préparé par me tignougou sanogo consultant juriste nationalles principes concernant de statut...

54
ANALYSE ET ÉVALUATION DE LA RÈGLEMENTATION NATIONALE DE L’EAU ET DES ACCORDS BI ET OU MULTILATERAUX EN LA MATIÈRE AU REGARD DE LA GESTION ET DE LA MISE EN VALEUR DES RESSOURCES EN EAU DU SAI (Mali) Rapport de consultation Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste National Mai 2005

Upload: others

Post on 05-Oct-2020

4 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

ANALYSE ET ÉVALUATION DE LA RÈGLEMENTATION

NATIONALE DE L’EAU ET DES ACCORDS BI ET OU MULTILATERAUX EN LA MATIÈRE AU REGARD

DE LA GESTION ET DE LA MISE EN VALEUR DES RESSOURCES

EN EAU DU SAI

(Mali)

Rapport de consultation

Préparé par

Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste National

Mai 2005

Page 2: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

2

Table des Matières

Préambule : 5

A. Rappel de la problématique de l’étude 7 1. Contexte de l’étude 7 2. Mission assignée au consultant 8 3. Méthodologie appliquée et résultats 9

a. Méthodologie appliquée 9

b. Résultats attendus 9

Introduction 10

I. Place du SAI en droit malien interne de l’eau 10 A. Pouvoirs de l’État et des Collectivités 11 A1. Pouvoir d’appropriation de l’État et des Collectivités sur les ressources en eau 12 A2. Pouvoir de gestion et de contrôle de l’État et des Collectivités sur les ressources en eau 13 1°. Cadre institutionnel de la gestion de l’eau 13 a. Modalités de gestion des ressources hydrauliques 14 b. Structures de gestion des ressources en eau 14 b1. Les services de l’État au niveau central 14 1. Le Ministère des Mines et de l’Énergie et de l’eau 15 2. Les autres Ministères ayant des compétences dans le domaine de l’eau 17 b2. Les services des collectivités décentralisées 18 b3. Les organes consultatifs 19 3°. Réglementation des activités liées à l’exploitation des ressources en eau 21 a. Réglementation de la disponibilité de l’eau 21 a1. Mesures juridiques ayant trait à la disponibilité de l’eau au plan quantitatif 21 a2. Mesures juridiques concernant la disponibilité de l’eau au plan qualitatif 23 b. Réglementation de l’alimentation en eau potable 24 b1. Notions de service public de l’eau et de maîtrise d’ouvrage 24 1. Notion de service public de l’eau 24 2. Notion de maîtrise d’ouvrage 25 b2. Notions de recettes, tarifs du service public et de fonds de développement 26

Page 3: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

3

1. Notion de recettes et tarifs du service public 26 2. Notion de fonds de développement 27 c. Réglementation des usages particuliers 27 c1. L’irrigation, la pêche, la pisciculture et la navigation 27 c2. Les utilisations industrielles et hydroélectriques 28 B. Pouvoirs des populations sur les ressources en eau du SAI 29 1°. Les us et coutumes 29 2°. En droit moderne 31 II. Place du SAI en droit international 32 A. Accords inter étatiques relatifs au bassin du Sénégal 33 1°. Principes régissant le statut juridique des eaux du bassin 33 a. Caractère international des eaux du bassin 34 b. Exploitation agricole et industrielle des eaux 34 c. Navigation et transport 34 d. Adhésion, retrait et règlement des litiges 35 2°. Principes relatifs à l’organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) 36 a. Création et missions de l’OMVS 36 b. Fonctionnement de l’OMVS 37b1. La Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement 37 b2. Les organes permanents 38 1. Le Conseil des Ministres 38 2. Le Haut Commissariat 38 3. La Commission Permanente des eaux 39 B. Accords inter-étatiques relatifs au bassin du fleuve Niger 40 1°. Accords multilatéraux 40 a. Les principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve Niger, cours d’eau national 42 b. Les principes déterminant le pour tour de l’autorité du bassin du Niger (ABN) 42 b1. Missions de l’Autorité 43 b2. Fonctionnement de l’Autorité 44 1. Le Sommet des Chefs d’État et de Gouvernement 44 2. Le Conseil des Ministres 44 3. Le Comité technique des experts 45

Page 4: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

4

4. Le Secrétariat Exécutif 45 2°. Accords bi ou trilatéraux 46 a. Accords ayant trait à l’utilisation des eaux 47 a1. Le protocole entre le Mali et le Niger, en date du 12 juillet 1988 47 1. Objet de l’Accord 47 2. Le Comité Technique Permanent 47 3. La durée de l’Accord 48 a2. Le protocole entre la Guinée et le Mali 48 1. L’objet de l’Accord 48 2. Comité Technique Paritaire 48 3. Les dispositions générales 49 b. Accords relatifs à la réalisation barrages 50 b1. La résolution n° 1/4°/CCE/86/Ouaga relatif à l’aménagement du bief fluvial Tombouctou – Gaya. 50

b2. Le protocole du 06 octobre 2004 concernant la réalisation des ouvrages de 50 Taoussa au Mali et de Kaindadji au Niger. 1. Le Préambule de l’Accord 50 2. Le dispositif de l’Accord 51 III. Conclusion – Recommandations 52

Page 5: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

5

Préambule Dans le cadre du projet TCP/RAF/3001 (A) relatif à la mise en place d’un mécanisme tripartite de concertation pour la gestion du système aquifère d’Iullemeden (SAI) un contrat de louage de service, en date du 1er juillet 2004, est intervenu entre la FAO et le consultant. Il vise à :

Rassembler, analyser et évaluer la réglementation nationale de l’eau et les accords en vigueur aux niveaux bi et trilatéral, ainsi que les documents de nature juridique présentant un intérêt pour la gestion et la mise en valeur des ressources en eau du SAI.

S’entretenir avec les représentants des Ministères et organismes du Mali, afin de

recueillir auprès d’eux tous les renseignements utiles concernant la future gestion concertée des ressources en eau du SAI.

Établir un rapport comportant les résultats des activités sus-visées.

En s’appuyant sur les textes législatifs, réglementaires dans le domaine de l’eau (voir liste en annexe 1) et les accords bi ou trilatéraux en matière d’eaux partagées (voir liste en annexe 2) d’une part ; les dires et expériences des personnalités rencontrées (voir liste en annexe 5) d’autre part ; le consultant s’est attelé à l’exécution des tâches qui lui ont été assignées (voir termes de référence en annexe 3). L’analyse bibliographique (voir liste des documents consultés en annexe 4) combinée à celle des textes juridiques, aura permis au consultant d’établir le présent rapport intitulé : « Analyse/Évaluation de la Réglementation Nationale de l’eau et des Accords bi ou trilatéraux en la matière, au regard de la gestion et la mise en valeur des ressources en eau du SAI ». Le document comprend trois parties précédées d’un préambule et d’un mot d’introduction qui fait un rappel de la problématique de l’étude à savoir : le contexte de l’étude (1), la mission assignée au consultant (2), la méthodologie appliquée et les résultats attendus (3). La première partie a trait à la place du SAI en droit interne malien de l’eau. Ici, l’analyse aura permis de révéler que le droit positif malien de l’eau repose sur le principe de la domanialité publique de toutes les eaux dont celles du SAI ; de ce fait, il y a un pouvoir d’appropriation de l’État et des Collectivités territoriales sur les ressources en eau. Corrélativement, l’État et les Collectivités disposent d’un pouvoir de gestion et de contrôle sur toutes les ressources hydrauliques : superficielles et souterraines. • S’agissant de la gestion, elle est globale, durable et équitable ; elle vise, dans son entier, à une protection quantitative et qualitative de l’eau. Cette protection se fait au moyen d’un contrôle des prélèvements de l’eau par leur soumission au régime de l’autorisation ou de la concession.

Page 6: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

6

Il s’agit d’une gestion, planifiée et concertée, rendue possible par : le découpage, de l’espace national, en unités hydrographiques appelées bassins ou sous bassins hydrographiques ou systèmes aquifères. - la création, auprès de l’administration chargée de l’eau, d’organes consultatifs (conseil national, régional, local de l’eau, comité de bassins ou de sous bassins) ; - la mise en œuvre de schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux. • S’agissant du contrôle, il trouve son expression dans la réglementation des activités liées à l’exploitation des ressources en eau. Cette réglementation tient pour l’essentiel, dans l’interdiction de polluer les eaux ; cette interdiction est assortie du principe du « pollueur payeur » ; vient ensuite la réglementation de l’alimentation en eau potable ; enfin la réglementation de l’irrigation, la pêche, la pisciculture la navigation, l’industrie, les installations hydroélectriques. Au total, tous les principes sus-visés s’appliquent aux ressources en eau du SAI. La deuxième partie concerne la place du SAI en droit international. Là dessus, l’analyse a permis de circonscrire l’espace de gestion des eaux partagées ; la coopération inter-étatique. Cette coopération se présente sous un jour différent selon qu’elle a trait au bassin du fleuve Sénégal ou à celui du fleuve Niger. Pour le bassin du fleuve Sénégal, il s’agit d’une gestion intégrée très poussée à travers des accords tri latéraux conclus par les États riverains. Ici, les eaux du fleuve sont des ressources internationales sur les territoires des États riverains ; quant à leur utilisation, elle fait l’objet d’un programme commun exécuté par une structure de coopération inter-États : l’OMVS. Dans ce cadre, les ouvrages réalisés (Manantali au Mali et Diama au Sénégal) sont communs en ce sens qu’ils sont propriété commune des États membres. C’est cette structure intergouvernementale qui est chargée de la répartition des eaux entre les divers usages et les usagers. Cette répartition se fait par l’entremise d’un organe de l’organisation : la Commission Permanente des Eaux (CPE). • Quant au bassin du fleuve Niger, où sont situées les ressources en eau du SAI, la coopération inter étatique, relative à la gestion des eaux, n’a pas atteint un niveau poussé, même s’il existe, également, un organisme de coopération inter étatique : l’Autorité du Bassin du Niger (ABN). Cet organisme, né sous les auspices d’accords multilatéraux (Acte de Niamey et Convention révisé de Djaména) constitue le cadre général de la gestion des eaux du bassin dont celles du SAI.

Page 7: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

7

Mais, il existe sur les mêmes eaux des organismes de coopération bi et trilatéraux : Comité Technique Consultatif Permanent (CTCP) entre le Mali et le Niger relatif à l’utilisation des eaux du fleuve Niger – Comité Technique Paritaire (CTP) entre la Guinée et le Mali relatif à l’utilisation des ressources en eau du fleuve Niger en général et du bassin du Niger Supérieur – Autorité de Développement Intégré de la Région du Liptako Gourma entre le Burkina, le Mali et le Niger relatif à l’aménagement du bief fluvial Tombouctou – Gaya par la réalisation des barrages de Tossaye, Kaindadji et W. Tous les organismes sus-visés, ont vocation à régir les eaux du bassin du fleuve Niger dont celles du SAI. Il y a de ce fait une superposition d’organes de coopération qui font double emploi avec l’Autorité du Bassin du Niger. La troisième partie traite de conclusion-recommandations. Le consultant tient à remercier le personnel de la Représentation FAO de Bamako, et le personnel de la Division Inventaire des Ressources Hydrauliques de la Direction Nationale de l’Hydraulique de Bamako de leur soutien lors de cette mission. Il tient à exprimer toute sa disponibilité à discuter de ses conclusions avec les autorités compétentes et à y apporter toute amélioration utile. A. Rappel de la problématique de l’étude Pour comprendre toute la problématique de l’étude portant analyse évaluation de la réglementation nationale et des accords bi ou trilatéraux intéressant la gestion et la mise en valeur des ressources en eau du SAI, il suffit de préciser, d’abord le contexte de l’étude ; ensuite, il faudra passer en revue la mission assignée au consultant ; enfin, il faudra exposer la méthodologie appliquée et les résultats attendus. 1. Contexte de l’étude

Le système aquifère d’Iullemeden consiste essentiellement en des couches aquifères reliées entre elles ; en leur sein, on distingue le continental intercalaire et le continental terminal.

La profondeur de ces couches aqueuses varie de 100 à 2000 mètres ; les réserves exploitables sont estimées à 2000 km². Le SAI s’étend sur une superficie estimée à 500000 km² répartie entre le Mali (31000 km²), le Niger (434000 km²) et le Nigéria (60000 km²). Il s’agit donc de ressource en eau partagée revêtant une importante stratégique au niveau sous régional, car le débit du SAI équivaut au débit total du fleuve Niger pendant 50 ans.

Sur les ressources en eau ci-dessus bien délimitées, les ressortissants des trois pays riverains exercent des activités socio-économiques : usages domestiques, alimentation en eau potable, irrigation, activités minières. Du fait des activités sus-visés, les prélèvements annuels actuels sur le SAI sont estimés à 50 millions de m3 au Niger et autant au Nigéria pour l’irrigation.

Page 8: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

8

Les points et forages réalisés dans les trois pays sont nombreux : on compte 400 forages qui ont une profondeur de 40 à 100 mètres et le prélèvement y effectué est de l’ordre de 20 à 100 m3/heure1. Ce qui précède montre qu’une surexploitation des ressources en eau du SAI est à redouter. En effet, l’accroissement prévisible des exploitations et des prélèvements est susceptible, à terme d’entraîner des modifications dans l’utilisation de la terre, dans les zones de recharge de l’aquifère ainsi que dans les zones humides. Il en résulte un risque de contamination des eaux du SAI par les cours d’eau. Ceci va contribuer à augmenter le potentiel conflictuel transfrontalier. Il faut le dire, l’eau stockée dans le SAI est généralement de bonne qualité et son exploitation n’a pas donné lieu à des problèmes majeurs quant à la qualité des eaux. Mais, au rythme où vont les choses, le risque de pollution est prévisible ; surtout quand on imagine les activités minières actuelles dans la région et les activités d’exploitation de pétrole qui se profile à l’horizon. Cette situation a conduit les trois pays partageant le SAI à solliciter et obtenir le soutien du Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM) en appui à un projet, portant sur la « Gestion des risques hydrogéologiques dans le système de couche aquifère d’Iullemeden ». Ce projet a pour objet : - l’identification des risques et des facteurs d’incertitude au niveau transfrontalier – la formulation de politiques communes ayant trait à la mitigation et le partage des risques – l’exécution des dites politiques par l’entremise d’un cadre juridique et institutionnel commun de coopération au niveau du SAI. Ce dernier aspect constitue un préalable indispensable à la mise en œuvre du projet FEM. Ceci explique et justifie pleinement la présente étude sur la mise en place d’une institution de concertation tripartite pour l’exécution des dites politiques, à travers un cadre juridique et institutionnel. Pour ce faire, une mission a été assignée au consultant juriste. 2. Mission assignée au consultant Les tâches imparties au consultant procèdent des termes de référence et trouvent leur manifestation de la façon suivante :

rassembler, analyser et évaluer la réglementation nationale et les accords en vigueur aux niveaux bi et/ou trilatéral, ainsi que les documents de nature juridique présentant un intérêt pour la gestion et la mise en valeur des ressources en eau du SAI ;

s’entretenir avec les représentants des ministères et organismes du Mali, afin de

recueillir auprès d’eux tous les renseignements utiles concernant la future gestion concertée des ressources en eau du SAI ;

établir un rapport comportant les résultats des activités ci-dessus ;

1 Documents du projet page 2.

Page 9: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

9

contribuer à la formulation de propositions quant aux missions, la nature et la forme de la structure de concertation tripartite visant la gestion concertée des ressources en eau du SAI ;

contribuer à l’organisation et à l’animation de l’atelier technique national de

discussion des propositions visées ci-dessus ; aider à la mise au point finale des propositions sus-mentionnées, compte étant tenu des

observations formulées et des recommandations émises par les ateliers techniques ; Participer à une rencontre de l’équipe du projet pour y relater les résultats des activités

réalisées et contribuer à la réflexion sur l’exécution de la seconde étape du projet ; S’acquitter de toute autre tâche liée à l’exécution du projet.

La mission du consultant étant ainsi délimitée de manière précise, il reste à en fixer les modalités d’exécution. 3. Méthodologie appliquée et résultats attendus Au premier chef, il s’agit d’exposer la méthodologie appliquée ; ce n’est après que l’on parlera des résultats escomptés. a. Méthodologie appliquée

Sous la supervision du Service Droit et Développement (LEGN) de la FAO, et en étroitement collaboration avec les autorités du pays et l’équipe FEM, il s’agit de :

- procéder à un inventaire des textes législatifs et des accords en vigueur aux niveaux bi

et/ou trilatéral présentant un intérêt pour les ressources en eau du SAI ; - analyser et évaluer les dits textes et accords au regard de la problématique de la

gestion des ressources en eau du SAI ; b. Résultats attendus On sait que l’objectif de la présente étude vise à la mise en place d’une structure permanente de concertation tripartite regroupant le Mali, le Niger et le Nigéria, pour une gestion intégrée concertée et durable des ressources en eau de la zone aquifère Iullemeden commune aux trois pays. Aussi bien, à l’achèvement de l’étude, les trois pays auront à leur disposition une proposition d’accord inter-États spécifique au SAI et portant création d’une structure permanente tripartite de concertation.

Page 10: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

10

Introduction

Dans le cadre de la mise en place d’un mécanisme tripartite de concertation pour la gestion du SAI, une étude du droit positif malien de l’eau et des accords bi ou trilatéraux en matière d’eaux partagées, renvoie à la nécessité de déterminer d’une part la place du SAI en droit interne malien de l’eau (I), d’autre part la place du SAI en droit international (II).

I. Place du SAI en droit malien interne de l’eau

La question, qui se pose ici, est celle de savoir dans quelle mesure la réglementation nationale de l’eau prend en compte les ressources en eau du SAI ; autrement dit quel est le statut juridique des ressources en eau du SAI ? Cette question lancinante renvoie aux modalités juridiques d’appropriation, de gestion et d’exploitation des eaux du SAI.

Ce sont à ces interrogations, ci-dessus posées qu’il convient d’apporter une réponse précise par une analyse critique de la législation malienne de l’eau.

Cette législation tient, pour l’essentiel dans deux textes fondamentaux : le code domanial et foncier (CDF), dans la rédaction que lui a donnée l’ordonnance n° 00-027/P-RM du 22 mars 2000, le code l’eau prévu par la loi n° 02-006 du 31 janvier 2002. On le sait : l’eau est vitale à la vie puisqu’elle est à la base de toute l’activité socio-économique ; aussi bien, sa réglementation est fortement tributaire du statut juridique de la terre qui la porte et d’où elle peut être extraite. La législation de l’eau est également tributaire de l’organisation administrative et de celle des services étatiques intervenant dans sa gestion et de tous les textes relatifs à la gestion des ressources naturelles. C’est pourquoi, les deux textes sus-visés doivent être complétés par les lois sur la gestion des ressources naturelles – l’environnement – la décentralisation – les structures étatiques intervenant dans la gestion de l’eau.2

L’idée essentielle qui se dégage de ces textes est celle du principe de la domanialité publique de l’eau. Ceci est corroboré, à la fois, par le CDF et la loi sur l’eau.

Ces textes préconisent l’incorporation de toutes les eaux situées sur le territoire national au domaine public hydraulique de l’État et des collectivités territoriales.

A la question de savoir si cette réglementation s’applique aux ressources en eau du SAI, il suffit de rappeler l’assiette des domaines hydrauliques de l’État et des Collectivités :

- Pour l’État, il s’agit des cours d’eau navigables et flottables, des sources et cours d’eau

non navigables ni flottables, des lacs et étangs, des nappes d’eau souterraines, quelles que soient leur provenance, leur nature et leur profondeur.

- Pour les Collectivités, il s’agit des sites naturels déterminés par la loi, ayant un

caractère d’intérêt régional, de cercle ou communal. En font partie les cours d’eau navigables ou flottables, les lacs et étangs, les nappes d’eau souterraines.

En l’état de cette énumération, il est permis d’affirmer que toutes les eaux (superficielle et souterraines) situées en territoire malien, et le SAI ne fait pas exception à la règle, tombent

2 Voir liste des textes en annexe 1.

Page 11: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

11

sous le coup de l’application de la réglementation nationale de l’eau, telle qu’elle procède des textes de loi sus-visés. Une analyse, combinée des textes en question, laisse apparaître que deux catégories de pouvoirs sont reconnus sur les ressources en eau du SAI : les pouvoirs de l’État sur les ressources en eau du SAI et des Collectivités territoriales et les pouvoirs des populations (B). A. Pouvoirs de l’État et des Collectivités territoriales

Les pouvoirs, que l’État et des Collectivités exercent sur les ressources hydrauliques, en général et celles du SAI, en particulier, sont de nature multiforme. Pour comprendre ces pouvoirs, il convient de se reporter à la loi fondamentale qui dispose dans son préambule : « le peuple souverain du Mali s’engage à assurer l’amélioration de la qualité de la vie, la protection de l’environnement ». A ce principe s’ajoute celui qui est énoncé à l’article 15 de la constitution à savoir : toute personne a droit à un environnement sain et la promotion de la qualité de la vie sont un devoir pour tous et pour l’État. Ces principes sont repris par la loi malienne de l’eau qui déclare en son article 4 que la protection de l’eau , sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels, constituent un devoir pour tous : « l’État, les Collectivités territoriales, les citoyens ». Par ailleurs, l’article 70 de la constitution prévoit que la loi détermine les principes de création, d’organisation et de contrôle des services et organismes publics, la libre administration des collectivités locales, de leurs compétences et de leurs ressources, de l’organisation administrative, de la gestion et de l’aliénation du domaine de l’État, de l’organisation de la production. D’autres dispositions importantes traitent d’une institution à caractère économique : le Haut Conseil des Collectivités. L’article 99 de la constitution le charge de donner un avis motivé sur toute question de politique de développement local et régional, de faire des propositions au gouvernement en matière de protection de l’environnement et l’amélioration de la qualité de vie des citoyens à l’intérieur des Collectivités ; le gouvernement étant tenu de déposer un projet de loi conforme et de saisir pour avis, le Haut Conseil des Collectivités, de toutes actions concernant la protection de l’environnement et l’amélioration de la qualité de la vie. Ces principes constitutionnels soulignent le rôle de l’État comme promoteur de l’économie nationale. On le sait : l’économie repose sur l’agriculture, l’élevage, la pêche, l’exploitation minière. Cela se sait également : aucune activité économique ne peut être menée sans le bienveillant concours des ressources en eau : c’est donc par une exploitation rationnelle et durable des ressources hydriques que l’État réalise sa mission de développement telle qu’elle procède des textes sus-visés.

Page 12: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

12

Sans doute, la vitalité de l’eau à la vie et le fait qu’elle est à la base de toutes les activités de production, expliquent et justifient le principe de la domanialité publique des ressources en eau du pays. En tous cas, tel est le principe en droit positif malien représenté aujourd’hui par le code domanial et foncier, le code de l’eau et les textes relatifs à la gestion des ressources naturelles. Il en résulte un pouvoir d’appropriation de l’État et des Collectivités sur les ressources en eau (A1) et un pouvoir de gestion et de contrôle sur les dites ressources (A2). A1. Pouvoir d’appropriation de l’État et des Collectivités sur les ressources en eau

Ainsi que cela a été déjà dit : les principes de droit régissant les eaux, quant à leurs utilisation, conservation et gestion procèdent du CDF, du Code de l’eau et de l’ensemble des textes relatifs à la gestion des ressources naturelles. L’examen de ces principes montre que sur toutes les eaux sans exclusive, l’État malien et les Collectivités exercent un pouvoir d’appropriation. Il faut se dépêcher de dire qu’il ne s’agit pas d’une appropriation privative. En effet, là-dessus la loi dispose sans équivoque que « l’eau ne peut faire l’objet d’appropriation privative, … » (article 3 du Code de l’eau). Quelle va donc être la nature du droit de propriété que celui de l’État et des Collectivités sur les ressources en eau du pays y compris celles du SAI ? La réponse à cette question nous est fournie par la loi sur l’eau qui déclare en son article 2 alinéa 2 que « l’eau est un bien public relevant du domaine public. Son usage appartient à tous pourvu qu’il ne soit pas contraire à l’intérêt public ». Ce texte est clair : l’emprise des pouvoirs publics sur les ressources en eau se manifeste à travers le principe dit de la domanialité publique de l’eau. L’appropriation, dont il est ici question, est une appropriation publique, conséquente à l’inclusion de toutes les eaux au domaine public. Ceci mérite d’être approuvé, car l’appropriation publique opère ici en tant que mécanisme protecteur des eaux. Cette protection des eaux pour cause domanialité publique, trouve sa manifestation au double plan matériel et pénal. La protection matérielle des eaux domaniales se traduit, au plan juridique, par trois constantes : inaliénabilité, insaisissabilité, imprescriptibilité. Le principe de l’inaliénabilité de l’eau s’entend de ce que les ressources en eau dépendant du domaine public ne peuvent faire l’objet de transaction, en ce sens qu’elle ne peut être cédée à des tiers ; quant au principe de la non saisissabilité de l’eau, il signifie que les eaux, faisant partie du domaine public, ne peuvent faire l’objet de saisie, au sens de leur mise sous main de justice dans l’intérêt d’un particulier.

Page 13: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

13

S’agissant du dernier principe : celui, de l’imprescriptibilité de l’eau, il s’entend de ce que l’écoulement du temps ne peut aboutir à une quelconque consolidation du droit d’un tiers sur les ressources en eau du domaine public. Ce qui précède montre que l’appropriation que l’État malien et les Collectivités exercent sur toutes les ressources en eau (y compris le SAI) n’a d’autre vocation que de les protéger. Cette protection matérielle permet de soustraire les ressources hydrauliques de l’accaparement de particulier au détriment du collectif humain. Mais, il y a aussi la protection pénale des eaux. Il s’agit de dispositif pénal prévu par le code domanial et le code de l’eau. Ce dispositif tient, pour l’essentiel, dans l’article 25 du CDF concernant les infractions relatives à la police, la conservation et l’utilisation du domaine public, ainsi qu’à l’exercice des servitudes d’utilité publique. Selon le texte sus-visé, toutes ces infractions constituent des contraventions ; elles sont passibles d’une amende de 3000 francs à 18000 francs et d’un emprisonnement de 1 à 10 jours ou de l’une de ces deux peines seulement, le tout sans préjudice de la réparation des dommages causés ou de la démolition, aux frais du contrevenant, des ouvrages indûment établis sur le domaine public et dans les zones de servitudes ou de l’exécution, également à ses frais, de travaux prescrits. L’autre aspect, du dispositif pénal, est prévu aux articles 72 et suivants du code de l’eau. Selon ces textes, toute infraction à la réglementation de l’eau est punie d’un emprisonnement de 1 à 6 mois et d’une amende de 50 000 à 500 000 francs cfa. De ce qui précède, il faut dire que le principe de la propriété de l’État et des Collectivités s’applique aux ressources en eau du SAI ; ces eaux font partie du domaine public et bénéficient des règles de protection matérielle et pénale prévues par le droit positif en ce domaine. Mais l’État et les Collectivités ont également un pouvoir de gestion et de contrôle sur les ressources en eau. A2. Pouvoir de gestion et de contrôle de l’État et des Collectivités sur les ressources

en eau En plus du pouvoir d’appropriation ci-dessus précisé, il faut dire que l’État malien et les communes ont sur les ressources en eau, en général et celles du SAI, en particulier, un pouvoir de gestion et de contrôle. Ce pouvoir trouve une expression, à la fois, au plan institutionnel et au plan réglementaire. Une analyse de ce pouvoir, à la lumière du droit positif malien, renvoie d’une part, à l’étude du cadre institutionnel de la gestion de l’eau (1°), d’autre part, à celle de la réglementation des activités liées à l’exploitation de l’eau (2°).

1°. Cadre institutionnel de la gestion de l’eau

Une étude, du cadre institutionnel de la gestion de l’eau au Mali, renvoie à une double interrogation. Celle-ci est la suivante : qui gère l’eau ? ; comment ?

Page 14: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

14

La réponse à cette question qui nous est fournie par la loi sur l’eau, amène à étudier d’une part, les modalités de gestion des ressources hydrauliques (a), d’autre part, les structures de gestion des dites ressources (b).

a. Modalités de gestion des ressources hydrauliques En droit positif malien, pour connaître les principes juridiques régissant la mécanique de la gestion de l’eau, il suffit de se reporter aux articles 8 et suivants de la loi n° 02-006 du 31 janvier 2002 portant code de l’eau. L’analyse de ces textes met en lumière les caractéristiques essentielles de la gestion de l’eau : - gestion globale, durable et équitable de la ressource en eau ; elle vise, dans son entier,

à la protection quantitative et qualitative de l’eau. Pour assurer cette double protection, les pouvoirs publics exercent un contrôle sur les prélèvements de l’eau de surface et souterraines ; en la matière, sauf pour les besoins domestiques tous les prélèvements sont soumis au régime de l’autorisation ou de la concession ;

- gestion planifiée et concertée ; celle-ci est rendue possible : d’abord par le découpage

du territoire national en grandes unités hydrographiques naturelles dénommées bassins ou sous-bassins hydrographiques ou systèmes aquifères ;

- ensuite, par la création, auprès de l’administration chargée de l’eau, d’organes

consultatifs (conseil national de l’eau, conseils régionaux et locaux de l’eau, comités de bassins ou de sous-bassins) ;

- enfin, par la mise en œuvre de schéma directeur d’aménagement et de gestion des

eaux ; il s’agit d’un document établi par l’administration chargée de l’eau pour une période de 20 ans. Ce document, qui peut être révisé à chaque quinquennat, fixe les objectifs généraux d’utilisation, de mise en valeur et de protection quantitative et qualitative des ressources en eaux, ainsi que des écosystèmes aquatiques.

Tout ce qui précède détermine le visage actuel de la gestion des eaux au Mali. Toutes les ressources aqueuses y contenu le SAI relèvent de la gestion étatique. Cette mission de gestion de l’eau, l’État s’en acquitte au moyen de structures créées à cette fin. b. Structures de gestion des ressources en eau : Ici, il s’agit, de façon pratique, de dresser le profil des structures ; qui, aujourd’hui, ont une compétence avérée dans le domaine de la gestion des eaux. De ce point de vue, l’analyse des textes juridiques, ayant trait à ces structures laisse apparaître que celles-ci sont multiformes et très diversifiées. Une distinction s’avère donc nécessaire entre les services de l’État au niveau central (b1) les services des Collectivités (b2) et les organes consultatifs (b3) b1. Les services de l’État au niveau central

Page 15: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

15

L’examen de l’armature juridico-institutionnel de la gestion de l’eau met en lumière une dispersion de compétence ; en effet, plusieurs départements ministériels exercent des attributions dans le secteur de l’eau. Ces attributions relèvent, plus spécifiquement, de directions nationales, avec des relais au niveau régional. Pour avoir une connaissance précise des départements ministériels et de leurs directions nationales qui officient dans la gestion de l’eau, il faut se reporter aux dispositions conjuguées du décret n° 04-145/P-RM du 13 mai 2004 fixant les attributions spécifiques des membres du gouvernement et des textes organiques de chaque direction nationale. Ces textes font une distinction entre le Ministère des Mines de l’Énergie et de l’Eau (1) et les autres Ministères (2). 1. Le Ministère des Mines, de l’Énergie et de l’Eau C’est le département qui, à titre principal, a les eaux dans ses attributions qui sont : - l’élaboration et le contrôle de l’application de la réglementation en matière de mines, d’énergie et d’eau – le développement des ressources en eau, en vue d’assurer notamment la couverture des besoins du pays en eau potable – la réalisation des études et travaux d’aménagement des cours d’eau, à l’exception des aménagements hydro-agricoles. Le bras armé de ce ministère est constitué par la Direction Nationale de l’Hydraulique. Elle a été créée par l’ordonnance n° 99-014/P-RM du 01 avril 1999 modifié par la loi n° 99-023, du 11 juin 1999. Ces textes doivent être complétés par le décret n° 99-185/P-RM du 5 juillet 1999 fixant l’organisation et les modalités de fonctionnement de la Direction de l’hydraulique. Une analyse de ces textes permet de fixer les missions de la direction de l’hydraulique et de déterminer les structures qui la composent. • Les missions de la Direction Nationale de l’Hydraulique : - elle élabore les éléments de la politique nationale de l’eau, procède à la définition des

normes techniques et de la réglementation en matière d’approvisionnement d’eau potable ;

- elle est chargée de faire l’inventaire et l’évaluation du potentiel des ressources

hydrauliques au plan national ; étudier, contrôler, puis superviser les travaux de réalisation des ouvrages et veiller à leur état de bon fonctionnement ; faire l’évaluation des projets de développement, dans le secteur de l’eau : participer à la promotion de la coopération sous-régionale, dans le domaine de la gestion des ressources en eau.

• La direction de l’hydraulique s’acquitte des missions ci-dessus spécifiées, en s’appuyant sur des structures. Les principes juridiques qui déterminent l’ossature de ces structures doivent être recherchés à travers le décret n° 99-185 précité. Pour connaître ces principes, il faut se reporter aux articles 5 à 18 de la loi du 5 juillet sus-visée.

Page 16: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

16

A l’analyse de ces textes, il ressort que les dites structures comprennent un centre de documentation et d’information en staff et cinq divisions ayant trait respectivement à : l’hydraulique urbaine, l’hydraulique rurale, l’aménagement hydraulique, l’inventaire des ressources hydrauliques, les normes et la réglementation. - S’agissant d’abord, du centre de documentation et d’informatique, il doit remplir les

missions suivantes : suivi et évaluation des activités du service ; suivi de la mise en œuvre et de l’impact des projets et programmes, ainsi que la formulation de mesures correctives ; centralisation, traitement et diffusion de l’information et des données statistiques ; élaboration des stratégies de communication en direction des partenaires ; centralisation, mise à jour, et gestion de la documentation spécialisée et de celle concernant les activités du service.

- S’agissant, ensuite de la division de l’hydraulique urbaine, elle comprend deux

sections : la section approvisionnement en eau des centres urbains et secondaires et la section évacuation des eaux pluviales et usées.

Elle est chargée de : élaborer les schémas directeurs d’approvisionnement en eau potable des centres urbains et secondaires – concevoir, coordonner et contrôler la réalisation des installations de production, de traitement de distribution d’eau potable et des ouvrages d’évacuation des eaux pluviales et des eaux usées – appuyer les collectivités locales et organismes personnalisés en matière d’exploitation des ouvrages et infrastructures d’approvisionnement en eau potable. - S’agissant encore de la division de l’hydraulique rurale, deux sections la composent : la section hydraulique villageoise et la section hydraulique pastorale. Ses missions sont les suivantes : élaborer les schémas directeurs d’approvisionnement en eau potable des villages – concevoir, coordonner et contrôler la réalisation des ouvrages de production d’eau et des installation d’assainissement villageois – appuyer les collectivités locales en matière d’exploitation des ouvrages et infrastructures et d’équipements hydrauliques, mener toute étude ou recherche appliquée en matière d’hydraulique. Quant à la division des aménagements hydrauliques elle comprend la section des aménagements hydro-techniques et celle de l’hydraulique fluviale. Cette division est chargée de : élaborer les schémas directeurs d’aménagement des bassins fluviaux des cours d’eau et des voies navigables – mobiliser et gérer les ressources en eau concevoir et contrôler l’exécution des projets d’aménagements hydrauliques – suivre la mise en place d’ouvrages, d’infrastructures et d’équipements hydrauliques mener toutes étude ou recherche appliquée en matière d’hydraulique. - S’agissant, par ailleurs, de la division inventaire des ressources hydrauliques, elle repose sur deux sections : la section inventaire des eaux de surface et la section inventaire des eaux souterraines. Elle a pour missions : faire l’inventaire de eaux, de surface et des eaux souterraines et mener des études générales pour une meilleure connaissance des ressources hydrauliques – suivre et évaluer l’exploitation des ressources hydrauliques – maintenir les équipements d’études, de mesures, de traitements et de communication.

Page 17: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

17

- Concernant, enfin, la division normes et réglementation, elle est composée d’une section normes et d’une section réglementation. Elle est chargée de : participer à l’élaboration et la révision des normes d’utilisation et de rejet des eaux – participer à l’élaboration et la révision des normes applicables aux ouvrages hydrauliques – élaborer, contrôler l’application de la réglementation relative à l’exploitation des ouvrages hydrauliques et à la gestion des ressources en eau. Au terme de l’étude relative aux missions et aux structures de la Direction Nationale de l’Hydraulique, il faut noter que son activité de coordination et de contrôle s’exerce sur les services régionaux et sub-régionaux. De plus, la direction est représentée au niveau régional et au niveau du district de Bamako par la Direction Nationale de l’Hydraulique et de l’Énergie. Il existe, également, auprès de la Direction Nationale de l’Hydraulique, le laboratoire de la qualité des eaux créé par l’ordonnance n° 90-51/P-RM du 4 septembre 1990. Tout ce qui précède montre, à suffisance, que c’est le ministère des mines de l’énergie et de l’eau, qui a en charge la gestion des ressources en eau. Mais, il y a aussi d’autres ministères qui ont des compétences dans le domaine de l’eau. 2. Autres Ministères ayant des compétences dans le domaine de l’eau Ces ministères sont les suivants : Ministère de l’environnement et de l’assainissement Ce département exerce ses compétences par l’entremise de la Direction Nationale de l’Assainissement et du Contrôle des Pollutions et des Nuisances. Créée par l’ordonnance n° 098-027/P-RM du 25 août 1998 cette direction est chargée de :

- suivre et veiller à la prise en compte, par les politiques sectorielles, des plans et programmes de développement, des questions environnementales et à la mise en œuvre des mesures prévues en la matière ;

- assurer la supervision et le contrôle technique des procédures d’étude d’impact sur

l’environnement telle qu’elle est réglementée par le décret n° 03-594/P-RM du 03 décembre 2003 ;

- élaborer et veiller au respect des normes nationales en matière d’assainissement de

pollution et de nuisances ;

- assurer le contrôle et le respect de la législation et des normes en matière l’assainissement, de pollution et de nuisances ;

- assurer la formation, l’information et la sensibilisation des citoyens sur les problèmes

d’insalubrité, de pollution et de nuisances en rapport avec les structures concernées, les collectivités et la société civile ;

- assurer le suivi de la situation environnementale du pays ;

Page 18: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

18

- Ministère de l’Administration Territoriale et des Collectivités locales.

Ici, la loi n° 95-034 du 30 mai 1995, portant code des Collectivités territoriales, confère au maire sous le contrôle du conseil communal, et sous la tutelle du représentant de l’État auprès de la commune, la responsabilité de la police de l’eau. Ministère de l’agriculture Ce département, à travers la Direction Nationale de l’aménagement et de l’équipement rural, créée par décret n° 96-346/P-RM du 11 décembre 1996, est chargé de la mise en œuvre des projets d’aménagement hydro-agricole. Ministère de l’Élevage et de la Pêche Ce nouveau département devra créer une direction nationale, qui devra avoir compétence en matière d’aménagement et de gestion des ressources pastorales et piscicoles. Ministère de la Santé Créée par l’ordonnance n° 1-020/P-RM du 20 mars 2001, et organisée par le décret n° 01-219/P-RM du 24 mars 2001, la Direction Nationale de la Santé publique applique la politique du département. Pour ce faire, elle est compétente en matière d’hygiène et de santé. En outre, elle est chargée du contrôle de la qualité des eaux grâce au Laboratoire de Santé. Ministère de l’équipement et des transports Là, c’est la Direction Nationale de la Météorologie qui a compétence pour effectuer des études météréologiques et hydrométéréologiques. Toutes les directions nationales, des ministères sus-visés, ont leurs relais au niveau régional et local. A ce niveau, il y a aussi les services communaux exerçant des compétences dans le domaine de l’eau. b2. Les services des collectivités décentralisées Les principes de droit régissant les attributions des services des collectivités dans le cadre de la gestion des ressources en eau, doivent être recherchés à travers les dispositions : du code des collectivités, du code de l’eau, notamment en ses articles 49 et suivants, de l’ordonnance n° 00-20/P-RM du 14 avril 2000 fixant les modalités d’application de l’ordonnance sus-visée n° 00-20/P-RM du 15 mars 2000. De l’analyse combinée de ces textes, il ressort que les services ayant compétence dans la gestion de l’eau sont : le conseil communal, le conseil de cercle et l’assemblée régionale. Le conseil communal assure la maîtrise d’ouvrage des activités d’approvisionnement en eau potable au niveau de la commune. A ce titre, il a la maîtrise d’ouvrage en matière d’alimentation en eau potable.

Page 19: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

19

Entrent, également, dans les compétences du conseil communal, la création et l’entretien des puits et points d’eau, le schéma d’aménagement du territoire communal, la gestion du domaine public communal, l’implantation et la gestion des équipements collectifs, l’hydraulique rurale et urbaine. Quant au conseil de cercle, il exerce des compétences dans le domaine de l’eau et de l’assainissement. Dans ce cas, c’est le représentant du gouvernement qui approuve tous les projets communautaires, avec l’appui des services techniques chargé du secteur au niveau local. Il intervient aussi en matière d’hydraulique rurale, de création et gestion des équipements collectifs et de protection de l’environnement. S’agissant de l’assemblée régionale, elle règle, par ses délibérations les affaires de la région notamment celles ayant trait aux programmes de développement, de sa mise en cohérence avec les programmes nationaux. Elle délibère également sur le schéma d’aménagement du territoire et de développement régional, ainsi que sur les actions de protection de l’environnement et d’alimentation en eau potable et d’hygiène publique. Les structures des collectivités dont le profil vient d’être dressé ne sont pas les seules à exercer des compétences dans le domaine de l’eau ; il y a aussi les organes consultatifs. b3. Les organes consultatifs Les règles de droit qui déterminent l’architecture des organes consultatifs, en matière de gestion des ressources en eau, sont prévues par le code de l’eau, en ses articles 66 à 70 et par le décret n° 03-587/P-RM du 31 décembre 2003 fixant l’organisation et les modalités de fonctionnement du conseil national de l’eau, des conseils régionaux et locaux de l’eau. L’analyse de ces textes permet de cerner le visage de ces organes : le conseil national de l’eau, les conseils régionaux et locaux de l’eau, les comités de bassins ou de sous-bassins. S’agissant, d’abord, du conseil national de l’eau, l’étude de sa composition va nous retenir ; ce n’est après que ses missions seront étudiées. La composition de cet organe est fixée aux articles 2 et suivants du décret organique sus-visé : il s’agit du Ministre chargé de l’eau ou son représentant, président ; sont membres ; tous les ministères ou leurs représentants sus-visés, exerçant des compétences dans le domaine de l’eau ; s’y ajoutent : le président de l’assemblée permanente des chambres d’agriculture du Mali ou son représentant – un représentant du haut conseil des collectivités territoriales – un représentant des associations de consommateurs – un représentant des associations des usagers – un représentant des exploitants – un représentant des ONG intervenant dans le secteur de l’eau – un représentant des comités de bassins ou de sous-bassins. Quant à ses missions, prévues à l’article 68 du code de l’eau, elles consistent à émettre un avis sur : les projets de plan directeur de l’eau et les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux, ainsi que des modifications y afférentes - les projets d’aménagements et de répartition des eaux ayant un caractère national, ainsi que sur les grands aménagements régionaux – toutes questions relatives à l’eau.

Page 20: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

20

S’agissant, ensuite des conseils régionaux et locaux de l’eau, ils se composent comme suit : Président, le haut commissaire ou son représentant ; sont membres : un représentant de chacune des directions ci-après : Direction régionale de l’hydraulique et de l’énergie, direction régionale de l’aménagement et de l’équipement rural, direction régionale de l’appui au monde rural, direction régionale de la santé, direction régionale de la conservation de la nature. S’y ajoutent : un représentant des associations de consommateurs ; un représentant des agences de bassins, des comités de bassins ou de sous-bassins ; un représentant des usagers ; un représentant des ONG intervenant dans le secteur de l’eau ; un représentant de l’assemblée régionale. Quant à leurs missions, elles sont dictées à l’article 69 de la loi sur l’eau. Selon ce texte « les conseils régionaux et locaux de l’État ont pour mission d’émettre un avis sur toutes les questions relatives à l’eau soumises par l’Administration de l’eau. A cet effet, ils peuvent : - formuler des propositions relatives à la gestion des ressources en eau du bassin ou sous-bassin hydrographique ou de systèmes aquifères ; - formuler des propositions de solutions à tous conflits d’usage de l’eau ; proposer la révision du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux, d’en assurer le suivi et l’évaluation au niveau régional et local ; … ». S’agissant, enfin des comités de bassins ou sous-bassins, ils ont pour rôle de garantir une gestion concertée des ressources en eau à l’échelle du bassin ou du sous-bassin. A cette fin, ils ont la faculté de formuler des propositions sur la gestion des ressources du bassin ou sous-bassin hydrographique ou systèmes aquifères – proposer la révision du plan directeur d’aménagement et de gestion des eaux des bassins et sous-bassins hydrographiques ou systèmes aquifères. Au terme de cette étude des structures de gestion de l’eau, il faut noter que le législateur malien a fait un bon dosage en attribuant, à chaque structure concernée, des compétences à la mesure de son domaine d’activité. Sans doute, la vitalité de l’eau, du fait de son caractère indispensable à la vie de l’homme, des animaux et des plantes, explique le comportement du législateur. Aussi bien, un effort de taille a été accompli, au sens d’une mise en cohérence des structures de gestion de l’eau. La création d’organes consultatifs auprès de l’Administration de l’eau, prouve, s’il en est besoin, le souci d’assurer la coordination des politiques sectorielles en matière de gestion des ressources en eau : un bien relevant du domaine public dont l’usage appartient à tous et s’exerce dans le cadre de la solidarité entre usagers. Ce qui précède montre que le système de gestion préconisé en droit positif malien est celui d’une gestion globale durable et équitable de la ressource en eau ; encore que cette gestion soit contrôlée au moyen d’une réglementation des activités d’exploitation de l’eau.

Page 21: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

21

2°. Réglementation des activités liées à l’exploitation des ressources en eau Une des missions classiques de l’État consiste à réglementer l’utilisation des ressources naturelles. Il est ainsi des ressources foncières, forestières, piscicoles, pastorales et hydrauliques. Pour ne retenir que ces dernières, c’est-à-dire les ressources en eau, il faut dire que c’est la spécificité de leur mode de gestion qui conditionne et détermine le visage actuel de la réglementation de leur exploitation : il s’agit, ainsi que cela a été vérifié ci-dessus, d’une gestion globale, durable et équitable. Ce type de gestion repose, fondamentalement sur la protection de la ressource, aux fins de la rendre disponible aux usagers ; de ce fait, la nécessité d’un contrôle étatique sur cette disponibilité s’impose. Ceci explique l’existence d’une réglementation en ce sens (a). A cela, il faut ajouter que l’examen du droit positif malien, sur les activités liées à l’exploitation de l’eau, recèle l’existence d’une hiérarchie entre les usages de l’eau. C’est, de la sorte que l’alimentation en eau potable est classée comme usage prioritaire, ce qui explique sa réglementation (b). Viennent, à la suite, les usages particuliers que sont l’irrigation, l’industrie, l’électricité, la pêche et la pisciculture, la navigation. Toutes les activités, sus-énumérées font l’objet d’une réglementation spécifique (c). a. Réglementation de la disponibilité de l’eau A proprement parler, il n’existe pas, dans l’ordonnancement juridique un intitulé comme ci-dessus. Ce qu’il faut donc, véritablement entendre comme tel, c’est en fait une série de mesures juridiques élaborées par le législateur pour assurer la disponibilité de l’eau. A l’analyse, ces mesures ne présentent pas la même physionomie, selon qu’on a affaire à la disponibilité au plan quantitatif ou à celle au plan qualitatif. a1. Mesures juridiques ayant trait à la disponibilité de l’eau au plan quantitatif

Les mesures, dont il s’agit ici, permettent à l’administration de l’eau de veiller au contrôle de la disponibilité de l’eau. Un tel contrôle fait appel à des mécanismes de protection de l’eau. Les principes qui régissent ces mécanismes sont contenus dans les articles 18 et suivants du code de l’eau. Un principe essentiel se dégage de l’analyse de ces textes : la soumission des prélèvements des eaux, au régime de l’autorisation et de la concession. L’autorisation s’applique aux prélèvements des eaux de surface, ainsi qu’au prélèvement des eaux souterraines. S’agissant des prélèvements des eaux de surface, ils sont réglementés à l’article 18 du code de l’eau. Ce texte prévoit un principe et une exception. Le principe posé est le suivant : aucune dérivation des eaux domaniales, de quelque manière et dans quelque but que ce soit, tendant à les enlever momentanément ou définitivement à leurs cours, susceptible de porter atteinte au libre écoulement ou de réduire la ressource en eau, ne peut être effectuée

Page 22: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

22

sans autorisation préalable de l’administration de l’eau, après avis du conseil national de l’eau. Mais, il y a une exception à ce principe : l’autorisation n’est pas requise pour des prélèvements d’eau superficielle destinées à des fins domestiques et qui ne dépassent pas un seuil de volume fixé par décret pris en conseil de Ministres sur proposition du ministre ayant l’eau dans ses attributions. Quant aux prélèvements des eaux souterraines, ils sont réglementés à l’article 19 du code de l’eau. Là encore, le texte pose un principe assorti d’une exception dans les termes ci-après : «les prélèvements d’eaux souterraines ne peuvent être faits sans autorisation, sauf pour des usages domestiques ne dépassant pas un seuil de volume fixé par décret pris en conseil des ministres et ne présentant pas de risques de pollution de la ressource ». Comme si cela ne suffisait pas, l’article 19 continue : « sont soumis au régime de la concession, les prélèvements d’une importance telle qu’ils sont susceptibles de présenter un danger pour la santé et la sécurité publique, de nuire de façon très significative au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d’accroître notamment le risque d’inondation, de porter gravement atteinte à la qualité et à la diversité du milieu aquatique ». Les dispositions sus-spécifiées sont sans ambiguité : elles marquent la volonté du législateur de soumettre les prélèvements de l’eau à un contrôle étatique, afin d’en assurer la protection quantitative. Dans le même sens, l’article 20 du code de l’eau affirme que « l’administration chargée de l’eau peut édicter des prescriptions spéciales destinées à assurer la conservation des ressources en eau, pour faire face à une menace, et aux conséquences d’accidents, de sécheresse ou à un risque de pénurie. Toute activité non visée par les articles 18 et 19 ci-dessus, mais susceptible d’intéresser les eaux du domaine public est classée à l’initiative de l’administration chargée de l’eau soit dans le régime de l’autorisation, soit dans celui de la concession ». Rien ne peut mieux, que ce texte, traduire le principe de la soumission de toutes les activités, se rapportant aux prélèvements de l’eau, au régime de l’autorisation et à celui de la concession. Ces deux instruments juridiques, mis à la dispositions de l’administration de l’eau pour contrôler les prélèvements de la ressource en eau, constituent en réalité de mesures destinées à assurer la disponibilité de l’eau au plan quantitatif. Ces mesures doivent être complétées par celles qui sont relatives aux périmètres de protection prévus à l’article 24 du code de l’eau. Selon ce texte, « des périmètres de protection sont instituées par déclaration d’utilité publique en vue de préserver des points de prélèvement des eaux destinées à la consommation humaine des risques de pollution provenant des activités exercées à proximité. La déclaration d’utilité détermine les interdiction ou réglementations à l’intérieur des périmètres de protection immédiate, rapprochée ou éloignées ».

Page 23: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

23

L’idée essentielle qui se dégage de ce texte est celle d’une protection des points d’eau destinés à l’alimentation en eau potable, contre la pollution. Une telle mesure, il faut le dire, se situe dans la protection de l’eau au plan qualitatif. a2. Mesures juridiques concernant la disponibilité de l’eau au plan qualitatif

L’eau disponible au plan qualitatif, s’entend de la qualité de l’eau. Cette qualité est définie, en droit malien, comme étant l’ensemble des propriétés physiques, chimiques, biologiques et organoleptiques qui rendent l’eau apte à l’utilisation à laquelle on la destine (article 1er du code de l’eau). En l’état de cette définition, on comprend qu’il ne suffit pas d’avoir l’eau en quantité ; encore qu’elle soit de qualité pour pouvoir satisfaire aux divers usages auxquels, elle est destinée. De ce qui précède, il ressort que la qualité de l’eau est le critère déterminant de sa gestion globale et durable de son exploitation et de sa mise en valeur. On comprend alors pourquoi le législateur a mis en œuvre tout un dispositif de mesures pour préserver la disponibilité qualitative de l’eau. La découverte de ces mesures préservatrices de la qualité de l’eau n’est pas chose aisée. En effet, au sein de l’ordonnancement juridique, elles ne présentent pas un front uni. Elles sont donc dispersées à travers le droit positif ; au sein du code de l’eau, ces mesures sont intitulées de la protection qualitative et sont contenues dans les articles 14 à 17. En dehors de la loi sur l’eau, les dites mesures sont réglementées par les textes ci-après : la loi n° 91-047/AN-RM du 23 février 1991 relative à la protection de l’environnement et du cadre de vie – la loi n° 01-079 du 20 août 2001 portant code pénal : ici, il s’agit d’une part, de crimes contre l’environnement prévus et réprimés aux articles 193 à 197 ; d’autre part, du pillage et de l’empoisonnement d’eau potable prévu à l’article 314 – la loi n° 1-020/AN-RM du 26 avril 2001 relative aux pollutions et nuisances – le décret n° 01-394/P-RM du 6 septembre 2001 fixant les modalités de gestion des déchets solides – le décret n° 1-395/P-RM du 6 septembre 2001 fixant les modalités de gestion des eaux usées et des Gadoues – le décret n° 1-396/P-RM du 6 septembre 2001 fixant les modalités de gestion des pollutions sonores – le décret n° 03-594/P-RM du 31 décembre 2003 relatif à l’étude d’impact sur l’environnement. Bien entendu, les textes, sus-visés, doivent être complétés par la réglementation spécifique aux diverses activités : pêche et pisciculture – irrigation – pastoralisme – mines – industrie – navigation etc. Une analyse combinée de tous les textes ci-dessus, laisse apparaître que le maître mot, des mesures relatives à la préservation de la qualité de l’eau, réside dans la réglementation de la pollution. Une étude de cette réglementation renvoi à deux aspects essentiels. Le premier aspect a trait à l’interdiction de causer des actes de pollution. Cette interdiction est prévue à l’article 14 du Code de l’eau dans les termes suivants : « est interdit tout déversement ou écoulement, rejet, dépôt indirect dans les eaux des matières de toute

Page 24: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

24

nature susceptible de porter atteinte à la santé publique ainsi qu’à la faune et à la flore aquatique ». Ce texte est clair et n’appelle pas de commentaire particulier. Le second aspect quant à lui, concerne les mesures de prévention de la pollution. Ces mesures sont les suivantes : soumission des déversements au contrôle de l’autorité compétente pour en garantir l’absence de nuisance – fixation, par les autorités compétentes, de normes de qualité des eaux, dans certaines zones des cours d’eau jusqu’à la limite de salure des eaux – réglementation ou interdiction d’activité en fonction des normes de qualité – obligation, pour toute personne exerçant une activité source de pollution, de préconiser toute mesure propre à enrayer ou prévenir les dangers pour la ressource en eau et l’hygiène du milieu – obligation pour tout pollueur de supporter les coûts de ses activités polluantes. S’ajoutent, aux mesures, ci-dessus énumérées, celles ayant trait à l’assainissement du milieu et le principe de la soumission, de tout projet concernant l’utilisation de l’eau, à une étude d’impact environnemental. Sans doute, la vitalité de l’eau à la vie explique et justifie les mesures juridiques ci-dessus exposées. Mais, il faut le dire : l’eau qui est source de vie, c’est l’eau non polluée, l’eau potable. b. Réglementation de l’alimentation en eau potable

Pour connaître les règles qui régissent l’approvisionnement en l’eau potable, il faut se reporter au code l’eau (articles 44 à 55), à l’ordonnance n° 00-020/P-RM du 15 mars 2000 portant organisation du service public de l’eau et au décret n° 0-183/P-RM du 14 avril 2000 fixant les modalités d’application de l’ordonnance sus-visée. L’analyse concertée de ces textes laisse apparaître que l’essentiel de la réglementation repose sur quatre notions fondamentales : d’un côté il y a les notions de service public de l’eau et de maîtrise d’ouvrage ; de l’autre côté, il y a celles de recettes et tarifs du service public et de fonds de développement. b1. Notions de service public de l’eau et de maîtrise d’ouvrage 1. Notion de service public de l’eau S’agissant du service public de l’eau, il peut être défini comme étant la production, le transport et la distribution d’eau potable en vue de satisfaire les besoins du public. Ainsi défini, il s’agit de s’interroger sur les modalités de gestion de ce service public. Selon la loi, le service public de l’eau est géré ou moyen du mécanisme juridique dit de la délégation de gestion. Cette délégation de gestion est faite à des exploitants, suivant une convention à la quelle est annexé un cahier de charges faisant état des obligations de service public.

Page 25: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

25

La délégation de gestion n’opère pas de la même façon en milieu urbain et en milieu rural. Dans les centres urbains, la gestion en régie directe du service public de l’eau est interdite. Dans les villages, centres ruraux et semi-urbains, une délégation de gestion peut être attribuée à des associations d’usagers dotées de la personnalité morale. Ici, le service public de l’eau ne peut pas être exploité en régie directe par les communes ; en cas de déchéance d’un exploitant et dans l’impossibilité d’en trouver un autre, la commune peut, avec l’accord du Ministre chargée de l’eau potable, mettre en place une régie autonome (articles 44 et 45 code de l’eau). Également, la loi sur l’eau en son article 46 détermine les acteurs du service public de l’eau potable. Ce sont : l’État, les maîtres d’ouvrage, les exploitants et la commission de régulation. L’État assure la définition de la politique nationale d’alimentation en eau potable, ainsi que le développement du service public de l’eau dans le pays. Les maîtres d’ouvrage sont soit l’État, soit les collectivités territoriales. Les exploitants, opérateurs ou associations d’usagers, assurent, dans le cadre d’une délégation de gestion du maître d’ouvrage, la fonction de réalisation, de gestion et maintenance des installations d’eau. La commission de régulation veille à l’application de la politique tarifaire et effectue la régulation du service public de l’eau dans les centres urbains. 2. Notion de maîtrise d’ouvrage Elle constitue l’autre notion phare de la réglementation de l’eau potable. Son pourtour est dressé par les articles 9 et suivants de la loi sur l’eau. A l’analyse, il ressort de ces textes que le législateur s’est surtout préoccupé à définir la fonction de maître d’ouvrage et à énoncer ses responsabilités. Cette fonction est exercée par l’État dans les centres urbains ; mais, il peut déléguer celle-ci, aux collectivités territoriales. Dans les centres ruraux et semi-urbains, ce sont les dites collectivités qui exercent la fonction de maître d’ouvrage du service public de l’eau. Dans ce cas, les collectivités territoriales agissent : soit directement, lorsque les installations d’eau relèvent de leur niveau d’intérêt ; soit par délégation de l’État. Les communes ont la liberté de s’associer en vue de développer et assurer une meilleure gestion des installations d’eau de systèmes intégrés dépassant géographiquement une seule commune.

Page 26: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

26

La fonction de maître d’ouvrage, ci-dessus décrite, est assortie de responsabilité. En effet, le maître d’ouvrage du service public de l’eau assume, vis-à-vis de la collectivité humaine, la responsabilité ultime de la gestion, de la maintenance et du développement des installations d’eau, ainsi que toute activité nécessaire à leur fonctionnement adéquat. Aussi bien, ses responsabilités sont : l’organisation du service public d’approvisionnement en eau potable ; la préservation du domaine public placé sous sa dépendance ; le lancement des appels d’offres des délégations de gestion soumises à concurrence ; la négociation et la conclusion des conventions de délégation de gestion ainsi que de leurs avenants ; l’approbation des plans, d’investissements des gestionnaires délégués ; la recherche et la mise en place de financement pour exécuter les investissements qui sont à charge d’ouvrage. b2. Notions de recettes, tarifs du service public et de fonds de développement 1. Notion de recettes et tarifs du service public

S’agissant des recettes et tarifs du service public de l’eau, ils sont régis par les articles 53 à 52, du code de l’eau Ensemble, ces textes posent une série de principes dont l’essentiel se présente comme suit : - toutes les recettes perçues au titre du servie public de l’eau potable doivent être

entièrement affectées au secteur ; à cet effet, la collectivité territoriale décentralisée, maître d’ouvrage, tient un budget spécial tant pour les services publics de l’eau que pour les charges et recettes en cas de gestion déléguée. Elle exécute ce budget à partir d’un compte spécifique ouvert auprès d’une banque.

- La politique tarifaire et le recouvrement des coûts du secteur sont tenus de respecter

les principes suivants : l’accès au service public de l’eau que ce soit aux bornes fontaines ou aux branchements individuels, doit toujours être payant ; pour chaque système d’eau, les tarifs applicables doivent permettre le recouvrement des coûts ; dans les centres urbains ce recouvrement doit être complet, si possible et comprendre les coûts d’investissement, de renouvellement et d’exploitation. Dans les centres ruraux et semi-urbains, le recouvrement doit être complet pour les coûts d’exploitation et de renouvellement ; par contre, le recouvrement peut être partiel, si possible s’agissant des coûts d’investissement.

- Chaque système doit être géré de façon autonome sur le plan financier, les subventions

directes ou indirectes devant être comptabilisées.

- Les tarifs doivent être révisés périodiquement pour tenir compte de l’évolution des conditions d’investissement et d’exploitation, conformément aux critères définis par la commission de régulation.

- Lorsque les services publics de l’eau potable obtiennent leurs ressources en eau à

partir d’ouvrages à usages multiples, le prix payé par ces services pour l’accès aux ressources ne peut être supérieur au prix moyen payé par les autres utilisateurs.

Page 27: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

27

Ce qui précède montre que l’eau a une valeur économique, ceci explique l’existence du fonds de développement du service public de l’eau. 2. Notion de fonds de développement L’article 55 du code de l’eau est le siège de cette institution. Selon ce texte, il est créé un compte d’affectation spécial du trésor dénommé fonds de développement de l’eau. Le fonds est essentiellement constitué de dotation de l’État, de subventions des bailleurs de fonds, des dons, legs et emprunts, subsidiairement du produit des amendes perçues sur les pollueurs et les préleveurs, ainsi que de tout ou partie du produit de redevances sur les ressources en eau des gestionnaires délégués. Le fonds est géré par un comité de gestion regroupant les représentants des ministères chargés de l’eau, des finances et de la tutelle des collectivités locales. En plus de la réglementation de l’eau potable, dont les principes viennent d’être exposés, il y a aussi la réglementation de certains usagers. c. Réglementation des usages particuliers

Ici, le législateur est parti de l’idée selon laquelle certaines utilisations de l’eau ont un impact sur la qualité de l’eau. Il s’agit de l’usage de l’eau dans les domaines de l’irrigation, la pêche la pisciculture, la navigation, l’industrie, l’exploitation hydroélectrique. L’étude de la réglementation de ces différentes activités appelle à faire une distinction entre l’irrigation, la pêche, la pisciculture et la navigation d’une part, les utilisations industrielles et hydroélectriques, d’autre part. c1. L’irrigation la pêche, la pisciculture et la navigation S’agissant, d’abord de l’irrigation, il faut noter que les règles la régissant sont contenues dans les articles 56 à 59 du code de l’eau. Ces règles trouvent leur expression de la manière suivante : - en matière d’irrigation, les propriétaires et les exploitants des terres agricoles doivent

procéder à une mise en valeur rationnelle et optimale des ressources en eau ; tout irrigant doit veiller à ce que les eaux utilisées ne forment pas une source de propagation de maladie, du fait de leur stagnation au delà de la période normale de culture.

- La gestion des infrastructures hydrauliques d’irrigation ou de drainage peut être

assurée par les exploitants agricoles, à titre individuel ou en groupement, avec l’assistance éventuelle des services techniques de l’administration ayant l’irrigation dans ses attributions.

Page 28: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

28

- L’utilisation des eaux usées en faveur de l’irrigation, les conditions techniques générales liées à la réalisation des projets, l’exploitation et l’entretien des installations nécessaires à l’irrigation sont fixées par arrêté ministériel.

- S’agissant, ensuite de la pêche et de la pisciculture, elles sont réglées par l’article 63 du code de l’eau de la façon la plus nette : « la préservation des milieux aquatiques et de protection du patrimoine piscicole sont d’intérêt général. Tout propriétaire d’un droit de pêche et de pisciculture est tenu de participer à la protection du patrimoine piscicole et des milieux aquatiques.

- S’agissant, enfin, de la navigation, l’article 64 du code de l’eau y est consacré. Ce

texte renvoie la question aux textes législatifs et réglementaires en vigueur.

Toutefois, l’administration de l’eau est consultée, pour avis conforme, avant l’établissement de tout service régulier de transport sur les cours d’eau, les lacs et la réalisation de tout escale portuaire, la matérialisation et l’amélioration de tout chenal. c2. Les utilisations industrielles et hydroélectriques L’usage de l’eau dans l’industrie et l’implantation d’ouvrages hydroélectriques sont réglementés par les articles 50 à 63 du code de l’eau. S’agissant de l’utilisation de l’eau à des fins industrielles, la loi sur l’eau met à la charge des usagers les obligations ci-après : les unités industrielles sont tenues de traiter leurs effluents avant rejet dans le milieu naturel ; toutes les fois que le recyclage de eaux utilisées est techniquement et économiquement réalisable, les industries sont tenues d’y procéder ; quiconque désire entreprendre des travaux miniers, susceptibles de porter atteinte à la qualité et au mode d’écoulement des eaux, doit requérir l’autorisation préalable des administrations chargées de l’eau et de la santé publique et de se soumettre aux obligations d’étude d’impact environnemental ; toute décision d’implantation ou d’extension d’unités industrielles ne peut être accordée, sans l’avis conforme de l’administration chargée de l’eau. Quant à l’utilisation hydroélectrique de l’eau, la loi sur l’eau dispose que « tout ouvrage à construire dans le lit d’un débit minimal garantissant en permanence la vie, la circulation et la reproduction des espèces qui peuplent les eaux. L’ouvrage doit comporter des dispositifs empêchant la pénétration du poisson dans les canaux d’amenée et de fuite ». Les développements qui précèdent ont mis en lumière les pouvoirs reconnus à l’État et aux collectivités décentralisées sur les ressources en eau, en général et celles du SAI, en particulier. Ces pouvoirs, ainsi que cela a été vérifié, trouvent leur expression : dans l’appropriation publique de l’eau, sa gestion étant dévolue à l’État et aux collectivités territoriales ; également, c’est l’État qui assure le contrôle de l’utilisation de l’eau par une réglementation stricte des différents usages ; cette réglementation assure la protection des ressources en eau en quantité et en qualité. Aussi bien, cette réglementation s’impose aux divers usagers : État, Collectivités territoriales, populations. Pour ne retenir que ces dernières, il convient de s’interroger sur les pouvoirs qu’elles exercent sur les ressources en eau ?

Page 29: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

29

B. Pouvoirs des populations sur les ressources en eau du SAI En droit positif malien, les pouvoirs qui sont reconnus aux populations sur les ressources en eau prennent leur source dans les us et coutumes et dans le droit moderne. 1°. Les us et coutumes A la vérité, les pouvoirs coutumiers reconnus, aux populations maliennes sur les ressources en eau ne posent pas de problèmes, quant à leur exercice. En effet, depuis la haute antiquité, les populations mènent des activités économiques liées, à l’utilisation de l’eau : agriculture, élevage, pêche, extraction minière traditionnelle, navigation etc. Dans tous les villages du pays, il y a un consensus de toutes les populations autour de la répartition de ces pouvoirs exercés sous le contrôle des institutions coutumières. Dans ce contexte, les ressources hydrauliques (fleuves, marigots, rivières, lacs, étangs, mares sources, oueds) constituent la propriété communautaire du village ; leur usage est donc ouvert à tous : ressortissants du village et étrangers. Ces principes se vérifient sur le terrain, parce qu’ils ont été mis en évidence par les travaux de l’observatoire du foncier au Mali en 3ème, 5ème et 7ème région3. a. Ainsi, dans la région de Sikasso, les ressources en eau sont sous la gestion et le contrôle des chefs coutumiers (chefs de village, de terre, de l’eau). Ici, dans la tradition l’eau est sacrée et inaliénable. Toutes les activités liées à l’eau sont donc sous la juridiction d’un droit coutumier d’usage à titre individuel ou collectif. b. Dans la région de Mopti, la gestion et le contrôle des ressources naturelles reposent sur une toile de fonds d’expériences, longuement cumulées par les populations, dont la plus intéressante est celle ayant trait à la gestion des ressources en eau. A l’observation, l’analyse fait apparaître que tous les mécanismes régulateur du jeu foncier (accès aux espaces de production : agricole, piscicole pastoral) sont fortement dépendants de l’eau. Ici, l’histoire des institutions coutumières, liées à la gestion de l’eau, remonte à l’époque d’implantation des communautés villageoises. A l’ère Ardo, la gestion des ressources en eau relève de la seule volonté de l’Ardo en chef du « leydi ». Avec la « Dina », une certaine forme de concertations tels que le « Bessema » (chef d’esclave, distributeur, délégué des terres) et le « Jowro » (maître des pâturages), qui se joignent au « Dji-tigui) (maître des eaux) pour les prises de décisions annuelles relatives à la gestion de l’espace de production qui supporte, à la fois, l’eau, l’herbe et le champ. De nos jours, l’application du code de la « Dina » est largement tributaire de l’abondance de la crue : en période de bonne crue, les acteurs appliquent volontiers le dit code ; lorsque la crue est faible, l’espace de production est réduit et les acteurs ont recours à d’autres règles de gestion. Ici, on est en zone inondée où la gestion des ressources naturelles fait appel à plusieurs cultes. Ceci s’explique par le fait que chaque composante des ressources naturelles (terre,

3 Samba Soumaré, Ousmane Traoré, Tignougou Sanogo, Sadou Ba, Karim Togola : Rapport Bilan – Perspectives de l’observatoire du foncier au Mali, mars 1998.

Page 30: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

30

eau, herbe) dépend d’exploitants relevant d’ethnies et de systèmes de production différenciés. Ainsi, chez les bozos, le chef de culte est le maître des eaux, pour les activités de pêche ; chez les peuls, le « hore suudu baaba » officie, en tant que chef de culte des activités pastorales ; mais prend l’avis du « Bessema », lorsqu’il s’agit des activités agricoles. En zone exondée, le chef de village, chez les dogons, est le doyen de la première famille reçue par le fondateur et ayant conclu un pacte avec lui. Il est le gestionnaire du terroir, conformément à la coutume. Le foncier hydraulique relève donc de son autorité, sous la supervision du conseil des sages, comprenant le chef de village, et les doyens des familles lignagères du village. De ce qui précède, il ressort que la gestion des ressources en eau repose, hier comme aujourd’hui, en 5ème région, sur les us et coutumes ; ce que l’on retrouve aussi en 7ème région. c. Dans la région de Gao, l’activité dominante liée à l’exploitation de l’eau demeure le pastoralisme ; l’aire d’habitat et l’aire de production se situent autour des points d’eau : mares permanentes, oueds, puits, forages ; toutes ces ressources en eau constituent des ressources pastorales auxquelles s’ajoutent les pâturages herbacés et ligneux, les terres salées, les plaines à fonio et à cram-cram. L’accès à toutes ces ressources est ouvert à tous : autochtones ou étrangers ; c’est ce qui s’appelle le principe de la liberté d’accès aux ressources pastorales. Toutefois, il faut dire que ce principe connaît quelques exceptions dues à l’existence de règles spécifiques. Ces règles régissent les mares, les plaines à fonio et à cram-cram et les puits pastoraux. S’agissant des mares, plaines à fonio et à cram-cram, les espaces qui les supportent constituent un terroir d’attache pour la plupart des fractions nomades, Kel Tamasheq en l’occurrence. La notion de terroir d’attache est attributive d’avantages semblables à ceux d’un propriétaire ; il en résulte la reconnaissance d’un droit de préférence d’abreuvement sur les mares et de cueillette sur les plaines de fonio et à cram-cram. Autour des puits pastoraux, la fourche est l’instrument technique d’exhaure ; ici, chaque individu ou chaque groupe social du terroir d’attache possède sa fourche qui stigmatise son occupation foncière. Mais, il faut le préciser : la possession d’une fourche ne donne pas à son titulaire un droit d’usage prioritaire à tout moment. Par contre, le puisard librement creusé, à un endroit quelconque du lit du fleuve ou de la mare, reste à l’usage exclusif de celui qui a réalisé les travaux. Ce droit d’usage exclusif est-il consacré en droit moderne.

Page 31: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

31

2°. Le droit moderne Pour connaître la véritable nature des pouvoirs, reconnus aux populations, sur les ressources en eau, en droit moderne, il faut se reporter à la constitution, à la loi sur l’eau, aux textes de la décentralisation et à la loi portant charte pastorale. a. La loi fondamentale, dans son préambule, engage le peuple malien à assurer l’amélioration de la qualité de la vie et la protection de l’environnement. Il s’agit là d’une injonction qui s’adresse à tous ceux qui exercent une activité de production. Les populations rurales, dans la pratique des activités liée à l’utilisation des eaux, ne doivent pas perdre de vue cet aspect : il pèse sur tous les acteurs du foncier hydraulique un devoir de protection et de défense de l’environnement. Corrélativement, tous ont droit à un environnement sain (article 15 de la constitution). b. Quant à la loi n° 02-006 du 31 janvier 2002 portant code d’eau, elle reconnaît et garantit les droits d’usage traditionnels des populations sur les eaux du domaine public, pourvu qu’ils ne soient pas contraires à l’intérêt public. Aussi, les prélèvements d’eaux de surface pour les besoins domestiques, et ne dépassant pas un seuil de volume fixée par décret, sont des usages libres ; il en va de même, pour les prélèvements d’eaux souterraines, à des fins domestiques ne dépassant pas un certain seuil de volume fixé par décret et ne présentant pas de risques de pollution de la ressource. Les populations ont également la faculté de se prévaloir de tous les usages de l’eau, soumis au régime de l’autorisation de la concession. Mais, dans l’exercice de toutes les activités liées à l’usage de l’eau, les populations sont tenues à la protection de l’environnement et du cadre de vie. Au total, il faut dire que les populations, en tant que personne physique ou morale, ont le droit d’exercer toute forme d’activité liée à l’exploitation de l’eau. c. Quant aux textes de la décentralisation, notamment la loi n° 95-034 du 12 avril 1995 portant code des collectivités territoriales, ils reconnaissent aux conseillers de village, de fraction et de quartiers : (i) le pouvoir d’être, consultés, par les organes délibérants des collectivités, sur les activités de protection de l’environnement et la gestion des ressources naturelles ; (ii) le pouvoir de donner leur avis sur la réglementation des activités liées à l’usage de l’eau (agriculture, élevage, pêche et pisciculture) et la définition des servitudes autour des cours d’eau, lacs et étangs. d. S’agissant de la loi n° 01-004 du 27 février 2001 portant charte pastorale en République du Mali, elle reconnaît, aux populations, des droits sur les ressources en eau. Ces droits ont trait à l’accès des pasteurs aux points d’eau. Ce droit ne présente pas le même visage selon qu’il porte sur les points, d’eau naturels ou des points d’eau aménagés. S’agissant des points d’eau naturels, c’est-à-dire les ressources en eau du domaine public (rivières, fleuves, mares, lacs) leur accès, en vue de l’abreuvement des animaux, est libre et gratuit. Mais cette liberté d’accès doit se faire dans le respect des droits des autres utilisateurs, sans abus ni gaspillage.

Page 32: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

32

Pour ce qui concerne les points d’eau aménagés, tout dépend de leur nature : lorsqu’il s’agit de puits traditionnels, de puits en buse de ciment et de forage privés, leur accès est subordonné à l’autorisation préalable de leurs propriétaires. Par contre, quand il s’agit de points d’eau publics aménagés (puits en buse de ciment publics, forages publics) ils relèvent de la gestion de la Collectivité territoriale de leur situation, en partenariat avec l’ensemble des usagers concernés. Ici, les pasteurs résidants ont un droit d’accès prioritaire ; des taxes peuvent être instituées, à charge des usagers, par ladite collectivité. Corrélativement aux droits sus-énoncés, la loi pastorale met à la charge des pasteurs, une obligation de préservation de l’environnement. A cet égard, ils sont tenus d’apporter leur concours, à la surveillance du milieu naturel, notamment en matière d’alerte et de lutte contre les feux de brousse et d’alerte à la pollution ; ils doivent aussi contribuer à la protection de l’environnement et à la lutte contre la désertification ; également, les pasteurs doivent apporter leur concours au maintien des écosystèmes naturels, à leur fonctionnement équilibré et à la valorisation de leur potentiel productif – (article 7 de la loi, sus-visée, portant charte pastorale).

II. Place du SAI en droit international Au Mali, le droit international de l’eau est constitué par l’ensemble des accords inter étatiques relatifs à la gestion des eaux partagées notamment les bassins des fleuves Sénégal et Niger. Ces accords sont, pour l’essentiel, constitués par la convention amendée du 11 mars 1972 portant statut du fleuve Sénégal, la convention portant création de l’organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal. L’acte de Niamey, en date du 26 octobre 1963 relatif à la navigation et à la coopération économique entre les États du Bassin du Niger, l’accord révisé de Niamey du 25 février 1964 portant création de la Commission du fleuve Niger, la convention révisée de N’Djamena du 29 octobre 1987 portant création de l’autorité du Bassin du Niger. Ces accords trilatéraux ou multilatéraux doivent être complétés par plusieurs protocoles d’accords relatifs à l’utilisation et l’exploitation des eaux du bassin du fleuve Niger. Qu’il suffise ici de citer ceux qui paraissent essentiels :

- la résolution n°1/4°/CCE/861/Ouaga du 27 mars 1986 sur l’aménagement du bief fluvial Tombouctou-Gaya ;

- le protocole d’accord du 12 juillet 1988 relatif à la coopération sur l’utilisation des

ressources en eau du fleuve Niger entre le Mali et le Niger ;

- le protocole d’accord du 23 janvier 2003, entre la Guinée et le Mali, relatif à la coopération bilatérale pour la connaissance, la gestion, la mobilisation et l’utilisation des ressources en eau du bassin du Niger Supérieur ;

- le protocole d’accord du 6 octobre 2004, entre le Mali et le Niger, relatif à la

réalisation des barrages de Taoussa au Mali et de Kaindadji au Niger sur le fleuve Niger.

L’ensemble des principes de droit, découlant des accords sus-visés ne fait que reprendre les principes prévus par la convention des Nations Unies sur le droit relatif aux utilisations des cours d’eau internationaux à des fins autres que la navigation du 21 mai 1997 et la convention

Page 33: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

33

du 17 mars 1992 sur la protection et l’utilisation des cours d’eau transfrontalières et des lacs internationaux. Comme tels, ce sont les accords ci-dessus cités qui constituent le cadre juridique de la gestion des eaux partagées au Mali. A priori, ces accords sont, dans le principe, applicables aux ressources en eau du SAI, parce qu’ils constituent le droit positif en matière de gestion des eaux partagées. Il faut donc étudier ces accords (A) dont l’analyse appelle à faire une distinction entre les accords inter-étatiques relatifs au bassin du fleuve Sénégal (A) et ceux relatifs à celui du fleuve Niger (B). A. Accords inter étatiques relatifs au bassin du Sénégal Les accords relatifs à la gestion inter étatique des eaux du bassin du fleuve Sénégal sont des accords trilatéraux qui intéressent trois pays : la République du Mali, la République du Sénégal et la République de la Mauritanie. L’économie de ces accords repose sur les principes régissant le statut juridique des eaux du bassin (1°) et ceux relatifs à l’organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) (2°). 1°. Principes régissant le statut juridique des eaux du bassin Le fleuve Sénégal, à l’opposé du fleuve Niger, n’a pas été soumis à une réglementation internationale exogène. Ceci, parce que durant la période coloniale, le Sénégal était considéré comme un fleuve intérieur. Après les indépendances, les États riverains vont se préoccuper de doter le fleuve d’un statut juridique. Celui-ci sera l’œuvre de la convention du 7 février 1964, signée par la Guinée, le Mali, la Mauritanie et le Sénégal ; par cette convention, les États riverains affirment solennellement leur volonté de développer une étroite coopération, afin de permettre l’exploitation rationnelle des ressources du bassin du fleuve et garantir la liberté de navigation et l’égalité de traitement des utilisateurs. Un Comité inter-État avait pour mission de veiller à l’application de la convention. En 1972, cette convention a été dénoncée par trois États membres, ce qui a dû entraîner sa disparition et son remplacement par la convention du 11 mars 1972. C’est donc à cette convention qu’il convient de se reporter pour connaître les principes de droit international qui régissent la gestion et l’exploitation des eaux du bassin du fleuve. La convention sus-visé est un instrument juridique de droit international qui ne prévoit pas de préambule ; elle tient donc exclusivement dans un dispositif dont l’ossature repose sur dix neuf (19) articles. Une analyse combinée des dispositions contenues dans les dix-neuf articles fait ressortir les principes ayant trait au caractère international des eaux du bassin (a) à l’exploitation agricole et industrielle des eaux (b), à la navigation et le transport (c), à l’adhésion, le retrait et le règlement des litiges (d).

Page 34: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

34

a. Caractère international des eaux du bassin Ici, ce sont les articles 1 à 3 de la convention qui consacrent le caractère international des eaux du bassin du fleuve Sénégal. Selon ces textes, le fleuve Sénégal y compris ses affluents, est déclaré fleuve international sur les territoires nationaux de la République du Mali, de la République Islamique de Mauritanie et de la République du Sénégal. Ces états ou « États contractants » affirment leur volonté de développer une étroite coopération afin de permettre l’exploitation rationnelle des ressources du fleuve et garantir la liberté de navigation et l’égalité de traitement des utilisateurs. L’exploitation du fleuve est ouverte à chaque état contractant. Il faut le dire, le caractère international du fleuve, tel que cela est précisé ci-dessus, détermine les modalités de son exploitation agricole et industrielle. b. Exploitation agricole et industrielle des eaux Les principes de droit relatifs à l’exploitation agricole et industrielle des eaux sont fixés aux articles 4 et 5 de la convention. Ces principes trouvent leur expression de la façon suivante :

- c’est aux États contractants qu’il appartient, après discussion et justifications des oppositions éventuelles, d’approuver tout projet national susceptible de modifier les caractéristiques du régime du fleuve, ses conditions de navigabilité, d’exploitation agricole ou industrielle, l’état sanitaire des eaux, les caractéristiques biologiques de sa faune et sa flore, son plan d’eau ;

- les États contractants doivent être informés, à temps, de tout projet intéressant

l’exploitation du fleuve ;

- quand il s’agira de mettre en œuvre un ouvrage d’intérêt commun, ses conditions d’exécution et d’exploitation, ainsi que les obligations des États devront être définies dans une convention spéciale entre les États contractants.

Une telle convention est-elle nécessaire en matière de navigation et transports. c. Navigation et transport Ce sont les articles 6 à 10 de la convention qui réglemente la question ayant trait à la navigation et transports. Les principes qui se dégagent de ces textes sont les suivants :

- entière liberté de la navigation sur le fleuve Sénégal et ses affluents ; cette navigation est ouverte aux ressortissants, aux bateaux affrétés par l’un ou plusieurs États riverains ; les divers usagers sont traités sur un pied d’égalité, en ce qui concerne les droits de port et des taxes sur la navigation commerciale. Les bateaux marchands et navires étrangers de toute origine seront soumis à une réglementation particulière ;

- engagement des États contractants à maintenir leurs secteurs du fleuve en état de

navigabilité, dans le cadre d’un règlement d’exploitation élaboré en commun et approuvé par les États contractants ;

Page 35: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

35

- mise en œuvre de conventions spéciales ou de règlement d’exploitation fixant le mode de financement des travaux ou ouvrages d’établissement ou d’amélioration de la navigabilité du fleuve, ainsi que les modalités d’entretien, d’exploitation et d’amortissement des ouvrages ;

- principe de non discrimination dans la perception des taxes et des redevances

représentatives de services rendus à la navigation ;

- réglementation, par les États contractants, du cabotage le long du fleuve ;

- prise en compte, comme dépendance de la navigation fluviale, des routes, chemins de fer ou canaux latéraux établis en vue de suppléer à l’inavigabilité ou aux imperfections de la voie fluviale ; ces dépendances pourront être ouvertes au trafic international, dans le cadre de règlements spéciaux approuvés par les États contractants ;

- perception, sur les routes, chemins de fer et canaux de péages calculés sur les

dépendances de construction, d’entretien et d’administration et sur les bénéfices dus aux entrepreneurs. S’agissant des taux de péage, les nationaux des États contractants seront traités sur un pied de parfaite égalité ;

- établissement, d’un régime commun, par les États contractants, dans le but d’assurer la

sécurité et le contrôle de la navigation, étant entendu que ce régime devra faciliter, autant que faire se peut, la circulation des navires et embarcations.

d. Adhésion, retrait et règlement des litiges La convention de 1972 est ouverte à tout État riverain c’est-à-dire à la Guinée, seul pays riverain non signataire de cette convention. Pour y adhérer, il lui suffira d’adresser une demande écrite à l’État dépositaire des instruments de ratification, ici la Mauritanie qui en saisira les autres États membres. La révision de la convention peut être demandée, à tout moment, par l’un des États contractants. A cet effet, il suffit d’adresser, par écrit, une demande de révision au gouvernement Mauritanien qui devra en saisir les États membres. S’agissant du retrait un changement notable est intervenu. En effet, dans sa rédaction initiale, la convention prévoyait que tout État membre pouvait en faire la dénonciation après l’expiration d’un délai de 10 ans. Ce délai a été porté à 99 ans par l’article 17 nouveau, suite à un amendement en date du 16 décembre 1975. Ce nouveau délai prend en compte le souci d’éviter toute perturbation susceptible d’entraver la réalisation des projets de l’OMVS. La dénonciation devra se faire sous forme de notification écrite adressée au gouvernement de la Mauritanie ; celui-ci en informera les autres États contractants. Elle prendra effet après un délai de six mois. Elle ne portera pas atteinte, à moins d’accord contraire, à des engagements antérieurs à la notification.

Page 36: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

36

Quant aux litiges susceptibles de s’élever du chef de l’interprétation ou l’application de la convention, ils seront résolus par la conciliation ou la médiation. A défaut d’accord, les États devront saisir la commission de conciliation et d’arbitrage de l’O.U.A. En dernier ressort, ils saisiront la Cour Internationale de Justice de la Haye. En cas d’urgence, l’organisme commun de coopération, dont la création est prévue à l’article 11 de la convention, prendra les mesures conservatoires destinées à sauvegarder les principes adoptés dans la convention, en attendant la solution du différend. C’est cet organisme de coopération qui est chargé de l’application de la convention. Il est donc nécessaire de mettre en lumière les principes relatifs à cette structure. 2°. Principes relatifs à l’organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal

(OMVS) C’est à travers la convention amendée, du 11 mars 1972, portant création de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal, qu’il faut rechercher l’ensemble des règles régissant l’OMVS. Ces règles sont, pour l’essentiel, contenues dans le dispositif de la convention qui comprend vingt neuf (29) articles. L’analyse des dispositions de ces articles fait ressortir deux types de règles : les unes ont trait à la création et aux missions de l’OMVS (a) ; les autres concernent le fonctionnement de l’OMVS (b). a. Création et missions de l’OMVS Ce sont les articles 1er et 2ème de la convention qui traitent, à la fois, de la création et des missions de l’organisation. Selon ces textes, il est créé une organisation commune de coopération pour le développement des ressources du fleuve Sénégal dénommée, OMVS dont le siège est fixé à Dakar. Il peut être transféré, en tout lieu, par décision des chefs d’État et de gouvernement. Cette organisation est chargée : - de l’application de la convention du 11 mars 1972 relative au statut du fleuve

Sénégal ; - de la promotion et de la coordination des études et des travaux de mise en valeur des

ressources du bassin du fleuve Sénégal sur les territoires des États membres de l’organisation ;

- de toute mission technique et économique que les États membres voudront bien lui

confier. Pour la réalisation de cette mission, l’organisation jouit de la personnalité juridique et possède notamment la capacité de :

Page 37: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

37

- contracter ; - acquérir et céder des biens meubles et immeubles nécessaires à son fonctionnement

normal ; - recevoir des dons, des subventions, des legs et autres libéralités ; - souscrire des emprunts,

- faire appel à l’assistance technique ; - ester en justice. Le conseil des ministres est le représentant légal de l’organisation. Il peut déléguer, au Haut Commissaire, le pouvoir d’accomplir les actes juridiques sus-énumérés. Cette organisation ne fait pas obstacle à la création, à l’existence et au fonctionnement d’organismes nationaux aux institutions régionales embrassant des domaines de coopération différents ou plus vastes. b. Fonctionnement de l’OMVS Le fonctionnement de l’OMVS fait appel à un certain nombre d’organes définis par les articles 3 et suivants de la convention. Ces textes font une distinction entre la Conférence des Chef d’États et de Gouvernement (b1) et les organes permanents (b2). b1. La Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement C’est au sein des articles 3, 4, 5 et 6 de la convention qu’il faut rechercher les principes régissant la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement. De la combinaison de ces articles, il ressort que cet organe est l’instance suprême de l’organisation ; c’est elle qui définit la politique de coopération et de développement de l’organisation. Elle prend les décisions relatives à la politique économique générale de l’organisation et toute décision au niveau de son ressort. La conférence se réunit en session ordinaire une fois l’an ; elle peut se réunir en session extraordinaire, à l’initiative de son président ou à la demande d’un État membre. Ses décisions sont prises à l’unanimité et une fois celles-ci adoptées, elles s’imposent à tous les États membres qui s’engagent à en assurer l’application ; la présidence de la conférence est tenue à tour de rôle et pour une durée de deux ans par chacun des chefs d’État et de Gouvernement.

Page 38: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

38

b2. Les organes permanents Conformément aux dispositions de l’article 7 de la convention, les organes permanents de l’OMVS sont : le Conseil des Ministres (1), le Haut Commissariat (2) et la Commission Permanente des Eaux (3). 1. Le Conseil des Ministres Le Conseil des Ministres est l’organe de conception et de contrôle de l’organisation. Il élabore la politique générale d’aménagement du fleuve Sénégal, de mise en valeur de ses ressources ; de coopération entre les États autour du fleuve Sénégal ; il est composé de Ministres dont un par État. Ces ministres peuvent être accompagnés de membres de leur gouvernement. Avant tout commencement d’exécution, les programmes d’aménagement intéressant un ou plusieurs États membres, doivent être approuvés par le Conseil des Ministres. C’est lui qui définit les opérations prioritaires d’aménagement du fleuve et de développement de ses ressources ; il fixe aussi la part contributive des États membres au financement du budget de fonctionnement et des opérations d’études, de travaux de l’organisation dont il approuve les budgets. Les décisions du Conseil des Ministres ont force obligatoire pour les États membres (article 8 de la convention). La présidence est assurée, à tour de rôle, et pour deux ans, par chaque état membre (article 9 de la convention). Les réunions ont lieu, deux fois par an, en session ordinaire, sur convocation du Président et en session extraordinaire, à la demande de l’un des États membres. Le Président du Conseil des Ministres est tenu de convoquer et de présider toutes les sessions ; il est fait obligations à chacun des États, d’assister aux réunions du Conseil qui en rend compte à la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement, par l’intermédiaire de son président en exercice assisté du Haut Commissaire. C’est le même conseil qui approuve le règlement intérieur du Haut Commissariat. Les décisions du Conseil sont prises à l’unanimité des États membres (article 10 de la convention). 2. Le Haut Commissariat Ce sont les articles 11 à 19 de la convention qui dressent le profil de cette institution. Selon ces textes, le Haut Commissariat représente l’organisation entre deux sessions du Conseil de Ministres. Cet organe prend toutes les décisions de son ressort, conformément aux directives du Conseil des Ministres, et dans les limites des pouvoirs qui lui sont délégués. Il est dirigé par un Haut Commissaire nommé, pour une période de quatre ans renouvelable, par la conférence des Chefs d’État et de Gouvernement ; la cessation de ses fonctions intervient dans les mêmes conditions.

Page 39: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

39

Le Haut Commissariat est l’organe d’exécution de l’organisation ; il est chargé d’appliquer les décisions du Conseil des Ministres et de rendre compte, régulièrement, de l’exécution desdites décisions et de toute initiative, par lui, prise dans le cadre des directives données par le conseil. Son organigramme est fixé par le Conseil des Ministres, sur proposition du Haut Commissaire. Le Haut Commissaire est chargé de rassembler les données de base intéressant le bassin du fleuve Sénégal sur le territoire des États membres ; il soumet, au Conseil des Ministres le programme commun des travaux pour la mise en valeur coordonnée et l’exploitation rationnelle des ressources du bassin du fleuve Sénégal ; il est responsable de l’exécution des études et des travaux relatifs à l’infrastructure régionale. Le Haut Commissaire examine les projets d’aménagement hydro-agricole élaborés par les États membres et les soumet, avec l’avis motivé de la Commission Permanente des Eaux, au Conseil des Ministres de l’organisation. Il peut être chargé par un ou plusieurs États de l’exécution des études et du contrôle des travaux relatifs à l’aménagement de périmètres dans la vallée du fleuve Sénégal. Il peut également, être chargé, par un ou plusieurs États membres, de la recherche de financements pour les travaux relatifs à l’aménagement du fleuve. Il est le représentant de l’organisation, dans ses relations avec les institutions d’aide internationale et de coopération bilatérale, pour tout ce qui concerne l’aménagement du fleuve Sénégal. A ce titre, il est habilité à négocier et à signer, au nom de l’organisation, les accords et conventions de financement et l’assistance technique nécessaire à la réalisation du programme régional d’infrastructure, dans les limites des pouvoirs qui lui sont délégués par le Conseil des Ministres. Le Haut Commissaire est l’ordonnateur des opérations financières de l’organisation, notamment de son budget de fonctionnement et de ses budgets, d’études et de travaux. Il est responsable devant le Conseil des Ministres auquel il rend compte de la gestion et des activités du Haut Commissariat ; il est aussi responsable de la gestion des biens et du personnel de l’organisation. Il est le chef de l’administration. A ce titre, il a pouvoir hiérarchique sur l’ensemble du personnel et des services de l’organisation, à l’exception du contrôleur financier. C’est donc lui qui recrute le personnel de l’organisation à l’exception du secrétaire général, des directeurs et des conseillers ; en conséquence, il met fin aux fonctions du personnel. Le Haut Commissaire a la faculté, sous sa responsabilité, de faire délégation de signature ou de pouvoirs qu’il juge utiles au bon fonctionnement du Haut Commissariat. C’est sur sa proposition que le Conseil des Ministres nomme le Secrétaire Général, les Directeurs et les Conseillers ; il est mis fin à leurs fonctions dans les mêmes conditions. Le Secrétaire Général assure l’intérim du Haut Commissaire en cas d’absence ou d’empêchement. 3. La Commission permanente des eaux

Page 40: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

40

C’est l’article 20 de la convention qui réglemente la commission permanente des eaux. Elle est composée de représentants des États membres de l’organisation ; elle émet un avis consultatif à l’adresse du Conseil des Ministres ; elle se réunit, en tant que de besoin, sur convocation du Haut Commissaire. La Commission permanente des eaux est chargée de définir les principes et les modalités de la répartition des eaux du fleuve entre les États et entre les secteurs d’utilisation de l’eau : industrie, agriculture, transport. C’est grâce aux organes, qui viennent d’être étudiés, que l’OMVS a pu réaliser les ouvrages communs que sont les barrages de Manantali et de Diama. Plusieurs accords ont permis le financement et la gestion de ces infrastructures propriété commune des États membres. Il s’agit de : la convention du 18 décembre 1978 sur le statut juridique des ouvrages communs – la convention du 12 mai 1982 relative aux modalités de financement des ouvrages communs – la convention du 7 janvier 1997 portant création de l’Agence de gestion et d’exploitation de Diama – la convention du 7 janvier 1997 portant création de l’Agence de gestion de l’énergie de Manantali. Au terme de l’étude sur les accords inter-étatiques relatifs à la gestion des eaux du bassin du fleuve Sénégal, un constat s’impose : il existe au Mali une expérience très poussée pour ce qui regarde la gestion inter étatique des eaux. Ici, l’utilisation des ressources hydrauliques a fait l’objet d’un programme commun exécuté par la structure de coopération inter-états. Une telle approche a permis une gestion intégrée des eaux partagées et éliminé, du coup, les risques de conflits majeurs. Sans doute, il peut y avoir des désaccords entre les États sans causalité avec l’aménagement du bassin. Mais, l’existence du Programme d’aménagement commun constitue un puissant facteur de stabilité entre les États membres de l’OMVS notamment par une minimisation des problèmes frontaliers. Une telle perspective existe-elle pour le bassin du fleuve Niger ? B. Accords inter-étatiques relatifs au bassin du fleuve Niger Les accords inter-étatiques régissant la gestion et l’exploitation des eaux du fleuve Niger se répartissent en deux catégories : il y a les accords multilatéraux (1°) et les accords bi et trilatéraux (2°). 1°. Accords multilatéraux Les accords multilatéraux qui ont été conclu par les États riverains du fleuve et qui sont en vigueur sont : l’acte de Niamey du 26 octobre 1963 relatif à la navigation et à la coopération économique entre les États du bassin du Niger et la convention révisée de N’Djaména du 29 octobre 1987 portant création de l’Autorité du Bassin du Niger (ABN). Ces deux instruments inter-étatiques ont trait à un ensemble de principes qui constituent le cadre juridique de la gestion et de l’exploitation des eaux du fleuve Niger.

Page 41: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

41

L’examen de ce cadre recèle deux types de principes : d’une part, les principes concernant le statut juridique des eaux (a) d’autre part, ceux qui déterminent ; le pourtour de l’Autorité du Bassin du Niger (b) a. Les principes concernant le statut juridique des eaux Ici, il faut rappeler que sous la colonisation, le fleuve Niger a fait l’objet d’une réglementation qui était successivement contenue dans : l’Acte de Berlin du 26 février 1885 et la convention de Saint Germain du 10 septembre 1919. Aujourd’hui, cette réglementation est contenue dans l’Acte de Niamey sus-visé et la convention du 29 octobre 1987 ci-dessus cité. Cette convention a révisé la convention initiale de Niamey du 25 février 1964 sur l’Accord relatif à la Commission du fleuve Niger. Aussi bien, c’est, à la fois, à ces deux conventions de Niamey qu’il convient de se reporter pour connaître les principes qui déterminent le régime juridique des eaux du fleuve Niger. La réglementation qui s’en dégage présente un aspect bipolaire, en ce sens qu’elle considère le fleuve comme étant, à la fois, un cours d’eau international (a1) et national (a2). a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international L’internationalisation du Niger repose sur deux idées essentielles. La première consiste à tenir compte du fait que les aménagements projetés dans chaque État riverain4 sont susceptibles de modifier le régime du fleuve et les conditions de son exploitation par les autres États. La seconde repose sur la nécessité d’une coopération inter-étatique aux fins d’une meilleure exploitation des ressources du fleuve. Partant de ces idées, les conventions de Niamey ont édicté les principes suivants : - l’abrogation des actes de Berlin et de Bruxelles et la convention de Saint Germain ; - l’entière liberté de navigation sur le Niger, ses affluents et pour le transport des

marchandises et des personnes ;

- l’exploitation agricole et industrielle du bassin fluvial, assortie d’une étroite coopération ;

- la création d’un organisme inter-gouvernemental appelé commission du fleuve Niger.

A côté de ces principes sus-énumérés, on retrouve des principes généraux concernant le règlement des différends, la ratification, la dénonciation, la révision et l’entrée en vigueur des conventions. Mais, tous ces principes ne doivent pas faire perdre de vue cet autre principe qui fait du fleuve Niger une dépendance du domaine public national.

4 Les États riverains du Fleuve Niger sont : le Mali, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Bénin, la Guinée, le Burkina Faso, le Niger, le Nigéria, le Tchad.

Page 42: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

42

a2. Le fleuve Niger, cours d’eau national Le principe qui fait du Niger un cours d’eau national est fixé à l’article 2 de l’Acte de Niamey du 26 octobre 1963. Ce texte affirme que : « l’exploitation du fleuve Niger, de ses affluents et sous affluents, est ouverte à chaque État riverain, dans la portion du bassin du fleuve Niger se trouvant sur son territoire et dans le respect de sa souveraineté selon les principes définis dans le présent acte et les modalités à déterminer dans les accords spéciaux qui pourraient être conclus ultérieurement ». Ce texte est clair : il accorde, à chacun des neuf États riverains du fleuve Niger, le droit de mettre en valeur, à titre individuel, la portion, du fleuve, de ses affluents et sous affluents, comprise dans les limites territoriales. Mais, il faut dire que l’exercice de ce droit ne se fait pas en toute liberté. En effet, l’article 4 de la convention révisée de Djaména portant création de l’autorité du bassin du Niger, met à la charge des États riverains deux obligations : celle « d’informer le Secrétariat exécutif de tous les projets et travaux qu’ils se proposeraient d’entreprendre, dans le bassin » et celle de « s’abstenir d’exécuter sur la portion du fleuve, de ses affluents et sous affluents relevant de leur juridiction territoriale, tous travaux susceptibles de polluer les eaux ou de modifier négativement les caractéristiques biologiques de la faune et de la flore ». Tout ceci prouve, s’il en est besoin, que l’internationalisation du fleuve Niger s’est effectuée sur la base d’une harmonisation entre les compétences nationales et celles internationales en la matière. b. Les principes déterminant le pourtour de l’autorité du bassin du Niger (ABN) L’autorité est née suite à un accord inter-étatique multilatéral, des pays riverains du fleuve Niger, en date du 29 octobre 1987. Mais, il faut comprendre que cet accord n’est que la résultante de plusieurs révisions de l’Accord relatif à la Commission du fleuve Niger et à la navigation et aux transports sur le fleuve signé le 25 novembre 1964 ; cet accord a été révisé : deux fois à Niamey le 2 février 1968 et le 15 juin 1973 à Lagos le 26 janvier 1979 – à Faranah le 21 novembre 1980 – enfin à Djaména le 29 octobre 1987. C’est donc au sein de ce dernier accord appelé la convention de Djaména, qu’il faut rechercher l’ensemble des principes de droit régissant l’ABN. Selon le texte de la convention, il s’agit de transformer la Commission du fleuve en une « Autorité du Bassin du Niger » ; l’autorité est donc instituée au lieu et place de la Commission du fleuve Niger ; de ce fait, elle prend en héritage tous les avoirs et assume toutes les obligations de la Commission. Le siège de l’Autorité est fixé à Niamey, République du Niger ; sont membres de l’Autorité et dénommés ci-après « États membres », les États riverains du fleuve Niger, de ses affluents et sous affluents signataires de la convention. De ce qui précède, il ressort que l’Autorité du bassin du Niger est une structure intergouvernementale chargée de la gestion et de l’exploitation du bassin du fleuve Niger.

Page 43: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

43

Comme telle, il faut étudier les missions de l’Autorité (b1) et ses modalités de fonctionnement (b2). b1. Missions de l’Autorité Pour avoir une vue d’ensemble des missions assignées à l’ABN, il faut faire une analyse combinée des dispositions des articles 3 et 4 de la convention. Ces textes mettent en lumière le but de l’Autorité et en énoncent les missions. Pour connaître le but de l’Autorité, il suffit de reproduire les termes de l’article 3 à savoir : « le but de l’Autorité est de promouvoir la coopération entre les pays membres et d’assurer un développement intégré du bassin du Niger dans tous les domaines de l’énergie, de l’hydraulique, de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche et la pisciculture, de la sylviculture et l’exploitation forestière, des transports et communication et de l’industrie ». S’agissant des missions, elles sont prévues à l’article 4. Selon ce texte, l’Autorité est chargée de : - harmoniser et coordonner les politiques nationales de mise en valeur des ressources en

eau du bassin du Niger ; - participer à la planification du développement par l’élaboration et la mise en œuvre,

d’un plan de développement intégré du bassin ;

- promouvoir et participer à la conception et l’exploitation des ouvrages et des projets d’intérêts communs ;

- assurer le contrôle et la réglementation, de toute forme de navigation sur le fleuve, ses

affluents et sous affluents, conformément à l’Acte de Niamey ;

- participer à la formulation des demandes d’assistance et à la mobilisation des financements des études et travaux ;

- entretenir un contact permanent avec les États membres, afin de s’informer des plans

de développement dans leurs volets intéressant le bassin du Niger.

Pour la réalisation des missions, ci-dessus délimitées, l’autorité jouit de la personnalité juridique et possède la capacité : - de contracter ; - d’acquérir les biens mobiliers et immobiliers indispensables à la réalisation de ses

objectifs ; - d’ester en justice ;

Page 44: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

44

- d’emprunter ;

- d’accepter les dons et legs.

b2. Le fonctionnement de l’Autorité Le fonctionnement de l’Autorité repose sur des structures qui sont définies par les articles 5 et suivants de la convention. Conformément à ces textes, ces structures appelées organes permanents de l’Autorité sont les suivantes : le Sommet des Chefs d’État et de Gouvernement, le Conseil des Ministres, le Comité Technique des experts, le Secrétariat Exécutif. 1. Le Sommet des Chefs d’État et de Gouvernement C’est à l’article 6 de la Convention qu’il faut se reporter pour connaître les principes qui régissent le Sommet des Chefs d’État et de Gouvernement. De ce texte, il ressort que le « sommet » est l’organe suprême d’orientation et de décision de l’Autorité ; il comprend : les Chefs d’États et de Gouvernement ou leurs représentants dûment mandatés. C’est le Sommet qui fixe l’orientation générale de la politique de développement de l’Autorité et assure le contrôle des fonctions exécutives en vue de la réalisation des objectifs ; il se réunit, en session ordinaire, une fois tous les deux ans, dans l’État membre assurant la présidence ; il peut se réunir, en session extraordinaire, à la demande du président en exercice ou d’un État membre. Les décisions du Sommet sont prises à la majorité simple ; mais, une fois adoptées, les décisions et directives du Sommet s’imposent à toutes les institutions de l’Autorité. Le Sommet statue, en dernier ressort sur toute question n’ayant pas trouvé une solution au niveau du Conseil de Ministres. A moins qu’il ne soit décidé autrement, la présidence du Sommet est tenue, à tour de rôle, pour une durée de deux ans, par chacun des Chefs d’État et de Gouvernement des pays membres, suivant l’ordre alphabétique du nom des États en français. Entre deux sessions, le Président représente le Sommet et rend les décisions de son ressort, dans l’intérêt et pour le fonctionnement harmonieux de l’organisme intergouvernemental. 2. Le Conseil des Ministres C’est l’article 7 de la convention qui détermine l’architecture institutionnelle du Conseil des Ministres. Selon ce texte : - Le conseil des Ministres ci-après dénommé « le conseil » est l’organe de contrôle de

l’Autorité ; il comprend les Ministres ou leurs représentants dûment mandatés, à

Page 45: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

45

raison d’une voix par État membre ; chaque Ministre a la faculté de se faire assister par des experts.

- Le conseil est responsable du suivi des activités du Secrétariat Exécutif dont il rend

compte au Sommet ; c’est lui qui assure la préparation des sessions du Sommet, examine tous les problèmes, traite les questions qui lui sont soumises et adresse des recommandations au Sommet ;

- Le conseil se réunit une fois l’an, en session ordinaire ; il peut se réunir, en session

extraordinaire sur convocation du Président en exercice, à la demande de tout État membre ; les recommandations et les résolutions sont adoptées par consensus ;

- Le conseil se réunit dans le pays assumant la présidence en exercice ; à défaut, dans le

pays du siège ou en tout autre lieu indiqué par le Président du conseil ; le mandat du Président est de deux ans ; il représente le conseil entre les sessions.

- Le conseil prend ses décisions conformément aux directives du Sommet, dans les

limites des pouvoirs qui lui sont délégués. La présidence est assurée à tour de rôle, suivant l’ordre alphabétique du nom des État en français.

3. Le comité technique des experts

Le comité technique des experts est composé de représentants des États membres.

Il se réunit, sur convocation du Secrétaire Exécutif, selon un calendrier approuvé par le Conseil des Ministres ; toute autre réunion du Comité, devra se faire avec l’approbation du Président du Conseil des Ministres. Il a pour mission de : - préparer les sessions du conseil des Ministres, - de présenter des rapports et des recommandations du Conseil des Ministres, 4. Le Secrétariat Exécutif Ce sont les dispositions de l’article 9 de la convention qui dressent le profil de cet organe. Selon ce texte, le Secrétariat Exécutif est l’organe d’exécution de l’Autorité. Il est dirigé par un Secrétaire Exécutif nommé pour une période de quatre ans renouvelable une seule fois, par le Sommet sur recommandations du conseil ; la cessation de ses fonctions intervient dans les mêmes conditions. Le Secrétaire exécutif est le fonctionnaire principal du Secrétariat exécutif de l’Autorité. Dans la nomination des fonctionnaires, aux différents postes du Secrétariat exécutif, on tient compte de la qualification et de la nécessité d’une répartition équitable de ces postes entre les États membres.

Page 46: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

46

Dans l’exercice de ses fonctions, le Secrétaire exécutif est responsable devant les instances supérieures de l’Autorité ; les autres fonctionnaires du Secrétariat sont responsables devant le Secrétariat exécutif. Le Secrétariat exécutif est chargé de l’administration de l’Autorité et de toutes ses structures assurant la réalisation des décisions arrêtées par les instances supérieures. A cet effet, il est chargé : - d’entreprendre tous travaux et études en vue de la réalisation des objectifs de

l’Autorité ; - de formuler toutes les propositions propres à contribuer au développement harmonieux

de l’Autorité.

Ce qui précède montre que les accords multilatéraux, notamment l’acte de Niamey du 26 octobre 1963 et la convention révisée de Djaména du 29 octobre 1987 constituent le cadre général de la gestion inter étatique des eaux du bassin du fleuve Niger. Dans quelle mésure ce dispositif est applicable aux ressources en eau du SAI devra faire l’objet d’une réfléxion ultérieure . Mais, il faut noter que ce cadre général ne fait pas obstacle à la mise en œuvre d’une coopération bi ou trilatérale relative à la gestion de ces eaux. 2°. Accords bi ou trilatéraux On le sait : le fleuve Niger est un cours d’eau dont les parties se trouvent dans neuf États différents. Mais, il faut reconnaître que les accords multilatéraux, qui déterminent le cadre de gestion des ressources en eau du bassin du fleuve Niger, sont moins avancés au plan intégration. Au surplus, les dits accords ne définissent pas de règles de partage des eaux. Aussi bien, avant 1980 tous les aménagements projetés ou réalisés l’ont été, à l’initiative individuelle des États riverains : - le barrage de Markala par la France, - le barrage de Kaindji par le Nigéria, - le barrage de Kaindadji par le Niger, - les projets de barrage de Tossaye et de Kénié par le Mali. Après 1980, des tensions sont nées entre le Mali et la Guinée à cause du barrage de Sélingué ; des désaccords se sont faits jour, entre le Mali et le Niger, à cause du projet de barrage de Kaindadji.

Page 47: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

47

Sur le fondement de l’expérience, acquise sur le fleuve Sénégal, le Mali a pris l’initiative de circonscrire les situations conflictuelles par la mise en œuvre de deux schémas d’améngement intégrés : le Haut Niger et le Moyen Niger5. Cela s’est traduit par un ensemble d’accords bi ou trilatéraux : - la résolution n° 1/4°/CCE/86/Ouaga, en date du 27 mars 1986 relative à

l’aménagement du bief fluvial Tombouctou – Gaya ; - le protocole d’accord, entre le Gouvernement de la République du Mali et le

Gouvernement du Niger, relatif à la coopération sur l’utilisation des ressources en eau du fleuve Niger, en date du 12 juillet 1988 ;

- le protocole d’Accord entre la République de Guinée et la République du Mali, en date

du 23 janvier 2003, relatif à la coopération bilatérale pour la connaissance, la gestion, la mobilisation et l’utilisation des ressources en eau du bassin du Niger Supérieur ;

- le protocole d’Accord, en date du 06 octobre 2004, relatif à la réalisation des barrages

de Taoussa au Mali et de Kaindadji au Niger sur le fleuve Niger entre le Gouvernement de la République du Mali et le Gouvernement de la République du Niger.

Au sein des accords sus-visés, il faut faire une distinction entre les accords ayant trait à l’utilisation des eaux (a) et ceux relatifs à la réalisation de barrage (b). a. Accords ayant trait à l’utilisation des eaux Ici, les accords en question trouvent leur expression en des protocoles d’accords : il y a, d’une part, le protocole intervenu ente le Mali et le Niger en date du 12 juillet 1988 ; d’autre part, le protocole intervenu entre la Guinée et le Mali en date du 23 janvier 2003. a1. Le protocole entre le Mali et le Niger, en date du 12 juillet 1988 En fait de protocole, il s’agit ici d’un accord bilatéral entre le Mali et le Niger. Les principes de droit qui déterminent cet accord sont consignés dans les articles 1er à 8 du protocole. Une analyse des dispositions de ces textes renvoie à trois aspects essentiels : l’objet de l’Accord ; le Comité Technique Consultatif Permanent (CTCP), la durée de l’Accord. 1. L’objet de l’Accord Il est prévu à l’article 1er du protocole. Ce texte déclare que « le présent protocole vise à instaurer une coopération bilatérale soutenue dans l’utilisation des ressources en eau du fleuve Niger ». 2. Le Comité Technique Consultatif Permanent

5 Robert Tiéblé N’Daw : Gestion de l’eau à l’échelon national et international, Bamako. Décembre 1996.

Page 48: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

48

Ce sont les articles 2 à 6 du protocole qui dressent le profil de cet instrument de coopération. Selon ces textes : • Il est constitué un Comité Technique Consultatif Permanent dénommé le « Comité » ; il comprend un nombre égal de représentants des deux parties. Le Comité se réunira une fois par an avant l’étiage ou à la demande de l’une ou l’autre partie ; la présidence du Comité est assurée à tour de rôle par les deux parties à chaque session ordinaire ; toutefois, en cas de session extraordinaire, elle sera assurée par le pays hôte. • Le Comité a pour missions de : Promouvoir l’échange d’informations et des données relatives aux études, aux simulations de l’écoulement fluvial et à l’aménagement des eaux ; analyser régulièrement la situation hydro-climatologique qui prévaut dans la partie concernée du bassin du fleuve Niger et d’en rendre compte aux autorités compétentes des deux pays. • Dans le cadre des missions, ci-dessus assignées au comité, celui-ci devra tenir compte : - du climat de la région et son influence sur le régime des cours d’eau – des besoins raisonnablement planifiés de la mise en valeur des eaux de surface – des besoins économiques et sociaux de développement des parties. 3. La durée de l’Accord Elle est prévue aux articles 7 et 8 du protocole. Ces textes prévoient que l’Accord entrera en vigueur à la date de sa signature, pour une durée illimitée, jusqu’à ce qu’il soit dénoncé par l’une ou l’autre des parties, au moyen d’une notification adressée à l’autre partie. a2. Le protocole entre la Guinée et le Mali Il faut le noter au premier chef : cet accord bilatéral est, à peu de choses près, le décalque de celui qui est ci-dessus analysé. Sa charpente repose sur 9 articles qui combinés les uns aux autres prévoient l’objet de l’Accord, la création d’un Comité Technique Paritaire et des dispositions générales. 1. L’objet de l’Accord C’est l’article 1er du protocole qui fixe l’objet de l’Accord. Conformément à ce texte, « les dispositions du présent protocole visent à instaurer une coopération bilatérale soutenue dans l’utilisation des ressources en eau du fleuve Niger, en général et en particulier du bassin du Niger Supérieur. 2. Le Comité Technique Paritaire Les principes régissant cet organisme de coopération bilatérale sont prévus dans les articles 2 à 6 du protocole. Ces principes sont les suivants :

Page 49: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

49

• Il est institué un Comité Technique Paritaire (CTP) ci-après dénommé le « Comité ». Le Comité est composé de dix membres comprenant cinq représentants par partie. • Le comité se réunira au moins une fois par an et, en tant que de besoin, à la demande expresse de l’une ou de l’autre des deux parties. La présidence du Comité est assurée, à tour de rôle, par les deux parties, à chaque session ordinaire ; toutefois, en cas de session extraordinaire, elle sera assurée par le pays hôte.

• Le Comité a pour missions de : - promouvoir les échanges d’informations et des données relatives aux études, aux

simulations de l’écoulement fluvial et à l’aménagement des cours d’eau conformément à l’article 6 du présent protocole d’Accord de coopération ;

- analyser régulièrement la situation hydro-climatologique qui prévaut dans la partie

concernée du bassin du Niger Supérieur et d’en rendre compte aux Autorité compétentes des deux pays ;

- soutenir les projets de barrage de Kénié en République du Mali et de Fomi en

République de Guinée ;

- entreprendre les démarches nécessaires auprès des autorités compétentes, pour le financement des ouvrages communs ;

- suivre l’exécution de toutes les mesures arrêtées d’un commun accord ;

- proposer un cadre institutionnel et réglementaire adéquat pour la réalisation et la

gestion des ouvrages communs.

• Dans le cadre de ses missions, le Comité tient compte du climat de la région et son influence sur le régime des cours d’eau ; - des besoins économiques et sociaux de développement des parties ; - de l’état d’avancement des projets d’études des deux ouvrages ; - des accords financiers négociés ou acquis auprès des bailleurs de fonds, dans le cadre

de la réalisation des deux projets d’études ; - du rôle dévolu à chacune des parties dans la recherche commune de financement pour

la réalisation des deux ouvrages.

3. Les dispositions générales

Pour avoir une vue d’ensemble des dispositions générales, il suffit de se reporter aux articles 7 à 9 du protocole.

Ces textes préconisent les principes suivants :

Page 50: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

50

- le présent protocole entrera en vigueur à la date de sa signature, - il peut être amendé, à la demande de l’une des parties ; cette demande doit être

adressée, par écrit, au président du CTP, - le protocole est conclu pour une durée illimitée ;

Il restera en vigueur jusqu’à ce qu’il soit dénoncé par l’une ou l’autre des parties ; cette dénonciation se fera par notification écrite ; elle ne deviendra effective que trois mois après la date de réception par l’autre partie.

b. Accords relatifs à la réalisation de barrages

Ici deux actes vont nous préoccuper : la résolution n° 1/4°/CCE/86/Ouaga relatif à l’aménagement du bief fluvial Tombouctou – Gaya (b1) et le protocole du 6 octobre 2004 concernant la réalisation des ouvrages de Tdoussa au Mali et de Kaindadji au Niger (b2).

b1. Résolution n° 1/4°/CCE/86/Ouaga relatif à l’aménagement du bief fluvial

Tombouctou – Gaya

La Résolution dont il est ici question a été adoptée à la 4ème Conférence des Chefs d’État de l’Autorité de Développement Intégré du Liptako – Gourma, tenue à Ouagadou (Burkina Faso) le 27 mars 1986.

Cette conférence adopte le Schéma d’aménagement qui prévoit la construction des ouvrages suivants :

le Barrage de Tossaye, à la côte 280, le Barrage de Kaindadji, à la côte 23,85, le Barrage du W, à la côte 210,5 et transfert du potentiel hydroélectrique du

site de Labbezanga (Mali) au site de Kaindadji (Niger), avec compensation pour le Mali en énergie.

Dans les mêmes circonstances de lieu et de temps, la dite conférence approuve la création d’un comité technique et juridique chargé de définir les conditions de réalisation et d’exploitation des ouvrages prévus au schéma.

Du coup, il a été décidé de la réalisation prioritaire et simultanée des ouvrages de Tossaye et de Kaindadji. b2. Le protocole du 6 octobre 2004 concernant la réalisation des ouvrages de Taoussa au Mali et de Kaindadji au Niger

A la réflexion, il ressort que toute l’économie de cet accord tient dans son préambule (1) et dans son dispositif (2).

1. Le préambule de l’Accord

Page 51: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

51

Au préambule de l’Accord, référence est faite à la convention portant création de l’ABN.

Immédiatement après, un rappel est fait :

- de la déclaration, sur les principes de gestion et de bonne gouvernance, pour un

développement durable et partagé du bassin du Niger, signée à Paris le 26 avril 2004 ; - de la résolution n° 1 de la 21ème session ordinaire du conseil des Ministres de l’ABN

tenue à Niamey (Niger) du 9 au 13 décembre 2002, affirmant le soutien des États membres à la réalisation des barrages de Kaindadji et de Taoussa et appelant à la réalisation des études d’impact environnemental de ces ouvrages pour la sauvegarde des intérêts des pays affectés ;

- de la Décision n° 7 du 7ème Sommet des Chefs d’États et de Gouvernement de l’ABN

tenue à Abujan (Nigéria) le 16 février 2002 relative à l’échange d’information entre les États membres à) l’occasion de la planification d’ouvrages sur le bassin du Niger.

Ce qui précède montre que le préambule de l’Accord retrace le cadre général de gestion et d’exploitation des eaux du bassin du Niger (y contenue le SAI).

Qu’en est-il du dispositif.

2. Le dispositif de l’Accord Le dispositif tient dans, quatre articles ; une analyse combinée de ces textes laisse apparaître les principes suivants :

- les deux parties marquent leur volonté commune pour la réalisation des ouvrages de

Kaindadji et de Taoussa ; - elles réaffirment la même volonté en faveur d’une action solidaire, concertée et

résolue pour leur réalisation en vue, de la sauvegarde de l’environnement, la régénération des écosystèmes de la vallée du fleuve et la lutte contre la pauvreté ;

- les deux parties s’épauleront dans leurs efforts visant à parachever la mobilisation des

financements nécessaires à la réalisation des études détaillées d’impact environnemental ;

- tout différend devra être réglé à l’amiable par voie diplomatique ;

- le présent Accord entrera en vigueur à la date de signature ; il est conclu pour une

durée illimitée. .

Page 52: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

52

Conclusion et recommandations

Au terme de cette étude, un bilan s’impose : il existe au Mali un éventail de normes relatif aux eaux partagées. Ces normes se situent aussi bien dans l’ordre juridique interne que dans celui international. Les principes qui se dégagent de l’ordre juridique interne sont les suivants : domanialité publique étatique et communale des ressources en eau – gestion et contrôle étatique et communale des ressources en eau ; gestion globale, durable et équitable, par une préservation de la ressource en quantité et en qualité ; contrôle par :

- une soumission des prélèvements des eaux au régime de l’autorisation ou de la concession ;

- une réglementation de toutes les activités liées à l’utilisation des eaux ;

- une interdiction de la pollution assortie du principe de « pollueur payeur » ; - une soumission des activités liées à la mise en valeur de l’eau à une étude d’impact

environnemental. Tous les principes sus-visés qui ressortissent de l’ordre juridique interne sont applicables aux ressources en eau du SAI. Quant aux principes découlant de l’ordre juridique international, ils se présentent comme suit :

- partage équitable et raisonnable des ressources en eau partagées ; - obligation de ne pas causer de dommage ; - gestion institutionnelle concertée ; - protection de l’environnement ; - développement durable.

Tous ces principes ont été pris en compte au sein des accords inter étatiques relatifs aux bassins des fleuves Sénégal et Niger. Seuls les accords inter étatiques, ayant trait au bassin du fleuve Niger, sont applicables aux ressources en eau du SAI, géographiquement situées dans le bassin de ce fleuve. C’est vrai que les accords inter-États du bassin du fleuve Sénégal ne concernent pas directement le SAI. Mais, étant donné le niveau d’intégration assez élevé en matière de gestion des eaux partagées, on devrait pouvoir s’inspirer de ce modèle unique au monde. Bien entendu, pour le moment, on n’en est pas là et les ressources en eau du SAI continuent de relever de la juridiction de l’ABN, organisme de coopération inter états du fleuve Niger forgé sur la base de la coexistence entre souverainetés des pays riverains. Au même moment, des accords bi et trilatéraux sont venus se superposer au cadre général de l’ABN en ayant vocation à gérer les eaux du bassin en général et celles du SAI en particulier. Ceci a donné

Page 53: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

53

naissance à des organismes bi et trilatéraux : Autorité du Liptako Gourma. Comité Technique Consultatif Permanent, Comité Technique Paritaire. De ce fait, il peut en résulter une interférence entre organismes inter-états, ce qui peut être préjudiciable à une gestion commune des ressources en eau. Au surplus, la gestion des ressources en eau partagées pose des défis cruciaux :

- problème de l’approvisionnement en eau potable ; - problème de l’adéquation entre le rythme de croissance de la population et celui des

besoins de consommation en eau ;

- problème d’adéquation entre la capacité de reconstitution des nappes phréatiques et le rythme croissant de leur exploitation ;

- problème lié à la distribution et à l’utilisation de l’eau face aux vicissitudes du climat

et aux différences d’ordre géophysique, économique et culturel .

- problème du gaspillage et de la dégradation de la ressource en eau ;

- problème de pollution ;

- problème lié aux maladies hydriques. S’agissant du SAI, tous les problèmes, sus-évoqués, ne peuvent avoir une réponse que dans le cadre d’une politique de coopération concertée. Celle-ci devra prendre corps dans un mécanisme de gestion tripartite. Pour cela, le cadre de coopération inter-états de la gestion des eaux du bassin du fleuve Niger a besoin d’être revitalisé, dans la perspective d’une politique de coopération plus appropriée. Cette coopération devra prendre en compte les contemporaines exigences d’un développement durable, dans un contexte de protection et de mise en valeur optimale des ressources en eau du SAI, dans l’intérêt bien compris des États ayant le SAI en partage. Deux possibilités sont envisageables :

- une première option serait de se limiter à consolider les accords bi ou tri latéraux existant en matière d’utilisation des eaux du fleuve Niger ; plus particulièrement le protocole d’accord entre le Mali et le Niger en ce domaine.

Il suffirait pour cela d’ouvrir cet accord au Nigéria tout en y incluant les questions ayant trait à la gestion et la mise en valeur du SAI. Cette option présente un avantage : la rapidité de sa mise en œuvre ; l’ABN constituant déjà le cadre de coopération générale.

Page 54: Préparé par Me Tignougou Sanogo Consultant Juriste NationalLes principes concernant de statut juridique des eaux 41 a1. Le fleuve Niger, cours d’eau international 41 a2. Le Fleuve

54

Mais cette formule va représenter un dispositif lourd et peu opérationnel puisqu’il s’agira d’ajouter aux questions déjà très complexes de l’utilisation des eaux de surface, celles relatives à la gestion des eaux souterraines : le SAI.

- la deuxième option consisterait à la mise en place d’un nouvel instrument de coopération tripartite exclusivement consacré à la gestion et la mise en valeur des ressources en eau du SAI.

Bien entendu : l’inconvénient ici réside dans le fait que c’est une nouvelle création qui pourrait s’avérer rigide. Un tel inconvénient n’est pas insurmontable et il suffira de s’investir dans un mécanisme léger et souple. Cette formule est tout avantage dans la mesure où il faudra faire sienne toute la riche expérience acquise en la matière au Mali et s’inspirer des expériences mondiales sur ces questions très spécifiques que celles de la gestion des eaux souterraines partagées. Il s’agira alors d’un nouveau dispositif modernisé de coopération trilatérale au sein de l’ABN faisant office de loi cadre de la coopération inter-étatique des États riverains du fleuve Niger. Dans cette optique, il conviendra :

- de mettre en œuvre une structure intergouvernementale de gestion des eaux du SAI ; - il faudra qu’il s’agisse d’une structure de concertation tripartite avec des objectifs bien

ciblés ; très souple, elle devra, logiquement, être au niveau des services inventaires des ressources hydrauliques des trois pays : le Niger, le Nigéria et le Mali.

- la dite structure devra faire l’inventaire et la collecte de donnée ; contrôler la qualité

physico-chimique ; procéder au classement et à la diffusion de l’information ;

- somme toute, cette structure devra être un instrument de veille et d’alerte en direction des États ;

- elle devra être dotée d’une source de financement conséquent.