propositions concrètes pour la cop 21

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Solutions pour la préservation et l'utilisation durable des écosystèmes : en milieu urbain, agricole et forestier

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  • climat :la nature source de solutions en le-de-france Recueil de pRopositions pouR contRibueR aux dbats loccasion de la 21e confRence des paRties de la convention-cadRe des nations-unies suR le changement climatique (cop 21)

    des solutions pour : la pRseRvation, lutilisation duRable et la Reconqute des cosystmes et de la biodiversit, dans le but dattnueR le changement climatique et dadapteR le territoire francilien ses effets.

  • pourquoi cette brochure ?

    Le changement climatique est aujourdhui une vidence et une ralit. Caus en grande partie par les activits humaines mettrices de gaz ef-fet de serre (GES), ses impacts sont trs varis en nature et en intensit. Les consquences de ce changement climatique se font dores et dj res-sentir (canicules, scheresses, arrive de nouveaux agents pathognes). Cette volution devient une proccupation majeure tant pour la commu-naut scientifique que pour les acteurs publics et privs qui cherchent des solutions. Cest dans ce contexte que souvre en dcembre 2015 Paris la 21e Confrence des Parties de la Convention-cadre des Nations-unies sur le changement climatique, galement appele COP21. Elle runit prs de 50000 acteurs et dlgus internationaux, de 194 pays diffrents, pour aboutir un premier accord universel et contraignant sur le climat. Un tel vnement suscite beaucoup dattentes, notamment vis--vis des stratgies dattnuation et dadaptation qui seront privilgies (voir encadr p. 6).En le-de-France, le changement climatique nest quune facette du chan-gement global puisque nous connaissons dans le mme temps une rosion spectaculaire de la biodiversit, les deux phnomnes tant lis. Impacte par le changement climatique et dautres pressions, la biodiversit change en retour et peut lacclrer mais elle peut tre aussi un rservoir de solu-tions puisque les cosystmes en bon tat de conservation contribuent la fois lattnuation (captage et stockage du dioxyde de carbone atmos-phrique) et ladaptation aux effets du changement climatique comme les temptes, les inondations, les glissements de terrain ou lrosion des sols.

    Cest dans cette optique que Natureparif, lagence rgionale pour la Nature et la biodiversit en le-de-France, souhaite diffuser les solutions fondes sur la nature qui concernent la prservation, la restauration ou la cration dcosystmes sur notre territoire. Elles peuvent sappliquer dans de nom-breux contextes, en ville comme la campagne, en complment dautres dispositifs plus techniques. Parce que ces solutions gnrent des bnfices multiples, la fois sur la biodiversit, le climat, mais aussi la qualit de vie, elles sont privilgier dans les stratgies territoriales.Ce document tente dexpliquer et dillustrer cet intrt. Il sappuie sur les travaux de diffrents organismes, dont Natureparif, mais sest aussi enrichi des remarques et contributions des participants au colloque Natureparif / GIS Climat-Environnement-Socit / Agence de lEau Seine-Normandie qui sest droul les 29 et 30 septembre 2015 Paris1. Les prconisations qui en sont issues doivent servir de base la rflexion mais ne prtendent videmment pas tre exhaustives.

    Merci de nous aider construire des solutions crdibles, efficaces et ambi-tieuses pour le climat et la nature en le-de-France!

    Liliane Pays, Conseillre rgionale dle-de-France, Prsidente de Natureparif

    1. Voir les prsentations du colloque Natureparif 2015 Climatet biodiversit : la nature source de solutions pour lle-de-France http://www.natureparif.fr/agir/colloques/1522-colloque-climat-biodiversite

    sommaire

    introduction 3

    quelles solutions fondes sur la nature pour les villes ? 9

    quelles solutions fondes sur la nature pour les milieux agRicoles ? 19

    quelles solutions fondes sur la nature pour les fRets ? 25

    conclusion 31

    tableau de synthse 32

    bibliographie non exhaustive c.

    introduction 3

    RemerciementsNatureparif remercie l'ensemble des intervenants et participants au colloque Climat et biodiversit : la nature source de solutions pour lle-de-France qui s'est tenu les 29 et 30 septembre 2015, et salue tout particulirement l'apport de Ludivine Conte, Charline Hue, Anas Kermagoret et Marine Kuperminc par leur travail de synthse effectu dans le cadre de leur master cologie, Biodiversit, volution et la production de leur mmoire bibliographique intitul Quelle place pour la biodiversit, les cologues et lingnierie cologique dans la COP climat Paris 2015 ? .

    direction de publication Liliane PaysRdaction Marc Barra et Gilles Lecuircoordination Julie Collombat-Duboiscoordination ditoriale Ophlie Ricciconception et ralisation graphique David Lopez (www.davidlopez.fr)illustrations de couverture Herv Nalletimpression Iropa Imprimerieparution Paris, Novembre 2015

  • introduction 54 climat : la nature source de solutions en le-de-france

    quel aveniR climatique pouR lle-de-fRance ?Les scnarios et modles climatiques prvoient de nombreux changements en le-de-France. Selon Mto- France, le changement climatique se traduira par une hausse des tempratures moyennes, hausse qui sera particulirement marque lt (avec une recrudescence des jours chauds et trs chauds, notamment en zone urbaine du fait du phnomne dlot de chaleur urbain), ce qui aura galement des consquences en matire de dgradation de la qualit de lair et, lhiver, un recul des jours froids. En parallle, les prcipitations annuelles diminueront. L encore, cette baisse sera particulirement marque lt et au dbut de lautomne et conduira lallongement de la priode sche estivale et laugmentation des sche-resses. Les prcipitations pourraient augmenter lhi-ver et dune manire gnrale se produire lors dv-nements mtorologiques plus intenses et violents (orages, temptes). Ces tendances de fond, qui seront videmment plus ou moins marques en fonction des quantits de GES mis dans latmosphre, nexcluront

    comment biodiveRsit et climat inteRagissent-ils ?

    le climat agit sur la biodiversit

    Le changement climatique figure aujourdhui parmi les menaces les plus importantes sur la biodiversit (sajou-tant aux impacts dautres activits humaines), et ses effets seront dune intensit croissante dans les dcen-nies venir (Leadley et al., 2010). Les consquences directes du changement climatique se traduisent par des modifications des conditions environnementales dintensit variable: hausse gnralise des tempra-tures moyennes terrestres et marines, acidification des ocans, fonte des glaces, etc. (GIEC, 2014). une chelle plus locale, ces changements vont irrvocablement affecter la biodiversit quabritent les cosystmes, entranant un dplacement daire de rpartition des espces animales et vgtales, mais aussi des modifica-tions et disparitions de certains types dhabitats, donc de leurs espces associes, des modifications physiolo-giques au sein des espces, etc. Ces impacts sont diffi-ciles apprhender avec prcision car on ne peut pas anticiper la raction des espces ces changements. Enfin, un grand nombre de ces espces sont dores et dj menaces aujourdhui, et ce sont elles qui sont les plus sensibles au changement climatique.

    la biodiversit rtroagit sur le climatCependant, comme tous les phnomnes naturels, lac-tion du changement climatique nest pas univoque. Il est essentiel de considrer dans les discussions clima-tiques non seulement ses impacts sur la biodiversit, mais aussi les manires dont cette biodiversit peut son tour influer sur le climat (positivement comme ngativement). En effet, la biodiversit impacte par le changement climatique exerce une rtroaction sur ce dernier, par la ralisation de plusieurs mcanismes. Par exemple, cause de lacidification des ocans, la population de zooplancton diminue. Or le zooplancton est lorigine du processus dabsorption du CO

    2 dans locan. Le CO

    2 est donc moins absorb, entranant laugmentation de la concentration en CO

    2 dans lair: le climat est alors impact1. Cette interdpendance ajoute

    une dimension nouvelle aux ngociations climatiques: elle implique ncessairement de prendre en compte ladaptation des cosystmes et du vivant dans son en-semble au changement climatique2.

    1. Voir les actes de la confrence GIEC IPBES sur les interactions climat / biodiversit sur http://www.fondationbiodiversite.fr/fr/documents-frb/comprendre-la-biodiversite/videos/585-climat-et-biodiversite-rencontre-avec-des-experts-francais-du-giec-et-de-l-ipbes.html2. Voir la publication ORE Climat et biodiversit: Enjeux et pistes de solutions sur http://www.oree.org/actualites-oree.html

    Les vnements climatiques extrmes, comme les pluies torrentielles, se produiront plus souvent et leur intensit sera plus forte. M. Barra

    Le changement climatique a des consquences sur la nature qui en retour influe le changement climatique... Creative Commons

    La biologie du zooplancton offre un bel exemple de boucle de rtroaction de la biodiversit sur le climat. Creative commons

    cependant pas une forte variabilit interannuelle (avec par exemple des hivers trs rudes certaines annes).Les scnarios pointent galement les consquences du changement climatique sur les cosystmes: probable arrive de pathognes ou de populations despces trouvant des conditions plus favorables, migrations, changement des rythmes cologiques (pollinisation, floraisons, relargage de C0

    2 par les vgtaux, cycles bio-

    gochimiques, etc.). Sil est difficile dattribuer la dispa-rition ou le fort dclin dune espce francilienne au seul changement climatique (mis part quelques espces de flore sub-montagnardes qui taient de toute manire en marge de leur aire de rpartition), cette tendance couple aux autres causes anthropiques de dgradation (urbanisation, fragmentation par les infrastructures de transport, intensification agricole) fragilise plus encore certains cosystmes. Ce cumul des diffrents impacts affectera svrement la biodiversit et les services que les franciliens en retirent.

  • introduction 76 climat : la nature source de solutions en le-de-france

    quelle stRatgie climat pouR lle-de-fRance ?La stratgie retenue par lle-de-France en matire climatique est dtaille dans le Plan rgional pour le Climat (PRC1), labor et approuv en 2011. Il sappuie sur les orientations du Schma rgional du Climat, de lAir et de lnergie dle-de-France (SRCAE) labor conjointement par les services de ltat (Direction r-gionale et interdpartementale de lEnvironnement et de lnergie - DRIEE), du Conseil rgional et de lADEME et qui dcline 24 actions et chantiers en matire dat-tnuation comme dadaptation. Les priorits daction rgionales pour lattnuation concernent la mobilit, le transport des marchandises, la prcarit nergtique, lagriculture, lcoconstruction ou encore les achats durables. La dcarbonation de lconomie francilienne et les politiques de rduction des missions de GES doivent rester la priorit, mme sil est ncessaire de prparer ladaptation dans le mme temps. ce titre, il est particulirement complexe dvaluer lefficacit des mesures dattnuation sur le bilan global en C0

    2.

    Du fait dune conomie mondialise, beaucoup dmis-sions de C0

    2 (entre autres impacts) sont dlocalises dans dautres territoires (on les appelle les missions

    importes ou exportes). Le Rseau Action Climat (RAC) insiste sur le fait que les politiques publiques existantes sur le climat et lnergie sont en partie inefficaces puisquelles nimpactent quune partie des missions des pays (celles mises directement sur le territoire) et quelles ne comptabilisent pas une par-tie des missions de GES lies la consommation des pays2. De mme, si lisolation thermique des btiments est effectivement une solution pour rduire les mis-sions lies au parc immobilier, il ne faut pas exclure les missions dues la fabrication de ces matriaux pour la plupart encore issus dune base ptrole. Enfin, au-del des missions de GES, certains dispositifs dattnua-tion peuvent avoir des impacts ngatifs sur la nature. Cest le cas des transports dit propres ou des ner-gies renouvelables, dont la fabrication peut avoir des impacts sur des cosystmes en dehors du territoire francilien (par ex. fabrication des batteries lectriques, extraction de terres rares).Les politiques en matire defficacit nergtique des logements doivent donc aussi sattacher privilgier des isolants issus de sources renouvelables, les plus locaux possibles et produits dans des conditions favorables la biodiversit. Il est important de privilgier des solu-tions qui conomisent du C0

    2 sans gnrer dmissions

    1. http://www.iledefrance.fr/sites/default/files/mariane/RAPCR43-11RAP.pdf2. Voir le rapport du Rseau Action Climat (RAC): Les missions importes - Le passager clandestin du commerce mondial (http://www.rac-f.org/IMG/pdf/EMISSIONS-IMPORTEES_RAC-Ademe-Citepa.pdf)

    les solutions fondes suR la natuRe ?

    Il existe diffrentes stratgies dattnuation et dadap-tation qui combinent des disciplines et des approches diffrentes. Certaines misent davantage sur la technolo-gie, notamment les solutions relatives la go-ingnie-rie (squestration du carbone dans les sols, construc-tion de digues et rservoirs contre les inondations, etc.), quand dautres ciblent lutilisation de la nature (vgta-lisation des villes, restauration des cours deau et des berges, prservation des sols, etc.). Selon lUnion inter-nationale pour la Conservation de la nature (UICN)1, les solutions fondes sur la nature (nature-based solu-tions en anglais) utilisent les cosystmes (et leurs capacit rgulatrices ou productives) afin de relever les dfis globaux tels que la lutte contre le changement climatique, lapprovisionnement alimentaire et le dve-loppement conomique et social. Les solutions natu-relles ont ceci de particulirement intressant quelles peuvent donc tre utilises autant pour lattnuation que pour ladaptation. Elles sont utiles simultanment pour la reconqute de la nature et la production de ser-vices climatiques utiles, le tout moindre cot pour les collectivits. Les possibilits en matire de solutions faisant appel la biodiversit sont innombrables et varies. Il en existe pour tous les cosystmes et des chelles daction diffrentes; que ce soit pour les me-sures dattnuation ou les mesures dadaptation visant renforcer la rsistance de la biodiversit face au futur changement climatique. Natureparif soutient la mise en uvre de ces solutions de faon plus systmatique et plus grande chelle en fonction des contextes locaux et des milieux (urbain, agricole, forestier).

    en matire dattnuation

    En 2002, le GIEC estimait 370 milliards de tonnes la quantit de CO2 pouvant potentiellement tre stocke

    par des mesures dattnuation biologique, soit bien plus que ce qui peut tre vit par tous les moyens technologiques en notre possession. Il est donc primor-dial de comprendre que la biodiversit na pas quun rle esthtique: elle assure des fonctions rgulatrices dont nous navons pas forcment conscience, comme la stabilit des changes gazeux, le bon droulement du cycle du carbone ou de leau dans un territoire donn.2 Des solutions mixtes peuvent aussi tre envisages condition que les structures physiques nentravent pas les processus naturels.

    1. http://www.uicn.fr/COP-21-lancement-initiative-SFN.html2. La stratgie de lUE met en avant les solutions fondes sur la nature: http://ec.europa.eu/environment/nature/climatechange/pdf/EbA_EBM_CC_FinalReport.pdf

    infRastRuctuRe veRte ?

    la notion d infrastructure verte2 , popularise par la commission europenne, met en avant les avantages conomiques de la nature (par exemple, les plaines inondables sont beaucoup moins onreuses que les digues pour lutter contre les inondations).

    elle tente de concilier les proccupations cologiques et la ncessit dun dveloppement durable en temps de crise. cest un cadre conceptuel innovant pour concilier prservation de la nature et dveloppement humain, tel que lurbanisation, la construction de routes et linfrastructure nergtique qui dgradent et fragmentent trop souvent nos prcieux cosystmes. les solutions fondes sur la nature, quelles concernent la ville, la gestion de leau, la production agricole ou forestire ou mme lnergie, sont beaucoup plus viables sur le plan conomique que le recours lingnierie traditionnelle ou infrastructure grise . elles contribuent crer de lemploi et stimulent une croissance locale, durable et non-dlocalisable.

    en france, le concept de trame verte et bleue sinscrit dans cette logique mais se limite souvent aux continuits cologiques, l o en europe on englobe dans le concept dinfrastructure verte tous les lments de nature mme non connects.

    disproportionnes (ou de dgradation dcosystmes) dans dautres territoires. En matire dadaptation, les propositions concernent no-tamment la lutte contre leffet dlot de chaleur urbain et ses effets associs sur la dgradation de la qualit de lair, la vulnrabilit des infrastructures et services urbains, la ro-bustesse des cosystmes, la disponibilit de la ressource en eau et sa qualit, les risques dinondation/scheresse et les risques sanitaires. Si les mesures proposes par le PRC sont htrognes, elles accordent une certaine im-portance au lien entre climat et biodiversit, en pointant notamment le besoin de renforcer la robustesse des co-systmes. Le PRC voque aussi des solutions biologiques pour ladaptation, comme la vgtalisation des villes ou la gestion cologique de leau. Enfin, le PRC fait le lien avec le Schma rgional de Cohrence cologique (SRCE), qui vise la cration de continuits cologiques fonctionnelles sur le territoire (on parle aussi de trame verte et bleue), un dispositif videmment essentiel dans le cadre de ladapta-tion au changement climatique.En sappuyant sur ce travail et au vu de lvolution des connaissances comme des pratiques au cours des der-nires annes, Natureparif propose de mettre en avant de nouvelles solutions qui font appel la nature et dapprofondir des approches plus intgres associant biodiversit et climat dans les dispositifs existants toutes les chelles, comme les Plans Climat nergie territoriaux (PCET).

    quest-ce que lattnuation et ladaptation ?

    lattnuation et ladaptation sont deux stratgies pour faire face au problme du changement climatique. elles sont complmentaires. lattnuation traite des causes du changement climatique (laccumulation de ges dans latmosphre) et vise les rduire, alors que ladaptation concerne un ajustement des systmes en vue de limiter les impacts du changement climatique. tandis que les bnfices de lattnuation sont globaux, ceux de ladaptation relvent du local et de la spcificit des territoires. les deux sont indispensables car mme si des efforts importants taient faits sur lattnuation, le climat continuerait changer pendant les prochaines dcennies, rendant ncessaire ladaptation ce changement.

    en matire dadaptation

    De mme, prserver la biodiversit renforce la capa- cit de chaque milieu faire face aux changements, notamment climatiques. Il est maintenant dmon-tr quun haut degr de diversit (gntique et spcifique) assure aux cosystmes une stabilit dans le temps. Ils sont par ailleurs plus mme de produire des services utiles aux tres humains. En effet, face des menaces diverses, seuls des co-systmes diversifis rsistent parce quune popula-tion ou un groupe despces sen trouvera toujours mieux que dautres, permettant lcosystme de se maintenir. Cest le cas notamment des systmes agricoles: alors que la monoculture est fragile si un changement intervient, la culture diversifie permet au systme de sadapter. La diversit biolo-gique est une assurance-vie face aux changements.Dautres critres que la diversit entrent en ligne de compte, dautres chelles, comme lhtrognit, la connexion entre cosystmes, ou encore le niveau dauto-entretien. La plupart des cosystmes sains font preuve dune rsilience naturelle aux vnements trau-matiques condition quils ne soient pas prolongs ou

  • 8 climat : la nature source de solutions en le-de-france quelles solutions pour les villes ? 9

    Localement, les villes engendrent un phnomne dlot de chaleur urbain se caractrisant par une augmenta-tion de temprature par rapport aux milieux alentours (Oliveira et al., 2014). Ce phnomne est en partie d aux matriaux utiliss dans la construction des bti-ments et des rues, en partie la forme urbaine en ca-nyon qui rverbre et pige la rayonnement solaire et donc la chaleur. Plus globalement, les villes rejettent dimportantes quantits de GES comme le CO

    2 ou le CH

    4

    et des particules en suspension. Les zones urbaines re-prsentent entre 53 et 87% des missions mondiales de CO

    2 (GIEC, 2014).

    En retour, les villes subissent les consquences du changement climatique: canicules, mauvaise qualit de lair et intensification des problmes lis des vne-ments extrmes comme les scheresses ou les inonda-tions. Ces impacts sont dautant plus inquitants quils

    rpts1. Concrtement, en pratique, cela veut dire quil est utile de prserver les cosystmes existants qui pr-sentent ces caractristiques ou de restaurer ceux qui ont t dgrads, voire de crer de nouveaux cosys-tmes (urbains, agricoles ou forestiers) en respectant ces principes fondamentaux. La prsence de davantage de nature, que ce soit dans les villes, mais aussi la campagne, notamment dans les milieux agricoles qui souffrent aujourdhui dun dclin massif de leur biodi-versit, aura pour effet de renforcer la capacit de ces territoires rsister aux alas climatiques.

    1. https://www.coe.int/t/dg4/majorhazards/ressources/pub/Ecosystem-DRR_fr.pdf

    dans les prochaines pages, vous trouverez des propositions de solutions qui rpondent ces deux stratgies, le plus souvent de manire conjointe. les mesures pour lattnuation et ladaptation sont souvent les mmes (ex. une toiture vgtalise sert la fois de puits de carbone, et contribue mme faiblement lisolation des btiments, mais participe aussi ladaptation aux effets du changement climatique par le ralentissement de leau de pluie).

    elles seront notes par les deux symboles ci-contre :

    quelles solutions fondes sur la nature pour les villes ?

    affectent une grande partie de la population qui vit aujourdhui majoritairement en ville. Le changement climatique implique donc des enjeux croissants pour les villes, pour la rduction des impacts sur le climat mais galement pour ladaptation face ce change-ment (Gmez-Baggethun et al., 2013; Gill et al., 2007). Cest dans ce contexte qumergent aujourdhui de nombreuses solutions. Parmi elles, la prservation et la restauration de la nature en ville gagne du terrain en offrant, en plus des services cologiques, dautres bnfices sociaux en termes de sant et de bien-tre des citadins (production doxygne, stockage du car-bone et filtration des particules, attributs rcratifs, lien social, utilisation positive de lespace public). Les solutions qui sen inspirent peuvent par ailleurs en cot global dinvestissement et de gestion sav-rer bien moins onreuses que leurs alternatives issues du gnie civil.

    +/- stockage du carbone

    attnuation des effets des vnements

    climatiques extrmes

    rgulation de la qualit de lair, de leau, du sol

    +/- albedo +/- vapotranspiration +/- rugosit de surface

    modifications de la phnologie de certaines espces

    disparition dhabitats (fonte des glaciers, fonte

    des perglisols, etc.)

    dplacement des aires de rpartition des espces

    amplification de la vulnrabilit aux pressions existantes

    prolifration de populations despces invasives

    et parasitaires

    lvation du niveau

    des ocans

    acidification des ocans

    augmentation en frquence et en intensit des vnements

    climatiques extrmes

    modifications des conditions environnementales (temprature

    de lair, pluviomtrie, etc.)

    perturbation des courants marins (gulf stream)

    changement climatique

    conditions enviRonnementales

    biodiveRsit / cosystmes

    Boucle de rtroaction entre le changement climatique, les conditions environnementales et la biodiversit. Adapt du GIEC et de lIPBES.

  • 10 climat : la nature source de solutions en le-de-france quelles solutions pour les villes ? 11

    certains cas ne pas tondre ni faucher du tout au sein despaces laisss en volution libre (les friches sont en effet un important rservoir de biodiversit urbaine, complmentaires des grands parcs). Le pturage savre un moyen efficace pour entretenir les espaces verts car le faible pitinement par les animaux stimule la pousse et leurs fces enrichissent le sol. La rcup-ration des dchets verts et des rsidus de taille peut servir faire du compost et du bois ramal fragment qui seront remploys dans le jardin. Enfin, dans un contexte de prolifration de populations despces caractre envahissant, la meilleure rponse semble daccrotre la diversit et de rduire la fragmentation pour laisser au systme la capacit de sautorguler. Le pturage est aussi une solution curative efficace face certaines plantes non-dsires.

    vgtaliser les rues, les places et les bords de voirie pour rduire leffet dlot de chaleur et mieux grer leauLa vgtation permet de diminuer les tempratures par les mcanismes

    dombrage et dvapotranspiration, en particulier durant les mois les plus chauds, et ainsi dattnuer leffet dlot de chaleur urbain (Gill et al., 2007; Oberndorfer et al., 2007). Les plantes contribuent par ailleurs amliorer la qualit de lair, diminuer la concen-tration en CO

    2 atmosphrique par la

    photosynthse et rduire les concentrations de par-ticules en suspension par des mcanismes dabsorp-tion et de dposition sur les surfaces foliaires (Azam

    et al., 2012). Toute forme de vgtation est bienvenue, depuis les arbres urbains isols ou non, les jardins et parcs, les massifs isols. Une attention particulire doit toutefois tre porte sur le choix des espces (privilgier les essences locales varies en pleine terre en vitant les plantations monospcifiques, vi-ter les espces allergnes et fortement mettrices de composs organiques volatiles) et le mode de gestion (sans pesticides, en limitant les interventions). Mais pour que la vgtation rafrachisse la ville, il lui faut disposer deau en priode de forte chaleur. Un arro-sage sobre partir deau pluviale rcupre et stoc-ke peut donc tre ncessaire.

    diversifier les espaces verts urbains, en appliquant systmatiquement une gestion cologique voire une non gestionEspaces rcratifs, zones laisses en vo-

    lution naturelle, forts urbaines, massifs et prairies fleuries mais aussi jardins et zones ddies lagriculture: la palette de solutions naturelles est large pour les villes. Afin de produire des services climatiques, une gestion cologique sim-pose. Elle prvoit notamment labsence totale dusage de pesticides ou engrais chimiques, par ailleurs metteurs de

    GES dans leur fabrication. Lentretien mcanique doit tre privilgi (brossage, arrachage manuel, fauche): faucher une deux fois par an en exportant le pro-duit de la fauche sur les prairies, relever la hauteur de coupe (gale ou suprieure 10cm) et ainsi rduire la frquence des tontes pour les pelouses, voire dans

    Moins grer cest parfois mieux grer! Ici une zone-refuge pour la faune et la flore laisse en libre volution, Nantes. G. LecuirDe nombreux espaces minraliss peuvent accueillir de la vgtation. Ici, Paris, 17e arr. G. Lecuir

  • 12 climat : la nature source de solutions en le-de-france quelles solutions pour les villes ? 13

    dvelopper lagriculture urbaine pour rduire les circuits alimentaires et augmenter la surface jardine en ville

    Quand elle cohabite avec une nature plus sauvage et spontane, lagriculture urbaine prsente un vrai potentiel pour reconqurir la biodiversit en ville en complment dautres dmarches: vgta-lisation du bti, espaces verts cologiques, etc. Plusieurs expriences confirment quelle peut prserver une biodiver-sit gntique grce au choix de varits endmiques, et accueillir de nombreuses

    espces dont les pollinisateurs sauvages. Des combi-naisons ingnieuses de plantes redonnent vie aux sols. une plus grande chelle, lagriculture urbaine peut aussi participer aux trames vertes et bleues. Mais pour rduire la longueur des circuits de distribution alimen-taire, elle doit tenir compte du cycle de vie des matriaux quelle utilise (semences, substrats de culture, nergie et eau) afin de rester hyper-locale.

    dvelopper des trames vertes urbaines multifonctionnelles, en crant des liaisons vertes entre les espaces verts

    Pour que lensemble du vivant puisse se dplacer, les habitats et les cosystmes doivent tre relis. En milieu urbain, la trame verte peut prendre des formes varies (espaces verts, parcs et jardins,

    friches temporaires, arbres isols ou aligns, vgtali-sation du bti) chacun pouvant servir de petits rser-voirs de biodiversit, de zones relais et de corridors. La fonctionnalit de la trame verte dpend par ailleurs des pratiques de gestion qui sont appliques ces es-paces. Cest pourquoi la suppression des pesticides couple aux recommandations en matire de gestion cologique est essentielle1. La rvision des documents durbanisme, notamment par la prise en compte des trames vertes et bleues au sein des plans locaux dur-banisme (PLU)2 semble indispensable tout comme la ralisation dun diagnostic cologique3 systmatique avant tout projet damnagement urbain.

    1. La labellisation de la gestion cologique des espaces verts, par exemple au travers du label EcoJardin, est un outil efficace daccompagnement des gestionnaires dans le changement et de communication externe: www.label-ecojardin.fr2. Voir le guide Prendre en compte le SRCE francilien dans les documents durbanisme: www.natureparif.fr/srce3. Voir la mthodologie du diagnostic cologique urbain: www.methodo-deu.fr

    vgtaliser les faades des btiments et les toitures plates (aprs un diagnostic pralable) via des systmes faible empreinte cologique (plantes grimpantes, prairies sur toits) plutt que des systmes industriels dont lintrt pour la biodiversit comme pour la lutte contre le changement climatique nest pas avr La vgtalisation des terrasses, des toi-tures et des murs peut participer r-

    duire llot de chaleur urbain, mais aussi et surtout mieux isoler thermiquement les btiments tout en restaurant des ha-bitats et des milieux favorables au vivant.

    Pour que la vgtalisation des toits et terrasses offre des services climatiques et de biodiversit, elle doit tre conue qualitativement. Selon le contexte et la portance, les

    cologues recommandent dessayer de reproduire un sol naturel, en jouant sur sa composition en matire or-ganique (mlange pierres et terre locale avec +/- ajout de compost), sa structure et sa hauteur, ce qui per-mettrait de stocker davantage de CO2 et deau de pluie dans la perspective du changement climatique (plus de chaleur, plus de phnomnes de pluies intenses).

    Il a t montr que les toits vgtaliss plants avec un mlange de plusieurs despces (plantes grasses et her-baces) permettent une meilleure rtention deau en cas dinondation et un meilleur rafrachissement des tempratures en cas de canicules (Dvorak et al., 2010) que les monocultures de sdum. Sur les murs, dans la majorit des cas, il est prf-rable (et souvent bien moins coteux!) de privilgier les plantes grimpantes, en utilisant (ou en concevant) les murs et faades comme support de la vgtation. En plus de leur facilit dinstallation, les plantes grim-pantes crent un microclimat prs des murs et rgulent la temprature et lhumidit relative. Cela participe dautant la diminution des effets dlot de chaleur en priode estivale. Les murs aveugles et pignons peuvent accueillir des plantes grimpantes qui offriront protection contre les intempries, rafraichissement de lair et accueil de la petite faune. M. Barra

    Lagriculture urbaine est aussi une manire de valoriser des espaces momentanment sans projet. Ici le projet R-Urban Colombes. G. Lecuir

  • 14 climat : la nature source de solutions en le-de-france quelles solutions pour les villes ? 15

    engager un programme de dminralisation des espaces urbains (cours dcole, dimmeubles, voiries) en lien avec les politiques de vgtalisation

    Quand conserver ne suffit plus, il faut res-taurer. Les villes franciliennes reclent un potentiel important de nature sup-plmentaire, condition de dsimper-mabiliser certains espaces aujourdhui btonns ou asphalts grande chelle, et ce de manire planifie. Cela consti-tuerait un levier important pour favo-riser le stockage du carbone, le cycle de leau et augmenter la surface vgtalise

    globale. Cette dsimpermabilisation peut se faire sur le domaine public par exemple, en crant de nouveaux espaces vgtaliss sur certains trottoirs larges avec la participation active des habitants impliqus dans la gestion future de ces nouveaux espaces de nature. Mais aussi, dans le domaine priv, avec le soutien de la puissance publique, en instaurant par exemple, un seuil maximal dimpermabilisation des sols pour tout projet damnagement de construction, de rnovation ou dagrandissement sur le territoire.

    stopper limpermabilisation des surfaces en dehors de la voirie et prserver des sols vivantsLes sols sont le sige de multiples pro-

    cessus biogochimiques essentiels dans lattnuation et ladaptation climatique. Ils stockent de grandes quantits de carbone (davantage que la vgtation en surface) et assurent par ailleurs le bon droulement du cycle de leau sils sont prservs intacts. En le-de-France, les sols sont fortement artificialiss: prs de 20% contre 2,77% lchelle nationale. La majeure partie de ces sols sont imper-

    mables. De plus en plus de collectivits optent pour des solutions limitant le tassement et limpermabilisa-tion des sols. Certaines villes appliquent dores et dj des coefficients dimpermabilisation dans leurs docu-

    Parking, cheminement, accs pompiers, autant despaces quon peut amnager sans impermabiliser. G. Lecuir

    ments durbanisme, comme Montreuil, ou pnalisent la sur-impermabilisation de lespace urbain, comme Rennes. Dautres privilgient dans les zones pitonnes ou faible circulation automobile des matriaux poreux ou drainants pour faciliter linfiltration de leau dans le sol (matriaux drainants, pavs non-joints, dalles alvoles et enherbes). lchelle rgionale, limpermabilisation des sols est un vritable flau qui ne faiblit pas. Seules des mesures fiscales dissuadant la construction sur les terres arables ou encourageant la densit (taxe sur les logements vacants, aides la densification) pourraient inverser la tendance. dfaut de stopper lextension ur-baine, lcoconception du bti et des infrastructures et la construction rversible pargnant les sols (par exemple sur pieux) doivent encore tre dveloppes.

    La dsimpermabilisation des sols asphalts ou btonns est un levier important pour renaturer les villes. Ici Strasbourg en lien avec des habitants du quartier. Hlne Natt

    favoriser linfiltration naturelle de leau via des cosystmes naturels pour rduire le risque de ruissellement et dinondationLes villes sont souvent trs minrales,

    empchant le droulement naturel du cycle de leau. La canalisation et la ma-trise de leau engendre par ailleurs des cots dinfrastructures trs importants pour les collectivits. La vgtation permet de limiter

    les effets nfastes dus des phnomnes extrmes tels que les inondations. Les plantes, en interceptant leau la surface des feuilles, diminuent la quantit deau arrivant au sol. Elles permettent galement de diminuer le ruissellement grce la fonction structu-rante de leurs racines, tout particulirement les arbres. Les mesures de vgtalisation doivent saccompagner de mesures damlioration de la qualit des sols en ville, par une diminution des surfaces artificialises et une diminution de leur compaction, afin damliorer la rsistance des vgtaux et de permettre une meil-leure infiltration de leau dans le sol. Jardins de pluie, noues, mares et bassins constituent autant de milieux rcepteurs pour leau. En cas de fortes pluies ou dinon-dations, ces milieux constituent des zones tampon dexpansion, dinfiltration et de retour vers les nappes. Ils sont par ailleurs des habitats favorables pour la bio-diversit urbaine ordinaire. Si les craintes lies la propagation de pathognes ou moustiques sont lgitimes, les zones humides carac-tre naturel ont la capacit dautorguler ces popula-tions par la prsence des prdateurs.

  • 16 climat : la nature source de solutions en le-de-france quelles solutions pour les villes ? 17

    exiger un bilan carbone complet (sur tout le cycle de vie) des solutions retenues pour lefficacit nergtique

    Encore trop souvent, on sarrte la rduction des GES sur le seul aspect de consommation des btiments et des quipements, en omettant les GES in-duits par les matriaux, leur transfor-

    mation, leur recyclage et leur destruction terme. Il faut intgrer systmatiquement cette nergie grise dans notre manire de qualifier nos actions de rduc-tions des GES.De mme, au-del des GES, il faut aussi considrer lim-pact de la production de matriaux sur la biodiversit sur tout leur cycle de vie. On parle alors de biodiver-sit grise, en amont et en aval de la filire. Il sagirait pour les praticiens de favoriser le recours des filires plus locales et certifies dun point de vue de la biodi-versit et de diversifier les sources (notamment en aug-mentant la proposition de matriaux bio-sourcs).

    promouvoir la phytopuration des eaux uses en ville, ce qui permet de rduire le besoin en infrastructures de gestion des eaux (coteuses et dgradant les sols)En ville, la cration de zones humides peut savrer utile pour grer les eaux de pluie mais aussi pour les eaux uses. On

    parle de phytopuration. Indpendants ou relis des systmes de traitements classiques, les bassins de phytopuration savrent particulirement efficaces pour traiter les polluants organiques des eaux grises issues des viers et des douches. Certaines combinaisons de plantes sont

    particulirement efficaces: les phragmites (roseaux), carex, massettes et lentilles par exemple. Outre le bn-fice cologique, ces zones humides permettent de limi-ter le nombre des tranches pour le passage des rseaux. Par ailleurs, un bassin de phytopuration connect dautres dispositifs comme les mares ou les noues urbaines participe de la cration dune trame bleue urbaine fonctionnelle. Quant aux eaux noires (toilettes), une des options consiste diriger ces flux vers une unit de mthanisation qui produira du biogaz, nergie alors utilisable localement pour chauffer les habitations (une solution cologique pour lattnuation du changement climatique). Il est aussi possible si les conditions sont runies (notamment au niveau de lespace disponible) de les traiter par lagunage et phytopuration.

    Lpuration par la nature vite de lourds travaux dagrandissement ou de rnovation des stations de traitement des eaux uses. L. Pags

    La rouverture et le remandrage des rivires urbaines enterres est une action positive la fois pour la qualit de leau, la lutte contre le risque dinondation, la prservation de la biodiversit et lusage rcratif par les citadins. SIAH

    Rouvrir et renaturer les rivires urbaines, renaturer les berges urbaines, remandrer

    Afin damliorer la qualit de leau en ville, de rduire les ruissellements et de crer de nouveaux habitats, les opra-tions de restauration voire de rouver-ture de rivires urbaines sont nces-

    saires. En le-de-France, Sarcelles (95), la restauration du Petit Rosne ouvre des perspectives intressantes en matire de savoir-faire (cf. illustration ci-dessous). Dans les Hauts-de-Seine, lassociation Espaces a ralis la renaturation dune portion des berges de la Seine, laide de techniques de gnie vgtal. Si lavantage des rivires caractre naturel est indniable pour la bio-diversit, il lest aussi pour permettre aux espces de se dplacer nouveau le long des berges, dans le cadre de ladaptation au changement climatique.

    privilgier les matriaux bio-sourcs pour lisolation

    En termes disolation, les matriaux bio-sourcs (issus de lagriculture et de la foresterie) font partie de la solution pour russir la transition nergtique tout en favorisant la biodiversit. Les choisir permet de rduire lempreinte par rap-port aux matriaux conventionnels, trs metteurs de C0

    2. Un isolant bio-sourc

    (paille, lin, chanvre, textile recycl, laine de bois, etc.) est prfrable un iso-

    lant driv du ptrole (polystyrne ou polyurthane). Des plantes comme le chanvre et le lin ont non seulement prouv leur intrt technique mais sont aussi des atouts pour une agriculture respectueuse de la biodiversit (rotations culturales, moindre utilisation dintrants). Il est ncessaire dencourager ces filires, sans perdre de vue que lon doit rflchir leur dploiement en fonction des spcificits locales.

    La paille compresse est un matriau de construction et un isolant bio-sourc efficace et prouv. M. Barra

    avant

    apRs

  • 18 climat : la nature source de solutions en le-de-france quelles solutions pour les milieux agRicoles ? 19

    amliorer lefficacit nergtique des btiments par la vgtalisation qualitative de tous les nouveaux btiments publics, industriels et commerciaux tant sur les faades que les toits

    La construction durable doit sinscrire dans une vision plus large que celle de lnergie. Les solutions privilgiant la nature peuvent aussi rendre des services climatiques. Cest le cas de la vgtali-sation du bti, un atout pour rduire les consommations nergtiques et amlio-rer lisolation. Plutt que dopposer les deux dmarches, on peut les combiner, lexemple des toitures sur lesquelles linstallation conjointe de panneaux solaires et de vg-

    taux est mutuellement bnfique aux diffrents objec-tifs recherchs. consommer intelligemment

    titre individuel, comme lorsque nous sommes amens tablir ou valider une commande publique ou prive, choisissons les produits et services faible empreinte carbone, faible

    mobilisation de ressources naturelles non-renouve-lables, dont les conditions de production ne dgradent pas lenvironnement, produites le plus localement possible et qui respectent une juste rmunration des personnes. Lalimentation est un puissant vec-teur daction en la matire, tant au niveau individuel en privilgiant les produits bios locaux, en adh-rant une AMAP, quau niveau collectif au travers de la restauration collective.

    Actuellement en France, 20% des missions de GES sont attribues lagriculture, auxquelles doivent sajouter les missions directes ou indirectes dues aux changements daffectation des sols (CITEPA, 2014). La plus grande partie des missions est lie la fertilisa-tion des champs (NO

    x) ainsi qu llevage (CH

    4, NO

    x).

    En le-de France, lagriculture nest responsable que de 7% des missions de GES, soit 3,5 millions de TeqCO

    2

    (la moyenne franaise slevant 20,5% des missions). En revanche lle-de-France met 3% des GES agricoles nationaux quand elle ne reprsente que 1,8% de la sur-face agricole utile nationale. Responsable dune partie des missions de GES, lagri-culture subit en retour les alas du changement cli-matique (qui viennent sajouter dautres impacts, notamment les changements doccupation du sol ou lin-tensification des pratiques), par le manque deau lt ou les intempries, par laugmentation de la chaleur en plaines agricoles. Elle subit le dplacement despces, notamment des ravageurs des cultures. Lintensification de lagriculture a eu galement pour consquence la simplification extrme des systmes en rduisant leur biodiversit, ce qui a pour effet daugmenter leur vuln-rabilit aux alas (par exemple la pression pathogne et parasitaire qui rend les systmes agricoles encore plus fragiles au changement climatique). En effet, lagricul-ture intensive repose largement sur la diminution du nombre des espces cultives et sur lhomognisation

    favoriser lutilisation de matriaux qui font sens dun point de vue des cosystmes (locaux, si possible de sources renouvelables et produits selon des cahiers des charges rigoureux dans la limite des disponibilits locales) Lle-de-France est la rgion la plus consommatrice de matriaux dans lHexagone (en majorit des granulats qui entrent dans la composition des

    mortiers et btons). Elle importe chaque anne plus de 45% de ses besoins en granulats depuis les rgions priph-riques, voire ltranger. Une demande qui ne cesse daugmenter: le projet du Grand Paris prvoit 4,7 millions de tonnes sup-

    plmentaires de granulats soit 2,6 millions de m3 de bton par an. Louverture de nouvelles carrires, la solidarit interrgionale ou lexploitation de gra-nulats marins sont autant de pistes envisages par les professionnels. Pour autant, cela ne permettrait pas de fournir la quantit ncessaire et aurait un impact ngatif sur les milieux naturels. Des solutions la fois bnfiques pour le climat et la biodiversit seraient dune part, de soutenir en priorit le recyclage et le remploi des matriaux issus de la dconstruction, et dautre part, les modes de production les moins impac-tants de ces matires premires (carrires rhabilites quand il sagit de granulats, forts gres pour le bois, et systmes agrocologiques polycultures/rotations culturales/ agroforesterie pour les matriaux bio-sour-cs). Par ailleurs, employer en priorit les matriaux co-conus, non complexes (non composites) les rendrait facilement recyclables ou valorisables sans traitements lourds en fin de vie. Enfin, il faut minimiser les quanti-ts utilises par des choix architecturaux plus sobres.

    quelles solutions fondes sur la nature pour les milieux agRicoles ?

    gntique intra-spcifique1. Elle exploite peu les fonc-tions cologiques intrinsques des cosystmes dont dcoulent pourtant des services cosystmiques, les remplaant par des intrants chimiques (pesticides, fertilisants) et une forte mcanisation, tout en limitant les habitats favorables la faune (haies, mares). En le-de-France, le paysage agricole est compos essentiel-lement de grandes exploitations (112ha/exploitation en moyenne). Selon Jean-Marc Meynard, chercheur lINRA, cette spcialisation agricole peu diversifie, no-tamment cralire, sest accompagne du raccourcis-sement et de la simplification des rotations.

    Face au triple dfi de rduire les missions agricoles de GES, tout en assurant la rsistance des systmes agri-coles aux alas climatiques et en gardant une produc-tivit suffisante, renouer les liens avec la biodiversit semble indispensable.Les stratgies dadaptation cites dans la littrature scientifique ont souvent pour objectif dadapter les cultures un climat qui change (varits gntique-ment modifies, cultures en conditions contrles, innovation technologique, matrise de lirrigation). Or, la communaut scientifique soutient depuis longtemps

    1. Papy F., Goldringer I., 2011. Cultiver la biodiversit http://www7.inra.fr/dpenv/pdf/C60Goldringer.pdf

    Associer nergie solaire et vgtalisation offre un gain mutuel: la vgtation rafrachit les panneaux et augmente leur productivit, tandis que ceux-ci offrent de lombre et une diversit dhabitats la flore. 2015 Green Roofers Ltd

  • 20 climat : la nature source de solutions en le-de-france quelles solutions pour les milieux agRicoles ? 21

    encourager la diversification de lagriculture francilienne

    linverse de la monoculture intensive, la mise en uvre de pratiques agroco-logiques vise le maintien dassolements diversifis et de rotations culturales plus longues, avec une alternance de cultures dhiver et de printemps et la prsence de lgumineuses. Elle prescrit galement une couverture du sol, au moins avant les cultures de printemps (par des rsi-dus de cultures ou des plantes de cou-verture semes en intercultures), lusage

    prfrentiel du dsherbage mcanique et de la lutte biologique en lieu et place des traitements phytosani-taires et herbicides. Introduire des lgumineuses qui fixent lazote atmosphrique dans les rotations des grandes cultures permet davoir des apports dazote pour les autres cultures. Ainsi la matire organique du sol aprs introduction de lgumineuses est pour dautres types de culture (bl, colza, orge). Laccrois-sement de la part des lgumineuses permet donc une rduction de la fertilisation minrale et des conomies dnergie fossile puisque la fabrication dengrais de synthse est fortement consommatrice dnergie. Les rotations culturales permettent aussi de diversifier les productions et de rpondre diffrents besoins. Face la demande croissance en matires premires agri-coles pour des usages non alimentaires (matriaux de construction biosourcs, fibres textiles, bois ou bio-masse), la diversification de lagriculture sur un terri-toire semble une rponse adapte. Cest notamment ce que prvoit le scnario Afterres20501, partir des besoins des franais (ou franciliens dans le cadre de sa dclinaison rgionale) en 2050. Enfin, des pratiques dirrigation conomes en eau sont indispensables pour faire face aux scheresses plus frquentes et plus svres. Dans cette optique, le choix des espces culti-ves et des semences de ces espces devrait davantage dpendre du climat local, mme si cela ncessite des politiques agricoles incitatives pour les agriculteurs.

    1. Afterres2050 : un scnario soutenable pour lagriculture et lutilisation des terres en France lhorizon 2050 http://www.solagro.org/site/393.html

    quil est possible de pratiquer des agricultures diff-rentes, fondes sur les mcanismes luvre dans les cosystmes. De grands principes se dgagent, comme la rintroduction dun niveau lev de diversit gn-tique et spcifique dans les cultures, notamment par le biais dassociations culturales, de rotations, par la restauration dhabitats favorables la faune sauvage (haies, arbres, fosss, bandes enherbes), par la rduc-tion du rythme et de la profondeur des labours. Mais aussi par laugmentation de la dure de vie des prairies temporaires, lallongement de la dure du pturage, lenherbement permanent en vignes et en vergers, et enfin par la rduction de lusage des engrais minraux

    de synthse. Si le paysage agricole est majoritaire-ment faonn par la Politique agricole commune (PAC) europenne, il est dsormais du rle de la collectivit rgionale de soutenir les initiatives tendant vers une agriculture francilienne climato-intelligente qui sap-puie sur la biodiversit. Il ny a pas de recette unique: agriculture biologique, bio-dynamie, conservation de varits anciennes, permaculture, agroforesterie, agri-culture de conservation, autant de concepts (que lon peut regrouper sous le terme plus englobant dagro-cologie) qui expriment la possibilit dune grande diversit dagricultures et de pratiques inspires de la nature et des contextes locaux.

    Rintroduire une diversit en espces et une diversit gntique dans les systmes de culture

    Face aux dfis de lagriculture de demain (alas climatiques, rduction des intrants, etc.), laugmentation de la diversit spci-fique (polyculture, cultures associes) et de la diversit gntique (cultures multi-varitales) est un levier daction efficace. Lintrt daugmenter la diversit gn-tique est avr, en particulier pour le bl et les prairies semes, pour le contrle des bioagresseurs, le maintien de la biodiver-sit sauvage associe aux cultures mais

    aussi pour la stabilit de la production et le maintien de lquilibre des espces semes en mlanges plurispci-fiques. Dautres recherches montrent que le fait dasso-cier plusieurs espces et plusieurs varits augmente le rendement en biomasse et diminue les besoins en eau des cultures (Litrico et al., 2015). Les diffrentes espces sont choisies de manire tre complmentaires pour leur utilisation des ressources. Cette pratique est intres-sante pour la structure du sol, sa productivit, sa qualit et la biodiversit qui lui est associe. En le-de-France, les cultures associes de crales et de lgumineuses savrent prometteuses mais dautres associations restent sans doute dcouvrir au gr des avances de la recherche scientifique. Il est aussi prconis dintroduire des couverts vgtaux et de raliser des cultures inter-mdiaires ou des bandes enherbes (Chenu et al., 2014), car dans un cosystme de type prairie, le stockage du carbone est augment par la diversit des espces pr-sentes dans le milieu (Amiaud et Carrre, 2012; Huyghe et Litrico, 2008). Cette technique de mlange de cultures savre avoir aussi une interaction positive sur la produc-tion primaire dans le cas de mlanges entre gramines et lgumineuses (Kirwan et al., 2007), lintroduction de doses de pluri-spcifit minimisant les attaques de bioagresseurs sur les cultures. Cela plaide galement pour les mlanges varitaux et la diversit gntique intra-spcifique.

    La diversit gntique des semences est essentielle ladaptation des cultures aux changements. Ici, du bl en slection massale. G. LecuirRintroduire de la diversit gntique, diversifier les assolements, mieux grer les sols, conserver des lments de paysages sont autant datouts pour la rsilience de lagriculture face aux changements. L. Pags

  • 22 climat : la nature source de solutions en le-de-france quelles solutions pour les milieux agRicoles ? 23

    protger les habitats spcifiques et les milieux favorables (fosss, haies, bandes enherbes, lisires, arbres et bosquets isols, mares et mouillres)

    Lobservation de prolifrations de popula-tions de ravageurs dans les grandes zones de monoculture plaide pour des solutions alternatives lusage des traitements chimiques, dont linefficacit moyen et

    long terme est dmontre. Parmi les solutions naturelles, la lutte biologique consiste favoriser la prdation des organismes pathognes par des prdateurs naturels. En soi, il sagit de rtablir des chanes trophiques (qui mange qui?) fonctionnelles dans les parcelles agricoles. Le renforcement des habitats connexes, des amna-gements pour la biodiversit en capacit de favoriser laccueil de la faune et de rtablir des interactions biolo-giques (reproduction, nourrissage, prdation, etc.) parat pertinent. Cette infrastructure agrocologique peut tre constitue dlments de diffrentes natures: bandes en-herbes (si elles sont suffisamment larges), bordures de champs, arbres isols, haies champtres plurispcifiques, bosquets, boqueteaux et buissons, ripisylves, fosss de drainage, mares et mouillres. Il est intressant de noter que la restauration de 60000km de haies en le-de-France permettrait de stocker 75000t de carbone en plus chaque anne (une haie stocke en moyenne 125kgC/m/an). Dautant plus quen matire de biodiversit, ces haies sont de vritables habitats pour de nombreuses espces infodes aux milieux agricoles, notamment lavifaune et les insectes auxiliaires utiles. Elles font aussi office de continuits cologiques indispensables pour le dpla-cement des espces, un atout de plus dans le cadre de ladaptation au changement climatique.

    Renforcer le stockage du carbone dans les sols et la biomasse par des pratiques adaptesLes milieux prairiaux stockent autant de

    carbone que les forts (soit 70tC/ha), par rapport aux 43tC/ha des milieux agricoles: il est important dassurer au niveau rgional des politiques de prser-vation des prairies permanentes, ptu-res ou non, voire denvisager leur res-tauration. En effet, on peut noter que la conversion des terres, dans ce contexte, dune culture traditionnelle en prairie aurait pour effet daugmenter la capacit de stockage

    du carbone. Ngatives si lon convertit des prairies ou forts en cultures, mais positives si lon convertit des cultures en prairies (ex. passage de culture prairie permanante = +0,49 de C). Selon Le Roux et al., pour maintenir une biodiversit prenne en milieu agricole, il faudrait atteindre un seuil de 20% de milieux semi-naturels herbacs (pour une moyenne de 11,6% ac-tuellement en le-de-France). Latteinte de cet objectif cologique reviendrait restaurer 46000 hectares de prairie, ce qui quivaudrait 80000 TeqCO

    2 stocks en plus par an. Comme souvent, les solutions pour amlio-

    rer la biodiversit sont aussi celles qui permettent de lutter contre le changement climatique. Par ailleurs, afin de stocker du carbone dans les sols et de rduire leur rosion, il est recommand dadopter des techniques de culture telles que la rduction du labour associe un semis direct et un travail superfi-ciel du sol. LADEME1 prcise ainsi quil faut favoriser la couverture des sols nus par lincorporation de cultures intermdiaires dans la rotation, lenherbement des interrangs des vignes et des vergers et laugmentation de la dure de vie des prairies temporaires.

    1. http://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/7886_sol-carbone-2p-bd.pdf

    Les haies ont un rle crucial dans la rgulation des ravageurs des cultures par les auxiliaires. M. Zucca

    conserver ou rtablir des zones dexpansion des crues en milieu rural comme zones tampon pour pallier dventuelles crues

    On observe depuis plusieurs annes un dclin des milieux herbacs en le-de-France, ces derniers ne reprsentant plus que 4% de la surface agricole utile rgio-nale. Cest le cas des prairies humides et

    inondables qui sont des milieux essentiels la fois pour la biodiversit mais aussi pour le stockage du carbone et ladaptation, aux inondations notamment (ces prai-ries faisant office de zones dexpansion des crues). Ces milieux constituent souvent le dernier reliquat prairial naturel o se rfugient actuellement des es-pces qui ny taient pas spcialement adaptes au dpart comme le Rle des gents, qui a disparu dle-de-France. Ils ont souvent t remplacs par des peu-pleraies plus ou moins intensives mais dont la biodiver-sit est toujours moindre.Enfin, un dbat important existe depuis plusieurs an-nes sur lavenir de la Basse, zone naturelle de Seine-et-Marne. Le rle de celle-ci pour lcrtage naturel des crues est reconnu mais un projet damnagement majeur y est envisag: il sagirait la fois de canali-ser le cours de la petite Seine et de crer une dizaine de caissons artificiels de stockage des eaux de crues exceptionnelles. Ce projet affecterait fortement la bio-diversit de cette rgion dont lintrt patrimonial est exceptionnel en le-de-France. Cet exemple montre bien quil y a aussi un dfi dans la conciliation des diffrents enjeux et moyens mettre en oeuvre pour atteindre un objectif commun comme la protection des personnes et des biens face aux inondations.

    Les zones dexpansion des crues seront dautant plus ncessaires lavenir du fait du changement climatique. Il faut les restaurer massivement. N. Flamand

    Les pratiques favorisant la biodiversit des sols amliorent le stockage de carbone par ces derniers. @ L. Pags

    Le retour de larbre dans les cultures est avantageux plusieurs gards pour le climat et la biodiversit P. Monin / Bergerie de Villarceaux

    Rintroduire une diversit darbres dans les cultures via lagroforesterieLagroforesterie revient rintgrer

    larbre au sein des cultures ou des ptu-rages. La prsence darbres a plusieurs atouts, notamment le fait daugmenter la production primaire (Chenu et al., 2014) ce qui conduit accrotre effica-cement lentre de carbone dans les sols et limiter sa sortie par lvitement de lrosion des sols (donc lutter contre la pollution des sols et des rivires). De plus, lagroforesterie rduit fortement lunifor-

    misation des paysages en recrant une mosaque de milieux plus htrognes. Cette technique doit aussi tre cohrente avec les contextes locaux, pour les choix des essences darbres, qui pourront par ailleurs tre diversifies au sein dune mme parcelle. La mise en uvre de ces pratiques agricoles, sans changement majeur de lorientation des systmes de production, permettrait donc une augmentation relative du stock de carbone des sols, ainsi quune production directe (bois, biomasse). La fertilit biologique des parcelles en prsence darbres est augmente (Boukcim, 2010), et le taux de matire organique est parfois suprieur de 50% par rapport aux parcelles tmoins (sans arbres). La rintroduction darbres offre gite, nour-riture et refuge de nombreux auxiliaires (pollinisa-teurs, insectes), ce qui permet de lutter biologiquement contre les ravageurs et pathognes et donc de limiter les apports dintrants (Le Roux, 2008). Lagroforesterie encore trs peu dveloppe en le-de-France pour-rait squestrer entre 1 et 4 tonnes supplmentaires de C/ha/an et contribuerait de faon non ngligeable au Schma rgional de Cohrence cologique (SRCE) en renforant la trame arbore en milieu agricole. La prsence darbres permet aussi de rguler lhumi-dit des sols sans concurrencer les cultures (enracine-ment profond) et donc dviter des phnomnes den-gorgement ou de ruissellement dommageables pour les sols. Enfin, elle peut participer diversifier les reve-nus des agriculteurs qui valorisent ces arbres en bois duvre, en bois-nergie ou en production alimentaire associe (fruits).

  • 24 climat : la nature source de solutions en le-de-france quelles solutions pour les foRts ? 25

    encourager le retour de llevage dans les fonds de valles franciliennes, et la polyculture-levage

    Aujourdhui, llevage ne reprsente plus que 7% des exploitations de la rgion (Agreste, 2013). Llevage ou plus largement le pturage, parfois sans vocation de rente (quids) a pourtant des atouts la fois pour le climat et la biodiversit1. Sil est souvent point du doigt car responsable dmission de GES quand il est intensif (du mthane notam-ment), il peut aussi contribuer mainte-nir des prairies permanentes en le-de-France, essen-

    tielles pour le stockage du carbone (voir p.23). Pour la biodiversit comme pour le climat, seuls des levages extensifs sont intressants, ce qui ncessite de sint-resser aux capacits de charge des cosystmes et de ne pas les dpasser. Par ailleurs, lherbivorie (toujours extensive) est intressante pour la fertilit des sols (incorporation de fces).

    1. Voir le rapport levage et biodiversit en le-de-France, des synergies encourager. Le cas des valles franciliennes http://www.natureparif.fr/attachments/observatoire/rapports-etudes/elevage.pdf

    Les forts hbergent prs de 65% des espces ter-restres recenses. Elles jouent galement un rle ma-jeur dans la rgulation de lair et du climat. Vritables puits de carbone, les milieux forestiers permettent le stockage (quantit permanente de carbone stock) et la fixation (variation du stock par an) du carbone au sein de la biomasse vivante et morte. Les stocks de carbone dans les cosystmes forestiers sont dif-ficiles quantifier: ils varient en fonction du climat, de lessence, du type de sol et des pratiques de gestion des sols. Les chercheurs estiment nanmoins que les forts adultes borales et tempres de lhmisphre nord stockent 2,4 tonnes de carbone par hectare et par an1. Plus un arbre est vieux, plus il capture de CO

    2 dans latmosphre pour continuer crotre, ce qui

    confirme lintrt de prserver les forts anciennes et les peuplements gs (Luyssaert et al., 2008). Les co-systmes forestiers franais mtropolitains captent annuellement par la photosynthse lquivalent dun tiers des missions de CO

    2 franaises, soit 32MtC/an.

    Le carbone est stock dans la biomasse (arienne et souterraine) raison de 1 147MtC pour lensemble de la fort franaise mtropolitaine, et dans le sol, qui ac-cumule prs de la moiti du stock total avec 1 074MtC. Au mme titre que les peuplements vgtaux, la pro-tection des sols est primordiale dans les politiques de lutte contre les changements climatiques en fort. Enfin, les arbres de gros diamtre constituent des

    1. http://www.planetoscope.com/climat/co2

    Llevage extensif a quasiment disparu dle-de-France alors que la demande locale y est la plus forte. DR

    Le mlange des espces et races (bovins, ovins, caprins, quids) permet aussi de diversifier la pression sur la vgtation (consommation diffrente en fonction des espces). En le-de-France, le retour de llevage aurait du sens dans les fonds de valles, la place de la popu-liculture. Sur les coteaux, des prairies temporaires, de fauche ou ptures, en rotation avec des cultures de rente sont galement possibles. Les prs-vergers sont aussi un choix intressant pour llevage, en combinant la prsence de milieux herbacs et darbres au sein des parcelles. La prsence des arbres stabilise les pentes, limite lrosion des sols, est apprcie par les ani-maux, participe la diversification de la production et, enfin, sert de refuge pour certaines espces sauvages. Pour finir, dans loptique dune production de qualit, certaines races reconnues pour leur rusticit (vlage facile, rsistance aux maladies), telles que les salers, pourraient tre apprcies dans la filire allaitante.

    quelles solutions fondes sur la nature pour les foRts ?

    stocks importants (troncs, branches, grosses racines). Ici encore, les solutions favorables la biodiversit sont aussi celles qui favorisent le stockage du carbone et ladaptation.Les milieux forestiers ont donc un rel potentiel datt-nuation du changement climatique caus par les acti-vits humaines.Mais ces espaces forestiers, comme tous les autres es-paces naturels, vont tre et sont dores et dj impacts par le changement climatique. Bien que la connaissance soit encore incomplte et incertaine, il est probable que le changement climatique induise le dplacement des aires de rpartition des espces vgtales de 200 1200 km vers le nord dici 2100, ce qui impactera par la mme occasion la diversit biologique qui leur est associe. Les scheresses seront plus frquentes et plus intenses, ainsi que les feux de forts. Laugmentation du CO

    2 atmosphrique pourrait galement accrotre la

    densit des arbres (GIEC), ce qui mnerait une plus grande comptition entre les arbres pour la lumire, in-hibant leur croissance et diminuant ainsi leur capacit de stockage de CO

    2. Cela aurait galement des cons-

    quences sur les espces vivant au sol. Enfin, laugmen-tation prvisible de la frquence et de lintensit des temptes pose la question de la rsistance et de la rsi-lience des forts face aux vents trs violents.

  • 26 climat : la nature source de solutions en le-de-france quelles solutions pour les foRts ? 27

    promouvoir une gestion adaptative en faveur de la biodiversit

    La gestion adaptative est un terme ambigu qui peut signifier plusieurs choses. Dans notre esprit, il sagit de pratiquer une gestion (qui peut aussi tre une absence de gestion) qui tienne compte des paramtres climatiques lo-caux (changeants) et qui donne la fort le maximum de chance de faire face aux alas et de se maintenir sur le temps long. Cette gestion adaptative doit aussi miser

    sur le potentiel biologique de la fort et sa diversit comme levier pour ladaptation. Selon Frdric Gos-selin, chercheur lIRSTEA, la gestion adaptative doit permettre doptimiser les capacits dadaptation des essences forestires face au changement climatique. Il prconise de faire cohabiter plusieurs types de gestion: une mosaque de peuplements de toutes surfaces, jeunes et gs, clairs et ombrags, avec des degrs dhumidit divers et des lisires varies. Cela va de la forte naturalit (forts non-gres) la gestion plus intensive, en tenant compte des cycles syl-vigntiques, en conservant du bois mort et des lots de snescence, en limitant le tassement des sols, etc. Cette situation peut convenir la fort francilienne. La prsence frquente dune rgnration naturelle en sous-bois permet de conserver le potentiel gntique et spcifique du peuplement et lui garantit une bonne rsilience face aux fortes perturbations (tempte, in-cendie, etc.) ainsi quune capacit dadaptation opti-male dans le cadre du changement climatique. Selon Daniel Vallauri, responsable du programme Forts au WWF, si lon cherche maximiser le stock de car-bone dans lcosystme forestier, lallongement des cycles sylvicoles est le meilleur choix de gestion. Il per-met galement doptimiser la production de gros bois duvre de qualit, conomiquement intressant pour le propritaire. Par ailleurs, un peuplement multistrati-fi stockera mieux le carbone grce linterception par les strates basses du carbone relargu par le sol. Cette complexit structurale est par ailleurs plus favorable tant pour la stabilit et la rsilience des peuplements, que pour la biodiversit1. LADEME prconise enfin de ne pas prlever toute la biomasse arienne en laissant une part des rmanents au sol pour prserver la ferti-lit chimique et minrale des sols forestiers et rduire les risques de tassement, ce qui participe laugmen-tation des stocks de carbone. Cette mise en garde est

    1. Rossi M., Andr J., Vallauri D., 2015. Le carbone forestier en mouvements. lments de rflexion pour une politique maximisant les atouts du bois. Lyon, Rapport REFORA, 40 pages. http://refora.online.fr/parutions/Rapport_carbone_forestier.pdf

    dautant plus pertinente que les politiques de dve-loppement du bois-nergie se dveloppent actuelle-ment, avec un risque rel de surexploitation forestire. Quant au prlvement, sil convient dviter autant que possible les coupes rases, les auteurs soulignent quune rduction de la densit de coupe environ 8 arbres/ha serait bnfique la fois pour le stockage du carbone, mais aussi pour la biodiversit prsente, en maintenant une distance minimale de 35 mtres entre arbres abat-tus. Enfin, les arbres, dont le diamtre est suprieur 100cm, ne devraient pas tre abattus car ce sont eux qui stockent les plus grandes quantits de carbone.

    favoriser le mlange des essences

    La plantation dun hectare de fort tem-pre peut permettre un stockage sup-plmentaire de 2 12 tonnes de carbone par an. Les peuplements mlangs pr-senteraient une meilleure adaptation

    aux changements globaux, notamment le changement climatique (Legay et al., 2007 et 2008). Dautre part, le mlange amliorerait la stabilit et la rsilience des peuplements suite des alas biotiques ou abiotiques (Dhte et al., 2005) grce une structure verticale com-plexe, qui permet en outre une prospection racinaire diffrents niveaux, utilisant au mieux les rserves en eau du sol. Il est gnralement admis par les chercheurs et gestionnaires quune plus forte diversit en essences darbres dans un peuplement contribue une meilleure rsistance de ces peuplements la scheresse dans cer-taines situations. Autant dlments qui incitent une gestion douce larbre plutt qu la parcelle.

    prserver ou augmenter la diversit gntique

    Selon Franois Lefvre, chercheur lIns-titut national de la Recherche agrono-mique (INRA), la diversit gntique est le carburant ncessaire pour une vo-lution adaptative des forts, quil sagisse dadaptation naturelle ou dadaptation dirige. Au sein mme des essences, elle permet lmergence dindividus plus rsistants que dautres, de mme que la diversit spcifique permet de prvenir leffondrement des peuplements dans le cas de lli-mination de lune ou lautre essence. Ce sont l deux facteurs cl de la rsilience des essences et des peuple-ments au changement climatique.

    En le-de-France, selon la DRIAAF, le taux de boisement est de 23%, relativement peu loign du taux moyen national de 26%. Malgr son caractre urbain remar-quable, lle-de-France est donc aussi forestire que bon nombre dautres rgions franaises. Qui plus est, comme ailleurs en France, la fort progresse en le-de-France tout en tant ingalement rpartie sur le ter-ritoire rgional: quelques trs gros massifs forestiers (principalement ceux de Fontainebleau et Rambouillet) mergent au milieu dune fort disperse dans le terri-toire rural de la grande couronne. La fort francilienne est aux prive avec une volution graduelle du centre vers la priphrie: dans Paris et la premire couronne la proportion de fort publique (prs de 90%) est beaucoup plus importante que dans les dpartements de la grande couronne. Il est vident que les pratiques sylvicoles (en fonction des options choisies) peuvent affecter la fois la capacit des forts stocker du carbone et leur biodiversit. Les interventions humaines ont profondment modifi la vgtation climacique, plus dailleurs en ce qui concerne la strate dominante que la flore arbustive et herbace.

    La sylviculture, par ses traitements en taillis, simple ou sous futaie, a longtemps favoris les essences rejetant de souche (chnes, charme, tilleul, bouleaux) au dtri-ment du htre. Elle a galement introduit massivement des essences trangres la rgion ou peu rpandues naturellement: le chtaignier pour les feuillus et le pin sylvestre pour les conifres. Si la fort francilienne ne fait pas lobjet dune exploitation intensive, les gestionnaires et les scientifiques sinterrogent aujourdhui sur les approches permettant la fort de rpondre ces mul-tiples dfis. Elle est lobjet de rflexions visant accroitre son exploitation notamment pour le bois construction ou le bois nergie. Ces politiques doivent sattacher pri-vilgier une gestion qui fait sens au regard de la biodiver-sit et des changements climatiques. Comme dans le cas de lagriculture, il savre que les solutions sont souvent les mmes pour lattnuation et pour ladaptation. Selon les chercheurs, les gestionnaires gagneraient allonger les cycles sylvicoles, conserver bois mort et rmanents en fort, viter les coupes rases et prfrer les interven-tions prudentes et continues, favoriser le mlange des essences et donc privilgier les traitements irrguliers couvert continu.

    Fort de Rosny-sur-Seine. A. Muratet

  • 28 climat : la nature source de solutions en le-de-france quelles solutions pour les foRts ? 29

    limiter la populiculture

    La culture monospcifique du Peuplier, notamment dans les valles alluviales, pose des problmes vis--vis de la biodi-versit. Elle reprsente le maximum de la simplification biologique. Dailleurs,

    les dgts occasionns en Europe sur le Peuplier par les diffrentes espces de Melampsora tmoignent de la faible rsistance des cultures monoclonales aux alas environnementaux (Pinon et al., 1998). En le-de-France, deux secteurs ont tout particulire-ment t dgrads par la populiculture: la Basse et la valle de lOurcq. Ces peupleraies nabritent quune diversit biologique trs faible et nont pas les carac-tristiques dune zone humide fonctionnelle. Dans la perspective du changement climatique, la prservation des forts alluviales est ncessaire, en lien avec des pra-tiques agricoles extensives, comme le pturage en fond de valle.

    maintenir des lots de vieillissement et conserver une trame de vieux bois en libre volution

    Il est indispensable de conserver une trame de vieux bois, quil sagisse darbres isols (arbres micro-habitats, arbres morts, etc.), dlots de snescence (zones laisses en volution naturelle la diffrence des lots de vieillissement coups plus

    tard que lge/diamtre dexploitabilit courant), ou de rserves intgrales. Pour tre efficaces, ces l-ments de la trame de vieux bois en libre volution doivent tre connects dun point de vue cologique (notion de corridor). En le-de-France, la politique de maintien dlots de vieillissement concerne 1810ha, qui viennent sajouter la surface classe en rserve biologique. Localement, certaines proprits prives forestires nont pas fait lobjet dexploitation ni de chasse depuis de nombreuses annes, et peuvent jouer galement un rle non statutaire de rserve bio-logique ou dlot de snescence, mme si leur pren-nit nest pas assure. De telles proprits peuvent at-teindre plusieurs centaines dhectares dans le massif de Rambouillet.

    Selon Jean Claude Gnot, cologue au parc naturel rgional des Vosges-du-Nord, il est important de conserver des forts anciennes mais aussi de ne plus grer certaines forts et de les laisser leur libre volu-tion naturelle. Pour lui, la gestion conservatoire suppo-se augmenter la biodiversit ne fait que favoriser des espces artificiellement maintenues dans des milieux ouverts, bien plus pauvres en diversit que les friches et les milieux boiss rsultant dune volution naturelle. En volution naturelle, les forts constituent des labo-ratoires vivants dadaptation au changement clima- tique. Enfin, certains massifs forestiers, sur coteaux comme en fond de valle, doivent tre absolument prservs: ils jouent un rle crucial de protection face au ruissellement et aux mouvements de terrains.

    Rduire la fragmentation forestire et crer des corridors

    La fragmentation demeure une problma-tique majeure bien que les marges dactions soient probablement plus limites quen ce qui concerne la gestion intra-forestire. Malgr une densit unique dinfrastruc-

    tures de transport, le niveau de fragmentation paysagre des forts franciliennes se situe dans la moyenne natio-nale (50 mtres linaires par hectare comme au niveau national). Cette fragmentation est aussi due la grande multiplicit des propritaires forestiers (les de la fort francilienne sont privs), sachant que cela peut aussi tre un atout puisque de nombreux propritaires nexploitent pas ces forts qui restent des zones de conservation. Dans certains contextes, lisolement de plusieurs mas-sifs par les grandes infrastructures ou lurbanisation ne permet pas les processus dimmigration ou dmigra-tion ncessaires au maintien des populations (notam-ment la faune, incapable de se dplacer). Presque toutes les forts situes dans un rayon de moins de 20km autour de Paris sont totalement enclaves. Ce constat doit conduire une meilleure prise en compte des trames forestires dans les documents durbanisme, mais aussi des oprations de reboisement en vue de rtablir des corridors fonctionnels. Dans certains cas, la cration de passages faune peut savrer une solution efficace (passages routiers ou ferroviaires), notamment pour les grands mammifres. Ces derniers doivent cependant tre de largeur suffisante pour tre fonctionnels.

    prserver les milieux associs

    La fort abrite une multitude dcosys-tmes, par exemple les clairires, landes et pelouses en zones sches ou humides, les prairies, ou encore les plans deau (mares et tangs) et les cours deau (ruisseaux, sources, suintements et principaux fosss). Ces milieux participent de la richesse biologique des forts et constituent des milieux ouverts qui abritent une faune et une flore varies. Ils sont galement nces-saires de nombreuses espces forestires pour leur reproduction, nourrissage, couvert. Ces milieux consti-tuent autant dhabitats pour les prdateurs naturels, favorisant ainsi la lutte biologique.

    Il faut laisser certaines parties de la fort la possibilit dvoluer naturellement, sans intervention humaine. M. Zucca Les champs darbres monospcifiques sont vulnrables. J. Birard

  • 30 climat : la nature source de solutions en le-de-france introduction 31

    en pRioRit : pRseRveR et RestauReR les zones humides lies aux milieux uRbains, agRicoles et foRestieRs

    1

    2 1. http://www.econostrum.info/Des-zones-humides-pour-amortir-les-effets-du-rechauffement_a16832.html#ixzz3iW8aQBZ92. Selon A. Schnitzler - http://www.snpn.com/IMG/pdf/ZHI_67.pdf

    en le-de-france, les zones humides reprsentent environ 2,8 % de la superficie rgionale (contre 5 % au niveau national), en incluant lensemble des boisements humides de fond de valle et mme les peupleraies (2,1 % sans ces dernires). les milieux humides ont perdu plus de 50 % de leur surface en un sicle, et une partie importante de ceux qui perdurent sont gnralement des plans deau dorigine artificielle, notamment issus de carrires. les zones humides figurent parmi les cosystmes les plus vulnrables vis--vis du changement climatique, la dgradation et la perte de ces milieux tant plus rapides que celles de tout autre cosystme (giec, 2007). pourtant, que ce soit en milieu urbain ou rural, elles assurent des fonctions essentielles et les services quelles rendent sont nombreux, dont les principaux sont la prvention des inondations, lpuration des eaux et le stockage de carbone.

    elles constituent galement un rservoir de biodiversit et sont le lieu de reproduction et de nidification de nombreuses espces animales. la prservation de la diversit des zones humides constitue un enjeu aussi important pour la biodiversit que pour le climat. par ailleurs, les protger est moins coteux que de construire des digues1. mais seules des zones humides dans un bon tat cologique peuvent jouer leur rle dponge naturelle face au changement climatique.

    les zones humides peuvent tre la fois des puits et des sources de carbone. en fonctionnement naturel, ce sont en gnral des puits : la vgtation forme de la tourbe et lensemble des deux est capable de stocker le carbone. en fonctionnement

    perturb, elles deviennent des sources de carbone. une tude mene dans le cadre du programme national de recherche sur les zones humides (pnrZh) a permis de montrer que les missions de carbone varient dune tourbire lautre : les tourbires alcalines sont plus productrices de co2 que les tapis de sphaignes. dans des conditions anarobies satures en eau et particulirement rductrices, il peut y avoir production de mthane. mais dans tous les cas, les tourbires pigent une partie non ngligeable du carbone de faon persistante (plusieurs millnaires) empchant ce dernier dentrer nouveau dans le cycle du carbone et donc de participer leffet de serre. les ripisylves permettent elles aussi de piger le carbone pendant des priodes relativement longues dans les parties prennes des arbres (troncs, branches). ce carbone ne peut alors pas retourner dans lcosystme avant plusieurs dizaines voire centaines dannes.

    pour lle-de-france, lenjeu principal est de prserver les zones humides existantes et les milieux inondables associs (prairies humides, forts alluviales) de toutes tailles (notamment les mares et mouillres forestires) et de limiter la gestion trop intensive de ces milieux : conversion en peupleraies, exploitation des forts alluviales, destruction des ligneux colonisateurs et trpage des tourbires, creusement des mares devenues non fonctionnelles, enlvement des bois morts2. par ailleurs, notons que les mesures en faveur de lagrocologie permettraient de rduire la fois la pollution et une trop forte sollicitation des zones humides vis--vis de la consommation deau.

    conclusion

    Il existe une grande diversit de solutions fondes sur la nature pour ladaptation comme pour lattnuation du changement climatique. Elles nont pas toutes le mme degr de maturit, ni la mme facilit de mise en uvre, mais chacune des solutions proposes dans ce docu-ment a t au moins une fois mise en uvre par les acteurs du territoire. Les solutions naturelles ont lavantage de contribuer de multiples bn-fices environnementaux et sociaux, tout en tant plus vertueuses pour les dpenses publiques que des solutions plus strictement issues du gnie civil et de lingnierie classique.Si les mesures utilisant la biodiversit prsentent des atouts indniables, le principal frein leur application rside dans les moyens de leur mise en uvre. Tout dabord, ces mesures demandent un changement des modes de pense des socits, ncessitant dabandonner des pratiques habituelles comme par exemple les systmes de production intensifs en milieu agricole, pour des systmes qui peuvent sembler moins avantageux court terme, bien quils le soient long terme. La diffusion de la connaissance scientifique toutes les parties prenantes est essentielle de mme que les occasions de dialogue ou de confrontation entre des personnes aux intrts pour chacun lgitimes mais nanmoins divergents.Ensuite, il faut tenir compte du fait que lingnierie cologique est une science nouvelle et en dveloppement dont nous ne matrisons pas tous les procds. Cette discipline demande notamment des avances scientifiques supplmentaires qui ncessitent du temps, alors que, dans le contexte du changement climatique, nous avons besoin de mesures rapides.

    Enfin, ces solutions gnrent la plupart du temps des conomies collectives, en rduisant les externalits, plutt que du profit individuel.

    En vue de la COP21, il est donc important de combiner des mesures dingnierie cologique avec des technologies traditionnelles durables comme lolien ou lutilisation de lnergie solaire et hydraulique, pour permettre une relle adaptation au changement climatique. Mais ce d-veloppement de techniques pour attnuer et sadapter aux changements globaux, particulirement en ciblant le carbone, doit viter lcueil de pro-jets sans concertation, limit un seul secteur, domaine ou type dacteur. Comme dans la nature, cest de la diversit que natra la richesse.

    Fort alluviale inonde, marais du Refuge Lesches. M. Zucca

  • 32 climat : la nature source de solutions en le-de-france

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