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POURQUOI L’HOMME A T-IL DEUX BRAS ET DEUX JAMBES ? Il a deux mains pour pouvoir écrire et se gratter le nez en même temps. Il a deux mains, une pour la caresse et l’autre pour tenir les rênes. Il a deux pieds pour garder l’équilibre et courir et sauter et faire des cabrioles. Il a deux pieds pour pédaler à fond sur son vélo. Deux bras deux jambes pour t’enlacer, te bercer, t’apprendre à marcher, courir, sauter, avancer, tenir debout, porter des bas nylon et des belles chaussures, être plus grande que toi. Si l’homme avait trois bras et trois jambes, il en aurait en trop. Si l’homme n’avait qu’un bras et qu’une jambe, il n’en aurait pas assez. Trois, c’est trop pour s’habiller; c’est plus difficile pour enfiler un vêtement et ça revient plus cher. Un seul bras, une seule jambe, c’est moins onéreux. Mais l’équilibre est plus incertain et le maintien moins ferme et moins assuré. Il faut bien dire ce qui est : être cul de jatte ou manchot ce n’est pas rigolo et, avoir trois membres supérieurs et inférieurs ce n’est pas beau. Pour serrer l’enfant dans ses bras, tout en caressant le bébé qui s’endort. Deux bras et deux mains pour tenir la pomme que l’on épluche, deux jambes pour courir et jouer au foot, pour guider l’enfant qui commence à marcher, l’aider à traverser, pour porter l’objet fragile, pour faire un déménagement, pour tenir la bêche au jardin, pour monter à l’échelle. Sans bras ni jambe, l’homme serait au début de la création : un poisson ? La crainte est levée : tout a bien fonctionné, le bébé a ses deux bras et ses deux jambes. Il aurait pu en être autrement. Quelques années plus tard, on me pose la question. Est- ce un hasard, une chance, une volonté ? Qu’en ai-je fait ? Consciemment, inconsciemment ? Tous les jours, beaucoup de choses ...et, sans jamais les casser. Est-ce un hasard, une chance ? L’homme a deux bras et deux jambes pour les ouvrir, les fermer, les lever, les baisser. Pour quelle gymnastique, physique, cérébrale, intellectuelle ? Comment embrasser si un bras vous manquait? Que de taches inachevées lorsque qu’un bras vous a lâché. Qu’il est difficile d’avancer lorsque l’accident vous a privé de l’usage d’une jambe ou d’un pied. L’homme a deux bras pour tenir un enfant, pour nager, faire la brasse, conduire une voiture, tenir dans ses bras une femme pour danser, pour faire plein de choses, quoique avec un bras une jeune fille a gagné des médailles d’or aux jeux de Sotchi. Deux jambes pour tenir debout : le premier usage, marcher, courir, bêcher pour le jardinier, faire du vélo etc... Pourquoi l’homme a-t-il deux bras et deux jambes ? se demande un homme tronc autonome. Je peux rouler de ma natte ; par un mouvement arrière, je me déplace vers la douche, des contorsions me mènent vers la cuisine, ma bouche commande les manettes. On le voit aussi ramper, sautiller, embrasser, rire et penser, aimer, lire, étudier, parler. Il transmet sa sagesse et sa joie de vivre. PDF Pro Evaluation

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POURQUOI L'HOMME A T-IL DEUX BRAS ET DEUX JAMBES ?

Il a deux mains pour pouvoir écrire et se gratter le nez en même temps. Il a deux mains, une pour la caresse et l’autre pour tenir les rênes.Il a deux pieds pour garder l’équilibre et courir et sauter et faire des cabrioles. Il a deux pieds pour pédaler à fond sur son vélo.

Deux bras deux jambes pour t’enlacer, te bercer, t’apprendre à marcher, courir, sauter,avancer, tenir debout, porter des bas nylon et des belles chaussures, être plus grande que toi.

Si l’homme avait trois bras et trois jambes, il en aurait en trop. Si l’homme n’avait qu’un bras et qu’une jambe, il n’en aurait pas assez. Trois,c’est trop pour s’habiller; c’est plus difficile pour enfiler un vêtement et ça revient plus cher. Un seul bras, une seule jambe, c’est moins onéreux. Mais l’équilibre est plus incertain et le maintien moins ferme et moins assuré. Il faut bien dire ce qui est : être cul de jatte ou manchot ce n’est pas rigolo et, avoir trois membres supérieurs et inférieurs ce n’est pas beau.

Pour serrer l'enfant dans ses bras, tout en caressant le bébé qui s'endort. Deux bras et deux mains pour tenir la pomme que l'on épluche, deux jambes pour courir et jouer au foot, pour guider l'enfant qui commence à marcher, l'aider à traverser, pour porter l'objet fragile, pour faire un déménagement, pour tenir la bêche au jardin, pour monter à l'échelle.

Sans bras ni jambe, l'homme serait au début de la création : un poisson ?

La crainte est levée : tout a bien fonctionné, le bébé a ses deux bras et ses deux jambes. Il aurait pu en être autrement. Quelques années plus tard, on me pose la question. Est-ce un hasard, une chance, une volonté ? Qu'en ai-je fait ? Consciemment, inconsciemment ? Tous les jours, beaucoup de choses ...et, sans jamais les casser. Est-ce un hasard, une chance ?

L’homme a deux bras et deux jambes pour les ouvrir, les fermer, les lever, les baisser. Pour quelle gymnastique, physique, cérébrale, intellectuelle ?

Comment embrasser si un bras vous manquait? Que de taches inachevées lorsque qu'un bras vous a lâché. Qu'il est difficile d'avancer lorsque l'accident vous a privé de l'usage d'une jambe ou d'un pied.

L'homme a deux bras pour tenir un enfant, pour nager, faire la brasse, conduire une voiture, tenir dans ses bras une femme pour danser, pour faire plein de choses, quoique avec un bras une jeune fille a gagné des médailles d'or aux jeux de Sotchi. Deux jambes pour tenir debout : le premier usage, marcher, courir, bêcher pour le jardinier, faire du vélo etc...

Pourquoi l'homme a-t-il deux bras et deux jambes ? se demande un homme tronc autonome. Je peux rouler de ma natte ; par un mouvement arrière, je me déplace vers la douche, des contorsions me mènent vers la cuisine, ma bouche commande les manettes. On le voit aussi ramper, sautiller, embrasser, rire et penser, aimer, lire, étudier, parler. Il transmet sa sagesse et sa joie de vivre.

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Pour embrasser les chênes, couper l’air comme avec des ciseaux, sauter à la corde et avoir le plaisir de jouer à cloche-pied.

Pourquoi le chat a-t-il neuf vies ?Pourquoi le ciel est-il bleu, gris, rouge ou blanc ?Pourquoi le vent souffle-t-il de l’ouest à Brest et de l’est à Nice ?Pourquoi les oiseaux chantent-ils alors que le jour se lève ?Pourquoi cette enfant a-t-elle peur de l’école ?Pourquoi écrit-elle pourquoi, pourquoi, pourquoi, pourquoi ?

L'être humain du 21 è siècle a besoin de ses membres pour vivre indépendant. Des jambes pour sa vie de tous les jours et des bras pour protéger, aimer, amener à soi, travailler, tout en sachant que ça ne suffit pas sans son cerveau.

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PETITES OBSERVATIONS

La première journée de soleil après la pluieLe chant du paonLes bourgeons des hortensiasLes enfants sur la balançoireLa fleur de pissenlit offerteLe tapis de boutons d'orL'aubépine fleurieLa visite de ma voisine.

En cuisineLe plan de travail viergeLe jeu disparate des poêlesLe bruit brusque de batteur électriqueL’odeur du poivre fraîchement mouluLes frissonnements du beurre fonduLa touche verte de la cibouletteLe regard d'envie du convive.

Les pêchers sont en fleursLes violettes parsèment le devant de la maisonLe camélia rose fait ses fleurs, qui fanent trop vite,Entendu un pic-vert taper sur le tronc de l'arbre,Le héron est allé se cacher dans les hautes herbes du lac,Au loin, le champ de colza fleuri éclaire le paysage.Les fleurs jaunes des pissenlits embellissent la pelouse.

Ne pas oublier son jetonApprécié la serviabilité du personnel Le caddy de la ménagère est bien rempliLe choix est difficileApprendre à bien se nourrirRespecter sa liste de coursesChoucroute ou cassoulet ?Regarder les prixLe stress de la jeune ménagèreBoycotter l'appareil scanLa caisse est ouverte

Le bonjour de la caissièreLa file d'attente est longueL’énervement bouillonne au troisième rangRespecter la caisse réservée prioritaire

Vous la prenez du rayonVous la mettez dans le caddyVous la sortez du caddyVous la mettez sur le tapis roulantVous la sortez du tapis roulantVous la remettez dans le caddyVous la sortez du caddyVous la mettez dans votre panierVous la sortez du panierVous la rangez dans le placardVous la sortez du placardVous l'ouvrezVous la versez dans la casseroleVous la reversez dans un saladierEt là, vous entendez la famille dire : « on n'aime pas les petits pois ».

Les volets closRemonté les volets fermés Trouvé les bols salisUn biberon de chocolat au lait pas terminé Deux bols de caféUn verre de jus d’orange Un bocal de confiture d’abricot entaméRangé les crêpes, la brioche et le pain Epluchures de pommes pour le composteurDéjeuner seuleApparition du soleil Lumière inondant la cuisine Le papyrus dansant au ventLes hellébores encore en pleine floraisonLes soucis à peine ouvertsLes primevères couvertes de roséeLes jonquilles et narcisses épanouiesLe forsythia couvert de petites fleurs jaunesLe bouleau au tronc couvert de lierreLe camélia blanc avec ses fleurs rouilléesLe noisetier et ses chatonsLes belles feuilles des arums sauvagesLes arums ayant résisté à l’hiverLe rouge-gorge picorant les miettes du petit déjeunerLe soleil a tournéLongue table préparéeNappe blanche bien repasséeBouquet de camélias centre de tableCorbeille de pain tranchéRamequin de beurre saléBouteilles d’eau plateBouteilles de vin chambré

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Assiettes au liseré doréVerres transparents sur pied Couverts inox argentés Serviettes en lin brodé Les invités : repas partagé Rideau tiré : volets fermés

A la bibliothèqueLe premier bonjour à la cantonadeLe petit coup d’œil alentourRencontre avec une amieLa recherche du bon livreLes hésitations et le choixLes bavardages des collégiensLe petit tour du côté des CDRecherche de la carte d’adhérenteLe passage à la table des prêtsLes livres bien serrés dans le sacDernier au revoir à la cantonade

Au concertL’église, moderne, impersonnelleLes musiciens, tous habillés de noirLe premier concert de l’annéeLa première arrivée, je choisis ma placeLes premiers essais des concertistesLes premiers violons prennent placeLes musiques de film.

La plageUn voilier, coque blanche, voile rougeDes sternes plongentUn bateau de pêche rentreDes goélands gourmands crientIl doit y avoir du poissonLa mer monteUne femme se baigne seuleDes enfants bâtissent un châteauDans un coin abrité, un homme litLa mer monteLes vagues arasent le châteauLes enfants se décident à se baignerCombinaisons, planches et bouéesL’ombre de la dune s'allongeJe me déplaceDernier bain de soleilC'est la fin de l'été.

Clic-clac sourd des portes coupe-feu dans le couloir,

Chuintement glissé des pas de l’infirmière,Grincement de la porte de la chambre,Ouverture ressort du store sur le matin blêmeBruit rond du moteur qui relève le litFroid de la main qui prend le poulsPincement sifflant du tensiomètreBip du thermomètreRaclement du stylo sur la tablette au pied du litTressautement du chariot du petit-déjeunerAmertume du thé trop longtemps infuséEclatement de la biscotte sous la pression du beurre congeléImpuissance devant la cuillère à soupe pour avaler le yaourt natureSonnerie de l’alarme qui retentit au loin Course précipitée dans le couloirClaquement des ordres froids et précis des réanimateurs.

A la plagePremière délivrance de vêtements sans importancePremiers frissons sur la peauPremiers chatouillis sous les pieds nusPremière vision de l’immensité de cette naturePremiers cris d’enfants libres dans la joiePremiers pas vers les caprices de cet élément liquide et salé.Première réticence à avancer plus loinPremier effort surhumainPremier bain de l’année

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MON VOISIN

LE voisin. Très rapidement après notre arrivée dans cette maison, nous avions posé un portail pour éviter les sorties intempestives du chien, mais ce portail se révéla bientôt plus utile à limiter les débordements de curiosité du voisin. Chaque matin, quand je refermais le portail avant de partir au travail, j’apercevais sa silhouette silencieuse dans l’entrebâillement de la porte de son garage. C’était au mouvement furtif de retrait pour mieux se dissimuler que je percevais sa présence. Que faisait-il donc tous les jours à me surveiller ? Que c’était horripilant ! On laissa à nouveau la haie pousser librement entre nos deux jardins. Puis on installa en limite de propriété un tas de bois. Tout pour empêcher son regard insistant et muet de nous suivre pas à pas dans le jardin. L’hiver, il recyclait ses anciens vêtements de l’armée de terre pour mieux se camoufler et nous observer. Il avait une marotte, une obsession : sa curiosité, et jouait avec nos nerfs comme le chat avec la souris. Dès qu’il apercevait le chien dans le jardin, il venait se cacher derrière la haie pour l’agacer, usant de divers cris d’animaux, jusqu’à ce qu’il aboie, provoquant ainsi notre sortie dans le jardin pour ramener le calme. Mon mari avait compris son stratagème. Il conçut de le retourner contre lui. Ce jour-là, le chasseur fut mon mari. Devant utiliser un outil à couper le béton très bruyant, il savait piquer la curiosité du voisin. Tout en allumant l’engin, il surveillait l’apparition

inévitable du voisin et, dès qu’il l’aperçut s’approcher, il arrêta aussitôt l’engin, le dissimula rapidement et attendit. Le voisin dépité, la curiosité piquée, ne pouvait voir la cause de ce bruit. Le voisin reparti, mon mari redémarra l’engin et l’arrêta aussitôt. La tête du voisin apparût à nouveau au-dessus du tas de bois, de plus en plus agacé de ne pas comprendre ce qui se passait. La troisième fois, mon mari alluma l’engin et se précipita aussitôt derrière le tas de bois, surveillant l’apparition inévitable du voisin. Mon mari surgit au même moment, tel un diable hors de sa boite, et lui cria un grand « bouh » en pleine face. Nous étions revenus à la maternelle ! Le voisinage glacial continua. De plus en plus de voisins se plaignaient de la curiosité DU voisin. Ayant recueilli le chien de sa fille, LE voisin le laissait vagabonder partout et sous le prétexte de le chercher, entrait dans toutes les propriétés ouvertes, afin de satisfaire sa curiosité. Enfin, un beau jour, le voisin sonna à notre portail, avec à la main une petite annonce pour vendre sa maison. Il demanda à mon mari de l’afficher sur son lieu de travail. « Je sais où vous travaillez, j’ai vu le macaron collé sur votre pare-brise » dit-il sans ciller. Bien que glacé par cette dernière phrase, mon mari s’empressa d’afficher l’annonce sur le panneau ad hoc. Plus vite la maison serait vendue, plus vite il partirait, et nous et nos voisins retrouverions la quiétude. La maison fut vendue et LE voisin partit dans les Landes, là, où les pins sont nombreux et pratiques pour se dissimuler tout en observant ses voisins.

Monsieur Palud descend, tous les jours, les escaliers de notre collectif à 6 h 30. Dans un état d’éveil involontaire, je l’entends de son pas pesant marteler de ses chaussures cirées à la perfection, les marches en bois grinçantes.

Monsieur Palud n’a pas d’âge. Il n’a pas d’âge,mais semble posséder beaucoup d’habitudes et de principes. Tous les soirs, il est de retour à 19 h30. Une serviette noire à la main, son manteau sombre porté par tous les temps, il remonte

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pesamment, sans laisser paraître une once de réflexion sur la vie, sur le temps qui passe ni sur quelque autre sujet que ce soit. Son entière calvitie semble avoir permis de laisser se libérer toutes ses pensées. Arrivé sur le palier, il sort de sa poche un trousseau de clefs et s’enferme chez lui. C’est fini ; monsieur Palud n’existe plus : pas le moindre bruit ne sortira, par la suite, de chez lui, pas de musique, pas de son de radio ou de télévision, aucune discussion téléphonique, pas le moindre murmure qui pourrait faire deviner une quelconque existence dans ce logis. Monsieur Palud n’existe plus. S’est-il emmuré ? Son nom inscrit sur sa porte est la seule trace de son existence. Lit-il ? Ecrit-il ou finit-il le travail qu’il n’a pas eu le temps de terminer à son bureau ? Ça doit-être cela. Il est sûrement comptable ou il exerce un métier de ce genre car il en a l’aspect. Comme le fait remarquer Madame Joly : « L’exactitude et la ponctualité semblent borner ses journées, » aime-t-elle à répéter dès qu’elle le peut.

Mme Joly occupe, avec son mari, l’appartement qui se situe entre le mien et celui de Monsieur Palud. Elle se pose beaucoup de questions à sonsujet. Sur d’autres personnes également. Elle adore rester balayer le palier pour voir les allers et venues de la petite communauté que nous formons dans ce bâtiment. « Vous le connaissez ? Avez-vous déjà conversé avec lui ? Que fait-il ? ». Je m’arrange toujours pour répondre dans le flou aux questions de Madame Joly et j’écourte au plus vite notre entretien car je n’aime pas trop rester commérer. Je ne l’aime pas trop. Néanmoins, dès que je peux bénéficier de renseignements sur ce personnage, je ne m’en prive pas. Monsieur Palud m’intrigue. Est-il vraiment celui que j’imagine ? Qui est le personnage qui est derrière la porte où il est marqué M. Palud ? Tiens, justement, cette porte est entrebâillée et laisse passer un rai de lumière. Il est là et ne s’est pas enfermé à clef comme il le fait d’ordinaire. Que se passe-t-il ? Est-ce une force obscure ou tout simplement la curiosité ? Je ne peux pas m’empêcher d’avancer. Mes jambes me poussent lentement et en silence vers ce faisceau de lumière. Mon

cœur commence à battre la chamade. Ma jambe droite en suspend garde l’équilibre au ras de la porte. Faut-il poursuivre cette investigation ou faire demi-tour et rester torturé de questions ? Les doigts de ma main droite ne s’en posent pas. Ils se posent sur le battant de la porte et le poussent sans aucune retenue. Ma jambe n’a pas longtemps à réfléchir et pose simultanément son pied à l’intérieur de l’appartement de monsieur Palud. Au même instant une odeur forte pénètre par surprise dans mes narines. Un mélange de térébenthine, de peinture et de vernis viennent s’entrechoquer dans mes cloisons nasales et un dédale de toiles de peintures s’offre à ma vue. Il me faut résister pour ne pas perdre conscience devant une telle surprise. Pas de doute, je suis chez un artiste peintre.

« Monsieur Ménard entrez, n’ayez pas peur, il n’y a aucune violence dans cet endroit. Avancez et tranquillisez-vous en jetant un coup d’œil sur ma passion. Ce ne sont que des vues de la vie de tous les jours. La vie de notre société repose en cet endroit caché de tous ». Alors, en bon voisin,je me permets de rentrer dans son intimité. Comment connait-il mon nom ?, me demandé-je sous le coup de la surprise. Ebahi par cette découverte, je traverse machinalement ce qui correspond chez un locataire normal à la salle à manger. Mais ici, pas de table ni de chaise pour les invités et encore moins de buffet.

Monsieur P est assis sur un tabouret. Une palette de peinture à la main, il barbouille une toile de bleu. Toujours sous le choc, je m’enfonce dans le couloir qui donne sur les autres pièces. Là aussi sont accrochées au mur des peintures de toutes sortes qui décrivent la vie du quartier. Au carrefour des rues de la tour d’Auvergne et de la rue Pasteur, un gendarme chasse du pied un pigeon qui lui becquette le soulier. La fleuriste réprimande une collégienne qui vient en passant de renverser un pot de chrysanthèmes. Une voiture passe au feu rouge. Une mère tire avec force sur le bras de son fils pour qu’il la suive. «Il s’agit de la vie quotidienne dis-je en moi-même. Rien d’anormal. »

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C’est tellement normal qu’au fond du couloir apparaît Madame Joly. Elle vient de fermer la porte de son appartement à clef. C’est le mouvement de sa robe, de gauche à droite, qui nous l’indique. Son cabas sous le bras, elle part au marché. A sa gauche, une autre toile attire mon attention. Un homme de petite taille entre sa clef dans la serrure de sa porte. Son imper semble mouillé. Il a plu sûrement sur le chemin du retour de son travail. Il est pressé de se sécher. J’ai horreur de rester mouillé. En effet c’est moi qui ouvre la porte où est écrit : M. Ménard.

Entre ces toiles (celles où M J et moi où nous posons malgré nous) une troisième est installée. Elle représente une porte fermée. Bien ferméeoù rien ne transparaît, ni son, ni odeur. Seule une étiquette la décore. Dessus il est noté M. P ‘’Artiste Peintre’’ Je n’avais jamais osé m’approcher pour la lire en entier.

C'est drôle, ce matin, André, notre voisin n'est pas encore passé pour la promenade du chien. Que se passe-t-il ? Est-il malade ? Ce n'est pourtant pas encore la date de sa cure annuelle. Ah ! Le voilà. Il s'approche de notre haie, toujours très attentif aux désirs du petit animal qui se fait bien vieux. Il s'arrête souvent, surtout devant les entrées de propriétés. Ainsi, il rencontre ses voisins et s'inquiète de savoir si tout va bien, si les légumes poussent, si la pelouse n'a pas trop souffert cet hiver, s'il y a suffisamment de bois coupé pour alimenter la cheminée. Notre voisin est très curieux. A chaque passage, il guette notre chat, qui selon son humeur, nargue le chien qui est bien dépité, ou s'en approche pour le saluer. André, retraité depuis 20 ans déjà, est à la recherche de compagnie. Il guette aussi le passage du facteur pour optimiser ses chances de rencontres, pour donner des nouvelles du quartier, et surtout nous parler de ses soucis de construction qui ne manquent pas. Car André est le champion des procès : un enrobé mal fait, un toit qui fuit, un mur qui n'est pas droit. Bien sûr, nous compatissons, mais pas trop, car après tout c'est peut-être son occupation favorite que de tout

remettre en question, de chercher le vice caché, pour ensuite se plaindre de sa malchance.

J'étais petite. Deux maison plus loin que chez moi habitait ma meilleure copine. J'allais souvent chez elle. Ensemble nous étions braves. Le voisin du rez-de-chaussée nous intriguait. Pourtant, nous devions obligatoirement passer devant sa porte, souvent close mais curieuse: était-ce sa forme, sa couleur, la forme de la serrure, rien de définissable, c'était simplement Sa porte. Nous espérions ne pas le rencontrer, mais en silence nous souhaitions le voir, le suivre, percer son secret ... Les rares fois où nous l'avions entrevu, il nous avait paru une petite masse brune, sans forme, de sa casquette brune à ses chaussettes brunes également. Il ne portait jamais de souliers, il glissait sur le sol en silence. Sans visage, sans regard, sans bras ni mains, il nous terrorisait et nous attirait. Personne ne rentrait chez lui, il ne parlait jamais à personne ; même à l'épicerie, lieu de toutes les rencontres ; il ne se rendait jamais à la boulangerie ni même au café.Personne ne le connaissait, il était pourtant celui dont on parlait le plus à voix basse. Comment vivait-il ? La rumeur disait qu'il élevait des vers de terre et s'en nourrissait. Il n'avait besoin de rien d'autre ni de personne : il était sombre comme la terre, comme la nuit, comme l'angoisse qu'il projetait. Puis, j'ai déménagé. Mais le voisin du rez-de-chaussée a figé mon imaginaire écologique.

C’était un voisin discret, effacé et un rien mystérieux. Sa chevelure très brune, devenue gris poivré avec le temps, se prolongeait par une barbe hirsute, qui néanmoins laissait deviner deux petits yeux vifs, observateurs et curieux. De sa bouche perdue dans sa barbe grisonnante sortaient des paroles assourdies sur un ton monocorde. Un bonnet bleu marine lui permettait de lutter contre le vent, le froid et la pluie qu’il redoutait énormément à cause de sa santé fragile. Sortant des manches de son grand manteau à carreaux gris clair et foncé, on devinait des mains violacées, que son cœur défaillant rendaient difficiles à réchauffer …

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Je le croisais régulièrement avec Cacao, le bouc, composteur, chargé de l’entretien des talus qui bordent notre jardin, je le voyais monter et descendre la côte devant chez nous, se promener sur les chemins avoisinants, luttant de sa haute stature , un peu dégingandée contre le vent et le froid mordants du Plateau, et tentant vainement de se réchauffer. Si l’envie lui prenait, il s’arrêtait, je lui parlais d’Holy ma chienne croisée border collie et beauceron, avec laquelle il s’était lié d’amitié… Je lui racontais ses déboires avec sa patte cassée, qui ne l’empêchait pas de poursuivre, de façon effrénée et très dangereuse, ses courses, sur trois pattes, avec les tracteurs, camions et différents engins agricoles qui passaient devant chez nous. Je m’inquiétais pour la guérison de sa patte, de sa broche, des plaques et des écrous que le vétérinaire avait dû resserrer… Quand elle revenait, de sa course intrépide, je l’attendais avec un bâton pour lui donner une leçon mais, sortant la tête de sa collerette démesurée, ses yeux perçants semblaient me dire d’un air jubilatoire quelque peu revanchard : « mais c’est moi, le cadeau, vous pensez bien que je fais tout pour être à la hauteur ! ». Poursuivant nos échanges, il me faisait de grands discours, montrant son érudition et sa culture, tout en cachant subtilement son ennui et son isolement, dans lesquels, successivement, séparation, départ des enfants, mauvaises affaires, crises agricoles et foncières, problèmes de santé, inactivité, l’avaient plongé de façon perverse et insidieuse.

Un voisin, je l'imagine de taille moyenne, avecde la bonté se reflétant sur son visage, courtois, aimant les choses simples de la vie, rendre service en toute convivialité, parler de nos enfants et petits-enfants, de leur avenir, de livres, de jardinage, de bricolage, faire des recherches généalogiques ensemble (avec Madame) quelqu'un qui vous écoute, en bon voisinage sans plus, en confiance, une main tendue en cas de besoin, ce qui devient rare à notre époque.

Plutôt grand, le teint gris, handicapé par la maladie, un chien noir trottinant derrière lui, il se promène, claudiquant légèrement. Rien n'échappe cependant à son œil resté vif malgré les ans. Un nouvel arrivant dans le quartier, une nouvelle plantation dans un champ, sans problème si vous le souhaitez, il saura vous renseigner. Sur les chemins creux, comme sur le bitume, il se promène inlassablement, du moins chaque fois que le temps le permet, espérant apercevoir une silhouette familière, et pouvoir lier conversation pour éclairer ses mornes journées d'hiver, lorsque la grisaille nous envahit.

Régulièrement, nous lui proposions notre aide pour l’entretien de ses haies de laurier palme qui masquaient la maison et empêchaient la lumière et la chaleur solaires de rentrer dans la demeure. Par amour propre ou fierté, mal placés sans doute, il déclinait toujours notre proposition. Toutefois il s’obstinait, aux premiers rayons du soleil, à ouvrir portes et fenêtres, pour aérer, et ainsi tenter d’enlever l’humidité et réchauffer l’air ambiant. Vivement le printemps et ses journées ensoleillées pour qu’il puisse se réchauffer (les mots maux laids à l’air) !

Paulette. Ma voisine est la mère de mon meilleur ami. C’est aussi la cousine germaine de mon père. Sa famille est arrivée en même temps que la nôtre. Elle est calme, gentille, généreuse, guère envahissante. Elle parle avec ma mère par-dessus le mur qui sépare les deux maisons. Pourquoi alors une certaine réserve, voire un agacement certain à son égard ? C’est à cause de son ménage. Pas de son couple, non ! Du ménage quoi ! Le ménage commence dès son réveil, qui devient aussi le nôtre. Elle ouvre grand les volets en bois de sa chambre, le claquant bien fort contre le mur. Elle en fait autant dans les autres pièces, ce qui fait cinq paires de volets lourdement plaqués. Ensuite, elle s’arme de son chiffon à poussière et époussette sans bruit. Mais presque aussitôt, s’ensuit un concert d’éternuements violents,

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bruyants, inépuisables. Ils ne cessent que lorsque, chaussée de ses sabots de bois, elle s’affaire à l’extérieur, où ses pas lourds résonnent sur le ciment. Ainsi, toute la matinée, les bruits du ménage de la voisine nous agacent les oreilles. Nous savons que notre vengeance sera possible à l’heure de sa sieste.

Ce matin, Jacques est déjà dans la rue. Par la fenêtre, alors que les lampadaires s'éteignent, je le vois faire des allers et retours. Il a dû encore mal dormir. Mal rasé, son vieux chapeau de feutre sur sa tête, il allume sa première cigarette tout en promenant son chien. Il lui parle, à moins qu'il ne parle seul. Je pense qu'il attend que nous cherchions le journal pour causer un peu. Veuf depuis un an, Jacques cherche de la compagnie. Avant, il était très actif ; avec ses copains, il faisait du vélo ; musicien, j'entendais sa guitare quand les fenêtres étaient ouvertes ; jardinier, il distribuait ses légumes au voisinage. Il organisait aussi la fête des voisins. Vif et sociable, Jacques avait toujours plein de projets.Hier, pourtant, je l'ai vu bêcher son potager. Par-dessus la haie je l'ai interpellé ; il a l'intention de planter des pommes de terre. Je l'ai vu aussi briquer son vélo. Jacques reprendrait il goût à la vie ?

Se sentant admirée une étoile fila.

Se sentant espionnée, une étoile filaSe sentant compromise, une étoile filaSe sentant dévisagée, une étoile filaPDF P

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QU’OUVRE CETTE CLE ?

C’est une clé en deux parties, noir et argent. C’est une clé qui tient parfaitement dans la main, se glisse aisément dans une poche. Elle est précieuse. Il ne faut surtout pas l’égarer, au risque de devenir folle. Il faut encore moins la perdre, sinon on est perdu. C’est la clé de l’indépendance, que dis-je, de l’aventure et de la liberté. C’est la clé de ma voiture.

C'est la clef qui ouvre l'armoire bretonne.La clef introuvable de la salle de réunion,La clef de la boîte à musique, de la tirelire, du cadenas. La clef pour démarrer ou verrouiller la voiture. Légèrement courbée, même un peu tarabiscotée, elle s'accrochait aux lignes droites parallèles qui semblaient la soutenir élégamment. Un profond silence envahissait la salle, quand, soudain, seule et cristalline une note s'échappa, comme libérée, entraînant toutes les autres dans une harmonie suave et mystérieuse.

On se la posait depuis longtemps, tout le monde cherchait, quelqu'un enfin craqua : « ok, on te la donne». Alors, le chat majestueux, un brin moqueur se décida à nous donner la clé de l'énigme.

Oh, Une clé. Égarée, quelqu'un doit la chercher. C'est une petite clé. La clé des secrets peut-être, un tiroir, une boîte, avec des photos précieusesinconnues de tous ou presque, des lettres, un passé non oublié, une peine, un immense chagrin enfoui, vulnérable, une illusion peut-être, alors, que faire de cette clé ?

La clé des champs ouvre la porte vers des randonnées mouvementées, sur les chemins longeant les différentes cultures : orge, blé, maïs ou colza. Randonnées à la campagne, sur des sentiers encaissés longeant des ruisseaux, sur des pierres patinées par des eaux claires, iriséeset nacrées. Randonnées à la montagne, partant du fond des vallées encaissées vers d’abrupts sentiers sur des pentes vertigineuses menant aux sommets couverts de neiges éternelles. Randonnées sur les sentiers côtiers permettant d’admirer la mer dans tous ses états : tour à tour coléreuse, déchaînée, enfin sereine, apaisée, à peine ridée, parfois écumeuse, camaïeu de bleu, tantôt violette, mauve, bleu marine, grise, verte, turquoise, tantôt rouge carmin ou vermillon, rose saumon, orange, ocre jaune, terre de Sienne brûlée ou naturelle, au soleil couchant. La clé des champs ouvre la porte vers l’aventure, le monde entier, cinq continents. Mais elle ouvre surtout le cœur des gens, convertis, unis par un langage universel : la musique, apprise par cœur, éclectique, dynamique. Si vous voulez y entrer, écoutez tout simplement, tous en chœur, les paroles de chants mélodieux. Et vous trouverez la clef des chants.

Elle ouvre le paradis, un jardin secret, la porte de l'infini, la boite aux trésors, la clé éternellement égarée toujours retrouvée, et qui nous permet d'entrer. L’énigme. Gisèle

Jour de rangement : décidée, j'ouvre les tiroirs du bahut. L'un sert de dépôt de clés conservées sans but. Certaines portent une étiquette. Souvenirs, souvenirs ! Mon attention se porte sur une petite clé rouillée. Quelle malle, quel coffre ouvrait-elle ? Dans mon grenier, je fais des essais sur de grandes valises de cuir abandonnées. Sans succès. Puis je me souviens de la grosse malle de bois munie de ferrures et de sa serrure imposante servant au cadenas. Je l'avais aménagée au début de notre mariage. Cachées au regard des invités, les bouteilles et les verres attendaient l'apéritif. Vingt ans après,ma fille se l'approprie pour le même usage. D'où venait-elle ? Me remonte à la mémoire le grenier de ma maison natale. J'y ai passé de longues heures à lire les livres et les vieilles revues. Cette

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malle en était remplie. Je regrette seulement de ne pas avoir interrogé mon entourage sur son origine. Quand la clé rouillée était bien utile, dans quel pays avait-elle voyagé ?

C’était une clé blanche et brillante comme l’appartement tout neuf dont elle ouvrait la porte. Premier appartement avec une belle vue dégagée sur les toits parisiens. C’était la clé de tous les possibles, vrais, imaginaires ou rêvés, loin des parents enfin ! La clé des premières amours aussi, des portes qui claquent, des cris de rage. La clé du refuge douillet enfin, où l’on pouvait rester enfermée tout le week-end, roulée sous la couette, loin des promenades dominicales obligatoires. Puis on rendit la clé. Le temps de l’indépendance était terminé et le temps des chaînes librement consenties était venu. Avec deux clés cette fois.

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DANS LE POT DE CONFITURE

Avec le petit « pop » de la bulle d'air ouvrant le couvercle, s'échappe une senteur fragile d'oranger. Puis, comme si un arbre tout entier libérait ses fruits, cuits et conservés depuis plusieurs mois, des arômes suaves envahissent la pièce. Avec l'odeur du pain grillé, resurgit un doux souvenir d'enfant. Pourtant, bien que sensible à ses palettes de couleurs, au moelleux de ses textures, à la variété de ses parfums, je n'aime pas, du tout, manger de la confiture.

Pour ce petit déjeuner-là, je décidai de servir cette confiture de mûres. A la fin de l'été, par un samedi ensoleillé avec les enfants encore présents, et quelques ustensiles, nous avons organisé une cueillette des mûres dans les champs bordant la maison entourés de talus pour nous protéger mais aussi pour pouvoir disposer de ronces pour les confitures. Il faisait bon dans les champs, et dans la cuisine, avec cette bonne odeur de ce début de cuisson.Cette deuxième étape ou l'on récupère le jus est magique, ce ruban coloré qui tombe en cascade dans les pots.

Il y a la chaleur de l'été à l'ombre d'un chapeaude paille,Des épines dans le pouce et l'index,Des pigments rouges,De longues stations debout ou accroupi,La patience des adultes, l'impatience des enfants,Le calme du jardin et de la campagne,Des animaux dérangés dans leur cachette,Les grosses marmites et les pesées précises : fruits, sucre, eau,Et surtout les odeurs qui envahissent la maison.Goûter, lécher, tartiner, partager, souvenirs magiques de mon enfance que je transmets à mes petits-enfants. Sauront-ils prendre le relais ?

Dans le pot de confiture, il y a d’abord l’anticipation de cette journée particulière où nous allons « cueillir des mûres ». Pour certains, moment de plaisir, pour d’autres, corvée à laquelle on ne peut échapper. Chacun a son seau; il faut tendre le bras en évitant les dents acérées des ronces, les insectes volants et araignées en nombre ; saisir le fruit, bien noir, bien le choisir, sinon il ne se détache pas, ou ilbien s’écrase entre les doigts ; pire encore ! il tombe au sol, il est perdu ! Petit à petit, les seaux se remplissent, en entier ou seulement à moitié. Les petits visages se couvrent de taches violacées. Le jeu fait place à la cueillette. Il est temps de rentrer. Tout le reste sera affaire des parents : ranger, laver, cuire, mettre en pots. Dans la confiture, il y a le souvenir vivace d’une journée heureuse en famille. CatherinePDF P

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Dans le pot de confiture, il y a le plaisir de faire soi-même ses confitures. Le meilleur moment est celui de la dégustation. Il y a ceux qui hésitent à l'heure du petit déjeuner et présentent deux ou trois parfums différents, et ceux qui comparent à celle de l'année dernière. On l'emporte en vacances, car rien n'égale le « fait maison ». Mes parfums préférés sont la mûre, la framboise, la fraise, l'abricot, la rhubarbe. Mais attention à la confiture en pique-nique, ou sur la table du salon de jardin : elle attire inévitablement les petites indésirables comme les guêpes, les fourmis. Les pots de confitures, on se les passe pour faire goûter notre nouvelle recette, et en retour on compare celle de nos amis. On la déguste sur les tartines, dans les yaourts, sur les gâteaux.

Dans le pot de confiture, il y a des mûres bien noires et juteuses qui collent aux mains, cueillies dans les ronciers, des framboises, des cassis, du sureau, avec lesquels on fait des gelées, ou bien de la confiture avec tous les fruits mélangés. Il y a de la gelée de pommes avec des pétales de roses, tous ces parfums embaument la cuisine et tous ces fruits mélangés à du sucre roux me rappellent mon enfance et enchantent le palais. Les guêpes sont toujours au rendez-vous ces jours-là.

Dans le pot de confiture, il y a des fraises, du sucre, la douceur du verger. Verger de pommiers couverts de fleurs blanches épanouies, de fleurs rosées. Rosée recouvrant de fines gouttelettes étincelantes, l’herbe du jardin au lever du soleil. Soleil resplendissant dans un ciel bleu sans nuages. Nuages cotonneux se promenant au gré du vent, emportant mon imagination. Imagination nourrie par leurs diverses formes provoquant l’inspiration. Inspiration et expiration : une nouvelle journée commence. La vie continue.

Dans le pot, il y a de la confiture à la rhubarbe,presque noire, avec des écorces d’orange confite. Le pot est rangé dans le grand bahut, noir, lui aussi, juste à côté du grand pot en verre de sucre en poudre. Le pot est si grand qu’on utilise une grande cuillère spéciale qui s’accroche au rebord. C’est la confiture que Grand-mère prépare avec la rhubarbe qui pousse à l’ombre au fond du jardin. J’ai longtemps cru qu’il n’y avait qu’une sorte de confiture, car c’était la seule que préparait Grand-mère. D’abord elle faisait sécher les écorces d’orange sur le fourneau bleu de la cuisine. Cela sentait très bon. Puis après avoir lavé, tranché en petits cubes les branches rouges de la rhubarbe et ajouté le sucre, elle faisait cuire le mélange longtemps, très longtemps. La confiture était prête à être mise en pot quand elle était presque noire. Je n’ai jamais pu retrouver ce goût si particulier, surtout avec le beurre salé que Grand-mère posait en premier sur la tartine. Aucune amertume dans cette confiture, rien que la douceur d’un moment partagé et perdu. Sylviane

Dans le pot de confiture, il y a les fruits gonflésde soleil et de chaleur estivale, les mains agiles du cueilleur qui ne craignent pas les griffures, les mains expertes du cuisinier sachant savamment doser le sucre, les fruits, évaluer le temps de cuisson, l'œil vif de l'enfant gourmand que l'odeur alléchante et la couleur attirante font briller. Souvenirs d’enfance, passe-temps du retraité, que d'émotions et d'authenticité dans ce petit pot de verre posé sur l'étagère. Gisèle

Le souvenir de l'endroit pour la cueillette des mûres, aller chercher les pots de l'année dernière, ne pas oublier de les laver. Il y a surtout la cuisson. Trouver le moulin à légumes, le vieux, celui à manivelle, et commencer à rendre cette préparation mangeable en retirant tous les grains en essayant de ne pas en mettre sur la gazinière, bien peser la quantité et mettre à poids égal le sucre.

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Recommencer l'opération de cuisson, et surtout savoir quand la goutte va rester sur la cuillère pour évaluer la fin de la cuisson. Verser ce liquide dans les pots et surtout ne pas se brûler les doigts. Tour de magie: vite retourner tous ces contenants. Et le lendemain ranger sur l'étagère cette confiture qui viendra améliorer ma tartine de pain ou le fromage blanc.

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LA PREMIERE FOIS

La première fois que je l’ai vu, mon cœur a fait un bond terrible. Une joie pure et intense m’a envahie toute entière. Je l’ai aimé dans l’instant et aussitôt j’ai su que ce serait pour la vie. Il m’était offert par mes parents, pour mes dix ans peut-être. Ce fut mon premier et unique chien. Il reste présent en moi comme une part d’enfance teintée d’une douloureuse tendresse.

Je venais d'avoir cinquante ans, et nous avons fait le projet de partir en voyage avec mon Comité d'Entreprise pour la première fois. Nous avons choisi un séjour en Crête. C'était un séjour au soleil, dans un hôtel près de la mer, entouré d'orangers et de citronniers dont on cueillait les fruits au passage. Quel plaisir de se promener parmi les fleurs et plantes du jardin exotique. Nous avions le soleil dès le petit déjeuner, des tables entières de plats à notre disposition, et des serveurs tout à notre service. Dans la journée, c'était la découverte des petits villages, le safari dans la montagne, la rencontre avec les chèvres perchées en haut des arbres, les églises, les plages, les sites archéologiques et les dégustations des fruits, fromages, alcools. Parmi les excursions sur les îles, celle de Santorin nous a beaucoup marqués, si bien que quelques années plus tard, nous y sommes retournés pour une semaine entière, et avons retrouvé avec le même émerveillement, la caldeira, les maisons et églises bleues et blanches et le coucher de soleil à la pointe de l'île.

La première fois que j'ai pris le train pour aller à Quimper, je devais passer un concours des

jeunes fermières. J'étais très jeune, nous circulions surtout en vélo. Je n'ai pas le souvenir que ce fut difficile. Ce fut plus ardu de trouver le"Paraclet" à Quimper, sans la moindre carte, à pied dans les rues. Ce fut hasardeux, j'y parvins mais j’étais perturbée par le concours. La journée fut vraiment difficile.

La première fois que j’ai acheté quelque chose avec mon argent de poche, je suis descendue très vite dans la rue à Brest. Il y avait une alimentation au-dessous de notre appartement. Une chose me faisait vraiment envie. Ce n’était ni les gâteaux ni les bonbons. J’ai acheté une orange bien brillante. Elle m’avait coûté 0.3o centimes je crois. De retour à la maison, je montrais fièrement mon achat à ma mère. Elle s’est fâchée. « Mais qu’est ce qui t’a pris d’acheter cela ! ». Je n’ai toujours pas compris sa colère. Au fond, peut-être ne s’était-elle pas elle-même autorisée à une telle fantaisie. Pour autant qu’acheter un fruit, un seul, passe pour une folie...

On a sonné à la porte. « Qui est-ce ? » demanda ma mère. « C’est le Père Noël ! », répondit une grosse voix. Point de Père Noël, mais mon père. Un large sourire lui barrait le visage et dans ses bras. Il portait un vélo bleu. C’était Noël et c’était merveilleux. Dès le lendemain, je fis des pieds et des mains pour essayer mon vélo, mon premier vrai vélo. Avec seulement deux roues, un grand, avec des poignées pour les freins, une selle, des garde-boue, etc. Devant mon insistance, mes deux sœurs, plus âgées que moi, nous conduisirent, mon vélo et moi, au parc de la Mairie où de grandes allées bordées d’arbres permettaient aux familles de se promener tranquillement le dimanche. Je montais sur ma bicyclette. « Fais attention ! Au début, nous te tiendrons puis nous te lâcherons. Là, tu as des poignées pour freiner, appuie dessus pour t’arrêter. » Je ne les entendais pas. J’étais assis sur mon vélo prêt à foncer sans me préoccuper de toutes ces recommandations. « Appuie sur les pédales, allez, vas-y ! ». Je l’ai fait. Le vélo a avancé, très vite même. Trop vite, et au bout de l’allée, seul

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sur mon engin, je ne savais plus quoi faire pour m’arrêter. « Tes freins, appuie sur tes frein s! » criaient mes sœurs. J’ai paniqué et me suis laissé tomber sur le côté pour m’arrêter. C’était la première fois que je faisais du vélo. Mais ce ne fut pas la dernière fois que je freinais.

Je me souviens de la première fois où j'ai eu le droit de circuler loin de chez moi en vélomoteur. Mes frères me l'avaient prêté pour quelques jours, pour aller chez une amie à Tréflévénez. J'en étais fière, j'avais l'impression de voler de mes propres ailes. Tout excitée, j'écoutais à peine leurs conseils. Ma mère avait longtemps hésité à me laisser partir, mais comme j'allais dans une famille « bien », elle avait accepté. Au début, cheveux au vent, j'avais un sentiment de liberté, mais passé Landerneau d'où je n'avais jamais bougé seule, j'étais un peu inquiète. Allais-je me repérer ? Les routes de campagne s'éternisaient, le moteur pétaradait et chauffait, je pédalais dans les côtes. Enfin je vis la ferme.Pour la première fois aussi, je découvrais une autre vie familiale et une vraie complicité avec une amie. Au retour, je n'avais plus 15 ans, j'avais grandi. Cécile

Ma table est décorée en écru et vert anis, tout y est : la fourchette à gauche, le couteau à droite, sans oublier les verres adaptés à la boisson. Les invités vont bientôt arriver, mais avant je dois le préparer. J'ouvre la porte, il est là, me regarde, dodu, resplendissant dans une belle peau. Surtout le prendre délicatement. Où le poser ? Sur la table ? Trop encombrée. Sur le plan de travail, c'est plus sûr. Commencer l'opération, je l’écarte, je plonge ma main à l’intérieur, après un certain temps, ça y est, il est prêt. Mais il temps d'aller se pomponner, se coiffer, les invités viennent de sonner, Tout le monde s'installe. Ils me regardent, devinent une inquiétude de ma part. Et c'est avec soulagement que je présente mon chapon que, pour la première fois, je venais de farcir.Le jour de Noël, ma première petite fille, cadeau merveilleux, ma petite étoile, un vrai

conte de Noël ; et ses parents lui ont donné unjoli prénom qui brille. C’est ….

La nuit du 4 Août, ma seconde petite fille, toute menue dans son berceau, moment magique. Ses parents lui ont donné un prénom tout doux, enlevez deux lettres à celui de sa grand’mère et vous le trouverez. C’est …

Un beau dimanche de mars, mon petit-fils, un bébé magnifique, inespéré, remplissant de joie, sa sœur, ses parents et ses grands-parents. Et un joli prénom, tout doux, qui commence par la lettre M … C’est …

Portant un pull dont la vue m’était singulièrement familière, réunion autour d’une grande table, discussion au sujet de la profession de foi, port de l’aube blanche ou non, invitation à se joindre au groupe (d’enfer) , quel est le sens du vêtement blanc ? Miséricorde. C’est mon dernier mot …

Après avoir traversé la mer Méditerranée, éblouissement en découvrant la « ville blanche». Grande émotion, choc des cultures, à la vue des femmes en costume traditionnel et début d’un apprentissage de la vie sur un autre continent. C’est …

La première fois que je suis allée en Maine etLoire, à Liré, voir mon beau-père, quelle chaleur humaine j'ai ressenti et quel accueil bienveillant, pourtant il avait dit à mon futur mari, « une parisienne ! », alors que lui était de Paris. Le courant est vite passé entre nous deux, puis il n'y avait que sa belle-fille qui comptait et plus tard ses petites-filles. Quel courrier elles ont échangé avec leur grand-père. Mon mari n'avait pas imaginé cela.

Responsable de classe, je devais préparer un voyage scolaire, direction Belle Isle en Mer. Le proviseur de l'établissement me convoque dans son bureau et me dit : "Mademoiselle, le téléphone est à votre disposition, vous avez certainement déjà répertorié la liste des hôtels susceptibles de vous accueillir. Maintenant

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téléphonez, et retenez celui qui offre les prestations les plus intéressantes. Quelle ne fut pas mon angoisse, je me mis à transpirer, j’étais prise de panique. Le téléphone ne faisait pas à l'époque partie de mon quotidien, il n'y en avait pas à la maison. Je restai figée, complètement inhibée, les mots me manquaient. « Mademoiselle ressaisissez-vous, vous en êtes capable ». Emue, tremblante, je décrochai. Hésitante au départ ma voix s'est progressivement placée. L’expérience ô combien stressante, s’est soldée par un succès.

J’avais pris le bus de bonne heure avec Maman. J’avais bien regardé l’itinéraire du bus, car demain je serais seule. Arrivées à la Mairie, nous avions remonté la place, tourné à droite derrièrel’Opéra, traversé la place du Palais, affronté les pavés de la rue St Georges, contourné la piscine. Dans le creux au bas de la rue Martenot se trouvait le Lycée Anne de Bretagne. Une fois la grille franchie, les élèves se hâtaient jusqu’à la cour. A l’entrée, une grande femme toute de noir vêtue nous accueillit. S’adressant à Maman, elle demanda, en me regardant :

« Quel est son nom » ? « Sylviane H , répondit Maman. La femme vêtue de noir consulta son grand registre puis nous précisa : « Mademoiselle H. Vous êtes inscrite en 6e B. Dirigez-vous à droite et mettez-vous à la suite dans le deuxième rang. Quant à vous, Madame, vous restez ici, les parents n’ont pas le droit d’accompagner les enfants ». La cour se remplissait peu à peu. En ce début septembre, la température était encore douce. Les élèves, petites et grandes, étaient vêtues d’une blouse bleue. Soudain, la porte du grand bâtiment beige s’ouvrit. Une femme petite et ronde apparut en haut de l’escalier qui menait à la cour. Elle

s’appuyait sur une canne. Elle aussi était vêtue de noir. Des mots murmurés coururent de rang en rang. Je n’entendis que la fin…. « trice ». La sonnerie retentit. Puis Madame la Directrice annonça d’une fois ferme : « Mesdemoiselles, il est l’heure de rentrer, en ordre et en silence, s’il vous plaît. Terminales A, avancez ». Les élèves avançaient lentement une par une, classe après classe, jusqu’à ce que ce fut le tour de la 6e B. Je ne me sentais pas bien. Je me retournai une dernière fois vers Maman qui me fit un signe d’encouragement.

La première fois que J'ai pris l'avion en 1971 : Paris / Montréal. Le voyage d'étude commence à Orly. Pour le groupe, passage rapide à la douane, passeport et valises qui s'amoncellent dans un chariot qui disparaît bientôt tiré par un tracteur.Le commandant de bord nous explique la durée du vol, l'altitude de croisière avant de nous souhaiter un bon voyage. Ai-je peur? Les hôtesses nous distribuent des bonbons à sucer pour le décollage, à vrai dire assez inutiles quand les moteurs accélèrent. J'écoute avec attention les consignes de sécurité, j'essaie de repérer les issues de secours, le gilet sous le siège, les masques qui tomberont du plafond. Mon cœur se serre. Tout redevient calme; il faut rester attaché sauf « urgence ». Bien que le vol sera long, je sais que je ne bougerai pas, là j'ai la trouille. Je regarde par le hublot, que du bleu. Je ne parviens pas à lire. Puis, les hôtesses, gants blanc, nous distribue les menus pour un vrai repas, dans de vraies assiettes, avec de vrais couverts gravés Air-France que je garde en souvenir, entrée, plat, dessert, vin dans des verres à pied, digne d'un Trois étoiles dans lequel je ne suis jamais allée. Le vol est long, j'ai des fourmis dans les jambes. Certains se promènent dans le couloir, je ne bouge pas. Enfin, on annonce l’arrivée, l'atterrissage est proche, tout le monde se rassoit, plus de bruit. J'ai une boule au ventre et je ne suis sans doute pas la seule. Les pneus se posent à peine qu'un tonnerre d'applaudissements éclate dans l'avion. Tout le monde reste bien sagement assis, jusqu'à ce que le commandant de bord vienne nous voir, nous

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remercie, nous annonce la température extérieur avant de nous souhaiter « bienvenueau Canada ». Ouf.

Photo Sylviane

L. A N. D. E .R. N.E.A U

Sur la lande sous la lune, le renne a rendu Anne à Edern - Ancrée dans la cour, la cane couve et recouvre sa couvée, le cou en vrac.

Anne née à Landerneau, rue André Renard, l'année de la lune en landau sur un radeau et l'âne rude rua dare-dare.

L’eau de la rade a rendu le radeau de René né à Landerneau.

René s'est rendu dans la dernière rue de Landerneau près du radeau dans l'eau.Le landau est là dans la lande drue.Le renne a eu la dent dure.

Alan le rude renard râle sur son nanar de renardeau, dans son landau , en rade sur un anneau dans une rue de Landerneau. Geneviève

Edern est dur et dru. Il est né à Landerneau près de l’eau - A un an, un lad sur un âne l'a vu nu sur la lande à la lueur de la lune. Dur Dur !

Un ver écru, nacré et cornu, crève dans un verre d’eau ocre et rance. Evan, rêveur, enroué, l’évacue vers la cane vorace d’Eva à l’œuvre sur la ronce, où il recouvre la vue, dans la rue, sur un créneau, sans rancœur.

Au bord de la rance la race de colvert au cou recourbé couve, navré ,comme un cancre ,face à

la cène de la cure ancrée dans le verre du curé de la Rance.

J’AIME

La nature au printempsLe chant des oiseauxLa douceur du soir

Le rire de la jeunesseLa gaité de mes filles

Les gâteaux" fait maison"Un certain tableau.

J’aime faire du bien, annoncer une bonne nouvelle, cueillir les fleurs du jardin, les couleurs chaudes, les ustensiles de cuisine, éveiller les sens, les bonnes idées, laver le linge sale en famille, limiter la casse, illustrer mes propos, prendre la balle au rebond, rendre service, orner la maison, être à l’unisson, récolter les légumes du potager, avoir des invités à table, rire aux éclats, exprimer mon ressenti, parler tout doucement, aller bien, raconter de belles histoires, taire un secret, aimer les membres de ma famille, me griser de l’air vif de la montagne, embarquer sur un kayak, rêver à tous les possibles. Ceci étant écrit, nous savons tous que rien n’est jamais tout blanc, rien n’est jamais tout noir … et j’aime les poules et les œufs en chocolat blanc, en chocolat noir, mais aussi en chocolat au lait.

Me plonger dans un livre d'aventuresRegarder des émissions documentairesDéguster des glaces en flânant l'été. Traîner chez les bouquinistes, dans les librairiesRegarder les danses bretonnes, et folkloriquesLes voyages.

J’aime lire le matin, le midi, le soir, la nuit aussi.

J’aime le voyage immobile au bord du rêve.

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J’aime le chant des oiseaux, quand j’ouvre les volets.

J’aime préparer le petit déjeuner pendant que P. se réveille doucement.

J’aime la première cuillère de muesli, la deuxième aussi.

J’aime la sonnerie de Skype et voir apparaître le visage de mon amie C. sur l’écran de l’ordinateur.

J’aime rentrer dans la maison silencieuse.

J’aime regarder les photos jaunies qui s’effacent doucement au fil des ans.

Me réveiller sans réveil, l’eau tiède de la douche, faire des bouquets...

Déjeuner tranquillement, les bijoux en toc, danser la valse, jardiner, semer, récolter …Les couleurs chaudes, le silence du jardin, la musique, la lecture, les taquineries de ma petite-fille, faire des boules de neige. La lumière, la verdure, la maison pleine, les jeux d’enfants danser, cuisiner, nager, marcher …

Le mimosa et l’engoulevent.

La communication, ma maison, être en famille,le café du matin, les fêtes de Noël, le bonheur de se coucher dans un lit, être avec mes amies, le chocolat, le jardin, la nature, la balancelle sur la terrasse, l'été, la beauté de l'univers, écouter des contes, chanter, le soleil, la mer,l'art floral, les voyages, mes activités, ma Bretagne, mettre le linge à sécher au soleil.PDF P

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JE N’AIME PAS

Le froid de l'hiverLes soirées trop longues

La solitudeLa tristesse

La peur des joursL’agressivité

Je n’aime pas faire mal : je n’aime pas haïr, utiliser la force, manigancer, imiter, les larmes de désespoir, intimider, exclure, les remords, les magouilles, les avantages, les lauriers palmes, les faux témoignages, arriver en retard, idolâtrer, tuer le temps, ennuyer, répliquer méchamment, les armes, les gravats, rire aux dépens de quelqu’un quand c’est sans espoir, sauter les étapes, la salade trop assaisonnée, entrer en conflit, regarder les films d’horreur.

Je n’aime pas les troupeaux de randonneurs qui se pressent sur les chemins côtiers,

Je n’aime pas les lettres recommandées,

Je n’aime pas voir P. boiter,

Je n’aime pas les poils blancs qui apparaissentsur le museau de mon chien.

La guerre le verglas, les insultes au volant, les discussions politiques, ceux qui chantent et qui faussent.

Le mensonge, l'hypocrisie l'indifférence, nettoyer les carreaux, ma voix enrouée, les fest-noz.

Parler, les principes éternels, les clés, les râleurs, faire des listes.

La viande saignante, les films d’horreur, le style Gothique, porter le chapeau, la buée sur mes carreaux de lunettes.

La vulgarité, la pluie, le café et le manque de franchise, le fait qu’on me commande alors que j’ai passé l’âge.

Le temps qui passe, les séparations, les enterrements, l’attente, être dépendante, les dictatures, le populisme, choisir.

Les mots inutiles, les aliments acides.

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QU’Y A-T-IL DANS CETTE VALISE ?

Je sais d'avance ce qu'elle contient ! Tout un passé, presque une vie de travail, de recherches sur les costumes de la commune, une expérience, une motivation, des broderies, des motifs, des livres des Lalaisse et autres, des cahiers de réflexions. ...

Une petite valise peut contenir des bijoux, des secrets, des dents de lait, une mèche de cheveux. Une grande, des vêtements, des jouets, des armes, des revues, des vieux livres, des archives, des souvenirs d'enfance, des habits de carnaval.

Pour faire le portrait d’un oiseau,Une colombe bien sûr, à la manière de Jacques Prévert.Prendre d’abord une valise, En carton mâché, Petite, miniature, à nu, Mais pleine d’idées,La placer dans un arbre, arbre de vie évidemment. Choisir une belle branche, bien cachée entre des rameaux bourgeonnants, La poser délicatement. Prendre ensuite un pinceau, La recouvrir de deux couches de gesso, La laisser sécher et quand elle est sèche, Peindre le fond en écru, puis le recouvrir de bruine à l’aide d’une brosse à dents,Une bruine de fines gouttelettes de peinture à la caséine.

Puis décalquer un motif, après avoir choisi un oiseau, une colombe avec un brin de paille dans le bec.Aquarelle et choisir les couleurs pour l’oiseau.Peindre d’abord les pattes et le bec avec un peu d’orange cerné de terre d’ombre naturelle, Peindre ensuite une à une les plumes, avec du blanc ombré de gris fer, Et l’oiseau s’envole emportant la petite valise, Et la valise grandit, grandit, grandit, Et vient se poser sur la table de la salle à manger, Elle est fermée à clé, la chercher … Ouf, elle était restée cachée au fond d’un tiroir du buffet, Mais ça coince, un peu d’huile trois en un et la clé tourne, La valise s’ouvre,Pleine de photos jaunies,De papiers manuscrits, De lettres désuètes, De cartes postales surannées, Partir avec la valise, pour un nouveau, voyage, aux souvenirs. Certainement plein de surprises.

Les vêtements du costume breton de mes grands-parents, le chapeau, la veste faite sur mesure, le pantalon, le grand châle noir de ma grand-mère, le châle clair de la jeune fille, le tablier brodé et la jupe, les coiffes du dimanche et de tous les jours.

La valise était cachée dans le fond du grenier.Elle me semblait bien lourde à transporter. Seule solution : découvrir ce qu'elle contenait. Doucement, ma main entreprit de faire glisser le système de la fermeture éclair. Un "switt" se fit entendre jusqu'à l'ouverture totale. L’ouvrir, découvrir ! Quoi donc à l’intérieur, une seconde valise de même couleur. Il faut recommencer le processus de l'ouverture et savoir ce que contient cette deuxième valise. Déception. Unetroisième valise. Un rangement parfait d'économie de place. Plus petite et toujours aussi lourde. Il faut connaitre le contenu. Je l'ouvre. Oh ! Ce que je cherchais depuis longtemps était là caché. J’en avais même acheté un autre, mais celui-là était toute ma jeunesse, ma scolarité, celui qu'il fallait avoir,

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pour chercher tous les mots de la langue française. Mon dictionnaire.

Un papillon, une dent de lait, un violoncelle, unparachute, un dentier, une cape, un sextant, un ressort cassé, un cric, un bon point, un arc en ciel.

Ma petite valise rouge attend posée au-dessus de l'armoire, couverte de poussière. De temps en temps je lui jette un œil désespéré. Non, pas de voyage en vue. Alors je vois en rêve ce qui me paraît un minimum pour tenir une semaine sur une île déserte et alléger ma valise : un ou deux livres, une flûte, un carnet et un crayon, une brosse à dent, une tenue de rechange pratique, un canif, du savon. Les bonnes chaussures, je les aurai aux pieds.

C’est la valise de Pablo. 56 ans en 2014. Né à Aveiro, Portugal. C’est un bel homme, qui a traversé de bien laides années. Il quittait très jeune son village natal pour s’installer en France. Sur ses épaules pesaient deux peurs au moins. Celle de la dictature et celle de l’enfer. Il m’a avoué que personne ne riait pas non plus avec le Bon Dieu à cette époque. Pablo n’était pas riche. Alors, dans la valise, rien, et même sans doute moins que rien. En France, il a appris un métier, celui de boulanger. Il avoue avoir pour la fabrication du pain la même patience, la même délicatesse qu’à l’égard des enfants. Selon lui, les deux sont faits de la même matière».

Que peut-on garder dans une si petite mallette, une minuscule mallette… Une toute petite mallette en carton qui ne ferme pas à clé ? On ne peut y placer que des bricoles. Mais attention, des bricoles de valeur : une photo, un coquillage, un ticket de cinéma, une petite pomme de pin... Toutes ces petites bricoles qui forment la trame de la vie.

C’était une petite valise rouge. Je suppose que Maman en avait choisi la couleur pour m’inciter à jouer avec. En fait, je ne jouais jamais, préférant m’allonger sur le lit avec un livre. Maintenant que j’allais au lycée en centre-ville, tout près de la bibliothèque, je pouvais y passer

presque chaque jour emprunter un nouveau livre. Un jour, j’invitai une copine de classe à la maison. Mireille repéra tout de suite la petite valise rouge qui gisait abandonnée dans un coin de la chambre. Elle s’en saisit et me demanda :

- Je peux l’ouvrir ?

- Bien sûr, lui répondis-je, levant à peine le nez de mon livre. Puis j’entendis Mireille s’exclamer :

- Que c’est joli ! C’est ta Maman qui les a cousus ?

- Oui, lui répondis-je- elle n’a eu qu’une poupée dans sa vie. Alors elle aime m’en offrir et leur coudre des vêtements. Mais moi, je n’aime pas les poupées.

C’est en voyant le regard d’envie que Mireille portait à cette collection de jupes, robes et chemisiers que je compris le plaisir que Maman devait ressentir en ouvrant la petite valise rouge pour jouer à la poupée.

Une petite valise, plutôt une petite mallette, garde les bijoux de ma grand-mèreUne petite valise renferme les trésors de couture de ma petite filleUne petite valise tapissée de tissu sert de réserve aux gâteaux faits maison.

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LE PRETRE MARIE

Magritte

Incognito. Comment reconnaître une pomme verte d’une autre pomme verte dans cette société où tout est calibré, programmé, standardisé, pesé, sans droit à l’erreur, sans originalité, sans fantaisie, même avec un masque. Seules, les feuilles permettent de les distinguer. Mais nous les vend-on avec les feuilles ?

Pommes en goguette. C'était carnaval, pourquoi ces magnifiques pommes vertes n'y participeraient-elles pas? Que cachent-elles derrière ce masque coloré. Souriantes, interrogatives, que signifie leur clin d'œil devant ce ciel nuageux ?

On avance masqué. Rien ne ressemble plus à une pomme qu’une autre pomme, à une pomme verte qu’une autre pomme verte. Pourquoi alors ajouter à chacune un masque, le même masque rose ? Toute la simplicité, le naturel de la pomme disparaît derrière le masque. De pomme, elle devient visage, oui, mais visage sans regard, sans expression donc. La pomme s’humanise par le masque, mais d’une humanité désagréable, dangereuse même, calculatrice. Les pommes sont deux, deux seulement, mais peut-être le début d’une longue cohorte. Dans une nature paisible, se mettent en marche les fruits d’un monde déshumanisé.

Pas vu, pas pris. Pourquoi porter un masque ? -Pour passer incognito. Je sais qu’il y a dans l’assistance une personne qui mange les pommes jusqu’au trognon.

Au bal masqué. Au bal masqué de la Corbeille à fruits, deux pommes masquées entrèrent dans le parc où le bal était organisé. Un beau concombre en livrée dorée les accueillit dès leur arrivée et avertit l’assemblée de l’arrivée du Comte et de la Comtesse Granny. M. le Comte et Mme la Comtesse allèrent sans hésiter saluer le Duc Ananas du Duché de Martinique. « Ne trouves-tu pas que son costume en rondelle est assez original ? » demanda Geneviève Granny à Edouard son mari. Ils se mélangèrent à la foule pour danser. « Tiens tu n’as plus ton masque et tu sembles pelée comme après un coup de soleil. » remarqua Edouard. « J’allais te faire la même réflexion mon cher. C’est un homme en tablier et toque blanche qui s’en est occupé. Arrêtez Edouard de me mordiller l’oreille, nous n’avons plus vingt ans. Geneviève vous me connaissez, ce n’est pas moi ! C’est un coutelas que je n’ai jamais vu. De plus, je pense qu’il y a un pépin dans cette histoire ou plutôt qu’il n’y en plus, car je me sens vidé, les jambes coupées. Pas toi ? ». La comtesse n’eut pas le temps de répondre : elle se retrouva dans une valse endiablée où se mélangeaient tous les convives sur un parquet ciré et glissant. Le Vicomte de la Banane, étourdi par ces pas à quatre temps, glissa, et sur le sol s’étala. Dans sa chute, il entraîna de jeunes clémentines « débutantes » qui, bien sûr, participaient à leur premier bal. Les Marquises ‘’Fraises Gariguettes’’ suivirent ce dangereux élan effréné quand des Poires un peu blettes vinrent s’écraser contre elles et les poussèrent au fond d’un saladier rempli de sucre et de kirsch.

Carnaval. Masquée, fais ce qui te plaît. Inconnue, qui es-tu ? Tu me ressembles, vert froid et rose tendre. Je roule sur le sable chaud jusqu'à toi. Je te frôle. Je te parle à l'oreille. Nos feuilles se dressent. Souris-tu ? Consens-tu ? Restons tous deux sur la plage. Laissons la foule bruyante s'éloigner».

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MOMENT-COINCE-LETTRE- FRAPPE-LUMIERE

«Attends, encore un petit moment, je coince! Bon, allez, je prends les lettres, et, en frappant la dernière sur la case, j’écris le mot lumière. Vingt points. »

La lumière jaillit et vient frapper les vitres à ce moment de la journée, les oiseaux restés coincés dans l'obscurité, soudain s'éveillent et décrivent dans le ciel de belles lettres dorées pour exprimer leur gaîté.

Encore une lettre de réclamation au percepteur. Ce n’est pas le bon moment, mais je suis coincée, je dois m’y mettre. Même si je ne suis pas une lumière, il saura que mes propos sont frappés au coin du bon sens.

« Victor était coincé dans sa tranchée. Coincé mais heureux. Enfin un moment de lumière dans cette grisaille guerrière. Il profitait de cet instant pour lire une lettre de Marie. Ce pli n’avait pas été frappé par la censure des hautes autorités ».

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DEJEUNER SUR L’HERBE

Manet

Insouciance. Ils sont arrivés ensemble en barque. Après son bain, la femme est restée nue mais pudique et rêveuse, indifférente au discours de l'homme au turban. Son regard et celui de son amant se rejoignent à l'infini. Un moment de détente. Pas de philosophie.

Le dernier métro – « Il serait temps de vous rhabiller ma douce Clarisse. Nous allons rater le métro. »

- Mais, cher Charles, nous prendrons le prochain et irons dîner directement au Moulin. Profitez-donc des derniers rayons du couchant !

Qui regarde qui ? « Mais qu’ont-ils donc à me regarder ainsi. N’ont-ils jamais vu Dame Nature ?

« Ils vous envient ma belle Hélène, engoncés qu’ils sont dans leurs habits mouillés à arpenter les salles du musée » !

La proposition du peintre« Vous êtes merveilleuse avec votre peau de pêche et votre chevelure rousse, voudriez-vous poser comme modèle pour mon prochain tableau ? »« Qu'en pensez-vous Monsieur ? »« C'est à elle de prendre la décision. Demandez à son amie si cela l'intéresse ? Elle est brune, mais d'une grande beauté également ».« Je veux bien faire un essai.

Surprenante balade. Un dimanche, dans le parc du bord de l’Elorn, je flânais. Des voix s’élevaient derrière un bosquet touffu de céanotes. Des rires de jeunes femmes répondaient aux remarques de voix graves masculines. Je ne compris pas clairement le sujet de la conversation. Mais il semblait s’agir d’un débat ordinaire :

« Ce sandwich au rosbif te donnera des couleurs aux joues, chère amie ».

« Ce vin te fait dire n’importe quoi, Edouard !Fabienne, ne reste pas à l’écart, viens près de nous. Tu es peu vêtue, notre présence te réchauffera ».

« Chut, écoutez, j’entends quelqu’un approcher. Il faut que je me rhabille ».

« Ta grâce et ta nudité ne peuvent choquer personne. » Ceci entendu, je fis demi-tour. Je ne voulais pas gêner.

Instant donné, un temps sacré. Femme recroquevillée et voilée, corps exposé… Dans sa nudité, Jambes entremêlées … Dans la proximité. Visages sereins … Main tendue pour dialoguer ?Tout respire la sérénité, la complicité. Est-ce le message annoncé ?

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MON JARDIN

Le printemps explose, jonquilles, narcisses primevères pointent leurs éclatantes corolles le long des allées qui traversent le sous-bois. Les timides violettes ainsi que les perce-neige et les crocus tapissent le sol endormi par l'hiver. Blancs, roses, rouges, les camellias surgissent çà et là, majestueux, éclatants sous le soleil encore timide, tandis que les giroflées odorantes surprennent le visiteur.

C’est le jardin qui m’a plus d’abord. Il enserrait la maison étroitement, semblant la protéger. Les massifs de bruyère rose s’étalaient sous les bouleaux et les rhododendrons envahissaient la terrasse de leurs grosses fleurs parme. A droite,les peupliers d’Italie se balançaient doucement sous la brise printanière. Quelques marches grimpaient le long de la maison, rejoignant le bois à l’arrière. Les anémones des bois en un large tapis blanc laissaient déjà apparaître les clochettes bleues des jacinthes. Nous serions heureux ici. Etait-il besoin de visiter la maison pour s’en convaincre ?

Les roses de Noël, violacées comme des aubergines, éclosent les premières, humbles hellébores, perdues dans le parterre hivernal, tandis que quelques soucis aux pétales orangesun peu anachroniques, jouent les prolongations estivales. Suivent crocus, minuscules taches jaunes, blanches ou violettes, accompagnésd’une rivière de bleus muscaris. Puis mars voit éclore les jacinthes au parfum capiteux, suivies

des jonquilles et des narcisses qui illuminent la pelouse carrée de leur lumière étincelante, jouxtant les branches de forsythias qui ne demandent qu’à s’épanouir …Plus modestes , les primevères sauvages , écrues ou rosées, accompagnent les pâquerettes et les boutons d’or sur une herbe moussue… Les rameaux nus du marronnier se couvrent de bourgeons duveteux qui n’attendent que les premières chaleurs printanières pour éclater et recouvrir l’arbre d’un manteau verdoyant ! Tandis que le camélia blanc se marie avec les camélias rouges ou roses coordonnés au pommier du Japon, tout de rouge vêtu … Puis viendra avril avec les tulipes aux coloris chatoyants …C’est mon vrai jardin, à la campagne, nature, un brin fouillis …C’est mon jardin des souvenirs : fruit des échanges de graines et de boutures, avec les voisins, les amis. Et finalement c’est aussi un peu mon jardin secret.

Le jardin était minuscule. Un simple carré de terre d’à peine un m², à l’abri des framboisiers. Grand-mère avait cédé à nos suppliques et nous pouvions enfin planter nos haricots levés dans une coupelle d’inox emplie de coton humide. Mais l’été est arrivé et le jardin fut oublié. Les vacances sous la tente, c’était drôlement plus intéressant.

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QUE VOIT L’HOMME EN ARRIVANT SUR LA LUNE ?

Après un long voyage dans son vaisseau, John s’applique à faire le nécessaire pour alunir pour la première fois de sa vie. Tout est parfait. Les indicateurs sont tous au vert. C’est prêt, il peut se poser. C’est en douceur que l’opération s’est faite, il craignait le contraire. Il suffit maintenant d’ouvrir la porte, de descendre les marches de l’échelle qui s’est automatiquement déployée. Il descend, commence à marcher d’un pas souple. Son regard se déplace dans l’infini. Quel est cet objet? C’est rond et ça fait tic-tac. John s’écrie «mon réveil ! ». Le réveil sonne et John se réveille.

Une bille de verre turquoise, fausse goutte d'eau dans un univers couleur cendre.

Il voit une pierre noire, des cailloux, un arbre rachitique, une immensité désertique où il ne ferait pas bon de vivre, trop désolant.

Une boucle de ceinture égarée par le cosmonaute – un autocollant décroché de la navette – un emballage de chewing-gum. .

Une masse confuse ondulant à l'infini...

Un oreiller, une plume, une balançoire, un arrosoir, une chaussure pointure 56, une carte routière.

Une pancarte où l’on peut lire une inscription en cyrillique : « я былa здесь первой » signé la chienne Laïka.

La plaque commémorative avec les signatures des trois membres de la mission Apollo 11 et de celle du président des États-Unis, Richard Nixon. Une statuette, des miroirs, des balles de golf.

Année 2548. Après un long voyage, le dernier homme de la terre arrive sur la lune où il doit retrouver sa compagne et de nouveau perpétuer la race. A l'arrivée du module, déception, personne. Il ajuste son casque, descend péniblement l'échelle et, s'engageant délicatement pour un premier pas, glisse sur une peau de banane. Devant lui, une montagne de déchets. Point de femme. Point d'avenir ?

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QUE FAIT NOE DEUX JOURS AVANT LE DELUGE ?

Que dois-tu faire Noé ? Sauver des millions d’individus. De quoi ? Du déluge. Bref, il explique qu’il va y avoir un déluge dans deux jours et que l’Etre Suprême, Celui qui fait tourner les boules du Loto, l’a choisi pour sauver une paire de chaque espèce d’animaux qui peuplent la Terre. « Je dois les embarquer sur une arche à l’embarcadère de Roscoff et voguer jusqu’à la délivrance. « Ecoute Noé, non seulement tu as été jouer au Loto mais je pense que tu as bu quelques apéros! Allez, va te coucher! ».

Il pleut, il pleut ! C'est le réchauffementclimatique, l'eau des fleuves déborde, les glaces fondent, des tsunamis envahissent les côtes. Sauve qui peut ! L’arche est prête, gros navire de bois rassurant, mais Noé est inquiet. Il ne peut accepter tous les vivants et il a déjà trié. Il donne des ordres : pressez-vous ! Les couples d'animaux défilent sur la passerelle et Noé vérifie. N'a-t-il pas oublié une espèce ? Sont-ils jeunes et en bonne santé ? Les deux sexes sont-ils présents ? Des humains affolés s'agrippent aux cordes d'amarrage. Noé se laisse attendrir. Il hisse à bord quelques couples et enfants qu'il joint à sa grande famille. Plus loin, des hommes clairvoyants ont aussi fabriqué des bateaux et amassé des provisions pour quarante jours au moins. Noé ne sera pas seul responsable du repeuplement de la planète Terre. Il est rassuré.

Noé avait déjà rassemblé sa famille dans l'arche car un rêve l’avait prévenu du déluge. Et les gouttes de pluie se faisaient plus serrées. Il vérifie que tous les siens sont à l’abri. Y a-t il de quoi se nourrir Personne ne croit à ce danger, on le prend pour un illuminé ? Il s'affaire à rassembler un couple de chaque espèce d'animaux passe tout en revue et délégué à chaque membre son travail et son rôle à l’intérieur de cette immense maison Déjà lapluie tambourine sur le toit. ?

Noé ne savait plus où donner de la tête. Il n'avait plus beaucoup de temps, et il lui fallait choisir deux animaux de chaque race, alors qu'il les aimait tous. Fallait-il tirer à la courte paille, où se fier à son instinct et choisir les plus beaux, les plus forts, les plus rapides ? Et personne ne pouvait l'aider ! Déjà, il sentait les prémices du déluge : le ciel noircissait, la montagne grondait, l'eau s'infiltrait et bientôt elle envahirait tout son espace. Lui aussi devait tout quitter : sa famille, sa terre, sa maison, ses arbres, ses fleurs. Tout cela lui faisait peur, mais c'était tellement excitant, et surtout, il allait survivre lui !

Noé lève les yeux au ciel : il est bleu, sans faille. Qui pourrait croire que ce ciel-là lâcherait sous peu toute son eau, engloutirait les continents, noierait déserts et oasis. Pour combattre le feu, il y a l’eau, mais que faire contre l’eau ? Heureusement, l’arche est finie. Dix ans pour la construire. Il a fallu penser à tout, ne pas mettre les prédateurs trop près du gibier, penser aux réserves de nourriture. Un vrai casse-tête. Je les ferai rentrer en rang par deux. A l’époque du rut, ce ne sera pas triste. Et où mettre les petits ? « Tu es sûr que ta liste est complète « ? demande Néo, le jeune fils de Noé. Alors, se dit Noé : j’ai les poux, les hiboux, les matous, les caribous, les nandous, les mérous. Mais trop tard pour les tatous.

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Noé marche de long en large sous la pluie. Il se dit en lui-même :« Tout est prêt. Le bateau. Les animaux. Les vivres. Pourquoi alors suis-je si inquiet ?Trop lourde est ma responsabilité.Et si j’échouais, si le bateau faisait naufrage, si les animaux mouraient, si les vivres manquaient?Trop grande est ma charge.Et si l’eau montait encore et encore, si nous finissions tous noyés, sans espoir de nous accrocher au moindre petit îlot ? Trop cruelle serait notre perte.Alors, Noé, n’abandonne pas. Tu prépares l’avenir, tu es l’avenir. L’avenir se souviendra de toi ».

Noé, tout énervé, en rentrant chez lui s’écrie

-‘’ Ecoute ça Valentine : Je suis allé au bar faire mon Loto hebdomadaire.

- Comme d’hab Noé et alors ?

- Et alors !

- Oui et alors ?

- Ecoute un peu ça : Au comptoir il y avait un drôle de type. Il m’a dit un truc délirant. Il m’a dit que le gros lot j’allais le gagner. C’était sûr !

- C’est bien ça, rétorqua Valentine sur un ton circonspect.

- Je te jure ! Il m’a dit que le gros lot j’allais le gagner, il me suffisait d’y mettre un peu de peine.

-Un peu de peine, comment ça ? a répondu Valentine.

-Un p’tit boulot sans lézard.

Il fallait construire une arche au moins trois étages, pour mettre à l'abri sa famille et les convaincre de le suivre avec des paroles justes, véritables, rassurantes, dans un langage animalier, Noé donne le pouvoir de communiquer entre eux pour annoncer la

nouvelle à chaque espèce d'animaux de se rassembler en couple, pour la survie de l'humanité.

Tranquillement, Noé consulte la liste de tous les animaux convoqués pour le départ. Minutieusement, il vérifie les caissons étanches de l'Arche. Lentement, il ouvre ses mails pour le suivi de sa commande de cirés jaune chez Cotten. Satisfait, il appelle sa femme : « et maintenant, on se le prend, ce café » ?

Deux jours avant le déluge, Noé construit un bateau fermé, en forme de coffre : suffisammentlarge et long. On l’appela l'Arche de Noé pour y loger sa femme et ses enfants, collatéraux, des amis, d'autres personnes, des provisions, ses animaux : un couple de chaque race afin de pouvoir repeupler la terre après le déluge. Il y aurait bien d'autres choses à dire, mais ce fut une belle aventure, lorsqu'il s'échoua sur le mont Ararat.

Malheureuse prédiction, que va faire Noé ? Il ne veut surtout pas que tout disparaisse, alors il se précipite pour rassembler les animaux de toutes les espèces, les grands, les petits, les féroces, les dociles. Ou loger tout ce monde agité et soucieux de son avenir ? Noé décide de construire une arche qui saura les protéger.Comment convaincre de l'efficacité de cette entreprise? Noé sait trouver les mots qui apaisent et donnent confiance. La traversée sera longue dit-il, mais l'espérance et le salut seront au rendez-vous.

Noé appelle un couple de chaque espèce animale, dans l’ordre alphabétique et leur dit :

- Abyssin, autruche, avancez-vous,- Boa, brebis, ne vous battez pas,- « Canard, caméléon, caracolez,- « Dindon, demoiselle, descendez,- « épervier, escargot, embarquez,-« Faon, flamant rose, foncez,- « gorille, gnou, garez-vous,- « hirondeau, hérisson, hâtez-vous,- « iguane, impala, infiltrez-vous,

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-« jaguar, jaco, joignez-vous ,- « Koala, kangourou, ok,- « Mouton, morse, maniez-vous,- « Nandou, narval, nommez-vous,- « Opossum, ouistiti, organisez-vous,- « Puce, poney, partez,-« Quetzal, quiscale, quittez,- « Renne, rainette, ne restez pas,- « Tatou, tapir, taillez-vous,- « Urubu, unau, usinez,- « Varan, vautour, venez,- « Wapiti, whippet, en wagon,- « Xiphophore, xylocope …x ,-« Yack, yorkshire, youyou…youpie-« Zébu, zèbre, ne zigzaguez pas trop …

La liste était longue. Noé ferma les portes.

Noé se réveilla brusquement. Le niveau de l’eau avait continué à monter pendant la nuit. La pluie tombait sans arrêter depuis plus d’une semaine.Il regarde Sarah, qui dormait tranquillement à côté de lui. La promesse de l’enfant à venir était déjà bien visible. Il fallait se hâter. Derrière la maison, sur la colline, les animaux commençaient à s’agiter. Bêlements, meuglements, aboiements se mêlaient. Demain, après-demain au plus tard tout devait être prêt pour le grand départ, le saut dans l’inconnu. Trouverait-il un abri, un refuge, où tout recommencer ? Assez tergiversé, il lui fallait sans tarder vérifier la solidité de la passerelle pour accéder à l’Arche. Au loin, il aperçut une meute de loups qui se rassemblait. N’allaient-ils pas

dévorer ses frêles agneaux, ses petits veaux, ses poussins et canetons ?

Allons, l’heure était venue. Il était temps de larguer les amarres. Il réveilla Sarah, l’aida à s’habiller. Il sortit, ouvrit l’enclos. Les bêtes s’avancèrent deux par deux pour franchir la passerelle. Il aida Sarah chargée de victuailles à franchir les quelques mètres qui la séparaient de l’Arche, puis largua les amarres. Les loups hurlèrent à la mort.

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COMME

Perdu comme le painSérieux comme une penduleRouge comme un baiserDésarmant comme un silenceVif comme une truiteEmouvant comme des haillons.

Triste comme la pluieDur comme la pierre, le fer.

Sérieux comme un devoir de maths Rouge comme le soleil couchant Désarmant comme le pardonVif comme un enfant espiègleÉmouvant comme un cantique bretonPerdu comme le chagrin.

Tendre comme un gros shamallowGai comme un enfant devant le sapin de NoëlBlanc comme l’écume de la mer démontéeSucré come le baiser de mon petits-filsMoelleux comme la fourrure d’Effy.

Sérieux comme la loi, comme un cyprès.Rouge comme la honte, comme une fessée.Désarmant comme le mensonge.Vif comme la colère, comme une gifle.Emouvant comme la vérité, comme des haillons.Perdu comme l'espoir, comme un trou.

Sérieux comme un maître d’écoleRouge comme une rose écarlate, dans un vase soliflore.

Désarmant comme les répliques de ma petite fille, le soir, entre son papa et sa maman. Vif comme un esprit éclairé. Émouvant comme un adieu définitif sans remerciement. Perdu comme le temps qui passeinexorablement.

Dur comme :L’eau glacée. Le travail.Un mur obscur.La glace. Ce regard. La mort.

Sérieux comme un papeRouge comme un coquelicotDésarmant comme un sourireVif comme un enfantEmouvant comme un récit, un film un regardPerdu comme un adversaire. F

Sérieux comme un policierRouge comme les graines d'une grenadeDésarmant comme un bébé qui pleureVif comme le poisson dans le bassinEmouvant comme l'amour des adosPerdu comme un enfant à la sortie de l’école.

Sérieux comme un lecteurRouge comme des lèvres pulpeusesDésarmant comme un sourire d'enfantVif comme un vol d'oiseauEmouvant comme un vieux couplePerdu comme un nourrisson qui a faim

Emouvant comme

La naissance. La vérité. Un adieu définitif. Un amour d’adolescent. Un vieux couple, main dans la main. Des haillons. Le regard de ma chienne.

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LA SOIREE ETAIT DOUCE ET PAISIBLE« Dans la brume électrique ». James Lee Burke

La soirée était douce et paisible, l’air chargé de parfums de fleurs et d'herbe fraîchement coupée. il restait trois semaines jusqu'au diplôme de fin d'études et tous nous avions le sentiment d'être peints de grâce légère,convaincus que le printemps était une symphonie juste pour nous. La peur du lendemain, une pulsion de crainte au creux des reins, la confirmation du rire d'une fille sous l’ombre des cerisiers pareil à une caresse venant éclater contre le ciel...

La soirée était chaude et bien avancée, l'air chargé des parfums de fleurs et d'herbe fraîchement coupée. Il restait trois semaines jusqu'au diplôme de fin d'études, et tous, nous avions le sentiment d'être peints de mille couleurs, convaincus que le printemps était une palette créée uniquement pour nous, L'aube, la promesse du lendemain, une pulsion d'excitation au creux des reins, la confirmation du rire d'une fille sous l'ombre des peupliers, pareil à une balle venant éclater contre le mur était assurément ce qui nous était le plus précieux.

La soirée était oppressante et imprégnait l'air chargé de parfums de fleurs et d'herbe franchement coupée. Il restait trois semaines jusqu'au diplôme de fin d'études et nous avions le sentiment d'être peints de ridicule, assurément convaincus que le printemps était une symphonie crée artificiellement pour nous L’espoir, la certitude du lendemain , une pulsion de chaleur au creux des reins , la confirmation

du sourire d'une fille sous l'ombre des saules pleureurs pareil à une évidence venant éclater contre le contre-jour était assurément ce qui nous était prédestiné.

La soirée était calme et douce, l'air chargé de parfums de fleurs et d'herbe fraîchement coupée. Il restait trois semaines jusqu'au diplôme de fin d'études, et tous, nous avions le sentiment d'être peints de couleurs fluorescentes convaincus que le printemps était une étape créée spécialement pour nous. L'espoir, la perspective du lendemain, une pulsion de vie au creux des reins, la confirmation du sourire d'une fille sous l'ombre des pins parasols, pareil à une grenade venant éclater contre le silence, était assurément ce qui nous était destiné.

La soirée était claire et chaude, l’air chargé des parfums de fleurs et d'herbe fraîchement coupée. Il restait trois semaines jusqu'au diplôme de fin d'études, et tous, nous avions le sentiment d'être peints de rouge carmin, convaincus que le printemps était une aubaine créée de senteurs pour nous. L’ingénuité, la conviction du lendemain, une pulsion de désir au creux des reins, la confirmation du visage d'une fille sous l'ombre des chênes, pareil à une tomate venant d'éclater contre le tronc était assurément ce qui nous était agréable.

La soirée était douce et exquise, l’air chargé des parfums de fleurs et d’herbe fraîchement coupée. Il restait trois semaines jusqu’au diplôme de fin d’études, et tous, nous avions le sentiment d’être peints de couleurs nostalgiques, convaincus que le printemps était une saison créée exclusivement pour nous. L’angoisse, la peur du lendemain, une pulsion d’appréhension au creux des reins, la confirmation du sourire d’une fille sous l’ombre des marronniers, pareil à une grive venant éclater contre le carreau, c’était assurément ce qui nous était perturbant.

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