rapport de mission conjointe sur les enquetes draft 1 · réunions avec les chefs de groupement et...
TRANSCRIPT
1
PARC NATIONAL DE LA SALONGA
RAPPORT D’ENQUÊTE CONDUITE PAR UNE ÉQUIPE CONJOINTE ICCN, WWF ET
OBSERVATEURS APEM SUR 6 CAS PRÉSUMÉS D’ABUS DE DROITS HUMAINS COMMIS
PAR LES ÉCO-GARDES DU PNS PENDANT LES PATROUILLES ENTRE 2002-2016 DANS
LES TERRITOIRE DE MONKOTO (PROVINCE DE LA TSHUAPA) ET TERRITOIRE D’OSHWE
(PROVINCE DE MAI- NDOMBE)
Mars 2019
2
Table des matières
PARC NATIONAL DE LA SALONGA ............................................................................................... 1
I. CONTEXTE ET JUSTIFICATION .............................................................................................. 4
II. OBJECTIFS ............................................................................................................................ 5
III. DEROULEMENT DE LA MISSION .......................................................................................... 5
1. DE LA MISSION SUR L’AXE MONKOTO ......................................................................... 5
1.1. Réunion d’échange et de planification à MONKOTO ................................................... 6
1.2. Descente sur terrain : entretien avec les victimes, les témoins, et auditions des Eco-
gardes présumés auteurs des infractions ............................................................................... 7
1.1.1. Réunions avec les chefs de groupement et notables : .......................................... 7
1.1.2. Entretien avec les victimes, les témoins des violations des droits de l’homme : ... 7
A. Cas de viol collectif et torture de 4 femmes dont une femme enceinte :...................... 8
a. Entretien avec des victimes et leurs témoins : .............................................................. 8
b. Audition des présumés auteurs (éco-gardes) cités par les victimes de viol collectif et
torture de 4 femmes dont une enceinte : .......................................................................... 10
- Mr EWAULA BAKONO Benoit alias Pablo, âgé de 49 ans, originaire de Botshima,
groupement de Momelinga, Secteur de Luay, Territoire de Bokungu, Province de la
Tshuapa, marié à LOKALA, fils de Bakono et de Buma, Grade 1ère classe, fonction chef de
station adjoint de la station de Mundja, Matricule 03620. A ce titre, il est ...................... 11
- Mr BOKOMO BOLONGI NDUZU, âgé de 52 ans, originaire de Nkasa, groupement
Ngele, Secteur de Djera, Territoire de Boende, Province de la Tshuapa, marié à Bonyema,
fils de Ekofo et de Bamuma, Grade 1ère classe, fonction LAB, matricule 03610, PP5,
Station ICCN de Watsikengo. ............................................................................................. 11
- Madame ILUNGU TULUNGU TETE THERESE, âgée de 40 ans, originaire de Mituku,
secteur de Basikate, territoire de Lowa, Province de la Tshopo, mariée à Mputu, fille de
Kisubi et de Bolumbu, grade nouvelle unité, fonction patrouilleur, station iccn de
Watsikengo. ....................................................................................................................... 12
- Mr ITELE BOMPANGO Pascal Blaise, âgé de 40 ans, originaire du village Yamboyo,
Groupement Biyimbi, Secteur Iyala et Territoire de Djolu, Grade 1ere classe, conducteur
hors-bord, station iccn de Watsikengo. ............................................................................. 12
B. Cas du viol d’une femme de 52 ans ............................................................................ 12
a. Entretien avec la victime et son témoin : ................................................................... 13
b. Audition de l’Eco garde présumé auteur : .................................................................. 14
3
- Mr LOKIMA IKAMBOLI Louis, 50 ans, originaire de Booke, groupement de Yongoboli,
secteur Wuni, Territoire de Boende, fils de Bondjoku et de Balukela, dernier grade garde
principal, station Watsikengo, Matricule : 01392. ............................................................. 14
C. Analyses juridique des allégations sur les cas de viol et torture des jeunes filles. ...... 14
D. Cas de torture contre Monsieur Dieu Voulu IMEKE LOKOFE ..................................... 16
a. Entretien avec la victime : .......................................................................................... 16
b. Audition de l’éco-garde présumé auteur : .................................................................. 17
- Mr BENTUMU ENYENGA Guy alias Beyenge, âge de 39 ans, originaire du village
Boonga, groupement Boleng’eangele, Secteur et Territoire de Monkoto. ....................... 17
E. Cas de torture et meurtre de Gaby Simba : ................................................................ 18
1.3. Conclusion Partielle, ................................................................................................... 18
1.3.1. Difficultés ................................................................................................................... 18
1.3.2. Recommandations ..................................................................................................... 19
2. DE LA MISSION SUR L’AXE OSHWE............................................................................. 20
2.1. Réunion des civilités auprès des autorités locales ..................................................... 20
2.2. Déroulement de la mission ........................................................................................ 21
2.2.1. De l’enquête ........................................................................................................ 21
A. Cas du viol collectif de Mme NDONGO NTENGI du village Bekoma ........................... 22
B. Cas du meurtre de Gaby SIMBA (village Bombole) ..................................................... 23
C. Cas de torture ayant entrainé la mort des sieurs HAUSSA BAFUTA et de NSAMBA ... 24
2.2.2. Identification des auteurs présumés .......................................................................... 25
2.2.3. Analyses juridiques des faits observés sur terrain ...................................................... 26
2.3. Conclusion partielle ................................................................................................... 27
2.3.1. Difficultés rencontrées ....................................................................................... 27
2.3.2. Recommandations .............................................................................................. 27
IV. CONCLUSION GENERALE ............................................................................................... 28
Annexe I : Tableau synthétique des cas .................................................................................... 30
Annexe I : Liste des éco gardes impliqués pour le cas du viol collectif des femmes ................. 33
Annexe II : Liste des éco gardes impliqués pour le cas du viol de la femme de 52 ans ............ 34
Annexe II : Liste des éco gardes impliqués pour le cas de torture de Dieu Voulu .................... 35
Annexe VI : PHOTOS DE LA MISSION ........................................................................................ 35
4
I. CONTEXTE ET JUSTIFICATION
Dans le but de faire régner la quiétude et d’améliorer les relations entre les agents en
sécurisation du PNS et la communauté locale. L’ICCN et WWF ne sont pas restés indifférents
face au dernier rapport de 2018 de RFUK qui a fait état de six cas présumés des violations des
droits humains qui auraient été commis par les éco-gardes du Parc National de la Salonga
notamment, torture, viol, meurtre etc. prétendument commis en majorité lors des patrouilles
mixtes (FARDC-Eco-gardes) avec des éléments vidéos et audio à charge.
L’UGPNS informée de la situation sur base d’un rapport produit par RFUK, s’était décidée de
mener une autre enquête mixte (Juristes ICCN, WWF, APEM) afin d’éclairer les zones
d’ombres et de réunir davantage les preuves, conformément à la loi en la matière et faire de
sorte que si infraction il y a, que les auteurs présumés de ces infractions sont identifiés,
verbalisés ainsi que leurs niveau de responsabilité établi afin qu’ils soient déférés devant les
instances judiciaires compétentes et afin de répondre de leurs actes sans préjudice des
mesures conservatoires que peut prendre l’ICCN conformément aux textes réglementaires
d’application en la matière.
La mission a été orientée sur deux axes : Oshwe et Monkoto ;
La mission sur l’axe BOENDE-MONKOTO a été menée par messieurs Hervé KIMONI, Freddy
ALUTA et Willy ELUA respectivement Conseillers juridiques UGPNS, ICCN/DG, et consultant
RFUK/APEM ; elle s’est réalisée du 13 au 21 février 2019 ;
La mission sur l’axe OSHWE-BEKOMA a été conduite par messieurs Pierre BASANGA, Roddy
NGOMA et Prince LUNGUNGU, respectivement conseiller juridique ICCN/DG, Chef d’Antenne
WWF/OSHWE et Consultant RFUK/APEM ; elle s’est réalisée du 13 au 23 Février 2019 ;
5
II. OBJECTIFS
Globalement, la mission avait pour objectif de lutter contre l’impunité dans le PNS et assurer
les bonnes relations entre « le Parc National de la Salonga » et les populations riveraines du
Parc.
Spécifiquement, la mission visait à mener des enquêtes sur les faits répertoriés par le rapport
de RFUK, tirer au clair toutes les zones d’ombres ; Suggérer la traduction en justice de tous les
litiges pénaux avérés devant les instances judiciaires compétentes, assurer à la clef, la
distribution de la justice à travers les sanctions disciplinaires et pénales à l’encontre des
présumés coupables.
III. DEROULEMENT DE LA MISSION
Afin de s’imprégner des réalités socio-historiques, il a paru nécessaire de s’entretenir
préalablement avec les autorités administratives locales et celles des structures qui
procédaient à l’enquête (UGPNS) puis avec les communautés locales, afin que soit compris le
bienfondé de la présente enquête.
Comme dit ci-haut, les activités se sont déroulées en deux grands axes Oshwe et Monkoto,
chaque axe comptait au-moins deux juristes.
1. DE LA MISSION SUR L’AXE MONKOTO
En ce qui concerne l’axe Monkoto, l’équipe s’est rendue à Monkoto avant de descendre sur
terrain.
Au niveau de Monkoto, l’équipe a présenté ses civilités à l’administrateur du Territoire et
d’autres autorités locales, avant de tenir une réunion d’échange, de planification et de
préparation de la descente vers les communautés au siège UGPNS en présence du directeur
de site.
Sur terrain, l’équipe a tenu deux réunions auprès des chefs de groupements de Nkas’ékungu
et Boleng’eangele, deux villages ciblés, avant de procéder à des entrevues des victimes,
témoins et autres renseignant. Toutes ces entrevues ont été bien documentées par des
supports vidéo.
6
De retour à Monkoto, et à Watsikengo, l’équipe de la mission a auditionné sur procès-verbal
certains présumés auteurs identifiés des violations des droits de l’homme cités par les
victimes. Il y a lieu de noter que tous les éco gardes cités ont été identifiés, mais tous n’ont
pas été auditionnés pour plusieurs raisons notamment le décès, l’éloignement de lieu
d’affection, l’indisponibilité, l’exclusion, la condamnation pénale pour certains des éco gardes.
Les dépositions des certains auteurs présumés ont été dressés par le chargé de contentieux
UGPNS pour des fins administratives.
1.1. Réunion d’échange et de planification à MONKOTO
Aussitôt arrivée à MONKOTO, l’équipe a été accueillie par le Directeur de l’UGPNS Pierre
KAFANDO qui l’a conviée à une réunion d’échange à leur salle de réunion. Il a commencé par
un aperçu historique du PNS en rappelant que le parc couvre 36.000 Km2 avec ses deux blocs,
l’importance de sa biodiversité et la richesse de sa faune qui renferme 40% de la population
mondiale de Bonobos, espèce qu’on ne trouve d’ailleurs qu’en RDC. Ensuite, il a expliqué
qu’historiquement le parc était géré par l’ICCN jusqu’au mois d’Aout 2015 date à laquelle il a
été mis en place une unité de gestion du parc national de la salonga entre WWF et ICCN. Ce
cadre de partenariat a permis aux deux entités de se fixer l’objectif de préserver l’intégrité
écologique du Parc tout en encourageant le développement local durable. Cette unité de
gestion ICCN-WWF apporte plusieurs avantages notamment, facilite la mobilisation des
moyens financiers pour la gestion et la sécurité financière ; renforcement des capacités des
éco-gardes dans des domaines tels que la prise en compte des droits humains ; l’application
des lois sur la conservation de la nature ou le code de conduite de l’Eco-garde et elle
contribue également à une plus grande visibilité du parc, conclut-il.
Prenant la parole, Willy ELUA est revenu sur la méthodologie de la mission en soulevant les
questions encore pendantes notamment celles de la tenue des réunions communautaires et
des cas nouveaux des violations des droits de l’homme par des Eco-gardes en dehors des 3
cas repris dans les termes de référence pour l’axe Monkoto.
7
Hervé KIMOKI, chargé de contentieux de l’UGPNS, a fait remarquer que la mission consistait à
vérifier la véracité des cas rapportés et que la tenue des réunions communautaires pourrait
se tenir dans l’avenir.
Concernant les nouveaux cas de violation des droits de l’homme qui surgirait sur terrain,
l’équipe devrait les documenter suffisamment, sans préjudice de leur approfondissement
ultérieur éventuel.
1.2. Descente sur terrain : entretien avec les victimes, les témoins, et auditions des
Eco-gardes présumés auteurs des infractions
Selon les termes des références de la mission, l’axe Monkoto devrait enquêter sur le premier
cas de viol collectif dont une femme enceinte où l’Eco-garde Ewaula était cité comme
présumé auteur ; deuxièmement, le cas du viol d’une femme de 52 ans et le dernier cas de
torture contre Mr Dieu Voulu IMEKE LOKOFE.
Cependant, avant de commencer les entrevues avec les victimes et leurs témoins dans les
communautés, deux réunions avec les chefs et notables de groupements de Nkas’ekungu et
Boleng’ea ngele ont eu lieu :
1.1.1. Réunions avec les chefs de groupement et notables :
L’équipe a commencé par présenter ses civilités, objectifs et résultats attendus de la mission
avant de leur demander un accompagnement pendant leur séjour. Les communautés ont
réitéré leur requête d’avoir même de manière périodique accès à la rivière LYENGE située
dans le Parc national pour la pêche, l’écopage et ramassage afin d’améliorer leur condition de
vie et élaguer la malnutrition endémique dans le milieu.
1.1.2. Entretien avec les victimes, les témoins des violations des droits de l’homme :
Toutes ces victimes citées sont dans la ligne YONGO qui va de la cité de Monkoto jusqu’à la
station ICCN de Mondjoku (50 km), précisément dans les villages Boonga, Mpoku, Mondjoku
et Isenga dans les groupements de Nkas’ekungu et Boleng’ea ngele, ont été contactées par
l’équipe. Ainsi donc, nous avons été dans les communautés pendant deux jours soit du 15 au
16 février 2019 pour interviewer les victimes citées, leurs témoins avant de revenir à
Monkoto et commencer les auditions des éco-gardes présumés auteurs.
8
A. Cas de viol collectif et torture de 4 femmes dont une femme enceinte :
Différemment de l’enquête initiale menée par le consultant RFUK/APEM qui n’avait interrogé
que deux des victimes, la présente mission a contacté toutes les 4 femmes victimes de viol1 et
tortures ainsi que d’autres témoins notamment la mère de Rebecca, l’époux de Ruth, le père
d’Yvonne, les infirmiers Nazaire Betamba et Daffy MPANGA.
a. Entretien avec des victimes et leurs témoins :
- Rebecca (Becky) BOLUMBU LOFEMBA, âgée de 23 ans2, de la tribu Mongo,
Cultivatrice, résidant actuellement au village Mpoko (village voisin de Boonga), fille de
LOFEMBE et de IYELA, originaire de Boonga, Groupement Boleng'ea ngele, Secteur et
Territoire de Monkoto.
La victime en présence de l’équipe, a réitéré ses allégations antérieures en relatant
que c’était sur la rivière Iyenge où elle et ses amies suivaient leurs époux et parents
pour transporter les poissons, et précisément au campement Bendola, qu’elles ont
été interpellées par une patrouille des vingtaines éco-gardes dont deux femmes
conduite par EWAULA. D’après son témoignage, aussitôt arrêtées, elles ont été mises
à terre, les éco-gardes leur ont donné des coups de fouet au dos et aux jambes, les
ont exposées contre les rayons solaires. Rebecca, enceinte de 3 mois au moment des
faits, dit avoir été violée par deux éco-gardes sous l’ordre d’EWAULA, après qu’elle ait
été isolée du groupe des autres.
De retour au village, Rebecca, selon elle-même et d’autres témoins, saignait et
ressentait des douleurs atroces. Elle a été admise aux soins au centre de santé de
Boonga chez l’Infirmier Nazaire Betemba qui déclare « ne plus détenir les pièces qui
retracent le soin donné à Rebecca parce qu’à l’époque il travaillait dans un centre de
santé privée, et il n’avait pas des moyens suffisants pour disposer des fiches
médicales et des rapports ». Par contre, il déclare qu’il pourrait détenir une copie
d’ordonnance où il avait lui avait prescrit les médicaments, mais qu’il faudra encore la
fouille. Il reconnait encore avoir accueilli Rebecca dans un état qu’il a qualifié de
2 Rebecca était mineure au moment des faits.
9
critique : écoulement de sang et avortement d’une grossesse de 3 mois. Rebecca a
été hospitalisée durant 5 jours avant d’aller, faute des moyens financiers, poursuivre
les soins à la maison.
- Ruth (prononcé Luta) ELANA BOKUNGU, 27 ans, Cultivatrice, fille de BOKUNGU et de
EKANSA, mariée à ELOMBA Dynamique, originaire de Mpenge, Secteur de Nongo,
Secteur et Territoire de Monkoto. Ruth a confirmé à l’équipe de la mission la version
telle que rapportée précédemment. Elle dit que pendant que les éco-gardes sous
ordre de Ewaula, voulaient la battre, elle leur implorait de l’épargner parce qu’elle
était enceinte de 6 mois mais qu’un des éco-gardes lui aurait rétorqué que « la
patrouille avait une matrone (sage-femme) et qu’elle s’en occuperait en cas de
problème ».
Par la suite, Ruth a indiqué continuer à avoir des douleurs au bas ventre et a été
admise aux soins auprès de Mr Daffy MPANGA, l’Infirmier titulaire du centre de santé
de Bolingo. On notera que l’infirmier s’est refusé de tout commentaire. Cependant, il
a indiqué dans la foulée qu’il aurait des rapports médicaux y relatifs mais il lui faut du
temps pour les retrouver. Ruth avait donné naissance à un enfant mort-né. Elle
impute cette perte au traitement que lui ont infligé les éco-gardes. Mr ELOMBA
Dynamique, l’époux de Ruth et témoin oculaire, reconnait avoir vu sa femme et les
autres victimes déshabillées, battues et violées. Lui-même dit avoir été giflé par les
éco-gardes, obligé de charger leur propre poisson dans la pirogue de la patrouille.
Pendant ces allers retours vers la pirogue, il va prendre fuite pour alerter le village.
- Yvonne NKOYO ISALIMO, âgée de 29 ans, Cultivatrice, fille de Isalimo et de Booto,
mariée à Tresor ISAFOLI, originaire de Boonga, Secteur et Territoire de Monkoto.
Absente du village pendant la précédente mission des consultants la RFUK/APEM, la
victime Yvonne, a indiqué qu’elle allaitait au moment des faits, et confirme que
l’ordre de les torturer, déshabiller et battre venait d’Ewaula en présence de son père
Mr Toito, son époux et autres. Par ailleurs, elle allègue que l’éco-garde qui aurait
tenté de la violer, s’est empêché de pénétrer parce qu’elle allaitait et avait une
cicatrice visible d’une opération chirurgicale, mais il l’aurait touché au sexe. Elle
confirme, tout comme les autres victimes et témoins, le fait que Rebecca aurait été
10
isolée du groupe et elle avait regagné le village après leur relaxation par le groupe de
patrouille, tout en saignant entre ses pieds. C’est là que tout le monde a compris
qu’elle se serait faite violé par les éléments qui l’avaient isolé et retenu. Mr Toito,
père d’Yvonne, affirme pour sa part que les éco-gardes leurs avaient déchiré les
habits, déshabillé et violé. Avant de relâcher les 4 femmes, Mr Toito dit avoir pris
courage en tant que père pour dire à Ewaula de l’arrêter et de laisser les jeunes filles
tranquilles, c’est ainsi que Ewaula va ordonner son arrestation immédiatement.
- Nancy BOLOKO BATALA, âgée de 33 ans, Cultivatrice, fille de BATALA et NYELA,
originaire de Boonga, Secteur et Territoire de Monkoto, une autre victime qui a été
citée ; elle n’avait pas été contactée par les enquêteurs de RFUK/APEM. Nancy, elle
aussi allaitait au moment des faits, elle dit avoir été torturée et battue à l’aide d’un
baton « Kawu » comme les autres, et que les éco-gardes leur auraient lié les seins
avec le fil appelé « Singa ya Kekele », fait des attouchements sexuels en présence de
leurs époux, parents et frères. Elle affirme porter les traces de ficelles à son sein
gauche et en avoir perdu l’usage.
Quant aux poursuites engagées par la suite, Yvonne dit que son époux avait porté plainte à
Monkoto. Elle a indiqué se rappeler que son époux avait tenté d’agresser Ewaula à Monkoto
en présence des autorités. Selon les autres victimes et témoins, le dossier a été pris en charge
par Maître Aimé ELEMA qui leur assurait et garantissait des réparations. Madame MT IYELI
BOTULI, la mère de Rebecca, dit que « l’avocat Aimé ELEMA nous avait transmis le message
du chef de site PNS de l’époque, selon lequel il allait retenir à la source les salaires et primes
des eco-gardes incriminés et s’en servirait pour nous payer mais jusque-là rien n’est encore fait
». Elle et Ruth disent avoir perdu bétails, argent auprès de l’OPJ Marcel de l’ANR qui instruisait
l’affaire qui n’a abouti à aucun résultat.
b. Audition des présumés auteurs (éco-gardes) cités par les victimes de viol collectif et
torture de 4 femmes dont une enceinte :
De manière générale, les auditions des éco gardes présumés auteurs ont eu lieu d’abord à
Monkoto et ensuite à la Station de l’ICCN de Watsikengo.
11
Les personnes qui se sont déclarées victimes de viol sont restées cohérentes et sans
équivoque, et elles ne cessaient de doigter Mr EWAULA. C’est ce dernier qui a été cité ainsi
que les autres éco-gardes qui faisaient partie de la patrouille en question.
Les lignes qui suivent seront consacrées au résumé de l’audition de chaque éco-garde
présumé auteurs de viol :
- Mr EWAULA BAKONO Benoit alias Pablo, âgé de 49 ans, originaire de Botshima,
groupement de Momelinga, Secteur de Luay, Territoire de Bokungu, Province de la
Tshuapa, marié à LOKALA, fils de Bakono et de Buma, Grade 1ère classe, fonction chef
de station adjoint de la station de Mundja, Matricule 03620. A ce titre, il est
En répondant aux questions de l’équipe de la mission, le présumé auteur, à l’époque
conservateur de la station ICCN de Watsikengo, a reconnu qu’en 2014 la patrouille de
longue distance était financée par la Société Zoologique de Milwaukee qui peut
même détenir les photos de ladite patrouille. Il se rappelle avoir interpellé 4 jeunes
filles dont une avec grossesse et 6 ou 7 hommes sur la rivière d’Iyenge et a ordonné la
saisie de leur poisson. Selon lui, parmi les 4 jeunes filles venues transporter les
poissons, 2 portaient des bébés, l’une était enceinte visiblement. L’un des hommes
arrêtés avait pris fuite.
Aucune des femmes n’a été violée ou torturée. Il leur aurait même donné une partie
des poissons avant de les relaxer. Seuls les hommes, dont Mr Toito, auraient été mis
aux arrêts et libérés sans paiement d’amende suite à une lettre de Monsieur KASIALA,
conservateur de la station ICCN de Mondjoku de l’époque.
Ensuite, Ewaula se rappelle qu’en mars 2015, il avait été interpellé par un inspecteur
de l’Agence Nationale de Renseignement de Monkoto répondant au nom de Marcel
sur ce cas et que le comité local de sécurité de Monkoto en avait statué.
Enfin, il a cité les noms des autres éco-gardes qui faisaient partie de la dite patrouille
(voir PV d’audition en annexe….).
- Mr BOKOMO BOLONGI NDUZU, âgé de 52 ans, originaire de Nkasa, groupement
Ngele, Secteur de Djera, Territoire de Boende, Province de la Tshuapa, marié à
12
Bonyema, fils de Ekofo et de Bamuma, Grade 1ère classe, fonction LAB, matricule
03610, PP5, Station ICCN de Watsikengo.
Dans sa déposition, il affirme que la patrouille en question était financée par la
Société Zoologique de Milwaukee qui est très hostile à la pêche sur la rivière d’Iyenge.
En principe, chaque éco-garde percevait 5 USD de la prime de patrouille par jour,
mais pour cette fois-là, Mr Bokomo déclare n’avoir rien reçu. En effet, au retour de
Monkoto, Ewaula leur avait dit qu’il s’était servi de leur prime pour faciliter la
procédure au niveau de Monkoto auprès des autorités afin de régler ledit dossier.
Il a nié les actes de viol et de torture sur les jeunes filles qu’ils avaient réellement
interpellées.
- Madame ILUNGU TULUNGU TETE THERESE, âgée de 40 ans, originaire de Mituku,
secteur de Basikate, territoire de Lowa, Province de la Tshopo, mariée à Mputu, fille
de Kisubi et de Bolumbu, grade nouvelle unité, fonction patrouilleur, station iccn de
Watsikengo.
La dame affirme avoir fait partie de la patrouille dont question, mais nie les
arrestations, viol et torture des jeunes femmes. Pour elle, certains détails pourraient
lui échapper parce qu’elle assurait la garde dans la pirogue. Elle est sage-femme
(matrone), métier qu’elle pratiquait avant d’être éco garde.
- Mr ITELE BOMPANGO Pascal Blaise, âgé de 40 ans, originaire du village Yamboyo,
Groupement Biyimbi, Secteur Iyala et Territoire de Djolu, Grade 1ere classe,
conducteur hors-bord, station iccn de Watsikengo.
Selon ses propos, 20 éco-gardes avaient pris part à ladite patrouille organisée
pendant la saison sèche et que le campement où ils ont interpellé les victimes se
situe en aval de Djombo sur la rivière Iyenge, mais libérées par la suite sans être
inquiétées.
B. Cas du viol d’une femme de 52 ans
Ici, l’équipe a procédé de la même manière que le cas précédent, nous avons eu des
entretiens avec la victime et un témoin avant d’auditionner l’éco garde présumé auteur.
13
a. Entretien avec la victime et son témoin :
- Madame Melanie Nongo Wessa, 53 ans, originaire de Mondjoku, groupement
Nkas’ekungu, Secteur et Territoire de Monkoto, fils de Wessa et Balanga, mariée à Mr
Floribert Besa, mère de 4 enfants.
La victime a confié à l’équipe qu’en 2002 l’ICCN avait lancé des annonces selon
lesquelles toute personne qui était dans le parc pour la pêche ou autre activité devait
en sortir immédiatement. Comme son époux faisait la pêche sur autorisation du
conservateur de l’époque, la victime s’y était rendue pour l’avertir. Arrivée au
campement Besenge à la rivière d’Iyenge dans le parc, elle a été interpellée par une
patrouille des éco gardes et conduite au camp des éco-gardes à Watsikengo. Mr
Lokima, un des éco-gardes a tenté de la violer le premier jour, elle refusa en arguant
qu’elle était une sœur en christ. Le jour suivant, le même éco-garde l’a menacé de
mort en tirant 10 coups de feu en l’air. Il la viola pendant 2 jours successifs. Pour être
relâchée, son époux a dû payer une amende transactionnelle de 25.000FC. Elle
déclare n’avoir pas déposé une plainte contre le présumé auteur car pour elle, la
liberté suffisait.
- Mr BESA Floribert, 59 ans, originaire de Mondjoku, groupement Nkas’ekungu, Secteur
et Territoire de Monkoto, fils de Nsonso et de Belotsi, marié à Melanie Nongo.
L’époux de la victime se rappelle exactement de la date de l’arrestation de son
épouse. Ce fut le 24 Juin 2002 au campement Besenge. En effet, à l’époque le
Directeur Technique Mr KABUNDA leur avait autorisé la pêche pour une période qui
devait se clôturer le 26 Juin 2002. Curieusement et contre toute attente, la patrouille
des éco gardes va les surprendre deux jours avant la date butoir. Il a cité 4 autres éco
gardes témoins de l’événement. Il s’agit de LOKIMA, BOLANGALA WATOLOLENGA,
LOLEMA, SIMON BATUKU, tous éco-gardes de la station ICCN de Watsikengo. Il
confirme avoir payé les amendes avant que sa femme soit libérée. Ces derniers n’ont
jamais été inquiétés et la victime n’a entamé aucune procédure tendant à se faire
rendre justice (vidéo de l’entretien en annexe).
14
b. Audition de l’Eco garde présumé auteur :
- Mr LOKIMA IKAMBOLI Louis, 50 ans, originaire de Booke, groupement de Yongoboli,
secteur Wuni, Territoire de Boende, fils de Bondjoku et de Balukela, dernier grade
garde principal, station Watsikengo, Matricule : 01392.
L’audition du présumé auteur a eu lieu à la station ICCN de Watsikengo. ecogarde
depuis 1980, Mr Lokima est déjà retraité de l’ICCN. En resumé, l’interrogé de l’équipe
ne se rappelle ni de lieu, ni des circonstances des faits mis à sa charge. Cependant, Il
reconnait avoir travaillé avec BOLANGALA WATOLOLENGA, LOLEMA, SIMON BATUKU,
tous décédés.
C. Analyses juridique des allégations sur les cas de viol et torture des jeunes filles.
Ce point permettra de faire les liens des allégations avec les textes juridiques qui s’appliquent
actuellement en RDC.
Les violences sexuelles sont prévues et punies par les dispositions de la loi n° 06/018 du 20
juillet 2006 modifiant et complétant le Décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal
congolais. L’article 170 dispose que quiconque aura commis un viol, soit à l’aide de violences
ou menaces « graves ou par contrainte à l’encontre d’une personne, directement ou par
l’intermédiaire d’un tiers, soit par surprise, par pression psychologique, soit à l’occasion d’un
environnement coercitif, soit en abusant d’une personne qui, par le fait d’une maladie, par «
l’altération de ses facultés ou par toute autre cause accidentelle « aurait perdu l’usage de ses
sens ou en aurait été privé par quelques artifices :
- Tout homme, quel que soit son âge, qui aura introduit son « organe sexuel, même
superficiellement dans celui d’une femme ou « toute femme, quel que soit son âge,
qui aura obligé un homme à « introduire même superficiellement son organe sexuel
dans le sien ;
- Tout homme qui aura pénétré, même superficiellement « l’anus, la bouche ou tout
autre orifice du corps d’une femme ou « d’un homme par un organe sexuel, par toute
autre partie du corps « ou par un objet quelconque ;
- Toute personne qui aura introduit, même superficiellement, « toute autre partie du
corps ou un objet quelconque dans le vagin ;
15
- Toute personne qui aura obligé un homme ou une femme à « pénétrer, même
superficiellement son anus, sa bouche ou tout « orifice de son corps par un organe
sexuel, pour toute autre partie du « corps ou par un objet quelconque.
La torture en droit congolais est réprimée par Loi n° 11/008 du 09 juillet 2011 portant
criminalisation de la torture. Elle dispose :
- Article 1 er : Il est inséré à la section 1 ère du titre I" livre II du Décret du 30 janvier
1940 portant Code pénal les articles 48 bis, 48 ter et 48 quater ainsi libellés.
- Article 48 bis : Tout fonctionnaire ou officier public, toute personne chargée d'un
service public ou toute personne agissant sur son ordre ou son instigation, ou avec
son consentement exprès ou tacite, qui aura intentionnellement infligé à une
personne une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, aux fins
d'obtenir d'elle ou d'une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la
punir d'un acte qu'elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d'avoir
commis, de l'intimider ou de faire pression sur elle ou d'intimider ou de faire pression
sur une tierce personne ou pour tout autre motif fondé sur une forme de
discrimination quelle qu'elle soit, sera puni de cinq à dix ans de servitude pénale
principale et d'une amende de cinquante mille francs congolais à cent mille francs
congolais.
- Article 48 ter : Le coupable sera puni de dix à vingt ans de servitude pénale principale
et d'une amende de cent mille francs congolais à deux cent mille francs congolais
lorsque les faits prévus à l'article 48 bis ci--dessus auront causé à la victime un
traumatisme grave, une maladie, une incapacité permanente de travail, une
déficience physique ou psychologique, ou lorsque la victime est une femme enceinte,
un mineur d'âge ou une personne de troisième âge ou vivant avec handicap.
Il sera puni de servitude pénale à perpétuité lorsque les mêmes faits auront causé la mort de
la victime.
Pour le cas de Rebecca, étant donné qu’au moment des faits elle était mineure d’âge, les
dispositions réprimant les actes de violences sexuelles contenues dans la loi n° 09/001 du 10
janvier 2009 portant protection pourraient aussi être appliquée contre les auteurs présumés.
16
Etant paramilitaires ou assimilés, les éco-gardes sont soumis aux juridictions militaires de leur
compétence, conformément à l’article 40 de la Loi n° 024/2002 du 18 novembre 2002 portant
Code pénal militaire 3
Vu les allégations très graves, le principal auteur présumé dans ce cas, Mr EWAULA Benoît a
été suspendu conservatoirement de ses fonctions afin d’être disponible pour une enquête
judiciaire. Certains autres éco-gardes ayant participé à cette patrouille ont été identifiés et
mis à la disposition du responsable des ressources humaines pour des éventuelles enquêtes
par l’Auditorat Militaire de Garnison de Boende.
Pour le cas de la femme de 52 ans, l’équipe a constaté conformément aux dispositions de
l’article 24 point 34 du code pénal congolais que l’infraction semble être éteinte par
prescription décennale, étant donné que cette action publique n’a aucunement été
interrompue par une procédure quelconque, 16 ans déjà. Toutefois, l’équipe a discuté aussi
sur le principe de la prescription de l’action civile conformément à l’article 647 du code civil
des obligations. Et dans ce cas, la victime devra prouver la faute civile pour espérer obtenir
une réparation civile. La plus grande difficulté à laquelle ce cas fait face est celle de la preuve
matérielle, étant donné que le présumé auteur de la faute, actuellement retraité n’aurait
aucune connaissance des faits et un seul témoignage à charge couvre ce cas. Sur le plan
administratif aussi, le PNS ne peut pas ouvrir une enquête disciplinaire sur cet auteur
présumé étant donné qu’il est retraité, le Statut du personnel de l’Institut Congolais pour la
Conservation de la Nature ne lui est donc plus opposable, vu l’absence de lien employeur et
employé.
Il incombe donc à la victime d’intenter une action civile, au mieux ou pénale, si elle le veut,
puisque ce n’est pas de la compétence de l’équipe de statuer et de déclarer une prescription,
même si elle en a simplement constaté.
D. Cas de torture contre Monsieur Dieu Voulu IMEKE LOKOFE
a. Entretien avec la victime :
3 Les infractions d’ordre militaire sont celles qui ne sont commises que par des militaires ou assimilés. Elles
consistent en un manquement au devoir de leur état.
Les infractions mixtes sont des infractions de droit commun aggravées en raison des circonstances de leur
perpétration et réprimées à la fois par le Code Pénal ordinaire et le présent Code. 4Toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans sans que celui qui allègue celle
prescription soit obligé d'en rapporter un titre, ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi.
17
L’équipe de la mission a rencontré la victime Dieu Voulu IMEKE LOKOFE au village Isenga,
groupement Nkas’ekungu, Secteur et Territoire de Monkoto où il travaille comme préfet
d’une école conventionnée protestante.
D’après son témoignage, le 18 Mars 2013 vers 14 heures, Messieurs Dieu Voulu IMEKE
LOKOFE, son grand-frère Héritier BOFENDA et beau-frère Mitterrand revenaient de la pêche à
côté du Parc. Aussitôt accosté au campement Ikali, ils seront interpellés par la patrouille
composée seulement d’eco-gardes qui répondraient aux noms de Beyenge, Malfeza et Trésor
qui saisirent leurs poissons et matériels de pêche avant de les ligoter. Pendant leur détention
(3 jours) à la station de Mondjoku de l'ICCN, les éco-gardes les auraient battu puis auraient
attaché leurs pénis avec du fil de pêche et les suspendre à la branche d'un arbre. Chacun
d’eux aurait payé une amende de 35.000FC avant leur remise en liberté. Enfin, Mr Dieu Voulu
a montré à l’équipe de la mission les cicatrices que ses pieds portent qu’il lie aux actes de
torture subis.
Faute de temps, la mission n’a pas pu auditionner les 2 autres victimes citées. (Vidéo de
l’entretien en annexe)
b. Audition de l’éco-garde présumé auteur :
- Mr BENTUMU ENYENGA Guy alias Beyenge, âge de 39 ans, originaire du village Boonga,
groupement Boleng’eangele, Secteur et Territoire de Monkoto.
Actuellement affecté à la Station ICCN de Monkoto, Mr Bentumu alias Beyenge cité par la
victime a été auditionné par l’équipe de la mission au site UGPNS à Monkoto. Il reconnait
parfaitement bien les victimes puisqu’ils sont du même village. Cependant, il nie en bloc les
allégations de la victime arguant qu’ils auraient des bonnes relations avec leur famille et qu’il
ne pouvait les arrêter (PV d’audition en annexe).
Pour les deux autres éco-gardes cités par la victime, l’équipe constate que Mr Tresor Itombo a
été exclu de l’ICCN en 2018, pour des faits nouveaux mais aussi pour sa récidive dans
l’indiscipline (copie de lettre de licenciement sans préavis en annexe) suivant la lettre du
Directeur Général du 18 Octobre 2018 N/Réf. 1113/ICCN/DG/CWB/14/011/2018 pour
d’autres faits. Concernant Iyomi Mbeko Malufeza, actuellement affecté à Bianga, il n’a pas pu
rejoindre l’équipe à Monkoto pour être entendu.
18
Ce cas, n’étant pas complètement suivi devra faire l’objet d’une suite étant donné que
l’enquête administrative avait déjà été ouverte. La prochaine étape sera de prendre la
déposition de Monsieur Iyomi Mbeko Malufeza, ensuite de passer à une confrontation entre
les présumés accusés et la victime. Le cours de l’enquête déterminera les décisions à
prendre.
E. Cas de torture et meurtre de Gaby Simba :
En principe, le présent cas, selon les termes de référence, devait être traité par l’équipe de
l’axe Oshwe. Mais profitant de la présence de Tony Inonga Bagbala, éco-garde cité comme
auteur de l’acte incriminé, nous avons saisi cette opportunité pour l’auditionner à Monkoto.
Dans sa déposition, Tony reconnait que Gaby était décédé mais pas dans les circonstances
telles que présentées dans les témoignages recueillis dans le rapport de RFUK. Selon lui, c’est
pendant une patrouille mixte FARDC-ICCN que dirigeait le lieutenant AZABIA Michel
actuellement muté dans le Territoire d’Ikela, Province de la Tshuapa, qu’il y aurait eu un
accrochage entre la patrouille et un braconnier Shomba et son frère Gaby, qui y a trouvé la
mort. Il accompagnait son frère Shomba qui aurait ouvert le feu contre l’équipe de patrouille
sur la rivière Luila. (PV d’audition en annexe).
1.3. Conclusion Partielle,
1.3.1. Difficultés
L’état de route très délabré ;
Les rapports et ordres de mission des patrouilles y référant au cas sur les violations
des droits de l’homme telles que dénoncées par le RFUK n’ont pas été trouvés ;
Le rapport ou fiche médicale de la victime Rebecca n’existe pas mais l’infirmier pense
que l’ordonnance peut être trouvée et qu’il faudra la fouiller ;
L’hostilité de l’infirmier Mr Daffy MPANGA qui après un moment fort de négociation
aurait déclaré dans la foulé avoir des rapports y référant au cas mais qu’il faudra les
chercher ;
Une durée moins que prévue de la mission : 8 jours au lieu de 2 semaines, suites à des
éventuelles lenteurs de procédure de sortie de fonds ;
19
1.3.2. Recommandations
Au regard de ce qu’a été notre mission, nous avons pu rencontrer toutes les victimes de l’axe
et parmi lesquelles, certaines ont confirmé leurs allégations tels que rapporté par le rapport
RFUK/APEM et d’autres ont témoigné à nouveau et d’autres ont été nouvellement citées.
Concernant les éco-gardes auteurs présumés, certains ont été auditionnés à Monkoto et
d’autres à Boende, mais il en reste encore une bonne partie située dans les postes des
patrouilles éloignées des Stations.
Nous faisons les recommandations suivantes :
Approfondir les enquêtes en auditionnant les auteurs présumés, les victimes et les
témoins non atteints :
• Pour le cas de viol collectif et torture de 4 femmes dont une femme enceinte, bien
que l’auditeur soit déjà saisi des faits, quatre autres éco-gardes travaillant dans des postes
des patrouilles de la Station de Watsikengo très éloignés de la Station (BOBOA MATITA,
BOKOTE NTULA, MPASO ITETE, MALA AMBUA), devaient être auditionner pour donner
leurs versions des faits, ce qui pourrait rajouter des lumières.
• Pour le cas de viol de la femme de 52 ans, le PNS, n’étant plus lié par un contrat
quelconque de travail avec l’auteur présumé des faits, vu que dans ce cas, le Statut du
personnel de l’ICCN ne peut pas lui être appliquer. il semble évident qu’aucune sanction
ne lui soit infligée et aucune action administrative ne lui soit opposable. Ainsi, il incombe à
la victime qui a qualité et intérêt de porter cette affaire devant le Parquet de Grande
Instance de Boende ou par citation directe devant le Tribunal près ce Parquet, contre
l’ancien éco-garde pour que justice soit faite.
• Pour le cas de la Torture sur Monsieur Dieu Voulu, une autre session devrait s’ouvrir
afin d’auditionner l’éco-garde Malufeza, les deux victimes nouvellement identifiées dans
ce cas : Héritier BOFENDA (grand-frère de Monsieur Dieu Voulu) et Mitterrand (beau-
frère) et peut-être, confronter ces victimes aux auteurs présumés, vu que l’un des auteurs
présumé, Mr BENTUMU ENYENGA Guy alias Beyenge déclare : « connaître parfaitement
bien les victimes puisqu’ils sont du même village […] qu’ils auraient des bonnes relations
avec leur famille…).
20
Envisager dans les jours avenir un protocole de pêche réglementé, dont la durée serait
bien déterminée en faveur de la communauté autour du PNS ;
Organiser pour les communautés autour du PNS des séances de sensibilisation,
vulgarisation pour une bonne compréhension de l’arsenal juridique en rapport avec la
conservation ;
Envisager une stratégie de protection des victimes :
Que APEM qui semble crédible devant les victimes, reste en contact permanent avec
elles, en prenant leurs nouvelles et en se rassurant de leur sécurité contre les
représailles des auteurs présumés et en informant le Parc de la Salonga de cette
situation ;
Que le PNS désarme les auteurs présumés, en les gardant fixe dans le quartier général
et les suspendant conservatoirement jusqu’aux issues des enquêtes.
2. DE LA MISSION SUR L’AXE OSHWE
2.1. Réunion des civilités auprès des autorités locales
Avant la descente sur terrain l’équipe de l’axe Oshwe s’est rendue au Bureau de
l’Administrateur du Territoire d’Oshwe pour présenter les civilités et les objectifs de la
mission.
Après s’être présenté auprès de l’AT, ce dernier a remercié l’équipe de l’axe concerné compte
tenu de l’importance de la mission tout en déplorant les menaces de destruction qui planent
au-dessus de la partie du Parc se trouvant dans son entité. Il a aussi déploré la prolifération
d’armes de guerre dans la zone, spécifiquement entre BONGIMBA et KOLE, où environ 350
armes de guerre circulent, ainsi que l’implication de diverses autorités qui concourent à la
pérennisation de ce fléau. Il a fini par lancer un appel à l’ICCN et ses partenaires d’y veiller
pour que ne disparaisse pas cette partie du PNS ni que ce soit réduit à néant les moyens de
21
survie séculaire des communautés riveraines. En outre il est revenu sur le besoin de booster
le développement de la zone.
Après ces actes de civilité, le 15 février l’équipe s’est mise en route sous la conduite du chef
de base de l’antenne de WWF/Oshwe associé aux deux juristes venus de Kinshasa pour aller
vers les sites retenus et enquêter sur trois cas majeurs retenus dont deux cas similaires
scindés, en ce qui concerne les violations des droits humains, entendu :
- Le cas du viol collectif de Mme NDONGO NTENGI à Bekoma ;
- Le cas du meurtre de Gaby SIMBA à Bombole ;
- Ainsi que les deux cas de coup et blessure, torture ayant entrainé le décès des deux
frères Haoussa BAFUTA KANKONDA et Bavene NSAMBA.
L’équipe de la mission a suivi la procédure suivante dans chaque village : une visite de
courtoisie pour présenter les civilités auprès du chef de village, suivi d’une réunion
communautaire où l’on annonçait le but de la mission, définissaient la qualité des personnes
que l’on recherchait pour nous renseigner ou témoigner ; interview avec la victime du viol,
témoins oculaires des évènements pour le cas ayant entrainé la perte de vie humaine,
vérification de l’information auprès des sources indépendantes : médecin, infirmier, chef de
village (Kapita) ayant soigné ou en poste lors du déroulement des faits.
Pour ce qui est des témoins ou renseignant, l’interview, interrogatoire s’est déroulé
contradictoirement en présence des trois enquêteurs, tour à tour de façon isolé pour éviter
que les témoins ne s’influencent les uns et autres.
2.2. Déroulement de la mission
La mission s’est déroulée sur base de trois objectifs spécifiques :
- Enquêter sur les faits répertoriés ;
- Déférer tous les litiges pénaux en justice ;
- Sanctionner les présumés coupables en cas de culpabilité établie par un jugement.
2.2.1. De l’enquête
Dans l’axe Oshwe il nous a été échu trois cas :
1 er cas de Torture et meurtre ; Auteur présumé un certain TONY non autrement
identifié et comme victime, monsieur GABY SIMBA période des faits, Août 2015, la date n’est
pas connue, le lieu des faits : campement rivière Lula (Bombole) ;
22
2ème cas : Torture ayant entrainé la mort de messieurs Haoussa BAFUTA KANKONDA
ET NSAMBA Bavene en 2015, sans précision de date, lieu des faits : Village Yalita (Station Anga
et Mundja) ;
3ème cas : Viol d’une femme en présence des témoins (Information tirée d’une vidéo,
Auteur présumé : non identifié, date non connue, époque : Août 2015, lieu : Campement
rivière Lula (village de Bekoma).
A. Cas du viol collectif de Mme NDONGO NTENGI du village Bekoma
Personnes interrogés ou témoins :
- Paul BOYOKO BAENDE BOTULI Kapita du village
- BONZALA KANZALE Pierre Chef de terre de Bekoma
- ISANGO BALONDO Anatole le mari de la victime
- NKATU IPENGE Mana
- BOOTO MBENZE Adosha témoin de l’événement
- BOLOPO Jean Pierre ancien commandant de navire, actuellement en retraite notable
du village
- Jules BOBOY NZONGA activiste (Fédération Nationale des Comités de Lutte Anti-
Tracasserie).
Faits recueillis : Le cas de viol à Bekoma a été le premier sur lequel nous nous sommes
penchés. Mais il sied de rappeler qu’il y avait eu erreur sur la personne étant donné que les
deux s’appellent NDONGO. La référence ayant été mal détaillée. D’après les témoignages
recueillis au village, il s’agit bien du cas de viol de Mme NDONGO NTENGI mariée à Mr
Anatole ISANGO BALONDO.
Après avoir entendu tous les témoins, nous avons approché la victime qui nous a confirmé
avoir été violée par les éléments de l’ICCN en patrouille identifiés comme des éléments de
l’opération mixte OPS Bonobo.
A la question de savoir comment ce cas est survenu ? Mme Ndongo Ntengi femme de Mr
Anatole, pécheur de profession et croix rouge de Bekoma, rapporte avoir suivi son mari qui
était parti faire la pêche au campement. Arrivé au lieu du rendez-vous, la dame sera surprise
par les éco gardes pendant qu’ensemble ils se préparaient à regagner le village. Ces derniers
ont ainsi fouillé le campement, dans une cabane du campement se trouvait les gibiers du
23
chasseur BOOTO MBENZE Adosha ainsi qu’une arme de chasse calibre 12 Baïkal. Les éco
gardes vont ligoter ses enfants puis ils vont déshabiller la dame pour la violer au nombre de 5.
A la question de savoir si elle peut identifier les auteurs du viol, Mme Ndongo Ntengi nous a
confirmé qu’elle peut reconnaître un éco garde d’origine Nkundo qui a interdit aux autres de
la violer.
Présumés auteurs : équipe de patrouille de l’OPS Bonobo.
B. Cas du meurtre de Gaby SIMBA (village Bombole)
Personnes interrogées :
- KABAMBE Eva (ami et créancier de Gaby, de même origine ethnique) ;
- IMONGO MBENGA Adolphe (Un de secouriste ayant transporté Gaby à l’Hôpital) ;
- MBOYO KAOLEY (agent de l’environnement détaché à Bombole) ;
- Kapita EPOTU BOOTO Louis alias Sénégalais (le chef de l’équipe qui a enterré Gaby) ;
- NKOPE ISAKO Jean Claude (chef de terre de Bombole) ;
- Chef du village SABU
- BEKOYA BANDO LUPETA Jacques, l’infirmier Titulaire du centre de santé de Bombole
ayant soigné Gaby Simba jusqu’à sa mort.
Les personnes interrogées ont fermement attesté avoir été présent lors du déroulement des
faits, ou avoir eu des relations particulières avec Mr Gaby SIMBA de son vivant, ou encore
l’avoir assisté jusqu’à son enterrement.
Selon le témoignage recueilli au niveau de la communauté : Un jour, sans précision de date
certaine, les éléments en patrouille auraient mis la main sur Gaby SIMBA qui était parti puiser
de l’eau en amont sur la rivière Lula. Ces derniers l’auraient contraint de les amener au
campement où était son jeune frère SHOMBA. Nous devons noter que GABY SIMBA comme
son petit frère SHOMBA étaient venus du grand Kasaï. Le premier Gaby a été identifié comme
vivant à Bombole marié à Mme Carine de Mayaya, tandis que l’autre Shomba habitait le Parc
selon les informations recueillies auprès du Chef de terre de Bombole et autres témoins. Si
GABY SIMBA était identifié, selon le chef de terre auprès de qui il s’est acquitté des droits
d’accès aux forêts, comme piégeur, son petit frère SHOMBA par contre, faisait la chasse avec
les armes de guerre dans la zone. Arrivée près du campement de monsieur SHOMBA, Gaby
SIMBA lança un cri d’alerte en langue Tetela. Au cri d’alerte, son petit frère qui était dehors va
entrer dans une cabane du campement pour chercher son arme. A sa sortie, les éco gardes
vont tirer sur lui. Puis soudain il va disparaître laissant tomber son arme. Celui qui conduisait
24
les militaires va alors expliquer tout ce que Gaby SIMBA avait dit à son petit frère en Tetela
tout en précisant qu’ils étaient des frères.
Les patrouilleurs vont ainsi s’en prendre à Gaby lui auraient infligé coups, blessures, tortures
jusqu’à l’amener au village où il aurait été copieusement passé à tabac et transféré à l’hôpital
où il aurait rendu l’âme après une demi-journée, d’après un témoin.
A la question de savoir s’il avait des traces des balles sur lui, Gaby ? L’infirmier semblait
catégorique sur ce point : « il n’y avait aucune trace de balle, sinon des poignards, couteaux,
baïonnettes à la pointe des armes de guerre… »
Témoin oculaire pouvant nous renseigner sur les auteurs du meurtre : Commandant Jordan
ILUNGA de la Police Nationale Congolaise et Mme Carine épouse de Gaby
Présumé auteur de la mort de SIMBA : Commandant Tony, l’équipe de patrouille OPS Bonobo
C. Cas de torture ayant entrainé la mort des sieurs HAUSSA BAFUTA et de NSAMBA
BEVENE
Personnes interrogées :
- Michel TOTA, Père biologique d’Haoussa et Bavene ;
- MPUTU KAOMA, mère biologique d’Haoussa
- Docteur Van KASHAMA.
Le cas de meurtre de Bavene et Haoussa aurait eu lieu sur place à Yalita. A la question de
savoir qu’est-ce qui s’était passé pour en arriver à ce niveau ? Un jour, dont la date reste
inconnue, nous répondait Papa Michel Tota, Père des deux défunts, les militaires sont arrivés
au village. Ils ont regroupé tous les villageois à un même endroit avant de procéder aux
fouilles maison par maison afin de vérifier qui détenait des armes. Lors de cette perquisition
ils auraient découvert chez l’un de fils au chef de terre Michel TOTA, Haoussa trois (3) armes
de chasse et deux armes de chasse chez son père. Continuant la fouille, les militaires ont
encore trouvé des armes chez NSAMBA Bavene et une Antilope (Sititunga) abattue par ce
dernier. C’est alors qu’ils se seraient pris à ce dernier, ils vont l’amener auprès du chef
Haoussa. Ils auraient tabassé ce dernier comme autorité qui permet aux villageois de tuer
même les espèces protégées.
A la question de savoir quand est-ce qu’Haoussa et Bavene étaient décédés des coups reçus ?
Selon, les témoins ci-haut cités, Haoussa serait décédé une semaine après avoir était torturé,
tabassé et blessé et Bavene trois mois.
25
Il reste une certaine divergence sur l’endroit de décès d’Haoussa. Pour sa mère ce dernier
serait mort le jour où il était ramené de l’hôpital vers la maison.
Pour le père d’Haoussa, ce dernier serait mort une semaine après à la maison après diverses
tentatives de traitement. Bavene serait mort trois mois après traitement à l’hôpital et
traitements traditionnels infructueux.
A la question de savoir s’ils pouvaient identifier les présumés auteurs de ces faits, ils nous ont
répondu qu’il leur était impossible, car ils étaient arrivés tard vers 15 heures pour repartir le
lendemain à 6 heures du matin. Néanmoins le commandant en poste à Bongimba Beach
BOTETE était présent et pourrait aider à identifier les auteurs des actes incriminés. De l’autre
ils nous ont donné certains noms des personnes sans trop des détails.
Information recueillie à BONGIMBA Etat : Sur ces entrefaites nous sommes dirigés vers
l’hôpital de Bongimba Etat pour vérifier le cas de décès de Bavene et Haoussa. Une séance de
travail a été organisée avec le Médecin de l’hôpital de Bongimba pour en savoir un peu plus
sur la mort des sieurs Haoussa et Bavene. Les informations recueillies confirment la mort
d’Haoussa et Bavene mais le médecin Directeur qui l’avait reçu n’est plus sur place, ce qui a
compliqué l’obtention de la fiche médicale.
Personnes à écouter comme témoin : Dr BESEMA médecin traitant d’Haoussa à l’époque, le
Commandant en poste Capitaine BOTETE PNC comme renseignant sur l’identité des auteurs
des actes ayant entrainé la mort de BAFUTA KANKONDA et BAFUTA NSAMBA Bavene.
Présumés auteurs cités par les villageois : Mbala, Capitaine Jacques, Tony, Patrick et Ayi Gola
et éco-gardes de la station de Mundja et Monkoto.
2.2.2. Identification des auteurs présumés
Après avoir enquêté et confirmé les allégations des victimes, il nous a paru important
d’écouter les auteurs présumés afin de tenter d’établir les responsabilités.
Pour cette phase il est important de procéder à l’identification formelle des présumés auteurs
afin de pouvoir donner une suite favorable à l’enquête.
Certes, les auteurs présumés tels que vérifier dans les allégations des victimes et les
témoignages seraient issus des groupes des Forces armées congolaises (Opération Bonobo) et
des éco-gardes. Ainsi, étant éloigné du Quartier Général du Parc, nous souhaitons que dans
l’étape suivante que ces auteurs présumés soient clairement identifiées et entendus, et que
le Parc demande à l’OPS Bonobo de lui venir en aide dans ce sens.
26
2.2.3. Analyses juridiques des faits observés sur terrain
Viol
Le viol collectif commis par les éco gardes sur la femme sur Mme Ndongo. Cet acte
infractionnel est défini en droit Congolais par l’article 170 de la loi 06/018 du 20 juillet 2006
modifiant et complétant le décret du 30 janvier 1940 portant code pénal congolais : « Aura
commis un viol, soit à l’aide de violences ou menaces graves ou par contrainte à l’encontre
d’une personne, directement ou par l’intermédiaire d’un tiers, soit par surprise, par pression
psychologique, soit à l’occasion d’un environnement coercitif… »
Or selon le témoignage des membres de la communauté et de la victime, les éco gardes (au
nombre de 5 personnes) ont usé de violence et menaces pour violer la dame.
Cet acte infractionnel est réprimé par l’Article 171 bis, « Le minimum des peines portées par
les articles 167, alinéa 2, 168 et 170 alinéa 2 du présent code sera doublé :
4 Si l’attentat a été commis soit par les agents publics ou …
5 Si le coupable a été aidé dans l’exécution de l’infraction par une ou plusieurs personnes ;
7 S’il est commis en public ;
8 S’il a causé à la victime une altération grave de sa santé et/ou laissé de séquelles physiques
et/ou psychologiques graves ;
10 Si le viol a été commis avec usage ou menace d’une arme. »
Or comme nous le savons les éco gardes sont des agents publics ; le viol a été commis avec
assistance de ses collègues soit 5 éco gardes ; le viola été commis en public en présence des
enfants et belle fille de la victime.
Suivant le témoignage de la dame et de Mana, la femme a depuis perdu du poids elle pleure
chaque fois suite au viol subit. Elle a des séquelles physiques et psychologiques.
Le viol a été commis sous la menace d’une arme de guerre. Tous les éléments sont réunis
pour que les auteurs soient rigoureusement sanctionnés par la justice.
Meurtre
En droit pénal congolais, les actions définies dans ce rapport peuvent être assimilées au
meurtre avec préméditation.
Article 43 : « Sont qualifiés volontaires, l'homicide commis et les lésions causées avec le
dessein d'attenter à la personne d'un individu déterminé ou de celui qui sera trouvé ou
rencontré, quand même ce dessein serait dépendant de quelque circonstance ou de quelque
condition... »
27
Les Articles 44 et 45 du Code Pénal Congolais, décret du 30 janvier 1940 mis à jour au 30
novembre 2004. Les articles 44 et 45 ont été fusionnés par l’article 1er de l’ordonnance n° 68-
193 du 3 mai 1968 portant modification des articles 44, 45, 81 5°, 145, 157, 158 du Code
Pénal Congolais M. C. n° 14 du 15 juillet 1968 : « L’homicide commis avec l’intention de
donner la mort est qualifié de meurtre. Le meurtre commis avec préméditation est qualifié
d’assassinat. Ils sont punis de mort. ».
En attendant la version des auteurs présumés, les témoignages recueillis sur la mort de Gaby,
Bavene et Haoussa, semblent établir que les coups et blessures reçus à cet effet auraient
entrainé ces gens à une mort après. Ceci pourrait être passible d’infraction de meurtre à
charge des éco-gardes
2.3. Conclusion partielle
La mission qui nous a été donnée était de mener des enquêtes dans la partie du PNS se
trouvant dans le territoire d’Oshwe. Et plus précisément d’enquêter sur trois cas allégués de
violation de droits humains dont : Le cas de viol d’une dame à Bekoma, le décès de Gaby de
Bombole ainsi que le cas de décès d’Haoussa et Bavene tous deux de Yalita.
En marge de la mission nous avons été interpellés sur d’autres allégations de communauté.
Notre mission a établi l’existence de ces cas et allégations à charge des éco-gardes en mission
dans la zone.
2.3.1. Difficultés rencontrées
La précipitation lors de la préparation de la mission
L’insécurité causée par la présence des différents acteurs armés dans la zone allant de
Bekoma à Taketa un peu plus bas ;
La logistique peu adéquate à répondre à certaines exigences de la mission ;
Peu de motivation au profit des missionnaires sur terrain ;
Peu de confiance des communautés vis-à-vis des agents de l’ICCN ;
2.3.2. Recommandations
Pour faire œuvre utile, l’équipe de l’axe Oshwe-Bekoma, après avoir écouté les victimes, cette
mission devra être complétée par :
Une descente sur terrain dans les stations (Mundja et Anga) pour espérer répertorier
les auteurs présumés dans les rapports des missions de patrouille allant de 2013 à
2017 ;
28
Mettre à la disposition de l’équipe les premiers éco-gardes cités ou identifiés pour les
auditionner, dans le cas où les rapports des patrouilles ne peuvent plus être
disponibles ;
Produire un rapport final identifiant formellement les présumés auteurs ;
Déférer les auteurs des actes ainsi identifiés devant la justice Miliataire pour qu’ils
soient jugés comme cela est l’objectif de la mission.
IV. CONCLUSION GENERALE
Les enquêtes menées ont permis de récolter suffisamment d’éléments susceptibles de
permettre aux Cours et Tribunaux en passant par le Parquet d’affiner les enquêtes pour enfin
rétablir l’ordre public là où il aurait effectivement été troublé et prévenir les abus dans le cas
où certains serait tenté, malheureusement, de verser dans la délinquance.
Il est vrai que sur les 6 cas cités, un seul cas, celui de l’axe de Boende a été transféré à
l’auditorat Militaire de Boende. Toutefois, certains cas, bien qu’avancés sur les allégations
demeurent moins détaillés en terme d’informations sur les identités des auteurs présumés. Et
d’autres cas par ailleurs, soulèvent des questions évidentes de droit qui ne peuvent qu’être
tranchées en justice, en même temps qu’ils limitent les manœuvres d’action disciplinaire à
exercer par les autorités du Parc. Tel est le cas du viol de la femme de 52 ans, qui semble être
prescrit et que l’éco-garde auteur présumé est retraité, n’ayant aucun lien avec l’ICCN.
Il importe donc de prendre en compte les recommandations et poursuivre avec les enquêtes
sans précipitation afin d’atteindre les objectifs tels que visés dans les termes de référence.
29
30
Annexe I : Tableau synthétique des cas
VICTIMES INFRACTIONS LIEU MOMENT
DES FAITS
CIRCONSTANCES
DES FAITS
PERSONNE
REPROCHÉE
STATUT ACTUEL
PERSONNE
REPROCHÉE
ETAT DE LA
PROCEDURE /JU
RIDICTION
COMPETENTE
RECOMANDATIONS
Rebecca Bolumbu,
Ruth Elana, Yvonne
Nkoyo et Nancy
Boloko
Viol et torture Riviere
Iyenge
Lors de la
patrouille mixte
avec les FARDC
Ewaula Bakono
Benoit
Chef de station
adjoint de
Mundja,
suspendu
conservatoirem
ent de ses
fonctions
Dossier
transféré à
l’Auditorat
Militaire de
Boende/TMG
Assistance judiciaire
des victimes par
une structure autre
que le PNS
Nongo wessa Viol Rivière Iyenge
2002 Lors des patrouilles des éco-gardes
Lokima Ikamboli Louis
Eco-gardes retraité
Difficulté d’engager une procédure disciplinaire contre l’éco-garde retraité/ Infraction semble être prescrite au regard de la loi.
Assistance judiciaire des victimes par une Structure autre que le PNS
Dieu voulu Imeke
Lokofe Héritier
Bofenda et
Mitterrand
Torture Campe-
ment Ikali
18 mars
2013
Patrouille des éco-
gardes
Bentumu
Enyenga Guy (St
Monkoto),
Trésor Itombo
et Iyomi Mbeko
Trésor Itombo
est exclu depuis
2018, Bentumu
Enyenga est en
suspension
RAS Interview les
nouvelles victimes
identifiées et toutes
les confronter avec
les auteurs
31
(PP Bianga,
Monkoto)
conservatoire,
Iyomi Mbeko
Malufeza non
auditionné déjà
en suspension
conservatoire
présumés.
Poursuivre les
auteurs présumés
devant la justice
Militaire
Gaby simba Torture et
meurtre
Tony Inonga(ST
Monkoto)
Tony Inonga
suspendu
conservatoirem
ent
Poursuivre
l’enquête et
identifier les éco-
gardes ainsi que les
FARDC auteurs
présumés et les
poursuivre en
justice
Haussa Bafuta et
Nsamba Bevene
Torture ayant
entrainé la mort
Yalita 2015 Patrouille mixte Poursuivre
l’enquête et
identifier les parties
puis les confronter
avec des témoins et
poursuivre les
suspects devant la
justice Militaire
Ndongo Ntengi Viol Bekoma Patrouille mixte Poursuivre
l’enquête et
32
identifier les parties
auteurs présumés
éco-gardes et
FARDC et les
poursuivre devant
la justice Militaire
33
Annexe I : Liste des éco gardes impliqués pour le cas du viol collectif des femmes
N° NOMS sexe Qualités Villages ou
stations
Observations
01 EWAULA BAKONO M Conservateur adjoint Mundja Auditionné
02 BOKONGO NDUZU M Ecogarde Watsikengo Auditionné
03 ILUNGU TULUNGU F Ecogarde Watsikengo Auditionnée
04 MBETUMO GUY M Ecogarde Watsikengo Auditionné
05 ITELE PASCAL M Ecogarde Watsikengo Auditionné
06 BOBOA MATITA M Ecogarde Watsikengo Non auditionné
07 BOKOTE NTULA M Ecogarde Watsikengo Non auditionné
08 MPASO ITETE F Ecogarde Watsikengo Non auditionnée
09 BOMOLO SABITI M Ecogarde Watsikengo Non auditionné et
suspendu pour
condamnation à
perpétuité de
pillage, en 2013
par défaut (en
attente
d’exclusion)
10 MALA AMBUA Dieu M Ecogarde Watsikengo Non auditionné
11 CHIMICO BOKOTE M Ecogarde Watsikengo Non auditionné et
suspendu pour
condamnation à
perpétuité de
pillage, en 2013
par défaut (a fait
opposition)
12 IKOMBI LOYOKO M Ecogarde Watsikengo Non auditionné et
Exclu
34
Annexe II : Liste des éco gardes impliqués pour le cas du viol de la femme de 52 ans
N° NOMS sexe Qualités Villages ou
stations
Observations
01 LOKIMA LOUIS M Ecogarde Watsikengo Retraité et
auditionné
02 BOLANGALA
WATOLOLENGA
M Ecogarde Watsikengo Décédé
03 LOLEMA M Ecogarde Watsikengo Décédé
04 SIMON BATUKU M Ecogarde Watsikengo Décédé
35
Annexe II : Liste des éco gardes impliqués pour le cas de torture de Dieu Voulu
N° NOMS sexe Qualités Villages ou
stations
Observations
01 BENTUMU BEYENGE M Ecogarde Monkoto Auditionné
02 MALFEZA M Ecogarde Monkoto Non auditionné
03 IKOMBO Tresor M Ecogarde Monkoto Exclu
Annexe VI : PHOTOS DE LA MISSION
Figure 1L'équipe de la mission avec Dieu voulu, Victime de torture
Figure 2l'équipe de la mission avec les 4 victimes de viol
36
Figure 3Mr Ewaula après son audition au site UGPNS
Figure 4Mr Beyenge après son audition au site UGPNS
37
Figure 5L'état de route vers la station ICCN de Mondjoku
Commentaires généraux :
Merci beaucoup à l’équipe qui a travaillé dans les conditions très difficiles et du rapport qui confirme les 6 cas avec des nouveaux éléments et les analyses pouvant nous permettre à restaurer les victimes dans leurs droits en sanctionnant les écogardes et/ou militaires qui seront jugés coupables par les cours et tribunaux civiles et militaires selon les cas. Dans les corps du texte, il y a nos inputs et en ci nous plaçons les commentaires de notre équipe consolidés :
1) Il est important que figure clairement dans le rapport, voire même répété avant chaque résumé des cas, quelque chose du genre : ‘La durée de la mission ayant été drastiquement réduite, la mission a manqué l’occasion d’interroger des témoins supplémentaires cités et de collecter des preuves matérielles (rapports médicaux) pourtant nécessaires à la bonne conduite de poursuites judiciaires ;
2) La description du cas de Gaby en particulier est succincte et assez partiale et pourtant c’est parmi les cas qui a beaucoup des témoignages qui corroborent dont le premier est la vidéo du premier rapport d’un renseignant qui est originaire du village et connaissant bien la victime. Je pensais que cette question on l’avais vidée lors de notre rencontre du lundi 11 mars.
3) Les nouveaux cas doivent être signalés pour ne pas les oublier dans l’avenir. Il s’agit du (1) double meurtre de monsieur Guylain et son ami qui avaient été tués par les écogardes pendant qu’ils faisaient la chasse à Wafania (vidéos et audio existent) et un député provincial de la Tshuapa s’est prononcé sur ce cas. (2) l’arrestation et tortures causant la perte des dents de monsieur Jules Boboyi de Bekoma (audio disponible).
4) Le travail de l’auditeur n’a pas été prévu dans les termes de référence de cette mission et n’avait pas fait objet de consensus, il serait mieux de ne pas en parler dans le rapport. C’est une étape qui devrait suivre la mission après analyses des informations recueillies. D’ailleurs toutes les équipes ont recommandé de saisir l’appareil judiciaire dans les conditions qui garantissent les droits des uns et des autres
38
sachant bien le contexte du fonctionnement de la justice dans notre pays ; 5) Nous revenons encore sur les préoccupations sur la planification de la mission
adressées dans notre mail adressé avant le départ de la mission. Ceci a eu comme conséquence la durée trop courte, manque de sérieux juridique, refus de collecter certaines preuves matérielles et de prendre le temps d’interroger des témoins supplémentaires, hostilité notable et révélatrice à l’égard de l'ICCN dans la zone, etc.