pouvoir légal romain. Le Seigneur reconnaît aux autorités romaines le pouvoir d’intervenir par l’épée contre la violence arbitraire de Pierre. Ce pouvoir permet aussi à l’individu à qui on fait du mal de ne pas rendre le mal pour le mal. Et Jésus se rend volontairement aux soldats romains venus contre lui avec des épées (26:55), et se soumet par la suite, au magistrat, Pilate. Dieu délègue désormais le pouvoir de l’épée à des personnes représentatives dans toutes les sociétés qui se succéderont à travers l’histoire. “Tu établiras des juges et des magistrats dans toutes les villes que l’Eternel, ton Dieu, te donne, selon tes tribus; et ils jugeront le peuple avec justice” (Deut.16:18). “Les anciens de la ville du meurtrier l’enverront saisir et le livreront entre les mains du vengeur du sang (le bourreau), afin qu’il meure” (Deut.19:12). Dans des cas de meurtre, on pourra se référer à un tribunal supérieur, aller en appel (Deut.17:8-13). : “Juges de la terre, recevez instruction!” (Ps.2:10). “Ce n’est pas en vain que le magistrat porte l’épée, étant serviteur de Dieu pour exercer la vengeance et punir celui qui fait le mal” (Rom.13:4). Il est au service de Dieu en punissant. Bien entendu, seule la résistance aux forces de l’ordre justifie l’usage par celles-ci, de leurs armes. Et le meurtre est l’unique crime passible de mort. Il est important de noter que les lois d’Israël étaient beaucoup plus sévères pour les crimes contre les personnes que pour les crimes contre la propriété. En plaçant l’épée entre les mains du gouvernement pour refréner et réprimer la violence, Dieu pose le fondement-même de l’Etat. Sans pouvoir de contrainte (le port d’armes par les forces de l’ordre) et la possibilité de tuer, l’Etat n’existe pas. “Si un homme tue quelqu’un, on ôtera la vie au meurtier, sur la déposition de témoins. Un seul témoin ne suffira pas” (Nom.35:30). Paul reconnaissait ce droit à l’Etat quant à sa propre personne: “Si j’ai commis... quelque crime digne de mort, je ne refuse pas de mourir” (Act.25:11). Si la peine de mort doit être commuée en l’emprisonnement à vie est un autre débat. Parce que les hommes ont rejeté l’autorité de Dieu, il leur donne des autorités humaines. Ils ne gagnent pas au change. Mais les Etats ne sont que des solutions temporaires, en attendant le retour du Christ et l’établissement de son règne éternel de justice et de paix. Inversément, là où un pouvoir, quel qu’il soit, est capable de maintenir l’ordre public, de protéger la

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vie et les biens, l’Etat existe. En tant qu’autorité instituée par Dieu, l’Etat n’appartient donc pas à l’ordre de la création, ni à l’ordre de la rédemption, mais à “l’ordre de la préservation”. Dieu “soutient les hommes et les bêtes” (Ps.36:6); “renouvelle la surface de la terre”(104:27-30); “retient l’iniquité” (2Thes.2:6,7); “abrège les jours de détresse” (Mat.24:22); “soutient toutes choses” (Héb:1:3). “en lui nous avons la vie, le mouvement et l’être” (Act.17:28); “toutes choses subsistent en lui” (Col.1:17). La préservation de la race humaine de l’auto-destruction justifie largement l’utilité de l’Etat, malgré toutes les dérives et les abus que le gouvernement humain a engendrés. Des déductions éventuelles au sujet de la légitimité de l’Etat à partir de l’ordre de la création et de la loi naturelle ne sont pas valides étant donné que l’Etat n’a pas été institué à la création, mais plus tard. Baser l’Etat sur la création, c’est ne pas tenir compte de la chute et du péché. La dignité de la personne humaine n’est pas, à elle seule, un fondement suffisant pour l’Etat étant donné la déchéance de la nature humaine, en évidence partout depuis la chute. L’idée que la légitimité d’un gouvernement dépend du “contrat social” (Rousseau) est fondée sur celle de la loi naturelle (Locke). De la sorte, elle rendrait illégitime tout Etat qui ne serait pas démocratique, ce qui est contraire à l’enseignement clair de l’Ecriture (voir plus haut). L’Etat est indispensable au sein d’une humanité composée de pécheurs. Même un mauvais gouvernement assure plus de liberté que ne le fait l’anarchie. “Un roi sage passe au van les méchants et fait retomber sur eux leur malice” (Prov.20:26). Où est la liberté quand on est à la merci du plus fort que soi, de voleurs de grands chemins, de pillards, de milices privées et de bandes armées qui rodent? “Quand les méchants s’élèvent, chacun se cache” (Prov.28:12). “Quand le méchant domine, le peuple gémit” (Prov.29:2). Il y a souvent eu des endroits et des moments de “non-droit” où se créait un vide de pouvoir; entre une armée qui se retire et une autre qui arrive, où sévissent représailles, pillages, viols. En général, l’Etat ne nous manque pas, tant qu’on ne l’a pas. C’est, d’ailleurs la fonction du magistrat en tant que “serviteur de Dieu pour exercer la vengeance et punir celui qui fait le mal” (Rom.13:4) qui justifie le prélèvement d’impôts par l’Etat. “C’est pour cela que vous payez des impôts. Car les magistrats sont des ministres de Dieu entièrement appliqués à cette fonction” (13:6 - “pour accomplir soigneusement cette tâche” BFC). Des forces de l’ordre, une magistrature et un appareil judiciaire performants coûtent beaucoup d’argent. Le service qu’ils rendent au citoyen en vaut largement la peine. Ne pas voler le fisc permet à l’Etat d’accomplir sa mission. Prier pour les autorités contribue à ce qu’elles les accomplissent bien. Mais l’Etat n’est ni une solution idéale ni une solution définitive, mais un pis aller en attendant le rétablissement du règne parfait de Dieu au retour du Christ. Toutefois, le maintient de l’ordre n’est pas la seule fonction de l’Etat et le prélèvements d’impôts ne sert pas uniquement à financer le législatif, l’exécutif et le judiciaire. L’Etat a aussi été établi par Dieu pour apporter certains effets bénéfiques à la société L’Etat est responsable de promouvoir la justice sociale Daniel dit de la part de Dieu au roi païen Nebucadnetsar: “Ô roi,...mets un terme à tes péchés en pratiquant la justice, et...en usant de compassion envers les malheureux” (Dan.4:27). Instructions à Lemuel, probablement un roi ismaélite: “Ouvre ta bouche pour le muet, pour la cause de tous les délaissés,...juge avec justice, et défend le malheureux et l’indigent” (Prov.31:1,8,9). Ce n’était donc pas uniquement sous la théocratie d’Israël que l’Etat devait promouvoir la justice sociale. C’est la responsabilité de n’importe quel Etat païen. Roi de Juda...toi, tes serviteurs et ton peuple...Ainsi parle l’Eternel: pratiquez la justice et l’équité; délivrez l’opprimé des mains de l’oppresseur; ne maltraitez pas l’étranger, l’orphelin et la veuve”

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(Jér.22:2,3). “O Dieu, donne tes jugements au roi...il jugera ton peuple avec justice et tes malheureux avec équité...il fera droit aux malheureux du peuple, il sauvera les enfants du pauvre, et il écrasera l’oppresseur...il affranchira les pauvres de l’oppression et de la violence” (Ps.72:1-4, 14). Le citoyen n’existe pas pour le bien de l’Etat, mais l’Etat existe pour le bien du citoyen. Dieu dit à Moïse: “Tu établiras des juges et des magistrats dans toutes les villes...et ils jugeront le peuple avec justice. Tu ne porteras atteinte à aucun droit, tu n’auras point égard à l’apparence des personnes, et tu ne recevras point de présents, car les présents aveuglent les yeux des sages et corrompent la parole des justes” (Deut.16:18,19). “Un roi affermit le pays par la justice, mais celui qui reçoit des présents le ruine” (Prov.29:4).“Quand le roi jugera, ce sera sans parti-pris” (Prov.16:10TOB). C’est l’Etat de droit. Résumons donc les responsabilités sociales des autorités: A. Ceux dont les autorités doivent s’occuper particulièrement sont : les malheureux, les délaissés, les indigents, les opprimés, les étrangers, les orphelins les veuves, les enfants, les pauvres. B. Les devoirs des autorités envers ces défavorisés sont: de leur faire droit, de pratiquer la justice et l’équité, de les juger avec justice, de les défendre, de ne pas les maltraiter, de les sauver, de les affranchir, d’user de compassion envers eux. L’assistance sociale de l’Etat est donc surtout une question de justice plutôt que de charité. Et c’est plus que simplement dire le droit au tribunal, mais comprend aussi la justice distributive. C. Les autorités ont aussi le devoir d’intervenir auprès de ceux qui profitent des démunis: Ils doivent défendre les opprimés contre ceux qui les exploitent, les délivrer des mains de l’oppresseur et écraser celui-ci; les libérer de l’oppression et de la violence. Légiférer et intervenir contre toute exploitation des défavorisé, constitue tout un programme pour n’importe quel gouvernement. D. Les autorité doivent rester impartiales: Ne pas faire preuve de favoritisme, ne pas juger d’après les apparences (à la tête des gens, ni à leur couleur), ne pas se laisser corrompre par des pots-de-vin, se défaire de tout parti-pris. Le rôle de l’Etat a des limites Mais il y a des limites à ce que peut et doit faire l’Etat. On ne doit pas attendre à ce qu’il prenne sur lui de faire tout le bien qui est à faire dans le pays. L’Etat n’est pas équipé pour transformer l’homme et son comportement, pour le rendre sage, travailleur et moral. L’Etat a peu d’emprise sur la faiblesse humaine. Il pourra soulager la pauvreté - non l’abolir. La mission de Jésus n’était pas de supprimer toutes les inégalités sociales. L’Etat ne doit pas empiéter non plus sur les rôles que l’Ecriture confie à la famille, à l’Eglise, aux employeurs et à la responsabilité personnelle. Penser qu’il doit y avoir une solution politique à tout problème, mène à l’Etat totalitaire. La société parfaite ne jaillira jamais d’une humanité composée de gouvernants et de gouvernés imparfaits. “L’Etat providence”, poussé à l’extrême, a des effets pervers. Quand il en fait trop sur le plan social, il en fait souvent trop peu sur le plan de la sécurité. On en arrive à ne plus punir le criminel sous prétexte de le réformer. La responsabilité de celui-ci se perd dans des considérations psychologiques, dans sa victimisation ou dans une sorte d’angélisme. On cherche les torts auprès des vraies victimes au lieu de protéger celles-ci contre les violents et les voleurs. L’Etat doit inciter au bien et encourager ceux qui le font Etant donné que l’Etat est incapable de faire tout le bien qui est à faire, Dieu lui donne la responsabilité de favoriser toute entreprise sociale privée. “Veux-tu ne pas craindre l’autorité? Fais le bien et tu auras son appobation. Le magistrat est serviteur de Dieu pour t’inciter au bien” (Rom.13:3,4 TOB). Certains Etats pensent avoir le monopole de l’action sociale et vont jusqu’à se méfier des initiatives privées. L’Etat peut supprimer des obstacles à l’action de l’Eglise (sans pour

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cela la subsidier - voir plus loin) et celle-ci peut, à son tour, promouvoir la justice, la liberté, la paix et la sécurité par des moyens spirituels. En général, l’argent entre les mains du monde associatif, d’organisations caritatives et non-gouvernementales (ONG) est employé de façon plus efficace en faveur des pauvres que l’argent administré par l’Etat. En ce qui concerne les maintient de l’ordre, les autorités incroyantes peuvent aussi inciter au bien et au respect des lois. Le agents de l’Etat ont aussi une conscience et une certaine notion du bien et du mal (Rom.2:14-16). Même sous un régime persécuteur, le chrétien peut faire appel à la conscience d’un policier ou d’un magistrat. Ce sont des hommes comme les autres et ils savent au fond d’eux-mêmes ce qui est juste et ce qui ne l’est pas. En général, les lois favorisent une vie harmonieuse en société. Certaines d’entre elles prévoient des récompenses pour ceux qui les respectent. “Le roi déteste qu’on agisse mal, car seule la pratique de la justice maintient son pouvoir. Le roi apprécie qu’on lui parle honnêtement, il aime ceux qui disent la vérité...Sa bonté est comme une pluie rafraîchissante” (Prov.16:12,13,15 BFC). Mais le rôle d’inciter au bien ne s’étend pas à imposer une moralité personnelle comme ce fut le cas en Israël sous la théocratie de Moïse. Ce fut le cas en Europe catholique au moyen âge où on édictait des lois contre le blasphème et l’adultère, et en pays protestants, contre le travail le dimanche ou l’alcool, et, actuellement, en pays islamiques où la charia règle tous les aspects de la vie. Quand quelqu’un demande à Jésus: “Dis à mon frère de partager avec moi notre héritage, le Seigneur lui répondit: Qui m’a établi pour être votre juge, ou pour faire vos partages” (Luc 12:13,14). Jésus ne prétend pas supprimer toutes les inégalités. Il propose une solution plus radicale en s’attaquand au péché, qui est une des causes importantes de la pauvreté. Bien entendu, il ne faut pas non plus s’attendre à trop peu de la part de l’Etat. Mais il aura rempli l’essentiel de la mission que Dieu lui confie, si son maintien de l’ordre, sa promotion de la paix et de la justice sociale assurent à chacun un espace de liberté qui n’empiète pas sur la liberté de l’autre. L’Etat peut aussi favoriser la paix, la liberté religieuse, l’honnêteté et la propagation de l’Evangile - en réponse à la prière. “J’exhorte...à faire des prières...pour les rois et pour tous ceux qui sont élevés en dignité, afin que nous menions une vie paisible et tranquille, en toute piété et honnêteté. Cela est bon et agréable devant Dieu notre Sauveur qui veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité” (1Tim.2:1-4). La prière pour que “toutes” les autorités (rois, présidents, parlementaires, ministres, juges, police, et fonctionnaires, etc.) fassent preuve de bonne gouvernance a des effets directs et indirects. Le premier effet mentionné est celui de la paix et la tranquilité à l’intérieur du pays et avec les autres nations. Ensuite: “Une vie...en toute piété et honnêteté” La stabilité politique peut, à son tour, donner un espace de liberté qui favorisera une vie d’attachement à Dieu et une conduite honnête. C’était déjà le cas pour Israël sous la déportation: “Rechercez le bien de la ville où je vous ai mené en captivité (Babylone), et priez l’Eternel en sa faveur, parce que votre bonheur dépend du sien” (Jér.29:7). La prière pour que l’Etat fonctionne bien, favorise le bonheur de l’Eglise. Elle jouit de la liberté religieuse et n’est pas soumise à des lois qui poussent à la malhonnêteté. Enfin, la prière pour la paix dans le monde permet une large propagation de la vérité et le salut des hommes. La pax romana à travers l’empire ainsi que l’attachement à Dieu de la part des premiers chrétiens, a permis que l’Evangile soit propagé dans tout le monde connu. Jésus avait prédit que, même les persécutions, seraient autant d’occasions de témoigner: “Vous serez menés, à cause de moi, devant des gouverneurs et des rois, pour servir de témoignage à eux et aux païens” (Mat.10:18). Le Seigneur avait dit de Paul: “Cet homme est un instrument que j’ai choisi pour

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porter mon nom devant les nations et devant les rois. Ce témoignage n’aurait pas été possible sans la stabilité et l’ordre apportés par Rome. Paul profitait de la protection que lui assurait le pouvoir romain, quand son annonce de l’Evangile suscitait la colère de foules hostiles, si bien juives (Act.18:12-17; 22:22-30; 25:6-12) que païennes (Act.16:19-40; 19:23-40). Par contre, les émeutes non réprimées, les soulèvements et les guerres en tous genres ont été, à travers l’histoire de l’Eglise, une entrave à l’évangélisation et aux missions. L’Ecriture contient des conseils de sagesse aux autorités, pour favoriser la stabilité politique Toutes les autorités gouvernementales ne sont pas attentives aux enseignement de l’Ecriture au sujet de la bonne gouvernance. Mais, les législateurs, les ministres, les magistrats et les fonctionnaires qui seraient des chrétiens, ou qui aurait un respect pour la Bible, peuvent s’inspirer des indications suivantes. “Le trône s’affermira par la clémence” (Esa.16:5). “Avec un homme qui a de l’intelligence et de la science, le règne se prolonge” (Prov.28:2). “Le roi soutient son trône par la bonté” (Prov.20:28). “Un roi affermit le pays par la justice...Un roi qui juge fidèlement les pauvres aura son trône affermi pour toujours” (Prov.29:4,14). “C”est par la justice que le trône s’affermit” (Prov.16:12; 29:4). “Que le roi n’ait pas un grand nombre de femmes...et qu’il ne fasse pas de grands amas d’argent et d’or...Il écrira pour lui dans un livre une copie de cette loi...Il devra l’avoir avec lui et y lire tous les jours de sa vie...Que le coeur du roi ne s’élève pas au-dessus de ses frères et qu’il ne se détourne pas de ces commandements afin qu’il prolonge ses jours dans son royaume” (Deut.17:17-20). “Le prince qui est ennemi de la cupidité prolonge ses jours” (Prov.28:16). C’est donc la bonne gouvernance qui permet de rester au pouvoir. Au moins sept de ces passages en témoignent. Sur le long terme, on ne gouverne pas impunément contre le peuple, quel que soit le type de régime. Il est significatif que ces sept passages vantent tous la stabilité politique comme étant un bienfait. Si de bons gouvernants peuvent contribuer à la moralité d’une société, il est vrai aussi qu’un pays a souvent le gouvernement qu’il mérite. Une société corrompue se donnera en général des gouvernements corrompus. Mais les indication ci-dessus sur la bonne façon de gouverner sont très sommaires et ne constituent aucunement une doctrine politique. L’Ecriture ne propose aucune forme de gouvernement ou doctrine politique pour le présent Ni monarchie, ni aristocratie, ni ploutocratie, ni république, ni califat, ni démocratie, ni oligarchie, ni théocratie, ni autocratie, ni anarchisme, ni fascisme, ni communisme. Ce qui ne veut pas dire que tous ces types de gouvernement se valent. Le prophète Samuel énumérait les inconvénients de la monarchie (1Sam.8:1-11). La démocratie est sans doute le système le moins mauvais parce qu’il permet de remplacer plus facilement les mauvais gouvernants. (1) En Eden, avant la révolte et l’entrée du péché dans le monde, l’Etat était superflu. L’homme innocent vivait en parfaite harmonie avec son Créateur bienveillant, dans un paradis. (2) Entre la chute (l’insoumission à Dieu) et le déluge, il n’y a aucune trace de gouvernement humain; c’était “l’anarchie” (litt. “absence d’autorité” - la loi du plus fort, voir plus haut). (3) Après le déluge et l’établissement du principe du gouvernement humain (Gen.9:5-6), Dieu disperse l’humanité en entités linguistiques (Gen.11:5-9) et territoriales (Deut.32:8; Act.17:26). C’est alors qu’apparaissent les nations, les Etats. (Gen.10:5,10). La plupart d’entre eux sont gouvernés par des rois (Gen.14:5). (4) Avec la constititution du peuple d’Israël, commence la théocratie, le règne de Dieu par l’intermédiaire des patriarches, de Moïse, de Josué, des juges, des rois et des prêtres. L’Etat et le

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religieux ne font qu’un. Il n’y a pas de distinction entre les lois religieuses et les lois civiles. (5) La déportation du peuple d’Israël coïncide avec la montée des empires: Assyrien, Babylonien, Médo-Perse, Grèc et Romain. Le pays promis est occupé par une succession d’envahisseurs. (6) Après l’exil et le retour des Juifs dans leur pays, les occupants successifs permettent aux prêtres de diriger la vie religieuse du peuple. Le politique et le religieux sont séparés. Viennent alors la destruction de Jérusalem en l’an 70 et la dispersion des Juifs de par le monde. (7) Jésus et les apôtres se soumettent à César et lui paient des impôts. Jésus déclare: “Mon royaume n’est pas de ce monde...maintenant mon royaume n’est pas d’ici-bas” (Jean 18:36). Ce règne n’est pas terrestre pour le moment, mais il le sera plus tard. L’épître aux hébreux enseigne aux Juifs devenus chrétiens: “Nous n’avons pas ici-bas de cité permanente, mais nous cherchons celle qui est à venir” (Héb.13:14). Le Christ ne rétablit pas encore le royaume d’Israël, bien que le moment de ce rétablissement ait été fixé par l’autorité du Père (Act.1:6,7). Jésus ne propose aucun programme politique. Il envoie ses témoins jusqu’aux extrémités de la terre (Act.1:8) et bâtit son Eglise (Mat.16:18; Act.2:41-47). (8) “Jésus-Christ est allé au ciel et se trouve à la droite de Dieu où il règne” (1Pi.3:22 BFC). Paul déclare: “Notre citoyenneté est dans les cieux” (Phil.3:20). Pour le moment, les membres du corps du Christ, l’Eglise, ont une double citoyenneté: celle de l’Etat où ils séjournent (quel que soit le régime politique de celui-ci) et celle de leur patrie céleste, où Christ règne. (9) Jésus prédit: “Alors on verra le Fils de l’homme venant sur une nuée avec puissance et une grande gloire...Quand vous verrez ces choses arriver, sachez que le royaume de Dieu est proche” (Luc 21:27,31). “Je te demande au nom de la venue du Christ et de son royaume: prêche la parole de Dieu” (2Tim.4:1,2BFC). Jésus-Christ revient pour établir son royaume. Le gouvernement humain est une nécessité temporaire et transitoire, en attendant le retour et le règne du Christ. (10) Le régime des Etats disparait de la scène du monde et est remplacé par le règne théocratique du Christ: “Le règne sur le monde est passé à notre Seigneur et à son Messie” (Apoc.11:15BFC). “Tu es mon fils!...Je te donnerai les nations pour héritage, les extrémités de la terre pour possession. Tu les briseras avec une verge de fer” (Ps.2:7-9). Le Messie prédit dans l’Ancien Testament est aussi un personnage politique. “Ne savez-vous pas que les saints jugeront le monde? (1Cor.6:2). “Tu as racheté pour Dieu par ton sang des hommes de toute tribu, de toute langue, de toute nation; tu as fait d’eux un royaume et des sacrificateurs, et ils régneront sur la terre” (Apoc. 5:9,10). Sous le Christ, roi entièrement juste, bienveillant et sage, le politique et le spirituel ne feront qu’un. Ayant vu la définitions que l’Ecriture nous donne de l’Etat et les fonctions que Dieu lui attribue, nous passons au domaine plus pratique des devoirs du chrétiens envers le gouvernement humain. QUELLES SONT LES RESPONSABILITES DU CROYANT ENVERS L’ETAT? L’Eglise, en tant que collectivité, n’a pas d’existence en dehors des membres qui la composent. Les membres du corps du Christ, l’Eglise universelle, ne sont pas des Eglises locales ou des institutions ecclésiastiques, mais les croyants: “Vous êtes le corps de Christ, et vous êtes ses membres, chacun pour sa part” (1Cor.12:27). De qui s’agit-il? L’épître s’adresse: “A tous ceux qui invoquent en quelque lieu que ce soit le nom de notre Seigneur Jésus-Christ” (1Cor.1:2), c’est à dire à l’Eglise universelle. Par conséquent, certains devoirs des membres sont également les devoirs de l’Eglise. Certaines responsabilités envers l’Etat incombent à tous les chrétiens La soumission A l’empereur romain? Au roi de Babylone? “Que toute personne soit soumise aux autorités

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supérieures...Il est donc nécessaire d’être soumis..., (Rom.13:1,5). “Rappelle leur d’être soumis aux magistrats et aux autorité” (Tite 3:1). “Soyez soumis au roi de Babylone et vous vivrez” (Jér.27:17). “Soyez soumis, à cause du Seigneur, à toute autorité établie parmi les hommes, soit au roi comme souverain, soit aux gouverneurs comme envoyés par lui” (1Pi.2:13,14). Cette soumission est donc due à tout magistrat ou fonctionnaire attitré d’un Etat quelconque. Les empires de Babylone et de Rome n’avaient pas de lois qui interdisaient l’esclavage, l’infanticide, l’avortement, l’euthanasie. Ils étaient des Etats despotiques et violents. Cependant il était “nécessaire” pour les Juifs à Babylone et les chrétiens à Rome d’y être soumis, car leur “vie” en dépendait. Cette soumission pour le croyant sous-entend plusieurs choses: La crainte La crainte n’est-elle pas un sentiment négatif? Elle est positive si elle nous sauve d’un danger. “Mon fils, crains l’Eternel et le roi” (Prov.24:21). Dieu et les autorités peuvent tous les deux être redoutables. “Veux-tu ne pas craindre l’autorité? Fais le bien...Mais si tu fais le mal, crains...Il est donc nécessaire d’être soumis, non seulement par crainte de la punition...Rendez à tous ce qui leur est dû:... la crainte à qui vous devez la crainte (Rom.13:3,4,5,7). L’Ecriture est réaliste en face du fait que les forces de l’ordre ont un pouvoir de contrainte et sont armées et que les magistrats peuvent infliger des châtiments. C’est plus que le respect; c’est aussi la peur de la sanction. Une attitude non-révolutionnaire “Mon fils,...ne t’associe pas à ceux qui veulent tout changer” (Prov.24:21 BFC). “Celui qui s’oppose à l’autorité résiste à l’ordre que Dieu a établi...” (Rom.13:2). L’Ecriture condamne les révoltes de Koré contre Moïse (Nom.16:1-35) et d’Absalom et de Schéba contre David (2Sam.15-18,20). Un chrétien ne participera donc pas à une insurrection et ne fera pas de la résistance. Rome était loin d’être un état démocratique. Il est incontestable que, au cours de l’histoire, certaines révolutions ont apporté plus de liberté à un peuple. Ce fait ne justifie pas aux yeux de Dieu, la participation active de ses enfants à une révolution. Plusieurs de celles-ci n’ont fait que remplacer un régime totalitaire par un autre. C’est pour cela, qu’en France, plusieurs révolutions se sont succédées. Plus ça change, plus c’est la même chose. La révolution russe a produit Staline. Victor Hugo déclarait: “La révolution transforme tout excepté le coeur humain.” Aux yeux de Dieu, les riches et les gens de droite sont des pécheurs, mais aussi les pauvres et les gens de gauche. Par contre, un croyant ne devrait pas, par conservatisme, soutenir activement un gouvernement répressif, qu’il soit de droite ou de gauche. Toute société a besoin de réforme. Le chrétien-individu qui s’engage pour la justice sociale ou dans la politique (voir plus loin) n’a plus besoin de se faire révolutionnaire. Il n’est pas dépourvu de moyens pacifiques. Plusieurs historiens estiment que les réformes sociales d’inspiration protestante en Angleterre ont empêché qu’il s’y produise une révolution, comme en France. L’Ecriture présente souvent le peuple de Dieu comme souffrant injustement aux mains des autorités. La délivrance des Israëlites du joug égyptiens n’était pas une révolution, mais un exode. Le respect “Rendez à tous ce qui leur est dû...l’honneur à qui vous devez l’honneur” (Rom.13:7). “Honorez le roi” (1Pi.2:7). “Tu ne maudiras point le prince de ton peuple” (Ex.22:28). Un chrétien ne doit pas insulter celui qui détient l’autorité, même si ce dernier en abuse, car on doit le respect à sa fonction même si on n’en a pas pour sa personne. Paul parle pour sa défense devant le Sanhédrin, et le souverain sacrificateur ordonne qu’on le frappe sur la bouche (Act.23:1, 2). “Alors Paul lui dit: ‘C’est Dieu qui te frappera, espèce de mur blanchi! Tu sièges là pour me juger selon la loi et,

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contrairement à la loi, tu ordonnes de me frapper!” (v.3 BFC). “Ceux qui étaient près de Paul lui dirent: ‘tu insultes le grand prêtre de Dieu!’(v.4). Paul répondit: ‘J’ignorais, frères, que c’était le grand prêtre. En effet, l’Ecriture déclare: ‘Tu ne diras pas du mal du chef de ton people” (v.5 - en citant Ex.22:28). L’apôtre n’a pas de respect pour la personne de celui qui détient l’autorité, parce qu’il agit illégalement. Mais quand il apprend la fonction détenue par celui-ci, il se rétracte. On peut respecter les autorités tout en récusant leur politique. L’obéissance “Rappelle leur d’être soumis aux magistrats et aux autorités, d’obéir” (Tit.3:1). “Observe les ordres du roi” (Eccl.8:2). Il s’agira de respecter les lois du pays et d’obtempérer à toute injonction d’un gardien de la paix quand il est dans l’exercice de ses fonctions. Tous ces impératifs frappent par ce qui semble être un manque de nuances. Mais elles sont basées sur une situation de fait que l’enfant de Dieu est appelé à accepter. Le paiement d’impots et de taxes “Voler le fisc, ce n’est pas voler”. Le Pharisiens tendent un piège à Jésus. Ils lui demandent: “Est-il permis, ou non, de payer le tribut à César?...Alors il leur dit: Rendez donc à César ce qui est à César” (Mat.22:17,21). Paul écrit aux Romains: “Le magistrat est serviteur de Dieu pour ton bien...C’est aussi pour cela que vous payez des impôts. Car les magistrats sont des ministres de Dieu entièrement appliqués à cette fonction. Rendez à tous ce qui leur est dû: l’impôt à qui vous devez l’impôt, le tribut à qui vous devez le tribut” (Rom. 13:4,6,7). Les autorités sont des “serviteurs”, des “ministres” qui rendent certains services aux citoyens de la part de Dieu. L’impôt donne à l’Etat les moyens de fonctionner. Celui-ci a le droit de lever l’impôt, c’est son “dû” et les croyants “doivent” payer leurs taxes. Ils financent le législateur, l’exécutif, les forces de l’ordre, les agents de prévention, la sureté de l’Etat, l’appareil judiciaire et les magistrats. Il n’empêche que le croyant consciencieux sera parfois désavantagé par la loi parce que le législateur part du principe que tout le monde triche. C’est particulièrement le cas pour les indépendants. La prière d’intercession Dieu donna l’ordre aux enfants d’Israël qui avaient été déportés à Babylone: “Recherchez le bien de la ville où je vous ai menés en captivité, et priez l’Eternel en sa faveur, parce que votre bonheur dépend du sien” (Jér.29:4,7). Et le bonheur de l’Eglise dépend du bon fonctionnement de l’Etat dans lequel elle vit. De là l’importance de la prière pour les autorités. Le roi Darius favorisa le rétablissement du culte dans le temple de Jérusalem afin que “les sacrificateurs prient pour la vie du roi et de ses fils” (Esdras 6:9,10). Voila un dirigeant païen convaincu de l’utilités des prières des prêtres d’Israël. Paul écrit à Timothée: “J’exhorte donc, avant toutes choses, à faire de prières, des supplications, des requêtes... pour les rois et pour tous ceux qui sont élevés en dignité, afin que nous menions une vie paisible et tranquille, en toute piété et honnêteté. Cela est bon et agréable devant Dieu notre Sauveur, qui veut que tous les hommes soint sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité” (1Tim.2:1-4). Il vaut toujours mieux prier pour les autorités que les critiquer. Mais comment et pourquoi intercéder pour les autorité? D’abord, la prière, dans toute sa variété, doit être prioritaire dans la vie du croyant et de l’Eglise. Deuxièmement, ce sont toutes les autorités, sans exception, qui doivent profiter de cette intercession: “les rois” (pluriel), et non seulement le bon chef d’Etat ou celui du pays dont celui qui prie est citoyen, mais aussi ceux d’autres pays. On ne prie pas pour que les dirigeants de son propre pays gagnent une guerre contre ceux d’une autre nation, qui abrite également des enfants de Dieu. Cette intercession vise la paix et la tranquilité de

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l’Eglise universelle. “Toutes les autorités” de son pays à soi comprennent donc, outre le chef d’Etat: les ministres, présidents, parlementaires, juges, maires, commissaires de police, gardiens de la paix, etc. Ensuite, il faut demander à Dieu que les autorités permettent aux chrétiens partout dans le monde, d’exercer librement leur culte, et que les législations et les agents de l’Etat ne mettent pas les croyants sous de telles pressions qu’ils soient tentés d’avoir recours à des pratiques malhonnêtes. Enfin, tout cela doit faciliter la propagation de la vérité, et le salut du plus grand nombre. La guerre est un des grand obstacles à l’évangélisation et à la mission. Le témoignage “Le Seigneur dit à Ananias: Va, car cet homme (Paul) est un instrument que j’ai choisi, pour porter mon nom devant les nations, devant les rois...et je lui montrerai tout ce qu’il soit souffrir pour mon nom” (Act.9:15,16). L’apôtre devait parler du Christ aux autorités, sachant que ce serait dangereux. “Le gouverneur Félix fit appeler Paul. Il l’entendit sur la foi en Christ. Mais comme Paul discourait sur la justice, la tempérance, et sur le jugement à venir, Félix, effrayé dit: Pour le moment retire-toi” (Act.24:24,25). L’apôtre ne s’en tenait pas à des généralités. Il fit de même devant le roi Agrippa: “En conséquence, roi Agrippa...j’ai prêché la repentance et la conversion à Dieu, avec la pratique d’oeuvres dignes de la repentance...J’ai subsisté jusqu’à ce jour, rendant témoignage...de ce que les prophètes et Moïse ont déclaré devoir arriver, savoir que le Christ souffrirait, et que, ressuscité le premier d’entre les morts, il annoncerait la lumière aux peuples et aux nations” (Act.26:19,20,22, 23). Pas de recommandations politiques, mais l’Evangile intégral! Cette responsabilité de témoigner devant les autorité ne se limite pas aux seuls apôtres. Jésus le déclare: “Je vous le dis, quiconque se déclare publiquement pour moi, le Fils de l’homme se déclarera aussi pour lui devant les anges de Dieu...Quand on vous mènera devant les synagogues, les magistrats et les autorités, ne vous inquiétez pas de la manière dont vous vous défendrez ni de ce que vous direz; car le Saint-Esprit vous enseignera à l’instant-même ce qu’il faudra dire” (Luc 12:8,10). “Même si vous souffriez pour la justice, vous seriez heureux. N’ayez d’eux aucune crainte et ne soyez pas troublés; Mais sanctifiez dans vos coeurs Christ le Seigneur, étant toujours prêts à vous défendre avec douceur et respect, devant quiconque vous demande raison de l’espérance qui est en vous” (1Pi.3:13-15). La Bonne Nouvelle du salut doit pouvoir pénétrér dans tous les milieux politiques, sans le poids exédentaire et encombrant d’un programme de “politique chrétienne”. La participation Dans la mesure où un Etat permet la consultation populaire, tout chrétien doit prendre ses responsabilités d’électeur et voter. Certains principes devront diriger l’exercice de ses droits civiques. Il s’informera sur les programmes des partis politiques et sur les qualités des personnes qui briguent les responsabilités dans l’Etat. Il votera pour ceux qui correspondent le mieux aux normes et aux valeurs chrétiennes. Il ne sera ni passif ni indifférent à la politique. Il écrira aux mandataires publics pour leur faire part de ses convictions. Il pourra embrasser une carrière dans le journalisme pour présenter l’information de façon exacte et l’opinion sous un jour biblique, sans pour cela utiliser le nom du Christ. Le chrétien votera pour ceux qui favorisent: L’intégrité du mariage biblique, Les intérêts de la cellule familiales et des enfants La dignité et la valeur de toute personne humaine, indépendamment de sa contribution en faveur de la société ou du poids qu’elle fait peser sur celle-ci Les libertés civiles et religieuses La sécurité des personnes et des bien, et la bonne marche de l’appareil judiciaire

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Le souci de Jésus pour les pauvres, les captifs, les handicapés, les opprimés (Luc 4:18,19) Le courage au travail, la responsabilité personnelle, l’indépendance économique La conservation des ressources de la terre La bonne gouvernance des instances gouvernementales L’élimination du pouvoir des corrompus et des immoraux Il acceptera de servir comme assesseur dans un bureau de vote, comme témoin devant un tribunal, ou comme membre d’un jury. Voila huit responsabilités du disciple du Christ envers l’Etat. L’Ecriture n’est donc pas avare de détails à ce sujet. Mais, étant donné que le Seigneur veut traiter avec nous comme avec des personnes responsables, il en précise également le pourquoi et le comment. Pourquoi le croyant doit-il accomplir ses devoirs envers l’Etat? Pour éviter la punition “Celui qui s’oppose à l’autorité résiste à l’ordre que Dieu a établi, et ceux qui résistent attireront une condamnation sur eux-mêmes. Ce n’est pas pour une bonne action , c’est pour une mauvaise que les magistrats sont à redouter. Veux-tu ne pas craindre l’autorité? Fais le bien...Mais si tu fais le mal, crains; car ce n’est pas en vain qu’il porte l’épée, étant serviteur de Dieu pour...punir celui qui fait le mal...Rendez à tous ce qui leur est dû...la crainte à qui vous devez la crainte.” (Rom.13:2-4,7). Cette exhortation sous-entend que le magistrat incroyant a une conscience suffisamment fiable pour distinguer entre le bien et le mal. C’est d’ailleurs ce que Paul explique au chapitre 2, versets 14,15 de cette même épître, où il déclare: “Les païens font naturellement ce que prescrit loi... l’oeuvre de la loi est écrite dans leur coeur, leur conscience en rendant témoignage.” “Soyez soumis...à toute autorité établie parmi les hommes, soit au roi comme souverain, soit aux gouverneurs comme envoyés par lui pour punir les malfaiteurs” (1Pi.2:14). Cette raison saute aux yeux, est terre-à-terre, réaliste, pragmatique. Mais l’Ecriture n’hésite pas à se servir de cette motivation pour proscire toute “résistance à l’autorité”, toute “mauvaise action”, et “le mal” de la part du croyant. Il doit respecter ces indications pour ne pas avoir à craindre le magistrat. Celui-ci est appelé un “serviteur de Dieu” quand il condamne et punit un chrétien qui fait le mal. Mais l’Ecriture n’exclut pas la possibilité que les autorités soient parfois injustes. Par motif de conscience Pour le chrétien, éviter la punition n’est pas le seul motif pour accomplir ses devoirs envers l’Etat. “Il est donc nécessaire d’être soumis, non seulement par crainte de la punition, mais encore par motif de conscience” (Rom.13:5). Paul se défend devant le gouverneur Félix en déclarant: “Je m’efforce d’avoir constamment une conscience sans reproche devant Dieu et devant les hommes” (Act.24:16). Que cette conscience est tout d’abord “devant Dieu”, montre qu’elle doit être éclairée et dirigée par sa parole et qu’elle est indépendante de l’Etat. Il ne s’agit donc pas d’une soumission aveugle et servile à l’autorité. L’obéissance à la loi doit être réfléchie, le fruit d’un choix délibéré et d’une conviction que c’est là ce que Dieu veut. “Soyez soumis à toute institution humaine, à cause du Seigneur” (1Pi.2:13). Le croyant respecte la loi par principe, de son plein gré, non uniquement par crainte de devoir payer l’amende. Qu’un agent de police soit présent ou absent, ne doit rien changer à sa façon d’agir. Il fait le bien parce que c’est bien. Il se souviendra aussi de tous les avantages pour la société d’une bonne citoyenneté de sa part. C’est lui le sel dans la masse, qui freine la corruption. Pour faire taire les critiques

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Le croyant se trouve souvent au milieu d’une société hostile qui lui cherchera volontier le moindre écart.“Soyez soumis, à cause du Seigneur, à toute autorité établie parmi les hommes, soit au roi comme souverain, soit aux gouverneurs comme envoyés par lui pour punir les malfaiteurs et approuver les gens de bien. Car c’est la volonté de Dieu qu’en pratiquant le bien vous réduisiez au silence les hommes ignorants et insensés, étant libres, sans faire de la liberté un voile qui couvre la méchanceté....honorez le roi” (1Pi.2:13-15,17). Ceux qui s’opposent à l’Evangile et aux chrétiens cherchent volontiers des raisons d’accuser ceux-ci sur base de leur attitude vis-à-vis du pouvoir. Pour autant que l’Etat assure un espace de liberté aux disciples du Christ, ceux-ci doivent veiller à n’abuser d’aucune façon de cette liberté. Il ne doivent prêter le flanc à aucune accusation d’incivisme. Il doit accomplir ses devoirs envers l’Etat malgré les imperfections et les torts de celui-ci Tout Etat a des torts. “Soyez soumis à toute institution humaine” (1Pi.2:13). Or, tout ce qui est humain est imparfait. En général, on cherche à justifier un manque de soumission aux autorités et le non-respect de la loi, en soulignant les dysfonctionnements aux différents niveaux du pouvoir et la corruption des politiques: “Tous pourris”. Selon ce raisonnement, le fait que certaines autorités ne seraient pas dignes de la soumission du citoyen, dispenseraient celui-ci de s’y soumettre. Et que certaines lois seraient mauvaises dispenserait le croyant d’y obéir. Dans cette optique, la légitimité d’un pouvoir résiderait dans sa bonne gouvernance. Des lois et des actes de l’Etat qui sont en opposition à des commandements de Dieu sont illégitimes - mais elles ne rendent pas l’Etat lui-même illégitime pour autant. Dieu se sert, même des actions mauvaises des autorités, pour accomplir ses desseins (Act.4:27). Dieu aurait-il prévu l’imperfection du pouvoir? “Que les vivants sachent que le Très-Haut domine sur le règne des hommes, qu’il le donne à qui il lui plaît, et qu’il y élève le plus vil (bas, abject) des hommes” (Dan.4:17). Il s’agissait du roi Nebucadnetsar, roi de Babylone qui avait fait façonner une statue en or de lui-même, que tous étaient obligés d’adorer. Il ne fut guère digne comme gouvernant! Il n’empêche que Dieu l’appelle “Nebucadnetsar, roi de Babylone, mon serviteur” (Jér.27:6). Même Israël, sous la théocratie, a eu plus de mauvais rois que de bons. Quand le peuple avait demandé un roi, Samuel ne l’avait-il pas averti de toutes les exactions, les abus, et les servitudes que ce dernier leur imposerait (1Sam.8:10-18)?. Hérode massacra les innocents (Mat.2:16). Et Paul déclare: “C’est une sagesse que nous prêchons...qui n’est pas de ce monde ni des princes de ce monde...sagesse qu’aucun des princes de ce monde n’a connue, car s’ils l’avaient connue, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de gloire” (1Cor.2:6-8). Les autorités furent ignorantes des réalités spirituelles et elles tuèrent le Christ. La Bible multiplie les exemples. Pilate fut un gouverneur lâche et un juge injuste (Luc 23:24). Mais Jésus se soumet en disant: “Tu n’aurais sur moi aucun pouvoir, s’il ne t’avait été donné d’en haut” (Jean 19:11). Il reconnaît l’origine divine du pouvoir de ce mauvais gouverneur. “En effet, contre ton saint serviteur Jésus, que tu as oint, Hérode et Ponce Pilate se sont ligués dans cette ville avec les nations et avec les peuples d’Israël” (Act.4:27). Jésus prédit le même sort à ses disciples: “Ils vous livreront aux tribunaux...vous serez menés, à cause de moi, devant des gouverneurs et des rois” (Mat.10:17,18). Plus tard, “Le roi Hérode se mit à maltraiter quelques membres de l’Eglise, et il fit mourir par l’épée Jacques, frère de Jean...Il fit encore arrêter Pierre” (Act.12:1-3). La rébellion de ces mauvais gouvernants contre Dieu ne les privait pas de leur légitimité à ses yeux. Mais il approuve uniquement le principe de l’autorité gouvernementale, et non le mauvais usage qu’on en fait. L’Ecriture est parfaitement consciente de la possibilité d’un abus de pouvoir de la part de l’Etat. Elle le considère comme une donne dont le disciple du Christ est appelé à tenir compte. Paul interdit qu’un croyant traîne un autre croyant devant un juge non-croyant en ces termes: “Ose-

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t-il plaider devant les injustes? (1Cor.6:1). Et encore: “Un frère plaide contre un frère, et cela devant des infidèles” (6:6). L’apôtre part du principe que les magistrats peuvent être des injustes et des infidèles. L’erreur judiciaire est toujours possible. Il écrit aux romains de se soumettre aux autorités (Rom.13:1-7), tandis que celles de Rome étaient violentes et persécutrices. Jean-Baptiste fut condamné injustement par Hérode et tué (Mc 6:21-29). Paul resta en prison parce que Félix espérait qu’il lui donnerait de l’argent (Act.24:26) et pour des raisons politiques, parce que Festus voulait plaire aux Juifs (v.27). Tous les hommes sont pécheurs, y compris ceux qui sont au pouvoir. En plus, le pouvoir corrompt. Nous allons voir que le système politique fait partie du “présent monde mauvais” (aion, kosmos - voir le chapitre 13). C’est à cause de l’imperfection des autorités, que Dieu fait siéger le pouvoir dans leur fonction plutôt que dans leur personne (voir plus haut). Les pires horreurs sont venues d’idéologies qui pensaient apporter une utopie, sans comprendre les faiblesses de la nature humaine et les limites de la politique. Cependant, des situations peuvent se présenter qui dispensent le croyant de se soumettre à l’Etat. L’Ecriture précise leur nature. Le croyant doit désobéir à l’Etat quand il exige ce que Dieu interdit, ou interdit ce qu’il exige Le roi d’Egypte ordonna aux sages-femmes des Hébreux de tuer les garçons nouveaux-nés (Ex.1:15,16). “Mais les sages-femmes craignirent Dieu, et ne firent point ce que leur avait dit le roi d’Egypte; elles laissèrent vivre les enfants” (1:17). Les trois jeunes-gens hébreux refusèrent d’adorer la statue d’or du roi Nebucadnetsar (Dan.3:16-18). Darius, roi des Mèdes, décrèta une interdiction d’adresser des prières à un dieu quelconque excepté à lui-même (Dan.6:6-9). Malgré cela, “Daniel priait et louait son Dieu comme il le faisait auparavant” (6:10). Ce furent des résistances passives et des refus du culte de l’Etat totalitaire. Ces prises de position courageuses furent fondées sur la conception biblique de la personne humaine, libre et responsable car créée à l’image de Dieu. Ces héros de la foi n’ont pas dit, pour sauver leur paux: “Nous n’avons pas le choix, il faudra bien nous prosterner”. Ils ont pris leurs responsabilités au risque de leur vie. Les totalitarismes modernes, marxisme, nazisme, laïcisme militant, capitalisme exploiteur (Mamon) se basent sur des religions inavouées qui sont idolâtres, tout comme les cultes rendus à Nebucadnetsar et Darius. L’homme, “mesure de toute choses”, se prend lui-même comme objet religieux. Le christianisme n’est ni collectiviste ni individualiste. L’Etat peut aussi interdire ce que Dieu exige. Jésus avait donné l’ordre formel à ses disciple d’annoncer la bonne nouvelle à Jérusalem et jusqu’aux extrémités de la terre (Mat.28:19,20; Mc.16:15; Luc 24:47,48; Jean 20:21; Act.1:8). Quand ceux-ci commencèrent à prêcher le Christ à Jérusalem, les autorités se dirent: “Défendons-leur avec menaces de parler désormais à qui que ce soit en ce nom-là. Et les ayant appelés, ils leur défendirent absolument de parler et d’enseigner au nom de Jésus” (Act.4:17,18). “Pierre et Jean leur répondirent: Jugez, s’il est juste, devant Dieu, de vous obéir plutôt qu’à Dieu” (v.19). Et encore: “Pierre et les apôtres répondirent: il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes” (5:29). Il faut préciser qu’il s’agit de l’obéissance à un ordre formel et clair du Seigneur et non pas d’une désobéissance à n’importe quelle loi avec laquelle le croyant n’est pas d’accord ou qui pourrait lui déplaire. Que faire donc quand l’obéissance à Dieu exige une désobéissance à une loi du pays? Obéir à Dieu et se prévaloir, pour sa défense, de tous les recours que la loi permet Le chrétien n’est pas appelé à se laisser faire. Paul et Silas prêchent l’Evangile à Philippes et sont traînés devant les magistrats (Act.16:16-24). Paul fait valoir ses droits de citoyen romain et est libéré (16:37-39). Paul fait la même chose à Jérusalem (Act.22:22-29) et parle pour sa défense devant le gouverneur Félix (24:10-22), devant Festus (25:1-12), devant le roi Agrippa (26:1-32) et,

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finalement il en appelle à César (25:10-12; 26:32; 28:18,19). Il est transféré à Rome et emprisonné (Act.28:16). Il faut toujours aller en appel; mais une issue heureuse n’est pas garantie. Obéir à Dieu et subir les conséquences de la désobéissance civile Etienne continue de prêcher (Act.7:1-53) et subit le martyre (7:54-60). Pierre continue de prêcher (Act.8:25) et est jeté en prison (12:1-5). Les trois jeunes gens Israëlites refusent d’obéir au roi Nebucadnetsar qui exige qu’ils se prosternent devant sa statue en or. Ils sont jetés dans la fournaise ardente (Dan.3:1-21). Dieu les en délivre. Mais la désobéissance civique comme arme politique ou simple moyen de pression ou de contestation n’est pas justifiée. Fuir dans un autre pays pour pouvoir y obéir à Dieu “Jésus parcourait la Galilée, car il ne voulait pas séjourner en Judée, parce que les Juifs cherchaient à le faire mourir” (Jean 7:1; 11:53,54). Ce n’était pas encore son heure. “Quand on vous persécutera dans une ville, fuyez dans une autre” (Mat.10:23). “Il y eut, ce jour-là, une grand persécution contre l’Eglise de Jérusalem; et tous, excepté les apôtres, se dispersèrent dans les contrées de La Judée et de la Samarie...Ceux qui avaient été dispersés allaient de lieu en lieu annonçant la bonne nouvelle de la parole” (Act.8:1, 4). L’émigration de chrétiens persécutés et leur dispersion de par le monde ont été, pendant 2000 ans, une des causes importantes de l’expansion de l’Eglise sur terre. La résistance armée à des états intolérants et les guerres de religion ont coûté la vie à des millions de chrétiens. L’Eglise n’en a été qu’affaiblie. Une brebis vivante vaut bien un lion mort. Comment le disciple du Christ doit-il se positionner quand sa patrie terrestre est occupée par un envahisseur étranger? Quel choix cornélien! Une telle possibilité n’est pas imaginaire. Le pays que Dieu avait donné à son peuple, Israël, avait été occupé pendant des siècles par une succession d’envahisseurs. Il était encore sous le pouvoir romain, quand Jésus et ses apôtres y vécurent. Et à travers l’histoire de l’Eglise d’innombrables disciples du Christ ont vu leurs patries terrestres envahies et occupées par des puissances étrangères. Au 20e siècle, des chrétiens français et belges ont dû vivre sous l’occupation allemande. Certains se sont joints à la résistance, d’autres ont été des collaborateurs. La plupart se sont positionnés, tant bien que mal et à des degrés divers, dans des attitudes intermédiaires. Actuellement, des croyants, en d’autres régions du monde, doivent faire face à des situations similaires. Chacun devra peut-être y faire face à l’avenir. L’attitude de Jésus et des apôtres face à l’occupation romaine est parfaitement pertinente pour n’importe quel patriote chrétien dont la patrie serait envahie et occupée. Aucun territoire au monde n’a été donné par Dieu à un peuple quelconque, comme le pays de Canaan fut donné au peuple d’Israël. Si certains eurent le droit d’être patriotes, ce furent bien Jésus et ses apôtres. Tout patriote chrétien doit s’inspirer de leur exemple. Jésus reconnaît l’autorité du gouverneur romain, Pilate, comme lui venant de Dieu (voir plus haut), et il enseigne qu’il faut payer des impôts à César. Cependant, il est très réservé vis-à-vis de l’occupant de la terre promise. Il dit à ses disciples: “Vous savez que les chefs des nations les tyranisent, et que les grands les asservissent” (Mat.20:25). Il ne dépeint pas les Etats comme assurant de grands espaces de liberté. Il appelle aussi le roi Hérode: “ce renard” (Luc 13:31,32). Devant Pilate, il n’est pas débordant de déférence. Quand ce dernier lui demande: “Es-tu le roi des Juifs?”, il répond: “Est-ce de toi-même que tu dis cela, ou d’autres l’ont-ils dit de moi?” (Jean 18:33,34). Quand Pilate lui demande: “d’où es-tu?” Jésus ne lui donna point de réponse” (19:9). Il “ne lui donna de réponse sur aucune parole” (Mat.27:14). Il garde son indépendance face au pouvoir. Il accorde aux autorités leur dû, mais rien de plus. Sa soumission n’est ni totale ni aveugle.

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Il désapprouve le “publicain”, collecteur d’impôts au service de l’occupant (Mat.18:17). Il se distancie du parti des hérodiens, collaborateurs du pouvoir romain. Mais Jésus n’est pas non plus un résistant. Les Juifs l’accusent devant Pilate de sédition contre le pouvoir romain: “Il excite notre nation à la révolte...Il soulève le peuple” (Luc 23:2,4). “Il se déclare contre César” (Jean 19:12). C’est donc un nationaliste révolutionnaire! Mais quand Pilate lui demande: “Es-tu le roi des Juifs?”, il répond: “Mon royaume n’est pas de ce monde...maintenant il n’est pas d’ici-bas...Si mon royaume était de ce monde, mes disciples auraient combattu pour moi” (Jean 18:36). Quand certaines personnes voulaient l’enlever pour le faire roi, il s’est dérobé (Jean 6:15). Le royaume présent de Jésus n’est pas terrestre, politique, mais céleste, spirituel. Ce n’est pas un pouvoir temporel, séculier, mais éternel. Il n’est pas basé sur le pouvoir de l’épée et imposé par la force: il n’est pas en concurrence avec un pouvoir politique existant, ce n’est pas un Etat. Et Pilate déclare Jésus innocent de toute atteinte à son pouvoir (Luc 23:14, 22). Jésus se distancie aussi du parti des zélotes, les nationalistes qui rechignaient à payer l’impôt aux romains. Mais toutes les relations entre le chrétien et l’Etat ne sont pas une question d’obéissance ou de désobéissance. Ils pourront aussi participer activement à la vie de la cité. Certains chrétiens pourront servir dans l’administration civile de l’Etat Des hommes de Dieu ont été hauts fonctionnaires “Pharaon dit à Joseph:...Il n’y a personne qui soit aussi intelligent et aussi sage que toi. Je t’établis sur ma maison, et tout mon peuple obéira à tes ordres. Le trône seul m’élèvera au-dessus de toi...Je te donne le commandement de tout le pays d’Egypte” (Gen.41:39-41). “Joseph dit à ses frères:...C’est Dieu qui a fait de moi le ministre le plus puissant du Pharaon, responsable du palais royal et administrateur de toute l’Egypte”(Gen.45:8 BFC). “Belschatsar donna des ordres, et l’on revêtit Daniel de pourpre, on lui mit au cou un collier d’or, et on publia qu’il aurait la troisième place dans le gouvernement du royaume” (Dan.5:29). “Darius mit à la tête des cent vingt satrapes trois chefs, au nombre desquels était Daniel, afin que ces satrapes lui rendent compte...Daniel surpassait les chefs et les satrapes, parce qu’il avait en lui un esprit supérieur; et le roi pensait l’établir sur tout le royaume” (Dan.6:2-3). “Mardochée sortit de chez le roi, avec un manteau royal bleu et blanc et une grande couronne d’or...Tous les...détails sur la grandeur à laquelle le roi éleva Mardochée, ne sont-ils pas écrits dans le livre des chroniques des rois des Mèdes et des Perses? Car le Juif Mardochée était le premier après le roi Assuérus...il rechercha le bien de son peuple et parla pour le bonheur de toute sa race (Est.8:15; 10:2,3). Si ces trois cas sont tirés de l’Ancien Testament, ils peuvent tous néanmoins être appliqués à la situation du chrétien aujourd’hui. Ces hommes ne détenaient pas un pouvoir dans la théocratie d’Israël, mais dans des pays païens où ils séjournaient en étrangers, comme le font actuellement les disciples du Christ. On peut tirer certaines leçons communes à ces trois cas: Il s’agissait d’hommes de Dieu qui, dans un premier temps, ont vécu leur foi d’une façon discrète mais ferme. Ils avaient souffert aux mains des autorités politiques. Ils avaient démontré des compétences hors normes. Ils n’avaient pas cherché le pouvoir. Les rois leur ont délégué des responsabilités en conséquence de services rendus à l’Etat dans des

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rôles subalternes. Ils ont été élevés au pouvoir par l’intervention de la providence divine. Ils ont usé de leur pouvoir pour promouvoir le bien de la nation où ils se trouvaient en exil, mais également pour favoriser le bien du peuple de Dieu. Ils ont servi loyalement sous leurs souverains respectifs sans chercher à les renverser. Les diverses fonctions de l’Etat peuvent être exercées par des croyants Ils étudieront le droit et chercheront à servir dans la magistrature en vue de promouvoir la justice. Ils s’engageront dans la police comme gardiens de la paix en vue du maintien de l’ordre. En tant que tels, ils sont “serviteurs de Dieu” (Rom.13:4). Ils se formeront pour une fonction éducative dans les diverses branches de l’enseignement officiel. Ils se formeront en vue de devenir assistant(e) social(e) auprès des nécessiteux. Ils se formeront en vue de servir dans l’administration au sein des différents ministères du gouvernement. Rien de plus normal pour un chrétien, en tant qu’individu, d’être rémunéré pour ses prestations au sein d’un service civil. Ces appointements ne constituent en rien une infraction au principe de la séparation de l’Eglise et l’Etat. Il en est tout autrement d’un pasteur qui recevrait une subvention de l’Etat pour son ministère au sein d’une Eglise (voir plus loin). Les chrétiens seront le sel de la terre et la lumière du monde au sein de l’Etat s’ils y remplissent bien leurs fonctions. Ils travailleront conscientieusement et avec entrain comme pour le Seigneur dans la soumission à leurs supérieurs hiérarchiques selon les indications de Eph.6:5-8. Ils chercheront à servir le public avec gentillesse et empressement. Il ne se laisseront pas gagner par la mentalité du fonctionnariat “rond-de-cuir”. Ils seront des témoins du Christ par leur comportement exemplaire auprès de leurs collègues et, quand l’occasion se présente, par la parole . Certains chrétiens-individus pourront s’engager dans la politique La Bible ne contient ni mention ni allusion concernant ce qu’on appellerait aujourd’hui l’élection démocratique d’un croyant à des responsabilités politiques. Il est question, tout au plus, d’une ratification par le peuple du roi David, que Dieu avait choisi et que Samuel avait oint (1Sam.11:14, 15; 2 Sam.16:18; 19:10). Il est possible que certaines personnes ayant été élues à des responsabilités politiques sous un régime démocratique dans la Grèce antique, se soient converties à Jésus-Christ lors de l’activité missionnaire décrite dans le Nouveau Testament. Pour ces personnes, les indications de Paul dans 1Cor.7:24 auraient, sans doute, été d’application: “Que chacun, frères, demeure devant Dieu dans l’état où il était lorsqu’il a été appelé.” Pour le reste, les indications bibliques qui inciteraient un chrétien à se présenter aux élections, sont surtout indirectes. Il pourrait, de la sorte, participer à “l’ordre de la préservation” qui fonde l’Etat (Gen.9; Rom.13 voir plus haut). Etant donné que l’Etat ne relève pas directement de l’ordre de la création, cet ordre-là apporte peu de lumières sur les questions politiques. Le croyant est appelé à être le sel de la terre et la lumière du monde parmi les politiques comme ailleurs (Mat.5:13-16). Ce sont les nombreux petits grains de sel (les chrétiens-individus) disséminés dans la masse qui y freinent la corruption, plutôt que les blocs de sel (partis politiques chrétiens). Ce sont les oeuvres bonnes des personnes chrétiennes que voient les autres hommes, qui sont la lumière du monde - non les déclarations de “politique chrétienne” de la part de partis ou des synodes. Si le royaume du Christ n’est pas maintenant de ce monde, il faut cependant s’occuper des gens de ce monde. Le principe de la séparation de l’Eglise et de l’Etat (voir plus loin) ne dira rien sur la séparation du chrétien- individu et de l’Etat. Que le croyant sache, cependant, que s’il ne s’occupe pas de la politique, la politique, elle, s’occupera de lui.

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Sur le plan pratique, trois options semblent se présenter à un chrétien qui veut s’engager dans une activité politique: Se joindre à un parti existant: N’importe quel programme politique d’un parti quelconque décevra le chrétien sur un certain nombre de points - surtout sur des questions éthiques (famille, mariage homosexuel, avortement, euthanasie, emploi de cellules-souches embryonnaires, etc.). Un chrétien ne trouvera jamais un parti dont toutes les prises de position seraient bibliquement défendables. Il doit donc choisir le parti qui lui semble être le plus proche de ses convictions chrétiennes et qui permet, en son sein, une libereté d’opinion aussi grande que possible sur un certain nombre de points. Comment devrait-il donc se comporter au sein d’un tel parti sans compromettre son témoignage chrétien? (1) Etre la conscience critique de ce parti. Y travailler de l’intérieur pour changer les choses. (2) “L’homme spirituel...juge de tout, et il n’est lui-même jugé par personne” (1Cor.2:15). Il doit apporter un regard indépendant de tout programme politique ou idéologique. (3) Donner l’exemple d’une intégrité personnelle scrupuleuse. (4) Témoigner de sa foi dans ses contacts personnels sans mener sa politique sous une bannière chrétienne. (5) Respecter l’adversaire politique. Le marxiste athée, le néo-nazi, le promoteur de l’euthanasie et du mariage homosexuel ne seront pas des ennemis à combattre, mais des pécheurs à aimer et à gagner pour le Christ. “Soyez en paix avec tous les hommes” (Rom.12:18). En tant que soldats du Christ (2Tim.2:3), “Nous n’avons pas à lutter contre des êtres humains” (Eph.6:12 BFC). Il est peu probable qu’un croyant qui respecte toutes ces consignes puisse monter très haut dans la hiérarchie d’un parti. Il pourra toujours se prévaloir du Ps.75:7,8: “Ce n’est ni de l’orient, ni de l’occident, ni du désert, que vient l’élévation. Mais Dieu est celui qui juge: il abaisse l’un, et il élève l’autre”. Dans le pire des cas, il pourrait être considéré comme subversif et être écarté, voir expulsé du parti. S’il était question pour lui d’être associé aux instances dirigeantes du parti, l’avertissement de l’apôtre pourrait le concerner: “N’allez pas vous placer sous le même joug que les incroyants” (2Cor.6:14BFC). Personne ne devrait douter, que sa foi est plus importante pour lui que la politique. Il n’entrera pas en politique par ambition. Se présenter à titre personnel comme indépendant: C’est une option surtout pour celui qui s’engage sur le plan local ou municipal. C’est à la base que le chrétien peut être le plus efficace, car c’est le premier niveau de pouvoir, là où on est le plus proche du citoyen. C’est ce niveau modeste, mais primordial qui touche la vie de tous les jours. Le chrétien fera de la politique de principe plutôt que de la politique de parti. La grâce commune lui permettra de collaborer sans compromis avec certains non-chrétiens sur des questions précises; avec des catholiques, des Juifs, des socialistes, des musulmans. Mais ce sera tantôt avec l’un sur tel point, tantôt avec l’autre sur tel autre point et, à condition qu’il ne prétende pas faire de la “politique chrétienne”. Le disciple du Christ qui s’engage en politique le fera en tant que citoyen de sa patrie terrestre, non en tant que citoyen de sa patrie céleste. Il devra promouvoir ses idées par le dialogue et la force d’une argumentation logique et fondée qui est accessible aux incroyants. Par exemple, un discours sur l’avortement fondé sur des considérations médicales, psychologiques et humanitaires sera plus efficace qu’une interdiction par la loi basée sur la religion. Il évitera de tenir un discours d’autorité au nom du Christ que les non-chrétiens ne reconnaissent d’ailleurs pas. Et il fera sans doute l’expérience de cette parole de Jésus: “Voici, je vous envoie comme une brebis au milieu des loups. Soyez donc prudents comme des serpents et simples comme des colombes” (Mat.10:16). La

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conscience du disciple de Jésus le désarme dans la lutte politique. Il se limitera strictement à ce qui est, bibliquement, du ressort de l’Etat, c’est-à-dire aux questions ayant trait au maintien de la paix et de l’ordre public, à la promotion de la justice sociale, à l’incitation au bien, c’est-à-dire à la promotion des causes justes sur le plan familial, social, éducatif, de la sécurité, et de l’emploi. Mais la notion que tout problème de société devrait avoir une solution politique est une des grandes illusions de notre temps. De nombreux maux de la sociètè échappent totalement à l’intervention de l’Etat. L’Etat ne doit pas se mêler de tout. Le bien de la société est tout autant fonction de la vie et de l’action des chrétiens dans les autres sphères bibliques d’autorité: à savoir celles du couple, de la famille, de l’Eglise, de l’entreprise et de la création. La société ne se limite pas à la sphère politique mais est constituée de l’ensemble de toutes ces sphères. Dieu délègue l’autorité pour agir à des personnes différentes dans chacun de ces domaines; aux parents dans la famile, aux conducteurs spirituels dans l’Eglise, aux magistrats dans l’Etat, etc. Les autorités gouvernementales ne sont ni mandatées ni aptes à intervenir dans les affaires de l’Eglise. Tout comme les autorités ecclésiales ne le sont pour intervenir dans l’Etat. S’engager dans le monde associatif: Associations de parents à l’école; comités de quartier; oeuvres caritatives, amicales socio-culturelles, programmes de réhabilitation pour drogués et de réinsertion pour prisonniers, organisations non-gouvernementales (ONG), etc. De nombreux chrétiens qui se sont engagés dans une carrière politique ont été déçus de ne rien pouvoir changer au sommet de la pyramide, et ont estimé être plus efficaces en s’engageant dans l’associatif, en agissant dans la proximité. La politique ne constitue pas la totalité de la vie publique. La foi n’est pas purement “privée” du simple fait qu’elle ne s’exprime pas sur le plan politique. Des chrétiens peuvent être impliqués dans des actions sociales et humanitaires sur le terrain, tandis que d’autres pensent que la solution des problèmes doit être recherchée en modifiant les structures de la société par un activisme politique. Ces derniers se désintéressent souvent des problèmes concrets. Mais, sur le long terme, certains d’entre eux se désintéressent aussi de la politique parce qu’ils se sentent impuissants pour influencer le sommet de l’Etat. Le chrétien-individu peut être fonctionnaire de l’Etat, déployer une activité politique et être investi d’un mandat gouvernemental. Qu’en est-il donc de la relation entre la collectivité chrétienne qu’est l’Eglise, y compris ceux qui y revêtent une charge officielle, et la collectivité qu’est l’Etat? LES RELATIONS ENTRE L’EGLISE-COLLECTIVITE, ET L’ETAT S’il existe certaines similarités superficielles entre ces deux collectivités, un examen de l’Ecriture révèle des différences fondamentales entre elles, qui peuvent influer sur leurs relations. L’Eglise et l’Etat sont deux sphères d’autorité différentes Nous avons vu par le détail que l’Etat a été investi par Dieu d’une autorité dans le domain politique et que les citoyens lui doivent soumission. L’Ecriture reconnaît également l’Eglise locale comme étant une sphère au sein de laquelle il existe une relation d’autorité et de soumission. Ceux qui y revêtent une charge officielle sont investi par Dieu d’une autorité sur ses adhérents, dans de domaine de la vie ecclésiale (Héb.13:7,17; 1 Thes.5:12; Tit.1:4; 2:15). Ces derniers, à leur tour, doivent soumission à leurs conducteurs spirituels (1Pi.5:5; 1Cor.16:15,16; Héb.13:17). Chacune de ces deux collectivités, l’Etat et l’Eglise, doit respecter l’autorité et l’action de l’autre dans son domaine. Mais les différences entre ces deux sphères sont importantes, et ont des conséquences pour les relations qu’elles entretiennent entre elles. Cependant, ces différences ne sont pas toujours

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comprises ni respectées. Les conséquences de cette méconnaissance peuvent être néfastes pour l’une comme pour l’autre. L’Eglise et l’Etat sont composés de majorités de personnes différentes L’Eglise est composée d’une majorité de croyants en Christ, de “ceux qui acceptent la parole et sont baptisés” (Act.2:41), que “le Seigneur ajoute à l’Eglise” (2:47), de “disciples” (6:7), des personnes “peu nombreuses” qui “entrent par la porte étroite (Mat.7:14). Jean, se met lui-même et l’Eglise en contraste avec le reste du monde: “Nous savons que nous sommes de Dieu, et que le monde entier est sous la puissance du malin” (1Jean 5:19). L’Etat, en effet, est composé d’une majorité de ceux qui entrent par la “large porte” et qui empruntent le “chemin spacieux qui mène à la perdition” (7:13). Paul précise: “Il y en a beaucoup qui se conduisent en ennemis de la croix du Christ” (Phil.3:18BFC). Et Satan est celui qui “séduit les nations”, c’est-à-dire les Etats. (Apoc. 20:3). Deux collectivités, dont l’une est composée majoritairement de personnes insoumises à Dieu, et dont l’autre est composée principalement de de ceux qui reconnaissent Jésus comme Seigneur, entretiendront forcément entre elles des relations ambiguës et empreintes d’incompréhensions. l’Eglise et l’Etat sont dirigés par deux autorités différentes “Jésus leur dit: Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu” (Mat.22:21; Mc 12:17; Luc 20:25). L’Etat romain était dirigé par un chef humain, César. L’Eglise est dirigée par un Seigneur divin, Jésus-Christ. Le contexte montre que l’Eglise doit rendre à l’Etat ce qui revient à l’Etat: c’est-à-dire: l’impôt. Elle doit rendre à Dieu ce qui revient à Dieu, c’est-à-dire ses libéralités - et tout le reste. Il y a des limites à ce qui revient à César. On lui refuse toute prétention totalitaire et le droit d’exiger ce que Dieu interdit. Mais il n’y a pas de limites à ce qui revient à Dieu. La répétition de cette vérité dans les trois évangiles synoptiques en souligne l’importance. Toute relation entre l’Eglise et l’Etat sera marquée par un tiraillement entre ce qui est dû à Dieu et ce qui est dû à César. L’Eglise et l’Etat sont dirigés selon des principes différents “Jésus appela ses disciples, et dit: Vous le savez, les chefs des nations les tiennent sous leur pouvoir et les grands sous leur domination . Il ne doit pas en être ainsi parmi vous. Au contraire, si quelqu’un veut être grand parmi vous, qu’il soit votre serviteur, et si quelqu’un veut être le premier parmi vous, qu’il soit votre esclave. C’est ainsi que le fils de l’homme est venu non pour être servi , mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude” (Mat.20:25-28 TOB; Mc.10:42-45; Luc 22:24-27). Jésus parle d’abord de ce qui a cours dans les “nations”, les entités politiques. Il précise que le principe qui a cours dans la direction d’un Etat, c’est le “pouvoir” et la “domination”. Dans son essence, la politique consiste à acquérir et à exercer un pouvoir. Le Seigneur parle ensuite des “chefs” des nations. L’Etat est hiérarchisé, c’est une pyramide. S’unir à l’Etat constitue pour l’Eglise un impérialisme car cette participation au pouvoir est une tentation pour elle d’imposer ses vues par des moyens charnels. Ce qui est légitime dans l’Etat, ne l’est pas forcément dans l’Eglise. Ensuite, Jésus met l’exercice d’un pouvoir politique en contraste avec ce qui devrait avoir cours “parmi vous” c’est-à-dire dans le rassemblement de ses disciples: l’Eglise. Il y a une différence fondamentale entre être un grand de ce monde et être “grand” ou “le premier” dans l’Eglise. On devient spirituellement “grand” dans l’Eglise en se montrant “serviteur” et “esclave”. Et Jésus établit son droit à être la tête de l’Eglise en se donnant lui-même comme exemple du principe: Il a le droit de diriger l’Eglise parce qu’il n’est pas venu pour être servi, mais pour servir; et parce qu’il s’est sacrifié à la croix pour la multitude de ceux qui constituent l’Eglise. Le principe qui doit inspirer les conducteurs spirituels dans la direction de l’Eglise, c’est le désintéressement, le service

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dévoué et le sacrifice de soi pour les brebis. Pierre précise pour les anciens de l’Eglise: “N’exercez pas un pouvoir autoritaire sur ceux qui vous sont échus en partage, mais devenez les modèles du troupeau” (1Pi.5:3TOB); Et l’apôtre Paul ajoute pour lui-même: “Non pas que nous dominions sur votre foi, mais nous contribuons à votre joie” (2Cor.1:24). C’est le contraire du régime politique. On ne soulignera jamais assez cette incompatibilités entre l’Eglise et l’Etat. Un autre principe qui fonde le gouvernement d’un pays, est celui de la contrainte par la force de l’épée. Dans l’Eglise c’est celui de la non-violence. Comment un chef d’Etat, face à un aggresseur, pourrait-il tourner l’autre joue (Mat.5:39) ou rendre le bien pour le mal (Rom.12:17)? Aucun Etat ne peut exister sans la coercition et l’Eglise participe inévitablement à celle-ci par tout lien avec lui. Et quand l’Eglise ne se sert pas de moyens de pression, elle est parfairement incapable de réaliser un programme politique. La douceur et l’abaissement que Dieu demande des serviteurs du Christ sont parfaitement inefficaces quand il s’agit de gouverner un Etat. L’Eglise et l’Etat ont des fonctions différentes Le rôle de l’Etat est: (1) De refréner la violence et empêcher la vengeance personnelle (Gen.9:5-6; Deut.19:12; Mat.26:52; Rom.13:4) en punissant celui qui fait le mal (Rom.13:4; 1Pi.2:14), pour que règnent l’ordre et la paix (1Tim.2:4). (2) D’approuver ceux qui font le bien et les y inciter (Rom.13:3,4). (3) De promouvoir la justice sociale (Prov.31:9; Jér.22:15,16). En résumé, l’Etat a pour objet la conservation des intérêts civils, c’est-à-dire de la vie, de la liberté, de la santé du corps et de la propriété. Mais Dieu n’a pas confié à l’Etat le soin des âmes. Le rôle de l’Eglise est: (1) De rendre un culte à Dieu (Act.4:23,24,31; 1Cor.14:15-17; Phil.3:3; 1Pi.2:9a etc.). (2) D’accomplir des oeuvres de miséricorde envers tous les hommes (Act.6:1,2; Rom.12:8; Gal.6:10; Héb.13:16; etc.). En même temps, elle ne doit pas donner l’impression à ceux qu’elle aide, que l’important est de rechercher d’abord le manger, le boire et le vêtement (Mat.6:31), ce qui est une démarche païenne (v.32). Elle doit aussi les amener à chercher premièrement le royaume de Dieu (v.33). Si elle y réussit, tout le reste leur sera donné par dessus, et ils ne resteront pas dans l’indigence ou la dépendance. On ne fera pas d’eux des assistés. On leur rendra leur dignité. (3) D’être un exemple pour le monde en moralité (Phil.2:15), en douceur et respect (1Pi.3:16), en amour réciproque (Jean 13:35), en esprit de louange (Act.2:47), en paix et joie par le Saint-Esprit (Rom.14:17-18), en unité (Jean 17:21; Act.5:12-14), en oeuvres bonnes (Jac.2:18), en honnêteté (2Cor.8:20,21). Etre la lumière du monde par le bien qu’elle fait (Mat.5:14,16). (4) D’annoncer la Bonne Nouvelle jusqu’aux extrémités de la terre (Act.1:8; 21:8; 1Cor.12:28,29). (5) De faire de ceux qui se convertissent à Jésus-Christ et qui se joignent à elle des disciples qui observent tout ce que Jésus a ordonné (Mat.28:19-20). Ceci implique le droit d’exclure de ses rangs une personne qui contreviendrait aux règles fixées pour la vie de la communauté à laquelle elle a adhéré librement. (6) De s’édifier elle-même (Act.9:31; Eph.4:16; 1Pi.2:5) par la prédication (Act.15:32; 1Cor.14:3,4,19,31), l’enseignement (Act.13:1; Rom.12:7; Héb;5:11,12), le travail pastoral (Jean 21:15-17; Act.20:28; Eph.4:11; 1Pi.5:1,2) et l’implantation d’Eglises locales nouvelles (1Cor.3:10,11; Rom.15:20). L’Eglise et l’Etat agissent dans des domaines différents L’Etat doit promouvoir la sécurité physique et matérielle, mais n’a aucune responsabilité spirituelle. L’Eglise est appelée à fonctionner, outre sur le plan temporel, surtout sur le plan spirituel. Cinq des

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six domaines mentionnés ci-dessus, dans lesquel l’Eglise doit agir, comprennent un élément spirituel. Ecoutons Paul: “Non, les armes de notre combat ne sont pas d’origine humaine, mais leur puissance vient de Dieu pour la destruction des forteresses. Nous détruisons les raisonnements prétentieux, et toute puissance hautaine qui se dresse contre la connaissance de Dieu” (2Cor.10:4,5 TOB). “Ce n’est pas à l’homme que nous sommes affrontés, mais aux Autorités, aux Pouvoirs, aux Dominateurs de ce monde de ténèbres, aux esprits du mal qui sont dans les cieux. Saisissez donc l’armure de Dieu...la vérité...la justice...l’élan pour annoncer l’Evangile..la foi...le glaive de l’Esprit, c’est-à-dire la parole de Dieu” (Eph.6:12-17TOB). L’Etat ne peut rien apporter à l’Eglise sur le plan spirituel, c’est-à-dire dans le domaine où se situe l’essentiel de la fonction de celle-ci. Les armes politiques n’ont pas d’utilité dans un combat spirituel et sont contre-productives. La politique ne touchera jamais l’âme d’un homme ou d’une population. L’Eglise et l’Etat doivent avoir des moralités différentes “Dieu a laissé toutes les nations suivre leurs propres voies” (Act.14:16). “Ephraïm (le royaume du Nord) est attaché aux idoles: laisse-le!” (Osée 4:17).Dieu “livre” les hommes et les Etats “aux penchants de leurs coeurs” (Ps.81:13) et “à l’impureté” (Rom.1:24). L’histoire du monde en confirme les conséquences. Quand le péché et la décadence morale d’une nation dépasse les limites, cette nation ou cet empire disparaît: Sodome, Babylone, la Perse, la Grèce, Rome et, en l’an 70, Jérusalem a été incendiée et rasée et le peuple juif a été dispersé dans le monde entier. “Que l’injuste commette encore l’injustice et que l’impur vive encore dans l’impureté, mais que le juste pratique encore la justice et que le saint se sanctifie encore. Voici je viens bientôt et ma rétribution est avec moi” (Apoc.22:11, 12 TOB). C’est là une des dernières paroles du Christ au monde et à son Eglise. Pour le moment, le Christ accorde aux nations injustes l’espace qui leur est nécessaire pour avoir et garder leur propre style de vie. Si Dieu laisse aller ces Etats à leurs injustices et à leurs penchants, l’Eglise doit aussi les y laisser aller. Cela ne veut pas dire qu’elle serait d’accord avec le mal qu’ils font. Mais, à l’exemple de Dieu, elle les laisse simplement libres de mal agir. Elle ne doit pas vouloir en faire trop en se rendant responsable de réformer les Etats. Dieu ne bâtit pas actuellement des nations chrétiennes; il bâtit l’Eglise dans toutes les nations. Sous la théocratie d’Israël, des hommes de Dieu ont confessés les péchés de la nation toute entière. Néhémie dit: “Ecoute la prière de ton serviteur...en confessant les péchés des enfants d’Israël, nos péchés contre toi; car moi et la maison de mon père nous avons péché, nous t’avons offensé” (Néh.1:6-7). Esdras et Daniël firent de même (Esdr.9:6; Dan.9:4-8). Dans certains pays protestants on entend, lors de la confession des péchés dans les Eglises, des confessions des péchés de la nation, comme si l’Eglise était responsable de tout ce qui n’allait pas dans leur société; comme si l’Eglise et l’Etat ne faisait qu’un comme en Israël sous la théocratie. Par contre, sous la Nouvelle Alliance, l’Etat est une chose, et l’Eglise en est une autre. L’Eglise a peu d’emprise sur la moralité de ses concitoyens qui ne sont pas chrétiens. En se sentant responsable de leurs péchés, elle se sent constamment frustrée et déprimée. Elle ne doit pas constamment s’identifier au monde, mais à son Seigneur, et aller de l’avant avec lui. Si une nation va trop loin dans le péché, elle connaîtra le jugement de Dieu. D’ailleurs, l’Eglise à suffisamment à faire en s’occupant de ses propres péchés. C’est pour cela que Jésus poursuit son dernier message à son épouse en disant: “Que le juste pratique encore la justice et que le saint se sanctifie encore” (Apoc 22:11b). L’Eglise doit accorder toute son attention à sa propre sanctification de sorte que son style de vie soit vraiment différent de celui de la nation dans laquelle elle vit. Elle exercera la discipline d’Eglise à l’encontre du concubinage, de l’adultère, du mensonge et de la triche au risque de perdre des membres et des revenus. L’Eglise doit faire la démonstration de l’obéissance à Dieu, non l’imposer aux incroyants. C’est ainsi qu’elle gagnera le droit et les occasions d’être entendue. On observe, en outre, une tendance dans les Eglises qui

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s’évertuent à réformer la société. Elles exercent peu une discipline en leur sein, de sorte que le divorce et le relâchement des moeurs qu’on observe dans le monde se retrouvent presqu’autant dans l’Eglise. Aussi, ces Eglises ne font que s’essouffler à essayer de rendre l’Etat plus moral. Il ne leur reste plus de force pour assumer leur propre sanctification et leur vraie vocation. Quand l’Eglise s’occupe des questions politiques et économiques au détriment de sa mission spirituelle, sa moralité s’en ressent, ainsi que celle de la société. Par contre, les Eglises qui veulent aider leurs membres à vivre en disciples du Christ et progresser dans la sanctification, acceptent comme une donne que le présent monde est mauvais (Gal.1:4). Elles ne cherchent pas à imposer une éthique chrétienne à une société qui n’en veut pas. Cette éthique sous-entend la conversion et la foi en Christ. Elle n’est pas une moralité que n’importe qui peut respecter sans le pardon des péchés et la force du Saint-Esprit. C’est une déformation du christianisme que de laisser entendre qu’une conformité extérieure serait possible ou nécessaire sans changement intérieur. Ces autres Eglises cherchent à témoigner du Christ à qui veut bien l’entendre, par un style de vie conséquent, par des oeuvres de miséricorde et par une annonce respectueuse de la Bonne Nouvelle. Elles contribuent à la moralité de la société de façon indirecte. Elles sont comme le sel qui imprègne la masse et y freine la pourriture. Elles partent du principe que la société est corrompue, mais elles s’assurent qu’elles-mêmes ne le deviennent pas. Le sel ne doit pas perdre sa saveur. Il doit y avoir une différence radicale entre l’Eglise et l’Etat, entre le sel et la masse, sur le plan de la moralité. Et ce que l’Eglise a de mieux à faire pour le bien de la masse, c’est augmenter la quantité de “sel” par l’évangélisation. S’il y avait eu seulement dix justes à Sodome, Dieu ne l’aurait pas détruite. Ninive s’est repentie à la prédication de Jonas et Dieu l’a épargnée. Le Christ, après avoir dit: “Que l’injuste commette encore l’injustice...et que le juste pratique encore la justice” (Apoc.22:11), ajoute: “Voici je viens bientôt et ma rétribution est avec moi” (22:12). Le Seigneur n’est pas indifférent à toutes les injustices du monde. Si, pour le moment, il laisse aller les nations à leurs mauvais penchants, cela ne veut pas dire qu’il n’interviendra jamais, car il revient pour juger les nations (Mat.25:31,32). Lors de sa première venue, il déclare: “Je suis venu, non pour juger le monde, mais pour sauver le monde” (Jean 12:47; 3:17). L’Eglise, à l’exemple de son Maître, au lieu d’être juge, et donneur de leçons, doit être témoin du salut. Et l’apôtre Paul, face à un cas d’inconduite dans l’Eglise à Corinthe déclare: “Ce n’est pas mon affaire, en effet, de juger les non-chrétiens. Dieu les jugera. Mais ne devriez-vous pas juger les membres de votre communauté? (1Cor.5:12,13BFC). L’Eglise, au lieu de juger la société non-chrétienne, doit laisser ce jugement enre les mains de Dieu qui s’en chargera plus tard. Par contre, elle aura à se sanctifier elle-même toujours plus par une saine discipline auprès de ses membres qui se méconduisent. C’est uniquement ainsi qu’elle sera le sel de la terre qui freine la corruption. Car “Le jugement va commencer par la maison de Dieu” (1Pi.4:17). La différence entre l’Eglise et l’Etat sur le plan de la moralité doit se creuser toujours plus. Toutes ces différences entre l’Eglise et l’Etat quant à leur composition, leurs autorités, les principes et les domaines de leur fonctionnement, leurs rôles dans le monde et leurs moralités respectives mettent en question tout chevauchement ou mélange entre eux. l’Eglise et l’Etat doivent être tenus séparés L’Eglise est une minorité d’étrangers jouissant d’une double nationalité au sein de l’Etat Paul, Silas et beaucoups d’autres chrétiens au premier siècle, étaient des citoyens Romains (Act.16:37; 22:25-29; 23:27). Tous les disciples du Christ, de nos jours, sont citoyens de l’un ou l’autre Etat. Mais “Nous n’avons pas ici-bas de cité permanente, mais nous cherchons celle qui est à venir” (Héb.13:14). Cette citoyenneté d’un Etat de ce monde, quel qu’il soit, est, pour le croyant

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en Christ, une nationalité temporaire qui demande de sa part qu’il soit soumis aux lois de ce pays. Tout croyant entre dans le royaume de Dieu par le nouvelle naissance (Jean 3:3,5), devient citoyen du ciel (Phil.3:20 BFC “Nous sommess citoyens des cieux”), et fait partie de l’Eglise, “une nation sainte...le peuple de Dieu” (1Pi.2:9,10). Cette citoyenneté du ciel est une nationalité éternelle qui demande de sa part qu’il soit soumis à la parole de Dieu. De ce fait, les enfants de Dieu sont citoyens de deux nations à la fois. Ils ont une double citoyenneté, la terrestre et la céleste et. Or, il existe une séparation entre la terre et le ciel. Mais la citoyenneté céleste fait d’eux des citoyens de leur cité terrestre qui sont différents des autres. Pierre écrit “aux élus qui vivent en étrangers...dans le Pont, la Galatie, la Cappadoce, l’Asie et la Bythinie” (1Pi.1:1TOB). Il poursuit: “Conduisez-vous avec crainte, pendant le temps de votre exil” (1Pi.1:17 Jérusalem). “Bien-aimés, je vous exhorte comme étrangers et voyageurs sur la terre, à vous abstenir des convoitises charnelles” (1Pi.2:11). “Ils ont ouvertement reconnu qu’ils étaient des étrangers et des exilés sur la terre. Ceux qui parlent ainsi montrent clairement qu’ils recherchent une patrie...En réalité, ils désiraient une patrie meilleure, c’est-à-dire la patrie céleste” (Héb.11: 13,14,16BFC). L’Eglise est un rassemblement d’étrangers, de passage dans ce monde, faisant fonction d’ambassadeurs pour le Christ, leur Roi. Ceux qui sont de passage ne s’attachent pas à ce qui est fixe ici-bas comme s’ils allaient y vivre pendant mille ans. Leur comportement d’en ressentira. L’Eglise ne doit pas s’imposer Comment un étranger doit-il se comporter dans son pays d’accueil? On peut illustrer la situation de l’Eglise au sein d’un Etat quelconque comme celle de la population issue de l’immigration, vivant au sein d’un de nos Etats d’Europe occidentale. Cette population d’étrangers naturalisés peut parfois susciter une certaine incompréhension, une irritation, voir des tensions. Elle a un autre style de vie, ses propres rassemblements et lieux de culte, une autre culture, d’autres valeurs. Quel serait la réaction des citoyens de souche, si cette population étrangère se servait de son droit de vote pour devenir politiquement active et imposer des changements. Si les étrangers deviennent trop puissants, les tensions peuvent se muer en peur et en haine. Quand Lot ne voulu pas se plier aux moeurs de Sodome, les citoyens de la ville lui dirent: “Ote-toi de là! Tu n’es qu’un étranger et tu voudrais faire la loi chez nous!” (Gen.19:9BFC). La population étrangère qu’est l’Eglise ne modifie pas les lois du pays d’accueil, sinon indirectement. Une situation délicate: Nous venons de dépeindre cette situation du point-de-vue de l’entourage de l’Eglise qui vit dans un des Etats de ce monde. Considérons les choses maintenant de notre point-de-vue, de celui des “étrangers” vivant dans un Etat quelconque. Notre Roi nous a donné la responsabilité de chercher à persuader des gens de notre entourage à devenir, à leur tour, des étrangers comme nous, et cela dans leur propre pays. On comprend que cela pourrait exacerber les incompréhensions, les irritations et les tentions. Surtout, que ces personnes seraient sans doute amenées, avec le temps, à changer leurs idées au sujet de différents problêmes de société. On comprend qu’il nous faille nous en tenir à une modeste réserve et ne pas nous unir à l’Etat pour imposer un style de vie à des gens qui ne veulent ni acquérir notre nationalité de chrétiens, ni changer de comportement. Que cela veut-il dire, concrètement? On n’aimerait pas, en Europe, que les mosquées émettent par haut-parleur les appels à la prière à six heures du matin, comme dans les Etats musulmans. Il ne faudrait pas non plus, dans un de nos Etats laïques, que les chrétiens insistent pour qu’on fasse sonner les cloches des Eglises tôt le dimanche matin. La valeur sentimentale des cloches pour certains chrétiens nostalgiques, vaut-elle l’irritation qu’elles provoquent chez les dormeurs

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incroyants? Si l’Eglise a des convictions sur les questions essentielles, elle doit se montrer accommodante pour les sensibilités des autres, sur tout ce qui est accessoire. Elle doit aussi évoluer avec la culture de son pays, sauf quand celle-ci est en contravention avec les impératifs moraux et spirituels de l’Ecriture. Que l’Eglise amène un certain nombre d’autochtones à devenir citoyens du ciel et à en adopter le style de vie, est certainement acceptable. Mais elle ne doit pas agir comme si elle était majoritaire dans un pays et que l’Etat devrait être chrétien. Profitons de l’exemple du Seigneur. Quand Jésus a quitté le ciel pour venir sur la terre, il s’est trouvé comme un étranger dans un monde dont le “prince” était mauvais. . Il a décrit lui-même l’attitude qu’il a adoptée en venant ici-bas: “Le Fils de l’homme est venu, non pour être servi, mais pour servir” (Marc 10:45). L’Eglise est le corps du Christ, l’organe de sa présence sur la terre. En tant que telle, elle doit adopter la même attitude que son Chef, et ne pas chercher son avantage à elle, mais plutôt les intérêts de la population qui l’entoure. Elle ne doit pas s’imposer, ni dominer, ni même être sur la défensive. Elle ne cherchera pas à devenir une majorité qui protège ses propres intérêts. Elle servira la population qui l’entoure par des oeuvres de miséricorde et de promotion sociale. Elle constituera une contre-culture qui freinera la corruption dans la société par une vie de pureté exemplaire, de droiture, de douceur, de joie, d’amour mutuel et de civisme. Elle ne cherchera pas à se faire servir. Jésus n’était ni révolutionnaire, ni réactionnaire. Le vrai combat de l’Eglise ne se situe pas au niveau de la citoyenneté terrestre, mais “contre les esprits méchants dans les lieux célestes” Eph.6:12). Un contre-exemple: Le pape Grégoire VII déclara que le pape a le droit de lier et de délier toutes choses sur la terre et que les rois n’y échappent pas. Il lui était donc permis de déposer les empereurs. Il excomunia Henri IV en 1076 en prétendant que l’empereur est dans l’Eglise et non au-dessus d’elle. Le pape Boniface VIII publia le bulle Unam Sanctam en 1302 qui confiait si bien l’épée spirituelle que l’épée temporelle à l’Eglise de Rome. Selon ce bull, le spirituel est dans les mains du clergé et le temporel est exercé par le bras séculier, mais en faveur de l’Eglise et sous sa direction. Le résultat fut l’Inquisition. La société entière, y compris l’Etat furent donc assujettis à l’Eglise. C’était “l’ecclésiocratie”. Au moyen-âge, les papes prétendaient, par l’investiture, conférer aux souverains leur légitimité. Le spirituel englobait le temporel et la vie sociale était cléricalisée. Dans certains Etats, comme la principauté de Liège, les princes étaient les évêques. L’effort fait par l’Eglise au moyen-âge de gérer l’ordre social présent reste l’idéal catholique, surtout pour les conservateurs. Les papes du XIXème siècle ont encore opposé un refus net au libéralisme politique. Mais leur pouvoir n’était pas le règne du Christ. Que l’Etat se trouve sous la souveraineté de Dieu ne signifie pas qu’il doit être soumis à l’Eglise. Mais ce n’est pas là le seul danger. L’Eglise ne doit pas s’assimiler L’Eglise doit comprendre qu’elle appartient aussi à un autre royaume, différent et distinct de l’Etat terrestre dans lequel elle vit. Son style de vie, ses valeurs, ses rassemblements et son discours peuvent attirer certaines personnes, mais peuvent tout aussi bien irriter le reste de la population. On peut trouver cette réaction compréhensible ou non, justifiée ou non. Mais l’Eglise doit comprendre que, si elle suit fidèlement Jésus-Christ, elle constituera dans tout Etat un corps étranger qui irritera et suscitera des incompréhensions. En général, une population étrangère naturalisée aura tendance à s’adapter à la culture ambiante et, avec le temps, à s’y assimiler. C’est, d’ailleurs, ce que souhaite toute nation pour ses minorités. C’est aussi ce qui fut le sort de certaines Eglises qui se sont conformées en tout au style de vie, à l’éthique et à la culture de la société qui les entourait. A force d’être présentes au monde, elles y ont perdu leur identité. Parfois, elles sont devenues des Eglises d’Etat qui épousaient et favorisaient les aspirations de la nation. . Mais Paul déclare: “Ne vous conformez pas au monde présent” (Rom.12:2TOB). L’Eglise doit supprimer toute les causes

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d’irritation inutiles, qui proviennent de ses propres inconséquences. Mais une fidélité authentique au Seigneur irritera toujours le “présent monde mauvais”. L’Eglise doit s’y résoudre. Et pour ne pas se conformer, elle devra se tenir à l’écart du pouvoir, car le pouvoir corrompt. Pourquoi cette attitude réservée? Lorsque l’Eglise s’associe de trop près à l’Etat, ce n’est pas l’Etat qui s’inspire des principes de l’Eglise, ce sont les façon d’agir de l’Etat qui déteignent sur l’Eglise. On obtient des Eglises politisées et de la politique d’Eglise, mais jamais ni une politique, ni un Etat vraiment chrétiens. Quand l’Eglise entre dans l’Etat, l’Etat entre dans l’Eglise. Tout va bien tant que le bateau est dans l’eau; mais attention quand l’eau commence à entrer dans le bateau! On cherchera en vain un discours ou une démarche politique dans l’enseignement ou le comportement de Jésus. Les pharisiens étaient déçus de lui parce qu’ils cherchaient un messie politique, tandis que Jésus refusait ce rôle. Il fut tout aussi réservé vis-à-vis des Zélotes activistes et contestataires, que vis-à-vis des Hérodiens qui participaient au pouvoir. Ce silence et cette réserve vis-à-vis des choses de ce monde doivent être respectés par son Eglise. Paul écrivait à l’Eglise à Colosse: “Attachez-vous aux choses d’en haut, et non à celles qui sont sur la terre” (Col.3:2). Pas de religion civile! Une Eglise ne devrait jamais présumer que son pays est “chrétien” ni même qu’il devrait l’être. Le Saint Empire Romain Germanique, l’Etat puritain en Angleterre, la Pologne catholique, les Pays-Bas de Guillaume d’Orange, la Gèce orthodoxe et les Etats-Unis de la “majorité morale” ont tous pensé que leur nation avait une relation privilégiée avec Dieu. Ils n’ont pas voulu comprendre que “le présent monde mauvais” dans leur pays n’était en rien différent de ce monde dans n’importe quelle autre nation sur terre. Les messes chantées aux funérailles des rois des Belges, la prière offerte par l’aumonier du congrès des Etats-Unis et le couronnement des souverains britaniques dans l’abbaye de Westminster, feraient-ils de ces pays des nations chrétiennes? Ils ont tous aspiré à une religion nationale. Mais l’Eglise est universelle et n’a pas de nationalité; elle dépasse toutes les frontières; elle est supra-nationale. (Act.15:14; Apoc.5:9). Elle ne doit donc s’identifier à aucune nation, ethnie ou culture particulière. Des rois ont accordé des privilèges à l’Eglise pour promouvoir l’unité nationale et éliminer les divisions. On a créé des Eglises d’Etat et on a pensé créer des Etats chrétiens. C’est le constantinisme, qui assimile l’Eglise aux structures dominantes de la société et au status quo. Poussé à l’extrême, ce mélange a abouti à l’erreur théocratique où l’Eglise et l’Etat s’unissent, s’englobent mutuellement et mélangent leurs attributions. Cette erreur est à la base de tous les nationalismes “chrétiens”. Le catholicisme a favorisé le nationalisme croate, comme l’orthodoxie a attisé le nationalisme serbe. Les “chrétientés” dans ces deux pays les ont aidés à s’entre-déchirer. Le constantinisme a contribué à la déchristianisation actuelle de l’Europe. Les fonctions respectives de l’Eglise et de l’Etat ne doivent pas être mélangées (1) L’Eglise ne doit pas s’appuyer sur l’Etat pour remplir ses fonctions à elle ou pour exercer une plus grand influence. Charlemagne et les ordres religieux militaires, tels les Chevaliers Teutoniques, “convertissaient” des nations entières au christianisme par la force des armes. L’Eglise ne doit pas intervenir dans la vie civile. Elle ne doit imposer d’aucune façon des signes de sa foi, des cérémonies et des pratiques religieuses, ou une doctrine quelconque à ceux qui ne partagent pas ses convictions à elle. Aucun élément religieux n’a sa place dans une manifestation, un acte ou un édifice civil. Pas de religion civile! L’Eglise catholique avait une théocratie en Angleterre, de laquelle se libérèrent les anglicans - pour, à leur tour, en créer une autre. Les puritains se libérèrent de la théocratie anglicane en émigrant en Amérique - pour en former une autre dans les colonies de la Nouvelle Angleterre. Les baptistes et les quakers se libérèrent de cette théocratie puritaine en émigrant en Pennsylvanie où il y avait la liberté du culte et la séparation de l’Eglise et de l’Etat.

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Cette séparation s’étendit à tous les Etats-Unis après 1776. Le désétablissement de l’Eglise en Europe ne doit pas être considéré comme une menace pour elle. Au contraire, il est une opportunité pour l’Eglise de retrouver son caractère pélerin et missionnaire. Pas de privilèges! Si l’Etat promeut les affaires de l’Eglise, il aura tendance à user de pressions et de contraintes sur les irreligieux ou les religions “non-officielles”. L’Etat doit rester neutre et ne faire aucune distinction de principe entre les religions. Moins il y a de liens entre l’Eglise et l’Etat, plus il y a de liberté du culte et d’expression pour tous. Liberté religieuse (de pensée, d’association et d’expression) et pluralité sont indissociables. Tout établissement d’une Eglise par l’Etat a pour conséquence l’intolérance. L’Eglise officielle finit toujours par faire usage de ses prérogatives au dépend des autres groupements religieux. Ceux-ci subissent des discriminations, sont désavantagées, suspectées, traitées de “sectes”, laissées sans protection, persécutées, voir mises hors la loi. Les califats, théocraties musulmanes, ont été coupables du martyre de nombreux chrétiens. Pendant des siècles des majorités “chrétiennes” ont persécuté des minorités chrétiennes. La conversion de Saul de Tarse, persécuteur de chrétiens au nom du pouvoir, l’a transformé en Paul l’apôtre, chrétien persécuté et sans pouvoir. Quand l’Eglise a accédé au pouvoir sous l’empereur Constantin, d’Eglise persécutée, elle est devenue Eglise persécutrice. Le pouvoir de l’Eglise a amené à l’inquisition en Espagne, au “tribunal du sang” en Belgique, à l’exécution de Servet à Genève et des sorcières de Salem dans la colonie puritaine du Massachussets. Actuellement, les Eglises non-officielles en Pologne et en Russie sont harcellées par les Eglises officielles catholiques et orthodoxes tout comme elles le furent précédemment par le communisme. Accorder le statut d’Eglise d’Etat mène droit à l’intolérance. Mais ni l’Eglise locale, ni l’Eglise universelle n’ont le moindre moyen de contrainte. (2) L’Eglise ne doit pas se servir du pouvoir législatif de l’Etat pour imposer une éthique chrétienne à des non-chrétiens. Un principe de loi est inefficace pour changer les comportements humains. Paul nous explique que “les désirs mauvais sont excités par la loi” (Rom.7:5BFC). Pour que la transgression de la loi garde son attrait et son frisson, il faut une autorité pour l’interdire. Et encore: “la faiblesse humaine rendait la loi impuissante” (Rom.8:3BFC). Par contre: “Le péché n’aura point de pouvoir sur vous, puisque vous êtes, non sous la loi, mais sous la grâce” (Rom.6:14). Seule la grâce est vraiment efficace. Ce n’est pas par la loi qu’on va réformer la société. Plutôt: “C’est par la loi que vient la connaissance du péché” (Rom.3:20), pour que le pécheur ait recours à la grâce et au pardon par la foi en Jésus (v.21-24). N’est-il pas paradoxal que ceux qui prêchent la grâce veulent souvent imposer la loi? Quand on légifère contre le péché, le pécheur se révolte. Le péché devient clandestin, et l’hypocrisie s’installe. L’Evangile, ce n’est pas changer les lois, c’est changer les coeurs. Jésus n’oblige personne. Il dit: “Et vous, ne voulez-vous pas aussi vous en aller?” (Jean 6:67). Son message respecte la liberté de chacun. Pas de contrainte. On passe facilement de la seigneurie du Christ sur tous les aspects de la vie, à la seigneurie de l’Eglise sur les non-chrétiens. L’Eglise apostolique n’avait aucun moyen de pression sur la vie publique sinon par la prière et le Saint-Esprit. Si l’Eglise s’ingère dans les affaires de l’Etat (si elle fait de la politique), elle sera tentée de se servir de la force et de moyens de contrainte. Ce sera une action contre nature et une menace pour son intégrité spirituelle. Les Eglises radicalement séparées de l’Etat ont tout autant d’influence sur la moralité publique que celles qui participent au pouvoir. En Angleterre, on a décrit l’Eglise anglicane comme “le parti conservateur en prière”. Ce n’est ni à son honneur, ni à son avantage. On prétend que l’évangélisation et l’aide humanitaire directes ne suffisent pas; que l’Eglise doit aussi agir en s’engageant dans un activisme politique pour s’attaquer aux causes de la misère humaine et changer les structures d’oppression. On ironise que l’action louable du bon Samaritain

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ne suffisait pas - qu’il aurait fallu une vraie solution politique: mettre plus de policiers sur les routes contre les brigands. Mais les meilleures structures ne changent pas la nature humaine. Les limites de la répression sont vite atteintes. On ne peut changer la société sans changer ceux qui la composent. On s’occupe des symptômes sans soigner le mal profond. La tâche de l’Eglise est de permettre le changement intérieur de l’individu par l’Evangile. Les questions politiques changent - les besoins existentiels et spirituels demeurent. L’Eglise ne sera socialement efficace qu’en répondant à ces besoins-là. C’était après qu’on avait fait des disciples, qu’il fallait enseigner à ceux-là à observer tout ce que Jésus avait commandé (Mat.28:19,20). Si tous les membres de toutes les Eglises étaient de vrais disciples du Christ, qui gardaient tous ses commandements et respectaient toutes les lois de tous les pays, l’effet serait immédiat, radical, et bouleverserait le monde - sans activisme politique. Pendant mille ans en Europe (500-1500), l’Eglise médiévale a disposé du pouvoir politique pour changer les structures de la société et les causes des inégalités. Il n’en fut rien. Au moyen âge, la société n’est devenue ni plus libre, ni plus juste, ni plus prospère sous ces régimes “chrétiens”. Et il n’y avait pas davantage de chrétiens dans le monde en 1500 qu’en 500.C’est après que ce pouvoir théocratique fut brisé à la réforme que les plus grands progrès sociaux furent réalisés, surtout dans les pays du Nord de l’Europe. Il y eut aussi un nouvel élan missionnaire. De la sorte, l’Eglise cessa d’être elle-même “la masse”, et redevint le sel qui freine la corruption de la masse. Elle devint aussi d’avantage la lumière du monde. Qu’est-ce que l’Eglise peut contribuer que l’Etat est incapable d’apporter, sinon l’Evangile? Si l’Eglise est accapparée par tout ce qui est du ressort du gouvernement, qui assurera sa tâche à elle? L’Eglise connut sa plus grande vitalité pendant les deux premiers siècles de son existence, quand elle fut une minorité en pleine croissance dans un monde païen et hostile. (3) L’Eglise ne doit pas, par la législation, imposer à des non-chrétiens de financer les fonctions pastorales et d’évangélisation de l’Eglise. Lorsque Jésus a dit: “Je bâtirai mon Eglise”, pensait-il embrigader l’Etat dans cette entreprise? L’Etat n’a ni devoir d’évangélisation, ni aptitude pour l’enseignement de la parole de Dieu, ni responsabilité pour l’édification de l’Eglise. Lorsqu’il s’occupe de ces choses, il fait pis que mieux. L’Eglise “s’édifie elle-même dans la charité” (Eph.4:16). A force de vivre au crochet des Etats, l’Eglise devient la “grande prostituée” avec qui “les rois de la terre se sont livrés à la débauche” (Apoc.17:1,2; 18:3). Nous reviendrons plus loin sur la question des subsides de l’Etat à l’Eglise. Un parti politique chrétien? De tels partis, d’inspiration catholique, existent dans certains pays d’Europe méridionale et en Amérique latine. D’autres, d’inspiration protestante, existent aux Pays-Bas, en Scandinavie et en Amérique centrale. D’autres encore, orthodoxes, en Europe de l’Est. Un parti politique chrétien aurait beau prétendre ne représenter aucune Eglise, les laïques y verraient une infraction au principe de la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Pour eux, n’importe quelle collectivité chrétienne serait l’Eglise. Mais, pour les croyants, qu’y aurait-il de mal à agir par le moyen d’un parti chrétien? Le parti politique chrétien déploie une action contre nature Présenter le christianisme sous un jour politique, c’est le dénaturer, étant donné que, pour le présent, la Bible ne préconise aucune forme particulière de gouvernement (voir plus haut). En cas de succès aux élections, on pourrait difficilement prendre le pouvoir au nom du Christ étant donné que Jésus a dit: “Mon royaume n’est pas de ce monde” (Jean:18:36). Si c’est le cas, il ne faut pas que son corps, l’Eglise, en tant que telle, s’occupe des royaumes de ce monde. Simone Weil écrivait un opuscule intitulé: “Note sur la suppression générale des partis politiques” (Gallimard. Climat. 91 pages). Nous citons: “La première fin et, en dernière analyse, l’unique fin de tout parti politique est sa

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propre croissance, et cela sans aucune limite” - “tout parti est totalitaire en germe (...) s’il ne l’est pas en fait, c’est seulement parce que ceux qui l’entourent ne le sont pas moins que lui.” Comment donc l’Eglise du Christ pourrait-elle entrer dans ce jeux-là, s’identifier aux structures du pouvoir? Un parti qui fait une politique capable de gagner aux élections, ne pourrait être vraiment chrétien. Le parti politique chrétien comprommet le nom du Christ Comment un chef d’Etat, élu sous une bannière chrétienne, pourrait-il agir chrétiennement sur toute la ligne sans jamais trahir l’Evangile? Face à un aggresseur, son Etat ne pourrait tourner l’autre joue (Mat.5:39), ni rendre le bien pour le mal (Rom.12:17). Ce qui est bon pour sa nation à lui est peut-être nuisible pour ses frères en Christ citoyens d’une autre nation. On devient facilement l’otage du système qu’on voudrait changer. Tout lien avec l’Etat compromet l’Eglise en l’obligeant à un accord explicite ou tacite avec les torts de l’Etat. Quand un parti chrétien accède au pouvoir, tous les dysfonctionnements de l’Etat rejaillissent sur le nom du Christ et le souillent. Quoi qu’il fasse, le parti chrétien au pouvoir sera critiqué par l’opposition et par la presse. Sans compter que des partis “chrétiens” au pouvoir en Italie, en Allemagne et ailleurs ont perdu le pouvoir à cause de scandales financiers. Comment enrôler Dieu dans un tel combat politique? Ce serait prendre le nom de Dieu en vain, atteler Jésus à sa charette, abuser de son saint nom à des fins intéressées. Le parti politique chrétien divise l’Eglise Certains croyants, conservateurs de nature, seront politisés à droite. D’autres croyants, de mentalité progressiste, seront politisés à gauche. Tous peuvent être également sincères. Le catholicisme et le judaïsme ont chacun deux ailes sur les questions politiques. On retrouve ces deux ailes dans les grandes dénominations protestantes. Quel mouvement politique pourrait-il jamais parler au nom de l’Eglise toute entière? Y a-t-il une seule politique chrétienne sur le nucléaire, sur l’immigration, sur la fiscalité, sur l’environnement, sur l’emploi, etc.? S’afficher comme politique chrétien c’est prétendre parler politique au nom du Christ et au nom des autres chrétiens. Ceux-ci sont-ils tous d’accord avec toutes nos prises de position? Ce serait suggérer que ceux qui mèneraient une autre politiques ne seraient pas vraiment chrétiens - ou le serait moins. Introduire la politique dans l’Eglise, c’est la diviser sur des questions des biens de ce monde. Ce serait oublier qu’il n’y aura jamais une seule politique chrétienne, mais uniquement des chrétiens dans la politique. Quand les normes et les valeurs chrétiennes entrent sur la scéne politique, elles se sécularisent. Le parti politique chrétien fait obstacle à l’évangélisation Se présenter à l’électeur sous une bannière chrétienne, ferait croire à des incroyants que, pour devenir chrétien, ils doivent changer leurs idées politiques. Quelqu’un peut toujours changer ses vues après s’être converti à Jésus-Christ. Mais comment conduire quelqu’un au Seigneur quand on lui a bouché les oreille avec un discours de “politique chrétienne” avec laquelle il n’est pas d’accord? On perd de la crédibilité en tant que témoin du Christ quand on commence à parler politique. On devient aux yeux du non-croyant, un simple groupe de pression comme un autre. Tout discours politique de la part de l’Eglise, qu’il soit de droite ou de gauche, est un obstacle à l’évangélisation. Les questions politiques changent, mais les besoins essentiels de l’homme demeurent. Le plus grand obstacle qui empêche les musulmans et les juifs de s’ouvrir au Christ aujourd’hui est la façon dont ils ont été traités par le Christianisme théocratique: les croisades et l’anti-sémitisme. La mentalité théocratique considère le monde islamique et le monde laïque comme des ennemis, non comme des champs missionnaires. Des considérations sécuritaires prennent le pas sur la responsabilité de témoigner du Christ à la personne musulmane ou à l’athée militant. Le témoin du

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Christ doit se demander si ses prises de position aideront un homosexuel qui meurt du sida à être réceptif à son message de salut; ou si son activisme permettra à une femme en dépression après avoir avorté, à chercher auprès de lui une aide spirituelle. Une femme de mauvaise vie devrait pouvoir se sentir autant à l’aise avec une chrétienne qu’avec Jésus? L’Eglise n’à qu’un seul message pour le monde des incroyants, à l’exclusion de tout discours moralisateur ou politique: Paul décrit son approche des païens de Corinthe: “J’avais décidé de ne rien savoir d’autre, durant mon séjour parmi vous, que Jésus-Christ et, plus précisément, Jésus-Christ crucifié” (1Cor.2:2BFC).? Au temps de Pierre et de Paul, les “étrangers et voyageurs” chrétiens ne faisaient pas la leçon aux incroyants sur les normes et les valeurs chrétiennes. Ils ne s’attendaient pas à ce que l’empire romain adopte ces normes et valeurs. L’Evangile est une bonne nouvelle, non pas une série de bons conseils. Pour s’en persuader, il suffit de faire l’analyse de toutes les prédications du livre des Actes qui s’adressaient à des non-chrétiens. Ceux-ci se voyaient confontés à une seule question, à l’exclusion de toute autre: “Que faites-vous de Jésus-Christ?”. Un témoignage chrétien unifié est possible à la seule condition que tous les témoins s’en tiennent strictement au message de la foi au Christ. Qu’est-ce donc que “témoigner de sa foi?” Est-ce énumérer les valeurs et les normes chrétiennes, ou annoncer “Jésus-Christ seul et Jésus-Christ crucifé? Les disciples du Christ appuyaient leur prédication par un style vie radicalement différent de celui de leur entourage. Mais c’était une éthique qu’ils considéraient être d’application uniquement à eux-mêmes. Le parti politique chrétien combat sur un terrain qui lui est étranger et à armes inégales L’Eglise n’est pas obligée de répondre à toutes les questions et à toutes les attentes d’un monde matérialiste. Elle n’a pas à se justifier devant ce monde pour ce qu’elle peut apporter directement à la société. Ce n’est pas à Dieu d’entrer dans le plan des hommes. Il veut que les hommes entrent dans son plan à lui. L’Eglise “responsable” n’est pas celle qui prend des responsabilités dans l’Etat, mais celle qui accepte les responsabilités que lui confie son Seigneur. C’est celle qui comprend ce qui est actuellement au programme du Christ quand il dit: “Je bâtirai mon Eglise”. Le contraire de “politique” est “a-politique”. L’Eglise qui s’engage dans la discussion politique se trouve en porte-à-faux. La prédication dans l’Eglise peut aborder des questions éthiques en les appliquant aux seuls croyants, mais sans les appliquer à la société. Dans sa bouche, le discours politique a toujours des effets pervers. On entend parler de “la voix prophétique de l’Eglise” qui consisterait à ce qu’elle se prononce sur toutes sortes de questions de société. On cite comme exemple les prophètes sous l’Ancienne alliance qui exhortaient la nation et ses rois. Mais on oublie qu’il s’agissait de la théocratie d’Israël. Dans l’Eglise, “la prophétie, au contraire, est un signe, non pour les non-croyants, mais pour les croyants” (1Cor.14:22). Le message de l’Eglise pour les non-croyants, c’est la Bonne Nouvelle, non une “voix prophétique” quelconque. Le but de la politique c’est de gagner la faveur des électeurs. Le chrétien-individu qui mène sa politique honnêtement, promettra à l’électeur ce dont il a besoin et ce que Dieu veut pour lui - et perdra l’élection. Le politique non-chrétien lui promettra ce qu’il réclame - et gagnera l’élection. Suivre Jésus, c’est accepter de passer pour perdant. Ce n’est pas tout gagner, c’est s’assurer l’approbation et la présence du Christ. Jésus dit: “Malheur, lorsque tous les hommes diront du bien de vous, car c’est ainsi qu’agissaient leurs pères à l’égard des faux prophètes” (Luc 6:26). L’Eglise qui réussit en politique devient forcément populiste. “Etroite est la porte, reserré le chemin qui mènent à la vie, et il y en a peu qui les trouvent” (Mat.7:14). L’Eglise se montre sous son vrai et son meilleur jour quand elle est une minorité. La “chrétienté” a souvent été majoritaire dans divers pays. Mais il faut maintenir la distinction entre “Eglise et “chrétienté”. Qu’est-ce-qui est maintenant au programme du Christ - christianiser le monde, ou “choisir du milieu des nations un peuple qui porte son nom”? (Act.15:14). C’est le propre de l’adolescent de se rebeller contre la société, contre “le

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système”. Quand le christianisme devient une religion civile, il s’assimile au “système”. Mieux vaut pour les jeunes issus de familles chrétiennes de se rebeller contre un “système” non-chrétien que contre un “système chrétien”. Refuser le parti politique chrétien, ne constitue pas une fuite On ne peut accuser l’Eglise qui, en tant que telle, refuse l’engagement politique, de “fuir” hors du monde et de se réfugier dans le domaine “privé”. Comme si la Bonne Nouvelle n’était qu’une question d’opinion personnelle, de sentiments religieux, d’idées philosophiques, et non de faits historiques. Jésus “a parlé ouvertement au monde...et n’a rien dit en secret” (Jean 18:19,20) et on peut encore lire ses paroles aujourd’hui. Il est mort physiquement aux yeux de tous. Il est ressuscité corporellement et est apparu publiquement à plus de 500 personnes à la fois (1Cor.15:6). Et rien n’est davantage public que son ordre missionnaire d’annoncer la Bonne Nouvelle qui serait proclamée sur les toits (Luc 12:3), dans les chemins et le long des haies (Luc 14:23), et jusqu’aux extrémité de la terre (Act.1:8). Sans compter que l’activité missionnaire de l’Eglise a toujours comporté un volet humanitaire, social, médical et éducatif important. Avant son départ, Jésus annonça: “Alors le signe du Fils de l’homme paraîtra dans le ciel, toutes les tribus de la terre se lamenteront, et elles verront le Fils de l’homme venant sur les nuées du ciel avec puissance et une grande gloire” (Mat.24:30). Quoi de plus objectif et public? Aussi, l’engagement de chrétiens-individus dans la politique et dans l’associatif (voir plus haut) est tout le contraire d’une fuite hors du monde. Il suffit à l’Eglise de s’engager dans sa vraie mission qui est d’obéir au dernier ordre de son Seigneur d’annoncer “publiquement” ces vérités à toutes les nations - ordre répété cinq fois dans l’Ecriture. Le contraire de “privé” n’est pas “politique”, mais “public”. Il faut distinguer espace public et espace politique. La séparation de l’Eglise d’avec l’Etat ne relègue pas celle-ci dans le domaine privé. Ses réunions sont publiques, ouvertes à tous. L’Eglise a accès à la sphère publique des médias (radio, télévision, internet, presse), de la rue, et de la publicité. C’est un espace ouvert à tous où la liberté de pensée et d’expression jouent pleinement. Décrier une foi “individualiste” c’est oublier qu’une foi qui n’est pas personnelle n’est pas une foi authentique. C’est aussi oublier que l’action des chrétiens la plus efficace dans le domaine public se manifeste quand ils y sont présents individuellement comme le sel qui imprègne la société, plutôt que collectivement comme des croisés qui s’y attaquent. Si l’Eglise, en tant que telle, ne doit pas s’ingérer dans les affaires de l’Etat, le contraire est également vrai. L’Etat ne doit pas s’ingérer dans les affaires de l’Eglise Il arrivait, dans l’Eglise à Corinthe, que des chrétiens qui avaient entre eux un différent, aillent en justice devant les magistrats de la cité (1Cor.6:1-8). L’apôtre les sermonne en déclarant que des juges incroyants “sont des gens dont l’Eglise ne fait aucun cas” (v.4) - “des gens qui ne comptent pour rien dans l’Eglise” (BFC). Comment dire plus clairement que l’Etat n’a pas à intervenir dans l’Eglise. Le Chrétien qui intente un procès à un frère ne rend pas seulement un mauvais témoignage devant des non-chrétiens, il expose l’Eglise à une ingérence de l’Etat dans ses affaires. Paul déclare l’Etat incompétent dans de tels cas. Mais il n’interdit pas qu’un croyant lésé aille en justice contre un incroyant qui lui aurait fait du tort. L’indépendance de l’Eglise, en tant que telle, ne serait pas mise en cause par une telle démarche. Paul déclare que les magistrats, qui comptent pour tout dans l’Etat (Rom.13), ne comptent pour rien dans l’Eglise. Cependant, au cours de l’histoire de l’Eglise, il y a eu ingérance de l’Etat dans ses affaires, de différentes manières. L’Etat ne doit pas déterminer la religion de ses sujets

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Le principe appliqué dans l’antiquité, par l’Islam, par l’institution catholique, et dans certains pays protestants après la réforme, était: “à chacun la religion de son roi”. Selon cette conception, la religion des individus ne dépend pas de leur choix personnel, mais de celui de leur prince, de leurs autorités politiques. Il en résultait les guerres de religion, un pouvoir exercé par l’Etat sur l’Eglise, le monopole de la religion par l’Eglise dominante, et la mise hors-la-loi des autres groupes religieux. Dans cette optique, l’Eglise n’était pas un des éléments de la société, mais était, elle-même la société; l’air même que l’on respirait. Et la société était l’Eglise. L’Edit de Nantes, malgré ses lacunes, a eu le mérite de distinguer, en France, entre appartenance nationale (citoyenneté), et appartenance religieuse. Les anabaptistes et les mennonites de la réforme radicale ont refusé le principe d’une religion imposée. Ils avaient la conviction que l’Evangile de Jésus-Christ exige le respect de la liberté de chacun; qu’il est un appel qui demande une réponse personnelle. Mais cette réponse n’est juste et vraie qu’en l’absence de toute contrainte. On ne naît pas chrétien, on le devient. Ils revendiquaient pour tous, et pas seulement pour eux-mêmes, le droit de croire, de pratiquer, de célébrer leur culte et de propager leur foi sans limites autres que celles du respect des lois du pays. Ils accordaient aussi à l’autre la liberté d’errer dans ses convictions. E. de Pressensé, pasteur des Eglises libres déclarait: “L’honneur d’une religion est qu’on puisse ne pas la pratiquer.” L’Etat ne doit pas intervenir dans la nomination des responsables de l’Eglise Thomas Hobbes (1588-1679) déclare que l’Etat est de droit divin, ce qui lui confère le droit d’interpréter la Bible et d’être le chef de l’Eglise. Eraste, théologien allemand du 16ème siècle, faisait dépendre l’Eglise de l’Etat et la plaçait sous son contrôle, sauf en ce qui concerne les questions doctrinales. Les allemands appelaient ce système le “Césaro-papisme”. En Angleterre, au 17ème siècle, l’érastianisme devint un puissant instrument de tyrannie. Encore aujourd’hui les évêques de l’Eglise anglicane sont nommés par la couronne. En Suède, depuis le 17ème siècle, le roi a été le chef de l’Eglise officielle et les évêques ont été nommés par le gouvernement. Le primat de l’Eglise luthérienne de Suède déclarait récemment que le statut de l’Eglise officielle n’apportait à celle-ci que des désavantages. L’Eglise en Suède est maintenant désétablie. La notion des “droits de l’homme” a limité l’ingérence de l’Etat dans les affaires de l’Eglise Les révolutions américaine (1776) et française (1789) ont inauguré le principe philosophique des “Droits de l’homme” Celui-ci ne vient ni de l’hindouisme, ni du bouddhisme, ni de l’animisme, ni de l’Islam, ni du catholicisme romain ni des Lumières françaises, ni de l’athéisme, ni du marxisme, mais du judaïsme et du christianisme protestant. La déclaration d’indépendance qui fonda les Etats-unis mentionne “le Juge suprème de l’univers” et “la divine Providence” et déclare que c’est le “Créateur” qui a doté les hommes de “certains droits inaliénables”. Ce document précéde de treize ans la déclaration française des droits de l’homme et celle-ci s’en est inspirée sur certains points. Dans son préambule, l’Assemblée nationale reconnaît et déclare ces droits “en présence et sous les auspices de l’Etre suprême.” Les penseurs des Lumières allemands et anglais ne seront ni anticléricaux, ni antireligieux, mais partisans de la “religion éclairée”, moderniste ou déiste. La révolution en France s’est durcie par la suite sous l’influence de la pensée des Lumières françaises, celle de Rousseau et de Voltaire. Ce fut le régime de la terreur, qui actionna la guillotine -1792-94. Par contre, plusieurs auteurs ont développé la thèse qu’en général, la révolution française était davantage une révolte contre le pouvoir du cléricalisme catholique que contre le christianisme en tant que tel. De nombreux concepts tirés de la Bible ont fondé la notion des droits de l’homme: La fraternité

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entre les hommes (Gen.9:5) et l’inviolabilité de la personne humaine créée à l’image de Dieu (Gen.9:6) comme fondements du gouvernement humain (voir le début de ce chapitre). La notion de la libération politique ancrée dans la délivrance du peuple de Dieu de l’esclavage en Egypte. Les nombreux éléments strictement civils de la législation mosaïque. Les exhortations des prophètes d’Israël aux autorités, pour qu’ils protègent les droits de l’individu, favorisent la justice sociale et fondent l’Etat de droit. L’égalité des hommes devant la loi, explicite dans l’interdiction aux juges de faire acception de personnes. L’exigence d’une pluralité de témoins dans les procès. Et finalement, les libertés civiles ancrées dans la mission de Jésus: La Bonne Nouvelle aux pauvres, la libération aux captifs, et la liberté aux opprimés (Luc 4:18-21). La notion des “droits de l’homme” a conduit au principe de “laïcité” qui, à son tour inaugure la séparation de la société civile de la société religieuse, de l’Eglise et de l’Etat. Ce principe a connu une évolution qui permet de reconnaître plusieurs degrés de laïcité. Ces degrés ont parfois été également des étapes qui, poussées à l’extrème sont devenues des dérives qui en ont trahi l’esprit en portant atteinte à la liberté religieuse. 1) La liberté de conscience qui permet à chacun de croire ce qu’il veut, et accorde le droit à l’erreur. 2) La neutralité et l’incompétence de l’Etat par rapport aux religions. L’école publique neutre. 3) La pluralité qui accorde à tous la liberté d’expression. 4) Les croyants en Dieu qui revendiquent pour les autres le droit à l’athéisme en se fondant sur la nécessité d’une conversion et une profession de foi personnelles. Ce n’est ni indifférence ni trahison ni lâcheté car ils continuent d’appeler chacun à la foi en Dieu. 5) La liberté de proclamer ses convictions athées ou religieuses, d’amener l’autre à les embrasser (sans pression ni contrainte). Le droit d’abandonner la religion ou l’incroyance et de changer de religion. (La Grèce a été condamnée par l’Union Européenne pour interdiction de prosélytisme). 6) Le refus de l’Etat de reconnaître un culte quelconque ou de définir ce qu’est une secte. Le droit d’association. 7) Le droit d’une religion d’être ce qu’elle est, que cela plaise ou non; d’enseigner à ses adeptes, à l’intérieur de ses rassemblements, une éthique qui n’accepte pas l’avortement, l’euthanasie, les actes homosexuels, etc., mais sans stigmatisation. Permettre le débat contradictoire, la confrontation des valeurs et des éthiques, c’est le contraire de la tendance sectaire. 8) Le pluralisme qui prétend que toutes les croyances sont également valables. 9) Le relativisme qui interdit de dire que quelque chose est faux, que quelqu’un a tort; qui prétend que toutes les idées sont également justes, qu’une chose et son contraire peuvent être également vraies, qu’il n’y a rien d’absolu qui puisse départager les opinions et les morales. La négation de l’absolu qui devient à son tour un absolu (“Il n’y a absolument pas d’absolu; en vérité il n’y a pas de vérité.”). 10) La fausse tolérance qui stigmatise comme intolérant et arrogant le fait de prétendre que ce qu’on déclare est la vérité; qui ne permet pas aux idées d’être affirmées ni de se confronter. 11) Une conception de la laïcité qui entend limiter l’évangélisation aux lieux de culte. Une hostilité à la différence religieuse appuyée. “Le religieux divise, est conflictuel”, etc.

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12) Le “laïcisme” qui prétend que conviction religieuse est forcément synonyme de superstition, d’obscurantisme, de fanatisme, et d’intégrisme; que toute conviction philosophique entrave la liberté de pensée et est incompatible avec la démocratie. 13) La laïcité officielle qui véhicule une conception matérialiste de la vie humaine (qui finit par remplacer la religion officielle). Toute souveraineté réside essentiellement dans la nation. Il y a immixtion de l’Etat dans la famille et dans l’Eglise. L’autorité dans ces sphères, des parents et des conducteurs religieux, n’est pas respectée. 14) La laïcité militante anti-secte (parfois assistée par la religion majoritaire) qui rédige un catalogue des mouvements dits “sectaires”et livre celui-ci aux autorité judiciaires et/ou aux médias sans préalablement consulter tous les intéressés ni les sociologues et qui, par conséquent, ne respecte pas la présomption d’innocence ni le droit à la défense. 15) L’athéisme d’Etat comme en URSS et en Corée du Nord, animé par un sentiment antireligieux passionnel et intolérant. Il définit quelles sont les religions soi-disant tolérées, oblige les Eglises d’être enregistrées, les soumet à une surveillance policière, les taxe de manière discriminatoire, leur interdit l’enseignement de la religion aux mineurs d’âge, et inflige mille autres brimades. L’Etat ne doit pas interdire les manifestations religieuses qui respectent l’ordre public

La liberté d’expression sur des questions philosophique, religieuse et sociale doit être préservée pour tous, y compris celle de critiquer les croyances des autres - tout en respectant leurs personnes, que celles-ci soient croyantes ou non-croyantes. La possibilité d’un entre-choc des idées doit être protégé. La déclaration française des droits de l’homme (1789) précisait: “Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi.” Et encore: “La loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société”. L’Etat ne doit établir ni publier une liste de sectes, étant donné qu’il est incapable de donner une définition de la secte. Il ne doit pas cataloguer d’office certaines minorités religieuses de “nuisibles”. Il doit se borner aux indices objectifs de la dangerosité des pratiques. Il lui suffit de poursuivre les infractions aux lois civiles et criminelles existantes, qui protègent suffisamment les citoyens contre les abus éventuels. Et ces infractions doivent être objectivement établies. Cependant, les autorités locales sont souvent hésitantes à accorder des permissions pour des manifestations publiques en plein air, ou une place sur un marché. Si elles ne refusent pas carrément, elles se cachent derrière des lenteurs administratives ou des réponses évasives.

Le sujet des sectes fait recette dans les médias et est souvent repris par la religion dominante qui a l’habitude du monopole, craint la libre-concurrence et traite de “secte” tout ce qui n’est pas elle. Que ce soit la laïcité officielle, ou la religion officielle, on taxe instruction religieuse “d’endoctrinement”, évangélisation de “propagande ou d’offensive”, formation de “bourrage de crânes”, enthousiasme de “fanatisme”, influence de “contamination ou d’infiltration”, croissance de “prolifération”, foi de “croyance ou crédulité”, membres “d’adeptes”, adhésion “d’embrigadement”, dévouement de “radicalisme”, bénévolat de “travail clandestin”, libéralité “d’exploitation”, spiritualité de “névrose”, exhortation de “manipulation”, croire au miraculeux “d’irrationnel ou de superstition”, les enseignants de “gourous”, ce qui est majoritaire dans un autre pays mais minoritaire dans le sien “d’exotique” ou de “groupuscules”, liberté religieuse “d’extrême tolérance”, camps de vacances de “détournement de la jeunesse”, etc. Ou on justifie la discrimination en l’appelant: “vigilance judiciaire.” Et souvent, on n’en reste pas là. L’Etat ne doit pas persécuter l’Eglise

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Y a-t-il encore des persécutions de nos jours? L’Ecriture présente les Etats comme étant le plus souvent hostiles au Christ et à son Eglise: “Les rois de la terre...se sont ligués contre le Seigneur et contre son Messie”(Act.4:26-28); “Si les chefs de ce siècle avaient connu cette sagesse, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de gloire”(1Cor.2:8; voir aussi Luc 23:1-12); “S’ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront aussi”(Jean 15:18-25), etc. Il ne faut pas juger de la persécution de l’Eglise dans le monde sur base des 200 dernières années en Occident , mais en tenant compte des 2000 ans de son histoire dans toutes les nations de la terre. Les nombreuses prédictions de Jésus et des apôtres à ce sujet se sont largement réalisées, et non seulement aux trois premiers siècles. Le mot français: “martyr” est dérivé du mot grec martus, qui signifie “témoin”. Depuis plusieurs années il y a eu plus de 150 000 martyrs chrétiens chaque année dans le monde. (David B. Barrett, World Christian Encyclopedia; Oxford University Press, 2001, vol.1: p.11). La définition d’un “martyr chrétien” dans cet ouvrage est la suivante: “Un croyant en Christ qui perd la vie prématurément dans une situation de témoignage en conséquence d’une hostilité humaine”. Les Etats sont les plus grands persécuteurs. Le 20ème siècle a été plus meurtrier que tous les siécles de l’ère chrétienne précédents réunis. Le harcèlement et les sévices contre l’Eglise ne sont jamais l’exception sur le plan mondial. Si l’Etat n’en est pas toujours la cause directe, il les permet et les favorise souvent. Le chrétien ne doit pas rechercher la persécution, en masochiste, ni céder à la paranoïa en la voyant partout, mais y faire face calmement avec les forces du Seigneur. L’Eglise universelle en pays libres aidera et priera pour ses frères et soeurs en pays persécuteurs et fermés. Quelle est la cause principale du martyre? Jésus demande qu’on le confesse publiquement devant les hommes (Mat.10:32). Son ordre missionnaire est repris cinq fois dans le Nouveau Testament. Quand on interdit aux apôtres de parler en son nom, ceux-ci déclarent qu’il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes (Act.4:19; 5:29). Paul s’écrie: “Malheur à moi si je n’évangélise” (1Cor.9:16). Une interdiction d’extérioriser sa foi, même si la liberté de conscience est officiellement tolérée (comme dans certains états communistes ou islamiques), cette limitation, sur le long terme, a des conséquences néfastes pour un christianisme authentique, donc évangélisateur. Il en résulte que certains cherchent à s’exiler et la communauté est affaiblie. L’ostracisme provoque un repli sur soi. On vit dans la peur. Certains se laissent assimiler. Il se forme des ghettos. On dissimule sa foi par prudence, pour avoir le droit de vivre. On a le complexe d’une minorité. A long terme, l’identité se transmet par une culture familiale, sans engagement personnel envers le Christ. La religion devient une affaire sociologique. Mais le christianisme vivant ne persiste que par la Bonne Nouvelle annoncée. Cependant, les libertés civiles sont présentées dans l’Ecriture comme dépendantes des libérations plus fondamentales qui sont l’affranchissement de l’esclavage du péché (Jean 8:34; Rom.6:14; Apoc.1:5), du pouvoir de Satan (Mat.12:25-28; Rom.16:20; Héb.2:14,15) et de la servitude de la corruption, de la maladie et de la mort (Rom.8:20-23; 1Cor.15:54-57). De tous temps des chrétiens vivant sous des régimes intolérants sont restés spirituellement et intérieurement libres tandis que leurs persécuteurs demeuraient sous l’empire de leurs mauvais penchants, du Malin et de la déchéance. Si l’Eglise doit se méfier des atteintes à la liberté religieuse de la part de l’Etat, elle doit également se méfier de ses faveurs. L’Etat ne doit pas subsidier l’Eglise Le roi Béra de Sodome, en guise de reconnaissance pour services rendus au pays par Abraham, lui dit: “Prends pour toi les richesses” (Gen. 14:8-21). Le père de tous les croyants répond: “Je ne prendrai rien de tout ce qui est à toi, pas même un fil, ni un cordon de soulier, afin que tu ne dises pas: J’ai enrichi Abrahm. Rien pour moi!” (14:22-23). Il ne voit pas dans ce geste du chef d’Etat une gratuité innocente. Il prévoit qu’on lui rappellera plus tard cette faveur et que le roi veut faire de

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lui son obligé; cela sent le piège. L’Etat a souvent cherché à avoir l’Eglise à sa solde pour mieux la contrôler et s’en servir à ses propres fins. Les ministres du culte qui vivent de subsides sont des fonctionnaires de l’Etat. En tant que tels, ils doivent tenir compte des intérêts de l’Etat, tandis que ceux-ci ne correspondent pas toujours aux intérêts de l’Eglise. Ils ne devraient pas avoir de comptes à rendre à l’Etat pour leur travail pastoral ou d’évangélisation. Qui paye commande. Certains Etats qui subventionnent les cultes, s’interdisent dans les textes officiels, tout ingérence dans les affaires des Eglises subsidiées. Et celles-ci se prétendent séparées de l’Etat. Mais, à la longue, une telle semi-séparation s’avère illusoire. Tôt ou tard, un pasteur en arrive à devoir choisir entre sa fidélité au Christ, et ses responsabilités envers l’Etat qui le rémunère. “Nul ne peut servir deux maîtres” (Mat.6:24). La majorité des pasteurs de l’Eglise officielle subsidiée en Allemagne ont soutenu le régime hitlérien, au contraire de ceux des Eglises libres. Si l’Eglise veut être libre de tout contrôle de l’Etat, elle doit renoncer à tout privilège. L’histoire de l’Eglise nous apprend que la pauvreté et la persécution ne peuvent pas détruire l’Eglise, mais que l’avoir et le pouvoir peuvent l’apprivoiser. Qui s’assemble se ressemble. Tout subside de l’Eglise par l’Etat finit aussi par infecter l’Eglise. L’argent de l’Etat amène l’Eglise à agir d’avantage selon le principe du pouvoir que selon celui du service, et davantage sur le plan temporel que sur le plan spirituel. Et la moralité de l’Etat déteint sur l’Eglise plutôt que le contraire. Au premier siècle, l’idée ne serait venue à personne de s’attendre à un soutien pécuniaire en faveur du culte de la part du pouvoir romain. L’Eglise et l’Etat, pour fonctionner selon leurs natures et leurs vocations respectives, doivent rester indépendants l’un de l’autre et libres l’un par rapport à l’autre. L’homme d’Etat français, Alexis de Tocqueville écrivait le commentaire suivant en 1830, après une visite à la nouvelle république des Etats-Unis: “L’indépendance des Eglises américaines face aux pouvoirs publics accroît leur influence à long terme en protégeant leur intégrité et en gardant leurs portes ouvertes à tous. En diminuant le pouvoir apparant de la religion, on accroît sa vraie puissance”. Être proche du pouvoir est grisant, ennivrant. Les politiques savent manipuler les leaders chrétiens et se servir d’eux, car ces derniers sont toujours naïfs en politique. Aussi, une trop grande identification de l’Eglise avec le pouvoir en place lui ôte une partie de sa crédibilité auprès des classes de la société qui ne participe pas à ce pouvoir, ou qui seraient même dans l’opposition. La méfiance des populations laborieuses face à l’institution officielle et subventionnée a souvent empêché l’Eglise de remplir sa mission auprès d’elles. Et comment un pasteur subventionné par l’Etat trouverait-il une écoute auprès d’un incroyant qui n’est pas d’accord de contribuer par ses impôts à la rémunération des ministres du culte? Immédiatement après son exposé sur les responsabilités de l’Eglise envers l’Etat (Rom.13:1-7) Paul déclare: “Ne devez rien à personne” (v.8). L’Eglise doit tenir farouchement à son indépendance face au pouvoir. Cela fait partie d’un principe plus général: “Maudit soit l’homme qui se confie dans l’homme, qui prend la chair comme appui...Il ne voit point arriver le bonheur...Béni soit l’homme qui se confie en l’Eternel , et dont l’Eternel est l’espérance! Il est comme un arbre planté près des eaux” (Jér.17:5-7). Un cadeau empoisonné. Paul disait du soutien financier qu’il recevait en tant qu’apôtre, de l’Eglise à Philippe: “Ce n’est pas que je recherche les dons ; mais je recherche le fruit qui abonde pour votre compte” (Phil.4:17).Pour Paul, l’importance de l’offrande se trouvait moins dans l’aide qu’elle apportait à son ministère, et bien plus dans les richesses spirituelles que récolteraient les Philippiens généreux. Les subsides, en supprimant la nécessité de consentir des sacrifices pour l’entretien des missionnaires, des pasteurs et des lieux de culte, sont un appauvrissement spirituel pour l’Eglise. Ils ne favorisent ni la foi, ni la consécration, ni le courage. Malachie écrivait au peuple de Dieu: “Apportez à la maison du trésor toutes les dîmes...et vous verrez si je n’ouvre pas pour vous les écluses des cieux, si je ne répands pas sur vous la bénédiction en abondance” (3:10). La libéralité

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contribue à la prospérité de l’âme. L’Eglise qui dépend de l’Etat ressent moins la nécessité de dépendre de Dieu. Ses membres perdent le sentiment de responsabilité personnelle et l’esprit de conquête. Ils auront toujours besoin des sous-produits spirituels de la libéralité. Dieu a donné un modèle pour l’Eglise qui permet qu’elle survive sous n’importe quel régime politique, du plus favorable au moins favorable. L’Eglise d’Etat est à la merci de tout changement de régime politique défavorable. L’institution catholique en France a reçu un coup de massue à la révolution française. L’Eglise d’Etat Orthodoxe Russe, ainsi que l’Eglise luthérienne officielle en Allemagne de l’Est ont subi le même sort quand vint le communisme. Elles furent décapitées et, faute de reconnaissance officielle, de privilèges et de subsides, furent réduites pendant des décennies à l’état de communautés locales, voir à la clandestinité. Mais ce qui en restait correspondait davantage à la réalité spirituelle, était plus vivace, et recevait de l’étranger un soutien de la part de chrétiens de tous bords. Nous avons suffisamment insité au début de cet ouvrage sur le fait que l’autonomie de l’Eglise locale est indispensable pour que soit favorisé l’unité de l’Eglise universelle. Il est évident que l’institution ecclésiastique en général, et l’Eglise d’Etat en particulier sont source de division, si bien à l’intérieur de la nation, qu’à l’échelle mondiale. Mais cette autonomie de l’Eglise locale est, de surcroît, l’élément qui permet à l’Eglise du Christ de survivre et même de prospérer sous les régimes les plus défavorables. De tels régimes n’ont pas été l’exception dans le monde pendant 20 siècles. Et les Eglises d’Etat ont été à la base des persécution contre les Eglises non-officielles dans toute l’Europe méridionale pendant trois siècles. “Small is beautiful”. Plusieurs éléments propres aux Eglises locales autonomes les rendent robustes, résistantes, coriaces et fécondes dans tous les climats politiques. Leur caractère dépouillé, laïc, non-clérical, proche de la base, apolitique et discret constitue une moindre menace aux yeux des pouvoirs dictatoriaux. La plupart des Eglises du silence sous les régimes communistes et islamiques sont des Eglises de maison ou qui se réunissent dans des locaux qui passent inaperçus. Elles sont d’ailleurs les seules à avoir de l’avenir en dehors du monde libre. Leur indépendance par rapport à l’Etat et à des structures hiérarchiques paralysantes les libère de pressions étrangères à l’Evangile et en font la principale branche du christianisme en rapide expansion. Par contre, les grandes Eglises-institutions sont en régression. L’attachement généralisé à l’Ecriture des communautés libres appelle un retour permanent aux sources du christianisme, à la simplicité évangélique et à une méfiance envers les traditions ecclésiastiques. Leur existence-même dépend de l’appel à une foi qui est un engagement personnel et par lequel on se choisit chrétien. On ne sauve pas les gens malgré eux. Le christianisme sociologique d’une Eglise “de peuple” ou “de multitude” qui agit “sur” et “pour” les gens ne résiste pas à la persécution. Même dans des climats favorables, l’homme moderne et post-moderne est davantage attiré par l’Eglise-communauté que par l’Eglise-institution. Cet homme, solitaire dans la masse, préfère l’atmosphère chaleureuse empreinte de simplicité d’une Eglise à visage humain, vulnérable mais forte de sa modestie. Et, lorsque le climat politique leur est favorable, les Eglises de ce type sont moins exposées à l’effet corrupteur du pouvoir et de l’avoir. Nous avons constaté que l’Ecriture ne prescrit aucun systéme politique particulier pour l’ère présente, et qu’il n’appartient donc pas à la raison humaine d’élaborer un système gouvernemental idéal. C’est pour cela que l’Ecriture propose un modèle pour l’Eglise qui est flexible et résistant, capable de se maintenir et de progresser partout dans le monde. Ce modèle se limite à deux notions: celle de l’Eglise universelle unique constituée de tous les individus authentiquement chrétiens sur terre, unis par des liens spirituels, et à celle des Eglises locales autonomes, multiples et apolitiques

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capables d’entretenir entre elles des relations sans entraves dénominationnelles. Cela étant dit, il serait faux de penser que la révélation biblique n’a eu aucune influence sur les développements politiques dans le monde, même si cette influence a été indirecte. Les pays où les droits de l’homme et la démocratie ont été les mieux respectés, et vers lesquels les gens du reste du monde ont le plus émigré depuis l’an 1500, à cause de la liberté et la qualité de vie qui y ont régné, sont: La Suisse, l’Ecosse, les Pays-Bas, la Suède, la Norvège, la Finlande, le Danemark, les Etats-Unis, l’Angleterre, la Nouvelle Zélande, le Canada et l’Australie. Ce sont tous des pays où l’influence protestante et de la Bible a été prépondérante. Au contraire de celle de l’athéisme militant et marxiste, de l’islam, de l’hindouisme, du bouddhisme, de l’animisme, voir même du catholicisme romain et de l’orthodoxie. CHAPITRE 12 L’EGLISE ET ISRAËL Les relations entre l’Eglise et la nation Israël à travers 20 siècles d’histoire ont été pour le moins ambiguës. Les diverses branches et époques de la chrétienté ont été marquées par une variété d’attitudes envers le peuple juif. La théologie et l’herméneutique ont parfois contribué aux malentendus. Nous nous en tiendrons, dans l’exposé qui suit sur cette question, aux données les plus évidentes de l’Ecriture. Celles-ci auraient dû empêcher la chrétienté de se livrer à l’anti-sémitisme dont elle a si souvent été coupable. La nation Israël fut l’instrument pour le salut de l’Eglise universelle “Le salut vient des Juifs” (Jean 4:22). Jésus est en conversation avec une femme samaritaine qui venait de faire allusion à la religion de son peuple. Celle-ci prétendait que c’était sur le mont Garizim qu’il fallait adorer Dieu et non pas à Jérusalem (Jean 4:20). Jésus répond que le salut était inséparable de son peuple à lui. Réaction de la femme: “Je sais que le Messie doit venir...quand il sera venu, il nous annoncera toutes choses” (v.25). Les Samaritains acceptaient les cinq livres de Moïse et s’attendaient à la venue d’un messie. Réponse de Jésus: “Je le suis, moi qui te parle”

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(v.26). Le salut vient donc des Juifs parce que c’est par ce peuple qu’est venu le Messie: Jésus-Christ. Il était juif, “fils de David, fils d’Abraham” (Mat.1:1), né de mère juive (1:16). Dans l’Apocalypse, il est appelé “le lion de la tribu de Juda, le rejeton de David (Apoc.5:5). Paul le confirme: “Les Israëlites, à qui appartiennent...les patriarches, et de qui est issu, selon la chair, le Christ” (Rom.9:4,5). C’est parce que le Sauveur du monde est un Juif que le salut vient des Juifs, et qu’Israël fut un instrument pour le salut de l’Eglise. Cette déclaration: “Le salut vient des Juifs”, dans l’Evangile de Jean prouve suffisamment que cet Evangile n’est pas anti-sémitique comme le prétendent certains. Jean, son auteur était, lui-même, Juif. Mais où donc se situait l’origine de ce salut qui venait des juifs? Dieu dit à Abraham: “Je ferai de toi une grande nation, et je te bénirai...tu seras une source de bénédiction...et toutes les familles de la terre seront bénies en toi” (Gen.12:2,3). Il ajoute une précision par la suite: “Toute les nations de la terre seront bénies en ta postérité” (Gen.18:18; 22:18) et en celle d’Isaac (26:4 ), c’est-à-dire en la nation juive. Il est donc question d’Israël, la “grande nation”, issue d’Abraham, et source de bénédiction pour toutes les nations. En quoi ces bienfaits s’étendraient-ils donc à toutes les nations de la terre? Il est certain que les Juifs ont apporté des contributions remarquables à l’humanité dans les domaines scientifique, philosophique et culturel. Mais les textes de la Genèse ont principalement trait aux bénédictions spirituelles. C’est l’Eglise universelle, composée de personnes issues de toutes les nations de la terre, qui est bénéficiaire de cette promesse à Abraham. L’apôtre Paul confirme qu’Abraham est la source de la justification de tous les croyants non-Juifs, membres de l’Eglise: “L’Ecriture, prévoyant que Dieu justifierait les païens par la foi, a d’avance annoncé cette bonne nouvelle à Abraham: Toutes les nations seront bénies en toi” (Gal.3:8). Israël fut l’instrument de leur salut. Mais la personne du Messie n’est pas l’unique bénédiction apportée par Israël à l’Eglise. “Quelle est donc la supériorité du Juif?...Grande à tous égards! Et d’abord, c’est à eux que les révélations de Dieu ont été confiées” (Rom.3:1,2TOB). Paul fait allusion aux Ecritures de l’Ancien Testament dont tous les auteurs furent Juifs. En outre, tous les auteurs du Nouveau Testament, le furent également, sauf un, Luc. C’est donc la nation Israël qui a donné la Bible à l’Eglise. “La foi vient de ce qu’on entend, et ce qu’on entend vient de la parole de Christ” (Rom.10:17). Paul veut que les membres non-Juifs de l’Eglise reconnaissent cette dette spirituelle envers Israël. Il écrit aux Romains: “Je vais à Jérusalem pour le service des croyants de là-bas. En effet, les chrétiens de Macédoine et d’Achaïe ont décidé de faire une collecte en faveur des pauvres de la communauté de Jérusalem. Ils l’ont décidé eux-mêmes, mais, en réalité, ils le leur devaient. Car les chrétiens juifs ont partagé leurs biens spirituels avec ceux qui ne sont pas juifs; les non-Juifs doivent donc aussi les servir en subvenant à leurs besoins matériels” (Rom.15:25-27BFC). Ces Eglises, issues des nations païennes, devait leur existence-même aux Ecritures juives, au Messie juif et aux apôtres juifs qui leur avaient annoncé l’Evangile. Israël fut l’instrument de leur salut. Le Dieu que l’Eglise adore est le Dieu d’Israël. Le passage-clé sur la relation entre Israël et l’Eglise est Romains 11. Dans les versets 16-24, Paul brosse une image saisissante du fait que les croyants en Christ d’origine païenne dépendent du peuple juif pour leur salut. Au v.17-18 l’apôtre établit un contraste entre Israël, un olivier cultivé, et les nations païennes, un olivier sauvage. La racine ou tronc de l’olivier cultivé c’est Abraham ou les patriarches, qui reçurent les promesses. Les branches de l’olivier cultivé sont les juifs; les branches de l’olivier sauvage sont les païens. Les branches de l’olivier cultivé qui ont été retranchées du tronc (v.17) sont les juifs qui n’ont pas cru en leur Messie, Jésus-Christ. La raison de leur retranchement est leur incrédulité (v.20). Les branches de l’olivier sauvage qui ont été greffées au tronc de l’olivier cultivé (v.17,19), sont les païens qui ont cru en Jésus-Christ. En conséquence de cette foi (v.20), les païens ont eu part aux bénédictions promises à Abraham

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pour ceux, parmi eux qui deviendraient ses enfants spirituels. Le croyant en Christ d’origine païenne est redevable à Israël pour les bénédictions de son salut. Il a été “rendu participant de la racine nourricière de l’olivier” (v.17), ou, “Il profite de la sève montant de la racine de l’olivier.” (BFC). En d’autres termes, les bénédictions promises à Abraham (la racine) sont communiquées aux croyants d’origine païenne qui croient en Jésus, à travers le peuple d’Israël, l’olivier. Par conséquent, Paul déclare aux croyants d’origine païenne de l’Eglise à Rome: “Ce n’est pas toi qui porte la racine, mais c’est la racine qui te porte” (v.18). C’est le Juif qui transmet les bénédictions d’Abraham au croyants d’origine païenne, et non le contraire. Le salut vient des Juifs. Tous les avantages apportés par Israël à l’Eglise déterminent à leur tour l’attitude qu’il convient à l’Eglise d’avoir vis-à-vis du peuple juif. Première conséquence: L’Eglise doit faire du bien au peuple d’Israël Pourquoi? Parce que sa prospérité spirituelle en dépend. Parmi les premières promesses que Dieu fait à Abraham et à sa postérité, il en fait une sous forme de prédiction: “Je bénirai ceux qui te béniront, et je maudirai ceux qui te maudiront” (Gen.12:3). Cette prophétie ne se limitait pas à la personne d’Abraham car elle est reprise plus tard, sous l’inspiration du Saint-Esprit, pour être appliquée à tout le peuple d’Israël: “Balaam vit que l’Eternel trouvait bon de bénir Israël...Balaam leva les yeux et vit Israël campé selon ses tribus. Alors l’Esprit de Dieu fut sur lui. Balaam prononça son oracle et dit:...Qu’elles sont belles, tes tentes, ô Jacob! Tes demeures, ô Israël...béni soit quiconque te bénira, et maudit soit quiconque te maudira” (Nom.24:1-9). L’attitude que l’Eglise adopte vis-à-vis de la nation Israël est de première importance. Il y va de son intérêt à elle et de la bénédiction de Dieu sur elle. Que signifie donc cet acte de bénir? Cette notion revient souvent dans l’A.T. Il s’agit de “faire du bien à quelqu’un”. Que cela signifie-t-il concrètement? Paul avait montré que l’Eglise a une dette envers les Juifs à cause de tous les biens spirituels qui sont venus aux chrétiens par l’intermédiaire d’Israël (Rom.15:25-27 - voir plus haut). Et il précise que bénir ce peuple comprend lui faire du bien sur le plan matériel: “En effet, les chrétiens de Macédoine et d’Achaïe ont décidé de faire une collecte en faveur des pauvres de la communauté de Jérusalem. Ils l’ont décidé eux-mêmes, mais, en réalité, ils le leur devaient. Car les chrétiens juifs ont partagé leurs biens spirituels avec ceux qui ne sont pas juifs; les non-Juifs doivent donc aussi les servir en subvenant à leurs besoins matériels” (Rom.15:25-27BFC). Dieu fera donc du bien à quiconque fera du bien à Israël. Cette prophétie a eu son accomplissement à travers l’histoire de l’humanité, si bien pour les individus que pour des nations. Et il est possible pour des chrétiens de collaborer avec des Juifs non-chrétiens dans des projets humanitaires et politiques quand il s’agit de questions d’éthique et de justice sociale. Cependant, il y a aussi le revers de la médaille. Pour Abraham: “Je maudirai ceux qui te maudiront” (Gen.12:3). Et, pour le peuple juif: “Maudit soit quiconque te maudira” (Nom.24:9). Cet avertissement s’est avéré tristement nécessaire pour des parties importantes de la chrétienté, qui ont initié des persécutions anti-sémites ou se sont jointes aux persécuteurs. Dieu lui-même promet d’intervenir contre ceux qui veulent du mal aux Juifs, qui le disent et qui le font. Cette intolérance au sein de la chrétienté est sans doute pour beaucoup dans la pauvreté spirituelle et la déchristianisation de l’Europe. Le prophète Zacharie montre par une image touchante l’extrême sensibilité de Dieu vis-à-vis de tout ce qui toucherait au peuple d’Israël: “Ainsi parle le SEIGNEUR le tout-puissant...à propos des nations qui vous ont pillés: Oui, quiconque vous touche, touche à la prunelle de mon oeil. Oui, me voici, je vais lever la main contre elles” (Zach.2:12-13 TOB). La prunelle de l’oeil (ou pupille) est l’ouverture du milieu de l’oeil, par laquelle passe la lumière. C’est la petite partie du corps qui est à la fois précieuse et la plus vulnérable et qui a donc le plus besoin de protection. Tout ce qui y touche provoque un réflexe. Dieu réagit contre tous ceux qui

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feraient du mal à son peuple. Les nations qui ont “pillé” Israël (l’ont maudite), Dieu lui-même “lèverait la main contre elles” (les maudirait). “La portion de l’Eternel, c’est son peuple, Jacob est la part de son héritage...Il l’a entouré, il en a pris soin, il l’a gardé comme la prunelle de son oeil” (Deut.32:9-10). Le fait qu’Israël soit toujours là malgré tout, qu’il a pu préserver intacte son identité de peuple après quatre mille ans d’attaques, de déportations, de dispersion, de malédictions et de persécutions, est la preuve que Dieu l’a gardé comme la prunelle de son oeil. Et qu’il continuera de le faire. Et qu’il veut aussi se servir de l’Eglise pour le faire. De quoi les Juifs, soumis à des brimades, ont-ils besoin. “Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu; Parlez au coeur de Jérusalem” (Esa.40:1,2). Le mot “Jérusalem” montre que le peuple de Dieu dont il est question est le peuple juif. Le contexte de la prophétie d’Esaïe fait penser qu’Israël a besoin d’être consolé à cause de son exil à Babylone, loin de son pays. Sa dispersion actuelle parmi les nations est pour lui une situation analogue. L’expression “votre Dieu” en contraste avec “mon peuple”, laisse entendre que ceux qui doivent le consoler ne feraient pas nécessairement partie du peuple d’Israël. La répétition de l’impératif “consolez, consolez” communique une forte émotion. Ce peuple a beaucoup souffert. Le Juif errant est souvent triste et a besoin d’être accueilli. Et l’exhortation de “parler à son coeur” suggère que ce peuple a besoin qu’on lui témoigne de la tendresse. Ces divers éléments font penser à une responsabilité actuelle de l’Eglise envers le peuple juif souffrant et qui a encore besoin d’être consolé. Mais Israël a surtout besoin d’une intervention divine. De là l’importance de l’exhortation: “Priez pour qu’il y ait la paix à Jérusalem” (Ps.121(122):6 Maredsous). La dernière partie du nom “Jérusalem”: “-salem” signifie “paix”. Les avis sur la première partie varient: “fondation de paix”, “vision de paix”, “ville de paix”, “possession de paix”. C’est une ironie de l’histoire que la ville de Jérusalem a connu la paix, moins que toute autre ville du monde. L’Eglise ne peut pas obéir pleinement à cette exhortation à la prière, en ne priant que pour la paix de l’Eglise. Il faut interpréter l’Ecriture avant d’en faire une application pratique. L’Eglise doit prier pour la paix au Moyen Orient et à Jérusalem, même si cette prière ne sera pas complètement réalisée avant le retour du Prince de la paix. Et toute paix à Jérusalem rejaillira sur tout le peuple d’Israël, et éventuellement sur le monde entier. Certains laissent entendre qu’il suffit d’agir avec bienveillance envers Israël, d’aider les juifs persécutés à rentrer en Palestine et de promouvoir les intérêts de l’Etat Israëlien. Mais la responsabilité de l’Eglise envers Israël ne se limite pas à lui faire du bien, à le protéger, à le consoler et à prier pour sa paix. LEglise doit annoncer l’Evangile au peuple d’Israël La plupart des Juifs n’en demandent pas autant. Mais eux aussi ont besoin de changer. Dernières paroles de Jésus à ses disciples: “Ainsi il est écrit...que la repentance et le pardon des péchés seraient prêchés en son nom à toutes les nations, à commencer par Jérusalem” (Luc 24:47). L’évangélisation du monde devait commencer parmi les Juifs. Et c’est la priorité que respectèrent Pierre et les autres apôtres à Jérusalem dès le jour de la Pentecôte: “Hommes Juifs...Hommes Israëlites...” (Act.2:14, 22 etc.). D’ailleurs, l’apostolat que Dieu avait confié à Pierre était spécialement à l’intention des “circoncis”, c’est-à-dire des Juifs (Gal.2:7-9). C’est qu’il devait leur annoncer la Bonne Nouvelle. Mais Paul, l’apôtre des non-Juifs ne se sent pas moins concerné au sujet d’Israël. Lui-même un Juif, Paul déclare: “Je n’ai point honte de l’Evangile: c’est une puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit, du Juif premièrement, puis du Grec” (Rom.1:16). La Bonne Nouvelle de l’Evangile est donc à l’intention du Juif, et il y va de son salut. Croire à l’Evangile est la condition du salut pour quiconque, c’est-à-dire pour le Juif également. Et cette Bonne Nouvelle doit être annoncée au Juif premièrement, avant-même d’être annoncée au non-Juif. Cette priorité a

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été respectée par l’apôtre Paul dans son oeuvre missionnaire, bien que Dieu l’eut établi, lui, plus spécialement comme apôtre des non-Juifs (Gal.2:7-9). Chaque fois qu’il débarquait avec ses collaborateurs pour la première fois dans une ville, “ils annoncèrent la parole de Dieu dans les synagogues des Juifs” (Act.13:5, 14; 14:1; 17:1,2, 10, 17; 18:4,5, 19; 28:16,17 - c’est précisé dix fois dans le livre des Actes). Quand ceux-ci refusaient cette parole, ils leur disaient: “C’est à vous premièrement que la parole de Dieu devait être annoncée” (13:45-47). Avant de se tourner vers les païens. Paul résume son ministère: “J’ai appelé Juifs et non-Juifs à se convertir à Dieu et à croire en notre Seigneur Jésus” (Act.20:21BFC). Pourquoi donc ce zèle de l’apôtre pour atteindre prioritairement le peuple d’Israël? La raison qui fonde l’annonce de l’Evangiles aux Juifs est que ceux-ci ont besoin d’être sauvés. Paul, un Juif, déclare: “Ce que je désire de tout mon coeur et que je demande à Dieu pour les Juifs, c’est qu’ils soient sauvés...J’espère ainsi exciter la jalousie des gens de ma race pour en sauver quelques-uns” (Rom.10:1; 11:14) BFC). Et la raison qu’ils ont besoin d’être sauvés c’est qu’ils sont pécheurs, au même titre que les païens. “Nous avons déjà prouvé que tous, Juifs et Grecs sont sous l’empire du péché, selon qu’il est écrit: Il n’y a point de juste, pas même un seul” (Rom.3:9,10). Annoncer l’Evangile aux Juifs est un acte salvateur. Un Juif qu’on a aidé à quitter la Russie pour émigrer en Israél et qui meurt sans Christ en Israël, est tout aussi perdu qu’un Juif qui meurt sans Christ en Russie. Mais certains font objection: On prétend que les chrétiens auraient perdu le droit d’évangéliser les Juifs à cause des persécutions que la chrétienté leur a fait subir à travers les siècles. On évoque les conversions forcées sous l’inquisition en Espagne et ailleurs. A tel point que chercher à amener les Juifs au Christ serait considéré maintenant comme un acte anti-sémite. Pierre, Juif, apôtre pour les Juifs déclare aux Juifs: “C’est à vous premièrement que Dieu, ayant suscité son Serviteur (Jésus), l’a envoyé pour vous bénir, en détournant chacun de vous de ses iniquités” (Act.3:26). Détourner un Juif de ses péchés en lui annonçant Jésus-Christ, c’est le “bénir”, non le maudir. C’est lui apporter le salut. D’autres prétendent qu’il y a deux alliances, l’ancienne pour le salut d’Israël, et la nouvelle pour le salut des non-juifs. Les Juifs seraient donc sauvés à leur façon par leur foi en le Dieu d’Israël, sans croire en leur Messie, Jésus-Christ. Mais Pierre montre aux Juifs que les promesses de l’alliance avec Abraham ont, précisément, leur accomplissement en Jésus et non en dehors de lui: “Vous êtes les fils des prophètes et de l’alliance que Dieu a traité avec nos pères, en disant à Abraham: Toutes les familles de la terre seront bénies en ta postérité. C’est à vous premièrement que Dieu ayant suscité son Serviteur (Jésus), l’a envoyé pour vous bénir” (Act.3:25-26). La postérité d’Abraham dont il est question, c’est le Christ lui-même. Pierre ajoute: “Chefs du peuple, et anciens d’Israël...Il n’y a de salut en aucun autre; car il n’y a sous le ciel aucun autre nom qui ait été donné parmi les hommes, par lequel nous devions être sauvés” (4:8,12). Et Paul confirme: “Or, les promesses ont été faites à Abraham et à sa descendance. Il n’est pas dit: et aux descendances, comme s’il s’agissait de plusieurs, mais comme s’il s’agit d’une seule: et à ta descendance, c’est-à-dire à Christ” (Gal.3:16). C’est en Jésus et non en dehors de lui que les promesses de l’ancienne alliance ont leur accomplissement pour les Juifs. D’autres encore prétendent qu’il est inutile d’annoncer l’Evangile au peuple d’Israël à cause de l’endurcissement qui les a frappé en conséquence de leur rejet du Messie (Rom. 11:17,19,25). Mais ce texte précise que seulement “une partie d’Israël est tombée dans l’endurcissement, jusqu’à ce que la totalité des païens soient entrés.” Cet endurcissement est donc à la fois partiel et temporaire. Certains Juifs se convertissent encore à Jésus-Christ malgré tout, et l’endurcissement des autres cessera un jour. On prétend aussi qu’actuellement, un voile est jeté sur le coeur des Juifs quand ils lisent l’Ancien Testament (2 Cor.3:14,15) et qu’il est impossible pour eux de se convertir à Jésus. Mais ce texte précise aussi au sujet de ce voile, que “c’est en Christ qu’il disparaît” (14b) et encore:

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“Lorsque les coeurs se convertissent au Seigneur, le voile est ôté” (16).Tout cela ne prouve pas qu’il est impossible pour les Juifs de croire, mais seulement que c’est une chose difficile. On cite aussi l’exemple des Juifs d’Antioche de Pisidie qui repoussaient la parole de Dieu, s’opposaient à Paul et Barnabas, les injuriaient, provoquèrent une persécution contre eux et les chassèrent de leur territoire” (Act.13:45-50). Sur ce, les deux apôtres “leur dirent...voici, nous nous tournons vers les païens (v.46)..., ils secouèrent contre eux la poussière de leurs pieds, et allèrent à Icone” (v.51). On en tire la conclusion, à tort, qu’il s’agissait là d’un renoncement définitif à évangéliser le peuple juif . Mais on ne tient pas compte du verset qui suit immédiatement: “A Icone, Paul et Barnabas entrèrent ensemble dans la synagogue des Juifs, et ils parlèrent de telle manière qu’une grande multitude de Juifs et de Grecs crurent” (14:1). Quelle donc fut la conséquence de la foi en Christ de ces Juifs et de ces Grecs?. Les croyants non-Juifs sont incorporés à l’Eglise de pair avec les croyants en Christ israëlites Comment pourrait-on donc unir des gens tellement différents? “Nous avons tous, en effet, été baptisés dans un seul Esprit, pour former un seul corps, soit Juifs, soit Grecs” (1Cor.12:13). Ce corps, c’est l’Eglise. Et encore: “C’est le Christ lui-même qui nous a apporté la paix, en faisant des Juifs et des non-Juifs un seul peuple...Par sa mort sur la croix, le Christ les a tous réunis en un seul corps et les a réconciliés avec Dieu; par la croix, il a détruit la haine” (Eph.2:14,16BFC). Ce nouveau peuple et ce corps, c’est l’Eglise. Les croyants en Christ, Juifs et non-Juifs, peuvent désormais vivre en harmonie dans une même communauté. “Par le moyen de la Bonne Nouvelle, les non-Juifs sont destinés à recevoir avec les Juifs, les mêmes biens que Dieu réserve à son peuple, ils sont membres du même corps” (Eph.3:6BFC). Ce peuple et ce corps, c’est l’Eglise. Il existe actuellement en Israël des Eglises qui regroupent des chrétiens palestiniens et juifs. Ils ont d’abord été réconciliés avec Dieu par Jésus, chacun de son côté, et ensuite la haine entre eux a été détruite. Ils ne permettent pas à la race et à la politique de semer la discorde entre eux. Ce n’est qu’au sein du corps du Christ qu’une telle chose est posssible. Mais cela ne date pas d’hier. En effet, des Juifs et des non-Juifs se sont retrouvés ensemble dans l’Eglise depuis le tout premier jour de sa fondation. Le jour de la Pentecôte, des prosélytes d’origine païenne étaient présents à Jérusalem avec les Juifs (Act.2:10). Des personnes, issues de ces deux groupes, se sont converties au Christ par la prédication de l’Evangile par Pierre et les autres apôtres. Et, par l’action du Saint-Esprit répandu, ils ont été constitués ensemble en un seul et même corps, l’Eglise. Depuis lors, d’innombrables Eglises locales partout dans le monde, ont accueilli en leur sein des personnes d’origines juive et non-juive. La vie de ces Eglises a connu des expressions culturelles d’une grande variété selon les nombreux contextes nationaux dans lesquels elles ont été implantées. Tout comme l’Eglise à Jérusalem au premier siècle avait une forte coloration juive, au vingtième siècle, il s’est constitué partout dans le monde, des centaines de communautés de Juifs messianiques qui ont voulu maintenir leur identité culturelle juive. Elles constituent un exemple d’une contextualisation parfaitement légitime. Elles accueillent aussi des non-Juifs en leur sein. Il faut cependant se rendre à l’évidence, que la plus grande partie du peuple d’Israël reste actuellement en dehors de l’Eglise du Christ. Il faut être réaliste: L’Eglise doit reconnaître que la nation Israël demeure encore dans l’incrédulité et l’endurcissement par rapport à Jésus, son Messie Dans quel esprit cette constatation doit-elle être faite? Il est important d’aborder la question en rappelant que les prophètes de l’Ancien Testament qui dénonçaient l’incrédulité et l’endurcissement du peuple d’Isrël furent tous eux-mêmes des Juifs. Et que les auteurs du Nouveau Testament qui firent de même étaient aussi des Juifs qui écrivaient au sujet d’un Juif, Jésus, et rapportaient ses

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paroles. Il ne s’agissait aucunement de critiques de la part de non-Juifs, émisent devant le monde. L’Eglise doit se borner à constater avec tristesse, sans condamner. Les chefs du peuple avaient cherché plusieurs fois à faire mourir Jésus (Mat.26:4; 21:46; Jean 5:18; 7:19; 8:37,40). Juste avant sa passion, le Seigneur s’adresse une dernière fois à la nation juive: “Jérusalem, Jérusalem, qui tues le prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants, comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous ne l’avez pas voulu! Voici, votre maison vous sera laissée déserte; car, je vous le dis, vous ne me verrez plus désormais, jusqu’à ce que vous disiez: Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur” (Mat.23:37-39). Le peuple juif a rejeté son Messie, son temple a été détruit et n’a pas été reconstruit, Jésus est monté au ciel et s’est dérobé à sa vue, et l’incrédulité de la nation perdure encore aujourd’hui. Mais, il y avait un: “jusqu’à ce que”. Ce rejet et cette incrédulité nationales ne seraient pas définitifs et auraient un terme. Et ce terme consisterait en l’accueil favorable que le peuple ferait à Jésus lors de sa deuxième venue. Nous y reviendrons. Mais Jésus n’est pas le seul à faire état de l’incrédulité présente de l’Israël national. Paul décrit l’incrédulité de ce peuple de plusieurs façons dans Rom. 11, où il compare Israël à un olivier cultivé, dont Abraham est la racine et les Juifs, considérés individuellement, sont les branches (voir plus haut). En parlant de ces branches, il déclare: “...elles ont été retranchées pour cause d’incrédulité” (11:20). Le Juif qui ne croit pas en Jésus s’est coupé de l’unique source de salut. Puis: “Une partie d’Israël est tombée dans l’endurcissement” (11:25). L’évangélisation parmi les Juifs est difficile depuis 2000 ans car ceux-ci n’y sont pas réceptifs. Et encore: “En ce qui concerne l’Evangile, ils sont ennemis” (11:28). Dès la Pentecôte les autorités juives se sont montrés adversaires des apôtres. Aujourd’hui encore, les Juifs ultra-orthodoxes en Israël et ailleurs s’opposent activement à ceux qui annoncent l’Evangile. Ils n’épargnent pas les Juifs messianiques. Enfin: “Par leur désobéissance, vous avez maintenant obtenu miséricorde...ils ont maintenant désobéi” (11:30,31). Outre leur désobéissance à l’Evangile, de nombreux Juifs mènent une vie de désobéissance, injuste et immorale. Et leur retour actuel dans leur pays, s’il est l’accomplissement de nombreuses prophéties, n’est pas la même chose que leur conversion. De nombreux agissement de l’Etat d’Israël sont injustes, violents et constituent des désobéissances à la loi de Dieu. On ne peut justifier la politique du gouvernement israëlien sur toute la ligne. Certes, on peut considérer que le retour en Israël de Juifs dispersés parmi toutes les nations, et la constitution de l’ Etat d’Israël, sont des accomplissements partiels de la prophétie biblique. Mais, jusqu’à présent, ce retour et la constitution de cet Etat se sont faits dans l’incrédulité à l’égard de leur Messie. Les promesses faites aux patriarches concernant le pays et son extension, ne peuvent être séparées de la conversion de la nation à Jésus-Christ. Si les promesses faites à Abraham étaient inconditionnelles, la jouissance de ces promesses par une génération quelconque de sa postérité, dépendait chez elle, de la foi et de l’obéissance. D’ailleurs les prophètes de l’Ancien Testament étaient unanimes pour dire que la jouissance des promesses dépendait de l’attachement du peuple à son Dieu et de ses agissement justes. Reconnaître les torts de l’Etat d’Israël n’empêchera pas le Seigneur d’accomplir, au moment voulu, ses promesses envers son peuple. Paul envisage aussi un terme à cet endurcissement. “Une partie d’Israël (la plus grande partie) est tombée dans l’endurcissement, jusqu’à ce que la totalité des païens soit entrée” (11:25). Voilà encore un: “Jusqu’à ce que...”. L’Eglise n’a pas remplacé la nation Israël dans le plan de Dieu; ce peuple a encore un avenir Cette incrédulité du peuple juif, a-t-elle pour conséquence son rejet définitif par Dieu? Paul répond sans ambiguïté: “Dieu a-t-il rejeté son peuple? Loin de là! (Rom.11:1). “Je demande donc: Quand les Juifs ont trébuchés, sont-ils tombés définitivement? Certainement pas...Or, si la faute des Juifs a

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enrichi spirituellement le monde...combien plus grands encore seront les bienfaits liés à leur participation totale au salut!...que sera leur réintégration, sinon le passage de la mort à la vie...Et si les Juifs renoncent à leur incrédulité, ils seront greffés là où ils étaient auparavant...Quant aux Juifs, ils sont les branches naturelles de cet olivier cultivé: Dieu pourra donc d’autant mieux les greffer de nouveau sur l’arbre qui est le leur...L’endurcissement d’une partie d’Israël durera jusqu’à ce que soit entré l’ensemble des païens. Et ainsi tout Israël sera sauvé, comme il est écrit: De Sion viendra le libérateur, il écartera de Jacob les impiétés...Car les dons et l’appel de Dieu sont irrévocables” (11:11,12,15,23,24,25,26,29 BFC). On ne peut donner ici au nom “Israël” le sens de “l’Eglise” quand il est précisé dans le contexte immédiat, qu’il s’agit de “Jacob”. Le nom “Israël” revient onze fois dans ce chapitre. Les dons et l’appel irrévocables de Dieu, sont donc ceux du peuple d’Israël. Et leur réalisation aura lieu à la venue de leur Libérateur, Jésus. Tout Romains 11 est une série de contrastes entre l‘Israël qui ne croit pas en Jésus comme son Messie, et les croyants actuels en Jésus, c’est-à-dire l’Eglise. L’Eglise n’est donc ni l’accomplissement, ni le remplaçant de la nation Israël. La pérennité du peuple juif et celle de son identité nationale avaient été prédites dans l’Ancien Testament: “Ainsi parle l’Eternel, qui a fait le soleil pour éclairer le jour; qui a destiné la lune et les étoiles à éclairer la nuit...Si ces lois viennent à cesser devant moi, dit l’Eternel, la race d’Israël aussi cessera pour toujours d’être une nation devant moi...Si les cieux en haut peuvent être mesurés...alors je rejetterai toute la race d’Israël, à cause de tout ce qu’ils ont fait” (Jér.31:35-37). Et Dieu déclare par Esaïe, en s’adressant aux “enfants d’Israël” (66:20): “Comme les nouveaux cieux et la nouvelle terre que je vais créér, subsisteront devant moi, dit l’Eternel, ainsi subsisteront votre postérité et votre nom” (66:22). Un language clair. Et dans le Nouveau Testament, l’Israël national, après avoir rejeté Jésus comme son Messie, est encore considéré comme le peuple de l’ancienne alliance. Pierre leur déclare: “Hommes Israëlites...Le Dieu d’Abaham, d’Isaac et de Jacob, le Dieu de nos pères, a glorifié son serviteur Jésus, que vous avez livré et renié devant Pilate...Vous avez fait mourir le Prince de la vie, que Dieu a ressuscité des morts...Vous êtes (temps présent) les fils des prophètes et de l’alliance que Dieu a traité avec nos pères” (Act.3:12,13,25). Et Paul, également Juif, confirme: “Je voudrais être moi-même anathème et séparé de Christ pour mes frères, mes parents selon la chair , qui sont Israëlites , à qui appartiennent (présent) l’adoption, la gloire, les alliances, la loi, le culte, les promesses et les patriarches (Rom.9:3-5). Pierre et Paul parlent donc tous deux de la nation juive incroyante comme étant encore, au temps présent, héritière des alliances et des promesses faites à leurs pères. Malgré leur dispersion parmi toutes les nations, les Juifs ne se sont jamais laissé assimiler, au contraire de nombreux autres peuples qui on émigré loin de leur propre pays et y ont perdu leur identité nationale en se mariant. Où qu’ils soient, même en petits nombres, les Juifs demeurent des Juifs. La circoncision y est pour beaucoup. “Dieu donna à Abraham l’alliance de la circoncision” (Act.7:8). Cette identité restée intacte, malgré d’horribles persécutions, permettra une conversion nationale de ce peuple au retour de son Messie: “Et ainsi tout Israël sera sauvé, selon qu’il est écrit: Le Libérateur viendra de Sion, et il détournera de Jacob les impiétés” (Rom.11:26). Outre les relations de l’Eglise avec les incroyants, l’Etat, et le peuple d’Israël, celle-ci se trouve confrontée à une autre entité, souvent insaisissable, mais non moins réelle, dénommée dans l’Ecriture “le présent monde mauvais” (Gal.1:4).

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CHAPITRE 13 L’EGLISE ET “CE PRESENT MONDE MAUVAIS” Qu’est-ce donc que le monde? Les divertissements malsains? L’occultisme? La dernière mode? La mondialisation? Le paganisme? Certains lieux du centre-ville? Le capitalisme? Les artistes? Les soirées mondaines? Les idéologies? Le scientisme? Le communisme? Il ne faut pas se tromper d’adversaire. Etant donné qu’il s’agit d’une notion biblique, il sera utile de consulter l’Ecriture. Deux termes bibliques peuvent se traduire par le mot français “monde”: kosmos et aion. Le mot “kosmos” revient 187 fois dans le Nouveau Testament et peut désigner: (1) L’univers créé par Dieu (Mat.25:34), composé du ciel et de la terre (Act.17:24). (2) La boule terrestre (Jean 16:28). Ces deux premiers sens sont les plus fréquents et désignent l’oeuvre merveilleuse du Créateur. Le mal n’est donc pas inhérent à la matière comme le voulait le dualisme grec. (3) Le monde des humains que Dieu a tant aimé, qu’il est venu sauver (Jean 3:16; 12:47). Ces trois premiers sens sont positifs. (4) Enfin, Le monde, avec une connotation éthique négative, c’est-à-dire l’ordre de la société humaine qui se veut autonome par rapport à Dieu. Dans ce dernier sens, il revient au moins 55 fois dans le Nouveau Testament (sur les 187). L’exposé qui suit se limitera à ces 55 passages qui contiennent ce terme dans son sens péjoratif. Le terme “aion” signifie “siécle”, “époque” ou “ère” et revient 124 fois dans le Nouveau Testament. Il peut désigner: (1) L’univers créé par Dieu considéré sous l’aspect du temps; la somme de tous les siècles (Héb.1:2;11:3), l’éternité, (Act.3:21). (2) L’ère future, le siècle à venir (Héb.6:5), celui de la vie éternelle (Mc.10:30). Cest deux premiers sens sont positifs. (3) Le siècle appelé “le présent siècle mauvais” (Gal.1:4), traduit par “monde” dans la plupart des versions, se termine au retour du Christ (Mat.24:3). Il peut donc être synonime de kosmos quand il revêt le sens péjoratif de ce terme, ce qu’il fait au moins une douzaine de fois (sur les 124). Un théme abordé au moins 67 fois (55+12) dans l’Ecriture n’est pas négligeable. Cependant, pour des raisons dogmatiques, “ce

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présent monde mauvais” n’a pas toujours retenu l’attention qu’il mérite. Par conséquent, l’Eglise n’a pas toujours sû se positionner vis-à-vis de lui comme il aurait fallu. Le monde est un système Nombreux sont ceux de nos jours qui “refusent le système”. A tort, ou à raison? Le terme kosmos signifie d’abord “ordre” par contraste avec chaos, “désordre” et s’applique à une chose qui est ordonnée, un système. Positivement, il peut avoir trait à l’agencement par Dieu du système solaire. Négativement, il peut avoir traît à la société humaine organisée ressentie comme contraignante. C’est là le système qu’on refuse. Ce sont tous les maux enracinés et “systémiques” de ce monde considérés comme inévitables car dans “l’ordre des choses”. Dans son sens biblique péjoratif, le monde est un régime organisé, qui peut inclure des éléments qui sont bons en eux-mêmes: des idéaux, des efforts humanitaires, des lois, une certaine moralité, des aspects culturels recommandables, des formes religieuses, etc. La racine du mal qui mine le monde n’est donc pas qu’il ne contient rien de recommandable, c’est plutôt qu’il est organisé sur base d’une indépendance totale vis-à-vis de Dieu. C’est aussi pour cela que les régimes politiques particuliers et les différents modèles sociaux n’apportent pas de solutions aux problèmes “systémiques” de la société humaine. Coluche constatait avec raison: “Le capitalisme, c’est l’exploitation de l’homme par l’homme; le communisme, c’est le contraire.” Dans la mesure où quelqu’un se veut autonome et refuse la seigneurie du Christ, dans cette mesure-là, qu’il en soit conscient ou non, il se fait récupérer par le système. Et les choses positives qui se trouvent dans le monde ne font que contribuer au pouvoir de séduction de celui-ci. Comment y voir clair? Il faut d’emblée se garder d‘une vision trop restreinte du monde, comme si celui-ci se réduisait à des divertissements, à certaines conduites: tabac, alcool, pornographie, paris, jeux, consumérisme, modes, films d’horreur ou violents, etc. Dans cette optique, vaincre le monde se limiterait à s’abstenir de certaines pratiques, à se conformer à un certain code. Ce serait une démarche réductrice et essentiellement négative, une moralité extérieure. L’attention se fixe de la sorte sur certaines réalités précises et est détournée d’autres domaines tout aussi “mondains”, sinon plus. Le monde est un système politique: “Le diable montra à Jésus tous les royaumes du monde (kosmos) et leur gloire, et lui dit: Je te donnerai toutes ces choses” (Mat.4:8,9). Pour pouvoir offrir tous les royaumes du monde au Christ, il fallait que Satan en dispose. Et le monde est composé de “royaumes”, c’est-à-dire, d’entités politiques. “Tous” les royaumes du monde, sans exception, sont donc déclarés être sous la coupe de Satan. Aucun système politique n’échappe à son influence, qu’il soit de droite, de gauche, du centre, monarchie, aristocratie, démocratie, république, califat, y compris tout ce qui se voudrait “théocratie”. Le monde, c’est aussi les hommes politiques. “Aucun des princes de ce monde (aion) n’a connu cette sagesse de Dieu, car s’ils l’avaient connue, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de gloire” (1Cor.2:8 TOB). Le monde qui a des “princes” est un monde politique. Il s’agissait, dans ce cas, des autorités juives et romaines qui ont crucifié Jésus. Elles n’ont pas hésité à exercer le pouvoir du glaive contre le Christ et, plus tard, contre ses disciples. Mais il n’en sera pas toujours ainsi. “De grandes voix retentirent dans le ciel, qui disaient: Le royaume du monde (kosmos) est passé à notre Seigneur et à son Christ; il régnera à tout jamais!” (Apoc.11:15 NBS). A la fin des temps, le “système politique mondial” passera sous le règne éternel du Christ. Certes, aujourd’hui, “les autorités qui existent ont été instituées de Dieu” (Rom.13:1; Dan.4:17-25; Jean 19:10,11), et rien n’échappe à sa permission souveraine. Dieu a voulu que l’Etat joue un rôle de dissuasion dans un

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monde fracturé par le péché, sans quoi l’existence de l’homme sur terre serait invivable. Il n’empêche que Jésus déclarait: “Vous serez haïs de toutes les nations, à cause de mon nom” (Mat.24:9). A ce jour, aucune nation n’est encore passée sous le règne éternel du Christ. Tout pouvoir politique, qu’il soit de droite ou de gauche, peu importe ses prétentions ou son apparence aux yeux des hommes, gouverne dans un esprit d’indépendance vis-à-vis de Dieu. “La nation chrétienne” n’a jamais existé. Jésus n’a pas contesté que le diable disposait de “tous les royaumes du monde” pour pouvoir les lui offrir. Et il n’a jamais accepté un seul de ces royaumes des mains de Satan, pour qu’il devienne une nation qui porte son nom (Mat.4:8-10). Plus le christianisme est politisé, plus l’Eglise est liée à l’Etat, plus elle subit l’influence du système. Si les croyants doivent “être soumis aux magistrats et aux autorités” (Tit.3:1), il sera avantageux pour l’Eglise de toujours tenir compte avec réalisme de ce refus de la part de Jésus de recevoir les royaumes du monde des mains de Satan. Le monde politique fait partie du système, et montre, tôt ou tard, son vrai visage. S’il peut exister des personnes authentiquement chrétiennes qui détiennent un pouvoir temporel, elles ne le peuvent longtemps sans compromissions. Et elles deviennent tôt ou tard prisonnières du système. Mais “le présent monde mauvais” ne se limite pas au politique. Le monde est un système économique. L’Ecriture associe les deux termes bibliques qui désignent le monde au domaine économique également: “Celui qui a été ensemencé dans les épines, c’est celui qui entend la Parole, mais le souci du monde (aion) et la séduction des richesses étouffent la Parole, et il reste sans fruit” (Mat.13:22 TOB). Le monde dont les inquiétudes sont liées à la séduction des richesses, est un monde économique. “Ne cherchez pas ce que vous mangerez et ce que vous boirez...Car toutes ces choses, ce sont les païens du monde (kosmos) qui les recherchent” (Luc 12:29,30). Le monde, constitué de païens qui recherchent d’abord les bien matériels, est un monde économique. Mais n’est-ce pas là du manichéisme? “Si quelqu’un possède les biens de ce monde (kosmos) et voit son frère dans le besoin, et qu’il se ferme à toute compassion, comment l’amour de Dieu demeurerait-il en lui? (1Jean 3:17 TOB). Le monde auquel appartiennent les biens accumulés et non partagés, est un monde économique. Certes, “C’est au Seigneur qu’appartient la terre avec tout ce qu’elle contient” (1Cor.10:26 BFC). Et “Dieu plaça l’homme dans le jardin d’Eden pour le cultiver et le garder” (Gen.2:15) Et “Dieu nous donne toutes choses avec abondance pour que nous en jouissions” (1Tim.6:17). Il n’empêche que les richesses ont une séduction, que leur recherche prioritaire c’est du paganisme, et que les biens accumulés et non partagés, deviennent “les biens de ce monde”. Plus l’Eglise devient un pouvoir économique, plus elle se laisse absorber par le système. Mais il n’y a pas que le matérialisme. Le monde est un système culturel. “Où est le sage?...Où est le raisonneur de ce monde (aion)? Dieu n’a-t-il pas rendu folle la sagesse du monde (kosmos)?” (1Cor.1:20; 3:19). Le système qui a des “raisonneurs” et une “sagesse” bien à lui, est le monde académique. “Les incrédules, dont le dieu de ce monde (aion) a aveuglé l’intelligence afin qu’ils ne perçoivent pas l’illumination de l’Evangile” (2Cor.4:4 TOB). Le monde des incroyants dont Satan aveugle l’intelligence est un monde intellectuel de raisonnements et de penseurs. “Prenez garde que personne ne fasse de vous sa proie par la philosophie et par une vaine tromperie,

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s’appuyant sur la tradition des hommes, sur les forces qui régissent le monde (kosmos)”(Col.2:8). Le monde de la philosophie et des traditions humaines, est un monde culturel. Le chrétien, serait-il donc condamné à rester bête et inculte? Certes, “Tu dois aimer le Seigneur to Dieu...de toute ton intelligence” (Luc 10:27 BFC), et “Un homme est estimé en raison de son intelligence” (Prov.12:8) et encore “Un coeur intelligent cherche le savoir” (Prov.15:14). Il y a toujours eu de nombreux chrétiens parmi les savants. Ils savent distinguer entre “science” et “scientisme”. Mais aucun système philosophique ne répond de manière satisfaisante aux grandes questions de la vie: de son sens, des ses origines, de l’au-delà. Et tous se contredisent entre eux et se neutralisent. La science peut répondre au “quoi?”, mais reste muette face au “pourquoi?” et au “à quoi bon?” Le mot “intelligentia” a, non sans raison, un sens péjoratif, car ceux qui en font partie égarent souvent plus qu’ils n’éclairent. Plus les écoles de théologie chrétiennes cherchent à se faire accepter par le monde académique, plus elles sont en danger de subir l’influence du système. Rares sont les facultés de théologie protestante qui, au cours des quatre derniers siècles, sont restées fidèles, pendant plus de cent ans, aux bases jetées par leurs fondateurs. Heureusement qu’il s’en est chaque fois fondées de nouvelles, et de plus nombreuses. Certes, Dieu a rempli de son Esprit Bessalel et Oholiab pour les rendre habiles pour travailler l’or, l’argent et le bronze, ciseler les pierres précieuses et les monter, tisser et broder les étoffes colorées des vêtements d’apparat et dessiner avec art les décorations du tabernacle (Ex. 31:2-12; 35:35). Dieu a doté sa création d’une grande beauté et a mis en l’homme la capacité de l’apprécier; mais aussi de crééer de la beauté à son tour. Les plus grands peintres du Moyen Age furent chrétiens. La musique instrumentale peut calmer et soulager (1Sam.16:16,23). Au moins quatorze types d’instruments de musique différents sont énumérés dans l’Ecriture. Ceux-ci sont mentionnés au moins 15 fois en rapport avec le culte rendu à Dieu. Le chant de louange est mentionné 22 fois. On compte J. S. Bach, G. F. Haendel et Mahalia Jackson parmi les grands musiciens chrétiens. Il n’empèche que les images taillées servent aussi à l’idolâtrie (Lév.26:1) et la peinture à l’érotisme (Ezech 23:14-17). Babylone, la grande prostituée, aura en elle “des harpistes, des chanteurs, des joueurs de flûte et de trompette et des artisans, tout en pratiquant la magie” (Apoc.18:21-23). Plus le culte rendu à Dieu se résume au culturel (architecture, sculpture, peinture, grande musique, formes, habits, rites), plus il glisse vers le monde. Le monde est un système religieux. Même les religions peuvent être mauvaises. “N’ajoutez pas foi à tout esprit; mais éprouvez les esprit, pour voir s’ils sont de Dieu; car beaucoup de faux prophètes se sont répandus dans le monde (kosmos)...Eux, ils sont du monde (kosmos); aussi parlent-ils le language du monde (kosmos), et le monde (kosmos) les écoute” (1Jean 4:1,5). Le système des spiritualités, de l’ésotérisme et des gourous que le monde écoute, est un monde religieux. Dans ce passage, Jean fait allusion aux nombreux maîtres des religions païennes et des hérésies de l’époque. D’autres encore se sont manifestés depuis lors. Le monde a son language religieux à lui, qu’il comprend et qui l’interpelle. Paul écrit aux Galates judaïsants: “Nous étions précédemment comme des enfants, nous étions esclaves des forces spirituelles du monde (kosmos). Mais quand le moment fixé est arrivé, Dieu a envoyé son Fils:...il a été soumis à la loi juive, afin de délivrer ceux qui étaient soumis à la loi, et de nous permettre ainsi de devenir enfants de Dieu” (Gal.4:3-5 BFC). Le monde du Judaïsme qui rejetait Jésus comme Messie et qui rendait esclave par des forces spirituelles légalistes, était un système religieux. En vertu de la venue du Christ, le Judaïsme prit désormais sa place, avec les autres religions, au sein du système religieux du monde. C’est pourquoi l’Evangile devait d’abord être annoncé aux Juifs et non seulement aux païens (Rom.1:16) et que Paul priait pour que ceux-ci soient “sauvés” (10:1). Plus l’erreur est proche de la vérité, plus elle séduit.

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“Du moment que vous êtes morts avec Christ, et donc soustraits aux éléments du monde (kosmos), pourquoi vous plier à des règles, comme si votre vie dépendait encore du monde (kosmos): ne prends pas, ne goûte pas, ne touche pas” (Col.2:20,21). L’apôtre fait allusion au mysticisme ascète du gnosticisme qui faisait aussi partie, à sa façon, du grand système religieux mondial. Ce système, malgré les variantes nombreuses et importantes qu’il recouvre, constitue un tout. C’est la religion de l’homme qui paye pour lui-même, et mérite son salut, en contraste avec le salut de Dieu, par le Christ qui paye pour les autres et accorde sa grâce. Une partie de la chrétienté se laisse influencer par le monde en s’engageant dans la contextualisation à outrance, le dialogue interreligieux, et le syncrétisme. Plus l’Evangile et la foi deviennent religiosité et que l’Eglise accepte en son sein le pluralisme, plus elle se laisse récupérer par le système. Le monde serait-il donc satisfait de s’en tenir à sa propre façon de penser? Serait-il vraiment tolérant, même en disant au chrétien: “à chacun sa vérité”? Le monde a de la haine pour le Christ Les mondes politique, économique, culturel et religieux ne sont donc pas innocents. Jésus déclare à ses frères qui “ne croyaient pas en lui” (Jean 7:5): “Le monde (kosmos) ne peut pas vous haïr, tandis que moi, il me hait (“me déteste” NBS) parce que je témoigne que ses oeuvres sont mauvaises” (7:7). Le monde n’avait aucune haine pour les frères de Jésus, encore incroyants , parce qu’ils faisaient eux-mêmes toujours partie du monde. Ils ne s’étaient pas encore engagés à ses côtés. La vie parfaite et sans péché du Seigneur constituait une condamnation des oeuvres mauvaises de son entourage; d’où la haine de celui-ci pour lui. “Aucun des princes de ce monde (aion) n’a connu la sagesse de Dieu, car s’ils l’avaient connue, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de gloire” (1Cor.2:8). Quelles furent les autorités qui participèrent à faire mourir le Christ? Il s’agisait des chefs du monde, de l’intelligentia juive (les docteurs de la loi), des autorités du monde religieux (le Sanhédrin) et celles du monde politique (le pouvoir romain représenté par Pilate). Jésus-Christ, et Jésus-Christ crucifié suscitera toujours de la haine de la part du monde, même de la part de ses frères selon la chair et d’un monde religieux et civilisé. La croix demeure un scandale. Mais le monde, s’en tient-il à haïr Jésus? Le monde a de la haine pour l’Eglise Ne risquons-nous pas un délire de persécution? “Si le monde (kosmos) vous hait (“vous déteste” NBS), sachez qu’il m’a haï le premier. Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui lui appartiendrait; mais vous n’êtes pas du monde: c’est moi qui vous ai mis à part du monde et voilà pourquoi le monde vous hait” (Jean 15:18,19 TOB). Le croyant ne doit pas être surpris de se trouver sur terre dans un milieu hostile, même s’il est lui-même aussi doux et pacifique que le fut Jésus. Derrière la haine pour le disciple du Christ se cache la haine pour le Christ. Il va de soi que rien dans le comportement du chrétien ne devrait susciter de la haine. Mais ce fut la non-appartenance des disciples de Jésus au monde, qui fut la raison de cette haine. Le système ne supporte pas l’Eglise qui accepte d’être “mise à part” du monde par Jésus, c’est-à-dire qui refuse de faire partie du système politico-économico-culturo-religieux hostile au Christ; qui ne veut pas s’y conformer, s’y adapter. “Je leur ai donné ta parole et le monde (kosmos) les a haïs” (Jean 17:14). Ceux qui prétendent détenir la parole de Dieu ne sont guère appréciés. La religion révélée, l’évangélisation suscitent une opposition. Ceux qui acceptent la parole sont menacés, exclus, persécutés. Leur simple présence est ressentie comme une menace. On cherche à les détourner du Christ pour qu’ils ne constituent plus une mise en cause du système.

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“Ne vous étonnez pas, frères, si le monde (kosmos) vous hait” (1Jean 3:13). Il faut s’en faire une raison et en tenir compte, sans être surpris, sans paranoïa. Il est impossible pour le disciple du Christ de “faire bon ménage” indéfiniment avec le monde. C’est difficile à vivre car nous désirons tous être acceptés et aimés. “Voici pourquoi le monde (kosmos) ne nous connaît pas: il n’a pas connu Dieu” (1Jean 3:1). La méconnaissance de Dieu par le système mène à la méconnaissance de ses enfants. Ceux-ci ne doivent pas s’attendre à être compris ou reconnus dans leur relation avec Dieu, par un monde qui ne reconnait pas Dieu. L’église “invisible” est passée sous silence. Le monde n’en tient simplement pas compte. Aussi, les péripéties de la vie des croyants ici-bas ne sont différentes en rien de celles des incroyants. Les conséquences de la haine du monde? “Dans le monde (kosmos) vous aurez de l’affliction” (Jean 16:33). Il y a actuellement plus de 50 pays persécuteurs dans le monde. Pincipalement islamiques, communistes, hindouistes et bouddhistes. “Vous serez livrés même par vos père et mère, vos frères, vos parents et vos amis; on fera condamner à mort plusieurs d’entre vous. Tout le monde vous haïra à cause de moi” (Luc 21:16,17). Ce ne sont donc pas les différences ethniques, culturelles, raciales ou nationales qui sont à la base de la persécution des enfants de Dieu, mais bien la différence spirituelle qui découle de leur relation avec Jésus. C’est la cause pour laquelle le martyr souffre qui fait de lui l’authentique martyr, non l’intensité de ses souffrances. Le changement spirituel est perçu comme une menace pour la cohésion sociale et pour le pouvoir religieux ou polytique en place. Le livre des Actes et les épîtres ont confirmé cette prédiction de Jésus. Mais derrière l’opposition à l’Eglise de la part du monde visible, se cache une sinistre réalité spirituelle, qui explique cette inimitié. Le monde entier est sous l’empire de Satan “Nous savons que nous sommes de Dieu, mais le monde (kosmos) tout entier gît sous l’empire (“est au pouvoir” BFC) du Mauvais” (1Jean 5:19TOB). Dieu est le Souverain légal de l’univers. Satan, “le Mauvais”, est un usurpateur. Une partie de l’univers que Dieu a créé, dont la terre, est occupé, pour le moment, par “l’adversaire”, une puissance ennemie, qui contrôle ce territoire. Ce texte n’envisage que deux possibilités: être “de Dieu”, à lui, de son côté; ou être “du monde...sous l’empire” de Satan. Et c’est précisément ce dualisme moral que le monde refuse. A trois reprises, Jésus appelle Satan “le prince de ce monde (kosmos)” (Jean 12:31; 14:30; 16:11). Le Seigneur parle du “royaume de Satan” en disant qu’il “se maintient” (Mat.12:26) et déclare que “le trône de Satan...là où Satan demeure” peut se trouver ici sur la terre, à Pergame (Apoc.2:13). Certains territoires seraient-ils d’avantage sous influence satanique que d’autres? En l’an 29 de notre ère on érigea un temple à Jupiter à Pergame. C’est dans cette ville qu’on construisit le premier temple dédié à un empereur romain, Auguste. Cette cité idolâtre fut-elle le quartier général de l’emprise du diable sur le monde antique? Jésus dit à Paul qu’il l’envoie aux païns pour “les détourner des ténêbres vers la lumière et de l’empire de Satan vers Dieu” (Act.26:18). Il n’y a que deux sphères d’influence spirituelle: le royaume de Satan (Mat.12:26), et le royaume de Dieu (v.28), “les ténèbres” et “la lumière”. Ceux qui ne veulent pas être sous l’influence de Dieu, ne sont pas, pour autant, libres et autonomes comme ils aiment le penser. Ils tombent, qu’ils le veuillent ou non, sous l’influence de Satan. De là leur aversion pour tout ce qu’ils traitent abusivement de “manichéisme”. Il n’y a pas de “no man’s land” entre ces deux royaumes, où l’homme serait son propre maître. La “libre pensée” est un mythe; elle fait partie des “ténèbres” dont il faut être détourné. Bob Dylan chantait: “You gotta serve somebody”.

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Pourquoi la plupart des gens ne voient-ils pas les choses de façon aussi tranchée? “Ils ne croient pas parce que Satan, le dieu de ce monde (aion -“siècle”), a aveuglé leur intelligence. Ce dieu les empêche de voir la lumière diffusée par la Bonne Nouvelle” (2Cor.4:4 BFC). Le diable maintient son pouvoir sur les incrédules en mettant un écran entre leur intelligence et l’Evangile. Ceux qui ne veulent pas le Christ pour Dieu, ont Satan pour dieu. Le diable les tient dans l’obscurité spirituelle, parce qu’il sait que seule la lumière du Christ peut les libérer de son emprise. Ces personnes peuvent être intelligentes et clairvoyantes dans beaucoup d’autres domaines. “Ce n’est pas à l’homme que nous sommes affrontés, mais aux Autorités, aux Pouvoirs, aux Dominateurs de ce monde (kosmokrator) de ténèbres, aux esprits du mal qui sont dans les cieux” (Eph.6:12 TOB). Le système se trouve sous la domination d’une armée invisible d’esprits angéliques mauvais et puissants. Le combat de l’Eglise pour rester libre par rapport au monde, n’est pas militaire (croisades, guerres de religion, révolutions), mais spirituel. Les différents titres: “Autorités”, “Pouvoirs”, “Dominateurs” désignent peut-être ceux qui s’occupent des différents domaines du système: le politique, l’économique, le culturel, le religieux. Ce sont les armes spirituelles mentionnés dans les versets suivants qui permettent au croyant de résister aux pressions constantes du monde. Elles sont: la vérité, une vie juste, le zèle à annoncer l’Evangile, la foi, l’assurance du salut, la parole de Dieu et les prières (Eph.6:13-19). “Le diable conduisit Jésus plus haut, lui fit voir en un instant tous les royaumes de la terre et lui dit: ‘Je te donnerai tout ce pouvoir avec la gloire de ces royaumes, parce que c’est à moi qu’il a été remis et que je le donne à qui je veux” (Luc 4:5,6). Certains prétendent que Satan mentait, et qu’il ne disposait pas du pouvoir de faire cet offre à Jésus. Mais le Seigneur, s’il refuse la proposition du diable, ne conteste aucunement que ce dernier avait un pouvoir sur le monde qui lui permettait d’en céder les royaumes à qui il voulait. A la fin des temps, le pouvoir du système politique (que le Christ a refusé de recevoir des mains du diable), Satan le donnera à l’antichrist qui, lui, l’acceptera: “On adora le dragon (Satan Apoc.12:9) parce qu’il avait donné le pouvoir à la bête (l’antichrist)” (13:4). Ce n’est pas Dieu qui donnera le pouvoir à l’antichrist. Mais d’où est venu ce pouvoir du diable sur le monde? Nos premiers parents, Adam et Eve, en cédant à la tentation du diable en Eden, en se conformant à ses paroles, sont tombés sous la coupe du Mauvais. “Vous êtes esclaves de celui à qui vous obéissez” (Rom. 6:16). L’humanité entière les y a suivi et ce monde rebelle à Dieu se trouve, de ce fait, sous un pouvoir dont Satan dispose effectivement. La souveraineté de Dieu sur toutes choses a permis cette conséquence de la chute et n’annule pas le règne effectif du Diable sur le présent monde mauvais. Mais, même parmi les chrétiens, certains ne voient pas la création à tel point en noir et blanc. D’après une certaine interprétation du 20ème chapitre de l’Apocalypse, le règne de mille ans du Christ qui y est décrit, recouvre la période présente (de durée indéterminée) entre sa première venue et son retour. Par conséquent, Satan serait actuellement lié par une grande chaîne et enfermé dans l’abîme dont l’entrée serait scellée au-dessus de lui, afin qu’il ne séduise plus les nations (20:1-3). Il est évident qu’une telle interprétation minimise l’importance de l’empire et de la séduction actuels du diable par rapport au monde. Elle prive le témoignage biblique clair et abondant cité plus haut de sa substance. En même temps, le danger que comporte le présent siècle mauvais pour l’Eglise, devient négligeable. Baudelaire disait: “L’astuce suprême du diable c’est de nous convaincre qu’il n’existe pas.” Une astuce presqu’aussi dangereuse serait de nous convaincre que Satan est lié dans l’abîme scellé, de sorte qu’il ne séduit plus les nations. Et cette séduction a encore d’autres conséquences. Le monde est mauvais, corrompu, souillé, pollué

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“Jésus-Christ s’est donné lui-même pour nos péchés, afin de nous arracher du présent monde (aion) mauvais” (poneros Gal.1:4). Si nous arracher à ce système fut au prix de la mort du Christ, c’est que nous y étions en danger et qu’il était important pour nous d’en être délivrés. Le monde n’est pas neutre, ni moralement ni spirituellement. Il est mauvais parce que “tous ont péché” et parce que le péché séduit, tente et asservit. Le mot poneros dénote ce qui est activement pernicieux et méchant. Le monde ne se borne pas à être lui-même corrompu; il cherche aussi à corrompre. “Que vous soyez irréprochables et purs, des enfants de Dieu sans défaut au milieu des gens faux et mauvais de ce monde (kosmos)” (Phil.2:15 BFC). Il s’agit littéralement “d’une génération tordue et perverse”, ce qui souligne l’importance de s’en méfier et d’être sur ses gardes par rapport au système. La vérité est droite; les mensonges sont tordus. On ne peut être droit que d’une façon, on peut être tordu de mille façons. Le monde est également “pervers” dans ce sens qu’il détourne les choses et les gens de l’intention du Créateur à leur égard. Jésus termine une de ses paraboles de la façon suivante: “Le maître fit l’éloge du gérant malhonnète parce qu’il avait agi avec habileté. En effet, ceux qui appartiennent à ce monde (aion) sont plus habiles...que ceux qui appartiennent à la lumière” (Luc 16:8). Jésus décrit deux groupes. D’une part, les gens du système, présentés comme malhonnètes en affaires, habiles à s’enrichir, et appartenant aux ténèbres. Et d’autre part, les enfants de Dieu: “gens de la lumière”, honnêtes et peu portés sur les stratagèmes et le lucre. Il tire la conclusion que les croyants devraient être aussi habiles que les non-croyants dans l’utilisation des bien matériels éphémères (tout en restant honnètes), non pas pour s’enrichir, mais afin d’être en bénédiction éternelle pour d’autres. Il y a différence entre les chrétiens authentiques et le monde. On nous sensibilise au sujet de la pollution qui menace l’atmosphère, l’eau et le sol. “La religion pure et sans tache devant Dieu le Père, la voici: visiter les veuves et les orphelins dans leur détresse; se garder du monde (kosmos) pour ne pas se souiller” (Jac.1:27). Le système est sale. On y touche difficilement sans se salir. Si on marche au milieu du droit chemin, on risque moins d’être éclaboussé par la boue des bas-côtés. Mais cela ne signifie pas qu’il faille s’isoler des non-chrétiens. “Que vous deveniez participants de la nature divine, en fuyant la corruption qui existe dans le monde (kosmos) par la convoitise” (2Pi.1:4). La nouvelle naissance et la présence du Christ en l’homme sont la condition première pour échapper à la pourriture du système. Sans elle, les règles et les interdits ne servent à rien. Il ne faut pas fuir le monde, mais bien la corruption qui s’y trouve. C’est un équilibre délicat à maintenir. Ce sont les convoitises de la chair et des yeux, qui pénètrent et imprègnent le monde dans toutes ses parties et qui sont la source de sa corruption. Celle-ci touche l’âme, mais aussi le corps. “Si ceux, en effet, qui se sont arrachés aux souillures (pollutions) du monde (kosmos) par la connaissance de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ....” (2Pi.2:20). Le contexte qui précède concerne les faux docteurs ainsi que les conséquences morales de leurs enseignements. Il s’agirait donc surtout de la pollution véhiculée par le monde religieux, qui méconnait Jésus-Christ comme Sauveur et Seigneur. Mais le monde ne se borne pas à être mauvais; il est aussi agissant. Le monde fait du tort “Le monde (kosmos)... me hait parce que je témoigne que ses oeuvres sont mauvaises” (Jean 7:7). Sous des dehors prestigieux, prospères, cultivés, respectables, et religieux, l’action du système se manifeste dans toutes sortes d’effets pervers.

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“Si quelqu’un scandalise un de ces petits qui croit en moi...Malheur au monde (kosmos) à cause des scandales! (Mat.18:6,7). Le skandalon est un obstacle qui fait trébucher, qui fait pécher, qui est une occasion de chute (Carrez et Morel). Dieu en veut au monde parce qu’il cherche par tous les moyens à séduire ses enfants, à les faire tomber. Le système les entoure, les sollicite, tente de s’introduire dans leur coeur, de les faire penser et agir comme lui. “La tristesse selon ce monde (kosmos) produit la mort” (2Cor.7:10 TOB). Comme pour Judas qui, pris de remord, se donna la mort. Le système, malgré ses promesses de bonheur, finit par favoriser la déprime et le désespoir. Il n’a pas de réponse à la question du sens. Et les dépressions, si elles ne conduisent pas toutes au suicide, assurent une fin de vie mélancolique et prématurée. “L’inquiétude du monde (aion) et la tromperie des richesses étouffent la parole” (Mat.13:22). Le système dit qu’il faut s’inquiéter d’acquérir les richesses quand on n’en a pas, et s’inquiéter de ne pas les perdre quand on en a. Les biens de ce monde sont trompeurs parce qu’ils inquiètent et n’apportent pas ce qu’ils promettent et s’acquièrent au dépens des vraies valeurs proposées par la parole de Dieu. “Quand nous étions des enfants soumis aux éléments du monde (kosmos), nous étions esclaves” (Gal.4:3 TOB). Le contexte nous fait penser aux mille et une précisions du légalisme talmudique. D’une façon plus générale, le système veut asservir l’homme, l’avoir sous sa coupe, le contrôler. Il exerce des pressions sociales, des contraintes collectives par des coutumes, des traditions, les média, les modes, les idées reçues qui privent le croyant de la liberté de vivre libre et en communion avec Dieu. Rechercher la considération sociale, vouloir faire carrière peut couler quelqu’un dans le moule du système. Cette servitude ne concerne pas uniquement les sociétés juive et occidentale, mais bien toutes les cultures du monde. En étant agissant, le monde donne une impression de force. Cepandant: Le monde a ses faiblesses “C’est lui l’Esprit de vérité, celui que le monde (kosmos) est incapable d’accueillir parce qu’il ne le voit pas et ne le connaît pas” (Jean 14:17 TOB). Le monde, parce qu’il n’accepte pas la vérité, est incapable de recevoir l’Esprit de vérité. N’ayant pas les yeux de la foi, il ne perçoit pas l’action de Dieu. Il ne reconnait pas quand le Saint-Esprit est à l’oeuvre et n’en fait pas l’expérience. Le monde est spirituellement pauvre, aveugle et ignorant. “Père juste, le monde (kosmos) ne t’a pas connu” (Jean 17:25). Dieu s’est révélé dans sa création, (Rom.1:19,20) mais “les hommes retiennent la vérité captive par l’injustice” (Rom.1:18). Par conséquent, le système ne connait pas le “Père juste”, mais les vains raisonnements, les ténèbres, la folie et l’idolâtrie (1:21-23). “Le monde (kosmos), par le moyen de la sagesse, n’a pas connu Dieu” (1Cor.1:21). Ni la philosophie grècque, ni l’érudition rabbinique, ni la méthode scientifique n’apportent la connaissance de Dieu. Le grand savoir de l’intelligentia, au lieu de les conduire vers leur Créateur, s’interpose entre eux et lui. “Nous sommes enfants de Dieu. Si le monde (kosmos) ne nous connaît pas, c’est qu’il ne l’a pas connu” (1Jean 3:1). La méconnaissance de Dieu par le système, est la cause de la méconnaissance par celui-ci, de ses enfants. Le monde a une volonté de ne pas s’intéresser, ni à Dieu ni à ses enfants, de ne pas les comprendre ni de les reconnaître. Il participe à une conspiration du silence. Cette méconnaissance systématique constitue pour le monde un appauvrissement dont il n’est pas conscient.

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“Dieu n’a-t-il pas rendue folle la sagesse du monde (kosmos)?...La sagesse de ce monde (kosmos) est une folie devant Dieu” (1Cor.1:20; 3:19). Le monde a une conception tordue des choses. Si la totalité du réel comprend Dieu, et que le monde ne tient pas compte de lui, les gens du monde ne sont pas en contact avec toute la réalité. Pour le matérialisme, le non-observable n’existe pas. Le monde apporte des pseudo-solutions aux problèmes de la société, des semblants de remèdes aux maux du système. Les sciences humaines (politique, économique, sociale, psychologique) sont loin d’être des sciences exactes. Elles ne cernent jamais toute la réalité. Ceux qui ne tiennent pas compte de la nature humaine déchue et des dominations démoniaques, proposent des panacées qui créent de nouveaux problèmes et qui s’avèrent, à long terme, être des folies. “Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne” (Jean 14:27). Le monde ne nous laisse pas la vraie sérénité, le calme intérieur durable. Il ne nous donne pas l’authentique repos de l’âme et de la conscience, qui viennent de la réconciliation avec Dieu. Il se contente de formules creuses: “vivons en paix”, “dormez tranquille” ou “fichez-moi la paix”. “Le prince de ce monde (kosmos) vient. Et il n’a en moi aucune prise” (Jean 14:30 TOB). Le pouvoir du diable sur le monde ne s’étendait pas au Seigneur. Ses tentations qui séduisaient le système ne trouvait aucun écho chez Jésus. Les faiblesses et la culpabilité du monde qui donnaient au diable une emprise sur lui, ne procuraient à Satan aucun avantage sur le Saint et le Tout-puissant. Celui qui est en vous est plus grand que celui qui est dans le monde (kosmos) (1Jean 4:4). Le Saint-Esprit habite le corps du croyant (1Cor.6:19) et l’Eglise (Eph.2:20-22). Satan est “le dieu de ce monde” (2Cor.4:4). La présence, après 2000 ans, de dixaines de millions de chrétiens disséminés partout dans le monde, territoire occupé par Satan, est la preuve de la faiblesse du diable et du système, par rapport à la puissance du Saint-Esprit. Et cette faiblesse à une autre conséquence: La défaite du monde est certaine “C’est maintenant le jugement de ce monde (kosmos), maintenant le prince de ce monde (kosmos) va être jeté dehors. Pour moi, quand j’aurai été élevé de la terre, j’attirerai à moi tous les hommes. Par ces paroles, il indiquait de quelle mort il allait mourir” (Jean 12:31-33 TOB). Jésus était à la veille de sa passion. Le système a été jugé dans son principe à la croix - notez le mot “maintenant”. Le verdict a été prononcé à la mort du Christ. Le péché étant expié, Satan perdait tous ses droits sur l’homme. Son sort fut arrêté. Notez aussi le futur: “va être jeté dehors”. Le verdict attend le retour du Christ pour être exécuté. “Jésus leur répondit:...Prenez courage, j’ai vaincu le monde (kosmos)!” (Jean 16:33). Il l’a fait, dans un premier temps, quand il a refusé l’offre de Satan de lui donner tous les royaumes du monde et leur gloire. Il n’est pas tombé sous la coupe du diable et a inauguré la défaite de son système. “Loin de moi la pensée de me glorifier d’autre chose que de la croix de notre Seigneur Jésus-Christ; par elle le monde (kosmos) est crucifié pour moi, comme moi pour le monde (kosmos)” (Gal.6:14). Pour celui qui a accepté la mort du Christ pour lui, il s’est opéré une double crucifixion. Le monde a été cloué à la croix en ce qui concerne le croyant, et le croyant a été cloué à la croix en ce qui concerne le monde. Paul en avait fini avec le monde, et le monde en avait fini avec Paul (Lenski). Toute communion, tout lien entre eux avait été rompu. Il existe désormais une séparation intérieure du croyant par rapport au système. Et il doit se résoudre à ne plus être pris en considération par le monde; à ne plus être affecté ni par son approbation ni par sa désapprobation. Et l’aspect du système dont il est surtout question dans le contexte, c’est le monde religieux légaliste du rite et du mérite.

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“Le monde (kosmos) passe, lui et sa convoitise” (1Jean 2:17). “La figure de ce monde (kosmos) passe ” (1Cor.7:31). Le système est fait de changements, il est éphémère. Tout passe, tout casse, tout lasse. Plus ça change, plus c’est la même chose; c’est toujours et encore le monde. Celui-ci veut nous détourner de ce qui est invisible et éternel pour qu’on s’occupe de ce qui est visible et passager. Mais qui veut embrasser et aimer ce qui est périssable et voué à disparaître? On ne place pas son argent dans une banque qui est en faillite. Le monde cessera d’exister, en tant que système, au retour du Christ. Même la convoitise, le désir lui-même faiblit et s’évanouit. “Nous sommes châtiés par le Seigneur, afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde (kosmos)” (1Cor.11:32). Il s’agit de la masse de l’humanité hostile au Christ dont la culpabilité la condamne. Cette condamnation future est bien plus redoutable que n’importe quelle discipline infligée à un enfant de Dieu dans cette vie. “Dieu est-il injuste quand il déchaîne sa colère?...Loin de là! Autrement, comment Dieu jugerait-il le monde (kosmos)? (Rom.3:5-6). Le jugement dernier est un thème important de l’Ecriture et, outre des personnes individuelles, il concerne tout le système satanique. “Ne savez-vous pas que les saints jugeront le monde (kosmos)? Et c’est par vous que le monde (kosmos) sera jugé...” (1Cor.6:2). Les disciples du Christ le feront parce qu’ils régneront avec le Christ (Rom.8:17; Apoc.20:4) et seront associés à son action judiciaire à l’encontre des rebelles et du système dont ceux-ci font font partie. “Il y eut dans le ciel de fortes voix qui disaient: le royaume du monde (kosmos) est passé à notre Seigneur et à son Christ; et il régnera aux siècles des siècles” (Apoc.11:15). Tout ce qui est sous le pouvoir de Satan passera sous l’autorité du Christ et son règne n’aura pas de fin. C’est la consommation de l’histoire de l’humanité. Il est important de se positionner dès maintenant du côté de la victoire. Mais en attendant: Les disciples du Christ se trouvent dans une certaine position vis-à-vis du monde “Je vous ai choisis du milieu du monde (kosmos). (Jean 15:19b). Jésus a choisis ses disciples, en tant qu’individus, pour qu’ils soient croyants et qu’ils lui appartiennent. Avant leur conversion, ils se trouvaient au milieu du système. Il les a puisés dans la masse des incroyants du monde pour les en extraire. Ils ne sont plus englobés dans le système. “J’ai fait connaître ton nom aux hommes que tu m’a donnés du milieu du monde (kosmos)” (Jean 17:6). Cette extraction du milieu du monde s’est faite pour ceux que le Père lui avait donnés, et par la révélation que Jésus leur avait accordée à son sujet. Le croyant en Christ ne se trouve plus “au milieu” du système, en son sein, dans son giron moral et spirituel. “Notre Seigneur Jésus-Christ s’est donné lui-même pour nos péchés, afin de nous arracher du présent monde (aion) mauvais” (Gal.1:4). Le pardon des péchés et la justification par Jésus-Christ a opéré une extraction morale et spirituelle du croyant par rapport au présent monde mauvais; sans que cette extraction ne soit physique. Le Christ ne nous arrache pas à sa présence, mais à son pouvoir, et à tout ce qui, en lui, est mauvais. Sa rédemption est une libération. Le contexte des Galates montre encore qu’il s’agissait surtout d’une délivrance par rapport au système religieux, de la circoncision et du légalisme, du rite et du mérite. “Du moment que vous êtes morts avec Christ, et donc soustraits aux éléments du monde (kosmos)... (Col.2:20). La mort au monde est considéré ici comme une séparation, une émancipation par

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rapport à l’ascétisme (v.21: “ne prends pas, ne goûte pas, ne touche pas”). Il s’agit d’être intérieurement détaché des doctrines et des préceptes d’une des pseudo-spiritualités du système, d’être libre par rapport à lui. L’Eglise, corps du Christ, ne se laissera jamais absorber par le monde philosophique ou religieux. Elle se distinguera par rapport à lui, gardera une identité propre. “Vous n’êtes pas du monde (kosmos)” (Jean 15:19a). “Ils ne sont pas du monde (kosmos) comme moi je ne suis pas du monde (kosmos)...Ils ne sont pas du monde” (Jean 17:14,16). Les vrais disciples du Christ ne feront jamais pleinement partie du système - pas plus que Jésus lui-même ne lui appartenait. Et ils appartiennent au Christ. Ils n’y seront jamais totalement intégrés, assimilés. Ils y sont “comme des gens de passage et des étrangers” (1Pi.2:11). Cela leur vaudra parfois d’être considérés comme des expatriés, des intrus, voir des sectaires, même au sein de leur propre culture. Ils y seront, dans une certaine mesure, à leur désavantage, incompris. “Ils sont dans le monde (kosmos)...Je ne te prie pas de les retirer du monde (kosmos), mais de les garder du Mauvais (Jean 17:11,15). Le croyant ne doit pas fuir hors du monde en s’isolant physiquement de celui-ci. Le cloîtré finit par découvrir le monde dans son monastère. En même temps il désobéit à l’ordre de Jésus d’aller dans le monde pour y proclamer l’Evangile (Mc.16:15). Si Jésus prie que ses disciples, présents dans le monde, soient “gardés du mauvais”, c’est que leur présence au système comporte pour eux un danger moral et spirituel. L’équilibre entre être “dans le monde”, tout en n’étant pas “du monde” a toujours été délicat. Paul explique aux Corinthiens: “Dans ma précédente lettre, je vous ai écrit de ne pas avoir de contact avec ceux qui vivent dans l’immoralité. Je ne visais pas, d’une façon générale, tous ceux qui dans ce monde (kosmos), sont immoraux, envieux, voleurs, ou adorateurs d’idoles. Sinon, vous devriez sortir du monde (kosmos)!” (1Cor.5:9,10). Il est possible de vivre en hermite ou en vase clos, de ne fréquenter que des chrétiens, de se créer un ghetto évangélique, un monde à part. Pour Paul, il n’est pas question de vivre à l’écart du monde; ce serait “sortir du monde”, être un marginal. “Ce n’est pas à l’homme que nous sommes affrontés, mais aux Autorités, aux Pouvoirs, aux Dominateurs de ce monde (kosmos) de ténèbres, aux esprits du mal qui sont dans les cieux” (Eph.6:12 TOB). La position du croyant vis-à-vis du système comprend un “affrontement”, littéralement un “combat” ou une “lutte” (pale) avec les puissances maléfiques qui le sous-tendent. L’Eglise devra toujours être “militante” par rapport au monde, qu’elle le veuille ou non. Le combat spirituel est mentionné au moins 23 fois dans le Nouveau Testament. Les disciples du Christ sont appelés à prendre position vis-à-vis du monde Outre les indicatifs quant à la position du croyant vis-à-vis monde, il reste les impératifs. “N’aimez pas le monde (kosmos) ni ce qui est dans le monde” (1Jean 2:15b). L’interdiction se situe sur le plan des affections. Jésus ne dit pas: “n’allez pas dans le monde”. C’est plutôt une affaire du coeur, une disposition intérieure. Le monde cherche à gagner l’amour de l’enfant de Dieu. Il faut veiller sur ses désirs, ses pensées, ses ambitions, ses mobiles. On peut se plier aux règles d’un certain milieu, et éviter les mauvaises fréquentations tout en étant porté vers ce qui est dans le monde quand on est seul.

“Si quelqu’un aime le monde, l’amour du Père n’est pas en lui” (1Jean 2:15b). Ces deux affections sont incompatibles. Le monde veut usurper nos affections. La jeune fiancée qui continue à fréquenter d’autres garçons, fait la preuve qu’elle n’aime pas vraiment son fiancé. Elle peut insister qu’elle ne fait rien de mal et qu’il ne faut pas être étroit d’esprit, elle ne convainc personne sur son amour pour lui.

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“Ne savez-vous pas que l’amour du monde (kosmos) est haine de Dieu” (Jac.4:4a). Ces deux amours s’excluent l’un l’autre. Il y a tant de pratiques, d’acquisitions, d’aspirations discutables, qu’il n’est que l’amour qui puisse trancher et déterminer où se situent les limites. On n’est séparé du monde que dans la mesure où on est attaché à Dieu. Il s’agit d’une séparation intérieure plutôt que corporelle. “Celui donc qui veut être ami du monde (kosmos) se fait ennemi de Dieu” (Jac.4:4b). Il n’y a que deux camps, et il n’est pas possible d’être des deux côtés en même temps. Il faut faire preuve d’amabilité envers les non-croyants tout en évitant un certain copinage, une complicité qui mènerait au compromis. Jésus a été crucifié par le système. Dieu dit: “l’ami de mon ennemi est mon ennemi”. “Démas m’a abandonné par amour pour le monde (aion) présent”. Il est parti pour Thessalonique (2Tim.4:10). Paul était en prison, en attendant le martyre (v.6) et en aimant l’avènement du Seigneur qui lui assurerait une couronne (v.8). L’amour de Démas, son jeune collaborateur, se portait sur la sécurité du monde présent, terrestre et visible. Son attachement au comfort physique, matériel et social, l’amène à laisser en plan l’apôtre, et à échapper au risque de subir le même sort que lui. On pense qu’il était originaire de Thessalonique. Il serait donc rentré à la maison. Le disciple du Seigneur est appelé à préférer le siècle à venir au siècle présent, à accepter d’être désavantagé par amour pour Dieu et sa cause, quitte à subir la haine du monde. Il y avait une Eglise à Thessalonique. Démas n’avait pas forcément l’intention d’abandonné la foi. Mais, par amour pour le monde, il n’était plus un chrétien engagé. “Ne vous conformez pas au monde (aion) présent” (Rom.12:2 TOB). L’Eglise doit se méfier des “formes” du système qu’elle risquerait de prendre en s’y adaptant, en se laissant façonner par ses us et coutumes, par son style de vie, par le contexte économique, culturel et religieux. Après des siécles de “présence chrétienne” en Amérique latine, on peut y découvrir si bien un christianisme paganisé que des païens christianisés. En occident on a vu une chrétienté intolérante, impérialiste, bourgeoise, imbue de culture et de consumérisme. Il y a eu imitation, conformité et ressemblance au siècle présent. Certains se conforment au monde même en devenant “non-conformistes”. Le croyant ne sera ni conservateur ni progressiste; ni traditionnaliste ni moderniste, ni même post-moderniste. Il ne se laissera mouler ni par la droite ni par la gauche, ni même par le centre, mais se laissera “transformer” en permettant à son intelligence d’être constamment renouvelée par la parole de Dieu. “La religion pure et sans tache, devant Dieu notre Père, consiste à...se préserver des souillures du monde (kosmos)” (Jac.1:27). Le système est un bourbier moral. Certes, Dieu peut nous garder de toute chute (Jude 24). Mais nous avons une responsabilité personnelle de nous garder nous-mêmes des pollutions du monde. Jésus a fréquenté les gens de mauvaise vie sans se laisser contaminer. “Si ceux, en effet qui se sont arrachés aux souillures du monde (kosmos) par la connaissance de notre Seigneur et Sauveur Jesus-Christ se laissent de nouveau entortiller et dominer par elles, leur situation devient finalement pire qu celle du début” (2Pi.2:20 TOB). Décider une fois pour toute où il se situe par rapport au monde peut simplifier et revigorer la vie d’un chrétien. “Tout ce qui est né de Dieu est vainqueur du monde (kosmos). Et la victoire qui a vaincu le monde, c’est notre foi. Qui est vainqueur du monde, sinon celui qui croit que Jésus est le Fils de Dieu” (1Jean 5:4,5 TOB). Sans la nouvelle naissance, sans la foi en Jésus-Christ, Fils de Dieu, toute victoire spirituelle sur le monde est illusoire. Sans une régénération intérieure, sans un attachement au Christ, sans une confiance personnelle en lui, rien ne peut protéger contre les séductions du système. Ni le millieu chrétien pourrait le faire, ni l’éducation, ni les interdictions. Il ne faut pas se

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barricarder dans une forteresse mais triompher dans les combats, en participant à la victoire remportée par le Christ. Jean est confiant que cette victoire est possible. “Comme tu m’as envoyé dans le monde, je les ai aussi envoyés dans le monde (kosmos)” (Jean 17:18). Jésus a été envoyé par le Père dans le monde, de l’extérieur de celui-ci. Au départ, il considère ses disciples comme étant aussi extérieurs au système. Il les en avait extraits. Mais comme il a pénétré lui-même dans le monde et que celui-ci a été le champ de son action, les disciples, à leur tour, sont appelés à aller dans le monde pour y représenter Dieu et y prolonger l’action de leur Seigneur. “Allez par le monde (kosmos) entier, proclamez l’Evangile à toutes les créatures” (Mc.16:15). C’est le contraire d’être un reclus, de s’enfermer dans une bulle, un cocon ou une tour d’ivoire. Mais ce n’est pas non plus parcourir le système pour lui donner des conseils, lui faire la leçon, lui imposer une morale, réformer ses structures, christianiser la société, introduire le royaume terrestre. C’est annoncer la Bonne Nouvelle à tous les hommes où qu’ils se trouvent. “Que vous soyez irréprochables est purs, des enfants de Dieu irréprochables au milieu d’une génération perverse et corrompue, parmi laquelle vous brillez comme des flambeaux dans le monde (kosmos), portant la parole de vie” (Pil.2:15). La parole de vie aura tout l’effet voulu, si le croyant est moralement différent du monde. Il restera “au milieu d’une génération corrompue” tout en se démarquant nettement d’elle. Ne pas fuir le monde, tout en restant irréprochable, lui permettra d’y briller comme un flambeau, y avoir une présence véritablement missionnaire. “Je prie pour eux. Je ne prie pas pour le monde (kosmos) (Jean 17:9). Jésus prie aussi pour les individus qui font encore partie du monde et qui “grâce à la parole de ses disciples, croiront en lui” (17:20). Mais il ne prie pas pour le système politico-économico-culturo-religieux en tant que tel. Il ne s’occupe pas encore du royaume mauvais qui lui est hostile, dont Satan est le prince, qui passe, qui sera jugé et qui subira la colère de Dieu. Il ne prie pas, comme il le fait pour ses disciple, que ce monde rebelle soit “gardé (v.11) ou “sanctifié” (v.17). Il n’attend aucune amélioration, aucune réforme du système. Aucune des responsabilités de l’Eglise par rapport au monde, citées plus haut, ne laisse entendre qu’elle aurait à influencer le système, à prier pour lui, à le récupérer pour le Christ, à christianiser la société. Il a toujours été contre-productif d’imposer à des non-chrétiens la pratique d’un christianisme qu’ils n’acceptent pas personnellement. Loin d’être une démission, cette attitude permet d’acorder toute son importance à l’annonce de l’Evangile et l’édification de l’Eglise pour que des non-chrétiens reçoivent le Christ et échappent à le colère à venir. Ceux qui, en proie aux intempéries, chercheraient à modifier le temps qu’il fait, ne connaîtront que des frustrations. L’Ecriture laisse entendre qu’il vaut mieux porter secours à ceux qui sont pris dans la tourmente et les “arracher au présent monde mauvais” plutôt que de chercher à améliorer l’atmosphère ambiante du système (Gal.1:4). Toutes les précisions ci-dessus au sujet du monde, nous laissent, malgré tout, perplexes face à certaines situations, pratiques et personnes. Comment discerner et cerner ce qui est de l’essence du monde? Les composantes essentielles du monde Le présent monde mauvais n’est pas un lieu ni des endroits, mais un système. Ce n’est pas la matière, mais un esprit. Ce n’est pas l’argent, mais l’amour de l’argent. Ce n’est pas l’usage des biens, mais leur abus. Ce n’est pas la pensée ou l’intellect, mais la pensée orgueilleuse, autonome et l’intellectualisme. Ce ne sont pas les hommes, mais ce qui domine les hommes. Ce n’est pas une émancipation mais un esclavage. Ce n’est pas les autorités, mais la politique. Ce n’est pas une

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question du corps, mais du coeur. Ce n’est pas la jouissance ou le plaisir, mais la luxure et la volupté. Le monde séduit sans satisfaire. Il brille tout en étant ténèbres. Ce n’est pas une création de Dieu; c’en est la corruption. Il peut écraser le croyant, mais sans le vaincre. Il entoure le vrai croyant, sans l’assimiler. Il veut bien servir l’Eglise, mais pour mieux s’en servir. Il accepte toutes les religions tout en haïssant Jésus le seul chemin. Il courtise le chrétien de nom, tout en détestant le vrai disciple du Christ. Toutes ces précisons peuvent être utiles. Mais comment déterminer concrètement dans nos choix et dans la gestion de notre quotidien, ce qui est du monde et ce qui ne l’est pas? Le système est souvent insaisissable; il varie selon les cultures et il évolue avec le temps et la technologie. On pense savoir en quoi il consite, mais il se dérobe, et on reste là avec autre chose en face de soi. On était à côté de la question; on s’est trompé d’adversaire, de cible. Satan dresse l’Eglise contre de faux ennemis et l’aveugle pour les vrais. Elle s’expose de la sorte à des attaques sournoises venant d’elle ne sait où. Quand on tente de définir le monde, soit on est tellement vague qu’on n’est différent de lui en rien; soit on est tellement précis qu’on se retrouve en plein légalisme avec un bon petit code de règles et d’interdictions. Heureusement, l’Ecriture nous donne trois précisions qui nous permettent de mieux cerner ce qu’est le monde dans son essence: “Tout ce qui est dans le monde (kosmos), la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie, ne vient pas du Père, mais vient du monde (kosmos)” (1Jean 2:16). En d’autres termes, ce qui émane du système au lieu de nous venir de Dieu, c’est: 1) La convoitise de la chair: Le désir de jouir, la recherche du plaisir, la poursuite de l’amusement. Ce qui vient du monde n’est pas le fait de désirer car: “Je suis à mon bien-aimé, et ses désirs se portent vers moi” (Cant.7:11). Et: “Fais de l’Eternel tes délices et il te donnera ce que ton coeur désire” (Ps.37:4). Le désir sexuel et la faim de nourriture peuvent très bien nous venir du Père. Ce qui vient du monde ce sont les désirs “de la chair”, c’est-à-dire ceux qui proviennent de notre nature humaine déchue. Or, “Les oeuvres de la chair sont: la fornication, l’impureté, la débauche...les envies, les beuveries, les orgies” (Gal.5:19-21), bref: les “mauvais désirs” (1Cor.10:6; Col.3:5) qui “viennent du coeur et qui souillent l’homme” (Mat.15:18-20). C’est désirer la femme qui ne nous appartient pas. C’est vivre pour manger plutôt que manger pour vivre. C’est faire passer la satisfaction de nos désirs avant tout autre chose. C’est aimer le plaisir plutôt que Dieu (2Tim.3:4). Ce qui vient du monde, ce n’est pas non plus la jouissance elle-même, car: “Si un homme mange, boit et jouit du bien-être au milieu de tout son travail, c’est là un don de Dieu” (Eccl.2:13). Et: “Dieu nous donne avec abondance toutes choses pour que nous en jouissions” (1Tim.6:17). La jouissance peut donc venir du Père et non du monde. Ce qui nous vient du monde c’est la recherche de la jouissance comme une fin en soi, c’est la poursuite du plaisir pour qu’il donne un sens à notre vie, c’est n’être vraiment content qu’en s’amusant (téléphagie, sorties) ou en jouissant (boulimie, alcoolisme, stupéfiants). C’est quand le plaisir devient un besoin, une évasion, la source de notre bonheur. C’est aussi quand on met son espérance en la perspective de jouir. Le caractère fondamental de ces trois “choses qui sont dans le monde”, ressort de la tentation de nos premiers parents par Satan en Eden; mais aussi de la tentation du Seigneur Jésus (le “dernier Adam”) par le diable dans le désert: . “Le serpent dit à la femme: Dieu a-t-il réellement dit: Vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin?... La femme vit que l’arbre était bon à manger...Elle en mangea...et son mari en mangea” (Gen. 3:1,6). C’était “la convoitise de la chair”. “Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, Jésus eut faim. Le tentateur, s’étant approché, lui dit: ‘Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains” (Mat.4:2,3). Jésus n’a pas cédé à la

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tentation. Et des anges sont venus le servir (v.11). Nous avons constaté plus haut que l’Ecriture établi un lien objectif entre le monde (kosmos, aion) et les domaines politique, économique, culturel et religieux. Ce sont les trois “choses qui sont dans le monde”, et qui “ne viennent pas du Père” qui corrompent ces quatre domaines, et qui font de la société humaine le “système satanique”. Comment la première “chose qui est dans le monde”, “la convoitise de la chair”, se manifeste-t-elle donc dans ces quatre domaines? a) Dans le politique: Le pouvoir des grands de ce monde leur facilite les conquêtes amoureuses. Les sultans ont leurs harems. Ce n’est pas l’effet du hasard qu’on parle de “festins de rois”. Des législations laxistes sur l’avortement, le mariage homosexuel, la prostitution et les stupéfiants contribuent actuellement a la déglingue dans la société. b) Dans l’économique: La publicité se sert de la femme légèrement vêtue pour vendre n’importe quoi. Qu’on soit homme ou femme, on épouse souvent quelqu’un pour son argent, plutôt que par amour vrai. Si on est riche, on peut divorcer plus facilement, ou on change plus souvent de partenaire. Les dîners d’affaires plantureux impressionnent le client, et on peut les déduire comme frais . c) Dans le culturel: Les philosophes échafaudent des systèmes qui favorisent l’empire des sens: hédonisme, épicurisme, sensualisme, nihilisme, etc. Des psychologues (Freud) réduisent le psychisme humain à l’élément sexuel. Des biologistes font de l’homme un animal évolué. Les romanciers traitent avant tout de l’amour-passion. La plupart des artistes, qu’ils soient peintres, musiciens, chanteurs ou cinéastes ne sont pas connus pour leur moralité, que ce soit dans leurs productions, ou dans leur vie privée; ni pour leur modération dans ce qu’ils consomment (alcool, drogue). d) Dans le religieux: L’idolâtrie des peuples qui entouraient Israël et celle de la Grèce et de la Rome antiques était d’une immoralité grossière. Le dieu Siva de l’hindouisme est le dieu de la passion et de la fécondité. L’islam et le mormonisme justifient la polygamie. Des dérives peuvent découler d’une perversion des vérités révélées, d’une réaction à l’ascétisme, d’une interdiction du mariage, de l’extase mystique qui se fond dans l’extase sexuelle, de l’amour comme valeur absolue et unique qui justifie tout. “Il s’est infiltré parmi vous...des impies qui travestissent en débauche la grâce de notre Dieu...Qui souillent vos repas fraternels, lorsqu’ils font bombance et se gavent sans pudeur” (Jude 4,12 TOB). 2) La convoitise des yeux: Le désir de posséder ce qu’on voit, la recherche des biens, la poursuite de l’argent. Ce qui vient du monde, ce ne sont pas les choses ou les biens eux-mêmes, ni le simple fait de les posséder: “Car tout ce que Dieu a créé est bon et rien n’est à rejeter, si on le prend en remerciant Dieu” (1Tim.4:4). Il a fait de l’homme le gérant de la terre. Celui-ci peut donc vivre des biens que le Créateur met à sa disposition. Et, “Dieu dit à Salomon...Je te donnerai ce que tu n’a pas demandé, des richesses...” (1Rois 3:10,13). Salomon n’a pas recherché les richesses. Par conséquent, celles qu’il avait lui sont venues du Père et non du monde. Ceux qui “recherchent” d’abord le manger, le boire et les vêtements, sont les “païens” (Mat.6:31,32). Toutes ces choses sont données par dessus à ceux qui cherchent premièrement le royaume de Dieu; car leur Père céleste sait bien qu’eux aussi en ont besoin (6:32,33). Ce qu’ils ont ne leur vient pas du monde mais du Père, parce qu’ils ne l’ont pas recherché premièrement. Par conséquent, ce sont les biens matériels qu’on recherche soi-même, indépendamment de Dieu et sans tenir compte de lui, qui nous viennent du monde. C’est d’avoir, comme but dans la vie, d’acquérir des choses . C’est penser que la vie d’un homme dépend de ce

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qu’il possède (Luc 12:15). C’est chercher son identité, son bonheur dans les biens, plutôt qu’en Jésus-Christ. La deuxième tentation du diable révèle un autre élément essentiel de “ce qui est dans le monde”. “La femme vit que l’arbre était...agréable à la vue...elle prit de son fruit” (Gen.3:6). C’était “la convoitise des yeux”. “Le diable transporta Jésus sur une montagne très élevée, lui montra tous les royaumes du monde et leur gloire, et lui dit: ‘Je te donnerai toutes ses choses, si tu te prosternes et m’adores” (Mat.4:8,9). Il a essayé de lui en mettre plein la vue. Jésus résista à la tentation.Comment donc la “convoitise des yeux”, le désir de posséder, se manifeste-t-il dans les quatre domaines dont Satan s’empare pour en faire “ce présent monde mauvais”? a) Dans le politique: L’expansionisme territorial est à la base de la plupart des guerres. La soif de pouvoir est à la base de la plupart des carrières politiques. Le pouvoir qui corrompt est à la base de la pourriture dans le domaine politique, qui se trouve absorbé de la sorte dans le “système satanique”. En offrant à Jésus tous les royaumes du monde, Satan cherchait à prendre le pouvoir sur lui. b) Dans l’économique: Le matérialisme est à la base si bien du capitalisme que du communisme. Ce sont deux expressions d’une même chose. La société de consommation nous en met plein les yeux et agrandit constamment le domaine de nos “besoins”. Gagner beaucoup d’argent, c’est réussir sa vie. Jésus disait que s’amasser des trésors sur la terre, c’est avoir le coeur dans le monde. Et que Mammon (le Dieu des richesses) est un maître qui se fait servir (Mat.6:19,21,24). c) Dans le culturel: La chasse au savoir et aux diplômes devient la chasse à la sécurité, aux gros salaires. Les sciences économiques visent la réussite dans les affaires. Auteurs et artistes, musiciens et chanteurs recherchent la notoriété rémunératrice en plaisant au grand public. d) Dans le religieux: “Les pharisiens, qui étaient avares” se moquaient de Jésus quand il disait qu’on ne pouvait servir Dieu et Mammon (le dieu de la richesse -Luc 16:13,14). Les chefs religieux “dévoraient les maisons des veuves” (Mat.23:14). De tout temps, certains ont cru “que la piété est une source de gain” (1Tim.6:5). L’évangéliste mercenaire ou l’Eglise qui vend des indulgences se servent de la religion pour s’enrichir. L’un et l’autre font partie du monde. “L’évangile de la prospérité” est aussi un message mondain. Paul confirme le caractère de ces deux convoitises (“de la chair” et “des yeux”) en les appelant des “convoitises mondaines” (Tit.2:12), ce sont celles qui prévalent dans le système. 3) L’orgueil de la vie: vouloir faire impression, se fair valoir, rechercher les honneurs. L’honneur et la gloire ne viennent pas forcément du monde mauvais, car Jésus dit: “Si quelqu’un me sert, le Père l’honorera” (Jean 12:26). Et Paul ajoute: “Nos détresses d’un moment sont légères par rapport au poids extraordinaire de gloire éternelle qu’elles nous préparent” (2Cor.4:17). Dieu a donné de la gloire à Salomon parce qu’il ne l’avait pas demandée (1Rois 3:10,13). Ce qui vient du monde c’est chercher à faire de l’effet, à se donner de l’importance, à soigner son image, à briguer les premières places. C’est chercher son bonheur dans l’approbation des autres, dans la gloire, et la réussite. Ce qui, dans son essence, “vient du monde”, nous est également révélé par la dernière des trois tentations de Satan. “Le serpent dit à la femme: ‘Non, vous ne mourrez pas, mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront et vous serez comme des dieux” (Gen.3:4). C’était “l’orgueil de la vie”. “Le diable transporta Jésus dans la ville sainte, le plaça sur le haut du temple, et lui dit: ‘Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi en bas; car il est écrit: Il donnera des ordres à ses anges à

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ton sujet; et ils te porteront sur les mains” (Mat.4:5,6). Satan pousse Jésus à prouver d’emblée au peuple, de manière spectaculaire, qu’il est le Messie, le Fils de Dieu - sans passer par la croix. Il aurait eu la gloire sans souffrir et mourir pour le péché du monde. Jésus répond à Satan: “Il est aussi écrit: tu ne tenteras point le Seigneur ton Dieu” (4:7). Comment donc “l’orgueil de la vie” se manifeste-t-elle dans les quatre domaines dont Satan s’empare pour en faire “ce présent monde mauvais”? a) Dans le politique: Le protocol mondain détermine l’ordre des places dans les cérémonies publiques selon l’importance relative des personnalités. Satan montre à Jésus “les royaumes du monde et leur gloire” (Mat.4:8). Les états ont leurs palais prestigieux, leurs habits royaux, ceux des magistrats et de la parade, ainsi que les titres nobiliaires et des gouvernants. Pour se faire élire, il faut paraître, être vu à la télé, être acclamé dans les grands rassemblements. Popularité, audience, éclat, splendeur, couronne, hommages, décoration, panache, vaines gloires, bonne presse, mégalomanie. L’Eglise n’a jamais été aussi entreprenante et puissante que pendant les premiers siècles quand elle n’avait rien d’officiel à voir avec le monde politique. b) Dans l’économique: Les nantis fréquentent les soirées mondaines pour se montrer avec le gotha. Ils s’assurent les signes extérieurs de la fortune: luxe, voyages, croisières, restaurants trois-étoiles airs distingués, résidences prestigieuses, clubs privés, pour faire impression. Arrivisme, notoriété, image de marque, prétention, immodestie, avoir la cote, arriver en haut de l’échelle, la gloriole. c) Dans le culturel: Pour les institutions scientifiques et académiques: distinctions, réputation, décorations, titres honorifiques, “pose académique, pose prétentieuse” (Larousse). Pour l’art et la musique: célébrité, vanité, starification, vedettariat, césars, oscars, palmes, être en tête d’affiche, briller. Pour les belles lettres: lauriers, se faire un nom, éloges, prix littéraires. “Style académique, où l’art se fait trop sentir” (Larousse). d) Dans le religieux: “Jésus dit: ‘les scribes et les pharisiens font toutes leurs actions pour être vus des hommes...Ils ont de longues franges à leurs vêtements; ils aiment les premiers sièges dans les synagogues; ils aiment à être salués dans les places publiques et à être appelés Rabbi, Rabbi” (Mat.23:5-7). Le légalisme des pharisiens ne les empêchait pas d’être foncièrement mondains. Jacques et Jean dirent à Jésus: “Accorde nous d’être assis l’un à ta droite, l’autre à ta gauche, quand tu seras dans ta gloire. Jésus leur répondit: Vous ne savez ce que vous demandez.” (Mc.10:35-38). Faire partie du cercle intime du Seigneur n’empêchait pas ces disciples d’avoir le monde dans le coeur. L’institution ecclésiastique a connu: magnificence, solennité, dignité, pompes, béatifications, éminence, révérence, vénération, fastes, airs d’importance, pourpre cardinalice. Dans le ministère chrétien, vouloir bâtir une oeuvre qui sera un monument à sa propre personne. C’est ainsi que le monde entre dans l’Eglise. “Rien de plus normal que le bateau soit dans l’eau; mais attention quand l’eau commence à entrer dans le bateau”. Le défi pour le disciple du Christ consiste à ne pas se séparer des gens du monde, tout en n’aimant pas les choses qui sont dans le monde et qui ne viennent pas de Dieu. C’est-à-dire de ne pas rechercher les jouissances, les biens matériels et les honneurs qui sont dans le système. C’est faire la distinction entre les autorités instituées par Dieu et le politique, entre les bonnes choses créées par Dieu et l’économique, entre l’art et la sagesse dans la crainte de Dieu et le culturel, entre la relation de confiance avec Dieu et le religieux. C’est de participer au politique, à l’économique, au culturel et au religieux tout en refusant tout, dans chacun de ces domaines, qui est poursuite du plaisir, de l’argent et de la gloire. C’est aussi le seul moyen d’échapper à l’empire de Satan et à la corruption qui est dans le monde. En ceci, le Christ a été notre exemple et le Saint-Esprit sera notre puissance. En cédant à la tentation de Satan, Adam et Eve se sont mis sous sa coupe, et tous les hommes, par la

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suite, par leur péché, se sont également placés en le pouvoir du diable qui, désormais, les manipule et les contrôle. C’est ainsi qu’il est devenu “le prince de ce monde” et que le monde est en son pouvoir (voir plus haut). Ce sont la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie qui, ne venant pas du Père, ont fait du monde merveilleux de Dieu, le triste monde de Satan. En refusant de céder à la tentation du diable, Jésus a démontré sa souveraineté sur toutes choses et a jeté les bases de sa victoire finale sur Satan. Il pouvait dire désormais: “Prenez courage, j’ai vaincu le monde” (Jean 16:33). Puissions-nous vaincre le monde avec lui! Un jour, le Seigneur fera “de nouveaux cieux et une nouvelle terre, où la justice habitera” (2Pi. 3:13; Apoc.21:1). Le triste monde de Satan sera passé, pour laisser la place au monde nouveau et merveilleux de Dieu. Le roi Salomon, lui, a fait la démonstration dans le livre de l’Ecclésiaste, et dans sa vie personnelle, que le monde ne satisfera jamais: Après avoir bien commencé sa vie, il la termine dans le désespoir. “Vanité des vanités, oui, tout est dérisoire...sous le soleil” (Eccl.1:2,3). Si on ne tient pas compte de Celui qui est au-delà du soleil, c’est-à-dire qu’on vit indépendamment de Dieu, l’existence humaine n’est que futilité. “A l’époque de la vieillesse de Salomon...son coeur ne fut point tout entier à l’Eternel” (1Rois 11:4) Ecoutons son témoignage dans ses vieux jours (Eccl.2:1-20): La convoitise de la chair: “Plaisirs...goûte...rire...joie...vin...folie...chanteurs et chanteuses... délices...de nombreuses belles femmes...je ne me suis privé d’aucun plaisir...dérisoire...absurde... c’est comme courir après le vent”. La convoitise des yeux: “Esclaves et servantes...j’ai possédé en abondance...je me suis amassé de l’argent et de l’or...je ne me suis rien refusé de tout ce que je voyais...à quoi cela m’avance-t-il... cela aussi est dérisoire....aussi j’en suis arrivé au désespoir.” L’orgueil de la vie: “J’ai entrepris de grands travaux...je devins puissant, et je surpassai tous ceux qui m’on précédé à Jérusalem...j’ai considéré l’ensemble de mes réalisations...je mes suis rendu compte que tout est futilité...il n’y a aucun intérêt à tout ce qu’on fait...je me suis mis à haïr la vie, car tout ce qui se fait sous le soleil m’est apparu détestable (Eccl.2:1-20 Semeur). Profitons de l’expérience de Salomon, car nous ne jouirons jamais autant que lui, nous ne serons jamais ni aussi riches ni aussi célèbres que lui. Le monde nous décevra toujours.

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TABLE DES MATIERES Introduction (p.2) Chapitre 1 - L’approche (p.4) Chapitre 2 - Le sens du mot “Eglise” (p.15) Chapitre 3 - Différences et concordances entre l’Eglise universelle et les Eglises locales (p.23) Chapitre 4 - Ce que l’Eglise n’est pas (p.32) Chapitre 5 - L’Eglise et la Trinité (p.44) Chapitre 6 - Les attributs de l’Eglise universelle (p.47) Chapitre 7 - La constitution de l’Eglise universelle (p.55) Chapitre 8 - La croissance de l’Eglise (p.64) Chapitre 9 - L’unité de l’Eglise (p.72) Chapitre 10 - Rôle et fonctions de l’Eglise (p.100) Chapitre 11 - L’Eglise et l’Etat (p.107) Chapitre 12 - L’Eglise et Israël (p.148) Chapitre 13 - L’Eglise et “ce présent monde mauvais” (p.156)