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Pratique du chiffre d’affaires en IFRS Véronique BOUSCAYROL Gilles COUPRIE Jean-Luc PEYRET Nicole RUEFF Bruno WILHELM Coordonné par Nicole RUEFF Avec la collaboration de Françoise LE MEUR Préface de Yves-Thibault de Silguy Président de Vinci Avant-propos de Daniel Bacqueroët Président de la DFCG Postface de Bernard Mirailles, Président de l’APDC

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Page 1: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

Pratiquedu chiffre d’affaires

en IFRS

Véronique BOUSCAYROLGilles COUPRIEJean-Luc PEYRETNicole RUEFFBruno WILHELM

Coordonné parNicole RUEFF

Avec la collaboration de Françoise LE MEUR

Préface de Yves-Thibault de SilguyPrésident de Vinci

Avant-propos de Daniel BacqueroëtPrésident de la DFCG

Postface de Bernard Mirailles,Président de l’APDC

Page 2: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

© Dunod, Paris, 2010ISBN 978-2-10-055484-3

Page 3: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

TABLE DES MATIÈRES

REMERCIEMENTS VI

PRÉFACE VII

AVANT-PROPOS IX

INTRODUCTION 1

LE CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS : ASPECTS GÉNÉRAUX 5

1. Aspects généraux de la comptabilisation du chiffre d’affaires 6

2. Difficultés à surmonter : les situations de mandat et les taxes associées 11

VENTES DE BIENS 17

1. Dispositions de la norme 18

2. Principales divergences avec les référentiels français et US GAAP 19

3. Difficultés à surmonter et clés pour une mise en œuvre réussie 21

4. Textes de référence 32

PRESTATIONS DE SERVICES 33

1. Dispositions de la norme 33

2. Principales différences avec le référentiel français et les US GAAP 40

3. Difficultés à surmonter et clés pour une mise en œuvre réussie 51

4. Textes de référence 60

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IV

PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

CONTRATS DE CONSTRUCTION 63

1. Dispositions de la norme 63

2. Principales divergences avec les référentiels français et US GAAP 75

3. Difficultés à surmonter et clés pour une mise en œuvre réussie 78

4. Textes de référence 88

OPÉRATIONS EN DEVISES, ACTUALISATION, RISQUE DE CRÉDIT 89

1. Opérations en devises 89

2. La problématique de l’actualisation 95

3. Contrôle de la solvabilité du client 98

4. Contrôle du risque-pays 99

TRANSACTIONS À ÉLÉMENTS MULTIPLES 105

1. De quoi s’agit-il ? 105

2. Principales dispositions des référentiels français, international et américain 106

3. Comment conduire l’analyse du contrat ou de la transaction ? 115

4. Comment décomposer et déterminer l’échéancier des produits de la transaction ? 118

5. Clés pour une mise en œuvre réussie 123

6. Textes de référence 130

PROGRAMMES DE FIDÉLISATION DE LA CLIENTÈLE 131

1. Dispositions de l’interprétation IFRIC 13 132

2. Principales divergences avec les référentiels français et US GAAP 139

3. Difficultés d’application et clés pour une mise en œuvre réussie 140

4. Textes de référence 150

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Table des matières

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SEPT CAS SPÉCIAUX 151

1. Ventes avec engagement de reprise (VAER) 152

2. Vente et rachat lié 157

3. Échanges de biens ou de services 161

4. Autres opérations 168

RETOURS D’EXPÉRIENCE OU COMMENT FONT-ILS ? 173

1. Groupe Areva 174

2. Groupe bioMérieux 181

3. Laboratoires Boiron 184

4. Dassault Systèmes 188

5. Groupe Havas 190

6. Groupe Steria 196

IMPACTS DE LA PREMIÈRE APPLICATIONSUR LES ÉTATS FINANCIERS 201

1. Présentation de l’échantillon 202

2. Analyse globale 204

3. Qui sont les groupes présentant les plus forts impacts ? 219

REVENUE RECOGNITION OU LA REFONTE DES NORMES SUR LE CHIFFRE D’AFFAIRES 225

1. Revenue Recognition : contexte du projet et orientations proposées dans le document pour discussion 226

2. Résultats de l’appel à commentaires 236

3. Les prochaines étapes 239

GLOSSAIRE 241

POSTFACE 245

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REMERCIEMENTS

Les auteurs tiennent à adresser ici leurs sincères remerciements :

À Françoise LE MEUR, contrôleur financier chez Orange BusinessServices, CIA, certifiée Visa IFRS, pour sa participation aux travaux et sesapports marqués de son expérience des fonctions comptabilité et auditinterne.

Ainsi qu’à :

Daniel BACQUEROËT, Président de la DFCG, pour ses encouragementsau long de la préparation de l’ouvrage

François MEUNIER, Président du comité scientifique de la DFCG, pour lesoutien apporté à leur initiative

Tous ceux qui ont accordé le temps nécessaire afin que leur témoignagerenforce le caractère pratique et vécu de l’ouvrage.

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PRÉFACE

La crise financière et économique des deux années écoulées a donné uneactualité nouvelle à la réflexion selon laquelle la comptabilité n’est pasneutre.

Dans les controverses récentes portant sur la normalisation comptableinternationale, les normes sur le chiffre d’affaires restent hors de cause. Ellessont acceptées dans leur capacité à fonder une mesure pertinente et lisible desactivités économiques de l’entreprise.

Pour le Groupe Vinci, depuis le passage aux IFRS en 2004, ces normes sontle socle de la communication financière avec les actionnaires, les analystes,les banques et les marchés. En interne, à tous niveaux, en tous pays, le mana-gement s’engage, pilote, rend compte sur la base de ce même référentiel.Lors d’opérations d’acquisition ou de cession d’entreprises publiant en IFRS,les discussions sur le niveau d’activité des entités concernées s’amorcent surla base d’une information comparable et qui n’exige plus désormais de retrai-tement préalable pour retrouver la réalité économique derrière le chiffred’affaires.

Pertinence, lisibilité et comparabilité de la mesure d’activité sont les troisavantages majeurs qu’apportent les IFRS ou, plus exactement, une justeapplication des IFRS aux opérations de l’entreprise qui suppose une appro-priation par les acteurs opérationnels autant que financiers, une organisationet des systèmes adaptés, et une gouvernance forte.

Pratique du chiffre d’affaires en IFRS est nourri d’expériences opération-nelles en la matière. Cet ouvrage vise trois objectifs. Il rend les normes sur le

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VIII

PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

chiffre d’affaires plus intelligibles et plus concrètes par l’explication et parl’exemple. Il présente la vision de professionnels sur les points de vigilanceet les difficultés à surmonter. Enfin, il sécurise dans leur démarche les diri-geants finance-gestion, et plus largement les équipes responsables de lacomptabilisation et de l’analyse du chiffre d’affaires, en leur donnant des cléspour réussir la mise en œuvre.

Le monde des affaires évolue en permanence. Les entreprises s’adaptent etse transforment. Le référentiel IFRS évolue lui aussi. La réforme des normessur le chiffre d’affaires est en cours. Il s’agit d’un domaine majeur pour laconvergence entre IFRS et US GAAP, donc pour la comparabilité au niveauinternational des groupes européens et des groupes américains. La mise enœuvre d’une réforme nécessite une bonne préparation. Ici également, Prati-que du chiffre d’affaires en IFRS fait œuvre utile en alertant les dirigeants« finance-gestion » et leurs équipes, et les aidera, le moment venu, à anticiperles impacts de l’évolution des normes comptables pour leur entreprise.

Yves-Thibault de SilguyPrésident de Vinci

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AVANT-PROPOS

Enfin, le voilà, l’ouvrage de référence que nous, directeurs financiers, prépa-rateurs des comptes en entreprise, attendions depuis des années : la« Pratique du chiffre d'affaires en IFRS », avec une mise en perspective parrapport aux US GAAP et au référentiel français.

Comprendre le chiffre d’affaires, c’est souvent comprendre plus de 75 %du tableau de bord de l’entreprise, mais aussi mesurer la performance decroissance de l’entreprise. En tant que Directeur Financier ou Directeur duContrôle de Gestion, il nous faut disposer d’une « bible » opérationnelle dela reconnaissance du revenu. Par là, entendons un ouvrage qui traite desméthodologies, de leurs mises en place, des pièges à éviter, et qui, ce faisant,nous aide également à déterminer l’adéquation entre revenu et marge ainsiqu’à réaliser la prévision du chiffre d’affaires sur la base du portefeuille decommandes ou d’activités.

C’est à ces questions que les auteurs de Pratique du chiffre d’affaires enIFRS ont voulu apporter des réponses. Ce groupe de travail, constituéd’experts et de préparateurs des comptes en entreprise, piloté par NicoleRueff, s’est naturellement fixé l’objectif de faire partager ses connaissances,non seulement à travers une lecture opérationnelle des normes, mais aussiavec des cas pratiques vécus.

Ainsi, les auteurs analysent et illustrent, avec clarté et précision, la façon detraduire les activités économiques dans le compte de résultat. Ils nousdonnent donc des clefs pour organiser au mieux la reconnaissance du revenuau sein de l’entreprise. Une double opportunité s’offre alors aux responsables

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PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

opérationnels : faire le lien entre l’activité et sa transcription dans les étatsfinanciers ou tableaux de bord de l’entreprise (via le pourcentage d’avance-ment, par exemple), et aussi intégrer les préoccupations ou les attentes desdirecteurs financiers ou contrôleurs de gestion bien en amont, dans le proces-sus décisionnel de la prise de commande. Ce livre devrait donc réconcilierdéfinitivement Opérations et Finance autour d’un tableau de bord unique,compris et accepté par tous.

Dès l’introduction des IFRS en Europe, la DFCG (Association Nationaledes Directeurs Financiers et de Contrôle de Gestion) a entendu apporter unecontribution aux réflexions et travaux divers suscités par l’application de ceschangements majeurs dans les groupes français ; c’est donc tout naturelle-ment qu’elle s’associe et soutient cet ouvrage, fruit d’un de ses groupes detravail.

« Longue est la route par le précepte, courte et facile par l’exemple »(Sénèque).

Daniel BacqueroëtPrésident de la DFCG

(Association Nationale des Directeurs Financierset de Contrôle de Gestion)

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INTRODUCTION

« Qu’est-ce que le chiffre d’affaires ? », la question paraît presque incongruetant la réponse est évidente. Le chiffre d’affaires est, non seulement lepremier poste du compte de résultat, mais aussi un indicateur clé dans lacommunication financière, le chiffre que regardent en premier les analysteset investisseurs, les prêteurs et autres parties prenantes lorsqu’il s’agitd’apprécier la situation et les perspectives d’une entreprise. C’est de plus lamesure de l’activité de l’entreprise, l’objet des efforts quotidiens des mana-gers opérationnels et de leurs équipes, un critère essentiel d’évaluation deleur performance. Le chiffre d’affaires est bien tout cela. Cependant, cela neconstitue pas une définition opérationnelle ni une explication pratique sur lamanière de le déterminer.

Or, bien déterminer le chiffre d’affaires n’est pas si simple qu’il y paraît,notamment en IFRS. Le référentiel international comporte deux textes prin-cipaux consacrés à ce sujet, les normes IAS 11, « Contrats de construction »,et IAS 18, « Produits des activités ordinaires ». Il s’agit en soi d’une singula-rité et d’une force par rapport à la plupart des référentiels comptables natio-naux – dont le référentiel français – qui n’ont pas d’équivalent. En revanche,rédigées sous forme de principes, très synthétiques, écrites dans un langagequi n’est pas celui de l’entreprise, ces normes soulèvent des questionsnombreuses au moment de l’application. Le besoin des professionnels restede bien en expliquer les dispositions, de mettre en évidence les pièges etdifficultés, de présenter les pistes pour une application réussie, de partagerles expériences.

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PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

C’est de cette réflexion qu’est née l’idée de Pratique du chiffre d’affairesen IFRS, celle d’un guide pratique qui présente et illustre les dispositionsnormatives, en s’attachant aux points complexes et à ceux où la norme estpeu explicite. Écrit par des praticiens pour des praticiens, le livre insiste surles difficultés d’application et propose des clés pour une mise en œuvre réus-sie. Le partage d’expérience s’enrichit du témoignage de six groupes de réfé-rence – de secteurs et de taille différentes – sur la mise en œuvre etl’application des normes sur le chiffre d’affaires et, plus largement, sur « leurvie en IFRS ».

La notion de chiffre d’affaires n’est pas définie dans le référentiel IFRSmais elle est généralement comprise comme correspondant au montant desaffaires réalisées avec les tiers au titre des principales activités économiquescourantes de l’entreprise : les ventes de biens et les prestations de services.Le concept est donc plus étroit que celui de produits des activités ordinaires :les autres produits de l’activité comme les droits de licence, les redevances,les revenus financiers – pour l’essentiel, ceux qui proviennent de l’utilisationd’actifs de l’entreprise par des tiers – en sont exclus. Dans cet ouvrage, nousnous centrons sur le chiffre d’affaires stricto sensu, sans aborder les « autresproduits de l’activité », et couvrons le sujet en onze chapitres, regroupés entrois sous-ensembles.

En premier lieu sont évoqués les principes généraux de la comptabilisationdu chiffre d’affaires en IFRS. Puis trois chapitres les déclinent et les précisentpar nature de transaction élémentaire : les ventes de biens, les prestationsde services et les contrats de construction, qui soulèvent chacune desproblématiques spécifiques. Les entreprises ouvertes à l’international factu-rent en devises ; certaines d’entre elles, en même temps qu’elles vendent,accordent des délais de paiement étendus à leurs clients ; quelles en sont lesconséquences pour la mesure du chiffre d’affaires ? C’est, entre autres, cequ’explore le chapitre 5, « Opérations en devises, actualisation, risque decrédit ».

Les clients d’aujourd’hui sont toutefois demandeurs de solutions plus quede produits ou de services isolés et, de leur côté, les entreprises trouvent dansl’offre de « packages » un levier intéressant du point de vue marketing. Pources deux raisons, la sophistication des offres s’accroît. Les incidences pourl’analyse de la formation et la comptabilisation du chiffre d’affaires en sontévoquées au chapitre 6, « Transactions à éléments multiples ». Récompenserles clients de leur fidélité et pérenniser ainsi la relation avec eux, la pratiqueen est courante. Le référentiel international est désormais doté d’une inter-prétation qui fixe les principes de comptabilisation correspondants. Sonapplication n’est pas nécessairement intuitive, le chapitre 7, « Programme defidélisation clients », s’attache à l’expliquer. « Sept cas spéciaux », c’est letitre du chapitre suivant, spéciaux parce qu’ils sont plutôt le fait de certainstypes d’activités, certains secteurs. Au-delà de son utilité pour les entreprises

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Introduction

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directement concernées, ce chapitre peut aussi, en favorisant une démarchepar analogie, éclairer le lecteur sur d’autres aspects de l’application desnormes IAS 11 et IAS 18.

La présentation type des chapitres 2 à 7 s’organise en quatre parties princi-pales précédées d’une synthèse « Ce qu’il faut retenir ». « Dispositions de lanorme » rappelle le texte de référence, la philosophie ou logique d’analyse,avec des illustrations qui rendent concrètes les situations évoquées et permet-tent d’expliciter la démarche. « Principales divergences avec le référentielfrançais et les US GAAP » vise à attirer l’attention sur les points où la vigi-lance s’impose. C’est là que les équipes devront être alertées sur la nécessitéde préparer, de faire ou de contrôler des retraitements. C’est là également quese trouveront les limites du recours aux US GAAP pour décliner en disposi-tions pratiques les principes exposés dans la norme internationale.« Difficultés d’application et clés pour une mise en œuvre réussie »expose les points plus délicats de l’application, ceux qui vont soulever desquestions dans la filière finance-gestion et chez les responsables de la comp-tabilisation du chiffre d’affaires. « Cas pratique » déroule un ou plusieurscas pratiques, et en explique le traitement.

Chacun de ces chapitres peut être lu indépendamment des autres. Lelecteur sélectionnera ceux qui sont d’intérêt pour lui, par exemple en fonctionde la nature des activités de son entreprise.

Les trois derniers chapitres ont une vocation différente, celle de prendre durecul et d’ouvrir sur le futur. Le propos du chapitre 9, « Retours d’expérienceou comment font-ils ? », est de traiter des implications managériales, parta-ger les expériences, les bonnes pratiques, voire les préoccupations en matièrede gouvernance du chiffre d’affaires et de contrôle interne. Six groupes deréférence y évoquent leur passage aux IFRS, leur fonctionnement sous IFRS,leur point de vue sur les projets en cours. Dans le chapitre 10, « Impactsfinanciers », nous faisons une analyse sur les impacts du passage à « lanouvelle comptabilisation du chiffre d’affaires » pour 50 groupes européensdans 10 secteurs différents : pour qui était-elle nouvelle ? en quoi était-ellenouvelle ? quelles ont été les incidences sur les trois indicateurs clés que sontle chiffre d’affaires, le résultat net et les capitaux propres ? Enfin, l’IASB,dans un projet commun avec le FASB, a entrepris une remise à plat desmodèles actuels de comptabilisation pour fonder une nouvelle norme quirégirait à l’avenir la comptabilisation du chiffre d’affaires. L’équilibre actuel-lement trouvé autour d’IAS 11 et IAS 18 pourrait-il être affecté par les dispo-sitions de la future norme « revenue recognition » ? C’est l’un des sujetsabordés dans le chapitre 11, « Revenue Recognition ou la refonte des normesde comptabilisation du chiffre d’affaires ».

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1 LE CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS : ASPECTS GÉNÉRAUX

CE QU’IL FAUT RETENIR

Le chiffre d’affaires comprend tous les produits des activités menées par l’entreprise dans lecadre de ses affaires normales et courantes ainsi que les activités liées à titre accessoire oudans le prolongement des activités principales : les ventes de marchandises et de biensproduits par l’entreprise, les prestations de services et les contrats de construction, et le caséchéant les contrats de location.La notion a été définie par les praticiens, pour lesquels elle représente un indicateur clé del’activité, largement utilisé dans la communication interne et externe. Elle ne figure pas dansle référentiel IFRS qui s’intéresse au concept plus large de « produits des activitésordinaires » ; celui-ci inclut également les produits nés de l’utilisation des actifs de l’entre-prise par les tiers comme les redevances, les intérêts et les dividendes.Pour comptabiliser un chiffre d’affaires, quelle que soit la nature de la transaction sous-jacente, les critères généraux suivants doivent être satisfaits :– la probabilité d’obtention des avantages économiques associés à la transaction doit être

établie, c’est-à-dire qu’il n’y aura pas remise en cause de la transaction et que lerecouvrement de son produit est raisonnablement assuré ;

– l’entreprise doit s’être libérée d’une part importante de ses obligations, c’est-à-dire avoir« mérité » le produit : le bien doit en principe être livré et le service rendu ;

– il doit être possible d’évaluer le montant des produits et de leurs coûts associés defaçon fiable ;

– les risques liés au bien ou au service doivent avoir été transférés.Ces critères généraux sont complétés par des critères spécifiques aux différentes naturesde transaction. En d’autres termes, la comptabilisation du chiffre d’affaires liée à une tran-saction et la reconnaissance du résultat correspondant vont dépendre des réponses à deuxquestions fondamentales :– s’agit-il d’une seule transaction ou de plusieurs transactions, à regrouper ou à séparer ?– quelle est la nature de la transaction ? question qui, de surcroît, détermine la norme

applicable.Dans certains cas, la réponse s’impose d’emblée ; d’autres situations sont plus délicates oumoins familières.Le principe général posé par la norme IAS 18 est celui d’une évaluation du CA né ou ànaître de la transaction à la juste valeur de la rémunération reçue ou à recevoir. Sou-vent, il s’agira tout simplement du prix contractuel mais des cas plus complexes existent.

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PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Le chiffre d’affaires constitue un indicateur clé de l’activité d’une entreprise,très largement utilisé par les analystes financiers et les investisseurs lors del’appréciation de son positionnement et de ses perspectives. En interne, leflash ou reporting de chiffre d’affaires en début de mois est un temps fortdans la plupart des groupes et des entreprises. Nous pourrions illustrer parmaints autres exemples l’importance de cette mesure de l’activité de l’entre-prise.

Pourtant, le chiffre d’affaires peut être un indicateur difficile à cerner, quisuscite de nombreux débats parmi les préparateurs des comptes, les utilisa-teurs et les normalisateurs.

Les dispositions de la norme IAS 18 s’attachent à identifier les produitsréellement générés par l’entreprise. Bien que les principes de base de lareconnaissance du revenu soient simples à comprendre a priori, le diable estdans les détails et la bonne application des dispositions demande une grandevigilance. Une vigilance d’autant plus indispensable que des évolutionséconomiques rendent l’exercice plus délicat que par le passé :

– la complexification des modèles économiques et des offres, que chacunconnaît ;

– l’extension de la délégation comptable donnée par la direction financièreet comptable aux services opérationnels, services commerciaux, contrô-leurs de gestion. Cette délégation fait gagner en efficacité et en réactivité.Elle a une contrepartie dans le fait que les responsables de la comptabilisa-tion du chiffre d’affaires ne sont pas les experts normatifs ;

– la réduction des délais de clôture ne laisse pas de place aux allers-et-retours de mise au point, elle impose que la première comptabilisation soitla bonne.

ASPECTS GÉNÉRAUX DE LA COMPTABILISATION DU CHIFFRE D’AFFAIRES

1.1 Qu’appelle-t-on produits, produits des activités ordinaires et chiffre d’affaires ?

Le cadre conceptuel des IFRS définit dans un premier temps les élémentsd’actifs et de passifs, puis considère les produits (et les charges) comme desvariations d’actifs ou de passifs. Ainsi, les produits sont définis comme lesaccroissements des avantages économiques intervenus au cours de la périodesous forme d’entrées ou d’augmentations de valeur des actifs ou de diminu-tions des passifs, qui conduisent à des accroissements de capitaux propres

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Chiffre d’affaires en IFRS : aspects généraux

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autres que les augmentations relatives aux apports effectués par les partici-pants aux capitaux propres. On retrouve là une notion d’enrichissement(variation de bilan), plus qu’une notion classique de résultat.

Les produits regroupent à la fois les produits des activités ordinaires et lesprofits ou gains venant d’activités qui ne sont pas des activités ordinaires. Lesactivités ordinaires correspondent aux activités opérationnelles (c’est-à-direautres que les activités d’investissement et les activités de financement) exer-cées sur une base récurrente ; elles s’opposent aux activités accessoires àcaractère non récurrent comme la cession d’immobilisations.

Les produits des activités ordinaires sont donc les entrées brutes d’avan-tages économiques au cours de l’exercice dans le cadre des activités ordinai-res d’une entreprise, lorsque ces entrées conduisent à des augmentations descapitaux propres autres que les augmentations relatives aux apports des parti-cipants aux capitaux propres (IAS 18 § 7). Les produits se distinguent desautres crédits du compte de résultat tels que, par exemple, les résultats decessions d’actifs.

Le terme « chiffre d’affaires » n’est pas défini dans le référentiel IFRS.Généralement, la rubrique chiffre d’affaires du compte de résultat comprendtous les produits des activités menées par l’entreprise dans le cadre de sesaffaires normales et courantes ainsi que les activités liées à titre accessoire oudans le prolongement des activités principales. Sont ainsi concernées : lesventes de marchandises et de biens produits par l’entreprise, les prestationsde services et les contrats de construction, et le cas échéant les contrats delocation1. Par contre les produits venant de l’utilisation des actifs par les tiers(les redevances de licences, les intérêts et les dividendes) n’en font générale-ment pas partie.

Le référentiel IFRS est doté de deux normes principales, IAS 18 et IAS 11,qui fixent les principes de comptabilisation du chiffre d’affaires, la premièrepour les ventes de biens et les prestations de services, la seconde pour lescontrats de construction. Nous aborderons leurs dispositions pratiques et leurapplication dans les chapitres suivants. Mais auparavant, nous évoquons iciles principes généraux.

1.2 Que faut-il pour qu’il y ait chiffre d’affaires ?

La question première en matière de comptabilisation des produits des activi-tés ordinaires, et donc du chiffre d’affaires, consiste à identifier le fait géné-rateur de la comptabilisation. Le principe général énoncé dans le cadreconceptuel et rappelé dans la norme IAS 18 est celui selon lequel les produits

1. Nous les avons laissés hors du périmètre de cet ouvrage.

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8 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

des activités ordinaires sont comptabilisés lorsqu’il est probable que desavantages économiques futurs iront à l’entité et que l’on peut évaluer cesavantages de façon fiable.

Pour comptabiliser un chiffre d’affaires, quelle que soit la nature de la tran-saction sous-jacente, les critères généraux ci-dessous devront donc êtresatisfaits :

– la probabilité d’obtention des avantages économiques associés à la tran-saction doit être établie ;

– l’entreprise doit s’être libérée d’une part importante de ses obligations (lebien doit être en principe livré / le service rendu) ;

– il doit être possible d’évaluer le montant des produits et de leurs coûtsassociés de façon fiable ;

– les risques liés au bien ou au service (même si ce n’est pas explicite dansles textes) doivent avoir été transférés.

Ces critères généraux seront complétés par des critères spécifiques auxdifférentes natures de transaction, abordés dans les chapitres suivants.

Comme sur de nombreux autres sujets, face à la latitude d’interprétationlaissée par le corpus international, l’entreprise pourra préciser sa démarcheen s’inspirant des dispositions du référentiel américain, codifiées dansl’Accounting Standard Codification (ASC) 605 – S99. En termes de principegénéral, le revenu – qu’il provienne de la vente de produits ou de la vente deservices – doit être reconnu uniquement lorsqu’il est acquis, c’est-à-dire quel’entreprise, ayant accompli l’essentiel de ce qui était attendu d’elle, a« mérité » les avantages économiques qui correspondent au chiffre d’affaires.D’après ce texte, il n’y a chiffre d’affaires que pour autant que les quatreconditions suivantes soient réunies :

– il existe une preuve convaincante d’un accord entre l’entreprise et sonclient ;

– la livraison a été effectuée ou les services ont été rendus ;

– le prix est déterminé ou déterminable ;

– le recouvrement de la créance est raisonnablement assuré.

Sans entrer dans le détail de ce texte, nous précisons ci-dessous quelques-uns de ses points clés.

1.2.1 Existence d’un contrat

L’existence d’un contrat doit être la règle. L’accord entre l’entreprise et sonclient peut se matérialiser de différentes manières : bon de commande, lettrede mission, contrat en bonne et due forme signée des deux parties, etc.

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Une attention particulière doit être portée à la relation habituelle avec leclient. Par exemple, si les procédures internes de l’entreprise prescriventqu’une vente n’est conclue qu’à compter de la réception du bon decommande émis par le client, la livraison anticipée des biens ne permet pasde comptabiliser un chiffre d’affaires au moment de la livraison, même si elleest ultérieurement ratifiée par la réception des documents appropriés.

1.2.2 Livraison effectuée ou services rendus

Il faut plus qu’un simple déplacement physique des biens vers le site del’acheteur pour qu’une livraison soit considérée comme effectuée,

En règle générale, si l’entreprise n’a pas satisfait à l’ensemble de ses obli-gations, la livraison ne peut pas être considérée comme effectuée. Si lecontrat prévoit que les éléments rendus sur place doivent faire l’objet par levendeur d’une installation, il est nécessaire d’attendre que cet événement aiteu lieu pour pouvoir procéder à la reconnaissance du revenu. Il en est demême lorsque le contrat prévoit que le client réalise une inspection ou effec-tue des tests sur les produits rendus sur place par le vendeur.

Corollairement, si la livraison physique a eu lieu mais que l’acheteur nepeut utiliser le bien ou le service, le revenu ne peut être reconnu antérieure-ment à la première date d’utilisation possible. C’est le cas, par exemple, pourun logiciel de mise à jour fiscale livré avant le 31 décembre, mais qui ne peutêtre utilisé qu’à partir du 1er janvier de l’année suivante.

1.2.3 Prix de vente déterminé ou déterminable

Le prix de vente n’est pas déterminé ou déterminable quand le client a ledroit unilatéral de résilier ou d’annuler le contrat et d’obtenir le rembourse-ment des sommes qu’il a versées.

Un prix de vente, des honoraires ou des commissions conditionnés par lasurvenance d’événements futurs, ne sont pas déterminés ou déterminablestant que ces événements futurs n’ont pas eu lieu.

Dans le cas des ventes avec droit de retour, aucun revenu ne peut êtrereconnu avant la date d’expiration des droits consentis au client. Toutefois, sile montant des remboursements peut être estimé de manière fiable, par exem-ple sur la base de données historiques, il est possible de comptabiliser lerevenu net des remboursements attendus. En revanche, si l’estimation ne peutêtre faite de manière fiable, la reconnaissance du revenu doit être différée.

1.2.4 Créance recouvrable

La créance doit être recouvrable, si ce n’est avec certitude, du moins avec uneassurance raisonnable. Autrement, il faut différer la reconnaissance durevenu jusqu’au moment où la créance devient recouvrable, ou, tout du

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10 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

moins, jusqu’à ce qu’il devienne possible d’estimer la partie recouvrableavec une précision suffisante.

1.3 L’évaluation du chiffre d’affaires

Le principe général posé par la norme IAS 18 est celui d’une évaluation duchiffre d’affaires né ou à naître de la transaction à la juste valeur de la rému-nération reçue ou à recevoir. Dans nombre de cas, cette évaluation ne soulè-vera pas de difficultés : il s’agit tout simplement du prix contractuel.

La question devient plus complexe lorsque l’entreprise consent des avanta-ges (rabais, remises, ristournes…) à ses clients. Nous ne traitons pas le pointici mais nous invitons le lecteur à se référer au chapitre 2, « Ventes de biens »pour une discussion sur le sujet.

Si l’entreprise se comporte en banquier de ses clients, au-delà des pratiquesusuelles du secteur dans l’environnement local, elle aura à décomposer sarémunération – le prix de vente – en une rémunération de nature commer-ciale ou opérationnelle et une rémunération de nature financière. Nous repre-nons ce sujet dans le chapitre 5, « Opérations en devises, actualisation etrisque de crédit ».

Comment faut-il évaluer une transaction réglée non en trésorerie mais ennature, bref les opérations d’échange ou de troc ? Ce sujet est évoqué auchapitre 8, « Sept cas spéciaux ».

1.4 À quelle transaction associer un chiffre d’affaires ?

Afin de traduire une transaction sur le plan comptable, dès la conclusion ducontrat, il est nécessaire de répondre à deux questions fondamentales :

– s’agit-il d’une seule transaction ou de plusieurs transactions à séparer ou àregrouper ?

– quelle est la nature de la transaction ?

L’analyse doit être faite indépendamment de l’appellation de la transactionet de sa formalisation. L’objectif de la norme est d’aboutir à une applicationfondée sur la substance juridique des opérations pour aboutir principalementà une meilleure présentation économique.

L’analyse détaillée et en substance du ou des contrats doit conclure sur :

– la séparation ou non de plusieurs transactions au sein d’un même contrat(par tranche ou par lot) ;

– le regroupement ou non de plusieurs contrats afin de les considérer commeune transaction unique.

La problématique est approfondie au chapitre 6, « Transactions à élémentsmultiples » et au chapitre 8, « Sept cas spéciaux ».

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La qualification de la transaction permet de définir le fait générateur et lescritères de la comptabilisation du chiffre d’affaires et du résultat de la tran-saction. On peut définir deux grandes familles de transactions ayant des faitsgénérateurs communs :

– les contrats de vente de biens ;

– les contrats de prestations de service et les contrats de construction.

Cette identification de la transaction est essentielle. Le Committee of Euro-pean Securities Regulators (CESR) a examiné la question en plusieurs occa-sions, par exemple dans le document publié en décembre 2007, 2nd extractfrom EECS’s database of enforcement decisions. La décision référencéeEECS/1207-11 : real-estate projects porte sur l’analyse de différents contratsde construction immobilière conclus par un groupe immobilier. Celui-citraite tous ces contrats comme des contrats de construction relevant de lanorme IAS 11. Le régulateur boursier conclut au caractère erroné de cetteapplication et remet donc en cause le chiffre d’affaires publié dans les étatsfinanciers.

DIFFICULTÉS À SURMONTER : LES SITUATIONS DE MANDAT ET LES TAXES ASSOCIÉES

Nous nous limitons ici à traiter deux cas qui, sans être « généraux », sontsusceptibles de concerner de nombreux secteurs.

2.1 Acteur principal ou mandataire ?

Le chiffre d’affaires doit-il être comptabilisé en brut ou en net ? En ces tempsd’entreprises étendues et de développement des partenariats de toutes sortes,la question prend une importance particulière.

La norme IAS 18 n’aborde le sujet que succinctement. Elle précise que lesproduits des activités ordinaires ne comprennent que les entrées brutesd’avantages économiques reçus ou à recevoir par l’entreprise pour son proprecompte, lorsque celles-ci contribuent à l’augmentation de ses capitauxpropres (IAS 18 § 8).

Dans une relation de mandataire, les entrées brutes d’avantages économi-ques comprennent des montants collectés pour le compte du mandant qui neconduisent pas à une augmentation des capitaux propres pour l’entreprise.Les montants collectés pour le compte du mandant ne sont pas des produitsdes activités ordinaires. Par conséquent, dans une transaction impliquantdeux entreprises et le client final, l’entreprise reconnaîtra le revenu brut sielle joue le rôle d’acteur principal. Sinon, elle reconnaîtra le revenu net aprèsdéduction de la rémunération de l’autre intervenant. En ce cas, les produitsdes activités ordinaires correspondent au montant des commissions.

2

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12 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Jusque récemment, la norme n’apportait cependant aucune indication pourdéterminer si l’entreprise intervenait à titre d’acteur principal ou d’agentdans une transaction. Le vide est en partie comblé car, dans le cadre desaméliorations annuelles du référentiel adoptées en avril 2009, l’IASB ainclus dans l’annexe de la norme IAS 18 un exemple illustratif traitant decette question. Par ailleurs, dans les normes américaines, l’ASC 605-45« Revenue, Principal Agent Considerations » (ex-EITF 99-19) propose des’appuyer sur une liste de critères fournis à titre indicatif et que l’on peutrécapituler selon le tableau suivant.

ACTEUR PRINCIPAL OU AGENT ?GRILLE D’ANALYSE DE LA POSTURE SELON L’ASC 605-45

Comptabilisation du chiffre d’affaires brut Comptabilisation du chiffre d’affaires net

L’entreprise est l’acteur principal de la transaction,en assume les risques et avantages. Sa responsabi-lité dans la fourniture du bien ou du service est avé-rée.

La responsabilité est assumée parle fournisseur de l’entreprise, nonpar elle-même.

L’entreprise assume le risque de stockage : elledétient le bien en stock avant la transaction, et lereprend en stock après la transaction en cas deretour.Elle court le risque d’obsolescence ou de détériora-tion du stock pendant la période où elle détient lesmarchandises

L’entreprise est libre de fixer le prix du bien ou duservice.

L’entreprise reçoit un prix fixe :montant fixé pour chaque transac-tion indépendamment du prix payépar le client, ou montant déterminéen fonction d’un pourcentage dumontant de la transaction.

L’entreprise réalise une part de la prestation, oumodifie le bien vendu. La part de la prestation réali-sée ou la modification apportée au bien sont tellesque le montant de la transaction en est augmenté.

L’entreprise peut choisir librement son fournisseur.

L’entreprise est impliquée dans la détermination desspécifications du bien ou de la prestation objet de latransaction.

L’entreprise assume le risque de crédit. À titred’exemple, le risque de crédit existe si l’entrepriseest tenue de payer son fournisseur que le client aitréglé la transaction, ou non.

Le fournisseur assume le risque decrédit.

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Exemple (tiré de l’ASC 605-45, Principal Agent Considerations)

Un prestataire de services, fournisseur d’applications d’inscription en ligne àl’université, conclut un contrat avec une université pour la mise en ligne de laprocédure d’inscription. L’application est installée sur le site du prestataire. Pourdéposer leur demande, les candidats accèdent à ce site, soit directement, soit viale portail internet de l’université. Les candidats remplissent un formulaire enligne puis le soumettent au prestataire après avoir saisi les informations relativesà leur carte de crédit. Avant d’enregistrer un dossier de candidature, le prestataires’assure de la provision sur la carte de crédit du candidat (ou obtient l’autorisa-tion de l’établissement émetteur de la carte) puis facture les droits d’inscriptionsur celle-ci. Ensuite, le prestataire transmet sans délai le dossier de candidature àl’université. Le prestataire apparaît comme le commerçant créancier dans lerelevé de la transaction. C’est à lui que l’établissement émetteur de la carte decrédit envoie les fonds correspondant au paiement des droits d’inscription.

Selon le contrat passé avec l’université, le prestataire est rémunéré, soit par unesomme fixe en dollars, soit par un pourcentage fixe des droits d’inscription. Dansles deux cas, le prestataire retient cette rémunération sur les sommes perçues.L’université fixe elle-même le montant des droits d’inscription. Le prestataire etl’université conviennent dans le contrat du niveau de la rémunération conservéepar le prestataire. Le 15 de chaque mois, ce dernier remet à l’université lemontant des droits d’inscription perçus au cours du mois précédent, nets des fraisprélevés. Si, par la suite, le candidat refuse le paiement de la somme facturée sursa carte de crédit, le prestataire est en risque sur l’intégralité de ce montant car ilest tenu de reverser à l’université la part des droits d’inscription qui revient àcette dernière.

APPLICATION À L’EXEMPLE DE LA GRILLE D’ANALYSE DE L’ASC 605-45

Conclusion de l’exemple : Le prestataire conclut que les recettes devraient êtrecomptabilisées pour le montant net perçu lors des transactions d’inscription. Iln’existe qu’un indicateur de comptabilisation brute : l’indicateur de risque finan-cier mais il n’est pas prépondérant par rapport aux indicateurs de comptabilisa-tion nette.

Faits Brut Net

L’université, et non le prestataire, est l’acteur principal vis-à-visdu candidat, car l’université est responsable de l’examen et del’acceptation ou du refus des candidatures

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L’université fixe les frais d’inscription et le prestataire reçoit unpourcentage fixe de cette somme

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Le prestataire est exposé au risque financier lié à la forme decollecte des frais sur les cartes de crédit

x

Synthèse x

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14 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Afin de faciliter l’application de la démarche dans l’entreprise, les services« Normes et procédures » mettront au point une grille d’analyse des transac-tions pour utilisation par les responsables de la comptabilisation du chiffred’affaires.

2.2 Taxes collectées sur les biens et services vendus

De nombreuses entreprises collectent des taxes au titre des biens et servicesvendus (nous ne parlons pas ici de la TVA pour laquelle le traitement comp-table est clairement défini, mais des autres taxes attachées à la vente). Cestaxes sont ensuite reversées aux administrations gouvernementales concer-nées (douanes, etc.). On trouvera des cas semblables dans des secteurscomme le tabac, les boissons alcoolisées, les produits pétroliers mais aussitout simplement dans l’hôtellerie avec les taxes de séjour.

Selon IAS 18 § 8, les montants collectés pour le compte de tiers tels que lestaxes sur les ventes, les taxes sur les biens et services et les taxes à la valeurajoutée ne sont pas des avantages économiques qui vont à l’entité et ilsn’aboutissent pas à une augmentation des capitaux propres. En conséquence,ils sont exclus des produits des activités ordinaires.

En pratique, la question n’est pas si simple qu’il y paraît : parmi ces taxessur les biens et services, lesquelles sont à exclure du revenu qui sera donccomptabilisé en net et lesquelles sont à inclure dans le coût des biens et servi-ces vendus, ce qui conduira à comptabiliser le revenu en brut ? Ici également,une analyse s’impose dont la conclusion fera de toute façon appel à l’exer-cice du jugement. La grille de critères à examiner peut combiner1 :

– l’analyse de la posture de l’entreprise : acteur principal ou agent ?

– l’analyse de l’assiette ou du mode de calcul de la taxe : est-elle assise surle chiffre d’affaires ou sur la production ?

– l’analyse de la présentation de la taxe : est-elle identifiée sur une lignedistincte de la facture ou non ?

– l’analyse du stade du processus de production-vente auquel l’entreprisedevient redevable du paiement de la taxe.

1. Source : Ernst & Young, International GAAP 2007.

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Les critères indicatifs sont repris dans le tableau suivant, qui lui aussipourra être décliné dans l’entreprise comme un questionnaire de contrôleinterne.

Le lecteur intéressé pourra consulter le document publié en décembre 2007par le CESR, « 2nd extract from EECS’s database of enforcementdecisions ». La décision portant la référence EECS/1207-02 : excise tax onfuel traite du cas d’un groupe pétrolier qui considérait que les taxes sur laconsommation de produits pétroliers, exigibles à la sortie des entrepôtsfiscaux de stockage, ne devaient pas être traitées comme des « montantscollectés pour le compte de tiers ». Le CESR lui donne raison, en confirmantque ces taxes représentent pour le distributeur une charge encourue lors de lamise à la consommation des produits (c’est-à-dire de leur retrait des entre-pôts douaniers) puis un revenu lorsque la vente au client final permet derecouvrer les coûts encourus.

Les bases de la décision du CESR sont les suivantes : « il s’agit d’une taxespéciale portant sur les achats, qui est encourue et réglée à la date de l’achatdes produits pétroliers ou lorsque le distributeur sort les produits des entre-pôts fiscaux. L’acheteur ne peut, ni récupérer la taxe auprès de l’administra-tion fiscale, ni l’imputer sur d’autres impôts ; de plus, l’acheteur supporte

Indicateur de comptabilisationdu chiffre d’affaires en brut

Indicateurs de comptabilisationdu chiffre d’affaires en net

L’entreprise est exposée à un risque finan-cier en relation avec la taxe : elle est tenuede la payer même en cas de non-recouvre-ment de la créance client

La taxe est remboursable en cas de détério-ration, d’obsolescence du stock ou si lacréance client n’est pas recouvrable

L’entreprise a toute latitude dans la détermi-nation de son prix de vente. Elle supporte lataxe et décide si elle la fait ou non, en partieou en totalité, supporter par le client

La taxe est incluse dans le prix de vente, quine peut être inférieur au montant de celle-ciL’entreprise a l’obligation d’augmenter sesprix lorsque le taux de la taxe ou son mon-tant augmentent, sans que l’augmentationdu prix de vente puisse excéder le montantde la taxeL’entreprise est tenue de baisser ses prix devente en cas de baisse de la taxe

L’assiette de la taxe est constituée par lenombre d’unités produites ou la valeur de laproduction

L’assiette de la taxe est constituée par leprix de vente ou le nombre d’unités venduesLa taxe est identifiée sur une ligne distinctede la facture

L’entreprise devient redevable du paiementde la taxe lors de la production ou dans unepériode proche de la production

L’entreprise devient redevable du paiementde la taxe lors de la vente ou dans unepériode proche de la vente

Page 26: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

16 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

intégralement le risque de non-recouvrement. Par conséquent, cette taxe doitêtre traitée comme un élément du coût des stocks. Elle n’a pas à être compta-bilisée comme une créance à recevoir de la part de l’administration fiscale oud’un client final hypothétique car il ne s’agit pas d’un actif monétaire.

Le groupe pétrolier répercute la taxe sur les produits pétroliers aux clientsfinals afin de recouvrer la charge encourue, comme il est usuel pour tous lescoûts liés aux stocks. Cette taxe participe donc à la formation du prix payépar les clients finals et « explique » une partie du produit de la transaction. Lemontant en question ne doit pas être enregistré comme une dette vis-à-vis del’administration fiscale. En effet, le groupe pétrolier n’est pas collecteur de lataxe pour le compte de l’administration fiscale ; il est, lui-même, redevablede la taxe. »

Vu les montants en cause (qui représentent 13,7 % des produits et 15,5 %des charges du groupe pétrolier), le CESR considère que la fourniture d’uneinformation en annexe sur le montant des droits d’accise inclus dans lesproduits et les charges est appropriée.

Note

Nous invitons maintenant le lecteur à se reporter aux chapitres suivants pour prendreconnaissance du traitement applicable aux différentes transactions simples oucomplexes.– les ventes de biens ;– les prestations de services ;– les contrats de construction ;– les particularités de la comptabilisation des opérations en devises, de l’actualisa-

tion et de la prise en compte du risque client ;– les transactions complexes, à livrables multiples ;– les programmes de fidélisation de la clientèle ;– certains cas spéciaux, comme les ventes avec engagements de reprise ou les

opérations de troc.

Page 27: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

2 VENTES DE BIENS

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les produits des activités ordinaires sont définis comme les entrées brutes d’avantageséconomiques au cours de la période, dans le cadre des activités ordinaires de l’entité lors-que ces entrées contribuent à des augmentations de capitaux propres, autres que les aug-mentations relatives aux apports des participants aux capitaux propres.Les produits des activités ordinaires provenant de la vente de biens doivent être comptabili-sés lorsqu’il a été satisfait à l’ensemble des conditions suivantes :– l’entité a transféré à l’acheteur les risques et avantages importants inhérents à la

propriété des biens ;– l’entité ne continue ni à être impliquée dans la gestion, telle qu’elle incombe

normalement au propriétaire, ni dans le contrôle effectif des biens cédés ;– le montant des produits des activités ordinaires peut être évalué de façon fiable ;– il est probable que des avantages économiques associés à la transaction iront à

l’entité ; et

– les coûts encourus ou à encourir concernant la transaction peuvent être évalués defaçon fiable.

Les produits des activités ordinaires doivent être évalués à la juste valeur de la contrepartiereçue ou à recevoir.Une entreprise doit notamment fournir les informations suivantes :– les méthodes comptables adoptées pour la comptabilisation du produit des activités

ordinaires, y compris les méthodes adoptées pour déterminer le degré d’avancementdes transactions impliquant la prestation de services ;

– le montant de chaque catégorie importante de produits des activités ordinairescomptabilisés au cours de la période, y compris les produits des activités ordinairesprovenant en particulier de la vente de biens ;

– et le montant du produit des activités ordinaires provenant de l’échange de biens ou deservices figurant dans chaque catégorie importante de produits des activités ordinaires.

Page 28: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

18 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

DISPOSITIONS DE LA NORME

1.1 Champ d’application

La norme IAS 18 s’applique en particulier à la comptabilisation des produitsdes activités ordinaires provenant de la vente de biens.

Elle ne traite pas des produits issus de contrats de location (voir la normeIAS 17), ni de la comptabilisation initiale et des variations de juste valeur desactifs biologiques liés à l’activité agricole, ni de la comptabilisation initialede produits agricoles (voir la norme IAS 41 « Agriculture » ), ni des produitsdes activités d’extraction minière.

1.2 Comptabilisation des produits des ventes de biens

Le produit est comptabilisé dès lors que :

– le transfert des risques et avantages liés à la propriété des biens est réalisé ;

– le vendeur n’a plus d’implication dans la gestion du bien ;

– une évaluation fiable de l’opération peut être faite ;

– il existe une forte probabilité que les avantages liés à la transaction aillentà l’entreprise ;

– l’on peut faire une évaluation fiable des coûts liés à la transaction.

1.3 Évaluation des produits

Les produits des activités ordinaires doivent être évalués à la juste valeur dela contrepartie reçue ou à recevoir.

Le produit provenant d’une transaction est en général déterminé par accordentre l’entreprise et l’acheteur du bien ou du service : c’est le prix contractuelen tenant compte de toute remise commerciale ou rabais sur quantité accor-dée.

En cas de différé de paiement significatif à des conditions avantageuses, leproduit devra faire l’objet d’une actualisation : la différence entre la valeuractualisée et la valeur nominale du produit doit être portée en produits finan-ciers. Les escomptes accordés pour règlement anticipé sont déduits desproduits des activités ordinaires.

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Les ventes en devises seront converties soit au taux en vigueur à la date detransaction, soit à un cours moyen pondéré périodique dans la mesure où cedernier constitue une approximation fiable du cours à la date de transaction.

Les produits d’intérêts en monnaie étrangère sont comptabilisés sur la basedu cours moyen pondéré sur la période durant laquelle courent les intérêts.

La différence entre le cours de comptabilisation et le cours de clôture ou derèglement est comptabilisée en différence de change.

PRINCIPALES DIVERGENCES AVEC LES RÉFÉREN-TIELS FRANÇAIS ET US GAAP

2.1 Principales divergences avec les principes français applicables dans les comptes sociaux1

La norme IAS 18 présente quelques différences significatives avec le référen-tiel français qui peuvent être à la source d’écarts à l’heure d’enregistrer lavente d’un bien. Ces différences sont synthétisées dans le tableau suivant :

1. Source PwC GlobalLearning, juin 2006.

IFRS Normes françaises

Principes généraux de comptabilisation• Comptabilisation lors du transfert del’essentiel des risques et avantages

Principes généraux de comptabilisation• Comptabilisation lors du transfert de pro-priété

Ventes sous conditions résolutoires• Ne génèrent pas de produits des activitésordinaires sauf si les risques liés à la résolu-tion de la vente sont négligeables (incerti-tude négligeable et probabilité de retourfaible)• Lorsque la condition résolutoire est telleque les risques et avantages sont considé-rés comme conservés par le vendeur, l’opé-ration n’est pas traitée comme une vente

Ventes sous conditions résolutoires• Si les risques liés à la résolution de lavente sont négligeables, le produit est inté-gralement pris en compte• Si les risques liés à la résolution de lavente sont faibles, la vente peut être consta-tée à condition de constituer une provisionpour risques• S’il n’y a pas transfert de l’essentiel desrisques et avantages inhérents à lapropriété : les ventes sous condition résolu-toire constituent un acte de financementet génèrent des produits des activitésordinaires

2

Page 30: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

20 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

2.2 Principales divergences avec les normes américaines US GAAP1

En matière de reconnaissance des produits, il n’existe pas de différence struc-turelle majeure entre les deux corpus de normes, aussi est-il généralementpossible de rendre compatible l’application des deux référentiels sans avoir àmettre en œuvre des processus de réconciliation complexes.

Néanmoins les US GAAP sont souvent plus contraignants ou plus précisque les normes internationales, et proposent des textes spécifiques parsecteur.

Le tableau suivant résume les principales divergences en matière de recon-naissance des ventes de biens :

IFRS Normes françaises

Ventes à livrer• Comptabilisation si la livraison est proba-ble, si le report de livraison est accordéentre les parties, si les conditions de paie-ment sont habituelles

Ventes à livrer• Comptabilisation si les produits sont fabri-qués et identifiés

Ventes avec clause de retour limité• Si la probabilité de retour est faible, il n’estpas nécessaire d’attendre que le délai deretour soit expiré : il suffit que les avantagesfuturs soient probables

Ventes avec clause de retour limité• Il faut attendre que le délai de retour soitexpiré pour comptabiliser le produit : il fautque les avantages futurs soient certains

Comptabilisation si le recouvrement est probable

Comptabilisation si le produit est certain et évaluable de façon fiable

Échanges de biens : aucun produit n’estcomptabilisé s’il s’agit de biens de nature etvaleur similaires

Échanges de biens : comptabilisation d’unproduit

Recouvrement différé : l’actualisation estobligatoire si son effet est significatif

Recouvrement différé : pas d’actualisation

Avantages économiques avec desfournisseurs : en moins du chiffre d’affaires

Avantages économiques avec desfournisseurs : en charges d’exploitation

Escomptes financiers accordés : sous-traits du chiffre d’affaires

Escomptes financiers accordés : enregis-trés en charges financières

1. Source : « Convergence IFRS – US GAAP », Cahier de l’Académie, n˚9, novembre 2007.

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DIFFICULTÉS À SURMONTER ET CLÉS POUR UNE MISE EN ŒUVRE RÉUSSIE

3.1 Méthode de conversion des revenus en devises étrangères : la règle… et la pratique en période de fortes fluctuations du cours des devises

La norme prévoit que les ventes en devises seront converties soit au taux envigueur à la date de transaction, soit à un cours moyen pondéré périodiquedans la mesure où ce dernier constitue une approximation fiable du cours à ladate de transaction. À chaque date de clôture, les créances clients sontconverties au cours de clôture. Les différences de change résultant de laréévaluation sont à comptabiliser en charges ou produits de la période. Letraitement pratique des opérations en devises est présenté plus en détail auchapitre 5, « Opérations en devises, actualisation, risque de crédit ».

IFRS US GAAP

Reconnaissance du revenu :• Principes généraux• Pas de disposition secto-rielle

Reconnaissance du revenu :• Texte de référence SFAC 5 « Recognition and measure-ment in financial statements of business enterprises »• Pas de principe général• Nombreuses dispositions sectorielles• Sociétés cotées soumises aux textes émis par la SEC

Conditions de reconnaissance du revenu : uniquement principiellesPas de précisions pratiques

Conditions de reconnaissance du revenu (SAB 104) :plus précises• Preuve d’accord entre les parties• Livraison effective• Prix déterminé ou déterminable• Recouvrement du prix certain

Transactions à éléments multiplesPas de précisions

Transactions à éléments multiples• Contrat à comptabilisation unique (« single unit ofaccounting ») : EITF 00-21 interdit de constater un revenuavant la livraison de l’ensemble des éléments prévus aucontrat• Contrat à comptabilisation séparée : les revenus au titredes éléments livrés ne sont enregistrés que dans la mesureoù la rémunération du vendeur n’est pas conditionnée par lalivraison ou la livraison future d’un autre élément

3

Page 32: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

22 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

3.2 Quelques particularités concernant la date de comptabilisation des produits

3.2.1 Marchandises en transit à la date de clôture

Il convient de s’interroger sur le transfert de propriété effectif dès lors quedes marchandises sont en transit à la date de clôture : en effet, c’est le trans-fert des avantages et risques qui permet la comptabilisation du revenu. Pourcela, il apparaît nécessaire, en particulier lors d’opérations d’export, des’intéresser aux Incoterms1 appliqués dans chacune des livraisons afin dedécider de la date de comptabilisation du produit.

3.2.2 Ventes sous condition suspensive

Le transfert de propriété et la comptabilisation de la vente ont lieu lorsque lacondition est réalisée. La condition ne fait que suspendre l’exécution de lavente : c’est le cas par exemple dans le cas d’une vente de bien immobiliersous condition de l’obtention d’un prêt par l’acquéreur.

Le produit correspondant à la vente doit être comptabilisé à la date où lacondition suspensive se trouve réalisée ; en effet, selon la norme IAS 18« Produits des activités ordinaires », les produits sont à comptabiliser lorsquel’entreprise a transféré les risques et avantages importants inhérents à lapropriété des biens et qu’il est probable que les avantages économiques irontà l’acquéreur.

Dans le référentiel français, cette position a été ratifiée par le comitéd’urgence du CNC2 et vient infirmer la précédente position de la COB(précurseur de l’AMF) qui prévoyait que la vente devait être comptabilisée àla date de clôture de l’exercice si la condition suspensive était levée entre ladate de clôture et la date d’arrêté des comptes.

3.2.3 Ventes à livrer mais dont la livraison est reportée à la demande de l’acheteur

L’acheteur demande que la livraison soit reportée tout en acceptant que lapropriété lui soit transférée et que les biens soient facturés. La comptabilisa-tion doit s’effectuer à la date de transfert de propriété, même si la livraisonn’est pas effectuée dès lors que

– la livraison future est probable ;

1. INternational COmmercial TERMS, La liste et la définition des Incoterms 2000, figure enannexe.

2. CNC comité d’urgence, avis 05-E du 6 septembre 2005.

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– les instructions de livraison sont spécifiquement reconnues par l’acheteur ;

– les conditions habituelles de paiement sont appliquées.

3.2.4 Ventes avec droit de retour illimité

La constatation du produit dépend de la nature de l’accord. En règlegénérale, pour les ventes autres que de détail ce type d’opération s’assimile àdes ventes en consignation, c’est-à-dire qu’aucun revenu ne sera constatéavant que le sort définitif du bien ne soit connu.

3.2.5 Ventes avec clause de réserve de propriété

La clause de réserve de propriété donne une garantie contre l’insolvabilité duclient, dès lors qu’elle est prévue en amont de la livraison. En principe, lapropriété est transférée du vendeur à l’acheteur à la livraison du bien, laclause de réserve de propriété (CRP) permet au vendeur de conserver lapropriété du bien vendu jusqu’au règlement complet du prix.

Si cette clause est inscrite dans les conditions de vente, la vente ne seracomptabilisée qu’à l’issue du paiement intégral du bien cédé

3.2.6 Ventes en consignation

La vente en consignation présente des avantages car elle protège intégrale-ment le distributeur contre le risque d’invendus. Cela peut donc s’avérer utilelors de la phase de développement d’un marché. De son côté, le vendeur neprend en compte le produit de la vente que lorsque le bien est acquis par untiers (l’acheteur-utilisateur final). Le fournisseur n’exerce plus de contrôlephysique sur les biens en consignation, mais il en reste néanmoins le proprié-taire.

En situation de « vente en consignation », lors de l’expédition des biens, lefournisseur comptabilise la vente en revenu différé. Simultanément, il comp-tabilise le stock détenu physiquement par les grossistes en stock en consigna-tion valorisé au coût de revient. La constatation du produit n’interviendra quelors de la vente à un tiers.

3.3 Produits dont le recouvrement n’est pas probable

3.3.1 … à la date de l’opération

En normes françaises si le principe et le montant de la créance sont certains,on comptabilise le produit et on constate une provision pour couvrir le risquede non-paiement.

Page 34: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

24 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

En principes internationaux, les produits ne sont constatés que s’il estprobable que les avantages économiques reviennent à l’entreprise. Si lapossibilité de recouvrement du produit n’est pas certaine, le produit n’est pasconstaté.

Cela s’applique en particulier dans le domaine de la grande distributionlorsque le client ne constate lui-même la dette vis-à-vis du vendeur qu’unefois que le produit a été vendu au consommateur final. Cette pratique répan-due peut conduire à ne constater la vente du produit qu’après un laps detemps significatif. Elle suppose que soit mis en place un reporting clair entreles deux partenaires commerciaux afin de mettre en lumière la sortie effectivedu produit des stocks du client.

Par ailleurs, si le client est – par les termes du contrat – autorisé à retournerle produit dans un délai clairement établi dans les conditions générales devente, alors le revenu ne devrait être enregistré qu’à l’échéance de ce délai.En revanche, lorsque la probabilité de retour est faible, et que l’on peut l’esti-mer de façon fiable, le vendeur a la possibilité de comptabiliser le produit dela vente et d’inscrire une provision pour risque.

Ce principe selon lequel le produit n’est pas constaté si la possibilité derecouvrement du produit n’est pas certaine, est également applicable pour lescréances identifiées à risque dès leur origine, pour lesquelles un risque denon-paiement a été identifié à la signature du contrat, ou avant l’émission dela facture. Le chiffre d’affaires ne sera constaté qu’à l’encaissement.

3.3.2 Ou postérieurement à l’opération

En normes françaises, comme internationales, on constate une provision pourdépréciation pour couvrir le risque de non-paiement, sans diminution desproduits antérieurement constatés.

Il est également admis de constater une provision pour risque dans lesmêmes conditions si un défaut ou une suppression au catalogue, par exemple,devait conduire le client à retourner le produit au vendeur contre émissiond’un avoir.

3.4 Produits dont le recouvrement est différé : actualisation des produits lors d’un différé significatif

Les normes internationales précisent que les produits des activités ordinairesdoivent être évalués à la juste valeur de la contrepartie à recevoir.

En cas de différé de paiement significatif accordé à des conditions favora-bles, il convient de :

– constater un chiffre d’affaires actualisé sur la base de la durée du différé etd’un taux d’intérêt du marché ;

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– comptabiliser en produits financiers, étalés sur la durée du différé, la diffé-rence entre la valeur nominale de la créance et la valeur actualisée.

En pratique, le cas général est celui de la non-actualisation des créances,l’effet d’actualisation n’étant à examiner qu’au-delà d’un délai de règlementde plus d’un an, et pour des créances d’un montant unitaire facial significatif.Nous renvoyons sur ces points au chapitre 5, « Opérations en devises, actua-lisation, risque de crédit ».

3.5 Escomptes de règlement : la règle est la déduction des produits

En principes français, une réduction de prix pour règlement anticipé parrapport aux conditions générales de vente constitue une charge financière.

Les normes internationales prévoient que la comptabilisation des produitsse fait après toute déduction, de rabais, remises et réductions de prix :l’escompte vient donc minorer le produit à comptabiliser.

Dans un contexte de crise de liquidités, le vendeur peut être tenté de sécu-riser le paiement de la créance et pour cela favoriser un règlement à uneéchéance plus courte qu’habituellement contre une réduction de prix. Si cettepratique devait se généraliser, il conviendrait à la date de clôture d’imputersur la créance brute un pourcentage correspondant à la pratique historique-ment constatée avec le client. Par la suite, le reliquat de chiffre d’affaires liéà l’escompte doit être reconnu prorata temporis jusqu’à la date du règlement.

En pratique, cela suppose que soit effectué un travail d’analyse et decomparaison des conditions de règlement et que l’on constate en déductiondu chiffre d’affaires le montant estimé du revenu d’intérêt accordé.

3.6 Accords de coopération commerciale et autres services associés à la vente de produits : charge ou réduction de revenu ?

En son paragraphe 9, la norme précise que les produits des activités ordinai-res sont évalués à leur juste valeur et au paragraphe 10 que « le montant desproduits des activités ordinaires provenant d’une transaction est en généraldéterminé par accord entre l’entreprise et l’acheteur ou l’utilisateur de l’actif.Ce montant est évalué à la juste valeur de la contrepartie reçue ou à recevoiren tenant compte du montant de toute remise commerciale ou rabais pourquantités consentis par l’entreprise ».

Il existe une présomption forte en IFRS pour que les services associés auxventes de produits soient considérés comme des réductions de revenu.

Page 36: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

26 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Toutefois, cette présomption peut être surmontée et le service associé prisen compte comme une dépense si le vendeur reçoit un avantage identifiable(biens ou services) et le vendeur peut raisonnablement estimer la juste valeurde cet avantage.

En effet, la norme IAS 18.10 indique que « les revenus sont valorisés à lajuste valeur de la contrepartie reçue ou à recevoir en tenant compte dumontant des remises commerciales et les rabais de volume autorisé parl’entité » mais aucun texte IFRS ne donne d’indications précises sur lesmesures d’incitation visées, contrairement au corpus de normes US GAAPpar exemple.

Par conséquent, une entité appliquant les IFRS peut conclure que certainesmesures d’incitation, ou autre, représentent un avantage identifiable et nonune dégradation tarifaire.

Reste néanmoins à démontrer que la charge ainsi identifiée est mesurable àl’aune de la juste valeur d’un service équivalent : en pratique, ce point peuts’avérer délicat à mettre en œuvre.

Prenons l’exemple d’un producteur de produits grand public qui en assurela promotion par le biais de chaînes de distribution qui disposent de publica-tions de publi-informations. Le producteur fait des insertions publicitairesvolontaires dans ces publications, indépendamment de toute opération deréférencement décidée par le distributeur.

En normes françaises, cette insertion est considérée comme une prestationpublicitaire et comptabilisée en charge. En normes internationales, la comp-tabilisation en charge n’est acceptée que si l’on peut avoir une évaluation dela juste valeur de la prestation : à moins de disposer d’un comparable exact,il est difficile d’avoir la certitude que la valorisation de la prestation est faiteà la juste valeur. Les US GAAP imposent systématiquement une comptabili-sation en déduction du chiffre d’affaires.

3.7 Quelques pistes pour une mise en œuvre réussie

La mise en œuvre de la norme IAS 18 repose en premier lieu dans laconnaissance aussi fine que possible des pratiques de l’entreprise en matière de :– distribution : quelles sont les conditions générales ou particulières de

vente qui pourraient influer sur la vente effective du bien ?

– d’exportation : quels sont les Incoterms utilisés qui vont déterminer la datede transfert de propriété ?

– de marketing : quelles opérations de promotion pourraient être considé-rées comme des rabais, remises ou ristournes ?

– de contrôle de gestion : quels sont les outils disponibles pour suivre latranscription des outils marketing ?

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– de contrats : s’assurer que les contrats signés avec les clients reflètent bienles opérations effectives ;

– de système d’information afin que les opérations de ventes, et de déduc-tion de chiffre d’affaires soient parfaitement tracées et individualisées dèsl’origine.

Cela suppose qu’une équipe pluridisciplinaire soit impliquée dès le lance-ment du projet de mise en œuvre de la norme et qu’elle en fasse un suivipermanent, les conditions de commercialisation pouvant évoluer dans letemps.

À cela, il convient d’ajouter que les outils de reporting internes et externesdoivent être adaptés de sorte qu’ils soient en mesure de traduire la nouvellenotion de « produits ordinaires » liés aux ventes : il est en effet souhaitableque reporting interne et externe soient à l’unisson, les IFRS devant être unreflet du mode de suivi de la gestion par le management de l’entreprise. Enoutre, la dichotomie en termes de processus de reporting peut s’avérer sourced’erreurs d’interprétation et consommatrice de moyens humains et techni-ques.

Cela passe par un effort de sensibilisation et de pédagogie auprès des déci-deurs (direction générale, marketing, financière…), des opérationnels(commerciaux, chefs de produits…), des fonctionnels (comptables, contrô-leurs de gestion, informaticiens…), des partenaires extérieurs (banquiers,analystes, investisseurs, actionnaires…).

Par ailleurs, afin de constituer le niveau d’information nécessaire à labonne comptabilisation des ventes de produits, l’entreprise doit être enmesure de recueillir auprès de ces clients ou de son réseau de distribution lesinformations qualitatives et quantitatives concernant en particulier :

– le risque de retour ;

– le recouvrement des créances ;

– la réalisation des conditions particulières : livraison ou paiements diffé-rés…

Enfin, lorsque la rémunération de tout ou partie du personnel est au moinspartiellement fondée sur la notion de chiffre d’affaires, il convient d’être enmesure, soit de reconstituer les indicateurs utilisés préalablement à l’adop-tion de la norme, soit d’adopter de nouveaux indicateurs : cette révision nepeut se faire sans l’apport des responsables des ressources humaines et éven-tuellement des partenaires sociaux.

Page 38: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

28 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Presso

1. Ventes à Marchémax : coopérations commerciales et assimilés, escompte derèglement

L’entreprise Presso vend 1 000 machines à expresso à la société Marchémax à 100 €chacune. Le délai contractuel de règlement est de 60 jours, mais un escompte de 5 %est accordé pour paiement anticipé. Au cas d’espèce, Marchémax règle à la livraison.Marchémax met à disposition de Presso un espace de 3 m2 pour effectuer desdémonstrations dans ses magasins, contre un forfait de 5 000 €, et lui propose d’insé-rer une annonce dans son magazine « Marchévie » pour 5 000 €.

1.1 Comptabilisation des produits ordinaires en normes françaises

Le produit brut de la vente, égal à la facturation (hors taxes), est comptabilisé à lalivraison des machines. Les dépenses liées à la disposition d’un espace de démons-tration et à l’insertion d’une annonce dans le magazine édité par Marchémax sontanalysées comme des dépenses de marketing-vente. L’escompte accordé à Marché-max pour le règlement anticipé de la facture est constaté à la date de règlement effec-tif et traité comme une charge financière.• Lors de la vente

• Lors du paiement à la livraison

1.2 Comptabilisation en normes IFRS

La disposition d’un espace de démonstration et l’insertion d’une annonce ne procu-rent pas à Presso d’avantages distincts du fait de pouvoir vendre à ou chez Marché-max. Les dépenses encourues sont donc prises en diminution du chiffre d’affairesréalisé avec Marchémax. L’escompte accordé à Marchémax pour le règlement anti-cipé de la facture est traité, à la date de règlement, comme une réduction du revenuinitialement constaté. Presso n’a pas anticipé cette réduction par la constitution d’uneprovision à la date de la vente car Marchémax n’a pas de pratique systématique en lamatière.

Clients 100 000

Ventes 100 000

Charges commerciales5 000 (espace de démonstration) + 5 000 (annonce) 10 000

Fournisseurs 10 000

Banque 85 000

Charges financières 5 000

Clients 100 000

Fournisseurs 10 000

C A S P R A T I Q U E

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• Lors de la vente

• Lors du paiement à la livraison

2. Ventes à Marchésuper : ventes avec droit de retour illimité

Presso signe le 1er octobre un contrat de concession de 10 000 machines avec lachaîne Marchésuper. Ce contrat prévoit que Marchésuper a un droit de retour illimitépendant les 3 mois suivant la vente. Au 31 décembre N, 3 000 machines ont étévendues par Marchésuper sur la base de son état des sorties de stocks. Le prix devente au client individuel est fixé à 250 € et la marge de Marchésuper est de 20 %. Ledélai contractuel de règlement est de 60 jours.En IFRS, comme en principes français, Presso ne peut reconnaître la vente qu’àl’échéance des 3 mois et sur la base de l’état des sorties de stock de Marchésuper.Au 1er octobre, les ventes enregistrées en normes IFRS sont donc de 0 machine,Marchésuper ayant un droit de retour illimité.Au 31 décembre, les ventes enregistrées en normes IFRS sont de 3 000 machines,sur la base du document établi par Marchésuper.

Parallèlement, Presso enregistrera une sortie de stocks de 3 000 machines et lepassage en résultat du coût des ventes correspondant.

3. Ventes à l’international

Si Presso livre des machines à différents distributeurs à l’international, suivant lesconditions négociées de livraison et de dédouanement, le transfert des risques etavantages se situera à différents stades de la transaction (cf. Incoterm1).– EXW : livraison à l’usine. Le vendeur a livré la marchandise dès lors qu’elle est

livrée dans ses locaux propres ou dans un lieu convenu entre les parties, sansaccomplissement des formalités douanières et sans chargement. L’opération devente est donc supposée accomplie dès cette mise à disposition. Le vendeursupporte les risques jusqu’au moment de la livraison telle que définie.

Clients 90 000

Ventes : 100 000 – 5 000 – 5 000 90 000

Banque 85 000

Clients 90 000

Ventes(escompte de 5 % sur 100 000) 5 000

Clients (Marchésuper) 600 000

Ventes (3 000 × 250 × 80 %) 600 000

1. www.douane.gouv.fr

Page 40: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

30 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

– FCA : Franco transporteur. Le vendeur a livré la marchandise au lieu convenu parles parties. Il fournit la preuve de la livraison et organise le dédouanement. Levendeur assume les risques jusqu’au lieu de livraison convenu aux conditions denotification de livraison près.

– FAS : Franco le long du navire, transport maritime. Le vendeur a obligation delivrer au port d’embarquement, le long du navire, en fournissant un reçu « le longdu navire » et en organisant le dédouanement à l’exportation. Le vendeursupporte tous les risques jusqu’à la livraison au quai d’embarquement, telle queconvenue.

– FOB : Franco bord, transport maritime. Le vendeur a obligation de livrer à bord, defournir un reçu à bord sans réserves, de payer les frais de chargement non inclusdans le fret, d’organiser le dédouanement à l’exportation. Le vendeur assume tousles risques jusqu’au moment ou la marchandise a passé le bastingage du navireau port d’embarquement convenu.

– CFR : Coût et fret au port de destination convenu, transport maritime. Le vendeurdoit conclure le contrat de transport, livrer la marchandise à bord, fournir un docu-ment de transport « sans réserve », organiser le dédouanement à l’exportation,payer les frais de déchargement. Le vendeur supporte tous les risques de lamarchandise jusqu’au moment où elle passe le bastingage du navire au portd’embarquement convenu.

– CIF : Coût, assurance et fret au port de destination convenu. Le vendeur doitconclure les contrats d’assurance, livrer la marchandise à bord, fournir un docu-ment de transport « sans réserve », organiser le dédouanement à l’exportation,payer les frais de déchargement. Le vendeur assume tous les risques jusqu’aumoment où la marchandise a passé le bastingage du navire au port d’embarque-ment convenu.

– CPT : port payé jusqu’au port de destination convenu. Le vendeur doit conclure lecontrat de transport, livrer la marchandise au premier transporteur, fournir undocument de transport usuel « sans réserve », organiser le dédouanement àl’exportation, payer les frais de chargement, payer les frais de déchargement. Levendeur assume tous les risques jusqu’à la livraison au 1er transporteur.

– CIP : port payé, assurance comprise, jusqu’au lieu de destination convenu. Levendeur doit Le vendeur doit conclure le contrat de transport et d’assurance, livrerla marchandise au 1er transporteur, fournir un document de transport usuel « sansréserve », organiser le dédouanement à l’exportation, payer les frais de charge-ment, payer les frais de déchargement. Le vendeur assume tous les risquesjusqu’à la livraison au 1er transporteur.

– DAF : rendu frontière (transport terrestre). Le vendeur doit livrer la marchandise àla frontière convenue, fournir un document permettant à l’acheteur de prendrelivraison de la marchandise à la frontière, organiser le dédouanement à l’exporta-tion. Le vendeur assume les risques jusqu’au lieu de livraison (frontière).

– DES : rendu ex ship, transport maritime. Le vendeur doit livrer la marchandise aubord du navire au port de destination, fournir un document permettant à l’acheteurde prendre livraison de la marchandise au bord du navire, organiser le dédouane-ment à l’exportation. Le vendeur assume tous les risques jusqu’à la livraison aubord du navire, dans le port de destination.

– DEQ : rendu à quai, transport maritime. Le vendeur doit livrer au quai de destina-tion, fournir un document permettant à l’acheteur de prendre livraison de la

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marchandise à quai, organiser le dédouanement à l’exportation. Le vendeurassume tous les risques jusqu’à la livraison au quai de débarquement.

– DDU : rendu droits non acquittés (lieu de destination convenu). Le vendeur doitlivrer la marchandise au lieu de destination convenu, fournir un document permet-tant à l’acheteur de prendre livraison de la marchandise, organiser le dédouane-ment à l’exportation. Le vendeur assume les risques jusqu’au lieu de livraisonconvenu.

– DDP : rendu droits acquittés. Le vendeur doit livrer la marchandise au lieuconvenu, fournir un document permettant à l’acheteur de prendre livraison de lamarchandise, organiser le dédouanement à l’importation. Le vendeur assume lesrisques jusqu’à la livraison, non déchargée à l’arrivée du véhicule, au lieu de desti-nation convenu.

Suivant les termes du contrat, le transfert des risques du vendeur à l’acheteur – etdonc l’enregistrement du produit – sera localisé au niveau du vendeur, du transpor-teur, de l’acheteur :

LOCALISATION DU TRANSFERT DES RISQUES EN FONCTION DES INCOTERMS

Incoterm Vendeur Transporteur Acheteur

Départ

EXW X

Transport principal non acquitté par le vendeur

FCA X

FAS X

FOB X

Transport principal acquitté par le vendeur

CFR X

CIF X

CPT X

CIP X

Arrivée

DAF X

DES X

DEQ X

DDU X

DDP X

Page 42: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

32 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Ce tableau ne se réfère pas à une stricte application de la norme mais à une lecturedes conditions contractuelles à la lumière de la norme IAS 18. Cette lecture prend toutson sens, lors de la détermination des revenus ordinaires à la date de séparation desexercices comptables.

TEXTES DE RÉFÉRENCE

Le texte de référence est la norme IAS 18, « Produits des activitésordinaires », révisée en 1993. Il a été homologué par l’Union européennedans le règlement CE n˚ 1725/2003 du 29/09/2003 paru au Journal Officielde l’Union Européenne le 15 octobre 2003 (remplacé depuis lors par le règle-ment CE n˚ 1126/2008 du 3/11/2008).

La comptabilisation des ventes de biens, objet du présent chapitre, est trai-tée dans les paragraphes 14 à 19 de la norme IAS 18.

Dans les sept interprétations faisant référence à la norme IAS 18, lessuivantes concernent plus particulièrement les ventes de biens :

– SIC-31, Produits des activités ordinaires – Opérations de troc portant surdes services de publicité ;

– IFRIC 13, « Programme de fidélité clients » ;

– IFRIC 4, « Déterminer si un accord contient une location » ;

– IFRIC 15, « Contrats de construction immobilière » ;

– IFRIC 18, « Transfert d’actifs de la part des clients ».

Le lecteur souhaitant consulter les normes américaines se référera àl’Accounting Standard Codification (ASC), Topic 605, Revenue Recognition,et en particulier aux paragraphes ASC-605-15, Products.

Page 43: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

3 PRESTATIONS DE SERVICES

CE QU’IL FAUT RETENIR

DISPOSITIONS DE LA NORME

La prestation de services consiste en l’exécution par le prestataire d’unetâche définie contractuellement dans un délai convenu, sur une ou plusieurspériodes. La norme IAS 18 traite du revenu des prestations de services dansses paragraphes 20 à 28 ; elle prévoit que le prestataire acquiert un revenu aufur et à mesure des progrès accomplis dans la réalisation du service. Lerevenu reflète ainsi l’activité déployée par le fournisseur pour la réalisationdu contrat.

• Le modèle de comptabilisation du chiffre d’affaires des prestations de services diffère decelui des ventes de biens.• Pour les prestations de services, le progrès accompli par le prestataire dans la réalisationdu service est le fait générateur de la reconnaissance du chiffre d’affaires.• La comptabilisation des produits des prestations de services intervient dans la période oùles services sont rendus (« à l’avancement »). Cette approche est nécessaire pour donnerune information pertinente sur l’activité et le niveau de performance de l’entreprise.• Le résultat du contrat ne peut être comptabilisé à l’avancement que si le degré d’avance-ment est évalué de façon fiable, d’une part, et que les coûts encourus et à encourir pourachever la transaction peuvent être évalués de façon fiable, d’autre part.• Dans le cas contraire, et tant que ces conditions ne sont pas remplies, les produits sontcomptabilisés à hauteur des coûts encourus sans qu’aucune marge ne soit reconnue.

1

Page 44: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

34 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

1.1 Principe général

Les prestations de services font l’objet d’une comptabilisation au degréd’avancement lorsque celui-ci peut être déterminé de manière fiable (IAS 18§ 20). Cette méthode donne, dit la norme, une information utile sur l’activitéet la performance de l’entreprise au cours de la période. L’approche estanalogue à celle retenue dans la norme IAS 11 « Contrats de construction »dont les dispositions sont généralement applicables à la reconnaissance duchiffre d’affaires des contrats de prestations de services et des coûts ratta-chés. Bien entendu, les incidences pratiques ne concerneront que les presta-tions étalées dans le temps (et en cours à la date de clôture).

Quatre conditions doivent être simultanément remplies pour que le résultatà terminaison puisse être évalué de manière fiable (IAS 18 § 20) :

– le montant des produits peut être déterminé de manière fiable ;

– il est probable que les avantages économiques, c’est-à-dire les flux detrésorerie, associés à la transaction reviendront à l’entreprise ;

– le degré d’avancement de la prestation à la date de clôture peut être déter-miné de manière fiable ;

– les coûts encourus à la date de clôture et les coûts à encourir pour acheverla prestation peuvent être déterminés de manière fiable.

Diagramme de décision pour la comptabilisation des produits des prestations de services

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La notion de fiabilité – des produits, du degré d’avancement et des coûts –est donc centrale. Pour la préciser, la norme IAS 18 se réfère à trois élémentscomplémentaires (IAS 18 § 23) :

– l’existence d’un contrat qui fournit la base d’évaluation ;

– un système budgétaire qui permet d’en suivre l’estimation ;

– et un suivi – physique ou financier – qui permet de suivre les étapes de laréalisation.

Pour la définition des produits initiaux de la transaction et les ajustementsultérieurs de la rémunération contractuelle (par exemple, que faire de larémunération de services additionnels ?), la norme IAS 18 § 21 renvoie versles dispositions de la norme IAS 11, Contrats de construction. Elle fait demême pour les coûts de la transaction. Sur l’un et l’autre point, le lecteur seréférera au chapitre 4 du présent ouvrage.

1.1.1 Fiabilité des estimations des produits du contrat

À la base de la notion de fiabilité se trouve le contrat conclu entre les parties.L’entreprise est en effet censée pouvoir faire des estimations fiables lorsqueles parties sont d’accord sur trois aspects :

– les droits juridiquement exécutoires de chaque partie concernant le serviceà fournir et à recevoir ;

– la contrepartie devant être donnée en échange ;

– les modalités et conditions du règlement.

Un accord écrit n’est pas exigé mais il faut que le prestataire puisse appor-ter la preuve convaincante de l’existence d’un accord pour comptabiliser unchiffre d’affaires.

La norme rappelle également que pour pouvoir faire des estimationsfiables, l’entreprise doit disposer d’un système d’information interne, budgé-taire et financier, efficace.

Ensuite, au cours de la prestation, l’entreprise passe en revue et, le caséchéant, révise les estimations du produit de la transaction. En elles-mêmes,ces révisions d’estimations sont admises et n’impliquent pas que ces produitsne peuvent être estimés de façon fiable.

1.1.2 Probabilité des avantages économiques futurs

La probabilité d’obtention des avantages économiques futurs est appréhen-dée au travers de l’évaluation de deux risques :

– le risque de remise en cause par la contrepartie (annulation de la transac-tion, contestation sur l’étendue du service rendu, restitution des sommesperçues en cas de survenance de certains événements) ; et

– le risque d’irrécouvrabilité des créances.

Page 46: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

36 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Les contrats dont les dispositions permettent au client de se dégager facile-ment et sans pénalités sont porteurs d’un risque de non-obtention des avanta-ges économiques futurs. Il en va de même des dépassements de contrats etservices additionnels non expressément acceptés par le client.

Des délais de paiement inhabituellement longs peuvent aussi être l’indica-teur d’un risque sur la réalité de la créance, donc de la probabilité de ne pasrecouvrer les avantages économiques liés à la transaction.

Enfin, si un gouvernement étranger impose ou est susceptible d’imposerdes restrictions au rapatriement des devises, le chiffre d’affaires ne pourraêtre comptabilisé avant d’être effectivement encaissé et disponible pour leprestataire.

En revanche, lorsqu’une incertitude apparaît sur la recouvrabilité d’unproduit déjà comptabilisé dans le compte de résultat, la créance concernée estimmédiatement dépréciée mais le produit comptabilisé n’est pas annulérétroactivement.

1.1.3 Détermination du degré d’avancement

Rappelons que pour déterminer de manière fiable le degré d’avancement,l’entreprise doit disposer d’un système d’information interne, budgétaire etfinancier qui permette :

– de suivre et, éventuellement de réviser au fur et à mesure de l’avancement,les estimations des produits et des coûts du contrat ;

– et de comparer les coûts estimés avec les coûts réellement encourus.

Aucune méthode spécifique n’est imposée pour l’appréciation du degréd’avancement : l’examen des travaux effectués (le suivi physique), le pour-centage de travaux exécutés et le pourcentage de coûts sont autant de méthodespossibles suggérées par la norme IAS 18 § 24.

– l’examen des travaux effectués (le suivi physique) : Ce sera le cas parexemple pour des contrats où sont identifiés des jalons techniques(travaux, livrables). Le degré d’avancement est mesuré à partir de l’exécu-tion des jalons prévus, auxquels sont rattachés des niveaux de produitsacquis ou de coûts encourus ;

– l’avancement des produits, mesuré par le ratio entre les produits cumulés àla date de situation et les produits totaux du contrat. La méthode s’attacheà suivre le transfert de valeur au client ;

Exemple

Une entreprise de nettoyage conclut un contrat pour le nettoyage et la remise enordre du château où sont organisées quatre soirées de concerts de prestige les 29,30, 31 décembre 2009 et le 1er janvier 2010.

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La rémunération du service a été fixée à 40 000 (montant du revenu évalué defaçon fiable).

Les parties se sont mises d’accord sur ce montant (probabilité que les avantageséconomiques associés à la transaction iront à l’entité).

À la fin de l’année, les trois-quarts de la prestation ont été rendus car3 interventions ont eu lieu sur les 4 programmées (degré d’avancement à la datede clôture évalué de façon fiable).

L’entreprise de nettoyage estime le coût d’une journée de nettoyage et de remiseen ordre à 8 000 (coûts évalués de façon fiable).

Elle peut donc reconnaître un chiffre d’affaires de 30 000 (soit 3/4 de 40 000) au31/12/2009 (ainsi que les coûts correspondants de 24 000).

– l’avancement par les coûts, mesuré par le ratio entre les coûts cumulésencourus à la date de situation et les coûts totaux à terminaison. Laméthode s’attache à appréhender l’activité productive du prestataire.

Exemple

Une société de conseil en intégration de systèmes chiffre le budget de coûts d’unemission à 1 000. À la date d’arrêté, la société constate que les coûts engagés autitre du contrat, qui sont tous à prendre en compte dans le calcul du degré d’avan-cement, sont de 250.

L’avancement à la date d’arrêté est donc de : 250/1 000 = 25 %

Pour des raisons pratiques, lorsque les services sont fournis au cours d’unepériode donnée au moyen d’un nombre indéterminé d’opérations, le chiffred’affaires est comptabilisé de manière linéaire sur la durée couverte parl’accord, à moins qu’une autre méthode ne reflète mieux le degré d’avance-ment (IAS 18 § 25).

Exemple

Un prestataire de services d’assistance téléphonique propose des contrats de12 mois, sans limitation du nombre d’appels, pour un prix forfaitaire payable à laconclusion du contrat. Comme le nombre d’opérations est indéterminé, le chiffred’affaires sera comptabilisé, à partir de la date de souscription au service, demanière linéaire sur la durée du contrat.

Par exception, lorsqu’une opération spécifique est beaucoup plus impor-tante que toute autre, la comptabilisation du chiffre d’affaires est différéejusqu’à ce que cette opération soit exécutée (IAS 18 § 25).

Des différentes méthodes, l’entreprise doit retenir celle qui est la plusappropriée au regard de la nature de la transaction.

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38 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Exemple

Rolls Royce (rapport annuel 2008) : « Les revenus de prestations de services sontcomptabilisés selon le degré d’avancement des services rendus à la date de situa-tion. La mesure du degré d’avancement dépend de la nature du contrat mais elleest généralement fondée sur les coûts encourus lorsque ceux-ci sont liés auxservices exécutés à la date de situation, ou sur l’atteinte de jalons contractuels, ousur le nombre d’heures de vol ou un équivalent pour des contrats de maintenance(de flotte) à long terme. »

Exemple

Atos Origin (rapport annuel 2008) : « Dans les activités Conseil et Intégration desystèmes, le chiffre d’affaires est reconnu selon la méthode du pourcentaged’avancement pour les contrats au forfait, qu’ils s’échelonnent ou non surplusieurs exercices ou qu’il s’agisse de contrats correspondant à la réalisation deprestations intellectuelles ou de systèmes intégrés.

Dans les activités Infogérance, le chiffre d’affaires est déterminé sur la base d’unforfait et/ou d’unités d’œuvre informatiques vendues.

Le chiffre d’affaires généré par les contrats au forfait est reconnu selon laméthode du pourcentage d’avancement. Le chiffre d’affaires lié à la vented’unités d’œuvre informatiques est constaté au fur et à mesure de la prestation.

La méthode du pourcentage d’avancement est basée sur les coûts cumulés enga-gés, à une date donnée, comparés aux coûts totaux prévus au contrat.

Dans les activités Services en ligne, le chiffre d’affaires correspond en grandepartie à des volumes de transaction ou des prestations informatiques réalisées. Lechiffre d’affaires est constaté au fur et à mesure que les prestations sontréalisées. »

1.1.4 Détermination des coûts encourus et des coûts à terminaison

Seuls les coûts qui reflètent les services exécutés à la date de situation sontinclus dans les coûts encourus à cette date ; ceux qui portent sur une activitéfuture du contrat sont exclus (IAS 18 § 24 (c)).

Exemple

Une société de conseil en organisation chiffre à 1 000, dont 200 de prestations desous-traitants, le budget de coûts d’une mission qui vient d’être conclue.

À la date d’arrêté, la société constate que les coûts engagés sont de 250 dont 30au titre de travaux de sous-traitance facturés mais non exécutés. Ces travaux nesont pas comptabilisés en charges de la période car ils ne sont pas exécutés ; parailleurs, ils ne sont pas pris en compte dans le calcul du degré d’avancement.

L’avancement à la date d’arrêté est donc de : (250 − 30)/1 000 = 22 %, et non250/1 000 = 25 %

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1.1.5 Détermination du résultat du contrat

Si le résultat du contrat peut être estimé de manière fiable, les trois conditionssuivantes étant réunies :

– l’estimation du produit total de la transaction est fiable ;

– les coûts encourus et à encourir (pour achever la prestation) sont évaluésde façon fiable ;

– la mesure du degré d’avancement de la prestation est fiable ;

l’entreprise comptabilise le chiffre d’affaires et le résultat à l’avancement.

Si le résultat du contrat ne peut être estimé de façon fiable mais qu’un béné-fice à terminaison est probable, l’entreprise comptabilise un chiffre d’affairesà hauteur des charges encourues et recouvrables, c’est-à-dire sans marge. Lecas peut notamment se présenter au début du contrat1 ; cette situation peutaussi survenir en cours de vie du contrat en cas d’événement exceptionnel.

Si l’entreprise n’a pas la certitude de recouvrer les coûts encourus, elle lespasse intégralement en charges et ne comptabilise aucun chiffre d’affaires.

Des contrats générant cette situation sont par exemple ceux dont la validitéest mise en question, ceux pour lesquels le client n’est pas en mesure de faireface à ses obligations ou pour lesquels le prestataire n’est pas en mesure defaire face à ses obligations contractuelles.

1.2 Évaluation des produits

Le produit des prestations de services est évalué à la juste valeur de la rému-nération reçue ou à recevoir. Cette rémunération est généralement celleconvenue entre les parties (IAS 18 § 10) : c’est le prix contractuel en tenantcompte de toute remise commerciale ou rabais sur quantité accordée.

Lorsque l’entreprise accorde des délais de paiement significatifs à sonclient, le produit est comptabilisé pour sa valeur actualisée et non pour savaleur nominale (IAS 18 § 11) : la différence entre la valeur actualisée et lavaleur nominale du produit doit être portée en produits financiers. Lesescomptes accordés pour règlement anticipé sont déduits des produits desactivités ordinaires.

Les produits des transactions en devises sont convertis soit au taux envigueur à la date de transaction, soit à un cours moyen pondéré périodique

1. Les entreprises françaises se rappelleront d’ailleurs les termes du PCG 1982 selon lesquelsl’avancement dans la réalisation du contrat devait être suffisant pour que des prévisionsraisonnables puissent être faites sur la totalité des coûts qui interviendront dans le coût derevient du service rendu.

Page 50: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

40 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

dans la mesure où ce dernier constitue une approximation fiable du cours à ladate de transaction.

La différence entre le cours de comptabilisation et le cours de clôture ou derèglement est comptabilisée en différence de change.

Ces différents points sont détaillés et abordés de manière pratique auchapitre 5, « Opérations en devises, actualisation, risque de crédit ».

PRINCIPALES DIFFÉRENCES AVEC LE RÉFÉRENTIEL FRANÇAIS ET LES US GAAP

2.1 Principales différences avec le référentiel français

2.1.1 Identification de la transaction et du service rendu

Dans ses comptes individuels, l’entreprise se fonde sur les dispositions ducontrat pour comptabiliser son chiffre d’affaires. Avec la norme IAS 18, onpasse à une application basée sur l’analyse de la substance de l’opérationpour aboutir principalement à une meilleure présentation économique.

Exemple

En normes françaises, les coopérations commerciales, demandées par la grandedistribution à ses fournisseurs, sont constatées en chiffre d’affaires par les distri-buteurs. Après analyse en substance, il a généralement été conclu à l’absence deservice distinct procuré par le distributeur au fournisseur. Au regard de la normeIAS 18, les marges arrière s’analysent donc, pour le fournisseur, comme desdégradations tarifaires et, pour le distributeur, comme une amélioration desconditions d’achat.

Dans ses comptes consolidés en normes françaises, l’entreprise peut retenirla même approche que dans ses comptes individuels ou bien retenir uneapproche en substance.

Exemple

Le groupe PPR, en normes françaises, comptabilisait déjà les coopérationscommerciales, comme une amélioration des conditions d’achat et non comme duchiffre d’affaires.

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2.1.2 Fait générateur de la comptabilisation

En normes françaises, le principe est la constatation du produit des presta-tions de services à la date d’achèvement. Ensuite, pour traiter les prestationséchelonnées sur plusieurs périodes comptables, il convient de distinguerentre :

– prestations continues (exemple : un contrat d’entretien, à durée définie,sans limitation du nombre d‘interventions) : comptabilisées en fonction del’écoulement du temps ;

– prestations discontinues à échéances successives (exemple : un contratd’entretien où le nombre d’intervention est limité) : comptabilisées àl’avancement dans la limite des produits facturables ;

– prestations déterminées dans un contrat global : comptabilisées, soit àl’avancement, soit à l’achèvement, selon le choix de méthode de l’entre-prise.

La divergence majeure porte sur les contrats à long terme : le règlementCRC 99-08 permet de choisir entre la comptabilisation à l’avancement et lacomptabilisation à l’achèvement. La norme IAS 18 impose la méthode àl’avancement.

2.1.3 Mesure de l’avancement

Pour les prestations de services ne relevant pas des contrats à long terme, lestextes français vont généralement conduire l’entreprise à comptabiliser unchiffre d’affaires au rythme des conditions contractuelles. La norme IAS 18prévoit que l’avancement soit toujours mesuré en fonction de l’intensité duservice rendu ou de l’importance de l’activité productive, et ceci indépen-damment des facturations contractuelles ou du calendrier d’encaissement desappels de fonds.

2.1.4 Évaluation des produits

➤ Avantages économiques consentis à des clients

Les avantages économiques consentis à des clients (rabais, remises autresque celles figurant sur la facture…) sont traités comme des dépenses demarketing en normes françaises. Ils viennent en déduction du chiffre d’affai-res selon la norme IAS 18.

➤ Escomptes accordés

Les escomptes accordés pour paiement anticipé sont traités comme des char-ges financières en normes françaises. Ils sont déduits du chiffre d’affairesselon la norme IAS 18.

Page 52: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

42 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

➤ Pénalités

Selon les textes français, les pénalités encourues par le prestataire du fait deretard dans l’exécution du contrat ou autres manquements à ses obligationsdoivent être traitées comme des charges. Ces pénalités viennent en déductiondes produits selon la norme IAS 18.

➤ Actualisation

De manière générale, les textes français ignorent l’effet temps de l’argent. Encas de différé de paiement significatif, la norme IAS 18 prévoit que le produitsoit mesuré à la valeur actualisée des flux de trésorerie à recevoir.

2.1.5 Incertitude sur le recouvrement

En cas d’incertitude sur la recouvrabilité des produits du contrat, l’entreprisequi applique les textes français constate le chiffre d’affaires lorsque le serviceest rendu et, en parallèle, déprécie la créance du montant estimé irrécouvra-ble. Tant que l’incertitude n’est pas résolue, la norme internationale interditla constatation d’un chiffre d’affaires avant l’encaissement de la créance.

2.2 Principales différences avec le référentiel US GAAP

2.2.1 Commentaire général

Normes US GAAP et normes IFRS ne présentent pas de divergences majeu-res sur les principes de constatation du chiffre d’affaires des prestations deservices. Les divergences généralement recensées portent sur des points oùles textes américains prévoient des dispositions d’application détailléesquand la norme internationale en reste au niveau des principes.

Sauf exceptions, le référentiel américain peut donc constituer un guidepour la mise en œuvre des dispositions de la norme IAS 18. Nous lemontrons à partir de l’exemple de l’industrie du logiciel et des services infor-matiques.

2.2.2 Secteur du logiciel et des services informatiques

La valeur du marché de l’informatique estimée en 2008 s’élève à plus de2 600 milliards d’euros dont 21 % pour le marché des services informati-ques. L’évolution rapide des technologies comme celle des besoins et deman-des des utilisateurs, couplées à l’imagination des départements marketing età celle des services commerciaux font que la diversité des offres est considé-rable et ne cesse de croître. Les problématiques de constatation du chiffred’affaires sont donc nombreuses.

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Source : Gartner Dataquest IT Services Market Databook, 2008

➤ Que dit la norme IAS 18 ?

Les dispositions générales du paragraphe 13 (« lorsque le prix de vente d’unproduit comprend un montant identifiable pour la rémunération de servicesultérieurs, ce montant doit être différé pour être rattaché aux périodes surlesquelles le service est rendu ») sont complétées par la présentation dansl’annexe de deux situations traitant de l’industrie du logiciel et des servicesinformatiques.

Situation 1 : « Lorsque le prix de vente d’un produit comprend un montantidentifiable pour la rémunération de services ultérieurs (par exemple, desprestations de maintenance associées dont des mises à jour, un support tech-nique, et des développements − effectués à la demande des clients − de fonc-tionnalités supplémentaires pour des logiciels standard) ce montant estdifféré et constaté en produits. Le montant différé est celui qui couvre le coûtdes services promis majoré d’une marge raisonnable pour ces services »(exemple 11 de l’annexe d’IAS 18).

Situation 2 : « La rémunération du développement d’un logiciel personna-lisé selon les spécifications du client est constatée en chiffre d’affaires enfonction du degré d’avancement du développement, incluant l’achèvementdes services fournis pour la maintenance ultérieure » (exemple 19 del’annexe d’IAS 18).

➤ Que dit le texte américain ?

Outre-Atlantique, l’American Institute of Certified Public Accountants(AICPA) s’est attachée à encadrer la pratique des acteurs par des dispositionsprécises traitant des situations concrètes. Pour l’industrie du logiciel et desservices informatiques, le référentiel américain comprend une série de textesmajeurs dont :

– l’ASC1 985-605-25 (ex-AICPA SOP n˚ 97-2 et AICPA SOP n˚ 98-9) quitraite des accords ne portant pas sur des développements, évolutions ou

1. Voir glossaire en fin d’ouvrage.

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44 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

adaptations significatifs de logiciels (donc l’édition de logiciels, le conseil,le support et la maintenance, la formation…) ;

– l’ASC 985-605-35 (ex-AICPA SOP n˚ 81-1) qui s’applique à la comptabi-lisation des accords portant sur des développements, évolutions ou adapta-tions significatifs de logiciels sur demande du client (donc ledéveloppement et l’intégration de systèmes).

À l’origine, les dispositions d’ASC 985-605-25 s’appliquaient aussi auxcontrats de vente portant sur des éléments corporels (immeubles, installa-tions, équipements…) et comprenant des logiciels nécessaires à leur fonc-tionnement. Ce n’est plus le cas depuis l’adoption de l’ASU1 2009-14 quientre en vigueur au plus tard le 15 juin 2010 et peut être appliqué par antici-pation.

Nous ne traiterons ici que des grandes lignes d’ASC 985-605-25 sans viserà l’exhaustivité.

L’ASC 985-605-25 distingue trois types de contrats de vente, selon qu’ilsportent sur :

– un logiciel spécifique (c’est-à-dire nécessitant des adaptations importantesaux besoins du client) ;

– un progiciel (ou logiciel standard) qui ne demande pas d’adaptations ouque des adaptations légères ;

– un contrat complexe couvrant la vente d’un logiciel spécifique ou d’unprogiciel et celle de services additionnels non essentiels au fonctionne-ment du logiciel.

La distinction est importante car chaque type de contrat suit des règles decomptabilisation différentes.

Les contrats portant sur des logiciels qui demandent beaucoup de dévelop-pements ou d’adaptations aux besoins du client sont assimilés à des contratsde construction ; ASC 985-605-25 renvoie alors l’entreprise vers ASC 605-35, « Construction-Type and Production-Type Contracts »2.

Pour les autres contrats, ASC 985-605-25 précise en premier lieu commentles critères généraux de comptabilisation du chiffre d’affaires doivent êtreappliqués dans le contexte particulier du secteur informatique. Ensuite, lanorme indique comment décomposer un contrat complexe en ses différentséléments puis associer à chacun une partie de la rémunération globale etenfin la comptabiliser.

1. Voir glossaire en fin d’ouvrage.2. C’est l’équivalent dans le référentiel américain de la norme IAS 11, « Contrats de

construction ».

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➤ Conditions générales de constatation du produit

Le revenu doit être constaté lorsque quatre conditions sont simultanémentréunies :

– une preuve convaincante d’un accord existe ;

– la livraison est intervenue (et aucun élément à livrer ultérieurement n’estessentiel au fonctionnement de l’élément livré) ;

– la rémunération du vendeur est déterminée ou déterminable ;

– le recouvrement est probable.

◆ Preuve convaincante de l’existence d’un accord

La preuve convaincante de l’existence d’un accord est déterminée par réfé-rence aux pratiques habituelles de l’entreprise, celles que prévoient le manuelde procédures et le guide de contrôle interne. Si la pratique habituelle del’entreprise est de considérer qu’il n’y a accord qu’une fois un contrat écritsigné des deux parties, elle ne peut se prévaloir d’aucune circonstance parti-culière pour constater un produit avant que la condition ne soit remplie.

◆ Livraison effective du produit

La notion de livraison du progiciel est interprétée de façon très restrictive : engénéral, la livraison est effective lors du transfert du produit maître ou de lapremière copie du progiciel. Pour les logiciels téléchargeables, on considèreque la livraison est intervenue lorsque le client télécharge le logiciel ou bienqu’il reçoit les liens, les codes d’accès et les clés d’activation nécessaires.

Lorsque le contrat prévoit une acceptation par le client et qu’il existe uneincertitude sur celle-ci le revenu est différé jusqu’à l’obtention du procès-verbal de réception ou l’expiration de la clause. De même, si l’élément livrén’est pas utilisable car des éléments nécessaires à son fonctionnement ne sontpas encore livrés on considérera que le deuxième critère de comptabilisationdu produit n’est pas rempli.

◆ Rémunération fixe ou déterminable

La rémunération n’est pas déterminable si elle a un caractère conditionnel àla livraison de certains livrables futurs.

Le caractère déterminable de la rémunération est aussi lié aux délais derèglement consentis aux clients1. Le prix convenu pour la licence sera

1. Dans ce délai, la valeur du progiciel peut se réduire suite à la mise sur le marché d’uneversion améliorée et le risque qu’il faille accorder des concessions pour obtenir le paiementde la créance augmente avec le temps.

Page 56: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

46 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

présumé être non déterminé lorsqu’une fraction significative de son montantn’est pas réglée sur la durée de validité de la licence ou dans les 12 mois desa mise à disposition. Il s’agit d’une présomption simple. L’entreprise laréfutera si elle établit qu’elle a pour pratique habituelle d’accorder des délaisde paiement longs et qu’elle recouvre effectivement ses créances sans avoir àfaire de concessions à ses clients.

Lorsque le caractère déterminé ou déterminable du prix ne peut être établià l’origine du contrat, l’entreprise constate le produit aux dates où les paie-ments deviennent exigibles.

◆ Recouvrement probable

Le caractère probable du recouvrement de la rémunération contractuelle doitêtre apprécié en fonction d’une série de critères : mention dans le contrat desproduits non encore disponibles ou à livraison différée ; prix distincts pourles différents livrables, clauses relatives aux garanties pour défaut desproduits…

Soulignons cependant que le recouvrement du prix n’est pas considérécomme probable si le vendeur a une pratique établie d’accorder des conces-sions à ses clients, et ceci quelles que soient les dispositions contractuelles.

➤ Contrats complexes

De nombreux accords sont à géométrie variable portant sur la vente delicence et différents services contemporains de la vente de la licence ou non :maintenance, droits aux mises à jour, conseil, installation, formation…L’ASC 985-605-25 définit les éléments qui doivent faire l’objet d’une comp-tabilisation séparée ; la norme précise comment ventiler la rémunérationcontractuelle entre ces éléments et échéancer dans le temps les rémunérationsallouées.

◆ Identification des livrables distincts

Les composants des accords de maintenance et d’assistance. Ces accordsvont porter entre autres sur l’assistance, la maintenance corrective, la mainte-nance évolutive…

Le droit à maintenance (explicite ou implicite) constitue un élémentdistinct du droit d’utilisation du logiciel existant.

Pour le droit à bénéficier de mises à jour ou d’évolutions, il faut distinguerentre mises à jour spécifiées et mises à jour non spécifiées. Les mises à jourspécifiées lors de la conclusion du contrat sont celles dont les fonctionnalitéssont connues, sur lesquelles le département R&D travaille déjà et dont lescalendriers de développement et de lancement sont déjà fixés. Ces droits à

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mises à jour doivent être comptabilisés comme un élément distinct, même sielles sont offertes gratuitement. À l’inverse, les mises à jour non spécifiées,susceptibles d’être ou non développées au cours de la durée de validité ducontrat d’assistance, sont considérées comme faisant partie des servicesd’assistance client et ne sont pas comptabilisées séparément.

Les droits à bénéficier de produits additionnels (y compris sur une base« s’il y en a et lorsqu’ils sont disponibles ») sont des livrables distincts.

Dans certains accords, l’entreprise va consentir à son client le droit de resti-tuer ou d’échanger son logiciel (par exemple pour lui offrir la possibilité depasser sur une nouvelle plateforme). Ou bien, l’entreprise va vendre un logi-ciel non encore disponible, livrer en attendant un autre logiciel qui sera resti-tué lorsque le produit commandé sera disponible. Ces droits de restitution ouà échange de logiciels ne conduisent pas à différer un revenu1.

Les autres prestations de services (conseil, formation, intégration…).Nombre d’accords comprennent la vente de services autres que les servicesd’assistance et de maintenance, tels que le conseil (assistance à la mise enœuvre, aide à la conception du logiciel…), la formation, l’installation ou leparamétrage. Ces services sont considérés comme des livrables distincts sousdeux conditions :

– ils ne sont pas essentiels au fonctionnement des autres éléments de la tran-saction (les logiciels) ;

– ils sont définis dans l’accord et on peut raisonnablement considérer que larémunération totale de l’accord varierait selon qu’ils y sont ou non inclus.

Si les services sont essentiels au fonctionnement du logiciel, on appliquerales dispositions relatives aux contrats de construction (la norme ASC 605-35)à l’ensemble formé du logiciel et des services.

Les services qui ne sont pas essentiels au fonctionnement du logiciel, etpour lesquels le deuxième critère mentionné est rempli, sont identifiés en tantque livrables distincts.

Le produit du ou des services est constaté lorsque les services sont rendusou sur une base linéaire si leur calendrier de réalisation ne peut être déter-miné.

1. Les droits de restitution (le nouveau logiciel présente des différences autres que minimes entermes de prix, de fonctionnalités ou autres, par rapport au logiciel restitué) donnent lieu àconstitution de provision.

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48 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

◆ Les méthodes de décomposition de la rémunération globale

La méthode des justes valeurs relatives fondées sur les VSOE. Le prixdéfini au contrat doit être réparti entre les différents livrables distincts enfonction de leur juste valeur déterminée sur la base des éléments de preuveobjective constitués par le vendeur (Vendor Specific Objective Evidence,VSOE).

La juste valeur est déterminée à partir des tarifs effectivement pratiqués parl’entreprise lorsque l’élément est vendu séparément ou au prix déterminé parla direction si le produit n’a pas encore été vendu. Dans le second cas, le prixestimé doit alors rester inchangé lors de la mise sur le marché.

Si l’entreprise ne dispose pas de la VSOE de la juste valeur pour tous leslivrables prévus par l’accord, l’intégralité du produit est différée jusqu’à ceque ces informations deviennent disponibles ou que l’ensemble des livrablessoient effectivement livrés. Ceci à moins que l’entreprise ne soit en situationd’appliquer la méthode résiduelle ou qu’une exception ne soit prévue pour lelivrable considéré.

La méthode résiduelle. La méthode résiduelle permet à l’entreprise de cons-tater un produit pour les éléments déjà livrés à hauteur de la différence entrela rémunération totale et la juste valeur des éléments non encore livrés. Sonapplication est soumise à la réunion de trois conditions :

– l’entreprise dispose de la VSOE de la juste valeur des éléments non encorelivrés,

– toutes les autres conditions de constatation du produit sont satisfaites, et

– la VSOE de la juste valeur des éléments non encore livrés est inférieure àla rémunération totale prévue par l’accord.

Cas de certains livrables. Lorsque le seul élément non encore livré est lamaintenance, et que l’entreprise ne dispose pas de sa VSOE, la rémunérationtotale de l’accord est étalée sur la période de maintenance.

Lorsque les seuls éléments non livrés sont des services ne constituant pasune production, modification ou personnalisation significatives de logiciel, etque l’entreprise ne dispose pas de leur VSOE, la rémunération de l’accord estétalée sur la période au cours de laquelle les services sont rendus.

Lorsque l’accord porte en substance sur un abonnement, la totalité de larémunération est étalée sur la durée de celui-ci.

Traitement des rabais, remises, et gratuités. Si l’entreprise applique laméthode de la VSOE de la juste valeur, tout rabais consenti doit être répartientre les livrables de la transaction autres que les droits mis à jour, en fonc-tion de leur juste valeur relative. Toutefois, les droits à mises à jour restentévalués sur la base de la VSOE de leur juste valeur. Si l’entreprise applique laméthode résiduelle, elle est tenue d’affecter le rabais aux éléments livrés.

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50 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

➤ Synthèse

Les principales dispositions de la norme ASC n˚ 985-605-25 sont compati-bles avec les principes énoncés dans IAS 18 et notamment avec IAS 18 § 13et ses exemples 11 et 19 en annexe. L’entreprise pourra donc très largement yrecourir comme à un guide méthodologique pour mettre en œuvre la normeIAS 18, ce qui lui fera gagner du temps et la sécurisera dans sa démarche.

On relèvera cependant qu’à la différence du référentiel américain, le réfé-rentiel IFRS n’exige pas que la juste valeur des différents livrables soit déter-minée selon la méthode de la VSOE. L’entreprise n’est pas contrainte dans laméthode de détermination de la juste valeur ; elle peut, par exemple, évaluerles éléments non livrés sur la base de leurs coûts estimés majorés d’unemarge raisonnable. Par conséquent, une entreprise appliquant les US GAAPse voit interdire de constater le produit associé aux éléments livrés si elle nedispose pas de la VSOE de la juste valeur des éléments non livrés. Son homo-logue appliquant la norme IAS 18 pourra, elle, constater le produit deséléments livrés, si elle peut déterminer de manière fiable la juste valeur deséléments non livrés par une méthode autre que la VSOE (et que les autresconditions de comptabilisation sont réunies).

Exemple

Alcatel-Lucent indique : « Alcatel-Lucent applique les dispositions de l’AICPASOP 97-2 aux ventes de logiciels compris dans un contrat et ayant un caractèrenon accessoire, avec quelques exceptions telles que l’utilisation de la juste valeurdéterminée sur une base autre que la VSOE (Vendor Specific ObjectiveEvidence) de la juste valeur si différer le revenu pour la partie relative auxéléments livrés du fait de l’impossibilité de déterminer la juste valeur deséléments non encore livrés est considéré comme contraire aux principes IFRS. »(Source : Rapport annuel 2008.)

Dans le traitement des efforts commerciaux, on note également des diffé-rences. En effet, en cas de décomposition de la rémunération contractuelle enfonction de la juste valeur des différents livrables, l’ASC 985-605-25 interditd’affecter une partie de la remise consentie aux droits à mise à jour. Cettedisposition n’a pas d’équivalent dans la norme IAS 18. Dans ces conditions,l’entreprise pourrait constater un produit initial plus important en IFRS qu’ennormes américaines.

Selon le référentiel américain, l’entreprise qui applique la méthode rési-duelle doit affecter aux éléments les premiers livrés tout rabais ou remiseconsenti. La méthode résiduelle est possible en IFRS mais aucune dispositionde la norme IAS 18 ne prévoit ce traitement. Dans ces conditions, l’entre-prise pourrait constater un produit initial plus important en IFRS qu’ennormes américaines.

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DIFFICULTÉS À SURMONTER ET CLÉS POUR UNE MISE EN ŒUVRE RÉUSSIE

3.1 Difficultés d’application

3.1.1 Identification et caractérisation de la transaction

Une identification correcte de la transaction est nécessaire pour déterminer letraitement comptable approprié. Par exemple, s’agit-il d’un contrat de presta-tion de services « simple » régi par la norme IAS 18 ou d’un contrat de cons-truction régi par IAS 11 ? s’agit-il d’un contrat de prestation de services oud’une location − qui relèvera de la norme IAS 17 − incorporée à un contratd’autre nature ?

➤ Contrat de prestation de services ou contrat de construction ?

L’IFRIC a rappelé la définition stricte donnée par la norme IAS 11 § 3 et § 5 :« Un contrat de construction est un contrat spécifiquement négocié pour laconstruction d’un actif pour le client, ou un contrat portant sur une prestationassociée à la construction d’un actif pour le client comme des prestationsd’architecture ou d’ingénierie. » Ces contrats relèvent de la norme IAS 11.Les autres contrats de prestations de services relèvent de la norme IAS 18.

Exemples

Un contrat portant sur la conception, le développement et l’intégration d’un logi-ciel spécifique est un contrat assimilé à un contrat de construction. Une prestationd’assistance au paramétrage d’un progiciel standard est une prestation de servi-ces relevant d’IAS 18.

Un accord de construction immobilière où le client dicte ses choix de conceptionest un contrat de construction. Un contrat pour la construction d’un bien immo-bilier « sur catalogue » où l’entreprise met en œuvre les matériaux qui lui sontfournis par le client est un contrat de prestation de services.

➤ À la recherche des locations cachées

Certains contrats de services peuvent accorder aux clients un droit d’usaged’un actif en contrepartie de loyers perçus dans le cadre de la rémunérationglobale du contrat. Le prestataire est alors considéré comme un bailleur àl’égard de ses clients. À titre d’exemple, on peut citer :

– l’externalisation du traitement des données ou d’autres fonctions d’uneentité ;

3

Page 62: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

52 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

– la fourniture de droits à capacité sur des réseaux de télécommunication ;

– les contrats d’achat ferme, par lesquels les acheteurs doivent effectuer despaiements déterminés qu’ils prennent ou non livraison des produits ouservices objet du contrat.

Ces contrats demandent à être analysés à la lumière des dispositions del’interprétation IFRIC 4, « Déterminer si un accord contient une location ».Ils contiennent une location dans les cas suivants :

– l’exécution de la convention rend nécessaire l’usage d’un actif spécifique.Peu importe que cet actif soit mentionné dans la convention. La conditionn’est pas remplie si le contrat fait mention d’un actif spécifique mais que leprestataire a le droit ou la possibilité d’utiliser d’autres actifs,

et

– l’accord comporte le droit d’utiliser un actif spécifique ou donne à l’ache-teur la possibilité de contrôler l’utilisation de cet actif. Il en ira ainsi danstrois cas :

• l’acheteur a le droit ou la possibilité d’exploiter l’actif, ou de dirigerceux qui sont chargés de l’exploiter selon la manière qu’il détermine, etceci dans un contexte où il obtient une partie non négligeable de laproduction de l’actif,

• l’acheteur a le droit ou la possibilité de contrôler l’accès physique àl’actif tout en obtenant une partie non négligeable de la production del’actif,

• il est peu probable qu’un tiers obtienne plus qu’une partie négligeablede la production de l’actif, dans un contexte où le prix payé par l’ache-teur n’est ni un prix contractuellement fixé par unité produite ni égal auprix de marché par unité produite à la date de livraison.

Les dispositions de la norme IAS 17 s’appliquent aux éléments de l’accordconstituant une location. La rémunération globale du prestataire au titre ducontrat est ventilée, sur la base de leur juste valeur respective, entre la rému-nération de la location et celle des autres prestations de services.

Dans les entreprises où la question se pose (par exemple les prestataires deservices d’infogérance), une méthodologie d’identification des locationsincorporées doit être élaborée et communiquée. Les équipes commerciales etjuridiques seront mises en alerte pour repérer ces situations et intégrer lesincidences comptables dès le stade du montage de l’opération. Les responsa-bles de la comptabilisation du chiffre d’affaires mettront en œuvre la métho-dologie formalisée dans la procédure interne, en recourant en tant quenécessaire aux « experts normatifs ».

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3.1.2 Acteur principal ou agent ?

Si le prestataire intervient comme mandataire en substance d’un acteur prin-cipal, il ne doit comptabiliser de produits que sur la base de sa rémunérationnette ou de sa commission (IAS 18 § 8).

Le cas se rencontre lorsque l’entreprise vend un service produit par un tiers.Ce point a été abordé dans le chapitre 1, « Aspects généraux de la comptabi-lisation du chiffre d’affaires ».

Pour déterminer si elle est ou non l’acteur principal dans la transaction,l’entreprise pourra, rappelons-le, se référer aux US GAAP. Elle appliqueraalors la grille d’analyse qui a été présentée au chapitre 1 du présent ouvrage.Le manuel de procédures précisera aux responsables de la comptabilisationdu chiffre d’affaires la règle retenue en interne.

Exemple

France Telecom, faisant application du texte américain, indique :

« …., les critères suivants sont analysés pour déterminer si les revenus doiventêtre comptabilisés pour leur montant brut ou net :

• le Groupe est le principal responsable dans la transaction ;

• le Groupe supporte le risque sur le stock ;

• le Groupe a une latitude raisonnable dans la fixation du prix au client final ;

• le Groupe a la discrétion du choix du fournisseur ;

• le Groupe est impliqué dans la détermination des spécifications du service ; et

• le Groupe supporte le risque de crédit.

Ainsi, les revenus des numéros à revenus et à coûts partagés (Audiotel, numéroscolorés, numéros à tarification spéciale, etc.) sont reconnus pour :

• leur montant brut lorsque le Groupe dispose d’une latitude raisonnable dans lafixation du prix facturé au client final et est le principal responsable de ladétermination des principales caractéristiques du contenu (service ouproduit) ;

• leur montant net des reversements aux prestataires de ces services lorsque cesderniers ont la responsabilité du service et déterminent la tarification del’abonné. » (Source : Rapport annuel 2008.)

3.1.3 Division et regroupement de contrats

Dans certains cas, la question se pose de savoir si la transaction constitue ounon l’unité élémentaire pour la comptabilisation. La norme IAS 18 § 13évoque deux situations :

– les transactions liées dont les effets s’annulent, comme les ventes avecengagement de reprise. Elles sont traitées dans le chapitre 7 relatif àcertains cas spéciaux ;

Page 64: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

54 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

– les transactions à livrables multiples. Elles sont abordées au chapitre 6,« Transactions à éléments multiples ».

Des seuils de matérialité seront fixés dans les procédures en vigueur afin deréserver ces analyses complémentaires aux contrats significatifs.

3.2 Pistes pour une mise en œuvre réussie

Nombre des préconisations figurant dans les chapitres 2, « Ventes de biens »,et 4, « Contrats de construction », sont bien entendu valables pour ce quiconcerne les prestations de services.

La mise en œuvre de la norme IAS 18 repose en premier lieu dans laconnaissance aussi fine que possible de la manière dont les services offertssont conçus, associés, tarifés, commercialisés, produits, gérés et contrôlés.Certains aspects sont plus spécifiquement à approfondir, comme :

– contenu de l’offre : où se trouve la valeur pour le client, à partir de quandest-elle délivrée, quelle est l’étendue des obligations futurescontractées… ?

– partenariats et recours à la sous-traitance : la prestation promise dépend-elle de services à rendre par des tiers ? quelle est alors la posture del’entreprise : acteur principal ou mandataire ?

– marketing : quels sont les avantages consentis aux clients, les prix sont-ilsajustés en fonction de l’utilisation des services, des quantités, du tempspassé, font-ils l’objet de clause « du client le plus favorisé » ; les opéra-tions de promotion sont-elles considérées comme des rabais ou remisesvenant en réduction du chiffre d’affaires, pourraient-elles être considéréescomme des ventes de produits ou services ultérieurs ?

En tant que nécessaire, les outils de reporting internes et externes devrontêtre adaptés pour traduire la notion de chiffre d’affaires selon IAS 18. Ilimporte en effet que celle-ci devienne ou reste la référence unique pour lamesure de l’activité dans le langage de gestion interne et que l’informationfinancière soit le reflet du mode de suivi de la gestion par le management.

Si la mise en œuvre d’IAS 18 se révèle avoir des impacts autres qu’insigni-fiants, des actions de sensibilisation et de pédagogie sont nécessaires eninterne comme auprès des partenaires extérieurs pour éviter toute dramatisa-tion née d’un effet de surprise.

Nombre de contrats de travail ou autres accords prévoient des rémunéra-tions variables déterminées par rapport au chiffre d’affaires. Y a-t-il desimpacts à prévoir si ces rémunérations sont assises sur le chiffre d’affairesselon IAS 18 ? C’est un point à vérifier lors du projet de mise en œuvre. Si telest le cas, il faudra généralement assurer la neutralité de la réforme en modi-fiant la formule de calcul.

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Enfin, le succès dans la mise en œuvre, puis le fonctionnement selonIAS 18, tient en grande part à la qualité de l’application par les entités opéra-tionnelles et à leur capacité à être en alerte sur les cas nouveaux ou complexes.La procédure à mettre en place prévoira :

– la sensibilisation des équipes commerciales et juridiques aux traductionscomptables et financières des clauses contractuelles ;

– l’instauration d’une collaboration entre les équipes financières, commer-ciales, juridiques et techniques afin de définir :

• le périmètre du(des) contrat(s) : regroupement ou séparation des tran-sactions,

• les jalons techniques à respecter dans le cadre des contrats de presta-tions,

• les différés de paiement significatifs consentis sur le règlement descréances (nets des avances reçues) ;

– le processus applicable à l’étude et à la validation du traitement comptabledes contrats complexes ;

– les modalités et le niveau de validation des études de rentabilité descontrats importants.

1. Vente de logiciel et prestations, décomposition de la rémunération du contrat

1.1 Contexte

La société LESOFT est un éditeur de logiciel qui conçoit, développe et commercialisedes logiciels. LESOFT propose différents services annexes : formation, installation etconseil ainsi que la maintenance logicielle. Le contrat annuel de maintenance proposéaux clients comprend : l’assistance à résolution de problèmes logiciels ainsi que ledroit aux mises à jour mineures, qui améliorent l’utilisation pratique du logiciel, et àcelles d’importance moyenne, qui enrichissent les fonctionnalités du logiciel.L’accord définitif concernant la vente du logiciel est matérialisé par la signature d’uncontrat de licence. L’installation est réputée réalisée dès l’installation physique du logi-ciel sur le matériel informatique du client, installation réalisée par une équipe dédiéede l’éditeur.Le client dispose d’un mois pour procéder aux tests. Au terme de ce mois, le clientsigne un procès-verbal de réception sur lequel il mentionne ses réserves éventuelles.L’expérience montre qu’il y a peu de retours pendant la période de test.L’installation est gratuite pour les clients qui souscrivent le contrat de maintenance etd’assistance. Elle est facturée – au prix de 150 – aux autres clients.

1.2 Description du contrat

LESOFT conclut un contrat de vente de logiciel (prix de la licence : 2 500), avec uneannée de maintenance (redevance : 420) ; ces conditions sont standard.

C A S P R A T I Q U E

Page 66: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

56 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Une fonctionnalité additionnelle, qui ne sera disponible que dans trois mois, seragratuitement fournie au client dans le cadre de son contrat de maintenance. Le prixpublic du module additionnel sera de 250.Le client achète également une formation de 2 jours (prix : 800). Suite à une négocia-tion serrée, il a obtenu de bénéficier d’une année supplémentaire d’assistance à unprix réduit de 200.

1.3 Analyse

Le contrat comprend six éléments livrables distincts. Il contient une remise explicite (laréduction de la redevance de maintenance pour l’année 2) et deux remises implicites(la gratuité de l’installation et celle du module additionnel). La remise totale est allouéeproportionnellement aux différents éléments du contrat en fonction de leur justevaleur, ce qui conduit à ventiler la rémunération du contrat comme suit :

La date et le calendrier de constatation des produits figurent dans le tableau ci-dessous :

Composants Prix contractuel

Juste valeurmontant

Juste valeur %

Remise %

Produit alloué

Licence progiciel 2 500 2 500 56,9 % – 10,2 % 2 243,74

Installation offert 150 3,4 % – 10,2 % 134,62

Droit à mise à jour offert 250 5,7 % – 10,2 % 224,37

Formation 800 800 18,2 % – 10,2 % 718,00

Assistance année 1 420 270 6,2 % – 10,2 % 242,32

Assistance année 2 220 420 9,6 % – 10,2 % 376,95

Total 3 940 4 390 100,0 % – 10,2 % 3 940,00

Composants Produitalloué Date ou période de comptabilisation

Licence progiciel 2 243,74 Date d’installation

Installation 134,62 Date d’installation

Droit à mise à jour 224,37 Date de livraison du module

Formation 718,00 Dates de réalisation de la formation

Assistance année 1 242,32 Étalement linéaire sur l’année 1

Assistance année 2 376,95 Étalement linéaire sur l’année 2

Total 3 940,00

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1.4 Comptes IFRS

Sous l’hypothèse que le client renouvellera son contrat de maintenance pourl’année 2, les impacts du contrat dans les états financiers IFRS peuvent être résuméscomme suit :• Compte de résultat

• Bilan

(1) Trésorerie : 2 500 + 800 +420 = 3 720 ; 3 720 + 220 = 3 940(2) Produits constatés d’avance = 3 720 – 3 563,05 = 156,95

Si le client décidait de ne pas renouveler le contrat d’assistance, le compte de produitconstaté d’avance serait repris en résultat à l’échéance du premier contrat.

2. Contrat d’infogérance, séparation ou non d’éléments, coûts de démarrage

2.1 Contexte

Le 1er janvier N, la société OSIRIS (prestataire de services informatiques) conclut uncontrat d’infogérance pour une durée de 4 ans non résiliable. Les parties sont conve-nues d’une date limite pour statuer sur le renouvellement du contrat et fixent cettedate au 30/06/N+3 au plus tard.De manière classique, le déroulement du contrat comporte trois étapes opération-nelles : transition (c’est-à-dire la reprise de l’existant), transformation (c’est-à-dire la

Année 1 Année 2 Total

Produits

Vente de licence + module 2 468,11 2 468,11

Installation 134,62 134,62

Formation 718,00 718,00

Assistance 242,32 376,95 619,27

Total 3 563,05 376,95 3 940,00

Année 1 Année 2

Actif

Clients et comptes rattachés – –

Trésorerie 3 720,00 3 940,00

Total 3 720,00 3 940,00

Passif

Report à nouveau et résultat 3 563,05 3 940,00

Produits constatés d’avance 156,95 –

Total 3 720,00 3 940,00

Page 68: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

58 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

réorganisation et l’optimisation des processus afin de réaliser des économies et desaméliorations de service) et exploitation (c’est-à-dire les services récurrents).La rémunération d’OSIRIS pour les 4 années du contrat est de 750, forfaitaire et factu-rée de manière dégressive. Les coûts de la phase de transition sont de 20 et ceux dela phase de transformation sont de 60. Les flux du contrat sont représentés dans letableau ci-dessous.

2.2 Analyse

• Nature du contrat et norme applicableSur la base des informations fournies, ce contrat est à traiter comme un contrat deprestations de services relevant d’IAS 18. La question se pose de savoir si les diffé-rentes phases constituent des éléments séparément identifiables du contrat global (etce, indépendamment des modalités de rémunération contractuelle).Selon l’analyse partagée entre les entreprises du secteur des services informatiquesen France, la réponse est négative. La phase de transition est une étape indispensa-ble pour le prestataire mais qui n’a pas de sens en dehors du contexte d’externalisa-tion et n’a pas de valeur en tant que telle pour le client. Elle ne figure pas à uncatalogue de société d’externalisation et ne peut être exécutée par un autre fournis-seur que celui qui réalise la phase d’exécution opérationnelle. Par conséquent, elle neconstitue pas un élément séparément identifiable. Il en va de même pour la phase detransformation : elle est réalisée à la discrétion du prestataire et elle n’est pas indé-pendante en termes de risque de la phase de services récurrents.• Modalités de constatation du chiffre d’affairesLa rémunération du contrat étant déterminée et forfaitaire (non liée à des indicateursquantitatifs ou qualitatifs de volumes ou de performance), le service est présumé êtrerendu au moyen d’un nombre indéterminé d’opérations. La rémunération totale ducontrat sera étalée linéairement sur la période au cours de laquelle le service estrendu (ici, sur la durée du contrat).• Traitement des coûts de transition et de transformationLa question se pose de savoir s’ils doivent être pris en charge dans la période où ilssont encourus (ce qui conduit à constater une marge négative sur la première année)ou s’ils peuvent être activés.Selon les analyses partagées par les prestataires de services d’externalisation, lescoûts directs et incrémentaux de la phase de transition comme ceux de la phase detransformation représentent des dépenses engagées en vue de la phase d’exécution

Année 1 Année 2 Année 3 Année 4 Total

Facturation 210 190 180 170 750

Coûts

Transition – 20 – – – – 20

Transformation – 40 – 20 – 60

Exploitation – 165 – 155 – 140 – 130 – 590

Total – 225 – 175 – 140 – 130 – 670

Net – 15 + 15 + 40 + 40 + 80

Page 69: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

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opérationnelle, ils sont relatifs à une activité future et ont vocation à être recouvrés surles produits de cette activité. Par conséquent, ils peuvent être activés en vue de leurétalement sur la durée du contrat s’ils sont recouvrables1 2.

2.3 Comptes IFRS

Les impacts du contrat dans les états financiers IFRS peuvent être résumés ainsi :• Compte de résultat

• Bilan

(1) Produits constatés d’avance = 210 – 187,50 = = 22,50 ; 22,50 + 190 – 187,50 = 25,00 ; etc.

1. Extrait de la note « Méthodes comptables » d’Atos Origin : « … certains coûts de transitionencourus au cours de la phase initiale du contrat d’Infogérance peuvent être différés etcomptabilisés en charge sur la durée du contrat, à condition que ces coûts soient recouvra-bles. Les coûts de transition capitalisés figurent au bilan sous la rubrique « Clients et comp-tes rattachés » et leur amortissement au compte de résultat en « charges opérationnelles »(Source : Atos Origin, Rapport annuel 2008).

2. Les conditions à remplir pour établir la recouvrabilité de ces coûts auront à être précisées eninterne.

Année 1 Année 2 Année 3 Année 4 Total

Produits 187,50 187,50 187,50 187,50 750,00

Charges

Transition (étalement) – 5,00 – 5,00 – 5,00 – 5,00 – 20,00

Transformation (étalement) – 15,00 – 15,00 – 15,00 - 15,00 – 60,00

Exploitation – 165,00 – 155,00 – 140,00 – 130,00 – 590,00

Total – 185,00 – 175,00 – 160,00 – 150,00 – 670,00

Marge + 2,50 + 12,50 + 27,50 + 37,50 + 80,00

Année 1 Année 2 Année 3 Année 4

Actif

Clients et comptes rattachés 40,00 40,00 20,00 0,00

Trésorerie 40,00 80,00

Total 40,00 40,00 60,00 80,00

Passif

Report à nouveau et résultat 2,50 15,00 42,50 80,00

Produits constatés d’avance 22,50 25,00 17,50

Trésorerie 15,00 – – –

Total 40,00 40,00 60,00 80,00

Page 70: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

60 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

TEXTES DE RÉFÉRENCE

La norme IAS 18, « Produit des activités ordinaires », définit les dispositionsapplicables à la comptabilisation du chiffre d’affaires des prestations deservices. Elles demandent à être lues en lien avec celles de la norme IAS 11,« Contrats de construction », car IAS 18 renvoie à IAS 11 sur différentspoints. Pour l’une comme pour l’autre norme, la version en vigueur est celleadoptée en 1993.

Sept interprétations précisent le traitement comptable de certaines presta-tions de services :

– SIC 27 « Évaluation de la substance des transactions comportant desopérations ayant la forme juridique de contrats de location » ;

– SIC 31 « Comptabilisation des produits : opérations de troc publicitaire » ;

– IFRIC 13 « Programme de fidélité clients » ;

– IFRIC 4, « Déterminer si un accord contient une location » ;

– IFRIC 12, « Accords de concession de service » ;

– IFRIC 15, « Contrats de construction immobilière » ;

– IFRIC 18, « Transfert d’actifs de la part des clients ».

En tant que nécessaire, par exemple, s’il apparaît qu’une location est incor-porée à un contrat de prestations de services, le lecteur pourra aussi se référerà la norme IAS 17, « Contrats de location ».

Dans le référentiel américain, une section de la nouvelle codification –l’Accounting Standard Codification ou ASC – est dédiée à la comptabilisa-tion du chiffre d’affaires des prestations de services ; elle est complétée pardes textes sectoriels, dont le guide d’application pour l’industrie du logiciel,les prestations de services informatiques et prestations connexes :

– ASC 605-20, Services ;

– ASC 605-25, Mutiple Element Arrangements (incorporant ASU 2009-13,Multiple Deliverable Revenue Arrangements, qui se substitue à l’interpré-tation EITF 00-21 à partir du 15 juin 2010 ;

– ASC 605-35, Construction-Type and Production-Type Contracts (anté-rieurement SOP 81-1, Accounting for Construction-Type and Production-Type Contracts et ARB 45, Long-Term Construction-Type Contracts) ;

– ASC 985-605-55, Hosting Arrangements (antécédents : SOP 97-2, TIS5100, EITF 00-03, ASU 2009-14) ;

– ASC 605-50, Customer Payments and Incentives (antérieurement EITF01-09, Accounting for Consideration Given by a Vendor to a Customer(Including a Reseller of the Vendor’s Products) et EITF 02-16) ;

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Prestations de services 61©

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– ASC 605-S99, SEC Materials (antérieurement SAB 104 : SEC StaffAccounting Bulletin, Topic 13 : Revenue Recognition) ;

– ASC 952-605, Franchisors (antérieurement FAS 45, Accounting for Fran-chise Fee Revenue) ;

– ASC 985-605-25, (antérieurement SOP 97-2, Software Revenue Recogni-tion et SOP 98-9, Modification of SOP 97-2, Software Revenue Recogni-tion With Respect to Certain Transactions), incorporant ASU n˚ 2009-14,Software (Topic 985) : Certain Revenue Arrangements That IncludeSoftware Elements, applicable aux exercices ouverts à partir du 15 juin2010.

Page 72: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS
Page 73: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

4 CONTRATS DE CONSTRUCTION

CE QU’IL FAUT RETENIR

DISPOSITIONS DE LA NORME

1.1 Principes généraux

La norme IAS 11 décrit le traitement comptable des revenus et des coûtsassociés aux contrats de construction. Son objectif est de s’assurer que lesrevenus et les coûts de chaque période sont comptabilisés en cohérence avecl’avancement des travaux.

Un contrat de construction concerne un projet à long terme comme la construction d’un tun-nel, d’un pont ou d’une usine clé en main.Il s’agit d’une offre de solutions comprenant des produits, de l’installation, et des services etnon pas de simples produits.La solution est spécifique, unique, et non pas identique d’un client à l’autre.La fabrication et la mise en œuvre s’étaleront sur plusieurs mois.Le revenu des produits standards est reconnu à l’installation complète, celui des services àl’avancement, ou à la fin des services en cas d’acceptation, alors que le revenu d’un contratde construction est reconnu à l’avancement.Le contrat de construction demande un suivi particulier, et l’implication de la majeure partiedes départements de l’entreprise ; à savoir, les ventes, les opérations, le gestionnaire duprojet, le département juridique, l’IS-IT, la comptabilité, le contrôle de gestion, la trésorerie.

1

Page 74: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

64 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

1.1.1 Champ d’application

La norme IAS 11 s’applique aux contrats négociés pour la constructiond’une immobilisation, comme un pont, un bâtiment, un barrage, un pipe line,une route, un navire, un tunnel, un logiciel ou un projet de recherche et déve-loppement. Un contrat de construction peut aussi traiter d’un ensembled’immobilisations liées comme la construction d’une raffinerie, d’une usine,ou d’un réseau téléphonique. Les dates de démarrage et d’achèvement d’uncontrat de construction se situent généralement dans deux exercices diffé-rents, et les travaux à réaliser le sont sur la base de caractéristiques spécifi-ques à l’acheteur ou au moins adaptés à ses besoins.

1.1.2 Définition

Les termes suivants sont utilisés dans cette norme avec la significationdécrite ci-après.

Un contrat de construction est un contrat spécifique négocié pour la cons-truction d’un actif ou d’un groupe d’actifs étroitement liés du fait de leurtechnologie, de leur fonction ou de leur utilisation.

Un contrat au forfait est un contrat dans lequel l’entrepreneur accepte unprix fixe, ou un prix fixe par unité produite, assorti dans certains cas de clau-ses d’augmentation de prix.

Un contrat en régie est un contrat de construction dans lequel l’entrepre-neur est remboursé de ses coûts majorés d’un pourcentage.

1.1.3 Fusion et segmentation de contrats

Quand un contrat couvre plusieurs immobilisations, la construction dechacune d’elle doit être traitée comme un contrat séparé quand elle a faitl’objet :

– d’une remise d’offre séparée ;

– d’une négociation séparée ;

– et que les coûts et les revenus de chaque immobilisation peuvent être iden-tifiés.

Un groupe de contrats avec un seul ou avec plusieurs clients doit être consi-déré comme un seul contrat de construction quand :

– le groupe de contrats est négocié globalement ;

– les contrats sont si liés qu’ils font partie d’un seul projet avec une margeglobale et

– les contrats sont réalisés en même temps ou en séquence continue.

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Un contrat peut générer la construction d’une immobilisation complémen-taire à la demande du client et doit être traité comme un contrat de construc-tion séparé quand :

– l’immobilisation diffère significativement dans sa conception, sa technolo-gie, ou sa fonction, de l’immobilisation du contrat d’origine ; ou

– le prix de l’immobilisation est négocié sans lien avec le prix du contratd’origine.

Exemple 1

Deux contrats distincts conclus par une entreprise de bâtiment portent sur laconstruction de deux usines identiques, l’une en Europe de l’Est, l’autre enAmérique du Sud au même prix de vente, mais avec des marges très différentes(respectivement de 4 % et de 18 %), sachant que l’un n’aurait pas été signé sansl’autre (équilibre de l’offre globale). Ainsi, le constructeur devra évaluer lamarge globale des 2 contrats (ici [4 + 18] : 2 = 11 %), et l’appliquer aux deux enfonction de leur avancement respectif.

Exemple 2

Un équipementier en satellites signe un contrat de quatre ans pour la fournitured’une constellation de quatre satellites, avec une option pour la fourniture d’unsatellite supplémentaire au même prix.

Cas 2.1 : Si l’option est exerçable à l’issue du premier contrat, l’équipementiertraitera les deux contrats séparément. Il devra donc étaler ses frais de recherchesur les quatre premiers satellites même si cela l’amène à constater une perte. Enrevanche, si l’option pour le satellite supplémentaire est levée, il constatera unprofit supérieur sur les cinquièmes et sixièmes années du fait de la prise encharge antérieure des frais de développement.

Cas 2.2 : Si l’option est exercée au début du deuxième exercice, l’équipementiertraitera les deux contrats séparément sur le premier exercice, mais devra étalerses frais de recherche sur les cinq satellites dès la signature du second contrat

1.2 Évaluation des produits

Les produits d’un contrat comprennent le montant initial de ventes figurantau contrat modifié par des ajustements liés à l’avancement du contrat et éven-tuellement à des réclamations, des pénalités, des primes de performance, despénalités de retard ou des conditions de règlement inhabituelles.

Un produit est comptabilisé à condition qu’il soit probable et mesurable defaçon suffisamment fiable.

Les revenus d’un contrat de construction sont incertains et dépendentd’événements futurs. À ce titre leur estimation doit être revue périodique-

Page 76: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

66 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

ment à la lumière des derniers événements et ils peuvent varier d’une périodeà l’autre. Par exemple :

– à cause de modifications des spécifications techniques par le client ;

– du fait de clauses de révision de prix, de pénalités de retard ou encore ;

– du fait d’une modification de la quantité.

Il arrive en effet fréquemment en cours de contrat que le client en modifiel’étendue ou les spécifications techniques. L’ajustement de prix correspon-dant sera inclus dans le contrat initial s’il est probable que le client en acceptela facturation et que le montant correspondant peut être estimé de façonfiable.

Une réclamation est un montant que l’entrepreneur cherche à encaisser enremboursement de coûts non inclus dans le prix initial. Elle peut provenir parexemple de retard imputable au client ou d’erreur dans les spécifications. Lerevenu provenant de réclamations est sujet à variations et dépend de l’issuedes négociations, il est inclus dans le contrat aux conditions suivantes :

– le degré d’acceptation probable du client est avéré ;

– le montant réclamé qui sera accepté par le client peut être estimé de façonfiable.

Les primes de performance sont des suppléments payés par le client pouratteinte ou dépassement des objectifs spécifiés (par exemple en cas d’achève-ment anticipé). Ces primes sont comptabilisées au contrat lorsque :

– le degré d’avancement du contrat rend probable l’achèvement anticipé ;

– le montant du revenu lié à la prime peut être estimé de façon fiable.

1.3 Évaluation des charges

Les coûts d’un contrat comprennent :

– les coûts directement rattachés au contrat (dédiés) ;

– les coûts attribuables à l’activité du contrat et qui peuvent lui être affectés ;et

– les autres coûts contractuellement à facturer.

Les coûts directement rattachés à un contrat comprennent :

– les coûts des salaires des personnes travaillant sur le site de construction, ycompris les coûts de supervision ;

– les coûts des matériaux utilisés ;

– l’amortissement des installations et équipements utilisés pour laconstruction ;

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– les coûts d’installation, d’équipements et matériels sur le site de construc-tion ;

– les coûts de locations des installations et des équipements ;

– les coûts de conception et d’assistance technique directement liés aucontrat ;

– les coûts estimés de garantie (à la fin du contrat) ;

– les coûts des réclamations provenant des tiers.

Ces coûts peuvent être réduits par des revenus non prévus, comme parexemple du produit de la vente de surplus de matériel et de la dispositiond’installation et d’équipement à la fin du contrat.

Les coûts qui peuvent être attribués à un contrat et qui peuvent lui êtreaffectés :

– les assurances ;

– conception, et assistance technique non directement attribuables à uncontrat ;

– les coûts fixes.

Ces coûts sont alloués en utilisant des méthodes systématiques appliquéesavec cohérence à tous les coûts ayant des caractéristiques similaires. L’allo-cation est basée sur le niveau normal d’activité. Les coûts fixes comprennentles coûts administratifs comme ceux liés à la paye des salariés (contrats, miseen place, paye mensuelle). Si un emprunt a été contracté pour acheter un actifutilisé pour un contrat de construction, alors l’amortissement des coûts de cetemprunt est à intégrer dans les coûts fixes du contrat (règlement CE1260/2008 du 10 décembre 2008 concernant IAS 23 « Coûts d’emprunts »).

Les autres coûts facturables au client selon les termes du contrat peuventinclure certains coûts d’administration générale et frais de développementdont le remboursement est spécifié au contrat.

Les coûts qui ne peuvent être ni attribués, affectés, ou alloués, à un contratsont exclus des coûts d’un contrat de construction. Il en est ainsi des coûtsd’administration générale, des coûts de vente, des frais de recherche et dedéveloppement dont le remboursement n’est pas spécifié au contrat, et del’amortissement des installations et équipements non utilisés dans le cadre ducontrat déterminé.

Les coûts encourus pour obtenir un contrat peuvent y être inclus à condi-tion d’être identifiés séparément et mesurés de façon fiable et s’il est proba-ble que le contrat sera obtenu, et s’ils sont comptabilisés au contrat dansl’exercice au cours duquel ils sont encourus.

Page 78: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

68 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

1.4 Méthodes pratiques de détermination du résultat

La norme IAS 11 vise à établir un parallélisme entre la progression dans letemps du travail productif effectué au titre du contrat par rapport au travailtotal à fournir pour compléter le contrat.

Ce parallélisme présuppose bien entendu que le résultat à terminaison ducontrat puisse être estimé de manière fiable (i.e. bonne visibilité de laprogression des travaux, existence d’une comptabilité analytique précise quicalculera la part des heures vendables au client et des heures improductives,etc.).

La technique de calcul du pourcentage d’avancement d’un contrat est lais-sée à l’appréciation de l’entreprise. La norme IAS 11, dans sonchapitre 11.30, cite, entre autres :

– le rapport entre le suivi des coûts cumulés à date par rapport au coût totalplanifié du projet, ou un calcul similaire en prenant le rapport des heuresproductives ;

– idem en appréciant l’avancement du contrat en unités physiques(exemple : km d’autoroute, étages d’immeuble, hauteur de barrage, etc.),ou par des études permettant d’évaluer le volume des travaux ou des servi-ces exécutés.

1.4.1 Incapacité de mesurer le pourcentage d’avancement

En cas de doute sur la fiabilité de l’enregistrement des données passées et uneincapacité à donner une assurance raisonnable du futur serait avérée, lanorme IAS 11, en vertu du principe de prudence, interdit de reconnaître deproduit. Dans ce cas, aucun revenu ne sera reconnu, et les coûts serontpassés en charge (cf. IAS 11.32).

Exemple

Bouygues dans son « document de référence 2008 » nous donne les précisionssuivantes pour son activité immobilière (page 179) :

« Le chiffre d’affaires des opérations immobilières est appréhendé selon laméthode de l’avancement, lorsque les conditions suivantes sont remplies :

• permis de construire purgé de tous recours ;

• vente notariée ou contrat de promotion signé ;

• marché de travaux signé (ordre de service donné). »

Enfin, si un contrat débute à une date trop proche de la clôture de l’exer-cice, et que le résultat ne puisse encore être estimé de façon fiable(IAS 11.33) la norme permet de plafonner le revenu au montant des coûts

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engagés, ce qui amènera à une situation de marge nulle sur l’affaire (voir ci-dessous).

Exemple

« Quand le résultat d’un contrat au forfait peut être évalué de manière fiable,alors le chiffre d’affaires et la marge sur le contrat sont reconnus sur la base d’unpourcentage d’avancement. On considère que le résultat d’un contrat peut êtreévalué de manière fiable au plus tôt six mois après le commencement du contratet lorsqu’il est au moins achevé à 50 %. Si le résultat d’un contrat ne peut pas êtreévalué de façon fiable, les revenus sont reconnus à hauteur des coûts encourus, àconcurrence des coûts qui seront probablement récupérés. » (Logica « Annualreport and accounts 2008 », p. 80)

1.4.2 Méthode du pourcentage des coûts engagés

C’est la méthode la plus couramment pratiquée. La norme IAS 11, dans sonchapitre 11.31, insiste bien sur le fait que les coûts retenus pour le calculdoivent tous (main-d’œuvre et matière) correspondre à un travail réellementeffectué. Cette disposition vise surtout les entreprises qui, en fin d’exercice,stockent de la matière destinée à être transformée, travaillée ou installée lorsde l’exercice suivant. Dans ce cas, le coût de cette matière (à moins qu’il nes’agisse d’un produit fini fabriqué spécifiquement pour le contrat) devra êtreretiré – temporairement – du calcul du pourcentage d’avancement par lescoûts.

La difficulté de cette méthode réside dans la capacité à évaluer le montanttotal des coûts, et dans l’aptitude à réviser au fur et à mesure de l’avancementdu contrat les coûts restant à supporter pour achever le contrat. De plus, il estfréquent que des changements contractuels soient décidés d’un communaccord avec le client, ce qui oblige régulièrement à revoir l’estimation decoût totale ainsi que l’évaluation du pourcentage d’achèvement.

La justesse de cette méthode repose sur les outils de gestion et de compta-bilité analytique ainsi que sur les contrôles internes permettant de s’assurerde la juste précision de la révision des estimations.

Exemple

Soit un contrat d’une valeur totale de 1 000 € et d’un coût estimé de 700 €,signé le 01/03/2011.

En fin d’exercice (l’exercice coïncide avec l’année civile), le cumul des coûtsengagés se monte à 500 €, dont 300 € correspondant à de la matière non trans-formée livrée la veille de Noël et pour laquelle aucune heure productive n’auraété passée.

Page 80: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

70 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Le vrai pourcentage d’avancement à retenir sera (500 – 300)/(700 – 300), soit50 %, et non pas 71 %, valeur obtenue en effectuant le rapport 500/700.

À fin mars 2011, on supposera que la matière livrée à Noël précédent aura ététransformée (ou installée, selon les cas) et que les coûts cumulés se montent à600 €. Dans ce cas, le pourcentage d’avancement (qui devrait être proche decelui indiqué par le suivi d’heures, s’il existe) sera de 600/700 = 86 %.

1.4.3 Méthode du pourcentage du volume de travail effectué

Cette méthode est applicable dans le cas où l’entreprise est capable d’évaluerle volume des travaux effectués par rapport à ceux restant à faire, ou duvolume des services exécutés par rapport à ceux restant à effectuer.

Soit cette mesure peut être effectuée physiquement, soit elle peut l’être parune étude.

Exemple

La société Technip donne les précisions suivantes dans son document de réfé-rence de 2008.

« Les revenus sur les contrats sont mesurés sur la base des coûts encourus, et lamarge sur le pourcentage d’avancement est calculée de la manière suivante :

• pour tous les contrats de construction au forfait, quand l’avancement estestimé suffisant, le pourcentage d’avancement est calculé sur l’avancementtechnique de certains composants prédéterminés ;

• pour les autres contrats de construction, le pourcentage d’avancement estreconnu en fonction du ratio entre les coûts engagés à la clôture et les coûtsrestant à engager pour terminer le contrat. »

1.4.4 Contrats en régie

Un contrat en régie est une variante de contrat de construction où le fournis-seur est assuré d’obtenir le remboursement de dépenses autorisées par lecontrat, plus un pourcentage desdites dépenses (ou un montant fixe d’hono-raires).

Mis à part le fait que le prix total du contrat est défini tel que décrit ci-dessus, les règles de reconnaissance du revenu, des coûts et des profits àl’avancement ne changent pas.

La différence essentielle est qu’en cas de dérapage des coûts ou du plan-ning, c’est le client qui supporte les coûts supplémentaires, alors que dans lecas d’un contrat au forfait, c’est le fournisseur qui supporte les risques etavantages des écarts de l’avancement du projet dans le temps.

Le risque du dérapage des coûts d’un contrat en régie et la difficultéd’évaluation de l’avancement n’existent pas dans le contrat en régie.

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1.4.5 Les pertes à terminaison

Sur ce point, la norme (IAS 11.36) est très claire : s’il apparaît que le totaldes coûts identifiés (tels que définis ci-dessus lors de l’évaluation des char-ges) va dépasser le prix que le client est disposé à payer, alors la perte doitêtre reconnue immédiatement. En conséquence, la perte à terminaison doitêtre comptabilisée dans sa totalité à la signature du contrat, et non pas àl’entrée en vigueur. Si la perte n’était pas connue à la signature et devientprobable au cours de la réalisation du contrat, elle doit être comptabiliséedans sa totalité aussitôt que l’entreprise en a connaissance.

Doivent être inclus dans le calcul des pertes à terminaison la totalité descoûts variables et des coûts fixes directement rattachés au contrat, alors queles coûts fixes indépendants du volume d’activité doivent être exclus.

Exemples

• Alstom dans son rapport annuel 2008 (p. 63) fournit la précision suivante.

« Si le résultat d’un contrat à terminaison ne peut être déterminé de façon fiable,tout en demeurant positif dans l’hypothèse la plus probable, le chiffre d’affairescontinue à être comptabilisé selon la méthode des jalons, mais la marge à termi-naison est ramenée à zéro.

S’il devient probable que le coût à terminaison d’un contrat excède son chiffred’affaires total estimé, la perte attendue est immédiatement comptabilisée encharge au compte de résultat. »

• Bouygues dans son rapport annuel 2008 (p. 178) :

« Les contrats dégageant une perte finale probable font l’objet d’une provisionpour perte à terminaison, inscrite au passif du bilan sous la rubrique "Provisionscourantes". La perte est provisionnée en totalité dès qu’elle est connue et estiméede manière fiable, quel que soit le degré d’avancement. »

• Concernant les pertes à terminaison liées aux contrats à long terme, Atos Origindonne la précision suivante dans son rapport annuel 2008 (p. 91).

« Le chiffre d’affaires et les coûts associés, y compris les pertes à terminaisonprévues, sont évalués conformément aux principes comptables exposés ci-après.Les coûts totaux prévus des contrats sont fondés sur des hypothèses opération-nelles (prévisions de volume et de variation des coûts de production) qui ont uneincidence directe sur le niveau de chiffre d’affaires et les éventuelles pertes àterminaison comptabilisées. »

1.4.6 Les changements d’estimation

Ces changements sont essentiels à la bonne comptabilisation de la marged’un contrat. En effet si l’on constate au cours d’une période que les coûts ducontrat ont été incorrectement estimés à l’origine, on va modifier l’estimation

Page 82: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

72 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

du coût total depuis l’origine du contrat, et la marge sera corrigée sur lapériode en cours.

Étant donné que la comptabilisation des revenus et des coûts à l’avance-ment se fait en cumulé, un changement dans l’une ou l’autre de ces compo-sants est comptabilisé également en cumulé au cours de la période où lechangement est constaté (échec des négociations commerciales avec le clientpour répercuter des coûts non prévus).

La norme IAS 8 précise dans ses paragraphes 32 et suivants (changementsd’estimations comptables) que lorsqu’une nouvelle méthode comptable estappliquée, elle doit l’être de manière prospective, à partir du début de lapériode la plus ancienne praticable et inclus dans la détermination du résultat(IAS 8.36) :

a) de la période du changement, si le changement n’affecte que cettepériode ; ou

b) de la période du changement et des périodes ultérieures, si celles-ci sontégalement concernées par ce changement.

Exemple

Le rapport annuel d’Alstom est très détaillé sur ce sujet (rapport annuel 2008,p. 63) :

« Comptabilisation du chiffre d’affaires et de la marge sur les contrats de cons-truction et de services à long terme et provisions y afférentes

Le chiffre d’affaires et la marge brute des contrats de construction et contrats deservices à long terme sont comptabilisés en fonction de l’état d’avancementdéfini par des jalons. De plus, si la revue du projet laisse apparaître une margebrute négative, la perte relative aux travaux non encore exécutés est immédiate-ment constatée.

Le chiffre d’affaires et la marge sont ainsi comptabilisés à partir d’une estimationdu chiffre d’affaires et des coûts à terminaison qui est sujette à révision au fur età mesure de l’état d’avancement du contrat. Le montant total des produits et descharges attendus au titre d’un contrat traduit la meilleure estimation par la Direc-tion des avantages et obligations futurs attendus pour ce contrat. Les hypothèsesretenues pour déterminer les obligations actuelles et futures tiennent compte descontraintes technologiques, commerciales et contractuelles, évaluées pourchaque contrat. La commercialisation de produits hautement technologiquesexpose le Groupe à des risques de défaut de ses produits qui dépassent largementle champ d’application des clauses de garantie habituellement applicables auxfournisseurs d’équipements.

Les obligations afférentes aux contrats de construction peuvent se traduire pardes pénalités pour retard pris dans le calendrier d’exécution d’un contrat ou parune augmentation imprévue des coûts due aux modifications du projet, au non-respect des obligations d’un fournisseur ou d’un sous-traitant ou à des retardsengendrés par des événements ou des situations imprévues. De même, les obliga-

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tions de garantie sont affectées par les taux de défaillance des produits, l’usuredes matériels et le coût des opérations à réaliser pour revenir à un service normal.

Bien que le Groupe procède à une évaluation individualisée des risques, contratpar contrat, le coût réel entraîné par les obligations liées à un contrat peut s’avérersupérieur au montant initialement estimé. Il peut donc se révéler nécessaire deprocéder à une ré-estimation du chiffre d’affaires et des coûts à terminaison lors-que le contrat est encore en cours ou à une ré-estimation des provisions lorsquele contrat est terminé. »

1.5 Informations à fournir

La norme donne des précisions sur les informations à fournir dans lesannexes mais n’en donne aucune quant à la présentation dans les états finan-ciers eux-mêmes. Un groupe qui réalise des contrats de construction présen-tera dans les annexes à ses comptes les éléments suivants :

1.5.1 Information générale (la politique appliquée par l’entreprise)

• Le montant total des produits reconnus dans la période au titre des contratsde construction.

• Les méthodes utilisées pour calculer ledit revenu au cours de la période.

• Les méthodes utilisées pour déterminer le pourcentage d’avancement descontrats en cours.

1.5.2 Information spécifique à chaque contrat à fournir (à chaque clôture)

• Coûts comptabilisés sur les contrats sur la période majorés de la marge etminoré des pertes,

• Le montant des avances reçues,

• Le montant des retenues de garantie (payées par le client sous conditionssuspensives de niveau de qualité atteint),

• Montant brut dus aux clients sur les en-cours,

• Montant brut dus par les clients sur les en-cours.

Le montant brut dû par les clients est le montant net :

– des coûts encourus majorés des profits comptabilisés ; moins

– la somme des pertes comptabilisées et des facturations intermédiaires pourtous les contrats en cours pour lesquels les coûts encourus plus les profitscomptabilisés (moins les pertes comptabilisées) dépassent les facturationsintermédiaires.

Page 84: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

74 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Le montant brut dû aux clients est le montant net :

– des coûts encourus plus les profits comptabilisés ; moins

– la somme des pertes comptabilisées et des facturations intermédiaires pourtous les contrats en cours pour lesquels les facturations intermédiaires sontsupérieures aux coûts encourus plus les profits comptabilisés (moins lespertes comptabilisées).

Ce qui précède n’empêche pas l’entreprise de respecter les obligationsimposées par la norme IAS 37, à savoir révéler les passifs potentiels résultantde coûts de garantie, plaintes déposées par le client, pénalités contractuellesou pertes potentielles.

Ces informations devront être présentées à chaque document financier àpartir de la date à laquelle l’activité ou la réalisation sur le contrat commence,jusqu’à la date à laquelle l’activité est significativement terminée. Pour uneentreprise publiant ses résultats financiers chaque trimestre, un contrat de12 mois courant du 1er mai de l’année N au 30 avril N+1 devra donc êtreinclus dans les éléments financiers du 30 juin de l’année N jusqu’au 30 juinN+1, soit sur 5 trimestres.

Exemple

Ericsson : Rapport annuel 2008 (p. 40).

Le type de contrat qui est soumis à la norme IAS 11 est un contrat de construc-tion où le fournisseur vend au client un réseau complet, qui est largement basésur une technologie nouvelle ou inclut des composants majeurs qui sont spécia-lement conçus pour ce client. Les revenus des contrats de construction sontreconnus en fonction du degré d’avancement, en utilisant généralement laméthode de l’avancement défini par des jalons.

Données de l’exercice 2008

Ventes de matériel et installation de réseaux : 150 846

Comprenant :

contrats simples : 148 358

contrats de construction : 2 488

Ventes de services : 48 978

Revenus de licences : 9 106

Total des ventes : 208 930

Contrats de constructions en cours

Travaux en cours : 2 156

Marges reconnues en cours (moins pertes reconnues) : 971

Montants bruts dus par les clients 1) : 204

Montants bruts dus aux clients 2) : 406

1) Pour tous les contrats en cours pour lesquels les coûts et les marges générés(moins les pertes) sont supérieurs aux facturations.

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2) Pour tous les contrats en cours pour lesquels les facturations sont supérieuresaux coûts et marges reconnues (moins les pertes).

Les montants accumulés des coûts encourus concernent tous les contrats de cons-truction non finalisés au 31 décembre 2008 et incluent tous les coûts générésavant le 1er janvier 2008. Le chiffre d’affaires net pour ces contrats s’élève en2008 à 2 488.

PRINCIPALES DIVERGENCES AVEC LES RÉFÉRENTIELS FRANÇAIS ET US GAAP

2.1 Principales divergences avec les principes français

2.1.1 Divergence dans la définition

La notion de contrat à long terme en principes français est d’acception pluslarge que celle de contrat de construction en normes IFRS : en sus descontrats « physiques » définis classiquement par l’IAS 11 (route, barrage,pipe-line, etc.) et des prestations de service à long terme également visées parle même standard, les contrats long terme comprennent également lescontrats de prestation de service ne correspondant pas strictement à descontrats de construction, et régulés par la norme IAS 18.

Les deux référentiels adoptant une méthode très voisine pour déterminers’il s’agit d’un ou plusieurs contrats, on peut en conclure que leur définitionen substance l’est également.

Reste la méthode de la comptabilisation, où les différences sont plussérieuses :

2.1.2 Divergence dans la comptabilisation

Selon les principes définis par l’IASB, si l’on a suffisamment d’élémentspour suivre le contrat, et que l’issue en est connue avec assez de certitude,seule la méthode à l’avancement est admise.

En principes français (comptes individuels ou consolidés), le choix estoffert entre :

– la méthode à l’avancement (PCG art. 3801-III), considérée comme préfé-rentielle, exactement selon les termes de l’IAS 11 (avec reconnaissanceimmédiate des pertes à terminaison dès que l’information est connue).Comme dans l’IAS 11, en cas de doute sur la capacité de l’entreprise àdéterminer de manière fiable le résultat à terminaison, le chiffre d’affairesest plafonné au montant des charges encourues ;

2

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76 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

– la méthode à l’achèvement (PCG art. 380-1), où le chiffre d’affaires et lerésultat ne sont comptabilisés qu’au terme de l’opération. En cours decontrat (livraison de biens ou de services), un montant de stock dit de« travaux en cours » est constaté à chaque clôture de période comptablepour le montant des charges qui ont été enregistrées.

Les contrats en régie ne sont pas considérés comme des contrats de cons-truction en normes françaises (CNC avis 99-10), ce qui ne change rien tantque l’on rattache les coûts aux produits.

Les provisions pour perte à terminaison doivent être comptabilisées aupassif en comptabilité française alors qu’en IFRS il y a lieu de comptabilisertout d’abord l’abattement sur les encours d’actif. Les en-cours d’actif doiventd’abord être diminués avant de passer une provision au passif.

Exemple

Alcatel-Lucent précise dans son rapport annuel 2008 (document de référence2008, p. 183) : « Les paiements partiels reçus sur contrats de construction, avantque les travaux correspondant n’aient été exécutés, sont comptabilisés en avanceset acomptes reçus au passif. Le montant des coûts encourus augmenté des profitscomptabilisés et diminué des pertes comptabilisées (notamment en provisionspour pertes à terminaison) et des facturations intermédiaires, est déterminé,contrat par contrat. Si ce montant est positif, il est comptabilisé à l’actif enmontants dus par les clients pour les travaux des contrats de construction ? S’ilest négatif, il est comptabilisé au passif en « montants dus aux clients pour lestravaux des contrats de construction ». »

2.1.3 Divergence dans la définition des produits

Alors que le référentiel français comptabilise certaines provisions pourrisque de non-réalisation du chiffre d’affaires en charges, les normes IASprécisent que ces montants doivent être portés en diminution des ventes. Sontainsi traités de façon différente :

– les pénalités à verser aux clients ;

– les provisions pour risque de non-paiement lorsque le risque est constatédans la même période que la vente ;

– les provisions du fait de l’incapacité de l’entreprise à déterminer demanière fiable le résultat à terminaison.

2.1.4 Principaux cas d’impact

Il est fort probable que l’un des impacts se traduise par un transfert des coûtsen diminution du chiffre d’affaires ; donc par une amélioration du ratio de

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marge, tout en ayant une marge identique en valeur absolue. En effet, danscertains cas, la charge est transférée en diminution des revenus.

• S’il y a un risque important que le client ne paie pas la créance, on enre-gistrera une provision, qui sera enregistrée dans les comptes groupe de lafaçon suivante ;

– si ce risque est constaté dans la même période que la vente, cette provisionapparaîtra en annulation de la vente ;

– si ce risque est constaté alors que la période de réalisation de la vente adéjà fait l’objet d’une publication, cette provision apparaîtra en charge.

En comptabilité il faut donc utiliser des comptes différents, l’un pourprovision pour risque sur créance de la période, l’autre sur créance d’unepériode antérieure. Le premier compte sera lié à des comptes différents encomptabilité locale (68174 du PCG) et en consolidation groupe (compte deventes), alors que le second compte sera rattaché à un compte de charge encomptabilité locale comme en comptabilité groupe.

• Les provisions pour pénalités n’apparaissent plus en charge mais en dimi-nution des revenus.

2.2 Principales différences avec les US GAAP

Dans la nouvelle codification des US GAAP, l’Accounting Standard Codifi-cation, le texte qui traite des contrats de construction est l’ASC 605-35 (anté-rieurement SOP 81-1, Accounting for Construction-Type and Production-Type Contracts et ARB 45, Long-Term Construction-Type Contracts).

Ce texte précise que la méthode du pourcentage à l’avancement est préféra-ble à chaque fois que l’entreprise a développé un système comptable de suivide projets suffisamment fiable, et que le coût (estimé) du contrat peut êtreestimé de manière fiable. On retrouve là les mêmes exigences qu’en normesIAS et PCG.

Précisons que la norme américaine est plus prudente que l’IAS 11 enmatière de comptabilisation de revenus supplémentaires en cas de dépasse-ments des coûts en cours de contrats. La première (US GAAP) exige en effetune base légale ou contractuelle (ainsi que la présence de documentationargumentée) pour permettre la comptabilisation, alors que la seconde(IAS 11) se contente de mentionner l’existence d’une « assuranceraisonnable » que le client acceptera de financer (totalement ou partielle-ment) le dépassement du coût du contrat.

D’autre part, si les US GAAP considèrent que la méthode naturelle estl’avancement, elles autorisent l’achèvement en cas d’incertitude d’évalua-tion.

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78 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

DIFFICULTÉS À SURMONTER ET CLÉS POUR UNE MISE EN ŒUVRE RÉUSSIE

On n’a pas vu récemment de scandale provenant d’erreur de comptabilisationdes revenus des contrats de construction mais il est clair que cette norme esttrès exigeante. Et, sans un investissement important en matière de contrôleinterne, les risques de dérapage sont significatifs.

Les entreprises qui appliqueraient pour la première fois la norme IAS 11,ou plus largement la méthode à l’avancement, devront aménager leur circuitd’information. Les départements comptabilité et contrôle de gestion serontles plus touchés, mais cette méthode aura aussi un impact sur le départementcommercial et sur le calcul des commissions versées aux vendeurs du fait dela nouvelle définition du chiffre d’affaires (ventes), des coûts directs et descoûts alloués aux contrats. En raison de la diversité des départements impac-tés, le besoin de formation est important. Ceci étant, l’effort pour l’entrepriseet ses équipes de l’application de la norme IAS 11 ne se limite pas à lapremière mise en œuvre ; c’est une discipline permanente à instaurer.

En effet, quand l’entreprise évalue le volume des travaux effectués par lesuivi de jalons techniques, le calcul du pourcentage de travail effectué estfiable et le risque d’erreur est généralement faible. Au contraire, quandl’avancement est reconnu en fonction du ratio entre les coûts engagés et ceuxrestant à engager pour terminer le contrat, le risque d’erreurs devient beau-coup plus important. Certes, les auditeurs internes et externes vont s’assurerque les méthodes ont été appliquées avec rigueur, que les principes compta-bles sont respectés, que les dossiers sont justifiés formellement, et que lebudget du contrat a été révisé récemment conformément aux procédures.Néanmoins la norme est difficile à appliquer et les bases de calculs peuventêtre soumises à interprétation.

L’entreprise aura commencé par fixer, en accord avec ses commissaires auxcomptes, un seuil de signification en deçà duquel les produits et les chargesliés au contrat seront comptabilisés conformément à IAS 18, c’est-à-dire queles coûts seront comptabilisés dans la période dans laquelle ils seront enga-gés, et que les revenus seront comptabilisés au rythme des facturationscontractuelles (sans prendre en compte bien évidemment les demandesd’acomptes). Il est possible pour aborder cette question de regarder dans lecompte de résultat actuel de l’entité la décomposition par nature des produitset des charges des contrats de construction.

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3.1 Impact sur le contrôle de gestion et le contrôle interne

L’exercice de la méthode de comptabilisation du revenu à l’avancementnécessite beaucoup d’intégrité de la part de l’équipe dirigeante. En effet lerevenu étant lié Il s’agit en effet d’une possibilité d’améliorer le revenu et leprofit par un simple jeu d’écritures, sans contrepoids extérieur, puisquecomplètement déconnecté en cours de contrat d’une possibilité de vérifica-tion extérieure (telle que la traditionnelle circularisation des clients).

Les équipes de contrôle interne, devront être particulièrement vigilantes surles valorisations suivantes.

– les heures productives (telles que prévues dans le contrat) qui peuvent êtreactivées contrairement aux heures utilisées pour rectifier un travail déjàfait (retouches, essais, corrections d’erreurs…) non facturables au client ;

– les coûts qui pourraient être improprement affectés à un contrat qu’ils neconcernent pas ;

– les dépassements de coûts qui pourraient être considérés comme allant êtreacceptés par un client et devant l’objet d’un contrat de régularisation, alorsque rien n’est moins sûr.

In fine, lors de la fin du contrat, les coûts seront correctement affectés.Mais, pour une entreprise qui gère une multitude de contrats, et donc un en-cours important, les risques d’allocations impropres des coûts d’un contrat,en attendant que sa situation globale s’améliore, sont significatifs et pour-raient faire varier sensiblement le résultat d’une entreprise.

Pour éviter les écueils décrits ci-dessus, un certain nombre de règles devraêtre mis en place, formalisé et communiqué dans les procédures internes. Onutilisera la mise en place des normes IFRS comme une opportunité pourrevoir la méthode de comptabilité à l’avancement et s’assurer de sa confor-mité avec la norme IAS 11, en même temps on s’assurera de l’omniprésencede la règle de prudence. Les procédures seront régulièrement mises à jourpour coïncider en permanence avec la réalité des opérations et leur modifica-tion donnera lieu des actions de communication et de formation en tant quede besoin.

3.2 Suivi des contrats

Il s’agit de recenser l’ensemble des contrats de construction excédant le seuilde signification selon leurs caractéristiques puis de collecter l’informationdestinée à alimenter les états financiers et les notes annexes. Ces travauxseront assurés par les opérationnels sur la base des procédures établies par lesservices centraux de comptabilité-consolidation.

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80 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Dans toute la mesure du possible, les contrats clients de longue durée serontorganisés en phases, chacune d’entre elle fera l’objet contractuellementd’une acceptation du client.

L’entreprise devra s’assurer de la collecte des informations nécessaires àla saisie des contrats, tout en déterminant les contrats à fusionner et ceux àscinder.

Pour alimenter les états financiers et les notes annexes, l’entreprise doitdisposer des informations reprises ci-dessous.

Tout contrat fera l’objet d’un budget comprenant les ventes, un détail descoûts par nature, et la marge attendue. Ce budget sera validé avant réponse àl’appel d’offres. Ce budget sera contrôlé régulièrement, sa revue sera justifiéeau moins une fois par trimestre, et mensuellement pour les plus gros contrats.Le résultat de la revue fera l’objet d’une note interne détaillant les élémentsfinanciers et cette note sera envoyée au commercial, aux techniciens ainsiqu’aux financiers (contrôle de gestion du projet, de l’activité, comptabilité,trésorerie).

La documentation relative au contrat sera à la disposition des financiers etdes auditeurs (internes et externes) et nul ne pourra leur en empêcher l’accès.

3.2.1 Avant réponse à l’appel d’offres

Un contrat est constitué de plusieurs phases, chaque phase peut représenterun groupe de produits, de sites. Les différentes phases ou étapes du contratdoivent être identifiables et identifiées avant que l’activité du contrat necommence. Un calendrier précis doit être établi. À moins que le contrat lui-même ne soit modifié, ou qu’un événement économique ou techniquen’oblige à changer le calendrier d’origine, ces phases ne doivent pas êtremodifiées.

Le résultat financier (comptable, trésorerie) du contrat sera établi avant laréponse à l’appel d’offre par un contrôleur de gestion en charge du contrat.Les données financières de chaque contrat seront de la responsabilité d’uncontrôleur de gestion qui sera en charge d’établir avec les opérationnels lebudget du contrat puis de faire un suivi indispensable aux arrêtés comptablesmensuels. L’entreprise devra ensuite s’assurer de très bonne qualité deremontée de l’information sur l’achèvement des phases du contrat. Unemauvaise qualité de l’information ferait courir de gros risque sur le résultatde l’entreprise et sur son anticipation.

La marge de chaque phase est évaluée par rapport à la marge totale ducontrat. Il est fortement souhaitable dans la mesure du possible que chaquephase corresponde à une phase clairement identifiée dans le contrat avec leclient et que sa finalisation fasse l’objet d’une approbation.

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3.2.2 En cours de contrat et à chaque clôture mensuelle

Prenons par exemple un contrat de 10 mois où le fournisseur doit installer5 sites où chacun sera accepté par le client. Supposons la facturation définiecontractuellement comme étant de 15 % à la commande, 8 % à chaque fin demois (sauf le dernier) et 14 % à terminaison. À chaque arrêté comptable, ons’assurera que les coûts sont conformes aux coûts budgétés sur le contrat, sinécessaire la marge prévue sera révisée, au pire une provision pour perte àterminaison sera comptabilisée (cf. § II.4.5). Les coûts seront stockés et àchaque approbation on reconnaîtra 20 % des revenus et de la marge ducontrat, ceci indépendamment du rythme de facturation.

Bien évidemment la réalité n’est pas toujours aussi simple. En effet,prenons la construction d’un pont d’un nouveau type qui va être réalisé pourla première fois (on peut penser au viaduc de Millau). La difficulté consisteraà déterminer le pourcentage d’avancement au moment où 40 % de la struc-ture du pont est réalisée. Considérer que 52 % du travail est effectué plutôtque 50 %, génère un impact sur le résultat sans doute supérieur à la margeréalisée sur l’affaire. Modifier le budget d’un contrat va donc avoir un impacttrès significatif sur le résultat de ce contrat.

Exemple

Concernant l’avancement des contrats de construction à la clôture, dans sonrapport annuel 2008, Thales donne la précision suivante : « Toutefois, lorsquel’avancement technique et les dates contractuelles de transfert de propriété neprésentent pas de décalage significatif, l’avancement retenu est celui des clausescontractuelles de transfert de propriété. »

Le calcul peut être plus complexe si on emploie plusieurs sous-traitants surle contrat, mais la méthode sera la même si l’entreprise est responsable dutravail des sous-traitants.

Exemple

Dans ses états financiers 2008, Alstom précise : « les ajustements apportés àl’estimation des contrats du fait de changements dans les conditions et la réalisa-tion des travaux sont comptabilisés dans le coût des ventes au prorata de l’étatd’avancement dès que ces changements sont identifiés ».

Si un complément a été effectué à la demande d’un client, et que l’entre-prise ne dispose pas encore d’un contrat formel signé du client, ou d’un bonde commande :

– il serait sage de ne pas stocker l’en-cours et de le comptabiliser en chargetant que la probabilité d’obtenir le contrat est insuffisante ;

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82 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

– la norme IFRS nous permet de stocker l’en-cours lorsqu’il est fort proba-ble que le complément sera accepté par le client.

Un revenu ne sera constaté qu’à la signature du contrat additionnel et l’en-cours comptabilisé en charges.

Exemple

Dans son rapport annuel 2008, Thales donne la précision suivante :

« L’estimation des travaux restant à effectuer ne tient compte des produits résul-tant de réclamations présentées que lorsqu’il est très probable que celles-ci serontacceptées par le client. »

3.2.3 À la fin du contrat

La norme considère que le suivi financier d’un contrat doit être effectuéjusqu’à ce que l’activité du contrat touche à sa fin. Ainsi, en fin de contrat,quand les parties sont en train de clore le contrat, on peut admettre un suivifinancier plus sommaire. Toutefois, le suivi opérationnel continuera à être faitavec la même attention. En effet, il faudra s’assurer de la satisfaction duclient jusqu’à la mise en route du bien, c’est-à-dire ne pas clore trop rapide-ment les contrats.

3.3 Fonctionnalités nécessaires dans le système d’information

Le système d’information permettra la saisie détaillée d’un budget parcontrat. Ce budget sera utilisé pour une validation du contrat avant réponse àl’appel d’offres. Par la suite, si le budget est modifié, il sera possible de tracerles modifications. Les contrats concernant plusieurs secteurs d’activité del’entreprise seront découpés par secteur d’activité (pour un suivi du contratpar secteur d’activité conformément à la norme IFRS 8 Secteurs opération-nels).

Durant la vie du contrat un suivi sera régulièrement fait quant à l’avance-ment des travaux, aux coûts comptabilisés, aux coûts restant à engager. Lesystème permettra de reconnaître les revenus en fonction du pourcentaged’achèvement des travaux, et dans ce cas d’enregistrer les coûts au prorata. Ilpermettra aussi de comptabiliser un prorata des coûts en stock (travaux encours) et si nécessaire de calculer une provision. Toute pénalité sera compta-bilisée dès qu’on aura connaissance qu’elle sera due. Ainsi, le systèmepermettra de calculer ou de signaler tout risque de pertes à terminaison, celle-ci sera comptabilisée dès l’instant ou l’on aura connaissance qu’une perte estprobable.

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Le système permettra de passer en charge (et non pas en stock) de lapériode les en-cours sur un contrat pour lequel le recouvrement n’est passuffisamment probable. Si par la suite, pour ce même contrat le recouvrementdevient probable, les charges de la période (à compter du début de la périodenon encore publiée) seront activées.

3.4 Organisation des processus de collecte et de restitution de l’information

Le contrôleur de gestion du contrat travaillera en étroite collaboration avecles équipes opérationnelles en charge du contrat. Il enregistrera directementdans le système d’information les éléments nécessaires aux services finan-ciers (trésorerie, comptabilité).

Exemple

Dans son rapport annuel 2008, Thales fournit la précision suivante :

« La préparation des comptes consolidés du Groupe conduit à effectuer des esti-mations et à retenir des hypothèses qui ont une incidence sur l’évaluation desrésultats, des actifs et des passifs consolidés. Ces estimations pourraient devoirêtre révisées en cas de changements dans les circonstances sur lesquelles ellesétaient fondées ou comme suite à de nouvelles informations ou à un surcroîtd’expérience. Les principaux comptes sujets à des estimations comptables signi-ficatives sont les suivants :

La comptabilisation des produits et charges relatifs aux contrats de constructionest basée sur l’estimation des résultats à terminaison de ces contrats. Ces estima-tions sont réalisées par les chargés d’affaires sous le contrôle de la DirectionGénérale, selon les procédures du Groupe. »

3.5 Compétences des équipes comptabilité-contrôle de gestion

Les dispositions de la norme IAS 11 seront présentées aux comptables et auxcontrôleurs de gestion dans le cadre d’une formation portant sur l’ensembledes revenus. Pour les entreprises ayant des contrats de construction et descontrats simples, le premier travail portera sur la classification des contratsentre ces deux catégories. Il faudra ensuite vérifier que les dispositions de lanorme sont bien comprises, assimilées et bien appliquées.

3.6 Compétences des équipes opérationnelles

Les intervenants opérationnels, et particulièrement les équipes commercialesdevront être formés à l’impact sur le chiffre d’affaires, et dans la mesure du

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84 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

possible leur commissionnement sera modifié pour ne prendre en compte queles revenus classés comme tels selon les normes IAS/IFRS.

Les entreprises passant d’un mode de comptabilisation à l’achèvement aumode de comptabilisation à l’avancement seront particulièrement vigilantesquant à la qualité du suivi financier des contrats. Celles qui déterminentl’avancement en fonction des coûts encourus seront particulièrement vigilan-tes car cette méthode peut masquer des pertes à terminaison qui ne serontconstatées qu’à la fin du contrat à moins d’un suivi financier rigoureux.

Nous présentons ci-après le traitement comptable d’un contrat de signalisation d’uneligne du métro de Pékin dans les comptes de Thales. Nous verrons successivementle contexte, la description du contrat lui-même, les options de traitement comptable etenfin l’impact de ce contrat sur les états financiers.

Contexte

Avec une première ligne inaugurée en 1863, le métro de Londres a été le premier etpendant longtemps le plus vaste réseau du monde avec 408 km. De nombreusescapitales ont rapidement suivi comme New York et Budapest puis Paris. Le premiermétro apparaît en Chine à Pékin en 1965. De 2007 à 2009, le nombre de lignes dumétro de Pékin a doublé, passant de quatre à huit. La taille du réseau doublera encored’ici 2020 : à cet horizon, Pékin disposera d’un réseau de dix-neuf lignes. Dés 2015,le réseau de transport collectif de Pékin sera le plus vaste au monde avec plus de560 km.On estime à 87 milliards d’euros le montant des investissements restant à faire pourmoderniser les métros en Chine. Nous comprenons donc qu’il s’agit de contratsmajeurs dont les grands équipementiers ne peuvent être absents.En novembre 2008, Alcatel-Lucent et Thales ont annoncé avoir été retenus pour four-nir la signalisation de la ligne 11 du métro de Pékin pour une valeur de 50 millionsd’euros. Depuis, l’une des dernières lignes mises en service est la ligne 4 reliantl’ancien palais d’Été, le nouveau palais d’Été et le quartier de l’université (Haidian) parXizhimen à la gare de chemin de fer Pékin Sud et au sud de la ville. Cette ligne seraprolongée de 22 km au sud par un tronçon comptant 11 stations desservants ledistrict de Daxing.Thales fournit des solutions sécurisées de signalisation ferroviaire, de contrôle-commande et de protection des infrastructures de transport (grandes lignes ferroviai-res, transports urbains, réseaux routiers et autoroutiers), ainsi que des systèmes debillettique et de contrôle d’accès pour les passagers et des systèmes d’informationssécurisés augmentant l’efficacité du transport ferroviaire.Ces différents contrats, où Thales intervient pour automatiser et sécuriser le flux desrames de métro et de trains, sont à l’origine d’un chiffre d’affaires important qui vacroissant. L’entreprise livrant les services met en place des systèmes de sécuritéextrêmement sophistiqués. Sur certaines lignes, les rames se succèdent toutes lessoixante secondes. Comme la vitesse d’une rame de métro est relativement faible, on

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n’en arrive pas encore à la fréquence de la ligne de TGV Paris Lyon où, aux heuresde pointe, la distance de freinage d’un train est supérieure à celle séparant deuxrames. Toutefois, la vitesse d’une rame entre deux stations de métro est limitée par letemps d’arrêt de la rame précédente en station. En effet, le temps nécessaire pourque les voyageurs montent et descendent de la rame à la station est difficilement infé-rieur à 50 secondes, parfois supérieur au temps de trajet théorique d’une rame entredeux arrêts.

Description et analyse du contrat

Le 9 novembre 2009 Alcatel-Lucent et Thales ont annoncé avoir été retenus parBeijing MTR Corporation pour lui fournir une solution de signalisation clés en maindestinée à la ligne Daxing du métro de Pékin. Après la mise en service de la ligne 4,ce nouveau tronçon devrait être opérationnel d’ici fin 2010. Alcatel-Lucent, par l’inter-médiaire de sa filiale chinoise Alcatel-Lucent Shanghai Bell, et Thales font partie d’unconsortium comprenant également Beijing Hua-Tie Information Technology Develop-ment CO (HT).Selon les termes du contrat, Alcatel-Lucent sera chargé de l’intégration réseau, ainsique des services de conseil, de conception et d’ingénierie. Thales fournira sa solutionSelTrac, un système CBTC (gestion des trains basée sur les communications) leaderdu marché. Les services d’ingénierie d’Alcatel-Lucent et les technologies de signali-sation de Thales garantiront la sécurité, la qualité et la fiabilité de la nouvelle ligneDaxing.Thales va partir de sa solution standard existante, que l’entreprise a déjà développéepour la gestion d’autres métros et l’adapter à la ligne Daxing. Les coûts seront consti-tués de matériel, logiciels, développements spécifiques, et de services associés dontle développement spécifique à la ligne représentera une part substantielle. Noussommes en présence d’un cas typique de contrat de construction. Puisqu’un contratde construction est un contrat spécifiquement négocié pour la construction d’un actifou d’un ensemble d’actifs qui sont étroitement liés ou interdépendants en termes deconception, de technologie et de fonction, ou de finalité ou d’utilisation.

Analyse du traitement comptable

En fonction de ses caractéristiques, ce contrat de construction va générer une affairecomptable sur laquelle seront reconnus les produits et les charges correspondants.Ces produits et ces charges seront enregistrés selon la méthode de l’avancementtechnique.Les études sont décomposées en un certain nombre d’étapes, chacune correspon-dant à un pourcentage estimé du travail total. La finalisation de chaque étape faitl’objet d’un document, et chacun d’entre eux fait l’objet d’un livrable.En ce qui concerne les installations de signalisation ferroviaire, la quantité de matérielnécessaire est estimée par avance. Chaque mois le contrôleur de gestion du projet vaestimer avec les ingénieurs la quantité utilisée par rapport à celle prévue et en déduirele pourcentage d’avancement du projet. Chaque trimestre, on fera un estimé de laquantité de matériel nécessaire pour terminer le projet et, si nécessaire, les prévisionsseront à nouveau ajustées en conséquence.

Coûts encourus pour obtenir un contrat

La norme précise que les coûts encourus pour obtenir un contrat peuvent y être inclusà condition d’être identifiés séparément et mesurés de façon fiable, s’il est probable

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86 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

que le contrat sera obtenu, et s’ils sont comptabilisés au contrat dans l’exercice aucours duquel ils sont encourus.Dans la pratique, la mise en œuvre de cette règle n’est pas facile. En effet, quelleentreprise peut considérer qu’il « est probable que le contrat sera obtenu » avant sonobtention ? À moins que le contrat n’ait pas fait l’objet d’une mise en concurrence, cequi est plus qu’improbable dans le cas d’un contrat de construction de montant élevé.Or, activer les coûts préalables à l’obtention d’un contrat en tablant sur son obtentionpuis constater que l’offre remise n’est finalement pas retenue, oblige l’entreprise àpasser immédiatement en charge l’intégralité des coûts activés. Sur des grandscontrats, cela peut représenter quelques millions d’euros qui pèsent sur le résultat dela période de manière notable, et imprévisible. Les deux raisons conjuguées ontamené nombre d’entreprises à considérer que la probabilité d’obtention du contrat nepeut être estimée de manière fiable et qu’en conséquence tous les coûts engagésdans la période de préparation de l’offre et de négociation du contrat doivent êtrepassés en charges dans la période où ils sont encourus.D’autre part, les entreprises demandant aux opérationnels d’enregistrer leurs heurespar affaire sur les contrats non encore signés sont rares ; toutefois, une telle disposi-tion est facile à mettre en place. La procédure interne exigera que l’entreprise soit auminimum en possession d’une lettre d’intention crédible de la part du client.En conclusion, le stockage des coûts encourus commencera généralement à la dated’obtention du contrat, et, sur le plan pratique, à la date d’ouverture du compte dansle système d’information « contrats ».

Coûts à rattacher aux contrats

Nous allons maintenant étudier les coûts à rattacher aux contrats. Certains coûts sontd’après la norme à rattacher au contrat, nous n’aurons pas d’hésitation sur d’autrescoûts qui ne doivent pas être rattachés aux contrats, et nous étudierons les coûts pourlesquelles la norme est imprécise.La norme spécifie que les coûts d’un contrat comprennent les coûts dédiés et directe-ment rattachés au contrat, les coûts attribuables à l’activité du contrat et qui peuventlui être affectés, et les autres coûts contractuellement à facturer.D’après la norme, ces coûts à rattacher au contrat sont ceux décrits au paragraphe ci-dessus « II.3 Évaluation des charges ». Tous les frais relatifs au contrat lui serontaffectés. Les frais de tout le personnel dédié au contrat ; il en sera ainsi aussi bien ducoût des ingénieurs travaillant dans la région parisienne sur les études liées au contratde la ligne Daxing, que des ingénieurs détachés sur le projet à Pékin. On procéderade même avec les coûts des administratifs, aussi bien d’un contrôleur de gestion qued’une assistante, affectés en totalité au projet. De même, on affectera au contrat tousles coûts engagés sur place dans le cadre du contrat. Ainsi, le coût des locaux supplé-mentaires loués à Pékin pour l’équipe affectée au projet sera rattaché à ce contrat deconstruction.Les coûts qui ne peuvent être ni attribués, affectés, ou alloués à un contrat sont exclusdes coûts d’un contrat de construction. Il en est ainsi des coûts d’administration géné-rale, des coûts de vente, des frais de recherche et de développement dont le rembour-sement n’est pas spécifié au contrat, et de l’amortissement des installations etéquipements non utilisés dans le cadre du contrat déterminé. Les frais générauxcommerciaux, administratifs et financiers qui ne sont pas engagés spécifiquementpour ce projet ne sont pas intégrés dans le contrat de construction et sont directementpris en charge dans l’exercice.

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La norme n’est pas prescriptive en ce qui concerne le temps des ingénieurs et dupersonnel administratif partiellement affectés au contrat. Ainsi, certaines entreprisesconsidèrent comme des coûts fixes non attribuables aux contrats les heures dupersonnel administratif travaillant partiellement sur le contrat : leur raisonnementconsiste à dire que si le contrat n’avait pas été obtenu, ces personnes resteraientdans l’entreprise et seraient affectées à d’autres opérations. D’autres vont affecter aucontrat à l’aide des feuilles de temps les heures du personnel passant une part impor-tante de son temps sur le contrat (par exemple supérieure à 50 %), enfin, d’autreseffectuent cette affectation au prorata, même pour les faibles montants, comme letemps passé en comité de pilotage de projet.

Présentation dans les états financiers

Dans la comptabilité consolidée du groupe Thales, ce contrat va impacter au31 décembre 2009 les comptes « contrats de construction actif », « Contrats de cons-truction passif », ainsi que le poste revenus des contrats de construction.En reprenant ses états financiers à la clôture de 2008 (voir le document« FR_annual_report_2008.pdf » disponible sur le site de Thales), nous constatonsque Thales a choisi de présenter son activité au titre des contrats de construction dela façon suivante, et le contrat Daxing suivra ce même traitement en 2009 et 2010.

Contrats de construction

Les montants présentés au bilan dans le cadre d’un contrat de construction corres-pondent, pour chaque contrat, au montant cumulé des coûts encourus et des profitscomptabilisés (diminué des éventuelles pertes comptabilisées), déduction faite desfacturations intermédiaires.

31/12/2008 (en M€)• Contrats de construction, actif (a) : 2 400,6• Contrats de construction, passif : 578,4• Contrats de construction, actif net, 1 822,2Ce solde correspond au :• Cumul des coûts encourus et des profits comptabilisés :(diminué des éventuelles pertes comptabilisées) 31 706,3• Moins, facturations intermédiaires : (29 884,1)(a) Inclut des travaux encours à hauteur de 1 066,3 M€ au 31 décembre 2008.

Les avances reçues des clients sur contrats de construction correspondant à destravaux non encore exécutés s’élèvent à 2 577,8 M€ au 31 décembre 2008. Ellescouvrent en partie les travaux en cours relatifs à certains contrats. Les retenues surcontrats de construction s’élèvent à 18,2 M€ au 31 décembre 2008.Revenus des contrats de construction : 6 440,2

Nous constatons que les revenus des contrats de construction représentent6 440,2 M€ sur un total de revenus de 12 664,8 M€, soit plus de 50 % des revenusdu groupe.

Page 98: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

88 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

TEXTES DE RÉFÉRENCE

➤ Versions en vigueur

La version actuellement en vigueur de la norme IAS 11 est celle applicableaux exercices ouverts à compter du 1er janvier 1995. Il n’existe pasd’interprétation attachée à cette norme.

Dans le référentiel américain, une section de la nouvelle codification –l’Accounting Standard Codification ou ASC – est dédiée à la comptabilisa-tion du chiffre d’affaires des contrats de construction. Il s’agit de l’ASC 605-35, (antérieurement SOP 81-1, Accounting for Construction-Type andProduction-Type Contracts et ARB 45, Long-Term Construction-TypeContracts).

➤ Normes liées

Sont liées à la norme IAS 11 les normes suivantes :

– IAS 2 « Stocks, dans les paragraphes relatifs à la valorisation des stocksliés aux contrats de construction » ;

– IAS 10 « Événements survenus après la clôture » ;

– IAS 37 « Provisions, passifs éventuels, actifs éventuels, concernant lesprovisions pour les garanties données aux clients, les réclamations, lespénalités et les autres provisions ».

Page 99: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

5 OPÉRATIONS EN DEVISES, ACTUALISATION, RISQUE DE CRÉDIT

CE QU’IL FAUT RETENIR

OPÉRATIONS EN DEVISES

Une transaction en monnaie étrangère est une transaction libellée ou devantêtre dénouée en monnaie étrangère. Sont donc des transactions en monnaieétrangère celles qui portent sur l’achat ou la vente de biens ou de servicesdont le prix est libellé dans une monnaie étrangère.

La norme IAS 21, « Effet des fluctuations du cours des devises », prévoitqu’une transaction en monnaie étrangère est enregistrée, lors de sa comptabi-lisation initiale, dans la monnaie fonctionnelle, en appliquant au montant en

Les produits des activités ordinaires font l’objet de traitements spécifiques dès lors :– qu’ils sont libellés en devises étrangères ;– que leur règlement est différé dans le temps ;– que surviennent des risques spécifiques : risque de crédit et risque pays, en particulier.Ces traitements sont semblables quel que soit le type de transaction envisagé : vente debiens, prestations de services, ou contrat de construction.C’est pourquoi ce chapitre traite de façon transversale des différentes problématiquessoulevées : économiques, comptables, d’évaluation et de présentation.

1

Page 100: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

90 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

monnaie étrangère le cours de change comptant entre la monnaie fonction-nelle et la monnaie étrangère à la date de la transaction.

1.1 Ventes de biens

1.1.1 Aspects économiques

La conversion des opérations en devises est un aspect sensible de l’activitédes entreprises qui ont une activité à l’international. Cette conversion reposesur la norme IAS 21 selon laquelle les ventes en devises seront converties,soit au taux en vigueur à la date de transaction, soit à un cours moyenpondéré périodique dans la mesure où ce dernier constitue une approxima-tion fiable du cours à la date de transaction.

En période de fortes fluctuations des cours, cette seconde méthode doit êtreutilisée avec précaution, le cours moyen ayant pour effet de lisser l’impactdes variations erratiques des devises. Si l’écart entre les deux calculs étaitmatériel, le calcul suivant la méthode de la moyenne pourrait être remis encause par les auditeurs. Cependant, il est à noter qu’en pratique les outils deconsolidation ne proposent pas dans leur paramétrage de base une conversionsuivant le taux moyen pondéré : il conviendra donc, le cas échéant et sil’écart entre les deux méthodes s’avère matériel, de mettre en place un dispo-sitif de conversion adapté.

Ainsi, si l’on s’intéresse à la parité EUR/USD sur l’exercice 2008, onpourra constater qu’un revenu de 698,74 millions de dollars américainsconverti au cours moyen de l’exercice 2008 conduit à enregistrer un montanten euros différent suivant la méthode de conversion retenue.

On se reportera à l’exemple ci-contre pour avoir un calcul détaillé. Ici, ladifférence en valeur relative entre une conversion au cours moyen mensuel etune conversion au cours moyen annuel ressort à 2 %, ce qui est très significa-tif et reflète la forte volatilité du cours en 2008.

1.1.2 Aspects financiers et comptables

La date d’une transaction est la date à laquelle la transaction respecte pour lapremière fois les conditions de comptabilisation, à savoir la date de transferteffectif des risques et avantages.

Les ventes en devises seront converties soit au taux en vigueur à la date detransaction, soit à un cours moyen pondéré périodique dans la mesure où cedernier constitue une approximation fiable du cours à la date de transaction.

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92 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

1.2 Prestations de services et contrats de construction

1.2.1 Aspects économiques

Le choix de la devise du contrat sera souvent déterminant pour la formationde la rentabilité et des risques de la transaction. Dès la phase de négociation,la direction financière a un rôle majeur à jouer vis-à-vis de la directioncommerciale pour l’aider à identifier et maîtriser ces enjeux. Ensuite, del’offre au dernier règlement, une coordination étroite est indispensable entreles équipes financières et les responsables de projet ou les contrôleurs degestion pour assurer le suivi et la gestion du risque de change.

Les normes IFRS n’ont pas modifié la donne économique sur ce plan maiselles ont souvent changé la traduction des opérations libellées en devisesdans le reporting interne et dans les états financiers. Selon le raisonnementsous-jacent à la norme IAS 21, la devise de dénomination est un attributessentiel d’une transaction. Par conséquent, les produits d’une transactionlibellée en devises étrangères sont évalués dans la devise du contrat puisconvertis dans la monnaie fonctionnelle au cours du jour de leur constatation.

1.2.2 Aspects financiers et comptables

➤ Évaluation des produits totaux du contrat

Lors de l’étude de rentabilité initiale, l’entreprise évalue les flux de produitsliés aux prestations à fournir sur la base des cours budget ou anticipés pour ladevise sur la durée de réalisation du contrat.

Ultérieurement, les produits correspondant aux prestations exécutéesseront évalués au cours de leur réalisation. Pour les produits correspondantaux prestations futures, plusieurs approches sont pratiquées : les estimer surla base des cours garantis si la transaction a été couverte, les estimer sur labase de cours anticipés, les estimer sur la base du cours à la date de clôture.

➤ Évaluation et comptabilisation des produits acquis à l’avancement

Les produits des contrats libellés en devises étrangères sont évalués en devi-ses puis convertis dans la monnaie fonctionnelle de l’entreprise.

Lorsque le contrat n’a pas fait l’objet d’une couverture contre le risque dechange, le cours retenu correspond au cours au comptant à la date du faitgénérateur du produit. L’entreprise peut cependant retenir le cours moyen dela période, si la simplification n’a pas d’incidence significative. Ainsi, ungroupe ayant des transactions de montant unitaire important devra le plussouvent retenir le cours du jour de la constatation du produit (et par ailleursse doter des outils appropriés tels qu’un logiciel multidevises). Un groupe

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ayant des transactions de montant unitaire homogène et faible, bien distri-buées au long d’une même période, pourra retenir le cours moyen de lapériode.

Sur le principe, la conversion au cours du jour de la constatation du produits’applique aussi aux contrats ayant fait l’objet d’une couverture contre lerisque de change, éligible à la comptabilité de couverture1. Toutefois, enpratique, de nombreux groupes comptabilisent directement au cours couvert2

les produits des prestations de service lorsqu’elles ont fait l’objet d’unecouverture qualifiée. En ce cas, seuls les effets de l’inefficacité éventuelle dela couverture sont enregistrés séparément.

Exemple

Alstom indique : « Le chiffre d’affaires et les coûts relatifs à un contrat clientsont comptabilisés tout au long de la vie du contrat au taux de change du jour àla date de la mise en place de leur couverture sous réserve que les relations decouverture correspondantes continuent de répondre aux critères d’application dela comptabilité de couverture. » (Source : Alstom, rapport annuel 2008.)

➤ Traitement des services rendus non encore facturés

Les services rendus non encore facturés (ce qu’on appellera souvent« créances sur contrat » ou « factures à établir ») sont des éléments nonmonétaires selon la définition de la norme IAS 21 § 18. Ils sont convertisdans la devise fonctionnelle au cours du jour de leur constatation et demeu-rent évalués sur cette base jusqu’à leur sortie du bilan.

➤ Traitement des factures émises

Les factures émises répondent à la définition d’un élément monétaire3. À leurcomptabilisation initiale, elles sont converties en monnaie fonctionnelle aucours du jour du fait générateur de leur comptabilisation. Ultérieurement,elles font l’objet d’une conversion dans la monnaie fonctionnelle au courscomptant de la date de clôture. L’éventuel écart de change par rapport aucours du jour de la précédente conversion est constaté au compte de résultat.

1. En ce cas, l’entreprise enregistre séparément les variations de valeur de la couverture.2. Selon le choix de l’entreprise relatif à la désignation du risque couvert, il s’agira du cours au

comptant du jour de la mise en place de couverture ou du cours à terme.3. Les éléments monétaires se caractérisent par le droit de recevoir (ou l’obligation de livrer)

un nombre déterminé ou déterminable d’unités monétaires. Il s’agit par exemple des créan-ces clients, les dettes fournisseurs, les provisions dénouées en numéraire. À l’inverse, lesmontants payés d’avance pour les biens et les services (par exemple, le loyer payéd’avance), les stocks, …, et les provisions qui se dénouent par la fourniture d’un actif nonmonétaire ne sont pas des éléments monétaires (IAS 21 § 16).

Page 104: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

94 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Lors de leur règlement, elles sont converties au cours du jour ; la différencede change entre le cours du jour du règlement et le cours prévalant lors de ladernière date de clôture est enregistrée en résultat.

➤ Traitement des avances et acomptes

Les avances et acomptes reçus ne présentent plus de risque de change car laquantité d’unités monétaires dans la devise fonctionnelle n’est plus suscepti-ble de varier. Ils demeurent convertis au cours du jour de leur règlement.

Le traitement comptable des avances et acomptes doit être bien distinguéde celui de la trésorerie reçue, qui dépend des choix de gestion financièreeffectués. Si la trésorerie est conservée en devises, elle sera contrevaloriséedans la monnaie fonctionnelle à chaque date d’arrêté. En revanche, si latrésorerie est convertie en monnaie fonctionnelle et transférée, sa contreva-leur en monnaie fonctionnelle est définitivement fixée par l’opération dechange ; par conséquent, cet encours comptable n’a plus à passer par le trai-tement de réévaluation.

1.3 Présentation dans les états financiers

Les écarts de change sont enregistrés en produits ou en charges, selon leursens, dans la période au cours de laquelle est intervenue la transaction. Si lerèglement intervient à une période ultérieure, l’écart de change est comptabi-lisé sur chacune des périodes concernées.

Lorsque des contrats de couverture de change sont en place, l’entreprisepourra appliquer les dispositions de la recommandation CNC n˚ 2009-R03du 2 juillet 2009 relative au format des états financiers des entreprises sousréférentiel comptable international. Celle-ci indique (5.5.2 – Opérations decouverture de change et couverture de taux) : « Les produits et charges résul-tant des activités de couverture sont à présenter dans la même rubrique quel’opération sous-jacente objet de la couverture. »

Exemple

Les résultats sur opérations de change relatives à des opérations commercialessont inscrits :

• quand la relation de couverture est démontrée, en résultat opérationnelcourant, (part efficace et part non efficace) : soit sur chaque ligne concernée(chiffre d’affaires, achats consommés…), soit globalement en « Autresproduits d’exploitation » et « Autres charges d’exploitation » ;

• quand la relation de couverture n’est pas démontrée, en « Autres produitsfinanciers » et « Autres charges financières ».

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Une entreprise qui retient la première solution, c’est-à-dire qui inscrit lesrésultats de la couverture sur la ligne « chiffre d’affaires », présente en fin decompte la même information que son choix de traitement comptable, soit :

– de comptabiliser l’opération au cours couvert en enregistrant les effets del’éventuelle inefficacité sur la ligne « chiffre d’affaires » ; ou

– de comptabiliser l’opération au cours du jour du fait générateur en enregis-trant les effets de la couverture sur la ligne « chiffre d’affaires ».

LA PROBLÉMATIQUE DE L’ACTUALISATION

Le plus souvent, le chiffre d’affaires correspond au montant de trésoreriereçu ou à recevoir au titre d’un contrat. Cependant, lorsque le règlementd’une prestation de service est différé au-delà des délais habituels, dans desconditions favorables au client, il faut tenir compte de l’effet de l’actualisa-tion s’il est significatif. C’est une conséquence du principe d’évaluation desproduits à leur juste valeur.

2.1 Détermination du seuil de signification

Les critères utilisés pour fixer le seuil de signification combinent souvent lemontant des créances engendrées par la transaction, la durée du différé derèglement en comparaison des pratiques locales dans le secteur et/oul’impact sur le compte de résultat. Un groupe considérera, par exemple,qu’une transaction dont la rentrée de trésorerie est différée au-delà de 2 anspour une valeur supérieure à 1 M€ doit donner lieu à actualisation pour lacomptabilisation du chiffre d’affaires. Un autre considérera que seules lestransactions d’un montant supérieur à 15 M€ pour lesquelles l’impact del’actualisation est supérieur à 1,5 M€ sont comptabilisées pour leur valeuractualisée.

Dans le premier cas, les équipes sont dispensées de faire le calcul lorsque leseuil de signification n’est pas franchi mais il faut pouvoir régulièrementjustifier vis-à-vis des commissaires aux comptes du caractère réellement nonsignificatif de l’effet de l’actualisation. Dans le second, elles ont à faire lecalcul mais sont dispensées d’en traduire les impacts dans les comptes.

2.2 Décomposition de la rémunération contractuelle

L’écart entre la valeur actualisée du produit du contrat et son montant nomi-nal est un produit financier qui sera comptabilisé au fur et à mesure du

2

Page 106: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

96 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

passage du temps. La décomposition du produit global du contrat entre unproduit opérationnel et un produit financier peut être effectuée de deuxfaçons :

– en déterminant la juste valeur du produit d’une transaction similaire régléeau comptant puis en calculant par différence le produit financier. Ilconvient de vérifier le caractère normal du taux d’intérêt implicite qui enrésulte ;

– en calculant la valeur actualisée des flux de trésorerie prévisionnels sur labase du taux d’intérêt en vigueur pour un instrument de nature similaireémis par un emprunteur de même qualité de signature. C’est la solutiongénéralement pratiquée.

2.3 Assiette et fait générateur de l’actualisation

L’assiette de l’actualisation est constituée par les produits acquis dont lerèglement est différé. La durée du différé correspond au délai qui s’écouleentre la constatation du produit au compte de résultat et son règlement.

Pour les prestations de services et contrats de construction, le point dedépart de l’actualisation se situe donc à la date de constatation du produit àl’avancement, non à la date d’émission d’une facturation intermédiaire oudéfinitive.

De manière générale, pour les transactions dont l’avancement est mesuréau prorata des coûts, l’assiette de l’actualisation sera donc constituée par :

Pour les transactions dont l’avancement est mesuré au prorata des produitsou au franchissement de jalons techniques, l’assiette de l’actualisation seraconstituée par :

Autrement dit, on ne tient pas compte des travaux en cours (évalués au coûtde revient) qui n’ont pas encore donné lieu à constatation de produits.

2.4 Taux d’actualisation

Le taux d’actualisation à retenir correspond à celui auquel le client pourraitcontracter un emprunt dans la devise de la transaction pour la maturité desflux de la créance. Ce taux est déterminé à la comptabilisation initiale duproduit et n’est pas ultérieurement modifié.

Créances + Factures à établir – Produits constatés d’avance – Avances reçues

Créances – Avances reçues

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En toute rigueur, pour une créance donnant lieu à des règlements fraction-nés, chacun des flux de règlement est à actualiser sur le taux prévalant pour lamaturité considérée. Il n’est toutefois pas inhabituel de retenir un taux uniquecorrespondant à celui de la maturité moyenne des flux engendrés par lacréance. Il est également fréquent de définir un taux par classe de maturité(par exemple, < 2 ans, 2 à 5 ans, > 5 ans) plutôt que de refléter tous les pointsde la courbe des taux.

Ce taux doit inclure une rémunération du risque de crédit liée à la qualitéde la signature du client. Différents cas devront être prévus dans la procédureinterne : celui, le plus simple, où le coût d’emprunt marginal du client seradirectement observable ; celui où le marché du crédit dans la devise serasuffisamment profond pour pouvoir se référer au coût du financementd’emprunteurs présentant un risque comparable ; celui où il faudra construirele taux à partir de la courbe des taux sans risque dans une devise de référence(par exemple celle de la société mère) ajusté pour tenir compte du risque decrédit du client et du risque-pays.

2.5 Présentation dans les états financiers

Le résultat de l’actualisation des créances sera classé dans le résultat finan-cier. La recommandation CNC 2009-R03 du 20 juillet 2009 préconise de leprésenter dans les « Autres produits financiers et autres charges financières »,qui comprennent les produits et charges de nature financière qui ne sont pasde nature opérationnelle et ne font pas partie du coût de l’endettement finan-cier net.

2.6 Procédure

Une procédure doit détailler tous les aspects pratiques concernant la mise enœuvre de l’actualisation. Elle précisera les modalités de collecte des informa-tions relatives aux produits à actualiser (montant et durée). Si une grille detaux est diffusée par la direction financière du groupe, la procédure indiqueracomment y accéder et comment identifier le taux approprié pour le cas à trai-ter. S’il revient aux filiales ou divisions opérationnelles de déterminer lagrille de taux applicable dans leur environnement, la procédure expliquerales principes de constitution et d’application de la grille. Enfin, la procédureexpliquera la méthodologie de calcul et les règles à suivre pour documenterles calculs effectués.

Page 108: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

98 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

CONTRÔLE DE LA SOLVABILITÉ DU CLIENT

Lorsque la solvabilité du client n’est pas connue ou est insuffisante, le chiffred’affaires ne peut être constaté qu’à l’encaissement des créances (IAS 18§ 18). Une procédure doit être préparée, par exemple par la direction finan-cière, pour rappeler la nécessité de mener systématiquement une étude desolvabilité des clients et de la tenir à jour. Il importera de bien en faire saisirles conséquences pour les états financiers.

L’appréciation doit être faite à l’initiation de la transaction. Elle doitensuite être régulièrement suivie afin de tirer les conséquences de touteévolution, favorable ou défavorable : des contrats de longue durée peuventêtre conclus avec des clients dont le risque de crédit est faible ou modérédans les premières années de la vie du contrat puis se détériore. Une évalua-tion régulière est d’autant plus importante que le portefeuille clients estconcentré, les montants unitaires des opérations sont élevés, la durée descontrats est longue et les délais de paiement importants.

En termes de procédure, le plus simple sera souvent de prévoir que lesservices commerciaux interrogent systématiquement un fournisseur d’infor-mation de solvabilité (Dun & Bradstreet ou similaire), consultent les notesattribuées par les agences de notation lorsque leurs clients ou prospects sontnotés, ou interrogent le service d’analyse interne s’il en existe un.

Lorsque l’entreprise dispose d’un service d’analyse interne, elle doit défi-nir les règles d’évaluation des dossiers. Il convient de préciser aux analystesles critères et ratios à calculer (par exemple, le niveau et l’évolution des cashflows des trois derniers exercices, le poids de l’endettement…) et leur modede calcul. Des seuils discriminants par critères seront définis ainsi que larègle conduisant à attribuer une note au dossier. Les instructions diront quel’analyste doit soumettre le dossier à un niveau supérieur dans la hiérarchielorsque le cas ne peut être évalué selon la grille standard.

Que la notation soit d’origine externe ou interne, la procédure indiquera leseuil au-dessous duquel le chiffre d’affaires ne pourra être constaté qu’àl’encaissement. Le cas échéant, les instructions prévoiront les solutionsauxquelles les services auront à recourir pour solvabiliser le client et sécuri-ser les rentrées de trésorerie pour l’entreprise.

La liste des clients ou prospects pour lesquels le chiffre d’affaires ne peutêtre constaté qu’à l’encaissement sera régulièrement établie, mise à jour etcommuniquée.

Les informations obtenues lors de l’analyse de solvabilité auront à êtrecorroborées par l’analyse des taux de défaut et le suivi des dépréciations decréances.

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De plus, il convient de noter que l’information sur le risque de contrepartieest une information particulièrement sensible en période de crise pour lelecteur des états financiers et qu’elle fait l’objet d’une attention particulièrede la part des autorités de contrôle. Ainsi, l’AMF requiert-elle dansla« Recommandation de l’AMF sur les facteurs de risque : mise à jour duguide d’élaboration du document de référence1 » de :

– préciser les risques vis-à-vis des clients et si ces risques sont avérés ilsdoivent faire l’objet d’un paragraphe spécifique ;

– évaluer le risque par pays, par secteur d’activité, sur la qualité descontreparties ;

– développer la manière dont les risques sont gérés ;

– indiquer les impayés, défaillances de contreparties à la clôture et les dépré-ciations constatées ;

– en cas de dépendance vis-à-vis de clients, de préciser le chiffre d’affairesréalisé avec le premier client par ordre d’importance, les 5 premiers, les10 premiers s’ils représentent une part significative et le montant descréances échues non recouvrées à l’égard des clients significatifs.

CONTRÔLE DU RISQUE-PAYS

Certaines entreprises exportatrices travaillent dans des pays où le gouverne-ment interdit ou est susceptible d’interdire le rapatriement des recettes detransactions commerciales. En ce cas, les prestataires qui ont prévu d’êtreréglés en trésorerie ne peuvent constater le chiffre d’affaires correspondant(IAS 18 § 18). En revanche, ceux qui auront prévu d’être réglés en nature oupar compensation, ou ceux qui auront prévu d’utiliser localement la trésore-rie reçue pourront constater le chiffre d’affaires correspondant aux presta-tions fournies.

Cet aspect particulier du risque-pays peut être apprécié à partir de critèresd’ordre politique, économique et social. Pour l’évaluation, les entreprisespeuvent recourir à des services d’information externes ou mener leurspropres analyses. L’important est qu’une politique de maîtrise du risque soitdéfinie dans les groupes opérant dans des zones géographiques sensibles.Cette politique doit être déclinée en procédures pour la gestion du risque etson suivi. Les enjeux sur le plan comptable doivent en être connus et maîtri-sés par les équipes commerciales et financières.

1. http://www.amf-france.org/documents/general/9145_1.pdf

4

Page 110: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

100 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Contrat libellé en devise n˚ 1

Description

Le 1er janvier 2010, la société ISIS – dont la monnaie fonctionnelle est l’euro – conclutun contrat de prestations de services pour 12 M$.Le contrat est décomposé en 3 jalons techniques auxquels sont associés des produitscumulés de : 3,6 M$ (30 %) ; 9 M$ (75 %) ; 12 M$ (100 %).Aucun appel de fonds ou facturation intermédiaire n’est prévu. La facturation définitiveinterviendra à l’achèvement de la prestation et le paiement sera effectué à réceptionde facture.La société ne met pas en place de couverture ; elle convertit immédiatement lesdollars reçus.

Comptabilisation des produits et détermination des résultats de change

• Situation en dollars

• Situation en eurosLes produits sont convertis en euros au cours du jour où ils sont acquis. Les encoursde créances sont convertis en euros au cours du jour de leur constatation initiale etrestent évalués sur cette base à chaque date de clôture. Le règlement final du clientest changé en euros le jour même.Un résultat de change est généré à la date du règlement final du fait de l’écart entrele cours de constatation des produits et le cours de règlement. Ici, la société ISIS vaenregistrer un gain de change.

1/1/2010 30/6/2010 31/12/2010 31/3/2011

Jalon 1 (M$) 3,60

Jalon 2 (M$) 5,40

Jalon 3 (M$) 3,00

Cours €/‘$ 1,10 1,30 1,20 1,00

1/1/2010 30/6/2010 30/09/2010 31/12/2010 31/3/2011 Total

Produits 3,60 – 5,40 3,00 12,00

Créances s/contrat 3,60 3,60 9,00 –

Client –

Trésorerie 12,00

Cours €/$ 1,10 1,30 1,48 1,20 1,00

C A S P R A T I Q U E

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Opérations en devises, actualisation, risque de crédit 101©

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(1) Produits : 3,60/1,30 = 2,77 ; 5,40/1,20 = 4,50 ; 3,00/1,00 = 3,00(2) Résultat de change : 12,00/1,00 – [3,60 × 1/1,30 + 5,40 × 1/1,20 + 3,00 × 1/1,00) = 1,73(3) Créances/contrat : 3,6 /1,30 = 2,77 ; 2,77 + 5,40 × 1/1,20 = 7,27 (4) Trésorerie : 12,00/1,00 = 12,00

Contrat libellé en devise n˚2

Description

Les données sont les mêmes que dans l’exemple précédent sauf pour le calendrierdes règlements client. Ici, le client règle un acompte de 4 M$ à la signature dumarché.La société ne met pas en place de couverture ; elle convertit immédiatement lesdollars reçus.

Comptabilisation des produits et détermination des résultats de change

• Situation en dollars

1/1/2010 30/6/2010 30/09/2010 31/12/2010 31/3/2011 Total

Produits(1) 2,77 – 4,50 3,00 10,27

Résultat de change(2) – 1,73 1,73

Créances s/contrat(3) 2,77 2,77 7,27 –

Client –

Trésorerie(4) 12,00

Cours €/$ 1,10 1,30 1,48 1,20 1,00

1/1/2010 30/6/2010 31/12/2010 31/3/2011

Jalon 1 (M$) 3,60

Jalon 2 (M$) 5,40

Jalon 3 (M$) 3,00

Cours €/$ 1,10 1,30 1,20 1,00

1/1/2010 30/6/2010 30/09/2010 31/12/2010 31/3/2011 Total

Produits 3,60 – 5,40 3,00 12,00

Créances s/contrat 3,60 3,60 9,00 –

Client –

Avances reçues – 4,00 – 4,00 – 4,00 – 4,00 –

Trésorerie 4,00 12,00

Cours €/$ 1,10 1,30 1,48 1,20 1,00

Page 112: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

102 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

• Situation en eurosDu fait du paiement de 4 M$ à la conclusion du contrat, un tiers des produits ducontrat n’est plus exposé aux fluctuations du cours du dollar. On considère que tousles jalons bénéficient de cette sécurité sur une base proportionnelle à leur montantdans le total du contrat. Par conséquent, les produits du contrat sont uniformémentconvertis en euros pour un tiers au cours du jour de l’encaissement de l’acompte etpour les deux tiers au cours du jour où ils sont acquis.Les encours de créances sont convertis en euros au cours du jour de leur constatationinitiale et restent évalués sur cette base à chaque date de clôture. Les encoursd’avances et d’acomptes nets demeurent convertis en euros au cours du jour de leurconstatation initiale. Le règlement final du client est changé en euros le jour même.Un résultat de change est généré à la date du règlement final du fait de l’écart entrele cours de constatation des produits et le cours de règlement.

(1) Produits : 3,60 × (1/3 × 1/1,10 + 2/3 × 1/1,30) = 2,94 ; 5,40 × (1/3 × 1/1,10 + 2/3 × 1/1,20 = 4,64 ;3,00 × (1/3 × 1/1,10+ 2/3 × 1/1,00) = 2,91(2) Résultat de change : 12,00/1,00 – [2,94 + 4,64 + 2,91) = 1,15(3) Créances s/contrat : 3,60 × (1/3 × 1/1,10 + 2/3 × 1/1,30) = 2,94 ; 2,94 + 4,64 = 7,57(4) Avances reçues : 4,00/1,10 = 3,64(5) Trésorerie : 4,00/1,10 = 3,64 ; 3,64+ 8,00/1,00 = 11,64

Différé de règlement et actualisation

Le 31 décembre N, Presso signe avec la chaîne Marchémax un contrat de vente de100 000 machines pour un prix de 10 000 000 €. Presso accorde à Marchémax undélai de règlement d’un an. Le taux du marché de l’argent est de 2 %.

Comptabilisation en normes françaises : au montant nominal

• Lors de la venteLe différé de règlement est ignoré. Le produit de la vente et la créance sont enregis-trés pour le montant nominal de l’opération.

1/1/2010 30/6/2010 30/09/2010 31/12/2010 31/3/2011 Total

Produits(1) 2,94 – 4,64 2,91 10,49

Résultat de change(2) – 1,15 1,15

Créances s/contrat(3) 2,94 2,94 7,57

Client

Avances reçues(4) – 3,64 – 3,64 – 3,64 – 3,64

Trésorerie(5) 3,64 3,64 3,64 3,64 11,64 11,64

Cours €/$ 1,10 1,30 1,48 1,20 1,00

B/R D C

B Clients 10 000 000

R Ventes 10 000 000

Page 113: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

Opérations en devises, actualisation, risque de crédit 103©

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• Lors du règlement à l’échéance

Comptabilisation en IFRS : au montant actualisé

Le différé de règlement est inhabituellement long et l’effet de l’actualisation significatif.Le produit de la vente sera donc comptabilisé pour la valeur actualisée du flux detrésorerie à recevoir dans un an.

Le tableau ci-dessous présente la ventilation des 10 000 000 € entre produit de la vente de biens et produit financier sur les deux exercices :

NB : (10 000 000 × 1,02–1 = 9 803 922)

• Lors de la venteAu 31 décembre N, le produit de la vente est constaté pour sa valeur actualisée autaux de 2 %. Le manuel de procédures comptables prévoit qu’en cas d’actualisation,une créance soit inscrite à l’actif pour sa valeur actualisée.

• À la clôture suivanteAu 31 décembre N+1, Presso constate le produit financier couru sur un an.

• À la date de règlementAu 31 décembre N+1, Presso constate le règlement de Marchémax et décomptabilisela créance.

B/R D C

B Banque 10 000 000

B Clients 10 000 000

Exercice Chiffre d’affaires Produits financiers

N 9 803 922 0

N+1 0 196 078

B/R D C

B Clients 9 803 922

R Ventes 9 803 922

B/R D C

B Clients 196 078

R Produits financiers 196 078

B/R D C

B Trésorerie 10 000 000

B Clients 10 000 000

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Page 115: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

6 TRANSACTIONS À ÉLÉMENTS MULTIPLES

CE QU’IL FAUT RETENIR

DE QUOI S’AGIT-IL ?

L’appellation « transactions à éléments multiples » apparaît à premièrelecture quelque peu ésotérique. Pourtant elle fait référence à des opérationscourantes voire banales dans la pratique actuelle. Le vendeur qui propose uneextension de garantie en accompagnement de la vente d’un appareil électro-ménager s’engage dans une transaction à éléments multiples. Il en va demême pour l’opérateur qui commercialise des téléphones portables dont le

• Qu’est-ce qu’une transaction à éléments multiples ? Tout simplement une offre groupée deproduits et de services, une opération éventuellement aussi courante que la vente d’un télé-phone portable avec un abonnement par exemple.• Le traitement comptable de ces opérations soulève deux difficultés : l’identification deslivrables devant faire l’objet d’une comptabilisation séparée puis l’allocation du prix entre ceslivrables et la détermination de l’échéancier du chiffre d’affaires.• Dans le référentiel international, la norme IAS 18 aborde le sujet mais sans donner deméthodologie pratique, aussi nombre d’entreprises européennes se réfèrent aux normesaméricaines, dont les célèbres AICPA SOP 97-02 et EITF 00-21.• Une fois identifiés les livrables à comptabiliser séparément, ce qui est une démarche com-plexe, l’entreprise ventile le prix contractuel entre eux, proportionnellement à leur part dansla juste valeur du service rendu au client.

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Page 116: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

106 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

prix de vente au public est modulé en fonction de la souscription ou non d’unabonnement.

Au-delà de ces deux exemples, constatons, d’une part, que les clients sontà la recherche de solutions plus que de produits et, d’autre part que les entre-prises sont à la recherche de voies de différentiation et d’outils de fidélisationde la clientèle. Pour ces deux raisons, les offres associant vente de biens etservices liés sont légion de même que les offres associant des services diffé-rents mais liés à des degrés divers entre eux. En résumé, dans tous lessecteurs d’activité, les offres groupées font florès.

La question se pose alors de savoir comment traduire les effets de cesopérations dans les états financiers. Il s’agit en pratique d’éviter l’anticipa-tion ou le retard indu dans la constatation du chiffre d’affaires ainsi qued’écarter les effets de subventionnement ou de pénalisation entre livrables.Les termes du contrat, en général pensés à des fins commerciales, ne sont pasnécessairement éclairants pour le traitement comptable ; le calendrier despaiements prévus ne l’est pas davantage.

PRINCIPALES DISPOSITIONS DES RÉFÉRENTIELS FRANÇAIS, INTERNATIONAL ET AMÉRICAIN

2.1 Que disent les textes français ?

Distinguons entre référentiel applicable dans les comptes sociaux et référen-tiel d’établissement des comptes consolidés.

2.1.1 Référentiel applicable dans les comptes sociaux

Dans les comptes individuels, la comptabilisation des revenus relatifs à descontrats composites doit correspondre à la ventilation des biens et autresprestations prévues dans le contrat. Par conséquent :

– si le contrat distingue le prix de vente du bien et la prestation de services,le bien et la prestation sont inscrits en chiffre d’affaires pour le montantfigurant dans le contrat ;

– s’il n’y a pas de distinction dans le contrat entre prix de vente du bien etprestations de services, le produit global est constaté lors de la vente dubien. En contrepartie, une provision pour prestations à fournir doit êtreconstatée.

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2.1.2 Référentiel applicable dans les comptes consolidés

En comptes consolidés, les produits relatifs à des contrats composites doiventêtre comptabilisés sur la base des justes valeurs respectives des prestations oudes biens vendus, objets du contrat. Ces justes valeurs sont obtenues à partirde tous les éléments disponibles, notamment à partir des tarifs pratiqués lors-que de tels contrats font l’objet d’une proposition de prix séparée (Bull.CNCC n˚ 131, septembre 2003).

2.2 Que disent les normes IFRS ?

Le référentiel IFRS fait prévaloir la substance sur l’apparence et applique ceprincipe à la constatation du chiffre d’affaires. Par conséquent, les normesIAS 11 et IAS 18 disent toutes deux que leurs dispositions sont généralementappliquées à chaque contrat ou chaque transaction, mais elles prévoient aussides cas où il faut appliquer la norme à des éléments séparés d’un mêmeaccord ou à un ensemble d’accords afin de refléter leur substance.

2.2.1 Les regroupements et divisions de contrats selon IAS 11

C’est de manière indirecte que la norme IAS 11 traite des transactions àéléments multiples. Elle prévoit que lorsqu’un contrat couvre un certainnombre d’immobilisations, la construction de chaque immobilisation doitêtre traitée comme un contrat de construction isolé quand les conditionssuivantes sont simultanément réunies (IAS 11 § 8) :

– des propositions séparées ont été remises pour chaque immobilisation ;

– chaque immobilisation a fait l’objet d’une négociation séparée et l’entre-preneur ainsi que le client ont pu accepter ou refuser la part du contrat rela-tive à chaque immobilisation ; et

– les coûts et les revenus de chaque immobilisation peuvent être identifiés.

Il en va de même pour les groupes de contrats. Un groupe de contrats avecun seul ou avec plusieurs clients doit être considéré comme un seul contrat deconstruction quand (IAS 11§ 9):

– le groupe de contrats est négocié globalement ;

– les contrats sont si liés qu’ils font partie d’un seul projet avec une margeglobale ; et

– les contrats sont réalisés en même temps ou en séquence continue.

Lorsqu’un contrat génère la construction d’une immobilisation complé-mentaire à la demande du client ou qu’il est modifié pour y ajouter la cons-truction d’une immobilisation supplémentaire, la construction de

Page 118: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

108 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

l’immobilisation additionnelle doit être traitée comme un contrat de cons-truction séparé quand :

– l’immobilisation diffère significativement dans sa conception, sa technolo-gie, ou sa fonction, de l’immobilisation du contrat d’origine ; ou

– le prix de l’immobilisation est négocié sans lien avec le prix du contratd’origine.

2.2.2 Les transactions à éléments multiples selon IAS 18

« Dans certaines circonstances, il est nécessaire d’appliquer les critères decomptabilisation à des éléments d’une transaction unique identifiables sépa-rément afin de refléter la substance de cette transaction. Ainsi, lorsque le prixde vente d’un produit comprend un montant identifiable au titre de servicesultérieurs, ce montant est différé et comptabilisé en produits des activitésordinaires sur la période au cours de laquelle le service sera exécuté. » Deuxexemples en annexe complètent ces dispositions du paragraphe IAS 18§13.

Annexe d’IAS 18, exemple 11 : « Lorsque le prix de vente d’un produitcomprend un montant identifiable pour la rémunération de services ultérieurs(par exemple, des prestations de maintenance associées dont des mises à jour,un support technique et le développement – à la demande du client – de fonc-tionnalités supplémentaires sur des produits standard) ce montant est différéet constaté en produits. Le montant différé doit couvrir le coût des servicespromis majoré d’une marge raisonnable pour ces services. »

Annexe d’IAS 18, exemple 19 : « La rémunération du développement d’unlogiciel personnalisé est constatée en chiffre d’affaires en fonction du degréd’avancement du développement, y compris celui des services fournis pour lamaintenance ultérieure. »

« À l’inverse, les critères de comptabilisation sont appliqués à deux ouplusieurs transactions regroupées lorsque celles-ci sont liées de telle façonque leur incidence commerciale ne peut être comprise sans faire référence àl’ensemble des transactions considérées comme un tout. Par exemple, uneentité peut vendre des biens et, dans le même temps, conclure un accorddistinct visant à racheter ces biens à une date ultérieure, niant de la sortel’effet réel de cette transaction ; dans ce cas, les deux transactions sont trai-tées conjointement. » Ce paragraphe concerne notamment les ventes avecengagements de reprise des constructeurs automobiles, les ventes avec clau-ses de retour, les cessions temporaires de titres et autres instruments finan-ciers.

2.2.3 L’éclairage apporté par l’IFRIC

Le comité d’interprétation de l’IASB a discuté, en plusieurs occasions, del’identification de la transaction. En particulier, l’IFRIC a fixé dans l’inter-

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prétation IFRIC 15, « Contrats de construction immobilière », le schémad’analyse des contrats de construction de biens immobiliers, en indiquantque la démarche pouvait, par analogie, être appliquée à tout type d’accord.

Comment conduire l’analyse d’un contrat

2.3 Que disent les textes américains ?

Plusieurs textes traitent des accords complexes, par exemple l’ASC1 605-35-(ex– AICPA SOP 81-1) pour les contrats de construction ou assimilés etl’ASC 985-605 (ex-AICPA SOP 97-2) pour les accords portant sur des logi-ciels et non assimilés à des contrats de construction. L’ASC 650-25 (ex-inter-prétation EITF n˚ 00-21) a doté le référentiel américain d’un texte fédérateurpour le traitement des accords complexes non couverts par un autre texte.

1. Voir glossaire.

Page 120: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

110 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

L’interprétation initialement codifiée comme ASU 2009-13, adoptée enoctobre 2009, vient en amender certaines dispositions.

2.3.1 Division et regroupement de contrats selon l’ASC 605-35

Un groupe de contrats doit être considéré comme un contrat unique pourl’application de la méthode à l’avancement lorsque les conditions suivantessont simultanément réunies (25.8) :

– les contrats ont été négociés comme un tout, dans un même contexteéconomique, avec un objectif de marge global ;

– ils constituent un accord portant sur la réalisation d’un projet unique ; lesprestations à fournir sont étroitement liées, en termes de conception, detechnologie, de fonction ou de finalité ;

– ils font appel à des ressources et des activités dont les coûts sont en partiecommuns et ne peuvent être directement affectés aux composants ouphases du projet ;

– les contrats sont exécutés simultanément ou en séquence continue dans lecadre d’une même direction de projet sur le même site ou sur des sitesproches les uns des autres ;

– en substance, ils forment un seul accord conclu avec un client unique.

Un projet ne peut être segmenté que s’il remplit les critères suivants :

– les termes et périmètre du contrat ou du projet impliquent clairement undécoupage en phases ou en éléments séparés ;

– les phases ou éléments séparables du projet font fréquemment l’objet depropositions ou de négociations distinctes ;

– le marché assigne des taux de marge brute distincts à chacun de cessegments car ils diffèrent en termes de niveau de risque ou bien d’équilibreentre offre et demande pour les services fournis ;

– pour tous les composants auxquels une marge supérieure à la margemoyenne du projet serait allouée, le prestataire dispose d’un historiqueconcernant la fourniture de services similaires à d’autres clients dans lecadre de transactions séparées ;

– l’historique des relations avec les clients ayant acheté les services séparé-ment montre une politique stable de tarification, c’est-à-dire sans disper-sion excessive ni anormale (en réponse à des circonstances extraordinairesou du fait de relations commerciales trop épisodiques) ;

– l’excédent de la somme des prix des segments sur le prix total du contratest clairement lié aux synergies de coûts résultant de la réalisationconjointe des différents composants du contrat (il s’agit, par exemple, deséconomies sur la supervision du projet, ou sur l’utilisation d’actifs) ;

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– la similitude des services et des prix des éléments du contrat avec desservices vendus séparément à d’autres clients, et avec leur prix, doit êtredocumentée et doit être vérifiable.

2.3.2 Décomposition des transactions selon l’ASC 985-605-25

Les paragraphes 41 et suivants de l’ASC 985-605-25 définissent les élémentsidentifiables d’un même accord :– vente de licence ;– droits à mise à jour ;– droits à produits additionnels ;– droits d’échange et de retour ;– maintenance et assistance ;– autres services.

Une des dispositions majeures du texte considère la VSOE (Vendor SpecificObjective Evidence1) de la juste valeur d’un bien ou service comme seulebase de détermination de la juste valeur.

2.3.3 Décomposition des transactions selon l’ASC 605-25

La section ASC 605-25 de la nouvelle codification des US GAAP précise dansquels cas les différents livrables d’une transaction complexe doivent donnerlieu à comptabilisation séparée puis indique comment allouer la rémunérationcontractuelle totale entre les unités de comptabilisation distinctes.

Dans une transaction à éléments multiples, les livrables devant donner lieuà comptabilisation séparée sont ceux qui satisfont simultanément à troiscritères :– les éléments livrés ont une valeur autonome pour le client. C’est le cas s’ils

sont vendus séparément par un fournisseur quelconque ou bien si le clientpouvait les revendre séparément (s’il en avait par ailleurs la capacité). Iln’est pas nécessaire que le marché des éléments en question ait les carac-téristiques d’un marché actif ;

– la preuve objective et fiable de la juste valeur des éléments non encorelivrés peut être apportée ;

– si l’accord prévoit un droit de retour du bien en faveur du client, la livrai-son ou l’exécution de l’élément non encore livré est probable et pourl’essentiel sous la maîtrise du vendeur.

La rémunération contractuelle est ventilée entre ces livrables sur la base deleur juste valeur relative (sauf application des dispositions particulières du

1. Voir glossaire.

Page 122: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

112 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

paragraphe 14 de l’interprétation). Cette disposition s’applique aussi – dansle silence du texte spécifique – lorsqu’il s’agit de ventiler la rémunérationcontractuelle entre éléments relevant de textes spécifiques et autres presta-tions. C’est donc ainsi que devrait être ventilée la rémunération d’un accordcomprenant un livrable relevant de l’ASC 605-35 et des livrables ne relevantpas de ce texte, car l’ASC 605-35 est muet sur ce point. En revanche, il n’y apas à appliquer cette disposition de l’ASC 605-25 à la ventilation desproduits d’un contrat de location simple associé à des prestations de mainte-nance de l’équipement loué car la norme FAS 13 relative aux contrats delocation traite ce point.

À la différence de l’ASC 985-605-25, l’ASC 605-25 admet que la justevaleur puisse être déterminée, soit sur la base de la VSOE, soit sur la base desprix effectivement pratiqués par la concurrence pour des biens ou servicessimilaires (Third-Party Evidence ou TPE).

Si l’entreprise dispose de la juste valeur des éléments non livrés mais nonde celle d’un élément livré, elle applique la méthode résiduelle : le produitassocié à l’élément livré est déterminé par différence entre la rémunérationglobale et la juste valeur des éléments non livrés. Si la juste valeur deséléments non livrés n’est pas déterminable, le produit de la transaction estdifféré jusqu’à livraison de l’ensemble des biens et services prévus aucontrat. Les critères de comptabilisation du chiffre d’affaires sont ensuiteappliqués à chacun des éléments séparés de la transaction selon leur nature.

Exemple tiré de l’ASC 605-25

Exposé

La société C vend du matériel de fabrication d’aérosols. C vend uniquement unesolution intégrée comprenant les machines X, Y et Z. Par contre, d’autres four-nisseurs vendent ces machines séparément et il existe un marché secondaire pourles machines d’occasion.

Dans le contrat analysé, C a livré les machines X et Z le 27 mars mais ne livrerala machine Y que le 6 avril. Sans la machine Y, le client ne peut utiliser lesmachines X et Z.

Il existe un marché actif pour les machines X, Y et Z neuves, notamment poursatisfaire les besoins de remplacement d’équipements.

Le contrat conclu entre C et sa contrepartie prévoit que si la troisième machinen’est pas livrée, le client peut restituer les machines X et Z en étant dégagé detoute obligation vis-à-vis de C. La date limite de livraison est fixée au 1er juin.C a la capacité de production nécessaire pour respecter cette échéance contrac-tuelle.

Comment comptabiliser le contrat ?

Analyse

Le premier des critères de séparabilité est rempli pour les machines X et Z : ellesont une valeur individuelle puisqu’elles sont vendues séparément par des concur-

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rents de C et autres fournisseurs. Le deuxième critère de séparabilité est remplipour la machine Y : on peut en effet trouver une preuve objective et fiable de sajuste valeur sur la base des prix pratiqués par les autres fournisseurs de cet équi-pement, indépendants de C. En dernier lieu, on observe qu’il n’y a pas de dispo-sition contractuelle relative à un droit général de retour.

Conclusion

Les trois machines sont des unités de comptabilisation distinctes. Toutefois, lafraction de la rémunération contractuelle totale à allouer aux machines X et Z estnulle car la rémunération leur revenant est conditionnée par la livraison de lamachine Y. Il convient donc d’attendre la livraison pour comptabiliser la totalitédu chiffre d’affaires du contrat. En l’absence de cette clause, l’entreprise enregis-trerait un produit pour les deux machines livrées à hauteur de leur juste valeurrelative.

2.3.4 La réforme adoptée en 2009 et ses enjeux

Un nouveau texte adopté en octobre 2009 apporte quatre changementsmajeurs par rapport à l’existant. Il définit la notion de livrable. Il ne subor-donne plus la comptabilisation séparée des éléments livrés à l’existenced’une preuve objective et fiable de la juste valeur des éléments non livrés. Ilprévoit que la rémunération contractuelle totale soit allouée aux livrablesséparés sur la base de leur prix de vente relatif (la référence à la notion dejuste valeur est supprimée). Il introduit une hiérarchie dans les méthodes dedétermination du prix de vente et permet de le déterminer sur la base d’hypo-thèses internes à l’entreprise (best estimate of selling price) lorsque ni VSOEni TPE ne sont disponibles.

Un livrable correspond à toute obligation d’exécution s’imposant auvendeur (livrer un bien, assurer une prestation, consentir une licence…). Unélément sera présumé être un livrable si les caractéristiques suivantes sontréunies :

– il est expressément désigné, dans le contrat, comme une obligation duvendeur ;

– il requiert une action spécifique du vendeur ;

– un défaut d’exécution entraîne des pénalités substantielles ;

– il est probable que le prix convenu varie de façon autre que négligeableselon que l’élément est inclus ou non dans le contrat.

Pour qu’un livrable donne lieu à comptabilisation séparée, deux critèresdoivent simultanément être remplis :

– l’élément doit avoir une valeur autonome pour le client ;

– si l’accord prévoit un droit de retour du bien en faveur du client, la livrai-son ou l’exécution de l’élément non encore livré est probable et pourl’essentiel sous la maîtrise du vendeur.

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114 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Le premier de ces critères est satisfait si l’élément livré est vendu séparé-ment par d’autres fournisseurs ou bien si les clients sont susceptibles devendre séparément cet élément (il n’est pas nécessaire qu’il y ait des transac-tions observables).

Exemple 1

OBURO est un fabricant de matériels de bureau. Le 15 janvier 2010, OBUROconclut un contrat avec la société B pour la vente et l’installation d’une impri-mante/photocopieuse couleur de la toute nouvelle génération, puis sa mainte-nance pendant 3 ans. L’imprimante est livrée et installée le 31 janvier 2010.Aucun concurrent d’OBURO n’a encore de matériel similaire à son catalogue.On peut cependant constater l’existence d’un marché secondaire ; notamment,OBURO a un historique d’interventions en maintenance auprès d’entreprisesayant acquis ses matériels d’occasion.

Avec ces éléments probants, et en dépit de l’absence de concurrence directe surce produit, OBURO est fondé à conclure que le matériel a une valeur autonomepour le client.

Exemple 2

FABER est un fabricant de matériel industriel hautement spécialisé. Ses procédésde fabrication sont tous protégés par des brevets. Le 15 janvier 2010, FABERconclut un contrat avec la société B pour la vente et l’installation d’un de sesmatériels. Le processus d’installation est complexe et demande une connaissanceapprofondie du matériel. Par conséquent, aucun client n’est à même d’effectuerl’installation et aucun autre fabricant ou prestataire ne peut fournir ce service.Aucun fabricant ou distributeur ne vend de matériel semblable.

Il est ainsi hautement improbable que le client puisse recouvrer une fractionsubstantielle du coût de son investissement par la revente du matériel, puisqueseul FABER est à même de fournir les services d’installation. Par conséquent, lavente et l’installation n’ont pas à être comptabilisées séparément.

Exemple 3

JEBRODE fabrique et distribue des machines à broder. Sa gamme se compose dedeux types de matériels A et B. L’une et l’autre ont une valeur autonome pour leclient et aucune n’est vendue avec un droit général de retour. La machine A estun matériel standard qui fait régulièrement l’objet de ventes séparées. Lamachine B est un équipement spécifique, développé dans une technologiepropriétaire, qui n’est jamais vendu séparément. Le 29 décembre 2009,JEBRODE signe une vente de 2 M€ pour 100 machines A et 100 machines B.Les 100 machines A sont livrées le 31 décembre 2009, les machines B sontlivrées le 5 janvier 2010. JEBRODE ne dispose pas de la VSOE des machines Bpuisqu’elles ne sont jamais vendues séparément, que ce soit par JEBRODE oupar d’autres fournisseurs.

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Dans l’ancienne version de l’ASC 605-25, en l’absence de VSOE ou de TPE dela juste valeur de l’élément non encore livré, JEBRODE ne peut constater dechiffre d’affaires avant la livraison des machines B. Aucun chiffre d’affaires nesera donc constaté au 31 décembre 2009.

Selon les dispositions adoptées en octobre 2009, chacun des livrables ayant unevaleur autonome pour le client et le contrat ne prévoyant pas de droit général deretour, chaque lot de machines constitue un élément à comptabiliser séparément.Au 31 décembre 2009, JEBRODE constatera le chiffre d’affaires lié à la livraisondu lot de 100 machines A.

La rémunération contractuelle doit être ventilée entre les différentséléments séparés sur la base de leurs prix de vente relatifs. La déterminationde la meilleure estimation du prix de vente est réputée toujours possible ;pour l’établir, l’entreprise doit considérer les facteurs caractéristiques dumarché (stratégies de prix des concurrents, cycles de vie des technologiesdans le secteur…) ainsi que les facteurs propres à l’entreprise. La méthoderésiduelle est désormais proscrite. Lorsqu’un rabais ou remise est consenti auclient, la réfaction de prix est répartie sur tous les éléments séparés sur unebase proportionnelle à leur prix de vente relatif.

En conclusion, les nouvelles dispositions mettent fin à une restrictionsévère à la constatation du chiffre d’affaires au fur et à mesure des mises àdisposition de produits ou de services. Le nouveau texte s’applique demanière obligatoire aux contrats conclus ou substantiellement modifiés àcompter du premier exercice ouvert après le 15 juin 2010 (pour les entrepri-ses dont l’exercice coïncide avec l’année civile, il s’agit des contrats conclusà compter du 1er janvier 2011). Le texte peut faire l’objet d’une applicationanticipée. Ainsi, Hewlett-Packard écrit : « HP a adopté [ce texte] par antici-pation pour les contrats conclus ou modifiés après le 1er novembre 2008. »

COMMENT CONDUIRE L’ANALYSE DU CONTRAT OU DE LA TRANSACTION ?

Les facteurs d’identification des transactions séparables diffèrent selon que lecontrat relève de la norme IAS 11 ou de la norme IAS 18.

3.1 Identification de la ou des normes de référence

Dans le cas général, la première étape d’analyse consiste à déterminer lanorme de référence du contrat. Les contrats de construction seront identifiésen fonction du caractère spécifique et personnalisé de l’objet du contrat et du

3

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116 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

degré élevé d’interdépendance technique des éléments du contrat.Lorsqu’une transaction est identifiée comme un contrat de construction, tousles contrats et toutes les prestations de services à fournir relatifs aux activitésde construction sont englobés dans le contrat de construction (normes IAS 11§ 5(a) et IAS 18 § 4).

Certains contrats globaux comprennent à la fois des transactions relevantde la norme IAS 11 et des transactions relevant de la norme IAS 18 ; ceux-ciseront décomposés de façon à isoler les activités de construction des autresprestations et ventes de biens.

Ensuite, on sépare les éléments du contrat ou de ses composants en fonc-tion des facteurs propres à chaque norme.

3.1 Segmentation ou regroupement des composants

Si le contrat relève de la norme IAS 11, il faut effectuer une analyse desmodalités de déroulement de la négociation (cf. ci-dessus).

Si le contrat relève de la norme IAS 18, une analyse en substance descomposants de la vente s’impose, pour laquelle on pourra se référer à la grillede l’EITF 00-21. La question centrale est de savoir si l’élément a une valeurindividuelle pour le client :

– peut-il l’utiliser séparément ?

– peut-il se le procurer séparément auprès d’autres fournisseurs ?

– pourrait-il le revendre séparément ?

Exemple 1

Pour les opérateurs de télécommunications, l’établissement de l’accès au servicedans le secteur des télécommunications n’est pas considéré comme une presta-tion ayant une valeur individuelle pour le client car il n’y a pas de marché pour lanégociation séparée de ce type de prestation.

Exemple 2

Les garanties légales ne sont pas considérées comme des éléments ayant unevaleur individuelle pour le client. Elles sont indissociables du bien vendu caraucun constructeur ne peut le vendre sans consentir la garantie prévue par la loi.

Illustration

L’exemple suivant est tiré de la norme ASC 605-25 dans sa nouvelle version.BIOTECH SA conclut un contrat avec PHARMA SA par lequel BIOTECHs’engage vis-à-vis de PHARMA à lui concéder une licence relative à une techno-logie propriétaire, ainsi qu’à lui fournir des prestations de R&D.

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Exposé

Concession de licence

BIOTECH consent une licence exclusive à PHARMA pour une période de10 ans. La licence donne à PHARMA le droit de produire, commercialiser etdistribuer le médicament B développé en application de la technologie A.BIOTECH conserve tous les droits de propriété sur la technologie A et le médi-cament B. L’accord ne prévoit aucune clause « when-and-if-available » ou autresobligations de performance relative à la licence, sauf sur les points suivants.

Recherche et développement

BIOTECH s’engage à fournir à PHARMA des prestations de R&D en dédiant auprojet 4 collaborateurs sur une base d’équivalents temps plein (ETP) ; PHARMAprévoit aussi de dédier plusieurs ETP à ces mêmes activités. L’objectif est dedévelopper le médicament B sur la base de la technologie A en vue d’obtenir dela Food and Drug Administration (FDA) l’autorisation de mise sur le marché dumédicament B.

Aux termes du contrat, la rémunération de BIOTECH se compose des élémentssuivants :

• 5 M$ à recevoir à la signature du contrat ;

• 0,25 M$ par an par ETP affecté aux activités de recherche et de développe-ment liées à ce contrat

Les sommes reçues ne sont pas restituables, même en cas de refus du dossier parla FDA. Pour ce qui concerne les prestations de R&D, BIOTECH s’engage surune base de « meilleurs efforts » et n’est tenu qu’à une obligation de moyens.

PHARMA est tenu de recourir aux services de BIOTECH pour la R&D néces-saire au développement du médicament B à l’aide de la technologie A carBIOTECH est seul à détenir le savoir-faire et l’expertise sur cette technologie.

Les honoraires demandés par BIOTECH pour les services de R&D à rendre (soit0,250 M$ par ETP et par an) sont « dans le marché » par rapport aux prix prati-qués par des tiers pour des prestations similaires ; ils représentent la juste valeurde ces prestations. De plus, BIOTECH effectue régulièrement des prestationssemblables pour d’autres clients à des tarifs comparables.

Analyse

Le contrat comprend deux livrables (la concession de licence et les prestations deR&D). La question qui se pose est de savoir lesquels doivent donner lieu à comp-tabilisation séparée.

La concession de licence ne remplit pas le premier critère de séparabilité car ellen’a pas de valeur autonome pour PHARMA. En effet, comme le médicament Bn’a pas encore été développé, la licence n’a pas de valeur sans les prestationsultérieures de R&D utilisant la technologie A, propriété de BIOTECH. De même,PHARMA ne pourrait pas vendre séparément la licence à un tiers (c’est-à-diresans un accord de BIOTECH pour fournir des prestations de R&D à ce tiers).

Il convient donc de considérer la concession de licence et les prestations de R&Dcomme une seule unité de comptabilisation. Par conséquent, la totalité de larémunération contractuelle sera étalée sur la durée du contrat.

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118 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

COMMENT DÉCOMPOSER ET DÉTERMINER L’ÉCHÉANCIER DES PRODUITS DE LA TRANSACTION ?

Les dispositions normatives sont maigres dans le référentiel IFRS. Pour lesaccords de construction immobilière, l’interprétation IFRIC 15 indique quesi un accord complexe comprend un contrat de construction et d’autreséléments, la rémunération de l’accord doit être ventilée entre les composantsde l’accord sur la base de leur juste valeur relative (IFRIC 15 § 8). Hors cecas, le référentiel ne comporte pas de disposition explicite mais la méthodepréférentielle est celle de l’allocation des produits sur la base des justesvaleurs relatives des biens ou services vendus.

Pour déterminer la juste valeur des biens ou services vendus (et ayant unevaleur autonome pour le client), décomposer et déterminer l’échéancier desproduits de la transaction, l’entreprise pourra s’inspirer de la méthodologiedans la norme américaine, l’ASC 605-25.

4.1 Détermination de la juste valeur des livrables et engagements pris

En pratique, trois approches vont pouvoir être retenues par l’entreprise pourdéterminer la juste valeur de façon fiable :

– se référer aux prix effectivement pratiqués par l’entreprise pour le bien oule service considéré (la VSOE de la juste valeur) ;

– se référer aux prix pratiqués par d’autres fournisseurs du bien ou duservice (la TPE de la juste valeur) ;

– se fonder sur les coûts de production du bien ou du service augmentésd’une marge normale (best estimate of selling price).

4.1.1 La VSOE de la juste valeur ou la référence aux prix pratiqués par l’entreprise

L’estimation de la juste valeur d’un bien ou d’un service repose sur l’analysestatistique des prix effectivement pratiqués1 par l’entreprise pour des transac-tions séparées, récentes, portant sur le même bien ou service. La VSOE peutêtre déterminée pour des groupes homogènes d’opérations constitués à partird’une étude des critères discriminants pour la tarification (type de clients,

1. À l’inverse, les tarifs catalogue et prix publics ne constituent pas une référence adéquate dela juste valeur.

4

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classe de clients en termes de volume d’affaires, circuit de distribution, zonegéographique…).

L’établissement de la VSOE dépend donc de l’existence et de la fréquencedes transactions séparées intervenues dans une période récente. Si l’entre-prise ne dispose pas d’historique, si le nombre des transactions observées esttrop faible et/ou que les transactions sont sporadiques, il faudra conclure àl’inexistence de la VSOE.

Les caractéristiques de la série des prix observés doivent être étudiées. Ilfaut que la dispersion des prix demeure faible pour pouvoir conclure à l’exis-tence d’une mesure fiable de la juste valeur sur la base de la VSOE.

Exemple

Il est souvent considéré que 80 % des prix observés doivent se situer dans unefourchette de +/– 15 % par rapport à la médiane de la série pour pouvoir conclureà l’existence d’une VSOE.

L’entreprise aura donc intérêt à avoir une base client finement stratifiée et àprocéder au calcul de la VSOE sur des populations de transactions véritable-ment homogènes pour augmenter ses chances de déterminer une VSOEfiable.

4.1.2 La TPE de la juste valeur ou la référence aux prix pratiqués par les autres fournisseurs

Ici, l’estimation de la juste valeur d’un bien ou d’un service repose sur lacollecte et l’analyse statistique des prix effectivement pratiqués par les autresfournisseurs pour des transactions séparées, récentes, portant sur des biens oudes services similaires.

L’entreprise a ainsi à identifier les produits similaires aux siens, dont elleobserve les prix, ainsi qu’à documenter et justifier cette similarité. Ceci fait,elle doit collecter régulièrement les prix pratiqués par ses homologues pouralimenter son « observatoire ».

Comme pour l’établissement de la VSOE, il faut que la base d’observationssoit suffisamment étoffée et que les observations se situent dans une four-chette suffisamment étroite pour que la mesure centrale soit considéréecomme significative.

Page 130: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

120 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

4.1.3 La juste valeur fondée sur les coûts augmentés d’une marge raisonnable

C’est la méthode à laquelle l’entreprise recourra lorsqu’elle ne peut établir niVSOE ni TPE (ce qu’elle doit prouver). De manière concrète, la situation seprésente par exemple pour les nouveaux produits ou services sur lequel il n’ya pas de profondeur d’expérience.

À ce moment-là, l’entreprise utilise toutes les données disponibles pourfonder une estimation de la juste valeur (c’est-à-dire du prix qu’elle pourraitpratiquer dans une transaction séparée) à partir de ses coûts et de ses objectifsde marge, dans la limite de ce que permet le marché.

Exemple

Dans le cas BIOTECH, c’est l’approche qui devrait être retenue. En effet,BIOTECH ne dispose pas de VSOE de la juste valeur n’ayant conclu aucun autreaccord par lequel elle a concédé une licence d’utilisation de la technologie Apour le développement, la fabrication, la commercialisation et la distribution dumédicament B. De plus, étant donné le caractère unique de la technologie A, iln’y a pas de TPE de la juste valeur de l’ensemble « licence plus R&D ».

Les éléments à prendre en considération sont notamment les suivants :

– les coûts que l’entreprise entend recouvrer (y compris les frais de R&D,les coûts de distribution…) ;

– les objectifs de marge (par catégorie de clients, zone géographique…) ;

– les pratiques de tarification (tenant compte des réductions de prix consen-ties aux clients, notamment des rabais pour quantité) ;

– les ventes séparées, même peu nombreuses, lorsqu’il y en a ;

– les prix contractuels effectifs ;

– l’état de la demande pour le bien ou service et l’intensité de la pressionconcurrentielle ;

– les données relatives aux prix pratiqués par les concurrents et/ou dans lesecteur ;

– le niveau des marges opérationnelles atteintes dans le secteur.

Le résultat de l’estimation doit demeurer dans une fourchette suffisammentétroite. Une trop grande dispersion des données par rapport au barème peutsignifier qu’il faut affiner la segmentation de la population étudiée.

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4.2 Décomposition de la rémunération lorsque les justes valeurs sont toutes déterminables

La rémunération de l’accord est ventilée entre les différents éléments sur labase de leur juste valeur relative. Par conséquent, si un rabais ou une remiseou un autre avantage est consenti au client, l’impact en est réparti sur tous leséléments de la transaction. De même, les éventuels subventionnements decertaines prestations par d’autres sont neutralisés sur le plan comptable.

Exemple

Une société de conseil conclut un contrat portant sur des prestations d’intégrationde système et l’externalisation de la comptabilité. La juste valeur de la prestationd’intégration est évaluée à 17,5 M€ tandis que celle de la prestation d’externali-sation est estimée à 40,0 M€. Pour obtenir le contrat, le prestataire fait un gestecommercial ; le total du contrat est arrêté à un montant de 54,5 M€, dont17,5 M€ pour l’intégration et 37,0 M€ pour la prestation d’externalisation.

Pour la comptabilisation du produit du contrat, il convient d’allouer la rémunéra-tion totale du contrat sur les deux composants en fonction de leur juste valeurrelative. Par conséquent, un montant de 0,913 M€ va être transféré de l’intégra-tion vers la prestation d’externalisation.

Le texte américain précise que la rémunération allouée à un élément estensuite plafonnée au montant inconditionnellement recouvrable, c’est-à-direnon subordonné à la fourniture ultérieure d’un bien ou d’un service. Cesdispositions sont appliquées par les sociétés européennes.

Exemple

MOBICELL, un opérateur de télécommunications, vend des téléphones porta-bles au prix de 1 € avec des frais de connexion au service de 49 €, sous réservede la souscription d’un abonnement de 2 ans par le client (tarif mensuel del’abonnement : 40 €). Le coût de revient pour MOBICELL est de 100 €, lemodèle fait régulièrement l’objet de ventes séparées dont le prix se situe à

PrestationsMontant

contractuel (1)

Juste valeur

Juste valeur %

Juste valeur

relative(2)

Montant réalloué (1 – 2)

Intégration 17,500 17,500 30 % 16,587 – 0,913

Externalisation 37,000 40,000 70 % 37,913 0,913

Total 54,500 57,500 100 % 54,500 0,000

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122 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

120 € ; le tarif d’abonnement n’est pas différencié selon que le client a ou nonobtenu un téléphone à 1 €. Les paiements effectués par le client ne sont pasrestituables ; l’expérience et la situation financière de MOBICELL donnenttoutes raisons de penser que la société remplira ses obligations contractuelles surl’horizon de l’abonnement.

Les deux seuls livrables à considérer sont la vente du téléphone portable et lafourniture de temps de communication. La répartition de la rémunérationcontractuelle en proportion des justes valeurs relatives conduirait à associer unproduit de 112,22 au téléphone et de 897,78 à l’abonnement. Toutefois, le produitassocié au téléphone est plafonné au montant reçu qui n’est pas dépendant de lafourniture ultérieure de temps de communication, donc à 50 €. La différence de112,22 – 50,00, soit 62,22, est réallouée à l’abonnement.

(1) 960 = 24 × 40

Illustration

Extrait du rapport annuel du groupe France Telecom pour l’exercice 2008 (notesur les principales méthodes comptables) :

« De nombreuses offres de services proposées sur les marchés principaux deFrance Telecom comportent deux éléments : un équipement (par exemple unterminal mobile) et un service (par exemple un forfait de communications).

Pour toute vente d’offres à produits ou services multiples, le Groupe analysel’ensemble des éléments de l’offre afin de déterminer s’ils doivent être compta-bilisés séparément.

Un élément livré (produit vendu ou prestation rendue) est comptabilisé séparé-ment

• s’il a une valeur individuelle pour le client et

• s’il y a une indication objective et fiable de juste valeur de l’élément à livrer.Le montant total fixe ou déterminable du contrat est alloué en fonction de lajuste valeur relative de chacun des éléments. Toutefois, lorsqu’un montantalloué à un élément livré est conditionnel à la livraison d’éléments complé-mentaires ou répondant à des conditions de performance spécifiques, lemontant alloué à cet élément est limité au montant non conditionnel.

PrestationsMontant

contractuel (1)

Juste valeur

Juste valeur %

Juste valeur

relative(2)

Allocation après

plafonnement

Téléphone 1,00 120,00 11,11 % 112,22 50,00

Connexion 49,00 n/a n/a – –

Abonnement (1) 960,00 960,00 88,89 % 897,78 960,00

Total 1 010,00 1 080,00 100,00 % 1 010,00 1 010,00

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Tel est le cas des ventes d’offres liées comprenant un terminal et une prestationde service de télécommunications. Il est alors considéré que le terminal a unevaleur individuelle pour le client et qu’il y a une indication objective et fiable dela juste valeur de la prestation de service à rendre. Comme le montant attribuableau terminal excède généralement le montant à recevoir du client à la date delivraison du terminal, le revenu reconnu au titre de la vente du terminal est géné-ralement limité au montant contractuel non conditionné à la réalisation de laprestation de service, c’est-à-dire au montant payé par le client pour le terminal.

Pour les offres commerciales pour lesquelles des éléments séparables ne peuventêtre identifiés, le chiffre d’affaires relatif à l’offre est reconnu dans sa globalitésur la durée du contrat. Ainsi, la connexion au service, qui constitue le principalcas d’application de cette méthode, ne constitue pas un élément séparable del’offre d’abonnement et de communication elle-même. En conséquence, les reve-nus associés à la première connexion au service sont étalés sur la durée moyennede la relation contractuelle attendue. »

CLÉS POUR UNE MISE EN ŒUVRE RÉUSSIE

La mise en œuvre du suivi comptable des contrats simples et des contrats deconstruction est, sous certains aspects, plus aisée que celle des contrats àéléments multiples. En effet comme vous avez pu le constater à la lecture deschapitres 2 et 4, nous disposons pour ces différents contrats de normes IFRS.Il en va différemment pour les contrats à éléments multiples car ceux-ci nefont pas l’objet d’une norme en tant que telle, mais seulement de quelqueslignes dans des textes existants (IAS 11 et 18). De ce fait, il est plus difficilede mettre en place une procédure systématique.

Les entreprises qui fabriquent des produits spécifiques à la demandedu client sont concernées par la norme IAS 11, « Contrats de construction ».Pour celles-ci, la première étape va donc consister à savoir si l’on est enprésence d’un contrat de construction ou d’un contrat simple. Le contrat deconstruction consiste à fabriquer une immobilisation pour un client, avec undegré élevé d’interdépendance technique des éléments du contrat. Si lecontrat est un contrat de construction, alors tous les contrats qui y sont ratta-chés ainsi que les prestations de services associées doivent être englobés dansle contrat de construction. On traitera séparément les contrats conclus avec lemême client, mais qui ne concourent pas à la construction.

Ensuite l’opération consiste à regarder comment les contrats clients sontrédigés et à se poser les questions suivantes :

– y a-t-il des contrats englobant une combinaison de services ou une combi-naison de services et de matériels ?

– en règle générale quels sont les éléments de montant significatif ?

5

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124 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

– y a-t-il des obligations futures contractées, et sont-elles d’un montantsignificatif ?

Un contrat qui génère une obligation future est susceptible d’être uncontrat à éléments multiples. La procédure interne attirera en particulierl’attention sur les dangers des remises futures. Si celles-ci font partie de lapolitique commerciale de l’entreprise, elles seront encadrées de façon à bienmesurer leur impact. Si nécessaire, la procédure interne exigera l’accordpréalable formel de la direction commerciale pour accorder un engagementsur une remise future. Par exemple une telle promesse accordée à un clientpourrait contraindre une entreprise de progiciel à développer une fonctionna-lité qu’elle avait envisagé dans son produit futur et qui se révèle pluscomplexe que prévu. Ainsi tout engagement pour une remise future supé-rieure à un seuil de signification à définir dans la procédure devra être validépar la direction commerciale et communiquée à la finance.

On sera tout aussi vigilant concernant les ventes d’un produit non encoreen catalogue.

Tout contrat qui génère une obligation future de livraison de bien ou deservices ou un droit à utiliser une licence ou une immobilisation est uncontrat à éléments multiples en puissance.

En conclusion, pour identifier les contrats à éléments multiples, on penseraprincipalement aux contrats comprenant les éléments suivants.

– vente avec remise future ;

– vente avec accord de retour futur ;

– vente de logiciels et matériel ;

– vente de logiciels ou matériel et maintenance ;

– vente de logiciel ou matériel et installation ;

– location de matériel et services.

Dans l’affirmative, on se demandera si l’élément en question est significatif.

Nous avons vu précédemment que pour comptabiliser séparément unélément il faut que les trois critères suivants soient simultanément remplis :

– l’article livré a une valeur intrinsèque pour le client,

– la juste valeur des éléments non livrés est mesurable,

– le client a le contrôle de l’élément livré, et il est plus que probable qu’il leconservera.

Il est donc important d’inventorier les articles qui ont un prix de marché etune valeur intrinsèque pour le client.

De plus, en travaillant avec les contrôleurs de gestion des divisions, onrecensera les types de contrats susceptibles de comprendre les trois critères

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ci-dessus simultanément remplis, systématiquement ou non : en effet unesegmentation des contrats remplissant toujours ou jamais les critères serafacile à gérer. En revanche, la gestion de contrats pouvant souvent lescirconstances remplir ou non ces conditions justifiera la mise en œuvre d’uneprocédure interne qui listera les points ci-dessus, et s’il le faut exigera que lescontrôleurs vérifient et documentent formellement les contrôles à effectuer.En fonction de l’entreprise, il peut être judicieux d’établir une procéduregénérale, et de la compléter par des paragraphes ou des annexes spécifiques àcertaines activités ou à certains départements du groupe.

Une analyse détaillée des procédures de reconnaissance du revenu desentreprises nous amène souvent à trouver des divergences entre la procédureécrite et la pratique sur le terrain. Il s’avère que les procédures groupe sontsouvent rédigées par des services éloignés du terrain sans tenir compte descirconstances spécifiques pratiques et sont en conséquence difficiles àtraduire comptablement. Cela provient de la difficulté pour un contrôleur degestion central de donner des règles applicables à toutes les activités d‘ungroupe. Aussi, conseillons-nous fortement à ce dernier de travailler avecchacun des contrôleurs de gestion des branches d’activité pour déterminer lesprincipaux cas de contrats à éléments multiples rencontrés dans la division etd’en établir une liste qui sera annexée à une procédure interne. À moins quel’entreprise ne soit spécialisée dans une niche d’activité, cette procéduredevra rester assez générique et contiendra en annexe pour chacune des divi-sions les principaux cas de contrats à éléments multiples et expliqueracomment les traiter.

Les procédures de reconnaissance du revenu ne doivent pas apparaîtrecomme un défi pour les opérationnels. L’expérience montre que des procédu-res ne sont pas suffisamment détaillées, et sont difficiles à mettre en pratiqueaussi bien pour les comptables que pour ceux en charge de traduire les règlesde gestion dans les systèmes d’information. Les procédures manquentparfois d’une vision concrète. Elles sont écrites dans le respect des règles del’art, mais doivent aussi tenir compte de la réalité du terrain. Cette dernièresera acquise par une analyse détaillée de cas concrets complexes effectuéeconjointement avec les contrôleurs de gestion des activités.

Les objectifs de la procédure doivent être de faciliter la gestion desimpacts, de s’assurer de la qualité de la prise en compte, de faire remonterl’information au niveau adéquat en fonction de son seuil de signification surles résultats de l’entreprise. La procédure doit donc permettre de :

– bien cadrer les impacts et s’assurer que les équipes de vente, les contrô-leurs de gestion et l’administration des ventes auront toutes les informa-tions nécessaires, pour les gérer avec la méthode appropriée,

– pour les impacts les plus significatifs s’assurer que le contrôle de gestioncentral, et si nécessaire la direction juridique auront l’information,

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126 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

– prendre en compte les éléments nécessaires au calcul par les équipes deressources humaines des éléments variables de rémunération des commer-ciaux.

– à plus long terme que la direction générale soit informée et puisse prendreles mesures appropriées et, quand le besoin s’en fait sentir, réviser laprocédure.

Quand l’entreprise valorise séparément, dans ses contrats clients, les arti-cles à leur juste valeur, ou quand l’article n’a pas de valeur autonome pour leclient, comme dans notre exemple ci-dessus des frais d’accès au service desopérateurs de télécommunications (cf. supra, titre 4), il n’y a pas lieu deprendre de mesure supplémentaire. La seule valorisation séparée de l’articlen’est pas suffisante, il faut s’assurer que le prix annoncé au client n’a pas étéfixé à titre purement commercial, et qu’il correspond aussi à la juste valeur(cf. infra, titre 5).

Les outils comptables et de reporting seront adaptés en conséquence. Avantde mettre à jour les systèmes, on fera l’inventaire des outils utilisés par lescontrôleurs de gestion sur le terrain. S’ils utilisent un tableur, l’une despremières étapes sera d’inventorier les feuilles de calcul utilisées, et des’assurer que le système d’information apportera au moins l’automatisationdes tâches gérées sur tableur. On s’assurera ainsi préalablement de l’appro-priation de l’outil par les utilisateurs.

La documentation à la disposition des utilisateurs des systèmes d’informa-tions financiers doit décrire les différents types de contrats en lien avec lesprocédures. L’utilisateur doit trouver une relation directe entre la procédurefinancière et le guide utilisateur du système financier. S’il a été décidé, pourdes raisons de coûts, de développer dans les systèmes d’information les diffé-rents types de contrats en plusieurs étapes, et que certaines fonctionnalités nesont pas encore disponibles, le guide utilisateur le précisera et décrira la solu-tion alternative à utiliser, que ce soit un tableur ou une feuille de papier.

La sélection d’une solution informatique est le résultat de multiples varia-bles, il ne faut pas perdre de vue que la plupart finiront par changer. Quelleque soit la solution choisie, elle doit être configurée pour évoluer, par exem-ple en mettant à profit les leçons apprises des autres entreprises (notammentdans les clubs utilisateurs) qui ont déjà automatisé la comptabilité de lareconnaissance du revenu.

L’objectif du processus d’automatisation est de mettre en œuvre les procé-dures dans les systèmes d’information et non pas de les définir. Il est indis-pensable que les procédures financières et de reporting soient en cohérenceavec les procédures comptables.

Aujourd’hui, le logiciel et les services entrent de façon de plus en plusimportante dans la composition du matériel. Il en est ainsi des téléphones

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mobiles, des réseaux, mais aussi des appareils d’imagerie médicale toutcomme de nombreux autres. De ce fait, de plus en plus d’entreprises serontdans l’avenir confrontées aux problématiques de la comptabilisation descontrats à éléments multiples.

La société Auto Location Divers loue des véhicules aux entreprises pour une longuedurée. Cette société propose aussi des services associés. Le contrat proposé auxclients comprend la location d’un véhicule pendant une durée de 3 à 5 ans.Les contrats que cette société vend aux entreprises peuvent inclure en plus du contratde location de véhicules lui-même les contrats suivants :– un contrat d’assurance du véhicule ;– un contrat d’entretien et de maintenance du véhicule ;– un contrat d’entretien des pneumatiques ;– un contrat d’assistance et de véhicule de remplacement ;– un contrat de carte accréditive d’achat d’essence, et un contrat de badge

autoroutier ;– un contrat de gestion de la flotte de véhicule.L’accord définitif est matérialisé par la signature du contrat. Celui-ci peut être annulépar le client dans les conditions suivantes :– jusqu’à la date de réception du véhicule, sans pénalité ;– à compter de la livraison, et sans motif, avec une indemnité de trois mois de loyer ;– au-delà de la première année, en cas de départ du salarié, le client peut annuler

le contrat moyennant un préavis de deux mois, sans pénalité. Cette clause permetau client de ne pas gérer le risque sur le véhicule et donc de ne pas l’immobiliser.

Le client doit entretenir le véhicule en bon père de famille, il est de sa responsabilitéde le déposer dans un garage agréé en temps utile pour les entretiens prévus par leconstructeur pendant et après la période de garantie. De même, il doit s’assurer quele véhicule est en bon état, le faire réparer par un garage agréé quand nécessaire etdéclarer les sinistres à l’assureur (que le véhicule soit assuré dans le cadre du contratdu loueur ou pas).

Type de contrats

Le contrat comprend jusqu’à six contrats annexes distincts, chacun étant indépen-dant.Le loyer mensuel est un montant fixe en fonction de la valeur du véhicule après remiseconstructeur, options incluses ; il varie aussi en fonction de la durée du contrat (36 à60 mois).1) L’assurance est un contrat tous risques vendu à un prix légèrement supérieur auprix du marché que le loueur peut justifier par le suivi des accidents qu’il effectue. Ilperçoit aussi une commission sur la vente et sur la gestion de la part de l’assureur carc’est le loueur qui gère les petits sinistres (hors corporel) et établit des statistiquespour le compte de l’assureur et pour le compte du locataire.

C A S P R A T I Q U E

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128 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

2) Le contrat d’entretien intéresse vivement les clients car il évite les aléas ; en lesouscrivant, le locataire s’assure de respecter son budget. Pour le vendeur, ce contratprésente peu de risques car, en répertoriant les pannes, il aura la possibilité de seretourner vers le constructeur en cas de fréquence anormale de pannes sur unepièce. Le client n’a pas les volumes suffisants avec un constructeur pour établir desstatistiques, ni l’information du nombre de pannes par modèle et pièces défectueuses.Isolé, il ne pourrait demander au constructeur de prendre en charge les pannes tropfréquentes. Les premières années, les coûts pour le loueur se limitent dans la plupartdes cas aux entretiens contractuels avec le constructeur et à la location d’un véhiculede remplacement. À partir de la fin de la troisième année, quelques pannes survien-nent, et leur nombre va croissant avec le nombre d’années du contrat. De ce fait, leloueur facture un prix fixe sur la durée du contrat, mais le prix de chaque mensualitéest croissant selon la durée du contrat (3, 4 ou 5 ans).3) Le contrat d’entretien des pneumatiques permet au client de changer ses pneustous les 50 000 km. Le client est en droit de les changer plus souvent, mais à ses frais.Ce contrat est facturé par Auto Location Divers pour le montant qu’il rembourse auxgarages agréés majoré de ses frais de gestion et de sa marge.4) Le contrat d’assistance et de véhicule de remplacement est un montant fixemensuel quel que soit le véhicule, car le véhicule de remplacement est un véhicule decatégorie standard. Son montant mensuel est de 12 euros pour 3 ans, 13 euros pour4 ans et 15 euros pour 5 ans.5) Le contrat de carte accréditive est offert. La gestion est faite par le pétrolier qui fidé-lise ainsi un client. De ce fait, la carte accréditive peut être offerte par le loueur qui enréalité n’offre pas d’autre prestation que le transfert de l’information par son systèmeinformatique. Le coût mensuel est estimé par le loueur à 1 euro par véhicule.6) Le contrat de gestion des véhicules est offert par Auto Location Divers qui peutainsi suivre sa flotte de véhicule. Pour chaque automobile, il va répertorier le nombrede km parcourus (relevé obligatoirement à chaque plein d’essence), la maintenance(les visites obligatoires et les visites de contrôle) et parfois les accidents. Ces informa-tions lui seront très utiles pour optimiser le prix de revente de ses véhicules. Sachantque le principal risque pour le loueur porte sur la revente du véhicule, et que le loueurgénère son profit, et à certaines périodes est en perte du fait de la baisse des prix dumarché de l’occasion, on comprend l’intérêt pour le loueur d’un suivi rigoureux desvéhicules.Cette gestion a un coût réel pour le loueur ; ce coût est fonction du nombre de véhicu-les par client. Dans notre exemple la valeur mensuelle est estimée à 10 euros parvéhicule.

Gestion des contrats

Le loueur définit un prix contractuel qui incite le client à prendre la totalité des contrats.Il ne correspond pas nécessairement au prix de marché. Mais chaque contrat a unevaleur autonome sur un marché existant et la juste valeur de chaque contrat peut êtredéterminée de manière fiable. Cela permet au loueur de déterminer pour chacun descontrats la juste valeur et ainsi le produit à allouer à chaque contrat.

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Prenons l’hypothèse que le client signe tous les contrats, et décrivons le compte derésultat prévisionnel de la location d’un véhicule dans les états financiers du loueur autitre de ce contrat.Le montant facturé pour la location du véhicule est inscrit dans les ventes de l’exercicepour son intégralité.L’entretien et la maintenance, tout comme le contrat d’assistance et de véhicule deremplacement qui va de pair, ont des mensualités qui vont croissant avec la durée ducontrat. En effet, durant les premiers mois, les pannes sont rares, et leur coût estremboursé par le constructeur. Les seuls frais à la charge du loueur sont ceux du véhi-cule de remplacement et la gestion des quelques appels d’assistance. Les coûtsassociés vont donc croissant avec les années, particulièrement la quatrième année.Le loueur va donc établir des statistiques et comptabiliser ses revenus en consé-quence.Il en va de même pour l’entretien des pneumatiques facturés mensuellement par leloueur, alors que le locataire a « droit » à changer de pneus dans un garage agréétous les deux ans. Une année sur deux, la charge se limite donc à la facturation faited’avance (qui génère des produits financiers pour le loueur, ou diminue ses chargesfinancières).Concernant le contrat d’assurance, le loueur a un rôle de courtier en assurances ; ilenregistre une commission d’apporteur d’affaires et de gestionnaire partiel du contrat.Le produit enregistré correspond à sa marge sur le montant hors taxes (qui sont supé-rieures à 30 % en assurance-automobile). Dans notre exemple, sa commission est dutiers de la prime hors taxes.

Les achats de services sont faibles la première année, principalement limités à lalocation de véhicules de remplacement. La seconde année, le client va changer lespneus. Quelques pannes commencent à survenir en fin de troisième année. Si le

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130 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

client a souscrit un contrat de quatre ans (notre exemple), la quatrième année, leloueur devra financer à la fois un changement de pneus ainsi que des pannes plusnombreuses, parfois associées à un véhicule de remplacement, d’autre fois auremboursement d’une nuit hôtel ou de taxis et de billets de train.Les salaires et charges représentent les salaires de l’assistance téléphonique, del’équipe en charge de la gestion des sinistres automobiles (assurance), de celle quisuive les statistiques de la flotte de véhicule, du commercial responsable de sonclient.L’amortissement du véhicule est tel que sa valeur nette comptable représente le prixque le loueur pense raisonnablement pouvoir vendre le véhicule à l’échéance ducontrat.

TEXTES DE RÉFÉRENCE

Comme rappelé en partie 2, dans les référentiels international et américain,les textes traitant des transactions à éléments multiples sont les suivants.

➤ Normes internationales

• IAS 11, « Contrats de construction », § 8 et 9.

• IAS 18, « Produits des activités ordinaires », § 13, exemples 11 et 19 del’annexe.

• IFRIC 15, « Accords de construction immobilière ».

➤ Référentiel US GAAP

• ASC 605-25, FASB Accounting Standards Codification Subtopic 605-25,Revenue Recognition : Multiple Element Arrangements.

• ASC 985-605, FASB Accounting Standards Codification Subtopic 985-605,Software : Revenue Recognition.

Dans leur version en vigueur au 1er janvier 2010, ces textes incorporent lesdeux interprétations adoptées en 2009 :

• ASU 2009-13, FASB Accounting Standards Update No. 2009-13, Multiple-Deliverable Revenue Arrangements – a consensus of the FASB EmergingIssues Task Force.

•ASU 2009-14, FASB Accounting Standards Update No. 2009-14, CertainRevenue Arrangements That Include Software Elements – a consensus of theFASB Emerging Issues Task Force.

Page 141: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

7 PROGRAMMES DE FIDÉLISATION DE LA CLIENTÈLE

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les avantages accordés aux clients tels que les bons cadeaux, miles des compagniesaériennes, km SNCF, ou autres services gratuits, sont de plus en plus répandus et se veu-lent un outil majeur de fidélisation de la clientèle (la reconnaissance d’un statut particuliervenant s’ajouter aux avantages financiers qui en découlent).L’interprétation IFRIC 13, d’application obligatoire pour les exercices ouverts à compter du1er juillet 2008, comble enfin un vide de la normalisation comptable internationale.Seuls sont dans le champ d’application de l’interprétation les avantages, bons, cadeaux etpoints accordés aux clients à l’occasion d’une vente payante :– aussi bien dans le cadre de programmes où les clients acquièrent puis consomment les

bons cadeaux chez le même prestataire (par exemple, les miles Air France accordésdirectement par Air France-KLM) ;

– que dans le cadre de programmes où une tierce partie intervient (par exemple, lesrèglements effectués avec la carte American Express auprès de commerçantspartenaires, et qui, donnent ensuite droit à des miles gratuits Air France).

Une vente incluant une action de fidélisation de la clientèle s’analyse comme une transac-tion à éléments multiples ; la partie correspondant au bien livré ou au service consomméimmédiatement est reconnue comme un revenu immédiat ; l’autre partie, ouvrant droit à uneconsommation – gratuite ou remisée – ultérieure, est différée.Le produit différé, correspondant au cadeau, réduction ou autre avantage accordé, est éva-lué sur la base de la juste valeur de la récompense offerte.

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132 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

DISPOSITIONS DE L’INTERPRÉTATION IFRIC 13

1.1 Le contexte

Remboursement de 5 % du total facturé sur présentation de la carte de fidélitéde la librairie revêtue de 10 tampons, minutes de communication gratuitespour l’abonné au service mobile de l’opérateur de télécommunication,gratuité au bar, bons d’achat, cadeaux dans le catalogue, chèques-cadeauxmulti-enseignes pour le détenteur de la carte de membre du casino selonl’importance de ses mises en jeu, les formules par lesquelles les entreprisesde toute nature, seules ou en partenariat, incitent leurs clients à augmenterleur fréquence d’achat, leur utilisation du service et leur panier d’achat sontinnombrables. Dans la suite de ce chapitre, nous utiliserons le terme « pointscadeaux » pour désigner de manière générale le droit à des avantagesconsenti au client et « cadeau » pour désigner cet avantage.

Sans être innombrables, les méthodes de comptabilisation des pointscadeaux accordés aux clients fidèles étaient diverses avant l’adoptiond’IFRIC 13, « Programmes de fidélisation de la clientèle ». Certaines entre-prises considéraient qu’il s’agissait d’une dépense de marketing et en provi-sionnaient le coût, coût complet pour les unes, coût marginal pour les autres.D’autres entreprises considéraient que les points cadeaux devaient êtreanalysés comme une vente future puisqu’ils permettent aux clients d’obtenirà une date ultérieure des biens ou des services gratuits ou à prix réduit.Celles-ci différaient un produit, produit dont le montant était évalué selon desméthodologies non uniformisées. L’objectif de l’interprétation IFRIC 13était de mettre fin à cette diversité.

1.2 Le champ d’application : les points cadeaux accordés à l’occasion de ventes

Les modalités de fonctionnement des programmes de fidélisation peuventêtre très variées. Dans certains cas, les clients sont tenus d’accumuler unnombre ou une valeur minimum de points cadeaux avant d’être en mesure deles échanger. Dans d’autres cas, les points peuvent être liés à des achats sépa-rés ou à des groupes d’achats, ou bien encore à une pratique d’achats régu-liers sur une période donnée.

L’entreprise peut exploiter elle-même le programme de fidélisation ou bienparticiper à un programme exploité par un tiers. Les cadeaux offerts peuventêtre des biens ou des services fournis par l’entité elle-même et/ou le droitd’obtenir des biens ou des services auprès de tiers.

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Toutes ces actions de fidélisation de la clientèle entrent dans le champd’application de l’interprétation IFRIC 13 lorsque les deux conditionssuivantes sont réunies :

– l’entreprise accorde des points cadeaux à ses clients à l’occasion d’unevente de bien ou d’une prestation de service payante ;

– les clients, sous conditions de remplir les autres conditions éventuellementprévues par le programme, ont la possibilité d’utiliser ultérieurement leurspoints cadeaux pour obtenir des produits ou services gratuits ou à prixréduit.

A contrario, l’interprétation ne s’applique pas aux coupons distribués avantque la vente n’ait lieu, par exemple, ceux distribués à l’entrée du magasin ousur la voie publique.

1.3 Le principe : les points cadeaux donnent naissance à une vente future

Les points cadeaux accordés lors d’une vente payante représentent des droitsfuturs au profit du client. Ils doivent être distingués des frais de marketing,car ils sont spécifiquement consentis à un client donné lors d’une transactioncommerciale. Dès lors, l’octroi de points cadeaux s’analyse en substancecomme donnant naissance à une vente à éléments multiples, les droits àcadeaux futurs étant identifiables séparément de la vente principale.

Quand le prix de vente d’un produit inclut un montant identifiable pour unservice futur, ce montant est différé dans le temps et reconnu en tant querevenu de la période durant lequel le service est rendu (IAS 18 § 13).L’IFRIC conclut donc (IFRIC 13, BC § 7b) : « Du fait que les cadeaux nesont pas délivrés au client en même temps que les autres biens ou services, ilconvient de séparer la vente initiale en plusieurs composants et d’appliquerdes critères de comptabilisation (du revenu) séparément à chaque composantpour refléter la substance de la transaction. »

1.4 La vente future se voit affecter une partie du prix payé par le client

Puisque la transaction comportant l’octroi de points cadeaux s’analysecomme une transaction à éléments multiples, le prix convenu pour la vente debiens ou de services (celle qui donne naissance aux points cadeaux) est àallouer entre les biens ou services objet de la vente principale et les pointscadeaux à utiliser dans le futur.

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134 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Exemple

Un opérateur de télécommunication met en place un programme de fidélisationpar lequel il accorde des points à ses clients lorsqu’ils souscrivent un abonnementet consomment du temps de communication. Les points peuvent être utiliséspour obtenir une remise sur le prix d’un téléphone portable lors du renouvelle-ment de l’abonnement. Lorsqu’ils ont gagné 100 points, les clients ont droit àune remise de 50 € sur le prix d’achat d’un nouveau téléphone portable.

Un client prend un abonnement de 12 mois pour lequel il paie 20 € par mois. Encontrepartie, ce client acquiert 100 points. Il est probable qu’il les utilisera.

La rémunération du contrat (240 €) est ventilée entre 50 €, qui représentent lavaleur des points cadeaux, et 190 €, la rémunération du temps de communica-tion. Quand le client utilise ses points cadeaux, le montant différé, soit 50 €, esttransféré au compte de résultat et vient alimenter le chiffre d’affaires de lapériode.

1.5 Les points cadeaux sont évalués par référence à leur juste valeur

Selon IFRIC 13 § 6 ; la contrepartie affectée aux points cadeaux est détermi-née par référence à leur juste valeur, c’est-à-dire au montant auquel ils pour-raient être vendus séparément. L’entreprise est à même d’observer cette justevaleur lorsqu’elle réalise régulièrement des ventes de points cadeaux1 pourdes volumes significatifs.

Hors ce cas, la juste valeur des points cadeaux n’est pas directement obser-vable. L’entreprise se réfère alors à IFRIC 13 § AG1 « Si la juste valeur nepeut être observée directement, elle doit être estimée » et IFRIC 13 AG § 2« Une entité peut estimer la juste valeur des points cadeaux par référence à lajuste valeur des cadeaux pour lesquels ils peuvent être échangés ». Autre-ment dit, le produit alloué aux bons cadeaux est évalué au montant que leclient aurait payé s’il avait acheté le bien ou le service séparément et qu’iléconomise donc en utilisant ses points cadeaux.

La juste valeur des points cadeaux peut être réduite de manière à prendre encompte :

– la juste valeur des cadeaux qui pourraient être offerts aux clients n’ayantpas acquis de points cadeaux lors d’une vente initiale (c’est-à-dire quin’ont pas été obligés de faire un premier achat pour acquérir des pointscadeaux) ; et

– la proportion de points cadeaux dont l’entité estime qu’ils ne seront paséchangés (cette proportion doit être déterminée par application de

1. Soit à ses clients soit à des tiers (qui à ce moment-là les accorderont à leurs propres clients).

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méthodes et en utilisant des données qui confèrent un caractère fiable aurésultat de l’estimation).

Si les clients peuvent choisir leur cadeau parmi un catalogue d’articles, lajuste valeur des points cadeaux doit refléter la juste valeur de la gamme descadeaux disponibles, pondérée par la fréquence à laquelle l’on s’attend à ceque chaque cadeau soit choisi.

Dans certains cas, d’autres techniques d’estimation peuvent être disponi-bles. Par exemple, si un tiers fournit les cadeaux et si l’entité paie à ce tierschaque point cadeau fourni, elle peut estimer la juste valeur des pointscadeaux par référence au montant payé au tiers, en y ajoutant une margebénéficiaire raisonnable (IFRIC 13 § AG3).

L’IFRIC n’a pas entendu être plus prescriptive que l’IASB ne l’avait étédans la norme IAS 18, de sorte que l’allocation du prix aux bons cadeauxpeut être effectuée, soit sur la base de leur juste valeur, soit sur la base de leurjuste valeur relative.

Sur tous ces aspects, il s’agit de choix de méthodes comptables qui deman-dent l’exercice du jugement. Une fois choisie, la méthode doit être appliquéede manière cohérente et permanente.

1.6 Le produit alloué aux points cadeaux est différé jusqu’à leur utilisation ou expiration

1.6.1 Principe

La comptabilisation, en chiffre d’affaires, de la partie du prix affectée auxpoints cadeaux est différée jusqu’à ce que les points cadeaux soient utilisésou, ayant atteint leur date limite de validité, soient périmés.

À son bilan, l’entreprise en présente le montant en tant que produit différé(et non comme une provision). Par exemple, Air France-KLM inscrit lavaleur du stock de miles utilisable dans un compte de passif courantdénommé « titres de transport non utilisés ».

Le montant du produit différé doit être rapporté au compte de résultat(autrement dit, constaté en chiffre d’affaires) lorsque les points cadeaux sontutilisés ou viennent à échéance. On comprend donc la tendance actuelle decertaines entreprises, par exemple les compagnies aériennes, de limiter dansle temps la durée de validité des points cadeaux pour faciliter l’évaluation desprogrammes et surtout pour récupérer au plus vite le revenu différé.

Page 146: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

136 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Illustration chiffrée et comparaison avec l’ancienne méthode

Le magasin A et le magasin B vendent des produits strictement équivalents. Lemagasin A vend ordinairement ses articles au prix unitaire de 100 euros alors queson concurrent les vend au prix unitaire de 90 euros. Pour rendre son offre plusattractive, le magasin A décide de mettre en œuvre un programme de fidélitéclientèle. À tout acheteur de ses produits, il donne un coupon de réduction de20 euros sur des achats futurs. Le prix net de cadeaux de l’achat futur sera ainside 80 euros, d’où un avantage concurrentiel de 10 euros par rapport aux produitsdu magasin B.

Ces 10 euros constituent la juste valeur unitaire du point cadeau donné au client.La valeur globale des points à inscrire au passif du bilan tient compte du taux denon-présentation des coupons. Par hypothèse, un tiers des points cadeaux neseront pas utilisés.

Dans la semaine S, 15 clients du magasin A achètent le produit au prix fort de100 euros. Il est donc estimé que 10 clients (10 = 15 × 2/3) reviendront en S+1pour présenter leur bon cadeaux. Le revenu constaté par période apparaîtra donccomme suit :

ÉVOLUTION DU REVENU CONSTATÉ DANS LE TEMPS

* Revenu = Facturation HT – Variation revenu différé.

On voit ici le décalage dans le chiffre d’affaires comptabilisé selon l’interpréta-tion IFRIC 13 et celui que le magasin A aurait enregistré dans le système anté-rieur. Un montant de 100 euros est reporté de la semaine S à la semaine S+1 dansl’approche selon IFRIC 13. L’observation peut être étendue au calendrier deconstatation de la marge brute et du résultat opérationnel.

Semaine S Semaine S+1

CumulQté Mt

unit. Total Qté Mt unit. Total

IFRIC 13

Facturation HT 15 100 1 500 10 80 800 2 300

Revenu différé 10 10 100 – – –

– ∆ rev. différé – 100 + 100 –

Revenu * 1 400 900 2 300

Ancienne méthode

Facturation HT 15 100 1 500 10 80 800 2 300

Revenu 1 500 800 2 300

Provision 10 20 200 – – 0 –

Dot/rep prov. – 200 200 –

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1.6.2 Quelques impacts observés lors du passage à une méthode de différé du chiffre d’affaires

L’impact du passage d’une méthode de provisionnement des coûts à uneméthode de différé du chiffre d’affaires peut parfois être spectaculaire,notamment lorsque les coûts provisionnés étaient des coûts marginaux.Diverses compagnies aériennes se sont trouvées dans ce cas.

Illustration

• Les trois compagnies ci-dessous chiffraient précédemment les miles gratuits àleur coût marginal, par construction très faible car pratiquement limité au coût del’émission des billets, des consommations du salon d’accueil, du nettoyage dusiège et du plateau-repas. Elles ont adopté la méthode aujourd’hui prescrite parIFRIC 13.

Impact du changement de comptabilisation

• Autre exemple : le groupe Air France-KLM qui a appliqué l’interprétationIFRIC 13 pour la première fois dans les états financiers de l’exercice 2008-2009.S’agissant d’un changement de méthode, d’application rétrospective, l’écartentre l’évaluation des miles prime selon IFRIC 13 et leur évaluation selonl’ancienne méthode, est venu en ajustement des capitaux propres à l’ouverture del’exercice 2007/2008.

Au 1er avril 2007, Air France-KLM comptabilise à son passif – dans le poste« billets émis non utilisés » – un revenu différé de 915 M€ (environ 15 jours dechiffre d’affaires). En contrepartie, le groupe constate une diminution de sespassifs d’impôt de 268 M€ et une diminution de ses capitaux propres de647 M€.

1.7 Synthèse sur le traitement comptable de différentes actions promotionnelles

Les équipes marketing-vente ont à leur disposition une variété de méthodespour promouvoir les produits de leur entreprise, l’attribution de points

Provision fondée sur le coût marginal

(M$)

Différé de revenu (M$)

Ajustement des fonds propres

(M$)

United Airlines 923 2 400 – 1 477

Northwest Airlines 412 1 500 – 1 088

Delta Airlines 896 2 600 – 1 704

Page 148: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

138 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

cadeaux n’étant que l’une d’entre elles. Le tableau ci-dessous indique, pourchacun des principaux outils existant, le traitement comptable approprié :réduction du chiffre d’affaires ou dépense1.

SYNTHÈSE SUR LE TRAITEMENT COMPTABLE DES ACTIONS PROMOTIONNELLES SELON LEUR CIBLE ET LEUR NATURE

* ACD : action commerciale de développement.

1. C’est-à-dire le coût du produit vendu et/ou les frais engagés spécifiquement pour la promo-tion (coûts supplémentaires de packaging, frais d’agence, etc.).

Cible But Support Type Traitement comptable

Consommateurs Acquérir de nouveaux acheteurs

emballage offre d’essai dépense de marketing

emballage offre croisée dépense de marketing

Augmenter les quantités achetées

produit-girafe produit en plus dépense de marketing

emballage vente à lot dépense de marketing

Augmenter le nombre d’achats

emballage échantillon dépense de marketing

emballage vente avec prime

dépense de marketing

emballage réduction de prix on-pack

diminution du revenu et dépense (surcoût emballage)

emballage réduction de prix in-pack

diminution du revenu

couponing réduction de prix

diminution du revenu

prescription dépenses

carte de fidélité

points gratuits diminution du revenu

Distributeurs Acquérir le référence-ment local

référencement diminution du revenu

Acquérir le référence-ment régional

référencement diminution du revenu

Acquérir le référence-ment national

référencement diminution du revenu

Acquérir le référence-ment supranational

référencement diminution du revenu

Acquérir un linéaire ACD* diminution du revenu

Mettre en avant (tête de gondole)

PLV ACD* diminution du revenu

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PRINCIPALES DIVERGENCES AVEC LES RÉFÉRENTIELS FRANÇAIS ET US GAAP

2.1 Principales différences avec le référentiel français

Le traitement comptable des droits à réduction ou avantages en nature accor-dés par les entreprises à leurs clients et liés à une vente initiale est prévu parl’avis n˚ 2004-E du Comité d’urgence du CNC, adopté en date du 13 octobre2004. Ce traitement s’applique à des droits ou avantages accordés à l’occa-sion d’une vente initiale et utilisables en cas de vente ultérieure.

Selon ce texte, l’engagement de l’entreprise à l’égard de sa clientèle donnelieu à la comptabilisation d’une provision, à la fois dans les comptes indivi-duels et dans les comptes consolidés. L’obligation de l’entreprise à l’égard desa clientèle naissant dès la vente initiale, la provision doit être comptabiliséeà cette date. On voit donc que ces dispositions épargnent aux entreprisesfrançaises la difficulté d’avoir à estimer la juste valeur des avantages accor-dés.

Toutefois, les entreprises qui, avant la parution de l’avis CU-CNC n˚2004-E,comptabilisaient déjà ces transactions dès la vente initiale sous forme deproduits constatés d’avance doivent maintenir leur traitement antérieur si lemontant du différé est au moins équivalent à celui de la provision.

2.2 Principales différences avec le référentiel US GAAP

Le comité d’interprétation du normalisateur américain, l’EITF, avait mis laquestion du traitement comptable des points cadeaux à son programme detravail en 2000 mais n’a pas conclu sur le sujet. Par conséquent, les sociétésaméricaines peuvent, soit provisionner les coûts, soit différer les produits liésà leurs actions de fidélisation. Dans le deuxième cas, elles doivent appliquerles dispositions précises de l’interprétation EITF 00-21, qui n’ont pas d’équi-valent dans le référentiel IFRS. On notera par ailleurs une divergence entreles dispositions d’IFRIC 13 et celles du référentiel américain dans la prise encompte du taux probable d’utilisation des points cadeaux.

2

Page 150: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

140 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

DIFFICULTÉS D’APPLICATION ET CLÉS POUR UNE MISE EN ŒUVRE RÉUSSIE

3.1 Évaluation de la juste valeur des points cadeaux

La détermination de la juste valeur des points cadeaux ne pose pas deproblème particulier lorsqu’ils portent sur une quantité d’unités monétairesdéterminée : réduction de 20 € sur le prochain achat ; remise de 5 % sur lemontant des achats cumulés. Elle ne soulève pas non plus de difficulté pourles biens et services qui peuvent être évalués par référence à un catalogueet/ou dont le prix est stable dans le temps (flacon de parfum ou rouge àlèvres) lorsque le cadeau est imposé par l’entreprise (une bougie parfumée au10e achat).

L’évaluation devient plus complexe dans d’autres situations. Il en va ainsilorsque la juste valeur de la prestation n’est pas directement comparable àune offre standard, lorsque le client a le choix dans un catalogue de cadeauxde nature et valeur diverses, lorsque le prix des cadeaux fluctue dans letemps.

3.1.1 Lorsque la prestation n’est pas directement comparable à une offre standard

Lorsque la prestation n’est pas directement comparable à une offre standard,il convient de procéder à des ajustements par rapport au tarif catalogue de laréférence utilisée.

Différents facteurs sont à prendre en compte ; le caractère exceptionnel etinhabituel du cadeau offert en est un. Ainsi, un séjour dans l’Antarctique avecconférences par une personnalité internationale ou encore un week-end aupôle Nord dans un hôtel de glace n’ont a priori pas de comparable direct. Onpeut légitimement considérer que l’un et autre ont une juste valeur bien supé-rieure à un cadeau classique comme « Noël aux Seychelles », offert réguliè-rement.

À l’inverse, si le cadeau promis à l’occasion d’une vente payante est enconcurrence frontale avec des gratuités, réductions…, non liées à un achat, sajuste valeur sera fortement réduite. À la limite, elle pourra être proche dezéro, puisque le client peut obtenir l’article cadeau sans débours initial.

3.1.2 Lorsque le client a un choix dans un ou des catalogues

Si les clients peuvent choisir leur cadeau parmi un catalogue d’articles, lajuste valeur des points cadeaux doit refléter la juste valeur individuelle descadeaux disponibles, pondérée par la fréquence à laquelle l’on s’attend à ceque chaque cadeau soit choisi. Ainsi, pour la SNCF, administrateur et partici-pant à différents programmes de fidélité, les points attribués sont évalués sur

3

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la base d’une juste valeur moyenne du point. Celle-ci est calculée en tenantcompte de la juste valeur des divers avantages accordés ou « primes »(primes fer, primes partenaires), et du poids relatif de chaque prime.

Exemple

Une chaîne de distribution met en place un programme de fidélisation danslequel ses clients acquièrent des points en fonction de leurs achats. Les pointscadeaux peuvent être utilisés pour obtenir gratuitement :

• des produits vendus par la chaîne : chaque point cadeau étant repris pour0,01 euro. Le prix des articles figurant dans le catalogue des cadeaux peutaller de quelques euros à plus de mille euros ; ou

• des billets de théâtre et des entrées dans les musées, chaque point cadeau étantrepris pour 0,02 euros.

Ayant analysé les historiques sur 12 mois, la chaîne fait les constats suivants :

• 30 % des points cadeaux ont été utilisés pour acquérir des billets de théâtre oud’entrée dans les musées ; les autres 70 % ont été utilisés pour acheter des arti-cles en magasin ;

• 15 % des points cadeaux sont détenus par un petit nombre de clients. Parmieux, certains n’ont encore utilisé aucun de leurs points mais on s’attend à cequ’ils s’en servent pour acquérir des articles de prix élevé. En conclusion, lesstatistiques historiques ne sont pas représentatives du comportement anticipéde ces clients ;

• 40 % des points cadeaux ont été accordés à des clients qui les accumulent, lesutilisent rapidement et font en sorte d’avoir toujours une réserve de 500 pointscadeaux. Les statistiques historiques permettent de modéliser correctementl’utilisation des points par cette catégorie de clients, notamment en matière dechoix d’articles.

Tous ces éléments pris en compte et toute modélisation effectuée, le distributeurestime que la juste valeur unitaire du point cadeau est de 0,012 euros.

3.1.3 Lorsque le prix du cadeau fluctue

Une autre difficulté apparaît lorsqu’il s’agit d’estimer la juste valeur de servi-ces comme le transport ou l’hôtellerie, dont le prix peut varier d’un jour àl’autre en fonction de la capacité disponible que le prestataire cherche à voirutiliser. Il en va notamment ainsi pour le prix du kilomètre-passager d’unecompagnie aérienne qui, grâce au yield management, optimise le taux deremplissage de ses avions ainsi que le chiffre d’affaires moyen par siège. Cesopérateurs doivent développer des approches qui leur sont propres pour esti-mer la juste valeur du bien fourni.

Exemple

Les sous-groupes Air France et KLM disposent d’un programme commun defidélisation « Flying Blue » permettant aux adhérents d’acquérir des miles au furet à mesure de leurs voyages sur des vols Air France ou KLM et d’autres compa-

Page 152: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

142 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

gnies partenaires. Ces miles donnent accès à divers avantages dont des voyagesgratuits sur les vols des deux compagnies respectives.

La grille tarifaire d’un avion est divisée en 35 classes, les payantes et celles réser-vées aux miles prime du programme Flying Blue. Chaque classe se voit attribuerun nombre de places déterminé, qui va varier jusqu’au jour de départ du vol enfonction du délai par rapport à la date de départ et du taux d’occupation par lespassagers payants, enregistré à une certaine date pour une classe tarifaire donnée.

La juste valeur des miles est estimée en fonction des conditions d’obtention desbillets gratuits. Par exemple, si un client bénéficiaire de miles prime désire voya-ger gratuitement en classe affaires sur un vol donné, il devra consommer d’autantplus de miles gratuits que cette classe sera déjà quasiment remplie par des passa-gers payants. A contrario, si peu de passagers ont réservé leur place en classeaffaires payante, Air France-KLM augmentera alors le nombre de places de laclasse affaires pouvant être réservées grâce a des miles prime ou à des« upgrades » (surclassement) de classe économique. Six mois d’observation descomportements des voyageurs face aux ouvertures et fermetures de classes tari-faires sont pris en compte dans les analyses qui conduisent à déterminer la justevaleur du mile.

3.2 Réestimation de la probabilité d’utilisation des points cadeaux

Le produit total alloué aux points cadeaux n’est jamais réestimé. Par contre,le taux d’utilisation probable des points fait l’objet d’un réexamen à chaqueclôture. Si ce taux est ajusté à la hausse ou à la baisse, le rapport entre lenombre des bons effectivement utilisés à date et celui des bons dont l’utilisa-tion est probable varie (pure arithmétique). Il en résulte une modification ducalendrier selon lequel le produit différé est rapporté au compte de résultat.

Le calcul du chiffre d’affaires comptabilisé dans une période donnée estdéterminé par différence entre le chiffre d’affaires cumulé constaté depuisl’octroi des points jusqu’à la date de clôture de la période et le chiffre d’affai-res cumulé constaté jusqu’à la date de clôture précédente. Cette méthodepermet de refléter l’effet des changements d’estimations.

Le changement d’estimation s’applique dès la clôture où la réestimation esteffectuée. Ce cas est illustré dans l’exemple en fin de chapitre.

Produit comptabilisé au titre de l’exercice N=

Points cadeaux utilisésà date

Points cadeaux dont l’utilisation est probable

x Produit alloué aux points – Produits comptabilisés fin N–1

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3.3 Que faire lorsque la récompense est consentie par un tiers ?

Plutôt que d’administrer son programme de fidélisation, une entreprise peutacheter des points cadeaux à un administrateur de programme de fidélisationpour les accorder ensuite à ses propres clients. Ceux-ci feront ensuite directe-ment valoir leurs points cadeaux auprès de l’administrateur. L’entreprise neconserve aucune obligation une fois qu’elle lui a réglé les points cadeaux.

En ce cas, la question se pose de savoir si, en substance, l’entreprise inter-vient en tant qu’acteur principal ou bien en tant que mandataire (ou agent) del’administrateur du programme. Autrement dit, encaisse-t-elle le produitaffecté aux points cadeaux pour son propre compte ou pour le compte d’untiers (IFRIC 13 § 8) ?

Lorsque l’entreprise intervient en substance en tant qu’agent, elle encaissele produit des cadeaux pour le compte de l’administrateur du programme. Parailleurs, elle a à régler à ce dernier le prix des points cadeaux. Dans soncompte de résultat, elle compense l’un et l’autre de façon à faire apparaître sacommission d’intermédiaire (IFRIC 13 § 8 (a,i)) . Celle-ci est comptabiliséelorsque l’administrateur contracte l’obligation de fournir le cadeau etacquiert le droit d’être rémunéré pour cela, c’est-à-dire à la date où les pointscadeaux sont remis aux clients (IFRC 13 § 8 (a,ii)). Dans les cas pluscomplexes où le client peut échanger ses points contre des biens ou servicessoit auprès de l’administrateur du programme soit auprès d’autres entreprisespartenaires, la comptabilisation de la commission n’intervient qu’au momentoù le client fait valoir ses points.

Si l’entreprise encaisse la contrepartie pour son propre compte, elle doitévaluer ses produits comme étant la contrepartie brute affectée aux pointscadeaux et comptabiliser ces produits lorsqu’elle remplit ses obligations delivrer les cadeaux (IFRIC 13 § 8 (b)).

L’interprétation IFRIC 13 ne donne pas d’indications méthodologiquespour déterminer si l’entreprise intervient en tant qu’acteur principal ou entant qu’agent. Par contre, il sera possible de recourir à une grille d’analyseinspirée de la norme comptable américaine ASC 605-45 (ceci avec précau-tion, l’exercice du jugement est nécessaire pour bien identifier les situationsd’agence par rapport à celles d’acteur principal).

– qui décide du contenu du catalogue de cadeaux ?

– qui fixe le prix, c’est-à-dire le barème d’échange des points contre descadeaux ?

– qui choisit les participants au programme, c’est-à-dire les fournisseurs desbiens ou services offerts ?

– qui a la responsabilité de fournir les cadeaux ? contre qui se retourne leclient s’il y a un problème d’exécution ?

Page 154: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

144 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

– qui porte le risque de crédit ?

– qui porte le risque de stock ?

Si l’administrateur du programme décide du contenu du catalogue decadeaux et qu’en cas de problèmes, le client ne peut se retourner que contrelui (l’administrateur), il y aura sans doute à conclure que l’entreprise est dansune posture d’agent. Si le participant au programme – qui en général acquiertdes points cadeaux auprès de tiers et les accorde à ses clients pour développerses relations clientèle et non pour générer une marge d’intermédiation – fixele contenu du catalogue et le prix en points des cadeaux, il est sans douteacteur principal.

Exemple

Un hôtel a mis en place un programme de fidélisation dans lequel les clients sevoient accorder des points cadeaux lorsqu’ils consomment des nuitées et autresbiens ou services. Ces points peuvent être échangés contre des nuitées gratuitesdans l’hôtel ou des entrées gratuites au théâtre ou des bons d’achat dans l’hôtelou dans d’autres magasins. L’hôtel est l’administrateur du programme et a unetotale liberté dans la sélection des cadeaux proposés. Il ignore sur quels articlesse portera le choix du client.

Sur la base des critères ci-dessus, on tendra à conclure que l’hôtel génère unproduit pour son propre compte et est donc acteur principal dans la transaction.En effet :

• l’entité qui contracte l’obligation à titre principal est l’hôtel ; son obligationdemeure tant que les points cadeaux ne sont pas exercés et que leur date devalidité n’est pas atteinte ;

• l’hôtel compose à sa convenance le catalogue des cadeaux offerts à ses clientset pourrait, par exemple, à tout moment décider de cesser d’offrir des billets dethéâtre ou des articles provenant d’autres magasins ;

• l’hôtel a une totale liberté pour définir le nombre de points nécessaires pouravoir droit aux cadeaux.

Comme l’hôtel est acteur principal, le produit alloué aux points cadeaux estcomptabilisé pour son montant brut. Il sera constaté au compte de résultat au furet à mesure que les droits sont utilisés ou expirent.

Illustration

Participant au programme de fidélisation client d’une compagnie aérienne,BONNE ROUTE, un loueur de véhicules, accorde à ses clients des miles gratuitsen fonction de leur utilisation de ses services. BONNE ROUTE détermine qu’ilest agent dans le programme et donc rémunéré par une commission pour l’octroià ses clients de droits à voyages gratuits. BONNE ROUTE achète les miles à lacompagnie aérienne au prix unitaire de 0,008 euros et estime que leur justevaleur unitaire est de 0,009 euros.

Pour la location prépayée d’un 4×4 pendant 30 jours au tarif de 1 000 euros, unclient reçoit 1 000 miles. La juste valeur des miles accordés est de 9 euros(9 = 1 000 × 0,009) ; leur coût est de : 8 euros (8 = 1 000 × 0,008).

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Pour sa participation au programme de fidélisation, le chiffre d’affaires deBONNE ROUTE correspond au montant net conservé, soit la différence entre leproduit alloué aux miles (9 euros) et le montant dû à la compagnie aérienne pourles miles achetés (8 euros). BONNE ROUTE ne conserve aucune obligation autitre des points cadeaux envers son client (l’obligation est transférée chez lacompagnie aérienne) et sera dégagé de toute obligation envers la compagnieaérienne lorsqu’il aura réglé le prix des miles. D’où la comptabilisation suivantedans les livres de BONNE ROUTE :

* BONNE ROUTE aura en fait à décider (c’est un choix de méthode comptable) si cette commis-sion est présentée en tant que chiffre d’affaires ou en tant qu’autre produit.

3.4 Le traitement des programmes de fidélisation déficitaires

Lorsque le coût des biens ou services à fournir excède le revenu différé,l’entreprise se trouve en présence d’un programme de fidélisation déficitaire.Elle doit alors constituer une provision à hauteur de la perte anticipée,conformément aux dispositions de la norme IAS 37, Provisions, passifséventuels et actifs éventuels.

Un programme peut être ou devenir déficitaire dans différents cas, parexemple :

– le coût de revient des biens ou des services offerts augmente ;

– le choix des clients se porte sur les articles de valeur plus élevée qu’iln’avait été estimé ;

– le taux d’utilisation des points cadeaux s’accroît, ce qui alourdit la factureglobale d’achat ou de production des biens ou services offerts.

3.5 Quels sont les outils nécessaires pour optimiser et réussir la mise en œuvre ?

L’entreprise qui applique l’interprétation IFRIC 13 doit disposer des infor-mations nécessaires à l’estimation des trois principaux paramètres d’évalua-tion du produit alloué aux points cadeaux : le nombre de points cadeaux

B/R D C

B Client X 1 000

R Chiffre d’affaires – location véhicule 991

R Chiffre d’affaires * – commission 1

B Passif courant – Compagnie aérienne 8

Page 156: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

146 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

accordés, la juste valeur unitaire des points cadeaux, leur niveau d’utilisationestimé. Il lui faut suivre la consommation réelle des points cadeaux ainsi queles annulations ou déchéances Il lui faut assurer la traçabilité des informa-tions à partir des transactions sous-jacentes jusqu’à leur enregistrement dansles comptes.

Si elle a déjà mis en place des programmes de fidélisation ou intervient entant que partenaire de tels programmes, en toute logique l’entreprise disposedéjà d’un outil lui permettant d’assurer le suivi opérationnel des émissions depoints cadeaux et de leurs utilisations. L’opportunité peut cependant seprésenter de profiter d’un meilleur suivi des programmes pour réfléchir à lastructuration des offres futures. Si une entreprise met en place pour lapremière fois un programme semblable, il lui faut créer l’outil de suivi. Ici untravail concerté entre les départements du marketing, du contrôle de gestionet de la finance est indispensable.

La gestion des données historiques stockées (organisées au minimum parprogramme et par période d’émission des points cadeaux) revêt une impor-tance particulière dans la mesure où celles-ci seront notamment utilisées pourdéterminer le taux d’abandon des points cadeaux par les clients. Lorsque lesclients peuvent faire valoir leurs points cadeaux auprès de différents établis-sements, ou différents tiers, il faut organiser les remontées d’informationsdétaillées avec les partenaires.

La méthodologie d’évaluation de la juste valeur des points cadeaux doitêtre fixée, notamment dans le cas de programmes multi-enseignes, ou deprogrammes à remise inconditionnelle.

Pour les programmes de fidélisation complexes, l’entreprise aura recours àdes modèles statistiques, sophistiqués s’il le faut, pour estimer le taux d’utili-sation en tenant compte de critères quantitatifs (fréquence et volume deconsommation des avantages) et qualitatifs (catégorie de clients, localisationgéographique, comportement…), informations normalement disponiblesdans les bases de données clients.

L’entreprise se sera doublement facilité la tâche si elle a assigné une duréede validité aux points cadeaux : d’une part, la modélisation sera plus aisée etson résultat plus fiable ; d’autre part plus cette durée est courte plus le tauxd’utilisation sera faible, donc plus le produit à allouer aux points cadeauxsera faible toutes choses égales par ailleurs.

Pour le pilotage, pour le suivi et pour la comptabilisation de ces actions,l’entreprise doit disposer d’un outil informatique qui justifie le niveau derevenu différé et son écoulement, puis permette de restituer l’informationdans le reporting interne, dans l’outil de consolidation et dans le systèmebudgétaire. Ici, des adaptations du système d’information, des tableaux debord de gestion et des outils de consolidation peuvent être nécessaires.

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L’entreprise aura aussi à évaluer régulièrement les informations collectéeset sa méthodologie d’analyse pour être assurée de produire des estimationsproches de la réalité. Il faudra également prévoir que les estimations de tauxd’exercice des points cadeaux sont bien régulièrement mises à jour.

Une procédure écrite décrira le mode opératoire des programmes de fidéli-sation depuis leur mise en place jusqu’à leur enregistrement comptable. Ellesera reprise, dans ses grandes lignes, dans le manuel des procédures compta-bles. Ces documents seront diffusés ou rendus accessibles à toutes lespersonnes concernées par les programmes de fidélisation.

L’objectif du cas est de montrer comment le chiffre d’affaires initialement différé estrapporté au compte de résultat année après année. Il illustre aussi la manière deprendre en compte des révisions du taux d’utilisation probable des points cadeaux.La société MESSAGE a mis en place un programme de fidélisation dont les pointssont valables trois ans.Les clients ont acquis 100 000 points, chaque point ayant une juste valeur de0,50 euro. MESSAGE estime sur la base de son expérience que 80 % des points attri-bués sont utilisés par les bénéficiaires. Un produit de 100 000 × 0,50 × 80 % =40 000 euros est donc différé.Sur les 100 000 points distribués, 20 000 points sont utilisés à la fin de la premièreannée de la période de validité, 30 000 sont utilisés au cours de la deuxième année.À la fin de la deuxième année, trois scénarios différents sont envisagés : dans lepremier, l’hypothèse initiale d’utilisation de 80 % des points au total reste inchangée ;dans le deuxième, elle est révisée à la hausse, dans le dernier, l’hypothèse est aucontraire révisée à la baisse.

Scénario n˚ 1 : l’estimation du taux d’utilisation des points reste inchangée

Année après année, MESSAGE détermine la proportion de points utilisés – en cumuldepuis la date d’octroi – par rapport à l’estimation totale la plus récente.

(1) 25 % = 20 000/80 000(2) 63 % = 50 000/80 000

Points NombreTaux utilisation estimé Points utilisés

cumul %Initial Révisé

Alloués 100 000 80 % N/A

Utilisés (cumul)

N+1 (1) 20 000 25 %

N+2 (2) 50 000 63 %

C A S P R A T I Q U E

Page 158: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

148 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Le calcul des produits à rapporter au compte de résultat est fait en cumul depuis ladate d’octroi des points. Le montant à comptabiliser sur une année s’obtient par diffé-rence entre le cumul en fin d’année et celui existant en fin d’année précédente. Lechiffre d’affaires comptabilisé au titre de l’année N+3 est déterminé par différenceentre le produit alloué aux points cadeaux à l’origine et le montant déjà constaté finN+2.

• Échéancier de comptabilisation du produit initialement différé

(1) 10 000 = 25 % × 40 000(2) 25 000 = 63 % × 40 000 ; 15 000 = 25 000 – 10 000(3) 15 000 = 40 000 – 25 000

Scénario 2 : révision à la hausse du taux d’utilisation estimé

Dans le scénario considéré, à la fin de l’année N+2, MESSAGE revoit à la hausse letaux d’utilisation probable des points. Le nombre de points dont l’utilisation est proba-ble est estimé à 90 000 (90 % de la quantité distribuée). De ce fait, la proportion debons effectivement utilisés par rapport au nombre dont l’utilisation est probable setrouve modifiée.

• Détermination du pourcentage cumulé de points utilisés

(1) 25 % = 20 000/80 000(2) 56 % = 50 000/90 000

La réestimation du taux d’utilisation probable des points reste sans incidence sur lemontant total du produit différé (40 000 € à l’origine) mais influe sur le calendrier desa constatation dans le compte de résultat.

Montant du CA différé

Points utilisés cumul %

CA à constater cumul en €

CA à constater dans l’exercice

N+1 (1) 40 000 25 % 10 000 10 000

N+2 (2) 40 000 63 % 25 000 15 000

N+3 (3) 40 000 40 000 15 000

Total 40 000

Points NombreTaux utilisation estimé Points

utilisés cumul %Initial Révisé

Alloués 100 000 80 % 90 %

Utilisés (cumul)

N+1 (1) 20 000 25 %

N+2 (2) 50 000 56 %

Page 159: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

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• Échéancier de comptabilisation du produit initialement différé

(1) 10 000 = 25 % × 40 000(2) 22 222 = 56 % × 40 000 ; 12 222 = 22 222 – 10 000(3) 17 778 = 40 000 – 22 222

Scénario 3 : révision à la baisse du taux d’utilisation estimé

À la fin de l’année N+2, MESSAGE revoit à la baisse le taux d’utilisation probable desbons. Le nombre de points dont l’utilisation est probable est estimé à 60 000 (60 % dela quantité distribuée). La démarche suivie est strictement identique à celle dévelop-pée pour le précédent scénario.• Détermination du pourcentage cumulé de points utilisés

(1) 25 % = 20 000/80 000(2) 83 % = 50 000/60 000

• Échéancier de comptabilisation du produit initialement différé

(1) 10 000 = 25 % × 40 000(2) 33 333 = 83 % × 40 000 ; 23 333 = 33 333 – 10 000(3) 6 667 = 40 000 – 33 333

Montant du CA différé

Points utilisés cumul %

CA à constater cumul en €

CA à constater dans l’année

N+1 (1) 40 000 25 % 10 000 10 000

N+2 (2) 40 000 56 % 22 222 12 222

N+3 (3) 40 000 40 000 17 778

Total 40 000

Points NombreTaux utilisation estimé Points

utilisés cumul %Initial Révisé

Alloués 100 000 80 % 90 %

Utilisés (cumul)

N+1 (1) 20 000 25 %

N+2 (2) 50 000 83 %

Montant du CA différé

Points utilisés cumul %

CA à constater cumul en €

CA à constater dans l’année

N+1 (1) 40 000 25 % 10 000 10 000

N+2 (2) 40 000 83 % 33 333 23 333

N+3 (3) 40 000 40 000 6 667

Total 40 000

Page 160: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

150 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Comparaison des trois calendriers et synthèse

Une fois déterminé à la date de la transaction payante, le montant global du revenudifféré n’est pas ultérieurement réestimé.Les ré-estimations successives sont effectuées de manière prospective.

TEXTES DE RÉFÉRENCE

L’interprétation IFRIC 13 a été adoptée par l’IFRIC le 28 juin 2007. L’Unioneuropéenne l’a homologuée par le règlement CE n˚ 1262/2008 du16 décembre 2008. Les entreprises européennes appliquent cette interpréta-tion au plus tard aux exercices ouverts à compter du 1er juillet 2008.

Page 161: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

8 SEPT CAS SPÉCIAUX

CE QU’IL FAUT RETENIR

Les ventes avec engagements de reprise que pratiquent, par exemple les constructeursautomobiles, ne génèrent pas un chiffre d’affaires de « vente », mais un produit de location(IAS 17), et ce, pendant la période où le droit de retour vers le vendeur peut être exercé.Certains accords prévoient une vente de biens et son rachat ultérieur. Liées de manièreindissociable, les deux opérations doivent être analysées dans leur ensemble. En l’absencede transfert des risques et avantages liés à la propriété du bien, le vendeur initial ne cons-tate pas de chiffre d’affaires lors de la vente initiale (ni de charge correspondante lors duretour du bien).Les opérations d’échanges de produits similaires ne génèrent ni chiffre d’affaires ni chargesdans le compte de résultat. Ces transactions sont courantes, par exemple dans les métiersde fournitures de matières premières (pétrole, produits de carrière…) ou de produits alimen-taires de base (lait…).Dans une opération de troc publicitaire, il est interdit d’évaluer les produits (et les charges)du troc publicitaire à la juste valeur des services de publicité reçus. Le vendeur doit se basersur la juste valeur des services qu’il offre et l’évaluer par référence à la rémunération d’opé-rations similaires autres que de troc.Un accord de construction de bien immobilier n’est un contrat de construction, au sens de lanorme IAS 11, que si l’acheteur peut spécifier les caractéristiques essentielles du« produit » ; autrement il s’agit d’une vente de biens ou, dans certains cas plus particuliers,d’une prestation de services. La détermination de la nature du contrat est l’étape premièrede l’analyse comptable : d’elle découle la méthode de comptabilisation du chiffre d’affaires.Les ventes en l’état futur d’achèvement (VEFA), sont des ventes de biens. Lorsqu’ellesorganisent le transfert continu du contrôle du bien immobilier à l’acheteur, malgré la qualifi-cation de vente de biens, le produit sera appréhendé à l’avancement, et non en une seulefois à l’achèvement.Les transactions par lesquelles un fournisseur d’accès reçoit de la part d’un client un élé-ment d’immobilisation corporelle (ou de la trésorerie affectée) afin de connecter le client àun réseau et/ou de lui fournir un accès continu à une offre de biens ou de services (électri-cité, gaz, eau…) s’analysent comme un échange de biens ou services dissemblables. Lefournisseur d’accès comptabilise le produit des biens fournis ou des services rendus enéchange de l’actif transféré.

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152 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

VENTES AVEC ENGAGEMENT DE REPRISE (VAER)

Selon la norme IAS 18, pour qu’un acte de “vente” puisse être comptabilisévalablement en revenu, les risques et avantages importants liés à la propriétédoivent être irrévocablement et définitivement transférés à l’acheteur.

Le traitement comptable de certaines pratiques commerciales qui prévoientcontractuellement la possibilité pour le client de retourner le bien« acheté » – et l’obligation pour le fournisseur de le reprendre – au boutd’un certain laps de temps, et moyennant un prix convenu d’avance, a dû êtrerevu en IFRS (par rapport aux comptes sociaux en normes françaises) afin derespecter IAS 18. Tel est le cas, dans le secteur automobile, des ventes avecengagement de reprise, dites encore « VAER », conclues par les construc-teurs avec des clients.

1.1 Le traitement des VAER en IFRS

1.1.1 Logique de l’analyse

Le raisonnement sous-jacent au traitement des VAER consiste à dire que lesprincipaux risques et avantages inhérents à la propriété n’ont pas été transfé-rés à l’acheteur lors de la vente. En effet, du fait de l’engagement de reprise àprix fixe, l’acheteur ne supporte pas le risque tenant aux variations de valeurdu véhicule acheté sur le marché d’occasion. Si la cote du véhicule baisse,l’acheteur exerce l’option, rend le véhicule et encaisse le montant initiale-ment convenu. Si la cote du véhicule monte, l’acheteur abandonne l’option etvend le véhicule sur le marché.

1.1.2 Conséquence pour le traitement comptable

Par conséquent, les VAER ne génèrent pas un revenu de « vente », mais delocation (IAS 17), et ce, pendant la période où le droit de retour vers le cons-tructeur peut être exercé. La valeur de la location est égale à la différenceentre le prix de vente (payé en totalité à l’origine par « l’acheteur ») et le prixde reprise (qui sera donc déboursé par le constructeur).

De plus, s’il n’y a pas vente en IFRS, cela implique ipso facto que le véhi-cule reste dans les comptes du constructeur, normalement en immobilisationssi le contrat a une durée supérieure à un an (avec amortissements en consé-quence), en stock dans le cas contraire.

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1.2 Principales divergences avec les référentiels français et US GAAP

1.2.1 Principales divergences avec le référentiel français

Selon les principes français, une VAER s’analyse comme une vente souscondition résolutoire. Sur le plan juridique, la propriété du bien étant trans-féré à l’acheteur, la vente est réalisée à la signature du contrat. Dans lesrègles actuelles de constatation des produits, la vision juridique l’emporte. Lavente étant réalisée, le chiffre d’affaires est constaté à la livraison du bien.Une provision pour risques peut devoir être constituée.

– si le risque de résolution de la vente est négligeable, le chiffre d’affaires estintégralement pris en compte à la livraison du bien – qui sort de l’actif –comme si la condition résolutoire n’existait pas ;

– si le risque de résolution de la vente n’est pas négligeable, le chiffred’affaires sera constaté mais l’entreprise devra constituer une provisionpour risques à hauteur du résultat de cession.

Dans le cas des VAER des constructeurs automobiles, un chiffre d’affairesest constaté à la première vente. Une provision est constituée dès la livraisonsi la valeur de reprise du véhicule apparaît supérieure à sa valeur de reventeprobable.

L’impact de cette divergence entre textes français et norme IAS 18, sur lesétats financiers est sensible. Le calendrier de constatation des produits esttransformé : au lieu de constater ponctuellement une vente, l’entreprise cons-tate des loyers de façon étalée dans le temps sur plusieurs années. Parailleurs, dans le compte de résultat, les produits seront présentés en tant queproduit de prestations de service et non en tant que chiffre d’affaires né desventes de biens. Enfin, le bilan est alourdi de la valeur des véhicules.

1.2.2 Principales divergences avec le référentiel américain

Les US GAAP et la norme IAS 18 ne présentent pas de différences dans letraitement des VAER.

1.3 Points clés pour une mise en œuvre réussie

Le contrôleur de gestion devra principalement :

– s’assurer de la pertinence de la fixation du prix de reprise prévu contrac-tuellement par rapport au prix estimé « Argus » lors de la fin de la périodede « location » (i.e. au-delà de laquelle le client doit garder définitivementle véhicule) ;

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154 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

– s’assurer que le contact avec le client sera pris en temps utile pour luipermettre d’exercer son choix avec le délai de réflexion nécessaire ;

– faire remonter par les canaux appropriés les conséquences en termes derésultat et de trésorerie du choix du client.

Illustration

Données et hypothèses

Un véhicule, dont le prix de revient usine est de 57 000 euros, fait l’objet d’uneVAER aux conditions suivantes :

• valeur de vente : 80 000 euros

• valeur de reprise : 20 000 euros

• durée de l’engagement de reprise : 4 ans

• valeur argus estimée à la date de la reprise : 21 000 euros

Dans ses livres, le constructeur amortit linéairement ses véhicules de serviceimmobilisés sur 6 ans. La valeur résiduelle du véhicule estimée à 3 000 euros. Onnéglige l’impact de la TVA.

Les produits de la location du véhicule, cumulés sur 4 ans, sont évalués à :80 000 – 20 000 = 60 000 euros. Les loyers annuels sont donc de 60 000/4 =15 000 euros. L’opération est une location simple.

Conclusion du contrat

Dans les livres IFRS, le compte de résultat n’est pas mouvementé à la conclusiondu contrat. Les effets de la transaction sont enregistrés dans des comptes de bilan.

Au cours du contrat

Chaque année, le constructeur enregistre une dotation aux amortissements de9 000 euros ((57 000 – 3 000)/6), d’une part, et les produits de location

B/R D C

Constatation de l’engagement pris envers le client

B Client X 80 000

B Dette d’exploitation 80 000

Reclassement du véhicule dans les immobilisations

B Immobilisations corporelles 57 000

B Stocks 57 000

Règlement du clientB Trésorerie 80 000B Client X 80 000

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(15 000 euros), d’autre part. En cumul sur les 4 ans couverts par le contrat, lesamortissements s’élèvent à 36 000 euros et les loyers à 60 000 euros.

Au terme des 4 ans, la valeur nette comptable du véhicule dans le livre des immo-bilisations du constructeur atteint 24 000 euros, soit 60 000 – 36 000 euros.

Reprise du véhicule par le constructeur

L’engagement pris envers le client est exécuté.

Revente du véhicule sur le marché de l’occasion

Par hypothèse, le véhicule est cédé à sa valeur nette comptable, de sorte que lacession n’engendre pas de résultat.

B/R D C

Constatation des amortissements

R Dotation aux comptes d’amortissement 36 000

B Amortissement des immos corporelles 36 000

Constatation des produits de location

B Dette d’exploitation 60 000

R Produits de location 60 000

B/R D C

Exécution de l’engagement de reprise

B Dette d’exploitation 20 000

B Client X 20 000

Règlement au client

B Client X 20 000

B Trésorerie 20 000

B/R D C

Décomptabilisation du véhicule

B Autres créances 21 000

B Amortissements immos corporelles 36 000

B Immobilisations corporelles 57 000

Encaissement du prix de cession

B Trésorerie 21 000

B Autres créances 21 000

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156 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Profitabilité de la VAER et comparaison avec une vente classique

Le résultat constaté par le constructeur s’élève à 24 000 euros :

Dans cet exemple, la marge totale de la VAER est supérieure à la marge brute de23 000 euros (80 000 – 57 000 = 23 000) qui aurait été constatée lors d’une venteclassique car la valeur de reprise est – légèrement – avantageuse pour le construc-teur. Avec des hypothèses différentes quant aux conditions de cession du véhi-cule sur le marché secondaire, il aurait été parfaitement possible d’aboutir auconstat inverse. Ce qui confirme bien qu’au-delà de la vente initiale, le construc-teur supporte encore des risques et avantages liés à la propriété.

Et si le client n’exerce pas son droit à la reprise ?

Si le client garde le véhicule, l’obligation du constructeur est éteinte. Sur le plancomptable, la dette d’exploitation résiduelle (20 000) est soldée avec contrepartieen revenu ; la valeur nette de l’immobilisation est transférée en stock avant d’êtreenregistrée en coût des ventes (21 000).

1.4 Impact des VAER dans les premiers états IFRS des constructeurs automobiles français

Dans leurs comptes consolidés en normes françaises, le groupe Peugeotcomme le groupe Renault traitaient déjà une partie des ventes de véhicules

80 000 prix de vente– 20 000 prix de reprise

= 60 000 revenu– 36 000 amortissements

0 résultat de cession

24 000 marge totale

B/R D C

Extinction de l’engagement de reprise

B Dettes d’exploitation 20 000

R Produit 20 000

Reclassement de l’immobilisation en stock

B Amortissements 36 000

B Stocks 21 000

B Immobilisations 57 000

Constatation du coût des ventesR Coût des ventes 21 000B Stocks 21 000

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neufs assorties de clauses de rachat comme des locations. Toutefois, seulesles opérations de durée courte (inférieure à 36 mois) étaient considéréescomme des locations simples ; les opérations de durée plus longue consti-tuant des locations financières comptabilisées comme des ventes assortiesd’une opération de financement.

Au passage aux IFRS, après redéfinition de la durée de référence permet-tant de distinguer entre location simple et location financière, l’ensemble desventes assorties d’une clause de rachat a été considéré comme des locationssimples. Toutes les opérations d’une durée supérieure ou égale à 36 mois ontdonc été retraitées.

L’impact du retraitement des VAER a été comparable en pourcentage durevenu, de sens opposé sur le résultat net de l’exercice 2004 (négatif de18 M€ pour Renault 2004 mais positif pour Peugeot de 54 M€, par suited’effets de portefeuille) et négatif pour les capitaux propres, comme lemontre le tableau suivant.

(En millions d’euros)

Sur les exercices postérieurs à la transition et jusqu’à l’échéance descontrats de VAER existant début 2004, l’impact du changement de référentiela été favorable pour le résultat opérationnel. En effet, il a conduit les deuxconstructeurs concernés à reconnaître au titre de la location une marge déjàconstatée (et annulée partiellement) jusqu’en 2004 au titre de la vente.

VENTE ET RACHAT LIÉ

Un industriel peut parfois confier à un fournisseur la réalisation d’une piècedans un accord par lequel l’industriel vend au fournisseur la matière spécifi-que nécessaire pour la pièce à fabriquer, puis lui achète la pièce fabriquée. Lefournisseur n’a pas le droit d’utiliser la matière fournie à d’autres fins que lafabrication de la pièce en question.

Impact chiffre d’affaires Impact résultat net Impact capitaux

propres

Mnt % Mnt % Mnt %

Peugeot – 551 – 0,97 % 54 + 4,00% – 397 – 1,0 %

Renault – 303 – 0,74 % – 18 – 0,56 % – 238 – 0,7 %

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158 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

2.1 Logique d’analyse

Sur le plan juridique, la vente de la matière brute et l’achat de la pièce finiesont bien distinctes ; sur le plan économique, les deux opérations sont indis-sociables. Elles doivent être analysées dans leur ensemble pour que la comp-tabilisation de la transaction en reflète la substance. Ici, il n’y a pas transfertau fournisseur des risques et avantages liés à la propriété de la matière. Lefournisseur intervient de fait comme un prestataire qui assure le façonnage dela pièce.

En l’absence de transfert des risques, la vente de la matière ne donne paslieu à la constatation d’un produit selon IAS 18. L’achat de la pièce finie estenregistré pour son montant hors matière. Dans l’intervalle, tout se passecomme si la matière n’était jamais sortie du stock de l’industriel.

2.2 Principales divergences avec les référentiels français et US GAAP

2.2.1 Principales divergences avec le référentiel français

Selon les textes français, chacune des opérations (vente de la matière puisachat de la pièce finie) est enregistrée sur la base de la facture émise.

2.2.2 Principales divergences avec le référentiel américain

Les US GAAP et la norme IAS 18 ne présentent pas de différences sur cesujet.

2.3 Points clés pour une mise en œuvre réussie

La principale préoccupation des équipes finance va porter sur l’identificationde ces opérations car leur traitement – une fois que les schémas comptablesappropriés ont été développés – ne présente pas de difficultés particulières.

En pratique, lorsqu’au sein d’un groupe, la société qui vend la matière ausous-traitant/façonnier est la même que celle qui lui rachète la pièce fabri-quée, les choses sont relativement simples : une fois avertis, les contrôleursde gestion concernés feront aisément le lien entre les deux branches del’opération.

La situation est plus complexe lorsque le vendeur et l’acheteur sont deuxsociétés différentes d’un même groupe. Chacune d’entre elles, prise isolé-

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ment, fait une opération classique de vente ou d’achat avec un tiers mais auniveau du groupe la transaction est une vente avec rachat lié.

Une approche possible consiste pour les services centraux à recenser cessituations avec l’aide des contrôleurs de gestion ou des directeurs financiersdes filiales. Ensuite, ce cas sera décrit de manière générique dans un paragra-phe de la procédure « Ventes » ; la liste détaillée des activités et des types debiens concernés y sera annexée. Pour chacun, les sociétés intervenantesseront identifiées avec leur posture vendeur ou acheteur. De la sorte, les deuxsociétés pourront repérer les transactions semblables lorsqu’elles sontinitiées, leur faire suivre le traitement approprié lors du processus de consoli-dation puis en contrôler la bonne application.

Illustration

Données et hypothèses

Un industriel conclut avec l’un de ses fournisseurs un contrat de vente et derachat lié pour la réalisation d’une pièce aux conditions suivantes :

• vente de la matière spécifique :80 000 euros

• coût de la matière vendue :80 000 euros

• coût d’achat de la pièce finie :160 000 euros

On néglige la TVA. Par hypothèse, l’architecture comptable est telle que lescomptes IFRS résultent de l’addition des comptes français et des reclasse-ments/ajustements IFRS.

Vente de la matière

Dans les livres français, la vente et la sortie de stock sont enregistrées.

B/R D C

Constatation de la vente

B Client X 100 000

R Vente 100 000

Sortie du stock

R Variation de stock matière 80 000

B Stock matière 80 000

Règlement du clientB Trésorerie 100 000B Client X 100 000

Page 170: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

160 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Dans les livres IFRS, ni produit ni charge liée ne doivent apparaître. Il fautcontrepasser les écritures relatives à la vente et à la sortie de la matière dans lescomptes de reclassement/ajustement IFRS.

Achat de la pièce finie

Dans les livres français, l’achat et l’entrée en stock sont enregistrées.

Dans les livres IFRS, doivent apparaître l’achat hors matière et la sortie de stockmatière première. Il faut donc contrepasser l’achat à hauteur du montant matièreretourné et enregistrer le transfert de la matière qui se trouve désormais incorpo-rée au stock de produits.

B/R D C

Annulation de la vente

R Vente 80 000

B Fournisseur, facture non parvenue 80 000

Annulation sortie du stockB Stock matière 80 000R Variation stock matière 80 000

B/R D C

Constatation de l’achat

R Achat de prestations 160 000

B Fournisseur X 160 000

Entrée en stock de produits

B Stock de produits 160 000

R Variation de stock de produits 160 000

Règlement du fournisseurB Fournisseur X 160 000B Trésorerie 160 000

B/R D C

Annulation du rachat de la matière

B Fournisseur, facture non parvenue 80 000

R Achat de prestation 80 000

Transfert du stock matière vers le stock de produitsR Variation stock de matière 80 000B Stock matière 80 000

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Au final, ce que l’on lira dans les livres IFRS pourrait correspondre aux écrituresnatives suivantes (hors écritures relatives à la trésorerie) :

ÉCHANGES DE BIENS OU DE SERVICES

Parmi les opérations d’échange, il faut distinguer entre les échanges deproduits similaires et les échanges de produits dissemblables. De plus, lesopérations de troc publicitaire portant sur des services dissemblables donnentlieu à un traitement particulier.

3.1 Biens ou services similaires

3.1.1 Analyse et traitement en IFRS

➤ De quoi s’agit-il ?

Les opérations d’échanges de produits similaires sont courantes dans lesmétiers de fournitures de matières premières (pétrole, produits de carrière…)ou de produits alimentaires de base (lait…). En effet, les fournisseurss’échangent des stocks en divers endroits pour satisfaire la demande en tempsvoulu en un endroit donné sans avoir à transporter les produits d’un point àun autre.

D’autres secteurs pratiquent aussi ce type de transactions. Ainsi, les grou-pes de média et de publicité échangent des services publicitaires. Les compa-gnies aériennes échangent des créneaux d’atterrissage ou « slots ». Lesopérateurs de télécommunications échangent des capacités de transport surleurs réseaux dans des « capacity swaps ».

B/R D C

Achat de prestations

R Achat de prestations 80 000

B Fournisseur X 80 000

Entrée dans le stock de produit

B Stock de produits 160 000

R Variation du stock de matière 80 000B Stock matière 80 000R Variation du stock de produits 160 000

3

Page 172: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

162 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

➤ Logique d’analyse selon IAS 18

Dans les échanges de produits ou de services similaires, les deux parties vontbien conclure un accord de vente et d’achat simultanés et émettre chacun unefacture. Toutefois, selon la norme IAS 18 § 12, le processus de réalisationdes produits n’est pas considéré comme achevé, de sorte que la transaction negénère pas de produits au compte de résultat. Si l’opération porte sur desbiens susceptibles d’être stockés, elle s’analyse comme un simple déplace-ment de stocks.

➤ Traitement comptable

Si les biens échangés sont des éléments de stock, le stock reçu est évalué à lavaleur comptable du bien échangé (stock sorti), ajustée du montant de tréso-rerie ou d’équivalent de trésorerie transféré, sauf à disposer d’une valorisa-tion plus fiable des biens donnés en échange. Un résultat sera constaté si lajuste valeur des biens remis diffère de la juste valeur des biens reçus ajustéed’une éventuelle soulte. Par exemple, lorsqu’un équipementier aéronautiqueprocède à l’échange standard d’un moteur contre un autre moteur semblablevoire identique dans le cadre d’une opération de maintenance, l’écart depotentiel entre les moteurs échangés est comptabilisé en résultat.

Exemple

Le chiffre d’affaires ne tient pas compte des livraisons effectuées auprès d’autrescompagnies pétrolières dans le cadre d’accord réciproques d’achat et de venteayant une nature d’échange. Les achats et ventes d’hydrocarbures dans le cadrede contrats d’échange nécessaires pour disposer de stocks utilisés dans les activi-tés de raffinage du Groupe Shell, ou repositionner ces stocks, sont présentés ennet au compte de résultat. (Royal Dutch Shell, rapport annuel.)1

Exemple

Les opérations d’échange de pétrole brut et de produits pétroliers conclues dansle cadre d’accords professionnels ne donnent pas lieu à résultat : les flux sontprésentés pour leur valeur nette au compte de résultat comme au bilan. (GroupeTotal, rapport annuel.)

Dans le cas de biens ou de services non stockables, seul le flux net deproduit ou de charge est enregistré au compte de résultat.

1. Purchase and sale of hydrocarbons under exchange contracts that are necessary to obtain orreposition feedstock utilised in the Shell Group’s refinery operations are shown net in theStatement of Income (Royal Dutch Shell, rapport annuel).

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3.1.2 Principales divergences avec les référentiels français et US GAAP

➤ Principales divergences avec le référentiel français

Selon les textes français applicables dans les comptes sociaux, les biens ouservices échangés doivent être comptabilisés à la valeur vénale de celui desdeux lots dont l’estimation est la plus sûre (PCG, art. 321-2). Toute1 opéra-tion d’échange se décompose donc en une opération de vente, qui donne lieuà constatation d’un produit, et d’un achat simultané, qui donne lieu à consta-tation d’une charge ou d’un actif. La différence éventuelle entre la valeurvénale du bien reçu en échange et la valeur comptable du bien cédé, ajustéede la trésorerie transférée, constitue une perte ou un profit. Dès lors, unproduit doit être constaté, même pour les opérations d’échange portant surdes biens similaires, voire identiques.

Dans les comptes consolidés, la présentation pour le montant net des flux(c’est-à-dire zéro dans le cas d’un échange de produits similaires et de valeuridentique) n’est pas interdite.

➤ Principales divergences avec le référentiel US GAAP

Sur ce point, le référentiel américain ne présente pas de divergences avec leréférentiel IFRS.

3.1.3 Exemple d’illustration

Un groupe laitier dont l’usine est située en Normandie dispose d’un stock de laiten Haute-Savoie. L’un de ses confrères, dont l’usine est située en Haute-Savoie,dispose d’un stock de lait en Normandie. Ils concluent un achat et une ventesimultanée de 100 000 litres de lait pour l’approvisionnement respectif de leurusine normande et de leur usine savoyarde. La juste valeur du litre de laitnormand est de 0,200 €, celle du litre de lait savoyard (dont les propriétés orga-noleptiques sont légèrement supérieures) de 0,202 €. La différence de valeurdonne lieu à règlement d’une soulte en trésorerie.

1. Une exception existe pour les échanges interconfrères dans les industries du raffinage pétro-lier de le la distribution d’hydrocarbures. Selon ce plan comptable professionnel de cesecteur, ces échanges n’interviennent pas dans le chiffre d’affaires.

Page 174: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

164 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Dans les livres français de l’entreprise normande, la transcription de l’opérationsera la suivante (on néglige la TVA) :

Dans les comptes IFRS, tous les mouvements au compte de résultat ont éténeutralisés, de sorte que la traduction de la transaction sera la suivante :

On remarquera que, si le groupe savoyard avait accepté de mettre à dispositionses 100 000 litres de lait sans demander le paiement du différentiel de justevaleur, le groupe normand aurait réalisé un profit car il aurait livré une valeur de20 000 et reçu une valeur de 20 200. Dans le référentiel français comme dans leréférentiel IFRS, le profit aurait été immédiatement enregistré au compte derésultat.

B/R D C

Vente

B Client X 20 000

R Ventes 20 000

Sortie de stock

R Variation des stocks 20 000

B Stocks 20 000

Achat

B Achats 20 200

B Fournisseur Y 20 200

Entrée en stockB Stocks 20 200R Variation des stocks 20 200

Règlement de la transaction

B Fournisseur Y 20 200

B Trésorerie 200

B Client X 20 000

B/R D C

Constatation de l’excédent de valeur du stock reçu

B Stocks 200

R Fournisseur Y 200

Règlement de la transactionB Fournisseur Y 200B Trésorerie 200

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3.1.3 Impact des retraitements sur les premiers états IFRS d’un groupe de l’industrie alimentaire, un exemple

Lors du passage aux IFRS, le groupe Bongrain a retraité son compte de résul-tat 2004 pour neutraliser les montants liés aux opérations sur matièrespremières et coproduits – les échanges de lait, les ventes d’excédents de lait,les ventes de coproduits – qui ne font pas partie du produit des activités ordi-naires en IFRS. Le total des retraitements représentait 508,7 M€ (12 % duchiffre d’affaires en normes françaises). Ces reclassements restent sans inci-dence sur la marge brute et le résultat, de même que sur les capitaux propres.

3.2 Biens ou services dissemblables

3.2.1 Logique d’analyse

Lorsque l’échange porte sur des biens ou des services dissemblables, il estconsidéré comme une transaction générant un produit.

Exemple

Un loueur de véhicules et un groupe de médias concluent un accord par lequel leloueur de véhicules met un parc de véhicules à disposition de la force de vente dugroupe de médias pour un temps donné, en contrepartie de la fourniture d’unensemble de services publicitaires par le groupe de médias. Il s’agit d’un échangede services dissemblables. Chacune des parties constatera le chiffre d’affaires (etles charges correspondantes).

Lorsque la juste valeur des biens ou services reçus peut être évaluée defaçon fiable, le produit sera constaté pour ce montant, ajusté s’il y a lieu dumontant de la trésorerie transférée en règlement d’une soulte. Tout écart entrela valeur comptable du ou des biens donnés en échange et la valeur des bienset services reçus, ajustée du montant de la trésorerie transférée, est enregistréimmédiatement en résultat à la date de l’échange.

Lorsque la juste valeur des biens ou services reçus ne peut être évaluée defaçon fiable, la juste valeur des biens ou services donnés en échange sert deréférence pour déterminer le montant des produits de l’opération.

3.2.2 Principales divergences avec les référentiels français et US GAAP

Le traitement des échanges de biens ou services dissemblables ne présentepas de divergence dans les trois référentiels.

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166 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

3.3 Troc publicitaire

L’expression « troc publicitaire » désigne des opérations par lesquelles deuxsociétés s’échangent des droits à parution de publicité, quel que soit lesupport de celle-ci. Le cas des opérations portant sur l’échange de services depublicité dissemblables1 est traité par l’interprétation SIC 31, « Produits desactivités ordinaires, Opérations de troc portant sur des services de publicité ».La question que posent ces transactions est celle de la fiabilité de l’estimationde la juste valeur des services échangés. À l’époque où l’interprétation a étéadoptée, il était d’autant plus nécessaire d’encadrer les pratiques que lesentreprises principalement concernées – celles du secteur internet – étaienten général valorisées à l’aide de multiples du chiffre d’affaires.

3.3.1 Disposition de l’interprétation SIC 31

En premier lieu, et contrairement au principe général d’évaluation desproduits nés d’opérations d’échange, il est interdit à l’entreprise d’évaluer lesproduits (et les charges) du troc publicitaire à la juste valeur des services depublicité reçus. Selon les bases de conclusion, il n’est pas possible de retenirla juste valeur des services de publicité reçus du client dans une opération detroc car le vendeur ne dispose pas des informations fiables dont il a besoinpour justifier son évaluation.

Le vendeur doit se baser sur la juste valeur des services qu’il offre etl’évaluer par référence à la rémunération d’opérations similaires autres quede troc. Celles-ci doivent remplir un ensemble de conditions pour pouvoireffectivement constituer une base de justification pertinente et fiable :

– similitude du service de publicité fourni avec celui de l’opération de troc.Deux opérations publicitaires sont considérées comme similaires si ellesont des caractéristiques quasi identiques (média, taille de l’espace, date dediffusion, public visé…) ;

– fréquence suffisamment élevée ;

– prépondérance en valeur et en nombre des opérations hors troc dansl’ensemble des opérations similaires à l’opération de troc ;

– rémunération en trésorerie, en autres actifs financiers ou non financiers, ouencore en services autres que publicitaires (autrement dit, des élémentsdont la valeur peut être estimée de manière fiable) ;

– contrepartie différente de celle de l’opération de troc.

1. Un échange de services de publicité semblables n’est pas une transaction générant desproduits des activités ordinaires selon la norme IAS 18.

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3.3.2 Principales divergences avec les référentiels français et US GAAP

➤ Principales divergences avec le référentiel français

Le référentiel français distingue entre troc publicitaire et échanges de publi-cité dans le cadre d’activités Internet, c’est-à-dire les transactions où l’un aumoins des lots échangés concerne une prestation publicitaire effectuée surInternet.

Les premières sont traitées comme des opérations d’échange ordinaires : leproduit est évalué à la valeur vénale de celui des deux lots échangés dont lavaleur est la plus sûre.

Les secondes doivent être évaluées par référence à des ventes « normales »(PCG 321-9), c’est-à-dire des opérations hors troc répondant à des critèressimilaires à ceux de l’interprétation SIC 31. Si l’estimation de la valeurvénale ne peut être considérée comme fiable pour aucun des deux lots échan-gés, le chiffre d’affaires (et les charges correspondantes) est annulé, saufpour le montant correspondant à l’éventuelle soulte reçue ou payée.

➤ Principales divergences avec le référentiel US GAAP

Le Comité d’urgence américain a publié en mai 2000 un texte sur les opéra-tions de troc publicitaire, l’EITF 99-17, « Accounting for Advertising BarterTransactions », aujourd’hui incorporé à la nouvelle codification des USGAAP dans la section ASC 605-20-25, paragraphes 14 à 18. Ce texte, qui ainspiré l’interprétation SIC 31, prévoit l’évaluation de la charge et du produità la juste valeur de la publicité accordée lorsque celle-ci peut être établie demanière fiable en référence à des transactions autres que de troc.

Le texte américain apporte des précisions pratiques qui ne figurent pas dansl’interprétation SIC 31. Ainsi,

– l’entreprise ne peut se référer à des opérations monétaires ou quasi moné-taires anciennes de plus de 6 mois à la date de l’opération de troc (voiremoins si le contexte économique a évolué) ;

– une fois qu’une opération monétaire (ou quasi monétaire) a servi de réfé-rence à une opération de troc, elle ne peut pas être utilisée comme réfé-rence pour d’autres opérations de troc.

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168 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

AUTRES OPÉRATIONS

L’application des IFRS se développant, les questions pratiques sur la justelecture des textes se sont récemment multipliées. C’est en particulier le caspour ce qui concerne la reconnaissance du chiffre d’affaires. Au cours desdeux dernières années, l’IFRIC a ainsi été saisie de demandes d’interpréta-tions sur différents sujets dont les accords de construction immobilière et lestransferts d’actifs de la part de clients.

4.1 Contrats de construction immobilière

Les contrats dont traite l’interprétation IFRIC 15 portent sur la constructionet la vente de biens immobiliers directement par l’entreprise titulaire ducontrat ou indirectement par l’intermédiaire des sous-traitants de celle-ci.Ces contrats peuvent avoir été conclus avant le commencement de la cons-truction ou lorsque celle-ci est en cours. Ils peuvent également concerner lafourniture de biens ou services en complément de la construction.

4.1.1 Logique d’analyse

L’entreprise doit en premier lieu identifier les différents éléments de la tran-saction, si celle-ci consiste en un accord complexe, et ventiler la rémunéra-tion globale entre les éléments séparément identifiables. Ensuite elledétermine la nature de chaque élément : contrat de construction, vente debiens ou prestation de services. La qualification du contrat conditionne lacomptabilisation des produits : s’il s’agit de contrats de construction ou deprestations de services, les produits seront comptabilisés à l’avancement, s’ils’agit de ventes de biens, les produits ne seront comptabilisés qu’au momentde la livraison. L’interprétation permet notamment de préciser le traitementdes ventes en l’état futur d’achèvement (VEFA).

➤ Décomposition du contrat

Si le contrat comporte des éléments autres que la construction immobilière àproprement parler, il convient de le ventiler en autant de composants qu’ilcomporte d’éléments séparables. Ce peut notamment être le cas lorsquel’accord de construction immobilière comprend la vente d’un terrain en susde la construction.

La décomposition de l’accord entre terrain et construction devra être effec-tuée si les droits sur chacun des deux éléments sont séparables. Par exemple,si la vente d’un terrain n’est pas susceptible d’être remise en cause en cas de

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non-réalisation de la construction, l’élément terrain sera considéré commeséparable.

Chaque élément séparé se voit allouer sa quote-part du revenu global de latransaction, évaluée à la juste valeur. Le produit correspondant sera compta-bilisé selon les règles applicables à la nature de l’élément.

➤ Détermination de la nature de la construction immobilière et comptabilisation associée

Le premier enjeu est de distinguer si la construction immobilière strictosensu est un contrat de construction, relevant de la norme IAS 11, ou uneautre nature d’opération, relevant de la norme IAS 18. Pour qu’une construc-tion de bien immobilier soit un contrat de construction, il faut que l’acheteurpuisse :

– spécifier les caractéristiques essentielles du produit, c’est-à-dire dicter seschoix de conception au constructeur ;

– et/ou modifier celles-ci une fois la construction entamée (peu importe quel’acheteur exerce ou non ce droit, il suffit qu’il en dispose).

À l’inverse, si l’acheteur ne peut choisir que parmi des options préalable-ment définies par le vendeur, ou ne peut modifier que très marginalement lescaractéristiques du bien, la transaction n’est pas un contrat de construction.Dans ce cas, le contrat doit être comptabilisé conformément à IAS 18.

Dans le cas le plus usuel, où le constructeur fournit les matériaux, on est enprésence d’une vente de biens. Le revenu est appréhendé lors du transfert àl’acheteur du contrôle et des risques et avantages majeurs inhérents à lapropriété du bien, généralement à l’achèvement lors de la livraison du bien.

Dans certains cas très spécifiques, l’acheteur fournit les matériaux néces-saires à la construction, le constructeur n’ayant qu’à les mettre en œuvre.L’accord porte alors sur une prestation de services dont le revenu est appré-hendé à l’avancement.

➤ Cas des ventes en état futur d’achèvement (VEFA)

Dans les VEFA, l’acheteur devient propriétaire du terrain et des ouvrages aufur et à mesure de la construction ; il ne peut généralement refuser la cons-truction (même inachevée) en cas de défaillance du constructeur. Le transfertde contrôle est donc continu durant toute la période de construction. Dans cecas de figure, et malgré la qualification de vente de biens, le produit seraappréhendé à l’avancement, et non en une seule fois à l’achèvement.

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170 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

4.1.2 Date d’entrée en vigueur et dispositions transitoires

L’IASB a prévu que l’interprétation IFRIC 15 soit applicable aux exercicesouverts à compter du 1er janvier 2009. La Commission européenne a homolo-gué l’interprétation par le règlement n˚ 636/2009 du 22 juillet 2009 publié auJOUE L. 191 du 23 juillet 2009. Les entreprises européennes appliquentcette interprétation au plus tard aux exercices ouverts à compter du1er janvier 2010.

4.2 Transferts d’actifs des clients

4.2.1 Champ d’application

Les accords placés dans le champ d’application de l’interprétation IFRIC 18sont ceux dans lesquels un fournisseur d’accès reçoit de la part d’un client :

– soit un élément d’immobilisation corporelle (à l’exception des infrastruc-tures utilisées dans le cadre d’accords de concession de services pourlesquelles s’applique l’interprétation IFRIC 12),

– soit de la trésorerie exclusivement affectée à la construction ou l’acquisi-tion d’une immobilisation corporelle (à l’exception des subventions publi-ques relevant de la norme IAS 20),

afin de connecter le client à un réseau et/ou de lui fournir un accès continu àune offre de biens ou de services (électricité, gaz, eau…). L’interprétationIFRIC 18 s’applique également aux accords dans lesquels celui qui transfèrel’actif n’est pas le bénéficiaire de la connexion ou de l’accès aux biens ou auxservices.

4.2.2 Principales dispositions

➤ Inscription de l’actif en immobilisation si le fournisseur en obtient le contrôle

Le fournisseur doit comptabiliser le bien reçu en immobilisation corporellelorsque deux conditions sont réunies : le fournisseur a le contrôle de l’actif –notamment il a la capacité de décider comment l’actif sera utilisé et entretenuet quand il sera remplacé – et il en attend des avantages économiques futurs.

➤ Constatation d’un produit en contrepartie

La transaction s’analyse globalement comme un échange de biens ou deservices dissemblables (élément d’immobilisation corporelle contre service).Par conséquent, le fournisseur comptabilise le produit des biens fournis ou

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des services rendus en échange de l’actif transféré conformément à la normeIAS 18, après avoir identifié les services identifiables à comptabiliser séparé-ment.

La connexion d’un client à un réseau constituera un service distinct, àcomptabiliser séparément, notamment si :

– la connexion à un service représente une valeur autonome pour le clientauquel elle est fournie ;

– la juste valeur de la connexion au service peut être évaluée de manièrefiable.

La fourniture au client d’un accès régulier à une offre de biens et servicesconstituera un service distinct, à comptabiliser séparément, notamment si leclient obtient un accès régulier, des biens ou services, ou les deux, à un prixinférieur à celui qui lui serait facturé s’il n’avait pas transféré l’élémentd’actif.

➤ Fait générateur de la comptabilisation des produits

Si le service rendu est ponctuel, comme la connexion au réseau, le produit del’accord est comptabilisé lorsque le service est rendu. Si le service rendu estcontinu, comme la fourniture d’électricité, le produit doit être étalé sur ladurée du contrat ou, s’il ne comporte pas de durée spécifiée, sur une périodequi ne peut excéder la durée d’utilité de l’actif transféré.

4.2.3 Date d’entrée en vigueur et dispositions transitoires

L’interprétation s’applique de manière obligatoire aux transferts d’actifsintervenant à compter du 1er juillet 2009. Une application anticipée estautorisée à condition que les valorisations et les autres informations prévuespar IFRIC 18 soient disponibles à la date à laquelle les transferts ont étéeffectués.

La Commission européenne a homologué l’interprétation par le règlementCE 1164/2009 du 27 novembre 2009 publié au JOUE L. 314 du1er décembre 2009. Les entreprises européennes appliquent cette interpréta-tion au plus tard aux exercices ouverts à compter du 1er novembre 2009.

Exemple

Présentation

L’exemple suivant est tiré de l’interprétation IFRIC 18. Un promoteur immobi-lier construit un ensemble résidentiel dans un secteur non raccordé au réseauélectrique. Pour obtenir l’accès au réseau, il est tenu de construire une mini-centrale électrique qu’il cède ensuite à la société gestionnaire du réseau de trans-

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172 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

port et de distribution d’électricité (TRD). Le contrôle sur l’actif est transféré àl’occasion de la cession.

Disposant de la mini-centrale, TRD raccorde ensuite chacune des habitations auréseau. Le tarif de l’électricité est unique : la réglementation en vigueur interditde le moduler selon que l’utilisateur a ou non transféré un actif à TRD.

Les utilisateurs ont la liberté de choisir leur fournisseur d’électricité mais sonttenus de passer par le réseau électrique de TRD pour être desservis, TRD ayantle monopole de la distribution d’électricité.

Analyse

La transaction entre dans le champ d’application de l’interprétation IFRIC 18.TRD comptabilise donc la mini-centrale électrique en tant qu’immobilisationcorporelle à sa juste valeur.

Comme les utilisateurs du réseau de TRD paient le même prix pour le transportd’électricité qu’ils aient ou non transféré un actif, il est conclu que l’obligationde fournir un accès continu au réseau n’est pas un service séparément identifiablede l’accord. Le raccordement des habitations au réseau est donc le seul servicefourni en échange de la mini-centrale électrique.

À la date de raccordement des habitations au réseau, TRD comptabilise le chiffred’affaires de l’échange à la juste valeur de la mini-centrale.

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9 RETOURS D’EXPÉRIENCE OU COMMENT FONT-ILS ?

CE QU’IL FAUT RETENIR

Indolore et totalement transparent ? ou complexe et à impact ? Comment les groupes fran-çais ont-ils vécu le passage à la « nouvelle pratique du chiffre d’affaires » ?Les IFRS peuvent-ils être le langage de gestion et celui de l’outil de pilotage ? Peut-on leurreconnaître une capacité à mesurer l’activité et la performance opérationnelle desmanagers ?Depuis 2004-2005, plus de cinq années se sont écoulées. Les modèles économiques évo-luent, les offres commerciales se transforment ; comment être prêt à anticiper l’impact deces évolutions dans la formation du chiffre d’affaires ? Comment le dialogue entre les res-ponsables Normes et Procédures et les responsables de la comptabilisation du chiffred’affaires s’est-il établi ? Comment maintenir la qualité de l’application au fil du temps ?L’IASB travaille à la refonte des normes sur la comptabilisation du chiffre d’affaires. L’équili-bre actuellement trouvé autour d’IAS 11 et IAS 18 pourrait-il être affecté par les dispositionsde la future norme « Revenue recognition » ?Six groupes de référence partagent leur expérience et leurs vues sur ces sujets : Areva, bioMérieux, Laboratoires Boiron, Dassault Systèmes, Havas, Steria.Leurs préoccupations et leurs approches sont diverses ; quoi de plus naturel, vu la diversitéde leurs situations respectives ? Il y a cependant deux points sur lesquels tous se rejoi-gnent. Les IFRS sont, chez eux, le langage commun en matière d’information financière etde gestion. Au quotidien, la maîtrise de la comptabilisation du chiffre d’affaires s’obtient parle développement de la conscience des enjeux dans une chaîne allant des responsablesdes offres jusqu’aux contrôleurs de gestion.

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174 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

GROUPE AREVA

◆ Interview de Jean-Pierre Kaminski, service Normes et Procédures

Le groupe AREVA est le leader mondial de l’énergie nucléaire et le numérotrois mondial de la transmission et la distribution d’électricité. Le Groupe estprésent sur l’ensemble de la chaîne du combustible nucléaire.

Ses activités sont organisées en quatre grands pôles. Le pôle Amontregroupe les activités liées à l’exploration et l’exploitation des minesd’uranium, à la conversion et l’enrichissement de l’uranium ainsi qu’à laconception et la fabrication du combustible pour les réacteurs nucléaires. Lepôle Réacteurs et Services regroupe les activités de conception et de cons-truction de réacteurs nucléaires ainsi que des produits et services nécessairesà la maintenance, au fonctionnement, à la modernisation et à l’améliorationdes capacités des centrales nucléaires. Le pôle Aval regroupe les activités derecyclage des combustibles après leur utilisation dans les centrales nucléairesainsi que des services de logistique, d’ingénierie, d’assainissement et dedémantèlement. Le pôle Transmission & Distribution (en cours de cession)regroupe les activités de production, d’installation et de maintenance deséquipements et systèmes pour la transmission et la distribution d’électricitéen haute et moyenne tension.

Les clients du groupe sont les principaux électriciens mondiaux, aveclesquels AREVA exerce une large part de son activité sur la base de contratsà moyen/long terme.

◆ La phase préalable au passage aux IFRS pour le groupe Areva

Au début des années 2000, le groupe Areva a modifié certaines de ses métho-des comptables de façon à se rapprocher des dispositions des normes IFRS.En particulier, pour ses contrats à long terme, le groupe est passé d’une cons-tatation du chiffre d’affaires à l’achèvement à une constatation du chiffred’affaires à l’avancement. Par ailleurs, dans la même période, le groupe aopté pour le provisionnement des engagements postérieurs à l’emploi dansses comptes consolidés.

• Le passage aux IFRS a été transparent pour la reconnaissance du chiffre d’affaires car leGroupe Areva comptabilisait déjà ses contrats de construction à l’avancement.• Une vaste action de formation menée de 2004 à 2006 a permis de former un grand nom-bre de collaborateurs dans les entités opérationnelles.• Aujourd’hui, le pilotage se fait à partir de données IFRS. Il faudrait revenir en arrière si lesnormes n’exprimaient plus la réalité opérationnelle.

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1.1 Comment la transition aux IFRS s’est-elle passée ?

➤ Comment le projet de conversion a-t-il été organisé ?

Le Groupe Areva a mis en place un projet de conversion aux normes IFRS enmai 2003 avec pour objectif d’identifier les principales différences de métho-des comptables et leurs impacts, d’une part, et de préparer le bilan d’ouver-ture au 1er janvier 2004 selon les IFRS, d’autre part. Le bilan et le compte derésultat 2004 retraités selon les IFRS, ainsi que l’analyse des impacts finan-ciers du passage aux IFRS ont été publiés en même temps que les états finan-ciers 2004 en normes françaises.

Dans la phase d’étude préalable puis au cours du projet, le groupe a portéson attention sur les points où les divergences entre normes françaises etnormes IFRS allaient avoir des impacts et entraîner des changements dans letraitement comptable ou la présentation des états.

Les principaux points d’impact identifiés ont été au nombre de cinq :l’actualisation des provisions à long terme (IAS 37), le traitement des écartsactuariels liés aux avantages consentis au personnel (IAS 19) ; le traitementdes instruments financiers, et notamment celui du portefeuille d’actifs finan-ciers constitué en couverture des obligations de démantèlement (IAS 39) et letraitement des options de vente consenties à des actionnaires minoritaires(IAS 32) ; la nécessité de mettre en place une méthodologie pour les tests dedépréciation (IAS 36). En revanche, la constatation du chiffre d’affaires n’apas été considérée comme un sujet à impacts significatifs dans la mesure oùle groupe avait déjà adopté la méthode de comptabilisation à l’avancementsur les contrats à long terme.

➤ Quelle part le thème « Constatation du chiffre d’affaires » a-t-il pris dans le projet d’ensemble ?

Ce thème n’a pas fait l’objet de travaux particuliers dès lors que le groupe, enaccord avec ses commissaires aux comptes, considérait que les méthodescomptables préexistantes étaient en ligne avec les IFRS.

➤ Quelle place votre groupe a-t-il décidé de donner au référentiel IFRS ?

Les IFRS sont le langage du groupe. Areva est un groupe international etnous n’avons pas vocation à gérer les référentiels comptables des 50 pays oùle groupe est implanté. Tout le reporting à destination du groupe est fait enIFRS. À l’occasion du passage aux IFRS, le processus de consolidation a étérepensé, notamment dans le partage des responsabilités entre unités locales etservices centraux.

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176 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Les comptes sociaux sont la responsabilité des unités locales (environ 400)et Areva demande aux comptables locaux d’avoir la compétence nécessairepour les établir conformément aux normes locales. Lorsqu’un choix deméthode comptable est permis par le référentiel national, et qu’une méthodeest compatible avec les dispositions IFRS, il est demandé aux unités de rete-nir systématiquement cette méthode, sauf si ça les pénalise du point de vuefiscal par exemple. Les auditeurs contrôlent les comptes sociaux et la liassede consolidation.

Avant les IFRS, les unités locales renseignaient leur liasse sociale dans lelogiciel de consolidation et donnaient en plus certaines informations complé-mentaires pour permettre à l’équipe de consolidation de faire les retraite-ments, par exemple sur les locations financement.

Depuis le passage aux IFRS, les comptes sociaux ne remontent plus auniveau du groupe et les unités locales sont responsables des retraitements :elles n’ont pas à les remonter pour contrôle aux services centraux. Il estdemandé aux unités locales d’établir des liasses de consolidation en IFRSnatifs, y compris la détermination des différences permanentes et les diffé-rences temporelles qui génèrent les impôts différés. Par contre, le calcul del’impôt différé lui-même reste effectué par les services centraux.

➤ Comment la formation aux IFRS a-t-elle été organisée ?

De 2004 à 2005 et jusqu’en 2006, un vaste plan de formation a été mené àdestination des unités opérationnelles, par des actions de formation interne.

Une équipe de 3 ou 4 experts IFRS à la Direction comptable a commencépar faire des sessions de formation de formateurs (10 à 12 personnes).Ensuite, ont été organisées plusieurs dizaines de sessions de formation assezgénéraliste, couvrant notamment la problématique de présentation des étatsfinanciers, les contrats à long terme, autres produits, provisions en général,provisions pour démantèlement. L’animation était assurée par un binômeentre un spécialiste et un formateur. Ces actions de formation ont eu lieu tanten France qu’à l’international.

Le groupe Areva a refait une action comparable en 2005 au moment de lamise en place d’IAS 39 avec une formation générale sur les risques finan-ciers, leur couverture et sa traduction comptable.

➤ Comment avez-vous procédé pour le manuel de procédures comptables ?

Areva a rédigé une procédure sur la comptabilisation des contrats à longterme. Le manuel de procédures est en ligne sur l’Intranet. Tous les 6 mois, ledépartement Consolidation lors de l’envoi des instructions pour la clôture

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semestrielle ou annuelle rappelle qu’il faut se référer aux procédures émisess’il y a des questions d’application des normes IFRS.

Cette procédure vit depuis lors. Elle a été révisée une ou deux fois pourtenir compte des difficultés ou des problèmes particuliers rencontrés au fil dutemps sur des situations non identifiées à l’origine ou des cas nouveaux. Àtitre d’exemple, il a fallu repréciser le traitement de contrats non encoresignés pour lesquels un commencement d’exécution a eu lieu selon la prati-que établie avec ce client. Nous avons également traité le cas de réclamationsadressées à un client avec lequel le groupe est en litige. Pour l’activité detrading s’est posée la question de savoir s’il fallait l’assimiler à une activitéd’agent dont seule la marge est reconnue.

➤ À quel moment les budgets et le reporting sont-ils passés en IFRS ?

Les premiers budgets IFRS ont été faits à l’automne 2004 pour l’exercice2005. À l’époque, la culture IFRS au sein du groupe n’était pas encore diffu-sée en profondeur. Les budgets 2005 ont donc plutôt été préparés en normesgroupe françaises avec une estimation des impacts des IFRS sur les trois ouquatre points identifiés comme étant susceptibles d’avoir des impacts sur lescomptes. À compter du budget 2006, les budgets ont été établis en IFRS defaçon native.

Depuis lors, tout le dispositif de pilotage et de reporting vers le manage-ment, tout le reporting sur lequel est fondée l’appréciation des performances,repose sur des informations établies selon les IFRS.

1.2 Quels impacts des IFRS dans la phase opérationnelle ?

➤ Lorsque naît un projet de nouvelle offre commerciale, produit ou service, comment procédez-vous ?

Lorsque naît un projet d’évolution d’un modèle économique, de nouvelleoffre commerciale, de nouveau produit ou service, le service Normes etProcédures étudie le projet pour identifier les impacts sur la reconnaissancedu revenu en IFRS puis déterminer les traitements adéquats.

➤ Comment faites-vous pour l’évaluation des impacts IFRS au niveau des contrats ?

Pour les cas standard connus, la détermination du traitement applicable enIFRS est faite au niveau des unités opérationnelles par référence à la forma-tion IFRS et au manuel de procédures comptables.

Pour les sujets compliqués ou sortant de l’ordinaire, où se pose la questiondu traitement comptable approprié, les responsables opérationnels ont

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178 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

souvent le réflexe d’appeler le service Normes et Procédures avant la conclu-sion du contrat s’ils ont conscience que ce qu’ils sont en train de négocierpeut avoir des impacts comptables. Au fil du temps, ils le font de plus en plusfréquemment.

Au service Normes et Procédures, sont organisées régulièrement desformations et des réunions d’actualité pour développer la connaissance desIFRS, la conscience des enjeux pour la constatation du chiffre d’affaires et leréflexe de consultation systématique sur les cas complexes ou nouveaux.L’objectif est d’éviter les situations où les problèmes apparaissent une foisque le contrat est signé et où il faut subir les effets alors qu’il aurait été possi-ble en les anticipant de les prévenir.

Les procédures ne prévoient pas l’établissement systématique d’unedescription du traitement comptable pour tout contrat. Par contre, chaque foisqu’une situation particulière soulève une question sur le traitement compta-ble applicable, le service Normes et Procédures est consulté et se prononce.De plus, dans certains cas, des fiches d’options comptables ont été établies àla demande des commissaires aux comptes.

➤ Aujourd’hui, à quel niveau de responsabilité a été diffusée la culture IFRS ?

Le niveau de diffusion est resté le même que celui choisi en 2004, où la vasteaction de formation menée de 2004 à 2006 a permis de former un grandnombre de collaborateurs dans les entités opérationnelles. Depuis lors,l’action de formation se poursuit à l’initiative des business units ou des sites.Des sessions sur l’actualité des normes sont périodiquement organisées pourle Comité de direction financière Groupe.

➤ Comment vous êtes-vous organisés pour suivre les évolutions normatives ?

Le service Normes et Procédures suit l’actualité normative. Il participe auxtravaux menés dans les cercles de travail professionnels (APDC/ACTEO…).Les changements sont relayés sur le terrain principalement par des réunionsd’actualité organisées par le service Normes et Procédures.

1.3 CAP 2013 ou la future norme Revenue Recognition

➤ Comment le groupe Areva aborde-t-il le projet de refonte des normes sur le chiffre d’affaires ?

Nous participons au groupe de travail d’ACTEO sur le sujet.

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➤ Quelle analyse votre groupe fait-il du document pour discussion « Revenue Recognition » ?

Le document pour discussion a été analysé au printemps 2009 par le serviceNormes et Procédures ; il était prématuré à ce stade de consulter la directionjuridique du groupe.

Pour le Groupe Areva, rappelons-le, l’activité se compose de contratscomptabilisés à l’achèvement ou à la livraison et de contrats suivis à l’avan-cement. Ces derniers sont très majoritaires. Dans le nucléaire, l’avancementest mesuré par la méthode du pourcentage des coûts engagés et contribuant àl’avancement du contrat sur les coûts totaux prévisionnels, limité lorsqu’il ya lieu à l’avancement technique ou physique. Dans le pôle Transmission &Distribution, la méthode appliquée est celle de l’avancement au jalon selonlaquelle le chiffre d’affaires et la marge ne sont comptabilisés qu’au franchis-sement d’un jalon. Les coûts sont accumulés dans les travaux en cours aubilan entre deux jalons.

Lors de l’analyse du document pour discussion, le Groupe Areva n’a pasperçu de modifications susceptibles d’avoir des impacts notables sur lacomptabilisation des ventes de biens. Les modifications concernent l’activitéréalisée dans le cadre de contrats de construction ou de contrats à long termede prestations de services. L’exposé du projet nous amenait à penser que laconstatation du chiffre d’affaires serait retardée au moment où l’entrepriseprestataire aurait remis au client une installation finie et en état de fonction-nement. En effet, ce n’est pas parce qu’il a atteint un jalon, et même un jalonreconnu par le client (avec acceptance), que le prestataire s’est libéré de sesobligations envers le client et lui a transféré le contrôle de l’actif, objet ducontrat1. Mais attendre d’avoir accompli les engagements contractuels enversle client, pour pouvoir reconnaître le chiffre d’affaires, équivaut à revenir à laméthode de constatation du chiffre d’affaires à l’avancement.

1. Prenons le cas de la construction d’une station électrique par T&D. Le fait que la produc-tion des éléments de la station soit terminée dans nos usines, et que les produits aient ététransférés sur le site pour pouvoir les monter, correspond peut-être à un jalon technique,voire à un jalon de facturation. Mais l’obligation de T&D vis-à-vis du client est de lui livrerune station électrique en bon état de marche.Le même raisonnement s’applique au cas de la construction d’une centrale nucléaire. Pourdes installations techniques complexes comme celles-ci, le transfert du contrôle a lieu enmême temps que la prise de possession parce que l’installation est en état de fonctionne-ment. Dans nos activités, nous ne voyons pas qu’on puisse faire un transfert de contrôleprogressif. D’autant que si Areva ne pouvait mener à bien un contrat, le client aurait les plusextrêmes difficultés à faire reprendre l’ouvrage car Areva vend un modèle, l’EPR, qui n’estconstruit que par le Groupe. Un autre fabricant de centrale qui reprendrait le projet, ayantson propre modèle et ne connaissant pas la technologie de l’EPR, devrait tout reprendre à labase.

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180 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Les normes IAS 11 et IAS 18 ne sont peut-être pas parfaites sur le planconceptuel et demandent peut-être à être amendées ou actualisées mais leursdispositions, telles que nous les appliquons, permettent de rendre compte denotre activité d’une façon pertinente. Nous ne voyons donc pas l’intérêtd’une remise à plat complète, si cette démarche doit conduire à des consé-quences telles que l’abandon de la méthode de constatation du chiffre d’affai-res à l’avancement

Sur un plan très concret, les utilisateurs des états financiers attendent que lechiffre d’affaires reflète l’activité de l’entreprise. Or, les dispositions duprojet Revenue Recognition en voulant privilégier la notion de transfert decontrôle de l’actif1 entreraient en conflit avec la mesure de l’activité del’entreprise si elles conduisaient à constater le chiffre d’affaires à l’achève-ment. Dans cette méthode, non seulement la mesure de l’activité, mais égale-ment celle du taux de marge opérationnelle (le ratio Marge/CA) n’auraientaucun sens. Au total, il y aurait dans le cas des contrats à long terme unerégression dans l’utilité de l’information. De plus, sur un plan interne, alorsqu’aujourd’hui tout le pilotage se fait à partir de données IFRS ; il faudraitrevenir en arrière si les normes n’exprimaient plus la réalité opérationnelle.

Telle était notre réaction au mois de juin 2009. Depuis les décisions prisespar le Board à l’automne 2009, et après les réunions de travail tenues avecl’équipe technique de l’IASB, nous comprenons qu’il demeurera possible decomptabiliser un chiffre d’affaires à l’avancement. Toutefois, les futuresdispositions risquent de modifier la manière dont le degré d’avancement estmesuré. Nous relevons aussi que le projet devrait conduire à traiter les garan-ties sur les actifs livrés comme des livrables distincts, auxquels sera allouéeune partie de la rémunération contractuelle. Cela signifie qu’il y aura desimpacts non seulement sur le chiffre d’affaires mais aussi sur la marge descontrats. Il faudra les évaluer et en apprécier les conséquences.

1. Le produit livré ou la prestation de service fournie.

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GROUPE BIOMÉRIEUX

◆ Interview de Rachel Teyssier, responsable Consolidation statutaire

Le Groupe bioMérieux, n˚ 8 au plan mondial, est spécialisé dans le secteurdu diagnostic in vitro destiné à des applications médicales et industrielles. LeGroupe est présent dans plus de 170 pays, au travers de 39 filiales internatio-nales, ainsi que d’un large réseau de distributeurs. Il dispose de 17 unités deproduction et emploie environ 6 000 collaborateurs.

Les systèmes que le Groupe conçoit, développe, produit et commercialisesont composés :

– de réactifs nécessaires à la réalisation des tests biologiques, comme l’iden-tification d’un type de bactérie ou de virus ;

– d’instruments (ou plateformes ou automates) permettant de réaliser destests de façon automatisée à des cadences plus ou moins élevées ; et

– de logiciels destinés au traitement des tests biologiques et de systèmes-experts dédiés à l’interprétation des résultats des tests biologiques, notam-ment pour le suivi épidémiologique et l’aide à la décision médicale.

Le Groupe bioMérieux fournit aussi à ses clients des services pour l’instal-lation et l’entretien des instruments, ainsi que la formation de leurs utilisa-teurs.

2.1 Comment la transition aux IFRS s’est-elle passée ?

Une première approche des impacts d’une mise en œuvre des IFRS a étéeffectuée en 2003, avec la création d’un comité de projet dont l’objectif étaitd’identifier les principaux enjeux du passage aux normes IAS-IFRS. Sespremiers travaux ont porté sur l’identification des normes « stratégiques »pouvant avoir un impact significatif sur les comptes du Groupe. Ce comité deprojet1 a été lancé en octobre 2003 et mis sous l’autorité du directeur finan-cier Groupe. Sur le plan opérationnel, le chef de projet était la Responsabledu service Consolidation & Reporting assistée d’une personne dédiée à ce

• Dans chaque activité, un contrat standard a fait l’objet d’une validation ; certains typesd’opérations ou de clauses ont été expressément interdits.• La direction financière Groupe a mobilisé les directeurs administratifs et financiers de filia-les pour qu’ils soient interrogés et relaient l’information.

1. Formé du directeur financier Groupe, du directeur financier de la filiale France, du directeurdu Contrôle de Gestion international et de la responsable du service Consolidation &Reporting.

2

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182 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

projet et qui ont travaillé avec un consultant externe à la mise en place desnormes.

➤ Quelle part le thème « Constatation du chiffre d’affaires » a-t-il pris dans le projet ?

Le domaine du chiffre d’affaires n’est pas, pour le Groupe bioMérieux, undomaine d’options comptables. Dans ses comptes consolidés en normes fran-çaises, le Groupe comptabilisait son chiffre d’affaires selon des principesglobalement conformes aux dispositions de la norme IAS 18. Celle-ci n’adonc pas été identifiée comme une norme à fort impact1. Néanmoins, lethème a fait l’objet d’une revue approfondie.

➤ Comment l’analyse des impacts a-t-elle été menée ?

Dans la phase d’analyse préalable, des entretiens ont été menés avec desresponsables de vente et des responsables juridiques. En outre, des question-naires de contrôle interne très approfondis ont été envoyés aux filiales lesplus importantes et aux filiales de distribution, pour recueillir leurs pratiquesaussi bien commerciales, que de facturation et de conditions de règlement.

Avec ces remontées d’information en provenance des entités opérationnel-les, il a été conclu que seuls les escomptes accordés aux clients devaient êtreretraités. Ces montants ont été reclassés en diminution des ventes, alorsqu’ils étaient jusqu’à présent considérés comme des charges financières.

L’ensemble de la documentation (questionnaire, réponses dépouillées,synthèses) a été présenté aux commissaires aux comptes qui l’ont analyséelors de leurs travaux de préparation de la clôture semestrielle 2005 puis àl’automne 2005.

➤ Comment avez-vous procédé pour le manuel de procédures comptables ?

Un manuel des procédures et règles de comptabilisation conforme auxnormes IAS-IFRS a été élaboré. Il comprend une procédure dédiée à lareconnaissance des produits selon IAS 18. Diffusé aux filiales ainsi qu’àleurs commissaires aux comptes, ce document constitue leur référentiel.

1. Pour le Groupe bioMérieux, les normes à plus forts impacts ont été celles relatives auximmobilisations corporelles et incorporelles, aux contrats de location (au titre d’un contratportant sur un site spécifique) et aux instruments financiers (au titre de la couverture desopérations en devises).

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2.2 Quels impacts des IFRS dans la phase opérationnelle ?

➤ Quel cadre a-t-il été donné aux activités commerciales pour limiter les risques de difficultés dans la constatation du chiffre d’affaires… ?

Dans chaque activité, un contrat standard a fait l’objet d’une validation.Certains types d’opérations ou de clauses ont été expressément interdits carils iraient à l’encontre des principes de constatation du chiffre d’affaires.

➤ Lorsque naît un projet de nouvelle offre commerciale, produit ou service, comment procédez-vous ?

La direction financière Groupe mène des actions de communication et desensibilisation pour être consultée. Elle a mobilisé les directeurs administra-tifs et financiers de filiales pour qu’ils soient interrogés et relaient l’informa-tion. Toutes les parties prenantes peuvent ainsi correctement anticiperl’impact des opérations sur les états financiers. Le dispositif fonctionne, nousl’avons vérifié en diverses circonstances.

Par exemple, un directeur administratif et financier a été interrogé par lesservices commerciaux de la filiale sur la possibilité de proposer un contrat delocation de matériel avec une option d’achat de montant élevé. Devant lesconséquences du montage, c’est-à-dire l’impossibilité de constater immédia-tement le chiffre d’affaires, cette voie a été abandonnée.

En général, la comptabilisation des ventes d’instruments se fait sans sépa-rer les différents éléments : matériel, logiciel et imprimante, car leur associa-tion est indispensable au fonctionnement de l’appareil. Cependant, dans lecas d’un contrat comprenant la vente d’un logiciel additionnel, non indispen-sable au fonctionnement du matériel, le logiciel additionnel fait l’objet d’unecomptabilisation séparée. Le service consolidation & reporting, a pu vérifierque le directeur administratif et financier de la filiale à l’origine de l’opéra-tion avait été saisi de la question et qu’il l’avait répercutée.

Ceci étant, les activités du groupe sont stables et ce genre de situationsn’est pas fréquent.

➤ Quel dispositif de contrôle avez-vous mis en place pour vous assurer de la bonne application des IFRS ?

Tout d’abord, soulignons qu’à la demande de la direction financière Groupe,les filiales ont aligné leurs méthodes comptables pour l’établissement descomptes sociaux sur les méthodes IFRS chaque fois que la réglementationnationale ne fait pas obstacle à ce choix. Les retraitements IFRS ne sont doncpas très nombreux.

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184 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Au plan local, les directeurs administratifs et financiers de filiales ont pourresponsabilité de s’assurer que les règles Groupe sont bien appliquées. Lescommissaires aux comptes certifient la liasse de consolidation.

Le service consolidation & reporting interroge régulièrement les filiales surles points critiques pour le traitement comptable. Tous les 2 ans, un contrôleapprofondi est effectué en envoyant à toutes les filiales un questionnairedétaillé (5 pages) pour prendre connaissance des activités, des types de tran-sactions, des contrats traités et des pratiques commerciales. Nous pouvonsainsi identifier s’il y a eu des évolutions en la matière et nous assurer durespect des principes comptables fixés par le Groupe. Les contrôles biennauxeffectués depuis 2005 ont confirmé la stabilité des activités et des pratiques.

➤ Comment vous êtes-vous organisés pour suivre les évolutions normatives ?

De manière générale, le Groupe fait régulièrement appel à un expert IFRSpour des points d’actualité sur le référentiel IFRS. Sur les sujets en évolution,l’analyse des impacts pour le Groupe bioMérieux est menée à l’aide d’unquestionnaire avec les points à analyser (ce questionnaire-diagnostic consti-tue notre programme de travail). Généralement, ce travail est mené lorsqueles dispositions sont devenues définitives, c’est-à-dire après l’adoption dutexte. S’agissant de la constatation du chiffre d’affaires, il n’y a pas eud’évolutions pour nous depuis 2005.

2.3 Cap 2013 ou la future norme Revenue Recognition

Le Groupe bioMérieux n’a pas encore entrepris l’étude approfondie du projet« Revenue Recognition ». Actuellement, le Groupe estime qu’il n’y a pasd’enjeux lourds qui rendent nécessaire une analyse des dispositions en projetdès le stade du document pour discussion ou celui de l’exposé-sondage.L’étude détaillée des impacts possibles et des plans d’actions nécessaires seraeffectuée après adoption de la future norme par l’IASB.

LABORATOIRES BOIRON

◆ Interview de Véronique Bouscayrol, directrice des comptes Groupe

• Au passage aux IFRS, le chiffre d’affaires publié a baissé de 10 % sans impact sur lesrésultats• Un effort de pédagogie important a été déployé en interne et vis-à-vis du marché• Reporting interne et reporting externe sont à l’unisson.

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Les Laboratoires Boiron sont le leader mondial de la fabrication et lacommercialisation de médicaments homéopathiques. Le Groupe représenteaujourd’hui près de 4 000 collaborateurs, 17 filiales à l’étranger, 5 sites deproduction et des médicaments distribués dans plus de 75 pays.

L’internationalisation du Groupe remonte aux années 80 ; elle s’intensifiedepuis les années 2000. Le groupe est principalement présent en Europe(Belgique, Espagne, Suisse, Russie et 7 pays de la nouvelle Europe) et enAmérique (États-Unis, Canada, Brésil).

3.1 Comment la transition aux IFRS s’est-elle passée ?

➤ Quelle part le thème « Constatation du chiffre d’affaires » a-t-il pris dans le projet ?

À l’origine, nous avions identifié peu d’impacts car notre Groupe n’a pas depratiques pouvant poser question. L’une d’elle cependant a fait exception :les accords de coopération commerciale avec les distributeurs. Nous avionsconsidéré au départ que ces contrats venaient rémunérer un service etdevaient être constatés en charges ; nos auditeurs ne l’ont pas vu ainsi. Enconclusion, la rémunération de ces accords a été traitée comme une réductionde chiffre d’affaires.

➤ Comment l’analyse des impacts a-t-elle été menée ?

Dans la phase d’analyse préalable, la direction des comptes Groupe a cons-truit un questionnaire de contrôle interne pour le thème « constatation duchiffre d’affaires ». Les membres du service consolidation se sont ensuitedéplacés dans les filiales et ont travaillé avec l’équipe locale pour collecterles informations demandées.

➤ Comment avez-vous procédé pour assurer l’exhaustivité de la revue du chiffre d’affaires ?

Dans les différentes sociétés du groupe, l’équipe finance est composée d’undirecteur ou responsable administratif et financier, épaulé d’un responsablecomptable et/ou d’un contrôleur de gestion. Nous avons adressé des ques-tionnaires aux directeurs administratifs et financiers. Sous leur responsabi-lité, le responsable comptable en lien avec le contrôleur de gestion a assurél’évaluation des retraitements à effectuer en IFRS, des retraitements qui sontrestés simples et n’ont pas nécessité de faire appel à l’analyse spécifique decertains contrats.

En effet, la seule pratique ayant posé question correspondait aux accords decoopération commerciale qui sont régis par un contrat maître. Celui-ci a été

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186 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

bien analysé et une fois le traitement comptable déterminé, il n’y a pas eu àsolliciter les autres services, les impacts étant bien maîtrisés dans les fonc-tions finances.

➤ Quelles actions avez-vous menées pour préparer les équipes aux changements ?

Nous avons conduit en interne des actions de formation pour tous les cadresde la fonction finance, soit une cinquantaine de personnes, et l’audit interneGroupe. Dans chaque filiale, les deux à trois personnes responsables de laconstatation du chiffre d’affaires ont participé à ces formations : le responsa-ble comptable, le responsable du contrôle de gestion et le directeur adminis-tratif et financier.

De manière systématique, des fiches « normes IFRS » ont été constituées etdiffusées. Elles sont intégrées dans le manuel de consolidation.

➤ Dans le système d’information, comment gérez-vous le double référentiel ?

Dans notre architecture comptable, les informations IFRS résultent de retrai-tements des comptes établis selon les normes locales. Les retraitements sontdécentralisés : ils sont préparés par les responsables de la comptabilisationdu chiffre d’affaires et remontés dans le logiciel de consolidation.

3.2 Quels impacts des IFRS dans la phase opérationnelle ?

➤ Lorsque naît un projet de nouvelle offre commerciale, produit ou service, comment procédez-vous ?

Le service juridique et le service marketing ont été sensibilisés sur le faitqu’ils doivent informer la direction comptes Groupe pour qu’elle déterminele traitement approprié.

➤ Quel dispositif de contrôle avez-vous mis en place pour vous assurer de la bonne application des IFRS ?

Le dispositif existant inclut une pluralité d’actions. Il prévoit des contrôles auniveau local et au niveau central.

Au niveau local, tous les retraitements sont justifiés et documentés. Dans lecadre du processus de clôture, les responsables comptables ou les responsa-bles du contrôle de gestion les supervisent systématiquement. Ils effectuentégalement des revues analytiques du chiffre d’affaires.

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Le contrôle de deuxième niveau est effectué par la direction comptesGroupe. C’est-à-dire que les filiales remontent au groupe une réconciliationde leur liasse en normes locales avec les IFRS en plus de leur liasse de conso-lidation IFRS et que la direction comptes Groupe contrôle la justesse de cetteréconciliation.

Il faut également dire que le chaînage entre le reporting et les budgets oureprévisions est aisé car tout est géré dans le logiciel de consolidation avec unmême plan comptable, des natures de retraitements spécifiques et permetainsi une comparaison aisée des données.

➤ Quelle place votre groupe a-t-il décidé de donner au référentiel IFRS ?

Dès l’origine, nous avons considéré nécessaire que reporting interne et repor-ting externe soient à l’unisson, l’information en IFRS devant être un reflet dumode de suivi de la gestion par le management de l’entreprise. Nous sommesdotés d’un outil unifié qui couvre la consolidation statutaire, le reporting degestion groupe et le budget. Ils ont été adaptés dans la même période afin derefléter les chiffres en IFRS, dont la nouvelle notion de « produitsordinaires » liés aux ventes.

Depuis 2005, toutes les analyses de gestion sont réalisées en normes IFRSau niveau du Groupe. Les performances des équipes commerciales, sontdésormais rapprochées de la base du chiffre d’affaires net.

➤ Comment vous êtes-vous organisés pour suivre les évolutions normatives ?

Nous avons mis en place une veille réglementaire, notamment via des alertese-mail, des abonnements à des revues spécialisées, des journées de formationprofessionnelle… Nous faisons régulièrement appel à un expert IFRS afin deprocéder à une mise à jour de l’actualité comptable et des obligations enmatière de publication de comptes consolidés (et annexes).

L’impact pratique des nouveaux textes est étudié par la direction comptesGroupe.

Lorsqu’interviennent des changements, nous tenons des réunions interneset, le cas échéant, des séminaires pour les filiales. Nous préparons une noted’application à destination des services/filiales concernés. Nous procédons àl’actualisation du manuel des normes comptables groupe. Une informationsur les évolutions du système d’information paraît dans la newsletter interne.

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188 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

DASSAULT SYSTÈMES

◆ Interview de Thibaut de Tersant, directeur financier Groupeet Frédéric Dunod, directeur comptable et reporting financier

Dassault Systèmes est le fruit de l’essaimage d’une équipe d’ingénieurs deDassault Aviation travaillant au développement de logiciels destinés à laconception de produits en trois dimensions (3D). Aujourd’hui, la société estle leader mondial en termes de parts du marché des solutions logiciellesaxées sur la gestion du cycle de vie des produits (PLM) et sur la conceptionmécanique en trois dimensions (3D).

4.1 Comment la transition aux IFRS s’est-elle passée ?

Cette transition a été relativement indolore et transparente car, antérieure-ment au passage aux IFRS, Dassault Systèmes reconnaissait son revenu surles logiciels vendus selon les US Gaap (notamment le SOP 97-2 etl’EITF 00-21, les standards de référence pour la reconnaissance du revenudans les sociétés de haute technologie), plus exigeants que les IFRS ou leréférentiel français sur le sujet. Se conformer aux US Gaap n’est toutefoispas toujours la solution idéale pour les revenus tirés de la vente de logiciels,en particulier sur deux points.

Les normes américaines imposent d’allouer la valeur totale d’un contrataux différents composants de la vente (par exemple, le logiciel lui-même et laformation qui l’accompagne) sur la base de la VSOE1 de la juste valeur. Cetteévaluation est complexe et il est parfois impossible de démontrer l’existencede cette VSOE pour un des composants. Dans ce cas, c’est généralement lareconnaissance de la totalité du revenu du projet qui est différée jusqu’à laréalisation de la prestation de services ou la fourniture de biens la plus éloi-gnée dans le temps. En revanche, les charges continuent à être comptabiliséesdans la période où elles sont encourues.

Il faut noter que des discussions importantes ont eu lieu en 2008 et 2009 ausein des autorités réglementaires américaines pour essayer de remédier àcette difficulté. Elles ont abouti à l’adoption de l‘interprétation EITF 08-01,qui remplacera EITF 00-21 en en modifiant profondément certains aspects.

• Le passage aux IFRS a été indolore et transparent pour la comptabilisation du chiffred’affaires.• Nos inquiétudes portent sur le document pour discussion Revenue Recognition.

1. Vendor Specific Objective Evidence.

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Cette évolution est intéressante même si elle ne touche pas directement lesventes de logiciels.

De la même façon, les normes américaines imposent dans certains cas dedifférer le revenu de l’ensemble d’un contrat si l’un des éléments promis n’apas été livré, cela dans le cas de promesses explicites faites dans le cadre ducontrat mais aussi parfois en considérant que la pratique de la société ou sacommunication ont créé des promesses implicites.

Ces deux points particuliers des US GAAP sont pénalisants au-delà d’unesimple logique économique pour les sociétés de logiciels comme DassaultSystèmes, qui sont incitées par leurs clients à s’engager à des fournitures deservices ou de logiciels sur des périodes assez longues vis-à-vis de leursclients, mais comprennent mal pourquoi ces prestations futures, quand ellesne représentent qu’une part du contrat total, devraient différer toute la recon-naissance du chiffre d’affaires, au lieu de ne différer que la valeur estiméedesdites prestations.

4.2 Quels ont été les impacts des IFRS dans la vie opérationnelle ?

Rien n’a fondamentalement changé avec l’introduction des IFRS car nousavons vérifié que sur tous les aspects qui concernent le groupe, les US GAAPsont conformes aux principes des normes IFRS. Dans un raccourci depensée, nous disons que les US GAAP sont restés le référentiel utilisé.

4.3 Cap 2013 : la future norme Revenue recognition, quels impacts potentiels ?

Paradoxalement, la sérénité actuellement de mise, en matière de reconnais-sance des revenus dans les sociétés vendant des logiciels, va sans doute céderla place à quelque inquiétude.

Par exemple, en l’état actuel des choses, la future norme fait l’hypothèsequ’il est toujours possible, dès la signature du contrat, de déterminer demanière fiable le montant du futur revenu à comptabiliser. Cela pose de réelsproblèmes d’évaluation lorsque ledit revenu est lié à des conditions deperformance : son montant initialement estimé à 100 pourra être en fin decompte être réduit à 90 ou, au contraire, augmenter jusqu’à 115, introdui-sant ainsi une volatilité dans les comptes de résultat qui n’est pas de nature àéclairer les utilisateurs d’états financiers, bien au contraire.

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190 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

GROUPE HAVAS

◆ Interview de Myriam Guillotin, directrice de la consolidation

Le groupe Havas est le 6e groupe mondial dans le secteur de la publicité et duconseil en communication. Ses principaux métiers sont la publicité tradition-nelle sur les médias classiques et sur Internet, l’expertise média et l’achatd’espace. Les activités du Groupe sont complémentaires les une par rapportaux autres et fonctionnent selon le même modèle économique. Par ailleurs,les offres faites aux clients du Groupe proposent généralement un serviceintégrant l’ensemble des métiers. Le groupe considère que ses activités sontsuffisamment homogènes et interdépendantes pour n’avoir identifié qu’unseul secteur d’activité au sens de la norme IAS 14 comme de la normeIFRS 8.

De manière générale, lors du passage aux IFRS un certain nombre degroupes, et c’est le cas du Groupe Havas, ont eu la volonté de décentraliserun certain nombre de retraitements. Tout ceci a supposé de la part desholdings des explications sur la cause de ces travaux, sur les pré-requis. Pourle groupe Havas, cela a été fait par le directeur financier et la directrice de laconsolidation de l’époque. Des formations ont été organisées pour bien expli-quer aux équipes ce dont il s’agissait, ce qui était attendu d’elles, à quellefréquence. Il y a également eu des formations pour que les opérationnelss’approprient le référentiel. Comme un grand nombre de groupes de la place,le groupe Havas a fait évoluer son outil de consolidation pour choisir un logi-ciel plus adapté au passage aux IFRS. Pour résumer, il y a eu une réellevolonté de communiquer, d’expliquer, de mettre en place les outils pourassure un suivi correct du passage aux IFRS.

• La phase préalable au passage aux IFRS

Suite à l’acquisition du groupe américain Snyder Communications Inc. en2000, le groupe Havas s’est retrouvé coté au Nasdaq. Ce choix a eu deuxconséquences majeures.

Tout d’abord, le groupe a dû établir des comptes selon les principes comp-tables américains, en plus de ses comptes établis selon les normes françaises.Le groupe a été accompagné dans sa démarche par des consultants externes(juridique et comptable). Cette expérience des retraitements et d’un référen-

• Sur ce process, le groupe Havas n’a pas de difficultés liées aux IFRS. • Les préoccupations portent sur les problématiques opérationnelles de bon traitement destransactions intragroupe mais pas sur la reconnaissance du revenu en lui-même.• Le principal indicateur de performance en interne est le résultat opérationnel déterminéselon les IFRS

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tiel international (différent du référentiel français) a clairement beaucoupfacilité le passage aux IFRS en 2004.

Par ailleurs, étant coté aux États-Unis, le groupe Havas a dû se soumettre àla loi Sarbanes-Oxley. Il lui a ainsi fallu se doter d’un dispositif de contrôleinterne de la production de l’information financière et comptable conforme àla loi américaine et le faire certifier par ses commissaires aux comptes. Cecia été fait sur la période 2004-2005, avec un recours à des consultants exté-rieurs pour formaliser les procédures. Sur le plan fonctionnel, le dispositifrequis est très structurant en termes d’organisation interne et de productionde l’information. De plus, le contrôle interne a un statut, reçoit une attentionet se voit allouer des moyens qu’il n’a pas dans d’autres contextes (postes deresponsables de normes, existence d’un contrôle qualité, nombre de procédu-res important). Un corpus de procédures important et de bonne qualité a ainsiété créé.

En juillet 2005, compte tenu des coûts induits par la loi Sarbanes-Oxley, legroupe Havas, comme d’autres grands groupes français, a décidé de sortir duNasdaq, ce qui a été fait en 2006.

Cependant, bien que les moyens dédiés aient été réduits1, la direction de laconsolidation a fait en sorte de conserver les procédures qui existaient àl’époque, et de les mettre à jour. Dans le domaine comptable et de la consoli-dation, le groupe Havas dispose ainsi d’un manuel de procédures étoffé, clair,bien fait et actuel, qui fixe les règles à suivre par les responsables financiersopérationnels et les centres de services partagés comptables.

• L’organisation de la fonction comptable dans le groupe Havas

Le groupe Havas comprend un très grand nombre de petites structures. Dansplusieurs pays où son implantation est importante, le Groupe a mis en placedes centres de services partagés (CSP) comptables auxquels peuvent recourirles sociétés du pays (ce n’est pas une obligation).

Les CSP, lorsqu’ils interviennent, sont « les experts-comptables des servi-ces de gestion », assurant selon les cas soit la tenue de comptabilité soit larevue de comptabilité. Ainsi, pour la constatation du revenu, le CSP va oubien comptabiliser le revenu2 ou bien vérifier que la comptabilisation par lesservices opérationnels est correcte. Cette solution assure l’homogénéité et laqualité des travaux comptables au niveau local.

De plus, pour des raisons opérationnelles, le Groupe consolide à des seuilstrès bas afin de suivre les revenus et les résultats de façon exhaustive. Environ325 sociétés sont ainsi consolidées, y compris des structures qui génèrent

1. Or les procédures, et par extension le contrôle interne, ne vivent que lorsque des personnesles font vivre, les diffusent, les commentent et les expliquent.

2. Dans tous les cas, la facturation est faite par les services opérationnels.

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192 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

seulement 1 million d’euros de revenu. Mutualisant les compétences et lesmoyens, les CSP permettent de faire, dans le respect de la qualité et desdélais, et de manière fluide, ce qui autrement serait irréalisable.

5.1 Comment la transition aux IFRS s’est-elle passée ?

Pour le groupe Havas, le passage aux IFRS a en quelque sorte été préparé parle passage aux US GAAP et accompagné par la mise en conformité avec laloi Sarbanes-Oxley.

Les principaux points d’impact identifiés ont été au nombre de quatre : lesplans de rémunération en actions1 (IFRS 2), les engagements de retraite etautres engagements postérieurs à l’emploi (IAS 19), les dépréciationsd’actifs (IAS 36) et les OCEANEs2 émises (IAS 32 et IAS 39). La constata-tion du revenu n’en fait pas partie.

➤ Comment le projet de conversion a-t-il été organisé ?

Le Groupe Havas a mis en place un projet de conversion aux normes IFRS enavril 2003 avec pour objectif d’identifier les principales différences deméthodes comptables et de préparer le bilan d’ouverture au 1er janvier 2004selon les IFRS. Le projet s’est accompagné d’un projet de changementd’outil de consolidation et de reporting groupe.

Le projet global de passage aux IFRS a été mis sous l’autorité de la Direc-tion Générale Finances. Sur le plan technique, il a été mené par une équipecentrale appartenant au service de consolidation.

Le bilan et le compte de résultat 2004 retraités selon les IFRS, ainsi quel’analyse des impacts du passage aux IFRS ont été publiés en même tempsque les états financiers 2004 en normes françaises.

➤ Quelle part le thème « Reconnaissance du revenu » a-t-il pris dans le projet ?

Les principaux métiers du groupe Havas sont la publicité traditionnelle surles médias classiques et sur Internet, l’expertise média et l’achat d’espace.

1. Le groupe Havas a instauré des plans d’incitation très importants pour favoriser la fidélitédes managers clés. De même, lorsqu’intervient l’achat d’une agence, il est classique deprévoir au profit des vendeurs, managers actionnaires, des clauses de compléments de prixen fonction des performances futures (earn-out), ou de rachats futurs des titres non immé-diatement cédés (buy-out).

2. OCEANE : Obligation convertible ou échangeable en actions nouvelles ou existantes.

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Sur le plan comptable, le revenu1 du Groupe est essentiellement constituéd’honoraires et de commissions perçus en rémunération des conseils et servicesrendus (communication, stratégie média, planning et achat d’espace publici-taire). Antérieurement au passage aux IFRS, le groupe appliquait déjà laméthode à l’avancement.

Dès les analyses préalables en 2003, il a été conclu que les règles appli-quées en normes françaises2 pourraient être reconduites telles quelles enIFRS, sans que cela appelle de remarque de la part des commissaires auxcomptes.

➤ Comment l’exhaustivité de la revue du revenu a-t-elle été assurée ?

Sur la base du diagnostic initial, il n’y a pas eu de revue du revenu différentede celle que commandait la constatation du revenu en normes françaises. Leseul ajustement effectué dans le cadre de la transition aux IFRS – ajustementconsidéré comme suffisamment peu significatif pour ne pas donner lieu àcommentaires – a été fait en central3.

➤ Quelle place votre groupe a-t-il décidé de donner au référentiel IFRS ?

Le groupe Havas a fait des IFRS le langage commun en matière d’informa-tion financière et de gestion. Par exemple, le principal indicateur de perfor-mance en interne est le résultat opérationnel déterminé selon les IFRS.

L’architecture comptable prévoit que, sur les quatre ou cinq aspects ciblés,où les IFRS diffèrent des référentiels locaux appliqués par le groupe, lesécarts sont traités comme des retraitements. Mais cela ne concerne pas laconstatation du revenu car il n’y a pas de différence de traitement.

➤ Comment la formation aux IFRS a-t-elle été organisée ?

En 2003, les actions de formation générale aux normes IFRS ont été desti-nées prioritairement à l’équipe centrale. Elles se sont intensifiées au long del’année 2004, vis-à-vis notamment des opérationnels des directions compta-bles et financières.

1. Il s’agit d’un revenu net et non d’un chiffre d’affaires au sens des facturations.2. Lors des analyses menées suite à l’acquisition de Snyder Inc., il n’avait pas été identifié de

divergences avec les US GAAP.3. Environ 3 M€, soit 0,2 % du revenu dégagé en normes françaises.

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194 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

➤ Comment avez-vous procédé pour le manuel de procédures comptables ?

Historiquement, le manuel des procédures a été créé à l’occasion de la miseen conformité avec la loi Sarbanes-Oxley (concomitante à la préparation aupassage aux IFRS). Il comprend une procédure de 34 pages relative à la cons-tatation du revenu, claire et bien faite. Elle couvre les situations concrètesque les responsables financiers opérationnels sont susceptibles de rencontrer.Entre autres, la comptabilité de mandataire, sujet important pour le groupe, adonné lieu au développement d’un exemple pratique.

En ligne sur l’Intranet, la procédure est accessible par le centre de servicespartagés et les responsables financiers opérationnels. La version créée en2004 n’a pas eu à connaître de modifications depuis lors car les activités dugroupe Havas sont stables (la part digitale est montée en puissance depuislors mais cette activité existait déjà en 2004) et, sur les aspects qui le concer-nent, la norme est restée stable.

5.2 Quels impacts des IFRS dans la phase opérationnelle ?

➤ Aujourd’hui, à quel niveau de responsabilité a été diffusée la culture IFRS ?

La compréhension des normes IFRS « à impact » est assez largement diffu-sée non seulement auprès des responsables financiers des divisions et agen-ces mais aussi auprès des responsables opérationnels. Le fait que les normesen question soient peu nombreuses permet en effet même aux non-spécialis-tes de s’informer et de se former. De cette façon, les responsables opération-nels peuvent comprendre et anticiper ce qui vient affecter la base de leurperformance.

La direction de la consolidation a ainsi en face d’elle des interlocuteursavisés qui la consultent et la challengent. Certains aspects des IFRS,complexes, sensibles et « nouveaux », demandent de la pédagogie encontinu. Il en va ainsi des charges liées aux rémunérations en actions, large-ment pratiquées dans le groupe Havas.

➤ Lorsque naît un projet de nouvelle offre commerciale, produit ou service, comment procédez-vous ?

Dans le domaine de la reconnaissance du revenu, la situation est stable. Surdifférents autres sujets, la direction de la consolidation est sollicitée, parexemple par les responsables opérationnels des divisions ou par le directeurfinancier, pour aider à anticiper les effets de certaines transactions sur lescomptes.

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➤ Quel dispositif de contrôle avez-vous mis en place pour vous assurer de la bonne application des IFRS ?

Le revenu est une donnée sensible qui est très regardée et la publication durevenu est vécue comme un moment très important. Il n’y a pas de contrôlespécifique aux retraitements IFRS, il serait sans objet. Par contre, il y a descontrôles à différents stades sur la constatation du revenu.

À la direction de la consolidation, une personne est responsable de cecontrôle permanent. Par ailleurs, tous les trimestres, les chiffres de revenupubliés par le reporting et ceux produits par la direction de la consolidation àpartir du même outil sont confrontés. La direction du contrôle/audit internevérifie la bonne application des procédures. Par ailleurs, il n’y a pas d’obser-vation de la part des commissaires aux comptes sur la manière dont est cons-taté le revenu, ni sur les outils à disposition.

Au premier chef, nous voulons que les responsables comptables se posentla bonne question : « quelle est l’origine de la transaction et comment doit-elle impacter les comptes du groupe Havas ? ». Pour ce faire, nous menonsdes actions de formation y compris à l’étranger. Le principal souci à la direc-tion de la consolidation, mais il était présent bien avant le passage aux IFRS,porte sur la correcte élimination de l’effet des transactions intragroupe, desorte que le revenu ne soit ni surévalué ni sous-évalué. Nous avons de trèsnombreux cas qui demandent de la vigilance. Par exemple, nous avons uneimportante filiale média française soumise à la loi Sapin1, la filiale médiaespagnole est soumise à une législation différente. La compréhension du trai-tement correct des intragroupe n’est pas toujours évidente pour les responsa-bles comptables dès lors qu’ils ne sont pas soumis à la même législation. Aubesoin, pour certains types de transaction, la direction de la consolidation, ladirection du reporting, ou les deux ensemble, referont l’analyse de la transac-tion pour pouvoir constater correctement le revenu dans les comptes consolidés.

➤ Pour la gestion des évolutions normatives, comment faites-vous ?

C’est par la participation à des cercles de travail professionnels puis par desformations que la direction de la consolidation suit les évolutions du référen-tiel puis y prépare le Groupe. Le référentiel n’en a pas connu en ce quiconcerne la constatation du revenu dans notre champ d’activité.

1. La loi Sapin instaure une transparence sur les conditions de la rémunération du mandataire.Elle prévoit que tout achat d’espace publicitaire ou de prestation ayant pour objet l’éditionou la distribution d’imprimés publicitaires ne peut être réalisé par un intermédiaire (commeune agence media) que dans le cadre d’un contrat écrit de mandat conclu avec l’annonceur.

Page 206: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

196 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

➤ Dans la relation avec vos commissaires aux comptes, quelles évolutions ?

De manière générale, le dialogue a évolué avec les commissaires aux comp-tes car il y a plus de maturité et d’expertise dans les entreprises qu’il n’y enavait par le passé. Il y a aussi plus de volonté de gérer les sujets comptablesde manière autonome. Ce constat est vrai pour le groupe Havas comme pourd’autres.

En cas de nouvelle problématique comptable, la direction de la consolida-tion consulte les commissaires aux comptes en leur soumettant la solutionqu’elle prévoit de retenir. De même, le groupe entend pouvoir bénéficier desaspects interprétatifs sans se voir d’avance imposer l’opinion des auditeursexternes.

5.3 CAP 2013 ou la future norme Revenue Recognition

La direction de la consolidation fait de la veille technique sur les sujetsd’intérêt pour le groupe Havas, c’est-à-dire lorsqu’il y a un risque futur surles états financiers qui demande à être anticipé ou préparé. Ce n’est pas le caspour le projet de refonte des modèles de constatation du revenu.

GROUPE STERIA

◆ Claude Tillard, directeur du Contrôle de gestion et de la Consolidation Groupe et Olivier Barouh, responsable Consolidation Groupe

Avec un chiffre d’affaires 2008 de 1,8 milliard d’euros, le Groupe Steria sepositionne parmi les dix premières sociétés de services informatiques euro-péennes. Ses activités se répartissent entre le conseil et l’intégration desystèmes (51 % de l’activité du Groupe), la gestion applicative (environ10 % de l’activité), la gestion d’infrastructure informatique (30 % de l’acti-vité), le business process outsourcing (8 % de l’activité). Groupe Steriacouvre les pays européens les plus fortement consommateurs en termes deprestations de services informatiques (la France, le Royaume-Uni et l’Alle-

• Aujourd’hui, les IFRS sont le langage de gestion du Groupe.• Il est essentiel que les managers opérationnels comprennent les indicateurs financiers et yadhèrent.• Nous déconnecterions l’information de gestion de l’information financière si le futur modèlede reconnaissance du chiffre d’affaires ne permettait plus de refléter la réalité opération-nelle.

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magne) et il est présent dans 13 autres pays. Ses effectifs étaient d’environ19 000 collaborateurs à fin décembre 2008. Le Groupe Steria est géré selonhuit secteurs opérationnels représentatifs de périmètres géographiques.

6.1 Comment la transition aux IFRS s’est-elle passée ?

➤ Comment le projet de conversion a-t-il été organisé ?

Le Groupe Steria a mis en place un projet de conversion aux normes IFRSdès le début de l’année 2003. Au cours du 1er semestre 2003, un premierdiagnostic a été mené qui a abouti à l’identification des principaux impactssur les comptes consolidés, liés au passage aux normes IAS. La mise enœuvre en termes de processus et de système d’information, réalisée en 2004,s’est accompagnée de la mise en place d’un nouvel outil de consolidation,plus souple que le précédent et plus adaptable en cas d’évolution des normes.Le Groupe Steria a publié ses comptes 2005 en IFRS avec, conformément àla norme, un retraitement et un rapprochement des données 2004.

➤ Quelles ont été les problématiques majeures identifiées en relation avec le chiffre d’affaires ?

Le Groupe Steria comptabilisait depuis longtemps le chiffre d’affaires descontrats à long terme selon la méthode du degré d’avancement ; il était doncclair que le passage aux IFRS n‘entraînerait pas de changement pour 90 %des opérations. Par contre, nous savions avoir différentes problématiquesopérationnelles à étudier comme le traitement des coûts de transition et detransformation des contrats d’externalisation, les relations d’agence, lescoûts des contrats…

Un groupe de travail sectoriel s’est créé fin 2004, dans le cadre duSYNTEC Informatique1, entre les principaux acteurs du secteur, d’abord afind’échanger sur les pratiques. Nous avons constaté qu’elles étaient assezvoisines d’un groupe à l’autre. Dans un deuxième temps, nous sommespassés à la phase d’étude proprement dite.

Par exemple, en normes françaises, les coûts de transition et de transforma-tion étaient inscrits à l’actif puis étalés sur la durée du contrat. Nos concur-rents américains activaient ces coûts. À première lecture, rien dans la normeIAS 18 ne semblait permettre semblable solution. Nous avions donc troispréoccupations : trouver – à partir d’une lecture commune – une solutionpour les comptabiliser d’une manière qui fasse sens économiquement, avoir

1. SYNTEC Informatique, l’un des syndicats constitutifs de la Fédération SYNTEC, est lachambre professionnelle des sociétés de conseil et de services informatiques, des éditeursde logiciels et des sociétés de conseil en technologies.

Page 208: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

198 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

des pratiques homogènes entre opérateurs français et ne pas laisser s’intro-duire de différences marquées avec nos homologues américains.

Le groupe de travail sectoriel a aussi mené une étude sur l’identificationdes relations de mandataire en substance, celles où l’entreprise constate unchiffre d’affaires net (une commission) et non un chiffre d’affaires brut et descharges. Ici également, nous avons fixé une méthodologie d’analysecommune.

Les conclusions des travaux ont été présentées aux commissaires auxcomptes qui les ont acceptées.

➤ Comment l’exhaustivité de la revue du revenu a-t-elle été assurée ?

Après les avoir formés (cf. infra), nous avons demandé à nos correspondantsdans les 8 zones géographiques – les directeurs financiers et comptables etles contrôleurs de gestion – de passer en revue les portefeuilles de contratssous leur responsabilité, de revoir les contrats complexes et de nous les trans-mettre pour que nous puissions les analyser ensemble.

➤ Quelle place votre groupe a-t-il décidé de donner au référentiel IFRS ?

Le Groupe cherche dans toute la mesure du possible à être en « IFRS natif ».Dans leurs comptes sociaux, les filiales retiennent la méthode conforme auxIFRS, dès lors que les normes locales n’y font pas obstacle.

Tout le reporting à destination du groupe ainsi que les tableaux de bord etles budgets sont en IFRS, avec des indicateurs alignés sur ceux de la commu-nication financière.

➤ Comment avez-vous organisé la formation à la nouvelle reconnaissance du revenu ?

Une fois les questions d’interprétation clarifiées, la direction du Contrôle degestion et de la Consolidation Groupe a organisé des actions de formation àl’intention de ses correspondants. Il s’agissait de leur présenter l’approchedes IFRS au sens large, puis de préciser les changements par rapport à lapratique antérieure et d’insister sur les points de vigilance, c’est-à-dire lespoints à revoir dans les contrats et, en particulier, dans le traitement descontrats complexes. Nous avons ainsi formé environ une quarantaine depersonnes, qui ensuite ont formé leurs propres interlocuteurs.

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➤ Comment avez-vous procédé pour le manuel de procédures comptables ?

Nous avons préparé un document complet qui, en une cinquantaine de pages,présente les normes Groupe relatives à la reconnaissance du chiffre d’affai-res, les procédures internes et le système d’information. Il est orienté métieret parlant pour les responsables opérationnels. Nous l’avons voulu pratique etconcret : les méthodologies d’analyse sont présentées à l’aide d’arbres dedécision qui expliquent les questions à se poser et les critères qui déterminentles réponses. Il a été diffusé aux opérationnels et à tous les responsables de lacomptabilisation du chiffre d’affaires.

➤ À quel moment, les budgets et le reporting sont-ils passés aux IFRS ?

Le premier budget en IFRS a été celui de l’année 2005, préparé à l’automne2004. Le Groupe venait à ce moment-là de changer d’outil budgétaire ; nousl’avons paramétré pour être d’emblée en IFRS.

6.2 Quels impacts des IFRS dans la phase opérationnelle ?

➤ Faites-vous une évaluation systématique des impacts IFRS pour chaque contrat ?

Le Groupe Steria a un processus très structuré d’approbation des offrescommerciales. Dès le stade de l’élaboration d’une proposition, le contrôleurde gestion fait une simulation financière détaillée des conditions d’enregis-trement comptable du contrat selon les IFRS. Cette simulation vient étayer ledossier soumis à l’instance de validation de la proposition.

Peu de temps après le passage aux IFRS, nous en avons revu la présentationpour l’harmoniser au sein du Groupe. Des contrôles supplémentaires ont étémis en place dans le système de gestion pour éviter tout risque de décalageentre la dernière simulation validée avant remise de la proposition et l’ouver-ture du contrat.

➤ Aujourd’hui, à quel niveau de responsabilité la culture IFRS a-t-elle été diffusée ?

Aujourd’hui, tous les patrons opérationnels et les contrôleurs de gestion sesont approprié les IFRS dans leur domaine de responsabilité. Ils les compren-nent et y adhèrent.

Page 210: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

200 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

➤ Pour le suivi des évolutions normatives comment faites-vous ?

Depuis l’adoption et l’entrée en vigueur d’IFRIC 4, « Déterminer si unaccord contient une location », il n’y a pas eu de nouveau texte portant sur lareconnaissance du revenu qui nous concerne. De manière plus large, nousfaisons une veille sur l’évolution des IFRS notamment grâce aux travaux duClub Finance du Syntec et en assistant à des conférences.

6.3 CAP 2013 : la refonte des modèles de constatation du chiffre d’affaires

➤ Avez-vous répondu à la consultation de l’IASB – FASB ?

Le Club Finance de SYNTEC Informatique a créé en son sein un groupe detravail spécifique afin de mener l’étude des propositions du Board et derépondre à la consultation.

➤ Quelle analyse votre groupe fait-il du document pour discussion « Revenue Recognition » ?

Les vues préliminaires exposées dans le document pour discussion auraient,si elles étaient entérinées dans la future norme, des implications majeurespour les entreprises de notre secteur. Sur toute l’activité de conseil et d’inté-gration de systèmes (50 % du chiffre d’affaires du Groupe Steria) nous nepourrions plus reconnaître de chiffre d’affaires à l’avancement mais devrionsrevenir à une méthode à l’achèvement. Ce serait très grave à deux titres.

D’une part, le compte de résultat ne donnerait plus la mesure de l’activitéde l’entreprise et, par conséquent, de sa performance. De plus, le fait decomptabiliser le chiffre d’affaires à l’achèvement rendrait aussi bien lecompte de résultat que le bilan très volatils d’une année à l’autre. Quellesdemeureraient la qualité et l’utilité de l’information financière dans cesconditions ?

D’autre part, le chiffre d’affaires comptable perdrait toute utilité pour lepilotage et le reporting en interne car il n’aurait plus de sens pour les patronsopérationnels. Comment leur dire : « vous n’avez pas travaillé, vous n’avezrien produit, vous n’avez pas contribué au résultat du Groupe, vous n’avezpas généré de performance tant que le contrat n’est pas achevé, tant que lasolution que vos équipes développent n’a pas été « transférée » au client ».Ce qui est vrai pour le reporting l’est également pour le pilotage ; il estimpensable de dire à un manager « pour l’année prochaine, vos objectifs dechiffre d’affaires et de marge sont de zéro ».

Si les dispositions de la future norme ne marquaient pas d’infléchissementpar rapport au document pour discussion, nous ne verrions pas d’autre solu-tion que de déconnecter l’information financière et l’information de gestion.

Page 211: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

10 IMPACTS DE LA PREMIÈRE APPLICATIONSUR LES ÉTATS FINANCIERS

CE QU’IL FAUT RETENIR

• Les impacts financiers concrets de la première application d’IAS 18 et IAS 11 en 2004-2005 ont été analysés pour un échantillon de 50 groupes européens assurant une largecouverture géographique et sectorielle.• Sans être systématiques, ces impacts sont fréquents. Dans l’échantillon, 36 groupes (soit72 %) mentionnent un impact ; les 14 autres (28 %) ne font état d’aucun impact ou signalentleur caractère non significatif.• Pour plus de 90 % des cas observés, les impacts identifiés se traduisent par une réductiondu chiffre d’affaires en IFRS par rapport au référentiel antérieur, éventuellement accompa-gnée d’une diminution du résultat et des capitaux propres.• En valeur relative, les impacts des reclassements sans impact sur le résultat sont plusimportants que les ajustements tenant à des changements de règles d’évaluation.• Le caractère national des impacts ressort avec évidence. Ceci reflète l’importance desdivergences entre les IFRS et les normes comptables du pays de la société-mère sur lesprincipes de constatation du chiffre d’affaires. Réduits pour les groupes anglais, les impactssont significativement plus élevés pour les groupes français.• Le caractère sectoriel des impacts, lui aussi, est marqué. La grande distribution, les fournisseurs de celle-ci, le secteur de la pharmacie et des bio-technologies ont présenté un chiffre d’affaires en IFRS inférieur à celui de leur référentielantérieur mais sans incidence notable sur le résultat et les capitaux propres.

Page 212: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

202 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

PRÉSENTATION DE L’ÉCHANTILLON

Un échantillon de 50 groupes européens cotés1 a été constitué pour analyserles impacts concrets de l’application d’IAS 18 et/ou IAS 11 sur les trois indi-cateurs financiers majeurs que sont le chiffre d’affaires, le résultat net et lescapitaux propres. La composition de l’échantillon figure en annexe.

Selon leur référentiel comptable antérieur, le chiffre d’affaires cumulé des50 groupes sur l’exercice de transition2 s’est élevé à 913 milliards d’euros etleur résultat net consolidé à 44 milliards d’euros ; leurs capitaux propres à ladate de transition représentaient 292 milliards d’euros.

Dans la construction de l’échantillon, priorité a été donnée à la couverturesectorielle, afin de prendre en compte une variété de problématiques tenant àla diversité des biens ou des services offerts. Les secteurs ont été définis parréférence à l’Industry Code Benchmark d’Euronext à un niveau intermédiaireentre secteurs et sous-secteurs. La nomenclature qui en découle est similaireà celle retenue dans la plupart des études parues sur la mise en œuvre desIFRS et ses impacts. Quelques secteurs ont été laissés hors du champ de nostravaux soit qu’ils présentent des problématiques spécifiques non traitées àl’époque par les IFRS soit qu’aucun impact n’était d’évidence à attendre.Ensuite, pour ménager une certaine diversité géographique, les groupes ontété sélectionnés de telle sorte qu’au moins un groupe non-français soitprésent dans chacun des secteurs retenus, et qu’au total, la part des groupesnon français soit de l’ordre de 50 %.

À l’opposé, l’industrie automobile, les opérateurs de télécommunication ainsi que les équi-pementiers de télécommunication, lorsqu’ils ont enregistré une contraction de leur chiffred’affaires, constatent une réduction simultanée de leur résultat net et de leurs capitaux pro-pres.• Ces différentes observations tendent à confirmer que l’introduction des IFRS améliore lacomparabilité de la mesure d’activité entre acteurs d’un même secteur en gommant les dis-parités dues aux différences des normes locales.• De manière générale, les groupes ont privilégié les options de mise en œuvre leur permet-tant d’éviter ou de limiter les ruptures de série en matière de mesure d’activité.• L’exercice de pédagogie se révèle essentiel pour aider les investisseurs et analystes à biencomprendre la nouvelle mesure d’activité et souligner, lorsque c’est le cas, que la perfor-mance opérationnelle et les flux de trésorerie futurs ne sont pas modifiés.

1. Tous ces groupes sont de « nouveaux adoptants » des IFRS dans le cadre du règlementIFRS pris par l’Union européenne en 2002.

2. Pour un groupe dont l’exercice coïncide avec l’année civile, la date de transition correspondau 1er janvier 2004 et l’exercice de transition à l’exercice clos le 31 décembre 2004.

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En définitive, les secteurs couverts sont au nombre de 11, avec une prédo-minance de l’industrie agroalimentaire (7 groupes), de la grande distribution(6 groupes), de l’industrie pharmaceutique (7 groupes) et des télécommuni-cations (7 groupes).

VENTILATION SECTORIELLE DE L’ÉCHANTILLON 1

(Montants en millions d’euros)(Source : rapports annuels, exercices 2004 ou 2004-2005)

L’échantillon couvre 8 pays différents au sens du pays d’implantation de lasociété tête de groupe, même si la France (27 groupes) et le Royaume-Uni(11 groupes) y sont plus particulièrement représentés.

VENTILATION GÉOGRAPHIQUE DE L’ÉCHANTILLON

(Montants en millions d’euros)(Source : rapports annuels, exercices 2004 ou 2004-2005)

Divers par leur origine géographique ou leur appartenance sectorielle, lesgroupes de l’échantillon présentent aussi une diversité de taille. Vingt-septgroupes génèrent plus de 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Représen-tant 54 % de l’échantillon en nombre, ils comptent pour plus de 90 % duchiffre d’affaires, du résultat net et des capitaux propres cumulés de l’échan-

1. LGAAP : Local Generally Accepted Accounting Principles, ce qui désigne ici les référen-tiels comptables antérieurement appliqués par les groupes de l’échantillon.

Page 214: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

204 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

tillon. Les seize groupes (soit 32 % de l’échantillon) qui génèrent de1 milliard à 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires comptent pour 7 % à8 % des masses financières considérées. Sept groupes génèrent moins de1 milliard d’euros de chiffre d’affaires ; par leur nombre, ils représentent14 % et, par leurs masses financières, 1 % de l’échantillon.

VENTILATION DE L’ÉCHANTILLON PAR CLASSE DE CHIFFRE D’AFFAIRES

(Montants en millions d’euros)(Source : rapports annuels, exercices 2004 ou 2004-2005)

ANALYSE GLOBALE

Seuls les impacts découlant de l’application d’IAS 18 et éventuellementd’IAS 11, pour les groupes qui appliquent cette norme, sont analysés ici.Même si d’autres normes peuvent avoir une incidence sur la déterminationdu chiffre d’affaires consolidé, celle-ci n’est pas prise en compte dans lecadre de cette étude. Il en va ainsi, par exemple, des modifications de périmètrede consolidation ou de méthode de consolidation applicable à une participa-tion, que certains groupes ont connues lors du passage aux IFRS.

2.1 Impacts globaux : le chiffre d’affaires est en baisse mais l’impact sur le résultat est amorti

Une première remarque s’impose : les écarts entre chiffre d’affaires déter-miné selon le référentiel antérieur et chiffre d’affaires déterminé selonIAS 18 et/ou IAS 11 sont fréquents. En effet, sur 50 groupes pour lesquelsles chiffres sont disponibles, 36 (soit 72 %) font mention d’un tel écart.

Cet écart est de manière générale négatif : pour 31 groupes (86,1 % de ceuxqui enregistrent un impact), le chiffre d’affaires selon les IFRS est moindreque le chiffre d’affaires selon le référentiel antérieur. Cinq groupes (13,9 %)font exception en la matière.

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En valeur relative, l’écart net est de – 1,3 % du chiffre d’affaires déterminéselon le référentiel antérieur. Le solde de – 1,3 % résulte d’une baissemoyenne de – 2,0 % du chiffre d’affaires pour 31 groupes, dont le chiffred’affaires représente 67,6 % du chiffre d’affaires total de l’échantillon etd’une hausse moyenne de 0,2 % du chiffre d’affaires pour 5 groupes, dont lechiffre d’affaires représente 11,9 % de l’échantillon.

Dans plus de 60 % des cas, les groupes qui font état d’une diminution deleur chiffre d’affaires montrent que celle-ci n’a aucun impact sur le résultat ;ils sont 19 sur 31 dans cette situation. Huit groupes (26 %) montrent que ladiminution du chiffre d’affaires s’accompagne d’un impact négatif sur lerésultat net tandis que 4 groupes (13 %) enregistrent simultanément unehausse du résultat net. En effet, certains reclassements peuvent conduire àune réduction du chiffre d’affaires sans incidence sur le résultat, alors quedans la même période, des ajustements de moindre ampleur vont entraînerune augmentation du chiffre d’affaires et du résultat.

SYNTHÈSE DES IMPACTS GLOBAUX

(Montants en milliards d’euros)

2.2 Reclassements ou ajustements

Selon une démarche classique, nous distinguons les effets de purs reclasse-ments, c’est-à-dire de changements de présentation sans impact sur le résul-tat, et les effets des ajustements, c’est-à-dire de changements de règlesd’évaluation ayant un impact sur le résultat. Cette analyse permet decomprendre 98,0 % de l’écart total entre le chiffre d’affaires selon les IFRSet le chiffre d’affaires selon le référentiel antérieur. Les groupes ayant géné-ralement pris le parti de ne pas détailler ou expliquer les écarts de faibleimportance relative, il subsiste un résidu de 2,0 % de l’écart total.

Nombre de groupes

Chiffre d’affaires

Écart en %

Résultat net

Écart en %

Capitaux propres

Écart en %

Avec un impact CA

36 726,4 – 1,7 % 33,7 – 0,7 % 231,2 – 1,6 %

Négatif 31 617,4 – 2,0 % 29,4 – 1,0 % 195,3 – 1,6 %

Positif 5 109,0 + 0,2 % 4,3 1,0 % 35,8 – 1,1 %

Sans impact CA

14 186,5 – 10,8 – 61,3 –

Total 50 912,9 – 1,3 % 44,4 – 0,6 % 292,4 – 1,2 %

Page 216: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

206 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Les reclassements expliquent environ les 3/4 des écarts observés. Ainsi,pour les 31 groupes dont le chiffre d’affaires présenté en IFRS est inférieurau chiffre d’affaires selon le référentiel antérieur, les reclassements contri-buent à hauteur de 1,5 % à la baisse de 2,0 % du chiffre d’affaires tandis queles ajustements y contribuent pour 0,4 %.

VENTILATION DES ÉCARTS OBSERVÉS ENTRE RECLASSEMENTS ET AJUSTEMENTS

(Montants en milliards d’euros)

Comme nous le verrons plus loin, les reclassements sont principalement lefait des groupes français de l’industrie agroalimentaire et de la grande distri-bution, alors que les ajustements sont principalement le fait des groupes fran-çais et italiens du secteur de l’automobile.

LIEN ENTRE ÉCART SUR LE CHIFFRE D’AFFAIRES,ÉCART SUR LE RÉSULTAT ET ÉCART SUR LES CAPITAUX PROPRES

(Montants en milliards d’euros)

Nombre de

groupes

Chiffre d’affaires

Écart en %

Reclassements Ajustements

Nombre Impact en % Nombre Impact

en %

Avec un impact CA

36 726,4 – 1,7 % 29 – 1,3 % 15 – 0,3 %

Négatif 31 617,4 – 2,0 % 26 – 1,5 % 10 – 0,4 %

Positif 5 109,0 + 0,2 % 3 ns 5 ns

Sans impact CA

14 186,5 – – – – –

Total 50 912,9 – 1,3 % 29 – 1,0 % 15 – 0,3 %

Nombre de

groupes

Chiffre d’affaires

Écart en %

Reclasst Impact

CAen %

Ajust Impact

CAen %.

Impact RN en %

du CA

Impact CP en % des CP

Avec un impact CA

36 726,4 – 1,7 % – 1,3 % – 0,3 % – 0,03 % – 1,5 %

Négatif 31 617,4 – 2,0 % – 1,5 % – 0,4 % – 0,05 % – 1,6 %

Positif 5 109,0 + 0,2 % ns ns 0,04 % – 1,1 %

Sans impact CA

14 186,5 – – – – ns

Total 50 912,9 –1,3 % – 1,0 % – 0,3 % – 0,03 % – 1,2 %

Page 217: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

Impacts de la première application sur les états financiers 207©

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Le retraitement opéré sur le chiffre d’affaires s’accompagne parfois d’unajustement opéré sur les charges de la période. Ceci explique que l’impactnet sur le résultat de l’exercice puisse être très sensiblement inférieur auretraitement opéré sur le chiffre d’affaires et même aux ajustements tels quenous les avons définis.

Les retraitements opérés sur le chiffre d’affaires de l’exercice de transitionne permettent pas de préjuger de l’ampleur des ajustements effectués – autitre des normes IAS 18 et IAS 11 – sur les capitaux propres du biland’ouverture. Le constat global peut être fait aussi bien pour les groupes dontle chiffre d’affaires selon les IFRS augmente par rapport au chiffre d’affairesen normes locales que pour les autres.

2.3 Analyse géographique : de fortes disparités nationales

L’analyse géographique révèle des différences marquées selon les pays,notamment entre les deux pays particulièrement représentés dansl’échantillon : la France et le Royaume-Uni. Sur 27 groupes français, toussauf un font ressortir un impact sur leur chiffre d’affaires. Sur 11 groupesanglais, seuls 4 font ressortir un impact sur leur chiffre d’affaires. Ce constat,largement prévisible, montre que l’impact est étroitement dépendant de laproximité ou de la distance entre les principes de constatation du chiffred’affaires dans le référentiel antérieur et dans le référentiel IFRS.

ANALYSE GÉOGRAPHIQUE DES IMPACTS

(Écarts en % de l’indicateur financier)

Nombre de

groupes

dont avec un impact sur le CA

% Écart sur CA

Écart sur RN

Écart sur CP

Allemagne 1 1 ns 0,2% – 1,7 % – 2,8 %

Belgique 2 0 ns ns – 0,4 % – 0,3 %

Espagne 1 1 ns 0,2 % 1,2 % – 1,9 %

France 27 25 93 % – 2,3 % 0,2 %s – 1,3 %

Italie 4 2 ns – 1,5 % 45,4 % – 2,5 %

Luxembourg – – – – – –

Pays-Bas 2 2 ns – 1,1 % ns Ns

Royaume-Uni 11 4 36 % – 0,4 % – % – %

Suède 2 1 ns 0,2 % ns ns

Total 50 36 74 % – 1,4 % – 0,5 % – 1,3 %

Page 218: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

208 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Au-delà du constat sur la fréquence des impacts sur le chiffre d’affaires, lacompréhension de leurs incidences sur le résultat et sur les capitaux proprespasse par une analyse sectorielle puis par l’analyse des causes d’écarts.

2.4 Analyse sectorielle : des contrastes marqués

2.4.1 Vue d’ensemble

Les différences entre secteurs sont marquées. L’industrie agroalimentaire estle secteur pour lequel la fréquence (100 %) et l’impact en valeur relative desécarts sur le chiffre d’affaires (– 5,3 %) sont les plus élevés. Pour autant, ni lerésultat net ni les capitaux propres ne varient du fait des nouvelles règles deconstatation du chiffre d’affaires.

ANALYSE SECTORIELLE DES IMPACTS

(Écarts en % de l’indicateur financier)

nc : La présence d’un groupe aux résultats lourdement négatifs interdit de calculer un écartmoyen qui fasse sens en valeur relative. S’il était calculé pour les seuls groupes dégageant unrésultat positif, le ratio serait nul dans le secteur des services informatiques et de 1,7 % dans lesecteur des voyages et des loisirs.

Nombre de

groupes

dont avec un impact sur le CA

% Écart sur CA

Écart sur RN

Écart sur CP

Aéronautique et équipementiers

3 2 ns – 0,1% ns ns

Agro-alimentaire 7 7 100% – 5,3 % ns ns

Automobile et équipementiers

5 5 100 % – 1,2 % 0,3 % – 2,7%

Grande distribution 6 4 67 % – 1,7 % – 0,5 % – 0,3 %

Luxe 3 2 ns – 1,0 % 0,1 % ns

Medias 4 3 75 % – 0,5 % 0,2 % -

Pharmacie et bio-technologie

7 5 70 % – 0,8 % ns ns

Services informati-ques

4 2 50 % – 0,7 % nc – 0,2 %

Télécommunica-tions

7 6 85 % – 0,6 % – 1,2 % – 2,1 %

Voyages et loisirs 4 1 25 % – 0,2 % nc – 0,1 %

Total 50 36 72 % – 1,3 % – 0,6 % – 1,2 %

Page 219: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

Impacts de la première application sur les états financiers 209©

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.

À un moindre degré, l’industrie pharmaceutique et les biotechnologiesprésentent le même profil. La contraction de 0,8 % du chiffre d’affaires nes’accompagne d’aucun impact important sur le résultat net ou les capitauxpropres des groupes concernés.

En revanche, pour les opérateurs de télécommunications, la réduction duchiffre d’affaires (– 0,6 %) est associée à une réduction du résultat net(– 1,2 %) et des capitaux propres (– 2,1 %). Il en va de même pour la popula-tion des constructeurs automobiles et la grande distribution.

2.4.2 Industrie agroalimentaire : le poids des échanges et des coopérations commerciales

Les groupes du secteur agroalimentaire enregistrent une diminution de 5,3 %en moyenne de leur chiffre d’affaires IFRS par rapport à leur chiffre d’affai-res dans le précédent référentiel. Cette réduction provient exclusivement dereclassements sans impacts sur le résultat ni les capitaux propres.

Ainsi, 3 groupes (Bel et Bongrain, France, ainsi que Diageo, Royaume-Uni) rappellent que les échanges de produits similaires (classiques dansl’industrie laitière mais aussi chez les viticulteurs et producteurs d’alcools),précédemment constatés simultanément en produits et en charges, n’impac-tent plus le compte de résultat.

L’ORIGINE DES ÉCARTS DANS L’INDUSTRIE AGRO-ALIMENTAIRE

Pays Groupe

Reclassements

Échanges de produits similaires

Coopérations commerciales et assimilés

Subven-tions

Ventes d’excédents et de sous-

produits

Escomptes pour

règlement anticipé

France Bel X X X X

Bonduelle X

Bongrain X X X X X

Danone X

Vranken-Pommery

X

Pays-Bas Unilever X

Royaume-Uni

Diageo X

Total 3 6 2 1 2

Page 220: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

210 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Les coopérations commerciales de même que les droits de référencement etles programmes de publicité en coopération avec les distributeurs sont cons-tatés en déduction du chiffre d’affaires, et non plus en dépenses de marke-ting. Sont concernés tous les groupes français, de même qu’Unilever, Pays-Bas ; Diageo (Royaume-Uni) suivait déjà cette règle.

Les deux groupes de l’industrie laitière (Bel et Bongrain, France) ont optépour la constatation des subventions et restitutions (perçues dans le cadre dela politique agricole commune) en diminution des charges et non plus enproduits.

Les ventes d’excédents et de sous-produits sont désormais traitées commedes atténuations de charges qui viennent en ajustement du coût matière (Belet Bongrain, France).

Exemple

Les Fromageries Bel détaillent les reclassements effectués : « L’application de lanorme IAS 18 se traduit par une diminution du chiffre d’affaires tel qu’il étaitprécédemment déterminé sur la base des normes comptables françaises pour lesraisons suivantes :

Les facturations de lait établies dans le cadre d’échanges de lait constituent deséchanges de biens similaires et n’impactent plus le compte de résultat en IFRS,aussi bien au niveau des charges que des produits, hormis les éventuelles régula-risations de qualité du lait ou de coûts accessoires.

Les restitutions et aides à l’exportation sont portées en minoration des coûts enIFRS selon l’option prise par le Groupe en ligne avec la norme IAS 20.

Certaines charges opérationnelles et financières reconnues selon les principesfrançais (coopération commerciale payée à la distribution, escomptes accordésaux clients pour paiement anticipé….) sont dorénavant déduites du chiffred’affaires conformément au principe de juste valeur énoncé par la norme. »

2.4.3 Industrie pharmaceutique et biotechnologies : encore les coopérations commerciales

Pour l’industrie pharmaceutique et les biotechnologies (7 groupes),5 groupes font mention d’un impact de la première application de la normeIAS 18. Le compte de résultat des 2 autres ne montre aucune variation duchiffre d’affaires en IFRS par rapport au chiffre d’affaires en référentiel anté-rieur.

Pour l’ensemble des 7 groupes, la diminution du chiffre d’affaires IFRS parrapport à la référence précédente est de 0,8 % en moyenne. Cette réductionprovient presque exclusivement de reclassements sans impacts sur le résultatni les capitaux propres.

Page 221: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

Impacts de la première application sur les états financiers 211©

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➤ Les reclassements

Deux groupes (Boiron, France, et Glaxo SmithKline French, Royaume-Uni)indiquent que les frais de coopération commerciale qui leur sont facturés parleurs clients sont désormais traités comme des dégradations tarifaires et nonplus comme des frais de marketing.

Un groupe supportant des contributions pharmaceutiques en a analysé lanature (Sanofi-Aventis, France). Celles qui sont déterminées en pourcentagedu chiffre d’affaires sont considérées être une réduction de la rémunérationdu groupe. Elles viennent désormais en diminution des produits et non plusen augmentation du coût des ventes.

Trois groupes (BioMérieux, Boiron et Ipsen, France) ont été amenés àretraiter les escomptes accordés pour règlement anticipé.

➤ Les ajustements

Un seul groupe (Ipsen, France) fait état d’un ajustement sur le chiffre d’affairesprovenant d’une modification dans le rythme de prise en compte des produitsde prestations de services. Des produits qui étaient comptabilisés à la date dela facturation contractuelle sont désormais comptabilisés en fonction del’avancement de la prestation. À la différence des précédents, cet écartengendre un ajustement sur le résultat net de l’exercice et sur les capitauxpropres d’ouverture.

L’ORIGINE DES ÉCARTS DANS LE SECTEUR PHARMACIE ET BIOTECHNOLOGIES

Pays Groupe

Reclassements Ajustements

Coopérations commerciales et assimilés

Contributions pharma-

ceutiques

Escomptes pour

règlement anticipé

Comptabi-lisation à

l’avancement de la

prestation

Belgique OmegaPharma

– – – –

France BioMérieux X

Boiron X X

Ipsen X X

Sanofi-Aventis X

Royaume-Uni

AstraZeneca – – –

Glaxo Smith-Kline French

X

Total 2 1 3 1

Page 222: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

212 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Exemple

La société Ipsen explique :

« a) L’application de la norme IAS 18 modifie le rythme de prise en compte desproduits perçus par le Groupe dans le cadre de contrats de partenariats avecd’autres laboratoires pharmaceutiques. Ces contrats impliquent en général laperception de sommes en début et/ou en cours de contrat (« Milestones »). Enprincipes comptables français, ces produits étaient enregistrés à chacune desétapes définies dans les contrats. Selon le référentiel IFRS, l’enregistrement desproduits est étalé sur la durée des contrats. Cette divergence a une incidencenégative de 3 878 milliers d’euros sur les capitaux propres (avant impôtsdifférés).

b) Par ailleurs, l’application de la norme IAS 18 a conduit le Groupe à reconnaî-tre à l’avancement les produits relatifs à un contrat de partenariat.

Sous le référentiel français, ces produits avaient été reconnus en totalité et,compte tenu des engagements contractuels, une provision pour charges avait étéenregistrée. Ce retraitement ne génère pas d’impact sur le résultat dégagé.L’échelonnement des charges, et corrélativement des produits constatés au titrede ce contrat en normes IFRS, a pour conséquence une réduction du poste« Provisions pour charges » et un accroissement du poste « Autres passifscourants » pour un montant de 9 681 milliers d’euros. 30.5.2.1.2 Produits desactivités ordinaires (E2) :

a) Selon les règles françaises, les escomptes accordés étaient comptabilisés par leGroupe en charges financières. Conformément à la norme IAS 18 « Produits desactivités ordinaires », les escomptes accordés sont, en IFRS, reclassés en réduc-tion du chiffre d’affaires. L’impact de ce reclassement induit, au 31 décembre2004, une diminution du chiffre d’affaires de 2 199 milliers d’euros en contre-partie d’un accroissement des « Autres produits et charges financiers ».

b) Les autres produits et charges opérationnels couvraient, en normes françaises,à hauteur de 38 153 milliers d’euros : des redevances perçues (24 882 milliersd’euros) ; des Milestones reçus (6 811 milliers d’euros) ; et des produits liés àdes refacturations de frais de Recherche et Développement (6 460 milliersd’euros).

Ces éléments, répondant à la définition des Produits des activités ordinairesénoncée par la norme IAS 18, ont été reclassés en « Autres produits del’activité ».

c) Pour les mêmes raisons, les produits de co-promotion (12 298 milliersd’euros), qui étaient antérieurement enregistrés en réduction du poste « Fraiscommerciaux », ont été reclassés dans les « Autres produits de l’activité ».

2.4.4 Télécommunications : distinguons entre opérateurs et équipementiers

Sur 7 groupes du secteur des télécommunications, 6 font état d’ajustementsliés à l’application d’IAS 18 et d’IAS 11. La diminution du chiffre d’affaires

Page 223: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

Impacts de la première application sur les états financiers 213©

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23

11

Page 224: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

214 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

IFRS par rapport au chiffre d’affaires dans le précédent référentiel est de0,6 %. Cette réduction s’accompagne d’une diminution moyenne de 1,2 %du résultat net et de 2,1 % des capitaux propres.

Sans détailler davantage ce point, on relève une différence entre la situationdes 5 opérateurs de télécommunications qui font tous ressortir des impactsfinanciers significatifs et celle des 2 équipementiers de télécommunicationdont l’un indique de faibles impacts et l’autre ne mentionne aucun impact.

➤ Reclassements

Pour 2 opérateurs de télécommunication (France Telecom, France, et BristishTelecom, Royaume-Uni), la rémunération de certains prestataires de services– principalement dans le cadre des numéros à coûts partagés (numérosspéciaux) – est désormais traitée comme un montant collecté pour compte detiers ; l’opérateur n’étant fondé à constater que le chiffre d’affaires net rému-nérant sa prestation spécifique.

Un opérateur (France Telecom, France) qui comptabilisait antérieurementses ventes d’équipements mobiles via un réseau de distribution tiers, auxconditions distributeur, les constate désormais au prix final payé par le client(éventuellement symbolique, dans le cas de certaines offres packagées).

Deux groupes (Alcatel-Lucent et France Telecom, France) enregistrentdésormais les pénalités sur contrats (pour non-respect des performances,retard…) en diminution du chiffre d’affaires et non plus en augmentation descharges

➤ Ajustements

Dans la téléphonie fixe, les frais de connexion au réseau se sont révélés nepas correspondre à une prestation de services distincte pouvant être constatéeen chiffre d’affaires (du fait de l’inexistence d’un marché). Trois opérateursde télécommunication (France Telecom, Deutsche Telekom et TelecomItalia), qui les constataient précédemment à l’activation de la connexion, lesétalent désormais sur la durée du contrat (spécifique au type de produit).

Dans la téléphonie mobile, l’étalement du produit des offres promotionnelles(minutes gratuites) sur la durée d’engagement contractuel engendre un ajus-tement pour France Telecom.

Un équipementier (Alcatel-Lucent, France) indique avoir eu à actualiser lesproduits de certains contrats en raison des délais de règlement particulière-ment longs consentis au client.

Exemple

Pour le groupe France Telecom : « L’impact sur les capitaux propres au1er janvier 2004 lié au retraitement IFRS du chiffre d’affaires hors effet program-

Page 225: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

Impacts de la première application sur les états financiers 215©

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mes de fidélisation est négatif de 1 052 millions (avant effet positif d’impôtdifféré actif de 346 millions d’euros). Cet impact correspond principalement àl’étalement sur la durée moyenne de la relation contractuelle, du revenu associéaux frais de première connexion au service dans la téléphonie fixe.

Le compte de résultat consolidé IFRS 2004 présente un chiffre d’affaires dimi-nué de 782 millions d’euros par rapport au chiffre d’affaires publié selon lesnormes françaises en raison principalement des changements dans les modalitésde reconnaissance du chiffre d’affaires et des changements de présentationdécrits ci-après.

Changement sur les modalités de prise en compte du chiffre d’affaires :

• impact négatif de 80 millions d’euros au titre de l’étalement des revenus asso-ciés aux frais de première connexion au service dans la téléphonie fixe ;

• impact positif de 26 millions d’euros au titre des offres promotionnelles prin-cipalement dans le mobile incluant des gratuités pour lesquelles le revenu estdésormais étalé sur la durée d’engagement contractuel.

Présentation de certaines charges en déduction du chiffre d’affaires :

• impact négatif de 352 millions d’euros au titre du reclassement en réductiondu chiffre d’affaires des reversements aux prestataires de services principale-ment dans le cadre des numéros à coûts partagés (numéros spéciaux) ;

• impact négatif de 345 millions d’euros au titre de la comptabilisation du chif-fre d’affaires de l’équipement mobile dans le cadre d’offres packagéesvendues par un réseau de distribution tiers, au prix payé par le client final,

• impact négatif de 16 millions d’euros au titre des pénalités de performanceversées dans la téléphonie fixe.

Ces éléments étaient comptabilisés en charges selon les normes françaises.

L’effet sur la marge brute opérationnelle consolidée 2004 est négatif de41 millions d’euros. L’impact sur les capitaux propres au 31 décembre 2004 estnégatif de 1 105 millions d’euros (avant effet positif d’impôt différé actif de360 millions d’euros) et inclut principalement l’impact négatif au titre de l’étale-ment sur la durée moyenne de la relation contractuelle du revenu associé auxfrais de première connexion au service dans la téléphonie fixe. »

2.4.5 Constructeurs automobiles et équipementiers : l’impact des ventes avec engagements de reprise en « Europe du Sud »

Sur 5 constructeurs et équipementiers automobiles, tous constatent un impactlors de la première application d’IAS 18.

La diminution du chiffre d’affaires IFRS par rapport au chiffre d’affairesdans le précédent référentiel est de 1,2% en moyenne. Elle s’accompagned’un ajustement de 0,3 % du résultat net et d’un ajustement négatif de 2, 7 %des capitaux propres d’ouverture.

La situation des différents groupes est contrastée. Trois constructeurs auto-mobiles (Fiat, Italie, ainsi que Peugeot et Renault, France) ont opéré des ajus-tements importants au titre de leurs ventes avec engagements de reprise. En

Page 226: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

216 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

revanche, les écarts constatés par le quatrième constructeur de l’échantillon(Volvo, Suède) et par l’équipementier (GKN, Royaume-Uni) sont peu signi-ficatifs. Bien que Volvo ne donne pas de détail, il est permis de supposer queles ventes avec engagements de reprise étaient antérieurement traitées selonune méthodologie comparable à celle d’IAS 18. Pour GKN qui les détaille,les écarts sont « classiques » en ce qu’ils proviennent du reclassement desescomptes pour règlement anticipé.

➤ Les reclassements

GKN fait mention du reclassement en réduction des ventes d’escomptes pourrèglement anticipé.

➤ Les ajustements

Fiat, Peugeot et Renault ont tous trois opéré des ajustements importants autitre de leurs ventes avec engagements de reprise. Dans leur référentiel anté-rieur, les trois groupes comptabilisaient tout ou partie de ces transactionscomme des ventes sur lesquelles la perte prévisible lors de la reprise devaitêtre provisionnée. Dans le référentiel IFRS, ces transactions sont traitéescomme des locations : seule la différence entre le prix de vente et le prixd’achat convenu est constatée en produit avec un étalement sur la durée de lalocation.

La diminution du chiffre d’affaires est de 1 % pour les deux groupesfrançais ; elle atteint 2,4 % pour Fiat. Elle s’accompagne pour tous les troisd’un ajustement négatif sur les capitaux propres d’ouverture dont l’impor-tance varie de – 1,7 %pour Peugeot à – 8,4 % pour Fiat.

L’ORIGINE DES ÉCARTS DANS LE SECTEUR DES CONSTRUCTEURS ET ÉQUIPEMENTIERS AUTOMOBILES

Pays Groupes

Reclassements Ajustements

Escomptes pour règlement anticipé

Ventes avec engagement de reprise

France Peugeot X

Renault X

Italie Fiat – X

Royaume-Uni GKN X

Suède Volvo nd nd

Total 1 3

Page 227: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

Impacts de la première application sur les états financiers 217©

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Exemple

Extrait de la note de transition de Peugeot, Rapport annuel 2004 (p. 223).

Les ventes de véhicules neufs assorties d’une clause de rachat n’entrent pas dansle chiffre d’affaires (voir note 1.5. A). Ces ventes sont remplacées par un produitde location, égal à la différence entre le prix de vente du véhicule neuf et le prixde rachat. Ce produit est enregistré sur la durée du contrat.

Dans le bilan d’ouverture IFRS au 1er janvier 2004 :

• les véhicules sont immobilisés à l’actif du bilan (1 437 millions d’euros), lechiffre d’affaires annulé est comptabilisé en passif non courant(1 962 millions d’euros) ;

• les provisions sont diminuées de 128 millions d’euros, correspondant àl’annulation des provisions pour garantie (67 millions d’euros), dont le coûtest rapporté au compte de résultat à proportion de la marge dégagée sur lesvéhicules loués, et l’ajustement des provisions pour vente avec clause derachat (61 millions d’euros) qui subsistent dans le seul cas où la marge globaleest négative ;

• les capitaux propres consolidés sont diminués d’une partie de la marge réali-sée sur les véhicules vendus préalablement au 1er janvier 2004 (397 millionsd’euros).

Au compte de résultat 2004 :

• la vente du véhicule neuf est remplacée sur la durée du contrat par un produitde location, égal à la différence entre le prix de vente du véhicule neuf et leprix de rachat ; le chiffre d’affaires consolidé est diminué d’un montant de551 millions d’euros ;

• la variation d’une clôture à l’autre, de l’encours net de véhicules vendus avecune clause de rachat génère un produit de 54 millions d’euros, enregistré enmarge opérationnelle, soit une diminution du coût des biens et services vendusde 605 millions d’euros, nette de la diminution de chiffre d’affaires

2.4.6 Grande distribution : les avantages obtenus des fournisseurs

L’échantillon comprend 6 groupes de la grande distribution. Quatre d’entreeux font état d’un écart entre le chiffre d’affaires selon les IFRS et leur chif-fre d’affaires dans le référentiel antérieur.

La diminution du chiffre d’affaires IFRS par rapport au chiffre d’affairesdans le précédent référentiel est de 1,65% en moyenne pour cette population.Elle s’accompagne d’un ajustement de 0,5 % du résultat net et d’un ajuste-ment négatif de 0,3 % des capitaux propres d’ouverture. En pratique, seulsles deux groupes français constatent des impacts significatifs. Pour Casinocomme pour Carrefour, ces impacts sont liés au retraitement des coopéra-tions commerciales en diminution des coûts d’achat.

Page 228: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

218 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

L’ORIGINE DES ÉCARTS DANS LE SECTEUR DE LA GRANDE DISTRIBUTION

2.5 Les contrats à long terme et la méthode à l’avancement pour les groupes français

L’échantillon comprend plusieurs groupes français dont l’activité relève pourpartie des « contrats de construction », ou de prestations de services assimi-lées à de tels contrats, au sens des normes IAS 11 et IAS 18 (Safran, Thalès,France Telecom, Capgemini, Atos Origin). Il est intéressant d’observer quetous, dans leurs comptes consolidés, c’est-à-dire pour les besoins de lacommunication financière, comptabilisaient les produits et la marge descontrats à l’avancement antérieurement au passage aux IFRS. Certes, l’un deces groupes (Capgemini) signale que l’indicateur du degré d’avancement aété révisé sur certains contrats mais aucun groupe n’a eu à changer de modèlelors de la transition aux IFRS.

Exemple

Extrait de la note de transition de Capgemini, Rapport annuel 2005 (p. 223).

L’application de la norme IAS 18 « Produits des activités ordinaires » se traduitpar un impact négatif avant impôts de 56 millions d’euros sur le résultat 2004 etde 12 millions d’euros sur les capitaux propres au 1er janvier 2004. [ …]L’application de la reconnaissance du chiffre d’affaires selon la méthode del’avancement précédemment retenue par le Groupe dans le référentiel françaispour les contrats d’intégration de système et conseils, conduisait à reconnaître lesdépassements sur contrats plus rapidement que ne le préconise la norme IAS 18.Il résulte de l’application de cette norme une augmentation des factures à émettrereconnue en contrepartie des capitaux propres, s’élevant à 12 millions d’euros au

Pays Groupes

Reclassements

Coopérations commerciales

Autres services associés à la

venteNon détaillé

Belgique Delhaize X

France Carrefour X

Casino X

Pays-Bas Ahold X

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Tesco – – –

Total 2 1 1

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1er janvier 2004, et à 3 millions d’euros au 31 décembre 2004, l’incidence corres-pondante sur le chiffre d’affaires de l’exercice 2004 s’élevant à – 9 millionsd’euros.

QUI SONT LES GROUPES PRÉSENTANT LES PLUS FORTS IMPACTS ?

3.1 Les 10 principaux impacts sur le chiffre d’affaires : l’industrie agroalimentaire au premier plan

Huit groupes français figurent parmi les dix groupes qui présentent les plusforts impacts sur le chiffre d’affaires. Un groupe hollandais et un groupeitalien en font également partie. En revanche, la liste ne comprend aucungroupe anglais.

Le principal secteur représenté est celui de l’industrie agroalimentaire avecsix groupes, viennent ensuite l’industrie automobile (2 groupes), la pharma-cie (1 groupe) et la grande distribution (1 groupe).

Le plus souvent, les écarts sur le chiffre d’affaires ne sont accompagnés nid’impacts sur le résultat ni d’impacts sur les capitaux propres. C’est notam-ment ce que l’on peut constater pour les cinq groupes français de l’industrieagroalimentaire en tête de liste avec des écarts entre chiffre d’affaires selonles IFRS et chiffre d’affaires dans le référentiel antérieur allant de – 20 % à– 8,4 % du chiffre d’affaires. Pour tous, ces écarts tiennent, en totalité ou enquasi-totalité, à des reclassements sans incidence sur le résultat.

Dans leur communication financière, tous les groupes concernés insistentsur ce message. Il s’agit pour eux de faire comprendre aux analystes finan-ciers qu’en dépit de la forte rupture de série par rapport au passé, la perfor-mance opérationnelle n’est pas affectée et que les cash-flows futurs ne sontpas modifiés.

LES 10 PRINCIPAUX ÉCARTS SUR LE CHIFFRE D’AFFAIRES

(Montants en millions d’euros)

3

Page 230: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

220 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

3.2 Les 10 principaux impacts sur le résultat net

Les groupes figurant dans le tableau ci-dessous sont ceux pour lesquels enproportion du résultat net en normes locales, la valeur absolue de l’écart lié àl’application des normes IAS 18 et IAS 11 est la plus élevée. On voit ainsiressortir les 6 groupes pour lesquels les nouvelles dispositions de constata-tion du chiffre d’affaires détériorent le plus le résultat et les 4 groupes pourlesquels le résultat est le plus amélioré.

Sur ces 10 groupes, 4 sont des opérateurs de télécommunication et 2 dusecteur automobile, 4 autres groupes relèvent de secteurs variés.

Pour les opérateurs de télécommunication, le tableau met en évidencel’importance relative de l’ajustement effectué par Telecom Italia (Italie) parrapport aux ajustements effectués par Deutsche Telekom (Allemagne),France Telecom (France) et Telefonica (Espagne).

Pour les groupes du secteur automobile, on remarquera que les variationsde portefeuille d’opérations influencent le signe de l’écart observé. Pour Fiat(Italie) comme pour Peugeot (France), le retraitement des ventes avec enga-gement de reprise est à l’origine d’un écart, mais l’écart est négatif pour Fiatet positif pour Peugeot.

LES 10 PRINCIPAUX ÉCARTS SUR LE RÉSULTAT NET

(Montants en millions d’euros)

3.3 Les 10 principaux impacts sur les capitaux propres

Ce sous-ensemble comprend 4 opérateurs de télécommunication et3 constructeurs automobiles ; leur présence ne saurait surprendre. Dans cessecteurs, la nature et l’importance des sources d’impacts ont été précédem-ment notées.

La présence d’un acteur de la grande distribution (Casino, France), d’unacteur de l’industrie pharmaceutique (Ipsen, France) et d’un acteur des servi-ces informatiques (Capgemini, France) a sans doute un caractère pluscirconstanciel.

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Pour Casino (France), rappelons que ce sont les « marges arrière » incorpo-rées au coût des stocks qui sont à l’origine de l’impact sur les capitauxpropres d’ouverture. Ipsen est un groupe de plus petite taille que les neufautres groupes cités ; par rapport à une base de fonds propres plus faible, toutécart en valeur relative tend à être amplifié. Pour Capgemini, comme nousl’avons vu, les écarts viennent d’une différence dans la constatation du chif-fre d’affaires de certains contrats d’externalisation ainsi que d’une différencedans la prise en compte des dépassements sur contrats.

LES 10 PRINCIPAUX ÉCARTS SUR LES CAPITAUX PROPRES

(Montants en millions d’euros)

Page 232: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

222 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

ANNEXE 1VENTILATION DE L’ÉCHANTILLON PAR SECTEUR

(Montants en millions d’euros)

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ANNEXE 2VENTILATION DE L’ÉCHANTILLON PAR PAYS

(Montants en millions d’euros)

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Page 235: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

11 REVENUE RECOGNITION OU LA REFONTE DES NORMES SUR LE CHIFFRE D’AFFAIRES

CE QU’IL FAUT RETENIR

De part et d’autre de l’Atlantique un besoin de remise à plat des normes de comptabilisationdu chiffre d’affaires se faisait sentir. Le FASB et l’IASB préparent cette refonte dans un projetcommun lancé en 2002. L’objectif : définir une norme commune qui améliore les principesde comptabilisation actuellement en vigueur, traite des nouveaux types de transaction etincorpore un guide d’application adéquat.Les vues préliminaires des deux Boards ont été exposées dans le document pour discus-sion publié en décembre 2008. Les deux normalisateurs y proposent un principe unique decomptabilisation pour toutes les activités industrielles, commerciales ou de service.Selon ce principe, le fait générateur de la comptabilisation du chiffre d’affaires est le trans-fert par le fournisseur au client du contrôle de l’actif promis (le bien à livrer ou le service àrendre). Conséquence potentielle perçue : l’impossibilité de constater à l’avancement lechiffre d’affaires des contrats à long terme.Le transfert de contrôle s’apprécie au niveau de chacune des obligations de performance(ou livrables) incluses dans le contrat. Parmi les implications de la définition de livrable : lesgaranties légales sont, selon le document pour discussion, des livrables distincts auxquelsune partie du prix contractuel devrait être allouée.Sans surprise, c’est la conclusion des deux Boards après l’analyse des commentaires reçus.Le projet de norme est donc en cours de développement sur la base du modèle unique pro-posé. Les modalités de mise en œuvre du modèle dans le cas des contrats à long terme doi-vent faire l’objet d’un examen spécifique au cours de cette phase. Affaire à suivre…Les prochaines étapes seront la publication du projet de norme prévue au cours dudeuxième trimestre 2010 et la parution de la norme définitive prévue pour le premier semes-tre 2011.

Page 236: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

226 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

REVENUE RECOGNITION : CONTEXTE DU PROJET ET ORIENTATIONS PROPOSÉES DANS LE DOCUMENT POUR DISCUSSION

Le 19 décembre 2008, l’International Accounting Standard Board (IASB) etle Financial Accounting Standards Board (FASB) ont publié leurs vues préli-minaires sur la comptabilisation des produits provenant de contrats conclusavec des clients, dans un document pour discussion commun.

1.1 Pourquoi refondre les normes actuelles ?

Les produits représentent un indicateur clé de la performance d’une entre-prise pour les lecteurs des états financiers. Or, les dispositions en matière decomptabilisation des produits aux États-Unis diffèrent de celles des IFRS, ettoutes deux nécessitent d’être améliorées.

Le référentiel IFRS est doté de deux normes générales relatives auxproduits (IAS 18, « Produits des activités ordinaires » et IAS 11 « Contratsde construction »).

Cependant, les principes sous-jacents aux deux principales normes ne sontpas cohérents. Pour les ventes de biens, IAS 18 prévoit une comptabilisationdu chiffre d’affaires au transfert des avantages et des risques liés à lapropriété. Pour les contrats de construction et les prestations de services,IAS 11 et IAS 18 prévoient une comptabilisation à l’avancement, générale-ment en fonction de l’activité productive du prestataire.

Le guide d’application d’IAS 18 est exagérément simplificateur, ce quilaisse les entreprises face à des incertitudes sur les modalités d’applicationdes dispositions principielles de la norme. Les problématiques relatives auchiffre d’affaires sont dans le trio de tête des problématiques posées àl’IFRIC (en pourcentage du nombre de questions posées sur la période 2005à 2010) :

– IAS 32 / IAS 39/ IFRS 7 : 24 %

– IAS 19 : 9 %

– IAS 11– IAS 18 : 8 %

Enfin, ces textes déjà anciens (les versions en vigueur ont été adoptées en1993) se révèlent très insuffisants sur les modalités de segmentation d’uncontrat en différents livrables, alors que les transactions à livrables multiplessont légion dans la vie économique actuelle.

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À l’inverse, dans les US GAAP, plus d’une centaine de textes – souventsectoriels – détaillent les règles de constatation des produits. Leurcomplexité, leur enchevêtrement et, éventuellement, leurs incohérences,conduisent à des difficultés d’application. Ils font de la comptabilisation duchiffre d’affaires la principale source d’erreurs demandant rectification dansles états financiers des sociétés américaines. De plus, leurs dispositions nesont pas toujours compatibles avec les principes des IFRS.

Face à ce constat, les deux Boards ont lancé en 2002 un projet conjoint surla reconnaissance des produits. Le document de travail publié endécembre 2008 marque l’aboutissement des premières étapes du projet1.

1.2 Vers un principe unique de comptabilisation du chiffre d’affaires

L’objectif général du projet est de définir un principe de reconnaissance duchiffre d’affaires identique pour tous les contrats conclus avec un clientquelle que soit l’activité considérée2 : construction, vente de biens ou presta-tion de services. Issue d’une remise à plat complète, la future norme éviteraitles incohérences qui peuvent exister dans les textes actuels, elle traiterait desnouveaux types de transactions et fournirait un guide d’application adéquat.

Le document pour discussion aborde les principes généraux de comptabili-sation du chiffre d’affaires et réserve les autres questions pour une étape ulté-rieure.

1. Un document pour discussion correspond à la troisième étape, non obligatoire, du processusde normalisation comptable ; sur des nouveaux sujets d’importance majeure, il vise à expli-citer la problématique traitée et à obtenir les commentaires des parties prenantes largementen amont du développement de la norme.

2. Sans prendre parti au stade du document pour discussion sur les exclusions du champd’application, les Boards interrogeaient sur l’applicabilité des dispositions proposées auxcontrats sur instruments financiers et aux contrats d’assurance. Les commentaires reçusconduiront à exclure ces contrats du champ d’application de la future norme.

Page 238: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

228 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

1.3 … Dès lors qu’il y a contrat commercial

La future norme porterait sur l’ensemble des ventes de biens et servicessusceptibles d’être fournis par une entreprise à ses clients1 dans le cadre d’uncontrat commercial, quelle que soit sa forme : le contrat n’est pas nécessaire-ment écrit mais il faut qu’un juge puisse en ordonner l’exécution. La distinc-tion existante entre les contrats de construction relevant d’IAS 11, et lesventes de biens et de services relevant d’IAS 18, prendrait fin.

1.4 Le fait générateur de la comptabilisation du chiffre d’affaires

1.4.1 … une variation positive de la situation nette du contrat liée à la satisfaction d’une obligation de performance

Un contrat de vente est à l’origine d’une obligation pour le vendeur ou leprestataire : celle d’avoir à livrer un bien ou celle d’avoir à fournir une pres-tation de services. Le même contrat est à l’origine d’un droit pour le vendeurou le prestataire : celui de percevoir le prix de vente du bien ou de la presta-tion.

À toute date, il est possible de déterminer la position nette du vendeur autitre du contrat : celle-ci résulte de la comparaison entre l’actif au titre ducontrat (le droit à percevoir le prix) et le passif au titre du contrat (l’obliga-tion d’accomplir les tâches prévues). Le fait que la position contractuellenette soit un actif, un passif ou une position nulle dépend de l’évaluation desdroits et obligations restants au contrat ; l’actif représente le reste à percevoir,le passif le reste à livrer. À la date de conclusion du contrat, la position nettedu vendeur est nulle, sauf cas des contrats d’emblée déficitaires.

Exemple 1

Un distributeur d’appareils électroménagers signe une vente de 10 téléviseurs auprix unitaire de 1 500 euros. Trois appareils sont disponibles, le client en prendlivraison immédiatement, les autres seront livrés ultérieurement. Le client réglerala facture une fois tous les appareils livrés. À la conclusion du contrat, la positionest la suivante :

• Actif brut au titre du contrat : 15 000 €

• Passif brut au titre du contrat : 15 000 €

Actif net : 0 €

1. Un client est une partie qui a contracté avec une entreprise afin d’obtenir un actif (tel qu’unbien ou un service) qui représente un résultat (une production) des activités ordinaires dufournisseur.

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Immédiatement après la livraison des 3 premiers appareils, la position du contratest devenue :

• Actif brut au titre du contrat : 15 000 €

• Passif brut au titre du contrat : 10 500 €

Actif net : 4 500 €

Exemple 2

Un distributeur d’appareils électroménagers signe une vente de 10 téléviseurs auprix unitaire de 1 500 euros. Trois appareils sont disponibles, le client en prendlivraison, les autres seront livrés ultérieurement. Le client paie la totalité du prixà la signature du contrat.

• Actif brut au titre du contrat : 0 €

• Passif brut au titre du contrat : 10 500 €

Passif net : 10 500 €

Le chiffre d’affaires est généré par les variations positives de la positionnette du contrat (augmentation des droits ou diminution des obligations),qu’elles proviennent de nouveaux contrats, d’avenants au contrat existant outout simplement de l’accomplissement par l’entreprise des tâches prévues.

Exemple 1 (suite)

Entre le moment de la conclusion du contrat et la livraison des trois premiersappareils, la position nette du contrat a varié de + 4 500 euros, conduisant àcomptabiliser un chiffre d’affaires.

1.4.2 La notion d’obligation de performance ou de livrable

Une obligation de performance correspond à l’engagement pris par levendeur de fournir à son client un actif – une ressource économique – qu’ils’agisse d’un bien ou d’un service, individuellement ou bien en conjonctionavec d’autres ressources économiques. Nous utiliserons le terme de« livrable » pour y faire référence. L’engagement peut être implicite ou expli-cite.

Dans cette approche, l’engagement de fournir un service est de mêmenature que l’engagement de livrer un bien. Du point de vue du client, recevoirun service c’est recevoir une ressource économique, même si cette ressourceest instantanément consommée et donc passée immédiatement en charge.

Il est donc possible de concevoir un principe unique de comptabilisation duchiffre d’affaires pour les biens et pour les services.

Page 240: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

230 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Pour permettre une comptabilisation du chiffre d’affaires qui reflète correc-tement la séquence des transferts de ressources au client, les différents livra-bles doivent être comptabilisés séparément si leur transfert n’est passimultané.

Par conséquent, les modalités de comptabilisation du chiffre d’affaires sontétroitement dépendantes :

– des conditions d’identification des différents livrables (obligations deperformance) ;

– des conditions de constat d’une livraison effective ;

– ainsi que des modalités d’évaluation des droits et obligations contractuels

1.4.3 Les conditions d’identification des différents livrables

Tout livrable, explicite ou implicite, facturé ou non, doit donner lieu à identi-fication s’il est susceptible de faire l’objet d’une transaction séparée et s’il nefait pas partie d’un groupe de biens livrés simultanément. Cette deuxièmecondition évite par exemple d’avoir à décomposer la vente d’un ordinateur enune vente de processeur, une vente de disque dur, une vente d’écran…

Exemple (tiré du document pour discussion, annexe A)

Le 29 février 2008, JÉQUIP conclut un contrat pour la fourniture, la livraison etl’installation d’une machine chez un client. Le prix convenu de 15 000 euros estpayable à la livraison. La machine est livrée le 31 mars et installée courant avril.Le transfert de propriété intervient à la livraison.

JÉQUIP vend séparément l’équipement pour 14 000 euros (y compris la livrai-son) et l’installation pour 2 000 euros. La prestation de livraison n’est jamaisassurée indépendamment d’une vente.

Chacun des composants de la transaction pourrait être vendu séparément(JÉQUIP ne fait pas de livraison indépendamment d’une vente mais d’autresfournisseurs et prestataires le font) et correspond à un actif. Par conséquent,chacun des composants constitue un livrable.

Le fait que ces livrables donnent lieu à comptabilisation séparée dépend de ladate du transfert de contrôle au client. L’équipement passe sous le contrôle duclient le 31 mars. C’est aussi à cette date que le service de livraison est fourni auclient1. Le client reçoit le service d’installation lors de l’installation de l’équipe-ment. Par conséquent, JÉQUIP regroupe l’équipement et la livraison et les comp-tabilise séparément de l’installation.

1. Tant que la machine est en transit, aucun actif n’est transféré au client (le service de livrai-son bénéficie au vendeur car la localisation géographique du stock du vendeur se trouvemodifiée).

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1.4.4 Les conditions de constat d’une livraison effective

Le vendeur remplit son obligation, et donc comptabilise un chiffre d’affaires,lorsqu’il transfère un livrable à son client. Ce transfert intervient, selon ledocument de travail, lorsque le client obtient le contrôle du bien, c’est-à-diregénéralement lorsqu’il en obtient la possession physique. De même, pour uneprestation de services, le transfert au client intervient lorsque ce dernierobtient le contrôle du service (qu’il le consomme immédiatement ou l’utiliseà l’amélioration d’un actif).

C’est indéniablement sur ce point que les changements par rapport à l’exis-tant sont les plus marqués et les plus lourds d’enjeux. En effet, le modèleactuel de comptabilisation des ventes de biens retient un critère de transfertdes risques et avantages liés à la propriété et non de contrôle. De plus, pourles prestations de services, la comptabilisation du chiffre d’affaires intervienten fonction de l’activité productive.

Par conséquent, dans un contrat de construction ou de production de biens,le vendeur ou prestataire ne pourra constater de produit en cours de contratque si le client obtient le contrôle de l’actif en cours au fur et à mesure de laconstruction. Ce sera par exemple le cas lorsque le client aura le droit deprendre possession du bien inachevé et de confier à un autre fournisseurl’achèvement de la construction.

Exemples

• Une entreprise de bâtiment de second œuvre conclut un contrat pour la réfec-tion des peintures dans les locaux d’un client. Le client prend possession duservice au fur et à mesure du déroulement des travaux puisque le service s’intè-gre aux murs de l’immeuble dès qu’il est rendu. L’entreprise de bâtiment est doncfondée à constater les produits tout au long de la prestation, sauf stipulationsparticulières du contrat.

• Un promoteur-constructeur immobilier vend sur plan un immeuble à construiresur un terrain qui n’appartient pas au client. Le contrat de vente prévoit unelivraison unique du bien à l’acheteur à l’achèvement de la construction, leproduit de la transaction ne pourra être constaté par le constructeur que lors dutransfert du contrôle du bien, donc à sa livraison.

1.5 L’évaluation du chiffre d’affaires à comptabiliser

Pour comptabiliser un contrat, une entité commencerait par évaluer ses droitset ses obligations provenant du contrat.

Page 242: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

232 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

1.5.1 L’évaluation des droits du vendeur au titre du contrat

À la date de conclusion du contrat, les droits du vendeur seraient évalués auprix contractuel, actualisé s’il y a lieu. L’application au cas des opérationsdont la rémunération n’est pas fixe et à celui des opérations rémunérées ennature sera déclinée à une étape ultérieure du projet.

1.5.2 L’évaluation des obligations du vendeur au titre du contrat

Les obligations de performance à la charge du vendeur seraient elles aussiévaluées à hauteur du prix de vente, éventuellement actualisé. Leur montantne serait pas ultérieurement réestimé, sauf si la transaction sous-jacenteapparaît déficitaire.

Pour les transactions à livrables multiples et donnant lieu à réalisationéchelonnée dans le temps, le prix de vente devrait être réparti entre les diffé-rents éléments proportionnellement à leur prix de vente lors de transactionsséparées. Ces prix de vente séparés pourraient résulter d’estimations fondéessur des observations ou sur des hypothèses internes de l’entreprise.

Exemple (suite de l’exemple JÉQUIP)

Le prix convenu de 15 000 euros est à ventiler entre les deux livrables à compta-biliser séparément.

(1) Remise implicite : 1 000 = 16 000 – 15 000 ; 875 = 1 000 × 14 000/16 000 ; 125 = 1 000× 2 000/16 000

1.5.3 L’évaluation de la position nette du contrat

La position nette du vendeur au titre du contrat résulte de la comparaisonentre l’évaluation de ses droits et celle de ses obligations résiduelles à unedate donnée. Une variation positive de cette position nette entre deux datesdéclenche la constatation d’un chiffre d’affaires dans la période. Au terme ducontrat, le cumul du chiffre d’affaires constaté par livrable et par périodecoïncide avec le prix contractuel.

Prix de vente

séparé

Allocation de la remise

implicite (1)

Évaluation des obligations de performance

Vente et livraison de la machine 14 000 875 13 125

Installation 2 000 125 1 875

Total 16 000 1 000 15 000

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Exemple (suite et fin de l’exemple tiré du document pour discussion)

La comptabilisation du chiffre d’affaires s’effectuerait ainsi.

(1) Fin mars, les droits résiduels au titre du contrat sont nuls car le client a réglé la totalitédu prix convenu ; les obligations résiduelles au titre du contrat correspondent à la prestationd’installation. D’où une position nette négative de – 1 875 euros.

1.6 Le cas des contrats de vente déficitaires

En présence d’un contrat commercial déficitaire, il convient d’ajuster à lahausse la valeur comptable de l’obligation à la charge du vendeur. Sansstatuer définitivement sur l’évaluation de cet ajustement (la perte à comptabi-liser), le document de travail propose qu’il reflète l’excédent des coûts restantà encourir pour exécuter intégralement le contrat par rapport à l’encours del’obligation de performance.

1.7 Les principaux effets potentiels sur les pratiques actuelles

Le document pour discussion concluait sur les effets potentiels de l’approcheproposée par rapport aux méthodes actuellement en vigueur. Pour les entre-prises qui préparent leurs états financiers selon les IFRS, le plus important deces effets semblait devoir concerner les entreprises traitant des contrats deconstruction.

1.7.1 Le passage du transfert des risques et avantages au transfert de contrôle

Selon IAS 18, la constatation des produits de la vente de biens intervient autransfert des risques et avantages liés à la propriété. Dans certains cas, la datede ce transfert peut différer de celle de transfert du contrôle. Sauf à revoirleurs pratiques contractuelles, les entreprises qui connaissent cette situationpourraient avoir à décaler dans le temps la comptabilisation de leur chiffred’affaires.

Position nette du contrat (fin de mois) (1)

Chiffre d’affairesdu mois

Février – –

Mars – 1 875 13 125

Avril – 1 875

Page 244: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

234 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

1.7.2 Le traitement des services à rendre après la livraison d’un bien

Actuellement, la pratique des entreprises consiste généralement à provision-ner les coûts à encourir au titre des garanties sur les produits vendus, et non àdifférer la constatation d’un produit pour la rémunération des services àrendre après la livraison.

La pratique actuelle serait proscrite dans le modèle proposé. Les garantiessur produit – légales ou contractuelles – seraient traitées comme des livrablesdistincts. Le prix de vente contractuel demanderait donc à être réparti entrerémunération de la vente et rémunération de la garantie donnée. Les produitsassociés à la garantie ne seraient constatés au compte de résultat que lorsquele service promis serait rendu ou que l’obligation aurait expiré.

1.7.3 Le cas des contrats de construction et prestations de services à long terme

Dans le référentiel en vigueur, le produit des contrats de construction celuides prestations de services à long terme est comptabilisé à l’avancement, desorte que le chiffre d’affaires traduise l’activité productive de l’entreprise. Ledegré d’avancement peut être mesuré de diverses façons : pourcentage descoûts encourus par rapport aux coûts budgétés, évaluation des travaux effec-tués ou franchissement de jalons techniques ou contractuels. La comptabili-sation du chiffre d’affaires est indépendante de toute considération relative aupassage du bien sous le contrôle du client.

Le modèle proposé retarderait la comptabilisation du chiffre d’affaires aumoment où le contrôle sur les actifs procurés au client serait transféré aucours du contrat.

1.7.4 Le traitement des coûts d’obtention des contrats

La norme IAS 11 permet, sous certaines conditions, d’inscrire à l’actif lescoûts encourus pour l’obtention des contrats.

Dans le futur modèle, les coûts ne seraient enregistrés à l’actif que si uneautre norme le permet ; or, ce n’est pas le cas des coûts d’obtention descontrats. Par conséquent, ces coûts devraient systématiquement être passésen charge dans la période où ils sont encourus.

1.7.5 L’utilisation d’estimations

Ce dernier point concerne plus particulièrement les entreprises qui se confor-ment aux US GAAP pour la comptabilisation de leurs transactions complexes.

Page 245: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

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Notamment, celles qui sont tenues par les dispositions de l’ASC 985-605,Software, Revenue Recognition doivent différer la constatation du chiffred’affaires sur des éléments livrés si elles ne disposent pas d’informationsobservables sur la juste valeur d’éléments non livrés.

La future norme permettrait au vendeur ou prestataire d’estimer le prix devente séparé des éléments non livrés à partir d’informations observables surles prix de biens ou services concurrents ou bien sur la base d’hypothèsesinternes à l’entreprise. Ces entreprises auraient ainsi la possibilité de consta-ter des produits qui, aux termes des textes américains actuels, sont différés.

1.8 Les sujets dont l’examen est prévu à une étape ultérieure

Divers sujets n’étaient pas traités dans le document de travail et devaient êtredébattus lors d’une étape ultérieure du projet, c’est-à-dire dans la phased’élaboration de l’exposé-sondage.

– Champ d’application de la norme sur la constatation des produits.

– Renouvellement de contrats et options d’annulation (y compris les droitsde retour).

– Regroupement de contrats.

– Modification des termes et conditions d’un contrat après son démarrage.

– Évaluation des droits du vendeur au titre du contrat :

• actualisation ;• prise en compte des incertitudes (notamment du risque de crédit et des

rémunérations conditionnelles) ;• échanges de biens et services (rémunération en nature)

– Guide d’application sur l’identification des livrables.

– Guide d’application sur la détermination de l’accomplissement des livra-bles.

– Guide d’application sur la détermination du prix de vente séparé decertains éléments des transactions à éléments multiples.

– Éventuelles autres approches pour la comptabilisation et l’évaluation decertains contrats, critères d’application.

– Détermination des coûts à prendre en compte pour évaluer si un contrat estdéficitaire.

– Détermination du périmètre à retenir pour l’appréciation du caractère défi-citaire d’un contrat.

– Présentation en brut ou en net des droits et des obligations nés du contrat.

Page 246: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

236 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

– Présentation en brut ou en net des actifs ou des passifs nés du contrat.

– Présentation des écarts d’évaluation dans le compte de résultat global.

– Présentation en brut ou en net des produits nés du contrat.

– Information à fournir.

– Dispositions transitoires et guide d’application pour la transition.

– Date d’entrée en vigueur.

RÉSULTATS DE L’APPEL À COMMENTAIRES

2.1 Quelles ont été les réactions des parties prenantes ?

2.1.1 Le nombre et l’origine des lettres de commentaires

Les deux normalisateurs ont reçu 211 lettres de commentaires, se répartissantainsi1 :

➤ Ventilation par qualité :

– Préparateurs : 79 réponses, soit 37% de l’ensemble.

– Associations professionnelles (fonctions) : 40 réponses, soit 19 %.

– Syndicats professionnels (secteurs/branches) : 32 réponses, soit 15 %.

– Normalisateurs comptables : 18 réponses, soit 8 %.

– Cabinets d’audit : 9 réponses, soit 4 %.

– Analystes : 6 réponses, soit 3 %.

– Autres : 37 réponses, soit 14 %.

➤ Ventilation par zone géographique :

– Europe : 76 réponses, soit 36 % de l’ensemble.

– Amérique du Nord : 75 réponses, soit 36 %.

– Australie Nouvelle-Zélande : 19 réponses, soit 9 %.

– Multinational : 13 réponses, soit 6 %.

– Asie Pacifique (autres) : 12 réponses, soit 6 %.

– Autres : 16 réponses, soit 7 %.

1. Source : FASB, analyse présentée à la séance de travail de juillet 2009.

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2.1.2 La teneur des lettres de commentaires

La majorité des commentateurs admet la proposition du Board d’un principeunique de comptabilisation du chiffre d’affaires, pour autant qu’elle neconduise pas à bouleverser la comptabilisation des contrats de construction etdes contrats de service à long terme. Divers autres aspects du document pourdiscussion font l’objet d’objections ou de questions mais celui-ci est le prin-cipal. Par ailleurs, de nombreuses questions portent sur la manière de décli-ner les principes en dispositions techniques susceptibles d’être appliquées.

Les commentateurs concernés s’élèvent contre l’idée d’attendre l’achève-ment d’un contrat de construction ou de prestations de services à long termepour en constater le chiffre d’affaires. Ils considèrent que cette méthode, nereflétant pas l’activité économique de l’entreprise aux termes du contrat, neconduirait pas à une information financière utile.

Les conditions d’identification des livrables soulèvent des questions enparticulier dans le cas des contrats de services à long terme et dans les contratsde construction. En tout état de cause, nombre de commentateurs recomman-dent que les Boards précisent les critères d’identification des livrables.

Dans leur ensemble, les commentateurs relèvent que le document pourdiscussion manque d’une définition claire du contrôle. Ils considèrent quecette notion doit être précisée dans la future norme, en particulier pour lesservices et autres produits immatériels.

2.2 Le modèle unique de comptabilisation du chiffre d’affaires est confirmé

Au total, l’IASB et le FASB ont estimé que les commentaires reçus sur leDocument pour Discussion « Revenue Recognition » étaient sans surprise.Ce constat permet aux deux Boards de fonder la rédaction du projet de normesur la base du modèle unique de comptabilisation du chiffre d’affaires qu’ilsavaient proposé, en prévoyant d’apporter des réponses aux questions soule-vées. Il est en particulier prévu que les modalités de mise en œuvre dumodèle dans le cas des contrats à long terme fassent l’objet d’un examenspécifique.

2.3 Les clarifications intervenues depuis l’automne 2009

Il ne s’agit pas ici de présenter de manière générale les dispositions en projetmais simplement de retracer les avancées sur les principales questions soule-vées par les commentateurs, notamment celles portant sur la compatibilité dufutur modèle avec la comptabilisation des contrats de construction et descontrats de services à long terme.

Page 248: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

238 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

2.3.1 … sur le transfert de contrôle

Une définition du transfert de contrôle d’actif entre fournisseur et client a étéadoptée. Le transfert de contrôle sera apprécié du point de vue du client. Pourles actifs à fabriquer ou à construire, l’appréciation du transfert de contrôlesera effectuée au stade d’avancement à la date d’évaluation. Selon la défini-tion retenue, une entité a le contrôle d’un actif si elle est en mesure d’en diri-ger l’utilisation et d’en recevoir les bénéfices. Une batterie d’indicateurspermettra de déterminer si le transfert de contrôle a eu lieu ou non. Dans ledocument présenté par le staff de l’IASB en février 2010, la liste des indica-teurs proposés est la suivante :

– le client a l’obligation inconditionnelle de payer l’actif et le paiement n’estpas remboursable ;

– le client détient le titre de propriété de l’actif1 et rien n’établit qu’il n’en apas le contrôle) ;

– le client détient physiquement l’actif (et rien n’établit qu’il n’en a pas lecontrôle) ;

– le client détermine la conception ou les fonctionnalités de l’actif.

Des analyses seront nécessaires pour valider leur pertinence et leur applica-bilité au cas des contrats de construction et des contrats de services à longterme.

2.3.2 … sur l’identification des obligations de performance et sur l’allocation du prix de vente entre les différents composants du contrat

L’allocation du prix de vente du contrat serait effectuée sur la base d’unesegmentation des contrats, et non au niveau – plus détaillé - de chaque livra-ble élémentaire. Le segment serait défini comme l’agrégat de différentesobligations de performance toujours commercialisées ensemble, et donc pourlesquelles il existe des données observables de marché. Appliquée à descontrats de construction, cette disposition pourrait conduire à dégager desmarges différentes pour chaque segment alors même que le prix a été définiglobalement pour l’ensemble des segments.

Les garanties de type « assurance qualité », celles qui compensent desdéfauts existant à la date de livraison mais non encore révélés, ne constitue-raient pas des obligations de performance à part entière. Ces garanties – ycompris les garanties légales – entraîneraient cependant un différé partiel de

1. Ce qui donne au client le droit de vendre l’actif à un tiers ou l’échanger avec un tiers ; ce quilui confère également le droit de donner l’actif en garantie ou en remboursement d’unedette.

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chiffre d’affaires. Leur traitement comptable passerait par la neutralisationd’une part de chiffre d’affaires correspondant au nombre estimé de produitsdéfectueux et par le maintien en stock d’une partie des biens livrés (comme siles produits défectueux étaient en consignation chez le client). La part dechiffre d’affaires différée serait évaluée sur une base de coûts augmentésd’une marge.

À l’inverse, les garanties de type « prestation complémentaire », visent àremédier à l’usure et aux avaries dans le temps d’un produit qui étaitconforme à l’origine. Ces garanties-ci – dont feraient partie les garantiesoptionnelles – constitueraient bien des obligations de performance à partentière. Leur rémunération serait évaluée sur la base d’un tarif de marché.

2.3.3 … sur la comptabilisation du chiffre d’affaires au sein d’un segment

La comptabilisation du chiffre d’affaires est fondée de manière générale surle transfert du contrôle. Les différentes modalités de comptabilisation duchiffre d’affaires à l’avancement actuellement pratiquées pourront être repri-ses pour la comptabilisation du chiffre d’affaires au sein d’un segment. Asso-ciées aux indicateurs de transfert de contrôle, dont la pertinence aura étévalidée, ces dispositions devraient permettre d’analyser le champ et lesmodalités d’application de la comptabilisation d’un chiffre d’affaires àl’avancement. Sur le principe, le chiffre d’affaires des contrats de construc-tion et des contrats à long terme pourrait ainsi continuer à être comptabilisé àl’avancement (le cas échéant à des dates et à un rythme différents de ceuxretenus aujourd’hui).

LES PROCHAINES ÉTAPES

Selon le processus de travail de l’IASB, la prochaine étape est la publicationd’un projet de norme qui consacre le passage des principes de haut niveauaux dispositions techniques. Cette publication devrait intervenir dans lecourant du deuxième trimestre 2010 (source : plan de travail de l’IASB,version à jour au 6 novembre 2009, www.iasb.org). L’adoption de la normedéfinitive est attendue au cours du premier semestre 2011. Le nouveau texten’entrerait pas en vigueur avant 2013.

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Page 250: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS
Page 251: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

GLOSSAIRE

Activités ordinaires

Les activités ordinaires correspondent aux activités opérationnelles (c’est-à-dire autres que les activités d’investissement et les activités de finance-ment) exercées sur une base récurrente ; elles s’opposent aux activitésaccessoires à caractère non récurrent comme la cession d’immobilisation.Les produits proviennent toujours des activités ordinaires alors que lesgains peuvent naître d’activités qui ne sont pas des activités ordinaires.

AICPA

American Institute of Certified Public Accountants ou Institut américaindes experts-comptables.

ASC

Accounting Standard Codification. C’est la nouvelle « codification » quiorganise les milliers de textes formant les US GAAP et en modifie lahiérarchie. Alors qu’ils étaient jusqu’à présent classés selon quatreniveaux d’autorité (de A à D), tous les textes codifiés ont désormais lemême niveau d’autorité A. La nouvelle codification s’applique auxrapports financiers intermédiaires et annuels se clôturant après le15 septembre 2009.

ASU

Accounting Standard Update, nouveau texte ou amendement à un textecomptable américain, non encore incorporé à la nouvelle codification.

Page 252: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

242 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Avantages économiques

Flux de trésorerie passés, présents et futurs.

Avantages économiques futurs

Potentiel à contribuer, directement ou indirectement, à des entrées detrésorerie et d’équivalents de trésorerie au bénéfice de l’entité.

Contrat de construction

Contrat négocié pour la construction d’une immobilisation ou d’ungroupe d’immobilisations se rapportant à un même projet, liées ensembledu fait de leur technologie, de leur fonction ou de leur utilisation, et dontl’exécution s’échelonne généralement sur plusieurs exercices.

Contrat déficitaire

Contrat dont les coûts inévitables excèdent la rémunération attendue.

Contrat au forfait

Contrat de construction dans lequel l’entrepreneur accepte un prix fixe, ouun prix fixe par unité produite, prix révisable éventuellement en fonctiondes clauses assorti, dans certains cas, de clauses d’augmentation de prix.

Contrat en régie

Contrat de construction dans lequel l’entrepreneur est remboursé de sescoûts majorés d’un pourcentage, ou d’un montant fixe.

Discussion Paper

Document pour discussion ou document de travail présentant les orienta-tions proposées par le Board.

EITF

Emerging Issues Task Force, comité d’interprétation constitué auprès del’institution de normalisation comptable américaine.

Exposure Draft

Exposé sondage ou projet de norme diffusé pour avis et commentaires.

FASB

Financial Accounting Standards Board, organe exécutif de l’institution denormalisation comptable américaine.

Hautement probable

Dont la probabilité de survenance est très largement supérieure à 50 %

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IASB

International Accounting Standards Board, organe exécutif de l’institu-tion de normalisation comptable, suite à la restructuration de 2001.

IASC

International Accounting Standards Committee, organisme privé fondé en1973 pour développer une normalisation comptable issue des meilleursprincipes et pratiques au niveau international.

IAS

International Accounting Standard, norme comptable internationale,adoptée par l’IASC avant 2001.

IFRIC

International Financial Reporting Interpretations Committee, comitéd’interprétation constitué auprès de l’institution de normalisation compta-ble internationale, suite à la réforme de 2001.

IFRIC interpretation

Interprétation d’une norme comptable internationale, adoptée par l’IFRICà compter de 2001.

IFRS

International Financial Reporting Standard, norme internationaled’information financière, adoptée par l’IASB à compter de 2001.

Juste valeur

Montant pour lequel un actif pourrait être échangé ou un passif éteintentre deux parties bien informées, consentantes et agissant dans desconditions de concurrence normale.

Location-financement

Location ayant pour effet de transférer au preneur la quasi-totalité desrisques et avantages inhérents à la propriété de l’actif.

Probable

Dont la probabilité de survenance est supérieure à 50 %.

Produits

Augmentations d’avantages économiques au cours de l’exercice, sousforme d’entrées ou d’accroissements d’actifs, ou de diminutions depassifs, qui ont pour résultat une augmentation des capitaux propres autreque les augmentations provenant des apports des participants aux capi-taux propres.

Page 254: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

244 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

Produits des activités ordinaires

Entrées brutes d’avantages économiques au cours de l’exercice dans lecadre des activités ordinaires d’une entreprise, lorsque ces entrées condui-sent à des augmentations des capitaux propres autres que les augmenta-tions relatives aux apports des participants aux capitaux propres.

Provision

Passif dont le montant ou l’échéance sont incertains.

SIC

Standing Interpretations Committee, comité d’interprétation constituéauprès de l’institution de normalisation comptable internationale, avant laréforme de 2001

SIC interpretation

Interprétation d’une norme comptable internationale, adoptée par le SICavant 2001.

SOP

Statement Of Position, norme comptable émise par l’institut des experts-comptables américains.

TPE

Third Party Evidence, éléments de preuve de la juste valeur fondés sur lesprix effectivement pratiqués par la concurrence pour des biens ou servicessimilaires à ceux à évaluer.

Transaction

Notion non définie, soit plusieurs contrats soit un élément d’un contrat.

Transaction à éléments multiples

Transaction portant sur plusieurs biens et/ou prestations de nature diffé-rente qui peuvent demander à être comptabilisés de manière séparée.

Valeur résiduelle

Montant estimé qu’une entité obtiendrait actuellement de la sortie del’actif, déduction faite des coûts de sortie attendus, si l’actif avait déjàl’âge et se trouvait déjà dans l’état prévu à la fin de sa durée d’utilité.

VSOE

Vendor Specific Objective Evidence, éléments de preuve objective consti-tués par le vendeur concernant la juste valeur d’un de ses produits ouservices.

Page 255: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

POSTFACE

Ce livre, sur la pratique du chiffre d’affaires en IFRS, est une contributionimportante à une meilleure compréhension de normes dont l’une des criti-ques les plus courantes est d’être qualifiées de complexes et d’un abordconceptuel difficile. À ce titre, la pédagogie des auteurs est un élément essen-tiel de la réussite de cette ?uvre collective.

Le sujet, essentiel pour les entreprises, de la reconnaissance du chiffred’affaires, indicateur clé de l’activité, explique l’intérêt porté par l’APDC(Association des Professionnels et des Directeurs Comptabilité et Gestion) àce projet initié à la DFCG (Association Nationale des Directeurs Financierset de Contrôle de Gestion).

Les retours d’expérience venant pour certains de membres de l’APDC etpour d’autres de membres de la DFCG ont contribué à mettre en évidence lapratique des entreprises sur ces normes plus spécialement dans la phase detransition aux IFRS et à évaluer leurs impacts dans la phase opérationnelle. Ilest intéressant de noter l’importance de la formation et de la diffusion de laculture IFRS bien au-delà de la sphère financière comme élément fondamen-tal de la réussite de cette reconnaissance du chiffre d’affaires en IFRS.

Cette collaboration exemplaire entre deux grandes associations du secteurdes métiers financiers illustre aussi l’impact des normes IFRS sur le traite-ment et la gestion de l’information financière.

Les normes IFRS, et en particulier celles qui traitent du chiffre d’affaires,s’inscrivent au c?ur de l’activité des entreprises. Elles imposent non seule-ment une évolution forte des référentiels comptables et financiers internes

Page 256: Pratique du chiffre d'affaires en IFRS

246 PRATIQUE DU CHIFFRE D’AFFAIRES EN IFRS

mais également un changement des modes de pensée et des pratiques profes-sionnelles de l’ensemble des contributeurs à la chaîne de valeur de l’entre-prise.

Cet ouvrage s’adresse donc, au-delà des équipes de la filière Finance, àtous les acteurs qui participent au développement des activités opérationnel-les de l’entreprise et souhaitent en maîtriser les mécanismes comptables etfinanciers.

Bernard MiraillesPrésident de l’APDC

(Association des Professionnels etdes Directeurs Comptabilité et Gestion)