draft - july 14, 2000
TRANSCRIPT
Sous la direction de Aboudou ADJIBADE,
Robert NDAMOBISSI, Aka KOUAME et Félix MOLOUA
avec la collaboration de Valérie MARY
L’enfant Centrafricain :
famille, santé, scolarité,
travail
Analyse causale de MICS 2000
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Équipe de réalisation
Direction des travaux : Aboudou Karimou ADJIBADE, représentant de
l’UNICEF en République centrafricaine.
Philippe OUARADAGUE, ministre délégué auprès du
Premier Ministre, chargé du Plan et de la coopération
internationale.
Coordination : Diego ZORRILLA, coordonnateur de programme
UNICEF-Bangui
Jean-Louis POUNINGUIZA, directeur général de la
Statistique et des études économiques et sociales.
Encadrement technique : Robert NDAMOBISSI, chargé de programme
Planification et Suivi-Évaluation à l’UNICEF (RCA)
Aka KOUAME, professeur-chercheur à l’IFORD
(Cameroun)
Abdoulaye SADIO, conseiller régional de l’UNICEF de
l’Afrique de l’Ouest et du Centre en matière de suivi-
évaluation, basé à Abidjan.
Auteurs : Raymond GOULA, Statisticien-démographe, expert
national au Comité national de lutte contre la pauvreté
(chapitre 1)
Docteur Emmanuel KITEZE, médecin de santé
publique, expert national responsable de la Cellule de
suivi des infrastructures sociales au ministère du Plan
(chapitres 7)
Frédéric KOBELEMBI, démographe, responsable de
suivi-évaluation du programme VIH/SIDA au Comité
national de lutte contre le sida (chapitre 5 et 8)
Aka KOUAME, professeur-chercheur à l’IFORD
(chapitres 1 et 2)
Francis LOKA, démographe, en fin de doctorat à
l’IFORD (chapitre 2)
Félix MOLOUA, démographe, directeur technique du
Bureau central du recensement au ministère du Plan
(Centrafrique) (chapitres 1, 2, 5 et 6)
Robert NDAMOBISSI, démographe, administrateur de
Programme planification et suivi-évaluation à
l’UNICEF (Centrafrique) (chapitres 1 et 5)
Faustin PIAMALE, démographe au Bureau central du
recensement (Centrafrique) (chapitres 4 et 9)
Mburano RWENGE, démographe, enseignant-chercheur
à l'IFORD (chapitre 5)
Alfred SABENDO, démographe au Bureau central du
recensement (Centrafrique) (chapitres 3 et 8)
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Abdoulaye SADIO, conseiller régional de l’UNICEF de
l’Afrique de l’Ouest et du Centre en matière de suivi-
évaluation, basé à Abidjan (chapitre 1)
Blaise TSABANG FOMENA, démographe, en fin de
doctorat à l’IFORD (chapitre 5)
Édition de l’ouvrage final : Valérie MARY, démographe, spécialiste en édition
d’ouvrages scientifiques.
RESUME GLOBAL
Dans un environnement national très difficile caractérisé par une pauvreté
monétaire généralisée des ménages, des troubles politico-militaires récurrents
et une mauvaise gestion publique, cet ouvrage nous plonge au cœur de la
tourmente centrafricaine et tente d'apporter des éclairages sur la situation des
enfants dans ce pays.
Comment envisager l’avenir de la Centrafrique alors même les futurs
acteurs de demain, c’est-à-dire les enfants d’aujourd’hui, se trouvent dans
une situation économique et sociale déplorable ? Famille, santé, scolarité,
travail des enfants sont les thèmes principaux abordés dans cette étude qui
montre au lecteur l’ampleur et les déterminants des problèmes rencontrés par
les moins de 15 ans.
Les résultats d'analyse s’appuient sur une enquête, représentative au plan
national, qui a porté sur près de 14 000 ménages. L'amélioration du statut de
l'enfant centrafricain ne se fera pas uniquement en permettant l'accès
géographique direct aux services sociaux de base, mais en agissant sur
l'ensemble des facteurs qui le déterminent. Les programmes de lutte contre la
pauvreté monétaire des ménages sont nécessaires pour garantir l'accessibilité
financière aux services sociaux de base mais aussi les programmes
d'amélioration du statut de la femme axés sur la promotion de l'éducation des
jeunes et en particulier des filles. Les normes sociales et culturelles qui
influencent négativement les attitudes et comportements individuels en
matière de soins aux enfants devraient être changées par le développement et
la mise en œuvre de stratégies de communication participative adaptées au
milieu culturel des enfants.
Un partenariat effectif de l’ensemble des acteurs multi-sectoriels du
développement est maintenant nécessaire si l’on veut aboutir à un
changement significatif du niveau de bien-être des enfants centrafricains.
C’est l’avenir de la République centrafricaine qui se joue ici. Saura-t-elle
offrir un monde nouveau digne à ses enfants ? Saura-t-elle rebondir dans le
nouveau millénaire ?
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
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Résumés des chapitres
Chapitre 1 – La société centrafricaine génératrice d’inégalités et de
pauvreté : santé, éducation, accès aux droits et profil des ménages
pauvres
La République centrafricaine est l’un des pays les plus pauvres de la
planète. Il est classé au 165e rang sur 173 pays selon l’indice de
développement humain durable établit par le PNUD dans son rapport annuel
2002. Confronté aux multiples troubles politico-militaires et les faiblesses en
matière de gestion macro-économique, le taux de croissance économique est
quasi nul en l’an 2002 et environ 62 % de la population vit en dessous du
seuil de pauvreté monétaire de 1 dollar par jour. Le pays n’a pas pu signer un
accord avec le FMI et la Banque mondiale depuis plus de cinq ans pour un
programme triennal de Facilité d’ajustement pour la croissance économique
et la réduction de la pauvreté.
L’analyse des inégalités par l’approche des « avoirs du ménage » à l’aide
des données de l’enquête MICS 2000, a révélé de grandes inégalités en
matière de santé, d’éducation, de nutrition et de jouissance des droits des
enfants en République centrafricaine. Le constat universel a été vérifié : les
ménages pauvres sont les plus vulnérables sur le plan social.
La caractérisation des ménages pauvres a permis de définir les groupes les
plus vulnérables face à la pauvreté : les ménages vivant en milieu rural, les
ménages vivant hors Bangui et principalement dans les zones cotonières et
l’est du pays, les ménages dirigés par une femme ou par un jeune, les
ménages dont le chef a un niveau d’instruction faible et dont le statut dans
l’emploi est instable, et les ménages de petite taille. Les ménages nombreux
avec plus d’adultes connaissent une situation plus favorable, du fait de
l’apport de plusieurs sources de revenus dans le ménage : il s’agit d’une
nouvelle stratégie développée par les ménages pour améliorer leur statut
économique. De même le VIH/sida a un impact sur la structure des ménages ;
des réponses appropriées pour faire face aux conséquences socio-
économiques du sida sur les familles s’avèrent nécessaires. La politique de
planification familiale doit prendre en compte cet aspect de la stratégie de
survie des familles en réfléchissant sur des approches efficaces de
communication.
Ces résultats recommandent une segmentation des actions de lutte contre
la pauvreté qui puisse adresser des réponses spécifiques appropriées à chaque
groupe cible. Des actions doivent également être envisagées pour lutter
contre le chômage des immigrants ayant un faible niveau d’instruction,
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vivant principalement dans les bidonvilles, et qui sont économiquement
vulnérables.
Chapitre 2 – Pauvreté, genre et scolarisation des enfants en
Centrafrique
L'incidence de la pauvreté et du genre sur la scolarisation des enfants en
République centrafricaine est certaine. Les facteurs mis en exergue
concernent d'une part les caractéristiques du ménage (niveau de vie du
ménage, éducation des parents) et d'autre part les caractéristiques
démographiques du ménage, les facteurs liés à la société, les facteurs liés à
l'école et le statut des enfants dans le ménage.
Un sous-échantillon de 14 730 enfants âgés de 5 à 17 ans sélectionnés à
partir des données de l'enquête MICS 2000 a servi de base pour l'étude. Pour
rendre compte de la complexité du phénomène, trois variables dépendantes
ont été construites. Il s'agit de la fréquentation scolaire, de la performance
scolaire et de l'abandon scolaire. Le sexe est la variable indépendante
principale de l'étude dont on cherche à mesurer l'incidence sur la scolarisation
des enfants. La prise en compte d'autres covariables dans le modèle permet
de contrôler les effets d'interaction. On y retrouve les caractéristiques de
l'enfant, les variables liées au ménage, à la communauté et celles qui sont
spécifiques au système scolaire.
Compte tenu de la nature des variables dépendantes, la régression
logistique est apparue comme la plus appropriée pour l'analyse de la
fréquentation scolaire et de la performance scolaire. En ce qui concerne
l'abandon, on a eu recours à la régression de survie en utilisant notamment le
modèle semi-paramétrique de Cox.
Il ressort des résultats un niveau inquiétant d’abandons scolaires. Cette
préoccupation concerne aussi bien la performance scolaire caractérisée par un
taux d'échec de 30 % lors des examens de passage en classe supérieure. À
cela s'ajoute le fait que 40 % des enfants d'âge scolaire n'ont jamais été
scolarisés.
Les analyses révèlent que plus l'école est éloignée, moins les enfants ont
de chance d'être scolarisés. Les tendances sont les mêmes pour les abandons
scolaires. En revanche, la performance scolaire ne semble pas être affectée
par la distance à laquelle se trouve l'école. Il semble également que le milieu
de résidence a un effet sur la scolarisation des enfants.
Le niveau d'instruction du chef de ménage accroît considérablement les
chances de scolarisation des enfants et réduit le risque d'abandon. On note
également une forte relation positive entre le niveau de vie du ménage et la
scolarisation alors que cette variable ne détermine pas la performance
scolaire.
On abandonne moins les études dans les familles de grande taille, mais la
performance scolaire des enfants issus de telles familles est moins bonne que
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
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celle des autres enfants. Ce qui se justifie par une probable promiscuité créée
par la taille élevée du ménage qui rend plus difficiles les conditions d’étude.
L'absence ou le décès des parents est aussi préjudiciable à l'instruction des
enfants. On note enfin que les filles sont moins scolarisées et abandonnent
plus tôt les études que les garçons. Les inégalités entre filles et garçons en
matière de scolarisation persistent quel que soit le niveau de vie.
Chapitre 3 – La prise en charge de la maladie de l’enfant à domicile
La survie de l’enfant fait partie des objectifs prioritaires des programmes
de santé en République centrafricaine au regard de la mortalité très élevée des
enfants de moins 5 ans. Si les services et structures adéquats de santé sont
essentiels pour les soins, la réduction du niveau de mortalité des enfants de
moins de 5 ans va au-delà de la disponibilité des infrastructures de soins et
des compétences du personnel de santé. Les communautés et les ménages
doivent assumer une grande responsabilité dans la prévention et la prise en
charge des enfants de moins de 5 ans qui représentent l’une des catégories les
plus vulnérables de la population. Ils doivent assurer la nutrition et les soins
adéquats et réagir convenablement face aux maladies. La Prise en charge
intégrée des maladies de l’enfant (PCIME), axée sur des comportements clés
de la Composante famille et communauté (CFC), semble constituer une
stratégie efficace pour lutter contre les principaux problèmes de santé qui
affectent la santé des jeunes enfants. Bien que la Centrafrique n’ait pas
encore mis en œuvre la PCIME comme elle l’a retenu dans sa politique de
santé, des résultats de l’enquête à indicateurs multiples (MICS 2000)
semblent montrer que celle-ci est utilisée par certains ménages.
C’est dans ce contexte que nous nous sommes intéressés de plus près à
certains volets de la PCIME mis en relief par l’enquête MICS 2000, à savoir :
la connaissance des signes de gravité d’une maladie et la recherche des soins
par les mères d’enfants de moins de 5 ans ; le traitement adéquat du
paludisme à domicile des enfants de moins de 5 ans et ; l’alimentation
appropriée des enfants pendant les épisodes de maladie. L’objectif général de
cette étude est de déterminer les caractéristiques distinguant les femmes qui
appliquent ces différentes composantes des autres. De façon spécifique, il
s’agit d’identifier les facteurs qui influencent les différentes composantes de
la PCIME à domicile et d’identifier les dimensions de la PCIME qui feront
l’objet d’un renforcement ou d’une nouvelle mise en place pour améliorer les
comportements des mères en matière de survie des enfants.
En raison du caractère dichotomique des variables dépendantes
(connaissance d’au moins deux signes de gravité d’une maladie et recherche
de soins, traitement adéquat du paludisme et alimentation appropriée pendant
les épisodes de maladie), la régression logistique a été retenue pour réaliser
notre analyse. Les facteurs socioculturels (niveau d’instruction, ethnie et
religion de la mère), les facteurs socio-économiques (niveau de vie des
ménages, accès aux formations sanitaires, milieu de résidence) et les facteurs
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de contrôle (âge et parité de la mère, âge et sexe de l’enfant, et taille de la
famille) ont été utilisés comme variables indépendantes.
Les résultats de l’étude ont montré que : 1) la connaissance de signes de
gravité d’une maladie n’est pas influencée par le niveau d’instruction, ni par
les variables socio-économiques, mais plutôt par les valeurs culturelles
puisées dans les groupes ethniques et religieux, ainsi que dans l’expérience
des mères ; 2) l’administration d’un traitement adéquat contre le paludisme à
domicile chez les enfants de moins de 5 ans dépend essentiellement du
niveau économique des ménages et de leur proximité des formations
sanitaires. En d’autres termes, les facteurs socio-économiques sont plus
déterminants dans l’accès à un meilleur un traitement ; 3) la pratique de
l’alimentation appropriée existe dans la société centrafricaine. Elle est la
même quel que soit le niveau d’instruction des mères. Cependant, celle-ci
diffère selon les groupes ethniques, les religions et le milieu de résidence.
Ces effets sont médiatisés par l’âge de la mère, sa parité, ainsi que par l’âge
de l’enfant.
D’une manière générale, l’analyse approfondie de la CFC et la PCIME
indique que malgré une politique pas encore opérationnelle, certaines
pratiques sont adoptées par quelques mères. Pour permettre à la majorité des
familles d’appliquer cette stratégie, essentielle à l’infléchissement du niveau
très élevé de la mortalité chez les enfants de moins de 5 ans dans notre pays,
les recommandations suivantes peuvent être formulées : 1) introduire et
rendre opérationnelle la PCIME dans le système de santé à travers
l’amélioration des compétences des agents de santé en matière de fournitures
de soins et de conseils appropriés aux familles et le renforcement des
plateaux techniques ; 2) introduire le module sur la PCIME dans le cursus de
formation des futurs cadres de la santé et ; 3) améliorer la prise en charge au
niveau de la famille et des communautés. On ne saurait sous-estimer
l'importance du milieu social de l'enfant comme déterminant de la santé.
Promouvoir la santé au niveau de la famille et au sein de la communauté est
un élément essentiel de l'approche intégrée préconisée par l'OMS. De bonnes
pratiques en matière d'alimentation, et d’autres interventions visant un
développement sain de l'enfant au sein des familles sont tous des facteurs qui
permettront de réduire la mortalité de l'enfant.
Chapitre 4 – Les déterminants de la santé des enfants de moins de
cinq ans
La santé de la population, en particulier celle des enfants, est l'une des
priorités du gouvernement. L'enquête MICS 2000 a permis la collecte de
données sur 14 300 enfants âgés de 0-4 ans, nécessaires à l’étude des
principales maladies cibles du programme élargi de vaccination. En outre
l'analyse de la vaccination se réfère à un sous-échantillon de 2 932 enfants
âgés de 12-23 mois. Les premiers résultats de l'enquête ont montré que les
prévalences pour les principales maladies de l'enfance sont respectivement
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de : 10,3 % pour les infections respiratoires aiguës (IRA), 25,7 % pour la
diarrhée et, 31,8 % pour la fièvre. Sur 2 932 enfants de la tranche d'âge 12-23
mois, 19,2 % ont été complètement vaccinés contre les principales maladies.
Ces niveaux de prévalence jugés très élevés pour les maladies et, très faible
pour la couverture vaccinale, expliquent en partie le niveau élevé de la
mortalité des enfants de moins de cinq ans (194 ‰).
On a privilégié ici les facteurs explicatifs de la mortalité et de la morbidité
dues à la fièvre, à la diarrhée, aux infections respiratoires aiguës (IRA) et, au
statut vaccinal des enfants de moins de cinq ans. L'utilisation du cadre
conceptuel de Chen et Mosley permet de distinguer les facteurs
environnementaux des facteurs démographiques, économiques et,
socioculturels.
Les résultats de l'étude montrent que le milieu de résidence, le statut
économique du ménage, le niveau d'instruction de la mère influencent le
niveau de prévalence des principales maladies de l'enfant. En effet, les
enfants qui résident en milieu urbain sont plus avantagés que leurs pairs du
milieu rural ; cependant à Bangui, seulement 64,1 % des enfants sont exposés
aux risques des IRA, 69,6 % à la fièvre et, 83,6 % à la diarrhée. Les risques
sont respectivement de 83,5 % pour les IRA et 91,9 % pour la fièvre dans les
villes secondaires. Les enfants vivant dans les ménages nantis sont moins
exposés aux risques de souffrir d'une quelconque des trois maladies : ces
risques sont de 77,2 % pour la fièvre, 82,3 % pour les IRA et de 95,9 % pour
la diarrhée, comparativement aux enfants des ménages pauvres. On note par
ailleurs, que les enfants issus des mères de niveau d’instruction secondaire,
courent 4,5 % fois moins de risques de souffrir de la fièvre, 17,9 % fois
moins de risque d'être infectés par les IRA et, 20,9 % fois moins d'attraper la
diarrhée, lorsqu'on les compare aux enfants des femmes sans niveau
d’instruction.
Le milieu de résidence influence assez considérablement la chance pour un
enfant d'être complètement vacciné. Les enfants qui résident à Bangui ont 3,3
fois plus de chance d’être vaccinés et ceux des autres villes 1,7 fois plus de
chance que ceux du milieu rural. Lorsqu'on compare les régions sanitaires, on
se rend compte que les enfants de la RS1 ont 48,2 % fois plus de chances
d’être vaccinés que ceux qui résident dans les autres régions sanitaires. Les
enfants des riches ont 64,4 % fois plus de chances de terminer les séries de
vaccinations que les enfants des pauvres. On constate également que les
enfants des mères qui ont atteint le primaire ont 34 % fois plus de chance
d'être complètement vaccinés que les enfants des mères sans niveau
d’instruction ; lorsque la mère a atteint le secondaire, ses enfants ont 2,1 fois
plus de chances d’être vaccinés. Le niveau d'instruction du conjoint n'a
d’influence qu'à partir du secondaire : leurs enfants ont 78 % fois plus de
chances de recevoir une vaccination complète que ceux dont le père a un
niveau d'étude inférieure.
Toute politique visant à l'amélioration de la santé des enfants doit tenir
compte de ces déterminants.
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Chapitre 5 – Les déterminants de la sexualité précoce des
adolescentes
La population centrafricaine, en grande partie rurale, est constituée en
majorité de jeunes. Le recensement général de la population de 1988
(RGP88) avait révélé que 43 % de la population avaient moins de 15 ans.
L’enquête MICS 2000 indique que plus de la moitié de la population
(51,4 %) a moins de 20 ans. Cette jeunesse soumise, à l’influence de la
culture occidentale, doit aborder dans sa phase d’adolescence les aventures
sexuelles avec leurs conséquences, à savoir : les grossesses précoces, la
maternité précoce, les avortements, les IST/sida etc… Dans ce pays où la
prévalence du sida avoisine les 15 % avec une majorité de cas de VIH
enregistrés parmi les jeunes de 15 à 24 ans, l’accent doit être mis sur la
recherche d’actions en vue d’aider les jeunes à aborder avec le moins de
risques possibles leur phase de transition entre l’enfance et l’âge adulte.
L’enquête MICS 2000 dont les données ont servi à la présente étude a
porté sur 3 445 adolescentes âgées de 15 à 19 ans. Selon ces données, l’âge
modal au premier rapport sexuel est de 15 ans et l’âge médian de 15,9 ans
chez les adolescentes centrafricaines. Le modèle de la régression logistique a
servi à vérifier l’hypothèse de l’étude formulée comme suit : toutes choses
égales par ailleurs, l’occurrence précoce des premiers rapports sexuels (avant
l’âge de 17 ans) varie selon les variables socioculturelles et selon les
variables socio-économiques.
Le sous-échantillon de ces adolescentes est constitué en majorité de
protestantes (51,4 %). Les catholiques et les musulmanes représentent
respectivement 35,6 % et 11,7 %. Parmi ces adolescentes, 49,3 % vivent en
milieu urbain, 41,9 % n’ont jamais été à l’école et 39,8 % n’ont atteint que le
niveau primaire.
De toutes les variables socio-démographiques, culturelles et économiques
introduites dans le modèle de régression logistique, il ressort que l’ethnie, le
milieu de résidence, la scolarisation et le niveau de vie des ménages agissent
de manière significative sur l’occurrence précoce des premiers rapports
sexuels. En effet, les résultats ont révélé que par rapport aux adolescentes
Haoussa, les adolescentes Ngbaka ont 65 % moins de risques d’avoir
précocement leurs premiers rapports sexuels. Les adolescentes résidant dans
les villes ont 30 % moins de risques que celles du milieu rural d’avoir
précocement leurs premiers rapports sexuels. Les adolescentes ayant le
niveau secondaire ont 45 % moins de risque que celles n’ayant jamais été
l’école de rentrer précocement dans la vie sexuelle. Enfin, les adolescentes
résidant dans les ménages de niveau de vie élevé ont 51 % moins de risque
que celles des ménages pauvres de connaître une expérience sexuelle
précoce.
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Chapitre 6 – Le comportement contraceptif des femmes en union
La recherche des déterminants du comportement contraceptif des femmes
en union en Centrafrique présente un intérêt important dans la mesure où ce
pays est de tradition fortement nataliste avec une prévalence contraceptive
moderne encore faible (6,9 % selon MICS 2000). Les femmes constituent, en
général, dans ce pays une catégorie de personnes plus vulnérables sur le plan
sanitaire et économique.
Au cours de l’enquête MICS 2000, la question de l’utilisation des
méthodes contraceptives modernes a été posée à 11 681 femmes non
enceintes. Cela a permis de rechercher les divers facteurs démographiques,
culturels et socio-économiques agissant sur la pratique de la contraception
moderne à partir du modèle multivarié de régression logistique.
Parmi les femmes enquêtées en union, environ 63 % vivent en milieu
rural, 61 % n’ont jamais été à l’école, 27,4 % ont atteint le niveau primaire et
66 % ont déclaré ne pas savoir lire en français. Les résultats ont révélé que
les variables « niveau d’instruction de la femme », « attitude du mari »,
« occupation de la femme », « milieu de résidence de la femme » et
« occupation du mari » ont un effet nettement significatif sur la pratique
contraceptive moderne.
En effet, plus le niveau d’instruction de la femme en union est élevé, plus
augmente sa chance de pratiquer la contraception moderne. Selon ces
résultats, les femmes en union qui ont un niveau secondaire ou plus ont
205 % plus de chances d’utiliser la contraception moderne que celles qui
n’ont pas été à l’école. Elles ont environ 3 fois plus de chance que les
femmes en union ayant atteint un niveau primaire de recourir aux méthodes
contraceptives modernes. L’attitude des époux influence le comportement
contraceptif des femmes. L’utilisation des méthodes contraceptives modernes
augmente chez les femmes lorsque leur époux approuve cette démarche.
Ainsi, les femmes dont le mari approuve la contraception ont 683 % plus de
chances de la pratiquer que celles dont le mari ne l’approuve pas. Les
femmes en union vivant en milieu rural sont plus défavorisées en matière de
pratique des méthodes contraceptives modernes. Les résultats indiquent que
les femmes du milieu urbain ont 118 % plus de chance d’utiliser les
méthodes contraceptives modernes que celles du milieu rural. Enfin, les
femmes en union exerçant une profession ont plus de chances de faire usage
des méthodes contraceptives modernes que celles qui pratiquent l’agriculture.
La variable fondamentale de changement de comportement des femmes en
union est le niveau d’instruction. L’amélioration de la scolarisation des filles
est susceptible d’augmenter la prévalence contraceptive moderne en
Centrafrique. Il y a lieu aussi de réduire la discrimination entre les milieux
urbain et rural en matière d’infrastructures sanitaires et de dotation en
produits pharmaceutiques.
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Chapitre 7 – La malnutrition chronique chez les enfants de moins
de cinq ans
En République centrafricaine, le problème de déficience nutritionnelle est
un sujet préoccupant. De plus en plus, on relève un nombre élevé de cas de
malnutrition protéique et énergétique, d’anémie nutritionnelle, de troubles
liés à la carence en micro-nutriments ou oligo-éléments tels que l’iode, la
vitamine A, le fer, le zinc et l’acide folique. Les enfants ne sont pas exposés
de la même manière au risque de malnutrition selon qu’ils résident dans tel
ou tel milieu de résidence. Les conditions écologiques et climatiques ne sont
pas étrangères à ces disparités.
Quels sont les facteurs qui pourraient expliquer les différences de
malnutrition chez les enfants ? Telle est la préoccupation centrale de ce
chapitre. On s’intéressera particulièrement aux différents facteurs
susceptibles d’avoir un effet différentiel sur l’état nutritionnel de l’enfant.
Malgré les nombreuses actions d’éducation en matière de nutrition et
d’hygiène, de mise en œuvre des programmes de soins de santé primaire, des
programmes communautaires de nutrition intégrée etc., entreprises par le
gouvernement centrafricain pour améliorer l’état nutritionnel de la
population, on observe une augmentation de la malnutrition. Pour permettre
de mieux agir sur les facteurs susceptibles de favoriser la malnutrition chez
les enfants, il est important d’étudier les déterminants de la malnutrition
infanto-juvénile pour enfin disposer d’informations fiables pour une
orientation judicieuse des actions à entreprendre.
Au niveau national, les variables telles que les régions sanitaires, l’ethnie
de la femme, le niveau d’instruction de la femme, le métier de la femme, le
niveau de vie du ménage, l’âge de la mère à l’accouchement concourent à
l’explication de la malnutrition chronique chez les enfants. Lorsqu’on
considère le modèle global, on constate que le risque d’être atteint par la
malnutrition augmente pour les variables qui demeurent significatives.
L’instruction maternelle œuvre en faveur de la création d’un
environnement propice à l’alimentation des enfants. La scolarisation des
filles et l’alphabétisation de la femme sont donc à promouvoir pour une
meilleure santé et une croissance harmonieuse des enfants. Elles dotent les
mères des connaissances leur permettant de lutter efficacement contre la
malnutrition infanto-juvénile. Ces connaissances sont de nature à favoriser
l’abandon des tabous alimentaires au profit d’une alimentation équilibrée des
enfants. L’éducation de la mère apparaît comme une stratégie efficace de
lutte contre ce fléau. Au niveau régional, il y a des disparités dont il faut tenir
compte pour mener des campagnes de sensibilisation sur la richesse des
aliments. Les résultats de l’étude montrent que le niveau de vie élevé réduit le
risque de malnutrition des enfants. La lutte contre la pauvreté est donc à
promouvoir pour parvenir à terme à la réduction du risque de malnutrition.
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
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Chapitre 8 – Les perceptions du VIH/sida chez les adolescentes
centrafricaines
Depuis son apparition en 1984, le sida a été considéré par les autorités
politiques et sanitaires centrafricaines comme un véritable problème de santé
publique. Malgré les actions multiformes de campagne de sensibilisation
menées à travers le pays, on se rend compte grâce aux résultats de l’enquête
MICS 2000 que les femmes ont encore un faible niveau de connaissance des
modes de transmission du VIH/sida. Considérant la jeunesse de la population
centrafricaine, notre propos est d’identifier les différentes perceptions du
VIH/sida chez les adolescentes et de mettre en lumière les facteurs qui les
sous-tendent et les expliquent.
Les déterminants des perceptions sont variables suivant qu’il s’agit de la
connaissance des trois modes de prévention, de la connaissance des trois
modes erronés de transmission et de la connaissance des quatre modes de
transmission. Les principaux déterminants de la connaissance des trois modes
de prévention sont la région de résidence, le niveau d’instruction, le niveau
de vie, la religion et le milieu de résidence. Quant à la connaissance des trois
modes erronés de transmission, le niveau d’instruction, la région
administrative, le niveau de vie et la religion sont les principaux facteurs qui
influencent cette connaissance chez les adolescentes. Enfin, la connaissance
des quatre modes de transmission chez les adolescentes est déterminée par
l’âge, le niveau d’instruction, la religion, la région de résidence et le niveau
de vie du ménage. On s’aperçoit ainsi que l’instruction est une variable
cruciale qui favorise l’émergence des nouvelles idées, l’ouverture vers la
modernité.
En définitive, la relation entre les perceptions du VIH/sida chez les
adolescentes et les principaux déterminants dépassent le simple truisme, mais
les mécanismes complexes qui les relient ne sont pas élucidés dans le cadre
de cet article et constitue l’une des limites de ce travail.
Chapitre 9 – Des enfants mis au travail
Suite à la ratification des conventions des Nations Unies relatives aux
droits de l'enfant, la lutte contre le travail des enfants considéré comme l'une
des pires formes d'exploitation des enfants est devenue l'une des
préoccupations de la communauté internationale. Le gouvernement
centrafricain qui a souscrit aux recommandations du Sommet mondial de
l'enfance a préconisé des mesures en vue d'éradiquer ce phénomène. La mise
en œuvre de ce programme passe par l'identification des principaux
déterminants (contexte socio-économique, caractéristiques individuelles de
l'enfant, celles du chef de ménage ou du tuteur).
Il apparaît que 61,5 % des enfants travaillent alors que le rendement
scolaire reste mitigé et caractérisé par une faible scolarisation et un rythme
d'abandon relativement élevé.
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De nos résultats, il ressort que l'urbanisation et la pauvreté sont les
principaux déterminants du travail des enfants. Au-delà de ces facteurs,
l'étude révèle la complexité du phénomène qui dépend des facteurs
endogènes tels que la scolarisation et les travaux domestiques. En effet, les
enfants qui vivent sous la tutelle de chefs de ménage plus instruits sont plus
exposés au risque de travailler quand bien même ils ont plus de chance d'être
scolarisés. Par contre, les enfants qui n'ont pas un lien de filiation directe
avec le chef de ménage ont moins de chance de fréquenter une école. Notons
enfin l'ambivalence du confiage qui peut augmenter les chances de
scolarisation lorsque les enfants sont confiés à des ménages riches, ou au
contraire astreindre les enfants confiés aux travaux domestiques lorsqu’ils
vivent dans des ménages pauvres.
Introduction générale
Le contexte économique et social
La République centrafricaine est l’un des pays les plus pauvres du monde.
Le PIB par habitant avoisine les 300 dollars américains. Le rapport annuel
sur le développement humain publié par le PNUD en 1999 classe la
Centrafrique au 165e rang mondial, parmi les pays les plus pauvres de la
planète. D’après les estimations de la Banque mondiale (2000/2001), la
Centrafrique fait partie des pays les plus touchés par la pauvreté, avec une
forte proportion de population qui vit avec moins de 1 dollar par jour.
Sur le plan économique, le pays enregistre de grands déséquilibres macro-
économiques caractérisés par un taux de croissance réel du PIB nul en l’an
2001 largement en dessous des prévisions de l’ordre de 5 % et du taux
d’accroissement démographique de 2,5 % ; une balance des paiements
déficitaire marquée par une baisse des exportations (suite à la baisse des
cours du café et du coton) s’oppose à une hausse des importations ; l’inflation
atteint 4,6 % en 2001 (indice des prix à la consommation base 1981) ; et
surtout un niveau très faible des recettes propres de l’État qui s’élèvent à 60
milliards de francs CFA en 2001 contre des prévisions de dépenses d’au
moins 100 milliards de francs CFA. L’absence d’apport financier extérieur
lié à la suspension du programme triennal d’ajustement avec le FMI n’a pas
permis de combler le déficit budgétaire de l’État qui se trouve ainsi dans
l’incapacité financière d’honorer les dépenses sociales de souveraineté. Les
arriérés de salaire se sont accumulés pour atteindre 28 mois (en janvier 2002,
le salaire du mois d’août 2000 n’est pas encore entièrement payé aux
fonctionnaires), les bourses des étudiants et les pensions des retraités ont des
dizaines de mois de retard de paiement et les décaissements pour le budget
d’investissement dans les secteurs sociaux ne peuvent être effectués, pour
cause de crise de trésorerie.
La République centrafricaine subit fortement le poids de la dette extérieure
dont le volume a atteint 642 milliards de francs CFA au deuxième trimestre
de l’année 2001. Les services annuels de la dette représentent au moins 80 %
des recettes d’exportation et plus de 80 % du PIB. Le remboursement de la
dette freine les investissements de l’État dans les domaines sociaux.
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
18
18
La situation économique dramatique de la Centrafrique a plusieurs
origines : les troubles politico-militaires à répétition qui ont entraîné le
délabrement du tissu industriel ; la mauvaise gouvernance qui occasionne de
nombreux détournements dans les régies financières et le manque de maîtrise
des dépenses de l’État, sans oublier la démotivation des fonctionnaires
entraînant un fonctionnement au ralenti des services de l’administration.
L’insécurité intérieure et aux frontières ainsi que l’enclavement du pays
constituent des obstacles majeurs au développement économique du pays.
Au niveau micro-économique, les conditions de vie des ménages sont très
difficiles. 62 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté fixé à
30 000 F CFA de consommation mensuelle par l’enquête prioritaire budget-
consommation (EIBC) de 1992. Le profil de pauvreté élaboré à partir des
données de l’enquête EIBC 1995/1996 indique que presque la moitié de la
population (49 %) soit 1 701 181 personnes vivent dans des ménages
pauvres. Cette pauvreté qui est à la fois monétaire et humaine touche
principalement la population rurale (71 %).
La mise en place de programmes d’ajustement structurel, à partir de
l’année 1989 avec le concours du FMI et de la Banque mondiale, pour faire
face aux déséquilibres macro-économiques, a eu un impact négatif sur le plan
social par la réduction des dépenses de fonctionnement de l’État dans les
domaines sociaux. On a vu entre autres la suspension des recrutements dans
la fonction publique, les départs de milliers de fonctionnaires (principalement
enseignants) à la retraite anticipée, l’abandon de la gratuité des soins et la
mise en place de la politique de recouvrement des coûts, l’abandon de
l’éducation primaire gratuite. À partir de janvier 1994, la dévaluation du
franc CFA et la flambée des prix des produits de première nécessité ont
entraîné une baisse très importante du pouvoir d’achat des ménages.
Les politiques économiques et sociales ont été durement ressenties par les
ménages dont les revenus ont fortement chuté à cause de la baisse des cours
des produits de rente (café, coton, tabac). Cela s’est également traduit par le
non paiement de salaire, la dévaluation du franc CFA, la faible circulation de
la monnaie en milieu rural due à l’absence d’achats des produits de récolte
aux producteurs agricoles.
L’évaluation des objectifs du Sommet mondial pour les enfants de 1990 a
révélé une détérioration importante de la situation centrafricaine en matière
de survie et de développement des enfants. Le taux de mortalité infanto-
juvénile a augmenté de 177 pour mille en 1990 à 194 en l’an 2000 ; le taux
de mortalité maternelle est passé de 683 estimé en 1988 à 948 pour 100 000
naissances vivantes en l’an 2000 ; à peine 42 % des femmes enceintes
accouchent dans un centre de santé en l’an 2000 ; la prévalence du VIH/Sida
est très élevée ; la malnutrition a gagné du terrain entre 1995 et 2000 ; la
scolarisation au primaire s’est dégradée (de 53 % en 1990 à 43 % en l’an
2000). La pauvreté monétaire généralisée a eu un impact colossal qui s’est
traduit par une détérioration de tous les indicateurs sociaux. La Centrafrique
dont l’autosuffisance alimentaire est normalement atteinte connaît cependant
des problèmes d’anémie et de carence en vitamine A avec 84 % d’enfants de
INTRODUCTION
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19
6-36 mois carencés en fer et 58 % carencés en vitamine A (d’après les
résultats de l’enquête nationale auprès des ménages sur les micro-nutriments
réalisée en 1998/99).
La situation sociale est très préoccupante. Les familles se trouvent dans
l’incapacité d’assurer l’accès des enfants aux soins essentiels, à l’éducation
ou à une alimentation de qualité quand bien même dans certains cas les
services existent tels la généralisation de l’initiative de Bamako à tout le pays
avec l’appui des partenaires au développement.
Présentation de l’enquête MICS 2000
En septembre 1990, lors du Sommet mondial de l’enfance auquel ont pris
part 185 chefs d’État et de gouvernements, un engagement ferme de toute la
communauté internationale s’est manifesté en faveur des enfants. En vue
d’évaluer les progrès enregistrés dans l’amélioration du bien-être des enfants,
il a été décidé la réalisation d’une série d’enquêtes par sondage appelées
enquêtes à indicateurs multiples (ou Multiple Indicators Clusters Survey en
anglais).
En tout 65 pays dans le monde dont 15 en Afrique de l’ouest et du centre
ont réalisé une enquête MICS en l’an 2000 entérinant ainsi la volonté
manifeste des pays signataires de cette importante résolution internationale à
dégager le bilan de 10 années d’interventions multiformes en faveur des
enfants dans le monde. Les enquêtes MICS 2000 mettent l’accent sur les
indicateurs concernant les aspects de santé, nutrition, éducation, l’accès à
l’eau potable et à l’assainissement de base, l’environnement ainsi que la
protection des enfants et des femmes.
En République centrafricaine, les objectifs de l’enquête ont été très
ambitieux en ce sens que les résultats devaient être désagrégés par préfecture
(au total 16 plus la capitale Bangui), entraînant une taille d’échantillon très
importante qui s’est révélée très utile aux analyses approfondies dans divers
domaines.
L’échantillon de l’enquête est obtenu à partir d’un sondage aréolaire à
deux degrés stratifié en urbain/rural à l’intérieur de chaque préfecture. Les
unités primaires sont sélectionnées à partir de la liste des aires de
dénombrement (AD) issue des travaux de la cartographie censitaire réalisés
en 1999-2000. Les ménages qui constituent les unités secondaires de sondage
sont tirés de la liste des ménages lors de la mise à jour de la zone retenue
pour l’enquête, par l’équipe des enquêteurs. Une aire de dénombrement
correspond à 1 000 habitants en milieu urbain et 800 habitants en milieu
rural. Au total 516 grappes (en moyenne 33 AD par préfecture), 14 033
ménages, 17 126 femmes âgées de 15 à 49 ans et 14 441 enfants de 0 à 5 ans
ont été effectivement enquêtés et ont servi aux analyses descriptives et
approfondies.
L’évaluation des données de l’enquête par des méthodes appropriées a
montré leur bonne qualité ainsi que la fiabilité des indicateurs.
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
20
20
Sur les 15 192 enfants de moins de 5 ans repérés dans l’ensemble des
ménages enquêtés, les informations ont été collectées pour 14 441 enfants,
soit un taux de réponse des enfants de 95,1 %. Dans presque toutes les
préfectures, la perte d'informations a été enregistrée sur moins de 10 %
d'enfants. Le niveau de couverture des enfants par l'enquête est presque le
même en milieu urbain (95,4 %) qu'en milieu rural (94,9 %). Dans
l'ensemble, la couverture des enfants éligibles a donc été convenablement
assurée. Les normes exigent que le rapport de masculinité à la naissance
(moins d’1 an) et dans le groupe d'âges 1-4 ans se situe entre 1 et 1,04. Le
rapport est de 1,02 à la naissance et de 1,03 dans le groupe d'âges 1-4 ans.
Ces résultats correspondent aux normes précitées et témoignent de la qualité
des données.
Les principaux objectifs de l’enquête MICS étaient : de suivre les progrès
réalisés dans les domaines fixés au cours du Sommet mondial pour les
enfants et comme base pour les actions futures ; de fournir des informations à
jour pour l’évaluation de la situation des enfants et des femmes en
Centrafrique ; de contribuer à la disponibilité des données pour la micro-
planification par préfecture en vue de la mise en œuvre de la politique de
décentralisation et de régionalisation ; de contribuer également à
l’amélioration des données et des systèmes de monitorage en Centrafrique ;
et de renforcer l’expertise technique en matière de conception, de mise en
œuvre et d’analyse de ces systèmes.
Pour atteindre ces objectifs, un questionnaire basé sur le modèle standard
des enquêtes MICS organisées dans le monde, mais adapté aux spécificités
centrafricaines a été utilisé. Ce questionnaire comprend trois volets :
« ménage », « femmes en âge de procréer » et « enfants de moins de 5 ans ».
Le questionnaire concernant les ménages a permis d’avoir des
informations sur les caractéristiques individuelles de chaque membre du
ménage (dont l’enfant), le niveau économique des ménages et la disponibilité
des infrastructures de soins. Le questionnaire « femmes en âge de procréer »
a fourni les informations sur les caractéristiques individuelles et
socioculturelles des mères et de leur conjoint ainsi que toutes les
informations en matière de santé et VIH/Sida.
Le questionnaire « enfants de moins 5 ans » comprend 7 modules ayant
trait à l’enregistrement des naissances et l’éducation préscolaire, à la
vitamine A, à l’allaitement au sein, au traitement des maladies, au paludisme,
à la vaccination et à l’anthropométrie.
Les résultats de cette enquête publiés dans un rapport final en avril 2001
révèlent que les progrès enregistrés par la République centrafricaine vis-à-vis
des objectifs de la décennie 1990 fixés lors du sommet mondial pour
l’enfance sont très mitigés. Si des améliorations ont été enregistrées dans
l’accessibilité de la population à l’eau potable (38 % en 1996 à 55 % en l’an
2000) ou dans la consommation du sel iodé (65 % en 1996 à 87 % en l’an
2000), la situation des enfants s’est nettement détériorée en matière de santé
avec un taux de mortalité infanto-juvénile qui a augmenté de 157 ‰ en
INTRODUCTION
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1994/95 à 194 ‰ en l’an 2000, et également en matière d’éducation avec un
taux net de scolarisation qui est passé de 63 % en 1996 à 43 % en l’an 2000.
En outre, la couverture vaccinale en antigène DTC (33 %), rougeole (37 %)
et poliomyélite (36,3 %) a enregistré une baisse considérable. Les soins
prénatals (62 %) et l’assistance à l’accouchement par un personnel de santé
(44 %) restent très faibles au niveau national. On note parallèlement une
recrudescence du travail des enfants âgés de 6-14 ans sollicités aussi bien à
l’intérieur qu’à l’extérieur de leur ménage. A peine 73 % des naissances sont
déclarées à l’état civil.
Pourquoi cette étude ?
La réalisation de cette analyse approfondie se justifie par la forte demande
des planificateurs, du gouvernement, partenaires au développement, ONG,
chercheurs, de mieux comprendre les causes profondes de la persistance de
cette situation dramatique en matière de santé et d’éducation des enfants en
Centrafrique telle que révélée par l’analyse descriptive des résultats de cette
enquête. L’analyse approfondie des données d’enquête, le premier exercice
du genre publié dans le pays (en dehors des travaux universitaires), doit
permettre de répondre aux multiples interrogations soulevées durant l’atelier
de restitution des résultats de cette enquête.
Afin d’améliorer les conditions de vie des enfants et de la femme de
Centrafrique à l’orée de ce troisième millénaire, des zones d’ombres sur les
facteurs économiques et socioculturels qui déterminent les comportements ou
attitudes des parents ou familles vis-à-vis de la santé ou l’éducation de leurs
enfants doivent être élucidées. Face à la multiplicité des réponses ou des
stratégies, il est indispensable d’entreprendre une recherche approfondie pour
déterminer les facteurs susceptibles d’avoir des effets multiformes et avérés
sur les phénomènes. Ce sont ces préoccupations qui ont motivé la réalisation
de cet exercice dont les principales résolutions devraient permettre d’orienter
les actions futures.
1
La société centrafricaine génératrice
d’inégalités et de pauvreté : santé,
éducation, accès aux droits et profil des
ménages pauvres
Robert NDAMOBISSI Abdoulaye SADIO Raymond GOULA
À l’issue du Sommet mondial sur le développement social tenu en mars
1995 à Copenhague, le gouvernement s’est engagé résolument dans la lutte
contre la pauvreté. En 1999, un Plan national de lutte contre la pauvreté
(PNLCP) a été élaboré avec le concours du PNUD et des autres partenaires
au développement. Ce premier document de stratégies de réduction de la
pauvreté s’est avéré limité car ne faisant pas suffisamment de liens entre les
stratégies de lutte contre la pauvreté et la nécessité d’une croissance
économique conséquente. Ainsi, en concertation avec les partenaires au
développement, le gouvernement a décidé de remplacer le PNLCP par le
Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté (CSLP). Le processus
d’élaboration de ce document qui s’appuie sur une démarche participative
vise les objectifs suivants :
servir de cadre de référence du développement national dans lequel
doivent agir tous les acteurs nationaux et internationaux ;
développer et renforcer la participation de tous les acteurs sociaux
au cours du processus d’élaboration du CSLP définitif ; et
recentrer les stratégies de développement du pays en optant pour
une planification stratégique.
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
24
24
Le processus de mise en œuvre du CSLP prévoit la réalisation d’études sur
la pauvreté afin de faire une bonne évaluation de la situation et de cibler les
zones ou groupes à risque en vue de finaliser le plan, définir des stratégies
d’interventions efficaces et mobiliser les ressources nécessaires.
L’évaluation objective de la situation de la pauvreté des ménages nécessite
la réalisation d’enquêtes auprès des ménages avec un échantillon de taille
importante. L’expérience décevante des enquêtes budget-consommation trop
lourdes réalisées sur la période 1991-1996 et dont l’analyse n’a pas été
achevée (le cas de l’enquête intégrale) à cause de multiples difficultés d’ordre
technique, n’encourage guère à renouveler ce genre d’opération onéreuse. La
Banque mondiale a mis en place un nouveau type d’enquête légère appelée
QUIBB (Questionnaire unifié des indicateurs de base du bien-être) qui
augure de nouvelles perspectives pour l’appréciation rapide de la pauvreté
sociale des ménages. Malheureusement, la Centrafrique n’a pas pu réaliser
l’enquête QUIBB planifiée en l’an 2001 à cause des troubles politico-
militaires intervenus dans le pays en mai et en novembre 2001.
L’enquête à indicateurs multiples (MICS) réalisée auprès d’un large
échantillon national de plus de 14 000 ménages offre l’opportunité de faire
une évaluation de la situation en l’an 2000, en matière de pauvreté sociale et
des inégalités vécues par les ménages en appliquant les nouvelles approches
d’analyse de la pauvreté de plus en plus admises au niveau international.
La question fondamentale qui se pose est de savoir comment, en l’absence
de données sur le revenu ou la consommation des ménages, on peut apprécier
la situation de pauvreté des ménages à l’aide de données issues d’une enquête
ordinaire auprès des ménages.
Il est évident que la politique de réduction de la pauvreté fondée
exclusivement sur l’amélioration des indicateurs macro-économiques n’est
pas suffisante ; la dimension monétaire de la pauvreté doit être complétée par
la dimension sociale du concept : la fonction principale du revenu est
d’acquérir les biens nécessaires à la satisfaction des besoins, notamment les
besoins essentiels. Ainsi la pauvreté peut se définir par l’incapacité à
satisfaire ses besoins essentiels. En l’absence d’information sur le revenu ou
sur les dépenses de consommation, cette incapicité peut être mesurée au
moyen de diverses enquêtes.
L’appréhension du niveau de pauvreté peut se faire sous deux angles. Soit
au travers d’informations sur la possession de biens durables. Notons que
cette approche ne permet pas de définir la pauvreté comme insatisfaction des
besoins essentiels, les biens durables satisfaisant plutôt des besoins non
essentiels. De ce point de vue, une telle mesure ne peut rendre compte de la
dimension sociale de la pauvreté, mais doit plutôt être considérée comme une
approximation du revenu permanent. Pour rendre compte de la dimension
sociale, toute mesure de la pauvreté doit porter sur la satisfaction des besoins
essentiels, à savoir l’alimentation, le logement, l’habillement, l’éducation des
enfants, et la santé. Les enquêtes doivent pouvoir capter l’information
pertinente sur ces thèmes.
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
25
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Une deuxième étape essentielle de ces enquêtes est l’analyse du profil
socio-démographique des ménages selon leur niveau de vie. Une telle analyse
a pour avantage de contribuer à l’explication du phénomène de la pauvreté
tout en montrant ses conséquences sur différents aspects de la vie des
populations.
L’étude qui va être menée dans cet ouvrage a pour but d’aider le
gouvernement centrafricain en particulier le Comité de pilotage de lutte
contre la pauvreté, les partenaires au développement et l’ensemble des parties
prenantes du Plan stratégique de réduction de la pauvreté (PSRP) à mieux
connaître l’impact de la pauvreté et à cibler les groupes sociaux concernés
afin d’établir de meilleures stratégies de lutte.
Nous tenterons ainsi de :
- rendre compte des inégalités en matière de santé, d’éducation et de
protection des enfants selon le niveau de vie ;
- mettre en exergue les défis importants en terme de réduction des écarts
entre les groupes extrêmes de pauvres et non pauvres ;
- identifier les facteurs socio-démographiques des ménages
vulnérables ;
- fournir aux décideurs et partenaires au développement, les
informations nécessaires pour l’élaboration de stratégies de lutte
contre la pauvreté, et notamment pour la réduction des inégalités
socio-économiques ;
Après avoir exposé les différentes approches théoriques de la pauvreté,
nous essayerons d’analyser les inégalités en matière de santé, d’éducation, et
de protection des enfants. Ces résultats permettront de définir les facteurs
déterminants des inégalités en établissant les corrélations entre les variables
socio-démographiques et la pauvreté.
Les différentes approches de la pauvreté
La pauvreté qui apparaît aujourd’hui comme le défi majeur du 3e
millénaire et contre laquelle les gouvernements, les bailleurs de fonds, le
secteur privé et la société civile luttent avec beaucoup d’acharnement n’est
pas un sujet nouveau. Déjà dans la Bible, on parle « des opprimés », « des
faibles » ou « des humbles » : les pauvres sont ceux qui manquent de quoi se
nourrir, se vêtir ou se loger, qui sont victimes d’injustice ou qui reconnaissent
leur faiblesse en attendant le salut de Dieu.
Depuis l’écriture de la Bible, de nombreux travaux ont été consacrés à
l’étude de la pauvreté, parmi lesquels on peut citer les travaux de Sen,
Ravallion, Rowntree, Lachaud, et Dubois. La littérature sur la pauvreté est
extrêmement abondante, et les définitions du concept de pauvreté peuvent
être tout également très diverses. Cela conduit évidemment à une
identification différente des pauvres selon les études. Hagenaars et Vos
(1988) en comparant l’impact des différentes définitions sur les estimations et
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
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26
la composition de la pauvreté ont conclu que le choix d’une définition donnée
peut modifier totalement le niveau du phénomène et sa répartition entre les
sous-groupes. De plus chaque conception amène ses propres
recommandations en matière de lutte contre la pauvreté. Les indicateurs
développés pour mesurer la pauvreté jouent donc un rôle crucial dans le
ciblage des politiques et dans l’évaluation de l’efficacité des différentes
politiques.
Aujourd’hui trois approches dominent les recherches sur la pauvreté. Il
s’agit de l’approche dite « welfariste » qui définit le bien-être en fonction du
niveau d’utilité atteint par l’individu, quelque soient ses choix individuels ;
de l’approche par les besoins de base et celle par les capacités. Ces dernières
approches, qui sont une remise en cause de la première, privilégient un
certain nombre de biens jugés nécessaires et définissent le bien-être à partir
de ces biens sans tenir compte des choix individuels.
L’approche welfariste ou monétaire
Elle est actuellement l’approche dominante privilégiée par la Banque
mondiale. C’est l’approche du revenu de la pauvreté. Selon cette école, la
pauvreté est la négation du bien-être économique qui est l’utilité générée par
la consommation totale. C’est le bonheur, le plaisir ou la satisfaction du désir
procuré à une personne par la consommation (ou la possession) de biens et
services. La pauvreté résulte donc de l’insuffisance de ressources engendrant
une consommation insuffisante, notamment alimentaire. C’est l’expression
d’un niveau de bien-être trop faible. Est donc pauvre, l’individu qui ne
dispose pas suffisamment de revenus en termes absolus ou relatifs. Ce
concept de pauvreté tire principalement ses origines dans la théorie micro-
économique moderne et découle de l’hypothèse que les individus maximisent
leur bien-être. Dans cette approche l’un des éléments fondamentaux de la
mesure de la pauvreté absolue est le seuil de pauvreté, i.e le niveau de revenu
ou de consommation critique, en dessous duquel un individu ou un ménage
est défini comme pauvre. Généralement la proportion de la population dont le
revenu ou la consommation tombe en dessous du seuil de pauvreté permet
d’évaluer l’étendue du phénomène. Pour réduire la pauvreté, l’école
welfariste préconise donc des politiques axées sur l’augmentation de la
productivité, de l’emploi, etc. et donc du revenu.
Cette approche est cependant limitée. En premier lieu, l’identification des
pauvres dans une société suppose inévitablement des comparaisons
interpersonnelles. Or le fait d’interpréter le bien-être économique comme un
concept subjectif laisse croire que les comparaisons interpersonnelles n’ont
aucun sens. En deuxième lieu, il y a un problème d’éthique. L’approche
impose de classer comme pauvre un individu très favorisé matériellement
mais toujours non comblé et comme non pauvre un individu très peu favorisé
financièrement mais néanmoins comblé.
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
27
27
L’approche par les besoins de base ou par les conditions de vie
C’est une contestation de l’approche monétaire dont les origines remontent
au début des années 1990 avec les études de Rowntree. Elle traduit une
situation d’exclusion par rapport à un certain mode de vie matériel et culturel,
résultant de l’impossibilité de satisfaire ses besoins essentiels ou de base
(carence dans les domaines relatifs à l’alimentation, à l’eau potable, à
l’assainissement sanitaire, à la santé, à l’éducation, au logement, aux services
de transport, etc.). Ils sont dits de base car leur satisfaction constitue un
préalable pour atteindre une certaine qualité de vie. Il ne sont pas considérés
comme contribuant nécessairement au bien-être. Comme Lipton (1994) le
dit : « on doit être avant d’être bien ».
L’un des principaux problèmes auquel se confronte cette approche, est la
détermination même des besoins de base. Ce sont généralement les
nutritionnistes, les psychologues et autres spécialistes qui sont appelés à
déterminer les besoins de base. Or ceux-ci ne s’entendent pas toujours. Au
plan nutritionnel pa exemple, le problème est que les besoins varient avec
l’âge et le sexe, mais aussi avec le type et le niveau d’activité de l’individu
qui sont, eux, endogènes.
Quoiqu’elle reconnaisse le bien-fondé des politiques de lutte contre la
pauvreté orientées vers l’accroissement des revenus, cette approche privilégie
plutôt des politiques ayant pour objectif la satisfaction des besoins de base.
Cela s’explique par le fait que l’accroissement du revenu des ménages
pauvres n’est pas la meilleure façon d’accroître la satisfaction des besoins de
base. En premier lieu, les besoins de base en éducation, santé, eau et en
hygiène sont plus facilement satisfaits par des services publics que par des
revenus accrus. En deuxième lieu, les individus n’utilisent pas toujours leur
augmentation de revenus pour accroître leur nutrition et leur santé. En
troisième lieu, il y a souvent une distribution inéquitable des ressources à
l’intérieur des ménages. Dans cette approche, les principaux indicateurs
utilisés sont : le taux de mortalité infantile, le taux d’alphabétisation, le taux
d’accès à l’eau potable, le pourcentage des ménages vivant dans une
habitation précaire, le pourcentage des ménages utilisant l’électricité (elle
permet aux pauvres d’améliorer leur productivité et leurs conditions de vie).
On comprendra que ces indicateurs sont utilisés au niveau macro. Au niveau
micro, leurs équivalents doivent être trouvés en vue de mesurer la pauvreté
au niveau du ménage.
Pour une approche de la pauvreté par les capacités ou les potentialités
Par rapport aux deux premières approches, l’école des potentialités met
l’accent sur l’indisponibilité de certaines facilités comme frein au
développement humain ; ces facilités pouvent être l’accès à l’intermédiation
financière (crédit, épargne), l’accès à la terre et aux marchés, à la formation
et l’emploi, et la bonne gouvernance. L’approche qui a été développée
principalement par Sen dans les années 1980 a beaucoup plus insisté sur la
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
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28
valeur humaine que sur la pauvreté. Toutefois il existe un lien entre les deux.
La valeur de la vie d’une personne dépend en fait d’un ensemble de façons
d’être et de faire qui constituent les fonctionnements. L’école des capacités
considère comme pauvre tout individu qui n’a pas les capacités d’atteindre un
certain sous-ensemble de fonctionnements tels qu’être bien nourri,
adéquatement habillé ou logé, prendre part à la vie communautaire,
apparaître en public sans gêne et prévenir la morbidité évitable. Cette
approche qui est récente est beaucoup plus utilisée par le PNUD.
Les critiques qu’on peut apporter aux deux dernières approches sont
essentiellement d’ordre conceptuel. Il est difficile de juger de ce qui est bon
pour un individu. En effet, « pas satisfait » ne signifie par pour autant que la
personne soit pauvre, mais pourrait impliquer tout simplement qu’elle préfère
ne pas trop dépenser en habillement (par exemple) même si elle en a les
moyens. De même une espérance de vie élevée n’est pas un indicateur de
richesse. À ce propos, Lipton et Ravallion ont dit : « to conclude that a
person was not capable of living a long life we must know more than just how
long she lived : perhaps she preferred a short but merry life ».
Ces trois approches vont influencer les méthodes de mesure de la pauvreté
et par conséquent les besoins en informations pour alimenter le dialogue et
mener les politiques de lutte contre la pauvreté. Toutefois le phénomène de
pauvreté étant complexe, on ne saurait se limiter à une seule de ces approches
pour le comprendre. En effet, si on se limite à la première approche, on omet
toutes les difficultés d’accès aux besoins de base. On oublie en fait que
certains choix sont contraints et qu’ils seraient peut-être différents dans un
autre contexte. C’est le cas par exemple d’un ménage qui n’est pratiquement
pas pauvre si on utilise comme indicateur le revenu monétaire, mais qui est
incapable d’envoyer les enfants à l’école simplement à cause de la non-
disponibilité d’établissements scolaires. Ce genre de situation qui caractérise
le milieu rural ne pourrait jamais être restitué par l’approche monétaire. C’est
également le cas des tabous qui privent souvent les ménages de nutriments
essentiels : si on peut admettre que ces choix sont ceux du chef de ménage, il
y a tout lieu de penser que les autres membres du ménage, et notamment les
enfants, subissent.
Enfin, les deux dernières approches gomment les préférences individuelles
et présentent en outre des difficultés de mesure. Le problème auquel on se
confronte quand on les utilise est le choix pertinent des variables entrant dans
le calcul des indicateurs composites de l’évaluation du niveau de vie et les
pondérations à affecter à chacune de ces variables. On est dans la même
problématique que pour l’IDH et l’IPH du PNUD.
Indicateur de mesure de la richesse du ménage
La définition de la pauvreté découle de la mesure du bien-être de la
population à travers un indicateur composite de niveau de vie du ménage. La
mesure du bien-être selon l’approche économique est généralement basée sur
le calcul du revenu moyen des ménages qui permet ensuite de classer les
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
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ménages ou individus en pauvres ou non pauvres selon un seuil mensuel ou
annuel. Les lacunes de cette approche purement monétaire résident
essentiellement dans la difficulté de mesurer le revenu des ménages dans une
économie informelle. La mesure du revenu à travers le niveau de la
consommation est justifiée par le fait que dans les pays pauvres où l’épargne
est quasi nulle, le revenu équivaut au total de la consommation. Cependant,
les enquêtes budget-consommation qui sont la principale source de données
sont lourdes et complexes. Elles nécessitent, pour de meilleurs résultats, une
étude longitudinale ou à multiples passages. De plus, la quantification et la
prise en compte de l’autoconsommation sont très difficiles.
En 1995, l’indice composite de richesse « wealth index » basé sur
l’approche de possession de biens par le ménage a été appliqué par la Banque
mondiale sur les données issues des enquêtes ordinaires auprès des ménages
afin d’apprécier le niveau socio-économique des ménages et leur influence
sur les indicateurs sociaux.
Les enquêtes démographiques et de santé (EDS) collectent des
informations sur les avoirs et les caractéristiques des ménages telles que le
mode d’accès à l’eau potable, le mode d’éclairage, la nature du sol, du toit,
des murs du logement, les biens possédés (bétail, voiture, réfrigérateur, radio,
mobylettes, bicyclettes, etc.), le nombre de personnes par chambre à coucher,
etc. À partir de ces variables, on peut construire un indice dit de richesse (ou
de pauvreté) qui permet de classer les ménages selon leur situation socio-
économique, c’est-à-dire des plus pauvres aux plus riches. La Banque
mondiale a réalisé de nombreuses études portant sur l’indice de richesse à
partir des EDS, notamment en Afrique de l’Ouest et du Centre1. Ces études
ont montré qu’en l’absence d’informations sur les revenus ou les dépenses
des ménages, les avoirs et les caractéristiques de ceux-ci constituent un bon
indicateur du statut socio-économique (Pritchett et Filmer, 1995). Cette
interprétation de l’indice de richesse reste fondamentalement socio-
économique et a servi l’analyse des inégalités comme dans les études
réalisées par la Banque mondiale.
La méthode de l’indice de richesse présente un grand intérêt pour les pays
africains où les enquêtes sur le budget et la consommation sont rares parce
que complexes, lourdes et coûteuses et où les déclarations de revenus et de
dépenses par les populations sont souvent biaisées pour diverses raisons. Elle
utilise l’analyse en composantes principales. Essentiellement, cette analyse
attribue un score à chaque ménage sur la base des avoirs et des
caractéristiques de celui-ci. Ainsi un ménage qui dispose d’un avoir donné a
un score de 1 pour cet avoir et un score de 0 sinon. Les scores sont sommés
pour l’ensemble des variables introduites dans le modèle spécifié en vue de
définir l’indice de richesse. Le score total d’un ménage est d’autant plus
1 Ces analyses ont été faites dans 12 pays avec les EDS suivantes : Bénin, 1996 ; Burkina
Faso, 1992/93 ; Cameroun, 1991 ; République centrafricaine, 1994/95 ; Tchad, 1996/97 ;
Côte d’Ivoire, 1994 ; Ghana, 1994 ; Mali, 1995/96 ; Niger 1998 ; Nigeria, 1990 ; Sénégal,
1997 ; et Togo, 1998.
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
30
30
élevé que le ménage possède des avoirs qui caractérisent son bien-être
matériel.
Les variables retenues dans la construction de l’indice de richesse portent
sur les biens du ménage (radio, bicyclette, moto, véhicule, téléviseur,
réfrigérateur), les caractéristiques de logement du ménage (mode d’éclairage,
source d’énergie pour la cuisine, matériaux constituant les murs, le toit, le sol
du logement principal, type de toilettes, source d’eau potable et le nombre
moyen de personnes par pièce d’habitation).
Pour la mise en œuvre de l’analyse en composantes principales, il a fallu
créer de nouvelles variables dichotomiques en transformant les modalités des
variables du questionnaire en sous-variables ayant les nouvelles modalités de
réponse 1 si le ménage possède le bien indiqué ou 0 si le ménage ne le
possède pas.
Ainsi, le score ou l’indice de pauvreté d’un ménage est donné par la
formule suivante :
Y = a1 . X1 + a2 . X2 + a3 . X3 +… ap . Xp...
où les ai sont des coefficients de pondération qui peuvent être positifs ou
négatifs.
Les ménages sont ensuite classés par ordre croissant de leur score total
normalisé. Ils sont divisés en cinq groupes d’effectifs égaux : le premier
quantile, composé des premiers 20 % des ménages, a le score total de
richesse le plus bas – c’est le quantile le plus pauvre ; le cinquième et dernier
quantile est composé des derniers 20 % des ménages qui ont le score total le
plus élevé – c’est le quantile le plus riche ; les deuxième, troisième et
quatrième quantiles se situent entre ces deux extrêmes. Les quantiles sont
définis sur l’échantillon total non pondéré des ménages. L’échantillon n’étant
pas auto-pondéré, des poids appropriés ont été utilisés pour produire les
tableaux qui ont servi à l’analyse. Ainsi, les 5 groupes créés sont les
suivants :
- quantile 1 (les premiers 20 %) : ménages « très pauvres » ;
- quantile 2 (20 à 40 %) : ménages « pauvres » ;
- quantile 3 (40 à 60 %) : ménages « aux revenus intermédiaires » ;
- quantile 4 (60 à 80 %) : ménages « riches » ;
- quantile 5 (80 à 100 %) : ménages « très riches ».
Pour ce qui est des caractéristiques individuelles, tout individu est classé
dans le même quantile que son ménage d’appartenance. Le modèle de
l’indice de richesse suppose que les caractéristiques d’un ménage sont
attribuables à tous les membres de ce ménage. Ainsi le mode d’éclairage d’un
ménage est aussi celui de tous les membres de ce ménage. Ceci revient à dire
que l’addition d’une personne de plus dans le ménage ne change pas le score
de ce ménage par rapport à une variable considérée. Cela est plausible pour
beaucoup de variables. Par exemple la nature du sol, des murs ou du toit du
logement ne change pas avec l’augmentation de la taille du ménage. De
même, la source d’eau potable d’un ménage reste la même pour ce ménage si
une personne de plus s’y ajoute. Ce principe selon lequel la jouissance des
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
31
31
biens et avoirs du ménage ne change pas avec la taille de celui-ci est connu
sous l’expression d’économies d’échelles.
Certains avoirs et caractéristiques des ménages peuvent refléter la richesse
ou la pauvreté dans un pays mieux que dans un autre. La bicyclette, par
exemple, peut être plus discriminante au plan socio-économique dans un pays
que dans un autre. Aussi les avoirs à utiliser dans le calcul de l’indice de
richesse doivent-ils tenir compte de chaque contexte national pour mieux
caractériser la richesse ou la pauvreté. En contrepartie, l’adaptation des avoirs
et des caractéristiques des ménages à chaque contexte national limite la
portée des comparaisons de la pauvreté entre pays.
Plus un modèle contient des variables sur les avoirs des ménages servant à
définir l’indice de pauvreté, plus élevés seront les scores des ménages, et
donc plus dispersée est la distribution des ménages selon ces scores. La
constitution des quantiles de richesse s’en trouve être améliorée. Mais
l’inclusion d’un nombre important d’avoirs et de caractéristiques de ménages
dans un modèle d’indice de richesse limite la portée de l’analyse. En effet,
tout avoir retenu dans la détermination de l’indice ne peut plus être utilisé
dans l’analyse de quantiles de richesse. L’alternative est donc de restreindre à
un nombre raisonnable les variables à inclure dans la construction de l’indice
afin de conduire l’analyse des inégalités sur d’autres variables que celles
retenues dans la définition.
L’analyse des inégalités repose sur le principe que chaque groupe socio-
économique doit compter dans la distribution d’une variable pour un poids
égal à son poids démographique. Ainsi un groupe socio-économique
représentant 20 % d’une population doit compter pour 20 % de la mortalité
observée dans cette population. Un groupe représentant la moitié de la
population doit compter pour la moitié de la mortalité, etc. Toute déviation
d’une telle distribution reflète une inégalité. L’indice de concentration ignore
toutefois les inégalités qui peuvent exister au sein d’un même groupe,
quoique le groupe soit plus homogène que tous les autres. Enfin, il faut
relever que la pauvreté est définie dans cette analyse en termes relatifs, c’est-
à-dire en référence à d’autres groupes.
Notre étude examine les variations selon les quantiles de richesse d’un
ensemble d’indicateurs associés à ces objectifs. Puis, pour chaque indicateur
est calculé le ratio entre le premier quantile (le plus pauvre) et le cinquième
quantile (le plus riche) qu’on peut appeler rapport pauvre/riche (RPR). Ce
ratio est d’autant plus grand que l’écart entre ces deux quantiles est grand. Un
ratio de 1,5 signifie que la prévalence de la variable sous analyse est de 50 %
plus élevée parmi les pauvres que parmi les riches. Un ratio de 1 indique que
l’indicateur considéré prend la même valeur parmi les pauvres que parmi les
riches.
Si pour un indicateur donné :
RPR = 1 : pas de différence entre pauvres et riches pour cet indicateur ;
RPR < 1 : indicateur moins élevé chez les pauvres que chez les riches ;
RPR > 1 : indicateur plus élevé chez les pauvres que chez les riches.
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
32
32
Le ratio des deux quantiles extrêmes ne rend pas compte des inégalités
dans la distribution d’une variable considérée entre les cinq quantiles. On
utilise alors l’indice de concentration pour saisir cette inégalité entre tous les
quantiles, tout comme le coefficient de Gini est utilisé dans l’analyse des
inégalités dans la distribution des revenus. L’indice de concentration mesure
le degré d’égalité (ou d’inégalité) d’une distribution à travers une série de
catégories données. La valeur de l’indice de concentration varie entre –1 et
+1. Elle est égale à 0 pour une distribution parfaitement égale c’est-à-dire
lorsqu’il n’existe aucune inégalité entre les catégories. Elle est égale à –1
lorsqu’il y a une inégale distribution de la variable considérée entre les
différentes catégories et une relation négative avec celles-ci. Par exemple,
pour la mortalité des enfants, en principe négativement liée aux quantiles de
richesse (baisse quand augmente le quantile), on s’attend à ce que la valeur
de l’indice de concentration soit non nulle et négative. Sa valeur est de +1
lorsqu’il y a inégale distribution de la variable considérée selon les catégories
et une relation positive avec celles-ci. Par exemple, la scolarisation des
enfants, en principe positivement liée aux quantiles de richesse, aura
certainement un indice de concentration différent de zéro et positif.
En résumé, l’indice de concentration ou indice de Gini varie entre 0 et 1 et
est interprété comme suit :
IC = 0 : il n’y a pas d’inégalités ou indice égalitaire ;
IC = 1 : fortes inégalités.
Ainsi, plus l’IC s’éloigne de 0, plus il y a des inégalités.
La santé, domaine d’expression de fortes inégalités sociales
Comment expliquer les disparités dans la santé des groupes socio-
économiques ? Dans la plupart des pays, il existe un biais au détriment des
couches les plus pauvres et des populations rurales dans l’implantation des
infrastructures sanitaires à travers le territoire national. Ainsi la disponibilité
des infrastructures et des services sanitaires est généralement plus dense et
plus diversifiée en milieu urbain et donc plus favorable aux populations
urbaines qu’aux populations rurales. L’accessibilité économique vient
exacerber ces disparités urbaines/rurales, les populations urbaines étant en
général les plus riches en termes économiques et à même de payer, de leur
poche ou par le biais du système d’assistance sociale, les services de santé.
La capacité à payer ces services est aussi déterminée par le revenu, lequel est
plus important en milieu urbain et chez les personnes ayant les niveaux
d’instruction les plus élevés.
Le comportement sanitaire influence la santé de l’individu. Il est lui aussi
déterminé, entre autres, par le niveau d’instruction, le revenu et la culture.
Les personnes ayant un niveau élevé d’instruction connaissent mieux que les
personnes analphabètes le processus de la maladie. Elles prennent en
conséquence plus rationnellement la décision de consulter un médecin en cas
de maladie, pour elle-même ou leurs enfants. La disponibilité des revenus et
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
33
33
des services de santé favorise l’application de ces décisions, leur manque les
inhibe. Les pratiques culturelles renforcent ou atténuent les effets du
comportement sur la santé.
Les politiques nationales influencent la santé par le biais des allocations
des ressources nationales faites directement à la santé ou à des secteurs qui
influencent la santé. Encore plus important est le modèle d’allocation de ces
ressources. Il existe un biais dans les allocations des ressources au profit des
structures supérieures de la pyramide sanitaire et donc au détriment des
services sociaux essentiels et de la prévention. L’allocation des ressources
détermine la disponibilité des infrastructures et des médicaments, la qualité
des services sanitaires et la motivation du personnel de santé, etc.
L’environnement physique, qui peut être influencé par l’homme, exacerbe
les disparités dans le domaine de la santé. Ainsi certains milieux naturels ou
humains favorisent le développement de certaines maladies, quand d’autres
tendent à être un frein. Il n’est pas rare d’observer une mortalité plus élevée
dans des zones péri-urbaines que dans des zones rurales en dépit de la plus
grande proximité des services sanitaires dans les premières.
Tels sont certains des facteurs, directs, comportementaux, structurels et
environnementaux qui expliquent les inégalités socio-économiques dans le
domaine de la santé. Ces inégalités sont examinées ci-après en passant en
revue les indicateurs d’impact (mortalité et nutrition), de couverture sanitaire
(vaccination, soins prénatals, assistance à l’accouchement), d’incidence et de
prise en charge des maladies de l’enfance, de la connaissance du VIH/Sida et
des droits de l’enfant, etc.
Inégalités de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans
En Centrafrique, le niveau de mortalité des enfants de moins de 5 ans était
de 194 décès pour 1000 naissances vivantes en l’an 2000. Il est plus élevé en
milieu rural (212 ‰) qu’en milieu urbain (158 ‰). Il y a une inégalité de
risque de décès des enfants selon le genre : il est plus élevé parmi les garçons
(206 ‰) que parmi les filles (180 ‰).
Le risque de décès des enfants de moins de 5 ans est plus élevé (de 30 %)
parmi les ménages les plus pauvres (198 ‰) que parmi les plus riches
(151 ‰). Bien que le niveau de mortalité ait augmenté entre 1994/95
(157 ‰) et l’an 2000 (194 ‰), on constate que les inégalités se sont
réduites : les enfants appartenant aux ménages les plus pauvres en 1994/95
courraient 2 fois plus de risques de mourir par rapport aux enfants des
ménages les plus riches. Le ratio pauvre/riche a chuté à 1,31 en l’an 2000.
L’écart entre les pauvres et les riches pourrait s’expliquer par plusieurs
facteurs dont l’insuffisance de la couverture géographique des services de
base, l’accès limité aux services de santé lié entre autre au manque de revenu,
au faible niveau d’instruction des parents.
Par ailleurs, on note une évolution irrégulière de la courbe de mortalité
infanto-juvénile entre les groupes les plus pauvres et les groupes les plus
riches. Le groupe des « pauvres » présente une mortalité (136 ‰) légèrement
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
34
34
supérieure à celle des « très pauvres » (118 ‰) alors qu’on s’attendait au
contraire. Cette situation peut s’expliquer par le fait que le groupe
« pauvres » semble être formé en majorité des résidents des quartiers pauvres
péri-urbains dont les conditions de vie sont plus difficiles que celles du
milieu rural (problème d’emploi, d’alimentation, etc.).
Figure 1. Taux de mortalité infanto-juvénile
selon les quantiles de richesse en ‰
La vaccination des enfants
La couverture vaccinale rend compte de l’accès aux services de santé et du
comportement des parents vis-à-vis de la maladie. Elle détermine dans une
large mesure la mortalité des enfants, notamment la mortalité juvénile (entre
un et cinq ans). Dans notre étude, l’analyse de la couverture vaccinale porte
sur les enfants de 12-23 mois et concerne le BCG, le DTCoq, la rougeole, la
poliomyélite et le tétanos néonatal.
198
229
211
153
151
194
193
183
158
150
98
157
0 50 100 150 200 250
Très pauvres
Pauvres
Intermédiaires
Riches
Très riches
Ensemble RCA
Quantiles de
richesse
Taux pour 1000
MICS 2000
EDS 1994/95
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
35
35
En l’an 2000, la couverture vaccinale était globalement basse pour tous les
antigènes (seulement 19 % des enfants sont complètement vaccinés). La
couverture du BCG (61,8 %) est la plus élevée surtout parce que cet antigène
est administré en une dose unique et dès les premiers jours après la naissance.
Aussi la plupart des enfants nés dans une formation sanitaire le reçoivent-ils.
L’inégalité est très grande entre les milieux de résidence : les enfants du
milieu rural sont 2 fois moins couverts (46 %) que ceux du milieu urbain
(88,7 %). Le taux de couverture vaccinale du BCG est un peu plus élevé pour
les garçons (62,8 %) que pour les filles (60,7 %). Les enfants appartenant aux
ménages pauvres sont 2,6 fois moins vaccinés par le BCG (38 %) que ceux
appartenant aux ménages riches (98 %).
Le tétanos néonatal (61,3 %) est le second vaccin le plus administré après
le BCG. Les disparités entre les pauvres et les riches sont moins exacerbées
que dans le cas du BCG : la couverture vaccinale de VAT 2+ est 1,8 fois
moins élevée parmi les pauvres (44 %) que parmi les riches (79 %). Les
enfants vivant en milieu rural sont moins protégés contre le tétanos néonatal
(51 %) que ceux du milieu urbain (79 %).
Figure 2. Couverture vaccinale des enfants âgés de 12-23 mois
selon le quantile de richesse
En l’an 2000, seulement 36 % des enfants ont reçu la 3e dose du vaccin
contre la poliomyélite. Les enfants vivant en milieu rural sont deux fois
moins vaccinés (24 %) que ceux du milieu urbain (57 %).
16 1822
38
44
23 25 24
52 53
24
30 31
5760
44
5147
76 76
6467
63
92
79
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
Dtcoq Rougeole Poliomyélite Tuberculose Tétanos
néonatal
%
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
36
36
Il n’existe pas de disparité selon le sexe : 36 % des garçons sont vaccinés
contre 37 % pour les filles. Les enfants appartenant aux groupes de riches
sont 3 fois plus vaccinés par Polio3 (62,6 %) que les enfants des pauvres
(21,7 %).
S’agissant de l’antigène DTCoq, 33 % des enfants ont reçu la 3e dose
avant leur premier anniversaire. Ce taux est 2,8 fois plus élevé en milieu
urbain (55 %) qu’en milieu rural (20 %). Les filles (33 %) en bénéficient au
même titre que les garçons (32,8 %). L’écart entre les pauvres et les riches est
très élevé (ratio pauvre/riche de 0,24) : les enfants appartenant aux ménages
riches (64,2 %) sont 4 fois plus vaccinés en DTC3 que ceux des ménages
pauvres (15,6 %). L’inégalité entre les pauvres (26,5 %) et les riches
(76,1 %) en matière de vaccination en DTC3 s’est sensiblement accrue entre
1994/95 (ratio pauvre/riche de 0,35) et l’an 2000, parallèlement à une baisse
de la couverture vaccinale.
Seulement 37 % des enfants sont vaccinés contre la rougeole en l’an 2000
avec une couverture deux fois plus élevée en milieu urbain (59,5 %) qu’en
milieu rural (23,9 %). Les garçons sont légèrement plus vaccinés (38,2 %)
que les filles (35,8 %). L’écart entre les pauvres et les riches est très
important : les enfants des ménages riches (67 %) sont 3,7 fois plus vaccinés
que ceux des ménages pauvres (18,3 %). L’écart entre les pauvres et les
riches s’est aggravé de 1994/95 à l’an 2000 passant de 2,5 à 3,7. Le taux de
couverture vaccinale en rougeole des pauvres était de 31,3 % contre 79,8 %
pour les riches en 1994/95. Il convient donc de noter qu’il y a eu une baisse
de la couverture vaccinale contre la rougeole qui s’est accompagnée d’une
aggravation des inégalités entre riches et pauvres.
Soins prénatals, lieu d’accouchement et assistance à l’accouchement
62 % des femmes ayant eu une naissance au cours des 12 derniers mois
ont consulté un personnel de santé durant leur grossesse. Les femmes du
milieu urbain ont 2 fois plus bénéficié de l’assistance du personnel de santé
durant la grossesse (86,6 %) que celles du milieu rural (47 %). L’accès est
deux fois moins élevé parmi les groupes les plus pauvres (42 %) que parmi
les autres (86 %). Si l’assistance aux femmes enceintes a baissé de 67 % en
1994/95 à 62 % en l’an 2000, il s’en est suivi une légère diminution des
inégalités entre les pauvres (40 %) et les riches (91,8 %) : l’écart entre riches
et pauvres est passé de 2,3 en 1994/95 à 2 en l’an 2000.
Un peu plus de la moitié des femmes (52,4 %) ont accouché à domicile
durant les douze derniers mois. Ce pourcentage est plus de deux fois plus
élevé en milieu rural (67,4 %) qu’en milieu urbain (27,7 %). Les inégalités
sont très grandes en matière de lieu d’accouchement : les femmes les plus
pauvres accouchent 3 fois plus à domicile (71 %) que les femmes riches
(24 %). Les inégalités en matière d’accouchement à domicile ont baissé entre
1994/95 (ratio pauvre/riche de 4) et l’an 2000 (ratio pauvre/riche de 3).
Cependant, l’ampleur des accouchements à domicile s’est accrue en 5 ans
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
37
37
passant de 49,4 % en 1994/95 (78 % pour les pauvres et 18,8 % pour les
riches) à 52,4 % en l’an 2000.
Figure 3. Accouchement à domicile, assistance à l’accouchement, accès
aux soins obstétriques
44 % des femmes sont assistées durant l’accouchement par un personnel
qualifié. La disparité entre le milieu urbain (73,8 %) et le milieu rural
(26,6 %) est très élevée. Cette proportion est de 25 % parmi les femmes
pauvres contre 77 % pour les femmes appartenant aux groupes des riches.
Les femmes riches sont 3 fois plus assistées par un personnel qualifié au
moment de l’accouchement que les femmes pauvres. Bien que la proportion
des femmes assistées pendant l’accouchement soit restée presque la même,
l’écart entre les pauvres et les riches s’est réduit entre 1994/95 et l’an 2000 :
le ratio riche/pauvre est passé de 5,7 en 1994/95 à 3 en l’an 2000.
Maladies diarrhéiques et infections respiratoires aiguës (IRA)
26 % des enfants ont attrapé la diarrhée durant les deux dernières semaines
ayant précédé l’enquête. Cette prévalence est plus élevée en milieu rural
(27 %) qu’en milieu urbain (23,8 %). La prévalence est supérieure de 17 %
chez les pauvres (27,3 %) par rapport aux riches (22,9 %). En 1994/95, la
prévalence était 1,5 fois plus élevée chez les pauvres (28 %) que chez les
riches (18,7 %). La baisse de la prévalence des maladies diarrhéiques durant
les cinq dernières années s’est accompagnée d’une réduction des inégalités
entre pauvres et riches.
L’utilisation de la TRO (traitement de réhydratation par voie orale) pour
traiter la diarrhée est très répandue (91 %) quel que soit le groupe socio-
économique. Le traitement de la diarrhée d’enfants de moins de 5 ans à
71
25
42
63
27
5151
36
60
35
65
78
24
77
86
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
Accouchement à
domicile
Assistance à
l'accouchement
Accès aux soins
obstétriques
%
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
38
38
domicile est pratiqué par un ménage sur trois ; ce pourcentage étant le même
dans toutes les catégories socio-économiques. Les enfants atteints de diarrhée
ont reçu davantage de liquides et ont continué à manger un petit peu, la
même quantité ou plus de nourriture indépendamment du statut socio-
économique. Il n’y a donc pas d’inégalité entre pauvres et riches en matière
de prise en charge des maladies diarrhéiques en l’an 2000 alors qu’il y avait
une forte variabilité entre riches (91 %) et pauvres (66 %) en 1994/95.
Figure 4. Prévalence de la diarrhée
et des infections respiratoires aiguës
Un enfant sur dix a souffert d’infections respiratoires aiguës (IRA)
pendant les deux dernières semaines. Cette prévalence est plus élevée dans
les couches sociales les plus pauvres : elle varie de 13 % parmi les pauvres à
7 % parmi les enfants appartenant aux groupes riches. Pourtant en 1994/95, il
n’y avait pas d’inégalités entre riches et pauvres.
Le traitement approprié des IRA par un prestataire de service médical est
2,5 fois plus élevé parmi les riches (49 %) que chez les pauvres (20 %). Les
inégalités entre les pauvres et les riches en matière de traitement des IRA ont
augmenté entre 1994/95 et l’an 2000, passant d’un ratio de 2 à un ratio
riche/pauvre de 2,5.
Initiative de prise en charge intégrée des maladies de l’enfance (PCIME)
La prise en charge intégrée des maladies de l’enfance et du paludisme
comprend le traitement à domicile des maladies les plus fréquentes pendant
l'enfance, la connaissance des symptômes et du lieu où se procurer les soins,
l’utilisation par les familles de moustiquaires imprégnées (traitement du
paludisme).
27
13
25
12
29
10
24
9
23
7
0
5
10
15
20
25
30
35
Diarrhée IRA
%
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
39
39
Plus de la moitié des enfants (57 %) ont été malades durant les deux
semaines ayant précédé l’enquête, ce qui est très élevé. La prévention du
paludisme par l’utilisation de la moustiquaire imprégnée a lieu pour environ
un tiers des enfants (31 %). Cette utilisation est deux fois plus élevée en
milieu urbain (48,5) qu’en milieu rural (20 %). L’utilisation d’une
moustiquaire imprégnée est 3 fois plus répandue parmi les riches (59 %) que
parmi les pauvres (19 %).
Deux tiers des ménages utilisent des antipaludéens pour traiter le
paludisme. Le recours à ces médicaments est plus fréquent parmi les riches
(73 %) que parmi les pauvres (58 %) soit un ratio riche/pauvre de 1,26. Un
tiers des enfants malades au cours des deux dernières semaines ont reçu un
traitement approprié à leur maladie. Cette prise en charge est pratiquement
identique dans tous les groupes socio-économiques.
38 % des personnes en charge d’enfants âgés de 0-59 mois connaissent au
moins deux symptômes pour chercher immédiatement des soins en cas de
maladie de l’enfant. Cette connaissance ne varie pas selon le niveau de vie du
ménage.
Figure 5. Traitement à domicile des maladies de l’enfance
Nutrition des enfants
L’allaitement exclusif se réfère aux enfants qui reçoivent seulement du lait
maternel, des vitamines, des suppléments minéraux ou des médicaments
durant les quatre premiers mois de la vie. Il est peu pratiqué dans le pays et
ne touche que 22 % des enfants âgés de 0-3 mois. Il n’existe pas de disparité
entre le milieu urbain et le milieu rural. Par contre, cette disparité s’observe
selon le genre : le taux d’allaitement exclusif est de 23,5 % chez les filles
32
20
39
30
343233
42
33
49
0
10
20
30
40
50
60
Traitement à domicile Recherche de soins pour IRA
%
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
40
40
contre 19,5 % chez les garçons. On constate une absence d’inégalités selon le
niveau de vie en matière d’allaitement exclusif en l’an 2000.
Les trois quarts des mères centrafricaines (77 %) introduisent les aliments
de complément au lait maternel avant 4 mois. Il n’existe pas de disparités
selon le sexe de l’enfant ou le milieu de résidence. Pas d’inégalités non plus
entre riches et pauvres mais on observe que le groupe ayant le niveau de vie
moyen utilise un peu plus les aliments de complément que les autres groupes.
La grande majorité des femmes (90 %) continuent d’allaiter leur enfant
jusqu’à l’âge de 12-15 mois. La différence de pratique entre les pauvres
(93 %) et les riches (85 %) est peu importante. Le pourcentage d’enfants
encore allaités à 20-23 mois est 2,5 fois plus élevé parmi les pauvres (70 %)
que parmi les riches (28 %). Il existe une grande disparité entre le milieu
urbain (33 %) et le milieu rural (64,3 %).
En conclusion, la pratique de l’allaitement reste similaire pour tous les
groupes socio-économiques en Centrafrique, à l’exception du fait que les
femmes des groupes les plus aisés allaitent beaucoup moins leurs enfants au-
delà de 15 mois que ne le font les autres femmes. La différence de statut
professionnel et de niveau d’instruction des mères pourrait expliquer cette
inégalité.
Figure 6. Prévalence de l’insuffisance pondérale (modérée)
et retard de croissance
L’état nutritionnel des enfants âgés de 0-5 ans est préoccupant en
Centrafrique. Les enfants ayant un retard de croissance (taille/âge)
représentent 39 %. Il n’existe pas de disparité significative selon le lieu de
résidence ni selon le sexe. Par contre, il y a une inégalité selon le niveau de
vie : les enfants des pauvres sont 1,25 fois plus malnutris que ceux des riches.
44
31
38
23
42
25
35
23
35
19
0
5
10
15
20
25
30
35
40
45
50
Retard de croissance Insuffisance pondérale
%
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
41
41
En considérant les enfants de 0-3 ans, l’écart entre riches et pauvres était de
1,7 en 1994/95.
Très peu d’enfants centrafricains ont reçu de la vitamine A (à peine 18 %),
en particulier les pauvres. Les enfants des riches bénéficient de la
supplémentation en vitamine A pour plus de 27 % d’entre eux.
87 % des ménages consomment du sel iodé. Ce pourcentage élevé classe la
République centrafricaine parmi les pays à forte consommation de sel iodé
dans la région. La politique pour interdire la vente de sel non iodé a permis la
consommation équitable du sel iodé par tous les ménages quel que soit leur
niveau de vie. L’indice de concentration correspondant est pratiquement nul.
Connaissance du VIH/sida, attitudes vis-à-vis des personnes infectées et test
du VIH
La prévalence du sida parmi les femmes adultes est de 14 %. C’est la plus
élevée d’Afrique de l’ouest et du centre. La connaissance des méthodes de
prévention du sida est limitée : 16 % des femmes en âge de procréer peuvent
citer spontanément les trois méthodes de prévention du VIH/sida. Cette
connaissance des méthodes de prévention du sida est plus élevée en milieu
urbain (25,6 %) qu’en milieu rural (8,7 %). Les femmes des riches (26 %) ont
un niveau de connaissance du VIH/sida cinq fois plus élevée que les pauvres
(5 %).
Par ailleurs 12 % des femmes ont une perception erronée des 3 moyens de
transmission du VIH/sida. Cette mauvaise perception est plus répandue en
milieu urbain (19 %) qu’en milieu rural (7 %). Elle est 4 fois plus répandue
parmi les femmes riches (24 %) que parmi les femmes pauvres (6 %).
Les femmes qui savent que le VIH/sida peut être transmis de la mère à
l’enfant représentent 45 %. La proportion de ces femmes est plus élevée en
milieu urbain (63 %) qu’en milieu rural (31 %). La connaissance de la
transmission du VIH/sida de la mère à l’enfant est 2,4 fois plus élevée parmi
les femmes riches (51 %) que parmi les femmes des groupes pauvres (21 %).
Les femmes qui ont une bonne connaissance2 de la prévention du
VIH/sida représentent seulement 4 % dont 7,4 % en milieu urbain et 1,3 % en
milieu rural. On observe une forte disparité entre les groupes socio-
économiques. En effet, cette bonne connaissance des 3 moyens de prévention
est 9 fois plus élevée chez les femmes des groupes riches que chez celles
appartenant aux groupes les plus démunis. 41 % des femmes en âge de
procréer (dont 56 % en milieu urbain et 29 % en milieu rural) ont une attitude
discriminatoire vis-à-vis des personnes infectées par le VIH/sida. La
discrimination est 2 fois plus importante parmi les femmes pauvres (74 %)
que les femmes riches (39 %).
2 Est considérée comme ayant une bonne connaissance du VIH/sida toute personne ayant
identifié les trois méthodes de prévention du VIH et trois conceptions erronées sur le
VIH/sida.
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
42
42
28 % des femmes connaissent un endroit où tester leur séropositivité. Ces
femmes sont plus représentées en milieu urbain (46,2 %) qu’en milieu rural
(13,1 %). La connaissance d’un lieu de dépistage du VIH/sida est 5,5 fois
plus élevée parmi les femmes riches (55 %) que parmi les femmes pauvres
(10 %).
Figure 7. Connaissance des méthodes de prévention et conceptions
erronées du VIH/sida
566
7
98
21
14
2624
0
5
10
15
20
25
30
Connaissent méthodes de prévention Connaissent des conceptions
erronées
%
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
Connaître un lieu de dépistage est une chose. Se soumettre au test en est
une autre. Le test du VIH/sida est 8 fois plus pratiqué par les femmes riches
(24 %) que par les femmes pauvres (3 %). Les inégalités entre riches et
pauvres sont donc énormes en matière de test du VIH/sida.
Utilisation de la contraception par les femmes ou leur partenaire
L’utilisation de la contraception traduit le droit du couple ou de la femme à
disposer du nombre d’enfants souhaité, à se protéger contre les infections
sexuellement transmissibles et éviter des grossesses non désirées. En
Centrafrique, 7 % des femmes utilisent une méthode de contraception
moderne et 28 % utilisent une forme de contraception, y compris les
méthodes traditionnelles.
Le fossé est très grand entre les riches et les pauvres dans le domaine de la
pratique de la contraception moderne. Seulement 2 % des femmes pauvres
pratiquent la contraception moderne contre 18 % pour les femmes riches. Cet
écart s’est pourtant légèrement amenuisé entre 1994/95 et l’an 2000. Les
femmes riches pratiquaient alors 12 fois plus la contraception moderne que
les femmes pauvres (8,8 % contre 0,7 %). La pratique de la contraception
moderne demeure principalement l’affaire des riches.
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
43
43
S’agissant de l’utilisation de « toutes les autres méthodes », le fossé entre
les riches et les pauvres est moins prononcé (ratio riche/pauvre de 1,5).
Figure 8. Taux de prévalence contraceptive moderne,
MICS 2000 et EDS 1994/95
21
3
1
4
2
9
6
18
9
0
2
4
6
8
10
12
14
16
18
20
MICS2000 EDS 1994/95
%
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
Inégalités dans la scolarisation des enfants et l’alphabétisation des
adultes
Le droit à l’éducation pour tous est universellement reconnu mais la réalité
est loin d’être aussi idyllique. Il existe d’importantes différences dans l’accès
à l’éducation selon le groupe socio-économique auquel on appartient ;
différences qui relèvent autant de l’insuffisance d’infrastructures adéquates,
des difficultés d’accès aux services scolaires que des obstacles culturels.
Accès à l’éducation de base
Pour l’ensemble du pays, le taux net de scolarisation au primaire est de
43 % avec 47 % pour les garçons et 39 % pour les filles, soit un écart de 8
points de pourcentage en défaveur des filles.
De façon générale, les enfants des riches ont 2,4 fois plus de chance d’être
scolarisés (49 %) que les enfants des pauvres (20,4 %).
Si l’on considère le facteur genre, la disparité riche/pauvre est plus
marquée chez les filles que chez les garçons. Les filles issues des milieux
riches ont 3,4 fois plus de chance d’être scolarisées au primaire (64 %) que
les pauvres (19 %) alors que les garçons appartenant aux groupes riches
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
44
44
(66 %) n’ont que 2,6 fois plus de chance de fréquenter l’école primaire que
ceux des pauvres (25 %).
On constate par ailleurs qu’il y a plus de discrimination sexuelle chez les
pauvres (taux net de scolarisation de 25 % pour les garçons et 19 % pour les
filles) que chez les riches (66 % pour les garçons et 64 % pour les filles) en
matière de scolarisation des enfants au primaire.
Figure 9. Taux net de scolarisation au primaire par sexe
19
2522
27
42
3535
4238
52
5955
6466 65
0
10
20
30
40
50
60
70
Filles Garçons Ensemble
%
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
L’éducation préscolaire, mesurée par la proportion d’enfants âgés de 3 à 5
ans qui fréquentent un programme organisé d’éducation préscolaire, reste très
peu développée en Centrafrique : elle ne touche que 3 % des enfants, mais
seulement 1 % des enfants pauvres contre 9 % des enfants riches.
Rendement scolaire
Le taux de transition de la première à la cinquième année de
l’enseignement primaire sans redoublement est de 12 % pour l’ensemble du
pays. Ce taux très bas traduit le rendement interne très faible du système
scolaire dans le pays. Les enfants des milieux riches inscrits en première
année du primaire ont deux fois plus de chance d’atteindre la 5ème année sans
échec (17 %) que ceux des milieux pauvres (8 %).
Il apparaît que non seulement, les enfants des pauvres ont moins de chance
de fréquenter l’école, mais ils ont plus de chance d’échouer.
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
45
45
Alphabétisation des adultes
En Centrafrique, environ la moitié des adultes (49 %) savent lire
facilement un texte, mais les femmes moins que les hommes (34 % contre
65 %).
De façon globale, les riches (74 %) sont 2,7 fois plus alphabétisés que les
pauvres (27 %).
Si on effectue des comparaisons par sexe, on s’aperçoit que les disparités
sont plus élevées chez les femmes (63 % des riches sont alphabétisées contre
12 % des pauvres) que chez les hommes (83 % des riches sont alphabétisés
pour 45 % des pauvres).
À l’intérieur d’un même groupe socio-économique, la discrimination selon
le genre peut révéler de grandes disparités de traitement : les hommes riches
sont à peine plus alphabétisés que leurs homologues féminines (soit un écart
de 30 %) alors que les femmes pauvres sont 3 fois moins alphabétisées que
les hommes.
Figure 10. Taux d’alphabétisation des adultes (15 ans et plus) par sexe
45
12
27
52
18
34
64
27
44
76
47
61
83
63
74
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
Hommes Femmes Ensemble
%
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
La discrimination à l’égard du sexe féminin constitue un sérieux handicap
en matière d’éducation de base et d’alphabétisation des adultes, d’autant que
la pauvreté des ménages aggrave cette situation.
Jouir de ses droits : un combat permanent pour les enfants de
Centrafrique
Le Sommet mondial pour les enfants a défini des indicateurs
complémentaires pour mieux cerner la situation des enfants, notamment face
aux droits dont ils sont censés bénéficier. Ces indicateurs couvrent entre
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
46
46
autres les aspects juridiques liés : à l’enregistrement à l’état civil, à la
situation des enfants orphelins, aux enfants séparés de leur(s) parent(s)
biologique(s) et aux problèmes du travail des enfants. On abordera également
un des aspects de la Convention pour l’élimination de toutes formes de
discrimination à l’égard de la femme (CEDEF), à savoir l’excision qui
symbolise fortement la soumission de la femme à l’homme et représente une
grave remise en cause de ses droits à disposer de son corps.
L’enregistrement des enfants âgés de moins de 5 ans à l’état civil
L’enregistrement des naissances à l’état civil dépend d’une série de
facteurs dont les plus importants sont la disponibilité et l’accessibilité
géographique de centres d’état civil, les coûts directs et les coûts
d’opportunité liés à la déclaration et à l’enregistrement, la motivation et le
niveau d’instruction des parents, la législation en matière d’état civil en ce
qu’elle rend l’enregistrement obligatoire et qu’elle est effectivement
appliquée.
Figure 11. Enregistrement des enfants de moins de 5 ans à l’état civil
54
62
75
84
91
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
Groupe socio-économique
%
Ainsi, près des trois quarts (73 %) des enfants sont enregistrés à l’état
civil. Les déclarations des naissances sont 1,4 fois plus élevées en milieu
urbain (87,5 %) qu’en milieu rural (63 %). Aucune différence significative
n’est observée selon le sexe mais on note un écart important selon le milieu
socio-économique : les naissances des enfants riches sont beaucoup plus
souvent déclarées que celles des enfants pauvres (91 % contre 54 %, soit un
ratio riche/pauvre de 1,7).
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
47
47
Les orphelins (0-14 ans)
Un enfant sur dix de cette tranche d’âge est orphelin. Le phénomène
touche beaucoup plus le milieu urbain (13,4 %) que le milieu rural (8 %).
Mais ce problème concerne autant les ménages pauvres (9 %) que les
ménages riches (12 %).
La pratique des enfants confiés
Un peu plus d’un enfant sur dix (11,1 %) ne réside pas avec au moins un
parent biologique. Ce pourcentage est sensiblement plus élevé en milieu
urbain (13,3 %) qu’en milieu rural (9,7 %). La perte de tutelle des parents
biologiques est 1,7 fois plus prononcée chez les riches (15 %) que chez les
pauvres (9 %).
Figure 12. Proportion d’enfants confiés (0-15 ans) et d’enfants orphelins
selon le groupe socio-économique du ménage
9 99 910
9
12 12
15
12
0
2
4
6
8
10
12
14
16
Enfants confiés Orphelins présents dans le ménage
%
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
La mise au travail des enfants (5-14 ans)
On considère qu’un enfant travaille lorsqu’il le fait pour une personne qui
n’est pas membre de son ménage, que le travail soit rémunéré ou non ou
lorsqu’il effectue des travaux domestiques pendant plus de quatre heures par
jour.
Pour l’ensemble de la Centrafrique, environ deux tiers (64 %) des enfants
travaillent. Le travail des enfants est plus fréquent en milieu rural (71 %)
qu’en milieu urbain (52 %). Mais il n’existe pas de disparités sensibles entre
les filles (65 %) et les garçons (62 %). Les enfants appartenant aux ménages
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
48
48
pauvres (72 %) sont 1,5 fois plus exposés au travail que ceux issus des
ménages riches (47 %).
Figure 13. Proportion d’enfants (5-14 ans) qui travaillent
selon le milieu socio-économique
72 71 69
58
47
0
10
20
30
40
50
60
70
80
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
Groupe socio-économique
%
Pratiques néfastes à l’égard de la petite fille (excision)
L’excision est l’une des pratiques qui portent atteinte à la dignité de la
petite fille et la jouissance de ses droits humains. Le pourcentage des femmes
excisées âgées de 15-49 ans est de 36 % en Centrafrique. Cette pratique
touche plus les femmes du milieu rural (41 %) que celles du milieu urbain
(30 %). Les femmes appartenant aux ménages pauvres sont deux fois plus
excisées (49 %) que celles des milieux riches (23 %).
Figure 14. Pratique de l’excision selon le milieu socio-économique
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
49
49
49
44
32 33
23
0
10
20
30
40
50
60
Très pauvres Pauvres Intermédiaires Riches Très riches
Groupe socio-économique
%
Pour faciliter la mise au point des stratégies spécifiques efficaces de lutte
contre la pauvreté, il semble nécessaire de caractériser les groupes les plus
vulnérables à la pauvreté.
Nous tenterons à présent d’établir une typologie des ménages selon le
risque qu’ils courent de s’appauvrir encore davantage.
Caractéristiques socio-démographiques et pauvreté des ménages
Jusqu’à présent, nous avons traité des conséquences de la pauvreté. Ici
nous abordons plutôt les facteurs du phénomène. Toutefois, ne disposant pas
d’information sur la séquence des évènements en jeu, nous ne chercherons
pas à établir des relations de cause à effet. Il s’agira de simples relations
d’association qui vont nous permettre de caractériser les populations en
fonction de leur niveau de vie, et ainsi nous faire une idée du profil socio-
démographique des ménages pauvres. L’analyse des causes possibles de la
pauvreté permet de distinguer les facteurs macro-économiques des facteurs
micro-économiques ; les derniers concernant les ménages et les individus.
Les caractéristiques des ménages susceptibles d’affecter la pauvreté sont sa
taille, sa composition et les caractéristiques du chef de ménage, que sont
l’âge, le sexe, l’instruction, etc. Nous nous attendons à ce que les ménages
dirigés par les jeunes et les personnes âgées, les femmes et les analphabètes,
soient plus pauvres que les autres. On anticipe aussi que les ménages ruraux
sont plus pauvres que les ménages urbains. De même nous pensons que la
taille du ménage et sa composition affectent son niveau de vie. Cet impact
dépend, toutefois, de la proportion de personnes dépendantes qui s’y
trouvent.
Globalement, nous tenterons ici de répondre aux interrogations suivantes :
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
50
50
- quelles sont les caractéristiques socio-démographiques des ménages
qui sont plus victimes des inégalités ?
- ces caractéristiques contribuent-elles à la condition de pauvreté de ces
ménages ? Autrement dit, est-il possible que la pauvreté soit
concentrée dans certaines catégories de ménages plutôt que dans
d’autres ? Par exemple : les ménages nombreux sont-ils plus pauvres
que les autres ? Si oui, à quoi cela est-il dû ? Est-ce parce qu’il y a
plus de dépendants que d’actifs ? L’instruction du chef de ménage
réduit-elle l’incidence de la pauvreté ? L’âge du chef de ménage a-t-il
une influence sur la pauvreté du ménage ? Les ménages dont le chef
n’est pas en union matrimoniale sont-ils plus exposés au risque de
pauvreté que d’autres ? Les ménages dirigés par les femmes sont-ils
plus pauvres que les autres ?
- certaines régions du pays sont-elles plus vulnérables à la pauvreté que
d’autres ? Les ménages vivant en milieu rural ont-ils plus de risques
d’être pauvres que ceux vivant en milieu urbain ? Autrement dit, est-il
possible que la pauvreté soit concentrée dans certaines zones
géographiques plutôt que dans d’autres ?
Les facteurs socio-démographiques de la pauvreté
En Afrique, l’indépendance à laquelle beaucoup de pays ont accédé s’est
limitée à la souveraineté politique malgré les énormes potentialités dont ils
disposent. Le modèle de développement préconisé à l’époque consistait
d’abord à développer l’agriculture d’exportation afin d’en utiliser les
bénéfices pour accroître l’industrialisation. Théoriquement la croissance qui
devait en résulter aurait dû permettre, à travers une répartition équitable des
revenus, d’accélérer le développement du pays et de lutter contre la pauvreté.
Ce modèle de développement économique devait être accompagné par la
construction d’infrastructures socio-économiques (routes, aéroport,
formations sanitaires, écoles, etc.). Même si après 40 ans, des progrès
importants ont été accomplis, force est de constater qu’en matière de lutte
contre la pauvreté, le bilan est mitigé ; à telle enseigne que certains n’hésitent
pas à parler d’échec de ce modèle de développement. La situation est
devenue suffisamment grave pour que l’année 1996 ait été déclarée « année
de lutte contre la pauvreté » suite au Sommet mondial sur le développement
social tenu en mars 1995 à Copenhague. Quels sont donc les principaux
facteurs de la dégradation des conditions de vie des individus ?
Des travaux réalisés, il ressort que la situation de la pauvreté résulte de
trois catégories de facteurs, qui, selon la manière dont ils affectent les
populations, déterminent leur appartenance à l’une ou l’autre des catégories
de pauvres et conditionnent leur maintien ou leur émergence de cette
catégorie. Ces facteurs peuvent s’analyser au niveau de la nation d’une part et
de l’individu ou du ménage d’autre part. Au niveau national, la pauvreté est
due aux conditions géographiques, et aux orientations politiques de l’État. Au
niveau communautaire, les conditions écologiques et l’état des infrastructures
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
51
51
de base peuvent avoir une influence sur les conditions de vie des populations.
Ainsi, on distingue :
les facteurs d’ordre économique à savoir le niveau et le caractère
régulier du revenu, les possibilités alternatives de revenu (crédit,
autre emploi, accès à un capital physique ou financier), le lieu
d’habitation ;
les facteurs d’ordre social : le niveau d’instruction, l’état de santé, le
nombre de personnes à charge, toutes les formes de discrimination
au sein du ménage, la privation des droits et des libertés, et enfin ;
les facteurs naturels : les catastrophes naturelles notamment les
sécheresses, les guerres, l’insécurité...
Au niveau des ménages, les causes de la pauvreté sont liées aux structures
et composition, aux caractéristiques sociales et économiques telles que les
maladies ou le handicap physique ou mental, l’âge, le sexe, le niveau
d’instruction, la situation dans l’emploi, etc.
Ainsi, les d’études réalisées par la Banque mondiale (Rapport de la
Banque mondiale 1994, 1995) ont révélé que les femmes sont plus
vulnérables que les hommes. Ayant un accès limité à l’instruction, à l’emploi
et aux ressources, les femmes seraient les plus défavorisées, exposées à la
malnutrition, aux violences de tout genre, et privées de leurs droits
fondamentaux (Kaboré, 1995 ; Mebara, 2001). Lachaud dans une analyse
multidimensionnelle de la pauvreté axé sur l’habitat, l’environnement
sanitaire et l’instruction, a pu montrer qu’il existe une différence importante
selon le genre du chef de ménage quant à la structure des déficits en termes
de besoins essentiels. Selon les résultats de cette étude, l’ampleur de la
pauvreté est plus importante dans les ménages gérés par les femmes que dans
ceux dirigés par les hommes. Cette situation serait due à la moindre
instruction des femmes.
Ces résultats ont été relativisés par les travaux de Backiny (1999) sur la
recherche des facteurs explicatifs de la pauvreté au Cameroun. En effet, en
utilisant deux modèles différents sur les données de l’enquête budget-
consommation de 1996, l’auteur est arrivé à deux résultats distincts. En
premier lieu, en opposant les classes pauvres aux classes intermédiaires et
aux classes non pauvres, les résultats ont révélé que le sexe n’a aucune
influence sur le phénomène de la pauvreté. Par contre lorsqu’il oppose les
classes non pauvres aux classes des pauvres et des intermédiaires, il ressort
que le sexe du chef de ménage influence le niveau de vie : les ménages
dirigés les hommes ont plus de chance de subir le phénomène que ceux
dirigés par les femmes.
En dehors du sexe, l’âge de l’individu exerce une influence sur son niveau
de vie. Knodel et al. (1990) ont prouvé que la pauvreté touche beaucoup plus
les ménages dirigés par les jeunes sans expérience ou les vieux. En outre, les
enfants constituent les poches les plus vulnérables (Kaboré, 1995). Ces
résultats qui ont été également confirmés par une étude faite en 1995 par la
Banque mondiale sont contestés par Backiny (1999). Pour ce dernier, l’âge
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
52
52
du chef de ménage n’influence pas le niveau de vie quel que soit le modèle
utilisé.
D’autres recherches menées dans ce domaine ont montré également que la
pauvreté est corrélée avec le niveau d’instruction de la population. Les
pauvres accèdent moins à l’éducation que les non pauvres. Il a été remarqué
que les faibles taux de réussite et les forts taux d’abandon et de redoublement
s’observent chez les populations pauvres. Du fait de la situation précaire de
leurs parents, la plupart des enfants vivant dans des familles pauvres et
désireux d’aller à l’école, sont contraints d’exercer des activités économiques
pour soutenir le budget de leur famille. Ces activités hypothèquent leur
instruction et font de ces enfants de futurs chefs de ménages analphabètes :
les contraintes économiques qui pèsent sur les familles pauvres permettent
ainsi à l’analphabétisme de perdurer de génération en génération (Lachaux,
1993 et 1999). Backiny (1999) en comparant le niveau d’instruction des chefs
de ménages est parvenu à la conclusion suivante : « les ménages dont le chef
a au plus le niveau d’étude du primaire ont deux fois plus de chance d’être
pauvres que ceux dont le chef a atteint le niveau du premier cycle du
secondaire. De même, les ménages dont les chefs ont au moins le niveau du
secondaire ont deux fois plus de chance de ne pas être pauvres par rapport à
ceux dont les chefs ont le niveau du premier cycle du secondaire ».
La pauvreté est également corrélée avec le statut matrimonial du chef de
ménage. Les ménages dont les chefs sont polygames sont plus vulnérables
que les ménages dont les chef sont monogames (Mebara, 2001).
La composition du ménage exerce également une influence sur le niveau
de vie des individus. Les travaux réalisés par les auteurs tels que Mason
(1988), Vimard (1987), Miller (1976) et Oberai (1991) ont aboutis au résultat
que le niveau de vie d’un ménage varie en fonction de sa composition. Les
ménages dont le chef est adulte (35-44 ans), ou vieux (55 ans ou plus) sont
aussi vulnérables que les ménages étendus avec un nombre relativement
élevé de femmes et d’enfants. Un ménage urbain peut être pauvre parce qu’il
est composé d’un nombre élevé d’adultes chômeurs ou de personnes mal
rémunérées ou parce que le nombre de personnes dépendantes est très
important. Dans ces cas, le ménage consomme plus qu’il épargne. Par rapport
aux autres, sa capacité d’investissement se trouve réduite au fur et à mesure
que le nombre de dépendants augmente (Mason, 1988).
En 1987, Blanchet a montré que la taille d’un ménage influe sur ses
conditions de vie. En effet, l’augmentation du nombre de personnes dans le
ménage peut constituer un facteur d’appauvrissement pour le ménage. Une
analyse faite par la Banque mondiale (1999) à partir des données de l’enquête
budget-consommation du Cameroun a révélé que la pauvreté était plus visible
dans les ménages de plus de six personnes. En s’appuyant sur les données de
l’ECAM de 1996, Backiny (1999) a observé que la taille du ménage non
seulement accroît la probabilité d’être pauvre, mais en plus fait décroître la
probabilité d’être non pauvre. Dans une analyse bivariée de Mebara (2001)
issue des données sur la consommation de l’enquête ECAM 1996, la taille
élevée du ménage contribue à sa pauvreté. En plus de la taille qui représente
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
53
53
un des aspects de la structure du ménage, la typologie du ménage joue un rôle
important dans le niveau de vie du ménage. Ainsi, Mebara a observé que les
ménages verticaux courent plus de risque d’être pauvres que les ménages
horizontaux ou étendus. Les ménages d’une seule personne, les ménages
étendus et les ménages nucléaires ont plus de chance d’être non pauvres. Ces
résultats ont été remis en cause par Wakam (1998). Selon les résultats de ses
travaux, la pauvreté conduirait plus à la nucléarisation de la famille qu’à un
élargissement. Sans être un rejet de la solidarité familiale, cette nucléarisation
serait le résultat de la dégradation des conditions de vie. Les ménages aisés
seraient plus disposés à accueillir les membres extérieurs au noyau familial
que les ménages pauvres (Akoto et al., 2001).
Le logement est un attribut du bien-être. L’accès à un logement décent
dépend non seulement du niveau du revenu des ménages mais également de
la disponibilité des parcelles. Dans certains pays, l’accès à un lopin de terre
est réservé uniquement aux personnes aisées disposant d’un revenu
conséquent et ayant des relations dans les hautes sphères de l’État. Ne
disposant généralement pas d’un revenu consistant, les pauvres dont la
grande partie du revenu est consacrée à la consommation alimentaire,
épargnent peu ou pas du tout. Ils vivent dans des habitations précaires peu
favorables à leur épanouissement. Les résultats provisoires de l’enquête
budget-consommation de 1994/95 réalisée en Centrafrique, révèlent que les
ménages pauvres sont beaucoup plus souvent locataires. De même, l’étude
descriptive de Mebara a révélé que les ménages locataires sont moins pauvres
que les ménages propriétaires. L’étude des déterminants de niveaux de vie à
Bamako, Cotonou et Dakar réalisée par Backiny (1999) a montré par contre
que le statut de logement n’a pas une influence significative sur le niveau de
vie des ménages.
Hypothèses de l’étude
Hypothèse (H1) : les caractéristiques des chefs de ménage permettent
d’identifier de manière spécifique les ménages pauvres.
Hypothèse (H2) : la structure des ménages contribue de manière
fondamentale à la détermination du profil de pauvreté des ménages.
Hypothèse (H3) : les caractéristiques des ménages permettent de
distinguer les ménages pauvres des autres catégories de ménages.
Cadre conceptuel
Dans le cas spécifique de cette étude, le cadre conceptuel est inspiré des
modèles macro-économiques et démographiques de Bilsborrow (1990) qui
intègrent les facteurs socio-démographiques des ménages dans l’élaboration
de profils de pauvreté. Le schéma suivant montre que les politiques macro-
économiques intervenant au niveau global sont en phase avec le contexte
prévalant dans le pays. L’idée est de montrer qu’à ce niveau, les fluctuations
économiques observées découlent des politiques adoptées. Ces fluctuations
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
54
54
vont agir sur la demande et entretiendront des relations d’interdépendance
avec les investissements. En d’autres termes, le revenu national est
conditionné par le niveau de la demande globale. Ce revenu national va
influer sur les caractéristiques socio-démographiques des ménages et donc,
sur le niveau de la pauvreté.
À long terme, une politique sociale axée sur l’éducation et la santé, agit sur
les aspects socio-démographiques des ménages dont les principaux éléments
sont les caractéristiques du chef de ménage, la structure et les caractéristiques
des ménages, lesquelles entretiennent des relations d’interdépendance avec le
niveau de pauvreté des ménages. La figure 15 ci-dessous donne un aperçu de
ces relations.
Variables dépendantes
À titre de rappel, l’indice de richesse permet de distinguer cinq groupes :
les « très pauvres », les « pauvres », une classe « intermédiaire », les
« riches » et les « très riches ». À partir de cette catégorisation, nous avons
défini une variable dépendante polytomique pour l’analyse multivariée :
- ménages pauvres : ce sont les ménages appartenant au premier et
deuxième quantile ;
- ménages moyens : ce sont les ménages appartenant au troisième
quantile ;
- ménages riches : ce sont les ménages appartenant aux deux derniers
quantiles.
Figure 15. Cadre conceptuel intégrant les facteurs socio-économiques et
démographiques dans le profil de pauvreté des ménages
Services sociaux
Politiques macro-économiques
Fluctuations économiques
Services
de santé
Services
d’éducation
Investissements Demande
intérieure/extérieure/
investissements
Revenu
national
Caractéristiques des
chefs de ménage
Structure des
ménages
Caractéristiques
des ménages
Niveau de pauvreté des
ménages
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
55
55
Variables indépendantes
Trois catégories de variables explicatives ont été retenues pour le modèle
d’analyse de la pauvreté par l’approche de wealth index. Il s’agit de :
Structures (composition) du ménage :
- taille du ménage
- typologie des ménages (cf. tableau en annexe)
- rapport de dépendance (ratio inactifs/actifs).
Lieu géographique :
- milieu de résidence
- région administrative.
Caractéristiques du chef de ménage :
- âge du chef de ménage
- sexe du chef de ménage
- niveau d’instruction du chef de ménage
- état matrimonial du chef de ménage.
Les variables sur la profession, le groupe ethnique ou la religion du chef
de ménage auraient pu être prises en compte dans le modèle ;
malheureusement, ces questions n’apparaissaient pas dans le questionnaire
ménage des enquêtes MICS II.
Modèle d’analyse
Pour cerner les facteurs déterminants des disparités et pour cibler les
ménages qui courent le plus de risques d’être pauvres, l’analyse par
régression multinomiale a été préférée à l’analyse logistique ordonnée ou
binaire. Ce choix est fortement guidé par la nature de la variable dépendante
qui est catégorielle à trois modalités. Toutefois, les différents modèles ont été
explorés pour aboutir à un choix plus approprié.
Quelques résultats de l’analyse multivariée
Concernant la taille et la structure du ménage : on note que la relation
avec le niveau de vie est positive. En effet, les ménages de taille moyenne et
élevée ont plus de chance d’appartenir à la classe moyenne ou à la classe
riche qu’à celle des pauvres. La comparaison entre classe moyenne et classe
riche se fait à l’avantage de la dernière, c’est-à-dire que les ménages de taille
élevée ont plus de chance d’appartenir à la catégorie des riches qu’à la classe
moyenne. Également, les ménages étendus et horizontaux ont plus de chance
d’appartenir aux classes moyenne et riche qu’à la classe des pauvres. Ainsi,
les ménages les plus nombreux ont un niveau de vie plus élevé que les
ménages de petite taille.
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
56
56
S’agissant du lieu de résidence : on note des différences significatives
entre les autres régions et Bangui en terme de niveau de vie. On a moins de
chance d’être pauvre à Bangui que dans les autres régions. Les régions
administratives dans lesquelles les risques de pauvreté sont les plus élevés
sont la région 4, la région 6 et la région 3. Ces résultats impliquent que les
classes moyenne et aisée sont concentrées à Bangui.
Le milieu rural a un effet négatif sur la richesse des ménages. Les ménages
qui vivent en milieu rural ont 88 % moins de chance d’être riches et 53 %
moins de chance d’appartenir à la classe moyenne que les ménages qui
résident en milieu urbain. Ces résultats impliquent une très faible présence de
ménages appartenant à la classe moyenne et à la classe aisée en milieu rural.
Les ménages s’y trouvant sont donc essentiellement pauvres.
En ce qui concerne les caractéristiques des chefs de ménage : de prime
abord, les ménages dont les chefs sont des adultes ont 88 % plus de chance
d’appartenir à la classe riche qu’à celle des pauvres comparativement aux
ménages jeunes. Cependant, la différence entre ces deux catégories de chef
de ménage devient moins significative quand on ajoute d’autres variables
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
57
57
Tableau 1. Risques relatifs d’exposition à la pauvreté des ménages
(wealth index) en République centrafricaine selon le lieu de résidence, la
structure du ménage et les caractéristiques du chef de ménage à partir
des données de l’enquête MICS 2000 – échantillon de 14 000 ménages
Variables explicatives
Risques relatifs par rapport aux modalités de référence (régression multinomiale)
Effectif
(ménage)
Effets bruts Effets nets
Niveau moyen Riche (non pauvre) Niveau moyen Riche (non pauvre)
Exp(B) Signif.
P Exp(B)
Signif.
P Exp(B)
Signif.
P Exp(B)
Signif.
P
A-STRUCTURE DU MENAGE
A1.Taille du ménage
-Petite taille (1-4 personnes)
-Taille moyenne (5-10 personnes)
-Grande taille (11-17 personnes)
A2. Typologie du ménage
-Ménage d’une personne
-Ménage nucléaire
-Ménage monoparental
-Ménage vertical
-Ménage horizontal
-Ménage étendu
A3. Catégorie d’âge des
membres du ménage (rapport de
dépendance inactifs/actifs)
4 392
7 616
1 857
408
5 668
2 429
187
668
4 503
9060/4805
Ref.
1,414
2,200
0,559
Ref.
0,752
1,202
1,283
1,418
1,206
Ref.
0,00
0,00
0,000
Ref.
0,000
0,303
0,019
0,000
0,000
Ref.
2,091
7,275
0,512
Ref.
1,627
1,103
2,235
2,983
1,577
Ref.
0,000
0,000
0,000
Ref.
0,000
0,604
0,000
0,000
0,000
Ref.
1,566
2,422
0,829
Ref.
0,852
0,896
1,040
1,193
0,970
Ref.
0,000
0,000
0,341
Ref.
0,268
0,561
0,754
0,003
0,652
Ref.
2,099
6,758
0,847
Ref.
1,598
0,802
1,460
1,531
0,996
Ref.
0,000
0,000
0,507
Ref.
0,002
0,330
0,007
0,000
0,959
B- LIEU DE RESIDENCE
B1. Milieu de résidence
-Urbain
-Rural
B2. Région administrative
-Bangui (RA7)
-Région 1
-Région 2
-Région 3
-Région 4
-Région 5
-Région 6
5 059
9 493
1 405
1 962
1 959
1 243
2 908
1 809
2 577
Ref.
0,455
Ref.
0,3213
0,3608
0,1492
0,1239
0,2684
0,1173
Ref.
0,000
Ref.
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
Ref.
0,0503
Ref.
0,0102
0,0070
0,0022
0,0023
0,0051
0,0021
Ref.
0,000
Ref.
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
Ref.
0,4753
Ref.
0,535
0,632
0,271
0,198
0,453
0,207
Ref.
0,000
Ref.
0,030
0,109
0,000
0,000
0,008
0,000
Ref.
0,116
Ref.
0,0397
0,0304
0,0108
0,0082
0,0188
0,0107
Ref.
0,000
Ref.
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
C- CARACTERISTIQUES DU CHEF
DE MENAGE
C1. Âge du chef de ménage
-Jeunes (moins de 25 ans)
-Adultes (25-59 ans)
-Vieux (60 ans ou +)
C2. Sexe
-Masculin
-Féminin
C3. Niveau d’instruction
-Sans niveau
-Primaire
-Secondaire ou supérieur
C4. État matrimonial
-Marié
-Célibataire
-Rupture d’union
860
11 148
1 855
11 739
2 122
6 231
5 068
3 192
11 046
329
2 469
Ref.
1,201
1,0619
Ref.
0,6197
Ref.
0,562
2,273
Ref.
0,9224
0,6262
Ref.
0,025
0,556
Ref.
0,000
Ref.
0,000
0,000
Ref.
0,596
0,000
Ref.
1,875
1,950
Ref.
0,9081
Ref.
0,1870
3,937
Ref.
1,109
0,909
Ref.
0,000
0,000
Ref.
0,000
Ref.
0,000
0,000
Ref.
0,414
0,060
Ref.
1,001
1,083
Ref.
0,8343
Ref.
0,6439
1,917
Ref.
1,360
0,9530
Ref.
0,983
0,468
Ref.
0,095
Ref.
0,002
0,000
Ref.
0,118
0,739
Ref.
1,183
1,629
Ref.
0,6908
Ref.
0,4099
2,314
Ref.
0,8617
0,6527
Ref.
0,138
0,000
Ref.
0,002
Ref.
0,000
0,000
Ref.
0,512
0,006
Caractéristiques du modèle
-N
-Probabilité de Khi2
-
-
13,991
0,0000
13,859
0,0000
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
58
58
explicatives. Ainsi donc, seuls les ménages appartenant aux chefs de ménage
très âgés (60 ans ou plus) ont 62 % plus de chance d’être riches que d’être
pauvres par rapport aux ménages de jeunes, en présence de toutes les
variables du modèle. Pour la classe moyenne, l’influence de l’âge du chef de
ménage n’est pas significative.
Le sexe du chef de ménage est déterminant dans le risque de pauvreté. Les
ménages dirigés par les femmes courent 70 % plus de risques d’appartenir à
la classe des pauvres que les ménages dont les hommes sont les chefs. L’effet
du genre sur la pauvreté des ménages est très significatif au seuil de 1 % en
défaveur des femmes.
Le niveau d’instruction du chef de ménage agit de façon significative sur le
niveau de vie du ménage. Les ménages dont les chefs ont atteint le niveau
secondaire ou plus ont deux fois (2,3) plus de chance d’appartenir à la classe
riches plutôt qu’à celle des pauvres comparés aux ménages dont les chefs
sont sans niveau d’instruction. Paradoxalement, les ménages dirigés par les
chefs qui ont arrêté leurs études au primaire ont 61 % moins de chance d’être
riches que les ménages dont les chefs n’ont jamais été à l’école. Les ménages
dont le chef a le niveau primaire ont plus de chance d’appartenir à la classe
des pauvres ou à la classe moyenne. Par contre, les secondaires ou plus ont
moins de chances d’être pauvres ou d’appartenir à la classe moyenne. C’est
dire qu’en Centrafrique, les ménages les plus riches appartiennent au groupe
des chefs de ménage ayant atteint le niveau d’étude le plus élevé, suivis par
les « sans niveau d’instruction ».
Le statut des chefs de ménages en rupture d’union prédispose ces ménages
à être moins riches (65 % de chance en moins) que les ménages dont les
chefs sont mariés. La pauvreté touche un peu plus les ménages dirigés par les
chefs en rupture d’union que les autres catégories de ménages.
Débat autour des résultats
L’analyse multivariée de l’indice composite du niveau de vie des ménages
mesuré par la possession des biens (indicateur de confort) a permis d’établir
un certain nombre de relations positives ou négatives entre les variables
socio-démographiques et la propension d’un ménage à être riche ou à avoir
un niveau de vie plus décent. Parmi ces variables explicatives, on retient
principalement :
L’effet très positif de la taille du ménage sur le niveau de vie du
ménage. L’influence de cette variable est plus déterminante que toutes les
autres variables du modèle quelle que soit la variante (région de Bangui avec
ou sans milieu de résidence).
L’hypothèse de base de cette étude selon laquelle les ménages de grande
taille devraient courir plus le risque d’être pauvres n’est pas vérifiée. Les
résultats contredisent cette hypothèse. Comment expliquer le fait que les
ménages ayant plus de bouches à nourrir aient plus de chance d’appartenir à
la classe des riches ? Deux types d’explications sont possibles :
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
59
59
Plutôt que d’être une variable explicative (la cause), la taille du
ménage semble être un effet de la possession de biens ; en d’autres
termes, l’influence positive de la taille du ménage sur le niveau de
vie du ménage traduirait tout simplement le fait que dans un
contexte de misère, les ménages économiquement ou socialement
mieux nantis attirent plus de dépendants (cousins, neveux, nièces,
petits-enfants, autres parents), immigrant pour besoins de scolarité,
de nutrition ou de recherche d’emplois. Le sida qui génère de plus
en plus d’enfants orphelins de père et de mère (10 % des enfants
sont orphelins d’après l’enquête MICS 2000), aurait-il une
conséquence sur la composition des ménages en ce sens que les
frères ou sœurs les mieux nantis seraient obligés d’héberger les
enfants de leur défunt parent ? D’autre part, 59 % des chefs de
ménage ayant le niveau d’instruction secondaire ont une taille de
ménage de 5-10 personnes ; parmi les chefs de ménage ayant le
niveau supérieur, la taille de ménage élevée (5 ou plus) représente
87 % (dont 57 % pour la modalité « 5-10 personnes » et 27 % pour
la modalité « 11 personnes ou plus »). La taille moyenne des
ménages est très élevée parmi les fonctionnaires ou les personnes à
revenu conséquent. Le fait que les ménages étendus aient plus de
chance d’appartenir à la classe des riches renforce cette hypothèse.
L’hypothèse de l’influence négative de la taille du ménage sur le
niveau de vie du ménage serait-elle plus adaptée dans l’approche
monétaire de la pauvreté que dans l’approche sociale (cf. mémoire
de DESS à l’IFORD de Mebara, 2001) ; la mesure du niveau de vie
par la possession des biens durables d’un ménage applicable à tous
les membres du ménage ne rendrait-il pas totalement compte de la
satisfaction individuelle (bien-être) dont chaque membre jouit ?
Devrait-on envisager un indicateur de satisfaction des besoins
sociaux du ménage qui prend à la fois en compte l’indicateur de
biens durables et la couverture adéquate des besoins d’éducation, de
santé et de nutrition ?
Les régions du pays en dehors de la capitale constituent des zones à
haut risque de pauvreté. L’intérieur du pays a une influence très négative
sur le niveau de vie des ménages. C’est dire que cette approche de mesure de
niveau de vie centrée sur la possession des biens révèle que l’essentiel des
biens est concentré à Bangui au détriment des zones provinciales. Ce résultat
corrobore bien ceux de l’approche monétaire issus de l’enquête budget-
consommation de 1995 qui révèlent que la pauvreté monétaire est plus faible
à Bangui que dans les autres zones du pays. Cela est conforme à la réalité
d’un écart très marqué de développement entre Bangui et les autres régions
du pays qui ont un caractère purement rural. Il y a un déséquilibre
considérable entre le niveau de développement de la capitale et l’arrière-pays.
Le risque très élevé de pauvreté dans les régions de culture du coton (régions
3, 4 et 6) soutient les résultats des études antérieures qui ont montré que la
culture exclusive du coton était économiquement et socialement moins
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
60
60
bénéfique aux paysans. Dans ces zones, la plupart des logements ont des toits
en paille contrairement aux autres régions (chapitre 2 du rapport final MICS
2000).
Le genre a une influence négative sur le niveau de vie des ménages en
ce sens que les ménages dirigés par les femmes courent plus de risques
d’être pauvres que ceux dirigés par les hommes. Le faible statut de la
femme lié à une discrimination dans l’éducation, dans l’accès aux emplois
qualifiés ou aux ressources, place les personnes dépendantes vivant dans ce
type de ménage dans une situation de vulnérabilité très grande par rapport à
celles qui vivent dans des ménages masculins.
La rupture d’union constitue un facteur de risque aggravant face à la
pauvreté. Est-ce lié au problème de dépossession des biens d’héritage dont
sont souvent victimes les veuves ? Les résultats de l’enquête MICS 2000 sur
le volet « protection de la femme » ont révélé que 40 % des veuves ont été
victimes de pertes de biens d’héritage de leur défunt mari. La rupture d’union
pourrait être également un effet de la pauvreté, c’est-à-dire que la non
satisfaction des besoins essentiels des membres du ménage les conduiraient
au divorce ?
L’élévation du niveau d’instruction du chef de ménage a un effet très
positif sur le niveau de vie du ménage. Après la taille du ménage, le niveau
d’instruction du chef de ménage est le deuxième facteur le plus déterminant
en matière d’acquisition de richesses par les ménages. L’hypothèse de base
est vérifiée et cela corrobore les résultats d’étude sur l’approche monétaire de
la pauvreté (Mebara, op. cit.).
Finalement…
L’étude visant la caractérisation des ménages pauvres a mis en exergue les
groupes les plus vulnérables face à la pauvreté que sont : les ménages vivant
en milieu rural, les ménages vivant hors de Bangui et principalement dans les
zones cotonières et l’Est du pays, les ménages dirigés par les femmes ou par
les jeunes, les ménages dont le chef a un niveau d’instruction primaire et qui
a des problèmes en matière d’emploi.
Ces résultats recommandent une segmentation des actions de lutte contre
la pauvreté qui puisse adresser des réponses spécifiques appropriées à chaque
groupe-cible. La discrimination négative en matière de développement
régional pratiquée depuis plusieurs décennies en faveur exclusive de la
capitale, devrait être corrigée pour accorder la priorité aux régions du pays
qui ont un caractère purement rural. La diversification des cultures et des
sources de revenu dans les zones cotonières afin de développer l’économie
rurale devient une priorité pour parvenir à une amélioration durable du bien-
être des enfants dans les régions défavorisées du pays.
Le faible statut de la femme mérite d’être amélioré par l’éducation, l’accès
aux ressources pour la prise en charge adéquate des dépendants de leurs
ménages.
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
61
61
Les actions de lutte contre la pauvreté en zones péri-urbaines méritent
d’être envisagées à travers de grands travaux afin de contrer le banditisme qui
trouve sa source auprès des immigrants chômeurs, faiblement instruits et
vivant principalement dans les bidonvilles.
Le résultat paradoxal concernant l’influence positive de la taille élevée du
ménage peut également s’appliquer à l’impact du VIH/sida sur la structure
des ménages. Les familles développeraient des stratégies de survie pour faire
face à la pauvreté ou la pandémie du sida. Des réponses appropriées pour
faire face aux conséquences socio-économiques de cette maladie sur les
familles s’avèrent nécessaires. De même, la politique de planification
familiale doit prendre en compte cet aspect de la stratégie de survie des
familles en réfléchissant sur des approches efficaces de communication.
Pour conclure
L’analyse a montré de grandes inégalités en matière de santé, d’éducation,
de nutrition et de jouissance des droits des enfants en République
centrafricaine. Le constat universel a été vérifié : les ménages pauvres sont
les plus vulnérables sur le plan social. La pauvreté ou le faible niveau de vie
des ménages apparaît comme l’un des principaux déterminants de la
mauvaise situation de survie, d’éducation et de protection des enfants en
Centrafrique. Cette influence de la pauvreté est prouvée par les analyses
multivariées sur la prise en charge de maladies des enfants, sur la
scolarisation, sur la malnutrition, etc. (cf. résultats d’analyse approfondie des
autres thèmes). Les résultats de l’analyse effectuée par la Banque mondiale
sur les données de l’enquête démographique et de santé de 1994/95 attestent
de l’existence de ces inégalités qui se sont aggravées en l’an 2000 (voir
tableau en annexe).
Les résultats de MICS 2000 sur les inégalités peuvent servir comme point
de départ de suivi des tendances des inégalités socio-économiques en
République centrafricaine en ce début du 3e millénaire.
À la lumière de ces résultats, le renforcement des capacités financières des
familles pour faire face aux problèmes de santé et d’éducation de leurs
enfants devient nécessaire de même qu’une politique sectorielle visant
l’allègement des charges d’éducation de base et d’accès aux soins essentiels
pour les familles.
Tout programme visant la réduction de la pauvreté sociale devrait être
accompagné de programmes de développement économique et de répartition
équitable des richesses aux niveaux communautaire, périphérique, régional et
national avec l’appui des partenaires mandatés en vue de réduire la pauvreté
monétaire si élevée des ménages qui constitue un grand handicap à
l’utilisation des services sociaux de base, bien qu’ils soient disponibles.
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
62
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Références bibliographiques
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Ministère de l’Économie, du plan et de la coopération internationale/Banque mondiale (1997), Enquête intégrale budget-consommation – EIBC 1994/95. Résultats provisoires non publiés, Bangui.
Ministère de l’Économie, du plan et de la coopération internationale/Banque mondiale (1995), Enquête prioritaire sur les conditions de vie des ménages – ECAM 1991. Rapport final, Bangui.
Ministère de la Santé publique et de la population/UNICEF (2000), Enquête nationale sur les carences en vitamine A et en fer 1998/1999. Rapport final, Bangui.
Ministère de la Santé publique et de la population/FAO (1996), Enquête sur la situation nutritionnelle de la population centrafricaine en 1995. Rapport final, Bangui.
NDAMOBISSI R. et al. (1995), Enquête démographique et de santé de 1994/95 en République centrafricaine, Washington, Ministère du Plan et de la coopération internationale/Macro International.
LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
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ANNEXES
Tableau A1. Variables socio-démographiques pour la caractérisation des
ménages pauvres dans le modèle d’analyse
par régression logistique multinomiale
Type de
variable Variable
Modalité dans le modèle de
régression Libellé
Structure des
ménages
Rapport de dépendance
Catégories d’âges des
membres du ménage
MENDEP
Ratio : Inactifs/Actifs
1-Adolescents inactifs : 0-19 ans
2-Adultes productifs : 20-59ans
3-Vieux-inactifs : 60 ans +
Typologie du ménage
TYP1= 1 Personne seule
TYP2=Ménages nucléaires
TYP3=Ménages monopar.
TYP4=Ménages verticaux
TYP5=Ménages horizontaux
TYP6=Ménages étendus
Personne seule, ménages
nucléaires ou ménages étendus
(plus d’actifs)
Taille du ménage
TAIL1=1-4 personnes
TAIL2=5-10 personnes
TAIL3=11-17 personnes
Lieu de
résidence
géographique
Région
REG1
REG2
REG3
REG4
REG5
REG6
REG7
Milieu de résidence Urbain
Rural
Caractéristiques
du chef de
ménage
Âge
AG1 (moins de 35 ans)
AG2 (35 à 54 ans)
AG3 (55 ans ou plus)
Sexe MASC
FEMCM
État matrimonial
(conjoint)
CELICM
MARIECM
RUPTCM
Niveau d’instruction
SANSNIV
PRIMCM
SECSUPCM
Typologie de ménage : - Ménages monoparentaux = un des parents, ses enfants et éventuellement d’autres membres ; - Ménages nucléaires comprennent exclusivement : le chef de ménage, son conjoint et ses enfants ; - Ménages verticaux = le chef de ménage, son conjoint, ses enfants et tous les autres membres qui sont sous la dépendance du chef de ménage ; - Ménages horizontaux = les personnes qui se mettent ensemble (collatéraux) pour satisfaire en commun leurs besoins ; cela peut comprendre aussi le chef de ménage, son conjoint et des personnes actives occupées (adultes de 35 à 54 ans) qui contribuent à l’augmentation du revenu dans le ménage ; - Ménages étendus : regroupent à la fois les ménages verticaux et horizontaux.
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
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LA SOCIETE CENTRAFRICAINE GENERATRICE D’INEGALITES ET DE PAUVRETE
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Tableau A3. Indice de Gini
Indicateurs Total
RCA
Ratio
pauvre/riche
Indice de
Gini
Émaciation sévère (%) 2 1,111 0,000
Introduction d'aliments de complément (%) 77 0,966 0,002
Utilisation TRO (%) 91 1,022 0,004
Consommation de sel iodé (%) 87 0,954 0,006
Traitement à domicile maladies (%) 32 0,952 0,007
Connaissance soins à chercher (%) 38 0,995 0,007
Traitement diarrhée à domicile (%) 34 0,967 0,009
Allaitement continu (12-15m) (%) 90 1,084 0,017
Allaitement maternel exclusif (%) 22 0,852 0,021
Poids à la naissance < 2,5 Kg (%) 13 0,917 0,022
Émaciation modérée (%) 9 1,203 0,029
Prévalence de la diarrhée (%) 26 1,192 0,032
Complément de vitamine A chez les enfants (%) 18 0,781 0,034
Retard de croissance modéré(%) 39 1,256 0,044
Traitement du paludisme (%) 66 0,791 0,047
Retard de croissance sévère (%) 19 1,465 0,062
Orphelin dans ménages (%) 10 0,760 0,063
Mortalité des < 1 an (‰) 131 1,269 0,065
Mortalité des < 5 ans (‰) 194 1,311 0,072
Travail des enfants (%) 64 1,534 0,080
Insuffisance pondérale modérée (%) 24 1,651 0,081
Résidence des enfants (%) 11 0,641 0,096
Enregistrement naissances (%) 73 0,588 0,107
Couverture vaccinale du tétanos néonatal 62 0,562 0,118
Prévalence contraceptive (%) 28 0,593 0,121
Expriment attitudes discriminatoires envers personnes infectées (%) 41 1,945 0,124
Prévalence IRA 10 1,970 0,126
Taux d'alphabétisation des adultes - Hommes (%) 65 0,538 0,127
Insuffisance pondérale sévère (%) 6 2,389 0,140
Accès aux soins prénatals (%) 62 0,488 0,144
Accès aux soins obstétriques (%) 62 0,488 0,145
Allaitement continu (20-23m) (%) 53 2,491 0,162
Recherche de soins pour IRA (%) 32 0,408 0,162
Couverture vaccinale de la tuberculose (%) 62 0,408 0,170
Taux de scolarisation au primaire chez les garçons (%) 47 0,376 0,171
% d'enfants atteignant la 5e année 12 0,471 0,171
Connaissent la transmission mère-enfant (%) 35 0,403 0,188
Taux de scolarisation au primaire - Total (%) 43 0,340 0,198
Taux d'alphabétisation des adultes - Total (%) 49 0,371 0,200
Accouchement à domicile 52 2,926 0,200
Couverture vaccinale poliomyélite (%) 37 0,347 0,223
Taux de scolarisation au primaire chez les filles (%) 39 0,301 0,232
Assistance à l'accouchement (%) 44 0,321 0,247
Évacuation d'excréments adéquat (%) 26 0,312 0,248
Couverture vaccinale rougeole (%) 37 0,273 0,258
Moustiquaires imprégnées(%) 31 0,316 0,265
Couverture vaccinale Dtcoq (%) 33 0,243 0,278
Connaissent des conceptions erronées (%) 12 0,241 0,295
Taux d'alphabétisation des adultes - Femmes (%) 34 0,190 0,314
Connaissent un endroit pour faire le test (%) 28 0,181 0,334
L’ENFANT CENTRAFRICAIN : FAMILLE, SANTE, SCOLARISATION ET TRAVAIL
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Indice de Gini (suite du tableau A3)
Indicateurs Total
RCA
Ratio
Pauvre/Riche
Indice de
Gini
Connaissance prévention (%) 15 0,201 0,341
Femmes 15-49 ans testées (%) 11 0,129 0,382
Prévalence contraceptive (%) 15 0,098 0,440
Développement préscolaire (%) 3 0,068 0,525
Anémie (%) 84
Cas de dracunculoses 202
Cas de poliomyélite 1
Cas de rougeole 1663
Cas de tétanos néonatal 82
Complément de vitamine A chez les mères (%) ND
Décès des <5 ans dus à la diarrhée 22
Décès des <5ans dus à la rougeole 15
Eau de boisson salubre (%) 69
Faible niveau en iode urinaire En cours
Ratio de mortalité maternelle (100 000) 948
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Tableau A2. Inégalités socio-économiques en République centrafricaine, en 1999/2000
Objectifs Indicateurs Niveau de richesse
Total Ratio
pauvre/riche Indice de
Gini * Très pauvres Pauvres Classe
moyenne Riches Très riches
SME Obj. 1 Mortalité des < 5 ans (‰) 198 229 211 153 151 194 1,311 -0,072
Mortalité des < 1 an (‰) 118 136 125 94 93 131 1,269 -0,065
SME Obj. 2 Ratio de mortalité maternelle (100 000) 948
SME Obj. 3 Insuffisance pondérale Modéré (%) 31 23 25 23 19 24 1,651 -0,081
Sévère (%) 9 6 7 5 4 6 2,389 -0,140
Retard de croissance Modéré(%) 44 38 42 35 35 39 1,256 -0,044
Sévère (%) 23 17 21 18 16 19 1,465 -0,062
Émaciation Modéré (%) 10 9 9 9 8 9 1,203 -0,029
Sévère (%) 2 2 2 3 2 2 1,111 0,000
SME Obj. 4 Eau de boisson salubre (%) 69
SME Obj. 5 Évacuation d'excréments adéquate (%) 20 20 28 37 64 26 0,312 0,248
SME Obj. 6 % d'enfants atteignant la 5e année 8 8 9 14 17 12 0,471 0,171
SME Obj. 6 Taux de scolarisation au primaire (%) Fille 19 27 35 51 64 39 0,301 0,232
Garçon 25 42 42 59 66 47 0,376 0,171
Total 22 35 38 55 65 43 0,340 0,198
SME Obj. 7 Taux d'alphabétisation des adultes (%) Homme 45 52 64 76 83 65 0,538 0,127
Femme 12 18 27 47 63 34 0,190 0,314
Total 27 34 44 61 74 49 0,371 0,200
SME Obj. 9 Accès aux soins prénatals (%) 42 51 60 78 86 62 0,488 0,144
SME Obj. 10 Prévalence contraceptive (%) Moderne 2 3 4 9 18 15 0,098 0,440
Trad. 24 20 27 31 40 28 0,593 0,121
Accouchement à domicile 71 63 51 35 24 52 2,926 -0,200
SME Obj. 11 Assistance à l'accouchement (%) 25 27 36 65 77 44 0,321 0,247
Accès aux soins obstétriques (%) 42 51 60 78 86 62 0,488 0,145
SME Obj. 12 Poids à la naissance < 2,5 kg (%) 12,1 16,7 14 10,9 13,2 13 0,917 -0,022
SME Obj. 13 Anémie (%) 84
SME Obj. 14 Consommation de sel iodé (%) 84 88 86 86 88 87 0,954 0,006
Faible niveau en iode urinaire En cours
SME Obj. 15 Complément de vitamine A (%) Enfants 15 19 20 19 19 18 0,781 0,034
Mères ND ND ND ND ND ND
SME Obj. 16 Allaitement maternel exclusif (%) 22 20 22 17 26 22 0,852 0,021
Introduction d'aliments de complément (%) 71 80 85 76 74 77 0,966 0,002
Allaitement continu (12-15m) (%) 93 94 88 89 85 90 1,084 -0,017
Allaitement continu (20-23m) (%) 70 61 60 40 28 53 2,491 -0,162
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Suite du tableau A2 SME Obj. 19 Cas de poliomyélite 1
SME Obj. 20 Cas de tétanos néonatal 82
SME Obj. 21 Décès des <5ans dus à la rougeole 15
Cas de rougeole 1663
SME Obj. 22 Couverture vaccinale (%) Dtcoq (%) 16 23 24 44 64 33 0,243 0,278
Rougeole (%) 18 25 30 51 67 37 0,273 0,258
Poliomyélite (%) 22 24 31 47 63 37 0,347 0,223
Tuberculose (%) 38 52 57 76 92 62 0,408 0,170
Tétanos néonatal 44 53 60 76 79 62 0,562 0,118
SME Obj. 23 Décès des <5 dus à la diarrhée 22
Prévalence de la diarrhée (%) 27 25 29 24 23 26 1,192 -0,032
Utilisation TRO (%) 92 91 92 91 90 91 1,022 -0,004
Traitement diarrhée à domicile (%) 32 39 34 33 33 34 0,967 -0,009
SME Obj. 24 Prévalence IRA 13 12 10 9 7 10 1,970 -0,126
Recherche de soins pour IRA (%) 20 30 32 42 49 32 0,408 0,162
SME Obj. 25 Cas de dracunculoses 202
SME Obj. 26 Développement préscolaire (%) 1 1 1 3 9 3 0,068 0,525
Droit des enfants Enregistrement naissances (%) 54 62 75 84 91 73 0,588 0,107
Résidence des enfants (%) 9 9 10 12 15 11 0,641 0,096
Orphelin dans ménages (%) 9 9 9 12 12 10 0,760 0,063
Travail des enfants (%) 72 71 69 58 47 64 1,534 -0,080
Initiative GIME et paludisme
Traitement à domicile maladies (%) 30 34 33 34 31 32 0,952 0,007
Connaissance soins à chercher (%) 39 38 35 40 40 38 0,995 0,007
Moustiquaires imprégnées (%) 19 17 23 41 59 31 0,316 0,265
Traitement du paludisme (%) 58 62 69 71 73 66 0,791 0,047
VIH / sida Connaissance prévention (%) 5 6 9 21 26 15 0,201 0,341
Connaissent des conceptions erronées (%) 6 7 8 14 24 12 0,241 0,295
Connaissent la transmission mère-enfant (%) 21 25 31 44 51 35 0,403 0,188
Expriment attitudes discriminatoires envers les personnes infectées (%) 74 71 65 51 38 41 1,945 -0,124
Connaissent un endroit pour effectuer un test (%) 10 14 19 37 55 28 0,181 0,334
Femmes 15-49 ans testées (%) 3 5 7 15 24 11 0,129 0,382
* Indice de Gini=
n
iii
n
iii yxyx
2
'
1
'
2
''
1 avec x'i = cumul de la proportion xi de la population selon les quantiles i et y'i= cumul de la proportion de l'indicateur yi
selon le quantile i.