préparation du projet de loi sur la famille...par lettre du 30 octobre 2013, la ministre...

52
1 Préparation du projet de loi sur la Famille CONTRIBUTION DE L’UNAF Décembre 2013

Upload: others

Post on 04-Sep-2020

1 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

1  

Préparation du projet de loi sur la Famille

CONTRIBUTION DE L’UNAF

Décembre 2013

Page 2: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

2  

Page 3: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

3  

          

Par  lettre du 30 octobre 2013,  la Ministre déléguée chargée de  la  famille a  sollicité l’UNAF  pour  présenter  sa  réflexion  et  ses  positions  sur  les  grands  axes  que  la Ministre entend développer dans le futur « projet de loi famille ».  

 Ce document présente cette contribution, adoptée par le Conseil d’administration de 

l’UNAF le 14 décembre 2013.  A  l’heure où ce document est publié,  l’UNAF n’a pas connaissance des propositions 

issues des groupes de travail mis en place par la ministre, sur lesquelles l’UNAF pourra être amenée à s’exprimer.   

Page 4: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

4  

 

Table des matières 

1.  REMARQUES GENERALES RELATIVES A L’ELABORATION D’UNE « LOI   FAMILLE »  1 

2.  QUELS NOUVEAUX DROITS POUR LES ENFANTS ? COMMENT MIEUX   APPLIQUER CEUX QUI EXISTENT DEJA ?  4 

2.1.  Considérations générales  4 2.2.  De l’intérêt ou non d’abaisser à 16 ans l’âge légal du droit  de vote  4 2.3.  L’engagement associatif du mineur  5 2.4.  Concernant la protection des jeunes majeurs confiés à  l’ASE : le droit à un projet de vie 

  semblable à celui des  autres enfants  6 2.5.  Audition de l’enfant en justice  8 

a.  Repenser le principe de l’audition de droit…  8 b.  … et étendre certains droits procéduraux  10 

2.6.  Les droits des enfants de parent incarcéré  11 a.  L’accueil de l’enfant de moins de 18 mois en milieu carcéral  11 b.  Le droit de rencontrer ses deux parents  11 

2.7.  Les droits de l’enfant hospitalisé  11 

3.  FAIRE DU PRINCIPE DE COPARENTALITE UNE REALITE POUR L’ENSEMBLE DES   FAMILLES  12 

3.1  Pour une justice familiale plus intégrée  12 3.2  Permettre aux familles de mieux appréhender les règles relatives à l’exercice de l’autorité 

  parentale  13 a.  Quant à l’information  13 b.  Quant à l’accompagnement  14 c.  Donner une dimension pédagogique aux jugements  14 d.  Les contrats de coparentalité  15 

3.3  Développer la médiation familiale  16 a.  La médiation « préalable obligatoire »  17 b.  Les limites de la double convocation et de la médiation préalable obligatoire 

  telles que mises en place par la Chancellerie.  18 c.  Sur l’obligation à l’entretien d’information dans les cas de séparations et de 

  divorces  19 d.  Les autres pistes envisageables pour favoriser le recours à la médiation 

  familiale et éviter le dépôt de requêtes modificatives  19 e.  Médiation familiale et Juge pour enfant  19 f.  Assurer le financement des services de médiation familiale  20 

3.4  Résidence alternée  21 a.  Les positions de principe  21 b.  Quelles contre‐indications à la résidence alternée ?  22 

3.5  Pensions alimentaires  23 3.6  Faire de la coparentalité une réalité juridique et sociale : accompagner les évolutions du 

  droit civil de la famille de nouveaux droits sociaux  24 a.  Fiscalité  24 b.  Prestations sociales et familiales  24 

Page 5: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

5  

4.  LE TIERS AUPRES DE L’ENFANT  25 

4.1  Clarifier les actes usuels  25 4.2  Des réponses déjà existantes  26 4.3  Faciliter le recours à la délégation‐partage de l’autorité parentale  27 4.4  Faciliter les dons et legs  29 

5.  OFFRIR AUX PARENTS EN DIFFICULTES LES MOYENS DE SATISFAIRE AUX   BESOINS DE LEURS ENFANTS  30 

5.1  Sur les fondements de la protection de l’enfance  30 5.2  Conditions matérielles d’existence : un pré‐requis à l’action psycho‐socio‐éducative  30 

a.  Améliorer le recours à l’accompagnement budgétaire des familles dans   l’intérêt de l’enfant  31 

b.  Le maintien du principe de versement direct des allocations familiales aux   parents en cas de placement judiciaire  32 

c.  Uniformité et revalorisation des aides financières de l’Aide sociale à l’enfance   (ASE)  32 

5.3  Respecter les droits des parents dans l’intérêt de l’enfant  33 a.  L’égalité devant la justice  33 b.  Le droit des parents de participer activement aux décisions prises pour 

  protéger leur enfant  33 c.  Respecter le contradictoire en protection de l’enfant  34 d.  Exécuter les mesures prononcées dans des délais raisonnables  34 

5.4  Clarifier et harmoniser le fonctionnement des conseils de famille des pupilles de l’Etat 35 

6.  FILIATION ADOPTIVE ET ACCES AUX ORIGINES  36 

6.1  Pour une filiation adoptive respectueuse de la diversité des  besoins de l’enfant  36 6.2  Mieux accompagner les parents adoptifs  38 6.3  Lorsque les parents ne peuvent assurer leurs responsabilités  à l’égard de leurs  

  enfants : améliorer les conditions d’accès  au statut de pupille de l’Etat  39 6.4  L’accès aux origines personnelles entre droit et sécurité  40 

a.  Concernant les droits de l’enfant à connaître l’identité des personnes qui ne   sont pas ou plus ses parents au sens de la filiation  41 

b.  Concernant la levée de l’anonymat du tiers donneur dans le cadre de l’aide   médicale à la procréation  42 

c.  Concernant les missions du Conseil National pour l’accès aux origines   personnelles (CNAOP)  43

 

Page 6: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

1  

 

1. Remarques générales relatives à l’élaboration d’une « loi famille »

 Alors que les textes de lois adaptent et modifient régulièrement les actions à destination des 

familles,  la  présentation  d'une  loi  "famille",  spécifiquement  dédiée  à  ce  sujet,  permettrait  de rappeler le rôle de la famille et de donner un sens aux politiques qui peuvent la concerner. 

 La  lecture  du  code  de  l’Action  Sociale  et  des  familles,  est  à  cet  égard  révélatrice  de 

l'absence, dans la loi, d'un cadre sur les objectifs assignés à ces politiques. Une loi « famille », par son caractère transversal, pourrait y apporter une réponse. 

 Dans  le  code,  un  chapitre  s’intitule  « politique  familiale » ,  et  quatre  articles  seulement  y 

figurent  :  deux  sur  les  dépenses  et  les  aides  financières  versées  aux  familles  ‐  comme  si  une politique  de  la  famille  n'était  qu'une  politique  dépensière  ‐  et deux  relatifs  à  la  protection  de l'enfance depuis la loi du 5 mars 2007 (voir annexe 1).  

 Ce  manque  d'orientations  est  particulièrement  marquant  quand  on  examine,  en 

comparaison, le  chapitre  dédié  à  la  lutte  contre  la  pauvreté  et  les  exclusions,  dans  lequel  le législateur  a  souhaité  fixer  les  objectifs  de  cette  politique,  ses  axes  d’intervention,  ainsi  que l’ensemble des acteurs qui concourent à sa réalisation (voir annexe 1).  

 Aussi,  conviendrait‐il d'inscrire dans  la  loi,  l'importance de  la  famille  et donc  l'intérêt de 

politiques à leur destination. La rédaction d’un tel article pourrait s’inspirer du texte qui figure dans la  partie  réglementaire  du  code  (Article  R112‐1) :  « La  famille  est  une  des  valeurs  essentielles  sur lesquelles est fondée la société. C'est sur elle que repose l'avenir de la nation. La politique familiale est conçue de manière globale ».  

 Elle pourrait être complétée par une rédaction indiquant : 

‐ que  chaque  famille  a  droit  à  des moyens  suffisants  pour  lui  garantir  une  qualité  de  vie assurant le bien‐être de chacun de ses membres et que les systèmes de protection sanitaire et sociale constituent un des moyens concourant à l’exercice de ce droit ; 

‐ que, dans un  impératif de  justice,  les  familles ont droit à une  compensation des  charges familiales (coût de l’enfant et temps parental) qui peut être assurée par différents moyens (prestations familiales, dispositions fiscales et équipements) ; 

‐ que le logement constitue un droit essentiel pour la famille, un logement de qualité et des équipements  de  proximité  permettant  son  épanouissement,  et  que  la  protection  de l’environnement est un élément nécessaire de la qualité de la vie. 

 En  outre,  la  loi  famille  mériterait‐elle  de  rappeler  que  les  deux  parents  ont  une 

responsabilité commune et égale pour éduquer  leur enfant, assurer  son développement et  son épanouissement, et lui faire acquérir son entière autonomie. 

 S’agissant  des  moyens  déployés,  une  loi  « famille »  pourrait  fixer  les  grands  principes 

autour desquels s’articulent les différentes politiques destinées aux familles.  

Page 7: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

2  

Elle pourrait ainsi indiquer que la politique familiale est un ensemble cohérent composé :  

- d’allocations  et  de mesures  fiscales  pour  compenser  les  charges  liées  à  la  présence d’enfants ;  

- de mesures de conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle ;  - de mesures de soutien à la fonction parentale ;  - ainsi que d’un droit de  la famille qui garantit une protection aux projets familiaux et à 

leur réalisation.  Elle  pourrait  également  citer  les  acteurs  qui  concourent  à  la  réalisation  des  objectifs 

poursuivis par la politique familiale, dont le Mouvement familial.  S’agissant du contour plus précis de cette future loi, l’installation récente de quatre groupes 

de travail par Mme Bertinotti, Ministre de la famille, nous renseigne en partie sur les thèmes qui pourraient y être abordés :  

‐    Nouveaux droits pour les enfants  ‐    Médiation familiale et contrat de coparentalité  ‐    Protection de l’enfance et adoption  ‐    Filiation, origines et parentalité  

Le présent document s’est attaché à  traiter spécifiquement de ces  thématiques confiées à ces groupes, sachant que  l’UNAF n’a pas connaissance, pour  l’instant, des propositions émanant des 4 groupes de travail.  

L’UNAF apportera naturellement sa contribution aux autres sujets susceptibles d’alimenter le futur projet de loi.  

A ce stade, nous avons donc volontairement fait le choix de ne pas aborder d’autres sujets familiaux qui ont fait, ou qui feront l’objet de contributions spécifiques (accueil du jeune enfant, gouvernance de la politique d’aide à la parentalité, aidants familiaux, vieillesse…), et mériteraient d’être abordés dans le cadre d’un projet de loi « famille ». Pour mémoire, dans le cadre de la consultation "Au tour des parents", l’UNAF avait remis début 2013 à la ministre de la famille trois contributions avançant un nombre important de propositions, en matière de :  - Petite enfance (http://www. UNAF.fr/IMG//pdf/dossier_d_analyse_petite_enfancedv_07janv2013.pdf), 

- Accueil à l’école  pour les enfants de deux ans,  - Soutien à la parentalité (http://www.UNAF.fr/IMG//pdf/dossier_d_analyse_soutien_a_la_parentalite_27_dec_.pdf).   Ces propositions restent pleinement d’actualité et pourront utilement venir enrichir la future loi famille. 

A noter un point particulier qui concerne  le fonctionnement de  l’Institution Familiale qui est régi  par  le  code  de  l’action  sociale  et  des  familles :  l’inscription  dans  la  loi  famille  de  la reconnaissance des URAF. 

La  loi  relative  à  la  simplification  du  droit  et  à  l’allègement  des  démarches  administratives définitivement adoptée par  l’Assemblée Nationale  le 29  février 2012, avait  institué, en son article 129, la reconnaissance des URAF par la loi. Par décision du 15 mars 2012, le Conseil constitutionnel a repoussé cet article 129 au motif qu’il ne présentait pas de lien, même indirect, avec cette loi. Si le Conseil constitutionnel a  jugé sur  la forme,  il n’a en revanche pas remis en cause  le bien fondé de l’inscription des URAF dans la loi.  

L’article qui prévoyait  cette  reconnaissance pourrait donc être  inséré dans  le projet de  loi Famille. 

Page 8: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

3  

Le présent document récapitule donc les positions de l’UNAF sur les thématiques retenues à ce jour par le ministère de la famille, et les complète en présentant des propositions et des pistes de  réflexions parfois nouvelles.  L’objectif  est de décliner  les  valeurs défendues par  l’Institution familiale  dans  des  dispositions  législatives  et  des  politiques  adaptées  à  notre  analyse  des transformations récentes des familles et de leurs conditions de vie.  

Pour  aborder  les  thématiques  précitées,  l’approche  retenue  par  l’UNAF  est  celle  de privilégier  une  logique  d’entrée  par  l’enfant,  à  partir  de  laquelle  peuvent  se  décliner  les propositions d’évolution des politiques publiques qui le concernent au premier chef.  

Ainsi pour  l’UNAF,  il  ne  peut  y  avoir  de  loi  à  l’égard  de  la  famille  sans  la  réalisation,  en amont, d’une véritable étude d’impact  réalisée en  référence à  la Convention  internationale des droits  de  l’enfant  (CIDE),  et  notamment  à  son  préambule  et  à  son  article  27,  qui  affirment respectivement le rôle premier de la famille et celui des parents à l’égard de l’enfant[1].  

Nous proposons alors de décliner nos positions, remarques et propositions autour des axes suivants :   

- Quels nouveaux droits pour  les  enfants  ? Comment mieux  appliquer  ceux qui  existent déjà ? 

- Faire du principe de coparentalité une réalité pour toutes les familles ; - Comment  concilier,  dans  l’intérêt  de  l’enfant,  les  responsabilités  des  parents  et  la 

légitime reconnaissance de l’investissement de tiers auprès de l’enfant ? - Offrir aux parents en difficulté les moyens de satisfaire les besoins de leurs enfants ; - Sécuriser la filiation adoptive et encadrer l’accès aux origines personnelles.  

[1] Extraits du préambule de la CIDE : « convaincus que la famille, unité fondamentale de la société et milieu naturel pour la croissance et le bien-être de tous ses membres

et en particulier des enfants, doit recevoir la protection et l’assistance dont elle a besoin pour pouvoir jouer pleinement son rôle dans la communauté »;

« reconnaissant que l’enfant, pour l’épanouissement harmonieux de sa personnalité, doit grandir dans le milieu familial, dans un climat de bonheur, d’amour et de compréhension ».

[1] Extraits de l’article 27 de la CIDE : « C’est aux parents ou autres personnes ayant la charge de l’enfant qu’incombe au premier chef la responsabilité d’assurer, dans les

limites de leurs possibilités et de leurs moyens financiers, les conditions de vie nécessaires au développement de l’enfant ». « Les Etats parties adoptent les mesures appropriées, compte tenu des conditions nationales et dans la mesure de leurs moyens, pour

aider les parents et autres personnes ayant la charge de l’enfant à mettre en œuvre ce droit et offrent, en cas de besoin, une assistance matérielle et des programmes d’appui, notamment en ce qui concerne l’alimentation, le vêtement et le logement ».

Page 9: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

4  

2. Quels nouveaux droits pour les enfants ? Comment mieux appliquer ceux qui existent déjà ?

  

2.1. Considérations générales  L’incapacité de l’enfant est pensée comme un moyen de sa protection, liée à sa vulnérabilité 

et à son inaptitude à défendre ses intérêts. Il appartient ainsi aux parents ou au représentant légal d’accomplir  à  la  place  de  l’enfant  certains  actes,  ou  de  l’autoriser  explicitement  à  en  exercer certains autres. Tel est le principe. 

Il  existe  toutefois  de  nombreuses  exceptions  à  ce  principe  d’incapacité  qui  sont  liées, généralement, à  la capacité de discernement du mineur, et qui  lui permettent de  s’affranchir de l’autorisation  de  ses parents ou  représentants  légaux.  Il  en  est  ainsi, pour  exemple,  en matière d’accès à la contraception1.  

 Le  droit  positif  consacre  ainsi  deux  statuts  du mineur  selon  l’âge  de  ce  dernier,  ou  plus 

exactement selon son degré de discernement. Pourquoi ne pas accorder ainsi de nouveaux droits aux mineurs, progressivement, par exemple dès 15 ou 16 ans – ainsi que  l’évoquait récemment  la Ministre de la Famille ?  

Si des aménagements pouvaient être envisagés, ils devraient selon nous concerner des actes précis  visant  l’acquisition  d’une  autonomie  progressive,  sans  incidence  sur  la  protection  des mineurs, et sans risque de disqualifier les parents. 

 La raison en est que c’est précisément à cet âge que les tensions sont les plus grandes entre 

les droits et aspirations des mineurs et les devoirs et responsabilités des parents.  C’est  sur  cette  tranche  d’âge  des  15‐18  ans  que  se  concentre  ainsi  une  grande  partie  des 

demandes d’informations et de soutien formulées par les parents, par exemple dans les actions de type  « REAAP ».  C’est  le  moment  où,  précisément,  les  parents  se  sentent  le  plus  souvent  en difficulté dans  l’exercice de  l’autorité parentale. Le moment aussi où  la prise de risque des  jeunes est maximale… 

 

 

2.2. De l’intérêt ou non d’abaisser à 16 ans l’âge légal du droit de vote

 Le projet d’abaisser l’âge du vote de 18 ans à 16 ans pose les questions suivantes : 

- Quelle  serait  la  signification  d’un  droit  de  vote  déconnecté  des  devoirs  et responsabilités qui accompagnent l’accès à la majorité ? 

- Ces nouveaux droits politiques devraient‐ils s’accompagner à plus ou moins long terme d’un accès conjoint à certains droits sociaux ou familiaux ? 

1 L’article L. 5131-1 du code de la santé publique dispose que la prescription, délivrance et administration de contraceptifs ne

nécessite pas le consentement du titulaire de l’autorité parentale.

Page 10: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

5  

- N’y  a‐t‐il  pas  un  risque,  en  accordant  aux mineurs  des  droits  identiques  à  ceux  des adultes, d’oublier que la société leur doit aussi une sollicitude particulière ? 

 L’UNAF considère en premier lieu qu’il y aurait une forme de paradoxe à accroître les droits et  libertés politiques des enfants, fût‐ce uniquement à partir de 16 ans, dans  un  contexte  sociétal  où  ces  derniers  sont  de moins  en moins  rapidement autonomes financièrement et matériellement.  

 Elle voit dans l’ouverture de nouveaux droits politiques au mineur de 16 ans, comparables à 

ceux  des  adultes,  un  risque  majeur :  celui  qu’à  terme,  ces  nouveaux  droits  viennent  justifier l’abandon pur et simple des principes éducatifs portés par l’ordonnance de 1945 relative à l’enfance délinquante.  

 C’est dans un même souci de protection des mineurs que le législateur a durci les conditions 

d’accès au droit au mariage des adolescentes. Afin de lutter contre les mariages forcés ou arrangés, il a ainsi voté la loi du 15 avril 2006, qui rehausse de 15 à 18 ans l’âge légal du mariage. 

L’UNAF n’est pas majoritairement favorable au droit de vote des mineurs de 16 ans lors des élections, qu’elles soient locales ou nationales. Des réflexions seront toutefois engagées dans les mois à venir sur cette question, en lien notamment avec l’acquisition du statut de mineur émancipé.  

Ce n’est pas dans l’expérience du vote, acte ponctuel et isolé de la participation à la vie démocratique, que l’enfant acquière réellement les bases de la citoyenneté. C’est  sous  d’autres  formes,  notamment  en  termes  d’engagement  associatif  et dans la cité, que les efforts devraient porter.  

  

Parallèlement, l’UNAF recommande de veiller à ce que les jeunes puissent exercer pleinement  leurs  droits  au  sein  des  structures  d’expression  citoyenne  déjà existantes,  aux  seins  des  établissements  scolaires,  dans  les  conseils municipaux d’enfants…   

 

 

2.3. L’engagement associatif du mineur  L’engagement  des  mineurs  dans  la  vie  associative  nous  semble  donc  relever  de  cette 

démarche en ce sens qu’il s’accompagne d’une expérience riche, faite d’acquisition de savoir‐faire et  de  savoir‐être.  Il  témoigne  d’une  démarche  potentiellement  tournée  vers  la  découverte  de l’autre, et d’une volonté d’agir sur son environnement, dans la cité. Il est extrêmement formateur et participe d’une éducation pleine et entière à l’exercice d’une citoyenneté active.  

Dans  cet  esprit,  l’article  15  de  CIDE  reconnaît  d’ailleurs  le  droit  des  enfants  à  la  liberté d’association. 

 Sur le principe, l’UNAF est favorable à l’octroi des possibilités pour les mineurs de s’investir pleinement dans des projets associatifs.  

 Pour autant, la loi n°2011‐893 du 28 juillet 2011 a déjà modifié l’article 2 bis de la loi du 1er juillet 

1901 permettant  ainsi  aux mineurs  de  16  ans  de  créer  une  association.  Seule  la  condition  d’une 

Page 11: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

6  

autorisation parentale (ou du représentant légal) vient ainsi s’ajouter aux conditions prévues pour les majeurs.  

Concernant la simple adhésion, la jurisprudence considère que l’autorisation peut être tacite. Une circulaire du 24 février 1978 autorise les mineurs de 16 ans à participer aux AG des associations agréées de jeunesse et d’éducation populaire. C’est alors à l’association de prévoir les conditions de vote des mineurs. Elle peut d’ailleurs  choisir aussi d’élire un mineur  comme dirigeant, mais  sans pouvoir se retourner éventuellement contre lui en cas de faute – ceci afin de protéger le mineur. 

 Resteraient,  à  la marge,  la possibilité de  supprimer  l’obligation  de  l’autorisation parentale 

dans  les  cas  de  création  d’association,  ou  encore  l’obligation  pour  les  associations  d’accepter l’élection d’un mineur dans l’équipe dirigeante. Mais n’y aurait‐il pas dans le premier cas un risque de  disqualification  supplémentaire  des  parents,  et  dans  le  second  cas,  une  atteinte  à  la  liberté associative ?    

 En  conclusion,  et  compte  tenu  des  avancées  notables  apportées  par  la  récente  loi  du            

28  juillet  2011,  l’UNAF  considère  que  la  réflexion  doit  porter  sur  l’amélioration  des  conditions d’accès à ces droits préexistants, ce qui passe par  l’information à destination des mineurs et de leur famille, et par le soutien aux acteurs associatifs.  

  

 

2.4. Concernant la protection des jeunes majeurs confiés à l’ASE : le droit à un projet de vie semblable à celui des autres enfants

 Le devenir des enfants confiés à  l’aide sociale à  l’enfance est une question  importante qui 

nécessite  un  investissement  particulier  des  pouvoirs  publics,  tant  au  niveau  de  politique  de jeunesse dans son ensemble, qu’au niveau spécifique de l’aide sociale à l’enfance.  

 Sur  ce  second  point,  il  nous  semble  opportun  de mieux  anticiper  la  fin  du  placement  et 

l’entrée dans la majorité dès l’âge de 16 ans, et même sans doute dès 14 ans.  Une  véritable  réflexion  doit  être  systématiquement menée  en  incluant  non  seulement  les 

questions relevant de  l’orientation scolaire et professionnelle de  l’enfant, mais aussi  les domaines de la vie quotidienne, du logement ou des soins corporels. L’accent doit être parallèlement mis sur l’entretien  d’un  réseau  social  et  la  capacité  du  jeune  à  l’utiliser  en  tant  que  ressource.  Ceci  est d’autant plus  important que  le relai parental ou familial est souvent  limité par rapport aux autres jeunes. 

  Aujourd’hui,  la  protection  des  jeunes majeurs  par  l’ASE  est  facultative  et  repose  sur  des 

impératifs qui se situent à  la frontière entre  insertion et protection. Formalisée par une demande écrite, elle prend  la forme d’un contrat, au point d’être désignée sous ce terme même, puisqu’on parle en effet de « contrat  jeune majeur » tandis que, sur  le versant  judiciaire,  la protection  jeune majeur  est prononcée par  le  Juge des  enfants  et mise  en œuvre par  les  services de  la PJJ. Ces dernières  années  ont  vu  les missions  de  ces  derniers  services  se  réorienter  vers  le  pénal  et  se désengager progressivement du suivi des jeunes majeurs. 

  La  réforme  de  la  protection  de  l’enfance  de  mars  2007  a  renforcé  la  compétence  des 

départements  y  compris  en matière  d’aide  aux  jeunes majeurs,  sans  pour  autant modifier  son 

Page 12: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

7  

aspect non obligatoire, ni préciser  ses  conditions de mise en œuvre. Ainsi,  chaque département définit lui‐même sa stratégie quant au déploiement de l’aide aux jeunes majeurs.  

Devenue contractuelle, celle‐ci se pose comme une négociation d’engagements réciproques pour la réalisation d’un projet visant l’insertion sociale et professionnelle. Mais la logique à l’œuvre étant celle d’une autonomie financière rapide, le modèle du projet est souvent calibré de la même manière pour tous, et orienté vers une formation courte et professionnalisante, sans toujours tenir compte des aspirations réelles des jeunes. Dans les faits, il apparaît même que les services de l’ASE, désireux de justifier au mieux du bon emploi des budgets ainsi investis, peuvent opérer une forme de  sélection  en proposant prioritairement  les  contrats  jeunes majeurs  à  ceux qui  leur  semblent avoir le plus de chance de mener à bien leur projet. Ce qui signifie, paradoxalement, que les jeunes les plus en difficulté tendent à être exclus du dispositif2.  

 L’aide  aux  jeunes  majeurs  pose  beaucoup  de  questions  de  par  sa  mise  en  œuvre 

contractuelle,  souvent  ponctuelle  et  calquée  sur  un  schéma  d’accès  à  l’indépendance  obsolète, tant en terme d’entrée dans le monde du travail qu’en terme d’âge. Or, dans le même temps nous constatons :  

- un allongement de  la dépendance  familiale à  l’entrée dans  l’âge adulte découlant de l’allongement des études ; 

- une importante précarité professionnelle des jeunes, surtout les moins diplômés ; - une  scolarité  difficile  des  enfants  confiés  à  l’ASE,  avec  en  moyenne  2  années  de 

redoublement, rallongeant d’autant la fin de la scolarité ; - une surreprésentation des  jeunes confiés à  l’ASE parmi  la population SDF (10 fois plus 

que dans la population générale des personnes logées).   

Pour  l’UNAF,  l’Aide sociale à  l’enfance a une responsabilité particulière quant au devenir  des  enfants  accueillis  durant  leur  minorité.  l’UNAF  souhaite  ainsi,  au minimum,  que  les  jeunes  accueillis  précédemment  par  les  services  de  l’ASE puissent  systématiquement  bénéficier  d’un  contrat  de  protection  financé conjointement  par  les  départements  et  l’Etat  au‐delà  de  leurs  18  ans,  s’ils  le demandent et dès lors qu’ils suivent régulièrement une scolarité générale ou une formation, et ce jusqu’à 21 ans.  

 La  loi  devrait  prévoir  en  outre  cette  possibilité  pour  les  jeunes  majeurs  n’ayant  pas 

bénéficié d’une prise en charge durant  leur minorité, ainsi qu’une possibilité d’extension  jusqu’à 25 ans pour tous les jeunes ayant besoin d’une protection.  

 l’UNAF demande également à ce que le passage à la vie autonome puisse s’accompagner le 

cas échéant de retours ponctuels en accueil selon les besoins du jeune majeur, comme un groupe de travail piloté par l’ONED en avait souligné l’intérêt dans un rapport de décembre 2009.  

 L’article  L.  224‐11  du  Code  de  l’action  sociale  et  des  familles  confie  aux  associations 

départementales  d’entraide  des  pupilles  et  anciens  pupilles  (ADEPAPE)  une  mission d’accompagnement des  jeunes dans  leur processus d’insertion. L’UNAF constate à regret que  les ADEPAPE sont insuffisamment dotées financièrement pour remplir efficacement cette mission.  

2 Nathalie Guimard, Juliette Petit-Gats, Contrat jeune majeur. Un temps négocié, préface de David Pioli, Paris, L’Harmattan,

2011.

Page 13: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

8  

Elle  soutient  ainsi  le  souhait  de  la  FNADEPAPE  de  voir  établie  une  convention  tripartite ETAT/ADF/FNADEPAPE  afin que  soit  impulsé  sur  l’ensemble du  territoire un véritable dispositif d’accompagnement des jeunes confiés à l’ASE.   

 En  complément  de  ces  remarques  et  propositions,  l’UNAF  souligne  que  le  parrainage  de 

proximité offre aussi des possibilités intéressantes encore insuffisamment explorées. Il  ressort  des  actions menées  dans  ce  domaine  par  notre  réseau  des UDAF,  une  série  de 

témoignages  probants  rendant  compte  de  la  construction  d’une  relation  affective  privilégiée instituée  entre  un  enfant,  un  filleul  et  un  parrain qui repose  sur  des  valeurs  d’échange,  de réciprocité, d’enrichissement mutuel et de  confiance. Le parrainage de proximité  constitue pour l’UNAF un mode d’accompagnement personnalisé prometteur  et  il  serait  souhaitable de  voir  ce dispositif se pérenniser et se développer dans ce cadre.  

 

 

2.5. Audition de l’enfant en justice  Dans  son  article  3,  la  Convention  européenne  des  droits  de  l’enfant  prévoit  que :  « Dans 

toutes  les  décisions  qui  concernent  les  enfants,  qu’elles  soient  le  fait  des  institutions  publiques  ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes  législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale ». 

Aujourd’hui, l’article 388‐1 du Code civil dispose que : « Dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut, sans préjudice des dispositions prévoyant son  intervention ou son  consentement,  être  entendu par  le  juge ou,  lorsque  son  intérêt  le  commande, par  la personne désignée par le juge à cet effet ».  

Cette  audition  est  alors  « de droit  lorsque  le mineur  en  fait  la demande »,  et  « il peut  être entendu seul, avec un avocat ou une personne de son choix ». Notons alors que l'audition du mineur ne lui confère pas la qualité de partie à la procédure. 

 L’UNAF formule deux remarques et propositions.   

a. Repenser le principe de l’audition de droit…  Une  jurisprudence  relativement  récente3  a montré  les  limites  du  principe  de  l’audition  de 

plein de droit qui peut, in fine, se retourner contre l’enfant. Ainsi, même lorsque les résultats d’une enquête sociale confirment  l’état d’emprise d’un mineur vis‐à‐vis d’un de ses parents  il n’est pas possible  de  refuser  la  demande  d’audition  d’un mineur  doté  de  discernement.  Et  ceci  tant bien même  cette  audition  serait  susceptible  de  le  mettre  dans  une  difficile  situation  de  conflit  de loyauté, si ce n’est dans une situation de danger. 

 C’est la raison pour laquelle un magistrat peut se contenter d’un simple compte rendu oral de 

l’audition de  l’enfant au moment de  l’audience, plutôt que de  leur communiquer  le compte rendu écrit préalablement à l’audience ‐ comme l’exigerait le respect de la procédure contradictoire.  

 

3 Cass. 1re civ., 20 juin 2012.

Page 14: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

9  

Quel est donc ce droit de  l’enfant qui,  lorsqu’il est respecté, oblige parfois des magistrats à faire fi du respect du principe du contradictoire dans la procédure afin de protéger l’enfant ? S’il en est ainsi, c’est bien que l’audition de l’enfant, de droit, peut, dans certain cas, constituer un danger pour l’enfant.  

 L’UNAF propose ainsi d’aménager ce principe de l’audition de droit prévu à l’article 388‐1 du 

C.Civ.   Afin de mieux protéger le mineur, cette audition pourrait être limitée selon les résultats des 

enquêtes  commandées par  les magistrats, dès  lors qu’elles  laissent  apparaître un danger pour l’enfant. 

 L’UNAF souhaite en outre que soient apportées des précisions au décret n° 2009‐572 du 20 mai 2009 relatif à l'audition de l'enfant en justice :  - Prévoir expressément que l’audition de l’enfant fait l’objet d’un compte rendu 

écrit  soumis  au  principe  de  la  contradiction,  établi  en  prenant  en  compte l’intérêt de l’enfant ; 

- Prévoir  la  lecture  systématique  de  ce  compte  rendu  à  l’enfant  et  l’informer que ses parents peuvent en avoir connaissance ; 

- Préciser  que  le  compte  rendu  est  consultable  par  les  parties  ou  leur représentant au greffe, et, qu’à défaut, le magistrat peut restituer lui‐même le contenu de l’audition lors de l’audience ; 

- Préciser que  le compte rendu doit rester au dossier afin de permettre à tout autre  juge de première  instance ou d’appel d’en prendre connaissance et de statuer en considération de ces éléments soumis à la connaissance des parties et au débat contradictoire ; 

- Prévoir  que  l’audition  ne  peut  se  dérouler  dans  un  temps  concomitant  à l’audience des parties. 

- Prévoir l’obligation de convoquer l’avocat lors de l’audition de l’enfant dès lors que ce dernier est assisté d’un avocat. 

 L’UNAF  relève que  le magistrat a  la possibilité à ce  jour  soit d’entendre  le mineur,  soit de 

déléguer cette audition à un tiers désigné (Association). Or, certains tribunaux ont systématisé ce recours au tiers désigné.  

Pour  l’UNAF,  ce  recours peut être  justifié dès  lors, par exemple, que  l’intérêt de  l’enfant exige  une  rapidité  dans  la  procédure  que  la  charge  de  travail  du magistrat  ne  permet  pas  de respecter. Mais ce  recours à un  tiers doit demeurer une exception. Cette délégation devrait en outre être motivée systématiquement, au regard de l’intérêt de l’enfant.  

   Enfin, nous constatons que les textes n’obligent pas le magistrat à motiver ses décisions.   

L’UNAF souhaite que chaque décision soit motivée, y compris lorsqu’il s’agit de ne pas auditionner un mineur, qu’on estime, dénué de discernement. 

  

Page 15: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

10  

b. … et étendre certains droits procéduraux  Concernant l’assistance éducative  

Il existe en matière pénale une obligation d’assistance du mineur par un avocat (Ordonnance du 2 février 1945) qui n’existe pas en matière civile. 

 L’UNAF ne voit pas d’obstacle à ce que  soit prévue une  telle obligation dans deux autres 

cas : celui où l’enfant est victime dans une affaire pénale, et en assistance éducative. En effet, un mineur  en  danger  du  fait  de  l’attitude  de  ses proches par  exemple  doit  avoir  les mêmes  droits d’assistance qu’un mineur présumé auteur de faits délictueux ou criminels.  

 L’UNAF relève en outre une limitation importante des droits de l’enfant dans les procédures 

d’assistance éducative. Ainsi, seuls  les mineurs doués de discernement ont droit à un avocat et à interjeter  appel  de  la  décision.  Il  en  va  de même  pour  ce  qui  est  de  la  consultation  du  dossier (Décret n° 2002‐361 du 15 mars 2002).  

 L’UNAF  propose  que  le  droit  à  l’assistance  d’un  avocat  d’enfant,  spécialement formé, soit étendu aux mineurs non doués de discernement dans  les procédures d’assistance éducative.  

  Concernant les procédures disciplinaires scolaires  

Le passage d’un enfant devant une commission de discipline est une affaire  importante qui peut avoir des conséquences durables sur son parcours. L’UNAF pense que la présence d’un avocat spécialement formé auprès du jeune et de sa famille peut permettre de réintroduire du droit et un équilibre dans des procédures où  les  familles et  les  jeunes ont trop souvent  l’impression de  faire face à une administration toute puissante qui serait à la fois juge et partie.  

Or, si la présence de l’avocat est aujourd’hui possible, les textes en vigueur ne précisent pas cette possibilité, qui reste ainsi mal connue, et ce recours à l’avocat demeure en outre difficile pour les familles les moins aisées.  

 Afin de faciliter  l’assistance d’un tiers, et  le cas échéant celle d’un avocat,  l’UNAF souhaite : - Que  les  documents  expliquant  les  procédures  disciplinaires  aux  parents 

précisent qu’ils ont la possibilité de se faire assister par toute personne de leur choix, dont un avocat ;  

- Que  soient  inscrits,  parmi  les  conditions  d’accès  à  l’aide  juridictionnelle,  les litiges liés aux rapports entre famille et école entrainant un risque d’exclusion et de déscolarisation.  

  

Page 16: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

11  

2.6. Les droits des enfants de parent incarcéré  

a. L’accueil de l’enfant de moins de 18 mois en milieu carcéral  Actuellement, un mineur peut vivre en milieu carcéral, avec sa mère, jusqu’à ses 18 mois. L’absence de moyens ou de volonté politique conduit aujourd’hui à des constats alarmants, 

relevés notamment par les associations, mais aussi récemment par le Contrôleur général des lieux de  privation  de  liberté.  Lieux  exigus  non  équipés,  absence  de  séparation  des  quartiers pénitentiaires  accueillant  les  enfants  des  autres  lieux  de  détention,  impossibilité  de  faire  entrer dans  le milieu carcéral certains produits destinés aux enfants, sortie de maternité  insuffisamment préparée…  

 L’UNAF  souhaite  que  l’élaboration  du  projet  de  loi  sur  la  famille  soit  l’occasion pour  le  gouvernement  de  se  prononcer  sur  les  propositions  faites  par  le Contrôleur  général  des  lieux  de  privation  de  liberté  afin que  soit  apportée  une réponse satisfaisante aux difficiles conditions de vie de ces enfants vivant auprès de leurs mères incarcérées.  

 b. Le droit de rencontrer ses deux parents

 L’UNAF considère que  l’accès de  l’enfant à  ses deux parents est un droit  fondamental qui 

nécessite  à  cette  fin  un  aménagement  spécifique  du milieu  de  vie  carcérale.  Les  unités  de  vie familiale constituent à ce titre  le  lieu privilégié pour ces rencontres qui doivent pouvoir avoir  lieu dès la naissance.  

 L’UNAF souhaite ainsi leur généralisation, comme le recommande le Contrôleur général des 

lieux de privation de liberté dans son rapport d’activité de 2010.   L’UNAF considère que l’enfant doit pouvoir entrer et sortir librement du milieu carcéral afin 

de rencontrer l’autre parent, titulaire de l’autorité parentale. De même, toute personne autorisée par la mère, doit pouvoir rencontrer l’enfant sans avoir à 

obtenir  un  permis  de  visite  spécifique,  comme  le  prévoit  une  circulaire  de  1999,  pas  toujours correctement appliquée.  

  

2.7. Les droits de l’enfant hospitalisé  Les  remarques  formulées  précédemment  valent  tout  autant  dans  le  cas  des  enfants 

hospitalisés. Ce dernier a droit à ses deux parents, et l’humanisation des lieux de vie sanitaires doit se traduire par une plus grande adaptation au respect de la vie familiale. 

 L’UNAF  et  ses  représentants  au  sein  des  CA  des  établissements  hospitaliers, encouragent  le  développement  des  chambres  « mère‐enfant »  et  toutes  les solutions  complémentaires  permettant  de maintenir  des  liens  quotidiens  entre l’enfant et sa famille.  

 Nous insistons pour que les parents puissent en outre être associés, s’ils le souhaitent, aux 

soins donnés à l’enfant. Cela évite de déposséder le parent, de diminuer les possibles angoisses qui accompagnent l’hospitalisation, tant du côté des parents que de l’enfant.  

Page 17: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

12  

Il est tout aussi important que de maintenir les liens entre l’enfant, ses camarades et amis en permettant un accès plus répandu et gratuit aux technologies nouvelles.  

 L’UNAF relève que  les textes relatifs à l’hospitalisation des enfants sont aujourd’hui anciens 

(Le dernier date de 1998). Il serait intéressant de les revisiter aujourd’hui sous l’angle des droits de l’enfant  et  de  la  parentalité,  et,  au  regard  des  évolutions  sociétales  de  ces  quinze  dernières années.  

 De la même manière, il existe aujourd’hui un droit à la scolarisation des enfants hospitalisés, 

mais à notre connaissance aucune évaluation de ce dispositif n’existe. Si tel est le cas, il serait souhaitable de remédier à cette absence.   

  

3. Faire du principe de coparentalité une réalité pour l’ensemble des familles

  

3.1 Pour une justice familiale plus intégrée  Il  nous  apparaît  qu’un  « pôle  famille »,  vraiment  structuré  et  identifié  au  sein  du  TGI, 

contribuerait à la promotion du droit de la famille lui‐même, qui y gagnerait ainsi dans sa dimension de « spécialité ».  Il permettrait d’améliorer parallèlement  les données statistiques de  la  justice, en facilitant une observation d’ensemble du champ familial. 

 L’UNAF  propose  sur  ce  dernier  point  que  soit  mis  en  place  un  dispositif  de  remontée 

régulière  des  statistiques  relatives  aux  divorces,  séparations  et  aux modalités  de  partage  du temps de  l’enfant auprès de ses parents. Les demandes formulées par  les parents en amont des décisions devraient aussi être  intégrées dans  le  logiciel utilisé par  les  juridictions. L’étude réalisée cette année par le ministère de la justice est muette sur ce point.  

Dans  l’attente d’une mise à niveau des  logiciels permettant une collecte au fil de  l’eau et  la réalisation d’études  annuelles,  l’UNAF  recommande de prévoir des études  spécifiques avec une périodicité régulière, par exemple, tous  les trois ans. La dernière étude sur  la résidence alternée réalisée par le ministère de la justice datait en effet de près de 10 ans…  

 L’UNAF  recommande aussi  la  spécialisation du  Juge aux affaires  familiales, ainsi que  la  délivrance  d’une  formation  obligatoire  relative  aux  problématiques familiales, aux spécificités de l’enfant et à la parole de l’enfant pour tout magistrat amené à occuper cette fonction. 

 L’UNAF a récemment avancé des propositions en ce sens dans le cadre des travaux initiés par 

la Chancellerie sur les « Juridictions du XXIème siècle », et dans le cadre du groupe de travail relatif à l’exercice à la coparentalité après les divorces et séparations. Ces propositions doivent à nouveau être présentées afin d’attirer l’attention des pouvoirs publics4.  

 

4 Voir le texte de l’audition de F. Fondard devant le groupe de travail « Juridiction du XXIème siècle ». Les conclusions des travaux du groupe de travail sur la coparentalité ne sont pas encore rendues publiques.

Page 18: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

13  

3.2 Permettre aux familles de mieux appréhender les règles relatives à l’exercice de l’autorité parentale

 Pour  rendre effective  la  coparentalité,  la  réponse  juridique ne  suffit pas à elle  seule.  Il est 

nécessaire de renforcer  l’information et  l’accompagnement des parents sur  les règles applicables en matière d’autorité parentale.   

Afin  d’accompagner  ces  derniers,  il  conviendrait  de  leur  donner  les  outils nécessaires pour  rappeler  les grands principes de  l’autorité parentale et de  son exercice, notamment afin de prévenir  les difficultés qui peuvent apparaître  lors d’une  séparation  ou  dans  le  cadre  d’une  recomposition  familiale.  Cette information  et  cet  accompagnement  doivent  se  faire  avec  l’idée  constante  que c’est  aux  parents  de  décider  librement  du  choix  et  de  la  façon  dont  doit  être organisée cette coparentalité et ce dans l’intérêt de l’enfant.  

  

a. Quant à l’information  

Les dispositifs d’accès au droit comme outil de prévention et de promotion de la coparentalité 

Nombre des difficultés rencontrées par  les parents au moment des séparations et divorces, ou plus généralement des conflits qui peuvent survenir entre eux, trouvent en partie  leur origine dans une méconnaissance de leurs droits réciproques, et de ceux de leur enfant. 

  Il existe pourtant des  lieux d’informations et de conseils, gratuits, déployés sur  le territoire, 

tels  les centres départementaux d’accès au droit  (CDAD). Plusieurs UDAF nous  signalent que  les familles les méconnaissent et que ceux‐ci ne sont pas assez nombreux pour être accessibles. C’est notamment le cas en milieu rural, et plus particulièrement pour les personnes les plus isolées ou les plus en difficulté.  

 Nous déplorons que cette  justice de proximité, qui correspond à un besoin réel et qui offre 

un panel de services très variés, ne puisse pas disposer de davantage de lieux d’information, et ne fonctionne pas convenablement partout, faute de moyens !  

Les UDAF nous confirment les difficultés de ces structures : ici de moins en moins d’avocats, ou d’éducateurs spécialisés, là, une baisse du budget pour employer du personnel au point d’accès au droit, ou au point info famille … 

 Nous proposons que  les maisons du droit,  les UDAF en  lien avec  les CAF, et  les délégués  du Défenseur  des Droits  puissent  définir  et  proposer  en  commun  des actions préventives et spécifiques sur la coparentalité et les droits réciproques des parents et des enfants.  

 

Page 19: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

14  

Brochure d’information à destination des familles 

Afin  de  prévenir  les  difficultés  qui  apparaissent  entre  les  parents  séparés  et  qui  ne  sont souvent que  le prolongement des difficultés  rencontrées durant  la vie  conjugale, des brochures d’informations  distribuées  dans  des  lieux  ressources  pourraient  être  distribuées  aux  familles Mairies, CAF, PIF, associations familiales…) et de proposer, comme le suggère la note d’analyse du centre d’analyse stratégique, de la détailler sur le portail grand public « info.familles.gouv »5.  

 

Guide sur l’exercice de l’autorité parentale 

A  l’instar du guide  sur «  l’exercice de  l’autorité parentale en milieu  scolaire »  réalisé par  le ministère  de  l’éducation  nationale6,  d’autres  guides  notamment  en milieu  hospitalier  devraient être donnés à chacun des parents  lors de  l’inscription de  l’enfant à  l’école, chez  le médecin,  les hôpitaux…  

Ces  guides  permettraient  une  meilleure  information  tant  à  l’égard  des  parents  que  des professionnels  sur  les  droits  et  devoirs  de  chacun,  et  permettraient  ainsi  de  réduire  les  conflits existant entre les parents et les institutions.  

  

b. Quant à l’accompagnement  L’UNAF souhaite que soient développées les actions de soutien à la parentalité. Les REAAP à 

travers  l’organisation  de  groupes  de  parole  et  de  conférences  permettant  ainsi  aux  parents d’échanger sur les questions concernant notamment l’exercice de l’autorité parentale.  

  

c. Donner une dimension pédagogique aux jugements  L’incompréhension du vocabulaire juridique et du sens à donner aux jugements rendus, sont 

source d’amalgames, d’incompréhensions qui peuvent être à l’origine de conflits entre les parents. Approche juridique des séparations ‐ Juge qui tranche un litige, avocat qui règle une affaire en droit – ne favorise pas  les  liens entre  l’institution  judiciaire et  le  justiciable et au  lieu de tendre vers un apaisement des personnes et des situations provoque souvent des souffrances supplémentaires.   

Les  jugements  rendus  sont  souvent  source  d’amalgames,  qui  peuvent  favoriser  le  conflit entre les parents séparés.  

 Dans  l’exercice de  sa pratique, Mme Danielle Ganancia,  JAF au TGI de Paris, a  inséré dans 

chaque  jugement une  formule destinée  à  rappeler  ce qu’implique  l’autorité parentale  conjointe, formule qui, d’ailleurs, a été  reprise par d’autres  JAF. Selon elle  «  la  loi ne définit pas  le  contenu précis de l’autorité parentale conjointe. Le juge doit donc non seulement l’expliciter à l’audience mais, pédagogie exige, l’écrire dans son jugement ». 

5 Note d’analyse, centre d’analyse stratégique, octobre 2012, n°294. 6 Site eduscol, « guide relatif à l’exercice de l’autorité parentale en milieu scolaire ».

Page 20: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

15  

  Ainsi, dans chaque jugement, il est rappelé que l’exercice de l’autorité parentale implique que les parents ont des devoirs et des droits égaux à l’égard de leur enfant et qu’ils doivent : - « Prendre  ensemble  les décisions  importantes  concernant,  la  santé,  l’orientation  scolaire,  l’éducation 

religieuse et le changement de résidence de l’enfant ; - S’informer  réciproquement,  dans  le  souci  d’une  indispensable  communication  entre  les  parents,  sur 

l’organisation  de  la  vie  de  l’enfant  (vie  scolaire,  sportive,  culturelle,  traitements  médicaux,  loisirs, vacances…) ; 

- Respecter  les  liens et  les échanges de  l’enfant avec  l’autre parent. L’enfant a  le droit de communiquer librement par lettre ou téléphone avec le parent chez lequel il ne réside pas, celui‐ci ayant le droit de le contacter régulièrement ; 

- Respecter l’image et la place de l’autre parent auprès de l’enfant ; - Communiquer, se concerter, et coopérer dans l’intérêt de l’enfant ».   

 Cette disposition formelle est pédagogique et elle a l’avantage de donner du sens au  jugement  concernant  les droits et  les devoirs qu’ont  les parents en  tant que protecteurs des intérêts de l’enfant. L’UNAF souhaite qu’une formulation telle que celle  utilisée  par  Mme  Danielle  GANANCIA  soit  généralisée  à  l’ensemble  des jugements.  

  

d. Les contrats de coparentalité  Les conventions passées par  les parents et soumises à homologation du JAF devraient être 

également  adaptées  aux  difficultés  pratiques  que  rencontrent  les  parents,  ceci  afin  d’apaiser notamment les conflits à l’occasion d’un divorce ou d’une séparation.  

 L’UNAF est favorable aux contrats de coparentalité, dès lors qu’ils sont un support à portée pédagogique aidant  les parents à  l’exercice de  l’autorité parentale dans tous les aspects de la vie quotidienne.   Ces contrats de coparentalité devraient mettre l’accent sur le rappel des droits et devoirs  partagés,  et  les  décliner  sur  les  différents  aspects  de  la  vie  de  l’enfant (Sport, école, vacances…).   Ces  contrats  devraient  également  mentionner  les  décisions  qui  nécessitent l’accord des deux parents.  

 A  l’instar des pays de common  law, où sont  institués  les « parenting plan »,  le contenu des 

contrats de coparentalité pourrait mentionner les principes directeurs de la coparentalité (Respect mutuel des parents, du comportement parental adéquat) et préciser les actes qui nécessitent une prise de décisions communes, ainsi que  l’ensemble des aspects pratiques  relatifs, pour exemple aux contacts téléphoniques, date d’anniversaire de l’enfant, etc...  

Son contenu est toutefois laissé à l’appréciation des parties. 

Page 21: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

16  

 Le  contrat  de  coparentalité  pourrait  être  annexé  au  jugement.  Le  juge homologuerait  alors  l’accord  des  parents  sur  les  aspects  qui  relèvent  de  sa compétence  (Résidence  de  l’enfant…)  et  inviterait  les  parties  à  se  référer  au contrat de coparentalité conclu entre ces derniers pour les aspects qui ne relèvent pas de sa compétence.  

  

3.3 Développer la médiation familiale

  Le principe même de la médiation vise à restaurer la communication et à préserver les liens entre les personnes et plus particulièrement les membres de la famille.  

  Le  champ  d’intervention  de  la médiation  familiale  va  donc  au‐delà  des  simples  ruptures conjugales  et  concerne  l’ensemble  des  situations  de  ruptures  familiales  (Médiation intergénérationnelle, rupture enfant‐parent...). 

Pour l’UNAF, la médiation familiale devrait pouvoir être entamée le plus en amont possible afin d’éviter que le conflit dégénère et se fige, dans bien des cas dans un débat judiciaire. Plusieurs dispositifs pourraient favoriser le recours à la médiation familiale en amont de toute procédure judiciaire :  - une plus grande diffusion sur les sites internet ; - la mise à disposition de brochures sur  la médiation et  la  liste des médiateurs   familiaux dans les mairies, écoles, associations, Caf… ; - une orientation par les professionnels ; - le lancement d’une campagne de promotion de la médiation familiale ; - Le recours à la médiation pourrait également être favorisé grâce à la mention   dans  les conventions parentales ou  les contrats de coparentalité du recours à   la médiation familiale  lors de  la survenance d’une difficulté entre  les parents   sur des questions liées à l’exercice de l’autorité parentale.  

  Pour  l’UNAF,  la mise  en œuvre  de  la médiation  familiale  dans  le  cadre  des  procédures judiciaires, doit se préparer et se travailler collectivement.  

  Elle suppose un partenariat de tous les acteurs du litige familial (juges, greffiers, avocats, notaires, médiateurs familiaux) réunis par le président du tribunal de grande instance, de concert avec le bâtonnier de l’ordre des avocats.  

  Ce  partenariat  doit  permettre  à  chaque  acteur  de  définir  son  rôle  et  sa  place.  Elle  doit permettre pour  les parents d’identifier  le médiateur  comme  un  tiers neutre,  et  indépendant du cadre judiciaire. 

Par ailleurs, pour  l’UNAF,  il est nécessaire d’assurer  la qualité et  la spécificité du service  en  confortant  le  diplôme  de  médiateur  familial.  L’UNAF  souhaite  que seules  les  personnes  qui  sont  titulaires  de  ce  diplôme  puissent  conduire  un processus de médiation familiale, quelle que soit leur profession d’origine. Il s’agit d’assurer à toutes les familles un égal accès à la médiation, mais aussi de renforcer la légitimité du médiateur familial et la lisibilité de ses compétences propres. 

Page 22: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

17  

  La médiation familiale, dans  le cadre des séparations conjugales, est  l’occasion de rétablir un dialogue entre les époux, qui permet parfois d’évoluer vers un divorce moins contentieux, voire vers un divorce par consentement mutuel.  

  Elle favorise également l’exercice en commun de l’autorité parentale et l’affirmation d’une responsabilité durable des parents, quelle que soit  l’histoire de  leur couple. La médiation familiale permet  aux  parents  de  se  réapproprier  un  espace  de  propositions  parentales  communes  qu'ils pourront soumettre au magistrat.  

  Elle permet d’apaiser  le conflit par‐delà  la seule question du  litige, donnant plus de  force aux décisions prises à l’occasion de la séparation. 

  Elle  permet  aux  justiciables,  dans  le  cas  où  une  procédure  devant  le  juge  est  engagée, d’accéder directement à la médiation familiale depuis l’institution judiciaire.  

  Les 2/3 des médiations  familiales  sont dites conventionnelles, c’est‐à‐dire à  l’initiative des parents. Pour le 1/3 restant, il s’agit de médiations familiales judiciaires.  

  L’UNAF  partage  le  souhait  du  Ministre  de  la  Famille  et  du  Ministre  de  la  Justice  de promouvoir davantage ce mode de résolution amiable des conflits dans le domaine familial. 

 a. La médiation « préalable obligatoire »

 L’UNAF  propose  d’étendre  l’expérimentation  de  la  médiation  « préalable obligatoire » menée par le TGI d’ARRAS.   

 En effet, de septembre 2008 à septembre 2013, le TGI d’Arras, à l’initiative de Daniel COQUEL, 

Président du TGI d’Arras et magistrat coordinateur, a mis en place en partenariat avec l’UDAF 62, et à titre d’expérimentation, une médiation préalable obligatoire à l’audience du JAF dans les cas des séparations et, après divorce.  

 La procédure est la suivante : 

Après  dépôt  de  la  requête,  les  parents  reçoivent  une  première  information  de  la médiation familiale grâce à l’envoi d’un dépliant joint au courrier adressé aux parents les convoquant devant  le médiateur familial. Un seul courrier est envoyé aux parents fixant la date et l’heure de la médiation ; 

Les parents rencontrent le médiateur dans un espace neutre ; 

Les parents sont libres d’accepter ou de refuser cette médiation.  

En l’absence d’un ou des parents, la médiation est reportée à une date ultérieure ; 

En  l’absence  d’adhésion  ou  en  cas  de  refus  d’un  ou  des  parents,  le  juge  statue immédiatement, ou reporte une date ultérieure ; 

Le juge ne tire aucune conséquence du refus des parties, aucune sanction n’est prévue ; 

En cas d’accord entre les parties, et en vue de l’homologation de leur accord, les parents peuvent choisir de rencontrer le magistrat, ou, de déposer leur accord au greffe qui sera homologué par le Juge ultérieurement.  

 

Page 23: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

18  

Cette expérimentation a permis d’aboutir à des résultats satisfaisants dans la mesure où sur les  2252  dossiers  confiés  au Médiateur,  1182 médiations  ont  pu  être  réalisées  dont  89%  seront homologuées par le JAF.  

 En septembre 2013, cette expérimentation sera définitivement interrompue à la demande de 

la  chancellerie  et  remplacée  par  les  deux  nouvelles  expérimentations  dites  de  la  « double convocation »  et,  de  la  tentative  de  médiation  préalable  obligatoire  dans  les  instances modificatives.  

 L’UNAF  regrette,  au  regard  des  résultats  relativement  positifs  de  l’expérience  du  TGI 

d’Arras, que cette expérimentation n’ait pas été portée par la Chancellerie et mise en place dans d’autres TGI afin d’évaluer la reproductibilité, ou non, de celle‐ci.  

Une  telle  démarche  aurait  permis  de  confronter  les  résultats  de  cette  démarche expérimentale aux autres expérimentations  initiées ; ceci, sous  réserve d’un accord préalable sur les attendus de chaque expérimentation et sur le choix des indicateurs utilisés pour l’évaluation des dispositifs. Tel n’est pas le cas à ce jour, et nous le regrettons.  

b. Les limites de la double convocation et de la médiation préalable obligatoire telles que mises en place par la Chancellerie.

 Deux démarches expérimentales ont été mises en œuvre par  le ministère de  la  Justice, en 

application des arrêtés du garde des Sceaux du 16 mai 2013 relatives à la « double convocation » et à la médiation préalable obligatoire ». 

  Concernant l’expérimentation de la « double convocation», l’UNAF reste réservée quant aux 

modalités d’application de ce dispositif qui ne semble pas favoriser  la poursuite de  la médiation familiale par les parents.   

Plusieurs  TGI ont  déjà mis  en place  à  ce  jour  un  dispositif  comparable. Or,  les  remontées d’information  concernant  l’impact  de  la  double  convocation  sur  la  poursuite  vers  la médiation familiale,  paraissent  varier  d’un  TGI  à  l’autre,  rendant  difficile  la mise  en  exergue  des  éléments favorisant ou non la poursuite vers la médiation familiale. C’est ce dernier point qui aurait du faire l’objet d’une évaluation. 

 L’UNAF est  tout aussi réservée sur  la seconde démarche expérimentale prévue par arrêté 

du 16 mai 2013. Il s’agit dans ce cas d’une médiation préalable obligatoire, imposée avant la saisine du  JAF, dès  lors que  celle–ci  a pour objet de modifier  la  fixation des modalités de  l’exercice de l’autorité parentale ou de  la contribution à  l’entretien et à  l’éducation de  leur enfant. A défaut du recours des parents à  la médiation familiale,  le magistrat doit alors observer une  irrecevabilité de leur requête.  

 En effet, pour  l’UNAF prévoir une  sanction en cas de  refus des parents de  rencontrer un 

médiateur  risque  d’avoir  des  effets  pervers : modification  de  l’esprit  de  la médiation  familiale, formalisation  de  la  démarche  sans  implication  véritable,  accord  de  façade,  augmentation  du conflit… 

  

Page 24: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

19  

c. Sur l’obligation à l’entretien d’information dans les cas de séparations et de divorces

 L’UNAF est favorable à cette disposition à la condition toutefois et ce notamment au regard des propositions qui ont été faites dans  le cadre des expérimentations citées ci‐dessus : - que cette obligation ne soit pas assortie d’une sanction, au risque d’avoir des 

effets pervers et de porter atteinte aux principes directeurs de  la médiation familiale ; 

- que cette obligation ne se  limite pas à une seule  information mais permette, en cas d’adhésion des parties, d’engager dans le même temps une médiation. 

  

d. Les autres pistes envisageables pour favoriser le recours à la médiation familiale et éviter le dépôt de requêtes modificatives

  D’autres  pistes  pourraient  être  envisagées  afin  d’amener  les  parents  à  recourir  à  la médiation familiale lorsqu’une difficulté apparait quant à l’exercice de l’autorité parentale. 

C’est  ainsi  que  l’UNAF  soutient  les  propositions  faites  des  UDAF  35  et  49,  en proposant  d’ajouter  à  la mention  prévue  dans  les  décisions  de  justice  initiales : « Sauf meilleur accord entre  les parties »  la mention  suivante  « ou élaboré dans  le cadre d’une médiation familiale… ». 

  Cette proposition permettrait d’amener  les parties vers  la médiation familiale et de  limiter le dépôt de requêtes modificatives. 

  Par ailleurs, dès  le dépôt d’une  requête concernant  les modalités d’exercice de  l’autorité parentale,  une  information  par  courrier  pourrait  être  adressée  aux  parties  sur  la  médiation familiale.  

  Il conviendrait que ces propositions s’articulent avec l’obligation faite aux juges d’informer lors de l’audience de la possibilité de recourir à la médiation familiale en cas de difficulté.  

 e. Médiation familiale et Juge pour enfant

 A  contrario  du  juge  aux  affaires  familiales,  il  n’existe  aucune  dispositions  spécifiques 

permettant  au  juge  des  enfants  de  désigner  un médiateur  familial.  Seul  un  article  du  Code  de procédure civile prévoit la possibilité pour les juges de recourir à la médiation.  

L’UNAF constate que  les  juges pour enfants  recourent ainsi  rarement à  la médiation, alors même  que,  par  nature,  nous  nous  retrouvons  dans  des  situations  souvent  problématiques  où, d’une part, l’intérêt de l’enfant peut être contraire à celui des parents, et où, d’autre part, les cas de conflits  conjugaux/parentaux  sont  largement  surreprésentés  en  comparaison  avec  la population générale.  

Page 25: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

20  

 L’UNAF est ainsi  favorable à ce que  le  juge des enfants ordonne une mesure de médiation  familiale dès  qu’il  la  pense  utile.  Nous  préconisons  donc  que  ce magistrat  soit  particulièrement  sensibilisé  à  cette  possibilité,  qui  lui  permet d’ordonner une médiation :  - à titre principal, dans le souci de favoriser un règlement apaisé du conflit et ce, 

avant l’application éventuelle de mesures plus contraignantes ;  - en complément d'une mesure éducative. 

 En  amont,  il  serait  souhaitable  que  les  travailleurs  sociaux  intervenant  dans  le  domaine  de  la protection de l’enfance soient sensibilisés, en cas de conflits parentaux, sur l’utilité d’avoir recours à  un médiateur  familial ;  soit  en  orientant  directement  les  parents  vers  le médiateur,  soit  en  le proposant au juge, par exemple à l’occasion du rapport de situation qui lui est adressé.   

f. Assurer le financement des services de médiation familiale  Pour  l’UNAF,  il  est  essentiel  que  la  réflexion  autour  du  développement  de  la médiation 

familiale soit faite en tenant compte des financements alloués aux services de médiation familiale.  Sur cette question,  l’UNAF souhaite attirer  l’attention sur  le  retrait des  financements de  la 

DGCS  à partir  de  janvier  2014,  concernant  la médiation  familiale.  Si  les  financements  issus  de  la branche famille vont augmenter dans le cadre de la COG Etat‐CNAF, il n’en demeure pas moins que l’objectif  fixé dans  cette COG, à  savoir  le doublement des mesures de médiation,  sera difficile à atteindre.  Par  ailleurs,  à  ce  jour  aucune  indication  n’est  faite  quant  aux  autres  financeurs  et notamment le ministère de la Justice. Dès lors que l’Etat se retire des financements, la participation des conseils généraux, qui est facultative, risque aussi d’être fragilisée. 

 Pour  l’UNAF,  pour  favoriser  le  développement  de  l’offre  il  est  nécessaire d’améliorer les financements des services de médiation familiale :  ‐  en  renforçant  la  prestation  de  service  versée  par  les  Caf  et  en  stabilisant  les financements ;   ‐ en revalorisant le prix plafond et veiller à ce qu’il soit régulièrement réactualisé ; ‐ en mobilisant un engagement pérenne de  l’ensemble des  financeurs  impliqués dans les comités de financement.  

  

Page 26: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

21  

3.4 Résidence alternée  

a. Les positions de principe  La  résidence  alternée  est  la  conséquence  logique  de  l’inscription  de  la  loi  du  principe  de 

coparentalité, en ce sens qu’elle constitue  la modalité de partage des temps de  l’enfant  la plus à même de faire de ce principe une réalité. 

 C’est  au  regard  de  cette  position,  défendue  par  l’UNAF,  que  notre  institution  conçoit  la 

nécessité de clarifier la place et le rôle de chacun.  Or,  une  confusion  existe  aujourd’hui  sur  la  notion  de  résidence  alternée,  qui  est  souvent 

assimilée à un partage de temps strictement égalitaire.   

Si l’UNAF est favorable à la résidence alternée, elle milite avant tout pour que soit inscrit, dans la loi, le principe d’un partage du temps auprès de l’enfant, sans pour autant que celui‐ci soit égalitaire. Le magistrat doit pouvoir statuer en fonction des particularités de chaque situation, en fonction d’un intérêt de l’enfant qui ne peut être estimé qu’au cas par cas (âge de l’enfant, éloignement géographique, nature du conflit parental…). 

  

Pour l’UNAF le terme de résidence alternée pourrait ainsi lui‐même être remplacé par  un  autre  terme  qui  rende  davantage  compte  de  l’éventail  des  modalités d’exercice  de  cet  « accueil ».  Ainsi  pourrions‐nous  parler,  par  exemple,  de « fixation des conditions » ou de « modalités » de partage de l’accueil de l’enfant.  

  

L’UNAF est donc opposée à ce que la résidence alternée paritaire soit inscrite dans la loi comme étant le principe de base. 

  

Enfin,  l’UNAF est  favorable à  ce que  soit modifié  le  terme même de  « résidence alternée » et de « droits de visite et d’hébergement » et, qu’il ne soit réservé qu’à des situations relevant d’une décision volontairement  « limitative », justifiée par la protection de l’enfant, et prononcée par le Juge des enfants.  

  Les droits de visites et d’hébergement, même étendus, ne sont pas perçus par les justiciables 

comme  des  droits  entiers.  Ni  par  celui  qui  en  « bénéficie »,  ni  par  le  parent  qui  a  la  résidence principale  :  ce  dernier  en  vient  très  souvent  à  penser  que  l’autre  parent  ne  partage  pas  les différents attributs de l’autorité parentale. 

Pourtant, dans les faits, il peut n’y avoir que très peu de différence entre un droit de visite et d’hébergement étendu et un prononcé de résidence alternée. Une même modalité de partage de l’accueil de  l’enfant, par exemple 5 nuits sur 14  jours (comme cela semble être parfois  le cas) peu légalement  être  qualifiée  par  le  magistrat  de  résidence  alternée  ou  de  droit  de  visite  et d’hébergement à l’égard du parent qui aurait moins souvent l’enfant à son domicile. Dans les faits, toutefois, c’est la deuxième solution qui sera généralement choisie par le JAF. 

Page 27: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

22  

Pourquoi ne pas étendre  le  terme de  résidence alternée à ces situations ? Cela permettrait symboliquement  de  regrouper  sous  un même  terme  le mode  d’accueil,  rétablissant  une  forme d’égalité en droit pour les deux parents. Ne serait‐ce pas une source d’apaisement des conflits, ainsi que de reconnaissance des droits des uns et des autres ?  

Une telle solution aurait en outre le mérite de permettre l’accès des deux parents à des droits fiscaux  et  à  une  possibilité  de  partage  des  allocations  familiales  (uniquement  possible  si  le magistrat qualifie le mode de résidence de résidence alternée, même si celle‐ci n’est pas paritaire).  

 

 b. Quelles contre-indications à la résidence alternée ?

  

Concernant le non versement des pensions alimentaires :  

L’UNAF  affirme  fortement  que  la  décision  de  résidence  alternée,  ou  le  simple exercice des droits de visites et d’hébergement, ne doivent pas être conditionnés par le respect de l’obligation parentale d’entretien, ou du versement de la pension alimentaire.  

 Une telle disposition reviendrait à faire de  la résidence alternée une forme de droit pour  les 

parents dont serait privé celui qui ne s’affranchirait pas de certaines obligations à l’égard de l’autre.  Par  ailleurs,  quel  est  le  lien  entre  le  paiement  de  la  pension  alimentaire  et  la  capacité  du 

parent à « permettre le développement de l’enfant dans le respect dû à sa personne » ?   

L’UNAF estime que l’intérêt de l’enfant ne peut et ne doit être mis en balance. S’il y  a  un  conflit  lié  au  paiement  de  la  pension  alimentaire,  il  doit  être  réglé indépendamment,  dans  le  cadre  de  procédures  dédiées,  et  autrement  qu’en privant éventuellement  l’enfant de  son droit à vivre durablement avec  ses deux parents dans une relation de quotidienneté, fût‐elle parcellaire.  

  

Concernant la présence d’un conflit parental :  Pour  l’UNAF,  le  constat  d’un  conflit  entre  les  parents  ne  peut  justifier,  en  soi,  un 

empêchement à  la résidence alternée, même s’il peut  la rendre plus difficile, et éventuellement y faire échec du fait de l’incapacité à communiquer qui accompagne le dit conflit. 

 Dans  le  cas  contraire,  cela  reviendrait à déléguer de  facto, en quelque  sorte,  la décision à 

celui des deux parents qui,  refusant  la  résidence alternée, se sentirait en position de  force. C’est l’intérêt de l’enfant qui doit rester le critère déterminant.  

 L’UNAF  considère  ainsi  que  le  conflit  n’est  pas  indépassable.  Il  est  possible  par  exemple 

d’ordonner parallèlement une médiation familiale pour y remédier.   L’UNAF souligne aussi qu’en  l’absence de résidence alternée,  le choix concurrent des droits 

de visites et d’hébergement n’apporterait pas de  solution plus  convaincante. En effet, dans une telle situation l’enfant est tout aussi contraint à des déplacements, à être témoin du conflit, etc… 

 

Page 28: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

23  

Il peut être aussi intéressant d’ordonner une résidence alternée, précisément lorsqu’il y a un conflit  parental,  afin  de  prévenir  l’éviction  d’un  des  deux  parents  du  fait  de  l’attitude,  de  la tentative d’obstruction, de l’autre.  

  

Concernant la question de la présence maternelle et celle de l’âge de l’enfant :  L’UNAF  considère  que  le  père  et  la  mère  peuvent  constituer  des  figures  principales 

d’attachement pour  les  jeunes  enfants.  La  condition  de maternité  ne peut  ainsi  être  en  soit  un critère pour refuser la résidence alternée.  

  Les  conditions d’un bon développement de  l’enfant en bas âge nécessitent pour  leur part 

une stabilité, si ce n’est une permanence, de la figure d’attachement principale mais aussi du cadre de vie. En conséquence, un mode d’accueil principalement fixé chez l’un ou l’autre des parents est sans nul doute préférable à  la résidence alternée durant  les toutes premières années de  la vie de l’enfant.  

Par  ailleurs,  les  droits  de  visites  et  d’hébergement,  induisent  également  une modification dans  le  rythme de vie du  jeune enfant.  Ils ne garantissent donc pas cette nécessaire  stabilité du rythme de l’enfant.  

 L’UNAF  estime  préférable  qu’il  ne  soit  accordé  au  parent  qui  n’héberge  pas l’enfant en bas âge, que des droits de visite sans hébergement durant les premiers mois  de  la  vie  de  l’enfant.  Toutefois,  parce  qu’il  est  primordial  pour  le développement de  l’enfant qu’il se construise très tôt une qualité d’attachement satisfaisante avec les deux parents, il est important que ces droits de visites soient suffisamment longs et réguliers.  

  

Concernant l’incapacité d’un parent :  

Le  fait  de  bénéficier  d’une  mesure  de  protection  des  majeurs  n’a  aucune  incidence  sur l’autorité parentale.  

Pour l’UNAF, cela ne peut donc justifier en soi le refus d’une résidence alternée.   

La  situation  individuelle  doit  être  estimée  de manière  spécifique  au  regard  de l’intérêt de l’enfant, en ayant éventuellement recours aux moyens d’investigations mis à l’usage du JAF. 

   

3.5 Pensions alimentaires  

l’UNAF est favorable à l’utilisation du barème indicatif des pensions alimentaires qui existe à ce jour, mais elle estime qu’il serait possible de l’améliorer en tenant compte non seulement des ressources du débiteur, mais aussi de celles du créancier ; sans toutefois prévoir une exonération totale de la contribution à la charge d’enfant. 

 

Page 29: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

24  

Pour  l’UNAF,  l’intérêt  de  l’enfant  doit  être premier,  de  sorte que  s’il  y  a  un  conflit  lié  au paiement  de  la  pension  alimentaire,  il  doit  être  réglé  indépendamment,  dans  le  cadre  de procédures  dédiées,  et  autrement  qu’en  privant  éventuellement  l’enfant  de  son  droit  à  vivre durablement avec ses deux parents dans une relation de quotidienneté, fût‐elle parcellaire.  

Les droits de visites et d’hébergement ou  la  résidence alternée ne doivent donc pas être strictement conditionnés par le versement ou non de la pension alimentaire.  

 En cas de non paiement, l’UNAF rappelle que les CAF peuvent se subroger dans les droits du 

parent créancier d’aliments lorsque l’autre parent se soustrait à ses obligations et engager à cette fin  toute action contre  le parent débiteur. L’allocation de  soutien  familial est alors versée à  titre d’avance.  

Cette intermédiation et cette mise à distance des deux parents permettent de protéger non seulement le parent créancier, mais aussi l’enfant.  

 A  noter  que  le  projet  de  loi  « Egalité  femme  –  homme »  prévoit  des  dispositions  visant  à 

améliorer ce dispositif.  

 

3.6 Faire de la coparentalité une réalité juridique et sociale : accompagner les évolutions du droit civil de la famille de nouveaux droits sociaux

 Pour  l’UNAF,  la  valorisation  de  la  coparentalité  doit  s’accompagner  de mesures visant à garantir un meilleur équilibre entre les deux parents, tant sur le plan des prestations sociales et familiales (Ex : partager les allocations), qu’au niveau de la politique fiscale, ou qu’en matière d’accès au logement social.  

  

a. Fiscalité  L’UNAF  souligne  l’iniquité d’un dispositif  fiscal qui, dans  les  cas de  résidence alternée, ne 

permet pas au parent débiteur d’une pension alimentaire de bénéficier à la fois d’une majoration du quotient familial liée à la présence d’enfants, et de la déduction de cette somme versée – de sorte que le parent en question va payer l’impôt sur le revenu sur une somme qu’une décision de justice lui interdit pourtant de disposer. 

Inversement, le parent bénéficiaire de la pension va, dès lors qu’il est imposable, devoir payer un montant d’impôt sur cette somme qui se trouve ainsi deux fois imposée. 

  

b. Prestations sociales et familiales  Aujourd’hui, seul  le partage des allocations familiales stricto sensu est possible, dans  les cas 

de  résidence  alternée,  lorsque  les  parents  le  demandent.  Cela  ne  permet  pas  l’accès  à  la coparentalité pour tous. Peut‐on admettre pour exemple qu’un enfant handicapé ne puisse vivre chez ces deux parents au motif que  l’un des deux n’a pas  les moyens matériels d’un accueil qui serait pourtant possible si  les deux parents pouvaient recevoir  l’allocation d’éducation de  l’enfant handicapé (AEEH) ?  

 

Page 30: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

25  

Une  réflexion mérite d’être  engagée  afin d’accompagner  les  évolutions du droit  civil d’un accès à de nouveaux droits sociaux et familiaux susceptibles de  les rendre effectifs pour tous  les couples divorcés ou séparés, au bénéfice de tous les enfants se trouvant dans cette situation. 

 

 

4. Le tiers auprès de l’enfant  

Sur la question des droits des tiers, l’UNAF a toujours été favorable aux dispositions destinées à faciliter la vie quotidienne des familles, mais à la condition que l’autorité parentale ne devienne pas une  propriété  disponible  pour  les  parents,  voire  les  tiers,  ce  qui  serait  contraire  à  l’intérêt  de l’enfant. Aussi, un  risque de  transformation de  l’idée même de  la  famille où  l’autorité parentale serait une  conséquence des  seuls  liens affectifs,  introduisant ainsi  le  trouble et  l’ambiguïté dans l’identification de ses parents par l’enfant, serait contraire à l’intérêt de l’enfant.  

 Pour  l’UNAF, c’est en raison de  la participation de cette personne à  l’éducation de  l’enfant, 

que le rôle et la place du tiers doivent être reconnus.   

 

4.1 Clarifier les actes usuels  Pour  l’UNAF, développer  l’information et  l’accompagnement des parents dans  l’exercice de 

l’autorité parentale  tant  au point de  vue de  l’accompagnement que de  la  clarification des  actes juridiques, permet de faciliter le rôle du tiers qui participe à l’éducation de l’enfant. Le plan parental doit s’inscrire dans cette dynamique. 

 Pour  l’UNAF  et  afin  de  faciliter  la  place  du  tiers  qui  exerce  de  fait  des  responsabilités 

éducatives, la définition des actes usuels doit être clarifiée.    L’article 371‐1 du Code civil dispose que « L'autorité parentale est un ensemble de droits et de 

devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant. Elle appartient aux père et mère jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne ». L’autorité parentale apparaît ainsi comme une mesure de protection de l’enfant.  

 Quel  que  soit  le  statut  du  couple  (marié,  pacsé  ou  vivant  en  concubinage),  depuis  2002, 

l’autorité parentale est exercée en commun par les père et mère (art. 372 C.Civ) et la séparation des parents est « sans  incidence  sur  les  règles de dévolution de  l’exercice de  l’autorité parentale »  (art. 373‐2). 

 Pour  faciliter  cet  exercice  conjoint  de  l’autorité  parentale  au  quotidien,  la  loi  prévoit  une 

présomption d’accord pour « les actes usuels » : « A l’égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l'accord de l'autre, quand il fait un acte usuel de la vie courante relatif à l'enfant » (art. 372‐2 C.Civ). 

 

Page 31: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

26  

L’UNAF considère qu’il n’y a pas lieu d’établir une liste des actes usuels, car ceci entrainerait de facto un risque de voir  les parents s’affranchir de chercher  l’accord de  l’autre pour exercer ces actes alors même que  la  loi  incite  les parents à  s’entendre  sur  tous  les aspects de  la vie de  leur enfant, quels qu’ils soient. Une telle disposition irait ainsi à l’encontre du principe de coparentalité. 

 Pour l’UNAF, sans dresser une liste des actes usuels, il serait toutefois possible de les clarifier. Elle propose ainsi d’inscrire dans  le Code civil  la définition des actes usuels telle que formulée par  la cour d’appel d’Aix‐en‐Provence dans un arrêt de 2011. Les actes usuels seraient ainsi définis comme étant :  « Les  actes  de  la  vie  quotidienne,  sans  gravité,  qui  n’engagent  pas  l’avenir  de l’enfant,  qui  ne  donnent  pas  lieu  à  une  appréciation  de  principe  essentielle  et  ne présentent  aucun  risque  grave  apparent  pour  l’enfant,  ou  encore,  même  s’ils revêtent un caractère important, des actes s’inscrivant dans une pratique antérieure non contestée ».7 

  

4.2 Des réponses déjà existantes  

Les solutions aux difficultés éducatives rencontrées dans le cas des familles recomposées ne sont que très partiellement à rechercher dans le droit civil de la famille, dans la création d’un statut juridique.  

C’est  avant  tout  dans  les  pratiques  et  les  interactions  quotidiennes  que  se  construisent chaque  jour  le statut social et  la place de chacun des adultes vivant auprès de  l’enfant. C’est en proposant ainsi des actions de  soutien à  la parentalité, ancrées  sur  les  réalités quotidiennes des familles,  que  la  collectivité  peut  réellement  aider  les  tiers,  notamment  les  beaux‐parents,  à  se construire une place auprès des enfants d’une précédente union, et inversement. 

 Toutefois, certains aménagements juridiques méritent d’être pensés, tout en prenant acte de 

l’existant.  L’UNAF rappelle qu’à ce jour, le droit positif permet déjà au beau‐parent d’obtenir :  

- Un droit de  visite  et d'hébergement  après  la  séparation d'avec  le parent de  l'enfant (C.Civ., art. 371‐ 4). Depuis  la  loi du  17 mai 2013,  le second alinéa de  l’article 371‐4 vise expressément le droit du beau‐parent, « le tiers qui a résidé de manière stable avec lui et l’un de ses parents, à pourvu à son éducation, à son entretien ou à son  installation, et a 

noué  avec  lui  des  liens  affectifs  durables ».  Sous  cette  expression  le  législateur désigne le « beau‐parent » qui a partagé pendant un temps certain la vie de l’enfant. 

- La garde de l'enfant en cas de décès du parent qui en avait la garde (C.Civ., art. 373‐3), - Mais surtout  le droit d'exercer ou de partager  l'autorité parentale avec  l'un des deux 

parents  ou  les  deux  du  fait  de  la  délégation  totale  ou  partage  (C.Civ.,  art.  377‐1 :  cf. supra). 

 L’UNAF est  favorable au maintien  tel quel de ces dispositions dont  la mise en œuvre doit 

rester  toujours motivée  par  l’intérêt  de  l’enfant.  Il  est  important  que  ce  droit  reste motivé  par l’intérêt de l’enfant et ne devienne par un droit du tiers à maintenir des relations avec l’enfant. En aucun cas le beau‐parent ne doit se voir reconnaître un droit automatique à maintenir des relations avec l’enfant. 

7 Cour d’appel d’Aix-en-Provence, chambre des mineurs, 28 octobre 2011.

Page 32: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

27  

  L’inscription d’un statut du tiers prenant la forme de dispositions générales dans le droit positif est inutile.  

 En  revanche,  les contrats de coparentalité pourraient clarifier  le cas échéant  les actes  de  la  vie  quotidienne  pour  lesquels  des  tiers  pourraient  agir  (nouveau conjoint d’un des parents par exemple), et constituer ainsi un outil de prévention des conflits, mais aussi de reconnaissance.  D’autre  part,  afin  que  le  tiers  puisse  obtenir  une  légitimité  juridique  dans  la réalisation des actes effectués pour les besoins de l’enfant il convient de favoriser le recours à la délégation partage et d’en faire un dispositif propre et distinct de la délégation totale ou partielle de l’autorité parentale.  

  

4.3 Faciliter le recours à la délégation-partage de l’autorité parentale

 Deux dispositions du code civil permettent d’exercer totalement ou partiellement  l’autorité 

parentale  sur  l’enfant  (délégation  totale  ou  partielle  de  l’autorité  parentale)  et  l’autre  de  la partager  avec  l’un  des  deux  parents  (délégation  partage)  Rappelons  que  ces  mesures  ne concernent pas  seulement  le beau‐parent  et peuvent  être mises  en œuvre  au bénéfice d’autres tiers (grands‐parents, oncle, tante…). 

 Les  effets  de  la  délégation  totale  ou  partielle  de  l’autorité  parentale  et  de  la  délégation 

partage sont différents. En cas de délégation totale ou partielle, les parents demeurent titulaires de l’autorité parentale mais renoncent à l’exercer en la déléguant au profit d’un tiers. 

En cas de délégation partage,  le ou  les parents partage(nt) son autorité parentale avec un tiers mais reste(nt) titulaire(s) de l’exercice de l’autorité parentale et il(s) continue(nt) de l’exercer.  

 A ce jour, le dispositif de la délégation est une mesure qui est justifiée par des circonstances 

particulières,  notamment  en  cas  d’impossibilité  pour  le  ou  les  parents  d’exercer  l’autorité parentale.  Elle  vise  à pallier de  façon  temporaire  l’incapacité du ou des parents  à  exercer  cette autorité en  la déléguant à un tiers. Cette délégation peut‐être volontaire, à  la demande du ou des parents ou, forcée à la demande d’un tiers.  

 La délégation partage de l’autorité parentale telle que prévue à l’article 377‐1 du code civil se 

présente comme une déclinaison de la délégation classique alors qu’elle est une idée innovante.  

 L’article 377‐1 alinéa 2 concernant la délégation partage est ainsi rédigé : « Toutefois,  le  jugement de délégation peut prévoir, pour  les besoins d'éducation de  l'enfant, 

que  les père et mère, ou  l'un d'eux, partageront  tout ou partie de  l'exercice de  l'autorité parentale avec  le  tiers  délégataire.  Le  partage  nécessite  l'accord  du  ou  des  parents  en  tant  qu'ils  exercent l'autorité parentale. La présomption de l'article 372‐2 est applicable à l'égard des actes accomplis par le ou les délégants et le délégataire.  

Le  juge  peut  être  saisi  des  difficultés  que  l'exercice  partagé  de  l'autorité  parentale  pourrait générer par  les parents,  l'un d'eux,  le délégataire ou  le ministère public.  Il statue conformément aux dispositions de l'article 373‐2‐11 » 

 

Page 33: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

28  

Le partage de l’autorité parentale présente donc l’avantage : 

‐  De ne pas dessaisir  le ou  les parents de  l’exercice de  l’autorité parentale qui  tout en  la partageant continue(nt) de l’exercer. 

‐  De  poser  comme  condition  à  sa  mise  en  œuvre  l’accord  des  deux  parents  en  cas d’exercice  commun de  l’autorité parentale,  et qu’elle  soit  justifiée pour  les besoins de l’éducation de l’enfant. 

‐  De  poser  une  présomption  quant  aux  actes  de  la  vie  courante  effectués  par  le  tiers délégataire à l’égard des tiers. 

‐  De prévoir le recours devant le juge, en cas de difficulté sur l’exercice partagé.   L’assouplissement  de  la  procédure  et  des  conditions  de  la  délégation‐partage  est  une 

possibilité  offerte  au  législateur  pour  permettre  aux  enfants  vivant  auprès  d’une  famille  dite recomposée  de  leur  voir  reconnues  des  prérogatives  et  obligations  parentales,  sans  avoir  à modifier par ailleurs les règles du droit de la filiation.  

 Afin d’aménager  l’exercice de  l’autorité parentale pour un  tiers  ayant  la  charge effective de l’éducation de l’enfant (Indépendamment de l’orientation sexuelle du couple dans lequel il vit), la délégation‐partage de l’autorité parentale au profit de l’autre membre du couple, marié ou non, pourrait être facilitée par  la  loi, tant du point de vue procédural que des conditions de mise en œuvre.  

 Pour autant,  le partage de  l’autorité parentale doit être un dispositif propre distinct de  la 

délégation. En effet,  la délégation classique qu’elle soit volontaire ou forcée vise  les situations où l’un  des  parents  en  raison  de  circonstances  particulières  ne  peut  exercer  cet  exercice.  Or,  la délégation ici ne vise pas une circonstance particulière ou une incapacité mais une organisation de l’enfant justifiée pour les besoins de l’enfant. La portée de cet article est donc source de confusion, puisque la délégation est soit utilisée comme venant sanctionner la défaillance de l’un des parents soit utilisée pour organiser la vie de l’enfant.  

 Pour  l’UNAF, sans modifier  les dispositions  juridiques sur  le partage de  l’autorité parentale,  il  conviendrait  de  distinguer  clairement  dans  le  code  ces  deux dispositifs ‐  celui de  la délégation  totale  et partielle  et celui de  la délégation de partage de l’autorité parentale – en créant deux articles distincts. 

  

Pour l’UNAF, et afin de rendre plus souple la procédure de délégation partage, une convention  de  délégation  partage  pourrait  être  simplement  soumise  à homologation  du  JAF,  voire  même  à  une  simple  validation  devant  le  greffe. Plusieurs conditions pourraient être  respectées et contrôlées dans un cas comme dans l’autre : - que cette demande soit justifiée pour les besoins d’éducation de l’enfant ; - le consentement libre et éclairé de chacun des parents ;   - l’exigence  d’une  durée  minimum  de  vie  commune,  d’une  stabilité  effective 

probante, ou d’une relation continue avec l’enfant.   Afin  de  prévenir  tout  conflit  dans  le  cadre  de  la  délégation  possible,  et  d’en protéger ainsi l’enfant, l’intervention du médiateur familial, ou de l’avocat dans la rédaction de la convention est une piste à envisager.   

Page 34: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

29  

Par ailleurs, le partage de l’autorité parentale prendrait fin suite à la séparation, en cas de nouvelle recomposition familiale, soit à  la demande du tiers ou de  l’un ou des deux parents. Elle devrait alors être constatée par le juge.  

 Elle prendrait fin dans tous les cas à la majorité de l’enfant. 

  

4.4 Faciliter les dons et legs  Aujourd’hui le beau‐parent qui souhaite donner à l’enfant de son ou sa partenaire est soumis 

à un taux d’imposition de 60 %, sans bénéfice des abattements – c'est‐à‐dire  indépendamment du montant de la donation.  

 L’UNAF  est  favorable  à  ce  qu’un  adulte  ayant  contribué  à  l’entretien  et  à l’éducation de  l’enfant de  son  conjoint ou de  sa partenaire puisse bénéficier de nouveaux avantages fiscaux en matière de libéralités, sous réserve qu’il soit marié ou pacsé avec le parent de l’enfant depuis un certain nombre d’années et que ces avantages  n’entament  pas  les  droits  des  enfants  dont  la  filiation  est  établie  à l’égard du parent.   Dans ce cadre, l’UNAF propose ainsi que le beau‐parent puisse bénéficier du même régime  fiscal  accordé  aux  parents  et  à  leur  enfant.  Les  dons  et  les  legs  ne concerneraient que la quotité disponible.   

 L’UNAF  tient  à  souligner  que  dans  le  cadre  de  l’adoption  simple,  le  parent  adoptif  peut 

donner ou léguer un bien à l’adopté en bénéficiant d’avantages fiscaux. Or, la jurisprudence considère toutefois, qu’une demande d’adoption motivée par la volonté 

de  transmettre  un  bien  à  l’adopté  est  contraire  au  but  poursuivi  par  l’institution.  La  demande d’adoption à des  fins exclusivement successorales ou  fiscales sera donc  rejetée par  le  législateur afin d’éviter notamment un détournement fiscal de  l’adoption simple. Si on ne peut comparer  les dons  et  legs  dans  le  cadre  l’adoption  simple  à  la  situation  du  beau‐parent,  la  question  du détournement des règles fiscales se pose toutefois.  

 C’est  la  raison pour  laquelle,  la  reconnaissance d’un allègement  fiscal sur  les biens que  le 

beau‐parent souhaite donner ou léguer à l’enfant de sa ou son partenaire, doit être encadrée par la loi et soumise à des conditions strictes.  

 

Page 35: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

30  

 

5. Offrir aux parents en difficultés les moyens de satisfaire aux besoins de leurs enfants

 L’UNAF tient à rappeler que  l’article 18 de  la CIDE dispose que  la responsabilité d’élever un 

enfant  incombe en premier  lieu aux parents ou à ses représentants  légaux,  lesquels doivent être guidés par  l’intérêt de  l’enfant. En contrepartie de ce principe,  l’UNAF considère que  l’Etat doit à l’enfant de soutenir autant que faire ce peut les parents dans leur fonction parentale. 

Cela passe par l’amélioration des conditions matérielles d’existence des familles, qui peut se décliner  sur  des  points  précis  directement  en  lien  avec  les  questions  liées  à  la  protection  de l’enfance, et par le respect des droits des parents. 

Les éléments de connaissances disponibles dans la littérature scientifique montrent d’ailleurs que ces deux dimensions sont étroitement liées, le non‐recours au droit étant sur‐représenté chez les familles pauvres. 

 

 

5.1 Sur les fondements de la protection de l’enfance  

L’UNAF est favorable à une conception élargie de la protection de l’enfance inscrite dans la réforme de 2007. 

L’UNAF se retrouve pleinement dans  l’esprit de  la  loi 2007‐293 du 5 mars 2007 réformant  la protection de l’enfance de 2007 qui indique dans son article premier que la protection de l’enfance « a pour but de prévenir les difficultés auxquelles les parents peuvent être confrontés dans l'exercice de leurs responsabilités éducatives, d'accompagner les familles et d'assurer, le cas échéant, selon des modalités adaptées à leurs besoins, une prise en charge partielle ou totale des mineurs ».  

 Les parents sont ainsi les premiers acteurs de la protection de l’enfance et se doivent d’être 

aidés à cette  fin par  la collectivité. Car  la protection de  l’enfance est aussi  l’affaire de  tous. Elle prend  appui  sur  la  qualité  du  contexte  environnemental  et  sur  l’enrichissement  et  le développement du tissu social pour se structurer dans le cadre de la politique familiale autour des dispositifs  de  soutien  à  la  parentalité,  et  dans  le  cadre  des  politiques  sociales,  éducatives  et judiciaires, tant au niveau de l’aide sociale à l’enfance qu’en matière de justice pénale des mineurs. 

En  ce  sens,  la  question  du  bien‐être  de  l’enfant  doit  intéresser  la  quasi‐totalité  des ministères.  

  

5.2 Conditions matérielles d’existence : un pré-requis à l’action psycho-socio-éducative

 Les  situations  d’enfance  en  danger  sont  des  situations  complexes,  où  se  cumulent  les 

difficultés.  Elles ont  toutefois  en  commun d’être  caractérisées dans  la majorité des  cas par une précarité économique et matérielle. Trop souvent, une action psycho‐socio‐éducative est proposée sans  autre  forme  d’accompagnement  véritable  permettant  d’agir  sur  les  conditions matérielles d’existence des familles.   

Page 36: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

31  

  

a. Améliorer le recours à l’accompagnement budgétaire des familles dans l’intérêt de l’enfant

 La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance a créé la mesure judiciaire d’aide à 

la gestion du budget  familial  (MJAGBF), en  remplacement de  l’ancienne  tutelle  aux prestations sociales enfance (TPSE), qu’elle introduit dans le code civil en même temps qu’elle l’inscrit dans le domaine de la protection de l’enfance.  

Il  s’agit d’une mesure  utile,  visant  le bien‐être  des  enfants par  un  soutien  actif  auprès  de parents cumulant des difficultés, notamment matérielles.  

 A)  La MJAGBF se doit d’être clairement différenciée de la loi n° 2010‐1127 du 28 septembre 2010 

visant  à  lutter  contre  l'absentéisme  scolaire en permettant  la  suspension des  allocations familiales, et de tout autre texte  législatif motivé par une  logique sécuritaire, et axé sur  la culpabilisation  et  le  répression  à  l’égard  de  parents.  Or,  le  fait  que  la  MJAGBF  soit expressément citée dans le cadre de la loi de prévention de la délinquance vient entretenir une  confusion  quant  à  sa  logique  et  ses  finalités,  amenant  les  acteurs  de  terrain,  et notamment  les  travailleurs  sociaux,  à ne pas  explorer  cette  voie,  et  à pénaliser  ainsi  les familles qui auraient pu en bénéficier. 

  Sa pleine application nécessite qu’elle soit aujourd’hui déconnectée de la loi de prévention de la délinquance qui prévoit dans son article 10 que  le maire ou son représentant au sein du conseil des droits et devoirs des familles peut saisir les juges des enfants, conjointement avec l’organisme débiteur des prestations familiales, afin de réclamer une MJAGBF.  

   L’UNAF souhaite la suppression de l’article 375‐9‐2 du Code civil ayant inscrit dans le dit code l’article 10 de la loi 2007‐297 du 5 mars 2007. 

 B)  La création de la MAESF, dans le cadre de la loi du 5 mars 2007‐293 réformant la protection 

de l’enfance, semble avoir contribué à un mouvement plus général de baisse du nombre de MJAGBF prononcées par  les  juges pour enfants. Cela, compte tenu du fait que  le principe de subsidiarité de  la  justice, porté par  la  loi réformant  la protection de  l’enfance, amène à ce que  les MJAGBF ne devraient être prononcées que dans  les cas où  l’accompagnement administratif, par l’intermédiaire de la MAESF, est insuffisant (Ceci a d’ailleurs été confirmé par  un  arrêt  de  la  Cour  de  cassation  du  20  octobre  2010).  Or,  une  majorité  des départements  ne  semble  pas  avoir  mis  en  place  cette  MAESF,  se  contentant  dans  le meilleur  des  cas  d’une  aide  de  substitution  effectuée  au  niveau  du  territoire  d’action sociale, généralement par l’embauche de CESF supplémentaires. 

 Pour  l’UNAF,  il  est  du  rôle  de  l’Etat  que  de  s’assurer  que  la  loi  est  appliquée partout sur le sol national, de sorte que l’offre de service prévue par la création de la MAESF puisse être proposée sur tout le territoire national.  

 C)  Mais  l’action  budgétaire  auprès  des  familles  dans  l’intérêt  de  l’enfant,  par  le  biais  des 

MAESF et MJAGBF est aussi empêchée par le dévoiement d’un autre dispositif créé dans le cadre de la loi du 5 mars 2007‐308 portant réforme de la protection  juridique des majeurs. Ces deux mesures de protection de l’enfance subissent ainsi une concurrence inappropriée avec  la mesure d’accompagnement social personnalisée avec gestion  (MASP 2)  (destinée aux  adultes  percevant  des  prestations  sociales  et  dont  la  santé  ou  la  sécurité  sont menacées par les difficultés éprouvées dans la gestion de leurs ressources).  

Page 37: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

32  

  Cette  dernière  peut  ainsi  être  utilisée  à mauvais  escient  par  des  travailleurs  sociaux  qui semblent souvent méconnaitre la MJAGBF. 

 A cette  fin,  il  serait  souhaitable que  les  services de  l’Etat communiquent auprès des  conseils  généraux  afin  de  leur  rappeler  l’intérêt  d’une  inscription  de  la MJAGBF dans  les schémas départementaux  relatifs à  l’enfance et à  la  famille où aux solidarités, selon les termes consacrés localement.  

  

b. Le maintien du principe de versement direct des allocations familiales aux parents en cas de placement judiciaire

 Afin de permettre aux parents de continuer d’exercer leurs responsabilités, et pour maintenir 

plus largement le lien entre parents et enfant au‐delà de la possible séparation, l’UNAF affirme avec force son attachement à ce que les allocations familiales et l’allocation de rentrée scolaire puissent continuer  à  être  versées  directement  aux  parents  dans  leur  intégralité  si  nécessaire.  Seul  le magistrat doit pouvoir estimer, au cas par cas,  l’opportunité de verser directement tout ou partie de ces aides aux services du conseil général. 

Rappelons ainsi que la très grande majorité des parents d’enfants placés restent titulaires de l’autorité parentale et que  le projet prioritaire pour  l’enfant est de permettre son retour dans son milieu de vie. Pour cela les parents doivent pouvoir avoir les moyens financiers de se déplacer afin de  rendre  visite  à  l’enfant,  de  lui  témoigner  par  de  petits  achats  une  forme  d’attention  et  de sollicitude, de s’investir dans son éducation en participant à  l’achat de fournitures scolaires et de livres,  de  pouvoir  payer  la  vêture,  l’alimentation  ou  le  mobilier  nécessaire  pour  l’accueillir ponctuellement (notamment  le week‐end), et d’être en mesure,  in fine, de préparer un retour de l’enfant qu’on espère définitif.  

 L’UNAF  s’oppose à  la proposition de  loi votée au Sénat proposant  le versement automatique  des  allocations  familiales  aux  services  de  l’ASE  dans  les  cas  de placement judiciaire d’enfant.  

  

c. Uniformité et revalorisation des aides financières de l’Aide sociale à l’enfance (ASE)

 Les  aides  financières  accordées  par  l’ASE,  versées  aux  familles  en  situation  de  grande 

précarité,  sont  des  aides  facultatives,  dont  le montant  et  le mode  d’attribution  sont  laissés  à l’appréciation des conseils généraux.  

Depuis plusieurs années les conditions d’éligibilité se sont durcies pendant que leur montant et la durée de leur versement se réduisaient – ce qui participe d’un recul plus général des politiques préventives en faveur des familles et enfants en difficulté. 

 Au‐delà de ce constat,  l’UNAF observe que  l’Etat n’a aucune visibilité sur  les pratiques des 

conseils généraux. Nous  savons néanmoins que  celles‐ci apparaissent extrêmement  contrastées. L’ODAS, en 2006, relevait ainsi un rapport de 1 à 13 selon les départements ! Il y a là une forme de rupture  d’égalité manifeste  dans  les  droits  des  familles  et  des  enfants  que  le  principe  de  libre administration des collectivités territoriales ne peut justifier. 

Page 38: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

33  

  

L’UNAF considère que  l’Etat doit  initier une réflexion commune avec  les conseils généraux  et  les  associations  familiales  afin  d’établir  des  indicateurs  nationaux quant  au  bien‐être minimal  des  enfants,  et  un  barème  commun  permettant  de définir des minima à partir desquels ces aides devraient être attribuées.  

  

5.3 Respecter les droits des parents dans l’intérêt de l’enfant   

a. L’égalité devant la justice  A quoi servent des droits si les familles ne peuvent accéder à la justice ? L’UNAF  est particulièrement  attachée  au principe d’égalité de  tous  les  individus devant  la 

justice,  inscrit  dans  la  constitution  française.  Le  coût  de  la  justice  ne  doit  jamais  constituer  une entrave à son recours. L’accès de toutes  les familles à  la  justice doit rester  identique, quelles que soient leurs ressources, ainsi que la qualité des réponses qui leur sont apportées, en tenant compte de chaque situation individuelle.  

 Compte  tenu  des  seuils  déjà  extrêmement  bas  permettant  l’accès  à  l’aide juridictionnelle,  et  du  faible  montant  de  celle‐ci,  l’UNAF  considère  que  toute mesure limitant davantage l’accès à cette aide constituerait une entrave grave au principe d’égalité de tous devant la justice.   

  

b. Le droit des parents de participer activement aux décisions prises pour protéger leur enfant

 Il  est  important pour  l’UNAF que  le placement ne  soit pas une  cause  supplémentaire de 

rupture entre parents et enfants.  Les recommandations de l’ANESM relatives à la question de l’autorité parentale dans le cadre 

du placement constituent une bonne base de travail. Plus  largement,  l’UNAF soutient pleinement l’esprit de la réforme de la protection de l’enfance de 2007 qui indique dans son article 1 que celle‐ci « a pour but de prévenir  les difficultés auxquelles  les parents peuvent être confrontés dans  l'exercice de  leurs responsabilités éducatives, d'accompagner  les familles et d'assurer,  le cas échéant, selon des modalités adaptées à leurs besoins, une prise en charge partielle ou totale des mineurs ». 

 Suivant  cette  logique,  l’UNAF  estime  que  les  parents  doivent  autant  que  possible  être 

informés et associés aux décisions prises à l’égard de leur enfant. Il devrait en particulier en être ainsi  lorsqu’il  s’agit  de  l’élaboration  du  « Projet  pour  l’enfant »,  prévu  par  la  réforme  de  2007. Pourtant, ceci est trop rarement le cas, quand ce n’est pas le projet lui‐même qui est inexistant. 

 Un  même  décalage  entre  les  textes  et  la  pratique  semble  exister  pour  ce  qui  est  de 

l’évaluation  de  la  situation  de  l’enfant,  obligatoire  avant  l’octroi  des  prestations  d’assistance éducative, et tous les ans par la suite. Or, projet et évaluation sont deux des éléments garantissant la stabilité et la cohérence des parcours. 

Page 39: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

34  

 L’UNAF  souhaite  que  soit  réaffirmée  l’obligation  d’association  des  parents  à  la l’élaboration du projet pour l’enfant, et que l’absence de réalisation de ce dernier constitue,  devant  les  juridictions  compétentes,  un motif  de  rejet  des  décisions prises en protection de l’enfance8.  

  

c. Respecter le contradictoire en protection de l’enfant  Le respect de  la procédure contradictoire est une exigence dès  l’évaluation de  la situation. 

Elle est en grande partie  la condition pour que  la mesure puisse être comprise et acceptée par  la famille. Or,  les services de protection de  l’enfance de nos UDAF relèvent, comme  le fait d’ailleurs régulièrement le Carrefour national de l’action éducative en milieu ouvert (CNAEMO), que certains magistrats,  faute  de  moyens  suffisants,  se  dispensent  parfois  de  convoquer  les  parents  pour audience lors des reconductions de MJAGBF ou d’AEMO.  

La décision est alors prise sur la seule base des rapports réalisés par les travailleurs sociaux, sans possibilité d’expression des justiciables.  

 Une telle pratique est inacceptable, tant sur le plan du fonctionnement de notre démocratie 

qu’au niveau de l’efficacité attendue des mesures, tant il est vrai que celle‐ci est fonction du niveau de compréhension et d’adhésion des familles aux dispositions prises à leurs égard. 

 L’UNAF  demande  que  la  Chancellerie  rappelle  aux  juridictions  cette  obligation d’auditionner les familles dans le cadre d’un renouvellement de mesure. 

   

d. Exécuter les mesures prononcées dans des délais raisonnables  Les  juges sont garants de  l’exécution des mesures qu’ils prononcent, et  la notion de temps 

n’y est pas indifférente.  Or, de nombreux  témoignages de  familles ou de services de protection de  l’enfance gérés 

par des UDAF nous alertent sur une lenteur excessive.  En  protection  de  l’enfance  :  les  décisions  de  mettre  en  place  une  mesure  d’assistance 

éducative en milieu ouvert (AEMO) ou une mesure  judiciaire d’aide à la gestion du budget familial (MJAGBF)  peuvent  prendre  plusieurs  mois  après  que  le  signalement  ou  la  demande  de reconduction aient été transmis…  

Les délégués aux prestations  familiales des UDAF nous  indiquent que  les ordonnances  leur sont parfois transmises plusieurs semaines (voire mois) après l’audience. Il est donc compliqué de démarrer la mesure (MJAGBF) ou bien de la poursuivre en cas de renouvellement, car c’est l’envoi de  l’ordonnance  à  la  CAF  qui  permet  de  percevoir  les  prestations  familiales  que  nous  sommes censés gérer dans l’intérêt de l’enfant. 

 Le  temps  de  la  prise  de  décision  ou  de  l’exécution  de  la  décision  aggrave  la  situation  de 

danger  des  personnes  concernées.  Comment  accepter  qu’une  décision  prise  au  regard  d’une situation de danger de l’enfant puisse ainsi être reportée ? 

 

8 La cour d’appel d’Aix a pour exemple déjà statuer en ce sens.

Page 40: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

35  

Une  note  d’instruction  du  29  juillet  2013  relative  à  la mise  en œuvre  de  l’article  12‐3  de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante vise à simplifier les modes de saisine des services éducatifs de milieu ouvert de la protection judiciaire de la jeunesse et à fixer à 5 jours le  délai  de prise  en  charge  des mesures  et  sanctions  éducatives ou  des mesures  restrictives  de liberté. Ces dispositions sont applicables au 1er janvier 20149.  

 Sans retenir ce délai spécifique de 5 jours, difficilement applicable, l’UNAF considère qu’une 

telle disposition qui permet de  réduire  les délais d’exécution de  certaines décisions  judiciaires prononcées  à  l’encontre  des  mineurs  mis  en  examen  ou  condamnés  dans  le  cadre  d’une procédure pénale pourrait être appliquée utilement dans les situations d’enfant en danger et de familles en difficultés… 

 L’UNAF réclame ainsi qu’un délai maximal soit fixé dans tous les cas de prononcés de mesures prises par les juges pour enfants.  

  

 

5.4 Clarifier et harmoniser le fonctionnement des conseils de famille des pupilles de l’Etat

 Le statut de pupille de l’Etat est une mesure de protection privilégiée de l’enfant qui rend un 

enfant adoptable et le dote d’un conseil de famille et d’un tuteur. La responsabilité du bien‐être de l’enfant est ainsi organisée selon un modèle démocratique basé sur une  répartition des pouvoirs entre le tuteur, le conseil de famille des pupilles de l’Etat, et l’ASE du conseil général, qui assure la prise en charge quotidienne des enfants pupilles de l’Etat. 

L’UNAF est attachée au maintien de ce statut et à ce concept ou nul n’est juge et partie.   A la fin de l’année 2012, l’UNAF a pris l’initiative de piloter la réalisation d’un guide destiné aux 

représentants associatifs au sein des conseils de famille des pupilles de l’Etat, en associant EFA, la FNADEPAPE et l’UFNAFAM.  

L’objectif était d’aider  les représentants, et d’harmoniser  les pratiques dans  le respect de  la loi. Le guide sera publié au premier semestre 2014.  

 Il apparaît, au regard des éléments collectés auprès des participants, que dans  les  faits,  les 

choses ne fonctionnent pas à ce jour de manière optimale.   Les  textes  juridiques  encadrant  le  statut  de  pupille  sont  extrêmement  complexes.  Leur 

rédaction est souvent peu lisible, et ils sont répartis de manière éparse dans plusieurs codes. Il est très difficile de  s’y  retrouver. Cela crée des  situations où  la connaissance des  règles de droit est imparfaite,  ou  très  inégalement  répartie  entre  les membres  du  conseil  de  famille,  ou  entre  le conseil de famille des pupilles de l’Etat et le tuteur ou l’ASE.  

 In  fine,  cela  induit  une  assez  forte  hétérogénéité  des  fonctionnements  des  conseils  de 

famille, et des situations où  l’équilibre des pouvoirs est souvent mis à mal. On observe ainsi une inégalité de traitement de la situation des pupilles de l’Etat.  

 

9 BOMJ n°2013-08 du 30 août 2013 - JUSF1320400N.

Page 41: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

36  

Ces  inégalités  de  traitement  selon  les  territoires  sont  renforcées  par  les  choix  politiques effectués par les conseils généraux qui peuvent, par exemple, privilégier un mode d’accueil plutôt qu’un autre  ; de sorte que  les choix du conseil de  famille en matière d’accueil de  l’enfant seront fortement contraints.  

 Il apparaît important pour l’UNAF que l’Etat assure pleinement ses responsabilités à  l’égard  des  enfants  pupilles  de  l’Etat  en  favorisant  l’accès  au  droit  des conseillers,  en  formant  et  sensibilisant  ses  personnels  à  l’échelle  des départements, en conduisant avec  les conseils généraux et  les acteurs associatifs une réflexion sur les conditions d’amélioration des Conseils de famille. 

 L’UNAF constate que le Système d’information pour l’adoption des pupilles de l’État (SIAPE), 

créé en 2005 afin de faciliter le rapprochement entre les enfants pupilles de l’État et les postulants souhaitant accueillir un enfant "à particularité", est un échec.  

L’UNAF  demande  que  les moyens  nécessaires  au  fonctionnement  du  SIAPE  soient  enfin alloués, avec par exemple une participation partagée de l’Etat et des conseils généraux. 

  

  

6. Filiation adoptive et accès aux origines   

6.1 Pour une filiation adoptive respectueuse de la diversité des besoins de l’enfant

 La  loi  du  11  juillet  1966  a  réorganisé  le  système  de  l’adoption  et  a  introduit  deux  régimes 

distincts : l’adoption plénière et l’adoption simple.  L’adoption plénière ne concerne que les mineurs de moins de 15 ans. Elle substitue la filiation 

adoptive à  la  filiation d’origine. Le  lien  juridique avec  sa  famille d’origine est  totalement  rompu. L’adoption  plénière  crée  un  lien  de  filiation  identique  à  celui  crée  par  la  filiation  biologique.  Le mineur  prend  le  nom  de  sa  famille  adoptante.  L’autorité  parentale  est  exercée  par  les  parents adoptifs. L’adoption est irrévocable.  

L’adopté  a dans  la  famille de  l’adoptant  les mêmes droits et  les mêmes obligations qu’un enfant légitime. 

 L’adoption simple est permise quel que soit  l’âge de  l’adopté et  laisse subsister un double 

lien  de  filiation.  L’adoption  simple  maintient  la  parenté  avec  la  famille  d’origine.  Les  droits héréditaires que l’adopté acquiert dans sa famille adoptive s’ajoutent à ceux qu’il conserve dans sa famille d’origine, sa filiation adoptive venant se superposer à sa filiation première. L’adoption est révocable mais seulement en cas de motifs graves.  

 L’adoption a été  instituée par  le  législateur dans  l’intérêt de  l’enfant afin de  lui apporter un 

cadre juridique sécurisé nécessaire à sa stabilité affective.  La confusion entre les effets de l’adoption plénière et l’accès aux origines a amené à penser 

que l’enfant du fait de l’adoption plénière ne pouvait pas avoir accès à ses origines. Or, si l’adoption plénière  rompt  les  liens  avec  sa  famille biologique,  l’enfant peut,  s’il  le  souhaite,  rechercher  ses origines.  l’UNAF  rappelle  à  ce  titre  que  trop  souvent  une  confusion  est  faite  entre  l’accès  aux 

Page 42: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

37  

origines et  la  recherche d’identité des parents, alors que bien souvent  l’enfant adopté  recherche son  histoire  familiale,  ses  origines  culturelles,  sans  forcément  vouloir  connaître  l’identité  des parents d’origine.  

 L’étude statistique du ministère de  la  justice et des  libertés de 2007 démontre que  les deux 

types d’adoption correspondent ainsi à des situations et des projets d’adoption très différents.  En  effet,  plus  de  70%  des  adoptions  plénières  le  sont  dans  le  cadre  des  adoptions 

internationales.  Les  adoptions plénières  dans  un  cadre  national  représentent  22%  et  concernent essentiellement des enfants pupille de l’Etat qui n’ont aucun lien de filiation. L’absence de filiation, la  volonté des parents de  rompre  les  liens  avec  l’enfant,  et  le  jeune  âge  de  l’enfant,  rend pour l’enfant nécessaire d’avoir une famille dont l’adoption plénière, irrévocable, apportera à l’enfant la sécurité et l’affection dont il a besoin.  

Les adoptions simples sont, dans 95 % des cas, dans un cadre intrafamilial, et sont souvent les enfants du conjoint ou d’un ex‐conjoint. Sur  l’ensemble des adoptés en  la  forme simple dans un cadre  intrafamilial  87%  sont majeurs,  et  10%  sont  âgés  de moins  de  15  ans.  L’augmentation  du nombre  des  adoptions  simples  dans  un  cadre  intrafamilial  s’explique  notamment  par  le changement de « type de conjugalité » que sont les familles recomposées. Bien souvent les parents séparés vont construire une nouvelle union, dans  laquelle  l’enfant va nouer des  liens avec  l’autre parent qui n’est pas son parent biologique. L’adoption simple va en quelque sorte légitimer le lien affectif qui s’est crée entre l’enfant et le nouveau conjoint de son père ou de sa mère. 

Force est de constater que l’adoption plénière et l’adoption simple correspondent ainsi à des 

projets d’adoption différents en fonction des besoins de l’enfant.  

 Pour l’UNAF, les deux types d’adoption doivent être maintenus.  

 

Il  pourrait  être  toutefois  nécessaire  de  favoriser  l’adoption  simple  dans  les  situations  où l’enfant a besoin d’une sécurité affective que ses parents ne sont plus en mesure de lui offrir.  

 En  fonction  de  la  situation  et  du  souhait  de  l’enfant,  l’UNAF  propose  que  soit développé  le  recours à  l’adoption  simple. Afin de mieux protéger  l’enfant et de sécuriser les parents, l’UNAF souhaite qu’elle soit irrévocable. 

 D’autre  part,  l’UNAF  souligne  que  l’accès  à  l’Etat  civil  des  enfants  adoptés plénièrement  n’est  pas  définitivement  effacé.  Celui‐ci  existe  bien,  puisque  les officiers d’Etat civil s’y réfèrent pour vérifier les possibles prohibitions du mariage. Nous  proposons  de  rendre  possible  l’accès  des  adoptés  à  leur  acte  d’Etat  civil intégral d’origine. Ceci pourrait se faire par l’intermédiaire du CNAOP. 

 Nous  précisons  qu’une  telle  disposition  n’aurait  aucune  répercussion  sur  l’accouchement 

sous le secret, puisqu’il ne figure dans ce cas aucune information identifiante sur cet acte. Elle permettrait, en revanche, de lever certaines critiques adressées à l’adoption plénière qui 

reste pourtant le mode d’adoption le plus approprié dans de très nombreux cas.  

 

Page 43: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

38  

6.2 Mieux accompagner les parents adoptifs

La question de l’adoption ne doit pas se limiter au seul volet juridique.  

L’insuffisant  accompagnement des  candidats  à  l’adoption  et des parents d’enfants  adoptés, tout au long des différentes étapes de la vie familiale, est régulièrement relevé par les associations spécialisées, comme par les spécialistes de cette question.  

Cet  accompagnement  est  d’autant  plus  important  que  le  contexte  de  l’adoption  a  évolué (fratrie, enfant à particularité, grand âge), accentuant ainsi l’écart entre le désir  initial des couples et la réalité de l’adoption.  

 Pour  l’UNAF,  il  conviendrait  à  l’instar  de  certains  pays  européens  (Belgique, Luxembourg) et du Québec, de mettre en place un véritable dispositif de soutien à la parentalité adoptive.  

Il doit s’inscrire dans la lignée de la politique de soutien à la parentalité mise en place en France, et avoir  comme objectif d’épauler  les  couples, en mettant à  leur disposition des  services et des moyens leur permettant d’assumer pleinement leur rôle éducatif.  

En Belgique, un programme de préparation des candidats adoptants a été mis en place (Accueil des  candidats  adoptants,  information,  sensibilisation  aux  principaux  enjeux  de  la  parentalité adoptive). Des séances de groupe sont prévues, afin de préparer à une parentalité plus responsable et éclairée. 

Un  tel  dispositif  doit  s’articuler  avec  les  différents  acteurs  impliqués  (Tribunaux,  OAA, associations) et s’ouvrir sur un réseau de personnes ressources (Adoptants, professionnels...).  

La mise en œuvre de cette politique doit  s’articuler avec d’autres dispositifs mis en place en France,  telle  que  la  consultation  d’orientation  et  de  conseil  de  l’adoption  (COCA).  Il  s’agit  de consultations  spécialisées,  animées  généralement  par  des  pédiatres  ayant  une  connaissance particulière du domaine de l’adoption. Elles peuvent, en fonction des besoins, être sollicitées à une ou plusieurs des périodes clés :  lors de  la proposition d’enfant, à  l’arrivée de  l’enfant, pendant sa période d’intégration  familiale et sociale, et à  l’adolescence, où  il est  fréquent que  les difficultés liées à cet âge se manifeste avec une intensité encore plus grande. 

L’UNAF  souhaite  que  la  consultation  d’orientation  et  de  conseil  de  l’adoption (COCA) soit développée et mise en place au sein des services hospitaliers, ou au sein d’espaces tels que les maisons des adolescents, de chaque département.  Ce  dispositif  permettra  ainsi  à  chaque  service  hospitalier  de  se  doter  d’une personne  ressource  formée  aux  questions  de  l’adoption.  Les  associations  de parents adoptifs pourraient faire « lien » et travailler en partenariat avec les services hospitaliers ou autres lieux d’accueil dans le cadre des COCA, en organisant comme cela est déjà le cas : des groupes de parole, des modules à destination des familles adoptantes. 

 

Page 44: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

39  

6.3 Lorsque les parents ne peuvent assurer leurs responsabilités à l’égard de leurs enfants : améliorer les conditions d’accès au statut de pupille de l’Etat

 

Désintérêt manifeste / Délaissement parental  Pour  l’UNAF,  il  va  de  soi  qu’un  projet  de  vie  stable  doit  le  plus  rapidement  possible  être 

envisagé  lorsqu’un enfant est placé en dehors de sa famille, et que  le retour dans  le milieu de vie d’origine doit être prioritairement travaillé. 

 Il est néanmoins des cas où cela est impossible. C’est la raison pour laquelle nous préconisons 

que dans certaines situations de placements complexes, un projet de vie alternatif à  l’élaboration du  projet  de  retour  au  domicile  des  parents,  pouvant  passer  par  une  demande  de  déclaration judiciaire  d’abandon  et  l’acquisition  du  statut  de  pupille  de  l’Etat,  soit  rapidement  travaillé  en parallèle au projet de retour au domicile. 

 Sur  ce  point,  l’UNAF  affirme  la  nécessité  de  penser  le  recours  à  la  déclaration judiciaire d’abandon  comme une mesure de protection de  l’enfance permettant l’accès  au  statut  protecteur  de  pupille  de  l’Etat,  et  pouvant  déboucher  sur  un projet d’adoption, et non comme un outil destiné à accroître le nombre d’enfants adoptables.  L’UNAF  souhaite  en  conséquence  que  l’article  portant  sur  la déclaration  judiciaire d’abandon (art. 350 C.Civ) soit déplacé du titre huitième du Code  civil,  relatif  à  la  filiation  adoptive,  au  titre  neuvième,  relatif  à  l’autorité parentale.  

 Il  pourrait  être  placé  au  sein  d’une  nouvelle  section  III  bis  intitulée  «  De  la  déclaration 

d’abandon », qui se situerait entre  les actuelles section III (art. 377‐3 C.Civ) et section IV (art. 378), comme le proposait un temps le Conseil supérieur de l’adoption, 

Ce faisant, l’article serait reconnu pleinement comme une mesure de protection avant d’être envisagé  comme  une  disposition  relative  à  l’adoption.  Accessoirement,  une  telle  démarche conduirait  à  bien  séparer  ces  articles  de  l’article  377‐3,  qui  prévoit  que  le  droit  à  consentir  à l’adoption du mineur n’est jamais délégué, mais qui ne concerne pas les situations prévues dans les autres sections du C.Civ que la sienne.  

Aucune modification de la rédaction de l’article 350 C.Civ n’est nécessaire pour lui donner  la dimension protectrice qui doit être  la sienne. On pourrait toutefois en modifier  la  rédaction  afin  de  le  rendre moins  stigmatisant,  et  d’en  faciliter  le recours,  en  supprimant  notamment  les  termes  « d’abandon »  et  de  « désintérêt manifeste ».  

 Il suffirait pour cela de remplacer le premier de ces deux termes par ceux de « bénéficiaire du 

statut  de  pupille  de  l’Etat »,  et  le  second  par  la  définition  que  donne  lui‐même  le  Code  civil du « désintérêt manifeste ».  La  nouvelle  rédaction  de  l’article  350  C.Civ  alinéa  1,  serait  la  suivante : « L’enfant  recueilli  (…), dont  les parents n’ont pas entretenu avec  lui  les  relations nécessaires au maintien de liens affectifs pendant une année, peut bénéficier du statut de pupille de l’Etat »10. 

10 Dans ce cas, l’enfant accueilli préalablement par un tiers ou un établissement obtiendrait, de fait, directement

le statut de pupille de l’Etat, alors que c’est actuellement uniquement le cas pour l’enfant préalablement accueilli par l’ASE. Il faudrait alors modifier aussi l’art. 347, 3° du C.Civ qui prévoit entre autre que les enfants déclarés

Page 45: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

40  

Pour aller jusqu’au bout du raisonnement conduisant à faire du recours à l’article 350 CC une 

mesure de protection, éventuellement transitoire vers une adoption, il faudrait modifier l’article L. 225‐1 du CASF qui  indique que « les enfants admis en qualité de pupille de  l’Etat (…) doivent faire l’objet d’un projet d’adoption dans les meilleurs délais ».  

La nouvelle formulation pourrait être la suivante : « les enfants admis en qualité de pupille de l’Etat  (…)  doivent  faire  l’objet  d’un  projet  de  vie  permanent  dans  les meilleurs  délais. Un  projet d’adoption est alors examiné à cette fin ».   

   Enfin, nous pensons que la prudence des magistrats dans le maniement de cet article (et celle des travailleurs sociaux en amont) pourrait être partiellement levée  s’il  leur  était  possible  de  limiter  au  cas  par  cas  l’effet  de  la  déclaration d’abandon  à  la  seule  possibilité  de  l’adoption  simple  –  garantissant  ainsi  le maintien d’un lien de filiation auquel ils restent le plus souvent attachés.  

 

Le consentement à l’adoption : Une autre voie à explorer  Une  autre  voie  est  aussi  possible,  et  mériterait  d’être  pleinement  explorée.  Il  s’agit  du 

consentement à l’adoption formulé par les parents, prévu par l’article 347 CC et suivants.   Une  telle  réflexion pourrait  être menée dans  le  cadre d’un  travail portant non plus  sur  le 

délaissement, mais sur les critères devant amener les professionnels à proposer un statut de pupille de l’Etat aux fins de mieux protéger l’enfant et d’élaborer un projet de vie durable.  

 Développer  le  recours  à  cette  disposition  pourrait  être  intéressant.  Certains  enfants 

pourraient ainsi bénéficier plus rapidement d’une plus grande stabilité et donc d’une plus grande protection, tout en évitant le côté stigmatisant de l’abandon. 

  Nous  préconisons  que  les  parents  puissent  donner  leur  consentement  pour  la forme d’adoption qu’ils souhaitent pour  leur enfant. Ceci permettrait d’inverser  le sens du débat en l’organisant autour de l’idée de protection, et non plus autour de la  seule  notion  de  « délaissement »,  culpabilisante  pour  les  parents  et  lourde  à porter pour l’enfant.  

 Ceci  est  actuellement  impossible,  l’enfant  adoptable  l’étant  tout  autant  en  simple  qu’en 

plénière.  En  offrant  cette possibilité,  davantage  de parents  se  trouvant  concrètement  dans  des situations d’empêchement durable, pourraient consentir plus facilement à  l’adoption, et  le travail des professionnels serait facilité.   

    

6.4 L’accès aux origines personnelles entre droit et sécurité  Protéger  l’intérêt de  l’enfant et  la vie familiale nécessitent de trouver un équilibre entre  les 

intérêts de chacun, et le respect des principes d’ordre public.   

abandonnés dans les conditions prévues par l’article 350 sont directement adoptables (sans passer par le statut de pupille de l’Etat).

Page 46: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

41  

L’équilibre de  l’enfant et sa stabilité passent par  la sécurisation de son  lien de filiation avec ses parents, que cette filiation soit adoptive ou biologique.  

 De l’établissement du lien de filiation de l’enfant à ses parents biologiques, ou adoptifs, vont 

découler  les droits et  les devoirs des parents sur  la personne de  l’enfant. Ses droits et ses devoirs doivent protéger l’enfant, et doivent donc être exercés dans son intérêt. 

 Toutes décisions ou réformes visant à modifier cette filiation auraient pour conséquence de 

fragiliser cet équilibre et de porter atteinte à l’intérêt de l’enfant.  Dans  le cas de  l’assistance médicale à  la procréation,  la  loi propose expressément à  l’article 

311‐19 du code civil « qu’aucun lien de filiation ne peut être établi entre l’auteur du don et l’enfant issu de la procréation ».  

  

a. Concernant les droits de l’enfant à connaître l’identité des personnes qui ne sont pas ou plus ses parents au sens de la filiation

 Toute  la complexité de  la question de  l’accès aux origines, et plus particulièrement celle de 

l’accouchement dans le secret, résulte de la difficile conciliation entre deux principes de justice qui se valent.  

 Dans  le cas de  l’accouchement sous  le secret,  l’UNAF estime que  les dispositions tendant à  lever totalement  le secret de  l’anonymat seraient contraires à  l’intérêt de  l’enfant, en ce sens qu’elles entraineraient des risques médicaux pour  la mère et l’enfant.  

 La mère risquerait ainsi, si elle était dans  l’obligation de donner son  identité, même sous pli 

fermé, de ne plus aller à  la maternité et d’accoucher de  façon sauvage en mettant en danger sa santé  et  en  faisant  courir  un  risque  sanitaire  pour  l’enfant.  Ce  risque  n’est  pas  totalement théorique. La  situation a pu être constatée en Europe, et notamment en Allemagne, où  il existe « des  boites  à  bébés »  (babyklappe),  dans  un  contexte  où  l’autorité  judiciaire  suprême  du  pays reconnait  que  le  droit  de  l’enfant  à  la  connaissance  des  origines  est  un  droit  fondamental opposable à ses parents de naissance (1989).  

 La Cour européenne des droits de  l’Homme dans un arrêt « Odièvre » du 13 février 200311, a 

jugé  les  dispositions  françaises  en  conformité  avec  l’article  8  de  la  Convention  européenne  des droits de l’Homme et a clairement évoqué entre autre le souci de protéger la santé de la mère et de l’enfant et d’éviter des avortements clandestins ou des abandons « sauvages »12. C’est également la position récente du Conseil constitutionnel saisi sur la constitutionnalité de l’accès aux origines13.  

 Pour l’UNAF, les dispositions actuelles permettent d’assurer, depuis la création du CNAOP de 

par  la  loi du 2  janvier 2002, un équilibre entre  les différents  intérêts en cause (intérêt de  l’enfant quant à sa santé, son droit à  la vie, choix des parents biologiques, et protection de  la santé de  la femme, et préservation du lien familial/respect de la vie familiale dûs aux parents adoptifs). 

 

11 CEDH, 13 février 2003, Odièvre c/ France, n°42326/98. 12 Notons que dans l’arrêt Godelli du 25 septembre 2012, la Cour EDH a condamné l’Italie pour violation du droit au respect de la vie privée

(Art. 8). Si une telle solution ne menace pas directement la législation française, qui garantit l’anonymat des mères qui le désir, il convient de noter que les juges européens proscrivent les dispositifs qui instaurent un refus absolu et définitif d’accès à leurs origines personnelles.

13 Conseil constitutionnel, Décision n°2012-248 QPC du 16 mai 2012.

Page 47: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

42  

   

Pour autant, certains aménagements pourraient être développés :  

- un meilleur  accompagnement  des  femmes  lors  de  l’entrée  en maternité,  et après l’accouchement, sur les possibilités qui lui sont offertes quant à la levée de l’anonymat en faciliterait ainsi l’exercice ;  

- amélioration du contenu du dossier et des  informations concernant  l’histoire de  l’enfant.  Les  enfants  souvent  souhaitent  connaître  les  raisons  de  leur adoption plus que l’identité de la mère.  

  

b. Concernant la levée de l’anonymat du tiers donneur dans le cadre de l’aide médicale à la procréation

 Pour  l’UNAF,  un  enfant  issu  d’une  AMP  pourrait  avoir,  s’il  le  souhaite,  accès  à certains éléments lui permettant de connaître des éléments de son histoire.  Les CECOS pourraient collecter des données non identifiantes au moment du don, susceptibles  d’être  transmises  aux  parents,  après  la  naissance  de  l’enfant,  et  à l’enfant majeur qui en fait la demande. 

 En outre, l’ensemble des données médicales devraient continuer à être collectées et mises à 

disposition du corps médical, uniquement dans une visée thérapeutique concernant l’enfant.   Les  CECOS  devraient  proposer  par  ailleurs  un  accompagnement  aux  parents  (cette  offre 

d’accompagnement devrait être proposée lors de la conception, de la naissance mais aussi durant toute  l’enfance  et  l’adolescence  de  l’enfant).  Les  donneurs,  au  moment  où  ils  répondent  au questionnaire,  devraient  également  être  accompagnés.  Enfin,  la  nature  des  données  non identifiantes ainsi que les modalités d’accompagnement devraient faire l’objet d’une concertation entre les représentants du corps médical et les associations familiales. 

 L’UNAF attire l’attention sur le fait que la question de l’accès aux origines dans le cadre d’une 

AMP avec tiers donneur ne doit pas se focaliser seulement sur les cas de don de sperme. Elle doit être étudiée en prenant en compte  l’ensemble des situations où un tiers donneur  intervient : don d’ovocyte et don d’embryon.  

   Par ailleurs,  les dons de gamètes et d’organes obéissent aux mêmes principes éthiques : anonymat,  gratuité  et  consentement.  La  question  de  la  levée  de  l’anonymat  des  donneurs  de gamètes  induit de poser une question préalable : faut‐il  lever  l’anonymat pour tous (donneurs de gamètes et d’organes) ou créer des règles distinctes en fonction de la nature des dons ?      Dans tous les cas, l’UNAF soulève les risques liés à la levée de l’anonymat du tiers donneur (y compris dans les cas où cette levée de l’anonymat ne serait pas systématisée, mais laissée au choix des couples demandeurs, comme du donneur) : 

- risque que les parents, du fait de la levée de l’anonymat, souhaitent garder secret le   recours à un tiers donneur, privant ainsi l’enfant de la possibilité d’accéder à certains   éléments relatifs à son origine ;  - risque de porter atteinte au respect de la vie familiale (principe consacré par l’art. 8 de la 

CEDH) ;  - risque d’une chute des dons.

Page 48: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

43  

 

c. Concernant les missions du Conseil National pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP)

 Le Conseil National pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP) a été créé par la loi du 22 

janvier 2002. Celui‐ci est compétent pour traiter les demandes des enfants adoptés qui souhaitent avoir  accès  à  leurs  origines  lorsque  l’identité  de  la mère  est  inconnue  (Accouchement  sous  X, enfant trouvé). Le CNAOP doit se déclarer incompétent si dans le cadre d’une recherche, l’identité de  la mère  est  connue. Cette mission  est  assurée  en  liaison  avec  les départements, organismes autorisés pour l’adoption… 

 Dans le cas d’une adoption nationale, le CNAOP demandera une copie du dossier à l’ASE, à un 

organisme autorisé pour l’adoption (OAA), et dans le cas d’une adoption internationale à la mission de l’adoption internationale. 

La  compétence  limitée  du  CNAOP  et  la  difficulté  de  transmission  des  données  par  les différentes  institutions  concernées, participent  à  la  confusion des  rôles,  et des  compétences de chacun des acteurs, portant ainsi atteinte aux droits de l’enfant adopté à connaître ses origines. 

 L’UNAF propose que la compétence du CNAOP soit élargie à toutes les demandes d’accès  aux  origines,  que  l’identité  de  la  mère  soit  ou  non  connue,  et  que l’ensemble des informations recueillies par les OAA, ASE et mission de l’adoption internationale dans les cas d’une adoption plénière soient transmises aux CNAOP.  

 

Page 49: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

44  

Annexe 1

La politique familiale dans le Code de l’Action Sociale et familiale Chapitre II : politique familiale

Article L112-1 Le Gouvernement présente chaque année au Parlement un rapport récapitulant les dépenses de l'Etat, des collectivités

territoriales, de la branche Famille de la sécurité sociale et d'assurance maternité, ainsi que les dépenses fiscales et les allègements de cotisations et de contributions, concourant à la politique de la famille. Ce rapport comporte également une présentation consolidée de ces dépenses par catégories d'objectifs. Il évalue l'impact et la cohérence d'ensemble des financements apportés par les différents contributeurs. Il est annexé au projet de loi de finances et au projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'année. Le Gouvernement présente tous les trois ans au Parlement le rapport prévu à l'article 44 (b) de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990.

Article L112-2

Afin d'aider les familles à élever leurs enfants, il leur est accordé notamment : 1° Des prestations familiales mentionnées à l'article L. 511-1 du code de la sécurité sociale et à l'article L. 732-1 code rural et de la pêche maritime ; 2° Des aides à l'emploi pour la garde des jeunes enfants mentionnées au titre IV du livre VIII du code de la sécurité sociale ; 3° Des réductions ou exonérations fiscales dans les conditions prévues par le code général des impôts ; 4° Des réductions sur les tarifs de transport par chemin de fer dans les conditions prévues par décret ; 5° Des allocations destinées à faire face à des dépenses de scolarité dans les conditions prévues par les articles L. 531-1 à L. 531-5 du code de l'éducation ou des réductions sur les frais de scolarité dans des conditions fixées par décret ; 6° Des prestations spéciales aux magistrats, fonctionnaires, militaires et agents publics ; 7° Des allocations d'aide sociale dans les conditions prévues au présent code.

Article L112-3 La protection de l'enfance a pour but de prévenir les difficultés auxquelles les parents peuvent être confrontés dans l'exercice de leurs responsabilités

éducatives, d'accompagner les familles et d'assurer, le cas échéant, selon des modalités adaptées à leurs besoins, une prise en charge partielle ou totale des mineurs. Elle comporte à cet effet un ensemble d'interventions en faveur de ceux-ci et de leurs parents. Ces interventions peuvent également être destinées à des majeurs de moins de vingt et un ans connaissant des difficultés susceptibles de compromettre gravement leur équilibre. La protection de l'enfance a également pour but de prévenir les difficultés que peuvent rencontrer les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et d'assurer leur prise en charge.

Article L112-4

L'intérêt de l'enfant, la prise en compte de ses besoins fondamentaux, physiques, intellectuels, sociaux et affectifs ainsi que le respect de ses droits doivent guider toutes décisions le concernant.

Chapitre V : lutte contre la pauvreté et les exclusions

Article L115-1 - La lutte contre la pauvreté et les exclusions est un impératif national fondé sur le respect de l'égale dignité de tous les êtres humains et une priorité de l'ensemble des politiques publiques de la nation. Elle tend à garantir sur l'ensemble du territoire l'accès effectif de tous aux droits fondamentaux dans les domaines de l'emploi, du logement, de la protection de la santé, de la justice, de l'éducation, de la formation et de la culture, de la protection de la famille et de l'enfance. L'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics dont les centres communaux et intercommunaux d'action sociale, les organismes de sécurité sociale ainsi que les institutions sociales et médico-sociales poursuivent une politique destinée à connaître, à prévenir et à supprimer toutes les situations pouvant engendrer la pauvreté et les exclusions. Ils prennent les dispositions nécessaires pour informer chacun de la nature et de l'étendue de ses droits et pour l'aider, éventuellement par un accompagnement personnalisé, à accomplir les démarches administratives ou sociales nécessaires à leur mise en œuvre dans les délais les plus rapides. Les entreprises, les organisations professionnelles ou interprofessionnelles, les organisations syndicales de salariés représentatives, les organismes de prévoyance, les groupements régis par le code de la mutualité, les associations qui oeuvrent notamment dans le domaine de l'insertion et de la lutte contre les exclusions, les citoyens ainsi que l'ensemble des acteurs de l'économie solidaire et de l'économie sociale concourent à la réalisation de ces objectifs.

Page 50: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

45  

Page 51: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

46  

Page 52: Préparation du projet de loi sur la Famille...Par lettre du 30 octobre 2013, la Ministre déléguée chargée de la famille a sollicité l’UNAF pour présenter sa réflexion et

47  

Union nationale des associations familiales 28 place Saint Georges 75009 PARIS

Tél. : 01 49 95 36 00 www.unaf.fr