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ENTREPRISES POURQUOI LE PAIEMENT SUR MOBILE VA S'IMPOSER PAGES 14-15 Pourquoi le paiement sur mobile va s'imposer NOUVEAUX USAGES Banquiers, opérateurs télécoms, distributeurs... autant de grandes entreprises qui voudraient imposer le paiement sur smartphone. Mais c'est peut-être bien du côté des start-up que viendra la capacité à installer un vrai réflexe d'usage auprès des consommateurs. Car elles fourmillent d'idées neuves et séduisantes. ODILE ESPOSITO Depuis des années, on l'annonce comme imminent, avec force démonstrations et opérations pilotes. Pourtant, le paiement sur mobile peine à décoller en France. Alors que le smartphone a envahi nos vies, outil préférédesjeunes notam ment, « il y a davantage de "slides" écrits aujourd'hui sur lepaiement mobile que de transactions réelle menteffectuéesenEurope », ironise Frédéric Boucher, cofondateur de la société Kiips et ex-associé de Capgemini Consulting en charge du développement des systèmes de paiement au plan européen. De fait, les acteurs engagés dans ces initiatives restent avares de chiffres. «Nous avons, à ce jour, 18 mois d'existence et nous nous sommes surtout employés, jusqu'à présent, à convaincre les grands acteurs du e-commerce d'adopter notre solution, soupire Sébastien Trova, directeur commercial de Buyster, un système de paiement créé en 2011 par les trois grands opérateurs de téléphonie mobile (Orange, SFR et Bouygues Tele com) et par l'expert en monétique Atos. Nous avons déjà signé avec plus de 450 sites marchands repré- français. Au niveau du grand public, notre existence est très récente puisque nous avons commencé à communiquer enseptembre dernier et la croissanceest exponentielle. » Les chiffres,eux, resteront confi dentiels. «Pour le paiement sans contact, les volumes ne sont pas encore considérables et le marché n'arrivera sans doute pas à matu rité avant 2015», reconnaît de son côté Fabrice Denèle, directeur de la stratégie moyens de paiement de BPCE. AUCHAN VA GÉNÉRALISER SON « FLASH'N PAY » Techniquement, pourtant, les outils sont là. Deux technologies principales sont utilisées pour assurer le paiement par smart phone :le NFC (Near Field Com munication), qui assure un échange de données sans contact à très courte distance (5 cm), est utilisé par exemple dans les « pass » de transport Navigodu métro parisien ou dans des badges d'accèsà certaines entre prises; et le Qll code (ou ilash- code), un pictogramme initiale ment créé par l'équipementier automobile japonais Denso pour le suivi des pièces dans les usines Toyota et qui a peu àpeu envahi de très nombreux supports de communication. Prônée notamment par les banques et les opérateurs télé coms, la technologie NFC n'est utilisable que sur les smart- phones compatibles - de plus en plus nombreux, il est vrai. Les QR codes, eux, peuvent être lus par un nombre bien plus important demobiles :il suffitde pouvoir photographier ces pic togrammes et d'avoirtéléchargé l'application permettant de les décrypter. Ils ont la préférence de certains acteurs de lagrande distribution, comme Auchan, pour son système « Flash'N Pay » qui devrait bientôt être déployé dans l'ensemble des magasins du groupe. Qu'ils aient choisi l'une ou l'autre technologie ou mis au point des systèmes dérivés, les grands groupes multiplient les initiatives pour tenter de faire enfin décoller ce paiement par mobile. Les banques, qui ont longtemps détenu un monopole sur les moyens de paiement, tentent de garder cet avantage. Les opéra teurs mobiles veulent jouer leur partition. « Nos actionnaires repré sentent 50 millionsde clientspoten tiels, indique Sébastien Trova. C'est un atout considérable. »La grande distribution se sent évidemment concernée. Quant aux géants du Web, ils ne sont pas en reste. Tous droits de reproduction réservés Date : 08/02/2013 Pays : FRANCE Page(s) : 1-15 Périodicité : Hebdomadaire

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ENTREPRISES

POURQUOI LEPAIEMENT SUR MOBILEVA S'IMPOSER PAGES14-15

Pourquoi le paiementsur mobile va s'imposerNOUVEAUX USAGES Banquiers, opérateurs télécoms, distributeurs... autantde grandes entreprises qui voudraient imposer le paiement sur smartphone. Mais c'estpeut-être bien du côté des start-up que viendra la capacité à installer un vrai réflexed'usage auprès des consommateurs. Car elles fourmillent d'idées neuves et séduisantes.

ODILE ESPOSITO

Depuis des années, onl'annonce commeimminent, avecforcedémonstrations etopérations pilotes.

Pourtant, le paiement sur mobilepeine à décoller en France. Alorsque le smartphone a envahi nosvies,outilpréférédesjeunes notamment, «il y a davantage de "slides"

écrits aujourd'hui sur lepaiementmobile que de transactions réellementeffectuéesenEurope »,ironiseFrédéric Boucher, cofondateur dela société Kiips et ex-associé deCapgeminiConsultingen charge dudéveloppement des systèmes depaiement au plan européen.

De fait, les acteurs engagés dansces initiatives restent avares dechiffres. «Nous avons, à ce jour,18 mois d'existence et nous noussommes surtout employés,jusqu'àprésent, à convaincre les grandsacteurs du e-commerce d'adopternotre solution, soupire SébastienTrova, directeur commercial de

Buyster, un système de paiementcréé en 2011 par les trois grandsopérateurs de téléphonie mobile(Orange, SFR et Bouygues Telecom) et par l'expert en monétiqueAtos. Nous avons déjà signé avecplus de 450 sitesmarchands repré-

français. Auniveau dugrandpublic,notre existence est très récentepuisque nous avons commencé àcommuniquerenseptembredernieret la croissanceest exponentielle.»

Les chiffres,eux, resteront confidentiels. «Pour lepaiement sanscontact, les volumes ne sont pasencore considérables et le marchén'arrivera sans doute pas à maturité avant 2015», reconnaît de soncôté Fabrice Denèle, directeur dela stratégie moyens de paiementde BPCE.

AUCHAN VA GÉNÉRALISERSON « FLASH'N PAY »

Techniquement, pourtant, lesoutils sont là. Deux technologiesprincipales sont utilisées pourassurer le paiement par smartphone : le NFC (Near Field Communication),qui assureun échangede données sans contact à trèscourte distance (5 cm), estutilisé par exemple dans les«pass » de transport Navigodumétro parisien ou dans desbadgesd'accèsà certaines entreprises; et le Qll code (ou ilash-

code), un pictogramme initialement créé par l'équipementierautomobile japonais Densopour le suivides pièces dans lesusines Toyotaet qui apeu àpeuenvahi de très nombreuxsupports de communication.

Prônée notamment par lesbanques et les opérateurs télécoms, la technologie NFC n'estutilisable que sur les smart-phones compatibles- deplus enplus nombreux, il est vrai.

Les QR codes, eux, peuventêtre lus par un nombre bien plusimportant demobiles :il suffitdepouvoir photographier ces pictogrammes et d'avoirtéléchargél'application permettant de lesdécrypter. Ils ont la préférencede certains acteurs de lagrandedistribution, comme Auchan,pour son système « Flash'N Pay»qui devrait bientôt être déployédans l'ensemble des magasins dugroupe.

Qu'ils aient choisi l'une ou l'autretechnologie ou mis au point dessystèmes dérivés, les grandsgroupes multiplient les initiativespour tenter de faire enfin décollerce paiement par mobile.

Les banques, qui ont longtempsdétenu un monopole sur lesmoyens de paiement, tentent degarder cet avantage. Les opérateurs mobiles veulent jouer leurpartition. «Nosactionnaires représentent50 millionsde clientspotentiels,indique Sébastien Trova.C'estun atout considérable.»La grandedistribution se sent évidemmentconcernée. Quant aux géants duWeb, ils ne sont pas en reste.

Tous droits de reproduction réservés

Date : 08/02/2013Pays : FRANCEPage(s) : 1-15Périodicité : Hebdomadaire

Google,par exemple, a lancé auxEtats-Unis un portefeuille électronique. Et PayPal teste lui aussi sasolution de paiement sur mobile,notamment dans certains restaurants McDonald's en France.

« APPORTER DU POUVOIR

D'ACHAT SUPPLÉMENTAIRE »Tous ces géants doivent aussi

compter avec des start-up biendécidées à sefaire une petite placeau soleil. «Pour faire passer lamusiquedessupportsphysiquesà ladématérialisation, cenesontpas lesacteurs traditionnels,commePhilipsouleslabels,qui ont innové,rappelleSébastienBurlet, cofondateur delapetite sociétéLemon Way.Dans lepaiement sur mobileégalement lesstart-up vontjouer un rôle important, neserait-cequepour accompagner les banques qui comprennentmal cette révolutionet s'inquiètentde ne pas savoir répondre à cesnouveauxenjeux.»

Et chacun d'avancer ses arguments pour convaincreles consommateurs et surtout lesrassurer.«Lesystème Buyster simplifie l'acted'achat, puisque le client n'a qu'àsaisir un code à 6 chiffres, tout engardant un niveau de sécurité trèsfort, assure Sébastien Trova. Etpour le commerçant, la garantie depaiement estsimilaireà celleapportée par la carte bancaire. » Carl'objectif est bien d'inciter le clientà préférer le mobile à la carte aumoment dupaiement.«Ilfaut pourcela que cesoit simple etpratique,estime Frédéric Boucher.Sinon lesgens abandonnent »

De fait, si le consommateur doitjongler en pleine rue ou dans lemétro avec son smartphone dansune main et sacarte bancaire dansl'autre, il risque devite laisser tomber. «Ilfaut égalementqu'ilyait unerécurrence d'achat, pour installerune habitude», poursuit FrédéricBoucher. Si le système n'est pasassezrépandu, lesconsommateursse lassent, mais s'il n'y a pas assezde clients potentiels, les commerçants ne s'équipent pas...«L'œuf etlapoule», soupirent en chœur tousles acteurs du paiement sur mobile.

Pour installerl'habitude,«ilfautsurtout apporterdu service,ajouteFrédéricBoucher.Et dans la criseque nous vivons,le serviceleplus

apprécié, c'est dupouvoir d'achatsupplémentaire». SaPME,Kiips,sepropose donc d'équiper les centrescommerciauxd'unsystèmede paiement mobile intégrant aussi, pourle client, des coupons de réductionet des euros de fidélités'il effectueses achats dans les boutiques ducentre. De quoiconvaincre lesplusréticents et créer cette fameuserécurrence d'achat. «Par exemplechezKrys,quand onpaie avecKiips,on obtient30Vode réductionsur lesRayban, précise le dirigeant. Dansles centres commerciaux équipés,Kiipsreprésente,au boutdesixmois,unpeu plus de2Vcdespaiementsdesenseignestravaillant avecnous.»

Le service semble donc bien êtrela clé indispensable pour installerl'habitude. Buyster vient parexemple de signer un partenariatavec le circuit CGR Cinémas,présent dans 37 villes un France,avec une offre de paiement surmobile qui devrait intéressernombre de fans des salles obscures. « Sije voisqu'il y a la queueaux caisses,j'achète ma place surmon mobileet cela me garantit depouvoir entrer pour la séance quej'ai choisie», explique SébastienTrova. Et de citer d'autres servicespotentiels comme « l'achat de sonCarréNeigealors qu'onestdéjà surlespistes de ski ».

Les chaînes de restaurationrapide proposent déjà,de leur côté,un système de réservation et depaiement sur mobile censé fairegagner du temps au restaurant etau client. À Issy-les-Moulineaux,près de Paris, depuis trois ans déjà,grâce àun partenariat entre Vinci-park et la société britanniquePayByPhone, on peut régler sonstationnement grâce à sontéléphone. Un SMSvous prévientlorsque la durée choisie estpresque écoulée et vous pouvezalors payer pour prolonger votrestationnement. Et,à l'inverse,vousêtes remboursé si vousne disposezpas de tout le temps initialementprévu... Le système vient d'êtreadopté par deux autres communesdes Hauts-de-Seine, Antony etBoulogne-Billancourt.

LE TRANSFERT D'ARGENT EN

TEMPS RÉEL : C'EST PARTI !

Mais, l'habitude dupaiement surmobile viendra peut-être d'unautre type d'utilisation, pourlequel l'Afrique fait figurede pionnier : l'échange d'argent depersonne à personne, letéléphonefaisant alors officede porte-monnaie électronique. C'est le créneauchoisi par la petite société Lemon

Way,créée en 2007 à Montreuil,en banlieue parisienne, par Sébastien Burlet et Damien Guer-

monprez, ex-patron de BanqueAccord (groupe Auchan). «Lorsd'un voyage à Madagascar, aprèsla revente de ma première start-upSunFlower Services, je me suisaperçu que les habitants pianotaient sur leur mobile pours'envoyer de l'argent, raconteSébastien Burlet. Par exemple, sil'un d'eux était frappé par lepaludisme, il demandait à un membrede safamille installé en France delui envoyerde quoi se soigner et letransfert était immédiat. »D'où l'idée de créer dans l'Hexa

gone un système analogue, pourremplacer le chèque ou lesespèces. Par exemple, pour lepartage d'une note au restaurant oud'un cadeau commun, lepaiementd'une baby-sitter ou un achat dansun vide-grenier. «Le grand intérêtde notre système,c'est defonctionner en temps réel, ce qui n'estpasle casde la carte bancaire, indiqueSébastien Burlet. Toutefois notrecombat n'estpas de tuer la carte,mais de nous positionner sur desniches. Nous comptons beaucoupdeprofessions libéralesparmi nos

clients,desplombiers, des chauffagistes, des médecins. Lepaiementmoyenest d'environ 40 euros. »Une idée séduisante, que tentent

d'imposer aujourd'hui nombre degrands acteurs. BPCE met ainsien place, depuis septembre dernier, son porte-monnaie électronique S-Money, déjà déployé àToulouse, Bordeaux, Rennes etNantes. «Nous avons choisi unedémarche pragmatique, en commençant par quatre villes test.explique Fabrice Denèle. Nousn'en sommes qu'au début, mais lesenice. quipermet un transfert defonds de manière totalementinstantanée, semble apprécié. Iloffreunefonctionnalité gratuite depaiement de personne à personne.

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Date : 08/02/2013Pays : FRANCEPage(s) : 1-15Périodicité : Hebdomadaire

Et nous avons une versionprofessionnelle,payan te,pour répondre,par exemple,aux besoins des artisans en déplacement. »

Le monde dupaiement sur mobilefourmille donc d'idées et d'innovations. Reste à convaincre des utilisateurs,toujours accrosà leur cartebancaire et plutôt craintifs quant àla sécurité des paiements.

«La carte bancairea mistrenteansà se généraliser», rappellent lesacteurs dupaiement sur mobile.Lesmartphone, que nombre de Français gardent déjà en permanencesur eux, devrait s'imposer commeoutil de paiement. À quel rythme,avec quelle technologie et pourquels grands usages? Beaucoup...paieraient cher pour le savoir!T

FOCUS

Resto Flash, les tickets resto sur smartphoneS'il faut, pour créer le réflexe du paiementsur mobile, une application pratique, économique et récurrente, alors Resto Flash atoutes ses chances. De quoi s'agit-il? D'untitre restaurant répondant aux mêmescritères et contraintes que les TicketsRestaurant ou autres Chèques Déjeuner,mais totalement dématérialisé.Son concepteur est une start-up, Octoplus,créée en avril 2011et dirigée par EmmanuelRodriguez-Maroto, ancien responsable de ladématérialisation chez Edenred (l'émetteurdu Ticket Restaurant). «Nous avonscommencéà opérer notre système enjuin dernier et noussommes en train défaire un gros travail deprospection, explique le dirigeant. A la fin demars, nousseronsprésents dans 30 entreprises

totalisant 5 000 salariés et chez300 à 350 restaurateurs. » Concrètement, le salarié reçoitun carnet virtuel, sous forme de QRcodes quipeuvent être lus par les terminaux installéschez les restaurateurs.Àla clé,détailleEmmanuel Rodriguez-Maroto,« un gain de temps pour les services deressources humaines et une économiepotentielle chiffrée,pour l'ensemble des entreprisesfrançaises, à environ 200 millions d'euros; unpaiement immédiat et une simplification de lagestion pour les restaurateurs; une facilitéd'usage, sans risque de perte, et des offres defidélisation pour lesalarié ».Resto Flash n'est encore qu'un Petit Poucet,sur ce marché de 5 milliards d'euros. Mais« l'accueilestgénial», assure son patron. To.e.

JJ LemarchéW n'arriverasansdoutepasà maturitéavant2015.»

| FABRICE DENÈLE, DIRECTEURDE LA STRATÉGIE MOYENS

DE PAIEMENT DE BPCE

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Date : 08/02/2013Pays : FRANCEPage(s) : 1-15Périodicité : Hebdomadaire

milliards de dollarsC'esl, selon Garlner lue, eonsullanl spérialîsle du ^1

secleur, levolume despaiements par-mobileréalisés -Jen 2012 dans le monde, contre 106milliards en 2011. a

La base d'utilisateursdu paiement mobile s'élève à 212millions en 2012, enprogression de 50 millions sur un an (Gartner). Selon unsondage PayPal(2012), 60 (k des Français y sont favorables.

L'EUROPE A LA TRAINE Ce sont l'Asie-Pacifique (40 aÂ)et l'Afrique-Moyen-Orient(30 94) qui utilisent le plus le paiementmobile. L'Europe occidentale représentemoins de 1054des volumes de paiement.

Au supermarché Auchan de Faches-Thumesnil, près de Lille,une cliente utilise l'application maison Flash'N Pay avec sonsmartphone. Celle-ci sera déployée sous peu dans l'ensembledes magasins du groupe. [Philippehuguen/afpimageforum]

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