prix charles cros des lycÉens de la nouvelle chanson

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Chroniques lycéennes # 8 PRIX CHARLES CROS DES LYCÉENS DE LA NOUVELLE CHANSON FRANCOPHONE Rencontres, reportages, critiques

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Page 1: PRIX CHARLES CROS DES LYCÉENS DE LA NOUVELLE CHANSON

Chroniques lycéennes # 8PRIX CHARLES CROS DES LYCÉENS DE LA NOUVELLE CHANSON FRANCOPHONE

Rencontres, reportages, critiques

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U n Charles Cros des lycéens, comme ilexiste aussi un Goncourt des lycéens ?Et pourquoi pas, si c’est un moyen de

contribuer à donner aux adolescents lesclefs d’une des formes d’expression les plusspontanées, les plus vitales, et les plusinventives : la chanson.Fallait-il que l’Académie Charles Cros s’enmêle ? Tordons le cou à une idée fausse.Académie ne veut pas nécessairement direacadémique. L’Akadêmia des Grecs, d’oùvient le mot, était le lieu où l’on se rencon-trait, où l’on discutait, où l’on échangeait,et c’est bien ainsi que nous l’entendons.Un Prix Charles Cros n’aurait guère desens s’il s’agissait simplement d’accrocherà un titre de chanson, à un album, à un ar-tiste, une médaille (et même pas en choco-lat). L’objet, c’est d’inciter les adolescentsà écouter d’une oreille active, à discerner,à exprimer leur réflexion, leurs émotionssur les musiques et les paroles qu’elles por-tent. C’est de les aider à découvrir les voiesde la création. Beau programme, initié etmené par le CRDP de Poitou-Charentes etle CDDP de Charente-Maritime, avec sonaspect pédagogique : entraîner à argu-menter, à prendre la parole. L’AcadémieCharles Cros a voulu apporter sa contri-bution, avec son réseau de partenaires,

CHRONIQUES

II Les Inrockuptibles / Chroniques lycéennes 2009

Il y a trente-trois ans, une chaîne publique de té-lévision inventait L’Ecole des fans : si l’émissiona disparu depuis belle lurette, c’est pour conti-nuer à entretenir le lien entre musique et sco-larité que s’associent chaque année l’AcadémieCharles Cros, le CDDP de Charente-Maritime etLes Inrockuptibles, et mettent en place les Chro-niques lycéennes. Ainsi, aidés par des ensei-gnants motivés, des centaines de lycéens ontcette année encore pu échanger avec des ar-tistes, préparer des interviews, observer des ré-pétitions, réviser leurs classiques et s’essayer àl’exercice de la chronique. De Mouss & Hakim àMoran, des auteurs-compositeurs-interprètessont venus partager leur expérience, répondre

aux interrogations des élèves et dresser aveceux un bilan de l’industrie du disque contempo-raine et de ses bouleversements. L’occasion, unefois encore, de constater l’inventivité et la cu-riosité des lycéens, les plus introvertis se révé-lant souvent les plus audacieux, les plus sagestrouvant dans les Chroniques lycéennes la pos-sibilité de s’affranchir des règles de l’écritureclassique et traditionnelle – la preuve avec lagrosse cinquantaine de chroniques sélection-nées et publiées dans ce supplément. Un grandmerci, donc, à tous les participants – artistes,enseignants, lycéens –, pour avoir permis ceséchanges culturels et replacé la musique aucœur de l’école. Les Inrockuptibles

CHRONIQUES LYCÉENNESLe pilotage des Chroniques lycéennes “Prix CharlesCros des lycéens de la nouvelle chansonfrancophone” est assuré par le CRDP de Poitou-Charentes/CDDP de Charente-Maritime etl'Académie Charles Cros en partenariat avec leCNDP, le Rectorat de Poitiers, la DRAC Poitou-Charentes, Les Inrockuptibles et les Francofolies.

CONTACT Céline Langevin, 05.46.00.34.60,[email protected]

RÉALISATION, SUIVI DES DROITS, FINANCEMENTDE LA COMPILATION ET COLLABORATION ÀL’ORGANISATION DES RENCONTRES Académie Charles Cros : Alain Fantapié Contact : [email protected] Nicolas Bernardwww.charlescros.org

MERCI à ceux, artistes, enseignants et lycéens qui ont participé à cette opération.

MERCI à Patrick Delaunay, Thierry Créteur,André Hisse (La Bouche d’Air), Emilie Yakich,

Françoise Rocklin, Stephan Rooy, FlorenceGuignard-Perron, Samuel Baluret, LudivineCorbet, Estelle Faure pour leur précieusecollaboration.

POUR LES INROCKUPTIBLES CHEF DE PROJET Laurent Girardot,Olivier Borderie • COORDINATION ÉDITORIALEJohanna Seban • RÉDACTION Johanna Seban,Alison Novic • DIRECTEUR ADJOINT DERÉDACTION Jean-Daniel Beauvallet•SECRÉTARIAT DE RÉDACTION François Rousseau,Céline Benne • ICONOGRAPHIE Naïri Sarkis •

DIRECTION ARTISTIQUE Pascal Arvieu •MAQUETTE Laurence Joly • FABRICATION Chefde fabrication Virgile Dalier • Impression, gravure,façonnage Roto Aisne SN •

LES INROCKUPTIBLES est édité par Les EditionsIndépendantes, société anonyme au capital de 159 023,61 €, 24, rue Saint-Sabin, 75011 Paris.RCS Paris B 428 787 188. Administrateurs-fondateurs Christian Fevret, Arnaud Deverre.© Les Inrockuptibles 2009 – Tous droits dereproduction réservés. Supplément au n°704 du26 mai 2009.Ne peut être vendu séparément.

Retrouvez les chroniques sélectionnées sur le site desChroniques lycéennes : www.chroniqueslyceennes.fr/

L'opération Chroniques lycéennes # 8 est soutenue par leSCEREN/CNDP (www.sceren.fr).Partenariat et soutien financier de l'Académie Charles Cros(www.charlescros.org)

salles de programmation et festivals dechanson française, avec aussi le concoursdes Inrockuptibles, présents depuis la pre-mière édition. Faire découvrir aux jeunesautre chose que les formes anesthésiantesde la chanson formatée de consommationindustrielle. Aménager des rencontres avecceux qui portent la chanson d’aujourd’hui,dans toute la variété des expressions cul-turelles, y compris celles qui viennent desquatre coins de la francophonie. Il ne fau-dra pas s’arrêter là et ouvrir désormaisplus largement le programme aux jeunespar delà les frontières.Alain Fantapié,Président de l’Académie Charles Cros

Huitième édition des Chroniqueslycéennes et huit ans de rencontres.Rencontre des lycéens avec lestextes, avec les musiques, avec leschansons, rencontre des jeunes

artistes de la chanson francophone avec leurpublic, rencontre des jeunes avec le talent,l’exigence, le travail. Rencontre des élèvesavec une ambition, celle de les conduire àtravers la création contemporaine et ladécouverte d’univers musicaux inventifs etnouveaux, vers l’écriture de chroniques auxrègles exigeantes.

Cette année encore ils sont nombreux às’être mobilisés pour relever le défi, ac-compagnés par des enseignants enthou-siastes et passionnés. Ils sont nombreux às’essayer à ce genre journalistique parti-culier et à faire montre de qualité et decréativité.Huit ans de chroniques et huit années departenariat au service des classes. Au côtédu CRDP de Poitou-Charentes et du CDDPde Charente-Maritime, l’investissement del’Académie Charles Cros permet que le tra-vail s’effectue tout au long de l’année dansles établissements autour de belles aven-tures humaines avec des rencontres d’ar-tistes. Les Inrockuptibles rendent comptedans ce supplément des aventures et destravaux pédagogiques menés sur l’annéescolaire. A tous un grand merci !Michel Reverchon-Billot,Directeur du CRDP de Poitou-Charentes

Chroniques lycéennes # 8

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Devant plus d’une centaine de lycéens,dans un établissement nantais,les artistes TOM POISSON et MORAN

sont venus présenter leurs morceauxet répondre aux questions des élèves.Reportage Johanna Seban

HIGH SCHOOLMUSICALMUSICAL

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IV Les Inrockuptibles / Chroniques lycéennes 2009

Il y a beaucoup d’élèves dans le foyerdu lycée La Colinière, ce mardi matin24 mars. La dernière fois qu’on s’étaitrendus à Nantes, c’était il y a quel-ques années, en centre-ville, au lycéeGuist’hau : cette fois, c’est à quelqueskilomètres de la gare, dans un bâtiment

baptisé “La Maison des lycéens”, au milieud’un parc, que les Chroniques lycéennes ontélu domicile. Recevant par ailleurs une quinzaine d’élè-ves de l’Institut d’éducation motrice LaGrillonnais, le lycée La Colinière accueillece matin deux artistes venus de part etd’autre de l’océan Atlantique : le FrançaisTom Poisson et le Québécois Moran – cedernier figure parmi les artistes présentssur la compilation agencée par l’AcadémieCharles Cros. Drôle d’horaire pour unconcert : il est certes dix heures, mais dumatin, et c’est quelques minutes après lasonnerie de la première pause que les ar-tistes empoignent leurs guitares, devantune centaine d’élèves de seconde curieuxet leurs professeurs de français attentifs. C’est le Québécois Moran qui ouvre le bal,accompagné d’un musicien, déballant unesérie de chansons à texte un tantinet déca-lées, plus proches de l’univers d’Arthur Hque de celui des plus populaires Seyfu ouRohff : si la plupart des élèves écoutent at-tentivement, une poignée d’entre eux sem-blent moins sensibles aux mots de l’artisteet l’on a de temps en temps la drôle d’im-pression d’assister à ce que pourrait don-ner une représentation de Pavarotti devantl’équipe de France de rugby.

Le set, entièrement acoustique et sansmicro, donne l’occasion à Moran de dévoi-ler sa prose (“Tu es à la fois la blessure et lepansement”). Puis arrive Tom Poisson dontl’univers (et l’accent français !) semblentdavantage toucher les élèves. “Je m’appelleTom Poisson, je suis ce qu’on appelle un artisteen développement… Qui perd ses cheveux,mais en développement.” S’inscrivant dansune tradition de chanson française qui re-lierait les textes de Brassens à ceux de Re-nan Luce, les morceaux de Tom Poisson sé-duisent rapidement les lycéens (même siquelques gentils rebelles continuent de secacher de leurs professeurs pour écouterfièrement leurs walkman). De La Com-plainte de l’homme moderne à Mon ami sansvoix, le chanteur dévoile Riche à millions,l’album qu’il a publié l’an passé.Après quelques chansons arrive l’heure del’interview : un peu timides, les élèves pei-

nent au départ à poser les questions qu’ilsont pourtant préparées avec leurs profes-seurs – la gêne des copains qui regardent yest sans doute pour beaucoup. Deux outrois minutes d’embarras etles langues se délient enfin.Pourquoi Tom Poisson s’ap-pelle-t-il ainsi ? “J’étais fas-ciné par la bestiole, par sonmode de déplacement insai-sissable.” Pourquoi n’a-t-ilpas emporté avec lui le cas-que rose qu’il arbore fière-ment sur la pochette de son album ? “Je leprends sur scène généralement. Mon disqueparle beaucoup de départ, de voyages : on re-trouvait cette symbolique dans le casque…”Comment est-il passé du marketing à lachanson ? “On sent que le bac approche et quevous vous posez des questions stratégiques survotre orientation !”Avec Moran, les élèves abordent le sujet dela crise et la difficulté de réussir dans le mi-lieu artistique aujourd’hui. “Je crois que c’est

de moins en moins compliqué de faire des dis-ques, et de plus en plus compliqué de les ven-dre. Il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus.”Du côté de Tom Poisson, les difficultés ré-

sident dans la rapiditéqu’exigent les labels oustructures de la part desartistes : “On ne laisse pasforcément le temps aux artis-tes de mûrir, maintenant ilfaut que ce soit fort et origi-nal tout de suite. Du coup, oncrée le risque de l’éphémère.”

Si les Chroniques lycéennes permettent desrencontres entre élèves et artistes depuishuit ans, l’édition 2009 donne surtout l’oc-casion de faire le point sur l’industrie dudisque, ses récents chamboulements, sesavancées, et de confronter l’opinion des mu-siciens avec celle de la jeune génération.Que pensent Moran et Tom Poisson desémissions comme Nouvelle Star, s’interro-gent ainsi les élèves ? “Pour nous, ça reste desémissions de télévision avant tout, ou des émis-

LE VÉRITABLE DÉBAT,ACTUALITÉ

OBLIGE, PORTERA SUR LA DÉMATÉRIALISATION DE LA MUSIQUE ET SUR LETÉLÉCHARGEMENT ILLÉGAL.

Tom Poisson, comme unpoisson dans l’eau devantles lycéens de La Colinière.

REPORTAGE POISSON ET MORAN À NANTES REPORTAGE POISSON ET MORAN À NANTES

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MORAN CHRONIQUES

Chroniques lycéennes 2009 / Les Inrockuptibles V

MORANDÉSORDRES

(Consult’Art)

Clara RobertNantesLycée Guist’hau

Désordres. Des mots quiflottent. Des notesqui coulent. Mélodie, le long du fleuve rocailleux.Poésie, collée aux bergesde la gorge suave.Désordre. Se mordre.Moran nous embarque sur sa guitare, nous déverse ses flots de mots.Il nous raconte l’amour, à la Thomas Fersen. Désordre.“Cette bouche encore pleine de jolies conneries” chante lechaos d’une tête amoureuse etensorcelle de sa puissancelangoureuse. De la France auQuébec, la mer est large mais Moran nage. Chanson

sions de producteurs qui essaient de créer lesuccès vite… Ceci dit, ça change, il sembleraitqu’on soit davantage en recherche de person-nalités aujourd’hui, un type comme JulienDoré en est la preuve. Après, on reste souventdavantage touchés par la carrière des au-teurs-compositeurs-interprètes, même s’il y atoujours de formidables contre-exemples : Bashung, Montand…”Le véritable débat, actualité oblige, porterasur la dématérialisation de la musique(“Nous, le support on s’en moque, ce qui comptec’est les chansons”, expliquera un élève) et,surtout, sur le téléchargement illégal surinternet. Résumant parfaitement la situa-tion, un lycéen osera “Monsieur, je comprendsque vous vouliez qu’on paye votre musique.Mais sur un iPod il y a 2000 chansons. Si ondoit payer un euro pour chaque morceau, ànotre âge, on s’en sort pas…” La salle souritet, si la reprise des cours doit bientôt inter-rompre les discussions, pour les artistescomme pour les élèves, le débat reste plusque jamais d’actualité. I

francophone, MonsieurMontréal maniela langue de l’hexagone. Longtemps auteur pour autreschanteurs, il ose enfin.Maturité. Il s’impose, auteur,compositeur et interprète, il rafle les prix de son pays etd’ici. Guitare en main, voix chaude et rien... de plus. Il nous invite dans son universacoustique. Intimité délivrée, son diaphragme s’ouvre, ses cordes vibrent et son cœur parle. Introspection.Désordres. Désirs. Des maux.Des mots. D’émotions.

Margaux RivierreNantesLycée Guist’hau

Moran, c’est avant tout une voixchaude et suave accompagnéepar un duo de guitares. C’estaussi un homme persévérantet méritant qui s’est faitune place dans le mondeimpitoyable de la musique, en s’enfermant dans son sous-sol avec l’ambition d’apprendreà jouer de la guitare pourpouvoir chanter ses proprestextes. Ses chansons trèspersonnelles nous emportentdans un univers un peu morose. Son style acoustique, qui apaise l’atmosphère, et ses paroles pleines d’évidencele rapprochent du pop-folk de Saez et de Charlie Winston.Dans la chanson Désordres,Moran nous livre, dès le titre,ses sentiments troublés et décrit de façon osée le désiramoureux qu’il fait passerpour sien. Lui qui a “du sangdans les doigts comme il n’en a jamais eu” à la vue de son élue,se place sous le signe dela confidence. Doté d’une voixde chambre à coucher etd’un charme envoûtant, Moran nous dévoile unesensibilité de chat, pattes develours et griffes à la fois.

Marine PilardRennesLycée Victor et Hélène Basch

Il y a trois ans, Moran, parolierpour d’autres artistes depuis plusieurs années, s’isole dans sa cave avec pourambition d’apprendre à jouerde la guitare dans le but de chanter ses propres textes.Naît alors l’album Tabac,duquel est extrait le titreDésordres. La chansoncommence par une mélodieminimaliste jouée par une

LE MEILLEURDES AUTRES

DAZIBAOMORAN DÉSORDRES

“Entre guitare et chant,

cette composition emmène

l’auditeur dans un univers

de nostalgie. La voix et

l’instrument, seuls à se

mettre à nu, se complètent,

se mélangent.” Célia Meyer,

Isle-sur-la-Sorgue ///

“Avec ses paroles

enchantantes retraçant la

vie d’un couple menacé par

la monotonie du quotidien,

Moran nous envoûte à son

tour dans un long silence,

un silence dévastateur où

l’amour prend une autre

couleur. Tout pour séduire,

le charme, le timbre,

l’assurance. Moran a tout

pour lui. Belle gueule, bonne

bête.” Caroline Le Puth, Nantes

guitare hispanisante. La voixchaude et veloutée de Moranse pose alors sur cette berceuse,et le texte, brut et poétique nous transporte vers un universdur et sombre où amour, désir et sensualité s’assimilentà des termes proches dela souffrance, de la mort et du désordre. Le texte estenivrant, les mots semblent se mêler, se nouer entre eux.Moran nous envoûte et nous transporte dansun monde malsain et presquecauchemardesque où l’amour etle temps qui passe ne fontpas bon ménage. Le quotidienest donc un air où se bercentet s’endorment les amants, où s’envolent les tous premierssentiments. Si l’amour a rejointle “bal des ordinaires”, ce n’estpas le cas de Moran qui, avec son timbre éraillé et sonatmosphère à la Arthur H, est un artiste à la douceurbrûlante, un “rauque” tranchantmais différent des mélodiessucrées qui composent le paysage doux et sans relief de la chanson française.

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ALEXANDRE KINN AUDE (EMMÈNE-MOI)

(AZ/Universal)

Romain Avouac, AurélienPilato, Samy KhellasPessacLycée Pape-Clément

Paroles recherchées et rythmeentraînant, cette recette sembleréussir à Alexandre Kinn quinous transmet à travers son Audetoute la richesse de son universmusical vaste et varié. Cet artiste surprenant opèreun habile mélange de sonoritésblues, soul et folk dignedes plus grands, et le résultat est absolument exquis. Commentalors ne pas tomber sous le charme de l’univers intriguantd’Alexandre Kinn, dont la voixenvoûtante marie nonchalance et charisme avec une habiletésans pareil ? Cette ôde à la vietranspire la joie de vivre, l’amouret la sincérité, pour notre plusgrand plaisir, et ça, notre ami l’a bien compris. Liés intimementpar un fil conducteur, Auden’est autre que la fille du meilleurami d’Alexandre, les coupletss’enchaînent avec fluidité,accompagnés de douces guitaresqui viennent nous caresser les

tympans, pendant que quelquesvocalises du plus bel effetnous envoûtent totalement. C’est un fait, ce chanteura le don de séduire, les fans enredemandent, nous enredemandons, et nous attendonsimpatiemment que d’autresde ses œuvres parviennent entrenos mains, ou plutôt à nosoreilles. Alexandre Kinn, affaireclassée, artiste à suivre...

Pauline Vasseur Vaux-le-PénilLycée Simone-Signoret

Mêlant le folk et le blues,Alexandre Kinn nous emmèneavec Aude dans un tourbillon de fraîcheur et de légèreté.De sa voix claire et ensoleillée,sautillant sur un rythmeentraînant, il partage avec nousson ode à la vie et nous inviteà découvrir un assortimentde petits bonheurs, tels quela liberté et l’amour, ou encore“passer du temps devant l’océan”,ça sent l’été et le ciel bleu… On s’y croirait presque ! On ressent une sensibilité à fleurde peau, les émotions quidéfilent… Et cette mélodie,dansante et agréable, n’a pas finide séduire nos oreilles ! Sans oublier le texte, touchant,empreint de poésie… Aude est

une invitation au voyage et à l’évasion, aubonheur, tout simplement… On est commetransportés, dès les premières secondes,dans l’univers hors du commun créé par Alexandre Kinn, une bulle, un monde àpart, un rêve duquel on ressort positif et serein, en fredonnant cet air que l’on nepeut plus oublier. Tirée de l’album Dans la tête d’un homme,Aude est un véritable petit rayon de soleil.Pleine d’espoir et de douceur, cette chansonnous fait sourire, danser, et rend les cœurslégers, histoire de s’évader, de vivre un rêveéveillé le temps d’une chanson … “Emmène-moi loin, loin, loin !”

Manon CannoToulouseLycée des Arènes

Dès les premières notes, on croirait entendrela version française de Jack Johnson, et on est aussitôt sous le charme. Une voixencore un brin adolescente, un texte qui nouslivre les émois d’un futur papa, le tout surune musique mêlant le blues et le groove à la chanson française. Une mélodie douce,aérée, un air de violoncelle envoûtant etrythmé par la contrebasse, nous voilàsublimés. L’artiste chante le bonheur, toutsimplement, avec une poésie à la portée detous où fraîcheur et émotion sont au rendez-vous. On y retrouve tout ce qui fait la viebelle : la maternité, l’amour, la liberté, lanature, le voyage... Au passage, on est séduitpar un joli jeu de mots, “Aude-ode”, qui estl’objet du refrain. Refrain qui, tout comme lesparoles, nous “emmène loin” par sa mélodie

langoureuse que l’on nemanquera pas de fredonner.Cette chanson est extraite dupremier album d’Alexandre Kinn,Dans la tête d’un homme, sorti en2008. Belle réussite en véritéd’un rescapé de l’égyptologie qui,au détour d’un voyage à laNouvelle-Orléans, est devenuamoureux du blues et s’est lancédans l’aventure. Son cœur seretrouve dans ses paroles et lamusicalité de ses chansons.Charmant et désarmant,faussement naïf, Alexandre Kinnlance sa carrière de bellemanière. On en redemande...

Corentin JolyHénin-BeaumontLycée technologique Louis-Pasteur

Alexandre Kinn marie des influences diverses quinourrissent sa musique et la liste laisse songeur quant à son prestige : John Butler trio, Dave Matthews, G. Love &Special Sauce, Jack Johnson et donc... Ben Harper sansoublier Bob Dylan... Pas simple de passer derrière de tels noms,mais Alexandre Kinn réussit à renouveler le traitement d’un thème pourtant maintes fois chanté : le bonheur d’une naissance, l’ode à Audepour tout dire. Il réussit à le fairesans niaiserie rose ; le bonheur a plusieurs sources mais il n’estjamais acquis et il est fragile.On se laisse aller très loin et avec bonheur dans la musiqued’Alexandre Kinn : même si elle est parfois un peu répétitive,ce style pop-rock lui va très bien.C’est Alexandre lui même qui joue de la guitare, une Gibson énorme qui résonne trèsbien (voir le clip réalisé parDavid Vallet). Sa technique estsûre et il mène le bal. Le groupequi l’accompagne est stable et sa cohésion réelle, cela évite le phénomène “Alexandre et son orchestre”. On peut encoreporter à son crédit un vraidiscours de guitaristeacoustique, de vrais “exploitsavec un bout de bois”, sansjamais tomber dans une virtuositéidiote. On envie Aude d’avoirdéjà une telle ode dédiée, les “mots bleus” sont mêmefinalement soulignésd’un trait de violoncelle avantqu’Alexandre relance et termine très intelligemmentsa chanson sans fade outcache-misère, une basse ronde et un joli coup de cymbale venantconclure. Très intéressant.A suivre de près.

“…Une mélodie qui fait rêver et un texte peu complexe qui nous fait du bien aux

oreilles, écouter sa chanson est comme faire une séance de kinésithérapie.” Stanislas

Ricou-Nicot, La Rochelle ///“Il raconte ses chansons à la façon de diseurs de bonne

aventure qui reflètent en réalité sa vie.” Alexandre Margaine, Vesoul

LE MEILLEURDES AUTRES

ALEXANDRE KINN AUDE (EMMÈNE-MOI)

CHRONIQUES

VI Les Inrockuptibles / Chroniques lycéennes 2009

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RACINELE ROI EST SOURD

(EMI)

Séréna BrasToulouseLycée des Arènes

Une guitare, une voix et Paris ontsuffit à révéler un vrai don, celui de Jean Racine. Il ne s’agitpas ici du célèbre dramaturgefrançais mais bien d’un auteur-compositeur-interprète d’originesénégalaise. Après quelquessessions dans la rue et quelquesconcerts dans des cafésparisiens, sa carrière démarre...Voilà un premier opus, Ivre duson. Notre chanteur à la voixdoucement éraillée nous offre un univers métissé, frais et coloré, saupoudré d’unepincée de funk, d’un bouchon de pop, d’une cuillère à soupe de reggae et d’une coupe de folk,le tout mixé en acoustique. Le roi est sourd nous transportetrois minutes et dix-huitsecondes durant, pour un voyageau pays de la révolte du peuple,de la grogne de la foule, le toutsur un fond de guitares, detrompettes et de percussions. Le rythme nous entraîne, nous prend loin de notre petitquotidien, pour nous plongerdans notre fort intérieur, celui du révolutionnaire, durévolté. Les paroles saisissantessont simples et justes, sansartifices ni détours. Et sa voix...Cette voix qui ne laisse pasl’oreille indifférente... Parce queJean Racine a un organe un peuparticulier, un peu androgyne,un peu chevrotant. Le genrede voix auquel on adhèrespontanément, que l’on gardedans un coin de sa tête, que l’on fredonne sans y penser. Une voix qu’on pourrait entendreinlassablement, encore et encore...

François-René PiotToulouseLycée des Arènes

C’est sous le signe de la musiqueafricaine que nous voyons arrivercet album de Jean Racine,intitulé Ivre du son. Musicien hors du commun, chanteur doué,compositeur de talent, il faithonneur à ses origines.Né au Sénégal, il écoute dureggae et du pop-rock dès l’âgede 10 ans. Des sons “made inMarley and Beatles” viennentdès lors chatouiller ses tympans.

Mais c’est ici, en France, que naîtvéritablement sa carrière d’artiste : arrivé à 21 ans, il est vite repéré par le labelRoy Music qui lui permettra de produireson premier album. C’est une réussiteincontestable et incontestée. Nos modestespavillons ont vite apprécié les sonoritésacoustiques, légèrement pop et folk, et surtout le clou de la production : Le roi est sourd. Cette chanson à butessentiellement politique (bien vu parles temps qui courent...), nous parle des abuset du ras-le-bol général. Les paroles se marient parfaitement avec le rythme en contretemps, tranquille, même si derrièrese cache une “grosse tempête”. L’intimitéde Racine nous arrive par une métaphorebien réelle : Etat = roi. Le chanteur joue aussi sur l’interaction avec des questionset des figures de réthorique qu’il adresseà tout ceux qui l’écoutent. Dès lors, “la pierres’envolera, le feu scintillera...” Dans nosneurones, trop souvent fatigués par la viede tous les jours, se produit une réactionparticulière : des baobabs, des ritesmillénaires, la paix des mangroves, le calme des caïmans... C’est le Sénégal qui vient à nous et qui nous réveille... Le mélange étonnant de cette penséeafricaine et de l’actualité mondialeest doux mais détonnant...

LE MEILLEURDES AUTRES

BARBARA CARLOTTI POUR LA NATURE

CHRONIQUES

BARBARA CARLOTTIPOUR LA NATURE

(Auvidis/Beggars)

Tatiana Maarova BordeauxLycée Camille-Jullian

Si on vous proposait de profiterd’une soirée passée avec vosamis à la belle étoile, accepteriez-vous ? Si oui, on vient de vousreconnaître. En bref, on connaîtla chanson qui peut saisir votrecœur. Elle s’appelle toutsimplement Pour la nature.Cette chanson est interprétéepar la jeune artiste talentueuseBarbara Carlotti. La chanson est extraite de son album le plus récent : L’Idéal (2008). Cet ensemble d’onze chansonsoriginales composées parBarbara elle-même est prêt à vous séduire par son élégance,sa mélancolie et sa joie. Il y en a pour tous les goûts !Pour la nature est basée sur lasimplicité de la mélodie du chantet de l’accompagnement. La voix de Barbara (une jeunefemme blonde d’apparencefragile) est plus profonde qu’onl’aurait crû. Elle est suave et grave en même temps.Barbara est accompagnée par le sifflement doux etl’applaudissement rythmique. Flûte et guitare acoustique sont les seuls instrumentsemployés. Ensemble, tout celadistille l’atmosphère joyeuse et amicale qu’on peut reconnaîtresi l’on a campé avec des amis

Chroniques lycéennes 2009 / Les Inrockuptibles VII

au bord de la mer. La chansonnous invite à penser qu’il fautfaire quelque chose pour lanature mais aussi à danser (“Il faut danser dans l’eau qui dort”)et à profiter du moment où noussommes si proches de la natureet de nos amis. Imaginez toutsimplement les gens dansant etchantant, pendant la nuit, autourdu feu du camp. Un peu régressif,n’est-ce pas ? Mais oui, c’est leretour à la nature (pas tout à faitmot à mot). Juste une aventure…C’est une chanson capable de satisfaire les désirs de votreâme aventureuse. Les autresmorceaux de L’Idéal font de même parce que Barbaraconnaît vos goûts musicaux et sait contenter ceux qui savent reconnaître leur idéal.

“Ce texte reflète ce que

personne ne veut croire, ce

que personne ne veut voir : il

nous met face à une situation

certes dure, mais réelle. Une

vie meurtrie par les hommes,

qui ne pensent qu’à leurs

énormes bénéfices.”

Nicolas Bilyk, Vaux-le-Pénil

DAZIBAO

“Le roi Jean Racine découvre Exodus de

Bob Marley et c’est la révélation : il vous

prête ses oreilles pour écouter sa voix de

messie, de prophète avec Le roi est sourd.

Sandrine Massieux, Mortain /// Le roi est

sourd, un élixir de joie et d’espoir. Pour

réussir un tel cocktail, il vous faut : des

racines sénégalaises, un joyeux concours

de circonstances, un timbre de voix subtil,

soufflé et rare, et bien sûr une bonne

dose de talent.” Andréa Fontanille, Toulouse

LE MEILLEURDES AUTRES

DAZIBAORACINE LE ROI EST SOURD

Véro

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uels souvenirs gardez-vous devos années passées au lycée ?Que des bons souvenirs, desgrands moments, on était tousles trois (Julien le chanteur, Jil lebassiste et Luc le batteur – ndlr)au lycée ensemble. On faisait unpeu les voyous mais juste pours’amuser.

Quelles musiques écoutiez-vous alors ?Beaucoup de hip hop, beaucoup de SnoopDogg. Un peu de reggae aussi. Julien étaitplus vieux, plus grunge. C’était l’époqueKurt Cobain et Nirvana. Il y avait Sound-garden aussi et toute la scène de Seattle. Vous figurez sur la compilation de l’Aca-démie Charles Cros qui a été soumise auxélèves participant aux Chroniques ly-céennes. Quel rapport entretenez-vousavec les jeunes ?On est convaincus de l’importance ducontact avec les jeunes. Il y en a beaucoupdans notre public. Après nos concerts, on asouvent rencontré des lycéens qui font de lamusique et qui venaient demander desconseils. On discute, d’ailleurs c’est avec eux

qu’on préfère parler. On leurraconte notre parcours, com-ment on a évolué, commenton a trouvé notre chemin.C’est important pour unjeune, surtout s’il fait des étu-des et qu’il ne sait pas tropquelle voie choisir. C’est im-portant de pouvoir les confor-ter dans leur goût pour la mu-

sique, ne pas les décourager. D’autant que lesjeunes sont dynamiques, c’est eux qui peu-vent lancer une salle pendant un concert. Lesjeunes, c’est les braises, nous on ne fait quesouffler dessus comme disait Léo Ferré.

ENTRETIEN LE GROUPE BENSÉ

VIII Les Inrockuptibles / Chroniques lycéennes 2009

“ON DEVRAIT INVENTER DES NOUVELD’ÉCOUTER DE LA MUSIQUE”

LELe groupe BENSÉ, emmenépar son leader Julien,raconte ses années lycée,à Nice, et l’importance deséchanges avec les jeunes.

EN EXPLIQUANT LESCONSÉQUENCES DU

TÉLÉCHARGEMENT ILLÉGAL,ON PEUT FAIRE CHANGERLES CHOSES, PLUTÔTQUE D’IMPOSER UNE LOISANS DIALOGUER.”

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Julien Bensé

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BENSÉAU GRAND JAMAIS

(Naïve)

Marion RaffierToulouseLycée des Arènes

Un air de violon, quelquesaccords de guitare et des riffs à l’harmonica, ça donne Au grand jamais, assorti de la voix douce mais engagée de Bensé. Ici, il nous faitvoyager, tout comme lui avoyagé des petits bars de Niceaux scènes de Paris. Avec Au grand jamais, Bensé signe la déclaration d’un jeunehomme pour ses réellespassions qu’il ne cèdera en rienaux passions amoureuses. Ce qui sonne un peu comme un défi, avec des questionscomme “Regardez moi ! Est-ceque je tremble ?” ; mais secachent derrière cela lesinterrogations d’un jeunehomme sur la vie et l’avenir, qui, malgré les passions, reste toujours incertain.Influencé par les plus grandscomme Brel, Brassens ouencore Neil Young, son stylemusical est à classer entreBénabar et Renan Luce, des jeunes hommes qui, toutcomme lui, avec humour, raison ou passion, composentsur l’essence même de la vie. Ce premier titre, de son toutpremier album au son pop-folkest comme un promesse faiteà la vie pour réussir et c’esttout ce qu’on lui souhaite.

Clément LemaigreNantesLycée Guist’hau

Une chanson a jamais dans latête. Au jamais, au jamais, au grand jamais, on n’oublieracette chanson débordante de bonheur, cette chanson quiaime la vie. Une voix un peucassée mais prenante, une musique fraîche et gaie. Cet ensemble mêle unharmonica et deux guitaresdont l’une est jouée par Bensé,ainsi que, bien sûr, la batteriepar Luc. L’alternance entre le chant accompagnée d’unesimple guitare et une partieinstrumentale plus douce fontque la chanson est prenante,que l’on aimerait goûter la vieavec cette mélodie dans la tête.Les paroles quant à elles sontà la fois des questions sur

la vie et sur l’homme : suis-jeparfois fragile ? Des questionsqui demandent des réponsesque chaque individu doittrouver en soi : ai-je vraimentle choix ? Des questions surla vie, sur la joie et le bonheur,retranscrites dans une mêmechanson écrite et interprétéepar Bensé, qui on l’espère,gardera dans ses bras la placede sa guitare. Cette chanson ne tremble pas, elle est claire etau grand jamais on ne voudraitoublier sa mélodie.

Marlène GoësAmiensLycée Edouard Gand

Il ne faut jamais dire jamais.Bensé, muni de sa guitare, nous fait voyager dans uneatmosphère magique. Il nousentraîne dans un rythme un peufolk, un riff d’harmonica etun texte à la première personne.Au grand jamais sonne commeune déclaration d’intentiond’un jeune homme peu enclinà sacrifier sa passion dela musique pour une relationamoureuse. Sa guitare est-t-elleplus importante qu’uneliaison ? Fera-t-il un aussigrand succès sans l’amourd’une femme ? Réussira-t-il à vivre sa passion jusqu’aubout ? De multiples questionslui trottent dans la tête... Le doute s’installe en lui.Aujourd’hui, il nous faitparcourir son univers et sonavenir à travers sa chanson.Julien Bensé nous a séduit avecsa voix et le son de sa guitareenivrante. Cette musique asu nous faire frissoner. Difficile,en fin de compte, de ne paséprouver de la sympathie pour ce jeune homme doux et tranquille, à l’écriture

BENSÉ CHRONIQUES CHRONIQUES

Chroniques lycéennes 2009 / Les Inrockuptibles IX

“Au premier abord, cet

artiste peut paraître banal,

sans grand intérêt comparé

aux autres du même genre,

mais au fil des écoutes,

on se rend compte

de la richesse de son texte

et de sa musique.” Etienne

Pelletrau, Vaux-le-Pénil ///

“Au grand jamais, histoire

d’un homme qui poursuivra

ses passions, peu importe

où elles le mèneront. “Non

jamais, plutôt crever que

laisser la vie me descendre”,

histoire d’un homme qui

n’a pas peur de la vie.

Au grand jamais, mais pour

toujours !” Gaëlle Guillois,

Toulouse ///“L’ancien

troubadour nous dévoile

tout son talent de poète

dans sa chanson écrite

d’une plume fragile

et nous éclabousse

d’une vague de mélodies

fraîches et rythmées.”

Jonathan Goure, Orvault

EL LES MANIÈRES Lorsque vous étiez lycéens, quellesétaient vos inspirations pour vos textes ?Il y en a eu plein, ça dépendait de nos pro-jets. On a fait du hip hop, du funk, du rock,du folk. On a été le BL2C, le Bats-les-Couil-les Crew, c’était du hip hop. Il y a eu Rabi-ton, du reggae un peu latino. Plus tard, ona été The Dudes aussi, on faisait pas mal dereprises de rock dans les bars de Nice, touten continuant à écrire nos propres textesà côté. Mais le problème à Nice, c’est queles gens n’étaient pas très ouverts sur lescompositions personnelles, c’est pour cetteraison qu’on est venus à Paris. On jouaitaux fêtes de la musique et dans les bars de-vant nos amis. Comment a évolué votre carrière à par-tir du lycée ?On a commencé en faisant des concertsdans les bars. Après, on a fait la manche, lemétro, des petites scènes, des scènes unpeu moins petites. En 2004, on a signé uncontrat d’édition avec Universal. En 2007,après un concert, Naïve nous a faits signer.Notre premier album, intitulé Album, estsorti l’année dernière.Un des thèmes récurrents lors des ren-contres entre artistes et lycéens cetteannée a été le téléchargement. Compre-nez-vous l’attitude des lycéens qui télé-chargent illégalement ?On a rencontré pas mal de jeunes dans lesfacs et dans les lycées. En discutant aveceux et en leur faisant comprendre lesconséquences du téléchargement illégal, onpeut faire changer les choses, plutôt qued’imposer une loi sans dialoguer. Nous pen-sons que le fait de rencontrer des artisteschange leur perspective. Ils ne pensentplus “les maisons de disques prennenttout”. Il y a un rapport direct artiste-publicqui s’instaure, et il y a plus de respect. C’estpar des rencontres comme ça qu’on devraitinventer des nouvelles manières d’écouterde la musique. Nous, on serait carrémentpartants aujourd’hui pour faire le tour deslycées et expliquer comment le télécharge-ment illégal nuit aux artistes. D’autant queça ne fonctionne pas à sens unique, nousaussi on apprend, on en tire des leçons. I

Propos recueillis par Alison Novic

Album Album (Naïve), disponible

LE MEILLEURDES AUTRES

DAZIBAOBENSÉ AU GRAND JAMAIS

sensible. Reste à espérer qu’ungrain de folie vienne sur scène,perturber quelque peu ces tropbelles mécaniques.

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CHRONIQUES

X Les Inrockuptibles / Chroniques lycéennes 2009

BATLIKEN ARRIÈRE(A Brûle Pourpoint)

Pierre CholletNantesLycée Guist’hau

Sa musique est une rivière, sa voix le flot. Ses mots, comme les voyages des saumons,reviennent sur la question : qui des hommes ou des poissonssaura donner raison au sens de lavie. Revenir en arrière ou toujoursaller plus loin, quelle attitudechoisir ? Ecoutez ses chansons. Ecoutez cette chanson.Après cinq années de tournée et cinq albums, Batlik ne cesse de nous emporter avec lui, seulsur scène, parfois accompagné.Chapeau sur la tête, une guitarefolk rythmée, des chantsmélodieux et des phraséssyncopés, il nous emmène dansson univers rêveur. Avec lui, la chanson devient une armecontre l’injustice et le capitalisme,dénoncés en parlant des chosesde la vie. Plein de tristesse et de comédie, il sait doser desémotions et joue avec son publicpour un spectacle complice. Artiste indépendant jusqu’aubout, il refuse la grandedistribution. Au commande de son label, il produit etenregistre ses disques. Il n’y aurapas moins de public pour autant,car son public, il le connaît et chante avec lui. Alors neréfléchissez plus et laissez-vousporter. Ne luttez pas, et avec luiremontez le courant... pour allerplus loin... en arrière.

“Une fragilité dans la voix, de la colère

dans les mots et un humour noir qui fait

mouche, voilà ce qui fait qu’on accroche

immédiatement au monde de Batlik.”

Samia Lamri, Pessac ///“Drapeau rouge

sur la mer Batlik, de quoi nous hérisser

les écailles.” Clarisse Bernez-Cambot, Nantes

LE MEILLEURDES AUTRES

BATLIK EN ARRIÈRE

Loriane FarèsNantesLycée Guist’hau

Rimes irrégulières Pour revenir en arrière.

Appréciez la voix de Batlik, la pureté presquenue, Guitare sèche, rythme qui suit le courantIndolent ; il faut “s’incliner doucement”Réalités révélées par des sous-entendus.

Peut-être qu’indifférents vous êtes, mais ce monde, c’est le vôtre.Un mot peut en cacher un autre,Il vous suffit de lire entre les lignes, c’est bien connu,Sans quoi cette chanson serait du déjà vu.

Refrain aux messages pas si flous,“En réalité qui a besoin de nous ?”Apnée qui se terminera sans vous.Grandes idées dites avec simplicité,Ironie qui s’entremêle à sincérité,Ralentissez le rythme car ça ne va pas durer...

(Visez un peu l’acrostiche – ndlr)

Samantha CartierReimsLycée Libergier

Gaspard Batlik, à la fois auteur,compositeur et interprète, estmalheureusement peu connu dupublic. Il a su, dans son morceauEn arrière, nous interroger sur lacondition humaine, menacée parde nombreux dangers : “Que l’onsoit né poisson ou de l’espècehumaine, la terre aura notre peauavant qu’on ait la sienne.”Batlik ne donne de leçon àpersonne, il invite plutôt à laréflexion en se positionnant enobservateur des gens quil’entourent. Il s’inspire destracas ainsi que de la douleuréprouvée au quotidien. Cetartiste s’adresse à un public trèslarge et chacun en tire sa propremorale. Ce compositeur est trèsengagé dans ses textes et trouvel’inspiration en assemblant sursa guitare des notes de musiquequi lui viennent naturellement.Dans son quatrième album,Utilité, dont fait partie cemorceau, le style musical estproche du blues et du folk.Batlik utilise un phrasé saccadé.Le jeu de guitare est rythmé,presque haché. La clarinette se fait légère et discrète. La musique suit la sonorité des mots qui sont rebondissants.Dans cette chanson, il nousprocure une sensation qui nous émeut tant dans le texteque dans la musique, capable de “réveiller” n’importequelle oreille. Batlik possède un véritable talent et beaucoup d’humour.Ce morceau, En arrière, est une vraie réussite, à consommersans modération !

Quentin Choupin PloërmelLycée La Mennais

Subtil, c’est le mot ! Le mot leplus approprié pour qualifiercette œuvre. Subtil comme sa mélodie douce et piquante,qui accompagne une voixtravaillée et particulière. Lacombinaison de la mélodie et dela voix est d’une finesseremarquable. L’auteur Batlik,accentue les premières syllabesde chaque vers et la guitaresèche, tantôt douce tantôtagressive, nous fait voyager. Mais cette œuvre est aussiadmirable par son texte. Avecune harmonie de rimes et devers finement écrits, l’auteurnous fait une critique de l’espècehumaine. En comparant

l’homme et le saumon, il nous faitprendre conscience de la dureréalité de la vie. Il nous dit aussi que l’envie perpétuelle del’espèce humaine, d’aller àl’encontre des lois de la Naturenous poussera à notre perte. Il propose, de plus, une légèrecritique de notre naïveté.L’homme étant le seulresponsable des problèmes qu’il cause, il nous est impossiblede revenir En arrière, prierne sert donc à rien ! Plus l’œuvreavance et plus la mélodieet les paroles s’intensifient. Cela traduirait-il une fin brutaleet tragique pour l’espècehumaine ? Toutefois sesdernières paroles nous fontréagir : “La terre aura notre peauavant qu’on ait la sienne.”

Pauline DrilletRennesLycée Victor-et-Hélène-Basch

Mélancolique. Entraînante.Engagée. Humble. Inventive.Douce. Les mots pour décrirecette ballade ne manquentpas, même s’ils sont parfoiscontradictoires. Cette chansonest tout cela à la fois. Un flot de sentiments. Une vaguede pensées. L’air simple et cependant irrésistible vousreste dans la tête. Mais il y a plus qu’une mélodie. Si l’auditeurest emporté par la voix de Batlik,les mots qu’il prononce ne sont pas vides de sens. En effet,il nous met en garde. Bientôt,nous allons nous retrouverpiégés, nous allons nous rendrecompte de notre incapacité à effacer nos erreurs. Ainsi, il nous parle de la vie, du tempsqui passe, des hommes et desconséquences de leurs actes, de l’avenir, le nôtre et celuide notre planète. Mais Batlik ne se présente pas en donneur de leçons, en “petit Parisien” tout aussi coupable qu’un autre,il nous fait simplement part de ses réflexions. C’est ainsi qu’il chuchote, presquetimidement, une questiondifficile : “On a besoin de tout, mais qui a besoin de nous ?”Cette chanson légère au premierabord, révèle un contenu réfléchi qui pousse celui quil’écoute à se questionner sur son rôle dans la société. Et heureusement, quand onarrive à la fin, il est possiblede revenir en arrière, au début duCD, pour l’écouter encore.

DAZIBAO

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Page 11: PRIX CHARLES CROS DES LYCÉENS DE LA NOUVELLE CHANSON

CHRONIQUES

Chroniques lycéennes 2009 / Les Inrockuptibles XI

“Une mélodie entêtante et

très agréable grâce aux

cordes, tandis que la voix

rauque, nasale, qui chante,

légèrement tremblée par

moments, gorgée de soleil,

entrelace le français et

le wolof. Scandé et dansant,

un titre bluesy aussi.”

Amélie Germain, Anne-Claire

Renvoiret, Manon Trioux, Niort

LE MEILLEURDES AUTRES

DAZIBAOEL HADJ N’DIAYE GÉEJ

EL HADJ N’DIAYEGÉEJ

(Siggi Musique/Marabi Production/Harmonia Mundi)

Laurent KientzMorteauLycée Edgar-Faure

Vous aimez la musique africaine en général ?Si non, passez votre chemin, si oui, alors El Hadj N’Diaye est pour vous. Ce chanteurd’origine sénégalaise est conteur etcompositeur. Avec sa voix rauque, nasale,puissante et légèrement tremblante parmoment, il arrive à transmettre la tristessede sa chanson comme venant de laprofondeur de la mer. Malgré le rythmerépétitif, jusqu’au bout on l’écoute avecplaisir. Déjà on n’a pas affaire à un débutant,et Géej est issu de son cinquième album : Géej.Dans cette chanson, il parle de l’immigrationclandestine. Il demande de l’aide à la mer,pour que lui et les africains voulant avoir unevie meilleure puissent rejoindre l’Europe sansdifficulté. Une chanson qui est un vibranthommage aux Africains qui, chaque jour, sontretrouvés sans vie sur les plages espagnolesou italiennes pour avoir tenté leur chance derejoindre le bon côté du monde, celui où l’onne crève pas de faim... Cette musique nous permet de nous rappeler que nous,Européens, vivons sans souci, alors que lesAfricains meurent sur les plages où nousnous baignons. Cela vaut effectivement et aminima une chanson : El Hadj l’a composée.

Thibaut Dichy-Malherme Château-ThierryLycée La Fontaine

Il y a plusieurs méthodes pourconstruire un mausolée. El HadjN’Diaye en utilise une nouvelle,inconnue de tous les architectes :il chante. En effet, Géej est un monument sculpté par la voixd’El Hadj en mémoire de tousceux qui meurent chaque jourà Gibraltar après avoirembarqué sur des bateaux de fortune, en directionde l’Europe. La voix d’El HadjN’Diaye, à la fois belle et fragile,tremble comme portée par cette mer à qui elle s’adresseavec tendresse et reproches. Géej n’a pas pour but de sublimerles hommes qui tentent latraversée mais ne les condamnepas non plus : El Hadj rappellejuste que les morts que l’on retrouve sur les plageseuropéennes et africaines sontdes hommes, qui vivent et qui rêvent de l’avenir, rien depus, rien de moins. Si El Hadjchante dans la langue des mortsde Gibraltar, on ne peut pas nierle fait que Géej est une chansonfrancophone car elle ne s’adressepas uniquement à l’Afrique, mais aussi à toute l’Europe. De plus, la barrière de la languen’est pas un obstacle pour la voix d’El Hadj. Son chant, universel etdéchirant, se passe de traductionlorsque l’on sait qu’il s’adresseà la mer qui emporte tant de vies,même si l’Europe a tendance à l’oublier. Heureusement, El Hadj est là pour administreren douceur la piqûre de rappel.

MERLOTCDI (MINIMUM)

(Boxson/Anticraft)

Adèle Arnoux, AliceRustique, Maxime AreillePessacLycée Pape-Clément

Entraînant et décalé, subtil etcontrasté, oscillant entreironie et chanson engagée, cetobjet musical a un style à part, difficile à répertorier. Loin desformats reggae ou ska, ce morceau ressemble à de laprose de trottoir, à des rimes de banlieusard. Merlot réussit,tel un acrobate, à mariervirtuosité et sensibilité avecgrande finesse. Sa musique, en apparence simple, nous prendau corps mais aussi à l’esprit.Les sons des cuivres vibrent etrendent la mélodie agréable. Sa plume noire et drôle balancede NTM à Boby Lapointe et d’Eminem à Jean Ferrat ; des styles différents reflétant

“C’est sur un rythme binaire accentué

par un piano et un cuivre que

Manuel Merlot s’empare d’une plume

noire pour narrer la tristesse du monde

d’aujourd’hui, dans sa chanson CDI

(minimum)”. Corentin Pestel, Nantes

LE MEILLEURDES AUTRES

DAZIBAOMERLOT CDI (MINIMUM)

bien sa personnalité loufoque.Gouailleur et charmeur, ce doux loser soulève, d’une voixécorchée, un grave problème de société qu’il dissimulesous une mélodie cadencée etonduleuse. La répétitionlancinante de “mini” permetà ce grand dandy déglinguéde dénoncer les conditions de viede ceux qui touchent le RMI, et plus largement les inégalitéssociales. Il serait regrettablede ne pas percevoir ce messageimportant que fait passer Merlot.Car à travers cette chanson,c’est toute l’ironie à la foisdésenchantée et jubilatoire de ce gars d’Ivry qui nous interpelle.Proche du Boogie Woogied’Eddy Mitchell, lequel étaitcependant moins subversif maistout aussi engagé, (CDI)minimum gagnerait à êtreentendu, notamment par ceux qui sont parfois sourdsau bruit “des gens de peu”.Ecoutez Merlot, joyeuxphilosophe du meilleur cépage,celui-ci a le vin gai. Barjo peut-être, mais pas jobard.

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L’ÉCHAPPÉE BELLEE

n fait, on a fait trois rencontres, tou-tes différentes. En arrivant, à cha-que fois, on ne savait pas à quoi s’at-tendre : seront-ils intéressés parnotre démarche musicale, aiment-ilsla chanson La Carte de résidence, choi-sie pour les

Chroniques lycéen-nes, cette chansonqui évoque tant dechoses pour nous,en particulier lacondition des im-migrés dans cepays ? Sont-ilspréoccupés par cette question ? Se retrou-vent-ils dans cette sonorité mandole accor-déon, ont-ils une image positive des vieuxgars que nous sommes ? Toutes ces questions sont explosées à par-tir du moment où la rencontre s’opère : il

n’y a plus de musiciens et d’élèves, justeun prétexte dans un cadre particulier à unéchange autour d’une idée subjective surle rôle d’un artiste, en dehors du spectaclequ’il propose habituellement au public.D’ailleurs là, il n’y a pas de public, juste des

jeunes gens qui sont àl’école et des moins jeunesqui viennent occuper un es-pace privilégié organisédans un lycée par des ensei-gnants ou des documentalis-tes, que nous remercions icipour leur conscience profes-sionnelle et leur conviction

sur l’idée qu’ils se font de leur boulot.

On a donc raconté notre chemin de non-musiciens devenus chanteurs, on a beau-coup parlé d’une vision de la réussite, del’idée d’une expression nécessaire à cha-

cun de nous, de la façon de dire que l’onaime ou pas en argumentant. Les critiquesétaient là, positives et négatives sur notreproduction musicale. En fait, pas de pro-blèmes, la musique est bien présente. Ellejoue son rôle, elle accompagne tous les mo-ments de la vie quelque soit l’âge que l’ona et ce que l’on vit, elle est notre dénomi-nateur commun, un langage.Finalement c’est ça le plus rassurant, unpoint de vue est possible si on laisse laplace à la parole, si on lui accorde la légiti-mité d’un espace, d’un moment, d’uneécoute et d’un dialogue… Basique mais efficace.Donc une spéciale dédicace aux élèves dulycée Raymond-Naves et du lycée des Arè-nes à Toulouse, à ceux du lycée Jules-Ferry dans le territoire de Belfort et par-ticulièrement aux élèves du lycée LaColinière et de l’Institut d’éducation mo-

ON A BEAUCOUP PARLÉ D’UNEVISION DE LA RÉUSSITE,

DE L’IDÉE D’UNE EXPRESSIONNÉCESSAIRE À CHACUN DE NOUS,DE LA FAÇON DE DIRE QUE L’ON AIMEOU PAS EN ARGUMENTANT.”

Echappés de Zebda, Mouss & Hakim, en tournée avec leur projet Origines Contrôlées, ont trouvé le temps des’arrêter dans les lycées pour échanger avec les élèvessur leur démarche et le métier d’artiste. Ils racontent.

TÉMOIGNAGE MOUSS & HAKIM

XII Les Inrockuptibles / Chroniques lycéennes 2009

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ORIGINES CONTRÔLÉES

LA CARTE DE RÉSIDENCE

(Atmosphériques)

Lison ScopelToulouseLycée des Arènes

Haut les cœurs ! Une bonne fois pour toutes, c’en est fini de l’archaïque cliché béret-baguette français! Extraite d’un album de reprises des grands pontes de la chansond’immigration, cette chansonn’est pas une chanson française :c’est une chanson de France. Dela France d’aujourd’hui. D’uneFrance métissée, de rencontres,de couleurs et d’identités. On l’écoute, et nous voicisoudainement kabyles au sond’une derbouka... Cettechanson, c’est la magnificencede Slimane Azem, une remiseen avant de propos toujoursplus véridiques par une vervetoujours plus bouillonnante. Et si la France peut ne plusplaire, la voici qui renaît de sescendres. Origines contrôlées,c’est le miroir musical qui nousrenvoie sans détours auxfondements de nos identités,nous conduisant à cette prise de conscience : de près ou de loin, nous sommes tous des immigrés. Forts de leurcollaboration avec le grandaccordéoniste Jean-LucAmestoy, le groupe nous offreici un magnifique travailde mémoire et d’humilité, dans la droite lignée de ce à quoi ils nous avaient habituésauparavant dans leurs parcourspersonnels. Nous qui fûmesjadis bercés d’Essence Ordinaire,nous pouvons à loisir constaterque nos anciens Zebda ontmûri ; et si la citoyenneté est la complémentarité des savoir-faire, le leur est magistral.Toulouse peut être fière de sesenfants, la France peut apprécierses nouveaux représentants.Aussi sincèrement qu’ilspourraient le dire, merci.

Alexandra TessierGaillonLycée André-Malraux

Il était une fois des pères kabylesarrivés dans les années 50 del’autre côté de la Méditerranée,sans famille, sans épouse. Ceshommes courageux, “déracinés”,travaillaient sans relâche enchantier, en usine : des hommesseuls, dociles, mobiles etrentables. Les mères sont venuesà la faveur du regroupementfamilial. Emouvante histoire de familles algériennes,partagées entre leurs origines et leur nouvelle vie, celle d’une génération qui s’est battuepour élever ses enfants dansla dignité. Mouss et HakimAmokrane sont deux des cesenfants nés en France à doubleidentité, française et algérienne.Issus des quartiers populaires deToulouse, ils retracent, à traversla musique, l’exil des parentsvenus du “bled”. Tradition etmodernité, double culture, exil etintégration, identité et mémoire,des problématiques d’uneactualité brûlante évoquées à travers Origines contrôlées.Mouss, Hakim et leurs musiciensreprennent La Carte derésidence, titre de Slimane Azem,chanteur et poète kabyleimmigré en France, et rendentcette chanson frappanted’actualité. Ils revisitent etrendent hommage à la chansonissue de l’immigrationalgérienne des années 40 à 70,popularisée par des poètes-musiciens-travailleurs.S’appuyant sur un accordéonomniprésent, ils mélangentmandole et guitare, poésie etpolitique. Le rythme dansant dela mélodie renvoie à un exotismedont tout le monde raffole. Le texte, mélange des deuxcultures arabe et française,évoque avec humour et poésie la souffrance et les difficultésquotidiennes de ces populations :vicissitudes d’immigrésclandestins en quête désespéréed’une carte de résidence,menace permanente d’“êtrearrachés” à la terre française. Et pourtant “leurs aïeux ontcombattu pour la France”…

“Un rythme entraînant nous jette directement sur la route entre Marrakech et Alger, rempli de mille épices et senteurs

avec la guitare comme guide, la mandole pour entraîner tout le monde et l’accordéon par dessus pour rajouter du soleil au

voyage.” Morgan Bercier, Nantes ///“Un mélange de musiques orientales, tziganes, voire reggae, ils sont l’un des rares groupes,

dans cette période où le jazz manouche est à la mode, à maîtriser la pompe manouche sans tomber dans

une banalisation fréquente désormais dans la musique française.” Gaspard Dhumes, Clermont-Ferrand

trice La Grillonnais de Nantes qui ont réa-lisé un clip très juste autour de la chansonet qui viennent nous voir régulièrementen concert. I

Album Origines contrôlées (Atmosphériques)Concerts 4/6, Fête des collégiens/Cenon,13/6 Fête de la ville/Houilles, 14/6 FestivalTaParole/Montreuil, 20/6 Fête de la Ville/La Verrière, 27/6 Les EcoFolies/Saint-Barthélémy-d’Anjou, 28/6 Solidays/ Paris, 4/7 Festival des PrésSaint-Jean/Alès, 7/7 Festival Cour du soir/Cusset,11/7 Luxembourg/ Centre culturel KulturfabrikEsch, 12/7 Festival de Salettes, 15/7 Festival de Poupet/Saint-Malo-du-Bois, 18/7 Thouars,29/7 Pau, 31/7 Chambery

ORIGINES CONTRÔLÉES CHRONIQUES

Chroniques lycéennes 2009 / Les Inrockuptibles XIII

Ait Jeddi Aïcha ForbachLycée Jean-Moulin

“Origines controlées” c’estun groupe (Mouss et Hakim), un festival, et un album sur lequel figure La Carte derésidence, chanson écritepar Slimane Azem, célèbrepoète et chanteur kabyle. On s’attend d’abord à un texteplat, sérieux, au regard du sujet sensible qui est abordé(l’immigration). Mais le côtéengagé de la chanson est viteoublié lorsque les premièresnotes de musique nousparviennent. Tout cela grâce à la diversité et à la vivacitéde l’instrumentation. L’allianceentre des instrumentstypiquement occidentauxcomme l’accordéon, la guitareou la batterie avec desinstruments à consonnanceorientale tel que la derboukaou encore la mandole, apportebeaucoup d’originalité àla chanson. De même pourles différentes langues chantées(français, arabe, kabyle) qui font de cette oeuvreun véritable arc-en-cielmusical. Quant aux paroles,elles sont nettement engagées :“Mesdames, Mesdemoiselles,Messieurs, si j’dois vous direadieu, sachez bien que mes aïeux,ont combattu pour la France...” ;mais pas pour longtemps carelles sont très vite tournées en dérision : “Après tout ça m’fradu bien, de retourner chez lesmiens, je suis un Africain, le soleilen permanence...” Cette touched’irrévérence et d’optimismeest capable de rendre la joiede vivre au plus grincheuxdes interlocuteurs. La Carte de résidence est donc unechanson qui mélange dans undésordre parfait : bonnehumeur, diversité, humour,sérieux, dérision... avec pourrésultat final une chansonénergisante, dynamique,engagée mais pas trop,accompagnée d’un honorablemessage : la tolérance et lerespect. Amateurs de musiqueraffraichissante, vous risquezde l’écouter en boucle !

LE MEILLEURDES AUTRES

DAZIBAOMOUSS & HAKIM LA CARTE DE RÉSIDENCE

Rencontre avec lesélèves du lycée

Jules-Ferry à Delle

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07 sup lycéens 12 13 MoussHakim 20/05/09 12:49 Page XIII

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CHRONIQUES

XIV Les Inrockuptibles / Chroniques lycéennes 2009

BALOJIENTRE LES LIGNES

(Virgin)

Christy DackoNogent-sur-MarneLycée professionnel La Source/Val-de-Beauté

Avec une certaine économie de moyens, une instrumentationréduite (guitare acoustique,xylophone et harmonica), Balojia trouvé la formule pour parlerde son vécu, de son expérienceet émouvoir l’auditeur.Alternant des passages “slam”scandés et des passages plusmélodiques (le refrain est chanté,contrairement au reste dumorceau), il évoque des périodesde sa vie, de son enfance, comme sa famille de substitution,son exil, son déracinement. Le texte est plutôt implicite maison comprend, Entre les lignes,qu’il fait référence aux relationsdifficiles qu’il a entretenues avec son père et à la séparation d’avec sa mère. Aux relationsavec sa terre natale aussi, sansdoute. Evocation d’un passédifficile à dépasser, ce morceautouche au cœur et fait mouche.

Anne-Laure MansardVaux-le-PénilLycée Simone-Signoret

Mélangeant hip-hop et afro-beat, Baloji nous captive. Entre les lignes nous offre unepolyvalence musicale qui nous emmène dansdeux mondes distincts et complémentaires.Saisi par la passion de la musique à l’occasiond’une compétition de slam qu’il remporte à Paris, Baloji sort en 2007 son premieralbum solo, Hôtel Impala, du nom du motelque possédait son père au Katanga. C’est un regard autobiographique, mais au-delà,son but est bien de nous rappeler ce que nous devons tous laisser derrière nous, pour grandir, et d’évoquer la difficulté d’alliermonde intime et société ; les jeunes seretrouveront bien sûr dans cette expression,mais tous les âges seront séduits par lafinesse du texte, qui n’assène pas de vérités etreste plein d’incertitudes. Cette incertitudeest sûrement due à sa vie passée : Balojiquitte le Congo avec son père à l’âge de 4 anspour immigrer en Belgique. “Amené par les cigognes”, accueilli “sans trop de grogne”, il ne se sent pourtant pas à sa place dans sa famille d’adoption. Sans rancune, il nous transmet les émotions intenses et contrastées de son enfance, portées par sa voix grave et celle, plus douce, de GabrielRios ; ses souffrances se transforment en remarquable tolérance. Ne ratez pas la belle leçon de vie de Baloji, entrez dans la vraie générosité de sa musique.

Lucie Csadéi Nogent-sur-MarneLycée professionnel La Source/ Val-de-Beauté

Comment parler de soi, de safamille, de l’exil, de son vécu sanstomber dans les clichés ? Baloji asu trouver le ton et le bon tempopour évoquer ce sujet. Ce jeuneCongolais, grandi en Belgique,évoque avec profondeur ledéracinement sur un flow quis’apparente au slam. Rimées,rythmées par des mots bienchoisis, ces phrases sonnent et tombent juste, à l’image des propos riches et nuancés.Ces derniers évoquent lesdifficultés quotidiennes de la vied’un exilé qui cherche à trouversa place dans le pays et la familled’accueil, qui cherche à seconstruire une identité alors qu’ilfait le grand écart entre pays etfamille d’adoption. Interrogationaussi sur la mémoire, sur le paysperdu ainsi que sur les lienspaternels et maternels.

Claire MarchalNantesLycée Guist’hau

Nous connaissions le slam àtravers les univers de GrandCorps Malade ou d’Abd Al Malik,et le redécouvrons maintenanten Baloji, jeune belge d’originecongolaise, aussi captivant et intéressant que sesprédécesseurs. Cet écorché vif,blessé par une enfance sansrepères, abandonné par sesparents, raconte avec émotion sajeunesse, ses sentiments face àl’intégration dans une familleinconnue. Le morceau Entre leslignes transporte l’auditeur ausein même de la vie du rappeur.Il lie afro-beat, hip-hop, slam, rap et musique africaine sur unfond musical tout en simplicité,avec quelques percussions et une guitare. Ainsi, nous pouvonsnous concentrer sur les paroles.Toute en finesse, sa plume nousouvre les yeux sur les problèmesd’intégration que connaît notresociété : “Retrouver de son paysdans le regard d’un inconnu. Se trouver comme chez soi, auhasard d’une avenue” Les refrainsmélodieux, inspirés de musiquesafricaines, adoucissent la voixgrave de l’artiste. Nous voyageonsavec lui vers ses origines, sonpays, avec beaucoup d’émotion.Baloji échappe aux préjugésattribués au rap, perçu violent,haineux et hostile ; il nous prouveque douceur et simplicitépeuvent suffire à notre plaisir.

LE MEILLEURDES AUTRES

“Baloji a fait de son univers un système solaire.

Mystérieux comme la nuque de la lune, il parle de la vie

comme d’un cauchemar. Ses rimes sont un déluge de

métaphores, on a l’impression qu’une éclipse se

produit à chaque vers.” Sihame Benamar,ToulouseBALOJI ENTRE LES LIGNES

DAZIBAO

Nic

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Kar

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LAURENT MONTAGNEAPRÈS L’ORAGE

(QI Prod/L’Autre Distribution)

Céline MalaquinLAONLycée professionnel Julie-Daubié

Après l’orage, le sourire.Après l’orage est extrait dupremier album solo d’un vétérande la scène francophone : en effetLaurent Montagne a fait sesclasse dans le groupe LesAcrobates depuis 1998. Si, depuis2005, il chante en solo, c’est avecune maîtrise et une exigenceartistique remarquables.En tant que parolier, Laurent necède pas à la facilité deschansons d’amour communes.L’image de l’orage pour traduireles fêlures entre amoureux estfilée jusqu’au bout de la chansonet reprise par des mots tels quesinistre, décombres, déterrer,vent… Il y a un habile équilibreentre les termes abstraits et lestermes concrets qui donne à sachanson un air spirituel. Desrimes renvoient comme deséchos les mots entre eux. Lerefrain est résolument optimisteet offre à qui veut le comprendreune leçon de comportement etd’attitude dans la vie. Tout celareste léger et nuancé : “On voit lesmêmes gestes revenir, les mêmeserreurs… se reproduire.”La guitare se fait insistante dès ledébut comme pour souligner lefatalisme des paroles. De légersstaccatos style mandoline endécrescendo ponctuent lesrefrains et offrent à l’auditeurtoute une palette de sons variéset entraînants.

Tang

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oula

irol

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Page 15: PRIX CHARLES CROS DES LYCÉENS DE LA NOUVELLE CHANSON

CHRONIQUES

Chroniques lycéennes 2009 / Les Inrockuptibles XV

“Ce moment de pur bonheur

musical sur un fond de

batterie relevé de piano me

glace le sang et me fait à

l’occasion douter sur moi-

même… le doute de ne jamais

avoir pris le temps d’écouter

une chanson et les paroles

qui l’accompagnent.”

Pierre Bleher, Ploërmel

LE MEILLEURDES AUTRES

CHLOÉ DU TRÈFLE LE DOUTE

CLOÉ DU TREFLELE DOUTE

(Trèfle Prod/COD&S Distribution)

Noëlline Madert,Paul Vienot MorteauLycée Edgar-Faure

Entre chanson et mélopée, Le Doute, de Cloé du Trèfle, selance et se balance, au rythmeexact de la balançoire surlaquelle j’écoute la chanson. La musique, mélanged’acoustique et d’électronique,est entêtante, répétitive, et nousemporte dans une transe, unmouvement, une danse... Je melaisse faire. J’ai la tête qui tourne,je fais corps avec la balançoire.En avant, en arrière, en avant...Le doute. D’un choix à l’autre,que choisir ? Cloé du Trèfle nousexplique, avec des mots précis,bien choisis, la nécessité dudoute, en tant qu’instrument... deréflexion. Et c’est dans saréflexion qu’elle nous implique.Un doute sur le doute lui-même.Et à la fin, une déclaration, une phrase qui coupe l’élan, quistoppe la balançoire. Et je resteassise, comme ça, sur laditebalançoire, à réfléchir pendantau moins cinq à dix minutes surle sens de la chanson... Le sens de la vie ? Après tout, pourquoisommes-nous là, sur cettebalançoire, alors qu’on pourraitfaire autre chose ? Pourquoisommes-nous là, toutsimplement ? C’est sur cettequestion-balançoire, auxréponses multiples, à des niveauxet des hauteurs différents, quenous entraîne Cloé du Trèfle,entre la balançoire enfantine desa musique et le grand tremplinde ses réflexions. A méditer autant qu’à écouter.

Florent Sanguine,Lore BrethenouxPessacLycée Pape-Clément

Agaçant et sans intérêt : Le Doute de Cloé du Trèfle nousfait douter de son talent.Composition sans texte, absencede voix, mais surtout un airobsédant, lancinant. En résumé,un produit lisse, commercial, et qui, pourtant, semble sedéfinir comme une réflexionexistentielle... Un piano rythmé,une voix prometteuse, mais ledoute reprend le dessus. Danscette chose à tendance electro etnouveau R’nB, la chanteuse crée

un style innommable, hybride, pas assezrythmé pour l’un, pas assez mélodieux pourl’autre, pas assez tout court en somme... ettoujours ce doute... Une fraîcheur trop froide,un éclat trop terne, un mystère trop clair, cela n’est ni triste, ni joyeux, pas mêmeintimiste. La jeune Bruxelloise a pourtant descordes à sa guitare, pardon, à son arc : multi-instrumentiste, douée dans la réalisation de sons synthétiques. Une introductionentraînante et rythmée nous fait croire à une chanson originale et mystérieuse, mais nos espoirs sont brisés avec l’arrivée de la faible voix rauque. Celle-ci s’éteint à la fin du morceau et laisse place à une notesynthétique et morbide où le doute persiste,encore et toujours. Les doutes s’enchaînentmais restent sans réponse. Finalement, Le Doute jaillit avec la déception : dès lors quela voix résonne, elle brise l’envol, elle enferme,elle ennuie, elle lasse, elle casse. Bluffintellectuel. Masque contrefait. Réflexions.

DAZIBAO

Nan

ou D

ekok

er

Au total, une chanson plaisante,qui réussit l’équilibre entreparoles et musique. On ne peutque sourire à ce titre et espérerque la renommée de LaurentMontagne lui permette de passeren boucle sur les ondes.

Adrien BarbeRomans-sur-IsèreLycée professionnel Auguste-Bouvet

Comme on le dit souvent, leserreurs font avancer. Et toi, sais-tu où tu en es ? Si tu pataugessans savoir où tu vas, sur le droitchemin ou dans le mur, demandeà Laurent Montagne quifoudroiera tout tes malheursavec son orage musical. Avec sapetite trentaine, ce gars là nousfait rêvasser avec ses histoires.Cette guitare qui va aussi viteque le vent donne l’impressiond’avoir été accordée juste pournous. Son orage qui claque à tousses coups de blues nous annoncele beau temps et des momentsheureux.

“Laurent Montagne vous

cuisine une pure merveille

en musique qui, de plus,

est couronné d’un peu

de philosophique.”

Thomas Kerveillant

et Rose Baptiste, Evreux

LE MEILLEURDES AUTRES

LAURENT MONTAGNE APRÈS L’ORAGE

DAZIBAO

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Page 16: PRIX CHARLES CROS DES LYCÉENS DE LA NOUVELLE CHANSON

CHRONIQUES

XVI Les Inrockuptibles / Chroniques lycéennes 2009

CHRISTOPHEMAL COMME

(AZ/Universal)

Clément ChamparnaudRochefortLycée professionnel Gilles-Jamain

Le retour du Jedi.“Mal comme, oh oui, mal comme” :tels sont les premiers motsmurmurés par Christophe dans cette chanson qui laisseclairement apparaître une souffrance qui, depuisquarante ans, ne s’est pasestompée. Après cette longueabsence, le style vocal duchanteur reste inchangé, unetessiture très aiguë, presqueféminine, qui nous entraîne dansune mélodie triste dont onpourrait reprocher une certainemonotonie. Christophe mâcheses mots, on ne saisit que des bribes de ses lamentationschantées. L’ambiance musicaleest particulièrement réussie et intéressante, on se trouveemporté tantôt par les chantsgrégoriens rythmées par le son lugubre d’une clocheaccompagnée de quelquescorbeaux, ou par une mélodierécurrente et synthétique qui “tourne, tourne autour”de “l’anneau de Saturne”. Non sans défaut, Christopheréussit au travers de soninterprétation à nous faire part de son amour perdu avec une certaine émotion.

Mélodie MinauxLaonLycée professionnel Julie-Daubié

O.S.N.I: Objet sonore non identifié.D’emblée, des nappes sonoresm’enveloppent. Venus d’unailleurs électronique, des chœurssynthétiques en surimpressionm’entraînent hors du champdu réel, puis la voix de flûtemétallique légèrement enrouéede Christophe Bevilacquas’élève, ambiguë : Malcom ou mal comme… répété trois foiscomme obsessionnellement avecles “oui” qui semblent confirmerque l’interprète est au bord del’extase. Puis le rythme croissantdu piano me rend plus optimistealors qu’un dialogue étrangem’entraîne au-delà des anneauxde Saturne – Dieu du temps.Christophe et Daniel Bélangeront écrit des phrases simpleset humanistes : “A aimer ce quetu es à aimer ce que je suis ensomme aimer ce que nous sommes.”

Ce leitmotiv est bien trouvé etrépond à mes interrogationsd’adolescente. La voix deChristophe reste tendue, fragile,comme hésitante et perplexe.C’est ce que j’apprécie : cette douceur plaintive chez unartiste confirmé qui vientd’enregistrer son neuvièmealbum studio. Il est à l’antipoded’un Polnareff, poseur,mégalomane et satisfait de lui.Quant à moi, j’ai passé tout montemps libre à écouter en bouclece premier titre de la sélectionsans me lasser tant les richessesmusicales et les trouvaillessonores m’ont fascinée.N’entend-on pas comme enréverbération le croassement de corbeaux, des chants féminins comme jetés en vaguesur la plage musicale. J’adore lorsqu’une syncopeme suspend en attentede la reprise mélodieuse. On sent un auteur-compositeurexigeant, à la recherche de sonsnouveaux, qui ferait planer ses auditeurs et leur donneraientla satisfaction d’une musiquesubtile. Cet homme de 63 ans a su se renouveler et parlerà ma génération grâce à cette composition hors-normequi prend en compte l’angoissede l’être humain devant le temps qui passe.

Paul StephanRennesLycée Victor-et-Hélène-Basch

Ce morceau simple, voluptueux et aérien estle reflet de son auteur. Christophe nous atoujours marqué par ses chansons quipassent comme un souffle dans l’oreille de sesauditeurs. Celle-ci ne déroge pas à la règle.Trouble et touchante, elle nous amène àréfléchir sur la chance de vivre. Sa voix et satonalité sont bien placées, s’alliantparfaitement au thème dramatique de lachanson. Le début du morceau est la parfaitereprésentation d’une chanson mélodieuseaux allures angéliques. L’introduction portéepar des chœurs est troublante, en accordavec le style de l’auteur qui se veutmystérieux. Le ton dramatique est renforcépar des paroles bien choisies, au sensprofond. Un interlude musical, placé aumilieu du morceau, renforce le côtédramatique du récit. Tout cela exécuté avecles instruments qu’il fallait, utilisés au mieux.La fin de la chanson résume bien l’ensemble :une mort et un évanouissement prématuréstant la vie a de belles choses à offrir. Ainsi“Oh oui, mal comme, de disparaître des hommes”et que “Si le temps m’offrait, l’aumône de lui-même, Je l’utiliserais”, confirment cettevolonté de vouloir toujours vivre et exister.En résumé, Christophe nous offre une chanson d’amour enivrante au tondramatique. Ce qui n’enlève rien à l’émotiontransmise par un artiste souvent décrié et pourtant grandiose. Aline et Les Mots bleusne sont pas le reflet le plus exact de l’auteur.Cette chanson, elle, l’est.

“Et si ce n’était pas des

violons mais des pleurs ?

Ses pleurs ? Que veut nous

dire Christophe dans cette

chanson ? Qu’il se ranime,

tout au bout du jour. Que

nous ne devenons plus qu’une

“vapeur diurne”. Audrey Salin,

Jarville-la-Malgrange ///“Alors,

peut être que vous pourrez

reprocher à Christophe une

certaine lenteur par rapport

à une chanson comme

Senõrita, ou une intonation

différente du célèbre Aline.

Mais la poésie est toujours

là et la magie opère comme

à son habitude.”

Thomas Chauveau, Bouaye

LE MEILLEURDES AUTRES

CHRISTOPHE MAL COMME

DAZIBAO

Luci

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Page 17: PRIX CHARLES CROS DES LYCÉENS DE LA NOUVELLE CHANSON

CHRONIQUES

Chroniques lycéennes 2009 / Les Inrockuptibles XVII

“Dans cette génération où hurler des insultes sur fond de guitare électrique semble être

le meilleur moyen de se faire entendre, Pierre Lautomne sort du lot et parvient à nous

surprendre.” Chloé Ullern, La Rochelle ///“Alors, en écoutant cet Automne, on sentirait la

fraîcheur de sa mélodie, la simplicité du mouvement, une odeur et surtout un son boisé.

L’introduction de ce souffle chantant est donnée par des notes carillonnant, égales à

des gouttes de pluies. Comme la mousse se marie à l’écorce, sa voix s’enlasse à quelques

accords de guitare puis se noue à un air plus sec au ukulélé.” Barbara Coutant, Nantes

LE MEILLEURDES AUTRES

PIERRE LAUTOMNE LES CHOSES PREMIÈRES

PIERRE LAUTOMNE LES CHOSES PREMIÈRES

(DTB2)

Alexandre GilbertStrasbourgLycée international des Pontonniers

D’abord, on laisse filer une sériede notes, sans vraiment yprendre garde, sans vraiment lesécouter. Puis vient une petitemélodie intrigante ; on nousy parle de vélo, de mécano, de psy. Quelque chose ne tournepas rond et, dans le doute,on l’écoute à nouveau.Là, on attrape les subtilités auvol, on se laisse charmer par lesmots et les notes envoûtantes.Et enfin, on se la repasse encoreet encore, parce que cette joliemusique nous fait penser à nous-même et nous fait réfléchir,mais aussi parce que, selon des termes de bon lycéen : elle est bien, c’te chanson.

Margot ThiaucourtStrasbourgLycée international des Pontonniers

Première écoute : ce sont d’abordquelques notes, qui dès la première mesure donnent le rythme de la chanson. Puis, une voix d’homme chante.Vaguement, je retiens quelquesbribes de phrases : “Toutes ceschoses premières, le mécano m’a dit,bonheur…” Revenir aux chosespremières dit-il ? “Mais mon gars,on est au XXIe siècle, va allumerton ordi’ et souris à la vie !”Deuxième écoute : n’est-ce pasbien d’accorder une deuxièmechance ? Le rythme est doux, intéressant en fait. Et lesparoles, que disent-elle ?L’homme regrette son passé, il cherche conseil. Cela mérited’être réécouté.Troisième et quatrième écoutes :ce sont de belles métaphoresfilées qui sont chantées ici. Le cœur devient un moteur et latristesse se transforme en eau…L’auteur n’a pas la prétentionde se faire plaindre : il accepte lacause de son mal-être. Pas uneonce de rancune, de haine, pas même de regrets, seulementde la mélancolie. Il recherchejuste un bonheur nouveau. Voilà son moyen : revenir auxchoses premières. Ouvrir son regard sur le monde,s’émerveiller de tout, profiter.Cinquième écoute : à présent,

je chantonne avec lui ce bel hymne au tempsqui passe, au bonheur éloigné. Il est chargéd’espoir. Et je remets la chanson dès qu’elleest finie. J’ai envie de fermer les yeux, de m’allonger dans l’herbe. Balancer ma têteau gré du temps qui passe, au rythmede la mélodie. L’ordi peut attendre, j’ai enviede revenir aux choses premières. La chanson se termine déjà, je la remetsencore. Combien de fois en tout ? Je ne saisplus : quand on aime, on ne compte pas !

Adelina Bourrieau, Claire JupilleCarentanLycée Sivard-de-Beaulieu

Vous déprimez ? Vous broyez du noir etmême votre psy ne sait plus quoi faire pourvous ? Un remède existe, sympathique etparfaitement inoffensif pour votre santéfragile. Découvrez Pierre Lautomne, unartiste franco-suisse qui vous rappellera quele monde n’est pas si triste ! Ce chanteur,engagé à sa manière et parfois qualifié de“bio”, s’inspire de toutes les petites choses dela vie pour écrire une ode à la nature, à“toutes ces choses premières”. Pour certains,une chanson un peu trop “fleur bleue” ; pourd’autres, une bonne occasion de retourner enenfance, “faire des ronds dans l’eau” et“marcher dans les pissenlits”. Et il fautreconnaître que ça fait parfois du bien

d’oublier un peu le quotidien.Avec ses rythmes pop-folk pleind’entrain, cette chanson fraîcheet simple sent bon le printemps,les prairies et les fleurs. Bref,peut-être pas le remède miracle,mais néanmoins une thérapieefficace et sans aucune contre-indication. Risqued’accoutumance.

Tania TchoumakovVaux-le-PénilLycée Simone-Signoret

Pierre Lautomne est bien unrêveur… et du type écolo ! C’estsous une musique entraînanteque Les Choses premières, issue deson album du même nom, nous rappelle le rythme desbalades à vélo, accompagné d’unharmonica lui donnant ce petitcôté provincial et même country, dont le slogan est bien simple : se mettre au vert ! Un cœurmalade, une “tristesse quidégouline”, cet artiste franco-suisse nous conseille ces chosessimples et premières, symboles de vie et de bonheur.Il se compare au rouage d’un

moteur exprimant la routine deson existence et déraille commeun vélo en visitant son psy. Bien que Les Choses premièress’écoute d’une bonne oreille, le refrain prend le dessus sur lesparoles et on peut très vite enarriver à saturation. “Son petitcœur qui tousse” sonne un peuniais de la bouche de Pierrot et“se coucher dans les fougères” nesemble plus de bon conseil ! Cet artiste exploite sonquotidien d’homme qu’il posesur des mélodies folk-blues. Un quotidien peu attirant et quimanque de peps. Des parolesrecherchées mais qui, bout àbout, portent à confusion sur lanature du problème… Un amourdéçu trop peu exprimé et quinous accroche qu’après plusieurs écoutes ne devrait pasconvaincre l’auditeur de marchersur les pissenlits ! Toutefois, lamusique reste agréable : unartiste à suivre de près pour lesfans de balades simples, àécouter dans la voiture ou dansle métro et afin de penser à semettre au vert pour que le vélone trotte pas que dans la tête !

DAZIBAO

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Page 18: PRIX CHARLES CROS DES LYCÉENS DE LA NOUVELLE CHANSON

Niort a pris le rythme des résidencesà la chef-boutonnaise, (Chef-Bou-tonne a accueilli les rencontres lycéen-nes l’an dernier – ndlr), mais commetoute bonne recette, l’a arrangée àsa sauce. L’objectif est le même :permettre à une classe de lycéens

de créer ses morceaux en compagnie d’un ar-tiste. Celle qui s’y colle c’est Valhère, sélection-née sur la compilation des Chroniques lycéen-nes/Prix Charles Cros des lycéens. Unenouveauté : s’inscrire d’un bout à l’autre dufestival Nouvelles Scènes en faisant le lien so-cial dans le quartier Grand Nord.

Ici, l’expérience est partagée entre le lycéeJean-Macé, la maison de quartier, l’Institutmédico-éducatif (IME), la maison de retraite,avec le soutien de la Ré-gion Poitou-Charentes, lamunicipalité et le collectifdu festival. Tout le mondes’y est mis comme pourprouver qu’on est meil-leurs à plusieurs. Valhère a débarqué deson train le lundi matinavec pour feuille de route l’écriture de texteset la mise en musique avec les lycéens.

Comme un premier stress, une petite bouleau ventre pour une aventure à part, un filrouge dans un festival qui prend de l’ampleur,elle est prête sans savoir où elle va. Valhère a pris ses marques, installée dansquatre salles avec piano, guitares et autresinstruments. Un jour à la maison de quartier,l’autre au sein de leur établissement, lesseize heures de création sont une course quioblige à garder le nez dans le guidon. Les sty-los fébriles du début ont rempli les pages

éparses sur les sièges dufoyer. De la concertation àla répétition, sous le re-gard de Gaëlle et d’Agnès,respectivement animatriceculturelle et enseignante,les lycéens savent que letemps est compté, celui quiva les conduire au public, à

leur première scène. De petits groupes seforment par affinité, abordant des théma-

RENCONTRE VALHÈRE À NIORT

Tisser le lien…A Niort, des lycéens ont vécu une semaine de créationartistique, aidés par la chanteuse Valhère. Ecriture, miseen musique et représentations dans le cadre du festivalNouvelles Scènes ont remué le quartier Grand Nord.

DE LA CONCERTATION À LA RÉPÉTITION,

LES LYCÉENS SAVENT QUE LETEMPS EST COMPTÉ, CELUI QUIVA LES CONDUIRE AU PUBLIC,À LEUR PREMIÈRE SCÈNE.

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Page 19: PRIX CHARLES CROS DES LYCÉENS DE LA NOUVELLE CHANSON

Le texte est digne d’un poèmeavec l’anaphore “il faudrait”repris au début des six couplets ;le refrain répondà la premièrepersonne en contrepoint à ces vœux d’une “folle” dont les exigences ne nous semblentpas si insensées : Qui nedésirerait pas garder “la tête au-dessus des nuages”, savoir “ce qui se passe en dessous de tout”… Dans le refrain, on appréciera aussi les jeux de mots autour de “former” en tant que verbe, en tant quenom et avec le préfixe “dé”.Tout cela montre un goût pourla langue, une volonté de creuserles sens du langage et de sespièges. Valhère exprime à traverscette chanson une douleurexistentielle, un besoin decommunication qui la rendentattachante. On ne peut se lasserd’écouter cette compositionéquilibrée qui n’est jamaiscompréhensible totalement etlaisse des pans de mystèreà chaque écoute. Si les titres de son premier album studio,Attrape-moi, sont de la mêmeinventivité électrisante, elle ne peut que séduire.

“Un alignement

incompréhensible de mots.

On cherche le sens de la

chanson qui devient vite

indigeste.”

Morane Godfrin, Strasbourg

LE MEILLEURDES AUTRES

DAZIBAOVALHÈRE LES FOUS

VALHÈRE CHRONIQUES

Chroniques lycéennes 2009 / Les Inrockuptibles XIX

VALHÈRELES FOUS

(Mon Slip)

Prudence Férez,Jessica Thomas LaonLycée professionnel Julie-Daubié

La 16e sélection du prix deslycéens de la chansonfrancophone nous fait planer àla manière du groupe NoirDésir. La voix de Valhère, à lafois torturée et acérée, parfoissuspend douloureusementl’enchaînement des couplets,d’autres fois les accélère dansune urgence qui semble vitale.La musique qui l’accompagne se love sur cette voix à nulleautre pareille. Elle nousentraîne dans une rêverie à lafois mystérieuse, mélodieuse eténergique. Valhère s’entoured’une équipe de musiciens trèstalentueux : Denis Barthe, Jean-Paul Roy, du groupe NoirDésir, et Vincent Bosler quisavent mettre en valeur lesaccents déchirants de sa voix.

tiques de leur âge ou de tout âge, respect,tolérance… Puis passent au filage pour unlendemain face à leurs premiers juges, dejeunes handicapés qui ont souvent le re-gard des autres sur eux. Drôle de situationinversée, pour mieux comprendre qu’onveut être compris et non jugé.

De néophytes le lundi, ils deviennent chan-teurs le mercredi matin, une immersionsans se poser de question. A 11 h, les jeunesde l’IME sont là qui les attendent. L’Institut,récemment inauguré, accueille en son seinson premier concert, un lien entre des jeu-nes du même âge, ou presque, avec leurs dif-férences qui les conduit à apprendre dansdes lieux séparés. Les premiers sons appor-tent aussi les premières émotions. Les ly-céens sont au point pour s’offrir à leur pu-blic. Tiens ! Ils ne se sont pas sentis jugés,au contraire. On a beau se croire en diffi-culté, fragile, l’autre qui nous écoute nousaide plus qu’il nous coule. Puis, c’est à Val-hère de prendre sa charge d’émotion.Comme si de voir ses poulains n’avait passuffit, elle se lance sur scène pour 30 minu-tes. Bien sûr, on applaudit. Un moment par-tagé qui ouvre la porte d’un atelier d’écri-ture en commun, l’an prochain, comme unehabitude qu’on veut déjà se donner. Reste le vendredi, une nouvelle et dernièreséance, intergénérationnelle celle-là. Desados chez les anciens, un lien social “trou-blant”, comme l’évoque encore Valhère. Lesrésidents de la maison de retraite des Bri-zeaux attendent le concert de ces jeunes ly-céens qui se sont aguerris durant la se-maine. Les différences d’âges et d’époquesvont s’effacer le temps d’un concert. Incon-grue cette rencontre autour de chansons ?Pourquoi donc ? Tout semble si évidentpour apprendre et se comprendre. Une nou-velle porte s’est ouverte, qui, comme celle del’IME, ne devrait pas se refermer.Le soir, ce vendredi, dernier jour, Valhère seproduit dans le cadre du festival, avec deslarmes en fin de set pour dire qu’elle seraitbien restée encore un peu. Mais elle saitqu’on ne reste pas. On peut revenir bien sûr,mais ce qui a existé est déjà suffisant pouravoir changé un temps des morceaux devies. Elle a donné beaucoup et emporte au-tant avec elle. Les photos, les vidéos, lesmessages sur internet sont encore un lienpour se rappeler une semaine de partage. Larecette a encore bien pris, chacun a em-mené un morceau. Le festival s’achève et onse dit à l’année prochaine avec un nouveaurendez-vous qui s’inscrit dans le temps. I

Patrick Delaunay

Seconde MPI/IGCPloërmelLycée La Mennais

Valhère, c’est un timbre éraillé, léché par le rock maisqui devient pur et mystiquelorsqu’elle trouve les aigus.Dans Les Fous, son texte donnede la gaieté à quelque chose de triste, elle ajoute le laid au beau et l’horreur au sublime. Valhère, c’est aussi quelquescentimètres de paroles rimées,qui viennent nous redonner un monde à inventer.

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CHRONIQUES

XX Les Inrockuptibles / Chroniques lycéennes 2009

MALOHC’EST GRAVEDOCTEUR ?

(Neomme)

Adèle Aubert,Charline Reveille Jarville-la-MalgrangeCollège Lycée La Malgrange

“Finis tes légumes” et viensécouter ce jeune breton. Maloh s’est découvert unepassion pour la musique aprèsavoir fait ses études de sport.C’est avec une guitare à la mainqu’il compose son premieralbum, 7200 minutes. Un mélanged’ambiance folk et de variétéfrançaise. Ses chansons sont simples, composées d’unrythme entraînant. Maloh possède une voix douce et apaisante comme celle du célèbre chanteur Raphaël. C’est grave docteur ? est unechanson enfantine issuede ce premier album. Les parents se reconnaîtrontdans cette chanson grâceaux paroles autoritaires d’un père à son fils. Maloh apeut-être vécu cette expérience :“De mon temps, si tu savais”.Le contraste entre la musiquedouce et les paroles dures estune originalité qui fait la qualitéde la chanson. La perfection de son album fait de Maloh un artiste complet.

Laura Martinaud-Petit NantesLycée La Colinière

Chronique médicaleDocteur Ducœur7200, avenue des Sentiments

Médecine de la voix cristalline.Le docteur Ducœur certifieavoir examiné le patient suivant :Maloh, jeune breton de 22 ans,à la voix surprenante ettouchante. Le patient est atteintd’un symptôme que l’onappellera le “rêve”, il nousentraîne dans des promenadesaux textes d’une douceur infinie.Cet homme, contagieux, par sespensées poétiques, accompagné

de sa guitare, fera traverser àplus d’un auditeur une mer desentiments, aussi bleue que sonregard malicieux. Pouvant êtrecomparé à Grégoire pour sesphrases charmantes etséductrices, Maloh est uniquepar ses compositions et jeux demots, simples et délicats, à lamanière d’un “marin d’eauxdouces”. Pour se différencier desautres chanteurs, il nous plongedans un univers totalementfolklorique et rêveur. Ce jeunepatient, définit sa maladie par des souvenirs enfantins :“caprices d’enfants gâtés” ouencore “on m’a piqué mes billes à la récré”. Ce petit homme passed’athlète sportif à athlètemusicien en un coup de main,posée sur sa guitare, et nous faitausculter son imagination devoyageur. D’un saut en longueur,il nous transportera dans sonchœur, faisant augmenter lerythme cardiaque des jeunesdemoiselles sur “une valse à troistemps”. Son pouls atteignant“7 200 minutes et 33 secondes”lorsqu’il n’est pas sur scène, il est préconisé d’en faire plusqu’un simple chanteur d’opérette.

Ce jeune patient appartient à un autremonde que seules les personnes contaminéespar son chant séducteur peuvent connaître.Une personne tout à fait inconnue au servicemédical nous poserait la question : “C’est grave docteur ?” Mais non, nous le savons déjà, Maloh est fou certes, mais fou de poésies racontant la vie… Prescription : une injection de 7 200 minutespar jour pour un état d’esprit voyageur.

Chloé RasquinToulouseLycée des Arènes

Maloh, petit breton de 22 ans, bouille degamin, cheveux ébouriffés, de quoi satisfaireles programmateurs du Boulevard des clips.Certains le compareront sans doute àRaphaël, mais Maloh a son propre style. Avec son dreamfolk aux accents celtiques etses textes nostalgiques ponctués d’une pointed’humour, le loupiot nous embarque dans son univers en quelques accords de guitareseulement. Sa musique discrète berce et nous renvoie dans la peau de cet anti-hérosaux grands yeux clairs. Elle nous rappelle ces petites choses quotidiennes qu’on ne voit plus. Les paroles sont attachantes,familières, l’histoire de ce petit garçonpeureux, ça sent le vécu, alors on se souvientgentiment, des caprices d’enfant gâté. Et puis,petit à petit, tout ça s’envole

pour laisser place à l’émotion,celle qui vous laisse là, béat.Quand c’est fini, on se surprendencore à siffloter la mélodie. Si Maloh est un nom facile à retenir, ses ritournelles ne lesont pas moins. C’est gravedocteur ? est une chanson toute simple sans paillettes niartifices et son album,7 200 minutes, vous ravira enmoins de temps que ça.

Marie Aubry-Bréchaire RennesLycée Victor-et-Hélène-Basch

Petit Maloh deviendra grand.22 ans, toutes ses dentset un grand talent. Auteur etcompositeur de son premieralbum 7 200 minutes, Maloh nous propose en ouverture C’est grave Docteur ?, petiteballade au cœur de l’enfance.Deux guitares, une voix douce et aiguë : atmosphère intime.Des paroles voluptueuses,simples, une vraie sensation de légèreté donnent des ailes àcette chanson. Une mélodiecalme et claire, pareille à sa voix.Une pointe d’innocence offertepar quelques expressionsenfantines. Un sourire se dessinesur nos visages. Mais aussi, nousretrouvons les peurs de notreenfance, comme celle du noir.Des souvenirs limpidesressurgissent d’un coin de notremémoire. Cette chansonparaît, certes, un doigt simpliste.Seulement, son aspectlégèrement frivole nous donnela possibilité de retrouver un instant notre innocenced’antan. Touché par la simplicité,coulé par la modestie.La voix cristalline du chanteurattire le public au cœur de sonunivers. Quelques rimes suffisentpour nous embarquer dansce voyage au pays du passé, il n’apas besoin de fard. Sur fond de musique folk, le texte dénoncecette société qui chercheà nous faire croire en une viemerveilleuse. Maloh ne chantepas pour nous plaire, il énoncesa vérité : il n’a jamais étéun super héros et n’en deviendrapas un. Laissez-vous bercer, “la vérité sort de la bouche des enfants”.

“Maloh n.m : 1. Se dit d’un petit monsieur de 22 ans qui en touchera plus d’un. A la manière des grands, ce petit prince

breton du folk (qu’il qualifie lui-même de dreamfolk), pas encore vraiment couronné, transporte déjà son public dans

un univers bien à lui à l’intérieur duquel il inscrit des textes touchants.” Margot Baty, Nantes ///“Il associe une plume douce

et imaginative à un style tendre et sans prétention. Ses textes rêveurs et nostalgiques évoque les saveurs

de l’enfance.” Aline Kpade, Vaux-le-Pénil

LE MEILLEURDES AUTRES

MALOH C’EST GRAVE DOCTEUR ?

DAZIBAO

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CHRONIQUES

Chroniques lycéennes 2009 / Les Inrockuptibles XXI

MANU GALUREJE FERME LES YEUX

(Kiui Prod)

Sophie PeresseBouayeLycée Alcide-d’Orbigny

Un piano. Une mélodie intrigantepresque envoûtante ; simple enapparence. Une voix quis’impose : celle d’un homme ! Des mots qui glissent, lentement,un peu comme le souffle duvent... Manu Galure, un artistedifférent, accompli du haut deses 20 ans. Premières paroles,premières phrases. Directementemporté dans un autre monde :le sien. Un univers à part entière.Pour lui, les mots n’ont plus desecret, il n’écrit pas, il compose.Comme les pièces d’un puzzle,

il suffit d’assembler. Je ferme lesyeux est un mélange de poésie, de provocation et fait preuved’un lyrisme impressionnant. Il nous impose le respect. “Peut-être me blottir derrière mesyeux clos, Fabriquer mon enclosà l’abri des regards. Pour simuler lenoir et me dissimuler. Je fermeles yeux pour chanter.”On en reste bouche bée. La façon dont il maîtrise les motsest impressionnante, et il s’enamuse ! Des grands discoursarrogants, aux petits reprochespas vraiment innocents : Manu Galure se joue de nous eton en redemande ! Il doit sonexpérience à son groupe nomméLes P’tits Thommes. Plus qu’unprovocateur au cœur d’artichaut,Galure est un créateur, un artistedébordant d’idées et de talent.On serait prêt a le suivre au boutdu monde les yeux fermés...

“Ce poète expressionniste sait trouver

les mots pour exprimer ce qu’il ressent,

des mots qui font rire, des mots

qui touchent, des mots poétiques...”

Margaux Le Gal, Nantes

LE MEILLEURDES AUTRES

MANU GALURE JE FERME LES YEUX

Quentin BurlotteNantesLycée La Colinière

Manu, l’homme qui vivaitla musique. “C’est peut être pour fuir”, “C’est peut être pour tenir”, “C’est peut être pour dire”. Voilà le petit air musical qui metrotte dans la tête depuisun moment. Mais quel chanteura bien pu me mettre cet air dans le crâne ? C’est peut êtrebien Manu Galure avec samusique Je ferme les yeux. Ça y est ! Je me rappelle cettemusique qui, malgré sonapparente simplicité, metransporte. Avec sa doucemélodie jouée au piano, qui medonne l’impression d’être dansune barque sur un lac paisibleen train de regarder le ciel. Le ton de sa voix donne un effetd’osmose à ce lac paisible.Venons-en au principal : le thèmede la chanson. Pourquoichanter ? Vaste question, quiappelle autant de réponses qu’il ya d’individus. Pourtant, Manu acette force de regrouper dans sachanson les principales émotionsque la musique peut satisfaire. Etlorsqu’il commence à chanter,soudain, ce petit lac paisiblesemble se transformer en unemer infinie telle une peinture quiprend vie. Au fil de la chanson,Manu formule ses hypothèses,ses pensées, et on se laisseentraîner par ce mélange defascination et de doute qui nousberce. Voilà, maintenant surcette barque, on ne sait pas oùaller, on se sent perdu, pourtanton est fasciné car cela nousprocure un plaisir énorme, un plaisir qui nous permet “defuir”, “de dire”, “de jouir”. Quelle interprétation magistralecar Manu réussit à nousfaire ressentir les principalesémotions que procure lamusique. Si vous ne savez pluspourquoi la musique estuniverselle, écoutez Je ferme les yeux et vous trouverez à coupsur votre réponse.

Marie MinkerForbachLycée Jean-Moulin

Il a de l’allure ce Galure !On dresse l’oreille lorsque lachanson débute sur un tour dechant en solo et en formulepiano-voix. Manu Galure, malgréson jeune âge, montre unecertaine maturité et une pointed’humour dans son écriture. C’est un artiste talentueux qui,

par son phrasé, se montre différent, il chantecomme on joue un rôle au théâtre, il soupire,il laisse échapper un rire... Il ponctue avecfinesse sa chanson de paroles poétiques. Le piano est nuancé en fonction des paroleset accompagne ses émotions. Cette chanson nous invite dans une ambianceintimiste où le chanteur fait uneintrospection. Il réfléchit sur lui-même en sedemandant pourquoi il ferme les yeux pourchanter. Cette chanson atypique a une chute, la fin sedétache du reste et se montre être unparadoxe final poétique qui donne à réfléchirsur le fait qu’on puisse rêver de la réalité.

Aurélie GravillonVaux-le-PénilLycée Simone-Signoret

Chapeau l’artiste ! C’est avec cet accessoirede scène que Manu Galure a créé unpersonnage nouveau dans le contexte de lascène française. Jeune artiste influencé parles accents dramatiques du mythiquemonsieur Jacques Brel, il affirme sa jeunessedorée et ses préférences pour une certaineacoustique. En fermant les yeux, on apprécietout particulièrement l’immense talent de cepetit bonhomme. La belle écriture, signed’une maturité sans contexte du gaminGalure, nous submerge d’émotions et nousremplit de sentiments. Les accentuations desnotes plus aiguës de son cher compagnon descène relèvent son timbre de voix, rehaussantl’arrogance de son style musical. C’est unhomme-piano qui réussit à mêler notesaiguës de l’instrument et voix théâtrale. Avec Je ferme les yeux, Manu Galure veutcroire à la possibilité d’une illusion dérisoirepour échapper à la réalité d’aujourd’hui. En nous incitant à faire ce geste simple,il lance l’espoir d’un imaginaire qui pourraitchanger ce monde. Manu Galure évoquetout à fait l’épicurien en herbe. Il reflèteparfaitement le comportement d’unepersonne recherchant le plaisir par tous les moyens dans le monde qui l’entoure. Ceci est mis en évidence par la tonalitéutilisée dans la prononciation du motjouissance. Il relève ainsi l’intensité de cette émotion mais aussi son importancedans la vie. On peut dire que Manu Galureest un vrai phénomène talentueux et qu’il a su créer son propre style en nousdépaysant du genre musical actuel…

DAZIBAO

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tant le morceau dégage uneénergie rock (punk ?), garage.Rentre-dedans, il évoque l’exildes parents, conséquence de laguerre. La chanteuse leur rendhommage et veut tirer sa forcede leur difficile histoire. Fière,jamais elle ne se laissera faire.Elle laisse libre cours à sa colère,ce qui fait la force de cettechanson teigneuse et revêche.Trop instinctive peut-être parfois(la comparaison qui sert de titre,naïve et un peu cliché quandmême !), mais tellement en accord avec le tempéramentet l’univers d’Ina-Ich.

“Des textes corrosifs, des paroles

tranchantes, comme des lames qui vous

détruisent un peu plus à chaque écoute,

le tout allié à une musique puissante,

la machine de guerre Ina-Ich prend tout

son sens.” Marion Patis, Toulouse

LE MEILLEURDES AUTRES

INA ICH LIBRE COMME L’EAU

LA MAISON TELLIERGRÈVE GÉNÉRALE

(Euro-visions)

Clara ColucciChennevières-sur-MarneLycée Samuel-de-Champlain

Chères lycéennes ! Chers lycéens !C’est en ces temps de criseque je vous parle ! La crise ducouple fait rage ! Nous entamonsdonc une Grève généralereconductible jour après jourmenée par La Maison Tellier ! Ecoutons leurs cuivres tellementRevolution des Beatles, laissons-nous emporter parleur texte à la Bénabar (en moins Bénabarbant).Guidons-nous à travers leurssolos de guitare au son crade,ces crash explosifs, cette rideclaquante ! Eux ont su nousparler ! Marre des “Mon cœurmon amour”, nous voulonsdu lourd ! Aujourd’hui, c’est La Maison Tellier qui nous faitvibrer ! Sans plagier Noir Déz’,sans foutre la honte au rockfrançais. Avec classe, humour et bon goût. Le texte est drôle,léger. Les cuivres apportent une touche originale sans pourautant tomber dans un ska à deux sous, on a envie de sauterpartout, de danser de manièreridicule, bref, de se lâcher !Le deuxième album de La Maison Tellier, Second souffleest sorti en octobre 2007 etdepuis, ils sillonnent la Francepour prêcher leur bonne parole.Ils ont déjà à leur actif deux EP,un premier album et despassages remarqués auxEurockéennes. Alors vous aussi,faites péter la sono et repreneztous en chœur ce refrain :

“Helmut, Raoul, Léopold,Alphonse et Alexandreprésidents ! Yes they can !”Comme quoi, en Normandie,il n’y a pas que des vaches et des pommes… Y’a aussi du bon rock-folk frais et classieux.Bref, sachez qu’à défaut derévolution, on doit pouvoirenvisager de se laisser vibrer surl’son de La Maison Tellier.

Océane Piednoir RennesLycée Victor et Hélène Basch

L’amour et ses réformes.Aimer et vivre ensemble n’estpas une mince affaire. Helmut,Raoul, Léopold, Alexandre etAlphonse Tellier l’ont biencompris. Certes, l’amour est lesujet bateau dans le domaine dela chanson. Cela fait desdécennies qu’on nous chante seslouanges. Certains aimentjusqu’à la déchirure, sans force etsans armure, d’autres offrentdes perles de pluie venued’un pays où il ne pleut pas… Mais non, ici, pas de grandedéclaration à la Jacques Brel.Pour les paroles, on se rapprocheplutôt du pessimisme des RitaMitsouko qui pensent que “leshistoires d’amour finissent mal, engénéral”. Grève générale ne serapas la chanson qui marqueral’histoire, certes, mais il faut toutde même avouer que La MaisonTellier manie à merveille lesprocédés métaphoriques. Ellepersonnifie l’amour en gréviste sisubtilement que c’est à peine sil’on s’en rend compte, qualité quel’on ne leur attribuerait pas aupremier abord : mal rasés, desyeux enfantins, des faussesallures d’adolescents en quête degloire, à première vue on pense àune blague ! Mais lorsqu’on les

DAZIBAO

INA-ICHLIBRE COMME L’EAU

(Wagram)

Anthony Maïa, Thibault Vialade,Steven Clairvil, Jérôme ThieryNogent-sur-MarneLycée professionnel La Source/Val-de-Beauté

Ina-Ich ne fait pas que chanter son vécu : ellevous le crache à la figure ! Avec ce titre, ellenous pousse dans son monde, pesant, lourdet provocateur. Le monde d’une fille issue deparents immigrés au parcours mouvementé.L’instrumentation, les sons distordusaccentuent la hargne de la voix de cettemusicienne hors du commun. Pas de guitarespourtant (mais des nappes de synthé et unerythmique syncopée), ce qui est surprenant,

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XXII Les Inrockuptibles / Chroniques lycéennes 2009

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CHRONIQUES

“Maison close de province,

tenue par Madame Tellier,

est “fermée pour cause

de première communion”

au grand dam des habitués.

Après un périple en chemin

de fer, les pensionnaires

assistent à la cérémonie

et sont émues par Constance,

nièce de Madame Tellier,

et l’ambiance de…”Anthony

Chaumont Cusset ///“A la

première écoute de Grève

générale, les influences

des années 70 sont grandes :

guitares électriques

saturées, rythmique

classique basse/batterie,

section cuivre… l’influence

folk-rock est indéniable :

l’utilisation d’une phrase

de la marseillaise rappelant

quelques garçons dans

le vent, les trompettes

rappelant le désireux album

d’un certain Zimmermann…”

Felix Kail, Isle-sur-la-Sorgue

LE MEILLEURDES AUTRES

LA MAISON TELLIER GRÈVE GÉNÉRALE

NICOLAS JULESPAPIER BLEU (L’Autre Distribution)

Julie BasseNantesLycée Guist’hau

Du Papier bleu pour des motsdoux, Nicolas Jules est loin de lapage blanche. Carburant à l’encreet roulant à la poésie, après avoirposé son cœur sur la table en2004, à qui destine-t-il donc cescris de douceur tout droit sortisde son dernier album Powête ?Du prix du jury du festival AlorsChante de Montauban au prixFélix-Leclerc des Francofoliesde Montréal en passant cinq foispar celles de La Rochelle, rienn’arrête ce chevelu un brin fleurbleue, tout juste ce qu’il faut, qui porte au micro la langue deRaymond Queneau à la manièrede Raymond Devos. L’auditeuroscille entre la légèreté et ladérision d’un texte interdisant la lecture au premier degré.Jicolas Nules (c’est ainsi qu’ilaime à se nommer) estaccompagné par Roland Bourbon,son fidèle batteur à l’apparence d’un mangeur d’enfants. Des doigts dégringolent sur unmanche de guitare tandis queles mots cabriolent jusqu’àvenir caresser nos écoutilles.Ouvrez-les grandes à ce duo virtuose, de la baguette pour l’un, de la plume pourl’autre. Cette plume justement, écoutez-la avant qu’elle ne disen’importe quoi ou bien chantecomme n’importe qui !

Marie EphèmeVaux-le-PénilLycée Simone-Signoret

Nicolas Jules est une crapule, ettransforme ses pannes d’écritureen drôles d’aventures. Après trois notes de contrebassemystérieuses, équilibrées par une batterie sans histoires, le jeu de pistes auquel vous livrel’artiste commence bien vite :Powête ironique qui prend la pose face à sa page blanche, et cherche l’inspiration surPapier bleu, ou jeune amoureuxtransi mais fantasque, oubliantsa timidité dans des vocalisesinspirées par Brigitte Fontaineou Catherine Ringer. Il ne faudrait pas prendreNicolas Jules pour un amateur, et ce dernier a déjà glané denombreuses récompenses, dontle Prix chanson des Découvertes

du Printemps de Bourges, en 1999 (remis par Jacques Higelin). L’album Powête, sorti en2008, est ainsi son cinquième opus ; joliparcours à 36 ans ! C’est un artiste complet,auteur-compositeur-interprète, qui vousamuse avec sa voix moitié dandy, moitié titifarceur, et les accords pleurés de sa guitareélectrique rappellent aussi l’humour du bonhomme, qui fait une chanson surl’absence de sa muse ! Le bougre a finalementraison, et trouve alors son originalité au sein de la scène française, mêlant qualitéd’écriture et ambiance de café-théâtre. Sa démarche est gagnante, puisque votreoreille sourira aux astuces du style, pleind’ellipses et de jeux de mots. Derrière cettehabileté littéraire, vous serez au final vaincuspar l’appel à la sensualité, par “la main qui caresse” ou le baiser qui clôt la chanson.Nicolas est un Jules irrésistible !

“Dans cette chanson,

Papier Bleu, le “powête”

Nicolas Jules parle du toucher

et réclame un baiser.”

Stéphanie Heuret, Vesoul

écoute jouer de la guitare, du tambour, de la mandoline, de la trompette, du banjo, nossourires narquois se transformenttrès vite en hochements de têteapprobateurs. Pourtant, lacourse aux compliments s’arrêtelà, car même si les sonorités folk venant d’outre-Atlantiquemélangées aux parolesfrançaises sont plaisantes, on a tendance à se lasser de la voixdu chanteur. On lui donnerait un zéro pointé pour sa vivacité :c’est comme si Saez nouschantait le dernier Montagné,plutôt burlesque, et on n’y croitqu’à moitié. Alors, amateurs de musique française, remercionsLa Maison Tellier de nous fairepasser du bon temps et soyons-leur reconnaissants pour ce ventde fraîcheur qu’ils ont soufflé sur la variété française, beaucouptrop commerciale aujourd’hui.

LE MEILLEURDES AUTRES

NICOLAS JULES PAPIER BLEU

DAZIBAO

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Lavo

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YOP

Chroniques lycéennes 2009 / Les Inrockuptibles XXIII

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